Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 13 septembre 2006

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

7 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je voudrais vous rappeler la

9 déclaration solennelle que vous avez prononcée au début de votre

10 déposition, à savoir que vous allez dire la vérité, toute la vérité et rien

11 que la vérité, donc vous êtes toujours tenu par cet engagement.

12 LE TÉMOIN: LAZAR MACURA [Reprise]

13 [Le témoin répond par l'interprète]

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic.

16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Un

17 instant, s'il vous plaît.

18 Interrogatoire principal par M. Milovancevic : [Suite]

19 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

20 R. Bonjour.

21 Q. Tout comme hier, je vous rappelle notre obligation de ne pas nous

22 chevaucher dans nos propos, à savoir d'observer un temps de pause entre mes

23 questions et vos réponses pour que les interprètes puissent nous

24 interpréter.

25 R. Oui, bien sûr.

26 Q. Le dernier thème que nous avons abordé hier était le plan Vance. Vous

27 avez dit que vous avez été présent au moment où le feu M. Babic a rencontré

28 M. Vance. Pourriez-vous nous dire si vous connaissez la raison pour

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1 laquelle M. Babic avait demandé à M. Vance de déployer les troupes des

2 Nations Unies selon le principe de tache d'huile ou de tache d'encre dans

3 les villes à l'extérieur de la communauté urbanisée ou agglomération ?

4 R. M. Babic avait expliqué cela à M. Vance, c'est-à-dire que les Serbes

5 qui habitaient dans les villes croates avaient été licenciés en masse de

6 leur travail. On avait déjà commencé à exécuter des Serbes et ces Serbes

7 étaient menacés. M. Babic avait mis ses garanties devant M. Vance que les

8 Croates habitant sur le territoire de la Krajina allaient bénéficier d'une

9 sécurité à 100 %.

10 Q. Merci.

11 R. Excusez-moi, je dois ajouter quelque chose. M. Babic, après ceci, avait

12 proposé que les troupes de l'ONU soient déployées sur la ligne de

13 démarcation. M. Vance ne voulait même pas en entendre parler.

14 Q. Merci.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur le Témoin, hier je vous ai

16 demandé de vous arrêter quand le conseil de la Défense vous dit "merci" ou

17 vous le demande.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, merci, merci, excusez-moi.

19 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je voudrais poser une question au

20 témoin.

21 Que voulez-vous dire par "exécution des Serbes" ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, nous avions déjà appris que l'on tuait

23 les Serbes dans les villes croates. On le savait dans le peuple, il y avait

24 de rumeurs qui allaient dans ce sens. Evidemment, au début, on n'avait pas

25 des informations exactes, mais on savait que cela se produisait. Puis

26 après, toutes ces rumeurs ont été confirmées par des enregistrements qui

27 ont été faits. Les Croates les faisaient à Karlovac, à Zagreb, et cetera.

28 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] "Exécution"; pourquoi avez-vous

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1 utilisé ce mot-là, ce terme-là, "exécution" ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous prenez quelqu'un et vous l'emmenez par

3 exemple à Maska, dans un pré, par exemple, vous le faites sortir de chez

4 lui, ensuite vous l'emmenez quelque part, ensuite il ne revient pas.

5 Normalement, la personne a été exécutée.

6 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Monsieur le Témoin, attendez ma

7 question, s'il vous plaît, puis répondez-moi en une seule phrase, s'il vous

8 plaît, si vous le pouvez.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous faites sortir quelqu'un de chez lui et

10 ensuite il ne revient plus jamais.

11 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Mais arrêtez-vous.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne vois pas ce que vous voulez dire.

13 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Vous êtes un témoin et vous devriez

14 parler des faits, et je voudrais savoir quels sont les faits auxquels vous

15 faites référence.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce qui a été publié dans tous les journaux,

17 par exemple : à Zagreb, la famille Zec a été tuée. C'était publié dans les

18 médias. En Krajina, il n'y a pas eu de cas semblables.

19 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Merci.

20 Vous pouvez continuer, Monsieur Milovancevic.

21 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

22 Q. Quand M. Babic a donné ses raisons à M. Vance pour demander que les

23 troupes des Nations Unies soient déployées dans les villes croates pour

24 protéger les Serbes, est-ce qu'il lui a exposé ses raisons ?

25 R. Mais oui, bien sûr qu'il l'a fait, mais je ne me souviens pas de tous

26 les détails. Il avait de toute façon des raisons, ses raisons pour le

27 demander.

28 Q. Merci. Vous vous souvenez, vous avez dit que vous avez été à Genève

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1 avec M. Babic au début de l'année 1991, et il s'agissait de parler de la

2 menace contre les Serbes. Enfin, on parlait aussi du HDZ, du parti, des

3 troupes armées, et cetera.

4 R. Oui. Nous sommes allés là-bas pour demander la protection des Nations

5 Unies.

6 Q. [aucune interprétation]

7 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je voudrais demander que l'on présente

8 sur l'écran la pièce 36, ou autrement dit, la pièce du Procureur sur la

9 liste 65 ter 1 226.

10 M. BLACK : [interprétation] Je pense qu'il s'agit de la pièce 236, si cela

11 peut vous être utile. C'est le numéro 65 ter 1226, la pièce 236.

12 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

13 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci. Merci. Excusez-moi. Pourriez-vous

14 agrandir ce document sur l'écran, s'il vous plaît ?

15 Q. Monsieur le Témoin, voyez-vous le document ?

16 R. [aucune interprétation]

17 Q. De quoi s'agit-il ?

18 R. Si vous voulez, je peux lire le texte du document.

19 Q. Oui, oui, justement, c'est ce que je voudrais vous demander. Lisez-moi

20 l'en-tête et le titre.

21 R. La République socialiste fédérative de Yougoslavie. La Région autonome

22 serbe de la Krajina. Le gouvernement de la SAO Krajina.

23 Q. Quelle date, s'il vous plaît ?

24 R. Knin, le 5 septembre 1991.

25 Q. Voyez-vous à qui est adressé ce document ?

26 R. La Conférence de la Paix concernant la Yougoslavie qui se tient à La

27 Haye.

28 Q. Très bien.

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1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Examinez, si vous pouvez, la septième

2 page en B/C/S qui est en haut à droite, le numéro 4 834.

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est un document qui a été envoyé à

4 la Conférence de la Paix à La Haye, comme l'a dit le témoin, ou est-ce que

5 c'est un document qui a été envoyé à la présidence de la RSFY ?

6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne vais pas

7 demander à qui a été envoyé ce document. Je lui ai demandé s'il peut nous

8 dire quel est le titre du document. Les questions que vous venez d'évoquer,

9 ce sont les questions que je vais aborder à présent, justement.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais écoutez, la question que vous

11 avez posée telle qu'elle figure au compte rendu d'audience à la page --

12 enfin, la ligne -- la page 4, c'est précisément la question que vous avez

13 posée, à savoir qui est le destinataire du document. Peut-être que c'est un

14 problème d'interprétation, mais nous pouvons vérifier cela.

15 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Non, non. C'est moi qui ai posé la

16 question qui, à juste titre, provoque la réponse que vous avez posée,

17 enfin, la question que vous avez posée. Mais finalement, moi, ce que j'ai

18 voulu savoir en réalité, c'était de savoir ce que contenait ce document.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

20 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] A qui, d'après le texte, on adresse

21 cette lettre ? Enfin, à qui est adressée la lettre ?

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Cette lettre a été envoyée à la

23 Conférence de la Paix; c'est cela ?

24 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

25 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, c'est ce qui est écrit dans le

26 document.

27 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Votre réponse n'était pas bien

28 claire.

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1 Pourriez-vous nous dire à qui est adressée cette lettre ? A qui elle est

2 envoyée ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] On voit très bien que cette lettre est

4 adressée à la Conférence de la Paix à La Haye.

5 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Merci.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais je ne vois pas où --

7 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Mais on voit cela où ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans le titre du document.

9 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Vous savez, l'en-tête, c'est une

10 chose, ensuite l'adresse, le destinataire, c'en est une autre, puis vous

11 avez le titre, aussi.

12 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Apparemment, il y a un amalgame

13 entre le titre et l'objet de la lettre ainsi que le destinataire, puisque

14 tous les Juges ont l'impression que le destinataire de la lettre est autre

15 que le destinataire indiqué par le témoin. C'est un point matériel, enfin.

16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Avec votre permission, je ne vais pas

17 vous donner une réponse, moi, mais je vais poser la question dans ce sens

18 au témoin. Je voudrais continuer, si vous le voulez bien, et je pense que

19 nous allons trouver une réponse à la fin.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Continuez. Vous nous avez

21 demandé de nous référer à la septième page en B/C/S. Quelle est cette page

22 en anglais ?

23 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Bien. Je ne sais pas quelle est vraiment

24 la page en anglais, mais en tout cas, c'est la dernière page du document

25 qui a un sceau. C'est vraiment la fin même du document puisque c'est là que

26 l'on voit qui a signé le document. On voit le sceau, on voit la signature.

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Allez-y.

28 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

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1 Q. Monsieur le Témoin, à la septième page du document en B/C/S, en bas à

2 droite, on peut lire quelque chose. Pourriez-vous me donner lecture de

3 ceci ?

4 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Agrandissez, s'il vous plaît, la partie

5 basse du document.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je le vois. C'est bien la page 7 ? Oui,

7 oui, je le vois.

8 "Le président du gouvernement de la SAO de la Krajina, le Dr Milan Babic."

9 D'après le contenu de la lettre, on peut comprendre que la lettre est

10 adressée à la Conférence de la Paix à La Haye.

11 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Faites défiler encore une page, s'il

12 vous plaît. La huitième page en B/C/S. C'est le numéro 4835, là vous allez

13 voir qui sont les destinataires de la lettre, à qui elle a été remise.

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais voyez que ce n'est pas la

15 Conférence de la paix de La Haye.

16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] On va y arriver, on va y arriver,

17 Monsieur le Président

18 Q. Monsieur le Témoin, qui sont les destinataires de la lettre. A qui a-t-

19 elle été remise ?

20 R. Un, les Nations Unies. Deux, le Conseil des ministres de la Communauté

21 européenne. Trois, le Parlement européen. Quatre, le Haut-commissariat de

22 la Conférence pour la sécurité et la coopération en Europe. Cinq, la

23 présidence de la République socialiste fédérative de Yougoslavie. Six, le

24 Comité exécutif fédéral. Sept, l'Assemblée nationale de la République de

25 Serbie. Huit, le président de la République de Serbie. Neuf, le

26 gouvernement de la République de Serbie.

27 Q. Merci. Je voudrais revenir sur la première page du document avec le

28 numéro 4828.

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1 Tout à l'heure, vous avez dit en lisant ce qui est écrit à l'en-tête du

2 document qui a écrit la lettre. Ensuite, je vous ai demandé qui étaient les

3 destinataires et vous avez donné une réponse, mais là je vous demande à

4 nouveau d'examiner le titre de la lettre et de nous dire si on peut

5 conclure d'après le titre du document à qui est destinée cette lettre.

6 R. Dans le titre de la lettre, on peut lire "la Conférence de la paix sur

7 la Yougoslavie qui a lieu à La Haye."

8 Q. Pourrions-nous lire le premier paragraphe ?

9 R. "Le gouvernement de la SAO Krajina" ne faites pas défiler le document

10 aussi rapidement, s'il vous plaît, puisque je ne peux pas le lire.

11 Je ne le vois plus sur l'écran. Je suis désolé.

12 Q. Revenez sur le début.

13 R. "Le gouvernement de la SAO Krajina, lors d'une séance qui s'est tenue

14 le 5 septembre 1991, a abordé la question de la déclaration sur la

15 Yougoslavie, prise lors d'un conseil des ministres extraordinaire de la

16 Coopération politique européenne à Bruxelles le 27 août 1991.

17 Un accord de cessez-le-feu, ainsi qu'un mémorandum portant sur la

18 mission des observateurs et à ce sujet le gouvernement a pris les positions

19 suivantes."

20 Q. Merci. Est-ce que vous saviez que cette lettre avait été écrite avant

21 que je ne vous la montre aujourd'hui ?

22 R. Les lettres que M. Babic envoyait aux organisations internationales,

23 c'est moi qui les traduisais en anglais. Evidemment, je ne peux pas me

24 rappeler de tous les détails.

25 Q. Merci.

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Quelle est la réponse précise à la

27 question ? On vous a demandé si vous étiez au courant de l'existence de

28 cette lettre-là, la lettre qu'on vous a montrée aujourd'hui ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. Excusez-moi. Tout va bien. Tout va

2 bien. Vous savez, j'ai du mal à m'habituer.

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien. Continuons.

4 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Vous voulez dire que vous connaissiez

5 le contenu de la lettre dont vous venez d'examiner la page ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous savez, il y en avait beaucoup. Il y avait

7 beaucoup de lettres. Mais tout ce qu'il fallait traduire en anglais, c'est

8 moi qui l'ai fait, mais je ne me souviens pas de toutes les lettres. Je

9 suis désolé.

10 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je veux dire que tout à l'heure,

11 quand vous avez répondu à la question de savoir à qui était adressée la

12 lettre, c'est le contenu de la lettre qui vous disait immédiatement qui

13 était les destinataires, c'est-à-dire que vous pouviez le dire à première

14 vue, dès que vous avez vu le contenu vous avez compris. Mais si vous

15 examinez le titre, la Conférence de la paix en Yougoslavie, cela n'a pas un

16 lien direct avec les destinataires de la lettre. Vous êtes d'accord ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

18 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Vous vous êtes un peu avancé quand

19 vous avez dit que c'était bien clair, qu'on pouvait facilement conclure qui

20 était les destinataires. Je vous demande de ne pas faire des conclusives

21 hâtives. Essayez de progresser pas à pas. Merci.

22 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] J'ai l'impression que d'après la

23 réponse du témoin, on peut en arriver à la conclusion que cette lettre a

24 été adressée pas à un seul destinataire, mais à un certain nombre de

25 destinataires. En réalité, cette lettre a été adressée à une personne et

26 ensuite des copies de cette lettre ont été remises à un certain nombre

27 d'autres organes ou destinataires. Vous pouvez continuer, Monsieur

28 Milovancevic, si le Juge Hoepfel a terminé.

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1 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Oui, merci.

2 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

3 Q. Monsieur le Témoin, au début je vous ai demandé de nous dire ce qui est

4 écrit en haut à gauche de cette lettre. Vous vous en souvenez ?

5 R. Oui.

6 Q. Vous avez dit que la lettre a été envoyée par le gouvernement de la SAO

7 Krajina. Je vous ai demandé à qui la lettre était adressée.

8 R. J'ai lu le titre et je me suis dit qu'elle devait normalement être lue

9 ou présentée à la conférence.

10 Q. Quand vous avez donné lecture du titre, est-ce que vous avez interprété

11 le contenu de la lettre ou est-ce que vous vous êtes contenté de lire

12 uniquement le titre ?

13 R. Je n'ai fait rien d'autre que de lire le titre.

14 Q. Maintenant que vous avez vu la première page et la dernière page, que

15 vous avez vu les destinataires de la lettre, quelle est votre conclusion

16 par rapport à la lettre compte tenu du titre ? A qui cette lettre est-elle

17 adressée ?

18 R. On voit bien qui sont les destinataires de la lettre, mais c'est une

19 lettre qui était véritablement destinée à la Conférence de la paix à La

20 Haye pour que les gens savent quelle est la situation, parce que ce que

21 l'on demande, on demande à la Conférence de la paix de nous protéger. On ne

22 demande pas cela aux destinataires de la lettre.

23 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Attendez. Je voudrais demander que

24 l'on corrige le compte rendu d'audience, page 10, ligne 7, le troisième mot

25 utilisé devrait être "deliverees" avec deux e. parce que cela n'a pas été

26 bien épelé.

27 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

28 Q. Merci. Est-ce que vous savez, Monsieur le Témoin, si au mois de

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1 septembre 1991, une conférence de paix s'est tenue à La Haye, une

2 conférence de paix concernant la Yougoslavie ?

3 R. Oui.

4 Q. Est-ce que vous savez qui a organisé cette conférence, quel pays ? Quel

5 était le thème ?

6 R. Je ne sais pas quels étaient les organes qui ont fait cela. Je pense

7 que c'était l'initiative de la Communauté européenne. La Communauté

8 européenne, oui, c'était l'organe qui existait à l'époque.

9 Q. Bien. Je vais vous demander d'examiner la deuxième page de la lettre

10 4829, c'est la deuxième page après la page de garde. Il y a juste un

11 paragraphe qui nous intéresse et je vais vous demander d'en donner lecture.

12 Pourriez-vous lire le deuxième paragraphe en partant du haut de la page ?

13 R. Je ne le vois pas sur l'écran.

14 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Pourriez-vous déplacer la page de sorte

15 que l'on puisse voir le deuxième paragraphe ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Il faut en réalité baisser la page. Encore.

17 Encore.

18 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

19 Q. Je ne vois pas ce que vous voyez.

20 R. Je vois la page 3 et pas la page 2.

21 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je voudrais demander que l'on présente

22 au témoin la deuxième page, deuxième paragraphe.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] "Le gouvernement croate néofasciste, qui est

24 par un certain nombre d'éléments identique au totalitarisme communiste qui

25 lui a précédé, a voulu en détruisant la Yougoslavie nous forcer d'accepter

26 la terreur sans faire usage de ce que la Croatie considère comme étant son

27 droit naturel, à savoir le droit à l'autodétermination jusqu'à la

28 sécession. Dans ces circonstances, alors qu'il nous conteste le droit de

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1 prendre les armes, il conteste notre référendum, il conteste notre droit à

2 l'égalité. Nous n'avions pas d'autre choix que de répondre aux armes par

3 les armes. La Croatie nouvelle a attaqué notre droit et nos décisions avec

4 les armes avec l'intention d'obliger le peuple serbe par le biais d'une

5 agression de vivre dans l'Etat croate indépendant néofasciste. L'Etat qui

6 rappelle tant", faites défiler le texte, s'il vous plaît, "on n'est pas les

7 seuls à avoir cette association pas seulement nous les Serbes -- rappelle

8 ce temps génocidaire (1941-1945) quand l'Etat se disait aussi "indépendant"

9 et se comportait comme tel, indépendant de toute humanité, indépendant du

10 sens commun.

11 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

12 Q. Merci. Dans l'introduction, il est précisé que c'est la position

13 adoptée lors de la session du gouvernement de la SAO Krajina sur la

14 situation et avant la Conférence sur la paix en Yougoslavie. M. Babic

15 partageait-il ce point de vue du gouvernement qu'il a signé ?

16 R. Oui, oui, tout à fait.

17 Q. Merci.

18 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Nous n'aurons plus besoin de ce

19 document. Merci.

20 Q. Comment se sont déroulés les pourparlers avec M. Vance puisqu'il ne

21 voulait pas entendre la requête de M. Babic ?

22 R. M. Vance s'est rendu compte quelle était la situation avec M. Babic et

23 il a choisi d'exercer des pressions sur le président de la Serbie, M.

24 Milosevic. Après cela, le gouvernement de la Krajina a été démantelé.

25 Q. Lorsque vous dites que par la suite M. Vance a choisi d'exercer des

26 pressions sur M. Milosevic, pouvez-vous nous dire ce que vous entendez par

27 là, dans quelle mesure des pressions ont été exercées, comment et avec quel

28 objectif ?

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1 R. L'objectif était de faire accepter sans réserve le plan Vance.

2 Q. Savez-vous s'il y a eu une session de la présidence qui a été tenue à

3 Belgrade consacrée à l'adoption de ce plan ?

4 R. Oui. La présidence a tenu une session. J'y ai assisté. Nous étions un

5 certain nombre de participants de la Krajina, les membres du gouvernement,

6 des membres de la présidence de la municipalité également de la Krajina ont

7 assisté à cette session ainsi que des représentants serbes de Bosnie. Le Dr

8 Radovan Karadzic à leur tête.

9 Q. Où s'est tenue cette session et qui l'a organisée ?

10 R. Pour être tout à fait honnête je ne sais pas qui a organisé cette

11 session, mais on nous y a emmené en voiture, nous sommes arrivés dans une

12 salle de conférence spacieuse. Je ne sais pas très bien où mais je sais que

13 Petar Stikavac, par exemple, s'est évanoui et que le Dr Karadzic a pris

14 soin de lui.

15 Q. Merci. Pouvez-vous nous dire si des membres de la présidence étaient

16 également présents à cette réunion ?

17 R. Je crois que c'est la présidence de Yougoslavie qui avait organisé

18 cette session puisque le président Jovic était présent ainsi que le général

19 Adzic et Kukanjac, ils exerçaient tous des pressions sur nous en essayant

20 de nous convaincre d'accepter le plan Vance.

21 Q. Quelles étaient les raisons avancées par eux ?

22 R. Je peux vous dire que cela a été une réunion assez désagréable

23 puisqu'ils criaient particulièrement. Le général Adzic nous criait dessus,

24 nous injuriait, nous, gens de la Krajina.

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'aimerais vous poser une question.

26 Vous dites que vous ne savez pas où a eu lieu cette session ? Vous ne savez

27 pas dans quelle ville elle s'est tenue ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était à Belgrade. Je ne sais plus exactement

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1 où, quel était le lieu de la conférence, parce que je ne connais pas bien

2 Belgrade.

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien. Merci. Au moins, cela nous donne

4 une réponse à la question qui vous a été posée, à savoir savez-vous où

5 s'est tenue la réunion et qui l'a organisée.

6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

7 Q. Quels ont été les arguments avancés motivant la demande faite par la

8 présidence et par les généraux, demande consistant à accepter et à adopter

9 ce plan ? Quelle était leur argumentation ?

10 R. D'après eux, nous allions être pleinement protégés grâce au plan Vance,

11 alors que nous disions le contraire et qu'en réalité, nous avions raison,

12 comme l'ont montré les événements par la suite.

13 Q. Vous avez dit, Monsieur Macura, que d'après eux, vous alliez être

14 pleinement protégés par le plan Vance. Qui est "vous" ?

15 R. Les Serbes en Krajina. Le général Adzic et M. Jovic nous ont garanti

16 que la JNA assurerait notre protection, et nous avons répondu qu'ils ne

17 mettraient même pas les pieds en Krajina.

18 Q. Vous ont-ils dit pourquoi le président de la présidence de la

19 Yougoslavie, M. Jovic et le général Adzic vous ont-ils dit pourquoi il

20 serait bon que les Nations Unies se déploient ? Que vous ont-ils dit là-

21 dessus précisément ?

22 R. Je vous l'ai déjà dit, ils ont affirmé que la JNA était présente et

23 qu'elle resterait en Krajina. Mais cela n'a abouti à rien. Ils disaient :

24 nous sommes -- nous restons en Bosnie, nous sommes à Grahovo, et Grahovo

25 n'est qu'à 10 minutes de Knin en voiture. Nous leur avons dit qu'ils ne

26 seraient même pas en Bosnie parce qu'il faudrait qu'ils quittent la Bosnie

27 également. Le général Adzic s'est mis en colère, comme M. Jovic, et ils ont

28 dit qu'ils ne quitteraient jamais la Bosnie.

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1 Q. Vous parlez de la Bosnie. Mais qu'était la Bosnie à l'époque ?

2 R. La Bosnie, c'était l'une des républiques de la République socialiste

3 fédérative de Yougoslavie.

4 Q. Pourquoi dites-vous que M. Jovic et le général Adzic vous ont dit

5 qu'ils seraient en Bosnie ? Qui sont ces "ils", et pourquoi en Bosnie ?

6 R. Ils parlaient de la JNA parce que nous étions en guerre. Pourquoi

7 pensaient-ils qu'ils seraient en Bosnie, je n'en sais rien.

8 C'est une question à leur poser à eux.

9 Q. A l'époque, a-t-on parlé de l'éventualité de la sécession et de

10 l'indépendance de la Bosnie ?

11 R. Non, personne n'en a parlé du tout à ce moment-là.

12 Q. Par la suite, a-t-elle eu lieu, cette sécession, et la Bosnie est-elle

13 devenue indépendante ?

14 R. Oui.

15 Q. Quand, Monsieur Macura ?

16 R. Très peu de temps après. Je n'ai pas la date à l'esprit. Je m'en

17 excuse, peut-être que j'aurais dû noter certaines dates, mais je ne sais

18 plus quand c'est. Je sais que la Bosnie, tout comme la Croatie, a été

19 reconnue alors même que les opérations de guerre et de combat se

20 poursuivaient.

21 Q. M. Jovic et le général Adzic, outre cette tâche immédiate dont ils ont

22 parlé, à savoir la protection des Serbes en Krajina, vous ont-ils dit

23 pourquoi ils pensaient que cette opération de paix était importante pour la

24 Yougoslavie et pourquoi elle devrait faire l'objet d'un contentement

25 général ? Quels étaient leurs arguments politiques ? Je ne parle pas

26 seulement de la situation factuelle.

27 R. Je dois reprendre les propos du général Adzic. Celui-ci a dit qu'il n'a

28 pas utilisé des termes très courtois.

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1 Q. Dites-le comme vous le souhaitez.

2 R. Il a dit : "Vous, bandits de la Krajina, ne pouvez pas vous comporter

3 comme des voyous et vous moquer d'un Etat tout entier." Voilà ce que disait

4 le général Adzic sur les Serbes de Krajina.

5 Q. [aucune interprétation]

6 R. [aucune interprétation]

7 Q. Quelle était son appartenance ethnique ?

8 R. Il était Serbe.

9 Q. Vous avez dit qu'un des participants à la réunion s'était évanoui. Qui

10 était-ce ?

11 R. M. Pero Stikavac. Il était professeur. Pourquoi s'est-il évanoui ? Je

12 pense que tout simplement la situation était extrêmement délicate, et il ne

13 le supportait plus. Il a commencé à se disputer avec le général Adzic et il

14 l'a même empoigné physiquement.

15 Q. Merci. Le général Adzic occupait quel poste, à l'époque ?

16 R. Il était commandant de l'armée yougoslave de la JNA ou le commandant de

17 l'état-major général. Je ne sais pas très bien quel était l'intitulé de son

18 poste, mais en tout cas, il était commandant en chef de l'armée yougoslave.

19 Q. Le plan Vance a-t-il été accepté après tout cela, et comment ?

20 R. Oui. Le plan Vance a été adopté lorsque, à Glina, une ville de Krajina,

21 une réunion ou une session de l'assemblée de la SAO Krajina a eu lieu,

22 assemblée qui était illégale. Branko Kostic était présent à cette réunion

23 également, et il s'agissait en réalité d'un petit groupe de personnes qui

24 s'était autoconstitué. A l'époque, Branko Kostic était président de la

25 présidence, de ce qui restait de la Yougoslavie à l'époque.

26 Lors de cette assemblée, le gouvernement de Milan Babic, en quelque sorte,

27 a été renversé.

28 Q. Le plan Vance a-t-il été adopté ?

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1 R. Oui, et mis en œuvre par la suite.

2 Q. Des explications ont-elles été avancées quant aux raisons pour

3 lesquelles le plan Vance devait être adopté ? Je parle de l'attitude des

4 hommes politiques de Krajina. Je pense qu'il devait y avoir certaines

5 divergences d'opinion.

6 R. Je faisais partie de ceux qui s'opposaient à l'adoption du plan Vance.

7 J'ai traduit l'intégralité du plan pour Babic à partir de l'anglais. Nous

8 avons parcouru la Krajina, organisant des rassemblements pour essayer

9 d'expliquer pourquoi ce plan ne devait pas être adopté.

10 Q. Merci. Monsieur Macura, pourriez-vous nous dire très brièvement quelle

11 était la substance des raisons qui faisaient que vous étiez opposé à ce

12 plan ? Etait-ce le concept de sécession, d'annexion ? Quelle était la

13 raison, exactement ?

14 R. Nous pensions que ce plan allait aboutir à quelque chose de semblable,

15 à une occupation de la région de la Krajina, et nous pensions que les

16 troupes des Nations Unies n'allaient être que le moyen d'accomplir

17 l'objectif de la Croatie ou tous ses objectifs.

18 Q. Est-ce précisément ce qui est arrivé ?

19 R. Oui, malheureusement.

20 Q. Pourquoi dites-vous cela ?

21 R. Je crois qu'à partir de ce moment-là, les choses sont devenues tout à

22 fait claires, et au jour d'aujourd'hui, il n'y a que les personnes âgées

23 qui restent en Krajina.

24 Q. Pensez-vous que l'objectif de Jovic et d'Adzic était de faire fuir les

25 Serbes de cette région ?

26 R. J'ai entendu ce qu'a dit Stipe Mesic à Bora Jovic lorsqu'on lui a posé

27 des questions sur la situation des Serbes dans la région de la Krajina.

28 Q. Qu'a-t-il dit ?

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1 R. Bora Jovic a dit que pour eux, ils pouvaient faire ce qu'ils voulaient

2 avec les Serbes. Faites-en ce que vous voulez, cela ne nous intéresse pas.

3 Q. Est-ce le soutien que vous avez reçu de Belgrade en Krajina ?

4 R. Malheureusement, oui. Mais je ne veux pas ajouter quoi que ce soit

5 d'autre pour éviter d'irriter les membres de la Chambre.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi. Ne tenez pas compte de

7 l'opinion ou de ce qui pourrait irriter ou pas les membres de la Chambre.

8 D'ailleurs, ce n'est pas à vous d'en juger. Je ne sais pas comment vous

9 pouvez savoir que les Juges seraient irrités de ce que vous allez dire.

10 Exprimez-vous simplement sans vous demander comment les Juges de la Chambre

11 vont réagir.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allez-y. Pouvez-vous nous dire la

14 suite de votre réponse ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] M. Jovic a dit : vous pouvez même les empaler.

16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

17 Q. M. Jovic a-t-il été mis en accusation devant ce Tribunal ?

18 R. Je ne sais pas.

19 Q. Mais il était président de la présidence de la Yougoslavie ?

20 R. Oui.

21 Q. Merci. Jusqu'à quand avez-vous occupé les fonctions de ministre de

22 l'Information ?

23 R. Jusqu'à l'assemblée de Glina, assemblée illégale. Au cours de cette

24 assemblée, tout le gouvernement a été destitué, en quelque sorte, et un

25 nouveau gouvernement a été formé.

26 Q. Merci. Connaissez-vous le plan Z-4 ? Savez-vous quelle en est la

27 teneur ?

28 R. Le plan Z-4 était le plan de la Croatie qui prévoyait l'autonomie des

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1 Serbes au sein de la Croatie. En réalité, étaient concernés les districts

2 de Glina et de Knin.

3 Q. Merci. Je vous ai interrompu, je m'en excuse. Vous aurez la possibilité

4 de finir cette phrase que vous avez commencée, mais j'aimerais vous

5 demander d'abord pourquoi vous avez dit que le plan Z-4 était le plan de la

6 Croatie, de l'Etat croate, et non pas de la communauté internationale.

7 R. C'est un plan qui a été conçu par la Croatie et qui était censé être

8 mis en œuvre par la communauté internationale.

9 Q. Merci. Savez-vous quelle a été la réaction de M. Martic en tant que

10 président de la Krajina lorsque ce plan lui a été soumis ?

11 R. C'était dans la forteresse de Knin. M. Martic a demandé des garanties

12 et a demandé à ce que le mandat de la FORPRONU soit prolongé ou élargi.

13 Puisque la Croatie avait déjà annoncé qu'elle s'opposerait à l'extension de

14 ce mandat de la FORPRONU et puisqu'il n'a reçu aucune garantie l'assurant

15 de l'extension du mandat, M. Martic n'a pas souhaité débattre de ce plan,

16 ni l'adopter ni l'accepter.

17 Q. Merci. Le nom de Galbraith vous dit-il quelque chose ?

18 R. Oui.

19 Q. Qui était cette personne ?

20 R. C'était l'ambassadeur des Etats-Unis à Zagreb.

21 Q. Avait-il quoi que ce soit à voir avec ce plan Z-4 ? M. Galbraith,

22 j'entends.

23 R. Bien sûr, puisqu'il était le représentant d'une superpuissance, d'une

24 grande puissance internationale qui évidemment exerce une influence sur

25 tout ce qui se passe dans le monde.

26 Q. Qu'est-ce que l'opération Eclair, pour vous ?

27 R. Il s'agissait du nettoyage de la Slavonie occidentale par les forces de

28 la police et des forces de l'armée croate. Ils essayaient de nettoyer la

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1 région en question des Serbes qui s'y trouvaient. Je crois que c'est en mai

2 que c'est arrivé.

3 Q. La Slavonie occidentale, à l'époque, était-elle placée sous la

4 protection de qui que ce soit ?

5 R. La Slavonie occidentale faisait partie de la Krajina, et les soldats de

6 la FORPRONU en assuraient la protection.

7 Q. Après le nettoyage de la Slavonie occidentale, comme vous l'avez appelé

8 vous-même, par les forces croates, les représentants de la Krajina ont-ils

9 par la suite participé à d'autres réunions avec les autorités croates

10 consacrées aux négociations sur la Krajina ?

11 R. Il n'y a plus eu de pourparlers. Les choses avaient été réglées de

12 manière militaire.

13 Q. Je vais vous parler de Genève et je vais revenir avec vous en arrière,

14 jusqu'en août 1995. Ceci vous dit-il quelque chose ?

15 R. Oui. Nous avons tenu des pourparlers. J'ai représenté moi-même, parmi

16 d'autres, la Krajina dans ces négociations. Nous avons négocié avec les

17 autorités croates sous l'égide de M. Stoltenberg.

18 Le matin, nous nous sommes réunis en séance plénière, les Croates et nous-

19 mêmes, puis M. Stoltenberg a eu des entretiens séparés avec chacune des

20 délégations.

21 Au cours de la discussion avec nous, nous avons accepté toutes les

22 exigences de M. Stoltenberg.

23 Q. Je vous interromps un instant. Vous dites que vous avez accepté toutes

24 ses exigences; s'agissait-il d'exigences qui lui étaient propres ?

25 R. Nous pensions qu'il s'agissait d'exigences qui avaient été formulées

26 par les Nations Unies et qui nous étaient transmises par M. Stoltenberg.

27 Q. Qu'avez-vous accepté exactement ?

28 R. Nous avons accepté de garantir dans tout le territoire de la Croatie

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1 que la vie normale reprendrait son cours, que tout fonctionnerait

2 normalement, les infrastructures, les axes routiers, les oléoducs.

3 Nous avons également convenu que tout ceci se ferait sur le terrain en

4 coopération avec les autorités croates et dans un délai de deux semaines.

5 La partie croate a demandé à ce que nous signions un acte de capitulation.

6 Q. Un instant. Quand les autorités croates ont-elles formulé cette

7 demande, avant ou après que vous ayez accepté ces exigences ?

8 R. Avant, lors de la séance du matin.

9 Q. Avez-vous accepté de capituler ?

10 R. Nous avons déclaré que nous n'avions pas compétence pour signer un tel

11 document.

12 Q. Mais vous avez dit avoir accepté toutes les exigences présentées par M.

13 Stoltenberg.

14 R. C'est exact.

15 Q. Que s'est-il passé le 3 août 1995 ? Que s'est-il passé par la suite ?

16 R. Dans la soirée, j'ai été invité par le représentant de la

17 mission russe à Genève, j'ai été invité à participer à une réunion au cours

18 de laquelle il m'a dit que les Etats-Unis et l'Allemagne avaient donné le

19 feu vert à la Croatie pour qu'elle attaque la Krajina et qu'ils les

20 aideraient dans cet effort. C'est ce qu'il s'est passé à l'aube du jour

21 suivant; la Krajina a été attaquée.

22 Q. Quel était le nom de cette opération d'attaque sur la Krajina ?

23 R. On a appelé cette opération l'opération "Tempête", qui est aujourd'hui

24 le jour de célébration de l'indépendance de la Croatie.

25 Q. Merci.

26 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Pouvons-nous avoir la pièce 1D0130 à

27 l'écran, s'il vous plaît ?

28 Voulez-vous vous concentrer -- agrandir la photographie, s'il vous

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1 plaît ? Parfait.

2 Q. Pouvez-vous reconnaître les personnes sur la photographie ?

3 R. A gauche, on peut voir M. Galbraith, ambassadeur des Etats-Unis en

4 Croatie, sur un char. Je l'ai entendu déclarer que les Serbes occupaient la

5 Croatie, alors que lui-même était en train d'essayer d'expulser les Serbes

6 d'un territoire habité par les Serbes depuis des centaines d'années.

7 Q. Où cette photographie a-t-elle été prise ? Que dit la légende sous la

8 photographie ?

9 R. Il est dit : "Sur un char croate," ambassadeur des Etats-Unis, M.

10 Galbraith. C'était également à la télévision. On le voyait demander à des

11 gens de se dépêcher.

12 Q. Quels gens ? Quelles personnes ?

13 R. Des réfugiés serbes qui ont été expulsés de leur territoire.

14 Q. Monsieur Macura, M. Galbraith a témoigné ici et il a déclaré n'avoir

15 jamais été sur un char croate.

16 R. Il ne disait pas la vérité puisque je l'ai vu à la télévision.

17 M. BLACK : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Je crois

18 qu'il s'agit d'une mauvaise interprétation. Il n'a jamais dit qu'il n'était

19 jamais monté sur un char croate. Il a dit qu'il n'était pas sur un char

20 croate durant l'opération Tempête et que ceci est une différence

21 essentielle.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, poursuivez.

23 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, la Défense -- M.

24 Galbraith était un témoin protégé et l'ancien ambassadeur des Etats-Unis à

25 la Croatie. Il a dû répondre à la question quant à savoir s'il était

26 photographié sur un tank croate. Il a répondu que non.

27 Quand la question lui a été reposée, il a donné l'explication suivante,

28 qu'il était sur un char américain -- ou pardon, il était sur une voiture

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1 Chevrolet américaine.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

3 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne peux pas le

4 faire maintenant, parce que je n'ai pas le compte rendu, mais mon collègue

5 du bureau de l'Accusation peut le confirmer qu'il n'était pas sur un char

6 croate. Ceci est suffisant, en ce qui me concerne. Je peux d'ailleurs le

7 retrouver dans le compte rendu.

8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mon éminent ami de l'Accusation est en

9 train de soulever une objection, et si vous insistez sur ce que vous êtes

10 en train d'avancer, vous allez devoir faire référence au compte rendu, sans

11 quoi nous allons devoir suspendre avant que vous ne pouviez poursuivre sur

12 ce point.

13 Le Juge Hoepfel l'a retrouvé quelque part. Il pourra peut-être vous aider.

14 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Si vous voulez savoir, Monsieur

15 Milovancevic, c'est le compte rendu 3 851, à la ligne 15. "Savez-vous que,"

16 M. Galbraith a été interrogé, "que les médias ont publié -- savez-vous que

17 votre photo a été publiée vous représentant sur un char de l'armée croate

18 et que cette photographie a été prise durant l'opération Tempête ?"

19 Réponse de M. Galbraith : "Aucune photographie n'a été prise de moi durant

20 l'opération Tempête sur un char croate. Je n'étais pas sur un char croate

21 durant l'opération Tempête," et cetera.

22 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge Hoepfel. C'était

23 exactement ce à quoi je faisais référence quand je posais ma question au

24 témoin. Dès lors, M. Galbraith a menti dans cette Chambre quand il a dit

25 qu'il était dans un véhicule civil.

26 M. BLACK : [interprétation] Objection, votre Honneur. Il ne s'agit pas de

27 la question qui a été posée. C'est tout à fait différent. Je soulève une

28 objection.

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1 L'INTERPRÈTE : L'interprète a mal compris le commentaire du bureau de

2 l'Accusation.

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, ce que vous

4 avez soumis comme question à ce témoin est une question différente de celle

5 qui a été lue par le Juge Hoepfel. Maintenant, pouvez-vous nous dire

6 exactement ce que vous avancez comme étant la question posée à

7 l'ambassadeur Galbraith et quelle a été sa réponse ? Pouvez-vous nous dire

8 exactement quelle a été la question qui lui a été posée et quelle a été sa

9 réponse ?

10 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, avec

11 plaisir. J'ai demandé à l'ambassadeur s'il savait que les médias du monde

12 entier avaient publié une photographie de lui sur un tank, sur un char

13 croate durant l'opération Tempête. Je lui ai même probablement posé cette

14 question à deux reprises. M. Galbraith a répondu qu'il n'avait pas été --

15 qu'il n'était pas sur un char croate, mais sur un véhicule de l'ambassade

16 américaine. Maintenant, on voit une photographie de lui ici sur un char, et

17 --

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ce n'est pas ce que dit sa réponse,

19 ici. Il a dit qu'il n'avait jamais été sur un char croate durant

20 l'opération Tempête.

21 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je lui ai demandé

22 : étiez-vous sur un char croate durant l'opération Tempête ? Et il a

23 répondu : non. Ici, on voit une photographie le représentant sur un char.

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Attendez. Attendez un instant,

25 Monsieur Milovancevic. Vous n'avez pas mal traduit la question.

26 Ce que vous êtes en train de soumettre au témoin, sauf si -- ce que vient

27 de dire le Juge Hoepfel n'était pas ce à quoi vous faisiez référence. Vous

28 parliez du compte rendu -- est-ce que vous pouvez nous montrer ailleurs

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1 dans le compte rendu ce que vous dites ? Je vais vous permettre de

2 poursuivre, sans quoi je serai -- j'ai peur que vous faisiez une

3 interprétation erronée du témoignage.

4 M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je juste ajouter un

5 point qui, je crois, est important ? Sauf si j'ai mal compris quelque

6 chose, ceci ne veut pas dire que la photographie a été prise durant

7 l'opération Tempête. Il n'y a rien qui permette de dire que -- sauf la

8 légende qui figure en dessous de la photographie et dit que l'ambassadeur

9 Galbraith est là, sur un char, et que cela a été pris pendant l'opération

10 Tempête.

11 Je voudrais savoir s'il y a quelque chose qui l'indique, parce que le

12 témoin -- la question exacte qui a été demandé au témoin : Monsieur Macura

13 -- c'est-à-dire quand -- où la photographie à été prise. Cette

14 photographie-ci, elle dit que c'était sur un char croate. Il ne dit pas

15 quoi que ce soit et ne parle pas de l'opération Tempête. Mais maintenant,

16 la question suivante, c'était : est-ce que ceci a été pris pendant

17 l'opération Tempête ? Le témoin a bien donné la réponse au conseil de la

18 Défense à travers l'argumentation des questions.

19 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Je me demandais, Monsieur Black,

20 s'il y a quelque chose dans le texte qui permettrait d'éclairer ceci --

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je regrette, je regrette, Madame le

22 Juge, que le témoin a été -- enfin, le témoin a été interrogé sur la

23 photographie, et pas sur la légende.

24 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] C'est vrai.

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Milovancevic, je

26 crois que vous êtes en train de mal interpréter la pièce à conviction, ici,

27 et vous allez devoir vous en tenir à votre question ou la reformuler. C'est

28 à vous de choisir.

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1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vais reformuler ma question. Ce qui

2 nous importe est l'essence, ce n'est pas la forme. Parfois, je crois que

3 c'est destiné à en cacher l'essence.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, je crois que

5 cette remarque est tout à fait hors propos, parce que nous sommes en train

6 d'essayer de comprendre la substance et pas la forme. La substance de la

7 question et de la réponse donnée par l'ambassadeur Galbraith sur le

8 transcript, c'était qu'il n'était jamais monté sur un char croate durant

9 l'opération Tempête. Il ne dit pas qu'il n'était jamais sur un char, ni sur

10 un char croate. Il est peut-être monté sur un char croate à une autre

11 occasion, mais pas durant l'opération Tempête.

12 Si vous n'arrivez pas à faire la distinction, n'insinuez pas des choses que

13 vous ne pouvez pas prouver.

14 Vous pouvez poursuivre.

15 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

16 Q. Témoin, le deuxième à droite de M. Galbraith porte un chapeau. Est-ce

17 que vous voyez un insigne sur son couvre-chef ou sur sa casquette ?

18 R. Il est difficile de voir l'insigne. Cela devrait être celui d'un

19 officier croate. Pourrait-ce être quelqu'un d'autre ? Non, la photographie

20 n'est pas très claire, mais je crois que l'insigne sur la casquette est un

21 symbole, un damier.

22 Q. C'est bien ce que je voulais dire.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, vous êtes en

24 train de dire au témoin qu'il s'agit d'un damier ? Mais il ne le voit -- il

25 vous a dit -- il vient de vous le dire, vous voyez ? Dites-moi pourquoi

26 vous avez dit damier. Vous ne pouvez pas vous mettre à la place du témoin

27 parce qu'on n'aperçoit pas de damier sur la photo.

28 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin a

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1 répondu littéralement qu'il voyait le damier. Je vais lui reposer la

2 question.

3 Q. Avez-vous dit cela ?

4 R. Oui, j'ai dit cela.

5 Q. Merci.

6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je crois qu'il est temps de faire une

7 interruption, Monsieur le Président.

8 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Avant de nous interrompre, je veux

9 dire que je n'arrive pas à identifier le char. Je crois que je n'ai pas

10 l'esprit aussi technique que mes confrères.

11 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne crois pas que ce soit vrai.

12 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] J'ai besoin d'aide. Peut-être nous

13 pourrions y revenir, si nous ne poursuivons pas maintenant.

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La Chambre va s'interrompre. Nous

15 allons revenir à 11 heures moins le quart et garder la photographie

16 affichée à l'écran.

17 --- L'audience est suspendue à 10 heures 14.

18 --- L'audience est reprise à 10 heures 44.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant la pause, Mme le Juge Nosworthy

20 nous faisait part des limitations techniques dont elle souffrait et elle

21 demandait qu'on l'aide pour qu'elle puisse voir les chars. Je dois dire que

22 je suis dans le même bain qu'elle.

23 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, dans le système

24 électronique cette photo existe, mais je l'ai aussi sous forme papier,

25 puisque la photo que j'ai est plus claire que celle qui est présentée dans

26 le système électronique. Je vais vous distribuer la photo, ensuite je vais

27 poser un certain nombre de questions à son sujet.

28 M. BLACK : [interprétation] Excusez-moi d'interrompre. Pendant la pause,

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1 nous avons parlé avec le conseil de la Défense. Nous avions l'impression

2 que le conseil de la Défense allait corriger un certain nombre de faits qui

3 ont été dits avant la pause et qui ne sont pas corrects. Je me demande si

4 le conseil va le faire immédiatement, parce que je pensais qu'il allait le

5 faire.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Peut-être que j'ai interrompu le cours

7 de la session, puisque j'ai pris la parole.

8 Monsieur Milovancevic, est-ce que vous vous êtes mis d'accord sur quoi que

9 ce soit avec la partie adverse pendant la pause que vous souhaiteriez dire

10 pour le compte rendu d'audience ?

11 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] M. le Juge Hoepfel a montré la page

12 3851, ligne 5, où la question de la Défense a été posée au témoin M.

13 Galbraith, en lui demandant s'il est exact que les médias mondiaux avaient

14 publié sa photo sur un char croate pendant l'opération Tempête. Il a

15 répondu qu'il n'a jamais été sur un char croate pendant l'opération

16 Tempête, qu'en revanche il était monté sur un tracteur pendant l'opération

17 Eclair. Si ceci convient au Procureur, c'était l'élément que j'ai voulu

18 présenter pour résoudre l'impasse.

19 Au fond je suis intervenu pour dire que j'accepte que cette photo ne

20 vienne pas de "Olija" puisque M. Galbraith a dit qu'il n'a jamais monté sur

21 un char croate pendant l'opération Tempête. Ensuite, il a donné quelques

22 explications concernant le blindé de l'ambassade américaine, char blindé,

23 et cetera. En tout cas, il a dit qu'il n'a jamais monté sur un char. Pour

24 ne pas examiner à nouveau le procès-verbal, nous avons la photo devant nos

25 yeux et je vais demander au témoin de nous dire ce qu'il voit sur la photo.

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant demander à M. Black ce qu'il a à

27 dire, voici la question que je vous pose : si vous acceptez, comme vous

28 venez de le dire, que M. Galbraith n'a jamais monté sur un char croate

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1 pendant l'opération Tempête, si vous acceptez cela quelle est alors la

2 pertinence de cette image ? Est-ce que nous avons encore raison de parler

3 de cela ?

4 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Et comment, Monsieur le Président, parce

5 que sur cette photo on voit justement M. Galbraith sur un char croate. Il a

6 été témoin ici. Il disait qu'il parlait plusieurs fois par jour parfois

7 avec M. Tudjman. Pour rétablir les faits, quant à ce qu'il faisait vraiment

8 M. Galbraith, c'est très important pour rétablir ce fait de voir cette

9 image.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne suis pas sûr de vous comprendre.

11 Parce que là vous apportez un nouvel élément, M. Tudjman, dans l'équation.

12 Evidemment, nous pouvons parler aussi de ce que faisait M. Galbraith avec

13 M. Tudjman, mais à moins de dire qu'il est avec lui sur le char, je ne vois

14 pas pourquoi nous avons besoin de cette photo, pourquoi avons-nous besoin

15 de l'appui de cette photo pour parler de ce qu'ils faisaient entre eux.

16 Si on lui a posé la question de savoir s'il était sur un char croate

17 pendant l'opération Tempête et il a répondu que, non, ce n'était pas le

18 cas, il n'était pas là pendant l'opération Tempête et que la Défense

19 accepte cette réponse, la question de la personne se pose et se pose de

20 façon imminente parce qu'il n'a jamais nié le fait d'avoir monté sur un

21 char. Il a juste dit qu'il n'est pas monté sur un char pendant l'opération

22 Tempête. Je ne sais pas si on lui a demandé s'il a jamais monté sur un char

23 et s'il a dit que ce n'était pas le cas.

24 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, à cette page-là 3

25 851, ligne 5, il a dit qu'il n'est jamais monté sur un char croate pendant

26 l'opération Tempête, qu'il n'est monté que sur un tracteur pendant

27 l'opération Eclair, ce qui montre qu'il nie avoir monté sur un char,

28 ensuite quand on insiste il a dit qu'il était dans un blindé de l'ambassade

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1 américaine. Ce qui est important pour moi ce n'est pas sa réponse. La

2 pertinence de ce thème, je dois vous expliquer pourquoi je considère que

3 cette photo est pertinente peu importe la date de la prise de cette photo.

4 Ce qui importe de savoir c'est si l'ambassadeur américain est monté sur un

5 char croate ? Que doit faire l'ambassadeur américain sur un char croate ?

6 Ce monsieur, il a fait des déclarations avec lesquelles il a corrigé des

7 rapports qu'il avait faits auparavant.

8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, n'avez-vous pas

9 l'impression que vous êtes en train de faire quelque chose que vous devriez

10 normalement faire au moment de la plaidoirie ? Parce que ce que vous dites

11 maintenant c'est quelque chose que vous devez soulever au moment de la

12 plaidoirie.

13 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, cette photo est

14 liée à un texte, un texte qui figure sur la même page. Elle est pertinente

15 directement par rapport à ce que je dois demander à ce témoin, le Témoin

16 Macura. Après avoir établi qui est la personne qui figure sur la photo, je

17 voudrais poser une question au sujet du texte qui figure sur la même page.

18 La question je la poserai au témoin et ceci concerne l'ambassadeur

19 Galbraith et les négociations à Genève.

20 Tout ceci est directement lié avec la déposition de ce témoin. J'ai besoin

21 de la photo à cause de la déposition du témoin.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez tout à fait le droit de

23 faire cela.

24 Vous pouvez faire cela. Tout ce que je vous demande c'est si, oui ou non,

25 M. Galbraith mentait quand il a dit qu'il n'a jamais été sur un char croate

26 pendant l'opération Tempête, n'est-ce pas un élément que vous devriez

27 garder pour la plaidoirie ? En ce qui concerne le texte, je ne l'ai pas vu.

28 Je fais un commentaire que sur la déclaration que vous venez de faire.

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1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je suis d'accord.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

3 Monsieur Black, est-ce que vous avez toujours besoin d'ajouter quelque

4 chose ?

5 M. BLACK : [interprétation] Oui, effectivement.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] S'il vous plaît.

7 M. BLACK : [interprétation] Nous considérons que le conseil de la Défense a

8 accepté que M. Galbraith a dit la vérité quand il a dit que M. Galbraith

9 n'était pas sur un char croate pendant l'opération Tempête, quand il dit

10 sur la ligne 19 du compte rendu d'audience que l'ambassadeur Galbraith a

11 menti sous serment. Il faudrait qu'il retire ce commentaire. D'ailleurs, je

12 ne sais même pas s'il est possible d'affirmer quelque chose comme cela.

13 Mais je pense que s'il accepte la vérité de ce que M. Galbraith a dit, il

14 faudrait qu'il retire son commentaire qui figure sur la page 25, ligne 19.

15 Où il a dit : "Donc, M. Galbraith a menti devant ce Tribunal et a menti

16 délibérément devant les Juges de la Chambre."

17 Je ne pense pas que ses commentaires sont appropriés et ce conseil de la

18 Défense a été informé par le Procureur il y a deux jours du fait que

19 d'après l'information que nous avons il s'agit d'une photo en date de 1993.

20 Ce n'est pas quelque chose qui est survenu pendant l'interrogatoire. Le

21 conseil de la Défense a choisi de poser ces questions et les commentaires

22 qu'il a faits au sujet de M. Galbraith sont absolument insupportables,

23 quand il a dit qu'il a menti alors qu'il témoignait sous serment. Je pense

24 qu'il faut retirer publiquement ce commentaire.

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, c'est tout à

26 fait logique. Vous ne pouvez pas à la fois accepter l'authenticité du

27 témoignage de M. Galbraith et en même temps dire qu'il s'agit d'un menteur.

28 De tout façon, si vous voulez faire ce commentaire, ce commentaire il

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1 convient de le faire pendant la plaidoirie.

2 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Un instant. Monsieur Black, avant

3 que M. Milovancevic ne réponde, je voudrais juste soulever un point.

4 Je n'ai pas compris que M. Milovancevic a vraiment accepté la vérité de

5 cette déclaration. Il a plutôt accepté le fait que la déclaration a été

6 faite, après avoir lu cela sur le compte rendu d'audience.

7 C'est ce que j'ai compris. Est-ce qu'il a vraiment accepté la vérité de la

8 déclaration de M. l'ambassadeur Galbraith, je ne suis pas sûre. Je

9 comprends les autres points que vous avez soulevés, mais le premier, pas la

10 base de ce que vous avez avancé.

11 M. BLACK : [interprétation] Merci, Madame le Juge. Il y a la possibilité

12 que je n'ai pas compris la position. Mais comme je l'ai déjà dit, nous

13 avons dit au conseil de la Défense qu'en réalité, il s'agissait d'une photo

14 qui date de 1993. Nous avons dit que c'était l'opération de -- c'était une

15 photo de l'opération Tempête, d'après les informations que nous avons.

16 Ensuite, il y a deux jours, nous avons parlé de cela. Nous avons dit cela

17 il y a deux jours. Mais ensuite, nous avons parlé de cela pendant la pause,

18 et j'ai compris qu'il a accepté cela, il a accepté que la photo n'ait pas

19 été prise pendant l'opération Tempête.

20 A la page 30, ligne 16, il dit : "J'accepte que cette photo ne date pas de

21 l'opération Tempête parce que l'ambassadeur Galbraith a dit qu'il n'est

22 jamais monté sur un char croate pendant l'opération Tempête."

23 Il a donc accepté que ce ne soit pas une photo datant de l'opération

24 Tempête.

25 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [aucune interprétation]

26 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

27 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, effectivement. Je retire les

28 commentaires concernant la réponse du Témoin Galbraith, et je vais garder

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1 d'éventuels commentaires futurs pour la plaidoirie.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

3 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Maintenant, je voudrais continuer.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ce n'est pas la seule référence que

5 vous avez faite. Vous en avez fait une autre, et je vais essayer de la

6 trouver.

7 Il s'agit de la ligne -- le paragraphe qui commence à la page 31, ligne 24,

8 et se poursuit jusqu'à la page 32, ligne 5. M. Milovancevic parle en disant

9 : "Monsieur le Président, M. Galbraith - et là, nous nous référons à la

10 page 3 851, ligne 5 et ainsi de suite - a dit qu'il n'est jamais monté sur

11 un char croate pendant l'opération Tempête. Il n'est monté que sur un

12 tracteur, et ceci, pendant l'opération Eclair. Il ne s'agit que d'un

13 tracteur, ce qui montre qu'il nie avoir jamais monté sur un char. Ensuite,

14 on lui a demandé où il était à l'époque. M. Galbraith a expliqué qu'il

15 était dans un véhicule blindé de l'ambassade américaine.

16 En réalité, vous n'avez pas besoin de retirer cela.

17 M. BLACK : [interprétation] Il y a une autre citation. Vous avez pensé sans

18 doute à une autre citation. Je peux vous aider. Il s'agit de la page 26,

19 lignes 17 à 20, où le conseil de la Défense a dit : "Je lui ai dit s'il est

20 monté sur un char croate pendant l'opération Tempête. Il a dit non, et

21 maintenant nous voyons une photo démontrant qu'il l'a fait, en réalité."

22 Je pense que là, ceci contredit la position qui vient d'être acceptée.

23 Peut-être que vous pensez à cela.

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Merci, Monsieur Black.

25 M. Milovancevic, je vous prie de nous dire quelle est votre position par

26 rapport à cela.

27 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, oui, je pense à cela. Mais je n'ai

28 besoin de corriger cela, Monsieur le Président, puisque l'ambassadeur a

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1 donné sa déclaration, il a fait sa déclaration. Je n'ai pas besoin de la

2 citer, elle figure à la ligne 31. Il a aussi fourni une explication par

3 rapport à ce char et la possibilité que l'ambassadeur soit monté sur ce

4 char. Mais l'ambassadeur a donné son explication, bien sûr, mais j'ai

5 retiré cette phrase qui fait référence à l'opération Tempête, puisque ce

6 n'est pas une photo qui date de l'opération Tempête. J'ai corrigé cela,

7 j'ai retiré ce que j'ai dit par rapport à cela.

8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, ligne 19, page

9 26 -- donc les lignes 19 à 20 ne sont plus nécessaires, n'ont plus lieu

10 d'être, où vous dites : "Maintenant, nous voyons la photo qui montre qu'en

11 réalité, il était bel et bien monté sur un char, donc je ne vois pas le

12 problème." Ce que vous avez dit, cette déclaration devient complètement

13 caduque. Elle contredit ce que vous avez dit juste avant.

14 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, effectivement, Monsieur le

15 Président. J'accepte ce que vous avez dit.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

17 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Monsieur Milovancevic, il s'agit de

18 la déclaration qui figure à la page 25, lignes 19 à 20. Vous avez dit que

19 M. Galbraith a menti aux Juges de la Chambre.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais M. Black a parlé de cela, n'est-

21 ce pas ?

22 M. BLACK : [interprétation] Oui. Oui, effectivement, j'ai parlé de cela.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien. Mais ceci a été déjà retiré.

24 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je vous remercie.

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien, Monsieur Milovancevic. Vous

26 pouvez continuer.

27 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

28 Q. Monsieur Macura, examinez de très près la photo que vous voyez sur

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1 l'écran. Est-ce que vous la voyez ?

2 R. Oui, oui, je la vois, mais elle n'est pas bien grande, la photo. Elle

3 n'est pas très claire.

4 Q. Très bien. Que voyez-vous devant M. Galbraith, puisque vous êtes un

5 officier de réserve ? Il y a quelque chose que l'on voit devant lui.

6 R. C'est un fusil mitrailleur sur le char, monté sur le char.

7 Q. A côté de M. Galbraith, on voit un homme en uniforme. Il porte des

8 lunettes de soleil. Le voyez-vous ?

9 R. Oui, il n'a pas de chapeau.

10 Q. Mais devant cet homme qui n'a pas de chapeau, de couvre-chef, qui est à

11 côté de M. Galbraith, on peut voir --

12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Attendez. Attendez un instant. Mais

13 qui est M. Galbraith ? Parce que j'ai besoin de vos lumières, je ne vois

14 pas qui c'est.

15 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

16 Je vais demander au témoin de me montrer tout d'abord M. Galbraith.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] M. Galbraith est la première personne à la

18 gauche, et à sa gauche, pour nous à notre droite, c'est cet homme qui a des

19 lunettes de soleil et qui n'a pas de chapeau. Mais M. Galbraith, je le

20 reconnais. C'est la première personne qui est tout à fait à la gauche de

21 l'image.

22 M. MILOVANCEVIC : [aucune interprétation]

23 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [aucune interprétation]

24 [La Chambre de première instance se concerte]

25 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Monsieur Milovancevic, il y a une

26 question que je dois vous poser. C'est une question qui découle de

27 l'objection soulevée par M. Black, et la réponse que vous y donnez, à

28 savoir que vous acceptez en principe que M. Galbraith a dit la vérité en

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1 disant qu'il n'est pas monté sur un char croate pendant l'opération

2 Tempête; est-ce exact ? Puisque si tel est le cas et si vous acceptez cette

3 réponse donnée au cours de son contre-interrogatoire, si tel est le cas,

4 vous n'aurez pas le droit de contredire ceci et cette déclaration par le

5 biais de votre témoin en attirant l'attention de votre témoin sur

6 l'incohérence de la position de M. Galbraith.

7 Est-ce que vous comprenez ce que je veux vous dire ? Si vous acceptez la

8 vérité que M. Galbraith a dit, la vérité quand il a répondu à la question,

9 pourquoi alors présenter ceci au témoin pour lui montrer d'éventuelles

10 incohérences ? Ce n'est pas bien. Vous ne pouvez pas le faire. D'après le

11 Règlement de procédure et de preuve, règlement qui régit les

12 interrogatoires et les contre-interrogatoires et la présentation des

13 moyens, vous ne pouvez pas faire cela. C'est pour cela que tout à l'heure,

14 je vous ai demandé si vous alliez vraiment accepter la déclaration qui a

15 été faite. Vous n'avez pas dit que c'était forcément la vérité, mais vous

16 avez confirmé aux Juges de la Chambre que vous acceptiez le fait que

17 l'ambassadeur avait dit la vérité.

18 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Non, mais je ne veux pas utiliser cette

19 photo pour contredire la déclaration de M. Galbraith, à savoir qu'il n'est

20 pas monté sur un char croate pendant l'opération Tempête. J'essaie

21 d'arriver à quelque chose d'autre, d'aboutir à quelque chose d'autre à

22 présent. Le témoin nous a dit que pendant les négociations à Genève, il a

23 été informé du fait que l'Amérique et l'Allemagne avaient approuvé

24 l'attaque sur la Krajina qui allait commencer justement le lendemain. C'est

25 l'opération Tempête.

26 Cette photo est associée avec le texte qui figure sur la page. Tout ce que

27 j'essaie de démontrer, c'est que M. Galbraith est bel et bien sur un char.

28 Au fait, ce que j'essaie d'établir, c'est de savoir si M. Galbraith était

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1 objectif ou partial. Est-ce qu'il favorise un côté, ou non ? Est-ce qu'il

2 regarde de la même façon les Croates et les Serbes ? Est-ce que ses

3 rapports avec les Croates et les Serbes sont absolument égaux ?

4 Puisque maintenant, je ne tiens plus à savoir s'il a dit la vérité ou non,

5 quand il a répondu à la question. Je pense que cette question a été

6 élucidée.

7 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Bien. Je comprends maintenant ce

8 que vous voulez dire. Peut-être que j'ai fait une conclusion un peu hâtive

9 quand je vous ai entendu parler de M. Galbraith à nouveau.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais j'ai un problème, Monsieur

11 Milovancevic, encore. Est-ce que nous pouvons identifier, s'il vous plaît,

12 les personnages sur la photo ? M.le Témoin a parlé de M. Galbraith. Il a

13 dit qu'il est sur la gauche. Ensuite, il a dit qu'il ne connaissait pas la

14 personne qui est sur la droite. Mais j'ai toujours besoin de savoir qui est

15 M. Galbraith. Il y a sur la photo quelque chose qui ressemble à un visage

16 humain au-dessus de la veste de la personne qui est complètement sur la

17 gauche, puis une autre personne qui a l'air de porter un uniforme de

18 camouflage. Mais là, c'est vraiment le détail -- mais sur la photo

19 principale, je vois quatre personnes.

20 Il y a une personne qui semble être une femme. C'est dans le médaillon, je

21 dirais. Puis, il y a quelque chose qui pour moi ressemble à un visage

22 humain.

23 Mais en plus des quatre personnes qui figurent sur la photo principale, je

24 vois trois autres visages. De qui parlons-nous ?

25 Qui est M. Galbraith ? Tout d'abord, pourriez-vous l'identifier ?

26 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

27 Q. Monsieur le Témoin, pourriez-vous nous montrer M. Galbraith sur la

28 photo ?

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1 R. Des personnes qui sont au premier plan, qui font partie d'un groupe, M.

2 Galbraith est le premier homme sur la gauche qui a une cravate.

3 Q. Est-ce que vous reconnaissez les autres personnes ?

4 R. Non. Je ne reconnais personne sur la photo. Je ne reconnais que M.

5 Galbraith.

6 Q. Très bien. Cette image, la tête d'humain, le visage humain, la tête que

7 l'on voit à droite de la photo ?

8 R. Sous le personnage de la femme ?

9 Q. Oui. Que cela signifie-t-il, s'il vous plaît ?

10 R. On dirait que c'est une tête humaine. Je n'en sais rien.

11 Q. Est-ce que c'est lui qui était le chauffeur du char ?

12 R. Mais oui, oui, c'est tout à fait possible. C'est le chauffeur, oui,

13 parce qu'il a ce couvre-chef, là, sur la tête. Oui, c'est le conducteur du

14 char, oui. Maintenant, je vois mieux, oui. Vous m'avez aidé.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous le voyez où ? La personne qui

16 ressemble à une femme, c'est le conducteur du char ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais non. Ce n'est pas une femme. C'est à

18 cause du casque qu'on a l'impression que c'est sa coiffure, mais c'est pour

19 se protéger -- enfin, c'est un casque.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais sur la photo, c'est qui

21 exactement ? Vous parlez de qui ?

22 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être que le

23 mieux serait de placer la photo sur le rétroprojecteur et que l'on demande

24 au témoin de nous montrer avec un pointeur ce à quoi il fait référence,

25 pour ne pas tirer des conclusions sur ce qui se trouve à gauche et ce qui

26 se trouve à droite.

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur

28 Milovancevic.

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1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

2 Q. Pouvez-vous nous montrer M. Galbraith et nous dire de quelle tête vous

3 parlez ?

4 R. Avec mon doigt ?

5 Q. On va vous donner un pointeur.

6 R. Voilà M. Galbraith ici, donc c'est M. Galbraith, là.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Celui d'à côté, à gauche de M.

8 Galbraith, avec les lunettes sombres ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'est pas le conducteur. Le

10 conducteur, il est là, ici.

11 L'INTERPRÈTE : Le témoin indique un visage en bas à droite de la photo.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr, la photo est de mauvaise qualité,

13 mais c'est bien le conducteur du char qui porte cette espèce de casque de

14 protection. Ce n'est pas un visage de femme.

15 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

16 Q. Mais qui sont ces gens derrière -- non, pardon, en dessous, ici, sur la

17 gauche ?

18 R. Ici, ce que je vous montre, c'est un soldat qui porte un uniforme de

19 camouflage. Mais bien entendu, l'image n'est pas suffisamment claire pour

20 que l'on puisse en deviner les détails. On voit que c'est un soldat et on

21 voit qu'il porte un uniforme de camouflage. C'est tout.

22 Q. Pourquoi sont-ils ici, en bas de la photo ?

23 R. Je pense qu'ils étaient là pour escorter ces individus qui se

24 trouvaient sur le char.

25 Q. Non, j'aimerais savoir pourquoi ils sont plus bas sur la photo que M.

26 Galbraith ?

27 R. Parce qu'ils ne sont pas sur le char, ils sont derrière le char.

28 Q. Merci. Vous avez dit plus tôt que vous aperceviez cette mitraillette;

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1 où est-elle ?

2 R. On en voit le canon ici très bien, très clairement. C'est une

3 mitraillette qui aura été utilisée, le cas échéant, dans le cadre

4 d'opérations, si nécessaire.

5 Q. Merci.

6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je pense que l'on peut demander le

7 versement de cette photo, si bien sûr la Chambre de première instance n'a

8 pas d'autres questions à poser.

9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Cette photo est versée au dossier.

10 Pouvons-nous lui attribuer une cote ?

11 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce 942, Monsieur le

12 Président.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

14 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

15 Q. Monsieur Macura, des colonnes de texte encadrent cette photo. Que

16 voyez-vous en bas à gauche de cette page ?

17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pouvons-nous avoir la version anglaise

18 de ce document, s'il vous plaît ?

19 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais juste

20 faire référence à la date, sans plus.

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais je ne suis pas capable de lire la

22 date.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 11 août.

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] -- en B/C/S

25 La date en bas --

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 11 août 1995.

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur le Témoin, s'il vous plaît,

28 lorsque je parle au conseil --

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Après l'opération Tempête.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] S'il vous plaît, restez silencieux,

3 Monsieur le Témoin.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. Désolé, désolé, Monsieur le

5 Président.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Taisez-vous, s'il vous plaît. Nous

7 sommes dans un prétoire. Nous ne sommes pas à l'école, ici.

8 Maître Milovancevic. La date seulement.

9 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien. Merci beaucoup.

11 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Permettez-moi de vous expliquer la

12 raison de tout cela.

13 Je voudrais simplement que l'on regarde la date de cet article, de ce

14 numéro. Toutefois la date qui se trouve en bas à gauche est en caractère

15 cyrillique, nous allons la traduire tout simplement.

16 Q. Je vais demander au témoin quelle en est la date ?

17 R. C'est le 11 août 1990.

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Milovancevic.

19 L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète, 11 août 1995.

20 M. BLACK : [interprétation] Excusez-moi, de vous interrompre. Avant de

21 poursuivre j'aurais une chose à dire. Peut-être que nous sommes sur le

22 point d'y venir mais je ne sais pas très bien ce qui a été versé au

23 dossier. Je crois que la demande de Me Milovancevic portait le versement de

24 la photo. Tant mieux, il y a aussi une référence qui est faite à la date

25 sur cette même page. Si aussi c'est proposé en tant que pièce très bien, je

26 suis d'accord pour la date. Mais si l'on demande à verser au dossier le

27 texte dans ce cas-là il se pourrait que j'aie une objection à formuler,

28 parce que je ne sais pas ce qu'il dit ce texte puisque nous n'avons pas de

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1 traduction. Je m'opposerais à ce que le texte soit versé au dossier

2 également, mais en ce qui concerne la photo et la date je n'ai pas de

3 difficulté.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien. Si j'ai bien compris Me

5 Milovancevic, d'abord j'avais demandé la traduction. Il a dit que ce qui

6 l'intéresse après la photo c'est la date et seulement la date. Je pense que

7 c'est cela qui fera l'objet d'une demande de versement au dossier. Je vois

8 qu'il acquiesce.

9 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Exact, Monsieur le Président.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Maître Milovancevic.

11 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] La date étant la date de la

12 publication de la photo dans ce journal serbe, n'est-ce pas ? Nous pouvons

13 formuler une telle supposition.

14 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pour que les choses soient tout à fait

16 claires. S'agissant de la pièce qui a été versée au dossier. La Chambre

17 aimerait préciser le point suivant : seules la photo et la date de

18 publication de ce journal ont été versées au dossier mais non pas le texte

19 qui encadre la photo en B/C/S. Merci beaucoup. J'espère que les choses ont

20 été ainsi précisées.

21 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, poursuivez.

23 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

24 Q. Jusqu'à quand êtes-vous resté en Krajina ?

25 R. Jusqu'à les accords de Genève, ensuite je suis allé à Martinbrod et je

26 n'ai pas pu rentrer à Knin parce qu'il y avait une grande colonne de

27 réfugiés qui se dirigeaient vers la Serbie.

28 Q. Vous avez dit que le 3 au soir vous avez reçu de la part du

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1 représentant russe les informations selon lesquelles l'opération croate

2 allait débuter.

3 R. Cette opération a commencé le 4 août à l'aube. J'avais obtenu cette

4 information du représentant de la mission russe.

5 Je ne peux pas suivre car je n'ai pas le compte rendu d'audience sur mon

6 écran. Merci, Monsieur l'Huissier.

7 M. Prijic qui était membre de la délégation et moi-même nous nous sommes

8 tournés vers M. Peters qui était un général belge des forces de la FORPRONU

9 et qui était avec nous à Genève.

10 Nous lui avons demandé de rentrer en Krajina le plus rapidement

11 possible. Il s'est contenté de rire. Il a dit qu'ils avaient leur propre

12 emploi du temps et qu'il n'y avait aucun problème. Ils avaient eu

13 connaissance de l'existence de l'opération Tempête qui avait fait l'objet

14 de préparatifs. Pavicevic, ambassadeur à Genève avait également eu cette

15 information, il nous a dit qu'il nous emmènerait à Samaruga. Nous devions

16 solliciter l'aide de la Croix-Rouge.

17 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

18 Q. Qui était M. Pavicevic ?

19 R. M. Pavicevic était l'ambassadeur de la Yougoslavie à Genève, il est

20 venu nous saluer lorsque nous sommes arrivés à Genève. Nous pensions être

21 venus négocier et régler un certain nombre de questions, mais dès que

22 l'ambassadeur nous a dit qu'il nous emmenait à Samaruga nous nous sommes

23 rendus compte que nous aurions besoin de l'aide de la Croix-Rouge, ce à

24 quoi nous ne nous attendions pas.

25 Q. Avez-vous eu besoin de l'aide de la Croix-Rouge ?

26 R. Oui. Car l'opération Tempête a commencé le lendemain et les gens ont

27 fui la région de la Krajina.

28 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'en ai terminé

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1 de cet interrogatoire.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Milovancevic.

3 Monsieur Black.

4 M. BLACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

5 Contre-interrogatoire par M. Black :

6 Q. [interprétation] Monsieur Macura, je suis M. Black. Je suis l'un des

7 procureurs dans cette affaire et c'est à moi maintenant de vous poser un

8 certain nombre de questions.

9 R. Bien.

10 Q. Je ne souhaite pas vous poser des questions sur l'histoire de la

11 Seconde Guerre mondiale, ceci ne veut pas dire pour autant que je suis

12 d'accord avec les opinions qui sont les vôtres sur cette question. Mais

13 j'aimerais vous parler de certains événements qui ont eu lieu dans les

14 années 1990 et qui concerne finalement plus directement le cas qui nous

15 occupe ici.

16 D'abord j'aimerais vous poser quelques questions sur certaines des

17 activités menées par vous en tant que ministre de l'Information de la SAO

18 Krajina en 1991.

19 La première chose que j'aimerais c'est que l'on précise un certain nombre

20 de dates. Vous avez dit que le premier gouvernement de la SAO de Krajina a

21 été établi en décembre 1990; vous souvenez-vous avoir dit cela ?

22 R. C'est possible, Monsieur. Toutefois, je ne pensais pas devoir noter

23 tout ce qui se passait. Je ne pense pas que les dates soient pertinentes.

24 Ce sont les événements qui le sont.

25 Q. C'est à moi qui vais décider ce qui est pertinent et ce qui n'est pas.

26 Je vous demanderais simplement de bien vouloir répondre à mes questions du

27 mieux possible.

28 Vous avez dit hier, je crois, que le premier gouvernement de la SAO Krajina

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1 a été établi en décembre 1990; confirmez-vous ceci aujourd'hui ou

2 souhaitez-vous modifier votre témoignage s'agissant de cette date, ou

3 n'avez-vous tout simplement plus le souvenir de cette date ?

4 R. Je me souviens avoir prêté serment le jour de la Saint-Michel, le 19

5 décembre.

6 Q. Vous serez d'accord avec moi pour reconnaître que vous étiez ministre

7 de l'Information dans le premier gouvernement de la SAO Krajina. Il n'y

8 avait pas eu d'autre gouvernement avant votre nomination au poste de

9 ministre, n'est-ce pas ?

10 R. Oui.

11 Q. J'aimerais vous montrer un autre document qui va vous être montré à

12 l'écran.

13 M. BLACK : [interprétation] Il s'agit du document qui porte le numéro ERN

14 02195913. Dans l'anglais il s'agit en fait de la page suivante 02195914.

15 J'aimerais qu'on l'affiche sur le système e-court, s'il vous plaît.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je me trouve confronté à une petite

17 difficulté, Monsieur Black. Je ne sais pas si vous avez été satisfait de la

18 réponse que vous avez reçue. Vous avez dit que c'était à vous de décider ce

19 qui était pertinent de ce qui ne l'était pas, et vous avez poursuivi en

20 disant : "Vous avez dit hier que le premier gouvernement de la SAO Krajina

21 a été établi en décembre 1990, confirmez-vous votre déposition aujourd'hui,

22 ou voulez-vous simplement modifier votre témoignage, c'est-à-dire changer

23 cette dates, ou simplement n'avez-vous plus le souvenir de cette date ?"

24 Le témoin a répondu : "Je me souviens, Monsieur, que c'était le jour

25 de la Saint-Michel le 19 décembre."

26 Je ne sais pas s'il s'agit du décembre 1890, 1790 ou 2090.

27 M. BLACK : [interprétation] J'ai cru comprendre qu'il me disait que c'était

28 1990, mais je vais lui reposer la question, Monsieur le Président.

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1 Q. Monsieur Macura, vous avez peut-être compris la question du Président

2 de la Chambre. Lorsque vous parlez du 19 décembre, de quelle année s'agit-

3 il ?

4 R. C'était le 19 décembre, mais je ne sais pas très bien au cours de

5 quelle année. Il se peut que cela ait été en 1991. Je me souviens que la

6 veille de l'adoption de la constitution croate, nous avions adopté un

7 certain nombre de dispositions législatives. Je ne me souviens que de la

8 substance des choses, mais je ne me souviens pas des dates.

9 Q. Bien. Je ne suis pas en train d'essayer de jeter la confusion ici.

10 Hier, vous avez dit décembre 1990. Vous avez également fait référence à la

11 constitution croate qui a été promulguée en décembre 1990. C'est bien à ce

12 moment-là qu'à votre avis, le premier gouvernement de la SAO Krajina a été

13 mis en place, n'est-ce pas ? Si vous ne pouvez pas répondre à cette

14 question, nous allons regarder le document et nous allons voir si nous

15 pouvons préciser les dates.

16 R. Je ne peux pas répondre à cette question s'agissant de la date. Je m'en

17 excuse, mais je n'ai jamais noté les dates et je n'ai pas fait d'efforts

18 pour essayer de m'en souvenir.

19 M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que grâce aux

20 questions que je me propose de poser maintenant, nous allons parvenir à

21 déterminer cette date.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Vous pourrez également

23 déterminer les dates concernant la promulgation de la constitution croate.

24 Nous allons voir si c'était bien cette année 1991 ou 1990.

25 M. BLACK : [interprétation] Bien.

26 Q. Vous avez dit que vous avez quelques difficultés à vous souvenir des

27 dates, je le concède. La constitution croate, cette constitution que l'on a

28 appelé "constitution de Noël" a bien été adoptée en décembre 1990 ?

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1 R. Je crois que c'était la constitution de Noël et elle a sans doute été

2 adoptée en 1990 puisque c'est à ce moment-là qu'ils ont gagné les

3 élections.

4 M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, ceci répond-t-il à votre

5 préoccupation ?

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

7 M. BLACK : [interprétation] Merci.

8 Q. Monsieur Macura, vous avez ici un document sur votre écran. Ce document

9 est la décision vous nommant ministre de l'Information pour la SAO Krajina,

10 n'est-ce pas ?

11 R. Oui.

12 Q. Vous serez d'accord avec moi pour reconnaître que cette nomination

13 remonte à mai 1991 ? On le voit d'après la date qui figure sur le document,

14 pas en décembre 1990 ?

15 R. Oui, c'est exact.

16 Q. Monsieur le Président, je voudrais que ce document soit versé au

17 dossier.

18 M. LE JUGE MOLOTO : [hors micro]

19 [interprétation] Excusez-moi. Ce document, c'est le 02195914 ?

20 M. BLACK : [interprétation] Oui. En B/C/S, c'est 02195913; en anglais il

21 s'agit du document 02195914.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ce document est versé au dossier.

23 Peut-il se voir attribuer une cote ?

24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 943.

25 M. BLACK : [interprétation] Merci beaucoup.

26 Q. Monsieur Macura, là encore pour préciser un peu mieux les dates, les

27 parties en l'espèce sont convenues du fait que la RSK a été établie en

28 décembre 1991. Confirmez-vous cette date ?

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1 R. Oui, c'est exact. Je m'excuse, mais la SAO Krajina, la RSK, je crois

2 que j'ai mélangé les dates.

3 M. BLACK : [interprétation] Bien. Je vais vous poser quelques questions sur

4 des déclarations que vous avez faites vous-même. Je pense que ceci vous

5 rafraîchira davantage la mémoire.

6 Vous avez dit en 1991 - et vous l'avez dit en tant que ministre de

7 l'Information - que tous les Serbes devraient vivre dans un Etat serbe

8 unique.

9 R. Oui, j'ai dit cela.

10 M. BLACK : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche le document

11 06037135 à l'écran.

12 Q. Monsieur Macura, je m'en excuse, c'est un article de journal que je

13 n'ai qu'en anglais. Je ne l'ai pas en B/C/S, mais je sais que vous lisez

14 parfaitement bien l'anglais. Ceci ne devrait donc poser aucune difficulté.

15 M. BLACK : [interprétation] Pourrait-on agrandir un petit peu cette image ?

16 Q. Monsieur Macura, vous le voyez ? C'est un article du Financial Times

17 qui remonte au 3 août 1991. Voyez au premier paragraphe qu'une référence

18 est faite à vous, Lazar Macura, et au deuxième paragraphe on lit, c'est une

19 citation de propos que vous avez tenus : "Tous les Serbes devraient vivre

20 dans une Serbie compacte, dit M. Macura, ministre de l'Information dans la

21 Région autonome de Krajina autoproclamée et peuplée de Serbes, située dans

22 le sud de la Croatie à la frontière avec la Bosnie-Herzégovine."

23 Vous avez bien dit cela en août 1991, n'est-ce pas ?

24 R. Oui.

25 Q. Nous allons avancer de deux paragraphes. Il y en a un qui commence par

26 "M. Macura pense," et je poursuis : "M. Macura pense qu'un corridor

27 territorial s'étendant de la Krajina vers la Serbie en traversant la

28 Bosnie-Herzégovine est la solution évidente permettant de réunir les deux

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1 communautés serbes."

2 Vous faisiez référence à ce qu'on a appelé le corridor de Posavina, n'est-

3 ce pas ?

4 R. Oui, mais si vous me le permettez, tous les Serbes vivaient dans un

5 Etat compact jusqu'alors et ils auraient dû y rester. Ce n'est pas eux qui

6 ont demandé la sécession.

7 Q. Veuillez vous concentrer sur mes questions, s'il vous plaît. Je vous ai

8 demandé si, dans cet article, vous parliez du corridor de Posavina. C'est

9 bien ce dont vous parliez, n'est-ce pas ?

10 R. Oui.

11 Q. Pour vous, c'était la solution permettant de réunir la Krajina, pas

12 seulement avec les parties de Bosnie peuplées de Serbes, mais également

13 avec la Serbie, n'est-ce pas ?

14 R. Oui, parce que je crois que les Serbes ont ce droit à

15 l'autodétermination.

16 Q. Regardez le dernier paragraphe de cet article, avant toutes les

17 informations liées au droit d'auteur, et cetera. On y lit "il". C'est vous

18 dont il s'agit. "Il affirme qu'aucune communauté serbe en Yougoslavie ne

19 devrait être décrite comme étant une minorité serbe. Toutefois, quand

20 Franjo Tudjman, président de la Croatie cette semaine a offert l'autonomie

21 culturelle et politique aux Serbes de Croatie après des bombardements

22 répétés par les nationalistes serbes des villages croates, les Serbes de

23 Krajina n'ont pas jugé bon d'accepter l'offre."

24 C'est bien ce qui est dit dans ce paragraphe, n'est-ce pas ?

25 R. C'est la conclusion du journaliste qui a rédigé l'article, pas la

26 mienne.

27 Q. Oui, mais il est exact de dire que le président Tudjman de Croatie a

28 offert une autonomie culturelle et politique aux Serbes de Croatie au début

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1 du mois d'août 1991, mais que les dirigeants de Knin ont refusé.

2 R. Je ne m'en souviens plus. Je ne me souviens plus que Tudjman ait

3 proposé quoi que ce soit. Ils n'ont jamais voulu négocier avec nous. Ils

4 n'ont fait qu'envoyer leurs policiers. Ils n'ont jamais voulu négocier avec

5 les politiques.

6 Q. Contentez-vous de répondre à mes questions et s'il est nécessaire

7 d'ajouter quoi que ce soit, je vous en ferai la demande.

8 M. BLACK : [interprétation] Peut-on verser ce document au dossier, Monsieur

9 le Président ?

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ce document est versé au dossier.

11 Peut-on lui attribuer une cote ?

12 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira du document 944.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

14 M. BLACK : [interprétation] Merci.

15 Q. Monsieur Macura, en tant que ministre de l'Information, vous estimiez

16 également que les Serbes de Krajina ne souhaitaient pas faire partie d'une

17 Croatie indépendante et qu'ils avaient le droit de faire sécession si la

18 Croatie avait elle-même fait sécession de la Yougoslavie, n'est-ce pas ?

19 R. C'est exact, Monsieur. Je suis toujours du même avis.

20 M. BLACK : [interprétation] J'aimerais que l'on examine un autre document

21 et qu'on le place à l'écran. Il s'agit du document -- non, en fait, c'est

22 un extrait d'un document plus volumineux. Le document est 03251158. Ce qui

23 m'intéresse, c'est la page 120 de ce document qui a le numéro ERN 03251277.

24 Avec l'aide de Mme l'Huissière, c'est un document qui n'existe qu'en B/C/S,

25 et j'ai demandé à un collègue de bien vouloir faire un brouillon de

26 traduction, dirais-je. Ce n'est pas une traduction officielle, mais ceci

27 pourrait vous aider à suivre. Je demanderais à ce que l'on distribue des

28 exemplaires de ce document au conseil de la Défense et aux Juges.

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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ce projet de traduction de ce

2 document, nous allons l'avoir devant nous sous les yeux ?

3 M. BLACK : [interprétation] Une toute petite partie de ce document,

4 Monsieur le Président, qui se trouve à la page 120.

5 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

6 M. BLACK : [interprétation] Si l'on pourrait, dans la version en B/C/S,

7 nous concentrer sur ce qui se trouve dans le coin à la droite dudit

8 document. Merci.

9 Q. Monsieur Macura, vous voyez qu'il y a une en-tête qui porte la date 8

10 août 1991, Belgrade, Tanjug.

11 Ceci fait référence à une entrevue que vous avez donnée à une radio

12 autrichienne au cours de laquelle vous disiez qu'il y avait une

13 restauration du fascisme en Croatie et que les Serbes ne voulaient pas

14 faire partie d'un Etat indépendant de Croatie, qu'ils avaient le droit de

15 faire sécession de la République yougoslave si elle-même faisait sécession

16 de la Yougoslavie.

17 C'était votre position en août 1991, n'est-ce pas ?

18 R. C'est exact.

19 M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, pourrait-on verser cette

20 pièce au dossier, s'il vous plaît ? Je vais demander une traduction

21 officielle du texte.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Black. Les

23 pièces sont versées au dossier. Peut-on leur donner une cote, s'il vous

24 plaît ?

25 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] En fait, ceci fait référence au

26 rapport Tanjug du 7 août, n'est-ce pas ?

27 M. BLACK : [interprétation] Oui. Monsieur le Président, Messieurs les Juges

28 --

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1 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Oui, maintenant, c'était en fait --

2 ceci fait évidemment référence à une source --

3 M. BLACK : [interprétation] C'est en tout cas exact, Monsieur le Président.

4 En fait, ceci peut prêter à confusion, mais c'est le passage qui

5 m'intéresse.

6 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] C'est la date qui est tout en

7 haut ?

8 M. BLACK : [interprétation] C'est exact.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je expliquer ?

10 M. BLACK : [interprétation]

11 Q. Veuillez le faire, s'il vous plaît.

12 R. Je peux expliquer ceci, cette question des dates. Glas est une

13 publication qui était un mensuel, la date ne doit pas prêter à confusion.

14 Ce n'était pas un journal. C'était un mensuel.

15 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Merci.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maintenant, est-ce que le document

17 peut être versé au dossier ? Je suis désolé de vous avoir interrompu. Je

18 sais ce que vous voulez nous dire, et tout le monde a sauté à une

19 conclusion.

20 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

21 Ceci, ce document va porter la cote numéro 945.

22 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

23 M. BLACK : [interprétation]

24 Q. Monsieur Macura, en janvier 1992, quand le plan Vance a été adopté,

25 était-ce votre avis que la Krajina ne ferait plus jamais partie de la

26 Croatie et que la guerre continuerait malgré le plan Vance; est-ce exact ?

27 R. Oui, c'est exact. C'est d'ailleurs ce qui s'est passé, mais la Krajina

28 fait aujourd'hui partie de la Croatie même si la guerre a continué à

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1 l'époque.

2 Q. Laissez-moi vous montrer un autre article de la presse qui porte la

3 cote ERN 06037133. Si nous pouvions encore une fois -- ce document est en

4 anglais, mais si nous pouvions nous concentrer sur le tiers supérieur de la

5 page, s'il vous plaît.

6 Vous allez voir que ceci est un article de Associated Press daté du 17

7 janvier 1992 à Knin. Vous y voyez dans les deuxième et troisième

8 paragraphes, on vous cite, vous dites : "L'Europe ne comprend pas. Nous ne

9 ferons plus jamais partie de la Croatie, dit Lazar Macura, ministre de

10 l'Information de la Région de Krajina en Croatie occidentale."

11 Ensuite, la citation reprend : "La guerre n'est pas terminée, ceci est

12 juste une interruption. Fin de citation de Macura."

13 Ceci représente assez fidèlement votre point de vue à l'époque en tant que

14 ministre de l'Information en janvier 1992, n'est-ce pas ?

15 R. Ce n'était pas seulement mon point de vue, c'était également le point

16 de vue de ceux qui m'ont élu, le SDS, la Krajina, le Dr Milan Babic, le

17 président ainsi que tous les membres du gouvernement.

18 Q. Pardonnez-moi de vous interrompre, mais essayez de vous concentrer sur

19 ma question.

20 M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, peut-on verser cette

21 pièce au dossier, s'il vous plaît ?

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Macura, puis-je vous poser

23 une question ?

24 Est-il vrai que l'article dit ensuite : "Un cessez-le-feu a été en effet,

25 et l'armée croate est optimiste. Ce cessez-le-feu peut se poursuivre." La

26 citation ici : "La guerre continue et elle ne cessera que quand une partie

27 écrase l'autre."

28 Etait-ce votre point de vue à l'époque ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact. C'est d'ailleurs ce qui s'est

2 passé. Les Serbes ont été la partie perdante.

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le document peut être versé au

4 dossier. Peut-on lui donner un numéro, s'il vous plaît ?

5 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ceci, Monsieur le Président, ce

6 document portera le numéro 946.

7 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Monsieur Macura, ce sont des

8 déclarations que vous aviez faites en tant que ministre de l'Information.

9 Est-ce que je comprends bien cela ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je devais agir en conformité avec la

11 ligne politique du gouvernement. Ce n'était pas des déclarations sur mon

12 propre compte, ou plutôt, de mon propre chef.

13 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] C'était l'essentiel de ma question.

14 Je vous remercie beaucoup.

15 Monsieur Black, vous pouvez poursuivre.

16 M. BLACK : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

17 Q. Monsieur Macura, vous avez également dit qu'il s'agissait de votre

18 point de vue ainsi que celui d'autres. Vous avez mentionné Milan Babic.

19 Etait-ce également le point de vue de Milan Martic à l'époque ?

20 R. Je n'étais pas en contact direct avec M. Martic parce que nous ne

21 faisions pas le même travail, nous n'étions pas au même poste. Mais c'était

22 possible. Il s'agissait également son point de vue.

23 Q. Je ne vous comprends pas très bien. Vous dites que vous ne le savez

24 pas, que cela pouvait l'être ou que cela ne pouvait pas l'être, ou bien

25 vous ne le savez pas ? Répondez.

26 R. Je ne sais pas.

27 Q. Je vous remercie.

28 M. BLACK : [interprétation] Pouvons-nous examiner un autre document qui

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1 date également du 17 janvier 1992. Il porte le numéro ERN 06037134.

2 Q. En attendant qu'il apparaisse à l'écran, Monsieur Macura, vous avez dit

3 à un reporter du New York Times que les Serbes de Krajina préféraient

4 continuer la guerre plutôt que de reconnaître les frontières de la Croatie

5 à l'époque comme étant les frontières légales. Vous souvenez-vous d'avoir

6 affirmé cela ou d'avoir défendu ce point de vue en janvier 1992 ?

7 R. Je crois encore que c'est vrai, parce que les frontières

8 internationales ne peuvent pas être changées conformément à l'acte final

9 d'Helsinki. Ils doivent rester des Etats souverains, sinon, si on commence

10 à prendre en considération les sécessions, c'est sans fin. Il s'agissait de

11 frontières internes. On ne pouvait pas les considérer comme des frontières

12 internationales.

13 M. BLACK : [interprétation] Si l'on peut faire défiler le texte pour faire

14 apparaître le bas de ce document, qui encore une fois est en anglais.

15 Q. Vous y verrez votre nom en caractères gras, et dans ce paragraphe, il

16 est dit, je vous cite : "'La Croatie n'a pas eu le contrôle ici depuis plus

17 de 18 mois,' dit Lazar Macura. Le ministre de l'Information a dit cela au

18 téléphone en parlant de la République de Krajina, le centre de la rébellion

19 serbe de Croatie."

20 La citation se poursuit : "Nous allons continuer à faire la guerre.

21 Nous n'allons pas reconnaître les frontières actuelles comme étant les

22 frontières légales de la Croatie."

23 C'était bien votre point de vue en janvier 1992; est-ce exact ?

24 R. C'était avant l'adoption du plan Vance. Il y a eu une rébellion qui a

25 éclaté en Croatie par rapport à la Yougoslavie avant la rébellion à Knin,

26 ce qui veut dire que la rébellion en Croatie contre la Yougoslavie a

27 précédé la rébellion de Knin.

28 Q. Laissez-moi encore vous poser la question. Quand je vous ai cité dans

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1 cet article de journal, il s'agissait de votre position le 17 janvier 1992;

2 est-ce exact ?

3 R. Oui. C'était mon point de vue en janvier 1992.

4 M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, peut-on verser ce

5 document au dossier ?

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, ce document sera versé au

7 dossier. Peut-on lui donner une cote, s'il vous plaît ?

8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, cette pièce

9 portera le numéro 947.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

11 M. BLACK : [interprétation]

12 Q. Monsieur Macura, vous avez dit plus tôt dans votre déposition que les

13 Serbes de Croatie avaient demandé l'autonomie culturelle. Vous souvenez-

14 vous d'avoir dit cela ?

15 R. Oui, c'est exact, mais cela, c'était tout au début.

16 Q. Vous vous souvenez que le 25 juillet 1990, il y a eu une assemblée

17 serbe qui s'est tenue au cours de laquelle une déclaration a été adoptée

18 sur cette question particulière de l'autonomie ?

19 R. Oui. Mais je n'ai pas assisté à cette réunion. Je sais simplement

20 qu'elle a eu lieu.

21 Q. Laissez-moi vous poser des questions sur le contenu de cette

22 déclaration. La déclaration est une pièce à conviction dans cette affaire.

23 Dans la déclaration, on a dit que la portée de l'autonomie serbe dépendrait

24 du fait de savoir si la Croatie allait rester ou faire encore partie de la

25 Yougoslavie, auquel cas où les Serbes demanderaient l'autonomie culturelle.

26 Mais si la Croatie se séparait de la Yougoslavie, les Serbes, toujours

27 selon la déclaration, avaient le droit de faire état d'une "autonomie

28 politique et territoriale."

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1 C'est exact, n'est-ce pas ? C'était votre point de vue en juillet 1990 ?

2 R. Oui.

3 Q. Dès le départ, dès juillet de 1990, les Serbes de la Krajina

4 contemplaient l'autonomie territoriale de la Croatie, qui est une autre

5 manière de dire l'indépendance; est-ce exact ?

6 R. Il n'est pas exact de dire que ceci était équivalent de l'indépendance.

7 C'était le genre d'autonomie qui nous a été proposée à Grac en 1993. Nous

8 aurions eu le même statut que le Tirol, mais les Croates ont refusé de

9 poursuivre les négociations.

10 Q. Quand vous dites le même statut que le Tirol, est-ce que vous faites

11 référence à une autonomie culturelle, une autonomie politique ou une

12 autonomie territoriale ? Laquelle de ces trois autonomies représente le

13 mieux le Tirol, à votre avis ?

14 R. Je crois que le Tirol a également une autonomie politique, pas

15 seulement une autonomie culturelle.

16 Q. Oui. Mais il n'a pas d'autonomie territoriale, n'est-ce pas ? C'était

17 autre chose ?

18 R. Oui, mais il a une autonomie politique, ce qui est important.

19 Q. Mis à part cela, je vous pose la question de savoir s'il avait une

20 autonomie territoriale. Le Tirol n'a pas d'autonomie territoriale.

21 L'autonomie territoriale, c'est quelque chose de plus que l'autonomie

22 politique, n'est-ce pas ?

23 R. Oui. Probablement

24 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Vous avez mentionné le Tirol comme

25 faisant partie de l'Italie ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Le Tirol est soit en Italie ou en Autriche.

27 Tout ce que je sais, c'est qu'on nous a fait la proposition d'avoir le même

28 statut que le Tirol, à l'époque. D'autres options ont été mentionnées --

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1 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu le nom des îles.

2 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Les interprètes n'ont pas entendu de

4 quelles îles il s'agissait. Pouvez-vous répéter le nom des îles ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit des îles Oland, les îles Oland sont

6 quelque part en Finlande ou en Suède. Cela n'a pas d'importance. Ceci a

7 également été évoqué à l'époque. Mais ceci n'a pas abouti. C'est la

8 tragédie. C'est ce que je suis en train de vous dire.

9 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Laissez-moi vous poser encore une

10 question sur le statut du Tirol. Qui a fait cette offre, et quand, et où ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était lors d'une réunion de trois jours qui

12 s'est tenue à Grac en 1993. Il y avait le Dr Pupovac de Zagreb, Milos

13 Vojnovic de Krajina, moi-même, ainsi qu'une délégation croate. Il y avait

14 des délégués des Nations Unies qui étaient des médiateurs. Je ne sais pas

15 qui avait organisé la réunion. Toutefois, tout ceci a été interrompu par la

16 suite.

17 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Merci. De qui venait cette offre ?

18 Avez-vous vu également cette question ? Dois-je comprendre que --

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Le représentant des Nations Unies a proposé

20 ceci. Je ne me souviens pas du nom de la personne.

21 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je vous remercie.

22 Monsieur Black.

23 M. BLACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

24 Si nous pouvions jeter un coup d'œil rapidement à la pièce 236 à l'écran,

25 s'il vous plaît.

26 Q. Monsieur Macura, ceci est un document qui a déjà été utilisé par le

27 conseil de la Défense et sur lequel on vous a déjà posé des questions. Il

28 est daté du septembre 1991.

Page 8276

1 Vous souvenez-vous de ce document qui est intitulé : "La Conférence de la

2 Paix de la Yougoslavie à La Haye" ?

3 R. Il y avait un million de documents. Je ne me souviens pas de tous les

4 documents.

5 Q. Laissez-moi alors vous demander de vous concentrer, s'il vous plaît,

6 sur ce premier paragraphe.

7 M. BLACK : [interprétation] Peut-on faire défiler le texte vers le bas,

8 s'il vous plaît ? Merci.

9 Q. Monsieur Macura, pouvez-vous lire ce premier paragraphe et voir si ceci

10 vous rappelle les réponses que vous avez données au conseil de la Défense

11 lorsqu'il vous a posé des questions plus tôt au cours de cet

12 interrogatoire ?

13 R. Vous parlez du premier paragraphe, n'est-ce pas ?

14 Q. Oui.

15 R. Oui. Je me souviens que nous en ayons parlé ce matin.

16 M. BLACK : [interprétation] Si l'on peut passer à l'avant-dernière page

17 pour voir la signature, je vous prie. Je crois qu'elle figure à la page 7.

18 Pouvez-vous vous concentrer sur le bas de la page, les deux ou trois ou

19 quatre dernières lignes en bas de la page ? Parfait.

20 Q. Monsieur Macura, la dernière phrase de ce document signé par Milan

21 Babic dit, je cite : "Pour la nation serbe, la liberté veut dire la

22 souveraineté, la souveraineté qui veut dire d'exister sous forme d'Etat

23 indépendant démocratique."

24 S'agissait-il du point de vue de M. Babic en septembre 1991 ainsi que votre

25 point de vue ?

26 R. Oui.

27 M. BLACK : [interprétation] Je crois que ceci est un moment tout indiqué

28 pour la pause, Monsieur le Président.

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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Nous allons faire une

2 interruption et revenir à midi et demi.

3 --- L'audience est suspendue à 12 heures 00.

4 --- L'audience est reprise à 12 heures 29.

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Black.

6 M. BLACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

7 Avant de revenir sur mes questions, je voudrais vérifier un point. La pièce

8 945. C'est la pièce pour laquelle j'ai dit qu'elle se trouvait à la page

9 120 d'un document bien plus important. Nous, nous sommes intéressés par

10 cette page. Peut-être que l'on pourrait extraire cette page du dossier et

11 la présenter en tant que document électronique si cela vous convient.

12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui. Mais est-ce que vous pouvez le

13 faire ? Très bien. J'ordonne que ceci soit fait.

14 M. BLACK : [interprétation] Encore un point au sujet de notre temps sur ce

15 que nous avons prévu de faire aujourd'hui. Hier, à la fin, vous avez dit

16 que vous vouliez revenir sur les évaluations de temps nécessaire. Est-ce

17 que vous voulez que je vous laisse un peu de temps ?

18 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

19 M. BLACK : [interprétation] Je pourrais laisser une quinzaine de minutes ou

20 plus, si vous le voulez.

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Normalement, on a besoin de plus que

22 cela. Laissez-nous autant de temps que vous pouvez nous laisser sans

23 déranger votre contre-interrogatoire.

24 M. BLACK : [interprétation] De toute façon, je ne pense pas que je vais

25 terminer mon contre-interrogatoire aujourd'hui. A un moment donné, je peux

26 m'arrêter et aborder la question.

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous allons parler de cela demain à

28 partir du moment où ce témoin quittera le prétoire.

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1 M. BLACK : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président. Comme vous

2 voulez.

3 Q. Monsieur Macura, excusez moi de vous avoir interrompu.

4 Je voulais être sûr que j'ai compris votre position par rapport aux

5 changements au niveau de la constitution croate au mois de décembre en

6 1990. Je ne voudrais pas passer trop de temps là-dessus, mais je sais

7 qu'hier, vous avez dit que le statut des Serbes en Croatie était changé,

8 qu'ils étaient devenus une minorité alors qu'avant, ils étaient une nation

9 constituante.

10 R. Monsieur le Procureur, je vais être clair. Je vais vous expliquer cela

11 clairement. Cela ne va pas me prendre trop longtemps.

12 Q. Vous l'avez déjà expliqué hier. Je vais vous poser juste quelques

13 questions pour être sûr de vous avoir bien compris.

14 R. Très bien.

15 Q. Tout d'abord, pour qu'il n'y ait pas de confusion, hier au niveau

16 du compte rendu d'audience 28 à 29, on vous a posé une question au sujet

17 de ce point particulier. Je vais vous lire ce que vous avez dit : "Je

18 pensais qu'on allait jamais pouvoir nous dépourvoir de notre statut de

19 peuple constitutif, mais cette violence qui a été faite en dépit des lois,

20 parce que la Croatie ne pouvait pas décider de façon unilatérale de nous

21 dépourvoir de ce droit. Ils auraient dû nous poser la question tout

22 d'abord. Ensuite, les Croates ont dit qu'ils allaient faire sécession de la

23 Yougoslavie et nous pensions que nous aussi nous avions ce droit - le droit

24 qui était plus important que celui-ci - c'est-à-dire le droit de rester

25 dans le pays de notre naissance et que ce droit était plus important que le

26 droit à la sécession des Croates. Nous ne demandions pas à avoir les villes

27 croates dans lesquelles habitaient plein de Serbes, mais nous avions un

28 territoire compact et ce territoire aurait pu être séparé de la Croatie si

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1 la Croatie voulait se séparer de la Yougoslavie. Dans Knin, il y avait plus

2 de 80 % de Serbes, les Croates ne comptaient que 7 %. Regardez combien il y

3 en a aujourd'hui. Il n'en reste plus."

4 C'est ce que vous avez dit hier.

5 R. Oui.

6 Q. Est-ce que vous voulez dire que les Croates n'avaient pas le droit de

7 changer le statut constitutionnel des Serbes, et qu'ils n'avaient pas le

8 droit de faire sécession de la Yougoslavie sans tout d'abord obtenir

9 l'accord des Serbes en Croatie ?

10 R. Pour moi, c'est parfaitement normal, puisque nous avons participé à la

11 création de la Croatie au cours de la Première et Deuxième Guerre mondiale.

12 D'ailleurs, ce sont les Serbes qui ont eu le plus de victimes, le plus de

13 tués.

14 Q. On ne va pas parler de la Deuxième Guerre mondiale tout de suite.

15 Je ne suis pas sûr que vous ayez répondu à la question. Est-ce que vous

16 voulez dire que la Croatie ne pouvait pas changer le statut constitutionnel

17 des Serbes et ne pouvait pas faire sécession de la Yougoslavie sans obtenir

18 au préalable l'accord des Serbes en Croatie ?

19 R. Oui, effectivement. C'est ce que je pense.

20 Q. Autrement, les Serbes avaient le droit de veto sur une éventuelle

21 sécession des Croates et sur des changements importants au niveau de la

22 constitution ?

23 R. Dans toutes les constitutions précédentes, les Serbes étaient là comme

24 un peuple qui avait les mêmes droits que les Croates. C'est pour cela qu'on

25 aurait dû leur poser la question. C'était une meilleure solution que de

26 changer de façon unilatérale la constitution.

27 Q. Je ne vous demande pas ce qui aurait dû être fait. Je vous demande si

28 vous pensez que les Croates ne pouvaient pas le faire, n'avaient pas le

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1 droit de faire.

2 R. Oui, c'est effectivement ce que je pensais.

3 Q. Pas seulement ce qu'ils auraient dû faire, mais est-ce qu'ils

4 pouvaient, est-ce qu'ils avaient le droit de le faire ?

5 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Vous voulez dire la possibilité

6 juridique ou du point de vue moral, ou historique ? Peut-être que vous

7 devriez préciser cela.

8 M. BLACK : [interprétation]

9 Q. Vous avez entendu cette question du Juge Hoepfel ? Est-ce que vous

10 parlez des possibilités juridiques, morales ou historiques ?

11 R. Les trois; juridiques, morales et historiques. Tout.

12 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Merci.

13 Vous pouvez continuer.

14 M. BLACK : [interprétation]

15 Q. Hier, dans la partie que l'ai lue, vous avez parlé d'un territoire

16 compact qui pouvait être complètement séparé de la Croatie. En réalité,

17 vous parlez de la Krajina, n'est-ce pas ?

18 R. Oui.

19 Q. Vous avez parlé combien il y avait des Serbes qui vivaient là-bas,

20 combien il y avait de Croates, et cetera. D'après vous, qu'est-ce qui se

21 serait passé ? Qu'est-ce qui serait arrivé aux Croates habitant en Krajina

22 si la Krajina s'était séparée de la Croatie ?

23 R. Nous étions prêts à donner tous les droits, à accorder tous les droits

24 aux Croates. Ils devaient être traités de la même façon que les Serbes.

25 Rien ne leur serait arrivé.

26 Q. Mais n'est-ce pas exactement la même chose que ce que la Croatie

27 garantissait aux Serbes, à savoir qu'ils auraient exactement tous les

28 droits, que leurs droits seraient garantis ?

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1 R. Oui, mais le droit fondamental a été aboli, c'est-à-dire le droit

2 d'être un peuple constitutionnel, de ce droit-là découle plein d'autres

3 lois.

4 Q. Est-ce que vous voulez dire -- attendez. Quand vous dites que vous

5 étiez prêts à accorder Croates tous les droits, les mêmes droits qu'aux

6 Serbes, de quels droits parlez-vous exactement ?

7 R. Nous étions prêts à les traiter de la même façon que le peuple serbe.

8 C'est vrai qu'ils constituaient une minorité, mais le président Babic

9 répétait toujours ceci, à savoir que rien ne devrait et ne pourrait arriver

10 aux Croates en Krajina.

11 Q. Quand vous dites, "les traiter comme un peuple égal," est-ce que vous

12 voulez dire qu'ils devraient devenir aussi un peuple constitutif de la

13 Krajina, ou bien une minorité protégée ?

14 R. C'est une question qui aurait dû être traitée par la suite avec la

15 constitution, et cetera.

16 Mais Monsieur le Procureur, permettez-moi de vous dire quelque chose. Dans

17 la Krajina de Knin, nous n'avons pas fait de mal aux Croates pendant la

18 guerre, pendant cette nouvelle guerre, la dernière. Je ne pense pas -- je

19 ne parle pas de la Deuxième Guerre mondiale.

20 Q. Bien. Je vais vous poser quelques questions à ce sujet, mais ce n'est

21 pas pour l'instant que je m'intéresse à cela.

22 M. BLACK : [interprétation] Je voudrais que l'on présente sur le

23 rétroprojecteur la pièce 137, s'il vous plaît.

24 Q. Monsieur Macura, hier, vous avez dit que vous aviez une fonction

25 publique en tant que membre du SDS, n'est-ce pas ?

26 R. Oui.

27 Q. Ce que vous voyez sur l'écran, c'est le document fondateur du SDS en

28 date du 17 février 1990, fait à Knin. Est-ce que vous avez été là ? Est-ce

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1 que vous avez été présent à l'assemblée fondatrice du SDS ?

2 R. Non, Monsieur, j'ai rejoint le SDS plus tard.

3 Q. Je vais vous demander d'examiner la dernière page, la dernière page en

4 anglais et en B/C/S, d'ailleurs.

5 Monsieur, vous pouvez voir sur l'écran devant vous que là, il s'agit de la

6 résolution du SDS sur le Kosovo adoptée lors de cette assemblée qui a eu

7 lieu au mois de février 1990. Si vous examinez l'avant-dernier paragraphe

8 pratiquement en bas de la page, on peut lire dans ce paragraphe : "Nous

9 considérons que les Albanais devraient garder le droit des minorités. Dans

10 la plupart des pays démocratiques, c'est le cas. Nous voulons qu'ils

11 détiennent les droits qu'ils ont. Il n'y a pas de minorité dans le monde

12 entier qui dispose d'une académie de sciences, des universités, des

13 programmes séparés dans les écoles, des médias indépendants, la radio, la

14 télévision, les maisons d'édition. Ils ont tout comme s'il s'agissait d'un

15 véritable Etat. Nous sommes résolument contre deux Etats albanais dans les

16 Balkans, dont un se trouverait dans la République de Serbie."

17 Voici la question que je vous pose : le SDS a des doubles critères, n'est-

18 ce pas ? Puisque pour les Albanais --

19 R. Ce n'est pas vrai. Ce n'est pas vrai.

20 Q. Mais laissez-moi terminer la question.

21 R. Excusez-moi.

22 Q. Tout va bien. Le SDS considérait que les Albanais du Kosovo devraient

23 se contenter des droits en tant que minorités, mais que les Serbes en

24 Croatie auraient dû avoir davantage de droits que cela, un statut

25 particulier, n'est-ce pas ?

26 R. Laissez-moi vous dire quelque chose.

27 La Krajina est, du point de vue ethnique et historiquement, une terre

28 serbe, alors que le Kosovo est Albanais uniquement du point de vue ethnique

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1 et pas historique. M. Mustajbasic de Belgrade qui était à Djakovica en

2 1946, c'est un diplomate de carrière. Il m'a dit : J'ai passé six mois à

3 Djakovica. C'est une ville qui se trouve à la frontière du Kosovo et de

4 l'Albanie. Dix mille Albanais traversaient la frontière par mois pour venir

5 s'installer au Kosovo. Josip Broz a interdit par la loi le retour des

6 Serbes au Kosovo.

7 C'est comme cela que les Albanais ont eu cette majorité. Même le président

8 de l'Etat, après la mort de Josip Broz, était un Albanais, un Albanais pas

9 du Kosovo, mais d'Albanie, Fadil Hoxha. Il n'avait même pas la citoyenneté

10 yougoslave et il était le président de la présidence yougoslave à Belgrade.

11 Je pense que là, nous avons vraiment deux choses complètement différentes.

12 Q. La première question : vous dites que les Albanais n'ont pas de droit

13 historique sur le Kosovo ? Avant 1940, ils n'y étaient pas ?

14 R. Oui, c'est exact. Essayez de trouver -- je vous défie de trouver un

15 seul monument historique albanais au Kosovo. Il n'y en a pas, parce qu'ils

16 n'étaient pas là.

17 Q. Je suppose que vous comprenez que de nombreux Albanais du Kosovo voient

18 la chose différemment, mais vraiment différemment. Ils considèrent qu'ils

19 ont les droits historiques.

20 R. Mais c'est complètement normal. Je veux bien. Vous avez sans doute

21 raison. Je vous dis pour ma part quels sont les faits historiques.

22 Q. Vous me donnez plutôt votre version de l'histoire, parce que d'autres

23 personnes pourraient avoir une autre idée sur ce qui est vraiment

24 l'histoire ?

25 R. Mais évidemment qu'on peut falsifier l'histoire. Vous pouvez

26 l'interpréter comme vous voulez. Je vous ai dit ce que m'a dit un homme

27 avec qui je parlais, un Musulman de Belgrade. Ce n'est pas un Serbe - c'est

28 un fait important - qui m'a dit cela. C'était un diplomate. Il a passé six

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1 mois sur les passages frontaliers à Djakovica. Justement, j'aime bien citer

2 les non-Serbes pour qu'on ne dise pas après que j'ai fait de la propagande,

3 ici.

4 Q. Comment s'appelle cette personne ?

5 R. Mustajbasic. Il habite à la rue Rimska, près de l'hôtel Serbia, j'ai

6 parlé plusieurs fois avec lui.

7 Q. D'après vous, ce qu'a dit cette personne, ce qu'elle vous dit avoir vu

8 à Djakovica établit ces vrais faits historiques pour le Kosovo tout

9 entier ? C'est ce que vous me dites ?

10 R. Oui, parce que les Serbes n'avaient pas le droit de retourner au

11 Kosovo. C'était interdit par la loi. Ils n'avaient pas le droit de regagner

12 leurs foyers et de regagner leurs terres, tout comme moi, je n'ai pas le

13 droit de retourner en Croatie à présent.

14 Q. On va revenir sur la Croatie. C'est bien que vous en parliez.

15 Vous accepterez aussi que certains Croates voyaient autrement l'histoire de

16 la Krajina ? Ils disaient que Krajina, historiquement, appartient à la

17 Croatie.

18 R. Bien. Je vous dis d'examiner les cadastres pour voir à qui appartient

19 la terre. Vous n'avez qu'à regarder quelle était la situation pendant

20 l'empire austro-hongrois, pendant la Venise, les Ottomans. Il s'agit de

21 regarder les cadastres et de voir à qui exactement appartient cette terre.

22 Mais vous savez, ce qui se passe, ce n'est même pas bon pour les Croates

23 parce que maintenant c'est une terre vide. Il n'y a rien qui est là-bas.

24 Eux non plus, ils ne sont pas contents avec la situation à présent.

25 Q. Ce que j'essaie de vous dire, c'est que les gens voient différemment

26 les demandes historiques, parce qu'une demande historique de posséder une

27 terre ne peut pas servir de base pour décider sur les questions de

28 sécession ou sur la question des droits constitutionnels puisque les gens

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1 ne vont jamais être d'accord là-dessus.

2 R. Ici, je vous parle de l'accord d'Helsinki sur l'inviolabilité des

3 frontières extérieures, et là, c'est exactement cela qui a été violé,

4 puisque c'est ce qui s'est passé en Yougoslavie. Si cela s'applique à la

5 Yougoslavie, je ne vois pas pourquoi cela ne s'appliquait pas à tous les

6 autres pays qui font partie de la Yougoslavie.

7 M. BLACK : [interprétation] Très bien. Nous n'avons plus besoin de ce

8 document.

9 Q. Je voudrais vous poser une question au sujet de M. Glavas. Est-ce que

10 vous vous souvenez de cette personne ? Vous avez parlé de lui.

11 R. Oui, je l'ai vu plusieurs fois à la télé, plusieurs fois.

12 Q. C'est un nationaliste croate extrémiste de l'extrême droite ?

13 R. Oui, je pense que c'est bien le cas.

14 Q. Vous avez dit d'ailleurs hier qu'il était en ce moment jugé pour avoir

15 commis des crimes de guerre en Croatie.

16 R. Oui, mais vous savez, tout le procès avance lentement, et de nombreux

17 témoins ne veulent plus témoigner.

18 Q. Je voudrais vous poser quelques questions au sujet de quelques détails

19 concernant ce monsieur, M. Glavas.

20 M. Glavas est accusé d'avoir arrêté et torturé deux Serbes et ensuite

21 d'avoir ordonné qu'on les tue, qu'on les fusille à Osijek; est-ce exact ?

22 R. Je ne connais pas les détails. Je sais que de nombreux Serbes ont été

23 tués à Osijek et que c'était le numéro 1 du HDZ à Osijek. Si les Croates

24 considèrent aujourd'hui qu'il est responsable d'un crime, il l'est sans

25 doute.

26 Ce que je sais aussi, c'est qu'il a menacé avec un pistolet notre

27 représentant dans le Parlement.

28 Q. Vous avez dit hier que les Croates traînent les pieds dans cette

Page 8287

1 procédure, la procédure contre Glavas, le procès. C'est ce que vous

2 pensez ?

3 R. Oui, oui. C'est l'impression que j'ai.

4 Q. Est-ce que vous savez qu'au mois de mai 2006, donc au mois de mai cette

5 année, le Parlement croate a levé l'immunité parlementaire de Glavas

6 justement pour faciliter cette enquête le concernant ?

7 R. Je ne suis pas au courant de cela. Vous savez, c'est 10 années après

8 l'opération Tempête.

9 Q. Vous n'avez probablement pas entendu cela non plus, mais il a fait

10 appel sur cette décision, mais le tribunal -- la cour d'appel de Zagreb a

11 rejeté sa demande. Il existe aujourd'hui une enquête judiciaire qui est

12 ouverte. Elle a été ouverte au mois de juillet 2006. Est-ce que cela vous

13 dite quelque chose ?

14 R. Ecoutez, je ne suis absolument plus ce qui se passe là-bas. Je suis un

15 réfugié de Krajina. Je ne peux plus revenir là-bas et je ne suis plus ce

16 qui se passe là-bas.

17 Q. Je vous pose des questions parce que vous-même vous l'avez mentionné.

18 C'est pour cela que je vous demande si vous savez qu'il y a un procès en

19 cours le concernant, et cetera.

20 R. Mais oui, parce que c'est un exemple qui m'est venu à la tête. Je vous

21 présente mes excuses si je vous ai dérangé.

22 Q. Bien. Je vais vous poser quand même quelques questions supplémentaires

23 à ce sujet.

24 Est-ce que vous savez que normalement, son procès doit commencer à la fin

25 de cette année ou au début de 2007 ?

26 R. Non.

27 Q. Est-ce que vous savez que dans le cas où il est condamné, il risque une

28 peine de 15 à 20 années d'emprisonnement ?

Page 8288

1 R. J'ai des doutes là-dessus.

2 Q. Vous avez des doutes par rapport à quoi ?

3 R. J'ai des doutes là-dessus, c'est-à-dire que je ne pense pas qu'il va

4 être condamné à une quinzaine ou une vingtaine années de prison. Mais on va

5 voir, qui vivra verra, Monsieur le Procureur.

6 Q. Vous pouvez le croire si vous le voyez. Pourquoi vous avez des doutes ?

7 R. J'ai des doutes parce que le peuple croate n'a pas le même sentiment à

8 ce sujet. J'ai des doutes quant à la loi appliquée et la peine qu'il risque

9 d'avoir.

10 Q. Vous savez aussi qu'il y a d'autres crimes de guerre qui font l'objet

11 de procès en ce moment en Croatie, des procédures au pénal ?

12 R. Oui, il y en a certainement. Cela ne m'intéresse pas.

13 Q. Est-ce que vous avez entendu parler de l'affaire Lora à Split, la

14 prison de la Lora ?

15 M. LE JUGE HOEPFEL : [aucune interprétation]

16 M. BLACK : [interprétation] Lora, L-o-r-a.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, j'ai suivi l'affaire Lora pendant la

18 guerre. Je sais qu'on avait torturé des Serbes là-bas, pas seulement les

19 Serbes de la Krajina, mais aussi les Serbes de Bosnie, donc d'un autre

20 pays, d'un autre Etat. Je sais qu'un procès a eu lieu. Je sais que ce

21 procès a été interrompu, et ensuite le procès a repris. Mais bon, cela ne

22 m'intéressait plus.

23 M. BLACK : [interprétation]

24 Q. Vous avez tout à fait raison de dire qu'ils ont été déclarés innocents,

25 mais ceci a été rejeté en appel et qu'il y a eu un nouveau procès par la

26 suite qui a duré cinq mois et demi, que deux Croates ont été condamnés à la

27 peine d'emprisonnement de huit années. Ensuite, un autre, un policier

28 militaire croate, il a été condamné à sept années de prison. Il y en a cinq

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1 autres qui ont reçu six années -- une peine de six ans d'emprisonnement

2 pour leur participation aux passages à tabac et aux tortures des civils.

3 Est-ce que vous savez cela ?

4 R. Non, mais c'est bien que ceci ait été fait.

5 Q. Hier, vous avez parlé de Sisak, vous avez parlé de ce qui s'est passé à

6 Sisak. Est-ce exact que vous avez dit qu'"à chaque fois, on tuait des

7 Serbes là-bas," que les non-Croates ont été "rassemblés et tués pour aucune

8 raison apparente" et que "chaque habitant de Sisak savait qu'au moins 50

9 Serbes ont été tués à Sisak ?"

10 Quelle est votre source pour dire cela ? Où est-ce que vous avez appris

11 cela ?

12 R. Je connais Nikola Dobrijevic, originaire de Sisak, qui habite à

13 Belgrade aujourd'hui. Il connaît beaucoup de Serbes qui ont été tués. Il

14 connaît leurs noms. Il venait sur leurs lieux de travail pour signer des

15 papiers, des déclarations. Ensuite, ils étaient tués d'une balle derrière

16 la tête. C'est ce qu'il m'a raconté, et je n'ai pas de raison de mettre en

17 doute ses propos. Je connais également d'autres gens de Sisak qui ont perdu

18 ou dont certains membres de leur famille sont disparus.

19 Q. A part M. Dobrijevic, connaissez-vous d'autres Serbes ? Connaissez-vous

20 qui que ce soit d'autre de Sisak qui pourrait vous parler de Serbes qui ont

21 été tués là-bas ?

22 R. J'avais un étudiant au lycée dont le père a été tué. Il était aussi de

23 Sisak. Je suis né loin de Sisak, je ne connais pas très bien la région,

24 mais j'ai eu vent de ces informations et je sais que Nikola Dobrijevic a

25 énormément d'informations sur le sujet puisque lui il habitait à Sisak.

26 Q. Quand dites-vous que ces événements se sont produits exactement ?

27 R. Ils se sont produits au cours de la guerre. Il n'y avait pas

28 d'activités de combat à Sisak, et c'est ce sur quoi j'attire votre

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1 attention. Il n'y avait pas d'activités de combat à Sisak, et pourtant on y

2 tuait des gens. Je ne peux pas vous donner la période exacte ni la durée de

3 cette période, mais je suis sûr que vous aurez la possibilité d'entendre

4 des éléments de preuve là-dessus.

5 Q. Pouvez-vous nous préciser l'année, peut-être au moins l'année de ces

6 événements ou une période de plusieurs années, éventuellement ?

7 R. Les dates et les années ne m'intéressent pas du tout. La seule chose

8 qui m'intéresse, ce sont les événements. La situation dans laquelle je me

9 trouve aujourd'hui, j'ai perdu une guerre et je ne peux pas rentrer chez

10 moi, dans mon lieu de naissance. Voilà ce qui m'intéresse.

11 Q. Oui, mais vous comprendrez que dans le cadre de nos activités à nous,

12 ici dans ce Tribunal, les dates nous intéressent. Alors si vous ne

13 connaissez pas la date, dites-le-moi. Je ne vais pas renoncer à vous

14 demander des dates lorsque j'ai besoin de les connaître.

15 R. Je ne sais pas.

16 Q. Je vous demanderais de faire de votre mieux.

17 R. Très bien.

18 Q. A votre connaissance, qui a tué ces gens, les Serbes dont vous dites

19 qu'ils ont été tués à Sisak ?

20 R. Ils ont été tués par leurs collègues de travail, par des Croates qui

21 vivaient dans la même ville. Mais bien sûr, la faute revient aux autorités.

22 Or, le pouvoir était occupé par le HDZ, l'Union démocratique croate, parce

23 qu'il est impossible que les gens soient tués ou blessés sans que les

24 autorités n'en soient informées.

25 Q. Lorsque nous avons commencé à aborder ce point, je crois vous avoir

26 entendu dire que les gens avaient été tués en arrivant au travail; c'est

27 vrai ? C'est bien ce que vous avez dit ?

28 R. Oui, dans les bureaux aussi.

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1 Q. Hier, vous avez dit que des non-Croates étaient "rassemblés et tués."

2 Avez-vous des exemples précis à nous donner d'événements tels que celui-ci,

3 à savoir des rafles et des meurtres ?

4 R. Les actualités en ont parlé, mais la chose n'a pas été confirmée par la

5 suite, je ne peux donc pas affirmer avec certitude que les choses se sont

6 passées. Mais près d'une forêt dans le coin, je parle du retrait des forces

7 au cours de l'opération Tempête, lorsque les forces serbes se sont repliées

8 dans une colonne en tant que réfugiés en direction de Serbie, il y avait

9 environ

10 10 000 personnes dans ce groupe --

11 Q. Je crois que nous ne nous comprenons pas.

12 Parlez-vous toujours de Sisak ? Parce que ce qui m'intéresse, c'est

13 ce que vous avez dit concernant des meurtres de Serbes à Sisak. Avez-vous

14 des exemples à nous donner de rafles et de meurtres de Serbes à Sisak ?

15 R. J'ai entendu des histoires. On disait qu'on les jetait dans des

16 fours à l'usine de métallurgie de Sisak. C'est ce que j'ai entendu. Je ne

17 peux pas le confirmer. Ce sont des histoires simplement que j'ai entendues.

18 Q. Mais était-ce ce dont vous parliez lorsque vous avez dit que des

19 Serbes étaient rassemblés et assassinés ? Est-ce que c'est à cela dont vous

20 faisiez référence, le fait qu'ils aient été brûlés dans des fours ?

21 R. Ce que j'ai essayé de dire, c'est qu'il y a eu des meurtres collectifs.

22 Ce n'était pas des cas isolés. C'est ce que j'ai essayé de dire.

23 Q. Bien. Ce que je vous dis, moi, Monsieur, et c'est d'ailleurs l'objet de

24 toutes mes questions, c'est que vous n'avez pas été très précis lorsque

25 vous avez parlé des événements de Sisak, n'est-ce pas ?

26 R. Je n'ai pas été très précis parce que je n'y étais pas présent moi-

27 même. Je n'ai pas été le témoin oculaire de ces événements. Je pense que

28 ces événements peuvent être confirmés par les gens qui se trouvaient sur

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1 place et qui ont observé les choses.

2 Q. Vous ne faites que répéter certaines choses que vous avez entendues,

3 mais vous ne savez pas directement ce qui s'est passé à Sisak, vous ne

4 l'avez pas observé vous-même ?

5 R. C'est exact. Je n'ai pas observé moi-même les choses.

6 Q. Vous ne savez pas non plus, même si c'est un peu ce que vous avez dit

7 tout de même, vous ne savez pas vraiment grand-chose sur ces gens qui

8 auraient été rassemblés et tués sans raison, n'est-ce pas ?

9 R. Je n'ai pas de certitude là-dessus. Je ne peux que vous faire rapport

10 de ce que j'ai entendu; de nombreux Serbes ont été tués à Sisak, beaucoup.

11 Je ne sais pas combien exactement.

12 Q. D'accord. Parce qu'hier, vous avez dit que toute personne de Sisak

13 connaissait au moins 50 Serbes qui avaient été tués sur place. Mais c'est

14 un chiffre que vous avez dit au hasard. Ce n'est pas un chiffre que vous

15 pouvez étayer par des informations concrètes ?

16 R. Ce que j'ai essayé d'expliquer, c'est que Sisak n'est pas une grosse

17 ville et que parmi les réfugiés de Serbie dont des parents avaient été

18 tués, ils savent eux précisément que ces gens-là ne vivent plus et ils

19 savent précisément qui a été tué.

20 Q. D'accord. Avez-vous la moindre idée du nombre de Serbes qui ont été

21 tués à Sisak ?

22 R. J'ai entendu le chiffre de 250. Je ne sais pas si ce chiffre est exact.

23 Q. Bien. Je sais que vous avez des difficultés avec les dates, mais à peu

24 près, disons, de quelle période parle-t-on ici lorsque l'on parle du

25 meurtre de 250 Serbes à Sisak ?

26 R. C'était pendant la guerre. Mais comme je l'ai dit, il n'y avait pas

27 d'activités de combat à Sisak, et pourtant des gens y étaient tués.

28 Q. Qui vous a donné ce chiffre de 250 Serbes tués ?

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1 R. Je l'ai entendu de la bouche de plusieurs personnes. Je ne connais pas

2 leurs noms. Je peux vous redonner le nom de Nikola Dobrijevic qui pourrait

3 vous donner les noms, lui, s'il était appelé à témoigner. Je ne sais pas

4 s'il est le témoin ou s'il le sera à un moment donné dans le cadre de cette

5 affaire.

6 Q. Vous avez également dit que des Serbes avaient tués à Zagreb. Vous vous

7 souvenez avoir parlé de la famille Zec ?

8 R. Monsieur, une vidéo ou un film a été réalisé sur ces événements. Cela

9 s'appelait Pavillon 22, je crois. Les Croates ont réalisé ce film, film sur

10 l'exécution de Serbes. Si les Croates ont filmé eux-mêmes cette vidéo, ils

11 sont, me semble-t-il, prêts à reconnaître que des crimes ont été commis.

12 Q. Si vous attendiez mes questions, vous sauriez de quoi il s'agit plutôt

13 que de nous faire des discours.

14 Ma question est la suivante : trois personnes, trois membres de la famille

15 Zec ont été tués, n'est-ce pas ?

16 R. C'est possible. Je sais que toute la famille a été tuée. Je crois que

17 l'un des enfants a survécu. Je ne me souviens plus des détails, mais ceci a

18 été publié.

19 Q. Vous n'avez pas d'autres exemples de Serbes qui auraient été tués à

20 Zagreb, n'est-ce pas, au cours de la guerre ?

21 R. Non, mais d'autres oui.

22 Q. J'aimerais que l'on change de sujet et que l'on parle d'autre chose.

23 J'aimerais attirer votre attention sur l'été 1990.

24 Vous nous avez dit hier que des policiers de Knin avaient refusé de porter

25 un nouvel insigne qui avait été introduit par les autorités croates, n'est-

26 ce pas ?

27 R. Oui.

28 Q. Vous parliez du damier, n'est-ce pas, du damier rouge et blanc; c'est

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1 bien de cela dont vous parliez ?

2 R. L'insigne que l'on a vu sur la photo où l'on voit l'Oustacha qui tient

3 une tête dans sa main.

4 Q. A quoi ressemble cet insigne ? Je ne m'en souviens plus, de cette

5 photo.

6 R. C'était sur la photo d'aujourd'hui. La personne qui était debout à côté

7 de l'ambassadeur Galbraith le portait sur son couvre-chef. C'était un

8 damier en U.

9 Q. Oui. En forme de U, mais cela peut être également la forme d'un

10 bouclier, n'est-ce pas, d'un écusson ?

11 R. Oui, en forme d'écusson. Je pense que c'est en forme de U. Voilà, c'est

12 ma description.

13 Q. Ce même symbole, cette forme que vous dites être la forme d'un U, c'est

14 un symbole croate qui remonte au Moyen Age, n'est-ce pas, symbole de rois

15 croates, ce damier en forme de U ?

16 R. Je ne sais pas de quels rois vous parlez. Il y a des légendes et il y a

17 des faits historiques.

18 Q. Vous serez d'accord avec moi pour reconnaître que le royaume de

19 Yougoslavie est un fait historique, que ce royaume a bel et bien existé ?

20 R. Oui, il a existé et il a été fondé avec du sang serbe.

21 Q. Cette armoirie en quelque sorte, ou l'écusson de la royauté arborait ce

22 damier rouge et blanc que vous dites être en forme de U. Il faisait partie

23 des armoiries du royaume de Yougoslavie, n'est-ce pas ?

24 R. C'est possible. Je ne sais pas.

25 Q. Savez-vous que ce même damier en forme de U faisait partie des

26 armoiries de la République populaire de Croatie, puis par la suite de celui

27 de la République fédérale ou République socialiste fédérative de

28 Yougoslavie, et ce, pendant toute la durée de la présence de la Croatie au

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1 sein de la Yougoslavie ?

2 R. Nous ne faisons que répéter les choses. Même la monnaie qui avait été

3 introduite par Ante Pavelic a été réintroduite, la kuna.

4 Q. Permettez-moi de vous interrompre parce que ce n'est pas ce dont je

5 parle. Je ne parle pas d'Ante Pavelic ni de la kuna. Je vous pose des

6 questions sur ce damier et je vous demande si vous le savez, oui ou non, si

7 vous le savez, si vous savez que ce symbole faisait partie des armoiries de

8 la Yougoslavie lorsque la Croatie faisait partie de la RSFY, de la

9 Yougoslavie, et qu'elle en était une république ?

10 R. Oui. C'était sur les sceaux.

11 Q. Bien. Vous seriez d'accord avec moi pour dire que l'Etat indépendant de

12 Croatie, les Oustachi n'étaient pas les créateurs de ce symbole du damier ?

13 Ils ne faisaient partie, ils n'étaient que l'un des multiples gouvernements

14 qui, dans l'histoire, ont introduit ce symbole parmi leur éventail

15 symbolique. Vous êtes bien d'accord avec moi ?

16 R. Ils ont changé l'insigne. Je ne sais plus quel insigne ils utilisaient,

17 mais je sais qu'ils l'ont changé, et c'est la raison pour laquelle la

18 police a refusé d'accepter ce nouvel insigne.

19 Q. Qui l'a changé ? Vous avez dit : "Ils ont changé l'insigne. Je ne sais

20 plus quel insigne ils utilisaient."

21 De qui parlez-vous ?

22 R. Les autorités à Zagreb, le nouveau gouvernement croate mené par le HDZ.

23 Q. D'accord. Vous n'avez pas vraiment répondu à ma question. L'Etat

24 indépendant croate et les Oustachi n'ont pas inventé le symbole du damier.

25 Ils n'étaient que l'un des différents gouvernements qui, au fil des

26 siècles, ont incorporé cet élément dans leur propre symbolisme, n'est-ce

27 pas ? Répondez à la question simplement.

28 R. Je sais que de nombreux Serbes ont été assassinés par des soldats qui

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1 portaient cet insigne.

2 Q. Vous n'avez pas répondu à ma question, n'est-ce pas ?

3 R. [aucune interprétation]

4 Q. Je ne crois que vous ayez répondu à ma question. Ma question, je la

5 répète : est-il exact que l'Etat indépendant croate et les Oustachi n'ont

6 pas inventé et créé de toutes pièces ce symbole du damier ? Ils n'étaient

7 que l'un des nombreux gouvernements qui, au fil des siècles, ont intégré

8 cet élément dans leur propre symbolisme. Veuillez répondre, s'il vous

9 plaît.

10 R. Oui, et ils en ont abusé.

11 Q. Pourtant, vous considérez qu'il s'agit surtout d'un symbole oustachi.

12 Vous dites d'ailleurs que ce symbole a la forme d'un U comme Oustachi,

13 plutôt que la forme d'un écusson; c'est bien ce que vous dites ? C'est cela

14 que vous voyez dans ce symbole ?

15 R. Dans le camp de Jasinovac, sur une statue, il y avait une fleur qui

16 avait aussi la forme d'un U. Ceci a été fait exprès, bien sûr. C'était un

17 monument à la mémoire des victimes des Serbes, des victimes.

18 Q. C'était vraiment un U, n'est-ce pas ? C'était le symbole oustachi le

19 plus aisément reconnaissable, n'est-ce pas ?

20 R. Ce n'était pas seulement qu'ils voulaient changer les uniformes, et je

21 n'ai pas tous les détails, peut-être que vous pourrez obtenir ces

22 informations de la part de policiers qui ont davantage d'informations sur

23 les uniformes.

24 Q. Sur la même chose, vous avez dit hier qu'il y avait eu des lettres

25 envoyées par certains policiers de Knin aux autorités fédérales et qui

26 s'opposaient à l'usage de vos insignes. Vous souvenez-vous avoir parlé de

27 ces lettres ou de cette lettre ?

28 R. Oui, c'est une lettre qui a été rédigée, puis publiée dans la presse.

Page 8298

1 Q. L'une des personnes qui a signé cette lettre, c'était Milan Martic,

2 n'est-ce pas ?

3 R. Probablement.

4 Q. Vous dites "probablement". Vous savez que c'est vrai, n'est-ce pas ?

5 R. Je n'ai aucun détail là-dessus. Je ne suis pas policier. J'avais

6 d'autres fonctions. Je sais que cette lettre existait. Je sais qu'elle a

7 été publiée dans la presse.

8 Q. Bien. Pendant tout --

9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi un instant.

10 Monsieur le Témoin, juste une question très simple. Savez-vous, oui ou non,

11 si Martic a été l'un des auteurs de cette lettre ? Si vous ne le savez pas,

12 ce n'est pas un crime.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas --

14 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

15 LE TÉMOIN : [interprétation] -- s'il a été l'un des auteurs de cette lettre

16 ou pas.

17 M. BLACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

18 Q. Monsieur Macura, tout au long de la période au cours de laquelle vous

19 avez occupé les fonctions de ministre au sein du même gouvernement, tout au

20 long de la période au cours de laquelle vous avez été un collègue de M.

21 Martic, jamais, au cours de la conversation, vous n'avez abordé la question

22 de savoir s'il avait été l'un des auteurs de cette fameuse lettre de

23 juillet 1990 ?

24 R. Je n'en ai jamais parlé avec lui. M. Martic avait de nombreuses autres

25 obligations, et nos rencontres étaient rares.

26 Q. Je comprends. Vous dites n'en avoir jamais parlé avec lui. Vous dites

27 que vos rencontres étaient rares. Toutefois, vous étiez ministre dans le

28 même gouvernement, le gouvernement de la SAO Krajina, n'est-ce pas ?

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1 R. Oui, Monsieur, mais j'avais d'autres fonctions également. J'étais

2 directeur général de la radio et j'étais ministre à titre bénévole, je veux

3 dire, dans la mesure où je n'ai jamais reçu rémunération. Chacun d'entre

4 nous avait d'autres tâches, d'autres fonctions, et nous exercions nos

5 fonctions ministérielles bénévolement.

6 Q. Même avant mai 1991, date à laquelle vous êtes devenu ministre du

7 gouvernement de la SAO Krajina, je suppose que vous aviez déjà des contacts

8 avec M. Martic ?

9 R. Je ne l'ai rencontré que de manière sporadique.

10 Q. Vous étiez vice-président de la municipalité de Knin en 1990, n'est-ce

11 pas ?

12 R. Oui, Monsieur, c'est exact. Mais M. Martic était au sein des forces de

13 police et il n'avait pas beaucoup de liens avec les autorités civiles.

14 Q. Bien. Savez-vous qu'aux environs du 5 juillet 1990, les autorités

15 croates à haut niveau, et je parle également de Josip Boljkovac, le

16 ministre de l'Intérieur, et Perica Juric, son adjoint, je crois, sont venus

17 à Knin afin d'y rencontrer Milan Martic et d'autres personnes qui avaient

18 signé cette pétition ? Avez-vous eu connaissance de cette réunion qui s'est

19 tenue au début de juillet 1990 ?

20 R. Si c'est quand ils sont venus au poste de police et que des gens se

21 sont rassemblés spontanément à l'extérieur, je ne sais pas si c'est de cela

22 dont vous parlez, je me souviens qu'à un moment donné, des gens se sont

23 rassemblés autour du poste de police. Est-ce que c'est ce dont vous

24 parlez ?

25 Q. Oui, effectivement. C'est à cet événement que je fais référence.

26 R. Oui. Je m'en souviens. J'étais présent avec d'autres gens dans la rue.

27 Je m'en souviens, mais je n'étais pas dans le bâtiment.

28 Q. Vous avez dit que des gens se sont rassemblés spontanément devant le

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1 poste de police. En fait, c'était une action organisée qui avait pour but

2 de rassembler des gens en soutien de leurs policiers, non ?

3 R. Ce n'est pas l'impression que j'ai eue.

4 Q. Saviez-vous que les autorités croates avaient besoin d'être protégées

5 pour pouvoir quitter cette réunion sans qu'il leur arrive quoi que ce soit,

6 qu'ils ont dû être escortés jusqu'à l'extérieur du bâtiment ?

7 R. C'est probablement le cas, et je crois qu'ils ont été escortés et qu'il

8 n'est rien arrivé à personne.

9 Q. Il était évident, à partir de ce moment-là, que Milan Martic ainsi que

10 d'autres officiers de police à Knin, du moins, croyaient que les autorités

11 croates n'avaient plus vraiment d'autorité à Knin. C'était ce qu'ils

12 croyaient à partir de ce moment-là, c'est-à-dire que les Croates n'avaient

13 pas d'autorité à Knin ?

14 R. Peut-être pour ce qui est de la police, du point de vue des officiers

15 de police.

16 Q. Mais en tout cas, c'était le point de vue de Milan Martic, n'est-ce pas

17 ?

18 R. Je ne peux pas dire cela. Peut-être qu'il s'agissait de son point de

19 vue, mais je ne sais pas. Je ne lui ai jamais demandé. Vous avez

20 probablement raison.

21 Q. Avez-vous jamais vu à la télévision cette déclaration au cours de

22 laquelle Milan Martic fait cette fameuse déclaration en disant que la

23 police de Knin ou le service de police de Knin était le service de police

24 du peuple et qu'il n'allait plus écouter ce que disait le gouvernement

25 croate ? Il a dit cela à un moment du mois d'août en 1990. Est-ce que vous

26 avez vu cette déclaration à la télévision ?

27 R. Non, je ne l'ai pas vue, mais j'en ai entendu parler.

28 Q. Avez-vous entendu dire -- avez-vous entendu que c'était ce qu'il

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1 disait, qu'il n'allait plus écouter les autorités croates à Knin ?

2 R. Je crois qu'il parlait du damier.

3 Q. Non, il s'agissait d'une autre déclaration, une déclaration différente.

4 Je vous pose la question. Je comprends qu'il y ait confusion dans votre

5 esprit, mais je voudrais vous parler du damier. Il a fait une déclaration

6 dont on a beaucoup parlé, au cours de laquelle il disait que pour autant

7 qu'il était vivant, le damier croate n'apparaîtrait pas à Knin, ou avec

8 d'autres mots qui disaient sensiblement la même chose.

9 R. Oui.

10 Q. Est-ce que c'est cette déclaration-là quand vous dites que vous ne

11 l'avez pas vue, mais dont vous avez entendu parler ?

12 R. Oui, j'en ai entendu parler.

13 Q. Je vais vous montrer un extrait d'une vidéo sur le système Sanction.

14 M. BLACK : [interprétation] Voulez-vous bien le mettre en haut du

15 système, s'il vous plaît ? Il s'agit de la pièce numéro 4. Le compte rendu

16 de cette séquence vidéo porte le numéro 5.

17 Veuillez bien regarder, s'il vous plaît.

18 [Diffusion de la cassette vidéo]

19 M. BLACK : [interprétation] Je vous remercie.

20 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

21 M. BLACK : [interprétation]

22 Q. Monsieur Macura, avez-vous déjà vu ceci ?

23 R. Je viens de le voir. M. Martic, et le journaliste, c'est Heni Erceg qui

24 a étudié en même temps que moi à l'université de Zadar.

25 Q. Je ne sais pas -- qui vous voulez et qui est -- savez-vous qui était la

26 femme qui travaillait à la télévision à l'époque ?

27 R. Elle est venue avec la télévision de Split, c'est-à-dire une chaîne de

28 télévision croate de Split, et nous avons également été étudiants au même

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1 temps à l'université. Je vois qu'il s'agit bien d'elle dans la vidéo.

2 Q. En fait, c'était votre point de vue que les autorités croates avaient

3 essentiellement perdu le contrôle et n'avaient plus d'autorité à Knin après

4 l'été de 1990; est-ce exact ?

5 R. Oui, c'est exact.

6 Q. Durant votre déposition hier, le conseil de la Défense vous a demandé

7 si soit les autorités fédérales ou les autorités croates avaient jamais

8 fait quoi que ce soit pour trouver une solution pacifique à cette question

9 sur les écussons, et vous avez dit que les autorités fédérales ont essayé,

10 mais que - ici, je cite - "le peuple de Croatie ne voulait rien entendre."

11 R. Quoi qu'il en soit, beaucoup de choses ont été faites pour essayer de

12 parvenir à une solution pacifique et ont été faites à un niveau fédéral.

13 Mais depuis que les Croates avaient décidé de faire sécession de la

14 Yougoslavie, ils prenaient des initiatives qui n'avaient rien à voir avec

15 l'état fédéral ou la constitution.

16 Q. Excusez-moi, je croyais que -- vous allez plus vite que moi, ici, et je

17 vous demande simplement de vous concentrer sur la date de septembre --

18 août, septembre 1990. Vous vous souvenez de cette réunion où on dit que les

19 gens se sont rassemblés autour du poste de police avec M. Martic ainsi que

20 d'autres ? Cela, c'était bien une tentative menée par les autorités croates

21 pour trouver une solution pacifique, n'est-ce pas ?

22 R. Je ne suis pas d'accord avec vous. Je ne suis pas d'accord. Je crois

23 que la bonne manière de procéder aurait été de tenter de discuter avec les

24 hommes politiques qui avaient gagné les élections et de ne pas en discuter

25 avec les policiers. Mais les politiciens ne voulaient pas nous parler.

26 Q. Cet événement en particulier était un événement du ressort de la

27 police, puisque c'était de nouveau les policiers qui refusaient de porter

28 les écussons de la police. Donc, il peut être considéré comme normal que

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1 cela soit le ministre de l'Intérieur qui dirige la police qui essayait de

2 trouver une solution à ce problème et qui essayait de trouver une solution

3 pacifique en juillet 1990, n'est-ce pas ?

4 R. Je crois qu'il s'agit d'un problème beaucoup plus vaste.

5 Q. Alors, je vais essayer de passer à quelque chose de plus large, si je

6 puis dire.

7 Le 10 septembre 1990, Milan Babic a signé un accord avec les

8 représentants officiels de la Croatie. Evidemment, Milan Babic était un

9 homme politique. Donc, il a signé un accord avec ces représentants

10 officiels de la Croatie pour essayer de résoudre de manière pacifique les

11 questions et les points dont ils discutaient et de rendre les armes qui

12 avaient été prises en août 1990; c'est exact, n'est-ce pas ?

13 R. Je n'ai pas eu vent de cet accord.

14 M. BLACK : [interprétation] Peut-être peut-on montrer la pièce 180 sur le

15 prétoire électronique, s'il vous plaît ?

16 Monsieur Macura, ce document est un petit peu difficile à lire, je le

17 comprends.

18 R. Je peux lire. Je peux lire.

19 Q. Ceci est la transcription de l'annonce fait publiquement de l'accord

20 qui a été passé entre M. Babic ainsi que d'autres personnes du côté serbe

21 et Jose Boljkovac ainsi que d'autres sur le côté croate. Avez-vous jamais

22 vu ce document avant ?

23 R. Non. Je le vois pour la première fois maintenant.

24 Q. Voyez-vous le nom de M. Babic ici en bas du document ?

25 R. Oui. Je vois toutes les signatures.

26 Q. Malgré vos interactions ou votre association étroite avec Milan Babic

27 vous n'avez jamais entendu parler de cet accord qui a été passé le 19

28 septembre 1990 ?

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1 R. Non, jamais, jamais, même si j'étais toujours aux côtés de M. Babic

2 quand il se déplaçait.

3 Q. Bien. Apparemment partout où il allait sauf quand il est allé négocier

4 cet accord, n'est-ce pas ?

5 R. Non. Je voulais parler ici du niveau local, je devais l'accompagner

6 lors de toutes ces conférences et entrevues avec la communauté

7 internationale. Je restais à Knin quand il se déplaçait localement parce

8 que j'étais son adjoint. Je ne pouvais pas suivre ses déclarations parce

9 que je travaillais à la municipalité.

10 Q. Bien. Est-ce que vous n'avez jamais entendu parler de cet accord et

11 qu'il ait été rejeté par le Conseil national de la résistance et Milan

12 Babic a lui-même été accusé d'être un traître pour l'avoir signé ? Vous

13 n'avez jamais entendu dire cela, n'est-ce pas ?

14 R. Non, non, jamais.

15 Q. Laissez-moi attirer votre attention un moment au mois d'août 1990 et

16 plus particulièrement au 17 août 1990 et quelques jours avant ou après, je

17 crois. Vous avez dit hier que les autorités croates ont saisi des armes de

18 postes de police à Benkovac et Obrovac pour essayer d'empêcher le

19 référendum serbe ?

20 R. Non, non, pas à Obrovac. Non, ils ont pris des armes à Benkovac. A

21 Obrovac, ils n'y sont pas arrivés parce que les gens sont sortis dans la

22 rue et ils les en ont empêchés. Ils n'ont seulement pu le faire qu'à

23 Benkovac.

24 Q. Bien. Merci pour cette précision. Ils ont essayé de le faire à Obrovac

25 mais ils n'ont pas réussi; c'est ce que vous êtes en train de dire ?

26 R. Oui.

27 Q. Bien. Vous avez dit hier que la raison pour laquelle ils ont tenté de

28 saisir les armes qui appartenaient aux postes de police était pour empêcher

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1 le référendum serbe. C'est ce que vous avez dit ?

2 R. C'est exact.

3 Q. D'après vous, les Serbes locaux ont érigé des barricades pour essayer

4 d'empêcher les autorités croates de procéder à ce qu'elles voulaient

5 faire ?

6 R. Oui, c'est exact.

7 Q. Ma première question, vous savez les armes - les armes qui ont été

8 saisies - étaient des armes de la police de réserve, n'est-ce pas ? Elles

9 ont été saisies à Benkovac, n'est-ce pas ?

10 R. Oui. C'était l'arsenal des officiers de réserve de la police, mais il y

11 avait des Serbes parmi ces officiers de réserve, pas seulement des Croates.

12 Q. Oui. C'est exact. Mais c'est l'arsenal des officiers de police de

13 réserve à Benkovac; c'est exact ?

14 R. Oui, il aurait dû être à Benkovac. Il n'aurait pas dû être enlevé,

15 c'est exact ?

16 Q. Ces armes appartenaient au MUP croate; est-ce exact ?

17 R. Oui. C'est peut-être exact. Je ne sais pas qui étaient les

18 propriétaires de ces armes. Je sais qu'il y avait des officiers de police

19 de réserve qui étaient responsables de ces armes, à qui on avait donné ces

20 armes, donc ces armes auraient dû rester à Benkovac à leur disposition. On

21 n'aurait pas dû les en enlever. Ce qui veut dire en gros que les officiers

22 de police de réserve ont été désarmés.

23 Q. Ma question, même si vous savez que vous ne savez pas qui étaient les

24 propriétaires de ces armes, vous n'êtes pas en train de le contester,

25 c'étaient des armes de police ? Quand les Croates ont procédé à la saisie

26 de ces armes tout ce qu'ils essayaient de faire c'était de prendre le

27 contrôle de ce qui était déjà à eux; n'est-ce pas exact ?

28 R. Non.

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1 Q. A qui dites-vous que ces armes appartenaient si elles n'appartenaient

2 pas au MUP croate ?

3 R. Les noms des officiers de police de réserve figuraient sur une liste,

4 il n'y avait pas de doute à savoir de qui ils étaient. On savait exactement

5 quelles armes leur avaient été données.

6 Q. Monsieur --

7 R. Les armes ont été données à un nombre d'officiers de police de réserve

8 et chaque officier de police était responsable de sa propre arme.

9 Q. Comme dans l'armée toutes les armes, que ce soit des fusils ou des

10 chars, n'appartenaient pas aux soldats mais appartenaient à l'armée. C'est

11 la raison pour laquelle ces armes appartenaient au MUP croate, n'est-ce pas

12 ?

13 R. Si cela avait été le cas alors la RFSY existerait encore aujourd'hui.

14 Q. Monsieur, vous êtes en train de dire que ce n'est pas le cas.

15 R. Bien évidemment que non.

16 Q. Je ne suis pas sûr de vous comprendre. Est-ce que vous êtes en train de

17 dire que ces armes n'appartenaient pas en réalité au MUP croate, qu'elles

18 appartenaient à qui que ce soit d'autre ou à personne ?

19 R. Je crois que les armes appartenaient à ceux qui en avaient la

20 responsabilité dans le sens que ces armes avaient donné à ces officiers. Ce

21 qui s'est passé c'est qu'on leur a enlevé ces armes.

22 Q. D'après vous --

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi.

24 M. BLACK : [interprétation] Merci. Monsieur le Président, je vous en prie.

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je voulais simplement m'informer

26 auprès du témoin qui avait donné les armes à ces officiers de réserve?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Leurs supérieurs, je suppose.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Qui étaient leurs supérieurs ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. Je ne sais pas s'il s'agissait

2 d'inspecteurs ou d'autres officiers.

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais en tout état de cause, les

4 supérieurs auraient eu le droit de les reprendre les armes pour quelque

5 raison que ce soit ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois qu'ils avaient l'intention de

7 désarmer les officiers de police de réserve et qu'ils étaient en train de

8 les menacer d'interdire le référendum.

9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ce n'était pas ma question. Je suis en

10 train de vous demander si leurs supérieurs avaient le droit de leur

11 reprendre les armes. Je crois que vous pouvez me répondre par oui ou par

12 non, ou que vous ne savez pas. C'est la seule réponse appropriée que vous

13 pourriez me donner.

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. Je ne sais pas.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien. Poursuivez, Monsieur Black.

16 M. BLACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

17 Q. Si je vous comprends bien, Monsieur Macura, vous êtes en train de dire

18 que vous ne savez pas si l'arsenal de police de Benkovac appartenait au MUP

19 croate, vous ne savez pas ?

20 R. Non, je ne le sais pas.

21 Q. Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que les opérations croates

22 destinées à prendre le contrôle sur ces armes de police n'étaient pas

23 destinées à empêcher la tenue d'un référendum. Elles étaient juste

24 destinées à prendre le contrôle des armes, n'est-ce

25 pas ?

26 R. Non, ce n'est pas la manière dont je vois les choses.

27 Q. Pensez-vous réellement que le MUP croate n'aurait pas pu empêcher le

28 référendum de se tenir par la force si c'est ce qu'il voulait plutôt que

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1 d'essayer de saisir des armes qui leur appartenaient et qui se trouvaient

2 dans différents postes de police en Krajina ?

3 R. Je ne crois pas qu'ils auraient pu faire cela.

4 Q. Pensez-vous qu'en saisissant des armes à Benkovac, comment pensez-vous

5 que ceci pourrait être une tentative pour empêcher le référendum de se

6 tenir ? Est-ce que Benkovac c'était le seul lieu où le référendum allait se

7 tenir ?

8 R. Je crois que leur intention était de faire cela dans toutes les

9 municipalités sous notre contrôle, sous le contrôle de nos autorités. Leur

10 idée c'était de le faire dans toutes les municipalités et quand ils ont

11 échoué à Obrovac, alors ils ont abandonné l'idée.

12 Q. Vous faites référence aux municipalités qui étaient sous votre

13 contrôle. N'était-ce pas le cas que les forces de police croate voulaient

14 prendre le contrôle de ces armes précisément parce qu'elles se trouvaient

15 dans des endroits où les forces de police locale étaient hostiles au

16 gouvernement croate ? Ils voulaient prendre le contrôle de ces armes pour

17 que ces armes ne soient pas utilisées contre le gouvernement croate. Est-ce

18 que ce n'était pas l'objectif même des opérations qui ont été menées à

19 Benkovac et qui était la raison d'être de l'opération qui a échouée ?

20 R. Il est certain qu'ils ont essayé d'en prendre le contrôle.

21 Q. La question que je vous posais était la suivante : la raison pour

22 laquelle le besoin de prendre le contrôle de ces armes, c'est parce que ces

23 armes étaient entre les mains de gens qui étaient contre le gouvernement

24 croate, qui auraient pu les utiliser contre le gouvernement croate ?

25 R. Ils avaient indiqué et déclaré plusieurs fois qu'ils allaient empêcher

26 le référendum de se tenir. Les autorités croates n'en ont pas fait grand

27 cas et je suis de cet avis.

28 Q. Bien. On va passer à quelque chose qui est lié à ce point mais quelque

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1 peu différent.

2 M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, je vais passer à un

3 autre sujet, peut-être qu'il vaut mieux interrompre pour aujourd'hui plutôt

4 que de continuer encore quelques minutes ?

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je crois que c'est une bonne idée de

6 faire ceci.

7 Nous sommes arrivés à la fin d'une autre journée. Nous allons reprendre

8 demain matin à 9 heures.

9 --- L'audience est levée à 13 heures 42 et reprendra jeudi le 14 septembre

10 2006 à 9 heures 00.

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