Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL AFFAIRE N° IT-98-30-T

2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE

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4 Lundi 28 février 2000

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6 L'audience est ouverte à 10 heures 30.

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8 (Les accusés sont introduits dans le prétoire.)

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10 M. le Président. - Vous pouvez vous asseoir.

11 Bonjours Mesdames, Messieurs. Je salue les interprètes, le

12 personnel de l'audiovisuel...

13 L'interprète. - Bonjour, Monsieur le Président.

14 M. le Président. - ... l'accusation, la défense et les accusés.

15 Monsieur le Greffier, pouvez-vous annoncer l'affaire s'il vous

16 plaît ?

17 M. Abtahi. - Oui, bonjour Monsieur le Président. Il s'agit de

18 l'affaire IT-98-30-PT, le Procureur contre Miroslav Kovcka, Milovica Kos,

19 Nadio Radic et Zoran Zigic.

20 M. le Président.- Merci beaucoup.

21 Monsieur le Procureur, pouvez-vous présenter le banc du Procureur,

22 s'il vous plaît ?

23 M. Niemann (interprétation). - Bonjour Monsieur le Président,

24 bonjour Madame et Monsieur les juges. Je m'appelle Niemann. Je comparais

25 ici avec mon collègue M. Waidyaratne et Melle Reynders et M. Maager nous

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1 assistent sur le banc arrière.

2 M. le Président. - Merci beaucoup. Pour la défense, pouvez-vous

3 vous présenter, s'il vous plaît, par l'ordre de présentation des accusés ?

4 M. Simic (interprétation). - Bonjour Monsieur le Président. Je

5 m'appelle Krstan Simic et avec M. Branko Lukic, nous défendons M. Kovcka

6 dans ce procès. Merci.

7 M. le Président. - Merci beaucoup Maître Simic. Je profite de

8 l'opportunité pour saluer aussi votre co-conseil. Maître Nikolic ?

9 M. Nikolic (interprétation). - Bonjour Monsieur le Président, la

10 défense de l'accusé Milovica Kos est représentée par M. Eugène O'Sullivan,

11 co-défenseur, et Zarko Nikolic, moi-même, qui suis le défenseur principal,

12 ainsi que l'assistante juridique assise à ma droite.

13 M. le Président. - Merci. Maître Fila ?

14 M. Fila (interprétation). - Bonjour Monsieur le Président.

15 Monsieur Zoran Jovanovic et moi-même représentons la défense de M. Radic.

16 Merci.

17 M. le Président. - Merci. Maître Tosic ?

18 M. Tosic (interprétation). - Bonjour. Je m'appelle Simo Tosic et

19 je travaille avec Slobodan Stojanovic, avocat de Belgrade, pour défendre le

20 dernier accusé.

21 M. le Président. - Merci. Je salue toutes les personnes, tout les

22 co-conseils qui sont ici pour la première fois dans la salle. Je salue

23 aussi le public. Pour le bénéfice du public, je vous dis que nous sommes

24 dans la phase du déroulement du procès, de l'ouverture du procès. Nous

25 sommes donc, dans nos règles, à l'article 84, c'est-à-dire que nous allons

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1 avoir les déclarations liminaires du Procureur, qui seront suivies par les

2 témoignages des accusés M. Kovcka, M. Kos et M. Radic. Pour aujourd'hui,

3 nous allons avoir la déclaration préliminaire du Procureur et, demain, nous

4 aurons le témoignage de M. Kovcka.

5 Je passe donc la parole à Me Niemann. S'il vous plaît,

6 Monsieur Niemann, pour vos déclarations liminaires.

7 M. Niemann (interprétation). - Monsieur le Président, Madame et

8 Monsieur les Juges, au cours de mon intervention, ici, aujourd'hui, je vais

9 faire référence à un certain nombre de pièces à conviction documentaires et

10 au fur et à mesure que je me référerai à ces documents, vous pourrez les

11 voir sur les écrans de vos moniteurs.

12 Ces documents seront les principaux documents auxquels je ferai

13 référence au cours de l'audience de ce matin. Ils ont déjà été fournis à la

14 défense ; d'ailleurs la défense en dispose pour certains, depuis pas mal de

15 temps. L'intégralité de ces documents, hormis un, a été versée au dossier

16 sur ordonnance de la Chambre de première instance précédemment.

17 De façon à présenter, dans les meilleures conditions qui soient,

18 ces documents, je demande l'autorisation des membres de cette Chambre de

19 première instance pour que M. Saxon et Mme Reynders puissent s'approcher du

20 rétroprojecteur de façon à présenter les documents lorsque j'y ferai

21 référence le plus rapidement possible. Merci.

22 J'ai également préparé, Monsieur le Président, trois classeurs qui

23 contiennent des documents qui, par nature, ne sont pas véritablement des

24 pièces à conviction, mais en fait des copies de pièces à convictions qui

25 seront versées au dossier au cours du procès. Ce sont également des

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1 documents auxquels je ferai référence. Ils sont d'ailleurs dans l'ordre

2 correspondant à ce que je dirai dans mon intervention liminaire.

3 J'aimerais vous remettre ces classeurs, Monsieur le Président,

4 Madame et Monsieur les juges, de façon que vous les ayez sous les yeux au

5 moment où j'y ferai référence, à moins que vous ne préfériez les examiner

6 plus tard. En tout état de cause, vous n'avez pas nécessité absolue de les

7 examiner pendant que j'y fais référence au cours de cette audience, car ils

8 seront montrés sur les écrans et je lirai les extraits qui nous

9 intéresserons. Je ne vous demande donc pas de suivre religieusement ces

10 documents que vous avez dans les classeurs, mais je vous remets les

11 classeurs pour qu'ils vous aident dans votre travail ultérieur.

12 Ah je vois que vous les avez déjà. Très bien.

13 M. le Président. - Excusez-moi Monsieur le Procureur, vous pouvez

14 continuer ?

15 M. Niemann (interprétation). - Merci Monsieur le Président.

16 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, ce procès nous

17 présentera une politique gouvernementale de persécution et de nettoyage

18 ethnique. Le crime commis l’a été à grande échelle. Des questions

19 s'imposent : qui, quand, où, pourquoi et comment ? Ces questions illustrent

20 la magnitude du crime et, si nous les posons, nous pouvons commencer à

21 entrevoir l'importance de ces actes criminels.

22 Qui a commis le crime ? Eh bien ce crime a très certainement été

23 commis par un nombre de personnes plus important que celles qui

24 comparaissent ici aujourd'hui. Il s'agit d'un grand nombre de représentants

25 politiques, de policiers, de dirigeants militaires et de fidèles de la

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1 Républika Srpska. C'est cette entité fantoche qui est suspendue au fil que

2 tient la main de Slobodan Milosevic, qui a retourné la police et les forces

3 militaires contre le peuple qu'ils représentent dans une recherche de

4 participation à la réalisation d'une grande Serbie ethniquement pure.

5 Comment le crime a-t-il été commis ? Il a été commis entre

6 avril 1992 et les conséquences de ce crime sont, dans une certaine mesure,

7 ressenties encore par le peuple concerné aujourd'hui.

8 Mais que s'est-il passé en avril-mai 1992 ? Cela n'a pas été un

9 événement inattendu qui s'est produit par hasard. Il s'est agi d'une

10 campagne orchestrée, bien planifiée ; une campagne de terreur qui se

11 préparait depuis quelque temps déjà.

12 Où le crime a-t-il été commis ? Il a été commis dans une grande

13 portion de la Bosnie-Herzégovine, principalement au nord de Sarajevo et

14 plus particulièrement dans le secteur dominé par les Serbes de Bosnie qui

15 se trouvent au nord et à l'ouest de la République.

16 Pourquoi le crime a-t-il été commis ? Il a été commis parce qu'une

17 poignée de nationalistes fanatiques ethnocentrés avaient saisi le pouvoir

18 et avaient bien l'intention de contraindre, d'imposer ce fanatisme

19 nationaliste à l'ensemble de la population.

20 Comment le crime a-t-il été commis ? Il a été commis en soumettant

21 la population non serbe, principalement musulmane, bosnienne et croate, à

22 une campagne de terreur sauvage inhumaine et d'une brutalité inégalée, dont

23 on n'avait pas vu d’exemples en Europe depuis la Seconde guerre mondiale.

24 Ce procès vous présentera cette campagne de persécution à grande

25 échelle des Musulmans bosniens et croates soumis au pouvoir des Serbes de

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1 Bosnie. Il vous montrera comment les accusés qui comparaissent devant vous

2 ont participé à cette campagne de persécution et de terreur.

3 Pour comprendre les crimes dont il sera question, il est

4 indispensable de ne pas fermer les yeux devant la nature globale du crime.

5 D'ailleurs, ce ne serait pas la voie convenable. En effet, il ne s'agit pas

6 simplement de crimes, tels que viols ou passages à tabac. D'abord, ce sont

7 des crimes de persécution reposant sur une politique ; politique qui a été

8 mise en œuvre par un Etat sur sa population civile. Ce crime s'est produit

9 au cours d'un conflit armé. Il a été commis à grande échelle et de façon

10 systématique.

11 Heureusement, Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges,

12 vous n'avez pas à vous inquiéter des meurtres et viols et passages à tabac

13 réalisés au niveau intérieur en Bosnie pendant cette période. Les seuls

14 éléments dont vous devez vous préoccuper sont les meurtres, les viols et

15 les passages à tabac commis dans le cadre de ce crime de persécution.

16 Vous n'avez pas non plus compétence, Monsieur le Président, Madame

17 et Monsieur les Juges pour juger les Etats coupables de crime. Mais ce sont

18 les individus qui sont employés par l'Etat en question, et qui ont commis

19 des crimes, qui relèvent de votre compétence.

20 Le gros des éléments de preuve qui vous seront présentés ici vous

21 décriront trois camps de prisonniers situés au nord-ouest de la Bosnie et

22 qui ont fonctionné au cours du printemps et de l’été 1992 en tant

23 qu'instruments de la politique mise en oeuvre. Il vous permettra d'entendre

24 parler des actes et des omissions des quatre accusés responsables

25 directement ou indirectement des nombreuses atrocités commises dans ces

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1 camps.

2 Les éléments de preuve qui vous seront soumis vous prouveront au-

3 delà de tout doute raisonnable que des milliers de détenus musulmans et

4 croates ont souffert et sont morts dans ces camps de prisonniers en raison

5 de leur appartenance ethnique. Soit parce qu'ils étaient directement entre

6 les mains des accusés, soit parce qu'ils étaient entre les mains

7 d'individus qui relevaient de l'autorité des accusés. Ces accusés vont sans

8 doute tenter de vous faire croire que ce ne sont pas eux qui ont planifié,

9 instigué ou ordonné cette campagne de persécution et de terreur. Ils

10 tenteront de vous faire croire que cette campagne était décidée plus haut

11 et, d'ailleurs, c'est peut-être le cas dans une certaine mesure.

12 Mais comment un Etat commet-il un crime ? Un Etat n'a pas de

13 cerveau, il n'a pas d'aptitude physique. Ce sont donc les serviteurs de cet

14 Etat qui le font fonctionner ou qui sont à l'origine de son

15 dysfonctionnement, comme c'est le cas ici.

16 Cette campagne de discrimination, de persécution, cette entreprise

17 criminelle, est née en raison de l'existence d'instruments humains de

18 l'Etat et ce sont les accusés qui comparaissent ici qui sont à l'origine de

19 cette entreprise criminelle.

20 Pendant toute mon intervention, comme je vous l’ai déjà annoncé,

21 je vais faire référence à des documents qui ont été saisis par des

22 enquêteurs du bureau du Procureur de ce Tribunal en exécution de mandats

23 d'arrêt à Prijedor et dans la ville de Banja Luka. Je l'ai déjà dit : au

24 fur et à mesure que je ferai référence à ces documents, ils apparaîtront

25 sur les écrans de vos moniteurs.

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1 Je parlerai d'abord de la page 1 de chacun des documents, après

2 quoi je préciserai l'extrait dont je donnerai lecture.

3 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, avant 1992,

4 la municipalité de Prijedor était une région multiethnique relativement

5 pacifique. La population totale de cette municipalité se montait à peu près

6 à 112 000 personnes dont 50 000 étaient des Musulmans, 48 000 des Serbes et

7 6 000 des Croates ; le reste se définissant en tant que Yougoslaves ou

8 appartenant à d'autres nationalités.

9 Lorsque la campagne de persécution des Serbes de Bosnie-

10 Herzégovine s'est achevée, il ne restait que 6 000 Musulmans et

11 3 000 Croates à Prijedor qui, selon les dire des Serbes de Bosnie, vivaient

12 dans la peur et l'incertitude permanente.

13 La création et le fonctionnement des camps d’Omarska et de

14 Keraterm et de Trnopolje ont fait partie du plan mis au point par les

15 Serbes de Bosnie-Herzégovine pour réaliser le nettoyage ethnique de la

16 municipalité de Prijedor en supprimant tous les noms serbes de cette

17 municipalité. Les dirigeants serbes de Bosnie ont pris pour cible les

18 Musulmans et les Croates de Bosnie à qui ils ont imposé des persécutions.

19 Ils l'ont fait avant tout à l'égard des intellectuels et des représentants

20 politiques qui pouvaient faire pièce à leurs efforts pour créer une grande

21 Serbie.

22 Monsieur le Président Madame et Monsieur les Juges, la

23 persécution, cela signifie des attaques graves contre les droits humains

24 fondamentaux dans le but d’exclure la victime de la société en défendant

25 des objectifs discriminatoires.

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1 Les éléments de preuve qui seront présentés au cours de ce procès

2 permettront de prouver que les accusés comparaissant ici, et d'autres

3 soumis à leur autorité, ont emprisonné, frappé, torturé, agressé

4 sexuellement et assassiné un grand nombre des détenus musulmans et croates

5 qui se trouvaient dans les camps dont nous parlerons durant l'été 1992 et

6 ce, pour la seule et unique raison que ces victimes avaient une

7 appartenance ethnique déterminée.

8 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, vous verrez

9 des images de squelettes, de dénutris dans ces camps de détention de

10 Prijedor. Ces images ont choqué le monde entier lorsqu'elles ont été

11 diffusées pour la première fois en 1992.

12 Et je vous demande de permettre à l'accusation de partager

13 certaines de ces images avec vous. Nous avons donc, Monsieur le Président,

14 une séquence vidéo brève que j'aimerais vous présenter. Dans les premières

15 images vous verrez Radovan Karadzic à son quartier général, sur les

16 hauteurs à Pale. Il parle à des généraux et nie avec insistance l'existence

17 des camps de prisonniers.

18 La deuxième séquence a été filmée très peu de temps après cette

19 interview, au moment où des journalistes ont finalement obtenu

20 l'autorisation de visiter les camps. La visite a été retardée pour

21 permettre de placer à l'écart un certain nombre des prisonniers ayant le

22 plus souffert. Certains ont été envoyés à Manjaca, d'autres à Trnopolje

23 mais, finalement, les journalistes ont pu voir les prisonniers.

24 (Diffusion de la vidéo)

25 «Radovan Karadzic : Il y a certains endroits où nous avons des

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1 prisonniers de guerre mais l'existence de camps pour des civils, cela c’est

2 hors de question, hors de question».

3 M. Niemann (interprétation). -A ce moment-là, les conditions

4 étaient bonnes encore Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges.

5 «Journaliste : Depuis combien de temps êtes-vous ici ?

6 Plusieurs centaines de prisonnier ont dit être arrivés d’Omarska

7 ce matin-là»

8 M. le Président. - Est-ce que les accusés peuvent suivre les

9 images ?

10 (Les accusés font un signe de dénégation.)

11 Monsieur le Greffier, pouvez-vous...

12 (L'huissier s'exécute.)

13 M. Niemann (interprétation). - Peut-être devrions-nous,

14 Monsieur le Président, demander aux techniciens de bien vouloir rembobiner

15 la cassette de façon à recommencer la diffusion au début.

16 M. le Président. - Excusez-moi, mais nous avons un problème

17 technique donc je crois que nous devons faire une pause d'au moins

18 10 minutes pour que la question soit réglée afin que les accusés puissent

19 suivre les images. Donc nous devons faire une pause d’au moins 10 minutes.

20 Excusez-moi.

21 (Suspendue à 10 heures 55, l’audience est reprise à 11 heures 05.)

22 M. le Président. - J'espère que tout est réglé. Monsieur le

23 Procureur, excusez-nous pour cette interruption. Vous pouvez reprendre vos

24 déclarations liminaires.

25 Maître Niemann, s’il vous plaît ?

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1 M. Niemann (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

2 Eh bien compte tenu de l’interruption de la diffusion de la

3 séquence vidéo, je pense qu'il conviendrait de recommencer la diffusion. De

4 toute façon, elle n'est pas longue.

5 (Diffusion de la vidéo.)

6 «Radovan Karadzic : Il y a certains endroits où nous avons des

7 prisonniers, des prisonniers de guerre, mais l'existence de camps pour des

8 civils, c’est hors de question, hors de question.

9 Commentaires inintelligibles d'une journaliste.

10 Journaliste : Depuis combien de temps êtes-vous ici ?

11 Réponse : (inaudible).

12 Journaliste : Plusieurs centaines ont déclaré être arrivées

13 d'Omarska ce matin là ou d’un autre camp de détention.

14 Prisonnier : Nous sommes arrivés ici en provenance d'un autre

15 camp. Nous ne savions pas quelles étaient les conditions ici. Nous

16 admettons qu'elles sont un peu meilleures.

17 Journaliste : Comment étaient-elles auparavant ?

18 Prisonnier : Terribles !

19 Journaliste : Si la liberté est finalement accordée aux hommes

20 détenus dans ces centres de détention, il n'y a guère de chance que cela se

21 passe dans la partie de la Bosnie contrôlée par les Serbes.

22 Quand as-tu été amené ici ?

23 Prisonnier : Mercredi soir.

24 Journaliste : Je suis allé à Omarska. Je sais qu'aujourd'hui

25 Omarska est vide il n’y reste que 170 personnes.

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1 Que se passe-t-il dans le grand hangar en aluminium où vous vous

2 trouviez ?

3 Prisonnier : (inaudible).

4 Journaliste : Et les 2000 hommes ?

5 Prisonnier : (inaudible) ».

6 M. Niemann (interprétation). - Monsieur le Président, Madame et

7 Monsieur les Juges, nous avons établi l'existence de ces camps. A la fin de

8 mai 1992, les autorités serbes de Bosnie ont créé un camp de prisonniers

9 dans la mine d'Omarska qui se trouvait au sud-est de la ville de Prijedor.

10 Simo Drljaca était le chef de la police à Prijedor en mai 1992. Il a été

11 mis en accusation par ce Tribunal pour des crimes qui, pour certains,

12 correspondaient exactement à ceux pour lesquels les accusés comparaissant

13 devant vous aujourd'hui sont poursuivis. Simo Drljaca était le supérieur de

14 l’accusé Kovcka, de l'accusé Radic et de l'accusé Kos.

15 En juillet 1997, la SFOR a tenté de l'arrêter mais, au cours de

16 cette tentative d'arrestation, Drljaca a saisi un revolver, des coups de

17 feu ont été tirés. En conséquence de ces coups de feu, Drljaca a été blessé

18 mortellement mais ce, uniquement après qu'un jeune soldat britannique ait

19 été blessé lui aussi.

20 Eh bien c'est ce même Simo Drljaca qui a émis un ordre, le

21 31 mai 1992, en tant que chef de la police de Prijedor ; ordre dans lequel

22 il explique quelles seront la nouvelle utilisation de la mine d'Omarska. Je

23 demanderais maintenant que le premier document soit présenté à l'écran.

24 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, dans le

25 premier paragraphe de ce document, Simo Drljaca déclare que la zone

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1 industrielle correspondant à la mine d'Omarska sera utilisée en tant que

2 centre de rassemblement provisoire destiné à regrouper des prisonniers

3 capturés aux combats ou arrêtés en raison d'informations fournies au

4 service de sécurité.

5 On ne nous dit pas quelle est la nature de ces informations

6 opérationnelles fournies au service de sécurité, mais je déclare qu'à la

7 fin de la présentation des éléments de preuve de l'accusation, vous aurez,

8 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, une meilleure idée,

9 une idée plus précise de cet euphémisme.

10 Dans le deuxième paragraphe du texte, Simo Drljaca affirme : «Avec

11 les documents appropriés, les personnes mises en état d'arrestation seront

12 remises au chef de la sécurité qui a pour devoir, en même temps que les

13 coordinateurs à la sécurité nationale publique et militaire, de les placer

14 dans cinq lieux affectés au logement des détenus».

15 Monsieur le Président, vous verrez quelles sont les conditions qui

16 présidaient dans ce que Drljaca appelle «des lieux affectés au logement des

17 détenus ». Je suis sûr que vous constaterez que ces conditions étaient loin

18 d'être suffisantes.

19 Au paragraphe 3 du document, Simo Drljaca affirme : «Un groupe

20 mixte composé d'enquêteurs nationaux publics et militaires sera responsable

21 du classement des détenus. Ils qu'organiseront leur travail dans le respect

22 du principe de parité». Le lieutenant-colonel Nestorovic et deux autres

23 hommes Mirko Jesic notamment, seront responsables de ce travail».

24 Ensuite, nous passons au paragraphes 6 où Simo Drljaca affirme :

25 «Les services de sécurité du centre de regroupement seront assurés par le

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1 commissariat de police d'Omarska avec un nombre approprié de policiers

2 présents à tout moment au centre de regroupements, qui s'organiseront en

3 équipe de garde sur le principe d'un roulement des personnels». Les accusés

4 Kovcka et Radic sont originaires, Monsieur le Président, Madame et

5 Messieurs les Juges, du commissariat de police d'Omarska, ainsi que Zeljko

6 Mejakic, le commandant du camp.

7 Paragraphe 8 du document, nous lisons : «Les dirigeants vont sans

8 délai placer une barrière autour du bâtiment administratif du lieu de

9 détention à l'aide de fil de fer barbelés. Une barrière sera placée sur la

10 route d'Omarska, avec fourniture également d'eau potable. Les gardes

11 empêcheront toute personne non habilitée à s'approcher ou à pénétrer à

12 l'intérieur du centre de regroupement, conformément au règlement applicable

13 par les gardes en poste».

14 Au paragraphe 9, nous entendons Simo Drljaca affimer : "Les

15 représentants habilités de l'armée de la République serbe de Bosnie-

16 Herzégovine vont sans délai placer des mines sur le terrain dans le respect

17 des réglementations relatives à la pose de mines, qui incluent

18 l'établissement d'un plan de situation des mines placées avec

19 identification de celles-ci", etc.

20 Il n'y a aucune difficulté à voir qui a pénétré ou est sorti de

21 ces camps, Monsieur le Président. Personne, d'ailleurs n'a proposé, à

22 l'époque, un contrôle quelconque.

23 Au paragraphe 11 du document, nous lisons : "Les services de

24 sécurité et les coordinateurs de ces services soumettront un rapport

25 24 heures à l'avance au chef du poste de sécurité publique de Prijedor tous

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1 les jours à midi ou immédiatement lorsque les circonstances l'exigeront".

2 Paragraphe 15, Simo Drljaca affirme : "J'interdis le plus

3 strictement possible que des informations soient fournies au sujet du

4 fonctionnement de ce centre de regroupement. Tous les documents officiels

5 seront conservés au centre de regroupement et ne pourront être sortis de ce

6 centre ou détruits qu'avec l'autorisation du chef de poste de sécurité

7 publique de Prijedor. Cette responsabilité incombera au personnel de

8 sécurité".

9 A la lecture de ce document, Monsieur le Président, Madame et

10 Monsieur les Juges, nous voyons qu'il ne fait aucun doute que les

11 informations fournies au commandant l'étaient vers le haut et vers le bas

12 et avaient une nature confidentielle pour des raisons évidentes.

13 Donc Omarska a servi de centre de détention temporaire avec une

14 très grande efficacité aux fins de détention de prisonniers de guerre, mais

15 la plupart des détenus étaient des civils musulmans et croates. Omarska a

16 servi de camp pour des intellectuels, des enseignants, des hommes

17 d'affaires et des représentants politiques de haut niveau de la communauté

18 musulmane. Les autorités serbes de Bosnie ont baptisé Omarska "centre de

19 regroupement", cependant, les éléments de preuve vous montreront au-delà de

20 tout doute raisonnable qu'Omarska était un camp de prisonniers, un centre

21 d'interrogatoire, un endroit où meurtres, tortures, viols et autres

22 traitements cruels et inhumains étaient commis au quotidien.

23 Les gardes de ce centre de prisonniers, principalement des

24 policiers du commissariat d'Omarska, notamment les accusés Kovcka, Radic et

25 Kos, ont commis un grand nombre des crimes dont il sera question.

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1 Dans toutes les parties du centre d'Omarska utilisées à des fins

2 de détention, les lieux où étaient placés les prisonniers étaient

3 surpeuplés. Il y avait si peu d'espace ouvert dans certains cas que les

4 prisonniers ne pouvaient, ni s'asseoir, ni s'allongeer. Les détenus ne

5 pouvaient absolument pas se déplacer, à moins d'en avoir l'autorisation

6 explicite, notamment pour se rendre aux toilettes ou pour s'alimenter. Très

7 souvent, les gardes frappaient sauvagement les prisonniers lorsqu'ils se

8 rendaient aux toilettes de sorte que la plupart d'entre eux souhaitaient

9 satisfaire leurs besoins naturels dans leurs vêtements plutôt que de

10 prendre le risque de se soumettre à ces coups.

11 Ce camp de prisonniers n'offrait aucune literie aux prisonniers

12 qui se servaient souvent de leurs propres vêtements comme oreillers. Il a

13 fait très chaud au cours de l'été 1992 et les prisonniers n'ont reçu que

14 très peu d'eau. Cette eau qu'ils recevaient était souvent impropre à la

15 consommation et les prisonniers n'avaient aucune possibilité de se laver,

16 de sorte que les poux, la dysenterie et d'autres maladies résultant d'une

17 mauvaise hygiène étaient monnaie courante à Omarska.

18 J'aimerais à présent, Monsieur le Président, Madame et Monsieur

19 les Juges, appeler votre attention sur la maquette qui se trouve ici et je

20 demanderai à Mme Reynders de s'approcher de cette maquette pour nous

21 montrer un certain nombre des éléments qui y figurent lorsque leur nom sera

22 mentionné.

23 Vous constaterez que quatre bâtiments composaient le camp : le

24 bâtiment administratif, le hangar, le bâtiment qu'on a l'habitude d'appeler

25 "la maison blanche", ainsi qu'un autre bâtiment appelé "maison rouge" et la

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1 "pista", comme on l'appelait. Chacun de ces éléments avait un rôle

2 déterminé dans le fonctionnement du camp.

3 Le centre administratif, par exemple, abritait la cuisine et une

4 cantine au rez-de-chaussée où les prisonniers n'étaient autorisés à passer

5 que quelques minutes pour s'alimenter. Des rations de famine leur étaient

6 distribuées leur permettant uniquement de survivre. Il s'agissait de soupe

7 et d'une minuscule tranche de pain. Certains des prisonniers ont perdu

8 jusqu'à 20 à 30 kilos au cours des un à trois mois qu'ils ont passés dans

9 ce camp. D'autres prisonniers ont perdu davantage.

10 Au rez-de-chaussée se trouvaient également une grande pièce où

11 certain prisonniers étaient détenus, ainsi qu'un garage de plus petite

12 taille où d'autres prisonniers étaient détenus.

13 Je demanderai à présent à voir les photographies de ce secteur

14 administratif du camp.

15 Les bâtiments que nous regardons à présent se trouvent dans les

16 bâtiments administratifs. Au premier étage du bâtiment administratif, il y

17 avait huit pièces qui étaient utilisées pour des interrogatoires quotidiens

18 de prisonniers. Ces bureaux étaient utilisés à des fins administratives

19 concernant l'administration du camp et en tant que dortoirs pour à peu près

20 quarante femmes détenues à Omarska. Ces femmes étaient forcées à nettoyer

21 les pièces destinées aux interrogatoires alors que les murs et les sols de

22 ces pièces étaient souvent couverts par le sang, les restes de peau, des

23 cheveux, des dérivés grotesques de ce que les autorités serbes appelaient

24 par euphémisme "les traitements des prisonniers".

25 La plupart des femmes détenues étaient violées ou agressées

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1 sexuellement d'autre façon sur une base quotidienne, à savoir toutes les

2 nuits dans la zone de l'administration. Typiquement, un gardien

3 s'approchait, venait dans la pièce où se trouvaient les femmes, il

4 l'appelait et ensuite, on l'amenait à l'accusé Mlado Radic. Mlado Radic est

5 accusé de cela dans l'acte d'accusation.

6 Entre la cantine et le hangar se trouvait une cour cimentée en

7 forme de L et les prisonniers, pendant qu'ils mangeaient, étaient forcés de

8 traverser la "pista" en courant et pendant qu'ils couraient, ils recevaient

9 des coups. Souvent, ils devaient courir au milieu d'une haie formée des

10 gardiens qui les battaient à l'aide de crosses de fusils, de bâtons, des

11 poings ou de bottes. Là, beaucoup de prisonniers restaient sur la "pista"

12 quelles que soient les conditions météorologique.

13 C'est sur la "pista" que Slavko Ecimovic, un leader de la

14 communauté musulmane de Prijedor, a été brutalement battu devant les autres

15 prisonniers au mois de juin 1992. Avant qu'il ne soit capturé par les

16 forces serbes, M. Ecimovic était à la tête d'un groupe de combattants

17 musulmans peu armés dans un effort chevaleresque pour prendre le contrôle

18 de la ville de Prijedor. M. Ecimovic a été passé à tabac par un groupe de

19 prisonniers qui ont crié aux autres prisonniers : "Voilà votre meneur,

20 voilà votre oustasa, regardez-le maintenant !" A ce moment-là, les mains de

21 M. Ecimovic étaient bandées derrière son dos et ses deux joues étaient

22 percées par les barbelés.

23 Les bâtiments du hangar.

24 En temps de paix, on entreposait dans le hangar les camions et les

25 machines de la mine, mais au moment où la mine a servi comme camp de

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1 prisonniers, la plupart des prisonniers d'Omarska étaient placés dans le

2 hangar.

3 Je souhaiterais montrer la photographie de l'intérieur du bâtiment

4 du hangar. Vous pouvez voir les machines qui y sont toujours ; en tout cas,

5 on peut dire que cet endroit n'était pas convenable pour y placer les

6 prisonniers. Les escaliers étaient souvent utilisés aussi comme un endroit

7 d'hébergement des prisonniers et les prisonniers étaient obligés de vivre

8 dans ces conditions.

9 Au rez-de-chaussée, il y avait une pièce où il y avait beaucoup de

10 détenus et, au premier étage, qui est plus petit que le rez-de-chaussée, il

11 y avait aussi d'autres détenus.

12 La maison blanche.

13 Avant le conflit armé, la maison blanche était utilisée comme

14 dispensaire pour les mineurs blessés. Ironie du sort, c'est précisément

15 dans la maison blanche que l'on infligeait aux prisonniers d'Omarska le

16 traitement le plus brutal et qu'ils étaient souvent assassinés, souvent,

17 ceux qui ont été marqués pour recevoir un traitement spécial et qui étaient

18 considérés comme des extrémistes, par exemple des dirigeants des parties

19 civiles ou les membres du SDA, le parti politique musulman, et à

20 l'exception d'une seule femme, il n'y avait que des prisonniers mâles dans

21 la maison blanche.

22 Au cours de ce procès, vous allez entendre des témoignages que

23 Zoran Zigic, à l'intérieur de la maison blanche, mais aussi d'autres

24 personnes, ont brutalement battu à mort Becir Medunjanin pendant plus de

25 deux jours. Becir Medunjanin était le Président du SDA et des témoignages

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1 vont confirmer qu'il a reçu un traitement particulièrement cruel à cause de

2 son rôle proéminent au sein de la communauté musulmane.

3 La maison rouge. Dernier des quatre bâtiments dans le complexe, la

4 maison rouge a été utilisée comme atelier à l'époque du fonctionnement de

5 la mine. Quand cette mine a été convertie à l'usage du camp de prisonniers,

6 les prisonniers qui entraient dans la maison rouge disparaissait souvent à

7 jamais.

8 L'emplacement de corps. Presque tous les matins pendant la période

9 couverte par l'acte d'accusation, au moins cinq à dix corps et souvent plus

10 ont été empilés l'un sur l'autre à l'extérieur de la maison blanche pour

11 qu'ils puissent être transportés par des camions.

12 Les Serbes ont enterré la plupart de ces corps à côté des restes

13 du village de Kevljani, un village musulman qui se trouvait à 4 kilomètres

14 du camp d'Omarska, le village qui a été détruit par les forces serbes

15 pendant la campagne de nettoyage ethnique. Les corps étaient ensevelis dans

16 une série de tombes qui avaient été creusées dans un pré près d'une mosquée

17 rasée qui se dressait auparavant à Kevljani.

18 Le personnel du bureau du Procureur a exhumé 72 corps de ces

19 tombes, mais les moyens de preuve qui seront présentés au cours de ce

20 procès vont prouver qu'un nombre indéterminé de corps avaient été déplacés

21 de ces tombes avant le début des exhumations du bureau du Procureur.

22 Je souhaiterais montrer quelques photographies de ces exhumations.

23 Beaucoup des corps qui ont été exhumés ont montré que les blessures qui ont

24 été infligées aux prisonniers étaient des blessures d'armes blanches. Cette

25 personne avait sur elle les clefs de sa voiture. La plupart des victimes

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1 ont été enterrées avec leurs vêtements et beaucoup d'entre elles avaient

2 des blessures à la tête. A l'aide de l'analyse de l'ADN, les membres du

3 bureau du Procureur ont pu identifier plusieurs corps exhumés à Kevljani

4 comme étant des corps des ex-prisonniers du camp d'Omarska.

5 La fermeture du camp. Les autorités des Serbes de Bosnie à

6 Prijedor ont fait fonctionner le camp d'Omarska jusqu'au début août 1992

7 quand la presse internationale a découvert l'existence des camps et des

8 conditions terribles dans ces camps. Cette découverte faite par la presse

9 internationale ont forcé les Serbes de mettre un terme à leur activité

10 criminelle à Omarska et la plupart des prisonniers ont été transférés dans

11 d'autres camps de prisonniers à Trnopolje et Manjaca. La plupart des

12 prisonniers ont été battus et tués pendant les prétendus transferts, dans

13 un communiqué daté du 5 août 1992, Simo Drljaca, le chef de police de

14 Prijedor, que j'ai déjà mentionné, a décrit le résultat de ces prétendus

15 traitements des prisonniers à Omarska.

16 Je vais vous demander de montrer le document suivant. Dans cette

17 dépêche, il dit : "je vous informe que les postes de sécurité publique de

18 Prijedor, en coopération avec les centres de sécurité publique de Banja

19 Luka et l'armée de la République Serbe de Bosnie-Herzégovine, a achevé le

20 traitement opérationnel des prisonniers de guerre. L'enquête a établi des

21 éléments de responsabilité pénale. Dans 1 466 cas, nous possédons des

22 preuves valables que nous allons remettre avec toutes les personnes

23 concernées sous protection armée au camp de Manjaca. En ce qui concerne les

24 autres personnes de ce groupe, elles ne représentent pas un intérêt en

25 termes de sécurité et ils seront transférés au camp de Trnopolje ce même

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1 jour sous l'escorte. Le camp de Trnopolje est un endroit où se sont

2 réfugiés les membres des unités qui ont combattu du côté musulman."

3 Monsieur le Président, les moyens de preuve que nous allons

4 présenter vont permettre de déterminer quelle était la nature des

5 prisonniers de guerre.

6 Quand les prisonniers étaient déplacés d'Omarska le 6 août 1992,

7 un certain nombre de prisonniers ont été tués alors que d'autres ont

8 disparu. A peu près quatre-vingts prisonniers dans un état de santé

9 acceptable sont restés pour nettoyer le camp pour fournir une vitrine et

10 montrer que rien ne se passait à cet endroit. Quand nous disons "dans un

11 état de santé acceptable", nous pensons aux personnes que vous avez vues

12 dans la séquence vidéo.

13 Par conséquent, plus tard, les personnes qui étaient restés à

14 Omarska pour nettoyer le camp ont été par la suite transférées dans les

15 camps de Trnopolje et Manjaca et des centaines de personnes ont été tuées

16 dans la région lointaine de Vlasic le 21 août 1992.

17 Le 23 août 1992, Simo Drljaca a informé ses supérieurs

18 hiérarchiques à Banja Luka concernant les prisonniers qui ont été

19 transférés à Manjaca. Dans son communiqué, on voit qu'il dit comme suit :

20 "nous vous informons que les documentations requises concernant les

21 prisonniers de guerre qui avaient été transférés du centre d'interrogation

22 d'Omarska ont été transférés dans le camp de prisonniers de guerre de

23 Manjaca et ils ont été remis au commandant du camp de prisonniers de

24 Manjaca aujourd'hui."

25 Donc ces prisonniers étaient détenus dans ces conditions terribles

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1 dans ce que l'on a appelé "le centre de prisonniers de guerre de Manjaca".

2 Ainsi, les autorités de Prijedor étaient impliquées dans chaque étape de

3 cette campagne de persécution dirigée contre les Musulmans et les Croates.

4 Les forces de police des Serbes de Bosnie-Herzégovine étaient tellement

5 sûres de son pouvoir et de la justesse de leur cause qu'ils ont conservé

6 les archives détaillées concernant les activités criminelles.

7 Le camp de Keraterm.

8 L'usine de céramique de Keraterm était aussi une partie importante

9 de la campagne de persécution des Serbes de Prijedor. Le 25 mai 1992, cette

10 usine est devenue un centre de détention opérationnel détenant entre deux

11 mille et trois mille prisonniers. La plupart des prisonniers étaient de

12 nationalité musulmane et croate, des hommes venant de la région de

13 Prijedor. Ils étaient détenus dans 4 pièces dans un tel surpeuplement

14 qu'ils ne parvenaient, ni à s'allonger, ni à circuler, et ils reçevaient

15 des rations de famine.

16 Je vous prie de bien vouloir montrer la photo du camp de Keraterm.

17 On peut voir la façade de l'usine ainsi que la maison où se tenaient les

18 gardiens pendant le fonctionnement du camp. Dans le cadre du complexe

19 d'emprisonnement destiné aux Musulmans et aux Croates dans la région de

20 Prijedor, Keraterm était une partie-clef du plan des Serbes de nettoyer

21 ethniquement la région de Prijedor des non-Serbes en participant de leur

22 plein gré dans cette campagne de violence et de persécution et du fait de

23 leur position de supérieurs hiérarchiques, les accusés sont devenus des

24 membres importants de ce système répressif.

25 Les Serbes de Bosnie-Herzégovine ont souvent infligé des mauvais

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1 traitements aux prisonniers et en essayant aussi de casser leur moral. Les

2 prisonniers ne recevaient aucune aide médicale même après avoir été battus

3 ou torturés. Les corps des prisonniers étaient souvent empilés à

4 l'intérieur de pièces destinées à la détention ou bien souvent à côté de la

5 benne à ordures, à côté de l'usine, près de la pièce n° 4. Les gardiens,

6 souvent, forcaient les détenus qui ont survécu de porter les corps à

7 l'extérieur et de les charger dans les camions. C'est à Keraterm qu'à la

8 mi-juillet 1992, l'accusé Zoran Zigic, avec un certain nombre de gardiens

9 du camp, a brutalement battu les prisonniers, y compris Jasmin Izeiri,

10 Spija Mesic et Drago Tokmadzic devant les pièces de détention.

11 C'est à Keraterm que vers la fin juillet 1992, l'accusé Zoran

12 Zigic et d'autres personnes ont brutalement battu Emsud Bahonjic et Sead

13 Jusufagic, appelé "Car", et cela a duré pendant plusieurs jours. Emsud

14 Bahonjic est devenu aveugle à la suite de ces passages à tabac, ses membres

15 ont été cassés et il est mort d'une mort terrible.

16 M. Zigic et autres ont infligé aux prisonniers des actions

17 violentes et dégradantes en les forçant de s'allonger sur du verre brisé et

18 à commettre des fellations avec d'autres prisonniers.

19 De plus, c'est dans le camp de Keraterm qu'au cours du mois de

20 juin 1992, l'accusé Zoran Zigic et d'autres ont brutalement battu Fajzo

21 Mujkanovic, Senahid Cirkic et Fikret Alic. Ils ont battu un groupe de

22 prisonniers dans la pièce n° 3 y compris Fahrudin Hrustic et ils ont battu

23 un groupe d'à peu près dix-huit prisonniers qui avaient été informés dans

24 la pièce n° 2.

25 C'est à Keraterm qu'au cours de l'été 1992, que l'accusé Zigic a

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1 également brutalement battu le prisonnier Jasmin Ramadanovic, aussi connu

2 sous le nom de "Sengain".

3 Le camp d'emprisonnement de Keraterm était aussi le théâtre d'un

4 massacre sanglant de prisonniers musulmans de la région de Brdo autour de

5 Prijedor, une région qui comprend les villages de Hambarine, Carakavo,

6 Rakovcani, Biscani et Rizvanovici.

7 Autour du 20 juillet 1992, les forces serbes de Bosnie ont amené

8 un grand nombre de prisonniers de la région à Keraterm et les ont enfermés

9 dans la pièce n° 3 qui avait été vidée en préparation de leur arrivée.

10 Pendant deux jours, ces hommes et ces jeunes hommes n'ont pas reçu de

11 nourriture ni d'eau jusqu'à ce que le gardien du camp, membre de l'armée

12 des Serbes de Bosnie et des visiteurs du camp, y compris l'accusé Zoran

13 Zigic, ne les massacrent finalement à la mitrailleuse. A peu près deux

14 cents personnes innocentes ont été massacrées ce soir-là dans la pièce qui

15 est devenue connue sous le nom de la pièce n° 3, "la pièce du massacre".

16 Le camp de Keraterm a continué à fonctionner jusqu'au 6 août 1992.

17 A cette époque-là, après la découverte de l'existence du camp par la presse

18 internationale, la plupart des prisonniers a été transférée dans les camps

19 de Trnopolje et Manjaca. Le camp de Trnopolje se composait d'un groupe de

20 bâtiments qui comprenait une école, un centre municipal et un cinéma. La

21 majorité des milliers de prisonniers qui avaient été détenus au camp de

22 prisonniers étaient des personnes âgées, des femmes et des enfants.

23 Les femmes et les jeunes filles étaient souvent violées, souvent

24 la nuit, quand les forces serbes venaient pour appeler les prisonnières. En

25 général, il y avait peu de nourriture et pratiquement pas d'eau potable.

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1 Tout comme à Omarska et à Keraterm, les prisonniers ne pouvaient

2 pas entretenir leur hygiène personnelle. Des maladies se répandaient

3 rapidement et les personnes qui souffraient ne recevaient pas d'aide

4 médicale. La dysenterie était en particulier un problème sévère.

5 Les pièces à conviction qui seront présentées pendant ce procès

6 vont montrer comment l'accusé Zoran Zigic a battu un prisonnier nommé Hasan

7 Karabasic à Trnopolje pendant cet été fatal de 1992. De nombreux survivants

8 aux horreurs des camps d'Omarska et de Keraterm se sont retrouvés par la

9 suite à Trnopolje.

10 Je vais vous demander de bien vouloir placer la pièce à conviction

11 suivante. Il s'agit d'un rapport datant de 1993 concernant le travail du

12 poste de sécurité publique de Prijedor au cours des neuf derniers mois de

13 l'année 1990, où on parle de Trnopolje.

14 Il est dit dans ce communiqué : "le centre de réception de

15 Trnopolje est resté en place jusqu'en novembre. Et en plus des femmes et

16 des enfants, il y avait un grand nombre d’hommes musulmans en âge de se

17 battre, y compris des personnes qui, à cause de leur implication directe ou

18 indirecte dans la rébellion armée, ont passé un certain temps à Omarska et

19 à Keraterm. Plusieurs convois ont été organisés pour transporter ces

20 personnes vers Skender Vakuf, Bugojno, Karlovac et Gradiska. Nos policiers

21 ont participé dans l'escorte et ont assuré la sécurité de ces convois ».

22 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, le camp de

23 Trnopolje a servi comme un point final avant d'expulser des milliers de

24 Musulmans et de Croates qui étaient forcés de quitter la région de

25 Prijedor. Ceux qui ont été suffisamment fortunés pour survivre dans des

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1 conditions brutales de Prijedor ont été transportés par des autobus, par

2 les autorités serbes de Bosnie, vers d'autres régions de Bosnie-

3 Herzégovine, souvent en coopération avec la Croix-Rouge internationale.

4 Je vais vous demander de voir les documents suivants. Il s’agit de

5 la traduction d'un article de journal publié à Prijedor le

6 13 novembre 1992. Les choses ont débuté d'une façon inattendue pendant le

7 jour où le drame de Trnopolje et le centre de réception a atteint son

8 climat lorsque les dernières journées où les centres de détention, où les

9 gens étaient littéralement menacés par la mort et la famine.

10 La moitié de ces gens-là était internée et l'autre restait dans la

11 dernière semaine. Le point tournant était lorsque les gens sont arrivés de

12 Trnopolje de la Croatie. Cinq cents personnes sont arrivées lundi et il y

13 avait donc 3 200 personnes. On estime que la majorité de ces gens-là

14 étaient des internés, et le mercredi, il n'en restait que 1 500.

15 Finalement, à la fin, au centre de réception et dans la municipalité de

16 Prijedor, les émigrants potentiels ou l'entente sur les émigrants

17 potentiels que l'on attendait d'une façon impatiente devait être résolue au

18 centre de Trnopolje. Jusqu'à ce moment-là, il y avait 1 500 personnes. Des

19 détenus internés continuaient à avoir faim et à mourir de froid.

20 Les derniers prisonniers de Trnopolje détenus n’ont pas quitté le

21 camp jusqu'en décembre 1992. Je demande à voir le prochain document.

22 Monsieur le Président, ce document est un article de journal qui

23 s'appelle Kozarski Vjesnik. Il est daté du 4 décembre 1992.

24 Il dit : «Le centre de réception de Trnopolje n'existe plus. Après

25 avoir été en opération pour plus de 6 mois, il a fermé officiellement vers

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1 la mi-octobre. Le centre de réception a été vidé autour de midi le mardi. A

2 ce moment-là, il y avait 1 560 personnes détenues, quelques immigrants

3 potentiels de la municipalité de Prijedor sont retournés à la maison et le

4 reste des détenus a été placé dans des demeures abandonnées, et 150 dans

5 des demeures abandonnées de Donja Ljubjana.

6 Au mois de septembre 1992, Milomir Stakic, président de

7 l'assemblée de la municipalité de Prijedor, a expliqué que les prisonniers

8 de Keraterm, Omarska et Trnopolje, de ces camps-là, ont été déplacés ».

9 Nous pouvons regarder le prochain document. Votre Seigneurie, ce

10 document est un extrait du procès-verbal pris lors de l'assemblée au mois

11 de septembre de la municipalité de Prijedor. La partie pertinente de ce

12 document, si on pouvait le voir si vous plaît sur l'écran...

13 La partie pertinente est indiquée en bleu. Stakic a indiqué que

14 les deux raisons-clés qui ont motivé le cabinet à Pale de prendre une telle

15 décision, c'était la pression de l'opinion internationale publique et la

16 politique officielle ; également les coûts de maintenir au centre de

17 détention, des détenus.

18 Monsieur le Président, c'est le genre de documents qui vous

19 donnent les éléments de preuve pour déterminer la chaîne de commandement

20 qui existait entre le Dr Radovan Karadzic et les représentants

21 gouvernementaux serbes, et qui peuvent prouver qu'il y a eu une campagne de

22 persécution contre les Musulmans et les Croates de Prijedor. Ces camps de

23 détention étaient un élément très important dans la machine de la

24 persécution contre les Bosniaques de la part des Bosniaques serbes.

25 Bien sûr, il n'y avait aucune garantie que les prisonniers, qui

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1 ont survécu les horreurs de ces centres de détention, ne pouvaient survivre

2 le processus d'expulsion. Le 21 août 1992, dans une région lointaine,

3 appelée Koricani, un grand nombre de prisonniers ont été massacrés de sang-

4 froid, après qu'ils aient été transférés par autobus et par camions du camp

5 de Trnopolje. Ils ont été, de façon répétée, transférés de Trnopolje vers

6 une partie musulmane de la Bosnie-Herzégovine. Cet incident, Monsieur le

7 Président, Madame et Monsieur les Juges, est devenu connu de la part de

8 tous. Lorsqu’il est devenu un événement officiel bien connu, les autorités

9 de Banja Luka ont voulu prendre des actions officielles et dire qu'il y a

10 environ 150 Musulmans qui étaient tués à Koricani.

11 Le prochain document vous informe ou vous démontre qu'il y a une

12 ordonnance du chef de police, Stojan Zupljanin. C'était bien sûr le

13 supérieur de Simo Drljaca. C'est une ordonnance qu'il envoie à Simo

14 Drljaca : «Je t'ordonne de faire une enquête, de voir ce qui s'est passé

15 concernant la mort de 150 Musulmans dans la région de Skender Vakuf, dans

16 la municipalité. Vous devez informer ce ministère immédiatement des

17 résultats de votre enquête et, dans le cas où l'allégation a été confirmée,

18 nous allons commencer des procédures légales contre les auteurs de ces

19 actes ». C’est signé "ministre Mico Stansic".

20 «Il est donc nécessaire d'immédiatement prendre les déclarations

21 concernant les événements de Skender Vakuf de la part de ce policier qui a

22 escorté le convoi de Prijedor à la frontière de Travnik, le 21 août 1992».

23 C’est signé "Stojan Zupljanin".

24 Par contre, les auteurs de ce crime étaient bien moins intimidés

25 par de telles choses que l'opinion publique internationale, c'est pourquoi

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1 l'enquête ou la demande pour cette enquête n’a jamais eu lieu. Simo

2 Drljaca, le chef de police de Prijedor, a informé ses supérieurs d'une

3 façon arrogante que les policiers qui ont escorté le convoi le 21 août 1992

4 agissaient ou étaient en train de combattre donc n'étaient pas disponibles

5 pour coopérer avec les enquêteurs.

6 Voici sa réponse qui apparaît sur ce document. Il dit : «Pour

7 répondre à votre dépêche, le nombre et la date de la communication, nous

8 aimerions vous informer que nous ne sommes pas en mesure de conduire une

9 enquête concernant la mort d'un grand nombre de Musulmans dans la région de

10 Koricani puisque tous les policiers qui étaient impliqués dans le transfert

11 du convoi de Travnik, le 21 août 1992, ont été déployés sur le front Han

12 Pijesak depuis le 9 septembre 1992. De plus, nous sommes incapables de vous

13 donner la liste des gens, des citoyens qui voyageaient sur ces convois

14 puisque la station, ou le poste de police de sécurité publique, n'avait pas

15 organisé ce genre de convois, mais nous avons assigné un certain nombre de

16 policiers pour, bien sûr, permettre une sécurité physique pour l'armée et

17 la Croix-Rouge». C’est signé "Simo Drljaca".

18 L'accusé dans ce procès et les camps de détention de Prijedor…

19 Donc les accusés : trois de ces quatre accusés sont employés. Ils faisaient

20 partie intégrante de la campagne violente de persécutions que les leaders

21 des Serbes bosniaques ont orchestrée dans le nord-ouest de la Bosnie

22 en 1992. Permettez-moi de vous donner une information précise sur ces

23 accusés et leur façon d'agir dans les camps de détention de Prijedor.

24 L'accusé Miroslav Kvocka est né le 1er janvier 1957 dans le

25 village de Maricka, dans la municipalité de Prijedor, de la Bosnie-

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1 Herzégovine. Avant le conflit armé, il était un officier de police

2 travaillant pour la municipalité de Prijedor. Kovcka était le premier

3 commandeur de camp à Omarska en juin 1992. Il a été remplacé de ce poste

4 par Zeljko Mejakic. A ce moment-là, M. Kovcka est devenu commandant député

5 de ce camp, commandant principal. Kovcka était présent au camp d'Omarska

6 d'une façon quotidienne et a souvent démontré qu'il était en contrôle.

7 Quand Zeljko Mejakic n'était pas présent dans le camp, Kovcka recevait des

8 visiteurs serbes importants.

9 Grâce à la position qu’il détenait comme premier commandant,

10 l'accusé Kvocka était en position d'autorité supérieure ; tout le monde au

11 camp, à part Zejlko Mejakic, bien sûr lorsqu'il était présent. L'accusé

12 Milovica Kos, aussi connu sous le nom de Krle, est né le 1er avril 1963

13 dans le village de Lamovita, dans la municipalité de Prijedor

14 de la Bosnie. Avant le début du conflit, dans la région, il était un

15 policier en réserve attaché à la station de police d'Omarska. Monsieur Kos

16 était l'un des trois commandants gardiens d'Omarska. En tant que

17 commandant, il supervisait un grand nombre de gardiens. En tant que

18 commandant de quart, Kos rapportait seulement au commandant de camp,

19 Zeljko Meakic, et au commandant adjoint, qui est l'accusé Kovcka. Chaque

20 gardien de ce rang avait environ 30 hommes sous lui et pendant que Kos

21 travaillait pour Omarska, il avait le contrôle et le commandement de tous

22 les gardiens qui travaillaient sous lui.

23 L'accusé Mladorav Radic, également connu sous le nom de "Krkan",

24 est né le 15 mai 1952, également dans le village de Lamovita, dans la

25 municipalité de Prijedor, en Bosnie-Herzégovine. Avant le début du conflit,

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1 Radic, l'accusé, était un agent de police travaillant pour la rmunicipalité

2 de Prijedor et il travaillait au poste de police d'Omarska.

3 Radic était l'un des trois gardiens de quart du camp d'Omarska. Sa

4 position en tant que commandant d'équipe voulait dire qu'il était le

5 subordonné seulement de l'accusé Kovcka et le commandant de camp, qui était

6 le commandant de camp de Kovcka et Zeljko Meakic. Il était donc en position

7 de supériorité sur tous les gardiens qui travaillaient sur son quart ou

8 sous lui.

9 L'accusé Zoran Zigic est né le 20 septembre 1958, dans le village

10 de Balte, dans la municipalité de Prijedor de la Bosnie-Herzégovine. Avant

11 le conflit armé, il était chauffeur de taxi. Il n'avait pas de position

12 formelle au camp, mais entrait dans ce camp-là périodiquement pour battre,

13 torturer, tuer, harceler ou voler les prisonniers.

14 La preuve présentée pendant ce procès a démontré hors de tout

15 doute raisonnable que chacun des accusés avait assez de responsabilités

16 criminelles, telles que décrites à l'article 7 (1) du Statut du Tribunal,

17 pour des violations sérieuses des lois internationales humanitaires dans le

18 cadre du centre de détention d'Omarska entre le 24 mai et le 30 août 1992.

19 De plus, la preuve vous démontrera hors de tout doute raisonnable que tous

20 les accusés, à l'exception de Zoran Zigic, sont responsables, tel que

21 stipulé à l'article 7 (3), des actions criminelles de leurs subordonnés au

22 camp de détention d'Omarska pendant cette période telle que décrite dans

23 l'amendement. La preuve démontrera, hors de tous doute raisonnable, que

24 Kovcka, les accusés Kos et Radic savaient que leurs subordonnés allaient

25 commettre des actions criminelles ou avaient déjà commis des actions

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1 criminelles et n'ont rien fait pour prendre des mesures nécessaires ou pour

2 prévenir ces actions ou pour les punir.

3 Pour comprendre la nature discriminatoire de ces crimes commis par

4 les accusés, il est nécessaire de comprendre l'environnement politique dans

5 lequel tout cela est arrivé, et qui a mené à la création des camps

6 d'Omarska, Keraterm et Trnopolje.

7 Le Parti démocratique serbe, également connu sous le nom de SDS, a

8 été fondé dans l'été 1990, en Bosnie-Herzégovine. A l'époque, la SDS a

9 adopté un programme qui a élu le Dr Radovan Raradzic en tant que président.

10 Peu de temps après, les leaders du SDS ont commencé à ouvertement parler de

11 la formation d'une Grande Serbie. En septembre 1991, les leaders serbes de

12 Bosnie ont proclamé l'établissement de plusieurs régions autonomes serbes

13 dans le but de les séparer de la République et des agences gouvernementales

14 de Sarajevo, de cette façon créant une Grande Serbie.

15 Prijedor était située à l'intérieur de la Bosanska Krajina. Je

16 vais vous montrer maintenant sur la carte. La flèche indique l'emplacement

17 de la municipalité de Prijedor à cet endroit-là. Nous pouvons voir, tout

18 près, la ville de Banja Luka.

19 La région autonome comprenait également la ville de Banja Luka et

20 les municipalités aux alentours où les Serbes étaient majoritaires. La

21 plupart de ces municipalités étaient celles que la SDS voulait joindre à la

22 région autonome. En fait, même Prijedor a finalement été incluse en 1991.

23 Finalement, cela laissait Prijedor presque isolée des autres municipalités

24 qui se trouvaient autour de l'association serbe.

25 Les députés bosniaques serbes du Parlement de la Bosnie-

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1 Herzégovine ont fait une autre chose pour essayer de créer une Grande

2 Serbie, lorsqu'ils ont établi l'assemblée de la République du peuple serbe

3 de la Bosnie-Herzégovine le 24 octobre 1991. Cette assemblée représentait

4 le plus haut organisme du SDS. Le 9 janvier 1992, les leaders bosniaques

5 serbes ont proclamé la création d'une République du peuple serbe en Bosnie-

6 Herzégovine. Le 26 janvier 1992, les assemblées de la République de peuple

7 serbe de la Bosnie-Herzégovine ont adopté une résolution constitutionnelle.

8 Pourrais-je avoir le prochain document, s'il vous plaît ?

9 Monsieur le Président, ce document est un extrait des minutes de

10 l'Assemblée de la République des peuples serbes de la République de Bosnie-

11 Herzégovine, datées du 26 janvier 1992. J'aimerais attirer votre attention

12 seulement sur le paragraphe 3. «L'assemblée du peuple serbe de la Bosnie-

13 Herzégovine donne droit au conseil municipal et autres représentants des

14 gens du peuple bosniaque de la Bosnie-Herzégovine d'écrire la prochaine

15 Constitution, l'organisation des gens serbes de la Bosnie-Herzégovine

16 créant un Etat pour que la République de la Bosnie-Herzégovine puisse

17 fonctionner comme un Etat en soi».

18 Le paragraphe 4 indique la place. «La République des peuples

19 serbes de la Bosnie-Herzégovine se trouve dans l'Etat des peuples serbes.

20 La transformation démocratique de la Yougoslavie doit être conduite d'une

21 façon parallèle avec l'organisation de tous les peuples serbes pour les

22 intégrer dans une fédération serbe ou une union d'Etats serbes. Et

23 finalement, il est nécessaire de redéfinir immédiatement nos relations avec

24 les institutions fédérales yougoslaves, en particulier avec la JNA, donc

25 l'armée des peuples yougoslaves sur la base de nos intérêts communs et

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1 politiques».

2 La SDS ou les leaders du SDS ont justifié leurs actes par les

3 résultats d'un plébiscite qui voulait démontrer un soutien populaire pour

4 l'inclusion de la Bosnie-Herzégovine à l'intérieur d'une Yougoslavie

5 fédérative. Lors d'une rencontre de la SDS, de la municipalité de Prijedor,

6 qui a eu lieu en février 1992, un leader de SDS, appelé Srdjo Srdic, a

7 indiqué qu' «Il est important pour notre transformation, le plébiscite que

8 nous avons conduit, la création des Etats fait en sorte qu'il y a un grand

9 nombre qui a engendré l'émigration massive, une émigration importante et un

10 transfert ainsi que des échanges de territoires imminents».

11 Au début de 1992, les forces du SDS et les militaires de la région

12 ont commencé à établir des gouvernements municipaux parallèles et des

13 forces de police distinctes dans des régions telles que Prijedor. Le

14 Président du SDS, Radovan Karadzic, a répété la poussée des Serbes de

15 Bosnie en faveur de la création d'un Etat serbe lors de cette même réunion

16 du SDS à Prijedor.

17 Dans le document que vous avez présent sous les yeux, nous

18 lisons : «Nous sommes contraints de créer des communautés nationales dans

19 des territoires ethniquement purs. Il y aura renforcement maximum de

20 l'autorité dans les régions économiquement et politiquement où les

21 activités de la Krajina de Bosnie sont dirigées vers ce but. Une fois que

22 la situation dans le pays se sera calmée et que les conditions préalables

23 existeront, la volonté du peuple débouchera sur l'unification de tous les

24 territoires serbes et de toutes les communautés serbes».

25 En mars 1992, l'assemblée du peuple serbe de Bosnie-Herzégovine a

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1 promulgué la Constitution de la République serbe de Bosnie en se déclarant

2 République distincte. Durant le printemps de cette année-là, les Serbes de

3 Bosnie ont pris le contrôle de l'émetteur de télévision situé sur le mont

4 Kozara, ce qui a eu pour son conséquence que les résidents de la

5 municipalité de Prijedor ne pouvaient recevoir que des émissions de

6 télévision provenant de Belgrade ou de Novi Sad, en Serbie, ou encore de

7 Pale et de Banja Luka en Bosnie-Herzégovine. La télévision était un moyen

8 puissant pour les dirigeants des Serbes de Bosnie, qui leur permettait de

9 diffuser leur propagande raciste et hyper enthousiaste. Durant cette

10 période, les symboles du nationalisme serbe, notamment les drapeaux, les

11 chants et d'autres emblèmes ont été montrés de façon très fréquente.

12 Le 30 avril 1992, le SDS a effectué, sans effusion de sang, la

13 prise de la ville de Prijedor avec l'aide des forces militaires et

14 policières. Une dépêche émanant du poste de sécurité publique de Prijedor

15 ce jour-là, le jour de la prise du pouvoir, nous fournit quelques détails

16 au sujet de cet événement, notamment que dix postes de police comptant

17 1 587 membres ont été mobilisés, que toutes les convocations ont été

18 obéies, que personne ne s'est donc soustrait à son obligation de travail,

19 qu'à 4 heures du matin, conformément aux conclusions du Comité exécutif de

20 l'Assemblée serbe de la municipalité de Prijedor, le pouvoir a été repris

21 sur le territoire de la municipalité par prise de tous les biens des postes

22 de sécurité publique et par capture d'autres points stratégiques, que ces

23 actes ont été accomplis dans le cadre d'une synchronisation effective sans

24 qu'une seule balle de fusil ait été tirée, que le travail et le

25 fonctionnement normal du service ont été garantis par l'organisation de

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1 patrouilles et de gardes chargés de la sécurité, que des organismes

2 économiques et non économiques fonctionnent normalement, et la dépêche se

3 conclut par les mots : "Nous vous informerons en temps utile de nos actions

4 futures".

5 Les dirigeants du SDS de Prijedor ont été chargés de prendre le

6 contrôle de tous les aspects du gouvernement municipal ; ils l'ont fait

7 avec l'aide de l'armée de l'ancienne République fédérale socialiste de

8 Yougoslavie, mieux connue sous le nom de JNA.

9 Feu Milan Kovacevic a décrit la prise de la municipalité de

10 Prijedor dans une interview accordée à Radio Prijedor en 1995. Dans la

11 partie pertinente de l'interview, M. Kovacevic prononce les mots suivants -

12 je cite- :

13 "Tout a été très bien préparé et réalisé. Nous avons attendu le

14 moment que nous avions fixé et à la date prévue, à l'heure prévue, 4 heures

15 du matin, nous avons fait ce qu'il y avait à faire. A ma propre surprise et

16 à la surprise de nombre d'autres hommes, les choses se sont déroulées comme

17 elles avaient été planifiées. Je veux dire, on m'a dit... Enfin, la

18 direction de notre mouvement a annoncé que celui-ci allait commencer dans

19 28 minutes. Je me trouvais au poste du Président du Conseil exécutif et

20 Stakic occupait le poste de Président de l'Assemblée municipale. Tous les

21 organes du pouvoir étaient en place et ont commencé à fonctionner à partir

22 de ce moment-là. Donc 20 minutes après le départ de Cirkin Polje, les

23 organes municipaux ont repris leur travail comme si rien ne s'était passé.

24 Cela s'est produit sans une seule victime, sans qu'aucun coup de feu ait

25 été tiré, rien. Nous avons simplement repris nos bureaux respectifs et

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1 avons commencé à travailler comme si cela se passait depuis des siècles et,

2 Dieu merci, les choses se poursuivent encore de cette façon aujourd'hui".

3 Fin de citation.

4 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, plus de

5 1 500 hommes ont été mobilisés, organisés et déployés au cours de cette

6 prise du pouvoir réussie par les Serbes de Bosnie à Prijedor. Il s'est agi

7 d'une opération bien planifiée, extrêmement bien coordonnée, impliquant la

8 police, les responsables politiques et les forces militaires. A la fin du

9 mois d'avril 1992, les Serbes de Bosnie avaient repris le contrôle de la

10 municipalité de Prijedor, qu'ils avaient rebaptisée "municipalité serbe de

11 Prijedor", ce qui était une manifestation efficace de l'intensification de

12 la campagne des Serbes de Bosnie, campagne de persécution visant les

13 Musulmans et les Croates de la municipalité de Prijedor à des fins

14 d'élimination de ces populations dans la région.

15 Les autorités serbes de Bosnie avaient des motifs stratégiques

16 importants pour perpétrer leur campagne de persécution contre les non-

17 Serbes de Prijedor. La municipalité de Prijedor se trouve dans la région de

18 Krajina, au Nord-Ouest de la Bosnie. Cette municipalité se trouve dans l'un

19 des couloirs les plus importants qui va de l'Est à l'Ouest de

20 l'ex-Yougoslavie. Si vous regardez la carte qui se trouve sur vos écrans,

21 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, vous voyez donc ce

22 corridor, ce couloir qui se trouve ici et puis la zone frontalière où des

23 forces serbes d'occupation étaient en grand nombre. En tant que tel,

24 c'était donc un secteur d'une valeur incomparable pour les dirigeants

25 serbes de Bosnie qui aspiraient à créer la Grande Serbie car ce couloir

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1 servait de lien entre la Krajina croate contrôlée par les Serbes à l'Ouest

2 et la République de Serbie à l'Est. L'objectif ultime des dirigeants

3 politiques serbes de Bosnie consistait à créer une région autonome serbe de

4 Krajina unifiée dans laquelle se trouverait également la municipalité de

5 Prijedor, et à faire de cette région une Grande Serbie.

6 Document suivant. Eh bien, Monsieur le Président, Madame et

7 Monsieur les Juges, ce document est un extrait du procès-verbal d'une

8 réunion tenue par le Conseil municipal du SDS à Prijedor en décembre 1991.

9 Dans cet extrait, Milan Kovacevic déclare -je cite- : "Prijedor est le

10 secteur le plus important en Bosnie-Herzégovine. Nous sommes en temps de

11 guerre, ce qui rend notre travail plus difficile. Le moment est critique

12 pour la survie du peuple serbe, notamment en Bosnie-Herzégovine". Fin de

13 citation.

14 M. le Président. - Monsieur Niemann, est-ce qu'une pause vous

15 paraît opportune à ce moment ?

16 M. Niemann (interprétation). - Oui, tout à fait, Monsieur le

17 Président.

18 M. le Président. - Eh bien nous aurons donc une pause de

19 15 minutes.

20 (L'audience, suspendue à 12 heures 15, est reprise à

21 12 heures 40.)

22 M. le Président. - Donc nous avons prévu, Maître Niemann, que nous

23 pourrions aller jusqu'à 3 heures 30. Je vous dis, pour que vous puissiez

24 gérer le temps, que nous allons faire une période de travail d'une heure

25 vingt, puis nous ferons une pause. Vous avez la parole, vous pouvez

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1 continuer, Monsieur Niemann. Merci.

2 M. Niemann (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

3 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, le pouvoir

4 serbe à Prijedor et dans d'autres régions au nord-ouest de la Bosnie s'est

5 consolidé avec la création du terme "cellule de crise de la région autonome

6 de Krajina" ou "cellule de crise de l'ARK". Cet organisme était également

7 connu sous le nom d'état-major de guerre ARK. Au début du mois de mai 1992,

8 la cellule de crise ARK, qui occupait des locaux dans la ville de

9 Banja Luka, a repris tous les pouvoirs du gouvernement et des cellules de

10 crise municipales établis à Prijedor et a mis en oeuvre ses propres

11 décisions.

12 Par exemple, il y a eu des pressions intenses pour que les hommes

13 serbes de Bosnie répondent à la convocation de mobilisation. Le

14 10 juin 1992, la cellule de crise ARK a adopté une décision stipulant -je

15 cite-, que "seuls les enfants, les femmes et les hommes âgés étaient

16 autorisés à émigrer hors de la région autonome de Krajina si tel était leur

17 désir". Les hommes serbes de Bosnie, manifestement, étaient censés

18 combattre pour la cause serbe. Les hommes musulmans et croates qui

19 pourraient revenir un jour combattre pour récupérer leur maison n'étaient

20 pas autorisés à quitter la région.

21 En juin 1992, la cellule de crise de Prijedor a émis toute une

22 série d'instructions détaillées relatives à l'établissement, à la

23 composition et aux tâches assignées à l'état-major de crise local de la

24 municipalité de Prijedor. Les tâches fondamentales assignées aux états-

25 majors de crise locaux correspondaient aux instructions suivantes :

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1 "- exercer et coordonner le pouvoir sur le territoire local ;

2 - maintenir une protection efficace et défendre le territoire

3 local ;

4 - veiller à ce que toutes les exigences soient satisfaites pour

5 remporter le succès au cours des combats :

6 - contrôler la sécurité sur le territoire, défendre la sécurité

7 des citoyens et leurs biens ainsi que la sécurité des biens appartenant à

8 la société, veiller à une adhésion permanente aux réglementations

9 existantes ;

10 - maintenir la synchronisation permanente et la coordination des

11 mesures et des actions de l'armée et de la police dans la localité ;

12 - organiser et mettre en oeuvre des mesures préventives et

13 opérationnelles pour assurer la défense civile ;

14 - développer les formes les plus variées et les méthodes les plus

15 variées d'information et de propagande politique, organiser et relancer

16 l'économie, notamment l'agriculture (semailles, récoltes, moissons,

17 battage, fauchage, cueillette) et veiller à l'entretien des outils

18 agricoles également ;

19 - organiser les distributions, notamment la fourniture et le

20 transport de moyens techniques ;

21 - organiser les services médicaux et sociaux destinés aux blessés

22 et aux malades ;

23 - organiser une aide effective pour les familles et les

24 combattants morts au combat".

25 Ces instructions assignaient aux cellules de crise locales toute

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1 une série de tâches et, manifestement, leur donnaient un grand pouvoir. Les

2 cellules de crise municipales, telle celle de Prijedor, devaient faire

3 rapport quotidiennement à l'état-major de crise ARK s'agissant des mesures

4 prises pour mettre en oeuvre la politique discriminatoire décidée par le

5 Centre exécutif de Banja Luka.

6 Une fois que les Serbes de Bosnie ont repris le pouvoir à Prijedor

7 le 30 avril 1992, les conditions de vie des Musulmans et des Croates de

8 Bosnie de la municipalité de Prijedor se sont rapidement dégradées. Les

9 membres les plus éminents de la communauté musulmane et croate, notamment

10 les membrues du SDA, parti politique musulman, et du HEZ, parti politique

11 croate, ont été démis de leurs fonctions et ont fait l'objet de

12 harcèlement. Ici, vous voyez le procès-verbal d'une réunion du Conseil

13 municipal de Prijedor du SDS, le 9 mai 1992, qui montre bien comment a

14 débuté la politique discriminatoire et quelles pratiques ont été mises en

15 oeuvre pour lancer le processus de nettoyage ethnique généralisé qui a

16 caractérisé cette campagne. Lors de cette rencontre, Milan Kovacevic,

17 Président du Comité exécutif de l'Assemblée municipale, a

18 déclaré -je cite- :

19 "Le cabinet se réunira quotidiennement, il a adopté au moins

20 50 décisions dont les plus importantes sont les suivantes :

21 - remplacement des personnels, tous les dirigeants du SDA sont

22 démis de leurs fonctions au sein de l'Assemblée municipale ;

23 - le fonctionnement du gouvernement au niveau de la Krajina a déjà

24 donné des résultats ;

25 - des instructions et des décisions ont été prises, qui vont être

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1 communiquées au sommet de la hiérarchie ;

2 - les grandes entreprises et institutions se sont séparées de

3 Sarajevo ;

4 - les transactions financières ont repris ;

5 - le cabinet continuera à se réunir tous les jours ;

6 - toutes les mesures, décisions et conclusions doivent être

7 vérifiées par l'Assemblée

8 - et les Comités locaux du SDS doivent être plus actifs".

9 L'expulsion des Musulmans et des Croates de Prijedor est devenue

10 une priorité pour les autorités serbes de Bosnie. Le 26 mai 1992, soit

11 quatre jours avant que le chef de la police de Prijedor n'émette son ordre

12 relatif à la création et au fonctionnement du camp d'Omarska, la cellule de

13 crise ARK a émis une série d'ordres au nombre desquels nous trouvons

14 l'ordre n° 5 -je cite- :

15 "Un comité est créé, qui est chargé de négocier avec les membres

16 des autres nationalités et les membres de l'Herceg Bosna".

17 L'ordre n° 6 : "Une agence est créée, qui travaillera sur le

18 problème du transfert des populations". Fin de citation.

19 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, alors que

20 vous examinez ces documents et les témoignages de nombreuses victimes dans

21 le procès qui nous intéresse, j'espère que vous irez au-delà des mots

22 sobres qui sont utilisés dans les documents. Ces mots, en fait, masquent la

23 nature véritable des projets et de la politique des Serbes de Bosnie.

24 L'accusation, le Procureur, prouvera au-delà de tout doute raisonnable que

25 la solution mise au moins par les Serbes de Bosnie pour régler ce que ceux-

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1 ci appelaient "le problème de l'émigration de la population" a consisté en

2 une campagne généralisée, systématique et violente de nettoyage ethnique

3 destinée à tuer ou à expulser une majorité des Musulmans et Croates de

4 Prijedor. L'énormité de cette tâche criminelle a requis la participation

5 active et la coordination d'un certain nombre d'agences gouvernementales

6 dont l'armée, la police et les cellules de crise municipales et régionales.

7 Avant l'éclatement du conflit armé, le 5ème Corps de la JNA, basé

8 à Banja Luka, était la composante militaire la plus importante du pouvoir

9 dans la région de Prijedor. A partir du 19 mai 1992, date à laquelle la JNA

10 est censée avoir quitté la Bosnie-Herzégovine, le 5ème Corps de la JNA a

11 changé de nom pour s'appeler désormais 1er Corps de Krajina de l'armée de

12 la Republika Srpska. Cependant, le commandant général et les officiers

13 serbes sont restés les mêmes au sein de cette unité. Cette unité militaire

14 a été responsable du déploiement de l'artillerie et des troupes sur les

15 collines entourant la ville de Kozarac, ville à majorité musulmane située à

16 proximité de la ville de Prijedor.

17 Les Serbes de Bosnie ont justifié le début des expulsions de

18 Musulmans et de Croates par la violence dans la municipalité de Prijedor en

19 arguant du prétexte qu'une attaque aurait été lancée contre les Serbes.

20 Dans une dépêche datée du 26 mai1992, Simo Drljaca a informé ses

21 supérieurs de Banja Luka au sujet des événements se déroulant à Prijedor :

22 "Nous vous informons par la présente que les combats qui ont

23 commencé le 22 mai 1992 avec le meurtre et des blessures infligées à un

24 groupe de réservistes de l'armée, nous vous informons donc que ces

25 opérations se poursuivent sur le territoire de la municipalité de Prijedor.

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1 Une opération de nettoyage est actuellement en cours sur le territoire de

2 Kozarac, Kozarusa, Kamicani et Trnopolje, qui sont toutes des communautés

3 locales.

4 Dans d'autres secteurs périphériques peuplés de Musulmans dans la

5 municipalité ainsi que dans la ville en tant que telle, des tirs

6 sporadiques d'armes légères sont entendu de temps en temps, bien que les

7 armes aient été distribuées de façon organisée ou qu'elles aient fait

8 l'objet de confiscations lors des fouilles d'appartements et d'autres

9 bâtiments.

10 D'autres activités liées à celles-ci se poursuivront de façon

11 organisée et en coopération avec le pouvoir militaire et les membres du

12 service de sécurité nationale". Fin de citation.

13 Les attaques militaires réalisées par les forces combinées du

14 1er Corps de Krajina de l'armée des Serbes de Bosnie et par des réservistes

15 de l'armée de Prijedor ainsi que des policiers de la police régulière et de

16 la réserve de Prijedor et par des unités paramilitaires organisées et

17 équipées par le SDS, ces opérations nous montrent l'existence d'un schéma,

18 schéma dans le cadre duquel des quantités importantes d'armes lourdes sont

19 utilisées d'abord pour pilonner les quartiers non serbes et réduire toute

20 tentative de résistance. Les groupes paramilitaires de Serbes de Bosnie ont

21 systématiquement encerclé les quartiers musulmans et croates pour en

22 expulser la population non serbe et, comme nous le voyons ici, les

23 résultats de cette campagne menée par les Serbes sur la population

24 musulmane de Prijedor sont tout à fait apparents. Ce sont des images de

25 Kozarac. Je vous prie de m'excuser... Il s'agit ici d'images de la ville de

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1 Kozarac.

2 Nous circulons dans la rue principale de la ville ; nous voyons

3 que les maisons et les commerces détruits sur ces images étaient des

4 bâtiments appartenant en majorité à des Musulmans. Ici, nous nous

5 approchons du camp et nous voyons certains bâtiments intacts. En général,

6 lorsqu'un bâtiment est intact, il était la propriété d'un Serbe. Nous

7 constatons également le caractère méticuleux de la campagne qui a été

8 menée, puisque seules des propriétés musulmanes ont été détruites.

9 Compte tenu de l'importance des destructions, la population

10 n'avait nulle part où aller. Leurs habitations ont été détruites, mais pas

11 seulement. En effet, les monuments du culte ont été détruits également,

12 comme cela a été le cas pour la mosquée que vous voyez actuellement,

13 mosquée qui, en tout état de cause, n'était pas une cible militaire.

14 Nous avons vu, il y a quelques instants, un côté de la rue. Ici,

15 nous voyons l'autre. Nous nous dirigeons vers le centre de Kozarac. Comme

16 je viens de le dire, les monuments et lieux du culte ont été attaqués

17 également, mais pas tous. Cela n'a pas été le cas de cette église orthodoxe

18 serbe de Kozarac, comme vous pouvez le voir sur cette image.

19 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, suite à ces

20 attaques, les groupes paramilitaires serbes ont encerclé systématiquement

21 les quartiers musulmans et croates pour en expulser la population non

22 serbe. Les personnes qui ont échappé à la capture se sont enfuies vers les

23 montagnes et les forêts environnantes. Quant à la plupart des femmes et des

24 enfants qui avaient été capturés, ils ont été emmenés vers le camp de

25 détention de Trnopolje. Les hommes, par ailleurs, ont en général été

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1 emmenés vers les camps d'Omarska ou de Keraterm. Très fréquemment, les

2 civils ont été interrogés au poste de police de Prijedor avant d'être

3 transférés à Omarska ou dans d'autres camps de prisonniers.

4 Document suivant : ce document est un extrait du quotidien

5 Kozarski Vjesnik, daté du 19 novembre 1993. Dans le passage pertinent de

6 cet article, nous lisons les mots qui suivent : "Suite aux soulèvements

7 armés, des centres d'accueil ont été créés à Keraterm, Omarska et

8 Trnopolje. Dans ces centres, des officiers du SJB, poste de police,

9 emmenaient les habitants pour interrogatoire dans le cadre d'opérations

10 destinées à assurer la sécurité et le traitement de ces habitants".

11 Les autorités serbes de Bosnie, et notamment les accusés qui

12 comparaissent devant vous, ont enfermé les civils musulmans et croates pour

13 toutes sortes de raisons artificielles et très douteuses. L'une des

14 justifications apportées à cet acte d'emprisonnement résidait dans un lien

15 de famille unissant la personne en question à un dirigeant politique

16 musulman.

17 Document suivant. Par exemple, dans une note manuscrite émanant du

18 poste de police de Prijedor, un responsable du poste de police a écrit ce

19 qui suit : "Puisque Kapetanovic est le beau-frère de Muhamed Cehajic, il y

20 a des raisons de croire qu'il connaissait les actions illégales du SDA. Des

21 informations indiquent sa participation à un crime en col blanc et indique

22 également qu'il a pris des sommes d'argent destinées à le corrompre, et

23 qu'il a adopté une attitude nationaliste à l'égard des responsables de

24 nationalité serbe. Par conséquent, un traitement ultérieur doit avoir lieu

25 au centre d'Omarska Il est, en effet, recommandé".

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1 Eh bien, Monsieur le Président, le terme «traitement» a un sens

2 tout à fait particulier dans ce contexte ; en tout cas, au cours de

3 l'été 1992. Par exemple, Muhamed Cehajic, l'homme auquel il est fait

4 référence dans ce document, était Musulman et, avant l'éclatement du

5 conflit armé, président du Conseil exécutif de Prijedor ; poste équivalent

6 à peu près à celui du maire d'une ville dans d'autres régions du monde.

7 C'est une des victimes du conflit dont le nom figure dans l'acte

8 d'accusation modifié, en annexe de cet acte d'accusation modifié.

9 Au cours du présent procès, vous entendrez des dépositions qui

10 vous diront comment Muhamed Cehajic a été vu dans le bâtiment administratif

11 du camp d'Omarska, couvert d'ecchymoses, et qui vous montreront que

12 M. Cehajic a été emmené le 26 juillet 1992, ou aux environs de cette date,

13 et n'a plus jamais été revu depuis.

14 Souvent, les membres musulmans du SDA étaient arrêtés parce qu'ils

15 étaient considérés comme extrémistes constituant une menace à la création

16 de l'Etat serbe en raison de leur position politique.

17 Document suivant. Selon un rapport des services de renseignement

18 de la police de Prijedor, daté de juillet 1992 : "Au n° 6 de la rue de la

19 deuxième brigade de Krajina, l'extrémiste Enes Kadiric réside dans une

20 maison dont le propriétaire est Muharem Kadiric. Il s'agit d'un membre

21 éminent de l'organisation SDA du village de Biscani, où il se cache dans la

22 maison de son parent susnommé. Par conséquent, l'arrestation de Muharem

23 Kadiric et d’Enes Kadiric devrait être effectuée en raison des suspicions

24 qui pèsent sur eux. Il est vrai que ces deux extrémistes constituent une

25 menace pour le système actuel du gouvernement. Selon les informations

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1 fournies de son plein gré par Dragoja Rodic, il y a un an, alors qu'il

2 travaillait en tant que directeur à la production, Kadiric, a démis de son

3 poste un Serbe en prétendant qu'il n'y avait pas de place pour eux dans ce

4 qui, aujourd'hui, était la Krajina, s'il ne se convertissait pas à

5 l'islam".

6 Et puis plus loin dans le document, nous trouvons une annexe qui

7 se lit comme suit : "Enes est un extrémiste plus grave que cela ne peut

8 apparaître à la lecture de la note. Dans le bureau de Oslobodjenje, il

9 s'est débarrassé de tous les Serbes qu'il a harcelés en employant des Turcs

10 à sa convenance. Je ne vais pas écrire un document très long, mais en

11 raison de ce qu'il a fait, la mort est la seule chose qu'il mérite de la

12 main des Serbes".

13 Et en haut à droite du même document, vous lirez, Monsieur le

14 Président, Madame et Monsieur les Juges, la note ajoutée à cette directive

15 par Dragoljub Mudrinic : "Vérifier les déclarations figurant dans cette

16 note et prendre les mesures appropriées en vue d'un traitement et d'une

17 arrestation, 23 juillet 1992".

18 Le 28 juillet, M. Enes Kadiric s'est trouvé entre les mains des

19 autorités serbes de Bosnie et son traitement a commencé. Par ailleurs, le

20 poste de sécurité publique de Banja Luka recueillait des renseignements

21 provenant des services de renseignement sur les Musulmans qui entraient en

22 possession d'armes et qui, était-il allégué, s'organisaient contre les

23 Serbes de Bosnie. La propagande serbe a justifié la prise de Prijedor comme

24 une attaque préventive, destinée à éviter un bain de sang de la part des

25 Musulmans et des Croates contre les Serbes.

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1 Selon les mots utilisés par un dirigeant serbe de Prijedor : «Il

2 était visible qu'il se préparait quelque chose et qu'ils prévoyaient,

3 qu'ils planifiaient de lancer une action. Nous savions exactement où ils se

4 trouvaient, quel était leur armement, quels étaient leur degré

5 d'entraînement, de quelle façon ils étaient préparés à Kozarac, et jusqu'à

6 Benkovac, Hambarine et Puhaska. Nous savions qui étaient les gens qui

7 possédaient des armes. Nous savions comment ils étaient organisés. Nous

8 savions tout. Tout cela, nous le voyons en face».

9 Et à la page suivante, nous lisons : "Je sais qu'ils ont pris

10 beaucoup d'argent aux habitants afin de se procurer des armes dans le but

11 d'attaquer les Serbes et de les contraindre à l'exode ou aux fins de les

12 massacrer".

13 Dans une autre interview à la presse, Simo Miskovic, le président

14 du SDS de Prijedor, explique les actes commis par les Serbes de façon plus

15 visuelle : "Oui, il est vrai que le SDS a réussi dans la tâche qu'il

16 s'était assignée, qui avait pour but de sauver la population serbe du

17 génocide planifié. En tant que chef de la cellule de crise, à ce moment

18 particulier, je n'avais qu'une idée en tête : l'obligation morale qui était

19 la mienne d'empêcher la récurrence des événements de 1941 et de nouvelles

20 souffrances pour la population serbe.

21 Les souffrances subies par les Serbes dans la région étaient

22 incarnées dans la famille de Sveto Banovic Lulas, qui a découvert les corps

23 écartelés de son père, de sa mère, de sa femme et de ses enfants, alors que

24 des cochons étaient en train de dévorer leurs intestins. C'est la raison

25 qui a rendu nécessaire la planification et la préparation de sang-froid

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1 d'une action opportune pour empêcher le danger imminent".

2 Contrastant de façon tout à fait évidente avec le contenu de ces

3 documents, et montrant qu’il ne s'agit que d'une version faussée des

4 événements, destinée à couvrir l'action criminelle qui se préparait en lui

5 accordant un certain degré de légitimité, nous avons les éléments de preuve

6 qui seront présentés au procès et qui démontreront qu’en réalité, des

7 groupes de non Serbes, en très petit nombre, ont essayé d'opposer une

8 résistance alors qu'ils étaient éparpillés un peu partout dans les

9 montagnes et les forêts environnant Prijedor. Mais ces groupes étaient en

10 général mal équipés. Ils ne possédaient que des armes légères et n'avaient

11 rien à voir avec la puissance de feu importante mise à la disposition des

12 Serbes de Bosnie.

13 Document suivant. Comme le démontrent les documents des Serbes de

14 Bosnie, "le groupe qui se trouve sur la colline de Hegici est celui de Kemo

15 Alagic. A l'époque, il se composait de 10 à 15 hommes armés. En provenance

16 de Kurevo, une aide pouvait venir d'un groupe plus important dirigée par

17 Slavko Ecimovic. Ces hommes possédaient des fusils, plusieurs avaient des

18 armes légères et quelques grenades à main. Avec le temps, le groupe s'est

19 développé en nombre et en équipement".

20 Le deuxième homme mentionné dans ce document, le chef de la

21 résistance musulman, Slavko Ecimovic, voit également son nom mentionné au

22 nombre des victimes, dans les annexes à l'acte d'accusation modifié. Des

23 milliers d'autres personnes ont été traitées de cette façon parce qu’ils

24 étaient dirigeants politiques ou dirigeants religieux, ou qu'ils occupaient

25 des postes au sein du SDS en tant que dirigeants de ce parti. Tel a été le

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1 sort d'Ivan Filipovic et d'autres hommes, Fehim Fazlic notamment, dont vous

2 lirez le nom dans les documents.

3 Document suivant. Ces hommes ont été arrêtés et emprisonnés à

4 Keraterm notamment. Mais combien d’hommes ont été traités dans les camps

5 d'Omarska et de Keraterm ?

6 Selon un rapport de 1993, relatif au travail du poste de sécurité

7 publique de Keraterm, «au cours des 9 derniers mois de 1992, plus de

8 5 500 personnes ont été "traitées" de façon complète dans les camps

9 d'Omarska et de Keraterm. La responsabilité, ou une certaine forme de

10 responsabilité, a été établie s'agissant d'eux et prouvée dans 1 502 cas.

11 Ces personnes ont ensuite été transférées dans le camp de prisonniers de

12 guerre de Manjaca".

13 Manifestement, l'incarcération et l'interrogatoire de

14 5 000 personnes exigeaient un personnel nombreux. La responsabilité du

15 contrôle physique effectué sur les camps de prisonniers dans la

16 municipalité de Prijedor, ainsi que le contrôle des détenus dans les camps

17 incombaient à la police de Prijedor, et plus particulièrement aux accusés

18 Kvocka, Radic et Kos.

19 Document suivant. La présidence de guerre de l'assemblée

20 municipale de Prijedor avait adopté une décision exigeant que l'armée

21 prenne le contrôle des camps à la date du 31 juillet 1992. Mais l'armée

22 était occupée ailleurs. Le chef de la police de Prijedor, Simo Drljaca,

23 déclare : "Nous vous informons par la présente que, lors d'une réunion

24 tenue le 24 juillet 1992, la présidence de guerre de l'assemblée municipale

25 de Prijedor a adopté une décision" -vous trouverez le numéro de cette

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1 décision dans le texte- en vertu de laquelle les forces de police de

2 réserve actuellement employées devraient être réduites considérablement et

3 la sécurité des centres d'accueil de Keraterm, Trnopolje et Omarska devrait

4 leur être confiée... devrait être confiée à l'armée. La date-limite pour la

5 mise en oeuvre de cette décision est fixée au 31 juillet 1992. L'armée a

6 refusé d'assurer la sécurité de ces centres que notre poste assure avec un

7 personnel de trois cents policiers tous les jours. Par conséquent, nous

8 vous informons par la présente que nous ne sommes pas en mesure de mettre

9 en oeuvre la décision sus-mentionnée relative à la réduction des forces de

10 policiers de réserve tant que l'armée n'assume pas ses devoirs conformément

11 aux décisions et dispositions prises précédemment ".

12 Alors que les accusés Kvocka, Kos et Radic ont exercé leurs

13 pouvoirs dans le camp d'Omarska, des atrocités se sont produites dans toute

14 la région nord-ouest de Bosnie dans le cadre de la campagne serbe de grande

15 ampleur destinée à persécuter les non Serbes de la région. Les militaires

16 et les policiers serbes bosniaques ont synchronisé leurs efforts en vue de

17 procéder au nettoyage ethnique visant les Musulmans et les Croates de la

18 municipalité de Prijedor. En mai 1992, mille policiers du poste de police

19 de Projedor ont participé aux combats et le chef de la police a enregistré

20 le nom des personnes qui ont trouvé la mort dans un certain nombre de

21 dépêches.

22 En fait, seuls les hommes qui avaient répondu à la convocation

23 pouvaient être enregistrés au poste permanent de police en tant que

24 policiers de réserve.

25 Sur le prochain document, nous pouvons voir qu'une dépêche a été

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1 émise par le poste de sécurité publique de Prijedor le 28 mai 1992 qui dit

2 que parce que... la plupart de la région autonome de Krajina, il y avait

3 une tendance de détérioration et que l'apparence de nouvelles zones de

4 crise apparaissait puisqu'il y avait une façon synchronisée et organisée

5 des activités, synchronisée et organisée pour que ce centre fonctionne.

6 Prochain document, s'il vous plaît. Les centres de sécurité de

7 Banja Luka ont émis une information et les données le 4 août 1992 stipulant

8 que : "grâce aux activités synchronisées de l'armée et de la police serbe,

9 ces formations paramilitaires avaient été rompues, ou en plus grande partie

10 détruites. Les membres des forces de police active et de la réserve ont

11 presque seuls, et sans se battre, mis un cordon autour de Prijedor et ont

12 organisé une sécurité aux alentours des structures vitales.

13 Ils ont montré un grand niveau de cohésion et de synchronisation

14 avec les membres des militaires, avec les militaires. Au mois de mai,

15 presque tous les policiers de Prijedor, d'Omarska ,de Lamovita et Tukovi

16 ont participé dans la lutte d'abord à Hambarine et ensuite, à Kozarac et

17 Prijedor. Dans ces luttes, bon nombre de policiers ont perdu leur vie et 22

18 ont été sérieusement ou légèrement blessés. En une seule journée, lorsque

19 les extrémistes musulmans et croates ont attaqué Prijedor, 4 policiers ont

20 perdu leur vie, deux d'une façon active... deux policiers actifs et deux

21 qui étaient en réserve.

22 Après cela, les choses se sont calmées légèrement et la police a

23 repris son activité. Seulement quarante policiers du peloton d'intervention

24 ont été impliqués d'une façon périodique pour l'inspection du terrain, mais

25 les policiers avaient la tâche, avaient une nouvelle tâche, une tâche

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1 additionnelle, de Keraterm, Omarska et Trnopolje. Trois de ces policiers,

2 trois policiers ont perdu leur vie dans la bataille de Raljas. Et

3 finalement, l'échange d'informations entre les militaires et la police

4 était très bonne. L'information était échangée sur une base quotidienne,

5 soit verbalement ou par écrit, avec des contacts constants maintenus

6 pour... dans le but de trouver des solutions.

7 De plus, nous devrions insister sur le fait que les militaires ont

8 joué un rôle si important pour équiper la police avec les armes, les

9 munitions, les mines et les armes explosives et des véhicules de combat.

10 Une façon de participation plus organisée de la police est recommandée pour

11 que la police soit... donc on demande une participation plus active de la

12 police". Signé "chef de la SJB, Simo Drljaca".

13 Vous allez peut-être, Messieurs et Madame les Juges entendre la

14 suggestion de la défense que la situation à Prijedor pendant la période

15 pertinente de cet acte d'accusation a été peut-être chaotique, que c'était

16 désorganisé, que la chaîne de commandement n'avait pas été établie

17 clairement. Mais à l'intérieur de la police locale et ainsi qu'avec

18 l'armée, à l'intérieur de l'armée, les Serbes de Bosnie ont autorisé et

19 maintenu des principes de discipline et ont établi clairement la chaîne de

20 commandement.

21 Ici, nous pouvons voir que les services de la sécurité publique,

22 ou le chef de la sécurité publique de Banja Luka, a émis les ordres : "il

23 est essentiel que la séniorité soit très strictement observée, que la

24 relation entre les agents séniors et les autres policiers doivent être bien

25 maintenue. On veut voir de l'ordre entre les policiers, ça ne devrait pas

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1 être chaotique. Nous devons donner l'exemple nous-mêmes. Tous mes ordres

2 donnés oralement ainsi que les ordres que j'écris doivent être exécutés.

3 Ils sont votre loi. La chaîne de commandement, de commander l'exécution,

4 est clairement distinguée à l'intérieur du service, au sein du service. Si

5 vous refusez ou si quelqu'un refuse d'obéir aux ordres, nous allons le

6 congédier. Nous devons débarrasser de l'ancienne idéologie et des concepts

7 qui ne nous conviennent plus en ce moment. Et finalement, dans toutes nos

8 activités, nous sommes obligés d'observer toutes les mesures et d'appliquer

9 toutes les procédures ordonnées par le personnel de crise, de la cellule de

10 crise de la région autonome". Merci.

11 Document suivant. Ces ordres ont été donnés 5 jours plus tard par

12 Simo Drljaca, qui a ordonné... ces ordres ont été exécutés 5 jours plus

13 tard, ordonnés par Simon Drljaca, chef de Prijedor. Au paragraphe 7, nous

14 pouvons voir que : "le policier sénior dit que la relation de travail doit

15 être très serrée, que tout le monde doit obéir tous les ordres et que le

16 refus de faire ou d'obéir fera en sorte que les gens seront congédiés".

17 Donc les éléments de preuve présentés au procès vont démontrer

18 hors de tout doute raisonnable que les militaires et la police ont

19 travaillé ensemble pour exécuter les politiques discriminatoires des Serbes

20 de Bosnie, et ces 2 institutions ont exécuté d'une façon conjointe

21 l'idéologie des Serbes bosniaques pour créer une grande Serbie. Les accusés

22 Kvocka, Radic et Kos, donc, sont des participants importants dans ces

23 crimes contre l'humanité.

24 Les médias des Serbes de Bosnie ont également commencé à

25 documenter le processus du nettoyage ethnique. On peut se référer au

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1 document suivant, un article publié le 10 juillet 1992, qui est appelé

2 "convoys for resettlement", qui décrit une expulsion des Croates et des

3 Musulmans de masse.

4 La cellule de crise de la municipalité de Prijedor établit que les

5 gens appliquent d'une façon volontaire ou quittent la municipalité d'une

6 façon volontaire et que les gens quittent la région de Krajina et les

7 autres régions autonomes.

8 Nous accélérons toutes ces ... (inaudible)... qui fait en sorte

9 que ce processus soit fait d'une façon organisée.

10 De plus, Madame et Messieurs les Juges, il y avait également

11 nettoyage ethnique économique lorsqu'on parle d'emploi. Les autorités

12 serbes de Bosnie se sont servies des pressions économiques discriminatoires

13 pour atteindre leur but. Les Croates et les Musulmans, pour éviter la

14 détention des camps de Prijedor, qui ne se sont pas retrouvés dans les

15 camps, se sont retrouvés sans moyen de survie.

16 Après la prise de Prijedor, seulement ceux qui travaillaient au

17 sein de la Republika Sprska ou qui croyaient en la République serbe avaient

18 le droit de travailler. Donc tous ceux qui étaient fidèles pouvaient rester

19 et travailler.

20 Les non-Serbes étaient congédiés et nous pouvons voir que ce

21 document démontre quels sont les principes : les emplois doivent être tenus

22 par des gens qui sont fidèles à la République serbe de Bosnie-Herzégovine.

23 Les postes les plus importants au niveau de l'organisation publique et

24 sociale, donc les cadres, ne peuvent être que des gens qui sont très

25 fidèles à cette nouvelle politique.

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1 Le document suivant indique que tous les postes très importants

2 peuvent être seulement tenus par des gens qui sont d'appartenance serbe,

3 qui ont une nationalité serbe. Cela se réfère à toutes les entreprises, les

4 entreprises institutions d'Etat, toutes les autres, le ministère de

5 l'intérieur et l'armée de la République serbe de Bosnie-Herzégovine.

6 Ces postes ne peuvent pas être tenus par les employés de

7 nationalité serbe dont la nationalité n'a pas été confirmée par le

8 plébiscite ou qui ne sont pas idéologiquement persuadés que le parti

9 démocratique serbe est le seul représentant du peuple serbe.

10 Document suivant, s'il vous plaît. Milomir Stakic, qui a remplacé

11 un Musulman du nom de Muhamed Cehajic en tant que président du Conseil

12 exécutif de Prijedor, a émis un ordre le 2 juillet 1992 dans lequel il dit

13 que :

14 "- tous les organismes, les entreprises et les communautés qui ont

15 ordonné de terminer l'emploi des travailleurs ou des employés qui ont

16 participé à la rébellion armée et se trouvent présentement à Omarska et à

17 Keraterm ;

18 - l'information sur ces employés doit être soumise par le poste de

19 police de sécurité de Prijedor sur la demande des organismes sus-

20 mentionnés ;

21 - le service d'inspection municipale et le poste de sécurité

22 publique seront responsables de l'exécution de ces ordres".

23 Finalement, les gens qui travaillaient au sein de la cellule de

24 crise de Prijedor étaient très méticuleux dans leurs efforts pour enlever

25 ou éliminer les non-Serbes de leurs emplois. Entre le 29 mai et le

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1 24 juillet 1992, les Serbes de Bosnie ont pris les places des non-Serbes et

2 ont pris leurs positions telles que, par exemple, directeur en charge du

3 centre médical. Par exemple, les principaux sont devenus directeurs

4 d'école, directeurs d'un grand nombre de compagnies ou chefs d'un bureau

5 d'emploi. Bien sûr, on a congédié plusieurs individus et nous avons

6 remplacé les Serbes bosniaques par des gens qui étaient fidèles à la

7 politique du SDS. Les Serbes de Bosnie dans la région autonome de Krajina

8 ont également restructuré plusieurs compagnies ou entreprises majeures pour

9 pouvoir éliminer les non-Serbes et s'emparer de ces entreprises.

10 Messieurs et madame les juges, dans un jugement récent du

11 14 janvier, dans la cause du Procureur contre Zoran Kupreskic, la Chambre

12 de première instance a expliqué que la perte de moyens de survie peut avoir

13 les mêmes conséquences inhumaines que le transfert ou la déportation.

14 Egalement dans cette cause, les restrictions placées... ces instructions

15 étaient discriminatoires et avaient pour but d'arriver à un faux transfert

16 d'un grand nombre de Musulmans et de Croates. Les pratiques d'emploi du

17 gouvernement serbe de Bosnie constituent un refus aux gens d'avoir leurs

18 droits fondamentaux.

19 De façon concurrente à l'enfermement des non-Serbes, les Serbes de

20 Bosnie ont systématiquement détruit la propriété culturelle et personnelle

21 qui appartenait aux Musulmans et aux Croates, des villages entiers, des

22 demeures, des mosquées, des église. La destruction d'une telle propriété

23 faisait partie intégrante du nettoyage ethnique. De détruire les familles,

24 les communautés, la vie culturelle également constitue des violations

25 graves des droits fondamentaux humains.

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1 Document suivant, s'il vous plaît. D'après un document de la

2 sécurité qui a été fait par la municipalité de Prijedor le 23 octobre 1992,

3 nous pouvons voir que :

4 "La division nationale a atteint son apogée pour le conflit qui a

5 eu lieu entre les Serbes et les autres qui ont pris le pouvoir, nous

6 pouvons voir les conséquences de ces choses-là partout. Des douzaines de

7 villages ont été presque entièrement détruits et laissés inhabités. Il y a

8 un grand nombre d'immeubles et l'exode est apparent partout.Cette

9 destruction démontre le début d'un exode de masse des Musulmans et des

10 Croates.

11 D'après les estimations, environ 38 000 Musulmans et Croates ont

12 dû quitter la municipalité de Prijedor..."

13 Plus loin, nous lisons :

14 "Et ces gens-là, lorsqu'ils ont quitté, un pillage de la propriété

15 a commencé à être fait, qui a laissé les choses ou les immeubles

16 complètement non surveillés, et toute cette période a été caractérisée par

17 une période où les endroits où les Musulmans et les Croates pouvaient aller

18 prier",

19 donc on les a empêchés de faire de la sorte".

20 Donc le résultat de ce nettoyage ethnique a été très efficace et

21 la population non serbe de la municipalité de Prijedor à été complètement

22 balayée. En 1991, il y avait 49 351 Musulmans comptés par le recensement de

23 Prijedor officiel et en 1983, seulement 6 124 d'entre eux étaient restés,

24 donc une perte de plus de 43 000 Musulmans, hommes et femmes, en seulement

25 deux ans. En 1991, 6 316 Croates vivaient dans la municipalité de Prijedor.

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1 En 1993, il n'y avait que 3 169 Croates qui restaient. En 1991,

2 9 295 personnes étaient recensées en tant que soit non-Serbes, non-Croates

3 ou non-Musulmans, mais en 1993 seulement 2 622 restaient dans la région.

4 Pendant cette même période de deux ans, la population serbe de Prijedor a

5 augmenté de plus de 6 000 personnes.

6 D'après le centre de sécurité qui a été fait pour la régions de

7 Prijedor au mois d'octobre 1992 :

8 "Avec le temps qui passe, nous pouvons sentir que les autorités

9 officielles et les citoyens, nous pouvons voir que les gens peuvent

10 comprendre ou se détendre en voyant que le départ des Musulmans et des

11 Croates a été fait".

12 Subséquemment, nous pouvons lire qu'à l'Assemblée annuelle de la

13 municipalité de Prijedor, M. Branko Simic, le Vice-Président de la

14 République de l'Assemblée serbe, s'est vanté des choses suivantes, en

15 disant que :

16 "Un groupe de braves Serbes s'est mis ensemble en cette époque

17 d'insécurité et ont commencé à travailler, à oeuvrer pour établir un Parti

18 démocratique serbe, et même là nous étions déjà trop tard en comparaison

19 avec les autres partis démocratiques. Grâce au SDS nous avons politiquement

20 et nationalement animé le peuple serbe et avons élevé ce peuple à une

21 position humaine. En fait, nous les avons mis sur pied. Avec aucune

22 expérience politique, sans capital, persécutés et agressés, nous avons

23 néanmoins atteint le but dès que nous avons pu créer l'Etat, la République

24 serbe. Ce que nous avons fait jusqu'à maintenant nous a donné le droit de

25 compléter cette tâche honorable pour que le peuple serbe, pour la première

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1 fois dans cette région, ait finalement son Etat. Ce sont les choses que le

2 Parti démocratique serbe a faites et personne ne peut ou ne devrait leur

3 nier ceci".

4 L'année suivante, au mois de novembre 1993, le département de la

5 police de Prijedor a reçu un prix pour sa contribution efficace au

6 nettoyage ethnique. L'événement a même été marqué par les médias locaux et

7 nous pouvons lire le texte suivant :

8 "Dans les préparations entreprises par le peuple serbe pour la

9 défense de leurs vieilles demeures, un rôle important a été joué par le

10 poste de police de Prijedor. Toutes les préparations ont été faites d'une

11 façon exemplaire avec l'armée serbe. En très peu de temps, 13 postes de

12 police serbes illégaux avec 1 600 (... inaudible) ont été fermés pendant

13 que le SDA était encore au pouvoir à Prijedor. Ce n'était pas facile

14 d'avoir des rencontres illégales et de préparer la défense, mais après la

15 Présidence de l'ancien BiH, des barraques et des (blocades ?) d'autres

16 installations militaires, il a été convenu que le Parti démocratique serbe

17 et le Comité exécutif de la municipalité de Prijedor devraient s'emparer du

18 pouvoir des extrémistes musulmans.

19 Cela a été fait le 30 avril de l'année dernière. Grâce à cette

20 merveilleuse organisation et discipline, la police serbe de Prijedor a pris

21 le pouvoir sans tirer un seul coup de fusil...

22 Et finalement, après tout cela, des centres de réception ont été

23 faits à Keraterm, Omarska et Trnopolje où les bureaux de la SJB étaient mis

24 en place, où on a pris les gens pour les questionner et nous avons commencé

25 le traitement et les opérations de sécurité.

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1 Et finalement, d'après les trouvailles officielles, les rapports

2 et les (... inaudible), la station de Prijedor est la plus efficace. Donc

3 c'est pour cela qu'on lui a donné un prix prestigieux, c'est-à-dire qu'on

4 leur a accordé la Médaille de Nemanjic. La station de police de Prijedor

5 est une station des plus efficaces de la Republika Srpska et c'est pour

6 cela qu'elle est nommée pour recevoir une décoration prestigieuse, la

7 Médaille de Nemanjic".

8 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, les trois

9 policiers qui ont contribué à la réussite de la campagne de persécution qui

10 a détruit la vie de milliers de citoyens de Prijedor sont devant vous

11 aujourd'hui : M. Kvocka, M. Radic et M. Kos. En réalité, l'accusé Radic a

12 même reçu une distinction spéciale sur la recommandation de ses supérieurs

13 hiérarchiques en forme de récompense en argent pour ses efforts dans le

14 soutien des persécutions :

15 "Depuis le début des activités de combat sur ce territoire, Mladjo

16 a activement participé à la préparation et à l'organisation des jeunes

17 officiers de police dans la mise en place de ces tâches de police les plus

18 complexes. Ses collègues le respectent à cause de ses actions.

19 Il a travaillé sans penser à soi pour découvrir les extrémistes

20 musulmans dans les centres de réception d'Omarska où il a travaillé jour et

21 nuit. Dans l'exécutions de ses tâches de combat sur les territoires sur le

22 front d'Orasje, il a donné l'exemple aux autres comment on défend son

23 foyer, sa patrie.

24 Même aujourd'hui, dans les conditions difficiles du travail de

25 police, il a travaillé par altruisme pour transmettre sa connaissance et

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1 son expérience aux jeunes employés".

2 La lettre est datée du 8 janvier 1993.

3 La responsabilité pénale et les comportements criminels.

4 Les articles 7 (1) et 7 (3) du Statut du Tribunal.

5 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, je vais

6 passer à une nouvelle partie de mon exposé.

7 L'article 7 (1). Tous les accusés de cette affaire sont

8 individuellement responsables des crimes visés dans l'acte d'accusation

9 modifié en vertu de l'article 7 (1) du Statut du Tribunal. En vertu de

10 l'article 7 (1), la responsabilité pénale individuelle incombe à quiconque

11 a planifié, inciter, ordonné, commis ou de toute autre manière aidé et

12 encouragé à planifier, à préparer ou à exécuter les actes ou omissions qui

13 représentent la conduite criminelle alléguée.

14 Monsieur le Président, comme je l'ai déjà indiqué auparavant, la

15 campagne de persécution qui a nettoyé la ville de Prijedor de ses habitants

16 musulmans et croates au cours de l'année 1992 n'était pas l'oeuvre d'une

17 personne, de dix personnes ou de vingt personnes. Ceci a impliqué un effort

18 systématique et coordonné de centaines d'individus, de soldats et de civils

19 de toutes les couches de la société, y inclu les quatre accusés qui ont

20 adhéré aux buts serbes nationalistes de créer un Etat serbe.

21 Au mois de juillet de l'année dernière, dans le jugement d'appel

22 dans l'affaire Tadic, la Chambre d'appel a conclu que : "Toute personne

23 impliquée dans les violations graves du droit humanitaire, quelle que soit

24 la manière dont elles ont commis ces violations ou y ont participé, doit

25 être traduite en justice".

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1 La Chambre d'appel a expliqué que les crimes commis pendant les

2 temps de guerre souvent "... ne sont pas le fait de la propension

3 d'individus isolés à commettre des actes criminels, mais sont des

4 manifestations d'un comportement criminel collectif. Ils sont souvent

5 exécutés par des groupes d'individus agissant de concert pour réaliser un

6 dessein criminel commun".

7 Eh bien, si uniquement certains membres du groupe «peuvent

8 perpétrer un acte criminel, par exemple la destruction de villes et de

9 villages, etc., la participation et la contribution des autres membres du

10 groupe est souvent d'une importance cruciale pour la commission des crimes

11 en question. Il s'ensuit que, sur le plan de l'élément moral, la gravité

12 d'une telle participation est rarement moindre -ou différente- de celle des

13 personnes qui ont effectivement exécuté les actes». Il s'agit du

14 paragraphe 191 du jugement d'appel Tadic.

15 Pour ces raisons, Monsieur le Président, Madame et Monsieur les

16 Juges, la responsabilité pénale pour ce Tribunal comprend, selon

17 l'article 7(1) du Statut, «les actions perpétrées par un ensemble de

18 personnes à la poursuite d'un dessein criminel commun». C’est le

19 paragraphe 193 du jugement d'appel Tadic.

20 La Chambre d'appel a expliqué que la responsabilité, aux termes du

21 Statut, comprend «les modalités des participations dans la commission des

22 crimes qui se sont produits, qui ont été perpétrés par des personnes qui

23 ont un dessein commun, et quand ils se sont embarqués dans une activité

24 criminelle qui est ensuite exécutée, soit de concert par ces personnes,

25 soit par quelques membres de ce groupe, quiconque contribue à la commission

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1 d'un crime par les groupes de personnes ou par une partie du groupe, en

2 poursuivant un but criminel commun, peut être tenu pénalement responsable».

3 Il s'agit du paragraphe 190 du jugement.

4 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, quel est le

5 but criminel commun qui a uni les quatre accusés dans ce procès ? Chacun

6 des accusés s'était attaché à la création d'un Etat serbe à l'intérieur de

7 l'ex-Yougoslavie et a œuvré pour atteindre ce but en participant à la

8 persécution des Musulmans et des Croates dans la région de Prijedor.

9 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, l'activité

10 commune d'Omarska, de Keraterm et de Trnopolje, des camps d'emprisonnement,

11 consistait en l’enfermement brutal des Musulmans et des Croates jusqu'à ce

12 qu'ils soient interrogés et, ensuite, soit tués, soit expulsés de Prijedor.

13 Le but de ces interrogatoires était d'aider au classement des prisonniers.

14 Les prisonniers qui étaient classés comme avoir participé à des opérations

15 paramilitaires musulmanes, quoique limitées dans la région de Prijedor, ou

16 bien qui étaient considérés comme représentant une menace aux objectifs des

17 Serbes, ces personnes étaient, soit tuées, soit torturées de façon

18 terrible.

19 La jurisprudence de ce Tribunal distingue trois catégories de

20 criminalité commune. Il s'agit donc de la doctrine de la responsabilité

21 criminelle liée au dessein commun. Au cours de ce procès, vous aurez des

22 preuves à l'appui de chacune de ces trois allégations.

23 Nous avons donc une première catégorie où tous les auteurs ont agi

24 en accord avec un dessein commun, et dont l'intention criminelle est la

25 même, même si les méthodes de participation peuvent varier. Par exemple, la

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1 Chambre d'appel a cité la décision rendue par l'affaire Einsatzgruppen,

2 dans le cadre du procès de Nüremberg, où la responsabilité criminelle n'est

3 pas limitée uniquement sur la personne qui a appuyé sur la gâchette ou

4 enterré les corps. «Ainsi, sont coupables non seulement les auteurs

5 principaux, mais aussi les complices qui ont participé dans la commission

6 d'un crime ou sont mêlés à des projets et entreprises liés à une telle

7 perpétration. Donc ceux qui ordonnent ou encouragent les crimes». Il s'agit

8 du paragraphe 200 du jugement d'appel Tadic.

9 En ce qui concerne actus reus et mens rea, le jugement d'appel

10 dans l'affaire Tadic a défini deux critères de responsabilité pour la

11 première catégorie de la doctrine de dessein commun. D'abord, les accusés

12 devaient participer volontairement dans un des aspects des desseins

13 criminels communs et, deuxièmement, l'accusé, même s'il n'a pas

14 personnellement commis les crimes, doit tout de même aspirer au résultat de

15 l'acte criminel. Il s'agit du paragraphe 196 du jugement dans

16 l'affaire Tadic.

17 En accord avec le mémoire du Procureur, qui a été soumis en vertu

18 de l'article 73 bis (B)(IV), le témoin ou la victime, [expurgée], qui a été

19 emprisonné dans le camp d'Omarska, nous donne un exemple pour cette

20 catégorie. Je vais lire sa déclaration -une partie- : «La première nuit,

21 quand nous sommes arrivés dans le camp, nous avons été fouillés devant

22 Kvocka, qui était présent. Alors que l’on battait les prisonniers et que

23 l’on nous prenait nos biens personnels, on nous a ordonné de tenir nos

24 têtes inclinées, tournées vers le sol, et de ne pas regarder autour de

25 nous. Mais je ne peux pas dire si Kvocka était près de nous ou non, pendant

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1 notre passage à tabac, mais dès que le passage à tabac s’est arrêté et dès

2 que nous avons été fouillés, je l'ai vu. Donc je suis sûr qu'il a été

3 présent et qu'il a vu tout ce que les gardiens ont fait».

4 L'accusé Kovcka, apparemment, n’a pas personnellement battu les

5 prisonniers ou ne les a pas pillés en cette occasion. Cependant, en tant

6 que commandant du camp ou l'adjoint du commandant, le fait qu'il était

7 présent et qu'il se soit abstenu de restreindre la mauvaise conduite du

8 gardien ne pouvait qu'encourager l'abus des prisonniers de la part du

9 gardien. En se tenant là et en encourageant, M. Kvocak a volontairement

10 pris part dans le dessein criminel commun.

11 De plus, du fait de sa présence, en tant que supérieur, il a

12 démontré qu'il souhaitait que ces actes soient commis. La première

13 catégorie de responsabilité dans le cadre de la théorie du dessein commun

14 s'applique à la conduite de Kvocka au sein du camp d'Omarska.

15 La deuxième catégorie de cas décrite par la Chambre d'appel ou la

16 doctrine de l'objectif commun est applicable et concerne le cas des camps

17 de concentration. Pendant le procès de Nüremberg, la doctrine de l'objectif

18 commun était utilisée au cas où les militaires ou les personnels

19 administratifs, comme les dirigeants des camps de concentration, avaient

20 commis des crimes allégués dans l'acte d'accusation.

21 En d'autres termes, les crimes étaient commis par des groupes de

22 personnes agissant de concertation pour accomplir un plan commun. Dans

23 l'affaire Tadic, on dit : «L'élément matériel, actus reus, était une

24 participation active dans la mise en oeuvre d'un système répressif, comme

25 cela pouvait se déduire du pouvoir que détenait chacun des accusés et des

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1 fonctions qu'il exerçait».

2 Alors quel était le système de répression auquel étaient

3 formellement attachés les accusés Kvocka, Radic et Kos ?

4 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, au cours de

5 ce procès, les moyens de preuves présentés vont prouver qu'au cours de

6 l'année 1992, les forces serbes avaient construit un système de camps de

7 concentration qui faisait partie du plan serbe de persécuter les Musulmans

8 et les Croates et de débarrasser la région de Prijedor de leurs habitants

9 non serbes. Donc les trois accusés, MM. Kvocka, Radic et Kos, avaient les

10 positions d'autorité au sein du camp d'Omarska. Kvocka était le premier

11 commandant du camp d'Omarska. Il a été, au mois de juin 1992, remplacé par

12 Zeljko Mejakic et, ensuite, il était commandant adjoint du camp.

13 Messieurs Radic et Kos étaient des chefs d'équipe des gardiens.

14 Les systèmes de camps de détention, dans la région de Prijedor,

15 sont décrits dans le paragraphe 611 de l'acte d'accusation. Dans ce

16 paragraphe, on décrit la détention illégale et les mauvais traitements

17 infligés à des milliers de Musulmans, Croates et de non Serbes de Bosnie

18 dans la région de Prijedor entre le 24 mai et le 20 août 1992.

19 Les preuves que nous allons présenter vont montrer que MM. Kvocka,

20 Radic et Kos ont activement participé à un système répressif et à grande

21 échelle des camps de détention, destiné à persécuter, à accueillir les non

22 Serbes. Ils ont pris part de façon délibérée dans un système qui ne

23 respectait guère la valeur de la vie humaine. Il est possible que ces trois

24 hommes n'étaient pas tout le temps présents dans le camp d'Omarska en même

25 temps, mais il ressortira des preuves présentées qu'ils allaient et

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1 venaient et le système restait. Quand chacun d'entre eux avait pris ses

2 fonctions, il a adhéré au système et a soutenu le système.

3 Quand on a parlé de but commun des camps de concentration, la

4 Chambre d'appel a dit que l'élément moral, mens rea, avait

5 deux composantes : d'abord la connaissance de la nature du système ;

6 deuxièmement, l'intention de contribuer à l'objectif commun,

7 paragraphe 203.

8 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, il paraît

9 qu'il était impossible d'appartenir au personnel du camp d'Omarska pendant

10 une certaine période de temps, comme c'était le cas de MM. Kovcka, Radic et

11 Kos, sans connaître le système malveillant. Il était impossible aussi

12 d'avoir des positions de responsabilité et d'autorité pour faire

13 fonctionner le camp d'Omarska, comme les accusés l'ont fait, sans connaître

14 la vraie nature du système, sans savoir que, quotidiennement, des

15 prisonniers innocents dans les camps ont été tués, violés, battus, torturés

16 et qu'ils mouraient de faim.

17 En ce qui concerne l'élément moral, mens rea, dans le cadre des

18 camps de concentration, la Chambre d'appel, au paragraphe 203 du jugement

19 de l'affaire Tadic, a dit que «dans ce cas, l'intention requise pouvait

20 aussi être déduite de la position d'autorité qui était tenue par les

21 personnels du camp. Il est à peine nécessaire de prouver l'intention

22 requise lorsque le rang occupé par l'accusé, ou l'autorité qu'il exerçait,

23 était en soi une indication qu'il avait connaissance du but commun et qu'il

24 avait l'intention d’y contribuer». Il s'agit donc du paragraphe 203 de

25 l'arrêt dans l'affaire Tadic.

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1 Les paragraphes 26 et 28 de l'acte d'accusation décrivent de

2 quelle façon Kvocak, Radic et Kos ont usé de leur autorité pour changer les

3 conditions de détention dans le camp d'Omarska. Les moyens de preuve

4 présentés vont prouver au-delà de tout doute raisonnable qu'ils avaient

5 l'autorité pour contrôler la conduite des gardiens qui leur étaient

6 subordonnés et qu'ils pouvaient empêcher les visiteurs de venir dans les

7 camps. Ils avaient le pouvoir d'accorder plus de liberté et de droits aux

8 détenus, y compris l'accès à l'eau potable, de leur fournir des conditions

9 de vie raisonnables, des moyens d'hygiène. Ils pouvaient aussi prendre des

10 contacts avec leurs familles ou recevoir la nourriture ou les médicaments,

11 etc.

12 Le camp d'emprisonnement d'Omarska est devenu l'emblème du système

13 des Serbes de Bosnie de persécution et de nettoyage ethnique. Les contrôles

14 du jour du fonctionnement du camp prouvent l'intention, la volonté, de

15 Kvocka, Radic et Kos de participer au système. Les moyens de preuve

16 présentés vont montrer qu’avec de rares exceptions, MM. Kvocka, Radic et

17 Kos n'ont rien fait pour améliorer les conditions de vie dans les camps.

18 Au niveau de leur responsabilité et autorité, il s'agit d'un

19 mépris calculé des devoirs ordinaires de tout geôlier ou gardien de prison.

20 Une telle omission cruelle constitue la preuve de l'intention de participer

21 à ce système répressif.

22 Selon la deuxième théorie de responsabilité de l'objectif commun,

23 MM. Kvocka, Radic et Kos doivent être tenus pénalement responsables.

24 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, la Chambre

25 d'appel a décrit une troisième catégorie de cas où il s'agit d'un dessein

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1 criminel commun. La Chambre d'appel a aussi donné l'exemple d'un dessein

2 commun où un groupe essaie de chasser de force des membres d'autres

3 groupes, donc d'exécuter un nettoyage ethnique ; ce qui a pour conséquence

4 qu'une ou plusieurs victimes soient tuées. Même si, au début, le meurtre ne

5 faisait pas partie du dessein commun, il était possible de prévoir que le

6 déplacement par la force des civils de leur foyer pouvait entraîner la mort

7 d'un ou plusieurs civils. Dans l'arrêt de la Chambre d'appel, dans

8 l'affaire Tadic, on énumère deux conditions requises.

9 D'abord, "il faut qu'il y ait une intention délictueuse de

10 poursuivre en commun un dessein criminel et, ensuite, qu'il ait été

11 prévisible que des actes criminels autres que ceux envisagés dans le cadre

12 du dessein criminel, soient commis par d'autres participants à ce dessein

13 commun". Il s'agissait du paragraphe 206.

14 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, comme je l'ai

15 déjà décrit, l'activité commune d'Omarska, Keraterm et Trnopolje était de

16 détenir les Musulmans et les Croates qui étaient interrogés et, ensuite,

17 ils étaient tués ou expulsés de Prijedor. Pendant les périodes couvertes

18 par l'acte d'accusation, alors que Kvocka, Radic et Kos étaient

19 responsables du fonctionnement du camp d'Omarska, des personnes venant de

20 l'extérieur du camp, telles que Zoran Zigic se sont rendus fréquemment dans

21 le camp pour agresser, torturer et tuer les prisonniers.

22 Encore une fois, un témoin, [expurgée], nous donne un exemple

23 utile : "Je me souviens également avoir vu Kvocka dans le camp quand Zoran

24 Zigic se rendait dans le camp avec une autre personne. Cette autre personne

25 était un peu plus jeune et moins grande que Zigic. A chaque fois que Zigic

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1 venait au camp, il choisissait quelques prisonniers et les amenait dans la

2 maison blanche pour les battre. Nous qui étions assis sur la pista, nous

3 pouvions entendre des cris et des hurlements de ces prisonniers qui étaient

4 battus. Pendant qu'ils étaient passés à tabac, les portes de la maison

5 blanche restaient fermées. A une telle occasion, j'ai vu Kvocka qui était

6 en train de parler à un gardien à côté de l'entrée au restaurant. A ce

7 moment-là, Zoran Zigic est venu. Il a appelé Asef, Kiki et Began. Je ne

8 connais pas le prénom exact de Began et Kiki. -L’interprète signale que ce

9 sont des surnoms- Asef et Began possédaient des restaurants à Prijedor et

10 Kiki avait une société.

11 Quand Zigic a appelé leur nom, les gardiens ont dit aux

12 prisonniers de la pista de se coucher par terre, visages face à la terre.

13 Peu de temps après, nous avons entendu des cris. Nous sommes restés tournés

14 vers la terre, couchés pendant trois heures. Et pendant presque toute cette

15 période, nous avons pu entendre des cris et des hurlements venant de la

16 maison blanche".

17 Tous les accusés dans le présent procès partagent un dessein

18 criminel commun : celui de persécuter les Musulmans et les Croates à

19 Prijedor afin de nettoyer la région de ceux qui n'étaient pas prêts à

20 participer à la création d’un Etat serbe. Dans l'arrêt Tadic, la Chambre

21 d’appel a conclu que la responsabilité pénale peut être imputée à tous les

22 participants, en-dehors de l'existence d'une entreprise commune, lorsque le

23 risque de violence est à la fois prévisible en tant que conséquence de

24 l'exécution d'un dessein commun, et que les accusés ont été, soit

25 indifférents, soit méprisants à l'égard de ce risque. Arrêt Tadic,

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1 paragraphe 204.

2 Les éléments de preuve présentés au cours du présent procès, tels

3 le témoignage [expurgée], montreront qu'il y avait acquiescement calculé

4 de la part des supérieurs du camp par rapport aux actes de violence commis

5 par Zigic et ses comparses.

6 Les visites qui ont eu lieu de l’extérieur étaient si fréquentes,

7 si manifestes et associées à une violence si prévisible que les blessures

8 infligées aux victimes, dans ce processus, ne peuvent absolument pas être

9 confondues avec le résultat d'une coïncidence ; ne peuvent en tout cas pas

10 être imputées au hasard.

11 Par conséquent, dans le cadre de cette troisième catégorie de

12 responsabilité liée à un dessein commun, en autorisant la pénétration du

13 camp à Zoran Zigic et d'autres tels que lui, ou en ne faisant rien pour

14 empêcher ces incursions, les accusés Kos, Radic et Kos sont devenus

15 responsables également des conséquences naturelles et prévisibles et

16 horribles de cet acte.

17 Dans le cadre de la troisième catégorie de responsabilité liée à

18 un dessein commun, la responsabilité pénale de ces trois hommes qui avaient

19 le pouvoir incombe à leur indifférence et au mépris que ces trois homme ont

20 manifesté par rapport au danger prévisible dû à la présence d’hommes tels

21 que Zoran Zigic dans l'enceinte du camp.

22 Les quatre accusés, par conséquent, n'ont pas tous participé au

23 dessein commun, qui consistait à persécuter les Musulmans et les Croates

24 exactement de la même manière, mais c'est l'amalgame de leurs actions ; le

25 résultat additionné des actions de tous ces hommes qui a débouché sur la

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1 commission de crimes qui sont au coeur de nos débats.

2 En résumé, Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges,

3 les élément de preuve qui vous seront présentés au cours du procès

4 prouveront, au-delà de tout doute raisonnable, que ce groupe d'hommes a

5 bien partagé un objectif commun : celui de débarrasser Prijedor et sa

6 région des Musulmans et des Croates dans le cadre d'un effort destiné à

7 créer un Etat serbe unifié.

8 Nombre de victimes sont arrivées dans les camps de prisonniers

9 après avoir été détenues pendant quelque temps, dans le cadre d’opérations

10 de nettoyage ethnique réalisées par les militaires ou les paramilitaires

11 dans le secteur où ils habitaient.

12 Chacun des accusés a participé activement à ce dessein commun et,

13 ce faisant, chacun est responsable des crimes contre l'humanité et des

14 violations, des lois ou coutumes de la guerre.

15 M. le Président. - Excusez-moi de vous interrompre mais, peut-

16 être, pourrions-nous avoir une pause ?

17 M. Niemann (interprétation). - Je me plierai à votre décision,

18 Monsieur le Président, mais il ne me reste que quatre pages.

19 M. le Président. - Mais vous n'aurez plus rien à ajouter dans le

20 cadre de votre déclaration liminaire ?

21 M. Niemann (interprétation). - En effet.

22 M. le Président. - Eh bien, dans ce cas, nous allons faire un

23 petit effort et terminer vraiment. Je crains que tout le monde en est

24 d'accord. Merci beaucoup.

25 M. Niemann (interprétation). - Eh bien, Monsieur le Président,

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1 j'en arrivais à l'article 7(3) qui porte sur l'autorité.

2 Tous les accusés, hormis Zoran Zigic, sont également responsables

3 pénalement et alternativement des actes de leurs subordonnés, eu égard aux

4 crimes poursuivis dans l'acte d'accusation et liés à leur position

5 d'autorité hiérarchique dans les camps, en application de l'article 7(3) du

6 Statut du Tribunal.

7 L'article 7(3) définit une personne occupant une responsabilité de

8 supérieur hiérarchique comme étant celle qui est responsable des actes

9 criminels de ses subordonnés si ce supérieur savait, ou avait des raisons

10 de savoir, que ses subordonnés s'apprêtaient à commettre cet acte, ou

11 l’avaient fait, et que le supérieur n'a pas pris les mesures nécessaires et

12 raisonnables pour empêcher que ledit acte ne soit commis ou en punir les

13 auteurs, qui sont ses subordonnés.

14 Dans le jugement Celebici, la Chambre de première instance a

15 déterminé que l'article 7(3) ne concernait pas uniquement la responsabilité

16 des commandants militaires, mais également celle des autorités civiles. On

17 trouve cela aux paragraphes 354 à 363 du jugement Celebici.

18 Les éléments de preuve qui seront présentés dans le présent procès

19 prouveront au-delà de tout doute raisonnable que les accusés Kvocka, Radic

20 et Kos ont exercé effectivement le contrôle sur leurs subordonnés dans le

21 camp d'Omarska.

22 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, le Procureur

23 présentera des éléments de preuve relatifs aux conséquences durables du

24 nettoyage ethnique sur la vie des victimes croates et musulmanes de

25 Prijedor, conséquences qui se font sentir encore aujourd'hui. Ces éléments

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1 de preuve aideront les Juges de la Chambre de première instance à

2 déterminer quelle est la sentence applicable au cas où un, ou plusieurs,

3 des accusés devaient être déclarés coupables des charges retenues contre

4 lui dans l’acte d’accusation.

5 A notre avis, Monsieur le Président, ces éléments de preuve sont

6 admissibles en application de l'article 84(A)(iv) du Règlement de procédure

7 et de preuve de ce Tribunal.

8 Les parties sont convenues, comme vous le savez, que la

9 présentation de la déclaration liminaire précédera le témoignage de trois

10 des accusés. Cependant, le recours à cette procédure n'exonère pas le

11 Procureur de la charge qui est la sienne, à savoir prouver chacun des

12 éléments de charge retenus contre les accusés au-delà de tout doute

13 raisonnable, et l'ensemble de ces charges.

14 Par conséquent, suite à la déposition des accusés, le Procureur

15 présentera ses arguments et ses éléments de preuve avec la vigueur

16 nécessaire, dans l'indépendance qui est la sienne, en application du Statut

17 du Tribunal.

18 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, le Procureur

19 s'attend à un certain nombre de témoins. Il a déjà présenté des pièces

20 documentaires à la Chambre de première instance. Il y aura également des

21 séquences vidéo, des photographies qui sont dressées au dossier.

22 Les éléments de preuve du Procureur prouveront la culpabilité des

23 accusés au-delà de tout doute raisonnable. Dans l'intérêt de la justice,

24 ils doivent être tenus responsables de leur comportement criminel. La

25 communauté internationale exige que ces crimes de haine soient exposés et

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1 punis en application du droit international.

2 Par conséquent, Monsieur le Président, Madame et Monsieur les

3 Juges, à la fin des débats, le Procureur vous demandera de décider de la

4 culpabilité de tous les accusés.

5 C’est la fin de ma déclaration.

6 M. le Président. - Pour l’instant, je crois que nous avons devant

7 nous tout le temps pour éclaircir tous ces points que vous venez de nous

8 présenter. Je crois que la défense de M. Kos voudrait dire quelque chose.

9 Je peux lui donner la parole.

10 Maître Nikolic, s'il vous plaît ?

11 M. Nikolic interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

12 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, la défense de l'accusé

13 Kos vous prie tout d'abord d'accepter ses excuses pour ce qu'elle va dire à

14 présent.

15 M. le Président. - Je n'ai pas pris le début de votre

16 communication. Si vous vouliez, vous pourriez répéter. Excusez-moi.

17 M. Nikolic (interprétation). - Très volontiers, Monsieur le

18 Président. Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, le

19 défenseur de l'accusé Kos vous prie tout d'abord d'accepter ses excuses

20 pour les propos qu'il va tenir à présent. En effet, la défense est bien

21 consciente des efforts que vous avez déployés pour raccourcir au maximum la

22 durée de présentation de cette déclaration liminaire.

23 Mais l'équipe de défense de l'accusé Kos, après avoir examiné tous

24 les aspects de cette présentation qui ont un lien avec l'accusé Kos, eh

25 bien après avoir examiné tous ces éléments, la défense a modifié sa

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1 stratégie et l'accusé Kos a renoncé à son droit de témoigner au début de ce

2 procès sous serment.

3 Je vous prie donc d'accepter ce changement de l'attitude de

4 l'accusé et de déterminer que c'est bien le droit d'un accusé de déterminer

5 au mieux les modalités de sa défense.

6 En tant que conseil de la défense de cet accusé, je me contente

7 pour ma part de vous faire connaître sa position à lui. Merci.

8 M. le Président. - Un moment. C'est tout ? Vous pouvez vous

9 asseoir, Maître Nikolic.

10 (Les Juges se concertent sur le siège.)

11 Maître Nikolic, nous avons une question. Ce que vous nous avez

12 communiqué, c'est une renonciation au droit de témoigner maintenant et

13 après, pendant le procès, ou c'est seulement renoncer au début ?

14 M. Nikolic (interprétation). - Monsieur le Président, simplement

15 au début du procès.

16 M. le Président. - Je crois que cela va poser toute une série de

17 questions. Je crois que, peut-être, on doit penser à cela. Peut-être que,

18 pour décider cela, je devrais ou je dois demander l'avis des autres parties

19 parce que, comme vous le savez, il y avait cette question : ou tous les

20 accusés témoignent en même temps et on pouvait accepter au début, ou non,

21 et cela compliquait totalement le déroulement du procès. Donc cela pose un

22 problème.

23 Peut-être, je profite de cet instant pour faire une pause parce

24 qu'on doit parler, peut-être qu'on va passer à une conférence de mise en

25 état tout de suite.

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1 Nous allons faire une pause de 20 minutes, et on va discuter de

2 cela. Vingt minutes de pause.

3 (L'audience est levée à 14 heures 12.)

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