Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL  Affaire IT-95-16-T

  2   POUR L’EX-YOUGOSLAVIE

  3   LE PROCUREUR

  4   C/

  5   KUPRESKIC

  6     Vendredi 23 juillet 1999

  7   L'audience est ouverte à 9 heures 08.

  8   Mme Lauer. – Bonjour. Affaire IT-95-16-T, le Procureur du

  9   Tribunal contre Zoran Kupreskic, Mirjan Kupreskic, Vlatko Kupreskic, Drago

 10   Josipovic, Dragan Papic et Vladimir Santic.

 11   M. le Président (interprétation). – Merci. Bonjour. Maître

 12   Radovic, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, nous pensons que nous

 13   pourrions reporter ces discussions au sujet de la remise en liberté

 14   provisoirement juste après la pause-café. Nous pensons qu'il est mieux de

 15   permettre à Me Krajina de poursuivre son interrogatoire. Si j'ai bien

 16   compris, il avait l'intention d'en avoir terminé vers 10 heures 30. Nous

 17   allons prendre une pause et aborder ce sujet à partir de ce moment-là.

 18   Maître Krajina, vous avez la parole.

 19   M. Krajina (interprétation). – Bonjour.

 20   (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

 21   M. Krajina (interprétation). – Bonjour, Monsieur Kupreskic.

 22   M. V. Kupreskic (interprétation). - Bonjour. Bonjour, Monsieur

 23   le Président, Madame et Monsieur les Juges. Bonjour à tout le monde.

 24   M. Krajina (interprétation). – Peut-on poursuivre ?

 25   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui.


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  1   M. Krajina (interprétation). – Pourrions-nous nous rappeler les

  2   dépositions de certains témoins qui ont comparu dans ce procès ? Le

  3   Témoin B, qui a déposé ici le 24 août 1998, a dit à votre sujet,

  4   Monsieur Kupreskic, la chose suivante : le 15 avril 1993, il a dit vous

  5   avoir vu devant l'hôtel Vitez où se trouvait à l'époque le quartier

  6   général du HVO. Vous rappelez-vous ce témoignage ?

  7   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, je m'en souviens très

  8   bien.

  9   M. Krajina (interprétation). – Pourriez-vous apporter votre

 10   commentaire : est-ce exact ce qu'a déclaré ce témoin ? Sinon, pour quelle

 11   raison ?

 12   M. V. Kupreskic (interprétation). - La déclaration faite par le

 13   témoin B n'est absolument pas vraie puisque à l'époque, à ce moment-là, le

 14   15 avril 1993, je me trouvais au moins à cent kilomètres de distance de

 15   cet endroit.

 16   Deuxièmement, de la manière dont le Témoin B l'a décrit en

 17   disant qu'il m'a vu depuis sa voiture en conduisant, autrement dit à

 18   travers les vitres, à une certaine vitesse, à une distance d'au moins

 19   30 mètres, et ce, en passant par certains obstacles. Cela remet en

 20   question cette déclaration !

 21   Jamais, je ne suis venu à l'hôtel dans ce quartier général du

 22   HVO ; je n'avais aucune raison d'y aller. Véritablement, je ne suis jamais

 23   entré dans cette partie où se trouvait ce quartier général. Egalement, si

 24   je m'en souviens bien, le témoin B est un officier, un officier des

 25   renseignements ou d'information.


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  1   Alors, si c'est la seule chose qu'il a dite à mon sujet à cette

  2   Chambre, je devrais peut-être m'en réjouir.

  3   M. Krajina (interprétation). – S'il vous plaît, connaissiez-vous

  4   bien ce témoin B ? Le fréquentiez-vous ?

  5   M. V. Kupreskic (interprétation). - (expurgée)

  6   (expurgée), mais nous ne nous sommes pas vus depuis quinze ou vingt ans.

  7   M. Krajina (interprétation). – Pour quelle raison ?

  8   M. V. Kupreskic (interprétation). - Parce qu'il est parti très

  9   tôt faire ses études à Belgrade ; c'est là-bas qu'il a terminé ses études

 10   et, à partir de là, il est parti travailler à Zagreb.

 11   M. Krajina (interprétation). – Quelles écoles ? De quel service

 12   s'agit-il ?

 13   M. V. Kupreskic (interprétation). - Il est diplômé de l'académie

 14   militaire et il a travaillé au sein de l'armée populaire yougoslave en

 15   tant qu'officier. Il rentrait chez lui très rarement, une fois en quelques

 16   années. Donc je peux dire qu'au moins depuis quinze ans, on ne s'était pas

 17   vus, notamment pendant la période où l'on change, où l'on évolue ; on a

 18   changé tous les deux, et physiquement.

 19   D'une part, il n'aurait pas pu me voir et, d'autre part, je ne

 20   m'y trouvais pas.

 21   M. Krajina (interprétation). – Très bien. Le témoin G a déposé

 22   ici le 1er septembre 1998. Il a dit vous avoir vu quelques jours après le

 23   16 avril 1993, en train de faire le tour de quelques maisons désertées

 24   d'Ahmici. Le témoin a dit que vous donniez l'impression de vouloir voler

 25   des objets. Vous vous rappelez cette déposition ?


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  1   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, je me souviens : c'est

  2   le témoin G. C'est un garçon qui n'avait que 13 ans à l'époque. A ce

  3   moment-là, je ne m'y trouvais pas, car il n'était pas possible d'accéder

  4   au village . A ce moment-là, j'étais à Donja Rovna. Mais, si l'on se

  5   rappelle la déposition de ce témoin, on se rappellera également que,

  6   pendant sept ou huit jours, ce garçon s'est retrouvé dans des conditions

  7   très difficiles, sans nourriture, sans eau, dans cette maison où il était

  8   et que, même souvent, pendant plusieurs jours, à plusieurs reprises, il a

  9   perdu conscience. Et aussi, à une distance de 300 mètres, par la fenêtre,

 10   il m'aurait vu de cette maison et ce, de dos. Il m'aurait vu de dos ! Ce

 11   sont vraiment les circonstances qui nous laissent comprendre que ce

 12   n'était pas possible.

 13   Permettez-moi d'ajouter une chose au sujet du témoin G : ce

 14   garçon est venu me voir à la maison en 1987, en 1997. Je n'étais pas au

 15   courant de tout ce qu'il a traversé et il m'a demandé d'acheter son

 16   terrain, une partie de son terrain. Je lui ai dit que je ne le souhaitais

 17   pas, mais je lui ai remis des cadeaux à lui, à sa sœur. Et c'est ainsi que

 18   cette conversation s'est terminée.

 19   Puis, peu de temps après, le témoin est revenu et il m'a demandé

 20   de lui prêter plusieurs milliers de marks en me disant qu'il avait besoin

 21   d'argent pour se rendre à l'étranger. Je ne lui ai pas donné cet argent et

 22   il est probable -et vous l'avez entendu ici- qu'il souhaitait obtenir

 23   l'asile politique. C'est peut-être pour cette raison-là qu'il a fait une

 24   fausse déposition.

 25   M. Krajina (interprétation). – Très bien. La dame, témoin A, qui


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  1   a déposé ici le 2 septembre 1998, a déclaré qu'elle vous a vu le 16 avril

  2   1993, vers 6 heures du matin, dans sa cour, dans la cour devant sa maison

  3   où son père a été tué. Que pouvez-vous dire à ce sujet ?

  4   M. V. Kupreskic (interprétation). – Je peux vous dire que je

  5   n'étais pas à cet endroit-là, j'étais dans l'abri de Jozo Vrebac. Donc,

  6   par rapport à cet endroit, j'étais à une distance de deux kilomètres

  7   environ. Mais je me souviens très bien de la déposition de ce témoin, de

  8   cette petite fille, le témoin H. Je peux vous dire que c'était vraiment de

  9   rage, de colère, de vengeance qu'elle a déposé parce qu'elle a perdu son

 10   père, son seul et unique père, irremplaçable ; elle l'a perdu.

 11   Ce qui m'étonne, c'est que le témoin H ne nous ait pas placés

 12   dans le contexte de ces événements dans la maison, moi et mes cousins.

 13   Mais elle savait probablement qu'elle ne m'avait jamais vu ni armé ni en

 14   uniforme. C'est de cette manière qu'elle voulait se venger. Elle voulait

 15   au moins indiquer que j'étais présent sur place, au moins en passant

 16   brièvement. Et ça, je peux le comprendre dans une certaine mesure. Il est

 17   difficile de se trouver dans une situation comparable.

 18   Dans une situation inverse, par exemple, ma fille qui a le même

 19   âge aurait peut-être pu agir de même si elle avait perdu son père.

 20   M. Krajina (interprétation). – Ce témoin a également déclaré

 21   avoir eu une conversation avec vous après la fin de la guerre. Il paraît

 22   qu'à un moment, vous lui auriez refusé l'accès à Ahmici. Vous vous en

 23   souvenez ? Est-elle exacte, cette déclaration ?

 24   M. V. Kupreskic (interprétation). – Non, ce sont vraiment des

 25   circonstances un peu bizarres que ce soit vraiment à ce moment-là où elle


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  1   vient -un moment qui ne dure que quelques minutes- que, pendant ces

  2   quelques minutes, j'accepte d'avoir une conversation avec ce témoin, cette

  3   fille, cette petite fille en fait. Et d'après la manière dont elle a

  4   décrit, elle était dans une voiture avec trois autres personnes ; elle

  5   était assise sur le siège arrière, elle avait une jambe cassée. Et à une

  6   distance de trente mètres depuis la voiture, elle aurait -dit-elle- eu ce

  7   genre de conversation avec moi, mais c'est totalement impossible. Et que

  8   moi, j'entre dans ce genre de délibération avec une petite fille, vraiment

  9   je n'avais aucun raison de faire cela.

 10   M. Krajina (interprétation). – (expurgé)

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13   bleu passer par la cour, devant la maison de son fils qui a été tué. Que

 14   pouvez-vous dire au sujet de cette déclaration ? Vous rappelez-vous le

 15   fait que ce témoin vous aurait vu depuis la fenêtre de sa maison ?

 16   M. V. Kupreskic (interprétation). – Oui, je me souviens très

 17   (expurgé); ce n'est pas exact. A l'époque, je

 18   me trouvais dans l'abri et il n'aurait pas pu me voir. Qui plus est, je ne

 19   vois pas où il a trouvé ce manteau bleu puisque je n'en n'ai jamais eu.

 20   Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, si vous me

 21   permettez d'utiliser un petit schéma pour analyser les déclarations de ce

 22   témoin.

 23   En fait, il montre deux endroits différents où il affirme

 24   m'avoir vu le matin en question, et il y a des différences dans ses

 25   déclarations, donc entre les déclarations qu'il a faites avant de venir


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  1   comparaître ici et la déposition (expurgé)

  2   (expurgé). Ce serait très bref.

  3   Permettez-moi de préciser ce dessin, ainsi que la légende, pour

  4   que nous puissions tous suivre les explications. Donc, en rouge, c'est

  5   moi. C'est moi, là où (expurgé) m'a vu. Ça, c'est le sud, la route

  6   principale qui mène vers Ahmici-le-Haut ; ça, c'est l'entrepôt, ma maison,

  7   la maison de Sukrija Ahmic, de son fils ; ça, c'est son étable et ici,

  8   nous avons la maison de Sakib Ahmic. Et cette fenêtre marquée Z, c'est la

  9   fenêtre ouest. Donc nous avons l'ouest là et, à l'opposé, l'est. Nord sud.

 10  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12   "Lorsque les attaquants sont partis... -ce sera très bref, réellement- je

 13   suis revenu dans ma chambre à coucher -donc c'est l'endroit qui est

 14   indiqué "Z"-, qui donne au Sud-Ouest, et j'ai vu quatre ou cinq membres du

 15   HVO dans la cour de la maison -c'est ici- la maison de Vlatko Kupreskic.

 16   Les membres du HVO étaient à environ cinquante mètres de distance -donc

 17   c'est cela- cinquante mètres depuis la fenêtre -la fenêtre où je me

 18   tenais-. C'était l'aube, c'était une belle journée. A peu près en même

 19   temps où j'ai vu les membres du HVO, j'ai vu Vlatko sur ma droite -donc

 20   cela confirme qu'il m'aurait vu dans cette partie-là- ; il portait des

 21   vêtements civils et il marchait en direction de sa maison. Quand il a

 22   atteint sa maison, il a continué à marcher, et après avoir dépassé les

 23   membres du HVO, il a tourné derrière la maison du côté sud de la maison.

 24   Donc je ne pouvais plus le voir".

 25   Permettez-moi de vous rappeler (expurgé)


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  1   (expurgé)

  2   suivante : "Il m'a vu ici, dit-il, entre la maison de son fils et ma

  3   maison à moi", donc à un endroit complètement différent, non pas au sud-

  4   ouest, mais au sud-est, et tout cela pour rapprocher cette déclaration de

  5   la déclaration du témoin H.

  6   Il y a d'autres détails. Ici, "je marchais lentement" alors qu'à

  7   l'autre endroit, il dit que "je suis passé en courant". Voilà, je vous en

  8   remercie, c'était tout au (expurgé)

  9   M. Krajina (interprétation). - Je vous en remercie.

 10   Le témoin L, qui a déposé le 17 septembre 1998, a dit que, le

 11   15 avril 1993, vous vous trouviez avec un groupe de soldats devant votre

 12   magasin à Ahmici et que ces soldats étaient dans votre entrepôt et sur le

 13   balcon de votre maison, que c'était le 15 avril. Pouvez-vous apporter un

 14   commentaire et nous dire si cela est exact ou non ?

 15   M. V. Kupreskic (interprétation). - Cela n'est pas exact. Le

 16   15 avril 1993, à ce moment-là, à l'heure indiquée par le témoin, de fait,

 17   j'étais dans un autre Etat, je n'étais pas là-bas. Nous pouvons tous nous

 18   rappeler la déposition du témoin L, qui est mon premier voisin ; et la

 19   seule chose que je peux ajouter, c'est que cet homme n'est pas

 20   psychologiquement stable, équilibré, qu'il a tendance à boire et qu'il

 21   s'était baigné dans la rivière Lasva alors qu'il avait de la fièvre et

 22   que, depuis ce moment-là, il avait abîmé son système neurophysiologique et

 23   qu'il est malade.

 24   Il dit : "Vers 4 heures de l'après-midi, j'ai bu une bière dans

 25   la maison de Vlatko, Ivica et Vlatko étaient assis à table devant la


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  1   maison et Mirko Vidovic était avec eux. Pendant que j'étais assis avec

  2   eux, j'ai vu des membres de l'armée dans la maison de Vlatko".

  3   Mais, voyez-vous, tous les trois, nous étions dans un autre

  4   Etat. Mirko Vidovic était en Allemagne, moi et Ivica, nous étions en

  5   Croatie.

  6   Mais, voyez, dans cette déclaration, il dit que, le 15 avril, il

  7   nous a vu devant ma maison, à table, alors que lui, ce témoin, et l'armée

  8   étaient dans la maison. Imaginez ce cirque qu'eux soient à l'intérieur de

  9   la maison et que nous, on soit dehors en train de boire une bière.

 10   Et d'après la déclaration donnée le 17 septembre par le

 11   témoin L, le 17 septembre 1998, moi-même et tous les trois, en fait, nous

 12   sommes installés ailleurs, installés devant mon magasin où nous trois

 13   sommes assis en train de boire une bière sans lui. Donc ce sont deux

 14   déclarations complètement différentes.

 15   Mais vraiment, je dois dire que, sur le plan psychologique, on

 16   peut dire que cet homme est malade.

 17   M. Krajina (interprétation). - Quant aux témoins M et O, ces

 18   deux témoins ont déposé ici en disant que, dans la nuit du 15 au

 19   16 avril 1993, ils ont vu la lumière dans votre maison, ce qui leur a

 20   semblé inhabituel ; pouvez-vous apporter un commentaire là-dessus, s'il

 21   vous plaît ?

 22   M. V. Kupreskic (interprétation). - En ce qui concerne la

 23   déposition de ces deux témoins, ils disent la vérité. Il est vrai que,

 24   chez moi, la lumière est allumée en permanence sur les balcons, et

 25   notamment au premier étage. Ce fut le cas également avant la guerre,


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  1   pendant la guerre et aujourd'hui également, ceci, pour des raisons tout à

  2   fait simples : c'est que, devant chez moi, sur le garage... sur le

  3   parking, j'ai mes voitures qui sont garées. Par conséquent, pour une

  4   question de sécurité, j'ai de la lumière à l'extérieur ; par conséquent,

  5   sur le premier balcon, il y avait les deux ampoules.

  6   M. Krajina (interprétation). - Entendu. Le témoin T, le

  7   24 septembre 1998, a déposé ; elle a déclaré avoir vu que vous emmenez des

  8   armes, que vous les faites rentrer chez vous ; c'était en automne 1992,

  9   d'après elle. Est-ce que c'est vrai et comment vous pouvez l'expliquer ?

 10   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je n'ai jamais emmené

 11   d'armes. J'ai dit que j'avais acheté une arme en 1995, janvier 1995 la

 12   première fois, après la guerre. Il est vrai que j'avais des articles et

 13   des produits différents qui se trouvaient dans mon garage, dans ma voiture

 14   etc., différents, des marchandises, donc, mais le gabarit n'était pas très

 15   grand. Et il s'agit de marchandises très chères. Et puis, en général, ce

 16   sont les ouvriers qui déchargeaient ma voiture.

 17   M. Krajina (interprétation). – Entendu. Et puis, je vais

 18   également vous rappeler une autre déposition d'un autre témoin : c'est le

 19   témoin Q. Dans sa déposition du 23 septembre 1998, il précise qu'il vous a

 20   reconnu et vu alors que vous étiez parmi les soldats, dans un groupe de

 21   soldats qui tiraient devant votre maison et qui ont tué son épouse, en

 22   avril, le 16 avril 1993, à Ahmici.

 23   Que pouvez-vous dire ? Comment pouvez-vous commenter la

 24   fiabilité de ce témoignage ?

 25   M. V. Kupreskic (interprétation). - Ce n'est pas vrai.


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  1   M. Krajina (interprétation). – Est-ce que vous vous en

  2   souvenez ?

  3   M. V. Kupreskic (interprétation). - Ce n'est absolument pas

  4   vrai. A ce moment-là, je ne me suis pas trouvé à cet endroit-là. J'ai déjà

  5   précisé, j'ai dit où je me trouvais. La première fois où j'ai réussi à me

  6   rendre jusqu'à chez moi, il était 13 heures. C'est là où j'ai bien vu les

  7   soldats, mais dans ma maison, à l'intérieur. Ce n'est que par la suite,

  8   vers 18 heures, que j'ai pu regagner ma maison. Par conséquent, ce n'est

  9   pas vrai : je n'ai pas été avec les soldats, à cette époque-là, à cet

 10   endroit-là.

 11   M. Krajina (interprétation). – Pourriez-vous maintenant nous

 12   donner des explications au sujet de ces dépositions ? Pourquoi ce témoin

 13   aurait-il des raisons de vous charger avec ce témoignage ?

 14   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je me suis posé la question

 15   à plusieurs reprises. Je me suis demandé pourquoi cet homme me charge de

 16   telles accusations, de telles allégations. Pourquoi il l'a fait ? Quelles

 17   sont ses raisons ?

 18   Cependant, je me suis expliqué ceci d'une façon assez logique ;

 19   tout au moins, je le pense. Ce matin-là, le conflit s'est déclenché ; on a

 20   tiré autour de sa maison, sur sa maison. Ce sont les soldats, bien

 21   évidemment, qui l'ont fait. Lui-même, il ne pouvait pas reconnaître qui

 22   que ce soit. Et il a perdu sa femme, sa fille a été blessée. Il voulait

 23   rendre coupable quelqu'un ; mais qui pourrait-il rendre coupable ? Moi, je

 24   suis son premier voisin…

 25   M. Krajina (interprétation). – Pourquoi vous ?


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  1   M. V. Kupreskic (interprétation). - Tout simplement parce qu'il

  2   a vu probablement qu'on tirait de ma maison et devant ma maison. Par

  3   conséquent, il a du se dire : "Ce sont les Croates qui sont coupables,

  4   c'est Vlatko qui est coupable. Qu'il aille devant le Tribunal et qu'il se

  5   justifie devant le Tribunal. Qu'il prouve qu'il n'est pas coupable. Et

  6   s'il n'est pas coupable, qu'il dise qui est coupable."

  7   Vous avez pu vous rendre compte également qu'une bonne partie

  8   des témoins me demande de dire qui l'a fait, qui a commis de tels crimes.

  9   Et, si vous me permettez de faire une comparaison, si je veux être

 10   réaliste : si mon épouse, que Dieu m'en garde, était victime ce matin-là

 11   et si l'on avait tiré de la maison du témoin Q, ou bien autour de cette

 12   maison-là, je me dis que probablement, moi aussi, je l'aurais accusé de

 13   l'avoir fait.

 14   M. Krajina (interprétation). – Merci. Je n'ai plus de déposition

 15   de témoin à vous soumettre.

 16   Monsieur Kupreskic, jusqu'à maintenant, lors de votre

 17   déposition, nous nous sommes référés à l'acte d'accusation, à des preuves

 18   à charge également. Lors de votre déposition, vous avez nié toutes ces

 19   allégations et toutes ces preuves à charge. Vous affirmez que rien n'est

 20   exact de tout ceci ?

 21   M. V. Kupreskic (interprétation). - Rien.

 22   M. Krajina (interprétation). – Est-ce que vous pouvez nous

 23   donner une explication, nous dire comment cet acte d'accusation a été

 24   dressé ? Pourquoi vous, vous étiez accusé alors que vous n'avez pas

 25   participé à quoi que ce soit ? Pouvez-vous nous donner votre commentaire ?


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  1   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je pense que j'ai déjà donné

  2   une bonne partie de la réponse à la question que vous venez de me poser,

  3   mais je peux compléter ce que j'ai dit.

  4   Je considère, par conséquent, que la raison principale, c'est la

  5   maison et l'endroit où elle se trouve. Les soldats qui ont enfoncé la

  6   porte, qui ont pénétré dans la maison, qui ont tiré de la maison et qui

  7   étaient devant la maison où mes voisins innocents ont été tués,

  8   véritablement, ils n'ont pas pu reconnaître qui que ce soit. Même moi, je

  9   ne les ai pas reconnus, parce que je les ai pratiquement regardés face à

 10   face. Et c'est tout à fait naturel : ils m'ont accusé parce que je suis

 11   leur premier voisin.

 12   Donc je pense que la raison principale, c'est ma maison et

 13   l'endroit où elle se trouvait. Je ne pouvais pas, en aucune façon,

 14   influencer ni empêcher ces soldats. Vous avez entendu le témoin de

 15   l'accusation, le colonel Wauters : c'est un militaire. Il a dit qu'il

 16   n'aurait pas pu s'opposer aux intentions et aux objectifs que l'armée

 17   s'était posés. Comment voulez-vous que je fasse ? Par conséquent, la

 18   raison principale, c'est ma maison et que, simplement, je suis leur

 19   premier voisin ; c'est tout.

 20   M. Krajina (interprétation). – Entendu. Eh bien, maintenant,

 21   avec cette distance et le temps, en observant ce qui s'est passé, en

 22   réfléchissant sur ces événements tragiques, Monsieur Kupreskic, pensez-

 23   vous que vous avez commis quelque erreur à cette époque-là ? Est-ce

 24   qu'aujourd'hui, éventuellement, vous auriez pu et vous auriez fait autre

 25   chose à ce moment-là ?


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  1   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je pense que je n'ai

  2   vraiment pas commis d'erreur. Je dois dire que je réfléchis, même

  3   aujourd'hui, et je me pose la question de ce que j'aurais pu faire

  4   différemment de ce que j'ai fait, ces jours avant la guerre et ce jour

  5   très précis.

  6   M. Krajina (interprétation). – Entendu. Et en guise de

  7   conclusion, j'aimerais vous demander si vous vous sentez responsable et

  8   coupable sur quelque fondement, que ce soit moralement parlant, du point

  9   de vue pénal, pour cette période pour laquelle vous avez été incriminé ?

 10   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je ne me sens pas du tout

 11   coupable, ni du point de vue moral et encore moins du côté pénal. Je n'ai

 12   tué personne, je n'ai fait pas de mal à qui que ce soit, je n'ai mis la

 13   flamme à la maison de qui que ce soit, je n'ai porté préjudice à qui que

 14   ce soit. Jusqu'au 16 avril 1993, aucune de mes démarches n'a pu donner

 15   lieu à de tels commentaires. Je n'ai jamais participé à aucune réunion, je

 16   n'ai pas porté d'uniforme, je n'ai jamais hissé le drapeau sur mon

 17   magasin. Je n'ai jamais contribué à provoquer mes voisins musulmans. Je

 18   n'ai jamais influencé les événements qui ont eu lieu le 16 avril 1993.

 19   Qu'est-ce que j'ai pu faire ? Si je savais ce qui allait se

 20   passer, ce que j'aurais pu faire et ce qui aurait été éventuellement

 21   intelligent, c'est tout simplement de me déplacer, de partir dans un autre

 22   Etat, de m'enfuir moi-même, également. C'est de cette manière là que je ne

 23   me serais pas trouvé ici.

 24   M. V. Kupreskic (interprétation). - Merci, Monsieur Vlatko

 25   Kupreskic. Je n'ai plus de questions à vous poser. Monsieur le Président,


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  1   je viens de terminer l'interrogatoire principal. J'ai essayé d'être concis

  2   et de ne pas trop abuser du temps qui m'a été imparti.

  3   M. le Président (interprétation). – Merci beaucoup, Monsieur

  4   Krajina. Très bien, je vous remercie d'avoir été concis et d'aller au vif

  5   du sujet, comme d'habitude. Nous pourrions peut-être aborder la question

  6   de la liberté provisoire si Me Radovic est d'accord ?

  7   M. Radovic (interprétation). – Oui, tout à fait.

  8   M. le Président (interprétation). - Mes collègues m'indiquent

  9   que nous devrions peut-être demander au témoin de reprendre sa place

 10   habituelle. Dès que nous aurons repris avec les questions pour le témoin,

 11   vous reviendrez ici.

 12   (Le témoin reprend sa place habituelle.)

 13   M. Radovic (interprétation). - Monsieur le Président, Madame le

 14   Juge, Monsieur le Juge, au nom de Zoran Kupreskic, au nom de ma collègue,

 15   Me Glumac, pour Mirjan Kupreskic, je voudrais tout simplement proposer de

 16   nous conformer à la règle 65 du Règlement de procédure où l'on parle de la

 17   possibilité de laisser en liberté provisoire les accusés ; selon cet

 18   article 65, la Chambre peut ordonner la mise en liberté dans les

 19   circonstances exceptionnelles.

 20   Quelles sont ces circonstances exceptionnelles ? Le Règlement ne

 21   le régit pas, mais laisse à la Chambre de considérer si les circonstances

 22   signalées par l'accusé rentrent dans la catégorie des circonstances

 23   exceptionnelles.

 24   Au cours de la journée d'hier et à titre d'introduction, j'ai

 25   dit quels étaient mes motifs qui m'ont poussé à avancer cette proposition.


Page 11196

  1   Un des motifs également était la visite de Mme le Procureur de la

  2   République de Croatie, son entretien avec le ministre de la Justice de

  3   Croatie au cours duquel il y avait un sujet qui a été soulevé et que,

  4   concernant un certain nombre d'accusés, il serait possible de leur

  5   permettre de se défendre en liberté. D'après les mass media -tout au moins

  6   ce que l'on a pu entendre en Croatie-, Mme le Procureur n'a pas refusé

  7   cette proposition. Elle a dit tout simplement qu'il fallait examiner cas

  8   par cas, soumettre au Tribunal, à la Chambre, et ensuite constater s'il y

  9   a des circonstances exceptionnelles ou non.

 10   La défense de Zoran et Mirjan Kupreskic considèrent que les

 11   circonstances exceptionnelles existent et qu'il y a les deux aspects de

 12   ces circonstances exceptionnelles. Il ne s'agit pas tout simplement que

 13   l'été arrive et qu'il fait très chaud chez nous alors qu'ici, il y a

 14   beaucoup de vent et que, par conséquent, il y a le procès également qui

 15   est assez long, mais qu'il faut avoir en vue également la situation

 16   complète dans laquelle se trouvent un certain nombre d'accusés et, tout

 17   premièrement, leurs familles et les circonstances dans lesquelles vivent

 18   leur famille.

 19   Concernant les deux Kupreskic –Zoran et Mirjan- un grand

 20   problème est leur mère Lucija, née en 1937, et qui vit toute seule à la

 21   maison -la propriété de feu leur père-, qui est très malade, qui a une

 22   thyroïde, des problèmes de thyroïde et qui s'est fait opérer deux fois.

 23   Elle utilise les médicaments contre la haute tension et la thyroïde. Elle

 24   devrait aller se faire traiter une fois par mois ; elle n'est pas allée

 25   chez le médecin depuis plus d'un an, car les instruments de contrôle


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  1   n'existent pas à Vitez, mais uniquement à Mostar. Et comme elle a un

  2   salaire qui est vraiment minime, ou plutôt des retraites minimes, elle ne

  3   peut se rendre nulle part et elle est heureuse de pouvoir survivre avec le

  4   peu de moyens dont elle dispose.

  5   Mais il est connu également qu'en ce qui concerne la tension et

  6   quand il s'agit également de la thyroïde, la cause, c'est le stress ; elle

  7   est en permanence sous le stress par le fait même d'ailleurs que ses deux

  8   fils se trouvent en prison -elle est la seule mère probablement dans le

  9   monde dans ce cas- qui ont été incriminés pour les crimes de guerre.

 10   Ce qu'a dit Mirjan, hier, lors de sa déposition, les deux fils

 11   ont très peur pour sa santé et pour sa vie, et ils considèrent que, si

 12   jamais ils rentrent temporairement chez eux, sa santé s'améliorerait.

 13   En ce qui concerne Zoran Kupreskic et son épouse Mira Kupreskic,

 14   qui est née en 1963, un mois après le départ de l'accusé à la Haye, les

 15   médecins ont constaté également des troubles au niveau de la thyroïde.

 16   Deux à trois mois plus tard, elle présente une tumeur des ovaires et de

 17   l'utérus. L'opération n'a pas pu être effectuée étant donné qu'il a été

 18   indispensable d'abord de traiter la thyroïde.

 19   C'est en septembre 98 que l'opération a été pratiquée et que

 20   l'on a fait une hystérectomie. Donc, après cette opération, elle s'est

 21   fait contrôler une fois par mois ; ces derniers temps, tous les deux mois.

 22   Pendant ce temps-là, ses trois enfants restent plus ou moins seuls chez

 23   eux, sans contrôle, sans être surveillés par les parents.

 24   Zoran Kupreskic a également des problèmes avec ses propres

 25   enfants. Il a trois enfants : Mladen, qui est né en 1985, Anto qui est né


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  1   en 1992 et Davor qui est né en 1989. Mladen et Anto présentent une

  2   bronchite qui dure depuis trois ans. Ils ont des frais permanents pour les

  3   médicaments. Et on a recommandé qu'au moins une fois par an, ils changent

  4   de climat, qu'ils se rendent au bord de la mer. Son épouse ne peut pas

  5   bien évidemment se le permettre, non seulement pour des raisons

  6   financières, mais également vu que, sur le plan de la santé, pour

  7   l'épouse, c'est contre-indiqué. Ce qui est donc recommandé pour les

  8   enfants ne l'est pas pour l'épouse.

  9   Mladen a été très attaché à son père sur le plan émotionnel. Il

 10   est dans la période de l'adolescence ; le contrôle de la mère ne suffit

 11   pas pour que, véritablement, on puisse l'empêcher de commettre un certain

 12   nombre d'activités qui ne sont pas toujours bonnes, d'autant plus que

 13   Vitez n'est plus un endroit pour les personnes qui ne sont pas tout à fait

 14   équilibrées.

 15   C'est la raison pour laquelle il y a toujours ce risque que le

 16   fils soit en contact avec la drogue où, bien évidemment, il est

 17   indispensable que le père soit présent et puisse surveiller son fils.

 18   En ce qui concerne Mirjan Kupreskic -ceci est vrai également

 19   pour Zoran Kupreskic- l'épouse de Mirjan, sa femme, ne travaille pas. Il a

 20   deux enfants : Marko qui est né en 1991, qui présente des problèmes

 21   psychiques ; il se fait traiter par un psychiatre et par un psychologue.

 22   Il présente des troubles tels qu'il est véritablement le seul enfant dans

 23   la région de Vitez qui n'a même pas pu terminer sa première classe, enfin

 24   le CE1 disons. Maintenant, il doit se présenter probablement dans une

 25   autre école, et si le père n'est pas présent à ce moment-là, ça posera


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  1   encore davantage de problèmes. Il y a la fille, Marija, qui est née en

  2   1988, présente également des problèmes psychiques, elle bégaie. Elle

  3   présente ces troubles, et c'est la raison pour laquelle elle devrait

  4   également être traitée par les médecins en Bosnie-Herzégovine, et en

  5   Croatie également, pour pouvoir véritablement traiter le bégaiement et ses

  6   problèmes psychiques peuvent être résolus dans le cadre de la faculté de

  7   Zagreb qui s'appelle Suag.

  8   Les deux enfants ont été traumatisés par la guerre et, après la

  9   guerre, vivent très mal l'absence du père. Les deux enfants ont des

 10   problèmes également de visibilité, ils ont une myopie assez importante. Et

 11   en ce qui concerne maintenant les conditions, ici, il est vrai que la

 12   procédure est quelque peu trop longue malgré, bien évidemment, la bonne

 13   volonté d'accélérer le procès. Ils se sont rendus sans que quiconque ne

 14   les arrête ; ils ont montré un comportement exemplaire dans l'unité de

 15   prévention, en prison, ce qui peut être vérifié également par la direction

 16   et l'administration de la prison.

 17   Par ailleurs, je pense que nous pourrions considérer qu'ils

 18   rentrent dans cette catégorie de circonstances exceptionnelles et de cette

 19   possibilité de mise en liberté provisoire.

 20   Par ailleurs, les accusés -comme j'ai dit- se sont rendus

 21   volontairement et de bon gré à La Haye ; ils ont essayé de se mette en

 22   contact avec les autorités de persécution et au sein du Tribunal, ici, à

 23   La Haye. Ils ont écrit plusieurs lettres, y compris au Président du

 24   Tribunal qui, à l'époque, était M. le Président de la Chambre actuelle. Si

 25   vous approuvez qu'ils retournent à Vitez, ils sont disposés à respecter


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  1   toutes les contraintes, toutes les conditions que vous auriez demandé, ce

  2   qui est prévu par l'article 65 C.

  3   En d'autres termes, il y a la Sfor et la police fédérale qui se

  4   trouvent à Vitez ; il n'y aurait aucun problème qu'on leur demande de se

  5   rendre à la police ou à la Sfor tous les jours, ou je ne sais pas ce

  6   qu'éventuellement vous auriez décidé.

  7   En ce qui concerne le danger pour les victimes et les membres

  8   des familles, avant que les accusés viennent à La Haye, ils sont restés

  9   longtemps chez eux. Après la guerre, ils ont montré depuis la guerre

 10   jusqu'à l'arrivée à La Haye qu'ils n'ont jamais menacé qui que ce soit, et

 11   que, pendant le procès, il n'y avait eu aucune preuve qui aurait démontré

 12   qu'éventuellement ils aient eu un comportement dangereux après la guerre.

 13   Il n'y avait pas de telles menaces non plus de leur part, une fois que

 14   l'acte d'accusation a été dressé.

 15   Monsieur le Président, Madame le Juge, Monsieur le Juge, nous

 16   nous remettons dans vos mains, et c'est à vous de prendre la décision,

 17   éventuellement pour la mise en liberté provisoire, ce que nous demandons.

 18   C'est tout ce que j'aurais à dire.

 19   J'aimerais tout simplement rajouter un petit mot : si vous ne

 20   croyez pas qu'il y ait ces maladies dont je viens de parler, à ce moment-

 21   là, nous sommes prêts, bien évidemment, au cours de la journée, au plus

 22   tard lundi, à vous remettre toute la documentation médicale sur les

 23   maladies que j'ai évoquées tout à l'heure.

 24   M. le Président (interprétation). – Je vous remercie, Maître

 25   Radovic.


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  1   Monsieur Terrier, vous avez la parole.

  2   M. Terrier. – Merci, Monsieur le Président.

  3   Tout d'abord, je voudrais exprimer ma satisfaction que

  4   Me Radovic ait déclaré que Mme le Procureur, lorsqu'elle a rencontré le

  5   ministre de la Justice de Croatie, à Zagreb, a purement et simplement

  6   renvoyé ses interlocuteurs au Règlement de procédure, à l'article 65, à la

  7   notion de circonstances exceptionnelles, ainsi qu'à l'autorité du Tribunal

  8   en charge de chacune des affaires et qui procède à l'examen des requêtes…

  9   Interprète. – Maître Terrier, pourriez-vous parler un peu plus

 10   lentement pour les interprètes, s'il vous plaît ?

 11   M. Terrier. – Je vais m'y efforcer.

 12   Je disais simplement que Mme le Procureur a renvoyé ses

 13   interlocuteurs au Règlement de procédure. Elle a renvoyé ses

 14   interlocuteurs à l'article 65 de ce Règlement, à la notion de

 15   circonstances exceptionnelles et à l'autorité du Tribunal.

 16   Je le souligne, car hier, il me semblait que les propos de

 17   Me Radovic étaient moins clairs que ceux qu'il a tenus aujourd'hui.

 18   Je procéderai, Monsieur le Président, si vous me le permettez,

 19   par observations. Il nous est nécessaire de constater qu'en application de

 20   l'article 65, paragraphe B du Règlement de procédure, il y a une certitude

 21   absolue que les accusés libérés comparaîtront. Et je tiens à souligner

 22   que, compte tenu de la gravité des accusations qui sont portées contre

 23   eux, compte tenu de la gravité des peines qui sont susceptibles d'être

 24   prononcées au terme du procès -s'ils sont déclarés coupables-, je pense

 25   que le Tribunal ne peut pas acquérir cette certitude que les accusés


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  1   comparaîtront s'ils sont libérés.

  2   Et j'ajoute qu'il ne me semble pas qu'une quelconque mesure,

  3   mesure de police en particulier, puisse garantir cette comparution des

  4   accusés s'ils étaient libérés et libres de rejoindre leur résidence.

  5   En deuxième lieu, il me semble qu'en application de

  6   l'article 65, paragraphe B, le Tribunal doit constater, avant de prononcer

  7   une décision de remise en liberté, qu'aucun des témoins, qu'aucune des

  8   victimes ne seraient mises en danger par cette libération. A cet égard, je

  9   souligne que nous sommes dans le cours de notre procédure, que toutes les

 10   preuves n'ont pas encore été soumises au Tribunal, que s'ouvrent devant

 11   nous les phases de la réplique, de la duplique ; qu'hier, nous avons remis

 12   au Tribunal une motion indiquant les noms des témoins que nous entendons

 13   appeler dans le cadre de la réplique et que, par conséquent, nul ne

 14   pourrait exclure que des contacts soient noués entre les accusés, s'ils

 15   étaient autorisés à retourner dans leur pays, s'ils étaient libérés, et

 16   ces témoins.

 17   Je rappelle tout de même que l'un des témoins qui figure sur la

 18   liste de l'accusation, en ce qui concerne la réplique, a d'ores et déjà

 19   déclaré dans une déclaration écrite que le Tribunal connaît qu'elle a subi

 20   certaines pressions ; en tout cas, que des demandes lui ont été présentées

 21   qu'elle a dû refuser.

 22   Donc il me ne me semble pas, dans ces circonstances, au stade du

 23   procès où nous sommes aujourd'hui, que le Tribunal puisse avoir la

 24   conviction que les accusés ou les témoins de ce procès ne seront pas mis

 25   en danger par la libération des accusés.


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  1   Et enfin, la notion de circonstances exceptionnelles prévue par

  2   le Règlement de procédure doit être évidemment comprise -me semble-t-il-

  3   comme des circonstances imprévisibles, normalement imprévisibles, et

  4   insurmontables, sauf par la mise en liberté de l'accusé. Or, de la bouche

  5   de Me Radovic, je n'ai entendu à cet égard que l'exposé de difficultés

  6   familiales, de difficultés financières et de difficultés de santé des

  7   membres des familles des accusés.

  8   Nous n'avons pas de justification, mais je ne doute pas de la

  9   réalité de ces difficultés. Et il me semble qu'à chaque incarcération d'un

 10   chef de famille, nécessairement, s'attachent des difficultés de cet ordre-

 11   là : des difficultés familiales, des difficultés financières, des

 12   difficultés de santé pour les plus jeunes de la famille, très souvent.

 13   Cela est désolant. Sans doute y a-t-il des moyens d'y porter remède, mais

 14   on ne peut en aucun cas, me semble-t-il, dire que nous avons là des

 15   circonstances exceptionnelles telles qu'elles sont prévues par

 16   l'article 65, paragraphe B du Règlement de Procédure.

 17   J'admettrais volontiers qu'il manque, aujourd'hui et depuis

 18   plusieurs mois, aux enfant des accusés l'autorité de leur père, très

 19   certainement ; que la vie de ces familles est  profondément bouleversée.

 20   J'espère que tous les secours de leur entourage, de leur famille au sens

 21   le plus large leur sont acquis, mais je ne vois pas là un motif qui puisse

 22   conduire le Tribunal à satisfaire à la requête présentée par les accusés.

 23   Je demande donc au Tribunal, aujourd'hui, de rejeter les deux

 24   requêtes aux fins de mise en liberté qui lui sont soumises. Merci,

 25   Monsieur le Président.


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  1   M. le Président (interprétation). – Merci, Maître Terrier.

  2   Maître Slokovic-Glumac ?

  3   Mme Glumac (interprétation). – Monsieur le Président, permettez-

  4   moi de réagir aux propos de M. le Procureur concernant les raisons

  5   générales pour lesquelles il estime qu'il n'y a pas lieu de satisfaire la

  6   demande de la requête de la défense.

  7   S'agissant de la possibilité d'influer sur les témoins, d'après

  8   la liste qui a été déposée, il n'est fait mention que d'un témoin en fait,

  9   en tout et pour tout, qui pourrait déposer au sujet de certaines

 10   circonstances concernant l'un des accusés. Comme le Procureur cite à

 11   comparaître ce témoin en tant que son témoin, la défense est prête à

 12   s'engager à ne prendre aucun contact avec cette personne.

 13   Il est dit également qu'il n'y a pas vraiment de garantie quant

 14   au retour de ces accusés devant ce Tribunal. Je pense qu'il n'y a pas lieu

 15   d'en douter : nos clients sont déjà venus de leur propre gré se remettre à

 16   la justice. Je pense qu'ils l'ont fait dans l'intention de venir prouver

 17   leur innocence et qu'ils sont prêts à se remettre à la disposition du

 18   Tribunal.

 19   S'agissant des témoins, même de ceux qui ont exprimé des

 20   accusations les plus fortes à l'encontre de nos clients, jamais nous

 21   n'avons eu de témoins qui auraient dit qu'ils se sentaient menacés de la

 22   part de nos clients. (expurgée), lui-même, dont les accusations sont

 23   les plus sévères, les plus sérieuses, graves, même lui, il ne s'en est pas

 24   plaint et je ne vois pas qu'il y ait lieu de penser que nos accusés se

 25   comporteraient autrement à l'égard de ces témoins, à l'avenir.


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  1   M. le Président (interprétation). – Je vous remercie.

  2   (Les Juges se consultent sur le siège.)

  3   Il s'agit d'un sujet très important et très sérieux. Nous ne

  4   pouvons pas prendre une décision immédiatement. Notamment, il s'agit aussi

  5   de prendre contact avec les autorités compétentes de Bosnie-Herzégovine.

  6   Nous avons déjà eu des contacts avec les autorités néerlandaises et je

  7   connais à présent leur position. Mais, comme je l'ai dit, nous devons

  8   avoir quelques garanties de la part des autorités de Bosnie-Herzégovine.

  9   Vu ce que je viens de dire, nous allons prendre la décision au

 10   début de la semaine prochaine, une décision par écrit. Et vous la

 11   connaîtrez à ce moment-là.

 12   Je propose qu'on poursuive avec le contre-interrogatoire de

 13   M. Vlatko Kupreskic. M. Blaxill ?

 14   (Le témoin reprend place.)

 15   M. le Président (interprétation). – Monsieur Blaxill, vous avez

 16   la parole.

 17   M. Blaxill (interprétation). – Je vous remercie, Monsieur le

 18   Président, Madame le Juge, Monsieur le Juge. Bonjour, Monsieur Kupreskic,

 19   vous connaissez la position que j'occupe ici ? J'ai un certain nombre de

 20   questions à vous poser. Au tout début,…

 21   M. V. Kupreskic (interprétation). - Bonjour, Monsieur le

 22   Procureur.

 23   M. Blaxill (interprétation). – Veuillez m'en excusez. Je ne

 24   pense pas que je sortirai du champ de ce qui a déjà été dit par la Chambre

 25   au sujet des citations, des déclarations ou des documents qui ont déjà été


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  1   présentés. Il s'agit donc de documents que possède déjà la Chambre et je

  2   pense que cela ne posera pas problème quand je poserai des questions à

  3   M. Kupreskic. Ainsi donc, vous avez passé toute votre vie à Ahmici jusqu'à

  4   la guerre qui a éclaté en 1993. Est-ce exact ?

  5   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui.

  6   M. Blaxill (interprétation). – Pour autant que vous le sachiez,

  7   est-ce qu'il y a d'autres personnes dans les parages, dans la municipalité

  8   de Vitez, qui portent le même nom que vous, qui s'appellent Vlatko

  9   Kupreskic ?

 10   M. V. Kupreskic (interprétation). - Non, je ne pense pas. Je ne

 11   crois pas que quelqu'un d'autre porte le même nom, le même homonyme, non.

 12   M. Blaxill (interprétation). – Peut-on dire qu'au fil des

 13   années, la famille Kupreskic est devenue une famille de tout premier plan

 14   dans la zone d'Ahmici ?

 15   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je ne sais pas. Je ne vois

 16   pas de raison. Comme toute autre famille, comme des Musulmans, comme des

 17   Croates. Non, je ne vois pas.

 18   M. Blaxill (interprétation). – Diriez-vous peut-être que, vu que

 19   votre cousin Ivica était dans les affaires, vous-même, vous étiez un cadre

 20   dans l'entreprise SPS, puis vos cousins Zoran et Mirjan avaient des

 21   activités, occupaient une place dans la vie culturelle, ne pourrait-on pas

 22   dire que c'était un famille respectée dans cette région ?

 23   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je pense que la famille

 24   avait une réputation et qu'elle était au niveau d'une famille européenne,

 25   mais nous avions nos voisins, également musulmans, qui étaient également


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  1   des familles de réputation.

  2   M. Blaxill (interprétation). – Vous avez déjà déclaré que,

  3   concernant vos voisins et, plus tard, vos clients, vos partenaires dans

  4   vos affaires, vous entreteniez de bonnes relations, des relations très

  5   correctes.

  6   M. V. Kupreskic (interprétation). - Mais c'est tout à fait ça,

  7   oui, oui.

  8   M. Blaxill (interprétation). – Monsieur, vous êtes un homme

  9   cultivé : lorsque vous avez vu la naissance de ces partis nationalistes et

 10   que vous avez vu que la population était appelée à voter selon les lignes

 11   d'une répartition ethnique, est-ce que cela vous a inquiété ? Vous, vous

 12   trouviez que c'était inquiétant ?

 13   M. V. Kupreskic (interprétation). - Moi, oui, ça m'a perturbé en

 14   quelque sorte, car moi-même, jamais, je n'ai voulu rejoindre les rangs

 15   d'un parti nationaliste.

 16   M. Blaxill (interprétation). – Vous avez pu suivre l'évolution

 17   de la situation politique sur place. Vous nous avez dit que vous avez

 18   décidé de quitter la société SPS, en partie pour des raisons de

 19   difficultés économiques et, en partie, -je cite- "parce que j'ai vu des

 20   problèmes avec certaines réglementations et je ne voulais pas me trouver

 21   en position de violer la loi". (Fin de citation.)

 22   Monsieur, qu'entendiez-vous par cette phrase ?

 23   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je pense que j'ai bien

 24   précisé qu'il y avait un certain nombre de dispositions qui ont été prises

 25   ultérieurement et que j'ai pressenti les problèmes. Je n'ai pas dit que


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  1   j'ai su sur place, tout de suite, mais, de toute façon, j'ai pressenti que

  2   cela pourrait créer et causer des problèmes. De toute façon, il est un

  3   fait qu'on ne respectait plus la législation en vigueur de l'ex-

  4   Yougoslavie, mais uniquement la législation de Bosnie-Herzégovine. Moi, je

  5   ne voulais pas tout simplement avoir à exécuter ces règlements. En 1991,

  6   la communauté internationale reconnaissait encore la Yougoslavie.

  7   M. Blaxill (interprétation). – Très brièvement, en termes

  8   généraux, pouvez-vous nous dire à quelles lois pensez-vous ? Celles qui

  9   réglementent la vie des affaires, le monde des affaires ou l'existence des

 10   communautés ethniques ?

 11   M. V. Kupreskic (interprétation). - Non, mais bien évidemment,

 12   je ne parle pas de règlements pourtant sur les groupes ethniques. Je parle

 13   de la réglementation au niveau commercial, donc il faut dire qu'il y a un

 14   certain nombre de règlements qui régissaient les affaires en Bosnie-

 15   Herzégovine et qui n'étaient plus conformes aux règlements, ces mêmes

 16   règlements au niveau de la Yougoslavie.

 17   M. Blaxill (interprétation). – Il semblerait donc que c'est vers

 18   le mois de septembre de 1991, que vous avez accepté la proposition de

 19   votre cousin Ivica, de venir le rejoindre et que avez commencé à

 20   travailler dans le secteur privé, n'est-ce pas ?

 21   M. V. Kupreskic (interprétation). – Oui, je pense que c'était le

 22   mois de novembre 1991, c'était l'entreprise de l'époque Stefani Bosna.

 23   M. Blaskic (interprétation). - Il me semble que vous avez

 24   également déclaré que M. Ivica Kupreskic appréciait votre niveau de

 25   formation et votre expérience dans les affaires commerciales, et votre


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  1   capacité à gérer la documentation commerciale, n'est-ce pas ?

  2   M. V. Kupreskic (interprétation). – C'est vrai, c'était une des

  3   raisons principales pour lesquelles il m'avait demandé de venir travailler

  4   dans sa société, étant donné qu'il n'y avait pas d'autres personnes qui

  5   occupaient le poste avec de telles activités.

  6   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur Kupreskic, sinon pour

  7   autre chose, mais par curiosité, puis-je vous demander ce qui vous a

  8   incité à modifier le nom de la société ?

  9   M. V. Kupreskic (interprétation). – Une des raisons, une autre

 10   raison pour laquelle Ivica m'avait demandé de venir dans cette entreprise

 11   Stefani Bosna, c'est que cette entreprise pratiquement était en faillite.

 12   C'est une société qui a été pratiquement dans une espèce de blocus. Moi,

 13   je suis venu pour débloquer les activités de l'entreprise, et j'y ai

 14   réussi. Vous savez comment, dans le monde des affaires, on réagi et on

 15   opère en occident. Moi, je ne voulais pas travailler dans une entreprise

 16   qui porte un tel nom. C'est une entreprise qui a déjà fait faillite et

 17   c'est moi-même, d'ailleurs, qui avais proposé de changer la désignation de

 18   l'entreprise et de l'enregistrer sous un autre nom, de la rebaptiser.

 19   M. Blaxill (interprétation). - Si je traduis correctement, le

 20   mot "Sutra" veut dire "demain", est-ce exact ?

 21   M. V. Kupreskic (interprétation). – Quelque peu comme ça, je ne

 22   sais pas tout à fait, non, je ne sais pas.

 23   Ce n'est pas Sutra, c'est demain. On avait un surnom "Sutra" et

 24   c'est selon ce surnom que j'ai désigné l'entreprise. Vous savez, quand

 25   vous donnez les noms de l'entreprise, c'est mieux que ce soit un seul


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  1   terme, c'est plus clair.

  2   M. Blaxill (interprétation). - Merci. Donc vous souhaitiez

  3   imposer une image plus positive de cette société. Il me semble que vous

  4   avez dit, ici, et que vous l'avez dit en parlant au représentant du Bureau

  5   du Procureur, que vous avez dit que ce qui vous intéressait en premier

  6   lieu, pendant toute cette période en 1992, à savoir ce n'était pas la

  7   politique ou ce genre de chose, mais ce qui vous intéressait avant tout,

  8   c'étaient les affaires. Peut-on dire qu'il en était ainsi ?

  9   M. V. Kupreskic (interprétation). – C'est tout à fait vrai,

 10   c'était comme ça, avant la guerre, pendant la guerre et tout de suite

 11   après la guerre. Ce n'est que les affaires qui m'intéressaient.

 12   M. Blaxill (interprétation). - Je vous demanderais de confirmer

 13   une impression que j'ai : il semblerait que ces partis nationaux, quel que

 14   soit le bord auquel ils appartenaient, que ces partis ne toléraient pas

 15   les gens qui ne les soutenaient pas, qui n'étaient pas d'accord avec eux,

 16   qui n'appartenaient pas au même groupe ethnique. Peut-on dire que c'est

 17   une évaluation correcte de l'attitude de ces partis politiques ?

 18   M. V. Kupreskic (interprétation). – Je ne sais pas ce qu'ils

 19   pensaient et comment ils concevaient les activités du parti, comme vous

 20   venez de les décrire. De toute façon, je n'ai jamais participé à une

 21   réunion d'un parti, que ce soit le parti qui représente le peuple croate,

 22   le peuple musulman ou le peuple serbe. Je ne sais absolument pas ce qu'il

 23   se sont proposé comme objectif.

 24   M. Blaxill (interprétation). – Monsieur Kupreskic, durant 1992,

 25   vous étiez un homme d'affaires, vous travailliez dans une entreprise


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  1   privée, vous aviez affaire aux autorités municipales, n'est-ce pas ? Vous

  2   aviez affaire aux autorités municipales, n'est-ce pas ? Vous aviez besoin

  3   d'autorisations, de permis, etc., n'est-ce pas ?

  4   M. V. Kupreskic (interprétation). – Non. C'est bien le

  5   contraire. Je n'étais pas du tout en très bonnes relations, justement

  6   parce que je ne faisais pas partie de la vie politique, je ne voulais pas

  7   rejoindre ces activités politiques. Et c'est mon cousin Ivica, au fond,

  8   qui était le principal.

  9   M. Blaxill (interprétation). - Autrement dit, vous-même, vous

 10   n'aviez pas affaire aux autorités municipales, mais votre société si,

 11   n'est-ce pas ?

 12   M. V. Kupreskic (interprétation). – Ma société était en contact

 13   avec l'exécutif parce qu'il y avait également des impôts à payer, comme

 14   partout dans le monde. Et c'est dans ce sens-là, quand il fallait payer

 15   des impôts, quand il fallait procéder à un certain nombre de négociations

 16   et d'entretiens, à ce moment-là, je me rendais à la mairie et j'étais en

 17   contact avec mes collègues économistes.

 18   M. Blaxill (interprétation). - Afin de pouvoir fonctionner, il

 19   était clair, en réalité, que vous aviez besoin de permis afin de pouvoir

 20   vous déplacer, et que vous avez reçu un permis général en tant que

 21   compagnie qui a été sélectionnée pour distribuer les vivres sur le plan de

 22   la municipalité. Est-ce exact ?

 23   M. V. Kupreskic (interprétation). – Oui, en 1992, il y avait

 24   l'exécutif politique, et il y avait des autorités et aucune personne qui

 25   est en âge de combattre ou des personnes qui ont été dispensées de


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  1   l'activité militaire ne pouvaient pas circuler sans autorisation du HVO.

  2   Mais c'est vrai également pour les autorisations de la part des autorités

  3   musulmanes qui, à l'époque, siégeaient dans la maison de Enes Sehic. Et je

  4   me souviens qu'Ivica et moi-même, nous nous sommes rendus chez les uns et

  5   les autres pour demander qu'on nous délivre des autorisations ; on ne

  6   pouvait pas circuler sans.

  7   M. Blaxill (interprétation). - Donc, en effet, il était

  8   important pour vous, n'est-ce pas, que votre société dégage une image

  9   positive face à l'une quelconque de ces autorités, que ce soit le HVO ou

 10   les autorités musulmanes, n'est-ce pas ?

 11   M. V. Kupreskic (interprétation). – En ce qui concerne l'image

 12   et la réputation, vous savez très bien que, dans le monde des affaires, le

 13   plus important est d'être compétitif. Par conséquent, c'était ma tâche

 14   principale au sein de la société, c'était la compétitivité qui comptait,

 15   pas autre chose. Vous ne pensez pas qu'on aurait eu les autorisations si

 16   on n'avait pas véritablement présenté la meilleure offre, et si l'on ne

 17   pouvait pas véritablement répondre à nos promesses. Bien évidemment, on

 18   n'aurait jamais eu d'autorisation. Par conséquent, c'est l'intérêt

 19   économique exclusif.

 20   M. Blaxill (interprétation). - Vous ne pensez pas

 21   qu'éventuellement, l'attitude des gens, comme le HVO, aurait joué un rôle

 22   quelconque dans la sélection, dans le choix des personnes avec qui ils

 23   allaient travailler ?

 24   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je pense que ce n'était pas

 25   le cas, tout simplement parce que notre société a, comme je l'ai dit,


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  1   présenté la meilleure offre. C'est la raison pour laquelle on nous a

  2   sélectionnés.

  3   M. Blaxill (interprétation). - A votre connaissance, y a-t-il eu

  4   d'autres sociétés et entreprises qui auraient été choisies pour exécuter

  5   des tâches comme la vôtre ?

  6   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je ne sais pas, je ne peux

  7   pas dire quelles sont les autres activités d'autres sociétés ; je ne sais

  8   pas.

  9   M. Blaxill (interprétation). - Mais on aurait raison de dire

 10   que, vu comment vous travaillez, dans une zone qui finalement s'est

 11   retrouvée sous le contrôle du HVO, votre compagnie a continué à

 12   fonctionner, à commercer et a survécu à la guerre, n'est-ce pas ?

 13   M. V. Kupreskic (interprétation). - Notre compagnie a travaillé

 14   dans la région contrôlée aussi bien par les autorités croates que par les

 15   autorités musulmanes. Notre marché était orienté notamment par les

 16   territoires contrôlés par les autorités musulmanes ; pour moi, ce n'est

 17   pas contestable.

 18   M. Blaxill (interprétation). - Il ressort de ce vous êtes en

 19   train de dire, Monsieur Kupreskic, que vous avez déployé des efforts

 20   considérables afin de traiter de manière équitable et correcte avec tout

 21   le monde, que vous vouliez vous montrer comme quelqu'un qui n'avait pas

 22   d'appartenance politique ?

 23   M. V. Kupreskic (interprétation). - Ceci est exact, c'est de

 24   cette manière-là que je me suis comporté jusqu'au 16 avril, c'est ainsi

 25   que je me suis comporté également pendant la guerre et je n'ai pas changé


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  1   mon point de vue non plus depuis la guerre.

  2   Et en ce qui concerne la structure des clients à Ahmici, en 94-

  3   95, selon les données statistiques, 90 % de nos clients étaient des

  4   Musulmans et la plupart ou plutôt beaucoup d'entre eux étaient mes

  5   premiers voisins ; là vous avez raison.

  6   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur Kupreskic, vous dites

  7   que, vers la fin du mois de décembre, la fin de 1992, vers le mois de

  8   décembre, vous avez entrepris des travaux pour la police locale, n'est-ce

  9   pas ? Vous deviez préparer un inventaire ?

 10   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, j'ai établi un

 11   inventaire. Il y avait une commission, avec moi, oui. C'était au cours de

 12   la deuxième moitié du mois de décembre 92.

 13   M. Blaxill (interprétation). - Ce département de police pour

 14   lequel vous travailliez, c'était la police de la communauté croate

 15   d'Herceg-Bosna, n'est-ce pas ? Et ce travail que vous avez effectué, vous

 16   l'avez effectué au poste de police de Vitez, n'est-ce pas ?

 17   M. V. Kupreskic (interprétation). - C'était le poste de police

 18   civile, c'étaient les autorités civiles de la ville de Vitez.

 19   M. Blaxill (interprétation). - Il me semble que vous avez parlé

 20   du chef de ce poste de police, Mirko Samija, me semble-t-il ? Samija ?

 21   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, Mirko Samija.

 22   M. Blaxill (interprétation). - Je n'ai pas parlé du premier

 23   conflit qui a éclaté le 20 octobre 1992, mais il me semble que vous avez

 24   dit que vous n'aviez pas pris part à cet événement, et que vous ne saviez

 25   pas grand-chose de cet événement, n'est-ce pas, le 20 octobre, c'est la


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  1   date à laquelle je me réfère ?

  2   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je n'ai pas participé au

  3   premier conflit, ça c'est vrai. Mais ce n'est pas vrai que je n'avais pas

  4   d'informations et que je ne savais pas ce qui s'était passé. Je sais qu'il

  5   y avait ce conflit qui s'est passé au niveau du premier barrage, de ce

  6   barrage qui était en bas et qu'il y avait des personnes qui avaient été

  7   tuées.

  8   M. Blaxill (interprétation). - Mais c'est ce que vous avez

  9   appris ultérieurement, n'est-ce pas ?

 10   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, c'est ça.

 11   M. Blaxill (interprétation). - Merci.

 12   Monsieur le Président, je vais passer à un autre sujet. Il est

 13   presque 10 heures 30. Peut-on faire une pause maintenant ?

 14   M. le Président (interprétation). - Oui, tout à fait, une pause

 15   de 30 minutes.

 16   L'audience, suspendue à 10 h 30, est reprise à 11 h 10.

 17   M. le Président – La parole est à M. Terrier.

 18   M. Terrier. – Monsieur le Président, me permettez-vous

 19   d'interrompre le contre-interrogatoire mené par M. Blaxill et de faire une

 20   très brève déclaration après ce que vous avez dit tout à l'heure, Monsieur

 21   le Président, sur la décision qui doit être prise à propos de la demande

 22   de mise en liberté ?

 23   (Assentiment du Président.)

 24   Le Tribunal a indiqué aux parties présentes dans cette enceinte

 25   qu'il attendait des autorités de Bosnie des assurances. Je voudrais


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  1   simplement exprimer là brièvement la préoccupation du Bureau du Procureur

  2   quant à la possibilité -simplement la possibilité- que les autorités de

  3   Bosnie-Herzégovine puissent donner quelque assurance que ce soit dans le

  4   domaine judiciaire, et en particulier dans cet aspect du domaine

  5   judiciaire qui nous occupe : la situation des personnes.

  6   Compte tenu de notre expérience de la coopération avec les

  7   autorités de Bosnie-Herzégovine, nous pensons que les autorités fédérales

  8   sont hors d'état de donner quelque assurance ou garantie que ce soit, dans

  9   quelque domaine que ce soit, qu'il s'agisse du domaine policier ou du

 10   domaine judiciaire.

 11   Compte tenu de ce que les accusés qui ont fait la demande

 12   soumise au Tribunal sont des Croates de Bosnie, nous ne pensons pas que

 13   les autorités bosniennes soient en mesure de donner quelque garantie que

 14   ce soit ; c'est hélas la triste réalité, encore aujourd'hui sur le

 15   terrain, presque cinq ans après les accords de Dayton

 16   Et quant aux autorités croates de Bosnie, nous devons dire au

 17   Tribunal que nous avons les plus grandes difficultés à obtenir leur

 18   coopération ; que nous avons les plus grandes incertitudes sur la réalité

 19   et la sincérité de leur engagement.

 20   Et à cet égard, je souhaite soumettre au Tribunal, à titre

 21   d'information, une lettre écrite par Mme le Procureur au ministre des

 22   Affaires étrangères de Bosnie-Herzégovine quant au comportement de l'agent

 23   de liaison croate à La Haye avec le Tribunal. Nous avons eu affaire à un

 24   agent de liaison croate qui a calomnié ce Tribunal, qui a considéré que ce

 25   Tribunal agissait de façon partiale en faveur d'une communauté contre une


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  1   autre communauté, qui n'a jamais tenu les engagements que nous lui

  2   demandions de prendre.

  3   Par conséquent, nous ne pensons pas que, dans le cas d'espèce,

  4   dans les circonstances où nous sommes, ces autorités croates, quand bien

  5   même elles prendraient un engagement, soient en mesure, soient

  6   véritablement sincèrement décidés à le tenir.

  7   Je remets donc cette lettre de Mme le Procureur qui est du

  8   27 janvier 99. J'ai préparé, bien entendu, des copies pour les avocats de

  9   la défense.

 10   Voilà, Monsieur le Président, très brièvement, aussi brièvement

 11   que possible pour ne pas interrompre ces débats, la préoccupation que le

 12   Bureau du Procureur souhaitait exprimer. Je vous remercie.

 13   M. le Président – Merci. Madame Slokovic-Glumac, souhaitez-vous

 14   réagir à propos de ce problème des assurances de la part des autorités de

 15   Bosnie-Herzégovine ? C'est un problème très sérieux parce que ce serait la

 16   condition sine qua non pour une éventuelle mise en liberté provisoire.

 17   Mme Glumac (interprétation) – Monsieur le Président. je n'ai

 18   l'intention de ne rien dire d'autre que ce que j'ai déjà, à savoir que les

 19   accusés s'engagent à répondre à toute invitation du Tribunal.

 20   D'ailleurs, lors de leur arrivée à La Haye, ils sont venus de

 21   leur plein gré, ce qui a montré de leur part le souhait que le procès se

 22   déroule dans de bonnes conditions. Vous l'avez entendu lorsqu'ils ont

 23   témoigné.

 24   Et j'ajouterai simplement ceci : que depuis un an environ qu'ils

 25   font l'objet d'un acte d'accusation, ils ont à un certain moment tenté


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  1   d'établir le contact avec le Tribunal et cela les a beaucoup ennuyés de ne

  2   pas trouver de solution pour régler le problème de leur reddition au

  3   Tribunal. D'ailleurs, il est constatable qu'ils ont passé tout le temps en

  4   question sur le territoire de Vitez. Donc, ils ne se cachaient pas à

  5   l'époque.

  6   S'agissant de ces relations avec les autorités, des engagements

  7   dont il a été question, bien entendu, c'est dans ces conditions que nous

  8   pourrions parler de remise en liberté. Sans ces assurances, ce sera chose

  9   impossible.

 10   Mais, dans la mesure où il sera possible d'établir les contacts

 11   nécessaires avec les entités compétentes en Bosnie et éventuellement aussi

 12   avec les ambassadeurs et les représentants officiels à La Haye, il devrait

 13   être possible sans doute d'obtenir de ces personnes des informations

 14   nécessaires et éventuellement quelques garanties. Merci.

 15   M. le Président – Merci, mais il demeure un petit problème, car

 16   nous ne cessons de parler des autorités croates, de l'ambassade croate.

 17   Maître Radovic a mentionné une rencontre entre le Procureur général et le

 18   ministre à Zagreb. Donc, d'une certaine façon, c'est quelque chose qui met

 19   l'accent sur le lien entre la Croatie et les Croates en Bosnie-

 20   Herzégovine, et donc un problème qui peut avoir quelque pertinence

 21   juridique.

 22   Mais je me demande si les autorités croates de Zagreb sont en

 23   mesure de fournir des garanties ou des assurances.

 24   Enfin, quoi qu'il en soit, nous prendrons en considération la

 25   lettre de Mme le Procureur au ministre des Affaires étrangères de Bosnie-


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  1   Herzégovine. Merci, Monsieur Terrier.

  2   Et nous pouvons à présent poursuivre. Puisque nous sommes en

  3   train de débattre d'autres questions que du contre-interrogatoire, je me

  4   demandais si M. Blaxill accepterait que je lui pose à lui et à

  5   Maître Terrier, une question relative au document que nous avons reçu ce

  6   matin. Il s'agit du document du Procureur au sujet des témoins en

  7   réfutation. Il y a un point que j'aimerais éclaircir le plus rapidement

  8   possible.

  9   Au point 4 de cette lettre signée par M. Terrier et M. Blaxill,

 10   il est stipulé que le Procureur prévoit que le temps nécessaire, pour

 11   arriver au terme des arguments finaux, devrait être une semaine environ

 12   avant la fin de la présentation des éléments de preuve. Nous parlons, ici,

 13   de notre calendrier pour l'avenir et du calendrier d'autres procès

 14   également qui sont impliqués.

 15   Cela signifie-t-il que, si nous reprenons nos travaux le 27,

 16   nous aurons sans doute besoin de deux semaines : une semaine pour le

 17   Procureur et une semaine sans doute pour la défense. Je suppose que la

 18   défense aura des témoins supplémentaires à présenter par la suite. Et

 19   après cela, vous aurez besoin de quatre semaines pour préparer vos

 20   arguments finaux, votre réquisitoire. Autrement dit, il y aura encore une

 21   interruption, il y aura quatre semaines d'interruption de ce procès avant

 22   présentation du réquisitoire, parce que nous pensions entendre le

 23   réquisitoire immédiatement après la présentation des derniers témoins de

 24   la défense.

 25   Donc je pense que cela signifie que je me trompais. Vous


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  1   souhaitez avoir cette interruption de quatre semaines, n'est-ce pas ?

  2   M. Terrier. – Monsieur le Président, en effet, nous souhaitons

  3   pouvoir après la présentation de la duplique, donc les derniers témoins de

  4   la défense, avoir quelque temps de réflexion. Si vous pensez que quatre

  5   semaines est un délai trop long, éventuellement nous pourrons bien entendu

  6   le réduire, mais il nous faut une interruption. Je pense que nous devons

  7   avoir une interruption après la duplique et avant les réquisitions

  8   finales. Cela me semble important que les réquisitions finales du

  9   Procureur soient aussi réfléchies que complètes qu'il est possible dans ce

 10   procès difficile.

 11   M. le Président. – Et vous comptez soumettre un texte écrit,

 12   donc ?

 13   M. Terrier. – Comme vous l'avez souhaité, Monsieur le Président.

 14   Nous soumettrons d'abord un résumé, donc aussi clair et rapide que

 15   possible et…

 16   M. le Président. – Avec beaucoup de références ?

 17   M. Terrier. – Avec les références au transcript, la référence

 18   aux pièces à conviction, et nous transmettrons la version complète de ces

 19   réquisitions écrites. Et il y aura, bien entendu, des réquisitions orales

 20   qui seront développées peu après.

 21   M. May (interprétation). – Mais, Monsieur Terrier, vous avez eu

 22   deux mois pour faire ce travail. Nous n'avons entendu que très peu de

 23   témoins ; donc je suis sûr que vous n'avez pas besoin d'encore un mois.

 24   Vous avez jusqu'au 27 septembre pour préparer ce document. Donc un jour ou

 25   deux devraient suffire pour les adjonctions nécessaires, je suppose.


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  1   M. Terrier. – Je concède volontiers au Tribunal que le délai est

  2   peut-être confortable ; c'est pour cela que j'offrais de le réduire.

  3   Mais il me semble qu'une interruption tout de même est

  4   nécessaire de manière à ce que nous puissions compléter les réquisitions

  5   écrites qui, bien entendu, sont déjà en cours de préparation ; cela va de

  6   soi.

  7   M. le Président. – Donc le même délai serait valable aussi pour

  8   la défense, elle aurait le même délai ? Si, par exemple, nous décidons

  9   d'avoir une suspension de trois semaines, deux semaines à trois semaines

 10   -pas quatre, c'est beaucoup trop- deux, trois semaines, la défense en même

 11   temps pourrait préparer leur mémoire écrit. De cette manière, lorsqu'on

 12   reprend le procès, donc, on aurait seulement la partie finale, les

 13   déclarations finales de l'accusation et de la défense ?

 14   M. Terrier. – Il me semble en effet, Monsieur le Président.

 15   M. le Président (interprétation). – Oui, Maître Glumac ?

 16   Mme Glumac (interprétation). – Monsieur le Président, si c'était

 17   possible, nous aimerions que le Procureur mette un point final à ses

 18   réquisitions un peu avant, et qu'il nous les remette au moins un jour

 19   avant la présentation de notre résumé, de nos arguments finaux. Car nous

 20   aimerions pouvoir aborder un certain nombre de thèmes qui apparaîtront

 21   sûrement dans les réquisitions du Procureur. Cela nous aiderait dans la

 22   préparation de notre plaidoirie. Donc nous aimerions que ce document nous

 23   soit soumis, en fait, au moins une semaine avant ce délai qui vient d'être

 24   mentionné.

 25   M. le Président (interprétation). – Je crois que ce serait


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  1   juste.

  2   (Les Juges se concertent sur le siège.)

  3   Je présente mes excuses à M. Vlatko Kupreskic et à Me Blaxill,

  4   mais, si cela ne vous dérange pas, nous aimerions en terminer sur ce

  5   point. Je voudrais proposer un calendrier qui n'est qu'un projet de

  6   calendrier. Nous reprendrions nos travaux le 27 septembre, le Procureur

  7   ayant besoin, si j'ai bien compris sur la base du document présenté par

  8   lui, de quatre jours de travail.

  9   Quatre jours de travail ? Que disiez-vous, Maître Glumac ?

 10   Mme Glumac (interprétation). - Ce que nous avons entendu en BCS,

 11   c'est que nous terminerons le 27 septembre ; nous savions qu'il s'agissait

 12   d'une reprise de nos travaux.

 13   M. le Président (interprétation). – Oui, en effet. Tout à fait.

 14   Nous reprendrons nos travaux le 27 septembre. Après quoi, quatre jours de

 15   travail seront accordés au Procureur, puis nous poursuivrons jusqu'au

 16   7 octobre, date à laquelle cinq jours de travail seront accordés à la

 17   défense pour présentation des témoins en réplique.

 18   Puis trois semaines seront accordées au Procureur pour la

 19   rédaction de leur réquisition finale, et quatre semaines à la défense. Le

 20   Procureur doit donc présenter son mémoire à la date du 29 octobre, alors

 21   que la défense devra le faire à la date du 5 novembre, selon la

 22   proposition de Me Glumac.

 23   Donc, du côté de la défense, vous bénéficierez d'une semaine

 24   supplémentaire, et cette semaine vous permettra de traiter les points

 25   résultant de la lecture du mémoire du Procureur. Après quoi, nous


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  1   reprendrons nos audiences le 8 novembre pour entendre les réquisitions et

  2   plaidoiries. Nous aurons besoin sans doute pour ce faire de trois jours.

  3   Donc reprise le 8 novembre à cette fin.

  4   J'ai bien dit qu'il s'agissait d'un projet de calendrier. Vous

  5   convient-il ?

  6   Monsieur Terrier ?

  7   M. Terrier. - Juste une observation, Monsieur le Président. Il

  8   nous a été indiqué que l'accusé, Dragan Papic, entendait déposer.

  9   M. le Président. - Oui.

 10   M. Terrier. - Donc je pense que ceci interviendra avant la

 11   réplique de l'accusation ?

 12   M. le Président. - Oui, tout à fait, vous avez raison. Donc

 13   c'est tout d'abord Dragan Papic, ensuite vos témoins, puis des témoins

 14   appelés par la défense. Merci.

 15   Maître Slokovic-Glumac, vous êtes d'accord ?

 16   (Signe affirmatif de Mme Glumac.)

 17   Bien. Donc voilà quel est le projet de calendrier. Mais vous

 18   savez que nous devons respecter ce calendrier car M. le Juge May siège

 19   dans un autre procès et les deux calendriers doivent correspondre.

 20   Je présente une nouvelle fois mes excuses à M. Vlatko Kupreskic.

 21   Monsieur Blaxill, vous avez la parole.

 22   M. Blaxill (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

 23   Monsieur Kupreskic, j'aimerais que nous revenions sur ce dont

 24   nous parlions avant la pause et le débat qui vient d'avoir lieu.

 25   Pendant un certain temps, vous avez travaillé au commissariat de


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  1   police de Vitez, à la fin de 1992, début de 1993. Est-ce exact ?

  2   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, mais vous me permettrez

  3   peut-être d'expliquer de quelle façon j'en suis arrivé à accomplir ce

  4   travail temporaire. A savoir qu'au mois de décembre, je me suis trouvé un

  5   jour à une noce où j'ai rencontré, tout à fait par hasard, le chef du

  6   commissariat de police de l'époque, M. Mirko Samija. Monsieur Mirko Samija

  7   s'est approché de moi, nous avons conversé et il m'a dit, ou plutôt il m'a

  8   prié, de venir, et -puisque nous en étions à la fin de l'année de travail-

  9   de faire ce qu'il fallait pour établir l'inventaire du commissariat de

 10   police, parce qu'il n'y avait personne au commissariat qui était capable

 11   de faire ce travail, sur le plan professionnel, c'est-à-dire avec les

 12   connaissances nécessaires.

 13   Lui est un homme qui est diplômé universitaire, je crois même

 14   qu'il est juriste. Il était arrivé peu avant au commissariat de police et

 15   il souhaitait que ce travail soit fait dans les meilleures conditions. Je

 16   lui ai répondu que, dans la réalité des faits, c'était quelque chose qui

 17   était impossible pour moi parce que je travaillais à l'entreprise Sutra.

 18   Nous nous sommes donc entendus sur la possibilité pour moi de venir au

 19   commissariat à temps partiel, c'est-à-dire une heure, deux heures par

 20   jour, lorsque cela m'était possible. C'est seulement dans ces conditions

 21   que j'ai accepté cette proposition. Donc, dans la deuxième quinzaine du

 22   mois de décembre 1992, j'ai commencé à travailler dans ces conditions.

 23   M. Blaxill (interprétation). - Pendant que vous établissiez cet

 24   inventaire au commissariat de police de Vitez, avez-vous rencontré

 25   quelqu'un qui avait un nom semblable ou identique au vôtre ?


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  1   M. V. Kupreskic (interprétation). - J'ai déjà dit qu'à la

  2   municipalité de Vitez, je n'ai rencontré personne qui avait le même prénom

  3   et le même nom de famille que moi.

  4   M. Blaxill (interprétation). - Avez-vous entrepris quelques

  5   autres activités pour la police pendant votre présence au commissariat,

  6   c'est-à-dire fin 92, début 93 ? Où vous a-t-on demandé d'entreprendre

  7   d'autres activités ou d'aider la police d'une autre façon ?

  8   M. V. Kupreskic (interprétation). - Non, parce que, pour ce

  9   genre d'activité, je n'avais pas les compétences nécessaires, la formation

 10   nécessaire. D'autre part, je n'avais pas le temps parce que je travaillais

 11   dans une autre entreprise. Et, troisièmement, je ne me suis jamais engagé

 12   à accomplir quelque autre activité que ce soit.

 13   M. Blaxill (interprétation). - J'aimerais vous soumettre

 14   quelques documents, Monsieur Kupreskic, qui ont été communiqués à la

 15   défense.

 16   Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, nous avons

 17   le nombre d'exemplaires nécessaire à la disposition de la Chambre.

 18   (L'huissier s'exécute.)

 19   Mlle Lauer. - Il s'agit de la pièce 377 du Procureur.

 20   M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que la cote 377 comprend

 21   bien les deux pièces qui portent deux dates, le 28 décembre 92 et le

 22   22 février.

 23   Mlle Lauer. - Excusez-moi, je pensais qu'il n'y avait qu'un seul

 24   document. Donc le premier document sera coté 377, le document en date du

 25   28 décembre 1992, et le document en date du 22 février 1993 sera coté 378.


Page 11226

  1   M. le Président (interprétation). - Monsieur Blaxill, je vous

  2   remercie. Nous n'avons pas reçu le document daté du mois de février.

  3   (L'huissier s'exécute.)

  4   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur Kupreskic, vous avez

  5   reçu ces documents ?

  6   M. V. Kupreskic (interprétation). - Non, je ne les ai pas reçus.

  7   M. Blaxill (interprétation). - Vous les aurez sous peu.

  8   (L'huissier s'exécute.)

  9   Vous avez à présent devant vous, Monsieur Kupreskic, un document

 10   qui émane de l'administration de la police de Travnik, devant la

 11   communauté croate d'Herceg-Bosna, daté du 28 décembre 1992. C'est bien le

 12   document que vous avez devant vous ?

 13   M. V. Kupreskic (interprétation). - J'ai un document qui porte

 14   le titre suivant : "Rapport du 22 février 1993". J'ai en fait deux

 15   exemplaires d'un même rapport, le document intitulé "Rapport".

 16   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur Kupreskic, nous allons

 17   vous apporter un autre document, un instant.

 18   (L'huissier s'exécute.)

 19   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, c'est un document daté

 20   du 28 décembre 1992.

 21   M. Blaxill (interprétation). - Si vous consultez la première

 22   page, vous verrez des noms, en bas de la première page, du moins dans ma

 23   traduction. Le premier nom dans la liste c'est Mirko Samija, c'est bien

 24   l'homme dont vous avez parlé dans votre déposition, n'est-ce pas ?

 25   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, oui.


Page 11227

  1   M. Blaxill (interprétation). - Ce document a toute une série de

  2   noms de personnes qui faisaient partie des effets de cette station de

  3   police, n'est-ce pas ?

  4   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, on voit dans la suite

  5   une liste de noms.

  6   M. Blaxill (interprétation). - Sous le n° 55 en fin de la liste

  7   des noms, pourriez-vous nous dire ce que vous voyez, s'il vous plaît ?

  8   M. V. Krupeskic (interprétation). - C'est mon nom et prénom. Il

  9   est dit "chargé des opérations afin de combattre la criminalité d'intérêt

 10   spécifique pour l'Etat, inspecteur de première classe ".

 11   M. Blaxill (interprétation). – Donc, c'est votre nom ? Vous

 12   n'étiez pas en train de faire uniquement, et ce, pendant une brève période

 13   de temps, un inventaire ? Alors, que pouvez-vous dire au sujet de ce qui

 14   figure ici comme votre fonction, à savoir "chargé des opérations de

 15   combattre la criminalité et d'intérêt spécial pour l'Etat" ?

 16   M. V. Krupeskic (interprétation). - Eh bien, l'explication que

 17   je peux donner est la suivante et elle est vraie. Dans chaque Etat, il y a

 18   un budget et ce budget permet de financer toutes sortes d'activités, dont

 19   la police.

 20   Permettez-moi de faire remarquer dès le départ que je n'avais

 21   jamais reçu un avis de nomination parce que notre accord ne le prévoyait

 22   pas. Moi, je m'étais mis d'accord avec le chef de ce commissariat de

 23   police, et cet accord signifiait que j'allais faire un certain travail

 24   pendant une période assez brève.

 25   Mais afin de pouvoir être rémunéré pour cette tâche, il fallait


Page 11228

  1   bien qu'eux fassent figurer mon poste, mes fonctions quelque part au sein

  2   de la hiérarchie, donc au sein du commissariat de police en question. Il

  3   fallait bien qu'ils puissent allouer leurs ressources d'une certaine

  4   manière.

  5   Donc, c'est pour ça que le chef Mirko Samija a indiqué ce poste

  6   à côté de mon nom. Et vous voyez que je figure en dernier lieu, donc en

  7   regard du n° 55. C'était un poste qui n'était pas affecté ;

  8   vraisemblablement, ce poste n'était pas occupé à l'époque, et donc il m'a

  9   placé à ce poste de manière purement formelle, dans la grille des

 10   fonctions et des postes au sein de ce commissariat de police.

 11   Or, comme je vous le disais, pour autant que je m'en souvienne,

 12   je n'ai jamais reçu un avis de nomination à ce poste, d'affectation à ce

 13   poste. Et je ne me souviens même pas d'avoir reçu à un moment quelconque

 14   une rémunération pour ce travail que j'y ai effectué.

 15   D'autre part, je dois dire que je n'ai jamais fait ce genre de

 16   travaux qui figurent ici, enfin ce que prévoit ce poste ; je ne savais pas

 17   le faire.

 18   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur Kupreskic, à l'époque,

 19   étiez-vous au courant du fait que cet homme allait vous inscrire dans la

 20   grille des postes du commissariat de police de cette manière-là ? Vous

 21   étiez au courant de cela, qu'il allait –disons- un peu contourner les

 22   règles de cette manière-là ?

 23   M. V. Krupeskic (interprétation). - Eh bien, non, je n'étais pas

 24   au courant du tout. Je ne savais pas du tout comment lui, ou plutôt ce

 25   poste de police allait me rémunérer pour ce service que j'ai rendu. Donc


Page 11229

  1   je pense que c'est ça, la seule raison.

  2   M. Blaxill (interprétation). - Ainsi, lorsqu'on passe à la pièce

  3   suivante, la pièce 378, s'il vous plaît, donc le rapport qui est daté du

  4   22 février 93, on constate qu'il s'agit d'un rapport qui a été constitué

  5   après une inspection qui a été faite dans le commissariat de police de

  6   Vitez. C'était une inspection de l'administration de police effectuée par

  7   la police de Travnik et ce, au nom de la communauté croate de Herceg-

  8   Bosna.

  9   Dans ce document daté du 22 février 93, on parle de vous, n'est-

 10   ce pas ? Et si je ne m'abuse pas, il est dit ici que vous êtes officier

 11   chargé de combattre la criminalité, qu'il s'agit de postes d'un intérêt

 12   spécial pour l'Etat. Et il est dit que c'est vous qui effectuez ce

 13   travail, Vlatko Kupreskic.

 14   Or, c'est un rapport officiel, enfin qui semble être officiel,

 15   Monsieur, et il est question de votre fonction officielle ici.

 16   M. V. Krupeskic (interprétation). – Ecoutez, je dois dire tout

 17   d'abord que je n'étais pas présent quand ces hommes sont venus inspecter

 18   le poste de police, et je n'ai pas assisté à cette –comment dire ?-

 19   réunion qui a eu lieu.

 20   Donc c'est un rapport, en fait, qu'ils ont effectué grâce à

 21   l'organigramme qu'ils ont pu consulter, et donc c'est là, dans

 22   l'organigramme, qu'ils ont pu voir mon nom. Parce que vous savez, je n'ai

 23   jamais moi-même pu procéder à l'audition de qui que ce soit ; je n'ai

 24   jamais pris de notes quelles qu'elles soient.

 25   Moi, j'ai été nommé dans ce bureau de la police criminelle, et


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  1   donc je devais dresser l'inventaire de l'équipement, du matériel. C'est là

  2   qu'ils m'ont installé, mais je n'ai jamais reçu de document officiel

  3   m'affectant à ce travail.

  4   Donc c'est formellement, en fait, que cela a été dit ; et puis,

  5   physiquement, j'étais placé dans ce bureau, et Mirko Samija, pour des

  6   raisons purement formelle, m'a inscrit donc au sein de l'organigramme à ce

  7   poste-là.

  8   M. Blaxill (interprétation). - Je souhaite présenter un autre

  9   document : le document du 1er mars. C'est un document qui est daté du

 10   1er mars 93 et qui est intitulé : "Plan ou programme pour le mois de

 11   mars."

 12   (L'huissier s'exécute.)

 13   Mme Lauer. – Il s'agit de la pièce 379.

 14   M. Blaxill (interprétation). – Monsieur Kupreskic, il s'agit

 15   d'un document qui est intitulé "Plan pour mars" daté du 1er mars 93. Vous

 16   êtes d'accord avec moi ?

 17   (Le témoin acquiesce)

 18   Ce document est signé par M. Anto Bajic, me semble-t-il.

 19   Connaissez-vous cet homme ?

 20   M. V. Krupeskic (interprétation). – Non, je ne l'ai jamais

 21   connu. Encore à ce jour, je ne le connais pas.

 22   M. Blaxill (interprétation). - Très bien. En consultant ce

 23   document, il semble être dit que les tâches et les obligations des hommes

 24   qui travaillent dans ce genre de domaine consistent essentiellement à

 25   recueillir des informations et des éléments de preuve.


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  1   Donc, il ne s'agit pas ici d'interroger des gens, il s'agit ici

  2   de faire un travail de bureau, n'est-ce pas ? Alors, est-ce que vous vous

  3   étiez au courant de ce genre d'activité dans ce département ? Au moins

  4   cela ?

  5   M. V. Krupeskic (interprétation). – Non, non, et puis, de toute

  6   façon, je ne figure pas là-dedans. A partir du 25 février 1993, je n'ai

  7   jamais mis les pieds au commissariat de police, au bâtiment de la police ;

  8   et ce, jusqu'à la fin de la guerre.

  9   Permettez-moi de dire cela. Moi, j'ai eu beaucoup de mal à

 10   dresser cet inventaire, à mener ma tâche à bien, et j'ai décidé, me

 11   semble-t-il… En fait, je me souviens bien que je m'étais dit que j'allais

 12   remettre ce rapport et que suis parti, j'ai quitté le poste de police.

 13   Mais le 27 février 1993, je ne sais pas quelle était la fonction

 14   de cet homme, mais je sais qu'on l'appelait Zuti, Jandric Zarko. Il a

 15   attaqué ce poste de police, et il a passé à tabac presque tous les hommes

 16   qui travaillaient dans ce commissariat de police. Alors, ensuite, j'ai

 17   appelé par téléphone, je ne voulais même pas me présenter en personne à

 18   M. Mirko Samija, et je lui ai dit que je n'avais plus envie de retourner

 19   dans ce poste de police. Et puis, je lui ai dit que tout simplement, je

 20   venais de terminer cet inventaire même si je n'étais pas sûr d'avoir mené

 21   à bien le bilan, enfin d'avoir complètement achevé le bilan. Mais je lui

 22   ai dit que je ne souhaitais plus revenir au poste de police. Et

 23   effectivement, je ne l'ai pas fait et ce, jusqu'à la fin de la guerre.

 24   J'ai des témoins qui peuvent le confirmer.

 25   Et ce Musulman, le Musulman qui travaillait avec moi pour faire


Page 11232

  1   cet inventaire, M. Trako Muhamed, c'est un témoin aussi. Et puis un autre

  2   témoin, c'est Miro Lasarevic, un Serbe qui, à l'époque, était à la tête du

  3   service de criminalité.

  4   Et à l'époque où moi j'ai dressé cet inventaire, en face de moi,

  5   en face de moi, travaillait quelqu'un que je connaissais bien, un Musulman

  6   qui est diplômé des études de droit. Je pense qu'il s'appelait Seljo.

  7   M. Blaxill (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur

  8   Kupreskic.

  9   Passons à présent aux journées qui précèdent ce qui a été

 10   décrit, ici, comme le deuxième conflit. Nous savons que c'est l'événement

 11   le plus grave et le plus terrible qui s'est produit à Ahmici.

 12   Vous avez dit qu'avant le 16 avril 1993, vous êtes parti en

 13   déplacement d'affaires à Split. Est-ce exact ?

 14   M. V. Kupreskic (interprétation). – Le 14 avril 1993, je suis

 15   parti... Nous sommes partis plutôt chercher avant tout l'épouse d'Ivica

 16   Kupreskic, Ankica Kupreskic. Et puis, de même, c'était un voyage

 17   d'affaires et ce, pour couvrir nos frais de déplacement.

 18   M. Blaxill (interprétation). - Et en réalité, vous avez déjà

 19   montré à la Chambre le document qui vous autorise à circuler librement,

 20   qui vous a été mis par le HVO de la communauté croate d'Herceg-Bosna, et

 21   il vous a été donné le 13 avril, n'est-ce pas ?

 22   M. V. Kupreskic (interprétation). – Non, ce n'est pas vrai.

 23   Cette feuille m'autorisant à partir en voyage de la part de l'entreprise

 24   est datée du 13 avril. Or, l'autorisation de la part du HVO quant à la

 25   circulation, elle, cette autorisation, a été émise le 14 avril, et c'était


Page 11233

  1   la pièce qui était la condition sine qua non de sortir de Vitez autrement

  2   dit, de voyager.

  3   M. Blaxill (interprétation). - Et c'est le document qui a été

  4   tamponné au poste de frontière de Metkovic ?

  5   M. V. Kupreskic (interprétation). – Je n'ai pas compris votre

  6   question.

  7   M. Blaxill (interprétation). – Peut-on présenter au témoin, s'il

  8   vous plaît, la pièce D26/3 ? Et peut-être pourrait-on lui remettre la

  9   pièce D24/3 ?

 10   (L'huissier s'exécute.)

 11   C'est un document qui a été tamponné au poste-frontière de

 12   Metkovic et qui porte la date du 14 avril 1993.

 13   Donc c'était ça l'autorisation du HVO qui vous a permis de

 14   circuler en Herceg-Bosna et de vous rendre de Vitez à Split, et puis de

 15   revenir à Vitez ?

 16   M. V. Kupreskic (interprétation). – Non, il n'en est pas ainsi.

 17   Je vais répéter brièvement. Nous avons reçu une sorte d'autorisation

 18   générale, et la défense l'a montré cette autorisation. Et sur la base de

 19   cette autorisation générale, nous avions le droit de recevoir ce type

 20   d'autorisation ; le numéro de référence est 1288-04-93 de cet ordre.

 21   Alors, quel est l'ordre chronologique de ce document ?

 22   Premièrement, on reçoit de la part de l'entreprise une feuille nous

 23   permettant de partir en voyage, en déplacement. Donc le 13 avril 1993,

 24   nous avons reçu cette feuille nous autorisant à nous déplacer pendant

 25   quatre jours. Puis, sur la base de ce document que nous émet l'entreprise,


Page 11234

  1   c'est le HVO qui nous émet à son tour son autorisation de circulation

  2   concernant les personnes, la circulation des personnes. Et cette

  3   autorisation du HVO était quelque chose que nous devions présenter au

  4   poste de contrôle, à la sortie de Vitez et qui se trouvait à Novi Travnik,

  5   donc aux hommes qui occupaient ce barrage. Donc, ce sont ces hommes-là

  6   qui, après avoir vérifié ce document, nous autorisaient à poursuivre la

  7   route.

  8   Et le même document nous a été demandé au poste-frontière de

  9   Metkovic. Ivica et moi, tous les deux, nous avions donc chacun une

 10   autorisation émise par le HVO. Donc sur les deux autorisations, vous

 11   voyez, figurait le tampon du poste-frontière de Metkovic, en haut, à

 12   droite. Tous les deux, donc, nous avons traversé la frontière à ce poste-

 13   frontière, comme cela est dit sur le tampon à la date du 14 avril 1993.

 14   Et j'ai la même autorisation sur moi, enfin la même autorisation

 15   qu'Ivica Kupreskic a reçue. C'était le seul moyen de circuler depuis la

 16   Bosnie centrale vers la République de Croatie.

 17   M. Blaxill (interprétation). - Et un autre document que nous

 18   avons ici est un document d'un autre genre. Vous avez dit que c'est un

 19   document qui a été émis par votre propre société, un document qui vous

 20   autorise à vous déplacer pour des besoins de l'entreprise et qui vous

 21   permet de vous faire rembourser les frais.

 22   M. V. Kupreskic (interprétation). – Oui, tout à fait.

 23   M. Blaxill (interprétation). – Et pendant ce voyage, vous avez

 24   rencontré quelqu'un que vous connaissiez ? Il s'agit d'un témoin protégé,

 25   je n'énoncerai pas son nom, mais c'est une personne qui conduisait. Et


Page 11235

  1   vous avez dit que vous l'avez croisé à la station d'essence, et vous avez

  2   dit que c'était le 14 avril, n'est-ce pas ? Ce jour-là ?

  3   M. V. Kupreskic (interprétation). – Le 14 avril 1993, nous avons

  4   croisé, à la station d'essence, le témoin qui a déposé ici sous le

  5   pseudonyme BE, le 6 mai 1995. Ce témoin, il ne conduisait pas, nous

  6   l'avons croisé à la station d'essence ; c'est une personne qui était

  7   arrivée en camion et qui avait garé -me semble-t-il- son camion en face.

  8   C'est à Pocitelj, dans la localité de Pocitelj qu'on s'est rencontrés.

  9   M. Blaxill (interprétation). – Très bien, merci.

 10   Monsieur Kupreskic, d'après vos souvenirs en 1993, auriez-vous

 11   tenu un journal de guerre ? Est-ce le document qui a été confisqué avec la

 12   mallette que vous aviez sur vous au moment où vous avez été arrêté ? Vous

 13   vous rappelez ce document ?

 14   M. V. Kupreskic (interprétation). – Oui, tout à fait. J'ai tenu

 15   un journal de guerre et cela m'a vraiment aidé, enfin m'a vraiment servi

 16   aujourd'hui.

 17   M. Blaxill (interprétation). - Nous aurons l'occasion de

 18   consulter ce document puisque nous allons le distribuer à toutes les

 19   parties.

 20   Mais, en août 1996, vous avez écrit quelque chose au sujet de

 21   certaines personnes et de certains endroits. Vous parlez de cette

 22   personne, la personne DE, en disant : "Nous a vus à Pocitelj et près de

 23   Capljina, le 15 avril 1992, peu avant la guerre, à la veille de la

 24   guerre", (Fin de citation).

 25   Alors il semblerait qu'il y a une différence dans ce que vous


Page 11236

  1   vous rappelez aujourd'hui et ce que vous avez inscrit dans votre journal

  2   de guerre, non ? Pouvez-vous expliquer ces différences ?

  3   M. V. Kupreskic (interprétation). - C'est très certainement que

  4   j'ai rencontré cette personne à Pocitelj le 14 avril 1993. Mais comment

  5   l'ai-je inscrit ou formulé dans mon journal de guerre, cela je ne m'en

  6   souviens pas tant que je ne le vois pas. Peut-être l'ai-je écrit en 96,

  7   97, au moment où j'ai préparé ma défense, puisque je sais, je suis sûr que

  8   nous avons rencontré, dans cette localité-là, cet ami musulman. Peut-être

  9   était-ce une erreur, mais vous ne m'avez pas encore présenté ce que j'ai

 10   écrit.

 11   M. Blaxill (interprétation). - Afin de pouvoir tirer cela au

 12   clair, nous allons présenter ce document à la Chambre et aux parties,

 13   ainsi qu'au témoin.

 14   (L'huissier s'exécute.)

 15   Il se peut qu'au cours de mon contre-interrogatoire, je me

 16   réfère à ce journal de guerre et je vous demanderai donc de le garder sous

 17   la main. Nous aurons peut-être quelques difficultés à repérer les

 18   endroits, dans ce document qui est un document manuscrit. La pagination

 19   n'est pas la même dans l'original et la traduction.

 20   Monsieur Kupreskic, pourriez-vous, s'il vous plaît, consulter

 21   les jours du 7 août... enfin, entre le 31 juillet 1996, ce que vous avez

 22   écrit entre le 31 juillet 96 et le 8 août 96 ? Voyez-vous le n° 14 dans ce

 23   passage ?

 24   Excusez-moi, c'est à la page 16, Monsieur le Président, Madame

 25   et Monsieur les Juges.


Page 11237

  1   M. V. Kupreskic (interprétation). - Vous pensez à l'endroit où

  2   j'ai écrit que c'est le 15 avril, à Pocitelj que j'ai rencontré cette

  3   personne ?

  4   J'ai trouvé cette page et il est écrit ici que j'ai rencontré

  5   cette personne le 15 avril 1992. Et j'ai même dit que c'était le jour, le

  6   premier jour de la guerre. Mais vous savez, c'était il y a trois ou quatre

  7   ans, c'est même plus loin ; enfin je ne considérais pas ça comme

  8   important.

  9   M. Blaxill (interprétation). - En anglais, il est dit "à la

 10   veille de la guerre", et pour nous cela signifie un jour avant, donc le

 11   15 avril serait la date correcte, puisque c'était effectivement la veille

 12   de la guerre. Alors que vous, vous venez de dire que vous avez écrit le

 13   premier jour de la guerre, le jour de la guerre. Y a-t-il là une erreur de

 14   traduction ?

 15   M. V. Kupreskic (interprétation). - Ce que je peux vous dire,

 16   c'est que, d'une part, ce n'est pas un document très formel, officiel.

 17   Ecoutez, moi j'ai esquissé des choses là-dedans. Ce n'est que plus tard,

 18   lorsque j'ai consulté les documents, quand j'ai vu les documents officiels

 19   en me préparant, que je me suis aperçu que c'était le 14 avril que j'avais

 20   rencontré cette personne. Donc cela ne fait que confirmer encore davantage

 21   le fait que je dis la vérité.

 22   M. Blaxill (interprétation). - Très bien, Monsieur Kupreskic,

 23   nous allons poursuivre.

 24   Vous êtes allé à Split, vous vous êtes occupé de vos affaires et

 25   vous avez dit que vous êtes revenu à Ahmici le 15 avril 1993. Est-ce


Page 11238

  1   exact, Monsieur ?

  2   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui. Je suis retourné à

  3   Ahmici le 15 avril 1993, vers 19 heures.

  4   M. Blaxill (interprétation). - Etes-vous tout à fait sûr de

  5   l'heure, du moment ? Etait-ce peut-être un peu plus tôt que 19 heures ?

  6   M. V. Kupreskic (interprétation). - C'est difficile bien

  7   évidemment de vous le dire au bout de six à sept ans. Mais, de toute

  8   façon, ce que je sais, c'est que c'était à peu près dans la soirée. Je

  9   sais que le magasin était fermé, je pense que c'était à peu près à ce

 10   moment-là.

 11   M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que vous vous souvenez, je

 12   pense que c'était le 11 juin 1998, que vous avez eu également une

 13   interview avec mes collègues, MM. Terrier et Smith ?

 14   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui.

 15   M. Blaxill (interprétation). - Si je vous dis, Monsieur, et je

 16   vais vous le montrer, que vous êtes arrivé vers 20 heures ce soir-là, car

 17   vous avez dit que la nuit tombait déjà et que vous étiez sûr que c'était à

 18   peu près cette heure, 20 heures du soir, est-ce que maintenant vous pouvez

 19   nous dire quelque chose de plus précis parce qu'il y a quand même une

 20   heure de battement ?

 21   M. V. Kupreskic (interprétation). - Au moment où nous avons eu

 22   cette interview, effectivement, moi, je considérais que c'étaient des

 23   choses qui n'étaient vraiment pas essentielles. Vous allez trouver

 24   également sur le transcript, là où je le dis à Me Terrier, à M. le

 25   Procureur, je lui ai dit : "Est-ce véritablement le plus important ?", et


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  1   ce n'est pas important de constater que je n'a jamais été un soldat, que

  2   je n'ai jamais porté d'arme ?

  3   Ce n'est pas ça l'essentiel, mais que je me trouvais à deux

  4   kilomètres par rapport au lieu où les événements se sont produits ? Moi,

  5   je pensais que c'était cela qui était important. Alors que maintenant au

  6   moment où je suis déjà entraîné dans ce procès, bien évidemment, j'ai

  7   compris que pour vous, c'est important ; c'est la raison pour laquelle

  8   j'ai essayé de m'en souvenir de manière un peu plus précise, : c'est

  9   probablement quelque peu plus tôt. Voilà. C'est entre 19 heures... C'est

 10   difficile vraiment de le dire, mais comprenez-moi, le temps est passé.

 11   M. Blaxill (interprétation). - Nous allons laisser de côté cette

 12   question-là ; on n'est pas parfaitement d'accord là-dessus.

 13   Monsieur, vous nous avez dit également que vous avez considéré

 14   qu'il y avait un certain nombre de points qui n'étaient pas importants.

 15   Est-ce que ceci veut dire que vous avez un souvenir très précis ? Ou est-

 16   ce que vous avez tout simplement considéré qu'il y avait un certain nombre

 17   de choses qui n'étaient pas importantes et que c'est la raison pour

 18   laquelle vous avez donné des réponses qui étaient officieuses ? Ou bien

 19   vous avez essayé d'être le plus précis possible ?

 20   M. V. Kupreskic (interprétation). - J'ai essayé de dire la

 21   vérité, j'ai dit la vérité. En ce qui concerne le temps, si j'étais

 22   véritablement précis, je ne sais pas, mais je ne sais pas qui peut l'être.

 23   Voyez-vous, le témoin L, en parlant de ces circonstances, il m'avait dit

 24   qu'il m'avait vu d'abord à 15 heures, ensuite à 16 heures, et puis ensuite

 25   à 18 heures du soir.


Page 11240

  1   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur Kupreskic, vous nous

  2   avez dit que le 15 avril, au moment où vous êtes retourné, vous êtes allé

  3   directement chez vous, que vous avez déchargé quelques marchandises qui

  4   auraient dû être livrées à Travnik le lendemain, si mes souvenirs sont

  5   bons.

  6   M. V. Kupreskic (interprétation). – Nous ne nous sommes pas

  7   véritablement arrêtés nulle part ; nous sommes arrivés directement chez

  8   moi, nous avons déchargé la marchandise et, ultérieurement, mon épouse et

  9   moi-même, nous l'avons donc portée jusqu'au premier étage parce qu'il

 10   fallait également mettre les étiquettes de Levi's pour l'acheteur de

 11   Travnik ; ce sont les Jeans 501.

 12   M. Blaxill (interprétation). – Et, par la suite, vous vous êtes

 13   couché. Est-ce que ce soir-là, éventuellement, vous avez vu quelques

 14   personnes ? Est-ce que vous êtes resté tout seul avec votre épouse ?

 15   M. V. Kupreskic (interprétation). – Mon épouse et moi-même, nous

 16   avons donc mis les étiquettes. Je me souviens également que nous avons

 17   fait une facture, nous avons préparé la note pour le client. Je voulais me

 18   coucher le plus tôt possible, mais à 20 heures, j'ai informé le client en

 19   question qui se trouvait à Travnik le lendemain matin, le 16 avril 1993 ;

 20   j'allais donc transporter cette marchandise avant 8 heures du soir, parce

 21   qu'il l'avait commandée quelques jours auparavant. Ensuite, effectivement,

 22   nous nous sommes couchés, tous.

 23   M. Blaxill (interprétation). - Par conséquent, ceci voudrait

 24   dire que vous n'aviez pas eu d'autres contacts avec qui que ce soit, une

 25   fois que vous êtes retourné chez vous ?


Page 11241

  1   M. V. Kupreskic (interprétation). – Mais c'est absolument vrai,

  2   il n'y avait personne qui était venu, ni à la maison ni devant la maison ;

  3   nous ne sommes allés nulle part. Moi, j'étais tellement fatigué ! Et puis

  4   je voulais le plus tôt possible terminer tout ce qu'il y avait à terminer

  5   au sujet de la marchandise et, le lendemain matin donc, continuer ce que

  6   j'avais à faire.

  7   M. Blaxill (interprétation). - Vous avez dit que, tôt le matin,

  8   le 16 avril, vous avez été réveillé par votre épouse. Vous avez entendu

  9   une voix qui vous était inconnue, qui vous a dit qu'il fallait vous lever,

 10   aller à l'abri. Est-ce vrai ?

 11   M. V. Kupreskic (interprétation). – Oui.

 12   M. Blaxill (interprétation). – Eh bien, excusez-moi ; est-ce

 13   qu'une fois, quand vous avez parlé avec la personne en question, vous avez

 14   entendu qu'il y avait éventuellement autre chose qui a été dit ? Est-ce

 15   qu'on avait dit quels étaient les motifs pour lesquels il fallait aller à

 16   l'abri ?

 17   M. V. Kupreskic (interprétation). – Non, mais c'est tout de

 18   suite qu'il a raccroché le téléphone. Mais ça s'est déjà passé auparavant,

 19   c'est la raison pour laquelle moi, j'avais considéré au début qu'il

 20   s'agissait d'une provocation.

 21   M. Blaxill (interprétation). - En conséquence, après, vous avez

 22   eu cet entretien avec M. Ivica Kupreskic, et tout de suite, vous avez

 23   compris qu'il y avait un problème et c'est la raison pour laquelle vous

 24   vous êtes dirigé vers l'abri. C'est comme ça que les événements se sont

 25   déroulés, n'est-ce pas ?


Page 11242

  1   M. V. Kupreskic (interprétation). – Oui, après, il y a Ivica qui

  2   nous a appelés.

  3   M. Blaxill (interprétation). - Vous avez dit que votre épouse a

  4   parlé avec vous sur le temps concernant le premier coup de téléphone. Elle

  5   avait dit également qu'il y avait quelqu'un qui vous a appelé à trois

  6   heures du matin, mais elle ne voulait pas vous déranger. Est-ce qu'elle

  7   vous a dit ce que la personne qui avait appelé lui a dit ?

  8   M. V. Kupreskic (interprétation). – Mais la même chose, comme la

  9   personne qui nous a appelés à cinq heures du matin. Mais je vais tout

 10   simplement , si vous me le permettez, je vais vous décrire une situation

 11   qui se produisait, se reproduisait avec les coups de téléphone qu'on

 12   recevait.

 13   Moi, j'ai appris qu'il y avait… Par moments, que des Musulmans,

 14   par exemple, avertissaient les Croates qu'ils devaient se rendre à l'abri

 15   et qu'il n'y avait rien qui se passait par la suite ; ça se produisait.

 16   M. Blaxill (interprétation). - Entendu. Ce que j'aimerais vous

 17   demander maintenant, c'est de revenir à votre journal de guerre que vous

 18   avez encore, et puis de jeter un coup d'œil sur le même chapitre, au même

 19   endroit, là où vous avez donc parlé de cette réunion que vous avez eue le

 20   14 avril. Est-ce que vous pouvez nous donner lecture du point 20 ?

 21   Mme Lauer. - Ce journal prendra le n° 380 des pièces du

 22   Procureur.

 23   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur Kupreskic, je voudrais

 24   tout simplement vous rappeler, je pense que c'est dans le chapitre du

 25   31 juillet 1996, c'est le 8 août 1996... Excusez-moi, je me suis trompé.


Page 11243

  1   M. V. Kupreskic (interprétation). – Vous parlez du 31 juillet

  2   1996 ?

  3   M. Blaxill (interprétation). – Oui, effectivement. Si vous jetez

  4   un coup d'œil sur le point n° 20, on parle de la personne Vlatko

  5   Matosevic, si j'ai bien prononcé son nom.

  6   M. V. Kupreskic (interprétation). – Excusez-moi, un petit

  7   moment, je n'ai pas trouvé l'endroit. Excusez-moi, je n'arrive pas à

  8   trouver cette page, il n'y a pas de numéro d'ordre.

  9   M. Blaxill (interprétation). – Oui, je vais pouvoir vous aider.

 10   Excusez-moi, Monsieur le Président, c'est donc le point 20 ; c'est

 11   marqué : Vlatko Matosevic.

 12   Qu'est-ce que vous avez écrit en-dessous ?

 13   M. V. Kupreskic (interprétation). – C'est le témoin et Pirici.

 14   C'est çà que j'ai marqué. C'est marqué le témoin et ensuite, un peu plus

 15   en bas, Pirici. Est-ce que c'est de ça que vous parlez ?

 16   M. Blaxill (interprétation). - Si vous voyez la traduction

 17   anglaise, c'est marqué : "Il a déclaré qu'il était possible qu'il avait

 18   téléphoné à 05 heures." Est-ce que ce sont les mots que vous voyez ?

 19   M. V. Kupreskic (interprétation). – Non.

 20   M. Blaxill (interprétation). - A ce moment-là, je pense que nous

 21   ne parlons pas du même point.

 22   M. V. Kupreskic (interprétation). – Du point 20 ?

 23   M. Blaxill (interprétation). – Oui, le point 20. Est-ce que

 24   c'est bien marqué, sous le point 20, est-ce que, par la suite, la

 25   citation : "Il a pointé son fusil sur mon cou" : qu'est-ce que ceci


Page 11244

  1   voudrait dire ?

  2   M. V. Kupreskic (interprétation). – Au moment où je suis arrivé

  3   au centre médical à Zume, on m'avait envoyé à Pirici pour emmener un

  4   certain nombre de médicaments et puis des pansements. C'était donc le

  5   premier jour. Le premier jour où je suis allé, justement parce que l'on

  6   m'avait convoqué, j'ai pris ma voiture et j'ai emmené ces articles.

  7   Il y avait un endroit où l'on ne pouvait plus aller en voiture,

  8   une cinquantaine de mètres à peu près, et c'est pour ça que j'ai marché à

  9   pied. Et c'est là où j'ai rencontré cet homme. Et à cette époque-là, moi,

 10   je ne le connaissais pas et lui ne me connaissait pas non plus. Et comme

 11   je revenais, je descendais vers ma voiture, il a probablement pensé que

 12   moi, je m'enfuyais de la ligne du front.

 13   Par conséquent, c'est la raison pour laquelle j'ai dit que lui

 14   aussi, il pourrait être le témoin, expliquer comment je me suis rendu au

 15   centre médical et comment il s'est comporté vis-à-vis de moi et de dire

 16   tout simplement ce que j'ai fait. C'est tout simplement que je n'étais pas

 17   sur la ligne de front.

 18   M. Blaxill (interprétation). - Nous avons entendu quelques

 19   témoins qui ont été cités à la barre et qui avaient mentionné qu'ils

 20   avaient vu un certain nombre de membres du HVO qui portaient des uniformes

 21   et qui étaient aux alentours des maisons Kupreskic. Est-il vrai de dire,

 22   Monsieur Kupreskic, que vous-même, vous n'y étiez pas, par conséquent,

 23   personnellement, vous ne savez pas s'il y avait les membres du HVO qui

 24   étaient à Ahmici et qui s'y trouvaient le 15 avril, étant donné que vous

 25   étiez à Split ?


Page 11245

  1   M. V. Kupreskic (interprétation). – Le 15 avril effectivement,

  2   j'étais dans un autre Etat. Mais en ce qui concerne ma maison et autour de

  3   ma maison, il n'y avait absolument pas d'armée qui s'y est rendue. Et mon

  4   épouse, elle ne m'a jamais parlé de ça, mes enfants ne m'ont jamais parlé

  5   de cela.

  6   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur Kupreskic, il est un

  7   fait que si vous étiez dans un autre Etat à ce moment-là, vous étiez en

  8   voyage et vous n'étiez pas à Ahmici ce jour-là, et vous n'étiez pas à

  9   Ahmici depuis le 14 avril jusqu'au 15, au 19, au soir.

 10   Par conséquent, personnellement, vous ne savez pas si les

 11   membres du HVO étaient dans cette région-là ou non ? Tout simplement, vous

 12   ne pouvez pas le dire ? Vous n'y étiez pas ?

 13   M. V. Krupeskic (interprétation). – Bien évidemment, je n'ai pas

 14   pu voir et je n'ai jamais entendu parler de cela.

 15   M. Blaxill (interprétation). – Merci. Monsieur le Président, je

 16   ne sais pas si vous envisagez une pause à 12 heures 10, étant donné que

 17   j'ai changé de sujet. Si vous voulez nous pouvons lever la séance ?

 18   M. le Président (interprétation). – Non, étant donné que nous

 19   allons nous arrêter à 1 heure, le mieux est de poursuivre.

 20   M. Blaxill (interprétation). - Bien évidemment, ça ne serait pas

 21   trop long. Mais d'accord, Monsieur le Président, je vais poursuivre et je

 22   vais essayer d'être très bref.

 23   Monsieur Kupreskic, vous avez dit que vous êtes parti à l'abri

 24   de Jozo Vrebac, n'est-ce pas ?

 25   M. V. Krupeskic (interprétation). - Oui.


Page 11246

  1   M. Blaxill (interprétation). - Vous avez dit également que vous

  2   avez laissé votre père dans votre maison.

  3   M. V. Krupeskic (interprétation). - Oui.

  4   M. Blaxill (interprétation). - Parce que lui tout simplement, il

  5   a refusé, il ne voulait pas partir avec vous ?

  6   M. V. Krupeskic (interprétation). – Oui, il est resté à la

  7   maison.

  8   M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que votre père vous a dit

  9   pourquoi il voulait rester à la maison ? Est-ce qu'il vous a dit qu'il n'y

 10   avait pas… Pourquoi avoir peur parce que de toute façon, il n'a rien

 11   appris qui lui ferait peur ?

 12   M. V. Krupeskic (interprétation). - Au moment où je suis venu

 13   lui demander de venir avec moi, il n'était pas prêt encore ; il m'a dit

 14   tout simplement : "Moi, je suis une personne âgée, et par conséquent je ne

 15   partirai pas." Je ne sais pas s'il avait dit encore autre chose. Il a dit

 16   peut-être : "Personne ne me fera rien", comme ceci s'est produit

 17   auparavant. Je ne sais pas, je ne m'en souviens pas exactement.

 18   M. Blaxill (interprétation). - Par conséquent, vous êtes parti

 19   avec votre famille. Qu'est-ce que vous portiez sur vous ? Comment étiez-

 20   vous vêtu ?

 21   M. V. Krupeskic (interprétation). – J'avais des vêtements

 22   civils, j'avais une veste, plutôt une fourrure, un pantalon. J'avais des

 23   chaussures ou peut-être des bottes, je ne m'en souviens pas, et puis une

 24   chemise, et puis c'est tout.

 25   M. Blaxill (interprétation). - Pourriez-vous nous dire, si vous


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  1   vous en souvenez, quelle était la couleur de cette veste et quelle était

  2   le tissu ?

  3   M. V. Krupeskic (interprétation). – Oui, je m'en souviens parce

  4   que c'est une veste qui me servait pour quand je sortais dehors. Je pense

  5   qu'elle était couleur chocolat.

  6   M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que vous vous souvenez

  7   également quel était le tissu du pantalon et quelle était la couleur de

  8   votre pantalon que vous portiez ce jour-là ?

  9   M. V. Krupeskic (interprétation). - Je pense que le pantalon

 10   était en velours, peut-être vert olive ou…

 11   M. Blaxill (interprétation). - Vous êtes arrivé jusqu'à l'abri,

 12   et puis, vous avez dit, si j'ai bien noté, que vous y êtes resté jusqu'à

 13   9 heures au moins.

 14   M. V. Krupeskic (interprétation). - Je suis resté dans l'abri

 15   jusqu'à 10 heures.

 16   M. Blaxill (interprétation). - 10 heures. Et pendant ce temps

 17   là, vous avez entendu les tirs qui ne cessaient pas. Donc vous avez

 18   entendu les tirs qui ne se sont pas arrêtés pendant ce temps-là ?

 19   M. V. Krupeskic (interprétation). – Oui, à l'intérieur, on a pu

 20   entendre les tirs ; les tirs étaient très intenses, très violents.

 21   M. Blaxill (interprétation). – Etes-vous sorti de cette maison

 22   avant 10 heures ? En d'autres termes, est-ce que vous êtes sorti de l'abri

 23   à un moment ou à un autre ?

 24   M. V. Krupeskic (interprétation). - Je pense que, pour la

 25   première fois, je suis sorti à 9 heures 30, car c'est à ce moment-là qu'il


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  1   y avait une certaine accalmie, et je pense qu'il y avait quelques autres

  2   personnes également qui sont sorties avec moi parce qu'on était curieux,

  3   on voulait savoir ce qui se passait. Et je pense que, la première fois,

  4   nous sommes sortis vers 9 heures 30.

  5   M. Blaxill (interprétation). - En d'autres termes, vous étiez

  6   très préoccupé, probablement, vous étiez très préoccupé pour votre père

  7   également et les conditions dans lesquelles il est resté, et pour son sort

  8   également ?

  9   M. V. Krupeskic (interprétation). – Oui, bien évidemment,

 10   j'étais très préoccupé parce que c'est bien la première fois dans ma vie

 11   que j'ai vécu des tirs qui étaient violents, et puis j'ai dit : "Mon dieu,

 12   mais c'est la guerre, c'est une véritable guerre."

 13   M. Blaxill (interprétation). - Et au moment où vous êtes arrivé,

 14   ou plutôt où vous êtes sorti, parti de cet abri, est-ce que vous avez

 15   aperçu à Zume la présence des soldats croates ou des formations des unités

 16   croates, des bunkers, enfin, ou n'importe quoi éventuellement pour

 17   protéger Zume ?

 18   M. V. Krupeskic (interprétation). – Non, je n'ai rien vu.

 19   M. Blaxill (interprétation). - Vous avez dit que vous-même, vous

 20   n'avez vu des soldats qui se rendaient à Ahmici ce matin là, n'est-ce

 21   pas ?

 22   M. V. Krupeskic (interprétation). - Oui.

 23   M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que quelqu'un vous a dit

 24   qu'il avait vu des soldats ? Et est-ce que quelqu'un vous a dit également

 25   qui étaient ces soldats, d'où ils sont venus ?


Page 11249

  1   M. V. Krupeskic (interprétation). – Non, c'est la première fois

  2   que je l'ai appris par Niko Sakic, et je l'ai appris dans la cuisine même,

  3   de lui-même.

  4   M. Blaxill (interprétation). - Et au moment où vous vous rendiez

  5   dans l'abri, est-ce que quelqu'un vous a dit que cette localité aurait pu

  6   être attaquée par les forces musulmanes ?

  7   M. V. Krupeskic (interprétation). – J'ignorais tout. Je voulais

  8   apprendre cette première information de mon cousin Ivica, mais je ne l'ai

  9   pas trouvé devant les maisons. C'est la raison pour laquelle j'étais

 10   encore plus perplexe et j'avais encore plus peur. Et c'est la raison pour

 11   laquelle, je me suis précipité vers l'abri.

 12   M. Blaxill (interprétation). - Est-ce qu'il y avait cette

 13   possibilité qu'éventuellement une attaque des Moudjahidine se préparait ?

 14   Est-ce que ça vous est passé par l'esprit ?

 15   M. V. Krupeskic (interprétation). - Je ne peux pas m'en souvenir

 16   exactement, mais je pense qu'au moment où je fuyais, je ne sais pas, je ne

 17   peux pas l'affirmer, peut-être que ceci m'a traversé l'esprit. Mais, de

 18   toute façon, j'avais appris également, une fois qu'on avait averti qu'il y

 19   avait eu une attaque des Moudjahidine qui allait se produire à partir de

 20   Barin Gaj, qu'ils se trouvaient dans une forêt. On appréhendait ces

 21   attaques.

 22   M. Blaxill (interprétation). - Mais est-ce qu'il y avait des

 23   rumeurs éventuellement ? Est-ce qu'on avait parlé éventuellement que les

 24   Moudjahidine étaient des personnes qui étaient terribles, qui égorgeaient

 25   les gens, et vous ne vouliez donc pas qu'ils arrivent jusqu'à votre


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  1   village ?

  2   M. V. Krupeskic (interprétation). – Oui, effectivement, il y

  3   avait des rumeurs de ce type-là qu'ils étaient très cruels et qu'ils

  4   commettaient des actes cruels. Et nous étions tous très troublée. Je pense

  5   que, même nos voisins musulmans, ils ont été très troublés et perplexes.

  6   M. Blaxill (interprétation). - J'avoue que je comprends mal

  7   cette partie, Monsieur Kupreskic, car tout ce que votre père aurait pu

  8   éventuellement avancer, comme ne pas vouloir partir avec vous, vous l'avez

  9   quand même laissé à la maison alors qu'il y avait quelque chose de

 10   terrible qui aurait pu se produire, vous n'avez pas essayé de le

 11   convaincre, de lui dire que vous alliez l'emporter, que vous alliez

 12   l'aider à partir de cette maison et de cette localité ?

 13   M. V. Kupreskic (interprétation). - A ce moment-là, je n'avais

 14   pas cette idée-là parce que je pensais qu'il allait être déjà prêt pour

 15   partir avec nous. Quand, la première fois, je suis allé le voir, il ne m'a

 16   pas dit qu'il voulait ou qu'il ne voulait pas partir avec moi.

 17   Mais, de toute façon, ce qui m'avait surpris, c'était surtout

 18   l'appel et les paroles d'Ivica Kupreskic qui m'avait dit : "Tous sont

 19   partis". A ce moment-là je n'ai pas réfléchi beaucoup : j'ai pris mes

 20   enfants et puis je suis parti. Je suis parti vers la maison d'Ivica

 21   Kupreskic.

 22   M. Blaxill (interprétation). - Vous avez dit que, plus tard, au

 23   cours de la journée, vous avez quand même essayé de regagner votre maison,

 24   de voir votre père ; et puis, vous avez dit que vous l'avez vu.

 25   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, avec beaucoup de


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  1   risques, avec beaucoup d'efforts également. J'ai presque passé trois

  2   heures pour venir jusqu'à chez moi depuis l'abri. Ce n'est qu'à 15 heures

  3   que j'ai réussi véritablement à regagner ma maison et à voir mon père.

  4   M. Blaxill (interprétation). - N'est-il pas vrai qu'un certain

  5   nombre de personnes de votre groupe ont réussi à circuler, à se déplacer

  6   dans cette région, au cours de la matinée, qu'ils n'avaient pas besoin de

  7   plusieurs heures, mais de quelques heures pour le faire ? Monsieur Ivica

  8   Kupreskic, par exemple, lui-même, circulait pendant ce temps-là.

  9   M. V. Kupreskic (interprétation). - Mais je l'ignore et je ne

 10   sais pas. Je ne sais pas ce qu'Ivica Kupreskic a fait.

 11   M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que vous l'avez rencontré

 12   ce jour-là ?

 13   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je ne me souviens pas que je

 14   l'avais rencontré ce jour-là.

 15   M. Blaxill (interprétation). - Eh bien, nous allons parler du

 16   soir. C'est 18 heures, 19 heures du soir. Vous dites que vous n'avez pas

 17   rencontré Ivica Kupreskic, n'est-ce pas ?

 18   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je ne sais pas. Je ne me

 19   souviens pas. Il est peut-être passé à côté de l'abri. Ce n'est pas

 20   impossible. Dans la soirée, c'est possible, mais je ne m'en souviens pas.

 21   M. Blaxill (interprétation). - Il y avait des choses qui se

 22   passaient à proximité et vous devriez quand même pouvoir vous souvenir si

 23   vous avez rencontré votre cousin ? Et puis, c'était en même temps votre

 24   patron. Vous auriez certainement le souvenir de cette réunion si vous

 25   l'aviez rencontré ?


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  1   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui bien évidemment, si je

  2   l'avais vu au cours de la journée, au moment critique, bien évidemment que

  3   je m'en serais souvenu, mais je n'ai vu personne et je n'ai pas pu voir

  4   des gens.

  5   M. Blaxill (interprétation). - Si je vous dis que dans le

  6   transcript, il est noté, et puis vous l'avez entendu, que le témoin vous a

  7   aperçu vers 18 heures devant l'abri de Vrebac. Monsieur Ivica Kupreskic

  8   également a dit qu'il vous a téléphoné, qu'il vous a appelé au téléphone.

  9   Ce que nous savons, et qu'il a vu également, qu'il a dit qu'il avait vu un

 10   groupe de soldats, et que vous vous deviez emmener votre famille dans

 11   l'abri.

 12   Auriez-vous quelques commentaires à ce sujet-là ?

 13   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je n'ai absolument pas de

 14   commentaire ; je ne sais pas qui Ivica a vu. Il est possible que l'on se

 15   soit rencontrés vers 18 heures dans l'abri. Je ne peux pas m'en souvenir

 16   exactement ; j'ai dit que c'est possible.

 17   M. Blaxill (interprétation). - Il y a deux faits précis,

 18   Monsieur Kupreskic, que j'aimerais que vous traitiez dans votre esprit

 19   comme des faits précis.

 20   Premièrement, que vous et lui, vous vous êtes trouvés hors de

 21   l'abri des Vrebac après 18 heures ce jour-là. Est-ce vrai ou est-ce faux ?

 22   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je crois que c'est sans

 23   doute exact, mais je l'ai déjà dit, je ne peux pas me rappeler exactement.

 24   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur Ivica Kupreskic a

 25   déclaré également que, lorsqu'il vous a appelé par téléphone, un peu plus


Page 11253

  1   tôt ce jour-là, il a dit avoir vu un groupe de soldats et que vous devriez

  2   aller dans l'abri avec votre famille.

  3   Le fait sur lequel j'aimerais que vous concentriez votre pensée

  4   et le suivant : Ivica Kupreskic vous a-t-il dit avoir vu un groupe de

  5   soldats ou ne vous l'a-t-il pas dit, lorsque vous avez parlé avec lui par

  6   téléphone ?

  7   M. V. Kupreskic (interprétation). - Au téléphone, il ne me l'a

  8   pas dit. Maintenant, savoir s'il a vu des soldats et que ce soit sur la

  9   base de ce fait qu'il m'ait appelé, ça je ne le sais pas.

 10   M. Blaxill (interprétation). - Nous avons entendu une question

 11   qui vous a été posée par Me Krajina. Il s'agissait au cours de la journée

 12   du 16 avril 1993 des divers lieux où vous êtes censé vous être trouvé ce

 13   jour-là. Maître Krajina vous les a énumérés, je ne répéterai pas ce qu'il

 14   a dit, car je considère qu'il l'a fait d'une façon tout à fait précise.

 15   Ce que je voudrais vous demander, Monsieur Kupreskic, c'est la

 16   chose suivante. Vous étiez, dites-vous, en très bons termes avec les

 17   Musulmans de la région. Vous avez vécu avec eux toute votre vie, vous

 18   étiez entouré de maisons et de familles musulmanes. Vous étiez respecté

 19   dans votre travail. Vos proches étaient autour de vous.

 20   Comment se fait-il que vous soyez accusé par toutes ces

 21   personnes qui vous connaissaient si bien ? Ce n'est pas sans doute parce

 22   que vous occupiez une position stratégique, n'est-ce pas, Monsieur

 23   Kupreskic ? C'est impossible !

 24   M. V. Kupreskic (interprétation). - Non, ce n'est pas le cas. Je

 25   redis une nouvelle fois qu'à mon avis, j'ai été mis en accusation


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  1   uniquement parce que mes voisins musulmans n'ont pas pu, pas plus que je

  2   n'ai pu le faire moi-même, reconnaître ces soldats. Ils m'ont accusé

  3   simplement parce que je suis leur premier voisin, leur voisin le plus

  4   proche, et parce que ma maison se trouvait à cet endroit-là, et qu'il est

  5   certain qu'il y ait eu des coups de feu tirés à partir de la maison et

  6   autour de la maison. Je ne vois pas d'autre raison ; d'ailleurs, il n'y en

  7   a pas.

  8   Et ce, d'autant plus que je n'ai prêté le flanc à rien de ce

  9   genre par l'un quelconque de mes actes.

 10   Vous avez pu constater ici, Monsieur le Procureur, que six de

 11   mes voisins musulmans d'Ahmici sont venus ici témoigner, devant ce

 12   Tribunal, en qualité de témoins de ma défense. Vous constaterez qu'au

 13   total, il y a trente dépositions qui ont été fournies à ce Tribunal par

 14   des témoins musulmans pour ma défense. J'ai toutes les statistiques :

 15   54 témoins de la défense se sont exprimés ici, dans cette Chambre, pour

 16   traiter des faits, des chefs d'accusations sur lesquels je considère et je

 17   déclare ne pas être coupable. Le Procureur n'a entendu que 57 témoins.

 18   M. Blaxill (interprétation). –  Je ne suis pas ici pour faire

 19   des statistiques avec vous, Monsieur Kupreskic.

 20   Ce que je vous demande, c'est la chose suivante. N'est-il pas

 21   surprenant -puisque vous affirmez avoir eu de si bonnes relations avec

 22   toutes les personnes vous entourant- qu'il y ait eu des personnes, au

 23   nombre de ces proches, qui vous ont accusé ?

 24   Mais je vais maintenant, si vous me le permettez, me

 25   consacrer...


Page 11255

  1   M. V. Kupreskic (interprétation). - Excusez-moi, Monsieur le

  2   Procureur, mais ce que vous venez de dire est une insulte à mes yeux.

  3   Un seul témoin m'a chargé. Un témoin qui affirme à telle et

  4   telle minute, à telle et telle seconde, m'avoir vu porter un fusil, une

  5   arme. Personne, parmi les autres témoins, n'a déclaré m'avoir vu porter

  6   des armes. Et le témoin L est, en fait, une personne un peu dérangée sur

  7   le plan mental. Un seul témoin, ici, m'a accusé, m'a chargé.

  8   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur Kupreskic, j'aimerais

  9   revenir, en fait, sur le témoignage du témoin Q. Vous rappelez-vous de qui

 10   il s'agit ?

 11   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je me rappelle.

 12   M. Blaxill (interprétation). - Très bien, Monsieur.

 13   Vous avez entendu ce que lui-même et les membres de sa famille

 14   ont dit eu égard aux efforts qu'ils ont accomplis pour se rendre vers

 15   Ahmici-le-Haut, eu égard au fait qu'ils sont passés tout près de votre

 16   maison. Ils déclarent vous avoir vu à cet endroit et vous avoir vu sous

 17   les traits d'un militaire en uniforme. Vous rappelez-vous leur avoir

 18   entendu dire cela ?

 19   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je ne me rappelle pas parce

 20   que je n'étais pas à cet endroit. Je ne peux pas me rappeler parce que je

 21   n'y étais pas. Mais si vous me demandez si je me rappelle leur avoir

 22   entendu dire cela, peut-être que la réponse est oui. Je ne sais pas, je

 23   n'ai pas très bien compris votre question.

 24   M. Blaxill (interprétation). - Oui, c'était exactement la

 25   question que je vous posais, je vous remercie d'y avoir répondu.


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  1   M. V. Kupreskic (interprétation). - Vous comprenez... votre

  2   question précédente m'a ébranlé et... Oui ,oui, j'ai compris ce qu'ils ont

  3   dit, effectivement.

  4   M. Blaxill (interprétation). - Merci. Les personnes qui ont

  5   formulé ces allégations à votre encontre, au nombre de ces personnes se

  6   trouvent des personnes qui connaissaient très bien votre famille, qui en

  7   fait, étaient des voisins. Est-ce exact ? Prenez votre temps.

  8   M. V. Kupreskic (interprétation). – Oui, ce sont mes voisins les

  9   plus proches, la famille Pezer compte au nombre de mes voisins proches.

 10   M. Blaxill (interprétation). - Parmi les propos de ces

 11   personnes, nous pouvons citer ce que certains d'entre eux ont dit ; ils

 12   ont déclaré que des cris avait été poussés dans leur direction. Et la

 13   personne qui s'exprime dans cette citation déclare s'être retournée, avoir

 14   regardé autour d'elle, et je crois résumer bien cette partie de sa

 15   déposition très brève, en disant que cette personne a reconnu avec quelque

 16   étonnement son voisin Vlatko Kupreskic qui se trouvait là avec d'autres.

 17   Alors, Monsieur, je vous pose une nouvelle fois cette question :

 18   comment se fait-il que vous étiez en si bonnes relations avec ces

 19   personnes ? Est-ce exact : avant la guerre, étiez-vous manifestement en

 20   bonnes relations avec ces personnes ?

 21   M. V. Kupreskic (interprétation). – Oui, j'avais des relations

 22   normales, de bonnes relations.

 23   M. Blaxill (interprétation). – Eh bien, encore une fois, je vous

 24   le dis, quand je lis : "Je me suis retourné et, à mon grand étonnement,

 25   j'ai vu mon voisin Vlatko qui portait un fusil et ces hommes qui criaient


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  1   dans notre direction", je trouve que c'est quelque chose de très difficile

  2   à comprendre, Monsieur Kupreskic. J'aimerais que vous essayez de

  3   m'expliquer pourquoi cette personne vous blâme, vous accuse.

  4   Pourquoi précisément cette personne et pas d'autres personnes de

  5   la localité ?

  6   M. V. Kupreskic (interprétation). – Eh bien, j'ai déjà répondu à

  7   cette question, cela me surprend qu'une seule, parmi quatorze personnes,

  8   m'aient vu et ce, pendant simplement une fraction de seconde. Je ne pense

  9   pas que cette personne dise la vérité.

 10   M. Blaxill (interprétation). - Très bien, merci. C'est une

 11   réponse. Vous avez rendu visite à la maison de votre famille, au cours de

 12   la matinée, ce jour-là ou aux alentours de midi. Je pense que c'est ce que

 13   vous avez dit. Et lorsque vous y êtes arrivé, vous avez vu des soldats

 14   dans votre maison. Est-ce exact ?

 15   M. V. Kupreskic (interprétation). – Oui, j'ai trouvé des soldats

 16   dans la maison.

 17   M. Blaxill (interprétation). – Lorsque vous avez découvert ces

 18   soldats, saviez-vous avec précision à quelle armée ils appartenaient ?

 19   Avez-vous pu les identifier facilement ?

 20   M. V. Kupreskic (interprétation). – Pas tout de suite. Quand

 21   j'ai vu le premier de ces soldats, je n'ai pas pu déterminer de qui il

 22   s'agissait ni même faire une supposition.

 23   M. Blaxill (interprétation). – Mais, Monsieur, que pensez-vous,

 24   sur le plan de la sécurité, du fait que vous vous soyez approché de ces

 25   soldats si vous ne saviez pas qui étaient ces soldats ? Que pensiez-vous


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  1   de votre sécurité personnelle, à ce moment-là ?

  2   M. V. Kupreskic (interprétation). – Vous avez raison. Le risque

  3   était effectivement très grand. Mais j'avais déjà depuis trois heures à

  4   peu près, plus de trois heures de très, très grande inquiétude pour mes

  5   parents ; peut-être que c'est cette inquiétude qui a prévalu. Bien

  6   entendu, quand j'ai vu ce soldat, je me suis pétrifié.

  7   M. Blaxill (interprétation). - En conséquence de cela, je trouve

  8   quelque difficulté à comprendre la description que vous avez faite de vos

  9   déplacements. A partir de 6 heures du matin donc, vous dites vous trouver

 10   dans un abri, vous êtes inquiet au sujet de votre père qui est resté dans

 11   la maison de famille et pourtant, vous ne vous rendez pas dans cette

 12   maison de famille avant 13 heures 30 ou l'heure que vous dites être celle

 13   du déjeuner.

 14   Donc c'est seulement au moment du déjeuner que vous allez dans

 15   la maison de famille et, à ce moment-là, vous êtes prêt à prendre ce

 16   risque. Alors, quelle est la différence entre le moment où vous estimez

 17   nécessaire de vous abriter, d'aller dans l'abri, et le moment où vous

 18   dites être prêt à courir le risque de vous rendre à la maison de famille,

 19   et de vous approcher de soldats inconnus ?

 20   M. V. Kupreskic (interprétation). – Mais ce que j'avais en tête

 21   était toujours la même chose : que faire ? Quel mouvement accomplir pour

 22   me rendre auprès de mon père ? Mais c'était impossible et puis le temps a

 23   passé, ensuite il y a eu des disputes avec ma femme, avec les enfants :

 24   "Ne t'en va pas, tu vas mourir !" Et c'est seulement vers 10 heures que

 25   les coups de feu se sont un peu calmés. A ce moment-là, j'ai cherché le


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  1   moment le plus approprié. J'ai pensé que le moment était arrivé, mais j'ai

  2   fait une erreur, parce que, quand je me suis rapproché -et la distance est

  3   d'un kilomètre à peu près-, quand je me suis rapproché de la maison de

  4   Niko Sakic, c'est à ce moment-là que j'ai compris quelle était la nature

  5   de ces coups de feu, de ces tirs. A ce moment-là, je n'ai plus osé faire

  6   un pas en avant. Plus du tout.

  7   M. Blaxill (interprétation). - Très bien. Mais finalement, vous

  8   vous approchez de la maison et c'est un soldat qui vous voit et qui vous

  9   empêche d'avancer, n'est-ce pas ? Ou est-ce que c'est vous qui l'avez

 10   appelé ?

 11   M. V. Kupreskic (interprétation). – C'est moi qui l'ai vu le

 12   premier. Lui ne m'a pas remarqué parce qu'il observait d'autres points

 13   qui, sans doute, avaient plus d'importance à ses yeux. Mais moi, je ne

 14   savais plus où aller, j'étais paniqué. C'est moi-même qui ai, de mon

 15   propre gré, levé les bras en l'air en disant : "Je m'appelle Vlatko

 16   Kupreskic, j'habite dans cette maison et je suis venu chercher mon père".

 17   M. Blaxill (interprétation). – Donc vous avez été le premier à

 18   parler ? C'est vous qui avez parlé le premier à ce soldat, si j'ai bien

 19   compris ce que vous venez de dire ?

 20   M. V. Kupreskic (interprétation). – Je crois que c'est moi qui

 21   ai parlé le premier, parce que je l'ai vu tout de suite. Lui observait, il

 22   tournait la tête à gauche, à droite, et il était impossible que, dans les

 23   quelques secondes à venir, il ne me découvre pas ; donc c'est moi qui ai

 24   dit tout de suite : "Je m'appelle Vlatko Kupreskic". Il s'est retourné, il

 25   a pointé son fusil dans ma direction.


Page 11260

  1   M. Blaxill (interprétation). - Et il vous est apparu rapidement

  2   que c'était un soldat croate, ou plutôt un soldat croate de Bosnie, et

  3   qu'il vous avait sans doute identifié par votre nom -ou d'autres éléments

  4   quels qu'ils soient- comme étant d'origine croate. Donc il vous a emmené

  5   dans la maison. Est-ce exact ?

  6   M. V. Kupreskic (interprétation). – Non, ce n'est pas exact. Moi

  7   aussi, c'est par hasard que je l'ai vu, et je ne savais pas où aller, je

  8   ne pouvais aller nulle part parce que, lui, portait des armes. Je ne

  9   savais pas de quelle armée, de quel soldat il s'agissait jusqu'au moment

 10   où je suis entré dans la maison et où j'ai constaté les choses.

 11   A ce moment-là, quand il m'a dit de m'approcher, quand je me

 12   suis approché de lui, je n'ai pas osé le regarder.

 13   M. Blaxill (interprétation). - Mais il est certain qu'aucun mal

 14   ne vous a été fait et qu'un soldat vous a escorté jusqu'à l'intérieur de

 15   la maison. Est-ce exact ?

 16   M. V. Kupreskic (interprétation). – Eh bien, maintenant, je

 17   crois comprendre pourquoi il m'a emmené dans la maison. A ce moment-là, je

 18   ne le savais pas. C'est parce que mon père se trouvait en haut. Mon père

 19   ne se trouvait pas au rez-de-chaussée où il habitait en fait, mais il

 20   était à l'étage. Plus tard, j'ai interrogé mon père pour savoir comment il

 21   se faisait qu'à ce moment-là, il était à l'étage puisqu'il avait du mal à

 22   se déplacer.

 23   Mon père m'a répondu que, pendant qu'il était au rez-de-

 24   chaussée, il avait remarqué que des soldats pillaient les maisons, qu'ils

 25   emportaient ce qu'il y avait dans les maisons. Et il avait donc pensé


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  1   qu'il pourrait peut-être empêcher un pillage dans notre maison s'il

  2   montait au premier étage. Donc il a réussi à se traîner jusqu'au premier

  3   étage, mais en fait, ils ne sont pas venus fouiller.

  4   M. Blaxill (interprétation). - Quand vous avez pénétré dans la

  5   maison, votre père était manifestement très perturbé, mais au moins il

  6   était sain et sauf, n'est-ce pas ?

  7   M. V. Kupreskic (interprétation). – Oui, je crois qu'il était en

  8   danger tout comme moi, parce que ces hommes n'ont pratiquement pas dit un

  9   mot, rien ; ils étaient terrifiants. J'ai même vu une baïonnette entre

 10   leurs mains.

 11   M. Blaxill (interprétation). - Pour dire les choses plus

 12   simplement, Monsieur Kupreskic, il est permis de dire que personne n'avait

 13   fait le moindre mal, n'avait blessé votre père quand vous êtes arrivé dans

 14   la maison, n'est-ce pas ?

 15   M. V. Kupreskic (interprétation). – En effet, il n'était pas

 16   blessé.

 17   M. Blaxill (interprétation). - Personne n'a commis la moindre

 18   violence contre vous ou contre votre père pendant que vous étiez à

 19   l'intérieur de la maison, n'est-ce pas ?

 20   M. V. Kupreskic (interprétation). – C'est exact. A moi non plus,

 21   ils n'ont rien fait.

 22   M. Blaxill (interprétation). – Et peut-être le seul drame qui

 23   s'est produit, s'est-il produit au moment où un char de la Forpronu s'est

 24   approché et un soldat du HVO s'est jeté au sol en vous entraînant avec lui

 25   dans sa chute pour attendre le passage du char. Est-ce exact ?


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  1   M. V. Kupreskic (interprétation). – Oui. Cela a été un événement

  2   dramatique parce que tout le monde s'est jeté au sol dans cette pièce, et

  3   moi, je n'ai pas très bien compris pourquoi cet homme m'a entraîné dans sa

  4   chute alors que j'étais assis sur une chaise. Mais voilà, c'est comme ça

  5   que les choses se sont passées. Moi, j'ai eu du mal à comprendre.

  6   M. Blaxill (interprétation). – Hier, vous avez fait référence à

  7   quelqu'un qui utilisait juste avant cet incident de la chute sur le sol,

  8   un incident au cours duquel quelqu'un a utilisé un appareil Motorola.

  9   Peut-être ai-je mal pris les notes à ce sujet, au cours de la séance

 10   d'hier. Pourriez-vous répéter ce qui, d'après vous, a été dit par cet

 11   homme qui utilisait l'appareil Motorola ?

 12   M. V. Kupreskic (interprétation). – Je ne me rappelle pas avoir

 13   dit ce que cet homme avait dit lui-même, je ne me rappelle pas ce qu'il a

 14   dit. Je ne sais pas, je ne crois pas avoir dit cela.

 15   A ce moment-là, j'étais tellement terrifié que j'aurais été

 16   incapable de me rappeler, et je n'osais même pas avoir l'audace d'écouter

 17   ce qu'il disait ; je pensais que c'était dangereux.

 18   M. Blaxill (interprétation). - C'est une remarque que vous

 19   faites. Nous en resterons là, Monsieur Kupreskic, vous et moi.

 20   Monsieur, vous avez décrit l'intérieur de votre maison, son

 21   aspect quand vous êtes arrivé à l'intérieur de la maison. Je crois vous

 22   avoir entendu dire que le contenu de certaines casseroles avait été jeté

 23   au sol, que la maison avait été un peu... était en désordre, que la terre

 24   de pots de fleurs se trouvait également sur les tapis.

 25   M. V. Kupreskic (interprétation). - Eh bien, c'est difficile à


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  1   décrire exactement, ce serait une perte de temps, mais tout était sens

  2   dessus dessous. Et je me rappelle ce que m'a dit mon père plus tard : ces

  3   soldats lui ont dit : "Mais comment se fait-il que dans une maison aussi

  4   riche, il n'y ait pas d'argent ?", et ils forçaient mon père à trouver de

  5   l'argent. C'était impossible, il n'y en avait pas.

  6   M. Blaxill (interprétation). - Très bien. Monsieur Kupreskic,

  7   pouvez-vous me dire si les fenêtres du bâtiment étaient intactes quand

  8   vous êtes arrivé dans votre maison le 16 avril 1993 ? Si les vitres

  9   étaient intactes ?

 10   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je n'ai pas vu ce jour-là ce

 11   qu'il en était, mais plus tard.

 12   M. Blaxill (interprétation). - Je vous demande, Monsieur, si les

 13   vitres des fenêtres étaient intactes quand vous êtes arrivé dans votre

 14   maison le 16 avril 1993.

 15   M. V. Kupreskic (interprétation). - Les fenêtres de ces deux

 16   pièces -ce sont les seules dont je peux parler- étaient intactes.

 17   M. Blaxill (interprétation). - Elles n'avaient pas été

 18   endommagées. Y avait-il d'autres militaires dans l'une quelconque des

 19   autres pièces de la maison ?

 20   M. V. Kupreskic (interprétation). - Il y a encore un autre étage

 21   et il y a encore des pièces à cet étage, d'autres pièces, mais je n'ai pas

 22   vu ce qui se trouvait à cet endroit, je n'osais même pas me retourner. Je

 23   n'ai vu que ce qui se passait dans ces deux pièces parce qu'une porte en

 24   accordéon sépare les deux pièces et cette porte en accordéon était

 25   ouverte, mais elle était déjà cassée. Cette porte était démolie, cette


Page 11264

  1   porte-accordéon.

  2   M. Blaxill (interprétation). - Mais si vous n'êtes pas monté à

  3   l'étage, avez-vous entendu le bruit de bottes foulant le sol ou le bruit

  4   de pas d'une ou plusieurs personnes circulant à l'étage ?

  5   M. V. Kupreskic (interprétation). - Vraiment, je n'ai rien

  6   entendu, maintenant, compte tenu de mon état de panique et de terreur,

  7   est-ce que j'aurais dû l'entendre ? Je ne le sais pas, mais je n'ai pas

  8   entendu.

  9   M. Blaxill (interprétation). - Vous affirmez, Monsieur, que les

 10   deux pièces dont vous avez parlé, qui avaient été occupées par les

 11   soldats, je suppose que ces pièces avaient des issues, des portes.

 12   Avaient-elles des portes ?

 13   M. V. Kupreskic (interprétation). - Il y a trois portes dans ces

 14   deux pièces, deux portes d'entrée, une pour chaque pièce, et trois portes

 15   accordéon séparant les deux pièces.

 16   M. Blaxill (interprétation). - Je me rends compte que vous

 17   décrivez des circonstances qui étaient assez pénibles et stressantes. Mais

 18   avez-vous remarqué quel était l'état de ces portes quand vous avez pénétré

 19   dans la maison ?

 20   M. V. Kupreskic (interprétation). - Les portes de ces deux

 21   pièces n'étaient pas endommagées à ce moment-là, au moment où je me suis

 22   trouvé dans la maison, pour autant que je me rappelle aujourd'hui, mais je

 23   n'ai pas regardé précisément les portes, mais je pense qu'elles étaient

 24   intactes.

 25   M. Blaxill (interprétation). - Je parlerai plus tard et nous


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  1   examinerons certains passages de votre interrogatoire de juin 1998, que

  2   nous avons étudié avec M. Terrier.

  3   Vous avez dit à M. Terrier : "J'ai trouvé mon père en larmes, la

  4   maison était dévastée et détruite", (Fin de citation).

  5   Dans la partie dont vous dites qu'elle était occupée par des

  6   soldats, ce que je vous dis, Monsieur, c'est que ce que vous venez de dire

  7   au sujet de ces pièces correspond assez mal à une description de

  8   dévastation ou de destruction, à moins qu'il ne s'agisse -entre nous- d'un

  9   malentendu purement linguistique.

 10   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, parce qu'effectivement

 11   vous utilisez des termes différents.

 12   Pourtant, les dommages ont été évalués à 25 000 DM et cette

 13   évaluation a été remise ici en tant qu'élément de preuve. C'est

 14   l'évaluation des dommages. Donc en constatant quel est le montant de cette

 15   somme, vous pouvez constater peut-être quelle est l'étendue des dégâts qui

 16   ont été infligés à cette maison. Mais, bien entendu, la maison n'était pas

 17   totalement détruite.

 18   M. Blaxill (interprétation). - Qu'est-il arrivé aux pantalons

 19   Levis ? Vous aviez emballé les Levis pour les livrer à Travnik : qu'est-il

 20   arrivé à cette cargaison ?

 21   M. V. Kupreskic (interprétation). - Cela aussi a été volé,

 22   emporté.

 23   M. Blaxill (interprétation). - Y avait-il d'autres articles qui

 24   étaient destinés à Travnik, qui se trouvaient dans la maison et qui

 25   auraient disparu ?


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  1   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui. Il y avait de la

  2   lingerie, il y avait des baskets. Car une partie de ces articles était

  3   préparée, emballée pour le client dont j'ai parlé, et l'autre partie était

  4   emballée pour être envoyée à notre entreprise.

  5   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur Kupreskic, avant

  6   d'envoyer ces articles à Travnik, vous les aviez entreposés quelque part.

  7   Alors où les avez-vous entreposés ?

  8   M. V. Kupreskic (interprétation). - Ivica et moi avions

  9   entreposé ces articles dans le garage, mais puisqu'il fallait faire deux

 10   emballages, un emballage devant rester dans l'entreprise et l'autre devant

 11   partir jusqu'au domicile du client, mon épouse et moi-même avons

 12   transporter ces articles à l'étage, parce que c'est à l'étage que nous

 13   adressions les paquets. C'est là que nous avions les étiquettes des

 14   adresses, c'est là que nous rédigions les factures ; donc ces articles ont

 15   fini par se trouver au premier étage de ma maison.

 16   M. Blaxill (interprétation). - Donc ces articles se trouvaient à

 17   un étage supérieur à celui où se trouvait la pièce dans laquelle vous avez

 18   découvert votre père et les soldats, n'est-ce pas ?

 19   M. V. Kupreskic (interprétation). - Non, ces articles se

 20   trouvaient à l'étage où j'habitais, c'est-à-dire à l'endroit où se

 21   trouvaient les soldats, parce que, ce matin-là, mon intention était de

 22   faire au plus vite, de m'occuper de ces articles dès que je me lèverais le

 23   matin ; il n'y avait pas grand chose.

 24   M. Blaxill (interprétation). - En fait, les soldats vous ont

 25   chassés de la maison ; vous avez décrit cet événement. Un des soldats vous


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  1   a dit de libérer les lieux et de revenir plus tard. Quand vous êtes

  2   retourné chercher votre repère, vous avez déclaré que les soldats étaient

  3   partis, n'est-ce pas ?

  4   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui.

  5   M. Blaxill (interprétation). - Vous avez déclaré avoir eu la

  6   possibilité de prendre de la nourriture dans le réfrigérateur. Donc il est

  7   permis de penser que les soldats n'avaient pas volé la nourriture, n'est-

  8   ce pas ?

  9   M. V. Kupreskic (interprétation). - En effet, il ne l'ont pas

 10   volée, mais ce qu'ils n'ont pas volé, c'était ce qui se trouvait dans le

 11   réfrigérateur de mon père, en bas. Parce que moi, je me suis alimenté en

 12   prenant de la nourriture dans le réfrigérateur de l'étage, chez moi. Mais

 13   chez mon père, en bas, tout était renversé et détruit. J'ai vu à l'étage :

 14   tout était renversé et détruit. Mais, chez mon père, ils ont laissé ce

 15   qu'il y avait dans le réfrigérateur et, chez moi, ils ont tout pris. J'ai

 16   vu des aliments, des vivres sur la table dans le plus grand désordre.

 17   M. Blaxill (interprétation). – Est-ce que vous avez vérifié la

 18   totalité de la maison, à ce moment-là, lorsque vous êtes revenu, le 16 ?

 19   M. V. Kupreskic (interprétation). - Mais non, bien sûr que non,

 20   je n'ai fait que traverser l'entrée principale pour me rendre au premier

 21   étage, arriver dans ces deux pièces. J'y suis resté le temps que j'y suis

 22   resté et ce temps ne m'a permis que de voir l'état de ces deux pièces -et

 23   encore, en partie-, ainsi que le couloir et l'escalier, une partie de

 24   l'escalier. C'est tout ce que j'ai pu voir ce jour-là. Je n'ai même pas eu

 25   le courage, le soir, aux alentours de 18 heures, de vérifier l'état de


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  1   toute la maison parce que je craignais à chaque instant qu'ils reviennent.

  2   J'ai bien compris ce qui se passait, j'ai bien compris que c'était la

  3   guerre.

  4   M. Blaxill (interprétation). – Donc il est impossible de dire

  5   manifestement si les dommages ou quoi que ce soit qui soit arrivé à votre

  6   maison soit le résultat des événements du 16 avril ou peut-être le

  7   résultat, la conséquence des événements qui se sont déroulés les jours

  8   suivants, alors que la guerre a continué, n'est-ce pas ?

  9   M. V. Kupreskic (interprétation). - Les destructions ont eu lieu

 10   le 16 et je suppose que des destructions ont également été infligées

 11   le 17, puisque je n'ai pas eu l'autorisation de m'approcher de la maison ;

 12   ils m'en ont empêché. Je pense que ces soldats, peu à peu, démolissaient

 13   les maisons de tout le monde, les unes après les autres, y compris des

 14   voisins musulmans et qu'ils l'ont fait dans les jours qui ont suivi. C'est

 15   ce que certains m'ont dit.

 16   M. Blaxill (interprétation). – Vous avez aussi entendu un soldat

 17   britannique qui s'est exprimé dans ce prétoire et qui dit que, ce jour-là,

 18   il a vu votre maison entre autres. Comme toutes les maisons appartenant à

 19   des Croates, cette maison semblait intacte en comparaison, en tout cas,

 20   avec les maisons des voisins musulmans qui étaient détruites. Qu'avez-vous

 21   à dire à ce sujet, Monsieur ? Est-ce exact ?

 22   M. V. Kupreskic (interprétation). - Pour autant que je me

 23   rappelle, cet homme n'a jamais dit m'avoir vu ce jour-là et il lui aurait

 24   été impossible de me voir ce jour-là.

 25   M. Blaxill (interprétation). – Je parlais de votre maison,


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  1   Monsieur. Il dit avoir vu des maisons intactes ce jour-là. Est-ce exact ?

  2   M. V. Kupreskic (interprétation). - Ce jour-là ? Ce qu'il a vu,

  3   je ne peux pas le dire avec certitude, mais évidemment, ce jour-là, ma

  4   maison n'était pas détruite dans la même mesure sans doute que les maisons

  5   de mes voisins. Parce que, quand ce soldat m'a escorté jusqu'à la maison,

  6   je n'ai eu qu'un instant pour voir que la maison de Sukrija Ahmic, mon

  7   voisin, était en feu ; par conséquent, elle était dans un état pire que ma

  8   maison à moi.

  9   M. Blaxill (interprétation). – J'ai encore une question à vous

 10   poser, Monsieur, au sujet de l'état de la maison. Et cette question est la

 11   suivante : est-il exact que le document produit par vous, je crois, à

 12   l'intention des Juges de cette Chambre, a été élaboré en 1995 ? Parce que

 13   c'est à cette date, n'est-ce pas, que la plainte a été déposée, en 1995 ?

 14   M. V. Kupreskic (interprétation). - Pour autant que je me

 15   rappelle, oui, c'était bien en 1995.

 16   M. Blaxill (interprétation). – Monsieur le Président, j'en suis

 17   arrivé, sur le plan des questions que je voulais poser, au moment où

 18   j'aimerais passer à un autre point et il n'y a encore que deux documents :

 19   le journal de guerre, premièrement, qui a été soumis aux Juges et

 20   l'interrogatoire, en 1998, de l'accusé par M. Terrier, que je voudrais

 21   soumettre à la Chambre. Peut-être pourrais-je vous les déposer avant le

 22   déjeuner. Après quoi, j'aurai très peu de références documentaires à

 23   aborder ; cela ne me prendra pas beaucoup de temps.

 24   M. le Président (interprétation). – Très bien. J'aimerais saisir

 25   l'occasion pour demander à Me Krajina s'il souhaite verser au dossier le


Page 11270

  1   dessin fait par Vlatko Kupreskic ? Le dessin utilisé par le témoin, ce

  2   matin ?

  3   M. Krajina (interprétation). – Non, Monsieur le Président.

  4   M. le Président (interprétation). – Non ? Je pensais que cela

  5   pourrait être utile. Enfin, si vous ne le souhaitez pas...

  6   M. Krajina (interprétation). – Dans ce cas, je vous remercie et

  7   je demande le versement de cette pièce en tant qu'élément de preuve de la

  8   défense. Nous pensions que, puisqu'il s'agissait d'un dessin fait par

  9   l'accusé, que nous n'avions pas vu avant... Mais, bon. Merci de votre

 10   proposition. Nous acceptons cette proposition.

 11   M. Blaxill (interprétation). – Je ne fais pas d'objection au

 12   versement de ce document.

 13   M. le Président (interprétation). – Très bien. Donc ce document

 14   est admis en tant qu'élément de preuve. Nous suspendons l'audience jusqu'à

 15   14 heures 30.

 16   L'audience, suspendue à 13 heures, est reprise à 14 heures 35.

 17   M. le Président (interprétation). – Je vous en prie.

 18   Mme Ameerali (interprétation). –  Nous avons une pièce à

 19   conviction, photo-croquis de Vlatko Kupreskic, D62/3.

 20   M. le Président (interprétation). – Monsieur Blaxill.

 21   M. Blaxill (interprétation). – Merci, Monsieur le Président.

 22   Monsieur Kupreskic, je voudrais vous poser une question pour

 23   éclaircir quelque chose. Vous êtes allé une première fois pour voir votre

 24   père. C'était exactement à quelle heure, s'il vous plaît ? Pourriez-vous

 25   dire en même temps combien de temps vous êtes resté chez vous, à la


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  1   maison ? Cette première fois, quand vous avez vu votre père et que les

  2   soldats y étaient ?

  3   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je ne peux pas vous préciser

  4   l'heure, mais je pense ne pas être resté, quand j'ai vécu tout ce qui

  5   s'est passé, pas au-delà de vingt minutes. Mais, pour moi, ces vingt

  6   minutes étaient vraiment beaucoup, elles représentaient beaucoup, tout au

  7   moins, actuellement, j'en ai l'impression. Mais cela n'a pas dépassé vingt

  8   minutes, entre un quart d'heure et vingt minutes.

  9   M. Blaxill (interprétation). – Merci. La question que je

 10   voudrais voir maintenant est la pièce à conviction 13/1 ; c'est une pièce

 11   à conviction de la défense. L'huissier voudra bien m'aider pour soumettre

 12   cette pièce au témoin.

 13   (L'huissier s'exécute.)

 14   M. Blaxill (interprétation). – Monsieur Kupreskic, j'aimerais

 15   une fois de plus apporter quelques précisions. J'aurais pu vous poser ce

 16   type de question avant, mais je pense que ce que vous avez sous vos yeux,

 17   les photos représentent l'abri dans la maison de Vrebac, n'est-ce pas ?

 18   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui.

 19   M. Blaxill (interprétation). – Pourriez-vous, s'il vous plaît,

 20   nous dire où, dans cet abri, vous vous trouviez au moment où vous êtes

 21   arrivé pour la première fois ?

 22   M. V. Kupreskic (interprétation). - Cela se trouvait dans le

 23   sous-sol. Nous avons descendu l'escalier.

 24   M. Blaxill (interprétation). – Pourriez-vous nous dire quel est

 25   le numéro par lequel la pièce a été marquée, s'il vous plaît ?


Page 11272

  1   M. V. Kupreskic (interprétation). - Nous étions à gauche. Donc,

  2   il y a des escaliers et il y avait une pièce que l'on ne voit pas sur la

  3   photo, à gauche. Toutes les pièces ne sont pas présentées sur les photos.

  4   Je m'en souviens fort bien, car ces deux pièces sont en face de celle où

  5   nous étions ; et puis, elles n'avaient pas de porte. Il n'y avait que

  6   cette ouverture. Mais, dans la pièce où nous étions, il y avait une porte.

  7   Par conséquent, sur la photo numéro 4, vous ne voyez pas l'entrée de la

  8   pièce où nous étions.

  9   M. Blaxill (interprétation). – Est-il possible qu'éventuellement

 10   on ne voie que l'ouverture de la porte ici ? C'est cela ?

 11   M. V. Kupreskic (interprétation). - On entrevoit un peu.

 12   M. Blaxill (interprétation). – Merci. Etes-vous resté dans cette

 13   pièce pendant tout le temps que vous êtes resté dans l'abri ou avez-vous

 14   changé d'endroit ?

 15   M. V. Kupreskic (interprétation). - Non, je suis arrivé en

 16   dernier pratiquement. Il y avait beaucoup de personnes ; c'était déjà

 17   rempli et, notamment, dans ces pièces au sous-sol. Très peu après, je suis

 18   monté et j'ai regagné cette pièce que l'on voit sur la photo numéro 1. Il

 19   y a un couloir, une antichambre.

 20   A ce niveau-là, au rez-de-chaussée, il y a encore quelques

 21   autres pièces et je me souviens que c'est dans les toilettes que je me

 22   suis trouvé. On voit les fenêtres. C'est une salle de bains au fond. Et

 23   puis, il y a également des fenêtres que vous apercevez devant. Et il y

 24   avait aussi la moquette qui a été enlevée parce que personne n'habitait

 25   ces deux-pièces.


Page 11273

  1   M. Blaxill (interprétation). – Merci, Monsieur Kupreskic.

  2   Nous pouvons poursuivre, si vous voulez bien. Je vais vous poser

  3   quelques questions, cette fois-ci, concernant le temps, y compris le

  4   16 avril 1993, mais nous n'allons pas dépasser cette date.

  5   Est-ce que vous, jusqu'au 16 avril, y compris le 16 avril 1993,

  6   avez-vous vous-même porté des armes à feu, vous personnellement ?

  7   M. V. Kupreskic (interprétation). - Jusqu'au 16 avril 1993, car

  8   c'est ainsi que je vous ai compris et que vous m'avez posé la question,

  9   jusqu'à ce jour-là, je n'avais absolument aucun fusil. J'ai acheté le

 10   fusil après la guerre, je l'ai déjà précisé.

 11   M. Blazevic (interprétation). - Est-ce que vous avez d'autres

 12   armes, un pistolet éventuellement, qui étaient dans votre propriété

 13   jusqu'au 16 avril ?

 14   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, je pense... Je ne pense

 15   pas, je sais que j'avais, avec une autorisation, un pistolet. Je ne me

 16   souviens pas exactement, mais c'était en 1985 que je me suis acheté ce

 17   pistolet, comme je circulais beaucoup, je voyageais beaucoup, je voyageais

 18   la nuit, je traversais le territoire. C'est avec autorisation bien

 19   évidemment que je possédais ce pistolet. Mais que vous me croyez ou non,

 20   moi, je n'ai pas tiré en dix ans plus de dix balles. Je me souviens,

 21   c'était avec mon père parce qu'on avait organisé des fêtes et qu'il était

 22   de coutume de tirer en l'air quelques balles.

 23   M. Blaxill (interprétation). - Vous venez de dire que vous

 24   l'avez acheté parce que vous avez beaucoup voyagé. Cela veut-il dire que

 25   vous avez porté ce pistolet pour votre propre protection ?


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  1   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, je l'avais normalement

  2   dans la voiture, devant, pour me protéger. Oui, c'est pour ça.

  3   M. Blaxill (interprétation). - Je présume, Monsieur Kupreskic,

  4   que les dix balles que vous avez tirées, que c'était plutôt pour vous

  5   entraîner ?

  6   M. V. Kupreskic (interprétation). - Mais les armes ne

  7   m'intéressaient jamais. Je ne sais même pas pourquoi. Je sais qu'une fois,

  8   j'étais chez moi, à la maison, et en montrant à mon ami le pistolet, une

  9   balle avait été tirée. J'ai eu tellement peur que, par la suite, je ne

 10   l'ai même plus pris avec moi, même pas dans la voiture. Et même,

 11   aujourd'hui, je l'ai ce pistolet. Vous pouvez même, éventuellement,

 12   appeler un expert et faire une expertise et vous verrez qu'on n'a pas tiré

 13   beaucoup de balles avec ce pistolet.

 14   M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que ces balles, ces dix

 15   balles ont été tirées sur une cible ? Etait-ce un entraînement ou dans

 16   quelles conditions avez-vous tiré ?

 17   M. V. Kupreskic (interprétation). - Quand c'était à la maison,

 18   le pistolet a tiré tout seul, je ne sais pas, la gâchette n'était pas bien

 19   mise. Mais c'est mon père qui l'avait utilisé. Par exemple, à Noël, c'est

 20   de coutume de tirer en l'air quelques balles. C'était la même chose pour

 21   les fêtes de famille. Cela arrivait, mais moi-même non, jamais.

 22   M. Blaxill (interprétation). - A cette occasion où cela s'est

 23   passé tout à fait par hasard, pouvez-vous dire à quel moment cela s'est

 24   passé ?

 25   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je pense que c'était en 88


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  1   ou 89, je ne me souviens pas exactement, mais je pense que c'est là

  2   effectivement qu'il y a eu cet incident, que le pistolet est parti tout

  3   seul parce que le cran de sécurité de la gâchette n'était pas mis.

  4   M. Blaxill (interprétation). - En ce qui concerne d'autres

  5   armes, le fusil ou une carabine, vous avez dit que vous n'avez jamais

  6   vous-même possédé de telles armes, y compris le 16 avril 93. C'est ainsi

  7   que je l'ai compris, est-ce vrai ?

  8   M. V. Kupreskic (interprétation). - C'est vrai, vous avez bien

  9   compris, je n'ai jamais possédé un fusil.

 10   M. Blaxill (interprétation). - A cette même période, à n'importe

 11   quel moment, étiez-vous dans la situation de posséder une arme

 12   temporairement, par exemple, qu'un ami vous ait laissé un fusil, une autre

 13   arme, peu de temps ?

 14   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je me souviens d'une scène,

 15   c'était quelque peu ridicule : c'était le 16 avril, au moment où je suis

 16   venu, c'était vers 13 heures, et j'ai dit qu'à la sortie de cette grande

 17   forêt, au croisement où il y avait une petite forêt, j'ai rencontré Drago

 18   Grgic. Lui, il portait un fusil, un petit fusil. Par la suite, j'ai appris

 19   que c'était le fusil qui appartenait à Ivica Kupreskic ; c'était une

 20   carabine au fond, c'était un fusil de chasse. Probablement qu'Ivica avait

 21   déposé ce fusil chez lui. Et il m'avait dit : "Tiens, tu peux prendre ce

 22   fusil, tu peux le passer à Ivica". Moi, j'étais confus. Je ne savais pas à

 23   qui appartenait ce fusil. Au moment où il m'a passé le fusil, la gâchette

 24   s'est déclenchée ; une fois de plus une balle est partie et moi, j'ai eu

 25   peur. Puis j'ai dit : "Non, je ne veux pas le prendre parce que j'ai peur


Page 11276

  1   et que je ne sais pas manier le fusil".

  2   Il y avait Anto Vidovic, surnommé Catko, qui était avec nous. Il

  3   a été quelques secondes dans mes mains. Par la suite, j'ai appris d'Ivica

  4   que c'était effectivement son fusil et qu'il l'avait repris. Et que ce

  5   fusil a été gardé par quelqu'un et qu'il l'avait repris.

  6   M. Blaxill (interprétation). - Entendu.

  7   Maintenant, j'aimerais me référer à votre journal de guerre, si

  8   vous le voulez bien, et jeter un coup d'œil une fois de plus sur quelques

  9   points. J'aimerais me référer à quelques notes de ce journal de guerre.

 10   Monsieur le Président, Madame le Juge, Monsieur le Juge, je vais

 11   me reporter à la page n° 2 ; c'est le 8 décembre 1993.

 12   M. V. Kupreskic (interprétation). - Monsieur le Procureur,

 13   pouvez-vous me permettre de donner quelques explications, s'il vous plaît,

 14   devant la Chambre et notamment au sujet de ce journal de guerre, pour que

 15   les Juges puissent mieux suivre et véritablement comprendre de quoi il

 16   s'agit, et ce que représente ce journal de guerre ?

 17   Ce journal de guerre a 49 page au total. Les 12 premières pages,

 18   par conséquent -y compris cette page sur laquelle il n'y a rien : c'est la

 19   page de couverture en quelque sorte-, se rapportent aux notes et les

 20   données concernant mes activités au sein de la commission du logement, qui

 21   a développé ses activités entre 87 et 88, et dans mon entreprise SPS. Par

 22   conséquent, les 12 premières pages datent de 87 et 88 et portent sur mes

 23   activités dans cette entreprise.

 24   Les quinze pages qui suivent ces douze premières pages, y

 25   compris ces pages de 1 à 15, comme je l'ai marqué, c'est effectivement le


Page 11277

  1   journal de guerre.

  2   Ce serait dans votre document à partir de la page 13. On peut

  3   compter ces pages comme le journal de guerre. Tous les jours, j'ai marqué

  4   ce que j'ai fait. Cela comprend une autre période. La période où j'ai été

  5   mobilisé, où j'ai été chauffeur auprès de ce centre médical ; en d'autres

  6   termes, à partir du 15 septembre 1993 jusqu'au 27 avril 1993, quand j'ai

  7   été démobilisé, quand je n'avais plus de tâche à remplir à ce poste.

  8   En d'autres termes, ces quinze pages se rapportent à ce journal

  9   de guerre comme je le désigne. Ensuite, les 22 pages, à partir de la

 10   page 27 jusqu'au n° 49, ces 22 pages se rapportent aux préparatifs de ma

 11   défense devant cette Chambre et ce sont les notes que moi-même j'ai prises

 12   en 1996 et en 1997

 13   Par conséquent, je pense que vous voyez plus clairement de quoi

 14   il s'agit. On peut par conséquent distinguer les trois chapitres. Il y a

 15   d'abord les notes de l'entreprise SPS, ensuite le journal de guerre, ce

 16   que j'ai fait. Et, en troisième lieu, il y a les préparatifs de ma défense

 17   devant cette Chambre. Ils se constituent de trois parties.

 18   M. Blaxill (interprétation). - Nous allons donc nous référer,

 19   Monsieur Kupreskic, à la deuxième partie. Je vais vous demander -pour

 20   abréger quelque peu- la date est le 13 décembre 1993 : c'est la deuxième

 21   page de notre traduction, Monsieur le Président, Madame le Juge, Monsieur

 22   le Juge.

 23   Serez-vous d'accord avec moi, Monsieur Kupreskic, que c'est bien

 24   vous qui avez pris les notes et que c'est le Dr Bosko qui vous a informé,

 25   ce soir-là, qui vous a désigné pour le commandant de la section sanitaire


Page 11278

  1   du 1er Bataillon ? Est-ce bien cela ?

  2   M. V. Kupreskic (interprétation). – C'est à droite. On parle du

  3   9-12-93 pour que l'on soit au clair. C'est marqué que le Dr Bosko m'a

  4   informé le soir. Effectivement, vous en avez donné lecture. C'est vrai.

  5   M. Blaxill (interprétation). – Est-il vrai, si nous voyons les

  6   pages qui suivent...

  7   M. V. Kupreskic (interprétation). – Mais je n'ai pas répondu à

  8   la question que vous m'avez posée. J'ai tout simplement constaté ce qui a

  9   été marqué, mais je peux vous donner mon commentaire, si vous voulez bien.

 10   A cette époque-là, le Dr Bosko, effectivement, m'a demandé…

 11   Etant donné que j'étais le seul homme dans le service médical, et je pense

 12   qu'il y avait plusieurs dispensaires qui existaient dans ce territoire, et

 13   sachant également que j'avais aussi un certain nombre de qualités sur le

 14   plan organisation, le Dr Bosko m'a demandé de l'aider pour contrôler,

 15   surveiller les dispensaires en dehors de Zume, où moi-même j'étais

 16   chauffeur.

 17   C'est pourquoi il avait proposé à M. Bertovic de me désigner

 18   comme tel, mais moi, je ne l'ai pas accepté. Et ceci, peut être conclu de

 19   ce même journal de guerre et de la description qui est donnée sur la même

 20   page.

 21   Et si vous pouvez me suivre, c'est en bas à droite. C'est marqué

 22   le 17-12-93 où moi, je dis -et je cite- : "Je n'accepte pas et je suis

 23   allé déposer une plainte et parlé avec M. Sahivic". Justement à ce propos-

 24   là, j'ai bien précisé que je ne voulais pas effectuer ces tâches. C'est

 25   avec M. Sahivic que j'ai eu cet entretien le 17 décembre 1993.


Page 11279

  1   De tout façon, j'avais pris note absolument chaque jour pour

  2   préciser ce qui s'était passé, et comment se sont déroulées mes journées.

  3   Ultérieurement, après cet entretien avec M. Sahivic, on m'avait donné un

  4   ordre verbal et je n'avais absolument rien à faire d'autre que d'aider le

  5   Dr Bosko. Je n'ai jamais eu de documents, on ne m'a jamais désigné sous

  6   forme écrite à ce poste-là. Comment ce poste s'appelait-il, si j'avais

  7   tout simplement rendu visite à des dispensaires différents ? Je ne sais

  8   pas. Mais je n'ai jamais eu de décision écrite à ce sujet.

  9   Plus loin, vous pouvez voir également… Je pense que ceci était

 10   le 20 décembre 1993, on m'avait donc ordonné verbalement d'aider le

 11   Dr Bosko et de visiter d'autres dispensaires. Vous pouvez le voir dans la

 12   suite.

 13   M. Blaxill (interprétation). - Par conséquent, nous pourrions

 14   dire, Monsieur Kupreskic, n'est-ce pas, si l'on se réfère à ces pages

 15   différentes, on peut en déduire de ce que vous avez dit, que vous avez

 16   rendu visite à des dispensaires différents. Nous allons voir la page 8 de

 17   la traduction. Nous pouvons voir ce qui a été marqué. Le premier concerne

 18   la période du 1er février 1994 au 4 février 1994.

 19   M. V. Kupreskic (interprétation). – Non, mais il ne s'agit

 20   absolument pas de cliniques ! Ce sont des dispensaires au niveau des

 21   villages qui étaient installés dans des caves avec trois, quatre femmes.

 22   Il n'y avait pratiquement pas une infirmière, même pas une aide soignante.

 23   Comment voulez-vous dire que j'avais rendu visite aux cliniques

 24   différentes ? Non ! Je ne suis pas médecin.

 25   M. Blaxill (interprétation). – Ce que j'aimerais vous demander


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  1   au sujet de ces notes que vous avez consignées dans ce document pour la

  2   période du début du mois de février, nous voyons des références faites à

  3   des inspections réalisées auprès de soldats ; notamment le 3 février 1994,

  4   une inspection réalisée ce jour-là, et puis le 4 février, une nouvelle

  5   inspection.

  6   Ces inspections étaient-elles réalisées par vous pour

  7   représenter le Dr Bosko ? Ou étaient-elles réalisées par des tiers ?

  8   Pouvez-vous nous le dire brièvement ?

  9   M. V. Kupreskic (interprétation). – Oui, brièvement. Puisque

 10   j'avais reçu l'ordre d'apporter mon aide au Dr Bosko, encore aujourd'hui,

 11   d'ailleurs, nous avons très peu de médecins à Vitez. Donc ce que je

 12   faisais, c'était de prendre des notes de façon à ce que la commission

 13   puisse examiner ces notes au sujet de ces patients. J'étais à ce poste

 14   uniquement pour prendre des notes. Je dirai que là encore, je faisais le

 15   travail qui était le mien.

 16   Mais je ne suis absolument pas un professionnel capable

 17   d'évaluer le degré d'invalidité de ces personnes, dirais-je.

 18   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur Kupreskic, disons la

 19   chose suivante : vous avez, par exemple, expliqué le contenu d'un document

 20   émanant de l'administration de la police dans lequel il est inscrit qu'au

 21   lieu de vous payer, on vous donne un titre ; est-il logique, dans ces

 22   conditions, que si ce certificat émanait du HVO et portait sur votre

 23   période de travail, ou supposée telle, nous lisons -je cite- : "Exécuter

 24   les activités d'assistant" ? Serait-ce une bonne façon de décrire l'aide

 25   que vous avez apportée au Dr Bosko ?


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  1   M. V. Kupreskic (interprétation). - Non, en aucun cas, je

  2   n'aurais pu être l'assistant du Dr Bosko, je n'ai aucun rapport avec la

  3   médecine et je n'ai jamais exécuté des activités de ce genre ou reçu un

  4   papier à cet égard. Le document qui est présenté par le Procureur, je l'ai

  5   vu pour la première fois ici et, pour moi, il est de nature plus que

  6   suspecte. A quel moment a-t-il été élaboré ? Quelle est la nature de ce

  7   document ?

  8   M. Blaxill (interprétation). - Bien. Monsieur Kupreskic,

  9   j'aimerais regarder la pièce à conviction de l'accusation 329, je vous

 10   prie.

 11   (L'huissier s'exécute.)

 12   Le document que vous voyez sur le rétroprojecteur en ce moment,

 13   vous le lisez, n'est-ce pas, en langue croate, bosniaque, n'est-ce pas ?

 14   (Le témoin acquiesce.)

 15   Vous dites que vous n'avez jamais vu de toute votre vie ce

 16   document avant de le voir produit ici dans ce prétoire par le Procureur ;

 17   est-ce exact ?

 18   M. V. Kupreskic (interprétation). - C'est exact, c'est ici que

 19   je l'ai vu pour la première fois.

 20   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur Kupreskic, vous

 21   rappelez-vous qu'une mallette a été saisie chez vous, sur vous, au moment

 22   de votre arrestation .

 23   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je me rappelle que j'avais

 24   un cartable, je ne sais pas quand il a été saisi. J'ai simplement appris

 25   plus tard qu'on l'avait emporté de chez moi, mais je ne me rappelle


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  1   absolument pas qu'il y ait eu un document de ce genre dans ce cartable,

  2   car je n'ai jamais vu ce document jusqu'à présent.

  3   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur Kupreskic, puis-je me

  4   permettre de vous dire que, lorsque le contenu de cette mallette a été

  5   inventorié par le bureau du Procureur, ce document a été trouvé dans votre

  6   mallette, votre attaché-case ? Vous continuez à affirmer n'avoir aucune

  7   connaissance de l'existence de ce document ?

  8   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je l'affirme parce que c'est

  9   moi, maintenant, qui vais vous dire quelque chose. J'ai reçu le document

 10   sur lequel figuraient l'adresse et le numéro de téléphone de la mère

 11   d'Anto Furundzija, ce qui montre bien qu'il s'agit de spéculations.

 12   Spéculations de qui ? Je ne sais pas. Mais moi, je ne connaissais pas Anto

 13   Furundzija, j'ai fait sa connaissance ici, au quartier de détention et je

 14   connaissais encore moins sa mère ou son numéro de téléphone ; comment

 15   aurais-je connu cela ?

 16   Le prénom et le prénom de famille de sa mère et son numéro de

 17   téléphone sur ce document, d'où viennent-ils ? Alors qu'en est-il de ce

 18   document que j'ai entre les mains ?

 19   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur Kupreskic, il existe des

 20   registres du HVO qui disent que vous n'êtes pas apte au service. Ce

 21   document a été trouvé dans votre attaché-case ; êtes-vous d'accord sur ce

 22   fait que ce document a bien été trouvé dans votre attaché-case ?

 23   M. V. Kupreskic (interprétation). - Mon livret militaire, oui,

 24   il était dans mon attaché-case, bien entendu.

 25   M. Blaxill (interprétation). - Est-il vrai également, Monsieur,


Page 11283

  1   qu'il y avait un magnétophone et une cassette enregistrée qui ont

  2   également été trouvés dans votre attaché-case ?

  3   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, tout cela est exact,

  4   sauf ces deux documents : celui-ci que j'ai entre les mains, dont je ne me

  5   souviens pas, je ne l'ai jamais vu, je l'ai vu ici pour la première fois,

  6   ainsi que le document comportant l'adresse et le numéro de téléphone de la

  7   mère de Furundzija.

  8   M. Blaxill (interprétation). - Et vous possédiez également des

  9   documents tels qu'un passeport, des documents d'affaires, professionnels,

 10   et un certain nombre d'autres documents qui se trouvaient dans cet

 11   attaché-case, n'est-ce pas ? Documents personnels ?

 12   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, tout cela est vrai,

 13   mais permettez-moi de dire que ces documents, vous le savez vous-même,

 14   puisqu'on en a discuté ici dans ce prétoire, ces documents ont voyagé, que

 15   cet attaché-case a été ouvert, qu'il a circulé d'un endroit à un autre.

 16   Donc tout est possible.

 17   M. Blaxill (interprétation). - N'est-il pas tout de même assez

 18   étonnant, Monsieur Kupreskic, que le document dont nous sommes en train de

 19   parler comporte votre nom, le nom de votre père, votre lieu de naissance,

 20   votre date de naissance, qu'il y soit stipulé que vous apparteniez au

 21   service médical du 92ème Régiment de Vitez, que vous étiez sans aucun doute

 22   impliqué dans une tâche professionnelle liée à la médecine et que vous

 23   avez été démobilisé le 15 janvier 1996 ?

 24   N'est-il pas assez étonnant que tous ces éléments figurant sur

 25   ce document aient trouvé leur chemin jusqu'à votre attaché-case, sans que


Page 11284

  1   vous n'en ayez eu connaissance ? Par conséquent, ce que je dis, c'est que

  2   vous connaissiez ce document, que vous saviez qu'il était en votre

  3   possession, que vous saviez qu'il était dans votre attaché-case, n'est-ce

  4   pas ?

  5   M. V. Kupreskic (interprétation). - Les données figurant ici

  6   sont inexactes à part le fait qu'il s'agit de moi, que je suis né à tel

  7   moment et à tel endroit. La date est absolument inexacte. Et vous avez vu

  8   ici, à la 13ème page du journal, quelque chose que je n'ai pas pu inventer

  9   à savoir que j'ai été mobilisé le 15 septembre. Il est écrit très

 10   clairement : en 1993, en tant que chauffeur d'une ambulance ; et que j'ai

 11   exécuté cette fonction, si je ne m'abuse, jusqu'au 27 avril 1993. Tout

 12   cela figure dans le journal. Je n'ai pas pu l'inventer puisqu'il m'a été

 13   confisqué.

 14   Ici, sur ce document, la date est inexacte et l'activité

 15   exécutée est inexacte également. Et vous verrez aussi que le 15 janvier

 16   1996 est la date qui figure sur le certificat que j'ai entre les mains.

 17   Autrement dit, j'aurais été démobilisé le 15 janvier 1996, alors que cela

 18   faisait deux ans, largement, que je travaillais à l'entreprise Sutra et,

 19   un peu plus tard, dans mon entreprise à moi.

 20   M. Blaxill (interprétation). – Vous contestez donc le fait que

 21   ce document ait jamais était présent dans votre attaché-case, n'est-ce

 22   pas, en dépit du fait que nous avons ici un mémoire officiel indiquant que

 23   ce document a été saisi dans votre attaché-case ?

 24   Restons-en là. Je voudrais en revenir à votre journal personnel

 25   quelques instants. Monsieur le Président, Madame le Juge, Monsieur le


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  1   Juge, il me reste peu de questions.

  2   Page 17 de notre traduction. Je vous propose, Monsieur, de lire

  3   ce texte correspondant à la date du 8 août 1996. C'est à la fin des

  4   annotations correspondant à cette date, c'est-à-dire à peine quelques

  5   lignes avant le titre "9 août 1996".

  6   M. V. Kupreskic (interprétation). - J'ai trouvé la date du

  7   8 août 1996. Il est écrit jeudi également.

  8   M. Blaxill (interprétation). – Voyez-vous, vers la fin du

  9   passage, le nom de Zvonimir Hodak, inscrit par vous ?

 10   M. V. Kupreskic (interprétation). - Pouvez-vous m'éclairer ? Je

 11   ne vois pas où ce nom se trouve.

 12   M. Blaxill (interprétation). – Dans notre traduction, nous avons

 13   l'inscription "9 août 1996" ; un peu au-dessus de cette annotation du

 14   "9 août 1996", j'aimerais que vous regardiez ce qui est écrit.

 15   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je n'arrive pas à trouver

 16   cette date.

 17   (L'huissier montre un document au témoin.)

 18   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, maintenant je vois sur

 19   votre exemplaire.

 20   Sur votre exemplaire, oui.

 21   M. Blaxill (interprétation). – Vous avez inscrit une liste

 22   d'articles vestimentaires ?

 23   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui.

 24   M. Blaxill (interprétation). – Dans quel contexte parlez-vous

 25   ici d'un manteau en daim, de couleur chocolat, avec un doublure en


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  1   fourrure, et d'un pantalon en velours côtelé de couleur olive ? A quoi se

  2   rapportent ces indications ?

  3   M. V. Kupreskic (interprétation). - J'ai préparé ma défense et

  4   cela se trouve dans cette partie de mon journal ; je préparais ma défense.

  5   J'ai écrit les vêtements que je portais ce matin-là, le 16 avril 1993.

  6   Autrement dit, je portais des vêtements civils et je les décris avec

  7   précision. J'ai écrit d'ailleurs, au cinquième point de ce paragraphe, que

  8   je n'avais aucune arme.

  9   Donc, vous voyez l'inscription "vêtements" ; sous "vêtements",

 10   vous avez une série de tirets ; au cinquième tiret, j'inscris le fait que

 11   je ne portais aucune d'arme, que je n'avais aucune arme.

 12   M. Blaxill (interprétation). – N'est-il pas également inscrit

 13   -je cite- : "Mais, sur le chemin du retour, on m'a donné un fusil de

 14   petits calibre appartenant à I.K. et trois ou quatre balles". (Fin de

 15   citation.)

 16   Je suppose que cela se rapporte à l'incident dont vous venez de

 17   faire état.

 18   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, quelques secondes à

 19   peine.

 20   M. Blaxill (interprétation). – J'aimerais appeler votre

 21   attention à présent sur les documents rédigés au moment de

 22   l'interrogatoire effectué par le Procureur. Monsieur le Président,

 23   Madame le Juge, Monsieur le Juge, il s'agit du document rédigé au moment

 24   de l'interrogatoire effectué par le Procureur.

 25   Mme Ameerali (interprétation). - Pièce à conviction de


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  1   l'accusation de n° 381.

  2   (L'huissier s'exécute.)

  3   M. Blaxill (interprétation). - Je n'ai pas l'intention de

  4   revenir sur les terrains qui ont déjà été abordés de façon tout à fait

  5   approfondie, mais, Monsieur Kupreskic, est-il exact que vous ayez dit aux

  6   représentants du Bureau du Procureur, M. Terrier et M. Smith, au moment de

  7   cet interrogatoire, que lorsqu'on vous a appelé et que vous êtes allé voir

  8   votre père avant de vous rendre dans l'abri, votre père vous a dit : "Tu

  9   sais toi-même que nous n'avons eu aucun problème". Donc il est resté dans

 10   la maison alors que les autres sont partis pour l'abri. Vous rappelez-vous

 11   avoir dit cela ?

 12   M. V. Kupreskic (interprétation). - J'ai sans doute dit cela.

 13   Car vraiment... peut-être que c'est ainsi que les choses se sont passées,

 14   mais je ne peux pas me rappeler tous les détails aujourd'hui, ici ; mais

 15   vraiment, nous n'avons jamais eu de problème, avec qui que ce soit. Et, à

 16   ce moment-là, je répète que je considérais, et je l'ai dit cela dans le

 17   compte rendu, que ces détails n'étaient pas importants à l'époque, alors

 18   qu'aujourd'hui, ici, bien entendu, j'ai un avis différent.

 19   M. Blaxill (interprétation). - Vous avez dit, et cela figure

 20   dans la traduction anglaise, en page 14, le deuxième paragraphe important,

 21   je cite : "A 9 heures, j'étais dans l'abri. On nous a dit que nous

 22   pouvions sortir de l'abri pour nous rendre dans la cour devant l'abri".

 23   Quand je suis sorti, ma femme et mes enfants sont restés à

 24   l'intérieur de l'abri. J'ai été choqué par ce que j'ai vu ; je me suis

 25   dit : "Mon Dieu, c'est vraiment la guerre". Et, à ce moment-là, vous


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  1   dites : "Pas de coups de feu, il n'y avait pas de coups de feu, il n'y

  2   avait plus de coups de feu dans le voisinage, mais des maisons étaient

  3   déjà en feu, notamment les maisons qui se trouvaient près de la mienne". A

  4   ce moment-là, vous exprimez une inquiétude au sujet du fait que votre père

  5   était toujours à la maison, puis vous proposez de dessiner l'endroit où se

  6   trouvait votre maison.

  7   Monsieur Kupreskic, vous avez dit à ce moment-là qu'à 9 heures,

  8   vous étiez hors de l'abri et qu'il n'y avait pas de coups de feu. La

  9   question que je vous pose est donc la suivante : pourquoi n'êtes-vous pas

 10   allé voir votre père à ce moment-là, si ce qui est écrit ici est exact ?

 11   M. V. Kupreskic (interprétation). - Pouvez-vous me dire à quelle

 12   page cela est écrit ? A la page 13, n'est-ce pas ?

 13   M. Blaxill (interprétation). - Moi, je travaille sur la base

 14   d'une traduction anglaise, Monsieur Kupreskic. Donc nous avons peut-être

 15   un problème à lier nos deux exemplaires. Mais je vais essayer de me

 16   procurer un moyen pour vous orienter un peu dans ce texte. On me dit que

 17   cela se trouve aux alentours de la page 13. On venait de vous demander

 18   d'épeler le nom de Jozo Vrebac. Je vous prierais de lire ces quelques

 19   paragraphes, à cet endroit là.

 20   M. V. Kupreskic (interprétation). - J'ai trouvé.

 21   M. Blaxill (interprétation). - Donc ma question est celle que je

 22   vous ai posée : est-il exact qu'il n'y avait pas de coups de feu, à

 23   9 heures, au moment où vous vous trouviez hors de l'abri ? Et dans ces

 24   conditions pourquoi n'êtes-vous pas allé jusqu'à votre maison à ce moment-

 25   là ?


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  1   M. V. Kupreskic (interprétation). - Eh bien, vous voyez, en

  2   haut, il est écrit très clairement, sous la référence VK, c'est-à-dire

  3   Vlatko Kupreskic, mon nom : "J'étais dans l'abri..", et ici c'est un peu

  4   mal écrit... "...jusqu'à 9 heures 30". Je crois que tout cela correspond à

  5   ce que j'ai dit aujourd'hui ou plutôt hier dans ma déposition. Donc c'est

  6   bien ce que j'ai dit, qu'aux alentours de 9 heures et demie, je suis sorti

  7   de l'abri, dans cette entrée, parce que j'avais l'impression que les coups

  8   de feu s'étaient un peu calmés. Et de cet endroit, bien entendu, j'ai vu

  9   de la fumée. Il y avait encore des coups de feu. Et j'ai dit : "Mais mon

 10   Dieu, c'est vraiment la guerre".

 11   Je crois que j'ai décrit cette situation dans des termes assez

 12   semblables au cours de ma déposition ici, étant entendu que là encore il

 13   s'agit d'un débat portant sur des détails. Ce débat a été interrompu un

 14   peu plus tard. Je n'étais pas censé faire une description aussi détaillée

 15   que celle que je viens de faire ici au cours des deux derniers jours, à ce

 16   moment-là. A ce moment-là, je ne considérais pas qu'il était aussi

 17   important de tout décrire. Et la discussion que nous avions n'avait pas

 18   cela pour objet. Nous nous sommes entendus sur une certaine forme de

 19   discussion.

 20   Et vous savez que j'ai présenté ma défense au Procureur dans son

 21   intégralité. J'ai fourni les bases de ma défense et c'est la raison pour

 22   laquelle j'ai demandé à témoigner ici pour éclaircir, à l'intention des

 23   Juges, les détails dont vous êtes précisément en train de parler.

 24   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur Kupreskic, avec tout le

 25   respect que je vous dois, à ce moment-là, vous étiez détenu, vous étiez en


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  1   prison. Vous étiez interrogé par des représentants de l'accusation. Vous

  2   étiez en présence de deux avocats de la défense, Me Krajina et Me Par. Et

  3   en dépit de cela, vous dites que vous vous êtes comporté sur la base de

  4   l'idée que les détails n'étaient pas importants. C'est bien ce que vous

  5   nous dites, Monsieur ? Si c'est ce que vous dites, j'accepte ce que vous

  6   dites.

  7   M. V. Kupreskic (interprétation). - Eh bien, oui, à ce moment-

  8   là, je considérais que ce n'était pas important ! C'est même écrit.

  9   D'ailleurs, je vous trouverai la page où est écrit ce que je dis à

 10   M. Terrier en lui disant : "N'utilisez pas ceci demain à mon encontre". Je

 11   dis la vérité.

 12   Rendez-vous compte que c'est la première fois de ma vie que je

 13   participe à un interrogatoire de ce genre. L'une des raisons les plus

 14   convainquantes réside précisément dans le fait, et vous l'avez constaté,

 15   que j'ai été le premier à demander à témoigner devant les Juges de façon à

 16   éclaircir tout ce qu'il convenait d'éclaircir pour les Juges.

 17   M. Blaxill (interprétation). - Vers le bas de ce qui est la

 18   page 15 de notre traduction, à peu près huit paragraphes après ce que vous

 19   venez de lire, vous dites de quelle façon vous vous êtes trouvé engagé

 20   dans votre travail pour le service médical.

 21   L'une de vos phrases est la suivante. Je cite : "Je ne pouvais

 22   pas refuser ceci puisque, y compris jusqu'à ce moment-là, j'étais toujours

 23   négativement critiqué, j'étais critiqué en raison de ma passivité." ; (Fin

 24   de citation).

 25   En fait, avez-vous manifesté votre volonté d'aider le HVO dans


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  1   cette activité, dans ce travail, de façon à ce que la perception que l'on

  2   avait de vous change ? Perception qui consiste à penser que vous n'étiez

  3   pas prêt à prendre parti.

  4   M. V. Kupreskic (interprétation). - J'évitais tout engagement.

  5   Qui, s'il est normal, a le désir d'aller faire la guerre et d'aller faire

  6   quelque chose de précis dans le cadre d'une guerre ? Je crois que je suis

  7   un homme normal, ça, je n'ai jamais voulu l'accepter. Mais quand vous êtes

  8   menacé par des soldats, quand vous recevez des ordres, il n'y a pas

  9   d'autre moyen. Est-ce que c'est une faute, pour moi, d'avoir aidé les

 10   gens ?

 11   Moi, dans la ville de Vitez, pendant la guerre, j'ai aidé y

 12   compris les blessés musulmans ; j'ai un témoin, une femme musulmane -qui a

 13   témoigné ici- et je l'ai aidée avec mon automobile, et cette femme a

 14   témoigné. Elle a également témoigné dans les locaux de la municipalité.

 15   Une femme témoin musulmane.

 16   M. Blaxill (interprétation). - Un dernier point. Vous avez

 17   indiqué, au moment de votre interrogatoire, que vous aviez signé un

 18   certain nombre de documents commerciaux lorsque vous vous trouviez à

 19   Split ; avez-vous conservé ces documents en votre possession pour prouver

 20   les transactions auxquelles vous participiez ?

 21   M. V. Kupreskic (interprétation). - Ce n'est pas ce que j'ai

 22   dit. Si vous pensez à la journée du 14 avril 1994, ce jour-là, nous

 23   n'avons eu qu'une seule conversation, qui s'est conclue par un accord dans

 24   les locaux de l'entreprise Kotex.

 25   Mais avant cela, la seule chose que je peux vous dire, c'est que


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  1   nous avions des conversations, des pourparlers, des accords, et il existe

  2   des preuves y compris dans l'entreprise Uzor, de Split, qui s'occupait de

  3   commerce de textiles ainsi qu'à Jugoplastika, à Brodomerkur, deux autres

  4   entreprises.

  5   Toutes ces entreprises sont des grandes entreprises avec

  6   lesquelles nous travaillions. Je pense qu'il existe là-bas encore un

  7   document personnel m'appartenant, qui ressemble à mon journal personnel,

  8   qui prouve que nous avions des rapports précis avec ces entreprises de

  9   Split.

 10   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur Kupreskic, vous avez

 11   aussi fait référence, dans cet interrogatoire, à la maison. Vous avez dit

 12   que lorsque vous étiez retourné jusqu'à la maison pour voir votre père

 13   -ceci se trouve en page 32 du document de l'interrogatoire, Monsieur le

 14   Président, Madame et Monsieur les Juges- quels genres de dommages avez-

 15   vous constatés ?

 16   Et vous décrivez à cet endroit... vous dites que la porte

 17   d'entrée était brisée, que la serrure de la deuxième porte était défoncée,

 18   que toutes les fenêtres étaient ouvertes, regardant sur la route d'Ahmici,

 19   que les chambres à coucher étaient détruites et ensuite, vous décrivez ce

 20   que vous avez déjà dit ici aujourd'hui et hier, c'est-à-dire de la boue

 21   sur le sol, sans doute provenant de bottes boueuses. Continuez-vous à

 22   maintenir, ici, aujourd'hui, que cette description est une description

 23   précise des dommages subie par la maison ?

 24   M. V. Kupreskic (interprétation). - Bien entendu. Ce que j'ai

 25   dit à l'époque et ce que j'ai dit aujourd'hui au cours des deux derniers


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  1   jours, tout cela est exact.

  2   Je crois que j'ai fourni une très bonne description. Ce que je

  3   dis ici, c'est que lorsque je suis arrivé avec mon épouse une dizaine de

  4   jours plus tard dans ma maison, à ce moment-là, nous avons vu plus en

  5   détail tout ce qui s'était passé. Je pense que ces deux descriptions

  6   correspondent tout à fait bien.

  7   M. Blaxill (interprétation). - Bien. Monsieur le Président,

  8   Madame et Monsieur les Juges, je voudrais passer à un autre sujet.

  9   Brièvement, j'ai une petite bande audio à diffuser, très brève,

 10   quelques lignes de conversation, et j'aimerais qu'on la diffuse

 11   maintenant.

 12   Oui, nous avons des exemplaires pour les Juges.

 13   M. le Président (interprétation). - J'ai également besoin d'une

 14   cote pour le document relatif à l'interrogatoire... 381, excusez-moi.

 15   Mme Ameerali (interprétation). - Pièce à conviction de

 16   l'accusation.

 17   M. Krajina (interprétation). - Monsieur le Président, permettez-

 18   moi, nous ne savons pas de quelle cassette, de quel document audio, il

 19   s'agit. Ce document ne nous a pas été remis et je considère que ce n'est

 20   pas le moment de diffuser ce document maintenant.

 21   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur le Président, vous

 22   m'avez entendu faire référence il y a quelques instants au contenu de

 23   l'attaché-case de M. Kupreskic, et dans cet attaché-case se trouvaient un

 24   magnétophone et une cassette audio. La cassette que j'entends diffuser

 25   maintenant est la cassette qui a été trouvée dans son attaché-case, pour


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  1   laquelle un reçu a été signé par Me Krajina quant au fait qu'il s'agissait

  2   d'un document retenu par le Bureau du Procureur, alors que tous les autres

  3   éléments qui étaient présents dans l'attaché-case ont été récupérés par

  4   M. Kupreskic.

  5   Voilà quelle est la source de cette cassette.

  6   M. le Président (interprétation). - Mais avez-vous communiqué

  7   cette cassette aux conseils de la défense à ce jour ?

  8   M. Blaxill (interprétation). - Oui, j'ai cru comprendre que

  9   c'était le cas. Cette cassette a été mentionnée le 20 mai 1998 dans une

 10   plaidoirie, dans une intervention où le Procureur a parlé de la filière de

 11   conservation des documents contenus dans l'attaché-case de Vlatko

 12   Kupreskic.

 13   En fait, dans le dernier paragraphe de ce document,

 14   paragraphe 14, nous lisons que l'attaché-case ne contient aucun des

 15   éléments au sujet desquels M. Kupreskic a formulé des contestations, que

 16   dans l'attaché-case saisi par le TPI, etc.

 17   Au paragraphe 13, le paragraphe précédent, nous lisons : "Les

 18   originaux et les copies de tous les éléments trouvés dans l'attaché-case

 19   de Kupreskic à l'exception d'une cassette et d'un magnétophone ont été

 20   retournés avec l'attaché-case", donc j'ai cru comprendre que les conseils

 21   de la défense ont une copie de ce document.

 22   M. le Président (interprétation). - Maître Krajina ?

 23   M. Krajina (interprétation). - Monsieur le Président, je suis

 24   vraiment surpris, nous n'avons jamais vu, nous n'avons jamais reçu cette

 25   cassette, et sans offenser personne, je voudrais dire que c'est un geste


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  1   inapproprié.

  2   Je ne sais pas quelle est la méthode utilisée ici, mais c'est

  3   probablement de façon intentionnelle que nous n'avons pas reçu cette

  4   cassette.

  5   M. Blaxill (interprétation). - Ceci concerne des éléments en

  6   date du 4 février 1998. Monsieur le Président, je voudrais avoir un

  7   instant pour consulter mes collègues, je n'étais pas dans le procès à ce

  8   moment-là, je voudrais vérifier un point.

  9   (Les Procureurs ce concertent).

 10   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur le Président, mes

 11   collègues et moi-même avons rencontré Me Par et Krajina en-dehors du

 12   prétoire hier et je suis certain que ceci a été évoqué. Le problème que

 13   nous avions, c'est qu'à l'époque, la traduction officielle de la cassette

 14   n'était pas prête, mais nous avons un projet de traduction qui est entre

 15   les mains des conseils de la défense. Donc je suis un peu surpris

 16   d'entendre mon collègue évoquer un malentendu avec nous quand à la nature

 17   de cette cassette. Car nous avons dit que nous avions l'intention de

 18   diffuser cette cassette, et comme je viens de dire, il est possible qu'il

 19   y ait eu un problème lié à la traduction.

 20   S'il s'agit d'un problème de communication entre nous, c'est

 21   très regrettable, mais comme je l'ai déjà dit, je ne peux m'appuyer que

 22   sur les comptes rendus en date du 20 mai 1998. A ce moment-là, chacun

 23   savait que ces documents avaient été saisis dans l'attaché-case.

 24   M. le Président (interprétation). – Mais vous parlez d'un compte

 25   rendu ; qu'en est-il de la cassette audio ? L'avez-vous remise à


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  1   Me Krajina ?

  2   M. Blaxill (interprétation). – Oui, c'est ce que j'essayais de

  3   vérifier. Je voulais vérifier si un exemplaire de cette cassette avait été

  4   dûment remise, et l'on me dit que oui, que c'est bien le cas.

  5   M. Krajina (interprétation). – Monsieur le Président ?

  6   M. le Président (interprétation). – Oui.

  7   M. Krajina (interprétation). – Ecoutez, Monsieur le Président,

  8   je vis ceci comme une insulte. Aucune cassette n'a jamais été remise ni à

  9   moi-même ni à mes confrères, jamais. Et je prie mon collègue, M. le

 10   Procureur, de tenir un peu mieux compte de ce qu'il dit.

 11   M. Blaxill (interprétation). - J'ai une information devant moi,

 12   Monsieur le Président, Madame le Juge, Monsieur le Juge. Tout ce que je

 13   peux citer, c'est que M. Vlatko Kupreskic, à ce moment-là, s'est plaint

 14   parce qu'un certain nombre d'objets étaient contenus dans son attaché-case

 15   et qu'on ne lui a pas rendus. On a parlé du journal de guerre. On a dit

 16   également qu'on allait lui remettre, ce journal de guerre. On parle aussi

 17   de cette cassette. On dit qu'il y avait ce magnétophone, et que son

 18   magnétophone ne lui a pas été rendu. On lui a expliqué que c'était comme

 19   pièce à conviction qu'on voulait garder ce magnétophone qu'on lui avait

 20   soumis, la copie de cette cassette. Je ne peux rien dire d'autre.

 21   M. V. Kupreskic (interprétation). – Monsieur le Président,

 22   Madame le Juge, Monsieur le Juge, est-ce que je peux dire, moi, quelques

 23   mots à ce propos.

 24   M. le Président (interprétation). – Je vous en prie.

 25   M. V. Kupreskic (interprétation). – Le directeur n'est pas trop


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  1   loin, par conséquent lui-même et moi-même, nous étions ensemble et c'est

  2   en présence du témoin que j'aie reçu tout ça sous une forme écrite avec

  3   une signature, et je dispose de ce témoin. Et tous les documents, je les

  4   ai eus en sa présence. Jamais je n'ai eu cette bande. Vous pouvez

  5   l'appeler, si vous voulez, M. McFayden. Il y a également toute une

  6   commission qui a enregistré tout ça. Ce n'est pas exact. Absolument. Je

  7   n'ai jamais eu cette bande et la copie de la bande.

  8   (Le Procureur se concerte avec le Bureau du Procureur.)

  9   (Les Juges se concertent sur le siège.)

 10   M. le Président (interprétation). – Je pense que vu un certain

 11   nombre de doutes qui ont été exprimés au sujet de cette bande, si elle a

 12   été soumise ou non à Me Krajina, on ne peut pas l'accepter. Je n'ai aucun

 13   doute sur ce que vient de dire Me Krajina. De toute façon, ce sont des

 14   choses qui arrivent. Il y a eu probablement peut-être une erreur qui s'est

 15   glissée. Cette cassette n'a jamais été remise à Me Krajina, par conséquent

 16   nous ne pouvons certainement pas l'approuver.

 17   M. Blaxill (interprétation). – Nous comprenons, nous allons

 18   vérifier. D'accord.

 19   Monsieur le Président, compte tenu du fait que c'est une bande

 20   qui existe, je pourrais quand même poser quelques questions.

 21   Eventuellement, nous allons pouvoir également poser ces questions au

 22   moment de la réplique. Par conséquent, j'aimerais poser quelques

 23   questions, si vous me le permettez maintenant. Je reste là.

 24   Monsieur Kupreskic, est-ce que vous vous souvenez qu'il y avait

 25   un magnétophone dans votre attaché-case ?


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  1   M. V. Kupreskic (interprétation). – Oui.

  2   M. Blaxill (interprétation). – Est-ce que dans cet attaché-case,

  3   il y avait également une bande ?

  4   M. V. Kupreskic (interprétation). – Oui.

  5   M. Blaxill (interprétation). – Est-ce que vous pouvez, s'il vous

  6   plaît, nous dire ce qui a été enregistré ? C'était une musique, une

  7   conversation ?

  8   M. V. Kupreskic (interprétation). – Bien évidemment, je vais

  9   vous dire tout. Vous savez très bien que ni mes avocats ni moi-même, on

 10   n'a jamais eu de problème au niveau de la coopération avec vous-même. Par

 11   conséquent, il n'y a rien de douteux. Et c'est les Juges qui doivent être

 12   au courant.

 13   Il s'agissait d'une petite cassette, c'était un magnétophone et

 14   un dictaphone à la fois, Philips. J'ai essayé d'enregistrer le soldat que

 15   j'ai moi-même aperçu au moment où j'étais sur le chemin du retour, depuis

 16   ma maison. Il était 13 heures de l'après-midi. Et je considérais qu'il

 17   s'agissait par conséquent, de cet homme. Et comme lui, il s'en est souvenu

 18   que Drago Grgic, -mais malheureusement il n'est plus en vie, il a été tué-

 19   il se souvenait du moment où Drago Grgic m'avait remis ce fusil. Il était

 20   à côte, il a vu que le fusil avait tiré tout seul.

 21   Par conséquent, au moment où j'avais demandé un chauffeur pour

 22   ma société, il y avait un jeune homme de Zenica qui est venu me voir. Lui,

 23   il me ressemblait à ce soldat que j'ai rencontré le 16 avril 1993, que

 24   j'ai vu à peu près vers 13 heures. Je l'ai vu à ce croisement, ensemble

 25   avec Drago Grgic avec Anto Vidovic surnommé Catko.


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  1   Et en me préparant pour la défense, ici, dans ce prétoire devant

  2   cette Chambre, moi, j'ai fait mon enregistrement. Je lui posais les

  3   questions : est-ce que tu te souviens de ceci ? Est-ce que demain tu

  4   pourrais me le confirmer si c'est toi même qui me ressemble, à cet homme-

  5   là ? Dans ce cas-là tu pourrais être mon témoin. C'est ce qui est marqué

  6   également dans mon journal, le journal de guerre.

  7   Je ne veux pas abuser de votre temps, c'est bien marqué sur mon

  8   journal de guerre, ce soldat qui était ensemble, etc., qui a vu cette

  9   scène. Nous avons ri un petit peu, parce que de tout façon, moi, je ne

 10   sais pas manier les armes et je n'ai rien à voir avec des fusils.

 11   Moi, je pensais qu'à ce moment-là, c'était très important. C'est

 12   de cela qu'il s'agit. En ce qui me concerne, moi-même ni mon avocat

 13   n'avons aucun problème, si vous voulez, pour voir cette cassette car

 14   c'était effectivement ce qui a été dit sur cette cassette.

 15   A mon avis, de toute façon, il n'y a rien qui soit contestable

 16   et qui ressort de cette cassette.

 17   M. le Président (interprétation). – Merci Monsieur Kupreskic.

 18   Cependant, l'avocat Krajina a fait objection en ce qui concerne

 19   la cassette. On ne va pas permettre la cassette.

 20   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur le Président, j'ai une

 21   copie de la lettre envoyée le 24 février 1998. Excusez-moi, je suis trop

 22   rapide, je parle trop rapidement.

 23   Donc la lettre qui a été envoyée à Me Krajina parle de ce

 24   magnétophone Philips. On a marqué dans cette lettre que la copie de cette

 25   bande a été retournée à votre client. On a informé Me Krajina, dans cette


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  1   lettre, du fait que nous avons remis cette bande à son client.

  2   Je sais bien évidemment que ceci créé des problèmes, et avec

  3   votre permission, nous pourrions peut-être également laisser cette

  4   question pour plus tard.

  5   M. le Président (interprétation). – Maître Krajina, je vous en

  6   prie.

  7   M. Krajina (interprétation). – Monsieur le Président, Madame,

  8   Monsieur le Juge, je pense que nous pouvons passer plus loin. Mais il est

  9   vrai que cette concertation de ce document a été contestée par nous. Et

 10   c'est la raison pour laquelle il y avait cette correspondance. Il y avait

 11   aussi ce débat devant cette Chambre. Nous avons affirmé que ceci n'a pas

 12   été retourné comme il a été signalé dans ce document, dans cette lettre.

 13   Est-ce que vous vous souvenez, Monsieur le Président, de la

 14   décision de la Chambre de vérifier, de nous remettre la copie, etc. On n'a

 15   jamais mis un terme à cette question-là.

 16   M. le Président (interprétation). – D'accord. Maître Blaxill, je

 17   vous en prie.

 18   M. Blaxill (interprétation). - Je pense que tout est clair,

 19   Monsieur le Président. Mais j'ai quelques questions également que je

 20   voudrais poser à M. Kupreskic, ça ne va pas durer au-delà de deux, trois

 21   minutes.

 22   Il est vrai qu'en 1995, n'est-ce pas, vous avez acheté l'arme

 23   sur la proposition de votre épouse ?

 24   M. V. Kupreskic (interprétation). - Je n'ai pas acheté sur la

 25   proposition de mon épouse, j'ai obtenu un fusil en 1995, je pense que


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  1   c'était en janvier 1995.

  2   M. Blaxill (interprétation). - Nous avons vu l'arme, que

  3   personnellement j'appellerai un fusil automatique Kalachnikov, qui a été à

  4   votre épouse au cours de ce procès. Et vous-même, vous étiez présent.

  5   S'agit-il de ce fusil, Monsieur Kupreskic, que vous aviez ? Celui qu'on a

  6   montré à votre épouse au moment où elle a déposé ici.

  7   M. V. Kupreskic (interprétation). - Probablement, je ne peux le

  8   contester. Je ne connais pas les références, je ne sais pas comment se

  9   présentait ce fusil ; que vous le croyiez ou non. Au moins de janvier,

 10   quand je l'ai amené chez moi, par la suite je ne l'ai jamais pris, par

 11   conséquent il n'y a aucune raison de perdre notre temps. De toute façon,

 12   vous pouvez me montrer le fusil, c'est probablement ça, je ne le conteste

 13   pas.

 14   (L'huissier montre le fusil au témoin.)

 15   M. Blaxill (interprétation). - Excusez-moi, nous perdons un

 16   petit peu notre temps, mais est-ce que vous voulez bien quand même voir de

 17   plus près ce fusil ? Est-ce que ce fusil vous rappelle quelque chose ?

 18   M. V. Kupreskic (interprétation). - Ce fusil que j'ai eu en

 19   1995, oui c'est quelque chose comme ça -je ne sais pas où est le problème-

 20   une Kalachnikov que j'ai achetée.

 21   M. Blaxill (interprétation). - Au moment où vous avez été arrêté

 22   par les forces de la Sfor, vous avez dit qu'il s'agissait probablement de

 23   cambrioleurs. Vous avez pris le fusil.

 24   Je pense que l'huissier n'a plus besoin de tenir ce fusil, il

 25   peut le remettre à sa place.


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  1   (L'huissier s'exécute.)

  2   Vous avez dit, par conséquent, qu'il s'agissait de cambrioleurs,

  3   n'est-ce pas ?

  4   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, au moment où j'ai

  5   entendu les tirs, puis il y avait un bruit également... D'abord, je me

  6   disais que je rêvais, qu'il y avait encore la guerre qui recommençait. Et

  7   puis, quand je me suis réveillé, j'ai pensé que c'était des cambrioleurs,

  8   car nous avions subi quelques attaques, c'était en 1994, en 1997. Notre

  9   maison a donc été attaquée à deux reprises, en 1995 et en 1997.

 10   M. Blaxill (interprétation). - Vous avez dit que votre maison a

 11   été attaquée. Comment, de quelle façon a-t-elle été attaquée ? Est-ce que

 12   c'étaient par les militaires ou des cambrioleurs ? De qui s'agissait-il ?

 13   M. V. Kupreskic (interprétation). - Il s'agissait de

 14   cambrioleurs, de voleurs. J'avais une entreprise et ils pensaient

 15   probablement que j'avais de l'argent sur moi. Chaque fois, ils enfonçait

 16   la porte et ils cambriolaient la maison au moment où moi j'étais en voyage

 17   d'affaires.

 18   M. Blaxill (interprétation). - Je me souviens vous avoir entendu

 19   dire, lors de l'interrogatoire principal, Monsieur Kupreskic, que vous

 20   avez entendu des détonations au moment où les gens ont enfoncé -comme vous

 21   l'avez dit- la porte et ont pénétré dans votre maison, lors de votre

 22   arrestation. Vous avez entendu des détonations, n'est-ce pas ?

 23   M. V. Kupreskic (interprétation). - J'ai dit et je le reprécise

 24   que j'ai eu l'impression que je rêvais, et que j'ai eu l'impression qu'il

 25   y avait des détonations comme le 16 avril 1993. Il y avait beaucoup de


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  1   bruits, enfin cela tirait de tous les côtés. Je ne sais pas, mais c'était

  2   quelque chose qui dépassait mon esprit. De toute façon je le redis, une

  3   fois de plus, ce n'était pas indispensable, il y a des grenades qui ont

  4   été d'abord jetées ; mon épouse est restée à l'intérieur. Donc des

  5   grenades ont été jetées au rez-de-chaussée, c'est à côté de ma mère, alors

  6   que ma mère dormait.

  7   Heureusement, que ma mère n'était pas, à cette époque-là, à la

  8   maison. Elle était chez ma soeur en Allemagne. C'est comme cela qu'elle

  9   n'a pas été tuée. Imaginez-vous ce jour-là, le 17 décembre, deux fois j'ai

 10   été en présence de ces gens-là. C'était comme un cirque.

 11   Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, sept jours

 12   plus tard, ma famille...

 13   Je vous en prie, Monsieur le Procureur, permettez-moi.

 14   Ma famille a été visitée par le commandant Kufuk, avec son

 15   interprète musulman, et je pense qu'il y avait aussi un autre membre ; ils

 16   sont donc arrivés chez moi à la maison. Mon épouse les a reçus chez nous,

 17   à la maison. Elle leur a même offert une boisson. Ils ont pris ce verre et

 18   il a laissé cette carte de visite à mon épouse, je l'ai ici sur moi. Et il

 19   avait dit, au moment où il m'a vu à Novi Travnik, au moment où il a vu les

 20   documents, et quand il a vu de quoi il s'agissait il s'est excusé auprès

 21   de ma famille. C'est tout ce qui me réjouit et qui me satisfait en ce

 22   moment, c'est la carte de visite de ce commandant.

 23   Merci. Encore une fois, chacun peut commettre des erreurs. Et

 24   voilà.

 25   M. Blaxill (interprétation). - Monsieur Kupreskic, je voudrais


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  1   tout simplement vous donner une proposition au sujet de votre commentaire.

  2   Les soldats qui vous ont arrêtés, ont dit qu'il y a eu deux rafales qui

  3   ont été tirées d'un fusil automatique. C'est vous qui avez tiré avant

  4   d'être blessé, et avant d'être en sécurité en tant que prisonnier.

  5   Est-il vrai que vous avez tiré et que c'étaient deux rafales

  6   très brèves ?

  7   M. V. Kupreskic (interprétation). - Non, ce n'est pas vrai parce

  8   que je ne savais pas tirer. Je pense... je ne sais absolument pas tirer

  9   des rafales... mais je pense que j'ai tiré effectivement. Mon épouse a

 10   regardé et me l'a raconté. Je pense que j'ai tiré du côté du mur. De toute

 11   façon, je ne savais pas tirer et j'ai eu peur ; au moment où j'ai tiré la

 12   première balle, le fusil est presque tombé, il n'est pas vraiment tombé,

 13   mais cela s'est passé en quelques secondes, et puis j'ai jeté le fusil.

 14   Au moment où j'ai retrouvé conscience, quand ils m'ont mis sur

 15   le canapé ces gens-là, j'ai tout de suite posé la question de savoir si

 16   quelqu'un avait été blessé. Mais personne n'a été blessé, c'est un fait,

 17   jamais dans ma vie je n'ai gardé un fusil dans mes mains. Et puis je ne

 18   savais même pas ce que c'était un fusil. Mais je pensais que c'étaient des

 19   cambrioleurs. Et c'est la raison pour laquelle j'ai posé la question :

 20   mais pourquoi vous m'avez fait cela, il n'y avait aucun besoin d'agir

 21   ainsi.

 22   M. Blaxill (interprétation). - Merci, Monsieur Kupreskic.

 23   En guise de conclusion, je voudrais vous poser quelques

 24   questions. Vous avez dit que votre famille avait quelques problèmes avec

 25   Sakib Ahmic, au sujet des frontières entre la terre qui est la vôtre et


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  1   que c'était également un homme qui n'était pas facile à vivre, et que

  2   d'autres voisins avaient les mêmes problèmes.

  3   M. V. Kupreskic (interprétation). - Ce n'est pas ma famille qui

  4   avait des problèmes. Mon père a vécu en très bons termes. Il a fait des

  5   problèmes non seulement à mon père, mais même vis-à-vis de ses voisins

  6   musulmans. C'était quelqu'un qui n'était pas confortable à vivre. De toute

  7   façon, en ce qui me concerne, je n'avais aucun problème avec lui parce que

  8   ce n'est pas la terre qui m'intéressait, il y avait beaucoup d'autres

  9   choses beaucoup plus intéressantes qui m'intéressaient, c'est pourquoi je

 10   n'avais pas de problème avec lui.

 11   M. Blaxill (interprétation). - Devant votre maison, ces jours-

 12   ci, il y a quelque chose qui est en blanc, tout au moins sur la photo

 13   aérienne. Est-il vrai qu'une fois que vous êtes retourné à Ahmici, une

 14   surélévation, une colline a été enlevée, et que cela a donc été terrassé ?

 15   Est-ce vrai ?

 16   M. V. Kupreskic (interprétation). - Oui, c'est une colline qui

 17   se trouvait juste devant la porte de mon magasin.

 18   (Le témoin montre l'endroit.)

 19   M. Blaxill (interprétation). – Oui. Où avez-vous enlevé et

 20   déposé la terre ?

 21   M. V. Kupreskic (interprétation). - J'ai déplacé cette terre

 22   devant l'entrepôt, mais ce n'est pas la terre qui m'appartient ; je n'en

 23   suis pas propriétaire. Ce sont les Ahmic, Latif et Atif Ahmic, qui en sont

 24   propriétaires. Eux, ils m'étaient reconnaissants parce que c'est comme

 25   cela que j'ai réussi à aménager le terrain, et c'est comme cela qu'ils ont


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  1   obtenu une meilleure qualité de la terre. Vous pourrez vérifier auprès

  2   d'eux et ils vous diront que c'est véridique, ce que je dis, parce que

  3   j''ai donné quelques milliers de Deutsche Marks pour le faire.

  4   J'utilise actuellement ce terrain comme parking. Ils ne m'ont

  5   jamais fait d'objection, au contraire. Ils m'ont été reconnaissants. Il y

  6   a quelques jours, c'est mon épouse qui me l'a raconté, eux-mêmes, ils ont

  7   déposé les ordures devant chez moi, et personne ne les a gênés. (expurgée)

  8   (expurgée)

  9   (expurgée) et lui également m'est

 10   reconnaissant parce que j'ai pratiquement aménagé le terrain grâce à cette

 11   terre que je lui avais portée.

 12   M. Blaxill (interprétation). – Est-ce que, en résultat, vous

 13   êtes parti une partie du terrain (expurgée) (?) ? Vous pouvez répondre

 14   par oui ou non.

 15   M. V. Krupeskic (interprétation). - Oui.

 16   M. Blaxill (interprétation). – Merci.

 17   M. V. Krupeskic (interprétation). – C'est une partie, une

 18   section, effectivement, qui touche le terrain, l'espace (expurgée) Je me

 19   souviens : lui, il s'est plaint à un moment donné, et nous avons envoyé

 20   une machine ; nous avons balayé le terrain. Nous n'avions plus de

 21   problèmes du tout.

 22   M. Blaxill (interprétation). – Merci, Monsieur le Témoin, merci

 23   Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges. J'aimerais que les

 24   pièces à conviction P 377, 378, 379, 380 et 381 soient versés au dossier.

 25   M. le Président (interprétation). – Y a-t-il une objection ?


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  1   M. Krajina (interprétation) – Non.

  2   M. le Président (interprétation). – Nous allons donc verser ces

  3   documents au dossier.

  4   M. Blaxill (interprétation). – Merci, Monsieur le Président.

  5   M. le Président (interprétation). - Avant de prendre la décision

  6   à quel moment on fera la pause, avez-vous l'intention de contre-interroger

  7   le témoin.

  8   M. Krajina (interprétation) - Juste une question.

  9   M. le Président (interprétation). – A ce moment-là, nous pouvons

 10   le faire tout de suite. Je vous en prie, Maître Krajina.

 11   M. Krajina (interprétation) – Monsieur Kupreskic, à la fin de

 12   votre déposition, je vais tout simplement vous poser la question

 13   suivante : auriez-vous vous-même quelques chose à dire sur laquelle on ne

 14   vous a pas posé de questions ? Est-ce que, éventuellement, vous voulez

 15   apporter quelques éclaircissements, déclarer quelque chose au sujet de

 16   l'acte d'accusation et sur les preuves qui ont été avancées au cours du

 17   procès ?

 18   M. V. Krupeskic (interprétation). - Je voudrais tout simplement

 19   remercier le Président, Madame et Monsieur les Juges de bien vouloir

 20   suivre ce que j'ai eu à dire. Je pense que j'ai réussi à démontrer ce que

 21   j'affirmais depuis le premier jour, à savoir que je ne suis pas coupable

 22   et qu'aucune allégation n'est justifiée.

 23   Vous vous souvenez que, la première fois, quand j'ai eu le droit

 24   à la parole, quand j'ai dit que toutes les allégations à l'égard de moi-

 25   même ne pouvaient pas être exactes parce que je n'avais ni intérêt, et je


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  1   n'avais même pas le courage d'entreprendre quoi que ce soit. J'ai même dit

  2   que mes voisins Musulmans allaient confirmer ce que j'ai dit moi-même.

  3   Mes avocats et moi-même, on n'avait aucune question que l'on

  4   pourrait dire contestable au cours des entretiens avec le Procureur. Vous

  5   savez que, moi, il y a un an déjà, j'ai découvert tous les documents que

  6   je possédais. Je n'ai jamais eu peur de la vérité. Mais l'une des raisons

  7   pour lesquelles je ne me suis pas rendu ici tout seul et de plein gré,

  8   c'est probablement parce que je suis ici depuis 2 ans. Et vous voyez que

  9   ce procès dure.

 10   Ma famille et moi-même, nous souffrons beaucoup à cause de tout

 11   ce qui se passe ici même. Et je vais vous demander, Monsieur le Président,

 12   Madame et Monsieur les Juges, de m'aider, de me dire ce qu'il est

 13   indispensable à entreprendre pour que mon avocat et moi-même, on puisse

 14   vous prouver mon innocence.

 15   Le Bureau du Procureur a été très correct vis-à-vis de nous,

 16   mais que faut-il faire encore pour vous prouver que je suis innocent et

 17   que je ne suis pas coupable ? Vous voyez que je ne peux pas tout vous

 18   raconter, ce n'est pas possible.

 19   Mais vous pouvez vous rendre à n'importe quel moment à Ahmici,

 20   et vous pourrez voir dans mon magasin, chez moi à la maison ; vous verrez

 21   que les Musulmans, les voisins, s'y rendent encore. Le témoin L -celui qui

 22   m'avait accusé ici- m'a fait saluer par ma fille, et s'est renseigné sur

 23   l'état de ma santé. Le témoin Q passe tous les jours devant chez moi ; il

 24   ne regarde pas vraiment, parce qu'il en a honte, alors que le témoin qui a

 25   été annoncé ce matin par le M. le Procureur, Musulman, Ahmic, passe à côté


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  1   de ma maison et s'arrête devant chez moi.

  2   Mais je me pose la question : ce qui est contestable encore, je

  3   suis profondément désolé de voir ce qui s'est passé à mes voisins et je le

  4   condamne de toutes mes forces, mais comprenez-moi, je suis parent, chef de

  5   famille, je suis malade, et je me pose la question de savoir comment j'ai

  6   pu véritablement tenir le coup un an et demi en prison, alors que ce n'est

  7   qu'après un an et 7 mois que j'ai eu cette possibilité de m'exprimer et de

  8   dire que je ne suis pas coupable de toutes ces allégations qui font

  9   l'objet de l'acte d'accusation.

 10   Ma défense cet après-midi va avancer la proposition pour la mise

 11   en liberté. Je pense que vous voudrez bien satisfaire à cette demande, à

 12   cette requête, et je vous prie de comprendre. Les familles souffrent. Les

 13   voisins musulmans, leurs familles souffrent, mais pourquoi ma famille

 14   doit-elle souffrir ? Parce que nous sommes innocents à 100 %.

 15   M. Krajina (interprétation) – Merci, Monsieur le Président.

 16   M. le Président (interprétation). - Merci, la Chambre n'a pas de

 17   questions à vous poser, Monsieur Kupreskic. Merci, Monsieur Kupreskic pour

 18   votre déposition.

 19   M. V. Krupeskic (interprétation). - Merci à vous.

 20   M. le Président (interprétation). – Y a-t-il d'autres questions

 21   éventuellement sur lesquelles on pourrait débattre avant de lever la

 22   séance ? Y a-t-il d'autres questions, éventuellement ?

 23   M. Susak (interprétation). - Bien évidemment, je pensais qu'il

 24   ne fallait pas abuser de votre temps étant donné que nous n'avions pas

 25   beaucoup de temps. C'est pourquoi je n'ai pas demandé non plus la mise en


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  1   liberté de Drago Josipovic.

  2   Par conséquent, je serai très bref et je vous donnerai très

  3   brièvement les motifs de cette proposition.

  4   M. le Président (interprétation). - Je vous en prie.

  5   M. Susak (interprétation). – Je pense en effet qu'il y a des

  6   circonstances exceptionnelles qui justifieraient la décision de la Chambre

  7   pour la mise en liberté de Drago Josipovic ; sa mère vient de décéder.

  8   C'est le 6 mai de cette année qu'elle est décédée. C'est elle qui s'est

  9   occupée des enfants de Drago Josipovic, et notamment de Nikola, qui est né

 10   en 1984 et qui est en première année de l'école secondaire.

 11   La mère des enfants, Slavica Josipovic, est chargée sur le plan

 12   du travail. Elle est la seule qui gagne la vie et qui peut subvenir aux

 13   besoins des enfants, et elle ne peut se consacrer suffisamment aux

 14   enfants. Goran est né en 1979 ; il est en première année d'études à la

 15   faculté des sciences économiques. Par conséquent, il est indispensable de

 16   surveiller les enfants, sinon cela pourrait avoir une influence négative

 17   ultérieurement.

 18   Ils ont été très attachés à la grand-mère, au père, qui

 19   s'occupait, et la mise en liberté de Drago Josipovic serait d'un grand

 20   secours, d'un grand support, pour Goran et Nikola, qui vivent

 21   difficilement l'absence de leur père.

 22   Les circonstances exceptionnelles également se justifient par le

 23   fait que tous les témoins ont été interrogés devant la Chambre en ce qui

 24   concerne Drago Josipovic.

 25   Par ailleurs, les témoins prévus par le Procureur ne se


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  1   rapportent pas à Drago Josipovic. Le procès est assez long, et comme on

  2   peut le constater, la Chambre a déjà pris la décision de mettre en liberté

  3   provisoire Drago Josipovic, et au moment où il est parti de La Haye à

  4   Santici pour assister à l'enterrement de sa mère.

  5   Drago Josipovic n'était pas sous le régime du contrôle spécial,

  6   il s'est rendu à Santici, il y était et puis il est retourné dans le

  7   quartier pénitentiaire de La Haye. Drago Josipovic est venu de plein gré

  8   ici à La Haye, devant le Tribunal, et au moment où il a appris l'acte

  9   d'accusation, il n'a pas changé le lieu de résidence.

 10   Le Tribunal, je pense, est convaincu que Drago Josipovic est là,

 11   il est présent, et qu'il ne pourra certainement pas présenter un danger,

 12   ni pour une victime, ni pour un témoin, ni pour qui que ce soit.

 13   C'est la raison pour laquelle nous proposons que la Chambre

 14   prenne la décision par laquelle Drago Josipovic sera mis en liberté

 15   provisoirement.

 16   Cette proposition se fonde sur l'article 65 du Règlement de

 17   Procédure et de Preuve. C'est tout, Monsieur le Président, merci.

 18   M. le Président (interprétation). - Merci.

 19   Le Procureur voudrait-il réagir ?

 20   M. Blaxill (interprétation). - Très brièvement. La réalité très

 21   malheureuse est que chaque fois que quelqu'un subit un procès, il se

 22   trouve dans une situation dans laquelle la liberté lui est déniée pendant

 23   le procès. C'est la règle générale ici étant donné la gravité des crimes

 24   allégués dans ces procès. Les difficultés subies par les parents, les

 25   enfants etc., sont un élément très regrettable qui accompagne ces procès.


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  1   En raison de cela, je dis, Monsieur le Président, Madame,

  2   Monsieur les Juges, qu'il faut exercer la plus grande attention en

  3   examinant les circonstances familiales ainsi qu'exceptionnelles invoquées

  4   ici.

  5   Je pense que l'exemple qui vient d'être évoqué au sujet de

  6   M. Josipovic a à voir avec le fait que le décès d'un membre de la famille

  7   s'est produit et que, bien entendu, l'accusé devait honorer sa mère et est

  8   revenu au procès après cela.

  9   Je pense cependant qu'à ce stade du procès, nous sommes... nous

 10   allons aborder les arguments liés à M. Josipovic. Un grand nombre du

 11   travail a déjà été effectué, sauf pour certains témoins généraux de

 12   l'accusation ainsi que la réplique et la duplique.

 13   Il a été dit ici que nous devions considérer des circonstances

 14   exceptionnelles dans des situations de ce genre. Le verdict du Tribunal a

 15   son importance, toute aussi exceptionnelle.

 16   Des pressions énormes pèsent sur les accusés au moment où ce

 17   verdict est imminent, notamment sur les personnes accusées des crimes les

 18   plus graves. Donc les pressions s'exerçant sur eux pour les empêcher de

 19   revenir à La Haye -c'est un facteur humain- sont nécessairement très

 20   importantes.

 21   L'autre facteur -je vous propose d'y réfléchir- c'est la réalité

 22   de la difficulté... des difficultés vécues par certaines familles jusqu'à

 23   ce jour. Mais ce ne sont pas des circonstances exceptionnelles à notre

 24   avis, en tout cas s'agissant de quelques mois.

 25   Je reprends à ce stade pour vous rappeler ce qu'a dit mon


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  1   collègue M. Terrier un peu plus tôt au sujet des demandes présentées par

  2   Me Slokovic-Glumac et Me Radovic.

  3   Il a dit que le Procureur avait une certaine expérience des

  4   problèmes qu'il a rencontrés avec les autorités pertinentes en Bosnie-

  5   Herzégovine. Nous ne prenons pas en compte uniquement la Croatie, je le

  6   répète, qui est un Etat distinct, mais nous parlons bien des deux

  7   composantes dans l'entité connue sous le nom de "Fédération de Bosnie-

  8   Herzégovine", et ceci a son importance, s'agissant d'un personnage qui

  9   représente l'Etat, ou l'une des composantes de ce pays.

 10   En tant que telles, les assurances sont peut-être difficiles à

 11   obtenir, en tout cas par la Chambre.

 12   Voilà ce que je voulais dire, Monsieur le Président, Madame et

 13   Monsieur les Juges, j'en ai terminé pour le moment.

 14   M. le Président (interprétation). - Merci.

 15   Y a-t-il d'autres arguments ?

 16   Mme Glumac (interprétation). - Monsieur le Président, en rapport

 17   avec ce texte que j'ai réussi à lire, que nous avons reçu de M. le

 18   Procureur, je voudrais dire qu'il est question ici d'une personne qui a

 19   pour fonction des fonctions d'agent de liaison d'un Etat et qui

 20   n'accomplit pas bien son travail.

 21   Je considère que c'est à la Fédération d'envoyer une autre

 22   personne qui permettra un meilleur travail, car la personne dont il est

 23   question ici ne pourra pas remplir sa responsabilité en termes

 24   d'assurances à fournir au Tribunal.

 25   Nous recevons l'information selon laquelle l'homme dont il est


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  1   question dans ce texte a perdu son emploi ici. C'est donc une information

  2   nouvelle que nous vous transmettons.

  3   Et un mot encore, si vous me le permettez, Monsieur le

  4   Président, puisque nous atteignons la fin de cette audience. Lorsque nous

  5   parlions de la forme des réquisitoires et plaidoiries, vous aviez dit que

  6   vous souhaiteriez recevoir une sorte de résumé comportant quelques pages

  7   qui présenteront donc notre point de vue sur les témoins qui ont été

  8   entendus.

  9   S'agit-il toujours d'un résumé ou bien convient-il que nous

 10   préparions à la fois le résumé et les plaidoiries dans leur intégralité ?

 11   M. le Président (interprétation). - Merci.

 12   Nous souhaitions obtenir un plan de votre plaidoirie avec, si

 13   possible, des références au compte rendu d'audience à l'appui de vos

 14   affirmations. Quant au reste de la plaidoirie, l'intégralité de la

 15   plaidoirie, elle sera présentée oralement. J'ai proposé cela pour

 16   faciliter le travail des deux parties.

 17   Bien entendu, vous avez toute liberté de rédiger un long

 18   mémoire, mais compte tenu des problèmes de langue qui se posent -puisque

 19   je suppose que vous rédigerez votre document en croate- cela présentera

 20   sans doute quelques difficultés eu égard à la difficulté de traduire ce

 21   texte en anglais ; j'ai pensé qu'il serait intéressant pour nous

 22   d'entendre l'intégralité de votre plaidoirie oralement et de vous demander

 23   uniquement un plan par écrit.

 24   Bien entendu, vous disposerez d'une semaine de plus que

 25   l'accusation pour pouvoir répondre aux éléments figurant dans ce résumé du


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  1   Procureur.

  2   Maître Par ?

  3   M. Par (interprétation). - Je vous prie de m'excuser mais

  4   j'aurais une question technique à évoquer, en rapport avec les témoins

  5   dont le Procureur a annoncé qu'il allait les citer à comparaître dans la

  6   phase ultérieure du procès.

  7   Je n'ai pas bien compris si le Procureur, eu égard à ces

  8   témoins, allait nous communiquer de nouvelles déclarations préalables.

  9   Dans notre cas particulier, le Procureur a fait savoir l'identité de l'un

 10   des témoins qui est un enquêteur du Tribunal et qui a effectué un certain

 11   nombre de mesures sur le terrain, en rapport avec les déclarations d'un

 12   témoin de la défense présenté par nous.

 13   Donc ce que nous aimerions savoir, c'est si le Procureur a

 14   l'intention de nous communiquer les mesures effectuées par le travail de

 15   cet enquêteur, de façon à ce que nous puissions préparer des preuves en

 16   réplique.

 17   Le Procureur nous a également annoncé qu'il va citer un témoin,

 18   un autre témoin, dont nous avons déjà une déclaration préalable qui a été

 19   recueillie il y a un an ou deux. Donc, au cas où le Procureur disposerait

 20   d'une nouvelle déclaration de ce témoin, nous aimerions savoir s'il a

 21   l'intention de nous la communiquer de façon à nous aider à réagir à cette

 22   déposition. C'est ce que nous ne savions pas, c'est la raison pour

 23   laquelle nous intervenons pour demander des renseignements à ce sujet.

 24   M. le Président (interprétation). - Oui, merci Maître Par.

 25   Maître Blaxill ?


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  1   M. Blaxill (interprétation). - Notre interprétation de la

  2   situation, Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, c'est que

  3   si nous présentons des témoins en réplique et duplique, c'est un peu comme

  4   un nouveau mini-procès. L'article 66 donc renvoie la balle et nous devons

  5   produire tous les éléments liés au témoin que nous avons l'intention de

  6   citer.

  7   C'est de cette façon que nous avons l'intention de procéder. Et

  8   ce que nous avions déjà en notre possession a déjà été communiqué. Bien

  9   entendu, s'il y a encore des découvertes faites par l'enquêteur, les

 10   résultats seront communiqués immédiatement à la défense.

 11   Comme je l'ai déjà dit -et je le répète- nous allons procéder

 12   comme si nous reprenions l'article 66 pour l'appliquer une nouvelle fois

 13   et toute communication sera faite eu égard à toutes les personnes que nous

 14   avons l'intention de citer à la barre des témoins.

 15   M. le Président (interprétation). - Excellent. Donc vous

 16   accorderez sans doute à la défense quelques semaines avant de reprendre ?

 17   M. Blaxill (interprétation). - Oui, s'il y avait un élément qui

 18   devait repousser nos travaux de plusieurs semaines et que nous nous voyons

 19   obligé d'accorder deux semaines à la défense, malheureusement nous le

 20   ferons vu la nature de cette procédure, mais si tout va bien nous pourrons

 21   poursuivre.

 22   Un des témoins, M. McLeod a fait l'objet d'un rapport qui est

 23   déjà entre les mains des deux parties. Les autres documents ont été

 24   communiqués. Donc j'espère pouvoir lever tout doute éventuel dans l'esprit

 25   de M. Par.


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  1   M. le Président (interprétation). - Maître Par s'inquiétait

  2   particulièrement de toute nouvelle déclaration préalable d'un quelconque

  3   témoin que vous souhaiteriez citer.

  4   M. Blaxill (interprétation). - Il s'agissait, je crois, surtout

  5   de l'enquêteur, car nous avions fait référence à des enquêtes, et il

  6   souhaitait savoir s'il disposerait des résultats de ce travail.

  7   Nous approchons maintenant des audiences du mois de septembre.

  8   Donc tout travail nouveau dans ce domaine devrait s'achever à la mi-août

  9   ou à la fin août ou même avant.

 10   Bien entendu, cela dépend de la logistique de la mission sur le

 11   terrain, mais si de nouveaux éléments apparaissent ils seront communiqués.

 12   M. le Président (interprétation). - Merci, très bien.

 13   Nous sommes maintenant en mesure de lever l'audience et nous

 14   suspendons jusqu'au 27 septembre, à 9 heures.

 15   La séance est levée à 16 heures 15.

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