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1 Le mardi 29 août 2006
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.
6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour, Monsieur. Je vous rappelle
7 que vous êtes toujours tenu par la déclaration solennelle que vous avez
8 faite au début de votre témoignage, de dire la vérité, toute la vérité et
9 rien que la vérité.
10 LE TÉMOIN: TÉMOIN MM-116 [Reprise]
11 [Le témoin répond par l'interprète]
12 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai compris cela.
13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Je ne suis pas sûr
14 où on s'est arrêtés hier.
15 Maître Milovancevic.
16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
17 Nouvel interrogatoire par M. Milovancevic :
18 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, bonjour.
19 R. Bonjour.
20 Q. A ce stade, la Défense a possibilité de vous poser des questions
21 supplémentaires et la Défense va le faire maintenant. S'il vous plaît,
22 encore une fois, je vous rappelle de ménager une pause entre mes questions
23 et vos réponses.
24 Vous souvenez-vous qu'hier M. le Procureur vous a posé des questions
25 concernant la composition ethnique des employés du MUP en Croatie en 1990 ?
26 Vous souvenez-vous de cela ?
27 R. Oui.
28 Q. Vous souvenez-vous d'avoir accepté le pourcentage que
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1 M. le Procureur vous a présenté par rapport à cette composition ?
2 R. Oui, je me souviens de cela. Je n'ai pas tout à fait accepté ce
3 pourcentage, mais je me souviens qu'il a à peu près parlé de ce
4 pourcentage.
5 Q. Par rapport à cela, je vous pose la question suivante : connaissez-vous
6 la composition ethnique des cadres du MUP de Croatie en 1990 ?
7 R. Jusqu'à 1990, la composition ethnique, je ne la connaissais pas parce
8 qu'il s'agissait du secret professionnel. La composition ethnique a changé
9 au profit des Croates en 1990 et après 1990.
10 Q. Je vous remercie. Par rapport à votre réponse, pouvez-vous nous dire
11 qui était le ministre, le chef de la police, le ministre de l'Intérieur en
12 Croatie en 1990 ? Connaissez-vous le nom du ministre ?
13 R. Je pense que le ministre de l'Intérieur était Josip Boljkovac.
14 Q. Quelle était son appartenance ethnique ?
15 R. Il était Croate.
16 Q. Pouvez-vous nous dire qui était le ministre de l'Intérieur avant lui,
17 qui était son prédécesseur ?
18 R. Je ne peux pas me souvenir de cela, parce que les ministres changeaient
19 tous les quatre ans, mais principalement, il s'agissait d'un Croate.
20 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas
21 d'autres questions à poser au témoin.
22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Maître Milovancevic.
23 Questions de la Cour :
24 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Monsieur le Témoin, je voudrais vous
25 poser la question suivante : pendant la campagne électorale, vous avez
26 mentionné qu'il y a eu beaucoup de propagandes nationalistes du côté
27 croate. Vous avez pensé aux Croates. Vous avez dit qu'on utilisait de
28 l'iconographie interdite. Vous souvenez-vous d'avoir dit cela ?
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1 R. Oui, Monsieur le Juge, je m'en souviens.
2 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] A quelle législation avez-vous pensé
3 après avoir dit cela ?
4 R. Je pense à la législation pénale en Croatie, plus particulièrement à la
5 loi portant sur les délits contre l'ordre public et la vie publique.
6 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Qu'était-il interdit et passible
7 d'une peine par rapport à ces deux lois ?
8 R. Je ne peux pas me souvenir précisément des définitions de ces deux
9 lois, mais la loi portant sur les délits contre l'ordre public et la paix
10 publique, je ne sais pas de quels articles il s'agissait. Il s'agissait
11 d'infractions pénales par lesquelles on violait l'ordre public et la paix
12 publique en écrivant quelque chose qui était interdit ou, par exemple, en
13 prononçant des slogans ennemis, en disant, en écrivant, en dessinant, en
14 chantant ces slogans interdits. Je ne me souviens pas de la définition
15 précise de ces infractions pénales.
16 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] C'est bien.
17 Je voudrais savoir qui vous a dit que ces actes qui ont été défendus
18 n'auraient pas dû être -- que les auteurs de ces actes n'auraient pas dû
19 être poursuivis.
20 R. Monsieur le Juge, dans de telles circonstances, il y a eu une règle
21 tacite, à savoir il ne fallait pas avoir de conflits avec les autorités à
22 l'époque et il fallait être tolérant. Il ne s'agissait pas d'un ordre
23 explicite, mais il s'agissait du point de vue de mes supérieurs. Je le
24 respectais et je ne voulais pas provoquer de conflits avec le peuple.
25 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Qui sont "ces gens" ou "ce peuple" ?
26 R. Si je vous ai bien compris, le peuple qui, à l'époque, agissait -- en
27 fait, il s'agissait d'un certain nombre du peuple croate qui étaient
28 partisans ou membres du HDZ.
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1 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] La même chose aurait été appliquée
2 sur les actions dont vous avez parlé, lesquelles actions ont été menées
3 dans la situation où les cloches de l'église orthodoxe sonnaient.
4 R. Oui. Je me souviens d'avoir parlé de ces cloches, mais il s'agissait là
5 d'un rite religieux. Il ne s'agissait pas de la violation de l'ordre public
6 et de la paix publique. C'était une sorte de coutume religieuse que tous
7 les croyants devaient respecter.
8 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] De quelle sorte d'action il
9 s'agissait qui a été menée et orientée contre les gens qui respectaient ces
10 coutumes religieuses ?
11 R. Il s'agissait d'une sorte d'euphorie. Nous avions 100, 150 ou 200
12 appels téléphoniques anonymes leur demandant pourquoi les cloches de
13 l'église orthodoxe sonnaient, parce que les citoyens ne pouvaient plus
14 dormir tranquillement. Il ne s'agissait pas de la violation de la paix
15 publique; il s'agissait de l'intolérance à l'encontre de l'autre communauté
16 nationale.
17 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je vous remercie. Je voudrais vous
18 poser des questions portant sur les Croates qui étaient des émigrés et qui
19 sont rentrés. Vous avez parlé des terroristes dans le cadre de l'idéologie
20 oustachi. Vous vous souvenez de cela ?
21 R. Oui.
22 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Vous avez parlé des membres d'une
23 organisation terroriste; est-ce vrai ?
24 R. Oui.
25 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Qu'est-ce que vous entendez par une
26 "organisation terroriste" ? Est-ce qu'il s'agit d'une organisation qui a
27 été qualifiée d'organisation terroriste conformément à la législation de
28 l'époque ou s'il s'agissait de votre opinion personnelle ?
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1 R. Si je pourrais éclaircir cela. Dans ma région où je vivais, il y avait
2 beaucoup d'émigrés qui étaient partis partout dans le monde. Il s'agissait
3 d'émigrés économiques. Il n'y avait aucun problème par rapport à ceci,
4 parce qu'ils devaient partir pour gagner leurs vies ailleurs. En 1945, au
5 moment où l'armée oustachi défaite est partie, qui était l'alliée d'Hitler
6 et de l'Allemagne d'Hitler, ces Oustachi qui étaient partis partout dans le
7 monde ont développé des noyaux d'organisations terroristes. Même à ce
8 moment-là, la communauté internationale a condamné cela. Je ne me souviens
9 pas de l'appellation exacte de ces organisations et de ces noyaux
10 d'organisations oustachi, terroristes. Il y avait des terroristes. En 1945,
11 sur le territoire de l'ancienne Yougoslavie, il y avait beaucoup d'actes
12 terroristes qui ont été faits. Par exemple, à la montagne de Valebit
13 [phon], le meurtre d'un policier qui s'appelait Uselat [phon]. Puis, en
14 1972, l'irruption d'un groupe de 19 hommes dans l'action appelée Radusa et
15 même dans mon endroit, je pense que c'était en 1988, le buste de
16 Bodejaradjan [phon], héros national, a été dynamité. Les émigrés Oustachi
17 ne toléraient rien qui était yougoslave. Ils ont fait beaucoup de
18 sabotages, peut-être des centaines de sabotages sur le territoire de
19 l'ancienne Yougoslavie.
20 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Maintenant, vous ne parlez pas de la
21 période de la campagne électorale mais plutôt de quelque chose qui s'était
22 passé des décennies avant ?
23 R. C'est exact. J'ai dit qu'une décennie avant cela, parce que c'était
24 justement de ces structures, de ces centres de pouvoir partout dans le
25 monde arrivaient certains groupes. Par exemple, Barisic qui a été condamné,
26 comme cet homme qui était à Radusa et beaucoup d'autres. Cela a intimidé
27 encore plus le peuple, parce que l'Etat de Croatie a enfreint les normes de
28 morale, parce que la Croatie a permis l'entrée des terroristes qui avaient
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1 été déjà condamnés auparavant. En 1990, il y a eu certaines personnes de
2 ces groupes, qui sont arrivées sur le territoire de la Croatie et qui ont
3 agi. Ils ont formé des unités. Ils ont armé des armées paramilitaires, et
4 cetera.
5 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Vous parlez des gens qui sont entrés
6 en Croatie en 1990 et qui avaient été déjà condamnés auparavant ?
7 R. Oui.
8 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Quel pays les a condamnés et quand ?
9 R. Le terroriste qui était à Radusa a été condamné par l'ancienne
10 Yougoslavie, à savoir par la Croatie. Je ne me souviens pas de la
11 compétence rationnelle aussi. Je pense qu'il a été condamné à 20 ans de
12 prison. L'autre terroriste a été condamné, mais il s'agissait de deux
13 terroristes qui ont été condamnés. Il y en avait d'autres qui n'ont pas été
14 condamnés, qui appartenaient à des organisations extrémistes et qui sont
15 entrés dans la Croatie, qui n'ont pas été arrêtés et qui n'ont pas été, par
16 la suite, condamnés.
17 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Les personnes dont vous venez de
18 parler et qui ont été condamnées, est-ce que ces personnes ont déjà purgé
19 leur peine ?
20 R. Le terroriste de Radusa a purgé sa peine. Je pense qu'il a purgé sa
21 peine.
22 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Est-ce qu'il a continué à commettre
23 des infractions pénales ?
24 R. Selon mes informations, il a attaqué une colonne de la JNA, de l'armée
25 légale de l'ancienne Yougoslavie dans la région de Kupres ou en
26 Herzégovine, et il s'est fait tué dans cette région-là. Il a organisé
27 l'attaque contre la colonne de l'armée régulière.
28 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Quand cela s'est passé et quand il a
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1 été tué ?
2 R. En 1991.
3 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] S'il vous plaît, la deuxième partie
4 de ma question était quand cette personne a été tuée et où ?
5 R. Cette personne - je n'y étais pas, mais cette personne a été tuée en
6 1991 lors de l'attaque contre la colonne de chars de l'armée yougoslave
7 régulière qui était placée dans cette région. C'est ce que j'ai appris de
8 mes collègues dans le cadre de mes activités professionnelles.
9 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] "Cette région" se trouve dans en
10 Bosnie-Herzégovine ?
11 R. Oui, c'est la région qui se trouve en Bosnie-Herzégovine.
12 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je vous remercie.
13 Vous avez également parlé, à savoir le conseil de la Défense vous a posé
14 des questions concernant l'assassinat d'un ambassadeur - je pense que
15 c'était en 1972 - il s'agissait d'un attentat contre cet ambassadeur ?
16 R. Oui, je me souviens de cela, mais j'ai oublié l'année de l'attentat.
17 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Où cet attentat a eu lieu ?
18 R. Je pense que cet attentat a eu lieu en Suède. L'ambassadeur yougoslave
19 a été attaqué dans les locaux de l'ambassade. Le terroriste l'a attaqué.
20 L'ambassadeur s'appelait Rolovic.
21 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] L'auteur du crime, qu'est-il devenu ?
22 R. L'auteur de ce crime a été jugé dans le pays où il a commis ce crime,
23 et il a purgé sa peine. Il est réapparu dans les années 1990 sur le
24 territoire de la Croatie, encore une fois pour former des formations
25 terroristes et pour attaquer l'armée yougoslave régulière. Je ne sais pas
26 ce qui s'est passé après, mais j'ai entendu que lui aussi, il s'est fait
27 tué.
28 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je n'ai plus de questions. Je vous
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1 remercie.
2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.
3 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Je n'ai pas de questions.
4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je prie qu'on passe à huis clos
5 partiel.
6 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes maintenant en huis clos
7 partiel, Monsieur le Président.
8 [Audience à huis clos partiel]
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8 [Audience publique]
9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Hier, vous avez parlé de la réaction.
10 Vous avez dit qu'il s'agissait de la réaction de la population serbe, de la
11 police serbe, et vous avez dit que cette réaction était une réaction
12 importante. Je pense que la page sur laquelle cela figurait a changé depuis
13 hier. Est-ce que quelqu'un est en mesure de me dire quelle serait la page
14 qu'hier était la page 18 ? Est-ce qu'il s'agit du même numéro de la page ?
15 Oui. Donc, à la page 18 du compte rendu d'hier, aux lignes 7 à 12, ce que
16 je veux maintenant savoir est la chose suivante : qu'est-ce que la
17 population et la police ont fait concrètement ? En quoi consistait cette
18 réaction virulente ?
19 R. Monsieur le Président, au cours de l'année 1990, il n'y avait pas de
20 police serbe. Nous avions la police yougoslave, à savoir la police de la
21 République socialiste de Croatie, au sein de laquelle il y avait des
22 Croates, des Serbes et des Musulmans et des personnes qui appartenaient à
23 d'autres nationalités qui vivaient sur ce territoire. Donc, au cours de
24 l'année 1990, nous avions la police yougoslave. Après que des groupes
25 extrémistes du peuple croate et du HDZ ont été réapparus, qui agissaient en
26 appliquant l'idéologie oustachi, le peuple serbe dans cette région a eu
27 peur. Une partie du peuple serbe a survécu des massacres que cette
28 idéologie même a provoqués. C'était justement le HDZ qui a assuré la
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1 continuité de cette idéologie à partir de l'année 1945 jusqu'à l'année
2 1990, le HDZ et ses dirigeants.
3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie pour ce que vous
4 venez de dire, mais vous n'avez toujours pas répondu à ma question. S'il
5 vous plaît, répondez à ma question.
6 R. Je m'excuse. Je vous prie de répéter votre question. Parce que vous
7 avez parlé de la police serbe, il n'y avait pas au cours de l'année 1990,
8 ou jusqu'au mois d'août 1990, à savoir au cours de toute l'année 1990.
9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur, je cite vos propos. Vous
10 avez dit : "Les armes ont été saisies dans certains endroits. Je ne suis
11 pas sûr de quelle municipalité il s'agissait, mais en tout cas, il
12 s'agissait de la réaction de la population serbe et de la police serbe, qui
13 était une réaction virulente parce que ces décisions n'étaient pas
14 logiques."
15 Donc, vous avez parlé de la police serbe. Il ne faut pas que vous disiez
16 qu'à l'époque la police serbe n'existait pas. Je vous demande quelle était
17 la réaction de la police serbe et de la population serbe, de quelle façon
18 cela s'est manifesté, cette réaction ? Pouvez-vous nous dire ce qu'ils ont
19 fait en parlant de cette réaction virulente ?
20 R. Monsieur le Président, je vais répondre à votre question. Encore une
21 fois, je vous affirme qu'il n'y avait pas de police serbe de façon
22 officielle, mais il y avait des policiers d'appartenance ethnique serbe au
23 sein de cette police. Ces policiers serbes n'étaient pas contents ainsi que
24 les policiers croates, parce que la saisie des armes dans des municipalités
25 serbes, où les Serbes étaient en majorité, démontrait qu'il y aurait des
26 problèmes plus tard, et le peuple pensait qu'en agissant de cette façon il
27 pouvait se protéger des extrémistes, des extrémistes en demandant les armes
28 aux autorités.
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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Quand vous avez parlé de la police
2 serbe - et cela figure dans ces lignes qui vous ont été citées - est-ce que
3 vous avez pensé aux membres de la police qui étaient d'appartenance
4 ethnique serbe ?
5 R. Oui, Monsieur le Président.
6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maintenant, je vous demande ce que ces
7 policiers serbes et la population serbe ont fait qui aurait pu représenter
8 une réaction véhémente ?
9 R. Les policiers serbes ont eu un problème, parce qu'ils partageaient
10 l'opinion de leur peuple, je suppose. Et le peuple a eu peur, parce qu'il
11 pourrait y avoir des sanctions de l'autre côté. Je n'étais pas présent au
12 moment où il y a eu cette saisie des armes. Il y avait des rassemblements
13 du peuple où le peuple disait qu'il ne permettrait pas que la police croate
14 saisisse les armes. Les policiers serbes partageaient la position du peuple
15 par rapport à cela ainsi que d'autres policiers. Il s'agissait d'un acte
16 inhabituel de la part de l'Etat croate.
17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur, c'est la dernière fois que
18 je vous pose cette question : qu'a fait la population serbe, les membres de
19 la police qui étaient Serbes ? Qu'est-ce qu'ils ont fait pour réagir à
20 cette situation puisque vous avez parlé d'une réaction virulente ? J'ai
21 voulu savoir ce qu'ils ont fait exactement. Quel était ce comportement ?
22 Quelle était cette réaction exactement ?
23 R. Je ne comprends cette question, je n'arrive pas à comprendre. Ecoutez,
24 je ne comprends pas la question. Vraiment, Monsieur le Président, peut-être
25 que la traduction n'est pas bonne, mais je ne comprends pas tout simplement
26 la question que vous me posez.
27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien, je vais essayer la dernière
28 fois de vous la poser. Vous avez dit au cours de votre déposition que je
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1 cite : "La réaction de la population serbe, de la police serbe --" - et je
2 pense que là vous vouliez dire, et de la police serbe aussi - "était
3 virulente puisque cette décision n'était pas logique. Je pense qu'ils se
4 sont emparés des armes ou bien qu'ils ont fait une saisie d'armes à Obrovac
5 et dans d'autres municipalités. Je ne suis pas vraiment sûr de ce que vous
6 avez dit." Mais c'est la phrase que vous avez dite. J'utilise les propos
7 que vous avez prononcés. Voici ma question : quand vous avez dit que la
8 réaction de la population serbe et de la police serbe était virulente, et
9 bien, qu'est-ce qu'ils ont fait exactement pour que vous puissiez qualifier
10 cette réaction de virulente ?
11 R. Maintenant je comprends. D'après ce que je sais, la population serbe,
12 ou plutôt plusieurs milliers d'habitants serbes de la municipalité de Knin,
13 et bien, ils sont entrés par la force dans les postes de la police à Knin
14 pour prendre les armes, justement pour empêcher que ces armes ne tombent
15 entre les mains de l'autre côté. Je ne sais pas si la police serbe avait
16 participé à cela, puisque dans notre poste de police, nous, nous n'avons
17 pas pris des armes. Au contraire, nous nous sommes tout simplement
18 débarrassés de nos armes puisque nous ne voulions par tirer. C'est tout.
19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous vous êtes débarrassés de vos
20 armes, vous les avez jetées où ?
21 R. En guise de protestation, nous avons jeté ces armes sur la table dans
22 la salle de réunion où nous étions assis, en disant que nous ne voulions
23 pas tirer sur notre peuple, puisqu'à l'époque nous considérions tout le
24 peuple yougoslave comme notre peuple.
25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je comprends. Hier, au cours de votre
26 déposition, vous avez dit ce qui suit. - et je voudrais vous demander de
27 m'expliquer davantage ce que vous voulez dire par là. Vous avez parlé de la
28 police et vous avez parlé d'une unité spéciale. Vous avez parlé des forces
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1 de réserve d'une police ordinaire. Est-ce que vous pourriez définir chacune
2 de ces catégories et nous dire que fait chacune de ces catégories ?
3 R. Monsieur le Président, je comprends tout à fait la question que vous
4 venez de me poser et je vais essayer de vous expliquer de qui il s'agit. Le
5 ministère des Affaires intérieures - je ne veux pas parler du ministère, je
6 veux parler du SUP de Sibenik, de n'importe quel SUP. Donc, à l'intérieur
7 d'un SUP, vous avez la police régulière qui est là pour empêcher la
8 criminalité, empêcher toute infraction à l'ordre public et à la paix
9 publique, et de là, pour contrôler aussi le trafic. Ensuite, ce volet-là se
10 divise en police régulière et la police et la circulation.
11 Ensuite, en vertu des lois en vigueur, nous avions le droit d'avoir
12 des forces de police de réserve. Je ne sais pas combien il y en avait. En
13 tout cas, cela dépendait des problèmes qui se présentaient dans chacune des
14 régions. Ils ne faisaient pas partie de la réserve de l'armée, ils
15 faisaient partie de la réserve de la police. Ils participaient de temps en
16 temps à quelques exercices, et on les invitait.
17 Ensuite, vous avez le troisième groupe, la police spéciale. Cette
18 police agissait au niveau de la république. Elle avait une taille de
19 bataillon. Et au niveau de postes de police, nous avions au niveau d'une
20 compagnie ou d'un peloton, une unité, donc une unité de la police spéciale.
21 Ils avaient eu un entraînement particulier. Ils portaient cependant le même
22 uniforme, mais c'était une unité spéciale, puisqu'ils avaient eu
23 auparavant, normalement, un entraînement particulier. La police régulière
24 était équipée de façon classique avec un pistolet, mais la police spéciale,
25 et bien, ses membres étaient plus jeunes, ils étaient plus en forme, et ils
26 pouvaient faire face à de criminels éventuellement qui posent plus de
27 problèmes. Ils étaient plus forts. J'espère que je vous ai bien expliqué la
28 situation.
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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous ne m'avez pas dit ce que faisait
2 la réserve, la police de la réserve.
3 R. La police de la réserve, et bien, ils avaient les mêmes pouvoirs que la
4 police régulière ou la police d'active. Mais ceci dans le cas où ils
5 étaient appelés pour entrer en service. Donc, ils étaient là pour renforcer
6 les rangs de la police régulière quand il s'agissait de protéger la loi,
7 l'ordre public, et dépendant aussi des besoins particuliers pendant
8 certaines périodes.
9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous nous avez dit que la police
10 spéciale avait suivi un entraînement particulier. Vous nous avez dit aussi
11 que cette unité avait la taille d'une compagnie ou d'un peloton et que leur
12 formation était particulière, la formation qu'ils ont suivie normalement.
13 Que faisaient-ils exactement au niveau de l'entraînement ? Quel était leur
14 rôle dans la société ?
15 R. Au niveau de la république, peut-être que leur taille était la taille
16 d'une brigade, mais au niveau du poste de police, il s'agissait de peloton
17 ou de compagnie un petit plus forte peut-être, mais pas plus que cela. Ces
18 unités de police spéciale, au niveau local, s'acquittaient des fonctions
19 régulières, mais aussi ils s'acquittaient des fonctions particulières et
20 ils suivaient des entraînements tels que l'entraînement en maniement
21 d'armes. Ils étaient censés intervenir dans les manifestations, dans des
22 tâches spéciales, faire face aussi à des groupes de criminels
23 particulièrement problématiques. Ces tâches-là ne pouvaient pas être faites
24 par les membres de la police régulière. Dans toutes les polices du monde,
25 vous avez ce genre de forces spéciales.
26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Peut-être que vous avez déjà répondu à
27 la question que je vais vous poser. Je suis désolé si je n'ai pas retenu la
28 réponse éventuellement. Est-ce que vous pouvez me dire quelle est votre
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1 appartenance ethnique ?
2 R. Je suis Serbe.
3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ante Bujas, il appartenait à quel
4 groupe ethnique ?
5 R. Il est Croate.
6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez dit que la population civile
7 avait organisé des barricades, que la police l'avait encouragée à se
8 comporter de façon civilisée. Est-ce que vous vous souvenez de cela ?
9 R. Oui.
10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La population civile qui avait créé
11 ces barrages routiers, est-ce qu'elle était autorisée à le faire ?
12 R. Non.
13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] N'était-ce pas le devoir de la police
14 ordinaire ou régulière, comme vous avez dit, de s'occuper de cela
15 puisqu'ils étaient responsables de la circulation ?
16 R. J'ai dit, qu'en des circonstances habituelles et normales, oui
17 effectivement, ils devaient s'occuper de cela. Mais vu les circonstances
18 telles qu'elles étaient, personne ne pouvait empêcher cela puisque c'était
19 la volonté du peuple. Le peuple a érigé ces barrages routiers pour
20 s'opposer aux agissements de l'Etat croate, pour ne pas vivre à nouveau la
21 même horreur que celle qu'ils ont vécue en 1941. Puisque, vous savez, on ne
22 peut pas dire qu'en 1941 c'était une chose et en 1991 c'était autre chose.
23 Non. Pour nous, c'était notre territoire, c'était notre terre, et nous
24 considérions malheureusement que la Deuxième Guerre mondiale ne s'était pas
25 arrêtée sur notre territoire.
26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions.
27 Monsieur Milovancevic, est-ce que vous avez des questions à poser suite aux
28 questions posées par les Juges ?
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1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je vous
2 remercie.
3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.
4 Monsieur Black ?
5 M. BLACK : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je vous remercie.
6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur le Témoin, je vous remercie
7 d'être venu déposer ici. Nous voudrions vous remercier d'être venu déposer
8 ici. Apparemment, vous êtes une personne très occupée. Je vous remercie
9 encore une fois d'avoir pris le temps pour venir déposer ici. Même si vous
10 n'aviez pas des obligations professionnelles particulières, je souhaite
11 tout de même vous remercier de votre déposition ici, d'être venu nous
12 aider.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie moi aussi.
14 [Le témoin se retire]
15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant de citer le prochain témoin,
16 nous souhaiterions soulever un point important, un point que j'ai soulevé
17 déjà par rapport à la présentation des moyens de la Défense et par rapport
18 au temps que vont prendre différents témoins de la Défense. Vous savez, ces
19 prévisions se sont avérées être très difficiles, et pour nous, il est très
20 difficile de prévoir le temps du procès et des procédures si nous ne
21 pouvons pas savoir exactement combien de temps vont prendre les témoins de
22 la Défense.
23 Est-ce que vous souhaitez dire quelque chose, Monsieur Milovancevic,
24 parce que j'ai l'impression que vous êtes déjà prêt à dire quelque chose ?
25 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, effectivement.
26 Concernant cet ordre de comparution des témoins et l'évaluation de la durée
27 du temps de chacun des témoins, effectivement, nous avons eu un vrai
28 problème avec cela. Vous savez, nous avons fait cette estimation au moment
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1 où nous n'étions absolument pas expérimenté. Nous n'avions absolument
2 aucune expérience pour ce faire, et nous avons fait cela dans un effort
3 d'être le plus réalistes possible par rapport à l'expérience que nous
4 avions à l'époque. Nous voulions aussi être aussi brefs que possible. Mais
5 vous savez, les choses ne se présentent pas toujours comme on le souhaite.
6 C'est pour cela que parfois nous avons dépassé le temps qui nous était
7 alloué ou que nous avions prévu.
8 Ce que je voulais vous dire, c'est qu'aujourd'hui, nous allons essayer de
9 refaire une évaluation par rapport à tous les témoins que nous souhaitons
10 présenter. Enrichis de l'expérience que nous avons pu acquérir jusqu'à
11 présent, nous espérons que cette évaluation sera meilleure. Nous avons
12 aussi abandonné cette éventualité de présenter M. Martic en tant que
13 témoin. Nous allons essayer de couvrir un certain nombre de questions dont
14 devait normalement déposer M. Martic, par un autre témoin ou d'autres
15 témoins qui seront à même de déposer à ce sujet.
16 C'est pour cela que je vous adresse une demande à vous, Monsieur le
17 Président, Madame, Messieurs les Juges, à savoir je voudrais vous demander
18 de bien comprendre dans quelle situation nous nous trouvons. Il ne s'agit
19 pas d'un manque de respect par rapport aux Juges de la Chambre ou au
20 Procureur, ce n'est absolument pas le cas, nous ne voulions jamais faire
21 cela. La prochaine fois, quand nous allons faire cette nouvelle évaluation,
22 nous allons prendre pour instructions ces recommandations que vous nous
23 avez fournies et que vous nous avez données au début. Nous allons essayer
24 de ne pas dépasser le temps que vous avez proposé. Je voudrais tout
25 simplement vous dire que nous avons cela bien en tête. Par rapport à cela,
26 puisque je suis debout, je voulais juste ajouter.
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7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Puis-je vous interrompre ? Je sais que
8 vous n'avez pas donné le nom de cette personne, mais les gens qui
9 connaissent ses fonctions vont peut-être pouvoir l'identifier sur la base
10 des informations que vous venez de nous donner puisque nous ne sommes pas à
11 huis clos partiel. Peut-être que vous souhaitez que tout ceci soit expurgé.
12 Je voudrais demander qu'à la page 17, à partir de la ligne 25 jusqu'à la
13 ligne 5 de la page 18, que toutes ces lignes soient expurgées. Ensuite, je
14 voudrais demander que nous passions à huis clos partiel pour que M.
15 Milovancevic puisse terminer ses propos.
16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
17 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes à
18 huis clos partiel.
19 [Audience à huis clos partiel]
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21 [Audience publique]
22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.
23 M. WHITING : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
24 Du point de vue de l'Accusation, je dirais que nous pensons que le chiffre
25 le plus important, c'est la durée totale de la présentation des éléments à
26 décharge. Je crois que nous en sommes à 260 heures à ce stade. C'est ce qui
27 a été fixé par la Chambre de première instance. Nous ne sommes pas d'avis
28 que tout ce qui s'est passé jusqu'ici justifierait une quelconque
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1 augmentation de la durée de cette période de présentation des éléments de
2 preuve à décharge. Au contraire, parce qu'un certain nombre de témoins ne
3 reviendront plus témoigner, étant donné la nature des éléments de preuve
4 qui ont été entendus. Il me semblerait au contraire qu'une baisse ou une
5 réduction de la durée de cette période se justifierait davantage. En outre,
6 les quelques premiers témoins entendus ont pris beaucoup plus de temps que
7 prévu.
8 Nous aimerions que la Chambre de première instance dise très
9 clairement à la Défense que les estimations prises pour bases des chiffres
10 décidés ne pourront être revues à la hausse sauf dans des circonstances
11 absolument extraordinaires. C'est quelque chose que l'on a vu se produire
12 dans d'autres affaires et nous ne voudrions pas que ceci se produise ici.
13 Nous n'aimerions pas, qu'après avoir entendu la moitié des témoins alors
14 qu'il reste une ou deux semaines seulement dans la présentation des
15 éléments à décharge, nous recevions une requête en vue d'obtenir quelques
16 semaines ou quelques mois supplémentaires, parce qu'il y a une nouvelle
17 liste de témoins très importants qui n'ont pas été entendus et qui
18 devraient être entendus dans le cadre de la Défense de l'accusé. Nous
19 voudrions éviter cette position. Le seul moyen de l'éviter, et bien, c'est
20 qu'une durée précise soit fixée à ce stade et que la Défense soit
21 contrainte de respecter ce délai. Si quelques jours supplémentaires sont
22 nécessaires pour un témoin particulier, et bien, que ceci se fasse au
23 détriment éventuellement d'autres témoignages, voire même que ceci se fasse
24 par l'abandon de certains témoins.
25 Bien entendu, l'accusé a le droit de se défendre pleinement. Et si la
26 Défense peut montrer qu'il y a justification qui justifie justement une
27 augmentation de la durée de la présentation des éléments à décharge, et
28 bien, qu'il en soit ainsi. La Défense pourra alors essayer de montrer
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1 qu'elle a raison et la Chambre devra trancher. Je dois dire que pour
2 l'instant, sur la base de tout ce que nous avons entendu jusqu'à présent,
3 cette justification n'existe pas. C'est le nombre total de témoins qui pose
4 problème pour l'Accusation, à notre avis.
5 Maintenant, s'agissant des témoins précis et de l'estimation de la
6 durée du témoignage de chacun, j'ai quelques préoccupations. Lorsque
7 j'entends la Défense qui nous dit que le problème a été -- qu'ils n'ont pas
8 pu évaluer précisément quelle serait la durée du témoignage de chaque
9 témoin. Je crois qu'il serait juste de dire que pour chaque témoin, peut-
10 être avec l'exception de ce dernier témoin, l'estimation a été largement
11 inférieure à la durée réelle du témoignage. Ce qui semble donner à penser
12 que les nouvelles estimations vont se faire à la hausse plutôt qu'à la
13 baisse. Ceci risque de poser problème étant donné le nombre d'heures
14 allouées à la Défense.
15 Alors, je dirais que le problème n'est pas seulement un problème
16 d'évaluation de la durée de chaque témoignage, mais je dirais que les
17 témoins ont pris plus de temps que ce qu'ils n'auraient dû prendre, pour
18 différentes raisons. Je me dis que l'interrogatoire principal pourrait
19 peut-être être mené de manière plus efficace et plus rapide. Je crois que
20 la Chambre de première instance s'est efforcée de faire en sorte que ce
21 soit le cas. Cela n'a pas fonctionné. Nous pensons qu'il y a eu un vrai
22 gaspillage du temps utilisé et nous pensons que ce temps devrait être
23 décompté du temps total qui a été alloué à la Défense.
24 En principe, s'agissant de témoins particuliers, par exemple, pour le
25 témoin qui va suivre, l'Accusation n'a pas d'objection particulière à ce
26 que la Défense demande une période de temps supplémentaire pour un témoin
27 en particulier. Si l'on nous dit pourquoi ceci est justifié. Si l'on nous
28 donne la raison d'une différence entre l'estimation initiale et une demande
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1 de temps supplémentaire. Y a-t-il d'autres questions qui vont être abordées
2 dans le cadre de l'interrogatoire principal, et cetera, et cetera. Pour
3 être tout à fait honnête, il semble que le conseil de la Défense est tenté
4 de présenter ce type de motif. Mais de manière à ne pas oublier le temps
5 total imparti à la Défense, nous suggérons que la Défense essaie de trouver
6 des moyens de réduire la présentation des ces éléments de preuve. S'il va y
7 avoir une demande de doublement du temps de témoignage d'un témoin
8 particulier, la Défense ne peut-elle pas envisager de réduire la durée du
9 témoignage d'autres témoins, voire même de supprimer le témoignage de
10 certains témoins. Ceci, à mon avis, permettrait de rester concentré sur la
11 durée totale de la présentation des éléments à décharge, ce qui nous paraît
12 être l'important ici.
13 S'agissant du témoin suivant, je crois qu'effectivement, il serait justifié
14 que le temps prévu d'interrogatoire principal soit augmenté. Ceci ne me
15 pose pas de problème. Je demanderais deux choses, toutefois. D'abord, c'est
16 que la Défense soit un peu plus précise quant au temps qu'elle entend
17 passer avec ce témoin. Dans plusieurs conversations avec le conseil de la
18 Défense avant aujourd'hui, hier, en réalité, il me semble, on m'a dit que
19 l'interrogatoire principal durerait trois jours. Aujourd'hui, il me semble
20 que le conseil de la Défense envisage 16 heures. Alors, s'il s'agit de
21 trois jours d'interrogatoire principal, puis trois jours de contre-
22 interrogatoire et des questions de la part des Juges, et bien, nous
23 dépassons, à mon avis, ces 16 heures. Je crois que nous sommes même à plus
24 de 20 heures. Je me demandais si le conseil de la Défense pourrait nous
25 donner des informations plus détaillées sur le temps qu'il entend passer
26 avec ce témoin au cours de l'interrogatoire principal.
27 La deuxième requête que j'aimerais faire, c'est la suivante : le
28 conseil de la Défense, il y a quelque temps, nous a communiqué un résumé
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1 conformément à l'article 65 ter pour ce témoin. A ce moment-là, je crois,
2 le conseil de la Défense envisageait un temps de huit heures pour ce
3 témoin-ci. Nous n'avons pas reçu de nouveaux résumés, de compléments
4 d'information. Or, la Défense nous dit qu'ils souhaitent doubler, voire
5 tripler la durée du temps passé avec ce témoin. Il me semble qu'il nous
6 faudrait recevoir des informations complémentaires. Je suis un peu surpris
7 de n'avoir pas reçu ces compléments d'information au titre de l'article 65
8 ter pour ce témoin-ci.
9 Voilà, je crois que c'est tout. Je souhaitais simplement mettre
10 l'accent sur la durée totale de la présentation des éléments de preuve à
11 décharge, et essayer de voir où nous serions une semaine ou deux avant
12 l'expiration de ce délai.
13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur Whiting. J'ai dit
14 avant que vous ne preniez la parole - je ne veux pas me répéter - j'ai dit
15 à M. Milovancevic que nous prenions en compte le fait que M. Martic
16 n'allait plus témoigner, que quatre autres témoins n'allaient plus être
17 citer à comparaître, et que nous nous attendions à une baisse de -- une
18 réduction de la durée de la présentation des éléments de preuve à décharge.
19 En outre, et conjointement, j'ai évoqué le fait, que contrairement à
20 l'estimation donnée par la Défense de 300 heures ou 320 heures, la décision
21 rendue au titre de l'article 73 ter a fait état de 260 heures, que nous
22 allions essayer de nous en tenir à 260 heures et que nous nous attendions
23 plutôt à être en dessous de ces 260 heures, étant donné que M. Martic ne va
24 pas témoigner ainsi que quatre autres personnes, et en raison d'autres
25 facteurs également.
26 Vous dites que l'Accusation n'a pas d'objection à ce que l'on double la
27 durée du témoignage du témoin à venir. La Chambre n'est pas satisfaite et
28 convaincue que les arguments pertinents ont été présentés justifiant que
Page 7332
1 l'on double cette durée. Nous allons donc suivre ce qui avait été décidé
2 préalablement. Je pense que la Défense avait prévu huit heures. Nous
3 devrions nous conformer à ces huit heures. Nous allons essayer d'en finir
4 au terme de ces huit heures, et nous verrons quelle sera la situation à
5 l'issu de cette période-là et voir ce que nous devrons faire ou si nous
6 devrons accorder davantage de temps. Pour l'instant, nous allons partir de
7 l'hypothèse que nous en aurons terminé en huit heures.
8 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président --
9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Whiting.
10 M. WHITING : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre. Sur ce point
11 particulier, de manière à ce qu'il n'y ait pas de difficulté ultérieure
12 liée au fait que la Défense n'ait pas eu la possibilité de présenter les
13 arguments qu'elle souhaitait présenter, nous pensons que la Défense devrait
14 avoir une nouvelle fois la chance d'expliquer de manière plus détaillée
15 pourquoi ils souhaitent obtenir davantage de temps avec ce témoin, de
16 manière à ce que les choses soient tout à fait claires sur cette question.
17 Je n'aimerais pas devoir traiter de la question plus tard dans le cadre
18 d'une procédure d'appel, si toutefois il y a procédure d'appel.
19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, mais quoi qu'il en soit, il
20 faudrait que la Défense dépose un résumé aux termes de l'article 65 ter, un
21 résumé concernant ce témoin, disant très précisément ou évoquant très
22 précisément les éléments dont vous avez parlé, vous, à moins que vous les
23 ayez sous la main, Maître Milovancevic. Ce qui nous occupe, Monsieur
24 Milovancevic, c'est que l'argument que vous avez présenté sur le témoignage
25 de ce témoin en demandant 16 heures n'est pas convaincant. Souhaitez-vous
26 présenter davantage vos arguments afin d'obtenir plus de temps ? Bien
27 entendu, il faudrait que vous nous présentiez des arguments de fond pour
28 justifier une telle demande.
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1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Afin que vous compreniez bien la
2 position de la Défense, je souhaite dire que la Chambre a fixé le nombre
3 d'heures disponibles pour que la Défense présente ses éléments de preuve.
4 Pour la quatrième ou la cinquième fois, je vous le dis, je vous le répète,
5 nous nous en tiendrons à ces orientations et nous n'oublierons pas la
6 demande qui nous est faite, à savoir de réduire la durée de la présentation
7 de ces éléments de preuve. A la place de M. Martic, d'autres témoins seront
8 cités à comparaître. Alors effectivement, nous retirons la demande de
9 témoignage de
10 M. Martic. Et je le dis, son témoignage aurait été beaucoup plus long que
11 ne le sera celui des autres témoins qui seront cités à sa place.
12 Maintenant, en ce qui concerne les arguments du Procureur, ils n'ont pas
13 véritablement de fondement factuel. Pourquoi dit-il qu'au final, nous
14 aurons besoin davantage de temps ? Nous allons nous en tenir au délai fixé
15 par la Chambre de première instance. Nous avions demandé 320 heures; la
16 Chambre de première instance nous en a accordé 260. Nous nous y tiendrons.
17 Ce qui se passera ensuite, cela dépendra de la situation qui découlera
18 éventuellement de questions que nous seront amenés à poser sur les
19 orientations données sur la Chambre de première instance.
20 Maintenant, s'agissant du témoin suivant, je dirais que son témoignage a
21 trait au cœur de cette affaire. Peut-être pourrais-je vous donner davantage
22 d'explications plus détaillées après la pause parce que ceci prendra peut-
23 être un peu plus de temps.
24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne veux pas que nous perdions de
25 temps à parler de l'avenir, parce que nous sommes en train finalement
26 d'utiliser le temps que nous avions réservé pour les témoignages. N'oubliez
27 pas, Monsieur Milovancevic, que lorsque vous dites que l'Accusation ne
28 fonde ses propos sur aucun fait, n'oubliez pas, que dès le début de la
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1 présentation des éléments de preuve à décharge, aucun témoin n'a témoigné
2 dans les délais qui lui avaient été impartis. Il semblerait qu'il y ait une
3 tendance qui se dégage ici, et qui serait perceptible pour tout observateur
4 quel qu'il soit. Alors, la question qui se pose, c'est comment allez-vous
5 vous en tenir au délai fixé si les choses se poursuivent ainsi ? Il y a une
6 crainte qui est exprimée ici, crainte que nous ne tenions pas ces
7 260 heures. La question qui vous est posée, c'est de savoir comment vous
8 allez compenser cette prise de retard.
9 La Chambre, dans sa décision rendue au titre de l'article 73 ter, la
10 Chambre prévoyait la comparution d'un certain nombre de témoins au titre du
11 92 bis. Vous avez rejeté cet argument. Vous dites que vous allez tous les
12 faire comparaître, les entendre, et vous allez pouvoir nous présenter un
13 certain nombre de faits justifiant ceci et expliquant comment vous allez
14 rattraper ce retard.
15 Nous allons faire la pause. Nous nous retrouvons à
16 10 heures 45, et nous poursuivrons la discussion à partir de là. Merci.
17 --- L'audience est suspendue à 10 heures 17.
18 --- L'audience est reprise à 10 heures 46.
19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic, vous souhaitiez
20 prendre la parole ? Tentez d'être bref afin que nous puissions poursuivre.
21 Soyez bien assuré du fait que la Chambre est tout ouïe.
22 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, je serai
23 assez bref.
24 Lorsque j'ai suggéré que le temps consacré au témoin suivant soit prolongé
25 et porté à 16 heures, je parlais de l'interrogatoire principal, du contre-
26 interrogatoire, des questions des Juges et des questions supplémentaires
27 des parties. Quel en est le motif ? Cette personne a occupé tous les
28 postes-clés au cours de la période qui nous intéresse. C'est une chose.
Page 7335
1 Deuxième chose, la Chambre de première instance a fixé les délais dans
2 lesquels nous devions présenter les éléments de preuve à décharge. Or, nous
3 pensons que nous devons nous y conformer. C'est à la Défense de choisir le
4 rythme d'examen, d'interrogatoire des témoins. C'est à notre client, M.
5 Martic, de juger la manière dont nous procédons à l'interrogatoire
6 principal en partie ou pleinement.
7 En ce qui concerne l'évaluation de la durée propre à chaque témoin,
8 comme je l'ai dit, nous allons revoir la liste que nous avions dressée,
9 puisqu'il est dans notre intérêt de présenter une évaluation la plus
10 réaliste possible à la lumière de ce qui vient de se passer. S'agissant
11 maintenant des préoccupations de l'Accusation, ce qu'ils prévoient ne s'est
12 pas encore produit. Ce sera à la Chambre de première instance de juger si,
13 oui ou non, nous nous en tenons aux délais qui ont été fixés, et nous
14 allons nous y attacher.
15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] A moins que qui que ce soit d'autre
16 ait quoi que ce soit à ajouter, je crois que nous avons bien entendu les
17 propos de M. Milovancevic. Nous avons également entendu les propos de
18 l'Accusation.
19 Le Juge Nosworthy a quelque chose à ajouter. Madame, je vous en prie.
20 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Maître Milovancevic, je crois que
21 M. Whiting, dans le cadre de ses observations, a mis des mots dans votre
22 bouche au moins à deux reprises. Je voulais le faire remarquer moi aussi.
23 Je dois dire que j'ai remarqué de fortes améliorations qui ont été
24 apportées, notamment dans le cadre de l'interrogatoire principal que vous
25 avez mené du témoin qui vient de quitter la salle, la manière dont vous
26 avez mené l'interrogatoire principal et les réponses obtenues de la part du
27 témoin, ce qui correspond beaucoup mieux aux attentes de la Chambre de
28 première instance. Je veux vous en féliciter. Je reste très optimiste par
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1 rapport aux témoins de la Défense à venir. Je suis sûre que vous préparerez
2 bien vos témoins, que vous allez gérer de manière efficace le temps qui
3 vous a été imparti. Parce qu'il est du devoir de la Défense de gérer le
4 temps alloué de manière efficace et sage. Je reste tout à fait optimiste et
5 j'espère que vous avez allez tenir le rythme.
6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.
7 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] J'aimerais ajouter une remarque un
8 peu plus critique que j'adresse à Me Milovancevic. La manière de s'exprimer
9 de tel ou tel témoin ne doit pas justifier qu'on lui donne davantage de
10 temps, à moins qu'il ait un problème d'élocution ou un handicap. C'est
11 simplement ce que je souhaitais ajouter.
12 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. Lorsque je
13 parlais de sa manière de s'exprimer, je parlais de son rythme de parole.
14 Parce que parfois, il faut plusieurs phrases à certaines personnes pour
15 exprimer une idée. Je n'oublierai pas vos remarques, et je ferai en sorte
16 d'aller au cœur des choses le plus possible. Merci beaucoup.
17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur Milovancevic.
18 Sans oublier ce qu'a dit Mme le Juge Nosworthy ni M. le Juge Hoepfel,
19 j'ajouterais qu'il vous incombe maintenant de garder la maîtrise des
20 témoignages de vos témoins. J'ai également remarqué que les questions que
21 vous avez posées au dernier témoin étaient beaucoup plus brèves. Si vous
22 poursuivez dans ce sens et si vous faites en sorte que le témoin écoute
23 minutieusement ce que vous dites et qu'il réponde directement à vos
24 questions, sachant que parfois vous pourrez éventuellement demander à ce
25 qu'il élabore sur telle ou telle question, mais pas sur toutes, je pense
26 que les choses iront dans le bon sens.
27 Je suggère maintenant que l'on fasse entrer le témoin suivant. Nous
28 verrons comment les choses se passent avec lui.
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1 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes en
2 audience à huis clos.
3 [Audience à huis clos]
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7 --- L'audience est levée à 13 heures 48 et reprendra le mercredi 30 août
8 2006 à 10 heures 30.
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