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1 Le jeudi 2 mars 2006
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 18.
6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Quelques observations avant que je ne
7 donne la possibilité à Me Milovancevic de poursuivre son contre-
8 interrogatoire. Pour ce qui est de l'intendance, on nous a offert la
9 possibilité, si nous le souhaitons, de siéger non pas demain après midi
10 mais demain matin. Il en sera de même pour le 6 mars. Si vous souhaitez
11 terminer plus tôt demain vendredi, nous pourrons siéger demain matin, tout
12 comme le 6.
13 Des observations, Monsieur Whiting ?
14 M. WHITING : [interprétation] Ces dates ne posent aucun problème à
15 l'Accusation.
16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic ?
17 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, si nous avions
18 une audience demain matin, cela va certainement perturber ce que nous
19 avions prévu, et perturber notre rythme de travail. Si ce n'est pas une
20 nécessité absolue, je vous demanderais de nous en ternir à ce qui avait été
21 prévu, à savoir que nous siégerons demain après midi.
22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Qu'en est-il du 6 ?
23 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Le 6, c'est la semaine prochaine, pas de
24 problème, Monsieur le Président. Cela n'est pas un problème.
25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je suppose que les personnes présentes
26 dans le prétoire n'ont pas de problèmes si nous siégeons l'après-midi du 6
27 au lieu du matin, et je m'adresse de toute façon aux interprètes et à
28 toutes les personnes qui sont ici. Nous siégerons demain après midi pour
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1 tenir compte de ce que nous a dit Me Milovancevic, mais nous siégerons la
2 matinée du 6. Est-ce que cela vous convient ? Je vois que les interprètes
3 semblent acquiescer et donc, nous siégerons demain après midi et pour ce
4 qui est du 6, nous siégerons dans la matinée.
5 Il y a une décision que nous aimerions rendre maintenant. Il s'agit d'une
6 décision relative à la requête de l'Accusation à propos d'une déposition
7 qu'ils souhaiteraient entendre par le truchement d'une liaison vidéo.
8 La Chambre est saisie de cette requête présentée par l'Accusation qui
9 souhaite qu'une liaison vidéo soit établie, et cela a été déposé
10 confidentiellement le 3 février 2006. Il s'agit d'une requête de
11 l'Accusation portant sur le témoignage du témoin protégé MM-022, ainsi que
12 du Témoin MM-023 et du témoin MM-040, en fonction de l'article 71 bis du
13 Règlement de procédure. Cela est demandé du fait du mauvais état de santé
14 de ces témoins. La Défense n'a pas déposé de réponse à cette requête.
15 Le 23 février 2006, l'Accusation a déposé, à titre confidentiel, une
16 requête relative aux renseignements médicaux. Il s'agit de certificats
17 médicaux relatifs à l'état de santé desdits témoins. La Chambre de première
18 instance estime que le témoignage de ces témoins porte sur leur
19 participation à certains incidents bien précis allégués dans l'acte
20 d'accusation et par conséquent, nous ne pouvons pas poursuivre sans ces
21 dépositions. La Chambre de première instance considère de plus qu'au vu des
22 renseignements qui étaient fournis dans les certificats médicaux, les
23 témoins ne sont pas en mesure de venir et de se présenter au Tribunal pour
24 témoigner en personne.
25 La Chambre de première instance estime qu'il va dans l'intérêt de la
26 justice que les témoins témoignent par le truchement de cette liaison vidéo
27 et il est donc ainsi indiqué que leur témoignage se fera par l'entremise de
28 cette liaison vidéo établit entre Zagreb et les salles d'audience du siège
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1 du Tribunal et ce, lors de la semaine du 20 mars 2006.
2 La Chambre de première instance indique qui plus est, que les lieux et les
3 dates exactes de cette conférence établie par lien vidéo sera déterminée
4 après consultation entre les parties, le Greffe et la Chambre de première
5 instance, car il faut que nous prenions en considération l'état de santé
6 des témoins ainsi que la possibilité de pouvoir les entendre à Zagreb ou
7 dans les environs de Zagreb. La Chambre de première instance demande au
8 Greffe de prendre toutes les mesures nécessaires afin que soit organisée
9 cette conférence par liaison vidéo et sans oublier, bien entendu, les
10 mesures de protection octroyées pour le Témoin MM-022.
11 Je vous remercie. J'en ai terminé avec cette ordonnance.
12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic. Avant que vous ne
13 repreniez le fil de votre contre-interrogatoire, j'aimerais rappeler à M.
14 Milan Babic que vous êtes toujours tenu par la déclaration solennelle que
15 vous avez prononcée au début de votre déposition. Je vous en remercie.
16 Je vous donne la parole, Maître Milovancevic.
17 LE TÉMOIN: MILAN BABIC [Reprise]
18 [Le témoin répond par l'interprète]
19 Contre-interrogatoire par M. Milovancevic : [Suite]
20 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Babic.
21 R. Bonjour.
22 Q. Nous allons reprendre votre contre-interrogatoire aujourd'hui. Comme
23 auparavant, j'aimerais vous rappeler la consigne des interprètes. Ils nous
24 ont effectivement demandé de marquer un temps d'arrêt entre les questions
25 et les réponses pour que tout puisse être interprété.
26 La dernière fois, vers la fin de votre contre-interrogatoire, nous avions
27 parlé du référendum portant sur la souveraineté et l'autonomie du peuple
28 serbe en Croatie, en août, septembre 1992. Puis ensuite, nous avons abordé
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1 la mise ne application de cette décision, avec l'adoption du statut de la
2 Région serbe autonome de la Krajina en décembre 1990. Vous vous souvenez de
3 cela, Monsieur Babic ?
4 R. Oui.
5 Q. J'aimerais revenir sur quelque chose auquel vous avez fait référence
6 lors de votre déposition, à savoir, la réunion avec M. Martic en juillet
7 1990, à l'occasion des manifestations des policiers de Knin. Lors de votre
8 déposition, avez-vous mentionné la pétition qui avait été envoyée par un
9 groupe de policiers de Knin au secrétariat fédéral de l'Intérieur, au
10 secrétaire du ministère fédéral à Belgrade, Petar Gracanin ?
11 R. Oui.
12 Q. Est-ce que j'interprète votre déclaration à bon escient lorsque je dis
13 que dans cette pétition, ils exprimaient et manifestaient leur opposition à
14 l'introduction de nouveaux symboles croates pour la police, à savoir, de
15 nouveaux uniformes, une nouvelle appellation pour leur service, et deux
16 nouveaux emblèmes tels que le drapeau à damier ?
17 R. Oui, c'est ainsi que je me souviens de cette pétition, effectivement.
18 Q. Est-ce que vous savez combien de policiers ont signé cette pétition ?
19 Est-ce que vous avez un chiffre à nous donner à ce sujet, même s'il n'est
20 pas exact ?
21 R. Je pense que la majorité des policiers du poste de police de Knin l'ont
22 signée.
23 Q. Vous avez dit qu'en juillet 1990, une réunion a été organisée à Knin
24 entre le MUP de la Croatie et les membres du poste de police de Knin. Le
25 but de cette réunion était de faire en sorte que les policiers, qui avaient
26 signé la pétition, deviennent plus obéissants.
27 R. Voilà ce qui a été dit grosso modo. Cela a été présenté par les membres
28 du MUP. Il a été dit que la police devait tout simplement faire son travail
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1 et ne pas s'immiscer dans les affaires politiques. Qu'il s'agissait du
2 comportement qui devait être adopté par la police de Knin, et d'ailleurs,
3 je viens de me souvenir du nom. Il s'agissait de Petar Jurica; je pense que
4 c'était le représentant de Zagreb.
5 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire où a été convoquée cette réunion ?
6 R. Au poste de police de Knin.
7 Q. Vous étiez présent à cette réunion. Pourquoi est-ce que vous étiez
8 présent à cette réunion ?
9 R. Ils m'ont convoqué parce que j'étais président de la municipalité de
10 Knin. Quelqu'un m'a appelé, je ne sais pas de qui il s'agissait.
11 Q. Vous avez dit qu'à cette réunion, les policiers ont présenté leurs
12 raisons, ils ont expliqué pourquoi ils avaient signé la pétition et la
13 délégation de Zagreb a exposé ses raisons également, et fondamentalement
14 chacun s'est tenu à son point de vue.
15 R. C'est ce que j'ai dit, il y a quelques moments. La délégation du MUP de
16 la Croatie a exposé son point de vue. Les policiers ont à nouveau expliqué
17 la teneur de la pétition.
18 Q. Lors de cette réunion, est-ce que les policiers ont expliqué pourquoi
19 ils étaient opposés à l'introduction de ces changements au sein de la
20 police ? Pourquoi étaient-ils opposés à ces nouveaux uniformes, à ces
21 nouveaux emblèmes, à ce nouveau nom ?
22 R. Je vous ai déjà dit que je n'étais pas en mesure de me souvenir de tous
23 les détails, mais je me souviens de la situation générale et des points de
24 vue généraux adoptés.
25 Q. Ces nouveaux emblèmes, ces nouveaux insignes destinés à la police, est-
26 ce que ces emblèmes évoquaient quelque chose pour la police de Knin ? Est-
27 ce que cela leur a rappelé quelque chose ?
28 R. Les symboles, les uniformes, le nom de la police, comme ils nous l'ont
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1 expliqué, leur a rappelé la police de l'Etat indépendant de Croatie. C'est
2 ce qu'ils nous ont expliqué. C'était notamment vrai pour le nom de la
3 police.
4 Q. Quel était le nom qui a été utilisé pendant la Deuxième Guerre
5 mondiale, il s'agit du gouvernement oustachi de l'Etat indépendant de la
6 Croatie ?
7 R. Oui, c'est cela. C'est le nom de la police de cet état.
8 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à Me Milovancevic de ne pas parler
9 si rapidement.
10 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]
11 Q. Est-ce que cela a coïncidé avec les mutations de la constitution de la
12 Croatie ?
13 R. Oui. Cela s'est passé pendant cette période, certes, après que la
14 présidence de la Croatie a pris cette initiative pour modifier la
15 constitution.
16 Q. Est-ce que nous pourrions rappeler à nouveau quelles étaient ces
17 modifications, à savoir que les Serbes ne seraient plus une nation
18 conformément à la constitution croate, qu'il y allait avoir un phénomène de
19 croatisation [phon], comme vous l'avez dit vous-même, avec des emblèmes
20 croates, des insignes croates. La langue serbe a été abolie, et on faisait
21 fi de la régionalisation qui allait disparaître.
22 R. Oui. Voilà les mutations en question. Il s'agit effectivement des
23 changements.
24 Q. Merci, Monsieur Babic. Vous avez dit à un moment qu'il y avait un
25 certain nombre de personnes qui se trouvaient devant le poste de police de
26 Knin. Est-ce que vous vous souvenez s'ils étaient très nombreux ou peu
27 nombreux ?
28 R. Il y avait toute une foule là-bas. La rue était bloquée.
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1 Q. Vous avez expliqué que ces personnes s'étaient rassemblées lorsqu'elles
2 ont entendu qu'il y avait des membres des forces spéciales dans le coin.
3 Pourquoi est-ce que ces personnes étaient là ? Qu'est-ce qu'elles étaient
4 censées obtenir de par leur présence face au poste de police ?
5 R. Ils apportaient leur soutien à la police, aux policiers.
6 Q. En quel sens ? Est-ce que les policiers couraient un danger du fait de
7 la présence des membres de ces unités spéciales ?
8 R. Ils voulaient exprimer leur solidarité avec les requêtes présentées par
9 la police. C'était le but essentiel, l'objectif essentiel de ce
10 rassemblement. Des renseignements ont été reçu suivant lesquels il y avait
11 des membres d'unités spéciales près de cet endroit.
12 Q. Monsieur Babic, vous avez dit que Martic était également présent à
13 cette réunion. Vous avez dit également que les discussions avec les
14 policiers de Knin étaient plus au moins les mêmes, puis qu'à un moment,
15 vous vous êtes adressé aux personnes qui étaient rassemblées là pour leur
16 demander de rentrer chez elles.
17 R. Oui. C'était à la fin. La réunion avait fait chou blanc. La délégation
18 du MUP de la Croatie était plutôt contrariée et il fallait bien trouver un
19 moyen pour qu'ils partent. Ce n'était pas facile pour eux de sortir. C'est
20 pour cela que les gens étaient censés partir. Il fallait qu'eux puissent
21 partir du poste de police. C'est pour cela que j'ai dit ce que j'ai dit.
22 Q. Est-ce que les gens sont partis lorsque vous vous êtes adressé à eux ou
23 est-ce qu'ils sont restés là ?
24 R. Il y a certaines personnes qui se sont exprimées. Je me suis exprimé.
25 Il y a des personnes qui sont restées là. Tout s'est passé assez lentement.
26 Puis, d'après ce que l'on m'a dit plus tard, la délégation du MUP de la
27 Croatie a pu partir par une porte arrière.
28 Q. Est-ce que vous vous souvenez si l'accusé Martic a parlé à ce moment-
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1 là ? Est-ce qu'il a fait une déclaration à la presse ? Maintenant, vous
2 nous dites que la délégation est partie. Qui est-ce qui a pris des mesures
3 pour que cette délégation parte ? Est-ce que ce sont les policiers du poste
4 de police de Knin qui ont fait en sorte que la délégation ait pu partir
5 sans problème, sans encombre ?
6 R. Je n'en sais rien. J'ai juste entendu dire que les policiers étaient
7 partis, que certainement des policiers les avaient fait partir par la porte
8 arrière. Voilà ce dont je me souviens.
9 Q. Lorsque vous avez mentionné les propos de Milan Martic, à savoir, il
10 avait dit que tant qu'il serait en vie, le drapeau à damier de la Croatie,
11 le drapeau à damier croate, ne flotterait pas sur la forteresse de Knin.
12 Est-ce que cela a quelque chose à voir avec le départ de ces personnes du
13 poste de police de Knin ?
14 R. Non. D'après ce dont je me souviens, cela avait un sens général compte
15 tenu de tous les événements qui se déroulaient là-bas. Cela avait à voir
16 avec la manifestation, la pétition, la visite de la délégation. Tout cela
17 avait à voir avec les conflits entre le MUP de la Croatie et le poste de
18 police de Knin.
19 Q. Vous avez expliqué quelle était la valeur symbolique de la forteresse
20 de Knin. Il s'agit d'une vieille forteresse qui se trouve en plein centre
21 de la ville. En fait, il s'agit d'un vieux bastion militaire. Cela a à voir
22 avec l'histoire, avec le passé des Serbes dans cette région et avec leur
23 lutte contre les Turcs. Est-ce que cela est exact, Monsieur Babic ?
24 R. C'est ce que j'ai dit, oui.
25 Q. La déclaration faite par Milan Martic, tant qu'il sera en vie, le
26 drapeau à damier croate ne flottera pas sur la forteresse de Knin. Est-ce
27 que cela exprimait son opposition face à ce symbole de l'Etat indépendant
28 de la Croatie, Etat où les Serbes étaient des victimes ?
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1 R. Oui, mais il s'agissait de l'Etat serbe. Le damier représentait l'Etat
2 croate, les nouvelles autorités croates. C'était cela que représentait le
3 drapeau à damier. C'était son symbole.
4 Q. Vous avez dit que le 10 août 1990, peu de temps après l'arrivée de la
5 délégation de Zagreb dans le poste de police de Split, vous avez rencontré
6 Milan Martic. Vous étiez près l'un de l'autre, et que Milan Martic est
7 arrivé en portant l'uniforme pour vous prévenir que vous n'étiez pas en
8 sécurité. Est-ce que cela est exact, Monsieur Babic ?
9 R. Oui, mais je pense que cela s'est passé le 9 août.
10 Q. Qu'avez-vous fait après cet avertissement de la part de Milan Martic ?
11 R. Il s'est arrangé avec son ami et son associé Pepin Cupkovic. Il a pris
12 des dispositions pour que ma famille et moi-même puissions être transférés
13 dans un autre bâtiment à la périphérie de Knin où nous pouvions passer la
14 nuit. Je veux dire que j'ai été tellement perturbé par cela, que j'ai
15 accepté sa proposition comme quelque chose d'assez logique.
16 Q. Est-ce que M. Martic était perturbé, était contrarié ? Est-ce qu'il a
17 été convaincant lorsqu'il vous a transmis cet avertissement, cette mise en
18 garde ?
19 R. Comme je vous l'ai dit, il me semblait calme. C'est de façon calme
20 qu'il a dit : "Tout va bien, mais ils vont venir nous attaquer." Son
21 comportement et sa sérénité, en fait, ce calme n'était absolument pas en
22 harmonie avec ce qu'il nous disait puisqu'il nous suggérait de nous
23 déplacer. Il semblait tout à fait calme et maître de lui-même.
24 Q. Pourquoi est-ce que vous êtes parti alors ? Est-ce que c'est parce que
25 vous aviez ce sentiment d'insécurité vous et votre famille ?
26 R. Il a dit : "Ils arrivent, ils arrivent. Il m'a dit que je n'étais plus
27 en sécurité. C'est pour cela que je devrais partir.
28 Q. Est-ce qu'il vous a dit qui menaçait votre sécurité ?
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1 R. Oui. Les forces de police spéciales croates.
2 Q. Vous avez dit que le lendemain, David Rastovic, le vice-président du
3 Conseil national serbe et Bogoljub Popovic, le vice-président du SDS, vous
4 ont dit que vous devriez vous rendre auprès de Milosevic pour demander à
5 être protégé. Est-ce que c'est comme cela que les choses se sont passées ?
6 R. Oui.
7 Q. Pour qui deviez-vous demander cette protection, Monsieur Babic ?
8 R. Pour les Serbes de Knin, pour les Serbes en Krajina et en Croatie.
9 Q. Qui menaçait les Serbes à Knin, en Croatie et en Krajina, d'après les
10 renseignements dont vous disposez ? Contre qui deviez-vous les protéger ?
11 R. Comme je l'ai dit, il y a deux choses : le Conseil national serbe avait
12 été convoqué après l'assemblée à Srb. Ils avaient décidé de convoquer un
13 référendum portant sur l'autonomie serbe. Cela, c'est un événement auquel
14 le gouvernement croate a réagi en disant que le référendum était illégal.
15 Le deuxième problème qui a surgi a été le problème créé par les officiers
16 de police dans le poste de police avec ce conflit ou ces débuts de conflit
17 avec le MUP croate. Il y avait deux problèmes, deux conflits. L'un était
18 politique et afférent au référendum, puis le deuxième, comme le
19 gouvernement croate l'expliquait, il y avait cette révolte de la police à
20 Knin. C'est cela qui a provoqué ou qui aurait pu provoquer une intervention
21 éventuelle du gouvernement croate, et qui fait qu'ils ont voulu régler le
22 problème par la force. Ils voulaient contraindre les forces de police à
23 bien se comporter. Ils voulaient également empêcher que le référendum n'ait
24 lieu, et tout cela par la force.
25 Q. Cette intervention éventuelle et puissante de la part du gouvernement
26 croate, est-ce que c'est pour cela que vous êtes allé voir M. Milosevic,
27 qui était alors président de la Serbie ? Vous avez mentionné le fait qu'il
28 se trouvait à Kupari avec le président de la présidence. Vous avez
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1 également dit que le ministre pour la Défense nationale, le général
2 Kadijevic, était présent là-bas. Est-ce que c'est comme cela que les choses
3 se sont passées ?
4 R. J'ai dit qu'il y avait ces deux problèmes, et que nous devions obtenir
5 la protection de Milosevic pour ces questions. C'est ce qui m'avait été
6 suggéré, et c'est ce que j'ai accepté.
7 Q. Est-ce que nous pouvons dire que vous avez également pensé exactement
8 comme les personnes qui vous avaient suggéré qu'il y allait avoir une
9 intervention de la part du gouvernement croate ?
10 R. J'ai accepté de me déplacer, de déménager dans un autre appartement, ce
11 qui signifie que j'étais moi-même assez contrarié. J'ai accepté cette
12 proposition parce que je pensais que le danger était un danger réaliste.
13 Q. Vous avez dit avoir envoyé un message au président Milosevic par
14 l'entremise de M. Vucetic. Vous lui avez demandé une réunion. Vous
15 souhaitiez lui demander sa protection. M. Milosevic vous a répondu qu'il
16 fallait que vous vous adressiez au président de la présidence, M. Jovic.
17 Est-ce que c'est exact ?
18 R. Oui. Ce fut une conversation indirecte; ce ne fut pas véritablement un
19 échange de messages. Bogoljub Popovic ainsi que moi-même avons expliqué le
20 problème à Vucetic, qui a lui-même expliqué le problème à Milosevic. Il a
21 dit que ces trois personnes étaient là, Milosevic, Kadijevic et Jovic.
22 D'après ce que j'ai compris, ils ont parlé de ce problème, ou plutôt ils
23 ont parlé de ce dont nous avons parlé. Leur réaction était qu'il fallait
24 que je demande à être reçu par Jovic à Belgrade pour pouvoir lui expliquer
25 le fond de la question.
26 Q. C'est ce que vous avez fait, n'est-ce pas ? Le
27 13 août 1990, vous avez été reçu par le président de la présidence de la
28 Yougoslavie, M. Jovic, à Belgrade. Vous avez été reçu sur votre demande,
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1 n'est-ce pas ?
2 R. Oui.
3 Q. Vous avez dit que c'est à ce moment-là que vous avez discuté de la
4 situation politique en Croatie avec ces modifications constitutionnelles
5 qui avaient été présentées par les nouvelles autorités croates. Vous avez
6 également discuté du fait que les Serbes en Croatie avait prévu un
7 référendum, et les autres ont parlé de la menace d'intervention armée de la
8 part du MUP de la Croatie; est-ce exact ?
9 R. Oui, c'est ce que j'ai dit. C'est ce dont nous avons parlé. J'ai parlé
10 des questions politiques, alors que les deux autres se sont plutôt
11 concentrés sur les questions relatives à la sécurité.
12 Q. Vous avez expliqué que M. Jovic, président de la présidence, face aux
13 renseignements que vous lui avez transmis, a indiqué qu'un projet de
14 législation était préparé en matière d'autodétermination pour l'assemblée
15 de la Yougoslavie, qu'il se ralliait à votre lutte politique et que la JNA,
16 en tant que force armée fédérale, serait le garant de votre lutte
17 politique, et que ce serait un instrument de soutien pour votre lutte
18 politique; est-ce exact ?
19 R. Oui.
20 Q. Vous avez dit qu'après votre conversation avec M. Jovic le 13 août
21 1990, vous êtes allé voir le secrétaire fédéral pour les Affaires
22 intérieures, Petrar Gracanin, et qu'il a suggéré que le référendum dont
23 vous aviez parlé, le référendum pour les Serbes, devait être organisé
24 conformément à la constitution de la Yougoslavie et la constitution de la
25 Croatie. Est-ce exact, Monsieur Babic ?
26 R. Cela ne s'est pas passé dans le bureau de M. Gracanin; cela s'est passé
27 dans le bureau de M. Jovic. C'était l'un des membres du cabinet de Jovic
28 qui nous a dit à quel article de la constitution il fallait faire
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1 référence. Nous devrions utiliser les articles de la constitution relatifs
2 à l'autodétermination ou a la détermination pour le référendum. Cela s'est
3 passé avant la réunion avec Gracanin.
4 Q. Vous avez également dit avoir rencontré Petar Gracanin pour le tenir
5 informé de la situation, et vous avez dit qu'après une conférence de
6 presse, il vous aurait dit que vous deviez mettre en place des barrages,
7 mais cela n'a pas été évoqué au cours de la conversation qu'il a eu avec
8 vous.
9 R. J'ai dit qu'il a fait cette déclaration à la presse, mais je ne sais
10 pas s'il nous a dit cela à l'époque ou non. Je ne m'en souviens pas. Peut-
11 être qu'il l'a dit lorsqu'il a reçu une délégation des policiers de Knin.
12 C'est ce que j'ai dit. Je ne me souviens pas.
13 Q. Après les pourparlers de Belgrade en présence des présidents de la
14 présidence de Yougoslavie, vous êtes rentré en Krajina le 16 août 1990. Il
15 y avait une réunion à Dvor Na Uni où le Conseil national serbe a fixé la
16 date d'un référendum sur l'autonomie du peuple serbe, et qu'une réunion
17 avait été prévue pour ce jour-là; est-ce exact ?
18 R. Oui.
19 Q. Vous avez dit que la déclaration faite par le Conseil national serbe à
20 propos du référendum du mois d'août et du mois de septembre 1990 a
21 rencontré une certaine résistance de la part des autorités croates
22 puisqu'ils ont annoncé qu'ils empêcheraient cela par la force. Vous avez
23 parlé de ces événements-là à Knin le 17 août. Vous avez parlé des
24 événements en rapport avec cela; est-ce exact, Monsieur Babic ?
25 R. Oui, c'est exact.
26 Q. Vous avez dit, en tant que président de la municipalité de Knin, le 17
27 août dans la matinée, vous avez reçu un télex du président de la
28 municipalité d'Obrovac en vertu de quoi des forces spéciales croates
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1 étaient en train d'attaquer Obrovac et la région de Knin. Ils y mettaient
2 en place des barrages également; est-ce exact ?
3 R. J'ai dit avoir reçu un télex de Sergej Veselinovic où il disait que les
4 forces spéciales croates traversaient le mont Velebit en direction
5 d'Obrovac, et qu'ils étaient en train de mettre en place des barrages à
6 Obrovac, alors que l'information que j'ai reçue de Dusan Orlovic précisait
7 que des véhicules blindés croates entraient dans la ville de Knin.
8 Q. Savez-vous si les forces spéciales croates sont arrivées à Obrovac, si
9 les personnes présentes au poste de police ont été désarmées et que les
10 personnes qui s'y trouvaient ont empêché cela le 17 août 1990 ?
11 R. Ce que je sais, c'est qu'au cours de ces journées-là, il y a eu une
12 concentration d'armes des forces de réserve de la police. Ces forces ont
13 été concentrées en un seul et même endroit. Je crois que c'est ainsi que
14 l'ont appelé les autorités croates. Je crois que c'est ce qui s'est passé
15 ce jour-là. Je n'en suis pas tout à fait certain. Cela a pu se produire un
16 autre jour.
17 Q. Il y a des témoins qui ont dit que cela s'est passé ce jour-là,
18 lorsqu'un homme que vous avez évoqué un peu plus tôt dans votre déposition
19 vous a informé des événements qui s'étaient déroulés à Obrovac. Savez-vous
20 ce qui s'est passé le 17 août à Benkovac ? Est-ce que les forces spéciales
21 ont confisqué les armes à Benkovac ? A Obrovac ils ont tenté, ils ont
22 essayé de le faire, mais ils n'ont pas réussi. Est-ce qu'ils ont réussi à
23 le faire à Benkovac ?
24 R. Je vais répéter ceci encore une fois. Ce jour-là ou les jours suivants,
25 --
26 M. WHITING : [interprétation] Puis-je soulever une objection, s'il vous
27 plaît ? Je m'oppose à la manière dont la question a été posée, parce qu'il
28 a parlé d'autres témoins qui ont dit quelque chose. Je m'y oppose, car ce
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1 sont des références très vagues à d'autres témoins qui auraient dit quelque
2 chose.
3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'étais sur le point de dire et de
4 vous poser la question de quels témoins s'agit-il s'il y a des témoins qui
5 ont témoigné là-dessus, et s'il existe de tels témoins, qui sont-ils ?
6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Ce que je
7 souhaitais dire, c'est qu'il y avait des témoins qui ont parlé de cela,
8 mais qu'il faudrait aborder cela une autre fois. Ce que je souhaitais
9 faire, c'était simplement demander à M. Babic s'il savait en tant que
10 président du Conseil national serbe et en tant que président de la
11 municipalité de Knin, que le 17 août, les forces spéciales croates ont
12 confisqué des armes des réservistes de la police de Benkovac.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai déjà dit ce que je savais à ce propos.
14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pardonnez-moi, qui sont ces témoins ?
15 C'est ma question, Maître Milovancevic ?
16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, ces témoins
17 vivaient en Krajina à l'époque, et viendront faire leur déposition devant
18 ce Tribunal lorsque la Défense estimera que le moment sera venu pour la
19 présentation de tels moyens. Je pense à des gens qui viennent de cette
20 région, des gens qui vivent près de Benkovac, Knin et Obrovac. C'est à eux
21 que je pense; la population de ce territoire. Pour l'instant, j'estime
22 qu'il n'est pas utile de mentionner leurs noms. Si la Chambre estime que la
23 question n'est pas suffisamment précise et que je dois la reformuler, à ce
24 moment-là, je peux le faire.
25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous pouvez reformuler
26 votre question de la façon suivante : que la Défense va présenter ses
27 moyens sur ce point et qu'elle fera venir des témoins pour parler de ce
28 sujet-là, car la manière dont vous avez posé la question, on avait
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1 l'impression que ces témoins étaient déjà venus témoigner. Merci.
2 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
3 Q. La Défense a un témoin qui a parlé de cela, qui a dit que la police
4 croate a tenté de confisquer les armes à Obrovac, le 17 août, que les
5 personnes qui se trouvaient rassemblées à cet endroit-là les ont empêchées
6 alors que la police croate a confisqué des armes des forces de réserve à
7 Benkovac. Vous avez dit n'avoir aucune connaissance à ce propos; est-ce
8 exact ?
9 R. J'ai dit que j'avais quelques éléments d'information à propos des
10 événements qui se sont déroulés à cet endroit-là. J'ai dit que je n'étais
11 pas tout à fait sûr. Je ne sais pas exactement si cela s'est passé le 17 ou
12 aux alentours de cette date-là, mais une décision a été prise par le
13 gouvernement croate et le MUP pour que le MUP confisque les armes des
14 forces de réserve de la police. C'est ce qui s'est passé dans les
15 différents postes de police. Il fallait aller chercher les armes et les
16 entreposer à certains endroits. C'est la raison pour laquelle le MUP croate
17 a confisqué des armes et les a entreposées à d'autres endroits, mais je ne
18 sais pas où ces derniers ont été entreposés. On parle toujours du même
19 événement, mais je ne sais pas si cet événement s'est en réalité déroulé le
20 17 à Benkovac ou non. Quoi qu'il en soit, je suis au courant de ces
21 événements-là.
22 Q. Pour essayer de faire la clarté ici, le jour que vous avez évoqué, il
23 s'agit d'une date bien précise, le 17 août 1990. Vous avez reçu un télex
24 d'Obrovac et Dusan Orlovic est venu vous dire que des véhicules armés
25 étaient en train d'entrer à Knin. A ce moment-là et dans ce contexte-là,
26 vous parlez de la capture d'armes dans la région par les forces spéciales
27 croates ?
28 R. Oui, je parle de cette période de temps-là, hormis le terme utilisé par
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1 les Serbes, c'était la "saisie" des armes, le terme utilisé par la Croatie
2 était "confiscation d'armes." J'espère maintenant que cela est clair.
3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Puis-je prendre le temps nécessaire
4 pour faire une petite pause et dire qu'il est important que vous fassiez
5 une pause lorsque vous parlez, car vous parlez un petit peu trop vite.
6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]
7 Q. Vous avez dit ce jour-là que le 17, à la veille du référendum, Dusan
8 Orlovic, qui travaillait avec Martic, est venu vous voir et qu'il était
9 très agité. Il a dit que les véhicules blindés de transport de troupes
10 croates entraient dans la ville. C'est sa phrase que vous nous avez citée.
11 A cause de son agitation, vous l'avez cru. Vous avez demandé qu'on instaure
12 un état d'alerte et vous vous êtes rendu dans le village de Strmica. Qui
13 vous a accompagné, et à qui avez-vous donné l'ordre d'instaurer cet état
14 d'alerte ?
15 R. Les différents représentants officiels qui étaient là, je leur ai
16 demandé de mettre en marche les sirènes dans la municipalité, et ensuite
17 accompagné d'un chauffeur, je me suis rendu à Strmica. L'un de ces
18 chauffeurs, je ne sais pas, un des chauffeurs qui était là, je ne me
19 souviens pas lequel.
20 Q. Vous avez également expliqué qu'à cette occasion-là la situation que
21 vous avez décrite à Knin était telle qu'on avait déclaré l'état de guerre,
22 que ceci s'est passé à un moment où la saison touristique était à son
23 apogée, et que ceci est quelque chose qui a été appliqué dans le reste de
24 la Yougoslavie; est-ce exact, Monsieur Babic ?
25 R. Oui.
26 Q. Vous avez expliqué qu'après vous vous êtes rendu à Golubic et vous avez
27 vu Martic et Orlovic à cet endroit-là, et ils vous ont dit qu'il n'y avait
28 pas de forces spéciales croates et que les armes avaient été distribuées.
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1 R. Oui.
2 Q. Vous avez également dit, le 17 août, que des hélicoptères, avec des
3 forces spéciales croates, survolaient Knin et avaient été arrêtées par la
4 JNA ou par l'aviation yougoslave; est-ce exact ?
5 R. J'ai lu cela dans la presse quelques jours plus tard. Ce jour-là, je ne
6 disposais pas de ces éléments d'information-là, car personne ne m'a
7 rapporté cela.
8 Q. Vous nous avez dit qu'à cette occasion-là, après que l'état de guerre
9 ait été proclamé, les armes ont été distribuées aux forces de réserve. Ce
10 n'est-ce pas une obligation pour la police lorsqu'on déclare un état
11 d'urgence ou un état de guerre, à savoir qu'il faut mobiliser les
12 réservistes, leur fournir des armes et garantir la sécurité de toutes les
13 installations vitales ?
14 R. Les armes ont été distribuées avant que cette information soit
15 diffusée. Autrement dit, avant la déclaration de l'état de guerre, les
16 armes avaient déjà été emmenées du poste de police avant mon arrivée à
17 Strmica.
18 Q. Comment avez-vous appris cela ?
19 R. On me l'a dit. Ces derniers ont été chargés sur des camions. Cela avait
20 déjà été chargé ce jour-là.
21 Q. Vous avez parlé à Golubic de barrages qui avaient été mis en place, et
22 c'est la raison pour laquelle le comité central du SDS avait pris cette
23 décision; est-ce exact ?
24 R. Oui.
25 Q. Pourriez-vous nous dire si vous avez assisté à cette réunion lorsque la
26 décision a été prise de mettre en place des barrages routiers ?
27 R. C'était le lendemain, c'était après le 17. C'était le 18. J'ai assisté
28 à cette réunion et je suis arrivé au moment où la discussion commençait,
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1 mais je me suis rendu à une autre réunion, à Knin, donc je n'ai pas pu
2 assister à la réunion jusqu'à la fin, et lorsque je me suis trouvé là, j'ai
3 appris que la décision avait déjà été prise de mettre en place les
4 barrages, et j'ai appris donc de l'existence de ceci.
5 Q. Par rapport à cette décision qui a été prise, est-ce que cela a
6 signifié que M. Martic devenait le chef de ce projet, autrement dit de la
7 mise en place de ces barricades et que c'est lui qui gérait tout cela ?
8 R. Oui.
9 Q. Pourriez-vous nous dire en quoi consistaient ces barrages et comment
10 ils avaient été placés, dans quelle direction, sur quelle route, sur quels
11 axes, et dans quel but ?
12 R. Ces barrages routiers avaient été placés tout autour des villages et
13 des communes serbes de façon générale, quels que soient les villages ou les
14 environs, dans la municipalité de Knin ou d'autres municipalités serbes, ou
15 à droite ou au milieu des municipalités. Un peu partout ces barrages
16 routiers se trouvaient partout; entre des villages, entre la ville de Knin,
17 entre un village, entre un autre village, entre des villages serbes et des
18 villages croates voisins; donc à différents endroits.
19 Q. Vous n'avez pas répondu à ma question : en quoi consistaient ces
20 barrages routiers ? De quoi étaient-ils faits ?
21 R. Il y avait des barrages différents. A certains endroits, c'était de
22 véritables barrières, ils avaient été érigés à l'aide de rondins. C'est
23 pour cela qu'on appelait cela la révolution des rondins. Quelquefois, il
24 s'agissait de piles, de tas de cailloux, ou quelquefois c'était simplement
25 symbolique, c'était un banc qu'on avait trouvé là.
26 Q. Est-il exact de dire que ces barrages avaient été mis en place sur
27 toutes les routes qui menaient à des localités serbes, ce qui était censé
28 empêcher toute personne d'emprunter cette route, surtout les forces
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1 spéciales croates ?
2 R. Oui. Pour ce qui est des positions qu'ils avaient adoptées, ils étaient
3 censés empêcher toute incursion de la police et ils souhaitaient empêcher
4 la prise des postes de police. C'est la raison pour laquelle la police a
5 agi ainsi. C'est ce qu'ont fait les villageois, c'est ce qu'a fait le SDS.
6 Pour la plupart, ils avaient été placés à cet endroit-là pour empêcher
7 toute prise de contrôle du poste de police de Knin ou empêcher le MUP
8 croate de prendre les postes de police, le poste de police de Knin. C'est
9 la principale raison. Pour ce qui est du SDS, la raison pour laquelle ceci
10 avait été mis en place, c'est que le référendum se préparait.
11 Q. Est-ce que l'on peut dire en résumé que ces barrages routiers ont été
12 érigés à des seules fins d'autodéfense ?
13 R. Oui.
14 Q. Pourriez-vous nous dire, après le 17 août 1990, vous vous êtes-vous
15 rendu à Golubic, c'est une commune qui se trouve près de Knin, et vous en
16 avez conclu qu'il s'agissait d'un camp militaire. C'est ainsi que vous
17 l'avez appelé, car il s'y trouvait un gardien en armes devant cet endroit.
18 R. C'était un camp militaire, non pas parce qu'il y avait un seul homme à
19 cet endroit-là, mais il y avait plusieurs hommes armés. L'ensemble du camp
20 et une partie du camp, pour autant que j'ai pu voir, étaient entourés de
21 barbelés. C'était loin du centre. Près du lac, il y avait un endroit qui
22 était entouré d'une barrière, et c'est à cet endroit-là que l'on entrait
23 dans ce camp. L'ensemble de cet endroit avait été transformé en camp
24 militaire, en quelque sorte.
25 Q. Est-ce que tout ceci est arrivé au moment où les forces spéciales de la
26 police croate étaient en train de rassembler des armes en Krajina et dans
27 les différents postes de police que vous avez décrits. Etait-ce à moment-
28 là ?
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1 R. Non, c'était après.
2 Q. Vous nous avez dit que lorsque Golubic a été transformé en camp, vous
3 avez suggéré à M. Raskovic, qui était président du SDS, de démanteler ce
4 camp de Golubic, et vous avez pensé que ceci compromettait la politique du
5 SDS. C'est effectivement ce type de décision qui a été prise, et le camp a
6 été démantelé; est-ce exact, Monsieur Babic ?
7 R. Oui.
8 Q. Vous avez également dit que M. Martic a respecté cette décision parce
9 qu'il a quitté Golubic. C'est en tout cas ce que vous nous avez dit
10 puisqu'il s'est rendu à un autre endroit. Le personnel de Golubic a dû
11 partir. Cette décision a bien été appliquée, n'est-ce pas, Monsieur Babic ?
12 R. Non. J'ai dit que pendant un certain temps le personnel est resté sur
13 place. Il ne souhaitait pas respecter la décision qui avait été prise.
14 Ceci a continué à fonctionner pendant un certain temps. Je ne sais pas à
15 l'initiative de qui, mais quelqu'un tout à coup a pensé qu'il était bon
16 d'appeler ces gens et de leur signaler que le camp allait être bombardé.
17 C'est à ce moment-là que les personnes qui s'y trouvaient encore sont
18 parties, tout d'abord dans les environs et ensuite beaucoup plus loin dans
19 d'autres villages. Martic n'a pas respecté la décision sur le renvoi du
20 personnel.
21 Q. En réponse à des questions qui vous ont été posées par l'Accusation,
22 après la décision qui avait été prise aux fins de démanteler ce camp,
23 Martic s'est d'abord installé dans une sorte de caravane.
24 R. Oui. J'ai dit que s'il s'agissait de quelque chose comme cela. C'est en
25 tout cas à cette époque-là. Cela correspond, environ.
26 Oui, une caravane dans les environs de Golubic, ensuite, il s'est rendu
27 dans un autre village.
28 Q. Pour ce qui est de ces événements qui portent sur le référendum, le 19
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1 août et le 2 septembre 1990, c'est à cette époque-là. Vous avez parlé d'une
2 réunion qui était tenue le 10 septembre 1990 et des pourparlers avec le
3 Parlement croate et le MUP croate afin d'apaiser la situation. Vous
4 souvenez-vous de cela, Monsieur Babic ?
5 R. Oui.
6 Q. Pourriez-vous nous dire si oui ou non le référendum du 19 août au 2
7 septembre, si ce référendum a été organisée, et si le peuple serbe a voté
8 en faveur de la souveraineté de son peuple au sein de la Croatie à une très
9 grande majorité ?
10 R. La question qui avait été posée dans ce référendum était de savoir
11 s'ils étaient en faveur de l'autonomie. Ils devaient répondre par oui ou
12 par non. Ils ont répondu par l'affirmative en disant qu'ils étaient en
13 faveur de l'autonomie.
14 Q. Vous avez dit le 10 septembre 1990, sur l'invitation de Jerko Vukas,
15 qui était membre du HDZ et qui était, cela dit en passant, président de la
16 municipalité de Sinj, vous êtes allé le voir pour essayer de trouver une
17 solution aux problèmes qui se posaient à ces municipalités-là; est-ce
18 exact ?
19 R. Non. J'ai dit que nous devrions trouver une solution à ces problèmes.
20 J'en avais déjà parlé plus tôt, parce que Jerko Vukas et moi-même, parce
21 que ces barricades qui avaient été érigées entre nos municipalités posaient
22 des problèmes, ces barrages qui avaient été mis en place par les Serbes,
23 parce que c'était difficile de circuler entre les municipalités, nous avons
24 trouvé une solution à ce problème-là. Ensuite, il y avait une autre
25 question. Nous avions déjà été en contact à l'initiative de Vukas, et il
26 avait été convenu que je rencontre les autres représentants de la région,
27 les représentants du Parlement et du gouvernement. Ceci s'est fait après
28 avoir trouvé une solution à ces problèmes entre les municipalités.
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1 Q. A l'initiative de Jerko Vukas, vous avez été d'accord pour assister à
2 une réunion en présence de représentants du gouvernement croate et du
3 Parlement croate, et vous dites avoir vu Slavko Degoricija, président d'une
4 des chambres du Parlement, ainsi que le ministre de l'Intérieur, Boljkovac.
5 Est-ce exact, Monsieur Babic ?
6 R. Oui.
7 Q. Qui d'autre a assisté à cette réunion, autrement dit, qui était de
8 votre côté, du côté serbe ?
9 R. Ma proposition était ou plutôt, j'avais demandé à ce que la délégation
10 -- j'ai demandé à ce que l'on accepte les représentants du conseil serbe.
11 Dusan Vjestica, Rastovic, et il y avait également les représentants
12 officiels de la municipalité de Donja Lapac. Quoi qu'il en soit, étant
13 donné que la délégation de Zagreb ne souhaitait pas nous parler en cette
14 qualité-là, nous avons décidé de nous présenter en tant que représentants
15 des municipalités serbes. Il y avait non seulement Vjestica, mais il y
16 avait Rastovic également qui était président du conseil exécutif de Lapac,
17 et le secrétaire de la municipalité de Donja Lapac, Djukic, et je ne me
18 souviens pas du nom du secrétaire.
19 Q. Vous avez eu une réunion qui avait été convoquée afin de parler de
20 questions politiques. Vous avez eu une réunion avec le Conseil national
21 serbe. Vous étiez quasiment premier ministre. Vous étiez président du
22 conseil exécutif. Avez-vous eu une réunion ou avez-vous dit qu'une réunion
23 allait être organisée, une réunion portant sur les questions politiques
24 avec les plus hauts représentants du gouvernement croate et de la police ?
25 Oui ou non.
26 R. L'académicien Raskovic et d'autres ont été informés de cela, et nous
27 avons organisé une réunion avec le Conseil national serbe à Srb,
28 immédiatement après les pourparlers de Lapac. Il s'agit de la même
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1 municipalité. J'ai ensuite informé l'académicien Raskovic et les autres
2 membres du Conseil national serbe du contenu de ces pourparlers, et une
3 discussion s'est ensuivie sur l'accord que nous avons conclu. Il y a ceux
4 qui étaient opposés à cela, mais l'académicien Raskovic a appuyé cet accord
5 et à la majorité, cet accord a été entériné.
6 Q. Avez-vous un procès-verbal de cette réunion ? S'agissait-il d'une
7 réunion officielle du Conseil national serbe ou s'agissait-il simplement de
8 discussions officieuses de discussions entre vous ?
9 R. Je n'ai aucun procès-verbal. Je crois qu'on a gardé un procès-verbal.
10 Je crois qu'il y en a un, mais je ne l'ai pas moi-même. Ce procès-verbal
11 existe, mais je ne sais pas où il se trouve actuellement. Ce serait la
12 réponse la plus juste que je puis faire.
13 Q. Il y a un communiqué de presse le 10 septembre à propos de ces
14 pourparlers avec la délégation croate. Qui l'a signé et qui a écrit le
15 texte ?
16 R. Un communiqué de presse qui évoque les participants à cette réunion ?
17 Q. Oui, les participants à ces pourparlers, Monsieur Babic.
18 R. Degoricija, Boljkovac, moi-même, Rastovic, Vjestica; il y avait
19 plusieurs signataires à cet accord. Dans les grandes lignes, il s'agissait
20 à la fois d'un accord et d'un communiqué de presse.
21 Q. Vous, en tant que président du Conseil national serbe, vous menez à
22 bien ces pourparlers politiques avec la délégation croate. En présence de
23 cette délégation croate, vous faites un communiqué de presse, et les
24 Croates ne font pas un communiqué de presse comme cela ?
25 R. J'ai dit que la délégation de Zagreb ne nous reconnaissait pas en tant
26 que représentants du Conseil national serbe. Nous étions censés représenter
27 les municipalités serbes. J'étais représentant de la municipalité de Knin à
28 cette réunion-là. C'est sur quoi nous sommes tombés d'accord.
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1 Q. Comment se fait-il que vous avez accepté d'échanger votre statut et de
2 passer de celui de président du Conseil national serbe au président d'une
3 municipalité et de tenir des pourparlers en cette qualité-là ?
4 R. Je n'ai pas changé mon statut. J'étais président de la municipalité de
5 Knin, et c'est en cette qualité-là que j'étais membre du Conseil national
6 serbe, précisément parce que j'étais président de la municipalité de Knin.
7 En tant que président de la municipalité de Knin, j'ai été élu au Conseil
8 national serbe. Si vous me demandez pourquoi j'ai accepté la proposition et
9 la demande de la délégation de Zagreb, c'est simplement parce qu'en cette
10 qualité-là et en tant que représentant des municipalités, et ensembles avec
11 tous les autres représentants des municipalités, nous souhaitions que ces
12 pourparlers aboutissent. En cette qualité-là, ainsi qu'en présence des
13 autres négociateurs, il s'agissait d'une façon tout à fait légitime et
14 valable, comme si nous étions passés aux urnes. En réponse à votre question
15 qui m'a donné l'autorisation de l'affaire, qui m'a donné l'autorisation de
16 faire cela, c'est par la voix électorale. J'avais été élu président de la
17 municipalité de Knin.
18 L'INTERPRÈTE : L'interprète ne pouvait pas entendre la question de Me
19 Milovancevic. Il y a eu superposition des voix.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Les armes ont été saisies ou plutôt vous dites
21 que ces armes ont été prises dans les différents postes de police et ont
22 été distribuées.
23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pour le besoin du compte rendu
24 d'audience, s'il vous plaît, Maître Milovancevic, l'interprète a indiqué
25 qu'elle ne pouvait pas entendre votre question car tout ceci se
26 chevauchait. Votre question a porté sur quoi ? La réponse à la question n'a
27 pas été enregistrée. "Les armes ont été saisies ou plutôt ont été prises
28 dans les différents postes de police et ont été distribuées." Quelle est la
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1 question que vous voulez poser par rapport à cette réponse ?
2 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Ceci s'est
3 passé un petit peu malgré moi.
4 Q. Monsieur Babic, vous dites qu'en cette qualité-là, vous étiez d'accord
5 avec M. Boljkovac et M. Degoricija de rendre les armes aux forces de la
6 réserve et que la police serbe distribuait cela. Où ? A quels endroits ? Où
7 ces dernières ont été distribuées ? Ensuite, que le secrétariat serait mis
8 en place par le gouvernement croate. Pourriez-vous expliquer ceci un petit
9 peu ?
10 R. Les armes ont été prises à Knin et à Donja Lapac, et peut-être dans
11 d'autres municipalités. Je n'en suis pas tout à fait sûr, à l'époque, en
12 tout cas. Nous étions là. Nous avons assisté aux négociations. Il y avait
13 les représentants des municipalités de Knin et Lapac. Donc, nous étions
14 tout à fait en mesure de mener à bien ces négociations.
15 Q. Est-ce que vous vous êtes mis d'accord pour que le gouvernement croate
16 rende les armes prises par le gouvernement aux postes de police sur le
17 territoire serbe ?
18 R. Je vous ai dit de quoi il s'agissait. Les postes de police font partie
19 du ministère de l'Intérieur de la Croatie. Les armes des effectifs de
20 réserve de la police se trouvaient dans des entrepôts des postes de police.
21 Pour certaines raisons, le gouvernement de la Croatie a décidé, et a
22 également annoncé ses raisons, a décidé que les armes du ministère de
23 l'Intérieur soient prises des postes de police pour les garder en d'autres
24 endroits pour probablement - je peux que supposer - parce qu'il y avait la
25 révolte à Knin. Il y avait le poste de police à Knin qui s'est révolté.
26 C'est pour ce qui est de la municipalité de Knin. Pour ce qui est d'autres
27 municipalités, je ne connaissais pas très bien la situation. Il s'agissait
28 de cela. Il ne s'agissait pas de la prise des armes des municipalités
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1 serbes; il s'agissait des armes de l'effectif de réserve de la police, des
2 postes de police de Knin et de Donja Lapac qui se révoltaient et qui ne
3 voulaient plus obéir. Est-ce que cette question portait sur cela ?
4 Q. Vous avez bien répondu à la question, Monsieur Babic. Cela suffit.
5 R. Oui, je me suis souvenu. Maintenant, vous m'avez demandé si la Croatie
6 a rendu des armes aux municipalités serbes ou quelque chose comme cela.
7 Dans ma réponse précédente, je vous ai expliqué comment j'ai compris le
8 conflit entre la police de Knin et de Lapac, d'un côté et de l'autre côté,
9 le gouvernement, c'est-à-dire, la police croate.
10 Q. Est-ce qu'on peut dire que dans de telles circonstances, c'est-à-dire,
11 de la méfiance de la part de la population serbe envers les autorités
12 croates par rapport aux changements de la constitution et par rapport au
13 référendum - parce que le référendum a été proclamé illégal - est-ce que
14 dans de telles circonstances, vous, en tant que président de la
15 municipalité, vous avez négocié pour que les postes de police fassent
16 partie de nouveau des autorités croates ? Est-ce que ce n'était pas une
17 décision d'un organe officiel ?
18 R. D'abord, les Serbes ont pris des armes. C'était un fait. Le deuxième
19 fait, c'était que ce n'était pas les Serbes mais la police à Knin, à Lapac,
20 et à d'autres municipalités serbes qui faisaient partie du ministère de
21 l'Intérieur de Croatie. Troisièmement, nous faisions partie intégrante de
22 la République de Croatie, du ministère de l'Intérieur. Nous menions des
23 discussions politiques tout à fait légitimes, des débats et même des
24 querelles pour ce qui est des solutions politiques concernant le futur de
25 la Croatie. Nous participions dans ce processus politique en tant que
26 représentants élus, de façon légitime, des municipalités, de ces autorités
27 locales, de ces municipalités, pour représenter notre peuple à l'assemblée
28 de la Croatie. C'était tout à fait normal et logique pour participer à ces
Page 1787
1 débats pour trouver une solution de la crise.
2 Q. Vous avez dit qu'il s'agissait de différentes opinions là-dessus, que
3 vous avez parlé à M. Jovo Raskovic qui vous a soutenu. Vous avez également
4 expliqué qu'à Knin ce soir-là, Jovo Vitas vous a menacé ainsi que Nedzo
5 Maric [phon], parce qu'ils n'étaient pas d'accord avec une telle décision.
6 Ils vous ont dit que vous étiez traître, n'est-ce pas ?
7 R. Jovo Raskovic m'a soutenu. La plupart d'autres personnes assistaient à
8 cette réunion du Conseil national serbe. Jovo Raskovic a dit alors, et je
9 cite : "La fusion de sang n'apporte rien aux Serbes ni au gouvernement
10 croate mais plutôt à une troisième entité, et cette troisième entité se
11 trouve à Belgrade." Il m'a expliqué de quoi il s'agissait. Il s'agit du
12 fait que quelqu'un d'autre voulait qu'en Croatie se passe une intervention
13 de l'armée de la JNA. C'est la première information qu'il m'a donnée par
14 rapport à l'évolution des événements en Croatie. Moi et Raskovic, nous
15 étions contre cela. C'est pour cela que notre point de vue était tel.
16 Q. Vous avez dit qu'une troisième entité voulait que la crise soit
17 provoquée --
18 M. WHITING : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Le conseil
19 a dit "toute personne normale." Je ne veux pas accepter cela, parce qu'il
20 ne s'agit pas de façon appropriée de présenter des arguments au témoin.
21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] On suggère que peut-être que la
22 personne à laquelle vous vous êtes adressée n'était pas normale, Monsieur
23 Milovancevic.
24 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Il dit que lui et Jovo Raskovic était
25 contre l'effusion de sang. J'affirme cela, et je soutiens cela en disant
26 que toute personne normale est contre cela, contre l'effusion du sang. Je
27 continue après. J'ai omis cela dans ma réponse suivante pour qu'il n'y ait
28 pas de confusion. Je suis désolé si ma question a été comprise de telle
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1 façon.
2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous pouvez reformuler votre question
3 en mettant cette première partie aux questions.
4 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]
5 Q. Vous avez dit que M. Raskovic a dit qu'il s'agissait d'une troisième
6 entité, qu'il voulait provoquer tout cela et que cette troisième entité se
7 trouvait à Belgrade.
8 R. Il ne m'a pas expliqué cela. M. Raskovic m'a dit que quelqu'un d'autre
9 voulait que l'intervention de la JNA arrive. C'était quelqu'un qui se
10 trouvait à Belgrade.
11 Q. Monsieur Babic, je vous ai demandé de me confirmer qu'il s'agissait de
12 votre conclusion et de votre explication par rapport à Belgrade, à cette
13 troisième entité à Belgrade.
14 R. Oui, il m'a dit exactement cela.
15 Q. Est-ce que vous avez entendu parler du général Spegelj ? Je pense qu'à
16 plusieurs reprises vous avez parlé de cela. Est-ce que vous étiez au
17 courant de sa déclaration au mois d'octobre 1990, qu'à Virovitica, il y a
18 cinq hommes armés sur une tête d'habitant, et qu'il ne s'agirait pas de la
19 guerre, dit M. Spegelj. Il ne s'agirait pas de la guerre civile, que les
20 obus allaient être envoyés dans des appartements, sur les femmes et sur les
21 enfants. Est-ce que vous étiez au courant de cette déclaration de M.
22 Spegelj au mois
23 d'octobre 1990 ?
24 R. Martin Spegelj était ministre de la Défense au sein du gouvernement de
25 la République de Croatie. Ces propos qu'il a proférés étaient diffusés à la
26 télévision de Belgrade au mois de janvier, fin janvier 1991. Je ne me
27 souviens pas de sa déclaration, de ses propos au mois d'octobre 1990.
28 Q. Nous allons revenir à la déclaration, aux propos de
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1 M. Spegelj du mois d'octobre 1990 - je vais vous montrer le document là-
2 dessus - mais continuons plutôt quant à d'autres événements. Vous avez dit
3 que votre réaction aux pourparlers avec le gouvernement de la Croatie était
4 l'opposition de certaines personnes de Knin, qui étaient membres du conseil
5 national de résistance. Ce conseil faisait des déclarations trompeuses, qui
6 dynamitaient des boutiques et des appartements des Croates et des Albanais
7 pour provoquer une intervention de la JNA, pour provoquer un état
8 d'urgence.
9 R. Oui.
10 Q. Vous avez expliqué également qu'il s'agissait de la politique du
11 président Milosevic, le président de la Serbie, et de
12 M. Jovic, en tant que président de la présidence de Yougoslavie, pour
13 occuper les territoires, et que ces territoires soient annexés au nouvel
14 Etat de Serbie.
15 R. Pour établir un état de facto, comme Milosevic disait, il faut que cela
16 soit annexé à l'Etat où les Serbes de Croatie, les Serbes du Monténégro, de
17 Bosnie-Herzégovine vivront.
18 Q. Vous avez dit, Monsieur Babic, que ce conseil national de la résistance
19 est apparu après le 10 septembre, c'est-à-dire, après les pourparlers avec
20 les représentants du gouvernement croate en septembre 1990. Vous avez
21 également dit qu'avec M. Jovic, président de la présidence, vous avez eu
22 une réunion au mois d'août, le
23 30 août 1990, et qu'il vous a dit qu'il était pour les négociations
24 politiques, pour le respect de la constitution de la Yougoslavie. Même, il
25 a fait venir un conseiller avec lui pour vous dire comment procéder au
26 référendum, n'est-ce pas, Monsieur Babic ?
27 R. Milosevic et Jovic étaient pour une modification de la constitution de
28 la Yougoslavie. Ils proposaient que l'assemblée de la Yougoslavie adopte la
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1 loi relative à l'autodétermination des peuples. Quelle était la troisième
2 chose ?
3 Q. Pouvez-vous me dire ce que signifiait le droit à l'autodétermination
4 des peuples qui devait être proposé pour être adopté à l'assemblée de
5 Yougoslavie ?
6 R. Ce qu'ils disaient en public, c'était la chose suivante. Cela différait
7 des choses qui se passaient sur le terrain. Borisav Jovic a expliqué le
8 contenu de ce droit à l'autodétermination à la télévision autour des 10
9 octobre. Les peuples devaient voter, les peuples de la Yougoslavie,
10 indépendamment des frontières des républiques. C'étaient leurs opinions et
11 leurs objectifs politique qui ont été réalisés plus tard, c'est-à-dire,
12 d'établir un nouvel état indépendamment des frontières des républiques
13 existantes qui engloberaient les Serbes vivant en Croatie, en Bosnie-
14 Herzégovine et en Serbie.
15 Q. Vous avez dit que vous avez vu M. Jovic le 13 août 1990, et que pour la
16 première fois vous avez rencontré M. Milosevic au mois d'octobre, n'est-ce
17 pas ?
18 R. J'ai dit que j'ai eu une réunion avec Milosevic le
19 10 août. C'était une rencontre indirecte. Pour la première fois, j'ai parlé
20 avec lui au mois d'octobre.
21 Q. Le conseil national a provoqué tout cela sur les instructions de
22 Milosevic, c'est-à-dire, dynamiter des appartements, donner des
23 déclarations trompeuses, et cetera. Vous n'avez pas vu Milosevic avant
24 octobre 1990 ?
25 R. J'ai dit que les informations par rapport à la révolte en Croatie,
26 l'effusion du sang, c'était quelque chose qui a été décidé à Belgrade par
27 cette troisième entité, que la JNA intervienne et établisse le régime
28 militaire en Croatie. Après cette information et après que Borislav Mikelic
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1 à Banija a fait les choses similaires, a provoqué des rébellions, j'ai dit
2 que c'était la raison pour laquelle la JNA devait intervenir, d'établir le
3 régime militaire en Croatie. Il s'agissait d'une phase initiale. C'était
4 une combinaison de Kadijevic et de Milosevic. Jusqu'au mois de mars 1991,
5 il s'agissait des tentatives d'établir le régime militaire en Croatie.
6 C'était le début de tout cela.
7 Q. A part M. Raskovic pour lequel vous avez dit qu'il vous avait donné des
8 informations par rapport aux intentions de Belgrade, est-ce qu'il y avait
9 d'autres personnes qui vous ont parlé de telles intentions de Belgrade ?
10 Est-ce qu'il y avait d'autres personnes qui vous ont dit la même chose ?
11 R. J'ai déjà dit qu'au mois de janvier, j'ai entendu parler de cela.
12 C'était l'information suivante que j'ai reçue de Mile Grbic de Bosanski
13 Novi. Il m'a dit que l'armée préparait quelque chose à Zagreb, un coup
14 d'Etat, et qu'il serait bon que je me renseigne à Belgrade.
15 A Belgrade, un autre homme m'a dit, je pense qu'il s'appelait
16 Kalicanin, il était officier au sein de service de Renseignement de la JNA,
17 je pense que ce service s'appelait à peu près comme cela. Il a dit que
18 l'armée, la JNA, préparait un coup d'état en Croatie et que tout le monde
19 serait renvoyé, y compris le gouvernement à Zagreb, même les présidents des
20 municipalités.
21 Après avoir reçu cette information, Milosevic m'a convoqué dans son cabinet
22 et il m'a dit que la JNA procèderait à l'arrestation des ministres croates
23 et que j'étais menacé et que je ne devais pas retourner à Knin, que je
24 devais rester à Belgrade et qu'il allait me protéger. Il m'a assuré la
25 protection des agents de la sécurité d'état et j'y suis resté pendant
26 quinzaine de jours ou dizaine de jours parce que je savais que j'étais
27 menacé, il y avait un danger pour ce qui est de l'armée, de l'arrestation
28 des militaires croates et du coup d'état en Croatie.
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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je pense que nous pourrions faire une
2 pause maintenant et nous allons continuer nos travaux à 16 heures.
3 --- L'audience est suspendue à 15 heures 33.
4 --- L'audience est reprise à 16 heures 00.
5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Maître Milovancevic.
6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]
7 Q. Monsieur Babic, nous avions mentionné le conseil pour la résistance
8 populaire. Est-ce que vous connaissez son nom complet ? Est-ce que son nom
9 complet est le conseil de la résistance populaire contre l'oppression du
10 peuple serbe ?
11 R. Oui, je pense déjà avoir mentionné ce nom une fois.
12 Q. Vous avez dit que la composition du conseil n'a jamais été annoncée
13 publiquement, mais que vous aviez entendu dire qu'il y avait parmi ses
14 membres Maric, et que Milan Martic en faisait également partie. Est-ce que
15 vous vous étiez également membre de ce conseil ?
16 R. Non, je n'en faisais pas partie.
17 Q. Si vous n'étiez pas membre, comment saviez-vous qui était membre alors
18 ?
19 R. D'abord, je voyais ces personnes. Deuxièmement, on m'a dit qu'elles
20 présentaient des déclarations au nom du conseil à Radio Knin. Je les voyais
21 devant le poste de police. C'est des gens qui gravitaient autour de Milan
22 Martic, et qui communiquaient avec eux. C'était le groupe de personnes qui
23 gravitaient autour de lui. Ce sont des personnes qui, publiquement,
24 s'étaient déclarées comme faisant partie du conseil de la résistance. Ils
25 n'ont jamais indiqué quelle était la structure de cet organe. Je ne sais
26 pas s'il s'agissait d'un nom ou s'il s'agissait tout simplement d'un autre
27 terme pour la police populaire, comme Martic l'a décrit.
28 Q. Est-ce que vous n'avez jamais écrit les communiqués de ce conseil qui
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1 étaient lus à la radio ?
2 R. Non.
3 Q. Vous avez dit que vous aviez l'habitude de voir Jovo Vitas qui portait
4 les communiqués de presse. C'est également une personne dont vous avez dit
5 qu'elle avait menacé de vous tuer; est-ce exact ?
6 R. Oui. Il amenait les communiqués du conseil à Radio Knin. C'est vrai
7 qu'il a proféré des menaces à mon encontre.
8 Q. Comment est-ce que vous savez qu'il prenait ces déclarations alors que
9 vous ne vous entendiez pas particulièrement bien avec ces gens ? Comment
10 saviez-vous ce qu'il portait ?
11 R. On me l'a dit. Dusan Orlovic ainsi qu'un autre, Nebojsa Mandinic,
12 transportaient également cela, amenaient ces communiqués de la part du
13 conseil de la résistance populaire à Radio Knin.
14 Q. Est-ce que vous ne vous êtes jamais rendu dans le poste de police de
15 Knin ou dans tout autre poste de police ?
16 R. Je suis allé au poste de police de Knin une ou deux fois dans ma vie.
17 Premièrement, lorsque je suis allé chercher ma carte d'identité
18 personnelle, puis un peu plus tard, lorsqu'il y a eu cette réunion en
19 juillet dont je vous ai parlé. J'ai été en avril 1991, me semble-t-il,
20 lorsque les conférences de presse ont commencé au secrétariat des Affaires
21 intérieures. Je voulais juste voir ce qui se passait là-bas.
22 Q. Est-ce que vous savez quel type d'armes se trouve dans un poste de
23 police ?
24 R. D'après ce que j'avais entendu, je pense que c'est Jovo Mitrovic qui
25 s'occupait des armes là-bas. C'était la personne qui s'occupait de leur
26 entrepôt. J'avais des informations à ce sujet. Ils avaient des pistolets.
27 Ils avaient des fusils à long canon. Ils avaient des pistolets de service,
28 des pistolets réguliers de service ainsi que des armes à long canon pour
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1 les situations d'urgence. C'est ce que je sais.
2 Q. Est-ce que vous savez qu'aucun poste de police, de par leur
3 réglementation juridique, n'a de la dynamite dans les locaux du poste de
4 police ?
5 R. Je ne sais pas ce qu'un poste de police est censé avoir. Ce que j'ai
6 dit, c'est que j'ai vu Vitas qui sortait avec des choses du poste de
7 police. Il m'a été indiqué qu'il s'agissait de dynamite. Je ne sais pas si
8 c'est quelque chose qu'un poste de police est censé avoir conformément aux
9 règlements intérieurs ou je ne sais si cela correspondait à une situation
10 extraordinaire. Je n'en sais rien.
11 Q. A partir de l'endroit où vous vous trouviez, vous avez vu que Jovo
12 Vitas transportait quelque chose que vous avez pris pour de la dynamite ?
13 R. Il est sorti avec des paquets, il les a mis dans sa voiture. Je lui ai
14 demandé ce que c'était. Quelqu'un m'a dit : Jovo Vitas porte de la
15 dynamite. Certaines des personnes qui se trouvaient là me l'ont dit.
16 Q. Monsieur Babic, vous nous avez dit que l'intention du président de la
17 présidence de la Yougoslavie, Borislav Jovic, ainsi que de Milosevic,
18 secrètement nettoyaient certains secteurs de la Croatie et les annexaient à
19 la Yougoslavie, contrairement d'ailleurs à ce qui a été indiqué lors de
20 certaines réunions. Vous avez également expliqué que vous aviez entendu
21 cela de la part de feu Jovan Raskovic, le professeur. Ou qu'en fait, vous
22 en avez déduit cette conclusion d'après ces dires.
23 R. Vous avez avancé un certain nombre d'hypothèses.
24 Q. Je vais vous poser une question. Je m'excuse de vous interrompre. Est-
25 il exact de dire que d'après certaines conversations avec une personne,
26 vous en avez tiré des conclusions relatives aux intentions de la direction
27 politique yougoslave, et vous avez conclu en entendant un propriétaire de
28 café à Banija, quelque part, que la direction politique yougoslave
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1 planifiait un coup d'état et voulait remplacer la direction croate ? Vous
2 avez entendu cela de la part d'un propriétaire de café. Vous avez également
3 entendu de la part de quelqu'un d'autre, que soi-disant, de la dynamite
4 était transportée hors du poste de police de Knin. Vous avez dit que vous
5 avez entendu un certain nombre de choses de la part de certaines personnes.
6 Qu'est-ce que vous savez d'après votre connaissance personnelle ?
7 M. WHITING : [interprétation] Je m'excuse. Il s'agit d'une question qui est
8 scindée en huit volets. J'ai une objection. Elle prête à confusion de toute
9 façon. Il y a été amalgamé, en quelque sorte, dans cette question
10 différents éléments. Je pense que cela ne reprend pas de façon exacte
11 l'élément de preuve qui avait été apporté par le témoin, et ce n'est pas la
12 première fois que nous avons ce problème aujourd'hui.
13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Maître Milovancevic.
14 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vais
15 reformuler la question. Je vais poser une question très, très précise avec
16 votre aval, Monsieur le Président.
17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, vous avez mon aval, mais je vous
18 demanderais de ne poser qu'une question à la fois.
19 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]
20 Q. Monsieur Babic, des renseignements que vous détenez à ce sujet, des
21 renseignements que vous détenez à propos du fait que les hauts dirigeants
22 de la Yougoslavie prévoyaient et planifiaient un coup militaire en Croatie,
23 des arrestations en Croatie, est-ce que ce sont des renseignements que vous
24 déteniez de la part d'un propriétaire de café d'une petite localité en
25 Croatie ?
26 R. Non.
27 Q. Sur la base de cette information, vous avez dit que vous aviez entendu
28 de la part d'un propriétaire de café que des arrestations étaient prévues
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1 en Croatie. Est-ce que c'est de ce fait que vous êtes allé à Belgrade en
2 janvier 1991 ?
3 R. Non. Je réponds de façon négative. Est-ce que vous pourriez me reposer
4 la question, je vous prie ?
5 Q. Qui est Mile Grbic ? Est-ce que vous pourriez nous le
6 dire ?
7 R. Je l'ai mentionné à propos d'une série d'événements. J'avais obtenu des
8 informations de la part du président Milosevic à propos de ce qui était
9 préparé en Croatie. Si vous souhaitez obtenir de plus amples renseignements
10 à ce sujet, si vous voulez entendre de plus amples renseignements à propos
11 de ce que je sais de Mile Grbic, je peux vous dire que c'était un homme qui
12 avait des contacts avec le général Andrija Raseta, l'un des commandants du
13 district militaire de Zagreb. Il m'a dit que l'armée préparait quelque
14 chose à Belgrade, et qu'il serait judicieux que je demande à Belgrade ce
15 qui se passait. Au vu de ma déclaration, vous me demandez qui était Mile
16 Grbic. C'est un homme de Bosanski Novi. Il avait effectivement un café là-
17 bas. Il avait de bons contacts avec l'armée du district militaire de
18 Zagreb, avec Jovica Stanisic également.
19 Q. Nous venons d'entendre que vous avez appris de la bouche d'un
20 propriétaire de café qu'il y allait avoir un coup d'état. Est-ce que cela
21 s'est concrétisé, tout comme, d'ailleurs, l'arrestation des dirigeants en
22 Croatie ?
23 R. Ce n'est pas ce que j'ai entendu dire de la part d'un propriétaire de
24 café qu'un coup d'état allait avoir lieu, mais il avait des informations
25 suivant lesquelles l'armée de la Croatie se préparait à quelque chose, et
26 qu'il serait utile pour moi que j'essaie d'obtenir des informations à
27 propos de ce qui se tramait et de ce qui était concocté à Belgrade. Les
28 informations que je détenais à propos de ce qui était préparé pour la
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1 Croatie émanait de Belgrade. Je vous l'ai dit, j'ai mentionné deux noms.
2 L'un de ces noms, c'est le nom de Slobodan Milosevic.
3 Q. Monsieur Babic, vous avez dit qu'en janvier vous vous êtes rendu à
4 Belgrade, en janvier 1991, après que vous avez parlé à Mile Grbic; est-ce
5 exact ?
6 R. Après avoir parlé à Mile Grbic, je suis allé à Belgrade. Mais cela ne
7 faisait pas partie de la chronologie des événements dont je vous ai parlé.
8 C'était l'une des réunions. Mile Grbic m'a envoyé pour que je pose des
9 questions, pour que je pose des questions à un officier du contre-
10 renseignement militaire.
11 Puisque vous me posez des questions à propos de Mile Grbic, je vous dirais
12 qu'il m'a envoyé auprès d'un homme - d'ailleurs, j'ai oublié le nom de cet
13 officier maintenant - il m'y a envoyé pour que je lui demande ce qui se
14 passait au sein de l'armée à Zagreb. Puisque cet homme ne m'a pas fourni de
15 réponse, il m'a d'abord posé des questions à propos de ce qui se passait au
16 sein du SDS. Ce n'est pas que j'ai obtenu des renseignements à la suite des
17 instructions qui m'ont été données par Mile Grbic; j'ai obtenu des
18 renseignements à la suite d'instructions qui m'ont été fournies par Boro
19 Rasula, un de mes amis, un politologue qui, plus tard, est devenu
20 conseiller, un homme qui connaissait déjà à Belgrade et qui avait un poste
21 assez important. C'est lui qui a établi le lien entre moi et M. Kalicanin,
22 qui était un officier des services d'information, et qui m'a expliqué ce à
23 quoi se préparait l'armée. C'est l'information que j'ai eue, et cela n'a
24 rien à voir avec ce Grbic.
25 Il y avait également l'information fournie par Milosevic suivant
26 laquelle ils allaient arrêter les ministres croates. Ils allaient limoger
27 le gouvernement ou congédier les ministres. C'est ce que j'ai compris.
28 Q. Qu'est-ce que vous a dit M. Milosevic ? Qui était sur le point
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1 d'arrêter des ministres croates, lui ou quelqu'un d'autre ?
2 R. La JNA.
3 Q. Est-ce que vous avez entendu parler d'une ordonnance de la présidence
4 de la Yougoslavie, qui date du mois de janvier 1991, suivant laquelle
5 toutes les armes prises aux forces de réserve devraient être ramenées, et
6 que la police devrait œuvrer dans le cadre de son cadre régulier ?
7 R. C'est une ordonnance ou un ordre qui avait trait aux paramilitaires en
8 général ainsi qu'à toutes les armes illégales.
9 Q. Est-ce que les Serbes de la Krajina et les Serbes de Knin, plus
10 précisément, puisque c'est la situation que vous connaissez, est-ce que ces
11 Serbes ont rendu leurs armes ?
12 R. Je pense qu'ils l'ont fait en partie. Je ne sais pas exactement de
13 quelle quantité il s'agissait.
14 Q. Pendant cette période, est-ce que le gouvernement croate a augmenté les
15 effectifs de la police ? Apparemment, cela a été quadruplé ?
16 R. Oui.
17 Q. Est-ce que le gouvernement croate a agi conformément à l'ordre émis par
18 le président de la Yougoslavie suivant lequel tous ces policiers devaient
19 rendre leurs armes ?
20 R. Je n'ai pas de renseignement précis sur la question. Il y avait une
21 promesse qui avait été faite suivant laquelle la Croatie respecterait sa
22 promesse. Je ne sais pas dans quelle mesure cela a été fait.
23 Q. Est-ce que vous connaissez la déclaration du gouvernement croate
24 suivant laquelle ils n'allaient pas demander leurs armes à leurs policiers
25 sur les ordres de la présidence yougoslave ?
26 R. Je ne sais pas exactement quelle fût la réaction du gouvernement
27 croate, comme je l'ai déjà dit. Je pense qu'il y a eu un accord qui fut
28 conclu entre Mesic et Borislav Jovic. Je pense qu'ils ont parlé de ces
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1 choses-là. Comme je vous l'ai déjà dit, je ne le sais pas exactement.
2 Q. Vous avez mentionné le conflit à Pakrac, le 1er et
3 2 mars 1991, au cours duquel la police spéciale de la Croatie est
4 intervenue, et ce, lorsqu'il y a eu des tirs qui, pour la première fois,
5 ont été tirés sur l'armée. Est-ce que vous savez qu'à l'occasion de cet
6 incident le secrétariat fédéral de la Défense nationale a proposé à la
7 présidence de la Yougoslavie un état d'urgence ?
8 R. Je ne sais pas si cela a été un prétexte ou non, mais une proposition
9 visant à imposer un état d'urgence a été présentée vers la mi-mars.
10 Effectivement, il y a eu une discussion à ce sujet. Maintenant, pour ce qui
11 est de savoir si Pakrac était le prétexte de tout cela ou en était la
12 raison, je n'en sais rien. Je pense que c'était un plan qui avait déjà été
13 préparé.
14 Q. Je m'excuse. Je ne vous ai pas demandé quel était votre point de vue.
15 Je me suis contenté de vous poser des questions à propos de ce que vous
16 avez entendu et de ce que vous n'avez pas entendu.
17 R. Bien, non. Cela n'avait rien à voir avec Pakrac. Je n'ai pas de
18 renseignement suivant lequel cela avait été provoqué par les événements de
19 Pakrac.
20 Q. Merci. A cette occasion, est-ce que la présidence de la Yougoslavie a
21 imposé un état d'urgence ?
22 R. A quelle occasion ?
23 Q. Je pense à la proposition présentée par le secrétariat fédéral pour la
24 Défense nationale à la mi-mars 1991. Est-ce que le président de la
25 Yougoslavie a introduit un état d'urgence ?
26 R. Non.
27 Q. Monsieur Babic, le gouvernement croate a refusé d'exécuter une décision
28 de la présidence de la Yougoslavie, décision qui visait que les armes des
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1 forces de réserve de la police soient rendues. La présidence de la
2 Yougoslavie a refusé la proposition du secrétariat fédéral pour la Défense
3 nationale qui voulait introduire un état d'urgence ou la loi martiale.
4 L'information que vous avez de la part du propriétaire du café à propos du
5 fait que les armes avaient été rendues, c'est quelque chose qui ne s'est
6 pas passé, Monsieur Babic, n'est-ce pas ?
7 R. Je n'ai pas entendu cette histoire à propos du gouvernement croate de
8 la bouche d'un propriétaire d'un café.
9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Whiting.
10 M. WHITING : [interprétation] Je m'excuse d'interrompre. Une fois de plus,
11 le conseil de la Défense ne reprend pas exactement ce que le témoin a dit
12 soit aujourd'hui, soit auparavant. Je peux d'ailleurs reprendre au cas par
13 cas tout ce qui s'est passé aujourd'hui, mais je ne pense pas que la
14 Chambre doive entendre cela. Une fois de plus, le témoin n'a pas dit que le
15 gouvernement croate avait refusé d'exécuter la décision de la présidence de
16 la Yougoslavie qui souhaitait que les armes des forces de réserve de la
17 police soient rendues. Cette question à propos du propriétaire de café a
18 été moultes fois expliquée par le témoin, qui a expliqué ce qui s'est
19 passé. Une fois de plus, Me Milovancevic ne reprend pas exactement ce qu'a
20 dit le témoin.
21 Voilà ce que j'aimerais demander : si le conseil de la Défense souhaite
22 insister pour reprendre à mauvais escient ce qu'a dit le témoin soit
23 aujourd'hui, soit lors de sa déposition au préalable, il devrait nous
24 fournir une référence car cela est fait très souvent. Parce que j'essaie de
25 façon active de trouver ces références, ce que je ne trouve pas,
26 d'ailleurs. Je pense qu'il serait beaucoup plus facile pour nous de suivre
27 si l'on trouvait les références. Si les références ne peuvent pas être
28 trouvées, que les questions soient posées au témoin comme bon lui semble,
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1 d'ailleurs, parce que cela le regarde. Je lui demanderais de ne pas
2 reprendre de façon inexacte les propos du témoin parce qu'il n'arrête pas
3 de faire des erreurs à ce sujet.
4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic, qu'avez-vous à
5 répondre à cela ?
6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, bien sûr que la
7 Défense ne va pas poser des questions qui conviennent au Procureur. C'est
8 justement les questions qui ne conviennent pas au Procureur qui vont être
9 posées par la Défense. Ce que j'essaie de voir, c'est si ce témoin dit la
10 vérité alors qu'il a prêté serment, alors qu'il a prononcé sa déclaration
11 solennelle. Je veux savoir s'il dit la vérité à la Chambre, alors que
12 maintenant j'essaie d'obtenir une explication de la part du témoin. Je
13 n'essaie pas de lui faire dire ce qu'il n'a pas dit; j'essaie tout
14 simplement de lui indiquer qu'il y a certaines choses illogiques, et ces
15 choses illogiques rendent sa déclaration ou font perdre un certain sens à
16 sa déclaration.
17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic, vous dites que
18 vous ne faites pas dire au témoin ce qu'il n'a pas dit. C'est pour cela que
19 nous avons cette objection. Parce que vous reprenez de façon inexacte les
20 propos du témoin. Vous avez tout à fait le droit, Maître, de poser toutes
21 les questions que vous souhaitez, mais vous n'avez pas le droit d'embellir
22 ou citer de façon inexacte le témoin.
23 L'exemple le plus récent, c'est la dernière fois que le témoin vous a
24 répondu. Il a dit de façon catégorique : "Je ne vous ai jamais dit que
25 j'avais entendu cette information de la part d'un propriétaire de café." Il
26 m'a dit cela de façon catégorique, si vous écoutez ce que je dis, Maître.
27 Maître Milovancevic. Je vous serais -- je vous parle, Maître. Je vous
28 serais extrêmement reconnaissant si, lorsque je vous parle, et si vous
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1 voulez absolument parler à votre co-conseil, vous m'en demandez la
2 permission au moins, pour que je puisse m'arrêter.
3 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous acceptons l'objection et je vous
5 le demande à nouveau. Ne citez pas à mauvais escient le témoin. Posez-lui
6 des questions. Si vous devez citer le témoin ou faire référence à des
7 propos qui ont été tenus par le témoin, donnez-nous la référence de ses
8 propos. Vous pouvez poursuivre.
9 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]
10 Q. Monsieur Babic, vous avez dit qu'en 1991, vous êtes allé à Belgrade, et
11 qu'on avait assuré votre sécurité parce qu'on vous avait dit que vous
12 couriez un danger. Qui était la personne qui représentait un danger pour
13 vous, et quel type de sécurité ou de protection vous a-t-on donnée ?
14 R. J'ai été convoqué dans le bureau de Milosevic. Milosevic m'a dit que
15 les ministres croates seraient arrêtés, que la JNA allait arrêter donc des
16 ministres croates, et que je courais un danger à Knin. J'étais en danger du
17 fait du gouvernement croate parce qu'ils s'attendaient à ce qu'il y ait une
18 résistance, et c'est pour cela que je devais rester à Belgrade sous sa
19 protection.
20 Il m'a envoyé au ministère de l'Intérieur ou, comme on l'appelait à
21 l'époque, au secrétariat. Il m'a envoyé voir Radmilo Bogdanovic pour qu'il
22 puisse assurer ma protection. Auparavant, il m'a demandé où je vivais, ou
23 plutôt en fait, il m'a proposé de séjourner à la résidence du gouvernement
24 de Serbie dans ce qu'on appelle la villa Boticeva. Je lui ai dit que
25 j'étais descendu chez des membres de ma famille. Il m'a dit que je devrais
26 le dire à Radmilo Bogdanovic, et que je devrais, pendant mon séjour à
27 Belgrade, être placé sous la protection du ministère de l'Intérieur de la
28 Serbie jusqu'au moment où il m'aurait dit que je peux quitter Belgrade.
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1 Après cette réunion avec lui, je suis allé dans le bureau de
2 Bogdanovic. Bogdanovic m'a demandé où je séjournais, et il m'a offert la
3 protection de la sûreté publique, à savoir, la police de Belgrade.
4 Bogdanovic m'a également envoyé auprès de Jovica Stanisic, l'un des
5 responsables de la Sûreté de l'Etat de la Serbie. Jovica Stanisic m'a
6 offert cette sécurité, ou plutôt une escorte de la Sûreté d'Etat. Il
7 s'agissait de personnes qui étaient habillées en civil, et qui me suivaient
8 dans une voiture où que j'aille dans Belgrade. Ils me suivaient tout le
9 temps lorsque j'étais chez moi ou lorsque je me déplaçais dans la ville.
10 Q. Est-ce que cela signifie, Monsieur Babic, que ces forces de la police
11 qui vous protégeaient, vous protégeaient d'un danger qui serait venu du
12 camp croate ?
13 R. C'est ce que Milosevic m'a expliqué.
14 Q. Vous avez expliqué qu'après environ 20 jours, vous avez reçu des
15 renseignements suivant lesquels à Knin, les gens disaient que vous aviez
16 quitté Knin pour la troisième fois, que la population était laissée sans
17 vous, et qu'il était le moment pour vous de rentrer là-bas.
18 R. Je ne l'ai pas dit. J'ai dit que les gens en parlaient à Knin, et
19 disaient que je m'étais enfui.
20 M. WHITING : [interprétation] Je me demande si nous pourrions avoir la
21 référence du conseil. Je ne suis pas en train de douter du fait que cela a
22 été dit, mais je dis tout simplement qu'il serait beaucoup plus facile
23 d'avoir la référence pour retrouver cela.
24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic ?
25 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, M. Babic nous a
26 expliqué que lorsqu'il a reçu les renseignements de la part de M. Martic,
27 il est d'abord parti de Knin le 10 août 1990. La deuxième fois, il est
28 parti le 18 août 1990. La troisième fois, en janvier 1991, et à chaque fois
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1 il fuyait les autorités croates parce qu'il était en danger. J'ai tout
2 simplement compilé toutes ces informations qui ont été présentées par M.
3 Babic lorsqu'il répondait aux questions de l'Accusation.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas vrai que j'ai dit cela. Ce n'est
5 pas vrai que j'ai dit que je m'étais enfui.
6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur Babic. Je
7 m'excuse, mais le Conseil s'adressait à moi.
8 Maître Milovancevic, ce qu'on vous a demandé est fort simple. Personne pour
9 le moment ne conteste ce que le témoin a dit, ce que vous dites que le
10 témoin a dit. Il s'agit tout simplement de nous donner une référence. C'est
11 ce qui vous a été demandé. Est-ce que vous pourriez nous donner cette
12 référence ?
13 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Un petit moment, je vous prie, Monsieur
14 le Président, Madame, Messieurs les Juges.
15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Peut-être que vous souhaiteriez
16 vérifier le compte rendu d'audience du 17 février 2006 entre 15 heures 22
17 et 15 heures 23. Vous m'avez entendu, Maître Milovancevic ?
18 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, oui. Oui, Monsieur le Président. Je
19 vous ai entendu. Juste un petit moment, je vous prie.
20 Monsieur le Président, à 1522, ligne 22, il est écrit : "A un moment, j'ai
21 décidé de rentrer à Knin parce qu'il y avait des bruits qui couraient
22 suivant lesquels je m'étais enfui." Pour ce qui est de cette partie du
23 texte, c'est ce que j'ai présenté au témoin. Je m'exprimais en toute
24 latitude, sans indiquer au témoin quelque chose qu'il n'aurait pas dit.
25 M. WHITING : [interprétation] Oui, mais c'est justement le problème que
26 nous avons. Le conseil interprète en quelque sorte ce que le témoin a dit
27 et le témoin a essayé de répondre. M. Babic a expliqué que chaque fois
28 qu'il partait de Knin -- c'est disparu de mon écran -- le 18 août, le 19
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1 janvier [comme interprété], et cetera, il fuyait les autorités croates
2 parce qu'il était en danger. Il n'y a pas d'interprétation de ce que le
3 témoin a dit, et c'est la raison pour laquelle je me permets de dire que si
4 le conseil va essayer d'interpréter ce qu'a dit le témoin, il faudrait
5 qu'il nous donne la référence de ses propos pour que nous puissions
6 vérifier tout cela, ou alors il faut qu'il trouve des formules différentes
7 pour poser au témoin ces questions.
8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que nous pouvons vérifier
9 cela ? Est-il exact, Monsieur Babic, que vous avez quitté Knin à trois
10 reprises pour vous rendre à Belgrade, et que ces trois fois, on vous a
11 accusé de vous enfuir ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.
13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Maintenant, vous pouvez
14 poursuivre et poser vos questions, Maître Milovancevic. Nous avons posé des
15 questions sans faire référence ici à la déposition du témoin.
16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]
17 Q. Monsieur Babic, vous aviez dit qu'au mois de janvier ou à la fin du
18 mois de janvier, après être resté une vingtaine de jours à Belgrade, vous
19 êtes revenu à Knin parce qu'on disait de vous que vous aviez quitté Knin.
20 C'étaient des rumeurs qui circulaient; est-ce exact ?
21 R. Je suis rentré parce que Radmilo Bogdanovic m'a demandé de rentrer pour
22 que je sois avec mon peuple. J'ai également dit qu'il y avait des rumeurs à
23 Knin, rumeurs en vertu de quoi j'avais fui. Je ne suis pas resté longtemps.
24 Je suis rentré parce que Radmilo Bogdanovic m'a permis de rentrer ou plutôt
25 Milosevic, parce que je suppose que Radmilo Bogdanovic avait l'autorisation
26 de Milosevic, parce que Milosevic m'a dit que je ne devais pas quitter
27 Belgrade jusqu'à ce que l'autorisation m'en soit fournie. J'ai dit que
28 j'étais sans cesse sous la protection de la police serbe.
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1 Q. Etes-vous retourné à Knin après cela, Monsieur Babic ?
2 R. Oui.
3 Q. Nous avons parlé des événements du 17 août 1990. Savez-vous quelqu'un
4 chose à propos du 21 août 1990, lorsque les forces croates se sont
5 approchées de la ville de Knin des deux côtés ?
6 R. Oui. Je ne suis pas tout à fait sûr de la date, mais c'est aux
7 alentours de cette date-là.
8 Q. Pourriez-vous nous dire ce que vous savez, s'il vous plaît ?
9 R. La police croate venait de Sibenik et venait de Split. Quelques jours
10 après la date du 17 août, ils sont partis en direction de Knin. Ils ont été
11 arrêtés au niveau des barrages de Klanac et Drnis et Knin. Les barrages à
12 Civljani et Sinj les ont empêchés d'avancer. Tels sont les incidents dont
13 j'avais connaissance. D'après la question que vous m'avez posée, c'est sans
14 doute ces incidents-là que vous aviez à l'esprit.
15 Q. Oui. Merci, Monsieur Babic. Après le référendum sur l'autonomie du
16 peuple serbe, référendum qui s'est tenu le 19 septembre 1990, la SAO de la
17 Krajina a été proclamée. Pourriez-vous nous dire ce que contenait cette
18 décision ? Est-ce qu'il y avait un lien ici avec une décision prise par la
19 Croatie ?
20 R. La première proclamation de la SAO de la Krajina, environ un mois après
21 le référendum, les résultats du référendum ont été publiés le 30 septembre.
22 C'est à ce moment-là que l'autonomie a été proclamée. Rien n'a été fait
23 pour faire appliquer cette décision avant les modifications apportées à la
24 constitution croate. A l'automne, dans le courant du mois de novembre et du
25 mois de décembre, il y a eu un débat public sur l'adoption d'une nouvelle
26 constitution de la République de Croatie. Une de ces propositions visait à
27 instaurer de nouveaux articles. Autrement dit, il s'agissait de mettre en
28 place une nouvelle région autonome sur le modèle croate. Cette nouvelle
Page 1807
1 constitution, la constitution de la Croatie nouvellement rédigée servait de
2 modèle aux régions, c'est ce qu'on appelle "les zupanjas." Ceci a été
3 débattu par nous et on avait tendance à suggérer que zupanja, qui était une
4 région, devait être appelée la Région autonome serbe de Zupanja Krajina.
5 Etant donné que Vladimir Seks, qui était le président de la
6 commission parlementaire, avait déjà rejeté cette proposition et l'avait
7 tourné en dérision. Cette proposition a été présentée comme un projet de
8 proposition, et devait être utilisée comme un statut qui serait appliqué à
9 la Krajina. C'était très précis. Etant donné que la proposition avait été
10 rejetée au cours du débat parlementaire, le Conseil national serbe a
11 présenté un projet de proposition sur le statut de l'Association des
12 municipalités de la Dalmatie du Nord et de Lika, de façon à ce que
13 l'Association des municipalités, qui existait déjà dans la région, devait
14 être recréée et rebaptisée, et devenir la Région autonome serbe de Krajina.
15 C'est quelque chose qui a été adopté le 21 décembre et ce, deux ou trois
16 jours avant l'adoption de cette nouvelle constitution croate. Ceci a été
17 fait pour des raisons juridiques afin de garder en l'état ces associations
18 de municipalités avant l'amendement de la constitution croate.
19 Q. Merci, Monsieur Babic. Est-ce que vous pouvez dire que la création de
20 la SAO de Krajina en tant que région autonome à l'intérieur de la Croatie
21 était la réponse apportée par le peuple serbe aux modifications apportées à
22 la constitution croate ?
23 R. Il ne s'agissait pas simplement de fournir une réponse. Il s'agissait
24 de protéger, il s'agissait de réaliser quelque chose. Il s'agissait
25 d'asseoir l'Association des municipalités en tant qu'organe régional
26 autogéré. C'était une forme de réponse en quelque sorte à tout cela.
27 Q. Les Serbes ont-ils été mis à l'écart par la constitution du mois de
28 décembre 1990 ? Est-ce que la régionalisation avait été bannie ? Est-ce que
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1 la langue serbe avait été bannie ou est-ce que de nouveaux symboles ont été
2 introduits à ce moment-là ?
3 R. On ne peut pas dire qu'ils ont été mis à l'écart à partir de la
4 nouvelle constitution. On peut dire qu'ils ont été mis à l'écart par
5 rapport à l'ancienne constitution, parce que l'ancienne contenait ce projet
6 de régionalisation. L'ancienne constitution était quelque chose qui avait
7 prévu cela.
8 Q. Après la date du mois de décembre 1990, la SAO de la Krajina avait son
9 propre conseil exécutif; est-ce exact, Monsieur Babic ?
10 R. Oui.
11 Q. Vous étiez le président du conseil exécutif, Monsieur
12 Babic ?
13 R. Ceci s'appelait le conseil exécutif provisoire. J'étais le président de
14 ce conseil exécutif provisoire de la SAO de la Krajina, entre le mois de
15 décembre 1990 jusqu'à la fin du mois d'avril 1991.
16 Q. Ce conseil exécutif provisoire de la SAO de la Krajina, à la date du 4
17 janvier 1991, ce conseil a-t-il adopté une décision portant sur la
18 formation d'un secrétariat chargé des Affaires intérieures de la SAO de la
19 Krajina ?
20 R. Oui.
21 Q. Ce même jour, lorsque la décision a été prise pour créer le secrétariat
22 de la SAO de la Krajina, est-ce que Milan Martic a été nommé secrétaire du
23 SUP de la Krajina ?
24 R. Oui. Il a été élu à ce poste.
25 Q. Nous avons vu le texte de cette décision conformément à l'article 65
26 ter. C'est une pièce qui porte le numéro de cote 46. C'est le procès-verbal
27 qui est daté du 4 janvier de la session du conseil exécutif, qui a noté que
28 la décision avait été prise à l'unanimité et que la proposition, qui visait
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1 à nommer Martic secrétaire du SUP, a également été adoptée à l'unanimité.
2 Est-ce exact, Monsieur Martic ?
3 R. La décision a été prise à l'unanimité et c'est Rastovic, si je me
4 souviens bien, qui a fait cette proposition.
5 Q. Vous nous avez expliqué cela, et vous nous avez dit qu'en tant que
6 président du conseil exécutif provisoire, vous avez voté en faveur de cette
7 décision car la majorité était en faveur de cette décision, et parce que
8 c'était intéressant pour vous. C'est ce que vous avez dit, je crois,
9 Monsieur Babic ?
10 R. J'ai dit que ce n'était ni sage, ni intéressant pour moi que de
11 m'opposer à cette décision, car je n'avais aucune contre-proposition à
12 fournir. Le candidat était un homme très connu du public, donc mon
13 opposition n'aurait pas servi à grand-chose. Je n'avais pas de meilleur
14 candidat à proposer, et sur un plan purement politique, cela ne m'aurait
15 pas été favorable.
16 Q. La pièce 183, qui est une pièce de l'Accusation, c'est un télex qui a
17 été présenté à la Chambre, il s'agit d'un message envoyé par le conseil
18 exécutif de la SAO de la Krajina, le 15 janvier 1991 aux organes fédéraux,
19 les différents organes de la république, sur la création d'un secrétariat
20 chargé des Affaires intérieures dans la SAO de la Krajina. Etes-vous au
21 courant de cette décision ?
22 R. Oui.
23 Q. Est-il exact de dire que ce message a été envoyé à la présidence de la
24 Yougoslavie, le SUP fédéral, aux différents ministères des Affaires
25 intérieures de la Croatie, de la Serbie et de la Bosnie-Herzégovine, ainsi
26 que différents services de la police en Croatie ? Est-ce que vous vous
27 souvenez de cela ?
28 R. Oui.
Page 1810
1 Q. Vous souvenez-vous nous avoir expliqué que le 19 janvier 1991, après la
2 création du SUP, un texte de loi a été adopté sur l'organisation interne et
3 sur la mise en place du SUP dans la SAO de la Krajina ? Ceci a été créé par
4 le conseil exécutif.
5 R. Oui.
6 Q. Il s'agit de la pièce 646 qui figure sur la liste des documents 65 ter.
7 Ceci a été admis au dossier sous la cote numéro 184. Vous nous avez
8 expliqué que cette structure était en vigueur jusqu'au 1er août 1991, date à
9 laquelle la décision a été prise pour faire appliquer le droit régissant
10 les Affaires intérieures de la République de Serbie; est-ce exact ?
11 R. Oui.
12 Q. La pièce 185 est un document qui a été présenté conformément à notre
13 Règlement, c'est un document qui figure sur la liste 65 ter sous le numéro
14 1845. Il s'agit du texte de loi sur la loi adoptée sur les Affaires
15 intérieures à partir du mois juillet 1991. Il s'agit d'un extrait du
16 journal officiel de la République de Serbie, décision sur l'application de
17 ceci sur le territoire de la Krajina. Nous en avons parlé un petit peu plus
18 tôt. Ceci n'est pas contesté; est-ce exact, Monsieur Babic ?
19 R. Oui.
20 Q. Vous avez expliqué que le 1er août 1991, une décision avait été prise
21 sur la création de toute une série de textes législatifs serbes sur le
22 territoire de la SAO de la Krajina; est-ce exact, Monsieur Babic ?
23 R. Non, pas toute une série de textes de loi, mais ce jour-là, la décision
24 a été prise de mettre en œuvre la loi sur la défense et la décision sur
25 l'abolition de service de Sûreté sur le territoire de la SAO de la Krajina.
26 Q. Merci, Monsieur Babic. Vous nous avez expliqué que le 29 août -- le 29
27 mai 1991, M. Martic a été élu ministre de la Défense, le document 65 ter,
28 pièce numéro 79. Vous souvenez-vous de cela ?
Page 1811
1 R. Oui.
2 Q. Vous nous avez expliqué que le 29 mai 1991, le gouvernement de la SAO
3 de la Krajina a été créé. Vous êtes devenu le président ou le premier
4 ministre de ce même gouvernement et ce n'était plus un secrétariat, mais
5 c'est un ministère des Affaires intérieures qui a été créé et d'autres
6 ministères ont également été créés à ce moment-là. Est-ce exact, Monsieur
7 Babic ?
8 R. Oui.
9 Q. Vous nous avez expliqué que M. Martic occupait le poste de ministre de
10 la Défense pendant deux ou trois jours. Il n'est pas resté plus longtemps à
11 ce poste et officiellement, il est resté à ce poste jusqu'au 27 juin 1991.
12 Est-ce exact, Monsieur Babic ?
13 R. Oui.
14 Q. La raison pour laquelle vous avez proposé le nom de M. Martic comme
15 ministre de la Défense, vous souhaitiez entamer son pouvoir parce qu'il
16 contrôlait le MUP, les forces spéciales et il négligeait l'ordre public.
17 Est-ce exact, Monsieur Babic ?
18 R. Oui.
19 Q. Vous nous avez également expliqué que M. Martic avait été nommé
20 ministre de la Défense, le 29 mai 1991, par l'assemblée sur la proposition
21 du gouvernement; est-ce exact ?
22 R. C'est moi qui ai fait cette proposition-là, c'était sur mon initiative.
23 On venait de former le gouvernement à ce moment-là.
24 Q. Vous nous avez expliqué que l'assemblée de la SAO de la Krajina, le 27
25 juin 1991 - il s'agit d'un document 65 ter, numéro 34 - a adopté une
26 décision sur l'élection Milan Martic, élu ministre du MUP et que Martic est
27 resté à ce poste jusqu'au début de l'année 1991; est-ce exact ?
28 R. Oui.
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1 Q. Vous avez également expliqué qu'à partir du 27 juin 1991, vous avez
2 rempli les obligations d'un ministre de la Défense, en place et lieu de
3 Martic. Est-ce exact, Monsieur Babic ?
4 R. Non, pas à la place de Martic, mais étant donné que ce poste
5 ministériel n'était pas rempli et que j'étais président du gouvernement, je
6 remplissais les fonctions qui incombaient au ministre de la Défense jusqu'à
7 l'élection d'un nouveau ministre à ce poste.
8 Q. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi la décision avait été adoptée
9 pour faire appliquer la loi sur les Affaires internes de la République de
10 Serbie sur le territoire de la Krajina ? Quelle en était la finalité
11 pratique ?
12 R. M. Martic est celui qui a proposé l'adoption d'un tel texte de loi.
13 Q. Savez-vous, Monsieur Babic, que le gouvernement de la République de
14 Croatie, le 21 février 1991, a adopté une décision qui mettait un terme aux
15 lois qui régissaient la République yougoslave sur le territoire de la
16 République croate ?
17 R. La décision de quitter la Yougoslavie a été adoptée, mais je ne sais
18 pas si toutes les lois qui étaient en vigueur en Yougoslavie ont cessé
19 d'être en vigueur à partir de ce moment-là. Car la Croatie a proclamé son
20 indépendance en juin 1991, entre ces deux dates, on avait tendance à
21 appliquer le texte de cette déclaration.
22 Q. Savez-vous que la SAO de la Krajina, à la fin du mois de février 1991,
23 a adopté une décision qui stipulait que cette région allait quitter la
24 Croatie parce que la Croatie avait décidé de quitter la Yougoslavie ?
25 R. Oui.
26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Je
27 souhaite réentendre la question. Vous avez dit que : "La SAO de la Krajina,
28 à la fin du mois de février 1991, a pris la décision de quitter la Croatie
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1 parce que la Croatie avait par voie de décision décidé de quitter la
2 Yougoslavie ? Est-ce que c'est ce que vous avez dit ? De quitter la Croatie
3 ou de quitter la Yougoslavie ?
4 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. C'était une
5 décision qui a été prise. J'ai posé la question au témoin. Je lui ai
6 demandé s'il savait que la décision prise par la SAO de la Krajina de
7 quitter la Croatie, parce qu'à la fin du mois de février, la Croatie avait
8 décidé de quitter la Yougoslavie. La décision a été prise également de
9 mettre un terme aux lois qui régissaient la Yougoslavie sur le territoire
10 de la Croatie. C'est ce que je voulais dire.
11 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]
12 Q. Monsieur Babic, vous avez expliqué comment en décembre 1991, en
13 Krajina, vous avez dit que sur la recommandation du président Milosevic, le
14 président de la Serbie, que les contacts ne seraient pas aussi ouverts ou
15 aussi faciles ?
16 R. Oui. Je crois que j'ai dit deux choses. Je crois qu'il y a deux
17 questions ici. Au mois de décembre, j'ai dit que la loi qui régissait les
18 affaires intérieures de la SAO de la Krajina a été adoptée. Si je me
19 souviens bien, c'est une question qui avait un rapport avec la suggestion
20 de Milosevic. Il s'agissait de faire adopter par la SAO de la Krajina des
21 lois qui étaient modelées sur les lois de la République de Serbie plutôt
22 que de faire appliquer directement les lois qui étaient appliquées en
23 Serbie, de façon à ce que l'on comprenne qu'il n'y ait pas de lien trop
24 étroit entre les deux.
25 Cette question et cette réponse qui portaient sur le ministère des
26 Affaires intérieures, c'est une chose, Milosevic suggérait déjà plus tôt, à
27 partir de l'été déjà, lorsqu'il a commencé à faire appliquer les lois
28 serbes sur le territoire de la Krajina. Le ministère des Affaires
Page 1814
1 intérieures était censé faire respecter ces lois-là. Il y avait d'autres
2 lois qui étaient adoptées également. Donc, cette recommandation était
3 plutôt une recommandation de nature générale.
4 Q. Pourriez-vous nous dire exactement quel était le libellé de cette
5 recommandation de façon à ce que nous puissions comprendre quelle
6 différence il y a entre ce que vous comprenez et ce qui a été dit ? Est-ce
7 que vous me suivez ?
8 R. Il a dit que nous devions promulguer de nouvelles lois. Nous devions
9 promulguer les lois de la Serbie, mais qu'il ne fallait pas simplement les
10 appliquer à la lettre, et ensuite, les faire appliquer, ce qui revient au
11 même. Il ne fallait pas que le lien trop étroit entre les deux soit trop
12 évident.
13 Q. A ce moment-là, la Croatie avait déjà pris la décision et avait décidé
14 que la législation fédérale était nulle et non avenue sur son territoire ?
15 R. Oui.
16 Q. Pour ce qui est des recommandations de M. Milosevic que vous avez
17 mentionnées, vous avez dit que c'était une stratégie qui était la sienne,
18 et qu'il voulait protéger une fédération ou qu'il prenait la conservation
19 d'une fédération forte - c'est, en tout cas, ce qu'il prônait en public -
20 c'était sa stratégique publique. Il y avait également une stratégie
21 secrète. Sa stratégie secrète portait sur la création d'unités
22 paramilitaires en Croatie, provoquant ainsi des incidents et provoquant
23 l'intervention de la JNA, de façon à ce que ces nouveaux territoires
24 puissent être annexés facilement. C'est comme cela que vous compreniez les
25 choses ? Je crois que j'ai réussi grosso modo à résumer vos propos.
26 R. C'était effectivement la position de Milosevic. C'est celle qu'il
27 prônait à partir de l'été 1990 et jusqu'à la fin de
28 l'année 1991.
Page 1815
1 Q. Vous avez été témoin dans le procès de l'accusé
2 M. Milosevic. A-t-il nié cette allégation-là ? Vous a-t-il posé des
3 questions sur ce point ?
4 R. Oui, j'ai été témoin dans cette affaire. La déposition a duré un
5 certain temps. Quelle est la question très précisément que vous voulez me
6 poser ? A quoi souhaitez-vous que je réponde ?
7 Q. Cela suffit, Monsieur Babic. Vous avez dit que Martic avait été nommé
8 ministre de la Défense nationale, et qu'en parallèle, une loi avait été
9 adoptée pour abolir le service de la Sûreté de l'Etat sur le territoire de
10 la Krajina. Vous souvenez-vous de cela, Monsieur Babic ?
11 R. Oui.
12 Q. Vous avez évoqué cette décision qui est datée du
13 1er août 1991, qui est une pièce de l'Accusation, numéro 187, document 106
14 sur la liste 65 ter. Ceci a été publié dans le journal officiel, au
15 paragraphe 2. On peut y lire que le gouvernement doit présenter une
16 proposition pour créer une agence gouvernementale chargée des questions de
17 sécurité nationale. Est-ce exact, Monsieur Babic ?
18 R. Oui.
19 Q. D'après les accords qui ont été conclus à l'époque, que le secrétariat
20 de l'Intérieur avait deux départements. Il y avait le département des
21 services de la Sûreté publique et les services de la Sûreté de l'Etat.
22 Ceux-ci étaient régis par le ministère de l'Intérieur à l'époque. Est-ce
23 exact, Monsieur Babic ?
24 R. Si vous parlez du ministère de l'Intérieur de la SAO de la Krajina, la
25 réponse est oui.
26 Q. Ai-je raison de dire que d'après la décision qui a été prise par vous
27 pour abolir les services de la Sûreté de l'Etat, décision qui est datée du
28 1er août 1991, l'objectif était bien d'adopter une solution européenne et
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1 d'avoir des agences gouvernementales chargées de la Sûreté de l'Etat, et
2 qui n'étaient pas rattachées au ministère de l'Intérieur ?
3 R. L'objectif était de faire en sorte que le service de la Sûreté de
4 l'Etat soit dépourvu de ses pouvoirs. Cela était fait par le service de la
5 Sûreté de l'Etat de Serbie et de la Krajina. La décision a été celle de
6 supprimer les services de Sûreté de l'Etat sur le territoire de la SAO de
7 Krajina. La décision n'a pas été prise de supprimer les services de la
8 Sûreté de l'Etat au niveau du secrétariat, à savoir, du ministère de
9 l'Intérieur de la SAO de la Krajina. L'objectif a été celui de libérer le
10 ministère de l'Intérieur ou plutôt de le débarrasser de cette
11 administration de la DB de Serbie et de la DB de la Krajina. C'était une
12 façon de placer Martic sous le contrôle du gouvernement.
13 Q. Ai-je raison, Monsieur Babic, de dire qu'une décision dans cet
14 objectif, tel que vous le décrivez, a été prise le
15 1er août 1991 ? C'est à cette date-là que cette décision-là a été adoptée,
16 n'est-ce pas ?
17 R. Oui.
18 Q. Avez-vous déclaré que suite aux événements à Plitvice, avril 1991, vous
19 aviez réclamé une assistance technique et autre de la part du ministère de
20 l'Intérieur de Serbie ?
21 R. Oui. J'ai envoyé un courrier dans ce sens, en effet. Un courrier pour
22 appeler à Milosevic la promesse qu'il avait faite au mois de mars. Il
23 s'agissait de tenir la promesse précédemment faite.
24 Q. Quelle a été la substance de cette requête du mois d'avril ? Quelle est
25 l'assistance dont vous aviez besoin ? Dans quel sens et à quel effet cette
26 assistance ?
27 R. Je vous ai déjà dit ce que Milosevic avait promis. Il avait promis deux
28 choses.
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1 Q. Monsieur Babic, ce n'est pas la question que je vous ai posée; je vous
2 ai posé autre chose comme question.
3 R. Je réponds à votre question. Je vous réponds à votre question.
4 Q. Dites-nous d'abord quel a été votre objectif ? Ensuite, vous pouvez
5 nous dire ce que Milosevic vous a dit.
6 R. J'ai dit qu'au mois d'avril j'ai envoyé un courrier pour rappeler à
7 Milosevic la promesse qu'il a faite. Il s'agissait pour lui de tenir cette
8 promesse. Je voulais faire savoir quelle a été cette promesse et la
9 signification de ce courrier.
10 Q. Continuez, s'il vous plaît.
11 R. La signification de ce que Milosevic avait promis, c'était de fournir
12 une assistance technique en cadre notamment, pour ce qui est de
13 l'organisation des secrétariats à l'Intérieur de la SAO de Krajina. Il a
14 promis d'armer la Krajina. Ou plutôt, il a dit que l'armement de la Krajina
15 avait déjà commencé.
16 Q. Pouvez-vous nous dire quand est-ce que vous êtes allé à Belgrade en
17 votre qualité de représentant des autorités de Knin après janvier 1991 ? En
18 quelle occasion ? Mars et avril 1991 ?
19 R. Je suis allé plusieurs fois.
20 Q. Ces fois-là, avez-vous réclamé une aide de la part de la République de
21 Serbie vis-à-vis du comportement des autorités de la Croatie ?
22 R. Au mois de mars, on a posé la question à Milosevic de savoir de quelle
23 façon il envisageait de nous protéger dans ces circonstances nouvelles, à
24 savoir, les circonstances où la présidence n'a pas décidé du recours à la
25 JNA. Pour répondre à votre question, je dirais dans ce sens-là, oui, en
26 effet.
27 Q. Serait-il exact de dire que ce qui vous préoccupait ou ce qui vous a
28 même fait peur, c'est que la présidence avait décidé de ne pas déclarer un
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1 état d'urgence, et vous avez compris cela comme un avertissement ?
2 R. L'objectif politique de Milosevic pour les Serbes de la Croatie était
3 celui de dire qu'ils avaient le droit de rester en Yougoslavie. Il a été,
4 de notre part, pris la décision de nous dissocier de la Croatie et de
5 couper toutes communications et liens avec la Croatie. Milosevic nous a
6 emmenés dans cette situation. Une fois que politiquement nous nous sommes
7 trouvés dans cette situation-là, la question qui se posait était celle de
8 savoir qui est-ce qui nous protégerait, parce que la situation se
9 présentait telle quelle, et ces garanties aux termes desquelles ce serait
10 la JNA ne tenaient plus debout.
11 Q. Vous nous avez dit dans le courant de la journée d'aujourd'hui, qu'en
12 août 1990, vous vous étiez adressé à Jovic, puis en octobre 1990 à
13 Milosevic pour la première fois, et que par la suite, vous avez aussi eu
14 des réunions. Vous avez présenté des appréhensions qui étaient les vôtres
15 concernant le comportement des autorités croates, vous avez réclamé le
16 soutien des autorités fédérales, n'est-ce pas, Monsieur Babic ?
17 R. Ces réunions se tenaient à peu près de la façon suivante : Milosevic
18 nous faisait savoir qu'il fallait que nous venions. On y allait,
19 l'académicien Raskovic y allait et d'autres personnes venaient avec moi
20 aussi. Ou alors, il demandait à ce que nous adressions une demande publique
21 pour être reçu, comme cela a été fait à le cas en janvier. Ensuite, on
22 allait le voir.
23 Indépendamment de ce que nous lui demandions, il présentait la chose comme
24 s'il s'agissait d'un déplacement des Serbes en raison d'appréhensions, de
25 peurs et d'une demande d'aide. Cela a été présenté ou dépeint de sa part
26 ainsi.
27 Q. Pouvez-vous nous dire ce qui s'est passé à Pakrac aux dates du 1er et 2
28 mars 1991 ?
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1 R. Je l'ai déjà mentionné. C'est ce que j'ai appris par la presse. Cela,
2 je peux le répéter.
3 Q. Non. Non, merci, Monsieur Babic. Cela, on l'a déjà entendu. Vous ne
4 savez pas concrètement et de façon directe ce qui s'est passé là-bas; vous
5 ne savez que ce que la presse a rapporté, n'est-ce pas ?
6 R. Je sais ce que Milosevic m'en a dit. Il a dit qu'il ne fallait pas que
7 je m'inquiète de ce qui s'était dit et de ce qui se passait, mais qu'il
8 fallait que je rentre calmement, en toute quiétude à Knin.
9 Q. Nous avons entendu devant ce Tribunal un témoin répondant au nom de
10 Dzakula, originaire de cette région-là. Il nous a expliqué que ce jour-là
11 la police spéciale croate est intervenue, qu'il y a eu des conflits armés,
12 que la JNA est intervenue également et la police spéciale croate avait pour
13 la première fois tiré sur la JNA. En avez-vous eu vent vous-même ?
14 R. Rien que de la part des médias. J'ai appris que la situation là-bas
15 était des plus dramatiques. On a dit que Bosanac avait été tué. Après, il
16 s'est avéré que cela n'était pas vrai. C'est tout ce que je sais à ce
17 sujet.
18 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, si je puis soulever
19 une question, j'aimerais le faire à présent. Peut-être cela peut être
20 expliqué par les différences culturelles. Parce que dans ma pratique ou
21 plutôt dans le système qui est le mien, il n'est pas approprié de dire au
22 témoin ce qu'un autre témoin a dit, que ce soit par écrit ou de façon
23 verbale. Le fait que cela soit contenu dans une déclaration de témoin ou
24 dans un témoignage, cela peut être mentionné. On peut dire, par exemple,
25 que le témoin X a témoigné de cette façon, et qu'auriez vous à en dire ?
26 C'est la pratique qui est celle de mon pays. Je sais que cela n'est pas
27 admissible.
28 Je sais que dans ce bâtiment, en ces lieux, cela est parfois autorisé,
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1 parfois pas. Je pense qu'il y a de bonnes raisons de ne pas le faire parce
2 que j'estime que le témoin devrait pouvoir témoigner partant des
3 connaissances qui sont les siennes. Quand bien même il serait confronté à
4 des faits à l'occasion du contre-interrogatoire et lorsqu'on lui poserait
5 des questions directrices, cela serait également le cas. Je crois que ceci
6 est susceptible d'influer de façon inappropriée sur le témoin, si on dit à
7 ce témoin-ci ce qu'un autre témoin a déclaré dans son témoignage. Cela est
8 mon opinion. Peut-être les Juges de la Chambre pourraient-ils fournir des
9 directives à ce sujet. A mon avis, cela n'apporte rien à la question qui a
10 été posée. Il se peut, par contre, que nous détournions l'attention de tout
11 un chacun de ce qui est crucial, et cela peut, dans certains cas,
12 influencer le témoin de façon inappropriée. Parce qu'il y a une réaction
13 naturelle de la part de quelqu'un qui témoigne. Lorsqu'il a appris que
14 quelqu'un a dit quelque chose d'autre, il se peut qu'il soit influencé. Je
15 ne dis pas que cela est nécessairement le cas, mais je pense qu'il serait
16 approprié de soulever la question, étant donné que c'est une question qui a
17 été débattue de façon variée dans ce Tribunal.
18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avez-vous une autorité quelconque à
19 citer ou une référence à citer en soulevant cette question ?
20 M. WHITING : [interprétation] Ce à quoi je me réfère, c'est la pratique
21 dans le système juridique national qui est le mien. Je ne peux pas, en ce
22 moment-ci, vous citer d'autorité juridique. Par exemple, dans l'affaire
23 Limaj, certains des conseils ont estimé que cela était acceptable de temps
24 à autre. D'autres ont estimé que cela était inapproprié. Pour autant que je
25 le sache, dans d'autres affaires, notamment celle de Brdjanin, ce type de
26 questions n'avait pas été autorisé. Il n'a pas été possible de dire : "Un
27 tel témoin a dit telle chose, qu'en diriez-vous vous-même ?"
28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne vois pas sur l'écran ce que vous
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1 avez dit tout au début. Je voulais vous citer. Je n'ai pas compris
2 exactement ce que vous avez dit au tout début, mais je m'efforcerai de
3 paraphraser. Vous avez dit que le fait qu'une déclaration ait été donnée ou
4 un témoignage ait été fait, cela peut être indiqué au témoin, mais pas dans
5 cette forme. Mais vous ne dites pas dans quelle forme.
6 M. WHITING : [interprétation] Oui, je m'excuse, j'aurais dû être plus
7 clair. Dans la pratique qui est celle de mon pays, celle-ci veut qu'on pose
8 la question sous la forme suivante : "Ne serait-il pas un fait avéré que
9 les officiers de police croates ont été les premiers à tirer ?" Cela,
10 c'était admissible. Mais il n'est pas admissible de dire que : "Le témoin X
11 a témoigné, et ce témoin X a dit que la police croate a été la première à
12 tirer. Qu'en diriez-vous ? Est-ce vrai ou pas ?"
13 Le fait que quelqu'un en ait témoigné peut être placé devant le témoin sous
14 une forme directrice ou non directrice. Cela est approprié, à mon avis.
15 Mais dire qu'un tel témoin a témoigné à ce sujet et en identifiant le
16 témoin en question, je crois que cela est inapproprié et cela ne nous fait
17 avancer en rien.
18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui. Ce que j'essaie, c'est de
19 comprendre les raisons pour lesquelles cela s'avérerait être inapproprié.
20 Ce que j'essaie, c'est de comprendre pourquoi il serait erroné de dire :
21 "Telle personne a dit telle chose. Avez-vous peut-être un commentaire ?"
22 Peut-être peut-il dire : "Je suis d'accord," "Je ne suis pas d'accord" ou
23 "Je n'en sais rien." Je ne vois pas en quoi cela peut influer sur le témoin
24 qui est en train de témoigner de façon inadéquate --
25 M. WHITING : [interprétation] Pour ce qui me concerne --
26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le témoin qui est ici, j'entends.
27 M. WHITING : [interprétation] La pratique qui est celle de mon pays fait en
28 sorte que l'on ajoute de cette façon-là un poids complémentaire à la
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1 question qui est posée, et que dans certains cas cela peut influer sur le
2 témoin. Je ne dis pas que cela est le cas ici en l'occurrence, et je ne
3 suis pas préoccupé par cela. Mais si on dit au témoin : plusieurs autres
4 témoins ont dit ceci ou cela, j'estime que cela peut distraire l'attention
5 du témoin de ce qui a de crucial et que cela peut l'influencer de façon
6 inadéquate.
7 J'estime que nous n'obtenons rien en affirmant à ce témoin-ci ce qu'un
8 autre témoin a déclaré dans son témoignage. Lui dire qu'un autre témoin a
9 témoigné ou témoignerait, il y a des éléments de conjecture qui sont
10 impliqués, et je crois que cela n'ajoute rien du tout à la question qui est
11 posée en tant que telle.
12 [La Chambre de première instance se concerte]
13 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vous prie. Je
14 voudrais répliquer brièvement, Monsieur le Président. Ma question se
15 rapportait à la déclaration d'une personnalité politique très influente
16 originaire de Pakrac. C'est le témoin Dzakula. Le témoin à qui j'ai posé la
17 question connaît parfaitement bien cet homme et connaît le rôle politique
18 qu'a eu celui-ci et le degré d'information. Ce que je voulais lui
19 communiquer, c'est la teneur et le sérieux d'une information qu'un témoin,
20 dans ce cas concret, l'homme que j'ai cité, a donné. Mais je ne vois pas
21 quelle est la différence de milieu culturel que mentionne le Procureur
22 pourrait générer des raisons pour empêcher ce type de question d'être posé.
23 Je ne vois pas quelle est la différence culturelle qui intervient.
24 Il s'agit de savoir si quelque chose est fondé ou infondé et si
25 quelque chose est admis ou pas. Est-ce que cela est conforme à une pratique
26 qui existe devant ce Tribunal ou pas, ou alors qui existe au niveau
27 d'autres institutions parce que la question présentée de la sorte me semble
28 être tout à fait inacceptable.
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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je n'ai pas compris votre toute
2 dernière phrase. Vous vouliez dire acceptable ou pas ?
3 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] L'objection portant sur les divergences
4 de milieu culturel ne peut pas constituer un fondement d'admissibilité
5 d'une question. Je pose une question qui est autorisée ou qui ne l'est pas,
6 mais objecter de la façon dont vient de le faire M. le Procureur, à mon
7 avis, cela est tout à fait dénué de fondement et de sérieux, si vous voulez
8 mon opinion.
9 Je voudrais attirer votre attention sur le fait que le moment se
10 prêterait peut-être fort bien à une pause. Peut-être pourrions-nous
11 reprendre après la pause, à moins que je ne me trompe au niveau de l'heure
12 de la pause.
13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez tout à fait raison. Nous
14 allons faire une pause à présent, et une fois revenus, nous allons parler
15 de cette objection. Nous allons continuer à 6 heures moins quart.
16 --- L'audience est suspendue à 17 heures 16.
17 --- L'audience est reprise à 17 heures 46.
18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Whiting, nous avons eu
19 l'occasion de nous pencher sur le compte rendu d'audience, et au compte
20 rendu d'audience, il est dit, ou plutôt il n'est pas dit, si vous pouvez
21 faire un commentaire à ce sujet, mais on demande d'avoir ou pas entendu
22 parler de cela. Est-ce que vous maintenez l'objection que vous avez
23 soulevée, Monsieur Whiting ?
24 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, non. Ce que je veux
25 dire, la réponse à votre question est oui. Je m'excuse. Je ne pense pas que
26 ce soit là une question liée à la formulation. L'objection est fondée sur
27 le fait que le témoin ait été confronté à la déposition ou au témoignage
28 d'un autre témoin. Je pourrais peut-être ajouter deux éléments
Page 1824
1 d'information.
2 Je sais que vous ne m'avez pas convié à le faire, mais pendant la
3 pause, j'ai réfléchi à la question et j'ai trouvé une autre raison pour
4 laquelle ce type de pratique a été adopté dans le système juridique qui est
5 le mien, à savoir, de ne pas avoir l'autorisation de confronter un témoin
6 avec le témoignage d'un autre témoin. C'est parce que cela convie le témoin
7 présent à commenter la crédibilité d'un autre témoin, ou d'autres témoins
8 au pluriel. Il appartient aux Juges de la Chambre de décider des questions
9 liées à la crédibilité d'un ou de plusieurs témoins. C'est encore une
10 raison pour laquelle cela devrait être considéré comme étant inappropriée.
11 L'autre point que je voudrais soulever, c'est qu'il faudrait faire la
12 distinction entre la confrontation d'un témoin avec des éléments de
13 témoignage du même témoin qui a témoigné dans le même procès sous serment.
14 Si l'on montre à un témoin une déposition, ou plutôt des dires d'un témoin
15 précis qui a comparu par l'une des parties en présence, alors qu'il s'agit
16 d'un témoin qui n'a pas encore comparu, il faudrait faire une différence,
17 une distinction, entre ces deux types de situation, parce qu'il se peut que
18 l'on juge approprié de confronter un témoin avec les dires d'un témoin qui
19 a témoigné dans ce procès-ci, alors que cela pourrait ne pas être le cas
20 pour des témoins qui ont fait des dépositions mais qui n'ont pas témoigné.
21 Cette distinction se fonde sur d'autres raisons en sus de celles que j'ai
22 déjà exposées pour argumenter mon objection.
23 En fin de compte, je voudrais dire que l'objection que j'ai soulevée,
24 ce n'est pas un point de préoccupation s'agissant de ce témoin-ci, mais je
25 voulais que la question soit une fois pour toute tirée au clair pour les
26 besoins de la Défense et de l'Accusation, afin que nous soyons cohérents à
27 l'avenir afin de nous en tenir à la décision telle que prise, si donc il y
28 en a une de prise. J'estime qu'il serait nécessaire que les Juges de la
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1 Chambre nous fournissent des lignes directrices sur le point.
2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous comprends, Monsieur Whiting.
3 Tout d'abord, la personne qui a fait cette déposition est un témoin qui a
4 déjà témoigné devant cette Chambre. Cela c'est d'un. La question a été
5 posée en disant la chose suivante : "Le témoin Dzakula a déjà comparu
6 devant cette Chambre, et il a expliqué telle chose à telle date." La
7 question qui a suivi : "Avez-vous entendu parler de cela ?"
8 Il y a deux distinctions. Il s'agit d'un témoin qui a témoigné, et si
9 je vous ai bien compris, si c'est le cas, vous accepteriez la chose.
10 Deuxièmement, la question était d'apporter un commentaire. On n'a pas
11 convié le témoin à commenter la crédibilité de nos témoins. La question
12 était celle de savoir s'il avait entendu parler de cette déclaration faite
13 par M. Dzakula. On peut dire oui ou non. Et il a clairement répondu que
14 c'était bien le cas, mais qu'il l'avait appris par les médias. Donc, ce
15 n'était pas une invitation à commenter en quoi que ce soit la crédibilité
16 du témoin.
17 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas à quel
18 point vous souhaitez que nous allions de l'avant dans ce débat, mais
19 indépendamment de la formulation qui est utilisée, c'est inévitablement le
20 type de questions qui amène le témoin à dire que : "Tel autre témoin n'a
21 pas dit la vérité ou est un menteur ou quoi que ce soit d'autre." Quoi que
22 la question n'ait pas été nécessairement formulée de la sorte, c'est en
23 finalité ce à quoi cela mène.
24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je crois qu'il doit répondre à la
25 question qui lui est posée, ce témoin. Si on arrive dans une situation où
26 on serait amené à demander au témoin à faire des commentaires, là nous
27 pourrions nous pencher sur la question. En l'occurrence, les Juges de la
28 Chambre ne voient pas quel est le fondement de l'objection que vous avez
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1 présentée.
2 M. WHITING : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] L'objection est rejetée.
4 Maître Milovancevic, vous pouvez continuer.
5 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
6 Q. Nous nous étions arrêtés à Pakrac, Monsieur Babic. Ce qui n'est pas
7 contesté, c'est qu'il s'agissait d'un événement datant du début mars 1991.
8 Il s'agissait d'un conflit armé, n'est-ce pas, Monsieur Babic ?
9 R. Oui.
10 Q. Vous avez également mentionné le fait qu'à la
11 mi-mars 1991, la présidence de la Yougoslavie n'a pas proclamé un état
12 d'urgence, n'est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Savez-vous que le secrétariat fédéral à la Défense nationale avait
15 proposé la proclamation d'un état d'urgence en expliquant que la guerre
16 civile en Yougoslavie avait déjà commencé ?
17 R. Oui.
18 Q. On a parlé de l'événement à proximité des lacs de Plitvice le 31 mars
19 1991, où il y a eu conflit entre la police croate et les policiers serbes.
20 Savez-vous si cette événement est survenu à un anniversaire quelconque ou
21 une fête quelconque ?
22 R. Je crois que c'était à Pâques. Je ne sais pas si c'était en vertu du
23 nouveau calendrier ou de l'ancien calendrier ou alors des deux.
24 Q. S'agissant de l'événement aux lacs de Plitvice, avez-vous oui ou non
25 confirmé qu'il y a eu intervention de la JNA pour séparer les parties en
26 conflit ?
27 R. Oui, en effet.
28 Q. Saviez-vous que le comité principal du SDS, juste avant les événements
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1 du lac de Plitvice, a pris position qu'il fallait négocier avec le
2 gouvernement croate ?
3 R. Je ne sais pas exactement quelles ont été les conclusions qui ont été
4 adoptées parce que je n'ai pas été présent à la réunion. Si vous parlez de
5 la réunion qui s'est tenue à Obrovac, où il y a eu également -- non, je
6 n'étais pas présent à cette réunion.
7 Enfin, je me suis souvenu du fait qu'après cette réunion-là, Goran
8 Hadzic était venu à Plitvice, puis qu'il a été arrêté par la police croate.
9 C'est la seule chose dont je me souviens au sujet de cette réunion.
10 Q. On en a entendu parler de la bouche du témoin qui a été entendu ici; je
11 ne vais donc pas poser de questions concrètes à cet effet. Je voudrais
12 savoir si vous avez connaissance du fait, qu'avec la médiation et
13 l'engagement de la partie serbe, du représentant SDS de la Krajina, Goran
14 Hadzic a fini par être libéré après avoir été gravement battu ?
15 R. Oui. Je ne sais plus qui est-ce qui avait servi de médiateur, mais je
16 sais qu'il y a eu une médiation.
17 Q. Savez-vous qu'au sujet de ces négociations liées à la libération de
18 Goran Hadzic du côté serbe, en guise de témoignage de bonne volonté, il a
19 été pris la décision d'enlever les barricades à Borovo Selo avant le
20 conflit du 2 mai 1991 ?
21 R. Je ne le sais pas. J'en sais rien.
22 Q. Vous avez dit que le 1er avril 1991, le gouvernement de la SAO de la
23 Krajina a adopté plusieurs décisions. Pouvez-vous nous rappeler quelles ont
24 été les décisions prises par ce gouvernement à la date du 1er 1991, à
25 l'occasion notamment des événements aux lacs de Plitvice ?
26 R. La décision de la réunification de la SAO de la Krajina avec la Serbie,
27 c'est l'une des décisions. La deuxième a été adressée à l'intention des
28 instances fédérales pour ce qui est du recours à la JNA pour inspecter le
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1 terrain, et notamment l'intervention de la Croix-Rouge pour retrouver des
2 personnes qui avaient été portées disparues.
3 Q. Merci. Par cette décision datant du 1er avril, n'avez-vous pas demandé
4 aide et protection des instances fédérales vis-à-vis des agissements des
5 autorités croates ?
6 R. Oui, en effet.
7 Q. Est-ce que le conseil exécutif de la SAO de la Krajina avait des
8 autorisations et des compétences constitutionnelles pour décider de
9 l'annexion d'un territoire quel qu'il soit à la République de Serbie ?
10 R. Cela avait été une provocation politique. Pour ce qui est de savoir si
11 elle avait le droit constitutionnel de le faire, la question est
12 discutable. Ce qui est la réalité, c'est que cela avait été une provocation
13 politique vis-à-vis de la République de Serbie.
14 Q. Savez-vous comment la République de Serbie a réagi à cette décision ?
15 R. Je sais comment a réagi Slobodan Milosevic.
16 Q. Monsieur Babic, je vous ai demandé si vous saviez comment la République
17 de Serbie avait réagi. Ma question a été précise. On en viendra à Slobodan
18 Milosevic. La question est posée maintenant pour la République de Serbie.
19 R. Dites-moi à qui vous vous référez quand vous parlez de la "République
20 de Serbie."
21 Q. Savez-vous que l'assemblée -- que le Parlement de la République de
22 Serbie, en date de 2 avril, a adopté une décision apportant un soutien au
23 combat politique du peuple serbe dans la Krajina, mais qui a rejeté - et
24 c'est là l'essentiel - qui a rejeté la décision que vous aviez adoptée en
25 guise de provocation
26 politique ?
27 R. Oui.
28 Q. Vous avez dit qu'en tant que réponse à vos demandes d'assistance
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1 technique à l'égard du SUP de la Krajina, le MUP de Serbie aurait envoyé
2 des gens que vous avez vus au centre de Golubic, n'est-ce pas, Monsieur
3 Babic ?
4 R. J'ai dit que je m'attendais à autre chose moi-même. C'était des cadres
5 professionnels à l'intention du secrétariat de l'Intérieur. Ce n'est pas ce
6 qui s'est passé à Golubic. Ce qui s'est passé à Golubic, c'était tout à
7 fait autre chose vis-à-vis à quoi je m'attendais en guise d'assistance
8 technique.
9 Q. Pourriez-vous, je vous prie, nous dire quel type d'assistance technique
10 et quel type d'encadrement technique vous attendiez de la part du MUP de
11 la Serbie ?
12 R. Nous nous attendions à voir des spécialistes ou des experts juridiques,
13 des experts de droit pénal, qui auraient organisé le travail au sein du
14 ministère en Krajina.
15 Q. Est-ce que vous aviez présenté une demande orale ou écrite en la
16 matière au MUP de la Serbie ?
17 R. C'est la requête ou la demande que vous avez citée. Il s'agissait de la
18 promesse de Milosevic, qui avait dit qu'il fournirait des cadres pour le
19 secrétariat la façon dont je l'avais demandé, en fait, en fonction de la
20 façon dont je le lui avais expliqué. C'est le genre d'assistance à laquelle
21 nous nous attendions.
22 Q. Est-ce que vous avez dit qu'en avril vous êtes allé au centre de
23 Golubic et que vous avez vu là qu'il y avait un entraînement pour des
24 forces de police spéciale ?
25 R. J'ai vu cet entraînement en mai. En avril, j'ai vu Milan Martic. Il n'y
26 avait pas d'entraînement ou de formation; il y avait juste Milan Martic, le
27 capitaine Dragan et d'autres personnes. Ce centre n'organisait pas
28 d'entraînement à cette époque-là.
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1 Q. Je vous remercie, Monsieur Babic. C'est moi qui avais fait une erreur.
2 Vous m'avez, à juste titre, corrigé. Je vous remercie.
3 Donc, en mai vous êtes allé à Golubic, et vous y avez vu Nikola
4 Amanovic; est-ce exact ? C'est lui qui s'occupait de tous les dossiers
5 administratifs.
6 R. Oui, de l'administration, des dossiers. C'est exact.
7 Q. Vous nous avez expliqué qu'il s'agissait de groupes de personnes qui
8 arrivaient de différentes municipalités de la Krajina et qui avaient une
9 formation spéciale. C'est quelque chose qui vous a été montré à l'époque,
10 et vous nous avez dit que ces personnes faisaient l'objet d'un entraînement
11 ou d'une formation idéologique ?
12 R. Oui.
13 Q. Est-ce que vous avez expliqué que cette formation idéologique vous a
14 été présentée de la sorte, à savoir, les gens qui participaient à ce cours
15 spécial organisé pour la police, étaient formés non pas pour agir
16 conformément aux instructions des parties, mais seulement en fonction des
17 intérêts ou de l'intérêt de l'Etat, à savoir, leurs actions, leurs
18 agissements devaient être guidés par les intérêts de l'Etat ?
19 R. Oui, c'est exact.
20 Q. Est-ce que vous savez que lors du mois de mai 1991, deux référendums
21 ont été organisés ? Est-ce que vous pourriez nous dire brièvement de quoi
22 il s'agissait ?
23 R. Au cours du mois de mai, un référendum a été organisé en Croatie. Un
24 autre référendum a été organisé dans la SAO de la Krajina. Il s'agissait du
25 statut de la Krajina.
26 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Pourrions-nous, je vous prie, voir le
27 document 62. Il s'agit d'un document de
28 l'article 65 ter. Je souhaiterais que cela soit affiché à l'écran. Il
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1 s'agit d'une décision visant la nomination d'une commission centrale pour
2 l'organisation du référendum.
3 Q. Avant que ce document ne soit affiché sur l'écran, Monsieur Babic,
4 j'aimerais vous poser une question. Est-ce que vous vous souvenez si
5 l'assemblée de la SAO de la Krajina, lors de sa première session qui fut
6 organisée le 30 avril 1991, avait adopté une décision relative à la
7 nomination d'une commission centrale ? Cela se trouve à l'écran maintenant.
8 R. Oui.
9 Q. Il s'agit de "la Commission centrale responsable de l'organisation du
10 référendum sur le territoire de la SAO de la Krajina pour l'annexion de la
11 SAO de la Krajina à la République de la Serbie, pour faire en sorte que la
12 Krajina reste en Yougoslavie avec la Serbie, le Monténégro et tous les
13 autres qui souhaitent conserver ou préserver la Yougoslavie." Est-ce qu'il
14 s'agissait bien du nom de la commission, Monsieur Babic ?
15 R. Oui, oui. C'est le nom exact de la commission.
16 Q. Au-dessus de ce texte, là où il est indiqué "décision," est-ce qu'il
17 est indiqué sur quelle base cette décision est adoptée ? Est-ce qu'il y est
18 indiqué que cette décision est adoptée en conformité avec la loi relative
19 au référendum et aux autres formes d'expressions personnelles de points de
20 vue, ainsi qu'en fonction de la décision qui avait été prise pour organiser
21 un référendum visant l'annexion de la SAO de la Krajina à la République de
22 la Serbie ?
23 R. Oui.
24 Q. Suis-je dans l'erreur si je disais que la première décision du
25 référendum des Serbes en Krajina a été la décision d'annexer la SAO de la
26 Krajina à la République de la Serbie, et que cette décision a modifié cette
27 autre décision ?
28 R. Oui. Ou plutôt, pour ce qui est du référendum à proprement parler, ou
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1 la question posée lors du référendum a été modifiée.
2 Q. Ai-je raison d'avancer que la première question était censée être comme
3 suit : "Etes-vous pour l'annexion de la SAO de la Krajina à la République
4 de la Serbie le 30 avril ?" Voilà comment cela a été écrit : "Est-ce que
5 vous êtes pour l'annexion de la SAO de la Krajina à la République de la
6 Serbie et pour le fait que la Krajina reste au sein de la Yougoslavie avec
7 la Serbie, le Monténégro et les autres qui souhaitent préserver la
8 Yougoslavie ?"
9 R. Oui.
10 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] J'aimerais qu'un autre document soit
11 affiché sur l'écran. Le numéro de ce document est le document 958, de la
12 liste des documents 65 ter.
13 Q. Avant que ce document ne soit affiché sur notre écran, Monsieur Babic,
14 je souhaiterais vous dire qu'il s'agit d'un document en date du 8 mai 1991.
15 Il s'agit du procès-verbal de la réunion régionale du SDS, qui s'était
16 tenue ce jour-là à Smrtici. Est-ce que vous vous souvenez de la teneur de
17 ce document maintenant que je vous en ai rappelé son nom ?
18 R. Oui. Plus tard, j'ai entendu parler d'une réunion. Je ne sais pas de
19 qui, d'ailleurs.
20 Q. Merci, Monsieur Babic.
21 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons voir le reste du
22 texte, plus précisément le paragraphe 1 ?
23 Q. Qu'est-il indiqué dans ce paragraphe 1 ? Que cette réunion à Smrtici a
24 été ouverte par Dzakula, qu'il a donné la parole à Dusan Ecimovic qui a dit
25 qu'ils s'étaient rendus à Belgrade, et qu'ils avaient vu Raskovic et
26 Milosevic, qu'avec Dusan Pekic, ils ont participé à une réunion des partis
27 de l'opposition non parlementaires, et que pour ce qui est des discussions
28 avec Milosevic, Milosevic était courroucé vis-à-vis de la Krajina, qui
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1 avait pris une décision sans le consulter. Il avait suggéré que si
2 effectivement un référendum était organisé le 12 mai, sur le bulletin, il
3 fallait que soit écrit : "Pour rester en Yougoslavie et non pas en Serbie."
4 Est-ce que c'est ce qui est indiqué dans ce premier paragraphe ?
5 R. Oui, mais ce n'est pas un document qui émane de l'organisation où je me
6 trouvais. Mais effectivement, c'est bien ce qui est écrit là.
7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic, avant que nous
8 n'oublions, j'aimerais vous poser une question. Ces deux documents auxquels
9 vous avez fait référence, est-ce qu'ils ont déjà une cote ? Est-ce qu'une
10 cote leur a déjà été attribuée en tant que pièce à conviction ?
11 [Le conseil de la Défense se concerte]
12 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, le premier
13 document est déjà versé au dossier, alors que l'autre document est un
14 document que je souhaiterais verser au dossier. Je souhaiterais que ce soit
15 une pièce à conviction de la Défense. Pensez-vous que je doive le faire de
16 suite ? Je pensais, dans un premier temps, qu'il fallait que je présente la
17 teneur du document au témoin. Il s'agit d'un procès-verbal d'une réunion
18 qui a eu lieu à Smrtici. Est-ce que cela pourrait être une pièce à
19 conviction de la Défense ?
20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous nous avez dit que le premier
21 document est déjà versé au dossier. On vient de me dire que le premier
22 document n'est pas une pièce à conviction, Maître Milovancevic.
23 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, alors mes
24 informations sont erronées. Le premier document, la décision relative à la
25 nomination d'une commission centrale, est-ce que ce document pourrait être
26 versé au dossier comme pièce à conviction de la Défense. Je vous remercie
27 vivement de votre aide, et je vous remercie de m'avoir mis en garde.
28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous en prie. Ce document, la
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1 décision relative au référendum sera versée au dossier. Quelle en sera la
2 cote ?
3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le document qui portera la cote
4 234, Monsieur le Président.
5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Maintenant, Maître
6 Milovancevic, pour ce qui est du document qui est affiché à l'écran,
7 souhaitez-vous également le verser au dossier ?
8 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je vous en
9 prie.
10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il sera versé au dossier. Nous allons
11 lui attribuer une cote.
12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction 235,
13 Monsieur le Président.
14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Poursuivez, Maître
15 Milovancevic.
16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir le
17 paragraphe II, en chiffres romains ?
18 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas saisi le numéro ERN du document.
19 Il s'agit de la deuxième page.
20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez entendu, Maître, ce qui
21 vient d'être dit ? Parce que les interprètes n'ont pas entendu tout ce que
22 vous avez dit.
23 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
24 Est-ce que nous pourrions avoir la page 2, et je souhaiterais que soit
25 affiché le tout début de la page 2.
26 Q. Monsieur Babic, nous avons le paragraphe II dans lequel il est indiqué
27 que Dzakula a fait état de la conversation avec Sloba et que son exigence
28 essentielle est que : Nous n'ayons plus de confrontations avec le MUP et
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1 qu'il faudrait laisser l'armée le faire et que l'armée peut s'occuper sans
2 aucun problème du NDH.
3 Au dernier alinéa du paragraphe II, il est dit : "Qu'il est d'accord pour
4 qu'il y ait des pourparlers avec la direction, parce qu'ainsi nous pourrons
5 comprendre exactement ce qu'il pense."
6 Est-ce que vous avez vu ce paragraphe numéro II, Monsieur Dzakula [sic] ?
7 R. Je suppose que vous me confondez avec M. Dzakula, mais --
8 Q. Je m'excuse, Monsieur Babic, c'est un lapsus de ma part. Je m'excuse.
9 R. Je n'ai plus sur l'écran ce dont vous venez de nous donner lecture.
10 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir à
11 nouveau le haut de la page 2 ? Est-ce que nous pourrions le voir sur
12 l'écran. Voilà, je vous remercie. Nous voyons ce paragraphe II, nous voyons
13 ce qui est écrit au paragraphe II.
14 Q. Est-ce que le texte auquel je viens de faire référence est écrit au
15 paragraphe II ?
16 R. Oui.
17 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Pour ce qui est du paragraphe III,
18 paragraphe III écrit en chiffre romain. Est-ce que nous pourrions voir
19 affiché ce paragraphe III à l'écran ?
20 Q. Il y est dit que : "Le référendum du 19 mai 1991 devrait faire l'objet
21 d'un boycott et pour ce qui est du référendum du 12 mai 1991, seulement à
22 Pakrac et à Okucani."
23 Est-ce c'est ce qui est écrit, Monsieur Babic, dans cette phrase ?
24 R. Oui.
25 Q. Ce référendum du 19 mai 1991, est-ce qu'il s'agit du référendum qui
26 avait été prévu par les dirigeants croates pour l'indépendance de la
27 Croatie, alors que l'autre est le référendum serbe dont vous avez parlé ?
28 R. Oui. Le premier, c'est le référendum croate, le deuxième, c'est le
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1 serbe.
2 Q. Juste en dessous de cette phrase, vous avez l'alinéa suivant et voilà
3 ce qu'il est dit : "Je suggère que nous essayons de persuader Knin et Babic
4 afin de surseoir à l'organisation du référendum du 12 mai à cause de la
5 situation politique, parce que certains vont voter d'une certaine façon,
6 d'autres vont voter d'une autre façon, d'autres vont encore d'une autre
7 façon, ce qui sera la pire des possibilités." Si nous sautons deux phrases,
8 nous voyons qu'il est écrit : "Il y a encore de nombreuses ambiguïtés. Que
9 se passera-t-il si Knin continue à soutenir la formule 'en faveur de la
10 Serbie' alors que le reste souhaite voir écrit 'en faveur de la
11 Yougoslavie' ? Il y a encore un certain désaccord qui persiste. Après ceci,
12 Sasic a fourni une explication extrêmement détaillée et une explication qui
13 fût très professionnelle. Il a expliqué pourquoi ma proposition qui
14 consistait à déployer des efforts pour différer le référendum -- ou plutôt
15 et je me reprends. Pour ce qui est de ma proposition de déployer des
16 efforts pour annuler le référendum, qui n'a aucune base juridique, la
17 majorité des Serbes resteraient à l'extérieur de la Krajina, et cela serait
18 l'équivalent d'un couteau qui serait planté dans les flancs de la Serbie."
19 Est-ce qu'il s'agit du texte du paragraphe III, Monsieur Babic ?
20 R. Oui.
21 Q. Les participants à cette réunion qui eut lieu à Smrtici le 8 mai, est-
22 ce qu'ils faisaient référence au référendum et à la formule du référendum ?
23 Quelle aurait été la question pour les Serbes ? Est-ce que vous êtes en
24 faveur de rester en Yougoslavie ou est-ce que vous souhaitez être annexés à
25 la Serbie ? C'était ce dilemme auquel on faisait référence ?
26 R. C'est la première fois que je lis cela, alors bien entendu, sur la base
27 de ces deux phrases, je peux tout à fait envisager des hypothèses, mais il
28 s'agit ici de l'initiative relative à la question du référendum à Knin et à
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1 d'autres initiatives que d'autres avaient. Si j'ai bien compris ce qui
2 était entendu. Il s'agit d'un comité régional du SDS de la Slavonie, non
3 pas de la Krajina.
4 Q. Au début, au début de ce document, qu'est-ce qu'il est indiqué pour les
5 participants de la réunion; à savoir que le président de la Serbie,
6 Milosevic, est partisan de la question suivante : est-ce que vous êtes en
7 faveur de rester au sein de la Yougoslavie par opposition à : êtes-vous
8 pour l'annexion à la Serbie ?
9 R. Je m'excuse, quelle est votre question ? Qu'est-ce que vous voulez
10 savoir ? Si cela est écrit dans ce texte ou non ?
11 Q. Oui, oui.
12 R. Je ne vois plus le texte maintenant.
13 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir à
14 nouveau le début du texte ou le haut de la page première ? Est-ce que cette
15 page première pourrait être affichée à nouveau sur l'écran ? Est-ce que
16 vous pourriez le faire remonter un peu pour que nous puissions voir le
17 premier paragraphe du texte ? C'est exact. Voilà, très bien.
18 Q. Au deuxième paragraphe, est-ce qu'il est indiqué que d'après Milosevic
19 sur le bulletin il faudrait que l'on ait "en faveur de rester au sein de la
20 Yougoslavie," et non pas "en faveur d'être annexé à la Serbie" ?
21 R. Oui, c'est exact.
22 Q. Est-ce que le référendum a été organisé en Krajina le 12 mai 1991,
23 Monsieur Babic ?
24 R. Oui. Dans la SAO de la Krajina ainsi qu'à Pakrac, la commission ou le
25 comité du référendum n'a pas accepté le référendum de Pakrac comme un
26 référendum. Il n'a pas été organisé par la municipalité, donc cela a été
27 considéré comme une manifestation des points de vue de la population; alors
28 que le référendum en Krajina a été organisé sur la base de la législation
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1 en vigueur.
2 Q. Pour ce qui est de la question posée par le référendum, qu'est-ce qui
3 était indiqué : "Etes-vous pour l'annexion de la Krajina à la Serbie ou
4 pour le fait que la Krajina doit rester au sein de la Yougoslavie pour ceux
5 qui souhaitent la préserver ?" Nous l'avons vu cela dans le document un peu
6 plus tôt.
7 R. Oui. C'est une version légèrement abrégée de ce que vous venez juste de
8 dire.
9 Q. Est-ce que cela signifie que les dirigeants de la Krajina n'ont pas agi
10 conformément à la proposition du président Milosevic, pour ce qui est de la
11 question qui devait être : "Etes-vous pour le maintient en Yougoslavie ?"
12 mais que cette question beaucoup plus générale a été formulée ?
13 R. Cette question a été formulée après l'intervention de Milosevic. La
14 première question a été : "Etes-vous pour le fait que la SAO de la Krajina
15 doit se rallier à la Serbie ?" Après l'intervention de Milosevic, la
16 question est devenue beaucoup plus générale.
17 Q. Monsieur Babic, nous avons vu la décision prise par la commission
18 centrale pour l'organisation du référendum, et cela a été adopté le 30
19 avril 1991. Cette réunion de Smrtici a été organisée le 8 mai 1991, huit
20 jours après cela, et les participants de la réunion ont indiqué que
21 Milosevic voulait que la question soit : "Est-ce que vous souhaitez rester
22 en Yougoslavie ?" et non pas la formule qui avait été formulée ici. Est-ce
23 que vous pouvez nous fournir une explication à ce sujet ?
24 R. Je ne sais pas de quoi ils ont parlé, de quoi ils ont discuté avec
25 Milosevic en Slavonie. Je vous ai parlé du point de vue de Milosevic. Il
26 était vigoureusement contre l'idée de l'annexion de la Krajina à la Serbie.
27 D'ailleurs, il m'a même menacé. Il m'a dit que cela ne devait pas être fait
28 de cette façon et que le lien avec la Serbie ne devait pas être présenté de
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1 cette façon. Il disait que cela devait être présenté, qu'il fallait
2 demander si les gens souhaitaient rester au sein de la Yougoslavie. J'avais
3 présenté les choses de cette façon pour expliquer précisément à l'homme de
4 la rue quel était son point de vue parce qu'il déclarait une chose en
5 public, et il faisait autre chose en privé, de façon dissimulée. Je l'ai
6 fait ceci pour le forcer à expliquer publiquement si la Krajina devait
7 rester au sein de la Croatie, et essayer de trouver une solution au sein de
8 la Croatie ou si la Krajina devait faire partie de la Serbie, et avec les
9 autres qui souhaitaient rester en Yougoslavie. Je voulais qu'il explique
10 cela en public, parce qu'à moi il m'expliquait que la Krajina ou le
11 territoire habité par les Serbes devait rester avec la Serbie, le
12 Monténégro en Yougoslavie, alors qu'en même temps, parallèlement il
13 négociait avec Tudjman pour donner à la Croatie, la Krajina, une partie de
14 la Bosnie.
15 J'ai appris tout cela lors de la réunion avec Milosevic, et après la
16 réunion entre Milosevic et Tudjman à Karadjordjevic, il y a eu cette
17 provocation pour faire en sorte qu'il expose au public serbe son point de
18 vue.
19 Q. Merci, Monsieur Babic, je comprends. Et le référendum, est-ce qu'il y a
20 eu un référendum organisé en Croatie le 19 mai 1991 et quel fut le résultat
21 de ce référendum ?
22 R. La Croatie s'est massivement exprimée en faveur d'une Croatie
23 indépendante.
24 Q. Les dirigeants de la Croatie et de la Slovénie, est-ce que le 25 juin
25 1991, est-ce qu'ils n'ont pas adopté une décision relative par rapport à la
26 Yougoslavie ?
27 R. Oui, je pense que cela fut appelé la déclaration de l'indépendance ou
28 quelque chose de ce style-là.
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1 Q. Est-ce que nous pouvons dire que les déclarations d'indépendance
2 représentaient des actes de sécession de la part de ces deux républiques,
3 de la République fédérale de Yougoslavie ?
4 R. Sécession ou fin d'association, cela dépendait de la façon dont on
5 interprétait et de qui interprétait cela.
6 Q. Est-ce que vous savez que la cour constitutionnelle fédérale de la
7 Yougoslavie, sur la demande du conseil exécutif fédéral a déclaré que ces
8 actes de la Slovénie et de la Croatie étaient non constitutionnels ?
9 R. Oui, je ne connais pas tous les détails, mais je sais qu'il y a eu une
10 intervention en ce sens.
11 Q. Est-ce que vous savez si cette décision de la cour constitutionnelle de
12 la Yougoslavie est relative au manque de constitutionalité des actes de
13 sécession a été donné aux autorités européennes et à Lord Carrington ?
14 R. Non, je ne le sais pas.
15 Q. Monsieur Babic, est-ce que vous savez ou plutôt Monsieur Babic, savez-
16 vous qui assumait la présidence de la Yougoslavie en mai et en juin 1991.
17 Je vais vous poser la question suivante : Pour Slovénie, Drnovsek, pour la
18 Croatie Mesic, pour la Macédoine Tupurkovski, pour la Serbie Jovic, et
19 Bogic Bogicevic pour la Bosnie-Herzégovine, et pour le Monténégro c'était
20 Branko Kostic.
21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic, non je vois, je
22 m'excuse. Je vois que le problème a été réglé maintenant.
23 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]
24 Q. Les représentants que j'ai mentionnés, est-ce qu'ils assumaient la
25 présidence de la Yougoslavie en mai, juin et juillet
26 1991 ?
27 R. Je ne sais pas quand est-ce que Branko Kostic a fait partie de cet
28 organe, probablement en mai. Il y a eu un changement après le mois de mars.
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1 Q. Est-il exact de dire qu'à l'époque le président du conseil exécutif
2 fédéral était Ante Markovic de la Croatie ?
3 R. Oui.
4 Q. Savez-vous que le secrétariat fédéral pour la Défense nationale, Veljko
5 Kadijevic, était également un cadre de la Croatie ?
6 R. Oui, ou plutôt je sais qu'il était né à Imotski. C'est un serbe de
7 Croatie.
8 Q. Savez-vous qui était le secrétaire fédéral pour les Affaires
9 extérieures dans le gouvernement d'Ante Markovic ?
10 R. Loncar.
11 Q. Est-ce qu'il s'agit de Budimir Loncar ?
12 R. Oui.
13 Q. Un cadre de la Croatie qui était le secrétaire fédéral pour les
14 Affaires étrangères ?
15 R. Oui.
16 Q. Est-ce que Zdravko Mustac était chef des services de la Sûreté ? Il
17 était également de la Croatie, est-ce exact ?
18 R. Oui.
19 Q. Est-ce que vous connaissez le problème relatif à l'élection de Stjepan
20 Mesic au poste de président de la présidence de la Yougoslavie en mai et
21 juin 1991 ?
22 R. Oui.
23 Q. Est-il vrai qu'après le dictat de l'Union européenne, et après que
24 trois ministres dont M. Van den Broek et deux autres ministres de l'Union
25 européenne, Stjepan Mesic a été élu président de la présidence de la
26 Yougoslavie, ce qui fait que le président, il était président de l'Etat au
27 moment où la Croatie qu'il représentait avait déjà proclamé sa sécession ?
28 R. Il y a eu des médiations. Vous avez utilisé le terme "dictat" mais je
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1 sais qu'il y a eu des médiations organisées pour que Mesic assume le poste
2 de président de la présidence auquel il avait le droit du fait du roulement
3 et pour que la Croatie et la Slovénie sursoient à la mise en application de
4 leur indépendance ou à l'avènement de leur indépendance pour une période de
5 trois mois, et cette période de trois mois a été utilisée pour que, lors
6 des négociations, la crise soit résolue.
7 Q. Monsieur Babic, ai-je raison de dire qu'il s'agit de deux choses
8 différentes. Dans un premier temps, nous avons l'élection de Mesic au poste
9 de chef d'Etat. Il a été élu après quelques problèmes, alors qu'il y a eu
10 un autre problème tout à fait différent. Il s'agissait de la Communauté
11 européenne qui était intermédiaire pour la résolution de la crise
12 yougoslave. Il y a eu le mémorandum de Brioni le 7 juillet 1991 ?
13 R. Je dis que cela a été réglé en même temps parce que la crise relative à
14 l'élection de Mesic a commencé en mai et en juin et en juillet cela a été
15 réglé avec l'aide des médiateurs européens.
16 Q. Le gouvernement fédéral, dirigé par Ante Markovic, et je précise ceci,
17 c'est un cadre de Croatie, ce n'est qu'avec cette représentation au niveau
18 ethnique, c'est important d'en tenir compte. C'est un fait important.
19 Savez-vous en réalité que le gouvernement fédéral a envoyé 2 000 soldats en
20 Slovénie après que la Slovénie ait fait sécession et après qu'elle ait
21 occupé les frontières de l'Etat de la Yougoslavie, au début du mois de
22 juillet.
23 R. Je ne peux pas vous dire si c'était au début du mois de juillet, mais
24 la JNA est intervenue en Slovénie pour reprendre le contrôle des frontières
25 de l'Etat ?
26 R. Oui.
27 Q. Monsieur Babic, nous allons poursuivre votre contre-interrogatoire et
28 nous allons vous montrer un document qui montre que cette décision a été
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1 adoptée par le gouvernement. Je ne souhaite pas y consacrer trop de temps
2 maintenant.
3 Savez-vous qu'il y a eu une attaque en Slovénie, et que ceci a été
4 organisé par la Défense territoriale slovène, en somme quasiment la
5 nouvelle armée slovène, attaque lancée contre la JNA et les soldats de la
6 JNA, qui ont été désarmés et tués très brutalement ?
7 R. Je sais qu'il y a eu une guerre de très courte durée en Slovénie.
8 Q. Est-ce que vous savez quelque chose à propos de la décision prise par
9 la présidence de la Yougoslavie portant sur le retrait temporaire de la JNA
10 de la Slovénie jusqu'à ce qu'une solution pacifique soit trouvée à la crise
11 politique yougoslave ?
12 R. Oui.
13 Q. Un peu plus tôt, vous avez parlé de la médiation de la Communauté
14 européenne. Encore une fois, je vous repose la question. Est-il exact de
15 dire que grâce à la médiation de la Communauté européenne, un accord a été
16 conclu entre la Yougoslavie et tous les participants de cette entité
17 yougoslave avec les membres de la Communauté européenne, un accord qui
18 stipulait que les décisions sur l'indépendance de la Slovénie et de la
19 Croatie, décisions sur l'indépendance et la sécession devaient être
20 retardées pour une période de trois mois ?
21 R. Oui.
22 Q. Saviez-vous cela et avez-vous pris part aux négociations sur la
23 résolution du conflit en Yougoslavie ? Parce qu'il y a eu d'abord la
24 Slovénie, et ensuite il y a eu le conflit en Croatie. Avez-vous pris part
25 aux négociations sur le cessez-le-feu en Croatie ? Est-ce que vous ave pris
26 part aux négociations qui ont abouti à un accord politique ?
27 R. Oui.
28 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Pourriez-vous regarder sur l'écran un
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1 document 65 ter, qui porte le numéro 1 226 ? Il s'agit d'une lettre datée
2 du 5 septembre 1991, venant du gouvernement de la SAO de la Krajina et
3 envoyée à la Conférence de Paix de la Yougoslavie à La Haye ?
4 Q. Cette lettre se trouve à l'écran maintenant. Est-ce que vous voulez
5 bien regarder l'entête de cette lettre ? S'agit-il bien d'une lettre
6 envoyée par le gouvernement à la Conférence de Paix sur la Yougoslavie, et
7 est-ce qu'on peut y lire en haut à gauche que cette lettre a été rédigée le
8 5 septembre 1991 et était adressée à la Conférence de Paix sur la
9 Yougoslavie, et que ces lettres qui se trouvent en haut à droite --
10 veuillez dérouler le texte un petit peu pour qu'on puisse voir le haut --
11 ou remonter dans le texte. On peut voir que ceci a été envoyé aux membres -
12 - veuillez remonter, s'il vous plaît -- et que cette lettre a été envoyée
13 aux membres de la présidence de la Yougoslavie et membres des différents
14 cabinets.
15 R. Oui. C'est exact. C'est en tout cas ce qu'on peut y lire.
16 Q. Veuillez vous reporter à la page 7 de ce document, où on peut voir la
17 signature et le cachet de la personne qui a signé ce document. S'agit-il
18 bien du cachet du gouvernement de la Krajina ? Et à côté du cachet ne lit-
19 on pas : "Président du gouvernement de la SAO de la Krajina, Dr Milan
20 Babic" ? C'est bien votre signature, n'est-ce pas ?
21 R. Oui.
22 Q. Veuillez vous reporter à la page suivante, la page 8 de ce même
23 document, s'il vous plaît. Est-ce qu'on ne peut pas lire ici que ce
24 document a été remis aux Nations Unies en regard du point numéro 1, au
25 Conseil des ministres; en regard du point numéro 2; en regard du point
26 numéro 3, au parlement de la Communauté européenne; en regard du point
27 numéro 4, au Haut-commissariat de l'OSCE; en regard du point 5, à la
28 présidence de la RSFY; en regard du point 6, au conseil exécutif fédéral;
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1 en regard du point 7, à l'assemblée nationale de la République de Serbie;
2 en regard du point 8, au président de la République de la Serbie; et en
3 regard du 9, au gouvernement de la République de Serbie; est-ce exact ?
4 Est-ce bien ce qu'on peut lire sur la page 8, Monsieur Babic ?
5 R. Oui, c'est exact.
6 Q. Pouvez-vous --
7 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je souhaite verser ce document au
8 dossier comme pièce de la Défense, s'il vous plaît. Veuillez lui attribuer
9 un numéro de cote, s'il vous plaît.
10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pardonnez-moi. Mon micro n'était pas
11 allumé.
12 Ce document est versé au dossier. Veuillez lui donner un numéro de cote,
13 s'il vous plaît.
14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document aura la cote numéro 236,
15 Madame, Messieurs les Juges.
16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.
17 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]
18 Q. Monsieur Babic, si vous regardez le premier paragraphe de la première
19 page de ce document - veuillez le placer ou le montrer à l'écran, s'il vous
20 plaît - veuillez regarder le premier paragraphe. Est-ce qu'on ne peut pas y
21 lire que : "Le gouvernement de la Région autonome serbe de la Krajina a
22 tenu une réunion le 5 septembre 1991 pour parler de la déclaration de la
23 Yougoslavie, et a organisé une réunion extraordinaire des ministres sur la
24 coopération politique avec l'Europe à Bruxelles le 27 août 1991, un accord
25 sur le cessez-le-feu et un mémorandum de la mission des observateurs, et
26 que par rapport à ces points évoqués, dans ces trois documents, on peut
27 constater que les positions suivantes ont été prises." Est-ce que ce
28 premier paragraphe ne dit-il pas ce que je viens de dire ?
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1 R. Oui, c'est exact.
2 Q. Ce paragraphe numéro 2 ne stipule-t-il pas que : "Le peuple serbe de la
3 SAO de la Krajina, qui englobe le territoire historique et ethnique du
4 peuple serbe à travers les institutions légitimes et légales et ses
5 différents organes, dès le début de leur combat pour la liberté et pour la
6 dignité humaine et la dignité de la nation, ils ont été attaqués par les
7 autorités croates néofascistes, et se servent d'un moyen démocratique, un
8 référendum, pour faire valoir leur droit à l'autodétermination. Le peuple
9 serbe a décidé de façon irrévocablement de ne pas vivre dans un état
10 croate. Ce premier paragraphe dit bien ce que je viens de lire, n'est-ce
11 pas, Monsieur Babic ?
12 R. Oui.
13 Q. Et la dernière phrase au niveau du deuxième paragraphe, tout à la fin.
14 Ce texte dit bien ce qui suit : "Le peuple serbe de la Krajina a décidé
15 d'inscrire sa souveraineté au sein d'un état et dans d'autres régions des
16 Balkans où vit le peuple serbe également."
17 R. Oui.
18 Q. Pourriez-vous regarder la page 2, s'il vous plaît ? Nous allons
19 regarder le paragraphe 1 ici. Que dit ce premier paragraphe ? "Que toutes
20 les décisions démocratiques qui ont été prises émanaient d'une volonté
21 démocratique du peuple serbe de Krajina, ce qui leur a été refusé par les
22 autorités néofascistes croates, qui usaient d'arguments de violence et se
23 servaient des armes, et malheureusement certains membres de la Communauté
24 européenne tout d'abord ont compris qu'il s'agissait d'un appui tacite et
25 plus tard, il s'agissait même d'un appui tout à fait clair en faveur du
26 régime croate néofasciste." Est-ce que bien ce qu'on peut lire, Monsieur
27 Babic ?
28 R. Oui.
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1 Q. C'est le texte que vous avez rédigé avec les membres de votre
2 gouvernement ?
3 R. Oui.
4 Q. A la page 2, je crois à la page 2, 829 en réalité, au niveau du
5 deuxième paragraphe, on peut lire que : "Les autorités croates néofascistes
6 sont, d'une certain façon, tout à fait semblables aux communistes du régime
7 totalitaire précédent, et en détruisant la Yougoslavie, ils voulaient nous
8 obliger à nous réconcilier avec la terreur ?"
9 Au niveau de la phrase suivante, la phrase suivante, vous dites que : "Dans
10 de telles circonstances, le fait de nous avoir refusé nos référendums, ce
11 qui était un droit qui était un droit ouvert à tous, nous avions le choix
12 de ne pas répondre aux armes par les armes. La nouvelle Croatie a attaqué
13 avec les armes nos droits et nos décisions avec l'intention de nous
14 obliger, autrement dit, en nous agressant pour empêcher le peuple serbe de
15 vivre de façon indépendante dans un état croate néofasciste, un état qui
16 nous rappelle tant cette époque génocidaire entre 1941 et 1945." Est-ce que
17 bien ce qu'on peut lire au niveau du deuxième paragraphe ?
18 R. Oui.
19 Q. Au niveau du troisième paragraphe, on peut lire que la Communauté
20 européenne - c'est bien ce que vous dites - en réalité, je ne cite pas une
21 phrase qui est assez longue. Je souhaite simplement vous signaler ou vous
22 parler du sens général de ce paragraphe.
23 La déclaration sur la Yougoslavie refusant au peuple serbe le droit à
24 l'autodétermination. Dans la déclaration sur la Yougoslavie, il est déclaré
25 que les pays membres de la Communauté européenne, je cite : "Souhaite
26 rappeler ceux qui sont responsables de la violence, leur rappeler leur
27 décision de n'avoir jamais reconnu les changements au niveau des
28 frontières, qui n'ont pas été réalisés par des moyens pacifiques ou par le
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1 biais d'accord."
2 A la page 3, après cela, vous, en tant que gouvernement de la Krajina, vous
3 attirez l'attention de la Communauté européenne sur le fait qu'il ne s'agit
4 pas de frontières étatiques ? C'est bien ce qui est dit dans ce texte ?
5 R. Oui.
6 Q. A la page 3, au paragraphe 3, vous dites qu'il est dit dans la
7 déclaration que je cite : "La politique tout à fait erronée, pratiquée par
8 des formations serbes irrégulières qui tentaient de résoudre des problèmes
9 qui ont tenté d'anticiper sur les problèmes en ayant recours à des moyens
10 militaires. Le gouvernement de la SAO de la Krajina n'accepte pas cette
11 appellation pour les raisons suivantes :
12 "1.Les forces armées serbes dans la SAO de la Krajina, qui se
13 composent de la police de la Krajina, la Défense territoriale de la
14 Krajina, sont des formations tout à fait légales et font partie d'un seul
15 et unique système de défense en Yougoslavie."
16 Est-ce bien ce qui est dit au niveau du paragraphe 1, Monsieur
17 Babic ?
18 R. Oui.
19 Q. Au paragraphe 2, on peut lire que : "Les forces armées serbes n'ont
20 aucune politique propre, mais ces dernières répondent à un programme de
21 politique générale mis en place par le gouvernement de la SAO de la Krajina
22 et les différents institutions et organes de la SAO de la Krajina. Le
23 gouvernement de la SAO de la Krajina se sert de ces forces armées que pour
24 défendre son territoire et ses frontières."
25 Est-ce bien ce qui est écrit à la fin de la page 3, Monsieur Babic ?
26 R. Oui.
27 Q. A la page 4, au point 3, vous dites, au milieu du paragraphe environ
28 que : "Le peuple serbe a décidé, par voie de plébiscite, de vivre à
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1 l'intérieur du même état avec les autres Serbes sur le territoire de la
2 Yougoslavie. C'est une toute autre question que de dire que ces décisions
3 sont contestées par une agression armée, ce qui n'était absolument pas
4 justifiée. Ceci a été mené par les autorités croates néofascistes.
5 L'évaluation qui est faite dans la déclaration en vertu de quoi certains
6 éléments de la JNA fournissent un appui incontesté aux Serbes, ne
7 correspond pas à la vérité. La vérité est que la JNA prend une part active
8 à la séparation des parties en conflit. En jouant ce rôle, la JNA se trouve
9 dans l'obligation de se défendre."
10 Est-ce bien ce qui est écrit sur cette page numéro 4, Monsieur Babic ?
11 R. Oui.
12 Q. Au niveau de l'avant-dernier paragraphe de cette même page numéro 4, ne
13 dites-vous pas : "Qui plus est, l'attitude prise par la Communauté
14 européenne de ne pas reconnaître les changements au niveau des frontières
15 par la force, représente un appui incontesté pour nous dans une situation
16 où les frontières, nouvellement établies entre la SAO de la Krajina et la
17 République de Croatie, est une frontière mise en place grâce au plébiscite.
18 Celle-ci a été attaquée par la Croatie fasciste."
19 Un peu plus loin, on peut lire au niveau du dernier
20 paragraphe : "Le gouvernement de la Krajina n'est pas d'accord avec le
21 terme utilisé pour décrire une partie du territoire de l'Etat yougoslave
22 dans les trois documents qui ont été examinés."
23 Le texte se poursuit et on reprend à la page numéro 5 : "Ce qu'était
24 appelée la République socialiste de Croatie correspond à ce qui est la
25 Région autonome serbe de la Krajina. C'est un sujet politique indépendant
26 et d'autres régions autonomes serbes de la République de Croatie." C'est
27 bien ce qui est écrit ici ?
28 R. Oui.
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1 Q. Un peu plus loin, à la page 5, en regard du numéro 832 - ce sont les
2 trois derniers chiffres que l'on peut lire ici - on peut lire que : "Le
3 gouvernement appuie le cessez-le-feu, conformément à toutes les
4 dispositions de l'accord sur le territoire où les combats ont eu lieu. Ceci
5 s'appellera la République de Croatie."
6 A la fin du deuxième paragraphe, à la page 5, vous dites que : "Le
7 gouvernement de la SAO de la Krajina est en faveur d'un accord de cessez-
8 le-feu, parce qu'il s'est servi des armes et du combat armé dans le seul
9 but de se défendre de l'agression croate. Deuxièmement, il estime, qu'en
10 principe, toutes les questions peuvent et doivent être résolues par des
11 moyens pacifiques uniquement, par des méthodes et des moyens pacifiques et
12 démocratiques."
13 Au niveau du paragraphe suivant, numéro 3 : "Par conséquent, le
14 gouvernement de la SAO de la Krajina demande que le gouvernement de la SAO
15 de la Krajina obtienne le statut de hôte, comme cela a été le cas ailleurs
16 en Yougoslavie. Le gouvernement de la SAO de la Krajina prévient tous les
17 éléments importants, qu'elle seule autorisera la présence des missions de
18 ses observateurs sur son territoire." C'est bien ce qui est écrit ici,
19 Monsieur Babic ?
20 R. Oui.
21 Q. A la fin de la page 5, à la fin de la phrase, est-ce qu'on ne peut pas
22 lire que : "Le gouvernement de la SAO de la Krajina n'accepte pas le
23 traitement tout à fait insoutenable du peuple serbe, puisque le peuple
24 serbe fait l'objet d'insultes en tant que minorité nationale. La Communauté
25 européenne est en faveur en partie de cela, et que les autorités croates
26 néofascistes sont soutenues par le Vatican" ? C'est bien ce qui est dit ici
27 à la page 5, Monsieur Babic ?
28 R. Oui.
Page 1851
1 Q. Ne peut-on pas lire à la page 6, au paragraphe 3 à partir du haut que :
2 "Le gouvernement de la SAO de la Krajina n'a rien contre la conférence de
3 paix, mais ce qu'elle n'approuve pas, c'est le fait que la SAO de la
4 Krajina n'est pas comprise, ou ne participe pas à la conférence de paix.
5 Ensuite, au niveau du dernier paragraphe, à la page 6, vous dites que le
6 gouvernement de la SAO de la Krajina, pour ce qui est de la position
7 adoptée par la Communauté européenne, avertit -- pardonnez-moi, ou prévient
8 que la conférence de paix sur la Yougoslavie ne doit pas tenir compte des
9 organes légitimes et légaux de la SAO de la Krajina, et prévient à la fois
10 la Communauté européenne et l'ensemble de la communauté internationale, sur
11 les éventuelles conséquences d'une telle position, parce qu'aucune décision
12 prise pas la conférence de paix sur la Yougoslavie ne sera exécutoire à
13 moins que la SAO de la Krajina ne participe pleinement, également, à cette
14 conférence."
15 C'est bien ce qu'on peut lire à la page 6 de ce document, Monsieur
16 Babic ?
17 R. Oui, mais personne n'en a tenu compte.
18 Q. Malheureusement pas. Passons à la page 7, si vous le voulez bien. Au
19 haut de la page, est-il bien dit : "Etant donné que cette question est, à
20 notre avis, importante pour la paix, la paix pour nous mais aussi la paix
21 en Yougoslavie et en Europe, nous prévenons les facteurs correspondants
22 tant en Europe qu'en Yougoslavie, de la nécessité de tenir compte de ce
23 fait juridique, politique et autres des plus élémentaires, s'agissant des
24 conceptions qui seront adoptées concernant le dénouement de la crise
25 politique et de la crise de l'Etat yougoslave, de même que du point de vue
26 de la cessation des conflits armés."
27 Vous y indiquez également que le gouvernement de la SAO de la Krajina ne
28 possède pas de mandat de la part du peuple serbe de la SAO de Krajina pour
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1 ce qui était de faire quelque concession que ce soit au détriment du peuple
2 qui lui a témoigné de sa confiance. Pour finir, au tout dernier paragraphe,
3 vous dites : "C'est la raison pour laquelle nous demandons à tous les
4 intervenants pertinents pour ce qui est du processus de prise de décisions
5 relatives à la paix, d'empêcher toute violence à l'égard du peuple serbe de
6 la SAO de la Krajina, exercée par les autorités fascistes croates, afin que
7 celle-ci ne soit pas remplacée par une autre sorte de violence, violence
8 qui annulerait la volonté démocratiquement exprimée par le peuple serbe
9 ainsi, par conséquent, son droit à l'autodétermination."
10 En dernière phrase, vous dites : "Aux yeux du peuple serbe, être libre,
11 signifie être souverain, et avoir la souveraineté, signifie avoir existé
12 dans une forme d'état autonome."
13 Est-ce que c'est bien ce qui est dit à la fin de ce texte, et est-ce
14 que c'est bien ce que vous avez signé ?
15 R. Oui, c'est ce que j'ai signé.
16 Q. Est-ce que vous avez communiqué ce texte aux Nations Unies et à toutes
17 ces institutions que vous citez ici, Conseil des ministres de la Communauté
18 européenne, parlement de la Communauté européenne au commissariat de la
19 CSCE ?
20 R. Oui, je le suppose.
21 Q. Vous l'avez communiqué à tout le monde.
22 R. Oui.
23 Q. Monsieur Babic, pouvez-vous nous expliquer où est la vérité maintenant
24 : ce que vous avez rédigé dans tant de détails sur cette page que vous avez
25 signée, que vous avez adressée à tant d'institutions internationales ou
26 est-ce que c'est ce que vous nous dites ici, ces derniers jours, et qui est
27 à l'opposé de ce qui est écrit ici ?
28 R. Ce document est de façon évidente rempli de phrases redondantes. Il
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1 s'agit d'un texte politiquement concentré où l'on réclame la reconnaissance
2 de la légitimité de ce gouvernement par la communauté internationale, à
3 savoir, la Commission européenne, à savoir, l'Union européenne, qui a
4 commencé à s'occuper de la solution de la crise yougoslave. C'est dans ce
5 contexte-là que cela a été rédigé, mais cela n'a pas été accepté. Cela a
6 été rédigé un peu avant l'arrivée de M. Henri Wijnaendts en guise de
7 préparatifs pour les négociations, mais cela n'a pas porté ses fruits. En
8 d'autres termes, il s'agit là d'un discours qui a été adapté à la situation
9 donnée, et qui se trouvait être exagéré.
10 Je répondrai à votre question en disant que cela a été exagéré.
11 Q. -- ce que vous avez rédigé à l'intention des Nations Unies, au Conseil
12 des ministres de la Communauté européenne, à l'intention du Parlement de la
13 Communauté européenne, au Haut-commissariat de la CSCE, à la présidence de
14 Yougoslavie ou est-ce ce que vous dites aujourd'hui dans votre témoignage,
15 tout à fait à l'opposé ? Où est la vérité, ici ou là-bas ?
16 R. Je vous dis ce que ce texte est. C'est quelque chose d'exagéré,
17 d'amplifié à l'excès.
18 Q. Monsieur Babic, veuillez me dire si ces instances de la communauté
19 internationale auxquelles vous vous êtes adressé, avaient ou pas des
20 raisons de vous croire ? Vous ont-elles cru ?
21 R. Elles ne m'ont pas cru à l'époque, parce que la situation était
22 différente, était autre.
23 Q. Encore une question si nous avons encore une minute. Vous étiez à
24 l'époque en liberté. Vous étiez premier ministre à l'époque. Vous étiez
25 ministre de la Défense à la fois. Vous étiez à l'époque président de
26 l'assemblée municipale de Knin. Vous étiez membre de comité principal du
27 SDS. A l'époque, vous étiez l'interlocuteur des observateurs
28 internationaux. Les avez-vous induit dans l'erreur, ou est-ce maintenant,
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1 en votre qualité d'homme placé en détention, que vous induisez dans
2 l'erreur les Juges de cette Chambre ? Vous avez évité de répondre à ma
3 question si je vous ai demandé ce qui est exact, ce qui est écrit ici ou ce
4 que vous êtes en train de nous communiquer à nous tous ici à présent ?
5 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite formuler
6 une objection concernant la forme de la question. Le document en question
7 est assez long. Il y est énuméré toute une série d'assertions. M.
8 Milovancevic les a parcourues en y consacrant beaucoup de temps. Poser une
9 question de façon aussi générale pour ce qui est de savoir si cela est
10 conforme à la vérité ou pas, j'estime, à mon avis, que le conseil de la
11 Défense pourrait avancer les allégations qui sont faites une par une pour
12 poser sa question, au fur et à mesure.
13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.
14 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je suggère que
15 nous mettions un terme à notre activité d'aujourd'hui, en raison de l'heure
16 qu'il est. Je m'adresserai demain à mon éminent confrère de l'Accusation
17 pour traiter des points au cas le cas, conformément à l'objection, suivant
18 les points que j'ai soulevés aujourd'hui, notamment. Merci.
19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Cela nous sera très utile, Monsieur
20 Milovancevic. Etant donné que vous avez donné lecture du document entier
21 pour les besoins du compte rendu d'audience, j'imagine que vous n'allez pas
22 demander son versement au dossier, ou alors, voulez-vous que nous le
23 fassions ?
24 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous remercie de m'avoir rappelé la
25 chose. Je demanderais à ce que ce document soit versé au dossier en guise
26 de document de la Défense. J'en ai donné lecture pour gagner du temps et
27 pour ne pas amener le témoin en position de lire lui-même. Ce qui est
28 importait pour moi, c'était de voir le témoin confirmer l'authenticité de
Page 1855
1 chacun des paragraphes. D'après ce que mes collègues de la Défense me font
2 savoir, c'est un document qui a déjà été versé au dossier.
3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Certainement. Pour être plus rapide,
4 si déjà vous avez l'intention de faire verser au dossier un document, il ne
5 sert à rien d'en donner lecture parce que cela nous faire perdre du temps,
6 Maître Milovancevic. Si un document, de votre côté, est destiné à être
7 versé au dossier, il n'est point nécessaire de nous en donner lecture. Je
8 vous suggère, qu'à l'avenir, de gagner du temps. Si vous avez l'intention
9 de demander le versement d'un document au dossier, posez les questions à
10 cet effet, ou alors, donnez-en lecture et évitez aux Juges le fardeau de la
11 lecture.
12 M. WHITING : [interprétation] Je sais que l'heure est tardive, mais il
13 convient de procéder à une rectification, page 97, ligne 24. Je n'ai pas
14 dit : "Plus conforme à la vérité," mais "plus fructueux."
15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, c'est ce qui m'a semblé entendre.
16 J'aimerais que cela soit noté au compte rendu d'audience. Remplacez un
17 terme par un autre.
18 Maître Milovancevic.
19 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je crois que cette situation ne
20 réapparaîtra plus à l'occasion du contre-interrogatoire. Comme il s'agit
21 d'un document très spécifique, la Défense a estimé qu'il était dans
22 l'intérêt des Juges de la Chambre de parcourir les différents paragraphes
23 dudit document avec le témoin, ou en présence du témoin. Merci.
24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Maître Milovancevic.
25 L'observation faite par les Juges de la Chambre est celle de dire que ce
26 n'est pas une situation si exceptionnelle que cela. C'est au contraire,
27 quelque chose qui est arrivé assez souvent. Dans l'intérêt de la rapidité
28 de notre fonctionnement, nous vous demanderons d'essayer de nous faire
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1 gagner du temps en faisant ce que nous avons l'intention de faire.
2 Nous allons lever l'audience, et nous allons reprendre demain après-midi
3 dans cette même salle d'audience.
4 --- L'audience est levée à 19 heures 06 et reprendra le vendredi 3 mars
5 2006, à 14 heures 15.
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