Affaire No.: IT-00-41-AR65
DEVANT UN COLLÈGE DE LA CHAMBRE D’APPEL
Composé comme suit:
M. le Juge Claude Jorda, Président
M. le Juge Mehmet Güney
M. le Juge Asoka de Zoysa Gunawardana
Assisté de:
M. Hans Holthuis
Décision rendue le:
16 septembre 2002
LE PROCUREUR
C/
PASKO LJUBICIC
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DÉCISION REJETANT LA DEMANDE D’AUTORISATION D’INTERJETER APPEL
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Le Conseil du Procureur
M. Christopher Staker
Le Conseil de la Défense
M. Tomislav Jonjic
LE COLLÈGE DE LA CHAMBRE D’APPEL du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le « Collège de la Chambre d’appel » et le « Tribunal international »),
SAISIE DE l’« Application for Leave to Appeal "Decision on the Defence Motion for the Provisional Release of the Accused" dated 2nd August 2002 », déposée par Pasko Ljubicic le 8 aoűt 2002 en application de l’article 65(D) du Rčglement de Procédure et de Preuve (respectivement la « Demande d’autorisation d’interjeter appel », le « Demandeur » et « le Règlement »),
VU la « Décision relative à la requête de la Défense aux fins de la mise en liberté provisoire de l’accusé » rendue par la Chambre de première instance I le 2 août 2002 (la « Décision contestée »), dans laquelle celle-ci a rejeté la « Defence Motion for the Provisional Release of the Accused », déposée par le Demandeur le 15 avril 2002,
VU la « Prosecution’s Response to the Accused’s Application for Leave to Appeal », déposée par le Procureur le 13 août 2002 (la « Réponse »),
VU la « Defence Request for Leave to Reply to the Prosecution’s Response to the Accused’s Application for Leave to Appeal » (la « Demande en report de délai ») et la « Defence Reply to the Prosecution’s Response to the Accused’s Application for Leave to Appeal » (la « Réplique »), respectivement déposées par le Demandeur les 14 et 19 août 2002,
CONSIDÉRANT que la Réplique a été déposée dans le délai prévu par le paragraphe 6 de la Directive pratique relative à la procédure de dépôt des écritures en appel devant le Tribunal international (IT/155 Rev. 1) et qu’il n’y a donc pas lieu de statuer sur la Demande en report de délai,
ATTENDU que dans la Décision contestée, la Chambre de première instance indique qu’elle a examiné « tous les éléments pertinents » au regard des faits particuliers de l’affaire1, y compris les mesures de rechange proposées par les parties – à savoir l’assignation à résidence et la mise en détention en Croatie – et le fait qu’il n’a pas été clairement établi que la reddition du Demandeur au Tribunal international n’a pas été volontaire,
ATTENDU qu’au terme de son examen, la Chambre de première instance a toutefois jugé qu’elle n’était pas convaincue que le Demandeur comparaîtrait au procès s’il était libéré2 et ce, considérant notamment que celui-ci a prouvé qu’il pouvait échapper à un mandat d’arrêt, qu’il disposait des moyens d’obtenir de faux documents et que le risque de fuite a été admis par le Gouvernement de la République de Croatie, ainsi qu’un tribunal croate,
ATTENDU que dans sa Demande d’autorisation d’interjeter appel, le Demandeur fait valoir que si sa Demande est accordée :
ATTENDU que dans sa Réponse, le Procureur s’oppose à la Demande d’autorisation d’interjeter appel aux motifs principaux que :
ii) même à supposer que le Demandeur soit autorisé à faire appel, il ne devrait pas être autorisé à présenter des moyens de preuve supplémentaires à moins d’établir que ceux-ci étaient indisponibles au moment des procédures en première instance,
ATTENDU que dans sa Réplique, le Demandeur, d’une part, réitère les moyens d’appel énoncés dans sa Demande d’autorisation d’interjeter appel et, d’autre part, développe des arguments supplémentaires, à savoir que la Chambre de première instance n’aurait pas suffisamment considéré certains éléments, tel le fait qu’il a fait usage de faux documents dans le but de protéger sa famille et le fait que l’assignation à résidence équivaut, en Croatie, à une mise en détention,
VU les articles 65 (A) et (B) du Règlement, lesquels prévoient qu’une fois détenu, un accusé ne peut être remis en liberté que sur ordonnance d’une Chambre et qu’une telle ordonnance ne peut être rendue qu’après qu’une Chambre de première instance ait donné au pays hôte et au pays où l’accusé demande à être libéré la possibilité d’être entendu, et pour autant qu’elle ait la certitude que l’accusé comparaîtra et, s’il est libéré, ne mettra pas en danger une victime, un témoin ou toute autre personne,
VU l’article 65(D) du Règlement, lequel prévoit que l’autorisation de faire appel d’une décision relative à la mise en liberté provisoire peut être accordée lorsque des motifs sérieux pour ce faire ont été invoqués,
CONSIDÉRANT que les « motifs sérieux » au sens de l’article 65(D) du Règlement commandent que le Collège de la Chambre d’appel soit convaincu par le Demandeur que la Chambre de première instance a pu verser dans l’erreur,
CONSIDÉRANT qu’en l’espèce, le Demandeur n’a pas démontré de quelle manière la Chambre de première instance a pu verser dans l’erreur en appréciant les critères énoncés à l’article 65(B) du Règlement,
CONSIDÉRANT par ailleurs qu’il n’est pas opportun que les parties présentent des moyens de preuve supplémentaires dans le cadre d’un appel d’une décision rendue en vertu de l’article 65 du Règlement, étant donné, d’une part, que ces éléments doivent d’abord être présentés à la Chambre de première instance et, d’autre part, qu’il est toujours possible que le demandeur présente une nouvelle demande de mise en liberté provisoire lorsque les circonstances le justifient,
PAR CES MOTIFS,
REJETTE la Demande d’autorisation d’interjeter appel.
Fait en anglais et en français, la version en français faisant foi.
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M. le Juge Jorda
Président
Fait le 16 septembre 2002
La Haye (Pays-Bas),
[Sceau du Tribunal]