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1 Le mercredi 6 avril 2005
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 22.
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour,
7 Monsieur Jasovic, je vous rappelle que vous avez prêté serment au
8 début de votre déposition et je vous rappelle que ce serment s'applique
9 toujours. Il semble qu'il y ait un problème de son.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne comprends pas. Je ne comprends rien.
11 Je comprends maintenant.
12 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous rappelle que vous avez prêté
14 serment au début de votre déposition et que ce serment est toujours
15 d'application.
16 LE TÉMOIN: DRAGAN JASOVIC [Reprise]
17 [Le témoin répond par l'interprète]
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Black.
19 M. BLACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, avant de
20 poursuivre mon interrogatoire, le greffe a attiré mon attention sur un
21 point. Nous avons versé au dossier la pièce à conviction 210, hier et je
22 souhaiterais que cette pièce à conviction 210 soit placée sous pli scellé.
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Sous pli scellé.
24 M. LE GREFFIER : [interprétation] P210, à savoir l'intercalaire 26 est
25 placé sous pli scellé.
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1 Contre-interrogatoire par M. Black : [Suite]
2 Q. [interprétation] Bonjour Monsieur Jasovic.
3 R. Bonjour.
4 Q. M'entendez-vous et me comprenez-vous ?
5 R. Oui.
6 Q. Comme je vous l'ai dit hier si à quelque moment que ce soit, vous ne
7 comprenez pas ma question, n'hésitez pas à m'interrompre. Faites-le moi
8 savoir et je tâcherai de reformuler ? Comprenez-vous ?
9 R. Oui.
10 M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais que nous
11 passions pour ce sujet-ci à une audience à huis clos partiel.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Huis clos partiel.
13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
14 [Audience à huis clos partiel]
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4 [Audience publique]
5 M. BLACK : [interprétation]
6 Q. Monsieur Jasovic, je souhaiterais que vous examiniez le cliché qui
7 apparaît à l'écran devant vous. Est-ce que vous reconnaissez cet endroit ?
8 R. Il s'agit d'un cliché de la prison de l'UCK, ou plutôt la maison de
9 l'UCK.
10 M. BLACK : [interprétation] Je demanderais peut-être à
11 M. Younis de faire un gros plan.
12 Monsieur le Président, il s'agit ici d'un cliché qui apparaît à la page 20
13 de la pièce à conviction P006.
14 M. Younis, pourriez-vous peut-être balayer l'image vers la gauche ?
15 Q. Monsieur Jasovic, pourriez-vous examiner l'écran quelques instants ?
16 Reconnaissez-vous ce que vous venez de voir sur l'écran en face de vous ?
17 R. Oui. A droite, il y avait la prison de l'UCK et de l'autre côté il y
18 avait le quartier général de l'UCK. Cela est la maison à droite. Puis là,
19 on voit la porte en métal qui la sépare du quartier général.
20 Q. Merci beaucoup.
21 M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, aux fins de compte
22 rendu, je vous signale que le bâtiment qui se trouve à gauche est "le
23 bâtiment A", et le bâtiment à droite sera désigné comme étant "le bâtiment
24 B", dans la documentation.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] A gauche, si l'on regarde depuis la route
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1 principale.
2 M. BLACK : [interprétation]
3 Q. Merci.
4 Monsieur Jasovic, vous êtes-vous rendu dans l'un ou l'autre de ces endroits
5 lorsque vous vous êtes rendu sur place avec le témoin X en date du 1er août
6 1998 ?
7 R. Oui. M. Sparavalo, le témoin X, le responsable agréé du SUP de
8 Pristina, ainsi que moi-même, nous nous sommes rendus dans l'ensemble de
9 bâtiments.
10 Q. Merci. Nous allons poursuivre l'examen de la pièce à conviction 005.
11 M. BLACK : [interprétation] Monsieur Younis, je vous demanderais de bien
12 vouloir la faire apparaître à l'écran.
13 Q. Monsieur le Témoin, pourriez-vous examiner le cliché que vous voyez
14 apparaître à l'écran et nous dire si vous reconnaissez ce que vous voyez à
15 l'écran.
16 R. Oui. Je reconnais parce que j'y étais.
17 M. BLACK : [interprétation] Monsieur Younis, je vous demanderais de balayer
18 l'écran et d'aller vers la gauche de manière à ce que l'ensemble des
19 bâtiments puisse être vu par le témoin.
20 Bien. Je pense que vous pouvez balayer dans l'autre sens, s'il vous
21 plaît, Monsieur Younis. Vous pouvez vous arrêter sur ce point.
22 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, c'est le même
23 cliché que l'on trouve à la page 6 de la pièce à conviction numéro 6 de
24 l'Accusation. Elle porte comme légende, "Bâtiments A1."
25 Q. Monsieur Jasovic, est-ce que vous reconnaissez ce bâtiment à l'écran
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1 devant vous ?
2 R. Oui.
3 Q. Est-ce que vous avez visité les pièces à l'intérieur de ces bâtiments-
4 là ?
5 R. Oui, j'y suis allé avec le témoin X. Je suis entré non pas au rez-de-
6 chaussée mais je suis allé en fait au premier étage, à l'étage où se
7 trouvent deux pièces. Le témoin X m'a dit que c'était dans ces pièces qu'on
8 l'avait amené pour faire son interrogatoire et c'est là qu'il avait été
9 battu et passé à tabac.
10 M. BLACK : [interprétation] Monsieur Younis, pourriez-vous, s'il vous
11 plaît, nous faire défiler l'image de telle sorte que l'on puisse voir la
12 montée de l'escalier au bâtiment A1. Poursuivre et maintenant balayer
13 l'image de telle sorte que nous puissions voir l'intérieur de cette pièce.
14 Merci, Monsieur Younis.
15 Q. Est-ce que vous reconnaissez cette pièce, Monsieur Jasovic ?
16 R. Oui. Je les reconnais toutes les deux.
17 Q. Est-ce que vous avez été dans ces pièces, juste pour être bien sûr et
18 bien au clair.
19 R. Oui, ce jour-là, le 1 août 1998. Je suis entré dans ces deux pièces.
20 Q. Est-ce que ces pièces avaient une apparence différente par rapport au 1
21 août 1998, de ce que vous voyez maintenant devant vous à l'écran, si vous
22 parvenez à vous souvenir ?
23 R. Elles avaient une apparence très différente. Il y avait des choses qui
24 gisaient un peu partout; des postes de télévision, des magnétoscopes, des
25 appareils vidéo, et ainsi de suite. Il est probable que c'est au moment où
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1 l'état-major de l'UCK se préparait à quitter ce quartier général qu'il y a
2 eu une certaine confusion et qu'ils ont emporté certaines choses.
3 M. BLACK : [interprétation] Monsieur Younis, pourriez-vous, s'il vous
4 plaît, cliquer de telle sorte que nous puissions quitter la pièce, et
5 ensuite nous déplaçant vers la gauche. Nous verrons le bâtiment qui a comme
6 marque A2. En fait, pourriez-vous d'abord revenir un instant au bâtiment
7 A1, Monsieur Younis, s'il vous plaît.
8 Q. Monsieur Jasovic, est-ce que vous êtes rentré dans autres pièces en
9 plus de celles que nous venons de voir ?
10 R. Je suis allé sur la gauche, à l'intérieur du garage. Je crois que c'est
11 là à ma gauche. J'ai trouvé là une éponge et j'étais là, donc, avec X.
12 C'était en l'occurrence qu'il s'agissait d'un matelas en mousse, et le
13 témoin X a dit que Safet Hyseni et Seva Petro [phon] avaient dormi là. Dans
14 l'autre partie du garage, il y avait, d'après ce que j'ai vu, j'estime que
15 c'était probablement peut-être 20 tonnes de farine.
16 Q. Monsieur Jasovic, vous avez dit "à gauche", "à main gauche". Est-ce que
17 vous voulez dire la partie gauche de l'écran ou alors pouvez-vous expliquer
18 ce que vous entendez par cette expression.
19 R. En regardant depuis l'entrée par la porte.
20 Q. Bien.
21 M. BLACK : [interprétation] Monsieur Younis, pourriez-vous, s'il vous
22 plaît, faire un balayage par la droite.
23 Q. Monsieur Jasovic, pouvez-vous voir ce garage sur votre écran
24 maintenant ?
25 R. Oui.
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1 M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, Madame et Monsieur les
2 Juges, il s'agit de --
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a un véhicule à l'intérieur. Un véhicule
4 se trouve à l'intérieur. Cette partie qui est au-dessus n'avait pas encore
5 été construite; la partie qui est au-dessus du garage à l'époque, je veux
6 dire.
7 M. BLACK : [interprétation]
8 Q. Je vous remercie.
9 M. BLACK : [interprétation] Pour le compte rendu, il s'agit du cliché A6,
10 et cette image que nous voyons se retrouve à la page 14 de la pièce P006.
11 Monsieur Younis, pourriez-vous, s'il vous plaît, balayer vers la
12 gauche en suivant ce bâtiment. Vous arrêtez juste ici. Merci.
13 Pour le compte rendu, c'est le bâtiment A2.
14 Q. Monsieur Jasovic, reconnaissez-vous cet endroit ?
15 R. Oui, je reconnais l'endroit. C'est l'autre bâtiment devant la même
16 cour.
17 M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes actuellement
18 en train de regarder le même cliché à la page 5 de la pièce P6.
19 Q. Monsieur Jasovic, est-ce que vous êtes entré dans l'une quelconque de
20 ces pièces de ce bâtiment ?
21 R. Dans ce bâtiment, je ne suis entré dans aucune pièce, parce qu'avec M.
22 X, puisque c'était une grange -- il y avait là la prison et de l'espace
23 pour des objets hétéroclites.
24 Q. Bon, vous mentionnez une grange, une pièce pour des objets divers ou
25 hétéroclites. Est-ce que vous vous rappelez de quoi il s'agissait ?
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1 R. Je ne sais pas très bien comment décrire cela. En regardant à partir de
2 l'entrée vers la cour, du coté droit, la première pièce était pour
3 permettre un larder. C'était, en fait, une grange pour des vaches, pour du
4 bétail.
5 M. BLACK : [interprétation] Monsieur Younis, je vais vous demander d'abord
6 de cliquer sur le puis-là, puis je vais vous demander de balayer vers la
7 gauche pour voir si nous pouvons obtenir une image.
8 Q. Monsieur Jasovic, vous allez voir, nous suivons le bâtiment. Voilà une
9 autre vue de la même partie du bâtiment dont nous venons de parler.
10 M. BLACK : [interprétation] Monsieur Younis, pourriez-vous arrêter ici,
11 s'il vous plaît.
12 Q. Monsieur Jasovic, regardez l'écran qui est devant vous. Pourriez-vous
13 nous dire quelque chose sur ce que vous voyez.
14 R. Ceci, du coté gauche, par rapport à l'endroit où je suis assis, ceci
15 n'existait pas à l'époque. Mais étant donné que cette image est prise à
16 distance, je suppose que cela conviendrait probablement à une grange, je
17 pense.
18 M. BLACK : [interprétation] Monsieur Younis, pourriez-vous, s'il vous
19 plaît, maintenant passer à la photographie suivante à droite. C'est cela.
20 Q. Monsieur Jasovic.
21 R. Oui.
22 Q. M. Younis va d'abord balayer cette pièce de façon à ce que vous
23 puissiez la voir un instant.
24 M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, Madame et Monsieur les
25 Juges, pour le compte rendu, cette pièce a reçu une cote A4, et vous pouvez
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1 trouver les mêmes clichés aux pages 8 et 9 du document P006.
2 Q. Monsieur Jasovic, reconnaissez-vous cet endroit local ?
3 R. Oui, c'est une étable. C'est une étable.
4 Q. Est-ce que vous vous rappelez si le témoin X vous a dit quoi que ce
5 soit concernant ce local ?
6 R. Je me rappelle qu'il a dit qu'il avait été dans une pièce qui était
7 censée être pour du bétail et qu'il pouvait l'entendre, il pouvait entendre
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9 (expurgée)
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11 Q. Monsieur Jasovic, je voudrais vous rappeler de faire très attention
12 avec les noms.
13 M. BLACK : [interprétation] Je vais demander que l'on expurge ici le compte
14 rendu, Monsieur le Président, pour les noms qui ont été mentionnés. Je
15 présente mes excuses.
16 Q. Monsieur Jasovic, en plus du Témoin X, faites attention pour ce qui est
17 de mentionner les noms, parce que nous sommes en audience publique. Si vous
18 avez des doutes, sur le fait de savoir si vous pouvez donner un nom,
19 prononcer un nom, demandez. A ce moment-là, nous irons en audience à huis
20 clos partiel, si c'est nécessaire.
21 M. BLACK : [interprétation] Monsieur Younis, pourriez-vous, s'il vous
22 plaît, maintenant nous faire sortir de cette étable et nous présenter
23 l'image. Attendez, avant que vous fassiez cela.
24 Q. Monsieur Jasovic, l'image qui se trouve devant vous, est-ce que vous
25 vous rappelez quoi que ce soit d'autre par rapport à ce que vous avez
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1 devant vous ?
2 R. Je me rappelle l'endroit qui se trouve devant l'étable et je me
3 rappelle bien parce que c'est à cet endroit-là que nous nous étions lavés
4 les mains.
5 M. BLACK : [interprétation] Pourrais-je aller brièvement en audience à huis
6 clos partiel, Monsieur le Président.
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Audience à huis clos partiel.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en audience à huis clos
9 partiel.
10 [Audience à huis clos partiel]
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20 [Audience publique]
21 M. BLACK : [interprétation] Je vous remercie.
22 Q. Monsieur Jasovic, nous sommes en audience publique, donc, s'il vous
23 plaît, faites attention avec les noms.
24 M. BLACK : [interprétation] Monsieur Younis, est-ce que vous pourriez --
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je présente mes excuses. Parfois cela
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1 m'échappe et j'oublie.
2 M. BLACK : [interprétation]
3 Q. Vous n'avez pas besoin de vous excuser, ne vous préoccupez pas.
4 M. BLACK : [interprétation] Monsieur Younis, pourriez-vous s'il vous plaît,
5 maintenant, faire un balayage vers la droite et vous arrêter ici.
6 Maintenant, pourriez-vous poursuivre et faire un gros plan sur la porte de
7 cette pièce ? Allez-y, faites nous entrer dans la pièce. Il s'agit de cette
8 pièce marquée A5. Vous pouvez la voir, Monsieur le Président, Madame,
9 Monsieur les Juges, page 11, 12 et 13, de la pièce P006.
10 Q. Monsieur Jasovic, est-ce que vous reconnaissez l'image qui apparaît sur
11 votre écran ?
12 R. Oui, ceci est le garde-manger, le cellier. C'est là que X, qui avait
13 été enlevé, a été mis.
14 Q. Est-ce que cela avait une apparence différente le 1er août 1998 par
15 rapport à l'image que vous avez devant vous ?
16 R. En 1998, le 1er août, il y avait des matelas en mousse qui se trouvaient
17 là. Derrière la porte se trouvait un sceau en métal que les détenus
18 utilisaient pour leurs besoins, petites et grandes commissions. Ceci, c'est
19 que m'a dit X à ce sujet, lorsque nous étions là.
20 Q. Je vous remercie beaucoup.
21 M. BLACK : [interprétation] Monsieur Younis, pourriez-vous maintenant nous
22 faire sortir de cette pièce, nous montrer à nouveau, la cour, balayez un
23 peu vers la droite, s'il vous plaît. En fait, je crois que nous en avons
24 terminé avec la pièce à conviction P005.
25 Q. Monsieur Jasovic, est-ce que vous avez emporté quoi que ce soit lorsque
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1 vous avez quitté ce lieu, le 1er août 1998 ?
2 (expurgée)
3 (expurgée)et les autres calottes et ceintures sont restées là. Moi-même et mon
4 collègue Momcilo Sparavalo n'avons rien pris qui se trouvait sur place.
5 Q. Sans mentionner de noms, s'il vous plaît, savez-vous ce qui est arrivé
6 ensuite à ces calottes et ces ceintures ? Est-ce qu'elles ont été prises ?
7 R. Vous voulez dire que c'est X qui a pris cette calotte et cette
8 ceinture.
9 Q. Oui. Tout ce que je vous demande si vous savez ce qui s'est passé, ce
10 qui est arrivé à cette calotte et cette ceinture après que vous soyez
11 partis de cet endroit ?
12 R. Lorsque nous en sommes partis après avoir fait notre enquête sur place,
13 sur les lieux, qui était faite par le personnel habilité du SUP de
14 Pristina, moi-même, X et Momcilo Sparavalo, nous sommes allés au
15 secrétariat du ministère de l'Intérieur d'Urosevac à Urosevac. Mais avant
16 cela, nous nous sommes arrêtés au secrétariat de l'Intérieur à Pristina.
17 Lorsque nous sommes arrivés à Urosevac, X et moi-même sommes allés voir le
18 chef du secrétariat. J'ai rendu compte à l'officier supérieur, qui est le
19 chef, de ce que nous avions trouvé sur le théâtre du crime. Etant donné le
20 fait que X avait peur et était très troublé, le chef du secrétariat lui a
21 dit à X : Calme-toi, va te reposer et reviens dans deux jours au
22 secrétariat pour que l'on puisse enregistrer ta déposition et qu'on puisse
23 lancer des poursuites étant donné que l'on a affaire à quelque chose de
24 délictuel au criminel. En fait, il s'agit de terrorisme.
25 Pendant un moment, je suis resté avec X, je l'ai emmené dans mon
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1 bureau et X m'a remis la calotte et la ceinture en disant qu'il reviendrait
2 dans deux jours pour les prendre. A ce moment-là, nous ne lui avons pas
3 donné de reçu pour cette calotte et cette ceinture. Je n'ai pas inscrit
4 quoi que ce soit pour ce qui était des poursuites au pénal, toutefois, X
5 n'est pas revenu au secrétariat d'Urosevac après deux jours --
6 Q. Bien. Excusez-moi mais, je suis désolé de vous interrompre, pourrions
7 nous aller brièvement en audience à huis clos partiel Monsieur le
8 Président ?
9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] L'audience à huis clos partiel
10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en audience à huis clos
11 partiel.
12 [Audience à huis clos partiel]
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8 [Audience publique]
9 M. BLACK : [interprétation] Je vous remercie.
10 Q. Monsieur Jasovic, je voudrais revenir en arrière un instant. Vous nous
11 avez parlé de votre visite des lieux de ce bâtiment avec le Témoin X et
12 avant de retourner au bureau du SUP, pourriez-vous nous expliquer ce qui
13 s'est passé immédiatement après avoir quitté le bâtiment ? Est-ce que vous
14 vous êtes rendu dans d'autres endroits ?
15 R. Avec le chef de la police, nous avons essayé d'aller à Velika Stena,
16 c'était le théâtre du crime. C'est à cet endroit là que M. X nous a
17 expliqué que des personnes avaient été enlevées, avaient été alignées en
18 deux groupes et avaient été emmenées à partir de cet endroit, et avaient
19 été ensuite tuées sur ce site. Toutefois, lorsque nous sommes partis du QG,
20 enfin, de l'ancien quartier général, en direction de Velika Stena à
21 quelques centaines de mètres sur la route, nous avons essuyé des coups de
22 feu tirés par des fusils, c'était des terroristes siptars de ce qu'on
23 appelait l'UCK et nous avons dû nous retirer. C'est ce que nous avons fait
24 de façon à éviter d'avoir des blessés ou des victimes.
25 Q. Je vous remercie, Monsieur Jasovic. Je voudrais maintenant appeler
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1 votre attention sur le document qu'on regardait tout à l'heure et je vais
2 vous demander encore une fois de faire très attention à ne parler que de M.
3 X sans donner de noms. Maintenant, je me réfère à ce document que je pense
4 que vous voyez probablement à l'écran. Il s'agit du document qui est appelé
5 l'intercalaire 27, vous devriez l'avoir devant vous. Est-ce que vous avez
6 dactylographié ce texte, Monsieur le Témoin ? Lorsque vous l'avez
7 dactylographié --
8 R. Oui, ce document a été dactylographié comme on peut le voir dans la
9 note, le 5 août 1998 parce qu'on s'attendait à ce que M. X vienne et fasse,
10 en personne, la déposition qui devait permettre de commencer l'enquête.
11 Etant donné qu'il n'a pas comparu, il n'est pas venu, mon collègue Momcilo
12 Sparavalo, nous avons à ce moment-là rédigé cette note officielle.
13 Q. Je vous remercie. Prenez maintenant un moment pour regarder cette note
14 officielle si vous le voulez et dites-moi : est-ce que ceci constitue un
15 compte rendu complet de ce que vous a dit le témoin X le 1er Août 1998 et de
16 ce que, vous-même, vous avez vu lors de la descente sur les lieux dont vous
17 venez de parler
18 R. Je ne dirai pas que c'est un compte rendu complet parce que nous
19 n'avons pas inclus certains renseignements du fait que nous comptions qu'il
20 reviendrait nous voir ?
21 Q. Je vous remercie.
22 M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
23 Juges, voici un nouveau document. Il s'agit de la pièce à conviction
24 présentée par l'accusation numéro 210, on en a débattu pendant longtemps
25 lors d'une déposition d'un témoin protégé au cours d'un contre-
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1 interrogatoire et d'un interrogatoire principal. Je voudrais demander que
2 ce document soit admis et puisse être versé au dossier et reçoive une cote
3 et sois déposé sous pli scellé.
4 M. GUY-SMITH : [interprétation] Excusez-moi.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Guy-Smith.
6 M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, je voudrais objecter à ce que cette
7 pièce soit versée au dossier, notamment, la dernière réponse faite par le
8 témoin et que ce document est incomplet. Il ne reflète pas de façon exacte
9 ce qui s'est passé entre le moment où il a eu cette discussion et le témoin
10 dont on n'a pas donné le nom.
11 M. LE JUGE PARKER : [hors micro]
12 M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, je pense que oui. Je pense qu'en ce
13 qui concerne le document d'hier, c'est-à-dire que c'est un document - enfin
14 si je ne me trompe pas - document qui a été reconnu par le témoin. Si vous
15 voulez bien me donner un moment juste pour vérifier mes notes.
16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous voulez dire lorsque le témoin
17 était ici en train de faire sa déposition ?
18 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je veux dire au moment où le témoin, en
19 fait, était auditionné en ce qui concerne ce document. Le premier document
20 du 18 juillet, je crois -- 18 juillet, audition, document que le témoin
21 connaît, a lu et signé. Le deuxième document est un document du mois
22 d'août. On en a parlé, le témoin ne l'a pas reconnu. Alors, c'est soit
23 pendant l'audition du témoin en ce qui concerne les renseignements qui sont
24 fournis dans ce document. On nous a dit que ce document était incomplet.
25 Je n'en ai pas un exemplaire intégral. Je n'ai pas, non plus, le
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1 compte rendu intégral en ce qui concerne ce qu'a dit le témoin, le témoin
2 A, au sujet du document après l'intercalaire 27. Je ne suis pas vraiment en
3 mesure de faire valoir pourquoi ce n'était pas entièrement couvert, et je
4 ne vais pas essayer de le faire. Toutefois, nous pensons que les
5 renseignements dans le document de l'intercalaire 27 sont incomplets, et
6 sur ces bases, nous demandons qu'ils ne soient pas versés au dossier.
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Y a-t-il d'autres arguments ?
8 Monsieur Black.
9 M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais simplement
10 mentionner le fait que je pense que Me Guy-Smith s'est lui-même repris à
11 corriger ce qu'il disait à la fin de son intervention. Le témoin n'a pas
12 dit que le document était inexact, il a simplement dit qu'il était
13 incomplet. Je voudrais dire qu'au cours du contre-interrogatoire de ce
14 témoin protégé, et au cours de son interrogatoire principal, ces
15 renseignements, quels que soient les renseignements en question qui n'ont
16 peut-être pas été inclus, je pense quand même qu'il a totalement approuvé
17 le document.
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mes souvenirs ne sont pas tout à fait
19 complets pour le moment de ce qui s'est passé au cours du contre-
20 interrogatoire et de l'interrogatoire principal. Votre thèse c'est que ce
21 document a été présenté au témoin ?
22 M. BLACK : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'espère que le
23 conseil de la Défense me corrigera si je me trompe, mais je pense que ce
24 document lui a été présenté par le conseil de la Défense de M. Limaj, et je
25 ne suis pas sûr si par d'autres membres de la Défense, mais on lui a posé
Page 5306
1 précisément des questions à ce sujet.
2 [La Chambre de première instance se concerte]
3 M. GUY-SMITH : [interprétation] Si je peux faire une suggestion, puisque,
4 franchement parlé, ma mémoire n'est pas tout à fait assez précise, donc je
5 pourrais peut-être proposer --
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Me Topolski a été identifié ainsi que
7 M. Mansfield comme coupables.
8 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je ne pense pas que je l'ai fait et il se
9 peut que pour cela --
10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] --
11 M. GUY-SMITH : [interprétation] -- c'est la raison pour laquelle j'ai
12 demandé la parole. J'essayais d'y venir. Mais si je pouvais -- si les
13 membres de la Chambre veulent se réserver une décision jusqu'à ce que j'aie
14 un moment de faire une vérification du compte rendu, je serais tout à fait
15 heureux de pouvoir revenir sur ce point si vous en êtes d'accord.
16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, je pense que cela serait ce qui a
17 de plus pratique. Nous allons poursuivre pour le moment et nous y
18 reviendrons plus tard.
19 M. BLACK : [interprétation] Bien sûr, Monsieur le Président. Je vous
20 remercie pour ce point.
21 Je pense qu'il faudra que nous allions en l'audience à huis clos partiel
22 pour un moment.
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Audience à huis clos partiel.
24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en audience à huis clos
25 partiel.
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1 [Audience à huis clos partiel]
2 (expurgée)
3 (expurgée)
4 (expurgée)
5 (expurgée)
6 (expurgée)
7 (expurgée)
8 (expurgée)
9 (expurgée)
10 (expurgée)
11 (expurgée)
12 (expurgée)
13 (expurgée)
14 (expurgée)
15 (expurgée)
16 (expurgée)
17 (expurgée)
18 (expurgée)
19 (expurgée)
20 (expurgée)
21 (expurgée)
22 (expurgée)
23 (expurgée)
24 (expurgée)
25 (expurgée)
Page 5308
1 (expurgée)
2 (expurgée)
3 [Audience publique]
4 M. BLACK : [interprétation] Merci.
5 Q. Monsieur Jasovic, je vais vous poser des questions concernant un
6 certain nombre de noms. J'aimerais savoir si vous connaissez ces
7 individus ? Connaissez-vous Lutfi Xhemshiti ?
8 R. Oui, je le connais personnellement. C'est un garde forestier du village
9 de Crni Breg, municipalité de Lipjan. Je ne sais plus très bien quand, à
10 quelle date ou au cours de quel mois cela s'est passé, mais en 1998 il est
11 venu me voir au bureau à Urosevac, et m'a dit qu'au cours de ces rondes
12 dans la forêt, il était garde forestier, il a reçu des menaces de mort de
13 terroristes de Siptar de l'UCK. C'est ce que j'ai dit hier. Ces gens, les
14 Albanais qui travaillaient dans un certain nombre d'organismes d'Etat ou
15 d'entreprises publiques, étaient visés.
16 J'ai rencontré cette personne par le biais du responsable du service de
17 police chargé de la circulation au secrétariat de l'Intérieur d'Urosevac,
18 parce que Lutfi Xhemshiti était dans la même caserne que le chef chargé du
19 service de police de la circulation du SUP d'Urosevac. Ils ont servi tout
20 deux au sein de l'armée yougoslave. Je ne sais pas très bien où par contre.
21 Lui, Lutfi Xhemshiti, est venu se plaindre de ces menaces de mort auprès du
22 chef des services de police chargé de la circulation, et c'est lui qui me
23 l'a envoyé à mon bureau.
24 Q. Vous dites que Lutfi Xhemshiti est venu vous voir dans votre bureau,
25 mais était-il juste, lui, informateur pour la police ?
Page 5309
1 R. C'est faux. Il ne l'était pas. J'ai des collègues Siptars encore
2 aujourd'hui. Si les gens se fréquentent, cela ne veut pas dire pour autant
3 que ce sont des espions ou des informateurs.
4 Q. Quand est-il d'une personne qui vient et qui fait état d'un incident à
5 cette occasion; considérez-vous ces personnes ou cette personne comme des
6 informateurs ?
7 R. Le ministère de l'Intérieur est une entité légale. Tout problème, qu'il
8 s'agisse d'un simple délit à un crime, doit être signalé au secrétariat de
9 l'Intérieur le plus proche de l'endroit où la personne en question réside.
10 Ici, nous parlons de terroristes siptars de l'UCK qui avaient leurs hommes
11 de main, en quelque sorte, et ils plaçaient leurs espions devant les postes
12 de police, par exemple, à Stimlje ou à Urosevac, afin de voir qui parmi les
13 Siptars allaient et venaient. C'est une autre chose. Pour eux, aucun Siptar
14 ne devait, par exemple, demander un permis de port d'armes ou une carte
15 d'identité, ou un passeport, ou tout autre document délivré par le
16 secrétariat de l'Intérieur. Tous les pays en Europe ou ailleurs dans le
17 monde procèdent de la même manière.
18 Q. Merci. Un autre nom maintenant. Connaissiez-vous un certain Emin
19 Emini ?
20 R. Je connaissais M. Emin Emini. Il venait du village de Crnoljevo,
21 municipalité de Stimlje. Sa femme était du village de Racak, dans la
22 municipalité de Stimlje. Je sais que c'était un homme pauvre. Il avait plus
23 d'une centaine de chèvres, et il a été enlevé et emmené à la prison célèbre
24 de Lapusnik. Nous disposons également d'informations selon lesquelles son
25 frère, qui s'appelle Kepsni [comme interprété], pardon, j'oublie le nom
Page 5310
1 pour l'instant, a également été enlevé.
2 Q. Emin Emini était-il un formateur pour le compte de la police ?
3 R. D'après la logique des terroristes siptars, oui; mais à mon avis, c'est
4 faux.
5 Q. Connaissez-vous une personne appelée --
6 M. GUY-SMITH : [interprétation] Excusez-moi, je n'ai pas objecté jusqu'à
7 présent, mais je me vois contraint de le faire, particulièrement à la
8 lumière de la réponse qui est donnée à la ligne 9 à 18, et qui ne répond
9 pas à la question posée dans sa totalité d'ailleurs.
10 Quant à la dernière réponse donnée, je vais m'y opposer aux motifs qu'elle
11 manque de base et qu'elle ne reflète pas la connaissance dont dispose le
12 témoin. Je pense que la question portait sur le lien entre M. Jasovic et
13 ces individus et s'il les considérait comme étant des informateurs pour le
14 compte de la police. La question ne porte sur le fait de savoir si d'autres
15 les considéraient comme tels.
16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La question ayant été posée à
17 plusieurs reprises, à savoir, si telles ou telles personnes étaient ces
18 informateurs. Cette question semble avoir été posée sur une base
19 relativement générale, ce qui nous amène à nous poser la question de savoir
20 si le témoin peut répondre véritablement à la question, quant au statut à
21 la perception de la personne aux questions par les forces de police. Peut-
22 il parler en leur nom ou ne peut-il parler en sa propre qualité. Peut-être
23 que vous devriez clarifier la chose, Monsieur Black.
24 M. BLACK : [interprétation] Oui. Très bien. Je crois que l'objection de Me
25 Guy-Smith portait sur l'idée exprimée par le témoin concernant la logique
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1 des terroristes. Je suis sûr que ceci ne sera pas jugé par vous comme étant
2 des éléments de preuve importants.
3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bien, je crois, qu'hier et
4 aujourd'hui, nous avons déjà essayé d'évaluer la nature des éléments de
5 preuve de la déposition qui est faite aujourd'hui. Toutefois, je pense que
6 vous vous rendiez bien compte que nous ne pourrons accorder aucun poids à
7 ce genre de propos.
8 M. BLACK : [interprétation] Oui. Merci.
9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez apporter une clarification
10 sur l'élément important, s'il vous plaît.
11 M. BLACK : [interprétation] Je vais tenter de le faire.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.
13 M. BLACK : [interprétation]
14 Q. Monsieur Jasovic, hier et aujourd'hui, je vous ai posé à plusieurs
15 reprises la question de savoir si telles ou telles personnes étaient des
16 informateurs pour le compte de la police. Connaissez-vous tous les
17 informateurs qui étaient utilisés par le SUP dans votre zone d'action ?
18 R. Conformément au texte législatif en vigueur et aux règles régissant le
19 travail au sein du ministère de l'Intérieur, pour de qui est de cela, je ne
20 pourrais pas vous répondre. Si moi, par exemple, j'avais un informateur
21 attitré, mon collègue n'aurait pas connu l'identité de cette personne.
22 Q. D'accord. Lorsque vous avez répondu à mes questions, vous avez dit en
23 règle générale que ces personnes n'étaient pas des informateurs. Etait-ce
24 une réponse que vous avez basée sur les connaissances dont vous disposiez
25 ou était-ce simplement une déclaration de nature générale de votre part ?
Page 5312
1 R. J'ai fondé mes réponses sur les informations que j'ai obtenues. Je fais
2 référence aux personnes enlevées et je suis absolument certain qu'en ce qui
3 concerne les personnes que vous avez mentionnées, il ne s'agissait pas
4 d'informateurs. Ils n'informaient personnes. Ils n'étaient pas non plus
5 considérés comme des contacts amicaux. J'en suis pratiquement certain.
6 Q. Combien de temps avez-vous été policier dans cette région ?
7 R. Pendant six ans, parce que je connais très bien la zone de Stimlje. A
8 partir du 1er juillet 1975 jusqu'au 1er mai 1981. J'ai été également
9 commandant adjoint du poste de police d'Urosevac, et nous effectuions un
10 certain nombre de patrouilles ensemble.
11 Q. Merci. Pour être tout à fait clair concernant la réponse que vous avez
12 donnée, vous avez dit que vous étiez certain que ces personnes n'étaient
13 pas des informateurs. Comment avez-vous acquis cette certitude ? Pouvez-
14 vous nous le dire ?
15 R. Lorsque le ministère d'Intérieur d'Urosevac a été délocalisé et
16 transféré à Leskovac, j'ai trouvé le dossier contenant le nom des
17 différents informateurs officiels. Peut-être qu'à Urosevac je n'aurais pas
18 eu accès à ces informations, mais j'y ai eu accès à Leskovac. Etant donné
19 tous les autres problèmes auxquels nous étions confrontés, nous étions deux
20 à travailler sur ces questions et sur les opérations. Nous conservions sous
21 la main le dossier contenant les noms de tous les informateurs, et autres
22 contacts.
23 Je ne sais pas si j'étais suffisamment clair.
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ce dossier a-t-il été communiqué ? A-
25 t-il été obtenu ?
Page 5313
1 M. BLACK : [interprétation] Non, non, Monsieur le Président. C'est la
2 première fois que je n'entends parler.
3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bien, si je comprends bien ce que nous
4 dit le témoin à ce stade, il maintiendrait la confidentialité des noms de
5 ces informateurs, ces informateurs qui ne seraient pas connus d'autres
6 officiers de police; et, en clair, normalement, il n'aurait pas été lui-
7 même au courant du nom des informateurs d'autres officiers. C'est là la
8 seule base factuelle qui est présentée. Or, ce dossier ne nous a pas été
9 communiqué. C'est bien exact ?
10 M. BLACK : [interprétation] Je pense que c'est exact, Monsieur le
11 Président. Je crois qu'il fonde son évaluation sur l'ensemble des
12 informations qu'il a acquises en tant qu'officier de police dans cette zone
13 au cours des années qu'il a évoquées ainsi que sur la liste dont il dit
14 qu'il a vue après avoir quitté les lieux.
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, mais en règle générale, vous ne
16 dépassez pas une position de nature tout à fait générale. En général, un
17 officier de police ne savait pas qui était les informateurs des autres
18 officiers de police.
19 M. BLACK : [interprétation] Oui. J'aimerais pouvoir être plus précis. C'est
20 ce que j'ai tenté de faire, en tout cas. J'ai demandé : si, à sa
21 connaissance, l'une ou l'autre de ces personnes était un informateur pour
22 le compte de la police. Si je peux faire mieux, je n'hésiterai pas à le
23 faire --
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous ai donné mon impression
25 concernant le poids de ces éléments de preuve et les informations qui
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1 viennent de nous être communiquées, je vous en prie; de même, Me Guy-Smith
2 aura la possibilité de le faire en temps voulu. Il me semble que nous avons
3 ici une petite base factuelle.
4 M. BLACK : [interprétation] Me donnez-vous un instant, Monsieur le
5 Président pour consulter mes collègues.
6 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
7 M. MANSFIELD : [interprétation] Monsieur le Président, pendant cette
8 concertation, puis-je vous dire une chose. Il serait bon de savoir si ce
9 registre existe, parce que ce n'est pas la première fois qu'il en est fait
10 mention. Il en parlé hier également par rapport à certains informateurs.
11 Nous aimerions savoir si ce document existe. S'agit-il du registre conservé
12 à propos de son propre informateur, de ses propres informateurs ou s'agit-
13 il d'un registre qui contient le nom de ses informateurs ainsi que le nom
14 d'autres personnes ? C'est peut-être ce dont il parle maintenant. Mais s'il
15 doit témoigner sur la base de l'un ou l'autre de ces deux registres. Nous
16 aimerions savoir s'ils existent, où ils se trouvent et s'il y aurait une
17 quelconque possibilité d'y avoir accès.
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je crois que ceci a interrompu les
19 concertations qui avaient lieu de l'autre côté de la salle.
20 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
21 [Le conseil de la Défense se concerte]
22 M. BLACK : [interprétation] Merci de votre patience, Monsieur le
23 Président. Je vais faire un peu de mon mieux pour creuser un peu la
24 question.
25 Q. Monsieur Jasovic, vous avez allusion à ce registre, ce dossier. Existe-
Page 5315
1 t-il toujours ?
2 R. Je suppose. Il doit se trouver au secrétariat de l'Intérieur de
3 Leskovac.
4 Q. Est-ce un document auquel ce Tribunal pourrait avoir accès ?
5 R. Je n'en sais rien. Il faut poser la question aux autorités supérieures
6 parce que c'est un document strictement confidentiel.
7 Q. A quelle autorité supérieure faites-vous référence. Qui devrait-on
8 contacter pour obtenir ce document si toutefois, nous ou la Défense
9 souhaitions l'obtenir ?
10 R. Ceci n'est pas de mon ressort. C'est au responsable du secrétariat
11 d'Urosevac, il serait possible, sans doute, à même de répondre à votre
12 question.
13 Q. Monsieur Jasovic, outre ces contacts attitrés ou officiels, vous dites
14 que vous êtes tout à fait certains que ces personnes n'étaient pas non plus
15 des contacts amicaux ? Sur quelle base fondez-vous pour dire cela ?
16 R. Pouvez-vous répéter votre question, s'il vous plaît ?
17 Q. Oui. Je crois que, dans une réponse que vous avez donnée à l'une de mes
18 questions il y a quelques instants, vous avez dit que vous étiez certain
19 que ces personnes n'étaient ni des contacts officiels, ni des contacts
20 amicaux. J'aimerais maintenant que vous vous concentriez sur la deuxième
21 partie de la réponse, à savoir les contacts amicaux. Comment savez-vous que
22 ces hommes n'étaient pas des contacts amicaux pour la police ou des
23 informateurs pour le compte de la police, mais en l'occurrence, des
24 informateurs officieux ?
25 R. Pour que les choses soient bien claires, un contact amical n'est pas la
Page 5316
1 même chose qu'un contact officiel. C'est une personne qui, de son plein
2 gré, entre en contact avec les policiers dans les bureaux ou dans un autre
3 lieu afin de fournir certaines informations qui présentent un intérêt pour
4 les services de police.
5 Cette personne n'est pas là dans une qualité d'informateur officiel. Seuls
6 les collaborateurs de la police, les informateurs de la police sont
7 considérés comme officiels. Il a également d'autres contacts sur le
8 terrain, des contacts amicaux, et cetera. Je ne sais pas si j'ai été bien
9 clair. Un collaborateur fournit des informations qui représentent un
10 intérêt pour le service et il le sait. On le lui dit et il est au courant
11 de cela. Ce qui n'est pas nécessairement le cas pour d'autres types de
12 contact. Il n'a même pas à le savoir. Je ne sais pas si j'ai été bien
13 clair.
14 Q. Connaissiez-vous les contacts amicaux de mon collègue, saviez-vous qui
15 ils étaient ?
16 R. Non, je ne le savais pas et je ne cherchais pas à le savoir. Dans
17 chaque pays du monde, personne ne vous dirait qui sont ses contacts amicaux
18 et vous ne poseriez pas la question. Vous ne demanderiez pas qui sont les
19 collaborateurs, les informateurs ou les contacts amicaux, les contacts
20 présents sur le terrain d'un collègue. Si un collègue soumet une note
21 officielle sur des questions de terrorisme, soumet ce document à un
22 supérieur, notre supérieur en l'occurrence, ce document pourrait me
23 parvenir dans le cadre de mon travail. Il pourrait être dit que les
24 informations ont été obtenues auprès d'un contact officiel, mais ce n'est
25 pas une obligation. Il pourrait avoir fourni des informations qui lui
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1 auront été communiquées par un contact amical. Un collaborateur, un
2 informateur, un contact amical ou un contact de terrain doit être protégé
3 de manière à ce que cette personne et sa famille n'en subissent pas les
4 conséquences.
5 Q. Monsieur Jasovic, étant donné l'explication que vous venez de nous
6 fournir. Sur quelle base affirmez-vous que ces personnes n'étaient pas des
7 contacts amicaux ?
8 R. Je n'ai pas dit que ce n'était pas des amis ou des contacts amicaux.
9 J'ai dit qu'il ne s'agissait pas de contacts officiels. En d'autres termes,
10 ce n'étaient pas des collaborateurs ou des informateurs officiels. C'est
11 tout ce que je dis. En ce qui concerne les contacts amicaux, c'est autre
12 chose. Il se peut que j'aie un ami qui soit un Siptar et, autour d'un
13 verre, dans un café, il sera peut-être amené à me donner une information.
14 Q. Monsieur le Président, le moment est-il bien choisi pour faire la
15 pause ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que --
17 M. BLACK : [interprétation]
18 Q. Pardon, si vous souhaitez ajouter quelque chose, Monsieur Jasovic,
19 n'hésitez pas.
20 R. J'allais dire que personne ne demanderait à un collègue le nom de ses
21 contacts, qu'ils soient officiels ou officieux, parce que vous pouvez faire
22 appel à l'un ou à l'autre, aux uns ou aux autres. Mais un collègue
23 présentant des éléments d'information à un supérieur pourra souhaiter que
24 cette personne devienne un informateur officiel ou un collaborateur
25 officiel.
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1 Q. Monsieur Jasovic, en ce qui concerne votre propre cas, et non pas celui
2 de vos collègues, les personnes dont nous avons parlées, Agim Ademi,
3 Shyqyri Zymeri, Vesel Ahmeti, Adem Ramadani, Shefqet Ramadani, ces hommes,
4 l'un ou l'autre d'entre eux, étaient-ils des informateurs, contacts
5 officiels ou des contacts amicaux pour votre compte ?
6 R. A l'exception de la personne que j'ai évoquée hier, aucun de ces hommes
7 n'étaient des informateurs, ou ne faisaient partie de mes informateurs.
8 Q. Bien. Vous avez dit : "à l'exception de la personne que j'ai évoquée
9 hier", c'est bien la personne dont vous nous avez parlé hier après-midi et
10 que vous avez qualifiée de contact officiel, n'est-ce pas ?
11 R. Oui, effectivement, c'est bien la personne à laquelle je fais
12 référence.
13 Q. Vous dites : "aucun d'entre eux ne faisaient partie de mes
14 informateurs." Cela veut-il dire qu'il s'agissait d'informateurs officieux,
15 s'agissaient-ils de contacts amicaux qui éventuellement auraient pu vous
16 apporter des informations ?
17 R. Non plus, ils ne faisaient pas partie de mes contacts amicaux. Il m'est
18 arrivé de m'asseoir autour d'un verre dans un café avec certains d'entre
19 eux. Cela ne veux pas dire pour autant que c'était des contacts amicaux. Ce
20 pouvait être de simples amis. D'après les règles, un contact amical, c'est
21 quelque chose de différent. Cela n'a rien à voir avec le fait que je
22 m'assois autour d'un verre dans un café avec un ami.
23 Q. Expliquez la différence entre un contact amical et un ami, s'il vous
24 plaît.
25 R. J'ai de nombreux amis qui sont Siptars, mais je n'ai jamais demandé à
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1 un ami personnel de me fournir des informations officielles. Ceci étant
2 dit, il se peut qu'un ami se rende dans mon bureau pour me fournir des
3 informations à titre officiel. Cela n'est pas impossible. Je ne sais pas
4 comment vous l'expliquer. Un contact à titre amical, c'est un ami qui
5 fournit une information mais ce n'est pas pour autant que j'abuserais de
6 mes relations amicales, puisque les informations, je pourrais les obtenir
7 de la part d'autres personnes. Mes amis, je veux qu'ils restent mes amis.
8 Mes contacts inscrits officiellement, je veux qu'ils restent mes contacts
9 officiellement inscrits. Je ne demanderais jamais à un ami et je ne
10 contraindrais un ami à me fournir des informations. Je n'accepterais cette
11 information que s'il me l'amène de plein gré au bureau de police pour faire
12 état d'un crime ou d'un délit, ou parce qu'il souhaite nous dire qu'il sait
13 qui pourrait être l'auteur de tel ou tel crime. Je ne sais plus comment
14 vous l'expliquer. La personne qui a rédigé les règles de service aurait
15 bien du mal à vous l'expliquer aussi j'ai l'impression.
16 Q. Merci beaucoup, Monsieur Jasovic. Je crois que vous avez vraiment fait
17 de votre mieux, peut-être le moment est-il venu de faire une pause.
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous reprendrons nos travaux à 16
19 heures 20.
20 --- L'audience est suspendue à 15 heures 48.
21 --- L'audience est reprise à 16 heures 23.
22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Black
23 M. BLACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
24 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
25 M. BLACK : [interprétation]
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1 Q. Monsieur Jasovic, connaissez-vous Xheladin Ademaj ?
2 R. Oui, je le connais.
3 Q. Comment le connaissez-vous ?
4 R. Je le connaissais à l'époque où je travaillais comme policier, au poste
5 de police de Stimlje.
6 Q. Savez-vous quelle est sa profession ?
7 R. De profession, il est meunier. J'ai fait sa connaissance à l'époque où
8 j'étais policier en patrouille dans le village de Petrovo et dans d'autres
9 villages, je me suis rendu chez lui à Petrovo. Je l'ai connu par
10 l'entremise de certains de mes collègues d'origine ethnique albanaise.
11 Q. Avez-vous entretenu des contacts avec lui au cours de l'année 1998 ?
12 R. Non. Je n'ai pas entretenu de contacts avec lui. Il m'est difficile de
13 le dire. Il me semble que c'est à partir de la fin 1997 que j'ai cessé
14 d'entretenir des contacts avec lui.
15 Q. Savez-vous s'il lui est arrivé quelque chose, quoi que ce soit au cours
16 de l'année 1998 ?
17 R. On m'a informé du fait qu'il avait été enlevé et emmené par la force
18 par des membres de ce qu'on appelait l'UCK, et qu'on l'avait emmené par la
19 force au camp de Lapusnik. J'ai appris cela au début du mois du mois de
20 juillet 1998.
21 Q. Vous a-t-on dit ce qu'il lui était arrivé suite à cela ?
22 R. Vous voulez dire au camp de Lapusnik ?
23 Q. Oui, à quelque moment que ce soit après son enlèvement. Savez-vous s'il
24 lui est arrivé quelque chose à quelque moment que ce soit après son
25 enlèvement ?
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1 R. Après son enlèvement, on l'a emmené à la prison de Lapusnik. J'ai
2 appris, par la suite mais je ne sais plus comment, qu'il était parvenu à
3 s'évader au moment où on les avait mis en rang en 1998 et qu'il avait été
4 emmené à Velika Stena. Je ne sais pas comment il est parvenu à rester en
5 vie. On m'a contacté après le 25 juillet. Mon collègue l'a contacté par
6 téléphone, Srboljub Vojinovic l'a contacté. Il a dit que Xheladin Ademaj
7 l'avait contacté depuis la Suisse, pour dire qu'il était en bonne santé et
8 en sûreté. J'ai demandé à mon collègue s'il avait expliqué les
9 circonstances dans lesquelles il avait été enlevé, et tout ce qui était
10 autour de son enlèvement, mais il a dit qu'il ne pouvait pas me le dire,
11 qu'il avait peur et apparemment il pensait que son téléphone était sur
12 écoute, sa ligne téléphonique était sur écoute. Ce que je vous dis, je le
13 tiens de Srboljub Vojinovic.
14 Q. Pour autant que vous le sachiez, Monsieur Jasovic, Xheladin Ademaj a-t-
15 il été, à quelque moment que ce soit, un agent, un contact pour la police
16 ou un informateur pour la police ?
17 R. Il n'était pas mon informateur officiel. Je peux vous dire qu'il
18 n'était pas non plus un informateur de mes autres collègues. Il est connu
19 parce que la plupart des Serbes achetaient leur farine chez lui, chez
20 Xheladin Ademaj, dans son moulin.
21 Q. Merci. Je souhaiterais que vous examiniez à présent le document à
22 l'intercalaire 11 dans le classeur que vous avez sous les yeux.
23 M. BLACK : [interprétation] Dont la cote ERN est K032-7360. C'est une
24 déclaration complémentaire portant la date du 24 juillet 1998.
25 Q. Monsieur Jasovic, je vous invite à examiner rapidement ce document. Une
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1 fois que vous l'aurez fait, je vous demanderais de bien vouloir nous dire
2 qui a recueilli cette déclaration ?
3 R. Cette déclaration a été recueillie par mon collègue, Momcilo Sparavalo
4 et par moi-même.
5 M. BLACK : [interprétation] Peut-on passer à huis clos partiel, s'il vous
6 plaît, Monsieur le Président ?
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Allons-y.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en audience à huis clos
9 partiel.
10 [Audience à huis clos partiel]
11 (expurgée)
12 (expurgée)
13 (expurgée)
14 (expurgée)
15 (expurgée)
16 (expurgée)
17 (expurgée)
18 (expurgée)
19 [Audience publique]
20 M. BLACK : [interprétation]
21 Q. Monsieur Jasovic, je souhaiterais que vous examiniez -- c'est à peu
22 près à la moitié de la page dans la version en B/C/S. Je voudrais vous lire
23 le passage suivant.
24 Il est indiqué : "Lorsque des actions terroristes étaient commises contre
25 des membres de l'armée ou contre des membres de la police sur une section
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1 de la route principale entre les villages" -- et ensuite c'est illisible.
2 Pourriez-vous le lire ?
3 R. Le village de Belince.
4 Q. Le village que vous venez de mentionner, c'est quel village ?
5 R. Le village de Belince, municipalité de Stimlje, jusque sur les hauteurs
6 du village de Crnoljevo.
7 Q. Merci. Nous allons poursuivre. "Les terroristes de la zone de Lapusnik
8 et Malisevo, commandés par Celik qui était à Malisevo, ont apporté leur
9 concours aux terroristes mentionnés dans ma déclaration précédente. J'ai
10 entendu dire que Celik était en compagnie d'un ancien policier du village
11 de Racak dont le pseudonyme est Qerqiz qui avait une fonction relativement
12 élevée de quelque type que ce soit dans ce qu'on appelait l'UCK. Je sais
13 aussi que les terroristes de Lapusnik avaient été entraînés à l'utilisation
14 de fusils mitrailleurs et de lance-grenades. Cet homme était le commandant
15 de ce qu'on appelait l'UCK dans la zone entre Lapusnik et Urosevac."
16 Monsieur Jasovic, la question que je vous pose à présent est la suivante :
17 cette information vous a-t-elle été remise par la personne dont nous avons
18 évoqué le nom en audience à huis clos partiel ?
19 R. Oui. C'est exact.
20 Q. Merci. Monsieur Jasovic, vous pouvez refermer le classeur à présent.
21 M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
22 Juges, je n'ai plus de questions à ce stade-ci.
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.
24 M. BLACK : [interprétation] Une chose seulement, Monsieur le Président, je
25 ne sais pas s'il serait souhaitable que nous revenions à l'intercalaire 27
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1 à ce stade-ci.
2 M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui.
3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] On lui donnera un numéro de pièce à
4 conviction à charge.
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Intercalaire 27, pièce à conviction à
6 charge P211, sous pli scellé.
7 M. BLACK : [interprétation] Merci beaucoup.
8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous êtes à pied d'śuvre, Monsieur
9 Topolski, vous avez l'air fin prêt de bien des manières à vrai dire.
10 M. TOPOLSKI : [interprétation] Votre information, Monsieur le Président,
11 est aussi exacte que la mienne.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Probablement la même source.
13 M. TOPOLSKI : [interprétation] Oui, j'ai demandé à être le premier et mes
14 distingués et éminents collègues ont convenu de me laisser poser mes
15 questions en premier.
16 Contre-interrogatoire par M. Topolski :
17 Q. [interprétation] Monsieur Jasovic, je représente conjointement avec Me
18 Powles, à mes côtés, Isak Musliu. Pensez-vous que le terme "Siptar" soit un
19 terme péjoratif à l'égard des Albanais ?
20 R. Dans les écoles primaires et secondaires, on m'enseignait ce qu'on
21 appelait la langue Siptar. J'ai remarqué à la télévision que lorsque Ramush
22 Haradinaj, l'ancien premier ministre, c'était sur Palma Plus, une chaîne de
23 télé située à Jagodina, lorsque cette chaîne de télé interviewait l'ancien
24 premier ministre, il disait : "Une jam Siptar", qui en traduction signifie
25 : "Je suis Siptar". A mon sens, cela est mon avis personnel, il ne s'agit
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1 pas d'un terme péjoratif.
2 Q. Est-ce que c'est l'équivalent de traiter une personne de couleur noire,
3 un nègre ?
4 R. Là, je serais incapable de vous répondre. Je ne le sais pas. Je suis né
5 au Kosovo-Metohija. Je ne suis pas né ailleurs, et par conséquent comment
6 voulez-vous que je réponde à votre question ?
7 Q. Je vous serais très reconnaissant au nom du client que je représente,
8 qui estime que ce terme est très péjoratif. Je vous demanderais de ne plus
9 utiliser ce terme, s'il vous plaît. Me comprenez-vous ?
10 R. C'est mon avis.
11 Q. Je vous comprends, mais je vous demande de ne plus utiliser ce terme.
12 Me comprenez-vous ?
13 Vous souriez, Monsieur Jasovic. Cela vous amuse-t-il ?
14 R. Je ne suis pas sûr que ce soit correct.
15 Q. Etes-vous d'accord avec moi lorsque je dis que le point de départ de
16 l'ordre du jour politique de M. Milosevic à la fin des années 1980
17 consistait à restaurer le contrôle serbe de Kosovo ? Etes-vous d'accord
18 avec moi sur ce point ?
19 R. Je ne sais pas. Je ne suis pas un politique. Je ne peux pas répondre à
20 cette question.
21 Q. Si, Monsieur, vous êtes un Serbe loyal, vous pouvez répondre à cette
22 question. C'était là le programme de Milosevic, et c'est un programme avec
23 lequel vous marquez votre plein accord, n'est-ce pas ?
24 R. Je ne sais pas. Je ne suis pas un politique. Je ne sais pas comment
25 répondre à votre question.
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1 Q. De façon franche et honnête, ce serait un bon point de départ, Monsieur
2 Jasovic. C'était le point de départ du contrôle qu'on allait récupérer sur
3 le Kosovo. C'est ce qui figurait au programme de M. Milosevic. C'est ainsi
4 qu'il a réussi à se faire élire au pouvoir, et vous étiez d'accord avec M.
5 Milosevic, n'est-ce pas ?
6 R. Comme je vous l'ai dit, je ne suis pas un politique.
7 Je respectais les lois et la constitution de la République de Serbie.
8 J'accomplissais mon devoir en respectant la constitution et les lois et en
9 respectant le droit des affaires intérieures, les règles du ministère de
10 l'Intérieur, et je respectais les règles de service du MUP de la République
11 de Serbie. Je ne faisais qu'accomplir mon devoir.
12 Q. Vous accomplissez votre devoir et vous respectez la loi et la
13 constitution de la République de Serbie. Est-ce que c'est là votre
14 déposition ?
15 R. Oui, c'est exact.
16 Q. Est-ce que c'est vrai ?
17 R. Vous voulez dire que je travaillais en respectant les règles et la
18 constitution de la République de Serbie ?
19 Q. Non. J'entends par là que vous avez violé la loi plus souvent que vous
20 ne l'avez respectée; c'est ce que je vous dis, Monsieur Jasovic. Est-ce que
21 vous êtes d'accord avec moi ou est-ce que vous n'êtes pas d'accord avec
22 moi ?
23 R. Non, ce n'est pas vrai que j'ai violé la loi. J'ai travaillé en
24 respectant les lois de la Serbie et la constitution au titre de la loi du
25 ministère de l'Intérieur et les règles de service du ministère de
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1 l'Intérieur.
2 Q. Peut-être pourriez-vous marquer votre accord avec ce point-ci, puisque
3 vous étiez sur place après 1998, au Kosovo, la bataille, après que l'UCK a
4 commencé à émerger, la bataille visait à récupérer ou à rétablir le
5 contrôle serbe. Vous êtes d'accord avec cela ?
6 R. Je ne peux pas être d'accord avec vous.
7 Q. Vous ne pouvez pas être d'accord avec moi. Voyons si vous pouvez être
8 d'accord avec ceci : Je prétends que Belgrade et tous ses agents, et vous
9 comptiez au nombre des agents de Belgrade, ont utilisé comme prétexte la
10 lutte des insurgés de l'UCK pour lancer une campagne nouvelle de nettoyage
11 ethnique au Kosovo. Vous étiez un des rouages d'une machine serbe visant à
12 rétablir le contrôle serbe sur le Kosovo. Est-ce que vous êtes d'accord
13 avec cela ou est-ce que vous n'êtes pas d'accord avec cela ?
14 R. Je ne suis pas d'accord et ce n'est pas exact.
15 Q. Vous et vos collègues, Vojinovic, et Sparavalo en particulier, et vos
16 hommes, faisiez partie des processus et politiques de Belgrade visant à
17 nettoyer ethniquement le Kosovo. C'est bien l'objectif que vous desserviez
18 en 1998, ainsi qu'avant 1998 et après 1998. Est-ce que vous êtes d'accord
19 ou est-ce que vous n'êtes pas d'accord ?
20 R. Je ne suis pas d'accord parce que ce n'est pas exact. Je vous ai déjà
21 dit que je travaillais en respectant les droits et la constitution de la
22 République de Serbie.
23 Q. Je prétends que vous et vos collègues et les hommes qui étaient sous
24 vos ordres, vous êtes livrés à des intimidations sur la personne de civils
25 innocents. Etes-vous d'accord ou n'êtes-vous pas d'accord ?
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1 R. Je ne suis pas d'accord parce que je ne pourrais pas me livrer à des
2 intimidations sur quoi que ce soit. Je travaillais dans un bureau du
3 secrétariat de l'intérieur de la République de Serbie.
4 Q. Je prétends que vous et vous collègues, vous êtes livrés à de mauvais
5 traitements, avez infligé de mauvais traitements à des civils de la
6 communauté albanaise. Est-ce que vous êtes d'accord ou est-ce que vous
7 n'êtes pas d'accord ?
8 R. Cela n'est pas exact. Mais vous êtes libre à vous d'avoir une opinion.
9 Q. Je n'ai pas d'opinions. Je présente une thèse et des arguments. Je
10 prétends que vous avez torturé des membres de la communauté albanaise.
11 Etes-vous d'accord ou n'êtes-vous pas
12 d'accord ?
13 R. Je ne suis pas d'accord avec cela.
14 Q. Je prétends que vous avez assassiné des membres de la communauté
15 albanaise, vous-même et vos collègues. Etes-vous d'accord ou n'êtes-vous
16 pas d'accord ?
17 R. Je vous affirme que nous n'avons pas tué d'albanais.
18 Q. Je prétends, et je vous le dis en votre présence comme je l'ai dit il y
19 a de cela de nombreux mois, et j'étais dans la même position que
20 maintenant, que vous êtes un boucher. Est-ce que vous êtes d'accord ou est-
21 ce que vous n'êtes pas d'accord ?
22 R. Cela n'est pas exact. Je ne suis pas d'accord.
23 Q. Le SUP faisait-il partie de la machinerie d'Etat Serbe; oui ou non ?
24 R. J'avais mon propre mandant et pour répondre à cette question, ce n'est
25 pas à moi qu'il faudrait la poser, mais au chef du secrétariat de
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1 l'intérieur d'Urosevac.
2 Q. Entendez-vous par là, David Gajic ?
3 R. Vous voulez bien répéter la question, s'il vous plaît ?
4 Q. Le chef du secrétariat de l'intérieur, dont vous venez de parler, à
5 Urosevac, est-ce qu'il s'agit de David Gajic ?
6 R. A cette époque là, le chef -- vous voulez dire en 1998 ?
7 Q. Oui.
8 R. Le chef du secrétariat de l'intérieur d'Urosevac à l'époque était
9 Bogoljub Janicevic.
10 Q. La question que je vous pose est la suivante : vous y travailliez, vous
11 faisiez partie de la machinerie d'Etat serbe en tant qu'employé du SUP; oui
12 ou non ?
13 R. Je ne sais pas comment répondre à cette question.
14 Q. Franchement et honnêtement, Monsieur Jasovic. Vous y travailliez. Vous
15 occupiez une fonction. Vous en étiez le commandant à certain moment. Cela
16 faisait-il parti de la machinerie d'Etat ? Est-ce que vous comprenez ce que
17 j'entends par là ? Oui, vous le comprenez, n'est-ce pas ?
18 R. Je vous ai déjà dit que j'avais mes attributions, et mes attributions
19 étaient travailler conformément aux lois et à la constitution de la
20 République de Serbie, au titre de la législation du ministère de
21 l'Intérieur de la République de Serbie ainsi qu'en conformité avec les
22 règles de service du ministère de l'Intérieur de Serbie.
23 Q. Dans votre déclaration que vous avez faite aux enquêteurs de ce
24 Tribunal, vous avez indiqué qu'une de vos attributions portait l'intitulé,
25 "délinquance politique." Qu'est-ce que la délinquance politique, Monsieur
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1 Jasovic ?
2 R. Suivant les ordres de responsable en charge, le chef du secrétariat,
3 ainsi qu'avec des collègues de la Sécurité d'Etat, je travaillais à des
4 tâches liées à l'établissement de quartier général de l'UCK. Il s'agissait
5 d'identifier pour moi, il s'agissait d'identifier les huiles de l'UCK.
6 Q. Délinquance politique, est-ce que cela ne signifie pas que vous
7 traitiez comme étant un ennemi toute personne marquant un désaccord avec
8 vous ? Est-ce que ce n'est pas très précisément cela que cela signifie ?
9 R. Je vous demanderais de bien vouloir répéter la question.
10 Q. Un délinquant politique est une personne qui n'est pas d'accord avec la
11 vue serbe du monde. C'est cela la réalité, n'est-ce pas ?
12 R. Un délinquant politique, à mon avis, c'est une personne qui enlève des
13 gens, qui inflige des mauvais traitements à des gens, qui torture des gens.
14 Q. Dans votre déclaration écrite au TPY, paragraphe 5 de cette déclaration
15 écrite, vous dites : "Suite aux protestations qui ont eu lieu en 1989 et
16 1990, la population albanaise exigeait l'indépendance, revendiquait
17 l'indépendance. Les Albanais revendiquaient leur propre constitution et
18 refusaient de se rendre dans les écoles, de se rendre à leur travail,
19 conformément aux lois de la République de Serbie. Ceci étant pour voie de
20 conséquence, la plupart des Albanais ont abandonné leur poste, pas
21 simplement dans la police, mais aussi dans d'autres lieux de travail."
22 Est-ce que vous diriez très franchement et honnêtement que les
23 Albanais ont quitté leur emploi librement et de leur plein gré ou est-ce
24 qu'ils ont été contraints à quitter leur poste ? Quelle est la vérité,
25 Monsieur Jasovic, selon vous ?
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1 R. La vérité est la suivante : je travaillais à Urosevac au secrétariat de
2 l'Intérieur. Nous avons supplié nos collègues pour qu'ils restent en poste.
3 Dans ces circonstances, certains sont restés à leur poste, ont continué
4 d'accomplir leur devoir et de faire leur travail.
5 Q. Qu'en est-il des enseignants, des médecins, des gens tels que ceux-là ?
6 Est-ce qu'ils ont simplement quitté leur travail ? Les étudiants qui ne
7 sont pas parvenus à finir leurs études, est-ce qu'ils sont simplement
8 partis de leur plein gré, Monsieur Jasovic, ou est-ce que la façon dont
9 vous les traitiez les a contraints à quitter leur poste ?
10 R. Le ministère de l'Intérieur n'a pas pour tâche de contraindre qui que
11 ce soit de quitter son travail. C'est un exercice auquel nous ne sommes
12 jamais livrés, auquel nous ne nous livrerions jamais.
13 Q. Je prétends qu'il s'agit là d'un mensonge pur.
14 R. Je vous réponds que c'est la vérité. Les Albanais n'ont pas été
15 contraints à quitter leur poste ou leur travail. Pour ce qui est du système
16 éducatif, là, je ne me souviens pas très bien. Il y avait trois ou quatre
17 cas qui faisaient un peu polémiques, parce que ceux qui travaillaient là ne
18 voulaient pas accepter de programme scolaire où universitaire de la
19 République de Serbie. Ils continuaient à travailler en suivant le programme
20 scolaire du Kosovo. Je ne suis pas un politique. Je ne sais pas comment
21 vous expliquez tout cela.
22 Q. Passons dans un domaine dans lequel vous êtes un peu plus à l'aise et
23 que vous connaissez un peu mieux que la politique. Je vous propose de
24 parler des informateurs à présent. Occupant le poste que vous occupiez à la
25 fin des années 80, au début des années 90, bien entendu, vous travailliez
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1 dans le domaine du contre-terrorisme, en utilisant votre propre
2 expression ; est-ce exact ?
3 R. Vous voulez dire à la fin de 1989 et au début de 1990 ?
4 Q. Et par la suite, dès que l'UCK a commencé à apparaître vers la fin des
5 années 80. C'était du contre-terrorisme dont vous occupiez, n'est-ce pas,
6 en ce qui vous concernait ?
7 R. Ce n'est pas exact. Hier, j'ai fait remarquer qu'avec un collègue, un
8 Albanais, j'étais chargé des travaux qui concernaient les conflits
9 interethniques.
10 Q. Alors, vous vous êtes occupé des tâches concernant l'UCK, n'est-ce pas
11 ?
12 R. D'après les ordres -- conformément aux ordres du chef du secrétariat,
13 avec le service de la Sécurité de l'Etat, j'ai travaillé aux tâches que
14 j'ai décrites.
15 Q. Ceci comprenait l'UCK, n'est-ce pas ?
16 R. Oui, c'est exact.
17 Q. En ce qui vous concerne, l'UCK était un lot de criminels, n'est-ce pas,
18 une bande de criminels ?
19 R. Pour moi, l'UCK était une organisation terroriste et illégale.
20 Q. Des criminels ?
21 R. Est-ce que vous pourriez clarifier ceci ? Criminel ou un délinquant
22 peut être un voleur, un cambrioleur, un pickpocket.
23 Q. Monsieur Jasovic, essayez de prendre votre rôle de témoin sérieusement
24 pour un moment, s'il vous plaît. Vous savez exactement ce que je veux dire.
25 Vous considériez l'UCK comme une bande de criminels, des contre-
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1 révolutionnaires. C'est cela qu'ils étaient, n'est-ce pas ?
2 R. Lorsque des états-majors de l'UCK ont été créés, tous ont été établis
3 en vue de se livrer à des activités terroristes, contre des membres du
4 ministère de l'Intérieur, le MUP de la République de Serbie, contre l'armée
5 yougoslave. Comme je l'ai dit hier, ils se sont comportés très brutalement
6 avec les Albanais qui étaient loyaux.
7 Q. Est-ce que -- excusez-moi. Poursuivez.
8 R. Ou des Albanais qui travaillaient pour des entreprises appartenant à
9 l'Etat ou des institutions de l'Etat.
10 Q. Arrêtons-nous un moment sur cette terminologie que vous employez. Les
11 Albanais loyaux, les Albanais qui coopéraient. Vous avez employé le mot
12 "Albanais coopérants" dans votre déclaration. Sparavalo, qui a fait une
13 déclaration à ce Tribunal, a utilisé les termes, "Albanais loyaux". Est-ce
14 que ceci veut dire la même chose pour vous ?
15 R. Pour moi, un Albanais loyal est un Albanais qui ne s'opposait pas à la
16 loi, qui ne faisait pas entrave à la loi et à la constitution de la
17 République de Serbie, mais qui respectait la loi et la constitution de la
18 République de Serbie.
19 Q. Est-ce que le monde en fin de compte a respecté le droit et la
20 constitution de la République de Serbie, Monsieur Jasovic ? J'ai à l'esprit
21 plus particulièrement le mois de mars 1999, lorsque les bombes ont commencé
22 à tomber.
23 R. Je ne sais pas comment répondre à cette question.
24 Q. Parlons d'une autre distinction que vous avez faite lorsque vous
25 parliez des informateurs entre les informateurs amicaux, les liens amis, et
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1 ceux qui étaient opérationnels. Est-ce que je pourrais comprendre que vous
2 dites que quelqu'un amical, un lien amical, c'est quelqu'un qui vous livre
3 volontairement des informations ? J'ai raison à ce sujet ?
4 R. Un contact amical ou une relation amicale est une personne que je
5 voyais dans le monde normalement. Un contact amical, par exemple, lorsque
6 l'on se réunissait, pouvait me dire, j'ai entendu parler de telle ou telle
7 affaire.
8 Q. Hier, vous avez fait une distinction entre une personne de ce genre et
9 quelqu'un que vous appelez un contact opérationnel. Il en est question à la
10 page 26, ligne 11 du compte rendu non révisé. Vous dites ceci : "Une
11 personne qui a un contact opérationnel peut être une source qui n'est pas
12 officielle, enregistrée de façon officielle, une personne à qui je confie
13 des missions spécifiques ou particulières."
14 Est-ce que je comprends bien ce que vous dites, Monsieur Jasovic, à savoir
15 qu'une personne qui est un contact opérationnel, c'est quelqu'un que vous
16 envoyez pour faire des coups tordus pour vous ?
17 R. Un contact opérationnel est une personne qui n'est pas officiellement
18 enregistrée. Il n'est pas envoyé sur le terrain, mais il est lié à une
19 enquête particulière portant sur un crime ou un délit particulier et on lui
20 confie une mission précise pour aider à découvrir les auteurs d'un crime ou
21 d'un délit particulier. Ceci n'est pas un contact officiellement
22 enregistré, parce que tous les contacts -- bien, ce n'étaient pas seulement
23 des Serbes qui utilisaient des contacts. Dans tous les pays du monde, on
24 utilise des contacts.
25 Q. Est-ce que vous envoyiez des gens dans la communauté pour commettre des
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1 crimes de façon à donner des informations sur d'autres personnes ?
2 R. Je n'ai pas, non --
3 Q. Est-ce que vous trouvez cela drôle, Monsieur Jasovic, n'est-ce pas ?
4 R. Je vous dis que non.
5 Q. Est-ce que vous riez parce que vous êtes embarrassé parce que vous avez
6 fait quelque chose de ce genre et que vous n'auriez pas le courage de
7 l'admettre, n'est-ce pas ?
8 R. Non, je ne suis pas embarrassé. Je me suis acquitté de mes fonctions de
9 façon consciencieuse et correcte et de façon honorable.
10 Q. Non, excusez-moi, je ne voulais pas vous interrompre. Vous vouliez dire
11 autre chose. Peut-être vous vouliez compléter votre liste d'adverbes ?
12 R. Consciencieusement, honorablement, honnêtement.
13 Q. Consciencieusement, honorablement et honnêtement. Est-ce que vous et
14 vos collègues, en 1994, avez consciencieusement, honorablement et
15 honnêtement attaché des électrodes à un jeune de 14 ans dans un poste de
16 police, est-ce que vous avez fait cela ?
17 R. Quelle était la date ?
18 Q. Vous avez besoin d'une date pour vous souvenir de cela ? Très bien.
19 Bien, la date, Monsieur Jasovic, c'était le 11 avril 1994. Les initiales du
20 garçon concerné sont F.E. Il vivait auprès de sa mère et ses plus jeunes
21 frères.
22 Je cite : "Ils m'ont donné l'ordre de retirer mon pantalon" --
23 écoutez-moi, s'il vous plaît, ainsi vous pourrez répondre. "Ils les ont
24 arrachés, ils m'ont lié les mains derrière le dos avec ma ceinture, l'un
25 m'a tenu la tête en bas, l'autre s'est assis sur mes jambes et ils ont
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1 attaché des fils électriques à cet appareil, qui ressemblait à un
2 téléphone, à mes oreilles et mes organes. La douleur était horrible."
3 Le 11 avril 1994. Est-ce que c'est ce que vous et vos collègues étiez en
4 train de faire consciencieusement, honorablement et honnêtement, vous
5 remplissiez ainsi vos fonctions pour le compte de l'Etat serbe, Monsieur
6 Jasovic ?
7 R. Le 11 avril 1998, le secrétariat du ministère de l'Intérieur à Urosevac
8 avait été relogé dans différentes maisons et différents endroits. Il n'est
9 pas exact de dire que la force physique ou d'autres formes de tortures
10 aient été utilisées contre cette personne.
11 Q. Je vous remercie de votre réponse. La date que j'ai citée était le 11
12 avril 1994, pas 8 ni 4. Voulez-vous changer votre réponse maintenant ?
13 Pardon ?
14 R. Non. Ceci n'a pas eu lieu non plus en 1994. Non.
15 Q. N'a pas eu lieu ?
16 R. Non, ce n'est pas vrai.
17 Q. Bien. Une telle chose, Dragan Jasovic n'aurait pas voulu y participer,
18 y avoir aucune part. C'est cela que vous dites dans votre déposition,
19 Monsieur Jasovic. Je voudrais être bien au clair à ce sujet.
20 R. Je n'aurais jamais voulu participer à des choses de ce genre, ni
21 dépasser les bornes de mon pouvoir.
22 Q. Nous allons avoir des exemples de personnes qui ont fait des
23 déclarations sous serment au Tribunal et je suggère précisément cela. Nous
24 y reviendrons.
25 Je me demande si je pourrais établir une distinction entre des
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1 contacts amicaux et des contacts opérationnels. Est-ce que la différence
2 entre les deux n'est pas ceux qui sont venus volontairement vous voir, et
3 ceux que vous avez forcés à venir et que vous avez enlevés dans la rue et
4 que vous avez obligés à travailler pour vous. Est-ce que ce n'est pas cela
5 la différence ?
6 R. Je n'ai jamais forcé quiconque à donner des renseignements. Pour moi,
7 ceci ne serait pas des renseignements utiles ou de bons renseignements, ce
8 serait de mauvais renseignements; des renseignements inexacts s'ils étaient
9 obtenus par la force.
10 Q. C'est ce que je suggère depuis le début, Monsieur Jasovic. Cela ne fait
11 que partie de cela, ce fût un prétexte pour recueillir des renseignements.
12 Le fait est que vous étiez en train d'intimider, de terrifier et de vous
13 débarrasser d'Albanais. C'était une des façons dont vous vous êtes
14 comportés vous et vos collègues pour faire du nettoyage ethnique pour
15 employer un autre nom, Monsieur Jasovic. C'est cela que je suggère que vous
16 étiez en train de faire. Vous n'êtes pas d'accord ?
17 R. Ceci n'est pas exact. Non.
18 Q. Est-ce pure coïncidence que votre seule source nommée et enregistrée
19 entre 1986 et 1998 soit décédée ? Est-ce que vraiment ce que vous dites
20 dans votre déposition ? Vous n'en aviez qu'un seul au cours de toutes ces
21 années ?
22 R. Oui, c'est exact.
23 Q. C'est une déposition exacte, n'est-ce pas, un seul informateur officiel
24 en 12 ans de police, et il est mort de sorte que nous ne pouvons pas lui
25 poser de questions vous concernant, on ne peut rien lui demander; c'est
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1 bien cela ? Un seul, Monsieur Jasovic ?
2 R. J'avais un informateur enregistré, officiel. Pas au cours de 12 ans de
3 service, mais pendant 30 ans de service effectif à compter du 1er juillet.
4 Q. Un seul informateur officiel en 30 ans de service continu. C'est bien
5 cela que vous dites ?
6 R. Oui, c'est exact.
7 Q. Je voudrais que vous regardiez maintenant le document qui se trouve à
8 l'intercalaire 17 devant vous, s'il vous plaît. Nous n'allons pas regarder
9 le texte proprement dit. C'est juste que je veux l'utiliser comme point de
10 départ pour la question suivante. Nous l'avons devant nous pour plus de
11 commodité.
12 Vous avez parlé de cela hier, et vous nous avez dit hier que quatre
13 personnes qui sont mentionnées comme recueillant des déclarations étaient
14 vous-même, Sparavalo, Janicevic et Antic. Vous vous rappelez nous avoir dit
15 cela hier ?
16 R. Oui, c'est exact.
17 Q. Oui. Donc --
18 R. C'est exact que nous recueillions les déclarations, Momcilo Sparavalo,
19 Srboljub Vojinovic, Miroslav Antic et moi-même.
20 Q. Parce que je vous ai suggéré très clairement, haut et clair, Monsieur
21 Jasovic, j'ai suggéré que vous comprenez qu'au SUP vous faisiez tous partie
22 de la machinerie de l'Etat. Je comprends que vous avez dit hier que vous et
23 Sparavalo faisiez partie du service de Sécurité publique, ainsi que les
24 autres hommes qui étaient de la Sécurité de l'Etat. C'est la déposition que
25 vous avez faite hier, c'est bien cela ?
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1 R. Oui, j'ai dit cela hier, c'est exact.
2 Q. Il serait juste de dire, d'une façon générale, n'est-ce pas, Monsieur
3 Jasovic, que quelqu'un d'extérieur qui regarderait cette situation, en
4 fait, ce que vous faisiez, vous vous occupiez des questions de sécurité
5 publique, de sécurité d'Etat. Vous travailliez ensemble la main dans la
6 main avec Belgrade. Vous êtes d'accord avec cela, d'une façon générale ?
7 Est-ce que ce serait une description exacte de la situation dans laquelle
8 vous vous trouviez ?
9 R. La sécurité publique, la sécurité d'Etat coopéraient à Urosevac, c'est
10 exact.
11 Q. Sous le parapluie, sous la direction générale, dirais-je, la direction
12 de Belgrade et des autorités serbes qui s'y trouvaient. Vous seriez
13 d'accord avec cela en termes généraux, Monsieur Jasovic ?
14 R. En ce qui concerne Belgrade, je ne sais pas. Comme je l'ai dit, je ne
15 faisais que remplir mes fonctions. J'étais un policier chargé d'investiguer
16 les questions de délits et de crimes. En ce qui concerne cette question,
17 vous pouvez demander à mes supérieurs au chef du poste de la sécurité
18 publique d'Urosevac, Bogoljub Janicevic.
19 Q. Vous ne faisiez qu'exécuter les ordres, n'est-ce pas ?
20 R. Je travaillais conformément à la loi et la constitution de la
21 République de Serbie.
22 Q. Donc --
23 R. Je remplissais toutes mes fonctions, je faisais tout mon travail
24 conformément aux ordres reçus du chef du secrétariat.
25 Q. Examinons un instant vos procédures pour recueillir des déclarations.
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1 Vous nous avez dit hier, au compte rendu page 10, ligne 10, je vous cite :
2 "J'avais ma propre méthode de travail."
3 Est-ce que vous rappelez nous avoir dit cela, hier ?
4 R. Oui.
5 Q. Est-ce que ceci impliquerait le fait d'avoir un pistolet sur la table
6 et des bâtons dans le coin de la pièce ?
7 R. Je ne porte toujours pas de pistolet. Je n'en porte pas. Je n'en
8 portais pas à l'époque, non plus. Je n'ai ni bâton, ni matraque, parce que
9 ce sont les policiers en uniforme qui portent des bâtons ou des matraques.
10 Q. C'est plus grand qu'une matraque ou un bâton, ce que j'avais à
11 l'esprit. Je me rappelle qu'un témoin nous a dit, il y a quelques semaines,
12 quelque chose à ce sujet, alors qu'il était assis dans cette chaise. Il
13 parlait d'un : "Grand bâton, d'un gros bâton dans le coin. Tout ce que
14 Jasovic devait faire, c'était le montrer, cela suffisait."
15 Est-ce que c'est bien cela que vous faisiez ? Vous aviez un grand
16 bâton dans le coin de la pièce, et vous le désigniez du doigt ce bâton ?
17 R. Ce n'est pas exact, je ne me rappelle pas avoir eu un bâton quelconque
18 sur place.
19 Q. Est-ce une coïncidence que l'expression, "ce qu'on appelait l'UCK ou la
20 soi-disant UCK" apparaît dans toutes les déclarations des témoins que vous
21 avez recueillies, est-ce que c'est une expression que vous utilisez vous-
22 même pour décrire l'UCK, "la soi-disant UCK ou la prétendue UCK" ? Est-ce
23 que le fait que cette formule se répète et est une simple coïncidence,
24 Monsieur Jasovic ?
25 R. "La soi-disant UCK", c'est une expression qui est utilisée parce que ce
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1 n'était pas une organisation autorisée par la loi.
2 Q. Je me demande pourquoi un agriculteur, un fermier de la campagne
3 kosovar en Albanie utiliserait cette formule dans une déclaration faite par
4 vous. A moins, bien sûr, que ce ne soit pas vous qui dictiez des paroles de
5 ce genre ou qui les mettiez dans sa bouche. Est-ce que ce serait exact ?
6 R. La personne qui faisait les déclarations utilisait l'expression en
7 question. Je pourrais dire que ce n'était pas une vraie armée; c'était une
8 soi-disant armée.
9 Q. Je vois, C'est ce que cela veut dire, très bien. Monsieur Jasovic, je
10 vous dis que vous aviez alors et vous avez maintenant une haine
11 pathologique de tout ce qui était Albanais. Est-ce que vous êtes d'accord
12 avec cela ?
13 R. Je ne suis pas d'accord, parce que j'ai des parents, j'ai de la parenté
14 avec des personnes d'origine ethnique albanaise. Je ne suis d'ailleurs
15 capable de haïr personne, qu'il s'agisse d'Albanais, de Macédoniens, de
16 Slovènes ou d'Anglais en l'occurrence.
17 Q. Certains de vos meilleurs amis sont Albanais, c'est cela ?
18 R. Oui, c'est exact. J'ai encore plusieurs amis qui m'appellent au
19 téléphone presque tous les jours de Skopje, d'Urosevac, de Pec, de Kacanik
20 et d'autres endroits.
21 Q. Examinons ensemble pendant un moment, voyons voir, s'il vous plaît,
22 s'il y a quelques fondements à cette suggestion, à cette affirmation que
23 j'ai faite, selon laquelle vous aviez une haine pathologique des Albanais à
24 l'époque et maintenant. Je voudrais vous demander de regarder, je crois que
25 ce sont des manifestations de haine en action. Pour commencer, vous êtes
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1 conscient d'une organisation dans votre pays qui s'appelait le Conseil de
2 défense des droits de l'homme et des libertés, vous avez connaissance de
3 cela ?
4 R. Où est son quartier général ? J'ai entendu parler de certaines
5 organisations humanitaires, mais --
6 Q. Pristina ?
7 R. Je ne me rappelle pas, non je n'en ai pas connaissance.
8 Q. Est-ce que vous avez connaissance ou peut-être que vous n'en avez pas
9 connaissance, si vous n'avez pas entendu parler de cette organisation.
10 Avez-vous jamais entendu dire que cette organisation, organisation légitime
11 et honorable, me permettrais-je de suggérer, a rendu compte des activités
12 des postes de police pendant, avant, et pendant la guerre, et que le poste
13 ou les postes où vous avez travaillé sont compris dans ce rapport ? Est-ce
14 que vous avez entendu parler de ce document ?
15 R. Non. Je n'en ai pas entendu parler, non.
16 Q. Vous n'en avez pas entendu parler ?
17 R. Non.
18 Q. Ferizaj, Urosevac sont des lieux où vous avez travaillé, n'est-ce pas ?
19 R. Urosevac, oui, pas, Orahovac. J'y ai été une seule fois.
20 Q. Entre 1991 et 1999, cette organisation a retrouvé avec des documents
21 médicaux à l'appui, 449 victimes de torture, sur lesquelles 371, c'est-à-
22 dire 82 % sont passées par le poste de police où vous étiez affecté. Est-ce
23 que vous pourriez faire vos observations à ce sujet, Monsieur Jasovic ?
24 R. Je ne sais rien de ces personnes. Ces personnes ne sont pas passées par
25 mon bureau, certainement pas. J'en suis sûr.
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1 Q. Nous allons voir cela. Incidemment, quelle était la pièce qui vous
2 servait de bureau, est-ce qu'elle avait un numéro dans ce poste de police ?
3 La pièce, c'était 81 ?
4 R. Non, c'était au troisième étage et c'était le numéro 59.
5 Q. Qui travaillait dans la pièce 81 ?
6 R. Je ne peux pas me souvenir maintenant. C'était un grand bâtiment, un
7 grand secrétariat. Je ne peux pas me rappeler les numéros des bureaux de
8 tout un chacun. Vraiment, je ne peux pas m'en souvenir.
9 Q. Les âges des personnes qui --
10 R. Excusez-moi, je pense que 81 se trouvait au quatrième étage, mais je
11 n'en suis pas sûr. Je ne peux pas être sûr. Je ne peux que deviner.
12 Q. Est-ce que quelqu'un ne vous a jamais --
13 R. Si vous me dites le nom de la personne.
14 Q. Nous allons y venir au nom. Je peux vous l'assurer. Nous allons y venir
15 au nom. Est-ce que quelqu'un n'ait jamais sorti par la fenêtre du quatrième
16 étage, Monsieur Jasovic ?
17 R. Au troisième étage, des fonctionnaires opérationnels, des inspecteurs
18 de la sécurité publique travaillaient, et je suis certain à 100 % que
19 personne n'ait passé par la fenêtre parce que c'était l'endroit où se
20 trouvait la sécurité publique. C'était la Sécurité d'Etat qui se trouvait
21 au quatrième étage, et je pense que le numéro 81 était au quatrième.
22 Q. Est-ce qu'ils sont sortis par la fenêtre au quatrième ou est-ce qu'ils
23 ne sont pas sortis par celle du troisième ? Il est vraisemblable que la
24 quatrième soit un peu plus haute.
25 R. Je ne sais pas.
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1 Q. Vous ne savez pas. Regardons simplement les âges.
2 R. Je ne sais pas.
3 Q. Vous ne savez pas. Regardons maintenant l'âge moyen des 441 personnes
4 au cours de ces huit ans, qui, si ma mémoire ne me trompe, cela représente
5 à peu près une semaine. Ils vont de 31 à 40 ans. Cinquante-huit pour cent
6 d'entre eux avaient des ecchymoses importantes sur le corps. Les avis
7 médicaux à ce sujet étaient que ces ecchymoses et ces blessures avaient été
8 causées, ou en tous les cas, correspondaient bien à des blessures infligées
9 par des coups de poing, des coups de bâton, des coups de crosse de fusil ou
10 de crosse de pistolet, des barres métalliques, des bâtons, des bats de
11 baseball, et des chocs électriques, des secousses électriques. Responsable
12 de tout cela, Monsieur Jasovic ?
13 R. Je ne sais rien de tout cela. Je ne parle que pour moi-même et Momcilo
14 Sparavalo.
15 Q. Est-ce que vous connaissiez un homme appelé Mustafa ?
16 R. Certainement.
17 Q. Un homme appelé Afrim Mustafa. Il était né le 16 avril 1983, et il a
18 fait une déclaration à Jonathan Sutch, enquêteur du Tribunal. Est-ce que
19 vous connaissez ce nom ?
20 R. Non, je ne me rappelle pas.
21 Q. En janvier 1999, au moment du massacre de Racak, il avait 16 ans. Il a
22 été emmené à votre poste de police pour être interrogé. Il a été accusé
23 d'être membre de l'UCK. Il y avait dans la pièce une boîte avec un
24 interrupteur et des fils électriques qui étaient rattachés. Votre bureau,
25 Monsieur Jasovic, avait une boîte avec des fils électriques qui étaient
Page 5345
1 reliés ?
2 R. Ce n'est pas exact. Ce n'est certainement pas exact. Je parle pour moi
3 et M. Momcilo Sparavalo. Nous n'avions ni boîte ni fils électriques. Je ne
4 sais rien de tout cela.
5 Q. "La première fois que j'ai touché les fils électriques, il ne s'est
6 rien passé. Mais lorsque je les ai touchés une deuxième fois, l'un des
7 hommes à ce moment-là utilisait l'interrupteur et j'ai senti un choc
8 électrique. J'ai commencé à pleurer et à crier. Les hommes ont commencé à
9 crier en disant : 'Tu es un membre de l'UCK.' J'ai seulement crié et
10 pleuré. J'avais très peur. Les hommes ont continué à me donner des chocs
11 électriques pendant dix minutes. Ils ont continué à me frapper les mains
12 avec des bâtons. Je ne leur ai donné aucun renseignement parce que je
13 n'étais pas en mesure de le faire. L'un d'entre eux écrivait quelque chose
14 sur son ordinateur. Pour finir, l'un d'entre eux m'a dit : laisse-le
15 repartir. Ce n'est qu'un enfant."
16 Est-ce que cela vous rappelle quelque chose, Monsieur Jasovic, cette
17 torture d'un garçon de 16 ans dans votre bâtiment en 1999 ? Peut-être que
18 vous auriez entendu ces cris ? Vous vous rappelez ?
19 R. Je ne me rappelle pas.
20 Q. Si vous ne vous rappelez pas de ce garçon, est-ce que vous vous
21 rappelez Muharim Xheladini qui également a fait une déclaration à M. Sutch
22 du Tribunal, et qui a été enlevé dans les rues de Stimlje en janvier 1999,
23 qui était accusé d'être un membre de l'UCK. Il a été emmené dans le bureau
24 51. A quel étage se trouvait le bureau 51, Monsieur Jasovic ?
25 R. J'ai dit il y a un instant qu'il est mal aisé pour moi de dire à quel
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1 étage se trouvait quelle pièce. Je suppose que c'est au deuxième étage.
2 Peut-être au troisième, je n'en suis pas certain.
3 Q. Bien, vous voyez ce témoin dit que votre nom se trouvait sur la porte.
4 Votre réponse est intéressante.
5 R. C'est faux parce que mon bureau s'est trouvé pendant plus de dix ans
6 dans la pièce 59.
7 Q. 59.
8 R. Oui, c'est là que je travaillais.
9 Q. Bien.
10 R. Oui, 59.
11 Q. 59.
12 R. Pas 51.
13 Q. D'accord. Bien voyons si vous vous souvenez avoir emmené ce jeune homme
14 dans la pièce 59. Je cite : "Trois autres hommes que je ne connaissais pas
15 étaient également présents dans la pièce." Jasovic plus trois. "J'ai dit
16 aux hommes que la veille, le 16 janvier, j'étais à Racak et que j'avais
17 aidé à déplacer les corps jusqu'à la mosquée. J'ai dit aux hommes que
18 j'avais vu 45 cadavres. Puis, on m'a ensuite envoyé dans une pièce plus
19 petite. La police m'a ensuite posé des questions pour savoir comment l'UCK
20 obtenait sa nourriture. J'ai répondu que je ne le savais pas. Jasovic m'a
21 ensuite envoyé à la cave."
22 Vous souvenez-vous avoir envoyé quelqu'un au sous-sol qui ne savait pas
23 comment l'UCK obtenait sa nourriture, Monsieur Jasovic ?
24 R. Ce n'est pas exact. Je n'ai pas envoyé ces personnes au sous-sol. Je ne
25 sais pas de quel sous-sol ici il est question.
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1 Q. Il décrit les choses de manière très précise et c'est une déclaration
2 qui a été recueillie par un enquêteur expérimenté.
3 "J'étais dans une pièce du sous-sol. Il voulait que je convienne du fait
4 qu'une personne de Racak avait effectivement un lance-roquettes. Je leur ai
5 dit que c'était faux.
6 "Lorsque je n'ai pas accepté de convenir de cela, quelqu'un m'a donné un
7 ordre -- ou quelqu'un leur a ordonné de me frapper. Jasovic les a arrêtés,
8 a dit, je reviendrai et lui reposerait la question. Jasovic m'a dit qu'il
9 me laisserait partir si j'acceptais de revenir le 22 janvier. J'ai accepté
10 et ils m'ont laissé partir."
11 Vous souvenez-vous de cela, Monsieur Jasovic ?
12 R. Non, je ne m'en souviens pas. Je ne sais pas à quelle personne vous
13 faites référence.
14 Q. Je vous ai donné le numéro de Muhadin -- bien sûr, je suppose qu'il y
15 en a eu des centaines qui sont passées entre vos mains. Il s'agit de
16 Muhadin Xheladini.
17 R. Non pas des centaines, à part des amis. Je ne peux pas me souvenir de
18 tous les noms albanais.
19 Q. Un de --
20 R. Excusez-moi. Pourriez-vous répéter la question ? Que m'avez-vous
21 demandé ?
22 Q. Je vous demandais si vous vous souvenez l'avoir laissé partir en
23 obtenant de lui qu'il revienne plus tard.
24 R. Je n'en ai pas le souvenir.
25 Q. Il était un peu préoccupé parce qu'il avait vu du sang sur le sol du
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1 sous-sol dans lequel vous l'avez emmené. Y avait-il du sang sur le sol de
2 votre sous-sol, Monsieur Jasovic ?
3 R. Je peux vous jurer que dans ce sous-sol - si vous parlez des salles de
4 détention que l'on trouve d'ailleurs au sein de tous les secrétariats - je
5 ne suis jamais rentré dans ce lieu. C'est un fait. Je n'y suis jamais allé.
6 Q. Il y avait une pièce consacrée à la détention dans le sous-sol de ce
7 bâtiment, n'est-ce pas, bâtiment du secrétariat ? C'est exact, on y
8 détenait des personnes ?
9 R. Vous voyez, je vous parle de la pièce de détention parce que chaque
10 organe du secrétariat détenait des individus en contravention ou en
11 violation de l'ordre public. Je ne peux pas vous dire exactement combien de
12 temps une personne y était détenue, peut-être jusqu'à ce qu'ils cuvent leur
13 vin, s'il y avait des soupçons, si l'on les soupçonnait de récidiver, s'ils
14 allaient violer l'ordre public dans un café, et cetera. Quoi qu'il en soit,
15 nous ne maintenions pas les gens en détention dans cette pièce. S'ils
16 devaient être interrogés par la suite, on les laissait partir, ou des
17 poursuites étaient engagées contre eux, cela dépendait de ce qui était
18 conclu avec le responsable du secrétariat.
19 Q. Aucune des deux personnes auxquelles j'ai fait référence jusqu'à
20 présent n'ont été arrêtée pour ivresse, Monsieur Jasovic. Ils ont été
21 arrêtés parce qu'ils étaient impliqués, qu'ils avaient des liens avec
22 l'UCK.
23 Passons à une autre personne, M. Shemsi Emini. Il a dit au tribunal qu'il
24 allait assister à un enterrement à Racak en février 1999, mais qu'il avait
25 été arrêté par la police, qu'il avait été amené dans votre poste de poste
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1 de police et qu'il y avait été interrogé. Lorsqu'il a dit aux policiers
2 qu'il était de Racak, l'un d'entre eux a dit : Comment est-ce possible que
3 vous soyez de Racak alors que tous les gens qui venaient de Racak ont été
4 tués ? Il a répondu qu'il allait à un enterrement, un enterrement de
5 personnes qui avaient été tuées par la police. L'homme a répondu : Quelle
6 police ?
7 Etait-ce vous, Monsieur Jasovic, qui était en train de parler à cet
8 homme, né en 1967, qui aurait aujourd'hui une trentaine d'années ?
9 R. Je n'ai pas quitté mon bureau. Je n'ai pas arrêté cet homme comme vous
10 le suggérez, en un quelconque lieu, qu'il s'agisse de la rue ou ailleurs.
11 Q. "Il y avait deux policiers," il continue, "dans la pièce qui avaient
12 des battes de baseball ou objets assimilés qui m'ont frappé pendant une
13 dizaine de minute. Ensuite, ils m'ont interrogé. Puis après cela, ils ont
14 recommencé à me frapper, à me poser des questions sur un certain nombre
15 d'individus vivant à Racak. Ils m'ont demandé si certaines personnes
16 étaient membres de l'UCK." Les battes de baseball les avez-vous utilisés ?
17 R. Je ne possédais pas de battes de baseball ou de bâtons, ni de
18 matraques.
19 Q. Pour illustrer votre travail, j'aimerais que nous examinions un certain
20 nombre de photos.
21 M. TOPOLSKI : [interprétation] Avec l'aide de l'huissier, voici une liasse
22 de documents, tant pour la Chambre que pour le témoin.
23 Mon intention est de démontrer que ces photos pourront être incluses
24 dans l'ensemble des éléments de preuve que je souhaiterais moi-même
25 utiliser en temps voulu. J'ai, bien entendu, communiqué un exemplaire de
Page 5350
1 ces photos à M. Whiting.
2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.
3 M. TOPOLSKI : [interprétation] Quand envisagez-vous de faire la pause ?
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Dans environ 20 minutes ou 15 minutes,
5 cela dépend bien sur de la manière dont les choses vont se dérouler.
6 M. TOPOLSKI : [interprétation] Merci.
7 Q. Très bien. La première photo est une photographie d'un homme qui
8 s'appelle Besim Zymberi qui présente des marques de coups sur les jambes et
9 sur les fesses. Le reconnaissez-vous ?
10 R. Je ne connais pas cette personne.
11 Q. Qui infligeait ce genre de blessures à des individus avec des battes de
12 baseball, vous ?
13 R. Tout d'abord, je m'exprime en mon nom et au nom de Momcilo Sparavalo.
14 Je n'avais pas, dans mon bureau, de battes de baseball, de bâtons ou de
15 matraques. Par conséquent, je n'aurais pu infliger des blessures qu'elles
16 soient légères ou graves à qui que ce soit, y compris M. Momcilo Sparavalo.
17 Q. Xhavit Zariqi est représenté sur les photos suivantes. En juillet 1998,
18 il a été attaqué brutalement. Une photo de ses pieds montre ce qui a dû
19 être une brûlure de cigarette à la cheville droite. Ses blessures sont
20 graves et elles ont dû lui être infligées par vous et par vos collègues. Le
21 niez-vous, Monsieur ?
22 R. Je déclare et j'en prends toute la responsabilité, que cette personne,
23 Xhavit Zariqi, n'est pas entrée dans mon bureau.
24 Q. Qu'en est-il de Mehmet Kashtanjeva ? J'espère que je n'ai pas trop
25 écorché son nom. C'est une personne plus âgée. Regardez les blessures qui
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1 lui ont été infligées au dos. Vous les devait-il ?
2 R. Non, ce n'est pas moi qui ai fait cela.
3 Q. Permettez-moi de vous poser la question suivante : si l'une ou l'autre
4 de ces personnes, Monsieur Jasovic, a effectivement reçu ces blessures ou
5 subi ces blessures dans votre poste de police, souhaiteriez-vous vous
6 excuser auprès d'elle aujourd'hui ? Ce sont tous des Albanais, incidemment,
7 avant que vous ne répondiez à la question.
8 R. Je n'ai pas infligé de quelconques blessures à ces personnes qu'il
9 s'agisse de blessures légères ou graves.
10 Q. Ce n'est pas ma question. L'avez-vous comprise, ma question ?
11 R. Oui
12 Q. Vous avez compris ma question, n'est-ce pas ?
13 R. Ai-je infligé des blessures à l'un ou l'autre de ces personnes ? C'est
14 comme cela que j'ai compris la question.
15 Q. Non, ce n'était pas ma question. Je vous donne une nouvelle chance, une
16 dernière chance. Ma question était la suivante : si, effectivement, ces
17 personnes ont subies ces coups et ont souffert de ces blessures dans votre
18 poste de police, si effectivement c'est le cas, souhaiteriez-vous leur
19 présenter vos excuses ?
20 R. Je ne l'ai pas fait, il n'est pas nécessaire que je présente des
21 excuses.
22 Q. Vous avez une haine pathologique pour tout ce qui est Albanais, n'est-
23 ce pas ?
24 R. Non, c'est faux. J'ai dit il y a peu que j'avais des liens de parenté
25 avec des Albanais et je peux le prouver. Des gens, dans la région de Pec,
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1 là où je suis né.
2 Q. En ce qui concerne les interrogatoires, ils ne se limitaient pas à des
3 supposés terroristes, n'est-ce pas ? Je pense qu'il y avait aussi des
4 membres de partis politiques; membres d'associations de défense de droits
5 humanitaires; musiciens; professeurs; toute l'intelligentsia; sont passés
6 de temps en temps, par votre poste de police, n'est-ce pas ?
7 R. Dans les années 1990, lorsque les professeurs appelaient à la
8 résistance, ou plus précisément, lorsque les enseignants appelaient au
9 rejet de cours et enseignements prescrits dans les programmes serbes, je ne
10 sais plus ceux d'entre eux qui ont été emprisonnés, mais ils ont été
11 libérés. Je peux vous garantir qu'aucune violence physique ne leur a été
12 infligée, qu'aucune matraque n'a été utilisée contre eux. Il s'agissait de
13 quelques professeurs dont je n'ai plus le nom.
14 Q. J'aimerais vous présenter un certain nombre de noms, mais en attendant,
15 avec l'aide de l'huissier, j'aimerais vous montrer une page, la photocopie
16 d'un document.
17 M. BLACK : [interprétation] Pourrais-je consulter ce document ?
18 M. TOPOLSKI : [interprétation] Bien. Je voudrais savoir si le témoin
19 reconnaît cette page et s'il y reconnaît sa propre écriture. C'est en
20 serbe. S'il ne la reconnaît pas, nous n'irons pas plus loin. Je dispose
21 d'exemplaires.
22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Je crois qu'en règle
23 générale, Monsieur Topolski, avant que le document soit soumis au témoin,
24 il doit l'être à l'accusation.
25 M. TOPOLSKI : [interprétation] Tout à fait.
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1 M. BLACK : [interprétation] Merci beaucoup.
2 M. TOPOLSKI : [interprétation]
3 Q. Pourriez-vous considérer ce document, Monsieur Jasovic, et me dire s'il
4 s'agit de votre écriture.
5 R. Absolument pas. J'ai une écriture convenable. C'est pour cela que je
6 peux vous répondre. Cette écriture est affreuse.
7 Q. Ce n'est pas la vôtre ?
8 R. Ce n'est pas la mienne. Je ne sais pas à qui elle appartient. Je vous
9 le dirais si je le savais, mais ce n'est pas la mienne.
10 Q. Ce n'est pas celle de Sparavalo ?
11 R. Non. Ce n'est pas son écriture. Il n'a jamais consigné d'informations
12 dans un calepin. Je peux le dire en son nom, mais je ne sais pas à qui
13 appartient cette écriture. Si je le savais, je vous le dirais. Peut-être,
14 pourrais-je essayer de le vérifier à Leskovac en comparant les écritures.
15 Q. Non, merci. Nous effectuerons nos propres enquêtes. Merci de la
16 proposition, en tout cas.
17 Au cours du temps qui nous reste avant la pause, et concernant les
18 personnes qui sont passées entre vos mains, je dispose ici d'une liste, et
19 j'aimerais savoir si vous reconnaissez l'un quelconque de ces noms. Ruzhdi
20 Jashari, membre du Conseil de défense des droits de l'homme, l'avez-vous
21 interrogé ?
22 R. Ruzhdi Jashari n'a jamais été interrogé par moi. D'après ces
23 informations que j'ai reçues, je sais qu'il était correspondant et qu'il se
24 déplaçait dans la région, mais je ne connais pas Ruzhdi Jashari et je peux
25 vous garantir qu'il n'est jamais venu dans ma zone d'intervention.
Page 5354
1 Q. Je vais vous suggérer sur un certain nombre de noms, ainsi que leur
2 métier, si je les connais. Ahmet Ahmeti était un membre du comité de l'UCK
3 pour Stimlje; Fehmi Mujota, magistrat; Ali Gashi; Nusret Musliu; Mufail
4 Salihu, homme d'affaires.
5 Oui, veuillez m'interrompre si vous reconnaissez un nom.
6 R. Ahmet Ahmeti, je sais qu'il venait de temps en temps. Fehmi Mujota, je
7 crois que c'est Fehmi Mujota, c'est lui que je crois qui est maintenant
8 président de la municipalité de Stimlje. Je crois qu'il y a quelques
9 erreurs dans les noms de famille.
10 Q. Je m'en excuse. Mais oui, c'est vrai, cette personne à laquelle vous
11 faisiez référence est bien ce que vous dites qu'il est. Il a été interrogé
12 et maltraité dans vos locaux le 19 mai.
13 R. Fehmi Mujota.
14 Q. Salihu, homme d'affaires; Shaban Halimi, membre du comité de l'UCK pour
15 Stimlje; Avdyl Jakupi, un policier; Azem Haxhiu, un enseignant d'éducation
16 physique; Abdyl Avdyli, président du Parti parlementaire.
17 Qu'en est-il de Raif Rushiti de l'Organisation Mère Teresa ? Ont-ils
18 attiré votre attention, Monsieur Jasovic, le 11 mars 1996 ?
19 R. Je connais Ahmet Ahmeti.
20 Q. Ali Sadriu, président de l'UCK pour Stimlje; Nazmi Shahini, membre de
21 l'UCK pour Stimlje; Mus Musliu, musicien folklorique, maltraité le jour de
22 Noël en 1995, dans votre poste de police; et enfin, Zaim Hysenaj, - excusez
23 ma mauvaise prononciation - professeur de musique qui se présente le 7
24 novembre 1995. Souhaitez-vous nous présenter vos aveux concernant l'un
25 quelconque de ces hommes, Monsieur Jasovic ?
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1 R. Non. Il est faux de dire qu'ils ont été maltraités. La seule personne
2 que je connais, c'est Ahmet Ahmeti sur cette liste. (expurgée)
3 (expurgée)
4 (expurgée)
5 (expurgée)
6 (expurgée)
7 R. Peut-être pourrais-je utiliser la déclaration.
8 M. BLACK : [interprétation] Doit-on passer en audience à huis clos partiel
9 pour cela ?
10 M. TOPOLSKI : [interprétation] Non, à moins que vous souhaitiez que je le
11 fasse.
12 M. BLACK : [interprétation] Oui, pouvons-nous y passer un instant pour que
13 je vous explique les motifs de mon intervention.
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Allons-y.
15 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en audience à huis clos
16 partiel.
17 [Audience à huis clos partiel]
18 (expurgée)
19 (expurgée)
20 (expurgée)
21 (expurgée)
22 (expurgée)
23 (expurgée)
24 (expurgée)
25 (expurgée)
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11 Page 5356 expurgée. Audience à huis clos partiel.
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1 [Audience publique]
2 M. TOPOLSKI : [interprétation]
3 Q. Nous venons de parler d'un individu précis et nous venons de nous
4 interroger sur le fait de savoir s'il avait fait de la prison, savoir si
5 cette même personne était la personne qui vous avait communiqué des
6 informations sur une éventuelle réunion à propos de laquelle on dit qu'Isak
7 Musliu y a participé.
8 M. TOPOLSKI : [interprétation] Monsieur le Président, le moment est-il
9 choisi pour faire la pause ou je pourrais peut-être couvrir un autre thème
10 en trois minutes.
11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Non, je pense que le moment est bien
12 choisi pour faire la pause.
13 M. TOPOLSKI : [interprétation] Très bien.
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Qu'en est-il de la liasse de photos et
15 de la feuille de papier que vous avez montrées au témoin, demandez-vous
16 qu'elles soient enregistrées aux fins d'identification ?
17 M. TOPOLSKI : [interprétation] En ce qui concerne cette dernière page, ou
18 feuille de papier, le témoin l'a rejeté. Il a dit qu'il n'avait rien à voir
19 avec cette feuille de papier. Il semblerait je n'ai aucune base me
20 permettant de demander l'enregistrement aux fins d'identification.
21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je ne sais pas si vous allez
22 l'utiliser par la suite, mais peut-être pourriez-vous demander à qu'elle
23 soit enregistrée aux fins d'identification, néanmoins.
24 M. TOPOLSKI : [interprétation] Oui. Vous me devancez --
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, enregistrée aux fins
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1 d'identification.
2 M. TOPOLSKI : [interprétation] Non, merci.
3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Les photos, les 14 photos sont
4 enregistrées aux fins d'identification de la manière suivante DM4 MFI et la
5 déclaration sera DM5 MFI.
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] S'agit-il bien d'une déclaration, je
7 n'en suis pas certain ?
8 M. TOPOLSKI : [interprétation] Je ne sais pas, il faudrait peut-être que je
9 vérifie auprès d'une personne qui parle la langue.
10 Peut-être qu'il s'agit de notes. Je ne sais pas très bien.
11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il s'agit de notes ou d'une
12 déclaration ?
13 M. TOPOLSKI : [interprétation] De notes.
14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Très bien, j'y apporte une correction,
15 DM5 est en fait un recueil de notes, DM5 MFI.
16 M. TOPOLSKI : [interprétation] Merci.
17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons lever l'audience et nous
18 reprendrons à 18 heures 5.
19 --- L'audience est suspendue à 17 heures 44.
20 --- L'audience est reprise à 18 heures 15.
21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Toutes mes excuses, Maître Topolski,
22 mais il a fallu expurger certains éléments.
23 M. TOPOLSKI : [interprétation] Oui, j'ai remarqué.
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous sommes arrivés juste au moment où
25 vous pouvez commencer. A vrai dire, j'étais là un petit peu pour faire du
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1 remplissage, vous savez comme cela se fait sur scène.
2 M. TOPOLSKI : [interprétation]
3 Q. Monsieur Jasovic, il va falloir que je ralentisse un petit peu parce
4 qu'on m'a signalé que je parlais un peu vite tout à l'heure, à certains
5 moments, je vous présente mes excuses.
6 Je souhaiterais vous poser une question et je ne vais pas demander un huis
7 clos partiel pour ceci, j'en ai parlé à M. Black, je souhaiterais vous
8 poser une question supplémentaire à propos d'Ahmet Ahmeti. Cela vous
9 convient-il ? Vous avez signalé hier que vous aviez des documents sur vous.
10 Est-ce que vous avez des documents sur vous ayant trait à cette personne-
11 là ?
12 R. Me permettez-vous de regarder ?
13 Q. Bien entendu.
14 R. Vous faites état d'un rapport de police ?
15 Q. Quelque document que ce soit ayant trait à cette personne.
16 R. Je n'ai aucun document parce que ce document était au bureau du
17 Tribunal de La Haye à Belgrade et je n'ai pas emporté avec moi les
18 documents qui m'ont été envoyés par le Tribunal de La Haye, j'entends par
19 là des déclarations ou autres documents.
20 Q. S'agissant d'individus qui pourraient vous fournir des informations,
21 que ce soit de leur plein gré ou pas, leur avait-on donné des noms de codes
22 pour autant que vous le sachiez ?
23 R. Non.
24 Q. Je n'ai pas entendu non.
25 R. Non, ils n'avaient pas de nom de code.
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1 Q. Vous en êtes absolument certain ?
2 R. Absolument.
3 Q. Est-ce que l'un quelconque de vos collègues disposait d'informateurs
4 portant des noms de code ?
5 R. Comme j'ai eu l'occasion de le dire tout à l'heure, je ne sais même pas
6 qui étaient les contacts opérationnels ou les collaborateurs dont
7 disposaient mes collègues. Pour des raisons de conspiration, mes collègues
8 et moi-même ne connaissions pas les contacts les uns des autres.
9 Q. Vous avez nié systématiquement toutes suggestions semblant indiquer que
10 des mauvais traitements avaient été infligés à des personnes à votre centre
11 opérationnel. Si ce n'est pas vous qui vous êtes livré à cet exercice qui
12 d'autre, au cours de la période qui intéresse le Tribunal, s'en serait
13 chargé ? Est-ce que c'est peut-être uniquement Sparavalo et vos autres
14 collègues ou y en avaient-ils d'autres ?
15 R. Les entretiens avec les parties étaient menés par des employés de la
16 sécurité d'Etat. Pour ce qui est de la sécurité publique, c'était M.
17 Sparavalo et moi-même qui nous en chargions. Je ne sais pas s'il y avait
18 quelqu'un d'autre ou pas. Je ne m'en souviens pas.
19 Q. S'agissant de vous-même, je souhaiterais vous citer un nom de plus et
20 un incident de plus. Avdi Hyseni, en date du 1er février 1999, a été détenu,
21 c'est que j'affirme. Je rappelle son nom Avdi Hyseni, ce nom vous dit-il
22 quelque chose ?
23 R. Non. Je ne connais pas le nom Avdi Hyseni ou Avdi Xhevat Hyseni.
24 Q. Peut-être que cela rafraîchira votre mémoire. Des collègues vous ont
25 interrompu pendant que vous étiez en train de le passer à tabac. Vous avez
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1 dit qu'il fallait qu'il confesse qu'il était commandant de l'UCK, et que
2 sinon à minuit, on lui couperait la tête. Vous en souvenez maintenant ?
3 R. Je ne m'en souviens pas. Ce n'est pas vrai que l'on ait dit à qui que
4 ce soit qu'on leur couperait la tête.
5 Q. Vous avez dit qu'il devait trouver une liste d'individus, liste
6 d'armements de l'UCK à Petrovo s'il voulait qu'il reste en vie, en lui
7 disant ceci, et je cite : "Ceci, ce n'est pas le Kosovo. C'est la Serbie."
8 C'est vous que je cite, Monsieur Jasovic. C'est ce que j'affirme. Le niez-
9 vous ?
10 R. Non, ce n'est pas exact. Je n'ai jamais prononcé ces mots.
11 Q. Dans la chaise, dans laquelle vous êtes assis en ce moment même, était
12 assis un témoin dans l'affaire de l'ancien président Milosevic. Son nom
13 était et est encore Marinkovic. Savez-vous à qui je fais référence, Danica
14 Marinkovic, juge Marinkovic ?
15 R. Je connais le juge Marinkovic. Lorsque le chef du poste de police de
16 Kacanik a été tué le 25 février 1999, nous sommes allés dans le village de
17 Kacanik pour mener une enquête.
18 Q. On peut dire que cette femme juge était votre chef, d'une manière
19 générale. Elle était un des juges qui supervisait les enquêtes; est-ce
20 exact ?
21 R. Elle n'était pas mon chef. D'une manière générale, elle n'était pas mon
22 chef. Elle était un juge d'instruction du tribunal de district de Pristina.
23 Au cours des enquêtes sur place, elle était la juge d'instruction qui était
24 en charge des enquêtes sur place. Je ne sais pas si j'ai été clair. Elle
25 n'était pas mon supérieur. Elle n'était pas mon chef. Elle dirigeait
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1 l'enquête sur place conjointement avec une équipe du SUP d'Urosevac.
2 Q. Il y a une coïncidence assez incroyable, Monsieur Jasovic, et je vous
3 en parle parce que ce sera la base de ma question suivante. C'est une
4 coïncidence tout à fait incroyable et il se trouve que par pure coïncidence
5 - coïncidence incroyable - que cette personne était assise dans la même
6 chaise que vous. M. Nice qui est procureur pour le bureau du Procureur
7 procédait à un contre-interrogatoire portant sur des mauvais traitements
8 infligés par des policiers au cours de la guerre.
9 R. Oui.
10 Q. Ce que j'ai sous les yeux si vous le permettez, je vais vous lire
11 quelque chose qui m'a été fournie par M. Whiting, et je souhaite attirer
12 votre attention sur cette incroyable coïncidence. J'ai le compte rendu de
13 ce qui a été dit ce matin. Ce sera la base des questions que je vais vous
14 poser. Est-ce que vous me suivez ?
15 R. Oui.
16 Q. Tout d'abord, permettez-moi de vous poser la question suivante. Est-ce
17 que vous connaissez quelqu'un répondant au nom de Natasa Kandic ? Si vous
18 ne la connaissez pas personnellement, dites-nous au moins si vous savez qui
19 elle est ?
20 R. Je ne la connais personnellement. Je sais qu'elle travaille dans une
21 organisation humanitaire, je ne sais pas laquelle et je ne sais ce qu'elle
22 y fait.
23 Q. Bien, elle est directrice du Centre de droit humanitaire de Belgrade,
24 et son centre de droit produisait et produit encore, je crois, des rapports
25 ayant trait aux questions liées au droit humanitaire, et c'est ce qu'elle
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1 faisait avant la guerre et pendant la guerre ainsi que d'ailleurs après la
2 guerre. Cela, vous le savez, n'est-ce pas ?
3 R. Je ne sais pas ce qu'elle fait, mais je sais qu'elle travaillait dans
4 une organisation humanitaire. Je ne sais pas ce qu'elle y fait.
5 Q. M. Nice l'a décrite ce matin comme étant "la conscience de certains
6 serbes, en tant que journaliste, d'enquêteuse et de juriste de droit
7 humanitaire, prête à dire des vérités, vérités que d'autres n'ont pas le
8 courage de publier." Je viens de vous citer ce que nous a dit M. Nice, ce
9 matin. Seriez-vous d'accord avec ces remarques Monsieur Jasovic ? Pourriez-
10 vous nous faire part de vos commentaires sur ce point ?
11 R. Je suis d'accord. La vérité finit toujours par éclater. Je ne me suis
12 jamais opposé à la vérité, je n'ai jamais été un partisan des
13 contrevérités.
14 Q. Si cette réponse signifie que vous êtes prêt à accepter que les
15 documents fournis par Natasa Kandic et son organisation de renom et si vous
16 êtes prêt à reconnaître qu'il y a là des vérités, je vous dirais ce que je
17 vous disais tout à l'heure avant la pause à propos des chocs électriques
18 infligés à un jeune homme de 18 ans. J'attire votre attention sur un
19 rapport portant la date du 16 février 1995. Souvenez-vous, vous aviez
20 quelques problèmes quant à la date du 11 avril 1994. Est-ce que vous voulez
21 modifier votre déposition à propos des chocs électriques infligés à ce
22 jeune homme ?
23 R. Non, je ne veux rien changer. Rien du tout, je n'ai électrocuté
24 personne. Je n'ai torturé personne et je ne sais pas sur quoi portait
25 l'enquête de Natasa Kandic.
Page 5364
1 Q. M. Nice, s'exprimant au nom du bureau du procureur, a affirmé ceci au
2 juge Marinkovic ce matin - je n'ai pas de référence de page mais je peux
3 vous dire à quelle heure, à 9 heures 46 et 55 secondes. Je cite M. Nice à
4 présent : "La deuxième affirmation que je vais faire devant vous est la
5 suivante : il n'était pas rare, en fait, il était peut-être très fréquent
6 que des accusés soient victimes de passages à tabac et même de sévices et
7 tortures lorsqu'ils étaient détenus sur votre ordre et qu'ils relevaient de
8 votre compétence; est-ce exact ?"
9 Voyez-vous, Monsieur Jasovic, je vous demande un petit moment. Voyez-
10 vous, M. Jasovic, le bureau du procureur, ce matin, affirmait à un témoin
11 qui déposait dans ce même prétoire que des individus tel que vous
12 torturaient des détenus. Je vous pose pour la énième fois, la même
13 question. Êtes-vous prêt à admettre que vous l'avez fait, oui ou non ?
14 R. Non, non, je ne suis pas prêt à le faire parce que ce n'est pas vrai.
15 Mon collègue, M. Momcilo Sparavalo et les collègues dont il est fait état
16 dans ces déclarations, nous n'avons pas fait cela.
17 Q. M. Nice a également affirmé devant le juge Marinkovic, qu'il existait
18 un document qu'il lui a montré, un document portant la date du mois
19 décembre 1994. Cela a été dit à 10 heures précises, si j'en crois le compte
20 rendu de l'audience de ce matin. Cela est le rapport qui a trait au même
21 sujet est un rapport d'un docteur, un docteur répondant au nom de
22 Dobrinanin --
23 R. Dobricanin.
24 Q. Vous le connaissez ?
25 R. Je ne le connais pas personnellement, mais je l'ai vu à la
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1 télévision.
2 Q. Cet homme était-il respecté ?
3 R. Oui.
4 Q. Voilà qui est intéressant. Parce qu'il a procédé à un examen
5 médical d'une personne qui avait été détenue dans votre prison, répondant
6 au nom d'Alija Isak, du village d'Urosevac. Il décrit les lésions que
7 portait cet homme : "Alija Isak, d'Urosevac… la peau des paumes de la main
8 d'une couleur verdâtre… l'avant-bras injecté de sang. La cheville écorchée,
9 la peau sèche à nue, d'une couleur brune, rougeâtre. Opinion : hématome" -
10 en français simple, c'est un bleu - "infligé suite à un coup sévère au
11 moyen d'un outil mécanique lourd, non contondant." Cela décrit une des
12 blessures. M. Nice a demandé au juge si elle avait reçu ce rapport.
13 Est-ce que vous êtes l'auteur de ces coups infligés à un homme
14 répondant au nom d'Alija Isak, d'Urosevac ?
15 R. Je n'ai pas infligé ces blessures, je n'en sais strictement rien.
16 Q. Est-ce que vous avez déjà entendu parlé d'un homme répondant au
17 nom de Peter Bouckaert de Human Rights Watch ? Est-ce que vous le
18 connaissez ?
19 R. C'est la première fois que j'entends ce nom.
20 Q. Il a fait une déclaration auprès de ce tribunal, dans laquelle il
21 dit ceci : "Le 25 septembre 1998, avec un homme du nom de Fred Abrahams
22 s'est entretenu avec un homme du nom de Shaip Qerqini, Rexhep Bislimi ainsi
23 que deux autres hommes. Connaissez-vous ces noms ?
24 R. C'est la première fois que j'entends ce nom de Qerqini.
25 Q. [aucune interprétation]
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1 R. Mais j'ai entendu parlé de Dugolli dans des déclarations, je sais qu'il
2 était membre de l'UCK, dans la zone de Petrastica. Dalib Dugolli, je le
3 connaissais et son fils Agron Dugolli a été tué le 28 novembre 1997.
4 Q. Je parle de Cen Dugolli, C-e-n Dugolli. Est-ce que vous le connaissez.
5 R. Non, non.
6 Q. Vous en êtes sûr ?
7 R. Je ne connais pas les autres, j'en suis sûr. Je suis sûr que je ne le
8 connais pas.
9 Q. Cette personne a dit à M. Bouckaert qu'il a été atterré, torturé,
10 victime de sévices alors qu'il était en détention et vous n'en savez
11 strictement rien ?
12 R. Non. Je n'en sais strictement rien.
13 Q. Vous nous avez dit, dans votre déposition d'hier, que vous aviez
14 rencontré et que vous aviez bu un verre dans un café avec Isak Musliu. Vous
15 souvenez-vous que vous nous avez dit cela hier ?
16 R. Oui. Je m'en souviens.
17 Q. Est-ce que vous nous dites sérieusement qu'Isak Musliu aurait pris un
18 verre avec vous dans un café à quelque moment que ce soit, quelque verre
19 que ce soit, en votre compagnie. Est-ce que vous êtes vraiment en train de
20 nous dire cela ? Sérieusement ?
21 R. A cette époque là, oui, j'aurai été boire un verre avec lui. Je ne sais
22 pas si ce serait le cas maintenant. Probablement pas. Q. Certainement pas
23 M. Jasovic. C'est un mensonge. Soit que c'est une erreur innocente ou un
24 mensonge délibéré; lequel des deux M. Jasovic ?
25 R. Monsieur, je dis la vérité. Je n'ai jamais peur de la vérité. J'ai dit
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1 que c'était Srboljub Vojinovic qui nous a présenté parce que je ne le
2 connaissais pas.
3 Q. Isak Ibrahimi, cela c'est peut-être quelqu'un avec qui vous auriez bu
4 un verre dans un café avec Vojinovic. Puisqu'ils étaient tous les deux
5 intéressés par les pigeons. Isak Ibrahimi et Isak Musliu, est-ce
6 qu'éventuellement vous auriez pu faire une confusion entre les deux noms,
7 ou est-ce que vous êtes en train, délibérément, d'intervertir les noms ?
8 R. Je n'ai pas changé, on intervertit les noms délibérément. Je ne connais
9 pas M. Isak Ibrahimi. Moi, la colombophilie, cela ne m'intéresse pas, je
10 sais que Srboljub Vojinovic aimait effectivement fréquenter des
11 colombophiles, oui.
12 Q. Monsieur Jasovic, est-ce que vous êtes fier du travail que vous avez
13 accompli en 1998 et 1999 ?
14 R. Je peux parler en mon nom propre ainsi qu'au nom de mes collègues. Oui,
15 nous sommes fiers.
16 Q. J'affirme que vous étiez un des rouages d'une machinerie brutale et que
17 vous jouiez votre rôle avec délectation, et vous vous livriez à des
18 activités de torture, d'intimidation, voire pire des membres de la
19 communauté albanaise, et que ceci faisait partie intégrante du programme de
20 Milosevic, programme de nettoyage ethnique. Est-ce que vous suivez
21 l'affirmation que je fais ?
22 (expurgée)
23 (expurgée)
24 (expurgée)
25 (expurgée)
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1 (expurgée)
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5 (expurgée)
6 R. Non, je ne sais pas. Sérieusement, je n'ai jamais entendu parler de
7 cette personne. Si j'en avais entendu parler, je vous l'aurais dit. Je n'ai
8 rien à cacher.
9 Q. Vous avez l'air un peu nerveux quand j'évoque ce nom, Monsieur Jasovic,
10 si vous permettez que je dise ceci.
11 R. Non, je ne suis pas nerveux; je ne suis jamais nerveux. Je ne suis pas
12 du genre nerveux ou inquiet. Je ne suis pas du genre à être nerveux ou
13 inquiet à propos de contrevérités.
14 Q. Je n'ai encore rien dit. Comment savez-vous qu'il s'agit de
15 contrevérités ?
16 R. Ce que vous dites n'est pas exact, que j'ai commis des crimes, de
17 torture, et je ne sais quoi.
18 Q. Savez-vous ce que l'on entend par un "dénonciateur" ?
19 R. Non.
20 Q. Quelqu'un qui est un "insider" et quelqu'un qui est prêt à parler
21 publiquement de ce qui se passe à l'intérieur d'une organisation, d'une
22 institution, c'est ce qu'on appelle un dénonciateur, Monsieur Jasovic. Est-
23 ce que vous me suivez ?
24 R. Non, je n'ai pas compris la question.
25 (expurgée)
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14 Q. Il a été dit qu'il y avait de nombreux exemples de meurtres et
15 assassinats commis par le MUP, la sécurité d'Etat, ou le SUP. Il a été dit
16 que ces meurtres avaient été imputés à l'UCK pendant la guerre. Est-ce que
17 vous savez que ces affirmations ont été faites ?
18 R. Non, c'est inexact. Comment voulez-vous que je le sache, puisque ce
19 n'est pas vrai.
20 Q. Est-ce que vous avez fait partie de l'attaque qui a été lancée à
21 Drenica en mars 1998, personnellement ?
22 R. Je dis que je n'ai pas quitté mon bureau, ma table de bureau. Je ne
23 suis pas allé sur le terrain.
24 Q. Jamais ? C'est cela que vous dites. Vous n'êtes jamais allé sur le
25 terrain ? C'est ce que vous dites ?
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1 R. Je ne suis pas allé sur le terrain, si ce n'est pour des descentes sur
2 les lieux dans des cas exceptionnels, lorsque le chef du poste de police à
3 Kacanik a été assassiné. Pour l'essentiel, je n'allais pas faire descente
4 sur les lieux ou des enquêtes sur les lieux. Cette partie du travail, ces
5 tâches étaient la responsabilité de ceux qui devaient s'occuper des crimes
6 de sang.
7 Q. Je ne suis pas en train de parler d'enquête ou chose de ce genre. Je
8 parle d'aller commettre des crimes. Est-ce que vous avez connaissance d'une
9 unité spéciale qui s'appelait les Bérets verts ?
10 R. Les unités spéciales, les Bérets verts, j'ai entendu parler de cela à
11 la télévision, du fait qu'une telle unité existait à Belgrade. Juste à la
12 télévision.
13 Q. Est-ce que vous n'avez jamais fait partie ?
14 R. Pourriez-vous répéter votre question.
15 Q. Est-ce que vous n'avez jamais fait partie de cette unité ?
16 R. Jamais. Je ne sais même pas quel type d'uniforme ils portaient.
17 Q. Peut-être que les Bérets rouges pourraient être une façon de les
18 repérer. Est-ce que vous n'avez jamais entendu parler d'une unité portant
19 des bérets rouges ?
20 R. Je vous ai dit que j'ai entendu parler des Bérets rouges à la
21 télévision.
22 M. TOPOLSKI : [interprétation] M. Black demande la parole.
23 M. BLACK : [interprétation] Excusez-moi de demander la parole. Ceci n'est
24 pas directement lié à ce qui vient d'être dit, mais pourrions-nous aller en
25 audience à huis clos partiel brièvement.
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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Audience à huis clos partiel.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en audience à huis clos
3 partiel.
4 [Audience à huis clos partiel]
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12 [Audience publique]
13 M. TOPOLSKI : [interprétation]
14 Q. Là encore, avec l'aimable assistance de l'Huissier, Monsieur Jasovic,
15 et j'en ai presque fini, je voudrais que l'on vous montre un document, est-
16 ce qu'il y a un exemplaire pour M. Black
17 --
18 M. TOPOLSKI : [interprétation] Un exemplaire pour M. Black, s'il vous
19 plaît. Pourriez-vous, s'il vous plaît, remettre celui-ci qui porte un
20 numéro ERN.
21 Q. Alors, Monsieur Jasovic, ce document est-il une déclaration en langue
22 serbe ?
23 R. C'est exact. C'est en serbe.
24 Q. Excusez-moi de vous interrompre. En regardant la façon dont il se
25 présente et la façon dont il est conçu, dactylographié, et cetera, est-ce
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1 que ceci vous donne l'impression qu'il s'agit d'un document qui aurait pu
2 être pris par un membre de la même organisation que celle pour laquelle
3 vous travaillez ? Est-ce que cela aurait pu être recueilli par un membre de
4 la même organisation ?
5 R. Je ne sais pas. Je n'ai pas recueilli cette déclaration. Je ne sais pas
6 qui l'a recueillie.
7 Q. Non, je ne suggère pas que vous l'ayez fait. Si cela peut aider,
8 Monsieur Jasovic, dans l'intérêt de gagner du temps ou de ne pas en perdre,
9 je vais demander que l'on vous aide --
10 M. BLACK : [interprétation] Excusez--moi. Avant que nous n'allions trop
11 loin, est-ce que vous avez ceci avec une traduction anglaise que nous
12 pourrions voir ?
13 M. TOPOLSKI : [interprétation] Non.
14 Monsieur le Président, ce n'est pas une déclaration de -- bon, en ce qui
15 concerne ce qu'a dit le témoin. Je peux assurer au Tribunal que c'est
16 important parce qu'il y a des noms qui figurent à la deuxième page et ces
17 noms ont rapport avec notre affaire, environ une dizaines de lignes vers le
18 bas pour aider M. Black.
19 Q. Monsieur Jasovic, vous ne reconnaissez pas ceci comme étant une
20 déclaration qui ressemble beaucoup à celle qui provienne du SUP ?
21 R. Il est dit ici, "compte rendu," mais je n'ai pas recueilli -- en tous
22 les cas, la sécurité publique, non, je n'ai jamais remarqué de déclarations
23 où on ferait des procès-verbaux ou des compte rendus. Ce n'est pas le terme
24 qu'on emploierait. Mes déclarations étaient rédigées directement. Je ne
25 sais pas de quel secrétariat ceci provient. Je ne pourrais vous donner que
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1 des suggestions fantaisistes. On lit : "4 juillet." Voilà, je peux voir
2 cela.
3 Q. Oui.
4 R. Il dit que ceci a été recueilli dans les locaux du CRDB de Prizren.
5 Q. Oui. Au-delà de cela, vous ne pouvez pas nous aider, à l'évidence.
6 Bien, je vous remercie. Je ne vais pas vous poser davantage de questions à
7 ce sujet.
8 R. Je ne pourrais pas parce que ceci pourrait être un centre de sécurité
9 d'Etat, et c'est tout ce que je peux vous dire pour aider en ce sens.
10 L'acronyme représente probablement centre de Sécurité de l'Etat à Prizren.
11 Q. Je vous remercie beaucoup.
12 M. TOPOLSKI : [interprétation] Bien, Monsieur le Président, Madame,
13 Monsieur les Juges, est-ce qu'on pourrait, s'il vous plaît, donner une cote
14 provisoire à ce document aux fins d'identification pour le moment ?
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.
16 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de DM6 MFI.
17 M. TOPOLSKI : [interprétation] Je vous remercie.
18 Q. Monsieur Jasovic, je vais en finir, en fait, là où j'avais commencé
19 avec vous, mais j'affirme que vous étiez un homme qui se rendait coupable
20 le plus de crimes que vous ne pouviez en résoudre et avec plaisir. Est-ce
21 que vous suivez ce que j'affirme ?
22 R. Je comprends ce que vous dites, mais c'est faux.
23 Q. Je suggère, pour finir, j'affirme, que vous aviez à l'époque et vous
24 avez encore maintenant une haine pathologique de tout ce qui était
25 albanais.
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1 R. Jamais de ma vie parce que j'ai des liens familiaux dans le secteur de
2 Pec avec des Albanais. Je n'ai jamais commis de crimes et je n'aurais
3 jamais fait quoi que ce soit de ce genre. Je peux, sous ma propre
4 responsabilité, dire qu'aujourd'hui encore j'ai des amis albanais à
5 Urosevac, Pec, Kacanik, à Stimlje, même où je garde des contacts presque
6 quotidiens par téléphone.
7 Q. Oui.
8 M. TOPOLSKI : [interprétation] C'est tout. Je vous remercie. C'est tout ce
9 que je vous poserais comme question.
10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Maître Topolski.
11 Je ne sais pas qui maintenant se propose de demander la parole. Serait-il
12 déraisonnable de suggérer qu'on pourrait faire usage des dix minutes qui
13 suivent ?
14 M. MANSFIELD : [interprétation] Ce n'est pas déraisonnable, toutefois des
15 documents maintenant ont été trouvés au cours de la dernière heure en
16 albanais, il va falloir les traduire, ce qui d'ailleurs a trait à une
17 question sur laquelle je pourrais poser des questions au témoin. Je
18 voudrais demander si je pourrais les examiner d'ici demain avant de
19 commencer.
20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bon. Nous allons suspendre l'audience
21 et nous reprendrons demain à 14 heures 15.
22 M. TOPOLSKI : [interprétation] Monsieur le Président, pourrais-je dire
23 simplement, par simple courtoisie que, vous savez, n'est-ce pas, nous avons
24 un engagement professionnel qui m'oblige à rentrer chez moi pendant toute
25 la semaine prochaine, et il se peut que je ne sois pas là jusqu'à la fin du
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1 réquisitoire de l'Accusation. Je laisse mon client entre les mains de M.
2 Powles et les autres. Bien entendu, dès que j'aurais fait les arrangements
3 nécessaires, enfin je présente mes excuses à ce sujet. J'espère que vous
4 voudriez bien m'excuser pendant la semaine qui vient.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Topolski.
6 Je lève la séance.
7 --- L'audience est levée à 18 heures 51 et reprendra le jeudi
8 7 avril 2005, à 14 heures 15.
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