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1 Le mardi 11 juillet 2006
2 [Déclaration liminaire de la Défense]
3 [Audience publique]
4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.
6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour à tous.
7 Maître Milovancevic ?
8 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame
9 et Messieurs les Juges. Avant de commencer avec ma déclaration liminaire,
10 je voulais soulever un point très bref. La Défense a jusqu'à demain pour
11 présenter le rapport de son témoin expert militaire. Nous demandons une
12 prorogation de délai car nous n'avons pas vraiment eu le temps de lire ce
13 rapport d'expert qui est rédigé en langue serbe. Il est très long et
14 détaillé et en raison des obligations que nous avons eues cette semaine,
15 nous n'avons pas eu le temps de lire ce rapport et nous n'avons pas pu non
16 plus le faire traduire afin de le communiquer à la partie adverse. Par
17 conséquent, nous demandons à la Chambre l'autorisation de présenter ce
18 rapport après les vacances judiciaires. Les dispositions pertinentes du
19 Règlement peuvent ensuite s'appliquer comme il se doit.
20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Whiting, souhaitez-vous
21 répondre ?
22 M. WHITING : [interprétation] Je n'ai pas d'objection à soulever. Après la
23 déclaration liminaire, j'aurai toutefois quelques questions d'intendance à
24 soulever, mais je le ferai plus tard.
25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Whiting.
26 [La Chambre de première instance se concerte]
27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Milovancevic, votre
28 demande est accordée. Pour que les choses soient claires, pourriez-vous
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1 nous dire quand précisément après les vacances judiciaires vous envisagez
2 présenter ce rapport ? Pourriez-vous nous donner une date ?
3 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes
4 certains de pouvoir présenter ce rapport le 14 août au plus tard, juste
5 après les vacances judiciaires.
6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Maître Milovancevic,
7 le 14 août sera la date butoir.
8 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.
10 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] La Défense va présenter aujourd'hui sa
11 déclaration liminaire et présenter sa thèse concernant les questions de
12 faits et de droit énoncées dans l'acte d'accusation dressé contre l'accusé,
13 M. Milan Martic.
14 La Défense attirera l'attention de la Chambre sur les points clés qui
15 démontreront que les accusations portées dans l'acte d'accusation sont
16 infondées. Nous sommes en présence d'une situation très complexe au plan
17 militaire pour ce qui est de ce qui se passait au sein de l'Etat et entre
18 les Etats pendant cinq ans sur le territoire d'un pays, sur le territoire
19 de l'ex-Yougoslavie. L'Accusation a choisi une approche sélective des faits
20 et des événements, les a sortis de leur contexte et n'a pas établi de liens
21 de cause à effet.
22 D'emblée, la Défense souhaite insister sur le fait que l'Accusation ne
23 parle que du tiers du territoire de l'ex-République socialiste de Croatie
24 qui, à l'époque, était habitée de Serbes, et de régions importantes de la
25 Bosnie-Herzégovine dans le contexte de la crise yougoslave. Ceci est
26 attesté par tous les documents émanant des Nations Unies. Toutefois,
27 l'Accusation considère que ce tiers du territoire de la Croatie et ces
28 régions importantes de la Bosnie-Herzégovine s'inscrivent dans un contexte
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1 isolé du reste de ce qui se passait ailleurs en Yougoslavie. L'Accusation
2 essaie de fonder sa thèse concernant une soi-disant entreprise criminelle
3 commune selon la base de déclarations de témoins et de documents.
4 La Défense va présenter un tableau chronologique de l'ensemble des
5 événements qui se sont déroulés au cours de cette période et sur ce
6 territoire. Ce qui est caractéristique de la période couverte par l'acte
7 d'accusation et la période située entre 1991 et 1995 c'est l'apparition de
8 certains partis politiques sur le territoire de l'ex-Yougoslavie, puis sur
9 l'unité fédérale de la Croatie. Au début de l'année 1989, en Croatie,
10 l'Union démocratique Croate a vu le jour. A sa tête se trouvait Franjo
11 Tudjman. Jusque-là, cela n'avait pas été un parti politique et il n'aurait
12 pas pu être créé officiellement en vertu des règlements existants. Cette
13 organisation n'est devenue un parti que plus tard conformément aux
14 règlements en vigueur. Un an plus tard sur le territoire de la SAO de
15 Krajina en Croatie, le Parti démocratique serbe, lui aussi a été
16 officiellement constitué. En conséquence, au début de l'année 1990, de
17 nouveaux partis politiques sont apparus sur le territoire de l'ex-
18 République yougoslave de Croatie et ce alors que la crise yougoslave et son
19 importance au plan international en vertu du droit international étaient à
20 son paroxysme.
21 L'Accusation fait valoir que l'apparition de certains partis
22 nationalistes a donné lieu à tous les méfaits mentionnés dans l'acte
23 d'accusation. Cependant, l'apparition de ces nouveaux partis politiques ne
24 constituait qu'une petite partie de la mosaïque politique de l'époque et
25 des tendances et des aspirations qui se faisaient le jour en Yougoslavie à
26 l'époque. En 1990, comme il s'était passé 50 ans plus tôt, il n'y avait
27 qu'un seul Etat, la République socialiste fédérale de Yougoslavie. Je
28 l'appellerai la Yougoslavie. Par ce terme j'entends l'ensemble du
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1 territoire de cet Etat. En 1991 jusqu'au milieu de l'année 1992, selon le
2 droit international, il ne faisait aucun doute qu'il n'existait qu'un seul
3 Etat officiellement reconnu, la Yougoslavie. La Yougoslavie était l'un des
4 45 pays membres des Nations Unies. En 1990 et en 1991 la Yougoslavie était
5 membre des Nations Unies. Son comportement et ses actes à tous les égards
6 étaient conformes au principe établi par l'OSCE et c'était un membre
7 respecté de la communauté internationale. Si bien que ni en 1990, ni en
8 1991 les unités fédérales de la Yougoslavie n'étaient pas des Etats
9 internationalement reconnus. Il s'agissait d'une unité administrative qui
10 se trouvait dans la fédération yougoslave. Il ne s'agissait pas d'entités
11 juridiques au plan international.
12 Pourquoi la Défense soulève t-elle ce point ? Parce que les
13 événements qui se sont produits et qui ont mené à la guerre et au désastre
14 peuvent être décrits en quelques mots seulement. Certaines unités fédérales
15 yougoslaves surtout la Croatie et la Slovénie ont voulu quitter la
16 Yougoslavie en enfreignant les dispositions de la constitution yougoslave
17 et du droit international. Ces unités fédérales voulaient agir ainsi à tout
18 prix. Ce processus de dissolution de l'Etat yougoslave a commencé lorsque
19 ces demandes séparatistes ont été présentées par la Croatie au début de
20 l'année 1990. Au niveau de l'Etat yougoslave et de la fédération, des
21 négociations étaient tenues à l'échelon de la présidence afin d'essayer de
22 trouver une solution à ces problèmes. Personne parmi les dirigeants de la
23 fédération de la Yougoslavie ne souhaitait la guerre. Personne ne se
24 préparait pour cette guerre, sinon il n'y aurait pas eu de pourparlers, ni
25 de négociations.
26 Il faut tenir compte de tout cela. Jusqu'à l'année 1990 sur
27 l'ensemble du territoire de l'ex-Yougoslavie, la paix régnait. Tous les
28 membres de la fédération yougoslave étaient égaux pour ce qui est de leur
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1 statut et de leur droit. Tous les membres de la fédération yougoslave
2 conformément à la constitution yougoslave et à leur propre constitution
3 participaient à niveau égal au fonctionnement de la fédération yougoslave.
4 Monsieur le Président, Madame et Messieurs les Juges, vous avez
5 entendu à de nombreuses reprises des éléments concernant la présidence
6 yougoslave. Il s'agissait d'une présidence collective. Il est difficile de
7 trouver un autre exemple de ce genre dans le monde, il s'agit, bien
8 entendu, d'un exemple positif, d'une exception tout à fait remarquable. Il
9 s'agissait du résultat des tentatives faites par la constitution yougoslave
10 et les constitutions des différentes républiques de Yougoslavie afin que
11 toutes celles-ci soient représentées à la tête de l'Etat. Par conséquent,
12 en vertu de la constitution en vigueur, chaque république présentait un
13 représentant. Donc les six républiques et les deux provinces autonomes de
14 Serbie en vertu de la constitution yougoslave présentaient huit
15 représentants. Ces huit représentants se trouvaient à la tête de l'Etat
16 pour assurer l'égalité parfaite. Lorsque des décisions devaient être prises
17 au niveau de l'Etat, ces membres de la présidence collective changeaient
18 chaque année. Selon un système de rotation. Le représentant slovène était à
19 la tête de l'Etat pendant un an, puis celui de la Macédoine, et cetera. Je
20 ne mentionnerai pas toutes les unités fédérales.
21 La constitution de la Yougoslavie prévoyait également la possibilité
22 que les unités fédérales deviennent indépendantes, qu'elles se séparent de
23 la Yougoslavie. Les unités fédérales avaient un statut très favorable.
24 Cette possibilité toutefois dépendait du respect de la procédure prévue par
25 la constitution, laquelle demandait l'aval des autres membres. Il est aisé
26 de dire quelle a été la réponse des dirigeants sécessionnistes de la de
27 Croatie et de la Slovénie, pour eux, c'était un obstacle. Mais ils ne
28 pouvaient pas y avoir d'ordre démocratique dans cet Etat si l'un des six
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1 membres de la fédération pouvait faire ce qu'il voulait, ce que bon lui
2 semblait. La constitution yougoslave prévoyait le droit à
3 l'autodétermination même à la sécession, mais tout cela devait se faire par
4 une décision conjointe de toutes les unités fédérales. En 1990, les
5 dirigeants de Croatie et de Slovénie ne voulaient pas obtenir cet aval. Ils
6 jugeaient cela inacceptable. Les dirigeants de Croatie et de Slovénie
7 voulaient l'indépendance tout de suite et à tout prix, même si cela devait
8 conduire à la guerre.
9 À l'époque, l'homme politique le plus en vue en Croatie, M. Franjo
10 Tudjman, président de la Croatie et président du HDZ, le parti le plus
11 puissant de Croatie, a annoncé publiquement et sans équivoque dès le mois
12 de mai 1992, à l'occasion d'un rassemblement au centre de Zagreb qui a
13 réuni plus de 100 000 personnes que : "L'indépendance ne pouvait être
14 obtenue que par la guerre. Il n'y aurait pas eu de guerre si nous ne
15 l'avions pas souhaitée." C'est ce qu'il a dit. Il a ajouté en mai 1992,
16 qu'ils avaient mené des négociations avec les autres républiques
17 yougoslaves afin de trouver une éventuelle solution. Mais il a annoncé
18 qu'ils se préparaient à la guerre. Comment se préparaient-ils à la guerre ?
19 La Défense est convaincue que la Chambre devra trouver une réponse juste à
20 cette question afin de parvenir à un verdict juste lui aussi.
21 La Chambre dispose déjà de quelques éléments de réponse suite à la
22 présentation des moyens de l'Accusation. Le témoin expert de l'Accusation,
23 M. Theunens, lors de son contre-interrogatoire, a confirmé que les
24 dirigeants de Croatie ont demandé à la population croate de se rebeller. Un
25 autre témoin à charge a confirmé qu'il s'agissait d'une rébellion armée.
26 Nombre d'éléments de preuve présentés lors de la présentation des moyens à
27 charge indiquent qu'il y a eu des activités armées, une rébellion armée. Le
28 protocole des conventions de Genève prévoit ce qu'un Etat doit faire en cas
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1 de rébellion armée. La République fédérale de Yougoslavie, conformément aux
2 dispositions du droit international, était tenue de réagir face à cette
3 rébellion armée et de traiter cette rébellion comme un problème interne. Il
4 fallait mettre fin à cette rébellion. Ceci est également prévu par la
5 constitution yougoslave et les lois fédérales. Les forces armées peuvent
6 être mises à contribution, quel que soit le pays, dans une telle situation.
7 Il en va de même pour les forces armées de Yougoslavie. Le Procureur
8 affirme que les activités des forces armées de la Yougoslavie constituaient
9 une agression à l'encontre des unités fédérales.
10 Je suis sûr que mon confrère connaît les dispositions fondamentales
11 du droit international. Il doit également connaître la constitution
12 yougoslave. Il s'agit de sa part d'une tentative visant à inventer une soi-
13 disant entreprise criminelle commune. Ce mensonge se fonde sur l'idée que
14 les activités de l'armée fédérale, suite aux ordres donnés par le chef de
15 l'Etat afin de mettre fin à la rébellion armée, constituaient une agression
16 contre la Croatie et la Slovénie. C'est ce qu'affirme le Procureur. J'y
17 reviendrai plus tard dans ma déclaration liminaire. Revenons-en à l'année
18 1990.
19 A ce moment-là, nous savons qu'il y a eu une crise politique sur le
20 territoire de la Yougoslavie. Les unités fédérales n'étaient pas toutes
21 d'accord. Leurs demandes politiques étaient parfois complètement opposées.
22 Certaines voulaient quitter la Yougoslavie et devenir indépendantes;
23 c'était le cas de la Slovénie et de la Croatie. D'autres voulaient rester
24 au sein de la Yougoslavie; c'était le cas de la Bosnie et de la Macédoine,
25 de la Serbie-et-Monténégro. Les négociations politiques qui se sont
26 déroulées dans le courant de l'année 1990 ont donné lieu à différentes
27 options. Un système pluripartite a été introduit en Yougoslavie. Des partis
28 nationaux ont vu le jour. Ils étaient fondés sur l'appartenance à un groupe
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1 ethnique donné. L'appellation même d'Union démocratique croate indique
2 qu'il s'agissait d'un parti national croate. Le Parti démocratique serbe
3 était avant tout le parti des Serbes. Bien sûr, il est prévu dans la charte
4 que n'importe qui peut en devenir membre, mais la raison d'être de ces
5 partis est qu'il s'agissait de partis fondés sur l'appartenance nationale à
6 un groupe. C'est dans ces circonstances, en 1990, que les premières
7 élections pluripartites ont été organisées en Croatie. Plusieurs partis se
8 sont présentés. Nous avons interrogé des témoins, nous les avons contre-
9 interrogés. Nous ne mentionnerons pas leur nom, mais toujours est-il qu'ils
10 nous ont dit un certain nombre de choses. Il est important de noter en
11 particulier que pour ce qui est du premier semestre de l'année 1990, on a
12 vu l'apparition de l'Union démocratique croate qui devenait le parti croate
13 le plus important. Il a gagné les élections en avril 1990 et a obtenu 41 %
14 des voix. Conformément au système majoritaire, il a gagné les deux tiers
15 des sièges du parlement appelé Sabor en Croatie. Il est important de bien
16 comprendre le programme politique de ce parti pour bien comprendre les
17 événements qui se sont déroulés à l'époque. L'Union démocratique croate, le
18 HDZ, dirigée par Franjo Tudjman, avait pour objectif d'obtenir
19 l'indépendance de l'Etat croate, du peuple croate. La Croatie était l'Etat
20 du peuple croate.
21 Le Parti démocratique serbe s'est également présenté aux élections en
22 1990. Ce parti nationaliste, comme l'appelle le Procureur, était dirigé par
23 Jovan Raskovic. Ce parti, pour pouvoir participer aux élections, a
24 toutefois rempli toutes les conditions nécessaires en matière
25 d'enregistrement et autres. A l'époque, en Croatie, aurait-il été possible
26 d'enregistrer officiellement un parti s'il avait exprimé des points de vue
27 nationalistes, et a fortiori, des points de vue nationalistes serbes ?
28 Pourtant, ce parti a été enregistré, et au début de l'année 1990, lorsque
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1 les premières élections pluripartites ont été tenues, lorsque le HDZ a
2 gagné ses élections et est devenu le parti le plus important représenté au
3 parlement et dans toute la Croatie, la participation du Parti démocratique
4 serbe de Jovan Raskovic est considérée par l'Accusation comme faisant
5 partie de l'entreprise criminelle commune. Lorsque ces premières élections
6 pluripartites ont eu lieu en Croatie avec la participation du Parti
7 démocratique serbe, l'unité fédérale croate comptait environ quatre
8 millions et demi d'habitants, dont 581 000 personnes qui étaient déclarées
9 Serbes lors du recensement. Ils étaient 12 % selon le recensement de cette
10 année. Sur ces 581 000 Serbes, il y a eu bien moins d'électeurs qui ont
11 voté pour le Parti démocratique serbe. Ils l'ont remporté rien qu'à Knin.
12 La grande majorité de la population du groupe ethnique serbe en 1990
13 avait voté en faveur d'un autre parti croate, le parti d'Ivica Racan, l'ex-
14 communiste croate qui avait modifié le Parti communiste croate pour le
15 nommer Parti des changements démocratiques. Pourquoi racontais-je tout
16 ceci ? Tout ceci serait dénué de pertinence si le Procureur n'avait pas
17 présenté les choses sens dessus dessous. Il le fait de la façon suivante :
18 il évite complètement de prendre en considération la situation politique de
19 la Croatie à l'époque de la tenue de ces élections en mai 1990. En
20 application de la constitution croate, il y a en Croatie deux peuples,
21 parce que le membre de la fédération yougoslave de la Croatie était défini
22 dans sa propre constitution comme étant l'Etat du peuple croate et du
23 peuple serbe de la Croatie, du peuple serbe de Croatie, et non pas de
24 Serbie. C'est la solution qui avait existé pendant les 50 années qui
25 avaient précédé. Cela avait existé depuis la fin de la Deuxième Guerre
26 mondiale. Peut-être la raison principale pour laquelle les Serbes ont eu et
27 bénéficié de ce statut de peuple constitutif en Croatie, c'est précisément
28 le fait que jusqu'en 1941, ils étaient un million de plus en Croatie. Sur
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1 le territoire de l'Etat croate indépendant de 1941 à 1945, il a été tué
2 dans un génocide terrible un million de Serbes. Ce sont les données qui
3 sont présentes. On dit qu'à Jasenovac, il en a été tué quelque 700 000, et
4 on estime que le chiffre n'a jamais été établi avec précision, mais on juge
5 qu'il y en a eu un million. Un million d'habitants serbes de cet Etat de
6 Croatie ont été tués de 1941 à 1945.
7 Pendant 50 ans, après la Deuxième Guerre mondiale, il n'y en a eu que
8 581 000, de ces Serbes, en Croatie. Ces dispositions de la constitution
9 croate se rapportaient essentiellement à ce peuple serbe exterminé pendant
10 la Deuxième Guerre mondiale. C'est un peuple qui a été détruit par le biais
11 d'un génocide, littéralement. Quand on parle des événements politiques et
12 des aspirations politiques, le Procureur reconnaît le fait qu'il y a eu des
13 souffrances terribles pendant la Deuxième Guerre mondiale. Mais cette
14 approche est plutôt cynique. Cynique, pourquoi ? Parce qu'un crime de
15 génocide ne saurait devenir caduc. On a vu la carte de cet Etat croate
16 indépendant. Cet Etat croate indépendant a été le seul pays sur le
17 territoire de l'Europe, de l'Europe hitlérienne où, mis à part l'Allemagne,
18 il a existé un camp de concentration, le terrible camp de concentration de
19 Jasenovac. Le Procureur, lui, dit que : "La population serbe a souffert, a
20 été victime d'un génocide, mais que sa peur avait été exagérée. Alors comme
21 cette peur se trouvait être exagérée, quelqu'un a mis le feu au
22 nationalisme serbe, et les nationalistes serbes, animés par ce feu
23 politique, se sont mis à tuer des Croates et à réaliser une entreprise
24 criminelle commune." C'est là l'image que nous présente le Procureur.
25 Mis à part ce fait, le Procureur a communiqué à la Défense toute une série
26 de documents qui illustrent la situation politique des années 1990 sur le
27 territoire de la Croatie et de la Yougoslavie. A cette fin, on ne saurait
28 affirmer que le Procureur n'a pas été au courant de la situation qui
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1 prévalait à l'époque sur le territoire de la Croatie et de la Yougoslavie.
2 Le Procureur avait pour devoir de connaître cette situation de par ses
3 fonctions. Ce bureau du Procureur nous a communiqué des éléments de preuve,
4 des documents qui nous sont communiqués et qui parlent de ce qu'a écrit la
5 revue Spiegel en Allemagne, qui parle des élections en Croatie et dit, à
6 propos de celle-ci, le 16 avril 1990 : "Les plus grandes chances aux
7 élections sont celles de l'Union démocratique croate, un groupe extrémiste
8 qui rêve ouvertement d'une Grande-Croatie et qui a des aspirations
9 territoriales vis-à-vis de la Bosnie-Herzégovine voisine," et chose qui est
10 plus importante encore, "propage une haine fanatique vis-à-vis les Serbes."
11 A la veille des élections en Croatie, avec la victoire du HDZ et du
12 président Tudjman en Croatie, il y a eu un parti politique sur la scène au
13 sujet duquel une revue allemande dit que ce parti propageait une haine
14 fanatique des Serbes. Messieurs et Madame les Juges, nous nous proposons de
15 démontrer par des éléments de preuve que cette campagne électorale du HDZ
16 et de tous les partis politiques croates qui portaient tous l'appellation
17 croates, ce qualificatif de croates, leurs campagnes électorales se
18 basaient sur une haine non dissimulée vis-à-vis des Serbes, une expression
19 d'une intolérance non dissimulée vis-à-vis d'une partie de la population de
20 cette même Croatie. Il ne s'agissait pas d'une haine vis-à-vis des Serbes
21 de Serbie ou des Serbes des Etats-Unis, mais des Serbes de la Croatie qui
22 constituaient 12 % de sa propre population.
23 Le Procureur dit que le SDS avait conduit une campagne nationaliste pendant
24 ces élections, alors qu'il existe des enregistrements publics des discours
25 du président Tudjman qui, à l'occasion d'un rassemblement électoral du HDZ
26 en avril et mai 1990, et je parle notamment du 24 février 1990, où dans la
27 salle Vatroslav Lisinski, il dit que cet Etat indépendant croate n'avait
28 pas été une création "quislinq" et un crime fasciste, mais également
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1 l'expression des aspirations historiques du peuple croate. Qualifier un tel
2 Etat, un tel Etat fasciste de Croatie pendant la Deuxième Guerre mondiale,
3 qui avait déclaré en sa qualité de satellite hitlérien la guerre à
4 l'Amérique et à l'Angleterre et qui est resté en guerre jusqu'en mai 1945
5 et qui avait des troupes au front de l'est, aux abords de Stalingrad, et
6 qui, chemin faisant, a abattu un million de Serbes, qualifier un tel Etat à
7 la veille des élections politiques en 1990 d'expression des aspirations
8 historiques du peuple croate comme l'a fait M. Tudjman a constitué la
9 phrase qui a sonné l'alarme aux oreilles des Serbes.
10 C'est la phrase qui a coagulé le sang des Serbes dans leurs veines.
11 La presse étrangère a parlé de cette Croatie nationaliste qui s'était
12 manifestée à la campagne électorale. Cela peut faire l'objet d'un combat
13 politique ou du moment politique. Il s'est passé ces élections d'avril et
14 mai, les partis qui se sont battus pour l'emporter sur le plan politique
15 ont obtenu le nombre de votes qu'ils ont obtenu, et il aurait été normal de
16 voir les passions politiques se calmer et la vie continuer normalement.
17 Que s'est-il passé en Croatie ? Les tout premiers documents adoptés
18 par l'autorité croate nouvelle avec Tudjman à sa tête sont des documents
19 visant à modifier la constitution croate, disant que la Croatie est l'Etat
20 seulement du peuple croate. Ces amendements éliminent les Serbes de la
21 constitution croate en sa qualité de peuple constitutif. Ils ne sont plus
22 peuple, plus nation, mais minorité nationale. On élimine leur langue, leur
23 alphabet et, à titre de nouveaux qualificatifs ou de nouvelles
24 caractéristiques, on réinstalle l'ancien drapeau croate qui était celui de
25 la Deuxième Guerre mondiale. S'agissant de ce drapeau à damiers avec ses
26 carrés rouges et blancs, nous avons entendu plusieurs déclarations
27 présentées ici par les témoins de l'Accusation. Il est un droit
28 incontestable d'une unité fédérale et d'une autorité quelle qu'elle soit
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1 dans une unité fédérale de décider de l'aspect qu'aura leur drapeau. Mais
2 ici, il s'est agi du choix du moment et de la façon dont cela a été fait.
3 Les Serbes avaient eu peur et avaient pris peur. Ils étaient bouleversés.
4 Ce qui les menaçait c'était le démantèlement, le démantèlement violent du
5 pays, de cette Yougoslavie. La Croatie, très ouvertement, affirme qu'elle
6 finira par quitter la Yougoslavie, et la population du groupe ethnique
7 serbe sur le territoire de la Croatie a réagi par le biais de ses
8 représentants politiques. Ces réactions-là ont été des réactions
9 politiques. Il a été créé un Parti démocratique serbe qui a pris part aux
10 élections qui n'a obtenu qu'un très peu petit nombre de votes, les députés
11 du Parti démocratique serbe ou des députés serbes qui sont élus sur des
12 listes électorales croates se réorientent pour faire partie du Parti
13 démocratique serbe. Ce Parti démocratique serbe commence à agir sur le
14 territoire.
15 Mais dans ces circonstances politiques, ces activités sont qualifiées
16 pour ce Parti démocratique serbe par l'Accusation, d'entreprise criminelle
17 commune, pour dire qu'il avait pour objectif de chasser toute population
18 non-serbe d'un tiers du territoire croate pour créer une Grande-Serbie. La
19 Défense ne va pas perdre son temps pour illustrer l'absurdité logique de
20 cette affirmation. Pourquoi, dans la Krajina, les Serbes qui étaient
21 majoritaires là-bas auraient-ils procédé à l'expulsion des Croates qui
22 étaient eux minoritaires ? Le Procureur dit à peu près, il n'ose pas le
23 décrire mais il dit que c'est pour des aspirations criminelles. Les Serbes
24 détestent les Croates, ils veulent les expulser, les exterminer et créer et
25 mettre en place une Grande-Serbie. Mais Madame et Messieurs les Juges, il
26 s'agit là de choses bien plus sérieuses. Lorsque les Serbes organisaient
27 dans des partis politiques sur le territoire de la Croatie cette population
28 serbe, des citoyens croates, entendons-nous bien ont appris quels étaient
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1 les amendements proposés par l'autorité de Tudjman. Ils avancent leur
2 contre-proposition, mais le parlement croate les dédaigne complètement. Les
3 Serbes n'ont aucune influence là-bas. La population du groupe ethnique
4 serbe se trouve être minoritaire à ce moment-là, rien que 12 % de la
5 population et de par l'organisation politique son importance est bien plus
6 petite encore. Dans de telles circonstances, lorsque le Sabor croate ne
7 veut reconnaître aucun ou n'acceptait aucun amendement avancé par la partie
8 serbe, il y a des rassemblements politiques.
9 Il y a un rassemblement à Srb, qui se tient le 25 juillet 1990 où il
10 y a eu plus de 100 000 personnes, des personnes qui étaient des
11 ressortissants de cette minorité ethnique serbe, se trouve être qualifié
12 d'entreprise criminelle commune. Mais on passe outre tout ce qui s'était
13 passé avant cela, les modifications de la constitution proposée par les
14 Croates et qui ne convenaient pas du tout à la population serbe. Le fait
15 que cela ne lui convienne pas, étant donné que ces Serbes étaient
16 minoritaires de par leur pourcentage, c'était non seulement un élément qui
17 ne leur convenait pas mais qui leur faisait peur. Ils ont eu peur de voir
18 l'histoire se réitérer.
19 Ce Sabor siège, par exemple, le même jour où il y a un autre
20 rassemblement avec intervention des serbes sur le plan politique et qui
21 adopte une déclaration de la souveraineté du peuple serbe. Le Procureur
22 affirme que cette adoption de la déclaration relative à la souveraineté du
23 peuple serbe fait également partie de cette entreprise criminelle commune.
24 Mais si la constitution croate en vigueur à l'époque donnait à la
25 population serbe un statut de peuple. Cet acte politique à Srb n'avait
26 aucune importance déclarative, cela n'avait aucune importance constitutive.
27 Les Serbes en Croatie étaient déjà et l'ont été pendant 50 ans auparavant
28 un peuple constitutif. Ils n'ont pas fait que confirmer ce fait, ils ont
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1 dit que : "Ils voulaient être traités de la sorte." Ils ont créé un conseil
2 national serbe pour l'organisation d'un référendum sur ces questions-là
3 justement.
4 Or, dans des circonstances d'aspiration politique de la direction
5 croate de faire sécession à tout prix vis-à-vis de la Yougoslavie, un tel
6 comportement de ces Serbes apeurés en Croatie était une chose qui allait à
7 l'encontre des intérêts de la direction croate. Cela leur a fourni un
8 argument pour intervenir et ils sont intervenus. Parce que le référendum
9 était prévu par la constitution yougoslave et par la constitution de la
10 Croatie en tant que forme d'expression de la volonté d'une population, les
11 Serbes entre août et septembre organisent un référendum sur le statut des
12 Serbes en Croatie. Les autorités croates interdisent la tenue de ce
13 référendum le 17 août, et non seulement ils l'interdisent mais ils envoient
14 des forces de police pour empêcher la tenue du référendum et pour désarmer
15 les forces de police sur les territoires où il y a majorité de la
16 population serbe, à Knin, Benkovac, Obrovac, et autres localités. Ce sont
17 des témoins de l'Accusation qui ont parlé de cela.
18 Qu'est-ce qui a été déterminé au-delà de tout doute possible sur la
19 base des déclarations des témoins de l'Accusation. Il y a eu interdiction
20 de la tenue de ce référendum de la part du gouvernement croate s'agissant
21 de la population serbe et il a été envoyé des policiers pour désarmer des
22 postes de police. Les Serbes réagissent de façon paniquée. A Knin, le 17
23 août 1990, c'est l'alerte qui est donnée. On proclame un état de guerre. On
24 place des barricades et tous ces faits --
25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Qui a déclaré cet état de guerre ?
26 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Le président de l'assemblée municipale
27 de Knin, feu M. Babic. Le président de cette assemblée municipale de Knin,
28 M. Babic, prend la décision de déclarer un état de guerre le 17 août 1990 à
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1 Knin. Ils mettent en marche la sirène d'alerte pour danger ou pour péril
2 aérien. La population est avertie par la radio de l'arrivée des policiers
3 croates, bien entendu, la réponse est logique et naturelle. La population
4 serbe place des barricades et des troncs d'arbres sur les routes. Quand on
5 parle de barricades, il est clair que ces barricades visent à empêcher tout
6 déplacement sur les routes. Dans un contexte de disposition de ces
7 barricades, il est clair que cela visait à empêcher l'arrivée des forces de
8 l'ordre armé croate. On a voulu poser des obstacles routiers, des obstacles
9 physiques aux fins de protéger cette population afin qu'elle se sente plus
10 en sécurité. A ce sujet, le Procureur dit que c'était des barricades qui
11 ont servi de moyen d'attaque, de moyen d'agression, d'expression de cette
12 entreprise criminelle commune. Quoique ayant montré une partie du livre
13 rédigé par M. Jovic, le président de la présidence de la Yougoslavie,
14 disant que les avions de l'aviation de guerre yougoslave ce 17 août 1990
15 ont fait rebrousser leur chemin aux hélicoptères de la police du ministère
16 de l'Intérieur croate, qui ont décollé de Lucko en Croatie pour intervenir
17 de façon armée à Knin. Cela aura été un massacre, Messieurs et Madame les
18 Juges. L'Accusation a cité à comparaître des témoins qui sont venus
19 expliquer que ces barricades placées par les Serbes sur les routes
20 n'entravaient que le déplacement des Croates. Ces barricades, dit-on, ont
21 été placées là pour mettre en péril la population croate. Ce serait
22 ridicule si ce n'était pas terrible que de voir le Procureur modifier la
23 signification et le sens d'une chose qui est si évidente.
24 La Défense propose, par le biais des témoignages de ses témoins, le
25 fait que le 20 et 21 août 1990, trois jours avant la disposition de ces
26 barricades, il y a eu une barricade qui a stoppé plusieurs autocars de
27 personnes qui allaient de Drnis vers Knin pour s'emparer du poste de police
28 à Knin. Or, le comportement des personnes sur les barricades a empêché dès
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1 ce moment-là la perpétration d'un massacre parce que les policiers croates
2 sont tombés dans une embuscade et ils auraient pu être massacrés, mais ils
3 ont, grâce à ces derniers, réussi à s'en sortir.
4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je commence à m'inquiéter, Monsieur
5 Milovancevic. Vous me donnez l'air d'être en train de témoigner vous-même.
6 Je ne veux pas laisser entendre que ce que vous êtes en train de dire est
7 conforme à ce que je m'attends à entendre dans une déclaration liminaire.
8 J'ai l'impression que vous êtes en train de faire un discours de clôture ou
9 de témoigner. Je voudrais vous suggérer de vous en tenir à ce qui
10 constituerait une déclaration liminaire.
11 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Permettez-moi de continuer, Monsieur le
12 Président.
13 La Défense s'est attardée sur ces faits car il s'agit d'éléments
14 fondamentaux que l'Accusation utilise pour fonder son accusation
15 d'entreprise criminelle commune.
16 La chronologie des événements qui ont suivi va contre cette
17 argumentation-là. La Défense va montrer que la signification, à la fois en
18 termes politiques et militaires de ces événements, était tout à fait
19 différente de celle qui lui est donnée par l'Accusation.
20 Si l'on doit choisir quelque chose comme étant le fait le plus
21 significatif de cette année-là, il s'agirait de la mise en place de
22 barricades à Knin. Le résultat du référendum, pendant lequel les Serbes ont
23 voté en faveur de leur autonomie, ensuite la décision du 21 décembre 1990
24 concernant l'établissement du SAO de la Krajina. Comme le démontrera la
25 Défense à travers ses témoins, les Serbes, en organisant un référendum,
26 tout comme l'autre ralliement serbe, a fait ce qu'a expliqué dans le détail
27 M. Raskovic, pendant ce ralliement. Il a dit que : "Le but de notre
28 activité politique n'est pas de mettre en place la Grande-Serbie. Il ne
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1 s'agit pas de prendre les armes, ni d'entrer dans un conflit avec le reste
2 de la population de la Croatie. Il s'agit simplement de répondre aux
3 revendications faites par la direction de l'Etat de la Croatie, à savoir
4 que ce qui se passe dans le territoire de la Krajina est le fait simplement
5 d'un groupe de bandits et que la majorité de la population serbe dans ces
6 zones ne partagent pas ses opinions."
7 C'est pour cela que ce référendum a été organisé et appliqué, pour
8 montrer que les Serbes étaient en faveur de l'autonomie. Cela a été tenu du
9 19 août au 2 septembre, et du fait de ce référendum, la province autonome
10 serbe de la Krajina a été mise en place. Nous allons montrer pourquoi
11 c'était le 21 décembre 1990 que le SAO de la Krajina a été mis en place.
12 Son nom, la province autonome serbe de la Krajina, démontre clairement
13 qu'il s'agissait d'une province à l'intérieur de la République de la
14 Croatie. Il s'agissait d'autonomie à l'intérieur de la Croatie, alors que
15 l'Accusation essaie de nous faire croire qu'il s'agirait d'une tentative de
16 sécession de la Krajina depuis la Croatie. Il n'est pas contestable que
17 dans le statut du SAO de la Krajina, il était dit que la Krajina faisait
18 partie de la Croatie et que la législation croate s'appliquait à ce
19 territoire.
20 Le fait que ceci se soit produit le 21 décembre 1994 a été utilisé
21 par l'Accusation pour montrer que l'entreprise criminelle commune a
22 commencé à cette date-là. En fait, il fait fi du fait que le jour suivant,
23 le 22 décembre, la nouvelle constitution croate a été appliquée, selon
24 laquelle les Serbes n'étaient plus un peuple constitutif, mais seulement
25 une minorité nationale. Je parle de tout ceci, Messieurs et Madame les
26 Juges, pour démontrer qu'il y a un lien entre ces différents événements.
27 Les activités politiques des Serbes à l'intérieur de la Croatie étaient en
28 général une réponse, une réaction aux actes des autorités croates qui
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1 allaient se produire. Le jour avant la constitution selon laquelle les
2 Serbes n'étaient plus un peuple constitutif en Croatie, les Serbes ont émis
3 leur propre document le 21 décembre qui mettait en place la province
4 autonome.
5 La Défense va démontrer que les aspirations politiques de la direction
6 croate, à savoir la sécession vis-à-vis de la Yougoslavie, a été mise en
7 place de nouveau à travers des activités, en recherchant des appuis à
8 l'étranger pour leurs requêtes, et à l'intérieur, à savoir des préparatifs
9 pour la guerre. L'unité fédérale croate de la Croatie préparait la guerre à
10 l'intérieur de son propre pays. La Défense va montrer qu'en 1990, en
11 septembre, octobre et novembre, il y a eu une importation illégale d'armes
12 en Croatie. Le film très bien connu concernant Martin Spegelj, le
13 commandant de la nouvelle armée croate, le démontre. Il parle à Boljkovac,
14 le ministre croate de l'Intérieur dans ce film, et dans tout les cas, ce
15 qui s'est passé en 1991 représente une accélération notable de la crise
16 yougoslave avec des demandes de sécession de plus en plus importantes, à la
17 fois en Croatie et en Slovénie, et les tentatives par la direction de
18 l'Etat yougoslave pour maintenir dans un cadre politique plutôt que
19 militaire et la prise d'un certain nombre de mesures pour éviter des
20 conflits militaires. Cette accélération des événements est décrite par
21 l'Accusation comme soi-disant des moyens d'évidence démontrant qu'il y
22 avait entreprise criminelle commune. Le fait que les Serbes ont établi le
23 SAO de la Krajina le 21 décembre 1990 est considéré par le Procureur comme
24 étant un moyen de preuve principal qui témoigne de l'existence d'une telle
25 entreprise, alors qu'il était possible, selon la constitution croate et la
26 constitution yougoslave, de déclarer l'autonomie à la suite d'un
27 référendum, à savoir exactement ce qui s'est produit. Mais l'Accusation,
28 néanmoins, interprète ces événements différemment.
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1 Dans le SAO de la Krajina, un nouveau gouvernement a été élu dont le
2 chef était M. Babic, et le 4 janvier, les ministres ont été nommés et M.
3 Martic fut nommé secrétaire de l'Intérieur. Là aussi, l'Accusation
4 considère ceci comme un moyen de preuve démontrant l'existence d'une
5 entreprise criminelle conjointe. Messieurs et Madame les Juges, aux mois de
6 janvier, février et mars jusqu'au mois d'août 1991, sur tout le territoire
7 de la Yougoslavie, il n'y avait pas de guerre. Il s'agissait d'un Etat qui
8 avait tous ses organes étatiques, qu'on les considère réguliers ou
9 irréguliers, mais il y avait néanmoins des postes de police, des chefs de
10 la police à la fois en Croatie et en Slovénie et dans toutes les
11 républiques yougoslaves, dans tous les villages, dans toutes les villes. La
12 nomination d'un homme, M. Martic, en tant que secrétaire de police, n'est
13 pas un moyen de preuve qu'il existait une entreprise criminelle commune. Il
14 s'agit simplement de preuves qui démontrent que le leadership politique de
15 la Krajina était tel que M. Martic était approprié pour faire le travail
16 qu'on lui a affecté. Tout ceci a été fait selon les règlementations qui
17 étaient en vigueur à l'époque. Cependant, les événements ont pris un tour
18 très différent, comme nous allons le démontrer.
19 Le 9 janvier 1991, la présidence de la Yougoslavie a émis une décision
20 concernant le désarmement des formations paramilitaires, toutes les
21 formations paramilitaires en Yougoslavie, y compris en Slovénie et en
22 Croatie. Les directions de la Croatie et de la Slovénie, les deux
23 directions ont refusé d'appliquer cette décision.
24 Le 25 janvier, à Belgrade, la présidence de la Yougoslavie, après que
25 cet ordre selon lequel il fallait démanteler les formations paramilitaires
26 fut rejeté, a émis une autre décision sur la démobilisation de toutes les
27 unités de police réservistes. C'est à ce moment-là que la vidéo de Martin
28 Spegelj a été montrée à la télévision, ce qui a provoqué un état de choc
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1 parmi le public dans son ensemble.
2 Même cette décision de la présidence, soit la démobilisation des forces de
3 police réservistes, ne fut pas mise en œuvre par l'Etat de la Croatie, et
4 nous allons vous le démontrer aussi. Il ne s'agissait pas d'une
5 démobilisation ordinaire de ces forces réservistes. La vidéo avait
6 désormais démontré que 54 000 armes automatiques avaient été importées
7 illégalement depuis la Hongrie, et nous allons montrer que la
8 démobilisation des réservistes de police en Croatie était une façon de
9 créer une nouvelle armée croate. En tous les cas, il est incontestable que
10 la direction des organes fédéraux de la Croatie et de la Slovénie refusait
11 de mettre en œuvre les décisions de la direction de l'Etat collectif, la
12 présidence de la Yougoslavie.
13 En même temps, avec cette conduite vis-à-vis de l'Etat fédéral, le 21
14 février 1991, la Croatie a émis une décision qui faisait que toutes les
15 législations fédérales étaient désormais nulles et non avenues dans le
16 territoire de la Croatie, et par conséquent, s'est exclue elle-même de
17 l'ordre constitutionnel de ce pays. Le 28 février, le District autonome de
18 la Krajina a répondu avec une loi concernant la dissociation vis-à-vis de
19 la Croatie. Ceci encore ne s'illustre pas à l'Accusation comme étant un
20 élément démontrant l'existence d'une entreprise criminelle commune, ce qui
21 est contraire à toute logique.
22 En même temps que ce manquement à respecter la législation fédérale, les
23 tensions au sein de la Croatie étaient de plus en plus fortes. Le 2 mars
24 1991, il y a eu un affrontement entre la population de Pakrac et les
25 autorités croates, ce qui a été à l'origine d'énormément d'angoisse parmi
26 les Serbes de Croatie en général, alors que l'Accusation essaie de nous
27 faire croire qu'il s'agissait là d'une tentative visant à encourager les
28 Serbes de Croatie à se rebeller avec des armes. C'est ainsi que s'est
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1 produit le premier affrontement armé, orchestré et dirigé par les nouvelles
2 autorités de la Croatie. C'était un crime contre la paix.
3 Après ce premier affrontement, le 2 mars 1991 à Pakrac, la présidence de la
4 Yougoslavie, le chef de l'Etat collectif a tenté de décider, sur la
5 proposition du secrétariat fédéral de la Défense, à savoir l'introduction
6 d'un état d'urgence qui pourrait permettre à l'armée fédérale de mobiliser
7 le peuple, de mobiliser les hommes afin de mettre en œuvre la décision de
8 la présidence, à savoir le désarmement des unités paramilitaires. La
9 Défense va démontrer que cette décision ne fut pas finalisée parce que la
10 présidence a voté avec quatre voix contre quatre. Les représentants de la
11 Slovénie et de la Croatie, de la Bosnie et de la Macédoine, ces républiques
12 qui par la suite ce sont séparées de la Yougoslavie, ont voté contre
13 l'autorisation de l'utilisation de l'armée populaire yougoslave pour
14 désarmer les unités paramilitaires. Ensuite, les événements ont commencé à
15 rentrer dans une spirale. L'affrontement suivant s'est produit le 31 mars
16 entre les Serbes locaux et les forces de la police croate à Plitvica. Deux
17 personnes furent tuées, 20 personnes blessées. La police fédérale y a été
18 envoyée pour séparer les parties qui s'affrontaient. Déjà le 2 mai, à
19 Borovo Selo, encore un autre affrontement s'est produit encore une fois
20 entre la police croate armée et la population locale. Là, 17 personnes
21 membres des forces armées croates furent tuées -- je me reprends, 13
22 personnes, et non 17.
23 En 1991 déjà, les événements échappaient au contrôle politique. Près de
24 Benkovac, le chef du poste de police a été tué à Polaca, près de Benkovac.
25 Cela a donné lieu à beaucoup d'indignation parmi les Croates, et cette
26 indignation à son tour a donné lieu à des actes de vandalisme à grande
27 échelle concernant des possessions serbes le 3 mai. Nous allons appeler des
28 témoins pour en parler. Le 5 mai à Trogir, Franjo Tudjman a fait appel au
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1 peuple croate pour qu'il se rebelle. Ceci a été confirmé par plusieurs
2 témoins. C'est ce que va démontrer la Défense. Après l'appel fait par
3 Tudjman appelant les gens à se rebeller, déjà le 6 mai 1991 à Split, il y a
4 eu des désordres manifestes dans les rues. Un soldat fut tué, un autre
5 blessé.
6 S'agissait-il là d'accidents ? Et bien, non. C'était une préparation visant
7 le référendum concernant l'indépendance de la Croatie qui était prévu pour
8 le 19 mai 1991, et lors de ce référendum, la population croate de la
9 Croatie a voté en masse en faveur de l'indépendance, et les citoyens serbes
10 de la Croatie n'ont pas voté. En réaction à ce référendum, la direction du
11 SAO Krajina a prévu son propre référendum pour le 12 mai 1991. Là, c'est la
12 population serbe qui a voté en faveur de continuer à faire partie de la
13 Yougoslavie, à l'intérieur de la Yougoslavie. La façon dont la question a
14 été formulée est encore une fois décrite par l'Accusation comme une preuve
15 de l'existence de l'entreprise criminelle commune. Cependant, Messieurs et
16 Madame les Juges, c'est le droit et même le devoir de toute population
17 d'être fidèle à son Etat fédéral, et c'est exactement ce qu'a voté la
18 population serbe croate le 12 mai.
19 Lorsque le référendum croate avait eu lieu et que la majorité des Croates
20 avait voté en faveur de la sécession de la Croatie, déjà le 28 mai 1991,
21 Franjo Tudjman a inspecté la nouvelle armée croate dans un stade se
22 trouvant à Zagreb. Cette nouvelle armée s'appelait la ZNG, la Garde
23 nationale croate.
24 C'est un fait que l'Accusation semble négliger. Sur le territoire d'un Etat
25 qui continue à exister, une nouvelle armée était proclamée et celle-ci se
26 préparait à se mettre en guerre contre l'armée régulière. L'Accusation
27 traite la proclamation de l'indépendance de la Croatie comme étant quelque
28 chose de régulier et normal. Ils ne la voient pas comme une preuve d'une
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1 intention de démanteler l'Etat existant régulier. La sécession en tant que
2 telle est vue par la communauté internationale et par le droit
3 international comme étant quelque chose, une blessure sur le corps du
4 monde. Mais c'est précisément la sécession que la Slovénie et la Croatie
5 voulaient mettre en œuvre, et c'est ce qu'ils ont proclamé le 15 juin 1991.
6 L'Accusation traite le refus de l'Etat yougoslave d'accepter cette
7 sécession comme une preuve d'agression contre ses propres membres
8 constitutifs. Incroyable, mais vrai.
9 Avant de faire notre première pause dans une minute, à cette époque-là où
10 se produisaient ces différents événements en Croatie et en Slovénie, la
11 présidence, son président était un représentant slovène qui -- enfin,
12 représentant d'un Etat qui avait pris une telle décision de sécession. Le
13 président suivant était Stjepan Mesic, encore une fois un représentant
14 d'une république qui avait décidé de faire sécession. Il y avait un
15 représentant de la Macédoine, un représentant de la Bosnie. Le chef d'Etat
16 collectif fonctionnait conformément, complètement conformément à la
17 constitution à l'époque où ces décisions sur la sécession furent adoptées.
18 Le premier ministre fédéral qui était Croate, Ante Markovic, a proclamé que
19 ces proclamations d'indépendance étaient non constitutionnelles le
20 lendemain, à savoir le 26 juin 1991, et le gouvernement fédéral a envoyé
21 des troupes, 2 000 hommes pour maintenir l'ordre à ses frontières.
22 Je pense que c'est le moment de faire une pause, Messieurs et Madame les
23 Juges.
24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Milovancevic.
25 Nous allons faire une pause et nous reviendrons ici à 11 heures moins
26 quart.
27 --- L'audience est suspendue à 10 heures 16.
28 --- L'audience est reprise à 10 heures 46.
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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic, veuillez
2 poursuivre.
3 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
4 Avant la pause, nous étions en train de parler des événements survenus au
5 mois de juin 1991. Bien entendu, tout cela était de notoriété publique. Le
6 Procureur reconnaît cela dans l'acte d'accusation. Il reconnaît qu'à
7 l'époque, deux républiques ont proclamé la sécession, et les conflits ont
8 éclaté. Nous savons également ce qui se passait à l'époque en Slovénie. Ce
9 qu'il est important de noter à ce stade, c'est que les actes de la Croatie
10 et de la Slovénie n'étaient pas légaux, étaient violents, et que le
11 gouvernement fédéral de Yougoslavie était dirigé par un Croate, Ante
12 Markovic, ce qui ne serait pas important dans d'autres circonstances, mais
13 cela l'est en l'espèce lorsque le Procureur met les choses sens dessus
14 dessous. Il est important de noter que le premier ministre était un Croate,
15 Ante Markovic. Il est important également de noter que le gouvernement
16 fédéral a proclamé les actes de la Slovénie et de la Croatie comme étant
17 anticonstitutionnels le 26 juin. Il a envoyé des troupes de la JNA en
18 Slovénie afin de rétablir l'ordre à la frontière internationale de la
19 Yougoslavie, côté slovène, côté autrichien, côté italien et côté hongrois.
20 Ceci ne s'inscrivait pas dans le cadre d'une entreprise criminelle commune;
21 cette décision a été prise par le gouvernement fédéral et par l'assemblée
22 de la RSFY. Deux mille soldats ont été déployés pour rétablir l'ordre le
23 long des frontières internationales de la Yougoslavie, y compris en Croatie
24 et en Slovénie.
25 Le lendemain, le 27, la République de Slovénie a attaqué des unités
26 de l'armée populaire yougoslave. Au cours de la dernière décennie, des
27 années 1990, sur le territoire de la Yougoslavie, les forces
28 sécessionnistes ont lancé une attaque contre les forces armées fédérales de
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1 la Yougoslavie. Cela a donné lieu à un conflit qui a entraîné la mort de
2 dix soldats yougoslaves. Un cessez-le-feu a été déclaré le 28 et le 29 juin
3 en Slovénie. Mais dès le 29 juin, les membres de la Défense territoriale
4 slovène ont poursuivi leurs attaques contre la JNA. Un massacre général, un
5 conflit généralisé a éclaté. Très peu de soldats ont été envoyés pour
6 intervenir conformément aux ordres donnés par le gouvernement fédéral. Le
7 président slovène Kucan a comparu devant cette Chambre en tant que témoin.
8 C'est lui qui a été le fer de lance de la sécession. C'est lui qui a donné
9 l'ordre d'attaquer les forces fédérales. C'est lui qui, le 29 juin, a
10 déclaré que la Slovénie n'abandonnerait pas l'indépendance. Cela a suffi
11 pour qu'il attaque l'armée fédérale. C'était un crime. Dans une telle
12 situation, grâce à l'intervention de la communauté internationale et aux
13 décisions qui ont été prises, la présidence de la Yougoslavie a rendu une
14 décision le 10 juillet à Belgrade selon laquelle les troupes de la JNA se
15 retireraient du territoire de la Yougoslavie en attendant qu'une solution
16 soit trouvée à la crise yougoslave. Cela s'est produit le 18 juillet 1991.
17 Cette décision concernant le retrait provisoire des forces de la JNA est
18 déformée par l'Accusation. L'Accusation affirme en effet que la fédération
19 yougoslave n'existait plus à ce moment-là. Cependant, le 7 juillet 1991, la
20 Communauté européenne est intervenue. C'est à ce moment-là que la troïka
21 européenne a conclu le fameux accord Brioni qui faisait partie d'un plan de
22 paix qui prévoyait premièrement de mettre un terme à toutes les activités
23 en Slovénie, deuxièmement, que la Slovénie et la Croatie sursoient à leurs
24 décisions d'indépendance pendant trois mois. A ce moment-là, cette demande
25 ressemblait à une tentative de participer à des négociations politiques et
26 à surseoir à certaines décisions, et ce, afin de trouver une solution à la
27 crise.
28 Ce qui est important pour la suite des événements, c'est que la Communauté
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1 européenne, lorsqu'elle a servi de médiatrice le 7 juillet 1991, a exprimé
2 son intention d'intervenir dans la crise yougoslave. Or, dès le 7 juillet,
3 elle a demandé ou plutôt exigé que la JNA regagne ses casernes. Nous
4 parlons de droit international et des lois régissant la conduite des
5 conflits. N'oublions pas le droit des autorités fédérales d'agir sur leurs
6 propres territoires afin de mettre un terme à la rébellion armée. Dès le 7
7 juillet 1991, l'Union européenne a demandé à la JNA de regagner les
8 casernes sans rien faire. Comment pourrait-on expliquer cette demande selon
9 laquelle ils doivent regagner les casernes alors qu'ils font l'objet
10 d'attaques violentes ?
11 En tout état de cause, la direction de l'Etat yougoslave, le 18
12 juillet, a fait preuve de bonne volonté et a retiré ses troupes d'une
13 partie du territoire afin d'éviter un conflit. Le général Kadijevic, qui
14 était alors ministre de la Défense, lorsqu'il a expliqué cela, a dit la
15 chose suivante : "Les dirigeants militaires de l'Etat fédéral se trouvaient
16 face à un dilemme terrible. En Slovénie, qui couvrait un petit territoire
17 et comptait peu d'habitants, si l'on avait recours à la force militaire
18 brutale et se servait de l'aviation et des chars pour mettre fin à la
19 rébellion au prix de pertes énormes, la Slovénie devait-elle faire cela,
20 simplement abandonner le territoire et la population slovène ? Pourquoi
21 tant de haine à l'égard de l'armée fédérale ? Les dirigeants de l'Etat
22 yougoslave ont décidé alors d'abandonner leur propre territoire pour
23 maintenir la paix."
24 L'Accusation a produit un document du Dr Wolfgang Pohrt dans le
25 magazine Konkret publié à Hamburg le 9 octobre en 1991, qui parle de ces
26 événements. Je vais citer les propos de M. Pohrt. Le 9 septembre 1991, il a
27 écrit la chose suivante : "Au lieu d'intervenir de façon déterminante et de
28 proclamer l'état d'urgence, au lieu de mettre fin à la sécession, au lieu
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1 de traduire en justice les autorités slovènes et croates pour trahison, le
2 gouvernement fédéral a ordonné à ses forces armées de mener un semblant
3 d'attaque à l'encontre exclusivement des sécessionnistes slovènes. C'est
4 sans doute la première fois dans l'histoire militaire," écrit le Dr Pohrt,
5 "qu'une armée régulière, c'est-à-dire la JNA, face à une situation
6 difficile, a préféré accepter ses propres pertes plutôt que d'utiliser des
7 armes lourdes lors des combats."
8 Voilà ce qu'a déclaré le Dr Wolfgang Pohrt à Hambourg, dans un
9 document publié le 9 septembre 1991. Le Procureur, quant à lui, affirme
10 dans l'acte d'accusation que l'envoi de troupes fédérales en Slovénie sous
11 le commandement de la présidence fait partie d'une entreprise criminelle
12 commune.
13 Il faut également garder à l'esprit le fait que les crises en
14 Slovénie et en Croatie ont eu lieu simultanément. Le 25 juin 1991, la
15 Slovénie et la Croatie ont déclaré l'indépendance. Ce que démontre
16 l'évolution de la situation politique en Yougoslavie, c'est qu'en
17 Yougoslavie, nous étions en présence de forces qui ne recherchaient pas une
18 solution politique. Il s'agissait des dirigeants de la Croatie et de la
19 Slovénie. Ils ne voulaient pas d'une solution politique. Ils voulaient la
20 dissolution de la Yougoslavie. La Défense démontrera cela par le biais de
21 ses éléments de preuve, qu'il s'agisse de dépositions ou de documents
22 écrits.
23 Mais pour bien comprendre le comportement des différents acteurs de
24 la crise, il faut se rappeler quelque chose. Le 1er juillet 1991, quatre ou
25 cinq jours après la proclamation d'indépendance de la Slovénie et de la
26 Croatie, la Communauté européenne, qui servait soi-disant de médiatrice
27 pour résoudre la crise, a contraint la présidence yougoslave d'élire
28 Stjepan Mesic en tant que président de la présidence de Yougoslavie. Il
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1 existe des preuves écrites de cela. La troïka européenne a assisté à la
2 séance de la présidence de Yougoslavie et c'est la première fois dans
3 l'histoire contemporaine qu'un chef d'Etat a été élu sous la pression et en
4 présence des représentants de puissances étrangères. Ceci était tragique,
5 le nouveau président élu, Stjepan Mesic, venait d'une république qui, cinq
6 jours plus tôt, avait déjà fait sécession de la Yougoslavie. Mesic, le
7 Croate qui venait de la République de Croatie qui avait fait cette
8 sécession, est imposé à la tête de la présidence de la Yougoslavie. Il
9 devient le président de la présidence de Yougoslavie et ceci s'est produit
10 en cet instant crucial.
11 Certaines forces politiques en Yougoslavie ont cherché à s'opposer à cela,
12 car au plan politique cela était tout à fait inacceptable, c'est logique.
13 Cependant, le Procureur affirme que cela aussi s'inscrivait dans le cadre
14 d'une entreprise criminelle commune. Stjepan Mesic n'a pas été élu de façon
15 régulière. Le 1er juillet 1991, Mesic, qui est alors président de la
16 Croatie, a été élu à la tête de la présidence et le 5 décembre 1991,
17 lorsqu'il a quitté ses fonctions, il a déclaré devant le parlement croate,
18 je cite : "J'ai mené à bien ma mission. La Yougoslavie n'existe plus."
19 Monsieur le Président, Madame et Messieurs les Juges, manifestement,
20 nous étions en présence d'une autre entreprise criminelle commune, une
21 entreprise visant à dissoudre un Etat européen souverain, la Yougoslavie.
22 Après que la présidence de Yougoslavie eut pris une décision concernant le
23 retrait de la JNA de Slovénie le 18 juillet 1991, d'importants convois de
24 la JNA transportant des munitions et des armes lourdes ont quitté la
25 Slovénie. Ils ont dû traverser le territoire de la Croatie en route pour
26 Belgrade. Il ne s'agissait pas d'une ruse de la part de la présidence de la
27 Yougoslavie. On ne cherchait pas à retirer les armes de la Slovénie pour
28 les garder en Croatie, qui était déjà en train de faire sécession, même si
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1 cela aurait été justifié. Ils étaient en droit de faire cela en tant
2 qu'autorité fédérale. Mais non, ils n'ont pas fait cela. En revanche,
3 qu'ont fait les dirigeants croates dirigés par Tudjman, Mesic et les
4 autres ? Ils ont pillé les trains. En juillet et en août, il y a eu des
5 embuscades contre ces trains et des dizaines de wagons transportant des
6 armes et des munitions ont été pillés pour armer les formations
7 paramilitaires.
8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il y a quelque chose que je ne
9 comprends pas très bien, Maître Milovancevic. Est-ce que vous dites que
10 Mesic était le président de la Croatie à l'époque ? Quelles étaient ses
11 fonctions en Croatie ?
12 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. J'ai
13 simplement mentionné le fait que M. Mesic occupait une position importante
14 au sein du HDZ. C'était une personne haut placée en Croatie à l'époque.
15 C'était le représentant croate au sein de la présidence de Yougoslavie.
16 Aujourd'hui, il est président de la Croatie. Il occupe ce poste depuis des
17 années. Il a succédé à M. Tudjman. C'est peut-être de cela que vient la
18 confusion.
19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.
20 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci.
21 Pour bien comprendre la situation en Yougoslavie, il est intéressant de
22 noter que la Communauté européenne, à cette époque, alors que la JNA se
23 retirait du territoire croate, a condamné la JNA pour les actions
24 militaires menées en Slovénie. On est en droit de se demander s'il y a eu
25 un soutien politique officiel aux objectifs sécessionnistes de la Croatie
26 et de la Slovénie. En tout état de cause, la situation sur le terrain s'est
27 détériorée et nous avons entendu de la bouche de témoins à charge que
28 toutes les casernes de la JNA sur le territoire croate étaient assiégées.
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1 En Croatie, en Slovénie et dans toutes les autres républiques yougoslaves,
2 la JNA, en tant que force armée fédérale, avait été déployée sur le
3 territoire dans des garnisons qui existaient depuis 50 ans. Ces
4 installations de la JNA qui étaient assiégées n'étaient pas récentes. Ces
5 entrepôts et ces installations se trouvaient déjà sur le territoire de
6 cette unité fédérale de façon officielle. Les systèmes d'approvisionnement
7 en eau et en électricité ont été coupés. On a installé des mines autour de
8 ces casernes. Des chevaux de frise ont également été posés et des personnes
9 armées se sont installées tout autour de ces installations militaires.
10 Des conflits armés ont éclaté tels que celui de Mirkovci le 22 juillet
11 1991. C'était un conflit opposant des policiers croates et des forces
12 locales serbes qui étaient également des citoyens croates. Douze personnes
13 ont été tuées.
14 Le lendemain, après que la Croatie eut déclaré la sécession, le 26 juin
15 1991, des policiers croates se sont emparés du poste de police de Glina.
16 Ils ont été chassés de là après un conflit les opposant aux forces serbes
17 locales, le 27 juillet 1991. Le 1er août, Franjo Tudjman, à Zagreb, a
18 annoncé à la population croate qu'il fallait se préparer pour la guerre. Il
19 a dit qu'il fallait poursuivre les préparatifs en vue d'une guerre globale,
20 s'il était impossible d'éviter celle-ci.
21 Le 22 août 1991, Franjo Tudjman a exigé de la présidence de la RSFY que les
22 soldats regagnent les casernes. Les forces armées fédérales sur le
23 territoire de la Croatie faisaient l'objet d'attaques de tous côtés.
24 Tudjman a demandé que ses forces n'interviennent pas et restent passives.
25 Le 26 août 1991, un conflit armé a éclaté sur l'ensemble du territoire de
26 la Croatie. Les combats autour de Vukovar. Il ne s'agissait pas d'une
27 agression contre Vukovar. Il s'agissait de combats dans les alentours de
28 Vukovar où se trouvaient les casernes de la JNA.
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1 Le 31 août 1991, des avions de la JNA ont intercepté un avion ougandais qui
2 transportait 19 tonnes d'armes. Ils ont contraint cet avion à atterrir dans
3 un aéroport militaire de la JNA à Pleso, près de Zagreb. Il s'agissait
4 d'armes que des émigrés croates au Canada avaient achetées en faisant une
5 collecte d'argent parmi les membres du HDZ là-bas. Tout cela était en train
6 de se passer pendant le moratorium de Brioni. Je rappelle la décision selon
7 laquelle on a demandé à surseoir à la décision concernant la sécession. La
8 Communauté européenne a produit cet accord de Brioni, en vertu duquel la
9 Croatie et la Slovénie devaient surseoir à leur décision de déclarer la
10 sécession et malgré tout, ces deux républiques étaient actives au plan
11 militaire sur leur propre territoire. Le 3 septembre, dans ces
12 circonstances, 12 pays de la Communauté européenne se sont mis d'accord à
13 La Haye pour dire que Lord Carrington, ancien ministre des Affaires
14 étrangères britanniques, devait être le coordinateur de la conférence de
15 paix sur la Yougoslavie, le 3 septembre 1991. Ce jour-là pourtant, le
16 Bundestag a défendu l'idée que la reconnaissance de la Croatie et de la
17 Slovénie permettrait de résoudre plus rapidement la crise yougoslave. Cette
18 reconnaissance des républiques a eu une incidence sur la situation alors
19 que nous étions au bord de la guerre civile. Le 7 septembre 1991, la
20 conférence internationale sur la Yougoslavie a commencé à La Haye. Dans ces
21 circonstances, alors qu'il y avait une forte tension et une incertitude qui
22 régnaient, les événements du 9 septembre 1991 se sont produits. M. Martic a
23 été arrêté. Là encore, l'Accusation affirme que cela s'inscrit dans le
24 cadre de l'entreprise criminelle commune, car Martic a été libéré par
25 d'autres membres de cette même entreprise, Kadijevic et d'autres.
26 La situation en Croatie était déjà tendue. L'arrestation de Martic ne
27 pouvait que donner lieu à une propagation du conflit. Il est assez logique
28 que les autorités fédérales déploient des efforts afin de libérer Martic et
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1 d'éviter ainsi davantage de problèmes. Cela est utilisé en guise de preuve
2 d'entreprise criminelle commune une fois de plus. Alors les forces croates
3 arrêtent le général Aksentijevic et ses collaborateurs. Le général
4 Aksentijevic était un général de la JNA, arrêté le 13 septembre. Le 17
5 septembre 1991, Lord Carrington, en sa qualité de président de la
6 conférence sur la Yougoslavie, convient avec le secrétaire fédéral à la
7 Défense nationale, le général Kadijevic et le président Tudjman l'un des
8 premiers des cessez-le-feu. Cela se passe le 17 septembre 1991. Le 25
9 septembre 1991, le Conseil de sécurité adopte une résolution portant sur
10 l'interdiction d'exportation d'armes vers la Yougoslavie et le 1er octobre
11 1991, le secrétariat fédéral à la Défense nationale communique un rapport
12 disant que, depuis la conclusion de ce cessez-le-feu le 17 septembre 1991
13 jusqu'au 1er octobre, donc au fil de ces quelque 13 jours, sur le territoire
14 de la Croatie, il y a eu 263 attaques contre les unités et installations de
15 la JNA. Il y a un document noir sur blanc à ce sujet.
16 Comme M. Carrington a été désigné comme président de cette conférence sur
17 la Yougoslavie, et étant donné que le 17 septembre il a déjà établi des
18 moyens de communication avec le général Kadijevic, le secrétaire fédéral à
19 la Défense met en place une pratique qui, jusque-là, ni avant ni après, n'a
20 existé nulle part ailleurs sur le globe terrestre. Le ministère de la
21 Défense d'un pays, s'agissant de documents secrets, de documents
22 confidentiels, pour ce qui est de ces rapports opérationnels au quotidien
23 reçus par le ministère fédéral à la Défense depuis le territoire du pays
24 entier, et bien, ce ministère les communique tous les jours par écrit avec
25 tous les renseignements nécessaires à Lord Carrington, à la présidence de
26 la Yougoslavie, à tous les présidents des républiques yougoslaves, au
27 conseil exécutif fédéral, à M. Hue tonne, à savoir aux représentants de la
28 Communauté européenne. En d'autres termes, à des pays étrangers dont on
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1 s'attend à obtenir de l'aide pour ce qui est de trouver une solution
2 politique à la crise grandissante. Comme sur la paume d'une main, on
3 communique des informations des plus confidentielles pour ce qui est du
4 nombre et des moyens, des déplacements, des déploiements de toutes les
5 forces qui sont attaquées au jour le jour. Nous avons ces documents, nous
6 vous les montrerons. L'Accusation les a aussi. C'est elle qui nous les a
7 communiqués sous forme de copies. Ces documents ne prouvent pas qu'il y a
8 entreprise criminelle commune, comme l'Accusation l'affirme, pour ce qui
9 est d'activité criminelle ou d'une agression quelconque de la part de la
10 JNA. Ces documents prouvent qu'il y a une insurrection armée sur le
11 territoire de la République de Croatie, tous les jours, d'une minute à
12 l'autre, allant du mois d'août 1991 jusqu'au déploiement des troupes des
13 Nations Unies, ou plutôt jusqu'à leur déploiement et jusqu'au retrait
14 définitif de la JNA du territoire de la Croatie.
15 Ce n'est que le 3 octobre 1991, dans une situation où, pendant ce moratoire
16 déclaré à Brioni, la situation était censée se calmer. Ce n'est que le 3
17 octobre 1991 que la présidence met en place un état d'urgence. Je vous
18 rappelle un fait, et nous allons le prouver en notre qualité de conseil de
19 la Défense. En septembre 1991, notamment depuis la mi-septembre jusqu'à la
20 fin septembre 1991, sur le territoire de la Croatie, il a été pris d'assaut
21 de très grandes casernes de la JNA, à Varazdin, Bjelovar, Krizevci et
22 autres sites tout au large de la Croatie. Il est difficile de les énumérer
23 toutes. Il a été saisi des quantités d'armes immenses. Dans certaines
24 casernes en Slavonie, on a saisi des chars par 200. Alors que la Croatie et
25 la Slovénie étaient tenues par les décisions de la Communauté européenne
26 visant à faire surseoir à l'application et à la mise en œuvre de ses
27 décisions relatives à la sécession et à l'indépendance, les républiques en
28 question s'attaquent de façon inconsidérée à l'armée fédérale. La Croatie a
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1 continué, ce faisant, à se préparer à la continuation de la guerre.
2 Pour ce qui est du moratoire proclamé à Brioni, un autre élément est
3 caractéristique. Le vice-premier ministre du gouvernement croate, le Dr
4 Zdravko Tomac, parle d'un premier gouvernement de l'Unité démocratique
5 croate, début août 1991. De façon ouverte, il écrit noir sur blanc, dans sa
6 qualité de vice-premier ministre de ce gouvernement à Tudjman, il dit :
7 "C'est en raison du moratoire de Brioni que nous n'avons pas osé créer un
8 gouvernement de guerre. Mais nous avons toutefois créé une cellule de Crise
9 et fait du gouvernement une cellule de Crise. Nous avons créé, tout au
10 large de la Croatie, bien d'autres cellules de Crise. C'est ainsi, dans la
11 clandestinité, que le gouvernement de la Croatie, contrairement aux
12 dispositions de ce mémorandum de Brioni, est intervenu en qualité de
13 gouvernement d'état de guerre," dit Tomac. Comme cela a été dit par Tomac,
14 nous allons le prouver pour notre part et indiquer que cette façon d'agir
15 avait pour objectif de faire en sorte que la JNA en sa qualité de force
16 armée fédérale vienne à être détruite, et c'est ce qui a été fait en muant
17 17 000 officiers de la JNA pour en faire des officiers de nouvelles unités
18 armées croates. Tous les officiers et sous-officiers de la JNA qui étaient
19 ressortissants croates sont passés du côté des forces armées croates, soit
20 de leur plein gré, soit suivant des modalités qui sont indiquées par M.
21 Tomac, le vice-premier ministre de ce gouvernement croate qui dit lui-même
22 : "Ceux qui n'ont pas voulu de leur plein gré passer du côté des nôtres,
23 même s'ils n'ont pas pris part à des opérations militaires contre la
24 Croatie, ne pouvaient pas être considérés comme étant en sécurité pour ce
25 qui était de leur vie à eux et à la vie des membres de leur famille." M.
26 Tomac s'en vante dans son livre : "Nous avons détruit l'armée fédérale,"
27 dit-il "et nous n'avons laissé dans la JNA que les cadres qui nous
28 permettaient de contrôler la situation dans les unités de la JNA qui
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1 étaient restées sur place." Le Procureur lui, en l'occurrence, affirme que
2 ce démantèlement et cette destruction de l'armée yougoslave constituaient
3 une preuve de plus pour ce qui est d'une entreprise criminelle commune de
4 la part des Serbes. Or, les Serbes, les Monténégrins et autres sont chassés
5 de la JNA. Nous allons démontrer que ces hommes ont violé, ont enfreint la
6 parole et le serment militaire qu'ils ont fait et l'honneur militaire
7 qu'ils s'étaient engagés à respecter. Ils ont quitté la JNA aux moments les
8 plus difficiles pour elle, alors qu'ils étaient justement censés défendre
9 cet Etat fédéral et sacrifier leur vie même à ce fait. Ils l'ont trahi. Le
10 fait qu'ils n'aient pas été présents dans la JNA constitue aux yeux du
11 Procureur une preuve de plus pour affirmer que l'armée a été nettoyée
12 suivant un modèle ethnique. Tout a été mis sens dessus dessous dans cet
13 acte d'accusation.
14 Quel a été le comportement de l'armée ? L'armée populaire yougoslave, à la
15 tête de laquelle se trouvait M. Kadijevic, collabore étroitement avec M.
16 Carrington et tous les autres représentants de la communauté
17 internationale. C'est sous pression de la communauté internationale que
18 l'armée populaire yougoslave, pendant ces graves et durs combats avec les
19 effectifs des insurgés, aboutit à la signature de 14 trêves et c'est la
20 quinzième qui a été signée en janvier 1992, la quatorzième trêve a été
21 signée en novembre sous l'égide de M. Vance, émissaire du secrétaire
22 général des Nations Unies. Cela a été signé par M. Kadijevic, moment où, en
23 présence de Milosevic et Tudjman, il a été convenu pour une quatorzième
24 fois d'essayer d'assurer le déblocage des casernes de la JNA et des unités
25 de la JNA, afin que celles-ci se retirent du territoire de la Croatie. Cet
26 accord de Genève, Madame et Messieurs les Juges, est la preuve suprême du
27 fait que la JNA n'avait pas eu des aspirations agressives comme l'affirme
28 le Procureur, et qu'il n'y a pas eu de mise en place d'entreprise
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1 criminelle commune, parce qu'une armée qui accepte, dans l'intérêt de la
2 paix, de se retirer, même du territoire de la Croatie, aux fins de procéder
3 par la biais d'une conférence de paix à la recherche d'une solution
4 pacifique à cette crise yougoslave, une telle armée n'est pas partie
5 prenante à une entreprise criminelle commune, comme l'affirme de façon
6 infondée, d'après moi infondée, le Procureur.
7 Cette armée n'a fait que montrer qu'elle n'avait pas suffisamment de
8 détermination pour régler son compte à ceux qui avaient organisé une
9 insurrection armée. L'expert militaire de l'Accusation a expliqué que ces
10 14 insurrections ont constitué un grand avantage pour les forces armées
11 croates, insurrections que la JNA aurait pu -- j'ai fait un lapsus,
12 excusez-moi -- les 14 trêves violées et enfreintes auraient pu donner lieu
13 à 14 victoires de la part de la JNA, qui aurait pu étouffer aisément ces
14 velléités. En termes de boxe, cela aurait été 14 knock-down, 14 K.-O.
15 L'expert militaire, notre expert militaire, va bien montrer quel a été le
16 nombre des soldats de la JNA qui ont été tués et blessés et c'est
17 précisément pendant ces trêves et cessez-le-feu qu'il y en a eu le plus de
18 tués et de blessés, cessez-le-feu enfreints par les unités armées de la
19 Croatie.
20 En de telles circonstances, le 8 octobre, un jour après l'écoulement
21 du moratoire de Brioni, le moratoire de Brioni ayant prévu une pause du 7
22 juillet au 7 octobre, le 8 octobre 1991, le Sabor de la Croatie, à savoir
23 le parlement croate, prend la décision de procéder à une rupture des
24 relations et des liens d'Etat avec la Yougoslavie. On continue, la Croatie
25 va de l'avant. Il y a eu, entre-temps, de terribles et de graves conflits
26 armés sur le territoire de la Croatie. Le 9 octobre, le jour d'après, après
27 la prise d'une telle décision, M. Mesic qui, à l'époque, se trouvait encore
28 être président de la présidence de la Yougoslavie puisqu'il l'est devenu le
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1 1er juillet 1991, donc le 9 octobre, une fois que la Croatie dit qu'elle se
2 sépare de la Yougoslavie, M. Mesic dit qu'il continue à exercer ses
3 fonctions de chef de l'Etat. Il a continué à les exercer jusqu'au 5
4 décembre 1991, date à laquelle, au parlement croate, il a déclaré qu'il
5 avait accompli sa mission et que la Yougoslavie n'était plus.
6 Nous allons vous montrer ce document et prouver par le biais de
7 témoignages de témoins que M. Mesic, à la session du conseil d'Etat croate,
8 le 12 novembre 1991, a informé le président de la Croatie, M. Tudjman,
9 ainsi que le sommet de l'Etat croate tout entier, en disant que c'est par
10 le biais de ses contacts privés, en sa qualité de président yougoslave, en
11 passant par des liaisons privées qu'il avait à l'île de Korcula, pour
12 rendre visite à Andreotti, en Italie, de façon secrète et illégale. C'est à
13 cette réunion-là du conseil d'Etat croate, c'est également un document qui
14 nous a été communiqué par l'Accusation, Madame et Messieurs les Juges, que
15 Mesic informe le sommet de la direction croate, du fait qu'Andreotti lui
16 avait promis que l'Italie, l'Autriche et l'Allemagne allaient reconnaître
17 l'indépendance de la Croatie et de la Slovénie, quand bien même la
18 Communauté européenne refuserait de le faire. C'est à cette réunion que
19 Mesic, de façon cynique, dit : "Moi, j'ai soi-disant été là-bas en ma
20 qualité de président de l'Etat fédéral."
21 Cela parle de la moralité d'un homme qui a prêté serment lorsqu'il a
22 pris les fonctions de chef de l'Etat yougoslave.
23 Mais je parle de ce document pour une autre raison. Ces faits-là peuvent
24 être intéressants, mais il est un autre fait, M. Mesic explique à ce
25 moment-là à M. Tudjman et au reste de la direction croate pour dire que
26 l'homme politique italien M. Andreotti pendant cette réunion lui avait dit
27 : "Mais M. Carrington, Lord Carrington m'a informé moi du fait que M.
28 Milosevic, le président de la Serbie, lui avait affirmé qu'il n'avait
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1 besoin d'aucun pouce de territoire pour créer une Grande-Serbie. Lui
2 n'était intéressé que par les droits des Serbes en Croatie." Quand il a
3 entendu relater ces propos de la part de Milosevic par la bouche
4 d'Andreotti : "Je lui ai expliqué dit-il qu'il ne disait pas la vérité et
5 que c'est au travers de la Grande-Serbie qu'il visait à préserver la
6 Yougoslavie."
7 Pourquoi est-ce que je mentionne cet événement-là, Madame et Messieurs les
8 Juges. Ces forces séparatistes qui ont visé à démanteler la Yougoslavie
9 ont, de façon erronée, accusé les républiques yougoslaves qui voulaient
10 préserver cet Etat et concrètement la Serbie, les républiques qui étaient
11 loyales vis-à-vis de cet Etat fédéral, les ont accusés d'une fiction qui
12 était celle de l'existence d'une volonté de créer une Grande-Serbie. C'est
13 dans l'affaire de l'accusé, M. Milosevic, l'Accusation a renoncé à la thèse
14 disant qu'il y avait eu une volonté de créer une Grande-Serbie.
15 Le 8 octobre 1991, la Croatie prend la décision de rompre tous liens d'Etat
16 avec la Yougoslavie, et le 16 octobre on donne un délai à la JNA de se
17 retirer de la Croatie avant le 10 novembre. Cela se passe le 16 octobre. La
18 Croatie demande à l'armée fédérale de : "Quitter son territoire." A ce
19 moment-là, les conflits armés en Yougoslavie durent depuis longtemps, mais
20 la conférence sur la Yougoslavie dure également et le 17 octobre 1991, à La
21 Haye, par le biais de Lord Carrington, on propose une déclaration portant
22 sur la souveraineté de toutes les républiques yougoslaves qui
23 souhaiteraient obtenir l'indépendance. A une conférence internationale où
24 il y a forcément les principes de l'OSCE et de la charte des Nations Unies
25 qui s'appliquent, à savoir que la souveraineté et l'intégrité territoriale
26 des Etats sont inviolables, sont choses sacro-saintes, l'on adopte un
27 document réclamant qu'un Etat se supprime de soi-même. Imaginez que cela se
28 passe au Pays basque, en Catalogne, en Corse, où n'importe où en Europe ou
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1 en Amérique, ou dans le monde. C'est ce qui s'est passé sur le territoire
2 de la Yougoslavie. Lorsque les autorités fédérales de la Yougoslavie n'ont
3 pas accepté ce type de document, le 24 octobre 1991, on présente une autre
4 version du document émanant de la Communauté européenne pour la solution de
5 la crise en Yougoslavie. Le 31 octobre, on présente une troisième version
6 émanant également de la Communauté européenne. Le 1er novembre 1991, la
7 présidence de la Yougoslavie souligne que le document en tant que tel est
8 inacceptable et que cela n'apporte pas de solution juridique.
9 Le 4 novembre 1991 déjà, le conseil des ministres de la Communauté
10 européenne adopte un paquet de mesures respectives prévoyant de sanctionner
11 celles des républiques yougoslaves qui n'acceptent pas qu'il y ait
12 démantèlement de l'Etat. Ce sont des événements politiques qui se sont bel
13 et bien passés.
14 Mais ils sont liés aux chefs d'accusation du bureau du Procureur disant
15 qu'il y a entreprise criminelle commune qui illustrerait les intentions qui
16 seraient potentiellement vraies pour ce qui est des intentions de certaines
17 parties de la Yougoslavie. On verra que l'Union européenne a apporté son
18 soutien à la sécession de certaines républiques yougoslaves; ce sont là les
19 faits véritables.
20 Par conséquent, à compter du premier document présenté par Lord Carrington
21 pour ce qui est d'une solution pacifique de la crise yougoslave le 17
22 octobre 1991 jusqu'au 8 novembre 1991, il s'est passé très peu de temps, la
23 Défense se propose de vous montrer tout ce qui s'est passé pendant cette
24 période de temps. Le 8 novembre 1991, la Communauté européenne décide de
25 mettre en place des sanctions vis-à-vis des républiques yougoslaves
26 désobéissantes qui n'acceptent pas que la Yougoslavie soit brisée. Au lieu
27 d'imposer des sanctions à l'égard des républiques sécessionnistes de
28 Slovénie et de Croatie et d'empêcher le démantèlement d'un pays qui est
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1 membre des Nations Unies, la Communauté européenne met en place des
2 sanctions vis-à-vis de la Serbie-et-Monténégro alors que celle-ci était
3 contre ce type de document proposé. C'est l'environnement politique dans
4 lequel certaines choses se produisent sur le territoire de l'ex-
5 Yougoslavie. Bien entendu, dès le lendemain, le 9 novembre 1991, la
6 Yougoslavie s'adresse aux Nations Unies, la présidence de la Yougoslavie
7 s'adresse aux Nations Unies en lui demandant d'envoyer des troupes des
8 Nations Unies sur le territoire de la Yougoslavie pour trouver une solution
9 pacifique.
10 Le 9 novembre 1991, la présidence de la Yougoslavie a recherché
11 l'intervention des Nations Unies afin de protéger l'intégrité de la
12 Yougoslavie. Dès le 23 novembre 1991, Cyrus Vance, l'envoyé spécial du
13 secrétaire général des Nations Unies a pu obtenir un accord à Genève avec
14 Veljko Kadijevic, Tudjman et Milosevic concernant un cessez-le-feu et
15 l'arrêt du siège concernant les unités de la JNA partout en Croatie, de
16 même que la fin du siège de toutes les garnisons de la JNA en Croatie, ce
17 qui permettrait à la JNA de se retirer du territoire de la Croatie. Cet
18 accord qui avait été obtenu à Genève le 23 novembre fut la base de la
19 résolution des Nations Unies sur l'opération du maintien de la paix des
20 Nations Unies en Croatie qui a été adoptée au mois de février et qui est
21 connue sous le nom du plan Vance. Par conséquent, le leadership militaire
22 et politique de la Yougoslavie a exprimé sa bonne volonté le 23 novembre
23 1991 à Genève afin de faire tout son possible pour prévenir la guerre, y
24 compris faire le retrait de ses propres forces d'une partie de son propre
25 territoire. Cependant l'Accusation accuse la direction militaire dans cet
26 acte d'accusation d'avoir participé à une entreprise criminelle commune
27 dans le but d'expulser les non-Serbes depuis un tiers du territoire croate.
28 C'est peu crédible.
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1 Le 27 novembre 1991, à savoir seulement 15 jours après que le gouvernement
2 yougoslave ait soumis la demande aux Nations Unies d'envoyer les casques
3 bleus en Yougoslavie, la Résolution #721 a été adoptée par le Conseil de
4 sécurité concernant le déploiement urgent de troupes des Nations Unies en
5 Yougoslavie.
6 Le 9 décembre 1991, seulement un mois plus tard, la présidence de la RSFY a
7 dit à Lord Carrington que les décisions de la commission d'arbitrage
8 n'étaient pas acceptables, car celles-ci impliqueraient que la Yougoslavie
9 en tant qu'Etat allait s'effondrer, qu'elle allait disparaître de la carte.
10 Nous allons attirer encore une fois l'attention sur le S/23280, du 11
11 décembre 1991, un document qui avait été émis par le secrétaire général des
12 Nations Unies, où il dit au Conseil de sécurité et à la Communauté
13 européenne que selon les conditions de l'arrivée prévue des troupes des
14 Nations Unies en ancienne Yougoslavie, une reconnaissance prématurée de
15 certaines républiques yougoslaves pourrait avoir des effets désastreux pour
16 la région. En même temps que ce document S/23280 du Conseil de sécurité en
17 1991, il y avait également une lettre de M. Van den Broek qui avait été
18 envoyée par celui-ci au secrétaire général le 10 décembre 1991, où il
19 attire l'attention de la Communauté européenne sur le fait qu'une
20 reconnaissance prématurée serait comme mettre de l'huile sur le feu et que
21 le président de la Bosnie-Herzégovine et de la Macédoine et d'autres
22 républiques yougoslaves demandaient que ceci ne soit pas fait. Mais ce fut
23 néanmoins ce qui se passa le 23 décembre 1991, d'abord lorsque l'Allemagne
24 a reconnu la Croatie et la Slovénie, ensuite le 13 janvier 1992, lorsque le
25 Vatican a reconnu la Croatie et la Slovénie, de même que le 15 janvier
26 1992, lorsque d'autres pays appartenant à la Communauté européenne ont
27 également reconnu la Croatie et la Slovénie, contrairement à ce qui avait
28 été demandé par le secrétaire général. La Défense va montrer qu'avant cette
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1 reconnaissance, le président des Etats-Unis, George Bush, le premier George
2 Bush, lors d'une conversation avec M. Perez de Cuellar, secrétaire général
3 des Nations Unies, avait fait savoir qu'il serait inacceptable de
4 reconnaître trop tôt l'indépendance de certaines républiques yougoslaves
5 qui demandaient leur reconnaissance.
6 Pourquoi la Défense attire-t-elle l'attention sur ces événements ? Car ces
7 faits ont été négligés par l'Accusation. L'Accusation fait comme si elle
8 n'existait pas. Cependant, celle-ci démontre quel était l'environnement
9 politique de la crise yougoslave et les circonstances dans lesquelles les
10 actes de chacun des participants à la crise se sont produits, y compris M.
11 Martic et d'autres participants à l'entreprise criminelle commune alléguée.
12 Le 8 décembre 1991, à Zagreb, sous les auspices de la Communauté
13 européenne, il s'agissait d'environ 15 jours après l'accord de Genève daté
14 du 23 novembre 1991 sous l'égide de Vance, un accord fut concordé entre le
15 gouvernement croate et la JNA concernant le retrait de l'armée du
16 territoire de la Croatie, tout le territoire. Alors que l'Accusation dit
17 que la JNA, qui était attaquée en Croatie, le fait qu'elle était présente
18 est un élément constitutif de l'entreprise criminelle conjointe. Cet accord
19 concernant le retrait de la JNA du 8 décembre était le quinzième accord de
20 ce type, Madame et Messieurs les Juges, qui avait été négocié par la
21 Communauté européenne, mais celui-ci n'a pas été respecté parce que les
22 forces croates continuaient à attaquer sauvagement la JNA.
23 Des preuves logiques qui viennent en appui de ce que j'ai dit et de
24 ce qui est également considéré par l'Accusation, d'ailleurs, se trouvent
25 dans le fait que le 2 janvier 1992, un accord de paix fut signé à Sarajevo.
26 Le 23 novembre 1991, il y a eu un accord à Genève sous l'égide de Vance,
27 selon lequel la JNA allait se retirer; encore une fois, le 8 décembre, un
28 autre accord qui n'a pas été respecté par la Croatie; et ensuite, une fois
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1 de plus, à Sarajevo le 2 janvier 1992 concernant le retrait qui pouvait
2 permettre que les troupes des Nations Unies puissent se rendre dans le
3 territoire de l'ancienne Yougoslavie.
4 Pendant ce temps-là, avant la fin de l'année 1991, dans ces
5 circonstances politiques, un autre événement s'est produit qui est lié au
6 contenu de l'acte d'accusation. La République serbe de la Krajina a été
7 promulguée le 19 décembre 1991, une constitution a été adoptée et la
8 République serbe de la Krajina a été établie en tant qu'Etat du peuple
9 serbe qui auparavant avait vécu dans le territoire de la République de
10 Croatie et qui désormais faisait sécession et abandonnait la Yougoslavie.
11 Le peuple croate reconnaissait leur droit à faire sécession, et tout ce que
12 faisait le peuple serbe en Croatie, c'est de demander ce même droit. Il
13 s'agissait d'une population beaucoup plus petite, beaucoup plus faible,
14 seulement 12 % de la population, mais ils ne voulaient pas quitter leur
15 Etat, ils voulaient rester à l'intérieur de la République serbe de la
16 Krajina. Voici les circonstances politiques qui existaient lorsque beaucoup
17 d'acteurs très importants de l'ordre international travaillaient sur le
18 démantèlement de la Yougoslavie. Ce sont là des faits qui sont utilisés par
19 l'Accusation en tant que preuve pour appuyer une thèse d'entreprise
20 criminelle commune. Tout le monde en Yougoslavie, les Macédoniens, les
21 Croates, les Slovènes et Musulmans, tout le monde avait le droit à
22 l'autodétermination, seuls les Serbes n'en avaient pas le droit. Comme le
23 Procureur est généreux.
24 Concernant la mission de paix des Nations Unies en Yougoslavie, une
25 des conditions préalables, c'était un cessez-le-feu. Nous avons déjà vu les
26 documents au mois de janvier qui démontrent que ces conditions n'avaient
27 pas été remplies. Il n'y avait pas de cessez-le-feu effectif. Nous avons vu
28 également les documents du Conseil de sécurité qui selon lesquels la JNA
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1 était en train de se retirer de la Croatie, mais qu'il n'y avait toujours
2 pas de cessez-le-feu. Le dernier cessez-le-feu fut signé en janvier 1992,
3 et ceci a été suivi par les événements qui sont très liés au contenu de
4 l'acte d'accusation.
5 M. Babic, M. Milan Babic, président de la RSK, et le gouvernement de
6 la RSK ont adopté la position que les troupes des Nations Unies pourraient
7 arriver sur le territoire de l'ancienne Yougoslavie, que ceci serait utile,
8 mais ils avaient deux demandes, à savoir que les troupes devaient être
9 déployées sur la ligne de démarcation entre les Serbes et les Croates et
10 qu'il s'agisse des frontières de la RSK vis-à-vis de la Croatie. Est-ce que
11 c'est illogique ? Est-ce que ce n'est pas raisonnable ? C'est en tout cas
12 la pratique courante avant chacune des missions de maintien de la paix à
13 Chypre et ailleurs. Les troupes des Nations Unies étaient également
14 déployées sur la ligne de démarcation qui séparait les deux parties. C'est
15 ce que demandait M. Babic. Il demandait également une autre chose, à savoir
16 que les troupes de la JNA ne devaient pas se retirer du territoire de la
17 Krajina. M. Babic l'a expliqué à M. Goulding, il s'agissait d'une réunion à
18 Knin le 27 janvier, et il n'a pas changé d'optique. C'était aux facteurs
19 internationaux et à la Yougoslavie -- il demandait qu'ils restent sur le
20 territoire de la RSK Krajina afin de protéger la population serbe s'y
21 trouvant.
22 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Le 8 janvier, à cause du point de vue de
23 M. Babic concernant l'arrivée de la FORPRONU qui était contraire au plan
24 qui avait été envisagé pour le déploiement de ces troupes partout dans le
25 territoire de la Krajina et le retrait de la JNA du territoire de la
26 Krajina aussi, le 8 janvier, le président de la Serbie, Milosevic, a écrit
27 une lettre ouverte qui condamnait publiquement Babic et qui lui demandait
28 de rendre compte. M. Babic a répondu à cette lettre le 12 janvier. Le 30
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1 janvier, à Belgrade, il y a eu une réunion avec la présidence étendue de la
2 Yougoslavie. Outre les membres de la présidence, des représentants des
3 Serbes de la Krajina et de ceux de Bosnie qui avaient reconnu l'Etat
4 fédéral ont participé à cette séance qui a duré jusqu'au 31 janvier, de
5 même que les 1er et 2 février 1992. Un communiqué a été publié disant que la
6 partie yougoslave, l'Etat de Yougoslavie, en tant que partie qui demandait
7 l'arrivée des troupes des Nations Unies, était d'accord pour le déploiement
8 de ces mêmes troupes et garantissait que ces troupes seraient déployées de
9 la façon concordée. Ils ont également promis que la Yougoslavie
10 respecterait ses obligations. Lors de cette réunion, l'accord des Serbes de
11 Croatie a également été obtenu en la personne de M. Milan Paspalj. M. Babic
12 n'a pas participé.
13 Concernant cette réunion, la présidence de la Yougoslavie a informé le
14 Conseil de sécurité que les troupes des Nations Unies allaient être
15 présentes afin de protéger les Serbes de la Krajina si -- au cas où -- ou
16 plutôt que la JNA protégerait les Serbes locaux si les forces des Nations
17 Unies ne le faisaient pas. Ceci a calmé les craintes de la population
18 locale serbe. Cette réunion a eu lieu à Belgrade, à savoir dans la ville
19 qui était la capitale de leur propre pays, mais encore une fois,
20 l'Accusation voit là les preuves d'une entreprise criminelle commune. Ils
21 disent : regardez, ils se sont rendus à Belgrade. Pourquoi des Serbes de la
22 Krajina devraient-ils se rendre à Belgrade ? Mais, Madame et Messieurs les
23 Juges, seul l'Etat de la Yougoslavie était légalement en existence à
24 l'époque. Et c'est à l'invitation du président de leur Etat que les Serbes
25 se sont rendus à Belgrade pour accepter le plan Vance.
26 En dépit de tout cela, je ne vais pas en rentrer dans le détail de ce
27 prétend l'Accusation en matière de la date de fin de la Yougoslavie. En
28 fait, la raison de cette réunion était d'accepter le déploiement des
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1 troupes des Nations Unies -- le plan des Nations Unies. Même ceci est
2 utilisé par l'Accusation comme preuve de l'existence d'une entreprise
3 criminelle commune. C'est absurde, complètement absurde.
4 Une chose encore concernant M. Babic. Son point de vue que les
5 troupes des Nations Unies devraient être déployées le long de la ligne de
6 démarcation et que la JNA devait rester en Krajina pour protéger la
7 population locale, M. Babic a expliqué pourquoi il le pensait, pourquoi il
8 insistait là-dessus, même auprès des représentants internationaux. Sur ce
9 point, il était en désaccord avec l'homme politique qui avait le plus
10 d'influence à l'époque, M. Milosevic. Nous avons entendu qu'il se peut
11 qu'il fut un homme très ambitieux, mais il est néanmoins très important de
12 savoir pourquoi il a pris ce risque de se confronter à M. Milosevic. Comme
13 nous l'avons vu plus tard, il se peut qu'il ait eu raison. Les Serbes n'ont
14 pas été protégés par les troupes des Nations Unies. Il y a eu cinq
15 opérations d'attaque contre les Serbes de la part des Croates, qui se sont
16 achevées avec les opérations Eclair et Tempête, où 250 à 300 000 Serbes
17 furent déportés de la Croatie, y laissant simplement 50 000 personnes sur
18 les 581 000 qu'il y avait au moment du recensement de 1991. Après les
19 opérations militaires de l'armée croate, il ne restait plus que 50 000
20 personnes. Dans ces circonstances, l'Accusation parle d'une entreprise
21 criminelle commune serbe.
22 On peut dire que M. Babic avait une bonne raison d'insister sur son
23 point de vue qu'il avait présenté au mois de septembre également. Nous lui
24 avons présenté la lettre qu'il avait écrite à l'époque, disant que la JNA
25 agissait de façon correcte et régulière, que les Serbes dans la Krajina
26 simplement demandaient les mêmes droits que la population croate avait
27 déjà, à savoir de décider de leur propre destinée, et que les raisons de
28 tous ces désordres était la conduite des nouvelles autorités croates néo-
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1 nazies.
2 Que tout ce que M. Babic avait fait à l'époque était raisonnable,
3 logique et justifié par ce qui s'est produit par la suite. On ne peut pas
4 nier ces faits.
5 Le 14 -- pardon, le 4 février 1992, à New York, après que la
6 présidence à la Yougoslavie avait déclaré le 3 février qu'elle allait
7 accepter le plan Vance, Boutros Boutros-Ghali a déclaré que les lois
8 croates n'allaient pas être appliquées dans les zones sécurisées par les
9 Nations Unies en Yougoslavie, en Croatie. C'est ce qui a été affirmé par M.
10 Marek Goulding au nom des Nations Unies, et en particulier, le Conseil de
11 sécurité. Le 14 mai, la présidence en Yougoslavie a émis une ordonnance
12 selon laquelle le système juridique de la Yougoslavie allait s'appliquer
13 aux parties de la Yougoslavie qui étaient sous la protection spéciale des
14 Nations Unies. Cela était également le point de vue des Nations Unies et la
15 décision de l'Etat fédéral yougoslave, à savoir que les zones où les
16 troupes des Nations Unies étaient déployées étaient des zones où la
17 législation yougoslave s'appliquait également. C'est ce qui s'est produit,
18 et cela a été appliqué dans toutes les décisions concernant la République
19 serbe de la Krajina.
20 Depuis le 3 février 1992, la présidence à la Yougoslavie avait obtenu
21 le consentement de la RSK. L'assemblée à Glina avait adopté les décisions
22 nécessaires permettant d'accepter ce plan, et M. Borislav Jovic, président
23 du comité d'Etat pour la coopération avec les Nations Unies, a informé de
24 ces faits les Nations Unies, et là, il s'agit encore une fois d'un document
25 officiel du Conseil de sécurité. Lors de la réunion à Glina le 9 février
26 1992, M. Martic était présent et a également appuyé le plan Vance. Il y
27 avait également le vice-président de la présidence de la Yougoslavie,
28 Branko Kostic, et Blagoje Adzic, qui était ministre de la Défense en
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1 fonction. Leur présence à Glina, afin de pouvoir obtenir l'acceptation du
2 plan des Nations Unies, a également été utilisée par l'Accusation comme
3 preuve d'une entreprise criminelle commune. "Regardez, il y a des
4 personnes, des autorités étatiques qui ont rendu visite à ces Serbes
5 rebelles," dit-elle.
6 Ensuite, le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté la
7 Résolution #743 concernant les zones sous la protection des Nations Unies
8 en Yougoslavie, et M. Babic fut remplacé en tant que président de la RSK,
9 car il n'était pas d'accord avec le plan Vance. Le 26 février 1992, un
10 nouveau président de la RSK a été élu. Le 29 février 1992, en Bosnie, une
11 autre république yougoslave, on y organisa un référendum croate et musulman
12 concernant l'indépendance de cette république mais sans la participation
13 des Serbes.
14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant de poursuivre avec ceci, peut-on
15 faire une pause, Monsieur Milovanovic ? Merci. Nous allons faire une pause
16 et revenir ici à midi.
17 --- L'audience est suspendue à 12 heures 01.
18 --- L'audience est reprise à 12 heures 30.
19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic, de combien de
20 temps avez-vous encore besoin ?
21 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, il est difficile
22 de vous donner une estimation. J'essaie de parler assez lentement pour
23 faciliter la tâche des interprètes. Si je devais présenter mes arguments
24 par écrit ce serait plus court, mais je suppose que j'en aurai terminé
25 demain lors de la première séance.
26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître
27 Milovancevic. Excusez-moi, Monsieur Whiting ?
28 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que vous
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1 pourriez m'accorder cinq ou dix minutes à la fin de l'audience
2 d'aujourd'hui. J'avais quelques questions d'intendance à soulever et je
3 souhaiterais en parler aujourd'hui. Je pensais que la déclaration liminaire
4 de la Défense serait terminée aujourd'hui. Si vous pouviez m'accorder cinq
5 ou dix minutes à la fin de l'audience, je vous en serais reconnaissant.
6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic, est-ce que vous
7 pensez qu'il serait possible d'accorder cinq ou dix minutes à la fin de
8 l'audience d'aujourd'hui à M. Whiting pour traiter de ces questions
9 d'intendance ?
10 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président.
11 Avant la pause, nous avons dit que l'acceptation du plan Vance par les
12 yougoslaves s'est traduite par la décision de la République serbe de
13 Krajina à Borovo Selo visant à remplacer le président de la RSK, M. Babic,
14 car M. Babic n'était pas favorable au plan Vance.
15 Concernant les allégations rapportées dans l'acte d'accusation pour ce qui
16 est de la Bosnie-Herzégovine, nous avons reçu des éléments de preuve durant
17 la présentation des moyens à charge qui mettent en exergue les problèmes à
18 cet endroit, mais la Défense souhaite dire de nouveau que l'approche
19 adoptée par l'Accusation est très sélective. On choisit deux ou trois
20 endroits sur un territoire vaste et, en examinant ces événements hors de
21 leur contexte, on tire des conclusions à propos de l'ensemble de la région.
22 Ce qui est pire encore c'est que l'on tire des conclusions concernant
23 l'existence d'une entreprise criminelle commune qui portait également sur
24 la Bosnie-Herzégovine.
25 La Défense démontrera qu'au cours de cette période, en Bosnie-Herzégovine,
26 y compris pendant la période couverte par l'acte d'accusation en l'espèce,
27 à partir du mois de février 1992, et à cet égard je rappelle à la Chambre
28 que l'un des témoins à charge, M. Kirudja nous a dit qu'au début du mois
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1 d'avril 1992, lorsqu'il est arrivé en ex-Yougoslavie, la situation était
2 calme et tranquille. Etait-ce une illusion ? Etait-ce la réalité ? Nous
3 démontrerons ce qu'il en était par le biais d'éléments de preuve. En ce qui
4 concerne la Bosnie-Herzégovine, en décembre 1992, les dirigeants de la
5 Bosnie-Herzégovine se sont adressés au secrétaire général des Nations
6 Unies, il en parle d'ailleurs dans un document daté du 11 décembre 1991,
7 pour dire qu'une reconnaissance prématurée ne devrait pas être reconnue
8 pour certaines républiques yougoslaves. Pourtant cette reconnaissance
9 prématurée a bien eu lieu malgré tous les avertissements. Ceci est
10 important à la lumière de la présentation des moyens à charge. Il est
11 important d'expliquer comment cela s'est passé.
12 Le 29 février 1992, un référendum a été tenu en Bosnie-Herzégovine et les
13 populations croates et musulmanes y ont participé. La République yougoslave
14 de Bosnie-Herzégovine était particulièrement bien connue du fait que trois
15 groupes ethniques constitutifs en faisaient partie, les Musulmans, les
16 Croates et les Serbes. Ces trois nations vivaient là-bas et constituaient
17 la population de la Bosnie-Herzégovine depuis des siècles. La constitution
18 de la Bosnie-Herzégovine définissait cette république comme une union des
19 trois nations constitutives. Cela a été défini de la même manière dans la
20 constitution de la Yougoslavie. Seuls les peuples avaient un statut
21 souverain et non pas les minorités nationales. Etant donné que la Bosnie-
22 Herzégovine était une république où vivaient ensemble trois communautés de
23 confession religieuse et d'appartenance ethnique différente, il était très
24 important de préserver cet équilibre et d'accorder le même traitement aux
25 trois communautés ethniques afin d'éviter tout conflit.
26 Pour bien comprendre la situation qui prévalait en Bosnie-Herzégovine en
27 tant qu'unité fédérale de la Yougoslavie, je rappellerai que pendant la
28 Deuxième Guerre mondiale la Bosnie-Herzégovine faisait partie de ce qu'on
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1 appelait l'Etat indépendant de Croatie, l'Etat Oustachi. Sur le territoire
2 de la Bosnie-Herzégovine également les Serbes ont été victimes d'un
3 génocide abominable. Voilà que le 29 février 1992, alors que la crise en
4 Yougoslavie suivait l'évolution que nous connaissons et après que le
5 conseil de sécurité eut adopté une résolution visant à envoyer des troupes
6 en Yougoslavie dans certaines régions de Croatie où les Serbes formaient
7 une majorité importante de la population et où des tensions interethniques
8 avaient, par le passé, conduit à des conflits, dans ce contexte, on
9 organise soudain un référendum en Bosnie-Herzégovine, référendum auquel
10 devaient participer deux communautés ethniques, les Croates et les
11 Musulmans contre la troisième communauté ethnique, les Serbes. Là encore le
12 même problème se pose qu'en Croatie et qu'en Slovénie : est-ce que la
13 Bosnie-Herzégovine deviendra indépendante ou est-ce qu'elle continuera à
14 faire partie intégrante de la Yougoslavie ? Ce référendum, tenu le 29
15 février 1992, a eu lieu au moment où le Conseil de sécurité des Nations
16 Unies avait déjà décidé, dans sa résolution concernant le plan Vance, de
17 certaines mesures et toutes les parties yougoslaves s'étaient engagées à
18 permettre à la JNA de quitter le territoire de la Croatie, y compris la
19 Krajina, et de quitter les zones qui devaient être protégées par les
20 Nations Unies.
21 Au moment où le Conseil de sécurité prend une décision concernant
22 cette opération de maintien de la paix et alors que l'armée populaire
23 yougoslave accepte de se retirer du territoire croate, la Bosnie fait
24 partie du territoire yougoslave, qui est une frontière commune avec la
25 Croatie. La décision de retirer la JNA de Croatie signifiait qu'il fallait
26 qu'ils aillent en Bosnie-Herzégovine, qui se trouve à la frontière de la
27 Croatie. Depuis ce territoire yougoslave, puisque la Bosnie-Herzégovine
28 faisait partie de la Yougoslavie, il est plus facile d'intervenir
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1 militairement au cas où la population serbe en Croatie serait attaquée.
2 Mais les événements politiques ont pris un tour bien différent. Le 29
3 février 1992 a lieu ce référendum qui implique deux nations en Bosnie-
4 Herzégovine, les Musulmans et les Croates. Il a été décidé que la Bosnie
5 ferait sécession, quitterait la Yougoslavie. Les Serbes, de leur côté, ont
6 organisé leur propre référendum et ont déclaré qu'ils souhaitaient "rester
7 au sein de la Yougoslavie." Une crise politique a alors éclaté en Bosnie-
8 Herzégovine, la communauté internationale est intervenue, notamment les
9 Nations Unies et la Communauté européenne. Les événements en Bosnie ne
10 présageaient rien de bon. Le référendum a eu lieu le 29 février. Dès le
11 mois de mars de cette année, un incident terrible a eu lieu à Sarajevo.
12 Pour comprendre la situation en Bosnie, il est très important de rappeler
13 que la population était totalement mixte. Il n'y avait pas de régions
14 exclusivement peuplées de Croates, de Serbes ou de Musulmans. Non, ces
15 communautés vivaient ensemble depuis de nombreux siècles. Après
16 l'expérience de la Deuxième Guerre mondiale, ces communautés ont continué à
17 vivre ensemble. Dans l'ancienne Yougoslavie, celle qui avait existé jusque-
18 là, on disait fréquemment que la Bosnie était un exemple, un modèle de
19 fraternité et d'unité, trois nations, trois communautés de confessions
20 religieuses différentes. Pourtant, alors que la situation en Croatie
21 n'avait toujours pas été résolue, que les troupes des Nations Unies
22 n'avaient pas toujours été déployées et que la JNA ne s'était pas retirée,
23 à Sarajevo, un certain Nikola Gardovic a été tué par les forces musulmanes.
24 On a mis en garde cet homme appelé Nikola Gardovic qui était le père du
25 marié à une cérémonie de mariage. On a confisqué et brûlé le drapeau serbe
26 qui était brandi lors de cette cérémonie de mariage. C'est un crime isolé,
27 mais de tels crimes arrivent. Mais ce crime particulier a causé des
28 troubles graves sur l'ensemble du territoire de la Bosnie. Le désordre a
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1 commencé à envahir les rues de Sarajevo à cause de cet incident.
2 Le 18 mars 1992, 19 jours plus tard, sous les auspices de la
3 Communauté européenne, des négociations ont commencé à Lisbonne concernant
4 l'avenir de la Bosnie-Herzégovine. Les représentants des trois principaux
5 partis politiques étaient présents : le parti musulman, le SDA, qui était
6 le Parti de l'Action démocratique dirigé par Alija Izetbegovic, le Parti
7 démocratique serbe dirigé par Radovan Karadzic, et l'Union démocratique
8 croate. Ces trois partis de Bosnie se sont rencontrés à Lisbonne sous
9 l'égide du président de la Communauté européenne, M. Cutileiro, et on en
10 est arrivé au plan Cutileiro qui visait à résoudre la crise en Bosnie-
11 Herzégovine.
12 D'après ce plan, les trois partis, les Musulmans, les Serbes et les
13 Croates, et les représentants des trois communautés ethniques ont convenu
14 que la future Bosnie serait organisée en fonction des cantons. Il y aurait
15 trois unités constitutives, et d'après les cartes qui ont été envisagées,
16 les Musulmans devaient obtenir 44 % du territoire, les Croates, 12 %, et
17 les Serbes, 44 %. Ce plan, qui était appuyé par la Communauté européenne,
18 voulait éviter que la Bosnie ne soit confrontée à la guerre. La Défense
19 démontrera que quelques jours plus tard seulement, le 25 mars 1992, à
20 l'initiative de l'ambassadeur américain à Belgrade Warren Zimmermann, le
21 chef des Musulmans de Bosnie Alija Izetbegovic est revenu sur ce plan et a
22 retiré sa signature.
23 Le 26 mars, après ce tournant dans l'évolution de la situation
24 politique, des forces croates et musulmanes, dans un village situé près de
25 Bosanski Brod, Sijekovac [phon], ont massacré 21 civils serbes. Les Serbes
26 de Bosnie-Herzégovine ont réagi à cela en tenant leur propre réunion de
27 l'assemblée et ont adopté la première constitution des Serbes de Bosnie-
28 Herzégovine. Les dirigeants musulmans de Bosnie-Herzégovine ont réagi en
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1 prenant la décision du 4 avril proclamant la mobilisation de la Défense
2 territoriale sur l'ensemble du territoire de la Bosnie-Herzégovine. Juste
3 après cela, le 6 avril 1992, malgré les mises en garde du secrétaire
4 général des Nations Unies, la Communauté européenne a reconnu la Bosnie-
5 Herzégovine comme un Etat indépendant et souverain en se fondant sur le
6 référendum tenu par deux nations de Bosnie, sans la participation de la
7 troisième nation le 29 février 1992. Le lendemain, le 7 avril, les Etats-
8 Unis ont reconnu la Bosnie. La population serbe et les partis politiques
9 serbes de la Bosnie-Herzégovine ont réagi le 7 avril en proclamant la
10 création de la Republika Srpska lors d'une réunion de l'assemblée du peuple
11 serbe de Bosnie-Herzégovine.
12 Nous en arrivons à la date du 7 avril 1992. C'était l'époque où M.
13 Kirudja, haut fonctionnaire des Nations Unies, est arrivé sur le territoire
14 de la Yougoslavie. Il a dit que la situation en Bosnie était toujours
15 paisible, tranquille. Après, les événements n'ont fait qu'empirer. Après la
16 reconnaissance de la Bosnie les 6 et 7 avril par certains Etats, le statut
17 de la JNA posait problème. Jusqu'à la date du 6 avril 1992, la JNA en
18 Bosnie était déployée sur son propre territoire. La Bosnie était une
19 république centrale au plan géographique, c'était une région montagneuse.
20 La JNA y était déployée, et pour les raisons stratégiques que je viens de
21 mentionner, les principales installations militaires, le principal entrepôt
22 d'armes, les aéroports les plus importants tels que celui de Bihac, un
23 aéroport sous terrain situé dans les montagnes, les usines militaires les
24 plus importantes se trouvaient toutes en Bosnie-Herzégovine. Le retrait de
25 la JNA de Bosnie-Herzégovine était un désastre, car la JNA perdait là toute
26 son industrie militaire, ses entrepôts les plus importants, mais malgré
27 cela, le 26 avril 1992, comme le démontrera la Défense, des pourparlers ont
28 eu lieu à Skopje entre le général Blagoje Adzic, chef de l'état-major
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1 général de la JNA, et le président de la présidence de Bosnie-Herzégovine,
2 Alija Izetbegovic. C'était le 26 avril 1992, alors que la Bosnie avait déjà
3 été reconnue par certains Etats, ce qui ne signifiait pas pour autant que
4 c'était déjà un Etat indépendant. Mais il en allait là de la survie de la
5 JNA. Un accord a alors été conclu entre Alija Izetbegovic et les hauts
6 responsables de la JNA. Il a été conclu que la JNA se retirerait
7 tranquillement du territoire de la Bosnie-Herzégovine. Le problème
8 principal avait été résolu.
9 D'après cet accord, rien ne justifiait la guerre. Trois jours plus tard
10 seulement, malgré l'accord qui avait été conclu et qu'il avait signé avec
11 la JNA le 26 avril, Alija Izetbegovic et ses collaborateurs ont donné un
12 ordre le 29 avril 1992 afin de barrer complètement et sur une grande
13 échelle l'accès à toutes les routes utilisées par la JNA pour se retirer de
14 la Bosnie-Herzégovine. Il s'agissait également d'assiéger toutes les
15 installations militaires de Bosnie-Herzégovine. Troisièmement, il fallait
16 empêcher les unités de la JNA de quitter les casernes. Quatrièmement, il
17 fallait commencer de façon urgente des opérations militaires contre la JNA
18 sur l'ensemble du territoire de la Bosnie-Herzégovine.
19 Quelqu'un voulait en arriver à la guerre et au désastre, mais ce qui s'est
20 passé n'était pas le fruit d'une entreprise criminelle commune des Serbes,
21 comme l'affirme l'Accusation.
22 Après la décision prise le 29 avril 1992, un conflit armé généralisé a
23 éclaté sur l'ensemble du territoire de la Bosnie-Herzégovine. La Défense
24 produira des documents, des rapports opérationnels émanant du secrétariat
25 fédéral à la Défense nationale. Il s'agit de documents qui ont été envoyés
26 à la présidence de Yougoslavie, aux présidents des républiques, à la
27 Conférence de La Haye et à d'autres instances internationales. Ces
28 documents concernent la Bosnie-Herzégovine. Cependant, la JNA a poursuivi
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1 son retrait de Bosnie-Herzégovine. Le 3 mai 1992, en présence de la
2 FORPRONU, par l'entremise du général canadien Lewis MacKenzie et de Carl
3 Doyle, émissaire de la Communauté européenne, un accord a été signé avec
4 Alija Izetbegovic concernant un retrait pacifique de Sarajevo. Les conflits
5 armés avaient déjà commencé, mais au terme de cet accord et grâce à la
6 médiation de MacKenzie et Doyle, on a convenu de cela. Le général MacKenzie
7 faisait partie du convoi de la JNA qui a été attaqué brusquement au centre
8 de Sarajevo. Des soldats de la JNA ont été tués à cette occasion et le
9 général de la FORPRONU a été témoin d'un crime terrible à l'occasion duquel
10 la JNA a été trahie.
11 En réponse à cet événement, ce massacre qui a eu lieu au centre de
12 Sarajevo le 4 mai 1992, la présidence de la Yougoslavie a décidé que tous
13 les membres de la JNA en Bosnie-Herzégovine qui étaient citoyens de la
14 République fédérale de la Yougoslavie devaient rentrer sur le territoire de
15 la Yougoslavie dans les 15 jours.
16 Il n'y a pas plus de doute s'agissant du fait de savoir si les
17 dirigeants politiques de la Yougoslavie étaient en faveur ou non du
18 retrait. Il s'agissait d'un appel public en vue du retrait.
19 Le 15 mai 1992, le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté la
20 Résolution #752 visant à mettre fin au combat en Bosnie-Herzégovine, mais
21 le même jour, à Tuzla, au nord de la Bosnie, un convoi de la JNA qui était
22 en train de quitter Tuzla a été attaqué. Plus de 200 des 600 soldats qui le
23 composaient ont été tués. Ceci a été le fait d'une unité paramilitaire
24 musulmane.
25 Malgré ce type d'agissement, le 22 mai 1992, la Bosnie-Herzégovine,
26 la Croatie et la Slovénie sont devenus membres des Nations Unies en tant
27 qu'Etats indépendants. En Bosnie-Herzégovine, un conflit armé faisait rage
28 en Croatie. La FORPRONU n'avait pas encore été déployée et un conflit
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1 faisait encore rage. La JNA avait quitté la Slovénie. Malgré tout cela, ces
2 trois Etats sont devenus membres des Nations Unies. Tout cela s'est produit
3 au moment où les troupes des Nations Unies n'avaient pas fini de se
4 déployer en Yougoslavie, et la résolution des Nations Unies prévoyait que
5 les troupes des Nations Unies maintiennent la paix de façon à ce que l'on
6 trouve une solution pacifique à la crise en Yougoslavie au niveau général.
7 Mais soudain, le Conseil de sécurité accueille en son sein trois Etats
8 membres, trois ex-Etats yougoslaves qui deviennent membres des Nations
9 Unies.
10 Ces caractéristiques, la Défense se propose d'en parler également parce que
11 cela illustre bien la situation en Bosnie-Herzégovine. Mais quelles sont
12 les véritables causes ? Quelles sont les conséquences de ce qui s'est
13 passé ? Avec une campagne médiatique très importante, ces trois ex-
14 républiques socialistes se sont vues recevoir aux Nations Unies une session
15 du Conseil de sécurité présidée par Petar Hornfeller [phon]. La réunion a
16 été extrêmement courte. Il a été prononcé une seule phrase sans parler de
17 la substance des choses. La charte des Nations Unies, article 2, prévoit
18 que peuvent être membres des Nations Unies des Etats souverains, et c'est
19 sous ces prémisses-là qu'il a été procédé à la réception, à l'admission de
20 ces Etats par acclamation. Alors, la procédure qui jusque-là avait été
21 respectée à chaque fois nécessitait qu'il s'écoule au moins 35 jours avant
22 la réception d'un pays. Mais cela n'a pas été respecté. Le secrétaire
23 général des Nations Unies a délégué un représentant, M. Samir Shihabi, qui
24 était représentant de l'Arabie saoudite, qui a souhaité une bonne admission
25 à ses frères musulmans, et c'est dans ces circonstances que les trois
26 républiques ont été acceptées dans les rangs des Nations Unies, suite à
27 quoi c'est ce qui a défini l'évolution des événements en Bosnie-
28 Herzégovine. Bon nombre d'éléments de preuve viendront l'étayer.
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1 La guerre de propagande, Madame et Messieurs les Juges, les désinformations
2 et le traitement médiatique des populations sont autant de formes de guerre
3 spéciale. Nous allons le démontrer. La crise de la Yougoslavie a connu un
4 nombre incroyable de supercheries. Le 27 mai 1992, au centre de Sarajevo,
5 dans la rue bien connue de Vase Miskina, il explose une grenade parmi des
6 gens qui étaient en train de faire la queue pour le pain. Il y a 16
7 personnes de tuées et plus d'une centaine de personnes blessées. Cela a été
8 la raison pour laquelle la délégation musulmane à Lisbonne a interrompu les
9 négociations concernant l'organisation constitutionnelle de la Bosnie-
10 Herzégovine. Parce que la Bosnie-Herzégovine a été reçue dans les Nations
11 Unies et on était en train de négocier des modalités d'une coexistence
12 pacifique entre les trois groupes ethniques. Cela se passe le 27 mai 1992,
13 cette terrible explosion.
14 Le 23 août 1992, deux mois à peine plus tard, suite à l'examen de rapports
15 confidentiels de la FORPRONU obtenus par Satish Nambiar, le commandant de
16 la FORPRONU, un reporter du journal Independent de New York dévoile que
17 quelques massacres terribles à Sarajevo, y compris le meurtre de 16 civils,
18 16 civils qui faisaient la queue pour le pain, a été commis par les
19 Musulmans pour s'acquérir le soutien des médias en faveur d'une
20 intervention militaire et que cela n'a pas été l'œuvre des Serbes qui en
21 ont été accusés. C'est le journal Independent de New York qui en parle le
22 23 août 1992. Mais les conséquences politiques ont déjà eu lieu. Les
23 pourparlers ont été interrompus et le 30 mai 1992, suite à l'interruption
24 de ces négociations concernant l'avenir de la Bosnie-Herzégovine et après
25 le massacre de Sarajevo, le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté
26 la Résolution #757 où il met en place un régime de sanctions généralisées à
27 l'égard de la Yougoslavie, en raison des événements en Bosnie-Herzégovine.
28 Le 30 mai 1992, le Conseil de sécurité estime que c'est la
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1 Yougoslavie qui est coupable de ce qui se passe sur le territoire de la
2 Bosnie-Herzégovine. Toutefois, trois jours plus tard à peine, la presse
3 mondiale informe du choc subi à New York, parce que le secrétaire général
4 des Nations Unies, Boutros-Ghali, a rédigé un rapport le 30 mai 1992, date
5 à laquelle il a été adopté une résolution concernant la Yougoslavie, lequel
6 rapport a été dissimulé vis-à-vis du Conseil de sécurité et n'a été publié
7 que deux jours plus tard, après qu'une partie en Yougoslavie, la partie
8 yougoslave, l'Etat fédéral ait fait l'objet de sanctions des Nations Unies.
9 Ce n'est qu'après le rapport du secrétaire général des Nations Unies a été
10 publié, rapport qui existait déjà avant l'adoption, disant que ces forces
11 des Serbes de Bosnie échappaient au contrôle de Belgrade, alors que l'on
12 avait affirmé que c'était le cas. Or, on dit que les forces serbes de
13 Bosnie échappaient au contrôle de Belgrade. Boutros-Ghali informe du fait
14 que la JNA ne s'était pas retirée de Bosnie-Herzégovine en raison du siège
15 de ses garnisons par les forces des Musulmans de Bosnie de M. Izetbegovic.
16 Troisièmement, il est fait état dans ce rapport d'une agression croate en
17 Bosnie-Herzégovine. C'est ce qui a été appelée l'opération de la création
18 d'un corridor, qui est reproché par l'Accusation à M. Martic. Le secrétaire
19 général a parlé de la présence de troupes croates sur le territoire de la
20 Bosnie-Herzégovine, alors que l'Accusation affirme qu'il y a eu une
21 opération désignée à créer une Grande-Serbie plutôt que de parler du fait
22 d'avoir coupé la seule route possible que pouvait utiliser les agresseurs
23 en provenance d'un autre Etat, à savoir de la Croatie. Le 15 juin 1992, un
24 nouveau président de la Yougoslavie, M. Dobrica Cosic, a été élu. Il est
25 intéressant de le dire, parce qu'après cette date, la présidence de la RSFY
26 n'existe plus.
27 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur
28 Milovancevic, je m'excuse de vous interrompre, mais j'ai besoin de
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1 consulter mon éminent confrère, le Président de la Chambre.
2 [La Chambre de première instance se concerte]
3 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Monsieur Milovancevic, je
4 vous prie d'accepter le fait que je regrette cette interruption, mais je
5 me sens tenue d'intervenir en ce moment. La finalité d'un propos liminaire
6 est très concrète. Je me suis retenue, j'avais espéré que vous alliez vous
7 centrer et que nous allions apprendre de votre bouche quels sont les
8 éléments de preuve qui constitueront les éléments-clés de la Défense et
9 quels sont les éléments de preuve que vous avez l'intention de présenter
10 aux Juges de la Chambre. Mais jusqu'à présent, je ne peux pas faire la
11 distinction entre les commentaires que vous faits personnellement, la toile
12 de fond historique que vous avancez, et je dois dire qu'en ce moment, je ne
13 suis pas en mesure d'évaluer au travers des propos qui sont les vôtres
14 quels sont les éléments de preuve que vous avez l'intention de nous
15 présenter. Les Juges de la Chambre, et je pense pouvoir parler au nom de
16 mes éminents confrères, puisque j'ai pris la liberté de les consulter avant
17 que de m'adresser à l'auditoire, je voulais dire que les Juges de la
18 Chambre ne devraient pas être dans la confusion ou le mystère pour ce qui
19 est des éléments de preuve que vous avez l'intention de présenter.
20 Je sais que mes éminents confrères, le Président de la Chambre et mon autre
21 confrère, ont l'intention de vous rediriger vers les éléments centraux afin
22 que nous comprenions quels sont les éléments qui constituent vos
23 commentaires et quels sont les éléments de preuve que vous avez l'intention
24 de présenter pour étayer votre thèse. Je ne pense pas pouvoir m'exprimer de
25 façon plus claire et j'estime que cela de vous servira de ligne directrice
26 à l'avenir. Ayez l'amabilité de nous indiquer quelle est la finalité de ce
27 propos liminaire et j'aimerais qu'en votre qualité de conseil de la
28 Défense, que vous le fassiez de façon plus directe.
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1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Madame le Juge.
2 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Je vous en prie.
3 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Il s'agit d'une approche méthodologique
4 que la Défense a choisi d'adopter. Si vous me demandez maintenant
5 d'expliquer ce qui se passe et les raisons pour lesquelles cela se passe,
6 je vais le faire très brièvement. Nous avons remis une liste des éléments
7 de preuve que nous nous proposons d'utiliser dans la présentation de notre
8 affaire, de la Défense que nous nous proposons de présenter ici. Ce sont
9 des éléments de preuve émanant des Nations Unies, des organes fédéraux et
10 des documents qui ont été communiqués à la Défense en application du 65 ter
11 par l'Accusation. Ce faisant, par le choix de cette approche, la Défense
12 s'est efforcée de contester la thèse principale de l'Accusation, qui est
13 celle d'une entreprise criminelle commune. En essayant de présenter une
14 chronologie des événements aux fins de démontrer quelle est la séquence
15 chronologique des événements qui ne fait que démentir les conclusions
16 tirées par l'Accusation aux termes desquels, sur le territoire énoncé par
17 l'acte d'accusation, il est survenu les événements qui sont énumérés à
18 l'acte d'accusation. L'approche de l'Accusation a fait ressentir à la
19 Défense la nécessité de présenter aux Juges de la Chambre la chronologie
20 des événements. Cette chronologie des événements est une chose publique, ce
21 sont des documents qui sont à caractère public. La question qui se pose
22 maintenant, c'est de savoir si la Défense, dans cette phase-ci, devrait
23 indiquer quels sont les documents concrets. La Défense a cité les
24 résolutions des Nations Unies et les différentes conclusions et nous allons
25 présenter ces documents au moment voulu pour étayer nos dires. Ce qui
26 importe maintenant, c'était de faire un résumé qui est censé démontrer que
27 les choses se sont passées de façon autre que ne l'est la séquence des
28 événements présentée par l'Accusation, parce que celle-ci a présenté des
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1 extraits arrachés à leur contexte de la situation sur le terrain. Cette
2 approche est conditionnée par la nécessité de la Défense de démontrer que
3 les événements, les comportements et les décisions et les agissements ne
4 sauraient être sautés et ne sauraient être dénués d'une corrélation ou
5 d'une interdépendance. Il ne s'agit pas, comme l'a fait la Défense, de
6 prendre des segments arrachés au contexte pour les présenter ici.
7 Au cas où les Juges de la Chambre voudraient piloter et diriger mes
8 dires vers ce qui figure à l'énoncé des chefs d'accusation, j'en suis
9 conscient. Mais le problème de l'acte d'accusation c'est que celle-ci se
10 fonde sur l'existence d'un programme politique en faveur duquel il n'est
11 avancé aucun document. Le Procureur affirme même qu'il n'a pas la nécessité
12 de le prouver parce que sur le terrain même, prétend-il, il existe des
13 éléments de preuve de l'existence de cette entreprise criminelle commune. A
14 notre avis, il est impossible de le prouver parce que si l'on ne fait
15 qu'énumérer la chronologie des événements, cela s'avère faut. Si l'on
16 présente les documents pertinents qui l'étayeront, cela s'en trouve
17 d'autant plus vrai. Mais je veux bien me conformer à vos instructions et je
18 veux vous remercier d'avoir attiré mon attention sur la nécessité de ce
19 faire.
20 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Monsieur Milovancevic, ce que je
21 voudrais juste ajouter, c'est qu'en cette phase-ci, vous savez exactement
22 quels sont les chefs de l'acte d'accusation. Je suppose que vous savez
23 pertinemment quels sont les points auxquels vous vous devez de répondre
24 dans votre défense. Je m'étais dit que par rapport à ces deux éléments-là,
25 vous finiriez bien par articuler les éléments de l'affaire ou de la cause
26 défendue par la Défense pour les placer en corrélation avec les deux
27 éléments-clés en question.
28 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous ai bien compris, Madame le Juge.
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1 Est-ce que vous me demandez également une autre explication ou un
2 commentaire pour ce que vous estimeriez que je doive faire.
3 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Non, à moins que vous ne
4 considériez cela absolument essentiel, je crois avoir été suffisamment
5 claire. Ce que je voudrais c'est que vous nous aidiez, honnêtement je me
6 suis sentie mal à l'aise pour ce qui est de la façon dont vous présentiez
7 ce discours liminaire. J'ai estimé que cela n'était pas suffisamment
8 approprié pour nous aider, mes confrères et moi, pour comprendre quels sont
9 les arguments présentés par la Défense. J'aimerais que vous acceptiez ce
10 fait-là et que vous mettiez en œuvre cet esprit-là dans la présentation de
11 vos éléments à décharge.
12 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Madame et Messieurs les Juges. Je
13 souhaite toutefois fournir un complément d'explication pour parler de ce
14 qui suit.
15 La base du crime, ou ce qu'il est convenu d'appeler ainsi, c'est un élément
16 dont la Défense se propose de traiter lorsqu'elle interviewera ou
17 lorsqu'elle auditionnera ses témoins. Dans cette phase-ci, ce que nous
18 avons souhaité, je ne sais pas si j'ai réussi parce que j'ai entendu ce que
19 vous venez de dire, mais ce que je voulais dire c'était de me placer dans
20 une position qui serait celle de faire comprendre aux Juges la thèse de la
21 Défense. Nous estimons que la thèse principale de la Défense en ce moment-
22 ci consiste à contrecarrer la thèse d'une entreprise criminelle commune. Au
23 paragraphe 6 de l'acte d'accusation, le Procureur énumère toute une liste
24 d'intervenants. C'est toute la direction militaire politique et policière
25 de l'ex-Etat allant sur une période de cinq années. Sans apporter les
26 explications de ce qu'ils ont fait, pourquoi ils l'ont fait et comment ils
27 l'ont fait et, à l'acte d'accusation, ensuite on parle de ce qui s'est
28 passé sur les lieux. Pour tirer la conclusion qui est celle de dire que ce
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1 qui s'est passé sur le terrain prouve bien l'existence d'une entreprise
2 criminelle commune. Cette thèse ainsi présentée par l'Accusation ne vise
3 pas autre chose que d'illustrer l'existence d'un plan politique qui s'est
4 réalisé sur une période de cinq ans. La Défense vise à présenter les
5 événements politiques ainsi que les éléments-clés de ce qui s'est produit
6 au fil de ces cinq années qui illustrent tout à fait autre chose. Ce sont
7 là les faits dont nous avons parlé tout à l'heure et les éléments de preuve
8 ou les éléments d'affirmation qui sont présentés par la Défense en ce
9 moment-ci seront étayés dans la présentation des éléments de preuve de la
10 Défense.
11 Cela ne constituera aucune difficulté pour la Défense que de le
12 démontrer. Il importe énormément de constater s'il y a eu ce programme
13 politique, cette entreprise criminelle commune dans une partie de la
14 Yougoslavie à l'époque pour commettre ce que l'Accusation affirme avoir été
15 commis. C'est une thèse politique. Je ne pense pas m'exprimer en termes
16 banaux. C'est une thèse qui est complètement inconsistante dénuée de
17 cohérence avec ce qui s'est passé sur le terrain. La Défense n'essaie pas
18 ce faisant de se défendre, de défendre les agissements inappropriés d'une
19 partie en parlant d'agissements inappropriés d'autres parties. Ce n'est pas
20 ce qu'il convient de faire. Mais nous estimons que les choses ne seraient
21 être claires si nous ne déterminons pas ce qui s'est passé sur le plan
22 politique au niveau du terrain. Nous n'avons reçu aucuns éléments de preuve
23 de la part de l'Accusation concernant la façon dont l'entreprise criminelle
24 commune a été réalisée si ce n'est la présentation des agissements de la
25 JNA au travers de ce qu'a fait une compagnie à Skabrnja ou une compagnie à
26 Saborsko. Il y a eu cent, deux cents hommes à Skabrnja et autant dans
27 l'autre localité, mais ce n'est pas la JNA toute entière, ce n'est pas la
28 police toute entière, ce n'est pas l'Etat, ce n'est pas la Yougoslavie. Or
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1 l'Accusation affirme que c'est bel et bien le cas. Dans un acte
2 d'accusation ainsi conçu, il est difficile de le contrecarrer en procédant
3 autrement.
4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je suppose, Maître Milovancevic,
5 qu'en substance ce qui a été dit c'est ce qui suit : nous comprenons que la
6 position de la Défense est celle de réfuter l'existence d'une entreprise
7 criminelle commune, mais ce à quoi nous nous attendions de votre part dans
8 vos propos liminaires c'est de nous indiquer ce qui suit : "Nous, conseil
9 de la Défense, affirmons qu'il n'y a pas eu d'entreprise criminelle commune
10 et nous nous proposons de présenter des éléments de preuve qui permettront
11 de le déterminer." Il ne vous appartient pas de passer une journée entière
12 à présenter des éléments de preuve sur le fait qu'il n'y a pas eu
13 d'entreprise criminelle commune. Je vous l'ai dit dès notre première
14 audience. J'ai l'impression que c'est vous qui êtes en train de témoigner.
15 A la deuxième et à la toute dernière des audiences, je ne fais qu'être de
16 plus en plus convaincu du fait que vous êtes en train de témoigner. Tout ce
17 que vous étiez en train de nous dire aurait été plus utile et aurait mieux
18 servi à la présentation de vos éléments de preuve si vous l'aviez fait par
19 le témoignage de témoins à vous.
20 Vous deviez présenter votre thèse, votre théorie et dire que : "Il
21 n'y a pas eu d'entreprise criminelle commune." Ceci dit, vous vous
22 installez au pupitre et vous citez à comparaître des témoins qui viennent
23 témoigner pour indiquer qu'il n'y a pas eu d'entreprise criminelle commune.
24 Il ne vous appartient pas à vous de nous réciter ou de nous relater toute
25 cette histoire. Cette histoire, il faut nous la relater au travers de
26 témoignages de témoins, Maître Milovancevic, c'est ce que nous vous
27 demandons de faire. Vous n'êtes pas témoin dans cette affaire. Vous êtes
28 conseil.
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1 Merci, Maître Milovancevic.
2 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] J'ai bien compris, Monsieur le
3 Président.
4 Je veux juste dire une phrase pour vous dire l'impression qui a été celle
5 des conseils de la Défense pour ce qu'il importait de dire et je me
6 conformerai à vos instructions. En parlant de la chronologie des
7 événements, nous avions cherché à justifier la présentation de certains
8 éléments de preuve et la comparution de certains témoins. Nous avions voulu
9 présenter les arguments principaux et non pas témoigner. Mais compte tenu
10 des instructions que vous venez d'énoncer, j'aimerais vous demander
11 l'autorisation de poursuivre.
12 Est-ce que j'ai votre autorisation ?
13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Milovancevic.
14 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Comme vous venez de le faire remarquer,
15 Monsieur le Président, la Défense va désormais essayer de montrer que pas
16 un seul élément dans les chefs d'accusation contenus dans l'acte
17 d'accusation, qu'il s'agisse des faits, d'éléments juridiques ou factuels,
18 ne tient. Il n'y a pas eu de plan ni d'activités organisées qui avaient
19 comme but d'expulser la population, créer des conditions inhumaines,
20 détenir des personnes, ni de tuer celles-ci. Il n'y a pas eu de plan visant
21 à causer un conflit avec les forces armées de la Croatie, dans le but, au
22 final, d'impliquer la JNA, ni de mettre en œuvre une quelconque entreprise
23 criminelle commune, que ce soit par des combats dans les villages et par le
24 fait de faire fuir les populations. La Défense va présenter des documents
25 qui montreront qu'il s'agissait d'un conflit contre une sécession armée,
26 une tentative qui visait à régler le problème des sièges très longs faits
27 devant les casernes militaires.
28 La Défense montrera également que la République de Croatie avait importé
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1 illégalement des armes, avait armé illégalement les civils et avait formé
2 des forces armées illégales. Nous allons le montrer à travers des
3 documents, y compris les documents émanant du ministère de la Défense
4 montrant que dans les villages et les villes qui étaient pacifiques
5 jusqu'ici, des unités de crise de guerre ont été mises en place, y compris
6 à Saborsko, Skabrnja et sept villages proches, Bacin, Dubica. La Défense
7 montrera que la distribution d'armes auprès de la population, sous l'égide
8 du parti politique dirigé par les dirigeants politiques de la Croatie, que
9 ces armes ont été distribuées à seulement un groupe ethnique, à savoir la
10 population croate dont les formations illégales ont agi, et la Défense
11 montrera que ces trois endroits, Skabrnja, Saborsko et Kostajnica, donc ces
12 trois emplacements, il s'agissait de sites très importants pour la JNA et
13 pour les positions de celle-ci. Sept villages de même que Skabrnja
14 formaient un champ, un aéroport militaire important. La Défense va montrer
15 que les formations paramilitaires illégales étaient équipées d'uniformes
16 importés de l'Allemagne orientale et de mitraillettes, que l'armée fédérale
17 s'est affrontée avec ces unités par nécessité.
18 La Défense montrera à travers ses témoins militaires que la conduite de ces
19 opérations militaires n'avaient rien à voir avec une quelconque entreprise
20 criminelle commune, ni avec les objectifs allégués dans l'acte
21 d'accusation. Au contraire, elles visaient à arrêter le siège des casernes
22 militaires et faire en sorte que les communications puissent être à nouveau
23 rétablies. La Défense montrera que toutes les unités qui étaient impliquées
24 dans les activités de combat ont agi conformément à la législation fédérale
25 et que le principe de l'unicité et du commandement était mis en œuvre et
26 que toutes les unités étaient unifiées sous le même unique commandement, le
27 commandement de l'unité la plus importante de l'opération, et ceci était
28 vrai à la fois pour Skabrnja et Saborsko. La Défense appellera des témoins
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1 qui montreront que les événements qui se sont produits dans tous ces
2 emplacements qui forment la base factuelle n'ont rien à voir avec la milice
3 de Krajina ni avec la police de Martic. Nous allons montrer, à travers les
4 documents relatifs à la Krajina, qu'il existait une extension de la police
5 régulière et que le travail de cette force était réglementé par le droit,
6 qu'il y avait des prisons régulières sous le contrôle du ministère de la
7 Justice, que les personnes chargées d'administrer ces prisons étaient des
8 employés du ministère de la Justice, sous la législation de la Yougoslavie
9 et la législation croate, que les effectifs, disons, les employés des
10 prisons ne faisaient pas partie de la force de la police ni du ministère de
11 l'Intérieur. La Défense va également montrer que les pressions qui ont été
12 faites sur la population serbe à travers tout le territoire de la Krajina
13 et de la Croatie pendant très longtemps ont abouti au fait que ces derniers
14 se sont organisés.
15 La Défense va présenter des éléments permettant de montrer que la direction
16 de la Croatie, avec le président Tudjman à sa tête, même en 1991, agissait
17 selon le fait qu'il lui fallait se débarrasser des Serbes dans certaines
18 professions et dans certaines zones. Seulement 6 % du personnel du MUP qui
19 étaient des Serbes n'y restait en 1992, alors que ce pourcentage était
20 beaucoup plus élevé avant que le HDZ ait démarré ses activités.
21 Il s'agissait d'un mouvement massif visant à faire enlever les Serbes de
22 leurs différents postes. Il n'y avait pas de plan du côté serbe. Il y a eu
23 une tentative visant à utiliser une force armée afin de discipliner la
24 population serbe de la Croatie. Des personnes ont été relevées de leurs
25 fonctions, tuées, intimidées, leurs maisons furent bombardées.
26 Pendant tout ce temps-là, pendant toutes ces terribles tensions et
27 conflits, au bout de tout cela, le système dans son ensemble s'est
28 effondré. L'Etat n'a pas pu continuer à fonctionner, les relations
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1 personnelles se sont détériorées et les instincts de base l'ont emporté de
2 tous les côtés. A travers les documents du Conseil de sécurité, la Défense
3 montrera que tous les éléments requis pour une guerre civile étaient
4 présents dans la région. Nous montrerons que l'acte d'accusation se réfère
5 à des choses qui se sont produites sur une zone protégée par les Nations
6 Unies, en présence des Nations Unies et sous leur contrôle.
7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je voudrais vous interrompre. Si vous
8 le permettez, M. Whiting avait demandé quelques minutes pour pouvoir régler
9 un certain nombre de questions d'intendance avant de s'arrêter aujourd'hui.
10 Est-ce que maintenant serait le moment opportun ? Vous pourrez continuer
11 avec vos propos liminaires demain. Est-ce que cela vous convient ?
12 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Whiting.
14 M. WHITING : [interprétation] Je voudrais soulever un certain nombre de
15 questions concernant l'ordonnance de la semaine dernière de la Chambre.
16 Nous avons reçu des copies des pièces de la Défense que nous n'avions pas
17 auparavant. Nous les avons reçues hier. Celles qui n'avaient pas les ERN,
18 nous avions deux fichiers, mais malheureusement, il n'y a aucune traduction
19 de ces documents. Nous avons deux fichiers -- deux dossiers, pardon, de
20 pièces dont quasiment l'intégralité est en B/C/S. Je pense que pour que ces
21 documents puissent être versés, évidemment il faudrait les traduire. Ils ne
22 sont pas très utiles pour nous si nous devons utiliser les services d'une
23 interprète pour les lire. Je pense la Défense l'a déjà demandé, mais
24 j'aimerais que ces traductions nous soient fournies le plus tôt possible.
25 Deuxième point, l'Accusation se préoccupe du fait qu'il a été fait mention
26 de plusieurs documents à la fois hier et plus tôt, documents qui sont
27 décrits comme faisant partie des plaidoiries, mais qui n'apparaissent pas
28 sur la liste. Par exemple, pendant la soumission 98 bis, on a entendu qu'il
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1 y avait une photographie de l'ambassadeur Galbraith qu'il voulait verser
2 pendant les plaidoiries, et je crois qu'il l'a dit à plusieurs reprises,
3 mais cette photographie n'apparaît pas sur la liste des pièces de la
4 Défense. Nous aimerions en avoir une copie. Un certain nombre d'articles et
5 de pièces ont été mentionnés aujourd'hui, par exemple l'article de Der
6 Spiegel de 1990, puis une déclaration faite par Dr Wolfgang Pohrt, un
7 document des Nations Unies datant du 11 décembre 1991, et une lettre du
8 secrétaire général du 10 septembre 1991, la Résolution #752 des Nations
9 Unies. Mais aucune de ces pièces n'apparaît sur la liste, apparemment. Si
10 la Défense compte les utiliser, celles-ci doivent apparaître sur leur
11 liste. Je suis un peu préoccupé.
12 Hier, nous avons reçu deux résumés 65 ter détaillés ou, du moins,
13 plus détaillés pour le témoin de demain et le témoin qui devrait commencer
14 après la pause. Il s'agit de Momir Bulatovic, ce deuxième témoin. Dans le
15 résumé 65 ter, il est fait mention de dix heures, donc trois jours, selon
16 mes calculs, peut-être un petit peu moins. Mais maintenant, la Défense nous
17 a désormais indiqué qu'il faudra quasiment toute la semaine. C'est le seul
18 témoin dont ils peuvent nous parler pour cette première semaine. Cela nous
19 préoccupe.
20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je n'ai pas très bien saisi
21 l'élément qui vous préoccupe.
22 M. WHITING : [interprétation] La Défense avait dit que cela prendrait
23 trois jours pour ce témoin et maintenant elle dit qu'il faudra la plupart
24 de la semaine, et c'est le seul témoin dont on nous parle pour la semaine
25 qui commence après les vacances judiciaires.
26 Concernant les résumés du 65 ter, j'ai noté que dans les deux cas,
27 rien n'est dit concernant ce que dira le témoin, le cas échéant, à propos
28 de Milan Martic. Peut-être que les témoins ne parleront pas de Milan
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1 Martic, c'est possible. Mais néanmoins, si l'on pense qu'ils vont parler de
2 l'accusé Milan Martic, c'est quelque chose qui devrait être contenu dans le
3 résumé 65 ter.
4 Je sais que pour le témoin de cette semaine, bien que le témoin soit
5 décrit comme étant le ministre des Affaires étrangères pour la RSK depuis
6 le mois d'octobre 1992 et après, quasiment l'intégralité de son témoignage
7 qu'il est prévu qu'il donne date de 1990 et 1991, je ne sais pas très bien,
8 d'après le résumé 65 ter, quelle est la base sur laquelle il faut ce
9 témoignage.
10 Enfin, je voulais dire que nous croyions recevoir hier la liste des
11 pièces qui allaient être utilisées au moins pour le témoin de demain, mais
12 également le témoin qui devrait prendre la parole après les vacances
13 judiciaires, mais nous n'avons rien reçu. Nous avons simplement reçu un e-
14 mail nous disant que nous allions les recevoir à la première heure
15 aujourd'hui, mais maintenant, on n'est plus à la première heure et nous
16 n'avons toujours rien reçu. Voilà les points que je voulais soulever,
17 Monsieur le Président.
18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur Whiting.
19 Maître Milovancevic, pouvez-vous peut-être répondre à ces soucis ? On va
20 les prendre un par un. Monsieur Whiting, si je vous ai bien compris, vous
21 allez devoir m'aider, parce que j'en compte six. D'abord, Maître
22 Milovancevic, les copies des pièces qui sont en B/C/S et qui ont besoin
23 d'être traduites, à la fois pour le compte rendu et pour l'utilisation par
24 l'Accusation, car sans traduction, ils n'ont aucune utilité; pouvez-vous
25 répondre ?
26 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, ce que m'a dit
27 mon éminent collègue M. Whiting est très compréhensible, et je comprends
28 très bien sa position. Cependant, le problème pour la Défense, c'est que
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1 nous avons très peu de temps. Nous avons un problème de temps énorme, nous
2 n'avons commencé à préparer la Défense qu'après la fin de la présentation
3 des moyens à charge, et c'est quelque chose sur lequel nous avons voulu
4 attirer l'attention de la Chambre. J'espère que vous ne pensez pas que la
5 Défense essaie de retarder le travail de l'Accusation. Bien sûr, c'est
6 notre devoir de faire en sorte que ces traductions soient faites.
7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, c'est votre devoir de faire faire
8 les traductions, mais également de les faire à temps. Nous allons revenir à
9 nouveau à cette histoire, ce point selon lequel vous n'avez commencé à
10 préparer la Défense qu'après la présentation des moyens à charge. Ce n'est
11 pas acceptable, Maître Milovancevic. Si vous vous rendez ici pour faire le
12 contre-interrogatoire des témoins de l'Accusation, vous savez très bien que
13 cela va prendre fin et vous devez immédiatement commencer à préparer la
14 Défense, y compris la préparation des documents que vous allez utiliser
15 lorsque vous allez démarrer votre défense. Les langues officielles du
16 Tribunal sont l'anglais et le français, et si vous n'avez les documents ni
17 dans l'une de ces langues, ni dans l'autre, le moins que vous puissiez
18 faire c'est de faire en sorte qu'il y ait des traductions. Cela n'a rien à
19 voir avec vous personnellement. Simplement, il suffit d'affecter cette
20 tâche à un traducteur, quelqu'un qui est ici pour que vous puissiez
21 continuer votre contre-interrogatoire des témoins de l'Accusation.
22 Je ne comprends pas pourquoi vous persistez à dire que la Défense n'a
23 pu être préparée qu'après la fin de la présentation des moyens à charge.
24 C'est quelque chose qui dépasse une petit peu mon entendement.
25 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, la Défense
26 s'efforce de faire comprendre à la Chambre et à nos collègues de
27 l'Accusation que nous sommes confrontés à une mission impossible. On ne
28 peut pas demander l'impossible à la Défense. Vous étiez présent à la
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1 réunion 65 ter au mois de novembre dernier, lorsque nous avons dit qu'à ce
2 moment nous n'avions aucune ressource depuis un mois pour travailler, car
3 on attendait une décision concernant ce que nous avions présenté à la
4 Chambre précédente et au Greffe. Vous étiez étonné que le début du procès
5 était prévu pour le 13 décembre. Nous étions disposé à préparer le contre-
6 interrogatoire au fur et à mesure, mais ce n'est pas possible de ne pas
7 travailler pendant 20 mois, mais la préparation contre-interrogatoire est
8 une chose, mais la préparation de sa propre défense, c'est quelque chose
9 d'autre. C'est beaucoup plus difficile. Nous savons ce que nous avons à
10 faire. Nous connaissons les règles, mais néanmoins, nous insistons de dire
11 à la Chambre que nous sommes confrontés à des délais impossibles à tenir.
12 Dès que le procès a été planifié, que son calendrier a été établi, nous
13 avons été soumis à des pressions temporelles impossibles. Après les
14 vacances, nous étions vraiment devant une mission impossible. Pour chacun
15 de ces stades, l'Accusation a pu bénéficier de beaucoup plus de temps. Ils
16 ont eu deux mois pour préparer la déclaration liminaire, deux mois pour
17 préparer leur liste de pièces et de témoins. Nous le savons. Mais c'est
18 certain le volume de travail est tel que nous ne pouvons pas le traiter.
19 Nous avons des rapports d'experts qui ont été organisés à temps, mais nous
20 n'avons pas eu le temps de les lire et nous n'avons pas pu préparer la
21 Défense avant que l'Accusation n'achève sa présentation des moyens à
22 charge. Toutes ces listes que nous devons soumettre conformément au 65 ter
23 et que nous devons amender d'ici à vendredi, ce sont des choses que nous
24 n'ont pas été faites. Non pas parce que nous n'avons pas de respect pour
25 l'Accusation, mais simplement parce que c'est impossible physiquement. Nous
26 travaillons 24 heures par jour.
27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Quand est-ce qu'on peut-on s'attendre
28 à obtenir les traductions des pièces qui sont toujours en B/C/S ?
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1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Il faut que je me concerte avec les
2 autres membres de mon équipe afin de pouvoir vous répondre. Je ne peux pas
3 vous répondre dans l'immédiat. Je le dis parce que le témoin lequel on
4 devrait écouter demain est arrivé hier soir. Nous n'avons pas eu de contact
5 avec lui. Nous ne pouvions pas le contacter aujourd'hui parce qu'on devait
6 être ici présent.
7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne vois pas très bien le lien entre
8 ces deux choses. Est-ce que vous pouvez vous concerter avec votre équipe et
9 nous dire, s'il vous plaît, à la première heure demain matin quand est-ce
10 que ces traductions peuvent être prêtes ?
11 Pardon ?
12 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, je le ferai. Je suis désolé de vous
13 avoir interrompu, Monsieur le Président.
14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le deuxième point soulevé par
15 l'Accusation qui leur fait souci, d'après ce que j'ai compris, c'est qu'il
16 y a des documents qui n'ont pas été divulgués, mais dont il est fait
17 mention dans vos remarques liminaires, ce qui laisserait à croire que ces
18 documents vont être utilisés, et il y a toute une liste d'exemples qui a
19 été donnée. Celui dont je me souviens dans l'immédiat, c'est la
20 photographie de M. Galbraith. Un certain nombre d'autres ont également été
21 mentionnés. J'espère que vous comprenez que pour que vous puissiez utiliser
22 ces documents comme éléments de preuve, il vous faut les divulguer.
23 Avez-vous des commentaires là-dessus ?
24 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, nous comprenons ceci et nous
25 l'acceptons comme étant de notre responsabilité, de notre devoir. La
26 photographie de M. Galbraith que nous n'avons pas incluse montre simplement
27 à quel point il y a des pressions sur nous. Il y a des milliers de pages de
28 documents. Nous ne savons pas quoi faire traduire en premier, mais nous
Page 6100
1 nous sommes trouvés --
2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] On ne traduit pas les photographies,
3 Maître Milovancevic. C'est un langage photographique.
4 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Ce n'est pas du tout ce que je voulais
5 dire, Monsieur le Président. Je voulais dire qu'il s'agissait simplement
6 d'une omission. Nous avions l'intention de le mettre sur la liste, car bien
7 qu'il s'agisse d'un document important et que c'est dans notre intérêt de
8 le montrer, nous allons le faire, bien entendu. Cela montre dans quelles
9 conditions nous travaillons.
10 J'espère que vous pouvez comprendre la situation. Après cinq mois de
11 présentation des moyens à charge, nous nous sommes préparés pour les
12 contre-interrogatoires au fur et à mesure, mais maintenant alors que nous
13 aurions pu nous reposer et partir en vacances, car nous sommes fatigués, il
14 ne nous faut mettre à profit ces vacances pour travailler davantage. Nous
15 ne sommes pas satisfaits de la manière dont se présente la liste des pièces
16 à conviction en l'état. Nous avons fait notre possible. L'Accusation a
17 raison de se plaindre, mais ce n'est pas que nous ne respectons pas le
18 bureau du Procureur ou les ordonnances de la Chambre, c'est que nous
19 travaillons dans des conditions impossibles. La Défense n'a pas le temps de
20 tout faire.
21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic, quand pensez-vous
22 que les documents qui n'ont pas encore été communiqués et que la Défense
23 entend présenter, quand pensez-vous que ces documents seront disponibles ?
24 Quand pensez-vous que l'Accusation pourra avoir ces documents ?
25 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Mon confrère, M. Whiting, a raison. Il a
26 mentionné plusieurs documents que j'ai évoqués dans le cadre de ma
27 déclaration liminaire. Le fait est que ces documents ne figurent pas sur la
28 liste. C'est de notre faute, mais nous n'étions pas au courant de cette
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1 lacune en raison de la charge de travail. Nous sommes face à des dizaines
2 de milliers de pages. Je ne sais pas.
3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je réitère ma question. Etes-vous en
4 mesure de nous dire quand vous pourrez nous communiquer ces documents ?
5 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, la Défense a bien
6 l'intention de respecter pleinement ses obligations, sans que l'Accusation
7 ait besoin de soulever des objections. Nous n'avons soulevé aucune
8 objection concernant les résumés qui nous ont été fournis par l'Accusation.
9 Ces résumés concernaient toutes les informations que l'Accusation jugeait
10 pertinentes. Si vous nous accordez jusqu'au 14 août, nous préparerons tout
11 comme il convient. Nous devons le faire. Mais les délais qui nous ont été
12 imposés jusqu'à présent ne nous aident pas à résoudre le problème. Nous
13 sommes perdus. Nous ne savons pas où donner de la tête. La stratégie de la
14 Défense consiste à réfuter la thèse de l'entreprise criminelle commune.
15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que nous pourrions essayer de
16 nous comprendre l'un et l'autre ? Je ne parle pas de la stratégie de la
17 Défense. Je parle des documents qui seront utilisés au procès et qui n'ont
18 pas encore été communiqués. Nous essayons de savoir quand la Défense pense
19 qu'elle sera en mesure de communiquer ces documents. Restons focalisés sur
20 cette question et efforçons-nous de la résoudre. Vous avez indiqué que si
21 la Chambre vous accordait jusqu'au 14 août, vous feriez tout ce qui est
22 nécessaire. Avant de donner la parole à M. Whiting pour avoir son avis sur
23 cette date butoir du 14 août, je souhaiterais savoir la chose suivante :
24 s'agissant de cette date butoir, est-ce que vous pensez aux documents que
25 vous avez l'intention d'utiliser cette semaine ? J'espère que non, car les
26 documents que vous entendez présenter cette semaine devraient être déjà
27 communiqués à l'Accusation.
28 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Président.
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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Monsieur Whiting ?
2 M. WHITING : [interprétation] Cela ne nous dérange pas que la Défense ait
3 jusqu'au 14 août pour finaliser sa liste. Cela étant, j'ai l'impression que
4 les éléments que j'ai mentionnés ou les documents dont la Défense a déjà
5 connaissance, étant sur le point de commencer la présentation de ses
6 moyens, ces documents pourraient nous être communiqués cette semaine. Je
7 pense que la Défense pourrait communiquer en plusieurs vagues ces documents
8 et nous communiquer des documents supplémentaires le 14 août. Cela nous
9 conviendrait.
10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous êtes en mesure de
11 faire cela, Maître Milovancevic ? Est-ce que vous pourriez communiquer au
12 moins les documents que vous avez mentionnés lors de la déclaration
13 liminaire ? Est-ce que vous pourrez communiquer ces documents cette
14 semaine ? Et pendant la pause, vous pourrez vous occuper du reste des
15 documents et les communiquer après les vacances judiciaires.
16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Comme je l'ai dit, nous devrions pouvoir
17 communiquer les documents mentionnés d'ici à la fin de la semaine. Nous
18 pouvons faire cela, en effet.
19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci bien. Il en est ainsi décidé.
20 J'ai noté un point suivant : vous avez déclaré avoir reçu hier des résumés
21 65 ter plus détaillés, mais je n'ai pas bien compris d'où venait le
22 problème.
23 M. WHITING : [interprétation] Il y en avait deux. Premièrement, la Chambre
24 avait ordonné à la Défense de communiquer des résumés 65 ter détaillés pour
25 tous les témoins qui seraient cités à comparaître après les vacances
26 judiciaires. Nous n'avons reçu qu'un seul résumé. La déposition de ce
27 témoin ne devait durer que trois jours. D'après les estimations de la
28 Défense, ce n'est plus le cas. Dans ces résumés, on ne sait pas non plus si
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1 les témoins parleront de l'accusé. Peut-être que non, mais si c'est le cas,
2 s'il sera question de l'accusé, cette information devrait être incluse dans
3 le résumé.
4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] M. Whiting a soulevé deux points
5 concernant les résumés 65 ter qu'il a reçu. Maître Milovancevic, est-ce que
6 vous souhaitez répondre à cela ?
7 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, étant donné que
8 nous avons préparé ces résumés, je comprends parfaitement les propos tenus
9 par M. Whiting. Je vois très bien ce qu'il veut dire. En ce qui concerne
10 ces résumés, le problème de la Défense est clair. Il y a un nombre
11 important de témoins. Même si nous avons réduit considérablement la liste,
12 mais ceci est en rapport une fois encore avec le calendrier des audiences.
13 Les résumés que nous sommes en train de remanier, nous nous en occupons
14 malgré les contraintes de temps, et il y a certaines choses qui manquent.
15 Le texte est incomplet. Il est trop bref. Nous savons quelles doivent être
16 les informations contenues dans le résumé de la déposition d'un témoin,
17 mais nos capacités physiques sont restreintes. Nous tenions absolument à
18 remettre cette liste. Les déclarations sont assez longues. Cela fait
19 plusieurs jours que nous nous en occupons, mais nous avons d'autres
20 obligations à respecter en même temps. Il y a eu la procédure en
21 application de l'article 98 bis et tout ce qui a suivi. Ce que j'essaye de
22 vous faire comprendre, c'est que les contraints de temps sont énormes pour
23 nous et nous n'avons pas le temps nécessaire pour nous préparer comme nous
24 le souhaiterions, même si nous souhaitons pouvoir faire notre travail du
25 mieux et nous souhaitons faciliter la tâche du Procureur également.
26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous rappelle que vous n'êtes pas
27 le seul à être soumis à des pressions énormes. Nous travaillons tous sous
28 pression. Si j'ai bien compris le problème soulevé par M. Whiting, tient au
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1 fait que vous avez annoncé la déposition d'un seul témoin pendant la
2 semaine qui suivra les vacances judiciaires. D'après vos estimations, qui
3 doivent être examinées par la Chambre, ce témoin est censé déposer pendant
4 trois jours. Nous ne comprenons pas bien si le témoin que vous avez annoncé
5 témoignera pendant toute la semaine ou seulement pendant trois jours. S'il
6 s'agit seulement d'une déposition de trois jours, vous devez communiquer le
7 résumé de la déposition du témoin qui le suivra cette semaine-là, et vous
8 devez communiquer ce résumé avant les vacances judiciaires. Je comprends le
9 problème que rencontre ici l'Accusation. Ensuite, aucun des résumés que
10 vous avez communiqués n'indique que les témoins ont quelque chose à dire au
11 sujet de l'accusé. Peut-être que les témoins ne parleront pas de l'accusé,
12 mais dans l'affirmative, l'Accusation est en droit de savoir ce que ces
13 témoins diront au sujet de l'accusé. Est-ce que je vous ai bien compris,
14 Monsieur Whiting ?
15 M. WHITING : [aucune interprétation]
16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vois que oui. Merci. Est-ce que
17 vous pourriez traiter de ces points particuliers ? Nous comprenons bien que
18 vous travaillez sous pression, mais êtes-vous en mesure de nous dire
19 comment nous devons faire, pour ce qui est des deux points qui ont été
20 soulevés ? Quelle est votre position ?
21 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons
22 examiné le témoignage de M. Bulatovic qui témoignera après les vacances
23 judiciaires, et selon nous, l'interrogatoire principal devrait durer trois
24 jours ou trois jours et demi, en raison du nombre important de documents
25 que nous entendons présenter par son entremise. Ensuite, il y aura un
26 contre-interrogatoire, des questions éventuelles de la Chambre, l'ensemble
27 de la déposition devrait durer toute la semaine. C'est la raison pour
28 laquelle c'est la seule déclaration que nous avons communiquée. Bien
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1 entendu, compte tenu de l'estimation que nous avons faite, nous avons
2 certaines obligations.
3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il est possible que cette déposition
4 dure plus longtemps que vous ne l'avez prévu. Est-ce que je vous ai bien
5 saisi ?
6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Notre
7 première estimation se fondait sur la déclaration de ce témoin, mais nous
8 avons examiné de nouveau la question et nous avons examiné les documents
9 qui seront présentés et nous nous rendons compte qu'il s'agit d'une
10 déposition très importante. Le témoin était président du Monténégro. Il
11 était premier ministre yougoslave. C'était un participant actif lors des
12 conférences, et il témoignera également au sujet des actes et du
13 comportement de l'accusé.
14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'ai un problème. Mme le Juge
15 Nosworthy a une audience à 14 heures 15.
16 M. WHITING : [interprétation] Peut-être que nous pourrions terminer avec
17 cette question demain. Si l'on pouvait simplement me dire plus ou moins
18 quand nous recevrons la liste des pièces à conviction qui seront utilisées
19 avec le témoin qui doit commencer sa déposition demain - c'est une liste
20 que nous devions recevoir déjà hier - si nous pouvions avoir juste cette
21 information, j'en serais ravi.
22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous aider,
23 Maître Milovancevic ?
24 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous allons faire
25 cela en toute urgence par courrier électronique, car nous ne pouvons pas
26 commencer l'interrogatoire principal de ce témoin avant que les documents
27 ne soient communiqués. Nous allons nous en charger.
28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Lorsque vous dites de façon urgente,
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1 qu'est-ce que cela veut dire au juste ?
2 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Il me faut consulter l'assistant de
3 l'équipe de la Défense sur ce point. Je ne peux pas vous le dire
4 précisément.
5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que je peux conclure que vous
6 allez communiquer les documents demandés avant 16 heures aujourd'hui,
7 Maître Milovancevic ?
8 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, ne nous imposez
9 pas de délai, je vous en prie. Si possible, nous le ferons même avant.
10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. L'audience est levée.
11 --- L'audience est levée à 14 heures 07 et reprendra le mercredi 12 juin
12 2006, à 9 heures 00.
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