Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL Affaire IT-98-33-T

2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE

3

4 LE PROCUREUR

5 C/

6 Radislav KRSTIC

7

8 mardi 28 mars 2000

9

10

11 L'audience est ouverte à 9 heures 40.

12 .

13

14 (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

15 M. le Président (interprétation). - Bonjour, mesdames et

16 messieurs. Je salue la cabine technique, les interprètes ; je crois qu'ils

17 m'entendent.

18 Interprète. - Bonjour, monsieur le président.

19 M. le Président (interprétation). - Je les entends aussi.

20 Bonjour, l'accusation, bonjour, la défense. Bonjour, Général Krstic. Nous

21 sommes ici pour continuer l'affaire du général Krstic. C'est à M. Cayley

22 de continuer. Bonjour, monsieur le Témoin et son interprète. Je vous

23 rappelle que vous êtes encore sous serment.

24 Nous continuons. Maître Cayley, s'il vous plaît ?

25 M. Cayley (interprétation). - Bonjour, monsieur le Président.

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1 Bonjour, madame et monsieur les Juges, bonjour, collègues.

2 Caporal Vaasen, avant de nous quitter hier, nous avons parlé de

3 la nuit du 12 juillet 1995. Dans votre déclaration, hier, vous avez parlé

4 de la découverte d'un viol d'une jeune femme. J'aimerais maintenant

5 avancer dans le temps et parler de la soirée. En fait, si je comprends

6 bien, vous avez patrouillé aux alentours de l'usine. Est-ce exact ?

7 M. Vaasen (interprétation). - Oui, c'est exact.

8 M. Cayley (interprétation). - Qu'avez-vous vu d'autre cette nuit

9 du 12 juillet ?

10 M. Vaasen (interprétation). - La nuit était vraiment terrible

11 parce que les sons qu'on entendait étaient vraiment très étranges : vous

12 entendiez les tirs, vous entendiez les gens crier. On pouvait également

13 entendre des tirs. C'était comme des cow-boys et des loups ; les gens

14 faisaient des bruits de ce type-là. C'était très sombre. Des réfugiés qui

15 se trouvaient là avaient très peur.

16 M. Cayley (interprétation). - Caporal Vaasen, les tirs que vous

17 avez entendus, est-ce que c'étaient des tirs qui provenaient de très loin

18 ou d'assez près ? Êtes-vous en mesure de le dire ?

19 M. Vaasen (interprétation). - Les tirs venaient de partout, je

20 crois.

21 M. Cayley (interprétation). - Maintenant, vous êtes un soldat de

22 profession et vous avez l'habitude d'entendre des tirs ; pouvez-vous

23 détecter ou êtes-vous en mesure de nous dire la distance des tirs ?

24 M. Vaasen (interprétation). - C'était dans les collines, les

25 tirs provenaient tout autour de notre base de l'ONU. On ne pouvait

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1 absolument rien voir.

2 M. Cayley (interprétation). - Vous dites avoir entendu des tirs

3 et des cris et le son de gens qui imitaient le bruit des loups ; ou, comme

4 vous avez dit, des gens qui imitaient les cow-boys et les loups. A

5 l'époque, que pensiez-vous ? D'après vous, qu'est-ce qui se passait ?

6 M. Vaasen (interprétation). - Quand j'ai entendu ces sons,

7 j'avais un sentiment très bizarre qu'ils étaient en train de chasser les

8 gens.

9 M. Cayley (interprétation). - Quand vous dites "chasser les

10 gens", pouvez-vous élaborer un peu et expliquer aux Juges ce que vous

11 voulez dire ?

12 M. Vaasen (interprétation). - Je croyais que les Serbes étaient

13 en train de chasser les Musulmans.

14 M. Cayley (interprétation). - Et pendant qu'ils le faisaient,

15 que pensiez-vous à l'époque qui se passait ?

16 M. Vaasen (interprétation). - On a entendu des tirs et je

17 croyais qu'ils étaient en train de tuer ces gens.

18 M. Cayley (interprétation). - Maintenant, je crois que vous avez

19 patrouillé toute la nuit ; est-ce que vous vous rappelez ce que vous

20 portiez ?

21 M. Vaasen (interprétation). - Oui. J'avais mes munitions, mes

22 armes avec moi, j'avais tout mon attirail de soldat. C'est ce que j'avais.

23 M. Cayley (interprétation). - Portiez-vous quelque chose de

24 couleur bleue ?

25 M. Vaasen (interprétation). - Oui, mon casque était de couleur

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1 bleue.

2 M. Cayley (interprétation). - Votre casque était bleu ?

3 M. Vaasen (interprétation). - Oui.

4 M. Cayley (interprétation). - Autre chose ?

5 M. Vaasen (interprétation). - Non.

6 M. Cayley (interprétation). - Est-ce que cet équipement est

7 resté avec vous toute la nuit ?

8 M. Vaasen (interprétation). - Non, monsieur.

9 M. Cayley (interprétation). - Pouvez-vous expliquer aux Juges ce

10 qui est arrivé ?

11 M. Vaasen (interprétation). - Plus tard dans la soirée ou dans

12 la nuit, des soldats serbes ont pris de l'équipement de mes autres

13 collègues soldats ; par la suite, ils m'ont demandé de leur remettre mes

14 armes, mon casque. Je leur ai répondu que non. Plus tard, ils m'ont

15 redemandé de leur remettre le tout. J'ai répondu par la négative. Par la

16 suite, un soldat serbe a pris son AK 47, il a chargé son fusil et l'a

17 pointé sur moi et m'a demandé de nouveau de lui remettre tout mon

18 équipement ; sinon, il me tuerait. Alors je lui ai tout donné, mon

19 équipement, mes armes et tout.

20 M. Cayley (interprétation). - Qu'est-il arrivé aux autres

21 également ?

22 M. Vaasen (interprétation). - Oui, presque tout le monde était

23 debout cette nuit-là, à l'extérieur.

24 M. Cayley (interprétation). – A combien de soldats néerlandais

25 la même chose est-elle arrivée ?

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1 M. Vaasen (interprétation). - A environ une trentaine de

2 soldats.

3 M. Cayley (interprétation). - Donc, c'est arrivé à environ

4 trente soldats qui ont dû remettre leur équipement, que leur équipement a

5 été volé par les soldats serbes de Bosnie ?

6 M. Vaasen (interprétation). - Oui.

7 M. Cayley (interprétation). - Passons au 13 juillet 1995.

8 Qu'avez-vous fait cette journée-là aux petites heures du matin ? Est-ce

9 que vous vous rappelez ?

10 M. Vaasen (interprétation). - La première chose que j'ai faite

11 le matin est de revenir à la base. Je suis revenu aux barricades des

12 Nations Unies parce que je n'étais plus armé. J'ai essayé de me procurer

13 une arme à la base. On m'a donné un pistolet et, quand je suis sorti de la

14 base, j'ai décidé de laisser le pistolet à la base. Je pensais que je me

15 le ferai voler de nouveau, alors j'ai laissé le pistolet à la base avant

16 de sortir et je suis sorti sans arme.

17 M. Cayley (interprétation). - Vous dites que vous êtes retourné

18 à la chaîne humaine. Qu'avez-vous vu ? Qu'est-ce qui se passait à ce

19 moment-là ?

20 M. Vaasen (interprétation). - Plus tard, cette journée-là,

21 c'était tôt le matin, les soldats serbes se préparaient à commencer le

22 transport de nouveau. Les autobus et les camions sont venus et le tout a

23 recommencé comme la veille.

24 M. Cayley (interprétation). - Quand vous dites qu'ils ont essayé

25 de recommencer le transport, que voulez-vous dire ?

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1 M. Vaasen (interprétation). - Ils voulaient de nouveau séparer

2 les hommes des femmes et des enfants. C'est ce qui est arrivé.

3 M. Cayley (interprétation). - Quand vous comparez la rapidité du

4 processus du 12 juillet, quand vous comparez à la rapidité au 13, est-ce

5 que cela s'est déroulé de la même façon ?

6 M. Vaasen (interprétation). – Non, le 13, cela s'est déroulé

7 plus rapidement.

8 M. Cayley (interprétation). – Est-ce que vous avez vu des gens

9 de la VRS que vous avez reconnus, cette journée-là ?

10 M. Vaasen (interprétation). – Oui, hier, j'ai montré une photo

11 d'un homme qui était assis à côté du général : il était également sur les

12 lieux.

13 M. Cayley (interprétation). – Est-ce que nous pourrions montrer

14 au témoin l'intercalaire 11 de la pièce à conviction 28/13 ou 13 1 ? Nous

15 allons poursuivre pour ne pas perdre du temps. Quand vous étiez debout sur

16 les lieux, tout près de la maison blanche, tout près de la chaîne humaine,

17 est-ce que vous avez regardé dans la direction de la maison blanche ?

18 M. Vaasen (interprétation). - Oui.

19 M. Cayley (interprétation). - ¨Pouvez-vous dire aux Juges ce que

20 vous avez vu ?

21 M. Vaasen (interprétation). - Ils ont essayé d'évacuer les

22 hommes. Il y a des hommes qui étaient à l'extérieur, d'autres à

23 l'intérieur ;, il y avait des hommes musulmans avec des soldats serbes qui

24 se tenaient à l'extérieur, certaines autres personnes étaient ressorties

25 battues : elles avaient des ecchymoses sur leur visage, sur leur bras

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1 également, mais ce n'était pas aussi grave, les blessures n'étaient pas

2 aussi importantes que la veille.

3 M. Cayley (interprétation). - Est-ce que vous vous rappelez

4 quelque chose d'important que vous avez vu cette journée-là, près de la

5 maison blanche ? Avez-vous avez entendu quelque chose qui s'était passé

6 près de la maison blanche ?

7 M. Vaasen (interprétation). - Ils ont sorti quelqu'un à

8 l'extérieur, ils l'ont emmené derrière la maison blanche ; c'étaient deux

9 soldats serbes qui ont pris un homme musulman, ils l'ont sorti de

10 l'immeuble de la maison blanche, ils l'ont emmené derrière la maison

11 blanche. Par la suite, j'ai entendu un coup seulement, un coup rien qu'un

12 et, par la suite, deux soldats serbes sont retournés.

13 M. Cayley (interprétation). - Pourriez-vous jeter un coup d'œil

14 sur la photo qui se trouve sur le rétroprojecteur à vos côtés ? J'aimerais

15 que l'on présente cette photo au témoin. Vous avez mentionné il y a

16 quelques instants que, ce matin-là du 13 juillet, vous avez vu un officier

17 de la VRS et je crois que vous avez identifié cet homme hier. Est-ce bien

18 le même individu dont il s'agissait en date du 13 ?

19 M. Vaasen (interprétation). - Oui, c'est exactement cela, c'est

20 l'homme. (Le témoin pointe l'homme qui trouve à droite sur la photo à côté

21 du général Mladic).

22 M. Cayley (interprétation). - Concernant le transport des

23 individus, vous avez dit qu'il s'est poursuivi le 13. Est-ce qu'il y avait

24 des femmes et des enfants qui étaient évacués ou transportés cette

25 journée-là, ou y avait-il des hommes également ?

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1 M. Vaasen (interprétation). - Ils ont pris certains autobus de

2 la compagnie de transport régulière, ils ont donc emmené un autobus ; à

3 d'autres reprises, deux. Ils ont emmené l'autobus près de la maison

4 blanche, ils ont fait monter les hommes à bord de cet autobus et sont

5 repartis. Une quinzaine de minutes plus tard, ils sont revenus.

6 M. Cayley (interprétation). – Lorsqu'ils sont revenus, est-ce

7 que l'autobus était plein ?

8 M. Vaasen (interprétation). – Non, il était vide.

9 M. Cayley (interprétation). - Quelle direction les autobus ont-

10 ils pris ?

11 M. Vaasen (interprétation). - Ils se sont dirigés en direction

12 de Bratunac.

13 M. Cayley (interprétation). – Vous avez vu les autobus se

14 déplacer dans la direction de Bratunac. Vous dites qu'ils sont revenus de

15 15 à 20 minutes plus tard. Avez-vous tiré une conclusion du tout ?

16 M. Vaasen (interprétation). - J'ai conclu que les hommes ont

17 été… qu'on les a laissés à Bratunac.

18 M. Cayley (interprétation). - Vous rappelez-vous combien de fois

19 ce jour-là ce processus a-t-il eu lieu ? Je parle du déplacement des

20 hommes de Potocari par le biais des autobus. Vous rappelez-vous combien

21 d'autobus ont quitté ?

22 M. Vaasen (interprétation). - Je ne sais pas à combien de

23 reprises l'autobus a déplacé ces hommes.

24 M. Cayley (interprétation). – Quand vous dites quelques fois,

25 vous rappelez-vous combien de fois, deux ou trois fois ?

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1 M. Vaasen (interprétation). - Je ne me rappelle pas du nombre de

2 fois que les autobus sont partis et revenus, mais c'était plus de trois

3 fois.

4 M. Cayley (interprétation). - Vous rappelez-vous environ à

5 quelle heure ce jour-là le processus de transport s'est arrêté ?

6 M. Vaasen (interprétation). - C'était déjà le soir, environ

7 vers 9 heures, 9 heures 30, le soir.

8 M. Cayley (interprétation). - Est-ce qu'il serait exact de dire

9 qu'à ce moment-là, il n'y avait plus de réfugiés, ni de femmes ni

10 d'enfants ni d'hommes à Potocari ?

11 M. Vaasen (interprétation). - Je ne voyais plus personne, non.

12 M. Cayley (interprétation). - Passons au jour suivant qui est

13 donc le 14 juillet 1995. Je crois que ce jour-là, on vous a assigné à vous

14 rendre à Srebrenica pour prendre de l'équipement militaire de la

15 compagnie B. Vous rappelez-vous ceci ?

16 M. Vaasen (interprétation). - Oui.

17 M. Cayley (interprétation). - Pourriez-vous raconter ce qui vous

18 est arrivé sur le trajet de Potocari à Srebrenica ?

19 M. Vaasen (interprétation). - Ce matin-là, nous avons reçu les

20 ordres d'escorter les hommes de la compagnie B à leur base, à leur propre

21 base, pour essayer de se procurer l'équipement militaire. Donc nous étions

22 en voiture avec eux. Lorsque nous sommes revenus, j'ai vu quelque chose,

23 des horribles choses.

24 M. Cayley (interprétation). - Pourriez-vous décrire ce que vous

25 avez vu sur la route de Srebrenica ?

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1 M. Vaasen (interprétation). - J'ai vu plusieurs cadavres à une

2 distance d'environ 500 à 600 mètres du côté gauche et du côté droit de la

3 route, à partir du portail. Nous avons vu donc des cadavres. Leur couleur

4 était déjà bleuâtre et mauve à cause de la chaleur. Quelques-uns étaient

5 morts de déshydratation.

6 Pour d'autres personnes, on pouvait voir qu'elles étaient mortes

7 par coups de feu ; elles étaient mortes par balle. C'était vraiment une

8 scène horrible.

9 M. Cayley (interprétation). – Vous rappelez-vous combien de

10 corps avez-vous vu de 500 à 600 mètres de la base des Nations Unies ?

11 M. Vaasen (interprétation). - Cela a commencé par deux, par la

12 suite quatre et, sur notre chemin, plus on se rapprochait de Srebrenica,

13 plus le nombre augmentait.

14 M. Cayley (interprétation). - Vous rappelez-vous de quelle façon

15 ces corps, ces cadavres étaient vêtus ? Est-ce que ces gens portaient des

16 vêtements civils ou militaires ?

17 M. Vaasen (interprétation). – C'étaient des vêtements civils.

18 M. Cayley (interprétation). - Etait-ce seulement des hommes ou y

19 avait-il des femmes également et des enfants ? Vous le rappelez-vous ?

20 M. Vaasen (interprétation). - Pour la plupart, c'étaient des

21 gens plus âgés. Lorsque nous nous sommes rapprochés de Srebrenica, nous

22 avons également vu des hommes, des enfants, et des femmes.

23 M. Cayley (interprétation). - Donc les cadavres… Le trajet de

24 Srebrenica était parsemé plutôt de personnes âgées ?

25 M. Vaasen (interprétation). - Oui.

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1 M. Cayley (interprétation). – Et donc, quand vous vous êtes

2 rapprochés de Srebrenica, vous avez vu des femmes et des enfants et

3 d'autres hommes.

4 Maintenant, j'aimerais vous ramener à la scène que vous avez vue

5 lorsque vous vous êtes rendus à Srebrenica. Pourriez-vous décrire aux

6 Juges, lorsque vous vous êtes rendus au centre de la ville de Srebrenica,

7 les lieux où est située la compagnie "Bravo" ?

8 M. Vaasen (interprétation). – Lorsque nous nous sommes

9 rapprochés du centre de Srebrenica, nous appelons cet endroit-là le

10 "marché noir". Les gens musulmans avaient un marché noir à cet endroit-là.

11 C'était rempli de corps, de cadavres, de parties de corps empilés les uns

12 sur les autres. La couleur de ces cadavres était également bleu et mauve.

13 Pour la plupart de ces corps… Je m'excuse. Excusez-moi. La scène

14 n'était pas agréable.

15 M. Cayley (interprétation). – Vous rappelez-vous combien de

16 corps vous avez vus environ au centre de la ville ?

17 M. Vaasen (interprétation). - Environ de 40 à 50 personnes.

18 M. Cayley (interprétation). – Et de nouveau, de quelle façon ces

19 corps étaient-ils vêtus ?

20 M. Vaasen (interprétation). – Ces cadavres portaient des

21 vêtements civils.

22 M. Cayley (interprétation). - Vous rappelez-vous le sexe de ces

23 cadavres ? Etait-ce un mélange de femmes, d'enfants et d'hommes ?

24 M. Vaasen (interprétation). - Pour la plupart, c'étaient des

25 femmes et des enfants. Certains cadavres étaient des personnes âgées. J'ai

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1 également vu quelques hommes.

2 M. Cayley (interprétation). – Maintenant, après avoir pris

3 l'équipement de la compagnie B, où vous êtes-vous dirigés par la suite ?

4 M. Vaasen (interprétation). - Nous sommes revenus à la base des

5 Nations Unies à Potocari. Et quand nous sommes revenus, ils nous ont dit

6 qu'il fallait quitter le plus tôt possible.

7 M. Cayley (interprétation). – Vous rappelez-vous à quel moment

8 vous avez quitté ?

9 M. Vaasen (interprétation). – Non. Je suis désolé, j'ai oublié.

10 M. Cayley (interprétation). - Combien de temps après le 14

11 était-ce ? Est-ce qu'il s'agissait d'une semaine, deux semaines, de

12 quelques jours ?

13 M. Vaasen (interprétation). - Environ une semaine plus tard,

14 après le 14.

15 M. Cayley (interprétation). – Et où êtes-vous allés après

16 Potocari ?

17 M. Vaasen (interprétation). - Nous sommes le dernier groupe à

18 avoir quitté. Nous avions un accord qu'il était possible que l'on prenne

19 les blindés de transport des troupes avec nous. Donc les hommes, les

20 derniers à partir de l'enclave. Donc il n'y avait pas de problème lorsque

21 nous nous sommes approchés de l'autoroute.

22 Nous nous sommes arrêtés. On ne pouvait plus prendre nos blindés

23 de transport de troupes puisque les gens pensaient qu'on allait faire une

24 action, ou attaquer ou faire quelque chose contre l'armée serbe. Mais tout

25 ce que l'on voulait faire était de retourner à la maison en question.

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1 M. Cayley (interprétation). – Lorsque vous parlez du pont, vous

2 parlez du pont de la rivière Drina, n'est-ce pas, qui représentait une

3 frontière vers la République fédérale de la Yougoslavie ?

4 M. Vaasen (interprétation). - Oui.

5 M. Cayley (interprétation). - Et, par la suite, vous vous êtes

6 dirigé vers la Croatie ?

7 M. Vaasen (interprétation). - Oui.

8 M. Cayley (interprétation). - Et par la suite, vous avez pris

9 l'avion en direction des Pays-Bas ?

10 M. Vaasen (interprétation). – Oui, c'est exact.

11 M. Cayley (interprétation). - Caporal Vaasen, il ressort très

12 clairement de votre déclaration que vous avez été profondément affecté par

13 ces horreurs que vous avez vues. J'aimerais simplement vous demander de

14 partager avec les Juges de quelle façon vous êtes-vous senti lorsque vous

15 avez revu votre famille ? Et maintenant, cinq ans plus tard, de quelle

16 façon est-ce que vous vivez avec ces images qui vous hantent ?

17 M. Vaasen (interprétation). – Lorsque je suis arrivé à

18 Soesterberg; à l'aéroport des Pays-Bas, j'étais très heureux de retourner

19 à la maison puisque j'ai pu voir ma petite amie ; j'ai revu ma famille.

20 Et plus tard, ce jour-là, assis avec mes parents et quand tout

21 le monde était parti, j'ai commencé à repenser à ce que j'ai vu, aux

22 événements que j'ai vécus.

23 Par la suite, j'ai demandé le soutien de mon père. Il est

24 également soldat de profession. J'ai commencé à pleurer et, par la suite,

25 j'ai vraiment craqué. J'ai commencé à lancer des choses dans la maison.

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1 Même ma petite amie ne pouvait pas comprendre ce qui passait avec moi.

2 Et maintenant, je ne dors pas très bien. Il y a des nuits où je

3 dors mieux, d'autres moins bien. Il m'arrive de me réveiller en plein

4 milieu de la nuit en sueur. Et chaque fois que je suis seul à la maison je

5 pense, je repense à ce que j'ai vu et vécu.

6 Il m'arrive aussi de parler ou de partager le tout avec mes

7 collègues qui étaient là, avec moi, parce que l'aide que nous recevons

8 quand nous sommes revenus en Hollande est bonne. Mais ça n'est pas aussi

9 facile d'oublier.

10 M. Cayley (interprétation). - Merci bien, caporal Vaasen.

11 Monsieur le Président, je n'ai pas d'autres questions pour le

12 témoin. Je pourrais maintenant offrir le témoin au contre-interrogatoire.

13 M. le Président. – Merci, monsieur Cayley.

14 Caporal Vaasen, vous allez maintenant répondre aux questions que

15 la défense va vous poser, sauf si vous avez besoin d'une pause pour

16 récupérer. Est-ce que vous préférez avoir une pause ou êtes-vous prêt pour

17 le contre-interrogatoire ?

18 M. Vaasen (interprétation). - J'aimerais poursuivre, monsieur le

19 Président.

20 M. le Président (interprétation). - D'accord. De toute façon,

21 vous pouvez demander la pause si vous en avez besoin. Maître Petrusic,

22 vous allez procéder au contre-interrogatoire ? Vous avez la parole.

23 M. Petrusic (interprétation). - Bonjour, monsieur le Président.

24 Bonjour, madame et monsieur les Juges. Bonjour, collègues du Bureau du

25 Procureur. Bonjour, monsieur Vaasen.

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1 Avant votre arrivée dans la zone protégée, en janvier 1995, vous

2 avez subi un entraînement particulier ici, aux Pays-Bas ?

3 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur.

4 M. Petrusic (interprétation). - Vous a-t-on dit quelles étaient

5 les formations de l'armée de la Republika Srpska qui se trouvaient sur le

6 territoire où vous deviez vous rendre, à savoir Srebrenica ?

7 M. Vaasen (interprétation). - Oui, on m'a dit que toutes les

8 unités serbes étaient présentes.

9 M. Petrusic (interprétation). - Vous a-t-on dit spécifiquement

10 quelles étaient les unités précises de l'armée de la Republika Srpska qui

11 se trouveraient sur place ?

12 M. Vaasen (interprétation). - Eh bien, nous avons subi un

13 entraînement ici aux Pays-Bas ; on nous a montré des emblèmes. On nous a

14 distribué aussi un petit livre. Chaque fois que nous rencontrions les

15 membres d'une unité serbe que nous n'étions pas capables d'identifier,

16 nous prenions ce petit livre et trouvions la réponse.

17 M. Petrusic (interprétation). - Monsieur le Président, je suis

18 désolé, mais j'aimerais tout de même revenir encore une fois sur cette

19 question. A-t-il été dit au témoin quelles étaient les unités de l'armée

20 de la Republika Srpska qui tenaient ce territoire ?

21 M. Vaasen (interprétation). - Non, monsieur. On ne nous l'a pas

22 dit.

23 M. Petrusic (interprétation). - Étiez-vous au courant qu'il y

24 avait des unités de l'armée musulmane sur ce territoire ?

25 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur. Plus tard, au

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1 moment où nous étions dans l'enclave, on nous a dit que la 82e Brigade

2 musulmane était sur place, ainsi que d'autres unités dans les montagnes,

3 qui étaient commandées par un commandant local.

4 M. Petrusic (interprétation). - Et qui faisaient partie, qui

5 appartenaient à la 82e Brigade ?

6 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur.

7 M. Petrusic (interprétation). - Connaissez-vous le nom de ce

8 commandant local de la 82e Brigade ?

9 M. Vaasen (interprétation). - Je n'ai connu le nom de ce

10 commandant local qu'à partir du moment où j'ai été stationné à mon poste.

11 M. Petrusic (interprétation). - Etes-vous sûr qu'il s'agissait

12 de la 82e Brigade ? N'aurait-il pas pu s'agir d'une autre unité ?

13 M. Vaasen (interprétation). - Non, monsieur ? Parce que, chaque

14 fois que nous partions en patrouille, nous arrêtions des soldats

15 musulmans ; s'ils portaient des armes, nous les leurs enlevions et nous

16 leur demandions à quelle unité ils appartenaient. Et nous leur disions

17 pourquoi nous devions leur retirer leurs armes.

18 M. Petrusic (interprétation). - Lorsque vous êtes arrivé dans la

19 zone placée sous votre responsabilité, saviez-vous que cette zone était

20 démilitarisée ?

21 M. Vaasen (interprétation). - C'était le sens de ce qu'on nous

22 avait dit.

23 M. Petrusic (interprétation). - Donc la zone n'était pas

24 démilitarisée ?

25 M. Vaasen (interprétation). - Elle était démilitarisée, mais

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1 nous avons eu le plus grand mal à récupérer toutes les armes.

2 M. Petrusic (interprétation). - Quel était le comportement

3 adopté par les membres de vote unité vis-à-vis des formations militaires

4 armées qu'ils rencontraient ? Des formations musulmanes ?

5 M. Vaasen (interprétation). - Nous appliquions une procédure

6 standard, c'est-à-dire que nous arrêtions les membres de ces formations ;

7 s'ils essayaient de s'enfuir, nous les poursuivions et nous procédions à

8 quelque chose qui ressemblait beaucoup à une arrestation policière. Nous

9 les arrêtions, nous les fouillions, nous les désarmions, c'est-à-dire que

10 nous prenions toutes les armes, toutes les munitions qu'ils pouvaient

11 avoir sur eux. Après quoi, ils pouvait récupérer tout cela à la base des

12 Nations Unies. Ensuite, ils se sont rendus jusqu'à la chaîne humaine de

13 Srebrenica.

14 M. Petrusic (interprétation). - Je n'ai pas très bien compris :

15 vous avez dit qu'ensuite, ils ont repris tout cela et sont partis à

16 Srebrenica. Que voulez-vous dire précisément ?

17 M. Vaasen (interprétation). - Je veux dire qu'ils avaient un

18 dépôt d'armes à Srebrenica. Je parle des soldats des Nations Unies : ils

19 avaient un dépôt d'armes à Srebrenica. Donc les soldats des Nations Unies

20 ont récupéré les armes que nous avions enlevées aux soldats musulmans.

21 Ensuite, ce sont les soldats des Nations Unies qui ont emporté ces armes

22 et les ont emportées jusqu'au dépôt des Nations Unies à Srebrenica.

23 M. Petrusic (interprétation). - Mais, monsieur Vaasen, au cours

24 de votre séjour sur les lieux, alors que vous patrouilliez sur ce

25 territoire, combien de fois vous est-il arrivé de saisir des armes de

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1 cette façon ?

2 M. Vaasen (interprétation). - Pas souvent.

3 M. Petrusic (interprétation). - Pourriez-vous être un peu plus

4 précis ? Une fois, deux fois ?

5 M. Vaasen (interprétation). - Personnellement, je ne l'ai fait

6 que deux fois.

7 M. Petrusic (interprétation). - Vous étiez au poste

8 d'observation M, n'est-ce pas ?

9 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur.

10 M. Petrusic (interprétation). - Les positions musulmanes

11 étaient-elle renforcées derrière ce poste d'observation, étaient-elles

12 fortifiées ?

13 M. Vaasen (interprétation). - Pas que je me souvienne.

14 M. Petrusic (interprétation). - Dans votre déposition d'hier,

15 vous avez fait mention du capitaine Enver ?

16 M. Vaasen (interprétation). – Oui, monsieur.

17 M. Petrusic (interprétation). – Etait-il originaire des environs

18 immédiats du village de Jaglici ?

19 M. Vaasen (interprétation). – Oui, c'était l'un des habitants du

20 village de Jaglici.

21 M. Petrusic (interprétation). - Et les formations qu'il

22 commandait étaient-elles stationnées dans ce village ?

23 M. Vaasen (interprétation). - Oui.

24 M. Petrusic (interprétation). – Avaient-elles des positions

25 précises ?

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1 M. Vaasen (interprétation). - Non. Les hommes habitaient dans

2 le village et il leur arrivait de nous observer.

3 M. Petrusic (interprétation). - Mais puisque le capitaine Enver

4 était un gradé, pouvez-vous nous dire quelle était la formation qu'il

5 commandait ?

6 M. Vaasen (interprétation). - C'était une unité locale, dons les

7 effectifs se composaient de quinze à vingt hommes. Ce n'était pas une très

8 grande unité.

9 M. Petrusic (interprétation). – Monsieur Vaasen, vous êtes un

10 soldat de métier. Considérez-vous que, s'agissant d'une unité de quinze à

11 vingt hommes, il est normal de voir un commandant qui ait un grade aussi

12 élevé que celui de capitaine ? Est-ce que vous trouvez cela normal,

13 puisque l'unité correspond à peu près à un peloton ?

14 M. Vaasen (interprétation). - Eh bien, je ne sais pas comment

15 fonctionnaient les structures de l'armée musulmane, donc je ne peux pas

16 répondre à votre question.

17 M. Petrusic (interprétation). - Etes-vous au courant du fait

18 que, le 10 juillet, aux abords de votre poste d'observation, un conflit

19 armé a éclaté entre des membres de l'armée musulmane ? Donc des soldats de

20 l'armée musulmane se sont heurtés à d'autres soldats de l'armée

21 musulmane ?

22 M. Vaasen (interprétation). – C'est arrivé plus tard, après le

23 début de l'attaque contre l'enclave.

24 M. Petrusic (interprétation). - L'attaque contre l'enclave a

25 commencé le 6 juillet ?

Page 1452

1 M. Vaasen (interprétation). - Oui.

2 M. Petrusic (interprétation). - Et le 10 juillet est une date

3 ultérieure au 6 juillet, mais ce que je vous demandais, c'est si cela

4 s'est produit le 10 ou un autre jour ?

5 M. Vaasen (interprétation). - Je ne me souviens plus.

6 M. Petrusic (interprétation). – Connaissez-vous les motifs, les

7 raisons de ce conflit qui a éclaté entre plusieurs unités de l'armée

8 musulmane ?

9 M. Vaasen (interprétation). - C'est seulement lorsque j'ai été

10 capturé à Jaglici que j'ai vu ces groupes de plus près.

11 M. Petrusic (interprétation). - Au cours de ce conflit, y a-t-il

12 eu des morts ?

13 M. Vaasen (interprétation). – Oui, monsieur.

14 M. Petrusic (interprétation). - Des pressions ont-elles été

15 exercées par le commandant musulman sur vos hommes, pour vous demander

16 d'escorter leur famille jusqu'à la base de Potocari ?

17 M. Vaasen (interprétation). – Non, il n'y a pas eu de pression.

18 Nous avions conclu un accord avec le capitaine Enver et nous avons emmené

19 ces femmes et ces enfants jusqu'à notre base.

20 M. Petrusic (interprétation). - Quelques-uns des membres de

21 l'armée musulmane préconisaient-ils de rester à Jaglici ?

22 M. Vaasen (interprétation). – Oui, monsieur.

23 M. Petrusic (interprétation). - Durant votre déposition, hier,

24 vous avez parlé de la présence de plusieurs centaines de soldats musulmans

25 à Jaglici ?

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1 M. Vaasen (interprétation). - Je n'ai pas parlé de Jaglici, j'ai

2 parlé de tout le secteur.

3 M. Petrusic (interprétation). – A Lehovici ?

4 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur.

5 M. Petrusic (interprétation). - Plusieurs centaines, mais

6 pourriez-vous être plus précis ?

7 M. Vaasen (interprétation). - Je ne pourrais pas vous donner un

8 chiffre précis, je suis désolé.

9 M. Petrusic (interprétation). - Monsieur le Président,

10 j'aimerais remettre… j'aimerais que l'on soumette au témoin ces

11 déclarations préalables devant les enquêteurs du Tribunal, faites les 11

12 et 18 novembre 1999.

13 (L'huissier s'exécute.)

14 M. Dubuisson - Il s'agira de la pièce D5.

15 (L'huissier remet le document au témoin.)

16 M. Petrusic (interprétation). – Monsieur Vaasen, ce que l'on

17 voit à la première page de ce document, correspond-il à votre signature ?

18 M. Vaasen (interprétation). – Oui, monsieur.

19 M. Petrusic (interprétation). - Cette déclaration est-elle bien

20 votre déclaration ?

21 M. Vaasen (interprétation). – Oui, monsieur.

22 M. Petrusic (interprétation). - En page 2, cinquième paragraphe

23 depuis le début de la page, à la quatrième phrase, nous lisons : "A

24 proximité du village de Lehovici, j'ai vu 1000 à 1500 soldats musulmans

25 qui se dirigeaient vers le nord."

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1 M. Vaasen (interprétation). – Oui, monsieur.

2 M. Petrusic (interprétation). - Ce nombre est-il bien le nombre

3 de soldats que vous ne pouvez pas préciser davantage aujourd'hui ?

4 M. Vaasen (interprétation). – Oui, monsieur.

5 M. Petrusic (interprétation). - Durant votre déposition, hier,

6 vous avez dit que les Musulmans se sont regroupés à Jaglici et qu'ils

7 manquaient de munitions.

8 M. Vaasen (interprétation). – Oui, monsieur.

9 M. Petrusic (interprétation). - Vous étiez au courant de cela,

10 vous le saviez ?

11 M. Vaasen (interprétation). – Je ne le savais pas.

12 M. Petrusic (interprétation). - Je ne comprends pas très bien.

13 Vous ne saviez pas qu'ils manquaient de munitions ? C'est bien cela ?

14 M. Vaasen (interprétation). - C'est quand ils nous ont capturés

15 qu'ils nous ont parlé de leurs armes et de leurs munitions, et qu'ils nous

16 ont dit combien d'armes et de munitions ils avaient.

17 M. Petrusic (interprétation). – Votre peloton a été maintenu en

18 détention trois jours ?

19 M. Vaasen (interprétation). - Nous étions six et nous sommes

20 restés à cet endroit trois jours.

21 M. Petrusic (interprétation). - Pour quelle raison vous a-t-on

22 arrêtés ?

23 M. Vaasen (interprétation). - Je redirai ce que j'ai déjà dit

24 hier : nous avons été arrêtés parce que nous étions des représentants des

25 Nations Unis, présents sur place à des fins de protection, et que nous

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1 avons servi de bouclier humain.

2 M. Petrusic (interprétation). - Mais étiez-vous au courant que,

3 déjà dans la période antérieure, des représentants des Nations Unies

4 avaient été fait prisonniers par des soldats de l'armée musulmane ?

5 M. Vaasen (interprétation). - Je ne le sais pas.

6 M. Petrusic (interprétation). - Au moment où votre poste

7 d'observation a été pilonné, ou pour être plus précis au moment où des

8 coups de feu ont été tirés contre votre poste d'observation, y a-t-il eu

9 des blessés ?

10 M. Vaasen (interprétation). - Non.

11 M. Petrusic (interprétation). - Votre poste d'observation a-t-il

12 été touché directement, donc endommagé ?

13 M. Vaasen (interprétation). – Oui, notre poste d'observation a

14 été endommagé par le premier obus de mortier qui a atteint le mur de

15 protection du poste.

16 M. Petrusic (interprétation). – Lorsque vous avez quitté Jaglici

17 pour vous diriger vers Potocari avec les réfugiés ou plutôt avec les

18 habitants de ce secteur, pouvez-vous dire quel était le nombre des

19 personnes que vous escortiez ? Je parle des femmes, des hommes, des

20 enfants, du nombre total ?

21 M. Vaasen (interprétation). - Au départ, nous étions un petit

22 groupe. Plus nous nous approchions de Potocari, plus le groupe

23 grandissait. Au bout d'un certain temps, nous étions accompagnés de 900 à

24 1.000 personnes, peut-être davantage.

25 M. Petrusic (interprétation). - Nous parlons bien de ce chemin

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1 qui mène de Jaglici à Potocari. C'est sur ce chemin que 900 à 1000

2 personnes se sont regroupées ?

3 M. Vaasen (interprétation). – Oui, peut-être même davantage.

4 M. Petrusic (interprétation). – Pouvez-vous nous dire combien

5 d'hommes se trouvaient dans ce groupe ?

6 M. Vaasen (interprétation). - Les hommes n'étaient pas nombreux

7 et, pour la plupart, âgés.

8 M. Riad (interprétation). - Excusez-moi, mais au compte rendu

9 d'audience, nous lisons 9.000 personnes. Mais vous n'avez pas parlé de

10 9.000, n'est-ce pas ?

11 M. Vaasen (interprétation). – Non, je n'ai pas dit 9.000.

12 M. Riad (interprétation). – Eh bien, il va falloir corriger ce

13 chiffre. Merci.

14 M. Petrusic (interprétation). - Donc c'est le 11, dans la nuit,

15 que vous arrivez à Potocari ?

16 M. Vaasen (interprétation). – Oui, monsieur.

17 M. Petrusic (interprétation). - S'agissant de la nuit du 11 au

18 12 juillet, aviez-vous des détails au sujet de la situation qui régnait

19 dans la base et aux alentours de la base ?

20 M. le Président. - Excusez-moi de vous interrompre. Le Juge qui

21 est intervenu est le Juge Fuad Riad et non pas le Juge Rodrigues. Il faut

22 aussi corriger le transcript.

23 Vous pouvez continuer, maître Petrusic.

24 M. Petrusic (interprétation). – Merci, monsieur le Président.

25 Donc nous sommes arrivés au 12 juillet. Il me semble,

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1 monsieur le Président, que je n'ai pas reçu de réponse à ma dernière

2 question qui concernait la nuit du 11 au 12 juillet. Je demandais au

3 témoin s'il avait des éléments s'agissant de la situation qui régnait

4 cette nuit-là dans la base et aux alentours de la base.

5 M. Vaasen (interprétation). – Non, monsieur.

6 M. Petrusic (interprétation). - Le 12 juillet, vous observez la

7 présence de soldats serbes au moment où vous commencez votre journée de

8 travail ?

9 M. Vaasen (interprétation). - Je ne sais pas.

10 M. Petrusic (interprétation). – Est-ce la première fois, ce

11 12 juillet, à cet endroit-là, que vous avez vu des soldats serbes ?

12 M. Vaasen (interprétation). – Eh bien, ils sont arrivés plus

13 tard.

14 M. Petrusic (interprétation). - Quand sont-ils arrivés ?

15 M. Vaasen (interprétation). - Ils sont arrivés voyons… autour de

16 3 heures.

17 M. Petrusic (interprétation). – Hier, pendant votre déposition,

18 vous avez déclaré que vous avez pu voir les Tigres d'Arkan.

19 M. Vaasen (interprétation). – Oui, monsieur. Lorsque l'armée

20 serbe est entrée dans l'enclave il y avait parmi eux aussi des Tigres

21 d'Arkan.

22 M. Petrusic (interprétation). – Ils portaient un emblème ?

23 M. Vaasen (interprétation). – Oui, monsieur.

24 M. Petrusic (interprétation). - Sur cet emblème, il était écrit

25 "Tigre d'Arkan" ?

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1 M. Vaasen (interprétation). – C'est ce qu'ils m'ont dit.

2 M. Petrusic (interprétation). - En plus des Tigres d'Arkan,

3 d'après votre déclaration, il y avait des Loups de la Drina. Pouvez-vous

4 nous dire, s'agissant des autres soldats, est-ce qu'eux, de par leur

5 emblème, de par leurs insignes, est-ce qu'ils étaient différents de ces

6 deux formations que nous venons de mentionner ?

7 M. Vaasen (interprétation). – Oui, monsieur. Les Loups de la

8 Drina portaient un badge avec un loup. Il y avait aussi des soldats

9 réguliers qui portaient des badges réguliers.

10 M. Petrusic (interprétation). - Quand vous parlez de badges

11 réguliers, qu'est-ce que c'était ?

12 M. Vaasen (interprétation). – Eh bien, nous avons consulté notre

13 manuel et c'était l'insigne normal, habituel.

14 M. Petrusic (interprétation). - Pourriez-vous être un peu plus

15 précis, s'il vous plaît ?

16 M. Vaasen (interprétation). – Eh bien, les Tigres d'Arkan…

17 M. Petrusic (interprétation). - Je vous interromps, excusez-moi.

18 Non, je ne vous posais pas la question au sujet des Tigres d'Arkan ni au

19 sujet des Loups de la Drina. Ce sont les autres soldats qui m'intéressent.

20 Quel était l'insigne qu'ils portaient ?

21 M. Vaasen (interprétation). - Oui, c'était une sorte de couronne

22 et il était aussi écrit "HVO" dessus.

23 M. Petrusic (interprétation). - Et les soldats qui sont arrivés

24 avec des chiens, auriez-vous remarqué leur insigne ?

25 M. Vaasen (interprétation). – Non, monsieur.

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1 M. Petrusic (interprétation). – Avez-vous vu des formations de

2 la police, des uniformes de police ?

3 M. Vaasen (interprétation). - Je ne m'en souviens pas.

4 M. Petrusic (interprétation). - Comme vous l'avez déclaré hier,

5 de ces deux formations que nous venons d'évoquer, leurs membres se rendent

6 dans des maisons, font du pillage, emportent des biens, des choses de ce

7 genre ?

8 M. Cayley (interprétation). – Objection ! Je me souviens que ce

9 n'est pas ça le contenu de la déclaration du témoin. Je pense que cela

10 doit être précisé pour le procès verbal et pour le témoin.

11 Je me rappelle et j'ai vu dans mes notes que le témoin a déclaré

12 que ce sont les Loups de la Drina qui ont pillé les maisons le long de la

13 route. Le témoin a déclaré cela. Il peut le préciser, mais il me semble

14 que ce n'est pas les Tigres d'Arkan qu'a mentionnés le témoin, hier.

15 M. le Président. - Maître Petrusic, quelle est votre réaction

16 par rapport à l'objection de M. Cayley ?

17 M. Petrusic (interprétation). - Un instant, s'il vous plaît. Je

18 souhaite consulter mes notes. Il nous faudrait beaucoup plus de temps pour

19 vérifier dans le compte rendu d'audience, mais il me semble que M. Cayley

20 a raison, en effet.

21 (Monsieur Petrusic consulte ses notes).

22 M. le Président. - Maître Petrusic ?

23 M. Petrusic (interprétation). – Oui, mais quoi qu'il en soit,

24 nous pouvons poser la question au témoin pour préciser cela. S'agit-il

25 uniquement de Loups de la Drina qui pillaient, ou bien c'était le fait

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1 d'autres unités également ?

2 M. le Président. – Oui, maître Petrusic, vous pouvez poser la

3 question. Il a parlé des Loups de la Drina. Oui, mais vous pouvez demander

4 s'il y a d'autres formations.

5 Allez-y.

6 M. Petrusic (interprétation). – Précisément. Pour que ce soit

7 tout à fait clair, monsieur Vaasen, est-ce qu'il y a eu d'autres unités

8 qui ont pillé ces maisons ?

9 M. Vaasen (interprétation). – Non, pas pour autant que je m'en

10 souvienne aujourd'hui.

11 M. Petrusic (interprétation). – Monsieur Vaasen, ces unités,

12 autrement dit ces soldats, lançaient des grenades incendiaires dans ces

13 maisons ?

14 M. Vaasen (interprétation). - Pas dans toutes les maisons.

15 M. Petrusic (interprétation). - Vous êtes soldat. Bien entendu,

16 c'est un domaine que je ne connais pas très bien. Il n'empêche que j'ai

17 quelque connaissance en la matière. Lorsqu'on lance ces engins

18 incendiaires, l'ensemble du site prend feu, en l'occurrence l'ensemble de

19 la maison, n'est-ce pas ?

20 M. Vaasen (interprétation). – Oui, monsieur.

21 M. Petrusic (interprétation). - En déposant, hier, il me semble

22 qu'on vous a présenté la pièce de l'accusation 5/19. Alors, je souhaite

23 vous présenter la même pièce, la pièce 5/19 ainsi que la pièce 5/5.

24 (L'huissier s'exécute).

25 (L'huissier remet la pièce au témoin).

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1 (L'huissier place la pièce sur le rétroprojecteur).

2 M. Petrusic (interprétation). – Monsieur Vaasen, s'agit-il bien

3 de maisons dans lesquelles faisaient irruption les soldats serbes ?

4 M. Vaasen (interprétation). – Oui, monsieur.

5 M. Petrusic (interprétation). - Je pense que nous pouvons

6 constater qu'aucune maison, sur cette photo, n'a été incendiée.

7 M. Vaasen (interprétation). - C'est exact, mais je ne sais pas

8 de quand date cette photo.

9 M. Petrusic (interprétation). - Il s'agit de la pièce de

10 l'accusation. Pour autant que je le vois c'est le 7 juin 1996.

11 M. Vaasen (interprétation). - C'est possible.

12 M. Petrusic (interprétation). – Peut-on placer sur le

13 rétroprojecteur la pièce 5/5, s'il vous plaît.

14 (L'huissier s'exécute).

15 M. Petrusic (interprétation). - Sur cette pièce, nous voyons,

16 nous avons une vue un peu plus large de l'ensemble de la zone, mais il

17 s'agit du même site où, je pense, il nous est possible de constater qu'il

18 n'y a pas de maison incendiée. Est-ce exact, monsieur Vaasen ? Seriez-vous

19 d'accord avec cette constatation ?

20 M. Vaasen (interprétation). - C'est exact, monsieur, mais je ne

21 sais pas de quand date cette photo.

22 M. Petrusic (interprétation). - La défense ne peut pas vous

23 éclairer là-dessus. La défense ne le sait pas non plus.

24 M. Cayley (interprétation). – Si vous me le permettez,

25 monsieur le Président,

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1 je trouverai les dates précises, je ne sais pas s'il s'agit

2 d'une photo qui a été prise d'un hélicoptère, donc la pièce 5/5. Il

3 s'agirait d'une photo qui a été prise bien avant ces événements.

4 Me Petrusic se rappellera que, lorsque M. Ruez a déposé bien après ces

5 événements, M. Ruez a déclaré que, dans toute une série de ces photos qui

6 ont été prises, il y a la date en bas à droite. Et il a dit que la date

7 peut être erronée puisque qu'il n'était pas en mesure de régler la date

8 sur la caméra. Bien que ce témoin ne puisse pas déposer à ce sujet, je

9 pense que Me Petrusic sait très bien qu'il y a eu nombre de maisons qui

10 ont été réparées et reconstruites, bien après les événements dont nous

11 parlons à présent. Mais je fournirai la date précise du moment où ont été

12 prises ces photos.

13 M. le Président - Merci, M. Cayley. Je crois que la Chambre

14 n'allait quand même ouvrir un débat. Maintenant nous sommes à recueillir

15 l'information et donc le témoin doit répondre seulement selon ce que le

16 témoin sait. Le témoin a dit qu'il ne peut pas répondre. De toute façon,

17 la Chambre vous sera reconnaissante d'avoir une précision. Je crois qu'on

18 va réserver des questions pour les Juges, pour éclaircir un peu cette

19 question.

20 Merci de toute façon de votre attention, maître Cayley. Maître

21 Petrusic, vous pouvez continuer, s'il vous plaît.

22 M. Petrusic (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur le

23 Président. Monsieur Vaasen, dans les maisons que nous voyons sur la pièce

24 qui est sur le rétroprojecteur, avez-vous pu voir des civils dans ces

25 maisons, avant que les soldats serbes n'y rentrent ?

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1 M. Vaasen (interprétation). – Non, monsieur.

2 M. Petrusic (interprétation). - Merci. Vous affirmez que vous

3 avez vu que les soldats qui pillaient ces maisons tiraient des coups de

4 feu, qu'ils étaient drogués, que vous avez vu qu'ils étaient drogués, si

5 j'ai bien compris vote déclaration ?

6 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur.

7 M. Petrusic (interprétation). - Pouvez-vous nous le préciser un

8 petit peu ? Je ne connais pas très bien ce sujet. Mais pourriez-vous nous

9 préciser comment cela est-il possible, ils tirent des coups de feu, ils se

10 droguent, ils rentrent dans les maisons et tout cela en même temps ?

11 M. Vaasen (interprétation). - Non, pas en même temps. Il était

12 très clair que l'homme ou les hommes qui rentraient dans les maisons

13 ressortaient de ces maisons avec des machines à écrire, des téléphones ;

14 c'était très clair. D'autres choses aussi. Et j'ai dit que je les ai vus

15 boire plein d'alcool, la Slivovitz, il nous en ont offert, mais on a

16 refusé d'en boire. Et parfois, ils se reposaient un petit peu et ils

17 s'installaient pour boire et pour sniffer de la cocaïne.

18 M. Petrusic (interprétation). - Mais vous étiez à côté d'eux,

19 très près ?

20 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur. Nous avons reçu les

21 ordres de les regarder, de les observer.

22 M. Petrusic (interprétation). - Mais vous a t-on donné l'ordre

23 de les empêcher de procéder à ce genre d'activités ?

24 M. Vaasen (interprétation). - Non, nous n'avons reçu aucun ordre

25 allant dans ce sens-là.

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1 M. Petrusic (interprétation). - Vous avez déclaré qu'il y a eu

2 quelques blessés que vous avez secourus au moment où les soldats serbes

3 ont commencé à tirer sur les réfugiés ou plutôt au-dessus des têtes des

4 réfugiés. Et puis vous avez dit que ces coups de feu ont causé quelques

5 blessures aux extrémités des membres du corps de ces réfugiés ?

6 M. Vaasen (interprétation). - J'ai vu une femme blessée à la

7 jambe, une autre blessée également à la jambe et à l'estomac.

8 M. Petrusic (interprétation). – A la base des Nations Unies, il

9 y avait des blessés ?

10 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur.

11 M. Petrusic (interprétation). - Auriez-vous proposé, auriez-vous

12 essayé de contribuer à ce que ces blessés eux aussi soient transportés à

13 la base ?

14 M. Vaasen (interprétation). – Non, monsieur.

15 M. Petrusic (interprétation). – Monsieur le Président, serait-ce

16 un moment convenable pour faire une pause ?

17 M. le Président – Maître Petrusic, je vous remercie de votre

18 attention. Nous allons faire une pause de 20 minutes.

19 (L'audience, levée à 10 heures 59 est reprise à 11 heures 10).

20 (L'accusé est introduit dans le prétoire.)

21 M. le Président - Maître Petrusic, vous pouvez continuer, s'il

22 vous plaît.

23 M. Petrusic (interprétation). – Monsieur Vaasen, avant le début

24 de l'évacuation des réfugiés de Potocari, d'après vos estimations, combien

25 il y avait de personnes là-bas ?

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1 M. Vaasen (interprétation). – Vous voulez dire, quand je suis

2 retourné à la base des Nations Unies ?

3 M. Petrusic (interprétation). - Vous êtes revenu le 11 juillet à

4 la base. Donc le 12 juillet, commence l'évacuation dans l'après-midi et

5 c'est le moment dont je parle, donc avant le début de l'évacuation.

6 M. Vaasen (interprétation). - Il y avait beaucoup de gens, des

7 milliers de personnes.

8 M. Petrusic (interprétation). - Pourriez-vous nous dire combien

9 il y avait d'hommes âgés de 18 ans et plus, enfin à partir de 18 ans ?

10 M. Vaasen (interprétation). - Je ne le sais plus.

11 M. Petrusic (interprétation). - Pouvez-vous nous dire combien

12 d'hommes ont été mis à part dans la maison blanche, pour autant que vous

13 le sachiez ?

14 M. Vaasen (interprétation). - Je ne m'en souviens plus.

15 M. Petrusic (interprétation). - Les 12 et 13 juillet, le général

16 Mladic s'est rendu sur les lieux ?

17 M. Vaasen (interprétation). - Il est arrivé… en fait, moi-même,

18 je l'ai vu le 12 juillet.

19 M. Petrusic (interprétation). - L'avez-vous vu le 13 juillet ?

20 M. Vaasen (interprétation). - Je ne m'en souviens plus.

21 M. Petrusic (interprétation). - S'agissant de l'officier qui est

22 représenté sur une photographie que nous avons vue aujourd'hui et hier, il

23 s'agit de la pièce 28/13, s'agissant de l'officier qui est assis à gauche

24 du général Mladic, nous voyons la photo à présent sur le rétroprojecteur.

25 M. Vaasen (interprétation). - Oui.

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1 M. Petrusic (interprétation). - L'auriez-vous vu le 12 et

2 le 13 juillet ?

3 M. Vaasen (interprétation). - Les deux jours.

4 M. Petrusic (interprétation). - Etes-vous en mesure de nous dire

5 si votre impression était la suivante : lorsque le général Mladic était

6 absent, cet homme, cet officier était en charge, était la personne

7 responsable de cette zone ?

8 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur.

9 M. Petrusic (interprétation). - Monsieur le Président, j'arrive

10 à la fin de mes questions. Permettez-moi de revenir à l'événement du

11 12 juillet au soir. Il s'agit du viol : d'après la déposition de ce

12 témoin, il s'agit d'un viol qui a eu lieu derrière l'enceinte de l'usine.

13 Monsieur Vaasen, vous êtes infirmier ?

14 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur.

15 M. Petrusic (interprétation). - C'était la nuit ; quand vous

16 avez allumé cette lampe, vous avez vu des bleus sur les cuisses de cette

17 femme ?

18 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur.

19 M. Petrusic (interprétation). – Considérez-vous, monsieur

20 Vaasen, que d'un point de vue médical, il est indispensable qu'un certain

21 laps de temps s'écoule entre le moment où le coup a été donné et le moment

22 où le bleu ou l'ecchymose apparaît ?

23 M. Vaasen (interprétation). - Je ne comprends pas.

24 M. Petrusic (interprétation). - Autrement dit, si on part du

25 principe que cette fille a subi des coups au niveau des cuisses, est-il

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1 indispensable qu'une certaine période s'écoule avant le moment où le bleu

2 n'apparaisse ?

3 M. Vaasen (interprétation). - Eh bien, si vous donnez un coup à

4 quelqu'un ou si vous forcez quelqu'un à faire quelque chose, en fait, le

5 bleu ou les bleus apparaissent très vite sur les jambes.

6 M. Petrusic (interprétation). – Monsieur Vaasen, vous avez vu

7 combien d'hommes pendus ?

8 M. Vaasen (interprétation). – Deux hommes, il y avait deux

9 personnes. Un homme était allongé sur la fille et l'autre se tenait debout

10 comme s'il était de garde.

11 M. Petrusic (interprétation). - Ma question était la suivante :

12 vous avez vu combien d'hommes qui se sont pendus ?

13 M. Vaasen (interprétation). – A l'usine ? Oui, j'ai vu quelques

14 hommes qui s'étaient pendus.

15 M. Petrusic (interprétation). - Précisez, s'il vous plaît.

16 M. Vaasen (interprétation). - Eh bien, j'ai vu trois ou quatre

17 hommes pendus là-bas.

18 M. Petrusic (interprétation). - Lorsque l'évacuation a commencé,

19 les hommes qui ont été mis à part ont été sélectionnés d'après un critère

20 d'âge : est-ce que c'est comme ça que ça s'est passé ?

21 M. Vaasen (interprétation). - Excusez-moi, c'était à partir de

22 l'âge de 16 ou 17 ans.

23 M. Petrusic (interprétation). - Alors que les autres montaient

24 dans le bus ?

25 M. Vaasen (interprétation). - Oui. Les hommes qui ont été

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1 sélectionnés sont montés dans les bus.

2 M. Petrusic (interprétation). – Pour autant que vous le sachiez,

3 combien de convois ont reçu une escorte constituée des membres des Nations

4 Unies ?

5 M. Vaasen (interprétation). - Je ne le sais pas.

6 M. Petrusic (interprétation). - Et enfin, monsieur Vaasen, le

7 14 juillet, quand vous vous êtes rendu à Srebrenica, pouvez-vous nous dire

8 qui était en votre compagnie ?

9 M. Vaasen (interprétation). - Oui, nous étions mélangés avec la

10 compagnie B. Je ne connais pas ces soldats de nom.

11 M. Petrusic (interprétation). - Je vous remercie, monsieur. Je

12 n'ai pas d'autres questions. Je vous remercie, Monsieur le Président.

13 M. le Président (interprétation). - Merci, maître Petrusic.

14 Monsieur Cayley ?

15 M. Cayley (interprétation). - Je n'ai pas de question, Monsieur

16 le Président, pour ce témoin.

17 M. le Président (interprétation). - Merci, monsieur Cayley.

18 Monsieur le Juge Fuad Riad.

19 M. Riad (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

20 Bonjour, caporal Vaasen.

21 M. Vaasen (interprétation). - Bonjour.

22 M. Riad (interprétation). - Je vous poserai quelques questions

23 bien que vous ayez été très clair. Vous avez dit que, le 12 juillet, vous

24 avez vu l'armée serbe qui arrivait de Bratunac, qui portait des armes

25 lourdes avec des lance-roquettes multiples, des chars russes. C'était

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1 l'armée serbe ou l'armée des Serbes de Bosnie ? C'était quelle armée ?

2 M. Vaasen (interprétation). - Ils portaient les badges du HVO.

3 Les soldats qui marchaient devant eux, c'étaient les Tigres d'Arkan.

4 M. Riad (interprétation). - Les Tigres d'Arkan ?

5 M. Vaasen (interprétation). - Oui.

6 M. Riad (interprétation). - Vous avez dit qu'il s'agissait d'une

7 force conséquente. Est-ce que la situation était telle qu'une force d'une

8 telle ampleur était importante ? Est-ce que des combats se déroulaient là-

9 bas ? Est-ce que les forces bosniaques étaient de taille comparable pour

10 que cette force militaire soit nécessaire ?

11 M. Vaasen (interprétation). - Non, monsieur le Juge.

12 M. Riad (interprétation). - La situation n'était pas telle ?

13 M. Vaasen (interprétation). - Non.

14 M. Riad (interprétation). - Vous avez parlé de Tigres d'Arkan.

15 Vous semblez bien connaître les insignes : vous êtes capable de distinguer

16 l'insigne des Tigres d'Arkan, ainsi que des Loups de la Drina ?

17 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur le Juge.

18 M. Riad (interprétation). - Et vous avez mentionné les soldats

19 réguliers ?

20 M. Vaasen (interprétation). - Oui.

21 M. Riad (interprétation). - Autrement dit, les Loups de la Drina

22 n'étaient pas des soldats réguliers. C'était une unité indépendante alors,

23 sous un commandement indépendant ?

24 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur le Juge.

25 M. Riad (interprétation). - Vous voulez dire qu'ils ne

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1 répondaient pas au même commandement suprême ?

2 M. Vaasen (interprétation). - Non.

3 M. Riad (interprétation). - Ils étaient autonomes ?

4 M. Vaasen (interprétation). - Oui.

5 M. Riad (interprétation). - Dans les événements que vous avez

6 mentionnés, par exemple, des événements tels que la mise à feu, le fait

7 d'incendier des maisons, jeter des bombes incendiaires, un endroit où vous

8 avez été arrêté et où l'on vous a dit que s'ils tuaient un ou deux de

9 plus, cela ne ferait aucune différence pour les pousser à arrêter ce

10 qu'ils étaient en train de faire, là, il s'agissait du Corps de la Drina ?

11 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur le Juge.

12 M. Riad (interprétation). - Étiez-vous suffisamment près pour

13 pouvoir le dire avec certitude ?

14 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur le Juge.

15 M. Riad (interprétation). - Puisque vous avez dit que des gens

16 vous ont arrêtés et vous ont ri au nez et qu'ils vous ont menacés, là vous

17 étiez près ; mais quand il s'agit du pillage des maisons et des bombes

18 incendiaires qui ont été jetées, vous étiez suffisamment près pour

19 affirmer qu'il s'agissait du Corps de la Drina ?

20 M. Vaasen (interprétation). - Non, monsieur le Juge.

21 M. Riad (interprétation). - Alors, comment avez-vous pu

22 identifier que c'était cette unité-là ?

23 M. Vaasen (interprétation). - Parce que c'était le même groupe

24 qui se rendait à l'intérieur et c'était le groupe que nous avons essayé

25 d'arrêter.

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1 M. Riad (interprétation). - Donc le groupe que vous avez arrêté,

2 c'étaient les soldats de la Drina ?

3 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur le Juge.

4 M. Riad (interprétation). - Ces Loups de la Drina, vous avez dit

5 que c'était une unité indépendante. Était-elle disciplinée, aussi

6 disciplinée et organisée sous un commandement rigoureux ? Ou bien était-ce

7 simplement une bande dissipée de combattants anarchiques ?

8 M. Vaasen (interprétation). - Ils étaient là à faire des

9 choses : c'étaient un peu comme des bandits, ils semblaient être des

10 bandits.

11 M. Riad (interprétation). - Ils pouvaient faire ce qu'ils

12 voulaient ou recevaient des ordres ?

13 M. Vaasen (interprétation). - Je ne les ai pas vus recevoir

14 d'ordre. La seule chose que j'ai vue, c'est qu'ils se sont rendus dans ces

15 maisons, qu'ils se sont mis à piller, à tirer des coups de feu, à jeter

16 des grenades et qu'ils se sont vraiment bien amusés.

17 M. Riad (interprétation). - Vous n'avez pas eu l'impression que

18 c'étaient des soldats disciplinés, des membres d'une armée disciplinée ?

19 M. Vaasen (interprétation). - Non. Ils n'étaient pas aussi

20 disciplinés que les autres soldats.

21 M. Riad (interprétation). - Et les Tigres d'Arkan étaient

22 différents ?

23 M. Vaasen (interprétation). - Oui.

24 M. Riad (interprétation). - Les Tigres d'Arkan étaient des

25 Serbes de Bosnie ou bien des Serbes ?

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1 M. Vaasen (interprétation). - D'après ce que je me souviens, des

2 Serbes.

3 M. Riad (interprétation). - Vous avez également mentionné de

4 faire la chasse aux Musulmans et de les tuer quand ils étaient trouvés.

5 Cette chasse à l'homme, c'était… Est-ce que des membres du Corps de la

6 Drina étaient impliqués ?

7 M. Vaasen (interprétation). - Je ne me souviens pas. J'ai

8 entendu seulement des sons, des coups de feu et des imitations de sons des

9 loups. J'ai imaginé, je crois que c'étaient les Loups de la Drina.

10 M. Riad (interprétation). - Et, dans tous ces événements, est-ce

11 que vous avez pu apercevoir le général Krstic ?

12 M. Vaasen (interprétation). - Non, monsieur.

13 M. Riad (interprétation). - Vous avez également mentionné hier,

14 je crois, qu'au centre de Srebrenica, ce que vous appelez le "marché noir"

15 était rempli de corps empilés qui représentaient un nombre de 40 à 50

16 personnes, que c'étaient des civils, des femmes, des enfants et des

17 personnes âgées. Est-ce exact ?

18 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur le Juge.

19 M. Riad (interprétation). - Est-ce que vous savez ce qui a causé

20 ces meurtres ?

21 M. Vaasen (interprétation). - Je sais que la compagnie "Bravo",

22 qui était basée à Srebrenica a dû se retirer sur le marché noir ; elle

23 s'est dirigée vers le marché noir. Ils se sont tenus debout autour du

24 marché noir pour aider les Musulmans. Je sais également que la plupart de

25 ces personnes étaient tuées pendant qu'elles essayaient de trouver un

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1 refuge à la base des Nations Unies, à Potocari.

2 M. Riad (interprétation). - Mais c'était le marché noir, les

3 femmes et les enfants. Quel est donc le lien entre eux, les femmes et les

4 enfants et l'armée qui s'était retirée ?

5 M. Vaasen (interprétation). - La compagnie "Bravo" avait

6 également souffert et avait été attaquée par des coups de feu.

7 M. Riad (interprétation). - Vous voulez dire que c'étaient des

8 coups de feu, que le pilonnage était dirigé vers les civils ?

9 M. Vaasen (interprétation). - Oui, les civils et les soldats des

10 Nations Unies.

11 M. Riad (interprétation). - Mais ces tirs provenaient d'où ?

12 M. Vaasen (interprétation). - De l'armée serbe. Ils provenaient

13 des montagnes, des collines.

14 M. Riad (interprétation). - Donc les Serbes de Bosnie, mais pas

15 le Corps de la Drina.

16 M. Vaasen (interprétation). - Non.

17 M. Riad (interprétation). - Vous ne pouvez pas déterminer avec

18 précision ?

19 M. Vaasen (interprétation). – Non, monsieur le Juge.

20 M. Riad (interprétation). - Vous avez dit que, chaque fois que

21 vous aviez vu les unités musulmanes, vous les avez désarmées et pris leurs

22 armes. Y avait-il des contraintes entre vous-même et les unités

23 bosniennes ? Ou est-ce qu'ils se sont simplement pliés à vos ordres ?

24 M. Vaasen (interprétation). - Ils n'étaient pas très heureux

25 bien sûr d'exécuter les ordres, mais nous étions très clairs en ce qui a

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1 trait à ces armes. C'était une question d'accord et c'était l'accord que

2 nous avions pris avec eux ; donc ils n'avaient pas le choix.

3 M. Riad (interprétation). – Mais vous n'avez pas été en mesure

4 de faire la même chose avec d'autres Serbes de Bosnie ?

5 M. Vaasen (interprétation). – Non, monsieur le Juge.

6 M. Riad (interprétation). – Merci, caporal Vaasen.

7 M. le Président. – Merci beaucoup, monsieur le Juge Fuad Riad.

8 Madame le Juge Wald ?

9 Mme Wald (interprétation). – Caporal, lorsque vous vous êtes

10 présenté pour la première fois dans la région de Srebrenica et que vous

11 vous trouviez basé au poste d'observation "Mike", étiez-vous au courant de

12 quelle partie de l'armée des Serbes de Bosnie avait autorité sur la

13 région ? Est-ce que quelqu'un vous a dit que ce corps ou ce bataillon

14 était en commande ?

15 M. Vaasen (interprétation). – Non, madame le Juge.

16 Mme Wald (interprétation). - Donc personne ne vous a dit :

17 "Voici tel et tel bataillon, voici tel et tel corps de l'armée serbe de

18 Bosnie qui est en contrôle" ?

19 M. Vaasen (interprétation). – Non, madame le Juge.

20 Mme Wald (interprétation). – Mais vous avez mentionné plusieurs

21 fois, durant votre déclaration, que vous connaissiez le Corps de la Drina.

22 Vous avez mentionné cela en répondant à la question du Juge Riad. A quel

23 moment avez-vous compris qu'il y avait des soldats du Corps de la Drina

24 qui se trouvaient présents dans la région ?

25 M. Vaasen (interprétation). - C'était très clair lorsqu'ils sont

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1 arrivés : ils avaient des badges.

2 Mme Wald (interprétation). - Vous voulez dire le jour où vous

3 êtes arrivés à Potocari ou le jour où vous êtes arrivés dans la région de

4 Srebrenica ?

5 M. Vaasen (interprétation). - J'étais aux barricades des Nations

6 Unies quand ils sont arrivés.

7 Mme Wald (interprétation). – Mais vous n'aviez donc aucune idée

8 avant cela des soldats qui pilonnaient le poste d'observation ? Vous ne

9 saviez pas à quel bataillon ou à quel groupe d'hommes ces soldats

10 appartenaient ?

11 M. Vaasen (interprétation). – Non, madame le Juge.

12 Mme Wald (interprétation). - Vous avez mentionné que les gens

13 qui se trouvaient à l'intérieur de la base de Potocari ont été apeurés ou

14 ont eu de plus en plus peur quand ils ont découvert que les Tigres d'Arkan

15 et les Loups de la Drina étaient présents.

16 Pourquoi les réfugiés avaient encore plus peur des Loups de la

17 Drina que des autres soldats ?

18 M. Vaasen (interprétation). – Eh bien, l'expression de leur

19 visage était claire. Quand ils sont arrivés, c'était très clair que les

20 gens avaient de plus en plus peur et ils sont devenus de plus en plus

21 nerveux. La tension et le sentiment qui régnaient étaient très marqués.

22 Mme Wald (interprétation). - D'après vous, aviez-vous entendu

23 des rumeurs qui feraient en sorte que si vous, vous étiez un réfugié, vous

24 auriez eu plus peur des Loups de la Drina ? Etait-ce à cause de leur

25 réputation peut-être ?

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1 M. Vaasen (interprétation). – Oui, madame le Juge.

2 Mme Wald (interprétation). - Qu'est-ce que c'était ?

3 M. Vaasen (interprétation). - Le nettoyage ethnique.

4 Mme Wald (interprétation). – Lorsque vous avez vu les Loups de

5 la Drina, étiez-vous au courant que les Loups de la Drina était d'une

6 certaine façon membres du Corps de la Drina ?

7 M. Vaasen (interprétation). - Oui.

8 Mme Wald (interprétation). – Oui, très bien. Je comprends.

9 Ma deuxième question est la suivante : quand vous êtes revenu à

10 Srebrenica -vous nous avez dit que vous êtes retourné à Srebrenica- vous

11 avez vu cette scène horrible de tous ces corps empilés. D'après vous et

12 d'après ce que vous avez pu voir ou apercevoir, qui était resté à

13 Srebrenica ? Y avait-il des gens qui vivaient encore à Srebrenica ? Y

14 avait-il des civils musulmans dont vous auriez connaissance ? Est-ce qu'il

15 y avait des Serbes laissés derrière ? Qui se trouvait dans le village de

16 Srebrenica après l'évacuation de Potocari ?

17 M. Vaasen (interprétation). - Après l'évacuation de Potocari,

18 cela s'est passé vraiment très vite. Quand les réfugiés musulmans sont

19 partis, les Serbes… on se tenait devant le portail qui permet l'entrée à

20 l'enclave.

21 Mme Wald (interprétation). – Oui, mais vous parlez de Potocari.

22 Qu'est-ce qui se passe à Srebrenica ? Lorsque vous êtes revenu à

23 Srebrenica et que vous avez vu les corps, y avait-il encore des habitants

24 à Srebrenica ?

25 M. Vaasen (interprétation). – Non, madame le Juge.

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1 Mme Wald (interprétation). - Donc c'était une ville fantôme ?

2 M. Vaasen (interprétation). - Oui.

3 Mme Wald (interprétation). - Vous avez commencé à parler de

4 Potocari après l'évacuation, le 14. Vous êtes resté à Potocari encore une

5 semaine. D'après ce vous avez pu observer, qui d'autre était resté

6 derrière, à Potocari, soit à l'intérieur de la base, soit dans les

7 maisons, soit dans la région entourant la base ?

8 M. Vaasen (interprétation). – Je suis certain que seulement le

9 bataillon néerlandais, le bataillon des Nations Unies était présent. J'ai

10 également vu qu'il y avait des Serbes. Des civils serbes se dirigeaient

11 également vers l'enclave, ils faisaient du pillage. Je les ai même vus

12 entrer avec des voitures vides et ressortir avec des machines à laver,

13 avec des magnétoscopes. Enfin, tout ce qu'ils avaient pu trouver sur leur

14 chemin.

15 Mme Wald (interprétation). - Pendant la semaine, avant de

16 quitter la base de Potocari, avez-vous vu des civils musulmans, des

17 femmes, des enfants, des vieux, des plus jeunes, quelqu'un ?

18 M. Vaasen (interprétation). – Non, madame le Juge.

19 Mme Wald (interprétation). – Merci, caporal.

20 M. le Président. - Merci beaucoup, madame le Juge Wald.

21 Caporal Vaasen, j'ai aussi quelques questions.

22 La première : vous avez parlé des Tigres d'Arkan, des Loups de

23 la Drina, des soldats avec des chiens et des troupes régulières.

24 Quand vous avez parlé des troupes régulières, vous avez répondu

25 à une question de Me Petrusic qu'il y avait un insigne, une couronne. Et

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1 vous avez aussi dit qu'ils avaient des lettres "HVO". Est-ce que vous êtes

2 bien certain qu'il s'agissait des lettres HVO ? Ou il y en aurait

3 d'autres ?

4 M. Vaasen (interprétation). – Non, monsieur le Président.

5 C'était très clair, on pouvait le voir.

6 M. le Président. - Donc HVO ?

7 M. Vaasen (interprétation). – Oui, monsieur le Président.

8 M. le Président. - Je ne veux pas induire votre réponse, mais

9 HVO c'étaient des lettres que l'on utilisait pour des soldats du conseil

10 de la défense des Croates. Ici, nous sommes à traiter avec des soldats

11 bosniens-serbes.

12 Après avoir dit ça, vous êtes sûr qu'il s'agissait des lettres

13 HVO ?

14 M. Vaasen (interprétation). - Oui, monsieur le Président,

15 puisque qu'ils portaient des vêtements différents. Ils avaient déjà nos

16 uniformes et ils portaient aussi des uniformes de l'armée régulière et ils

17 portaient aussi ces uniformes-là.

18 M. le Président - Très bien, merci. Ma deuxièmement question :

19 est-ce que vous pouvez vérifier que la pièce à conviction 5/19 est sur le

20 rétroprojecteur ?

21 (L'huissier s'exécute.)

22 Devant cette photo, je vous poserai la question suivante : est-

23 ce que l'état des maisons que vous voyez sur la photo est le même que vous

24 avez vu quand quelques soldats les ont brûlées ou l'état est différent ?

25 Il y a quelques différences ?

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1 M. Vaasen (interprétation). - Je ne me rappelle pas, monsieur le

2 Président.

3 M. le Président - D'accord, merci. Une autre question : je crois

4 que vous avez déjà répondu à mon collègue le juge Riad ; je m'excuse, mais

5 je vais vous poser la question. Connaissez-vous le général Krstic ?

6 M. Vaasen (interprétation). - Non Monsieur le Président.

7 M. le Président - Donc jamais vous n'avez vu le général Krstic

8 sur le terrain, ni à quelque endroit ?

9 M. Vaasen (interprétation). - Non, monsieur le Président.

10 M. le Président - Donc ma dernière question : vous êtes un

11 militaire. Vous êtes habitué à vivre l'organisation et la discipline. Si

12 on prend ces paramètres, organisation et discipline et après avoir revu,

13 comme vous l'avez fait beaucoup de fois, la situation que vous avez

14 observée, est-ce qu'à votre avis, il y a eu une discipline et une

15 organisation dans tous ces événements que vous avez observés ou non ?

16 M. Vaasen (interprétation). - Pendant la déportation des

17 Musulmans, des réfugiés musulmans, il y a eu une certaine discipline mais,

18 pour ce qui est du reste, il n'y avait pas de discipline.

19 M. le Président - Du point de vue de l'organisation, est-ce que

20 vous avez senti qu'il y avait une organisation qui supportait ou qui était

21 avant cette discipline ?

22 M. Vaasen (interprétation). - Je ne sais pas.

23 M. le Président - D'accord. Donc, caporal Vaasen, nous vous

24 remercions beaucoup d'être venu ici au Tribunal prêter votre témoignage et

25 vivre encore ces moments difficiles pour vous. On peut comprendre que cela

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1 a été très difficile de les d'observer et de les revivre. Nous vous

2 remercions beaucoup et nous souhaitons que vous profitiez du calme de

3 votre très beau pays. Nous remercions aussi l'interprète qui a été

4 disponible pour nous aider.

5 M. Dubuisson – Monsieur le Juge, avant de libérer le témoin,

6 j'aimerais qu'il soit statué sur les pièces du Procureur 57/3 a - 3 b et

7 sur la pièce de la défense D 5.

8 M. le Président - Monsieur Cayley ?

9 M. Cayley (interprétation). - C'est exact, Monsieur le

10 Président, la pièce à conviction 57 représente le badge que le témoin a

11 identifié sur l'uniforme de membres du Corps de la Drina. S'il n'y a pas

12 d'objection, j'aimerais verser cette pièce à conviction au dossier

13 également. Nous n'avons aucune objection à ce qui a trait à la pièce à

14 conviction D 5.

15 M. le Président - Très bien. Maître Petrusic, de votre côté,

16 objection par rapport à la pièce 57 ? Et vous demandez le versement de

17 D 5 ?

18 M. Petrusic (interprétation). - Nous n'avons aucune objection

19 concernant la pièce à conviction qu'a mentionnée Monsieur Cayley. Je suis

20 désolé, Monsieur le Président, je n'étais pas assez concentré : quelle

21 était votre deuxième question pour la pièce à conviction ?

22 M. le Président - Je crois que vous allez demander le versement

23 au dossier de votre pièce D 5 ?

24 M. Petrusic (interprétation). – C'est exact, oui.

25 M. le Président - Donc les pièces à conviction 57 et D 5 sont

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1 versées au dossier, Monsieur Dubuisson.

2 Caporal Vaasen, seulement pour terminer, le Procureur vous a

3 posé des questions, la défense vous a posé des questions, les Juges vous

4 ont posé des questions : est-ce qu'il y a quelque chose que vous voudriez

5 ajouter à moment-ci ?

6 M. Vaasen (interprétation). – Non, Monsieur le Président.

7 M. le Président - Nous vous remercions de nouveau, merci

8 beaucoup.

9 (Le témoin est reconduit hors du prétoire).

10 (L'interprète du témoin quitte la salle d'audience).

11 M. le Président - Maître Harmon ou Maître Cayley ?

12 M. Cayley (interprétation). - Oui, nous avons un autre témoin,

13 Monsieur le Président, mais c'est peut-être le moment opportun de prendre

14 une pause à ce moment-ci. Je ne voudrais pas le faire devant les Juges, ce

15 sera peut-être plus facile.

16 M. le Président - Oui.

17 Monsieur Dubuisson attire mon attention : seulement à

18 l'intention du public qui suit nos débats, est-ce que le témoin prochain

19 va être protégé ou non ?

20 M. Cayley (interprétation). - Oui, c'est un témoin protégé,

21 Monsieur le Président. C'est exact.

22 M. le Président - Excusez-moi d'aller un peu plus loin. Quelles

23 sont les raisons et les mesures de protection, Monsieur Cayley ?

24 M. Cayley (interprétation). - Je crois que c'est mon collègue

25 Me McCloskey qui répondra à votre question. Mais j'aimerais d'abord passer

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1 à huis clos avant de discuter de la raison de cette mesure de protection.

2 M. le Président - A l'intention du public, nous allons passer à

3 huis clos pour discuter des raisons de la protection du prochain témoin.

4 M. Dubuisson - Nous sommes à huis clo

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16 (expurgé)

17 (expurgé)

18 (expurgé)

19 (expurgé)

20 (expurgé)

21 (expurgé)

22 (expurgé)

23 L'audience est suspendue à 11 heures 57 et reprise à

24 12 heures 22..

25 (audience publique)

Page 1487

1 (L'accusé est introduit dans le prétoire)

2

3

4 M. le Président - Maître McCloskey ?

5 M. McCloskey (interprétation) - Merci….

6 M. le Président - Pouvez-vous répéter ? Il n'y avait pas

7 l'interprétation.

8 L'interprète - Je suis désolée. Nous étions sur le mauvais

9 canal.

10 M. McCloskey (interprétation) - Oui, certainement, Monsieur le

11 Président. Je crois qu'il s'agit du témoin F. Nous sommes prêts.

12 M. Dubuisson - Effectivement, il s'agira bien du témoin F. Donc

13 il ne doit y avoir personne dans la galerie du public de cette salle

14 d'audience. La possibilité d'écouter les débats se fait au rez-de-

15 chaussée. Merci.

16 M. le Président - Vous pouvez faire entrer le témoin, s'il vous

17 plaît.

18 (Le témoin est introduit dans le prétoire).

19 M. McCloskey (interprétation) - Monsieur le Président, notre

20 témoin témoignera en néerlandais.

21 M. le Président - Une question préliminaire, excusez-moi : est-

22 ce que vous allez présenter des pièces à conviction sur le

23 rétroprojecteur ?

24 M. McCloskey (interprétation) - Oui, monsieur le Président.

25 M. le Président - On peut peut-être changer la position du

Page 1488

1 témoin et de l'interprète, parce que le témoin peut être plus près du

2 rétroprojecteur ?

3 M. McCloskey (interprétation) - C'est une très bonne idée,

4 monsieur le Président.

5 M. le Président - Vous pouvez mettre vos écouteurs, changer un

6 peu de position ?

7 D'accord, merci. Vous m'entendez, Témoin F ?

8 Temoin F (interprétation). - Oui.

9 M. le Président - D'accord. Don, Témoin F, c'est comme ça qu'on

10 va vous appeler et vous traiter à cause des mesures de protection qui vous

11 ont été accordées. Vous allez lire la déclaration solennelle que

12 M. l'huissier va vous tendre, s'il vous plaît.

13 (L'huissier s'exécute.)

14 Temoin F (interprétation). - Je déclare que je dis la vérité,

15 toute la vérité et rien que la vérité.

16 M. le Président – Monsieur l'huissier, vous pouvez donner la

17 formule de déclaration solennelle à l'interprète ?

18 Interprète - Je jure solennellement que je dirai la vérité,

19 toute la vérité et rien que la vérité. Je déclare solennellement que

20 j'accomplirai ma tâche d'interprète auprès de la Cour et dans le respect

21 de la confidentialité.

22 M. le Président – Témoin F, M. le greffier va vous montrer une

23 pièce de papier avec votre nom inscrit. Vous allez dire seulement si le

24 nom inscrit est votre nom ou non ?

25 Temoin F (interprétation). - Oui.

Page 1489

1 M. le Président - Donc c'est bien votre nom ?

2 Temoin F (interprétation). - Oui.

3 M. le Président (interprétation). - Vous allez répondre aux

4 questions que le Procureur M. McCloskey va vous poser. Monsieur McCloskey,

5 c'est à vous maintenant. Merci beaucoup.

6 M. McCloskey (interprétation) - Je vous remercie, Monsieur le

7 Président. Témoin F, vous êtes soldat dans l'armée néerlandaise, est-ce

8 exact ?

9 Temoin F (interprétation). – Oui, c'est exact.

10 M. McCloskey (interprétation) - En 1995, faisiez-vous partie

11 des casques bleus en tant que soldat néerlandais en Bosnie ?

12 Temoin F (interprétation). - C'est exact.

13 Cabine anglaise : On demande au témoin de parler un peu plus

14 fort. Peut-on rapprocher le micro du témoin, s'il vous plaît ?

15 M. McCloskey (interprétation) - Quelle était votre mission en

16 Bosnie à l'époque ?

17 Temoin F (interprétation). - C'était une mission humanitaire. Il

18 s'agissait d'une mission qui nous engageait à désarmer tout soldat

19 musulman qui serait en état de combattre. Il s'agissait de conduire des

20 missions de reconnaissance, de patrouiller le long de la frontière, de

21 maintenir la paix dans l'enclave.

22 M. McCloskey (interprétation) - Vous étiez posté à quel poste

23 d'observation ?

24 Temoin F (interprétation). - J'étais au portail, à l'entrée

25 principale de l'enclave et donc, au début, c'était le poste d'observation

Page 1490

1 "Papa" et plus tard "Sierra".

2 (Question inaudible).

3 M. le Président - L'interprète me dit qu'elle n'a pas entendu la

4 question. Si vous pouvez répéter, s'il vous plaît ?

5 Interprète - Monsieur le Président, nous avons là une

6 interprétation à trois étages. Il faudrait une pause entre les questions

7 et les réponses.

8 M. Dubuisson – Je profite de cet instant pour préciser qu'il y a

9 un intermédiaire supplémentaire dans le chemin des traductions. Donc je

10 vous demande vraiment de prendre le temps après chaque question et aussi

11 après chaque réponse. C'est pris en relais et nous avons un troisième

12 relais maintenant ce qui est énorme.

13 M. le Président. - C'est-à-dire que, si normalement on doit

14 faire une pause entre la question et la réponse, ici, selon les dires de

15 M. Dubuisson, on doit faire au moins deux pauses. Merci de votre

16 attention.

17 M. McCloskey (interprétation). - Vous est-il arrivé de

18 travailler avec le caporal Vaasen à un moment quelconque durant votre

19 mission ?

20 Témoin F (interprétation). - Non, je n'ai jamais été avec le

21 caporal Vaasen. Je n'ai jamais travaillé avec lui à un quelconque des

22 postes d'observation. Je n'ai jamais travaillé avec le caporal Vaasen à un

23 quelconque poste d'observation.

24 M. McCloskey (interprétation). - Pouvez-vous nous décrire les

25 armes que vous avez vues entre les mains de l'armée bosniaque à différents

Page 1491

1 moments durant votre mission ?

2 Témoin F (interprétation). - L'armée musulmane possédait, pour

3 l'essentiel, des armes légères, des mortiers, des mortiers portables, des

4 AK 47 russes, des grenades à main, des mitrailleuses, des pistolets. Ils

5 avaient également des armes qu'ils avaient fabriquées eux-mêmes. En fait,

6 ils étaient doués d'un grand talent pour créer eux-mêmes les armes. Et

7 c'était cela la plupart des armes que nous avons eues à Srebrenica.

8 M. McCloskey (interprétation). - Avez-vous remarqué une

9 modification dans la quantité ou la qualité de leur armement quand on se

10 rapproche du mois de juillet 1995 ?

11 Témoin F (interprétation). - Plus il y avait de tension, plus il

12 y avait de pression qui s'exerçait dans la zone. Nous avons remarqué qu'il

13 y avait des parachutages par hélicoptère. Nous avons vu qu'ils avaient de

14 meilleurs uniformes militaires, de meilleures armes, de meilleures

15 chaussures, un meilleur équipement en somme ; donc ils étaient mieux

16 préparés.

17 M. McCloskey (interprétation). - Avaient-ils des armes plus

18 importantes ?

19 Témoin F (interprétation). - Non, pas vraiment. La plupart des

20 armes lourdes avaient été confisquées par le 12e Bataillon à ce moment et

21 se trouvaient à la base Srebrenica.

22 M. McCloskey (interprétation). - Avez-vous vu des soldats

23 musulmans porter des armes avant la chute de l'enclave ?

24 Témoin F (interprétation). - A un moment, quand je suis arrivé

25 au début du mois de janvier, j'ai vu un combattant musulman avec un AK et

Page 1492

1 il a couru le plus vite qu'il a pu.

2 M. McCloskey (interprétation). - Vous avez vu un char de l'armée

3 musulmane ?

4 Témoin F (interprétation). - Une fois, un de mes collègues a pu

5 voir un char.

6 M. McCloskey (interprétation). - Vous l'avez vu

7 personnellement ?

8 Témoin F (interprétation). - Non.

9 M. McCloskey (interprétation). - Le 11 juillet, à la chute de

10 Potocari, quelle était votre tâche le jour en question ?

11 Témoin F (interprétation). - Le jour en question, nous n'avions

12 pas suffisamment d'hommes. Nous devions faire plus de choses que

13 normalement au poste d'observation. Moi, je me trouvais à un poste de

14 mitrailleuse dans l'ensemble du poste d'opération.

15 M. McCloskey (interprétation). - Cela se trouvait où ?

16 Témoin F (interprétation). - Cet endroit n'était pas dans le

17 corridor. Cela donnait sur le nord de l'enclave, donc l'endroit où je me

18 trouvais.

19 M. McCloskey (interprétation). - Vous étiez à quel étage ?

20 Témoin F (interprétation). - J'étais au deuxième étage de ce

21 bâtiment. C'était aussi le dernier étage, il n'y en avait pas davantage.

22 M. McCloskey (interprétation). – Monsieur le Président, je

23 voudrais présenter au témoin la pièce 5/2.

24 Pouvez-vous placer cette pièce sur le rétroprojecteur ?

25 (L'huissier s'exécute).

Page 1493

1 Je demande au témoin de regarder directement la pièce qui est

2 placée sur le rétroprojecteur. Pouvez-vous examiner la pièce, s'il vous

3 plaît.

4 Reconnaissez-vous cette photo ?

5 Témoin F (interprétation). - Oui.

6 M. McCloskey (interprétation). - En jaune, peut-on voir la base

7 des Nations Unies entourée en jaune ?

8 Témoin F (interprétation). – Oui, c'est exact.

9 M. McCloskey (interprétation). - Vous voyez la partie de la base

10 des Nations Unies où vous vous trouviez vous-même, au deuxième étage ?

11 Témoin F (interprétation). - Oui.

12 M. McCloskey (interprétation). - Pouvez-vous prendre le crayon

13 vert qui est devant vous pour indiquer cette zone, pour l'encercler ?

14 (Le témoin s'exécute).

15 Pouvez-vous, s'il vous plaît, inscrire vos initiales ou placer

16 uniquement le F, la lettre F, à côté ?

17 (Le témoin s'exécute).

18 A quelle heure vous êtes-vous rendu pour la première fois à ce

19 poste d'observation ?

20 Témoin F (interprétation). - Tôt le matin, après avoir reçu

21 l'ordre, après avoir reçu les armes et après que la mission nous soit

22 précisée.

23 M. McCloskey (interprétation). - A un moment de la journée,

24 avez-vous remarqué des activités militaires dans la zone que vous

25 observiez ?

Page 1494

1 Témoin F (interprétation). - C'est exact. Il y avait de plus en

2 plus de coups de feu. Nous entendions des bruits forts de pièces lourdes,

3 notamment en provenance du Nord. Du côté Est, il y avait des pièces

4 d'artillerie lourde qu'on entendait. Mais le jour en question, la

5 provenance était essentiellement le Nord. On voyait la fumée, on entendait

6 des coups de feu, on entendait des pièces d'artillerie lourde, on voyait

7 des Musulmans tirer des coups de feu et puis s'enfuir par la suite.

8 M. McCloskey (interprétation). – Pouvez-vous nous indiquer à

9 quel endroit, par rapport à cette photo, il y avait des soldats musulmans

10 avec des pièces d'artillerie ?

11 Témoin F (interprétation). - Je ne peux pas voir de combattants

12 musulmans, mais je vois bien entendu l'endroit.

13 M. McCloskey (interprétation). - L'endroit où vous avez vu des

14 soldats musulmans avec des mortiers, pouvez-vous l'indiquer ?

15 (Le témoin s'exécute).

16 Témoin F (interprétation). – Ici, ici, et ici.

17 M. McCloskey (interprétation). - Le témoin a indiqué qu'il a vu

18 les combattants musulmans des deux côtés de la base des Nations Unies,

19 dans les collines ainsi que du côté nord par rapport à la base. Pouvez-

20 vous nous décrire ce que vous avez vu le matin en question ?

21 Témoin F (interprétation). - Le matin en question, j'étais avec

22 un camarade. On est allés chercher de l'eau et on a vu de plus en plus de

23 mouvements du côté des combattants musulmans : ils se regroupaient et puis

24 ils re disparaissaient dans les bois. Nous en avons vu vers le site

25 "Papa", en direction de "Papa". Nous avons entendu des bruits de coups de

Page 1495

1 feu plus tard dans la journée ; je ne peux pas vous indiquer l'heure

2 précise cependant. Des Serbes ont commencé à arriver, nous avons vu la

3 fumée au niveau "Papa", donc du côté nord dans la colline, de plus en plus

4 de bruit de coup de feu et de pièces lourdes. Les combattants musulmans

5 étaient très nerveux et ils ont commencé à disparaître dans les bois, ils

6 se sont enfuis. Du côté est, il y avait quelques combattants musulmans qui

7 tiraient des coups de feu de pièce d'artillerie. Et ils étaient pris sous

8 un feu nourri de pièces d'artilleries lourdes.

9 M. McCloskey (interprétation) - Vous avez eu l'occasion de

10 prendre une photo de la fumée au niveau du poste d'observation "Papa", le

11 jour en question ?

12 Témoin F (interprétation). – Oui, de l'endroit où je me

13 trouvais, je pouvais bien voir ce qui arrivait, l'infanterie. Et cela m'a

14 permis aussi de voir les maisons ainsi que l'entrée principale du poste

15 d'observation "Papa". Et comme il me restait encore de la pellicule, j'ai

16 pris quelques photos des coups de feu, de la fumée, du char russe et de la

17 fumée très dense.

18 M. McCloskey (interprétation) - Peut-on présenter au témoin la

19 pièce 63 ?

20 (Le greffe distribue la pièce aux Juges et à la défense.)

21 (L'huissier place la pièce sur le rétroprojecteur.)

22 Cette photo représente-t-elle ce que vous avez pu photographier

23 ce jour-là ?

24 Témoin F (interprétation). - C'est exact.

25 M. McCloskey (interprétation) - Pouvez-vous indiquer les

Page 1496

1 colonnes de fumée que vous avez vues ?

2 (Le témoin s'exécute.)

3 Témoin F (interprétation). - Je me trouvais ici, c'est la

4 colline où se trouvaient essentiellement les positions serbes. Ils avaient

5 des canons également qu'on avait vus auparavant.

6 M. McCloskey (interprétation) - Pouvez-vous écouter de manière

7 très précise la question et répondre à la question telle qu'elle vous a

8 été posée. Pouvez-vous tout d'abord nous indiquer les volutes de fumée que

9 vous avez remarquées, donc les différentes volutes de fumée ?

10 Témoin F (interprétation). - Ce sont les volutes de fumée qui

11 s'élèvent des maisons. Le poste d'observation "Papa" se trouvait ici. Ici,

12 nous avions un terrain à découvert qui se trouvait derrière le poste

13 d'observation "Papa" et, ici sur cette colline, se trouvaient des

14 positions serbes. On nous a dit qu'ici, il y avait un champ de mines.

15 Après, il s'est révélé que ce n'était pas vrai : c'est un char T 55 russe

16 qui produit cette fumée.

17 M. McCloskey (interprétation) - Peut-on consigner au procès

18 verbal qu'au milieu de la photo, nous voyons une volute de fumée et que le

19 témoin déclare que cette volute de fumée provient d'un char, alors

20 qu'avant, cette volute de fumée foncée, il a été dit que la zone qu'il a

21 indiquée était la zone où se trouvaient les positions serbes. Pouvez-vous

22 nous décrire les autres volutes de fumée ?

23 Témoin F (interprétation). – L'autre provenait des maisons qui

24 se trouvaient dans cette zone. La plupart ont été incendiées. On voit

25 clairement, grâce à la couleur blanche de cette fumée, que c'étaient des

Page 1497

1 maisons : ce n'est pas de la fumée foncée qui provient du pétrole. Et ici,

2 le long de ces collines, il y a eu des maisons qui ont été incendiées,

3 parfois on a pu voir des flammes.

4 M. McCloskey (interprétation) - Le témoin a indiqué, à droite

5 sur la photo, les fumées, les volutes de fumée et a déclaré que, même

6 encore plus à droite, il lui est arrivé de voir des volutes de fumée.

7 Pouvez-vous nous dire ce que vous avez vu immédiatement après

8 avoir pris ces photos, monsieur, s'il vous plaît ?

9 Témoin F (interprétation). - Ce que nous avons pu remarquer,

10 c'est que les combattants musulmans étaient très nerveux. A ce moment-là,

11 on a entendu des bruits de chars et d'autre armes ;et ces bruits se

12 rapprochaient le long de cette ligne de bois. Il y avait des unités

13 d'infanterie avec des chars, c'était un groupe d'infanterie très bien

14 organisé ; il y avait donc un char T 55 russe, donc le char avec la fumée

15 foncée, et, à gauche de la base, il y avait aussi des militaires

16 organisés, à droite également. Alors, ils ont vidé les maisons, ils ont

17 pillé tout ce qu'ils ont pu prendre.

18 M. McCloskey (interprétation) - Cette première vague, vous

19 qualifiez ces soldats d'organisés. Comment étaient-ils équipés, comment

20 étaient-ils ?

21 Témoin F (interprétation). - Cette première vague de soldats

22 organisés, d'armée organisée consistait en une infanterie bien organisée.

23 Ils avaient des casques, d'excellents uniformes de camouflage, ils étaient

24 bien armés ; il y avait plusieurs commandants, il y avait des officiers et

25 des sous-officiers qui donnaient des ordres. Ils avaient de bons moyens de

Page 1498

1 communication. Les unités étaient déployées des deux côtés de l'enclave et

2 ils pouvaient maintenir un contact entre eux. C'est comme ça qu'ils

3 avançaient, alignés. J'avais l'impression qu'ils étaient très bien

4 organisés.

5 Je pense que j'ai suffisamment d'expérience pour pouvoir

6 l'évaluer.

7 M. McCloskey (interprétation) - Leur uniforme de camouflage

8 était de quelle couleur ?

9 Témoin F (interprétation). - A droite, par rapport à la base,

10 donc sur ma droite, la plupart de ces soldats étaient vêtus en noir.

11 C'étaient des garçons grands et forts qui portaient des armes légères. Ils

12 portaient sur leur dos essentiellement un bon équipement de communication

13 et la plupart était vêtus de noir. Ils ont vidé à fond les maisons. A

14 gauche, c'était essentiellement de l'infanterie. Ils avançaient à travers

15 les champs et à gauche, il y avait moins de maison qu'à droite. Donc, eux,

16 ils portaient des casques, des uniformes de camouflage, des mitrailleuses,

17 des AK 47, des grenades à main. C'était une unité d'infanterie, une unité

18 ordinaire d'infanterie.

19 M. Riad (interprétation). – Ils ont nettoyé toutes les maisons,

20 "vider toutes les maisons", a dit l'interprète français. Je veux connaître

21 la signification précise.

22 Témoin F (interprétation). - Ils ont vidé ou nettoyé les maisons

23 de telle manière qu'ils pouvaient être sûrs qu'il n'y avait plus ni

24 combattant musulman ni d'autre personne dans ces maisons. A partir de ce

25 moment-là, il s'agissait de nettoyer ou de vider l'ensemble de la zone

Page 1499

1 pour que les unités qui les suivaient puissent avancer dans la zone.

2 M. McCloskey (interprétation). - Les uniformes de camouflage que

3 vous avez décrits en dernier lieu étaient de quelle couleur ?

4 Témoin F (interprétation). - Noire.

5 M. McCloskey (interprétation). - C'était la première vague de

6 soldats. Etaient-ils tous vêtus de noir alors ?

7 Témoin F (interprétation). - Sur ma droite, oui. Et ils ont

8 nettoyé toutes les maisons. A gauche, il y avait l'infanterie en uniforme

9 de camouflage. Sur ma droite, il y avait davantage de combats que sur ma

10 gauche.

11 M. McCloskey (interprétation). - Mais, à gauche, les soldats

12 étaient vêtus de noir également ?

13 Témoin F (interprétation). – Quelques-uns d'entre eux, oui.

14 M. McCloskey (interprétation). - Et les autres étaient vêtus

15 comment ?

16 Témoin F (interprétation). - Des uniformes de camouflage avec

17 des casques. Ils étaient sous le commandement direct d'un commandant de

18 groupe, un caporal ou un sergent. Son grade était quelque chose comme ça.

19 M. McCloskey (interprétation). - Avez-vous vu des soldats en

20 uniforme de camouflage vert en plus de ces uniformes de camouflage noir ?

21 Témoin F (interprétation). - De prime abord, non, jusqu'à ce

22 qu'ils aient traversé donc la moitié du chemin menant vers la base. Je

23 n'ai pas de photos à présent, je ne peux pas le montrer.

24 (L'huissier place un document sur le rétroprojecteur).

25 M. McCloskey (interprétation). - Nous sommes revenus à la

Page 1500

1 pièce 5/2.

2 Témoin F (interprétation). - En premier lieu, il y avait des

3 hommes vêtus en noir qui sont arrivés le long de cette ligne. Ils ont

4 avancé comme je l'indique et il y a eu plusieurs combats durant plusieurs

5 heures avec les combattants musulmans.

6 M. McCloskey (interprétation). – Excusez-moi de vous

7 interrompre. Le témoin a montré le bas de la photo et en direction de la

8 base des Nations Unies : c'est là qu'avançaient les soldats vêtus de

9 noir ?

10 Témoin F (interprétation). - Donc c'est ici que se trouvaient

11 les soldats en noir. Ici, nous avions l'armée organisée qui avançait dans

12 cette direction, sous les ordres d'un sergent ou d'un caporal. Les soldats

13 vêtus de noir avançaient également. Ils ont nettoyé les maisons, ils se

14 sont regroupés autour de cet endroit.

15 M. McCloskey (interprétation). - C'est là que se trouve

16 l'inscription "Base des Nations Unies" sur la photo.

17 Témoin F (interprétation). - C'est là qu'ils se sont organisés.

18 Les militaires en uniforme de camouflage avançaient de cette direction-là

19 vers le bas.

20 M. McCloskey (interprétation). - Depuis la colline, à gauche sur

21 la photo, les militaires en uniforme de camouflage avançaient vers le bas.

22 M. le Président. - Excusez-moi de vous interrompre. Pouvez-vous

23 demander au témoin quelle est la position et la direction d'où il a pris

24 les photos, c'est-à-dire la photo, c'est-à-dire la pièce 63, s'il vous

25 plaît ?

Page 1501

1 M. McCloskey (interprétation). – Oui, merci, monsieur le

2 Président.

3 Pouvez-vous dire à la Chambre d'où a été prise cette photo et

4 comment étiez-vous orienté quand vous avez pris cette photo ?

5 Témoin F (interprétation). - Vers cette direction-là.

6 M. McCloskey (interprétation). - Tout d'abord, dites-nous où

7 vous avez pris cette photo. Vous étiez à l'intérieur de ce cercle qui est

8 indiqué par la lettre F ?

9 Témoin F (interprétation). – Oui, c'est exact. J'étais dans ce

10 bâtiment foncé que vous pouvez voir ici.

11 M. McCloskey (interprétation). - Pouvez-vous, à l'aide du

12 pointeur, nous indiquer la direction dans laquelle vous étiez orienté

13 quand vous avez pris la photo ?

14 (Le témoin s'exécute).

15 Pour le compte rendu d'audience, le témoin a montré droit vers

16 le bas de la photo. C'est en direction de Bratunac. Est-ce exact ?

17 Témoin F (interprétation). – Oui, c'est exact.

18 M. McCloskey (interprétation). - Quand vous avez vu ces soldats

19 entrer dans ces maisons, vous les avez vus emmener des biens, porter des

20 affaires, faire quelque chose qui ne correspond pas à un comportement

21 correct militaire ?

22 Témoin F (interprétation). - Pendant cette première vague, ils

23 ont essentiellement vidé les maisons et ils étaient certainement entraînés

24 pour faire cela. Tout de suite après, certaines personnes sont entrées

25 dans les maisons et ont pris tout ce qu'il y avait de valeur dans ces

Page 1502

1 maisons et elles ont sorti tout ça.

2 M. McCloskey (interprétation). – Pouvez-vous nous décrire ces

3 gens-là ? Comment étaient-ils vêtus ?

4 Témoin F (interprétation). - Ils portaient des uniformes de

5 camouflage, ils étaient moins bien organisés. Ils n'étaient pas placés

6 sous un commandement direct quel qu'il soit. Après la percée de cette

7 première ligne d'infanterie, ils devaient surveiller la zone pour qu'il

8 n'y ait pas de résistance, parce qu'il y aurait pu y avoir une résistance.

9 Ils ont simplement pillé les biens qui appartenaient aux autres.

10 M. McCloskey (interprétation). - Ces deux unités que vous avez

11 décrites portaient des uniformes de l'armée serbe de Bosnie ?

12 Témoin F (interprétation). - C'est exact.

13 M. McCloskey (interprétation). - Etiez-vous en mesure de suivre

14 tout cela depuis l'endroit où vous vous trouviez au deuxième étage ?

15 Témoin F (interprétation). - C'est exact. C'était un point

16 d'observation excellent en direction du nord et de l'est.

17 M. McCloskey (interprétation). - Avez-vous vu d'autres soldats

18 serbes de Bosnie arriver dans la zone pendant que vous vous y trouviez ?

19 Témoin F (interprétation). - Oui. Les unités recevaient des

20 renforts. Il y avait aussi des renforts en équipement ; il y a eu

21 plusieurs unités qui sont venues en renfort de ceux qui avançaient vers

22 Srebrenica. Donc ils apportaient de l'équipement. Il y avait quelques

23 officiers de haut grade parmi eux. La zone où l'on se trouvait était déjà

24 nettoyée, d'autres avaient déjà pu avancer.

25 Donc il y a eu des unités d'hommes que je qualifierais de

Page 1503

1 "Rambo", du type "Rambo", pas disciplinés. Et peut-être quelques hommes de

2 réserve.

3 M. McCloskey (interprétation). - Quelle était leur tenue

4 vestimentaire ?

5 Témoin F (interprétation). - La plupart d'entre eux portaient un

6 uniforme de camouflage mais, en fait, il s'agissait d'un mélange

7 d'uniformes de camouflage et de vêtements civils ; la plupart avaient le

8 pantalon de l'uniforme de camouflage et une chemise civile parce qu'il

9 faisait très chaud ce jour-là. Ils étaient moins en forme sur le plan

10 physique que les autres : ils étaient plus corpulents, certains était

11 légèrement ventripotents et ils étaient un peu plus âgés que les premiers

12 mais ils portaient aussi des AK 47 avec des crosses en bois, des

13 revolvers ; ils avaient souvent un bandana autour de la tête. Les hommes

14 armés de mitraillette avaient la sangle, la lanière de la mitraillette en

15 bandoulière, mais ils étaient moins disciplinés que les premiers.

16 M. McCloskey (interprétation). - Avez-vous vu d'autres unités

17 dans le même secteur ?

18 Témoin F (interprétation). - Une fois que les premiers hommes

19 ont dépassé la base et que ces hommes de type "Rambo" se sont trouvés

20 autour de la base, chargés en principe d'en assurer la sécurité, de

21 nouveaux véhicules sont arrivés : des véhicules militaires, des véhicules

22 civils, y compris des véhicules de la police. J'en ai vu certains sur

23 lesquels figurait le mot "Police", l'inscription "Police". Et j'ai vu très

24 clairement un char de couleur bleue qui se trouvait entre ces autres

25 véhicules de couleur verte. C'était la police militaire qui était

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1 représentée à cet endroit. Et il y avait aussi des gens en civil, peut-

2 être des journalistes, etc.

3 M. McCloskey (interprétation). - Mais ce véhicule bleu que vous

4 avez vu, était-ce un char ou un blindé transport de troupes ?

5 Témoin F (interprétation). - Ce n'était pas un char ; c'était un

6 véhicule qui n'avait pas de chenilles mais des roues normales : c'était un

7 blindé destiné à transporter des hommes. En général, quinze hommes peuvent

8 entrer dans un tel véhicule qui, en général également, est équipé d'une

9 mitrailleuse.

10 M. McCloskey (interprétation). - Avez-vous vu d'autres véhicules

11 de couleur bleue aux environs de Potocari, ce jour-là ?

12 Témoin F (interprétation). - Non. Seulement des voitures de

13 police dont la plupart était des Golf, des Volkswagen Golf de type 1.

14 M. McCloskey (interprétation). - Avez-vous vu des soldats

15 portant un uniforme militaire bleu ?

16 Témoin F (interprétation). - Oui, ils portaient des uniformes

17 militaires bleus avec un gilet pare-balles et ils étaient équipés d'un

18 revolver et d'un AK 47. La plupart avaient une arme d'origine allemande

19 également.

20 M. McCloskey (interprétation). - Quand avez-vous vu ces hommes

21 en bleu ?

22 Témoin F (interprétation). - Plus tard dans la journée, après le

23 passage de la première vague, une fois que la base était déjà encerclée et

24 qu'une foule importante était regroupée devant la base.

25 M. McCloskey (interprétation). - Ces hommes en bleu étaient-ils

Page 1505

1 des soldats de l'armée serbe de Bosnie ?

2 Témoin F (interprétation). - Il s'agissait de policiers serbes,

3 sans aucun doute, de policiers militaires. Mais oui, pour répondre à votre

4 question, je dirai oui : ils dépendaient du gouvernement.

5 M. McCloskey (interprétation). - Avez-vous vu comment ces

6 policiers militaires serbes ont agi au cours de la journée ? Pourriez-vous

7 dire quel a été leur rôle dans les événements survenus ce jour-là ?

8 Témoin F (interprétation). - Pour l'essentiel, ils étaient

9 présents. Certains ont pénétré à l'intérieur de la base pour regarder les

10 réfugiés de plus près. A mon avis, leur tâche consistait principalement à

11 assurer la sécurité des plus haut gradés. Je crois que c'est d'ailleurs la

12 tâche courante de la police militaire : agir dans le cadre de ce que

13 j'appellerai des opérations antiterroristes pour assurer la sécurité des

14 plus haut gradés.

15 M. McCloskey (interprétation). - Est-il exact que vous vous

16 rappelez ces journées de la façon suivante : le jour de la première

17 réunion est le jour de l'arrivée des soldats serbes de Bosnie et le jour

18 de la deuxième est celui où les réfugiés ont été évacués, n'est-ce pas ?

19 Témoin F (interprétation). - C'est exact.

20 M. McCloskey (interprétation). - Peut-être ai-je fait une erreur

21 dans la date, Monsieur le Président, mais nous continuerons à faire

22 référence à ce jour-là comme étant le premier jour. Pendant combien de

23 temps a duré votre service, ce premier jour ?

24 Témoin F (interprétation). - Quelques heures. La veille de cette

25 première journée, nous étions déjà sur les lieux, mais nous n'avions pas

Page 1506

1 suffisamment d'hommes. Donc je ne pourrais le préciser absolument, mais je

2 crois que c'est aux alentours de midi que nous avons cessé de travailler.

3 M. McCloskey (interprétation). - Et ce premier jour, le jour de

4 l'arrivée des soldats, qu'avez-vous fait une fois que vous avez quitté

5 votre poste d'observation ?

6 Témoin F (interprétation). - Une fois que les Serbes ont pénétré

7 dans la base, une fois que la base a été encerclée, nous avons reçu

8 l'ordre de déposer les armes et de nous faire voir par les hommes des

9 unités serbes de façon à démontrer que nous n'avions aucune intention

10 d'utiliser la violence à leur égard. Donc il nous a fallu sortir à

11 découvert et attendre pour voir ce qui allait se passer.

12 M. McCloskey (interprétation). - Qui vous a donné l'ordre de

13 déposer les armes ?

14 Témoin F (interprétation). - L'ordre est venu du commandant

15 Otter, mon commandant à ce moment-là et lui, bien sûr, recevait ses ordres

16 du niveau hiérarchique supérieur. Puis, l'ordre redescendait vers les

17 niveaux inférieurs.

18 M. McCloskey (interprétation). - Après cela, est-ce que vous

19 avez pu aider les réfugiés ?

20 Témoin F (interprétation). - Oui. Nous étions déjà en nombre

21 insuffisant à ce moment-là et le nombre des réfugiés était tellement

22 important que nous avons dû leur apporter de l'aide. Pouvez-vous dire

23 comment vous, personnellement, vous les avez aidés ?

24 Témoin F (interprétation). - Les réfugiés étaient bien sûr déjà

25 arrivés dans la base des Nations Unies ; donc, pendant la nuit, nous nous

Page 1507

1 sommes occupés d'eux, nous avons essayé de les réconforter. Et le jour où

2 les armes ont été déposées, il n'y avait plus de chaîne de commandement

3 direct. Donc chacun a fait ce qu'il pouvait, comme il le pouvait.

4 Autrement dit, nous avons aidé les réfugiés comme nous le pouvions. Moi-

5 même, je les ai aidés -enfin, ce n'est peut-être pas la façon la plus

6 juste de dire les choses. En tout cas, en ma qualité de commandant et

7 comme il n'y avait pas de chaîne de commandement direct dans toute cette

8 opération, j'ai orienté les gens vers les autobus et les camions.

9 M. McCloskey (interprétation). - Est-ce que vous avez aidé des

10 réfugiés quand ils avaient des problèmes avec leurs enfants ?

11 Témoin F (interprétation). - C'est exact. Le nombre des réfugiés

12 arrivant dans la base ne cessait de grandir.

13 Je peux vous montrer, si vous le voulez, d’où ils arrivaient,

14 sur le schéma.

15 (L'huissier place la pièce sur le rétroprojecteur.)

16 Nos hommes avaient ménagé un trou dans la clôture et les

17 réfugiés arrivaient par ici. Moi, j'étais à ce moment-là à cet endroit-là.

18 M. McCloskey (interprétation). - Pour le compte rendu

19 d'audience, vous parlez d'un point qui se situe juste en-dessous du carré

20 blanc qui représente l’usine bleue, elle-même immédiatement au dessus du

21 rectangle jaune qui représente la base des Nations Unies.

22 Témoin F (interprétation). – Dans cette foule, il y avait de

23 très nombreuses femmes et de très nombreux enfants, surtout d'ailleurs des

24 bébés, des bébés dont le visage était congestionné. La situation était

25 vraiment pénible, les vieux avaient été laissés à l'arrière et, de plus en

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1 plus souvent, on voyait pénétrer dans la base des gens qui portaient dans

2 les bras des bébés. J'en ai eu un d'ailleurs moi-même dans les bras dont

3 le visage était totalement congestionné et qui était mort.

4 M. McCloskey (interprétation). - Pouvez-vous nous dire combien

5 personnellement vous avez dû transporter de bébés décédés ?

6 Témoin F (interprétation). – Entre 5 et 15, et peut-être même

7 plus. Mais je dois dire que je n'ai pas compté à ce moment-là.

8 M. McCloskey (interprétation). - Mais vous a-t-on parfois mis

9 dans les bras des bébés vivants ?

10 Témoin F (interprétation). – Oui, certains des bébés qu'on me

11 passait étaient vivants, mais sans aucun doute dénutris. En général,

12 c'était des femmes qui me tendaient leur bébé parce qu'elles ne savaient

13 plus quoi faire avec lui ; elles n'avaient pas la moindre idée de ce que

14 réservait l'avenir.

15 M. McCloskey (interprétation). - Avez-vous pu vous occuper des

16 bébés vivants, leur apporter quelques soins ?

17 Témoin F (interprétation). – Une fois que je recevais le bébé

18 dans les bras, je le remettais à notre personnel médical dont la tâche

19 consistait à s'occuper des réfugiés, des blessés, des enfants et des

20 nourrissons ; parce que moi, je m'occupais surtout des gens qui essayaient

21 de rentrer dans la base. Donc les bébés je les remettais entre les mains

22 du personnel médical.

23 M. McCloskey (interprétation). - Après quelque temps, pendant

24 toute cette période où vous avez aidé les réfugiés à pénétrer dans la

25 base, avez-vous fini par vous rendre à l'endroit où l'on faisait monter

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1 les gens dans les autobus ?

2 Temoin F (interprétation). – Oui,c'est exact.

3 M. McCloskey (interprétation) - Qu'avez-vous vu à cet endroit ?

4 Temoin F (interprétation). - Le chaos régnait dans la base : il

5 y avait plusieurs autobus, des camions, des tracteurs qui circulaient et

6 personne n'était responsable . Il faisait très chaud ce jour-là ; nous

7 manquions d'eau et de nourriture, mais les soldats des Nations Unies

8 avaient des récipients remplis d'eau. Donc j'ai donné des ordres à mes

9 subordonnés pour qu'ils distribuent de l'eau aux réfugiés et les soldats

10 serbes se sont contentés de rester là à regarder ce qui passait, semblant

11 apprécier ce qu'ils voyaient. Certains d'entre eux, d'ailleurs, nous ont

12 volés, nous, les soldats du Bataillon néerlandais : ils nous ont pris

13 notre revolver, notre casque, une montre, un pièce vestimentaire à titre

14 de souvenir.

15 Je rappelle que j'ai déjà dit il y a quelques instants que cette

16 deuxième vague d'hommes qui sont arrivés, était très semblable à un groupe

17 de ce que j'appellerais des "Rambo".

18 M. McCloskey (interprétation) - Etiez-vous présent lorsque les

19 Musulmans sont montés à bord des autobus ?

20 Temoin F (interprétation). - Oui.

21 M. McCloskey (interprétation) - Pouvez-vous décrire de quelle

22 façon cela s'est passé et ce que vous avez vu au cours de ce processus ?

23 Temoin F (interprétation). - Les gens, que l'on faisait monter

24 dans les autobus et dans les camions, provenaient pour l'essentiel de

25 l'extérieur de la base. Ils souhaitaient s'en aller le plus rapidement

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1 possible. Et les hommes âgés de 14/15 ans à 50 ans ont été séparés du

2 reste de la foule, après avoir été contraints de remettre leurs objets

3 personnels. Quant aux femmes, elles ont été transportées en sens inverse

4 vers les autobus. Et dès qu'un autobus était rempli, il partait. Donc deux

5 ou trois autobus ont fini par quitter l'enclave, parfois escortés par un

6 véhicule militaire.

7 M. McCloskey (interprétation) - Une fois que les hommes ont été

8 séparés du reste de la foule, avez-vous pu voir où on les a dirigés ?

9 Temoin F (interprétation). - Certains des autobus faisaient face

10 à la route qui menait à Srebrenica, d'autres à la route menant à Bratunac

11 et c'est dans le même sens qu'ils ont quitté l'enclave.

12 Les hommes ont été séparés du reste de la foule. Je pourrais

13 vous le montrer si vous le voulez, sur le schéma.

14 M. McCloskey (interprétation) - Revenons à la pièce 5.2.

15 Temoin F (interprétation). – C'est ici dans ce secteur que les

16 hommes ont été séparés du reste de la foule.

17 M. McCloskey (interprétation) - Pour le procès verbal

18 d'audience, le témoin a tracé un cercle autour du bâtiment indiqué comme

19 étant la maison blanche.

20 Vous avez parlé du fait que les hommes ont dû déposer leurs

21 objets personnels. Qu'est-il advenu de ces objets personnels ?

22 Temoin F (interprétation). - Ces hommes étaient fouillés très

23 rapidement et tous leurs objets personnels leur étaient retirés. Les

24 hommes les plus âgés devaient monter à bord des autobus ; donc,

25 immédiatement, on a pu voir une différence entre les hommes plus jeunes,

Page 1511

1 âgés de 15 à 50 ans à peu près, et les hommes plus âgés. Les plus jeunes

2 étaient mis à part, certains d'entre eux étaient interrogés. Tous leurs

3 objets personnels étaient entassés et, par la suite, ils étaient emmenés.

4 D'ailleurs, ils pouvaient être emmenés dans les deux directions.

5 M. McCloskey (interprétation) - Avez-vous vu où l'on a emmené

6 ces hommes à des fins d'interrogatoire ?

7 Temoin F (interprétation). - La plupart, sinon tous ces hommes,

8 je vais vous le montrer, ici, sur le graphique, ont été emmenés jusqu'à la

9 maison blanche, de l'autre côté de la base. C'était un lieu très

10 reconnaissable, car il était entouré de nombreux soldats.

11 M. McCloskey (interprétation). - Et où étaient accumulés les

12 objets personnels ?

13 Témoin F (interprétation). - Leurs objets personnels ont été

14 entassés près de l'entrée de cette petite maison ; je vais vous le montrer

15 également sur le graphique. Vous voyez, ici, un autobus ou plutôt un petit

16 chemin en blanc ; c'est le chemin qui menait à l'entrée principale de la

17 maison blanche. C'est là que les objets personnels de ces hommes ont été

18 entassés. A la fin, il y en avait un tas tellement important que l'on

19 pouvait y trouver tout ce que l'on voulait : des sacs à dos, des sacs, des

20 chaussures, des passeports, des couteaux, des rasoirs, un peu tout ce que

21 l'on voulait.

22 M. McCloskey (interprétation). - Pour le compte rendu

23 d'audience, j'indique que le témoin a montré un petit trait blanc qui se

24 trouve à côté de l'indication "Maison blanche", enfin, du secteur

25 répondant à l'indication "Maison blanche". C'est donc un endroit qui se

Page 1512

1 trouve devant la maison blanche.

2 Monsieur le Témoin, vous avez dit plus tôt que personne n'était

3 responsable de rien. Voulez-vous dire que, dans le bataillon néerlandais,

4 il n'y avait pas de responsable ? Ou voulez-vous dire qu'il n'y en avait

5 pas du côté serbe ?

6 Témoin F (interprétation). – Nous, nous étions en nombre

7 insuffisant. Nous n'avions pas d'officiers de haut rang ou de sous-

8 officiers en nombre suffisant et nous étions très tendus. Nous avions

9 énormément de choses à faire et nous ne nous sommes pas tellement

10 préoccupés du commandement ; tout le monde a fait ce qu'il a pu. Et du

11 côté serbe, les choses étaient sans aucun doute très bien organisées.

12 M. McCloskey (interprétation). - Qu'est-ce qui vous permet de

13 dire cela ?

14 Témoin F (interprétation). - Il ne fait aucun doute qu'il

15 s'agissait d'une étape très organisée et bien préparée. Chacun connaissait

16 la tâche qui lui était assignée, chacun connaissait sa position. Il y

17 avait des hommes qui devaient garder la population, d'autres qui devaient

18 garder les environs ; des unités étaient chargées de nettoyer les maisons,

19 d'autres procédaient aux interrogatoires.

20 Les hommes n'étaient pas tous jeunes. La plupart d'entre eux

21 portaient un revolver et l'unité qui a accompli cette tâche était très

22 bien organisée. Je dirais qu'il s'agissait peut-être d'une unité

23 différente des autres.

24 M. McCloskey (interprétation). - Pouvez-vous décrire cette unité

25 et pourquoi vous estimez qu'elle était différente des autres ? Pouvez-vous

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1 dire à quoi ressemblaient les hommes qui en faisaient partie et quelle

2 était leur tenue vestimentaire ?

3 Témoin F (interprétation). - Aux alentours de la maison blanche

4 -qui était la maison où avait lieu les interrogatoires-, on voyait surtout

5 des hommes en uniforme militaire de l'armée. C'étaient des hommes qui

6 n'étaient pas tout jeunes, qui portaient des revolvers et qui semblaient

7 avoir une certaine expérience. Il ne fait aucun doute que la hiérarchie

8 existait, qu'elle était bien organisée.

9 C'était donc une chaîne de commandement tout à fait déterminée

10 qui décidait de ce qu'il convenait de faire aux personnes qui arrivaient,

11 aux autobus qui étaient chargés. Et puis, il y avait ces voitures de

12 marque Volkswagen Golf ; je ne parle pas des blindés qui étaient présents

13 également.

14 M. McCloskey (interprétation). – La description que vous venez

15 de nous faire semble indiquer que ces hommes avaient des tâches

16 différentes : certains nettoyaient les maisons, d'autres gardaient la

17 base, d'autres séparaient les hommes des femmes et des enfants, d'autres

18 interrogeaient la population.

19 Comment pourriez-vous décrire la coordination existant entre ces

20 différents groupes, selon ce que vous avez pu voir ?

21 Témoin F (interprétation). - D'un point de vue militaire, je ne

22 saurais entériner ce qui s'est passé, mais je dirais que l'opération était

23 bien menée. Elle était bien organisée, elle a été bien préparée, elle

24 était bien commandée. Chacun connaissait exactement la tâche qui lui

25 incombait. Il ne fait donc aucun doute que cette opération a été

Page 1514

1 planifiée.

2 Et elle a impliqué la participation de plusieurs unités. C'était

3 une opération à grande échelle. En effet, ils ne savaient pas à quelle

4 résistance ils risquaient d'être opposés, mais ils avaient prévu de

5 l'anéantir le plus rapidement possible.

6 Les transmissions étaient d'un bon niveau -je parle des

7 communications entre ces hommes. Ils avaient donc un équipement permettant

8 la communication entre eux qui était de très bonne qualité. Comme chacun

9 le sait, l'armée yougoslave était très bien équipée en matériel de

10 transmission.

11 L'opération était, je vous le répète, très bien organisée. La

12 chaîne de commandement était tout à fait satisfaisante et on ne cessait de

13 voir arriver de nouveaux équipements, de nouveaux hommes, de nouvelles

14 unités. Les roulements étaient très bien huilés.

15 M. McCloskey (interprétation). - Voyez-vous une personne dans ce

16 prétoire, aujourd'hui; qui était à l'époque des faits à l'endroit dont

17 vous parlez ?

18 Témoin F (interprétation). – Oui.

19 M. McCloskey (interprétation). - Pouvez-vous nous montrer cette

20 personne et nous dire de quelle façon elle est habillée ?

21 Témoin F (interprétation). - Il est assis là-bas derrière cet

22 homme. Il a les cheveux gris, il a une raie à gauche et il porte une veste

23 noire et une chemise blanche.

24 M. McCloskey (interprétation). - Je demande qu'il soit inscrit

25 au compte rendu d'audience que le témoin a identifié le général Krstic.

Page 1515

1 Monsieur le Président, je pense que, comme vous l'avez indiqué,

2 le moment est venu pour une pause.

3 M. le Président. – Oui, je crois que nous avons une heure cinq

4 de travail. Comme nous allons terminer à deux heures trente, il est

5 convenable de diviser un peu le temps. Je vois qu'il y a un interprète

6 anglais qui travaille tout le temps. Nous allons donc faire une pause de

7 15 minutes.

8 L'audience, suspendue à 13 heures 27, est reprise à 13 heures

9 43.

10 (Le témoin est déjà introduit dans le prétoire avec son

11 interprète.)

12 (L'accusé est introduit à l'instant dans le prétoire.)

13 M. le Président (interprétation). - Vous pouvez continuer, s'il

14 vous plaît, Maître McCloskey ?

15 M. McCloskey (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

16 Monsieur le Témoin F, avant la pause, vous avez identifié le

17 général Krstic comme étant l'homme présent à Potocari, pendant cette

18 période. A quel moment avez-vous vu la première fois le visage du général

19 Krstic, après l'avoir vu à Potocari pendant cette période-là ?

20 Témoin F (interprétation). - Le deuxième jour.

21 M. McCloskey (interprétation). - Ce n'était pas exactement ma

22 question, mais je vais y revenir plus tard. Donc le premier jour étant le

23 jour où les soldats de la VRS se sont présentés pour la première fois à

24 Potocari. De nouveau, quel jour, quand avez-vous vu effectivement le

25 général Krstic ?

Page 1516

1 Témoin F (interprétation). - Le premier jour, le jour de la

2 chute de l'enclave.

3 M. McCloskey (interprétation). - Très bien. Maintenant, vous

4 l'avez vu le jour où les soldats se sont présentés pour la première fois

5 dans l'enclave ?

6 Témoin F (interprétation). - Oui. Qu'est-ce qu'il s'est-il passé

7 le deuxième jour ?

8 Témoin F (interprétation). - Je l'ai vu également une fois

9 devant la base. Il était là avec quelques militaires plus haut gradés, je

10 crois.

11 M. McCloskey (interprétation). - Lorsque vous l'avez vu devant

12 la base avec les autres militaires de plus haut grade, était-ce le premier

13 jour ou le deuxième jour ?

14 Témoin F (interprétation). - Le premier jour.

15 M. McCloskey (interprétation). - L'avez-vous jamais revu la

16 deuxième journée ?

17 Témoin F (interprétation). - Oui.

18 M. McCloskey (interprétation). - Où l'avez-vous vu le deuxième

19 jour ?

20 Témoin F (interprétation). - Autour de la base, non loin de la

21 maison blanche, dans ce secteur-là.

22 M. McCloskey (interprétation). - Que faisait-il lorsque vous

23 l'avez vu ce deuxième jour ?

24 Témoin F (interprétation). - Pour la plupart, absolument rien.

25 Ils ne faisaient pas grand-chose, ils observaient et s'assuraient que tout

Page 1517

1 se déroulait selon le plan. Ils n'ont pas donné d'ordre direct. C'était

2 sous le commandement des officiers et des sous-officiers. Tout était déjà

3 préparé.

4 M. McCloskey (interprétation). - Donc, le premier jour, quand

5 vous dites qu'il était avec les officiers non loin de la base, qu'est-ce

6 que vous avez vu ce premier jour ?

7 Témoin F (interprétation). - Le premier jour, ils ont voulu

8 pénétrer à l'intérieur de la base pour voir combien il y avait d'hommes à

9 l'intérieur de la base à ce moment-là. Je parle de réfugiés qui se

10 cachaient dans notre base. Donc ils étaient en train de se consulter à la

11 base, à l'entrée de la base pour savoir s'ils pouvaient entrer ou non.

12 M. McCloskey (interprétation). - Quand vous dites "Ils", de qui

13 parlez-vous ?

14 Témoin F (interprétation). - Les militaires plus haut gradés,

15 les unités de sécurité également qui devaient assurer la sécurité des

16 officiers.

17 M. McCloskey (interprétation). - Et le général Krstic faisait

18 partie de ce groupe ?

19 Témoin F (interprétation). - Les gens de la sécurité étaient

20 nerveux puisque la base n'était pas encore sous sécurité. Et ils avaient

21 peur ; ils pensaient qu'il y aurait peut-être des hommes armés à

22 l'intérieur. Donc ils n'avaient pas encore assuré la sécurité de la base.

23 M. McCloskey (interprétation). - J'aimerais simplement vous

24 reposer la question, car je n'ai pas entendu la réponse à ma question de

25 savoir si vous aviez vu le général Krstic et ses officiers à l'extérieur,

Page 1518

1 parmi le groupe de personnes, d'officiers qui trouvaient à l'extérieur de

2 la base ?

3 Témoin F (interprétation). - Oui, il était également présent.

4 M. McCloskey (interprétation). - Revenons maintenant à la

5 question que je vous ai posée il y a quelques instants. Après avoir vu le

6 général Krstic, à Potocari, combien de jours, de semaines ou d'années

7 après avez-vous vu, revu son visage par la suite ?

8 Témoin F (interprétation). - Je n'ai plus jamais revu son visage

9 après ces photos.

10 M. McCloskey (interprétation). - On vous a montré des photos,

11 n'est-ce pas ?

12 Témoin F (interprétation). - C'est exact.

13 M. McCloskey (interprétation). - A quel moment on vous a montré

14 des photos du général Krstic ?

15 Témoin F (interprétation). - Après avoir été appelé par le

16 Tribunal, ces photos m'ont été montrées ; on m'a demandé si j'ai déjà vu

17 cet homme auparavant.

18 M. McCloskey (interprétation). - C'était il y a deux ou trois

19 jours, n'est-ce pas ?

20 Témoin F (interprétation). - Oui.

21 M. McCloskey (interprétation). - Je suis la personne qui vous a

22 montré ces photos ?

23 Témoin F (interprétation). - C'est exact.

24 M. McCloskey (interprétation). - Et quand je vous ai montré ces

25 photos, étiez-vous en mesure de reconnaître la personne sur les photos ?

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1 Témoin F (interprétation). - Oui.

2 M. McCloskey (interprétation). - Est-ce la même personne que

3 vous voyez ici présente au Tribunal, à l'intérieur de cette salle ?

4 Témoin F (interprétation). - Oui.

5 M. McCloskey (interprétation). - Y a-t-il un doute, quel qu'il

6 soit, dans votre esprit que cette personne que vous avez vue à Potocari,

7 pendant la période de temps dont on parle, est bien celle qui est assise

8 ici dans cette salle d'audience ?

9 Témoin F (interprétation). - Non, je n'ai aucun doute.

10 M. McCloskey (interprétation). - Pendant le processus de

11 séparation, avez-vous été témoin, avez-vous pu observer que les troupes

12 serbes usaient de la force ou étaient violentes envers les hommes ?

13 Témoin F (interprétation). - Lorsque je me trouvais à

14 l'extérieur de la base et que les gens étaient séparés, les choses se sont

15 déroulées rapidement. Il y avait de vieilles personnes parmi eux, des

16 enfants, des femmes avec des enfants et leurs effets personnels. C'était

17 une journée très chaude, il n'y avait pas d'eau potable. Et si ces gens-là

18 ne s'étaient pas empressés, des fois, ils étaient poussés, battus ; de

19 nombreuses personnes sont tombées par terre et, à cause de cela, ils ont

20 paniqué. L'endroit était tellement congestionné qu'il y avait des gens qui

21 tombaient et même les gens qui montaient à bord des autobus étaient

22 complètement entassés ; ils n'ont pas eu de nourriture ni d'eau potable,

23 les fenêtres ne pouvaient pas s'ouvrir. C'était comme un four. Il faisait

24 tellement chaud qu'on se croyait à l'intérieur d'un four.

25 On les battait, on les injuriait, les gens crachaient dessus.

Page 1520

1 M. McCloskey (interprétation) - Est-ce que vous seriez en

2 mesure de reconnaître d'autres officiers de la VRS, présents à Potocari

3 cette journée-là ?

4 Témoin F (interprétation). - Oui.

5 M. McCloskey (interprétation) - Et qui étaient-ce ?

6 Témoin F (interprétation). - Il s'agit du général Mladic, il

7 était présent.

8 M. McCloskey (interprétation) - Que faisait le général Mladic ?

9 Témoin F (interprétation). - Il se trouvait tout près des

10 réfugiés avec beaucoup de fusils, de gardes de sécurité autour de lui. Il

11 y avait une équipe de télévision, ils ont distribué des bonbons, ils ont

12 fait des actes de gentillesse envers les enfants et les personnes qui s'y

13 trouvaient pour la caméra. Ils ont essayé d'agir amicalement, ils

14 disaient : "Ne vous inquiétez pas, rien de grave ne vous arrivera et on

15 vous emmènera en lieu sûr".

16 M. McCloskey (interprétation) - Et par la suite, que s'est-il

17 passé ?

18 Témoin F (interprétation). – Après que l'équipe de télévision a

19 terminé le tournage, le général s'est retourné, il a souri, il a ri. Les

20 soldats ont repris les cigarettes et les bonbons, ils ont craché sur les

21 enfants et les femmes, et ils ont été emmenés immédiatement.

22 M. McCloskey (interprétation) - A part Krstic et Mladic, avez-

23 vous reconnu d'autres soldats serbes ou des officiers serbes ?

24 M. Riad (interprétation). - Vous dites qu'ils avaient été

25 emmenés directement. Qui avait été emmené directement et où ?

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1 Témoin F (interprétation). – Les réfugiés qui, à ce moment-là,

2 se trouvaient autour de la maison, à qui on avait distribué des bonbons,

3 c'est eux qui avaient été emmenés immédiatement.

4 M. Riad (interprétation). - Où ?

5 Témoin F (interprétation). - Après le tournage, à la fin du

6 tournage.

7 M. Riad (interprétation). - Quand vous dites "ils ont été

8 emmenés", où ? Vers les autobus, vers la maison blanche, à quel endroit

9 ont-ils été emmenés ?

10 Témoin F (interprétation). - Directement à bord des autobus.

11 M. McCloskey (interprétation) - Merci, monsieur le Juge. Est-ce

12 que vous avez reconnu d'autres officiers serbes de Bosnie qui étaient

13 présents à Potocari ?

14 Témoin F (interprétation). - Je ne connais pas leur nom.

15 M. McCloskey (interprétation) - J'aimerais montrer au témoin la

16 pièce à conviction 28-13.1.

17 Reconnaissez-vous la personne qui se trouve sur cette

18 photographie ?

19 Témoin F (interprétation). - Oui, c'est exact, je le reconnais.

20 M. McCloskey (interprétation) - Vous dites lui, le ou la

21 personne ? A quel endroit est-ce que vous l'avez vu ?

22 Témoin F (interprétation). - Je l'ai vu au poste d'observation

23 "Papa", quand les convois ne passaient pas . C'est à moment-là que nous

24 avons négocié avec eux et que je l'ai vu à l'enclave.

25 M. McCloskey (interprétation) - Vous parlez de deux moments

Page 1522

1 distincts : le moment dont on parle traite des convois et les convois qui

2 ne pouvaient pas passer à travers ?

3 Témoin F (interprétation). - C'est exact. L'arrêt de ce convoi

4 s'est produit à peu près au milieu de mon séjour à Srebrenica.

5 M. McCloskey (interprétation) - Donc quelques semaines au moins

6 avant la chute de l'enclave ?

7 Témoin F (interprétation). – C'est exact.

8 M. McCloskey (interprétation) - Et quand est-ce que vous avez

9 revu l'homme que l'on voit sur la pièce à conviction 28/13.1 ?

10 Témoin F (interprétation). - Au voisinage de la base et des

11 réfugiés.

12 M. McCloskey (interprétation) - Quel jour ?

13 Témoin F (interprétation). - Le premier jour.

14 M. McCloskey (interprétation) - Et le deuxième jour, que s'est-

15 il passé ?

16 Témoin F (interprétation). - Il était là aussi.

17 M. McCloskey (interprétation) - Le premier jour, que faisait-il

18 au voisinage des réfugiés ?

19 Témoin F (interprétation). – Pas grand-chose. Cet homme était

20 là, debout ; il ne parlait qu'à des officiers, il ne parlait pas aux

21 subordonnés. C'était un homme calme, qui certainement avait pas mal

22 d'autorité.

23 M. McCloskey (interprétation) - Avez-vous pu reconnaître

24 certains des officiers ou des soldats serbes de Bosnie à qui cet homme a

25 parlé ce jour-là ?

Page 1523

1 Témoin F (interprétation). – Oui.

2 M. McCloskey (interprétation) - De qui s'agit-il ?

3 Témoin F (interprétation). – De l'homme qui est ici dans

4 prétoire.

5 M. McCloskey (interprétation) - La personne que vous avez déjà

6 identifiée dans prétoire il y a quelques instants ?

7 Témoin F (interprétation). - C'est exact.

8 M. McCloskey (interprétation) - Pour le compte rendu

9 d'audience, il s'agit du général Krstic.

10 Pouvez-vous nous dire ce qui s'est passé lorsque vous avez vu

11 l'homme de la photo avec le général Krstic ? Où était-il, que faisait-il ?

12 Témoin F (interprétation). - Ces hommes avaient envie de rire et

13 il me semble, en tout cas pour ce que j'en ai vu, qu'ils trouvaient la

14 situation des plus drôles. Ils étaient présents pour vérifier que tout se

15 passait conformément au plan. Et il leur arrivait de lancer un ordre pour

16 dire aux gens ce qu'il fallait qu'ils fassent ou bien il arrivait aussi

17 que quelqu'un leur rende compte du progrès de la situation. Et lorsque des

18 comptes rendus leur étaient faits, il s'agissait principalement de

19 personnes venant de l'extérieur.

20 M. McCloskey (interprétation) - Avez-vous vu le général Mladic

21 non loin de ces deux hommes ? Je parle du général Krstic et de l'homme de

22 la photographie.

23 Témoin F (interprétation). - Oui.

24 M. McCloskey (interprétation) - Avez-vous vu aussi un

25 commandant, un homme ayant le grade de commandant, que vous auriez déjà vu

Page 1524

1 auparavant dans l'enclave avant la chute de l'enclave ?

2 Témoin F (interprétation). - Je ne comprends pas votre question.

3 M. McCloskey (interprétation) - Le nom de M. Nikolic vous dit-

4 il quelque chose ?

5 Témoin F (interprétation). - Oui.

6 M. McCloskey (interprétation) - Qui est le commandant Nikolic ?

7 Témoin F (interprétation). - C'est un officier de haut rang

8 jouissant d'une grande autorité. A première vue, c'est un homme très

9 sympathique, un bon père de famille apparemment, quelqu'un qu'on pourrait

10 aussi comparer à un homme d'affaires. Mais nombreux étaient les

11 prisonniers qui devenaient très anxieux quand il était dans les parages.

12 M. McCloskey (interprétation) - Comment avez-vous fait la

13 connaissance du commandant Nikolic ?

14 Interprète - Je regrette, mais l'interprète néerlandais anglais

15 dit ne pas avoir compris ce qu'a dit le témoin et prie le témoin de bien

16 vouloir répéter sa réponse.

17 M. McCloskey (interprétation) - Monsieur le Témoin, nous avons

18 un petit problème d'interprétation : donc je vous repose la question. Dans

19 quelles conditions, dans quelles circonstances, avez-vous fait la

20 connaissance du commandant Nikolic ?

21 Témoin F (interprétation). - Quand j'étais au poste

22 d'observation "Papa", en observation, il nous arrivait souvent de nous

23 rendre sur les frontières de l'enclave. Il y avait là une espèce de

24 guérite de garde et on nous consultait souvent à cet endroit-là, au sujet

25 de convois transportant des vivres qui ne recevaient pas l'autorisation de

Page 1525

1 passer, et lui était souvent présent à moment-là.

2 M. McCloskey (interprétation) - Avez-vous vu le commandant

3 Nikolic à Potocari le premier jour, le jour de l'arrivée des soldats

4 serbes ?

5 Témoin F (interprétation). – Oui, il y était.

6 M. McCloskey (interprétation) - Où était-il exactement ?

7 Témoin F (interprétation). - Non loin de la base.

8 M. McCloskey (interprétation) - Savez-vous qui l'accompagnait ?

9 Témoin F (interprétation). - Principalement des officiers de

10 haut rang et puis, il avait aussi ses propres gardes du corps chargés de

11 sa sécurité. En général, il était au volant d'une Volkswagen Golf de

12 couleur bleue.

13 M. McCloskey (interprétation) - Eh bien, si vous le voulez

14 bien, nous allons maintenant parler du deuxième jour. Nous ne parlons plus

15 du premier jour. Où avez-vous passé la nuit du premier au deuxième jour ?

16 Témoin F (interprétation). - Passé la nuit, c'est peut-être trop

17 dire, parce que nous avons passé toute la nuit à travailler. La plupart du

18 temps, j'étais dans la base avec les réfugiés dans ce hangar de grande

19 taille, dans cet entrepôt.

20 M. McCloskey (interprétation). - Vous est-il arrivé de voir des

21 corps sans vie de Musulmans dans la base ?

22 Témoin F (interprétation). - Oui.

23 M. McCloskey (interprétation). - A quel moment ?

24 Témoin F (interprétation). - Le plus souvent en début de soirée,

25 si nous parlons de la base en tant que telle.

Page 1526

1 M. McCloskey (interprétation). - Le premier jour ou le deuxième

2 jour ?

3 Témoin F (interprétation). - Dans la soirée du premier jour.

4 M. McCloskey (interprétation). - Pouvez-vous décrire ce que vous

5 avez vu ?

6 Témoin F (interprétation). - Les gens qui se trouvaient dans la

7 base étaient terrorisés, ils ne savaient pas ce que leur réservait

8 l'avenir. Il y en a qui se sont pendus. D'autres s'étaient provoqués des

9 blessures à eux-mêmes. Il y avait aussi des bébés qui étaient morts et qui

10 gisaient au sol enveloppés dans leurs vêtements. Oui, il y avait des

11 cadavres que l'on pouvait voir.

12 M. McCloskey (interprétation). – Le lendemain matin, qu'avez-

13 vous fait, le matin du deuxième jour ?

14 Témoin F (interprétation). - Ce jour-là, nous avons continué à

15 vaquer à nos occupations, nous avons préparé les autobus et les camions.

16 Nous avons fait des tours de reconnaissance conformément à notre mission.

17 M. McCloskey (interprétation). – Avez-vous effectué une

18 reconnaissance particulière en raison d'un fait particulier ?

19 Témoin F (interprétation). - J'ai, à plusieurs reprises, fait le

20 tour de la base. Je passais le plus clair de mon temps dans le hangar où

21 se trouvaient les réfugiés. J'y étais déjà allé plusieurs fois. Et à un

22 certain moment, j'y ai vu un soldat blessé dans le hangar que j'avais déjà

23 rencontré avant.

24 M. McCloskey (interprétation). - Lui avez-vous parlé ?

25 Témoin F (interprétation). - Je lui ai parlé.

Page 1527

1 M. McCloskey (interprétation). - En quelle langue ?

2 Témoin F (interprétation). - En anglais.

3 M. McCloskey (interprétation). - Que vous a-t-il dit ?

4 Témoin F (interprétation). - Ce soldat avait à peu près le même

5 âge que moi. Nous nous sommes reconnus parce que nous nous étions déjà vus

6 au poste d'observation "Sierra". Il m'a demandé ce qui passait à

7 l'extérieur et ce qui allait lui arriver à lui. Il s'était blessé lui-

8 même. Il avait des blessures au bras, à la jambe, à la tête. Je lui ai

9 demandé ce qui avait provoqué cela. Il m'a dit qu'il s'était battu avec

10 des militaires serbes.

11 Je l'ai interrogé au sujet d'un de ses amis parce qu'avant, il

12 était accompagné d'un ami. Il m'a répondu que son ami s'était fait tuer au

13 cours d'un combat et qu'ensuite, lui-même avait pris la fuite vers la

14 base. Il m'a demandé ce qui allait lui arriver. Je ne pouvais pas lui

15 répondre directement ou plutôt oui, j'aurais pu lui répondre. Mais c'était

16 une chose très difficile que de lui dire que, parce qu'il était un homme,

17 il allait être séparé du reste de la population. Donc je ne lui ai pas dit

18 grand-chose.

19 Et lui m'a dit : "D'ailleurs, tu n'as pas besoin de me le dire.

20 Je sais ce qui va se passer. On va m'emmener et on va me tuer".

21 A ce moment-là, j'ai simplement hoché la tête et j'ai pu voir la

22 terreur dans ses yeux. Je ne pouvais pas faire grand-chose. J'étais là,

23 impuissant, et je ne l'ai pas revu depuis.

24 M. McCloskey (interprétation). - Le deuxième jour, êtes-vous

25 sorti de la base pour patrouiller et qu'avez-vous découvert ?

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1 Témoin F (interprétation). - Le deuxième jour, effectivement,

2 j'ai continué à accomplir les tâches qui étaient les miennes.

3 Effectivement, j'ai marché en périphérie de la base.

4 M. McCloskey (interprétation). - Et à l'extérieur de la base,

5 avez-vous découvert quelque chose de particulier ?

6 Témoin F (interprétation). – A l'extérieur de la base, on voyait

7 de très nombreux objets étalés sur le sol, des objets qui avaient été des

8 objets personnels, de personnes qui les avaient laissés là. J'ai trouvé

9 des passeports et toutes sortes d'autres choses. Il y avait aussi des

10 cadavres.

11 M. McCloskey (interprétation). – Où avez-vous découvert ces

12 cadavres ?

13 Témoin F (interprétation). - Derrière la maison blanche, la

14 maison des interrogatoires.

15 M. McCloskey (interprétation). – Avez-vous découvert des

16 cadavres également sur une crête, quelque part ?

17 Témoin F (interprétation). - Oui.

18 M. McCloskey (interprétation). – A quel endroit exactement ?

19 Témoin F (interprétation). – A 700 mètres de la base à peu près,

20 derrière la maison blanche. Là, il y a un transformateur électrique. Je

21 connaissais très bien cet endroit parce que j'y étais allé plusieurs fois

22 en patrouille.

23 M. McCloskey (interprétation). - Quand vous dites derrière la

24 maison blanche, vous parlez des cadavres que vous avez trouvés

25 immédiatement derrière la maison blanche ? Ou de ceux que vous avez

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1 trouvés sur cette espèce de crête ?

2 Témoin F (interprétation). - Je parle des cadavres que j'ai

3 trouvés plus loin de la maison blanche.

4 M. McCloskey (interprétation). - Donc vous n'avez trouvé qu'un

5 seul groupe de cadavres ?

6 Témoin F (interprétation). – Oui. J'ai vu entre 9 et

7 10 cadavres.

8 M. McCloskey (interprétation). - Avez-vous pu les

9 photographier ?

10 Témoin F (interprétation). - Oui.

11 M. McCloskey (interprétation). – Monsieur le Président,

12 j'aimerais que soit remise au témoin la pièce enregistrée comme pièce du

13 Bureau du Procureur 5/3a.

14 (Le greffe distribue la pièce).

15 (L'huissier place la pièce sur le rétroprojecteur).

16 Je vous demanderai, monsieur le Témoin, de bien vouloir prendre

17 le stylo vert que vous trouverez à côté de vous, et de tracer un cercle

18 autour du point sur cette photographie où vous avez découvert les

19 cadavres.

20 (Le témoin s'exécute).

21 J'aimerais que l'on place ce document sur le rétroprojecteur de

22 façon que chacun puisse le voir.

23 Y a-t-il un cours d'eau ou un ruisseau au voisinage de l'endroit

24 où vous avez trouvé ces cadavres ?

25 Témoin F (interprétation). – Oui, c'est exact.

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1 M. McCloskey (interprétation). - Vous rappelez-vous

2 l'emplacement de ce ruisseau ?

3 Témoin F (interprétation). - Oui.

4 M. McCloskey (interprétation). - Pourriez-vous utiliser le stylo

5 vert pour indiquer, sur cette photographie aérienne, l'endroit où vous

6 vous rappelez que se trouvait ce ruisseau ?

7 (Le témoin s'exécute).

8 M. McCloskey (interprétation). - Pourriez-vous également tracer,

9 à l'aide d'un cercle, l'endroit où se trouvait la Maison blanche sur la

10 photo, dans votre souvenir ?

11 (Le témoin s'exécute).

12 Merci. Pourriez-vous décrire la situation et nous expliquer de

13 quelle façon vous avez découvert ces corps ?

14 Témoin F (interprétation). – Ce jour-là, il y a déjà eu des

15 rumeurs à cet effet, des rumeurs nous indiquant qu'il était possible de

16 trouver des corps dans l'entourage, non loin de là, et que les coups de

17 feu avaient été entendus dans la région. Bien sûr, ce n'étaient que des

18 rumeurs. J'avais un peu de temps et je suis simplement allé patrouiller la

19 région, je ne voulais pas trop m'éloigner parce que j'étais seul, mes

20 collègues étaient tous occupés et tout pouvait arriver. Donc je me disais

21 que, si quelque chose n'allait pas bien, ils remarqueraient que je n'étais

22 pas là.

23 J'ai donc rencontré un collègue qui était plus haut gradé ; nous

24 avons commencé à discuter. Il m'a demandé ce que je faisais là à ce

25 moment-là et je lui ai répondu que j'avais entendu des rumeurs, qu'il y

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1 avait des corps dans la région, et il m'a répondu que, lui aussi, il avait

2 entendu la même rumeur.

3 Donc, après cet entretien, nous nous sommes dirigés ensemble,

4 nous avons pris un chemin qui nous a emmenés vers les lieux que j'ai

5 tracés d'un cercle. C'est à cet endroit-là que nous avons découvert ces

6 corps. Donc la rumeur était vraie.

7 M. McCloskey (interprétation). - Est-ce que vous vous êtes

8 rapprochés des corps lorsque vous avez pris les photos et à quelle

9 distance vous êtes-vous rapprochés des corps ?

10 Témoin F (interprétation). – J'étais sur une colline, ce

11 ruisseau trouvé à 20 mètres de là. C’est à cet endroit-là que les corps se

12 trouvaient. Mon collègue faisait la sentinelle parce qu'il y avait

13 plusieurs soldats serbes non loin de là, les soldats du type Rambo.

14 M. McCloskey (interprétation). - Très bien.

15 Pourrions-nous montrer au témoin la pièce à conviction portant

16 la cote 29 ?

17 (Le greffe distribue les documents.)

18 (L'huissier place la pièce sur le rétroprojecteur.)

19 Cette pièce à conviction n° 59, est-ce que c’est une photo que

20 vous avez prise vous-même ?

21 Témoin F (interprétation). – Oui.

22 M. McCloskey (interprétation). - Elle ne ressort pas très bien

23 sur le rétroprojecteur, mais il y a deux lignes blanches. Est-ce que c’est

24 bien vous qui avez placé ces deux lignes blanches sur la photo ? Un visage

25 apparaît sur cette photo, est-ce que c’est vous qui avez indiqué ce visage

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1 à l'aide de ces deux lignes blanches ?

2 Témoin F (interprétation). – Oui.

3 M. McCloskey (interprétation). - Cela ne ressort pas très bien

4 sur le rétroprojecteur, mais pourriez-vous, du mieux que vous pouvez,

5 indiquer à l'aide du pointeur sur la photographie l'endroit où vous croyez

6 qu'il y a un visage ou une personne, une silhouette ?

7 Témoin F (interprétation). – Voilà sa tête, cette partie foncée

8 représente ses cheveux et ce petit point blanc représente son visage. Cet

9 homme portait un gilet bleu par-dessus une chemise blanche. Voici la veste

10 bleue ou le gilet bleu, et voici le bras de l'homme portant la chemise

11 blanche. Cette partie blanche ici représente le col de sa chemise blanche.

12 Voici le ruisseau. C'était le premier cadavre que nous avons aperçu, qui

13 était couché, qui gisait sur le sol. Les autres se trouvaient non loin de

14 là, un peu plus bas.

15 M. McCloskey (interprétation). - Pour le compte rendu

16 d'audience, le témoin a indiqué le ruisseau qui se trouvait un peu plus

17 bas de la silhouette de la personne et indiqué qu'il y avait d'autres

18 corps qui gisaient sur le sol, un peu plus à gauche de la photo.

19 M. le. Président. - Excusez-moi de vous interrompre. Pouvez-vous

20 demander quelle est la date de la photo ? Je crois que c'est le 12

21 juillet, mais j'aimerais bien savoir la date de la photo.

22 M. McCloskey (interprétation). - Pour préciser la date,

23 j'aimerais vous demander s’il s'agit bien du deuxième jour, n'est-ce pas ?

24 Témoin F (interprétation). – Oui, le deuxième jour. Le premier

25 jour, nous étions beaucoup trop occupés à donner de l'aide aux réfugiés.

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1 Il y avait beaucoup de gens qui étaient non loin de là.

2 M. le. Président. - Excusez-moi d'insister, pouvez-vous dire la

3 date ?

4 M. McCloskey (interprétation). – Connaissez-vous la date à

5 laquelle c'est arrivé, la date à laquelle vous avez vu ce que vous avez

6 vu ?

7 Témoin F (interprétation). – Le 12.

8 M. le. Président. - Merci.

9 M. McCloskey (interprétation). - Etiez-vous en mesure de prendre

10 des photographies d’autres cadavres dans la région, se trouvant près de ce

11 cadavre-ci ?

12 Témoin F (interprétation). – J'ai pris plusieurs photographies

13 de cadavres qui gisaient sur le sol. Ces hommes étaient alignés les uns à

14 côté des autres, comme vous pouvez le voir. Le feuillage était très dense.

15 Et je dois répéter que je me trouvais sur le bord d'une

16 colline ; il y avait beaucoup de soldats autour de moi. J'ai finalement

17 risqué ma propre vie pour prendre ces photographies, mais effectivement

18 j’ai pris plusieurs photographies. Comme vous pouvez le voir, j'ai pris

19 plusieurs photos.

20 M. McCloskey (interprétation). - Les pièces à conviction 60 et

21 61 seront maintenant montrées au témoin.

22 (Le greffe distribue le document.)

23 (L'huissier place la pièce sur le rétroprojecteur.)

24 M. le. Président. – Monsieur McCloskey, excusez-moi, je profite

25 de l'interruption pour dire qu'on peut peut-être finir la séquence des

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1 photos pour aujourd'hui.

2 M. McCloskey (interprétation). – Oui, merci, Monsieur le

3 Président.

4 Avant de venir au Tribunal ce matin, avant de vous présenter,

5 avez-vous eu la possibilité d'étudier ces photographies qui sont

6 démarquées avec ces lignes blanches ?

7 Témoin F (interprétation). – Oui.

8 M. McCloskey (interprétation). – Est-ce que c’est une des photos

9 que vous avez prises vous-même, cette photographie portant la cote 60 ?

10 Témoin F (interprétation). – Oui.

11 M. McCloskey (interprétation). – Cette scène vous permet de

12 rafraîchir votre mémoire en ce qui a trait aux corps que vous avez

13 trouvés ?

14 Témoin F (interprétation). – Oui.

15 M. McCloskey (interprétation). – Il est vraiment impossible de

16 dire, à partir de cette photo, si l’on aperçoit les cadavres sur la photo,

17 mais vous avez essayé de souligner avec ces lignes blanches l'endroit ou

18 l'emplacement où les corps se trouvaient. Est-ce que c’est exact, est-ce

19 que c’est ce que vous avez essayé de faire ?

20 Témoin F (interprétation). – Oui.

21 M. McCloskey (interprétation). – Pourriez-vous nous expliquer

22 votre façon de faire ?

23 Témoin F (interprétation). – Voici l'emplacement de la première

24 victime, voici l'emplacement de la deuxième victime qui était couchée

25 juste ici : cet homme portait des vêtements noirs. Voici l'endroit où il

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1 gisait, où il était couché. Cet endroit représente l'endroit où se

2 trouvait une troisième victime. Il portait des pantalons blancs, voici le

3 visage.

4 Pour vous répéter, voici la direction du ruisseau qui se

5 trouvait un peu plus bas.

6 M. McCloskey (interprétation). – Pour le compte rendu

7 d'audience, le témoin a parlé de la première victime qui se trouvait à

8 l’extrémité gauche, l’autre se trouvait au centre et la troisième se

9 trouvait plus bas à droite, le ruisseau se trouvant en-dessous de ces

10 lignes blanches.

11 Pourriez-vous maintenant examiner la pièce à conviction portant

12 la cote 61 ? Est-ce que c'est la même chose que vous aviez fait avec cette

13 photo n° 61 ? Vous aviez visionné cette photo auparavant et vous aviez

14 marqué l'emplacement ?

15 Témoin F (interprétation). – Oui.

16 M. McCloskey (interprétation). – C’est la photo que vous avez

17 prise cette journée-là également ?

18 Témoin F (interprétation). – Oui.

19 M. McCloskey (interprétation). – Pourriez-vous nous décrire ce

20 que vous pouvez concernant cette photo ?

21 Témoin F (interprétation). – Pour vous donner une idée, voici

22 l'endroit où le ruisseau coule ; juste ici, se trouvait un corps qui

23 faisait face au ruisseau et, un peu plus haut, ici, on trouvait un autre

24 corps : c'était le premier corps de la première photo, l'homme portant un

25 gilet bleu, des manches blanches et qui avait des cheveux foncés.

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1 M. McCloskey (interprétation). - Pour la transcription, le

2 premier corps dont vous avez parlé, c'est le corps qui se trouvait sur la

3 première photo. Et vous avez mentionné que le ruisseau se trouvait en-

4 dessous de ces deux corps que nous apercevons sur cette pièce.

5 Monsieur le Président, ce serait peut-être le moment opportun

6 d'ajourner pour la journée ?

7 M. le. Président. – Oui, monsieur McCloskey.

8 Nous allons ajourner pour aujourd'hui. Et demain, à 9 heures 30,

9 on reprendra. Donc, à demain.

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11 L'audience est levée à 14 heures 35.

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