Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Vendredi 11 mai 2001.)

2 (Audience publique.)

3 (L'audience est ouverte à 9 heures 20.)

4 M. le Président: (S'adressant aux accusés.) Bonjour. Veuillez vous

5 asseoir.

6 Bonjour Mesdames, Messieurs. Bonjour, cabine technique. Bonjour, les

7 interprètes.

8 Les interprètes: Bonjour, Monsieur le Président.

9 M. le Président: Bonjour, le Greffe. Bonjour, les conseils de l'accusation

10 et de la défense. Je salue aussi le public qui nous accompagne aujourd'hui

11 encore une fois. Nous allons donc continuer notre affaire.

12 Hier, nous avions un doute s'agissant de savoir si nous allions avoir un

13 témoin ou l'autre.

14 Maître Jovan Simic, qui allons-nous avoir aujourd'hui?

15 M. J. Simic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, Madame et

16 Monsieur les Juges.

17 J'espère que nous entendrons quatre témoins aujourd'hui. Monsieur

18 Djukanovic est venu, il sera en troisième position; et par la suite nous

19 entendrions encore un témoin, M. Gajic, le Dr Gajic. Et je crois que,

20 j'espère du moins, que nous finirons les quatre témoins aujourd'hui.

21 M. le Président: Donc nous avons modifié la séquence, c'est cela?

22 M. J. Simic (interprétation): Non, Monsieur le Président. Djukanovic était

23 censé être le troisième, il sera le troisième, mais nous avons fait juste

24 qu'accélérer. C'est-à-dire que le témoin qui était prévu pour lundi

25 comparaîtra aujourd'hui en quatrième place, à savoir M. Gajic Slobodan.

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1 M. le Président: D'accord. Très bien.

2 (Le témoin, M. Dragan Velaula, est introduit dans le prétoire.)

3 Bonjour Monsieur Slobodan Gajic, vous m'entendez?

4 M. Velaula (interprétation): Oui.

5 M. le Président: Vous allez lire la déclaration solennelle que M.

6 l'huissier va vous tendre, s'il vous plaît.

7 M. Velaula (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

8 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

9 M. le Président: Veuillez vous asseoir. Oui, Monsieur Waidyaratne?

10 M. Waidyaratne (interprétation): Monsieur le Président, je voudrais juste

11 vérifier s'il s'agit ici de M. Slobodan Gajic.

12 M. J. Simic (interprétation): Non, il y a une erreur. Ce témoin s'appelle

13 Dragan Velaula.

14 M. le Président: D'accord. Très bien. Très bien. Merci d'avoir attiré

15 notre attention, Monsieur Waidyaratne.

16 Merci beaucoup d'être venu, M. Velaula Dragan. Vous allez maintenant

17 répondre aux questions que Me Jovan Simic va vous poser et après nous

18 verrons comment les choses vont se dérouler.

19 Pour l'instant, c'est à Me Jovan Simic de poser ses questions. Vous avez

20 la parole, s'il vous plaît.

21 (Interrogatoire principal du témoin, M. Dragan Velaula, par Me Jovan

22 Simic.)

23 M. J. Simic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

24 Pour les besoins du compte-rendu d'audience, je vous prie de décliner

25 votre identité.

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1 M. Velaula (interprétation): Velaula Dragan.

2 Question: Je vous demanderais de répondre avec une petite pause à cause du

3 service d'interprétation. Quand est-ce que vous êtes né?

4 Réponse: Je suis né le 5 janvier 1960 à Petrov Gaj.

5 Question: Etes-vous marié? Avez-vous des enfants.

6 Réponse: Je suis marié et j'ai deux enfants.

7 Question: Où vivez-vous maintenant?

8 Réponse: Je vis à Omarska.

9 Question: Quelle est votre profession?

10 Réponse: Je travaille dans l'hôtellerie, je suis garçon de café.

11 Question: Depuis, dans la période de 1992, sur le territoire de la

12 municipalité de Prijedor, pouvez-vous nous dire où est-ce que vous vous

13 trouviez juste avant l'éclatement des conflits, la prise du pouvoir, enfin

14 tous ces événements qui ont précédé la guerre?

15 Réponse: J'étais à Berlin, en Allemagne.

16 Question: Quand êtes-vous revenu de Berlin?

17 Réponse: Le 29 mai.

18 Question: Quelle était la raison de votre retour?

19 Réponse: Eh bien, je suis revenu parce que mon visa touristique venait à

20 expirer. Mon visa de trois mois touchait à sa fin.

21 Question: Avait-vous été mobilisé, et si oui quand?

22 Réponse: J'ai été mobilisé dès le 1er juin.

23 Question: Quelle était votre affectation militaire?

24 Réponse: J'ai été mobilisé dans l'infanterie et j'étais attribué, affecté

25 à la cellule de crise d'Omarska pour faire, pour y exercer mes fonctions.

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1 Question: Où se trouvait ce quartier général?

2 Réponse: Au centre d'Omarska, près de la maison de la JNA.

3 Question: Qui avait-il dans cette cellule de crise?

4 Réponse: Je me souviens de Milan Andzic. Il y avait encore des gens venus

5 d'ailleurs, et ainsi de suite.

6 Question: Pendant tous ces événements, avez-vous gardé cette affectation

7 ou avez-vous été transféré?

8 Et je vous prie de faire une pause entre ma question et votre réponse.

9 Réponse: Etant donné que je travaillais dans l'hôtellerie, j'ai été

10 transféré à la Separacija -c'est une station de tri- pour aider dans la

11 cuisine.

12 Question: Vous savez ce que c'est que la Separacija mais il faudrait peut-

13 être l'expliquer à la Chambre.

14 Réponse: C'est l'endroit où se trouvait la cuisine principale.

15 Question: Attendez un peu avec votre réponse. Cela se situe au niveau de

16 la mine de Ljubija?

17 Réponse: Oui, dans la mine d'Omarska.

18 Question: Quand vous dites Separacija, qu'est-ce que l'on avait là-bas?

19 Réponse: Il y avait un bâtiment de la direction et une cuisine.

20 Question: A qui appartenait cette direction?

21 Réponse: A la mine.

22 Question: Que faisiez-vous là-bas?

23 Réponse: J'aidais, j'épluchais des patates, je coupais le pain et ainsi de

24 suite.

25 Question: Qui travaillait encore avec vous dans la Separacija?

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1 Réponse: Il y avait pas mal de femmes, il y avait des hommes aussi, des

2 bouchers, des cuisiniers.

3 Question: Pouvez-vous nous citer quelque noms?

4 Réponse: Drago Vuceta était le boucher. Il y avait Zoran Delic, il y avait

5 un certain Seva; Novo Ratkovic, Bajo Beric et le chef de la cuisine était

6 Pero Rendic.

7 Question: Est-ce que vous connaissiez un certain Drajko?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Est-ce qu'il avait travaillé là-bas?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Y avait-il là-bas des femmes?

12 Réponse: Il y avait des femmes, oui. Des cuisinières.

13 Question: Pendant combien de temps avez-vous travaillé dans cette

14 Separacija?

15 Réponse: Jusqu'au 25 juin et ensuite j'ai été transféré au centre

16 d'enquête.

17 Question: Quand vous dites 25 juin, c'est de quelle année?

18 Réponse: Le 25 juin.

19 Question: Il s'agit bien de l'année 1992, n'est-ce pas?

20 Réponse: Oui.

21 Question: Pouvez-vous me dire donc, comme vous me l'avez dit tout à

22 l'heure, on préparait de la nourriture au niveau de la Separacija?

23 Réponse: Oui.

24 Question: Qui approvisionniez-vous?

25 Réponse: Pour le département de police d'Omarska, pour le quartier

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1 général, pour les gardes autour du camp, pour les militaires aussi bien.

2 Enfin, pour tous ces autres.

3 Question: Pouvez-vous nous dire de quoi avait l'air ce processus

4 technologique? Comment on préparait les denrées alimentaires, comment on

5 les transportait, comment on les distribuait?

6 Réponse: Je venais vers 5 ou 6 heures et il y en avait qui arrivaient plus

7 tôt encore. Nous découpions le pain, nous préparions les vivres, nous

8 emportions cela à Omarska à certains points de distribution, puis au

9 centre d'instruction en fin de compte.

10 Question: Soyons un peu plus clairs. Quand vous dites Omarska, vous

11 entendez le département de police?

12 Réponse: Oui.

13 Question: Et ces points de contrôle?

14 Réponse: C'était l'armée, c'était des points de contrôle de l'armée.

15 Question: Au moyen de quoi distribuiez-vous la nourriture?

16 Réponse: Il y avait une fourgonnette Tam d'abord, et puis ensuite un

17 véhicule Zastava.

18 Question: Sous le commandement de qui vous trouviez-vous?

19 Réponse: Nous, à la cuisine, nous faisions partie du commandement

20 militaire. C'est-à-dire notre commandement, c'était le commandement

21 militaire.

22 Question: Quelle avait été la situation au niveau de l'approvisionnement

23 en électricité sur le territoire de la municipalité de Prijedor et le

24 territoire du village d'Omarska?

25 Réponse: Il y avait des coupures très fréquentes et l'approvisionnement

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1 n'était pas régulier du tout. Des fois cela durait une journée, parfois

2 quatre ou cinq heures et ainsi de suite.

3 Question: Aviez-vous des problèmes à cause de cela pour ce qui était de la

4 préparation des denrées alimentaires?

5 Réponse: Oui, nous ne pouvions pas préparer en temps utile de si grandes

6 quantités de plats.

7 Question: Lorsque vous portiez des vivres vers le département du poste de

8 police d'Omarska, en début juin donc, quand vous avez commencé à le faire,

9 est-ce que, dans ce département du poste de police, vous pouviez

10 rencontrer Dragoljub Prcac?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Vous nous avez dit que le 25 juin, vous avez été transféré au

13 centre d'instruction d'Omarska?

14 Réponse: Oui.

15 Question: Quelles avaient été vos attributions une fois transféré?

16 Réponse: Eh bien, je devais transporter la nourriture, préparer la

17 distribution et procéder à la distribution.

18 Question: Et aviez-vous auparavant été à la Separacija et ensuite au

19 centre d'instruction?

20 Réponse: Oui, nous allions préparer ce qu'il fallait, puis nous

21 transportions cela au point de contrôle militaire et en fin de compte,

22 nous nous rendions au centre d'enquête.

23 Question: C'est ce que vous faisiez lorsque vous avez également été

24 transféré au centre d'instruction ce 25 juin?

25 Réponse: Oui, oui.

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1 Question: Quels étaient vos horaires de travail?

2 Réponse: De 5 à 6 heures jusqu'à 2 heures ou 3 heures, jusqu'à ce que les

3 denrées alimentaires aient été distribuées. Je travaillais un jour, puis

4 j'étais libre un jour.

5 Question: Vous transportiez donc ces denrées alimentées au moyen d'une

6 fourgonnette Tam? Et dans quoi ces aliments-là se trouvaient-ils placés?

7 Réponse: Dans des containers militaires.

8 Question: Et dans ces marmites ou containers, une fois préparés à la

9 cuisine, est-ce que vous transvasiez les plats ou vous transportiez les

10 containers là-bas?

11 Réponse: C'étaient de grand containers et il n'était pas nécessaire de

12 transvaser.

13 Question: Y avait-il une différence de qualité de vivres entre ce que vous

14 donniez aux détenus et ce que vous donniez aux enquêteurs?

15 Réponse: Pour les enquêteurs, nous préparions des plats à part.

16 Question: Mais entre ce que vous donniez aux détenus et aux gens qui

17 assuraient la sécurité, y avait-il une différence?

18 Réponse: Non, il n'y avait pas de différence.

19 Question: Combien de temps par jour passiez-vous au centre d'instruction

20 lorsque vous y alliez, étant donné que vous travailliez par tournées?

21 Réponse: De 8 heures à 3 heures de l'après-midi, donc de 8 heures du matin

22 jusqu'à 3 heures, parfois jusqu'à 4 heures de l'après-midi, cela dépendait

23 de l'heure à laquelle nous arrivions là-bas.

24 Question: Connaissiez-vous les gens qui assuraient la sécurité là-bas?

25 Réponse: Oui.

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1 Question: En sus de ces effectifs de sécurité ou aux gens que vous pensiez

2 appartenir aux effectifs de la sécurité, y avait-il d'autres groupes de

3 personnes qui avaient des attributions autres? Qu'avez-vous remarqué?

4 Réponse: Il y avait deux ou trois femmes de ménage. Il y avait du

5 personnel technique, des enquêteurs. il y avait des gens originaires de

6 Banja Luka et ainsi de suite.

7 Question: Pour ce qui est de ces gens originaires de Banja Luka, ces gens-

8 là appartenaient-ils à une unité spéciale ou que faisaient-ils?

9 Appartenaient-ils au personnel d'enquête ou au personnel technique? Que

10 faisaient-ils?

11 Réponse: Je ne sais pas du tout quelles avaient été leurs attributions.

12 Question: Vous nous avez dit que vous travailliez auparavant dans

13 l'hôtellerie.

14 Réponse: Oui.

15 Question: Où travailliez-vous avant?

16 Réponse: J'ai travaillé au restaurant "Potzo Zarje" à Omarska.

17 Question: Est-ce que cette Stojica Prcac, l'épouse de Dragoljub Prcac,

18 travaillait avec vous?

19 Réponse: Oui, elle travaillait dans la cuisine, elle était cuisinière en

20 chef.

21 Question: Savez-vous nous dire quelque chose au sujet de cette famille

22 Prcac?

23 Réponse: Oui. Dragoljub venait souvent lorsqu'il revenait du travail ou

24 lorsque sa femme travaillait dans la deuxième équipe, il venait la prendre

25 au passage. Et, bon, on en discutait souvent de leur situation financière;

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1 leur fils cadet avait quelque chose au bras, il fallait prélever beaucoup

2 d'argent pour le soigner et il fallait avoir des emplois supplémentaires,

3 notamment dans l'agriculture, aux fins de pouvoir mettre de côté

4 suffisamment d'argent pour le soigner. Mais de toute manière,

5 financièrement parlant cela n'allait pas très fort chez eux.

6 Question: Vous nous avez dit que vous voyiez Dragoljub Prcac au

7 département du poste de police à Omarska?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Le voyiez-vous au centre d'instruction d'Omarska?

10 Réponse: J'ai pour la première fois vu Dragoljub là-bas, vers la mi-

11 juillet. C'est la première fois que je l'y ai vu.

12 Question: Et sauriez-vous nous dire quand est-ce que Dragoljub Prcac a

13 cessé de travailler au centre d'instruction?

14 Réponse: Je crois qu'il a cessé de travailler là-bas lorsque le groupe de

15 gens était parti vers Manjaca.

16 Question: Et sauriez-vous nous dire si le centre d'instruction a continué

17 à fonctionner?

18 Réponse: Je crois qu'il était resté quelque 150 à 200 détenus là-bas et

19 que cela avait continué à fonctionner pendant peut-être encore 10 ou 15

20 jours.

21 Question: Vous nous dites 10 ou 15 jours, quelles étaient les conditions

22 qui prévalaient au centre d'instruction?

23 Réponse: Vous parlez avant ou après?

24 Question: Je parle des derniers 15 jours.

25 Réponse: Eh bien, il y avait des lits, la nourriture était meilleure étant

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1 donné qu'on devait faire une quantité moindre de denrées alimentaires ou

2 de plats, mais avant les conditions n'étaient pas aussi bonnes.

3 M. J. Simic (interprétation): Je vous remercie.

4 Monsieur le Président, nous n'avons plus de questions à l'intention de ce

5 témoin.

6 M. le Président: Très bien. Merci, Maître Jovan Simic.

7 Est-ce que d'autres conseils veulent poser des questions? Je ne vois

8 personne.

9 C'est donc à M. Waidyaratne. Vous avez la parole pour le contre-

10 interrogatoire, s'il vous plaît.

11 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Dragan Velaula, par M. Waidyaratne.)

12 M. Waidyaratne (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

13 Monsieur Velaula, vous nous avez dit que vous aviez travaillé comme garçon

14 de café. Quand est-ce que vous avez travaillé comme garçon de café dans ce

15 restaurant appelé "Potzo Zarje"?

16 M. Velaula (interprétation): De 1977 à 1979. Puis j'ai fait une pause,

17 j'ai travaillé au bord de mer pendant quatre saisons jusqu'en 1983. En

18 1983, je suis revenu à "Potzo Zarje" et j'y ai travaillé jusqu'en 1992.

19 Question: Et jusqu'à quand en 1992?

20 Réponse: Jusqu'au mois de janvier à peu près. Vers le mois de février, je

21 suis parti en Allemagne, et j'y suis resté jusqu'au mois de mai.

22 Question: Aviez-vous eu quelque chose à voir avec le restaurant Europa?

23 Réponse: Non, c'est mon frère qui travaillait là-bas, il y a travaillé

24 environ 6 mois.

25 Question: Monsieur Velaula, vous nous avez dit que Mme Prcac avait

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1 travaillé avec vous au restaurant "Potzo Zarje".

2 Réponse: Oui.

3 Question: Etait-ce un bar, une taverne? Quel type de restaurant était-ce?

4 Réponse: C'était un restaurant où il y avait aussi une grande salle, une

5 petite salle pour les déjeuners et une grande salle pour les occasions. Il

6 y avait beaucoup de gens, donc c'était un restaurant. On appelle cela un

7 restaurant.

8 Question: Mais c'était donc un bar, il y avait aussi…

9 Réponse: Oui.

10 Question: Et M. Prcac venait souvent, fréquentait-il les gens qui venaient

11 là-bas?

12 Réponse: Oui, il venait parfois en revenant de son travail, il restait

13 peut-être 10 à 15 minutes, et comme sa femme travaillait jusqu'à 10 heures

14 du soir, il venait la chercher vers 9 heures, il l'attendait, puis la

15 ramenait à la maison, l'accompagnait à la maison.

16 Question: Il ne s'est jamais plaint auprès de vous au niveau de problèmes

17 familiaux? C'était un homme heureux et satisfait?

18 Réponse: Je ne pourrais pas dire qu'il s'agissait là d'un homme heureux et

19 satisfait, mais je ne me suis pas entretenu beaucoup avec lui. C'était

20 surtout avec sa femme que j'ai pu m'entretenir.

21 Question: Je vous remercie.

22 Nous allons passer maintenant à la période où vous étiez revenu de Berlin,

23 vous avez dit que vous êtes rentré le 29 mai de Berlin, et que vous avez

24 été mobilisé le 1er juin.

25 Réponse: Oui.

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1 Question: Combien de temps êtes-vous resté à la cellule de crise?

2 Réponse: Non, je n'étais pas à la cellule, je ne faisais que monter la

3 garde devant, et j'y ai passé quelque sept à huit jours.

4 Question: Je comprends. Vous y avez donc passé combien de temps à cet

5 endroit?

6 Réponse: Sept à huit jours.

7 Question: A quelle unité étiez-vous rattaché et qui était votre supérieur?

8 Réponse: Cela s'appelait la Défense territoriale, la TO. Et maintenant

9 pour ce qui est de savoir qui était le commandant, je crois que c'était

10 Milan Andzic ou l'un de ces gens-là, mais cela ne m'intéressait pas

11 beaucoup.

12 Question: Vous n'étiez pas rattaché à l'intendance à cette époque, vous

13 étiez à la Défense territoriale?

14 Réponse: Oui, au début, je crois même que la cuisine faisait partie de la

15 Défense territoriale.

16 Question: Je vous pose une question directe. Donc, vous n'apparteniez pas

17 à l'intendance?

18 Réponse: Non.

19 Question: Vous nous avez dit que vous aviez commencé à travailler à la

20 distribution des plats qui étaient préparés là-bas, et que l'on vous

21 confiait par la suite pour les distribuer, n'est-ce pas?

22 Réponse: Oui.

23 Question: Quelle était votre fonction au juste? Etiez-vous chauffeur ou

24 étiez-vous la personne qui était destinée à verser les repas dans les

25 containers?

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1 Réponse: Moi, je versais les plats dans les containers, le chauffeur nous

2 emmenait, on faisait décharger les containers et on distribuait à manger

3 aux gens. C'était ce que je faisais.

4 Question: Vous nous avez donc dit que vous passiez d'abord par le

5 département du poste de police, n'est-ce pas?

6 Réponse: Le poste de police, la cellule de crise, les points de contrôle

7 et enfin, après tout cela, nous allions au centre d'instruction.

8 Question: Bien. Dites-moi d'abord si toutes les vivres que vous chargiez à

9 bord de cette camionnette étaient faites en une fois?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Donc, vous faisiez juste un trajet de tous ces sites-là?

12 Réponse: Oui, tous ces endroits-là, on en faisait le tour en un trajet.

13 Question: Et qui décidait des endroits où vous deviez vous rendre?

14 Réponse: Le responsable de la cuisine. C'est lui qui me donnait mes

15 instructions, le chef de la cuisine.

16 Question: Et comment saviez-vous combien de repas vous deviez amener à

17 chaque endroit?

18 Réponse: Eh bien, le chef de la cuisine nous remettait une liste sur les

19 quantités à apporter à tel ou tel endroit.

20 Question: Donc, est-ce que c'est M. Pero Rendic le chef de la cuisine?

21 Réponse: Oui, c'est exact.

22 Question: Donc, il vous donnait une liste sur le nombre de repas qui

23 devaient aller au poste de police d'Omarska, au point de contrôle, etc.

24 Réponse: Oui.

25 Question: Et est-ce qu'il vous indiquait le nombre de repas qui devait

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1 être envoyé au centre de détention d'Omarska?

2 Réponse: Il y avait 2000 ou 3000 rations, repas, donc on emmenait environ

3 2000 rations ou 3000 rations.

4 Question: Vous n'êtes pas très clair. Ma question était la suivante: est-

5 ce que M. Pero Rendic vous donnait le nombre de repas qui devait être

6 amené au camp de détention d'Omarska?

7 Réponse: Il avait une liste, il nous remettait cette liste. Il disait

8 qu'il fallait emmener tant de repas à cet endroit, tant au deuxième, tant

9 au troisième, et il avait également une liste qui s'appliquait au centre

10 d'enquêtes.

11 Question: Ce que vous êtes en train de me dire, c'est que M. Pero Rendic

12 savait le nombre de repas qui devait être envoyé au camp d'Omarska?

13 C'est bien exact?

14 Réponse: Il le savait probablement, quelqu'un devait le savoir. En tout

15 cas, il y avait une liste.

16 Question: Merci. Vous nous dites que vous-même, vous emmeniez 2000 à 3000

17 containers ou rations, est-ce que c'étaient des rations qui se

18 présentaient séparément ou est-ce qu'elles étaient dans un seul container?

19 Réponse: Si c'était dans un même container, il y en avait 5 ou 6 de ces

20 containers, je ne sais pas combien ils contenaient chacun de repas, mais

21 en tout cas, toute la nourriture était transportée dans ces containers

22 dont je ne peux vous dire combien de rations chaque container contenait.

23 Question: Monsieur Velaula, nous allons prendre le temps qu'il faudra.

24 Vous nous avez dit que vous, vous arriviez à 5 heures. Est-ce qu'à la

25 cuisine, on commençait à travailler à 5 heures ou à 6 heures?

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1 Réponse: Vers 5 heures ou 6 heures, parfois même à 4 heures du matin.

2 Question: Et quand vous entamiez vos transports, à quelle heure

3 commenciez-vous à emmener la nourriture?

4 Réponse: Vers 6 heures et demie, 7 heures, c'était toujours tout prêt.

5 Question: Donc, vous êtes en train de nous dire qu'à 6 heures 30, 7

6 heures, les repas étaient prêts et vous pouviez les transporter? C'est ce

7 que vous nous dites?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Combien de temps vous fallait-il pour arriver jusqu'au centre de

10 détention d'Omarska pour y amener la nourriture, sachant que vous alliez

11 d'abord au poste de police, au point de contrôle, à la cellule de crise

12 comme vous nous l'avez dit? Donc combien de temps vous fallait-il pour

13 arriver au centre de détention?

14 Réponse: Environ une heure, une heure et demie.

15 Question: Donc d'après ce que vous nous dites, c'est vers 8 heures que

16 vous arriviez là-bas?

17 Réponse: Oui, 8 heures, 8 heures et demie.

18 Question: Monsieur Velaula, M. Rendic a déposé devant le Tribunal, je vous

19 demande donc de réfléchir avec soin. Est-ce que vous apportiez leur petit

20 déjeuner aux gardes?

21 Réponse: Non, pas le petit déjeuner.

22 Question: Est-ce que vous apportiez leur petit déjeuner aux détenus?

23 Réponse: Non, il n'y avait qu'un seul repas.

24 Question: Combien de repas recevaient les enquêteurs?

25 Réponse: Pareil. Un repas.

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1 Question: Merci. Bien. Vous nous avez dit que vous épluchiez des pommes de

2 terre, des oignons, etc. Donc dans ce que vous qualifiez de repas, repas

3 qui étaient servis aux détenus, qu'est-ce qu'il y avait, quels étaient les

4 ingrédients?

5 Réponse: Parfois, c'était de la soupe, une soupe à la pomme de terre,

6 parfois une soupe aux choux, enfin ce genre de chose, ou bien un ragoût,

7 un ragoût de pommes de terre, ce genre de plat.

8 Question: A votre avis, quelle était la qualité de cette soupe, est-ce que

9 c'étaient des soupes de bonne qualité?

10 Réponse: Non.

11 Question: Oui, poursuivez?

12 Réponse: Il n'y avait pas suffisamment d'ingrédient pour faire un repas

13 qui soit véritablement bon.

14 Question: Mais du point de vue de la quantité, est-ce que c'était

15 suffisant pour les détenus qui se trouvaient là?

16 Réponse: Eh bien, pour la quantité, il faut savoir qu'ils avaient un repas

17 par jour et recevaient une assiette de cette soupe ou de ce ragoût, puis

18 un quart de pain. Quant à vous dire si c'était suffisant ou pas, je ne

19 sais pas.

20 Question: Je vous pose cette question car vous nous avez dit que vous avez

21 servi les repas au camp, c'est cela que je vous demande. Je voudrais

22 savoir quand vous serviez la nourriture, est-ce que les détenus recevaient

23 toujours un quart de pain?

24 Réponse: Au début c'était un huitième de pain. Mais le 1er août, à partir

25 du 1er août, ils ont reçu un quart de pain. Au début, il n'y avait pas

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1 autant de pain qu'après.

2 Question: Et je voudrais savoir entre le 1er juin et le 30 juillet. Est-ce

3 qu'ils recevaient suffisamment de pain?

4 Réponse: Du 1er juin à quelle date?

5 Question: Au 30 juillet?

6 Réponse: Il y avait pénurie de pain, c'est pourquoi, au début, on ne

7 donnait qu'un huitième de pain à chaque personne.

8 Question: Merci. Monsieur Velaula, vous nous avez dit que vous êtes allé

9 donc au camp d'Omarska, que vous avez travaillé à la cantine, est-ce bien

10 exact?

11 Réponse: Je ne comprends pas ce que vous voulez dire: cantine, de quelle

12 cantine parlez-vous?

13 Question: Vous nous dites qu'après avoir travaillé à la cuisine, est-ce

14 que vous n'avez pas été transféré au camp de détention d'Omarska, au

15 centre d'enquête?

16 Réponse: Oui.

17 Question: Et que faisiez-vous à cet endroit?

18 Réponse: Au centre d'instruction, au centre d'enquête, eh bien j'ai déjà

19 expliqué. On apportait la nourriture au centre d'enquête et moi,

20 j'organisais la distribution de la nourriture et puis je contrôlais un

21 petit peu ce qui se passait. Il y avait des femmes qui faisaient la

22 vaisselle, et puis je surveillais pendant que l'on distribuait la

23 nourriture.

24 Question: Vous nous parlez de distribution, vous nous parlez de l'endroit

25 où les détenus venaient manger, c'est ce que l'on appelle le restaurant,

Page 11607

1 c'est cela?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Il s'agissait donc du bâtiment, si vous le savez, est-ce que

4 vous savez que ce bâtiment était dénommé le bâtiment administratif

5 également?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Combien de temps avez-vous… combien de temps passiez-vous dans

8 ce bâtiment du restaurant lorsque vous vous y rendiez pour distribuer la

9 nourriture et contrôler la distribution de la nourriture?

10 Réponse: Eh bien, j'y passais la plupart de mon temps, de 8 heures jusqu'à

11 15 heures ou 16 heures suivant le temps qu'il fallait pour donner à

12 manger.

13 M. le Président: Vous l'avez sous contrôle, votre temps?

14 M. Waidyaratne (interprétation): Oui Monsieur le Président. Merci,

15 Monsieur le Président.

16 Est-ce que vous avez vu M. Prcac dans ce bâtiment administratif?

17 M. Velaula (interprétation): Le matin, une cuisinière venait et puis on

18 apportait leur nourriture aux enquêteurs. On allait, on se rendait donc

19 d'abord à l'endroit où il y avait écrit "police". Et puis, à droite, il y

20 avait une pièce, Dragoljub était là, on laissait la nourriture là, il y

21 avait un téléphone également. Ensuite on allait distribuer les repas aux

22 enquêteurs et on retournait en bas, au rez-de-chaussée.

23 Question: Est-ce que vous avez vu M. Prcac venir à la cuisine pour y

24 prendre ses repas?

25 Réponse: Non.

Page 11608

1 Question: Est-ce que vous avez vu…

2 Réponse: Je n'allais pas en bas parce que nous, on amenait la nourriture à

3 l'étage.

4 Question: Ma question est très claire: la cuisine se trouve donc au rez-

5 de-chaussée, lorsque vous procédiez à la distribution est-ce que vous avez

6 vu, est-ce que vous voyiez M. Prcac au rez-de-chaussée?

7 M. J. Simic (interprétation): Le témoin a répondu il y a instant qu'il

8 n'était pas au rez-de-chaussée, donc il ne l'a pas vu là, donc il n'y a

9 aucune raison pour que l'accusation insiste et essaie ainsi d'extraire des

10 réponses du témoin puisqu'il a dit que M. Prcac ne se trouvait pas à cet

11 endroit.

12 M. le Président: Je crois qu'il y a un point à éclaircir ici, "il n'était

13 pas au rez-de-chaussée"! Vous savez, le restaurant était au rez-de-

14 chaussée, le bureau de M. Prcac était au premier étage, il reste à savoir

15 qui.

16 Continuez s'il vous plaît Monsieur Waidyaratne, et votre temps est déjà

17 terminé.

18 M. Waidyaratne (interprétation): Merci Monsieur le Président, une minute

19 supplémentaire, je vous prie. Je n'ai besoin que d'une minute

20 supplémentaire.

21 Monsieur Velaula, est-ce que vous avez vu M. Prcac au rez-de-chaussée?

22 Réponse: Monsieur Prcac, au rez-de-chaussée? Moi, je l'ai vu le premier

23 jour quand il est venu.

24 Question: Est-ce que vous l'avez vu au rez-de-chaussée?

25 Réponse: Non, moi je ne le voyais pas au rez-de-chaussée, moi je le voyais

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1 à l'étage supérieur.

2 Question: Est-ce que vous avez vu les détenus se faire frapper, passer à

3 tabac lorsqu'ils venaient prendre leur repas? Et ceci par les gardes qui

4 se trouvaient au camp?

5 Réponse: Non je n'ai pas vu cela, je ne pouvais pas voir cela, je les

6 voyais quand ils entraient, puis quand ils étaient dans la cuisine, parce

7 que je ne pouvais pas voir le devant. Il y a d'abord une porte, ensuite il

8 y a l'entrée de la cuisine, et c'est là que je me trouvais, donc je ne

9 vous pouvais pas voir cela de l'endroit où je me tenais.

10 Question: Est-ce que vous saviez que les détenus étaient passés à tabac

11 lorsqu'ils venaient prendre leur repas? Est-ce qu'ils étaient battus par

12 les gardes, oui ou non?

13 Réponse: Eh bien, il est possible que j'aie vu des gens qui avaient été

14 battus, qui portaient des ecchymoses quand ils venaient manger, mais je ne

15 pas vu les gens se faire battre, je n'ai pas assisté à cela.

16 Question: Dernière question Monsieur Velaula, de combien de temps les

17 détenus disposaient-ils pour prendre leur repas?

18 Réponse: Deux ou trois minutes.

19 Question: Merci, j'en ai terminé du contre-interrogatoire.

20 M. le Président: Maître Jovan Simic, des questions supplémentaires si vous

21 en avez. Allez-y.

22 (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin, M. Velaula Dragan, par

23 Me Jovan Simic.)

24 M. J. Simic (interprétation): Je serai très bref, Monsieur le Président,

25 mais si l'accusation prend de notre temps à chaque fois, ce sera très

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1 difficile. Nous avions prévu d'avoir quatre témoins par jour mais cela va

2 être difficile si l'accusation nous prend du temps. Mais je serais aussi

3 bref que possible.

4 Monsieur Velaula, vous nous avez dit que vous n'apparteniez pas au début

5 au service de l'intendance, est-ce que cela a trait à la première période

6 de 7 jours? Est-ce que c'est ce que vous vouliez dire?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Est-ce qu'ensuite vous avez été transmis au service de

9 l'intendance?

10 Réponse: Oui, oui oui, j'ai été transféré à la cuisine, donc je suis

11 devenu membre du service de l'intendance.

12 Question: Est-ce que vous savez si à Omarska il y avait un poste de police

13 ou un département de police?

14 Réponse: Il y avait un département de police.

15 Question: Ma question suivante a trait à la liste relative à la

16 nourriture. Monsieur Waidyaratne vous a posé une question à ce sujet. La

17 liste que vous receviez donc de Pero Rendic, est-ce que cette liste

18 indiquait le nombre de repas ou le nombre de containers? Est-ce qu'elle

19 vous indiquait 2000 ou 3000 repas ou bien est-ce qu'il y avait des

20 containers sur lesquels il y avait écrit "Omarska", "l'armée" etc.?

21 M. Waidyaratne (interprétation): Objection. Le contexte est le suivant: le

22 témoin a dit que M. Pero Rendic avait une liste des détenus.

23 M. le Président: La question de Me Jovan Simic n'est pas finie. Posez la

24 question. Ici on ne parle pas de personnes, on parle de portions, c'est

25 différent. Allez-y.

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1 M. Waidyaratne (interprétation): Bien Monsieur le Président.

2 M. J. Simic (interprétation): Pouvez-vous répondre à ma question, s'il

3 vous plaît? Est-ce qu'il s'agissait du nombre de repas ou bien de la

4 quantité de containers? Est-ce que vous vous pouvez nous l'expliquer à la

5 Chambre de première instance afin que cela soit très clair?

6 Réponse: Eh bien, on préparait environ 4000 à 5000 repas. Je ne sais pas

7 si c'était la quantité ou le nombre. On avait des containers, et on

8 disait: "ceux-là vont au centre d'enquête, ceux-là au poste de police",

9 c'était écrit sur chacun des containers et on les amenait là-bas et on les

10 distribuait.

11 Question: Pouvez-vous me dire s'il vous plaît si les enquêteurs, le

12 personnel du centre et les gardes mangeaient dans la Separacija après

13 leurs heures de travail?

14 Réponse: Je ne peux pas vous dire parce que je me rendais immédiatement

15 chez moi, je ne retournais donc pas au bâtiment Separacija.

16 Question: Merci. Où se trouvait la table à laquelle les gardes mangeaient?

17 Réponse: Les gardes? Eh bien, cela ne se trouvait pas dans la cuisine, il

18 n'y avait pas de table là, ils venaient, ils prenaient leurs repas.

19 Certains d'ailleurs amenaient de la nourriture de chez eux, mais ils

20 n'avaient pas de table dans la cuisine, cela c'est sûr.

21 Question: Merci, je n'ai plus de questions.

22 M. le Président: Merci beaucoup, Maître Jovan Simic.

23 Monsieur Riad, s'il vous plaît?

24 (Questions au témoin, M. Dragan Velaula, par M. le Juge Riad.)

25 M. Riad: Monsieur Velaula, bonjour, est-ce que vous pouvez m'entendre?

Page 11612

1 M. Velaula (interprétation): Oui.

2 Question: Je souhaiterais avoir de votre part certaines précisions au

3 sujet de votre déposition. Vous nous dites qu'après le 15 juillet, les

4 conditions de vie au camp se sont améliorées, mais qu'avant cette date

5 elles étaient plutôt mauvaises, c'est-à-dire pour la période qui allait de

6 juin à la mi-juillet.

7 Que vouliez-vous dire quand vous nous avez dit que les conditions étaient

8 assez mauvaises? Est-ce que vous pouvez me l'expliquer s'il vous plaît?

9 Réponse: Les gens étaient dans le hangar, ils étaient à l'extérieur, ils

10 étaient assis les uns à côté des autres. Les conditions d'hygiène

11 n'étaient pas optimales. C'est cela que j'ai voulu dire en disant que les

12 conditions n'étaient pas bonnes.

13 Question: En ce qui concerne les conditions d'hygiène, pour vous, quel

14 était le problème? Qu'est-ce qui n'allait pas? Qu'est-ce qui laissait à

15 désirer?

16 Réponse: Qu'est-ce qui n'allait pas? C'est que les gens ne pouvaient pas

17 se laver, ils allaient bien aux toilettes, mais ils ne pouvaient pas se

18 laver correctement, donc c'est pour cela que j'ai dit que les conditions

19 d'hygiène étaient mauvaises.

20 Question: Et vous nous dites que ça s'est aussi amélioré en ce qui

21 concerne la nourriture. Qu'est-ce qui s'est amélioré en ce qui concerne la

22 nourriture? Les gens ont reçu un quart de pain au lieu d'un huitième de

23 pain comme avant?

24 Réponse: Oui. Oui, c'est cela, oui.

25 Question: Mais les gens continuaient à ne recevoir qu'un repas par jour?

Page 11613

1 Réponse: Oui, ça c'est vrai; ils continuaient à recevoir un repas par

2 jour. Ils recevaient encore un repas par jour.

3 Question: Et en plus de ce quart de pain, que recevaient-ils comme repas

4 après le 15 juillet?

5 Réponse: Eh bien, il y avait ces soupes ou ces espèces de ragoûts qui

6 étaient faits à partir de pommes de terre, choux ou pois. Ce genre de

7 choses.

8 Question: Et avant le 15 juillet, est-ce que c'était le même genre de

9 soupe qui était servie ou est-ce que c'était pire?

10 Réponse: Oui. Eh bien, ce genre de soupe, oui.

11 Question: Et c'étaient les mêmes repas, c'est ce que vous nous avez dit je

12 crois? C'étaient les mêmes repas qui étaient servis aux gardes, aux

13 membres de la sécurité?

14 Réponse: Oui. Oui, on le servait aussi bien à eux qu'aux détenus. C'était

15 pareil.

16 Question: Mais les personnels de la sécurité, eux, ils ne recevaient que

17 de la soupe et un quart de pain?

18 Réponse: Eh bien, ils amenaient à manger de chez eux. Nous, on leur

19 donnait les mêmes repas mais ils amenaient aussi à manger de chez eux

20 parce qu'ils n'aimaient pas la nourriture que nous nous servions, donc ils

21 amenaient leur propre nourriture. Donc, il y en avait très peu qui

22 mangeait ce qu'on leur servait, ils amenaient leur propre nourriture.

23 Question: Donc, à votre avis, cette nourriture qu'on servait n'était pas

24 mangeable?

25 Réponse: Si c'était mangeable, mais ce n'était pas d'une excellente

Page 11614

1 qualité.

2 Question: Mais est-ce que vous en avez mangé vous-même?

3 Réponse: Non.

4 Question: Vous nous dites que les enquêteurs, eux aussi, recevaient un

5 repas par jour tout comme les détenus? Quelles étaient les heures de

6 travail de ces enquêteurs? Combien d'heures restaient-ils au camp?

7 Réponse: Je crois que c'était pareil à partir de 8 heures du matin jusqu'à

8 14 heures ou 15 heures.

9 Question: Donc il avait un seul repas, le déjeuner?

10 Réponse: Oui, oui, le déjeuner.

11 Question: Et pas le dîner, parce qu'ils rentraient chez eux?

12 Réponse: Oui, c'est exact.

13 Question: Mais les détenus, eux, n'avaient pas de dîner?

14 Réponse: Je l'ai déjà dit, les détenus ne recevaient qu'un repas par jour.

15 Question: C'était le déjeuner?

16 Réponse: Eh bien, c'était tout, tout à la fois: déjeuner, dîner, petit

17 déjeuner. Je ne sais pas bien comment appeler cela.

18 Question: Et vous nous dites que quand ils entraient au restaurant, de

19 l'endroit où vous teniez, vous ne pouviez rien voir du style de passage à

20 tabac, etc., mais est-ce que vous pouviez entendre quelque chose? Des

21 cris, par exemple?

22 Réponse: Parfois, on pouvait entendre mais je ne pouvais rien voir du

23 tout. De l'endroit où je me tenais, je ne pouvais rien voir du tout.

24 Question: Mais qu'est-ce que vous avez entendu, si vous vous en souvenez?

25 Réponse: J'ai entendu des gens crier et des gens gémir.

Page 11615

1 M. Riad (interprétation): Merci beaucoup.

2 M. le Président: Merci beaucoup, Monsieur le Juge Riad.

3 Madame la Juge Wald?

4 (Questions au témoin, M. Dragan Velaula, par Mme la Juge Wald.)

5 Mme Wald (interprétation): J'ai quelques questions à vous poser.

6 Est-ce que je vous ai bien compris? Est-ce que vous nous avez dit que

7 cette soupe ou ce ragoût qui représentait le plat principal, si l'on peut

8 dire de ce repas, donc ça c'était préparé à la Separacija ou bien est-ce

9 que c'était préparé à l'extérieur et ensuite réchauffé et qu'à l'immeuble

10 Separacija on ajoutait quelque chose? Ou est-ce que tout était préparé à

11 partir de tous les ingrédients d'origine à la Separacija?

12 M. Velaula (interprétation): C'était préparé dans la Separacija, dans la

13 cuisine qui s'y trouvait.

14 Question: Donc c'était préparé à cet endroit. Mais en ce qui concerne le

15 pain, où était-il préparé ce pain? Est-ce que c'était aussi à la

16 Separacija?

17 Réponse: Je crois que le pain venait de Prijedor.

18 Question: Bien. J'ai compris qu'à une question de M. le Juge Riad, vous

19 avez dit que cette nourriture que vous prépariez à l'intention de diverses

20 endroits, le département de police, les détenus, certains postes

21 militaires, enfin, disons que c'était en tout cas un repas qui était un

22 déjeuner, puisque vous l'ameniez sur place au milieu de la matinée,

23 c'était une sorte de déjeuner que généralement les destinataires

24 consommaient en milieu de journée. Donc on partait du principe qu'à

25 l'exception des détenus, les autres personnes concernées mangeaient,

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1 prenaient le petit déjeuner ailleurs et, le soir, leur dîner ailleurs?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Donc c'était un déjeuner, un repas pris en milieu de journée,

4 mais pour les détenus c'était leur seul et unique repas de la journée?

5 Réponse: Oui, c'est exact.

6 Question: Je me suis un peu perdu dans vos explications, parce qu'il m'a

7 semblé qu'à un moment donné, vous nous avez dit que les enquêteurs

8 recevaient une nourriture différente, que les gardes recevaient la même

9 chose mais pas les enquêteurs. Cependant, à un autre moment, vous avez

10 parlé du fait que vous avez amené leurs repas aux enquêteurs.

11 Donc j'aimerais bien que vous me précisiez ce point: je voudrais savoir si

12 effectivement vous serviez ces mêmes repas aux enquêteurs qu'aux gardes?

13 Réponse: Oui, j'ai dit qu'on préparait pour eux un repas différent.

14 Question: C'est bien ce qu'il m'avait semblé entendre mais je voulais en

15 être sûre.

16 Vous nous avez dit qu'il y avait des femmes dans la cuisine de la

17 Separacija, je voudrais savoir s'il s'agissait de femmes civiles qui

18 venaient de l'extérieur ou bien si c'étaient des détenues, des femmes

19 détenues qui travaillaient dans la cuisine?

20 Réponse: Eh bien, il y avaient des femmes au camp au centre d'instruction,

21 des détenues, mais il y avait également des femmes de ménage à cet

22 endroit.

23 Question: Donc il s'agissait aussi de détenues, de détenues femmes qui

24 travaillaient à la cuisine?

25 Réponse: Eh bien, elles nous aidaient essentiellement à servir les repas

Page 11617

1 et à faire la vaisselle.

2 Question: Donc à un moment donné, après votre transfert au centre, vous

3 avez participé au contrôle de la distribution des repas aux détenus. Vous

4 nous dites que, de l'endroit, vous ne pouviez pas les voir au moment où

5 ils entraient mais vous étiez en mesure de les voir lorsqu'ils prenaient

6 leurs repas au restaurant, lorsqu'ils s'alignaient pour recevoir leurs

7 repas, s'asseyaient pendant quelques minutes pour manger. Tout cela, vous

8 étiez en mesure de le voir, n'est-ce pas?

9 Réponse: Oui. Oui, j'étais là.

10 Question: Qu'avez-vous pu observer sur l'état dans lequel ils se

11 trouvaient? Est-ce qu'ils avaient l'air mal nourris? Est-ce que certains

12 portaient des hématomes, des blessures, du fait qu'ils n'étaient pas en

13 mesure de se laver. Ils étaient sans doute, ils avaient sans doute l'air

14 sale et peu soignés, mais du point de vue de leur santé quel semblait être

15 leur état de santé?

16 Est-ce qu'ils étaient suffisamment nourris?

17 Réponse: Ils n'étaient pas très bien nourris, en tout cas ils étaient

18 maigres, ils étaient minces. Vous voyez le genre de chose.

19 Question: Ma dernière question: quand vous avez vu M. Prcac au camp,

20 quelle impression avez-vous eu quant à la nature de ses fonctions? Je vous

21 demande simplement de vous baser sur vos observations, que pensiez-vous

22 quelles étaient ses fonctions, là, au camp?

23 Réponse: Je ne sais pas, j'ai vu Dragoljub la première fois quand j'ai

24 amené les repas en haut, je l'ai vu dans la pièce, il était près du

25 téléphone là où il y avait également la dame. Quel était son rôle ce qu'il

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1 faisait au sein de la police, je ne sais pas, je ne suis pas au courant de

2 l'organisation de la police, donc je ne peux pas vous dire.

3 Question: Mais votre impression pendant cette période où vous entriez et

4 sortiez du camp dans le cadre de la distribution des repas, je voudrais

5 savoir si vous avez eu l'impression pendant cette période que c'était un

6 garde comme les autres ou si ses fonctions différaient de celles des

7 autres gardes qui étaient chargés de garder la prison?

8 Réponse: Je viens de dire que je ne savais pas ce qu'il faisait, quel

9 était son travail là-bas, quelle était sa fonction non plus donc je ne

10 peux pas répondre à cette question.

11 Question: Les uniques fois lors desquelles vous l'avez vu, c'était à

12 l'étage, dans ce bureau où il y avait des radios et des téléphones n'est-

13 ce pas?

14 (Signe approbatif du témoin.)

15 M. le Président: J'ai une question très rapide. Si j'ai bien compris nous

16 avions une cuisine à la Separacija et une cantine pour distribuer la

17 nourriture au centre d'enquête d'Omarska, est-ce que j'ai bien compris?

18 Réponse: Au centre d'Omarska?

19 Question: Oui.

20 Réponse: Oui il y avait un réfectoire où l'on distribuait la nourriture et

21 on la préparait à la Separacija.

22 Question: Où travaillaient les femmes détenues? Elles travaillaient dans

23 le réfectoire seulement ou elles travaillaient aussi dans la cuisine, dans

24 le bâtiment Separacija?

25 Réponse: Les femmes détenues, elles étaient au réfectoire du centre

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1 d'instruction, et non pas à la Separacija. Lorsque nous, on arrivait,

2 elles étaient déjà en bas, deux ou trois d'entre elles lavaient la

3 vaisselle et deux ou trois nous aidaient à distribuer la nourriture.

4 M. le Président: Très bien, nous n'avons pas d'autres questions Monsieur

5 Velaula. Nous vous remercions donc d'être venu, nous vous souhaitons un

6 bon retour dans votre lieu de résidence et de travail.

7 Je vais demander à M. l'huissier de vous raccompagner.

8 M. Velaula (interprétation): Merci à vous.

9 (Le témoin, M. Dragan Velaula, est reconduit hors du prétoire.)

10 M. le Président: Maître Jovan Simic maintenant?

11 M. J. Simic (interprétation): Le témoin suivant est un témoin protégé

12 Monsieur le Président, DE1, qui sera interrogé par mon collègue Me Masic.

13 M. le Président: Si je me rappelle bien, les mesures de protection

14 accordées sont: pseudonyme, distorsion du visage et de la voix, non?

15 M. J. Simic (interprétation): Non Monsieur le Président, pas de distorsion

16 de voix, la galerie du public pourra donc entendre.

17 Monsieur le Président, je m'excuse peut-être vaudrait-il mieux, étant

18 donné que le témoin est un peu anxieux déjà, que l'on procède à une pause

19 jusqu'au début de sa déposition et ensuite on enchaînera avec le

20 troisième.

21 M. le Président: Il faut prendre des mesures pour préparer la salle, c'est

22 peut-être mieux de faire la pause maintenant, c'est ce que vous voulez

23 dire Maître Jovan Simic?

24 M. J. Simic (interprétation): Oui.

25 M. le Président: Nous devons préparer la salle à cause des mesures de

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1 protection. Le public peut suivre le témoignage mais il y a quelques

2 restrictions du point de vue de la protection du témoin. Nous allons faire

3 une pause maintenant d'une demi-heure et nous allons revenir pour

4 continuer avec un autre témoin donc une demi-heure.

5 (L'audience, suspendue à 10 heures 23, est reprise à 11 heures 02.)

6 (Les accusés sont réintroduits dans le prétoire.)

7 M. le Président: Veuillez vous asseoir.

8 (Audience publique avec mesures de protection.)

9 (Le témoin TE1 est introduit dans le prétoire.)

10 M. le Président: Bonjour témoin TE1, vous m'entendez?

11 Témoin DE1 (interprétation): Oui.

12 M. le Président: Vous allez lire la déclaration solennelle que M.

13 l'huissier va vous tendre s'il vous plaît.

14 Témoin DE1 (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

15 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

16 M. le Président: Vous pouvez vous asseoir s'il vous plaît.

17 Monsieur l'huissier va lever les rideaux et après nous allons continuer.

18 (Le témoin s'assoit.)

19 (L'huissier lève les rideaux.)

20 M. le Président: Donc Témoin DE1, vous allez regarder cette pièce de

21 papier où en principe est inscrit votre nom, vous allez me répondre par

22 oui ou par non seulement s'il s'agit de votre nom.

23 Témoin DE1 (interprétation): Oui.

24 M. le Président: Très bien.

25 Merci beaucoup d'être venu Témoin DE1, vous allez pour l'instant répondre

Page 11621

1 aux questions que Me Masic va vous poser et après nous verrons la

2 séquence.

3 Donc Maître Masic, vous avez la parole s'il vous plaît.

4 (Interrogatoire principal du témoin DE1 par Me Masic.)

5 M. Masic (interprétation): Bonjour, Monsieur DE1, c'est ainsi que nous

6 vous appellerons pour des raisons de mesures de protection qui vous sont

7 attribuées. Je demanderai à M. le Président de passer à huis clos partiel

8 juste pour les renseignements d'identification.

9 M. le Président: Oui nous allons passer à huis clos partiel pour

10 l'identification du témoin.

11 Nous sommes maintenant à huis clos partiel.

12 (Audience à huis clos partiel.)

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9 (Audience publique avec mesures de protection.)

10 M. le Président: Nous sommes en session publique. Vous pouvez continuer Me

11 Masic.

12 M. Masic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Monsieur, après

13 votre mobilisation où avez-vous était affecté?

14 Témoin DE1 (interprétation): J'ai été affecté au département du poste de

15 police d'Omarska.

16 Question: Qu'avez-vous fait là-bas?

17 Réponse: J'étais policier de réserve.

18 Question: A l'époque, qui se trouvait être le chef de ce département du

19 poste de police d'Omarska?

20 Réponse: C'était Zeljko Mejakic.

21 Question: Y avait-il un adjoint quelconque à ce chef de département de

22 poste de police?

23 Réponse: Non.

24 Question: Y avait-il au département du poste de police d'Omarska un

25 policier de permanence?

Page 11623

1 Réponse: Oui.

2 Question: Quels étaient les devoirs de ce policier de permanence?

3 Réponse: Eh bien ses tâches consistaient à recueillir les plaintes des

4 citoyens pour par exemple des cambriolages ou des accidents, et de

5 distribuer aux policiers, aux autres policiers de service, des ordres ou

6 des instructions écrites qui étaient déjà pré-rédigées pour qu'ils

7 puissent procéder.

8 Question: Qui avait rédigé les ordres ou instructions que vous venez de

9 mentionner?

10 Réponse: Zeljko Mejakic.

11 Question: Est-ce que cela signifie que ce policier de permanence ne

12 faisait que transmettre les ordres de Zeljko Mejakic?

13 Réponse: Oui.

14 Question: Ce policier de permanence pouvait-il vous dire, en votre qualité

15 de policier de réserve, de faire quoi que ce soit ou de vous donner

16 quelque ordre?

17 Réponse: Non.

18 Question: Le policier de permanence pouvait-il vous sanctionner?

19 Réponse: Non.

20 Question: Avez-vous ensuite été transféré au centre d'instruction

21 d'Omarska?

22 Réponse: Oui.

23 Question: Veuillez nous expliquer comment cela s'est passé, le plus

24 brièvement possible, je vous prie.

25 Réponse: Un matin quand nous sommes arrivés dans notre équipe de travail,

Page 11624

1 le policier de permanence nous a dit que nous allions être transportés en

2 fourgonnette vers la mine de fer d'Omarska.

3 Question: Qui vous a accueillis au complexe d'exploitation industrielle

4 des minerais de fer d'Omarska?

5 Réponse: Zeljko Mejakic.

6 Question: Que vous a-t-il dit à ce moment-là?

7 Réponse: Il a dit que nous allions désormais rester là pour garder les

8 détenus musulmans.

9 Question: Et vous a-t-il dit à ce moment-là pendant combien de temps vous

10 alliez exercer ces tâches?

11 Réponse: Oui, il a dit, il a parlé d'environ 10 à 15 jours.

12 Question: Et a-t-il déterminé quels seraient vos postes de garde, à savoir

13 qui est-ce qui serait de garde à quel endroit?

14 Réponse: Ce matin-là, non. Ils nous ont ramenés à la maison et nous sommes

15 venus travailler le soir en deuxième équipe, et c'est alors qu'il nous l'a

16 dit.

17 Question: Est-ce que vous pouviez choisir selon votre propre bon vouloir

18 le poste où vous alliez être de garde? Et où étiez-vous?

19 Réponse: Oui, nous pouvions choisir comme bon nous semblait, et moi

20 j'étais dans la partie arrière vers les garages, à savoir les hangars.

21 Question: Y avait-il une discipline quelconque parmi vous? Quel était le

22 type de discipline que vous aviez?

23 Réponse: Non, il n'y avait pas de discipline.

24 Question: Quand vous dit qu'il n'y avait pas eu de discipline, comment

25 cela se traduisait-il? Est-ce que vous pouviez quitter votre poste de

Page 11625

1 garde et est-ce que vous deviez rapporter à qui que ce soit lorsque vous

2 quittiez votre poste de garde pendant votre tour de garde?

3 Réponse: Nous n'avions pas à nous présenter à qui que ce soit.

4 Question: Je vous prie de faire une petite pause entre ma question et

5 votre réponse afin que les interprètes aient le temps de traduire. Allez-y

6 maintenant.

7 Réponse: Nous n'avions pas à demander cela à qui que ce soit mais nous

8 disions juste à nos collègues que nous allions sortir.

9 Question: Est-ce que, pratiquement parlant, cela signifie que les

10 collègues vous remplaçaient ou que vous les remplaciez?

11 Réponse: Oui.

12 Question: En sus des gardiens au centre d'enquête d'Omarska, y avait-il

13 d'autres personnes, y avait-il d'autres unités?

14 Réponse: Oui.

15 Question: Veuillez nous dire qui il y avait au juste là-bas?

16 Réponse: Il y avait du personnel technique qui était chargé de l'entretien

17 des mines, puis il y avait une unité originaire de Banja Luka et il y

18 avait un groupe de policiers chargés des arrestations.

19 Question: Y avait-il des femmes de ménage?

20 Réponse: Oui, il y avait deux femmes, deux femmes de ménage.

21 Question: Y avait-il des enquêteurs?

22 Réponse: Oui, il y avait des enquêteurs.

23 Question: Y avait-il des soldats?

24 Réponse: Oui, il y avait eu des soldats.

25 Question: Qui est-ce qui emmenait les détenus pour qu'ils soient

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1 interrogés par les enquêteurs?

2 Réponse: C'était un groupe particulier de policiers.

3 Question: Qui faisait partie de ce groupe à part de policiers?

4 Réponse: Une partie des policiers originaires de Banja Luka et une partie

5 des policiers de chez nous.

6 Question: Quand est-ce que ce groupe chargé d'accompagner ou d'escorter

7 ces détenus a-t-il été constitué?

8 Réponse: Plus ou moins trois ou quatre jours après notre arrivée là-bas.

9 Question: Pouviez-vous souvent voir Zeljko Mejakic au camp?

10 Réponse: Oui.

11 Question: A combien de reprises?

12 Réponse: Très souvent.

13 Question: Et connaissez-vous Dragoljub Prcac?

14 Réponse: Oui.

15 Question: Comment l'avez-vous connu? Quand est-ce que vous avez fait sa

16 connaissance,?

17 Réponse: Eh bien, j'ai fait sa connaissance en 1988 ou 1989. Son épouse,

18 Stojica, travaillait dans un restaurant où nous allions manger, et il

19 venait la chercher pour l'accompagner quand elle terminait son travail.

20 Question: Est-ce que vous vous entreteniez avec Drago lorsqu'il

21 l'attendait? Et de quoi parliez-vous d'habitude?

22 Réponse: Oui, nous nous entretenions de questions agricoles, de questions

23 secondaires.

24 Question: Et d'après vous, quel type d'homme était ce Drago Prcac?

25 Réponse: Drago était un homme assez calme, retiré, aimable, une personne

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1 tout à fait bien.

2 Question: Est-ce que vous savez nous dire quand est-ce que Drago est venu

3 au centre d'instruction d'Omarska, s'il y est allé?

4 Réponse: Eh bien, vers la fin de l'existence de ce centre d'instruction.

5 Question: Pourriez-vous nous dire quand est-ce que ce centre a été fermé,

6 donc qu'est-ce que vous entendez par la fin?

7 Réponse: Eh bien, c'était vers le 15 juillet.

8 Question: Que faisait Drago Prcac au centre d'instruction?

9 Réponse: Je ne sais pas ce qu'il faisait

10 Question: Etait-il l'un quelconque de vos supérieurs?

11 Réponse: Non, non.

12 Question: L'avez-vous vu donner des ordres à qui que ce soit?

13 Réponse: Non.

14 Question: Début août, est-il arrivé quelque chose? Et si oui, pouvez-vous

15 nous dire quel est l'événement en question?

16 Réponse: Oui. Drago Prcac lisait des listes de noms de femmes qui devaient

17 aller à Trnopolje.

18 Question: Et comment se fait-il que vous vous souveniez précisément de

19 cette chose-là?

20 Réponse: Eh bien, cela est resté gravé dans ma mémoire parce qu'elles

21 l'enlaçaient et elles l'embrassaient tellement, elles étaient heureuse de

22 l'apprendre.

23 Question: Et par la suite, avez-vous revu Drago Prcac au centre

24 d'instruction d'Omarska?

25 Réponse: Non.

Page 11628

1 M. Masic (interprétation): Monsieur le Président, je vous remercie, je

2 n'aurai plus de questions pour le moment à l'intention de ce témoin.

3 M. le Président: Oui, Maître Nikolic s'il vous plaît?

4 M. Nikolic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président.

5 Avec votre permission, la défense de M. Kos voudrait poser quelques

6 questions à ce témoin.

7 M. le Président: Allez-y, Maître Nikolic, s'il vous plaît.

8 (Interrogatoire principal du témoin DE1 par Me Nikolic.)

9 M. Nikolic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Témoin DE1.

10 Ma première question à votre intention sera la suivante: connaissez-vous

11 une personne du nom de Milojica Kos?

12 Témoin DE1 (interprétation): Oui.

13 Question: Le connaissiez-vous avant le conflit armé de 1992?

14 Réponse: Oui.

15 Question: Et dans ce centre d'instruction d'Omarska, avez-vous travaillé

16 avec M. Milojica Kos?

17 Réponse: Oui.

18 Question: Aviez-vous travaillé dans la même équipe?

19 Réponse: Oui.

20 Question: Et d'après ce que vous en savez, M. Milojica Kos avait-il

21 quelque attribution ou compétence que ce soit pour donner des ordres?

22 Réponse: Non.

23 Question: D'après ce que vous en savez encore, M. Kos a-t-il donné des

24 ordres à votre intention ou à l'égard de quelque autre personne que ce

25 soit?

Page 11629

1 Réponse: Non.

2 Question: Et dernière question de ma part: d'après ce que vous en savez,

3 M. Milojica Kos avait-il quelques hommes subordonnés ou placés sous ses

4 ordres au centre d'instruction d'Omarska?

5 Réponse: Non.

6 M. Nikolic (interprétation): Je vous remercie aussi, Monsieur le

7 Président.

8 M. le Président: Merci beaucoup, Maître Nikolic.

9 Y a-t-il d'autres conseils? Non.

10 Donc c'est M. Saxon qui va contre-interroger. Monsieur Saxon, vous avez la

11 parole, s'il vous plaît.

12 (Contre-interrogatoire du témoin DE1 par M. Saxon.)

13 M. Saxon (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

14 Monsieur DE1, vous nous avez expliqué que vous aviez d'abord été mobilisé

15 en tant que policier de réserve en mai 1992 et que, par la suite, vous

16 aviez travaillé en tant que gardien au camp d'Omarska, n'est-ce pas?

17 Témoin DE1 (interprétation): Oui.

18 Question: Vous souvenez-vous avoir signé une déclaration en mai 1992,

19 disant que vous vous conformeriez à la législation, à la Constitution de

20 la Republika Srpska en Bosnie-Herzégovine?

21 Réponse: Oui, je m'en souviens.

22 Question: Je voudrais demander à M. l'huissier de nous aider et de bien

23 vouloir distribuer la pièce à conviction 3/289.

24 Je demanderai aussi également un petit huis clos partiel, Monsieur le

25 Président, étant donné que sur ce document y figurent le nom et le prénom

Page 11630

1 de ce témoin-ci. Je voudrais bien vérifier aussi que l'image reflétée par

2 le rétroprojecteur n'est pas visible sur les moniteurs dans la galerie du

3 public.

4 M. le Président: Nous allons donc passer à huis clos partiel. Je demande à

5 la cabine technique de ne pas faire passer pour le public le document qui

6 va être placé sur le rétroprojecteur.

7 (Audience à huis clos partiel.)

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25 (expurgé)

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1 (Audience publique avec mesures de protection.)

2 Nous sommes maintenant en session publique, Monsieur Saxon.

3 M. Saxon (interprétation): Vous avez mentionné, lors de votre

4 interrogatoire principal, que lorsque vous êtes arrivé au camp d'Omarska,

5 Zeljko Mejakic vous a accueilli là-bas et qu'il vous a dit que vous alliez

6 y passer environ 10 à 15 jours en gardant les détenus. Est-ce que vous

7 avez appris à un certain moment que la plupart de ces détenus au camp

8 d'Omarska étaient des Musulmans, des non Serbes?

9 Réponse: Oui.

10 Question: Le jour de votre arrivée au camp d'Omarska, lorsque Zeljko

11 Mejakic vous a rencontré là-bas, avez-vous par hasard remarqué si Mlado

12 Radic était présent à l'époque?

13 Réponse: Non, je ne m'en souviens pas.

14 Question: Vous avez dit que lorsque vous vous êtes présenté pour

15 travailler au sein de la deuxième équipe, cette nuit-là, Zeljko Mejakic

16 vous a dit où vous alliez être déployé en tant que garde, à quel poste de

17 garde. Et ensuite, vous avez dit que vous avez choisi où vous souhaitiez

18 être. Donc est-ce que c'est Zeljko Mejakic qui vous a déployé à vos postes

19 ou bien, est-ce que les gardes ont simplement décidé entre eux, en ce qui

20 concerne l'endroit où ils allaient monter la garde.

21 Réponse: Moi, j'ai dit que nous sommes retournés; nous sommes arrivés le

22 matin et puis ensuite nous sommes allés chez nous et nous sommes rentrés

23 dans l'après-midi pour l'équipe du soir. Et à ce moment-là, c'est Zeljko

24 Mejakic qui nous a rencontrés, et il nous a dit qu'il fallait que l'on

25 complète, que l'on se rende au poste de garde.

Page 11633

1 Question: Est-ce que c'est Zeljko Mejakic qui vous a dit et aux autres

2 gardes à quel endroit il fallait monter la garde?

3 Réponse: Non.

4 Question: Et dans ce cas-là, comment saviez-vous, comment vous et vos

5 collègues, vous saviez où vous rendre afin de monter la garde?

6 Réponse: Il y en a qui sont partis…, par exemple mon groupe et moi-même

7 nous sommes allés vers le hangar, et les autres, ils y sont restés.

8 Question: Et il s'agissait-là d'une décision spontanée, les gens se sont

9 promenés tout simplement aux endroits qu'ils préféraient?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Mladjo Radic a donné, a accordé un entretien au Bureau du

12 Procureur en 1999. Et lui aussi, il a parlé de son premier jour au camp

13 d'Omarska. Je crois qu'il s'agit là de la pièce à conviction du Procureur

14 3/215, pages 67 de la version en anglais et 69 en BCS.

15 L'on a posé la question à M. Radic concernant le premier soir qu'il a

16 passé au camp d'Omarska; et il a dit que c'est Zeljko Mejakic qui lui a

17 dit la chose suivante:

18 "Camarade Radic, vous allez travailler ici"; à un autre, il a dit: "Vous

19 allez être un peu plus loin par rapport au garage"; et à un troisième, il

20 a dit: "Vous, vous allez être à côté du réfectoire"; et puis à une autre

21 personne, il a dit: "Vous, vous allez être à côté de la maison blanche".

22 A la page 68 de la page en anglais: "il m'a dit, à moi: "Toi, tu restes

23 ici. Et à Mirko, il a dit: "Toi, tu restes ici" et encore à une autre

24 personne là-bas, etc.".

25 Dragoljub Prcac, lui aussi, il a alors accordé un entretien au Bureau du

Page 11634

1 Procureur. Il s'agit de la pièce à conviction 3/167. Et il décrit le

2 premier jour, c'est à la page 62 en anglais, et à la page 90 en BCS.

3 D'après Monsieur Prcac, Zeljko Mejakic lui a dit: "Drago, tu doit être

4 l'officier, le policier de permanence ici, à savoir tu seras dans un des

5 bureaux au premier étage du bâtiment administratif".

6 Est-ce que vous pouvez faire un commentaire là-dessus? Puisqu'il y a un

7 certain décalage entre la manière dont les gardes dont vous faisiez partie

8 ont reçu leur affectation et la manière dont les gardes tels que Mlado

9 Radic ont reçu leurs affectations et l'expérience de M. Prcac. Est-ce que

10 vous pouvez faire un commentaire par rapport à ce décalage?

11 Réponse: Eh bien, peut-être qu'ils ont reçu des instructions un peu plus

12 précises. C'est possible. Moi, tout ce que je sais, c'est que nous,

13 environ cinq ou six personnes, nous sommes allés vers le hangar.

14 Question: Vous avez fait un commentaire sur Zeljko Mejakic. Quelle était

15 la fonction de Zeljko Mejakic au camp?

16 Réponse: Moi, je connaissais Zeljko en tant que chef du département du

17 poste de police d'Omarska.

18 Question: Quelle était la fonction de Zeljko Mejakic dans le camp

19 d'Omarska, dites-le nous si vous le savez?

20 Réponse: Je ne le sais pas.

21 Question: Zeljko Mejakic, est-ce qu'il ne vous jamais donné des ordres ou

22 pas, pour autant que vous le sachiez?

23 Réponse: Pendant que l'on était au département du poste de police

24 d'Omarska, oui.

25 Question: Pendant que vous travailliez au camp d'Omarska en tant que garde

Page 11635

1 et pendant que Zeljko Mejakic travaillait là-bas lui aussi, est-ce qu'à

2 quelque moment que ce soit Zeljko Mejakic donnait des ordres?

3 Réponse: Pas à moi.

4 Question: Et aux autres personnes devant vous?

5 Réponse: Non, je n'en ai pas entendu; en ce qui concerne les autres je ne

6 sais pas.

7 Question: Vous avez dit qu'il n'y avait pas de discipline dans le camp

8 d'Omarska. Est-ce que vous vous souvenez approximativement combien de

9 personnes y étaient détenues?

10 Réponse: Vraiment, je ne le sais pas.

11 Question: Et s'il n'y avait pas de discipline au camp d'Omarska, comment

12 saviez-vous ce que vous deviez faire?

13 Réponse: C'était facile pour moi de savoir ce que je devais faire.

14 Question: Comment le savez-vous?

15 Réponse: Moi, je devais garder les détenus, leur permettre d'aller aux

16 toilettes, c'est ce qu'ils faisaient eux-mêmes lorsque j'arrivais, et de

17 les préparer à aller prendre leur déjeuner au moment de l'arrivée du

18 déjeuner.

19 Question: Très bien. Et vous suiviez cette procédure?

20 Réponse: Oui.

21 Question: Vous vous acquittiez de vos tâches, vous faisiez votre travail?

22 Réponse: Oui.

23 Question: Donc vous êtes d'accord avec moi pour dire que ce n'est pas

24 l'anarchie qui régnait dans le camp d'Omarska, il y avait une certaine

25 discipline?

Page 11636

1 Réponse: Eh bien, je ne pouvais pas faire en sorte que qui que ce soit

2 sorte de l'ordre afin de manger. Il fallait suivre un certain ordre.

3 Question: Dites-moi, s'il vous plaît, qui avait établi cet ordre?

4 Réponse: Je ne sais pas.

5 Question: C'était tombé du ciel pour autant que vous le sachiez?

6 Réponse: Non, je vais vous expliquer. Depuis le hangar, à l'étage, il y

7 avait un endroit où étaient les détenus et puis de l'autre côté aussi. Si

8 les uns étaient les premiers à prendre leur déjeuner aujourd'hui, ils

9 étaient les derniers le lendemain. Et vice-versa. C'est comme cela qu'on

10 savait comment les choses allaient se passer.

11 Question: Très bien. Et qui a établi ce système?

12 Réponse: Je ne sais pas.

13 Question: Comment saviez-vous à quel moment vous deviez venir au travail?

14 Réponse: Je connaissais les horaires des équipes.

15 Question: Mais qui a établi les horaires des équipes, et les équipes?

16 Réponse: Au début lorsque nous sommes venus, il y avait deux équipes, par

17 la suite, trois, mais je ne sais pas qui les avait établies.

18 Question: Et comment pouviez-vous respecter les horaires?

19 Réponse: Eh bien, lorsqu'il y avait deux équipes, j'allais chez moi pour

20 me reposer, et ensuite je reprenais le travail dans le cadre de mon

21 équipe.

22 M. Saxon (interprétation): Monsieur le Président, je n'ai plus de

23 questions à poser.

24 M. le Président: Merci? Monsieur Saxon. Et merci aussi d'avoir terminé

25 avant votre temps.

Page 11637

1 Maître Masic, avez-vous des questions supplémentaires?

2 Me Masic (interprétation): Non merci, Monsieur le Président.

3 M. le Président: Merci beaucoup. Du côté de Maître Nikolic? Je vois que

4 non.

5 Monsieur le Juge Riad s'il vous plaît?

6 (Questions au témoin DE1 par M. le Juge Riad.)

7 M. Riad (interprétation): Bonjour.

8 Témoin DE1 (interprétation): Bonjour.

9 Question: Vous m'entendez?

10 Réponse: Oui, je vous entends.

11 Question: Je n'ai qu'une question, peut-être deux.

12 Vous avez mentionné le fait que vous ne deviez pas soumettre des rapports

13 à qui que ce soit lorsque vous disiez qu'il n'y avait pas de discipline.

14 Est-ce que cela signifie que qui que ce soit pouvait tabasser des détenus

15 sans être tenu responsable par rapport à qui que ce soit, ou bien qu'on

16 pouvait harceler des femmes sans que ceci entraîne des conséquences?

17 Réponse: Pour autant que je le sache, non.

18 Question: Et dans ce cas-là les gens étaient responsables devant qui?

19 Réponse: De quoi?

20 Question: De ce que je viens de dire, par exemple si quelqu'un tabassait

21 un détenu ou harcelait une femme détenue, si l'on violait la loi dans le

22 camp ou bien s'il n'y avait aucune loi à respecter? C'est ce que je

23 souhaite savoir.

24 Réponse: Je n'ai pas dit ceci. Moi je ne sais pas, excusez-moi.

25 Je n'ai pas vu et je ne sais pas que qui que ce soit ait tabassé qui que

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1 ce soit d'autre, mais je ne sais pas devant qui cette personne aurait été

2 responsable.

3 Question: Vous n'avez jamais vu qui que ce soit subir un passage à tabac?

4 Réponse: Pas devant mes yeux pendant que j'étais au hangar.

5 Question: Avez-vous entendu parler de cela?

6 Réponse: Oui, j'en ai entendu parler.

7 Question: Et quand est-ce que ceci s'est passé? Au moment où ceci s'est

8 passé, est-ce que quoi que ce soit a été entrepris au sujet de cela?

9 Réponse: Pour autant que je le sache, non.

10 Question: Rien. Et si l'on parle du manque de discipline, vous avez dit

11 également que tout le monde pouvait choisir ce qu'il souhaitait faire et

12 si plusieurs personnes choisissaient la même chose, qui aurait résolu ce

13 problème si plusieurs personnes par exemple souhaitaient sortir du camp

14 afin d'assister à une fête ou bien si plusieurs personnes souhaitaient

15 faire la même chose, le même travail, le travail plus intéressant que

16 l'autre?

17 Réponse: Ecoutez, il n'y a jamais eu ce genre de problème.

18 Question: Merci beaucoup.

19 M. le Président: Merci beaucoup Monsieur le Juge Riad.

20 Madame la Juge Wald s'il vous plaît?

21 (Questions au témoin DE1 par Mme la Juge Wald.)

22 Mme Wald (interprétation): Ai-je bien compris si je dis que vous avez

23 déposé en disant que vous n'avez jamais été témoin des passages à tabac ni

24 du mauvais traitement infligé aux détenus, même si vous avez entendu

25 parler de ce genre de chose? Est-ce que c'est bien ce que vous avez dit?

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1 Témoin DE1 (interprétation): Oui.

2 Question: Avez-vous jamais vu dans le camp, des détenus qui portaient des

3 traces sur leur corps, des blessures, des ecchymoses, des traces des

4 passages à tabac?

5 Réponse: Oui.

6 Question: Oui. Donc vous nous avez dit également que si un garde devait

7 partir un peu plus tôt, les gardes se regroupaient et trouvaient une

8 solution pour être sûrs que l'on puisse faire face à la demande de

9 l'autre. Je crois que c'est ce que vous avez dit.

10 Réponse: Oui.

11 Question: Très bien. Voici ce qui m'intéresse. D'après votre déposition,

12 il n'y avait pas de hiérarchie parmi les gardes. Supposons qu'un garde

13 avait un ami ou un voisin ou un cousin parmi les détenus et que ce garde

14 souhaité que cette personne soit protégée, à un certain degré, est-ce que

15 parfois par exemple un garde disait à quelqu'un d'autre: "Laisse cette

16 personne tranquille", ou bien "N'embête pas cette personne", ce genre de

17 chose? Est-ce que c'est ce que les gardes se disaient entre eux pour qu'un

18 certain nombre de personnes puissent bénéficier d'une certaine protection

19 par rapport au mauvais traitements et au passages à tabac?

20 Réponse: Moi, je ne le sais pas.

21 Question: Vous n'avez pas eu une telle expérience pendant la période que

22 vous avez passée dans le camp?

23 Réponse: Moi j'ai été assis à l'étage, lorsqu'avant le déjeuner et après

24 le déjeuner ces Musulmans passaient. Ils étaient assis avec moi librement,

25 tout comme moi je suis assis ici, mais il s'agissait des personnes

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1 inconnues. Je ne les connaissais pas.

2 Question: Très bien. Nous avons entendu quelques dépositions ici indiquant

3 qu'une fois M. Prcac lui-même est intervenu afin d'arrêter le mauvais

4 traitement infligé à un prisonnier, et il a dit aux personnes qui le

5 faisaient: "Arrêtez, arrêtez de faire cela!" et il est même allé aussi

6 loin qu'il a sorti son pistolet et l'a pointé vers les gardes ce jour -là.

7 Voici mon expérience, est-ce que, d'après votre expérience, un garde

8 aurait dit à un autre garde à un moment: "Fais cela", ou "Ne fais pas

9 cela", ou bien si un garde a entrepris quelque chose afin d'empêcher un

10 autre garde de faire quelque chose qui pourrait être caractérisé comme du

11 mauvais traitement?

12 Réponse: Non.

13 Question: Est-ce que vous, dans votre esprit, à l'époque, vous aviez une

14 quelconque idée concernant ce que vous feriez si vous voyez quelqu'un

15 soumis aux mauvais traitements? Est-ce que vous aviez une idée de ce qui

16 serait votre obligation en tant que garde, si vous voyiez le mauvais

17 traitement d'un détenu, compte tenu de la formation que vous aviez reçue

18 auparavant? Quelle serait, d'après vous, l'obligation dans laquelle vous

19 seriez si vous voyiez le mauvais traitement infligé à un détenu?

20 Réponse: Mon obligation était de garder les détenus, de les amener aux

21 toilettes et de les amener au déjeuner.

22 Question: Très bien, mais lorsque vous dites: "Je devais garder les

23 prisonniers", est-ce que cela veut dire, pour vous, le fait de les

24 protéger, non pas seulement pour qu'ils ne s'échappent pas mais aussi de

25 les protéger par rapport aux passages tabac ou aux mauvais traitements

Page 11641

1 infligés par quelqu'un d'autre? Est-ce que, d'après vous, ceci faisait

2 partie aussi de votre fonction de garde?

3 Réponse: Mais aucun détenu n'a été tabassé devant moi à l'époque.

4 Question: Je comprends mais puisque vous étiez policier de réserve qui

5 gardait temporairement les détenus et puisque M. Mejakic vous avez dit que

6 votre fonction était de garder les prisonniers, je souhaitais savoir ce

7 que cette obligation signifiait à vos yeux. Est-ce que, selon vous, tout

8 simplement vous deviez les empêcher de fuir ou empêcher que qui que ce

9 soit vienne afin de les maltraiter?

10 Réponse: Il faudrait qu'il y ait 300 ou 3000 policiers pour pouvoir

11 assurer cela.

12 Question: Vous parlez de la deuxième partie de la phrase, c'est-à-dire

13 "que personne ne vienne les maltraiter", vous souhaitez dire qu'il y

14 aurait besoin de beaucoup plus de gardes pour cela?

15 Réponse: Oui.

16 M. le Président: Merci, Madame la Juge Wald

17 (Questions au témoin DE1 par M. le Président.)

18 M. le Président: J'aimerais bien revenir à cette question de votre tâche.

19 Je crois avoir entendu, M. Saxon a touché un peu cette question dans une

20 question qu'il a posée, mais vous avez dit dans votre interrogatoire

21 principal que votre tâche était de garder les détenus musulmans.

22 J'aimerais bien comprendre pourquoi garder les détenus musulmans?

23 Réponse: C'est comme cela que l'on disait à l'époque.

24 Question: Donc je crois que c'était Zeljko Mejakic qui vous a dit que vous

25 alliez là pour garder les détenus musulmans, j'ai bien compris, c'était

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1 Zeljko Mejakic qui vous avait dit cela?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Je vous pose la question d'une autre façon: y avait-il d'autres

4 détenus que des Musulmans, qui n'étaient pas Musulmans?

5 Réponse: Je pense que oui. Oui.

6 Question: Donc quelle était l'appartenance ethnique des autres?

7 Réponse: Je pense qu'il y avait un Serbe.

8 Question: Donc, aviez-vous une obligation de garder ce prisonnier serbe

9 aussi ou non?

10 Réponse: Non.

11 Question: Donc selon vous, vous étiez là seulement pour garder les détenus

12 musulmans? Les Serbes ou éventuellement des Croates, vous n'aviez pas

13 cette obligation, c'est cela que vous voulez nous dire?

14 Réponse: On ne s'est pas compris. Ces détenus étaient à l'extérieur de mon

15 poste de garde.

16 Question: Donc si j'ai bien compris aussi, vous gardiez ces détenus par

17 rapport à des, si je peux dire, périls qui venaient de l'extérieur du

18 centre, c'est cela?

19 Réponse: Je ne l'ai pas dit. J'ai dit simplement que je gardais les

20 détenus pour qu'ils ne fuient pas, que je devais les emmener prendre leur

21 déjeuner et aux toilettes.

22 Question: D'accord donc, mais dans une réponse -si j'ai bien compris- que

23 vous avez donnée à mon estimée collègue Mme la Juge Wald, vous avez

24 répondu que pour les protéger des périls internes, il faudrait avoir

25 beaucoup de gardes, je crois, "beaucoup plus de gardes". Donc, vous dites

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1 que vous n'étiez pas en condition de les protéger par exemple des

2 agressions entre eux ou des agressions faites par exemple par d'autres

3 gardes, oui ou non?

4 Réponse: Non.

5 Question: Monsieur le témoin que dites-vous par non? Je sais que j'ai mal

6 posé ma question mais si vous pouvez m'expliquer pourquoi vous dites non.

7 Réponse: Comme je l'ai dit tout à l'heure, aucun incident ne s'est produit

8 pendant que moi j'ai monté la garde.

9 Question: D'accord très bien. Vous avez répondu que vous avez vu des

10 prisonniers battus, avez-vous une idée de qui a battu ces prisonniers?

11 Vous n'avez pas vu, vous nous l'avez déjà dit, mais vous avez dit que vous

12 avez vu, avez-vous une idée de qui a battu les prisonniers?

13 Réponse: Oui j'ai vu mais je ne sais pas qui les a battus car je n'ai pas

14 vu cela.

15 Question: Avez-vous essayé de demander, de savoir qui a fait cela aux

16 prisonniers qui étaient sous votre garde?

17 Réponse: Non.

18 Question: Je vais poser une autre question. Témoin DE1, vous avez répondu

19 à une question, je crois de M. Saxon, "peut-être ils", et vous mentionnez

20 "MM. Radic et Prcac ont reçu des instructions plus précises à propos de la

21 distribution des postes de garde". Vous rappelez-vous avoir dit cela?

22 Réponse: Non, je n'ai pas dit cela.

23 Question: Avez-vous une idée de ce que vous avez dit à propos de cela?

24 Sinon je vais revenir en arrière.

25 Réponse: Non.

Page 11644

1 Question: Monsieur Saxon vous a dit que MM. Radic et Prcac ont dit que:

2 "Zeljko Mejakic avait distribué d'une certaine façon les postes de garde".

3 Vous avez dit ici que: "personne n'avait distribué, vous avez spontanément

4 avez choisi le poste de garde". Et à la suite, vous auriez dit, -je n'ai

5 pas ici maintenant le compte rendu mais vous avez dit que-: "peut-être ils

6 ont reçu des instructions plus précises". Vous ne vous rappelez pas avoir

7 dit cela?

8 Réponse: Je m'en souviens.

9 Question: Vous vous souvenez?

10 Réponse: Oui, oui maintenant je m'en souviens.

11 Question: Donc ma question est de savoir pourquoi pensez-vous

12 qu'éventuellement ils ont reçu des instructions plus précises? Pourquoi

13 ils pouvaient avoir reçu plus précisément des instructions?

14 Réponse: Monsieur le Juge, Zeljko Mejakic, lorsqu'ils sont venus afin de

15 travailler dans leur équipe, a dit: "Toi tu vas par là, toi tu vas par

16 là", etc., je ne sais pas ce qu'il souhaitait dire par là, je me souviens

17 très bien de cela.

18 Question: Oubliez l'autre partie, je voudrais seulement savoir comment

19 vous expliquez qu'il pouvait avoir reçu des instructions plus précises.

20 Vous n'avez pas une idée?

21 Réponse: Moi, je ne sais pas.

22 Question: Très bien. Rappelez-vous. Est-ce que vous vous souvenez du

23 premier jour que vous êtes arrivé au camp au centre d'enquête?

24 Réponse: Oui.

25 Question: Comment ont été distribués les postes de travail aux gardes,

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1 notamment à vous?

2 Réponse: Au début, j'ai dit que nous sommes venus le matin et que nous

3 avons été renvoyés chez nous. Et dès le matin, les postes de garde ont été

4 distribués. Mais nous étions dans l'équipe du soir, et on est allés au

5 hangar et entre-temps on était renvoyés à la maison pour se reposer.

6 Question: Qui a distribué les postes de garde?

7 Réponse: Dans l'équipe du matin?

8 Question: Dans votre équipe.

9 Réponse: Dès le matin, les postes de garde ont été créés et le soir,

10 lorsque nous sommes arrivés, nous avons simplement pris la relève.

11 Question: … (inaudible.)

12 Réponse: Je ne sais pas.

13 Question: D'accord, vous ne savez pas. Mais quand vous êtes arrivé le

14 soir, les postes étaient déjà distribués, c'est cela?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Vous occupiez un poste, quel était le poste?

17 Réponse: Au hangar.

18 Question: Avez-vous eu toujours ce même poste ou avez-vous changé?

19 Réponse: A l'intérieur du hangar, il y avait trois ou quatre postes de

20 garde, et on faisait le tour.

21 Question: Combien de jours avez-vous travaillé au centre, notamment à ce

22 poste?

23 Réponse: Presque jusqu'à la fin.

24 M. le Président: D'accord.

25 Témoin DE1, nous n'avons pas d'autres questions à vous poser. Vous avez

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1 répondu aux questions de la défense, de l'accusation, des Juges. Nous vous

2 remercions beaucoup d'avoir coopéré avec nous, et nous vous souhaitons un

3 bon retour à votre endroit de résidence et de travail.

4 Témoin DE1 (interprétation): Merci à vous.

5 (L'huissier rabaisse les rideaux pour faire sortir le témoin.)

6 (Le témoin DE1 est reconduit hors du prétoire.)

7 (Questions relatives à la procédure.)

8 M. le Président: Oui, Monsieur Saxon?

9 M. Saxon (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

10 En ce moment, le Procureur souhaite verser au dossier la pièce à

11 conviction 3/289, qui contient en fait trois pages en anglais. Il s'agit

12 de la déclaration solennelle qui a été montrée au dernier témoin, une

13 copie de l'original en BCS, et la déclaration de M. Inayat, l'enquêteur du

14 Bureau du Procureur qui explique de quelle manière le Procureur a obtenu

15 ce document.

16 M. le Président: Maître Masic?

17 M. Masic (interprétation): La défense ne s'oppose pas à ce que cette pièce

18 soit versée au dossier.

19 M. le Président: Très bien, Maître Masic. La pièce du Procureur est donc

20 mentionnée et versée au dossier.

21 Donc maintenant, Maître Jovan Simic, s'il vous plaît?

22 M. J. Simic (interprétation): Monsieur le Président, je dois m'excuser

23 tout de suite.

24 Nous avons planifié que ces deux témoins déposent jusqu'à la pause

25 déjeuner. Nous avons procédé un peu plus rapidement que prévu, donc le

Page 11647

1 témoin suivant viendra d'ici une demi-heure.

2 Vous avez pu voir peut-être que notre collègue était sorti, il a essayé de

3 contacter le service en charge mais il y a apparemment un problème

4 puisqu'il n'a pas réussi à les contacter. De toutes façons, le témoin doit

5 être ici d'ici 30 à 40 minutes. Si cela pose problème, nous pouvons

6 procéder à une pause déjeuner maintenant et, dans l'après-midi, nous

7 allons terminer avec les témoins prévus.

8 Excusez-moi d'avoir changé d'ordre, mais nous avons prévu de procéder

9 moins rapidement.

10 M. le Président: Les témoins qui sont prévus maintenant sont: Slavko

11 Djukanovic et Milo Jankovic, c'est cela?

12 M. J. Simic (interprétation): Non.

13 M. le Président: Je continue à ne pas avoir le bon papier, je crois. Il a

14 un papier qui est différent. Je crois que je commence à être jaloux de Mme

15 Somers parce qu'elle a toujours les bons papiers, et moi non.

16 M. J. Simic (interprétation): Peut-être que vous pouvez être jaloux de

17 Madame Thompson aussi, parce qu'elle l'a elle aussi. Je vais vous remettre

18 ça pendant la pause. Je vous le promets.

19 M. le Président: Pas de problème. D'accord. De toutes façons, nous avons

20 Slavko Djukanovic et… Quel est l'autre témoin, Maître Jovan Simic?

21 M. J. Simic (interprétation): Slobodan Gajic.

22 M. le Président: Je pensais que c'était le premier aujourd'hui. Donc

23 d'accord. Très bien.

24 Oui, je crois que nous allons profiter du temps. Et une façon d'en

25 profiter, c'est de faire une pause quand on ne peut pas travailler. Quand

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1 on devait faire la pause, on travaille.

2 Et donc voilà, peut-être que vos déjeuners ne sont pas prêts, mais vous

3 pouvez quand même augmenter un peu votre appétit en attendant un peu.

4 Nous allons faire une pause de 50 minutes maintenant.

5 (L'audience, suspendue à 12 heures 3 est reprise à 13 heures 02.)

6 (Audience publique.)

7 (Les accusés sont introduits dans le prétoire.)

8 M. le Président: Veuillez vous asseoir s'il vous plaît.

9 (Le témoin, M. Slavko Djukanovic, est introduit dans le prétoire.)

10 M. le Président: Bonjour témoin, m'entendez-vous bien?

11 M. Djukanovic (interprétation): Oui je vous entends.

12 M. le Président: Veuillez lire la déclaration solennelle que M. l'huissier

13 va vous tendre s'il vous plaît.

14 M. Djukanovic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

15 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

16 M. le Président: Vous pouvez vous asseoir s'il vous plaît.

17 Merci beaucoup d'être venu. Pour l'instant, vous allez répondre aux

18 questions que Me Jovan Simic va vous poser, et après nous verrons.

19 Donc Maître Jovan Simic, vous avez la parole.

20 (Interrogatoire principal du témoin, M. Slavko Djukanovic, par Me Jovan

21 Simic.)

22 M. J. Simic (interprétation): Bonjour. Pour les besoins du compte rendu

23 d'audience, je vous prie de décliner vos nom et prénom.

24 M. Djukanovic (interprétation): Je m'appelle Slavko Djukanovic.

25 Question: Quand êtes-vous né et où?

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1 Réponse: Le 3 décembre 1949 à Bosanska Gradiska.

2 Question: Etes-vous marié?

3 Réponse: Oui.

4 Question: Avez-vous des enfants?

5 Réponse: Trois enfants, deux fils et une fille.

6 Question: Où résidez-vous actuellement?

7 Réponse: Je réside actuellement au Monténégro dans une maison familiale à

8 Herceg Novi.

9 Question: Monsieur Djukanovic, en avril/mai, juste avant le début des

10 conflits armés, avez-vous été mobilisé? Et si oui, dites-nous où?

11 Réponse: Oui j'ai été mobilisé dans le cadre de la mobilisation générale

12 qui avait été décrétée à cette période-là, et j'ai dû faire partie des

13 unités de la défense territoriale. Je séjournais pendant ce temps-là à

14 l'aéroport Urije, et je faisais partie d'une unité qui était chargée

15 d'assurer la sécurité de certains moyens techniques.

16 Question: Pendant toute la période des conflits, est-ce que vous êtes

17 resté là avec cette affectation?

18 Réponse: Mon affectation militaire a évolué. Ce qui fait que j'ai dû

19 quitter cette unité pour passer au centre de presse militaire en raison

20 des moyens techniques dont je disposais pour exercer des tâches de

21 photographe ou de caméraman.

22 Question: Quand est-ce que vous êtes passé travailler au centre militaire?

23 Réponse: Ce centre de presse militaire a été institué au mois de mai -je

24 ne me souviens pas de la date exacte- de l'année 1992.

25 Question: Cela faisait-il partie de quelque organisation militaire ou

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1 autre?

2 Réponse: Ce centre de presse militaire a été créé dans le cadre du

3 commandement de la 43e Brigade motorisée de la région, et c'est ce type de

4 personnel qui a été notamment dirigé vers cette unité.

5 Question: Pouvez-vous me dire de quelle façon ce centre de presse avait

6 fonctionné, sous quel commandement il avait été placé et quelles avaient

7 été ses missions?

8 Réponse: Ce centre de presse, après sa formation dans le cadre de la 43e

9 Brigade, se trouvait sous le commandement de la 43e brigade. Il se

10 constituait de quelques personnes, nous étions trois ou quatre au début et

11 ensuite nous avons reçu encore deux hommes, et nous avons travaillé pour

12 les besoins des militaires avec l'accord du commandement militaire.

13 Question: Quelles avaient été vos tâches concrètes dans ce centre de

14 presse militaire?

15 Réponse: Eh bien, en ma qualité de caméraman, étant donné que les

16 événements abondaient dans cette période, il s'agissait quotidiennement de

17 prendre le matériel technique et d'aller effectuer des tâches de travail,

18 comme nous les appelions, qui étaient quotidiennes.

19 Les collègues journalistes avaient donc reçu des tâches de la part du

20 commandement militaire et, après nous être concertés sur les tâches à

21 accomplir tel jour, nous prenions nos équipements, notre matériel et nous

22 partions sur le terrain.

23 Question: Donc vous ne déterminiez pas le contenu de vos reportages ni les

24 sites de ces reportages?

25 Réponse: Non pas moi, en aucun cas.

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1 Question: Est-ce que vous pouviez de façon autonome faire des reportages

2 ou filmer des sites?

3 Réponse: Non, sur ma propre initiative non.

4 Question: Ce centre de presse militaire avait-il fonctionné de façon à

5 permettre des déplacements individuels des membres de ce centre ou alors

6 partiez-vous en équipe?

7 Réponse: Eh bien, une équipe comportait un chauffeur, un journaliste et un

8 caméraman. Je crois que ce chauffeur, pendant un certain temps, était un

9 soldat actif et, par la suite, c'est soit le journaliste qui conduisait

10 soit l'un d'entre nous; et il y avait donc, en général, par la suite, un

11 journaliste, le caméraman et le terrain.

12 Question: Est-ce que vous connaissez M. Dragoljub Prcac?

13 Réponse: Non.

14 Question: Est-ce que vous êtes allé au centre d'instruction, à quelque

15 reprise que ce soit, à Omarska?

16 Réponse: Oui.

17 Question: Pouvez-vous nous dire quand et à combien de reprises?

18 Réponse: Je ne connais pas les dates exactes. Je sais que j'y suis allé au

19 mois de mai, tout de suite après la mise en place de ce centre de presse,

20 et je crois peu de temps après la mise en place de ce centre que nous

21 appelions "centre de rassemblement d'Omarska".

22 Question: Quelle était la mission qu'on vous avait assignée lorsque vous

23 êtes parti à Omarska?

24 Réponse: Je suis allé au centre d'enquête d'Omarska avec, pour mission, de

25 filmer certains documents qui nous avaient été présentés à Omarska. Il

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1 s'agissait notamment de paperasserie.

2 Question: Excusez-moi, pouvez-vous me dire combien de fois vous êtes allé

3 au centre d'instruction?

4 Réponse: J'y suis allé deux fois.

5 Question: Pouvez-vous nous dire à quel site, au niveau de ce centre

6 d'instruction, vous avez pris des vues de ces documents?

7 Réponse: Il s'agissait d'un grand bâtiment à Omarska. A l'étage, il y

8 avait une grande pièce et c'est dans cette pièce que l'on a mis à ma

9 disposition ces papiers-là, et nous les avons filmés à deux reprises.

10 Question: Vous avez dit que vous étiez en possession d'un équipement qui

11 vous appartenait à vous-même, si j'ai bien compris?

12 Réponse: Oui.

13 Question: L'équipement en question se trouvait-il chez vous ou alors se

14 trouvait-il ailleurs?

15 Réponse: Dans le cadre de l'acte de mobilisation, les équipements m'ont

16 suivi au centre de presse, donc tous les moyens techniques: la caméra

17 vidéo et deux appareils photo étaient gardés par mes soins, et sur place,

18 parce que j'y passais 80/90% de mon temps. Lorsque nous allions sur le

19 terrain, je prenais cet équipement, puis on le ramenait au retour et ainsi

20 de suite.

21 M. J. Simic (interprétation): Voilà. Merci, Monsieur le Président. Pour le

22 moment nous n'avons plus de questions.

23 M. le Président: Est-ce que d'autres conseils veulent poser des questions?

24 Je vois des signes négatifs.

25 Donc Madame Somers, c'est à vous pour le contre-interrogatoire s'il vous

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1 plaît.

2 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Slavko Djukanovic, par Mme Somers.)

3 Mme Somers (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

4 Monsieur Djukanovic, vous vous êtes présenté comme étant Slavko

5 Djukanovic, est-ce que vous utilisez également le prénom de Slavica?

6 M. Djukanovic (interprétation): Parfois, par erreur, on utilise dans

7 certains documents le nom de Slavica, mais généralement on fait référence

8 à moi en utilisant le nom de Slavko Djukanovic.

9 Question: Monsieur Prcac ou plutôt son conseil de la défense nous a remis

10 un document officiel, et ils ont parlé de vous en utilisant le prénom de

11 Slavica, est-ce le prénom que vous utilisez?

12 Réponse: Non je ne crois pas.

13 Question: Mais vous reconnaissez que ce prénom est parfois utilisé pour

14 vous désigner, même si c'est une erreur? Vous y répondez autant qu'au

15 prénom de Slavko, c'est cela, n'est-ce pas?

16 Réponse: Oui. J'ai dit qu'avant donc il y avait parfois des erreurs, mais

17 il y a très longtemps, avant la guerre. Parfois dans la ville, les gens

18 m'appelaient Slavko, parfois Slavica.

19 Question: La personne à qui le conseil de la défense a fait référence en

20 donnant le nom de Slavica Djukanovic, c'est vous-même Slavko Djukanovic?

21 Je souhaite préciser cela afin qu'il n'y ait aucun confusion.

22 Réponse: Oui, je pense que c'est cela effectivement.

23 Question: Je vous remercie de m'avoir donné cette précision.

24 Quand avez-vous commencé à filmer, soit dans le cadre d'une mission

25 militaire, soit pour les représentants officiels de la Republika Srpska?

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1 Je parle de la période de guerre.

2 Réponse: J'ai commencé à travailler pour le service de presse militaire au

3 début de sa mise en place, dès le jour de sa mise en place, c'est-à-dire à

4 partir du mois de mai 1992.

5 Question: Et quel jour en mai, s'il vous plaît?

6 Réponse: Je ne pense pas que je sois en mesure de vous donner la date

7 exacte, mais je crois que c'était à peu près à la mi-mai que le centre de

8 presse a été mis sur pied. Je suis donc sûr que j'ai commencé à travailler

9 le premier jour de la mise en place de ce centre.

10 Question: Comment définissez-vous votre activité? Etes-vous simplement un

11 cameraman, êtes-vous un journaliste, êtes-vous un journaliste de presse?

12 Réponse: Jusqu'à la guerre, je travaillais comme journaliste, comme

13 reporter photographique, et puis dans le cadre du centre de presse

14 militaire, j'ai travaillé comme cameraman.

15 Question: Avant la guerre, vous nous avez donc dit que vous travailliez

16 comme photographe, comme reporter photographe, avec qui travailliez-vous,

17 pour qui travailliez-vous?

18 Réponse: Avant la guerre, à Prijedor, il y avait un journal local et je

19 travaillais pour ce journal, c'est le journal qui s'appelle Kozarski

20 Vjesnik, et c'est là que je travaillais avant la guerre.

21 Question: Est-ce que, à aucun moment après le conflit, vous avez continué

22 à travailler pour Kozarski Vjesnik après la prise de contrôle du 30 avril

23 1992?

24 Réponse: Parfois mes obligations, du fait de mes horaires, se recoupaient.

25 Il m'est donc arrivé de travailler pour Kozarski Vjesnik à certains

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1 moments à leur demande, de faire quelques photographies.

2 Question: Après la prise de contrôle par les Serbes du 30 avril, vous avez

3 parfois continué à le faire?

4 Réponse: Oui.

5 Question: J'aurai certaines questions à vous poser au sujet de vos

6 collègues: avec qui, combien de personnes, avez-vous travaillé au centre

7 de presse si vous le savez? Parce que je m'intéressais plus

8 particulièrement à un certain nombre de personnes, Rade Mutic et Zivko

9 Ecim.

10 Réponse: Oui.

11 Question: Est-ce que vous avez travaillé avec Milenko Rajlic pour lui?

12 Est-ce que vous avez travaillé pour lui ou avec lui?

13 Réponse: Je ne sais pas quelle était la nature de ses fonctions mais je le

14 connais personnellement. Je sais qu'il travaillait dans le domaine du

15 journalisme mais je n'avais pas de contact direct, d'ailleurs je n'ai

16 jamais travaillé avec lui.

17 Question: Quand vous êtes allé à Omarska, est-ce que vous aviez un

18 document, une sorte de laissez-passer qui vous permettait d'entrer?

19 Réponse: Nous avions des laissez-passer qui étaient délivrés par le centre

20 de presse militaire, et on les utilisait chaque fois qu'on allait sur le

21 terrain, et puis quand il s'agissait de nous identifier, quand on allait

22 faire un travail. Parce qu'il y avait beaucoup de gens qui ne nous

23 connaissaient pas sur le territoire de la Republika Srpska, donc parfois

24 il était nécessaire pour nous que nous nous fassions connaître et que nous

25 prouvions notre identité.

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1 Question: Etes-vous allé à Omarska avec Rade Mutic et/ou Zivko Ecim?

2 Réponse: Oui avec les deux.

3 Question: Et afin d'entrer à Omarska, vous trois étiez tenus, obligés de

4 détenir une sorte de laissez-passer, c'est exact?

5 Réponse: Oui, il le fallait. Mais on n'y est jamais allés les trois. Je

6 suis allé une fois avec Zivko, une fois avec Rade, mais on n'y est jamais

7 allés les trois ensemble.

8 Question: Est-ce qu'il y a un autre Slavisa qui travaillait au centre de

9 presse militaire, à votre connaissance, et qui soit allé à Omarska?

10 Réponse: Non.

11 Question: Est-ce que vous aviez un numéro d'identification pendant le

12 conflit qui aurait pu figurer sur certains documents?

13 Réponse: Eh bien, j'avais ma carte d'identité régulière qui m'avait été

14 délivrée avant la guerre. C'était un document officiel. J'en disposais

15 encore à ce moment-là pendant la guerre, mais cela n'avait absolument rien

16 à voir avec mes activités au centre de presse militaire et avec des

17 documents d'identification dans le cadre de mon activité professionnelle.

18 Question: Est-ce que vous avez conservé des photocopies des documents qui

19 vous permettaient d'entrer au camp d'Omarska? Et si c'est le cas, est-ce

20 que vous les avez examinés récemment?

21 Réponse: Non.

22 Question: En ce qui concerne le camp de Keraterm, est-ce que vous y êtes

23 déjà allé?

24 Réponse: Oui. Oui, une fois j'ai été détenu à Keraterm.

25 Question: Est-ce que vous êtes allé à Keraterm, au camp de Keraterm, en

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1 tant que photographe, en tant que reporter-photographe, en tant que

2 cameraman?

3 Réponse: Non. Non, j'y suis allé en tant que détenu, en tant que personne

4 détenue à cet endroit.

5 Question: Donc un témoin qui a dit que le 25 juillet vous photographiiez

6 des corps à Keraterm, ce témoin donc se tromperait?

7 Réponse: A Keraterm?

8 Question: Oui.

9 Réponse: Tout à fait.

10 Question: Je vais demander à l'huissier de m'aider pour distribuer les

11 pièces à conviction de l'accusation 3/290 et 3/291.

12 (L'huissier s'exécute.)

13 Monsieur Djukanovic, je vais d'abord vous demander d'examiner la pièce à

14 conviction de l'accusation 3/290. C'est un document qui vient de

15 l'ensemble des documents de Prijedor, et il s'agit d'une demande faite au

16 poste de sécurité publique, et, en personne, au chef de ce poste.

17 C'est un document qui est daté du 29 juin 1992. Il s'agit du fait que des

18 permis de travail ont été délivrés aux reporters suivants, avec Rajic

19 Milenko, Mutic Rade, et Ecim et Slavka Djukalic.

20 Est-ce qu'en fait il s'agit plutôt de Djukanovic? Est-ce que c'est une

21 faute de frappe?

22 Réponse: Je pense que oui.

23 Question: Ce document est signé par Milenko qui est secrétaire du

24 secrétariat à l'information, et ceci, ce document vient du secrétariat à

25 l'information de la région autonome de la Krajina.

Page 11658

1 Les termes de ministère de l'Information ou secrétaire de l'Information ou

2 plutôt ces instances sont souvent utilisées dans le cadre de campagne de

3 propagande, sans que cela ait une connotation négative, mais il s'agit de

4 travailler à la promotion d'une cause donnée. C'est bien exact, n'est-ce

5 pas?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Est-ce que vous étiez tenu d'obtenir toutes les autorisations de

8 vous déplacer par le biais du secrétariat de l'Information ou du ministère

9 de l'Information qui s'occupait également de la propagande, pour utiliser

10 ce terme au sens le plus général?

11 Réponse: Je ne suis pas très sûr d'avoir bien compris votre question. Nous

12 avions des laissez-passer qui nous permettaient d'aller sur le terrain

13 quand il fallait travailler.

14 Question: Oui mais il semble qu'ici, en ce qui concerne le camp d'Omarska,

15 vous aviez besoin d'un laissez-passer spécial, d'un permis pour aller

16 travailler à Omarska. Donc chaque fois que c'était le cas, chaque fois que

17 vous deviez obtenir un permis relatif à un camp, vous étiez donc censé en

18 faire la demande auprès du ministère de l'Information?

19 M. J. Simic (interprétation) Mon éminente consœur essaie de pousser le

20 témoin à se lancer dans des spéculations. Je pense qu'il faut qu'elle lui

21 pose des questions très claires, à savoir s'il connaît ou s'il sait ou

22 s'il ne sait pas, mais ne pas lui demander la signification de quelque

23 chose.

24 Mme Somers (interprétation): Je vais reformuler ma question.

25 Pour aller à Omarska, pour entrer à Omarska, est-ce que vous aviez besoin

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1 d'un permis particulier ou bien est-ce que vos papiers militaires ou votre

2 laissez-passer militaire était suffisant? Est-ce que cette question est

3 suffisamment claire?

4 M. Djukanovic (interprétation): Oui, je comprends bien votre question

5 maintenant. Je vous ai déjà dit que, quand je suis allé à Omarska, je n'ai

6 utilisé que mon laissez-passer militaire.

7 Question: J'ai deux ou trois questions à vous poser au sujet de la pièce à

8 conviction 3/291. Il s'agit d'un document où figure non pas votre

9 signature mais votre nom, photographie réalisée en mai et juin 1992.

10 Réponse: Oui, c'est ma signature, c'est cela.

11 Question: On a indiqué ici la nature des diverses photographies, nous ne

12 disposons pas des photographies ici mais nous avons la description. Par

13 exemple n°11, "map" confisquée du plan de défense de Kozarac; n°6, partie

14 d'une Chambre avec renfort; n°14, n°16, une partie d'une carte d'identité

15 qui a été confisquée etc.

16 Je voudrais savoir s'il y a une organisation précise ou une institution

17 précise qui vous a envoyé photographier ces documents?

18 M. Djukanovic (interprétation): Non, d'abord pour que les choses soient

19 bien claires, il s'agit bien ici de mon écriture et de ma signature. Je

20 suis désolé, je n'ai pas mes lunettes là mais je sais très bien à quelle

21 photographie vous faites référence.

22 Cela faisait partie de la tâche qui m'avait été assignée ce jour-là, je ne

23 me souviens pas de tous les détails concernant les laissez-passer, les

24 cartes d'identité etc. Ces documents avaient été trouvés suite à l'attaque

25 sur Kozarac et j'ai pris des photographies de ces éléments. Certaines ont

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1 sans doute paru dans Kozarski Vjesnik et d'autres sont restées au centre

2 de presse militaire mais, comme je l'ai dit, tout ceci faisait partie de

3 mon obligation de travail et de la mission qui m'était confiée.

4 M. le Président: Puis-je vous rappeler que votre temps est écoulé?

5 Mme Somers (interprétation): Est-ce que vous me permettrez de finir cette

6 série de questions?

7 Oui j'en suis bien consciente, merci beaucoup.

8 Qui vous a envoyé remplir cette mission précise?

9 M. Djukanovic (interprétation): A quelle mission précise faites-vous

10 référence, à cette liste ici?

11 Question: Oui.

12 Réponse: Eh bien, je crois qu'en ce qui concerne cette liste précise cela

13 ne s'est pas fait en un seul jour et en une fois.

14 Est-ce que vous pouvez me lire les deux ou trois premières lignes car je

15 n'ai pas mes lunettes et je n'arrive pas à lire.

16 Question: "Arme n°2, une cache avec des armes et des documents", etc.

17 Réponse: Ah oui, ça y est je me souviens. J'ai fait ceci avec Rade Mutic,

18 c'est une tâche qui nous a été donnée immédiatement après l'attaque sur

19 Kozarac. J'ai inspecté la zone et j'ai fait des photographies, j'ai moi-

20 même vu cette zone, cette région. J'ai réalisé les photographies de ces

21 éléments, et j'ai vu cette cache que l'on mentionne ici.

22 Pourquoi cette liste a été établie? Je n'en sais rien, sans doute pour les

23 dossiers militaires.

24 Question: Une dernière question et ensuite j'en aurais terminé. Un certain

25 (expurgé), je crois que vous le connaissez, a dit qu'il y avait un

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1 certain nombre de corps qui ont été filmés à Omarska du côté de la maison

2 rouge sans doute, en tout cas un certain nombre de corps ont été filmés.

3 M.J.Simic (interprétation): Monsieur le Président je crois que M.(expurgé)

4 (expurgé) ne l'a pas dit,ou du moins je ne me souviens pas qu'il ait dit une

5 chose pareille. Il serait peut-être préférable de prendre la partie du

6 compte rendu d'audience et de voir ce qu'il a dit au juste, alors

7 qu'essayer de nous souvenir et de dire de l'à peu près, c'est dangereux.

8 Donc je crois qu'il n'a pas dit cela. Je crois qu'il avait dit qu'il lui

9 avait semblé que quelqu'un était en train de prendre des photographies

10 mais il faut mieux se référer au compte rendu d'audience plutôt que de

11 faire des suppositions.

12 M. le Président: D'accord.

13 Mme Somers (interprétation): Je ne suis pas en train de citer quoi que ce

14 soit qui soit extrait du compte rendu d'audience. Je rappelle, je pose une

15 question au sujet de (expurgé).

16 M. J. Simic (interprétation): Monsieur le Président, la défense ne

17 s'oppose pas à la question concernant (expurgé). Nous nous opposons au

18 fait de se référer de façon vague à ce qu'il a dit. J'affirme moi qu'il

19 n'a pas dit cela en ces termes-là. Maintenant l'accusation peut lui poser

20 la question de savoir s'il connaissait untel mais je ne pense pas que

21 l'intéressé ait déclaré, ait fait ce type de déclaration.

22 M. le Président: Prenez compte de cela Madame Somers et posez la question.

23 Mme Somers (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

24 Des documents,dont dispose le Bureau du Procureur, indiquent que (expurgé)

25 (expurgé) a dit que vous-même et Drago Prcac à Omarska avez réalisé des

Page 11662

1 enregistrements vidéos, enfin que vous en compagnie de Drago Prcac avez

2 réalisé des enregistrements vidéos de cadavres de civils musulmans, et que

3 ces photographies sans qu'on indique l'origine ethnique des personnes

4 concernées ont été utilisées par la propagande serbe indiquant qu'il

5 s'agissait des cadavres de Serbes.

6 M. J. Simic (interprétation): Monsieur le Président, maintenant je suis

7 tout à fait certain, (expurgé) n'a jamais dit cela, le document dont

8 est en train de parler mon éminente collègue.

9 M. le Président: Peut-être pouvez-vous formuler la question au contraire:

10 "N'êtes-vous jamais allé pour cet objectif, pour notamment filmer des

11 cadavres et si oui" vous continuez, "pourquoi faut-il mettre là (expurgé)

12 (expurgé) et surtout qu'il a dit… qu'il a dit… qu'il a dit…"?

13 Posez la question directement de façon claire, concrète et concise.

14 M. J. Simic (interprétation): Excusez-moi Monsieur le Président, je vous

15 demanderai de me permette seulement de finir ma phrase étant donné que

16 cela figure déjà au compte rendu d'audience.

17 (expurgé) n'a jamais mentionné cela devant cette Chambre. Nous avons le

18 document et la Chambre ne l'a pas. Il a mentionné cela dans sa déposition

19 écrite et cela n'a jamais été mentionné ici. Nous sommes en train donc de

20 nous servir d'un document dont est au courant l'accusation et personne

21 d'autre, donc il n'y a aucune raison de le mentionner. Cela n'a jamais

22 figuré au compte rendu d'audience de ce procès.

23 M. le Président: Madame Somers, nous allons entrer dans une autre

24 discussion. Est-ce que vous avez une réponse pour cette question?

25 Ou vous citez ce que la personne a dit et vous posez la question, ou je

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1 crois donc que vous posez la question comme je vous l'ai déjà suggéré,

2 sinon nous allons entrer ici dans une discussion notamment sur un document

3 que la Chambre ne connaît pas.

4 Tenez compte de cela Madame Somers et posez la question comme je vous ai

5 dit.

6 Mme Somers (interprétation): Bien entendu. Merci Monsieur le Président. Il

7 s'agit de la crédibilité du témoin ici. Je ne suis pas en train de lire un

8 extrait du compte rendu d'audience, je le précise. Est-ce vous connaissez-

9 le photographe journaliste (expurgé)? Quelqu'un avec qui vous avez

10 peut-être réalisé des photographies précédemment?

11 Réponse: Je connais personnellement (expurgé), cela date de la période

12 du début de la guerre.

13 Question: Pendant la période de temps où le camp d'Omarska a fonctionné,

14 disons à partir de la mi-juillet 1992 et jusqu'à la fin de ce mois, est-ce

15 que vous avez été à Omarska, est-ce que vous avez filmé quoi que ce soit?

16 Réponse: Personnellement, je n'ai pas amené la caméra vidéo au camp

17 d'Omarska, je ne l'ai jamais emmenée avec moi.

18 Question: Est-ce qu'il y a eu un enregistrement qui a été réalisé, que ce

19 soit vous qui ayez amené la caméra ou pas? Etiez-vous présent pendant que

20 cet enregistrement vidéo a été réalisé à Omarska?

21 Réponse: Je ne peux parler que pour ce qui me concerne personnellement. Et

22 de la période…, les deux fois où je suis allé à Omarska, donc je veux dire

23 que pour les deux fois où je suis allé à Omarska, je n'ai pas pris ma

24 caméra vidéo. D'ailleurs, je n'ai vu personne filmer avec une caméra vidéo

25 en ma présence. Donc ma réponse est non.

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1 Question: Alors, qu'est-ce que vous êtes allé faire à Omarska ces deux

2 fois-là parce qu'apparemment vous aviez un permis pour y aller?

3 Réponse: Eh bien, ces deux fois-là, j'ai filmé les documents écrits:

4 certificats, documents de toute sorte. Par exemple, il y avait des gens

5 qui faisaient des dons en numéraire au SDA, et donc c'étaient des

6 certificats stipulant que telle ou telle personne avait donné telle somme

7 à telle ou telle organisation. Donc moi, je prenais des photocopies de

8 documents, de certificats, de document de ce type.

9 Question: Vous nous dites que vous n'aviez pas de caméra vidéo, mais est-

10 ce que vous aviez un appareil photographique classique quand vous y

11 alliez?

12 Réponse: Oui, bien entendu, les deux fois, j'ai pris mon appareil

13 photographie.

14 Question: Et avec cet appareil photographique, est-ce que vous avez

15 réalisé des photographies de corps, de cadavres?

16 Réponse: Non, non.

17 Mme Somers (interprétation): Donc ce que j'ai dit précédemment,

18 l'allégation que j'ai présentée au sujet de l'utilisation de photographies

19 prises pendant votre visite et le fait de faire passer ces photographies

20 pour les cadavres de Serbes décédés, est-ce que c'est quelque chose dont

21 vous avez eu connaissance?

22 M. J. Simic (interprétation): Je me sens mal à l'aise. Mais à quoi cela

23 nous mène.

24 Maintenant, d'où sortent des cadavres que vous auriez pris en

25 photographies qui ont été utilisées aux fins de la propagande serbe? Je

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1 m'étonne qu'elle n'ait pas utilisé les termes de "grands Serbes". D'où

2 cela vient-il?

3 Vous venez de prévenir, d'avertir mon éminente collègue, et elle

4 recommence! Alors, moi j'ai raccourci mon interrogatoire pour respecter

5 les cadences imparties, et j'ai l'impression que j'ai raccourci au profit

6 du Procureur. Alors!

7 M. le Président: Quand même, d'une certaine façon nous sommes ici pour

8 contribuer à la paix, c'est un des objectifs du Tribunal. Je crois qu'il y

9 a quelques expressions qui, souvent, utilisées d'une certaine façon

10 peuvent être dommageables pour cet objectif. Première observation.

11 Deuxième observation. Madame Somers, je vous ai donné un peu de temps.

12 Mais je vous dis que vous avez abusé, parce que vous aviez déjà pris plus

13 de 12 minutes. Donc, quand est-ce que vous allez terminer? Quand allez-

14 vous terminer?

15 Mme Somers (interprétation): Si je peux obtenir une réponse à cette

16 question, ce sera ma dernière question. Je pense que c'est une question

17 qui se justifie.

18 M. le Président: Mais pas comme vous l'aviez formulée, s'il vous plaît.

19 Reformulez la question et ce sera la dernière question.

20 Mme Somers (interprétation): Si vous estimez que c'est le terme de

21 "propagande", bien que ce que soit le terme qui soit utilisé couramment

22 dans le domaine militaire, je vais éviter d'utiliser ce terme, et je vais

23 parler des objectifs militaires serbes.

24 Je vais donc répéter la question puisque vous avez peut-être oublié de

25 quoi il s'agit, Monsieur le Témoin. Donc la question est la suivante: est-

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1 ce que vous avez connaissance du fait que des photographies de civils

2 musulmans morts auraient été utilisées dans le cadre d'objectifs

3 militaires serbes pendant cette période, oui ou non?

4 M. le Président: Monsieur Jovan Simic?

5 M. J. Simic (interprétation): Monsieur le Président, je voudrais que la

6 question soit posée de façon précise. Quelle photographie? Est-ce qu'il

7 s'agit d'une photographie que M. Djukanovic a prise ou d'une photographie

8 qui n'est pas identifiée. Est-ce que l'on peut demander s'il y a des

9 cadavres filmés ou pas?

10 M. le Président: Nous n'allons pas nous en sortir. Est-ce que vous pouvez

11 poser cette question dans vos questions supplémentaires?

12 M. J. Simic (interprétation): Oui, je peux.

13 M. le Président: Sinon nous allons entamer un débat ici sur ce que l'on

14 peut demander et sur ce que l'on ne peut pas demander.

15 Donc, Mme Somers va terminer sa question comme elle l'a formulée. Vous

16 aurez l'opportunité. Vous savez tout de même que je vous ai toujours dit

17 dès le début, je suis ici avec une règle très pratique que j'ai apprise

18 très tôt dans ma carrière: premièrement, traiter les parties de façon

19 égale; deuxièmement, donner toujours l'opportunité de contredire ce que

20 l'autre a dit. Je vais donc l'utiliser maintenant, c'est très pratique

21 pour dépasser la question.

22 Donc, Madame Somers, vous allez poser votre question.

23 Vous, Monsieur Jovan Simic, vous aurez la possibilité de contredire.

24 Allez-y. Pour terminer, s'il vous plaît.

25 Mme Somers (interprétation): Monsieur Djukanovic, vous souvenez-vous de ma

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1 question? Est-ce que vous êtes en mesure de vous en souvenir? Sinon,

2 j'essaierai de la reposer une dernière fois.

3 M. Djukanovic (interprétation): Pouvez-vous, s'il vous plaît, la répéter

4 si cela ne vous gêne pas?

5 Question: Donc pendant les périodes de temps que vous avez passées à

6 Omarska et au moment où vous avez réalisé des photographies, est-ce que

7 vous avez eu connaissance du fait qu'on ait réalisé soit des

8 enregistrements vidéo, soit des photographies de corps de cadavres de

9 civils, de civils musulmans à Omarska qui, plus tard, aient été utilisés,

10 aient été présentés comme étant les cadavres de Serbes, et ceci pour des

11 raisons politiques ou militaires, et dans l'intérêt de la Republika

12 Srpska? Voilà ma question. Est-ce que c'est clair?

13 Réponse: Oui, je crois ce que c'est clair. A Omarska, les deux fois où j'y

14 suis allé, je n'ai pas photographié les cadavres de Musulmans, d'ailleurs

15 je n'ai photographié aucun cadavre quel qu'il soit. Je n'en ai pas entendu

16 parlé, je n'ai pas vu, je n'ai pas pris ces photographies. Voilà ce que

17 j'ai à vous dire et ce que j'ai à répondre à votre question.

18 Mme Somers (interprétation): Merci, Monsieur Djukanovic.

19 Merci, Monsieur le Président, de m'avoir accordé un peu plus de temps.

20 M. le Président: Madame Somers, vous devez payer ce crédit d'avance.

21 D'accord.

22 Maître Jovan Simic, s'il vous plaît?

23 M. J. Simic (interprétation) La défense n'a pas de questions

24 supplémentaires à poser. Je crois que les choses sont tout à fait claires

25 maintenant.

Page 11668

1 M. le Président: Bien. D'accord. Monsieur le Juge Riad, avez-vous des

2 questions? Madame la Juge Wald, s'il vous plaît?

3 (Questions au témoin, M. Slavko Djukanovic, par Mme la Juge Wald.)

4 Mme Wald (interprétation): J'ai une seule question pour que ce débat

5 s'éclaircisse pour moi. Vous avez dit très clairement qu'à aucun moment,

6 quand vous vous êtes rendu à Omarska, ces deux fois où vous vous êtes

7 rendu à Omarska, vous n'avez pris aucune photographie, vous n'avez

8 enregistré aucun film de cadavre. Donc c'est ce que vous nous dites? Vous

9 n'avez pas photographié de cadavre, vous n'avez pas réalisé

10 d'enregistrement vidéo de cadavre, c'est bien ce que vous nous dites?

11 Réponse: Oui.

12 Mme Wald (interprétation): Bien. Pour que tout soit extrêmement clair, ma

13 seule question est la suivante: à votre connaissance, pendant ces deux

14 visites à Omarska, est-ce qu'un ou plusieurs des autres membres de votre

15 équipe de presse, travaillant pour le centre de presse militaire, a

16 réalisé des photographies de cadavre?

17 M. Dujkanovic (interprétation): A question directe, réponse directe. Je ne

18 pense pas qu'aucun de mes collègues ait fait une chose de ce genre. Je

19 n'ai pas de preuve qu'ils l'aient fait, et mon opinion personnelle c'est

20 qu'aucun de mes collègues ne l'a fait.

21 M. le Président: Merci Madame la Juge Wald.

22 (Questions au témoin, M. Slavko Djukanovic, par M. le Président.)

23 Monsieur Djukanovic, moi-même j'ai une question. Vous avez dit que vous

24 êtes allé à Omarska au moins deux fois, et vous avez dit: "pour filmer des

25 documents". En principe, ces documents se trouvaient dans un grand

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1 bâtiment. Deux questions: vous êtes allé deux fois toujours pour filmer

2 les mêmes documents?

3 M. Djukanovic (interprétation): Oui.

4 Question: Pourquoi une deuxième fois pour filmer les mêmes documents?

5 Réponse: Ces documents n'étaient pas tout à fait les mêmes documents.

6 D'abord ce n'étaient pas les mêmes parce qu'au fur et à mesure que le

7 temps passait, les documents changeaient, au fur et à mesure que les gens

8 collectaient des documents. De temps en temps, on nous appelait pour

9 prendre des photographies.

10 La première fois, nous avons donc photographié une partie des documents

11 mais la deuxième fois ce n'étaient pas les mêmes, mais d'autres documents

12 encore qui ont servi d'éléments de preuve, donc une documentation à

13 l'appui.

14 Question: Ce grand bâtiment, est-ce que vous pourriez nous donner au

15 moins… Je n'arrive pas avoir une idée précise où était cet endroit?

16 Pouvez-vous nous dire où se plaçait ce grand bâtiment?

17 Réponse: Je crois que je pourrai vous expliquer. Il y avait un grand

18 plateau à Omarska, et je crois que c'est très reconnaissable, le bâtiment

19 en question se trouve au centre du plateau et c'est le bâtiment

20 prédominant, c'est ce grand bâtiment qui y figure.

21 M. le Président: Très bien. Monsieur Djukanovic, nous n'avons pas d'autres

22 questions à vous poser. Nous vous remercions beaucoup d'être venu et nous

23 vous souhaitons un retour à votre travail et à votre lieu de résidence.

24 Merci beaucoup.

25 Monsieur l'huissier va vous raccompagner.

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1 M. Djukanovic (interprétation): Merci beaucoup.

2 (Le témoin, M. Slavko Djukanovic, est reconduit hors du prétoire à 13

3 heures 45.)

4 M. le Président: Je vois que cela va être Me Masic.

5 M. Masic (interprétation): Oui Monsieur le Président. La défense cite à la

6 barre le Dr Slobodan Gajic.

7 (Le témoin, le Dr Slobodan Gajic, est introduit dans le prétoire.)

8 M. le Président: Bonjour, Docteur Slobodan Gajic. M'entendez-vous?

9 M. Gajic (interprétation): Je vous entends. Bonjour.

10 M. le Président: Vous allez lire la déclaration solennelle que M.

11 l'huissier va vous tendre, s'il vous plaît.

12 M. Gajic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

13 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

14 M. le Président: Très bien. Vous pouvez vous asseoir. Rapprochez-vous un

15 peu des micros et installez-vous le plus confortablement possible. Merci

16 beaucoup d'être venu. Pour l'instant, vous allez répondre aux questions

17 que Me Masic va vous poser.

18 S'il vous plaît, Maître Masic, vous avez la parole.

19 (Interrogatoire principal du témoin, M. Slobodan Gajic, par Me Masic.)

20 M. Masic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

21 Bonjour Monsieur Gajic.

22 M. Gajic (interprétation): Bonjour.

23 Question: Pour les besoins du compte rendu d'audience, je vous prie de

24 décliner vos nom et prénom.

25 Réponse: Docteur Slobodan Gajic.

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1 Question: Quand êtes-vous né?

2 Réponse: Le 19 janvier à Banja Luka.

3 Question: Où résidez-vous actuellement?

4 Réponse: A Banja Luka.

5 Question: Vous êtes médecin de profession?

6 Réponse: Je suis médecin spécialiste en médecine générale.

7 Question: Qu'avez-vous été de profession en 1992?

8 Réponse: En 1992, j'ai travaillé à l'établissement de santé de Jajce, et

9 j'ai été médecin généraliste également.

10 Question: Pourquoi avez-vous cessé de travailler dans cet établissement de

11 santé à Jajce?

12 Réponse: Le 3 avril 1992, j'ai été licencié du fait de mon appartenance

13 ethnique dans ce centre de santé, tout comme cela a été le cas pour le

14 reste du personnel appartenant au même groupe ethnique, et je suis parti à

15 Banja Luka.

16 Question: Est-ce qu'en d'autres termes vous avez perdu votre emploi parce

17 que vous étiez serbe?

18 Réponse: C'est cela.

19 Question: Et qu'est-il arrivé par la suite, une fois que vous êtes arrivé

20 à Banja Luka?

21 Réponse: Eh bien, par la suite, quelque 50 jours après, je n'ai pas eu

22 d'affectation à quelque poste de travail que ce soit, et vers le 25 mai je

23 me suis présenté aux unités militaires de Banja Luka, et j'ai été mobilisé

24 dans une brigade ou plutôt au service sanitaire de cette brigade.

25 Question: De quelle brigade s'agissait-il?

Page 11672

1 Réponse: Il s'agissait de la 1re Brigade blindée.

2 Question: Qui était le commandant des services de santé?

3 Réponse: C'était le lieutenant-colonel Kovacevic à l'époque.

4 Question: Et avez-vous été envoyé à Omarska pour y prêter main forte?

5 Réponse: Oui, au début du mois de juin, j'ai été envoyé avec mon chauffeur

6 avec une ambulance à Omarska, enfin dans l'établissement de santé

7 d'Omarska, pour rejoindre les médecins de là-bas, et j'ai été accueilli là-

8 bas par la Dr Slavisa Popovic qui était chef là-bas avec les autres

9 médecins et infirmiers et personnel auxiliaire.

10 Question: Comment avez-vous organisé les activités de cet établissement de

11 chanter à Omarska?

12 Réponse: Eh bien, dans cet établissement de santé, les activités étaient

13 organisées de façon à satisfaire les besoins de la population civile, de

14 l'armée et de la police.

15 La doctoresse m'a dit, parce que je ne le savais pas à l'époque, qu'il y

16 avait là un centre d'instruction et qu'il s'agissait d'y accomplir des

17 tâches aussi. Et nous avons dû convenir des modalités qu'il convenait

18 d'appliquer pour effectuer nos tâches concernant ce centre d'instruction.

19 Question: Pouvez-vous expliquer à l'intention de cette Chambre ce que vous

20 avez convenu avec cette collègue, et pourquoi vous a-t-elle demandé de

21 couvrir également le centre d'instruction?

22 Réponse: Cette collègue m'a demandé de couvrir ce centre étant donné que

23 je venais d'une autre région et que je ne connaissais pas les gens qui se

24 trouvaient au centre d'instruction.

25 J'étais d'abord homme, j'étais médecin, j'avais un véhicule ambulant bien

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1 équipé: il y avait quatre places couchées pour des blessés et deux places

2 assises. Nous avions pas mal d'équipements sanitaires et j'ai accepté de

3 le faire par égard aux préoccupations de cette collègue qui était femme.

4 Question: Comment avez-vous organisé vos déplacements vers Omarska, alors

5 que vous étiez employé par cet établissement de santé à Omarska?

6 Réponse: Eh bien, tous les matins, vers 7 heures et demie, 8 heures, avec

7 une équipe, un chauffeur, une ou deux infirmières et moi, nous prenions

8 pour nous rendre au centre.

9 Question: Comment était organisée la protection médicale au niveau du

10 centre d'instruction d'Omarska même?

11 Réponse: Au centre même, nous avions des ensembles sanitaires que nous

12 complétions au moyen de médicaments et pour ce que nous n'avions pas nous

13 avions demandé au niveau de la pharmacie de l'établissement de santé pour

14 que cela nous fourni tous les matins. Il s'agissait d'analgésiques,

15 d'anti-pirétiques, des médicaments contre les rhumatismes, contre

16 l'asthme, contre les troubles dits de digestion, les ulcères et nous

17 avions aussi des ampoules que nous administrions à certaines personnes.

18 Question: Docteur, comment cela s'était-il organisé au niveau du centre

19 d'instruction? A qui les malades ou les gens qui avaient besoin de soins

20 médicaux s'adressaient et comment saviez-vous qui il fallait examiner, qui

21 il fallait aider?

22 Réponse: Les gardiens avaient pour mission chacun dans leur zone, dans la

23 zone qu'ils couvraient, d'enregistrer les personnes qui voulaient passer

24 un examen médical et amener ces gens-là à l'endroit où nous nous

25 trouvions.

Page 11674

1 Question: Est-ce que cela signifie que tous les matins, vous examiniez des

2 gens qui se présentaient en demandant une assistance médicale?

3 Réponse: Oui.

4 Question: Docteur, à l'époque, d'une manière générale quelle était la

5 situation au niveau des médicaments, du matériel sanitaire et de tout le

6 reste dans cette région-là?

7 Réponse: La situation était connue et notoire. La pénurie de matériel

8 sanitaire et de médicaments était grande. Au début, nous avions été pas

9 mal équipés parce qu'en ce temps-là il y avait déjà des problèmes

10 d'approvisionnement en médicaments de la République fédérale de

11 Yougoslavie. Nous avions été coupés et nous manquions de certains

12 médicaments. Mais pour ce qui est des analgésiques, des antibiotiques et

13 des médicaments contre l'asthme et les cardiotoniques, nous en avions

14 encore à l'époque. Nous avions un problème au niveau de l'insuline, cela

15 je m'en souviens.

16 Question: Y avait-il quelques soins médicaux que ce soit à titre préventif

17 au centre d'instruction d'Omarska?

18 Réponse: Il existait certainement des mesures préventives car sans cela il

19 y aurait certainement eu des épidémies, nous avons contacté un centre

20 épidémiologique de Prijedor et ce dernier a pris des mesures au travers de

21 ses techniciens, ce qui fait qu'on nous a transmis des moyens et nous

22 avons pris les mesures nécessaires pour empêcher qu'il ne survienne des

23 épidémies.

24 Question: Je voudrais vous demander si devant l'entrée du réfectoire il y

25 avait une espèce de récipient où les détenus pouvaient se laver les mains

Page 11675

1 avant d'y accéder?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Est-ce que ce récipient contenait une solution chlorée?

4 Réponse: Oui.

5 Question: Jusqu'à quand êtes-vous resté dans la région d'Omarska?

6 Réponse: Eh bien, à peu près, jusqu'à la mi-juillet.

7 Question: Et où êtes-vous allé par la suite?

8 Réponse: Je suis parti pour les besoins de mon unité militaire sur des

9 lignes de front.

10 Question: Pendant votre séjour à Omarska, Docteur, à quelque moment que ce

11 soit avez-vous entendu ou parlé ou vu Dragoljub Prcac? Je ne voudrais pas

12 vous demander si vous l'avez connu mais je ne sais pas si vous en avez

13 entendu parlé ou si vous l'avez vu.

14 Réponse: J'ai fait la connaissance de Dragoljub Prcac dans une situation

15 spécifique à un moment où, à l'établissement de santé d'Omarska, on avait

16 amené un homme mort qui était de nationalité serbe et pour lequel on

17 disait à l'époque qu'il s'était suicidé. Et il y avait tout de suite des

18 doutes pour dire qu'il ne s'agissait pas d'un suicide véritable.

19 Il est venu deux hommes. L'un des deux était Dragoljub dont j'ai fait la

20 connaissance et ils ont effectué leur partie du travail et ont déterminé

21 qu'il s'agissait d'un meurtre. Par la suite, je n'ai plus eu l'occasion de

22 rencontrer cet homme-là du tout.

23 Question: Est-ce que cela signifie que Dragoljub Prcac avec un autre homme

24 était venu pour établir un constat policier?

25 Réponse: Oui.

Page 11676

1 Question: Docteur, pouvez-vous vous rappeler à peu près vers quelle

2 période de votre séjour à Omarska cela s'est situé?

3 Réponse: Il me semble qu'il se s'agissait du début du mois de juillet.

4 Question: Je vous remercie beaucoup Docteur.

5 Monsieur le Président, je n'ai plus de questions pour ce témoin.

6 M. le Président: Y a-t-il d'autres conseils qui veulent poser des

7 questions? Oui Maître Deretic.

8 M. Deretic (interprétation): Monsieur le Président, deux questions très

9 brèves.

10 Docteur, vous avez dit tout à l'heure que, le 3 avril 1992, vous aviez été

11 chassé de votre emploi en raison de votre groupe ethnique alors que vous

12 travailliez à Jajce à l'époque?

13 Réponse: Oui.

14 Question: Pouvez-vous dire à cette Chambre, sous le contrôle de qui se

15 trouvait être la ville de Jajce dès cette époque-là?

16 Réponse: Elle était sous le contrôle des Musulmans.

17 Question: Et pouvez-vous ici nous dire aujourd'hui à quelle entité

18 appartient actuellement la ville de Jajce?

19 Réponse: A la fédération croato-musulmane.

20 Question: Merci.

21 M. le Président: Merci Maître Deretic.

22 Du côté du Procureur qui va contre-interroger? C'est M. Saxon?

23 Allez-y s'il vous plaît.

24 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Slobodan Gajic, par M. Saxon.)

25 M. Saxon (interprétation): Merci Monsieur le Président.

Page 11677

1 Docteur Gajic, je vous prie de m'excuser, je ne sais pas très bien

2 prononcer les noms et les noms propres dans votre langue. Pouvez-vous me

3 dire le nom de la ville où vous êtes né?

4 Réponse: Je suis de Banja Luka. Je suis né à Banja Luka, et avant la

5 guerre je travaillais j'habitais à Jajce qui se trouve à 75 kilomètres de

6 Banja Luka.

7 Question: En octobre 1992, Jajce est tombée aux mains des forces

8 militaires serbes, c'est exact?

9 Réponse: Oui.

10 Question: Vous avez dit qu'au début juin on vous a affecté au centre

11 médical d'Omarska et vous avez appris qu'un centre d'instruction avait été

12 mis en place à Omarska?

13 Réponse: Oui.

14 Question: Il a été décidé de faire en sorte que les soins médicaux au

15 centre de détention d'Omarska fassent partie également des tâches qui vous

16 étaient imparties. Est-ce vous êtes sûr que c'était début juin que vous

17 êtes arrivé à Omarska?

18 Réponse: Oui.

19 Question: Est-ce que vous travailliez avec un certain Ljuban Andzic au

20 centre médical d'Omarska?

21 Réponse: A ma connaissance, Ljuba Handic n'était pas employé au centre

22 médical mais il faisait partie de la défense civile et il allait là très

23 souvent. Il travaillait aussi avec le centre d'instruction.

24 Question: Ljuban Andzic se souvient que vous êtes arrivé à Omarska dans la

25 deuxième partie du mois de juin, vers la deuxième partie du mois de juin

Page 11678

1 ou peut-être dans les premiers jours du mois de juillet. Il ne se

2 souvenait pas de la date exacte. En tout cela se trouve à la page 7537 du

3 compte rendu d'audience. Est-ce que M. Ljuban Andzic se trompait quand il

4 a déclaré cela?

5 Réponse: Je pense qu'il s'est trompé. Mais moi-même je ne suis pas très

6 sûr de la date précise. Je sais que je suis arrivé dans les 10 premiers

7 jours de juin. Sans doute ceux qui m'ont envoyé là pourraient vous le dire

8 et le savent.

9 Question: Est-ce que vous pouvez être un peu plus précis quant à la nature

10 du travail que vous avez accompli au camp d'Omarska? Est-ce que vous

11 pouvez nous dire comment vous vous êtes procuré les médicaments, comment

12 vous avez obtenu les médicaments au centre médical d'Omarska? Est-ce que

13 vous pouvez nous décrire précisément ce que vous avez fait?

14 Réponse: Eh bien, pendant les deux ou trois premiers jours, ce qui se

15 passait c'est que j'entrais dans les hangars qui étaient surpeuplés, il

16 était très difficile de travailler car c'était l'été et donc l'air était

17 étouffant là-dedans. Et puis ensuite, comme il faisait beau, on s'est dit

18 que peut-être les gardes devraient transporter quelques chaises et

19 quelques tables à l'extérieur car nous avions un certain nombre

20 d'équipements qu'il était possible d'utiliser à l'extérieur. Donc ce jour-

21 là nous avons réalisé nos examens à l'extérieur, à l'ombre sur la pelouse.

22 Question: Je vois. Donc pendant ces journées-là au bout des 2 ou 3

23 premiers jours, quand on a fait sortir les prisonniers souffrants à

24 l'extérieur, vous avez procédé aux examens et aux soins à l'extérieur dans

25 une zone qui se trouvait à l'ombre avec des bureaux, des tables?

Page 11679

1 Réponse: Oui.

2 Question: Mais cela se passait de toute façon à l'extérieur, on pouvait

3 passer et voir ce que vous étiez en train de faire?

4 Réponse: Eh bien, ceux qui ne demandaient pas d'examen, de subir un examen

5 ne pouvaient pas car les gardes ne voulaient pas de problème. Ils

6 voulaient que tout l'endroit où l'on travaillait soit calme pour que l'on

7 puisse se concentrer.

8 Question: Oui mais les gardes pouvaient passer à côté de vous et voir ce

9 que vous étiez en train de faire, est-ce exact de dire cela?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Est-ce qu'on vous a jamais critiqué pour avoir fourni,

12 administré ces soins à ces prisonniers qui pour la plupart n'étaient pas

13 Serbes?

14 Réponse: Non jamais. Personne n'a jamais été en mesure d'influencer mon

15 travail d'une manière ou d'une autre et d'ailleurs je n'ai jamais reçu

16 aucune critique de ce style.

17 Question: Est-ce que vous avez été sanctionné, réprimandé, transféré ou

18 sanctionné d'une manière ou d'une autre?

19 Réponse: Non.

20 Question: Sanctionné donc pour avoir fourni une telle assistance à ces

21 personnes?

22 Réponse: Non.

23 Question: Est-ce qu'il vous est arrivé de voir Dragoljub Prcac au camp

24 d'Omarska pendant que vous y étiez vous-même en train d'administrer des

25 soins aux détenus?

Page 11680

1 Réponse: Non.

2 Question: Est-ce que vous connaissez un dénommé Miroslav Kvocka?

3 Réponse: Non.

4 Question: Et Milojica Kos?

5 Réponse: Non.

6 Question: Mladjo Radic?

7 Réponse: Non.

8 Question: Zoran Zigic?

9 Réponse: Non.

10 Question: Et Zeljko Mejakic?

11 Réponse: Non.

12 Question: Est-il exact de dire que la première fois que vous êtes allé au

13 centre de détention d'Omarska c'était au début juin 1992? Est-ce que cela

14 correspond à peu près à la réalité?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Quelle est la dernière fois, quand êtes-vous allé au camp

17 d'Omarska pour la dernière fois à peu près?

18 Réponse: Je ne me souviens pas avec précision de la date exacte mais cela

19 devait être vers le 10 ou le 12 juillet.

20 Question: Donc vous n'avez passé qu'environ un mois à cette activité,

21 c'est-à-dire qui consistait à administrer des soins aux détenus du camp

22 d'Omarska?

23 Est-ce que vous vous souvenez des détenus qui présentaient des blessures

24 visibles qui ont nécessité des soins très précis?

25 Réponse: Eh bien il y avait beaucoup de personnes qui avaient été passées

Page 11681

1 à tabac, beaucoup de gens présentaient des hématomes, des égratignures.

2 Enfin j'ai vu ce genre de chose.

3 Question: Vous nous dites qu'il y a eu beaucoup de gens qui ont été passés

4 à tabac?

5 Réponse: Oui.

6 Question: Comment savez-vous que c'était le cas, est-ce que vous avez

7 demandé aux détenus ce qui leur était arrivé?

8 Réponse: Oui, je l'ai fait.

9 Question: Et que vous ont dit ces détenus?

10 Réponse: Eh bien, généralement, ils répondaient de façon très succincte.

11 Il n'y avait rien de particulier, de particulièrement intéressant dans ce

12 genre de réponse. Ils me disaient simplement qu'ils avaient été passés à

13 tabac.

14 Question: Mais est-ce qu'ils vous disaient qui les avait passés à tabac?

15 Réponse: Non.

16 Question: Il faisait assez chaud à Prijedor pendant cet été 1992?

17 Réponse: Oui.

18 Question: La Chambre de première instance en l'espèce a entendu beaucoup

19 de témoins qui nous ont dit qu'il y avait souvent des centaines de

20 personnes qui étaient assises ou bien étendues sur une zone que l'on

21 appelle la Pista. Est-ce que vous-même vous avez vu ces prisonniers sur la

22 Pista?

23 Réponse: Oui.

24 Question: Du point de vue médicale, est-ce que vous avez estimé que

25 c'était là une manière appropriée de traiter les prisonniers?

Page 11682

1 Réponse: A mon avis, ce n'était pas approprié mais je ne pouvais rien

2 faire pour changer la pratique.

3 Question: Est-ce que vous avez essayé de faire quelque chose pour modifier

4 cette situation?

5 Réponse: Non.

6 Question: Vous avez mentionné l'importance de la prévention dans le

7 domaine médical. Vous avez dit que, vous-même et vos collègues, vous avez

8 contacté le service épidémiologique de Prijedor?

9 Réponse: Oui.

10 Question: Est-ce que Dusanka Andjelkovic, est-ce que vous l'avez

11 contactée, c'est une femme médecin?

12 Réponse: Oui.

13 Question: Et qu'avez-vous dit au Dr Dusanka Andjelkovic?

14 Réponse: Eh bien, je lui ai dit qu'il y avait un nombre très important de

15 personnes là-bas, qu'il faisait très, très chaud, et qu'il fallait qu'elle

16 prenne toutes les mesures nécessaires à ce sujet. Elle est médecin elle-

17 même, donc elle savait parfaitement ce qu'il convenait de faire. Il m'a

18 suffi de lui dire qu'il convenait de prendre des mesures de nature

19 épidémiologique. En tant que spécialiste, elle-même savait pertinemment ce

20 que recouvrait ces mesures, et je crois qu'elle a fait un travail

21 excellent et qu'elle a permis d'éviter l'apparition d'épidémies.

22 Question: Est-ce qu'elle est allée au camp d'Omarska pour apporter son

23 assistance au personnel médical qui y travaillait?

24 Réponse: Je ne connais pas le docteur personnellement. Elle y est peut-

25 être allée mais je ne l'ai pas vue. Nous avons eu des contacts

Page 11683

1 téléphoniques.

2 Question: Vous avez parlé avec le Dr Andjelkovic au téléphone. Est-ce

3 qu'elle vous a dit qu'elle allait faire quelque chose, qu'elle allait

4 s'efforcer de faire quelque chose pour remédier à la situation au centre

5 d'instruction d'Omarska?

6 Réponse: Oui, elle a dit qu'elle ferait de son mieux.

7 Question: Donc, elle ne vous a pas dit, par exemple, que le camp ou le

8 centre d'instruction d'Omarska ne relevait pas de sa compétence?

9 Réponse: Non.

10 Question: Vous nous dites qu'il y avait des difficultés en matière

11 d'approvisionnement en médicaments pendant l'été 92. Vous avez décrit

12 différents types de blessures que vous avez constatées sur les détenus,

13 les maladies auxquelles vous avez été confronté. Vous dites que des

14 détenus vous ont dit qu'ils avaient été passés à tabac. En tant que

15 médecin chevronné, affecté à une unité militaire, est-ce qu'il ne vous est

16 jamais venu à l'esprit qu'il aurait peut-être été plus raisonnable de

17 mieux traiter les prisonniers, de ne pas les passer à tabac, de ne pas les

18 laisser au soleil? Est-ce que cela n'aurait pas été plus pertinent du

19 point de vue de l'économie des ressources dont vous disposiez? Est-ce que

20 cela n'aurait pas permis d'utiliser beaucoup moins de fournitures

21 médicales?

22 Réponse: Bien entendu que oui! Mais moi, je n'étais pas en mesure de faire

23 leur travail à eux.

24 Question: Pendant que vous avez administré des soins au centre d'Omarska,

25 jusqu'à la mi-juillet à peu près, je voudrais savoir si vous avez disposé

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1 de suffisamment de fournitures médicales pour mener à bien votre travail

2 jusqu'au disons 12 juillet?

3 Réponse: Eh bien, oui, en général oui. Sauf l'insuline, qui manquait

4 d'ailleurs dans toute la région de Banja Luka à l'époque.

5 Question: Ljuban Andzic a témoigné ici pour Miroslav Kvocka, et il a dit

6 que le centre médical d'Omarska disposait d'une réserve de fournitures

7 médicales qui ont duré de la fin mai jusqu'au 15 juin. Ceci figure à la

8 page 7595 à 7596 du compte rendu d'audience.

9 Et Monsieur Andzic a dit que lorsque les membres du centre médical

10 d'Omarska sont allés au camp d'Omarska, ils y sont allés les mains vides.

11 Ce sont les termes mêmes qu'il a utilisés. Est-ce que vous avez des

12 observations quant au fait que son souvenir de la situation soit si

13 différent de ce que vous dites?

14 Réponse: Monsieur Andzic n'est pas médecin. Et lui n'avait qu'un accès

15 très limité aux médicaments, il n'avait pratiquement aucun accès.

16 Ce dont il pouvait disposer, c'était des désinfectants, de ce genre de

17 produit. Et je ne sais d'ailleurs même pas pourquoi il a parlé de ce genre

18 de chose parce qu'il n'est pas médecin, donc il n'aurait de toute façon

19 pas pu avoir accès à des médicaments.

20 Question: Donc bien que M. Andzic ait suivi une formation de médecin, il

21 n'a pas eu l'autorisation d'administrer des médicaments au centre

22 d'instruction d'Omarska?

23 Réponse: Non! Ce n'est pas un médecin. Il n'est allé que jusqu'à la

24 deuxième partie des études médicales. En fait, c'est un infirmier, c'est

25 un technicien médical.

Page 11685

1 Question: Est-ce que vous avez vu ou est-ce que vous avez rencontré

2 certains des médecins qui étaient détenus au camp d'Omarska?

3 Réponse: Oui, oui. Mais je ne me souviens pas de leurs noms. Ce sont les

4 infirmières qui travaillaient avec moi qui me disaient les noms de ces

5 gens, mais j'ai oublié les noms, cela ne m'intéressait pas.

6 Question: Je vais vous rafraîchir la mémoire. Est-ce que Eso Sadikovic,

7 est-ce que ce nom vous dit quelque chose?

8 Réponse: Oui, j'ai effectivement entendu ce nom. C'est un médecin.

9 Question: Est-ce qu'il était un des médecins que vous avez vu au camp

10 d'Omarska?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Et Jusuf Pasic, le Dr Jusof Pasic, est-ce que ça vous dit

13 quelque chose?

14 Réponse: Non, je ne me souviens pas.

15 Question: Et le Dr Enes Begic?

16 Réponse: Non.

17 Question: Le Dr Osman Mahmuljin, est-ce que ça vous dit quelque chose?

18 Réponse: Il me semble avoir entendu ce nom mais je ne me souviens pas avec

19 précision, au jour d'aujourd'hui.

20 Question: La Chambre de première instance en l'espèce a entendu des

21 témoins nous dire que le Dr Sadikovic a été vu pour la dernière fois

22 vivant au camp d'Omarska en août 1992. Est-ce que vous avez pris des

23 renseignements pour essayer de déterminer ce qui était arrivé à cet ancien

24 confrère?

25 Réponse: Eh bien, c'est la première fois que j'entends dire qu'il n'est

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1 plus de ce monde. Je ne savais pas où il était. Non, je n'ai pas pris de

2 renseignements.

3 Question: Est-ce que vous avez jamais été au camp ou au centre

4 d'instruction de Keraterm?

5 Réponse: Non.

6 Question: Est-ce que vous êtes jamais allé au centre de Trnopolje?

7 Réponse: Non.

8 M. Saxon (interprétation): Je n'ai plus de questions, Monsieur le

9 Président.

10 M. le Président: Maître Masic, s'il vous plaît?

11 (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin, M. Slobodan Gajic, de

12 Me Masic.)

13 M. Masic (interprétation): Juste deux petites questions. Docteur, avez-

14 vous connu en personne le Dr Eso Sadikovic?

15 M. Gajic (interprétation): Non, je n'ai connu aucune personne à Omarska,

16 jusqu'à la date à laquelle je suis arrivé à Omarska.

17 M. Masic (interprétation): Je vous remercie. Je n'ai plus de questions.

18 M. le Président: Monsieur le Juge Riad?

19 (Questions au témoin, M. Slobodan Gajic, par M. le Juge Riad.)

20 M. Riad (interprétation): Docteur Gajic, bonjour.

21 M. Gajic (interprétation): Bonjour.

22 Question: J'ai une ou peut-être deux questions que je dois vous poser.

23 Vous avez dit que la tâche des gardiens avait consisté à interroger les

24 détenus qui avaient besoin de soins médicaux et de les amener à vous.

25 Est-ce que vous aviez, vous, la possibilité d'effectuer des visites des

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1 gens malades, dans ce centre d'instruction ou au camp, ou avez-vous dû

2 attendre que l'on vous amène les gens que l'on voulait vous amener?

3 Réponse: Moi, j'avais l'autorisation de faire le tour, mais d'une manière

4 générale lorsque je venais, les gens de certaines parties du centre

5 étaient amenés par des gardiens, et on entamait tout de suite le travail.

6 Ce qui fait que les gardiens suivants venaient à chaque fois avec des

7 groupes nouveaux.

8 Question: Donc vous n'aviez pas accès aux pièces ou aux endroits où vous

9 pourriez vous-même constater si quelqu'un était malade ou souffrait?

10 Réponse: Oui au début je le faisais mais en raison de ce grand nombre de

11 personnes et la volonté de tout un chacun de demander quelque chose,

12 évidemment tout le monde voulait s'en allait et tout le monde souffrait de

13 quelque chose donc j'aurais pu rester des heures et des jours dans une

14 seule pièce. Je me suis efforcé de faire diminuer la pression qui était

15 exercée sur ma personne.

16 Question: Mais cette pression était due au fait que vous étiez le seul

17 médecin dans le camp, le camp tout entier?

18 Réponse: Non. Il y avait d'autres docteurs qui venaient: Slavica Popovic,

19 Nada Lukic, Jasenka Mijatovic, Dr Vlado Radic, et je ne me souviens plus

20 quand je suis parti qui était encore venu. Mais c'est moi qui étais là-bas

21 le plus souvent. J'y suis allé à titre régulier.

22 Question: Et quand vous alliez dans le camp, est-ce que vous avez pu voir

23 les conditions de vie dans le camp et combien cela affectait la santé des

24 détenus car vous pouviez en juger?

25 Réponse: Les conditions étaient extrêmement mauvaises. Et il n'y a rien à

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1 ajouter d'autre.

2 Question: Nous ne sommes pas des experts mais est-ce que vous pouvez nous

3 préciser ce que vous entendez par là, ce que vous essayez de nous

4 indiquer?

5 Réponse: Eh bien, sur un petit espace, il y avait énormément de gens sans

6 condition, sans possibilité de s'allonger, de se reposer ou de se

7 déplacer, de se changer, de se laver, donc d'avoir, de procéder à une

8 hygiène personnelle.

9 Question: Et d'après vous, où cela nous menait-il au bout d'un certain

10 temps alors d'après vous?

11 Réponse: Je n'ai pas très bien saisi votre question.

12 Question: Ces conditions-là, que pouvait-on s'attendre à ce qu'il advienne

13 des gens qui vivaient dans de telles conditions?

14 Réponse: Il est certain que ces mauvaises conditions ont influé à titre

15 supplémentaire sur leur état de santé, cela n'a contribué qu'à la

16 détérioration de leur état de santé.

17 Question: Quel type d'épidémie cela aurait-il pu entraîner?

18 Réponse: Eh bien, quel type d'épidémie? Vous avez des maladies

19 contagieuses qui peuvent devenir massives.

20 Question: Comme par exemple…

21 Réponse: Les entérocolites.

22 Question: Lorsque des gens sont déjà malades, pouvait-il être fatal pour

23 eux de vivre dans des conditions pareilles, dans cette situation de

24 pénurie de médicaments, lorsque les gens étaient dans des conditions aussi

25 pénibles?

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1 Réponse: Oui.

2 Question: Je vous remercie Docteur.

3 M. le Président: Merci beaucoup Monsieur le Juge Riad.

4 Madame la Juge Wald, s'il vous plaît?

5 (Questions au témoin, Dr Slobodan Gajic, par Mme la Juge Wald.)

6 Mme Wald (interprétation): Docteur, vous avez dit que vous avez eu des

7 contacts, que vous vous êtes entretenu avec un médecin du centre

8 d'épidémiologie et vous avez estimé que la femme en question avait

9 effectué une tâche appropriée pour ce qui est de la prévention des

10 épidémies.

11 Je voudrais vous demander de nous donner un exemple de ce qui aurait été

12 fait au camp et, chose dont vous seriez au courant, dans le sens de cette

13 prévention épidémiologique. On avait mentionné un récipient où l'on

14 pouvait se laver les mains avant d'aller manger, mais en outre pourriez-

15 vous nous donner, nous citer certaines autres mesures que vous savez avoir

16 été entreprises pour empêcher des épidémies?

17 Réponse: L'une de ces mesures, c'était au niveau de la cuisine à savoir

18 d'aller manger, les gens devaient se désinfecter les mains. Je sais aussi

19 qu'un véhicule venait apporter une citerne, venait laver l'enceinte.

20 Ensuite dans les pièces, il a été procédé à une désinfection de ces

21 dernières. Il a été pris des mesures au niveau de la cantine afin que les

22 personnes qui y travaillaient prennent des mesures de précaution pour

23 éviter tout contact possible avec des maladies contagieuses.

24 Question: Saviez-vous ou étiez-vous au courant de l'existence de quelques

25 points de lavage de mains à proximité des toilettes? Nous avons beaucoup

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1 entendu parler de toilettes qui ne fonctionnaient pas, qui étaient

2 bouchées et bien d'autres conditions malsaines, étiez-vous donc au courant

3 de quelques mesures qui auraient été prises à ce sujet parce que cela

4 pouvait certainement constituer des sources d'infection ou des

5 entérocolites? Réponse: Oui de temps en temps, il arrivait que ces pièces-

6 là se bouchent et nous prenions des mesures à cette fin. Il y avait

7 continuellement des gens qui venaient déboucher pour empêcher bien sûr que

8 les conduites d'évacuation ne soient bouchées complètement.

9 Question: Bien. Pendant vos visites et ces examens que vous avez effectués

10 au niveau des personnes que l'on vous amenait, avez-vous vu qu'il y avait

11 des gens suffisamment malades ou suffisamment blessés au point de devoir

12 leur apporter des traitements médicaux dans un hôpital? Et si oui,

13 qu'avez-vous réussi à faire à ce sujet?

14 Réponse: S'agissant de toute personne que j'estimais nécessaire

15 d'installer dans un centre médical à l'époque, je les faisais monter dans

16 l'ambulance avec le chauffeur et une ou deux infirmières pour les envoyer

17 à Banja Luka aux fins d'une hospitalisation.

18 Question: Pouvez-vous nous faire une évaluation au cours de ce mois et

19 plus que vous avez passé là-bas? Combien de gens avez-vous envoyés au

20 moyen de cette ambulance vers l'hôpital?

21 Réponse: Eh bien, nous avions un registre que nous tenions régulièrement à

22 jour, il me serait difficile de me rappeler. Je me réjouirais d'avoir le

23 registre sous les yeux mais je crois qu'il devait y avoir au moins une

24 vingtaine de personnes.

25 Question: Bien, une vingtaine de personnes dans une période de plus d'un

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1 mois?

2 Réponse: Je ne sais pas véritablement.

3 Question: Je comprends, c'était à peu près.

4 Y avait-il quelques provisions disant que l'on pouvait vous appeler vous-

5 même ou un autre docteur du centre médical en cas d'urgence? Vous alliez

6 là-bas sur une base régulière mais dans le cas où une maladie grave

7 surviendrait en pleine nuit, y avait-il possibilité d'accès ou alors

8 possibilité d'avoir recours au service d'urgence?

9 Réponse: Pendant 24 heures, nous étions de permanence et dans des cas

10 pareils nous nous rendions sur place.

11 Question: D'après ce que vous savez nous dire, est-ce que cela est arrivé

12 souvent? Etes-vous souvent allé sur place vous-même ou l'un quelconque des

13 autres membres du centre médical pour traiter des cas de ce genre?

14 Réponse: En sus des déplacements réguliers, tous les jours, on allait au

15 moins encore une fois au camp.

16 Question: Bien.

17 Certains des médicaments que vous avez cités, parmi lesquels il y avait

18 des médicaments pour l'estomac, l'un des problèmes dont on a entendu

19 parler comme étant un problème fréquent, c'était précisément la diarrhée,

20 et tout ce qui pouvait arriver lorsqu'il y avait beaucoup de gens sur un

21 petit espace ou lorsque les conditions d'hygiène n'étaient pas appropriées

22 de même que les conditions d'installation.

23 Dites-moi, dans ces conditions-là, avez-vous fait des recommandations à

24 l'intention des gens qui conduisaient, qui étaient à la tête du camp, pour

25 ce qui est d'une façon particulière ou spéciale de les nourrir? Parce que

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1 nous avons entendu dire que les gens n'avaient qu'un repas par jour, on

2 nous a dit qu'un même repas avait été préparé et distribué à l'ensemble

3 des personnes là-bas. Alors que faisiez-vous quand il s'agissait de gens

4 qui avaient besoin d'une alimentation particulière?

5 Réponse: Pour ce qui est des médicaments destinés à l'estomac, vous m'avez

6 mal compris. Nous avons soigné des gens qui avaient des ulcères et ces

7 gens nous faisaient parvenir leur documentation, la documentation qui

8 était en poche, et pour ce qui est des gastrites aussi.

9 Maintenant, pour ce qui est des entérocolites, nous n'avions que peu de

10 médicaments et nous ne pouvions pas les aider grandement dans ce segment.

11 Maintenant, quant à la cuisine, nous ne pouvions pas influer grandement au

12 niveau des plats préparés.

13 Question: Je n'ignore pas la chose en partie, mais si quelqu'un avait des

14 troubles de l'estomac, une maladie quelconque, je crois que vous serez

15 d'accord avec moi pour dire que ces médicaments pouvaient aider mais qu'il

16 fallait aussi un certain régime d'alimentation. Est-ce ce que vous nous

17 dites, c'est que vous ne pouviez pas influer de quelque façon que ce soit

18 lorsqu'il s'agissait d'une alimentation particulière aux gens qui en

19 avaient besoin?

20 Réponse: La seule possibilité que nous avions dans une telle situation,

21 c'était de l'envoyer à l'hôpital de Prijedor. Chose que nous avons

22 d'ailleurs faite à plusieurs reprises.

23 Question: Bien. Avez-vous traité des femmes détenues pendant la période où

24 vous étiez là-bas? Elles étaient bien moins nombreuses que les hommes et

25 d'après ce que nous en savons, elles étaient 30 ou 40. Les avez-vous

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1 soignées également?

2 Réponse: Pendant que j'étais là-bas, pour autant que je le sache, il y

3 avait deux femmes. Je me souviens que l'une de ces deux femmes, qui

4 travaillaient à la cuisine, était avec un doigt blessé, et elle avait

5 besoin de secours d'urgence. Et c'est la seule fois que j'ai vu cette

6 personne. Je ne l'ai plus revue par la suite.

7 Question: Donc, je voudrais savoir si vous avez eu, à quelque reprise que

8 ce soit, l'occasion de traiter quelque femme que ce soit suite à des

9 rapports sexuels forcés qui pourraient être désignés par "viols"?

10 Réponse: D'après ce que je sais, cela n'a pas eu lieu. Comme je vous l'ai

11 dit tout à l'heure, il n'y avait que deux femmes, et aucune des deux ne

12 s'est adressée à moi avec un tel problème.

13 Question: Bien. Et ma dernière question à votre intention est la suivante.

14 En votre qualité de médecin, estimiez-vous que les détenus à Omarska, au

15 centre de détention d'Omarska, recevaient des soins médicaux appropriés?

16 Pouvez-vous nous formuler une conclusion générale à ce sujet?

17 Réponse: L'assistance médicale n'a peut-être pas été appropriée à ce

18 moment-là mais dans ces temps-là, dans ces circonstances-là, elle n'avait

19 pas pu être améliorée.

20 Question: Mais conformément aux normes médicales professionnelles, à la

21 façon dont vous avez été éduqué de faire, est-ce que vous pourriez dire

22 que ces gens-là étaient médicalement traités de façon adéquate?

23 Réponse: Les gens qui se sont adressés à moi et qui avaient la possibilité

24 de trouver tel médicament pour telle maladie ont été traités de façon

25 appropriée.

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1 Question: Je comprends cela. Cette partie, je la comprends. Mais en tant

2 que médecin et du point de vue du patient qui souffre d'une maladie, qui

3 traverse un problème, exception des conditions de guerre et des pénuries

4 qui justifiaient le fait de ne pas pouvoir mieux aider ou aider davantage

5 ces gens-là, diriez-vous -comme médecin- que ces détenus, au cours de ce

6 un mois et demi, recevaient des soins médicaux appropriés?

7 Réponse: Eh bien, en ma qualité de médecin, il m'est très difficile de

8 travailler sans laboratoire et sans résultat d'analyses spécialisées. Et à

9 l'époque, cela n'était pas faisable.

10 Mme Wald (interprétation): Bien. Je vous remercie.

11 M. le Président: Merci beaucoup, Madame la Juge Wald.

12 (Question au témoin, Dr Slobodan Gajic, par M. le Président.)

13 J'ai moi-même au moins quatre questions, quatre lignes de questions.

14 La première, si vous considérez blessures et causes, notamment causes de

15 blessures et les instruments utilisés, est-ce que vous pouvez nous dire

16 quel a été le résultat général de votre observation?

17 Nous savons déjà que les patients, les prisonniers étaient très succincts

18 et notamment ne disaient pas qui les avaient battus. Mais c'est votre

19 regard clinique, à mon avis, je crois qui vous donne la possibilité de

20 savoir que cette blessure a été faite de cette façon. Est-ce que vous

21 pouvez nous donner une idée générale?

22 M. Djukanovic (interprétation): Eh bien, la majeure partie des blessures

23 découlait de coups au moyen d'objets contondants. Y compris des bottes

24 militaires, puis des parties de fusil, il y avait des coups de poing.

25 M. le Président: Très bien. Un autre aspect relatif de votre observation.

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1 Quelle est votre idée générale de la condition physique de ces personnes

2 que vous avez observées? Et même les personnes que vous avez observées

3 directement mais quand vous passiez, quelle était la condition physique

4 des détenus?

5 Réponse: La condition physique était assez mauvaise. Les gens étaient

6 épuisés, apeurés, psychiquement abattus. C'était triste à voir.

7 M. le Président: Une autre question, Docteur Gajic: vous avez dit que

8 plusieurs médecins, si j'ai bien compris, allaient au centre d'enquête,

9 comment vous vous organisiez pour ce travail?

10 Réponse: Le travail était organisé de manière suivante. Chaque matin, vers

11 7 heures et demie, je complétais mes réserves de matériel médical, à la

12 pharmacie du centre de santé. Le véhicule S4 qui est une ambulance

13 militaire dispose de quatre places allongées pour le transport des blessés

14 et de deux places assises. Il y avait généralement une infirmière, un

15 infirmier, le chauffeur et moi. Et d'habitude, il y avait deux

16 infirmières, même en fonction des disponibilités de personnel au niveau du

17 centre médical.

18 Question: Aviez-vous un calendrier de présence pour chaque médecin ou est-

19 ce que les médecins arrivaient tous en même temps?

20 Réponse: Le Dr Slavica Popovic était chef ou directeur de ce centre

21 médical et c'est elle qui désignait les gens et qui faisait cette espèce

22 d'organigramme.

23 Question: D'accord. Donc vous étiez là, vous alliez au centre suivant des

24 indications que la doctoresse Slavica Popovic vous donnait, c'est cela?

25 Réponse: Le premier départ médical, nous n'avions pas besoin qu'on nous

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1 dise qu'il fallait partir. Nous savions que dès que nous nous levions, il

2 fallait aller là-bas. Il ne fallait pas un ordre ou une invitation

3 quelconque. Dès que nous nous levions, nous complétions nos ensembles

4 sanitaires et nous y allions. Pour ce qui est des autres départs, en

5 général, cela se faisait sur appel téléphonique, et en général suite aux

6 recommandations de cette collègue, le Dr Slavica.

7 M. le Président: Vous avez dit, Docteur Gajic, que normalement les gardes

8 étaient chargés d'enregistrer les situations de besoin de soins médicaux,

9 et après, les gardes amenaient les patients, je veux dire, les personnes

10 malades à vous, pour que vous puissiez faire votre travail.

11 Avec votre regard clinique, comment les gardes procédaient? Est-ce que les

12 gardes étaient organisés, suivaient des ordres, suivaient des indications,

13 quel est le résultat de votre observation de ce point de vue?

14 Réponse: Eh bien, je n'ai pas pu remarquer sur les gardiens s'ils avaient

15 reçu des ordres ou que quelqu'un avait déterminé la façon dont ils se

16 comporteraient, du moins pas pendant que j'étais là-bas.

17 Question: Donc d'accord, vous n'avez pas pu observer une organisation,

18 mais est-ce qu'il vous semble qu'il y avait au moins quelque indice de

19 discipline ou d'organisation, ou étaient-ils complètement désorganisés,

20 indisciplinés?

21 Réponse: Je pense qu'il y avait une certaine organisation. Cela n'était

22 pas désorganisé.

23 Question: Une autre question, Docteur Gajic, que je voudrais vous poser:

24 vous avez exercé votre métier en plein, si je puis dire, conflit ethnique,

25 le médecin, comme vous savez, fait toujours un serment en prêtant serment

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1 d'Hippocrate, connaissez-vous des situations où un médecin, par la

2 différence, pour une différence ethnique, a refusé de traiter une personne

3 malade?

4 Ne dénoncez pas quand même, il n'est pas nécessaire de prononcer des noms!

5 Je voudrais seulement savoir si vous en avez connaissance.

6 Réponse: Là où je travaille, il y a des gens de différents groupes

7 ethniques, et en principe, je n'ai jamais eu l'occasion de rencontrer

8 quelqu'un qui ait eu la moindre pensée de ce type.

9 Question: Vous avez dit "pensée", je pense "action". Avez-vous vu une

10 mission ou action dans ce sens? Je ne dis pas "pensée".

11 Réponse: Oui, cela ne leur est pas venu à l'idée, non je n'ai pas vu.

12 Question: Ni jamais passé à l'action, vous voulez dire?

13 Réponse: J'ai dit que je n'ai pas vu, que je n'étais pas présent pour voir

14 une telle chose.

15 M. le Président: Très bien, Docteur Gajic. Nous vous remercions beaucoup

16 d'être venu ici, d'avoir répondu à toutes nos questions. Nous vous

17 souhaitons un bon retour à votre travail et à votre résidence.

18 Merci beaucoup, Docteur.

19 M. Gajic (interprétation): Je vous remercie aussi.

20 (Le témoin, Dr Slobodan Gajic, est reconduit hors du prétoire.)

21 (Questions relatives à la procédure.)

22 M. le Président: Maître Jovan Simic?

23 M. J. Simic (interprétation): Nous avons terminé avec nos témoins

24 d'aujourd'hui et je crois que notre collègue, Madame Somers, va proposer

25 le versement au dossier de quelques documents.

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1 M. le Président: Excusez-moi, Madame Somers. Allez-y.

2 Mme Somers (interprétation): Merci, Monsieur le Président il s'agit de

3 documents qui ont été identifiés pendant le témoignage de M. Djukanovic:

4 les pièces à conviction de l'accusation 3/290 et 3/291.

5 Nous estimons donc qu'elles devraient être versées au dossier du fait de

6 leur pertinence et du fait que leur authenticité a été démontrée. Nous

7 demandons donc qu'elles soient versées au dossier.

8 M. J. Simic (interprétation): La défense ne fait pas d'objection, Monsieur

9 le Président.

10 M. le Président: Donc les pièces mentionnées sont versées au dossier.

11 Donc, nous n'avons pas d'autres témoins pour aujourd'hui. Nous avons

12 terminé, c'est une bonne heure.

13 Je voudrais informer les parties que suite à nos décisions orales des 6

14 octobre 2000 et 10 mai 2001, donc hier, le Greffe nous a communiqué que

15 dans l'équilibre de l'urgence de la Chambre et de l'affaire et de la

16 disponibilité des moyens techniques, le Greffe nous suggère la date du 31

17 mai pour la vidéoconférence.

18 Est-ce qu'il a quelque objection ou commentaire du côté des parties?

19 Madame Somers?

20 Mme Somers (interprétation): A ce stade, nous n'avons pas d'observation

21 Monsieur le Président, nous allons nous entretenir avec le témoin pour le

22 confirmer mais je vous remercie beaucoup de nous avoir informé de ce fait.

23 M. le Président: Comme vous le savez, nous travaillons avec un calendrier

24 serré et il faut vraiment décider de cela.

25 Du côté de la défense, Maître Jovan Simic?

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1 M. J. Simic (interprétation): Monsieur le Président, oui. Au nom de toutes

2 les équipes de la défense, d'après ce que je puis voir, cette date nous

3 convient. Donc nous n'avons aucune objection à formuler.

4 M. le Président: Donc le Greffe prend date que nous allons tout faire pour

5 avoir cette vidéoconférence le 31 mai.

6 Donc pour aujourd'hui il n'y a pas d'autres choses à traiter. Seulement,

7 pour faire un point de situation, par rapport aux témoins que nous avons

8 encore à entendre le lundi ou éventuellement mardi, Maître Jovan Simic.

9 Seulement pour voir si j'arrive à avoir un bon papier.

10 M. J. Simic (interprétation): Vous ne l'avez pas probablement pas,

11 Monsieur le Président.

12 M. le Président: J'espère l'avoir maintenant.

13 M. J. Simic (interprétation): Le premier témoin, lundi, ce sera M. Mirko

14 Jesic. Le deuxième sera… Excusez-moi. Juste une petite seconde. Le

15 deuxième sera Jankovic Milos et le troisième, Stojakovic Momcilo. Et je

16 pense que ce sont seulement ces trois témoins-là que nous entendrons.

17 M. le Président: Je crois que nous avons encore un témoin expert?

18 M. J. Simic (interprétation): Nous l'avons prévu pour mardi, le dernier

19 témoin.

20 M. le Président: Donc à la suite de ces quatre témoins, on aura le témoin

21 expert, c'est cela?

22 M. J. Simic (interprétation): Nous avons un autre témoin qui est prévu

23 pour mardi, c'est Vuleta Stojan. Et j'avais envisagé que le dernier témoin

24 soit le témoin expert.

25 Mais s'il s'avère que nous avons suffisamment de temps lundi, étant donné

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1 que deux témoins témoigneront seulement sur des faits très brefs, et si le

2 Procureur est d'accord, je crois que nous pourrions entamer le témoin

3 expert. Mais cela dépendra de la façon dont évoluera la situation. En tout

4 état de cause, le témoin sera présent.

5 Mme Somers (interprétation): Monsieur le Président, je souhaiterai

6 intervenir très brièvement, parce que vu la façon dont nous sommes

7 organisés, cela risque d'être un petit peu difficile.

8 Nous nous sommes organisés sur la base de ce qui nous a été dit la semaine

9 dernière. Donc moi, je vous serais très reconnaissante si l'on pouvait

10 s'en tenir au calendrier que l'on avait fixé précédemment.

11 M. J. Simic (interprétation): Je m'excuse. Oui, cela changerait quelque

12 peu l'ordre. Donc, nous allons entendre Vuleta Stojan, et on laissera le

13 témoin expert pour mardi.

14 M. le Président: D'accord. Très bien. De toutes façons, nous allons voir.

15 Nous comprenons quand même que Mme Somers aime beaucoup l'ordre et est

16 organisée. Nous aussi. Mais souvent il faut quand même mettre

17 l'organisation au service des objectifs. Voilà.

18 Nous allons donc avoir un bon week-end, j'espère, mérité pour nous tous,

19 car nous avons beaucoup travaillé.

20 Donc nous serons là de nouveau, lundi, à 9 heures 20.

21 (L'audience est levée à 14 heures 51.)

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