Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 26 octobre 2006

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Peut-être que vous le savez déjà,

7 Monsieur le Témoin, mais il est de mon devoir de vous le rappeler, vous

8 êtes toujours tenu par la déclaration solennelle que vous avez dite au

9 début de votre déposition, à savoir que vous allez dire la vérité, toute la

10 vérité et rien que la vérité. Est-ce que vous en êtes conscient ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

12 LE TÉMOIN: MILE DAKIC [Reprise]

13 [Le témoin répond par l'interprète]

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Maître Milovancevic, vous

15 pouvez prendre la parole.

16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

17 Nouvel interrogatoire par M. Milovancevic : [Suite]

18 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

19 R. Bonjour.

20 Q. La Défense va continuer à vous poser des questions. Je vous prie de

21 bien vouloir faire attention aux pauses entre mes questions et vos

22 réponses.

23 Hier, le dernier thème que nous avons abordé était le plan Z-4; vous vous

24 en souvenez ?

25 R. Oui.

26 Q. Ce plan Z-4, est-ce que les dirigeants de la République serbe de la

27 Krajina ont réfléchi à ce plan à partir du mois de janvier 1995 ?

28 R. Oui, effectivement, ils en ont discuté. D'ailleurs, les dirigeants ont

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1 conditionné l'adoption de ce plan par les garanties préalables qui seraient

2 fournies par les Nations Unies et les garanties de rester sur le territoire

3 de la Krajina.

4 Q. Merci. Pour faire suite à cela, à l'époque, au mois de janvier 1995,

5 est-ce qu'il y avait des problèmes avec la mission de la FORPRONU dans la

6 Krajina ?

7 R. Si mes souvenirs sont exacts, la Croatie avait demandé que les forces

8 des Nations Unies quittent ce territoire.

9 Q. Merci.

10 Vu la position des dirigeants de la République serbe de la Krajina,

11 est-ce que le mandat de la FORPRONU a été prolongé en 1995 ?

12 R. Oui, effectivement.

13 Q. Merci. Est-ce que vous savez si c'est au mois de

14 mars 1995 ?

15 R. Non, je ne me souviens pas de la date exacte.

16 Q. Merci. Cela me suffit.

17 Pourriez-vous nous dire si, après avoir prolongé le mandat de la FORPRONU,

18 est-ce qu'on a à nouveau proposé le plan Z-4, et avant l'opération Eclair,

19 aux dirigeants de la République serbe de la Krajina ?

20 R. Oui. Je me souviens qu'il y a eu une assemblée qui s'est tenue à Knin.

21 Il s'agissait de négocier, de réfléchir à l'adoption du plan Z-4, mais cela

22 ne s'est pas fait.

23 Q. Est-ce que vous parlez de la situation avant ou après la prolongation

24 du mandat ?

25 R. Je ne me souviens pas de cela.

26 Q. Vous avez confirmé que le mandat de la FORPRONU avait été prolongé au

27 mois de mars 1995. Vous avez dit que le 1er mai aussi la Croatie avait lancé

28 une attaque contre les zones protégées dans la Slavonie occidentale ?

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1 R. Oui.

2 Q. Est-ce que vous savez si qui que ce soit était tenu responsable de

3 cette attaque, parce qu'il s'agissait d'une d'attaque perpétrée contre les

4 zones protégées ?

5 R. A ce que je sache, personne n'était tenu responsable ou n'a répondu de

6 cette attaque et des crimes qu'ils ont commis.

7 Q. Savez-vous si M. Martic a commis des crimes pendant l'opération de

8 l'armée croate dans la Slavonie occidentale ?

9 R. Je pense que Martic, que je connaissais très bien d'ailleurs

10 personnellement, n'a jamais commis un crime. Ceci n'a jamais été enregistré

11 où que ce soit. C'était un héros, un héros du peuple. Les héros ne tuent

12 pas les civils et les prisonniers, et cetera. Ce sont les autres qui font

13 cela.

14 Q. Mais ici pourtant M. Martic est accusé d'avoir tué des civils à Zagreb.

15 R. En tant que scientifique --

16 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

17 M. BLACK : [interprétation] Objection. Je pense que ceci ne découle tout

18 simplement pas du contre-interrogatoire. Je ne pense pas avoir mentionné le

19 bombardement de Zagreb à moins que je ne me trompe.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

21 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je retire la question. Mon collègue a

22 tout à fait raison.

23 Q. Hier, vous avez dit que vous aviez l'impression que M. Tudjman et M.

24 Milosevic se mettaient d'accord sur un passage de la Bosnie. Est-ce que

25 vous vous en souvenez ?

26 R. Oui.

27 Q. Est-ce que vous, personnellement, est-ce que vous avez assisté aux

28 entretiens entre Milosevic et Tudjman ?

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1 R. Non, jamais. Mais j'ai appris cela.

2 Q. Est-ce que vous avez vu un document qui confirmerait ce que vous avez

3 dit, à savoir qu'il y a eu un accord ?

4 R. Les auteurs en Croatie parlent de cela, écrivent de cela. Ils disent

5 qu'il y a eu un accord.

6 Q. Merci. Sur la base des écrits des auteurs croates, est-ce que vous en

7 êtes arrivé à la conclusion que ces accords entre Tudjman et Milosevic ont

8 existé ?

9 R. Oui, c'est tout à fait l'impression que j'ai eue.

10 Q. Hier, vous avez évoqué cette déclaration de M. Mesic dans l'assemblée

11 quand, en tant que président de la présidence de la Yougoslavie, il était

12 revenu à Zagreb. Vous vous en souvenez ?

13 R. Oui.

14 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je voudrais demander que l'on présente

15 l'enregistrement vidéo de cette déclaration.

16 [Diffusion de la cassette vidéo]

17 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Vous savez,

18 c'est très bref. C'est une vidéo très brève.

19 [Diffusion de la cassette vidéo]

20 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

21 "Je considère que j'ai accompli ma mission. Il n'y a plus de

22 Yougoslavie. Je vous remercie."

23 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

24 Q. Est-ce que vous avez entendu cette déclaration de

25 M. Mesic ? Qu'est-ce qu'il a dit ?

26 R. "Je pense que j'ai accompli ma mission, la Yougoslavie n'est plus."

27 Q. C'est exactement mot pour mot ce qu'a dit M. Mesic ?

28 R. Oui.

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1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être me

2 suis-je trompé. J'ai oublié de vous donner le texte de la phrase. Nous

3 l'avons en anglais. Si vous en avez besoin, nous pouvons à nouveau montrer

4 la vidéo. En tout cas, je vous présente ces documents, la transcription de

5 la vidéo.

6 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Faites donc, s'il vous plaît.

7 [Diffusion de la cassette vidéo]

8 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

9 "Je pense que j'ai accompli ma mission. La Yougoslavie n'existe plus.

10 Je vous remercie."

11 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

12 Q. Le président Mesic, en tant que président de la présidence yougoslave,

13 s'adresse à ce moment aux personnes présentes en disant : "Je pense avoir

14 accompli ma mission. La Yougoslavie n'est plus. Je vous remercie." C'est ce

15 que nous avons entendu, n'est-ce pas ?

16 R. Oui.

17 Q. Le président de la Yougoslavie, qui a prêté serment pourtant, dit qu'il

18 a accompli sa mission, que la Yougoslavie n'existe plus. Quelle était sa

19 mission ? Que la Yougoslavie s'arrête d'exister, cesse d'exister ?

20 R. Oui, c'était la mission qui lui a été confiée par la Croatie.

21 M. BLACK : [interprétation] Question qui guide le témoin.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il y en a eu plusieurs.

23 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, effectivement, j'accepte cela et je

24 vais reformuler la question.

25 Est-ce que je dois attendre votre décision ?

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non, vous n'en avez pas besoin. Vous

27 avez retiré la question.

28 M. MILOVANCEVIC : [aucune interprétation]

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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous n'avez pas besoin de reformuler

2 la question puisque le témoin a déjà répondu.

3 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Nous en avons parlé suffisamment. A

4 présent, je voudrais demander que cette vidéo soit présentée comme pièce à

5 conviction de la Défense.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et la traduction ?

7 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Avec la traduction. Excusez-moi.

8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Donc, l'enregistrement

9 vidéo et la traduction vont être versés au dossier. Je vais vous demander

10 quelle pièce à conviction ce sera, une cote pour cela.

11 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce à conviction

12 988.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

14 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je viens de terminer mes questions

15 supplémentaires. Vu la décision prise par les Juges de la Chambre, est-ce

16 que vous me permettez de poser quelques questions additionnelles au témoin

17 par rapport aux trois thèmes que nous avons annoncés ?

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pourquoi ? Vous n'avez pas vu la

19 décision ?

20 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous ai posé la question. Je n'ai pas

21 voulu préjuger quoi que ce soit. Je n'ai pas voulu soulever --

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous avez vu la décision,

23 la décision qui vous a été communiquée hier ?

24 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui.

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Vous pouvez continuer.

26 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci.

27 Q. Je vais vous poser quelques questions concernant trois thèmes. Le

28 premier thème : vos entretiens avec M. Tudjman. Pourriez-vous me dire à

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1 quel moment, M. Dakic, vous avez rencontré

2 M. Tudjman au début de 1990 et pourquoi ?

3 R. Nous nous rencontrions assez souvent en tant que présidents des partis

4 en Croatie. Souvent, nous nous rencontrions à Banski Dvori et nous

5 discutions des problèmes actuels. Je me souviens qu'une fois, il était

6 juste assis en face de moi, et puisque je le connaissais d'avant, je lui ai

7 dit : "Franjo, ce n'est vraiment pas bien d'utiliser pour ta campagne

8 électorale l'idée de l'Etat indépendant croate, le mouvement oustachi."

9 Devant tout le monde, il a dit : "Mile, après les élections, je serai

10 différent et je ne le mentionnerai plus." Cependant, après les élections,

11 il a continué la même pratique.

12 Q. Merci. Vous avez dit que vous lui avez dit cela, et il vous a répondu

13 devant les autres, vous dites. Qui étaient ces autres ?

14 R. Je ne me souviens pas de tous ces gens parce que cette équipe a changé.

15 Entre-temps, il y avait toujours une dizaine de personnes présentes faisant

16 partie de différents partis politiques.

17 Je me souviens que je lui ai dit : "Mais écoute, ne le fais pas,

18 parce qu'on va vraiment baigner dans le sang, on va avoir un bain de sang

19 parce que les Serbes ne peuvent pas accepter cela." Je lui avais dit cela.

20 Q. Est-ce que je vous ai bien compris ? Les autres personnes qui étaient

21 présentes, c'étaient les représentants d'autres partis politiques et pas de

22 l'HDZ ?

23 R. Oui, effectivement.

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Quand vous dites que c'étaient les

25 représentants d'autres partis politiques, de quels gens vous parlez

26 exactement ? Oui, les gens qui étaient présents, à qui il a parlé ?

27 D'accord.

28 Q. Après que le HDZ a remporté la victoire, après les premières élections

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1 multipartites au mois de mai 1990, quand le HDZ a pris le pouvoir, est-ce

2 que vous pouvez nous dire quelles étaient les activités législatives sur le

3 territoire de la Croatie ?

4 R. On discutait le plus de la constitution de la Croatie, et dans toutes

5 les municipalités croates, il y a eu des discussions.

6 Q. Merci. Merci. Cela me suffit.

7 Le nouveau gouvernement croate, dans le cadre de sa mission, a-t-il adopté

8 des nouvelles lois, des nouvelles règles en Croatie ? Est-ce que vous vous

9 en souvenez, donc après la victoire de l'HDZ ?

10 R. Rien ne me vient à l'esprit. Mais tout était par rapport à cette

11 nouvelle constitution. On attendait l'adoption de la nouvelle constitution.

12 C'est pour cela qu'il n'y a pas eu beaucoup de lois de passées.

13 Q. Est-ce que la loi sur les jours fériés vous dit quelque chose ?

14 R. Oui, je me souviens de cette loi sur les jours fériés. Là on a bien vu

15 qu'il existait bien une discrimination entre les catholiques et les

16 orthodoxes par rapport à la fête de la Vierge, Noël, par exemple. Les

17 Croates fêtaient Noël à leur date pendant deux jours, aux dates du Noël

18 croate.

19 Si les orthodoxes voulaient fêter leur propre Noël, il fallait qu'ils

20 annoncent à l'avance qu'ils allaient prendre une journée à cause de cela.

21 C'est pour cela qu'ils hésitaient à le faire. Souvent, ils ne prenaient

22 même pas de journée. Il en va de la même pour la fête de la Vierge le 15

23 août. Les Croates avaient une journée alors que les orthodoxes, non.

24 Q. Le Noël catholique, est-ce que c'était une fête nationale ?

25 R. Oui.

26 Q. Est-ce que le Noël orthodoxe était aussi un jour férié officiel, une

27 fête nationale ?

28 R. Non.

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1 Q. Je vais demander à l'Huissière de distribuer un exemplaire de cet

2 exemplaire, la loi donc sur les jours fériés et les fêtes nationales de la

3 République de Croatie. Merci.

4 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Est-ce que vous avez une copie

5 supplémentaire pour les interprètes ?

6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui. Vous savez, c'est très bref. On ne

7 va même pas le citer.

8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais vous avez bien un exemplaire pour

9 eux ?

10 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, oui.

11 Q. Sous vos yeux se trouve le texte de la loi sur les jours fériés et les

12 fêtes nationales que nous venons d'évoquer; est-ce bien cela ?

13 R. Oui.

14 Q. Merci.

15 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je propose que le texte de cette loi

16 soit versé au dossier en tant que pièce à conviction de la Défense.

17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui. Cette pièce va être versée au

18 dossier. Pourriez-vous nous attribuer une cote.

19 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 989.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

21 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Milovancevic,

22 est-ce que vous allez nous fournir une traduction complète de ce

23 document ou bien est-ce que nous allons juste avoir cette petite partie de

24 la traduction ?

25 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Nous n'avons traduit que la partie de la

26 loi qui traite des jours fériés, des fêtes nationales ou religieuses. Nous

27 n'avons pas traduit autre chose.

28 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Quel article ?

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1 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Qu'est-ce qui est pertinent par

2 rapport aux éléments de preuve ici ? Qu'est-ce que nous devons regarder ?

3 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin a parlé

4 des lois qui régissent les fêtes nationales, les dates, et là on énumère

5 les fêtes nationales, donc différentes fêtes religieuses et autres qui

6 constituent les fêtes nationales et les journées fériées officielles de

7 l'Etat de Croatie.

8 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Donc, je devrais en déduire que

9 ces jours fériés étaient maintenant beaucoup plus restreints et avaient

10 tendance à être placés le jour des fêtes catholiques et non le jour des

11 fêtes orthodoxes, n'est-ce pas ?

12 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui. C'est tout à fait ce dont parlait

13 le témoin. C'est d'ailleurs pour cela que nous vous avons fourni ce

14 document et ce texte de loi. Puisque le texte de loi donne la liste de tous

15 les jours fériés catholiques, alors que pour ce qui est des autres jours

16 fériés des autres fois, elles ne sont pas congés nationaux, donc ne sont

17 pas des congés.

18 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Vous êtes en train de témoigner,

19 Monsieur Milovancevic ou alors vous êtes en train de nous donner des

20 informations supplémentaires ?

21 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Non, pas du tout. Je répondais à la

22 question du Juge Nosworthy.

23 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Pour être parfaitement exhaustive,

24 je pense qu'il vaudrait mieux que ce soit le témoin qui parle de ce

25 document et du contenu de ce document.

26 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Oui. J'y faisais référence d'ailleurs

27 avec cette réponse à laquelle je n'ai pas encore eu de question.

28 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci.

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1 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] De quel article faites-vous

2 référence ?

3 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Si vous me permettez, Mesdames et

4 Messieurs les Juges, j'aimerais poser des questions très précises au témoin

5 sur ce point.

6 Q. Avez-vous le texte de loi sous les yeux, Monsieur le Témoin ?

7 R. Oui.

8 Q. Vous avez parlé déjà du passage qui porte sur Noël. Est-ce que dans le

9 texte il est écrit combien de jours sont fériés pour Noël ?

10 R. Oui. Il y en a deux.

11 Q. Pourriez-vous nous dire quel article de loi légifère à propos de cela ?

12 R. Congés sur jours fériés pour Noël. Loi sur le congé de Noël, il s'agit

13 de l'article 4.

14 Q. Quand vous avez dit que les Serbes n'avaient qu'un jour pour fêter

15 Noël, à quel jour faisiez-vous référence ?

16 R. Cela devait être le 7 janvier, mais ce n'était pas un jour férié

17 national.

18 Q. Le Noël orthodoxe, le Noël des Serbes, de ce fait, n'était pas un jour

19 férié national. Quel impact ceci pouvait-il avoir sur les Serbes ? Est-ce

20 que les Serbes pouvaient fêter Noël quand même ?

21 R. Oui, bien sûr, ils pouvaient fêter Noël quand même. Mais les salariés

22 orthodoxes devaient prévenir à l'avance qu'ils ne viendraient pas

23 travailler ce jour-là. Donc, ceci était évidemment une discrimination sur

24 les bases religieuses.

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] M. Milovancevic, avant que j'oublie,

26 le témoin a fait référence à la page 12, ligne 24,

27 article 4. Cela n'a pas été traduit dans votre pièce à conviction -- de ce

28 que vous avez traduit la pièce à conviction avant. Il faudra donc le faire

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1 traduire.

2 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, il est évident

3 que nous allons faire traduire le reste du texte et que nous allons vous

4 transmettre la traduction à une date ultérieure.

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous remercie aussi.

7 Q. Vous nous avez parlé de la fête de la Sainte Vierge, de l'Assomption

8 donc. Cette fête de l'Assomption était-ce une fête nationale, donc un jour

9 férié en Croatie ?

10 R. Oui. Normalement c'est le 28 août. Enfin, bien sûr, c'est dans le cadre

11 de la religion orthodoxe, mais l'Assomption des orthodoxes, elle n'était

12 pas inclue dans la loi.

13 Q. Mais vous nous parliez de la fête religieuse des catholiques ou des

14 orthodoxes ?

15 R. Je parlais de la fête religieuse des orthodoxes.

16 Q. Cette loi prévoit-elle que l'Assomption soit fériée pour les

17 catholiques, enfin que l'Assomption des catholiques soit fériée, elle ?

18 R. Oui. C'est prévu dans la loi, mais uniquement l'Assomption des

19 catholiques et non pas l'Assomption des orthodoxes.

20 Q. Pouvez-vous nous dire à quel article de loi vous faites référence ici ?

21 Je fais référence à l'article, la première page, où il y a mention de

22 l'Assomption, l'Assomption qui est la fête de la Sainte Vierge.

23 R. C'est le 15 août.

24 Q. Je vous remercie.

25 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je voudrais verser ce document au

26 dossier en tant que pièce de la Défense, et nous allons, bien sûr, vous

27 soumettre une traduction à une date ultérieure de la loi elle-même.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, M. Milovancevic. Maintenant,

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1 pour ce qui est de la traduction anglaise telle qu'elle est à l'heure

2 actuelle, pourriez-vous nous aider et nous traduire les mots qui sont

3 écrits après le 15 août ? Car nous sommes un peu perdus. Ce sont des mots

4 absolument identiques que ceux que l'on retrouve en B/C/S. Pouvons-nous

5 avoir la traduction en anglais de ces mots ?

6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Je dois

7 récupérer mon exemplaire que j'ai donné au témoin, sinon nous allons avoir

8 un peu de mal à nous retrouver.

9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Si vous aviez une version anglaise,

10 vous verriez que les mots qui sont après le 15 août sont exactement les

11 mêmes dans la version B/C/S. Ils n'ont donc pas été traduits. Il s'agirait

12 de nous les traduire, surtout que vous vous en êtes servi lors de votre

13 interrogatoire supplémentaire.

14 [La Chambre de première instance se concerte]

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Poursuivons. Avez-vous fini avec vos

16 questions ?

17 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Absolument pas, Monsieur le Président.

18 Je vais juste un peu consulter mes collègues.

19 Pour ce qui est de cette date, du 15 août et de ce qui est écrit après,

20 donc le 15 août, Velika Gospa. Le terme est complètement intraduisible. En

21 fait, c'est le nom d'une fête.

22 L'INTERPRÈTE : L'interprète fait remarquer qu'il s'agit juste de

23 l'Assomption de la Sainte Vierge.

24 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Pour être un peu précis, s'il vous

25 plaît, je peux poser la question au témoin.

26 Q. Le 15 août, Velika Gospa --

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] M. Milovancevic, je crois que vous ne

28 comprenez pas ce que j'essaie de vous dire. Vous avez déjà posé cette

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1 question assez directe à ce témoin à propos cette date. Il a répondu. Les

2 interprètes, fort heureusement, nous ont aidés, nous ont dit à quoi

3 correspondait ce 15 août, cette date. Maintenant, voici ce qui se passe.

4 Vous avez décidé que vous allez traduire toute cette loi en anglais. Alors,

5 quand vous en arriverez au 15 août, il faudra bien que vous vous souveniez

6 de traduire tout en anglais, puisqu'il faut retraduire la partie qui a déjà

7 été en anglais, puisque, après le 15 août, dans la version qui est déjà

8 traduite en anglais, il y a quelques mots qui ne sont pas traduits. Il ne

9 faudrait pas oublier de les traduire.

10 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je comprends maintenant, et j'en suis

11 désolé. Maintenant, je vois très bien où vous voulez en venir.

12 M. BLACK : [interprétation] Je suis désolé de vous interrompre.

13 La procédure sur laquelle le reste du texte sera traduit en anglais plus

14 tard, n'est pas vraiment acceptable pour nous parce que je ne peux plus

15 faire de contre interrogatoire. J'avais cru que ce n'était que le passage

16 qui avait été traduit en anglais qui allait être versé au dossier, donc

17 l'article 1. Cela ne me gênait pas. Maintenant on a déjà fait référence à

18 l'article 4 et à d'autres. Je ne peux absolument pas les lire puisqu'ils

19 sont en B/C/S. Je me doute bien qu'il s'agit d'autres jours fériés,

20 d'autres fêtes nationales, mais je ne veux qu'elles soient versées au

21 dossier. Donc, je ne voudrais que ce soit uniquement l'article 1 qui soit

22 versé au dossier, parce que ce n'est que celui-là qui a été traduit et que

23 c'est cela qui peut me permettre de faire un contre interrogatoire.

24 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Monsieur Black,

25 l'article 1 n'a pas été traduit en entier non plus, n'est-ce pas ?

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous savez, Monsieur Black, je pense

27 que vous êtes un petit peu -- vous avez un peu l'esprit d'escalier là. Vous

28 auriez dû déjà vous lever lorsqu'on a commencé à aborder l'article 4 ?

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1 Consultant l'article 4 et que j'ai demandé qu'il soit traduit, il y a quand

2 même quelques lignes en B/C/S auxquelles il a été fait référence et vous ne

3 vous êtes absolument pas -- vous n'avez rien à ce moment-là.

4 Donc, Monsieur, maintenant que vous dites que M. Milovancevic vous

5 donne immédiatement la traduction de l'article 4 pour vous permettre de

6 faire vous contre interrogatoire, il pourra peut-être traiter de cela plus

7 tard ?

8 M. BLACK : [interprétation] J'essaie de trouver la référence bien

9 précise.

10 Lorsque tout ceci a été versé au dossier, devenu une ligne - il

11 s'agit, je crois, de la page 10, lignes 21 à 25, jusqu'à présent, vous

12 n'avez pas encore abordé l'article 4. Donc, vous n'avez pas besoin à faire

13 une objection. Il s'agit que plus tard --

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui. Les questions ont été soulevées

15 par les Juges pour demander des clarifications. Ensuite, il y a eu une

16 plainte de la part des Juges de la Chambre, parce qu'ils voulaient que ce

17 soit le témoin qui explique et non pas le conseil de l'accusé. Ensuite, le

18 conseil de l'accusé a parlé au témoin, il lui a demandé d'expliquer

19 l'article 4, et c'est là qu'on a commencé à aborder l'article 4.

20 M. BLACK : [interprétation] Tout à fait. Et je ne pensais pas que je

21 pouvais soulever une objection à propos d'une question qui émanait de cette

22 éminente Chambre.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui. Mais alors, vous auriez pu faire

24 l'objection du fait qu'il faisait maintenant référence à la loi. Cela n'a

25 pas encore été traduit.

26 M. BLACK : [interprétation] Oui, j'aurais sans doute dû le faire.

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maintenant, nous avons un problème,

28 puisque l'article 1 de la loi est maintenant versé au dossier. Alors que

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1 faire ? La solution serait quand même de fournir une traduction au moins de

2 l'article 4 pour que vous puissiez, Monsieur Black, procéder à votre

3 contre-interrogatoire. Ensuite, nous obtiendrons le reste de la traduction

4 de toute la loi à une date ultérieure.

5 M. LE JUGE HOEPFEL: [interprétation] Oui, je pense qu'il faudrait aller

6 plus loin que l'article 4. Enfin, c'est ma question. En tout cas,

7 j'aimerais savoir exactement, ce qu'il y a dans tout le texte, L'article

8 auquel vous faites référence, par exemple, puis la question aussi du Juge

9 Nosworthy. Vous avez peut-être oublié aussi, mais l'article 1 n'a pas été

10 entièrement traduit. Il n'y a que le paragraphe 1 qui est traduit. Il nous

11 faudrait une traduction. Il faudrait qu'on comprenne bien exactement quelle

12 est la loi tout entière.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vois que vous -- j'espère que vous

14 comprenez, Monsieur Milovancevic, que nous avons un problème.

15 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] S'il vous plaît, nous pouvons peut-être

16 trouver une solution.

17 Dès que cette loi sur les jours fériés n'a que cinq articles, et que

18 le dernier article, l'article 5 parle de la date d'entrée en vigueur de la

19 loi, bien que les articles 1, 2, 3 et 4 qui sont courts et qui sont

20 vraiment pertinents, peut-être que le témoin pourrait tout simplement lire

21 le texte. Nous entendrons ainsi la traduction qui sera notée au compte

22 rendu, puis la traduction officielle vous sera donnée plus tard. De cette

23 façon, nous aurons une solution.

24 Nous n'avions traduit que l'article 1, parce que nous pensions que le

25 2 et le 3 étaient des articles très techniques, connectés et reliés à

26 l'article 1. Pour ne pas nous acharner sur quelque chose peut-être

27 pourrions-nous utiliser la solution que je viens de vous proposer. J'en

28 suis absolument désolé. Il est vrai que j'aurais dû penser à l'avance et

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1 faire traduire le texte entier.

2 Donc, voici ma proposition. Le témoin pourrait lire tout - pourrait

3 lire les quatre articles, ainsi le reste sera lu.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, j'ai peut-être

5 un problème avec la façon dont vous gérez votre présentation des moyens.

6 Par exemple, cet article 1, la Défense savait très bien que nous allions en

7 traiter, donc il fallait tout traduire. Il y a un paragraphe après la date

8 du 25 et 26 décembre qui n'a pas été traduit en anglais. Cela aura dû être

9 traduit quand même. Il y a des mots en B/C/S après le 25 et le 26, et en

10 anglais, en revanche, ces mots tout simplement ont été annulés.

11 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, il suffit de

12 laisser le témoin lire l'article 1 et les autres.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Répondez d'abord à ma question :

14 pourquoi n'avez-vous pas traduit ces mots en B/C/S qui se trouvaient après

15 les 25 et 26 décembre ? Vous saviez quand même que vous alliez employer

16 l'article 1. Ce sont des mots qui font partie de l'article 1. Pourquoi tout

17 d'un coup ont-ils disparu de la version anglaise ? Il n'y a que deux lignes

18 en plus; ce n'est pas un travail colossal.

19 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit d'une

20 erreur de traduction. Il y a eu une négligence de la part de la traduction.

21 C'est le passage de l'article 1 qui traite de la façon dont on doit

22 utiliser, dont on doit administrer les congés. Nous allons le traduire

23 ultérieurement.

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ecoutez, vous n'êtes absolument pas là

25 pour témoigner. Ne nous dites pas ce qui n'a pas été traduit. Dites-nous

26 plutôt pourquoi vous n'avez pas traduit ce texte.

27 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] J'essaie de vous expliquer que nous

28 avons tout simplement négliger de le faire. Donc, pour trouver une

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1 solution, je pensais que le témoin pourrait lire les quatre articles en

2 B/C/S. Ainsi, nous aurions eu une traduction anglaise des quatre articles

3 plutôt que des cinq articles. De toute façon, nous sommes extrêmement

4 désolés et nous vous donnerons ultérieurement une traduction officielle.

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, continuez. De

6 toute façon, à moins quart vous devez arrêter votre interrogatoire

7 principal. Cela ne vous donne donc 30 minutes. Trente minutes donc pour

8 trois sujets.

9 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, je vais tâcher de m'en souvenir.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais lire tout le texte ?

11 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

12 Q. S'il vous plaît, article 1.

13 R. "Les congés de la République de Croatie sont le

14 1er janvier, le jour de l'an; 1er mai, fête du travail; 30 mai, fête de la

15 nation; 22 juillet, jour de la lutte antifasciste; 15 août, Velika Gospa,

16 c'est-à-dire Assomption de la Sainte Vierge; 25 et

17 26 décembre, Noël, fête de Noël."

18 Q. Je suis désolé de vous avoir interrompu, mais veuillez maintenant lire

19 la partie du texte qui n'a pas été traduite.

20 R. "Citoyens de la République de Croatie ne travailleront pas les jours

21 prévus au paragraphe 1 du présent article, et auront donc droit à être

22 néanmoins rémunérés pour ces jours-là. Si l'un des jours cités ci-dessus

23 est un dimanche, le congé ne sera pas le jour suivant."

24 Q. Pouvez-vous maintenant nous lire l'article 2 de cette loi.

25 R. "Les jours fériés dans la République de Croatie pour lesquels les

26 salariés seront rémunérés seront les suivants :

27 6 janvier, 7 janvier, lundi de Pâques, deuxième jour de Pâques, Bajram, 1er

28 novembre correspondant à la Toussaint. Les membres de la communauté juive

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1 auront le droit de s'absenter de leur travail le jour du Yom Kippur et de

2 la Rosh Hashanah, et auront droit de toucher leur salaire pour ces jours.

3 Les Musulmans, eux, ont droit de s'absenter de leurs jours pour le Bajram,

4 le grand Bajram, et pourront touché leur rémunération."

5 L'article 3 : "Le gouvernement de la République de Croatie sera en mesure

6 de décider quelles administrations et quelles entités morale et physique

7 devront travailler les jours de congé en vigueur en République de Croatie."

8 Article 4 : "Pour ce qui est de la mise en application de cette loi, le

9 passage de texte de loi suivant va devenir nul et non avenu : La loi sur la

10 proclamation du 27 juillet en tant que journée de congé officielle, Gazette

11 officiel 111/47. La loi fêtant la Toussaint, Toussaint, fête des morts.

12 Gazette officiel numéro 46/89. La loi sur les fêtes de Noël. Gazette

13 officiel 53/90, l'article 46, donc paragraphe 1 de la loi du travail,

14 Gazette officiel numéro 19/90. Les mots du paragraphe 1 de cet article au

15 paragraphe 2 de ce même article seront annulés. La date de mise en vigueur

16 de cette loi est-elle - loi sur les congés de la République fédérative

17 socialiste de Yougoslavie, Gazette officiel de la RSFY numéro 6/78,

18 deviendra nulle et non avenue sur le territoire de la République de

19 Croatie, et l'article 5 de cette loi entrera en vigueur au jour de la

20 publication de la Gazette officiel numéro 960-01/91/01/02, Zagreb,

21 1er mars 1991."

22 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Avez-vous lu tout le texte ? Pensez-vous

23 que votre réponse est bien complète ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

25 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Le texte de loi entier vous a été lu.

26 Une traduction entière en anglais vous sera donnée, bien sûr. Jusqu'à

27 présent, nous ne vous avons traduit qu'un passage de l'article 1. C'est

28 tout ce que vous avez à disposition à l'heure actuelle. Ceci étant, je ne

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1 sais pas si la Défense -- de toute façon, mon collègue me prévient que ceci

2 a déjà été versé au dossier, donc je vais passer à autre chose.

3 Q. Avez-vous la moindre connaissance de la loi sur les arts et les

4 sciences croate ?

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous ai déjà -- je me demande si

6 vous avez lu la décision qui a été rendue hier. Cette décision vous donnait

7 10 minutes par sujet. Vous avez commencé votre interrogatoire principal au

8 quart, cela fait déjà 30 minutes, d'ailleurs 35 minutes, vous êtes censé

9 déjà avoir terminé votre interrogatoire principal sur ce sujet que vous

10 vouliez explorer.

11 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je n'ai plus qu'une ou deux questions.

12 J'en ai presque terminé avec mon interrogatoire principal. Nous avons passé

13 malheureusement énormément de temps sur des petits problèmes techniques. Je

14 demande votre bienveillance, s'il vous plaît, afin de m'accorder quelques

15 minutes de plus.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez droit à deux questions.

17 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

18 Q. En tant que président de la commission des crimes commis ou au nom de

19 la République de Krajina serbe, vous avez dit que vous avez procédé à

20 recueillir des données, des informations concernant les souffrances subies

21 par la population serbe ?

22 R. Oui.

23 Q. Avez-vous eu connaissance du sort qui était celui des Serbes dans le

24 territoire de la République de Croatie en 1990 et 1991 en Slavonie, dans le

25 secteur de Sisak ?

26 R. Oui, pour parler de Slavonie, bien sûr que j'en ai eu connaissance,

27 notamment de l'exodus [phon] qu'ils ont connu, les Serbes de Slavonie en

28 1991. Il s'agissait de parler de masses de population qui ont dû quitter

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1 leurs foyers. Il s'agissait d'un nettoyage ethnique sur une vaste échelle

2 en Croatie.

3 Q. Lorsqu'on parle des villages de Kinjacka, Cakale, Trnjani ?

4 R. Oui.

5 Q. Et lorsqu'on parle de la police croate de Sisak, est-ce que cela vous

6 dit quelque chose ?

7 R. Cela me dit beaucoup. J'ai même sur moi ici pas mal de données, choses

8 que j'ai pu noter pendant les hostilités. Je les ai dans ma mallette, ces

9 documents. Il s'agit de villages où les forces policières croates ont

10 perpétré des massacres, des crimes à l'encontre de la population civile.

11 Q. Merci, merci.

12 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Pouvons-nous, s'il vous plaît, Madame

13 l'Huissière, faire distribuer les documents s'y rapportant à l'intention de

14 la Chambre, de l'Accusation et également pour le service de

15 l'interprétation ?

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic.

17 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Monsieur Milovancevic, je crois que

18 vous venez de poser une autre question additionnelle avant cela sans que

19 nous y obtenions une réponse. En ce moment-là, on était en train de parler

20 du temps qui vous était imparti et que vous avez exploité.

21 Par conséquent, j'aimerais bien entendre le témoin répondre à votre

22 question sur la loi concernant l'éducation et la science en Croatie.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit d'une loi portant sur

24 l'Académie croate des sciences et des arts. Cette académie a été fondée pas

25 sous cet intitulé en 1866 à Zagreb, et qui s'appelait l'Académie yougoslave

26 des sciences et des arts. L'Etat indépendant croate, en 1941, la rebaptise

27 pour la rendre comme étant l'Académie croate des sciences et des arts.

28 Après la Seconde Guerre mondiale, une fois de plus cette académie est

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1 rebaptisée pour devenir l'Académie yougoslave des sciences et des arts.

2 Très célèbre comme institution, et jusqu'en 1990, il s'agissait de

3 parler toujours de l'académie yougoslave, mais ensuite elle a été

4 rebaptisée.

5 La loi dit que l'Académie croate des sciences et des arts tire son

6 origine, pour ainsi dire, de l'Académie croate des sciences et des arts qui

7 avait été instituée une première fois sous cet intitulé pendant l'Etat

8 indépendant croate.

9 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Merci.

10 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] A moins qu'il n'y ait d'autres

11 questions, j'en ai terminé avec le contre-interrogatoire, respectant le

12 temps qui m'a été imparti. Je vous prie de bien vouloir rendre au conseil

13 de la Défense le document que nous venons de faire distribuer. Nous

14 l'exploiterons, ce document, à une autre occasion. Je vous remercie,

15 Monsieur le Président.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi, je ne suis pas tout à

17 fait sûr d'avoir compris ce que vous avez dit tout à l'heure : "Nous allons

18 exploiter ce document à une autre occasion".

19 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, ce document que

20 nous venons de faire distribuer a été distribué au temps où le temps s'est

21 écoulé, le temps qui nous a été imparti. Lorsque j'ai dit à une autre

22 occasion, nous nous en servirons, c'est que par le truchement d'un autre

23 témoin, nous le ferons. Je voulais tout simplement vous faire savoir

24 maintenant que je veux respecter la décision prise par la Chambre. Je

25 voudrais tout simplement que vous nous rendiez ce document pour ne pas que

26 nous soyons obligés d'en tirer de nouvelles copies.

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

28 [La Chambre de première instance se concerte]

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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Black.

2 M. BLACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'ai quelques

3 questions à poser, très peu de questions à poser à titre complémentaire.

4 Contre-interrogatoire par M. Black :

5 Q. [interprétation] Commençons par cette loi sur les jours fériés.

6 Je crois qu'il s'agit de la pièce à conviction 989. Nous n'avons

7 guère besoin de nous y pencher. Vous venez de dire, en répondant aux

8 questions, qu'il y avait des similitudes entre l'Etat indépendant croate de

9 la Seconde Guerre mondiale et le gouvernement croate en 1990. Vous venez de

10 dire que le gouvernement de 1990 était un gouvernement oustachi fondé sur

11 les principes oustachi. Pouvez-vous nous dire, Monsieur, quelle est la

12 raison pour laquelle une fête nationale le 22 juillet serait considérée

13 comme la fête où célébrer la lutte contre le fascisme ?

14 R. Je peux dire que le 27 juillet a été fêté en Croatie et en Bosnie comme

15 jour de l'insurrection nationale. La Croatie, pour essayer de sous-estimer

16 la lutte menée par le peuple serbe lors de la Seconde Guerre mondiale, a

17 pour ainsi dire un petit peu forcé l'affaire, tiré par les cheveux pour

18 dire que ce sera le 22 juillet où un groupe de communistes, avec à leur

19 tête Janic Capa, était venu dans une forêt de Sisak pour s'organiser. Ils

20 se sont fait évacuer de Sisak pour organiser l'insurrection. Ceci était une

21 cause de schisme entre l'un et l'autre peuple. Voilà la raison pour

22 laquelle nous avons réagi fermement.

23 Q. Monsieur, il s'agit d'une fête moyennant laquelle on célèbre la lutte

24 engagée contre le fascisme. C'est en cela que se voient, d'après la loi, le

25 sens et la signification de ce jour férié, de cette fête.

26 R. Oui, mais ceci n'est rien par rapport à ce qui s'était réellement

27 produit en Croatie en date du 27 juillet, où il s'agit de parler d'une

28 insurrection massive. Ici, il s'agit seulement de parler d'un groupe de

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1 Communistes qui ont fuit Sisak pour gagner les forêts de Brezovica. Il n'y

2 a aucune logique d'y voir une fête nationale si les Serbes se sont enfuis

3 de Sisak pour chercher un abri, un refuge dans une forêt, vous voyez.

4 Q. Je crois que je vais passer à un autre sujet. Je vous en remercie.

5 Vous venez de faire référence, lors de votre témoignage, vers la fin de

6 votre témoignage, à la loi sur l'Académie croate des sciences et des arts,

7 et vous venez de dire que la loi mentionne entre autres l'Académie croate

8 des sciences et des arts du temps de la Seconde Guerre mondiale. N'est-il

9 pas vrai de dire que cette loi porte sur autre chose ? Permettez-moi de

10 vous en donner lecture, pour voir si cela coïncide à vos souvenirs. Il est

11 dit : "L'académie poursuit ses activités en tant que l'ayant droit de

12 l'Académie yougoslave des sciences et des arts fondée en 1866 comme étant

13 l'instance suprême en matière des sciences et des arts des Slaves du sud.

14 L'Académie croate de 1941, 1945 et 1947 était devenue une fois de plus

15 l'Académie yougoslave des sciences et des arts."

16 Cela est exact, n'est-ce pas ? Il a été fait référence à toutes les

17 instances préalables. Il s'agissait d'un successeur de toutes les instances

18 préalables, n'est-ce pas ?

19 R. Oui, mais nous avons dû réagir, vous voyez, parce que toute

20 mention faite --

21 Q. Monsieur, excusez-moi. Avant de nous parler de vos réactions, il

22 est exact, ce qui était libellé par la loi, n'est-ce pas ? Toutes ces

23 instances ont été mentionnées. Il ne s'agit pas seulement de faire

24 référence et faire mention de l'Académie croate des sciences et des arts du

25 temps de la Seconde Guerre mondiale ?

26 R. Oui. Cela est vrai, mais ce qui nous a gênés, nous, c'est de faire

27 mention et de faire référence, plutôt, à cette période de crimes commis.

28 M. BLACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'en ai terminé

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1 avec les questions supplémentaires.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, avez-vous

3 besoin de poser des questions supplémentaires ?

4 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Non. Je vous remercie, Monsieur le

5 Président.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ainsi donc sommes-nous à la fin de

7 votre témoignage -- non, une seconde, s'il vous plaît.

8 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je n'ai pas de questions pour ce

9 témoin.

10 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Moi non plus, je n'ai pas de

11 questions à poser à ce témoin. Je vous en remercie, Monsieur le Président.

12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'ai quelques questions à vous poser,

13 Monsieur le Témoin.

14 Questions de la Cour :

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous nous avez dit tout le temps

16 pendant votre témoignage, notamment hier, que vous êtes historien de

17 formation; est-ce exact ?

18 R. Oui, cela est exact.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avez-vous écrit des livres du domaine

20 de l'histoire ?

21 R. Oui, j'en ai écrit. Une dizaine de mes livres ont été publiés jusqu'à

22 maintenant.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] S'agit-il de livres d'histoire, du

24 domaine de l'histoire ?

25 R. Oui, en général, essentiellement, mais je m'occupe de belles-lettres

26 également, de nouvelles. J'écris des nouvelles, je fais de la poésie

27 également.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien. Essayons de nous en tenir à ce

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1 domaine d'histoire, à vos livres d'histoire. Sur quels pays avez-vous

2 écrit ? Sur quels peuples ?

3 R. J'ai en premier lieu écrit des livres d'histoire sur le peuple qui est

4 le mien et auquel j'appartiens, mais j'ai écrit également des livres

5 d'histoire concernant d'autres nations et peuples. J'ai traité de cette

6 cohabitation des peuples serbe et croate en Croatie, notamment au temps de

7 la guerre de libération nationale, lorsque cette communauté d'esprit et

8 unité a été surtout mise en exergue et a été réalisée, d'ailleurs, dans le

9 fait.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien, alors nous allons tenter d'en

11 prendre connaissance.

12 Cette communauté d'esprit des peuples croate et serbe en Croatie, à quelle

13 période de temps faites-vous référence ?

14 R. J'ai écrit un livre, "La Krajina à travers les siècles", lequel livre

15 j'ai ici sur moi. C'est dans ce livre-là que j'ai traité des relations et

16 de la coopération entre les Croates et Serbes depuis la création de la

17 Vojna Krajina, de ce comté militaire depuis le XVIe siècle, des années 30

18 du XVIe siècle jusqu'à nos jours. La Krajina était une institution

19 territoriale sous l'égide de l'empire austro-hongrois, de la monarchie

20 austro-hongroise jusqu'à 1881, lorsque le comté militaire a été supprimé.

21 Ensuite, la Krajina -- le comté militaire a fait partie intégrante du

22 territoire de l'empire austro-hongrois, mais cette fois-ci sous l'égide de

23 la Hongrie.

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que depuis 1990 à 1995, vous

25 avez traité également en des termes historiques le pays et le peuple ?

26 R. Oui, j'ai écrit un livre intitulé "Sprska Krajina", la Krajina serbe,

27 qui traite des hostilités de 1990 à 1995.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, mais j'ai voulu parler justement

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1 de la période d'après 1995, c'est-à-dire est-ce que vous publiez des livres

2 après 1995 ?

3 R. Oui.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Quel est ce livre ?

5 R. Il s'agit du livre "La Krajina à travers les siècles".

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous en prie, écoutez plutôt ma

7 question. Avez-vous écrit entre autres des livres d'histoire sur la Croatie

8 qui englobent la période de 1990 à 1995 ? Oui ou non ?

9 R. Oui.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, dites-vous. Si oui, alors dans ce

11 livre-là, avez-vous traité des relations entre les Croates et les Serbes en

12 Croatie, et cela en détail ?

13 R. Je crois avoir fait une description très en détail de leurs relations.

14 Plutôt, je dirais depuis l'existence de comté militaire jusqu'à la chute de

15 la République de Krajina serbe vers la fin des hostilités.

16 Chronologiquement parlant, en annexe, j'ai notamment fait référence à tous

17 les événements importants qui se sont produits lors de cette époque.

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous avez traité de ces

19 événements tels que vous les avez perçus, parlant des relations entre les

20 Croates et les Serbes dans la période de 1990 à 1995 ?

21 R. Oui, Monsieur le Président. Oui.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous avez le sentiment

23 d'avoir présenté historiquement, de façon impartiale, sans partialité

24 aucune, les relations qui régnaient entre ces deux peuples ?

25 R. Absolument. Oui, absolument, je crois que je l'ai fait.

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pourquoi, lors du contre-

27 interrogatoire, répondant à des questions qui vous ont été posées, ou

28 plutôt revenons en arrière. Lorsque on vous a posé des questions lors de

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1 l'interrogatoire principal, où pourquoi dans le cadre de la déclaration que

2 vous avez faite vous-même, vous avez souvenance d'un grand nombre

3 d'atrocités perpétrées par des Croates contre les Serbes, alors que tout

4 d'un coup, lorsqu'on vous a posé une question concernant des crimes commis

5 par les Serbes à l'encontre des Croates, votre mémoire devient plutôt

6 opaque. Vous n'étiez plus en mesure de vous rappeler les dates non plus que

7 d'incidents, et cetera ? Pourquoi ?

8 R. Monsieur le Président, il y a du côté des Croates des historiens, qui

9 eux, traitent de l'histoire du peuple croate.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous en prie. Une seconde. Arrêtez-

11 vous. Je ne vous pose pas de questions sur d'autres; je vous pose des

12 questions vous concernant. Je vous ai demandé si vous avez traité de façon

13 correcte l'histoire de ce peuple. Vous dites oui. Alors maintenant je vous

14 demande pourquoi avez-vous plutôt tendance de faire autrement. Lors de

15 contre-interrogatoire on vous a demandé pourquoi vous avez bonne mémoire

16 des attaques lancées par des Croates contre les Serbes, alors que pour

17 autant vous n'en avez pas de souvenance pour parler d'attaques des Serbes

18 contre les Croates. Voilà. Vous avez essayé toujours d'éviter d'y répondre.

19 Vous avez dit que vous n'étiez pas sur la ligne de front, par conséquent

20 vous étiez sans information. Alors que vous n'avez pas été sur la ligne de

21 front, et pour autant vous avez eu pas mal d'informations sur les attaques

22 perpétrées contre les Serbes. Vous dites, vous n'avez pas eu accès à des

23 documents concernant les crimes perpétrés par les Serbes contre les

24 Croates. Voilà un segment de votre déclaration. Il me semble que votre

25 mémoire se fait sélective. Pourquoi, Monsieur le Témoin ?

26 R. Monsieur le Président, je crois que vous n'avez pas raison de dire

27 cela. J'ai recueilli des informations et des données concernant tous les

28 crimes et toutes les victimes. On ne peut pas faire de comparaison. Nous,

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1 nous avons été victimes de cette guerre. Nous avons été objets de nettoyage

2 ethnique. Nous avons été détruits comme une population, un peuple. Dans nos

3 foyers tout est devenu désert et vide. C'est une grande injustice qu'on a

4 fait subir à mon peuple. Et les Croates, tout comme lors de la Seconde

5 Guerre mondiale --

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi, je dois vous interrompre.

7 Je sais tout cela. Vous en avez témoigné. Vous en avez parlé très en

8 détail. Ma question était la suivante : le fait est que devant cette

9 Chambre de première instance vous dites que vous êtes historien. Or, je

10 m'attends à ce que vous traitiez de ce sujet d'une façon un peu différente

11 de la façon qui est celle de quelqu'un qui voit uniquement le tout dans une

12 perspective propre à une victime. Je m'attends à ce que vous traitiez de

13 tout cela en historien même si vous êtes une victime. Je ne vous pose pas

14 de question pour savoir ce que vous avez écrit; je vous pose maintenant la

15 question à savoir ce que vous avez fait devant cette Chambre de première

16 instance. Vous faites preuve d'une mémoire sélective. Ai-je raison de dire

17 cela ?

18 R. Il ne s'agit pas de mémoire sélective. Je crois qu'il faut contribuer à

19 l'historiographie en faisant valoir la vérité sur tous et chacun. Moi, je

20 me suis, dans mes livres, occupé des souffrances subies par mon peuple.

21 Cela ne veut pas dire que je sous-estime ou que je ne condamne pas les

22 crimes commis contre d'autres peuples, le peuple croate. Par un crime on ne

23 peut pas tuer un homme. Je traite des crimes, mais je traite des crimes

24 commis contre mon peuple. Je suis là pour voir évidemment tout ce qui a été

25 écrit par d'autres historiens, d'autres hommes qui condamnent les crimes

26 commis contre le peuple croate. Je crois qu'ils méritent tout l'honneur de

27 l'autre côté, et ils doivent le faire.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi. Permettez-moi de vous

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1 poser cette question. Ici dans ce prétoire nous voulons aboutir à la

2 vérité, alors que vous êtes en train de témoigner pour nous parler de

3 crimes perpétrés contre votre peuple seulement, alors que pour autant vous

4 avez oublié les crimes commis contre un autre peuple. Comment pouvez-vous

5 dire devant cette Chambre de première instance qu'il faudra se comporter -

6 lorsqu'il s'agit de la présentation des événements - lorsque vous devez,

7 par exemple, conseiller cette Chambre de première instance, qu'est-ce que

8 vous avez à nous dire à notre intention ?

9 R. On saura la vérité sur moi et sur ma mémoire lorsque j'aurai fait

10 publier mon journal de guerre. Dans mon journal de guerre j'écris sur

11 toutes les victimes. Partout où j'ai vu qu'il y avait eu un crime, je l'ai

12 condamné partout et à tout moment.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Votre journal de guerre ne sera pas

14 certainement accessible à cette Chambre de première instance. Ce qui

15 importe pour cette Chambre de première instance c'est votre témoignage dans

16 ce prétoire. Cela demeure une partie importante dont cette Chambre de

17 première instance sera saisie. Vous n'avez pas de réponse à nous fournir à

18 la question ou peut-être si ?

19 R. Je fais de mon mieux pour dire la vérité, et croyez-moi que chaque

20 phrase de mon témoignage --

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ma question était la suivante : avez-

22 vous un conseil à donner à cette Chambre de première instance pour ce qui

23 est du comportement de la Chambre face à votre témoignage, ayant entendu le

24 fait que vous venez de vous souvenir de certaines parties alors que

25 d'autres vous l'avez oublié ?

26 R. Il y a différentes sources de connaissance, Monsieur le Président. Tout

27 ne doit pas être terminé par et avec mon témoignage. D'autres documents

28 sont à consulter également.

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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Merci beaucoup.

2 Par curiosité, tout simplement, puis-je vous demander quelle était la

3 raison pour laquelle vous avez été surnommé le "capitaine Darda" par les

4 médias ? Vous avez dit que Darda était la colline la plus élevée de Petrova

5 Gora, le point le plus élevé de Petrova Gora. Est-ce qu'il s'agit d'une

6 coïncidence ou d'une association faite par rapport à votre taille ou votre

7 position dans la structure sociale, et cetera ?

8 R. Lorsqu'on parle de Petrova Gora, j'ai été directeur du centre mémorial

9 de Petrova Gora pendant 28 ans. J'étais quelqu'un là-bas. J'étais peut-être

10 quelqu'un qui ai eu la meilleure formation possible, écrivain que j'étais

11 aussi de cette région. Comme j'ai pu devenir historien - j'ai vu d'ailleurs

12 ce qui a été commis comme crimes dans Petrova Gora pendant la Seconde

13 Guerre mondiale - par conséquent, j'ai pu être considéré comme quelqu'un

14 d'assez célèbre.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Y a-t-il d'autres

16 questions qui découlent des questions qui viennent d'être posées ?

17 Monsieur Milovancevic.

18 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, j'en aurais

19 quelques-unes, mais je crois que le moment est venu pour marquer une pause.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Merci beaucoup. J'ai oublié que

21 le temps passait. Nous allons marquer une pause maintenant.

22 L'audience est suspendue.

23 --- L'audience est suspendue à 10 heures 17.

24 --- L'audience est reprise à 10 heures 47.

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic.

26 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

27 Nouvel interrogatoire supplémentaire par M. Milovancevic :

28 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, je vais vous poser quelques

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1 questions. Vous vous souvenez que le Président Moloto vous a demandé si

2 dans vos livres, si vous avez correctement décrit les événements qui se

3 sont produits entre 1990 et 1995 sur le territoire croate et le territoire

4 de la République serbe de la Krajina sans partialité. Est-ce que vous vous

5 en souvenez ?

6 R. Oui.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je n'ai pas parlé de ce livre, je ne

8 lui ai pas demandé quelle était la situation quant à ce livre; j'ai demandé

9 si ici, dans ce prétoire, s'il avait décrit de façon partiale et

10 correctement ces événements.

11 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je pose la

12 question qui porte sur une autre question qui a été posée au préalable

13 avant.

14 Q. Quelques questions concernant vos livres, la chronologie des événements

15 qui se sont produits là-bas; est-ce que vous vous en souvenez ?

16 R. Oui.

17 Q. Pourriez-vous nous dire si dans ces livres, si vous avez écrit la

18 vérité ?

19 R. Oui, j'ai écrit la vérité. D'ailleurs, dans le préambule de mon livre,

20 j'ai bien dit que j'essayais d'être parfaitement véridique et conséquent

21 par rapport à l'époque, et que la vérité était placée en premier lieu. Je

22 suis désolé que le Président de la Chambre n'ait pas lu mes livres.

23 Q. Est-ce que ces livres ont été lus ici dans le prétoire ?

24 R. Non.

25 Q. Vous vous souvenez de la question posée par le Juge quand il vous a

26 demandé pourquoi vous ne vous souvenez pas des crimes commis contre les

27 Croates, si votre récit était historiquement correct ?

28 R. Oui, je m'en souviens.

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1 Q. Voici ma question : peut-on dire que vous ne vous souvenez pas des

2 crimes contre les Croates ?

3 R. Non. Je m'en souviens. J'ai vu cela à Kordun et à Banija. C'est ma

4 région, la région où je vis. Cependant, les rapports entre ces crimes ne

5 sont absolument pas proportionnels. Il s'agit des crimes qui ont été commis

6 contre les Serbes dans cette époque-là, dans la Deuxième Guerre mondiale

7 qui ont été répétés, à nouveau commis.

8 Q. Quand vous dites que les rapports entre ces crimes sont complètement

9 disproportionnés et que l'on ne peut pas les comparer, qu'est-ce que vous

10 voulez dire ?

11 R. Et bien, je veux dire que pendant la guerre à peu près

12 7 000 personnes sont mortes, ont péri pendant la guerre. Alors qu'en

13 Croatie on parle de 12 000 à 15 000. Si vous regardez quelle est la densité

14 de la population dans ces deux régions, dans ces deux pays, et bien, la

15 disproportion devient énorme.

16 Q. Vous voulez dire que le nombre de victimes est disproportionné ?

17 R. Par rapport au nombre des habitants, vous avez -- enfin, d'après les

18 statistiques il avait 12 % de Serbes.

19 Q. Tout à l'heure vous avez parlé de 7 000 personnes qui ont péri sur le

20 territoire de la Krajina, et vous avez comparé cela au chiffre de 15 000

21 Croates. Vous parlez des personnes tuées ?

22 R. Oui. Tuées, disparues, portées disparues.

23 Q. Quand vous dites que 7 000 personnes ont péri à Krajina, quelle est

24 leur appartenance ethnique ?

25 R. Je dirais que 98 % d'entre eux étaient Serbes.

26 Q. Vous vous souvenez de la question posée par le Juge Moloto quand il

27 vous a dit que vous ne vous souvenez pas que les Croates avaient été

28 attaqués par les Serbes, et il vous avait dit que vous avez esquivé la

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1 réponse à la question posée par le Procureur; est-ce que vous vous souvenez

2 de cela ?

3 R. Oui.

4 Q. Est-ce que vous avez esquivé la réponse dans le cadre de ce thème-là ?

5 R. Non, je ne l'ai jamais fait.

6 Q. Est-ce que le Procureur vous a donné la possibilité d'expliquer

7 pourquoi vous avez écrit ce que vous avez écrit ?

8 R. Non, je n'ai pas eu le temps pour cela.

9 Q. Merci. Vous vous souvenez que le Président Moloto vous a dit qu'on

10 attendait de vous de ne pas nous donner une perspective qui réfléchit, une

11 mémoire sélective; est-ce que vous vous souvenez de cela ?

12 R. Oui.

13 Q. Est-ce que vous aviez vraiment cette mémoire sélective ? Est-ce que

14 votre perception des choses n'était pas droite ?

15 R. Non, on ne pourrait jamais dire cela. Parce que, moi, les crimes, je

16 les vois quelle que soit la personne qui les commet. Parce que j'ai dit :

17 Un meurtre ne tue pas une seule personne. C'est moi, qui ai dit cela et

18 beaucoup de personnes répètent cela.

19 Q. Vous avez répondu à la question posée par le Président et vous avez dit

20 : Nous sommes les victimes, tout a été nettoyé. Vous faites référence à

21 quoi ?

22 R. Au peuple serbe, à la Krajina croate, de cet exode incroyable, démesuré

23 des Serbes, de toutes les villes croates. Tout est vide. Ma région est

24 vidée alors qu'elle avait été habitée pendant des siècles.

25 Q. Qui a été nettoyé tout cela ?

26 R. La politique croate a créé toutes ces victimes, pas le peuple croate,

27 mais la politique croate et l'armée croate qui a mis en œuvre cette

28 politique.

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1 Q. Quel est votre point de vue, quelle est votre position, quelles

2 sont vos informations : les victimes croates, des victimes des Serbes sont-

3 elles le résultat de la politique serbe ?

4 R. Pour moi, il s'agit de la défense. Nous n'avons pas attaqué; nos

5 unités n'ont pas attaqué qui que ce soit. Ils étaient en défensive sans

6 arrêt, à partir de la révolution des troncs d'arbre, comme on disait, nous

7 avons été attaqués sans arrêt.

8 Q. Concernant les questions posées par le Juge vous demandant si

9 vous étiez historien. Donc, vous avez fait l'école normale, ensuite vous

10 avez fait des études à la faculté de philosophie. Vous avez aussi étudié le

11 droit et vous êtes intéressé par l'histoire; mais pourquoi ?

12 R. Et bien, j'ai fait cela, parce que quand j'avais 11 ans, j'ai été

13 témoin d'un crime terrifiant. J'ai vu les Oustachi qui ont tué 194 femmes,

14 enfants et vieillards. J'ai vu cela. J'ai vu une petite fille qui allait de

15 sa mère à son père en disant : "Réveille-toi, papa. Réveille-toi, maman. On

16 va rentrer, on va rentrer à la maison." Il y avait une fosse et la fumée

17 sortait de la fosse parce qu'il faisait froid. J'avais l'impression que

18 c'était leurs âmes qui partaient au ciel. C'est pour cela que je suis

19 devenu un historien. C'est pour cela que j'ai écrit cela sur mon peuple.

20 Q. Votre petit nom, capitaine Darda, où on mentionne -- et on vous a posé

21 aussi une question au sujet du sommet de Petrova Gora qui s'appelle Darda;

22 dites-moi, est-ce que vous êtes un grand homme physiquement ou bien

23 psychiquement ? Est-ce que vous vous souvenez de cette question ?

24 R. Oui.

25 Q. Voici la question. Les caractéristiques physiques des hommes, d'après

26 vous, sont-elles importantes, pertinentes ?

27 R. Non.

28 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions.

Page 10117

1 [La Chambre de première instance se concerte]

2 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [aucune interprétation]

3 [La Chambre de première instance se concerte]

4 Questions de la Cour :

5 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je voudrais poser une question

6 additionnelle. On va parler de la mémoire de cet incident où vous avez vu

7 l'humidité se lever de la terre et vous pensiez que c'étaient les âmes qui

8 partaient au ciel. Quel est le jour de la Toussaint dans votre pays ?

9 R. La Toussaint chez les catholiques, c'est le 1er novembre.

10 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Le 2 novembre, le jour de tous les

11 saints, est-ce que vous connaissez ce jour-là ? Vous avez le jour des

12 morts, ensuite la Toussaint. Est-ce que vous savez que ce jour-là, les gens

13 se rendent aux cimetières ?

14 R. Dans l'Eglise catholique, vous avez plusieurs jours des morts. On se

15 rend au cimetière plus souvent. Les Croates y vont le 1er novembre -- enfin,

16 les catholiques.

17 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je voudrais poser quelques questions

18 additionnelles au sujet de cette loi puisque nous n'avons pas eu la

19 traduction complète. La première question : quelle est la différence dans

20 le sens juridique entre jour férié et fête ?

21 R. Il s'agit des fêtes nationales, donc les fêtes nationales telles

22 qu'elles figurent dans la loi. Pour les orthodoxes, il ne s'agit pas là

23 d'une fête nationale. C'est pour cela que j'ai dit qu'on n'apprécie pas les

24 autres. On dit que c'est un jour férié, mais on ne dit pas que c'est une

25 fête nationale. Je pense que c'est un grand problème qui se trouve dans la

26 loi. C'est un oubli de taille.

27 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Vous voulez dire que la différence

28 entre une fête nationale et le jour férié pour les personnes appartenant à

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1 une région est que pour les fêtes nationales, personne ne travaille ?

2 R. Oui. Personne ne travaille les jours de fêtes nationales, et un jour

3 non travaillé ou férié, c'est autre chose. Dimanche, c'est un jour férié.

4 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Quelle était la situation avant 1990

5 -- 1991, du temps des socialistes ?

6 L'INTERPRÈTE : L'interprète demande qu'on corrige : le

7 1er novembre égale la Toussaint; le 2, à Défunt.

8 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Quel était à l'époque ceci, quelle

9 était la situation à l'époque socialiste ? Peut-être qu'on peut vous donner

10 ce document à nouveau. Qu'est-ce qui était fêté soit comme un jour férié,

11 soit comme une fête nationale du temps de l'ère socialiste ?

12 R. Le 1er janvier, donc le nouvel an, était célébré. Le

13 1er mai, comme la fête du travail.

14 M. LE JUGE HOEPFEL : [aucune interprétation]

15 R. Ensuite, en ce qui concerne Noël, je ne m'en souviens pas très bien,

16 mais vous savez, c'était interdit. Les communistes interdisaient cela.

17 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Qu'est-ce que vous avez dit ? Les

18 autorités communistes interdisaient que l'on fête quoi exactement ?

19 R. Ce n'était pas vraiment interdit. C'est que tout simplement, de façon

20 officieuse, on n'avait pas le droit de fêter les fêtes religieuses, de

21 célébrer les fêtes religieuses. Les gens qui allaient à l'église et qui

22 respectaient et observaient les fêtes religieuses étaient mal vus.

23 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Bien. Nous avons parlé des

24 différences entre les catholiques et les orthodoxes, mais il s'agit là

25 quand même de fêtes chrétiennes. A-t-on protégé les fêtes juives ou

26 musulmanes à l'époque de la République socialiste de Croatie ?

27 R. Cela ne se voit pas, parce que tous les autres deviennent les citoyens

28 de deuxième classe, pour ainsi dire.

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1 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Qu'est-ce que vous voulez dire par

2 là ?

3 R. Par exemple, les fêtes musulmanes ou juives ou orthodoxes ne sont pas

4 des fêtes nationales.

5 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Le fait que ces fêtes soient

6 mentionnées dans cette loi, est-ce un fait nouveau ou bien quelque chose

7 qui existait auparavant ?

8 R. Je ne sais pas quelle était la loi auparavant. Je sais quelle était la

9 situation dans les faits. Les gens qui allaient à l'église étaient mal vus.

10 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je ne parle pas d'aller à l'église.

11 Là je vous ai posé une question, d'ailleurs en ce qui concerne le fait

12 d'aller à la synagogue ou à la mosquée ?

13 On va revenir sur le premier paragraphe de cet article 2. Il a été

14 traduit, mais je ne me souviens pas vraiment de cela. Vous dites que c'est

15 un jour férié ou qu'il y a des journées en janvier qui sont des jours

16 fériés. Quelles sont ces journées-là ?

17 R. Le 6 et le 7 janvier; vous avez la veillée de Noël et Noël

18 orthodoxe. Il s'agit d'une journée fériée mais qui n'est pas une fête

19 nationale. Les citoyens peuvent bénéficier de ces journées comme des

20 journées fériées mais sans que ce soit pour autant une fête nationale.

21 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Du point de vue pratique, cela veut

22 dire que les orthodoxes peuvent, s'ils le veulent, avoir deux Noël. Ils ont

23 deux jours les 25 et 26 décembre, ensuite, en plus, ils ont le Noël

24 orthodoxe, le 6 et le 7 janvier.

25 R. Oui, ils avaient deux jours, comme les catholiques, le droit de ne pas

26 travailler, mais ce n'était pas une fête nationale.

27 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je le sais très bien de ma propre

28 expérience. Je suis un protestant dans un pays à majorité catholique. J'ai

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1 toujours eu des journées fériées en plus des autres. C'était très bien

2 quand j'étais à l'école.

3 Vous allez me comprendre. Je pense que nous avons compris cela.

4 [La Chambre de première instance se concerte]

5 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Le Juge Nosworthy voudrait poser une

6 question concernant le 6 et le 7 janvier. Parce que moi, je n'ai plus de

7 questions.

8 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Monsieur, vous vous plaignez du

9 fait, n'est-ce pas, que le 6 ou le 7 janvier, les Serbes ne pouvaient pas

10 bénéficier de fêtes nationales. Ces journées-là n'étaient pas déclarées

11 fêtes nationales, mais en revanche, journées fériées, jours fériés. Puisque

12 dans l'article 2, le 6 et le 7 janvier sont mentionnés, ce sont des

13 journées fériées, des jours fériés ?

14 R. La question qui se pose, c'est pourquoi les deux Noël ne sont pas des

15 fêtes nationales.

16 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] S'il vous plaît, parlez-moi de la

17 situation telle qu'elle est présentée dans l'article. Le 6 et le 7 janvier

18 étaient des jours fériés, d'après la loi ?

19 R. Oui, des jours fériés.

20 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Bien. Ces jours-là, est-ce que

21 vous deviez travailler ou bien est-ce que c'étaient des journées fériées,

22 des jours fériés ?

23 R. Oui. Si mes souvenirs sont exacts, quand il s'agissait de bénéficier de

24 ces jours fériés, il fallait demander au préalable à son employeur, dire à

25 son employeur qu'on n'allait pas travailler ces jours-là. Les gens ne le

26 faisaient pas le cœur léger, ce qui voulait dire de fait qu'ils n'avaient

27 pas le droit de célébrer les jours fériés puisque la situation à l'époque

28 était difficile.

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1 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Les faits étaient qu'en réalité

2 vous aviez deux jours de plus, deux jours fériés de plus que les Croates ou

3 les catholiques plutôt, puisque vous aviez leur Noël que vous pouviez

4 célébrer en tant que fête nationale, ensuite vous aviez vos propres jours

5 fériés pour célébrer vos fêtes religieuses. On pourrait dire que votre

6 position était meilleure finalement, que vous vous trouviez dans une

7 meilleure situation ?

8 R. Quand on n'aime pas travailler, oui, effectivement. Mais la question

9 qui se pose, c'est de savoir pourquoi a-t-on fait la différence. D'un côté,

10 vous avez la fête nationale et de l'autre côté vous avez les jours fériés.

11 La loi n'était pas égalitaire à cet effet.

12 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Vous auriez voulu avoir vos fêtes

13 nationales, puis vous auriez voulu aussi que les Musulmans et les

14 catholiques aussi bénéficient de ces journées. Vous auriez préféré que les

15 catholiques et les membres des autres groupes d'autres religions, les

16 pratiquants d'autres religions puissent bénéficier de ces jours-là comme

17 des fêtes nationales ?

18 R. Oui.

19 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Vous avez dit que les orthodoxes

20 n'étaient pas contents puisqu'ils devaient faire la demande avant de

21 bénéficier de ces jours fériés.

22 R. Oui, Madame le Juge, c'était cela qui leur déplaisait le plus. Il

23 fallait poser ces jours de congé, donc annoncer à l'employeur que l'on

24 voulait prendre un jour de congé et bénéficier de ce jour férié. Les gens

25 avaient peur de cela. C'est pour cela que cette loi a créé des problèmes.

26 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] J'imagine que vous avez remarqué

27 que je ne suis pas Juive. Je n'ai ni l'air Juive et ce n'est pas ma

28 religion. Pouvez-vous m'expliquer quel serait le jour de Yom Kippur,

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1 puisqu'à l'article 2 il est fait référence à Yom Kippur ?

2 R. Il est écrit ici que le Yom Kippur est le jour du grand pardon.

3 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Je vous demande la date, la date

4 de l'année à laquelle on célèbre Yom Kippur ?

5 R. Cela, je suis parfaitement incompétent pour vous répondre.

6 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Merci.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je pense que, Monsieur Milovancevic,

8 pour être juste, nous devons vous demander si vous avez des questions qui

9 font suite aux questions du Juge Nosworthy et du Juge Hoepfel avant de

10 laisser M. Black poser des questions.

11 Monsieur Milovancevic, avez-vous des questions suite à cette interrogation

12 des deux Juges de la Chambre ?

13 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Dans ce cas-là, Monsieur Black, avez-

15 vous des questions ?

16 M. BLACK : [interprétation] Non.

17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

18 Monsieur Dakic, nous en avons terminé avec votre déposition. La Chambre

19 tient à vous remercier d'être venu témoigner en l'espèce et d'avoir pris le

20 temps, pour un homme aussi occupé, de venir déposer. Nous vous remercions.

21 Vous pouvez maintenant quitter le prétoire.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

23 tiens à dire qu'il m'a semblé que cette procédure était tout à fait

24 équitable et tout à fait juste ainsi que toute l'aide qui m'a été donnée.

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Merci.

26 [Le témoin se retire]

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, avez-vous

28 quelque chose à rajouter ?

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1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'aimerais

2 citer le témoin suivant et qu'il soit escorté dans le prétoire. Il s'agit

3 de Zoran Lakic.

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il faudrait que le témoin fasse sa

6 déclaration solennelle.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare de façon solennelle que je vais

8 dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

9 LE TÉMOIN: ZORAN LAKIC [Assermenté]

10 [Le témoin répond par l'interprète]

11 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Vous pouvez vous asseoir.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic, vous avez la

14 parole.

15 Interrogatoire principal par M. Milovancevic :

16 Q. [interprétation] Merci. Bon après-midi, Monsieur Lakic.

17 R. Bonjour.

18 Q. Vous devez savoir que je suis le conseil de la Défense de Milan Martic.

19 Je vais vous poser des questions lors d'une première phase qui s'appelle

20 l'interrogatoire principal. Etant donné que nous parlons la même langue, il

21 serait bon que vous fassiez une pause entre mes questions et votre réponse

22 afin que les interprètes aient le temps de traduire. Je vais faire en sorte

23 que mes questions soient courtes et concises, et il conviendrait que vos

24 réponses soient de la même eau. S'il vous plaît, essayez de parler

25 lentement et surtout de ménager une pause entre questions et réponses.

26 R. [aucune interprétation]

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Souvenez-vous, Monsieur Milovancevic,

28 que vous avez estimé que le témoignage de cette personne prendra cinq

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1 heures.

2 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous remercie de me le rappeler,

3 Monsieur le Président.

4 Q. Pourriez-vous me dire tout d'abord, Monsieur le Témoin, votre nom et où

5 vous êtes né ?

6 R. Je m'appelle Zoran Lakic. Je suis né à Benkovac, République de Croatie.

7 Q. Quand êtes-vous né et quelle est votre appartenance ethnique ?

8 R. Je suis né le 12 octobre 1956 et je suis de nationalité serbe.

9 Q. Je tiens à vous rappeler une fois de plus de ne pas parler trop vite.

10 Vous pouvez voir sur le compte rendu vos propos s'afficher en anglais.

11 Donc, si vous suivez ce qui est écrit cela vous donnera le rythme qu'il

12 convient d'adopter.

13 Pourriez-vous nous dire quelle est votre carrière ?

14 R. Je suis allé à l'université, donc j'ai un diplôme universitaire. Je

15 suis professeur d'électronique et je suis diplômé d'électronique.

16 Q. Où habitez-vous aujourd'hui ?

17 R. J'habite à Pozarevac, en République de Serbie, et je suis professeur

18 d'électronique à l'école technique Nikola Tesla près de Pozarevac, à

19 Kostolac.

20 Q. Où avez-vous fait votre service militaire, si tant est que vous l'ayez

21 fait ?

22 R. J'ai fait mon service militaire à Belgrade, à l'école des officiers de

23 réserve, en 1982-1983. La moitié de mon service national s'est déroulé à

24 Belgrade, donc à cette école d'officiers de réserve, et le reste à Samobor,

25 près Zagreb.

26 Q. Après avoir fait votre service national, où avez-vous travaillé tout

27 d'abord ? Quel était votre premier poste ? Je pose ainsi ma deuxième

28 question quant à savoir si vous avez trouvé un emploi au sein de la Défense

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1 territoriale.

2 R. Tout à fait. J'ai continué à travailler comme je l'avais fait

3 auparavant en tant que professeur à l'école secondaire de Benkovac en tant

4 qu'enseignant. Après mon service militaire, j'y étais déjà allé en tant

5 qu'enseignant, et après, une année après mon service militaire, j'ai

6 travaillé à nouveau comme enseignant pendant un petit moment, et en octobre

7 1985, j'ai trouvé un poste comme chef d'état-major -- comme technicien ou

8 directeur des opérations pour ce qui est du temps de guerre au sein de la

9 Défense territoriale de la municipalité de Benkovac.

10 Q. En 1985 vous avez travaillé pour la Défense territoriale de Benkovac.

11 Vous étiez chef des opérations, vous étiez technicien. Pourriez-vous nous

12 dire qui était le commandant de la Défense territoriale, nous donner son

13 nom ? Qui était le secrétaire de la Défense nationale et quels étaient les

14 groupes ethniques représentés ?

15 R. En ce qui concerne la population de Benkovac, c'était une communauté

16 multiethnique. Il y avait bien plus de Serbes que de Croates. Cette

17 composition nationale était reflétée dans la politique de cadres nationaux

18 de la municipalité ainsi que bien représentée dans les structures

19 militaires et structures de police. J'étais adjoint du commandant. Le

20 commandant était Dinko Drazina, Croate. Il n'y avait pas que moi, il y

21 avait une autre personne, Magjan Pinter [phon], qui était aussi Croate et

22 qui s'occupait de la mobilisation et des différentes affaires. Son

23 assistant à l'arrière était Ljubo Kresovic, qui lui était de nationalité

24 serbe. Le directeur de l'entrepôt était Mirko Slovajevic. Il était Serbe.

25 Il a pris rapidement sa retraite. Il y avait aussi un employé qui

26 s'occupait des affaires administratives, qui travaillait aux services

27 fédéraux. Il s'appelait Zeljko Lavanja. Il était aussi Serbe.

28 Le secrétariat de la Défense nationale avait différents employés de

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1 différents groupes ethniques. Le secrétaire lui-même était un Serbe, Gojko

2 quelque chose, Gojko Tampolja. J'ai les noms de tout le monde, si vous

3 voulez.

4 Q. Non, cela va suffire.

5 R. [aucune interprétation]

6 Q. La composition de l'état-major de la Défense territoriale de Benkovac

7 existait quand vous avez trouvé votre poste, donc en tant que membre de la

8 Défense territoriale en 1985. Pendant combien de temps cette structure a-t-

9 elle subsisté ?

10 R. Cette structure a existé en 1985 quand j'ai obtenu mon poste jusqu'à ce

11 qu'elle cesse d'exister, c'est-à-dire que la Défense territoriale a été

12 établie suite à des documents qui existaient au sein des lois républicaines

13 qui gouvernaient la Défense nationale et la Défense territoriale de la

14 République de Croatie. Cette loi était en application avec la Défense

15 nationale de la RSFY, donc de la République socialiste fédérative de

16 Yougoslavie. C'était une institution en temps de paix dont les structures -

17 -

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il faudrait aller beaucoup moins vite.

19 Vous parlez beaucoup trop rapidement.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais ralentir.

21 Comme je disais, le Défense territoriale a été établie. C'était une

22 formation pacifique, et ce, jusqu'en 1991. Ensuite, en application des

23 plans qui traitaient des temps de guerre, cette Défense territoriale est

24 devenue une formation de guerre dont les effectifs venaient des forces de

25 réserve des militaires ainsi que des conscrits venant de la municipalité de

26 Benkovac. Quand ils ne pouvaient pas être déployés au sein de la Défense

27 territoriale de la municipalité de Benkovac ou qu'on ne pouvait déployer --

28 ou plutôt, on ne pouvait pas déployer quoi que ce soit si ce n'était pas

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1 enregistré, si ce n'était pas des personnes qui étaient déjà prévues au

2 niveau des registres pour faire partie de la Défense territoriale de la

3 municipalité de Benkovac.

4 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

5 Q. Si j'ai bien compris - et je vous répète - il n'y avait que les

6 habitants donc, les citoyens de Benkovac qui pouvaient être membres de la

7 Défense territoriale au sein de l'état-major de la Défense territoriale de

8 Benkovac ?

9 R. Tout à fait. C'était ainsi que la loi l'avait prévu et nous avons, bien

10 sûr, suivi la loi.

11 Q. Y a-t-il eu des modifications au sein de la Défense territoriale de

12 Benkovac après les premières élections multipartites ?

13 R. Oui, bien sûr. Par exemple, le commandant de la Défense territoriale en

14 temps de paix et en temps de guerre était Drazina. Mais en 1990, enfin vers

15 les élections, il a quitté l'état-major de la Défense territoriale et est

16 passé dans le privé.

17 Q. Très bien. Vous dites que cette personne, Drazina, était Croate, et

18 qu'il était commandant de la Défense territoriale. C'était son poste,

19 n'est-ce pas ?

20 R. Oui.

21 Q. Quand il est parti, donc quand il y a eu les élections multipartites,

22 par qui a-t-il été remplacé ? Qui a pris le poste de commandant de la

23 Défense territoriale ?

24 R. Selon toutes les dispositions en vigueur à l'époque, juridiques,

25 documents militaires, plans de guerre, et cetera, enfin tout ce qui

26 réglementait et administrait la Défense territoriale, c'est le chef d'état-

27 major, c'est-à-dire moi, qui devait remplacer le commandant de la Défense

28 territoriale. Ensuite, cette personne prenait la transition et devait

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1 nommer le nouveau commandant; la sélection se faisant à nouveau selon les

2 lois existantes et les règlements existants.

3 Q. Très bien. Vous dites que le commandement de la Défense territoriale de

4 la municipalité avait été nommé par l'assemblée. Pouvez-vous nous dire de

5 quelle assemblée il s'agir pour ce qui est de Benkovac ? Y avait-il

6 d'autres conditions prévalant pour ce qui est de la nomination du

7 commandant de la Défense territoriale de cette municipalité ?

8 R. C'était le chef d'état-major, c'est-à-dire moi, et le commandant de la

9 Défense territoriale. Il y avait ces deux postes, deux postes où l'on était

10 nommé suite à une élection du parlement de la municipalité, mais avec un

11 accord de la Défense -- du commandant de la Défense territoriale de la

12 République de Croatie, ce qui veut dire que je n'aurais jamais pu être

13 nommé à ce poste avant que le commandant de la Défense territoriale de la

14 République de Croatie ne donne son assentiment.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allez beaucoup moins vite, s'il vous

16 plaît.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, je ralentis.

18 Le commandant du territoire de la Défense territoriale de la République de

19 Croatie était le général Martin Spegelj. C'est lui qui a donné son

20 assentiment pour approuver ma nomination.

21 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

22 Q. Bien. Pendant que vous étiez en poste et que vous fonctionniez en tant

23 que commandant de la Défense territoriale de Benkovac, qui était votre

24 supérieur hiérarchique immédiat - et là dans la Défense territoriale de la

25 République de Croatie selon les dispositions en vigueur à l'époque ?

26 R. Tous les états-majors municipaux en Dalmatie étaient sous le

27 commandement du commandement de la zone pour la Dalmatie, dont le siège se

28 trouvait à Split. Le commandant de la Défense territoriale de la Dalmatie

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1 était Ante Marinov, colonel, officier de la JNA.

2 La composition complète de l'état-major à Split était composée des membres,

3 d'officiers de la JNA à l'époque. Un petit nombre d'employés étaient des

4 officiers de réserve qui venaient de Split. Donc, vous avez là la structure

5 de la Défense nationale qui, bien sûr, suivait la loi de la Défense

6 nationale de la République fédérative socialiste de Yougoslavie et ses

7 dispositions y afférentes.

8 Q. Très bien. Combien de temps avez-vous occupé le poste de commandant de

9 la Défense territoriale ?

10 R. J'ai occupé ce poste jusqu'à ce que la Défense territoriale soit

11 abolie, c'est-à-dire jusqu'à la fin novembre 1992. 1992. Je crois que

12 c'était le 27 novembre 1992.

13 Q. Merci. Je vais maintenant vous poser quelques questions ayant trait à

14 la municipalité de Benkovac.

15 Vous nous avez dit que c'était une communauté multiethnique, que le rapport

16 entre Croates et Serbes était environ 50/50. Qu'en est-il de Benkovac en

17 tant que telle ? Combien d'habitants y avait-il à Benkovac ? Quelle était

18 la composition ethnique de cette ville en 1990 ?

19 R. En 1990, la municipalité de Benkovac était une communauté

20 multiethnique. En tout, dans la ville, enfin dans la municipalité, il y

21 avait 64 villages en plus de la ville même de Benkovac, et le territoire

22 était d'environ 620 kilomètres carrés en tout. La majorité des villages

23 étaient serbes. Il y avait plus de villages serbes que d'autres. Il y avait

24 aussi quelques villages, mais d'un nombre moins élevé, qui étaient des

25 villages entièrement croates. Puis, il y avait 20 à 15 villages qui étaient

26 de composition mixte, où il y avait à la fois des Serbes et des Croates.

27 Q. Merci. Quelles étaient les relations entre les communautés jusqu'aux

28 premières élections multipartites ? Pour vous donner un cadre de référence.

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1 R. Et bien, les relations entre les différentes communautés étaient bonnes

2 au sein de la municipalité de Benkovac. Il y avait parfois quelques

3 disputes, quelques désaccords, mais les relations étaient tout à fait

4 correctes, et les gens, quelle que soit leur nationalité, travaillaient

5 ensemble, se voyaient, se fréquentaient. Enfin, la vie était tout à fait

6 normale.

7 Q. Merci. Pour ce qui est de la ville de Benkovac et la municipalité de

8 Benkovac, pouvez-vous nous donner le pourcentage croate et serbe ?

9 R. Pour ce qui est de la ville de Benkovac, qui était au centre de la

10 municipalité de Benkovac, il y avait des villages serbes qui étaient très

11 proches de ce centre de la municipalité. Ce qui fait qu'à Benkovac et au

12 centre de Benkovac, il y avait 75 à 80 % de Serbes. Un grand nombre

13 d'officiers y résidaient aussi. On avait de grandes casernes avec beaucoup

14 d'officiers, qui eux, étaient de communautés différentes.

15 Etant donné que les Serbes étaient en majorité dans l'ex-Yougoslavie, ce

16 rapport se reflétait aussi au niveau des officiers, des cadres de l'armée.

17 Là aussi ils représentaient 75 % des cadres de l'armée par rapport à 25 %

18 pour les autres communautés. Alors que dans la municipalité, les Serbes

19 représentaient 48 % -- les Serbes étaient 52 % et les Croates 48 %.

20 Q. Pour être bien sûr et certain de ce que vous avez dit, quand vous avez

21 parlé du pourcentage de population de Benkovac et différents groupes

22 ethniques, si j'ai bien compris, vous nous avez dit que le pourcentage de

23 Serbes par rapport aux Croates comprenait énormément d'officiers serbes qui

24 habitaient dans les casernes à Benkovac, et c'est pour cela que le

25 pourcentage était élevé.

26 R. Oui, parce que les officiers qui étaient en majorité Serbes habitaient

27 là avec leur famille, donc cela faisait monter les pourcentages.

28 Q. Merci. Vous dites que les relations interethniques étaient normales.

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1 Est-ce que ces relations dites interethniques normales se trouvent

2 perturbées à un moment donné ?

3 R. Oui. Oui, perturbées et aggravées d'une façon dramatique pendant un

4 laps de temps très court; cette dégradation étant due à l'apparition de

5 partis politiques qui étaient sur des bases et principes nationalistes. Il

6 s'agit de parler évidemment des médias également qui ont été créés et qui

7 ont été entre les mains des partis politiques de la Croatie. La dégradation

8 de ces relations, lors du nouvel an 1990, connaît son apogée. Personne ne

9 s'attendait à ce que le peuple croate, notamment dans des villages à

10 composition ethnique purement croate, avec l'emploi des armes, s'est mis à

11 fêter le nouvel an, ce qui évidemment a fait sonner la frayeur parmi la

12 population serbe.

13 Q. Vous dites qu'à un moment donné les relations et les rapports

14 interethniques ont été perturbés. A titre d'exemple, vous parlez de cette

15 célébration du nouvel an ?

16 R. Oui.

17 Q. Pourquoi est-ce que si bruyants, ces Croates perturbent la population

18 serbe ?

19 R. Ecoutez, toutes les fois, la fête du nouvel an est célébrée comme cela

20 dans le monde entier ainsi que chez nous. Mais à un moment donné, de

21 sources tout à fait peu fiables, apparaissent des armes, et cela entre les

22 mains de membres et adhérents de partis politiques dans Benkovac. Ces gens-

23 là, évidemment, en tirant dans l'air, fêtaient le nouvel an. C'était pour

24 ainsi dire un terme mis sur toute relation normale et sur toute vie normale

25 dans le territoire de Benkovac.

26 Q. Dans votre réponse de tout à l'heure nous avons pu noter que les partis

27 politiques de Croatie, moyennant les masses médias qui apparaissaient,

28 dites-vous, ont contribué à la perturbation de ces bonnes relations

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1 interethniques. Comment ?

2 R. On s'est mis à parler de l'origine des Serbes dans ce territoire. Les

3 Serbes, eux, ont eu peur, parce qu'étant donné leur mémoire du temps de la

4 Seconde Guerre mondiale, souvenirs des temps qu'ils ont vécus. Ensuite, ont

5 été affichés des mots d'ordre chauvinistes nationalistes avec emblèmes et

6 insignes du même genre, du même temps, ce qui n'a fait autre chose que de

7 créer une situation psychologique aggravée telle une frayeur chez les gens.

8 Q. Vous dites qu'on affichait des emblèmes, des insignes et on citait des

9 mots d'ordre. De quoi il s'agit ?

10 R. Il s'agit de parler d'emblèmes datant de la Seconde Guerre mondiale,

11 qui témoignaient des forces nationalistes fascistes et cléricales de l'Etat

12 indépendant croate. D'abord, il y avait lieu de parler du damier, ensuite

13 des mots d'ordre, "Pendez les Serbes sur les saules", et cetera. Voilà tant

14 d'autres mots d'ordre datant de la Seconde Guerre mondiale.

15 Q. Merci. Lorsque vous faites mention de damier, est-ce qu'à cette époque-

16 là - et vous êtes en train de parler du début de l'année 1990 - le damier

17 était-il un insigne officiel de la Croatie ?

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Black.

19 M. BLACK : [interprétation] Je m'excuse de vous interrompre. J'ai laissé

20 tout cela se dérouler, mais cela ne fait pas partie du résumé qui a été

21 offert au titre de la Règle 65, à savoir lorsqu'il s'agit d'emblèmes, de

22 symboles et de damier. J'ai une objection à soulever.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic.

24 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] J'accepte cela, Monsieur le Président.

25 Je retire ma question.

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Milovancevic.

27 N'oubliez pas les contraintes qui sont à votre intention quant au temps qui

28 vous est imparti. Par conséquent, essayez de vous en tenir à ce qui a été

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1 donné dans le cadre du résumé au titre de la Règle 65 ter. Merci.

2 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

3 Q. Monsieur le Témoin, vous avez parlé de la perturbation de ces relations

4 interethniques. Quelle est la situation qui prévaut après les premières

5 élections législatives ?

6 R. La situation se dégrade de plus en plus. Moi qui étais le commandant de

7 la Défense territoriale, j'essayais de faire rapport de tout cela chaque

8 jour au commandement supérieur qui se trouvait à Split. Il était de mon

9 devoir de rapporter sur l'évolution de la situation en termes de sécurité

10 et en termes de politique. Evidemment, les tensions étaient grandes, en

11 escalade, et se répercutaient sur la vie normale et la situation qui devait

12 prévaloir dans la vie normale.

13 Q. Est-ce que le terme de "barricades" vous dit quelque chose ? Vous en

14 avez entendu parler ?

15 R. Oui.

16 Q. Quand avez-vous entendu parler de cela ?

17 R. C'était en automne 1990, je crois même avant l'automne, fin août 1990.

18 Etant donné que le peuple serbe, dans le territoire de la Krajina, par

19 conséquent dans celui de la municipalité de Benkovac, était pratiquement

20 sans arme, aucune, je dirais. Et alors que, comme nous en avons été

21 informés, la partie croate se faisait armer sans cesse, le peuple serbe, ou

22 plutôt les représentants du peuple serbe se sont adressés à nous autres, à

23 des militaires, à la Défense territoriale et à la police, à la JNA, pour

24 solliciter une certaine défense. Etant donné que la TO existait du temps de

25 la RSFY, comme elle existait, nous n'avions aucune base légale, aucun

26 fondement légal pour agir en vue de protéger le peuple. Le peuple s'est mis

27 donc à s'auto-organiser par lui-même. L'une de ces formes d'organisation,

28 l'une des tentatives de prévenir des attaques ou les invasions des forces

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1 paramilitaires à l'encontre des villages serbes consistait en l'érection de

2 ces barricades, comme vous dites.

3 Q. Merci. Tout à l'heure, en répondant à ma question, vous avez dit que le

4 peuple était sans arme. Comment, sans arme ? Qu'en est-il des armes qui

5 étaient en possession de la TO de Benkovac ?

6 R. En juin 1991 - je ne peux pas préciser la date - deux officiers de la

7 caserne à Slobodan Macura [phon] de Benkovac --

8 Q. Pardon. Toutes les fois où vous parlez d'officiers, dites-nous à qui

9 ces officiers appartiennent.

10 R. Oui. Il s'agissait de deux officiers de la JNA. L'un deux était Dusan

11 Dragicevic, l'autre était Branislav Ristic. Dusan Dragicevic était

12 commandant. Il était adjoint du commandant chargé de l'arrière de la

13 brigade. Le capitaine Ristic était l'homme du service de sécurité. Ils sont

14 venus chez moi, dans mon appartement, et m'ont demandé de leur remettre les

15 clés des entrepôts de la Défense territoriale, de la caserne de Benkovac.

16 Q. Pardon. Ils vous ont demandé les clés des entrepôts; qu'y avait-il dans

17 ces entrepôts ?

18 R. Il y avait des armes et des munitions qui, organiquement parlant,

19 appartenaient à la TO du temps de guerre de la municipalité de Benkovac,

20 conservées, entreposées dans la caserne.

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Black.

22 M. BLACK : [interprétation] Je m'excuse d'intervenir, d'interrompre. Avant

23 que l'on aille trop loin, on fait référence à juin 1991, ne serait-ce qu'à

24 en juger d'après le compte rendu d'audience en anglais. Ne s'agit-il pas

25 plutôt du mois de juin 1990. Je voudrais que l'on tire au clair cela.

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, qu'en dites-

27 vous ?

28 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je remercie mon honorable collègue de ce

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1 qu'il dit.

2 Q. [aucune interprétation]

3 R. Il s'agissait bien de juin 1991, pas de 1990. Les armes se trouvaient

4 sous le contrôle de la JNA, et nous étions absolument incapables de faire

5 quoi que ce soit, d'y avoir accès sans le consentement de la JNA. Peut-être

6 qu'il y a eu une erreur qui s'est glissée dans le compte rendu d'audience,

7 dans ce document du Tribunal.

8 Q. Lorsque vous avez fait mention de barricades, vous avez dit qu'il

9 s'agissait de la fin août 1990.

10 R. Oui.

11 Q. Vous avez évoqué aussi les premières élections législatives tenues lors

12 de la première moitié d'août 1990.

13 R. Oui.

14 Q. Vous parlez de cet événement-là, et d'après vous, le tout s'était

15 produit en juin 1991 ?

16 R. Oui, en juin 1991, c'est pour sûr.

17 Q. Merci. En qualité de commandant de la Défense territoriale, quelle

18 était la coopération qui était la vôtre avec le QG de Split ? Est-ce que

19 vous leur adressiez des rapports ? Est-ce que vous receviez de ce QG de

20 Split des ordres ou des instructions ?

21 R. Jusqu'au 30 juillet 1991, je devais être en contact plusieurs fois par

22 jour, en contact permanent avec le commandement, avec le commandant de

23 Split. Eux, ils me demandaient des informations sans cesse. Ils savaient

24 très bien que les armes ont été prises pour être transférées quelque part,

25 je ne sais pas où. Il y avait aussi dans les mêmes entrepôts, dans les

26 mêmes casernes, les armes de la TO d'Obrovac et de pas mal d'autres

27 municipalités. Ces armes ont été tout simplement transférées quelque part.

28 Où tout cela a fini, ces armements, je n'en sais rien.

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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, je m'excuse. Je

2 me dois de le faire encore une fois. Tout comme M. Black, je vois ici qu'on

3 évoque ici la date du 30 juillet 1997. Il doit s'agir soit d'une mauvaise

4 interprétation, soit d'une mauvaise entrée dans le compte rendu d'audience.

5 Il dit que : "Jusqu'au

6 30 juillet 1997, j'étais en permanent contact régulier avec le commandant

7 de Split."

8 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

9 Merci d'avoir attiré notre attention sur cela. Il s'agit de quelque autre

10 erreur.

11 Q. Qu'est-ce que vous avez dit, Monsieur le Témoin ?

12 R. J'ai dit le 30 juillet 1991.

13 Q. Oui, par conséquent, il s'agit de la ligne 14.

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Merci beaucoup.

15 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] C'est moi qui vous remercie, Monsieur le

16 Président.

17 Q. Ce que vous venez de dire, Monsieur le Témoin, parlant armements de la

18 Défense TO de Benkovac, d'Obrovac et d'autres municipalités, vous ai-je

19 bien compris, que la JNA a évacué ces armes de ces entrepôts de Benkovac

20 pour les transférer ailleurs ?

21 R. Exactement, c'est ce qui s'est passé.

22 Q. Merci. Lorsque vous dites que vous faisiez rapport au QG de Split

23 quotidiennement, à quel QG pensez-vous, pour parler de rapports et de

24 contacts ?

25 R. Il s'agit évidemment du QG de la Défense territoriale de la zone

26 opérationnelle de Split.

27 Q. Merci. Lorsqu'on évoque le 1er mai 1991, est-ce que cette date vous dit

28 quelque chose ?

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1 R. Oui, oui. Cela évoque pas mal de choses. Le 1er ou le 2 mai et les

2 jours qui ont suivi, il y a eu des affrontements et des conflits armés dans

3 les rayons des villages Kakma et Polaca. Polaca se trouve au sud de

4 Benkovac.

5 Q. Qui est-ce qu'il y avait là, impliqués dans ces confrontations ? Il y a

6 eu des suites fâcheuses ?

7 R. Le village de Polaca était important. En majorité, il y avait des

8 Croates, ethniquement parlant. Ces Croates ne voulaient plus observer,

9 ainsi considéraient-ils tout ce que faisait la police dans le poste de

10 police de Benkovac. Evidemment, la direction de Zadar avait, paraît-il,

11 formé un poste de police dans le village de Polaca.

12 Pour parler des membres de police, ceci sur l'axe Benkovac, Polaca, Biograd

13 et sur les routes environnantes, ils contrôlaient la circulation. Ce

14 contrôle de la circulation consistait à ce que lorsque les membres de

15 groupes ethniques serbes circulent, ils soient fouillés, contrôlés pour ne

16 pas qu'il y ait des armes, et cetera. Ces gens-là n'ont pas été censés être

17 maltraités. Evidemment, ceci a donné lieu à des échauffourées, à des

18 problèmes intervenus entre les membres de la police de Zadar et les membres

19 du personnel du SUP de Benkovac.

20 On a essayé évidemment de trancher ce problème à l'amiable, mais voilà que

21 cela a donné lieu plutôt à un conflit armé qui a duré deux ou trois jours,

22 et cetera. Je ne me suis pas rendu sur place, mais j'en ai été informé.

23 Q. Au sujet de ce conflit armé, une question, s'il vous plaît. Vous dites

24 qu'il y avait des conflits dans lesquels se trouvaient impliqués les

25 membres de Zadar et de Benkovac. Ces gens-là, ces membres-là, ces forces-

26 là, avant l'échauffourée, avant les conflits où se trouvaient-ils

27 déployés ?

28 R. Qui parle du village de Polaca dit que ce village se trouve environné,

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1 encerclé par quelques villages purement serbes. Chaque jour, dans ces

2 villages, il y avait lieu de citer la présence des membres de la police de

3 Benkovac. Il a fallu donc régler le problème de ces mauvais traitements

4 auxquels étaient exposés les Serbes de Polaca. Dans des contacts entre les

5 deux polices, il s'agit toujours de la police relevant de la compétence de

6 la Croatie. Pour parler des Serbes de Benkovac ou des Croates de Polaca, il

7 y avait un règlement de compte entre les membres de la police respective.

8 Il s'est avéré qu'un membre de police paramilitaire et parapolicière de la

9 Croatie qui s'appelait Franko Lisica s'est fait tuer.

10 Q. Est-ce que je vous ai bien compris, qu'à Polaca, lors de ce conflit

11 armé où Franko Lisica s'est fait tuer, il y avait des policiers serbes et

12 des policiers croates qui se sont trouvés impliqués dans ces

13 échauffourées ?

14 R. Ecoutez, voilà de quoi il s'agit. A Benkovac, parmi les membres de

15 police, il y avait beaucoup plus de Serbes. Il y avait encore des policiers

16 croates qui étaient employés de service, alors qu'à Polaca, il y avait des

17 formations policières nouvellement créées. On les appelait les

18 "redarstvenici". Ce nouveau terme --

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, je m'excuse. Je

20 sais que ce n'est encore pas le temps, mais avec votre permission, à la

21 demande de Mme le Juge Nosworthy, pouvons-nous marquer une pause pour

22 revenir plus tard en audience ?

23 Avant de faire cela --

24 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, Monsieur, bien sûr.

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] -- pouvons-nous peut-être revoir la

26 date dans le compte rendu d'audience, page 59, ligne 16, lorsqu'une mention

27 a été faite de la date du 2 mai ? Pouvons-nous le faire, s'il vous plaît ?

28 Nous suspendons l'audience pour reprendre le travail en audience à midi

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1 trente.

2 M. MILOVANCEVIC : [aucune interprétation]

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] L'audience est suspendue.

4 --- L'audience est suspendue à 11 heures 58.

5 --- L'audience est reprise à 12 heures 31.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

7 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

8 Q. Monsieur Lakic, avant la pause, vous avez parlé de cet incident

9 dans le cadre duquel Franko Lisica est mort. Vous avez parlé du début du

10 mois de mai. De quelle année parlez-vous en réalité ?

11 R. De 1991.

12 Q. Comment ce conflit a-t-il été résolu ? Que s'est-il passé après ?

13 R. Les forces se sont accumulées sur les monts voisins, donc les milices

14 croate et serbe de Benkovac, et ils ont pris le contrôle des collines

15 environnantes. Jusqu'aux 5 et 6 mai, il y a eu un échange de feux

16 sporadiques sans qu'il y ait eu de vie sur ces terres.

17 Q. Est-ce que vous aviez quelques activités par rapport à ces événements ?

18 R. Oui. En tant que commandant de la Défense territoriale, 24 sur 24, je

19 recueillais des informations pour les envoyer à mon commandement. Ce sont

20 des informations que je recevais directement des gens qui s'occupaient du

21 renseignement. J'ai proposé au chef de la police de Benkovac à l'époque,

22 Bosko Drazic, d'intervenir avec les Croates au nom des Serbes pour essayer

23 de résoudre ce problème de façon paisible.

24 Q. A-t-on accepté votre proposition et que s'est-il passé après ?

25 R. Oui, nous sommes entrés en contact avec les Croates et nous avons

26 contacté les citoyens de Polaca. Je ne sais pas ce que la police à Benkovac

27 a fait à ce sujet, mais toujours est-il que nous sommes allés voir les

28 habitants pour que ces activités, les combats s'arrêtent et pour que la vie

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1 reprenne son cours normal dans cette région.

2 Q. Vous avez eu ces entretiens; est-ce que vous pouvez nous dire quand ?

3 Est-ce que vous pouvez nous dire s'il y a eu un accord ?

4 R. C'était le 6 mai, le matin, à 8 heures du matin.

5 Q. Quelle année ?

6 R. En 1991. Un certain Bobanovic du village de Polaca, un homme en vue

7 était venu. Je pense qu'il s'appelait Franjo. Nous sommes venus dans la

8 maison de Djuro Miljevic, qui était un citoyen assez respecté. Il est venu,

9 parce que ce jour-là il y avait une fête dans sa famille. Il venu justement

10 participer à cela. Mais ce n'était pas une fête à la fin. Nous avons

11 effectivement discuté. J'ai eu des bons contacts, des rapports avec ce

12 village avant la guerre, et on a décidé de continuer à collaborer, que les

13 armées allaient se retirer, que les gens allaient vaquer à leurs

14 occupations habituelles, agricoles et autres. On s'est dit qu'on allait

15 tout arrêter tout de suite ou dans une heure, donc nous avons fait cela

16 normalement. Tout le monde était content. Il s'agit du village Jagodnja

17 Gornja.

18 Q. Est-ce que cet accord a été respecté par la suite ?

19 R. Pour une période très brève, oui. Pendant plusieurs jours, quelques

20 jours, les gens ont travaillé dans les champs. Pendant la nuit, il y a eu

21 des provocations avec les armes d'infanterie. Cela a duré sept ou 10 jours,

22 peu importe. Je sais que c'était l'époque, la saison pour labourer les

23 champs.

24 Q. Votre commandant local à Benkovac, la Défense territoriale, pendant le

25 mois de mai 1991, il s'agissait donc d'une information en temps de paix ?

26 R. Oui, j'étais tout seul. J'étais le seul à être là, à travailler

27 activement. Mes collaborateurs ont travaillé jusqu'à

28 2 heures de l'après-midi, ensuite ils rentraient chez eux. J'étais le seul

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1 à continuer à travailler avec les informations et je les envoyais à Split.

2 Q. Quand vous dites que vous recueilliez des informations pour les envoyer

3 à Split, pourriez-vous nous dire - même si l'on peut comprendre de quoi

4 vous parlez - mais dites-nous tout de même quelle était la nature de ces

5 informations et quelles étaient les personnes que vous informiez à Split.

6 R. Il s'agissait des informations ayant trait exclusivement à la sécurité

7 et à la cause militaire. Je travaillais à Benkovac. Il fallait que j'aille

8 sur le terrain voir quelle est la situation et voir exactement ce qui se

9 passe et en informer mon commandement supérieur.

10 Q. Jusqu'à quel moment existent les formations en tant que telles de la

11 Défense territoriale de Benkovac ?

12 R. Jusqu'au 15 juillet 1991, bien sûr. C'est à ce moment-là que nous avons

13 été invités par le président du gouvernement M. Milan Babic d'assister à

14 une réunion à Knin, nous les commandants de la Défense territoriale et les

15 chefs de police des municipalités de la SAO Krajina.

16 Lors de cette réunion, c'était une réunion à huis clos, je dirais, nous

17 avons été informés de la situation du domaine de la sécurité sur le

18 territoire de la SAO Krajina, qui s'était prononcé pour une sorte

19 d'économie, et qu'il fallait encore traduire politiquement des propositions

20 précises. L'information a été donnée, ensuite il y a eu un ordre. Les QG

21 municipaux devaient être mobilisés d'après un ordre et ils devaient

22 atteindre un certain niveau d'aptitudes au combat pour pouvoir agir par la

23 suite.

24 Comme la situation se détériorait en permanence, surtout entre les 15

25 et 30 juillet 1991, de façon quotidienne, puisque nous étions quand même

26 assez nombreux, nous rassemblions des informations et nous avions des

27 contacts avec les commandements de la JNA.

28 Q. Merci. Vous avez dit que M. Babic vous a convoqué pour assister à une

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1 réunion, et il s'agissait de parler de la situation du point de vue de la

2 sécurité. Pouvez-vous nous dire quelle était la raison pour laquelle on a

3 mobilisé les QG de la Défense territoriale ?

4 R. Les rapports entre différents groupes ethniques sur le territoire de la

5 SAO Krajina et en Croatie s'étaient détériorés. On ne contrôlait plus la

6 situation. Pour protéger la population serbe, il a fallu mobiliser la

7 Défense territoriale.

8 M. MILOVANCEVIC : [aucune interprétation]

9 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

10 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

11 Q. Que s'est-il passé le 30 et le 31 juillet ? Est-ce qu'il y avait des

12 raisons pour faire la mobilisation ?

13 R. Le 30 juillet, par le QG de la Défense territoriale de Benkovac, j'ai

14 été informé par l'officier de garde que les femmes, les bergères qui

15 gardaient leur bétail en direction de Biograd et de Sibenik, ont remarqué

16 des mouvements plus importants en direction de ces villages serbes. Il

17 s'agissait des forces de la police paramilitaires, les forces de police du

18 MUP de la République de Croatie venant du village de Vuksic en direction de

19 villages serbes. On a lancé une attaque avec les forces qui correspondaient

20 à peu près à une compagnie. Une centaine de soldats du MUP ont attaqué ces

21 villages qui étaient complètement sans défense, sans arme.

22 Du sud, en direction de la municipalité de Benkovac, en direction des

23 villages de Miranje Donje et Ceronja, un groupe terroriste d'à peu près

24 quatre personnes est parti dans cet axe. Puis, en direction du village de

25 Ceronje Gronje, un autre groupe de terroristes attaquait. J'y suis allé,

26 voir de quoi il s'agissait. Il y avait trois terroristes qui faisaient du

27 sabotage, des actions de sabotage dans la région.

28 Q. Est-ce qu'il y a eu un conflit ?

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1 R. Vous aviez les forces croates, enfin, cette compagnie croate qui

2 marchait le long de cet axe, et vous aviez les villageois serbes qui

3 étaient un peu partout. Les gens habitaient là-bas. Ils avaient monté des

4 barrages. Ils avaient leurs fusils de chasse, et cetera. Ils les ont

5 avertis en tirant. C'était assez pour les arrêter. La police était là

6 aussi. Ils avaient leurs armes d'infanterie, c'était tout à fait normal.

7 Ils se sont déployés pour aider le peuple. Les gens étaient complètement

8 paniqués.

9 J'y suis passé, j'ai fait un tour de tous ces axes pendant à peu près

10 une heure, et la police effectivement est allée aider les villageois des

11 villages dans la direction de Vukovar. Le groupe qui marchait dans l'autre

12 direction - après on a compris qui c'était - a attaqué une garde

13 villageoise qui se trouvait là, et les gens qui étaient là ont tiré. Ils

14 ont liquidé un membre de ce groupe. On ne le savait pas au début, on l'a

15 appris cinq ou six jours plus tard.

16 Le groupe qui a attaqué en direction de Pristeg [phon] et de Gornji

17 et Donji, ils avaient plusieurs saboteurs au milieu du terrain, ils étaient

18 déjà entrés dans la région des villages serbes. Les villageois étaient là,

19 ils montaient la garde --

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ralentissez, s'il vous plaît.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais en mesure de suivre les

22 déplacements de ces trois saboteurs. Je les ai suivis à l'aide des

23 jumelles. J'étais en hauteur, et ils ont été encerclés par ces villageois

24 qui, de façon complètement spontanée, armés de fusils de chasse, des armes

25 de fortune, se sont défendus et ils ont attaqué ce groupe qui s'était caché

26 dans un verger, dans des vignes.

27 Q. Est-ce que ce groupe a été arrêté ?

28 R. Oui, pendant la nuit. Le groupe a été bloqué pendant toute la journée.

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1 Le matin, quand les membres de ce groupe ont essayé de percer

2 l'encerclement, de sortir, on leur a tiré dessus et ils ont été tués.

3 Q. Pendant cette période, vous dites que cela se produisait autour du 30

4 juillet 1991, dites-moi, à l'époque à Benkovac, est-ce qu'il y avait une

5 caserne de JNA ?

6 R. Oui.

7 Q. Quelle était la taille de cette caserne ?

8 R. C'était une caserne grande, qui pouvait en permanence assurer la

9 sécurité de deux unités d'une taille d'une brigade, donc 5 000 ou 6 000

10 personnes. Il y avait en permanence 2 000 ou 3 000 hommes là-bas en

11 permanence, en temps de paix, encore.

12 Q. Quelle était la situation quant aux axes de communication que

13 comptaient les unités de la JNA pendant cette période-là ? Je ne parle pas

14 seulement à Benkovac, je ne parle pas seulement de la caserne.

15 R. Le commandement a demandé que toutes les structures fassent tout ce qui

16 est possible pour garder la paix, pour préserver la paix et pour ne pas

17 bloquer les routes. Cependant, vous aviez les contrôles permanents

18 exclusivement sur les frontières des municipalités en direction de Zadar et

19 Sibenik. Donc, ce qui se passait, c'est que pendant la journée, on érigeait

20 les barrages, puis on les détruisait. On les démantelait pendant la journée

21 parce que les gens avaient peur.

22 Q. Vous avez dit que l'on érigeait les barrages dans les villages, mais

23 dans quels villages et qui les démantelait par la suite ?

24 R. Cela est arrivé même qu'on fasse des barrages entre deux ou trois

25 villages serbes, ce qui démontrait bien qu'il n'y avait pas de logique là-

26 dedans, parce que là, il s'agissait des villages serbes. Parfois, nous

27 avions même reçu des ordres nous ordonnant de démanteler des barrages, par

28 exemple, les compagnies d'entretien de routes, et cetera.

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1 Q. Nous parlons de l'été 1991. Est-ce qu'il y a eu d'autres provocations

2 au niveau de la circulation à l'époque, qui entravaient la circulation ?

3 R. J'étais commandant de la TO et je n'ai absolument pas participé

4 directement aux activités de la JNA. Je ne pouvais pas le faire. La JNA

5 avait des problèmes, parce qu'il s'agissait de débloquer les casernes de

6 Sibenik en 1991, en automne. Après qu'un accord a été passé entre le

7 gouvernement de la République de la Croatie et la présidence de la RSFY

8 permettant à la JNA de sortir son matériel, ses armes, et cetera, de la

9 caserne de Zemunik, de l'aéroport de Zemunik en Croatie, c'est à ce moment-

10 là que la caserne a été évacuée.

11 Q. Vous avez parlé d'un accord passé entre la présidence de la RSFY et le

12 gouvernement de Croatie concernant le déblocage -- le démantèlement des

13 barrages. Est-ce que cela a été respecté ?

14 R. Non. Au niveau de Benkovac, oui, mais le côté croate faisait tout pour

15 empêcher justement que l'on parte avec l'équipement. Les Croates faisaient

16 tout ce qui était possible pour détruire cet équipement.

17 Q. Quelles étaient ces forces croates ? Elles se trouvaient dans quels

18 villages ? Elles se trouvaient où ?

19 R. C'étaient les ZNG, les policiers de réserve, du MUP. Les villages

20 principaux étaient Skabrnja et Nadin -- ou plutôt, Nadinska Gradina.

21 Q. Merci. Que faisait-on exactement pour empêcher que la JNA se retire

22 avec son équipement ?

23 R. Vous aviez les armes d'infanterie et aussi des canons antiaériens, et

24 on tirait de ces armes. Et très souvent on empêchait les sorties des

25 différentes installations, équipements d'Udbina parce qu'ils tiraient des

26 armes de calibre 12,7 millimètres.

27 Q. Vous avez parlé des canons antiaériens et des mitrailleuses

28 antiaériennes. Où se trouvaient exactement ces armes ?

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1 R. A Nadinska Gradina. C'était un endroit un peu élevé, fortifié,

2 complètement invisible et enterré, enfoncé dans le terrain. C'est de là

3 qu'ils tiraient en direction de la route Zadar-Benkovac qui passe par la

4 région. Ils étaient là, élevés, sur un point élevé sur la colline. Ils ont

5 aussi tiré sur un avion de fret qui décollait de l'aéroport.

6 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire d'où vous tenez ces informations, et

7 des informations concernant l'équipement, mais aussi concernant les

8 conséquences de tout cela ?

9 R. Je peux dire que tout d'abord nous avons observé la région, donc comme

10 cela, nous avons eu accès à un certain nombre d'informations. Ensuite, les

11 forces de la JNA ont saisi ces équipements. Par la suite, nous avons pu

12 savoir quelles étaient ces armes. Je peux vous dire aussi que des véhicules

13 ont été endommagés par les tirs, et nous pouvions voir quelles étaient ces

14 armes d'où l'on tirait.

15 Q. Vous avez dit que les convois de la JNA ont été attaqués. C'est de cela

16 que vous parlez ?

17 R. Oui.

18 Q. Quel était l'équipement technique que la JNA essayait de sortir ?

19 R. C'était l'équipement électronique. Là-bas se trouvait l'académie

20 militaire, les forces aériennes. Il y avait aussi l'aéroport militaire,

21 d'énormes quantités de pétrole, de gasoil et de carburant pour les

22 hélicoptères. Il s'agissait d'énormes quantités de biens techniques,

23 matériels, et cetera. L'armée a réussi à sortir une grande partie de cet

24 équipement.

25 Cependant, quelque part sur la route, les forces croates ont commencé

26 à tirer sur eux et une quinzaine ou une vingtaine de chauffeurs qui

27 assuraient l'escorte de ces convois ont été tués et les biens matériels ont

28 été pris, saisis.

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1 Q. Cette route qui traverse les champs, qui était construite par l'armée,

2 où elle commençait et où elle se terminait ?

3 R. Elle partait de l'aéroport de Zemunik, au nord de Zemunik en passant

4 par le village de Smokovici, ensuite jusqu'à Gornji Zemunik et le village

5 de Smilcic, vers Knin, et cetera.

6 Q. Pourquoi on a construit cette route ?

7 R. Parce qu'on ne pouvait pas prendre cet équipement en utilisant les

8 routes régulières, et tout ceci, suite à l'accord passé entre le

9 gouvernement croate et la présidence de la RSFY.

10 Q. Vous avez dit que 15 à 20 personnes ont trouvé la mort en empruntant

11 cette nouvelle route. De quel côté ?

12 R. Du nôtre. Il s'agissait de chauffeurs de camion, de membres de l'armée

13 qui servaient d'escorte aux convois, donc toutes les personnes qui

14 assuraient la sécurité des convois. Quand les forces croates ont commencé à

15 tirer, ils sont tombés sous le feu des Croates.

16 Q. Merci. Vous avez parlé de Nadinska Kosa et Skabrnja. S'agissait-il des

17 villages qui appartenaient à la municipalité de Benkovac ?

18 R. Oui, Nadin, c'était un village mixte, en ce qui concerne sa composition

19 ethnique. Cela dit, c'était quand même principalement habité par des

20 Croates. Les Serbes étaient déjà partis depuis très longtemps à cause de la

21 présence des forces paramilitaires croates. Il ne restait plus que des

22 Croates à Nadin.

23 Pour ce qui est de Skabrnja, c'est un village dans la municipalité de

24 Zadar. En termes économiques, c'est le village le plus riche. C'est un

25 village qui se trouve à la frontière de la municipalité de Zadar et de la

26 municipalité de Benkovac.

27 Q. Vous avez dit que Skabrnja était le village croate le plus puissant, le

28 plus fort. Où est-ce que ce village avait réussi à obtenir ces

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1 mitrailleuses antiaériennes, ces canons antiaériens, enfin, tous ces

2 armements ?

3 R. Je ne sais pas du tout où ils avaient obtenu leurs armes, mais ayant

4 fait des reconnaissances, nous nous sommes rendu compte qu'ils avaient des

5 armes, et nous avons ensuite réussi à saisir ces armes.

6 Vous me demandez d'où j'avais obtenu ces informations. J'étais quand

7 même dans une position qui me permettait d'écouter les conversations entre

8 le général Kadijevic, le chef d'état-major, et le général Ratko Mladic, qui

9 était déjà général d'ailleurs. Il commandait la 180e Brigade d'ailleurs, et

10 lors de cette réunion où en tant que commandant de la TO j'ai participé, on

11 nous a fait un briefing sur la situation en matière de sécurité.

12 A ce moment-là, le général Mladic a été appelé au téléphone pour

13 qu'il parle au téléphone avec le chef d'état-major, le général Adzic, et la

14 plupart des officiers ont dû quitter la pièce parce qu'ils n'étaient pas

15 censés écouter cette conversation téléphonique. Avec les autres

16 commandants, j'ai pu rester dans la pièce. Le général Adzic a demandé

17 pourquoi cet avion de la JNA avait atterri à Belgrade en mauvais état, donc

18 endommagé, puisque visiblement on avait tiré dessus. C'est ainsi qu'il

19 avait été endommagé. Le général Mladic a dit qu'il n'avait aucune

20 information là-dessus, mais qu'il allait se pencher sur ce problème et

21 qu'il allait faire rapport ensuite à l'état-major de Belgrade.

22 L'INTERPRÈTE : L'interprète fait remarquer qu'il convient de

23 remplacer Kadijevic par Adzic, tout en haut du paragraphe.

24 R. Le général Adzic a demandé au général Mladic de faire de son mieux pour

25 établir ces contacts avec le côté croate, et ce, pacifiquement, et les

26 informer de l'existence d'un accord concernant la récupération des

27 matériels. Cela, bien sûr, il s'agit de quelque chose qui est arrivé 10

28 jours avant que le conflit armé n'éclate à Skabrnja.

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1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

2 Q. Très bien. Très bien.

3 Savez-vous quoi que ce soit à propos de ce qui s'est passé à Skabrnja

4 en novembre 1991 ?

5 R. Oui, puisque tout ce qui avait trait à la Défense territoriale et

6 à tout ce qui s'est passé par la suite en Skabrnja est bien connu.

7 Q. Comment avez-vous appris tout cela ? Pouvez-vous nous dire si la

8 Défense territoriale a été impliquée dans les actions de combat de Skabrnja

9 ?

10 R. Oui, la Défense territoriale a été impliquée de façon indirecte

11 dans cette action. Je vais d'abord vous expliquer ce qui s'est passé au

12 niveau de la préparation des actions.

13 Le soir, vers 6 à 7 heures du soir, en novembre, j'ai été invité là comme

14 commandant de la TO et Drazic en tant que chef de la police de Benkovac.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] L'interprète n'a pas entendu la date

16 en novembre. Il s'agissait de la soirée vers 6 ou

17 7 heures, mais de quel jour ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Du 17.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais de quelle année, 1991 ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis désolé. C'était bien 1991. C'était le

21 17 novembre 1991.

22 Puis-je poursuivre ?

23 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

24 Q. S'il vous plaît, dites-nous toujours l'année quand vous indiquez une

25 date. Il convient vraiment de préciser aussi de quelle année vous parlez.

26 R. Très bien. Je m'exécuterai.

27 Q. Vous avez dit que vous avez été invité. Où êtes-vous allé ? Qu'avez-

28 vous trouvé ?

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1 R. J'ai été invité par le chef d'état-major de la

2 180e Brigade, le lieutenant-colonel Momcilo Bogunovic.

3 Q. Vous dites que c'était lors de la soirée du

4 17 novembre 1991. Que vous a dit ce lieutenant-colonel à cette occasion, ce

5 lieutenant-colonel Bogdanovic ?

6 R. Le lieutenant-colonel Bogdanovic nous a dit qu'il y avait une action

7 qui était prévue et qu'il y avait une mission pour la TO, pour notre TO, vu

8 nos compétences et l'endroit où nous étions installés. L'officier

9 opérationnel de l'époque qui était le lieutenant-colonel Babic - je ne me

10 souviens pas de son prénom - avait préparé un plan et a donc déclaré que

11 les commandants des différentes TO se verraient attribuer la mission de

12 préparer les unités de la TO aux combats, en face de la ligne de

13 démarcation entre les Croates et les Serbes, sur l'axe de Skabrnja. Pour

14 moi, cela signifiait que les gardes du village devaient arrêter de monter

15 la garde puisque l'opération de la JNA était en préparation. Il fallait

16 maintenant être en état d'alerte renforcé.

17 Q. Vous avez fait mention des gardes du village qui devaient être en état

18 d'alerte. Où se trouvaient-ils ?

19 R. Il s'agit des villages qui étaient dans la partie occidentale de

20 Benkovac.

21 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Le témoin a dit qu'il fallait mettre

22 en état d'alerte ces gardes, n'est-ce pas, de village ?

23 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

24 Juges, je ne sais pas si j'ai bien cité le témoin. Je vais reformuler ma

25 question, car je pense que j'ai peut-être été un petit peu imprécis dans la

26 formulation de ma question.

27 Q. On vous a donné pour mission - quand vous parlez d'un village ou d'une

28 unité, s'il vous plaît, précisez exactement de quoi il s'agit. Quelle était

Page 10154

1 l'unité de village que vous aviez en tête en tant que chef de la TO ?

2 R. C'était le groupe de la TO d'une commune locale de Biljana Donja, à peu

3 près dix personnes. C'était un petit groupe, un petit groupe dans ce

4 village de Veljane, de Milici [phon], dans un village qui était juste à la

5 frontière de la municipalité de Zadar.

6 Q. Je vous ai interrompu. Dites-nous exactement quelle était votre mission

7 qui vous avait été attribuée lors de cette réunion.

8 R. On nous a informés que la JNA avait reçu l'ordre de se regrouper, non

9 pas pour montrer sa force par le biais de tirs, mais de montrer sa présence

10 au moins aux environs de Skabrnja et de contacter les représentants des

11 forces armées croates, c'est-à-dire la ZNG ou la force qui s'y trouvait là

12 et qui représentait le côté croate, pour essayer de mettre sur pied des

13 négociations. Des officiers bien précis ont été nommés. On leur a donné

14 toute une liste de sujets qui devaient être discutés. Le but était de bien

15 avertir les forces croates, de leur dire qu'il ne convenait plus de tirer

16 sur les convois et sur les aéronefs, comme ils l'avaient fait par le passé,

17 et les avertir aussi qu'il convenait que les forces croates se retirent de

18 la zone. Suite à un accord qui avait été signé, un accord politique, ils

19 devaient rétablir le passage sur la route.

20 Pour ce qui est de l'infanterie de la JNA, tous les officiers d'active de

21 la JNA ont pris part à l'opération en ce qui concerne l'infanterie. L'unité

22 qui a été mise sur pied faisait à peu près

23 80 hommes. Pour ce qui est de l'emploi des moyens armés, il y a eu

24 artillerie, unité mécanisée avec huit à dix véhicules de transport de

25 troupes blindés. Les équipiers à bord des chars n'étaient que des

26 conscrits, des conscrits qui étaient sous les drapeaux pour leur service

27 national. Les officiers étaient aussi des officiers d'active de la JNA.

28 Certaines des personnes à bord des blindés de transport de troupes venaient

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1 de la TO. Mais ce n'était pas de la TO locale de Benkovac, mais plutôt de

2 Bosnie ou de Serbie, et cetera. Et c'étaient des personnes extrêmement

3 qualifiées, qui avaient été formées au maniement des véhicules de transport

4 de troupes blindés, des VTT. Ce sont ces soldats, membres des forces de la

5 réserve, qui se sont retrouvés vers Benkovac et qui ont été tout d'abord

6 hébergés dans une sorte de kolkhoze, le kolkhoze de Smilcic. Ils y étaient

7 arrivés d'ailleurs plusieurs jours auparavant.

8 J'étais venu là d'ailleurs trois à quatre jours avant, parce que je voulais

9 montrer au commandant du 9e Corps, le commandant en charge du moral des

10 troupes, où se trouvait exactement cette ferme collective. Il faisait nuit,

11 je l'ai emmené là avec ces hommes qui étaient des renforts, mais eux, ils

12 voulaient rentrer chez eux. Cela faisait déjà un moment qu'ils étaient

13 mobilisés.

14 Q. Vous avez dit que c'étaient des soldats qui étaient mobilisés au sein

15 de la JNA ?

16 R. Oui, de la JNA, ce n'était pas uniquement de Croatie, ils venaient de

17 partout. Il y avait même des Macédoniens.

18 Q. Vous avez mentionné avoir emmené l'officier, vers ce kolkhoze. Qui

19 était-il ?

20 R. C'était le colonel Mesud.

21 Q. Mesud Hasotic, peut-être ?

22 R. En effet, Mesud Hasotic. J'étais là quand il a parlé à ces hommes, et

23 il a dit : Ecoutez, Messieurs, dans quelques jours, je ne sais pas

24 exactement quand, nous allons avoir une mission simple, une mission où il

25 n'y aura aucun combat. Vous pourrez rentrer, après vous pourrez rentrer

26 chez vous. Donc, ne vous plaignez pas, vous ne risquez rien, il ne va rien

27 se passer. Il a réussi à les calmer.

28 Maintenant, je vais retourner à Skabrnja pour vous parler de la composition

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1 des forces qui s'y trouvaient, y compris les forces de la réserve. Le

2 commandant des forces - donc il y avait des chars, des véhicules de

3 transport de troupes - était Miodrag Stevanovic, qui était un lieutenant

4 d'active. Sous ses ordres, il y avait des jeunes types qui faisaient leur

5 service national. Sa mission était d'utiliser un mégaphone alors qu'il

6 était à bord d'un char pour s'adresser aux personnes de Skabrnja et leur

7 dire de poser leurs armes et de ne pas tirer. Un des soldats qui était avec

8 lui d'ailleurs portait le drapeau.

9 Q. Vous avez parlé de l'officier d'abord --

10 R. Oui, c'était le plan.

11 Q. Vous avez parlé d'un officier de la JNA qui était Stevanovic et des

12 soldats ?

13 R. Oui. Ils faisaient tous les deux partie de la JNA. Il y avait

14 l'officier de la JNA et puis le soldat.

15 Quand la colonne a traversé la partie occidentale de Skabrnja --

16 Q. Je suis désolé, il faudrait s'arrêter. Il faudrait que vous

17 attendiez ma question avant de répondre.

18 Le 17 novembre 1991, vous êtes allé à une réunion avec le lieutenant-

19 colonel Bogunovic; est-ce qu'il vous a parlé de cette mission le 17

20 novembre ?

21 R. Oui.

22 Q. Quand est-ce que l'action était prévue ?

23 R. Le lendemain le 18, à partir de 8 heures du matin, une fois que chacun

24 avait reçu son ordre de mission.

25 Q. Que s'est-il passé le 18 novembre 1991 ? Quand est-ce que l'action a

26 commencé ? Pouvez-vous la décrire brièvement ?

27 R. L'unité est partie de ce kolkhoze à Smilcici où étaient hébergées les

28 forces de la réserve et a suivi la route Smilcic, Zemunik Gorji. Le but,

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1 c'était de tourner vers Skarbrnja en fin de compte. Les choses se sont

2 déroulées comme prévu. J'étais à Smiljani Donji, avec d'autres officiers

3 qui avaient reçu pour mission de se trouver là, et j'ai suivi toute

4 l'opération par le biais des moyens de transmission.

5 Q. Vous dites que l'unité est partie de Smilcici. C'était bien l'unité de

6 la JNA ?

7 R. Oui, tout à fait.

8 Q. Avant de passer à la description même de l'action, pourriez-vous nous

9 dire quel était le niveau des forces engagées par la Défense territoriale ?

10 Combien y avait-il de personnes impliquées dans cette opération ?

11 R. En plus des forces venant des communes locales ou des villages locaux,

12 donc ces 15 à 20 hommes dont je vous ai parlé, qui étaient là pour assurer

13 la sécurité des dispensaires, des transformateurs électriques, et cetera,

14 ma mission, pour ce qui me concerne - j'ai reçu un ordre de mission

15 d'ailleurs, à ce but - était de me préparer à l'escalade de la violence, si

16 jamais il y avait une escalade. Bien sûr, le but était d'éviter le pire,

17 d'éviter justement qu'il y ait escalade. Il fallait que je protège mes

18 unités de Défense territoriale dans ces villages ainsi que les civils qui

19 se trouvaient à la municipalité de Benkovac.

20 Le matin, j'ai préparé un groupe d'environ 12 hommes, une unité

21 antisabotage qui existait déjà en temps de paix, et je leur ai demandé de

22 monter à bord d'un minibus et de se recantonner à Biljani Donji. Cette

23 unité a été escortée par deux mortiers de 82-millimètres avec servants.

24 Evidemment nous suivions le règlement. Il y avait aussi une escorte

25 médicale, il y avait une ambulance présente. Il me semble que c'était Mme

26 Pupovac qui était en charge de cette ambulance. Déjà, elle s'occupait de

27 tout ce qui était problèmes médicaux en temps pacifique. Ils m'ont rejoint,

28 c'est-à-dire dans la région de Biljani Donji, où il y avait certains

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1 officiers de la JNA qui étaient déjà là et qui étaient aussi en mission.

2 J'ai donc réussi à suivre toute l'opération par le biais des moyens de

3 transmission.

4 Q. Merci. Vous nous avez bien décrit les forces de votre côté. Pourriez-

5 vous nous dire combien d'hommes servaient au sein de l'unité de la Défense

6 territoriale que vous aviez mise sur pied ?

7 R. Vingt-cinq à 30 hommes. Ils étaient soit prêts à s'engager directement

8 au combat ou alors ils étaient sur le pied de guerre.

9 Q. Très bien. Vous nous dites que ces forces se trouvaient au même endroit

10 que vous. Pouvez-vous répéter exactement où ces forces se déployaient ?

11 R. Elles étaient déployées à Biljani Donji, qui est le hameau de Skoric,

12 qui se trouve juste à côté de l'école, sur la route.

13 Q. A quelle distance cela se trouve de Skabrnja, du village de Skabrnja, à

14 vol d'oiseau ?

15 R. Environ 2 kilomètres, 2 à 3 kilomètres.

16 Q. Cette unité de la TO, la vôtre, si je peux l'appeler, ces 25 à 30

17 hommes qui formaient votre unité de la TO, quand sont-ils arrivés à Biljani

18 Donji ?

19 R. Le matin, avant 7 heures du matin, le 18 novembre 1991.

20 Q. Merci. Vous avez dit qu'au matin l'unité de la JNA s'était ébranlée.

21 Pourriez-vous nous répéter à nouveau quelle était la composition de cette

22 unité de la JNA qui s'ébranlait vers Skabrnja ?

23 R. Je vous l'ai déjà dit, c'était une unité d'infanterie mécanisée avec

24 huit à neuf véhicules de transport de troupes blindés, les APC.

25 Q. Pourriez-vous nous dire exactement ce que signifie l'infanterie

26 mécanisée ?

27 R. Il s'agit de fantassins qui sont transportés sur la zone de combat et

28 qui utilisent un APC pour se faire transporter, le véhicule de transport de

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1 troupes blindé.

2 Q. Très bien. Merci. Il y en avait sept à huit, de ces véhicules transport

3 de troupes blindés. Vous avez parlé de chars aussi.

4 R. Oui, il y avait environ trois chars. Cela, c'était vraiment pour

5 montrer notre force, pour impressionner l'ennemi, pour montrer que la JNA

6 était puissante et que la JNA pouvait utiliser sa puissance de feu si

7 nécessaire. Les chars avaient leur équipe à bord.

8 Q. Vous dites qu'ils sont partis de votre base à 7 heures du matin.

9 Comment savez-vous quelle route ils ont empruntée ?

10 R. Je le sais parce que j'étais là quand ils se sont ébranlés. J'étais

11 toujours dans cette espèce de kolkhoze, et les officiers de la JNA qui

12 étaient à Biljani Donji avaient emprunté une route différente. Ils sont

13 arrivés à Biljani Donji environ cinq minutes après que je sois arrivé.

14 J'avais pris une autre route qu'eux. Je ne les ai pas escortés.

15 Q. Très bien. Dites-moi ce qui est arrivé à la colonne de la JNA avec les

16 trois chars et les sept ou huit APC quand ils sont arrivés à Skabrnja.

17 Quelle route ont-ils prise ? Où sont-ils allés ? Pouvez-vous dire ce qui

18 s'est passé ?

19 R. La colonne est arrivée à l'embranchement Zemunik Gornji, Skabrnja

20 Zadar. Ils sont partis vers la gauche au travers du hameau appelé Ambar

21 [phon]. Il y avait beaucoup de Croates là-bas. Nous avons reçu des

22 informations que les Croates, d'ailleurs, ont salué l'armée lorsqu'elle

23 passait. Visiblement, ils ont continué à avancer animés des meilleures

24 intentions.

25 C'est un hameau appelé Ambar qui fait 300 à 400 mètres. Ensuite, on arrive

26 à nouveau à la grand-route et on arrive à l'entrée, au centre presque de

27 Skabrnja plutôt, qui relie Biljani Donji à Zadar. Là, on parle d'une

28 distance de 300 à 400 mètres au plus.

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1 Q. Excusez-moi, mais jusqu'à ce moment, est-ce qu'il y a eu des tirs de

2 quelque côté que ce soit ?

3 R. Non, pas du tout. Tout semblait être normal.

4 Q. Merci. Que s'est-il passé par la suite ?

5 R. Lorsque le convoi est arrivé à cette intersection des routes, Biljani

6 Donji et Zadar, Skrabrnja - parce Skrabrnja va dans les deux sens, n'est-ce

7 pas, il y a un carrefour - là, le convoi s'est arrêté. D'après mes

8 informations, ce lieutenant Stevanovic descend de son transport blindé,

9 transport de troupes, prend le mégaphone, un soldat l'escorte, portant un

10 drapeau, parce qu'à une distance de 50, 60 mètres en face d'eux, il y avait

11 des gens, ils voyaient des gens. Lui, il a fait en sorte que les moteurs

12 soient arrêtés et il voulait contacter ces gens-là, ce groupe de gens.

13 A ce moment-là, du côté des Croates, quelqu'un tire pour toucher au

14 front, à la tête, le lieutenant qui, sur place, illico, tombe mort. Il y

15 avait donc le soldat qui était escorté avec un drapeau. Il s'agit de parler

16 de quelqu'un qui n'avait pas plus de 19 ou 20 ans et d'appartenance

17 ethnique musulmane. Lui, voulait venir en aide au lieutenant et il a été

18 tué lui aussi.

19 Q. Tué par qui ?

20 R. Par des membres, des paramilitaires de l'armée croate de Skabrnja.

21 Q. Que s'est-il passé ensuite ?

22 R. Ensuite, c'est le chaos qui s'installe, qui a duré peut-être une demi-

23 heure à peine. Des deux côtés on a tiré dessus, les uns sur les autres.

24 Cela dit, les officiers de la JNA de Biljani Donji avaient donné

25 l'ordre, explicitement fallait-il cesser le feu. Les gens de la JNA ne

26 pouvaient pas arrêter le tir, parce que les autres du côté croate tiraient

27 évidemment de plus en plus farouchement. A un moment donné, un armistice,

28 un cessez-le-feu s'installe.

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1 Q. Vous avez dit que ces tirs duraient pendant une demi-heure, après quoi

2 il y a eu évidemment un cessez-le-feu ?

3 R. Oui, exact.

4 Q. Que s'est-il passé ensuite ?

5 R. Là où il y avait le colonel Bogunanic, la Brigade de Benkovac a été

6 informée. Il a été demandé que le commandant du

7 9e Corps donne des ordres à suivre dans le sens où il a fallu voir ce

8 groupe se relier ou bien prendre position pour évidemment garder les

9 positions ou aller de l'avant. Voilà les trois possibilités.

10 En face de ce groupe, le commandant Janko Djurica, encore commandant

11 d'un régiment d'artillerie de Benkovac, s'achemine vers eux. Lui, il a

12 probablement reçu cet ordre de la garnison de Benkovac pour aller apaiser

13 la situation, et il sera en route, informé de ce que lui conviendra de

14 faire. Le commandant Djurica s'y rend, on ne tire plus. Les pourparlers

15 n'ont duré qu'une quinzaine de minutes. On attendait d'autres ordres.

16 Pendant ce temps-là, les forces croates s'étaient consolidées, et de

17 façon organisée, s'attaquent au convoi, à la colonne de transports de

18 troupe blindés et des chars. Evidemment, tout le monde prend ses positions,

19 les transports blindés de troupe et les chars, et il y avait un tir

20 généralisé des deux côtés.

21 Les choses ainsi en escalade, on avait essayé de contacter la partie

22 croate pour mettre une fin et un terme à ces activités de combat. La partie

23 croate ne voulait pas s'y engager, et étant donné tant de morts et de

24 blessés, étant donné l'attaque de lancée à l'encontre des chars de la JNA,

25 le tout a évolué de sorte qu'on avait repris le chemin de Skabrnja pour

26 avancer.

27 Q. Pendant combien de temps ont duré ces activités de combat en date du 18

28 novembre 1991 ?

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1 R. Ces tirs et ces activités de combat ont duré jusqu'à la tombée de la

2 nuit.

3 Q. Merci. Monsieur Lakic, vous étiez à Skabrnja. Il s'agit d'une autre

4 position. Comment savez-vous ? D'où tenez-vous toutes ces informations ?

5 R. Je suis entré dans Skabrnja lorsque l'action a été arrêtée. Pour parler

6 de la force et des effectifs que j'avais en réserve, tous mes effectifs

7 étaient pratiquement transformés en forces chargées de l'évacuation de

8 blessés, de militaires et civils. Le minibus qui a servi pour transporter

9 ma section d'antisabotage, je crois que ce minibus, à cinq ou six reprises,

10 s'est occupé de l'évacuation de personnes âgées, de femmes et d'enfants de

11 Skabrnja. Lorsque vers 17 heures il n'y avait plus d'activités de combat,

12 lorsque tout s'était arrêté, que les Croates s'étaient retirés, considérant

13 qu'il y avait encore des civils à Skabrnja au cours de la soirée et de la

14 nuit, je devais m'occuper de leur évacuation.

15 Tous ces gens-là que nous avons pu trouver ont été évacués vers Benkovac, à

16 savoir vers un jardin d'enfants, vers une école élémentaire qui ne

17 fonctionnait pas et vers d'autres installations de la TO à notre

18 disposition. Je crois qu'environ 120, 130 civils, personnes âgées, femmes

19 et enfants ont été évacués. Bien sûr, au cours de cette nuit, je me suis

20 rendu personnellement. Je leur ai demandé ce qu'il fallait faire avec. Eux,

21 ils ont proposé de leur permettre de passer vers le côté croate pour

22 retrouver les leurs.

23 J'avais demandé à une firme de Benkovac, qui s'occupait de transport,

24 j'avais demandé des autocars pour s'occuper de ces civils, pour les

25 transporter vers le point le plus proche des parties croates, et ainsi fut

26 fait. Vers 20 heures, 21 heures, ces gens-là ont donc pu passer vers la

27 Croatie.

28 Q. Vous avez dit que plus d'une centaine de civils habitants de Skabrnja

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1 ont été évacués de la part des membres de la TO --

2 R. Oui.

3 Q. -- cela, pendant les combats, n'est-ce pas ? Pouvez-vous nous dire

4 combien d'habitants il y avait dans le village de Skabrnja à cette époque-

5 là ?

6 R. Je ne saurais vous préciser le nombre d'habitants, peut-être

7 approximativement il y avait 2 000 habitants. C'est un village assez

8 étendu, assez grand. Par conséquent, il couvre un territoire assez étendu,

9 dans les 2 000, oui.

10 Q. Vous avez pu évacuer plus d'une centaine de personnes. Qu'est-il advenu

11 des autres civils ?

12 R. Pour ce qui est des restants de civils, probablement il s'agissait de

13 dire que les représentants des paramilitaires croates étaient en repli, en

14 retrait en direction du village Prkos et de Polac [phon]. Ils sortaient --

15 enfin, on ne tirait pas sur eux. Nous avons reçu une information de leur

16 retrait, mais n'ont pas été tirés ni par des pièces d'artillerie ni rien

17 d'autres. Il n'y avait ni victimes, non plus de cadavres. Ces gens-là, en

18 toute sécurité, étaient capables de se replier pour quitter le village,

19 pour parler des paramilitaires croates.

20 Q. Lorsqu'au cours de cet après-midi, au crépuscule, en date du 18

21 novembre 1991, vous êtes venu à Skabrnja, est-ce que vous avez pu observer

22 qu'il y avait des victimes ?

23 R. Si je me rappelle bien maintenant, j'en ai vu deux ou trois. Il s'agit

24 évidemment de militaires. Ils portaient un ceinturon avec poudrier, mais

25 des uniformes bariolés, peut-être de camouflage. Ces cadavres gisaient près

26 et tout le long de la route, la principale voie de communication qui

27 traversait le village de Skabrnja.

28 Q. Ces gens-là qui portaient un uniforme avec ceinturon et poudrier,

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1 dites-vous, à qui appartenaient-ils ?

2 R. A des formations militaires de cette unité de la TO de Skabrnja.

3 Q. Merci.

4 Vous avez dit que le mouvement des unités de la JNA en direction de

5 Skabrnja a commencé à 7 heures du matin ce jour-là. Peut-on dire qu'avant

6 de voir entrer ces unités de la JNA dans Skabrnja, il y a eu des tirs

7 d'artillerie à l'encontre de Skabrnja ?

8 R. Non, absolument pas. Il n'y avait même pas une balle tirée. Parce que

9 sans parler d'artillerie - parce qu'il s'agissait de parler d'un objectif

10 prévu pour le temps de paix - il a fallu trancher tous ces problèmes à

11 l'amiable.

12 Q. Au sujet de ces unités d'artillerie, savez-vous combien d'unités

13 d'artillerie il y avait et de quoi étaient-elles composées ?

14 R. Je ne sais pas combien de pièces d'artillerie il y avait. Il n'y en

15 avait pas beaucoup parce que la JNA ne se proposait pas de les engager. Il

16 n'y avait pas de raison valable. Mais je sais qu'il y a eu des unités

17 d'obusiers. Il s'agissait d'un ou de deux obusiers et d'un peloton de

18 mortiers de 120-millimètres. Quant à moi, je n'en avais pas, de tels

19 pelotons de mortiers. Organiquement parlant, je ne pouvais pas en avoir.

20 Q. Merci. Pouvez-vous nous dire, faire état d'une donnée ou d'une

21 estimation approximative de ce que pouvait représenter le gros des forces

22 de la JNA qui ont été impliquées dans cette action ?

23 R. Vous pensez à l'artillerie ?

24 Q. Non, à l'ensemble des forces.

25 R. Il devait y avoir dans ce convoi peut-être environ

26 80 hommes près de pièces d'artillerie, qui escortaient ces forces. Je ne

27 sais pas vraiment, je ne détenais pas de telles informations à ce moment-

28 là.

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1 Q. Pouvez-vous nous dire, numériquement parlant, comment se présentaient

2 les forces croates à ce moment-là à Skabrnja ?

3 R. Je crois qu'à ce moment-là, ces unités croates n'étaient pas,

4 numériquement parlant, très fortes. Il s'agit de parler de ces forces qui

5 étaient de permanence cette nuit et ce matin. Mais de Skabrnja jusqu'à

6 Nadinska Gradina, les Croates disposaient de cinq compagnies.

7 Du côté croate, l'unité chargée de sécuriser ces deux ou trois

8 villages tout le long de la route possédait trois à cinq compagnies, il

9 s'agissait de Bataillon de Skabrnja équipé d'un armement des plus

10 sophistiqués, chose constatée plus tard, et doté de tout équipement et

11 matériel de guerre d'appui. C'étaient vraiment des unités bien équipées.

12 Q. Lorsque vous dites de tels équipements, vous parlez de quels

13 équipements ? De quoi parle-t-on, d'équipements dus à l'infanterie ou à

14 d'autres ?

15 R. Pour parler évidemment de l'infanterie, il s'agissait de revolvers,

16 pistolets, snipers jusqu'à un calibre de 12-millimètres, 12,7 millimètres.

17 Ensuite, il y avait des mortiers, 82-millimètres, 120 et d'artillerie.

18 Ensuite, il y avait des lance-roquettes portatifs, et on a trouvé des

19 Maljutka, et cetera.

20 Q. Vous dites qu'il y avait aussi des Maljutka. Vous les avez trouvés où

21 et comment, dans quelles circonstances ?

22 R. Ce n'est pas que je les ai trouvés, je ne les ai pas cherchés non plus,

23 mais ceci a été constaté par des forces de la JNA qui ont présenté tout

24 cela, toutes ces armes dans la garnison de Benkovac. J'ai pu les voir de

25 mes propres yeux. Quand je dis "on", tout cela a été transporté par

26 quelqu'un, il s'agissait de forces serbes.

27 Q. Qu'est-ce qu'un Maljutka ?

28 R. Il s'agit de roquettes antichars d'origine russe, mais produites par la

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1 JNA, par la Yougoslavie.

2 Q. Merci.

3 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Comment épelez-vous ce terme, ce

4 nom-là ? Parce qu'il y a un problème de compte rendu d'audience.

5 M. MILOVANCEVIC :[interprétation] Il s'agit de M-a-l-j-u-t-k-a.

6 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Merci beaucoup.

7 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

8 Q. Vous dites que vous aviez pour mission, vous, Défense territoriale,

9 d'être en position du côté latéral, pour ainsi dire --

10 R. Oui, bien sûr.

11 Q. S'il vous plaît, écoutez d'abord ma question. Les interprètes ont du

12 mal à vous suivre. Ils travaillent toute la journée déjà.

13 Vous étiez à Biljani Donji suivi de vos hommes, de la TO, de 20 à 30

14 personnes. Quand vos hommes se trouvent impliqués dans cette action de

15 combat de Skabrnja, vous, dites-vous, nos hommes, nos transports blindés de

16 troupes s'occupaient de l'évacuation des civils.

17 R. J'ai amené mes hommes au moment où il y a eu une toute première

18 victime. Lorsque des civils ont été blessés, on a dit : qu'est-ce qu'on va

19 faire, avaient dit les civils. Parce que l'armée n'a pas été préparée à

20 tout cela.

21 Or, j'avais ce minibus de marque Volkswagen, j'avais deux ou trois

22 personnes qui travaillaient dans les services de santé, j'avais un petit

23 minibus qui était propriété d'une entreprise de commerce de Benkovac qui

24 avait de 20 à 30 sièges. J'ai tout de suite donné l'ordre d'évacuer la

25 population pour ne pas, que Dieu nous en garde, ces gens-là périssent là.

26 Q. Merci. Je vous ai posé des questions concernant les effectifs de

27 la JNA, leur composition et qui ont pris part à de telles actions. Y a-t-il

28 eu des membres de la police de la SAO Krajina ?

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1 R. La police, quant à elle, a eu pour mission quelque chose de tout

2 à fait régulier, je parle de la police de la SAO de Krajina. Il a fallu

3 exercer le contrôle de la circulation dans la région. Peut-être fallait-il

4 renforcer les effectifs, le cas échéant. De concert avec la TO, la police

5 devait maintenir l'ordre et la paix dans ces villages environnants, et

6 éventuellement, s'il y a eu évidemment des fusiliers qui auraient pu être

7 cause d'une situation évidemment exacerbée, il a fallu du côté policier

8 prendre les mesures nécessaires pour évidemment imposer tout, sans plus.

9 Q. Merci. Ces missions affectées à la police, qui est-ce qui les a émises

10 et à qui ces missions ont-elles été affectées, à quelle police ?

11 R. A la police de la République de la Krajina serbe.

12 Q. Excusez-moi, je voulais que vous me localisiez, que vous situiez un

13 petit peu.

14 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] A-t-on répondu à votre question,

16 Maître Milovancevic ? Vous avez posé la question comme quoi je vous ai

17 demandé quelque chose au sujet de la composition de ces effectifs, de ces

18 unités qui ont pris part aux actions. "Y a-t-il eu parmi eux des membres de

19 la police de la SAO Krajina ?"

20 Je ne suis pas sûr que ce qui a suivi a pu être une réponse à votre

21 question.

22 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je me proposais justement de

23 reposer cette question, Monsieur le Président.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, pas directement, ces hommes n'ont

25 pas été engagés directement dans ces activités-là. Absolument pas.

26 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

27 Q. Merci. Cette tâche, cette mission qui vous a été communiquée en date du

28 17 novembre, du 17 au 18 novembre 1991, de la part du lieutenant-colonel

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1 Bogunovic, vers les heures du soir, à quel moment ces ordres et ces

2 missions ont-ils été donnés à la police, et à quelle police, quelles

3 unités ?

4 R. A des unités de police ordinaires, régulières, professionnelles qui

5 appartenaient au poste de sécurité publique de Benkovac, à leur chef Bosko,

6 au même moment où j'ai reçu des missions, moi, valables pour la TO. Nous

7 parlons du 17 novembre 1991.

8 Q. Est-il connu de vous combien de policiers ont été affectés pour

9 s'acquitter de cette tâche qui était la leur et est-ce qu'ils se sont

10 rendus de concert avec des unités de la JNA vers Skabrnja ?

11 R. Non. Non, ils n'ont pas pu le faire et ils n'ont pas reçu d'ordre. Ils

12 n'osaient pas le faire. Je ne leur ai pas dit de le faire. Finalement,

13 cette unité de police ne se rendait pas à Skabrnja. Elle n'avait, la

14 police, aucune tâche à accomplir à Skabrnja. La police devait s'occuper des

15 missions qui étaient les siennes, pour parler de la police dans Benkovac.

16 Ils n'avaient rien à chercher à Skabrnja.

17 Q. Pour ce qui est du nombre de ces membres du poste de police de

18 Benkovac, qui s'acquittaient de ces tâches dans les villages avant

19 Skabrnja, savez-vous combien ils étaient en nombre ?

20 R. Je ne peux pas vous le dire, mais une quinzaine à une vingtaine de

21 personnes. Il s'agit évidemment de ces patrouilles de police régulière. Il

22 s'agit de police qui s'occupait d'ailleurs de l'ordre, du maintien de

23 l'ordre public et de la paix.

24 Q. Merci. Vous avez dit que vers les heures du soir, vers la fin de la

25 journée en date du 18 novembre 1991, vous étiez arrivé à Skabrnja ?

26 R. Oui.

27 Q. Pouvez-vous nous dire à quel moment cette action a été terminée ce

28 jour-là à Skabrnja ? Que s'est-il passé par la suite ?

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1 R. Je crois que strictement parlant, cette action a été terminée le 19,

2 mais je crois que c'était plutôt le 18.

3 Je n'étais plus là à la Défense territoriale, au siège, mais il n'y

4 avait pas, pour ainsi dire, d'activités de combat. Cette action a duré

5 pendant deux jours. Pratiquement, strictement parlant, je crois que

6 l'action a été menée bien en date du 18, mais la mission n'a pas été

7 accomplie. Je dirais que cette action a été, pour ainsi dire, arrêtée.

8 Q. Est-ce que vous savez quelque chose au sujet des pertes essuyées du

9 côté de la JNA ? Est-ce qu'il y avait des pertes du côté de la TO ou bien

10 des pertes essuyées par la partie croate ?

11 R. Pour parler de la JNA, elle avait deux soldats, deux militaires tués,

12 ce lieutenant et son soldat d'escorte. Il y avait plusieurs personnes

13 légèrement ou grièvement blessées; deux, trois ou quatre en tout. Pour ce

14 qui est de la police et de la TO, il n'y avait pas de victimes du tout

15 parce qu'ils n'ont pas été impliqués ni la police ni la TO, elles n'ont pas

16 été impliquées dans ces combats.

17 Q. [hors micro]

18 L'INTERPRÈTE : Micro. Merci.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

20 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, merci et excusez-

21 moi. Je n'ai pas branché le micro. Je crois que nous touchons peut-être

22 vers la fin du temps prévu pour l'audience d'aujourd'hui. Je propose pour

23 ma part qu'on s'arrête ici pour aujourd'hui.

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous ne voulez peut-être pas poser

25 cette toute dernière question lorsque votre micro n'a pas été branché ?

26 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je crois qu'il s'agit d'un sujet dont

27 nous nous occuperons demain lorsque nous aurons poursuivi les débats. Nous

28 n'avons pas besoin maintenant de le faire.

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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup. Merci. Ainsi

2 l'audience pour aujourd'hui est terminée. Nous reprenons les débats demain

3 à 9 heures dans cette même salle d'audience.

4 L'audience est levée.

5 --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le vendredi 27

6 octobre 2006, à 9 heures 00.

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