Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Lundi le 28 Mai 2001.)

2 (Audience publique.)

3 (L'audience est ouverte à 10 heures 20.)

4 M. le Président: Bonjour, veuillez vous asseoir.

5 Bonjour Mesdames, Messieurs, bonjour cabine technique, bonjour les

6 interprètes, le personnel du Greffe. Bonjour conseils de l'accusation et

7 de la défense.

8 Nous allons donc commencer la réplique du Procureur. Nous sommes

9 maintenant à cette phase du procès mais avant il faut que la Chambre rende

10 une décision sur la liste des témoins proposée pour la réplique.

11 Donc le 18 mai 2001, le Procureur a soumis la liste des onze témoins qui

12 ont souhaité présenter devant la Chambre dans le cadre de sa réplique.

13 Le 22 mai, il a retiré un témoin de cette liste. Sur les dix témoins

14 restants, deux concernaient plus spécialement l'accusé M. Kvocka, quatre

15 concernaient plus directement l'accusé M. Zigic et quatre concernaient

16 l'accusé M. Prcac.

17 La défense des accusés, M. Kvocka, M. Zigic et M. Prcac, a soumis des

18 écritures qui tendent à s'opposer à la comparution de ces témoins dans la

19 mesure où, notamment en premier lieu, leurs dépositions porteraient sur

20 des points fondamentaux de l'accusation et auraient donc dû, en tant que

21 telles, être présentées dans le cadre de la présentation de ces preuves à

22 titre principal par le Procureur.

23 En deuxième lieu ou simultanément, ces témoins de la défense et notamment…

24 Pardon, je me corrige, en deuxième lieu, un autre, ou simultanément ces

25 témoins viendraient contredire des points évoqués par les témoins de la

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1 défense et notamment des points de vue sur les accusés auxquels le

2 Procureur devait légitimement s'attendre.

3 La Chambre souhaite tout d'abord rappeler que les parties ont été averties

4 à plusieurs reprises que la Chambre interpréterait strictement les notions

5 de réplique et de duplique.

6 Dans cette perspective, la Chambre constate que, d'une manière générale,

7 les témoins cités par le Procureur viendraient déposer sur des événements

8 au cœur de l'acte d'accusation ou réfuter des affirmations; comme par

9 exemple le fait qu'un accusé n'avait pas une attitude discriminatoire à

10 l'égard des Musulmans, dont le Procureur ne pouvait que raisonnablement

11 s'attendre à ce qu'elle soit faite en faveur de la défense.

12 La Chambre note cependant que, compte tenu du nombre d'incidents criminels

13 visés à l'Acte d'accusation, du nombre d'accusés et de la nature de la

14 défense de chacun d'eux, il ne serait pas équitable de n'autoriser aucune

15 réplique du Procureur.

16 Dans ces conditions, [expurgée]

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18 Mme Somers (interprétation): Je m'excuse. Je voudrais que l'on passe à

19 huis clos partiel pour ce qui est des noms, étant donné que ces noms sont

20 communiqués sous scellés.

21 M. le Président: Nous allons passer à huis clos partiel, vous avez raison

22 Madame Somers.

23 (Audience à huis clos partiel à 10 heures 25.)

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8 (Audience publique à 10 heures 27.)

9 M. le Président: Je crois que, pour cette décision, il faut seulement

10 tenir à huis clos partiel ou sous confidentialité les noms des témoins

11 cités et je crois pas tous les témoins, parce que seulement, je crois, ne

12 sont pas protégés. Des mesures de protection ont été demandées. Pour tout

13 le reste, la décision est publique.

14 Donc, si on considère les noms des témoins, on ne mentionne pas les noms

15 des témoins et, tout le reste, la décision est publique.

16 Je crois que, maintenant, l'autre question que je voudrais poser et avant

17 de continuer nos travaux de réplique du procureur, c'est exactement la

18 question des mesures de protection.

19 Le Procureur a demandé des mesures de protection pour plusieurs témoins et

20 je crois que selon la décision que la Chambre vient de rendre, seulement

21 deux témoins font objet de mesure de protection. De toute façon,

22 maintenant, la défense ne s'est pas prononcée encore sur ces mesures de

23 protection et avant que la Chambre décide, nous aimerions bien savoir

24 quels sont les points de vue de la défense.

25 Donc nous allons passer à huis clos partiel pour discuter cette question

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1 des mesures de protection.

2 (Audience à huis clos partiel à 10 heures 28.)

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13 Pages 11928 à 11937 expurgées audience à huis clos partiel.

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3 (Audience publique à 10 heures 52.)

4 Donc nous allons faire la pause et après nous allons revenir pour

5 continuer notre travail. La pause sera de 30 minutes.

6 (L’audience, suspendue à 10 heures 52, est reprise à 11 heures 30.)

7 M. le Président: Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

8 Donc la Chambre a déjà décidé: sur les mesures de protection, il y avait

9 un point qui avait fait objet d'échanges entre les parties, c'était le

10 problème de communication. La Chambre a considéré mais n'a pas communiqué,

11 mais nous avions noté que la défense va avoir l'opportunité de contre-

12 interroger le témoin avec les éléments d'information qui sont disponibles

13 et la défense a toujours l'opportunité de présenter des preuves, si

14 nécessaire, pour contester ce que le témoin dit etc., a toujours

15 l'opportunité de le faire dans la duplique. Je crois donc qu'il n'y a pas

16 une offense aux droits des accusés et on maintient quand même

17 l'opportunité de contester les éléments.

18 Voilà la raison pour laquelle la Chambre a décidé quand même de commencer

19 tout de suite et dès maintenant ce travail d'entendre le témoin.

20 Après avoir dit cela, [expurgée]

21 [expurgée]

22 Mme Somers (interprétation): Le nom doit être protégé, attention.

23 M. le Président: Vous avez raison, tout à fait, excusez-moi.

24 Madame Thompson, quels seront les pseudonymes pour ces témoins? On peut

25 les appeler avec quelque chose au moins?

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1 Mme Thompson (interprétation): Ce sera le témoin AW.

2 M. le Président: Très bien. Donc maintenant, nous allons entendre le

3 témoin AW.

4 (Le témoin AW est introduit dans le prétoire.)

5 M. le Président: Bonjour Témoin AW, m'entendez-vous?

6 Témoin AW (interprétation): Oui, je vous entends.

7 M. le Président: Vous avez demandé des mesures de protection qui ont été

8 accordées. Vous allez maintenant lire la déclaration solennelle que M.

9 l'huissier va vous tendre, s'il vous plaît.

10 Témoin AW (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

11 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

12 M. le Président: Vous pouvez vous asseoir, s'il vous plaît. Je crois que

13 quelqu'un va vous montrer une pièce à papier. En principe, votre nom

14 serait inscrit. Vous allez répondre par oui ou non seulement s'il s'agit

15 vraiment de votre nom.

16 Témoin AW (interprétation): Oui, c'est bien mon nom.

17 M. le Président: Très bien, merci beaucoup d'être venu. Pour l'instant,

18 vous allez répondre aux questions du Procureur et, après, aux questions de

19 la défense et éventuellement des Juges. Mais avant de commencer, il faut

20 attendre un peu pour enlever le rideau.

21 Monsieur Saxon, nous sommes donc en condition de commencer, vous avez donc

22 la parole, s'il vous plaît.

23 (Interrogatoire principal du témoin AW par M. Saxon.)

24 M. Saxon (interprétation): Merci Monsieur le Président. Avant de

25 continuer, je souhaiterais passer à huis clos partiel pour quelques

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1 instants pour ne pas divulguer l'identité du témoin -par les questions que

2 je vais lui poser- au public.

3 M. le Président: Nous allons passer à huis clos partiel pour quelques

4 instants. Nous y sommes. Monsieur Saxon, vous pouvez continuer.

5 (Audience à huis clos partiel à 11 heures 37.)

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22 (Audience publique à 11 heures 42.)

23 M. Saxon (interprétation): Merci.

24 Témoin AW, quelle est votre appartenance ethnique?

25 Témoin AW (interprétation): Je suis Musulman.

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1 Question: Quelle est l'appartenance ethnique de votre sœur et de votre

2 beau-frère?

3 Réponse: Musulman également.

4 Question: En novembre 1990, est-ce que la nature de votre emploi a changé?

5 Réponse: Oui.

6 Question: Est-ce que vous avez eu une nouvelle fonction, et si oui

7 laquelle?

8 Réponse: Je suis devenu le commandant de la police de réserve, et donc

9 j'ai été le commandant pour plusieurs municipalités de Prijedor.

10 Question: Est-ce que votre unité de police de réserve avait des formations

11 régulières?

12 Réponse: Oui.

13 Question: Quelle fréquence?

14 Réponse: Eh bien, parfois tous les jours mais nous faisions des tours de

15 garde avec les membres de police d'active.

16 Question: Pendant combien de temps avez-vous travaillé comme commandant de

17 police de réserve?

18 Réponse: Jusqu'au début de la guerre, au début de 1992.

19 Question: Et pendant cette période, est-ce que vous avez fréquenté ou

20 rencontré des membres de police, des professionnels, des policiers

21 professionnels à Prijedor?

22 Témoin AW (interprétation): Oui.

23 M. Saxon (interprétation): Est-ce que vous connaissez Miroslav Kvocka?

24 M. le Président: Maître Krstan Simic?

25 M. K. Simic (interprétation): Moi, j'ai l'impression qu'il s'agit ici d'un

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1 interrogatoire qui fait partie de la présentation des moyens de preuve à

2 charge du Procureur.

3 M. le Président: Monsieur Saxon?

4 M. Saxon (interprétation): Monsieur le Président, si le témoin va

5 mentionner plus tard M. Kvocka peut-être et M. Momcilo Gruban, je dois

6 tout d'abord poser la question au témoin de savoir de quelle façon il a

7 rencontré ces gens, et c'est pour cette raison-là que j'ai posé cette

8 question.

9 M. le Président: Maître Krstan Simic?

10 M. K. Simic (interprétation): Dans ce contexte, je ne vois pas pourquoi on

11 parle du rôle de policiers, de l'entraînement, etc.

12 M. le Président: Donc allez-y.

13 M. Saxon (interprétation): Je peux répondre Monsieur le Président. Le

14 témoin va expliquer que c'est dans ce contexte-là qu'il a rencontré M.

15 Kvocka, et c'est pour cela que je souhaite d'abord expliquer ce contexte.

16 M. le Président: Peut-être pourrait-on aller plus vite mais, je crois

17 qu'il faut vraiment encadrer les questions.

18 Donc Monsieur Saxon, continuez s'il vous plaît. Merci beaucoup de toute

19 façon d'avoir attiré mon attention. Continuez, s'il vous plaît.

20 M. Saxon (interprétation): Pendant la période avant le début du conflit

21 armé, Monsieur le Témoin AW, est-ce que vous connaissiez M. Kvocka? Est-ce

22 que son nom vous disait quelque chose?

23 Témoin AW (interprétation): Oui.

24 Question: Comment avez-vous rencontré M. Kvocka?

25 Réponse: Je l'ai rencontré parce qu'il habitait à Pecani comme moi, et

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1 aussi dans le cadre de mon travail avec la police puisque nous

2 accomplissions un certain nombre de missions dans la municipalité de

3 Prijedor avec les membres de policiers professionnels.

4 Question: Après le début de la guerre, en 1992, est-ce que vous avez été

5 détenu?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Quand cela?

8 Réponse: Au début du mois de juin 1992.

9 Question: Où avez-vous été détenu?

10 Réponse: A Keraterm.

11 Question: Combien de temps êtes-vous resté à Keraterm?

12 Réponse: Je suis resté jusqu'à la fin du mois de juin, juillet et le mois

13 d'août 1992.

14 Question: Après Keraterm, où êtes-vous allé?

15 Réponse: Je suis allé à Trnopolje.

16 Question: S'agit-il du camp de Trnopolje?

17 Réponse: Oui.

18 Question: Combien de temps avez-vous été détenu à Trnopolje?

19 Réponse: Une dizaine de jours.

20 Question: Après votre libération de Trnopolje, où êtes-vous allé?

21 Réponse: Je suis revenu à Pecani dans mon appartement.

22 Question: Pendant combien de temps êtes-vous resté à Prijedor avec votre

23 famille?

24 Réponse: J'y suis resté jusqu'au 29 mars 1994.

25 Question: Témoin AW, est-ce que votre beau-frère a survécu à la guerre?

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1 Réponse: Non.

2 Question: Que lui est-il arrivé?

3 Réponse: Au mois de juin 1992, la police ou l'armée serbe l'ont assassiné

4 -je ne sais plus lequel des deux- devant sa maison à lui.

5 Question: Et où se trouvait cette maison?

6 Réponse: A Carakovo.

7 Question: Vous avez dit que vous connaissiez un certain Momcilo Gruban.

8 Avant la guerre, est-ce que Momcilo Gruban savait que votre sœur et votre

9 beau-frère étaient riches?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Au début de 1993, est-ce que vous avez eu un contact quelconque

12 avec Momcilo Gruban?

13 Réponse: Oui.

14 Question: Pourriez-vous nous expliquer la nature de ces contacts?

15 Réponse: Eh bien, j'ai reçu un coup de fil, il travaillait au poste de

16 police d'Omarska. Il m'a appelé, il m'a dit que, compte tenu de la

17 richesse de ma sœur et de mon beau-frère, il faudrait aller chercher,

18 aller creuser pour trouver l'or et les objets de valeur qu'ils ont cachés.

19 Question: Est-ce que, à l'époque, vous aviez l'impression que vous pouviez

20 choisir si vous deviez obéir à la demande de M. Gruban ou non?

21 Réponse: Non.

22 Question: Pourquoi cela?

23 Réponse: D'après l'expérience que j'ai eue du camp et d'après l'expérience

24 de tout ce qui s'est passé, je savais que je n'avais pas le choix. J'ai

25 supposé que mon sort serait difficile.

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1 Question: Est-ce que Momcilo Gruban vous a dit au cours de ce coup de fil

2 ce que vous deviez faire?

3 Réponse: Il a dit que, le lendemain, il allait venir avec un collègue chez

4 moi que nous allions nous rendre à Carakovo pour trouver cet or et

5 l'argent.

6 Question: Après avoir reçu ce coup de fil de Momcilo Gruban, qu'avez-vous

7 fait?

8 Réponse: J'ai appelé ma sœur qui était réfugiée à Tukovi. Je l'ai appelée

9 au téléphone et, une demi-heure plus tard, je m'y suis rendu directement,

10 je suis allé chez elle pour l'informer de ce coup de fil.

11 Question: Comment a réagi votre sœur?

12 Réponse: Elle avait visiblement très peur. Elle avait peur pour moi, pour

13 ma vie et elle avait peur que je ne survive pas si jamais je partais à

14 Carakovo avec Gruban.

15 Question: Qu'avez-vous dit à votre sœur?

16 Réponse: Pour la protéger, puisque son mari avait déjà été tué, elle avait

17 deux enfants en bas âge, moi j'ai décidé d'y aller à sa place, donc

18 d'aller à Carakovo à sa place.

19 Question: Est-ce que votre sœur vous a dit où était caché l'or dans sa

20 maison ou près de sa maison à Carakovo?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Qu'est-ce qu'elle vous a dit? Elle vous a dit d'aller les

23 chercher ou à peu près?

24 Réponse: L'or était près du mur, près de l'étable, et l'argent était

25 enterré près de la porcherie ou poulailler.

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1 Question: Témoin AW, que s'est-il passé les jours suivants?

2 Réponse: Après 12 heures, Momcilo Gruban et Miroslav Kvocka sont venus

3 avec leur voiture. Ils se sont arrêtés devant mon immeuble à moi. Ils sont

4 venus me chercher pour m'emmener à Carakovo.

5 Question: Quand vous dites Miroslav Kvocka, s'agit-il du même Miroslav

6 Kvocka, celui qui était votre voisin et qui faisait partie de la police?

7 Réponse: Oui.

8 Question: De quelle façon M. Kvocka et M. Gruban étaient vêtus ce jour-là?

9 Réponse: Monsieur Gruban portait un uniforme de policier de réserve de

10 couleur bleue et M. Miroslav Kvocka portait un uniforme de camouflage de

11 l'armée.

12 Question: Est-ce que MM. Kvocka et Gruban étaient armés ce jour-là?

13 Réponse: Oui MM. Gruban et Kvocka avaient tous les deux des fusils

14 automatiques et des pistolets.

15 Question: Est-ce qu'ils avaient d'autres équipements, s'ils en avaient, M.

16 Kvocka et M. Gruban, j'entends?

17 Réponse: Ils avaient une pioche dans le véhicule pour creuser la terre,

18 ils avaient préparé cela, une pelle.

19 Question: Et comment étaient-ils, comment se sont-ils comportés à ce

20 moment-là?

21 Réponse: Ils avaient l'air heureux.

22 Question: Qui a conduit le véhicule jusqu'à Carakovo?

23 Réponse: Miroslav Kvocka.

24 Question: Est-ce que, sur le chemin de Carakovo, vous deviez passer par

25 des points de contrôle?

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1 Réponse: Oui.

2 Question: Comment êtes-vous passés par ces points de contrôle?

3 Réponse: Personne ne nous a arrêtés et chaque fois que l'on passait par un

4 point de contrôle, eh bien, on nous saluait par ce salut nationaliste

5 serbe en levant les trois doigts.

6 Question: Vous dites "eux, ils levaient les trois doigts". A qui pensez-

7 vous?

8 Réponse: Je pense à Miroslav Kvocka et à Momcilo Gruban puisqu'ils étaient

9 assis à l'avant.

10 Question: Est-ce que vous savez à qui appartenait cette voiture qu'ils ont

11 utilisée ce jour-là?

12 Réponse: Je le sais, c'était la voiture de Miroslav Kvocka.

13 Question: Quand vous êtes arrivés à Carakovo dans la maison de votre sœur

14 et de votre beau-frère, dans quel état se trouvait la maison?

15 Réponse: Eh bien, la maison, il lui manquait le toit; la porte, les

16 fenêtres, l'étable, le poulailler étaient dans un état lamentable,

17 détruits.

18 Question: Qu'est-ce qu'ont fait M. Gruban et M. Kvocka, quand vous êtes

19 arrivé à la maison?

20 Réponse: Ils ont sorti la pelle et la pioche de la voiture, et ils m'ont

21 dit de commencer à creuser tout de suite, de chercher l'or.

22 Question: Pendant que vous avez creusé ce jour-là, que faisaient M. Kvocka

23 et M. Gruban?

24 Réponse: Eh bien, ils étaient près de moi, pas loin de moi et ils

25 portaient dans leurs bras les fusils automatiques.

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1 Question: Et, si vous vous en souvenez, est-ce que vous pourriez nous dire

2 vers où étaient pointés ces fusils?

3 Réponse: Vers moi, pendant que j'étais en train de creuser.

4 Question: Témoin AW alors que vous étiez en train de creuser, est-ce que

5 Miroslav Kvocka a demandé quoi que ce soit à M. Gruban? Est-ce qu'il lui a

6 demandé de faire quoi que ce soit?

7 Réponse: Etant donné qu'il allait faire nuit tôt, dans les périodes de

8 printemps il fait vite nuit. J'ai entendu Miroslav Kvocka dire à Momcilo

9 Gruban de faire accélérer les choses. Dans le cas contraire, je pouvais,

10 je risquais fort d'être enterré là si jamais on ne retrouvait pas ce que

11 l'on cherchait.

12 Question: Pour que le compte rendu soit tout à fait clair, est-ce que

13 Miroslav Kvocka a demandé à Momcilo Gruban de se dépêcher? Ou est-ce que

14 Miroslav Kvocka a demandé à Momcilo Gruban de vous dire de vous dépêcher?

15 Réponse: Miroslav Kvocka a dit la chose à M. Gruban, et M. Gruban me l'a

16 transmise à moi.

17 Question: Lorsque vous dites que vous avez entendu les mots suivant: "que

18 je pouvais être enterré moi-même", vous voulez dire que vous auriez été

19 enterré sur place? A quelle distance se tenait M. Kvocka lorsque vous avez

20 entendu ce commentaire?

21 Réponse: A 5 ou 6 mètres de moi.

22 Question: Avez-vous reconnu la voix de Miroslav Kvocka?

23 Réponse: Oui.

24 Question: Avez-vous eu peur à ce moment-là?

25 Réponse: Oui.

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1 Question: Ce même jour, est-ce que vous avez découvert l'or?

2 Réponse: Non.

3 Question: Vous étiez en train de creuser, est-ce qu'au fil des heures la

4 nuit a commencé à tomber?

5 Réponse: Oui.

6 Question: Alors que la nuit tombait, précisément, est-ce que M. Gruban

7 vous a dit quoi que ce soit? Et le cas échéant que vous a-t-il dit?

8 Réponse: On m'a dit, étant donné que nous n'avions pas trouvé l'or, qu'il

9 fallait revenir le lendemain très tôt, et amener avec moi ma soeur.

10 Question: Témoin AW, aviez-vous l'impression d'avoir quelque choix que ce

11 soit quant à votre possibilité de revenir ou pas le lendemain matin pour

12 venir chercher cet or?

13 Réponse: Je n'avais pas le choix, j'ai dû venir.

14 Question: Pourquoi aviez-vous cette impression d'obligation?

15 Réponse: Parce que j'étais convaincu que je ne serais pas resté en vie si

16 j'avais refusé.

17 Question: Vous êtes revenu vers Prijedor ce jour-là dans une voiture. Qui

18 la conduisait?

19 Réponse: Monsieur Kvocka.

20 Question: Alors que vous approchiez de Pecani, M. Kvocka vous a-t-il dit

21 de faire quoi que ce soit le lendemain?

22 Réponse: Il a regardé dans le rétroviseur déçu, de façon évidente, par le

23 fait de n'avoir rien trouvé et il a dit: "Si l'on ne trouve pas l'or et

24 l'argent quelqu'un pourrait le lendemain…".

25 Interprètes: Le témoin peut-il répéter, car nous n'avons pas du tout

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1 entendu?

2 M. Saxon (interprétation): Témoin AW, veuillez répéter clairement et

3 lentement ce que M. Kvocka vous a dit dans la voiture.

4 Témoin AW (interprétation): En nous approchant de Prijedor, Momcilo Gruban

5 se trouvait assis à côté de Miroslav Kvocka et Miroslav Kvocka était au

6 volant. Auparavant, M. Kvocka et Momcilo se concertaient et ils ont

7 regardé dans le rétroviseur. En me voyant sur le siège arrière, il a dit:

8 "Si l'on ne retrouvait pas l'or et l'argent, le corps de quelqu'un

9 pourrait très bien flotter par la Sana."

10 Question: Pour que tout soit bien clair, qui a fait ce commentaire Témoin

11 AW?

12 Réponse: Miroslav Kvocka.

13 Question: La rivière Sana traverse-t-elle ou passe-t-elle à proximité de

14 la ville de Prijedor?

15 Réponse: Oui, et par le village de Carakovo.

16 Question: Alors que vous arriviez à Pecani, vous a-t-il dit quoi que ce

17 soit?

18 Réponse: Nous nous sommes arrêtés devant le garage de Kvocka et il a dit

19 que le lendemain matin avec ma sœur, il fallait que l'on y aille de bonne

20 heure pour que l'on ait plus de temps pour creuser, aux fins de retrouver

21 l'or et l'argent.

22 Question: Témoin AW, est-ce que vous souhaitez un verre d'eau?

23 Réponse: Non.

24 Question: Poursuivons. Que s'est-il passé le lendemain?

25 Réponse: J'ai informé ma sœur de la nécessité pour elle de venir avant

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1 midi dans mon appartement à Pecani et, avant midi, ma sœur et moi sommes

2 allés vers ce garage situé à Pecani.

3 Question: Avez-vous rencontré qui que ce soit dans le garage de M. Kvocka?

4 Réponse: Devant le garage de Kvocka, il y avait Miroslav Kvocka et Momcilo

5 Gruban.

6 Question: Est-ce que M. Kvocka et M. Gruban avaient un certain équipement

7 avec eux ce jour-là? Et, le cas échéant, quel type d'équipement?

8 Réponse: Le même équipement que le jour d'avant, ils avaient les mêmes

9 vêtements et le même type d'armes.

10 Question: Lorsque vous dites le même type d'équipement, est-ce que vous

11 pensez à ces pioches, à ces pelles?

12 Réponse: Oui, la pelle et la pioche, et je disais aussi qu'ils étaient en

13 uniforme.

14 Question: Est-ce qu'ils portaient les mêmes fusils automatiques?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Pendant le trajet vers Carakovo ce jour-là, qui était au volant?

17 Réponse: Miroslav Kvocka.

18 Question: Votre sœur a t-elle dit quoi que ce soit pendant le trajet? Et,

19 si oui, qu'a-t-elle dit exactement?

20 Réponse: En arrivant vers Carakovo, ma sœur pleurait beaucoup et elle

21 avait dit qu'elle montrerait tout de suite les emplacements où se

22 trouvaient enterrés l'or et l'argent, "pourvu que l'on ne touche pas à

23 moi."

24 Question: Lorsque votre sœur a dit qu'elle avait de l'argent, est-ce

25 qu'elle faisait référence à des devises en particulier? Le savez-vous?

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1 Réponse: On parlait de marks allemands.

2 Question: Lorsque vous êtes arrivés à cette maison à Carakovo, quels

3 propos ont été échangés?

4 Réponse: Ils ont sorti la pelle et la pioche et ils m'ont dit d'aller. Ma

5 sœur m'a tout de suite montré où se trouvait l'or, où il était enterré.

6 Ils m'ont dit de commencer tout de suite à travailler, donc à creuser,

7 pour que l'on ne perde pas de temps.

8 Question: Qui a dit qu'il fallait que vous commenciez immédiatement à

9 creuser?

10 Réponse: Miroslav Kvocka.

11 Question: Que s'est-il passé ensuite? Est-ce que vous avez effectivement

12 commencé à creusé la terre?

13 Réponse: Oui, j'ai tout de suite commencé à creuser. Et Momcilo Gruban a

14 pris la pelle et m'a aidé pour que l'on retrouve cet or au plus vite.

15 Question: Monsieur Kvocka s'est-il jamais emparé d'une pelle pour creuser?

16 Que faisait-il pendant ce temps-là?

17 Réponse: Il était debout à quelques mètres de nous avec son fusil. Il

18 était en train de monter la garde, soi-disant.

19 Question: Aviez-vous trouvé quoi que ce soit?

20 Réponse: Très vite, nous avons retrouvé cet or qui était enterré.

21 Question: Et cet or était dans un contenant particulier?

22 Réponse: Dans une boîte en matière plastique pouvant contenir quelque deux

23 litres.

24 Question: Pour que le compte rendu soit bien clair, cette boîte était une

25 boîte de deux mètres de long ou est-ce qu'il y a un petit problème

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1 d'interprétation?

2 Réponse: Non, une boîte qui pouvait contenir deux litres de liquide.

3 Question: Après que la boîte a été découverte, qu'en a fait M. Gruban ?

4 Réponse: Il a pris la boîte, il l'a donnée à Miroslav Kvocka et ce dernier

5 l'a placée dans la voiture.

6 Question: Savez-vous ce que contenait cette boîte?

7 Réponse: Momcilo a ouvert le couvercle tout de suite et il a vu qu'il y

8 avait de l'or à l'intérieur.

9 Question: Y avait-il également des bijoux dans cette boîte?

10 Réponse: Il s'agissait notamment d'or et de quelques bracelets et autres

11 bijoux, mais en faux.

12 Question: Après le retour de M. Kvocka de la voiture, est-ce qu'il a dit

13 quoi que ce soit?

14 Réponse: Il s'agissait de partir tout de suite chercher les marks

15 allemands, l'argent qui était enterré de l'autre côté, à côté du

16 poulailler.

17 Question: Est-ce que vous avez essayé de découvrir cet argent?

18 Réponse: Oui, j'ai de nouveau creusé avec la pioche et Momcilo Gruban

19 sortait la terre à la pelle afin que l'on puisse découvrir, avant la

20 tombée de la nuit, l'argent qui s'y trouvait.

21 Question: Que faisait M. Miroslav Kvocka tandis que vous-même et M. Gruban

22 creusiez pour trouver l'argent?

23 Réponse: Il se tenait non loin de là où nous étions à quelque cinq ou six

24 mètres et il tenait un fusil à la main.

25 Question: Avez-vous finalement découvert l'argent ce jour-là?

Page 11956

1 Réponse: Nous n'avons pas retrouvé l'argent et la nuit a de nouveau

2 commencé à tomber et nous n'avions pas l'éclairage nécessaire pour

3 continuer à creuser la nuit tombée.

4 Question: En fin de compte, est-ce que le groupe est remonté à bord du

5 véhicule pour se diriger vers Pecani?

6 Réponse: Oui. Lorsque la nuit tombait, nous sommes retournés à Pecani et

7 nous nous sommes arrêtés devant le garage de Miroslav Kvocka.

8 Question: Lorsque vous êtes arrivés devant le garage de Miroslav Kvocka,

9 que s'est-il passé?

10 Réponse: Ils ont dit à ma sœur de rentrer dans mon logement parce que ses

11 enfants étaient chez moi et moi j'ai été retenu.

12 Question: Bien. Vous êtes donc resté au garage. Que s'y est-il ensuite

13 passé?

14 Réponse: Etant donné qu'il n'y avait pas d'énergie électrique, Miroslav

15 Kvocka a branché l'éclairage du garage sur la batterie de la voiture pour

16 avoir de la lumière.

17 Question: Et, une fois que vous avez pu obtenir de la lumière, que s'est-

18 il passé?

19 Réponse: Alors, ils ont vidé la boîte en matière plastique de tout son

20 contenu sur une grande table en bois qui se trouvait du côté droit dans le

21 garage.

22 Question: Qu'a-t-il été ensuite fait du contenu de cette boîte? Qu'ont

23 fait MM. Kvocka et Gruban?

24 Réponse: Ils ont rangé les pièces en or par leur taille, les bracelets,

25 les colliers, les bagues par leur taille. Ils ont commencé à se partager

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1 le tout entre eux, afin que chacun d'entre eux récupère à peu près la même

2 quantité.

3 Question: Est-ce que l'on vous a donné une partie de cet or?

4 Réponse: Pour ce qui est de l'or, je n'ai rien reçu.

5 Question: Qu'en est-il des pièces de bijouterie qui avaient de la valeur?

6 Réponse: Tout ce qui était en or et qui avait de la valeur, Momcilo Gruban

7 et Miroslav Kvocka se le sont partagé. Et ce qui n'avait pas de valeur,

8 donc les bijoux en faux, ils l'ont remis dans la boîte et ils m'ont dit de

9 le porter à ma sœur. Donc, tout ce qui n'était pas en or véritable, ils me

10 l'ont donné pour que je le porte à ma sœur.

11 Question: Avant de quitter le garage ce jour-là, est-ce que MM. Kvocka et

12 Gruban vous ont dit quoi que ce soit quant à ce que vous deviez ou ne

13 deviez pas dire?

14 Réponse: Ils m'ont prévenu tous les deux, Miroslav Kvocka et Momcilo

15 Gruban, qu'il ne fallait en parler à personne et il ne fallait pas non

16 plus que l'on aperçoive de quelle direction je venais lorsque j'irai dans

17 mon logement.

18 Question: Est-ce que quelqu'un vous a dit ce qu'il adviendrait de vous si

19 vous parliez de tout cela?

20 Réponse: Momcilo Gruban et Miroslav Kvocka m'ont dit: "Tu perdras la tête,

21 c'est-à-dire que ta tête est en jeu et peut-être les nôtres aussi".

22 Question: Des projets ont-ils été faits pour le jour suivant?

23 Réponse: Oui, le lendemain, vers midi, une fois de plus, sans ma sœur, il

24 fallait que je vienne à ce garage pour que l'on aille une fois de plus

25 chercher l'argent.

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1 Question: Et que s'est-il passé le jour suivant?

2 Réponse: A midi pile, j'étais de nouveau devant le garage à Miroslav

3 Kvocka situé à Pecani.

4 Question: Ce jour-là, qu'avez-vous fait?

5 Réponse: Nous nous sommes dirigés vers Carakovo pour essayer de retrouver

6 l'argent, car les marks allemands avaient beaucoup plus de valeur à

7 l'époque que l'or en tant que tel.

8 Question: Etiez-vous encore une fois accompagné de MM. Kvocka et Gruban?

9 Réponse: Oui.

10 Question: Lorsque vous êtes arrivés à Carakovo ce jour-là, que s'est-il

11 passé?

12 Réponse: Etant donné que la neige commençait à fondre et qu'il avait

13 beaucoup plu, la rivière Sana a commencé à déborder. Et dans toute la cour

14 de la maison de ma sœur et de mon beau-frère, il y avait de l'eau, toute

15 cette partie-là était inondée.

16 Question: Avez-vous pu essayer de découvrir quoi que ce soit ce jour-là?

17 Réponse: Nous n'avons pas pu le faire car il y avait des quantités d'eau

18 vraiment très grandes.

19 Question: Monsieur Miroslav Kvocka vous a-t-il dit quoi que ce soit quant

20 aux tentatives futures de découvrir cet argent?

21 Réponse: Que l'on allait attendre des temps plus cléments et que nous

22 retournerions là-bas pour essayer de retrouver l'argent.

23 Question: Témoin AW, pourriez-vous nous décrire l'aspect de Miroslav

24 Kvocka en 1993?

25 Réponse: Il avait quelques centimètres de plus que moi, il devait faire

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1 1,82 mètre. Il ne portait ni barbe ni moustache, de corpulence moyenne,

2 cheveux châtains.

3 Question: Quel âge M. Kvocka avait-il en 1993, approximativement?

4 Réponse: 35 ans.

5 M. Saxon (interprétation): Monsieur le Président, je n'ai plus de question

6 à poser au témoin, merci.

7 M. le Président: Merci beaucoup Monsieur Saxon. Maître Krstan Simic.

8 M. K. Simic (interprétation): Monsieur le Président, je voudrais vous

9 demander une petite pause en ce moment afin que je puisse m'entretenir

10 avec mon client étant donné qu'il s'agit de choses que l'on entend pour la

11 première fois et qu'elles sont pour la première foirait présentées ici et

12 il nous faut quelque temps pour préparer les questions que nous allons

13 poser.

14 M. le Président: Monsieur Saxon.

15 M. Saxon (interprétation): Je voudrais simplement faire remarquer que nous

16 avons posé des questions à M. Kvocka, sur cet incident, lors de son

17 contre-interrogatoire à la mi-février. M. Kvocka a reconnu que d'une

18 certaine façon il avait pris part à cet incident qui implique également ce

19 témoin, donc l'accusation est d'avis que la défense de M. Kvocka a disposé

20 de 2 mois pour débattre de cet aspect de la défense avec son client.

21 M. K. Simic (interprétation): Je vais répliquer avec plaisir Monsieur le

22 Président. Il est exact de dire que M. Kvocka dans son témoignage a parlé

23 de ceci.

24 Il a parlé de tout ce qui lui avait été demandé, mais ce que l'on a

25 entendu aujourd'hui est véritablement une chose que l'on entend pour la

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1 première fois et c'est la raison pour laquelle nous avons besoin de

2 quelque consultation, mais en principe nous pouvons enchaîner

3 immédiatement.

4 M. le Président: Un moment s'il vous plaît.

5 (Les Juges se consultent sur le siège.)

6 M. le Président: Nous allons faire la pause déjeuner.

7 De toute façon, je crois que pour l'après-midi nous avons le témoin expert

8 Nedopil. C'est cela Madame Somers, je crois.

9 Mme Somers (interprétation): Effectivement, Monsieur le Président.

10 M. le Président: Cela veut dire que Maître Krstan Simic nous allons

11 continuer le témoignage de ce témoin demain, donc vous aurez plus de temps

12 que vous pensiez. Parce que l'après-midi nous avons un autre témoin. Donc

13 témoin, comme vous avez compris, nous allons continuer votre témoignage

14 demain. Maintenant nous allons faire une pause déjeuner et pour que vous

15 puissiez sortir.

16 Pardon je vois Maître Krstan Simic.

17 M. K. Simic (interprétation): Monsieur le Président, après ce témoignage,

18 il apparaît avec évidence que M. Saxon a dû disposer d'une déposition

19 faite par ce témoin pour avoir un interrogatoire aussi détaillé.

20 Conformément à l'Article 66, nous tenons à ce que la déposition faite par

21 ce témoin nous soit communiquée, car procéder à un tel interrogatoire sans

22 avoir au préalable obtenu une déposition cela nous semble impossible en

23 dépit de la maîtrise de Monsieur Saxon.

24 M. le Président: Peut-être que M. Saxon a beaucoup de choses bonnes et une

25 bonne maîtrise. Car quand même, cela ne veut pas dire que M. Saxon a une

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1 déclaration écrite. Je crois. C'est de cela dont vous parlez Maître Krstan

2 Simic, vous parlez d'une déclaration écrite?

3 M. K. Simic (interprétation): Monsieur le Président, l'article 66 prévoit,

4 dit qu'un entretien représente une déclaration.

5 M. le Président: Je vous ai demandé si vous parliez d'une déclaration

6 écrite.

7 M. K. Simic (interprétation): Oui. Il doit y avoir une déposition ou un

8 procès-verbal pour ce qui est de l'entretien qui a eu lieu entre le Bureau

9 du Procureur et M. le témoin.

10 M. le Président: Monsieur Saxon, voulez-vous répondre?

11 M. Saxon (interprétation): Certainement Monsieur le Président. Je pense

12 que Maître Simic doit lire les Articles du Règlement plus attentivement.

13 Ce que dit l'Article 66 sont les choses suivantes: nous devons communiquer

14 les déclarations préalables écrites du témoin, or ce témoin n'a pas fourni

15 au Bureau du Procureur quelque déclaration écrite que ce soit.

16 Par ailleurs, l'accusation n'a pas en sa possession quelque déclaration

17 écrite que ce soit qui aurait été peut-être, par le passé, produite par ce

18 témoin.

19 Le fait que l'accusation ait eu des entretiens avec ce témoin, et très

20 franchement au cours de ce week-end nous avons effectivement échangé un

21 certain nombre de propos avec le témoin pour le préparer à sa comparution

22 ici, mais toutes notes prises au cours d'un entretien avec le témoin sont

23 le produit du travail de l'accusation et au titre de l'Article 70 ce type

24 d'élément ne doit pas faire l'objet d'une communication vis-à-vis des

25 avocats de la défense.

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1 M. le Président: D'accord, donc nous allons continuer notre travail

2 demain. Maître Krstan Simic, vous aurez peut-être pour demain une

3 déclaration écrite, le compte rendu d'audience vous permet quand même de

4 travailler. Nous allons faire.

5 M. Saxon (interprétation): Monsieur le Président, est-ce que je n'ai pas

6 été suffisamment clair?

7 M. le Président: J'ai été mal traduit, je vois maintenant Madame la Juge

8 Wald a attiré mon attention, je n'ai pas dit que M. Krstan Simic aurait

9 demain une déclaration écrite, j'ai dit que pour demain il peut avoir le

10 compte rendu d'audience. D'accord. C'est cela que j'ai dit. Je n'ai pas

11 dit que M. Saxon allait inventer une déclaration préalable pour donner à

12 M. Simic, ce j'ai dit c'est que demain, M. Krstan Simic peut avoir comme

13 instrument de travail, de son travail, le compte rendu d'audience. C'est

14 cela que j'ai dit.

15 Souvent on voit ces questions et j'espère au moins que je peux avoir une

16 version officielle en français, au moins. Pour me défendre moi-même. Je

17 crois. Nous allons faire une pause d'une heure. Je dois attendre le compte

18 rendu.

19 D'accord. Monsieur l'huissier, vous pouvez faire sortir le témoin s'il

20 vous plaît, donc faire baisser les rideaux.

21 (Le témoin AW est reconduit hors du prétoire.)

22 M. le Président: Donc, une heure.

23 (L'audience suspendue à 12 heures 23, est reprise à 13 heures 31.)

24 M. le Président: Veuillez vous asseoir. Donc, je crois que c'est à Me

25 Stojanovic que je dois donner la parole une fois que nous allons entendre,

Page 11963

1 selon le terme de la décision que la Chambre a pris avant, le témoin

2 expert, le Dr Nedopil. C'est cela Maître Stojanovic?

3 Je vois le compte rendu. Je n'ai pas dit que nous avions entendu le

4 témoin. Nous allons maintenant entendre le témoin. Il faut bien expliquer

5 les choses. Je m'excuse devant les interprètes qui font un travail énorme

6 mais nous n'avons pas encore entendu le témoin, nous allons entendre le

7 témoin maintenant. Ce que nous avions fait dans le passé, c'était de

8 décider de le faire maintenant. Je crois que les choses sont claires

9 maintenant.

10 Maître Stojanovic?

11 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, c'est précisément

12 comme vous l'avez dit notre témoin suivant, c'est un témoin expert,

13 Norbert Nedopil, qui est originaire d'Allemagne. Nous voudrions donc le

14 faire entrer dans le prétoire mais je tiens à vous dire qu'il avait

15 exprimé le souhait d'avoir un traducteur pour l'allemand. Mais d'après ce

16 que j'ai pu comprendre, il parle très bien l'anglais, il va faire son

17 exposé en anglais. Ce que nous voudrions vous demander, c'est de lui

18 accorder une cadence quelque peu plus lente pour ses difficultés de

19 s'exprimer en anglais. C'est tout, merci.

20 M. le Président: Maître Stojanovic, rappelez-moi maintenant s'il vous

21 plaît. Je crois que nous avions accordé 20 minutes au Procureur. Nous

22 allons partir du principe que vous allez offrir son rapport comme

23 interrogatoire principal ou vous allez l'interroger?

24 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, je crois que la

25 première des variantes que vous avez mentionnées a été convenue. Nous

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1 avons proposé de verser le rapport et le Procureur a tenu à se réserver le

2 droit de procéder au contre-interrogatoire.

3 Donc c'est au Bureau du Procureur que la parole revient en premier et nous

4 nous sommes réservés le droit de poser quelques questions éventuellement

5 par la suite.

6 M. le Président: Monsieur l'huissier, s'il vous plaît.

7 (Le témoin, Dr Norbert Nedopil, est introduit dans le prétoire.)

8 M. le Président: Bonjour Docteur Norbert Nedopil, m'entendez-vous

9 maintenant?

10 M. Nedopil (interprétation): Je vous entends.

11 M. le Président: Vous allez lire la déclaration solennelle que M.

12 l'huissier va vous tendre, s'il vous plaît.

13 M. Nedopil (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

14 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

15 M. le Président: Vous pouvez vous asseoir. Merci beaucoup d'être venu.

16 Nous savons que vous êtes une personne très occupée, donc nous vous

17 remercions beaucoup.

18 D'aucun m'a fait savoir que vous alliez à la fin vous exprimer en anglais

19 et vous avez demandé de le faire lentement. Je crois que les interprètes

20 vont être très contents parce que là, c'est cela qu'ils veulent tous les

21 jours. De toute façon, aujourd'hui nous allons faire ce cadeau aux

22 interprètes. Vous avez l'opportunité de parler lentement sans problème,

23 nous n'avons pas de problème de temps aujourd'hui, donc vous allez

24 maintenant Docteur répondre aux questions que le Procureur va vous poser à

25 propos de votre rapport, et éventuellement le conseil de la défense aura

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1 des questions supplémentaires à vous poser, éventuellement les Juges.

2 Maintenant, c'est le Procureur qui va vous poser des questions.

3 Madame Somers, vous avez la parole, s'il vous plaît.

4 (Interrogatoire principal du témoin, Dr Norbert Nedopil, par Mme Somers.)

5 Mme Somers (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

6 Professeur Nedopil, je vais m'efforcer de respecter un rythme lent. Ce

7 n'est pas mon rythme naturel, si jamais je m'emballais, veuillez me le

8 signaler, je tâcherai de me freiner.

9 Professeur, afin d'utiliser au mieux le temps qui nous est imparti, j'ai

10 dores et déjà fait la liste de points pour lesquels il me faudrait des

11 éclaircissements; points qui apparaissent dans votre rapport.

12 Je vais vous demandé d'abord si vous disposez d'une copie de votre rapport

13 en anglais?

14 M. Nedopil (interprétation): Je n'en ai pas.

15 Question: Je vais donc demander à un de mes collègues de vous donner un

16 exemplaire de votre rapport. Je pense que cela nous sera utile. En

17 attendant, je vais vous poser des questions préliminaires, si vous me le

18 permettez.

19 Pour que tout soit clair, Professeur. En fait, la seule source

20 d'information, dont vous et le Pr Hoff avez disposée pour écrire votre

21 rapport, était M. Zoran Zigic, l'accusé lui-même, n'est-ce pas?

22 Réponse: Non, ce n'est pas tout à fait exact. Nous avons également disposé

23 de l'Acte d'accusation et nous avons disposé de notes qui étaient

24 adjointes à l'Acte d'accusation. Par ailleurs, nous avons disposé de

25 rapports médicaux qui nous ont été communiqués par M. Zigic.

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1 Question: Ces rapports, si j'ai bien lu ce que vous dites vous-même,

2 portent sur des blessures par l'accusé en 1992?

3 Réponse: C'est exact.

4 Question: Il y a un point qui apparaît à la page du texte anglais, la page

5 7 du texte anglais. Je vais le lire, car vous ne l'avez pas entre les

6 mains: "Le sujet a refusé permission à moi-même et au Dr Hoff de lire les

7 documents médicaux couvrant la période 1998 à 2000 tels que dressés dans

8 l'institution pénitentiaire dans laquelle le sujet se trouvait."

9 Y avait-il eu une explication particulière avancée par Zigic quant à ce

10 refus?

11 Réponse: Non, il s'agit d'une conversation que M. Zigic a eue avec le Pr

12 Hoff et je ne suis pas tout à fait au fait des arguments que M. Zigic a

13 avancés en réponse aux questions posées par le Pr Hoff. Donc, je sais

14 simplement qu'il a manifesté un refus.

15 Question: Professeur, je sais bien qu'il y a toujours des délais qui sont

16 fixés pour ces examens, des limites de temps, mais est-ce que vous avez pu

17 disposer de suffisamment de temps pour mener à bien un certain nombre

18 d'examens, l'examen notamment dit de métastases? Quel a été le temps dont

19 vous avez disposé pour faire ces examens; un examen d'établissement de

20 l'état mental?

21 Réponse: J'ai disposé de tout le temps dont je voulais disposer. J'ai

22 arrêté de mener à bien ces examens lorsque je me suis dit que je

23 connaissais suffisamment M. Zigic et que je pensais pouvoir donner une

24 opinion exacte de son cas.

25 Question: Vous avez déjà eu l'occasion, Professeur, de travailler en tant

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1 que psychiatre légal sur des affaires où il y avait des allégations de

2 violation du droit humanitaire international?

3 Réponse: Effectivement, j'ai témoigné devant cette Cour auparavant.

4 Question: Dans quelle affaire?

5 Réponse: Dans l'affaire Tadic.

6 Question: Est-ce que c'est l'accusation ou la défense qui vous a demandé

7 de témoigner dans cette précédente affaire?

8 Réponse: Je n'en ai pas le souvenir.

9 Question: Dans d'autres pays, avez-vous eu l'occasion de participer à des

10 examens d'individus qui auraient participé à des crimes de guerre?

11 Réponse: Oui, en Allemagne, j'ai été amené à étudier le cas d'une autre

12 personne qui est accusée d'avoir commis des crimes de guerre en ex-

13 Yougoslavie. Je suis également expert près le tribunal allemand qui traite

14 des affaires de crime de guerre commis lors de la Seconde Guerre mondiale.

15 Question: De façon générale, je crois que votre système juridique est plus

16 neutre, n'est-ce pas? Mais est-ce qu'il y a eu des cas où l'accusation

17 vous a déjà demandé de faire un examen psychologique ou psychiatrique d'un

18 sujet ou est-ce que c'est quelque chose qui est demandé généralement par

19 le Greffe?

20 Réponse: En Allemagne, généralement, c'est le tribunal lui-même qui

21 désigne l'expert qui sera chargé de mener à bien cet examen. Mais, très

22 souvent, cette tâche est déléguée par le tribunal au procureur, dans la

23 plupart des cas en Allemagne. Donc, le procureur c'est l'entité qui

24 demande à l'expert d'intervenir.

25 Conformément au droit militaire américain, c'est le procureur qui

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1 intervient, donc je suis un peu au fait du système qui est en vigueur ici.

2 Question: Je voudrais vous demander un certain nombre de choses sur ce que

3 vous avez appris à propos de M. Zigic, à l'époque où les crimes dont il

4 était accusé ont été commis. Alors que vous vous entreteniez avec M.

5 Zigic, et je me rapporte à la page du rapport dans sa version anglaise,

6 page 23, à cette même page il y fait référence au fait qu'il a perdu une

7 partie de son doigt. Le commentaire qui est fait est le suivant: "Cette

8 blessure lui a été infligée après qu'on lui ait tiré dessus avec un

9 fusil". Donc c'est un impact de balle qui a causé la blessure. Est-ce que

10 vous vous rappelez dans quelles circonstances ceci s'est produit? Il me

11 semble que, dans ce même paragraphe, un peu plus tard, M. Zigic précise

12 qu'il ne souhaite pas faire de déclaration sur cette période.

13 Réponse: En effet.

14 Question: Quel a été le bilan que vous avez dressé de cette blessure et,

15 d'après vous, quel a été son impact sur l'entretien que vous avez pu avoir

16 à ce sujet avec l'accusé?

17 Réponse: D'après ce que je me rappelle, il a parlé de cette blessure en

18 disant qu'au départ il était rentré chez lui et il portait des bandages

19 autour de sa main. Et par la suite, il était un petit peu inquiet à l'idée

20 de perdre son doigt parce qu'il jouait de la guitare et il avait peur de

21 ne plus pouvoir se produire en public, de ne plus pouvoir jouer de la

22 guitare en public, en sa qualité de musicien. Maintenant, pour autant que

23 je m'en souvienne, il a parlé d'une certaine espèce de douleur qu'il

24 ressentait. Il a également parlé du fait qu'il souhaitait absolument

25 poursuivre ses activités en tant que membre des groupes policiers ou

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1 militaires auxquels il participait à cette époque-là. Pour autant que je

2 m'en souvienne, il a dit presque littéralement: "Je suis alors allé

3 retrouver les rangs de la police, je voulais travailler pour eux".

4 Question: A la page 24 de votre rapport, dans la version anglaise, vous

5 dites effectivement qu'il avait été se présenter au poste de police, qu'on

6 lui avait dit qu'il fallait qu'il se fasse porter malade parce qu'il ne

7 pouvait pas exactement être utile à la police. Mais il n'est pas retourné

8 à la maison, il a été envoyé à Keraterm pour être garde.

9 Réponse: Effectivement, effectivement.

10 Question: Est-ce que c'est ce type de service qu'il souhaitait pouvoir

11 poursuivre?

12 Réponse: Pas exactement ce type de service, mais il ne voulait pas être à

13 la maison. Il voulait être avec ses camarades, donc il a été envoyé à

14 Keraterm parce que c'était le seul poste qu'il pouvait occuper de façon

15 utile.

16 Question: Est-ce qu'il vous a suggéré qu'en fait la blessure n'allait pas

17 l'empêcher de reprendre ses activités de policier?

18 Réponse: Eh bien, il ne souhaitait pas que cela l'empêche de reprendre ses

19 activités de policier.

20 Question: Venons en maintenant à la question de la consommation de drogue

21 du sujet. A la page 27 de votre rapport, dans sa version en anglais, vous

22 faites une remarque. Vous indiquez que le sujet est resté dans les rangs

23 de l'armée jusqu'en mars 1993, date à partir de laquelle il a commencé à

24 souffrir de troubles psychologiques et cela fait partie de ce que vous dit

25 Zigic.

Page 11970

1 Réponse: Oui.

2 Question: Et vous dites qu'il souffre de troubles du sommeil, qu'il

3 transpire beaucoup, qu'il cauchemarde pendant la nuit.

4 Réponse: Oui.

5 Question: Il poursuit. Il dit que, suite à l'intervention d'un ami

6 médecin, il a été transféré à Belgrade dans un service psychiatrique pour

7 être observé.

8 Réponse: Oui.

9 Question: Il n'a pas reçu de traitement, mais il est resté dans ce

10 département jusqu'au début du mois de juin. Il a eu trois entretiens avec

11 le médecin, mais il n'est pas resté à l'hôpital, il vivait à l'hôtel.

12 Réponse: C'est exact.

13 Question: Est-ce que vous avez pu sur la base de ces échanges avec le

14 sujet, est-ce que vous avez pu donc déterminer si c'était là le bon

15 traitement à administrer au sujet, si effectivement il y avait de réels

16 soucis manifestés par les représentants officiels de l'armée quant aux

17 types de handicaps dont il souffrait du fait de sa consommation d'alcool?

18 Réponse: Je ne sais pas du tout quelle était la situation qui prévalait en

19 ex-Yougoslavie. Je sais bien qu'en Allemagne, cela ne pourrait pas être le

20 cas, en Allemagne, on ne se trouverait pas dans une telle situation.

21 Question: Donc ce ne serait pas la bonne réponse médicale à apporter à un

22 problème d'alcoolisme, n'est-ce pas?

23 Réponse: Effectivement. Et permettez-moi de préciser une chose: pour

24 autant que mes souvenirs soient exacts -je crois avoir rédigé la chose de

25 façon un petit peu différente en allemand-, or c'est très important parce

Page 11971

1 que, pour autant que je m'en souvienne, il ne buvait pas tant que cela

2 pendant qu'il était dans le cadre de son service militaire et pendant la

3 période où il était vraiment officier d'active, donc du mois d'octobre

4 1992 jusqu'au printemps de 1993. Il n'a pas bu tant que cela. C'est ce

5 qu'il m'a lui-même dit. Donc, il faut absolument que je vérifie pour

6 savoir quelle est l'importance à donner à cela.

7 Question: Eh bien c'est à la page 27 du rapport en anglais.

8 Réponse: Oui, mais moi il faut que je consulte mes notes en allemand si

9 vous le permettez.

10 Question: Est-ce que vous avez un exemplaire sous les yeux?

11 Réponse: Un exemplaire en allemand oui.

12 Non la traduction est juste car, dans le paragraphe qui précède, il est

13 dit –enfin c'est moi qui ai pris les notes-, il n'a pas bu pendant le

14 temps qu'il a passé en opération de combat.

15 Question: Merci Professeur Nedopil. Revenons alors maintenant au récit

16 qu'il vous a fait de son historique en matière d'alcoolisme.

17 A la page 31 de la version en anglais de votre rapport, il vous dit qu'il

18 a vraiment commencé à boire lorsqu'il était en Russie. Mais il vous

19 précise également que les choses n'étaient pas catastrophiques parce qu'il

20 ne buvait pas tous les jours, seulement en fin de semaine, et par ailleurs

21 il ne s'est jamais vraiment senti ivre.

22 Réponse: Oui.

23 Question: Ensuite il parle de ses activités de chauffeur de poids lourds.

24 Les conducteurs de camions ont la réputation de boire et il lui arrivait

25 parfois à lui de boire beaucoup au quotidien.

Page 11972

1 Réponse: Oui.

2 Question: Lorsqu'il a renoncé à cette profession, est-ce que sa

3 consommation d'alcool a été modifiée?

4 Réponse: Oui.

5 Question: Est-ce que vous avez l'impression que lorsqu'un individu occupe

6 un emploi particulier, eh bien son comportement va changer en fonction de

7 ce qu'il pense être le profil que l'on doit adopter pour occuper cet

8 emploi particulier?

9 Réponse: Non non non. Il avait déjà commencé à boire et il a continué à

10 boire lorsqu'il est rentré en ex-Yougoslavie. Et comme cela pouvait aller

11 dans le cadre de la profession qu'il occupait -vous savez en Allemagne on

12 dit la même chose des maçons, on dit que les maçons boivent beaucoup-

13 voilà ce que je peux dire.

14 Question: Un peu plus tard -et je me permets d'avancer jusqu'aux

15 conclusions de votre rapport- donc un peu plus tard, vous dites, c'est à

16 la page 39 du rapport en anglais, vous dites que Zigic a plusieurs fois

17 dit qu'il comprenait très bien ce qu'attendaient les examinateurs, ceux

18 qui lui faisaient passer ses entretiens et ses examens.

19 (Assentiment du témoin.)

20 Est-ce que vous aviez l'impression qu'il vous donnait des réponses qui,

21 d'après lui, se conformaient à ce que vous attendiez de lui, ou qu'est-ce

22 que vous voulez dire exactement?

23 Réponse: Je crois qu'il voulait rester tout à fait au contrôle de ce qui

24 passait. Il voulait maîtriser ce qui se passait. Il disait ce qu'il avait

25 envie de dire et il refusait de répondre aux questions qui ne lui

Page 11973

1 convenaient pas. Et il commençait et interrompait l'entretien comme il lui

2 semblait bon.

3 Les personnes qui lui ont fait passer ces examens, moi-même y compris,

4 avaient cette impression; impression qu'il voulait démontrer que c'est lui

5 qui avait le contrôle de la situation, il était chez lui, sur son près

6 carré et que nous n'avions pas à intervenir.

7 Question: Je vais faire référence à des points qui viennent étayer ce que

8 vous venez de dire. A la page 40 de votre rapport, vous faites référence à

9 une impression que vous avez ressentie, selon laquelle le sujet examiné à

10 tout moment souhaitait garder le contrôle sur les sujets évoqués et sur la

11 teneur de la situation; il voulait également garder le contrôle de la

12 situation de façon générale. Il était important à ses yeux que ses

13 objectifs soient satisfaits par cet examen?

14 Réponse: Oui.

15 Question: Est-ce qu'il vous est apparu que les objectifs pour lesquels

16 vous vous étiez déplacés n'étaient pas en tête de sa liste de priorités?

17 Quel était votre sentiment sur la question?

18 Réponse: Il ne l'a pas dit de façon verbale mais il a donné cette

19 impression. Impression suivante: je vous parle parce que je veux tirer

20 profit de vous. Je ne vous parle pas nécessairement pour apporter des

21 éclaircissements sur des questions que se pose le Tribunal.

22 Question: A la page 42 de votre rapport, vous dites qu'il donnait

23 l'impression d'être un homme politique qui donnait une interview, qu'est-

24 ce qui vous a amené à porter ce jugement?

25 Réponse: Vous savez, lorsque les hommes politiques donnent une interview,

Page 11974

1 ils regardent la caméra, ils regardent le public, ils essaient de

2 s'attirer l'attention des personnes qui les entourent et ils ne se

3 concentrent pas forcément sur les questions qui leur sont posées.

4 Et lorsque j'étais de l'autre côté de la table, face à M. Zigic, j'avais

5 l'impression vraiment qu'il ne me parlait pas à moi directement, qu'il ne

6 répondait pas directement à mes questions, mais qu'il me disait quelles

7 étaient ses opinions, il regardait ce qui se passait aux alentours pour

8 savoir ce que traversaient les autres intervenants. Exactement comme si

9 l'on se trouvait dans une conférence de presse et pas dans le cadre d'un

10 examen médical.

11 Question: Dans vos conclusions, à la page 53 du rapport en anglais, vous

12 dites également que l'abus d'alcool ne joue pas un rôle prépondérant, mais

13 vous n'avez pas déterminé cependant que l'abus d'alcool avait mené à une

14 situation de dépendance, simplement cela avait poussé l'individu à des

15 comportements parfois excessifs.

16 (Assentiment du témoin.)

17 Quelle est votre distinction entre abus excessif, c'est-à-dire une volonté

18 d'ingérer une substance et excès? Quel distinguo faites-vous entre abus,

19 excès et dépendance?

20 M. le Président: Oui Maître Stojanovic?

21 M. Stojanovic (interprétation): Je tiens à préciser qu'il y a une erreur

22 de compte rendu, on dit "rôle considérable", et ici il est marqué "non

23 considérable". C'est tout à fait le contraire. Je parle de la page 53.

24 Je tiens à dire que cela est probablement dû à la vitesse d'élocution.

25 M. le Président: Madame Somers?

Page 11975

1 Mme Somers (interprétation): Je crois que le conseil de la défense a

2 raison. J'ai dit effectivement, j'ai voulu dire que la consommation

3 d'alcool n'était pas négligeable, et c'est exactement l'inverse qui est

4 apparu dans le compte rendu. Il faut donc bien lire "la consommation

5 d'alcool a joué un rôle non négligeable", et non pas "n'a pas eu de

6 conséquences fondamentales".

7 M. le Président: Allez-y.

8 Mme Somers (interprétation): J'en suis bien consciente, Monsieur le

9 Président, j'ai encore trois questions à poser si vous me le permettez.

10 Est-ce que vous avez compris ma question?

11 M. Nedopil (interprétation): Différence entre dépendance et consommation

12 excessive? La dépendance, cela veut dire qu'après qu'il y a eu sevrage ou

13 arrêt de la consommation d'alcool, il y a des symptômes de sevrage, c'est-

14 à-dire des manifestations physiques assez graves et prononcées. Cela peut

15 même avoir une issue fatale pour le sujet.

16 La consommation excessive, cela veut dire que vous buvez plus que cela

17 n'est acceptable aux yeux d'un groupe social, vous buvez de telle sorte

18 que cela porte préjudice à votre santé, que cela peut même avoir des

19 conséquences sur votre comportement social.

20 Donc vous voyez bien que la différence est très nette. La consommation

21 excessive peut être chronique, peut être régulière ou peut être

22 ponctuelle; il peut s'agir d'une intoxication ponctuelle à l'alcool.

23 Question: A la page 55 de la version en anglais, vous indiquez qu'il n'y a

24 pas de preuve claire de dépendance vis-à-vis de l'alcool. Les symptômes

25 qui auraient signalé une dépendance ne sont pas présents.

Page 11976

1 Réponse: En effet.

2 Question: Donc en terme non professionnel, cela veut dire qu'il y a

3 consommation à un certain nombre d'intervalles mais qu'il n'y a pas de

4 dépendance vis-à-vis d'une substance, n'est-ce pas?

5 Réponse: Oui.

6 Question: A la page 58, vous parlez de l'incapacité, de la capacité à

7 distinguer ce qui est bien de ce qui est mal, et vous dites que c'est

8 quelque chose que l'on peut supposer parfois dans le pire des cas mais que

9 dans le cas de M. Zigic il n'y a rien qui puisse laisser penser qu'il y a

10 eu des cas d'intoxication sévères de ce type. Donc vous avez prononcé

11 cette conclusion sur la base des éléments dont vous disposiez en tant

12 qu'expert et, à l'époque où ces faits sont présumés s'être passés, est-ce

13 que vous pensez qu'il aurait été à même de distinguer le bien du mal.

14 Réponse: Je pense qu'il aurait été capable de le faire. En tout cas

15 d'après les éléments que j'avais à ma disposition, je ne peux pas dire

16 qu'il ne pouvait pas, à l'époque, distinguer le bien du mal.

17 Question: Il y a un point qui est soulevé, je ne me souviens plus

18 exactement de quelle façon, mais il y a un incident relaté à la page 55;

19 incident dans le cadre duquel Zigic lui-même décrit un acte qui est repris

20 dans l'Acte d'accusation.

21 Il parle du fait, c'est en bas de la page 34, il parle de cet homme très

22 mince à Keraterm qu'il a fait se déplacer en courant avec un fusil à la

23 main.

24 (Assentiment du témoin.)

25 Il dit qu'il l'a forcé à se déplacer ainsi pendant une demi-heure et qu'il

Page 11977

1 l'a frappé lorsque cet homme ne pouvait plus marcher.

2 (Assentiment du témoin.)

3 Ensuite, il y a un paragraphe qui parle de la motivation de l'accusé. Il

4 vous répond, d'après ce que vous dites, que cet homme qu'il avait soumis à

5 ce traitement et qui était un voleur à la tire de la ville, il le

6 connaissait, et il dit, je le cite: "Comment est-ce que cet homme osait

7 s'attaquer à nous alors qu'il n'était qu'un lâche." Fin de citation.

8 Qui est-ce qui a mené à cette partie de l'entretien en particulier? Est-ce

9 qu'il y a d'autres choses qui ont été dites, qui n'ont pas été consignées

10 dans le rapport? Comment avez-vous réagi à cette déclaration de l'accusé?

11 Réponse: Je ne me souviens pas de choses différentes de celles qui

12 apparaissent dans mon rapport. Je ne peux rien ajouter. Mais de la façon

13 dont j'ai relaté ce qui m'a été dit, on voit qu'il m'a donné ses propres

14 motifs pour son action.

15 Ce ne sont pas des motifs pathologiques. Ce sont des motifs qui, au vue de

16 son histoire et de son passé, peuvent être –disons- compréhensibles. Il y

17 a là une situation conflictuelle, mais il n'y a pas dans le cadre de cette

18 situation conflictuelle, manifestation d'un comportement psychotique, ou

19 il n'y a pas manifestation d'ivresse qui permettrait d'apporter un motif

20 différent.

21 Question: A la page 57 de votre rapport, il y a le dernier paragraphe qui

22 se finit sur une phrase de synthèse. Vous dites: "Tous ces facteurs

23 indiquent qu'il y a grande confiance en soi en matière d'action et qu'il y

24 a grande capacité du sujet à exercer un contrôle conscient sur la séquence

25 d'évènements qui suit l'action.

Page 11978

1 (Assentiment du témoin.)

2 Est-ce que vous maintenez cette conclusion?

3 Réponse: Voyons, il faudrait que je la lise.

4 Question: C'est à la page 57 de la version en anglais. Je regarde le tout

5 dernier paragraphe.

6 M. Nedopil (interprétation): Je suis tout à fait en accord avec cela.

7 Mme Somers (interprétation): Merci Monsieur le professeur.

8 M. le Président: Merci beaucoup, Madame Somers.

9 Maître Stojanovic, avez-vous des questions supplémentaires?

10 (Contre-interrogatoire du témoin, Dr Norbert Nedopil, par Me Stojanovic.)

11 M. Stojanovic (interprétation): Oui Monsieur le Président, quelques

12 questions.

13 Monsieur le Professeur, est-ce que, lorsque vous avez rédigé le rapport

14 relatif à votre conversation avec M. Zigic, vous avez averti l'intéressé

15 que vous n'aviez pas à conserver, à titre confidentiel, ce qu'il avait

16 lui-même relaté?

17 M. Nedopil (interprétation): Oui.

18 Question: Est-ce que, de temps à autre, s'agissant de votre affirmation au

19 terme de laquelle il avait une attitude réservée, il avait, lui,

20 l'impression que vous vous placiez de temps à autre dans une position de

21 procureur? Est-ce peut-être là le résultat, la cause de son attitude

22 parfois réservée?

23 Réponse: J'ai cité ses propos. Il a dit: "Vous m'interrogez comme un

24 procureur." Et c'était tout à fait contradictoire avec la façon dont le

25 Pr. Hoff menait à bien son interrogatoire et son comportement. Alors,

Page 11979

1 peut-être que c'était peut-être dû à la façon dont effectivement je

2 formulais mes questions vis-à-vis de l'accusé.

3 Mais je crois que c'est là la position que toute personne accusée

4 adopterait. Elle manifesterait des réserves vis-à-vis d'une personne qui

5 la soumettrait à un examen. Ils manifestent bien sûr des réserves vis-à-

6 vis de l'accusation et de toutes les personnes qui travaillent dans le

7 Tribunal. C'est quelque chose auquel je suis habitué. Cela apparaît dans

8 tous mes examens, dans tous les examens auxquels je me livre sur des

9 personnes.

10 Question: Merci. Professeur, vous avez parlé aussi de la blessure que M.

11 Zigic avait à son doigt. Est-ce que vous pourriez nous en dire plus long

12 concernant l'influence des douleurs, tant physiques que psychiques, sur la

13 psychologie et le comportement de M. Zigic dans la période qui a, de plus

14 ou moins près, suivi cette blessure?

15 Réponse: Comme je l'ai déjà dit en réponse à une autre question qui m'a

16 été posée par l'accusation, je sais et parce qu'il me l'a dit, qu'il y a

17 eu une influence évidemment considérable de cette blessure sur lui, car il

18 ne pouvait plus jouer de cet instrument. En conséquence…, les mots me

19 manquent, je ne trouve pas les mots en anglais qu'il me faudrait pour

20 exprimer précisément ma pensée. C'est bien sûr un préjudice énorme qu'il a

21 ressenti. Il se sentait très désavantagé parce qu'il considérait vraiment

22 le fait de jouer de la guitare comme quelque chose de très important pour

23 son amour-propre. Il considérait que c'était très important pour sa

24 capacité à séduire les femmes également. Donc pour lui, effectivement,

25 cela a eu un impact négatif considérable. Il a dû souffrir également

Page 11980

1 physiquement de cette blessure. Il n'était pas très disposé à suivre le

2 traitement médical qui se serait imposé. Donc, de ce point de vue-là, on

3 peut dire que, oui, il y a eu des troubles psychologiques qui ont découlé

4 de cette blessure.

5 Question: Merci Professeur, vous avez établi votre rapport vers le mois

6 d'août de l'an passé. Entre-temps, nous avons entendu bon nombre de

7 témoins.

8 Maintenant, à une question hypothétique, pourriez-vous nous formuler un

9 commentaire? Si je vous disais qu'une trentaine de témoins ont déclaré ici

10 que Zigic, dans la période critique, avait consommé de l'alcool dans un

11 degré très important, au point de ne pas pouvoir reconnaître des personnes

12 à la recherche desquelles il se trouvait être.

13 Réponse: Je ne peux pas me prononcer sur la véracité de cela ou pas. Mais

14 cela corrobore ce qu'il m'a dit, à savoir qu'il buvait beaucoup à cette

15 époque. Mais je ne peux pas dire, effectivement, si le témoin a fait une

16 déclaration véridique sur ce qu'il faisait à ce moment-là. Quand on est

17 dans un état où l'on ne peut plus reconnaître les gens et quand on est

18 quelqu'un comme M. Zigic qui est habitué à l'alcool, cela veut dire qu'on

19 est quelqu'un qui a eu une consommation d'alcool telle que la

20 concentration d'alcool dans le sang est d'environ 1,8 grammes. Et cela

21 peut aller de 1,8 à 2,5 grammes. Ce serait le taux d'alcoolémie dans le

22 sang.

23 Le taux de 1,8 serait le taux minimum, mais c'est un chiffre abstrait que

24 je vous livre et je ne peux pas vraiment calculer la concentration exacte

25 d'alcool dans le sang. Mais pour avoir un taux d'alcoolémie de cette

Page 11981

1 importance-là, il faut boire au moins trois litres et demi d'alcool en

2 l'espace de deux heures, trois litres et demi de bière en l'espace de deux

3 heures. Peut-être que pour une population bavaroise, c'est envisageable.

4 Question: Monsieur le Professeur, à un endroit, vous avez dit, et je vais

5 essayer de retrouver le texte en version anglaise, qu'il n'y avait pas

6 d'obstacle pour la réintégration de M. Zigic dans la société. En est-il

7 vraiment ainsi et comment pourriez-vous nous commenter cette assertion?

8 M. Nedopil (interprétation): Oui, certainement, du point de vue médical,

9 du point de vue psychiatrique, M. Zigic ne souffre pas d'une pathologie.

10 Monsieur Zigic ne souffre pas de troubles, M. Zigic a certaines

11 spécificités de caractère, certaines spécificités de personnalité, mais

12 c'est quelqu'un qui est compétent, qui est tout à fait apte à mener une

13 vie normale. Donc, de ce point de vue-là, rien ne l'empêcherait de se

14 réintégrer de façon tout à fait satisfaisante dans la société.

15 M. Stojanovic (interprétation): Professeur, je vous remercie infiniment

16 pour vos propos et je n'ai plus de questions à vous poser.

17 M. le Président: Merci, Maître Stojanovic.

18 Monsieur le Juge Riad, avez-vous des questions?

19 (Questions au témoin, M. Norbert Nedopil, par M. le Juge Riad.)

20 M. Riad (interprétation): Bonjour Professeur, je n'ai qu'une question à

21 votre égard qui découle de la dernière phrase que vous avez prononcée.

22 Vous avez en effet dit que M. Zigic ne souffrait d'aucun trouble mais

23 qu'il a certaines particularités dans sa personnalité. Je voudrais que

24 vous nous disiez ce que vous désignez par particularités dans votre

25 profession.

Page 11982

1 M. Nedopil (interprétation): Eh bien, je vais citer mon rapport et les

2 éléments de mon entretien que j'ai eu avec M. Zigic. J'ai regardé son

3 comportement au cours de sa vie et j'ai pensé qu'il avait eu un

4 comportement un petit peu immature. Il n'a pas pu garder un emploi stable.

5 Il a eu un certain nombre de compagnes, parfois de façon simultanée, sans

6 pour autant divorcer de sa femme, sans pour autant cesser de vivre par

7 moments avec sa femme. Donc, il changeait de compagne parfois d'un jour à

8 l'autre. Et il a dit, lorsque je lui ai dit que c'était quelque chose qui

9 n'était pas très représentatif d'un comportement mûr pour quelqu'un de son

10 âge, il a dit: "Vous savez, c'est votre point de vue d'occidental. Nous

11 les méditerranéens, nous sommes un petit peu différents."

12 Voyez ce que j'entends par particularités de personnalité. Ce sont des

13 particularités aux yeux des critères qui sont ici prévalant, en Europe

14 occidentale.

15 Mais il y a eu une autre spécificité de caractère que j'ai décrite, à

16 savoir son besoin de toujours avoir le contrôle de ce qui se passe, d'être

17 toujours indépendant, de ne jamais être sous l'influence de quelqu'un. Et

18 cela, il l'a démontré pendant toute la durée de l'entretien et de

19 l'examen. Et ça, c'est une autre spécificité de son caractère et c'est ce

20 qui fait que le fait de travailler, le fait de trouver un travail et de

21 travailler dans un cadre très structuré tel qu'un système bureaucratique,

22 est assez difficile pour lui, mais cela n'est pas une entrave à sa

23 réintégration dans une vie tout à fait semblable à celle qu'il vivait

24 jusqu'à présent.

25 Question: En sus de ce besoin d'exercer le contrôle, les autres

Page 11983

1 particularités sont des particularités plutôt culturelles et non pas

2 psychiatriques?

3 Réponse: Aucune de ces particularités n'est d'ordre psychiatrique.

4 Je l'ai dit dans mon rapport. Nous, notre travail est de regarder les

5 traits de la personnalité qui peuvent expliquer certaines difficultés,

6 traits de personnalité qui peuvent révéler comment dans certaines

7 circonstances, dans des circonstances conflictuelles des problèmes sont à

8 même de surgir, mais ce n'est pas un trait qui est représentatif d'une

9 pathologie psychiatrique, c'est plus un trait de personnalité qui peut

10 conduire à des conflits dans certaines circonstances bien précises.

11 Merci beaucoup Monsieur le professeur.

12 M. le Président: Merci Monsieur Riad, Madame la Juge Wald?

13 (Questions au témoin, M. Norbert Nedopil, par Mme la Juge Wald.)

14 Mme Wald (interprétation): Docteur Nedopil, le terme de contrôle a été

15 utilisé à plusieurs reprises dans le dialogue que vous avez eu avec M. le

16 Procureur et le Juge Riad. Vous avez en effet dit que M. Zigic s'efforçait

17 d'exercer son contrôle sur l'entretien, l'interview.

18 Est-ce que vous avez eu le sentiment qu'il s'efforçait de contrôler

19 d'autres personnes également dans des situations autres, à savoir dans ses

20 contacts sociaux, dans le travail? Avait-il donc cette même tendance à

21 garder le contrôle sur la situation? Nous ne parlons pas bien entendu de

22 cet aspect psychiatrique, nous voulons tous garder le contrôle jusqu'à un

23 certain point, mais pensez-vous qu'il s'agisse là d'une facette importante

24 de sa personnalité?

25 M. Nedopil (interprétation): En fait, ce qui constitue vraiment une

Page 11984

1 facette de sa personnalité, c'est qu'il ne veut pas être contrôlé, il ne

2 veut pas être sous le contrôle de quelqu'un d'autre. Et dans des

3 situations où il n'a pas vraiment la possibilité d'échapper à ce contrôle

4 -comme par exemple dans une unité de détention- eh bien il doit faire la

5 démonstration de son indépendance, il essaie de montrer qu'il a le

6 contrôle de la situation. C'est cela l'important: ne pas être sous le

7 contrôle de quelqu'un, c'est plus important pour lui que le fait d'être en

8 contrôle de la situation.

9 Question: Le terme est parfois utilisé, mais je voudrais savoir si vous

10 utiliseriez ce terme en le plaçant dans une catégorie de personnes

11 insurgées ou rebelles à l'égard de l'autorité, à savoir de gens qui

12 veulent rejeter toute…

13 Réponse: Je ne comprends pas exactement ce que vous voulez dire, je ne

14 peux pas dire oui ou non parce que je pourrais mal interpréter vos propos.

15 Question: J'étais en train de me référer à un type de personnes qui

16 n'aimaient pas se faire imposer des règles par autrui, et c'est ce type de

17 personnes qui se rebellent parfois en quittant la scène, en quittant les

18 lieux pour ne pas voir quelqu'un rejeter son autorité.

19 Réponse: Oui il n'aime pas qu'on lui impose de règle.

20 Question: C'est cela, c'est cela. Pensez-vous qu'une autre sorte de

21 contrôle pourrait être envisagée? Est-ce que vous pensez que M. Zigic est

22 une personne qui se contrôle soi-même? Je ne parle pas maintenant de

23 l'affaire de l'alcool, mais s'agit-il d'une personne qui est susceptible

24 de contrôler ses propres émotions, à savoir susceptible sous une situation

25 de stress extrême, susceptible de perdre le contrôle sur soi-même?

Page 11985

1 Réponse: Eh bien, dans des circonstances normales, c'est une personne qui

2 peut tout à fait se contrôler. Sans doute, mais là c'est pure spéculation,

3 ce n'est pas quelque chose qui repose sur des faits. Sans doute dans des

4 situations de stress, je ne pourrais pas affirmer qu'il serait à même

5 d'avoir ce même contrôle sur lui-même. Je pense qu'il ne serait pas à même

6 d'avoir ce contrôle sur lui-même. Je ne partirais pas en croisière avec

7 lui sur un bateau, pour dire les choses clairement.

8 Question: Bien. A votre avis, M. Zigic est-il une personnalité

9 introspective, renfermée sur lui-même, considérant ses propres motifs et

10 sa conduite, ou plutôt une personne qui construit l'image de soi-même par

11 projection de son image à l'égard du monde extérieur?

12 Réponse: J'opterai pour votre deuxième proposition.

13 Question: Bien. Une dernière question qui est une question générale plutôt

14 que concernant M. Zigic. Votre rapport se base sur certains documents, à

15 savoir l'Acte d'accusation, vos notes, des renseignements médicaux et vos

16 interviews avec M. Zigic. Je voudrais savoir dans quelle mesure vous

17 pensez qu'il importerait de connaître les événements effectifs pour ce qui

18 est de leurs influences sur la conduite de quelqu'un?

19 J'entends par là qu'il y a une impression psychiatrique lors de

20 l'interview, et vous avez une autre chose lorsque vous recevez des

21 documents afférents à une personne qui avait par exemple eu un

22 comportement étrange ou violent, ou avez-vous été surpris par ces

23 inconsistances?

24 Réponse: Il y a toujours parfois des incohérences et lorsque l'on est un

25 psychiatre qui a un petit peu d'expérience, on sait qu'il y a des

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1 personnes pour lesquelles il n'y a pas beaucoup d'incohérence, tandis que

2 pour d'autres il y en a beaucoup qui se présentent.

3 Pour ce qui est de M. Zigic, je dirais qu'il se trouve exactement au

4 milieu de ces deux cas de figure. Il disait parfois -et c'est là un

5 indice- il disait parfois: "Je ne veux pas en parler", et quand les

6 personnes disent cela "Je ne veux pas en parler", c'est un indice, un

7 indice qui révèle que ces personnes sont susceptibles de formuler des

8 incohérences qui ne sont pas spectaculaires ou qui ne portent pas

9 totalement à conséquence. Parce qu'il refuse de parler des choses qui

10 seraient susceptibles de le pousser à formuler une incohérence.

11 Question: Ma dernière question -je l'ai dit tout à l'heure, mais

12 maintenant c'est vraiment ma dernière question-: à l'occasion de vos

13 interviews avec lui avez-vous eu l'occasion de lui poser des questions

14 concernant sa conduite dans cette période où il avait été gardien dans des

15 camps de détention?

16 Réponse: Je lui ai posé des questions portant sur son comportement dans

17 les camps de détention. Je lui ai posé des questions sur les émotions

18 qu'il ressentait alors qu'il se trouvait dans ce camp et il m'a dit, et

19 cela apparaît dans le rapport, qu'il n'était pas très heureux, non pas du

20 fait de ce qu'il faisait, mais parce qu'il y avait tant de personnes qu'il

21 connaissait d'auparavant qui vivaient là dans des conditions déplorables.

22 Il ne pouvait cependant rien faire pour les aider. Notamment, il y avait

23 un professeur qu'il connaissait bien -ce professeur était détenu- et il

24 était très malheureux parce qu'il ne savait pas quoi faire pour ces

25 personnes. Il ne savait pas ce qu'il pouvait faire.

Page 11987

1 Question: Vous pensez que ce récit-là avait été une présentation objective

2 et véridique de ce qui se passait? Est-ce que vous ne pensez pas plutôt

3 que cette explication s'applique ou s'intègre dans le reste de son récit?

4 M. Nedopil (interprétation): Toute personne qui se trouve dans une

5 situation où elle doit répondre devant un tribunal essaye de produire la

6 meilleure impression possible, donc c'est là un aspect de sa personnalité,

7 celui qu'il m'a montré à ce moment-là, mais ce n'est pas l'ensemble de sa

8 personnalité.

9 Mme Wald (interprétation): Merci.

10 (Questions au témoin, M. Norbert Nedopil, par M. le Président.)

11 M. le Président: Moi-même, j'ai quatre questions. En quoi le fait d'être

12 la défense, l'accusation ou le Tribunal à demander votre examen peut

13 influencer les résultats? C'est un peu induit parce que je voudrais

14 demander s'il est possible d'influencer les résultats de l'examen? Je pose

15 la question en ayant conscience que les personnes qui font des examens ont

16 toujours conscience et font des efforts pour contrôler l'objectivité de

17 l'examen lui-même. Je ne porte donc aucun jugement de valeur.

18 M. Nedopil (interprétation): Je viens du système législatif allemand. Dans

19 ce système, un expert se doit d'être neutre, tel un juge. Il ne conseille

20 qu'aux juges en réalité. Donc dans le système d'où je viens, ceci veut

21 dire qu'en réalité, nous ne devrions parler avec aucune partie avant de

22 donner notre expertise. Evidemment, nous parlons entre nous tout de même

23 puisque nous nous connaissons, mais vous devez rester neutre, objectif et

24 impartial parce que vous êtes un conseiller de la Cour, en réalité.

25 Bien sûr, le contrôle, il doit y avoir un certain degré de contrôle de ce

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1 que vous pensez, de ce que vous ressentez. Les psychiatres des tribunaux

2 doivent contrôler leurs sentiments personnels puisqu'ils sont influencés

3 en quelque sorte par les sentiments de la personne qu'ils sont en train

4 d'examiner. Et cette personne va vous dire ce qu'elle souhaite, d'une

5 façon assez subtile et vous devez être en mesure de contrôler ceci. Mais

6 encore plus, vous devez être en mesure de contrôler, à partir du moment où

7 vous discutez avec quelqu'un pendant 10 heures, 20 heures, et vous devez

8 vous poser des garde-fous pour ne pas verser dans le rôle du thérapeute de

9 cette personne-là. Et c'est ce genre de contrôle qu'il faut exercer le

10 plus, c'est ce qui est le plus important. Donc il faut maintenir le

11 contrôle et garder son impartialité à tout moment.

12 Question: Encore une question. Est-ce que, de votre point de vue, il est

13 important pour la personne qui est examinée de percevoir ou d'avoir

14 l'information sur l'entité qui a demandé l'examen? C'est-à-dire, nous

15 avons parlé de l'accusation, de la défense ou du tribunal, est-ce que

16 c'est important du point de vue de l'accusé et, si oui, dans quelle

17 mesure?

18 Réponse: Oui. Chaque individu doit être informé de quel est le parti qui a

19 demandé qu'il soit interrogé, donc qui a demandé l'examen. L'accusé

20 devrait être en mesure de se consulter avec son avocat, donc avec le

21 représentant de la défense, pour définir son comportement, puisque c'est

22 la seule personne sur laquelle il peut compter. Et, dans ce cas

23 particulier, M. Zigic a eu l'occasion de se consulter avec son avocat

24 avant l'entretien et même pendant l'entretien, pendant l'interrogatoire.

25 Et il était tenu au courant du fait que c'était la Chambre qui nous a

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1 demandé de mener à bien cet examen.

2 Question: Ma deuxième question, Professeur Nedopil: est-ce que vous avez

3 une idée sur la question de savoir si M. Zigic est gaucher ou droitier?

4 Réponse: Ecoutez, c'est une très bonne question. Je dois vérifier mes

5 notes, je ne me souviens pas si je l'ai noté quelque part ou non. Je ne me

6 souviens pas. Je me souviens d'avoir discuté de cela avec le docteur Hoff,

7 mais je ne suis pas sûr.

8 Question: Quand vous avez discuté de cela avec le docteur Hoff, pourquoi

9 avez-vous discuté de cette question gaucher-droitier avec le Professeur

10 Hoff? Est-ce que vous vous souvenez pourquoi vous avez discuté de cette

11 question?

12 Réponse: Probablement parce que nous n'avons ni l'un ni l'autre posé cette

13 question-là. Nous avons probablement omis tous les deux de poser cette

14 question-là, mais je ne suis pas sûr. Peut-être que nous n'y avons pensé

15 qu'après, peut-être que nous nous sommes posé la question de savoir s'il

16 était gaucher ou droitier, probablement, mais je ne le trouve pas ici.

17 Question: Nous avons cette question dans votre rapport je crois. De toute

18 façon, vous n'avez donc pas une idée pour l'instant.

19 Réponse: Oui.

20 Question: Troisième question, Professeur Nedopil. Est-ce que, si une

21 personne –disons- a été sujette à une consommation excessive ou à une

22 dépendance de l'alcool dans les termes que vous avez répondus, il y a par

23 exemple 8 ans et 7 ans, est-ce qu'il est possible de reconnaître des

24 résultats aujourd'hui dans l'observation clinique, éventuellement

25 psychiatrique, de cette personne?

Page 11990

1 Réponse: Cela dépend vraiment. S'il existait un syndrome très fort,

2 organique de cette dépendance, étant comme conséquence de son alcoolisme,

3 ceci pourrait se trouver, pourrait se voir. Mais dans la plupart des cas,

4 l'alcool, l'ingestion…, mais je pense que j'ai un problème avec l'anglais.

5 Ce n'est pas les connaissances médicales qui me manquent.

6 Donc les changements provoqués par l'alcool dans le corps, comme par

7 exemple polynervisme des pathologies organiques, le syndrome de pathologie

8 organique au niveau du cerveau, ont cette capacité remarquable de

9 disparaître si les personnes ont subi une désintoxication ou bien si elles

10 sont restées sobres pendant un moment.

11 Donc la plupart des cas d'alcooliques graves qui ont été examinés par des

12 psychiatres, en Allemagne par exemple, une demi-année après leur

13 désintoxication, eh bien, souvent, ces syndromes au niveau du cerveau, les

14 syndromes organiques au niveau du cerveau disparaissent, et si on vous

15 demande d'examiner une personne sept ou huit ans plus tard, eh bien, il

16 serait très difficile de prouver l'existence préalable d'un tel syndrome.

17 Il en est de même avec le système de neuropathie périphérique. On ne peut

18 pas le dire, nous n'avons pas vraiment de moyens de l'établir.

19 Question: Ma dernière question, Professeur Nedopil, vous avez mentionné

20 comme résultat de votre observation des conditions d'examen de M. Zigic

21 qu'il interrompait l'interview, qu'il disait ce qu'il voulait seulement

22 dire, qu'il contrôlait la situation et vous avez présenté tout cela comme

23 une spécificité de son caractère.

24 Contrôler la situation, c'est peut-être ce que je voudrais considérer avec

25 vous. Peut-être que vous reconnaissez la situation d'un enfant qui essaie

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1 toujours de remplir l'espace et le temps de conversation pour cacher sa

2 mauvaise action -si je peux dire comme cela- devant son père ou sa mère.

3 Est-ce que vous reconnaissez cette situation ici ou non? C'est-à-dire,

4 est-ce que contrôler la situation, interrompre l'interview, dire ce qu'il

5 voulait, pourrait signifier d'une certaine façon qu'il avait quelque chose

6 à cacher, qu'il ne voudrait pas dire ou qu'il voudrait faire passer sa

7 propre version de la réalité? Vous comprenez ma question?

8 Réponse: Oui. La conclusion à laquelle je pourrais arriver, en me basant

9 sur mon observation, est qu'il a voulu me donner sa version des choses et

10 des faits. Je pense qu'il a été irrité et il m'a demandé pour quelle

11 raison je lui ai posé mes questions, comme si j'étais le Procureur. Il a

12 été irrité si par exemple on lui présentait une autre version des faits,

13 ou bien si l'on contestait sa propre version, ou si on lui posait des

14 questions sur sa version des choses.

15 Je n'ai pas eu l'impression qu'il me racontait sa version des choses, ou

16 bien qu'il a tenté de contrôler ou d'entraver cet entretien pour essayer

17 de cacher quelque chose, de se protéger. C'est plutôt qu'il avait peur que

18 je ne le contrôle pas, moi. C'est l'impression que j'ai eue, moi. C'est à

19 peu près la réponse que j'ai donnée aussi dans ma réponse précédente.

20 Il s'agit plutôt de la peur d'être contrôlé que le besoin de prendre le

21 contrôle. C'est ceci qui domine chez lui et qui le force à agir comme

22 cela.

23 Question: Oui Professeur Nedopil, vous avez mentionné que M. Zigic se

24 fâchait quand vous posiez des questions qui l'irritaient. Est-ce que vous

25 avez une idée du type de questions qui irritaient M. Zigic? Il s'agissait

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1 de questions sur les faits ou sur l'histoire de vie? Est-ce que vous avez

2 une idée du type de questions?

3 Réponse: Eh bien, je l'ai confronté. J'ai…, les mots me manquent en

4 anglais.

5 Question: Nos interprètes sont très aimables d'être ici.

6 Réponse: J'ai trouvé, j'ai trouvé ces termes. Quand je le confrontais avec

7 des contradictions concernant lui-même ou bien des points de l'Acte

8 d'accusation, les connaissances que j'avais par rapport à l'Acte

9 d'accusation, eh bien cette confrontation l'irritait.

10 Ce n'est pas le fait que je lui pose la question au sujet d'un certain

11 nombre de faits, ce n'est pas qu'il ne voulait pas répondre à mes

12 questions mais il était irrité, par exemple, par cette confrontation. Donc

13 c'était un peu comme un politique, il disait: "Je ne veux pas répondre."

14 C'est le moment où je l'ai confronté avec des contradictions concernant sa

15 personne, ou bien à la contradiction qui relevait de soit ses remarques

16 soit les connaissances que j'avais par rapport à l'Acte d'accusation ou

17 aux faits.

18 M. le Président: Très bien. Je n'ai pas d'autres questions Professeur

19 Nedopil. Nous vous remercions beaucoup d'être venu.

20 Je me sens très solidaire avec vous par rapport aux questions des langues

21 parce que moi-même je n'ai pas l'opportunité de parler ici ma langue, je

22 me sens solidaire avec vous mais je sens aussi que vous avez fait une

23 bonne communication. Vous avez bien communiqué, nous avons bien compris ce

24 que vous avez voulu nous dire.

25 Nous vous remercions donc beaucoup d'être venu. Nous savons que cela a été

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1 très difficile pour vous. Nous vous souhaitons un bon retour dans votre

2 pays et à votre travail. Merci Professeur.

3 M. Nedopil (interprétation): Je vous remercie. Je vous dis que j'ai été

4 honoré d'avoir été invité à témoigner en tant qu'expert devant ce

5 Tribunal.

6 (Le témoin, M. Norbert Nedopil, est reconduit hors du prétoire.)

7 M. le Président: Maintenant pour aujourd'hui je crois que nous avons donc

8 terminé. Nous n'avons pas… Je vois que Mme Somers veut… D'accord.

9 Maître Stojanovic en premier lieu peut-être, parce que nous sommes

10 maintenant dans le temps de la défense. Je ne sais pas. Nous suivons

11 toujours la règle de "ladies first", mais ici il y a une autre règle

12 maintenant.

13 Maître Stojanovic?

14 (Questions relatives à la procédure.)

15 M. Stojanovic (interprétation): Je vais être très bref Monsieur le

16 Président, nous avons déjà proposé que ces documents soient versés au

17 dossier. Je pense qu'il faudrait lui attribuer une cote et prendre une

18 décision quant à son versement au dossier.

19 M. le Président: Oui, voilà, Madame Somers, peut-être est-ce que vous

20 pouvez nous dire si vous avez une objection au versement au dossier? Et si

21 vous avez autre chose vous pouvez profiter du moment pour nous

22 communiquer.

23 Mme Somers (interprétation): Merci beaucoup Monsieur le Président,

24 l'accusation n'a pas d'objection à élever quant à ce qui a été demandé par

25 la défense et quant au versement de ce document.

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1 Par ailleurs, il y a une autre question que je souhaite soulever, je ne

2 sais pas si cela doit faire l'objet d'une audience publique ou d'une

3 audience à huis clos partiel: je voudrais votre avis sur un commentaire

4 qui nous a été fait par Me Jovan Simic ce matin, un incident dont il a eu

5 connaissance et qui s'est produit à Keraterm, nous ne savons pas

6 exactement ce qu'il en est.

7 Est-ce qu'il y a une obligation pour nous de faire quelque chose? Est-ce

8 que nous pouvons obtenir des éclaircissements sur ce point? Peut-être

9 qu'il convient de le faire dans le cadre d'une audience à huis clos

10 partiel. Je ne sais pas, à vous d'en décider.

11 M. le Président: Très bien Madame Somers, on va prendre les choses par

12 ordre peut-être. Donc maintenant. Je vois Maître Jovan Simic, je vais vous

13 donner la parole.

14 Madame Thompson, est-ce qu'il y a une cote pour ce document ou va-t-il

15 être versé avec la cote d'enregistrement?

16 Mme Thomson (interprétation): D31/4.

17 M. le Président: Le document est donc versé au dossier et aura la cote

18 D31/4.

19 Maintenant il y a encore un aspect au-delà de cette question soulevée par

20 Mme Somers qui peut justifier un huis clos partiel, il y a une question

21 dont j'aimerais encore traiter en session publique.

22 Comme vous savez, nous avons prévu deux semaines pour la duplique de la

23 défense. Mais devant la réplique du Procureur, on peut s'attendre que, si

24 la duplique c'est seulement répondre aux aspects, aux questions soulevés

25 par la réplique du Procureur, je crois que nous n'allons pas avoir besoin

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1 de deux semaines pour la duplique de la défense.

2 Mais nous avons besoin vraiment d'organiser notre travail parce que nous

3 avons beaucoup de choses à faire. J'aimerais donc bien quand même pour

4 l'instant, avant d'éventuellement passer à huis clos partiel, j'aimerais

5 bien entendre du côté de la défense une idée.

6 Je vous dis que dans ma tête pour l'instant -et c'est ma responsabilité

7 personnelle, je ne sais pas quelles sont l'opinion et l'idée de mes

8 collègues- j'ai un peu l'idée que nous n'allons pas avoir besoin de deux

9 jours pour la duplique de la défense.

10 Et quand je dis cela, je ne veux pas influencer la défense quand je pose

11 la question de savoir quel est le temps. Je respecte, je sais que, si vous

12 avez besoin de trois jours, vous allez le dire. Voilà donc la question:

13 j'aimerais bien savoir quelle est l'idée de la défense.

14 Maître Krstan Simic, de votre côté?

15 M. K. Simic (interprétation): Monsieur le Président, je pense devoir dire

16 que vous avez soulevé une question très importante compte tenu du fait que

17 nous nous trouvons ici maintenant et que, dans 7 jours comme prévu, il y a

18 beaucoup de choses techniques et autres à effectuer.

19 Il faudrait donc que la duplique soit reportée à l'autre semaine, au début

20 de cette autre semaine, ce qui nous ménagerait 14 jours afin que les

21 arguments en duplique puissent être préparés en bonne et due forme.

22 La défense de M. Kvocka a l'intention de faire venir des témoins. Nous

23 avons eu un témoin aujourd'hui aussi.

24 Et une autre question doit être soulevée, c'est-à-dire la possibilité de

25 citer l'accusé à témoigner en duplique, étant donnés les gros écarts entre

Page 11996

1 les différents dires. Cela nous permettrait de montrer certains éléments

2 parce que dans l'interrogatoire principal cela ne nous importait pas trop

3 parce que l'accusé n'avait pas parlé de ces trois journées dans le détail.

4 Et je compte moi faire venir au moins trois, peut-être même quatre

5 témoins, ce qui dépendra du contre-interrogatoire de demain. C'est alors

6 que je pourrai vous faire une évaluation précise mais je crois pouvoir

7 vous dire que cela ne nous prendrait pas plus d'une journée voire une

8 journée et demie.

9 M. le Président: Très bien Maître Krstan Simic.

10 Maître Nikolic, je crois que vous n'avez pas de duplique?

11 M. Nikolic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

12 Vous avez tout à fait raison, l'équipe de la défense va rendre la monnaie

13 de sa pièce au Procureur et n'aura pas d'éléments à présenter en duplique.

14 M. le Président: Maître Jovanovic.

15 M. Jovanovic: Monsieur le Président, étant donné qu'il n'y a pas eu de

16 témoins pour réfuter les témoignages en défense de l'accusé M. Radic et en

17 sus des témoins qui sont venus témoigner à décharge, la défense de M.

18 Radic n'a pas de témoin à citer pour répondre à quelques nouveaux éléments

19 de preuve; aussi n'allons-nous citer aucun témoin.

20 M. le Président: Maître Stojanovic?

21 M. Stojanovic (interprétation): Nous interprétons le règlement et cela

22 découle de la réplique, si entre-temps il y a quelque chose en réplique.

23 Bien entendu nous allons avoir une duplique, mais nous supposons que nous

24 n'aurons rien en réplique.

25 M. le Président: Très bien.

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1 Maître Jovan Simic?

2 M. Jovan Simic (interprétation): Cette équipe de la défense a l'intention

3 de citer des témoins en duplique, mais nous ne sommes pas encore en mesure

4 de vous dire combien de témoins nous allons citer et combien de temps il

5 nous faudra, étant donné que pour ce qui est des témoins que nous allons

6 citer ici, c'est la première fois que l'on en entend parler. Nous n'avons

7 aucun document, on ne nous en a parlé en rien à l'exception faite d'une

8 phrase seulement qui n'en dit pas très long. Aussi vous demanderais-je

9 d'avoir de la compréhension pour cet ajournement d'information de notre

10 part, en attendant de voir comment les choses vont évoluer.

11 M. le Président: Très bien Maître Jovan Simic, le temps que…

12 Madame Somers, sur cette question de l'organisation de la duplique, est-ce

13 que vous avez quelques commentaires? C'est une question essentiellement de

14 la défense, mais de toute façon vous êtes de l'autre côté. Je ne sais pas

15 si vous avez quelques commentaires?

16 Mme Somers (interprétation): Merci. Avec tout le respect que je vous dois,

17 je voudrai vous demander la possibilité de me réserver le droit d'élever

18 des objections un peu plus tard. Peut-être que nous pourrons voir

19 ultérieurement, par exemple sous la forme de ce qui a été fait par

20 l'accusation, ce que se propose de faire la défense.

21 Jusqu'à maintenant je n'ai pas bien saisi ce que n'aurait pas pu dire M.

22 Kvocka, outre ce qu'il a déjà dit, mais peut-être que l'on pourrait nous

23 transmettre une espèce de synthèse qui pourrait être dressée par la

24 défense de la même façon qu'elle l'a fait par le passé. J'aimerais pouvoir

25 m'appuyer sur ce type de base avant de me prononcer de façon définitive.

Page 11998

1 Est-ce qu'il s'agit vraiment de la duplique? En ce cas parfait, si c'est

2 une tentative qui essaie de repasser en revue tous les éléments du

3 dossier, là j'aurais peut-être quelque chose à dire.

4 M. le Président: Je crois que la Chambre va être stricte comme nous

5 l'avons déjà dit. La duplique doit venir de la réplique et seulement cela.

6 Donc là, nous allons être stricts de toute façon.

7 Vous voyez, la position de la défense. Je comprends la position

8 essentiellement de Me Krstan Simic et de Me Jovan Simic. La réplique du

9 Procureur n'est pas encore terminée, donc ils ne sont pas vraiment dans la

10 condition de dire exactement ce qu'ils vont faire, seulement à la fin ils

11 peuvent avoir cette idée.

12 Mais les parties, le Procureur et la défense, savent bien que cette

13 Chambre a annoncé, beaucoup de temps avant, qu'elle allait être stricte

14 -et nous l'avons dit aujourd'hui aussi pour la défense- le moment venu, va

15 être stricte dans l'interprétation des notions de réplique et de duplique.

16 Donc à ce moment-là nous serons là Madame Somers. Je crois que l'on va

17 attendre. De toute façon, je crois qu'il y a au moins deux idées que j'ai

18 un peu dans ma tête. Maintenant, c'est qu'il est tout à fait possible de

19 penser que vraiment nous n'allons pas avoir besoin de plus de trois jours

20 pour la duplique de la défense, je crois.

21 Et surtout il y a une autre idée, c'est une préférence manifestée par la

22 défense: au lieu d'avoir la semaine du 11 juin, elle préférerait avoir la

23 semaine du 18 juin. Je crois que c'est cela que l'on peut déjà conclure.

24 Donc dans la base de ces idées, je vais discuter la question avec mes

25 collègues et encore cette semaine nous allons vous dire quelle sera la

Page 11999

1 semaine pour la duplique de la défense.

2 Une fois que nous arriverons à cette conclusion, nous n'allons pas avoir

3 besoin de deux semaines pour la duplique. Il faut donc au moins trouver

4 quelques idées pour que l'on puisse organiser notre travail et, quand je

5 dis notre, je dis le travail de la Chambre, le travail de l'accusation et

6 le travail de la défense.

7 Aujourd'hui je crois que l'on ne peut pas avancer plus que cela et l'on

8 vous communiquera avant de partir, avant de finir éventuellement, la

9 réplique du Procureur. Je crois que pour aujourd'hui on va en rester là.

10 Madame Somers, je vois que vous avez autre chose.

11 Mme Somers (interprétation): Oui Monsieur le Président, rappelez-vous

12 cette question soulevée par Me Jovan Simic, ce qu'il a dit ce matin. Je me

13 demande si nous ne devrions pas passer en huis clos partiel?

14 M. le Président: Nous allons passer au huis clos partiel.

15 (Audience à huis clos partiel à 14 heures 52.)

16 [expurgée]

17 [expurgée]

18 [expurgée]

19 [expurgée]

20 [expurgée]

21 [expurgée]

22 [expurgée]

23 (Audience publique à 14 heures 53.)

24 M. J. Simic (interprétation): Monsieur le Président, au cours de la

25 semaine dernière et, peut-être ne me suis-je pas bien expliqué ou peut-

Page 12000

1 être ne m'avez-vous pas tout à fait bien compris, j'ai présenté des

2 écritures pour ce qui est de reprendre le compte rendu d'audience du

3 procès Keraterm que je vous donnerai les pages concernées et je voudrais

4 que cette Chambre soit saisie de ce procès et de ce compte rendu. La

5 semaine dernière, lors de l'interrogatoire d'un témoin de l'accusation, M.

6 Senad Kenjar, il a été établi, et c'est ce témoin qui l'a déclaré lui-

7 même, qu'il avait fait une première fois une déclaration juste avant de

8 venir témoigner devant ce Tribunal, et ce sur incitation de son oncle, à

9 savoir son oncle Hase Icic…

10 Mme Somers (interprétation): Objection, Monsieur le Président.

11 Excusez-moi d'intervenir. Nous ne savons si cela fait l'objet d'une

12 déposition publique ou privée. Par excès de prudence, je demanderai que

13 les délibérations qui se tiennent sur ce sujet se fassent dans le cadre

14 d'un huis clos partiel. Je ne sais pas si nous pouvons faire une demande

15 particulière vis-à-vis du compte rendu, je ne sais pas de quel témoin nous

16 parlons, je crois que le risque est trop élevé. Quel mal y a-t-il à passer

17 en huis clos partiel?

18 M. J. Simic (interprétation): Puis-je répondre, Monsieur le Président?

19 M. le Président: Non. J'aimerais vous poser une question. Ce témoignage

20 dont vous parlez a été fait à huis clos partiel, à huis clos total ou en

21 public? Vous le savez?

22 M. J. Simic (interprétation): C'était une session publique. Ce dont

23 j'étais en train de parler était en session publique. Par la suite, la

24 session est devenue une session à huis clos. Mais pour être précis, je

25 parle de l'affaire Keraterm et je parle du 3586 à la ligne 9 où l'on voit

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1 une audition en public jusqu'à la ligne 18.

2 Après, on est passé à huis clos et par la suite elle n'a été réouverte

3 qu'à la ligne 3602. Entre-temps, dans cette partie, je ne sais pas ce qui

4 s'est passé, je ne sais pas ce qui a été dit. Mais la partie dont j'étais

5 en train de parler tout à l'heure est une partie qui s'est passée en

6 session publique. Je ne vois pas de raison pour laquelle nous serions à

7 huis clos partiel ou à huis clos. Je vous dis que c'était en session

8 publique et c'est ainsi que cela s'est passé.

9 M. le Président: Cela s'est passé comme ça. Dès que nous parlons de la

10 partie publique, il n'y a aucun problème. Le problème est que nous sommes

11 dans une frontière, souvent, où l'on peut tomber.

12 Mme Somers (interprétation): Si c'est quelque chose qui s'est passé dans

13 le cadre d'une audience publique et si cela porte sur un témoin qui n'est

14 pas pour nous un témoin protégé, parfait, mais tout n'était pas clair pour

15 nous.

16 M. le Président: Quand vous parlez de Keraterm, vous parlez de l'affaire

17 Sikirica, c'est cela?

18 M. J. Simic (interprétation): C'est exact, Monsieur le Président. Je

19 m'excuse de pas l'avoir dit: Sikirica, Kolundzija et Dosen. Dans le

20 témoignage d'un témoin à charge, ce témoin a déclaré que, sur incitation

21 de son oncle Hase Icic, qui est venu témoigner ici d'ailleurs, il était

22 parti au bout de sept ou huit ans faire une déposition au Bureau du

23 Procureur pour obtenir son visa.

24 Ce que moi je suppose et que je ne sais pas encore, c'est de quelle façon

25 il a obtenu son visa parce que, par la suite, en lisant le compte rendu

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1 d'audience, on peut constater qu'il a obtenu son visa. Et je ne sais pas

2 quelles avaient été les demandes formulées par le Bureau du Procureur pour

3 que ce témoin se voit accorder un visa. Ça, je ne le sais pas parce que

4 cela s'est passé à huis clos.

5 Mais la question qui se pose, c'est de savoir de quelle façon les témoins

6 viennent témoigner ici. Nous avons des informations au terme desquelles le

7 Bureau du Procureur aurait communiqué une information assez grande dans

8 l'affaire Sikirica où l'on explique comment on catégorise les témoins,

9 dans quel groupe on les place et quel est le statut de ces témoins-là dans

10 leur pays de résidence. Et nous ne nous nous posons la question de savoir

11 si c'est peut-être la raison et la modalité permettant de voir aujourd'hui

12 ici, dans notre affaire, des témoins venir présenter des détails dont nous

13 n'avons jamais été informés.

14 Je m'excuse de revenir sur votre décision concernant la réplique et la

15 duplique. Nous l'acceptons et nous respectons la chose. Mais il est

16 incompréhensible que de voir, au bout de huit ans, deux témoins venir dans

17 cette affaire et nous sommes venus nous préparer en 45 jours seulement.

18 Nous tombons dans une situation où l'on voit des témoins qui n'ont jamais

19 rien déclaré au cours de ces huit années écoulées, depuis leur temps

20 d'internement dans des camps de détention, et on les voit venir et on ne

21 sait pas ce qui se passe.

22 Tout simplement, je ne sais pas et je m'efforce d'apprendre quelle est la

23 vérité vraie et sous quelles conditions l'on fait venir certains témoins

24 ici. Nous ne pouvons pas laisser subsister ne serait qu'une seule ombre de

25 doute pour ce qui est de savoir si par exemple tel témoin est venu

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1 témoigner parce que son témoignage est conditionné par le pays hôte pour

2 l'obtention de son visa de résidence.

3 Et c'est dans ce cadre-là que nous nous imaginons qu'il y a des témoins

4 qui viennent témoigner après huit ans alors que l'on n'en a jamais entendu

5 parler.

6 Je tiens à le dire pour notre client et, dans une certaine mesure, nous

7 subissons de très gros préjudices lorsqu'on fait venir des témoins qui

8 n'ont été annoncé nulle part, mais nous allons soulever la question. C'est

9 ce que je tenais à vous dire. Merci beaucoup.

10 M. le Président: Madame Somers.

11 Mme Somers (interprétation): Je vais avouer, Monsieur le Président, que je

12 ne comprends pas grand-chose à cet éclat et cette démonstration d'émotion.

13 Si j'ai bien compris, nous sommes l'objet d'accusations scandaleuses qui

14 sont absolument insultantes. S'il y a des questions que M. Simic souhaite

15 poser à un témoin, eh bien, qu'il les pose à ce témoin, mais les

16 insinuations ou les suggestions explicites auxquelles il se livrent ne

17 sont absolument pas dignes de cette Chambre et je les considère pour ma

18 part comme étant l'indice qui nous montre qu'il a une question à poser. Si

19 c'est le cas, qu'il la pose dans les circonstances qui s'y prêtent. Pour

20 l'instant, il est en train de se livrer à un exercice qui est totalement

21 stérile et fort peu utile.

22 Si besoin est, peut-être pouvons-nous préparer une réponse dans les

23 formes, mais pour l'instant, je ne sais absolument pas dans quoi nous nous

24 engageons.

25 M. le Président: Voulez-vous répondre, Maître Jovan Simic?

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1 M. Jovan Simic (interprétation): Je m'excuse si j'ai été compris comme si

2 j'accusais qui que se soit. Notre intérêt à nous tous est celui

3 d'apprendre comment et dans quel contexte tous les témoins viennent

4 témoigner ici. Je crois savoir qu'il y a une petite enquête menée dans

5 l'affaire Sikirica à ce sujet-là aussi.

6 Je voudrais donc savoir quelle est la vérité vraie pour savoir comment

7 cela se passe. Je n'affirme pas, je ne peux pas savoir et je ne peux pas

8 affirmer; mais je voudrais pouvoir jeter un oeil sur ce compte rendu

9 d'audience et voir si jamais quelqu'un est venu témoigner ici aux fins

10 d'obtenir un visa de résidence. Si cela est exact, cela est bien triste.

11 Je n'affirme pas que cela est véridique, et je m'excuse si le Procureur

12 l'a compris ainsi.

13 M. le Président: Un moment, s'il vous plaît.

14 (Les juges se consultent sur le siège.)

15 M. le Président: Maître Jovan Simic, vous nous posez peut-être une

16 question, c'est un peu difficile même pour la Chambre. Sur la fin, comme

17 vous le savez, la Chambre ne contrôle pas le travail des parties. La

18 Chambre coordonne et dirige les travaux, mais nous ne sommes pas vraiment

19 dans un système que vous connaissez bien et moi-même aussi. Le système que

20 nous avons ici c'est que pour qu'un témoin qui veuille être présenté ici,

21 il y a la partie qui présente le témoin interroge et l'autre partie

22 contre-interroge.

23 L'objet du contre-interrogatoire c'est toujours le sujet de déposition et

24 la crédibilité du témoin. Donc s'il y a un problème qui vous pose des

25 doutes vous devez investiguer, vous devez rechercher, vous devez poser les

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1 questions au témoin. Ce n'est pas à la Chambre que vous allez maintenant

2 poser la question. Vous nous posez une question un peu compliquée. C'est

3 aux parties d'amener à la salle, devant le témoin toutes les questions qui

4 peuvent mettre en jeu ou mettre en cause sa crédibilité.

5 Si vous avez une question, si vous avez un doute vous devez rechercher et

6 poser la question vraiment, pourquoi est-ce que vous êtes venu témoigner.

7 Est-ce que le Procureur, est-ce que quelqu'un… Parce que là Me Jovan

8 Simic, nous allons avoir la même question du point de vue de l'accusation.

9 Peut-être l'accusation a beaucoup de questions à poser sur la présence des

10 témoins de la défense. Ce n'est pas une question personnelle de se méfier

11 ou de mettre en cause l'honnêteté de quelqu'un personnellement, mais c'est

12 toujours la question. Je crois donc que si je trouve au moins quelque

13 chose de positif dans cette question c'est que les parties ont toujours la

14 possibilité de poser les questions concernant la crédibilité du témoin.

15 Vous savez, nous sommes préoccupés de trouver la vérité vraie que vous

16 avez mentionnée et c'est un peu pour cela quand même que la Chambre à la

17 fin a toujours le pouvoir d'appeler ses propres témoins, parce que comme

18 vous le savez peut-être pour les parties dans ce système, il pouvait y

19 avoir des témoins mais qui n'étaient pas convenables pour sa cause. Voilà

20 l'équilibre à mon avis du point de vue intellectuel.

21 Les parties ont leur place, la Chambre conduit, observe, fait son jugement

22 et elle-même a le pouvoir d'appeler ses témoins et donc la vérité vraie

23 que vous avez mentionnée je trouve que c'est une expression heureuse.

24 Celle-ci, la vérité vraie doit, comme je vous ai déjà dit une fois,

25 découler du respect des règles. Là, une autre chose si la règle est la

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1 bonne ou non c'est une autre question, mais là je crois que la Chambre ne

2 peut, à mon avis, faire d'autres choses qu'accueillir les témoins, vous

3 donner l'opportunité de tester la crédibilité des témoins. Voilà je crois

4 que l'on ne peut pas faire d'autre chose Maître Jovan Simic.

5 M. J. Simic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

6 M. le Président: Donc demain on sera là à 9 heures 20 et donc à demain.

7 (L'audience est levée à 15 heures 06.)

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