Press Release
                . Communiqué de presse 
            (Exclusively for the use of the media. Not an official document) 
              
           
              
            
              
                  
                |  
                  APPEALS CHAMBER | 
                 
                
                  
                |  CHAMBRE 
                  D’APPEL | 
                 
             
          
              
            
            La Haye, 28 fèvrier 2005 
              CT/S.I.P./940f 
              
            ARRÊT DE LA CHAMBRE D’APPEL DANS L’AFFAIRE 
               
              LE PROCUREUR CONTRE MIROSLAV KVOCKA, MLADO 
              RADIC, ZORAN ZIGIC ET DRAGOLJUB PRCAC 
              
            Veuillez trouver ci-dessous le résumé de l'arrêt 
              rendu par la Chambre d'Appel composée des Juges Shahabuddeen 
              (Président), Pocar, Mumba, Güney et Weinberg de Roca 
              et  tel que lu à l’audience de ce jour par le Juge 
              Président :  
            	Ce qui suit n’est qu’un résumé 
              et non pas l’Arrêt lui-même. À l’issue de l’audience, 
              des copies de l’Arrêt en anglais, français et BCS seront 
              mises à la disposition des parties, et en particulier des 
              accusés dans une langue qu’ils comprennent. Je souligne que 
              seul fait autorité l’exposé des conclusions de la 
              Chambre d’appel que l’on trouve dans le texte écrit de l’Arrêt 
              en anglais. Cependant il sera donné lecture du dispositif 
              à la fin du présent résumé. 
            	Le procès de Miroslav Kvocka, Mladjo 
              Radic, Zoran Zigic, Dragoljub Prcac et Milojica Kos s’est ouvert 
              le 28 février 2000. La Chambre de première 
              instance I du Tribunal a rendu son jugement le 2 novembre 2001. 
              Miroslav Kvocka a interjeté appel du Jugement le 13 novembre 2001, 
              suivi de Mladjo Radic et de Dragoljub Prcac le 15 novembre 2001, 
              puis de Milojica Kos et de Zoran Zigic le 16 novembre 2001. 
              Le 21 mai 2002, Milojica Kos a retiré son 
              appel. 
            	La procédure d’appel en l’espèce 
              a été notamment marquée par le dépôt 
              de plusieurs requêtes aux fins d’admission de moyens de preuve 
              supplémentaires en application de l’article 115 du Règlement 
              de procédure et de preuve. La Chambre d’appel a conclu que 
              trois éléments de preuve supplémentaires ainsi 
              que trois éléments de preuve en réplique étaient 
              admissibles aux termes de l’article 115. Le procès en 
              appel a eu lieu du 23 au 26 mars 2004. Des audiences 
              consacrées aux éléments de preuve supplémentaires 
              ont eu lieu du 19 au 21 juillet 2004. 
            	Les événements qui sont à 
              l’origine du présent appel se sont déroulés 
              dans trois camps établis dans les villages d’Omarska et Trnopolje 
              et dans l’usine Keraterm, dans la région de Prijedor, au 
              nord-ouest de la Bosnie-Herzégovine. Ces camps ont été 
              établis peu après la prise de contrôle par les 
              Serbes de la ville de Prijedor le 30 avril 1992 : 
              leur objectif premier était de détenir des personnes 
              soupçonnées d’être solidaires de l’opposition 
              à la prise de contrôle de la ville. 
            Je vais maintenant présenter les appelants : 
            	Miroslav Kvocka était policier d’active 
              relevant du poste de police d’Omarska au moment de la création 
              du camp d’Omarska. La Chambre de première instance a conclu 
              que Miroslav Kvocka tenait, dans l’administration du camp, un rang 
              équivalent à celui de commandant en second du service 
              de garde et qu’il avait une certaine autorité sur les gardiens. 
              Vu son pouvoir et son influence sur ces derniers et son manque de 
              zèle à empêcher la commission de crimes et à 
              soulager les souffrances des détenus, vu également 
              le rôle important qu’il a joué pour perpétuer 
              le fonctionnement du camp et ce, bien qu’il ait su qu’il s’agissait 
              d’un projet criminel, la Chambre de première instance a jugé 
              que Miroslav Kvocka était coauteur de l’entreprise criminelle 
              commune du camp d’Omarska. Il a été déclaré 
              coupable, sur la base de l’article 7 1) du Statut, en tant 
              que coauteur des crimes de persécutions, sanctionnées 
              par l’article 5 du Statut, et de meurtres et tortures, réprimés 
              par son article 3. La Chambre de première instance l’a 
              condamné à une peine unique de sept ans d’emprisonnement 
              pour les crimes dont il a été déclaré 
              coupable. 
            	Dragoljub Prcac était un policier à 
              la retraite ayant exercé des fonctions de technicien de la 
              police scientifique et il a été mobilisé pour 
              servir au poste de police d’Omarska le 29 avril 1992. 
              La Chambre de première instance a conclu qu’il avait exercé 
              les fonctions d’auxiliaire administratif auprès du commandant 
              du camp d’Omarska pendant plus de trois semaines et, qu’à 
              ce titre, il pouvait circuler librement dans l’enceinte du camp. 
              La Chambre a estimé que Dragoljub Prcac, du fait de sa position, 
              avait une certaine influence sur les gardiens. La Chambre a conclu 
              qu’il avait choisi de rester impassible lorsque des crimes étaient 
              commis en sa présence, et que s’il n’était pas responsable 
              du comportement des gardiens ni de celui des personnes procédant 
              aux interrogatoires, il n’en restait pas moins responsable de la 
              gestion des mouvements des détenus au sein du camp. La Chambre 
              de première instance a conclu que sa participation en connaissance 
              de cause au fonctionnement du camp avait été importante 
              et que ses actes et ses omissions avaient largement contribué 
              à aider et à faciliter l’entreprise criminelle commune 
              du camp. La Chambre de première instance l’a déclaré 
              coupable, sur la base de l’article 7 1) du Statut, en 
              tant que coauteur des crimes de persécutions, sanctionnées 
              par l’article 5 du Statut, et de meurtres et tortures, réprimés 
              par son article 3. La Chambre de première instance l’a 
              condamné à une peine unique de cinq ans d’emprisonnement 
              pour les crimes dont il a été déclaré 
              coupable. 
            	Mladjo Radic était policier d’active 
              relevant du poste de police d’Omarska. La Chambre de première 
              instance a conclu qu’il avait pris ses fonctions de chef d’équipe 
              de gardiens au camp d’Omarska vers le 28 mai 1992 et qu’il 
              y était resté jusqu’à la fin août 1992. 
              La Chambre a conclu que Mladjo Radic avait une autorité considérable 
              sur les gardiens de son équipe. Il a choisi de se servir 
              de ce pouvoir pour empêcher certains crimes, sans prêter 
              attention à la vaste majorité de ceux qui étaient 
              commis lorsque son équipe était de garde. La Chambre 
              de première instance a noté que les gardiens de son 
              équipe étaient particulièrement brutaux et 
              que Mladjo Radic avait personnellement fait subir des violences 
              sexuelles à des femmes détenues au camp. La Chambre 
              a conclu que Mladjo Radic avait joué un rôle important 
              dans le fonctionnement du camp d’Omarska et qu’il était coauteur 
              de l’entreprise criminelle commune. Il a été déclaré 
              coupable sur la base de l’article 7 1) du Statut en tant 
              que coauteur des crimes suivants, commis dans le cadre d’une entreprise 
              criminelle commune : persécutions, crime sanctionné 
              par l’article 5 du Statut, meurtres et tortures, crimes sanctionnés 
              par son article 3. Mladjo Radic a été condamné 
              à une peine unique de vingt ans d’emprisonnement pour sa 
              participation aux crimes commis au camp d’Omarska. 
            	Zoran Zigic était chauffeur de taxi 
              et civil et avait été mobilisé pour servir 
              en tant que policier de réserve. Il a brièvement travaillé 
              en tant que garde au camp de Keraterm, où il effectuait des 
              livraisons, et il était également autorisé 
              à pénétrer dans les camps d’Omarska et de Trnopolje. 
              S’agissant du camp d’Omarska, la Chambre a conclu que Zoran Zigic 
              s’y rendait régulièrement à seule fin d’y maltraiter 
              des détenus. La part importante prise par Zoran Zigic aux 
              crimes commis dans le camp d’Omarska, ajoutée au fait qu’il 
              savait que ces crimes constituaient des persécutions, ainsi 
              que l’ardeur et l’enthousiasme avec lesquels il y a participé 
              ont amené la Chambre de première instance à 
              conclure qu’il s’était rendu coauteur de l’entreprise criminelle 
              commune du camp d’Omarska. La Chambre a également conclu 
              que Zoran Zigic avait commis des crimes de persécutions, 
              torture et meurtre au camp de Keraterm et que ces crimes s’inscrivaient 
              dans le cadre d’une attaque généralisée ou 
              systématique dirigée contre les détenus non 
              serbes de ce camp, constituant de ce fait des crimes contre l’humanité. 
              La Chambre de première instance a en outre conclu que Zoran 
              Zigic s’était rendu au camp de Trnopolje et y avait maltraité 
              des détenus. 
            	Sur la base de l’article 7 1) du 
              Statut, Zoran Zigic a été déclaré coupable 
              de persécutions, à raison des crimes commis au camp 
              d’Omarska en général, et en particulier contre des 
              personnes identifiées, ainsi qu’à raison des crimes 
              commis par lui au camp de Keraterm contre des personnes identifiées. 
              Zoran Zigic a été reconnu coupable de meurtre, à 
              raison des crimes commis au camp d’Omarska en général 
              et contre une personne identifiée en particulier. S’agissant 
              du camp de Keraterm, il a été déclaré 
              coupable du meurtre de personnes identifiées. Il a été 
              déclaré coupable de torture, à raison de crimes 
              commis au camp d’Omarska en général et contre des 
              personnes identifiées en particulier, et à raison 
              de crimes commis au camp de Keraterm contre des personnes identifiées. 
              Il a été déclaré coupable de traitements 
              cruels, à raison de crimes commis contre une personne identifiée 
              au camp d’Omarska et contre une autre au camp de Trnopolje. La Chambre 
              de première instance a condamné Zoran Zigic à 
              une peine unique de 25 ans d’emprisonnement. 
            Je vais maintenant aborder les moyens d’appel 
              soulevés par les appelants : 
            	Les quatre appelants partagent des moyens d’appel 
              qui ont trait à une insuffisance alléguée des 
              motifs donnés par la Chambre de première instance, 
              à des questions relatives à l’acte d’accusation et 
              à la thèse de l’entreprise criminelle commune. Nous 
              allons examiner ces moyens avant d’aborder les moyens d’appels propres 
              à chacun des appelants. 
            Examinons donc les moyens d’appel communs : 
            	En premier lieu, traitons de l’insuffisance 
              alléguée des motifs donnés. Plusieurs appelants 
              soutiennent que la Chambre de première instance n’a pas suffisamment 
              motivé les déclarations de culpabilité prononcées 
              à leur encontre. 
            	La Chambre d’appel rappelle que tout accusé 
              a droit à connaître les motifs de la décision 
              le concernant. Cependant la Chambre de première instance 
              n’a pas l’obligation de justifier ses conclusions pour chacun des 
              arguments présentés au procès. Il convient 
              de supposer que la Chambre de première instance a évalué 
              tous les éléments de preuve qui lui ont été 
              soumis, sauf indication contraire, quand par exemple il n’est pas 
              fait référence à un élément qui 
              aurait manifestement dû être mis en exergue. À 
              cet égard, la Chambre d’appel souligne qu’un appelant alléguant 
              une erreur de droit en raison de l’absence de décision motivée 
              doit identifier les constatations ou les arguments spécifiques 
              que la Chambre de première instance n’a, selon lui, pas abordés 
              et expliquer pourquoi pareille omission invalide la décision. 
              On ne peut se prononcer sur la qualité d’un jugement sur 
              la seule base de sa longueur ou en comparant le nombre de pages 
              consacrées à certaines questions particulières. 
              Ces moyens d’appel sont rejetés. 
            	Deuxièmement, les questions relatives 
              à l’acte d’accusation. Les appelants avancent que la Chambre 
              de première instance a commis une erreur de droit en les 
              déclarant coupables de crimes qui n’ont pas été 
              correctement exposés dans l’acte d’accusation, et dont ils 
              n’ont par conséquent pas été notifiés. 
              Les appelants font valoir en particulier que l’acte d’accusation 
              ne met pas en cause leur responsabilité sur la base d’une 
              participation à une entreprise criminelle commune. 
            	Il est établi que le Statut impose au 
              Procureur d’exposer dans l’acte d’accusation tous les faits essentiels 
              qui fondent les accusations portées, mais non les éléments 
              de preuve qui doivent établir ces faits. Un acte d’accusation 
              est vicié s’il n’expose pas les faits essentiels. Le caractère 
              essentiel d’un fait est déterminé par la nature de 
              la thèse de l’Accusation. Si l’Accusation fait appel à 
              la théorie de l’entreprise criminelle commune, elle doit 
              indiquer l’objectif de l’entreprise, l’identité des participants 
              et la nature de la participation de l’accusé à ladite 
              entreprise. L’acte d’accusation doit également préciser 
              la catégorie d’entreprise criminelle commune alléguée. 
              Cependant, dans certains cas, le caractère préjudiciable 
              d’un acte d’accusation vicié peut être purgé 
              si l’Accusation a fourni en temps voulu à l’accusé 
              des informations claires et cohérentes, concernant les faits 
              sur lesquels reposent les accusations portées contre lui, 
              ce qui contrebalance le fait que celles-ci ne lui ont pas été 
              indiquées de manière appropriée. 
            	La Chambre d’appel note que la participation 
              à une entreprise criminelle commune n’a été 
              alléguée contre les appelants ni dans l’acte d’accusation 
              initial, ni dans ceux qui ont suivi. Cependant, la Chambre d’appel 
              fait observer que l’Accusation a fourni en temps voulu des informations 
              claires et cohérentes aux appelants. Ces informations concernaient 
              les faits sur lesquels reposaient les accusations portées 
              contre eux et contrebalançaient le fait que l’acte d’accusation 
              ne les avaient pas informés de manière appropriée 
              de l’intention de l’Accusation de mettre en cause leur responsabilité 
              pour leur participation à une entreprise criminelle commune. 
              L’Accusation a traité de la question de l’entreprise criminelle 
              commune dans son mémoire préalable au procès 
              du 9 avril 1999, ainsi que dans sa version mise à 
              jour du 14 février 2000, puis dans sa déclaration 
              liminaire et dans sa nouvelle déclaration liminaire prononcée 
              après l’arrestation de Prcac et la suspension du procès 
              qui en a résulté. L’examen des arguments présentés 
              en première instance par les appelants confirme qu’ils étaient 
              informés du fait que leur participation à l’entreprise 
              criminelle commune serait un argument de l’Accusation au cours du 
              procès. 
            	Mladjo Radic et Miroslav Kvocka font également 
              valoir que la Chambre de première instance a commis une erreur 
              puisqu’elle s’est abstenue de faire des constatations pour chacun 
              des faits énumérés dans les annexes confidentielles 
              de l’acte d’accusation. Comme l’a fait observer la Chambre d’appel 
              par le passé, « les annexes d’un acte d’accusation en 
              font partie intégrante ». Les faits ou événements 
              mentionnés dans les annexes confidentielles constituent des 
              faits essentiels qui doivent être prouvés pour que 
              l’accusé puisse être tenu responsable des crimes qui 
              lui sont reprochés dans l’acte d’accusation. La Chambre d’appel 
              fait observer que la Chambre de première instance a fait 
              des constatations pour certains des faits énumérés 
              dans les annexes confidentielles et s’est assurée que des 
              crimes relevant de chaque catégorie d’infractions visées 
              dans l’acte d’accusation avaient effectivement été 
              commis, sans choisir de procéder à une analyse au 
              cas par cas pour chaque victime et pour chaque crime. La Chambre 
              d’appel estime qu’il aurait été préférable 
              que la Chambre de première instance fournisse une liste exhaustive 
              des faits établis sous-tendant chacun des crimes. Cependant 
              la Chambre d’appel a été en mesure de trouver dans 
              le jugement rendu en première instance un grand nombre de 
              constatations tendant à établir les crimes dont les 
              appelants ont été déclarés coupables. 
            	Le troisième moyen d’appel commun 
              a trait à l’entreprise criminelle commune. Les appelants 
              contestent les principes juridiques appliqués par la Chambre 
              de première instance pour conclure qu’ils avaient pris part 
              à une entreprise criminelle commune. La Chambre d’appel affirme 
              que l’entreprise criminelle commune constitue une forme de « commission » 
              au sens de l’article 7 1) du Statut et suppose une pluralité 
              de coauteurs agissant pour atteindre un objectif commun impliquant 
              la perpétration d’un crime visé dans le Statut. La 
              jurisprudence du Tribunal international a identifié trois 
              catégories d’entreprise criminelle commune. En l’espèce, 
              c’est la deuxième catégorie d’entreprise criminelle 
              commune qui était invoquée, la variante « systémique », 
              caractérisée par l’existence d’un système criminel 
              organisé, en particulier dans les affaires de camps de concentration 
              ou de détention. Les participants à une entreprise 
              criminelle commune de cette catégorie sont censés 
              avoir connaissance personnellement du système organisé 
              et avoir l’intention de contribuer à l’objectif criminel 
              concerté de ce système.  
            	Dans leurs arguments, les appelants soulèvent 
              des questions relatives à la distinction qu’il convient d’établir 
              entre la participation en tant que coauteur et la participation 
              en tant que complice à une entreprise criminelle commune. 
              La Chambre de première instance a considéré 
              que le coauteur d’une entreprise criminelle commune doit partager 
              l’intention de réaliser cette entreprise et en favoriser 
              activement la réalisation. Un complice, en revanche, ne doit 
              pas partager l’intention des autres participants ; il suffit 
              qu’il soit conscient du fait que sa contribution aide à perpétrer 
              ou facilite un crime commis par les autres participants. La Chambre 
              de première instance a estimé que l’intention commune 
              pouvait être déduite d’une connaissance de la nature 
              criminelle du projet et d’une participation continue et importante 
              à sa réalisation. Elle a concédé qu’il 
              pouvait être difficile d’établir une distinction entre 
              un complice et un coauteur, en particulier lorsque sont en cause 
              des accusés occupant des fonctions de niveau intermédiaire 
              qui n’ont pas commis personnellement de crimes. La Chambre de première 
              instance a toutefois estimé que lorsqu’un accusé avait 
              participé à un crime qui facilitait la réalisation 
              des objectifs de l’entreprise criminelle, il était plus probable 
              qu’il soit tenu responsable en tant que coauteur que comme complice. 
            	En outre, les appelants soulèvent tous 
              des questions relatives au degré de contribution requis pour 
              établir la participation à une entreprise criminelle 
              commune. Ils font notamment valoir que l’on ne saurait déduire 
              qu’il y a eu contribution importante de leur part en raison de la 
              position qu’ils occupaient dans le camp. La Chambre d’appel note 
              tout d’abord que pour établir la participation d’une personne 
              à une entreprise criminelle commune, il n’est pas nécessaire 
              que celle-ci ait matériellement participé à 
              l’un quelconque des éléments constitutifs des crimes 
              reprochés. La Chambre d’appel considère par ailleurs 
              qu’il n’est pas expressément requis en droit que l’accusé 
              ait contribué de manière importante à l’entreprise 
              criminelle commune. En pratique, toutefois, l’importance de la contribution 
              de l’accusé est un élément pertinent lorsqu’il 
              s’agit de démontrer que celui-ci partageait l’intention de 
              réaliser l’objectif commun. La Chambre d’appel affirme également 
              que le poste occupé de fait ou de droit par l’accusé 
              dans le camp ne constitue que l’un des éléments contextuels 
              que la Chambre de première instance doit prendre en considération 
              pour déterminer s’il a ou non participé à la 
              réalisation de l’objectif commun. Les pouvoirs dont était 
              investi l’accusé peuvent néanmoins être à 
              prendre en considération pour établir la connaissance 
              qu’il avait du système et sa participation à la mise 
              en œuvre ou au maintien de l’objectif criminel commun dont procédait 
              le système, ainsi que pour évaluer ultérieurement 
              son degré de participation dans le cadre de la fixation de 
              la peine. 
            	Les appelants laissent tous entendre qu’ils 
              n’étaient pas animés de l’intention requise pour contribuer 
              à la réalisation de l’entreprise criminelle commune 
              et qu’ils ne faisaient que leur travail. La Chambre d’appel remarque 
              qu’elle a confirmé à maintes reprises qu’il y avait 
              lieu d’établir une distinction entre l’intention et le mobile. 
              Il n’est pas nécessaire, pour que l’intention délictueuse 
              soit démontrée, que le coauteur éprouve une 
              satisfaction personnelle ou un enthousiasme quelconque, ni qu’il 
              décide de sa propre initiative de contribuer à l’entreprise 
              commune. 
            	Parmi les arguments juridiques avancés 
              par les appelants figure la question de savoir si l’Accusation doit 
              prouver l’existence d’un accord conclu entre l’accusé et 
              les autres participants à l’entreprise criminelle commune. 
              La Chambre d’appel estime que la jurisprudence est claire à 
              cet égard. L’entreprise criminelle commune requiert l’existence 
              d’un objectif commun qui consiste à commettre un crime ou 
              en implique la perpétration. Cet objectif commun ne doit 
              pas nécessairement avoir été élaboré 
              ou formulé au préalable ; il peut se concrétiser 
              de manière inopinée. 
            	Plusieurs arguments avancés par les 
              appelants semblent implicitement indiquer que ces derniers ne devraient 
              pas être tenus responsables de crimes commis alors qu’ils 
              ne se trouvaient pas dans le camp. Dans le cadre d’une entreprise 
              criminelle commune, il n’est pas nécessaire que le coauteur 
              commette physiquement l’un quelconque des éléments 
              matériels constitutifs du crime reproché. Le participant 
              à une entreprise criminelle commune ne doit pas non plus 
              être physiquement présent au moment et à l’endroit 
              où le crime est commis. Même s’il est possible en droit 
              qu’un accusé soit tenu responsable de crimes commis en son 
              absence, l’application de cette possibilité dépend 
              des éléments de preuve produits. 
            La Chambre d’appel en vient maintenant aux moyens 
              d’appel soulevés par chacun des appelants : 
            	Pour des raisons pratiques, la Chambre d’appel 
              abordera les moyens d’appel soulevés par les appelants dans 
              un ordre différent de celui qu’ils ont choisi dans leurs 
              mémoires respectifs. Le présent résumé 
              n’examine que les principaux arguments présentés. 
            Parlons d’abord de Miroslav Kvocka : 
            	Miroslav Kvocka affirme que la Chambre de première 
              instance a mal apprécié son audition par l’Accusation. 
              Il fait valoir que les éléments de preuve relatifs 
              à cette audition n’auraient pas dû être admis 
              et que, contrairement à ce qu’a conclu la Chambre de première 
              instance, rien dans l’audition en question n’étaye la thèse 
              selon laquelle il y avait des chefs d’équipe au camp d’Omarska. 
            	La Chambre d’appel ne considère pas 
              que la Chambre de première instance ait eu tort d’admettre 
              les éléments de preuve relatifs à l’audition 
              de Miroslav Kvocka. S’agissant de l’interprétation qui a 
              été faite du procès-verbal de l’audition, la 
              Chambre d’appel estime qu’un juge du fait aurait pu raisonnablement 
              tirer la même conclusion que la Chambre de première 
              instance. Ce moyen d’appel est donc rejeté. 
            	Dans son deuxième moyen d’appel, Miroslav 
              Kvocka soutient que la Chambre de première instance a conclu 
              à tort qu’il était de fait commandant en second du 
              service de garde. Il affirme que les éléments de preuve 
              ne l’établissent pas au-delà de tout doute raisonnable 
              et il conteste certains témoignages. Selon lui, il n’était 
              pas le second de Zeljko Meakic, commandant du poste de police d’Omarska 
              à l’époque, et ne remplaçait pas non plus Meakic 
              en son absence. 
            	La Chambre d’appel estime que le grief formulé 
              par Miroslav Kvocka est sans fondement. Miroslav Kvocka n’a pas 
              démontré qu’aucun juge du fait ne pouvait raisonnablement 
              conclure qu’il détenait de fait une position d’autorité 
              dans le camp. Pour parvenir à cette conclusion, la Chambre 
              de première instance s’est fondée sur un certain nombre 
              de témoignages. La plupart des arguments qu’avance Miroslav 
              Kvocka pour réfuter ces témoignages ne tiennent pas. 
              Un juge du fait pouvait raisonnablement conclure sur la base du 
              témoignage fourni par Miroslav Kvocka lui-même que 
              ce dernier agissait en qualité de second de Zeljko Meakic 
              lorsque Meakic était absent. La Chambre d’appel note en outre 
              que comme, dans l’acte d’accusation modifié, Miroslav Kvocka 
              est tenu responsable sur la base de l’article 7 1) du 
              Statut, le poste qu’il occupait officiellement dans la hiérarchie 
              de la police, qu’il s’agisse de commandant ou de commandant en second, 
              ne revêt aucune importance en ce qui concerne sa responsabilité. 
              Une personne ne doit pas nécessairement occuper un poste 
              officiel dans la hiérarchie pour que sa responsabilité 
              soit engagée sur la base de l’article 7 1). Ce 
              moyen d’appel est donc rejeté. 
            	Miroslav Kvocka soutient que la Chambre de 
              première instance a conclu à tort que l’élément 
              matériel et l’élément moral requis étaient 
              réunis pour établir sa responsabilité en tant 
              que coauteur dans le cadre d’une entreprise criminelle commune. 
              Il affirme en particulier qu’il n’avait pas connaissance de l’objectif 
              criminel commun et qu’il n’avait pas l’intention de contribuer à 
              la réalisation du système de mauvais traitements. 
            	La Chambre d’appel rappelle ici les constatations 
              de la Chambre de première instance : Miroslav Kvocka 
              a travaillé au camp entre le 29 mai 1992 environ 
              et le 23 juin 1992. Il a été absent du 2 au 6 juin 1992, 
              puis du 16 au 19 juin 1992. Il occupait un poste 
              important au sein du camp et avait une certaine autorité 
              sur les gardiens. Il avait suffisamment d’influence pour prévenir 
              certains sévices ou y mettre un terme mais ne s’est servi 
              de cette influence qu’à de très rares occasions. Il 
              s’acquittait diligemment de ses tâches et prenait une part 
              active à la marche du camp. Par sa participation, il a cautionné 
              aux yeux des autres participants ce qui se passait dans le camp. 
              Miroslav Kvocka n’a pas démontré en quoi les constatations 
              de la Chambre de première instance étaient déraisonnables. 
              Il est évident que, de par les fonctions qu’il exerçait, 
              Miroslav Kvocka a contribué à la gestion et au fonctionnement 
              du camp au quotidien et que, ce faisant, il a permis au système 
              de mauvais traitements qui y régnait de perdurer. 
            	Bien que Miroslav Kvocka ait pu participer 
              à l’entreprise criminelle commune, dans les premiers temps, 
              sans être conscient de la nature criminelle de celle-ci, les 
              faits de l’espèce prouvent qu’il n’aurait pas pu ne pas en 
              prendre conscience par la suite. La Chambre d’appel se rallie à 
              l’opinion de la Chambre de première instance selon laquelle, 
              faute d’éléments de preuve directs, l’intention de 
              Miroslav Kvocka peut être déduite des circonstances, 
              eu égard à l’autorité dont il jouissait au 
              camp, à la connaissance qu’il avait des crimes qui y étaient 
              perpétrés et à sa participation continue à 
              la marche de l’établissement. La Chambre d’appel estime qu’un 
              juge du fait aurait pu raisonnablement conclure, sur la base des 
              constatations de la Chambre de première instance, que Miroslav 
              Kvocka partageait l’intention de contribuer à la réalisation 
              de l’objectif criminel commun. Pour ces raisons, la Chambre d’appel 
              considère que la Chambre de première instance n’a 
              pas commis d’erreur lorsqu’elle a déclaré Miroslav 
              Kvocka coupable en tant que coauteur de crimes commis dans le cadre 
              de l’entreprise criminelle commune. Ce moyen d’appel est donc rejeté. 
            	Miroslav Kvocka soutient que la Chambre de 
              première instance l’a déclaré à tort 
              coupable de meurtre. Il avance que la Chambre de première 
              instance n’a pas apprécié comme il convenait les éléments 
              de preuve relatifs aux meurtres de prisonniers perpétrés 
              à Omarska entre le 24 mai et le 30 août 1992. 
              Selon lui, la Chambre de première instance n’a pas établi 
              qu’il avait commis des actes ou omissions en rapport avec le décès 
              de chacune des victimes. 
            	La Chambre d’appel doit tout d’abord examiner 
              le laps de temps pour lequel la responsabilité de Miroslav 
              Kvocka peut être engagée. La Chambre d’appel convient 
              avec Miroslav Kvocka que la Chambre de première instance 
              a décidé de ne pas le tenir responsable des crimes 
              commis avant son arrivée au camp. La Chambre de première 
              instance a également estimé qu’il ne pouvait être 
              tenu responsable des crimes commis après son départ. 
              Cependant, la Chambre d’appel considère que la Chambre de 
              première instance n’a pas limité la responsabilité 
              de Miroslav Kvocka à la seule période pendant laquelle 
              il travaillait effectivement au camp mais l’a tenu responsable des 
              crimes qui y ont été commis pendant la durée 
              de son service, qu’il ait été ou non présent 
              sur les lieux. 
            	Pour déclarer un accusé coupable 
              du crime de meurtre commis dans le cadre d’une entreprise criminelle 
              commune, il n’est pas nécessaire d’établir que ce 
              dernier a matériellement participé au meurtre. Il 
              suffit de démontrer que le décès de la victime 
              a résulté de la mise en œuvre d’un objectif criminel 
              commun et que la responsabilité de l’accusé est engagée 
              pour avoir contribué à la réalisation de cet 
              objectif. La Chambre d’appel juge que la Chambre de première 
              instance n’a pas commis d’erreur lorsqu’elle a déclaré 
              Miroslav Kvocka coupable de meurtre sans qu’ait été 
              établie sa participation matérielle à chacun 
              des meurtres reprochés. 
            	Miroslav Kvocka avance que la Chambre de première 
              instance l’a déclaré à tort coupable du meurtre 
              de certaines personnes identifiées. Pour les motifs exposés 
              dans l’Arrêt, la Chambre d’appel retient les arguments de 
              Kvocka relatifs aux meurtres d’Ahil Dedic et d’Ismet Hodzic et rejette 
              le surplus. La Chambre d’appel estime que ces deux erreurs ne sont 
              pas de nature à invalider la déclaration de culpabilité 
              prononcée à l’encontre de Miroslav Kvocka s’agissant 
              du chef 5, meurtres, dans la mesure où elle confirme 
              la déclaration de culpabilité prononcée pour 
              les meurtres de Mehmedalija Nasic et de Becir Medunjanin.  
            	Miroslav Kvocka soutient que la Chambre de 
              première instance a conclu à tort qu’il était 
              responsable des tortures infligées aux détenus du 
              camp d’Omarska. 
            	Contrairement à ce qu’affirme Miroslav 
              Kvocka, la Chambre d’appel fait observer que la Chambre de première 
              instance n’a pas exigé la preuve que l’un au moins des auteurs 
              des actes reprochés était un agent de l’État 
              pour que les actes en question soient qualifiés de torture. 
              En outre, la Chambre d’appel estime que la Chambre de première 
              instance n’a pas commis d’erreur de droit lorsqu’elle n’a pas exigé 
              que ce critère soit rempli, reprenant ainsi à son 
              compte l’arrêt Kunarac. Pour les motifs exposés 
              dans le présent Arrêt, la Chambre d’appel rejette les 
              griefs soulevés par Miroslav Kvocka au sujet de certains 
              actes de torture. 
            	Miroslav Kvocka affirme que la Chambre de première 
              instance l’a déclaré à tort coupable de persécutions, 
              un crime contre l’humanité. Il avance que les actes de persécution 
              doivent atteindre le même degré de gravité que 
              les autres crimes contre l’humanité prohibés par l’article 5 
              du Statut et que, par conséquent, les actes de harcèlement, 
              les humiliations et les violences psychologiques ne constituent 
              pas des persécutions. Il fait valoir que l’Accusation n’a 
              pas démontré au-delà de tout doute raisonnable 
              que les viols et les violences sexuelles allégués 
              ont été perpétrés pendant la durée 
              de son service au camp. Il fait également valoir que, comme 
              il lui était impossible d’influer sur l’emprisonnement ou 
              la libération des détenus, il n’aurait pas dû 
              être tenu responsable de leur internement dans des conditions 
              inhumaines. 
            	Miroslav Kvocka soutient par ailleurs que la 
              Chambre de première instance l’a déclaré à 
              tort coupable de persécutions, un crime contre l’humanité, 
              l’Accusation n’ayant pas démontré au-delà de 
              tout doute raisonnable qu’il était animé de l’intention 
              discriminatoire requise. Il souligne qu’il est marié à 
              une Musulmane de Bosnie et entretenait des rapports étroits 
              avec des non Serbes, qu’il était membre du Parti réformiste 
              d’Ante Markovic, de tendance modérée, et qu’il a été 
              relevé de ses fonctions au camp d’Omarska après qu’on 
              l’eut perçu comme un traître et soupçonné 
              d’aider des Musulmans de Bosnie.  
            	Pour la Chambre d’appel, il ne fait aucun doute 
              que, vu le contexte dans lequel les actes reprochés ont été 
              commis et compte tenu de leur effet cumulatif, les actes de harcèlement, 
              les humiliations et les violences psychologiques mentionnés 
              par la Chambre de première instance, de par leur gravité, 
              constituent des éléments matériels du crime 
              de persécutions. La Chambre d’appel estime également 
              qu’il n’importe aucunement que Miroslav Kvocka n’ait pas été 
              en mesure d’empêcher certains crimes puisque sa contribution 
              à l’entreprise criminelle commune englobant ces crimes a 
              été établie. 
            	S’agissant des viols et des violences sexuelles, 
              la Chambre d’appel juge que la Chambre de première instance 
              a eu tort de déclarer Miroslav Kvocka coupable de ces crimes, 
              étant donné qu’il n’a pas été établi 
              que ceux-ci avaient eu lieu au cours de la période pendant 
              laquelle il travaillait au camp d’Omarska. La Chambre d’appel retient 
              donc cette branche du moyen d’appel soulevé par Miroslav 
              Kvocka et annule la déclaration de culpabilité prononcée 
              à son encontre pour viols et violences sexuelles, qualifiés 
              de persécutions. 
            	La Chambre d’appel rappelle sa conclusion selon 
              laquelle la Chambre de première instance n’a pas commis d’erreur 
              en estimant que Miroslav Kvocka était animé de l’intention 
              de contribuer à l’entreprise criminelle commune mise en place 
              au camp d’Omarska. La Chambre d’appel est d’avis que, dans le contexte 
              propre à cette affaire, l’intention de contribuer à 
              l’entreprise criminelle commune et l’intention discriminatoire recouvrent 
              la même notion. Partant, la Chambre d’appel considère 
              que la Chambre de première instance n’a pas commis d’erreur 
              en concluant que Miroslav Kvocka possédait l’intention discriminatoire 
              requise. Hormis la branche relative aux viols et aux violences sexuelles, 
              ce moyen d’appel est donc rejeté.  
            La Chambre d’appel en vient maintenant aux moyens 
              d’appel soulevés par Mladjo Radic : 
            	Mladjo Radic fait valoir que la Chambre de 
              première instance a violé son droit à un procès 
              équitable et impartial en s’abstenant de faire des constatations 
              concernant chaque fait énuméré dans les annexes 
              confidentielles. Après avoir minutieusement examiné 
              les constatations de la Chambre de première instance, la 
              Chambre d’appel estime que contrairement à ce que soutient 
              Mladjo Radic, la Chambre de première instance ne l’a déclaré 
              coupable de certains chefs retenus dans l’acte d’accusation qu’après 
              avoir établi au moins certains faits qui sous-tendent chacun 
              d’entre eux. En conséquence, ce moyen d’appel est rejeté. 
             
            	Mladjo Radic reproche à la Chambre de 
              première instance de l’avoir déclaré coupable 
              de persécutions constitutives d’un crime contre l’humanité. 
              Il fait valoir qu’un acte n’est qualifié de discriminatoire 
              que s’il entraîne des conséquences discriminatoires, 
              et qu’il ne suffit pas d’établir que l’appelant savait que 
              ses actes étaient discriminatoires, mais aussi qu’il était 
              animé de l’intention consciente d’exercer une discrimination. 
              Mladjo Radic conteste la conclusion de la Chambre de première 
              instance selon laquelle l’intention discriminatoire requise à 
              titre individuel pour les persécutions peut être déduite 
              du caractère discriminatoire du camp d’Omarska.  
            	La Chambre d’appel considère que vu 
              les circonstances, il ne fait aucun doute que les crimes sous-jacents 
              ont été commis pour des raisons discriminatoires et 
              ont été discriminatoires dans les faits. La Chambre 
              d’appel est d’accord avec Mladjo Radic pour estimer que l’intention 
              discriminatoire ne saurait être directement déduite 
              du caractère discriminatoire général d’une 
              attaque qualifiée de crime contre l’humanité. Toutefois, 
              l’intention discriminatoire peut être déduite du contexte 
              dans lequel s’est inscrite l’attaque, à condition que les 
              circonstances entourant les crimes confirment l’existence d’une 
              telle intention. 
            	Mladjo Radic soutient également qu’il 
              ne partageait pas les objectifs visés par la politique discriminatoire, 
              et qu’il avait travaillé au camp contre son gré parce 
              que son supérieur lui en avait expressément donné 
              l’ordre. Selon la Chambre d’appel, il semble que Mladjo Radic n’établit 
              pas de distinction entre le mobile et l’intention. Elle estime que 
              la Chambre de première instance a eu raison de conclure, 
              sur la base de la connaissance qu’il avait de la nature des crimes 
              et de sa participation, en connaissance de cause, au système 
              de persécutions mis en place dans le camp, que Mladjo Radic 
              avait agi avec une intention discriminatoire. En conséquence, 
              ce moyen d’appel est rejeté.  
            	Mladjo Radic conteste diverses constatations 
              faites par la Chambre de première instance, et en particulier 
              celle qui concerne l’autorité dont il était investi 
              dans le camp. Il fait valoir que la Chambre de première instance 
              n’a pas établi au-delà de tout doute raisonnable qu’il 
              était chef d’équipe et qu’il occupait un poste de 
              responsabilité. Il soutient qu’il avait offert son aide aux 
              détenus « chaque fois que possible » et qu’il ne 
              l’a pas fait parce qu’il était investi d’une quelconque autorité, 
              et il ajoute qu’il n’exerçait pas un contrôle effectif 
              sur les gardiens de son équipe. La Chambre d’appel fait observer 
              que la Chambre de première instance s’est fondée sur 
              les déclarations d’un grand nombre de témoins pour 
              établir l’autorité de Mladjo Radic. Une lecture attentive 
              des déclarations de témoins sur lesquelles ce dernier 
              s’appuie pour contester la conclusion de la Chambre de première 
              instance montre qu’elles n’étayent pas ses arguments. Mladjo 
              Radic n’a donc pas démontré qu’aucun juge du fait 
              n’aurait pu raisonnablement parvenir à la conclusion tirée 
              par la Chambre de première instance.  
            	Mladjo Radic fait également grief à 
              la Chambre de première instance d’avoir conclu qu’il avait 
              violé, tenté de violer certaines personnes et commis 
              des violences sexuelles à leur encontre. Après avoir 
              examiné ces griefs et les preuves pertinentes, la Chambre 
              d’appel rejette, pour les motifs exposés dans l’Arrêt, 
              les arguments de Mladjo Radic.  
            	Dans ce moyen d’appel, Mladjo Radic reproche 
              à la Chambre de première instance d’avoir appliqué 
              en l’espèce la théorie de l’entreprise criminelle 
              commune. Il conteste la conclusion de la Chambre de première 
              instance selon laquelle le camp d’Omarska constituait une entreprise 
              criminelle commune. Il soutient que d’après les conclusions 
              de la Chambre de première instance, l’anarchie et le désordre 
              régnaient dans le camp et qu’à son avis, il n’est 
              guère plausible de parler de dessein commun. À supposer 
              même, ajoute-il, que ce dessein commun ait été 
              une réalité, les Appelants n’en avaient pas connaissance 
              et n’avaient pas pris part à son élaboration. Il soutient 
              également qu’il n’a pas participé délibérément 
              et intentionnellement au fonctionnement du camp. Il avance que loin 
              de là, le camp n’était pour lui qu’un simple lieu 
              de travail, un lieu auquel il était affecté sur ordre 
              de ses supérieurs.  
            	L’argument de Mladjo Radic concernant l’anarchie 
              et le désordre qui régnaient dans le camp ne tient 
              pas. L’existence du camp et la gestion du service de garde nécessitaient 
              un certain degré d’organisation. En effet, s’agissant de 
              l’intention de persécuter la population non serbe de la région 
              de Prijedor, le camp opérait avec une redoutable efficacité. 
              L’anarchie et le désordre auxquels la Chambre de première 
              instance a fait référence faisaient partie intégrante 
              des rouages du camp ; les gardiens pouvaient ainsi infliger 
              à l’envi des mauvais traitements aux détenus, mais 
              cela ne signifiait pas pour autant que leurs agissements étaient 
              ceux d’une bande désorganisée et ne s’inscrivaient 
              pas dans le cadre de l’entreprise criminelle commune. La Chambre 
              d’appel fait remarquer que Mladjo Radic reconnaît qu’il avait 
              connaissance des crimes commis dans le camp. Lorsqu’il avance qu’il 
              travaillait dans ce camp parce qu’il exécutait des ordres 
              et craignait les conséquences que le refus d’y obéir 
              pourrait entraîner, il confond intention et mobile. Dans la 
              mesure où il a pris part, délibérément 
              et en connaissance de cause, au fonctionnement du camp, ses mobiles 
              ne revêtent aucune importance s’agissant de la déclaration 
              de culpabilité prononcée à son encontre. Pour 
              ces raisons, ce moyen d’appel est rejeté.  
            La Chambre d’appel en vient maintenant aux moyens 
              d’appel soulevés par Zoran Zigic : 
            	Zoran Zigic a, à plusieurs reprises, 
              prié la Chambre d’appel de considérer son mémoire 
              en clôture comme faisant partie de son mémoire d’appel. 
              La Chambre d’appel rappelle qu’un appelant doit lui indiquer précisément 
              les paragraphes des jugements, les comptes rendus d’audience, les 
              pièces à conviction ou les sources auxquelles il est 
              fait référence afin qu’elle puisse s’acquitter efficacement 
              de sa tâche. Des références générales 
              aux arguments présentés au procès ne remplissent 
              pas cette condition et la Chambre d’appel n’en tiendra pas compte. 
             
            	Les griefs formulés par Zoran Zigic 
              portent sur l’acte d’accusation. La Chambre d’appel croit comprendre 
              qu’il conteste la présentation de l’acte d’accusation, et 
              en particulier les annexes, qui, selon lui, ont semé la confusion 
              et l’on gêné dans la préparation de sa défense. 
              La Chambre d’appel croit comprendre que Zoran Zigic se plaint de 
              ce qu’il a été déclaré coupable de certains 
              crimes qui n’étaient pas clairement exposés dans l’acte 
              d’accusation.  
            	Afin d’examiner ces griefs, la Chambre d’appel 
              doit déterminer si la Chambre de première instance 
              a prononcé des déclarations de culpabilité 
              en se fondant sur des faits essentiels dont l’acte d’accusation 
              modifié ne dit mot, et si tel a été le cas, 
              déterminer si le procès de Zoran Zigic a été 
              de ce fait inéquitable. Après avoir analysé 
              les exemples fournis par Zoran Zigic, la Chambre d’appel conclut, 
              pour les motifs exposés dans l’Arrêt, qu’il n’a subi 
              aucun préjudice du fait de l’imprécision de l’acte 
              d’accusation.  
            	Zoran Zigic relève que la Chambre de 
              première instance a commis une erreur de droit en appliquant 
              un critère juridique erroné pour déterminer 
              s’il était animé de l’intention requise pour les persécutions. 
              Il fait également valoir que les conclusions tirées 
              par la Chambre de première instance ne sauraient conforter 
              l’idée qu’il a agi avec une intention discriminatoire. En 
              outre, il avance que la Chambre de première instance s’est 
              trompée car les persécutions étaient motivées 
              non pas par des considérations religieuses ou ethniques mais 
              par une volonté de faire sécession.  
            	La Chambre d’appel estime infondé l’argument 
              de Zoran Zigic selon lequel la Chambre de première instance 
              a commis une erreur de droit dans la définition de la discrimination. 
              Elle considère également qu’il n’a présenté 
              aucun élément de preuve à l’appui de son argument 
              concernant la volonté de faire sécession. Le dossier 
              de première instance n’accrédite pas cette opinion 
              et aucun témoin n’a indiqué qu’on lui avait demandé 
              de s’exprimer sur la question de la sécession. La Chambre 
              d’appel fait observer que la Chambre de première instance 
              disposait de preuves en nombre lui permettant de conclure raisonnablement 
              que les détenus des camps d’Omarska, de Keraterm et de Trnopolje 
              s’y trouvaient en raison de leur appartenance religieuse, ethnique 
              et politique.  
            	Dans la plupart de ses moyens d’appel, Zoran 
              Zigic conteste les déclarations de culpabilité prononcées 
              à son encontre pour le meurtre de certaines personnes, les 
              tortures infligées à des personnes identifiées 
              et les sévices dont ont fait l’objet des victimes nommément 
              désignées. Après avoir soigneusement examiné 
              le Jugement et les preuves relatives à ces arguments, la 
              Chambre d’appel, pour les motifs exposés dans l’Arrêt, 
              rejette ces griefs s’agissant de toutes les personnes concernées. 
             
            	Outre le fait qu’elle l’a déclaré 
              coupable des crimes commis à l’encontre de personnes identifiées, 
              la Chambre de première instance a déclaré Zoran 
              Zigic responsable « des crimes commis au camp d’Omarska en 
              général », à savoir des persécutions, 
              des meurtres et des tortures. Zoran Zigic conteste cette conclusion 
              au motif qu’elle n’est pas étayée par les constatations 
              de la Chambre de première instance, et ajoute que celle-ci 
              a commis une erreur en concluant qu’il avait contribué de 
              manière importante au fonctionnement du camp.  
            	La Chambre d’appel estime qu’il n’est pas besoin 
              qu’une personne exerce des fonctions officielles dans le camp ou 
              appartienne au personnel de ce camp pour être tenue responsable 
              pour sa participation à l’entreprise criminelle commune. 
              Il est possible d’avancer que le fait que des visiteurs opportunistes 
              aient pu pénétrer dans le camp et maltraiter au hasard 
              les détenus a ajouté au climat d’oppression et de 
              peur qui régnait dans le camp. Toutefois, dans un tel cas, 
              la preuve d’une contribution importante au régime instauré 
              dans le camp s’impose pour établir la responsabilité 
              en vertu de la théorie de l’entreprise criminelle commune. 
              La Chambre d’appel n’entend pas minimiser la gravité des 
              crimes que Zoran Zigic a commis dans ce camp ; ils constituent 
              des violations graves du droit international humanitaire. Par ailleurs, 
              la Chambre de première instance a conclu que le camp était 
              le théâtre d’une « succession ininterrompue de 
              meurtres, d’actes de torture et d’autres formes de violences physiques 
              et psychologiques » et que « SlCes actes de brutalité 
              extrême y étaient généralisés ». 
              Cette violence n’était pas seulement le fait d’un petit groupe. 
              Les actes auxquels Zoran Zigic a participé, nonobstant leur 
              gravité, n’étaient que des détails d’un tableau 
              de violence et d’oppression généralisées. La 
              Chambre d’appel estime qu’en l’absence de preuves supplémentaires 
              portant sur la participation de Zoran Zigic au fonctionnement du 
              camp, aucun juge du fait n’aurait pu raisonnablement conclure, sur 
              la base des éléments de preuve présentés 
              devant la Chambre de première instance, que l’appelant a 
              participé à l’entreprise criminelle commune. La déclaration 
              de culpabilité prononcée à son encontre pour 
              les crimes commis au camp « en général » 
              est annulée.  
            La Chambre d’appel en vient enfin aux moyens 
              d’appel soulevés par Dragoljub Prcac : 
            	Dragoljub Prcac soutient que la Chambre de 
              première instance a accepté tous les arguments qu’il 
              avait présentés, et qu’en conséquence, elle 
              aurait dû l’acquitter de tous les chefs. La Chambre d’appel 
              considère que vu les conclusions énumérées 
              dans le Jugement, la Chambre de première instance n’a pas, 
              de toute évidence, accepté tous les arguments de l’appelant. 
              Ce moyen d’appel est, en conséquence, rejeté.  
            	Dragoljub Prcac s’attache ensuite à 
              ce qu’il appelle « la conformité de l’acte d’accusation 
              avec le jugement rendu en première instance ». Il fait 
              valoir que la Chambre de première instance a fait un certain 
              nombre de constatations relatives à des faits sur lesquels 
              l’acte d’accusation reste muet. La Chambre d’appel fait remarquer 
              que Dragoljub Prcac n’a pas exposé en détail les incohérences 
              entre l’acte d’accusation et le Jugement qui peuvent faire l’objet 
              d’un recours, à l’exception d’une référence 
              à la conclusion selon laquelle il exerçait les fonctions 
              d’auxiliaire administratif. Dans l’acte d’accusation, il est dit 
              que Dragoljub Prcac avait remplacé Miroslav Kvocka au poste 
              de commandant en second du camp d’Omarska. Toutefois, la Chambre 
              de première instance a conclu qu’il n’était pas commandant 
              en second du camp mais qu’il exerçait en fait les fonctions 
              d’auxiliaire administratif auprès du « chef de la sécurité ». 
              Dragoljub Prcac soutient qu’en faisant abstraction des éléments 
              figurant dans l’acte d’accusation et en concluant qu’il exerçait 
              les fonctions d’auxiliaire administratif, la Chambre de première 
              instance a, à tort, joué le rôle du Procureur 
              et l’a déclaré coupable sur la base de faits qui n’étaient 
              pas exposés dans l’acte d’accusation.  
            	La Chambre d’appel fait observer que la question 
              qui se pose est celle de savoir si la conclusion selon laquelle 
              Dragoljub Prcac exerçait les fonctions d’auxiliaire administratif 
              a une incidence sur sa responsabilité pour les crimes commis 
              au camp d’Omarska. La Chambre d’appel fait également remarquer 
              qu’au procès, la Défense n’a pas contesté la 
              description des tâches de Dragoljub Prcac qui figure dans 
              le Jugement, mais qu’elle l’a au contraire confirmée. Dans 
              son mémoire en clôture, l’appelant a lui-même 
              dit qu’il occupait « un poste administratif ». En conséquence, 
              il n’a pas démontré qu’aucun juge du fait n’aurait 
              pu raisonnablement aboutir à la conclusion de la Chambre 
              de première instance selon laquelle il exerçait les 
              fonctions d’auxiliaire administratif. Plus important encore, la 
              Chambre d’appel considère que l’intitulé utilisé 
              par la Chambre de première instance pour décrire le 
              poste qu’il occupait importe peu s’agissant de la conclusion selon 
              laquelle il était coauteur dans le cadre d’une entreprise 
              criminelle commune. La Chambre de première instance n’a pas 
              estimé que le fait d’exercer les fonctions d’auxiliaire administratif 
              permettait de conclure à la responsabilité pénale. 
              L’intitulé du poste servait uniquement à résumer 
              les tâches que Dragoljub Prcac accomplissait et qui se distinguaient 
              de celles des autres gardiens ou de leurs supérieurs. La 
              Chambre de première instance a, à juste titre, conclu 
              à la responsabilité de Dragoljub Prcac sur la base 
              des tâches qu’il accomplissait effectivement et non sur celle 
              d’un intitulé décrivant ces tâches. La Chambre 
              d’appel estime que Dragoljub Prcac n’a pas démontré 
              qu’aucun juge du fait n’aurait pu raisonnablement conclure, comme 
              l’a fait la Chambre de première instance, qu’il a contribué 
              de manière importante à l’entreprise criminelle commune 
              que constituait le camp d’Omarska. En conséquence, ce moyen 
              d’appel est rejeté.  
            	Dragoljub Prcac avance que la Chambre de première 
              instance a commis plusieurs erreurs de fait et de droit concernant 
              ses fonctions administratives, son rôle dans la préparation 
              et la lecture des listes de détenus, etc. Il affirme que, 
              si la Chambre de première instance n’avait pas commis ces 
              erreurs, elle « l’aurait certainement acquitté ». 
            	Dragoljub Prcac fait valoir que la Chambre 
              de première instance a constaté à tort que, 
              dans le mémoire préalable au procès, il avait 
              essentiellement prétendu qu’il n’était guère 
              qu’un auxiliaire administratif de Zeljko Meakic au camp d’Omarska. 
              L’appelant soutient qu’il n’a jamais rien prétendu de tel 
              et affirme qu’il n’accomplissait que ponctuellement des tâches 
              administratives. La Chambre d’appel estime que l’argument de Dragoljub 
              Prcac est infondé. La Chambre de première instance 
              n’a jamais dit que la thèse de la Défense était 
              que Prcac exerçait officiellement des fonctions administratives. 
              En constatant que la Défense prétendait, en bref, 
              que Dragoljub Prcac n’était guère qu’un auxiliaire 
              administratif de Zeljko Meakic au camp d’Omarska, la Chambre de 
              première instance analysait simplement la nature des tâches 
              qu’il accomplissait dans le camp en se fondant sur les éléments 
              de preuve présentés au procès, et sur le fait 
              que Dragoljub Prcac avait lui-même soutenu qu’il occupait 
              « un poste administratif ». La Chambre de première 
              instance a fait une appréciation parfaitement raisonnable 
              des éléments de preuve sur ce point. 
            	Dragoljub Prcac affirme également que 
              la Chambre de première instance a constaté à 
              tort que « SdCe nombreux témoins à charge SavaientC 
              confirmé la description faite par Prcac des tâches 
              administratives qu’il exerçait au camp ». Selon l’appelant, 
              aucun de ces témoins n’a qualifié ses tâches 
              d’administratives et rien dans leur déposition au procès 
              n’indique qu’il « s’occupait des tâches administratives » 
              du camp. De l’avis de la Chambre d’appel, la conclusion de la Chambre 
              de première instance selon laquelle Dragoljub Prcac exerçait 
              les fonctions d’auxiliaire administratif était fondée 
              sur la nature des tâches qu’il exécutait au camp, telles 
              qu’elles ont été décrites par plusieurs témoins 
              à charge et par l’appelant lui-même, et non sur l’intitulé 
              décrivant ces tâches. Au surplus, puisque la Chambre 
              de première instance n’a pas conclu que Dragoljub Prcac exerçait 
              officiellement les fonctions d’« auxiliaire administratif », 
              la Chambre d’appel estime qu’il importe peu que les témoins 
              entendus au procès n’aient pas dit expressément que 
              les tâches accomplies au camp par Dragoljub Prcac étaient 
              de nature administrative. 
            	En outre, Dragoljub Prcac affirme que la Chambre 
              de première instance a constaté à tort qu’il 
              avait la responsabilité de s’occuper des listes des détenus 
              qui étaient interrogés, transférés, 
              échangés ou remis en liberté. La Chambre d’appel 
              ne constate aucune erreur de la Chambre de première instance 
              sur ce point. Elle fait observer qu’outre les autres tâches 
              qu’il accomplissait dans le camp, également tenues pour acquises 
              par la Chambre de première instance, le fait de s’occuper 
              des listes de détenus donnait une indication sur la nature 
              de ses fonctions et de son autorité dans le camp. Aussi, 
              la Chambre d’appel ne voit aucune raison d’infirmer les conclusions 
              de la Chambre de première instance sur ce point. Dragoljub 
              Prcac conteste également les constatations de la Chambre 
              de première instance selon lesquelles il appelait les détenus 
              dont les noms figuraient sur les listes. La Chambre d’appel conclut 
              que les arguments de Dragoljub Prcac sont sans fondement. La Chambre 
              de première instance n’a jamais dit que Dragoljub Prcac avait 
              déclaré qu’il avait fréquemment accompli cette 
              tâche ou qu’il était le seul à le faire. Du 
              reste, la Chambre d’appel note que les épisodes pour lesquels 
              il est établi que Dragoljub Prcac avait appelé des 
              détenus ont simplement été considérés 
              par la Chambre de première instance comme une preuve de la 
              nature de ses fonctions dans le camp et qu’ils ne constituent en 
              aucun cas un crime dont il a été déclaré 
              coupable. Dragoljub Prcac avance que, puisqu’il ignorait tout du 
              sort réservé aux détenus qui avaient disparu 
              après avoir été appelés, la Chambre 
              de première instance a eu tort de le tenir pénalement 
              responsable de ce qui leur était arrivé. La Chambre 
              d’appel fait observer que Dragoljub Prcac n’a été 
              tenu responsable d’aucun crime commis à l’encontre de détenus 
              en particulier. La Chambre de première instance a au contraire 
              conclu qu’il avait pris part à une entreprise criminelle 
              commune visant à commettre des persécutions au camp 
              d’Omarska. En conséquence, le fait que Dragoljub Prcac ait 
              eu connaissance ou non du sort qui a été réservé 
              aux détenus disparus importe peu s’agissant de sa responsabilité 
              pénale au regard de l’article 7 1) du Statut. 
            	Dragoljub Prcac affirme en outre que la Chambre 
              de première instance a commis une erreur en concluant qu’il 
              ne travaillait pas dans le camp sous la contrainte. À propos 
              de la constatation de la Chambre de première instance selon 
              laquelle il « n’a jamais fait mention de ces menaces lorsqu’il 
              a été interrogé par l’Accusation », Dragoljub 
              Prcac affirme qu’il a bel et bien déclaré alors à 
              l’Accusation qu’il était venu travailler au camp sous la 
              menace, ce qu’il a réaffirmé dans son mémoire 
              préalable au procès et lors de la déclaration 
              liminaire, et qui a été confirmé par deux témoins. 
              La Chambre d’appel note que la constatation selon laquelle Dragoljub 
              Prcac n’a jamais fait mention de menaces lorsqu’il a été 
              interrogé par l’Accusation n’était que l’un des éléments 
              pris en compte par la Chambre de première instance dans sa 
              conclusion. Au vu de l’ensemble des éléments de preuve 
              présentés devant la Chambre de première instance, 
              la Chambre d’appel estime que Dragoljub Prcac n’a pas démontré 
              qu’aucun juge du fait n’aurait pu raisonnablement conclure qu’il 
              ne travaillait pas dans le camp sous la contrainte. 
            	Dragoljub Prcac fait valoir que, dans le Jugement, 
              la Chambre de première instance n’a pas fourni « la 
              moindre explication » à propos de la crédibilité 
              des témoins ni indiqué si elle considérait 
              qu’un témoignage était digne de foi et, le cas échéant, 
              dans quelle mesure. Il soutient en particulier que la Chambre de 
              première instance a commis une erreur en ne précisant 
              pas si elle était convaincue par le témoin Jesic et 
              par lui-même. 
            	La Chambre d’appel note que, contrairement 
              à ce qu’avance Dragoljub Prcac, les références 
              concernant l’appréciation que la Chambre a faite de la crédibilité 
              des témoins abondent dans le Jugement. En tout état 
              de cause, la Chambre d’appel estime qu’il n’est nul besoin qu’y 
              figurent les conclusions relatives à la crédibilité 
              de chaque témoin entendu. Au surplus, la Chambre d’appel 
              fait observer que Dragoljub Prcac ne soutient pas que tous les témoins 
              à charge, ni même certains d’entre eux, n’étaient 
              pas des témoins oculaires ou qu’ils ont déposé 
              devant la Chambre de première instance à propos de 
              faits dont ils n’avaient pas une connaissance directe. Dragoljub 
              Prcac n’a donc relevé aucune erreur de fait ou de droit. 
            	Dragoljub Prcac avance en outre que certains 
              témoignages ne cadraient pas avec les « faits réels » 
              et étaient en partie « mensongers ». La Chambre 
              d’appel constate que Dragoljub Prcac ne précise pas la conclusion 
              de la Chambre de première instance qu’il attaque dans cette 
              branche du moyen d’appel et qu’il ne mentionne aucun des faits à 
              propos desquels les témoins auraient fait des fausses déclarations. 
              Ce moyen d’appel est en conséquence rejeté.  
            	En dernier lieu, Dragoljub Prcac affirme qu’il 
              a été privé du droit à un procès 
              équitable car il n’a pas eu suffisamment de temps pour se 
              préparer convenablement au contre-interrogatoire et à 
              la présentation de la déposition de dix témoins. 
              La Chambre d’appel constate que cette question a été 
              soulevée devant la Chambre de première instance, qui 
              l’a tranchée. La Chambre d’appel s’est elle-même prononcée 
              sur ce point pendant le procès en première instance 
              dans le cadre d’un appel interlocutoire. En outre, les arguments 
              avancés par Dragoljub Prcac concernant la communication tardive 
              ou la modification des listes de témoins sont sans fondement. 
            	Dragoljub Prcac prétend également 
              que la Chambre de première instance n’a pas répondu 
              à sa demande de consultation de comptes rendus d’audience 
              provenant de l’affaire Sikirica. La Chambre d’appel note 
              que la Défense de Dragoljub Prcac a présenté 
              oralement cette demande à l’audience du 28 mai 2001 
              et que la Chambre de première instance a immédiatement 
              rendu une décision orale sur la question. Dragoljub Prcac 
              n’a pas démontré que la Chambre de première 
              instance avait commis la moindre erreur concernant cette demande 
              formulée oralement. Par ces motifs, le moyen d’appel en question 
              est rejeté. 
            La Chambre d’appel en vient maintenant à 
              la question de la sentence : 
            	Les appelants ont tous interjeté appel 
              de la sentence qui a été prononcée contre eux. 
              Miroslav Kvocka estime que la Chambre de première instance 
              n’a pas tenu compte de certaines circonstances atténuantes 
              dans la sentence et qu’elle a fixé une peine disproportionnée 
              par rapport aux autres peines prononcées par le Tribunal. 
              Dragoljub Prcac soutient que la Chambre de première instance 
              n’a pas tenu compte de plusieurs circonstances atténuantes 
              dans la sentence et qu’elle lui a de ce fait infligé une 
              peine trop lourde. Mladjo Radic avance que la Chambre de première 
              instance n’a pas suffisamment motivé la sentence, qu’elle 
              a retenu à tort certaines circonstances aggravantes, qu’elle 
              n’a pas accordé suffisamment de poids à certaines 
              circonstances atténuantes et que la comparaison de sa sentence 
              avec d’autres prononcées par le Tribunal montre que sa peine 
              devrait être réduite. Zoran Zigic soutient que la Chambre 
              de première instance n’a pas tenu compte de plusieurs circonstances 
              atténuantes. 
            	La Chambre d’appel rappelle que la fixation 
              de la peine est laissée à l’appréciation des 
              Chambres de première instance. La procédure d’appel 
              ne donne pas lieu à un nouveau procès, elle est au 
              contraire de nature corrective. C’est pourquoi la Chambre d’appel 
              ne substituera pas sa propre sentence à celle prononcée 
              en première instance sauf s’il peut être démontré 
              que la Chambre de première instance a commis une erreur manifeste. 
              La Chambre d’appel constate que la Chambre de première instance 
              a commis une erreur lorsqu’elle a refusé de retenir la reddition 
              volontaire de Zoran Zigic au Tribunal comme une circonstance atténuante. 
              Toutefois, il n’est accordé que peu de poids à cet 
              élément puisque Zoran Zigic était en prison 
              lorsqu’il s’est livré. Quant aux autres moyens d’appel relatifs 
              à la sentence, ils sont rejetés. 
            En résumé : 
            	Par ces motifs, qui sont exposés en 
              détail dans l’Arrêt, l’appel de Miroslav Kvocka contre 
              la déclaration de culpabilité prononcée à 
              son encontre pour les meurtres d’Ahil Dedic et d’Ismet Hodzic et 
              contre la déclaration de culpabilité prononcée 
              à son encontre pour viols et violences sexuelles sous la 
              qualification de persécutions, est accueilli. L’appel de 
              Zoran Zigic contre la déclaration de culpabilité prononcée 
              à son encontre pour les crimes commis au camp d’Omarska en 
              général est également accueilli, ainsi que 
              la branche du moyen d’appel selon laquelle la Chambre de première 
              instance n’aurait pas retenu sa reddition volontaire comme une circonstance 
              atténuante. Tous les autres moyens d’appel sont rejetés. 
            Je vais maintenant vous donner lecture du dispositif 
              de l’Arrêt dans son intégralité. 
            Messieurs les appelants, veuillez vous lever. 
            DISPOSITIF 
            Par ces motifs, LA CHAMBRE D’APPEL, 
             EN APPLICATION de l’article 25 du 
              Statut et des articles 117 et 118 du Règlement, 
            VU les écritures respectives des 
              parties et leurs exposés aux audiences du 23 au 26 mars 2004 
              et du 21 juillet 2004, 
            SIÉGEANT en audience publique, 
            À L’UNANIMITÉ, 
            S’AGISSANT DES MOYENS D’APPEL SOULEVÉS 
              PAR MIROSLAV KVOCKA : 
            NOTE le retrait du premier moyen d’appel 
              de Miroslav Kvocka, 
            ACCUEILLE partiellement le quatrième 
              moyen d’appel soulevé par Miroslav Kvocka en ce 
              qu’il a trait à la déclaration de culpabilité 
              en tant que coauteur de persécutions prononcée à 
              son encontre pour viols et violences sexuelles (chef 1), ANNULE 
              la déclaration de culpabilité prononcée à 
              son encontre sur la base de l’article 7 1) du Statut pour le 
              chef 1 (persécutions, un crime contre l’humanité) 
              en ce qu’elle a trait aux viols et aux violences sexuelles, et CONFIRME 
              pour le surplus la déclaration de culpabilité prononcée 
              à son encontre sur la base de l’article 7 1) du Statut 
              pour le chef 1, 
            ACCUEILLE partiellement le cinquième 
              moyen d’appel soulevé par Miroslav Kvocka en ce qu’il a trait 
              aux meurtres d’Ahil Dedic et d’Ismet Hodzic, ANNULE la déclaration 
              de culpabilité prononcée à son encontre sur 
              la base de l’article 7 1) du Statut pour le chef 5 (meurtres, 
              une violation des lois ou coutumes de la guerre) en ce qu’elle a 
              trait aux meurtres d’Ahil Dedic et d’Ismet Hodzic, et CONFIRME 
              la déclaration de culpabilité prononcée à 
              son encontre sur la base de l’article 7 1) du Statut pour le 
              chef 5 en ce qui concerne les meurtres de Mehmedalija Nasic 
              et de Becir Medunjanin, 
            REJETTE, pour le surplus, l’appel interjeté 
              par Miroslav Kvocka contre les déclarations de culpabilité 
              prononcées à son encontre, 
            CONFIRME la peine de 25 années d’emprisonnement, 
              tel qu'imposé par la Chambre de première instance. 
            S’AGISSANT DES MOYENS D’APPEL SOULEVÉS 
              PAR MLADJO RADIC :  
            REJETTE l’ensemble des moyens d’appel 
              soulevés par Mladjo Radic et CONFIRME la peine de 
              20 années d’emprisonnement, tel qu'imposé par la Chambre 
              de première instance. 
            S’AGISSANT DES MOYENS D’APPEL SOULEVÉS 
              PAR ZORAN ZIGIC :  
            ACCUEILLE les moyens d’appel soulevés 
              par Zoran Zigic concernant sa responsabilité pour les crimes 
              commis au camp d’Omarska en général, ANNULE 
              la déclaration de culpabilité prononcée à 
              son encontre sur la base de l’article 7 1) du Statut pour le 
              chef 1 (persécutions, un crime contre l’humanité) 
              en ce qu’elle a trait aux crimes commis au camp d’Omarska en général, 
              ANNULE la déclaration de culpabilité prononcée 
              à son encontre sur la base de l’article 7 1) du Statut 
              pour le chef 7 (meurtres, une violation des lois ou coutumes 
              de la guerre) en ce qu’elle a trait aux crimes commis au camp d’Omarska 
              en général, ANNULE la déclaration de 
              culpabilité prononcée à son encontre sur la 
              base de l’article 7 1) du Statut pour le chef 12 (tortures, 
              une violation des lois ou coutumes de la guerre) en ce qu’elle a 
              trait aux crimes commis au camp d’Omarska en général, 
              et CONFIRME la déclaration de culpabilité prononcée 
              à son encontre sur la base de l’article 7 1) du Statut 
              pour le chef 1, en ce qu’elle a trait aux crimes commis contre 
              Becir Medunjanin, Asef Kapetanovic, les témoins AK, AJ et 
              T, Abdulah Brkic, Emir Beganovic, Fajzo Mujkanovic, le témoin 
              AE, Redzep Grabic, Jasmin Ramadonovic, le témoin V, Edin 
              Ganic, Emsud Bahonjic, Drago Tokmadzic et Sead Jusufagic, CONFIRME 
              la déclaration de culpabilité prononcée à 
              son encontre sur la base de l’article 7 1) pour le chef 7 
              en ce qu’elle a trait aux crimes commis contre Becir Medunjanin, 
              Drago Tokmadzic, Sead Jusufagic et Emsud Bahonjic, et CONFIRME 
              la déclaration de culpabilité prononcée à 
              son encontre sur la base de l’article 7 1) du Statut pour le 
              chef 12 en ce qu’elle a trait aux crimes commis contre Abdulah 
              Brkic, les témoins T, AK et AJ, Asef Kapetanovic, Fajzo Mujkanovic, 
              le témoin AE, Redzep Grabic et Jasmin Ramadanovic, 
            REJETTE, pour le surplus, l’appel interjeté 
              par Zoran Zigic contre les déclarations de culpabilité 
              prononcées à son encontre,  
            CONFIRME la peine de 25 années d’emprisonnement, 
              tel qu'imposé par la Chambre de première instance. 
            S’AGISSANT DES MOYENS D’APPEL SOULEVÉS 
              PAR DRAGOLJUB PRCAC :  
            REJETTE l’ensemble des moyens d’appel 
              soulevés par Dragoljub Prcac et CONFIRME la peine 
              de cinq années d’emprisonnement, tel qu'imposé par 
              la Chambre de première instance, et enfin, 
            DIT, aux termes de l’article 118 du 
              Règlement, que l’Arrêt est exécutoire immédiatement, 
            ORDONNE, en application des articles 103 C) 
              et 107 du Règlement, que les appelants restent sous la garde 
              du Tribunal international jusqu’à ce que soient arrêtées 
              les dispositions nécessaires pour leur transfert vers l’État 
              auquel ils purgeront leur peine. 
            *** 
            Le texte intégral de l’Arrêt 
              disponible sur demande aux Services d’Information Publique ainsi 
              que sur le site Internet du Tribunal. Ce document est disponible 
              en anglais; sa traduction en français sera publiée 
              aussi rapidement que possible. 
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