Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Mardi 15 mai 2001.)

2 (Audience publique.)

3 (L'audience est ouverte à 9 heures 22.)

4 (Les accusés sont introduits dans le prétoire.)

5 M. le Président: Bonjour. Veuillez vous asseoir.

6 Bonjour cabine technique, bonjour interprètes, personnel du Greffe,

7 bonjour conseils de l'accusation et de la défense.

8 Maître Masic, je vois que vous êtes en position. Y a-t-il un problème avec

9 M. Prcac?

10 M. Masic (interprétation): Monsieur le Président, il n'a pas de gros

11 problèmes, il a juste un capillaire dans l'oeil qui a éclaté et je crois

12 que nous pouvons continuer à travailler en son absence.

13 M. le Président: Très bien. En son absence, j'ai entendu qu'en son absence

14 nous pouvions continuer.

15 Donc, maintenant nous allons avoir Momcilo Stojakovic?

16 M. Masic (interprétation): Oui Monsieur le Président, c'est exact. La

17 défense cite à la barre son témoin suivant M. Momcilo Stojakovic.

18 M. le Président: D'accord. Donc Monsieur l'huissier s'il vous plaît?

19 M. Masic (interprétation): Monsieur le Président, avant que l'huissier ne

20 fasse venir le témoin dans le prétoire, l'équipe de la défense voudrait

21 vous faire savoir qu'il a renoncé à Vuleta Stojan, après ce témoin. Nous

22 n'aurons donc plus que le témoin expert et plus personne. Nous terminerons

23 donc la présentation de notre défense dans cette affaire.

24 (Le témoin, M. Momcilo Stojakovic, est introduit dans le prétoire.)

25 M. le Président: Bonjour Monsieur Stojakovic, m'entendez-vous?

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1 M. Stojakovic (interprétation): Oui, je vous entends.

2 M. le Président: Vous allez lire la déclaration solennelle que M.

3 l'huissier va vous tendre s'il vous plaît.

4 M. Stojakovic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

5 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

6 M. le Président: Vous pouvez vous asseoir.

7 Merci beaucoup d'être venu Monsieur Stojakovic. Pour l'instant, vous allez

8 répondre aux questions que Me Masic va vous poser, après il y aura

9 d'autres questions sûrement mais pour l'instant c'est Me Masic.

10 Maître Masic, vous avez la parole s'il vous plaît.

11 (Interrogatoire principal du témoin, M. Moncilo Stojakovic, par Me

12 Masic.)

13 M. Masic (interprétation): Merci beaucoup Monsieur le Président.

14 Bonjour Monsieur Stojakovic, je vous prie de nous dire pour les besoins du

15 compte rendu d'audience quels sont vos nom et prénom?

16 M. Stojakovic (interprétation): Je m'appelle Stojakovic Moncilo.

17 Question: Dites-nous votre date de naissance?

18 Réponse: Je suis né le 16 avril 1940.

19 Question: Où êtes-vous né?

20 Réponse: A Gornja Omarska.

21 Question: Et où résidez-vous?

22 Réponse: Je réside de nos jours encore à Gornja Omarska.

23 Question: Etes-vous marié?

24 Réponse: Oui je suis marié.

25 Question: Avez-vous des enfants?

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1 Réponse: Oui.

2 Question: Combien d'enfants avez-vous?

3 Réponse: Quatre.

4 Question: Que faites-vous actuellement?

5 Réponse: Depuis avril 2000, je suis retraité.

6 Question: Et avant que d'avoir été mis à la retraite, que faisiez-vous?

7 Réponse: J'ai travaillé dans la mine de fer de Ljubija, donc à Omarska et

8 j'ai été employé à la sécurité de l'entreprise.

9 Question: Avez-vous travaillé pendant les conflits armés au même poste? Et

10 si oui, qu'avez-vous fait au juste? Je vous prie aussi de faire une petite

11 pause avant de répondre à cause des interprètes. Vous pouvez y aller

12 maintenant.

13 Réponse: J'ai travaillé au même poste de travail. J'ai eu pour obligation

14 de travail de faire précisément cela et j'ai continué à occuper mon poste

15 de travail.

16 Question: Veuillez-nous dire où se trouvait ce poste de travail? Où

17 travailliez-vous?

18 Réponse: Je travaillais au portique d'entrée, juste devant le centre de

19 rassemblement, donc à quelque 150 mètres du centre même.

20 Question: Et avec qui vous releviez-vous au portail d'entrée? Qui

21 travaillait encore là-bas avec vous?

22 Réponse: Obrad Popovic travaillait là-bas avec moi. Nous n'étions que nous

23 deux à travailler là-bas. Donc nous nous relevions toutes les 24 heures.

24 Question: Pendant l'existence de ce centre d'instruction que vous aviez

25 mentionné tout à l'heure, dites-nous si les véhicules sanitaires, donc les

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1 véhicules de l'ambulance passaient par là-bas?

2 Réponse: Des ambulances tant civiles que militaires passaient souvent par

3 là-bas.

4 Question: Excusez-moi. Est-ce que vous pouvez expliquer de plus près:

5 qu'entendez-vous par "souvent"?

6 Réponse: Eh bien, je ne peux pas être très précis mais au cours d'une

7 journée, il passait pas mal de véhicules à l'aller en direction du centre

8 et au retour.

9 Question: Qui pouvait passer à côté de vous sans laissez-passer pour

10 accéder au centre d'instruction?

11 Réponse: Par ce portail, à côté de nous, toute personne en uniforme, donc

12 soldats et policiers, pouvait passer.

13 Question: Est-ce que les gens qui étaient employés dans la mine pouvaient

14 également passer pour autant que vous les connaissiez?

15 Réponse: Les employés de la mine, qui travaillaient là-bas au niveau de

16 l'entretien, pouvaient se rendre là où il fallait se rendre si tant est

17 que des pannes étaient survenues au niveau de l'électricité ou alors des

18 pompes à eau, au niveau des surfaces d'exploitation à ciel ouvert.

19 Question: Lorsqu'une personne en vêtement civil inconnue venait et

20 souhaitait accéder au centre d'instruction, qu'étiez-vous censés faire?

21 Réponse: A chaque fois qu'une personne inconnue en civil se présentait,

22 nous téléphonions -comment dirai-je- il y avait un local au bâtiment

23 administratif où il y avait des policiers, et l'un d'entre eux se

24 déplaçait pour emmener cette personne, mais je ne sais plus ce qu'il se

25 passait par la suite parce que cela ne nous concernait pas du tout, ces

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1 civils.

2 Question: Et qu'est-il arrivé dans votre famille en juillet 1992?

3 Réponse: En juillet 1992, ou plutôt le 9 juillet pour être tout à fait

4 précis, ma mère est décédée.

5 Question: Avez-vous reçu des jours de congé? Et combien de jours vous a-t-

6 on accordé pour procéder aux obsèques?

7 Réponse: Je me suis vu attribuer 7 jours pour tout ce qui devait être

8 accompli au niveau des obsèques de ma mère.

9 Question: Et quand êtes-vous revenu au travail? A quelle date donc après

10 les funérailles?

11 Réponse: Après cette absence, je suis revenu au travail le 16 juillet.

12 Question: Et le matin que vous êtes revenu au travail, avez-vous relevé

13 Popovic Obrad?

14 Réponse: Ce matin, j'étais venu plus tôt que prévu, étant donné qu'il n'y

15 avait pas de transport ou alors les moyens de transport étaient plutôt

16 fortuits, je suis arrivé là-bas et j'ai trouvé Popovic Obrad au poste de

17 travail.

18 Question: Et ce matin-là, avez-vous donc vu Drago Prcac ou Dragoljub Prcac

19 entrer par le portail d'entrée et se diriger vers le centre d'instruction?

20 Réponse: Eh bien, ce matin précis, oui. Pour la première fois, j'ai vu

21 Drago Prcac entrer par notre portail et se diriger vers le centre de

22 rassemblement.

23 Question: Mais connaissiez-vous Drago Prcac avant cela?

24 Réponse: Je ne connaissais Drago Prcac que de vue.

25 Question: Et Obrad Popovic, vous a-t-il dit quoi que ce soit au niveau de

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1 Drago Prcac cette fois-là?

2 Réponse: Je lui ai demandé comment se faisait-il que cet homme-là vienne

3 là et depuis quand il se rendait au centre de rassemblement. Il m'a

4 répondu que la veille, pour la première fois, Drago était venu là sans le

5 vouloir. Il a donc été contraint de venir contre son gré.

6 Question: Quand avez-vous vu Drago Prcac venir au centre?

7 Réponse: Je l'ai vu pendant deux semaines, 15 jours, je ne sais pas

8 exactement, mais en gros c'est cela.

9 Question: Et qu'avez-vous appris au sujet de Drago Prcac si tant est que

10 vous ayez entendu quoi que ce soit au sujet de Drago Prcac, là où dans le

11 village d'Omarska où vous viviez?

12 Réponse: Eh bien, les gens disaient que Drago était un homme honnête et un

13 bon père de famille.

14 Question: Je vous remercie. Je voudrais pour les besoins du compte rendu

15 d'audience que vous nous répétiez la date du décès de votre mère. Je vous

16 prie donc de nous réitérer cette date. Comme cela n'est pas bien indiqué

17 en page 599 du compte rendu.

18 Réponse: Ma mère est décédée le 9 juillet 1992.

19 M. Masic (interprétation): Je vous remercie Monsieur, Monsieur le

20 Président, je n'ai plus de questions à poser à ce témoin.

21 M. le Président: Est-ce que d'autres conseils veulent poser des questions?

22 Je ne vois personne.

23 Donc c'est Monsieur Waidyaratne. Monsieur Stojakovic, vous allez répondre

24 aux questions du Procureur.

25 Monsieur Waidyaratne, vous avez la parole s'il vous plaît.

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1 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Moncilo Stojakovic, par M.

2 Waidyaratne.)

3 M. Waidyaratne (interprétation): Merci Monsieur le Président.

4 Monsieur Stojakovic.

5 M. Stojakovic (interprétation): Oui.

6 Question: Vous étiez-vous rendu au centre d'Omarska, au camp?

7 Réponse: Pour ce qui est du camp ou du centre de rassemblement, je n'y

8 accédais pas.

9 Question: Vous n'êtes jamais allé aux endroits où l'on avait gardé des

10 détenus?

11 Réponse: Je ne suis jamais allé là-bas et d'ailleurs c'est ce que nous

12 avait ordonné notre supérieur, à savoir le directeur.

13 Question: Mais saviez-vous qui était le commandant du camp, le voyiez-vous

14 arriver au camp?

15 Réponse: Je n'en sais rien. Je ne sais pas du tout qui c'était. C'étaient

16 des gens que je ne connaissais pas et je ne m'intéressais pas à tout cela.

17 Question: Vous êtes-vous entretenu avec M. Popovic? Lui avez-vous demandé

18 ce qui se passait au camp? Est-ce que vous avez discuté de ce qui se

19 passait à l'intérieur du camp avec lui?

20 Réponse: Nous ne nous sommes jamais entretenus à ce sujet.

21 Question: Donc pendant plus de trois mois passés là-bas, vous ne vous êtes

22 jamais entretenu avec lui de ce qui se passait au camp, c'est bien ce que

23 vous nous affirmez?

24 Réponse: C'est ce que j'affirme. En effet nous ne savions pas qui y

25 travaillait et ce qui se passait.

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1 Question: Voyiez-vous des gens qui étaient amenés, des détenus dans les

2 autocars, dans des fourgonnettes de police?

3 Réponse: Toute sorte de véhicules passaient souvent par le portail

4 d'entrée, mais je ne savais pas de qui il s'agissait.

5 Question: Monsieur Stojakovic, en 1992, avez-vous été mobilisé ou rattaché

6 à quelque…?

7 Réponse: Non. Une fois que la guerre ou ces conflits ont éclaté, nous qui

8 étions assez âgés, on nous a dit de rester affectés aux postes que nous

9 occupions dans notre entreprise, pour assurer la sécurité.

10 Question: Monsieur Stojakovic, avez-vous reçu un uniforme et une arme

11 lorsque vous deviez travailler au portail d'entrée?

12 Réponse: Je portais l'uniforme que je portais auparavant. Pour ce qui est

13 des armes, nous avions un pistolet de service. C'était la seule arme que

14 nous possédions.

15 Question: Merci. Je vous prie de nous dire, Monsieur Stojakovic, ou plutôt

16 de nous aider à mieux comprendre: combien de portes d'entrée il y avait en

17 sus de ce portail principal pour accéder au camp?

18 Réponse: Eh bien, il y avait encore deux entrées, si on accepte quelques

19 routes secondaires, étant donné que l'enceinte est énorme -cela je n'en

20 sais-, mais je sais qu'il y avait encore deux entrées.

21 Question: Donc des gens pouvaient entrer par quelle entrée pour entrer au

22 camp?

23 Réponse: Non, pour aller au camp ou pour aller au centre de rassemblement

24 ils ne pouvaient passer que par notre portail, mais dans l'enceinte d'une

25 manière générale, qui fait peut-être 2 kilomètre sur 2, ils pouvaient

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1 accéder par d'autres endroits.

2 Question: Mais vous a-t-on dit à quelque moment que ce soit que des gens

3 avaient obtenu la permission d'accéder au camp?

4 Réponse: Non, cela je ne le sais pas.

5 Question: Mais que faisiez-vous pendant que vous étiez au portail lorsque

6 quelqu'un vous montrait un laissez-passer quelconque ou une autorisation

7 quelconque pendant ces deux ou trois mois que vous avez passés là-bas?

8 Réponse: Nous ne recevions rien. Lorsque des civils se présentaient nous

9 téléphonions et quelqu'un venait pour accueillir telle ou telle personne.

10 Question: Excusez-moi, mais quand vous dites il les emmenait, de qui

11 parlez-vous au juste? Des policiers qui se trouvaient au camp ou des

12 gardiens qui venaient prendre en charge les personnes pour les emmener?

13 Réponse: Mais je n'ai pas dit qui ils emmenaient, parce que dans les

14 véhicules nous ne pouvions pas reconnaître les gens. Toute sorte de

15 véhicules venaient et sortaient.

16 Question: Excusez-moi. Je vous ai posé une question au sujet des personnes

17 qui, une fois arrivées, vous incitaient à téléphoner. Est-ce que les gens

18 qui venaient de l'intérieur du camp étaient des policiers ou alors des

19 gardiens qui prenaient en charge ces personnes?

20 Réponse: C'étaient des policiers en uniforme d'été et, lorsque nous

21 téléphonions, l'un d'entre eux venait et prenait en charge telles

22 personnes.

23 Question: Avant d'en finir avec ce volet, je voudrais vous demander ce qui

24 suit: lorsque vous téléphoniez au centre, par exemple un civil se présente

25 au portail et vous téléphoniez, qui est-ce qui répondait au téléphone?

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1 Réponse: Je ne reconnaissais pas parce que mon lieu de résidence est assez

2 loin, à plus de 10 kilomètres de ce centre, et je ne connaissais pas, je

3 ne connaissais personne de ces policiers.

4 Question: Mais lorsque vous avez dit que le 16 juillet vous aviez vu M.

5 Prcac, dites-nous comment il était vêtu ce jour-là?

6 Réponse: Il portait une sorte d'uniforme de policier, un uniforme d'été

7 bleu clair, jaunâtre.

8 Question: Et il était vêtu en uniforme de police, n'est-ce pas?

9 Réponse: Oui c'est ce qu'il portait.

10 Question: Portait-il une arme?

11 Réponse: Oui, il portait un pistolet d'après ce que j'ai pu voir.

12 Question: Vous nous avez dit que M. Popovic vous avez dit que M. Prcac a

13 commencé à travailler la veille et qu'il est venu là-bas contre son gré.

14 Réponse: C'est exact. C'est bien ce qu'Obra Popovic m'a raconté, ce

15 collègue à mon poste de travail.

16 Question: Et M. Popovic a-t-il dit pourquoi M. Prcac ne voulait pas

17 travailler là-bas?

18 Réponse: Eh bien, en sa qualité de retraité, il ne voulait pas le faire,

19 il évitait de le faire, il n'était pas heureux de le faire, d'après ce

20 qu'Obrad Popovic m'a dit, mais je crois qu'on l'avait menacé ou qu'il

21 avait été contraint de venir travailler là.

22 Question: Je crois que vous n'avez pas compris ma question.

23 Est-ce que M. Obrad Popovic vous a dit pourquoi M. Prcac ne voulait pas

24 venir au centre d'Omarska ou dans ce camp de détention?

25 Réponse: Il ne m'a pas directement dit pour quelle raison celui-ci ne

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1 voulait pas venir, mais j'imagine que du fait d'avoir été retraité,

2 d'après ce qu'Obrad m'a dit en sus il s'agissait d'un homme assez retiré

3 et modeste, je pense qu'Obrad Popovic entendait par là les raisons de son

4 opposition pour ce qui était de venir travailler là.

5 Question: Monsieur Stojakovic, tirons la chose au clair.

6 Dans votre réponse, vous avez dit qu'il ne voulait pas se mêler à cela ou

7 il ne voulait pas se laisser aventurer dans ce tourbillon: qu'est-ce qu'il

8 se passait au camp?

9 Réponse: Pouvez-vous répéter votre question?

10 Question: Bien. Dans votre réponse, vous aviez dit que M. Prcac ne voulait

11 pas y prendre part, participer à tout cela ou entrer dans ce tourbillon:

12 qu'entendiez-vous par là?

13 Réponse: C'est ce qu'Obrad Popovic m'a dit, comme je vous l'ai raconté, il

14 m'a dit qu'il ne voulait pas venir mais qu'on l'a contraint à le faire. Et

15 je ne sais pas les raisons.

16 Question: Merci. Monsieur Stojakovic, saviez-vous que M. Prcac, avant de

17 venir au centre, avait été employé au poste de police d'Omarska?

18 Réponse: Non.

19 Question: Et M. Obrad Popovic vous a-t-il dit peut-être que M. Prcac

20 remplaçait quelqu'un au camp?

21 Réponse: Non, cela, je n'en ai jamais entendu parler de la part d'Obrad

22 Popovic, pas plus que de qui que ce soit d'autre. Et je ne m'intéressais

23 pas à ce que les uns et les autres faisaient.

24 Question: Vous êtes venu témoigner au profit de M. Prcac, à la décharge de

25 M. Prcac, saviez-vous quelles étaient les attributions et la position

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1 qu'occupait M. Prcac au camp?

2 Réponse: Pour ce qui concerne quelque policier que ce soit, nous n'en

3 savions rien, étant donné que nous n'y allions pas et que nous ne nous

4 intéressions guère à cela. D'ailleurs, l'accès nous avait été interdit par

5 nos supérieurs hiérarchiques. Donc nous n'accomplissions que les tâches

6 que nous étions censés accomplir.

7 Question: Monsieur le Président, je vous remercie, je n'ai plus de

8 questions.

9 Monsieur le témoin, je vous remercie.

10 M. le Président: Merci, Monsieur Waidyaratne.

11 Maître Masic, avez-vous des questions supplémentaires?

12 M. Masic (interprétation): Merci Monsieur le Président mais nous n'avons

13 pas de questions supplémentaires à poser?

14 M. le Président: Monsieur le Juge Riad s'il vous plaît?

15 (Questions au témoin, M. Momcilo Stojakovic, par M. le Juge Riad.)

16 M. Riad (interprétation): Monsieur Stojakovic, bonjour, est-ce que vous

17 m'entendez?

18 M. Stojakovic (interprétation): Bonjour, je vous entends.

19 Question: Vous étiez placé au portail d'entrée au camp d'Ormaska. A quelle

20 distance se trouvait ce portail par rapport au bâtiment principal?

21 Réponse: Le portail se trouvait au moins 150 mètres du bâtiment

22 administratif.

23 Question: Et vous ne saviez pas du tout ce qui se passait à l'intérieur?

24 Réponse: Absolument pas.

25 Question: Vous n'aviez pas de contacts avec les gens qui étaient à

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1 l'intérieur ou qui passaient, est-ce que l'on ne vous rapportait pas ce

2 qui se passait?

3 Réponse: Personne ne nous disait rien à ce sujet et je ne sais pas du tout

4 ce qui se passait au sein de ce centre de rassemblement.

5 Question: Mais ne pouviez-vous pas entendre des bruits des fois, des coups

6 de feu ou des troubles à quelque 150 mètres de là où vous étiez?

7 Réponse: De temps en temps, on entendait des coups de feu autour mais pour

8 ce qui est des coups de feu tirés directement là, non. Mais dans les

9 environs on entendait souvent des coups de feu.

10 Question: Mais n'étiez-vous pas curieux de savoir ce qui se passait ou de

11 demander ce qui se passait?

12 Réponse: Absolument pas. J'étais moi-même un petit peu effrayé de ce qui

13 se passait là où je travaillais, et puis les temps étaient comme cela.

14 Question: Et combien de temps êtes-vous resté là-bas à ce poste de garde?

15 Réponse: J'ai commencé à travailler dans cette entreprise le 1er février

16 1984.

17 Question: Non non, je pensais au camp d'Ormaska.

18 Réponse: Tout le temps jusqu'à mon départ en retraite, vers la mi-avril de

19 l'an 2000.

20 Question: Et à partir de quelle date?

21 Réponse: J'ai travaillé jusqu'au 15 avril de l'an passé, de l'an 2000

22 donc.

23 Question: Je vous remercie. Vous nous avez dit que M. Popovic vous avait

24 affirmé que M. Prcac était contraint de venir, qu'il était venu contre son

25 gré, est-ce que vous avez ouï-dire de cela seulement de la part de Popovic

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1 ou d'autres sources d'informations encore?

2 Réponse: Obrad Popovic était la seule source d'information. Je n'ai pas

3 contacté d'autres personnes. Je connaissais plus ou moins certaines

4 personnes là-bas de vue.

5 Question: Et personne ne s'est adressé à vous au sujet de M. Prcac?

6 Réponse: J'ai par la suite appris qu'il s'agissait d'un homme honnête,

7 d'un bon père de famille, mais je ne me suis pas entretenu à ce sujet avec

8 qui que ce soit d'autre. Cela ne m'intéressait pas trop.

9 Question: Je vous remercie.

10 M. le Président: Madame la Juge Wald?

11 (Questions au témoin, M. Moncilo Stojakovic, par Mme la Juge Wald.)

12 Mme Wald (interprétation): Monsieur Stojakovic, je n'ai qu'une question à

13 vous poser. Vous nous avez dit qu'après le 16 juillet, lorsque vous aviez

14 vu M. Prcac pour la première fois, que vous aviez continué à le voir

15 pendant quelques deux semaines et que vous ne l'avez plus revu.

16 Pouvez-vous me dire si vous avez ouï-dire de la part de M. Popovic ou de

17 qui que ce soit d'autre qu'il avait quitté le camp, ou avez-vous

18 simplement cessé de le voir?

19 Est-ce que quelqu'un vous a dit qu'il était parti et pourquoi il était

20 parti, ou bien vous avez juste constaté que vous ne le voyiez plus et

21 qu'il était donc parti?

22 Réponse: Je ne l'ai plus revu après ces quelques 14 ou 15 jours.

23 Question: Et M. Popovic?

24 Réponse: Il ne m'en a pas parlé du tout. Parce que moi j'étais là-bas un

25 jour sur deux, alors s'il venait j'aurais pu le voir. Mais comme il ne se

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1 présentait pas à l'entrée du centre de rassemblement.

2 Question: Bien. Mais M. Popovic vous a-t-il mentionné à quelque reprise

3 que ce soit au sujet de M. Prcac et du fait qu'il n'était plus au camp?

4 Vous ne vous êtes donc pas entretenu avec M. Popovic suite au départ de

5 cet homme-là?

6 Réponse: Non, je ne me suis pas entretenu avec lui et, d'après ce que je

7 sais, je sais, je puis affirmer que lorsque j'étais de service, donc un

8 jour sur deux, je ne le voyais pas. Donc je faisais 24 heures, un jour sur

9 deux.

10 Question: Bien.

11 M. le Président: Merci beaucoup Madame la Juge Wald.

12 (Questions au témoin, M. Moncilo Stojakovic, par M. le Président.)

13 M. le Président: J'ai aussi quelques questions Monsieur Stojakovic.

14 La personne ou le policier auquel vous téléphoniez quand un civil

15 arrivait, vous avez dit que ce policier venait au portail pour chercher le

16 civil, c'est cela?

17 M. Stojakovic (interprétation): C'est exact.

18 Question: Ce policier était toujours le même ou il variait?

19 Réponse: Ce n'était pas toujours le même. Cela variait.

20 Question: Est-ce qu'il vous est arrivé d'apprendre le nom de quelqu'un?

21 Réponse: Non, je ne connaissais pas le personnel de la police, étant donné

22 que je vivais assez loin de cette localité, et je ne m'aventurais pas à

23 l'intérieur. Je ne m'intéressais pas au fait de savoir qui était qui, je

24 ne faisais que mon travail.

25 Question: Avez-vous idée de combien de fois le même policier est venu au

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1 portail? Le même policier, plus ou moins combien de fois est-il venu, si

2 vous avez une idée?

3 Réponse: Je ne peux pas vous répondre.

4 Question: Très bien. Vous avez dit qu'Obrad Popovic…

5 Réponse: Vous savez, le fait de les reconnaître, et puis il s'est passé

6 beaucoup de temps. Pour moi, il s'agissait donc d'accomplir mon travail.

7 Certains étaient renvoyés, on a fait entrer certains, c'était leur travail

8 à eux. C'est tout ce que je saurai vous dire à ce sujet.

9 Question: Nous allons donc continuer. Vous avez dit, Monsieur Stojakovic,

10 qu'Obrad Popovic était votre seule source d'information. Pourquoi dites-

11 vous cela?

12 Réponse: Parce que je n'avais pas de contact avec les autres. Dès que lui

13 venait pour la relève, moi je n'attendais qu'une chose c'était de rentrer

14 chez moi et, de chez moi, je revenais à mon poste de travail.

15 Donc ce Popovic m'avait dit au sujet de M. Prcac que c'était un bon

16 voisin, que c'était un homme honnête et ainsi de suite. C'est tout ce que

17 nous nous sommes dit, Popovic et moi.

18 Question: Vous connaissiez M. Prcac avant ce 16 juillet?

19 Réponse: Je l'avais connu mais de vue, et depuis environ deux ans.

20 Question: D'accord. Une autre question: est-ce que vous savez si d'autres

21 personnes sont venues à ce centre de rassemblement contre leur volonté,

22 au-delà de M. Prcac?

23 Réponse: Je ne le sais pas.

24 Question: Donc pourquoi savez-vous seulement de M. Prcac? Pourquoi, pour

25 vous, M. Prcac est un cas spécial? Vous comprenez ma question?

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1 Réponse: Oui je comprends. Eh bien, parce que cela m'a été raconté par

2 Popovic. Il m'avait dit que celui-ci ne voulait pas venir étant donné

3 qu'il était retraité. De là à savoir pourquoi, je ne sais pas, mais il

4 m'avait dit qu'on l'avait contraint.

5 Question: Monsieur Obrad Popovic vous a raconté si d'autres personnes sont

6 venues également contre leur volonté?

7 Réponse: Non non.

8 Question: Vous avez dit, à propos d'une question que mon distingué

9 collègue, M. le Juge Riad, vous a posée, que personne ne vous disait rien,

10 que personne ne parlait, que vous ne saviez pas parce que personne ne

11 parlait avec vous. Je vous demande: est-ce que vous demandiez aux

12 personnes quelque chose, est-ce que vous posiez des questions?

13 Réponse: Je n'ai posé aucune question à personne, si votre question se

14 rapporte au centre de rassemblement. Je ne m'intéressais guère à cela.

15 Question: Est-ce que vous vous posiez des questions vous-même sur ce que

16 vous voyiez?

17 Réponse: Je me suis posé des questions à moi-même pour ce qui était de

18 comprendre ce qui s'est passé dans cette région. Il m'était très difficile

19 de comprendre d'une manière générale la situation tout entière qui nous

20 avait apporté tant de mal.

21 Question: Au centre de rassemblement, quelles étaient vos questions?

22 Réponse: En rapport avec Omarska, aucune, mais ce que je supportais mal

23 c'était la situation générale qui nous est tombée dessus dans ces régions.

24 Question: D'accord. Mais par rapport… c'est vrai qu'Obrad Popovic vous a

25 raconté beaucoup de choses, mais est-ce que vos yeux, vos oreilles vous

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1 disaient quelque chose? Quel est le résultat, quelle était votre

2 perception de ce qui se passait à cet endroit, que vous connaissiez bien?

3 A la fin vous avez toujours travaillé à cette mine, et tout d'un coup cet

4 endroit se transforme: vos yeux, vos oreilles que vous ont-ils dit sur

5 cette réalité? C'est-à-dire quel est le résultat de votre perception que

6 vous avez vue?

7 Réponse: Ce que mes yeux, mes oreilles me disaient, c'était que c'était

8 pénible cette transformation à partir de la beauté qui existait avant.

9 Cette transformation dans cette région, dans toute la région et puis là

10 aussi.

11 M. le Président: Très bien Monsieur Stojakovic, nous n'avons pas d'autres

12 questions à vous poser. Nous vous remercions beaucoup d'être venu et nous

13 vous souhaitons un bon retour dans votre lieu de résidence. Profitez bien

14 de votre retraite.

15 Je vais demander à M. l'huissier de vous raccompagner.

16 M. Stojakovic (interprétation): Je vous remercie.

17 (Le témoin, M. Moncilo Stojakovic, est reconduit hors du prétoire.)

18 M. le Président: Maître Jovan Simic ou Maître Masic, je crois que nous

19 allons passer à notre dernier témoin, Lakcevic Dusan, c'est cela?

20 M. J. Simic (interprétation): c'est cela Monsieur le Président.

21 Témoin expert, Dusan Lakcevic, c'est notre dernier témoin.

22 M. le Président: Monsieur l'huissier s'il vous plaît pouvez-vous faire

23 entrer le témoin?

24 (Le témoin, M. Dusan Lakcevic, est introduit dans le prétoire.)

25 M. le Président: Bonjour, m'entendez-vous?

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1 M. Lakcevic (interprétation): Je vous entends.

2 M. le Président: Vous allez lire à la déclaration solennelle que M.

3 l'huissier va vous tendre s'il vous plaît.

4 M. Lakcevic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

5 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

6 M. le Président: Vous pouvez vous asseoir.

7 Donc avant tout, merci beaucoup d'être venu. Ici nous avons convenu que

8 votre rapport en principe sera équivalent à l'interrogatoire principal et

9 donc nous allons passer tout de suite aux questions dans le contre-

10 interrogatoire par le Procureur. C'est donc Mme Somers qui va vous poser

11 des questions.

12 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Dusan Lakcevic, par Mme Somers.)

13 Mme Somers (interprétation): Merci Monsieur le Président.

14 Monsieur Lakcevic, j'aimerais vous demander si pendant le conflit à

15 Prijedor, il vous est jamais arrivé de vous rendre dans la région pour

16 étudier ce qui se passait sur les lieux, si cela peut vous aider, je peux

17 préciser la période éventuellement.

18 M .lakcevic (interprétation): Je n'ai pas eu l'occasion d'aller là-bas

19 pour une raison très simple, à savoir que je réside à Belgrade dans la

20 République fédérale de Yougoslavie. Mais en tant qu'ancien policier de la

21 République fédérale de Yougoslavie et ayant été membre d'un grand nombre

22 d'équipes d'experts, qui sont à l'origine d'un certain nombre de

23 réglementation et de lois valables et applicables sur la totalité du

24 territoire de la République, de l'ancienne République socialiste fédérale

25 de Yougoslavie, dans toutes les républiques de la Yougoslavie fédérale,

Page 11836

1 j'ai soumis mon avis d'expert en m'appuyant sur ces lois, règlements,

2 instructions et autres obligations.

3 Donc je répète que je n'ai pas eu l'occasion d'aller là-bas, je n'y suis

4 donc pas allé.

5 Question: Merci Monsieur Lakcevic. Pouvez-vous, je vous prie, nous parler

6 de votre expérience de policier? Etiez-vous policier de terrain? Et si

7 oui, pouvez-vous nous parler un peu de votre passé, de votre expérience en

8 tant que policier?

9 Réponse: C'est en 1968 que je suis entré au ministère de l'Intérieur de la

10 Serbie au niveau de la République et en tant que juriste diplômé. Puis

11 plus tard en tant que professeur du droit, docteur en droit, ayant rédigé

12 une thèse sur les affaires intérieures, les organismes de l'intérieur et

13 leurs activités dans le pays, je suis donc entré au ministère.

14 Je n'étais pas un policier qui travaillait dans la rue, compte tenu de ma

15 formation universitaire, de mes qualifications, mais j'ai participé à

16 l'entraînement et même à l'entraînement avancé de tous ceux qui

17 travaillaient dans les diverses organismes du ministère de l'Intérieur, ce

18 qui signifie les policiers, les inspecteurs, les officiers chargés de la

19 sécurité de l'Etat et de la sécurité nationale.

20 Par conséquent, mon expérience était une expérience de théoricien, mon

21 savoir, mes qualifications dépendaient de ce que je recevais du terrain et

22 bien sûr aussi de ce que j'ai appris dans la littérature, dans les textes

23 écrits, et à partir de mon engagement personnel au sein d'un certain

24 nombre d'équipes d'experts et d'inspecteurs.

25 Il faudrait peut-être aussi que j'ajoute également que j'étais membre

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1 d'une commission de la République, de la République socialiste fédérative

2 de Yougoslavie, commission qui représentait tous les secrétariats de

3 l'Intérieur au niveau des républiques. Nous travaillions à l'unification,

4 l'harmonisation des lois. C'est-à-dire que nous essayions de faire que les

5 lois et règlements soient du même type dans toutes les républiques de

6 façon à ce que les règlements applicables par les services de sécurité

7 publique ainsi que tous les autres actes officiels traitant de la sécurité

8 soient pratiquement les mêmes sur tout le territoire du pays.

9 Question: Merci beaucoup Monsieur. Pouvez-vous nous dire, pour que tout

10 soit absolument clair, si votre expérience vient principalement de la

11 République de Serbie? Vous avez surtout travaillé en République de Serbie,

12 quelle que soit l'action que vous avez pu avoir sur le plan professionnel

13 au niveau inter-république dans le pays, est-il permis de s'exprimer

14 ainsi?

15 Réponse: Je peux me dire d'accord avec vous en partie, car en tant que

16 personne qui s'occupait de science, je devais aussi tenir compte de

17 l'expérience acquise dans les autres républiques.

18 C'est dans un travail commun mené au sein du secrétariat fédéral de

19 l'Intérieur, autrement dit le ministère de l'Intérieur de la Yougoslavie

20 de l'époque, que nous avions très fréquemment des réunions avec des

21 scientifiques, des collègues, que nous participions à des symposiums. Je

22 ne peux donc pas dire que je n'étais absolument pas au courant, mais bien

23 entendu et très normalement mon expérience personnelle s'est construite et

24 s'est perfectionnée sur le territoire de la République de Serbie.

25 Question: Vous avez indiqué, Monsieur Lakcevic, que vous receviez des

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1 informations du terrain sous forme de règlements et autres textes

2 officiels. Quand vous parlez de terrain, je vous demande quelles étaient

3 vos sources d'information, en particulier s'agissant de ce qui se passait

4 sur le territoire de la municipalité de Prijedor, disons, depuis la fin

5 1991 jusqu'au mois d'août ou à la fin du mois d'août 1992? Comment avez-

6 vous appris ce qui se passait sur les lieux pendant cette période?

7 Réponse: S'agissant des informations que je recevais de Bosnie Herzégovine

8 et en particulier de la région sur laquelle vous insistez, je peux dire

9 que les informations que j'ai reçues m'ont été fournies par la télévision

10 et la presse. C'étaient les seules informations dont je disposais car je

11 n'ai pas ressenti le désir ni le besoin d'aller recueillir des

12 informations sur cette région.

13 Question: Pouvez-vous nous dire sur quel média vous vous êtes appuyé, et

14 bien entendu quelle station de télévision vous avez suivi pour satisfaire

15 vos besoins?

16 Réponse: Si vous insistez sur ce point, je vous dirai qu'il s'agit

17 principalement de la radio télévision serbe.

18 Question: Vous êtes-vous à quelque moment que ce soit intéressé ou bien

19 avez-vous à quelque moment que ce soit eu l'occasion de recueillir des

20 informations provenant de Sarajevo ou peut-être de Croatie ou de Slovénie?

21 Réponse: Non et je n'en avais pas le besoin.

22 Question: Pourquoi n'en n'aviez-vous pas le besoin? Cela n'aurait-il pas

23 permis de créer un équilibre dans votre recueil d'informations? N'aurait-

24 ce pas été utile que vous agissiez de cette façon?

25 Réponse: A ce moment-là, je ne savais pas ce qui arriverait, auquel cas je

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1 me serais sans doute comporté de façon différente. Parce que je vivais en

2 République socialiste fédérative de Yougoslavie, un pays divisé en

3 plusieurs républiques, et comme j'étais déjà un homme d'âge mûr, je n'ai

4 pas réussi à imaginer que ce pays allait se démanteler. Mais c'était peut-

5 être pour des raisons affectives que j'ai été dans l'incapacité de me

6 rendre compte de cela.

7 Question: Quand vous dites que vous ne saviez pas que cela allait arriver,

8 vous référez-vous au démantèlement de la Yougoslavie ou aux événements qui

9 sont intervenus à Prijedor et dans les diverses municipalités qui

10 composaient la Republika Srpska sur le territoire de la Bosnie

11 Herzégovine?

12 Réponse: Oui oui.

13 Question: Excusez-moi mais vous répondez oui à quoi? Au démantèlement de

14 la Yougoslavie ou aux événements dans les municipalités de Bosnie-

15 Herzégovine?

16 Réponse: En tout état de cause, je parle tout d'abord du démantèlement, de

17 l'éclatement de la Yougoslavie, puisque tout le reste résulte de cet

18 éclatement. Mais de toute façon, je n'avais pas l'occasion et je n'avais

19 pas non plus ni l'intention, ni le désir, ni d'ailleurs la possibilité de

20 suivre tout cela de très près.

21 Question: Aviez-vous des collègues originaires du ministère de l'Intérieur

22 de Sarajevo?

23 Réponse: Oui avant l'éclatement de la Yougoslavie.

24 Question: Auriez-vous l'amabilité de donner le nom de certaines de ces

25 personnes avec qui vous aviez des contacts professionnels et qui venaient

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1 de Sarajevo, donc de Bosnie de façon générale?

2 Réponse: Non non.

3 Question: Vous ne voulez pas donner leur nom ou vous ne vous rappelez pas?

4 Réponse: Ma réponse est la suivante: tout de même, j'étais d'une certaine

5 manière professeur universitaire de la police, et je ne ferai pas de

6 fausse modestie, tout le monde me connaissait plus ou moins. Quant à moi,

7 je connaissais moins les gens et, si je les connaissais, il m'arrivait de

8 ne les connaître que par leur surnom, mais je ne les connaissais pas

9 vraiment.

10 Question: Vous ne pouvez pas vous rappeler le nom d'un seul professeur de

11 Sarajevo dont le nom serait resté dans votre souvenir?

12 Réponse: Ecoutez, je peux me rappeler les professeurs de l'université de

13 droit, mais la plupart d'entre eux sont morts aujourd'hui. Quant à la

14 Bosnie-Herzégovine, pour autant que je le sache, elle ne disposait que

15 d'une école secondaire formant au profession du ministère de l'Intérieur,

16 et moi je ne m'intéressais pas particulièrement à cette école compte tenu

17 du fait que mes intérêts portaient surtout sur les institutions

18 d'éducation supérieure ainsi que sur l'institut de l'Etat de Belgrade qui

19 se situait à un niveau fédéral.

20 Question: Monsieur Lakcevic, avez-vous dans votre vie eu une activité

21 politique, et en avez-vous une aujourd'hui centrée sur les intérêts serbes

22 ou de manière plus générale sur la vie quotidienne? Etes-vous quelqu'un

23 qui a une activité politique?

24 Réponse: Je n'ai pas participé, parce que personnellement je ne le

25 souhaitais pas. Par ailleurs, la loi applicable au niveau du ministère de

Page 11841

1 l'Intérieur m'empêchait d'avoir des activités ne serait-ce que syndicales

2 et encore davantage des activités politiques, de sorte que, sur ce plan,

3 je n'exprimais pas mes souhaits et par ailleurs les lois et règlements s'y

4 opposaient également.

5 Question: Pourriez-vous nous dire si cette loi applicable au niveau du

6 ministère de l'Intérieur -et je vous demande de vous appuyer sur votre

7 expérience pour nous répondre-, est-ce que cette loi aurait pu

8 éventuellement empêcher également que les actions de tel ou tel parti

9 politique, sur le plan de la police et de la justice criminelle,

10 s'orientent dans une direction particulière, disons l'action du SDS? Est-

11 ce que ce parti, d'après la loi, aurait pu s'orienter vers des activités

12 criminelles?

13 Réponse: Je n'étais pas sur le terrain, je n'étais pas dans la région dont

14 vous parlez, je veux dire Prijedor et la République de Bosnie-Herzégovine,

15 donc je ne peux pas répondre à votre question.

16 Tout ce que je peux dire en ce qui concerne la Serbie, c'est que des cas

17 de ce genre n'ont pas eu lieu, ne se sont pas produits. Je parle de la

18 République de Serbie parce que c'est là que je travaillais. Quant à la

19 Bosnie-Herzégovine, vraiment je ne peux rien en dire car je n'étais pas

20 présent sur le terrain et je n'ai rien entendu au sujet de cela, je n'ai

21 rien appris à ce sujet par les mass media ou d'une quelconque autre

22 source.

23 Mais je dois ajouter un élément, à savoir que les activités

24 professionnelles de la police, la prévention du crime, le maintien de

25 l'ordre public et de la loi, toutes ces activités sont liées au service de

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1 sécurité publique et bien entendu à ceux de la sécurité de l'Etat

2 également qui est responsable de défendre l'ordre constitutionnel, et

3 c'est la raison pour laquelle on parle de ce service sous la dénomination

4 du service de sécurité de l'Etat.

5 Question: Nous revenons sur le point que vous avez fait au sujet de loi.

6 Mais je reviendrai sur ce point au sujet de la loi et de l'ordre: je pense

7 que vous parlez du ministère de l'Intérieur -et j'en parle sur un plan

8 strictement théorique-, vous avez indiqué que vous alliez discuter à

9 partir de ce point de vue théorique, est-ce qu'un parti politique pouvait

10 orienter ses activités s'agissant des institutions de police ou du

11 maintien de l'ordre dans le sens indiqué?

12 Réponse: Je suis un homme qui respecte la loi, donc ma réponse sera

13 conforme à cela. J'ai un regard professionnel sur tout cela, je parle donc

14 des obligations constitutionnelles de ceux qui dépendent du ministère de

15 l'Intérieur. Peut-être aurais-je dû vous fournir une réponse différente

16 qui vous aurait peut-être davantage satisfaite, si j'avais été sur les

17 lieux. Mais je dois dire que je n'ai pas agi en dehors du ministère de

18 l'Intérieur, et j'ai pu lire les lois applicables aux Etats-Unis; en

19 Angleterre s'agissant de la professionnalisation de ces institutions:

20 quand un nouveau gouvernement arrive au pouvoir, que fait-il par rapport à

21 l'ancien ministère? Est-ce qu'il dépend de ce ministère ou est-ce que,

22 professionnellement, les choses changent? Je dois dire que, chez nous, les

23 professionnels restent en place, les gouvernements peuvent changer autant

24 qu'ils veulent, mais les professionnels restent en place. Et ce que je

25 viens de dire s'applique bien entendu à la police.

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1 Question: Donc un professionnel doit pouvoir rester à son poste

2 indépendamment de son appartenance ethnique ou de sa religion, c'est ce

3 que vous dites? Si un gouvernement change en temps de paix, un

4 professionnel doit pouvoir rester à son poste indépendamment de son

5 appartenance ethnique ou d'autres caractéristiques immuable?

6 Réponse: Ecoutez-moi, il m'est difficile de répondre à votre question

7 parce que moi je parle de situation normale, et la guerre est une

8 situation anormale dans laquelle les relations entre les gens sont

9 différentes.

10 Mais dans une situation normale, ce que j'ai dit tout à l'heure au sujet

11 des professionnels, je le maintiens.

12 Question: Mais Monsieur, est-ce que vous souhaitez que nous comprenions

13 que votre rapport d'expert traitait des rapports dans la police et des

14 situations en temps normal, et pas dans ce que vous avez qualifié de

15 "situation anormale", à savoir la guerre? Est-ce que c'est cette

16 description de la situation normale que l'on trouve dans votre rapport?

17 Réponse: En effet.

18 Question: Eh bien, si tel est le cas, je vous demanderai, en vous

19 demandant toujours de vous appuyer sur votre expérience importante, je

20 vous demanderai la chose suivante: un certain nombre de dépositions ont

21 été entendues ici selon lesquelles un accusé au moins ne souhaitait pas

22 participer au travail exigé de lui au centre d'enquête ou dans le camp

23 d'Ormaska, et la question était posée de savoir ce qu'une personne pouvait

24 faire lorsqu'elle subit un tel ordre?

25 Pouvez-vous nous dire, selon votre expérience en tant que professeur

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1 spécialisé dans les questions policières, ce que vous pensez d'une

2 situation dans laquelle une personne, un policier est soumis à un ordre

3 illégal ou peut-être à un ordre qui pourrait déboucher sur la commission

4 d'un crime, que peut faire ce policier dans une telle situation? Quelles

5 sont les options qui se présentent à lui selon vous?

6 Réponse: La réponse à cette question est la suivante: j'ai donné mon avis

7 d'expert et mon avis personnel sur la base de mon expérience du droit

8 régissant les questions qui dépendent du ministère de l'Intérieur sur la

9 base donc des règlements de service et des instructions de travail qui

10 régissent les enquêteurs chargés des enquêtes criminelles dans les centres

11 techniques chargés de ces enquêtes.

12 Je ne peux donc pas répondre à votre question, je ne peux pas la commenter

13 non plus pour une raison très simple, à savoir que je ne connais pas la

14 situation que vous venez de décrire. Je n'ai jamais connu quelqu'un qui a

15 travaillé dans ces circonstances. Je ne connais pas la structure et

16 l'organisation dans laquelle travaillaient des personnes placées dans la

17 situation que vous avez décrite. Je ne connais pas la structure qui

18 existait à l'époque dont vous parlez.

19 Mais bien sûr je suis très ferme et je maintiens ce que j'ai dit ici, à

20 savoir que les autorités et les attributions d'un policier d'active et

21 d'un policier de réserve, sont celles que j'ai décrites. Mais je ne sais

22 pas s'ils auraient pu agir d'une façon ou d'une autre dans la situation

23 que vous décrivez.

24 Il faudrait qu'on me décrive plus concrètement la situation, que l'on me

25 donne tous les paramètres pour que je puisse répondre à la place de cette

Page 11845

1 personne au problème qui était le sien en vous donnant mon avis personnel

2 sur la question.

3 Question: Je demanderai à l'huissier de distribuer la pièce à conviction

4 de l'accusation 3/275A pour la version serbo-croate et 3/275B pour la

5 traduction anglaise.

6 (L'huissier s'exécute.)

7 Mme Somers (interprétation): Vous avez sous vos yeux, Docteur Lakcevic, un

8 document émanant du ministère des Affaires intérieures de la République

9 socialiste de Bosnie-Herzégovine de Sarajevo, avec la date de septembre

10 1991.

11 Pour l'information de la Chambre, il y a une déclaration qui est ajoutée à

12 ce document qui indique de quelle la source le Bureau du Procureur tient

13 ce document.

14 Je voudrais vous demander de regarder les paragraphes 40 en anglais, il

15 s'agit de la page 9, et en langue serbo-croate il s'agit de la page 11.

16 Docteur, ceci a été publié de façon officielle. Il s'agit probablement de

17 règles de lois de ce qui était la République socialiste de Bosnie-

18 Herzégovine. Ceci prévalait à l'époque, c'est-à-dire était valable à

19 l'époque dont nous discutons.

20 Et je voudrais vous demander votre avis tout d'abord en ce qui concerne le

21 point 39. Il est écrit que: "Les ordres doivent être légaux, complets,

22 donnés à temps et clairs pour que les employés puissent les comprendre."

23 Ensuite, il est dit que: "Les supérieurs hiérarchiques qui donnent l'ordre

24 doivent assurer les moyens pour exécuter cet ordre ou la tâche

25 officielle." Ensuite, paragraphe 40: "Les employés doivent exécuter les

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1 ordres de leurs supérieurs. Si un employé croit que l'ordre donné par les

2 supérieurs n'est pas en accord avec la loi, il doit en prévenir l'officier

3 supérieur qui a émis l'ordre de le faire. L'employé doit exécuter l'ordre,

4 quand cet ordre a été répété par écrit, et en même temps informer les

5 supérieurs hiérarchiques immédiats ou une unité organisationnelle ou les

6 ministères. Donc, les employés dans ce cas-là n'auront pas le devoir

7 d'exécuter cet ordre."

8 Je continue: "Si l'exécution de cet ordre répété, écrit représente un

9 délit criminel, les employés ne vont pas exécuter cet ordre, ils vont en

10 informer les supérieurs hiérarchiques ou bien l'unité organisationnelle

11 appropriée ou bien les hautes instances du ministère. L'employé qui

12 exécute un tel ordre va être tenu responsable ainsi que les supérieurs."

13 Connaissez-vous ce type de régulation de loi? Est-ce que c'est quelque

14 chose qui existait dans la pratique de la police en Serbie?

15 Réponse: La question que vous avez lue, c'est quelque chose de similaire

16 qui existe dans tous les pays démocratiques, mais, à nouveau, ces

17 instructions s'impliquent dans un état normal, en temps de paix.

18 Et pour vous répondre, il est évident qu'il faut voir comment on va

19 interpréter cet ordre: de quelle façon cet ordre a été émis, est-ce que

20 quelqu'un s'est opposé à l'exécution de cet ordre, est-ce qu'il en a

21 informé les supérieurs etc.

22 Mais en tout cas, en ce qui concerne l'explication de cette loi, eh bien,

23 il est évident que, si un ordre représente un délit au pénal, eh bien on

24 peut refuser d'exécuter cet ordre sous certaines circonstances. Mais je

25 répète à nouveau, c'est la situation qui s'applique à l'état de paix quand

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1 il n'y a pas de guerre.

2 Question: Donc excusez-moi, mais ce que vous venez de dire, vous le dites

3 aussi dans le texte de votre opinion d'expert? Excusez-moi, j'ai un

4 problème avec ma voix.

5 Réponse: Pourriez-vous m'expliquer ce que vous venez de dire? Vous pensez

6 à mon opinion d'expert?

7 Question: Oui, je pense à des rapports dont vous avez déjà parlé, les

8 structures, etc., vous avez déjà parlé de cela?

9 Réponse: Oui, oui, oui. Je dois vous dire aussi que j'ai analysé avec

10 beaucoup d'attention et je pense que vous aussi, depuis le temps que vous

11 vous occupez de cette affaire, je pense que vous avez pu avoir une idée

12 assez claire de la structure organisationnelle du ministère.

13 Mais moi, je vais partir à partir de cette unité, la plus petite de la

14 police: les commandants, ensuite les postes de police, les postes de

15 sécurité publique, ensuite les centres de sécurité et les ministères.

16 Par exemple, ce commandant, il ne pourrait pas sanctionner un policier qui

17 commet un délit, mais il devrait tout d'abord en informer le commandant du

18 poste de police qui est le seul à avoir le pouvoir d'entreprendre des

19 actions.

20 Donc, il existe la possibilité de porter plainte, ensuite il y a un

21 Tribunal disciplinaire, il y a une commission disciplinaire, le Procureur

22 et la défense. Et donc, le commandant, le commandant du poste de police

23 peut suspendre un policier et peut soumettre le dossier aux organes

24 compétents pour continuer la procédure à cause des violations qu'il a

25 commises.

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1 Question: Docteur Lakcevic, si je vous ai bien compris, en regardant le

2 contexte de ce qui est écrit, au moins sur papier, il existe une option

3 pour chaque policier à tout niveau, à chaque policier qui croit qu'un

4 ordre qui lui a été donné constituait un délit, eh bien il existe la

5 possibilité pour lui de ne pas exécuter cet ordre. Est-ce que c'est

6 l'interprétation correcte du texte de ma part?

7 Réponse: Oui, oui, oui. Je pense que oui. Mais il s'agit ici de la

8 théorie. Moi, je n'étais pas présent au moment de la guerre, je n'ai pas

9 pu voir, examiner des cas particuliers pour pouvoir vous faire mon

10 commentaire là-dessus, mais évidemment il faut tenir compte de l'époque,

11 de l'époque où ces textes ont été élaborés et de l'épode dont nous

12 discutons en ce moment-ci parce qu'il s'agit de deux contextes différents.

13 Question: Est-ce que vous conviendrez qu'il s'agisse du temps de guerre ou

14 de paix, un meurtre, un viol, des sévices corporels, des tortures, des

15 vols, tout cela représente des crimes qu'il s'agisse du temps de guerre ou

16 bien du temps de paix, n'est-ce pas? Peu importe?

17 Réponse: Je suis venu ici vous donner mon opinion d'expert. Je vais donc

18 vous demander de rester dans le domaine de mon expertise, à savoir vous me

19 posez une question, il y avait sans doute des personnes qui étaient venues

20 ici pour donner leur opinion d'expert au sujet des agissements d'un

21 certain nombre de personnes ou de groupes. Il existe sans doute aussi des

22 régulations de lois qui régissent le droit de la guerre, il faudrait s'y

23 référer mais en tout cas ceci sort du domaine de mon expertise.

24 Je peux en revanche m'exprimer en temps qu'homme. Evidemment, je peux dire

25 qu'il y avait des crimes de guerre, mais est-ce qu'il y a eu des crimes de

Page 11849

1 guerre ou pas? Moi je ne peux pas vous dire, je n'étais pas là sur le

2 terrain, donc si vous posez la question à d'autres, ils vous diraient tous

3 qu'ils sont contre les crimes de guerre. C'est la vérité, mais ceci ne

4 rentre pas dans le domaine de mon expertise.

5 Question: Eh bien, dans le domaine de votre expertise, dans votre opinion

6 d'expert, vous faites des commentaires concernant les membres de milices

7 de réserve. Je regarde la page 8 en anglais où vous dites que: "Une

8 personne qui est impliquée, qui fait partie de la sécurité nationale et

9 publique, il doit s'agir des officiels et ils n'ont pas le droit de

10 participer aux meurtres, aux pillages, aux viols, aux crimes de ce genre,

11 etc. qu'il s'agisse de temps de guerre ou de paix", n'est-ce pas?

12 Réponse: Quand j'ai parlé des forces de police de réserve dans mon opinion

13 d'expert, quand j'ai parlé de leurs engagements, j'ai dit qu'on pouvait

14 les engager dans les circonstances extraordinaires, c'est-à-dire les

15 catastrophes naturelles, les tremblements de terre, feu, incendie etc., et

16 que ces personnes doivent être autorisées par un membre officiel du

17 service, et qu'il est possible de donner une réponse concernant chaque

18 individu appartenant à de telles forces, mais à condition que vous ayez

19 des éléments nécessaires: son âge, est-ce qu'il est allé à l'école, sa

20 personnalité etc., et à condition qu'il exécute ses tâche de la façon

21 convenable.

22 De l'autre côté, je pense que moi je ne devrais pas vous répondre à la

23 question si un crime est un crime puisque, nous, nous faisons partie du

24 monde de l'Europe. Nous appliquons nos lois, nous appliquons ces lois-ci

25 et je ne peux pas vous répondre en ce qui concerne chaque cas particulier,

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1 parce que je parle de façon globale, et je pense que vous avez la réponse

2 dans mon rapport.

3 Question: Si on regarde le temps de paix, car apparemment vous êtes plus à

4 l'aise dans ce domaine, il y avait une déclaration sous serment faite par

5 un accusé qui a mentionné -je regarde l'affidavit de Rade Knezevic-, il a

6 donc dit que sur le territoire de l'ex-Yougoslavie la force était souvent

7 utilisée en temps de paix pour recueillir des témoignages, des aveux, etc.

8 Au cours de votre travail de recherche, avez-vous trouvé des cas

9 semblables en Serbie ou en Yougoslavie?

10 Réponse: En ce qui concerne mes connaissances dans l'ex-république

11 fédérale socialiste de la Yougoslavie et en Serbie et à travers mon

12 travail par participation aux différentes commissions, les commissions qui

13 ont élaboré différentes lois, je dois répéter que nous, en tant qu'un pays

14 qui fait partie de l'Europe et du monde, eh bien, nous avons appliqué les

15 lois. Et c'est écrit d'ailleurs très clairement dans la loi que tout abus

16 d'une fonction ou d'une fonction professionnelle, ou bien chaque violation

17 de la loi représente un délit criminel.

18 Notre force de police, et je peux le dire très clairement, surtout à

19 l'époque où notre police a eu une formation particulière c'est-à-dire

20 depuis 1968 dans l'ex-Yougoslavie, eh bien nous avons entraîné, formé nos

21 policiers, et je peux le dire sans fausse modestie, nous avons formé une

22 force de police en nous basant sur cette relation entre la police et les

23 citoyens. Et je peux vous dire que la police yougoslave a été félicitée

24 par le monde entier, par Interpol, par les Etats-Unis d'Amérique. Ils nous

25 ont donné des moyens financiers, ils nous ont aidés pour lutter contre les

Page 11851

1 drogues, la criminalité, le terrorisme etc.

2 Je peux vous dire que nous avons été aussi efficaces car nous coopérions

3 avec les citoyens qui nous appelaient, qui nous informaient du fait que

4 les crimes avaient été commis. Evidemment, il a pu y avoir des

5 infractions, il a pu y avoir des actes, des délits de commis et il y en

6 aura toujours mais je peux vous dire que de tels cas ont toujours été

7 repérés, sanctionnés. Moi j'ai pu rencontrer de tels cas à l'époque où

8 j'ai été juge au tribunal disciplinaire de la Serbie, et je les ai donc

9 toujours sanctionnés, ces cas isolés.

10 Mais je peux vous expliquer à nouveau que nous nous basons sur les

11 rapports de police. Moi je peux, par exemple, conduire une enquête, je

12 peux demander une enquête, je peux la faire d'ailleurs. Je peux demander

13 qu'on fouille un appartement ou recueillir des informations. Mais dans la

14 phase de la procédure légale, et ceci ne peut être fait que par un juge

15 d'enquête et d'instruction, à partir du moment où le juge d'instruction a

16 terminé son enquête, eh bien il est obligé de s'appuyer sur les

17 déclarations qui avaient été recueillies par la force de la police.

18 Et dans une enveloppe sous scellés, donc cette déclaration, ce rapport de

19 la police ne peut être utilisé que dans les cas extrêmes en tant que

20 moyens de preuve. Donc si des cas isolés se sont produits quand quelqu'un

21 a utilisé la force par exemple ou bien la coercition, ces déclarations

22 peuvent être utilisées au cours d'un procès.

23 Nous respectons toujours les règles et la procédure, et ceci fait partie

24 du code de conduite pénale et de la loi sur la procédure pénale.

25 M. le Président: Nous allons donc faire une pause de 30 minutes et je vais

Page 11852

1 demander à M. l'Huissier de raccompagner le témoin hors du prétoire s'il

2 vous plaît.

3 (L'audience, suspendue à 10 heures 50, est reprise à 11 heures 38.)

4 (Les accusés sont introduits dans le prétoire.)

5 M. le Président: Veuillez vous asseoir s'il vous plaît.

6 (Le témoin, M. Dusan Lakcevic, est réintroduit dans le prétoire.)

7 M. le Président: Vous pouvez vous asseoir s'il vous plaît Monsieur

8 Lakcevic.

9 Madame Somers, vous pouvez continuer s'il vous plaît.

10 Mme Somers (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

11 Docteur Lakcevic, vous avez répondu à ma question, à savoir j'ai parlé des

12 affidavits où la personne qui a prêté serment, qui a fait cette

13 déclaration sous serment, a dit que sur le territoire de l'ex-Yougoslavie,

14 la force était souvent utilisée dans le travail de la police au cours des

15 enquêtes. Votre réponse a été très longue avec beaucoup d'informations,

16 mais ce n'était pas une réponse exacte.

17 Pourriez-vous nous dire si ceci correspond à la vérité ou non? Est-ce que

18 c'était une pratique acceptée dans le cadre du travail de police dans

19 l'ex-Yougoslavie pour autant que vous le sachiez? Y a-t-il eu recours à la

20 force au cours des enquêtes ou des interrogatoires que subissaient des

21 prisonniers ou des détenus?

22 M. Lakcevic (interprétation): Quels que soient vos souhaits, vos désirs,

23 vous insistez -c'est vrai- mais je suis désolé, je dois vous dire que ceci

24 n'est pas exact.

25 Tout d'abord, la loi, les réglementations et les contrôles exercés par les

Page 11853

1 gens qui ont des missions opérationnelles, c'est-à-dire au moment où on

2 arrête des suspects, des suspects accusés ou pour lesquels on pense qu'ils

3 ont commis des crimes, ou bien si on les arrête et si on les présente au

4 juge d'instruction compétent, eh bien, la mission de la police va être de

5 respecter les lois et les réglementations et de respecter la dignité

6 humaine.

7 Moi je nie la déclaration, je n'accepte pas la déclaration de Knezevic qui

8 déclare que ceci s'est produit souvent. Si cela s'est produit, cela ne

9 pouvait être que des cas isolés, et dans ce cas-là il y avait des

10 sanctions appropriées, des sanctions prévues à l'encontre des personnes

11 qui ont fait appel à la force, à la contrainte, menaces, mensonges et

12 supercheries j'insiste sur ce mot.

13 Question: Merci pour votre explication Docteur. Dans votre rapport, vous

14 parlez de la police et de l'armée, de la relation entre les deux. Je

15 voudrais vous demander votre point de vue professionnel sur un certain

16 nombre de points.

17 Par exemple, il y avait un élément de preuve du Procureur qui avait été

18 utilisé dans le contre-interrogatoire d'un témoin pour l'accusé Kos, il

19 s'agissait d'un certain Skrbic la pièce du Procureur 3/213. Je vais

20 demander à l'huissier de la placer sur le rétroprojecteur.

21 Docteur Lakcevic, l'individu qui a témoigné était un policier de police,

22 un policier qui a subi beaucoup d'entraînements dans la Bosnie après

23 Dayton et qui était un officier de police avant les Accords de Dayton.

24 Je vous poserai une question: ce document qui est signé par Stojan

25 Zupljanin, tout d'abord connaissez-vous ce nom, Stojan Zupljanin?

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1 Réponse: Non, je ne le connais pas.

2 Question: Ce document signé par cet individu dont la Chambre connaît, elle

3 connaît son nom tout au moins, c'est écrit: "Après la requête faite par le

4 2e Corps de Krajina, je vous ordonne ici d'engager les membres de la

5 police suivant du poste de sécurité de Jajce pour être subordonnés au

6 commandement de la région de responsabilité." Et ensuite, on énumère les

7 municipalités et les officiers de police qui doivent exécuter ces tâches.

8 Pourriez-vous nous dire à quelle fréquence, d'après l'expérience que vous

9 avez eue, des membres de la police étaient subordonnée à l'armée, c'est-à-

10 dire placés sous leur commandement effectif pour mener des actions que

11 l'on peut considérer comme actions militaires?

12 Réponse: Malheureusement je n'ai aucune expérience là-dessus. Moi mon

13 expertise, mon opinion d'expert, je l'ai élaborée en me fondant sur les

14 temps de la paix, l'époque où il n'y avait pas encore la guerre, alors que

15 la date qui figure ici, le 26 août 1992, eh bien, il y avait déjà la

16 guerre.

17 Evidemment, des ordres pareils n'auraient jamais pu être émis du temps de

18 paix, ils n'auraient pas pu être exécutés non plus, mais la situation ici

19 était différente.

20 Question: Je voudrais voir si je vous ai compris. Vous avez dit qu'en

21 temps de paix, excusez-moi, est-ce que vous dites qu'en temps de paix, de

22 tels rapports ne peuvent pas exister, des rapports qui viennent de vous

23 être décrits par ce document, c'est-à-dire que les unités de la police, la

24 police ne peut pas être subordonnée aux unités militaires?

25 Réponse: Non, c'est-à-dire non était ma réponse. Dans l'ex-République

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1 fédérative socialiste de Yougoslavie, celle-ci n'était pas possible? Un

2 tel document ne pouvait pas être valide et une telle mission ne pouvait

3 pas être exécutée.

4 Mais maintenant, vous me donnez un document précis, qui est très

5 difficilement lisible, je ne peux pas m'exprimer là-dessus, mais je

6 maintiens mon affirmation en vous disant qu'il existe un certain nombre de

7 rapports en temps de paix qui ne comprennent pas la subordination de la

8 police à l'armée pour exécuter un certain nombre de missions, à part une

9 coopération du point de vue d'échange d'informations dans le cadre du

10 ministère des Affaires intérieures et des armées.

11 Question: Je voudrais aussi vous poser une question, Docteur. Il s'agit du

12 document du Procureur 2/4.16 qui a reçu la cote de la défense 40/5 hier,

13 et donc je vais tout simplement vous lire une partie de ce document. Je

14 vais vous demander votre commentaire.

15 Donc, une partie de ce document, l'extrait vient de la partie qui avait

16 été signée par Simo Drljaca. En anglais, il s'agit de la page 3 et en BCS,

17 de la page 4:

18 "Les autorités locales armées et même la police n'étaient pas préparées

19 pour de tels développements, croyant qu'il y avait un accord pacifique et

20 civilisé entre les communautés ethniques. Donc le problème de procurer

21 l'abri et la sécurité pour les personnes employées s'est produit dans une

22 telle situation…"

23 M. le Président: Maître Masic?

24 M. Masic (interprétation): Excusez-moi d'interrompre le Procureur mais je

25 voudrais demander que l'on présente le document au témoin sans en donner

Page 11856

1 lecture, tout simplement.

2 M. le Président: Maître Masic?

3 M. Masic (interprétation): Si j'ai bien compris, Madame la Greffière a

4 déjà rangé ce document?

5 M. le Président: J'ai fait signe à Mme Thompson d'attendre car je ne

6 savais pas si le témoin expert avait besoin ou non de ce document.

7 Je crois qu'il est suffisant d'entendre la lecture. Vous avez le document,

8 vous pouvez contrôler si Mme Somers lit tout ce qu'il y a sur le document

9 ou non. Pour que le témoin puisse répondre, il suffit d'entendre et après

10 de poser la question. Sinon nous allons perdre beaucoup de temps.

11 Madame Somers, je vous dis que le témoin expert a répété beaucoup de fois

12 qu'il n'a pas considéré et étudié la question de temps de guerre. Nous

13 sommes ici pour analyser les situations en temps de guerre. Peut-être

14 allons-nous donc perdre beaucoup de temps.

15 Je voudrais Maître Masic l'économiser mais, si vous l'estimez

16 indispensable, nous pouvons donner le document au témoin. Moi-même, je

17 pense que ce n'est pas nécessaire mais si vous pensez et vous insistez

18 Maître Masic…

19 M. Masic (interprétation): Vous savez Monsieur le Président, je n'insiste

20 pas là-dessus. Mais si la question se pose, concernant cette période-là,

21 je pense qu'il serait nécessaire que l'expert puisse examiner ce document.

22 Je suis entièrement d'accord avec vous pour dire que l'expert s'est

23 exprimé à plusieurs reprises aujourd'hui pour dire qu'il n'était pas en

24 mesure de commenter cette période-là, puisqu'il ne l'a pas étudiée.

25 Mais si le Procureur insiste pour qu'il se prononce tout de même au sujet

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1 de cette période-là, je pense qu'il serait dans ce cas-là nécessaire qu'il

2 puisse examiner ce document pour en faire son commentaire.

3 M. le Président: Madame Thompson, il serait peut-être mieux de donner le

4 document pour n'avoir aucun doute. Mais je vous dis Maître Masic, si c'est

5 comme ça, je ne comprends pas pourquoi le témoin vient ici.

6 Nous sommes ici pour analyser le temps de guerre et non pas le temps de

7 paix. De toute façon, le Procureur a le droit quand même de poser les

8 questions relatives à ce temps, ce temps que nous analysons.

9 Donc Madame Thompson, avez-vous le document?

10 Mme Somers (interprétation): Si cela peut vous aider, j'ai le BCS.

11 M. le Président: Il faudrait aussi avoir la version anglaise sur le

12 rétroprojecteur. Nous allons discuter jusqu'à la fin. Madame Thompson, la

13 version anglaise pour le rétroprojecteur car le public a le droit de nous

14 suivre.

15 Mme Somers (interprétation): Madame la Greffière, il s'agit du document

16 2/4.16 ou D40/5, ils ont les deux cotes à la fois. C'est un document qui

17 est daté d'hier. Il s'agit d'un rapport et la majeure partie du rapport a

18 été présentée par Vojin Bera. C'est un rapport concernant les camps et je

19 voudrais me référer maintenant à la partie qui se trouve vers la fin et

20 qui a été signée par Simo Drljaca.

21 (L'huissier s'exécute.)

22 Il me semble que nous ayons des difficultés pour ce qui est de retrouver

23 la version anglaise. Je vous proposerai maintenant d'utiliser ma propre

24 copie mais j'ai procédé à des notes dessus, donc cela pourrait prêter à

25 confusion.

Page 11858

1 J'ai peut-être moi-même contribué à la confusion et je crois que c'est

2 peut-être ma faute.

3 Le document porte la cote 3/292.

4 Je m'excuse, c'est moi qui ai mal marqué la cote: il s'agit de la partie

5 vers la fin, signée par Drljaca, en version anglaise, la partie concernée

6 se trouve en page 3 du moins le document rédigé par Drljaca.

7 Nous l'avons retrouvé.

8 (L'huissier s'exécute.)

9 Mme Somers (interprétation): Et maintenant Docteur Lakcevic, nous nous

10 référons à la page 3 de la version anglaise où on dit ce qui suit:

11 "Dans une telle situation, la cellule de crise de la communauté de la

12 municipalité de Prijedor s'est décidée à utiliser Keraterm à Prijedor pour

13 y installer les personnes arrêtées et de les placer sous la surveillance

14 du personnel de poste de sécurité publique de Prijedor et de la police

15 militaire de Prijedor. Le poste de sécurité publique de Prijedor est

16 conscient de la situation au niveau du personnel et du sérieux de la

17 situation nouvellement créée, et suite à cela, il a informé le centre de

18 sécurité à Banja Luka et le commandement du Corps d'armée à Banja Luka

19 pour leur demander de l'aide pour ce qui est du personnel spécialisé qui

20 traiterait de manière opérationnelle les gens incarcérés. Le centre de

21 sécurité et le commandement de Banja Luka ont pris une part active dans la

22 solution de la situation. Ils ont envoyé un grand nombre de professionnels

23 expérimentés à Prijedor, ce qui fait qu'il s'est constitué des équipes

24 mixtes, composées de la sécurité d'Etat, de la sécurité publique et de la

25 sécurité militaire avec pour tâche de traiter de manière opérationnelle

Page 11859

1 les personnes détenues et de déterminer la responsabilité de chaque

2 individu dans le soulèvement armé."

3 Je vais interrompre ma lecture ici, et je voudrais vous poser une question

4 à ce sujet. Je crois que vous vous étiez référé au traitement

5 opérationnel, à la mise en détention provisoire et à la procédure suivie.

6 Je voudrais, que, partant de votre expérience, vous nous disiez si vous

7 êtes au courant de quelque autre situation où l'armée et les services

8 militaires se sont associés au service de la sécurité d'Etat pour conduire

9 des interrogatoires de personnes mises en détention; quelque chose donc

10 d'analogue au processus décrit ici par Simo Drljaca?

11 Je voudrai savoir si vous avez eu ce type d'expériences au cours de votre

12 expérience personnelle?

13 Réponse: Auparavant, je tiens à m'excuser et vous indiquer qu'en anglais,

14 on dit "professionnel expérimenté". Chez nous, on dit travailleur

15 expérimenté. Le mieux aurait été de dire peut-être policier expérimenté ou

16 d'utiliser un autre terme.

17 Maintenant, pour répondre à votre question, je puis vous dire que je n'ai

18 pas séjourné sur le territoire des conflits armés. Ce qui fait qu'au

19 niveau des activités concertées et coordonnées, je ne pourrai pas en

20 parler. Mais en tout état de cause, je crois qu'il convient de signaler

21 que les principes en matière de criminologie doivent être appliqués, ainsi

22 que la loi régissant la procédure pénale qui était en vigueur en ex-RSFY

23 et qui sous-entend qu'à l'époque il a été appliqué dans cette région-là,

24 c'est-à-dire sur le territoire de toute la République de Bosnie

25 Herzégovine.

Page 11860

1 Par conséquent, les règles de comportement et les principes des activités

2 opérationnelles tactiques, en matière de criminologie, déployés par les

3 policiers sont précisés de façon claire, de par la réglementation

4 régissant le service, tout comme par la loi régissant la procédure pénale.

5 A mon avis, il n'importe pas autant de parler de la coopération conjointe

6 entre ces intervenants mais le fait de savoir si l'on s'en est tenu à la

7 réglementation régissant la procédure pénale et la procédure en matière de

8 criminologie. J'en parle en fonction bien sûr de mon expérience et de mes

9 réflexions, mais non pas en fonction d'une situation concrète.

10 Question: Docteur Lakcevic, au cours de la collecte des informations sur

11 la situation à l'époque, vous avez dit que vous vous êtes référé aux

12 médias, à la presse, à la télévision, ainsi de suite. Mais êtes-vous

13 parvenu à une conclusion concernant les attributions des cellules de

14 crise, et est-ce que vous avez appris ce que c'était qu'une cellule de

15 crise en tant qu'instance active du pouvoir, instance chargée de

16 l'exercice du pouvoir dans une situation qui n'est pas habituelle, qui

17 n'est pas normale? Avez-vous à quelque reprise que ce soit analyser la

18 législation mise en oeuvre pour ce qui est des activités des cellules de

19 crise?

20 Réponse: Je dirai que je n'ai pas été en position d'étudier, de disposer

21 de tous les paramètres. Cependant cela ne signifie pas que cela ne fera

22 pas l'objet de l'intérêt que j'y porterai ou que portera à la question

23 quelqu'un d'autre, non seulement pour ce qui est des localités que nous

24 identifions ici, mais d'autres régions également.

25 Donc, je répondrai que je n'ai pas été en position de procéder à des

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1 recherches sur ces questions, pour la simple et bonne raison qui est la

2 suivante: Il s'agissait d'une région en conflit armé et cela ne m'était

3 pas accessible en raison des activités que je devais déployer, et en

4 raison de la situation qui prévalait en ex-République fédérative de

5 Yougoslavie.

6 Question: Vous avez mentionné dans votre réponse les termes suivants:

7 d'après mon expérience, il importe moins de voir dans quel degré ils

8 collaborent, ils coopèrent, mais dans quel degré on s'en tient à la

9 réglementation pour ce qui concerne le fait d'empêcher des actes criminels

10 et de respecter la procédure pénale.

11 D'après l'expérience que vous avez acquise dans votre éducation, je

12 voudrais savoir si dans une situation de guerre, on l'avait appliquée. La

13 procédure pénale qui était prévue et je voudrais savoir si l'on s'en était

14 tenu à ces circonstances concrètes?

15 Réponse: Je dirai en guise de réponse que je ne peux donner une réponse

16 objective, véridique et explicite, et il serait difficile de fonder ce

17 procès sur des hypothèses.

18 A cet effet, je dirai que ma réponse est la suivante: je ne me suis pas

19 aventuré à étudier des cas concrets, parce que chaque cas concret comporte

20 des phases concrètes. Maintenant, de là à savoir si tel inspecteur se

21 conforme et dans quelle mesure il se conforme à cette procédure, c'est une

22 chose à étudier.

23 Il s'agit donc de disposer de paramètres, d'éléments de preuve et de

24 procéder à une analyse. Ce dont je suis donc en train de parler, à savoir

25 du respect des principes et des règles de la procédure pénale, cela peut

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1 être davantage respecté par un inspecteur plutôt que par un autre.

2 Maintenant, je pourrais donc vous donner une réponse objective seulement

3 au cas où je disposerais de faits devant moi, noir sur blanc.

4 M. le Président: Madame Somers, vous savez?

5 Mme Somers (interprétation): Oui Monsieur le Président, je vais essayer de

6 restreindre mes questions et de conduire mon contre-interrogatoire à son

7 terme.

8 Docteur, si cette procédure pénale est applicable, celle qui était en

9 vigueur en Bosnie-Herzégovine à l'époque et celle qui était en vigueur en

10 République de Serbie, pendant combien de jours pouvait-on garder quelqu'un

11 en détention sans entamer une procédure pénale ou sans indiquer la cause

12 de l'arrestation? Il doit y avoir une limite de temps qui était prévue et

13 imposée, pouvez-vous nous en dire quelque chose au niveau de l'arrestation

14 de quelqu'un?

15 Réponse: Juste un moment, je vous prie.

16 Question: Oui, je voudrais que vous me disiez ce que vous êtes en train de

17 lire?

18 Réponse: Je m'excuse, je suis en train de lire la loi régissant les

19 affaires intérieures. Je répondrai à votre question.

20 Question: Je m'excuse: quelle loi régissant les affaires intérieures? De

21 quelle entité êtes-vous en train de parler?

22 Réponse: Il s'agit de la Republika Srpska mais elle est tout à fait

23 identique… elle a été adoptée en 1992 mais elle est identique à celle qui

24 a été en vigueur en Bosnie-Herzégovine du temps de l'ex-République

25 socialiste fédérative de Yougoslavie. Je pense que cette information vous

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1 suffira.

2 Maintenant pour répondre à ce que vous m'avez demandé, dans la loi

3 régissant la procédure pénale, la détention provisoire en police pouvait

4 durer jusqu'à trois jours.

5 Mais ici, cela pour répondre à votre question et ce, de manière détaillée,

6 le fait est de savoir pourquoi ces gens-là s'étaient trouvés dans ce

7 centre de rassemblement ou dans ce centre d'instruction. J'imagine qu'il a

8 été supposé que telle personne devait être placée sous instruction, mais

9 la loi sur l'intérieur permettait une telle détention qui n'était pas

10 considérée comme une garde à vue, mais dans certaines situations le délai

11 prévu par la loi pouvait être prolongé.

12 Donc il s'agissait de mettre en garde à vue des personnes en attendant

13 qu'une situation se passe et ce, lorsqu'il s'agit de situations qui

14 risquaient de mettre en péril la vie d'autres personnes ou les biens

15 d'autres personnes. Donc lorsqu'on estime que, dans certains cas, il

16 s'agissait de limiter les déplacements, la possibilité de déplacements de

17 certains gens, ce qui n'était pas considéré comme une garde à vue, il

18 pouvait être procédé de cette façon.

19 Je ne dispose pas de suffisamment d'informations mais je puis vous

20 affirmer en toute responsabilité que de telles mesures, destinées à la

21 solution de certaines situations au niveau de la sécurité, pouvaient ne

22 pas être traitées comme une garde à vue.

23 Dans la procédure pénale, je tiens à vous dire que cette garde à vue dure

24 3 jours mais le juge d'instruction peut prolonger cela jusqu'à un mois ou

25 deux, et la cour suprême jusqu'à 3 mois. Donc au total cela vous donne 6

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1 mois.

2 Si on accepte maintenant l'opinion que je viens de formuler aux termes de

3 laquelle ce tri qui peut-être n'est pas très approprié, qu'il n'est pas

4 approprié d'utiliser lorsqu'il s'agit de personnes, lorsqu'il s'agit donc

5 de personnes pour lesquelles on ne pense pas qu'elles ont commis des actes

6 pénaux, elles doivent être relâchées.

7 Donc pour ce qui est de la garde à vue en police, c'est un délai de 3

8 jours, mais les juges d'instruction peuvent pour des délits graves

9 demander 6 mois et pour des délits de moindre importance ou de moindre

10 gravité, cela peut s'étirer jusqu'à 3 mois.

11 M. le Président: De combien de temps pensez-vous avoir encore besoin?

12 Mme Somers (interprétation): J'avais demandé à l'origine une heure, et je

13 crois avoir utilisé 26 minutes.

14 M. le Président: Non, votre temps est terminé. Je ne sais pas comment vous

15 faites vos comptes. Je crois que vous devez changer d'horloge encore.

16 Mme Somers (interprétation): Je suis sur le point de finir.

17 M. le Président: Terminez. Allez-y.

18 Mme Somers (interprétation): Merci de m'avoir prévenue, j'avais en effet

19 une heure qui n'est pas la même et je m'excuse pour la différence qui est

20 survenue.

21 Docteur Lakcevic, pour résumer: avez-vous étudié les articles de la loi

22 sur la procédure pénale et de la Constitution qui ont été placés en

23 vigueur par l'autorité placée du temps de la Republika Srpska? Je voudrais

24 savoir si avant de venir témoigner, vous avez étudié cela et comparé avec

25 la situation qui a prévalu dans les Etats issus de l'ex-Yougoslavie?

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1 Réponse: Je répondrai en disant ce qui suit: la loi sur la procédure

2 pénale en vigueur dans la République socialiste fédérative de Yougoslavie

3 a été appliquée aussi bien dans les Républiques qui se sont séparées, et

4 même certains de ces pays appliquent de nos jours encore les articles

5 législatifs en question.

6 Maintenant je suis très au courant de ce qui est appliqué dans la

7 Republika Srpska, dans cette entité-là, quand il s'agit de la garde à vue,

8 de la procédure de police et de la procédure d'instruction judiciaire qui

9 peut s'étirer jusqu'à 3 mois, ou alors à la demande d'un tribunal

10 d'instance supérieure jusqu'à 6 mois.

11 Il n'y a aucun dilemme de ce point de vue-là pour ce qui est de la durée

12 de la garde à vue possible. Maintenant, s'agissant des principes des

13 règlements et des phases de la procédure judiciaire, ces procédures sont

14 tout à fait identiques à celles qui avaient existé dans la loi régissant

15 la procédure pénale en RSFY ou celle qui est encore en vigueur dans la

16 République fédérale de Yougoslavie de nos jours.

17 Mme Somers (interprétation): Je vous remercie.

18 M. le Président: Merci beaucoup Madame Somers.

19 Maître Masic, avez vous des questions supplémentaires?

20 M. Masic (interprétation): Non, nous n'avons pas de questions

21 supplémentaires, je vous remercie beaucoup.

22 (Questions au témoin, M. Lakcevic Dusan, par M. le Juge Riad.)

23 M. Riad (interprétation): Bonjour Docteur Lakcevic. Vous m'entendez?

24 M. Lakcevic (interprétation): Je vous entends. Bonjour.

25 Question: Je voudrais vérifier si je vous ai bien compris au début de ce

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1 que vous nous disiez, vous avez indiqué que vos sources d'informations

2 étaient en général ce que vous pouviez entendre dans les médias, dans les

3 rapports de télévision, et notamment la télévision serbe et ce, depuis fin

4 1991 jusqu'août 1992. Ai-je bien compris ce que vous avez dit?

5 Réponse: Monsieur le Juge, je n'ai pas parlé de dates du tout. Ce n'est

6 pas du tout ce que j'ai dit. Je n'ai pas mentionné août 1992.

7 Question: Bien, c'est moi qui l'ai mentionné. C'est moi qui ai fait la

8 corrélation avec ce que vous avez dit. Est-ce donc bien exact que pendant

9 cette période-là vous avez pris plus concrètement part à ce qui se

10 passait?

11 Réponse: Je n'ai pas pris concrètement part, il n'y avait aucune raison

12 que je le fasse, je n'avais aucune ambition dans ce sens-là. Je n'ai pas

13 été engagé par qui que ce soit et personne n'a demandé mon opinion, ni un

14 engagement plus direct de ma part.

15 Question: En fait, vous avez répondu à plusieurs questions partant de vos

16 réflexions personnelles et non pas en fonction d'une situation concrète,

17 vous l'avez d'ailleurs mentionné à plusieurs reprises.

18 Toutefois, vous avez affirmé ou plutôt daigné ce que Knezevic a dit, renié

19 ou réfuté ce que Knezevic a dit pour ce qui est de l'usage de la force. Le

20 réfutez-vous partant de certaines raisons théoriques de vos connaissances

21 scolaires ou alors d'informations concrètes?

22 Réponse: Monsieur le Juge, je ne suis pas en train d'en parler par cœur

23 sans disposer de certains faits. Je suis en train de parler d'une période

24 où l'ex-République socialiste fédérative de Yougoslavie existait encore,

25 où j'ai pris une part active à ce qui se faisait.

Page 11867

1 S'agissant de l'usage de la force, de la menace ou de quelques subterfuges

2 que ce soient de la part de la police et où des gens chargés d'activités

3 relatives à l'instruction en matière de criminologie, je tiens à dire

4 qu'il n'était pas prévu de recours à la force, de recours à la matraque ou

5 d'armes à feu ou de moyens chimiques. C'était une chose que l'on suivait

6 de près au niveau du ministère fédéral de l'Intérieur.

7 Or, j'ai démenti ou plutôt j'essaie de dire que la déclaration faite par

8 Knezevic c'est ainsi que je l'ai comprise, avait, concernait l'époque

9 aussi où les instances de police s'étaient comportées de façon qui

10 n'excluait pas l'usage à la force ou la contrainte. Nous avions donc suivi

11 au niveau fédéral le comportement des ministères de l'Intérieur des

12 différentes républiques pour savoir si on se servait de force, de

13 matraque, d'armes à feu et ainsi de suite. Pour chaque utilisation de la

14 force physique, de matraques, ou d'armes à feu, il s'agissait de rédiger

15 un rapport à l'intention d'un supérieur hiérarchique qui était censé

16 justifier ou ne pas justifier le comportement de tel policier pour ce qui

17 est de sa façon de faire dans la solution d'une affaire quelconque dans le

18 traitement de ces enquêtes criminelles.

19 Question: Je cite donc que: "Ceux qui avaient fait usage de la menace ou

20 de la force avaient été sanctionnés de façon disciplinaire." Avez-vous vu

21 cela se passer à l'époque, dans la période dont nous parlons en 1991 et

22 1992 car vous avez également parlé de la possibilité que la situation ait

23 été autre en temps de guerre?

24 Réponse: Je ne l'ai pas vu. Je me suis consacré à une approche

25 scientifique de ce problème. Mais dans l'objectif du renforcement de

Page 11868

1 l'approche scientifique, j'avais demandé aux analystes des rapports. Ils

2 n'ont pas parlé de noms, en utilisant des noms et des prénoms, mais ils

3 ont utilisé de chiffres. Ils ont dit cinq fois, usage d'armes à feux, ou

4 tant de fois, usage de matraques en caoutchouc.

5 Partant de là, je me suis concentré sur la réglementation, la législation

6 disant que personne n'avait le droit d'utiliser la force ou la contrainte,

7 ou encore des subterfuges au nom de l'Etat pour aboutir à un résultat. Il

8 s'agissait donc de la législation et de la réglementation afférentes.

9 Il y a eu des cas isolés, cela n'est pas contesté, mais si cela s'était

10 manifesté dans une mesure telle qu'indiquée par Knezevic, cela pourrait

11 signifier qu'il y avait une anarchie policière en ex-République socialiste

12 fédérative de Yougoslavie, or cela ne peut pas être exact et n'est pas

13 exact.

14 Question: Je ne suis pas en train de parler de la RSFY, il s'agissait d'un

15 grand pays civilisé, comme nous le savons tous, mais d'une période de

16 guerre où les choses comme vous l'avez dit étaient différentes, et dans

17 les rapports que vous trouviez, où vous voyiez un certain chiffre, un

18 nombre de policiers qui avaient comme vous l'avez dit usé d'armes à feu ou

19 de la force. Mais avez-vous trouvé des rapports disant que ces policiers

20 ont été sanctionnés?

21 Réponse: Oui. Je suis tombé dessus et il y a des procédures disciplinaires

22 et pénales lorsqu'il s'agit de cas graves. Lorsque par exemple un délit

23 pénal a été perpétré au travers d'une violation de la loi ou d'un abus de

24 position officielle et pour des délits moins graves ou des infractions

25 -parce que "délit" est un terme très vaste, pour des infractions à la

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1 discipline de travail, pour des infractions moins graves il y avait des

2 mesures disciplinaires prononcées qui pouvaient être réalisées au travers

3 d'un licenciement, d'un congédiement et s'il y avait un délit pénal

4 commis, une telle personne se voyait renvoyée de son travail. Même pour

5 des infractions moins graves, mais pour des délits graves, des délits

6 pénaux graves, il y avait obligation de prononcer une cessation du rapport

7 du travail avec un jugement qui comportait sentence pénale.

8 Question: Et c'est comme vous l'avez dit, à la lumière de ce que vous

9 concluez, à la lumière de vos réflexions et de vos conclusions?

10 Réponse: Excusez-moi, je suis en train de parler de l'époque d'avant.

11 J'avais alors des renseignements statistiques qui provenaient des analyses

12 effectuées par le service tout entier. Et c'est donc en toute compétence

13 que j'ai pu me procurer des renseignements, des données que je serais à

14 même de présenter ici parlant de la République socialiste fédérative de

15 Yougoslavie.

16 Maintenant pour ce qui est des ministères de l'Intérieur de chaque

17 république, nous recevions des renseignements pour ce qui est de tout cas

18 ou tel officiel aurait outrepassé ses fonctions ou pouvoirs.

19 Maintenant s'agissant du rapport de Knezevic, je ne puis faire de

20 commentaires parce que c'est une période que je ne connais pas. Mais étant

21 donné que je suis une personne qui a tant traité de ces problématiques

22 -que cela soit agréé ici ou pas- je voudrais vous demander l'opportunité

23 de le dire. Car si le rapport dit que là-bas on envoie des gens

24 professionnels, des experts, je crois en ma qualité d'homme et en ma

25 qualité de policier qui a traité de cette problématique et qui en traite

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1 encore, que ces gens-là, que ces enquêteurs je ne sais pas si le terme

2 est le mieux choisi, donc il s'agissait de gens qui s'en tenaient à la

3 réglementation des services et aux cadres légaux.

4 Maintenant pour ce qui est de certains cas concrets, évidemment je ne puis

5 vous donner de réponse définitive.

6 Question: Vous avez parlé de la détention en disant que la détention ne

7 pouvait durer que 3 jours en garde à vue, et qu'ensuite le juge

8 d'instruction pouvait la prolonger jusqu'à un mois si je ne m'abuse,

9 après quoi c'est la cour suprême qui pouvait étendre cette durée de

10 détention à 3 mois et à l'extrême à 6 mois.

11 Sans intervention du juge d'instruction, la garde à vue ne pouvait donc

12 durer que 3 jours et pas plus, n'est-ce pas, sans décision du tribunal?

13 Réponse: Selon le code de procédure pénale, cette garde à vue durait au

14 maximum 3 jours, après quoi le dossier était transmis au juge

15 d'instruction.

16 Mais sur ce point, j'aimerais faire connaître mon point de vue, je n'ai

17 pas l'intention de l'imposer, mais j'aimerais vous le soumettre. Je pense

18 qu'il faut également lire les lois promulguées par le ministère de

19 l'Intérieur. Celles-ci dans des situations déterminées, donc pendant

20 l'existence d'un centre de regroupement par exemple, il faut vérifier si

21 ce centre avait pour fonction de mener des enquêtes ou une autre fonction,

22 et si toutes les personnes qui se sont trouvées à cet endroit faisaient

23 l'objet du même genre de suspicion. Je parle de suspicion et pas de

24 culpabilité car la culpabilité ne peut être prononcée que par un tribunal.

25 Est-ce donc cela la cause du fait que ces personnes sont restées plus

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1 longtemps à cet endroit mais pas en qualité de détenus? Je ne peux pas me

2 prononcer sur ce point. Mais je vous prie -si cela est possible- de relire

3 les décrets du ministre de l'Intérieur qui prévoient la limitation de

4 circulation de certaines personnes etc. etc., sans qu'il soit possible de

5 parler de poursuite pénale dans ce cas, de poursuite judiciaire.

6 Je suis convaincu que la Chambre de première instance, devant laquelle je

7 parle, va vérifier l'état précis de la situation car la loi du ministère

8 de l'Intérieur, et promulguée par le ministère de l'Intérieur de la

9 République de Bosnie-Herzégovine prévoyait ce genre de circonstances

10 également.

11 Mais vous avez tout à fait raison de m'interroger sur la durée de la garde

12 à vue et la possibilité de faire appel etc., vous avez bien compris ce que

13 j'ai dit.

14 Après ce délai, un juge d'instruction prend en charge le dossier et peut

15 ordonner un mois de détention en outre, en sus de la garde à vue. Mais

16 comme je viens de le dire, j'aimerais aider ce Tribunal et m'aider moi-

17 même afin d'avoir la possibilité de dire tout ce que je peux dire sur les

18 faits pertinents par rapport à la situation concrète.

19 Comme je l'ai dit, il convient de vérifier si les lois et les dispositions

20 du ministère de l'Intérieur de Bosnie-Herzégovine ont été mises en œuvre à

21 cette époque-là et dans cette localité particulière? donc dans la région

22 où il y avait prédominance serbe, majorité serbe ou domination serbe.

23 Et il faut voir si en examinant ces dispositions légales, on trouve une

24 justification du fait que des personnes poursuivies ou suspectes ont été

25 limitées dans leurs possibilités de circulation sans que s'applique une

Page 11872

1 détention policière.

2 (Questions au témoin, M. Dusan Lakcevic, par Mme la Juge Wald.)

3 Mme Wald (interprétation): Monsieur Lakcevic, j'aimerais vous interroger

4 sur certaines des théories policières et de la pratique que vous avez pu

5 constater, et nous partirons d'une situation de paix, comme vous l'avez

6 fait vous-même dans votre rapport.

7 Ma première question est la suivante: Dans un quelconque poste de police,

8 commissariat, département de police, enfin dans une quelconque unité de

9 l'organisation policière, est-il conforme à la pratique ou à la théorie,

10 selon votre expérience, de voir un commandant, dont vous avez parlé à

11 plusieurs reprises comme étant l'homme qui a autorité sur cette unité

12 structurelle de la police, donc est-il cohérent, conforme à la théorie ou

13 à la pratique de constater qu'un tel commandant, s'il était absent,

14 autorisait quelqu'un d'autre à donner des ordres à sa place ou à répondre

15 aux situations d'urgence qui n'étaient pas couvertes par les instructions

16 et règlements en vigueur?

17 Autrement dit, est-ce que quelqu'un commandait à sa place lorsqu'il était

18 absent? Est-ce que ceci serait conforme à la théorie et à la pratique

19 policières valable en temps de paix?

20 M. Lakcevic (interprétation): Avec tout le respect que je dois à la

21 question qui m'a été posée, je dois me lancer dans une petite digression,

22 car il faut distinguer entre un poste de police et un département de

23 police.

24 Question: Oui, je sais cela, mais vous pouvez parler des deux, je connais

25 bien la différence entre les deux instances.

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1 Réponse: Je ne sais pas si vous savez qu'un poste police a un commandant

2 et un adjoint du commandant ainsi que deux assistants, trois assistants ou

3 cinq assistants, selon l'importance des problèmes et l'importance du poste

4 de police, parce que si on se trouve dans une ville industrielle, il est

5 tout à fait normal que les effectifs soient plus importants. Il y a aussi

6 des hommes de patrouille, des agents de service etc., ils sont assez

7 nombreux. Tout cela relève de la réalité des problèmes, et ces postes de

8 police sont divisés en secteurs de sécurité. Secteur, c'est un mot latin

9 qui signifie le segment d'un cercle, une partie d'un cercle qui vient du

10 latin. Et dans un tel secteur nous avons une personne qui le dirige. Le

11 secteur peut recouvrir, peut être responsable d'une communauté locale.

12 La communauté locale est plus petite, c'est un niveau inférieur à celui de

13 la municipalité, c'est l'unité territoriale la plus petite.

14 Et donc un secteur peut éventuellement même recouvrir deux communautés

15 locales. Dans un secteur de ce genre, il y a des policiers de patrouille

16 et des policiers qui mènent des enquêtes. Ces patrouilles peuvent être

17 composées de deux ou trois hommes à pied, qui peuvent aussi utiliser un

18 véhicule motorisé et dans certains pays y compris des hélicoptères, des

19 bateaux etc.

20 Eh bien, la question que vous avez posée, Madame la Juge, portait sur

21 l'absence d'un commandant. Si un commandant est absent pour une raison ou

22 pour une autre il n'y a pas de problème à ce que le commandement passe

23 entre les mains de son adjoint ou de ses assistants, lorsque l'on est dans

24 un poste de police. Mais lorsqu'on est en présence d'un département de la

25 police, autrement dit un département qui a été détaché créé hors de la

Page 11874

1 zone du poste de police, eh bien un tel détachement à un commandant et un

2 certain nombre de policiers en uniforme ainsi qu'éventuellement un

3 technicien de police scientifique, et des opérateurs, des agents

4 opérationnels en civil, donc si un crime se produit, ces hommes doivent

5 réagir.

6 Cependant, le commandant d'un département de police n'a pas d'adjoint. Il

7 dispose d'un policier de service qui peut répondre à la situation. Il n'y

8 a pas de chef d'équipe, cet homme qui réagit à la situation est un simple

9 policier qui effectue son service, et il doit tout consigner dans un

10 registre, il doit donc avoir un registre de service qu'il doit remplir.

11 Tout doit être inscrit dans ce registre.

12 Question: Je vous interromps dans l'intérêt de la procédure pour aller un

13 peu plus vite. Je vais vous reposer ma question. Je comprends bien la

14 différence qui existe entre un département et un poste de police: le

15 département n'ayant en général pas d'adjoint du commandant.

16 Mais ma question est d'avantage théorique que pratique. J'ai une assez

17 bonne expérience de l'organisation de la police dans le système américain

18 et je sais que quelque que soit la petitesse de l'unité de police, elle a

19 un commandant et en général cinq hommes de patrouille, ou bien en général

20 il existe un mécanisme qui régit le commandement lorsque le commandant est

21 absent. S'il a eu un accident de voiture par exemple ou s'il est absent

22 pour telle ou telle raison, s'il ne peut pas être présent physiquement,

23 des dispositions techniques existent qui permettent à quelqu'un de le

24 remplacer dans sa tâche au sein du département, donc pour que les tâches

25 du département puissent continuer à être menées à bien, sinon ce serait

Page 11875

1 l'anarchie.

2 Je vous interroge simplement sur la théorie ou la pratique que vous

3 connaissez: y a-t-il un équivalent de ce genre de système dans ce que vous

4 connaissez? Si le commandant ne peut pas être là pour agir, que se passe-

5 t-il?

6 Il ne suffit pas de dire, on consigne tout dans un registre! Si un

7 incendie éclate ou s'il y a une rixe dans la rue alors que le commandant

8 n'est pas présent, est-ce que quelqu'un peut être appelé pour donner des

9 ordres et régler le problème même s'il n'a pas le titre officiel

10 d'adjoint? Je parle d'opérations de police qui doivent pouvoir être menées

11 à bien dans toutes les situations. Alors aidez-moi en me répondant.

12 Réponse: Je vous remercie, parce que votre question me permet de répondre

13 plus facilement et plus raisonnablement que je ne pensais le faire au

14 départ. Car vous avez dit qu'il devait exister un mécanisme, ce mécanisme

15 ne signifie pas nécessairement que tout repose sur un seul homme ou sur

16 ses responsabilités de communication avec d'autres.

17 Alors ce que je dis c'est la chose suivante: un policier est un homme qui

18 est habilité à agir et formé pour agir. L'exemple que vous avez mentionné

19 me paraît très bon. C'est le cas d'un incendie. Le responsable de service

20 qui a été informé de cet incendie en informe les pompiers ou les policiers

21 chargés de la lutte anti-incendie, comme on les appelle, qui vont avoir à

22 traiter le problème.

23 Par ailleurs, si les cadres de la police souhaitent transférer leur

24 autorité sur moi, ils peuvent le faire. Ils peuvent me dire que je

25 commande les opérations en l'absence de la personne habilitée à commander.

Page 11876

1 Ce commandant pendant ses heures de service a pour devoir de remplir

2 toutes les tâches qui sont prévues dans ses obligations, il doit décider

3 d'envoyer des hommes en patrouille etc., il doit utiliser le téléphone

4 pour obtenir l'aide nécessaire par tous les moyens lorsqu'une situation

5 d'urgence se présente et c'est lui qui désigne donc l'homme qui va le

6 remplacer en son absence ou en cas de maladie l'affectant lui.

7 Il en informe le poste de police, il en informe les agents de ronde, de

8 patrouille, et donc on a une hiérarchie avec le commandant qui est n°1,

9 son adjoint qui est n°2, et l'un de ses assistants qui peut être présent

10 également et qui est le n°3. Mais un système de communications, un

11 mécanisme de communications existe et elles sont utilisées, ces

12 communications, dans tous les cas d'urgence. Lorsqu'un policier est

13 habilité par le commandant à le remplacer dans ses fonctions, il est

14 habilité à prendre des initiatives personnelles.

15 Question: Oui, merci mais je vais vous donner un dernier exemple avant de

16 passer à un autre point. Vous avez par exemple un officier de service dans

17 un département de police, il reçoit un appel téléphonique qui lui dit

18 qu'une banque a été dévalisée à un endroit particulier et le cambriolage

19 n'est pas encore terminé, est-ce que cet officier de service ne peut pas

20 entrer en contact avec le commandant, est-ce qu'il a autorité sans appeler

21 le commandant de mettre en place une patrouille qui va se rendre sur les

22 lieux à la banque pour vérifier ce qui se passe et essayer d'aller à

23 l'endroit précis où se passe le cambriolage pour régler le problème avant

24 d'en informer un niveau hiérarchique supérieur? Parce que s'il fallait

25 qu'il s'adresse d'abord au niveau hiérarchique supérieur le cambriolage

Page 11877

1 pourrait être terminé avant même que la moindre initiative soit prise. Je

2 vous pose une question pratique.

3 Réponse: Je pense qu'en fait vous avez déjà répondu à la question dans ce

4 que vous venez de dire. Cet homme informe par téléphone le chef de secteur

5 en lui disant que telle et telle chose s'est produite, il n'a pas à lui

6 donner d'ordre. Si je l'informe qu'il y a eu un cambriolage, lui par la

7 loi, par les attributions qui sont les siennes il a pour devoir

8 d'intervenir. Et ensuite, l'affaire passe entre les mains de la justice,

9 va devant les tribunaux etc.

10 Il ne s'agit donc pas d'ordre en la matière, il s'agit d'information

11 fournie par l'homme de service selon les obligations légales qui sont les

12 siennes dans l'exercice de ses fonctions, il informe les personnes

13 compétentes. Parce que dans le règlement du service de sécurité publique

14 il est dit que dès qu'il arrive le moindre indice ou la moindre suspicion

15 fondamentale -c'est le niveau de suspicion le plus bas- et si je dois être

16 plus précis, je dirai que l'agent de service informe le responsable de la

17 patrouille pour que celui-ci puisse réagir en accord avec les textes

18 législatifs en vigueur. S'il n'agissait pas, il serait poursuivi pour

19 responsabilité criminelle.

20 Question: Bien, nous allons maintenant passer à un point suivant.

21 Vous avez dit quelques mots d'un technicien de la police scientifique dans

22 votre rapport, bien entendu parce que M. Prcac est technicien de la police

23 scientifique, dans les pages 9 et 10 de votre rapport en anglais, mais

24 cela ne se retrouve que dans une seule phrase, vous dites que le

25 technicien de la police scientifique est membre d'une équipe d'enquêteurs

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1 mais jamais à la direction de l'équipe d'enquêteurs. Il est chargé de

2 découvrir les indices et de les interpréter.

3 Donc selon ce que vous dites, il semblerait que le technicien de police

4 scientifique ne soit jamais le dirigeant d'un équipe d'enquêteurs mais

5 qu'en général il fasse partie de l'équipe d'enquêteurs. Je crois que c'est

6 ce que le contexte de votre rapport signifie.

7 Est-ce que cela veut dire qu'une équipe d'enquêteurs a un dirigeant,

8 autrement dit, cela devrait être la personne responsable de l'équipe

9 d'enquêtes qui dit aux autres membres de l'équipe ce qu'il attend d'eux?

10 C'est bien cela?

11 Réponse: Comme dans toutes les polices du monde, chez nous, la situation

12 est la même. Il existe des activités d'enquêtes urgentes qui selon la loi

13 peuvent être menées à bien par les organes du ministère de l'Intérieur,

14 autrement dit des professionnelles habilités légalement à mener de telles

15 enquêtes. Et bien entendu, il faut constater les choses et en cas

16 d'enquête urgente, il faut se rendre rapidement sur les lieux, il faut

17 sécuriser les lieux de façon que les indices ne soient pas manipulés, il

18 faut découvrir des indices matériels qui permettront éventuellement de

19 déterminer rapidement qui sont les auteurs des actes criminels en

20 question.

21 Dans des situations de ce genre, il existe une équipe chargée de l'enquête

22 qui peut compter deux ou trois hommes. Mais l'équipe la "plus pauvre" se

23 composera de deux hommes: l'un étant celui qui se rend immédiatement sur

24 les lieux et qui détermine de quelle façon les constatations seront

25 faites, et avec lui se trouve un technicien de police scientifique.

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1 Question: Très bien, très bien. En page 7 de votre rapport, vous dites

2 quelques mots de l'armée. Au deuxième paragraphe de la page 7, vous parlez

3 des devoirs d'un caporal de la garde. Je crois que vous parlez de

4 personnel de l'armée. Vous dites que cet homme a pour devoir de visiter et

5 de contrôler les membres de la garde au moins une fois, et vous dites

6 qu'il est responsable devant le commandant. Vous parlez bien de l'armée

7 dans ce cas, n'est-ce pas? Je voulais m'assurer de cela.

8 Réponse: Oui.

9 Question: Il est dit dans votre rapport que l'armée peut se trouver dans

10 une situation où il existe quelqu'un qui s'appelle "caporal de la garde"

11 qui, dans la traduction en anglaise, je lis: "Visite et contrôle,

12 supervise le travail de chacun des gardes, au moins une fois."

13 Est-il vrai ou n'est-il pas vrai que les structures policières existant

14 dans le système que vous connaissez bien n'ont pas d'équivalent pour cet

15 homme que l'on trouve dans l'armée, autrement dit pour le caporal de la

16 garde? Y a-t-il, dans la police, un homme qui remplit les mêmes fonctions

17 que le caporal de la garde, au sein de l'armée? Et si oui, qui est cet

18 homme?

19 Réponse: Dans mon rapport, j'ai voulu démontrer que la structure de la

20 police n'était pas la même que celle de l'armée et que nous devons, il est

21 de notre devoir -j'insiste- de faire une différence entre ceux qui

22 travaillent pour la police, autrement dit les policiers qui sont des

23 salariés soumis à certaines obligations dans le cadre de leur travail et

24 qui ne vont pas à leur travail accompagnés d'un représentant du poste de

25 police, autrement dit de quelqu'un qui a un grade supérieur aux leurs.

Page 11880

1 Pour atteindre le poste où ils assurent la sécurité, ils ne sont pas

2 accompagnés d'un supérieur et c'est intentionnellement que je n'utilise

3 pas le terme "garde", car selon nos lois et règlements nous utilisons le

4 terme "policier" pour parler de ceux qui assurent la sécurité.

5 Mais comme cet homme est un salarié qui a été formé pour travailler, là où

6 il travaille, il connaissait ses tâches. Il va donc simplement au poste de

7 police, il se change, il enlève ses vêtements civils pour se vêtir en

8 uniforme, il prend son arme de service et les autres instruments qu'il

9 utilise, comme par exemple des appareils de communication, et puis il va à

10 son lieu de travail. Il sait quel est son horaire de travail et ce qu'il a

11 à faire dans le cadre de son travail.

12 Donc dans ce cas, nous sommes dans une situation différente de celle du

13 caporal de la garde qui répartit les gardes à leur poste. Ce sont des

14 jeunes soldats de première classe qui viennent d'achever leur service

15 militaire et pas des professionnels formés. Il les rassemble, il indique à

16 ceux qui doivent être relevés qu'ils doivent être relevés.

17 Mais, quand on parle de policier, le policier va seul à son poste de

18 travail. Il est informé par ses collègues de la situation qui a existé

19 jusqu'à son arrivée, si quelque chose de nouveau s'est passé. Puis la

20 personne qu'il relève s'en va, retourne au poste et, si nécessaire,

21 consigne son action dans un rapport.

22 Question: Mais c'est très intéressant. Je vais vous dire ce qui se passe

23 dans mon pays, les Etats-Unis, et je crois que cela se passe également

24 dans d'autres pays que je connais assez bien.

25 Dans les systèmes policiers de ces pays, on utilise une terminologie

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1 militaire, c'est-à-dire qu'on parle d'agents de première classe qui

2 correspond aux soldats de première classe, on parle de lieutenants.

3 Donc la hiérarchie du point de vue terminologique est la même. On a des

4 sergents de police comme on a des sergents dans l'armée qui ont un certain

5 pouvoir sur leurs subordonnés. Ils peuvent donc donner des ordres dans

6 certaines limites: ils donnent des ordres aux agents de première classe.

7 Si on est en présence d'un lieutenant, il a une certaine autorité, il peut

8 donner des ordres à un sergent.

9 Alors, est-ce qu'il n'y a rien de comparable du point de vue hiérarchique

10 dans la Republika Srpska ou dans les forces policières de Serbie? Vous

11 n'avez pas la même terminologie, la même hiérarchie, dans les forces de

12 police que celle qui est utilisée dans les forces militaires par rapport

13 aux subordonnés?

14 Réponse: La question consiste à se demander si un capitaine de marine peut

15 donner un ordre à un simple soldat pour réaliser telle ou telle tâche.

16 Moi, ce que j'essaie de dire, c'est que l'autorité dont dispose telle ou

17 telle personne émane, lui est décernée par les textes législatifs en

18 vigueur, par les règlements de service, sur la base de l'organisation et

19 de l'organigramme de l'institution dans laquelle il travaille.

20 Je peux affirmer qu'un capitaine de police chargé de la circulation ne

21 peut pas donner d'ordre à un policier de l'ordre public parce que tout ce

22 qu'il peut faire c'est éventuellement attirer l'attention de ses collègues

23 sur telle et telle situation et les mettre en garde. Je crois que l'erreur

24 est là, lorsqu'on parle de police et d'armée.

25 Je peux dire que j'ai bien lu des textes au sujet des Etats-Unis où on

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1 parle de professionnalisation, et la professionnalisation aux Etats-Unis

2 signifie que telle ou telle personne a l'initiative de prendre elle-même

3 des décisions sur le plan technique.

4 Mais moi, je dis que si nous nous transformons tous en techniciens, on

5 peut se poser des questions sur le résultat. Nous, nous sommes plutôt

6 orientés dans une direction différente de celle des Etats-Unis et je pense

7 que, peut-être, l'avenir dira si nous avons eu raison et, dans quelle

8 mesure, nous avons eu raison. Mais je pense que nous avons eu raison.

9 Là où il y a des grades, il est possible de mettre en place une structure

10 hiérarchique militaire mais, là encore, il faut faire attention à

11 l'existence d'unités spéciales de police chargées du maintien de l'ordre,

12 chargées de la circulation, etc., donc de la spécialisation des forces de

13 police.

14 Question: Très bien. Ma dernière question est la suivante: en vous

15 appuyant sur la théorie et la pratique policière que vous connaissez en

16 temps de paix en Serbie, si vous vous trouviez en présence d'une force

17 policière dans une ville où, tout d'un coup, une situation d'urgence se

18 présente, ainsi que la nécessité de superviser, de contrôler le travail de

19 plusieurs milliers de policiers -je parle bien de plusieurs milliers de

20 policiers chargés, en raison de la situation d'urgence, de garantir ou de

21 rétablir la sécurité- et nous nous trouvons dans une situation comparable

22 à celle dont vous avez parlé tout à l'heure, c'est-à-dire l'existence de

23 dispositions particulières prévoyant de limiter la possibilité de

24 circulation de certaines personnes sans les mettre en détention, donc

25 plusieurs milliers de policiers chargés de contrôler ou de limiter la

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1 circulation de plusieurs milliers de civils, est-ce que vous pourriez vous

2 attendre, dans la théorie ou la pratique policière que je viens de vous

3 exposer, à disposer d'un certain niveau de supervision entre le simple

4 commandant qui se trouve en haut et chacun des vingt, trente, quarante,

5 cinquante ou davantage de gardes appelés à rétablir la sécurité ou à

6 garantir la sécurité?

7 Réponse: Je ne sais pas très bien comment vous répondre. Je crois ne

8 pouvoir le faire que sur le plan théorique. Mais sur le plan théorique,

9 voilà quelle est ma réponse: indépendamment du nombre de policiers appelés

10 à intervenir, tout dépend de la dénomination des gens qui interviendront.

11 Si on parle de département de police, il y a des gens qui vont intervenir.

12 Je ne sais pas quelle était la situation réelle, mais tout dépend de la

13 façon dont ces personnes appelées par le département de police vont mener

14 à bien leur mission.

15 Donc, nous devons toujours tenir compte de l'aspect théorique, qui permet

16 et c'est tout à fait indispensable- de se rendre sur place, de contrôler

17 etc., mais il faut tenir comme aussi de l'aspect pratique de la situation

18 sur laquelle je ne peux pas me prononcer. Est-ce qu'il y avait un nombre

19 suffisant de personnes compétentes pour mener à bien ces activités, ou

20 est-ce qu'on s'est appuyés sur d'autres moyens techniques pour assurer la

21 sécurité de ces personnes? Vraiment, je ne peux pas répondre.

22 Mais dans la théorie, il faudrait qu'il y ait quelqu'un qui se rende sur

23 place pour vérifier le travail de ces personnes. Il faut toujours tenir

24 compte de ce que j'ai déjà dit, à savoir que ce sont des hommes qui sont

25 soumis à une obligation de travail, et cette obligation de travail c'est

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1 en fait le niveau suprême de contrôle pour leur travail.

2 Question: Merci beaucoup.

3 M. Lakcevic (interprétation): Merci à vous également.

4 M. le Président: Merci beaucoup, Madame la Juge Wald.

5 Questions au témoin, M. Dusan Lakcevic, par M. Le Président.)

6 J'ai aussi des questions. Ma première question est une question

7 essentiellement d'ordre pratique: qu'est-ce que les personnes qui vous ont

8 contacté pour venir ici vous ont demandé d'étudier?

9 M. Lakcevic (interprétation): Je vous remercie de m'avoir posé cette

10 question. Les gens qui m'ont prié de leur fournir mon rapport me l'ont

11 demandé parce qu'ils connaissaient mon expérience pour avoir parlé à des

12 personnes qui me connaissaient, et parce que, jusqu'en 1990/1991, dans

13 l'ancienne RSFY etc., on me connaissait. Ils m'ont demandé…

14 Question: Je vous ai demandé "pourquoi ils vous ont demandé?" Je vous ai

15 demandé "qu'est-ce qu'ils vous ont demandé?" L'objet?

16 Réponse: Oui, oui. Le thème de mon rapport… parce que moi ce qu'on m'a dit

17 c'est qu'il y avait des problèmes de compréhension, qu'il fallait fournir

18 des éclaircissements entre la définition d'un poste de police, d'un

19 département de police, d'un service de sécurité publique, et puis la

20 définition des dirigeants d'un département de police, il fallait expliquer

21 ce genre de choses. Et puis on m'a aussi demandé d'expliquer les rapports

22 qui existaient entre ceux qui assuraient la sécurité dans certaines

23 installations: est-ce que c'étaient des gardes, est-ce que c'étaient des

24 policiers qui avaient des missions un peu différentes, dans le sens qu'ils

25 accomplissaient simplement leur travail et qu'ils étaient relevés

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1 régulièrement?

2 Ensuite on m'a demandé d'expliquer ce qu'était un technicien de la police

3 scientifique, quelle était la nature exacte de ces fonctions, quelles

4 étaient ses tâches et je crois que j'ai fourni des réponses à ces

5 questions dans mon rapport. Mais je constate qu'on ne m'a pas interrogé

6 sur ce sujet. Je considère que j'ai rempli les obligations qui étaient les

7 miennes, j'espère que cela vous satisfait et je suis désolé si ce n'était

8 pas le cas.

9 Question: Vous avez analysé tout cela du point de vue d'une situation de

10 paix et pas du point de vue d'une situation de guerre? Est-ce cela que je

11 dois comprendre?

12 Réponse: C'est cela.

13 Question: Je vous pose une autre question: est-ce que les règlements que

14 vous avez analysés, que vous connaissez, prévoient des situations de

15 guerre ou des situations de conflit?

16 Réponse: Non. Ni la loi du ministère de l'Intérieur public ni la loi de

17 maintien de l'ordre et de la sécurité publique. Sans doute parce que

18 personne ne pensait que la guerre allait éclater, et moi non plus je ne

19 souhaite la guerre à personne, mais je pense qu'à l'avenir il faudra que

20 notre police et les autres tiennent compte de cela.

21 Question: Nous sommes d'une certaine façon dans une situation qui n'est

22 pas adaptée au règlement, quel est votre point de vue?

23 Réponse: D'après moi, ce règlement qui régit le service de la sécurité

24 publique, qui date de 1977 et qui décrit de façon concrète les

25 attributions légales des personnes chargées d'assurer cette sécurité ainsi

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1 que les obligations auquelles ces personnes sont soumises, prévoit

2 l'engagement donc le recrutement des policiers de réserve, les

3 réservistes, et stipule que cet engagement, ce recrutement ne peut se

4 faire qu'en présence de situation extraordinaire.

5 Et je considère, en tant que théoricien, que la guerre peut être

6 considérée comme une circonstance extraordinaire. Donc ces dispositions du

7 ministère des Affaires intérieures qui s'appliquent encore aujourd'hui en

8 cas de situation extraordinaire prévoient la nécessité d'assurer la

9 sécurité.

10 Donc moi je considère que ces dispositions devaient également s'appliquer

11 en temps de guerre.

12 Question: D'une façon générale, est-ce qu'on peut dire que ces règlements

13 sont adaptés et -je souligne- adaptés à une situation extraordinaire? Oui

14 ou non?

15 Réponse: Je pense que vous n'obtiendrez de moi qu'une réponse incomplète

16 si vous me demandez de répondre par oui ou non. Je vous prie de m'excuser

17 et je vais vous expliquer pourquoi. Parce que c'est le poste de police qui

18 évalue le degré de sécurité ou d'insécurité et sur la base de cette

19 appréciation il rédige un rapport écrit où il attire l'attention sur tel

20 et tel point. Légalement, j'insiste, légalement, il ne dit donc pas qu'il

21 faut assurer la sécurité d'un match de foot de cette façon ou de cette

22 autre façon, ou que pour assurer la sécurité dans un centre de

23 regroupement il faut agit de telle ou telle façon.

24 Simplement le poste de police va apprécier le degré de sécurité et les

25 décisions prises en matière de sécurisation physique de nombre de

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1 personnes qu'il faut détacher pour assurer la sécurité, de la

2 configuration du terrain, ce sont des dirigeants qui le décident.

3 Question: Je vous pose la question d'une certaine façon pour résumer.

4 Du point de vue théorique, éventuellement devant une situation pratique,

5 cette circonstance extraordinaire de conflit, et du point de vue du

6 raisonnement, la logique, l'honnêteté du raisonnement: est-il adapté, est-

7 il correct d'invoquer le règlement normal pour une situation

8 extraordinaire?

9 Réponse: C'est possible. Mais je vais vous l'expliquer, je vais vous dire

10 pourquoi.

11 Pour que moi j'applique un certain nombre de règles vers les personnes qui

12 se trouvent là-bas, eh bien je dois respecter cette règle, je dois venir

13 parler avec eux, je dois en faire une note officielle, je dois recueillir

14 sa déclaration etc., et donc dans ce règlement se trouve le chemin que je

15 me dois d'emprunter, moi en tant que policier.

16 Après la question de savoir si le centre peut faire cela ou cela, eh bien,

17 ceci dépendra de la décision prise par le chef. Mais ce sont évidemment

18 d'autres circonstances. Mais de toute façon, il faut absolument appliquer

19 le règlement en vigueur, sinon on se trouve dans une situation d'anarchie.

20 Question: Oui voilà. Sinon nous nous trouvons dans une situation

21 d'anarchie.

22 Vous avez dit, Docteur Lakcevic, qu'un policier est formé pour agir et

23 doit pouvoir agir. Je pense que vous dites ou que vous mettez ici la base

24 essentielle de la nécessité d'avoir une discipline, oui ou non, parce

25 qu'on ne peut pas agir de quelque façon, êtes-vous d'accord? Comment vous

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1 voyez cette question: obligation d'agir et discipline? Est-ce qu'elles ont

2 quelque chose à voir l'une avec l'autre?

3 Réponse: Ma réponse est comme suit: les pouvoirs de toutes les polices du

4 monde et donc chez nous aussi, car moi j'ai fait des enquêtes là-dessus,

5 et je vais me permettre de faire une digression. Il existe à peu près 1500

6 pouvoirs différents, grands ou petits, appartenant à chaque police.

7 Par exemple, le pouvoir de la police consiste à aider une vieille femme à

8 traverser la rue ou bien à faire descendre un chat d'un toit. Cela aussi

9 c'est un devoir.

10 Mais après, il y a d'autres pouvoirs: le pouvoir d'arrêter, d'utiliser les

11 armes à feu, d'utiliser la force. Eh bien pour avoir recours à ces

12 pouvoirs, pour utiliser ces pouvoirs, eh bien cette personne doit avoir de

13 l'initiative, elle doit connaître ses pouvoirs, elle doit remplir ses

14 obligations de travail, elle doit se comporter de façon correcte avec les

15 citoyens et donc il faut que cette personne ait de l'initiative, de

16 l'initiative par rapport à son travail mais aussi par rapport à la

17 société.

18 Question: Le devoir est un pouvoir d'agir. Nous avons une discipline et je

19 vous pose une troisième pièce: comment joue avec pouvoir d'agir, la

20 discipline, l'organisation notamment la hiérarchie? Est-ce que la

21 hiérarchie a quelque chose à voir avec la discipline et le devoir d'agir?

22 Réponse: Du point de vue formel, oui.

23 Question: Même du point de vue pratique?

24 Réponse: Du point de vue pratique, ces services sont centralisés ce qui

25 veut dire que le ministère va proposer la réglementation concernant la

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1 systématisation de l'organisation interne des services. Ensuite, cette

2 proposition est éventuellement acceptée par les gouvernements. Ensuite au

3 niveau du ministère, il y a des secrétaires, on peut appeler cela des

4 secrétaires d'Etat ou bien les assistants des ministres.

5 Ensuite il y a des centres, des centres qui ont des chefs à leur tête et

6 ils sont subordonnés au ministère, mais se trouvant supérieurs au poste de

7 sécurité publique qui a aussi sa propre hiérarchie.

8 Ensuite il y a des postes de police où se trouve à la tête le commandant

9 et, évidemment, il faut qu'il existe une hiérarchie. Il existe un certain

10 nombre d'obligations, d'obligations qui relient les supérieurs et les

11 subordonnés.

12 Question: Vous avez affirmé à plusieurs reprises que vous étiez un

13 scientifique, vous vous intéressez à l'étude théorique de ces questions,

14 etc. Est-ce que jamais vous avez vu ou lu ou réfléchi sur les apports, par

15 exemple, la psychologie sociale pour cette question de la hiérarchie?

16 Réponse: Eh bien, je ne pourrait vous donner une réponse satisfaisante.

17 Elle ne serait pas suffisamment exacte mais chaque étude doit impliquer

18 évidemment l'étude de la question de la sociologie sociale. Donc, du point

19 de vue strict, orthodoxe, je ne l'ai pas fait.

20 Question: Mais je vous dis quelque chose. Avez-vous quelques informations,

21 par exemple, sur les hiérarchies mêmes informelles? C'est-à-dire il peut

22 arriver une situation où il n'y a pas une règle formellement établie mais,

23 devant la situation pratique, cette hiérarchie va naître obligatoirement,

24 car il est impossible de vivre dans un groupe, surtout dirigé pour une

25 action, sans une hiérarchie. Avez-vous quelques indications, quelques

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1 réflexions sur le besoin de hiérarchie même informel?

2 Réponse: Etant donné la structure de la police, les obligations, les

3 droits qui régissent la police et l'armée, il n'existe pas d'autorité

4 informelle pour ainsi dire. Ceci dépend de la culture, de l'éducation, de

5 tout un chacun. Est-ce que je vais accepter quelque chose qui m'a été dit,

6 demandé par une personne qui ne fait pas partie de la hiérarchie

7 officielle, quelqu'un qui n'a pas le droit de le faire?

8 Par exemple, est-ce que quelqu'un que l'on peut estimer si, par exemple,

9 il attire mon attention sur une mission, sur quelque chose qu'il faudrait

10 faire, eh bien, cela dépendrait de ma bonne volonté, est-ce que je vais

11 l'accepter ou non, car il faut qu'il existe un document, un papier pour

12 ainsi dire qui vous autorise à faire quelque chose, à donner des ordres,

13 sinon après, tout le reste, cela dépend de la bonne volonté, de mon

14 éducation, de ma culture.

15 M. le Président: Imaginez la situation concrète, je reviens un peu à la

16 question que ma collège, Madame la Juge Wald, vous a posée.

17 Imaginez la situation où il y a par exemple des milliers de personnes

18 rassemblées. Il y a par exemple 15 policiers qui doivent prendre soin de

19 sa sécurité et, du point de vue de fait, il n'y a pas un commandant là,

20 disponible. Est-ce que vous admettez que, naturellement, il y aurait

21 quelqu'un à qui les autres personnes s'adresseraient de préférence pour

22 résoudre un problème qui peut arriver, et naturellement sans avoir un

23 ordre de quiconque?

24 Réponse: Tout d'abord, cette situation n'existe pas, c'est ce que je

25 pense. Donc la police, l'instruction de la police, l'organisation de la

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1 police est telle qu'il faut qu'il existe. Mais après, vous savez, vous

2 avez un commandant de département.

3 M. le Président: Je vous ai posé la question théoriquement.

4 Imaginez, cela veut dire: il y a le commandant qui n'est pas disponible,

5 et là dans la situation il n'y a pas un téléphone alors qu'il y a un

6 problème. C'est la question pratique que je vous pose. Si elle existe ou

7 si elle n'existe pas, il n'y a aucun intérêt maintenant.

8 Selon votre expérience, votre connaissance de spécialiste sur les

9 questions de sécurité de police, comment cette situation va s'organiser?

10 Comment prévoyez-vous qu'elle s'organise?

11 Réponse: Eh bien, ma réponse sera la suivante.

12 Dans de telles situations, si nous nous connaissons, entre nous, nous les

13 15, 20 policiers, on sait qui a plus d'expérience, dans quel domaine, qui

14 se débrouille mieux pour ainsi dire, ou bien qui a plus d'éducation, le

15 plus de culture, et qui sera plus à même d'organiser les choses, car la

16 loi n'a aucune signification si on ne l'a fait pas vivre!

17 Il faut donc qu'il y ait toujours quelqu'un qui décide: où on va se placer

18 par exemple, si ma culture en termes de sécurité est plus large, si je

19 suis plus expérimenté, je vais dire tout simplement "eh bien, toi tu vas

20 te placer là et toi tu vas te placer là, et comme cela on va protéger ces

21 personnes." Donc du point de vue théorique et pratique évidemment cette

22 psychologie sociale serait nécessaire.

23 Question: Très bien, Docteur Lakcevic, nous pourrions continuer à discuter

24 de cette question, mais nous devons nous arrêter ici. Nous vous remercions

25 beaucoup d'être venu, d'avoir apporté vos connaissances et votre

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1 contribution pour éclaircir cette situation et nous vous souhaitons une

2 bonne continuation ainsi que de bonnes réflexions. Merci beaucoup.

3 M. Lakcevic (interprétation): Je vous remercie aussi Monsieur le

4 Président. Je vous en remercie.

5 (Le témoin, M. Dusan Lakcevic, est reconduit hors du prétoire.)

6 (Questions relatives à la procédure.)

7 M. le Président: Donc maintenant nous sommes arrivés à une situation de

8 conflit, c'est faire la pause pour déjeuner et revenir parce que nous

9 avons encore quelque chose à traiter du point de vue de la suite de nos

10 travaux ou risquer de rester -et toutes les personnes vont regarder les

11 horloges en même temps et ne vont pas regarder ce que je dis.

12 Voilà, je ne sais pas comment… mais peut-être Maître Jovan Simic a une

13 réponse. Nous avons des documents à verser au dossier. Maître Jovan Simic,

14 avez-vous une bonne suggestion?

15 M. J. Simic (interprétation): Moi je propose que l'on continue et si l'on

16 voit que nous ne sommes pas en mesure de terminer rapidement nos travaux

17 -je crois que ceci ne sera pas le cas-, nous pourrions faire une pause. Je

18 propose que l'on commence, qu'on regarde de quelle façon évolue la

19 situation et je pense que nous allons être en mesure de terminer à temps.

20 M. le Président: J'essaie de regarder les interprètes pour savoir si oui

21 ou non nous allons continuer. Nous avons déjà dépassé vraiment d'une heure

22 et demie. Nous essayons de terminer le plus rapidement possible et après

23 nous verrons. Nous risquons toujours en continuant de dire que c'est

24 toujours tard, mais sinon nous dirons que c'était mieux de le faire.

25 Nous avons trois questions à traiter maintenant: verser le versement des

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1 documents, une décision orale que nous devons rendre sur les témoins

2 experts de la défense de M. Radic, et troisième question vous donner

3 quelques indications pour la réplique et la duplique des parties qui va

4 suivre.

5 Premier point, Madame Somers, verser au dossier les documents, dites-nous?

6 Mme Somers (interprétation): Monsieur le Président, pour ce dernier

7 témoin, le Dr Lakcevic, je vais demander le versement au dossier de la

8 pièce du Procureur 3/275A et B, et il y avait une déclaration qui était

9 ajoutée à ce document et qui porte la lettre C.

10 M. le Président: C'est tout, Madame Somers, à verser au dossier?

11 Mme Somers (interprétation): Oui pour aujourd'hui.

12 M. le Président: Maître Jovan Simic?

13 M. J. Simic (interprétation): Monsieur le Président, en ce qui concerne

14 3/275A et B, nous soulevons une objection, puisque nous ne savons pas du

15 tout si ce texte est un texte qui a été adopté. Est-ce qu'il s'agit d'un

16 texte définitif de sa version intégrale? Il n'y a pas de signature, il n'y

17 a pas de sceau; nous avons tout simplement une lettre disant de quelle

18 façon ce texte a été élaboré.

19 En ce qui concerne la déclaration, je pense que la Chambre a déjà adoptée

20 la position que nous ne pouvons pas verser au dossier la déclaration, si

21 j'ai bien compris.

22 M. le Président: La déclaration d'authentification, c'est cela?

23 M. J. Simic (interprétation): Je m'excuse Monsieur le Président, j'ai reçu

24 une interprétation erronée, j'ai mal compris, j'ai cru comprendre qu'il

25 s'agissait de la déclaration de M. Knezevic à laquelle a fait référence ma

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1 consœur, Mme Somers. Nous soulevons donc notre objection pour les raisons

2 que je viens d'énumérer, je vous en remercie.

3 M. le Président: Madame Somers, voulez-vous répondre aux raisons que Me

4 Jovan Simic a mentionnées?

5 Mme Somers (interprétation): S'il s'agit de l'origine du texte, au début à

6 la page 2 en version anglaise, il est écrit en vertu de l'Article 33,

7 paragraphe 1, alinéa 2, de la loi du code des affaires intérieures, eh

8 bien, il est indiqué que ce texte provient du journal officiel qui fait

9 partie de la documentation officielle de la République socialiste de

10 Bosnie-Herzégovine.

11 On a posé des questions au témoin concernant ce document, qui a répondu,

12 qui a fait son commentaire. Je pense qu'il existe un lien entre ce

13 document et l'expertise du témoin, ce document se rapporte à la période

14 avant la guerre, et je pense que l'admission de ces documents serait

15 extrêmement utile pour les travaux de la Chambre et je pense que ce

16 document est pertinent.

17 M. le Président: Maître Jovan Simic, vous maintenez l'objection après

18 l'explication?

19 M. J. Simic (interprétation): Monsieur le Président, je vais être très

20 bref. Il est vrai qu'elle en parle: quel est le fondement juridique, sur

21 quelle loi ce document se base, mais nous n'avons pas de preuve que ce

22 document a été adopté et appliqué.

23 D'habitude, quand une ordonnance, une instruction, quelque chose est

24 élaboré dans le territoire de l'ex-Yougoslavie, eh bien après il y a un

25 sceau qui est apposé, une signature. Mais nous nous n'avons aucune preuve

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1 que ce document, que ce projet a jamais été adopté. C'est pour cela que

2 nous soulevons cette objection.

3 M. le Président: Un moment s'il vous plaît.

4 Mme Somers (interprétation): Vous m'avez posée une question tout à

5 l'heure, je voudrais vous répondre.

6 Monsieur le Président, je n'avais pas compris que le problème était

7 l'origine mais c'est le nom d'Alija Delimustafic qui se trouve à la fin,

8 il était le ministre des Affaires intérieures et j'ai voulu attirer

9 l'attention de la Chambre sur ce fait.

10 M. le Président: J'avais remarqué cela, mais cela ne change rien à ce que

11 Me Jovan Simic a dit. J'avais remarqué qu'il y avait un ministre de

12 l'Intérieur, Alija Delimustafic.

13 Mme Wald (interprétation): Y a-t-il une signature aussi, ou bien un nom en

14 lettres imprimées, tapées?

15 Mme Somers (interprétation): Je n'ai pas de signature non plus, mais en ce

16 qui concerne la source, eh bien nous tenons ce document de la faculté de

17 criminologie de l'université de Sarajevo.

18 M. le Président: Un moment, s'il vous plaît.

19 (Les Juges se concertent sur le siège.)

20 Madame Somers, la Chambre, à propos de l'admission de ce document, a la

21 position suivante: la Chambre aimerait bien avoir le texte officiel de la

22 gazette. Donc, la Chambre vous donne la possibilité de montrer à la

23 Chambre le texte officiel et nous allons attendre que vous puissiez donc

24 remettre à la Chambre et à la défense ce texte officiel.

25 Etes-vous disponible pour faire cela, Madame Somers?

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1 Mme Somers (interprétation): Je devrais m'enquérir auprès de la personne

2 qui nous a fourni ce document et ensuite j'informerai la Chambre de la

3 suite à donner.

4 M. le Président: Très bien, merci beaucoup, Madame Somers. Donc ce

5 document attend une indication de votre côté.

6 Maintenant deuxième point: décision orale de la Chambre concernant

7 l'admission des rapports d'expertise, la défense, l'accusé M. Radic.

8 "Le 27 avril 2001, le Procureur et la défense de Mlado Radic ont demandé

9 le versement au dossier des rapports des experts du Pr Nenad Kecmanovic et

10 du Dr Robert Donia.

11 La Chambre avait déjà pris, le 9 mars 2001, la décision suivante: la

12 Chambre admet donc le rapport de M. Kecmanovic avec la réponse écrite du

13 Procureur dans le dossier, sans prendre aucunement partie à ce stade sur

14 le poids éventuel qui lui serait conféré, et c'est la page du transcript

15 en anglais 9012.

16 Le rapport du Dr Robert Donia constitue la réponse écrite du Procureur, en

17 notant que sont réunies toutes les conditions pour décider définitivement

18 de son admission.

19 La Chambre confirme l'admission des rapports au dossier et note que les

20 n°34/3 et 3/266 ont été déjà accordés respectivement au rapport du Pr

21 Kecmanovic et du Dr Robert Donia.

22 Troisième point, si je peux dire: la Chambre aimerait bien partager avec

23 les parties quelques directions pour la réplique et pour la duplique qui,

24 comme vous savez, est déjà marquée pour la semaine du 28 pour le

25 Procureur, la réplique donc, et pour la défense la semaine du 11 juin et

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1 18 juin. En notant que pour le Procureur, c'est le 28 mai.

2 Avec la fin de la défense de M. Prcac, nous avons achevé la présentation

3 des moyens de preuve par la défense, donc, à la fin de la présentation des

4 moyens de preuve à décharge de M. Prcac, clôt donc aussi la présentation

5 des éléments de preuve par la défense de tous les accusés.

6 Nous nous retrouverons la prochaine fois dans les dates que j'ai déjà

7 mentionnées, afin d'entendre la réplique du Procureur, puis la duplique de

8 la défense de chacun de ces accusés.

9 Je vois Me Stojanovic debout. Est-ce aussi urgent? Vous voulez

10 m'interrompre?

11 M. Stojanovic (interprétation): Vous m'avez fait peur en disant que la

12 présentation des moyens de preuve de la défense était terminée. Moi, au

13 cours de mes propos liminaires, je proposais…

14 M. le Président: Nous savons, c'est un cas spécial. Nous avons parlé de

15 cela. Ne vous sentez pas anxieux, nous n'avons pas oublié votre témoin

16 expert. Mais nous avons considéré qu'il devait être considéré le 28. Mais

17 pour tout le reste, nous avons fini.

18 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, nous avons fait des

19 propositions concernant un certain nombre de moyens de preuve. J'ai pris

20 contact avec Mme Thompson et j'en ai parlé à propos de mon propos

21 liminaire, il s'agissait de trois documents, le quatrième avait été admis,

22 il s'agissait...

23 M. le Président: Attendez. Nous allons… C'était pour cela… Attendez,

24 Maître. Il y a un certain ordre, sinon nous n'allons pas y arriver.

25 Je disais donc que la présentation des éléments de preuve à décharge, en

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1 principe, en règle, est terminée.

2 Il y a quelques exceptions, comme je vous ai dit, avant de vous quitter,

3 je souhaiterais cependant rappeler aux parties les règles d'admission des

4 éléments de preuve que la Chambre entend appliquer au stade de la réplique

5 et de la duplique.

6 Comme vous savez, la Chambre de première instance III, dans l'affaire

7 Kordic, avait indiqué qu'elle n'admettrait que les éléments de preuve qui

8 ne se rapportent pas à des points déjà soulevés lors de la phase de

9 présentation des éléments de preuve par les parties.

10 La Chambre va appliquer ce même principe. Plus précisément, la Chambre

11 compte appliquer le texte énoncé dans l'arrêt Celebici rendu par la

12 Chambre d'appel le 20 février dernier, comme cette Chambre a déjà fait

13 précédemment dans l'affaire Krstic.

14 Ceci signifie que les éléments de preuve présentés en réplique par le

15 Procureur ne seront admis que s'ils sont importants et s'ils répondent

16 directement à des éléments de preuve présentés par la défense. C'est

17 pourquoi, les éléments qui se rapportent à un aspect essentiel de la

18 présentation des éléments de preuve par le Procureur ne seront pas admis.

19 Certains éléments de preuve pouvant apparaître fondamentaux pourront être

20 cependant admis, si le Procureur n'a pas pu, malgré ces diligences, entrer

21 en leur possession pour la présentation de ces moyens de preuve et, si en

22 outre, ils répondent directement à un point soulevé par la défense, lors

23 de la présentation de ces éléments. Bien entendu, les mêmes règles

24 s'appliqueront aux éléments de preuve présentés par la défense des accusés

25 en public.

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1 Pour résumer, et comme vous savez, souvent il a des problèmes de

2 traduction parce que dans la terminologie française il n'y a pas certains

3 termes qui existent seulement en anglais, il faut dire pour résumer que la

4 Chambre va appliquer la jurisprudence Kordic, que le Procureur connaît et

5 les parties aussi, la défense aussi, la jurisprudence Celebici, et il y a

6 aussi la jurisprudence Krstic qui est bien récente.

7 Donc, ça pour vous orienter et vous faciliter. La Chambre vous dit

8 clairement qu'elle va être stricte dans l'application de ces règles. Donc

9 n'essayez pas de faire passer ce que vous, à première vue, vous savez qui

10 ne va pas passer; donc ne perdons pas de temps. C'est vrai que l'on peut

11 toujours discuter si ça doit ou ne doit pas être considéré mais c'est une

12 autre question. Et là, je vous invite vraiment à faire des échanges entre

13 les parties même si vous avez des doutes et, avant de présenter une

14 requête ou quelque chose, on maintient la règle, la décision orale de

15 cette Chambre dès le début que, avant de présenter une requête, la partie

16 qui présente la requête doit consulter l'autre partie et vient avec la

17 requête en disant: "Je demande ça, j'ai consulté la partie adverse, elle

18 est d'accord ou elle n'est pas d'accord." Et donc voilà.

19 Pourquoi parce que nous allons avoir très peu de temps et il faut bien

20 profiter du temps, sinon on va tomber dans une situation de calendrier

21 ingérable. Je vous fais appel à ça, je vous invite à préparer les choses

22 pour éviter de tomber dans une situation qui peut être difficile, de

23 gestion, de gérer, face aux limitations de calendrier que cette Chambre a

24 et donc qu'elle doit mener.

25 Donc voilà ce que j'avais à vous dire, c'étaient les trois points.

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1 Maintenant, je donne la parole à Me Stojanovic pour manifester vos

2 préoccupations que vous avez, d'une certaine façon, déjà dites.

3 Maître Stojanovic?

4 M. Stojanovic (interprétation): Je vous remercie Monsieur le Président.

5 Cependant, j'ai reçu une note…

6 M. le Président: Terminez, OK.

7 M. Stojanovic (interprétation): J'ai reçu une lettre…

8 M. le Président: Faites un exercice de clarté, d'être clair, concret et

9 concis. C'est toujours la règle que nous utilisons.

10 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, nous avons fait

11 notre demande par une requête écrite. Nous avons demandé que les pièces

12 D6/4, D7/4 soit versées au dossier. J'avais présenté ce document lors de

13 ma déclaration liminaire, ensuite restés deux...

14 M. le Président: Peut-être, vous ne savez pas. Mon Dieu, mon Dieu! Madame

15 Thompson, la greffière d'audience, est chargée de revoir toutes les

16 questions des documents qui sont encore pendants, et elle est chargée de

17 voir avec chaque partie toutes ces questions. Après, on va décider. Est-ce

18 que vous avez une autre question?

19 M. Stojanovic (interprétation): Non, Monsieur le Président, je viens de

20 recevoir ces recommandations de la part par de Madame Thompson, tout va

21 bien.

22 M. le Président: Il faut avoir une certaine organisation et discipline. Il

23 y a des situations où il n'y a pas de discipline mais ici on doit en

24 avoir.

25 Maître O'Sullivan?

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1 M. O'Sullivan (interprétation): Monsieur le Président, nous souhaiterions

2 avoir quelques indications concernant la réception, lors de la réception

3 de documents que le Procureur entend présenter comme ses moyens de preuve,

4 ainsi que les délais pour les réponses de la défense concernant les

5 propositions de l'accusation. Puisque la présentation des moyens de preuve

6 pour l'accusé Kos s'est terminée le 19 février, dans d'autres procès, il

7 doit être à la fois considéré de façon séparée et joint avec les autres

8 accusés. Nous n'avons rien entendu de la part de l'accusation au cours de

9 ces derniers mois et nous souhaiterions savoir si l'accusation entend

10 présenter des moyens de preuve supplémentaires à son sujet.

11 Donc nous nous attendons à recevoir un certain nombre de documents mais,

12 s'ils ont une réponse, nous souhaitons donc connaître la réponse que

13 réserve l'accusation concernant l'accusé Kos.

14 M. le Président: Madame Somers?

15 Mme Somers (interprétation): J'ai fait attention au temps qui passe

16 Monsieur le Président. Le Procureur, sans aucune autre direction, applique

17 cette même règle, règle des sept jours, et nous nous préparons et nous

18 espérons, qu'avant la fin de la semaine, nous allons préparer toute la

19 liste de pièces en réplique.

20 Donc je vous propose de vous présenter un tableau indiquant le nom des

21 témoins, les thèmes qu'ils vont aborder, ainsi qu'une liste de moyens de

22 preuve qui vont corroborer les témoignages.

23 Donc avant la fin semaine, nous proposons de fournir cette liste et

24 évidemment nous sommes prêts à entendre tout conseil que la Chambre peut

25 nous donner.

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1 M. le Président: Maître O'Sullivan, ça répond à vos préoccupations?

2 M. O'Sullivan (interprétation): Donc nous allons recevoir cela avant la

3 fin de la journée de travail de vendredi. C'est comme cela qu'il faut

4 comprendre, n'est-ce pas?

5 M. le Président: Cette semaine, Madame Somers?

6 Mme Somers (interprétation): Oui, bien sûr il s'agit de la règle des sept

7 jours, donc sept jours avant d'appeler les témoins, concernant Kos, oui,

8 dans ce cas-là, oui.

9 M. O'Sullivan (interprétation): Monsieur le Président, ce n'est pas la

10 pratique concernant la présentation des moyens de preuve. Moi, je

11 considère que le Procureur doit nous dire à l'avance qui ils ont

12 l'intention d'appeler et concernant quel chef.

13 Dans le cadre de la réplique à la défense de Kos, trois mois se sont

14 déroulés et nous considérons qu'il y a un manque de communication entre la

15 communication et nous, car nous devons préparer notre duplique, nous

16 devons enquêter sur ces personnes. Parce que cette règle des sept jours,

17 elle est valable pour le procès, pour le procès principal, mais pour la

18 réplique, pour la duplique, c'est différent. Il s'agit là de l'Article 75

19 parce qu'on ne peut pas dire que sept jours avant la préparation de la

20 duplique de la défense, eh bien, que cela suffit pour la défense de se

21 préparer et de répondre à l'accusation.

22 M. le Président: On ne peut pas. Nous sommes presque arrivés à deux heures

23 de travail, mais la question que vous avez posée est importante. Je crois

24 que nous allons faire la pause de 50 minutes et revenir pour discuter de

25 cette question. Car il n'est pas possible de continuer dans ces

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1 conditions. Donc, voilà nous allons faire une pause de 50 minutes et

2 revenir.

3 (Le témoin, M. Dusan Lakcevic, est reconduit hors du prétoire.)

4 (L'audience, suspendue à 13 heures 35, est reprise à 14 heures 35.)

5 (Les accusés sont introduits dans le prétoire.)

6 M. le Président: Veuillez vous asseoir s'il vous plaît.

7 Mme Somers (interprétation): Monsieur le Président, je demanderai quelques

8 instants de patience pour préciser ce que j'ai déclaré ce matin.

9 M. le Président: Oui, nous avons quelques instants de patience, nous avons

10 beaucoup de patience en ce sens. Allez-y.

11 Mme Somers (interprétation): Merci beaucoup. Monsieur Jovanovic a attiré

12 mon attention sur le fait que je n'ai peut-être pas été tout à fait claire

13 dans le document au sujet duquel vous avez demandé la date de publication

14 à Sarajevo.

15 Il a été indiqué que cela ne serait pas publié dans le journal officiel,

16 mais que cela entrerait en vigueur au huitième jour, suite à son adoption.

17 Je me réfère ici au document 3/285A, B et C. Ce qui fait que je voulais

18 attirer votre attention sur le fait de ne pas devoir vous attendre à ce

19 que je puisse vous apporter ce journal officiel.

20 Mme Wald (interprétation): La seule chose qui nous intéresse, c'est de

21 savoir si ce document, cet acte législatif a été adopté, car vous auriez

22 pu nous apporter juste un projet qui n'a jamais été prévu pour adoption.

23 Mme Somers (interprétation): Nous nous efforcerons de l'apprendre et c'est

24 une information que j'ai reçue de la faculté de justice de criminologie de

25 Sarajevo. Merci.

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1 M. le Président: Quand vous parlez la même langue sans faire de pauses: on

2 doit faire la pause enfin. C'est donc déjà éclairci.

3 Nous allons donc reprendre la question et reposer la question qui nous a

4 fait revenir au prétoire.

5 Maître O'Sullivan, peut-être pourriez-vous s'il vous plaît nous résumer

6 votre question? Et après je donnerai la parole à Mme Somers pour répondre.

7 S'il vous plaît, Maître O'Sullivan?

8 M. O'Sullivan (interprétation): Merci Monsieur le Président. Notre

9 position concernant l'accusé Kos est la suivante: le bureau du Procureur

10 ne nous a pas indiqué, si oui ou non, elle avait l'intention de présenter

11 des documents, des éléments de preuve pour contester ce qui a été avancé

12 par la défense.

13 Nous avons terminé notre présentation des éléments de preuve à décharge le

14 19 février. Il y a donc près de 3 mois et, si en effet l'accusation à

15 l'intention de demander la présentation de pièces à conviction en

16 réplique, je pense que cela devait nous être communiqué en temps utile,

17 car leur obligation, du fait de l'Article 66, consiste bien à mettre à la

18 disposition de la défense les déclarations de tout témoin additionnel

19 qu'elle envisagerait de citer à la barre. C'est ce qui est dit au 66 A)

20 ii) et je crois que nous avons terminé le 19 ou 20 conformément à

21 l'Article 82 A) dans un procès conjoint où chacun des accusés bénéficie

22 des mêmes droits que dans des procès individuellement conduits.

23 L'accusation, comme nous le pensons, comme nous l'affirmons, ne savait pas

24 suffisamment de temps à l'avance combien de témoins l'accusation avait

25 l'intention de citer, pour contester les éléments de preuve que nous avons

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1 présentés. Mais avant de le savoir, nous ne pouvons pas faire savoir à la

2 Chambre quelle a été ou quelle va être notre position qui se fondra sur

3 les prémisses que je viens de présenter.

4 Je crois qu'il serait donc important de faire en sorte qu'entre la date de

5 présentation de nos éléments de preuve à décharge et la présentation des

6 éléments de preuve complémentaires de l'accusation, de nous faire savoir

7 quels seront les témoins que l'on citera et quels seront les éléments de

8 preuve contestés, afin que nous puissions nous préparer à ce que

9 l'accusation entreprendra.

10 M. le Président: Avant de donner la parole à Mme Somers, j'aimerais bien

11 savoir quelle est la position des autres conseils, afin que Mme Somers

12 puisse répondre et avoir une idée générale?

13 Est-ce que d'autres conseils ont des observations à faire?

14 M. Lukic (interprétation): Monsieur le Président, nous avons eu

15 l'opportunité d'en discuter avec nos collègues pendant la pause et je puis

16 juste vous dire que nous appuyons les affirmations avancées par notre

17 collègue, Me O'Sullivan.

18 M. le Président: Maître Jovanovic?

19 M. Jovanovic (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Nous avons

20 convenu pendant la pause, comme l'a dit notre collègue, M. Lukic, et nous

21 avons pris une position tout à fait identique à celle qui a été présentée

22 par Me O'Sullivan.

23 M. le Président: Maître O'Sullivan?

24 M. O'Sullivan (interprétation): Monsieur le Président, je me joins à la

25 position qui vient d'être présentée, mais je vois un autre problème

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1 supplémentaire.

2 J'imagine que nous avons aussi l'obligation de communiquer 7 jours à

3 l'avance à l'accusation ce que nous allions présenter dans notre duplique,

4 et ce que nous allons présenter dans notre duplique, nous ne le saurons

5 que lorsque la réplique sera terminée. La réplique sera terminée au 1er

6 juin. Pour nous en tenir à ce délai de 7 jours, notre dernier délai de

7 préparation de duplique et de communication à l'accusation, c'est le 3

8 juin un dimanche. Donc si on finit le 1er juin la réplique et c'est un

9 vendredi, le dernier délai qui nous est imparti pour respecter ce délai de

10 sept jours cité par l'accusation, tombe le 3 juin, un dimanche.

11 J'aimerais que nous discussions aussi de ce problème-là. Merci.

12 M. le Président: Madame Somers?

13 Mme Somers (interprétation): Merci, Monsieur le Président de me fournir la

14 possibilité de répondre à l'ensemble, en une fois.

15 Je pense qu'il n'y a aucun fondement pour ce qu'affirme la défense. En

16 fait l'Article 85 ne dit rien concernant le délai de communication,

17 concernant ce que l'on a l'intention de présenter en réplique pour

18 contester ce que la défense a avancé. Je crois que Me O'Sullivan est en

19 train de confondre certains droits de procédure dont bénéficie chaque

20 accusé. L'Article 21 dit en effet que ces droits ne sauraient être réduits

21 par le fait de tenir un procès conjoint.

22 Pendant la pause, je me suis rappelée certaines conclusions tirées dans

23 l'affaire Kordic où nous avions deux accusés, Kordic et Cerkez, et à la

24 fin de la présentation des éléments de preuve, il a été conclu de la

25 présentation des éléments de preuve en réplique de l'accusation.

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1 En fait, l'accusation jusqu'à la fin de la présentation des éléments de

2 preuve, pour tous les accusés, ne s'est pas en fait ou n'a pas

3 suffisamment d'indications tout comme la Chambre n'a pas suffisamment

4 d'indications pour ce qui s'est passé au cours du procès. Donc il n'y a

5 pas de renseignements afférents au témoin, aux affidavits, ainsi de suite.

6 La Chambre a compris cela et a fourni l'occasion à tout conseil de la

7 défense, au contre-interrogatoire, d'interroger les témoins parce qu'elle

8 a compris que cela pourrait modifier la position de chaque accusé, quoique

9 la présentation par exemple des éléments de preuve pour tel accusé soit

10 déjà terminée.

11 En d'autres termes, l'accusation a dû réexaminer toute l'affaire dans le

12 cas où quelque chose surgirait lors de la présentation des éléments de

13 preuve. Par exemple dans l'affaire Prcac ou concernant l'accusé Kos, il

14 faudrait que nous réexaminions tout ce qui a été dit pour aboutir à une

15 conclusion pertinente.

16 En fait, dans l'affaire Delalic, dans le cas de l'affaire Delalic,

17 Celebici, il y a eu une proposition de soulever, au terme de laquelle

18 l'accusation était censée présenter ses éléments de preuve en réplique, et

19 par la suite de présenter des documents à l'appui en duplique de Delalic

20 et la Chambre a rejeté cette approche. Elle a rejeté la possibilité de le

21 faire accusé par accusé. En fait donc la Chambre de première instance a

22 refusé de procéder ainsi étant donné qu'il s'agissait d'un procès

23 conjoint. Et c'est une chose qu'il convient de souligner dans chaque phase

24 de la procédure. Je crois qu'on ne limite en rien les droits de quelque

25 accusé que ce soit jusqu'à la fin du procès étant donné que j'estime que

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1 tout conseil de la défense a le droit de contre-interroger une fois que

2 nous aurons procédé à l'interrogatoire.

3 Cette règle de communication des informations dans un délai de 7 jours

4 avant, qui a été mentionnée ici, constitue en fait un délai suffisant pour

5 la défense aux fins de prendre connaissance de tout ce qu'il lui est

6 nécessaire, aux fins de la préparation de sa duplique.

7 Je crois que nous allons pour l'accusation avoir moins de temps, de par la

8 façon dont le procès se tient, pour procéder à nos recherches, mais nous

9 ne concentrons pas notre attention sur cette limitation de certains de nos

10 droits.

11 Il est important de dire dans le cas Kordic ou dans l'affaire Foca Kunarac

12 qu'il faut attendre que la présentation des éléments de preuve soit

13 terminée pour chaque accusé, étant donné qu'il s'agit d'un procès

14 conjoint. C'est sur ce même principe que l'on a fonctionné dans l'affaire

15 Kordic et Foca Kunarac où on avait trois accusés, et je crois qu'on avait

16 adopté le même principe.

17 Le Procureur a donc proposé et j'espère que la Chambre sera d'accord avec

18 cette proposition, car cela nous permettra de procéder de façon équitable

19 et rapide pour traiter de la question, et si vous êtes d'accord, d'ici la

20 fin de la journée ouvrable de vendredi, nous pourrions communiquer quels

21 sont les témoins que nous entendons citer et ce, partant des ordonnances

22 émanant de cette Chambre et les déclarations de témoins conformément a

23 l'Article 66 qui ne seront mis en application que dans le cas où il y a

24 une décision pour ce qui est de les faire venir pour contester les dires

25 de la défense.

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1 M. le Président: Cela vous intéresse (inaudible) les conclusions

2 additionnelles?

3 Mme Somers (interprétation): Je crois avoir fait allusion au fait que

4 l'accusation recevra le côté épais du bâton. Je crois qu'il faut que tout

5 le monde se comporte de façon bon affidé et que ce délai de 7 jours est un

6 délai suffisant.

7 M. le Président: Maître O'Sullivan?

8 M. O'Sullivan (interprétation): Quelques points très brièvement.

9 Nous devons nous poser la question de savoir pourquoi l'accusation détient

10 les déclarations en sa possession qu'elle peut utiliser dans sa réplique

11 contre M. Kos. Ils avaient trois mois à leur disposition pour réfléchir de

12 ce qu'il convenait de faire pour réfuter la défense de Kos. Je crois qu'il

13 n'est pas équitable de ne pas attirer notre attention sur les déclarations

14 de témoins potentiels qui sont susceptibles d'être cités à la barre pour

15 témoigner ici et cela étant en opposition flagrante avec l'Article 66.

16 Mon éminente collègue cite le cas de Celebici. Je me féliciterais de voir

17 cette Chambre appliquer la décision prise en appel de Celebici, auquel cas

18 l'accusation n'avait point le droit de présenter certains éléments de

19 preuve pour réfuter les allégations de la défense.

20 Pour ce qui est de l'affaire Celebici et ce, en partie parce que Delalic

21 avait terminé sa présentation des éléments de preuve au début du printemps

22 et ce n'est qu'en juillet que l'accusation a annoncé ce qu'elle entendait

23 faire.

24 La dernière chose que je voulais souligner, c'est que l'Article 82 ne

25 limite en rien le droit de l'accusé d'être jugé de la même façon comme si

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1 cela était un procès conduit à son égard seul. C'est ce qui nous est

2 précisé par les Articles 20 et 21. Donc en bref, je pense que ce que

3 l'accusation a fait, à savoir conserver aussi longtemps pour soi certains

4 documents, avait en fait pour objectif de nous empêcher de pouvoir traiter

5 et rechercher des éléments, soulever des questions que nous pourrions

6 peut-être poser à l'occasion de notre duplique.

7 Mme Wald (interprétation): J'ai moi une question.

8 Maître O'Sullivan, on est mardi, l'accusation indique que d'ici vendredi

9 nous recevrions les documents qui nous préciseront quels sont les témoins

10 qu'elle entend citer. Et je voudrais que Mme Somers me rectifie si je me

11 trompe, j'imagine que dans le cas où les témoins qui sont cités sur une

12 liste devraient faire l'objet d'une communication des déclarations. Par

13 conséquent, je voudrais savoir quelle est la solution que vous proposeriez

14 en ce moment, compte tenu des critiques que vous avez formulées concernant

15 la conservation de certains éléments?

16 M. O'Sullivan (interprétation): Pour ce qui est de l'affaire Kos, je crois

17 qu'il faudrait refuser leur requête.

18 Mme Wald (interprétation): A cause du délai?

19 M. O'Sullivan (interprétation): Oui.

20 M. le Président: Pourquoi soulevez-vous cette question seulement

21 maintenant, une fois que nous avons déjà ce calendrier établi depuis

22 longtemps?

23 M. O'Sullivan (interprétation): Monsieur le Président, je crois que la

24 question devrait être posée à l'accusation, car c'est l'accusation qui est

25 la partie qui se doit de décider quels sont les éléments de preuve qu'elle

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1 entend présenter dans sa partie du procès. Ils doivent s'adresser à nous.

2 M. le Président: Réplique du Procureur, c'est cela? Vous avez donc appris

3 aujourd'hui qu'il y aurait une réplique?

4 M. O'Sullivan (interprétation): Je n'ai jamais entendu dire de la part de

5 l'accusation si celle-ci a l'intention de présenter des éléments de preuve

6 complémentaires concernant l'affaire Kos. Je ne sais pas encore si elle se

7 propose de présenter des éléments de preuve supplémentaires concernant

8 Kos. La question maintenant qui se pose est de savoir si cela est conforme

9 aux affaires Celebici et Kordic.

10 M. le Président: Est-ce que le Procureur fait cette communication pour la

11 réplique?

12 M. O'Sullivan (interprétation): Je pense qu'il y a une double obligation.

13 D'abord, conformément à l'Article 66 qui concerne la communication des

14 éléments de preuve et qui concerne le moment où l'accusation décide de la

15 présentation d'un témoin ou d'un élément de preuve.

16 Je crois qu'il importe de ne pas priver l'accusé de certains droits dont

17 il bénéficierait au cas où il aurait été jugé à part. Je crois que cela

18 constitue un préjudice que d'attendre des mois et des mois, de façon

19 intentionnelle -il s'agit d'une attente d'au moins deux mois-, et pendant

20 ce temps nous n'avons pas été informés de l'intention du Bureau du

21 Procureur. Je crois que la réfutation des éléments de preuve de la défense

22 doit concerner tout ce qui s'est passé au cours des cinq procès… ou plutôt

23 du procès de ces cinq accusés.

24 M. le Président: Il s'agit toujours d'un délai fixé par la Chambre et

25 comme vous avez dit, la réplique a une dimension à mon avis tout à fait

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1 différente, la présentation initiale des éléments de preuve. Maintenant à

2 ce stade de développement de l'affaire, je crois qu'il y a des questions

3 très restreintes, très strictes.

4 Est-ce que vous pourriez être d'accord pour, par exemple -je n'ai pas

5 parlé avec mes collègues, c'est mon idée-, respecter ce délai que nous

6 avons dans le calendrier? Et si vous avez un préjudice vraiment

7 significatif, vous pourriez le signaler à la Chambre. Quelle est votre

8 position?

9 M. O'Sullivan (interprétation): Je vais faire deux observations.

10 La première va dans le sens de l'Article 66 A) alinéa 2, la dernière

11 phrase où il est dit que: "La décision est prise d'appeler ces témoins."

12 D'après moi, il s'agit de la décision qui a été prise par un parti, c'est-

13 à-dire le Procureur, et pas par la Chambre. Quand le Procureur décide

14 qu'il souhaite appeler un témoin, il se voit dans l'obligation de

15 communiquer les déclarations concernant ce témoin.

16 Et mon deuxième point concerne… le point suivant: nous ne comprenons pas

17 pour quelle raison il existe un tel secret sur cette question simple: est-

18 ce que la défense doit s'attendre à une réplique ou non? Je ne comprends

19 pas pourquoi le Procureur ne nous en informe pas à l'avance, et pas sept

20 jours d'ailleurs.

21 Ce n'est pas raisonnable de s'attendre que nous répondions, que nous nous

22 préparions et de faire notre enquête, alors que nous ne savons pas s'il y

23 a un témoin ou dix témoins. Nous considérons qu'au cours de ces derniers

24 mois, les trois derniers mois, le Procureur aurait pu réfléchir à la

25 question et nous donner une réponse.

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1 M. le Président: Je crois que nous avons ici des points nouveaux.

2 Madame Somers, peut-être avez-vous quelque chose à répondre?

3 Mme Somers (interprétation): Oui, je voudrais répondre puisque moi je ne

4 comprends pas vraiment, je ne crois pas vraiment à cette argumentation. La

5 Chambre a toujours été juste envers toutes les parties, et je suis

6 vraiment désolée d'entendre dire par la défense aujourd'hui que nous avons

7 retenu des information. Ce n'est pas vrai.

8 Il n'y a pas eu de conférence préalable à la présentation des moyens de

9 preuve mais il est vrai qu'on nous a posé des questions, et nous avons

10 toujours demandé quels étaient les délais qui nous étaient alloués pour la

11 présentation de notre réplique. Nous avons toujours essayé de nous y

12 tenir. C'est vrai que nous aurions pu inviter et appeler n'importe quel

13 témoin, à la fin de la défense de la présentation des moyens de preuve en

14 principal en ce qui concerne l'accusé Kos, nous aurions donc pu appeler un

15 ou deux témoins pour la réplique et nous aurions pu procéder de la même

16 façon en ce qui concerne Kvocka, mais ceci aurait signifié que l'on

17 répétait le procès à l'infini. Nous n'avons jamais fait de conférence au

18 cours de laquelle la Chambre nous a donné des dates exactes.

19 M. le Président: J'ai vraiment beaucoup de mal à vous suivre. Je vais

20 changer de canal et passer sur l'anglais.

21 Interprète: Cela va trop vite, Monsieur le Président.

22 M. le Président: Les interprètes ont vraiment beaucoup de mal à vous

23 suivre: ou vous parlez lentement ou nous aurons des problèmes.

24 Mme Somers (interprétation): Je suis désolée Monsieur le Président. J'ai

25 été vraiment énervée par ce que j'ai entendu de la part de la défense de

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1 l'accusé Kos.

2 Je considère que cette approche n'est pas juste, nous avons toujours été

3 ouverts à toute la discussion. La Chambre a été très ouverte dans ses

4 positions de tout point de vue, et la Chambre a sorti de l'ordre en

5 violant l'Article 45 et elle a permis à Kvocka et Radic de présenter ces

6 moyens en ne respectant pas l'ordre.

7 Nous considérons donc que ce que la défense dit aujourd'hui, eh bien que

8 ceci n'est pas fondé du tout. L'Article 66 A) alinéa 2) prescrit les

9 limites, les délais. Et nous savons que la Chambre s'occupe de la justesse

10 de ses procès, et nous considérons qu'il n'est pas possible de dire

11 aujourd'hui que nous n'avons pas permis à la défense de se présenter.

12 Nous avons une idée très claire concernant ce qu'il nous reste à faire, et

13 nous réfléchissons aux limites, aux limites que nous rencontrons au moment

14 où nous présentons nos moyens de preuve, mais nous ne sommes tout

15 simplement pas en mesure de refaire l'enquête depuis le début.

16 Il s'agit de points qui ont été soulevés par la défense et il nous

17 appartient de répondre à ces points. Il n'y a donc pas de base à ce que

18 dit la défense. Nous demandons donc à la Chambre de nous permettre de

19 présenter notre liste et de nous permettre de procéder avec notre affaire.

20 Mme Wald (interprétation): Je vais vous poser une question. Je ne sais pas

21 combien de témoins vous allez appeler. Mais je vais vous poser la question

22 suivante: je ne sais pas combien de temps s'est déroulé entre le moment

23 dans l'affaire Kordic où les conseils de la défense ont reçu la liste des

24 témoins dans le cadre de la réplique, est-ce que cette période était plus

25 longue qu'une semaine ou non?

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1 Pouvez-vous nous affirmez aujourd'hui, vous basant sur votre expérience,

2 je ne sais pas exactement de combien de temps vous allez avoir besoin pour

3 chaque accusé, mais est-ce que vous pouvez nous assurer qu'une semaine

4 nous suffira pour examiner tous les témoins et pour examiner tous les

5 moyens de preuve concernant ce témoin?

6 Mme Somers (interprétation): Je vais vérifier ce qu'il s'est passé dans

7 l'affaire Kordic pour ne pas vous donner de fausses informations. Mais

8 nous allons terminer la présentation des moyens de preuve et nous allons

9 continuer. Tout simplement je pense que cette pause n'était pas très très

10 longue.

11 Mme Wald (interprétation): Mais une semaine ce n'est pas une période très

12 longue, je vous pose la question suivante: pensez-vous vraiment

13 honnêtement qu'ils seront en mesure de se préparer en l'espace d'une

14 semaine?

15 Mme Somers (interprétation): Oui oui Madame la Juge.

16 Mme Wald (interprétation): Mais il y a une grande différence, si vous

17 dites qu'il y aura cinq témoins dans la réplique ou bien y en a-t-il plus

18 et combien de documents?

19 Mme Somers (interprétation): Je pense que nous avons réagi parfois en

20 moins d'une semaine, parfois nous sommes obligés de réagir en l'espace

21 d'une nuit ou d'un jour ou de deux jours, mais nous avons toujours pu

22 assumer notre tâche. Et je pense en employant toute la diligence

23 nécessaire ceci ne sera pas difficile. Nous agissons en bonne foi. Nous

24 n'essayons pas de poser des barrages sur la route de qui que ce soit, mais

25 nous considérons que cet espace de temps sera suffisant, en tout cas nous

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1 n'avons pas disposé de la même période de temps pour nous préparer à la

2 présentation des moyens de preuve de la défense.

3 Mme Wald (interprétation): Pourriez-vous répondre à la question suivante,

4 car je pense que vous n'avez pas compris? Quel est le nombre des témoins

5 maximal que vous allez appeler dans le cadre de la réplique contre

6 l'accusé? Et vous n'avez pas à me dire par exemple quel est cet accusé.

7 Mme Somers (interprétation): Puis-je avoir une seconde s'il vous plaît

8 pour consulter? Je ne voudrais pas être liée par cela.

9 Mme Wald (interprétation): Oui, bien sûr, bien sûr.

10 Mme Somers (interprétation): Cinq, six au maximum.

11 Mme Wald (interprétation): Pour un accusé, vous voulez dire?

12 Mme Somers (interprétation): Oui. Par exemple si nous avons une semaine et

13 que nous avons plusieurs points qui vont être soulevés, cela ne va pas

14 être la même chose, mais, nous, nous disons que cela représenterait le

15 chiffre maximum et s'il y a des documents qu'il faut présenter eh bien,

16 nous les présenterons, mais nous les présenterons le temps nécessaire de

17 faire la traduction.

18 Mme Wald (interprétation): Je comprends.

19 Mme Somers (interprétation): Oui mais avec cinq accusés.

20 M. Riad (interprétation): Madame Somers, je pense que vous n'avez pas les

21 mêmes moyens que la défense. Vous dites que vous réagissez pendant une

22 nuit mais vous avez beaucoup plus de ressources que la défense puisque les

23 ressources de la défense sont vraiment limitées.

24 Mme Somers (interprétation): Oui, je le comprends et je suis entièrement

25 d'accord Monsieur le Juge.

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1 M. O'Sullivan (interprétation): Madame et Monsieur les Juges, Monsieur le

2 Président, je n'ai rien à ajouter mais je voudrais présenter mes excuses à

3 Mme Somers si elle pense que je l'ai offusquée. Je m'excuse si elle a

4 compris cela de cette façon parce que nous n'avons pas agi de mauvaise

5 foi, nous n'avons jamais fait, c'est contraire à notre éthique, moi je

6 m'efforce de défendre les intérêts de l'accusé en respectant la loi.

7 M. Riad (interprétation): Maître O'Sullivan, mais le fait est que vous

8 auriez pu attirer notre attention sur cela plus tôt.

9 M. O'Sullivan (interprétation): Moi je ne savais pas si elle avait des

10 témoins ou non.

11 M. Riad (interprétation): Mais vous auriez pu vous entendre puisque vous

12 saviez qu'elle était très active.

13 (Les Juges se concertent sur le siège.)

14 M. le Président: Madame Somers, nous voudrions avoir encore une

15 information: qu'est-ce que vous allez transmettre au conseil vendredi

16 prochain?

17 Vous avez parlé d'une liste de témoins etc., mais est-ce que les

18 déclarations des témoins sont incluses ou non? Qu'est-ce que vous allez

19 transmettre?

20 Mme Somers (interprétation): Monsieur le Président, ce que nous espérons

21 avoir en possession est un tableau. Je pense que c'est toujours mieux de

22 présenter un tableau: donc le nom du témoin, la nature de son témoignage,

23 c'est-à-dire les chefs sur lesquels portent les témoignages, les

24 déclarations des témoins s'y afférant, traduits ou non -cela dépendra de

25 la langue dont nous disposerons vendredi et l'autre partie qu'il s'agisse

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1 du BCS ou de l'anglais dès que nous l'aurons.

2 Mais, moi, je voudrais vous donner une image complète de ce qui est requis

3 par l'ordonnance de la Chambre dans l'affaire Krstic. Je pense que tout le

4 monde devrait savoir quel est le point auquel on se réfère, donc les

5 documents, les déclarations préalables des témoins, et si je ne les

6 possède pas physiquement, les documents, les moyens de preuve entre mes

7 mains, eh bien, on va les énumérer, on va en faire un résumé.

8 Evidemment, tout peut être inclus là-dedans en vertu de l'Article 66, des

9 déclarations, mais aussi en vertu de l'Article 65 ter, ceci peut

10 représenter des résumés des témoignages proposés des témoins, concernant

11 un point précis de la réplique.

12 M. le Président: Donc tout cela, vous êtes en condition d'envoyer

13 vendredi?

14 Mme Somers (interprétation): Oui, nous allons nous efforcer de le faire.

15 Nous disons cela à la Chambre en toute bonne foi. Donc nous déclarons que

16 nous allons, au moins, identifier les noms, les points ainsi que les

17 points de la réplique, les chefs auxquels ceux-ci se réfèrent.

18 M. le Président: Il faudrait déjà faire quelque chose aujourd'hui ou

19 demain.

20 Mme Somers (interprétation): Je pense que certains noms pourraient être

21 communiqués. Si je suis en mesure de retrouver tous les documents, je vais

22 faire de mon mieux pour les préparer pour demain mais, en tout cas, je

23 pense que nous serions en mesure de préparer des noms pour demain, un

24 certain nombre de noms.

25 M. le Président: Donc, la décision de la Chambre sera la suivante: vous

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1 allez communiquer au plus tard vendredi tous les éléments nécessaires pour

2 que les conseils de la défense puissent se préparer.

3 Quand la Chambre dit au plus tard, cela veut dire que si vous êtes en

4 condition de communiquer déjà des éléments aujourd'hui et demain, vous

5 devez les transmettre.

6 La Chambre de cette façon va maintenir le calendrier fixé depuis

7 longtemps. La Chambre ne peut pas à ce stade, en ce moment, dire la date

8 mais, si nécessaire, la date va apparaître.

9 Les conseils de la défense jusqu'à la fin de la semaine prochaine, devant

10 les éléments qu'ils vont recevoir du Procureur, vont communiquer à la

11 Chambre deux choses.

12 En premier lieu, s'il y a un préjudice pour les droits de l'accusé.

13 Deuxième point, quelles sont les raisons et quelle est la nature du

14 préjudice.

15 Donc voilà la décision sur cette question.

16 Je crois donc que nous avons fini nos débats par rapport à cette question.

17 Maître O'Sullivan, y avait-il d'autres questions par rapport aux points

18 que vous avez soulevés ou non?

19 M. O'Sullivan (interprétation): Non, Monsieur le Président.

20 M. le Président: Très bien.

21 Du côté du Procureur, est-ce qu'il y a quelque point qui doit mériter

22 quelques éclaircissements, ou avons-nous terminé?

23 Mme Somers (interprétation): Peut-être la Chambre pourrait-elle nous

24 indiquer si elle émettra une ordonnance similaire concernant la duplique

25 de la défense, à partir du moment où cette ordonnance aura été accomplie

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1 par le Procureur, c'est-à-dire respectée par le Procureur. Puisque la

2 défense va sans doute présenter une duplique et ensuite je ne sais pas ce

3 qu'il en est en ce qui concerne les conseils puisque peut-être que nous

4 allons terminer plus tôt que prévu mais je ne sais pas si les conseils

5 vont rester à La Haye ou non, mais en tout cas je souhaiterais connaître

6 l'endroit où ils vont se trouver pour pouvoir leur communiquer tous les

7 documents de façon convenable.

8 M. le Président: Je crois qu'il y a ici deux questions.

9 Si la Chambre va émettre une autre ordonnance, je crois qu'il n'est pas

10 nécessaire, vous quand même, Madame Somers, vous avez accepté le risque et

11 donc je crois qu'il y a une bonne foi de toutes les parties, et je crois

12 que la défense ne va pas créer délibérément des problèmes au Procureur.

13 S'il y a un problème, vous, vous allez le mentionner.

14 La question des endroits pour faire les communications, comme vous savez,

15 la Chambre n'a pas les adresses des conseils de la défense. C'est au

16 Greffe qu'appartient de prendre soin de cette chose, voilà, ou alors vous

17 vous mettez en contact tout de suite avec les conseils. De toute façon,

18 les papiers restent ici et vous êtes à un autre endroit et après le

19 Procureur a dit qu'il a envoyé, mais vous dites que vous n'avez pas reçu,

20 donc il faut que vous preniez soin de cela. Ce n'est pas à la Chambre de

21 garantir cet aspect.

22 Je vous vois debout, Madame Somers, y a-t-il autre chose car nous devons

23 terminer?

24 Mme Somers (interprétation): Peut-être n'ai-je pas été très claire?

25 J'ai demandé si la Chambre allait émettre une ordonnance similaire

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1 concernant la duplique de la défense, donc concernant les témoins.

2 Moi je ne demande pas que la Chambre fasse une ordonnance écrite

3 concernant les obligations en ce qui concerne la réplique du Procureur.

4 Je me demande si on va faire la même demande, si on va demander la même

5 chose à la défense ou la chose similaire, c'est tout ce que je voulais

6 savoir.

7 M. le Président: Je dois avouer que je ne comprends pas bien quel est

8 votre point. Je ne sais pas s'il y a un problème de traduction ou quelque

9 chose comme cela.

10 Ce que je comprends maintenant, c'est que vous demandez à la Chambre si la

11 Chambre va émettre une autre ordonnance similaire à celle-ci.

12 Mme Somers (interprétation): Concernant la duplique de la défense, c'est-

13 à-dire si la défense a l'intention de présenter sa duplique, de présenter

14 des moyens de preuve supplémentaires dans le cadre de sa duplique, va-t-on

15 imposer à la défense les mêmes délais que ceux qui ont été imposés au

16 Procureur dans le cadre de la réplique du Procureur?

17 M. le Président: Peut-être est-ce la fatigue, mais ce n'était pas la

18 question soulevée par Me Stojanovic?

19 (Signe négatif de Mme Somers.)

20 (Les Juges se concertent sur le siège.)

21 Pour autant que je comprends la question, je crois que nous sommes un peu

22 dans la même situation mutatis mutandis, la décision s'applique mais je

23 crois que nous tomberons dans la situation, je crois que je suis excessif

24 en disant cela, qui a été soulevé par Me Stojanovic, car si on doit

25 respecter les 7 jours, Me Stojanovic avait bien soulevé que ce jour

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1 tombait le 3 juin, le dimanche. Et donc à la fin, c'est un peu la même

2 question, c'est-à-dire, et vous avez répondu à cela, Madame Somers, en

3 disant que souvent le Procureur devait travailler avec des délais un peu

4 plus courts. Donc j'ai compris que vous aviez accepté.

5 Maintenant vous posez la question et la question est: la décision

6 s'applique mutatis mutandis, c'est-à-dire que vous devriez accepter

7 éventuellement que les conseils vous communiquent par exemple, jusqu'au 5,

8 ou quelque chose comme cela. Mais on ne peut pas être rigides là car,

9 comme vous savez, vous terminez votre réplique le 1er juin, c'est un

10 vendredi, et donc le délai est peut-être difficile. Il faut donc avoir une

11 certaine malléabilité.

12 La décision s'applique mutatis mutandis, c'est-à-dire entre des personnes

13 qui sont bien sur la situation et qui ne vont pas créer un problème quand

14 le problème peut être évité. Est-ce que les choses sont claires

15 maintenant? Peut-être dois-je encore les revoir?

16 Mme Somers (interprétation): Je crois que oui, Monsieur le Président. Nous

17 voulions également disposer d'une liste analogue et je comprends que peut-

18 être le délai sera plus court à cause du week-end, ce n'était pas là la

19 substance de la question soulevée, c'était davantage une réciprocité, une

20 mutualité, une réciprocité de présentation de liste.

21 M. le Président: Pour moi, c'était clair déjà depuis le début car je crois

22 que jamais, jamais la défense n'a voulu imposer une règle au Procureur

23 qu'elle ne voudrait pas accepter pour elle-même. J'ai pensé, je crois que

24 je me suis trompé, mais je crois que non, donc pour moi c'était clair.

25 Maintenant, c'est plus clair encore.

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1 Je crois donc que nous sommes tous un peu fatigués. Il faut terminer parce

2 que quand même, quoique fatigués, nous avons beaucoup de choses à faire.

3 Vous savez, il n'y a pas seulement cette affaire dans le Tribunal. La

4 Chambre est engagée à plusieurs choses et nous avons donc d'autres

5 obligations mais nous oublions que nous passons dans ce petit monde, que

6 c'est l'affaire, cette affaire, c'est aussi notre affaire.

7 Nous en avons d'autres quand même. Donc pour aujourd'hui nous allons

8 terminer. Je vous remercie beaucoup d'avoir coopéré, et je crois que nous

9 allons continuer comme cela jusqu'à la fin pour terminer.

10 Donc bon travail et nous nous retrouverons ici le 28 mai.

11 (L'audience est levée à 15 heures 28.)

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