Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL IT-97-24-PT POUR

2 L'EX-YOUGOSLAVIE Vendredi 16 Janvier 1998 LE PROCUREUR

3 C.MILAN KOVACEVIC L'audience est ouverte à 14 heures 00.

4 M. le Président (interprétation). - Peut-on introduire l'affaire, s'il vous

5 plaît ?

6 M. le Greffier. - Il s'agit de l'affaire IT-97-24-PT, le Procureur contre

7 Milan Kovacevic.

8 M. le Président (interprétation). - Les parties peuvent-elles se

9 présenter ?

10 M. Keegan (interprétation). - Bonjour, Madame et Messieurs les

11 Juges. Je m'appelle Michael Keegan. Je suis assisté de M. Morten

12 Bergsmo et de Mme Ann Sutherland.

13 M. le Président (interprétation). - Et pour la défense ?

14 M. Vucicevic (interprétation). - Je m'appelle Dusan Vucicevic. Je suis

15 assisté de mon confrère M. Igor Pantelic.

16 M. le Président (interprétation). - Très bien. L'accusé se trouve dans

17 cette salle. Je voudrais m'assurer qu'il entend tout ce qui est dit et que

18 tous nos propos sont traduits dans une langue qu'il comprend.

19 Monsieur Kovacevic, m'entendez-vous et me comprenez-vous ?

20 M. Kovacevic (interprétation). - Oui, je vous comprends.

21 M. le Président (interprétation). - Très bien. Monsieur Vucicevic, il

22 s'agit de votre requête que nous allons entendre aujourd'hui.

23 M. Kovacevic (interprétation). - Oui, Monsieur le Président, en effet.

24 M. le Président (interprétation). - Nous avons les documents que vous

25 nous avez transmis et nous les avons lus. Dans votre dernière lettre,

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1 nous avons vu que vous n'appelleriez pas de témoins experts en

2 médecine et je ne crois pas que le Procureur le souhaite. Est-ce bien

3 comme cela que les choses se feront ?

4 M. Vucicevic (interprétation). - La défense a compris, après avoir pris

5 connaissance des ordonnances précédentes du Tribunal, que les

6 parties avaient reçu pour seul droit la possibilité de contre-interroger

7 les témoins qui s'opposent à eux et c'est ainsi que nous avons compris

8 la décision du Tribunal.

9 M. le Président (interprétation). - Nous allons entendre vos arguments

10 maintenant.

11 M. Vucicevic (interprétation). - Puis-je procéder, Monsieur le

12 Président ?

13 M. le Président (interprétation). - Allez-y.

14 M. Vucicevic (interprétation). - Il s'agit d'une requête de la défense

15 pour la libération provisoire. Cette requête, sur le plan juridique,

16 tente de concilier un certain nombre d'éléments qui ont déjà été

17 abordés par ce Tribunal dans les affaires Blaskic, Delic, Delalic et

18 Landzo. Les interprétations qui ont été soumises par le Bureau du

19 Procureur dans ces affaires sont très comparables à celles qui nous

20 intéressent, mais laissent suffisamment de possibilité à la Chambre

21 d'instance, dans laquelle nous procédons aujourd'hui, pour revoir la

22 doctrine fondamentale de l'article 21.3 du Statut intitulé :

23 "Présomption d'innocence". Par conséquent, il demeure en

24 permanence une opposition entre les instruments qui régissent les

25 décisions du Tribunal, à savoir l'article 21 du Statut et l'article 65 du

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1 Règlement de procédure et de preuve. Avec la présomption

2 d'innocence, la détention qui se prolonge est à prendre en que l'article

3 65 du Règlement, s'il est interprété littéralement, octroie un droit

4 illimité, un droit sans restriction et une discrétion totale, au Bureau du

5 Procureur et aux Juges de maintenir l'accusé en détention. Toutefois,

6 notre requête entérinée par les faits indique qu'il existe des

7 circonstances exceptionnelles, mais également un dossier médical

8 qu'il convient de prendre de façon exhaustive, le dossier médical du

9 Dr Kovacevic et cette requête indiqueront également l'existence d'une

10 suspicion depuis son arrestation jusqu'à aujourd'hui, une suspicion

11 quant à l'absence de suspicion suffisante. Dans l'affaire Delalic, la

12 Chambre de première instance a estimé que la gravité du délit imputé

13 à la personne accusée devant ce Tribunal International est évidente.

14 Cependant, maintenir cette conception initiale quant à l'évidence de la

15 gravité de ces faits pendant toutes les audiences du Tribunal, quelle

16 que soit leur durée, serait une erreur. Ce serait prendre à son compte

17 de façon globale une décision préexistante du Bureau du procureur et

18 aller à l'encontre de la présomption d'innocence qui doit pourtant être

19 à la base de l'administration de la justice vis-à-vis d'une personne

20 devant être considérée comme innocente tant qu'elle n'a pas été

21 prouvée coupable. Ici, Monsieur le Président, dans cette affaire, nous

22 parlons d'une personne dont l'acte d'accusation est très mince,

23 s'agissant des éléments de preuve à retenir contre cette personne,

24 puisqu'il est stipulé qu'elle a aidé et encouragé la commission d'un

25 crime allégué. Si nous ne modifions pas cette façon de penser au

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1 départ, nous rendons toutes décisions impossibles, injustes. Par

2 conséquent, toutes les requêtes présentées par la défense vont tenter

3 d'aider la Chambre de première instance à rendre une décision

4 équitable et juste. L'affaire Delalic permet de conclure également sur

5 le plan juridique que la charge de la preuve repose sur la défense qui

6 a pour tâche d'entériner la présomption d'innocence. l'existence d'une

7 suspicion raisonnable, l'accusé a le droit de faire citer des témoins qui

8 prouveront que cette suspicion raisonnable ne l'était pas. Sur le plan

9 juridique, nous ne sommes pas d'accord avec les éléments de départ

10 de ce raisonnement et, avec tout le respect que nous devons à la

11 Cour, nous présentons nos arguments sur les faits en affirmant que

12 cette conclusion juridique suffit à elle seule pour appuyer la

13 conclusion de la Chambre de première instance selon laquelle il

14 n'existe pas de suspicion raisonnable et suffisante pour mettre en

15 accusation et encore moins maintenir en détention le Dr Kovacevic.

16 Le Procureur dans son mémoire récapitule les éléments de droits qui

17 sont appliqués par la Chambre de première instance dans cette

18 décision. Il y est fait mention notamment du dossier médical qui a été

19 soumis en vertu de l'article 65 (A) du Règlement de procédure et de

20 preuve. D'autre part, comme dans l'affaire Landzo, il est estimé que

21 la longueur de la détention et le caractère raisonnable de la suspicion

22 quant aux crimes commis doivent être considérés séparément mais

23 cela est une façon inexacte, inappropriée, de considérer les choses sur

24 un plan juridique. En effet, à la simple lecture de ce mémoire, on

25 constate que dans l'article 65 (A), il est stipulé que le Tribunal a

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1 l'autorité de rendre les décisions et a le pouvoir, l'autorité, de faire la

2 lumière sur la véracité des circonstances en cause. Par conséquent,

3 dans un contexte aussi complexe sur le plan de la discrétion et de

4 l'autorité détenues par les uns ou les autres, je propose que l'ensemble

5 des éléments soit étudié sur le fond. Ce serait me semble-t-il la seule

6 manière acceptable pour que vous, Monsieur le Président, Madame et

7 Messieurs les Juges, rendiez votre décision de façon équitable.

8 Monsieur le Président, je vais maintenant analyser un certain nombre

9 de propositions présentées par la défense dans son mémoire à

10 l'encontre de certaines propositions Bureau du Procureur. Les

11 contraintes de temps ont pesé sur les deux parties ; c'est en raison de

12 ces contraintes que les documents déposés le 14 janvier, c'est-à-dire il

13 y a à peine deux jours, n'ont pas pu être traités dans notre mémoire.

14 Je vais compléter notre mémoire par des arguments relatifs au

15 document déposé récemment dans le cadre du calendrier prévu par le

16 Tribunal. Le premier élément à prendre en compte dans cette requête

17 de la défense porte sur les distances ou non d'une suspicion

18 raisonnable. Nous revenons à ce sujet sur l'affaire Delic où il a été

19 montré qu'il appartenait aux Juges de déterminer si, oui ou non, il

20 existait une suspicion raisonnable. Si l'on examine le dossier qui

21 existe contre le Dr Kovacevic, il est tout à fait indubitable qu'il n'a

22 jamais eu la moindre intention de commettre le crime qui lui est

23 reproché. Ce crime, reproché à l'accusé, exige pour être prouvé qu'il

24 y ait eu intention préalable et en outre intention concomitante avec la

25 date des faits. Nous avons déjà dit, lors de nos interventions dans ce

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1 prétoire et dans le document que nous avons soumis au Tribunal, que

2 cette intention n'existait pas. Qu'est-ce que le Tribunal nous a rendu

3 après la présentation par nous de cet argument ? Il nous a renvoyé un

4 document de trente à trente-cinq pages qui découle de l'affaire Tadic

5 ; seul accusé qui a été jugé par ce Tribunal à la date d'aujourd'hui. Or

6 les charges qui pesaient sur M. Tadic ne sont pas identiques à celles

7 qui pèsent contre le Dr Kovacevic ; ce dernier n'avait rien à voir avec

8 l'affaire Tadic. En outre, le nom du Dr Kovacevic n'est même pas

9 évoqué dans ce document que nous a fourni la Chambre de première

10 instance. Nous demandons donc, Monsieur le Président, que ce

11 document soit supprimé du dossier comme n'ayant aucune pertinence

12 dans l'affaire qui nous intéresse. Si nous examinons les décisions

13 juridiques rendues par ce Tribunal, nous voyons que le caractère

14 raisonnable de la suspicion et le degré de culpabilité de l'accusé

15 doivent être au moment de la requête portant sur la demande de

16 libération provisoire ; et ce de la façon suivante : plus la culpabilité

17 est importante, plus la charge de la preuve -quant à l'existence de

18 circonstances exceptionnelles- doit entrer en jeu. Avec tout le respect

19 que nous devons à ce Tribunal, Monsieur le Président, et puisque les

20 allégations du Procureur ne sont prouvées par rien, jusqu'à présent

21 -elles n'ont pas été prouvées par le Juge de confirmation ou à quelque

22 moment ultérieur de cette procédure- la charge qui nous incombe est

23 donc minimum. Cependant, l'ensemble du dossier médical -les

24 certificats, les documents nombreux qui prouvent l'existence de

25 problèmes cardiaques, d'hypertension, de troubles cérébraux, de

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1 modification du comportement cérébral chez le Dr Kovacevic- est

2 suffisant pour satisfaire à l'exigence incombant à un défenseur qui

3 devrait assurer à un degré très élevé de charge de la preuve. Cela

4 étant, je ne peux pas cesser de parler du caractère raisonnable de la

5 suspicion de façon aussi rapide. Il y a également cet élément

6 d'intention dont j'ai déjà parlé. Le Procureur va devoir prouver que le

7 Dr Kovacevic avait l'intention, voulait délibérément commettre les

8 crimes qui lui sont allégués. Il aurait donc dû avoir l'intention de

9 contribuer et d'aider à la commission de ces crimes. Or pour le

10 moment, l'accusation n'a pas apporté la moindre preuve de cette

11 intention. Le Bureau du Procureur a confirmé l'acte d'accusation en

12 toute hâte, le 13 mars 1997, simplement parce que les forces des

13 Nations Unies ou d'autres forces sur le terrain devaient avoir la

14 possibilité d'arrêter l'accusé. Il fallait donc confirmer les charges

15 pesant contre lui. C'est ce qui a été fait. Je rappelle dans mon mémoire

16 un certain nombre de conclusions tirées par M. Reid à cet égard. Je

17 tiens à vous rappeler que la liberté d'expression est le seul élément qui

18 peut être reproché au Dr Kovacevic. Il a effectivement exercé sa

19 liberté d'expression. Même dans le de cette liberté d'expression pas

20 un des mots qu'il a prononcés ne peut être considéré comme une

21 incitation à commettre un acte de génocide. Monsieur le Président, il

22 y a une autre déclaration du Dr Kovacevic que je cite dans mon

23 mémoire. C'est une phrase qui a été prononcée lors d'une conférence

24 de presse. Nous voulons être tout à fait sincères devant ce Tribunal

25 parce que le Dr Kovacevic tient beaucoup à être totalement blanchi

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1 par rapport aux crimes qui lui sont imputés. Comme nous l'avons dit,

2 il a été nommé par une assemblée municipale multi-ethnique au poste

3 qu'il occupait, à savoir celui de président du conseil exécutif de la

4 municipalité. Il a été nommé à l'unanimité. Il a eu un certain nombre

5 de conversations officieuses dans les jours qui ont suivi sa

6 nomination. Il n'avait d'autorité en fait que sur 10 ou 15 % des

7 décisions prises dans le cadre de ses fonctions. Ses responsabilités

8 portaient, je tiens à le souligner, sur les aspects sanitaires, éducatifs et

9 les services communaux. Le médecin qui s'occupait de l'hôpital a

10 présenté des preuves tout à fait irréfutables sur ce plan, Monsieur le

11 Président. Ces éléments de preuve provenant du médecin prouvent

12 qu'il a toujours soigné avec la plus grande conscience tous les

13 patients, quelles que soient leur origine ethnique et leur nationalité. Il

14 en a soigné plusieurs centaines. Ce rapport a été certifié par le

15 directeur de l'hôpital. Nous pensons que c'est donc un élément de

16 preuve tout à fait crédible. Nous voulons également vous remettre

17 des exemplaires des dossiers de la salle d'opération dans laquelle il

18 travaillait. Que montrent ces dossiers ? Ils indiquent que dans le

19 cadre de son travail quotidien, à savoir la fourniture d'anesthésies aux

20 patients qui en avaient besoin, le Dr Kovacevic a toujours agi dans la

21 plus grande conscience. Je vous demanderais de bien vouloir regarder

22 les documents que nous vous avons remis. Ce sont des calendriers.

23 Malheureusement l'ordre des pages est un peu inversé.

24 M. le Président (interprétation). - C'est une pièce à conviction jointe à

25 joindre à votre mémoire ?

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1 M. Vucicevic (interprétation). - Oui, Monsieur le Président. Je vous

2 demanderais de bien vouloir regarder la page 11-75, dossier S, où l'on

3 trouve les noms de Radzen Merima et de Kadiric Basija, mais je ne

4 suis pas sûr du prénom, Kadiric est le nom. Ces deux personnes sont

5 des Musulmans. Lorsqu'on vient de Yougoslavie, on peut déterminer

6 l'origine d'une personne par son prénom. Elles ont reçu une

7 anesthésie du Dr Kovacevic. Vous verrez également sur cette page

8 que le 26 avril 1992 Alijana Alibegovic, c'est un prénom et je ne

9 peux pas lire le nom de famille, mais il s'agit également d'un

10 Musulman, a également reçu une anesthésie du Dr Kovacevic. Si vous

11 prenez maintenant la dernière page, où sont consignées les activités

12 du mois de mai, cette page concerne le 1er mai. Le Dr Kovacevic, là

13 encore, a dispensé une anesthésie à Emina Kadic. Nous pouvons

14 poursuivre la lecture de cette liste.

15 M. le Président (interprétation). - Quelles pages ?

16 M. Vucicevic (interprétation). - Page 11-81. Monsieur le Président,

17 nous avons entouré d'un cercle certains passages de ce document qui,

18 sur la gauche, fait figurer le nom de l'anesthésiste et sur la droite le

19 nom du patient. Nous avons inscrit un cercle autour du nom de

20 l'anesthésiste et de la date de chacune des journées qui nous

21 intéressent. Vous constaterez que le Dr Kovacevic était présent au

22 travail tous les jours, qu'il y avait un certain nombre de patients

23 musulmans et qu'aucune discrimination, de quelque nature que ce

24 soit, n'a été commise par le Dr Kovacecvic pendant toute cette

25 période. C'est par conséquent, Monsieur le Président un élément de

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1 preuve tout à fait irréfutable qui, nous l'affirmons, prouve de façon

2 tout à fait convaincante l'absence de toute intention de nuire ou de

3 faire le moindre mal à ses concitoyens de Prijedor. L'accusation n'est

4 même pas parvenue à citer le nom d'un seul témoin qui aurait de lui

5 faire du mal. Monsieur le Président, je voudrais revenir sur un autre

6 aspect. Supposons que M. Nezirovic, témoin de l'affaire Tadic,

7 rapporte qu'il a entendu le Dr. Kovacevic parler à l'extérieur du

8 bâtiment abritant une petite station de radio et prononcer des jurons

9 -jurons qui sont traduits en anglais dans le compte rendu de l'affaire

10 Tadic, et que j'ai lu- je vous dirai qu'il y a de très nombreux jurons en

11 langue serbe. La façon dont ces jurons ont été traduits constitue une

12 véritable déformation de la vérité ; leur sens n'a rien à voir avec celui

13 qui résulte de cette traduction. C'est très certainement, à notre avis, le

14 fruit d'une volonté frénétique des médias. Monsieur le Président, nous

15 tenons beaucoup à ce que la justice soit faite dans cette affaire devant

16 ce Tribunal. Il n'y a rien d'autre qui peut être pris en compte contre le

17 Dr Kovacevic, médecin de grande qualité, humaniste, et qui n'a rien à

18 voir avec le crime qui lui est allégué. Mais je poursuis, Monsieur le

19 Président, si vous le voulez bien. Après son arrestation, l'état de santé

20 du Dr Kovacevic s'est gravement dégradé. Nous avons reçu des

21 rapports médicaux suite à des examens médicaux pratiqués dans son

22 lieu de détention, notamment un rapport daté du 18 juillet 1997, signé

23 par un médecin spécialiste de médecine interne qui l'a examiné. Je

24 cite : " La tension artérielle du Dr Kovacevic s'est modifiée. Elle est

25 passée de 170 à 200 et à 130 sur le plan diastolique. Cette tension est

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1 trop élevée quels que soient les critères que l'on utilise pour en juger".

2 Si vous regardez la pièce à conviction de l'accusation dont je parle,

3 page 2, nous voyons que la tension artérielle de M. Kovacevic,

4 mesurée en deux endroits du corps, notamment sur le bras gauche, a

5 des valeurs différentes, dont 190 au bras gauche, sept jours

6 cardiaques, le 7 et 10 juillet. Nous ne savons pas ce qu'il en est du 15

7 ou du 17 juillet mais en tout cas, avant sa détention, un médecin

8 l'avait examiné et déjà découvert les signes d'une attaque préalable.

9 Nous pensons que le résultat de ces examens médicaux pratiqués par

10 un médecin très compétent ne sont toutefois pas suffisants. Si vous

11 regardez les conclusions des experts, vous lisez à ce moment-là que

12 sa tension était beaucoup trop importante et qu'un traitement aurait du

13 être entrepris.

14 M. le Président (interprétation). - Pouvez-vous nous aider ? Qu'est -ce

15 qu'un CVA et un TIA ?

16 M. Vucicevic (interprétation). - CVA veut dire accident cérébral

17 vasculaire, une attaque.

18 M. le Président (interprétation). - Le Dr Haeck a découvert que le

19 coeur du Dr Kovacevic ne battait pas régulièrement. Ces battements

20 irréguliers du coeur sont le produit d'un revêtement qui se dépose sur

21 les parois gauches du coeur et qui agit directement sur le cerveau

22 produisant une thrombose. Le TIA c'est l'effet clinique de ces

23 accidents répétés. Ce sont donc des signes que l'ont peut constater au

24 niveau du cerveau. Le Dr Haeck a prescrit un certain nombre de

25 médicaments et vous trouverez l'ensemble de ses conclusions dans le

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1 rapport. Je ne peux que féliciter le Dr Haeck pour ses conclusions. Il

2 a établi des doses de médicament toutes en rapport avec la digitaline.

3 Le conseil de la défense cite ici un certain nombre de médicaments

4 que l'interprète n'a pas suivi et nous constatons, à la lecture de ces

5 noms, que l'état de sang du Dr Kovacevic est particulièrement grave

6 puisque c'est tout à fait évident au vu des doses et des médicaments

7 en question. Cependant, cela n'a pas suffit à réduire la tension

8 artérielle du Dr Kovacevic. Il a continué à avoir des attaques. S'il a

9 encore une attaque à partir d'aujourd'hui, le sang se déversera dans

10 son cerveau et il risque fort d'en mourir. Le rapport suivant présenté

11 par l'accusation provient d'un cardiologue qui semble confirmer que

12 les dosages des médicaments anticoagulants ne sont pas normaux,

13 qu'il y a un élargissement de son coeur, que des caillots se dirigent

14 vers son cerveau. Le Docteur dit la chose suivante : troisième phrase

15 avant la fin de la page 2 du rapport de ce cardiologue : "La thérapie

16 est adaptée pour l'hypertension, mais les deux médicaments (que M.

17 Vucicevic vient de citer et que l'interprète n'a pas saisis) vont à

18 l'encontre de ces problèmes cardiaques". Donc nous soignons son

19 hypertension, mais nous rendons son coeur encore plus faible et le Dr

20 Kovacevic souffre. Il a peu de souffle, il ne peut plus bouger et il sent

21 bien que quelque chose n'est pas normal. Ce rapport, en date du 18

22 juillet au 25 novembre, montre que la thérapie a été modifiée

23 puisqu'il y avait une suspicion selon laquelle ce traitement n'était pas

24 adapté. Enfin, après quelques mois, et grâce à l'aide de sa défense,

25 l'accusé a obtenu un traitement, une cathétérisation afin d'améliorer

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1 sa situation cardiaque. Je ne suggère pas que le docteur, à cette

2 époque, avait mal fait son travail, mais si cette personne était placée

3 en de meilleures mains, son sort en serait amélioré. Pourquoi de telles

4 omissions, de telles négligences arrivent-elles à une personne qui se

5 trouve dans cette prison ? Je voudrais attirer votre attention sur la

6 chose suivante : nous n'avons pas, ici, une personne qui ne s'y connaît

7 pas en médecine. Si cela avait été le cas, peut-être n'aurait-il rien

8 remarqué. Mais il s'est rendu compte que quelque chose n'était pas fait

9 pour améliorer sa santé. Il se sentait de plus en plus faible, son

10 souffle était de plus en plus court, il avait de plus en plus de mal à

11 respirer et il a demandé à son conseil de la défense de l'aider. Nous

12 remercions d'ailleurs cette Chambre de première instance d'avoir bien

13 voulu entendre nos demandes et d'avoir permis que tous les examens

14 soient réalisés. Sur la base de ces examens, le Dr Dijkman, le 25

15 novembre, a modifié le traitement et de renforcer le muscle

16 cardiaque. Mais que s'est-il produit ? Sa tension est restée au même

17 niveau. Le problème principal de l'accusé est sa tension artérielle qui

18 n'est toujours pas ou plus traitée. La pression artérielle a rendu son

19 coeur faible et, suite aux examens, on a remarqué que l'artère

20 coronaire droite était totalement fermée. Il semble donc que la

21 circulation sanguine ne se fasse pas facilement ; ce que notre expert à

22 Belgrade a d'ailleurs très bien décrit dans son rapport. En effet, il a

23 dit que le coeur du Dr Kovacevic était plus gros que la moyenne. C'est

24 pourquoi, son coeur est faible. C'est pourquoi il ne peut pas faire

25 d'exercice et se mouvoir normalement. C'est pourquoi des pensées de

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1 mort lui traversent l'esprit. Il en a encore peut- être pour quatre ou

2 cinq ans à vivre. Il risque peut-être même de mourir cette année. Les

3 risques de mort cette année s'élève à 30 ou 40 %. Ce sont les faits que

4 le Pr. Ostojic de Belgrade a établis dans son rapport. C'est un

5 cardiologue tout à fait respecté de sa profession, qui donne des

6 conférences dans de nombreuses villes européennes et qui a été

7 professeur de cardiologie aux Etats-Unis. Cependant, nous sommes

8 en train de faire de M. Kovacevic un handicapé et ceci l'a beaucoup

9 touché psychologiquement. Il a appris en travaillant en Europe

10 occidentale que la médecine moderne pouvait remédier à ses

11 problèmes, mais qu'il n'a pas été traité comme il aurait dû l'être. Son

12 hypertension n'a pas été traitée. On s'est moqué de lui. Je vous

13 renverrai aux faits qui figurent dans le rapport de son psychiatre du

14 Texas, Lorraine Sommerfeldt, lorsqu'elle a demandé pourquoi le Dr

15 Kovacevic avait eu une hémorragie à la jambe. Le docteur a répondu

16 : "Vous vous êtes cogné", mais le docteur savait que son sang était

17 plus fluide que la moyenne et que cela aurait pu mener à une

18 hémorragie plus importante. Cela aurait pu être un saignement au

19 niveau du cerveau, mais le docteur de la prison a répondu : "Ne vous

20 inquiétez pas, vous ne vous cognerez pas la tête, cela n'arrivera pas".

21 Cela est extrêmement cynique et c'est un signe de négligence de la

22 part de ce médecin. On s'est moqué de lui et il a perdu la foi. Il s'est

23 intériorisé, il s'octroie ses propres médicaments. Il ressent un

24 sentiment de peur, d'isolement qui va jusqu'à la paranoïa selon

25 certains médecins. Il n'aide pas ses médecins dans la prise du

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1 traitement. Il est très passif. Il a eu également un très bon docteur de

2 Londres, le Dr Bowden qui a passé trois heures avec le Dr Kovacevic

3 et deux heures à visiter la prison avec l'assistant du commandant de la

4 prison, qui n'a écrit qu'une page et quelques lignes sur l'état

5 psychiatrique du patient. Ce qui m'a frappé dans la première phrase

6 de son rapport est qu'il se basait sur une mauvaise traduction. Le Dr

7 Bowden va donc écrire son rapport et examiner les conséquences de

8 l'état psychiatrique du Dr Kovacevic pour en tirer des conclusions tout

9 à fait différentes. Dans le rapport, Monsieur le Président, à la page

10 7, le Dr Bowden écrit : "Antécédents : le Dr Kovacevic a dit qu'en

11 1979, à peu près, il a eu une néphrite". Il s'agit d'une affection des

12 reins qui a demandée qu'il soit hospitalisé en Allemagne. Des

13 examens de routine ont montré, à l'époque, qu'il avait eu une gastrite

14 qui s'était soignée. A l'époque, le Dr Kovacevic travaillait en

15 Allemagne pendant six mois, cela figure dans le rapport de Mme

16 Lorraine Sommerfeldt. Il a souffert à l'époque d'une gastrite qui est

17 une affection de l'estomac, une hémorragie qui est le symbole même

18 de la somatisation d'un trouble dû au stress. Il a passé un mois à

19 l'hôpital à essayer de se soigner. Le problème a été résolu lorsque son

20 fils et sa femme sont venus avec lui. Si le Dr Bowden avait su cela,

21 peut- être à ce moment-là aurait-il parlé, cherché à tirer des

22 conclusions sur l'état d'esprit de son client. Il n'aurait peut-être pas été

23 aussi concis. Le rapport du Dr Sommerfeldt établit des conclusions

24 tout à fait différentes. Mais, laissez-moi revenir en arrière un instant.

25 Je ne tiens pas à essayer de critiquer les médecins. J'essaie

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1 simplement de vous aider à appliquer le droit dans un domaine qui est

2 très complexe et pour des faits qui sont aussi complexes. Par exemple,

3 dans l'affaire Landzo, la des différents rapports et de juger quel

4 rapport leur semble le plus satisfaisant. S'il y a deux contre un c'est

5 vous qui avez perdu parce que vous n'avez qu'un ; c'est une approche

6 tout à fait simpliste. Il faudrait au contraire que les tribunaux

7 comparent les différents rapports entre eux, les différents faits

8 mentionnés. Si le Dr Bowden avait eu sous les yeux le rapport du Dr

9 Elsman, qui était l'expert pour le greffe, il n'aurait pas tiré cette

10 conclusion. Le Dr Elsman est arrivé aux mêmes conclusions que le

11 Dr Sommerfeldt. Tous les deux ont affirmé que le Dr Kovacevic était

12 dans un état psychiatrique grave qui nécessitait un traitement.

13 Cependant, la présentation du Dr Bowden indique qu'il a reçu une

14 copie de l'acte d'accusation contrairement aux deux autres médecins,

15 qu'il a également reçu les conclusions volumineuses sur les faits dans

16 l'affaire Tadic des mains de M. Keegan, Procureur, qui n'a rien à voir

17 avec le Dr Kovacevic.

18 M. le Président (interprétation). - Vous avez promis de ne pas

19 critiquer les docteurs alors que vous êtes en train de le faire. Je ne

20 sais pas si ceci va nous aider. Je pense également que pour rectifier le

21 compte rendu il est vrai que les conclusions du Dr Elsman portent sur

22 la condition médicale. Il n'a pas déterminé de troubles psychotiques. Il

23 a constaté qu'il y avait des phénomènes de stress. J'examine la

24 dernière page de son rapport, page 4. Il a effectivement dit qu'il fallait

25 sans doute une forme de thérapie mais il conclut que l'état

Page 17

1 psychiatrique de l'accusé est compatible avec sa détention. Pour en

2 revenir à votre analogie, il ne faudrait pas accepter deux probabilités

3 contre une.

4 M. Vucicevic (interprétation). - Monsieur le Président, je vous

5 demande d'étudier les conditions dans lesquelles a eu lieu l'examen. Il

6 a fallu trois heures au Dr Bowden pour étudier le cas du témoin, cinq

7 heures trente au Dr Summerfeldt, une heure au Dr Elsman. possibilité

8 de tendance suicidaire. Laissez-moi consulter cette page, Monsieur le

9 Président, : "Le sujet se sent très déprimé".

10 M. le Président (interprétation). - Où en êtes-vous ?

11 M. Vucicevic (interprétation). - A la page 3. Il s'agit d'un dossier du

12 greffe, le dossier 2/14-72. Il est dit : "Le sujet se sent très déprimé

13 mais il n'y a pas de symptôme de dépression dans le sens étroit du

14 terme". Rien n'indique la présence de tendance suicidaire. Il ne dit

15 pas qu'il n'y en a pas, il dit que rien ne l'indique. Le paragraphe

16 stipule : "Le sujet est très tendu et il tend à exercer un auto contrôle

17 excessif et à faire face de façon excessive également". Le docteur

18 utilise ici un langage très prudent mais il ne dit rien sur le fait que le

19 patient pourrait ou non essayer de mettre fin à ses jours. Le docteur

20 était pris par le temps. Il dit qu'au départ le Dr Kovacevic est membre

21 de l'Eglise catholique orthodoxe. Il célébrait le Noël catholique

22 orthodoxe. Je ne sais pas dans quel contexte cette déclaration

23 s'inscrit. Cela revient à dire que le Dr Kovacevic était un homme très

24 religieux et que cela aurait pu le mener à se renfermer, à ne pas

25 s'ouvrir aux autres, à ne pas montrer et exprimer ses émotions. Au

Page 18

1 contraire, la déclaration du Dr Sommerfeldt indique que le Dr

2 Kovacevic exprime volontiers ses émotions, qu'il a tendance à

3 pleurer. Le Dr Sommerfeldt soutient chacune des conclusions

4 apportées aux questions qu'elle a posées afin d'évaluer l'humeur du

5 patient lorsqu'elle a évalué ses capacités au jugement, ses capacités

6 intellectuelles. Chaque fois, elle a trouvé que le patient avait des

7 capacités réduites. Au moment d'évaluer si, oui ou non, il avait des

8 sentiments de paranoïa ou des tendances suicidaires, elle a demandé à

9 ce médecin des questions très précises et un peu provocatrices. En

10 revanche, les évaluations des Dr Elsman et Bowden montrent que le

11 C'est surtout le cas pour les questions posées par le Dr Elsman. Alors

12 qu'il ne s'ouvre pas du tout avec le Dr Bowden, il a ouvert son coeur

13 au Dr Sommerfeldt. Il n'a pas tout dit parce qu'il est fier. Il n'a pas

14 dit qu'il pensait à la mort tout le temps. Il a dit qu'il lisait en ce

15 moment beaucoup de livres de philosophie, ce qui l'aide à exprimer

16 ses sentiments. Madame et Messieurs les Juges, au moment d'évaluer

17 les faits qui figurent dans ces conclusions tirées par les experts

18 psychiatriques ou par les psychiatres, il y a un facteur commun : il

19 semble que le patient réagisse mal au stress qu'il a subi par le passé. Il

20 souffre actuellement d'un état de santé qui risque de mettre fin à ses

21 jours, qui le handicape de façon grave et qui n'a pas été bien traité

22 dans le cadre de sa détention. Je ne rejette la faute sur personne, mais

23 cela vient détériorer la santé du Dr Kovacevic. Le Dr Kovacevic l'a

24 d'ailleurs remarqué. Il a essayé de corriger en vain les erreurs

25 commises et ceci l'a déprimé. Il s'est refermé, il n'est plus capable de

Page 19

1 communiquer et de suivre les conseils et les ordonnances de ses

2 docteurs comme l'a dit le Dr Sommerfeldt. Il ne prend pas ses

3 médicaments comme on le lui a dit. Il sent qu'il y a une injustice,

4 qu'il n'y a pas de traitement médical adapté, qu'il ne lui reste plus que

5 quatre ans à vivre et que, même si justice est faite, il se peut qu'au

6 bout du compte il soit condamné à une peine que ce Tribunal ne peut

7 lui attribuer, à savoir la peine de mort parce qu'il aura été mal soigné

8 au quartier pénitentiaire. Même s'il dépasse ces quatre années, il se

9 pourrait très bien qu'il soit acquitté et qu'il meurt juste après. Nous

10 trouvons que c'est une peine très grave qui aura été provoquée par ses

11 conditions de détention. Nous pensons que sa vie est entre ses mains

12 et nous devons poursuivre et passer au fait suivant. Troisième critère

13 qui est établi par l'article 65 : si l'accusé est libéré le Dr Kovacevic

14 représenterait-il une menace ou un danger à d'autres personnes ? Ici,

15 devant ce Tribunal, nous parlons de jeunes hommes auxquels sont

16 allégués des crimes. Il semble qu'ils aient commis des violations des

17 lois ou coutumes de la guerre, qu'ils ont blessé ou porté Rien de tout

18 cela ne figure dans l'histoire du Dr Kovacevic. Des preuves montrent

19 que pendant que les autres étaient en train de tuer lui était en train

20 d'aider. Des conclusions hasardeuses, qu'un accusé pourrait présenter

21 une menace à un témoin, ne suffit pas à entraver la bonne

22 administration de la justice à laquelle il a droit, ainsi qu'à sa

23 libération. Il faut qu'il y ait un lien de cause à effet. Nous n'avons vu

24 aucun témoin, nous n'avons aucun nom de témoin, qui l'aurait accusé,

25 encore moins des témoins qui vivent dans la zone de Prijedor. Même

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1 si nous mettions notre imagination à profit, on ne pourrait pas

2 imaginer qu'un docteur ait voulu porter préjudice à qui que ce que

3 soit et ait pu perpétrer le crime qui lui est imputé, car il faut qu'il y ait

4 une complicité, une association avec d'autres. Si le docteur est

5 présent aujourd'hui et si d'autres conspirateurs sont encore en liberté,

6 ces témoins, s'ils craignent quoi que ce soit, ou plutôt ces

7 conspirateurs, mais pas le docteur, devraient être ici. Il reviendrait ici

8 pour le procès. Tout ce qu'il veut faire c'est se blanchir, blanchir sa

9 réputation et celle de sa famille. Les rapports le montrent, il a mené

10 une vie sans aucun blâme alors que maintenant on lui impute des

11 choses entérinées dans un acte d'accusation mal rédigé. De quoi a-t-il

12 besoin ? Si vous faites preuve de bienveillance et si vous voulez bien le

13 laisser rentrer chez lui, il suffit qu'il y ait un représentant du greffe

14 qui l'appelle et il sera là sur le champ. Nous avons des garanties du

15 gouvernement de Mme Biljana Plavsic qui a fait preuve de beaucoup

16 de coopération. Nous avons aussi la défense de maintien de la paix, la

17 défense internationale en Bosnie qui vont aider ce Tribunal à mettre en

18 oeuvre toutes les conditions associées à la mise en liberté

19 provisoire que vous allez peut-être décider d'accorder. D'autres

20 affaires ont déjà été mentionnées dans le cadre desquelles il a été fait

21 allusion au fait que certains pays voisins ne coopèrent pas avec le

22 Tribunal et ne sont pas prêts le faire. Permettez-moi de citer l'ancien

23 Président Roosevelt : "Il n'y a rien qui soit pire que la peur sinon la

24 peur elle-même". Il souffre d'une forte stigmatisation, d'ostracisme. Je

25 reprends les termes des psychiatres. Il veut retrouver sa bonne

Page 21

1 réputation, c'est ce qui compte pour lui. Où pourrait-il s'enfuir ? Il ne

2 pourrait s'enfuir que vers sa propre tombe où il se placerait lui-même.

3 Il n'a nulle part où aller. Le seul avenir qui lui est possible, c'est par le

4 truchement de votre jugement, Madame et Messieurs les Juges.

5 Objectivement, il y a les forces de l'Otan à Prijedor, les forces de

6 police internationale, les forces de police de Mme Plavsic, la police

7 militaire du gouvernement qui a fait preuve d'une grande coopération,

8 qui a été reçue à Banja Luka. Tout le monde est prêt à apporter son

9 aide et à mettre en oeuvre les conditions restrictives que vous allez

10 peut-être souhaiter imposer. Le Dr Kovacevic est tout à fait prêt à

11 être assigné à résidence, il est prêt à aider et à faire rapport aux

12 autorités que vous allez peut-être vouloir désigner. Il est prêt à ne pas

13 quitter sa ville natale ou le pays où il réside. Il est prêt à ne pas

14 s'associer avec qui que ce soit que désignerait le Procureur ou le

15 Tribunal. Il a besoin de paix, de sérénité et de l'aide de sa famille

16 pour se soigner dans ses sentiments comme dans ses pensées. Il a

17 aussi besoin d'un traitement médical qui l'aide à améliorer son état de

18 santé. Vous avez l'exemple de son passé. Il est resté vivant après tout

19 ce qu'il a traversé en Allemagne. Maintenant, il a pris de l'âge. Vous

20 avez les résultats de l'imagerie de la résonance magnétique. Nous

21 venons d'obtenir le résultat il y a une semaine. Il a eu un problème

22 cérébral, un accident cérébral vasculaire, un petit infarctus qui a

23 causé une atrophie cérébrale légère. Nous souhaitons que vous ayez

24 ces résultats, Madame et Messieurs les Juges ; tel est ce qu'a dit le Dr

25 Kovacevic et ses propos ont été confirmés. L'imagerie magnétique

Page 22

1 confirme les thèses du Dr Kovacevic.

2 M. le Président (interprétation). - (Hors micro.) Les interprètes ont

3 quelques difficultés à vous suivre. Pourriez-vous ralentir votre débit ?

4 M. Vucicevic (interprétation). - Oui, bien sûr, je vais le faire. Le Dr

5 Kovacevic est très malade mais il y a un remède à cette maladie. Il n'y

6 a pas de problèmes psycho-organiques qui se poursuivraient à tout

7 jamais, c'est simplement une dépression dont il souffre en réaction

8 aux circonstances dans lesquelles il se trouve. S'il se voit donner

9 l'occasion de passer un peu de temps avec sa famille à titre

10 provisoire, il vous sera reconnaissant à tout jamais et à tel point qu'il

11 reviendra pour se faire juger à l'occasion d'un procès. Il veut améliorer

12 son état de santé afin d'avoir la possibilité, à un stade ultérieur, de

13 conter sa version des faits. Il ne veut pas languir en prison, devenir un

14 être sans esprit, une victime de par la force de sa propre action. Ce

15 sera tout. Toutefois, avant d'en terminer, je voudrais passer la parole à

16 Me Pantelic qui va vous parler davantage de la lettre écrite par Mme

17 le Président Plavsic, car il est informé à ce sujet. Je vous remercie.

18 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie.

19 M. Vucicevic (interprétation). - Une dernière chose : j'ai une pièce

20 que je voudrais verser au dossier avec votre autorisation. J'aimerais

21 vous la présenter.

22 M. le Président (interprétation). - L'accusation a-t-il déjà pris

23 connaissance de ce document ?

24 M. Vucicevic (interprétation). - J'en ai un exemplaire. Cette pièce est

25 simplement une copie d'une note écrite par une infirmière du quartier

Page 23

1 pénitentiaire que nous avons reçue hier. Ce sont les relevés quotidiens

2 de la tension artérielle du Dr Kovacevic. L'infirmière a eu la

3 gentillesse de me transmettre ces résultats. Vous avez l'original de

4 cette pièce devant les yeux, Madame et Messieurs les Juges. à peine.

5 Plusieurs relevés de sa tension restent dans des cadres normaux et

6 paranormaux, ce qui veut dire que si l'on en revient aux conclusions

7 des médecins, du Dr Haeck expert de l'accusation, qui disait que l'on

8 ne pourrait pas trouver de remède à son état de santé dans le cadre du

9 quartier pénitentiaire, cela corrobore ce qu'a dit le Dr Sommerfeldt,

10 expert cité dans ce cadre. Nous demandons la mise en liberté

11 provisoire pour les raisons ci-dessus évoquées.

12 M. le Président (interprétation). - Maître Pantelic que vouliez-vous

13 ajouter ?

14 M. Pantelic (interprétation). - Je ne prendrai que quelques minutes

15 afin de vous expliquer certaines conditions particulières que nous

16 connaissons dans la région de Prijedor. Cela pourra vous être d'une

17 certaine assistance dans l'examen de la requête que nous avons

18 déposée auprès de vous en vue d'une mise en liberté provisoire. Puis-

19 je commencer ?

20 M. le Président (interprétation). - Allez-y.

21 M. Pantelic (interprétation). - Tout d'abord, et à titre général, nous

22 sommes d'accord sur l'objectif poursuivi par l'article 65 du Règlement

23 de procédure et de preuve basé sur le droit international et sur des

24 standards reconnus en matière de droits de l'homme ; quelques

25 conclusions communes peuvent être tirées. Dans toutes les affaires

Page 24

1 dont a été saisi ce Tribunal, il a été avéré que des conditions avaient

2 été réunies et qu'elles se réunissent une fois de plus dans l'affaire

3 Kovacevic. L'article 65 doit veiller à ce qu'il y ait présence au procès

4 d'un accusé à qui la mise en liberté provisoire a été accordée, mais

5 rien ne permet de savoir ce qu'est une circonstance exceptionnelle.

6 Chaque requête doit être examinée à la lumière des circonstances

7 particulières qui président à celle-ci. Il n'y a que quelques cas rares,

8 comme l'incompatibilité de l'état de santé de l'accusé avec toute

9 forme de détention qui peuvent intervenir. La gravité extrême de l'état

10 de santé de l'accusé n'est pas compatible avec la détention. Le

11 Tribunal Pénal International doit bien sûr interpréter son Règlement

12 dans son cadre juridique. Il doit veiller à ce que quiconque est

13 accusé...

14 M. le Président (interprétation). - Pourriez-vous ralentir ?

15 M. Pantelic (interprétation). - Le Tribunal doit s'assurer et ne peut pas

16 penser que la libération fait courir des dangers ou des menaces pour

17 des victimes ou des témoins. Cela provient des décisions précédentes

18 rendues dans le cadre de ce Tribunal par d'autres Chambres. Je

19 voulais appeler votre attention sur certains faits précis relevant de

20 cette affaire. Parlons d'abord des circonstances exceptionnelles des

21 deux parties. Elles sont plus ou moins d'accord sur le fait que si la

22 santé d'un accusé motive une demande de mise en liberté provisoire,

23 toutes les autres questions, telles que la suspicion raisonnable, la

24 durée de la détention, raisons qu'a évoquées mon confrère, ne

25 prennent pas une place de première importance. Me Vucicevic a

Page 25

1 évoqué tous les faits pertinents relatifs à l'état de santé de M.

2 Kovacevic. Je suppose que nous ne pouvons pas nous opposer à ces

3 conclusions médicales qui montrent la gravité de l'état de santé de M.

4 Kovacevic. Pour vous convaincre du fait que M. Kovacevic, s'il était

5 mis en liberté, comparaîtrait à son procès, la défense se base sur

6 divers documents officiels montrant que rien dans la République, dans

7 les institutions de la Republika Srpska, ne s'oppose à ce que M.

8 Kovacevic comparaisse devant cette Chambre de première instance. Il

9 faut expliquer une partie d'un document à l'appui de la réponse du

10 Procureur en date du 14 janvier. Vous trouvez en annexe une lettre en

11 date du 2 janvier 1998 signée par le Président de la Republika Srpska,

12 Mme Plavsic, lettre adressée au secrétaire-général des Nations Unies,

13 ainsi qu'aux ambassadeurs des états membres du Conseil de sécurité,

14 lettre dans laquelle la position de la République à l'époque est

15 exposée, c'est-à-dire en date du 2 février 1997. Je suis convaincu que

16 tout le monde sait que dès le début de l'année dernière -nous parlons

17 ici de la date à laquelle cette lettre a été rédigée- de nombreuses

18 modifications importantes sont intervenues dans la vie politique de la

19 Republika Srpska et que la position de communauté internationale à

20 l'égard de notre situation politique en Bosnie- Herzégovine a changer

21 aussi. Nous savons que Mme Plavsic est tout à fait reconnue par la

22 communauté internationale ainsi que par les représentants de

23 communauté internationale en Bosnie-Herzégovine puisqu'elle est la

24 figure de proue, la personne-clé, qui permettra de satisfaire à toutes

25 les obligations découlant des accords de Dayton. S'agissant des

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1 obligations incombant aux institutions de Republika Srpska dans

2 l'affaire Kovacevic, s'agissant aussi de l'éventuelle assistance que

3 pourraient fournir les forces de police locales dans la région, la

4 défense peut assurer cette Chambre de première instance que toute

5 l'assistance policière nécessaire pour satisfaire ces obligations sera

6 fournie immédiatement sans aucun retard. A l'appui de ce fait, je vous

7 rappelle que la police locale de Prijedor a beaucoup aidé lors des

8 actions récentes lancées par le Bureau du Procureur de la région de

9 Prijedor ou dans la ville de Prijedor, pas plus tard que le mois dernier.

10 Rappelez-vous, cette action a été menée pour obtenir certains

11 documents dans la municipalité de Prijedor auprès du Bureau du parti

12 SDS, ainsi que dans les bureaux de la police locale. Ce fait montre à

13 quel point les institutions politiques de la Republika Srpska se sont

14 engagées à coopérer avec le Tribunal et à participer pleinement au

15 processus de mise en oeuvre des accords de paix de Dayton. S'il est

16 fait droit à cette requête, en vue de la mise en liberté provisoire du Dr

17 Kovacevic, ceci montrera non seulement l'extrême crédibilité de ce

18 Tribunal, mais constituera aussi un jalon, à mon avis, qui montrera

19 qu'il est possible d'assister des personnes vraiment engagées dans le

20 processus de paix. Je parle ici bien sûr de Mme Plavsic, mais aussi de

21 toutes les personnes qui lui sont loyales ; je pense notamment au

22 ministère de la Police. Ce Tribunal devrait continuer à soutenir le

23 processus de paix en Bosnie et cette affaire pourrait manifester cette

24 bonne volonté, surtout si la Chambre accordait la mise en provisoire

25 du Dr Kovacevic. Je suppose également qu'en accordant la liberté

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1 provisoire, le Tribunal a une occasion unique. En effet, il lui est

2 possible d'encourager certaines des personnes mises en accusation et

3 résidant en Republika Srpska à se rendre au Tribunal, car cette

4 décision favorable que vous allez éventuellement rendre aura, à mon

5 avis, un effet extraordinaire sur les personnes mises en accusation.

6 Cette décision les incitera à se livrer au Tribunal et à se faire traduire

7 en justice. Je vous remercie.

8 M. le Président (interprétation). - Merci. Avez-vous quoi que ce soit à

9 ajouter ou bien regardez-vous l'horloge ? Je pensais faire une

10 interruption après 15 heures 30.En aurez-vous terminé avant la pause?

11 M. Keegan (interprétation). - Je vais essayer en tout cas. Je crois que

12 notre réplique couvre la plupart des points que nous voulions évoquer

13 aujourd'hui Les articles 64 et 65 imposent la détention une fois qu'une

14 personne a été livrée au Tribunal et une mise en liberté ne peut être

15 accordée que si tous les critères imposés par l'article 60 sont réunis.

16 La décision Delalic, suivie et appliquée dans les affaires ultérieures,

17 Blaskic et Landzo, indique que même si les conditions sont réunies,

18 les critères sont respectés. Les Juges de la Chambre gardent leur

19 pouvoir discrétionnaire. De plus, si les critères ne sont pas remplis, il

20 ne peut pas y avoir de mise en liberté. Il est clair aussi que les critères

21 de l'article 65 doivent être corroborés par des faits à la satisfaction de

22 la Chambre de première instance, faits qui soient équivalents à des

23 éléments de preuve si vous voulez. Je ferai remarquer aujourd'hui que

24 nous avons entendu beaucoup d'affirmations de la part de la défense et

25 que les seuls faits ou éléments de preuve présentés sont quelques

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1 pages qui proviennent apparemment d'un rapport médical à Prijedor.

2 Nous avons maintenant une feuille de papier qui est un relevé de prise

3 de tension artérielle. Il ne s'agit donc pas d'éléments de preuve et ceci

4 ne peut pas nous permettre de savoir si les critères sont bien respectés

5 et ne peuvent pas être compris comme des faits.

6 M. le Président (interprétation). - N'oubliez pas que nous avons bien

7 compris tout cela.

8 M. Keegan (interprétation). - Ceci étant, il n'incombe plus que de

9 répondre aux faits évoqués par la défense et si la Chambre estime que,

10 par ses arguments la défense a bien soulevé une suspicion raisonnable

11 quant à la base qu'il y aurait pour une détention, effectivement, vous

12 en jugerez de la sorte, mais je vous rappelle la décision de l'affaire

13 Delalic et la question de savoir si la Chambre doit s'intéresser aux

14 raisons qui permettent la détention. Si la défense rassemble

15 suffisamment d'éléments de preuve pour éveiller ce doute, vous

16 pouvez estimer qu'il y a un doute à la raison qui, au départ,

17 motivait la détention. Nous ne pensons pas que les informations

18 fournies par la défense aujourd'hui éveillent le moindre doute quant à

19 la décision prise par le juge de confirmation de l'acte d'accusation qui

20 a estimé qu'il y avait effectivement des présomptions de preuves. Si la

21 Chambre estime que la fourniture de toute information dans la

22 réplique de l'accusation peut être utile, nous avons préparé quelques

23 pièces ; car, en dépit de ce qu'affirme la défense, nous n'avions aucune

24 information préalable, aucune preuve en ce qui concerne l'accusé pour

25 le moment.

Page 29

1 M. le Président (interprétation). - Avant que vous ne poursuiviez,

2 j'aurais voulu évoquer une question avec mes collègues. (Les Juges se

3 consultent sur le siège)

4 M. le Président (interprétation). - Nous n'allons pas entendre d'autres

5 éléments de preuve. Nous avons suffisamment d'éléments pour le

6 moment.

7 M. Keegan (interprétation). - Fort bien. Je peux passer directement à

8 divers points. Comme nous l'avons indiqué dans notre réplique, nous

9 ne pensons pas que la défense ait assuré sa charge de la preuve sur

10 aucun des critères en rapport avec l'état de santé de l'accusé et qui

11 représenteraient des circonstances exceptionnelles. Même si nous

12 acceptions ce qu'a dit la défense comme étant un reflet fidèle de l'état

13 de santé de l'accusé -le fait qu'il ait un problème cardiaque, qu'il soit

14 déprimé étant donné les circonstances dans lesquelles il se trouve-

15 tout cela ne représente en aucune façon une circonstance

16 exceptionnelle. Ces deux étapes trouvaient remède soit au quartier

17 pénitentiaire soit dans un hôpital néerlandais si c'est nécessaire,

18 comme cela a d'ailleurs déjà été fait. Rien dans les circonstances ainsi

19 évoquées n'empêcherait qu'il y ait la détention et ceci correspond tout

20 à fait à la décision dans l'affaire Delalic que nous avons évoquée dans

21 nos écritures. Nous disons donc qu'il n'y a pas circonstance

22 exceptionnelle, mais maintenant la défense a soulevé la question de la

23 suspicion raisonnable. Vous avez pris connaissance des arguments

24 dans nos écritures. Il ne faut pas aller plus loin puisque l'un des

25 critères n'a pas été rempli. Vu la jurisprudence déjà établie à propos

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1 de l'article 65, cela permet de mettre un terme à la discussion puisque

2 si un critère n'est pas réuni, il est inutile de poursuivre la discussion.

3 J'aimerais malgré tout revenir sur un point. D'abord, la question de

4 savoir si l'accusé risque de s'échapper, présente un risque d'évasion.

5 Rien n'a été dit par la défense à ce propos, aucune preuve n'a été

6 apportée. Au contraire, nous avons des indications selon lesquelles,

7 du seul fait même de l'acte d'accusation, le Dr Kovacevic a été accusé

8 du crime que l'on considère peut-être comme le plus grave, le crime

9 de génocide. La nature des crimes commis, génocide ou complicité de

10 génocide montre qu'effectivement, un danger réel existe pour les

11 témoins. S'il était libéré, s'il était continuellement informé de l'affaire

12 du fait de la communication et il pourrait menacer des connaîtrait des

13 faits qui ne sont pas connus des co-auteurs de ces crimes. La défense

14 parlait de la coopération dont fait preuve la Republika Srpska. Vous

15 savez que nous avons encore quarante-huit personnes mises en

16 accusation. Aucune de ces personnes n'a encore été arrêtée. Si vous

17 avez la lettre de Mme Plavsic qui indique que si des obstacles

18 juridiques sont présentés ils sont ultra vires, en dehors de l'autorité de

19 ce Tribunal. Nous savons aussi que la lettre la plus récente soumise

20 par la défense ne dit rien des garanties qui seraient fournies en retour

21 pour le procès de l'accusé. Quant à la question de l'effet que cela

22 pourrait avoir sur les témoins, il y a d'abord les affaires précédentes

23 qui nous donnent une certaine indication et l'analyse de ces faits. Rien

24 ne justifierait cette mise en liberté provisoire. Elle ne pourrait avoir

25 qu'un effet délétère sur l'administration de la justice et ce sera de cette

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1 façon que je terminerais ce que j'avais à dire.

2 M. le Président (interprétation). - Auriez-vous quelque chose à

3 ajouter, Maître Vucicevic ?

4 M. Vucicevic (interprétation). - Les spéculations soulevées par Me

5 Keegan quant à la possibilité d'intimider des témoins manquent de

6

7 fondement. Le Dr Kovacevic n'a jamais fait quoi que ce soit de nature

8 à intimider une autre personne. Dans l'affaire que nous avons citée,

9 U.S. c/ Galo, le co-conspirateur à été mis en liberté car les Juges ont

10 décrété que s'il y avait l'intention de porter préjudice à des témoins

11 cette intention pouvait se manifester même si l'accusé se trouvait en

12 prison. Sur le fait qu'il y ait des co-conspirateurs en liberté, si l'on

13 permettait au Dr Kovacevic de rentrer chez lui pour un certain temps,

14 pour se soigner, ce serait agir de façon humanitaire et il reviendrait se

15 faire juger ici. Les arguments de l'accusation ne servent qu'à elle, ils

16 servent aussi à justifier que l'accusé demeure en détention alors qu'il

17 est très malade. Vous savez que les autres détenus peuvent sortir pour

18 jouer au ballon. Lui, il ne là ? Ceci n'est en tout cas pas corroboré par

19 les éléments provenant des rapports médicaux. Ces conclusions de

20 l'accusation ne sont utiles qu'à l'accusation. Me Keegan a fait un

21 commentaire sur le traitement médical. Il a dit qu'il n'y avait pas de

22 faits qui avaient avancé. Tous les faits que j'ai évoqués sont déjà

23 contenus dans les rapports ; ce n'étaient pas des arguments que

24 j'invoquais mais des conclusions du rapport. Pourtant, le Procureur dit

25 que son état cardiaque pourrait faire l'objet d'un traitement dans un

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1 hôpital local ou à la prison. Si cela était le cas, pourquoi cela n'a pas

2 été essayé ces derniers mois ? Le Procureur affirme toujours, en

3 paroles bien sûr, qu'il veut aider à ce qu'un traitement soit administré,

4 mais rien n'a été fait dans ce sens. Même si le Dr Kovacevic mourait

5 de mort naturelle, ou par acte de Dieu avec une chance de 30 ou 40 %,

6 ou s'il se suicidait, l'accusation ne serait-elle pas soulagée parce

7 qu'elle n'aurait pas à apporter de preuve.

8 M. le Président (interprétation). - Ce n'est pas très honnête d'avoir

9 recours à cet argument.

10 M. Vucicevic (interprétation). - Monsieur le Président, je ne dis pas

11 que c'est là l'intention de l'accusation. Je n'ai pas non plus dit ceci

12 pour vexer qui que ce soit, mais c'est la conclusion logique qu'il faut

13 tirer. La raison et la logique imposent cette conclusion. La raison et la

14 logique ne sont-elles pas la quintessence du droit ?

15 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie. Nous allons faire

16 une pause. Je vais vous demander quelle est la durée habituelle des

17 pauses ? Nous allons étudier la question en l'espace de vingt minutes

18 de pause. L'audience, suspendue à 16 h 30, est reprise à 15 h 50.

19 M. le Président (interprétation). - L'article 65 du Règlement de

20 procédure et de première instance que dans des circonstances

21 exceptionnelles et pour autant qu'elle ait la certitude que l'accusé

22 comparaîtra et s'il est libéré ne mettra pas en danger une victime, un

23 témoin ou toute autre personne. Nous avons examiné la requête qui

24 nous a été soumise. Nous avons examiné les éléments de preuve qui

25 nous ont été proposés, ainsi que la présentation orale et écrite des

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1 arguments. Notre conclusion est que nous ne pouvons découvrir

2 l'existence de circonstances exceptionnelles dans ce cas précis. En

3 conséquence, la demande de mise en liberté provisoire est rejetée et

4 nous fournirons nos motifs par écrit ultérieurement. Cela met un point

5 final à nos débats en ce qui concerne la requête, mais comme je l'ai

6 déjà dit précédemment un certain nombre de questions liées à la

7 procédure dans cette affaire méritent d'être débattues. Donc une

8 Conférence de mise en état va avoir lieu, mais elle se déroulera à huis

9 clos comme d'habitude. Nous allons suspendre l'audience pour

10 quelques instants afin que la salle puisse être préparée. Après quoi,

11 nous tiendrons la Conférence de mise en état. L'audience est

12 suspendue à 15 heures 54

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