Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 1er décembre 2004

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 22.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Guy-Smith.

  6   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bonjour.

  7   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour à vous.

  8   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je sais que nous allons faire rentrer le

  9   témoin très rapidement, mais Me Topolski m'a fait part d'une question qu'il

 10   aimerait soulever devant la Chambre et qui me paraît d'une certaine

 11   importance. Par conséquent, je demande à ce que mon contre-interrogatoire

 12   soit reporté, ne serait-ce qu'un instant, de manière à ce que la Chambre

 13   puisse entendre ce que Me Topolski tient à lui dire.

 14   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Topolski.

 15   M. TOPOLSKI : [interprétation] Oui. La réunion que mon co-conseil, Me

 16   Powles --

 17   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous sommes en audience publique. Ceci

 18   est-il possible ?

 19   M. TOPOLSKI : [interprétation] Non, j'aimerais que nous soyons en audience

 20   à huis clos partiel dans le cadre de cette demande -- de cette présentation

 21   d'arguments.

 22   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ainsi soit-il.

 23   [Audience à huis clos partiel]

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 25   [Audience publique]

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  1   M. TOPOLSKI : [interprétation]

  2   Q.  Je représente le troisième accusé de cette affaire, dont le nom est

  3   Isak Musliu. Pendant la guerre, Isak Musliu répondait au nom de Qerqizi. Me

  4   comprenez-vous ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Je vais vous poser un certain nombre de questions. Je m'efforcerai de

  7   vous poser des questions aussi brèves que possible. Si vous ne me comprenez

  8   pas, n'hésitez pas à m'arrêter, et je reformulerai la question. Me

  9   comprenez-vous ?

 10   R.  Oui.

 11   M. TOPOLSKI : [interprétation]

 12   Q.  L'homme dont on vous a dit qu'il portait le nom de Qerqizi, vous a

 13   frappé et a frappé d'autres personnes; est-ce exact ?

 14   R.  Il n'a pas dit que nous avons été frappés, mais il m'a donné son vrai

 15   nom, parce qu'il était un parent de lui. Mais Qerqizi nous a tous frappés.

 16   Q.  L'homme dont on vous a dit qu'il s'appelait Qerqizi portait toujours un

 17   masque; est-ce exact ?

 18   R.  Qerqizi portait régulièrement un masque. Il le connaissait. Je le

 19   connaissais comme étant Qerqizi. Il le connaissait d'avant, et il m'a donné

 20   son vrai nom.

 21   M. TOPOLSKI : [interprétation] Je ne sais pas pourquoi mon micro s'éteint.

 22   Je ne l'ai même pas touché. Je ne sais pas pourquoi, Monsieur le Président.

 23   Peut-être pourrais-je me déplacer.

 24   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] J'ai le regret de vous annoncer qu'en

 25   raison de la déformation de la voix, à chaque fois que vous prendrez la

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  1   parole après quelqu'un d'autre, vous serez dans l'obligation d'appuyer sur

  2   le bouton marche du micro.

  3   M. TOPOLSKI : [interprétation] J'ai chargé M. Powles d'opérer le bouton du

  4   micro.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Voilà qui est très sage.

  6   M. TOPOLSKI : [interprétation]

  7   Q.  Hier, dans cette même salle, vous nous avez dit que Qerqizi portait

  8   toujours un masque.

  9   R.  Oui, c'est vrai.

 10   Q.  Vous nous avez dit hier qu'il était de corpulence et de taille moyenne;

 11   est-ce exact ?

 12   R.  Oui, moyenne.

 13   Q.  Hier, vous nous avez dit qu'il faisait environ 1 mètre 70.

 14   R.  Oui.

 15   Q.  On vous a dit que son nom était Qerqizi, qu'on l'appelait Qerqizi.

 16   R.  Je le connaissais sous le nom de Qerqizi, et ce, pendant toute la durée

 17   de ma détention dans l'étable, à savoir, 28 jours.

 18   M. TOPOLSKI : [interprétation] Je souhaitais évoquer le nom de la personne

 19   qui lui a dit quel était le nom, et c'est la raison pour laquelle je

 20   souhaiterais que nous passions en audience à huis clos partiel.

 21   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

 22   [Audience à huis clos partiel]

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  5   [Audience publique]

  6   M. TOPOLSKI : [interprétation]

  7   Q.  Le 29 novembre, date à laquelle vous êtes venu à La Haye, vous avez dit

  8   à quelqu'un, un responsable du bureau du Procureur que Qerqizi portait un

  9   uniforme noir; est-ce exact ?

 10   R.  Régulièrement, oui, un uniforme noir.

 11   Q.  Vous avez dit aux enquêteurs du TPIY que d'autres hommes portaient

 12   également des uniformes noirs; est-ce exact ?

 13   R.  Oui. La police militaire de l'UCK, qui qu'ils soient, chacun d'entre

 14   eux portait un uniforme de couleur noire.

 15   Q.  Vous avez dit aux enquêteurs de ce Tribunal que certains hommes

 16   portaient des uniformes noirs, et portaient les lettres PU au niveau de

 17   leurs bras et de leurs casquettes; est-ce exact ?

 18   R.  Vous voulez dire à cette époque-là ou avant cela ?

 19   Q.  Voilà une excellente question. La question que je vous pose, Monsieur,

 20   est la suivante : est-il exact d'affirmer que vous avez dit aux enquêteurs

 21   que lorsque vous étiez dans le camp de Lapusnik, les hommes portaient des

 22   uniformes avec, au niveau du bras et de leurs casquettes, les lettres, les

 23   initiales PU ?

 24   R.  Je ne comprends pas. Si je comprenais, je vous aurais répondu.

 25   Q.  Très bien. Je vais reformuler la question. Ce n'est pas de votre faute

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  1   si vous ne comprenez pas; c'est la mienne.

  2   J'ai devant moi la déclaration que vous avez faite, vous l'avez faite en

  3   octobre 2002. Me comprenez-vous ? C'est le document que j'ai sous les yeux

  4   maintenant. Me comprenez-vous ?

  5   R.  Je ne me souviens pas n'avoir jamais dit cela. Je vous le répète, bien

  6   du temps est passé.

  7   Q.  Bien entendu. Je vais vous lire très lentement la

  8   page U0031203, et je vais vous lire un passage de cette page, une phrase

  9   que vous avez écrite. Je cite : "Ils," et ils fait référence à Shala et

 10   Moritzi, c'est ainsi que vous les nommez, "portaient des uniformes noirs,

 11   dites-vous, avec les initiales PU, politcia ushtarake," police militaire,

 12   "au niveau du bras et de la casquette."

 13   Je viens de faire lecture de cette phrase qui figure dans votre déclaration

 14   préalable. Me comprenez-vous ?

 15   R.  Je vous entends très bien. J'ai vu les lettres PU, mais je ne pense pas

 16   avoir dit de Qerqizi, qu'il portait ces lettres PU. J'ai simplement dit que

 17   ses vêtements étaient de couleur noire.

 18   Q.  Dans le camp, avez-vous vu des hommes portant des uniformes de couleur

 19   noire avec, au niveau du bras ou de la casquette, les lettres PU ? Veuillez

 20   me répondre par oui ou par non.

 21   R.  Je ne me souviens pas de ce que j'y ai vu ou je ne me souviens pas d'y

 22   avoir vu les lettres PU, j'entends l'étable.

 23   Q.  Si vous avez dit dans une déclaration écrite que vous avez faite vous-

 24   même, que vous avez vu ces lettres, c'est probablement exact, n'est-ce pas

 25   ?

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  1   R.  Dans l'étable, je ne me souviens plus si j'ai vu ces lettres PU ou pas.

  2   Q.  Je n'ai pas dit dans l'étable; j'ai dit dans la déclaration. Si vous

  3   l'avez dit dans votre déclaration, c'est que c'est vrai. Vous ne mentiriez

  4   pas dans une déclaration, n'est-ce pas ?

  5   R.  J'ai essayé de dire la vérité et de ne pas mentir. J'ai essayé de ne

  6   dire que la vérité. Je ne mens pas maintenant. Simplement, je ne me

  7   souviens pas.

  8   Q.  Il y avait de nombreux soldats et de nombreux gardes à cet endroit,

  9   n'est-ce pas ?

 10   R.  Il y avait des soldats, mais c'est Shala qui était le garde pendant

 11   toute la durée de notre détention.

 12   Q.  Vous quitterez ce prétoire beaucoup plus rapidement, c'est ce que je

 13   vous dis, si vous vous contentez de répondre à mes questions au lieu de

 14   donner des informations que je ne vous demande pas de me donner. Me

 15   comprenez-vous ?

 16   R.  D'accord.

 17   Q.  Si l'on estime au nombre d'une cinquantaine le nombre de gardes et de

 18   soldats dans le camp, cela vous paraît-il exact ?

 19   R.  Je ne me souviens pas. Il y avait de nombreux soldats. Je peux dire la

 20   vérité. Si vous me donnez la parole, je peux dire la vérité.

 21   Q.  Les hommes faisant office de soldats avaient différentes tailles,

 22   différentes corpulences, des âges différents, n'est-ce pas ?

 23   R.  Ils étaient des soldats parce que je les entendais parler à

 24   l'extérieur. J'étais à l'intérieur. Je ne les ai pas comptés, je n'ai pas

 25   compté combien ils étaient.

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  1   Q. Vous ne les avez pas comptés, bien entendu. La question que je vous pose

  2   est la suivante : dans la mesure où ils étaient nombreux, ils étaient

  3   évidemment de tailles, de corpulences et d'âges différents, cela paraît

  4   évidemment, n'est-ce pas ?

  5   R.  Je l'ai dit une fois, et je répète. Il y avait de nombreux soldats. Il

  6   y avait un QG sur place. A l'intérieur, nous, nous étions attachés au moyen

  7   de chaînes. Shala est venu, et Qerqizi venait nous frapper.

  8   Q.  Un des soldats présents sur place répondait au nom de Murrizi; n'est-ce

  9   pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Vous avez vu à la télévision que Murrizi avait été tué; n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui, c'est ce que j'ai vu. La photographie me semblait familière.

 13   Q.  Vous l'avez reconnu dès que vous avez vu sa photographie à la

 14   télévision; n'est-ce pas ?

 15   R.  Je pensais, oui. Je l'ai vu à la télévision.

 16   Q.  Le vrai nom de Murrizi était Besim Beli; n'est-ce pas ?

 17   R.  Pour le moment, je ne me souviens pas.

 18   Q.  Murrizi vous a laissé voir son visage à l'endroit où vous étiez; n'est-

 19   ce pas ?

 20   R.  Murrizi ne portait pas de masque.

 21   Q.  Le dernier jour, cet homme, Murrizi, vous a dit que vous seriez libéré;

 22   n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui. Il est venu ouvrir la porte et il a dit : N'essaie pas de partir.

 24   N'essaie pas de t'enfuir. On te dira où aller. C'est lui qui nous a

 25   détachés, qui nous a libérés de nos chaînes.

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  1   Q.  Lorsqu'il a fait cela, il ne portait, comme d'habitude, aucun masque;

  2   n'est-ce pas ?

  3   R.  Effectivement, il ne portait pas de masque.

  4   Q.  Puisque nous sommes en train de parler de masques, permettez-moi de

  5   vous montrer une photographie.

  6   M. TOPOLSKI : [interprétation] Il s'agit d'une photo, Monsieur le

  7   Président, Madame, Monsieur les Juges, de la pièce à conviction de

  8   l'Accusation numéro 18. Des exemplaires ont été distribués aux uns et aux

  9   autres. J'espère que nous allons pouvoir le placer sur rétroprojecteur.

 10   Q.  Je vous invite à présent, Monsieur le Témoin, à examiner cette

 11   photographie, U0032776.

 12   M. CAYLEY : [interprétation]   Excusez-moi, Maître Topolski, pourrait-on

 13   présenter cela au témoin, ensuite, nous pourrons peut-être le placer sur

 14   Sanction.

 15   M. TOPOLSKI : [interprétation] Oui.

 16   M. TOPOLSKI : [interprétation] Oui, tout à fait. C'était une erreur que

 17   j'ai commise. Je voulais dire Sanction, en fait.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation]  Je vois bien la photographie, mais je ne le

 19   connais pas.

 20   M. TOPOLSKI : [interprétation]

 21   Q.  Sur cette photo, vous ne voyez personne que vous connaissez, vous ne

 22   reconnaissez personne ?

 23   R.  Non.

 24   Q.  Je vous demanderais de bien vouloir regarder les trois personnes qui

 25   sont en position debout, et de bien vouloir examiner leurs masques, et je

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  1   voudrais que vous nous disiez la chose suivante. Le masque que portait

  2   Qerqizi ressemblait-il à l'un quelconque de ces masques qui apparaissent à

  3   l'écran ?

  4   R.  Non, les masques étaient tous noirs, et dans la photo, ils sont tous en

  5   noir.

  6   Q.  Le masque que portait Qerqizi était-il de couleur noire ?

  7   R.  Oui, exactement. Il était en noir.

  8   Q.  Je vous demanderais de bien vouloir regarder à nouveau les trois hommes

  9   en position debout. Le masque que portait Qerqizi, ressemblait-il à l'un

 10   quelconque de ces masques que portaient ces hommes ?

 11   R.  Comme je vous l'ai dit, sur la photo, ils sont tous en noir. Il m'est

 12   difficile de tirer quelque conclusion que ce soit de l'examen de cette

 13   photographie. Je vois simplement trois photos qui portent des casquettes et

 14   des masques.

 15   Q.  Il y a cinq soldats qui portent des masques sur cette photo, trois sont

 16   en position debout, deux en position assise. Le voyez-vous ? Je vous

 17   demanderais de regarder la photo qu'on vous a remise et que vous avez sous

 18   les yeux et pas à l'écran, ce sera peut-être plus facile pour vous.

 19   R.  Je vois sur la photo que les masques sont noirs. Ils portaient tous des

 20   masques noirs.

 21   Q.  Ces masques sont-ils identiques à ceux que portait Qerqizi ?

 22   R.  Je ne sais pas si ces masques étaient comme ceux de Qerqizi, mais les

 23   vêtements étaient noirs, et ils portaient des masques noirs.

 24   Q.  Vous voyez les deux femmes à la droite de la photographie, vous voyez

 25   que ces deux femmes semblent avoir les initiales PU au niveau de leurs

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  1   bras. Est-ce que vous voyez ces deux femmes sur la photographie ?

  2   R.  Oui, je les vois.

  3   Q.  Je souhaite vous poser la question suivante : est-il vrai que vous avez

  4   dit que vous aviez vu des uniformes identiques à ceci à Lapusnik, au camp

  5   de détention, au moment où vous y étiez détenu ? Je vous demanderais de

  6   répondre par oui ou par non.

  7   R.  Pour l'instant, je ne me souviens pas.

  8   Q.  Je souhaite que nous revenions pendant quelques instants à l'homme qui

  9   vous a libéré le dernier jour, Murrizi. Oubliez cette photographie.

 10   M. TOPOLSKI : [interprétation] Peut-être est-il préférable que l'on retire

 11   cette photographie du bureau du témoin. Cela facilitera peut-être les

 12   choses pour lui. Merci. Cela évitera qu'il soit distrait.

 13   Q.  Je vais vous poser des questions à propos de Murrizi à présent.

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Est-ce que l'année dernière, vous regardiez la télévision, février

 16   2003, date à laquelle ces accusés sont venus à ce Tribunal pour la première

 17   fois. Avez-vous vu ces images à la télévision l'année dernière ?

 18   R.  A la télévision, j'ai vu tout ce qui se passait et tout ce qui s'est

 19   passé après la guerre.

 20   Q.  La question que je vous pose a trait à ce Tribunal-ci, à l'endroit où

 21   nous nous trouvons, La Haye, et à l'arrivée de Fatmir Limaj et d'autres à

 22   ce Tribunal. Ceci s'est produit -- et cela a été retransmis à la

 23   télévision ?

 24   R.  Bien, je n'avais pas le temps de regarder la télévision en permanence.

 25   Parfois, je la regardais, parfois, je ne la regardais pas. Mais je me

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  1   souviens, effectivement, avoir vu ceci à la télévision.

  2   Q.  Saviez-vous qu'ils disaient que Murrizi était ici à La Haye en février

  3   2003 ? Saviez-vous que c'était ce qu'ils disaient ?

  4   R.  Je ne m'en souviens pas. Je ne me souviens pas du tout. Je ne me

  5   souviens de rien semblant indiquer que Murrizi était ici.

  6   Q.  Il n'aurait pas pu être ici, le vrai Murrizi, en

  7   février 2003, puisqu'il était mort. Ce que j'affirme est exact,

  8   n'est-ce pas ?

  9   R.  Pour autant que je sache, il est mort, mais c'est ce que cette photo

 10   m'a amené à croire.

 11   Q.  Avez-vous reconnu l'homme que l'on désignait sous le nom de Murrizi

 12   ici, lorsque vous regardiez l'affaire à la télévision l'année dernière ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Avez-vous dit à qui que ce soit qu'ils se sont trompés sur la personne

 15   de Murrizi.

 16   R.  Non, je ne souviens pas de l'avoir dit à qui que ce soit mais j'ai vu

 17   qu'il ne s'agissait pas du vrai Murrizi.

 18   Q.  Vous avez vu qu'il ne s'agissait pas du vrai Murrizi mais vous n'avez

 19   rien fait. C'est ce que vous nous dites dans votre déposition ?

 20   R.  Lorsque je l'ai vu à la télévision, je me suis dit à moi-même, cela ce

 21   n'est pas Murrizi. Je m'en souviens, ce n'était pas Murrizi, cela ne

 22   correspondait même pas à sa corpulence.

 23   Q.  Le vrai Murrizi était mort, pourquoi avez-vous gardé le silence lorsque

 24   vous avez compris qu'il s'était trompé de Murrizi ?

 25   R.  J'ai vu que c'était une erreur mais je peux le dire à nouveau, ici et

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  1   maintenant, ce n'était pas le vrai Murrizi, l'homme que j'ai vu.

  2   Q.  Votre objectif est-il de nous dire la vérité ?

  3   R.  J'ai prêté serment ici, j'ai dit que je dirais la vérité et rien que la

  4   vérité mais si je ne m'en souviens pas, je ne m'en souviens pas. Ce que je

  5   sais, je vous le dis.

  6   Q.  Est-ce que le fait d'avoir condamné un innocent vous est indifférent ?

  7   R.  Je pense que je dis la vérité ici. Bien entendu, je regretterais qu'un

  8   homme innocent soit condamné ici mais je ne peux que vous dire ce que j'ai

  9   vu. Je vous dis ce que j'ai vécu moi-même et rien d'autre. Il se peut que

 10   j'oublie des choses.

 11   Q.  Avez-vous exagéré de quelque manière que ce soit, ce que vous avez vu,

 12   pour en brosser un portrait plus grave ?

 13   R.  Je n'ai pas compris, je n'ai tout simplement pas compris votre

 14   question.

 15   Q.  Avez-vous vraiment vu que l'on frappait à 59 reprises (expurgée),

 16   est-ce que vous avez compté 59 coups ?

 17   R.  Oui, c'est exact parce que nous étions enchaînés ensemble et nous

 18   étions très proches physiquement l'un de l'autre.

 19   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Cayley.

 20   M. CAYLEY : [interprétation] Peut-on passer en audience à huis clos

 21   partiel ?

 22   M. TOPOLSKI : [interprétation] Bien entendu, vous avez raison.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous expurgerons cela. Nous passons en

 24   audience à huis clos partiel.

 25   M. TOPOLSKI : [interprétation] Je ne vais mentionner d'autres noms.

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  1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous pouvons demeurer --

  2   M. TOPOLSKI : [interprétation] Toutes mes excuses, j'ai oublié de demander

  3   à ce que l'on passe en audience à huis clos partiel lorsque j'ai indiqué le

  4   nom. C'est une erreur que j'ai commise.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous retirons la mention de ce nom et

  6   nous repassons en audience publique, merci.

  7   M. TOPOLSKI : [interprétation]

  8   Q.  Vous avez dit que Qerqizi était un homme très méchant, c'est exact,

  9   n'es-ce pas ?

 10   R.  C'était quelqu'un de très agressif et la première fois où je l'ai vu à

 11   Lapusnik.

 12   Q.  Ce Qerqizi était un homme très violent, n'est-ce pas ?

 13   R.  Qerqizi nous frappait à chaque fois. Il était agressif. Il nous a fait

 14   presque tout fait.

 15   Q.  Et vous ne l'oublierez jamais.

 16   R.  Non, je ne peux pas oublier cet homme.

 17   Q.  En date du 16 janvier 2002, vous vous êtes assis en compagnie d'un

 18   homme du nom de Kereakes de Chicago, cet homme était un enquêteur. Vous en

 19   souvenez-vous ?

 20   R.  A vrai dire, je ne m'en souviens pas. Je ne peux pas vous le dire.

 21   Q.  Vous aviez avec vous un ami qui vous aidait à traduire. Cet ami parlait

 22   allemand. Vous en souvenez-vous maintenant ?

 23   R.  Oui, si vous parlez de la première fois. Au début, je veux dire.

 24   Q.  Oui, c'est de cela que je parle.

 25   R.  Oui, je m'en souviens, mais je ne souviens pas du nom.

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  1   Q.  C'était en date du 16 janvier 2002 et c'était la première fois que vous

  2   aviez un entretien avec des enquêteurs; est-ce exact ?

  3   R.  Oui, c'est exact, mais je ne me souviens pas de l'année.

  4   Q.  C'était janvier 2002, il y a de cela quatre années et demie après votre

  5   départ de Lapusnik.

  6   R.  Je vous l'ai dit, c'est exact, mais je ne peux pas vous dire quelle

  7   année c'était, je ne m'en souviens pas.

  8   Q.  Je vais essayer de formuler ma question, je l'espère, de façon très

  9   simple. Je souhaite vous poser des questions à propos de cet entretien.

 10   J'espère que vous allez pouvoir me répondre soit par oui, soit par non.

 11   Répondre par oui ou par non à chacune de ces questions, me comprenez-vous ?

 12   R. Oui, je vous comprends.

 13   Q.  Dans cet entretien avec Monsieur Kereakes, vous lui avez communiqué un

 14   grand nombre d'informations; est-ce exact ?

 15   R.  Je lui ai parlé, c'était la première fois. I y avait un interprète. Je

 16   sais de quoi vous parlez. J'interprétais.

 17   Q.  Vous avez parlé de différents endroits ?

 18   R.  Oui, de Lapusnik.

 19   Q.  Vous avez parlé de choses qui se sont produites, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Vous vous souveniez même d'une partie du numéro d'immatriculation de

 22   certains véhicules que vous décriviez; est-ce exact ?

 23   R.  Je vous comprends. Non, je ne m'en souviens pas.

 24   Q.  A la page 03231249, à la fin du paragraphe vous faites référence à un

 25   véhicule portant une plaque d'immatriculation serbe et vous avez mentionné

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  1   ces numéros à deux reprises. Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que

  2   vous vous souveniez du numéro de la plaque d'immatriculation ?

  3   R.  Non, pour autant que je sache cela ne s'est pas produit comme cela. Je

  4   ne souviens pas d'avoir mentionné de numéro de plaque d'immatriculation

  5   serbe, en fait, je ne me souviens pas d'avoir parlé de cela du tout.

  6   Q.  Je souhaiterais vous affirmer que vous l'avez fait.

  7   M. CAYLEY : [interprétation] Puis-je formuler une objection ou faire un

  8   commentaire à ce moment-ci.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation]Je n'ai pas dit cela. Je ne  me souviens pas de

 10   l'avoir mentionné. Je ne me souviens pas d'avoir parlé d'une plaque

 11   d'immatriculation, d'avoir évoqué de numéro.

 12   M. CAYLEY : [interprétation] Pour être tout à fait juste envers le témoin,

 13   il faudrait peut-être mettre les propos du témoin en contexte, puisqu'on

 14   lui lit certaines parties de la déposition du témoin, et je crois qu'il

 15   serait juste envers le témoin de lui lire le paragraphe au complet.

 16   M. TOPOLSKI : [interprétation] Justement, j'allais présenter au témoin une

 17   partie de sa déclaration, lui montrer sa déclaration en albanais.

 18   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez poursuivre. Nous serons à

 19   huis clos partiel.

 20   [Audience à huis clos partiel]

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 12   [Audience publique]

 13   M. TOPOLSKI : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur, j'espère que vous me croirez lorsque je vous dis que dans cet

 15   entretien qui a eu lieu avec M. Kereakes, vous avez évoqué 16 noms

 16   différents. Je sais qu'il vous est bien difficile de vous rappeler du

 17   nombre exact de personnes que vous avez citées, mais est-ce que vous seriez

 18   d'accord avec moi pour dire que vous avez effectivement cité 16 noms ? Car

 19   je les ai comptés. Est-ce que vous me croiriez si je vous disais cela ?

 20   R.  Je ne me souviens pas d'avoir mentionné 16 noms différents. Si vous

 21   parlez des personnes qui étaient là avec moi, ou des personnes avec

 22   lesquelles j'ai été emprisonné, ou des personnes qui ont été libérées en

 23   même temps que moi, à ce moment-là, je pourrais dire que oui.

 24   Q.  Non. Je ne vais pas évoquer des noms. Je parle de noms de personnes que

 25   vous avez donnés comme étant des personnes qui avaient été enlevées en même

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  1   temps que vous, qui avaient été détenues avec vous. Est-ce que vous seriez

  2   d'accord avec moi pour affirmer cela ? Si vous voulez, je peux vous montrer

  3   votre déclaration.

  4   R.  Si vous parlez de la première fois, lorsque j'ai évoqué des plaques

  5   d'immatriculation, je ne me souviens pas du numéro que j'ai vu sur ces

  6   plaques d'immatriculation. Maintenant, je ne sais rien concernant ces noms.

  7   Q.  Vous étiez présent. Vous étiez avec cet enquêteur, et vous aviez décidé

  8   de lui donner votre version des faits, n'est-ce pas ?

  9   R.  Je ne comprends pas ce que vous me demandez.

 10   Q.  Vous avez décidé d'être courageux et de parler, n'est-ce pas ? C'est la

 11   raison pour laquelle vous étiez là, pour lui accorder cet entretien ?

 12   R.  Non, je n'avais pas décidé tout d'un coup d'être brave, d'être

 13   courageux.

 14   Q.  Vous vouliez que les autorités aient connaissance de ce qui vous êtes

 15   arrivé, ce qui est arrivé aux autres personnes. C'est la raison pour

 16   laquelle vous étiez là, que vous vous êtes entretenu avec cet enquêteur,

 17   n'est-ce pas ?

 18   R.  Je peux simplement dire la vérité. Ce n'est pas que j'ai décidé tout

 19   d'un coup de devenir courageux, ou quoi que ce soit. Je n'ai pas décidé

 20   d'inventer de toute pièce des événements qui ne se sont jamais produits. Ce

 21   que je voulais dire, c'est que je voulais simplement dire ce que j'ai su.

 22   Ce qui m'est arrivé. Je voulais raconter comment j'ai souffert. J'ai encore

 23   des marques de chaînes sur l'un de mes bras.

 24   Q.  Pourquoi n'avez-vous pas mentionné le nom de Qerqizi, cet homme qui

 25   était si violent, cet homme qui était si terrible ? Pourquoi n'avez-vous

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  1   pas donné son nom à l'enquêteur qui vous avait interrogé ?

  2   R.  On ne m'a pas posé le genre de questions que vous me posez en ce

  3   moment.

  4   Q.  Vous ave rencontré d'autres enquêteurs presque deux mois plus tard,

  5   c'est-à-dire le 13 mars 2002. Nous avons devant nous un procès-verbal ou

  6   des notes qui ont été prises lors de cet entretien. Vous avez emmené ces

  7   enquêteurs à un endroit particulier. Vous souvenez-vous de cela ?

  8   R.  Si vous parlez des montagnes, oui, effectivement je m'en souviens.

  9   Q.  On parle des montagnes. Pour des fins de référence, il s'agit de la

 10   page 0323-1269.

 11   Il semblerait que ce jour-là, vous n'avez de nouveau pas fait mention de ce

 12   nom, Qerqiz, qui était un homme si redoutable.

 13   R.  Je ne me souviens pas de qui que ce soit me poser des questions

 14   concernant Qerqiz. Je ne me souviens pas que l'on m'ait demandé quoi que ce

 15   soit à son sujet.

 16   Q.  La première fois que vous avez mentionné le nom de Qerqiz, c'était lors

 17   du troisième entretien qui a eu lieu une semaine plus tard, c'est-à-dire le

 18   20 mars 2002.

 19   R.  Non, je ne me souviens pas de cela.

 20   Q.  De nouveau, en examinant le document 03231271, il s'agit d'une

 21   déclaration que vous avez fournie vous-même. C'est dans cette déclaration

 22   que le nom de Qerqiz figure pour la première fois.

 23   Est-ce que vous seriez d'accord avec moi pour dire qu'effectivement

 24   cela a été dit ? Est-ce qu'ils vous ont posé des questions concernant cet

 25   homme, ou est-ce que vous avez simplement donné son nom, car vous vous êtes

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  1   rappelé de lui ?

  2   R.  A l'instant, je ne me souviens pas de cela.

  3   Q.  Le 1er avril 2002, une nouvelle réunion a eu lieu. Il s'agit d'un

  4   quatrième entretien. Je vais maintenant vous poser une question concernant

  5   quelque chose que vous n'avez pas encore évoqué.

  6   Dans cet entretien qui porte le numéro 0323-1282, il s'agit de la

  7   cote de votre déclaration en cette date-là, est-ce que vous vous souvenez

  8   d'avoir parlé de deux femmes de l'UCK ? Vous souvenez-vous d'avoir dit aux

  9   enquêteurs qu'il y avait deux femmes ? Vous n'êtes pas obligé de donner des

 10   noms, mais répondez-moi par un oui ou par un non.

 11   R.  Je peux certainement vous mentionner des noms, si vous parlez de ces

 12   deux femmes que vous évoquez.

 13   Q.  Très bien.

 14   M. TOPOLSKI : [interprétation] Puisqu'il s'agira peut-être d'une victime,

 15   nous devrions peut-être passer à huis clos partiel.

 16   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, nous sommes à huis clos partiel.

 17   [Audience à huis clos partiel]

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 12   [Audience publique] 

 13   M. TOPOLSKI : [interprétation]

 14   Q.  Vous avez dit à l'enquêteur qu'une personne s'était faite passer à

 15   tabac, et que l'auteur de ces coups était la sœur de Qerqizi. Vous lui avez

 16   dit cela, car quelqu'un d'autre vous avait donné cette information, n'est-

 17   ce pas ?

 18   R.  Non, je ne me souviens pas d'avoir parlé de la sœur de Qerqizi.

 19   Q.  Vous étiez prêt à donner le nom d'une personne simplement parce

 20   quelqu'un d'autre vous a dit de qui il s'agissait, n'est-ce pas ?

 21   R.  Je ne me souviens pas d'avoir dit quoi que ce soit concernant la sœur

 22   de Qerqizi. Si je l'avais dit, je vous l'aurais avoué. Ce que je sais, je

 23   sais. Ce que je ne sais pas, je ne le sais pas. Mais je sais que je n'avais

 24   pas dit cela. Il est vrai que six ans se sont écoulés. Depuis il se peut

 25   que j'aie oublié certaines choses. Mais je vous dis simplement ce que je

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  1   sais.

  2   Q.  Vous avez donné une déclaration datée du 1er avril, et je vais

  3   maintenant vous donner lecture : "Du meilleur de ma connaissance, l'une des

  4   femmes soldats était de Racak. C'est la soeur de Qerqiz, et c'est une

  5   personne qui travaille maintenant en tant qu'officier de la KPS à Ferizaj."

  6   M. CAYLEY : [interprétation] M. Topolski pourrait-il donner lecture de la

  7   dernière phrase de ce paragraphe, en fait, de la phrase qui précède. Je

  8   crois qu'il faudrait replacer le tout dans le contexte.

  9   M. TOPOLSKI : [interprétation] Très bien. Pourrait-on passer à huis clos

 10   partiel. Je vais donner lecture.

 11   [Audience à huis clos partiel]

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 21   [Audience publique]

 22   M. TOPOLSKI : [interprétation]

 23   Q.  La toute dernière fois que vous avez rencontré des enquêteurs pour

 24   parler de cette affaire avant de mettre les pieds dans cette salle

 25   d'audience, c'était lorsque vous êtes effectivement arrivé dans cette

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  1   ville. Est-ce que vous vous souvenez de cela ? A la fin du mois de

  2   novembre, en fait, il s'agit de, -- il y a quelques jours. Vous souvenez-

  3   vous de cela ?

  4   R.  Pardon, voulez-vous répéter votre question ? Je n'ai pas tout à fait

  5   bien saisi ce que vous vouliez dire.

  6   Q.  La dernière fois, la sixième fois que vous avez rencontré des

  7   enquêteurs concernant l'affaire en l'espèce, c'était il y a quelques jours

  8   lorsque vous êtes arrivé ici à La Haye. Vous souvenez-vous d'avoir eu un

  9   entretien avec les membres du bureau du Procureur, et vous souvenez-vous

 10   d'avoir parlé de votre témoignage ?

 11   R.  Oui, nous avons parlé, mais je ne sais pas de quoi vous voulez que je

 12   vous parle moi-même.

 13   Q.  Je voulais simplement vous demander si vous vous souvenez d'avoir eu un

 14   entretien avec ces personnes, et vous m'avez répondu que oui.

 15   Je vais maintenant vous poser un certain nombre de questions. Vous leur

 16   avez parlé de Qerqizi, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui, nous avons parlé de Qerqizi.

 18   Q.  C'était la première fois, n'est-ce pas, que vous avez tenté de donner

 19   une description de Qerqizi; est-ce exact ?

 20   R.  Vous voulez dire ici ou plus tôt ?

 21   Q.  Non, ici.

 22   R.  Oui.

 23   Q.  C'est à ce moment-là que vous leur avez dit que vous aviez su que son

 24   nom était Isak Musliu. Vous avez appris cela de la bouche d'un homme --

 25   M. TOPOLSKI : [interprétation] Nous sommes en audience publique, mais

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  1   effectivement, pour être tout à fait prudent, il faudrait peut-être passer

  2   à huis clos partiel.

  3   [Audience à huis clos partiel]

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 15   [Audience publique]

 16   M. TOPOLSKI : [interprétation] Je voudrais vous demander si vous avez vu

 17   cet homme Isak Musliu, si vous n'avez jamais entendu ou parler cet homme,

 18   Isak Musliu au courant des dernières années. Vous nous avez déjà dit que

 19   vous avez déjà vu ce procès à la télévision, n'est-ce pas ?

 20   R.  Pour ce qui est de Qerqizi, effectivement, je l'ai vu à la télévision.

 21   Q.  Vous avez vu des photographies de cette personne, dans les journaux,

 22   n'est-ce pas ?

 23   R.  Non, car je ne vois pas très bien et je ne lis pas les journaux.

 24   Q.  Est-ce que vous savez ce qu'est un calendrier. 

 25   R.  Oui, je crois savoir ce qu'est un calendrier.

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  1   Q.  N'avez-vous pas vu la photographie de Qerqizi sur des calendriers qui

  2   se vendent au Kosovo ?

  3   R.  Non, je n'ai jamais eu l'occasion de voir des calendriers de la sorte.

  4   Q.  Je crois que nous pouvons certainement nous mettre d'accord sur les

  5   faits suivant : la seule raison pour laquelle vous appelez Qerqizi Isak

  6   Musliu, c'est parce que d'autres personnes vous ont dit que c'est son nom;

  7   est-ce que c'est exact ?

  8   R.  Je crois vous avoir dit de qui j'ai appris son vrai nom.

  9   Q.  Je vais maintenant vous poser une question concernant une autre

 10   personne que vous avez mentionnée hier. Vous souvenez-vous d'avoir parlé de

 11   Tamuli, hier ?

 12   R.  Oui, je me souviens de cela quelque peu.

 13   Q.  Tamuli est un nom célèbre, n'est-ce pas, au Kosovo ?

 14   R.  Je n'ai jamais entendu ce nom.

 15   Q.  Tamuli est un martyr, n'est-ce pas ? Sa mort est célébrée chaque année

 16   au Kosovo, n'est-ce pas ?

 17   R.  Je sais que c'est un héros national, mais je ne vais pas là.

 18   Q.  Voyez-vous, en 1998, cet homme appelé Tamuli n'était pas connu sous le

 19   nom de Tamuli car il portait un autre nom. Est-ce que vous le saviez ?

 20   R.  Je le connaissais sous le nom de Tamuli. Simplement, je ne savais pas

 21   qu'il portait un autre nom.

 22   Q.  En 1998, il était connu sous le surnom de Moudjahidin car il avait une

 23   peau assez foncée. C'est la raison pour laquelle on l'avait surnommé ainsi.

 24   R.  Vous voulez dire que Tamuli était appelé Moudjahidin ?

 25   Q.  Oui. Mais si vous l'aviez vu à Lapusnik en 1998, il ne portait pas le

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  1   nom de Tamuli, puisqu'on lui a donné ce surnom que beaucoup plus tard.

  2   Donc, je vous demande la chose suivante :  est-ce que vous êtes tout à fait

  3   certain que c'était Tamuli que vous avez vu en 1998, ou bien s'agit-il

  4   d'autre chose, s'agit-il de quelqu'un d'autre qui vous aurait donné un

  5   autre nom ?

  6   R.  Je ne sais pas qui m'a donné ce nom, mais les gens l'appelaient Tamuli.

  7   Je ne sais pas s'il avait un autre nom. Je n'ai pas eu connaissance qu'il

  8   ait eu un autre nom, qu'il ait parlé d'un autre nom.

  9   Q.  Nous savons que le dernier jour de votre incarcération à Lapusnik aura

 10   été le 26 juillet 1998. Vous nous avez dit que Qerqiz venait vous voir tous

 11   les jours ou toutes les nuits à l'exception de la dernière semaine; est-ce

 12   exact?

 13   R.  Qerqiz venait des fois pendant la nuit, et des fois pendant le jour.

 14   Mais il n'y avait pas une nuit où il n'était pas venu nous donner des

 15   coups. C'est la vérité.

 16   Q.  A la page 38 du transcript, à la ligne 25, hier vous avez dit à M.

 17   Cayley que cette personne, la personne qui était assise à votre droite,

 18   vous avez dit qu'il venait toutes les nuits, à l'exception de la dernière

 19   semaine. J'aimerais savoir quelle est la vérité.

 20   R.  Comme je vous l'ai dit, toutes les nuits il venait et il nous battait.

 21   Il nous donnait des coups, à chaque fois qu'il n'était pas sur le champ de

 22   bataille, sur le front. Il venait là-bas pendant le jour et pendant la nuit

 23   et il nous donnait des coups, à l'exception de la dernière semaine.

 24   Q.  Lorsque vous parlez de la "semaine", est-ce que vous parlez d'une

 25   semaine de sept jours ?

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  1   R.  Non, pas d'une semaine de sept jours. Je ne parle pas d'une semaine

  2   complète. Je parlais peut-être des derniers jours, peut-être trois jours

  3   avant mon départ. Mais il venait tous les jours, toutes les nuits. Il

  4   venait injurier nos mères, il nous donnait des coups, il nous donnait des

  5   coups de pied, des coups-de-poing. Il nous donnait des coups aux extrémités

  6   inférieures. Nous étions recouverts de sang. J'ai encore des traces de

  7   cela.

  8   Q.  Je ne mets pas en doute ce qui vous ait arrivé, mais la question est à

  9   savoir qui vous a asséné ces coups ? L'homme que je représente n'était pas

 10   à Lapusnik pendant les sept jours avant le 26 juillet. Il était sur le

 11   front ailleurs. Il ne pouvait donc pas venir vous asséner des coups. Est-ce

 12   que vous me comprenez ?

 13   R.  Oui je comprends. Il s'agit de trois jours, en fait.

 14   Q.  Très bien.

 15   R.  Lorsque l'offensive serbe a commencé et lorsqu'ils avançaient vers

 16   Lapusnik.

 17   Q.  Vous devez comprendre que lorsque vous parlez de la dernière semaine,

 18   en fait, vous parlez des trois derniers jours, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui, c'est juste avant que je ne sois libéré, avant que je ne sois

 20   libéré de l'étable.

 21   Q.  Après la guerre est-ce que vous avez entendu Qerqiz et Isak Musliu

 22   donner une interview à la radio concernant les batailles dans lesquelles

 23   ils avaient été impliqués ? Vous avez entendu cela ?

 24   R.  Non.

 25   Q.  Est-ce que vous saviez qu'Isak Musliu était membre de la police

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  1   militaire de Nerodimje après la guerre ?

  2   R.  Je ne me souviens plus de cela.

  3   M. TOPOLSKI : [interprétation] Monsieur le Président, c'est tout ce

  4   que je souhaite demander à mon témoin. Apparemment, je n'ai pas donné la

  5   bonne référence du compte-rendu. Si toutefois ceci est d'une importance

  6   quelconque, peut-être que c'est la page 28 et non pas la page 38. Je m'en

  7   excuse. Je regardais, moi, le compte rendu non révisé.

  8   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

  9   M. TOPOLSKI : [interprétation] Il s'agit de la référence concernant ce qui

 10   a été dit à propos de la dernière semaine.

 11   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons faire une pause et nous

 12   nous retrouverons à 17 heures 15.

 13   --- L'audience est suspendue à 15 heures 56. 

 14    --- L'audience est reprise à 16 heures 36.

 15   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Cayley.

 16   M. CAYLEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 17   Nouvel interrogatoire par M. Cayley : 

 18   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, m'entendez-vous ?

 19   Monsieur le Témoin, rebonjour. M'entendez-vous ?

 20   R.  Oui. Oui.

 21   Q.  Bien. J'ai très peu de questions pour vous. Le Président pourra vous

 22   permette de quitter ce prétoire, et ce Tribunal, dans très peu de temps.

 23   J'ai toutefois un certain nombre de questions à vous poser.

 24   Hier, Me Mansfield, le représentant de Fatmir Limaj vous a posé la question

 25   suivante : "Aviez-vous jamais été à Lapusnik avant la guerre ?" Et votre

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  1   réponse a été la suivante : "J'y étais allé régulièrement."

  2   Ma question sera la suivante : avant la guerre à quelle fréquence alliez-

  3   vous à Lapusnik, le village de Lapusnik ?

  4   R. Avant la guerre, je ne me suis pas du tout rendu au village de Lapusnik.

  5   Par contre, je traversais le village, peut-être une fois par semaine, en

  6   tracteur. J'allais à Orllat, à proximité de Lapusnik. C'est la raison par

  7   laquelle je traversais le village. J'empruntais la route qui traversait ce

  8   village.

  9   Q.  Avant la guerre, vous traversiez le village de Lapusnik une fois par

 10   semaine; c'est exact ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Connaissez-vous bien le village de Lapusnik ?

 13   R.  Je connais assez bien Lapusnik. Je vous ai dit : traversé le village,

 14   et je connais l'endroit. J'y suis déjà allé.

 15   Q.  Je n'ai plus de questions à poser au témoin.

 16   M. CAYLEY : [interprétation] Monsieur le Président, la seule question que

 17   j'aimerais soulever avant de conclure, j'aimerais le faire avec le témoin

 18   ici présent.

 19   J'ai montré une photo, de la pièce 6 du Procureur et c'est une photo

 20   de l'étable. J'ai cité le numéro ERN. Ceci se trouve à la page 80 du projet

 21   de compte rendu. J'aimerais vous donner lecture de la question puisque la

 22   page finale ne sera sans doute pas la même.

 23    "Le témoin montre le mur du fond à droite de l'étable sur U0083764 où il

 24   indique où se trouvait Vesili dans l'étable."

 25   En fait, le nombre exact c'est U0083674. Je voulais simplement

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  1   apporter cette correction puisque j'avais inversé les chiffres. Mes

  2   collègues pourront vérifier cette photo, et verront bien qu'il s'agit là

  3   maintenant du bon numéro.

  4   Je vois que la partie adverse acquiesce, M. Khan, en particulier. Je pense

  5   que nous sommes d'accord.

  6   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Cayley. Ceci correspond

  7   effectivement au numéro que nous avions sous les yeux.

  8   Monsieur, je tiens à vous informer que nous sommes parvenus au terme de

  9   votre déposition. Vous n'aurez plus à répondre à d'autres questions. Les

 10   Juges souhaitent vous remercier de votre venue à La Haye et de l'aide que

 11   vous nous avez apportée.

 12   Vous pouvez maintenant vous retirer, et rentrer chez vous. Des personnes à

 13   l'extérieur de ce prétoire vous aideront. Dans un instant, vous serez libre

 14   de quitter le prétoire et de rejoindre la zone réservée aux témoins.

 15   Merci, beaucoup. Vous pouvez vous retirer.

 16   [Le témoin se retire]

 17   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Cayley. Etes-vous prêt à

 18   poursuivre avec le témoin suivant.

 19   M. CAYLEY : [interprétation] Tout à fait. C'est mon collègue Me Black qui

 20   va lui poser des questions, et vous serez heureux d'entendre que ce témoin

 21   pourrait être entendu en audience publique.

 22   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

 23   M. CAYLEY : [interprétation] Permettez-moi de me retirer deux à trois

 24   minutes. Je reviendrai à côté de Me Black, mais je dois sortir de ce

 25   prétoire pour quelques instants.

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  1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Cayley.

  2   Le témoin suivant, s'il vous plaît.

  3   L'INTERPRÈTE : L'interprète dit que Mme l'Huissière retire le paravent de

  4   protection du témoin précédent.

  5   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  6   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour, Monsieur. Vous êtes M.

  7   Bakrac, n'est-ce pas ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous m'entendez dans une langue que

 10   vous comprenez, je pense ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

 13   Voulez vous, je vous prie, vous saisir du document portant la déclaration

 14   solennelle qui vous est tendue, et lire cette déclaration ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 16   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 17   LE TÉMOIN : VOJKO BAKRAC

 18   [Le témoin répond par l'interprète]

 19   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir.

 20   Oui, Maître Black.

 21   M. BLACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 22   Interrogatoire principal par M. Black :  

 23   Q.  [interprétation] Monsieur Bakrac, m'entendez-vous également ? Me

 24   comprenez-vous ?

 25   R.  Oui, je vous entends.

Page 1275

  1   Q.  Vous sentez-vous à l'aise là où vous vous trouvez ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Si à un quelconque moment vous ne comprenez pas l'une de mes questions,

  4   veuillez m'en informer, et j'essayerais de la reformuler. Vous comprenez ?

  5   R.  Oui, je comprends tout à fait.

  6   Q.  Maintenant, sauf lorsque nous passerons en ce que nous appelons les

  7   audiences à huis clos partiel, j'aimerais que vous ne mentionnez pas le

  8   pays dans lequel vous résidez actuellement. Me comprenez-vous bien ?

  9   R.  Oui, je comprends.

 10   Q.  Monsieur Bakrac, avant de vous poser un certain nombre de questions

 11   concernant votre histoire et les événements qui ont eu lieu en 1998,

 12   j'aimerais passer en revue brièvement les déclarations que vous avez faites

 13   avant d'entrer dans ce prétoire.

 14   Vous souvenez-vous avoir été interrogé par un enquêteur du TPIY en janvier

 15   2003 ?

 16   R.  Oui, je m'en souviens.

 17   Q.  Avez-vous à l'époque fait une déclaration que vous avez ensuite

 18   signée ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Vous a-t-on donné la possibilité de relire cette déclaration, et d'y

 21   apporter des corrections éventuelles ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Entre le moment où vous avez fait cette déclaration, et votre arrivée

 24   ici à La Haye aux fins de cette déposition, avez-vous rencontré un

 25   quelconque représentant du TPIY, avant votre arrivée à La Haye ?

Page 1276

  1   R.  Non.

  2   Q.  Mais depuis votre arrivée à La Haye, vous et moi, nous sommes

  3   rencontrés une ou deux fois pour débattre et discuter de votre déposition,

  4   n'est-ce pas ?

  5   R.  C'est exact.

  6   Q.  Merci. Avant de rencontrer l'enquêteur du TPIY en 2003, aviez-vous

  7   jamais fait une déclaration à une quelconque organisation sur les

  8   événements que vous avez vécus en 1998 ?

  9   R.  Oui. Juste après les événements en question, à l'Organisation

 10   internationale pour le droit humanitaire.

 11   M. BLACK : [interprétation] Avec l'aide de Mme l'Huissière, j'aimerais que

 12   soit montré au témoin un document qui porte le numéro ERN U0031082, et qui

 13   se poursuit jusqu'à la cote U0031092.

 14   Q.  J'aimerais, Monsieur, que vous consultiez ce document un instant.

 15   Reconnaissez-vous ce document ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  S'agit-il de la déclaration que vous avez faite à l'Organisation

 18   internationale à laquelle vous venez de faire référence ?

 19   R.  Oui. C'est cette première déclaration que j'ai faite.

 20   Q.  Quand l'avez-vous fait ? A quelle date ?

 21   R.  Le 2 août 1998.

 22   Q.  Merci. Où a eu lieu l'entretien ? Dans quel pays ?

 23   R.  En Serbie, à Belgrade. A Grocka, un lieu-dit à

 24    proximité de Belgrade. C'est d'ailleurs là qu'est née ma femme.

 25   Q.  Par conséquent, vous nous dites avoir fait cette déclaration peu de

Page 1277

  1   temps après les événements en question. Les événements étaient-ils

  2   extrêmement vivants, frais, dans votre esprit, mémoire ?

  3   R.  Oui. Assez, oui.

  4   Q.  Avez-vous eu la possibilité également de relire cette déclaration et

  5   d'y apporter d'éventuelles modifications ?

  6   R.  Non.

  7   Q.  Avez-vous eu la possibilité de relire cette déclaration ?

  8   R.  Non. Pas avant ma venue ici.

  9   Q.  Lorsque vous êtes arrivé ici, l'avez-vous lue ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Monsieur, cette déclaration relate-t-elle précisément ce qui vous est

 12   arrivé en 1998 ?

 13   R.  Oui. Oui, effectivement. C'est un récit fidèle.

 14   M. BLACK : [interprétation] Je demanderais que ce document devienne la

 15   prochaine pièce de l'Accusation.

 16   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Sur quelle base, Maître Black ?

 17   M. BLACK : [interprétation] La Défense a suggéré que cette affaire est une

 18   fabrication de toutes pièces, que les témoins ont parfois fabriqué des

 19   informations après les événements. Hors, nous disons qu'il s'agit là d'une

 20   déclaration presque simultanée. Elle a été fait le 2 août 1998, et c'est un

 21   des éléments de preuve ayant une valeur probante, puisqu'elle montre qu'au

 22   moins il n'a pas, par la suite, fabriqué de toute pièce cette histoire,

 23   puisqu'il en a fait le récit à cette organisation, le 2 août 1998. Je pense

 24   que c'est sur cette base que j'aimerais demander le versement de cette

 25   pièce.

Page 1278

  1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pour l'instant, cette pièce peut-être

  2   versée au dossier, à des fins d'identification. Si toutefois il y a des

  3   suggestions qui sont faites, et qui donnent à penser qu'il y a eu invention

  4   ou fabrication, peut-être qu'à ce moment là elle prendra une autre

  5   importance.

  6   M. BLACK : [interprétation] Très bien. Merci, Monsieur le Président.

  7   Q.  Maître Bakrac --

  8   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Attendez. Attendez que le compte rendu

  9   nous rattrape.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de l'acte d'accusation P77 ID,

 11   versé au dossier à des fins d'identification.

 12   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, à des fins d'identification

 13   uniquement, s'il vous plaît. Pas une pièce.

 14   M. BLACK : [interprétation] Merci Monsieur le Président.

 15   Q.  Monsieur Bakrac, outre les deux déclarations dont nous venons de

 16   parler, avez-vous fait d'autres déclarations concernant ce que vous avez

 17   vécu en 1998 ?

 18   R.  Non.

 19   Q.  N'avez-vous jamais été interrogé par les autorités serbes sur votre

 20   expérience ?

 21   R.  Le lendemain de ma libération au centre de Sécurité nationale à

 22   Pristina.

 23   Q.  Avez-vous parlé avec l'une quelconque des autres victimes depuis votre

 24   libération ?

 25   R.  Non.

Page 1279

  1   Q.  Et votre fils, avez-vous abordé les grandes lignes de votre témoignage

  2   avec lui ?

  3   R.  Non. Nous n'en avons pas parlé des grandes lignes de mon témoignage.

  4   Q.  Ma dernière question sera la suivante : avez-vous suivi, à la

  5   télévision, ou ici, depuis votre arrivée à La Haye, une partie ou la

  6   totalité de ce procès ?

  7   R.  Non. Je n'ai fait que jeter un œil à certains articles de journaux.

  8   C'est tout.

  9   Q.  J'aimerais maintenant vous poser un certain nombre de questions sur

 10   vous. Où êtes-vous né ?

 11   R.  A Brezice, en Slovénie.

 12   Q.  Quand ?

 13   R.  Le 11 novembre 1950.

 14   Q.  A quel groupe ethnique appartenez-vous ?

 15   R.  Je ne comprends pas la question.

 16   M. KHAN : [interprétation] Si vous me le permettez, en ce qui concerne les

 17   questions préliminaires, sur tout ce qui s'est passé jusqu'en 1998, je

 18   n'aurais aucune objection à ce que mon éminent confrère de la partie

 19   adverse aide le témoin à répondre aux questions.

 20   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Khan.

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation] Moi, non plus, Monsieur le Président.

 22   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce une proposition, une offre que

 23   tout le monde partage, que tout le monde sait ? Oui, ceci semble accélérer

 24   les choses, Maître Black.

 25   M. BLACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

Page 1280

  1   Q.  Vous considérez-vous comme étant un Yougoslave, Monsieur ?

  2    R.  Oui.

  3   Q.  Etes-vous de religion orthodoxe ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Où viviez-vous jusqu'en 1991 ?

  6   R.  A Zagreb, en Croatie.

  7   Q.  Avez-vous également suivi toute votre scolarité en Croatie ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Quel type d'étude avez-vous fait ?

 10   R.  J'ai fait une école d'hôtellerie à Zagreb. Je travaille également dans

 11   l'hôtellerie.

 12   Q.  Avez-vous fait votre service militaire au sein de l'Armée nationale

 13   yougoslave en 1969 et 1970 ?

 14   R.  Oui. J'étais à Raska, c'est-là que j'ai servi. A Raska, dans le sud de

 15   la Serbie.

 16   Q.  Etes-vous marié, père de deux enfants ?

 17    R.  Oui, deux fils.

 18   Q.  Monsieur Bakrac, vous et votre famille, avez-vous quitté la Croatie en

 19   1991 ?

 20   R.  Oui, nous sommes tous partis ensemble.

 21   Q.  Pourquoi ?

 22   R.  Etant donné la situation à l'époque. Ma femme est née à Belgrade, il y

 23   avait des provocations orales qui visaient ma femme et mes enfants et c'est

 24   la raison pour laquelle nous avons décidé de partir et de nous installer

 25   avec ses parents.

Page 1281

  1   Q.  Par conséquent, vous êtes allé à Belgrade, fin 1991, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui, en décembre, à la fin décembre. Mon épouse et mes enfants étaient

  3   déjà à Belgrade.

  4   Q.  Combien de temps êtes-vous resté à Belgrade ?

  5   R.  Entre huit et neuf mois de l'année 1992, jusqu'au mois de septembre,

  6   pour être exact.

  7   M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, pouvons-nous brièvement

  8   passé en audience à huis clos partiel ? Brièvement, je vous rassure.

  9   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Passons en audience à huis clos

 10   partiel.

 11   [Audience à huis clos partiel]

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 12   [Audience publique]

 13   M. BLACK : [interprétation]

 14   Q.  Venons en maintenant à la période que vous avez passée à Djakovica, au

 15   Kosovo. Avez-vous eu un certain nombre de problèmes avec vos voisins, ou

 16   vos collègues albanais ?

 17   R.  Non.

 18   Q.  Savez-vous si la population albanaise avait des problèmes avec les

 19   autorités serbes ?

 20   R.  Oui, j'en ai entendu parler.

 21   Q.  Pourriez-vous nous dire, si vous le pouvez, le type de problèmes

 22   auxquels ils étaient confrontés ?

 23   R.  Peut-être que je ne décrirai pas les choses comme je devrais le faire.

 24   Q.  Très bien, nous pouvons passer à la question suivante.

 25   R.  Quoi qu'il en soit, ils étaient disons négligés.

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  1   Q.  Pour que les choses soient bien claires, qui était négligé ?

  2   R.  Les Albanais. Ils étaient négligés par les autorités de l'époque. Les

  3   autorités dominées majoritairement par les Serbes, même si la population

  4   Serbe était en minorité, à l'époque.

  5   Q.  Pouvez-vous nous décrire l'ambiance qui régnait à Djakovica au

  6   printemps 1998. Les choses étaient-elles différentes des années

  7   précédentes ?

  8   R.  Pour moi, personnellement, rien n'avait changé. Mais lorsqu'on lisait

  9   les journaux et qu'on regardait la télévision, c'est comme cela que je me

 10   suis rendu compte que des choses commençaient à se produire. Peut-être que

 11   je pourrais décrire cela comme étant des provocations émanant des Albanais

 12   contre les Serbes. A Djakovica, à proprement parler, cela n'était pas le

 13   cas.

 14   Q.  Quand, pour la première fois, avez-vous entendu parler de l'Armée de

 15   libération du Kosovo, à peu près ?

 16   R.  Je pense que c'était cette année-là, 1998. Je ne sais plus très bien.

 17   Q.  Etait-ce avant les événements dont vous allez nous faire part

 18   aujourd'hui ?

 19   R.  Oui, avant.

 20   Q.  Je ne vous demande pas d'entrer dans les détails, je sais que beaucoup

 21   de temps a passé, mais était-ce quelques mois avant les événements ?

 22   Pouvez-vous nous le dire ?

 23   R.  Oui, quelques mois avant.

 24   Q.  Qu'aviez-vous entendu dire, si vous pouvez nous donner un exemple ?

 25   R.  Les gens disaient qu'ils étaient armés, qu'ils mettaient en place des

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  1   embuscades contre des civils serbes, qu'ils s'opposaient aux autorités, à

  2   l'armée. C'est ce que les gens disaient, en gros.

  3   M. BLACK : [interprétation] Je ne souhaite pas passer en audience à huis

  4   clos partiel régulièrement au cours de cette déposition, mais il y a un

  5   certain nombre de points sur lesquels je solliciterai une audience à huis

  6   clos partiel. Je vous demanderais de pouvoir le faire très brièvement à ce

  7   stade.

  8   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.

  9   [Audience à huis clos partiel]

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 13   [Audience publique]

 14   M. BLACK : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur, nous vous avez dit que le 29 juin 1990, vous et votre

 16   famille, vous vous rendiez à Belgrade. Quel était le mode de transport pour

 17   lequel vous aviez opté pour vous rendre à Belgrade ce jour-là ?

 18   R.  Moi-même, ma femme et un de mes fils, parce que l'autre était étudiant

 19   en littérature anglaise à Pristina, il s'était déjà rendu à Belgrade la

 20   veille; donc, ma femme, mon fils cadet et moi-même nous nous sommes rendus

 21   à Belgrade par bus. C'était le seul moyen de s'y rendre. Nous sommes allés

 22   à Belgrade via Pristina.

 23   Q.  Qui était à bord de ce bus que vous avez pris à destination de Pristina

 24   -- ou qui se rendait dans la direction de Pristina, devrais-je dire ?

 25   R.  Il y avait des passagers. Tous voyageaient pour leurs propres raisons.

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  1   Je n'en connaissais aucun.

  2   Q.  Vous souvenez-vous s'il y avait d'autres Serbes, exception faite de

  3   vous-même et de votre famille à bord du bus ?

  4   R.  Oui. Il y en avait quelques-uns. Je ne sais pas combien il y en avait.

  5   Je me souviens qu'il y avait deux filles et peut-être deux ou trois hommes

  6   jeunes. Je ne pourrais pas vous dire combien ils étaient exactement. Le bus

  7   était pratiquement plein.

  8   Q.  Les autres passagers à bord du bus étaient-ils tous Albanais ?

  9   R.  Oui, ils étaient Albanais.

 10   Q.  Savez-vous si le chauffeur du bus était lui-même Albanais ou était-il

 11   Serbe ?

 12   R.  Il était Albanais.

 13   Q.  Monsieur, vous souvenez-vous s'il y avait eu quelque retard d'une

 14   nature ou d'une autre aux environs du début du voyage juste après

 15   Djakovica, dans les premiers temps ?

 16   R.  Oui. En route vers Prizren, à peu près à mi-chemin, le bus s'est arrêté

 17   parce qu'il y avait une panne et nous avons dû attendre là.

 18   M. BLACK : [interprétation] Avec l'assistance de l'huissière, je

 19   souhaiterais utiliser le rétroprojecteur, et y placer la carte numéro 4,

 20   P1, pièce de l'Accusation.

 21   Q.  Monsieur Bakrac, vous verrez à l'écran, mais aussi à votre gauche, il y

 22   a une carte. Ce sera peut-être plus facile pour vous de la voir à votre

 23   gauche. Je vous laisse le soin de décider.

 24   Tout d'abord, pourriez-vous indiquer au moyen du pointeur sur la carte où

 25   se trouve Djakovica ?

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  1   R.  [Le témoin s'exécute]

  2   Q.  Est-ce l'endroit où viviez avec votre famille à cette époque-là ?

  3   R.  Oui. C'est à cet endroit-là que je vivais.

  4   Q.  Vous souvenez-vous de l'itinéraire que devait emprunter le car ce jour-

  5   là, le 29 juin 1998, en route vers Pristina ?

  6   R.  Il devait passer par Prizren et Suva Reka, et ensuite, à Pristina.

  7   Q.  Pourriez-vous indiquer cet itinéraire de façon approximative si vous le

  8   pouvez en utilisant la carte que vous avez à votre gauche ?

  9   R.  [Le témoin s'exécute]

 10   Q.  Merci. Vous étiez-vous rendu à Pristina par car auparavant, avant cette

 11   date ?

 12   R.  Oui. Un mois et demi, peut-être, avant, parce que mon épouse était à

 13   l'hôpital à Pristina. Je m'étais rendu à Pristina, soit par voiture de

 14   service, ou bien par bus, mais je ne devais pas emprunter cet itinéraire-

 15   là.

 16   Q.  Quel itinéraire avez-vous emprunté ?

 17   R.  Nous avions emprunté un autre itinéraire. C'est l'itinéraire que l'on

 18   empruntait toujours pour aller à Pristina, et puis pour poursuivre vers

 19   Belgrade.

 20   Q.  Pourriez-vous montrer à votre gauche cet itinéraire-là, au moyen du

 21   pointeur, sur la carte ?

 22   R.  Je vais essayer. [Le témoin s'exécute]

 23   Q.  Merci. Je crois que c'est clair pour nous.

 24   R.  Je ne sais pas si c'est exact ce que je viens de vous montrer, c'est

 25   l'itinéraire que j'ai décrit de manière générale.

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  1   Q.  Savez-vous pourquoi l'on n'a pas emprunté cet itinéraire en date du 29

  2   juin 1998 ?

  3   R.  Oui, on nous a dit que cet itinéraire-là était bloqué. On ne pouvait

  4   pas passer.

  5   Q.  Savez-vous qui l'a dit ?

  6   R.  C'est ce qu'on disait à la gare routière, que cet itinéraire, il ne

  7   fallait pas l'emprunter, qu'il valait mieux passer par Brezovica, si l'on

  8   voulait aller à Pristina.

  9   Q.  Je souhaiterais vous montrer une autre carte, si vous me le permettez.

 10   Il s'agit de la carte portant la cote numéro 5, pièce de l'Accusation 1.

 11   Pourrait-on placer cette carte sur le rétroprojecteur, s'il vous plaît ?

 12   M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, à quelle heure pensez-

 13   vous que nous ferons notre deuxième pause ?

 14   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] En raison du retard, il faudra que ce

 15   soit deux séances courtes. Je ne sais pas. Vers moins quart, six heures

 16   moins quart, 6 heures moins 10, peut-être ?

 17   M. BLACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 18   Q.  Monsieur Bakrac, je ne sais pas ce qui sera plus facile de nous montrer

 19   sur cette carte ou sur celle d'avant, mais est-ce que vous pourriez peut-

 20   être nous montrer cet itinéraire via Brezovica sur la carte que nous venons

 21   maintenant de placer à votre gauche.

 22   R.  Je vais essayer, mais vous savez, je ne connais pas très bien ces

 23   routes. On nous a dit que cela allait être une route qui passerait par

 24   Brezovica. Moi, personnellement, je ne l'avais jamais empruntée, cette

 25   route-là. [Le témoin s'exécute]

Page 1289

  1   Q.  Merci. Le chauffeur du car, a-t-il emprunté cet itinéraire pour se

  2   rendre -- cet itinéraire via Brezovica que vous venez de nous montrer ?

  3   R.  En partie. Jusqu'à Suva Reka, si je ne m'abuse.

  4   Q.  Après Suva Reka, pourriez-vous nous montrer sur la parte par où il est

  5   passé ?

  6   R.  [Le témoin s'exécute]

  7   M. BLACK : [interprétation] Juste aux fins du compte rendu, je souhaiterais

  8   que l'on précise qu'il indique un itinéraire qui se dirige vers le nord en

  9   direction de Dule, sur cette route.

 10   Je crois que nous n'avons plus besoin de cette carte. Merci.

 11   Q.  Monsieur, est-ce que quelqu'un a posé la question au chauffeur,

 12   pourquoi est-ce qu'il passait par là, c'est-à-dire Dule plutôt que de

 13   passer par Brezovica ?

 14   R.  Oui, le contrôleur et un autre homme ont posé la question.

 15   Q.  Est-ce que vous avez entendu la réponse à la question posée ?

 16   R.  Oui. Il a dit qu'il avait posé la question à la police, et que c'est la

 17   police qui l'avait assuré qu'il n'y aurait aucun échange de tir s'il

 18   passait par là. Il avait demandé cela à la police au point de contrôle.

 19   Lorsque nous avons quitté Suva Reka, il a posé la question, il a demandé :

 20   Est-ce qu'il y a des échanges de tir à Dule ?

 21   Q.  Est-ce que le chauffeur du car parlait en langue serbe au moment où il

 22   a dit cela ?

 23   R.  Oui, il l'a dit en serbe.

 24   Q.  A quelque moment que ce soit de ce voyage, avez-vous vu des soldats sur

 25   la route, le long de la route ? Après Suva Reka, pour être précis.

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  1   R.  Oui, juste avant que le car soit arrêté.

  2   Q.  Est-ce qu'il s'agissait des soldats de l'UCK ?

  3   R.  Oui. Le chauffer a dit : Vous voyez, cela, c'est l'UCK.

  4   Q.  Est-ce que vous les avez vus de vos propres yeux aussi ? Parce que je

  5   ne suis pas tout à fait sûr.

  6   R.  Oui. Ils étaient assis sur l'herbe surplombant la route, et les

  7   Albanais ont commencé à leur faire des signes de la main.

  8   Q.  Est-ce que c'est la première fois que vous, personnellement, voyiez

  9   l'UCK, ces soldats de l'UCK ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Monsieur Bakrac, je souhaiterais que vous nous décriviez ce qui s'est

 12   passé ensuite, après que vous ayez vu ces soldats le long de la route.

 13   R.  Un kilomètre ou deux plus loin, je ne suis pas tout à fait sûr, trois

 14   personnes ont arrêté le car. Une de ces personnes avait une sorte de

 15   pancarte stop. Il a indiqué avec cette pancarte stop que le chauffeur

 16   devait s'arrêter. Cette personne portait un uniforme de camouflage avec un

 17   couvre-chef avec les insignes de l'UCK. Il y avait deux autres hommes qui

 18   étaient là et se tenaient debout à ses côtés.

 19   Q.  Le car s'est-il arrêté ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Ensuite, que s'est-il passé ?

 22   R.  Cet homme qui tenait la pancarte stop, est monté à bord du car. Il nous

 23   a demandé de lui montrer nos documents d'identité en serbe. Dans la mesure

 24   où ma femme, mon fils et moi-même étions assis à l'avant du bus, il a

 25   commencé par prendre mes papiers. Il les a vérifiés, puis il m'a dit de

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  1   sortir, de descendre. Puis, il a vérifié les papiers d'Ivan, mon fils. Il a

  2   vérifié ses documents d'identité, et il lui a dit la même chose, de

  3   descendre.

  4   Nous sommes descendus. Ma femme a commencé à pleurer, à hurler. A un moment

  5   donné, elle a essayé de retenir mon fils, mais un des hommes qui était là

  6   l'a poussée de façon assez violente. Il lui a dit de se calmer, mais de

  7   façon très menaçante. Il a commencé à avoir beaucoup d'agitation à bord du

  8   bus, et deux autres personnes sont descendues.

  9   Q.  Juste un petit instant.

 10   M. GUY-SMITH : [interprétation] Excusez-moi, mais mon client a un petit peu

 11   du mal à comprendre la traduction. Le témoin parle un peu trop vite. Peut-

 12   on l'inviter à parler quelque peu plus lentement ?

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci. Oui, nous allons essayer de

 14   vous aider.

 15   Monsieur Black.

 16   M. BLACK : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur Bakrac, comme le savez, tout ce que nous disons est traduit en

 18   d'autres langues. Pourriez-vous essayer de parler le plus clairement

 19   possible et relativement lentement ? Nous vous en serions reconnaissants.

 20   Si je ne m'abuse, vous étiez en train de nous dire si oui ou non d'autres

 21   personnes ont été invitées à descendre du bus ou pas, exception faite de

 22   vous-même et de votre fils. Je vous pose la question : a-t-on demandé à qui

 23   que ce soit d'autre de descendre du bus ?

 24   R.  Oui, deux autres hommes, jeunes, ont été invités à descendre du bus.

 25   Q.  Comment s'appelaient-ils ?

Page 1292

  1   R.  J'ai appris leurs noms plus tard. A ce moment-là, je ne connaissais pas

  2   leurs noms. Je peux vous donner leurs noms maintenant, parce que je les

  3   connais maintenant.

  4   Q.  Veuillez nous dire quels étaient leurs noms.

  5   R.  Les noms étaient Zeljko Cuk et Stamen Genov.

  6   Q.  Pourriez-vous décrire la personne dont vous dites qu'il s'appelle

  7   Stamen Genov ? Quel était son aspect physique à l'époque ?

  8   R.  C'était un homme jeune, d'une vingtaine d'années, d'une belle

  9   corpulence. Il était un peu moins grand que moi, mais c'était un homme

 10   jeune d'une belle corpulence, en bonne santé.

 11   Cuk était plus mince et plus grand que Genov. C'était un vrai réfugié, si

 12   je peux m'exprimer ainsi.

 13   Q.  Monsieur, afin que les choses soient parfaitement claires, quelle est

 14   votre taille en centimètres ?

 15   R.  175 centimètres.

 16   Q.  Merci. Permettez-moi de vous montrer deux photos sur Sanction. Vous

 17   devriez les voir apparaître à l'écran, Monsieur Bakrac. Il s'agit de la

 18   pièce à conviction de l'Accusation P54. Cette pièce à conviction est sous

 19   pli scellé, mais ces photos sont publiques.

 20   La première photo porte la cote ERN U0032164.

 21   Monsieur Bakrac, reconnaissez-vous la personne qui apparaît à l'écran en

 22   photo ?

 23   R.  Oui, c'est Cuk.

 24   Q.  Son aspect physique était-il différent à l'époque de celui que l'on

 25   voit apparaître à l'écran sur la photo ?

Page 1293

  1   R.  Peut-être ces cheveux étaient-ils un peu plus longs, mais il n'avait

  2   déjà pas beaucoup de cheveux.

  3   Q.  Je souhaite vous montrer une autre photo, cote

  4   ERN U0032165. Monsieur Bakrac, reconnaissez-vous cette personne-là ?

  5   R.  Oui, je le reconnais; c'est Stamen Genov. Sur cette photo, il est très

  6   jeune. On voit bien les traits de son visage. Ils sont déjà apparents, sur

  7   cette photographie, d'un homme jeune.

  8   M. BLACK : [interprétation] Merci. Je crois que nous n'avons plus besoin de

  9   l'écran Sanction pour l'instant.

 10   Q.  Monsieur Bakrac, que s'est-il passé après que vous quatre avez été

 11   invités à descendre du bus ?

 12   R.  Lorsqu'ils nous ont fait descendre du bus, ils nous ont emmenés de

 13   l'autre côté de la route dans un espace entre un magasin et puis un autre

 14   bâtiment. Ils nous ont mis en rang. L'homme qui avait vérifié nos pièces

 15   d'identité, a dit que Cuk, Genov et Ivan devaient passer en premier.

 16   D'abord Ivan, Cuk et moi, on devait rester sur place. Je les ai suppliés de

 17   me laisser rester avec mon fils. Il a dit : D'accord. Il a pris Cuk et

 18   Genov, il les a mis dans une voiture, une voiture bleue. Il les a emportés.

 19   Je ne sais pas où il les a emmenés.

 20   Ivan et moi-même, nous sommes restés là. Le troisième homme qui était un

 21   homme plus âgé --

 22   Q.  Désolez de vous interrompre. Je souhaitais simplement vous poser deux

 23   questions à propos de ce que vous venez de nous dire. La voiture bleue que

 24   vous décrivez comme étant une voiture bleue, savez-vous de quel type de

 25   voiture il s'agissait, cette voiture qui a emmené Cuk et Genov ?

Page 1294

  1   R.  Je sais que c'était une voiture bleue. Je ne sais pas si c'était une

  2   Kadet ou une Golf. A l'époque, je pensais que c'était une Golf. Les deux

  3   sont possibles.

  4   Q.  Vous avez également mentionné les soldats qui avaient contrôlé vos

  5   pièces d'identité. Est-ce que vous vous souvenez de quoi que ce soit à

  6   propos des autres soldats qui ont arrêté l'autocar ?

  7   R.  Oui. L'un d'entre eux étaient un homme assez jeune avec les cheveux en

  8   bataille. Il avait une marque, une cicatrice sur le visage. Je ne sais pas.

  9   Je ne sais pas si c'était une dépigmentation ou quelque chose dans ce

 10   genre-là. Le troisième homme était un homme plus grand et plus âgé aussi.

 11   Il avait la cinquante ou peut-être

 12   60 ans.

 13   Q.  Ces hommes étaient-ils armés ?

 14   R.  Oui, ils étaient armés. Le plus âgé portait un fusil; un semi-

 15   automatique. Le plus jeune avait un fusil automatique.

 16   Q.  Au moment où l'on vous a fait descendre du bus, je vais encore vous

 17   poser quelques questions à propos de l'état dans lequel vous étiez et puis

 18   dans l'état dans lesquelles étaient les trois autres personnes qu'on a

 19   demandé de descendre du bus. Monsieur, étiez-vous armé à ce moment-là ?

 20   R.  Non, nous ne l'étions pas.

 21   Q.  Pour revenir sur vous exclusivement. Que portiez-vous ?

 22   R.  Je portais des pantalons de couleur bleue, une paire de chaussures

 23   normales, et je portais une chemise à carreaux jaunes avec un peu de bleu.

 24   Q.  Monsieur, est-ce que vous faisiez partie d'une force militaire ou

 25   policière à cette époque-là ?

Page 1295

  1   R.  Non, jamais.

  2   Q.  Qu'en est-il de votre fils, Ivan ? Etait-il armé à ce moment-là ?

  3   R.  Non, à cette époque-là, jamais.

  4   Q.  Lui, que portait-il au moment où on vous a fait descendre du car ?

  5   R.  Des jeans et le genre de T-shirt que mettent les jeunes. Je ne sais pas

  6   s'il y avait des lettres qui étaient inscrites.

  7   Q.  Quel âge avait-il à ce moment-là ?

  8   R.  Il venait tout juste d'avoir 19 ans, le 16 août. A ce moment-là, il

  9   n'avait pas même 19 ans encore.

 10   Q.  Votre fils faisait-il partie d'une force militaire ou d'une force de

 11   police quelconque ?

 12   R.  Non.

 13   Q.  Etait-il rémunéré par une force de police ou force militaire pour faire

 14   quoi que ce soit ?

 15   R.  Non, à aucun moment.

 16   Q.  La personne que vous désignez comme étant Cuk, était-elle armée au

 17   moment où on vous a fait descendre du bus ?

 18   R.  Je pense que non. Non, il n'avait aucune arme sur lui.

 19   Q.  Vous souvenez-vous de ce qu'il portait ?

 20   R.  Non, je ne me souviens pas.

 21   Q.  Savez-vous si lui, faisait partie d'une force militaire ou d'une force

 22   de police ?

 23   R.  Je n'en sais rien. J'en doute. C'était un réfugié de -- je ne me

 24   souviens plus de quel endroit.

 25   Q.  Stamen Genov, vous souvenez-vous de ce qu'il portait lui ?

Page 1296

  1   R.  Non, je ne me souviens pas, mais tout le monde portait des tenues

  2   civiles.

  3   Q.  Etait-il armé ?

  4   R.  J'ai appris plus tard qu'il avait un pistolet sur lui, dans le car.

  5   Q.  A quelque moment que ce soit, au moment où tout cela se produisait,

  6   lorsque l'on vous a demandé de descendre du bus, est-ce qu'il a dégainé son

  7   arme ?

  8   R.  Non.

  9   Q.  Savez-vous ce qu'il a fait de son arme ?

 10   R.  J'ai appris, après notre libération, qu'il avait laissé le fourreau

 11   dans le car et que, il y avait, dans ce fourreau ou dans ce sac, un

 12   pistolet.

 13   Q.  Savez-vous si Stamen Genov était membre d'une force de police ou force

 14   armée quelconque ?

 15   R.  Il était membre de l'armée.

 16   Q.  Saviez-vous quel était son grade ?

 17   R.  Oui. Il était sergent dans le corps sanitaire.

 18   Q.  Vous-même, Monsieur, avez fait votre service dans la JNA. Que faut-il

 19   faire pour devenir sergent ?

 20   R.  Il faut avoir un diplôme du secondaire, de l'école militaire

 21   secondaire.

 22   Q.  Savez-vous si Stamen Genov était marié ?

 23   R.  Je ne sais pas si, il était marié, à l'époque, ou peut-être devait-il

 24   se marier peu après.

 25   Q.  Comment le savez-vous ?

Page 1297

  1   R.  Je l'ai appris après notre libération, parce qu'un de mes amis, enfin,

  2   la sœur de la femme d'un de mes amis était sa fiancée. Je ne la connaissais

  3   pas, mais je ne le connaissais pas lui non plus.

  4   Q.  Merci. Pour revenir au fait que vous décriviez tout à l'heure, y avait-

  5   il des gardes qui vous gardaient au moment où Genov et Cuk ont été

  6   emportés ?

  7   R.  Oui. Cet homme, plus âgé, nous gardait. Il était à quelques mètres de

  8   nous. Nous nous étions assis à côté d'un mur, par terre. A un moment donné,

  9   je lui ai demandé si on pouvait fumer et il a dit : Oui, cela va.

 10   Q.  Ce soldat portait-il une arme pendant qu'il vous gardait ainsi ?

 11   R.  Oui. Il était muni d'un fusil demi automatique avec un ajout pour que

 12   cette arme puisse devenir un lance-grenades.

 13   Q.  Outre de vous permettre de fumer, est-ce que ce soldat s'est adressé à

 14   vous ?

 15   R.  Oui. Il parlait d'une grande Albanie et il tenait ce genre de propos.

 16   Il disait qu'il pouvait nous tuer. Il pouvait dire qu'il nous a tiré dessus

 17   alors que nous essayions de fuir, mais ce n'est pas ce qu'il a fait.

 18   Q.  Comment vous sentiez-vous, à ce moment-là ?

 19   R.  Je me sentais particulièrement effrayé.

 20   Q.  Qu'en est-il de votre fils ? Quelle réaction avait-il ? Nous pouvons

 21   prendre quelques instants si vous avez besoin de quelques instants.

 22   R.  Mon fils était terrifié. Il avait peur. Il avait l'impression que nous

 23   allions nous faire tuer, tout comme moi d'ailleurs.

 24   Q.  Est-ce qu'effectivement et en fin de compte, une voiture est venue pour

 25   vous chercher, vous et votre fils ?

Page 1298

  1   R.  Oui. C'était peut-être une demi-heure plus tard. Je ne pourrais pas

  2   vous dire l'heure exacte, mais toujours est-il que cette voiture est

  3   revenue nous chercher, tous les deux.

  4   Q.  Et où vous a-t-on amenés ?

  5   R.  Pour ce qui nous concerne, on nous a emmenés dans une direction

  6   inconnue. Ce n'est que lorsque nous étions arrivés sur place que nous avons

  7   vu où nous étions.

  8   Q.  Et où étiez-vous ? Pourriez-nous nous décrire le bâtiment ou l'endroit

  9   où l'on vous a emmené ?

 10   R.  Il s'agissait d'un village. Je peux l'appeler ainsi. Dans ce village,

 11   il y avait un bâtiment qui était entouré d'une sorte de clôture. Je dirais

 12   qu'il s'agissait d'une école, l'école du village.

 13   Nous sommes entrés à l'intérieur. Il y avait des bancs en deux rangées. Il

 14   y avait peut-être trois ou quatre bancs dans une rangée et d'autres bancs

 15   dans l'autre rangée. C'est là qu'il y avait Cuk et Genov. Ils étaient assis

 16   derrière un banc d'école et nous sommes entrés à l'intérieur de cette

 17   pièce.

 18   Q.  Que se passait-il lorsque vous êtes entré ?

 19   R.  Ces deux personnes étaient des gens en train de donner des coups à

 20   toutes sortes de personnes qui se trouvaient déjà là. Pour ce qui est de

 21   Genov et de Cuk, je me souviens bien que Cuk avait reçu l'ordre de se

 22   cogner la tête contre le mur.

 23   Lorsque nous nous sommes assis au dernier banc contre le mur, j'ai placé

 24   Ivan plus près du milieu de la pièce. A côté de moi, Genov était assis

 25   alors que Cuk était devant après qu'il l'ait remis sur ses pieds.

Page 1299

  1   Q.  Les hommes qui étaient-là, comme vous le dites, comment étaient-ils

  2   vêtus, ces hommes qui donnaient des coups à Cuk ?

  3   R.  Ils portaient des uniformes de camouflage, certains d'entre eux. Pour

  4   ce qui est du reste, ils étaient vêtus de vêtements civils.

  5   Q.  Portaient-ils des armes ?

  6   R.  Oui. Ils étaient armés.

  7   Q.  Ont-ils posé des questions à Genov et à Cuk ?

  8    R.  Oui. Ils leur ont demandé qui ils étaient, ce qu'ils faisaient. Genov

  9   avait dit qu'il travaillait dans l'entreprise Electrokosovo. Il n'a pas

 10   parlé de l'armée. Il savait sans doute ce qui allait lui arriver.

 11   Alors que Cuk répétait constamment qu'il était réfugié, qu'il n'avait rien

 12   à voir avec rien et qu'il travaillait dans la construction et ainsi de

 13   suite.

 14   Après, on m'a posé des questions à moi et à Ivan. On nous a demandé qui

 15   nous étions, ce que nous faisions. Nous avons dit que nous étions des

 16   réfugiés et que nous étions partis en direction de Belgrade.

 17   Q.  Avant d'en arriver là, je suis désolé de vous interrompre.

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Est-ce que vous avez personnellement parlé avec Genov, à quelque moment

 20   que ce soit, alors que vous étiez dans cette salle de classe ?

 21   R.  A ce moment-là, pas encore.

 22   Q.  A quel moment avez-vous parlé avec Genov ? Est-ce que vous lui avez

 23   parlé à quelque moment que ce soit alors que vous vous trouviez dans cette

 24   école que vous nous avez décrite ?

 25   R.  Seulement une fois, lorsqu'il m'a offert son portefeuille, je lui ai

Page 1300

  1   dit que je ne pouvais pas l'accepter.

  2   Q.  Pourquoi vous a-t-il offert son portefeuille ?

  3   R.  Plus tard, j'ai compris lorsque son portefeuille est tombé pourquoi il

  4   voulait me le donner. Parce que à l'intérieur, il y avait un livret

  5   militaire

  6   Q.  Que s'est-il passé après que son portefeuille soit tombé de sa poche ?

  7   R.  Il se faisait passer à tabac. Son portefeuille est tombé. Ils l'ont

  8   ramassé. Ils l'ont ouvert et ils ont vu qui il était. C'était sa fin.

  9   Q.  Est-ce que Genov et Cuk se sont faits passer à tabac à l'intérieur de

 10   la salle de classe ? Ou bien peut-être à l'extérieur ou ailleurs ?

 11   R.  Avant qu'ils ne trouvent ce portefeuille, le portefeuille de Genov, ils

 12   leur ont donné des coups, là, dans cette salle de classe, mais ils les ont

 13   également fait sortir à l'extérieur de cette pièce. Mon fils Ivan pleurait

 14   énormément.

 15   Q.  Est-ce que vous avez vu Genov et Cuk se faire passer à tabac ?

 16   R.  Non, mais nous les avons entendu gémir.

 17   Q.  Qu'en est-il du moment où vous étiez à l'intérieur de la salle classe,

 18   est-ce que vous les avez vus ? Est-ce qu'on leur a donné des coups à ce

 19   moment-là ?

 20   R.  Oui. Ils ont donné des coups à Genov, et lorsqu'ils ont vu ce livret

 21   militaire, l'homme qui nous a demandé nos papiers dans le bus a

 22   littéralement sauté sur lui. Il a commencé à lui donner des coups-de-poing,

 23   des coups de pied. C'était un vrai passage à tabac.

 24   Q.  Avec quoi ont-ils donné des coups à Genov ? Est-ce qu'ils se sont

 25   servis de leurs poings, de leurs pieds, ou d'autre chose ?

Page 1301

  1   R.  A coup de poing, à coup de pied, mais à un certain moment donné,

  2   également avec la crosse du fusil.

  3   Q.  Combien de soldats ont pris part à ce passage à tabac de cette

  4   personne ?

  5   R.  Il n'y avait que cette personne-là qui donnait des coups.  Je ne sais

  6   pas combien il y en avait en tout, là-bas. C'était un par un, donc. Ils ne

  7   se mettaient pas à deux pour donner des coups.

  8   Q.  Combien de soldats avez-vous vus dans cette salle de classe, si vous

  9   vous en souvenez ?

 10   R.  Il y avait plus que cinq.

 11   Q.  Ces passages à tabac ont duré combien de temps exactement ?

 12   R.  Je ne pourrais pas vous donner la durée exacte. Il est certain que cela

 13   a duré jusqu'à la tombée de la nuit. Lorsque la nuit est tombée, c'est là

 14   que nous sommes allés là-bas.

 15   Q.  Quel était l'état de Genov et Cuk ? Dans quel état se trouvaient-ils

 16   quand ce passage à tabac s'est terminé ?

 17   R.  Genov avait des fortes douleurs. A un certain moment donné, il avait

 18   même perdu connaissance, alors que Cuk a été gravement battu. Il avait des

 19   ecchymoses sur la tête, mais c'est surtout Genov qui était la victime dans

 20   cette histoire.

 21   M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, c'est peut-être le bon

 22   moment pour prendre la pause.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons prendre

 24   notre pause, et nous reprenons nos travaux à 18 heures 10.

 25   --- L'audience est suspendue à 17 heures 50.

Page 1302

  1   --- L'audience est reprise à 18 heures 14.

  2   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Black, je vous écoute. Veuillez

  3   poursuivre.

  4   M. BLACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  5   Pourrait-on passer à huis clos partiel, Monsieur le Président, j'aurais

  6   quelques questions à poser au témoin qui devraient être posées à huis clos

  7   partiel ?

  8   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, très bien. Nous passerons à huis

  9   clos partiel.

 10   [Audience à huis clos partiel]

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11  Page 1303 expurgée. Audience à huis clos partiel.

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  8   [Audience publique]

  9   M. BLACK : [interprétation] 

 10   Q.  Monsieur Bakrac, tout juste avant la pause, vous nous avez dit qu'ils

 11   attendaient la tombée de la nuit avant de vous faire sortir de cette salle

 12   de classe. Que s'est-il passé après que le passage à tabac de Cuk et de

 13   Genov soit terminé ? Est-ce que vous êtes sorti de l'école ?

 14   R.  Oui, nous sommes montés à bord d'une camionnette. C'est d'abord Cuk et

 15   Genov que l'on a fait entrer dans la camionnette. Ils étaient attachés

 16   alors qu'Ivan et moi, nous n'étions pas attachés. Ensuite, nous sommes

 17   montés à bord de cette camionnette. Ils leur ont mis des sacs de plastique

 18   sur les têtes alors nous, on nous a bandé les yeux avec des bouts de tissu.

 19   C'est ainsi que nous nous sommes dirigés vers un autre endroit.

 20   Q.  Qui se trouvait dans cette camionnette outre vous-même, votre fils,

 21   Genov et Cuk ?

 22   R.  Il y avait un chauffeur. Il y avait peut-être une ou deux autres

 23   personnes. Je ne me souviens pas exactement.

 24   Q.  Ces hommes, étaient-ils armés ?

 25   R.  Oui.

Page 1305

  1   Q.  Ces hommes, où vous ont-ils emmenés ?

  2   R.  Ils nous ont emmenés dans une maison qui se trouvait sur un terrain --

  3   une ferme. Je ne sais pas où c'était, mais je l'ai su plus tard.

  4   Q.  Permettez-moi de vous poser la question suivante; que s'est-il passé

  5   lorsque vous êtes arrivés à la destination ?

  6   R.  Il y avait un très grand portail. Ils l'ont ouvert. Nous sommes entrés

  7   dans la cour. Ils se sont placés devant la porte de la maison, et ces deux

  8   hommes nous ont fait entrer à l'intérieur de la maison, nous deux. Je parle

  9   d'Ivan et de moi-même.

 10   Q.  Est-ce qu'ils ont enlevé les bandeaux qui bandaient vos yeux ?

 11   R.  Oui. Comme il faisait nuit, nous ne pouvions rien voir. Nous ne

 12   pouvions pas voir ce qu'il y avait dans la cour.

 13   Q.  Vous avez dit : "Ils nous ont fait entrer." Ils vous ont fait entrer

 14   où ? Parce que vous avez dit que vous deux, vous vous êtes faits entrer.

 15   R.  Au rez-de-chaussée de cette maison. D'abord, nous sommes passés par une

 16   cuisinette. Ensuite, à gauche, il y avait une salle à dîner. C'est là qu'il

 17   y avait des matelas en éponge tout autour des murs. Cela ne rassemblait pas

 18   à des lits, mais c'était des éponges. Et nous trois, nous étions assis à

 19   l'intérieur.

 20   Q.  Vous dites que vous n'avez pas vu la cour car il faisait nuit.

 21   Pourriez-vous nous décrire cette pièce dans laquelle vous étiez ?

 22   R.  Oui, c'était une salle à manger. La lumière était allumée, je pouvais

 23   voir cette salle à manger.

 24   M. BLACK : [interprétation] Je demanderais que l'on montre au témoin la

 25   pièce de l'Accusation P5. Cette pièce sera diffusée, ou sera visible sur

Page 1306

  1   l'écran du témoin.

  2   Q.  Voyez-vous effectivement, Monsieur, ce qui figure sur votre écran ?

  3   R.  Oui.

  4   M. BLACK : [interprétation] Monsieur Younis, pourriez-vous, je vous prie,

  5   nous montrer le rez-de-chaussée de cette maison qui est identifiée par la

  6   lettre A et le numéro 1. Je vous prierais de continuer cette visite

  7   virtuelle et de nous faire voir cette pièce.

  8   Q.  Monsieur Bakrac, reconnaissez-vous cette pièce ?

  9   R.  Oui, c'était cette pièce-là dans laquelle on nous a emmenés après

 10   l'école, à l'exception du fait qu'il n'y avait pas de sofa, mais qu'il y

 11   avait plutôt des matelas en éponge.

 12   M. BLACK : [interprétation] Je demanderais à M. Younis de balayer l'écran

 13   vers la gauche légèrement. Je vous remercie.

 14   Q.  Où étaient placés ces matelas en éponge ?

 15   R.  Ils étaient placés par terre, à côté du mur.

 16   M. BLACK : [interprétation] Nous pouvons maintenant éteindre notre logiciel

 17   Sanction.

 18   Q.  Monsieur Bakrac, lorsque vous êtes entré dans cette pièce, est-ce que

 19   vous avez vu des soldats ?

 20   R.  Oui, j'en ai vu quelques-uns. J'ai vu quelques personnes.

 21   Q.  Vous souvenez-vous du nom ou du surnom de ces soldats que vous avez

 22   vus ?

 23   R.  Je me souviens ni de leur nom ni de leur surnom. J'ai su plus tard le

 24   nom de quelqu'un. Il les gardait en mémoire.

 25   Q.  De quel nom s'agit-il ?

Page 1307

  1   R.  C'était Shala.

  2   Q.  Shala, était-il présent dans cette pièce lorsque vous êtes arrivé ?

  3   R.  Je ne pourrais vous l'affirmer avec certitude. Je ne connaissais encore

  4   personne à ce moment-là. Il y avait plusieurs personnes sur place.

  5   Q.  Que se passait-il dans cette pièce lorsque vous êtes entré dans la

  6   pièce ?

  7   R.  De nouveau, on a commencé à faire subir à Genov de mauvais traitements.

  8   Cuk n'avait pas reçu de coup, mais Genov, oui. On lui a redonné des coups.

  9   Q.  Vous souvenez-vous qui donnait des coups à Genov ?

 10   R.  Il y avait un jeune homme bien bâti, assez agressif, et c'est lui

 11   donnait des coups.

 12   Q.  Vous souvenez-vous quelle était la taille de ce jeune homme ?

 13   R.  Il me semble qu'il devait être aussi grand que moi. Il était peut-être

 14   un peu plus petit par contre.

 15   Q.  Vous souvenez-vous de la couleur de ses cheveux ?

 16   R.  Il avait des cheveux foncés. Il portait également une barbe.

 17   Q.  Cette personne vous a-t-elle parlé de son éducation, de son parcours

 18   scolaire ?

 19   R.  Plus tard, il m'a dit qu'il avait étudié la culture physique et qu'il

 20   connaissait les arts martiaux.

 21   Q.  Pourriez-vous nous décrire de quelle façon il assénait des coups à

 22   Genov ?

 23   R.  Il lui donnait des coups de poing, des coups de pied. Pour la plupart,

 24   c'était cela. Je ne me souviens pas des détails exacts. Mais c'étaient des

 25   passages à tabac qu'il avait subi.

Page 1308

  1   Q.  Le soldat a-t-il dit quoi que ce soit pendant qu'il frappait Genov ?

  2   R.  Plus ou moins. Combien de gens, le sergent a tué ? Ce genre de chose. A

  3   chaque fois, ceci était suivi de coup.

  4   Q.  Au début de votre témoignage, je vous ai posé des questions concernant

  5   des déclarations que vous avez faites au TPY et à une autre organisation,

  6   l'organisation internationale pour le droit humanitaire.  Vous vous en

  7   souvenez, n'est-ce pas ? Vous vous souvenez de ces questions que je vous ai

  8   posées ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Dans ces autres déclarations, vous souvenez-vous avoir également décrit

 11   cette personne dont vous nous dites maintenant qu'elle frappait Stamen

 12   Genov ?

 13   R.  Je pense, oui.

 14   Q.  Pensez-vous l'avoir décrit en gros de la même manière que vous venez de

 15   nous le décrire ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Monsieur Bakrac, en tout combien y avait-il de soldats dans la pièce si

 18   toutefois vous vous en souvenez ?

 19   R.  Il y avait d'autres soldats sur place, mais je ne me souviens plus

 20   combien.

 21   Q.  Vous souvenez-vous de la manière dont ils étaient vêtus ?

 22   R.  Des uniformes de camouflage. Certains étaient vêtus intégralement de

 23   noir. D'autres étaient en tenue civile. Pour la plupart d'entre eux, ils

 24   portaient des vêtements de différentes sortes.

 25   Q.  L'un ou l'autre avait-il des armes, vous en souvenez-vous ?

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  1   R.  Oui, ils portaient des armes.

  2   Q.  Un ou l'autre de ces autres soldats a-t-il également frappé Genov ?

  3   R.  Je n'ai plus de souvenir.

  4   Q.  Pourquoi les soldats semblaient-ils en vouloir à Genov sans se tourner

  5   vers vous Cuk ou votre fils ?

  6   R.  Je pense que c'est parce qu'il était un militaire.

  7   Q.  Pourquoi le fait qu'il soit un militaire serait un motif pour que les

  8   soldats s'acharnent contre lui ?

  9   M. GUY-SMITH : [interprétation] Excusez-moi, une observation de ma part. Je

 10   pense, qu'ici, il y un manque de fondement quant à la question qui vient

 11   d'être posée au témoin et qui sollicite son opinion.

 12   M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, je posais la question,

 13   je crois, qu'il était présent, et je voulais recueillir ses impressions,

 14   mais si vous souhaitez que je --

 15   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous en prie, poursuivez.

 16   M. BLACK : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur Bakrac, au cours de passage à tabac de Genov, vous-même ou

 18   votre fils avez-vous été emmené à sortir de la pièce ?

 19   R.  Non.

 20   Q.  Dans votre souvenir, quelle est la dernière chose qui se soit produite

 21   dans cette pièce ?

 22   R.  L'un des soldats a dit qu'une petite fille de Djakovica venait de se

 23   faire violer. L'homme qui le frappait a sorti un couteau et a fait un geste

 24   vers ses parties génitales. Puis, ensuite, ils m'ont fait sortir avec Ivan

 25   devant la maison, et j'ai entendu Genov l'implorer en lui disant, "Ne

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  1   faites pas cela. Je n'ai jamais tué personne." Il disait des choses pour

  2   essayer de se protéger dans sa propre défense.

  3   Q.  Savez-vous si le soldat a fait quoi que ce soit avec le couteau qu'il

  4   brandissait menaçant quoi que ce soit à Genov ?

  5   R.  Non.

  6   Q.  Non, vous ne savez pas, ou non, il n'a rien fait à Genov avec ce

  7   couteau ?

  8   R.  Non, il n'a rien fait.

  9   Q.  Au total, combien de temps a duré ce passage à tabac de Stamen Genov ?

 10   R.  Peu de temps, nous avons été placé dans une autre pièce.

 11   Q.  Quelle était-il à peu près lorsqu'ils vous ont placé dans une autre

 12   pièce ?

 13   R.  Je ne pourrais le dire.

 14   Q.  Quel était l'état général de Stamen Genov au moment où ils vous ont

 15   placé dans une autre pièce 

 16   R.  Il était dans un état très mauvais, mais il devait pratiquement le

 17   porter.

 18   Q.  Vous avez dit qu'ils vous ont amené placer dans une autre pièce. Dans

 19   quelle condition cela s'est-il produit ?

 20   R.  Je ne peux pas vous donner les détails, mais quoi qu'il en soit, après

 21   l'incident avec le couteau. En tout cas, peu de temps après cela, nous

 22   sommes tous allés dans le sous-sol, d'abord les deux autres, et puis

 23   ensuite ils se sont demandés ce qu'ils allaient faire de nous. Et puis ils

 24   ont dit que nous devions également aller dans le sous-sol.

 25   Q.  Vous souvenez-vous qui a dit que vous devriez également être placés

Page 1311

  1   dans le sous-sol ?

  2   R.  Je ne sais pas qui l'a dit. En tout cas, ce que je sais c'est que

  3   quelqu'un l'a dit.

  4   Q.  Monsieur Bakrac, j'aimerais que vous nous décriviez brièvement le sous-

  5   sol dans lequel on vous a amené.

  6   R.  Il était à peu près au milieu de la cours, de ce lieu. Il y avait une

  7   petite fenêtre. Et une porte. Derrière la porte, il y avait un petit

  8   escalier et on rentrait dans la pièce. Je n'en connais pas les dimensions

  9   exactes. Mais je dirais que c'était une pièce de trois sur cinq ou six

 10   mètres. Je ne peux pas vous le dire avec exactitude. Ils nous y ont fait

 11   rentrer. Il y avait déjà certaines personnes dans la pièce qui s'y

 12   trouvaient déjà depuis un moment.

 13   Q.  Qui était déjà à l'intérieur lorsque vous êtes arrivé ?

 14   R.  Lorsque nous sommes arrivés, bien entendu, nous n'avons pas pu

 15   distinguer tout ce qu'il y avait immédiatement, mais nous nous sommes

 16   rendus compte qu'il y avait au total 13 personnes avec nous. Y compris

 17   nous, dans ce sous-sol.

 18   Q.  Quels sont vos souvenirs de ces 13 personnes ? Qui étaient-elles ?

 19   R.  Trois Albanais, y étaient détenus, ainsi que 6 Serbes et nous 4. Les

 20   quatre nouveau venus.

 21   Q.  Pouvez-vous me décrire les trois personnes albanais, ou d'origine

 22   ethnique albanaise6

 23   R.  Je ne pourrais pas les décrire parce que je ne les ai pratiquement pas

 24   vu, ils dormaient tout le temps. Personnes ne les a jamais touchés. De

 25   toute façon, il faisait noir dans le sous-sol.

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  1   Q.  Seriez-vous en mesure d'estimer leur âge ?

  2   R.  Non. Je ne le pourrai pas.

  3   Q.  Quand est-il des six personnes d'origine ethnique Serbes ? Pourriez-

  4   vous nous dire ce que vous savez à propos de ces derniers ?

  5   R.  Il y avait un jeune homme du nom de Zeljko. Je ne connais pas son nom

  6   de famille. Il avait été blessé à la jambe.

  7   Il y avait un homme âgé. Il était malade. Il soufrait de diabète. Juste

  8   avant ces événements, il avait subi une opération à l'œil, aux yeux.

  9   Il y a avait les frères Krstic. Je ne connais pas le nom des autres

 10   personnes. L'un d'entre eux s'appelait je crois Slobodan. Je m'en souviens

 11   parce que mon père s'appelle aussi Slobodan.

 12   Q.  Merci. Permettez-moi de vous poser un certain nombre de questions

 13   concernant ce que vous venez de nous dire.

 14   Vous avez parlé des frères Krstic. Savez-vous d'où ils venaient ?

 15   R.  Je pense qu'ils venaient de Suva Reka. Ils ont été interceptés alors

 16   qu'ils étaient dans leur Golf, un véhicule civil. C'est ce qu'ils m'ont dit

 17   à l'époque. Ils ont été interceptés, leur voiture leur a été prise. Ils

 18   sont arrivés dans le sous-sol. Je ne sais pas très bien comment, mais en

 19   tout cas c'est-là qu'ils se trouvaient.

 20   En ce qui concerne un autre homme qui y était aussi, il avait été enlevé

 21   alors qu'il était dans un car. Nous avons appris ce qu'ils leurs étaient

 22   arrivés. Nous avons appris de leur bouche qu'ils étaient déjà présents sur

 23   les lieux depuis six, sept jours au moment de notre arrivée. Quant aux

 24   trois Albanais, cela faisait plus de temps qu'ils étaient-là. Je ne sais

 25   pas si c'est exact ou non, mais c'est ce qu'ils nous ont dit.

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  1   Q.  Pour que les choses soient tout à fait claires, avez-vous parlé avec

  2   ces hommes, qui se trouvaient dans le sous-sol avec vous, ces autres

  3   hommes ?

  4   R.  Pas trop. Ils se sont contentés de nous dire ces choses-là. Ils

  5   savaient que nous allions être libérés. Je ne sais pas comment ils l'ont

  6   appris. Peut-être qu'ils ont parlé à quelqu'un en haut. Pas nous. Mais ils

  7   nous ont consolé en disant que nous allions être libérés.

  8   Q.  Les prisonniers qui se trouvaient dans le sous-sol, avaient-ils

  9   l'autorisation de se parler ?

 10   R.  Nous murmurions, dans la plupart du temps, et seulement quand cela

 11   était nécessaire.

 12   Q.  Vous avez parlé d'un homme âgé, qui semblait être malade. Pouvez-vous

 13   me dire autre chose sur son compte ?

 14   R.  Simplement qu'il souffrait de diabète et d'un problème aux yeux, qu'il

 15   avait été obligé à subir une opération. Je ne sais pas ce que je pourrais

 16   vous dire d'autre. Je ne sais plus quelles caractéristiques étaient les

 17   siennes.

 18   Q.  Avez-vous jamais su comment il avait atterri dans le camp ? Ou plutôt

 19   dans le sous-sol, excusez-moi.

 20   R.  Non. Non. Je ne me souviens plus.

 21   Q.  Plus tard, est-ce que vous avez eu l'occasion de rencontrer les membres

 22   de sa famille ? Est-ce que vous vous souvenez de les avoir rencontré ?

 23   R.  Oui. Un homme est venu me voir. Il m'a montré des photos et il m'a

 24   demandé si j'avais vu cet homme. Et j'ai dit, Oui, mais je ne savais pas ce

 25   qu'il lui était arrivé. C'était à Pristina.

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  1   Q.  Quand cela s'est-il produit ? Vous vous en souvenez-vous ?

  2   R.  C'était un jour ou deux. Enfin, j'étais à Pristina pendant deux jours.

  3   Je suis arrivé le soir. Je suis resté un jour de plus à Pristina. Je

  4   logeais chez une dame qui était la secrétaire de l'organisation de la Croix

  5   Rouge pour le Kosovo. Donc, cela devrait être au seuil d'accueil de la

  6   Croix Rouge. J'étais allé voir un médecin, parce que j'étais en très

  7   mauvais état psychologiquement. Donc, cela a dû avoir lieu à ce moment-là.

  8   Q.  Pour que les choses soient parfaitement claires, après que vous ayez

  9   quitté cet endroit, après votre libération ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Monsieur, je vous ai demandé tout à l'heure, enfin, je vous ai posé des

 12   questions à propos de votre rencontre avec l'enquêteur du Tribunal en

 13   janvier 2003. Vous en souvenez-vous ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Vous souvenez-vous si cet enquêteur vous a montré des photographies,

 16   photographies de personnes que vous avez reconnues comme ayant été avec

 17   vous dans ce sous-sol ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Vous a-t-il également montré des photographies de gens que vous n'avez

 20   pas reconnus ?

 21   R.  Oui.

 22   M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, peut-on passer en

 23   audience à huis clos partiel. Je souhaiterais montrer des photos au témoin.

 24   Certaines sont publiques, d'autres ne le sont pas. 

 25   Pourrait-on passer à huis clos partiel ?

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 1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.

 2   [Audience à huis clos partiel]

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 17   [Audience publique]

 18   M. BLACK : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur, vous souvenez-vous comment vous et les autres prisonniers

 20   étiez disposés dans la pièce, savez-vous à quel endroit vous étiez assis ?

 21   Vous en souvenez-vous encore aujourd'hui dans ce sous-sol ?

 22   R.  Oui, je m'en souviens. Je crois que j'avais dessiné un petit croquis

 23   qui figure dans ma déclaration. J'y indiquais sur ce croquis où étaient les

 24   détenus, à quel endroit du sous-sol.

 25   M. BLACK : [interprétation] A ce stade-ci, je souhaiterais montrer au

Page 1318

  1   témoin, nous pouvons le faire sur Sanction, le public peut le voir. Il

  2   s'agit du document portant la cote ERN U0032209. Si cela facilite les

  3   choses, nous pourrions éventuellement remettre une copie papier au témoin.

  4   Q.  Monsieur Bakrac, reconnaissez-vous ceci ?

  5   R.  Oui, c'est moi qui ai dessiné ceci. C'est là que se trouvaient les

  6   différentes personnes dans le sous-sol.

  7   Q.  Vous souvenez-vous avoir dessiné ceci au cours de votre entretien avec

  8   un enquêteur du Tribunal en janvier 2003 ?

  9   R.  Oui, c'est à ce moment-là, effectivement, que j'ai dessiné ce croquis.

 10   Q.  Lorsque vous le voyez aujourd'hui, est-ce qu'il paraît encore exact ?

 11   R.  Oui, il est exact. Puisque l'homme malade, et je m'en souviens

 12   maintenant, il était couché là juste à côté de la fenêtre. Les frères

 13   Krstic étaient juste à côté de lui.

 14   M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais que l'on

 15   donne un numéro à ce document, un numéro de pièce pour l'Accusation.

 16   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce numéro P78.

 18   M. BLACK : [interprétation] Merci beaucoup. Voilà, ce document, nous devons

 19   plus nous y attarder.

 20   Monsieur le Président, peut-être serait-il opportun que nous interrompions

 21   nos travaux à présent, à moins que vous souhaitiez que je poursuive. J'en

 22   aurais pour cinq minutes à peu près. A vous d'en décider, Monsieur le

 23   Président.

 24   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci. Je vais accepter votre

 25   suggestion. Merci. Nous allons suspendre l'audience.

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  1   Monsieur Bakrac, nous allons suspendre l'audience à présent, et nous

  2   reprendrons l'audience demain après-midi. Il vous sera indiqué exactement à

  3   quel moment et nous reprendrons le reste de votre déposition.

  4   Merci beaucoup.

  5   --- L'audience est levée à 18 heures 57 et reprendra le jeudi 2

  6   décembre 2004, à 14 heures 15.

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