Page 7887
1 (L'audience est ouverte à 9 heures 30.)
2 (L'accusé est dans le prétoire.)
3 (Audience publique.)
4 M. le Président (interprétation): Veuillez citer l'affaire s'il vous plaît.
5 Mme Chen (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Il s'agit de
6 l'affaire IT-97-25-T, le Procureur contre Milorad Krnojelac.
7 M. le Président (interprétation): Je vous en prie, Madame Kuo.
8 (Contre-interrogatoire de l'accusé, M. Milorad Krnojelac, par Mme Kuo.)
9 Mme Kuo (interprétation): Bonjour, Monsieur M. Krnojelac.
10 M. M. Krnojelac (interprétation): Bonjour.
11 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît,
12 mettre le micro au témoin.
13 Mme Kuo (interprétation: Hier, à la fin de votre déposition je vous ai
14 posé la question: ce que vous savez au sujet de ce qui se passait dans la
15 ville. Maintenant j'aimerais vous poser un certain nombre de questions
16 très concrètes.
17 Vous savez par exemple que la plupart des mosquées ont été détruites,
18 n'est-ce pas?
19 M. M. Krnojelac (interprétation): Oui, c'était évident, nous avons pu le
20 constater, nous le voyions.
21 Question: Vous saviez également que les Musulmans ont été rassemblés,
22 qu'ils ont été emmenés à Livade d'abord, ensuite au KP Dom, n'est-ce pas?
23 Réponse: J'ai pu constater les détenus musulmans au KP Dom alors qu'il y a
24 un certain nombre de détenus, comme par exemple Ucuvalja (?), qui m'ont
25 dit qu'ils étaient à Livade. Auparavant, il y avait également une dame
Page 7888
1 médecin, Asima, qui m'a appris qu'elle était à Livade avant de venir au KP
2 Dom. C'est ce qu'elle m'a dit qu'ils étaient rassemblés d'abord à Livade.
3 Question: Par conséquent vous étiez au courant, vous saviez qu'ils
4 arrêtaient les médecins de l'hôpital de Foca, qu'ils les emmenaient au KP
5 Dom en détention.
6 Réponse: Je sais que c'est comme ça parce que j'en ai aperçu un certain
7 nombre parmi ces détenus.
8 Question: Par ailleurs, vous saviez également que l'on perquisitionnait,
9 fouillait les appartements des Musulmans?
10 Réponse: Croyez-moi, ce n'est que par la suite que je l'ai appris, mais au
11 début je ne le savais.
12 Question: Et puis vous saviez également que les Musulmans ont été passés à
13 tabac au moment de l'arrestation, n'est-ce pas?
14 Réponse: Moi je ne le savais pas, je n'ai pas pu le savoir et je ne l'ai
15 pas vu mais j'ai entendu des rumeurs à ce sujet-là.
16 Question: En d'autres termes, ce sont les autres qui vous ont raconté
17 cela, qui vous ont dit que les Musulmans étaient passés à tabac.
18 Réponse: Oui, tout à fait.
19 Question: Par ailleurs, vous avez appris également que les femmes
20 musulmanes ainsi que les filles ont été détenues à Partizan -c'est la
21 salle de sport Partizan- et à l'école secondaire de Foca, n'est-ce pas?
22 Réponse: Oui, j'ai entendu dire qu'elles avaient été rassemblées à ces
23 deux endroits pour ensuite être transférées dans d'autres endroits.
24 Question: Par ailleurs, vous avez appris également que les soldats serbes
25 se rendaient à cet endroit-là, qu'ils sortaient les femmes et les filles
Page 7889
1 de ces endroits-là pour les violer, n'est-ce pas? Vous l'avez appris.
2 Réponse: Je vous affirme que je n'ai jamais appris une telle chose.
3 Question: Vous n'avez jamais entendu dire, parler de ce qui se passait
4 dans la salle de sport Partizan à Foca?
5 Réponse: Non, effectivement je me dois de vous dire une fois de plus ce
6 que j'ai déjà précisé lors de ma déposition. Moi, je me rendais au travail
7 et je retournais chez-moi. C'est très rarement que je m'attardais, que je
8 restais avec des gens. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas beaucoup
9 parlé avec les gens et je n'étais pas tellement au courant de ce qui se
10 passait.
11 Question: Votre fils Dubravko était membre de la police de réserve à cette
12 époque-là, n'est-ce pas? Il y travaillait.
13 Réponse: Oui, tout à fait, vous avez raison.
14 Question: En ce qui concerne le poste de police, il se trouve pratiquement
15 à côté de Partizan, à côté de cette salle sportive de Partizan.
16 Réponse: Oui, tout à fait.
17 Question: Mais votre fils Dubravko ne vous a jamais dit quoi que ce soit
18 au sujet de ce qui se passait dans la salle de sport à Partizan, ce qui
19 s'est passé avec les femmes et les filles, les soldats qui venaient les
20 prendre et qui les faisait sortir?
21 Réponse: Non j'ai eu très peu de contact avec Dubravko. Il avait sa
22 famille, sa femme, ses fils. Il habitait à Gornje Polje, chez son beau-
23 père. C'est la raison pour laquelle c'est très rarement que l'on se
24 rencontrait ou, de temps à autre quand il avait du temps, il se rendait
25 chez nous dans notre appartement. Faites-moi confiance, on n'en a jamais
Page 7890
1 parlé véritablement et moi je n'étais pas au courant de tout cela.
2 Question: Mais vous saviez, ou plutôt vous savez que les Musulmans à cette
3 époque-là s'enfuyaient de Foca parce qu'ils avaient peur, n'est-ce pas?
4 Réponse: Je ne peux pas l'affirmer, ce n'est peut-être pas par la peur, je
5 sais qu'ils partaient en bus, ils quittaient Foca.
6 Question: Et à la mi-août 1992, la plupart des Musulmans d'une façon ou
7 d'une autre quittaient Foca, que ce soit dans un arrangement individuel ou
8 par les bus organisés par le gouvernement, n'est-ce pas?
9 Réponse: Je ne sais pas si c'était mi-août, mais c'était à peu près à ce
10 moment-là que nous avions appris que la plupart effectivement avaient
11 quitté la ville.
12 Question: Mais en effet il y avait une mère et la fille de la famille
13 Sabanovic qui véritablement voulaient quitter Foca et elles avaient
14 tellement peur. Vous le savez, n'est-ce pas?
15 Réponse: Mais je ne connais même pas cette famille. Je ne sais pas comment
16 vous le dire.
17 Question: La famille dont Desanka Bogdanovic avait parlé, vous ne la
18 connaissez pas? Vous ne connaissez pas le nom de cette famille?
19 Réponse: Non, je ne connais pas leur nom, mais je sais qu'elles sont
20 parties début juin, et ça s'est sûr. Moi, je me réfère à mon propre
21 malheur qui m'est arrivé en juin, fin mai, début juin, c'était à peu près
22 à cette période-là.
23 Question: Maintenant j'aimerais tout simplement être sûr que nous parlons
24 du même événement. Desanka Bogdanovic vous a parlé de cette mère et de
25 cette fille, des Musulmans. Elles avaient très peur, elles voulaient
Page 7891
1 quitter Foca. Elles se sont adressées à vous, elles vous ont demandé de
2 l'aider. Donc c'est très tôt le matin, dans les heures matinales, qu'elles
3 voulaient s'échapper de Foca. Est-ce bien de cet incident, de cet
4 événement que nous parlons?
5 Réponse: Oui, tout à fait.
6 Question: Eh bien, je voudrais vérifier également quelque chose. Dans le
7 compte rendu, il figure que ceci a eu lieu après votre propre malheur qui
8 vous est arrivé. Je suppose que c'était au moment où votre fils a eu cet
9 accident?
10 Réponse: Non, c'était juste avant ce malheur qui m'est arrivé et à moment-
11 là que j'ai rendu service à Mme Desanka. C'est elle qui me l'avait demandé
12 et ensuite c'est elle qui a rendu un service à ses deux amies. Elle les a
13 mises à bord de la voiture de mon fils; mais à ce moment-là, elle m'a dit
14 qu'elle les conduisait à un endroit pour qu'elles rencontrent les membres
15 de leur famille. C'est ce qu'elle m'avait dit à ce moment-là.
16 Question: Mais vous, vous avez organisé tout cela, vous avez organisé que
17 le chauffeur emmène ces deux femmes très tôt le matin. C'était à 6 heures
18 et demi ou 7 heures du matin. Vous l'avez organisé de cette façon-là parce
19 que c'était beaucoup en sécurité, parce qu'il ne fallait pas qu'elles
20 partent à la mi-journée, n'est-ce pas?
21 Réponse: Vous, vous pouvez faire des conclusions comme vous le souhaitez
22 mais moi, je pensais que c'était effectivement mieux parce que moi-même
23 également je devais me rendre au travail à 7 heures du matin. C'est la
24 raison pour laquelle j'ai donné la voiture de mon fils au chauffeur et il
25 me restait du temps également pour me rendre à sept heures dans mon
Page 7892
1 bureau. Et puis, je pense qu'il y avait le couvre-feu et on ne pouvait pas
2 partir avant 6 heures. Par conséquent, c'était entre, c'était entre 6
3 heures 20, 6 heures 30 jusqu'à 7 heures ou je ne sais pas exactement, mais
4 c'était le bon moment pour moi et pour ça également pour le couvre-feu.
5 Question: Mais est-ce que vous savez qu'au moment où ces femmes sont
6 montées dans la voiture, elles étaient obligées de se cacher derrière les
7 valises pour qu'on ne les voit pas?
8 Réponse: Pourquoi elles se sont accroupies, pourquoi elles ne se sont pas
9 assises sur les sièges? Moi, je n'y ai pas réfléchi mais il est probable
10 également qu'elles voulaient se cacher plutôt pour traverser plus
11 facilement la ville car il y avait tout ce trajet dans la direction de
12 Scepan Polje qu'elles devaient passer. Donc de Gornje Polje, de Scepan
13 Polje c'est probablement à cause de ça que au lieu de rester sur les
14 sièges elles se sont cachées. Je ne sais pas, elles se sont accroupies.
15 Question: Mais en ce qui vous concerne vous auriez dû quand même conclure
16 qu'elles essayaient de se cacher pour que personne ne les voit, pour que
17 personne ne voit également qu'elles quittent Foca parce que sinon ce n'est
18 pas de cette manière-là qu'on prend place dans une voiture, n'est-ce pas?
19 Réponse: A partir du moment où Desanka m'a dit qu'elle ne pouvait se
20 confier à personne, à ce moment-là il y a du vrai également dans ce que
21 vous dites. Il fallait cacher probablement leur départ. Cela me paraît
22 évident. Moi à ce moment-là, je n'ai pas posé de questions. Je n'ai pas
23 demandé qu'ils avaient des papiers, s'ils avaient des autorisations pour
24 quitter la ville. Moi, je n'ai vraiment pas fait attention à tout cela.
25 Tout ce que je pouvais faire c'est d'assurer cette voiture et le chauffeur
Page 7893
1 pour les emmener à l'endroit où elles voulaient aller.
2 Question: Mais la manière dont ces deux femmes ont quitté Foca et sont
3 donc parties en voiture et même la réaction de Desanka Bogdanovic qui ne
4 pouvait faire confiance à qui que ce soit, qu'à vous-même, tout ceci
5 pourrait vous faire conclure qu'il s'agissait de deux Musulmanes qui
6 avaient peur et qui voulaient quitter Foca et qu'elles pouvaient quitter
7 Foca tout simplement en secret, n'est-ce pas. C'était une seule conclusion
8 qui s'impose à nous?
9 Réponse: Moi aussi je peux conclure ceci actuellement car elles aussi
10 elles le faisaient en secret. Elles n'étaient pas les seules d'ailleurs.
11 Question: Vous saviez que Foca n'était pas un endroit sûr pour les
12 Musulmans, n'est-ce pas?
13 Réponse: Je dois vous reconnaître à cette époque-là Foca n'était pas sûre
14 pour quiconque ni pour les Musulmans ni pour les Serbes. Je ne sais pas si
15 lors de ma déposition j'ai eu l'occasion de le dire mais à Foca et autour,
16 dans les alentours de Foca il y avait des combats ; pas dans la ville-même
17 mais dans les environs il y a des combats qui étaient en cours
18 pratiquement jusqu'en 1994. Il ne faut pas oublier non plus qu'à la fin
19 1992 il y avait cet événement qui a eu lieu à neuf kilomètres de Foca,
20 c'est à côté c'est pas loin.
21 Question: Monsieur, la question que je vous ai posée porte tout simplement
22 sur ce qui se passait à Foca. Est-ce qu'à cette époque-là vous compreniez
23 que pour les Musulmans Foca n'était pas un endroit qui était sûr. Vous
24 avez même proposé à une autre femme (nom incompris) de la faire sortir de
25 Foca, même si c'était nécessaire. Est-ce que vous vous en souvenez?
Page 7894
1 M. M. Krnojelac (interprétation): Je ne m'en souviens pas.
2 Mme Kuo (interprétation): Mais vous étiez présent pendant que Mme
3 Bogdanovic a déposé et vous avez également entendu ce qu'elle a dit?
4 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Bakrac.
5 M. Bakrac (interprétation): Excusez-moi pour que la réponse ne soit pas
6 mal interprétée quand on a posé la question du nom de la femme, cette
7 autre femme, l'interprète n'a pas compris le nom.
8 Par conséquent, notre client non plus n'a pas entendu le nom. C'est la
9 raison pour laquelle je ne voudrais pas qu'on interprète mal, si vous
10 voulez, sa réponse. Il ne savait pas de quel nom il s'agissait, il n'a
11 reçu le nom dans les écouteurs.
12 M. le Président (interprétation): Par conséquent, vous voulez dire que le
13 nom n'a pas été prononcé en BCS , mais je pense que ce nom ne figure même
14 pas dans le compte rendu. Probablement, Madame Kuo, vous n'avez pas bien
15 prononcé ce nom.
16 Mme Kuo (interprétation): Oui, je peux donner la description de tout ce
17 qui s'est passé mais je pense que M. M. Krnojelac ne connaît même pas ce
18 nom.
19 M. le Président (interprétation): Mais dites le nom.
20 Mme Kuo (interprétation): Il s'agissait d'une troisième femme qui
21 s'appelait Sirbubalo Nedziba et quand la mère et la fille sont sorties et
22 ont quitté Foca, d'après un témoin, au moment où elles se sont saluées
23 cette troisième Musulmane n'est pas partie. Mais vous avez dit à Mme
24 Bogdanovic que vous alliez aider, que cette troisième Musulmane, donc
25 Nedziba Sirbubalo également quitte la ville un jour ou l'autre.
Page 7895
1 M. M. Krnojelac (interprétation): Je me souviens qu'il y avait deux
2 Musulmanes et Desanka Bogdanovic qui sont parties dans la voiture. Je ne
3 me souviens pas du tout d'une autre femme encore dont vous avez prononcé
4 le nom. Je n'ai jamais… je ne me souviens pas de cela, Nediba…
5 Question: Vous n'avez jamais dit, par conséquent, à Mme Bogdanovic que
6 vous alliez aider quelqu'un d'autre, un autre Musulman, si jamais un autre
7 Musulman avait besoin de votre aide.
8 Réponse: Mais si Desanka m'avait demandé d'aider quelqu'un d'autre, je
9 l'aurais fait si cela avait été indispensable . Mais à ce moment-là, je ne
10 me souviens pas que je le lui avais promis, mais tout est possible, il
11 n'est pas impossible que je le lui ai promis.
12 Question: Monsieur M. Krnojelac, vous saviez à ce moment-là qu'il y avait
13 d'autres centres de détention dans d'autres municipalités où on avait
14 détenu les Musulmans. Le KP Dom n'était pas le seul endroit où il y avait
15 des détenus musulmans?
16 Réponse: Depuis le 18 avril, quand j'étais sur place, je savais qu'il y
17 avait le KP Dom et quelques personnes qui ont été transférées de Livade.
18 Il y en avait d'autres qui avaient été arrêtées dans la ville mais je n'ai
19 jamais appris qu'il y en avait ailleurs.
20 Question: Pendant tout ce temps-là, pendant que vous étiez directeur du KP
21 Dom, vous vous rendiez en réunion avec les représentants du ministère de
22 la Justice. Vous avez dû apprendre également qu'il y avait des camps de
23 détention dans d'autres municipalités qui gardaient les Musulmans.
24 Réponse: Oui, dans d'autres municipalités effectivement il y avait
25 d'autres camps de détention.
Page 7896
1 Question: Mais le 27 et 28 avril 1992, vous étiez présent au KP Dom vers 3
2 heures du matin au moment où un officier de l'ex-JNA, un Musulman qui
3 venait de Pilipovici a été emmené. Vous vous souvenez de cela, n'est-ce
4 pas?
5 Réponse: Oui, moi j'avoue que je n'étais pas au KP Dom au moment même où
6 il a été emmené. Il n'a pas été emmené d'ailleurs au KP Dom à ma
7 connaissance. Ce n'est qu'après que je l'ai appris, qu'il y avait un
8 officier qui avait été emmené avec un groupe de soldats. Il a été installé
9 juste dessus du restaurant, du réfectoire mais pas au sein, dans
10 l'enceinte du KP Dom.
11 Question: Mais l'officier dont je parle et auquel je me réfère était un
12 Musulman et, vous saviez, les deux frères de ce Musulman. Est-ce que nous
13 parlons de la même personne, s'il vous plaît?
14 Réponse: Moi, je connaissais feu son père et je connaissais également un
15 de ses frères mais je ne connaissais pas l'autre frère et je me souviens
16 qu'il avait été installé au-dessus du restaurant et qu'il n'a pas été
17 installé dans l'enceinte du KP Dom.
18 Question: Vous avez permis à cet officier d'appeler son frère à Sarajevo,
19 n'est-ce pas? C'est vous qui avez permis de l'appeler.
20 Réponse: Je ne me souviens pas, mais s'il m'a demandé qu'il téléphone,
21 probablement que je l'ai fait. Je me souviens qu'une fois on a pris un
22 café ensemble un matin. Il m'a posé la question et m'a dit: "Est-ce que je
23 peux prendre un café avec vous?". Effectivement, c'est ce que nous avons
24 fait. Je vous ai dit que j'étais dans ce bureau qui à l'époque était le
25 bureau où l'on vérifiait la qualité des produits à l'époque. Eh bien,
Page 7897
1 c'est dans ce bureau-là que nous avons pris un café. Je sais, comme je
2 l'ai dit, et je maintiens qu'il n'était pas dans l'enceinte du KP Dom mais
3 il y avait des locaux qui étaient au-dessus du restaurant. Ce sont les
4 familles des prisonniers qui purgeaient la peine avant la guerre qui se
5 rendaient là et c'est là qu'il a été installé.
6 Question: Avant que vous ne buviez votre café avec cet officier, on venait
7 de l'emmener. Il y avait également un soldat serbe qui répondait au nom de
8 Dida qui criait, qui menaçait et qui a également tiré, qui avait menacé
9 les réfugiés, soi-disant qu'il allait les fusiller si jamais quelqu'un ne
10 le payait pas?
11 Réponse: Excusez-moi, mais je n'étais pas présent à cet événement, cet
12 incident. Mais j'ai appris effectivement qu'il y avait cet incident qui
13 s'était produit mais dans la soirée, une nuit, que les soldats avaient
14 emmené un groupe de femmes et d'enfants, que ces enfants et ces femmes
15 avaient été emmenés de Pilipovici, que ce groupe avait passé la nuit dans
16 des locaux où se trouvaient des Musulmans déjà.
17 Question: Mais ils n'ont pas demandé votre permission pour le faire?
18 Réponse: Cela s'est passé dans la nuit et personne ne m'a demandé la
19 permission. Je ne sais pas si le KP Dom avait déjà été loué, je sais que
20 c'était l'armée qui en était responsable. Je n'aurais jamais pu l'empêcher
21 si j'y avais été, mais je n'y étais pas.
22 Question: Au moment où vous êtes arrivé le matin, quand vous avez pris le
23 café avec cet officier dans votre bureau, vous avez appris que les femmes
24 et les enfants avaient été gardés dans l'enceinte du KP Dom la nuit
25 précédente, n'est-ce pas?
Page 7898
1 Réponse: Si mes souvenirs sont bons, ce n'est pas le lendemain matin que
2 j'ai pris un café avec lui. Ils ont passé quelques jours à cet endroit-là
3 l'officier et les soldats. Ce n'est pas le lendemain matin. Ce n'est
4 qu'après que j'ai appris de l'un des gardes je ne me souviens pas
5 exactement lequel- que ce groupe de femmes et d'enfants avait passé une
6 nuit à cet endroit et que le lendemain matin on les a pris pour les
7 transférer du KP Dom, pour les transférer quelque part, je ne sais pas où
8 ils ont été emmenés, mais je sais qu'ils ont passé une nuit.
9 Mme Kuo (interprétation): Et qui les a emmenés au KP Dom? Qui les a
10 installés au KP Dom?
11 M. M. Krnojelac (interprétation): Je n'étais pas présent et je ne sais pas
12 qui les avaient installés au KP Dom mais on m'a dit que c'étaient les
13 soldats qui les avaient emmenés. Ce sont les ""Aigles blancs" ou une
14 garde, mais en tout cas c'étaient les soldats.
15 M. le Président (interprétation): Je vous en pris Maître Bakrac.
16 M. Bakrac (interprétation): C'est dans le compte rendu que l'on a marqué
17 "garde". Si je parle suffisamment bien l'anglais, les gardes ce sont ceux
18 qui assurent la sécurité. Alors qu'ici, il s'agit de la garde étant donné,
19 comme la garde nationale. Ce sont les "Aigles blancs", c'est la 24e ligne,
20 pardon.
21 M. le Président (interprétation): Excusez-moi. Est-ce que vous êtes
22 préoccupé tout simplement parce qu'il y a également un autre…, c'est
23 marqué au pluriel et vous pensez que cela devrait être au singulier?
24 M. Bakrac (interprétation): Non Monsieur le Président, je ne sais pas si
25 je parle correctement l'anglais, si je connais bien le terme. Mais, j'ai
Page 7899
1 l'impression qu'ici on parle des gardes, les gardes de sécurité, alors que
2 le témoin, le client a parlé d'une formation militaire qui s'appelle la
3 "garde".
4 Nous avons appris ici qu'il y avait des "Aigles blancs", qu'il y avait
5 également une garde serbe. Mais on peut conclure du compte rendu qu'il
6 s'agissait des gardes, les gardes, les hommes qui montaient la garde.
7 M. le Président (interprétation): (hors micro) Madame Kuo, il serait peut-
8 être bien de mettre au clair cette question-là, car moi aussi j'ai compris
9 qu'il s'agissait des gardes. Les gardes ne sont pas obligatoirement les
10 militaires. Pouvez-vous vérifier en reposant la question du témoin?
11 Mme Kuo (interprétation): Oui Monsieur le Président.
12 Je vous ai posé la question: qui avait emmené ces femmes au KP Dom et vous
13 avez dit: les soldats. Est-ce qu'il s'agissait des "Aigles blanc" ou de la
14 garde? Qu'est-ce que vous sous-entendez sous ce terme? Il s'agissait des
15 soldats, des militaires, d'une unité?
16 M. M. Krnojelac (interprétation): Excusez-moi, mais j'ai appris, je ne
17 suis pas sûr, qu'il s'agissait des "Aigles blancs" ou de la garde serbe.
18 C'est comme cela qu'on les appelait. Mai moi, je n'étais pas présent,
19 c'est la raison pour laquelle que je ne peux pas véritablement affirmer,
20 dire avec certitude qui les a emmenés.
21 Question: Au moment où ces femmes et ces enfants ont été emmenés au KP
22 Dom, c'était bien le moment où cet officier de la JNA était emmené au KP
23 Dom? Tous sont arrivés de Pilipovic, n'est-ce pas?
24 Réponse: Je ne sais pas s'ils sont arrivés ensemble, mais je sais que ça
25 s'est passé au cours de la nuit, de cette même nuit, dans la soirée. C'est
Page 7900
1 ce que j'ai entendu dire.
2 Question: Ceci s'est passé à la fin du mois d'avril, c'était le 27 ou le
3 28 avril, si je ne m'abuse. Par conséquent avant que le contrat ait été
4 signé pour louer une partie du KP Dom à l'armée?
5 Réponse: Je ne me souviens pas exactement mais, dans ce cas-là, je suis
6 sûr qu'il y avait cette unité d'Uzice qui assurait la sécurité et, même si
7 j'étais sur place dans la nuit, je n'aurais pas pu m'y opposer. Ils sont
8 arrivés avant et je n'aurais pas pu intervenir, ni réagir, ni demandé
9 pourquoi ils le font.
10 Question: Vous étiez par conséquent responsable de l'ensemble des locaux
11 du KP Dom à cette époque-là, n'est-ce pas? Il n'y avait pas de contrat de
12 l'occasion, il n'y a pas de contrat dans lequel on précisait qu'une partie
13 serait louée à l'armée?
14 Réponse: Cette partie du KP Dom où étaient installés les détenus et je
15 dirai même de l'ensemble des locaux du KP Dom, responsables étaient les
16 gardes d'Uzice. Alors que moi, j'étais uniquement dans le bâtiment
17 administratif et ma tâche, ma mission était de constater les dégâts. Je
18 n'avais aucun droit vis-à-vis de cette unité, je ne pouvais même pas y
19 aller. C'est la raison pour laquelle je me suis rendu chez M. Mladjenovic,
20 c'est la raison pour laquelle j'ai dit que ça ne pouvait pas se passer
21 comme ça. Je ne pouvais pas, moi, être chargé, responsable de préserver le
22 patrimoine et de l'autre côté des choses et des incidents se produisent
23 tels que celui-là.
24 C'est là où Mladjenovic m'a dit: "Mais Milorad, c'est la raison pour
25 laquelle que je t'ai désigné. Il faut absolument que quelqu'un protège ce
Page 7901
1 patrimoine."
2 Question: Monsieur M. Krnojelac, le 25 mai 1992 un autocar est arrivé de
3 Bare, du Monténégro, et à son bord il y avait des Musulmans et des Serbes.
4 Environ 25 Musulmans ont été emmenés au KP Dom, certain d'entre eux ont
5 été passés à tabac en route, chemin faisant, jusqu'au au KP Dom. Vous
6 étiez présent, n'est-ce pas?
7 Réponse: J'affirme ici, que je n'étais pas présent à ce moment-là, mais
8 j'ai entendu dire que des gens étaient venus du Monténégro, qu'ils ont été
9 amenés. Mais je ne sais pas à quel moment, quel jour, en quelle date ni
10 l'heure de leur venue. Mais ceci devait se passer en juin ou en mai. Je
11 n'ai vraiment pas de raison pour laquelle je ne dirais pas si j'étais
12 présent. Je ne peux pas préciser l'heure où ils sont venus.
13 Question: Mais vous avez appris que ce groupe d'hommes a été amené, n'est-
14 ce pas?
15 Réponse: Oui, je l'ai appris plus tard, quelques jours plus tard. Certains
16 de ces gardes qui les ont escortés, -m'ont dit parce que je connaissais
17 quelques gardes qui avaient travaillé déjà préalablement au KP Dom- ils me
18 l'ont dit. Enfin, j'ai été étonné d'entendre dire par ces gardes que parmi
19 ces gens-là qui ont été amenés du Monténégro il y avait aussi des Serbes.
20 Question: Vous souvenez-vous des noms de ces gardes qui vous l'ont dit?
21 Vous avez dit que vous avez appris cela des gardes. Lequel des gardes vous
22 l'a dit?
23 Réponse: Croyez-moi je ne peux pas m'en souvenir. Mais probablement ceci
24 devrait être quelques-uns de ces gardes que j'ai pu mieux connaître avant
25 le déclenchement de la guerre. Car d'ordinaire les rumeurs circulaient
Page 7902
1 vite, il y a n'y avait pas évidemment ces soirées de restaurant que nous
2 avons connu avant où on pouvait s'asseoir à l'aise. Mais tout simplement
3 la rumeur passe vite, enfin de bouche à bouche et on l'a dit "on a emmené
4 des Musulmans, des Serbes et des Croates, etc. J'espère que vous allez me
5 comprendre: il m'est difficile évidemment après tant d'années écoulées de
6 me souvenir des noms, des heures précises, etc. Mais il faut le dire on a
7 entendu parler de cela.
8 Question: Monsieur Krnojelac, vous avez eu connaissance du fait qu'en
9 avril, en mai ou même en juin des Musulmans, des hommes ont été amenés au
10 KP Dom et en grand nombre, plusieurs centaines d'entre eux ont été
11 emmenés?
12 Réponse: Tout ce que j'ai su, moi, je l'ai appris des autres, je n'ai rien
13 vu de mes propres yeux. On savait que des gens étaient amené mais je n'ai
14 rien vu de mes propres yeux car si je l'avais vu je m'en saurais souvenu.
15 Je devais le faire parce que vraiment j'avais tant à faire, mes
16 obligations étaient si nombreuses. Et qu'avais-je pu faire? Je devais
17 aller à Brioni, je devais aller à Maglic cette société. Ensuite me rendre
18 aux entrepôts centraux à Perucica. Et puis mon trajet était simple
19 l'entrée principale, je tourne à droite, j'emprunte le bâtiment
20 administratif, et comme ça.
21 Question: Monsieur Krnojelac, vous avez appris qu'il y avait un certain
22 nombre de détenus musulmans en parlant avec le cuisinier et vous avez dit
23 aux enquêteurs que vous saviez quel était le nombre de détenus?
24 Réponse: Un jour et ce n'est pas seulement en une occasion mais à
25 plusieurs reprises, le magasinier -enfin celui qui travaillait auprès des
Page 7903
1 cuisiniers- m'a dit que nous avons beaucoup de détenus et nous avons
2 besoin de beaucoup de nourritures. Mais moi en réponse, je ne pouvais lui
3 dire autre chose que c'est aux militaires qu'il fallait s'adresser parce
4 que que c'étaient aux militaires de s'en occuper pour procurer de la
5 nourriture parce que ce sont les militaires qui ont eux-mêmes d'ailleurs
6 embauché le personnel, entre autres le cuisinier.
7 Moi ce que j'avais à faire c'est que tout simplement si de temps en temps
8 on pouvait faire une collecte de fonds ou tout de même avoir quelques
9 aliments pour offrir à ces gens-là, parce qu'il n'y avait pas que les
10 Musulmans il y avait le personnel d'administration qui a travaillé là-bas.
11 Question: Vous avez mentionné un cuisinier, un cuisinier militaire mais
12 c'est celui-là qui a cuisiné pour l'ensemble du personnel, des civils et
13 des militaires au KP Dom. Vous avez eu un seul cuisinier ou vous avez un
14 cuisinier civil aussi.
15 Réponse: Non, non il y avait qu'une cuisinière autant que je sache il y
16 avait une seule marmite où on faisait les plats. Et vous savez comme
17 souvent il n'y avait pas d'électricité on devait tout de même allumer du
18 feu. Cette chaudière était devant la cantine et moi pour me rendre dans la
19 fabrique de meubles j'ai pu voir comment on était affairé autour de ce
20 chaudron, de cette marmite. Nous autres du personnel de l'administration
21 nous venions d'ordinaire un peu plus tard et surtout nous nous rendions
22 dans l'autre réfectoire pour prendre notre petit déjeuner par exemple.
23 Question: Lorsque vous dites que ces gens-là prenaient leur petit déjeuner
24 et regagnaient leur salle avant que nous mangions: qui sont ces gens, eux,
25 ils?
Page 7904
1 Réponse: Je me réfère cette fois-ci aux personnes détenues de toutes les
2 nationalités d'ailleurs et évidemment il s'agit de ces gens-là qui étaient
3 là pour purger leur peine. Il y en a qui y était pendant 3, 4 ou 5 ans,
4 etc.
5 Question: Monsieur Krnojelac, vous vous étiez là pour assurer de la
6 nourriture pour l'ensemble des gens qui se trouvaient au KP Dom, n'est-ce
7 pas?
8 Réponse: Non, non, non, je vous en prie. Ce n'était pas enfin un travail à
9 moi, je n'en étais pas chargé du tout. Moi j'étais chargé de ce que je
10 vous ai dit tout à l'heure en parlant de mon travail. Mais pour dire que
11 j'étais obligé et chargé d'assurer de la nourriture pour tous on ne pourra
12 pas le dire. Mais je faisais de mon mieux pour organiser un troc de
13 marchandises, pour demander de la nourriture à la Croix-Rouge, pour me
14 rendre s'il fallait à des sociétés diverses pour essayer d'organiser
15 quelque chose parce que, écoutez avec tant d'années qu'on a vécu plutôt
16 bien maintenant nous nous sommes trouvés dans une situation où il y a eu
17 une pénurie, un déficit alimentaire. Par conséquent, je ne sais pas si je
18 me suis peut-être trop étalé là-dessus mais en tout cas je n'ai pas été
19 chargé de l'ensemble des détenus pour assurer de la nourriture.
20 Question: Mais Monsieur Krnojelac, il faut dire que les magasins, les
21 entrepôts n'ont pas été séparés. Il y avait un seul magasin, un seul
22 entrepôt. Je pense à ces entrepôts de denrées alimentaires?
23 Réponse: Il y avait un entrepôt qui se trouvait au-dessous de la cuisine,
24 de la cantine dans lequel devaient être stockés les aliments, autant que
25 je le savais d'ailleurs, reçus par les militaires c'est-à-dire le
Page 7905
1 commandement des arrières de Livade. Un autre entrepôt réservé à des
2 équipements divers, mais aussi à des aliments se trouvait dans cet partie
3 de l'enceinte près de ce bâtiment n°1 comme intitulé. Et autant que je
4 sache je crois pouvoir dire que ce n'est pas dans le même entrepôt qu'on
5 gardait tout, la nourriture et le reste.
6 Question: Monsieur Krnojelac, vous avez dû tout de même organiser un
7 service qui devait tenir le livre des besoins et des nécessités de tout,
8 que ce soit pour les condamnés et pour les autres. Peut-être que le terme
9 "d'être chargé de" ne correspond pas tout à fait et que ce n'était pas
10 évidemment de votre devoir, mais vous avez tout de même dû tenir à jour
11 les besoins et le reste?
12 Réponse: Non, ce n'est pas moi qui m'en suis occupé, c'est le chef de la
13 cuisine, de la cantine qui devait s'en occuper, selon les besoins qui
14 étaient les siens, pour parler de quantité et le reste.
15 Question: Mais vous vous êtes rendu auprès des militaires? Vous leur avez
16 envoyé des lettres, des mémos pour demander des quantités concrètes et
17 spécifiques de nourriture pour les détenus?
18 Réponse: C'est le chef de la cantine qui devait s'adresser au magasinier.
19 Celui-ci devait venir m'en saisir et ensuite moi, je devais m'adresser au
20 commandement d'ailleurs militaire, qui se trouvait à Livade, pour laisser
21 saisir cette fois-ci de toutes ces nécessités.
22 Question: Par conséquent, vous avez tout de même était impliqué que ce
23 travail lorsqu'il a fallu s'organiser pour assurer de la nourriture pour
24 les détenus?
25 Réponse: Je vous ai même dit tout à l'heure et très précisément: même,
Page 7906
1 j'ai dû faire du troc. Souvent, je me suis engagé auprès des organismes
2 humanitaires, etc., mais je l'ai dit parce que je l'ai fait comme ça et
3 non pas parce que j'en étais chargé.
4 Question: Mais vous étiez en contact direct avec l'armée en ce qui
5 concerne la nourriture pour les détenus?
6 Réponse: Je n'ai pas été en contact direct avec les militaires. Mais il ne
7 s'agit pas seulement de cela pour dire que si je leur écris des mémos,
8 j'étais en contact direct. Pour ma part, ceci ne l'est pas.
9 Question: Je voudrais qu'on montre au témoin la pièce à conviction D105.
10 (L'huissier s'exécute.)
11 Monsieur Krnojelac, il s'agit d'une lettre rédigée par vous, signée par
12 vous. Il s'agit d'une lettre du mois de février 1993 adressée au groupe
13 tactique de Foca, tout comme au comité exécutif de la municipalité de
14 Foca, n'est-ce pas?
15 Réponse: Je ne vois pas très bien. Ce n'est pas très lisible, mais je veux
16 bien vous croire. Mais ici devrait figurer également le commandement des
17 arrières: c'est à ce commandement également que j'ai dû adresser de telles
18 lettres.
19 Question: Oui, nous voyons d'abord au milieu où l'on dit en anglais
20 "illisible". C'est probablement là où vous vous adressez au commandement
21 des arrières.
22 Mais je voulais vous demander quelque chose au sujet de la teneur même de
23 cette lettre. Au milieu du premier fragment, il a été dit que l'aide des
24 organes militaires consistait en aides sporadiques, en vivres, en aliments
25 mais qui ne suffisaient toujours pas à couvrir évidemment tous les frais
Page 7907
1 et pour assurer l'ensemble de la nourriture requise.
2 Ensuite, vous dites que les vivres sont acheminés régulièrement pour
3 couvrir nos besoins. Et dans cette même lettre, vous dites que l'on doit
4 procurer 100 litres d'essence par mois au KP Dom pour couvrir ses besoins
5 en carburant?
6 Réponse: Je n'ai pas dit que nous ne nous sommes pas occupés de
7 papyrologie pour ainsi dire, que nous n'avons pas eu de contact par
8 courrier pour leur demander ce que je leur demandais. Cela dit, j'avais dû
9 d'abord apprendre de la part du magasinier, c'est-à-dire de la part du
10 chef de la cantine, que les vivres n'ont pas été envoyés régulièrement. Je
11 voulais tout simplement porter à la connaissance le fait qu'ils en étaient
12 tenus pour parler de carburant, évidemment pour la simple et bonne raison
13 que tout ceci devait être remporté: on ne peut pas transporter tout cela à
14 dos d'âne ou porter sur le dos. Par conséquent, il a fallu avoir des
15 véhicules de transport.
16 Voilà, c'est suivant ces principes-là, les principes des besoins que j'ai
17 ressentis, à savoir d'après ce que m'avait dit préalablement le
18 magasinier, le chef de la cantine. Je ne pouvais que réagir et j'ai dit à
19 la fin: "Je m'attends à votre compréhension et à votre aide". Evidemment,
20 si c'est un méfait ou une bonne chose, alors là, je demeure où je suis.
21 Question: Merci.
22 Je voudrais maintenant que l'on présente au témoin la pièce à conviction
23 D107.
24 (L'huissier s'exécute.)
25 C'est un autre mémo signé par vous-même, du 3 mars 1993, adressé au poste
Page 7908
1 militaire 7141 de la garnison de Foca. Dans cette lettre, vous dites entre
2 autres qu'au KP Dom, se trouvent détenus des Musulmans et des Serbes qui
3 ont commis une infraction au règlement militaire. Et vous rédigez là une
4 liste très concrète de vivres parmi lesquels on fait mention de riz, de
5 haricots verts, de pâtes, macaronis, etc. Et puis vous dites que "les
6 quantités ci-dessus citées suffisent pour assurer l'alimentation de ces
7 personnes pour une période d'un mois"?
8 Réponse: Si, oui. Je vous en prie, Madame, ceci a dû être établi par le
9 chef de la cuisine dans le respect des tableaux, selon le règlement. C'est
10 ainsi qu'il a rédigé tous cela et je n'avais qu'à en donner suite à
11 l'adresse de la poste militaire, à l'adresse des militaires. Parce qu'ici,
12 il a été dit, entre autres, qu'il y a en outre des condamnés, des
13 personnes autres que des militaires musulmans et serbes, etc.
14 C'est évidemment à cette Chambre d'instance d'en juger, mais il est vrai
15 que cette lettre est telle qu'elle est, et la signature apposée est la
16 mienne.
17 Question: Merci. Monsieur Krnojelac, lorsque vous avez appris de la part
18 du magasinier qu'il n'y avait pas assez d'aliments, lorsqu'il s'agissait
19 de détenus. Vous ne vous êtes jamais rendu auprès de ces gens-là que vous
20 avez décrits comme étant effectivement chargés des détenus du KP Dom, pour
21 parler des militaires? Vous ne vous êtes pas adressé à eux directement?
22 Vous avez écrit des lettres au commandement?
23 Réponse: La meilleure des coopérations que j'ai pu assurer moi, c'était de
24 leur écrire. Se rendre auprès d'eux sans écrire, cela n'aurait rien donné
25 du tout. Mais moi, aujourd'hui, si je n'avais pas écrit, vous ne pourriez
Page 7909
1 même pas me croire aujourd'hui sur ce que j'ai dit. C'est-à-dire que
2 jamais, je ne suis allé au-delà du commandement des arrières de Livade, à
3 savoir à deux kilomètres et demi, enfin, du KP Dom.
4 Cela dit, non seulement c'est à eux que j'ai demandé, mais je suis allé
5 ailleurs demander de la nourriture auprès de diverses sociétés, auprès de
6 la Croix-Rouge. Et de temps en temps, on parvenait à recevoir quelque
7 chose même de la Croix-Rouge. Parce qu'il y avait une des responsables de
8 la Croix-Rouge, nommée Snejana, une de mes anciennes élèves, qui toutes
9 les fois où cela était possible distribution faite évidemment à
10 l'intention des réfugiés et de la population, elle pouvait nous donner
11 quelque chose. Même si l'on nous donnait par exemple une vingtaine de
12 litres d'huile comestible, j'étais heureux. Je n'avais pas demandé de
13 saindoux parce que les Musulmans ne l'absorbent pas, ne le consomment pas;
14 par conséquent, je ne pouvais demander que de l'huile comestible.
15 Question: Monsieur Milorad Krnojelac, Mitar Rasevic n'a pas pris part à
16 ces actions portant aliments et vivres à l'intention des détenus.
17 Réponse: Mitar Rasevic avait d'autres obligations à remplir au KP Dom.
18 Question: Savo Todovic, lui non plus, n'a pas été impliqué dans cette
19 affaire de denrées alimentaires, n'est-ce pas?
20 Réponse: Lui aussi avait d'autres choses à faire. Je ne sais pas s'il
21 devait venir en contact avec le commandement au sujet de la nourriture,
22 mais lui aussi devait être au courant pour ce qui est de la situation
23 alimentaire au KP Dom parce que lui aussi se rendait à la cantine pour
24 prendre son petit déjeuner: il a pu en parler avec le cuisinier, etc. Je
25 ne sais pas s'il a pris des contacts avec les militaires et s'il savait
Page 7910
1 quelque chose de plus que moi.
2 Question: Monsieur Milorad Krnojelac, vous saviez quel nombre de Musulmans
3 se trouvaient détenus au KP Dom parce que vous avez eu accès aux livres
4 dans lesquels ils ont été enregistrés et au moyen desquels il fallait
5 faire l'appel. Evidemment, tous ces livres étaient gardés dans les pièces
6 du bâtiment, sur les étagères et dans les tiroirs d'un bureau qui se
7 trouvait dans une pièce tout à fait précise. On savait, d'après ces
8 listes, combien de gens se trouvaient détenus, n'est-ce pas?
9 Réponse: Non, je ne le savais pas. Et je voudrais vraiment que vous me
10 disiez sur la base de quoi j'aurais pu le savoir. Parce que ces documents-
11 là ne m'ont pas été vraiment accessibles.
12 Question: Monsieur Milorad Krnojelac, vous avez eu accès au personnel mais
13 aussi à la main-d'œuvre assurée par les détenus musulmans, n'est-ce pas?
14 Réponse: Excusez-moi. Voulez-vous, s'il vous plaît, reformuler cette
15 question ou la répéter?
16 Question: Je vais la reformuler: il n'y avait pas suffisamment de main-
17 d'œuvre au KP Dom et dans Foca, prises ensemble, n'est-ce pas?
18 Réponse: Oui.
19 Question: D'après votre déposition, on s'attendait à ce que vous
20 mainteniez en vie l'unité économique de la Drina pour que celle-ci
21 fonctionne?
22 Réponse: Oui.
23 Question: Pour que cette unité économique puisse fonctionner, vous avez eu
24 besoin d'ouvriers, n'est-ce pas?
25 Réponse: Oui, dans une certaine mesure et pour une certaine partie
Page 7911
1 d'activités, on pouvait dire qu'on en avait besoin.
2 Rêve Question: Et avant la guerre, la main-d'œuvre de l'unité économique
3 Drina a été assurée par les condamnés détenus, n'est-ce pas?
4 Réponse: Oui. Mais avec un complément de personnel important, de civils
5 qui étaient embauchés: parce qu'il y avait des civils qui étaient
6 embauchés au KP Dom et qui travaillaient de concert avec les personnes
7 condamnées.
8 Question: Et vous avez demandé de l'aide; vous avez demandé aussi que M.
9 Mladjenovic vous aide en vous assurant des artisans parmi la population
10 civile qui se trouvait en dehors du KP Dom. Et vous en avez pu en
11 recevoir, n'est-ce pas?
12 Réponse: Nous avons pu en recevoir. Quelques menuisiers, par exemple, pour
13 les faire embaucher dans la fabrique de meubles. Cela est vrai, mais tout
14 ceci suivait le même schéma, à savoir sur la base des décisions portant
15 obligation de travail.
16 Question: Mais tous ces gens-là ne suffisaient pas pour assurer le bon
17 fonctionnement de l'unité économique la Drina: vous avez eu besoin de plus
18 d'ouvriers, n'est-ce pas?
19 Réponse: A ce moment-là, j'aurais été content de deux ouvriers de plus.
20 Quelqu'un qui serait à la tête de l'atelier des laques et vernissage, et
21 un artisan qui s'occuperait de matelas et qui s'occuperait de tapisserie,
22 un tapissier. Mais ils m'ont plutôt envoyé des gens qui organisaient les
23 travaux de nettoyage et, comme je vous l'ai déjà dit, parmi les détenus,
24 il y avait cinq ou six personnes de nationalité musulmane qui étaient
25 engagées à travailler dans cette fabrique de meubles, de concert avec ces
Page 7912
1 menuisiers.
2 Question: C'est à cela que je pensais justement, Monsieur Milorad
3 Krnojelac. Pour assurer le bon fonctionnement de l'unité économique, vous
4 avez demandé qu'on mette à votre disposition certains de ces détenus, pour
5 qu'ils puissent travailler?
6 Réponse: Non, il n'en est pas ainsi. C'est-à-dire je n'ai pas demandé
7 qu'on m'assure parmi les détenus certains gens qui travaillent. Mais j'ai
8 demandé tout simplement quelqu'un qui serait à la tête de l'atelier de
9 vernissage, et un artisan de tapissier. C'est ainsi qu'ils m'ont trouvé
10 tout simplement 5 ou 6 personnes et ils les ont chargées croyant
11 probablement que ces gens-là étaient un petit peu initiés aux travaux de
12 menuisier où étaient-ils des menuisiers eux-mêmes. Ceci je ne le savais
13 pas.
14 Question: Monsieur Krnojelac, nous allons lentement, pas à pas. Pour
15 assurer le fonctionnement de l'unité économique vous avez eu besoin
16 d'hommes. Et vous avez été très concret pour demander de l'aide. Enfin,
17 n'insistons pas maintenant mais vous avez demandé les gens dont vous avez
18 eu besoin, n'est-ce pas.
19 Réponse: Oui, mais parmi les civils.
20 Question: Il vous a été dit que vous ne pouviez pas avoir de civils, qu'il
21 n'y avait pas suffisamment de gens parmi la population civile de Foca pour
22 satisfaire vos besoins. Voilà pour quelle raison on vous a donné des
23 détenus, n'est-ce pas?
24 Réponse: C'est M. Todovic qui nous a passé une liste en disant que ces
25 gens-là pouvaient être évidemment engagés. et qu'à une des réunions du
Page 7913
1 personnel je n'avais qu'à transmettre cette information au chef des
2 différent ateliers et unités, à savoir que M. Todovic a rédigé cette liste
3 et qu'eux ils n'avaient qu'à s'adresser à M. Todovic pour que ces gens-là
4 de cette unité de détenus leur soient assurés.
5 Question: Vous parlez d'une réunion du conseil, de quel conseil s'agit-il?
6 Réponse: Eh bien, c'est le conseil de direction. Le responsable de
7 l'atelier, celui de la ferme, celui de l'usine, le chef comptable, le
8 responsable du service commercial, tous ces gens-là. Tous les gens qui
9 étaient responsables des divers services, des diverses unités de l'unité
10 économiques de la Drina.
11 Question: Est-ce une réunion à laquelle Todovic a également participé?
12 Réponse: Monsieur Todovic n'a pas participé à cette réunion, il m'avait
13 informé un ou deux jours auparavant qu'il avait reçu un ordre dans ce
14 sens. Je lui ai dit que j'en parlerai aux responsables des unités de
15 travail et qu'il devait s'adresser à eux et leur demander de combien
16 d'hommes ils avaient besoin chacun d'eux. Mais je dois ajouter qu'à ce
17 moment-là j'ai demandé à M. Todovic de me dire s'il s'agissait là de
18 personnes qui se portaient volontaires pour travailler. Il a répondu que
19 c'était le cas, que ces gens se portaient volontaires et qu'il y avait
20 beaucoup plus de volontaires que de personnes choisies parce que tout le
21 monde n'avait pas les compétences nécessaires.
22 Question: L'ordre reçu par M. Todovic, pouvez-vous nous dire de quoi il
23 s'agissait exactement, à quel ordre faites-vous référence, s'il vous
24 plaît?
25 Réponse: Eh bien, j'ai pensé que c'était quelque chose qui avait été fait
Page 7914
1 oralement, peut-être par écrit. Mais j'ai eu l'impression qu'on lui avait
2 dit verbalement qu'il fallait qu'il établisse cette liste de compétences,
3 la compétence des personnes concernées et le type de travail qu'elles
4 pouvaient effectuer. Voilà ce que je voulais dire. Donc on lui avait
5 demandé d'établir une liste des compétences.
6 Question: Est-ce que vous avez appris qui lui avait donné cet ordre?
7 Réponse: Eh bien, le commandement militaire du groupe tactique, je
8 suppose. Quant à la personne précise qui lui a donné cet ordre, non je ne
9 l'ai pas vue et je ne lui ai pas demandé. Mais comme cela faisait partie
10 de la section militaire du groupe tactique qui se trouvait à Velecevo,
11 c'était sans doute la partie de la prison des femmes qui auparavant
12 appartenait au KP Dom.
13 Question: A qui avez-vous fait cette demande pour obtenir des artisans?
14 Réponse: A M. Mladjenovic.
15 Question: Et M. Mladjenovic ne vous a pas répondu directement?
16 Réponse: Mladjenovic m'a dit qu'il allait voir ce qu'il pouvait faire et
17 qu'il ferait de son mien parce qu'il avait compris que j'avais besoin de
18 ces gens et que si je n'avais pas eu besoin d'eux je n'aurais pas fait
19 cette demande. En plus il s'agissait d'artisans extrêmement précis.
20 Question: Excusez-moi, pour que les choses soient bien claires, vous avez
21 fait une demande à M. Mladjenovic et ensuite ce qui s'est passé c'est que
22 M. Mladjenovic vous a dit qu'il avait établi une liste de détenus
23 disponibles pour travailler pour vous?
24 Réponse: Après la conversation avec Mladjenovic il y a eu la conversation
25 avec Todovic qui a eu lieu après lorsqu'il m'a dit qu'il disposait d'un
Page 7915
1 certain nombre d'hommes. Moi, j'avais surtout besoin de quelqu'un à la
2 tête du service de vernissage parce qu'on avait environ une centaine
3 d'étagères de bibliothèque qu'il convenait de vernir.
4 Question: Nous n'avons vraiment pas besoin de ce genre de détails, vous
5 nous avez déjà parlé à de très nombreuses reprises du service de
6 vernissage.
7 Vous étiez également responsable de la supervision de l'atelier de
8 métallurgie.
9 Monsieur Relja Goljanin lui était responsable de quoi?
10 Réponse: On m'a mis à la tête de la totalité de l'unité de la Drina y
11 compris l'atelier de métallurgie, mais Relja, lui, s'occupait plus
12 précisément de ce service, de cet atelier.
13 Question: Les gens qui travaillaient pour M. Goljanin dans l'atelier de
14 mécanique c'étaient des ouvriers qualifiés, n'est-ce pas?
15 Réponse: Je ne dirai pas qu'ils travaillaient pour Goljanin. Ils
16 travaillaient dans l'atelier de métallurgie et c'étaient des ouvriers
17 qualifiés effectivement.
18 Question: A quel moment en mai ou en juin 1992? Donc à un moment donné au
19 mois de mai et juin 1992 on a emmené un groupe de détenus musulmans en
20 dehors du KP Dom, et certains d'entre eux travaillaient dans l'atelier de
21 métallurgie. Monsieur Goljanin l'a appris et il était furieux d'apprendre
22 qu'on avait emmené un certain nombre d'hommes qui travaillaient dans son
23 atelier. Est-ce que vous vous souvenez de cela?
24 Réponse: Tout ce que je sais c'est que M. Hamdo a quitté l'atelier de
25 métallurgie et en ce qui concerne les autres personnes, on ne m'a rien
Page 7916
1 dit. Je ne sais pas qui est parti pour être échangé ou autre chose.
2 Question: Mais il y a un moment où il y a une liste des ouvriers qualifiés
3 de l'atelier de métallurgie, qui se trouvait au portail d'entrée et qui
4 indiquait qu'il s'agissait là d'ouvriers qualifiés qu'il ne fallait pas
5 sortir, dont on avait besoin au KP Dom. Il y avait une telle liste qui
6 existait, n'est-ce pas?
7 Réponse: Je ne l'ai jamais vue, je ne connais pas son existence.
8 Question: Monsieur Milorad Krnojelac, vous savez qu'il y avait des
9 ouvriers qualifiés qui travaillaient dans l'atelier mécanique pendant
10 toute leur détention. Et pourquoi? Parce qu'ils avaient les compétences
11 nécessaires pour le faire. Ils ne changeaient pas de poste, on ne les
12 plaçait pas à d'autres postes. Il s'agissait d'un nombre bien déterminé de
13 gens qui ont travaillé pendant plusieurs mois de suite à l'atelier de
14 mécanique?
15 Réponse: La mission de cet atelier, c'était la maintenance. Et je crois
16 qu'ils ont également terminé la construction de deux kiosques qui étaient
17 près d'être terminés. L'autre travail de cet atelier, c'était la
18 maintenance des bâtiments, des installations du KP Dom.
19 Question: Veuillez, s'il vous plaît, répondre à ma question qui était la
20 suivante: n'est-il pas exact qu'il s'agissait là d'un groupe bien précis
21 de détenus qui travaillaient dans cet atelier?
22 Réponse: Je ne sais pas.
23 Question: Vous savez que Ekrem Zekovic a travaillé plusieurs mois dans cet
24 atelier au cours de sa détention. C'est quelqu'un que vous connaissiez?
25 Réponse: J'ai déjà dit que je ne connaissais pas Ekrem si bien que cela.
Page 7917
1 Mais j'allais là-bas très rarement ou il m'arrivait d'entrer dans
2 l'atelier alors que lui se trouvait dans un atelier différent. Il
3 m'arrivait donc d'y aller et de ne pas le voir parce que je ne me rendais
4 pas dans tous les ateliers. Cela n'était pas nécessaire, il n'était pas
5 nécessaire que je me rende dans tous les coins de cet atelier de travail
6 du métal. Il m'arrivait de passer par là et de jeter un coup d'oeil.
7 Je ne sais donc pas s'il y avait effectivement un groupe de détenus bien
8 précis. Non, ça ne peut pas, ça ne pourrait pas être possible. Parce que
9 chaque fois que j'y allais… C'est Relja qui me le disait; il m'a dit qu'on
10 avait emmené quelqu'un. Ce n'était donc pas un groupe fixe, ça changeait.
11 Question: Vous avez dit que Relja vous a dit quelque chose au sujet de
12 gens que l'on emmenait, mais la traduction n'était pas très claire à ce
13 sujet. Est-ce que vous pouvez répéter ce que vous avez dit?
14 Réponse: J'ai dit que ce n'était pas toujours les mêmes, ce n'était
15 toujours pas le même nombre de gens parce que, parfois, il me disait,
16 parfois il ne me disait pas que l'on emmenait quelqu'un. Par exemple, il
17 me disait: "On a emmené Hambo et je ne sais pas quand est-ce qu'ils vont
18 me le ramener". Et on savait que c'étaient les soldats de Miljevina qui
19 les emmenaient.
20 Question: Et cet Hambo dont vous nous parlez, il a été emmené à Miljevina
21 pour y travailler sur des voitures en tant que mécanicien, n'est-ce pas?
22 Réponse: Ce qu'il a fait là-haut, je n'en sais rien, je ne lui ai jamais
23 demandé. En tout cas, c'est vrai que c'était un mécanicien dans le domaine
24 de l'automobile; c'était quelqu'un qui était un excellent artisan.
25 Question: Monsieur Milorad Krnojelac, vous connaissiez également Mohamed
Page 7918
1 Lisica: vous savez qu'il a travaillé pendant longtemps dans l'atelier?
2 Réponse: On se connaissait, mais on ne se connaissait pas depuis si
3 longtemps que ça, je ne dirais pas ça. Mais je le connaissais, je le
4 connaissais surtout de vue.
5 Question: Vous avez également parlé de ce que l'on fabriquait dans cet
6 atelier de mécanique. Ce qu'on fabriquait à cet endroit, cela devait
7 recevoir l'approbation de vous-même et Goljanin. Il n'était pas possible
8 de procéder à un travail non autorisé dans cet atelier, n'est-ce pas?
9 Réponse: Relja Goljanin pouvait autoriser tout ce qu'il voulait parce que,
10 lors d'une autre réunion du conseil d'administration, on avait dit qu'il
11 serait très souhaitable que la fabrique de meubles et l'atelier de
12 mécanique puissent faire des missions au coup par coup, des livraisons
13 individuelles. Parce que cela permet de gagner de l'argent. Donc M.
14 Goljanin était autorisé à faire cela. Bien entendu, il fallait rédiger des
15 factures en conséquence.
16 Question: Donc c'est lors du conseil d'administration qu'on a procédé à
17 cette décision? Et c'est une décision en fait que vous avez prise, en tant
18 que directeur, pour qu'il y ait une certaine flexibilité quant à la
19 détermination du travail réalisé?
20 Réponse: Il n'y a pas eu de détermination formelle, c'était un
21 arrangement.
22 Question: Vous étiez responsable de l'unité économique de la Drina, donc
23 c'était vous qui étiez en mesure de donner à vos subordonnés la
24 possibilité de travailler avec un peu plus de flexibilité. Ce n'est pas
25 quelque chose qu'ils pouvaient décider d'eux-mêmes.
Page 7919
1 Réponse: Je suis d'accord, mais c'était ce qui se passait avant et je ne
2 voulais pas leur enlever des prérogatives qu'ils avaient auparavant. Ce
3 que je voulais, c'était qu'il y ait une meilleure atmosphère au sein de
4 l'équipe. Je voulais contribuer à une meilleure compréhension.
5 Question: La facture à laquelle vous faites référence, c'est qu'il
6 arrivait à cet atelier du travail du métal, cet atelier de mécanique, de
7 travailler pour des intervenants extérieurs au KP Dom. A ce moment-là, les
8 personnes en question, que ce soit une entreprise ou un individu,
9 recevaient une facture suite au travail accompli au sein du KP Dom.
10 Réponse: Je n'ai jamais vu de facture parce que cela ne me venait pas.
11 S'il y avait eu, on ne me l'aurait pas amenée. Elle était remise au
12 service administratif.
13 Question: Je vous demande vraiment d'essayer de répondre à mes questions.
14 Je ne vous demande pas si vous avez vu cette facture. Vous avez parlé
15 d'une facture. Moi, simplement, je vous demandais ce que vous entendiez
16 par là. Quand vous parliez de facture, est-ce que vous parliez d'une
17 facture qui aurait été envoyée à une personne ou à une entreprise située
18 en dehors du KP Dom pour laquelle on avait réalisé un certain travail.
19 C'est ce que vous vouliez dire par là, n'est-ce pas?
20 Réponse: Je ne sais pas s'il y avait des factures, je ne sais pas s'ils
21 travaillaient pour des gens à l'extérieur du KP Dom.
22 Question: Monsieur, vous avez déclaré que M. Goljanin était en mesure
23 d'autoriser ce genre de choses. Je cite: "sauf qu'il fallait établir bien
24 entendu une facture pour cela." Donc, ce qui a été convenu c'est que
25 l'atelier du travail pour le métal pouvait procéder à ce genre de travail
Page 7920
1 et ensuite on envoyait une facture aux personnes pour qui ce travail avait
2 été réalisé. C'est ce qui avait été convenu, n'est-ce pas?
3 Réponse: Oui, mais cette facture n'était pas remise au responsable de
4 l'unité économique, mais à l'administration qui ensuite pouvait procéder
5 au calcul nécessaire et envoyer la facture pour le travail accompli. Cela,
6 c'est le chef du service comptabilité.
7 Question: Merci, Monsieur Krnojelac. Vous étiez également chargé de la
8 supervision du travail qui était du travail de nature saisonnière qui se
9 déroulait à l'extérieur du KP Dom, comme par exemple le fait de faire le
10 foin ou de couper de l'herbe?
11 Réponse: Oui.
12 Question: Et même si cela ne se déroulait pas dans les locaux du KP Dom ou
13 même dans l'exploitation agricole, cela faisait quand même partie de vos
14 fonctions, n'est-ce pas?
15 Réponse: Monsieur Novica Mojovic qui était responsable de l'exploitation
16 agricole était chargé de ce travail.
17 Question: Mais vous, vous étiez responsable de M. Mojovic. Vous étiez
18 placé au-dessus de lui dans la hiérarchie, n'est-ce pas?
19 Réponse: Oui, oui.
20 Question: Donc, c'était vous ou lui-même, qui étiez responsable si on
21 emmenait des détenus pour travailler à l'extérieur, vous étiez responsable
22 du retour de ces détenus en toute sécurité?
23 Réponse: C'est celui qui était chargé de la sécurité qui devait s'assurer
24 que ces gens rentraient en toute sécurité. Je parle des gens qui étaient
25 sortis pour aller travailler.
Page 7921
1 Question: Mais ces gens travaillaient pour vous. Est-ce que vous-même vous
2 n'étiez pas également responsable de leur sécurité pendant qu'ils
3 travaillaient et de leur sécurité dans le trajet aller et retour. Cela
4 faisait partie également de vos responsabilités, n'est-ce pas?
5 Réponse: Eh bien, en tout état de cause c'est la responsabilité de celui
6 qui donne le travail et de celui qui s'occupe de ces gens. En tant
7 qu'homme, si vous vous placez dans un contexte de relations humaines, bien
8 entendu moi, je suis responsable de tout le monde. Si on parle ici du
9 point de vue des fonctions et des obligations, c'est celui qui a autorisé
10 le travail et celui qui assure la sécurité des hommes en question qui en
11 sont responsables.
12 Question: Si un groupe de détenus était emmené pour aller faire les foins,
13 s'ils leur arrivaient quelque chose, si quelqu'un était blessé ou s'il y
14 en avait un qui ne revenait pas au KP Dom, à ce moment-là il aurait été de
15 votre responsabilité de découvrir ce qui s'était passé, n'est-ce pas?
16 Réponse: Cela n'aurait pas été ma responsabilité parce que ce n'était pas
17 moi dans cette hypothèse qui aurais donné l'autorisation pour que ces gens
18 sortent pour se rendre à cet endroit et qui aurais déterminé la nature de
19 leur mission. Cela aurait été la responsabilité de celui qui les aurait
20 fait sortir. Si par exemple, dans le pire des cas, quelqu'un s'était fait
21 mordre par un serpent ou s'était coupé, bien entendu quelle que soit la
22 nature précise des responsabilités, j'aurais fait de mon mieux pour sauver
23 la vie de la personne en question, j'aurais fait de mon mieux.
24 Mais en ce qui concerne tout le reste, je ne pense pas que j'avais aucune
25 responsabilité quelle qu'elle soit dans ce contexte.
Page 7922
1 Question: Mais si, par exemple, on imagine qu'on ait fait sortir des
2 détenus pour aller ramasser des prunes, c'est le genre de travail de
3 nature saisonnière dont nous parlons, et si ces détenus ne revenaient pas,
4 à ce moment-là il aurait été de votre responsabilité de découvrir ce qu'il
5 leur était arrivé. Cela faisait partie de vos fonctions, n'est-ce pas?
6 Réponse: Excusez-moi…je vous en prie, je ne vois pas vraiment pourquoi
7 vous ne me comprenez pas quand je vous dis quels sont…., ce qu'il en est.
8 Je vous dis que je ne sais pas ce qui leur est arrivé. Je ne sais pas qui
9 les a fait sortir mais vous, apparemment, vous avez l'intention de me
10 faire porter la responsabilité mais ce n'était pas du tout ma
11 responsabilité.
12 Question: Monsieur M. Krnojelac, en fait à ce moment-là aucun détenu n'a
13 été mis à contribution pour ramasser des prunes parce qu'à cette époque-là
14 les vergers étaient minés, n'est-ce pas?
15 Réponse: Je sais qu'il y a une partie des vergers qui avait été minée.
16 C'était dans la direction de Scepan Polje. Il y avait un verger qui
17 appartenait à la coopérative avec des pommiers. Je ne sais pas combien de
18 fois je suis passé et puis j'ai vu que personne ne ramassait jamais les
19 pommes. Cela veut dire que c'était miné.
20 A d'autres endroits il n'y avait peut-être pas de mines mais je n'en sais
21 rien parce que je ne suis pas un militaire et je n'allais pas à cet
22 endroit. Je ne sais donc pas s'il était miné ou non. Autant que je puisse
23 vous dire, en fonction de mes capacités intellectuelles, je crois qu'un
24 détenu en a parlé, ou plutôt un témoin a également parlé de cet incident.
25 Ensuite on a parlé du ramassage des prunes, donc vraiment je ne sais rien
Page 7923
1 de tout cela. Je ne sais pas si je pourrais tenir le coup.
2 Question: Monsieur M. Krnojelac, vous vous êtes entretenu avec les
3 enquêteurs et vous avez dit que tous les vergers étaient minés à ce
4 moment-là. Il aurait donc été impossible pour quiconque d'aller ramasser
5 des prunes ou d'autres fruits, n'est-ce pas?
6 Réponse: C'est peut-être la façon dont ça a été interprété mais en tout
7 cas, moi, je n'ai pas dit que tous les vergers avaient été minés. J'ai dit
8 qu'il y avait un certain nombre de vergers où l'on avait posé des mines et
9 où on ne pouvait pas entrer.
10 Si l'agriculteur n'allait pas ramasser ses fruits, il fallait que personne
11 d'autre y aille parce qu'il devait savoir ce qui se passait. L'agriculteur
12 savait que c'était miné, donc il n'allait pas ramasser ses fruits. Mais je
13 ne suis pas allé partout pour me renseigner, pour savoir si tous les
14 vergers sans exception ont été minés.
15 Question: Mais jamais dans le cadre de l'unité économique de la Drina, on
16 a envoyé des gens pour ramasser des fruits, c'est ce que vous dites?
17 Réponse: Non jamais. Puis il n'était pas nécessaire pour l'unité
18 économique de la Drina d'aller ramasser des fruits.
19 Question: Monsieur, vous saviez qu'on faisait sortir des détenus du KP Dom
20 soit pour qu'ils soient échangés… En tout cas, ce sont des gens qui ne
21 sont jamais revenus?
22 Réponse: Je ne comprends pas pourquoi vous affirmez que j'étais au courant
23 de tous les échanges. Il y en a… La plupart, je n'en ai entendu parler
24 qu'après les faits, après l'échange, après la réalisation de ces échanges.
25 A ce moment-là quelqu'un de l'administration ou quelqu'un d'autre que je
Page 7924
1 rencontrais comme ça à l'extérieur ou ailleurs me disait qu'il y avait eu
2 un échange, mais je n'étais pas au courant.
3 Moi, je vous ai dit qui était responsable de cela et je vous ai expliqué
4 que cet ordre était transmis d'une personne à l'autre en ce qui concerne
5 le commandement militaire. J'avais suffisamment de travail de mon côté,
6 j'avais suffisamment d'ennuis personnels, etc.
7 Question: Vous nous parlez de quelqu'un de l'administration. Qu'est-ce que
8 vous entendez par administration?
9 Réponse: Eh bien, je pense aux employés qui travaillaient au sein de
10 l'unité économique de la Drina.
11 Mme Kuo (interprétation): Vous avez appris, excusez-moi…
12 M. M. Krnojelac (interprétation): Je vous prie de m'excuser également.
13 (Questions relatives à la procédure.)
14 M. le Président (interprétation): Madame Kuo, je ne souhaite pas vous
15 forcer à accélérer le rythme, mais avez-vous une idée de la longueur du
16 contre-interrogatoire? Nous nous inquiétions un peu des deux témoins que
17 nous entendions entendre cette semaine.
18 Mme Kuo (interprétation): J'entendais finir aujourd'hui mais je ne suis
19 plus très optimiste, vu la façon dont les choses se déroulent. Je me suis
20 entretenu avec la défense et il apparaît que l'on pourrait faire venir les
21 témoins cet après-midi à 14 heures 30. Interrompre donc le témoignage de
22 l'accusé pour pouvoir en terminer aujourd'hui avec ces détenus.
23 M. le Président (interprétation): Donc témoin de la défense ou de
24 l'accusation?
25 Mme Kuo (interprétation): Oui, oui, ce sont ces deux témoins et si nous
Page 7925
1 siégions demain, à ce moment-là, je pourrais recommencer le contre-
2 interrogatoire et puis le terminer.
3 M. le Président (interprétation): Nous nous inquiétons uniquement pour ces
4 deux témoins parce qu'il y en a une qui ne peut pas venir lundi.
5 Maître Bakrac, est-ce que cela vous gêne d'interrompre la déposition de
6 votre client pour entendre les deux autres témoins?
7 M. Bakrac (interprétation): Non cela ne gêne pas l'équipe de la défense,
8 mais je souhaiterais que vous me donniez un instant pour vérifier la chose
9 avec l'accusé qui est sous serment actuellement pour expliquer de quoi il
10 retourne. Mais la défense n'a pas d'objection et on pourrait effectivement
11 entendre notre témoin expert à 14 heures 30. Le témoin est déjà au courant
12 de ce fait.
13 M. le Président (interprétation): Nous n'allons rien faire sans le
14 consentement de votre client et vous pourrez vous entretenir avec lui de
15 cela pendant la pause. Mais il s'agit uniquement d'essayer d'en finir,
16 enfin sans vouloir parler au sens strict du terme, avec les deux autres
17 témoins puisque sinon on ne pourrait pas les réentendre avant la semaine
18 du 16 juillet. Nous ne voulons cependant faire peser aucune pression sur
19 vos épaules. Il s'agit uniquement de voir ce qui est possible de faire et
20 nous souhaitons cependant nous opposer à aucune objection que vous
21 pourriez avoir.
22 Donc essayez de réfléchir à la question et de nous faire savoir à 11
23 heures 30 quelle est votre décision.
24 Nous allons maintenant faire une pause.
25 (L'accusé est reconduit hors du prétoire.)
Page 7926
1 (L'audience, suspendue à 11 heures, est reprise à 11 heures 32.)
2 (L'accusé est introduit dans le prétoire.)
3 M. le Président (interprétation): Maître Bakrac, êtes-vous en mesure de
4 nous donner des indications au sujet de l'interruption de la déposition de
5 votre client?
6 M. Bakrac (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Je me suis
7 entretenu avec mon client et cela ne le gêne pas si cela peut-être être
8 utile et si cela nous permet d'avancer plus efficacement vers la fin de
9 cette affaire.
10 M. le Président (interprétation): Nous vous sommes très reconnaissants,
11 Monsieur M. Krnojelac, d'accepter cette proposition. Nous vous sommes
12 reconnaissants, Maître Bakrac, d'organiser la chose.
13 Donc maintenant, ce qui va se passer à 14 heures 30 Maître Bakrac: nous
14 allons entendre votre témoin, c'est votre expert, et ensuite l'expert de
15 l'accusation devrait se trouver dans le prétoire pour écouter et ensuite
16 contribuer au contre-interrogatoire éventuellement. Ensuite votre expert
17 Maître Bakrac, pourra rester pour vous aider dans le cadre du contre-
18 interrogatoire du témoin de l'accusation. Vous disposez, n'est-ce pas, de
19 la déclaration du témoin de l'accusation, de l'expert de l'accusation si
20 bien que vous pouvez interroger votre propre témoin au sujet de ce qui
21 vous intéresse dans cette déclaration. Nous ne voulons pas avoir à
22 rappeler de nouveau votre expert en réplique si cela peut être évité.
23 Madame Kuo, veuillez poursuivre avec le contre-interrogatoire du témoin.
24 (Contre-interrogatoire de l'accusé, M. Milorad Krnojelac, par Mme Kuo.)
25 Mme Kuo (interprétation): Monsieur Krnojelac, vous avez parlé avec Faik
Page 7927
1 Tafro le jour où il a été ramené de Cajnice à la fin juin 1992 et il vous
2 a dit qu'on l'avait ramené parce que l'échange n'avait pas eu lieu. Il
3 avait échoué.
4 M. M. Krnojelac (interprétation): Je ne sais pas si c'était à la fin juin,
5 je crois que c'était un peu plus tôt, mais en tout cas je lui ai parlé.
6 Question: Ensuite il y a un certain nombre de détenus qui sont revenus de
7 Niksic et vous avez appris à cette occasion, que cet échange, lui aussi,
8 avait échoué.
9 Réponse: Non, plus tard j'ai appris quand ils étaient revenus de Niksic
10 mais après leur retour de Niksic, quelques jours après.
11 Question: A ce moment-là, vous saviez déjà qu'il y avait des groupes qui
12 étaient emmenés pour être échangés, qu'il y avait des groupes de détenus
13 que l'on faisait sortir, qui parfois revenaient, qui parfois ne revenaient
14 pas.
15 Réponse: Je suis au courant pour ces deux groupes. Je sais qu'ils sont
16 revenus. Je sais qu'un autre groupe a été emmené à Niksic mais je ne sais
17 pas pour ce qui est des autres. J'ai entendu dire parfois qu'après les
18 échanges…., après les échanges parfois j'étais mis au courant, j'apprenais
19 ce qui s'était passé et parfois je n'en savais rien du tout.
20 Question: Il y a un autre groupe qui a été emmené pour être échangé à la
21 fin août, le 30 août. Ce groupe lui aussi est revenu et dans ce groupe il
22 y avait votre ex-collègue, RJ, qui vous a dit ce qui s'était passé?
23 Réponse: Non, non. Il ne m'a rien dit et je ne sais pas, je n'ai pas
24 connaissance que ce groupe soit revenu. Est-ce qu'il s'agit du groupe qui
25 est revenu après Niksic? Personne ne m'en a parlé parce que j'ai
Page 7928
1 simplement entendu que Pero Elez les avait ramenés de quelque part avant
2 Niksic. Mon collègue ne me l'a pas dit, ce n'est pas mon collègue qui me
3 l'a dit, à ce moment-là je n'ai pas vu mon collègue.
4 Question: Mais vous savez que votre collègue, on l'a emmené le lendemain,
5 qu'il a été échangé?
6 Réponse: Non, je ne sais pas, je ne savais pas.
7 Question: A plusieurs reprises vous avez rencontré votre collègue RJ alors
8 qu'il était retenu au KP Dom, n'est-ce pas?
9 Réponse: Oui.
10 Question: Donc vous devez être au courant des circonstances de sa
11 libération, n'est-ce pas?
12 Réponse: Non? je ne sais pas.
13 Question: Vous n'avez aucune idée de ce qui est arrivé à votre ami, à
14 votre collègue RJ?
15 Réponse: Je ne le savais pas. Je savais simplement que M. Dakic avait
16 demandé qu'il soit libéré. Mais comment il a été libéré, comment il est
17 parvenu à être libéré, s'il a été échangé, je ne sais pas.
18 Question: Mais vous n'avez jamais dit à RJ quand il vous a dit….
19 Je reformule ma question. Vous n'avez pas dit: "C'est ce que je pensais"
20 quand RJ vous a expliqué comment s'était passé l'échange au départ et
21 comment il avait échoué?
22 Réponse: Non.
23 Question: Mais vous savez que ces échanges ont été réalisés en fonction de
24 listes qui étaient remises à la personne qui était de service à l'entrée?
25 Réponse: Cela, je l'ai appris plus tard. Une fois, j'ai demandé sur
Page 7929
1 quelles bases on emmenait ces gens et on m'a répondu qu'il arrivait
2 généralement une liste, on faisait l'appel des noms qui figuraient sur
3 cette liste et les gens s'en allaient.
4 Question: Est-ce que vous avez découvert où ces listes étaient établies et
5 qui les établissait?
6 Réponse: Croyez-moi, je ne sais pas. Je ne l'ai pas appris, je ne sais pas
7 qui rédigeait ces listes, qui faisait des propositions quant aux noms des
8 personnes qui devaient être échangées.
9 Question: Mais quand la liste arrivait au KP Dom, les gardes du KP Dom
10 allaient chercher les détenus et les rassemblaient avant qu'ils ne soient
11 emmenés.
12 Réponse: Je ne suis pas au fait de la procédure en question.
13 Question: Vous nous avez dit la manière dont ces listes arrivaient. Qui
14 vous l'a dit?
15 Réponse: Généralement quelqu'un me disait qu'il y avait un échange, et
16 parfois je m'intéressais de savoir comment cela se passait. Une fois, il y
17 avait un Cancar Milenko. Je lui ai posé la question, il m'a dit: "Milorad,
18 il y a une liste qui arrive, on fait l'appel et on emmène les gens en
19 question pour l'échange." C'est ce qui se passait. Je ne me souviens pas à
20 quelle période exactement cela s'est produit.
21 Question: Milenko Cancar était policier au KP Dom, n'est-ce pas?
22 Réponse: Il travaillait au service de sécurité.
23 Question: C'est la même chose que policier, n'est-ce pas?
24 Réponse: Mais ce jour-là quand je lui ai posé la question il n'était pas
25 de service.
Page 7930
1 Question: Mais quoiqu'il en soit pendant la guerre, d'avril 1992 jusqu'au
2 moment de votre départ ses fonctions c'étaient celles de policiers au sein
3 de la sécurité du KP Dom, n'est-ce pas?
4 M. M. Krnojelac (interprétation): Il travaillait dans la sécurité, mais je
5 ne me souviens pas à partir de quand et jusqu'à quand.
6 Mme Kuo (interprétation): L'accusation souhaiterait attirer l'attention de
7 la Chambre sur le document P-3. Milenko Cancar figure au regard du n°26.
8 M. le Président (interprétation): Merci.
9 Mme Kuo (interprétation): Monsieur Cancar vous a expliqué ce qu'il se
10 passait avec cette liste parce que vous étiez intéressé? Vous nous avez
11 dit vous-même que vous étiez intéressé.
12 M. M. Krnojelac (interprétation): Je lui ai demandé si quelques jours
13 avant il y avait un groupe qui avait été emmené pour être échangé. Il a
14 répondu: "Oui.". Alors je lui ai dit: "Mais alors explique-moi comment
15 cela se passe, comment cela s'est passé!".
16 Il m'a répondu: "Ben, d'après ce que je sais, il y a une liste qui est
17 venue, on a fait l'appel des noms qui figuraient sur cette liste et les
18 gens étaient emmenés pour être échangés."
19 Question: Est-ce que vous lui avez posé des questions supplémentaires pour
20 savoir d'où venait cette liste et qui l'avait rédigée?
21 Réponse: Je ne lui ai pas posé de questions supplémentaires, je ne lui ai
22 posé aucune question supplémentaire. Cela s'est fait en passant devant le
23 KP Dom cette conversation. Je ne sais plus si c'est lui qui était plus
24 pressé que moi ou moi que lui, mais en tout cas je ne lui ai pas posé de
25 questions supplémentaires parce que d'une certaine manière je me suis dit
Page 7931
1 que cette liste devait venir de l'extérieur et en toute probabilité du
2 commandement militaire.
3 Question: Pourquoi avez-vous pensez à cela?
4 Réponse: C'est ce que j'ai pensé à ce moment-là parce que cette partie du
5 KP Dom avait été louée au commandement militaire et c'est eux qui
6 s'occupaient de ces gens.
7 Question: Mais vous nous dites donc qu'à ce moment-là vous n'avez plus
8 ressenti aucune curiosité en ce qui concernait cette question, vous n'avez
9 plus posé aucune question à qui que ce soit en ce qui concerne l'origine
10 de ces listes, c'est cela?
11 Réponse: Eh bien, non, je l'ai dit. On s'est rencontrés comme ça en
12 passant. Il y en a un de nous deux qui était pressé donc on n'est pas
13 restés à discuter longtemps. On n'aurait pas pu en parler en détail.
14 Question: Mais vous n'avez demandé à personne d'autres d'où provenaient
15 ces listes , n'est-ce pas?
16 Réponse: Non.
17 Question: Votre collègue RJ vous a appris qu'il y avait des détenus qui
18 disparaissaient pendant la nuit, n'est-ce pas? Il vous l'a dit?
19 Réponse: Mon collègue ne m'a jamais dit cela et je n'ai jamais appris
20 cela.
21 Question: Vous n'avez jamais appris qu'il y avait des gens qui
22 disparaissaient tout simplement du KP Dom?
23 Réponse: Jamais.
24 Question: Mais vous avez sans doute remarqué que le nombre des détenus
25 diminuait sur la base des quantités de nourriture nécessaires?
Page 7932
1 Réponse: Jamais, personne ne m'a jamais dit cela et je ne pouvais
2 l'apprendre.
3 Question: Vous n'avez jamais su que le nombre de détenus musulmans
4 diminuait et a diminué pendant les mois de juin et juillet?
5 Réponse: Non.
6 Question: N'est-il pas exact que vous connaissez le nombre exact de détenus
7 qui étaient au du KP Dom au début du mois de juin?
8 Réponse: Ce n'était pas quelque chose à quoi j'avais accès, je n'avais
9 aucun moyen de le savoir.
10 Question: J'aimerais que les choses soient bien claires. Donc vous êtes en
11 train de nous dire que vous n'aviez aucune idée du nombre de détenus
12 musulmans en juin 1992?
13 Réponse: Je ne le savais pas.
14 Question: Le 17 septembre vous étiez au KP Dom, lorsque le groupe de
15 personnes que l'on a soi-disant emmenées pour qu'elles cueillent des
16 prunes, lorsque ce groupe donc a traversé la cour?
17 Réponse: Excusez-moi, je n'ai absolument aucune idée où je me trouvais le
18 17 septembre et je ne sais absolument rien de ce groupe qui a été emmené,
19 je ne les ai pas vues.
20 Question: Vous nous dites également donc que vous n'avez jamais appris
21 quoi que ce soit au sujet de ce groupe dont tout le monde parlait
22 pourtant?
23 Réponse: Je n'ai jamais entendu parler de ce groupe, je n'ai jamais
24 entendu parler de cette cueillette de prunes jusqu'à ce que je lise la
25 chose dans les déclarations que vous avez remises ici à La Haye.
Page 7933
1 Question: Est-ce que vous êtes en train de dire que cela ne s'est pas
2 passé ou bien que cela a pu se passer, mais que personne ne vous en a
3 informé?
4 Réponse: C'est comme toutes les choses que je n'ai pas vues de mes propres
5 yeux, ou entendues de mes propres oreilles. Je ne peux rien dire, je ne
6 rien affirmé. Tout ce que je peux vous affirmer c'est que je n'ai rien
7 entendu dire au sujet de cette chose.
8 Question: Mais vous n'êtes pas en mesure de nous dire où vous vous
9 trouviez le 17 septembre 1992, n'est-ce pas?
10 Réponse: C'est indéniable que je ne peux pas vous le dire. Je ne peux même
11 pas vous dire si j'étais au KP Dom ce jour-là parce que savoir où j'étais
12 ce jour-là, ce jour précisément si ça se trouve c'était un samedi ou
13 dimanche. Il était possible que j sois parti pour le week-end.
14 Question: Vous ne travailliez le samedi ou dimanche, n'est-ce pas?
15 Réponse: Personne au sein de l'unité économique ne travaillait le samedi
16 ou le dimanche, l'unité économique de la Drina.
17 Question: Vous n'avez donc jamais signé aucun document le samedi ou le
18 dimanche?
19 Réponse: Je n'aurais rien pu signer si je n'étais pas là.
20 Question: En d'autres termes vous n'avez jamais emmené d'autres documents
21 ou bien on ne vous a jamais remis de documents pour signature le samedi où
22 le dimanche?
23 Réponse: Cela n'était pas nécessaire et je me souviens pas que quiconque
24 ne m'ait jamais amené un document le samedi ou le dimanche.
25 Question: Mais la date des documents qui portent votre signature
Page 7934
1 normalement doit être exacte. Cela correspond à la date à laquelle vous
2 avez signé ledit document?
3 Réponse: C'est ainsi que les choses devraient être mais ce n'est pas
4 forcément le cas parce qu'il est possible que la date qui est inscrite sur
5 le document soit la date du jour précédent ou du jour qui suit. Cela
6 dépend du moment où le document a été rédigé.
7 Question: En fait la date qui figure sur un document, c'est la date à
8 laquelle ce document a été établi et non pas forcément la date à laquelle
9 vous avez signé ledit document, c'est cela?
10 Réponse: Oui, c'est possible. Ça, c'est une possibilité mais je ne
11 l'affirme pas parce que je ne sais pas de quel document nous parlons. Je
12 ne sais rien de cela mais c'est possible.
13 Question: Mais nous parlons de la procédure générale qui prévalait puisque
14 vous nous avez dit que vous n'étiez pas là le samedi, le dimanche. Donc la
15 date qui figurait sur les documents c'est la date à laquelle ce document
16 avait été rédigé, c'est exact, n'est-ce pas?
17 Réponse: A mon avis, c'est comme ça que les choses se passent.
18 Question: Monsieur M. Krnojelac, vous avez transmis des requêtes aux fins
19 de libération d'un certain nombre de détenus musulmans bien précis, n'est-
20 ce pas?
21 Réponse: Il y a avait des demandes, des requêtes que j'ai transmise, je
22 l'admets.
23 Question: Cependant vous avez déclaré aux enquêteurs du Bureau du
24 Procureur, je cite: "Je n'avais aucun contact avec les détenus au KP Dom
25 et je n'ai jamais proposé non plus que personne soit libéré du KP Dom."
Page 7935
1 Est-ce que vous vous souvenez de cette déclaration?
2 Réponse: Maintenant je vous dis également que je n'avais rien à voir avec
3 eux et que je n'avais personne à qui faire des propositions en ce qui
4 concernait la libération de qui que ce soit du KP Dom. Je n'ai jamais
5 remis cette proposition à qui que ce soit.
6 Question: Mais vous avez transmis de telles demandes. Vous avez transmis
7 une telle demande dans un cas à la cellule de crise et dans le deuxième
8 cas au groupe tactique de Foca, n'est-ce pas?
9 Réponse: Excusez-moi, mais là c'est complètement différent. Transmettre un
10 bout de papier, transmettre la demande de quelqu'un mais je n'avais aucun
11 accord avec la personne qui envoyait la demande ou avec le destinataire de
12 ladite demande. Transmettre un document, oui, oui cela s'est produit.
13 Question: Je vais demander l'aide de l'huissier afin de vous présenter la
14 pièce D-67.
15 (L'huissier s'exécute.)
16 C'est bien votre signature, n'est-ce pas en tant que directeur en
17 exercice?
18 Réponse: Oui, c'est ma signature.
19 Question: Et vous avez écrit là une brève note à la cellule de crise qui
20 dit, je cite: "Veuillez trouver ci-joint une demande que je vous
21 communique pour que vous puissiez prendre les mesures nécessaires", n'est-
22 ce pas?
23 Réponse: Oui, c'est ce qu'on lit, effectivement.
24 Question: Cette requête vous a été remise par Enes Zekovic alors que vous
25 étiez directeur en exercice du KP Dom, n'est-ce pas?
Page 7936
1 Réponse: Si c'est ce qui est écrit ici, c'est ça.
2 Question: Mais dans quelles circonstances avez-vous reçu cette demande
3 présentée par Enes Zekovic? Comment cette demande a-t-elle atterri entre
4 vos mains?
5 Réponse: La date est celle du 15 mai et on peut lire ici, de toute façon
6 tout à fait normale, que sa demande est transmise. Une demande qu'il fait
7 aux fins d'être libéré de sa détention. Maintenant ce qui m'intéresserait,
8 c'est de savoir s'il y a effectivement écrit sur la demande en tant que
9 telle? A qui elle a été destinée? Si elle a été envoyée à la cellule de
10 crise, à ce moment-là?
11 Moi, j'ai envoyé ce document directement à la cellule de crise parce que
12 je transmettais les documents au destinataire indiqué par la personne qui
13 souhaitait transmettre ce document.
14 Comment je l'ai obtenu, je ne sais pas. Il est probable que quelqu'un me
15 l'a amené le 15 mai, peut-être par le biais d'un garde, peut-être que
16 cette personne a demandé à un garde: "S'il te plaît, donne ça à Milorad."
17 En tout cas, moi, j'ai transmis immédiatement cela. Je ne sais pas ce que
18 contient la requête elle-même, je ne sais pas à qui elle était adressée.
19 Mais si moi, j'ai adressé ça à la cellule de crise de municipalité serbe,
20 à ce moment-là c'est sans doute ce qui figure également sur la requête en
21 tant que telle.
22 Vous n'avez que ce papier, ce papier où il y a simplement ce mot? Est-ce
23 que vous disposé de la demande elle-même?
24 Question: Je vais demander l'aide de l'huissier pour vous présenter la
25 pièce 67-1 qui est la demande elle-même.
Page 7937
1 (L'huissier s'exécute.)
2 Nous pouvons voir sur ce document D67-1 que cette demande signée par Enes
3 Zekovic était adressée à la cellule de crise.
4 Réponse: S'il vous plaît, M. Enes Zekovic a également adressé ceci à la
5 cellule de crise de la municipalité serbe de Foca. Moi, dans ma lettre à
6 moi, j'ai transmis cette même requête à la cellule de crise parce qu'il
7 était inutile… Enfin il devait le savoir puisque lui-même il a adressé la
8 demande à la cellule de crise. Il était inutile qu'il adresse la demande à
9 Milorad mais il avait sans doute confiance en moi, peut-être confiance en
10 moi. Il pensait que j'allais effectivement transmettre la demande à qui de
11 droit et aux personnes à qui il souhaitait faire parvenir la demande.
12 Question: Monsieur M. Krnojelac, cette lettre ne vous était donc nullement
13 adressée?
14 Réponse: Non, elle ne m'était pas adressée. On peut le lire ici "à
15 l'attention à la cellule de crise de la municipalité de Serbe de Foca".
16 Question: Cependant, vous avez vous-même rédigé un mémo pour transmettre
17 cette demande au nom du KP Dom. Vous ne vous êtes pas simplement contenter
18 de transmettre cette demande à la cellule de crise parce qu'elle ne vous
19 était pas adressée, à vous?
20 Réponse: Je l'ai transmise aux destinataires, aux personnes à qui elle
21 était adressée. Moi, j'ai eu le sentiment M. Zekovic savait pertinemment
22 que je n'avais rien à voir avec ces gens. Si vous me permettez d'ajouter
23 la chose suivante: s'il s'agissait par exemple d'un condamné, s'il s'était
24 agi d'un condamné qui purgeait une peine de prison, j'aurais transmis cela
25 au ministère. Mais ici on a indiqué à l'attention de cellule de crise de
Page 7938
1 la municipalité serbe de Foca et j'ai donc transmis à la demande de cette
2 institution.
3 Question: Merci.
4 Maintenant, je souhaiterais avec l'aide de l'huissier présenter la pièce
5 D-66 au témoin.
6 (L'huissier s'exécute.)
7 Ici encore nous avons un mémo qui est signé de votre main en tant que
8 directeur du KP Dom. Ce mémo, lui, est daté du 30 juillet 1992 et adressé
9 au groupe tactique de Foca. Il s'agit d'une lettre de garde de couverture
10 pour transmettre deux demandes de libération de détenus. Ici, vous parlez
11 de prisonniers de guerre, mais en fait c'étaient des gens qui étaient
12 détenus au KP Dom, n'est-ce pas?
13 Réponse: Ici on peut lire, je cite: "j'ai trouvé ci-joint les demande de
14 détention des prisonniers de guerre Ismet Pasovic et Sadic…", je n'arrive
15 pas très bien à lire, mes lunettes ne sont pas très bonnes, je n'arrive
16 pas à lire le nom, mais en tout cas: "…pour démarches ultérieures" fin de
17 citation.
18 Je ne sais pas à qui ceci est adressé, mais en tout cas, oui, c'est ma
19 signature. Ces documents, je les ai également transmis au groupe tactique
20 puisque ça concernait sans doute le groupe tactique. Je veux parler des
21 demandes.
22 Question: Je vais demander l'aide de l'huissier pour vous présenter la
23 pièce à conviction D-66-1
24 (L'huissier s'exécute.)
25 C'est là, n'est-ce pas, un exemplaire d'une des demandes que vous avez
Page 7939
1 jointes à votre mémo et transmises au groupe tactique de Foca, n'est-ce
2 pas?
3 Réponse: Eh bien, ici on peut lire à l'intention du directeur du KP Dom,
4 demande de libération du KP Dom. C'est l'objet de cette lettre. Mais
5 franchement il est inutile que je répète ce que j'ai dit. Il y a une
6 partie du KP Dom qui était occupée et louée aux militaires.
7 Question: Inutile de répéter cela, effectivement. Mais la question que
8 j'ai à vous poser c'est que, ici, cette demande est adressée à vous, à
9 vous en tant que directeur, et non pas au groupe tactique, n'est-ce pas?
10 Réponse: A l'intention du directeur du KP Dom. Il faut que je donne une
11 explication si c'est possible. Moi, je n'étais pas leur directeur. J'ai
12 envoyé cela au groupe tactique parce que leur directeur à eux était au
13 sein du groupe tactique. C'est pourquoi j'ai transmis cette demande au
14 groupe tactique. Moi, je n'avais absolument aucune autorité au sujet de
15 ces personnes, des personnes qui étaient amenées en détention.
16 Question: Je voudrais que les choses soient extrêmement claires. Est-ce
17 que vous êtes en train de nous dire que vous n'étiez pas le directeur du
18 KP Dom même après le 17 juillet 1992? Vous nous avez expliqué la nature de
19 vos fonctions mais je voudrais que les choses soient bien claires en ce
20 qui concerne votre titre. Etes-vous en train de nier le fait que vous
21 portiez le titre de directeur du KP Dom?
22 Réponse: Le directeur du KP Dom est le dirigeant de l'unité économique de
23 la Drina; les deux.
24 Question: Mais cette lettre, en fait, elle vous a été adressée à vous,
25 n'est-ce pas?
Page 7940
1 Réponse: Je vous en prie, une partie a été louée au KP Dom et par
2 conséquent, le directeur du groupe tactique, ce n'était pas moi.
3 Question: Oui, je vous comprends parfaitement. Mais si quelqu'un envoie
4 une lettre, une lettre qui est adressée au directeur du KP Dom Foca, à ce
5 moment-là c'est bien vous, n'est-ce pas, est-ce que l'on se comprend bien?
6 Réponse: Ce n'est pas moi qui suis en mesure de parler de cette lettre.
7 Moi, je ne suis pas responsable, je ne suis pas compétent.
8 Question: Mais ça, c'est une autre question et je vais vous la poser mais
9 vous ne niez pas que c'est une lettre qui vous a été adressée et que vous
10 l'avez bien reçue?
11 Réponse: Cette lettre a été envoyée. Donc le destinataire était le
12 directeur du KP Dom mais ce n'est pas marqué Milorad Krnojelac. Moi, je
13 l'ai transmise ensemble avec une lettre d'accompagnement au directeur du
14 groupe tactique. Je ne sais pas si vous pouvez me comprendre mais je ne
15 sais pas vous expliquer mieux que ça. C'est tout ce que je peux... c'est
16 tout ce que je vous ai dit. Vous me demandez de comprendre mais je ne sais
17 pas vous expliquer mieux que ça. C'est tout ce que je peux, c'est tout ce
18 que je vous ai dit. Vous me demandez d'être bref, de vous expliquer
19 brièvement les choses, c'est ce que je vous ai dit.
20 Question: Monsieur, qui vous a adressé cette lettre? Est-ce que c'est un
21 garde qui vous l'a apportée?
22 Réponse: Je ne sais pas. Il n'est pas impossible que c'est un des gardes
23 qui me l'ait apportée et qui connaissait bien M. Pasovic. D'ailleurs, il
24 figure dans la lettre que Monsieur Stanic a adressée à M. Mladjenovic.
25 C'est bien marqué dans la lettre.
Page 7941
1 Question: Mais ce n'est pas indispensable de nous parler de la teneur de
2 la lettre. Ce que je tiens à vous dire c'est que vous n'aviez pas le
3 contact direct avec M. Pasovic, n'est-ce pas. Il s'agit d'une lettre qui
4 vous a été adressée moyennant un garde.
5 Réponse: Non, je n'ai pas eu un contact direct. C'est quelqu'un qui
6 m'avait remis la lettre et c'est pour des raisons de sécurité qu'on lui
7 avait passé cette lettre. Ensuite moi, également, je l'ai transmise. Ce
8 n'était pas dans mes compétences.
9 Question: Et ce médiateur, celui qui vous a passé la lettre, c'était
10 probablement un des gardes parce que ce sont les gardes qui avaient des
11 contacts avec les détenus, n'est-ce pas? Ce sont eux qui auraient pu vous
12 transmettre une telle lettre.
13 Réponse: Le plus probablement.
14 Question: J'aimerais vous montrer maintenant la pièce à conviction D-66/2.
15 (L'huissier s'exécute.)
16 Il s'agit là également d'une lettre. Il y a une lettre d'accompagnement
17 également que vous avez envoyée au groupe tactique de Foca. C'est une
18 demande de M. Demirovic qui a été également détenu. Il s'agit donc d'une
19 requête qui n'a pas été transmise à quelqu'un de manière très directe.
20 Réponse: Mais je ne connais même pas Sadik Demirovic. Je ne sais pas
21 comment j'ai pu être saisi de cette lettre, mais de toute façon,
22 probablement que c'était une lettre qui avait été envoyée au groupe
23 tactique pour l'examen. Ce n'était pas resté dans mon tiroir. Je peux vous
24 l'affirmer tous les documents qui m'ont été parvenus, je les avais
25 transmis par la suite au groupe tactique ou bien, si vous voulez au
Page 7942
1 destinataire comme c'était dans l'en-tête. Mais ici, il n'y avait pas
2 d'en-tête. Je ne vois pas à qui c'était adressé. Probablement que cette
3 lettre également a été envoyée au groupe tactique. Il n'y a pas d'en-tête,
4 pas de destinataire.
5 Question: Je vous comprends parfaitement. Je comprends bien évidemment que
6 c'est une lettre que vous avez transmise au groupe tactique mais il est un
7 fait, n'est-ce pas, que cette requête s'est retrouvée dans vos mains et
8 que vous l'avez transmise par la suite, n'est-ce pas?
9 Réponse: Oui, à partir du moment où la lettre m'a été remise,
10 automatiquement je l'ai transmise si c'est moi qui l'ai transmise.
11 Question: Mais cela vous a été apporté une fois de plus par un garde, tout
12 comme la dernière fois, par conséquent, de la part de M. Demirovic. C'est
13 une lettre qui vous a donc été remise directement par le garde
14 probablement.
15 Réponse: Oui, probablement.
16 Question: Merci.
17 Réponse: Peut-être il y avait un employé qui travaillait dans le personnel
18 qui s'est saisi de cette lettre qui me l'a remise, je ne me souviens pas
19 exactement, je suis désolé.
20 Question: En d'autres termes, dans tous les cas, c'est par quelqu'un qui a
21 travaillé au KP Dom que vous avez été saisi de cette lettre, n'est-ce pas?
22 Réponse: Oui.
23 Question: Merci, nous n'avons plus besoin de ce document.
24 Monsieur M. Krnojelac, pour que vous puissiez transmettre le premier
25 document à la cellule de crise, ensuite il y a toute une autre série
Page 7943
1 également, d'autres documents que vous avez transmis à ce groupe tactique.
2 Vous auriez dû disposer de leur adresse, n'est-ce pas? Vous connaissiez
3 leur adresse.
4 Réponse: Le document que j'ai reçu, j'ai marqué au crayon et à la main une
5 lettre d'accompagnement. Je l'ai porté au bureau de permanence qui l'a
6 fait suivre par la suite.
7 Question: Et ce bureau, qu'est-ce que vous sous-entendez sous ce "bureau
8 de permanence"? Est-ce que c'est un bureau qui est dans le cadre du KP
9 Dom, il y avait un bureau de correspondance, de courrier, de courrier qui
10 rentrait et sortait?
11 Réponse: Oui, il y avait quelqu'un qui était responsable du courrier, de
12 la correspondance, donc des entrées et sorties. Ce bureau c'est, comme
13 cela que je l'ai appelé, le bureau d'enregistrement. C'est un bureau qui
14 avait pour tâche de transmettre toutes les lettres aux destinataires comme
15 ceci est marqué dans l'en-tête.
16 Question: La personne qui a été responsable de ce courrier et des entrées
17 et sorties au sein du KP Dom, elle a été responsable pour l'ensemble de la
18 correspondance, n'est-ce pas?
19 Réponse: Oui, en ce qui concerne l'unité économique, elle en était chargée
20 mais si c'était d'autres unités ce n'est pas cette personne-là qui en
21 était chargée.
22 Question: Vous voulez nous dire alors que cette personne qui a été chargée
23 du courrier, de la correspondance, n'était pas chargée du courrier
24 militaire, c'est ce que vous voulez dire?
25 Réponse: Mais l'unité économique ne recevait pas le courrier militaire
Page 7944
1 sauf s'il s'agissait du cas concret quand il fallait louer une partie du
2 KP Dom. De toute façon, il s'agissait d'une lettre qui a été adressée à
3 l'unité économique ou, pour parler très précisément, au KP Dom.
4 Question: Est-ce que vous voulez nous dire par-là que la personne chargée
5 du courrier…. Excusez-moi, je vais reformuler la question.
6 La personne dont vous avez parlé, elle n'avait rien à faire avec le
7 courrier militaire? Que tout simplement cette personne était responsable
8 et chargée du courrier qui concernait l'unité économique ou l'exploitation
9 économique de la Drina? C'est ce que vous voulez dire?
10 Réponse: Le KP Dom a été responsable devant le ministère de la Justice. Et
11 il fait partie du ministère de la Justice.
12 Question: Attendez, les lettres que nous venons de passer en revue et que
13 vous avez envoyées au groupe tactique de Foca et à la cellule de crise, il
14 n'y a pas d'adresse. A ce moment-là, nous pourrions dire que la personne
15 de permanence était au clair et savait où il fallait adresser ce courrier?
16 Réponse: Bien évidemment, elle aurait su où il fallait l'envoyer mais d'un
17 autre côté, il y avait peut-être l'adresse sur l'enveloppe.
18 Question: Quel type d'enveloppe, excusez-moi?
19 Réponse: Mais il y a toujours une enveloppe, il y avait une enveloppe dans
20 laquelle vous mettez la lettre. Et probablement qu'il y a une adresse qui
21 a été portée sur l'enveloppe comme dans l'en-tête du document.
22 Question: Entendu, mais je vais vous poser la question différemment. Est-
23 ce que, dans ces lettres que nous avons parcourues, il n'y a pas d'adresse
24 exacte mais c'est marqué la "cellule de crise." Est-ce que ceci suffit
25 pour que la lettre arrive jusqu'à son destinataire?
Page 7945
1 Réponse: Je ne vois pas pourquoi ce ne serait pas suffisant étant donné
2 qu'il s'agit d'un acte que nous avons envoyé, un document qui nous est
3 parvenu que nous devons transmettre une requête.
4 Question: Par conséquent, il y avait quelqu'un qui était sur place et qui
5 pouvait transmettre ces documents, ces lettres à la cellule de crise, au
6 groupe tactique de Foca à condition que l'adresse figure sur l'enveloppe.
7 Réponse: Pourquoi pas.
8 Question: Et au moment où vous avez été saisi de ces requêtes par les
9 détenus, ces requêtes n'étaient pas sous une enveloppe, enfermées. Par
10 conséquent, vous avez pu les lire.
11 Réponse: Je ne sais pas que je les ai lues, je ne me souviens pas. Quand
12 j'ai vu l'intitulé, j'ai pu très bien comprendre de quoi il s'agissait.
13 Moi, je ne me souviens pas les avoir lues. Ce n'était même pas
14 indispensable. A partir du moment où vous voyez dans l'intitulé "demande
15 pour le relâchement, pour la libération, etc." vous savez tout de suite de
16 quoi il s'agit.
17 Question: Mais il est vrai également que vous les avez lues à fond et que
18 vous saviez qu'il s'agissait des demandes de libération.
19 Réponse: Mais je vous ai dit dans l'intitulé c'était bien marqué quelle
20 était la raison pour laquelle on envoyait cette lecture. Il n'était même
21 pas indispensable d'en donner lecture ou de lire. Et d'un autre côté ceci
22 également se trouvait peut-être sous une enveloppe et c'est la raison pour
23 laquelle éventuellement j'ai pu constater d'après ce qui a été écrit sur
24 l'enveloppe, il faut envoyer telle et telle lettre à telle et telle
25 adresse.
Page 7946
1 Question: Excusez-moi, mais je suis véritablement désolée, vous êtes en
2 train de parler maintenant des enveloppes, mais les trois lettres que vous
3 avez transmises il s'agissait de demande de libération de détenus. Ce sont
4 des lettres qui ne vous ont pas été remises sous une enveloppe. Vous en
5 avez lu éventuellement mais c'étaient les lettres qui étaient ouvertes,
6 vous étiez au courant, vous saviez de quoi il s'agissait?
7 M. M. Krnojelac (interprétation): Peut-être, je ne sais pas. Il y a
8 éventuellement cette éventualité que ces lettres étaient déjà sous une
9 enveloppe. C'était marqué peut-être c'est "cellule de crise" ou
10 éventuellement "directeur de l'établissement pénitentiaire" je ne sais
11 pas. Mais à partir du moment où, je vous dis, dans l'intitulé vous lisez
12 demande de libération il n'est pas indispensable de lire la lettre. Je ne
13 sais pas si vous me comprenez.
14 Mme Kuo (interprétation): Eh bien, j'aimerais vous montrer maintenant les
15 pièces à conviction 66 et 67. Nous allons une fois de plus donc parcourir
16 la pièce à conviction 66.
17 (L'huissier s'exécute.)
18 M. le Président (interprétation): Il s'agit par conséquent des pièces à
19 conviction 66 et 67.
20 Mme Kuo (interprétation): Oui.
21 Monsieur Krnojelac, dans la lettre que vous avez signée il est dit de
22 manière tout à fait claire: "Nous vous adressons la demande de Enes
23 Zekovic pour la libération de la détention." fin de citation.
24 Par conséquent vous saviez très précisément de quoi il s'agissait. En
25 d'autres termes ce n'était pas sous une enveloppe, ou il a été tout
Page 7947
1 simplement portée "la cellule de crise"?
2 M. M. Krnojelac (interprétation): Mais, pourquoi vous ne pensez pas que
3 c'était possible que sur l'enveloppe il y a ce titre "la cellule de crise,
4 groupe tactique Foca." Puis Milorad rédige une lettre d'accompagnement et
5 puis vous envoyez ensemble la lettre d'accompagnement avec cette lettre
6 qui est dans l'enveloppe. C'est une possibilité. Je l'ai précisé, je le
7 répète ou bien c'était dans une enveloppe fermée ou bien c'était ouvert
8 comme vous l'avez dit.
9 Mais c'est possible si c'était dans une enveloppe, je maintiens que je
10 n'ai pas ouvert l'enveloppe pour lire. J'ai vu tout simplement le
11 destinataire, le nom du destinataire. Je ne sais pas pourquoi vous ne
12 voulez pas me comprendre, je ne sais pas si moi je ne suis pas clair et je
13 ne sais pas expliquer les choses.
14 Question: Monsieur Krnojelac, je vous comprends je comprends parfaitement
15 que vous voulez convaincre cette Chambre que ceci était possible, je
16 comprends. Ce n'est pas que je ne le comprends pas, mais permettez-moi de
17 vous poser la question suivante: un détenu, un prisonnier n'avaient pas le
18 droit de circuler librement ou d'envoyer librement son courrier du KP Dom;
19 il y a donc une supervision, un contrôle. C'est quelque chose qui existe
20 dans toutes les prisons, dans tous les établissements pénitentiaires. Donc
21 les entrées et les sorties du courrier ont été supervisées, contrôlées.
22 Réponse: Je ne sais pas véritablement si le courrier a été contrôlé, je ne
23 peux pas vous le dire. Tout au moins pas dans la partie militaire parce
24 qu'il y avait des procédures qu'eux avaient engagées et que j'ignorais.
25 Question: Mais vous voulez convaincre la Chambre que vous aviez reçu une
Page 7948
1 enveloppe sous scellés pour adresser à la cellule de crise, que vous ne
2 l'avez pas ouverte, que vous l'avez tout simplement transmise avec une
3 lettre d'accompagnement pour préciser que vous leur transmettiez cette
4 demande?
5 Réponse: Moi, je dis que si cela m'était parvenu sous une enveloppe qui
6 était fermée à ce moment-là je ne l'ouvrais et je l'adressais au
7 destinataire. C'est tout ce que j'ai dit.
8 Question: Maintenant j'aimerais vous montrer la pièce à conviction D66.
9 (L'huissier s'exécute.)
10 Monsieur Krnojelac, est-ce que vous voulez nous dire que toutes ces
11 requêtes pour la libération que vous avez transmises au groupe tactique de
12 Foca, que tout ceci est arrivé sous scellés jusqu'à vous?
13 Réponse: Si c'était marqué le destinataire "groupe tactique" à ce moment-
14 là je n'ouvrais pas, mais si c'était sous une enveloppe et en plus deux
15 destinataires il y avait le directeur du KP Dom à ce moment-là je
16 l'ouvrais pour voir de quoi il s'agissait. Mais si moi j'avais constaté
17 qu'il s'agissait de la libération d'un détenu à ce moment-là je fermais
18 l'enveloppe et je la transmettais au groupe tactique étant donné qu'ils
19 avaient leur propre directeur, chef du groupe tactique.
20 Par conséquent, c'est en fonction de ce qui était marqué sur l'enveloppe,
21 si c'était marqué "le directeur du KP Dom" bien évidemment j'ouvrais
22 l'enveloppe parce que vous pouvez également recevoir des lettres qui vous
23 concernent ou même à titre privé, etc. Mais dès que j'ouvrais l'enveloppe
24 je voyais de quoi il s'agissait. Il s'agissait par exemple d'une
25 libération je savais que je ne pouvais rien faire à ce sujet-là je
Page 7949
1 transmettais à la personne compétente la lettre en question.
2 Question: Et pendant que vous le faisiez vous avez eu également à rédiger
3 cette lettre d'accompagnement et c'est vous qui l'avez signée, n'est-ce
4 pas?
5 Réponse: Oui ça c'est ma signature, je n'ai pas dit le contraire.
6 Question: Merci. Je n'ai plus besoin de ce document, vous non plus
7 Monsieur krnojelac.
8 Réponse: Merci.
9 Question: En ce qui concerne Enes Zekovic est-il vrai de dire que pendant
10 un certain temps en avril 1992 ou le 19 avril 1992 votre ami Zarko Vukovic
11 vous a demandé de…, vous a appelé au téléphone pour vous parler de la
12 demande de M. Zekovic qui vous avait demandé d'être libéré. Enfin il
13 s'agissait plutôt d'une conversation téléphonique orale?
14 Réponse: Mais je maintiens que M. Vukovic ne l'a pas fait, il savait très,
15 très bien que je n'avais strictement rien à faire avec ces gens-là qui
16 étaient détenus et que je ne pouvais pas entreprendre de démarche
17 quelconque. Il ne m'a jamais parlé de ça. Et je ne connais même pas la
18 raison pour laquelle si, par exemple, aujourd'hui si je le rencontrais
19 quelque part je n'aurais pas pu vous dire voilà c'est Enes Zekovic. Ce que
20 j'ai appris c'est qu'il a travaillé à la mairie de Foca et je ne sais même
21 pas quel était le poste qu'il occupait.
22 Question: N'est-il pas vrai de dire que vous avez dit à M. Zarko Vukovic
23 que vous ne pouviez pas vous porter garant de la libération de M. Enes
24 Zekovic et de toute façon que personne ne le passera à tabac?
25 Réponse: Ça, ce n'est pas vrai, c'est sûr que ce n'est pas vrai. Zarko
Page 7950
1 Vukovic ne m'a jamais posé une telle question. Il ne m'a jamais rien dit,
2 car il savait très bien que je ne pouvais rien faire.
3 Question: Monsieur Enes Zekovic a été relâché en juin 1992
4 approximativement, n'est-ce pas?
5 Réponse: Je n'ai aucune idée, je n'ai pas la moindre idée, je ne sais
6 vraiment pas.
7 Question: Monsieur M. Krnojelac, vous avez déclaré qu'au moment où vous
8 êtes arrivé pour la première fois au KP Dom qu'il y avait beaucoup de
9 dégâts. Et c'étaient les Musulmans qui avaient commis ces dégâts pendant
10 qu'ils étaient au KP Dom. N'est-il pas vrai de dire qu'il y avait d'autres
11 forces militaires serbes avant que vous vous rendiez au KP Dom?
12 Réponse: Il y avait ce groupe d'Uzice –je l'ai déjà dit- qui était sur
13 place et bien avant que je vienne.
14 Question: Par conséquent vous ne savez pas, vous ne savez pas si c'étaient
15 les membres d'Uzice, si c'étaient les Serbes, si c'était eux qui avaient
16 commis ces dégâts, qui avaient causé les dégâts?
17 Réponse: Eux, ils m'ont dit qu'ils ont trouvé les locaux dans cet état-là
18 comme moi, et c'est ce que j'ai appris par eux-mêmes.
19 Question: Mais vous les avez crus? Vous les avez crus sur parole, n'est-ce
20 pas?
21 Réponse: C'est la commission qui avait établi un inventaire. Ils ont
22 constaté que ceci avait été détruit, que des dégâts ont été causés par la
23 population civile qui s'y trouvait pendant les opérations de combat à
24 Foca.
25 Question: La question que je vous ai posée était quelque peu différente.
Page 7951
1 C'est que vous ne savez pas en effet si les dégâts, les endommagements au
2 KP Dom avaient été causés par les Musulmans et non par les Serbes?
3 Réponse: Je sais que la commission qui a été mise en place à constater que
4 ça était causé, endommagé comme je vous l'ai expliqué. Je dispose de ce
5 rapport qui a été établi par cette commission et qui m'a été remis.
6 Question: Mais cette commission n'a pas existé avant que le groupe d'Uzice
7 se rende au KP Dom, n'est-ce pas? Par conséquent, les endommagements, les
8 dégâts qui ont été estimés par la commission étaient effectués après les
9 événements, n'est-ce pas? Elle n'était pas sur place?
10 Réponse: Bien évidemment, la commission n'était pas là pendant les
11 opérations de combats mais ils ont constaté ce que j'ai déjà dit, car
12 l'unité d'Uzice ne pouvait pas avoir des papiers, des vêtements usés.
13 Pourquoi voulez-vous qu'ils endommagent les meubles et les chaises, les
14 dispositifs qui étaient sur place. Moi, personnellement je ne vois pas
15 pourquoi je n'ai pas pu constater autre chose. J'ai tout simplement
16 constaté avec les membres de commission que nous sommes en présence des
17 endommagements et des dégâts.
18 Question: Il y a un certain nombre de choses qui ont été détériorées,
19 endommagées mais il y a des obus également qui sont tombés sur le KP Dom.
20 Ce n'est pas parce que les gens s'y trouvaient que les endommagements ont
21 été causés?
22 Réponse: Je pense que dans le rapport, dans le constat on avait également
23 parlé des dégâts causés par des d'opérations de combat. Il y avait des
24 traces de balles, des éclats d'obus également, Il y avait des enfoncements
25 des portes. Ça c'est quelque chose qui a été provoqué de force. Il y a des
Page 7952
1 vitres qui ont été brisées mais c'étaient les conséquences des opérations
2 de combat. C'est ce qui était marqué dans le rapport.
3 Question: Mais votre commission ne pouvait pas véritablement déterminer
4 qui avait lancé des obus sur le KP Dom?
5 Réponse: Il y avait des combats. Qui a lancé des obus? Vous savez,
6 difficile à dire.
7 Question: Vous ne le savez pas, n'est-ce pas?
8 Réponse: Non mais je n'ai pas participé aux opérations de combat. Je n'ai
9 rien vu de mes propres yeux, je n'y ai pas participé. Comment voulez-vous
10 que je vous le dise?
11 Question: Il y avait un certain nombre de tâches qui ont été effectuées
12 par les gardes, surtout pour ne pas permettre que les gens de l'extérieur
13 dans l'enceinte du KP Dom, qu'ils ne provoquent pas des dégâts, etc.
14 Réponse: C'est la raison pour laquelle il y avait la sécurité intérieure
15 et la sécurité extérieure. Je suppose que leur supérieur leur a dit ce
16 qu'il fallait faire.
17 Question: C'est la sécurité qui était à l'extérieur qui pour vous était
18 extrêmement importante parce qu'il fallait préserver le patrimoine du KP
19 Dom. Pour vous c'était important, n'est-ce pas?
20 Réponse: Oui, bien évidemment. Toutes ces installations à l'extérieur
21 étaient fermées à clef et moi, ça me paraissait normal. Il faut protéger
22 votre patrimoine même s'il n'y avait pas l'état de guerre. Mais c'est dans
23 le cadre de la protection des biens qu'il y avait des gardes qui étaient à
24 l'extérieur. Bien évidemment personne ne se serait aventuré pour enfoncer
25 la porte si par exemple, il avait vu un garde.
Page 7953
1 Question: Mais si jamais un garde de la sécurité extérieure ne remplissait
2 pas sa tâche, il permettait à quelqu'un de franchir la porte et
3 d'endommager les meubles ou, je ne sais pas, autre chose au KP Dom. A ce
4 moment-là, vous auriez eu à introduire une plainte et éventuellement dire
5 qu'il faudrait demander qu'on le sanctionne?
6 Réponse: Eventuellement, je me serais plaint mais je pense que je n'aurais
7 pas fait grand-chose en me plaignant. C'est plutôt pour mettre un autre
8 garde à sa place. De toute façon, il n'y avait jamais de problème de ce
9 côté-là. Il y avait cette sécurité qui était assurée comme je l'ai dit et
10 je n'ai jamais fait, en effet, je n'ai jamais moi-même procédé dans ce
11 sens-là.
12 Question: Mais à qui, à ce moment-là, vous auriez dû introduire la plainte
13 ou bien est-ce que vous pouviez demander que quelqu'un soit sanctionné?
14 Réponse: Non, je n'aurais pas pu sanctionner qui que ce soit. J'avais une
15 obligation de travail, c'est la raison pour laquelle à ce moment-là
16 j'aurais eu à envoyer quelqu'un comme garde à l'extérieur. Heureusement,
17 cela ne n'est jamais produit et c'est la raison pour laquelle je n'ai
18 jamais eu de problème de ce côté-là. Ceci aurait pu arriver mais moi, je
19 n'ai jamais eu de tel cas. Je n'ai jamais eu de cas où quelqu'un, par
20 exemple, avait enfoncé une porte ou cambriolé, etc.
21 Je me souviens qu'une fois, il y avait quelqu'un qui avait brisé une
22 fenêtre, un restaurant, il y avait quelques bouteilles de jus et de vin
23 qui ont été volées. Mais ceci a été fait de l'extérieur et nous n'avons
24 donc pas fait grand-chose là-dessus.
25 Question: Lorsque vous parlez de restaurant, à quel restaurant vous
Page 7954
1 référez-vous: celui qui se trouvait en dehors du KP Dom ou celui qui était
2 dans l'enceinte du KP Dom?
3 Réponse: A l'extérieur du KP Dom, du côté de la rive droite de la Drina.
4 Question: Permettez-moi de tirer au clair quelque chose qui figure dans
5 votre transcript. Il a été dit lorsque pour la première fois on vous a
6 posé la question: que feriez-vous?
7 Vous avez dit: je pourrais peut-être me plaindre et à l'adresse de tel ou
8 tel garde mais que je ne pourrais pas avoir évidemment ni l'autorité ni le
9 droit de le punir. Est-ce que vraiment vous avez eu et vous auriez pu vous
10 plaindre à quelqu'un, si par exemple un garde était venu ou si un garde
11 avait permis à quelqu'un et si un dégât aurait été causé?
12 Réponse: Je me demande si jamais une telle plainte de ma part pourrait
13 évidemment être, enfin, à bon escient et aurait une suite heureuse. Mais
14 je devrais certainement en donner suite à qui de droit, à un poste de
15 police par exemple. Et ces gens-là devraient ensuite évidemment se servir
16 des compétences qui sont les leurs pour entreprendre toute mesure
17 nécessaire à l'encontre de la personne en question.
18 Je voudrais tout simplement préciser que l'essentiel était que
19 j'entreprenne des mesures pour contrecarrer et empêcher tout
20 endommagement, mais si jamais de tels cas se produisent, alors c'est à
21 d'autres d'en être saisis pour dire que ceci a été fait par dessein ou
22 faute, etc. ou simplement quelqu'un a causé un dégât alors que personne
23 n'a rien pu lui faire, ni le punir par exemple.
24 Question: Vous avez dit également, on lit dans le transcript: "Je devais
25 d'une manière ou d'une autre, m'assurer qu'une autre personne vienne et
Page 7955
1 qui aurait pour affectation cette obligation de travail, pour venir monter
2 la garde et garder ceci. Heureusement je n'étais pas obligé de le faire."
3 Est-ce que vraiment ceci faisait partie de vos compétences et de vos
4 prérogatives pour nommer quelqu'un, pour poster quelqu'un?
5 Réponse: Bon, vous me demandez si j'ai eu une telle prérogative. Ecoutez,
6 le garde qui était à monter la garde près du kiosque, il devait s'y
7 rendre, c'était le trajet, le parcours de sa garde, pour voir si par
8 exemple quelque chose a été endommagé. Si par exemple le lendemain, on
9 rencontre, de fait, le kiosque a été cambriolé, on devait faire évidemment
10 un procès-verbal. Le poste de police en serait saisi et puis après se
11 mettre à la recherche du voleur, du cambrioleur, etc. D'ailleurs il y a
12 temps de choses même en temps de paix, sans parler du temps de guerre.
13 Question: Vous parlez de kiosque, cette fois-ci de kiosque de Foca où des
14 produits du KP Dom de Foca étaient vendus?
15 Réponse: Non, il n'y a pas seulement lieu de parler de produit du KP Dom
16 mais d'autres articles et marchandises y étaient vendus également, dans
17 ces kiosques qui étaient ces points de vente.
18 Question: Lorsqu'il s'agit du service de sécurité, ces mêmes gens qui
19 étaient engagés pour garder le KP Dom devaient garder la propriété et le
20 personnel du KP Dom?
21 Réponse: Je ne leur ai jamais dit évidemment de s'occuper de la garde de
22 la propriété, mais étant donné qu'il s'agit d'ouvriers et de personnel du
23 KP Dom, ils devaient considérer tout cela comme étant une propriété à eux.
24 parce que moi, je n'étais qu'un directeur par intérim. Ils devaient savoir
25 que j'allais quitter le KP Dom.
Page 7956
1 Or qui parle de propriété, parle de quelque chose qui leur appartenait.
2 Pour laquelle propriété, pour l'acquisition de la propriété, ils devaient
3 évidemment investir eux-mêmes. Il me semble logique qu'ils se soient
4 occupés de la garde de cette propriété.
5 Question: Par conséquent il n'y avait pas d'unité de sécurité, de service
6 qui serait par exemple sous forme de garde ou de policiers, qui
7 s'occuperait uniquement de la garde de la propriété.
8 Réponse: Non.
9 Question: Quant à l'unité économique, cette unité de production le Drina,
10 elle ne disposait pas d'un service de sécurité à elle?
11 Réponse: Si, mais uniquement à Ekonomija, cette ferme. Disons plutôt que
12 c'était une prison au régime semi-ouvert. Il y avait là non seulement la
13 nécessité de garder la propriété et les personnes détenues mais on devait
14 évidemment protéger la propriété parce que quelqu'un aurait pu venir de
15 l'extérieur pour voler un porc ou quelque chose qui appartenait à la
16 ferme,
17 un cochon.
18 Question: Mais même ces gens-là qui étaient affectés dans les services de
19 sécurité spéciaux faisaient partie évidemment des services de sécurité du
20 KP Dom?
21 Réponse: Non, non, non, c'étaient des gens qui étaient affectés, qui
22 avaient pour obligation de travail dans la ferme même, Brioni. Par
23 conséquent si entre temps pour des raisons tout à fait justifiées,
24 quelqu'un devait être muté depuis le KP Dom à Ekonomija; alors, celui-ci
25 par exemple ne revenait plus au KP Dom. En ce cas-là, on n'avait pas
Page 7957
1 besoin spécialement de l'affecter à Ekonomija. Je connais un cas
2 d'ailleurs, je connais quelqu'un dont le fils a été tué sur le front; il a
3 eu une crise de nerfs; après quoi, il a été muté à Ekonomija une fois
4 qu'il était revenu de son congé de maladie.
5 Question: Monsieur, vous nous avez dit que Mitar Rasevic était chargé des
6 gardes du KP Dom? Qui était chargé des gardes à Ekonomija, à la ferme
7 agricole?
8 Réponse: Pour tout ce temps-là et pour l'ensemble des travaux, c'est M.
9 Novica Mojevic qui était chargé des gardes. Par conséquent, il a dû
10 affecter lui-même les gardes, un de ses anciens, les gardes qui par
11 roulement simplement devaient avoir un calendrier, leur horaire de
12 travail. Par roulement tout simplement, ils s'échangeaient à ce poste de
13 travail. Ce n'était pas vraiment un problème et puis, finalement, ce
14 n'était pas vraiment un secteur important à couvrir par la garde. Il
15 s'agit d'une petite plaine comme ça, d'un terrain pas très vaste. A moins
16 que lui n'ait dit à quelqu'un: "Occupe-toi des équipes de gardes et
17 occupe-toi des relèves de gardes."
18 En tout cas, cela a pu se produire aussi parmi les gens qui ont été
19 affectés à Ekonomija.
20 Question: Lorsque les détenus de nationalité musulmane partaient de
21 l'enceinte du KP Dom pour Ekonomija, pour la ferme agricole, pour y
22 travailler, ils y étaient gardés par les gardes pendant tout ce temps-là
23 où ils devaient travailler, n'est-ce pas?
24 Réponse: Je ne suis pas tout à fait sûr qu'il en était ainsi, mais je
25 suppose que oui. Peut-être que quelquefois, d'autres venaient pour monter
Page 7958
1 la garde. Je n'en suis pas tout à fait certain pour pouvoir en parler.
2 Question: Par conséquent, quelquefois, vous voulez dire que les gardes du
3 KP Dom se rendaient à Ekonomija, à la ferme agricole? C'est ce que vous
4 voulez dire?
5 Réponse: Oui.
6 Question: Et lorsque les détenus de nationalité musulmane travaillaient à
7 Ekonomija, à la ferme, ils travaillaient côte à côte avec les condamnés
8 serbes qui travaillaient déjà à Ekonomija? Ils étaient là à travailler
9 ensemble?
10 Réponse: On ne peut pas dire vraiment qu'ils devaient travailler côte à
11 côte, l'un à côté de l'autre. Si jamais les détenus du KP Dom étaient
12 venus pour travailler, on les affectait par exemple pour travailler dans
13 un endroit à part; il s'agissait de travaux différents de ceux qui
14 quotidiennement étaient effectués par les gens qui s'y trouvaient sur
15 place quotidiennement. On ne peut pas dire vraiment qu'ils étaient les uns
16 à côté des autres.
17 Question: Et lorsque les détenus, les Musulmans et les Serbes, ces
18 personnes jugées et condamnées, travaillaient ensemble à la ferme, s'agit-
19 il de dire que ce sont les mêmes gardes, les mêmes service de sécurité qui
20 s'en occupaient.
21 Réponse: Je ne connais pas tous ces détails parce que moi, je n'étais pas
22 là sur place. C'est certainement feu Novica Mojevic qui devait le savoir
23 et les autres qui étaient chargés d'eux.
24 Question: Il y avait des situations où les prisonniers serbes devaient
25 travailler dans l'enceinte du KP Dom au même moment où des détenus
Page 7959
1 musulmans s'y trouvaient pour travailler, n'est-ce pas?
2 Réponse: Pour parler de l'enceinte du KP Dom, évidemment, les Musulmans ne
3 travaillaient pas. Excepté dans les ateliers.
4 Question: C'est à cela que je pensais. Je voulais notamment parler de la
5 fabrique de meubles ou de l'atelier de mécanique: au même moment, on
6 pouvait y voir travailler Musulmans et Serbes?
7 Réponse: Oui, dans des circonstances vraiment spécifiques, à moins qu'il
8 n'y ait eu des travaux à faire faire par des artisans, mais je n'en suis
9 pas informé dans le détail.
10 Question: Au sujet de la fabrique de meubles, lorsque les gens venaient y
11 travailler, vous avez dit qu'il y avait là des détenus musulmans et des
12 condamnés serbes qui ont travaillé là-bas, dans cette fabrique de meubles.
13 Ils ont été gardés par les mêmes services de sécurité. Il n'y avait pas de
14 gardes chargés des détenus musulmans alors que d'autres gardes devraient
15 également s'occuper de la garde des condamnés serbes. C'étaient les mêmes
16 gardes, n'est-ce pas, qui montaient la garde pendant que ces gens-là
17 travaillaient dans la fabrique de meubles, n'est-ce pas?
18 Réponse: J'ignore que de tels cas auraient pu se produire: de voir
19 travailler en même temps les détenus musulmans et les condamnés serbes.
20 Ces trois ou quatre personnes qui étaient là-bas, ils avaient affaire avec
21 M. Lazar Divjan, s'il s'agissait de faire quelque chose au sujet
22 évidemment de marchandises à charger ou décharger, ou peut-être s'ils
23 devaient travailler dans la fabrique de meubles.
24 Ensuite, comme je viens de le dire, ils devaient peut-être donner un coup
25 de main à Lazar lorsqu'il a fallu charger ou décharger des colis ou des
Page 7960
1 marchandises.
2 Question: Lorsque vous parlez de ces trois ou quatre personnes, est-ce que
3 vous vous référez à des Serbes ou à des Musulmans.
4 Réponse: Moi, je parle des personnes condamnées, qui purgeaient leur
5 peine. Mais lorsque vous me posez la question de Serbes qui auraient été
6 condamnés parce qu'ayant fait une infraction à la loi militaire, alors là,
7 je n'en sais rien. Ça, c'étaient les responsables du service de sécurité
8 qui devaient le savoir.
9 Question: Et ces gens-là qui étaient à purger leur peine, c'étaient
10 notamment ces gens-là qui ont dû travailler avec le magasinier, n'est-ce
11 pas?
12 Réponse: Oui, il s'agissait de personnes qui préalablement étaient déjà
13 installées au KP Dom pour purger leur peine.
14 Question: Lorsqu'ils étaient à travailler avec les magasiniers, ils
15 n'étaient pas sous escorte ni gardés par des Serbes de sécurité?
16 Réponse: Non, il s'agit de gens qu'il ne fallait pas vraiment garder
17 spécialement ni surveiller spécialement parce que ces gens-là étaient
18 conscients de tout.
19 Vous avez pu déjà entendre dire par des gens qui ont déposé ici, toutes
20 les fois où l'on ouvrait par exemple le portail ou la porte des véhicules,
21 ils auraient pu s'évader pour ne plus jamais être là pour purger leur
22 peine, une fois que le KP Dom a été pour ainsi dire ouvert, mais ils ne
23 l'ont pas fait.
24 Question: Alors, permettez-moi de vous poser une autre question à savoir:
25 vous dites que vous avez été chargé des condamnés, ceux qui étaient là
Page 7961
1 pour purger leur peine. Sur la base de ce que vous venez de dire, vous,
2 pour votre part, vous avez considéré que ces gens-là ne représentaient
3 aucun risque, que ces gens-là ne devaient pas être gardés, strictement
4 gardés pour ne pas qu'ils s'évadent?
5 Réponse: Ils étaient dans un bâtiment à part, donc ils venaient de ce
6 bâtiment pour se rendre aux entrepôts et puis, une fois le travail fini,
7 ils regagnaient leur bâtiment. Ils se trouvaient dans ce bâtiment, à
8 l'étage au-dessus de la fabrique de meubles.
9 Question: Monsieur Krnojelac, je ne vous pose pas la question au sujet de
10 ces quelques personnes qui ont pu travailler dans les entrepôts, mais ma
11 question se réfère à ces 25 ou plusieurs personnes qui étaient là pour
12 purger leur peine.
13 Vous avez dit que vous étiez chargé de ces gens-là mais que, d'après vous,
14 ils ne représentaient pas de risque du point de vue et en matière de
15 sécurité. Et c'est ainsi que vous décrivez votre comportement?
16 Réponse: Ces gens-là n'étaient pas uniquement dans l'enceinte du KP Dom:
17 ils se trouvaient également dans la ferme agricole et c'est M. Novica
18 Mojovic qui était chargé de ces gens-là. C'est lui qui devait s'occuper
19 d'eux, c'est lui qui avait à disposer d'eux parce qu'il en avait besoin
20 pour des travaux à faire faire dans la ferme agricole.
21 Voilà la raison pour laquelle je n'étais vraiment pas très inquiet à leur
22 égard.
23 Question: Je m'excuse si je vous ai peut-être mal compris, mais essayons
24 de tirer au clair ce fait-là.
25 Monsieur Mojovic, en fait, était chargé de la ferme agricole; voilà la
Page 7962
1 raison pour laquelle vous n'avez guère eu besoin de vous y rendre et pas
2 souvent?
3 Réponse: Oui. Monsieur Novica Mojovic en était chargé, mais je m'y rendais
4 quant à moi assez souvent et pour pas mal de raisons.
5 Question: Monsieur, excusez-moi. Toutes les fois où je vous pose une
6 question concernant la ferme agricole, vous me dites que c'est M. Mojovic
7 qui en était chargé. Ma question était la suivante: vous n'aviez pas trop
8 affaire au sujet et avec la ferme agricole. C'est M. Mojovic qui gérait
9 les affaires quotidiennement à la ferme agricole et c'est vous qui étiez
10 son supérieur, n'est-ce pas?
11 Réponse: Oui, j'y allais souvent.
12 Question: Mais si vous y alliez souvent, c'est que vous ne saviez pas
13 grand-chose au sujet de ce que je vous demande. Je vous pose une question
14 au sujet des gardes; alors vous me répondez que vous ne vous y rendiez pas
15 souvent. Alors que maintenant, vous me dites que vous y étiez souvent.
16 Réponse: Oui, mais si je devais aller voir si la production était bonne,
17 si le travail était prospère, s'il y avait suffisamment de fourrage, etc.,
18 etc., alors, je devais me fier un petit peu à ce que me disait l'homme qui
19 était le principal là-bas et qui était chargé de tout.
20 Et puis après, permettez-moi de le dire aussi, toutes les fois où je
21 n'avais pas grand-chose à faire au KP Dom, je pouvais également me rendre
22 à la ferme agricole, d'abord voir s'ils avaient besoin de quelque chose et
23 puis, après, peut-être me permettre le temps d'un café à prendre avec
24 quelqu'un. C'est tout.
25 Question: La plupart des personnes jugées, condamnées qui étaient là à
Page 7963
1 purger leur peine se trouvaient installées à la ferme agricole, n'est-ce
2 pas? Ils n'étaient pas dans le KP dom, n'est-ce pas?
3 Réponse: Oui, oui, il y avait là des locaux où ils pouvaient être logés.
4 Question: La question par laquelle j'ai ouvert le volet de cette
5 discussion concernait notamment ces gens-là. C'est-à-dire que je voulais
6 savoir si ces gens-là représentaient un risque en matière de sécurité.
7 Vous, de votre côté, vous n'avez pas considéré cela comme étant un risque
8 de les voir s'évader?
9 Réponse: Il n'y avait pas de risque du simple fait qu'on n'a jamais
10 enregistré une simple tentative d'évasion pour qu'on puisse se faire des
11 idées ensuite, si jamais il y a des risques.
12 Question: Permettez-moi de vous poser une question au sujet des rapports
13 que vous avez entretenus avec M. Mojovic. Vous étiez son supérieur, n'est-
14 ce pas, suivant la hiérarchie des affaires et de l'organigramme?
15 Réponse: Oui, du point de vue des papiers, documents, encadrement, bien
16 sûr, j'étais son supérieur.
17 Question: Cela nous emmène à dire que, si jamais quelque chose se serait
18 passé ou s'il aurait fait quelque chose, vous devriez agir en tant que son
19 supérieur?
20 Réponse: Oui.
21 Question: Si quelque chose s'est produit à Ekonomija, à la ferme, vous
22 avez voulu en être informé, n'est-ce pas?
23 Réponse: Bien sûr parce que je devais en être informé.
24 Question: Ce n'était pas une situation, par exemple, où l'on pouvait dire:
25 "Ceci, je ne l'ai pas vu; par conséquent, du fait que je ne l'ai pas vu,
Page 7964
1 je n'en suis pas responsable", n'est-ce pas?
2 Réponse: Mais je ne peux pas dire vraiment qu'il en est ainsi parce que,
3 si quelque chose s'est produit de fâcheux, il y a toujours quelqu'un qui
4 en est responsable. Or, en ce cas-là, c'est lui qui devrait en être
5 responsable et ensuite moi. Surtout lorsque, par exemple, je n'avais rien
6 entrepris pour en saisir le ministère. Si, par exemple, quelque chose se
7 passe de ce genre-là, à quoi vous vous référez, je devais tout de même en
8 informer le ministère pour qu'on puisse savoir par qui telle ou telle
9 faute a été commise.
10 Question: Si, par exemple, vous avez constaté qu'à la ferme agricole, il y
11 a eu une erreur commise par quelqu'un, vous devriez donc agir pour savoir
12 qui en était le responsable, pour punir le fauteur, n'est-ce pas?
13 Réponse: Je ne disposais pas de règlement suivant lequel je devais punir
14 et je pouvais punir qui que ce soit. Tout simplement, je voulais dire que
15 je devais engager une procédure, à savoir que je devais en saisir le
16 ministère pour dire quels étaient les constats des choses et pour dire que
17 je m'attendais à ce que le ministère m'instruise sur ce qu'il fallait
18 faire ensuite. S'il avait fallu relever quelqu'un de ses fonctions moi-
19 même ou s'il avait fallu faire quoique ce soit, engager une action à
20 l'encontre de qui que ce soit, notamment les gardes; celui qui en a été
21 l'auteur, certainement que j'aurais agi de la sorte et que je me serais
22 comporté de la sorte si de telles erreurs auraient été commises.
23 Question: Mais le fait est, parlant de la procédure, que vous auriez dû
24 tout de même agir de la sorte?
25 Réponse: Oui, certainement, j'aurais agi de la sorte. C'est ce que je
Page 7965
1 viens de dire.
2 Question: Si, par exemple, vous constatez qu'une de ces personnes qui
3 étaient à purger leur peine à la ferme agricole était passée à tabac, et
4 si c'était évidemment l'œuvre de quelqu'un, l'acte de quelqu'un qui était
5 membre du personnel du KP Dom, vous auriez dû évidemment engager une
6 instruction?
7 Réponse: Oui, bien sûr, j'aurais engagé une enquête et j'en aurais saisi
8 le ministère, pour attendre ensuite des directives de la part du ministère
9 sur ce qu'il convenait de faire.
10 Question: Monsieur Milorad Krnojelac, je voulais vous poser quelques
11 questions au sujet de votre maison.
12 Nous avons tant entendu déposer de la part de ceux qui ont travaillé sur
13 votre maison. Vous avez dit que vous avez, de votre côté, déposé une
14 demande à la municipalité et que si vous n'avez pas pu faire grand-chose
15 en vue des arrangements concernant les matériaux de construction, etc.,
16 vous avez tout de même reçu ces matériaux de construction?
17 Réponse: Je vous en prie, il faut savoir à quoi l'on se réfère lorsqu'on
18 parle de la demande déposée par moi.
19 Question: Je parle de ce laps de temps qui va vers la fin de l'année 1992,
20 lorsque vous avez dit que vous avez déposé une demande en vue de la
21 réparation de votre maison, fin de cette année, n'est-ce pas?
22 M. M. Krnojelac (interprétation): Je vous en prie, je n'ai pas dit que
23 j'avais déposé cette demande. J'ai dit tout simplement que je me suis
24 rendu à l'assemblée municipale de Foca où j'ai trouvé M. Radovic, qui
25 était chargé des personnes sinistrées, dont les maisons étaient incendiées
Page 7966
1 et des réfugiés.
2 Je lui ai demandé oralement de mettre à ma disposition un certain
3 matériel, soit des toiles de tente soit des feuilles de plastique, au
4 moyen desquelles je devais protéger la toiture, la maison contre la pluie.
5 Ce n'est pas dire pour autant que j'ai déposé une demande. Je vous prie de
6 ne pas me charger maintenant de tout cela, en disant de votre côté que
7 j'ai déposé quoi que ce soit comme demande. J'ai demandé oralement tout
8 simplement qu'on m'aide à protéger ce qui restait. J'ai dit à ce moment-là
9 que, tôt ou tard, Dieu le voudra ainsi, que j'y revienne avec ma famille,
10 pour que tout cela ne tombe pas en ruines. Et c'était tout.
11 Mme Kuo (interprétation): Monsieur, personne ne vous charge de rien. On
12 n'insiste pas sur le fait que vous avez fait ou pas une demande par écrit
13 ou, comme vous dites, que vous l'avez demandé oralement. Mais maintenant,
14 il me semble que c'est le moment propice pour suspendre l'audience.
15 M. le Président (interprétation): Oui, en effet. Nous allons suspendre
16 l'audience et nous reprendrons le travail en audience à 14 heures 30.
17 Nous commençons par la déposition de Mme Nayman.
18 (L'audience, suspendue à 13 heures, est reprise à 14 heures 30.)
19
20
21
22
23 (Le témoin, Mme Ana Najman, est déjà introduit dans le prétoire.)
24 (Questions relatives à la procédure.)
25 M. le Président (interprétation): Maître Bakrac, la Chambre s'est penchée
Page 7967
1 sur ce rapport qui a été préparé par Mme Najman. Nous voyons ici les tests
2 quels elle a soumis à la personne.
3 Ne serait-il pas mieux afin d'économiser du temps de verser ce document,
4 ce qui lui permettrait simplement d'ajouter des points qui conviendraient
5 d'ajouter et qui se présenteraient à un moment de la procédure.
6 M. Bakrac (interprétation): Monsieur le Président, oui cela paraît tout à
7 fait être une décision appropriée, mais c'est plutôt mon collègue Me Vasic
8 qui s'est occupé de ce problème. Puisque moi j'étais plutôt chargé de
9 l'histoire de l'interrogatoire principal de l'accusé.
10 M. le Président (interprétation): Nous ne souhaitons absolument pas vous
11 restreindre dans les questions que vous souhaitez aborder avec Mme Najman,
12 mais nous avons entendu le témoin nous raconter ce qui s'est passé il y a
13 beaucoup d'années. Ceci n'a rien avoir avec ce genre de déposition
14 Ici il s'agit d'un aspect de l'affaire au sujet de laquelle elle a pris
15 des notes à l'époque.
16 Il s'agit d'un rapport sur les tests qu'elle a fait passer. Il s'agit de
17 ses conclusions. Donc est-ce que cela vous gênerait de vous appuyer sur
18 cela simplement?
19 M. Vasic (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président, Madame
20 et Monsieur les Juges.
21 La défense demandera le versement de ce rapport comme pièce IDD-145 et
22 145A. Nous ne poserons des questions qu'au sujet d'un certain nombre de
23 détails qu'il nous semble utile de préciser. Merci.
24 M. le Président (interprétation): Je dois m'adresser à présent à
25 l'accusation.
Page 7968
1 Madame Uertz-Retzlaff, il semblerait que ce soit la manière la plus simple
2 de procéder.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, tout à fait.
4 M. le Président (interprétation): Nous allons donc verser ces deux pièces
5 IDD-145 et 145A.
6 M. Vasic (interprétation): Je vous remercie.
7 M. le Président (interprétation): Le témoin peut-il prononcer la
8 déclaration solennelle?
9 Mme Najman (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la
10 vérité, toute la vérité, rien que la vérité.
11 M. le Président (interprétation): Veuillez vous asseoir.
12 Mme Najman (interprétation): Je vous remercie.
13 (Interrogatoire principal du témoin, Mme Najman, par Me Vasic.)
14 M. Vasic (interprétation): Bonjour Madame.
15 Mme Najman (interprétation): Bonjour.
16 Question: Pourriez-vous décliner votre identité, s'il vous plaît?
17 Réponse: Ana Najman.
18 Question: Votre date et lieu de naissance?
19 Réponse: Le 25 mars 1951 à Subotica.
20 Question: Puisque nous avons ici sous nos yeux votre opinion d'expert,
21 pourriez-vous nous dire quel a été votre parcours professionnel de
22 psychologue?
23 Réponse: J'ai d'abord fait un diplôme à la faculté des lettres. Par la
24 suite j'ai suivi une spécialisation qui a duré trois ans à la faculté de
25 médecine de Belgrade. J'ai suivi d'autres cours de médecine légale, de
Page 7969
1 médecine familiale, de thérapie de groupe, et par la suite j'ai travaillé
2 à partir de 1976 jusqu'à aujourd'hui. Donc environ pendant 25 ans j'ai
3 travaillé, en commençant dans une école puis dans un centre d'aide
4 sociale. Puis dans un hôpital de prison où je suis restée pendant une
5 dizaine d'années où j'ai acquis une expérience en médecine légale.
6 Aujourd'hui je travaille à la clinique psychiatrique du centre clinique et
7 médicale de Belgrade, dont le nom est Misovic Dragisa.
8 Question: Merci. Avez-vous publié dans le domaine de votre activité
9 professionnelle?
10 Réponse: Oui, j'ai l'habitude d'assister à tous les colloques et
11 séminaires de l'association des médecins légistes yougoslaves.
12 J'ai présenté des conférences à la fois de nature théorique et pratique.
13 J'ai participé également à des réunions de psychologues que ce soit en
14 Serbie ou en Yougoslavie dans le domaine de l'activité familiale,
15 s'agissant de la médecine légale et s'agissant de la psychologie clinique.
16 Question: En tant qu'expert, avez-vous déjà été citée à comparaître devant
17 le Tribunal pénal international de La Haye?
18 Réponse: Oui, je suis expert depuis 1986 en Yougoslavie et j'ai eu
19 l'occasion de comparaître ici dans l'affaire Dokmanovic, dans l'affaire
20 Radic, Krnojelac et actuellement également dans l'affaire Dosen.
21 Question: Merci Madame.
22 A présent sur la base de l'anamnèse qui traite du cas de M. Krnojelac.
23 Pourriez-vous nous dire quelle était la motivation qu'a reçue M. Krnojelac
24 en tant qu'enfant dans son cadre familial?
25 Réponse: Les lignes directrices qu'il a reçues de la part de ses parents,
Page 7970
1 qui étaient relativement pauvres, étaient de lui indiquer d'essayer de se
2 scolariser au maximum afin de pouvoir quitter un milieu pauvre, rural,
3 pauvre de tous les points de vue, donc un milieu très modeste. Dans ce
4 sens, c'est sa mère qui a joué le rôle d'incitateur principal et c'est
5 elle qui était particulièrement active dans ce sens-là. C'est avec elle
6 qu'il a eu surtout un rapport émotionnel fort.
7 Question: Pouvez-vous nous dire combien de temps a duré cette
8 scolarisation jusqu'à ce qu'il devienne enseignant de mathématique?
9 Réponse: Au début, il a fait son école primaire, puis il est allé au
10 lycée. Par la suite, il a fait une école pédagogique et, enfin, il a suivi
11 l'enseignement dans une école supérieure de Sarajevo pour devenir
12 enseignant de physique et de mathématique. Officiellement, il est diplômé
13 de l'école supérieure et ce diplôme, il l'a eu en 1970. Donc à l'âge de 30
14 ans, il est devenu professeur de physique et de mathématiques mais, entre-
15 temps, il a déjà travaillé. Donc son parcours professionnel a un certain
16 nombre de particularités dans le sens où ce n'était pas un parcours
17 continu: donc scolarité d'abord et travail plus tard, mais il a d'abord
18 été à l'école, puis il a travaillé. Il a interrompu le travail pour se
19 former de manière supplémentaire.
20 Question: De cette anamnèse, vous est-il possible de nous dire si M.
21 Milorad Krnojelac s'est trouvé dans un conflit, quel qu'il soit, à un
22 moment quelconque de sa vie, avec son environnement?
23 Réponse: Sur la base de l'anamnèse, nous avons pu voir qu'il n'a jamais
24 été condamné, qu'il n'a jamais été engagé dans un conflit, qu'il n'a même
25 jamais fait partie d'une rixe. Ce sont du moins les données que j'ai eues
Page 7971
1 à ma disposition.
2 Question: Je vous remercie, Madame. Pourriez-vous, s'il vous plaît, faire
3 une petite pause après la fin de ma question pour que ma question puisse
4 être interprétée complètement et pour que votre réponse, elle aussi,
5 puisse être consignée au procès-verbal dans sa totalité? Je vous remercie.
6 L'anamnèse vous permet-elle de savoir ce qui s'est produit en 1992?
7 Qu'est-il arrivé à la famille et à la maison de M. M. Krnojelac et de quel
8 genre d'expérience psychologique s'est-il agi pour lui?
9 Réponse: L'anamnèse nous a permis d'apprendre que, le 15 avril de cette
10 année-là, sa maison a brûlé. Il a quitté sa maison la veille à toute
11 vitesse. Il a dû plier bagages et quitter la maison. Il est parti avec les
12 membres de sa famille chez son frère qui vivait dans un village dans les
13 environs. Il a fait observer que sa maison était située dans un cadre
14 musulman, que ses voisins étaient des Musulmans, qu'il pensait qu'il ne
15 devait pas quitter cette maison et qu'il n'évaluait pas la situation comme
16 étant grave à ce point de devoir partir. Donc il est parti au dernier
17 moment et il a pu voir d'une colline, dans les hauteurs, sa maison brûler.
18 C'était le 15 avril 1992. Il a regardé cette scène, très ému, en pleurant
19 avec les membres de sa famille qui tous pleuraient. Donc, nous estimons
20 qu'il s'agissait d'un événement qui a causé un stress significatif, non
21 seulement pour lui-même, mais c'était un stress considérable pour tous. Il
22 a vécu très difficilement, il a très difficilement retravaillé cet
23 événement.
24 Question: Dans ce genre de situation, il s'est trouvé également lorsque
25 ses deux fils ont fait l'objet d'un accident, lorsqu'un de ses fils a été
Page 7972
1 blessé aux deux jambes et l'autre fils a été également grièvement blessé,
2 a perdu partiellement l'usage d'une jambe.
3 Réponse: Oui, par analogie psychologique, il nous est permis de considérer
4 qu'il s'agit là encore d'un stress d'une très forte intensité. L'événement
5 que vous mentionnez signifie aussi la perte d'une maison, non en tant que
6 bâtiment mais en tant que foyer. Puis, par la suite, il s'agit d'une
7 blessure ou des blessures dont ont fait l'objet ses fils. Il s'agit d'un
8 événement tragique et on considère généralement ces événements comme des
9 événements étant à l'origine d'un stress très fort.
10 Question: Dans la psychologie, au sens psychologique du terme, qu'est-il
11 considéré comme stress?
12 Réponse: Le stress, c'est une réaction généralisée d'un organisme. Il
13 s'agit d'un ensemble de réactions non spécifiques de l'organisme suite à
14 une demande d'adaptation, lorsque les circonstances changent dans
15 l'environnement où l'organisme se trouve. Il est lié étroitement à des
16 événements émotionnels. Plus le stress est fort, plus les émotions sont
17 fortes. Dans la classification internationale des maladies, dans DSM3R et
18 dans l'IC3, il y a là un certain nombre de facteurs de stress sociaux qui
19 sont énumérés, qui sont classifiés. Cela comprend des sources au sein de
20 la famille, psychosociologiques, juridiques. Cela implique l'arrestation,
21 l'enquête, le jugement, etc. Puis le stress peut être provoqué par des
22 maladies, des blessures et également par d'autres événements
23 psychosociaux, à savoir la guerre, la persécution, des événements
24 douloureux et traumatisants qui se produisent par exemple dans des
25 conflits armés.
Page 7973
1 Question: Merci, Madame.
2 Dans votre rapport, page 5, vous dites que le sujet a du mal à comprendre
3 les indications qu'on lui donne au moment où il doit se soumettre à ce
4 test. Pouvez-vous nous dire de quelles instructions s'agit-il? De quelles
5 consignes?
6 Réponse: Au moment où l'on présente les tests, nous suivons une règle
7 générale. Tout psychologue respecte cette règle, qui est tout à fait
8 généralisée et à appliquer de manière identique à chacun des patients. Il
9 s'agit donc de ne pas fournir d'explications complémentaires ou une
10 assistance complémentaire –si je puis m'exprimer ainsi-, parce que la
11 règle est formulée de telle sorte que tout sujet est censé pouvoir la
12 comprendre. Bien entendu, au moment où nous présentons un test, nous
13 déduisons de l'anamnèse le niveau de l'éducation qui est celui d'un sujet
14 donné. Donc nous appliquons les tests appropriés.
15 Lorsque j'ai évoqué ces instructions, je pensais avant tout au fait que le
16 patient a demandé qu'on lui fournisse des explications supplémentaires. Ce
17 n'est pas d'une façon simple et sur-le-champ qu'il a pu comprendre ce
18 qu'on lui demandait de faire. Cela n'est pas habituel et cela est au-
19 dessous de nos attentes psychologiques, compte tenu du fait qu'il s'agit
20 d'un enseignant en mathématique qui enseigne aux enfants et qui
21 normalement, dans toute situation, devrait pouvoir comprendre ces
22 instructions.
23 Question: Je vous remercie.
24 En page 5 également, vous dites que vous avez interrompu ce test "à cause
25 d'un état de faiblesse généralisée de M. Milorad Krnojelac".
Page 7974
1 Pouvez-vous nous décrire dans quel état était M. Krnojelac à ce moment-là?
2 Réponse: Monsieur Krnojelac a fait des efforts sensibles pour appliquer
3 les instructions qui lui ont été fournies et il avait un petit peu de mal
4 à le faire. Il ne s'est donc pas senti sûr de lui, il a commencé à
5 transpirer et, à un moment, il a pâli de manière très prononcée. Il a dit
6 qu'il avait le vertige à un moment. Il me semble qu'on lui a proposé un
7 verre d'eau et du sucre. Et l'aspect extérieur laissait comprendre que
8 c'était quelqu'un qui était très agité, qui était dans un état spécifique.
9 Je ne qualifierais pas cela d'une manière précise sur le plan du
10 diagnostic mais, de manière descriptive, je vous ai présenté son état.
11 C'est à ce moment-là que j'ai décidé de mettre fin à ses tests et de
12 reporter cela au lendemain. Par la suite, il a pu se recueillir un petit
13 peu, rassembler ses esprits et il n'a plus présenté les mêmes symptômes.
14 Et le lendemain, nous avons donc pu poursuivre ce travail sur les tests.
15 Question: Merci, Madame.
16 Très brièvement, pourriez-vous résumer le niveau des capacités
17 intellectuelles de M. Milorad Krnojelac, s'il vous plaît?
18 Réponse: Comme je l'ai déjà évoqué, les résultats à ces tests, comme on a
19 pu le supposer, n'étaient pas brillants. Son niveau est celui d'une
20 moyenne inférieure à ce test. Il s'agit d'un test qui est destiné à
21 évaluer les capacités de raisonnement logique; en psychologie, on
22 l'appelle "Culture Free", parce qu'il échappe à toute influence
23 culturologique, donc du milieu, de l'environnement culturel.
24 Je lui ai présenté également un autre test qui est censé mesurer le niveau
25 des capacités générales. Alors là, bien entendu, le résultat était même
Page 7975
1 inférieur, légèrement inférieur. Pourquoi? Parce qu'au moment où l'on
2 résout ces tests, M. Milorad Krnojelac, ainsi que tout autre patient dans
3 ce cas, se retrouve dans une situation de feed-back momentané où il
4 s'interroge sur la réussite de ce qu'il vient de faire ou non. Donc il
5 s'interroge tout de suite sur les résultats qu'il aura obtenus.
6 Donc, compte tenu du fait qu'il avait un petit peu de mal à résoudre ces
7 problèmes, il devenait de plus en plus inquiet et agité. Cela se reflétait
8 de manière suivante: son anxiété a augmenté, son angoisse a augmenté et
9 donc les résultats étaient inférieurs à ceux auxquels on aurait pu
10 s'attendre de la part d'un enseignant en mathématique.
11 Par conséquent, je peux dire que ce qu'il a présenté de manière active
12 -comme on le dit en psychologie-, donc ce niveau de capacité
13 intellectuelle correspond à une moyenne inférieure. Ce qui est bien
14 entendu différent du niveau de ses potentialités intellectuelles
15 premières. Si vous me permettez, je souhaite préciser cela puisque, dans
16 mon rapport, j'ai employé justement ces termes: le niveau actuel de
17 fonctionnement intellectuel et les potentialités premières ou primaires.
18 Donc les potentialités premières, c'est quelque chose qu'un individu
19 possède. Comment dire? on pourrait presque dire que c'est quelque chose
20 d'inné, c'est un potentiel qu'un individu développe au cours de sa vie.
21 Quant à ses capacités intellectuelles actuelles, eh bien, elles peuvent
22 être perturbées, gênées, empêchées dans différents moments et suite à
23 l'activité de différents facteurs, comme on le voit ici, où il s'agit
24 d'une angoisse, d'une anxiété de la part du sujet.
25 Question: Très bien. Vous venez de nous expliquer quel est le niveau de
Page 7976
1 capacités intellectuelles de M. Krnojelac. Dans ce sens, pouvez-vous nous
2 préciser un petit peu sa manière de raisonner?
3 Réponse: Bien entendu, le niveau des potentialités et des capacités
4 intellectuelles sous-entend aussi un certain niveau de raisonnement.
5 Et très schématiquement, on pourrait séparer, distinguer ici deux
6 catégories théoriques et concrètes.
7 Alors, pour ce qui est du niveau de réflexion abstraite, on pourrait dire
8 que ce niveau était pratiquement inexistant, que l'on a pratiquement pas
9 pu le constater chez ce patient. Donc ce qui a prévalu, c'était la
10 réflexion concrète et notamment -pour ce qui est du test de Rorschach- de
11 distinction entre l'essentiel et le superflu, de l'ensemble et du
12 particulier.
13 Et c'est là que nous avons pu constater une certaine rigidité
14 intellectuelle. Et également, jusqu'à un certain point, ce qui s'est
15 manifesté, c'était un ralentissement au niveau de la psychomotricité. Bien
16 entendu, partiellement, cela est dû -comme je viens déjà de le dire- au
17 comportement du sujet dans cette situation et dû également à l'action d'un
18 certain nombre de traits de personnalité. Cela est dû aussi partiellement
19 à ses capacités intellectuelles relativement inférieures, de manière
20 générale, relativement peu élevées.
21 Question: Merci.
22 Lorsque vous décrivez les traits de personnalité de M. Krnojelac, vous
23 employez des thèmes comme "somatisation, hypersensibilité, angoisse" qui
24 se joignent donc aux traits d'une "personnalité passive". Et vous dites
25 qu'il s'agit des caractéristiques principales d'un groupe de patients.
Page 7977
1 Alors, pouvez-vous me dire sur quoi vous vous êtes fondée pour arriver à
2 ce genre de conclusion?
3 Réponse: Mis à part cet entretien psychologique qui nous a permis de
4 diagnostiquer l'état du patient, où nous avons recueilli un certain nombre
5 de données, j'ai également eu recours au test de personnalité dont le test
6 MMPI de Pluchick et le test de projection. Le test PIE également et EPQ.
7 Lorsque nous avons procédé au test appelé "inventaire de la personnalité",
8 le test MMPI qui nous permet de tracer la personnalité actuelle du sujet,
9 nous avons pu voir prévaloir une tendance hypocondriaque, ensuite le
10 refoulement et la négation, ainsi que l'anxiété. Et tout ceci était
11 accompagné également d'une légère situation dépressive; je ne dirais pas
12 vraiment dépressive, mais sous-dépressive.
13 Et en psychologie, ce profil de personnalité est qualifié de la manière
14 dont je l'ai fait justement. Donc cette somatisation, cette angoisse et
15 cette certaine passivité est quelque chose qui prédomine dans la structure
16 de sa personnalité.
17 Question: Compte tenu des tests que vous avez appliqués et que vous venez
18 d'évoquer, pourriez-vous, s'il vous plaît, me préciser un certain nombre
19 de caractéristiques qui sont importantes pour comprendre la personnalité
20 de M. Krnojelac?
21 Réponse: Bien entendu, le sujet s'est présenté comme quelqu'un de très
22 sociable comme une personnalité d'extraverti, prête à coopérer, prête
23 également à attirer l'attention d'une certaine manière qui lui est propre.
24 Mais il s'agit là de quelque chose qui était lié au test que nous avons
25 présenté, mais aussi qui était lié à son comportement.
Page 7978
1 Question: Vous avez mentionné les caractéristiques que vous avez pu
2 constater dans le comportement de M. Krnojelac pendant qu'il était appelé
3 à faire ces tests. Pourriez-vous me dire s'il cherchait à se présenter
4 sous une meilleure lumière que la réalité?
5 Réponse: Bien entendu, ces tests -et là, j'évoque avant tout le MMPI et le
6 test de Pluchick - mais aussi à l'interrogatoire de Azjnic (?) contiennent
7 une échelle, une bio échelle. Ici, il s'agit donc de mesurer la manière
8 dont le sujet présente les choses; il ne s'agit pas vraiment de voir où il
9 y a un manque d'approche vraie ou sincère, mais la manière qui est la
10 sienne de comprendre le test, la manière qui est la sienne de le résoudre.
11 Mais j'insiste sur le fait que ces deux échelles, l'échelle bio et
12 l'échelle L, sont des échelles qui nous ont permis d'accepter les
13 résultats, en confirmant la validité des tests auxquels il a été soumis.
14 Donc la personne que nous avons testée n'a pas essayé de se présenter sous
15 une meilleure lumière, plus acceptable de manière sociale.
16 Je tiens à ajouter que, lorsque nous avons d'autres résultats sur ces
17 échelles, nous ne considérons pas que l'interviewé cherche à mentir mais
18 qu'il cherche simplement à se préserver dans une situation donnée; donc il
19 cherche à cacher des aspects qu'il considère comme étant moins
20 souhaitables, moins désirables, moins positifs.
21 Question: Si je vous ai bien compris, ce n'était pas le cas pour ce qui
22 est de M. MiloradKrnojelac?
23 Réponse: Vous avez tout à fait raison et je l'ai souligné.
24 Question: Dites-moi, Madame, lors de ces tests que vous lui avez fait
25 faire et que vous avez mentionnés, M. Milorad Krnojelac a-t-il manifesté
Page 7979
1 particulièrement une agressivité et une impulsivité comme étant les
2 caractères de sa personnalité?
3 Réponse: Non. Et je crois l'avoir dit même en prononçant l'une de ses
4 phrases qui figurent dans les résultats: il n'est ni impulsif, ni
5 agressif; il n'a pas fait preuve de ces caractéristiques dans le MMPI, non
6 plus que dans le test de Pluchick, non plus que dans le test de Rorschach
7 qui sont évidemment méritoires comme tests pour témoigner des mécanismes
8 inconscients.
9 Le profil obtenu qui en témoigne d'ailleurs se présente quelque peu
10 autrement quand même. Dans ce cas-là, la valeur des échelles de psychose
11 ou de manie serait peut-être davantage exprimée dans le MMPI test, ce qui
12 serait manifeste d'entrée de jeu.
13 Question: Merci, Madame Najman. Vous venez de résumer les capacités
14 intellectuelles et la structure de la personnalité de M. Krnojelac. Ayant
15 en vue le niveau de ses capacités intellectuelles et ayant en vue
16 l'anxiosité dont il fait preuve de temps en temps, et cet état de
17 faiblesse relative et sporadique dont vous avez parlé, comment se
18 présentait le comportement de cette personnalité à l'école, pendant qu'il
19 enseignait, pendant qu'il travaillait en qualité d'enseignant?
20 Réponse: Voyez-vous, je peux dire en réponse que j'ai tout de même une
21 modeste expérience en tant qu'enseignant et, en ce moment, je peux dire
22 que tout enseignant ou maître de classe d'abord reçoit un certain
23 programme à réaliser. Cela dit, ce programme reçu ainsi, il doit se
24 préparer et par écrit; ces soi-disant préparatifs sont sur lui, à tout
25 moment, et c'est en les consultant, ces préparatifs, qu'il donne un cours.
Page 7980
1 C'est ce qui permet évidemment aux autorités pédagogiques ensuite de faire
2 l'inspection de son travail pour voir si, dans l'ensemble, il a pu
3 dispenser l'enseignement de la matière en question. Mais cette fois-ci, il
4 s'agit d'une situation concrète, d'une situation donnée, dans laquelle M.
5 M. Krnojelac peut maîtriser son travail. Il n'y a pas de surprise, il n'y
6 a rien de nouveau, automatiquement se sent-il davantage sûr: il est plus
7 sûr de lui-même. Probablement, il est capable de transmettre tout cela, un
8 tel comportement vers ces apprenants, vers ces enfants. Mais une autre
9 problématique de son auto-examen, si j'ose dire, c'est à dire la mesure de
10 toutes ses capacités intellectuelles, évidemment chacun de nous, nous
11 considérons cela comme étant un épisode frustrant plus ou moins. Il s'agit
12 là de parler d'une situation qui semble un petit peu en écart par rapport
13 à la situation standard, situation type telle qu'il l'a connue en tant
14 qu'enseignant, en dispensant des cours à l'école et au moyen des
15 préparatifs concrets que je viens d'évoquer.
16 Question: Merci. Ayant en vue tout cela, dites-nous quel est le
17 comportement de M. Krnojelac dans toutes les situations qui sont nouvelles
18 pour lui, nouvellement créées, qui lui sont inconnues?
19 Réponse: Les situations nouvelles, bien entendu, sont de nature à
20 mobiliser certains autres mécanismes à lui. A savoir, cette insécurité,
21 cette insuffisante sûreté de lui-même, une certaine passivité, en suite de
22 quoi se manifeste une certaine anxiété davantage prononcée, où on le voit
23 prêt à reléguer en quelque sorte ces situations, à les reporter pour plus
24 tard, à se montrer ambivalent, comme nous le disons, où il est dans une
25 certaine ambiguïté. Et si jamais il ne peut pas dominer, maîtriser cette
Page 7981
1 situation, il a plutôt envie d'en sortir en le demandant à lui-même ou en
2 demandant à quelqu'un d'autre de ne plus y participer. Il s'agit en effet,
3 et par la même occasion, de caractéristiques propres à la structure
4 passive de la personnalité, ce dont j'ai parlé et que j'ai évoqué sous
5 forme de résultat. D'ailleurs, le candidat présente notamment ces
6 caractéristiques-là, il les a manifestées. Monsieur M. Krnojelac les a
7 manifestées.
8 Question: Merci.
9 Alors comment se présente le comportement de M. M. Krnojelac en situation
10 où il doit recevoir des ordres?
11 Réponse: En situation où il doit recevoir des ordres, se manifeste d'abord
12 la caractéristique de la structure passive de sa personnalité. Je dois
13 dire d'emblée que la structure de la personnalité, c'est cette somme de
14 caractéristiques qui déterminent le comportement de tout un chacun dans
15 différentes situations.
16 Ainsi donc de façon passive, serait-il prêt à accepter les ordres donnés.
17 Il n'a plus de force, non plus que d'impulsion nécessaire, pour s'y
18 opposer. Il est en quelque sorte docile, obéissant à l'égard des autorités
19 qui lui émettent de tels ordres. Mais, ayant en vue le niveau de son
20 fonctionnement intellectuel et ayant en vue les caractéristiques de la
21 structure passive de sa personnalité, il n'est pas prêt à entrer dans une
22 analyse profonde, ou plutôt ample de conséquences en possibilité.
23 Si nous revenons à ce que j'ai dit tout à l'heure en parlant des
24 caractéristiques, de la façon de raisonnement qui est la sienne, alors
25 cela me semble maintenant plus clair. Parce qu'il ne fait pas preuve de
Page 7982
1 cette sorte de curiosité. Il n'a pas cet esprit de chercheur, il ne
2 ressent pas le besoin de faire une analyse du tout car définitivement, à
3 un niveau primaire, M. M. Krnojelac ne dispose de cette capacité
4 intellectuelle de la personnalité.
5 Question: Ayant entendu tout ceci, quel est son rapport fasse au travail,
6 à la fonction qui est la sienne étant donné la création de ces situations
7 dites nouvelles?
8 Réponse: Pour ce qui est de son travail, de son engagement au travail, M.
9 M. Krnojelac fait preuve d'une action plutôt hyperactive. Il est fait
10 preuve de zèle, il est fort absorbé par le travail, parce qu'il se sent
11 comme propulsé vers un mécanisme intérieur vers un tel zèle et réponse
12 positive.
13 Nous pouvons parler de cela en parlant d'autres mécanismes de défense qui
14 sont les siens et qui déterminent son comportement. Ces mécanismes
15 supposent différentes façons moyennant lesquelles les personnalités
16 saines, en bonne santé, s'opposent et se défendent au cas où des éléments
17 de danger, intérieurs ou extérieurs, deviennent susceptibles de dépasser
18 le niveau de ce que l'on appelle homéostase; c'est-à-dire ce niveau de
19 fonctionnement normal de la personnalité.
20 Chez M. M. Krnojelac -ne ce serait-ce qu'à en juger d'après les tests que
21 je lui ai fait faire- c'est ce que j'ai souligné, était dominant notamment
22 ce refoulement, ensuite la négation et une espèce d'isolement enfin de
23 l'affect. Il s'agit de mécanismes moyennant lesquels une telle structure
24 de la personnalité, toutes les fois où elle se trouve dans la situation où
25 elle ne peut pas dépasser la situation, essaye de se défendre et cela de
Page 7983
1 façon émotionnelle.
2 Je dois dire, chemin faisant, que ces mécanismes de défense ne
3 représentent pas les niveaux conscients. Ils ne se trouvent pas au niveau
4 de la conscience de l'individu. Il s'agit plutôt de l'inconscient. Ce
5 n'est pas tout simplement une décision prise de façon rationnelle: à
6 savoir que quelqu'un devrait se défendre soit en refoulant soit en niant
7 ou se faisant retirer de la situation.
8 Il s'agit d'un mécanisme inconscient qui se déclenche au moment où la
9 partie saine de la personnalité se rend consciente du fait qu'elle perd
10 tout contrôle sur tout ce qui lui arrive soit de l'extérieur soit de
11 l'intérieur. Quand je dis de l'extérieur, ceci peuvent être évidemment des
12 épisodes et événements traumatisants.
13 D'ailleurs ce mécanisme est connu lorsque nous parlons de situations
14 catastrophiques ou malheureuses, mais il s'agit aussi de situations
15 d'ordre intérieur. C'est à dire le deuil ressenti par le fait que nous
16 avons perdu quelqu'un ou une douleur quelconque de ce genre-là.
17 Par conséquent, cette structure-là de la personnalité tend à maintenir à
18 un niveau relativement sain et bon, positif de son fonctionnement.
19 Question: Merci Madame. Vous nous avez dit déjà comment se présentait le
20 comportement de M. M. Krnojelac dans les conditions nouvelles crées,
21 auxquelles il n'a pas été habitué. Vous nous avez dit également quel était
22 son comportement en face des ordres reçus.
23 Etant donné les caractéristiques de sa personnalité, pouvez-vous nous dire
24 comment se présente le comportement dans la situation où il est emmené à
25 faire quelque chose qu'il n'a jamais fait de sa vie avant et surtout dans
Page 7984
1 différentes situations, c'est-à-dire en état de guerre par exemple?
2 Comment se répercute tout cela sur lui?
3 Réponse: Voyez-vous je crois qu'en parlant du troisième ou du quatrième
4 point, en résumé, en réponse s'occupe notamment de la question que vous
5 venez de poser. Je répète une fois de plus que le niveau du fonctionnement
6 de sa personnalité, la structure de la personnalité, c'est un phénomène
7 caractéristique pour l'ensemble de la période de vie, de la durée de la
8 vie d'une personnalité, d'un individu.
9 C'est ainsi que ce phénomène semble exister durant toute la vie du
10 candidat, à savoir: les conditions de vie, les événements dus à la guerre,
11 les catastrophes subies. Tout ce qui donc pratiquement va au-delà d'une
12 vie normale et des événements normaux de la vie.
13 Par conséquent il s'agit de phénomènes qui sont susceptibles de faire
14 marcher -pour ainsi dire- les structures de la personnalité que je viens
15 de mentionner. Cela veut dire qu'un tel individu, une telle personnalité
16 se trouvant dans cette situation demeure de plus en plus anxieuse et
17 encore moins sûre d'elle-même, se trouve obligée d'obéir aux ordres parce
18 qu'il y a ce trait d'obédience, il y a ce trait du haut conformisme. Ce
19 dont je n'ai pas parlé et que j'ai pu repérer dans mes résultats.
20 Puis il a senti aussi le besoin de satisfaire à certaines demandes ou
21 ordres de toutes les autorités en face de lui. Mais cela dit, d'une façon
22 ou d'une autre, il n'est pas en mesure de dépasser, de maîtriser tout cela
23 à un niveau émotionnel. Et au niveau où le niveau de sa tolérance arrive
24 au point où l'individu n'est plus en mesure d'y répondre de façon
25 émotionnelle correcte, alors cet individu laisse de côté tout cela, se
Page 7985
1 replie sur lui-même, devient passif, par conséquent tend à sortir -et sort
2 le plus souvent- de la situation nouvellement créée.
3 Question: Merci, Madame Najman.
4 Dites-moi, Madame, avez-vous eu l'occasion de connaître les résultats et
5 l'opinion de Mme Vera Folnegovic-Smalc? Est-ce que vous avez sur vous ces
6 résultats et l'opinion de Mme Folnegovic-Smalc?
7 Réponse: Oui.
8 Question: Alors voulez-vous nous dire si, en regardant un petit peu
9 comment se présentent l'opinion et les résultats atteints dans ses
10 recherches par Mme le Pr, le Dr Vera Folnegovic-Smalc, et en regardant ce
11 que vous avez fait dans vos recherches, est-ce que ces résultats cadrent
12 avec les vôtres?
13 Réponse: J'ai lu avec attention les résultats et l'opinion de madame. Je
14 crois qu'il me semble que nos conclusions semblent être pour ne pas dire
15 identiques sont très semblables. A la page 11, Mme Folnegovic-Smalc dit
16 que "M. Krnojelac, à en juger d'après deux classifications en vigueur, ne
17 possède rien de ce qui pourrait être considéré comme un désordre
18 psychique. Ce qui était avant une maladie, maintenant c'est un trouble. Il
19 ne présente aucun symptôme de trouble mental, non plus que d'un état
20 arriéré de sa structure psychique."
21 Là-dessus, je suis tout à fait d'accord. Dans un autre fragment, elle fait
22 la description de la personnalité du candidat de la même façon ou presque,
23 enfin identique à ce que j'ai dit. Cela dit, les résultats de Mme
24 Folnegovic-Smalc -pour parler évidemment de l'examen psychiatrique- sur la
25 base des estimations quantitatives et qualitatives de tout ce qu'il a pris
Page 7986
1 en considération, elle peut conclure que le sujet ne souffre d'aucun
2 trouble.
3 Question: Madame Najman, merci.
4 Pouvez-vous me dire, s'il vous plaît, seulement dans l'opinion faite par
5 Mme Folnegovic-Smalc, il a été dit que l'expression de névrose et de
6 panique dont vous avez parlé dans l'anamnèse et l'analyse qui sont les
7 vôtres, elle les a considérées comme des modèles de comportement.
8 Etes-vous d'accord là-dessus? Est-ce que vous approuvez une telle
9 constatation de Mme Folnegovic-Smalc?
10 Réponse: Je crois qu'il serait bon de poser la même question à Mme
11 Folnegovic-Smalc. Et si j'ai bien compris votre question, si j'ai compris
12 ce que vous venez de me demander, alors il s'agit de ce qui suit. J'ai
13 fait la description de la structure du sujet et j'ai décrit le niveau de
14 ses capacités intellectuelles. J'ai décrit le niveau des fonctionnements
15 du sujet. Et ce modèle de comportement tel que je l'entends, je pense que
16 Mme Folnegovic-Smalc pensait plutôt au niveau du fonctionnement. Elle,
17 pour sa part, a considéré que ce niveau de fonctionnement, ce dont j'ai
18 parlé, parlant de mes résultats, et qui concerne des attaques de panique
19 et d'anxiété sporadiques ne mérite pas d'être qualifié d'une façon
20 psychiatrique. Par conséquent, ne devrait pas être identifié à une maladie
21 psychiatrique.
22 Si peut-être je m'abuse, si je n'ai pas très bien compris, nous pouvons
23 toujours plus tard essayer d'en parler pour nous mettre d'accord là-
24 dessus.
25 Mais un psychologue, à titre préventif, est là pour déterminer le niveau
Page 7987
1 intellectuel du fonctionnement, pour déterminer la structure de la
2 personnalité et les niveaux de fonctionnement. Le niveau de fonctionnement
3 considère la façon dont un individu se défend, résiste, maîtrise les
4 situations désagréables et la façon dont il se débrouille dans une
5 situation nouvellement créée. Moi, j'en ai déjà parlé mais, dans une
6 appréciation, une évaluation psychiatrique, ceci ne mérite toujours pas,
7 ne nous mène toujours pas vers un diagnostic qui serait celui de
8 l'existence d'une maladie. C'est ainsi que j'ai appréhendé cette opinion.
9 Mme Najman (interprétation): Merci, Madame Najman.
10 Je sais que vous êtes là pour sentir tout de même un certain malaise
11 lorsqu'il faut parler de l'opinion de Mme Folnegovic-Smalc avant qu'elle
12 ne s'y prononce pas. Mais en tout cas, la Chambre d'instance est là pour
13 se prononcer et je crois que c'est ainsi que nous allons terminer enfin
14 cet interrogatoire de notre témoin expert.
15 J'ai encore une question. Page 12 de l'opinion de Mme Folnegovic-Smalc,
16 deuxième fragment, nous lisons que "M. Krnojelac est prêt à recevoir, il
17 est plutôt sujet à recevoir des ordres. Il peut tester, traiter
18 intellectuellement tous les ordres reçus et il est capable également de
19 les exécuter. Ce n'est qu'après coup que se manifeste son attitude d'y
20 résister ou de les refouler, reporter pour la plupart."
21 Il me semble que cette suite de phénomènes, telle que l'on vient de la
22 présenter, rappelle les actions rationnelles de personnalité. Est-ce que
23 je suis dans mon droit de dire ainsi? Est-ce que je ne m'abuse pas?
24 Réponse: Je crois que Mme le Dr Folnegovic-Smalc saurait mieux décrire
25 tout cela pour répondre. Mais étant donné que, par ordre de déposition, je
Page 7988
1 suis la première à en parler et certainement -comme j'ai dit- peut-être
2 pas très bien placée parce que Mme Folnegovic-Smalcviendra parler après
3 moi. J'ai compris et vécu tout cela comme suit.
4 Pourrait-on dire que ceci, du point lexique, me semble un peu gauche.
5 C'est-à-dire, je ne me propose pas évidemment d'émettre des reproches.
6 Certainement Mme Folnegovic-Smalcaura voix au chapitre pour dire ce qui
7 est connu en psychologie, en psychiatrie, comme suit: les mécanismes de
8 défense sont en développement et en maturité graduellement. Ils ne sont
9 pas, ces phénomènes-là, toujours au niveau de la conscience de l'individu.
10 Il ne s'agit pas d'une action rationnelle de prise de décision. Il s'agit
11 tout simplement de la configuration d'une phrase qui peut vous traduire
12 d'autres réalités ou avoir une image différente pour vous.
13 Mais pour moi, la négation et le refoulement existent chez ce sujet.
14 L'isolement l'affecte également mais ce n'est qu'une fois que le niveau de
15 son appréhension est tel qu'il ne peut pas le dépasser, il ne peut pas
16 maîtriser la situation, il ne peut pas combattre. Ainsi se manifestent ces
17 mécanismes pour maintenir l'équilibre de son fonctionnement et pour
18 maintenir l'ensemble du fonctionnement de ces mécanismes. C'est ainsi que
19 j'ai compris. Bien sûr en attendant que le Dr Folgenovic y ajoute ce
20 qu'elle a à dire la-dessus.
21 M. Vasic (interprétation): Le conseil de la défense n'a plus de questions
22 pour ce témoin expert.
23 M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff.
24 (Contre-interrogatoire du témoin, Mme Ana Najman, par Mme Uertz-
25 Retzlaff.)
Page 7989
1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci, Monsieur le Président.
2 Bonjour Madame Najman.
3 Mme Najman (interprétation): Bonjour.
4 Question: Madame Najman, vous avez dit que vous avez déjà déposé dans
5 l'affaire, le Procureur contre Mladjo Radic. C'est en mars dernier que
6 vous avez pu déposer?
7 Mme Najman (interprétation): Oui.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur Radic est un Serbe qui est
9 accusé d'avoir pris part en tant que chef d'une équipe de gardes dans les
10 passages à tabac et mauvais traitements, sévices physiques qui ont été
11 imposés à Omarska aux détenus musulmans. Je ne me propose pas évidemment
12 de contester, non plus que de mettre en question ce que vous avez pu
13 constater au sujet de M. Radic.
14 Ceci ne fait pas évidemment l'objet de l'ordre du jour mais permettez-moi
15 de relever quelques points similaires, qui me semblent être similaires,
16 dans le cadre de l'affaire Radic et dans la présente affaire.
17 Si vous avez, Monsieur le Président, devant vos yeux le document
18 concernant l'évaluation des résultats du cas Mladjo Radic, je ne propose
19 pas de demander le versement au dossier. Je voulais tout simplement
20 discuter certains de ses points.
21 M. le Président (interprétation): Je ne voulais pas vous interrompre,
22 Madame Uertz-Retzlaff, mais je ne savais pas où vous alliez par cette
23 question. Même s'il s'agit de résultats identiques ici et dans l'affaire
24 Radic, à quoi cela sert-il?
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je voulais tout simplement repérer
Page 7990
1 quelques points concernant l'anxiété accrue et la situation où le candidat
2 est prêt à obéir aux ordres. Parce que, étant donné que nous ne savons ce
3 que le sujet a fait effectivement, je ne me propose pas de descendre dans
4 le détail. Mais je voudrais tout simplement donner lecture de deux ou
5 trois phrases issues du résultat atteint par le témoin expert.
6 M. le Président (interprétation): J'espère que ce sera court.
7 Vous pouvez procéder, Maître Vasic.
8 M. Vasic (interprétation): Je suis déjà inquiet pour savoir où tout cela
9 mène, étant donné que le témoin expert qui a été convoqué par le Procureur
10 a abouti aux mêmes résultats. Je ne sais ce que ce résultat devrait faire
11 voir lorsque nous sommes dans l'affaire de M. Radic.
12 M. le Président (interprétation): Maître Vasic, il s'agit de l'un de ces
13 grands mystères mais de ces délices et joies qu'offrent les contre-
14 interrogatoires.
15 Vous ne savez pas toujours où vous allez et cette Chambre d'instance
16 devrait toujours s'attendre aux conseils de l'accusation, notamment à Mme
17 Uertz-Retzlaff qu'elle n'irait pas très loin.
18 Et comme elle ne l'a pas fait et comme nous ne nous y attendons pas, vous
19 pouvez peut-être refaire votre objection.
20 Madame Uertz-Retzlaff, allez-y.
21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): J'ai ici les résultats de vos
22 recherches en BCS et permettez-moi de vous en citer quelques phrases
23 seulement.
24 M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, je suis désolé.
25 Vous dites que vous avez devant vous les résultats ou le rapport ou la
Page 7991
1 déposition de l'expert. S'agissait-il évidemment d'un rapport de cette
2 expertise?
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Il s'agit évidemment d'un rapport
4 d'expertise du 7 mai dans l'affaire Radic.
5 Avec l'aide de l'huissier, je vais vous présenter la version en BCS.
6 Dans les résultats que vous avez atteints, vous parlez également de la
7 description de la personnalité du sujet... page 4, page 5 en version
8 anglaise.
9 Mme Najman (interprétation): Page 6 en BCS.
10 Question: Vous l'avez?
11 Réponse: Oui.
12 Question: Au troisième paragraphe, vous parlez de cette insécurité accrue,
13 inquiétude, méfiance face à des situations nouvellement crées et face à
14 des personnes.
15 Est-ce que vous y êtes? Troisième fragment donc.
16 Après avoir défini les symboles, vous passez au paragraphe suivant. C'est
17 la dernière phrase dont je viens de vous donner lecture.
18 Réponse: Oui, oui, j'y suis.
19 Question: Dans le fragment suivant vous dites, au fait, comme suit : "Ce
20 profil a été caractérisé comme suit: servilité, obédience (sic), haut
21 degré de conformisme, des privations également…", ensuite vous dites que
22 les dimensions de cette obéissance et d'abattement également. Est-ce que
23 vous y êtes? et si ces fragments… et le dernier fragment de votre
24 résultat, nous permet de voir que vous mettez en relief le conformisme et
25 le fait que le sujet est prêt à accepter tout, sous forme de comportement
Page 7992
1 social.
2 Il se conforme d'ailleurs à ce qu'on attend de lui. Est-ce que vous y
3 êtes?
4 Réponse: Oui, c'est un petit peu différent quand vous regardez la version
5 en anglais et la version en BCS. Par conséquent, oui, j'y suis, je vous
6 suis.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, il s'agissait par conséquent des
8 résultats auxquels vous êtes parvenue au sujet de Mladjo Radic.
9 Je pense que maintenant nous pouvons revenir également à votre résultat
10 concernant M. M. Krnojelac.
11 Chapitre n°3, page 3, vous parlez des fils de M. M. Krnojelac qui ont été
12 blessés: troisième paragraphe de ce même chapitre. Vous dites, je cite:
13 "que leurs blessures ont été vécues très durement, péniblement par lui."
14 (fin de citation)
15 Réponse: Oui, effectivement, émotionnellement.
16 Question: Il n'était pas tellement triste mais il a dû également accepter
17 cela comme une conséquence de la guerre. Est-ce que vous vous souvenez
18 vraiment de ce qu'il a dit exactement?
19 Réponse: Si nous pensons véritablement au même incident, à la même chose,
20 j'ai vaguement l'impression qu'il s'agissait de "la guerre", "c'est la
21 guerre" et c'est une phrase qui est répétée souvent. Je ne sais pas si
22 vous pensez exactement cela. Je ne saurais pas véritablement vous en dire
23 plus. Vous pourriez peut-être parcourir quelque peu ce document.
24 Nous avons des originaux également de mon anamnèse de M.M. Krnojelac. Je
25 pourrais éventuellement, avec votre permission, retrouver dans mon texte
Page 7993
1 ce qu'il a dit exactement, si je ne vous ai pas répondu à la question de
2 manière exacte. Je ne sais pas. A quoi pensez-vous? Ou bien vous m'aidez,
3 s'il vous plaît, pour que je m'y retrouve.
4 Question: Oui, je pense que ce n'est pas véritablement indispensable de
5 chercher vos propres notes parce que dans le résultat, le résultat de Mme
6 Folnegovic-Smalc, vous allez trouver que c'est elle qui cite justement
7 "c'est la guerre".
8 Donc, au moment où ses fils ont été blessés, ce qu'il avait répondu c'est,
9 "c'est la guerre", exactement ce que vous venez de dire et dont vous vous
10 souvenez.
11 Le Dr Folnegovic-Smalc dit également et je cite: "Il a dit: je donnerais
12 tout pour que la guerre n'ait pas eu lieu mais malheureusement la guerre a
13 eu lieu et par conséquent on l'accepte'." Est-ce qu'il a dit quelque chose
14 dans ce sens-là?
15 Réponse: Oui, nous étions toutes les deux, le Dr Folnegovic-Smalc et moi-
16 même lors de cette interview. Bien sûr que je l'ai entendu.
17 Question: Par ailleurs, le Dr Folnegovic-Smalc dans son expertise et par
18 écrit avait formulé ce qu'elle pensait au sujet de la guerre.
19 Je cite: "La guerre peut, peut être, se déclencher dans la maison de celui
20 qui la souhaite mais quand ceci arrive chez les autres qui ne souhaitent
21 pas, à ce moment-là, il faut l'accepter." Est-ce que vous vous souvenez
22 qu'il a dit cela?
23 Réponse: Oui, quelque chose comme ça.
24 Question: Et quelqu'un qui prononce des phrases de tel type, qui s'exprime
25 de cette façon-là, si quelqu'un lui demande de participer à la guerre, à
Page 7994
1 ce moment il aurait accepté, n'est-ce pas, parce que la guerre, c'est la
2 guerre. Enfin, c'est comme ça.
3 Réponse: Peut-être, mais on pourrait également interpréter ça
4 différemment. Il se dit: "Bon, mais c'est la guerre, on est obligé de
5 subir". Il a cette réaction également.
6 Question: Mais pas tout simplement subir, mais également y participer.
7 Dans ce cas-là, on lui aurait demandé d'y participer, n'est-ce pas, c'est
8 ça son comportement. Est-ce que c'est comme cela que vous l'interprétez?
9 Réponse: Non, mais je dis que de supporter la guerre, il s'est retrouvé
10 dans un contexte de guerre; il ne pouvait strictement rien faire pour
11 changer. Par conséquent, il doit tout simplement subir un fait réel. C'est
12 ce que personnellement, j'ai dit et j'ai interprété ça comme cela.
13 Question: Et M. Krnojelac, quand il a parlé de lui-même, dans le cadre de
14 la guerre, en effet, il vous a dit qu'il a participé à cette guerre: il
15 s'est rendu tout de suite au centre de l'école secondaire et c'est là où
16 il a pris la mission qui lui a été assignée?
17 Réponse: Oui, il s'est rendu au centre. Et il n'était pas soldat d'active,
18 si j'ai bien compris ce qu'il m'avait raconté, mais c'était tout
19 simplement une obligation de travail. C'est comme ça que je l'ai compris;
20 je pense que c'est comme ça qu'il nous l'a expliqué.
21 Question: Eh bien, pour ce qui concerne M. Krnojelac et la personne qui a
22 cette personnalité, si je peux dire ainsi, normalement, devrait faire en
23 sorte de remplir la tâche qui lui a été confiée. Ça correspond à sa
24 personnalité, n'est-ce pas?
25 Réponse: Oui, tout à fait. Je l'ai dit et je pense que cela figure dans le
Page 7995
1 résultat: il a ce côté passif de la personnalité. Il a également des
2 caractéristiques de la personnalité qui, dans un certain sens, se
3 conforment à ce que quelqu'un qui lui est supérieur lui demande; et il
4 obéit. Mais au moment où il ne peut pas s'en sortir
5 et moi, je pense que je l'ai expliqué quelque peu lors de ma déposition
6 cet après-midi, à ce moment-là, il devient décisif, il ralentit en quelque
7 sorte son rythme d'activité. Et très vite, il sort de telles situations.
8 Je pense et c'est maintenant que cela me passe par l'esprit, étant donné
9 que nous parlons de cela, il avait demandé à un moment donné également de,
10 il a déposé la demande de démission parce que lui voulait qu'on le libère.
11 C'est comme ça que j'interprète, si vous voulez, son acte, sa démarche
12 parce qu'il est indécis. Et c'était sous cet aspect psychologique que je
13 vois les choses.
14 Question: Eh bien, Mme Folgenovic-Smalc également, dans son expertise,
15 avait parlé, avait relaté qu'en ce qui concerne la partie militaire…
16 (Interruption d'enregistrement, problème technique général: aucune
17 traduction.)
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que je peux recommencer? Je
19 vais en donner lecture pour la deuxième fois donc il ne faisait attention…
20 (Non cabine anglaise ça ne marche pas.)
21 M. le Président (interprétation): Nous pourrions peut-être, nous,
22 carrément sortir du prétoire si ça continue comme ça.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que tout le monde entend là
24 maintenant?
25 Les interprètes: Oui.
Page 7996
1 M. le Président (interprétation): Toutes les trois cabines peuvent suivre.
2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Il n'a pas fait attention à ce qui se
3 passait de l'autre côté dans l'autre partie du KP Dom. Il ne m'a pas posé
4 la question si quelqu'un était passé à tabac, s'il a subi des mauvais
5 traitements. Ensuite, il a dit: "Moi, je n'ai pas été informé. C'était pas
6 à moi de toute façon. Moi, j'ai fait les tâches qui ont été confiées. Eux,
7 ils ont fait ce qu'ils devaient faire. C'est la guerre, etc.". Est-ce que
8 vous vous en souvenez? C'est qu'il avait dit?
9 Mme Najman (interprétation): Oui, parfaitement.
10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que vous considérez…
11 M. le Président (interprétation): Maître Vasic?
12 M. Vasic (interprétation): Excusez-moi mais mon honorable confrère vient
13 de lire un texte à Mme Najman mais je pense qu'il y a quelques phrases qui
14 manquent parce que je pense que toute la citation n'a pas été lue. Je
15 pense qu'on avait quelques problèmes techniques, c'est peut-être à cause
16 de ça. C'est peut-être moi qui fais erreur mais il me semble qu'il y a
17 quelques phrases qui manquent.
18 M. le Président (interprétation): Mais il n'est pas impossible qu'elle
19 n'ait pas lu chaque mot, chaque phrase mais tout ce qu'elle vient de lire
20 figure dans le rapport. Par conséquent, l'accusation contre-interroge,
21 elle peut lire tout en entier ou en partie. C'est vous par la suite qui
22 pouvez, éventuellement, compléter et dire ce qui d'après vous est
23 pertinent et ne l'est pas, etc..
24 M. Vasic (interprétation): Merci, Monsieur le Président,. Je comprends
25 parfaitement ce que vous dites mais j'ai l'impression qu'il y a en quelque
Page 7997
1 sorte le sens qui n'est plus le même et l'interprétation serait
2 différente. C'est dans ce sens-là que moi j'ai soulevé l'objection parce
3 qu'il me semble que toute la citation est indispensable pour une bonne
4 compréhension, sinon le sens ne passe pas.
5 M. le Président (interprétation): Dans tous les cas, vous avez le
6 contexte, vous avez les citations, moi je n'ai pas véritablement suivi de
7 près, mot à mot, mais de toute façon, au moment où vous allez poser les
8 questions, vous pouvez éventuellement apporter des corrections.
9 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Il est vrai qu'il s'agissait d'une
10 citation qui était beaucoup plus complète. Mais si vous voulez, je peux
11 lire le paragraphe en entier. Je cite: il a dit par conséquent qu'il
12 n'avait rien à faire avec la partie militaire: "Je n'avais absolument pas
13 de temps, je travaillais de 7 à 15 heures sans avoir de repos, beaucoup de
14 tâches à remplir. Je ne m'intéressais pas à ce qui se passait de l'autre
15 côté". Personne ne l'a informé de ce qui s'est passé de l'autre côté.
16 (Les interprètes demandent que Mme Uertz-Retzlaff lise un peu plus
17 lentement.)
18 "Personne ne m'a informé de ce qui s'était passé de ce côté-là, que les
19 détenus ont été passés à tabac, qu'ils ont subi des sévices. Et de toute
20 façon, je l'ai appris ultérieurement mais ce n'était pas à moi de m'en
21 occuper. Moi, j'ai fait ce qui m'a été confié et eux, ils ont fait ce
22 qu'ils avaient à faire. Par conséquent, c'est la guerre, c'est le
23 commandement militaire qui avait la responsabilité, les prérogatives dans
24 cette partie du KP Dom." Fin de citation.
25 Je pense que ça se poursuit mais c'est probablement suffisant pour le
Page 7998
1 témoin.
2 Mme Najman (interprétation): Oui, bien sûr.
3 Question: Et j'avais une autre question, également complémentaire: je vous
4 ai posé la question si un tel comportement qui a été épousé par l'accusé
5 témoigne du fait qu'il s'agissait d'une personnalité dont l'opinion et le
6 raisonnement est quelque peu restreint enfin le discernement également.
7 Qu'est-ce que vous en pensez?
8 Par conséquent il s'agit de quelqu'un qui raisonne d'une manière très
9 conformiste vis-à-vis du monde vous ne le pensez pas?
10 M. le Président (interprétation): Mais je pense qu'il y a un petit
11 problème sur le terme que vous utilisez. La personne qui n'a pas une
12 largesse d'esprit, est-ce que vous voulez parler de quelqu'un qui est
13 quelque peu limité, qui ne pense à autre chose?
14 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, c'est tout à fait cela ce que je
15 voulais dire.
16 M. le Président (interprétation): Pour vous c'est peut-être analogue ou
17 similaire, pour un psychologue il y a une différence certainement. Ce sont
18 les deux termes totalement différents.
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, mais est-ce que vous serez
20 d'accord avec moi pour dire qu'il s'agissait par conséquent d'une personne
21 qui était concentrée sur elle-même, refoulée, repliée sur soi-même. Donc
22 qu'il n'avait pas une largesse d'esprit.
23 Mme Najman (interprétation): Oui, au moment où vous venez de me lire dans
24 l'ensemble le paragraphe cela me donne une autre impression quand vous
25 vous en donnez lecture et quand moi je le lisais. Moi je ne peux pas non
Page 7999
1 plus oublier le fait, comme le Président vient de le dire, que moi je suis
2 un psychologue. Moi je vois la personnalité dans son intégrité. Pour moi
3 je n'aurais pas dit qu'il s'agissait d'un comportement, comportement de
4 quelqu'un qui n'a pas la largesse d'esprit. Pour moi c'est également ici
5 le fait qu'il s'agit de la personnalité qui a des capacités
6 intellectuelles qui sont quelque peu restreintes. Je n'ai pas peut-être
7 mis l'accent sur le fait qu'il n'a pas cet esprit de curiosité de
8 connaître. Par conséquent tout ceci est issu d'un potentiel primaire,
9 global, initial.
10 Par conséquent, en tant que psychologue c'est plutôt à cela que je me
11 référerai, et pas à son comportement, comportement pour moi sous-entend
12 autre chose. Et c'est à l'instant même que j'interprète ce que vous venez
13 de lire comme cela.
14 Question: Maintenant paragraphe 5 de votre expertise, concernant… Excusez-
15 moi, il s'agit plutôt d'un chapitre. C'est l'anamnèse et vous avez dit
16 qu'il avait fait une formation professionnelle, donc il s'est formé pour
17 devenir enseignant parce que c'étaient ses propres souhaits, n'est-ce pas?
18 Est-ce que vous vous en souvenez? C'est la page 3 et en bas de la page.
19 Par conséquent, il n'a peut-être pas véritablement souhaité l'être, mais
20 il l'a accepté c'est bien cela. Même si ce n'était pas son souhait le plus
21 profond, il l'a fait quand même, il a poursuivi ses études?
22 Réponse: Moi, je pense qu'ici je pourrais éventuellement donner une
23 interprétation de ce que M. Krnojelac nous a dit et comment moi en tant
24 que psychologue je l'ai vécu, comment je l'ai senti.
25 Il a fait une école d'instituteur et il avait travaillé avec les enfants.
Page 8000
1 Il aimait les mathématiques ou plutôt il parlait de calcul et un moment
2 donné il avait cette occasion qui s'est offerte devant lui pour poursuivre
3 des études et se former un peu plus et d'obtenir ce grade d'enseignant en
4 mathématiques.
5 Par conséquent, ce n'est pas lui qui a fait son choix, ce n'est pas lui
6 qui a opté pour s'inscrire pour une autre école parce qu'il a vécu dans
7 des conditions matérielles et familiales extrêmement dures.
8 Il était déjà marié si je me souviens bien, il avait un enfant ou deux et
9 il ne pouvait pas se permettre de faire des études et de ne pas
10 travailler.
11 Moi, c'est comme cela que je l'ai interprété. Je pense ce n'est pas parce
12 qu'il n'avait pas souhaité, mais c'est tout simplement qu'il a vécu dans
13 des circonstances qui ne le lui permettaient pas et elles étaient telles
14 quelles étaient.
15 Question: Je pense que vous en avez parlé au paragraphe n°5, dans le
16 chapitre portant le titre "Anamnèse". Vous avez dit même si ce n'était pas
17 son souhait, par conséquent, c'est comme cela que j'interprète étant donné
18 que c'était vous qui l'avez écrit?
19 Réponse: Moi, je pensais que j'ai donné des explications suffisantes. Je
20 pense que ce n'était pas le fait qu'il manquait de souhaits, mais il
21 vivait dans des conditions extrêmement pénibles. Il avait été obligé de
22 s'occuper de sa famille, il avait la famille à sa charge.
23 Il n'a pas tellement réfléchi sur ce qui était ses souhaits ou pas. Je
24 n'ai peut-être pas formulé de manière très claire, par écrit tout ce que
25 vous venez de lire, mais moi je pense que Mme Folnegovic-Smalc était avec
Page 8001
1 moi présente et moi en ma qualité de psychologue c'est comme cela que j'ai
2 interprété ce qu'il nous a raconté.
3 Question: Madame Folnegovic-Smalc, dans son rapport, en parlant et en se
4 référant à d'autres situations similaires en a parlé. Par exemple elle a
5 dit qu'en 1973 il a rejoint les rangs du parti communiste et c'est par un
6 décret. Je ne sais pas si vous vous en souvenez de cela.
7 Mme Najman (interprétation): Oui, oui, tout à fait.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Ensuite elle a dit qu'une fois de
9 plus par un décret il a été transféré à l'école Veselin Maslesa. Par
10 conséquent une fois de plus ce n'était pas sa propre décision, c'est
11 quelqu'un d'autre à sa place qui a pris sa décision. Et lui il a tout
12 simplement obéi, il a accepté. Ne pensez-vous pas qu'il s'agit là d'un
13 comportement conformiste typique?
14 M. le Président (interprétation): Mais dans les deux rapports on constate
15 qu'il s'agit d'une personnalité conformiste. Donc je ne vois pas où est la
16 différence.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, oui, je vais y arriver. Je vais
18 vous montrer ce que je tenais à vous montrer.
19 M. le Président (interprétation): Je vous en prie.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Eh bien, aujourd'hui vous avez
21 mentionné qu'il n'avait pas poursuivi une carrière typique sur le plan
22 enseignement, qu'il y avait une certaine… enfin c'était quelque peu
23 différent par rapport aux autres. Est-ce qu'il avait avancé un peu plus
24 rapidement que les autres? Comment cela c'est-il passé?
25 Mme Najman (interprétation): Non, absolument pas. Il a terminé son école
Page 8002
1 en 1970, il avait dans les 30 ans, n'est-ce pas.
2 Question: Mais c'est vous-même qui avez dit qu'il y avait eu une procédure
3 qui n'était pas tout à fait habituelle, par laquelle il avait passé: il a
4 travaillé en même temps.
5 Comment vous l'expliquez? Pourriez-vous me dire comment vous l'expliquez?
6 Réponse: Ce n'est peut-être pas un terme tout à fait propre que j'ai
7 utilisé. J'ai dit que ce n'était pas habituel. Mais moi, je peux bien sûr
8 dire ce que moi j'ai compris par cela: je pense que normalement, vous
9 faites l'école, vous sortez de l'école et puis vous commencez à
10 travailler. Alors que, chez M. Krnojelac, il y avait l'un et l'autre mais
11 il n'y avait pas un ordre chronologique qui était un ordre chronologique
12 type. C'est pour ça que j'ai dit "habituel" et "non habituel"; c'était une
13 impression que j'avais.
14 Question: Vous avez remarqué également qu'il était anxieux et que cette
15 anxiété est quelque peu plus élevée que normale, et notamment pendant les
16 tests?
17 Réponse: Oui.
18 Question: Mais dans de telles situations, probablement la plupart des
19 personnes auraient réagi de la même manière: ce n'est pas quelque chose
20 qui n'est pas habituel, n'est-ce pas?
21 Réponse: Je pense qu'aujourd'hui, je l'ai dit: au moment où vous mesurez
22 les capacités intellectuelles, automatiquement, les gens se trouvent dans
23 une situation quelque peu frustrante. Par conséquent, je l'ai précisé
24 également. Je pense que M. Krnojelac a été un peu plus frustré et anxieux
25 d'après mon estimation, mon appréciation par rapport à ce qu'on aurait dit
Page 8003
1 normal.
2 C'est la raison pour laquelle je l'ai interrompu. Je lui ai dit, je lui ai
3 demandé de prendre du sucre et de l'eau. Et ce n'est que le lendemain
4 matin que nous avons continué. Eh bien, on peut éventuellement faire la
5 comparaison avec M. Mlado Radic. Ceci ne s'est pas produit. Nous l'avons
6 interrogé depuis le début jusqu'à la fin. Il n'y avait absolument aucune
7 interruption, il n'y avait aucun facteur, aucun élément qui nous aurait
8 éventuellement fait opter pour l'interruption.
9 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, je pense qu'il
10 est 4 heures.
11 M. le Président (interprétation): Oui, mais je pense que ce n'est pas un
12 signe d'anxiété ni de la préoccupation, de la frustration, mais je vais
13 vous demander de me dire combien vous pensez que ceci va durer?
14 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Il y a une seule différence sur
15 laquelle je voulais attirer mon attention.
16 M. le Président (interprétation): Combien de temps vous faut-il?
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Une vingtaine de minutes de plus.
18 M. le Président (interprétation): Mais je pense que nous ne pouvons pas
19 commencer demain avant 11 heures 30. Nous avons d'autres obligations.
20 Demain, à 11 heures 30.
21 (L'audience est levée à 16 heures.)
22
23
24
25