Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 4 septembre 2008

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 8 heures 30.

  5   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Cepic, y a-t-il une question

  6   préliminaire que vous souhaitiez évoquer ?

  7   M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai simplement oublié

  8   de demander l'admission de certains documents au dossier. J'ai déjà parlé

  9   avec M. Groome et nous n'avons aucune objection à ce sujet. Il s'agit du

 10   témoignage -- ou de la transcription du témoignage de VG-14 dans l'affaire

 11   Vasiljevic et le feuillet de renseignements concernant certains témoins que

 12   j'avais présentés à VG-13 au cours de son interrogatoire.

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Nous n'avons qu'à admettre le

 14   document.

 15   M. CEPIC : [interprétation] Il y a la lettre P dans la transcription et il

 16   y a une erreur à la ligne 9, VG-13 et pas 14. C'est ma prononciation de

 17   l'anglais qui n'est pas parfaite.

 18   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit du

 19   feuillet contenant le pseudonyme qui sera le 1D371 et qui devient la pièce

 20   à conviction 2D8, et le 1D1000-0049 [comme interprété] devient la pièce à

 21   conviction 2D9, les deux déposés sous pli scellé.

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  3   [Audience à huis clos partiel]

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 24   [Audience publique]

 25   [Le témoin est introduit dans le prétoire] 

 26   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Que le témoin fasse la déclaration.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 28   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

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  1   LE TÉMOIN: TÉMOIN VG-32 [Assermenté]

  2   [Le témoin répond par l'interprète]

  3   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir.

  4   Vous pouvez commencer, Monsieur Groome.

  5   M. GROOME : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   Interrogatoire principal par M. Groome : 

  7   Q.  [interprétation] VG-32, la Chambre a accordé certaines mesures de

  8   protection concernant votre identité et votre déposition ici aujourd'hui de

  9   sorte que je vous appellerai VG-32 pendant votre déposition.

 10   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais demander

 11   que nous allions en audience à huis clos partiel brièvement avant que je ne

 12   montre au témoin le feuillet contenant son pseudonyme.

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Audience à huis clos partiel.

 14   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes en audience à huis clos

 15   partiel.

 16   [Audience à huis clos partiel]

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  6   [Audience publique]

  7   M. GROOME : [interprétation] Je voudrais demander à l'huissière de

  8   présenter au témoin la feuille contenant le pseudonyme.

  9   Q.  VG-32, regardez le papier qu'on vient de vous remettre. Je voudrais

 10   vous demander si c'est bien votre nom qui figure sur cette feuille ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  C'est bien votre date de naissance sur cette feuille ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Je vais vous demander de bien vouloir signer ce feuillet, d'y apposer

 15   votre signature.

 16   R.  [Le témoin s'exécute]

 17   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, après que le document a

 18   été montré au conseil de la Défense et aux membres de la Chambre, je

 19   demande qu'il soit versé au dossier sous pli scellé comme élément de

 20   preuve.

 21   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, le document est

 22   admis sous la cote P64 et sous pli scellé.

 23   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

 24   M. GROOME : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais je

 25   n'ai pas entendu, je ne sais pas si on a attribué un numéro de pièce pour

 26   le moment. C'est quelque chose qu'il faut que je sache avant de poursuivre.

 27   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ceci devient la pièce P64 sous pli

 28   scellé.

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  1   M. GROOME : [interprétation] Je vous remercie.

  2   Q.  VG-32, comme vous pouvez le voir au bas du feuillet, vous avez ici les

  3   noms de deux autres personnes dont vous pourrez parler durant votre

  4   déposition. Et je voudrais vous demander de les mentionner par leur nom.

  5   Le témoin a une longue déposition à faire aujourd'hui, Monsieur le

  6   Président. Peut-être que ça pourrait accélérer les choses si je peux poser

  7   des questions au témoin concernant les tenants et les aboutissants de

  8   certains renseignements - je ne pense pas qu'il y ait un problème en

  9   l'espèce. Donc avec la permission de la Chambre, je voudrais demander de

 10   pouvoir lui poser des questions concernant son passé et des renseignements

 11   généraux concernant Visegrad.

 12   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Je vais l'autoriser, mais si

 13   les équipes de la Défense pensent qu'une question que vous soulevez est

 14   controversée, ils ont la possibilité de le porter à mon attention.

 15   M. GROOME : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 16   Q.  VG-32, pour accélérer les choses je vais résumer certains

 17   renseignements que vous nous avez donnés lors de votre déposition dans le

 18   passé et dans votre déclaration, et vous demander si ce que je résume est

 19   exact.

 20   En ce qui concerne votre scolarité et votre formation professionnelle, vous

 21   êtes né en 1965 dans la région de Visegrad. Vous avez achevé votre

 22   scolarité primaire à Visegrad et la scolarité secondaire à Sarajevo. A

 23   Sarajevo, vous êtes allé en faculté de médecine. Bien que vous ne soyez pas

 24   médecin, vous avez reçu une formation dans les professions de santé. Vous

 25   êtes revenu à la ville de Visegrad où vous avez travaillé au centre

 26   sanitaire. En 1988, vous êtes revenu pour faire une formation

 27   complémentaire qui avait trait à un autre domaine de la santé.

 28   Est-ce que tout ce que je viens de dire est exact ?

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  1   R.  Oui. Excusez-moi, Monsieur le Président. Mais au lieu de 1988 il

  2   faudrait dire 1998, je crois.

  3   Q.  Bien. Avec cette correction, le reste des renseignements que j'ai

  4   donnés sont exacts ?

  5   R.  Exact.

  6   Q.  Au printemps 1992, vous avez quitté Visegrad du côté du 10, 12 avril

  7   1992, lorsque le conflit a éclaté à Visegrad. Il a d'abord éclaté à

  8   l'extérieur de la ville de Visegrad, et rapidement il a gagné la ville

  9   proprement dite. Vous n'avez pas voulu prendre part à ce conflit et vous

 10   étiez opposé à toute violence, et par inquiétude pour votre femme et vos

 11   jeunes enfants, vous avez décidé de quitter Visegrad et d'aller à Gorazde;

 12   n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Au printemps 1992, vous étiez marié et vous aviez un

 15   enfant ?

 16   R.  Oui. J'étais marié et nous avions une enfant, une fille.

 17   Q.  Quel était l'âge de votre fille à ce temps ?

 18   R.  Si on part du début du printemps, elle avait 20 mois. Si c'est à la fin

 19   du printemps, elle avait 22 mois. Donc elle avait juste un peu moins de 2

 20   ans.

 21   Q.  Est-il vrai que lorsque vous étiez à Gorazde, vous avez vu des rapports

 22   dans les médias selon lesquels le Corps d'Uzice de l'armée populaire de

 23   Yougoslavie était entré en ville et que la ville était ainsi sécurisée et

 24   que les autorités avaient garanti la sécurité de tous ceux qui revenaient

 25   en ville, indépendamment de leur origine ethnique ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Est-ce que les médias ont été utilisés pour aviser les habitants de

 28   Visegrad qui avaient quitté la ville qu'ils avaient des obligations de

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  1   travail ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Et vous avez compris que ça voulait dire quoi ?

  4   R.  Ce que moi, j'ai compris - en fait, c'est ce que j'ai fait d'ailleurs -

  5   c'est que je devais retourner à la ville de Visegrad, et me présenter sur

  6   mon lieu de travail, le centre sanitaire. Je me suis rendu compte qu'à

  7   moins que je ne retourne à mon travail, je perdrais mon emploi. Je n'ai pas

  8   cru que la guerre éclaterait de la façon dont ça s'est passé. Je croyais

  9   qu'avec mon retour à Visegrad, la guerre prendrait fin.

 10   Q.  Vous nous avez dit que vous êtes retourné à Visegrad. Est-ce que vous

 11   vous rappelez approximativement les dates de votre retour à Visegrad venant

 12   de Gorazde ?

 13   R.  Je ne me rappelle pas de la date exacte. C'était en gros deux semaines

 14   plus tard que je suis retourné à Visegrad. Donc du côté du 25 ou 26 avril.

 15   Q.  Lorsque vous êtes retourné à Visegrad, est-ce que le Corps d'Uzice

 16   occupait encore la ville ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Lors de votre retour vers Visegrad, est-ce que vous avez rencontré des

 19   points de contrôle ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  D'autres témoins ont déposé au sujet de ces points de contrôle qui se

 22   trouvaient là, mais il se peut qu'il ne soit pas nécessaire que vous

 23   entriez dans beaucoup de détails concernant ces points de contrôle que vous

 24   avez traversés. Je voudrais vous demander approximativement à combien de

 25   points de contrôle vous avez été arrêté lorsque vous étiez en route vers

 26   Visegrad ?

 27   R.  J'ai été arrêté à cinq points de contrôle. Le dernier point de contrôle

 28   se trouvait à l'entrée même de Visegrad juste avant le pont sur la Drina.

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  1   Si vous le voulez, je peux vous donner la liste des endroits où j'ai été

  2   arrêté.

  3   Q.  Je ne pense pas que ce soit nécessaire pour le moment. Si ça devient

  4   pertinent, je vous poserai des questions à ce sujet à ce moment-là. Est-il

  5   vrai qu'après votre retour vous ne vous êtes pas senti en sécurité, parce

  6   que vous avez appris que des personnes d'origine éthique musulmane devaient

  7   se présenter au poste de police et que très souvent ceux qui s'y

  8   présentaient ne revenaient pas. En plus en dehors du centre médical de

  9   Visegrad où vous avez travaillé, vous avez vu un soldat tirer tout un

 10   chargeur de son arme automatique en l'air ?

 11   R.  C'est exact.

 12   Q.  Est-ce que ces deux événements ont eu lieu pendant que le Corps d'Uzice

 13   était encore en ville ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Est-ce que vous connaissiez personnellement certaines de ces personnes

 16   qui sont allées au poste de police et qu'on n'a pas revues ?

 17   R.  Oui, effectivement. J'en connaissais un certain nombre. J'avais été ami

 18   de certains d'entre eux et pour d'autres je les connaissais, c'était des

 19   connaissances.

 20   Q.  Est-ce que vous avez eu connaissance du fait que des maisons

 21   appartenant à des Musulmans étaient incendiées pendant cette période ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Pendant que le Corps d'Uzice était présent en ville, est-ce que vous

 24   avez observé des groupes paramilitaires en ville ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Pourriez-vous nous dire le nom ou les noms du groupe ou des groupes en

 27   question, comment on les appelait ?

 28   R.  Les groupes qui étaient présents dans la ville de Visegrad avaient le

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  1   nom générique et général de Aigles blancs, les Aigles blancs. C'est comme

  2   ça que nous les désignions indépendamment de savoir exactement quel groupe

  3   c'était. Je crois qu'il y avait également un groupe à Visegrad qui était

  4   mentionné comme étant les hommes de Seselj et les hommes d'Arkan. J'ai

  5   également eu envie de dire à un moment donné qu'il y avait un groupe appelé

  6   Garavi Sokak. Il y avait plusieurs noms qui circulaient en ce qui

  7   concernait ces groupes. Je parle de la période et des circonstances qui

  8   existaient à ce moment-là.

  9   Q.  Est-ce que vous connaissez certains des lieux dans lesquels les

 10   paramilitaires en question dormaient ou utilisaient comme quartier général

 11   ?

 12   R.  L'un des lieux qui était bien connu et devant lequel je devais passer

 13   tous les jours c'était l'hôtel de Visegrad qui se trouvait juste à côté du

 14   pont Visegrad, du côté droit. Tous les matins je devais passer devant

 15   l'hôtel pour me rendre à mon travail. Il y avait toujours un garde qui se

 16   trouvait à l'extérieur de l'hôtel, parfois juste hors de l'hôtel, parfois

 17   d'autres fois sur le trottoir, à quelque 10 mètres de l'hôtel. Je

 18   connaissais l'un d'entre eux qui était du cru, d'autres ne m'étaient pas

 19   connus.

 20   Q.  Cet hôtel Visegrad, le connaît-on également sous le nom de Nouvel hôtel

 21   ?

 22   R.  Oui, c'est comme ça qu'on l'appelait.

 23   Q.  Est-ce qu'à un moment donné vous avez été arrêté par des membres des

 24   paramilitaires alors que le Corps d'Uzice était encore en ville ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Pourriez-vous décrire quand ça eu lieu et exactement ce qui s'est

 27   passé, donc cet événement ?

 28   R.  Je ne sais pas vraiment la date, je sais que le Corps d'Uzice était

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  1   encore présent alors que je revenais du travail. J'ai été arrêté. Et je

  2   voudrais remarquer que pendant un certain temps, la façon la plus sûre pour

  3   aller au travail était de prendre ma voiture, parce qu'il ne me fallait

  4   qu'un moment pour aller sur l'autre rive de la Drina où je travaillais, et

  5   la même chose était vrai pour mon retour chez moi. Toutefois, un jour alors

  6   que je revenais du travail, j'ai été arrêté par deux personnes, deux hommes

  7   à l'extérieur de l'hôtel et je crois, ils m'ont traité de façon correcte.

  8   Ils m'ont demandé de montrer mon identité, puis ils ont voulu que j'ouvre

  9   le coffre de la voiture, puis également le capot pour voir le moteur. L'un

 10   d'entre eux a pris mes papiers d'identité, est allé dans l'hôtel tandis que

 11   les autres sont restés à l'extérieur avec moi.

 12   Il est revenu quelques minutes plus tard, a dit à son

 13   collègue : "Il est pas là." Il m'a rendu ma carte d'identité et à ce

 14   moment-là j'ai été libre de repartir.

 15   Q.  Lorsqu'il a dit : "Il n'est pas là." Qu'est-ce que vous avez compris

 16   que cela voulait dire ?

 17   R. Selon ma propre logique, ça veut dire que s'il avait pris ma carte

 18   d'identité en allant vers l'hôtel, il est probable qu'il avait une liste

 19   dans l'hôtel et qu'il avait dû aller vérifier si mon nom y figurait. Et

 20   quand il est revenu et qu'il a dit : "Il n'y est pas," "Il n'est pas là,"

 21   il est probable qu'il n'a pas trouvé mon nom sur cette liste, sinon,

 22   pourquoi aurait-il pris ma carte d'identité ?

 23   Q.  A partir de ce jour-là, est-ce que vous avez repris votre voiture ?

 24   R.  Non, à partir de ce jour-là je ne suis plus allé au travail en voiture.

 25   Q.  Connaissez-vous une personne du nom du Dr Safet Sahilovic ? Etait-ce un

 26   de vos collègue au centre médical ?

 27   R.  Il faut apporter une correction, il s'agit de Safet Zejnilovic. Nous

 28   étions de très bons amis.

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  1   Q.  Pourrais-je vous demander, s'il vous plaît, d'épeler son nom de façon à

  2   ce qu'on ait cela de façon exacte au compte rendu ?

  3   R.  Safet Zejnilovic, Z-e-j-n-i-l-v-i-c.

  4   Q.  Savez-vous ce qui est arrivé au Dr Zejnilovic?

  5   R.  Oui, je sais très bien ce qui lui est arrivé.

  6   Q.  Veuillez nous expliquer, veuillez expliquer ça aux membres de la

  7   Chambre.

  8   R.  Le Dr Zejnilovic se trouvait à Visegrad avant la guerre. Et avant que

  9   le Corps d'Uzice ne vienne en ville, il était allé à Gorazde avec le chef

 10   du centre médical en passant par Cajnice et Pljevlja. Il est allé à

 11   l'endroit où il était né et il a poursuivi à l'autre centre, et il est

 12   resté là-bas, il est allé jusqu'à Tera, il est resté jusqu'à ce que le

 13   Corps d'Uzice soit venu en ville. Et à l'initiative de celui qui était le

 14   commandant à ce moment-là, ou le chef de l'hôpital en tant de guerre, ils

 15   ont réussi à convaincre sa femme médecin, qu'ils lui ont même fourni un

 16   chauffeur pour aller chercher le Dr Safet et lui donner toute garantie

 17   concernant sa sécurité, mais pour le convaincre, ses services étaient

 18   nécessaires en ville.

 19   Ils ont réussi à le convaincre à revenir en ville, et lorsqu'il est rentré

 20   chez lui une heure ou deux plus tard, un groupe d'hommes armés s'est

 21   présenté et l'ont emmené. Elle lui a dit qu'ils l'avaient brutalisée à

 22   l'époque et, malheureusement, je dois dire que le corps du médecin a été

 23   identifié au cimetière de Visoko. Ces restes ont été retrouvés.

 24   Q.  Et pour sa maison, qu'est-il arrivé ?

 25   R.  Environ deux jours après qu'on l'ait emmené, sa maison a été incendiée.

 26   Q.  Depuis combien de temps était-il retourné à Visegrad avant qu'il ait

 27   été emmené par ces hommes qui l'ont finalement tué ?

 28   R.  D'après le récit de son épouse, c'était quelque trois ou quatre heures

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  1   plus tard. Dans la même soirée que le jour où il était rentré, il était

  2   arrivé.

  3   Q.  Jusqu'à maintenant vous avez décrit les événements qui se sont produits

  4   tandis le Corps d'Uzice de l'Armée de la république yougoslave se trouvait

  5   à Visegrad, qui était là ostensiblement pour protéger et assurer la

  6   sécurité de tous les citoyens yougoslaves indépendamment de leur origine

  7   ethnique. Est-ce que vous vous rappelez ce qui s'est passé lorsque le Corps

  8   d'Uzice est parti ?

  9   R.  Quand le Corps d'Uzice est parti, j'ai été réveillé un matin par des

 10   fusillades très violentes en ville. Ces coups de feu pouvaient être

 11   entendus de partout et provenaient d'armes de poing. Et alors que j'étais

 12   en route pour me rendre à mon travail sortant d'une rue pour aller sur la

 13   rue principale, j'ai vu une grande colonne de véhicules militaires, ce qui

 14   voulait dire pour moi que le Corps d'Uzice quittait la ville de Visegrad.

 15   Je suis retourné chez moi, j'ai informé ma famille de ce qui se passait. Et

 16   à mon insistance et à l'insistance de ma mère, ils ont quitté la ville de

 17   Visegrad le même jour que celui où le Corps d'Uzice est parti. Ils ont pris

 18   un car à 10 heures du matin en direction d'Uzice.

 19   Q.  Est-ce que votre fille est partie avec votre femme et est-ce que votre

 20   fille a voyagé avec votre femme pour quitter Visegrad ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Quand vous avez quitté Visegrad et le Corps d'Uzice a quitté Visegrad,

 23   est-ce que les groupes paramilitaires sont partis également ?

 24   R.  Malheureusement, bien que nous ayons pensé que les paramilitaires

 25   quittaient la ville aussi, ce jour-là au centre médical, puisque le

 26   commandement de guerre était parti, le nouvel administrateur est resté au

 27   centre et il a tenu une réunion en nous réunissant tous pour nous dire que

 28   nous n'avions pas à craindre pour notre sécurité, que la Défense

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  1   territoriale était là pour la ville de Visegrad, et que le Corps d'Uzice

  2   reviendrait si c'était nécessaire. Je crois, en fait, qu'il essayait de

  3   nous apaiser, d'apaiser nos craintes. Et qui plus est, on nous avait dit

  4   que les paramilitaires avaient quitté la ville aussi, chose qui n'était pas

  5   vraie.

  6   Q.  Une fois que le Corps d'Uzice a quitté la ville, y a-t-il eu un autre

  7   incident entre vous-même et un groupe d'hommes armés à Visegrad ?

  8   R.  Je dirais plutôt, enfin, je ne sais pas à quel incident vous faites

  9   référence. Est-ce l'incident qui est survenu dans mon appartement ?

 10   Q.  Oui, justement. Pouvez-vous nous parler de l'incident qui s'est déroulé

 11   dans votre appartement ?

 12   R.  J'avais pensé que vous parliez d'autre chose.

 13   Mais si, il y a eu un incident de survenu dans mon appartement. Etant donné

 14   que je ne me sentais pas très en sécurité chez moi, je passais la plupart

 15   de mon temps dans la maison de mon beau-père, et un jour la propriétaire de

 16   la maison où j'habitais m'a fait savoir que des inconnus étaient entrés

 17   dans mon appartement, ils avaient enfoncé la porte. Elle ne savait pas

 18   s'ils avaient pris quelque chose, mais la porte était enfoncée et ouverte,

 19   et ce serait une bonne chose pour moi de venir pour fermer la porte et

 20   changer la serrure. Je l'ai fait.

 21   J'ai pris des chemins détournés pour arriver chez moi. A l'instant où

 22   j'étais en train de réparer la serrure de la porte, il est arrivé un

 23   véhicule devant la porte. Deux soldats en sont sortis, deux soldats en

 24   arme. Ils ont demandé, "Où est la clé de la Mercedes qui se trouvait dans

 25   le garage ?" Je lui ai dit que je ne savais pas, que je ne faisais

 26   qu'habité là. A moins qu'il n'aille à l'étage pour demander. Alors la

 27   propriétaire de la maison est venue et sa belle-fille avec. Elles ont dit

 28   qu'elles n'avaient pas les clés, que le jour d'avant leur fils, le

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  1   propriétaire de la Mercedes avait essayé de quitter la ville de Visegrad et

  2   qu'il se trouvait dans la localité de Dragobilje et l'autocar au bord

  3   duquel il se trouvait a été arrêté là-bas, lui et d'autres hommes ont été

  4   descendus du car et qu'elle n'avait pas les clés.

  5   Ils sont repartis. Ils ont écrit quelque chose sur un bout de papier et ils

  6   ont mis cela sur la porte du garage. Ils ont mis "réservé," et signature

  7   Buco. Au bout de dix à 15 minutes, ils sont venus avec un électricien et

  8   mécanicien de la ville pour essayer d'ouvrir la Mercedes par la force et la

  9   mettre en marche. Ça n'a pas été une tâche facile, ça a pris quand même

 10   quelques minutes. Moi, j'ai continué à être là. Je n'ai pas quitté les

 11   lieux. Or l'épouse de ce jeune homme qui était le propriétaire de la maison

 12   a demandé, "Qu'est-il advenu de ces gens qui étaient à bord de l'autocar ?"

 13   Et l'autre lui a dit à la lettre : "Madame, je ne sais pas si vous aviez

 14   quelqu'un des vôtres dans ce car, mais si oui, je dois vous exprimer mes

 15   condoléances, ces hommes ne sont pas en vie." La femme, bien sûr elle s'est

 16   mise à pleurer. Et vous voyez, enfin, vous pensez bien qu'à ce moment-là

 17   elle était en état de choc. Et l'autre m'a dit, "Est-ce que tu peux venir

 18   avec moi ?" Il m'a fait entrer dans mon appartement, on s'est assis à la

 19   table de la salle à manger et il m'a demandé, "Est-ce que tu veux racheter

 20   ta tête ?" Alors j'ai dit, "Comment voulez-vous que je rachète ma tête ?"

 21   Il m'a dit, "Ne fais pas l'idiot, tu sais très bien de quoi je parle.

 22   Donne-nous l'argent, l'or, les devises que tu as, sinon, je te remettrai

 23   entre les mains des gens d'Obrenovac et là tu es fichu." Alors j'ai dit,

 24   "Non mais pas du tout, vous n'y êtes pas, enfin.

 25   J'avais un peu d'argent, je leur ai donné 50 marks à peu près et mon

 26   alliance en or. Il a dit, "Bon." Il avait l'air satisfait. On est sorti. On

 27   est ressorti devant la maison, devant l'immeuble.

 28   Q.  Peut-être pourrais-je vous poser une question concrète. Quand on vous a

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  1   dit, "Vous serez remis aux gars d'Obrenovac," vous avez montré de votre

  2   index droit un trait traversant votre gorge. Est-ce que c'est ce que l'on

  3   voulait dire, vous passez le doigt, que voulait dire vous passer le doigt

  4   par le cou ?

  5   R.  Quand on vous dit, "Tu es fichu," ça veut dire qu'on sera tué. C'était

  6   simple. C'est la façon dont j'ai interprété la chose.

  7   Ça ne veut pas dire que je serai forcément égorgé quand je fais ce signe

  8   par-dessus mon cou. Ça veut dire, tu es fichu, à savoir cela signifie, tu

  9   seras tué.

 10   Q.  Avez-vous eu l'occasion de voir une Passat rouge cerise qui a été

 11   facilement reconnaissable dans la ville de Visegrad ?

 12   R.  Si, je connaissais. Je connaissais le véhicule. Je rectifie un peu la

 13   couleur, c'était rouge foncé, cerise mûre.

 14   Q.  Saviez-vous qui était le propriétaire de cette voiture ?

 15   R.  C'était Behija Zukic qui était propriétaire de ce véhicule ainsi que

 16   son époux Dzemo. Ils étaient propriétaires d'une épicerie non loin de chez

 17   moi. J'allais souvent chez eux, j'achetais souvent chez eux, et même le

 18   jour où Dzemo a emmené cette voiture, j'étais là alors je l'en ai félicité.

 19   Q.  Est-ce qu'à un moment donné vous avez appris que Behija Zukic a été

 20   tuée ?

 21   R.  Oui, je l'ai appris au centre médical. On m'a dit que Behija Zukic

 22   était dans la morgue et qu'on avait emmené sa dépouille dans la morgue. On

 23   m'a aussi dit que l'homme qui se trouvait à la morgue et qui a vu tout cela

 24   a dit qu'elle était massacrée et qu'une partie de sa tête manquait.

 25   Q.  Le jour où vous avez appris qu'on l'avait apportée à la morgue, vous

 26   trouviez-vous au centre médical ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Avez-vous vu ce véhicule le jour où elle a été tuée ?

Page 1153

  1   R.  Je ne peux pas affirmer que ça s'est passé le même jour ou le jour

  2   d'après, ça non. Mais je suis sûr d'avoir vu le véhicule.

  3   Q.  Est-ce que vous pouvez nous décrire les circonstances dans lesquelles

  4   vous avez vu cette voiture ?

  5   R.  Les circonstances dans lesquelles j'ai vu la voiture. Ça s'est passé à

  6   10 heures. D'habitude, c'est le petit déjeuner entre neuf heures demie et

  7   10 heures au centre médical. Nous étions au petit déjeuner. Et le petit

  8   déjeuner on le prenait dans le bâtiment administratif du centre médical. Au

  9   début j'avais coutume de retrouver là quelques amis, parce qu'on avait

 10   encore dix à 15 minutes de temps libre et on s'asseyait dans l'un des

 11   bureaux, c'était le bureau du secrétaire du centre médical. Depuis ce

 12   bureau-là on peut bien voir l'entrée de l'aide d'urgence et on peut bien

 13   voir également le parking entier du centre médical.

 14   A un moment donné, cette Passat dont on a parlé tout à l'heure est

 15   arrivée, alors quand vous connaissez la personne qui était le propriétaire

 16   de la Passat, vous savez qu'elle a été tuée et qu'on avait emmené sa

 17   dépouille dans la morgue de ce centre médical, alors ça vous rend tout

 18   chose, parce que vous vous demandez d'où vient la voiture et qui est au

 19   volant de la voiture maintenant.

 20   Q.  Avez-vous vu qui est-ce qui conduisait la voiture ?

 21   R.  C'était un soldat en uniforme de camouflage qui portait des baskets à

 22   ses pieds. D'après ce que j'ai eu l'occasion de savoir, puisque c'était

 23   quelqu'un que j'avais vu plusieurs fois auparavant, il s'agissait de Milan

 24   Lukic.

 25   Q.  Est-ce qu'à un moment donné vous auriez compris qu'il n'était plus sûr

 26   pour vous de rester dans votre appartement et est-ce la raison pour

 27   laquelle vous êtes parti ?

 28   R.  Oui, j'ai compris que ce n'était pas sûr du tout de rester chez moi, et

Page 1154

  1   j'ai décidé de déménager vers la maison de mon épouse, ou plutôt chez son

  2   père, mon beau-père.

  3   Q.  Une fois que vous êtes parti là-bas, avez-vous continué d'aller au

  4   travail ?

  5   R.  Oui, j'ai continué à aller au travail. Ma motivation pour ce départ,

  6   c'est parce que pour aller de chez moi jusqu'au travail, il fallait que je

  7   traverse toute la ville, que je passe par la rue principale. Et depuis chez

  8   mon beau-père, je n'avais qu'une toute petite partie de chemin à parcourir,

  9   il suffisait de passer le pont et j'étais tout de suite très près de mon

 10   travail, donc de Bikavac j'avais juste un petit pont traverser et j'étais

 11   là.

 12   Q.  Avez-vous compris que vous n'étiez plus en sécurité et c'était la

 13   raison pour laquelle vous avez décidé de vous en aller ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Comment avez-vous compris que ce n'était plus sûr pour vous d'aller et

 16   de revenir du travail ?

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  4   Alors, continuez. L'homme qui vous a parlé était de quel groupe ethnique ?

  5   R.  Il était du groupe ethnique serbe, et comme on se connaissait bien, je

  6   viens de vous le dire, on jouait au billard ensemble souvent. Et il m'a

  7   dit, "Qu'est-ce que tu fais,

  8   malheureux ?" Alors je lui disais que je rentrais du travail chez moi. Il

  9   m'a dit, "Tu n'es pas normal, si tu es pris tu est mort." Alors je lui ai

 10   dit, "Mais que veux-tu que je fasse ?" Il m'a dit, "Abrite-toi, cache-toi

 11   où tu peux." "Où veux-tu que je me cache ?" Il m'a dit, "Je ne peux pas

 12   t'aider, cache-toi où tu peux." A ce moment-là, croyez-moi, je n'étais plus

 13   en mesure de marcher jusqu'à chez moi. Je lui ai dit : "Mais écoute mon

 14   ami, comment veux-tu que je rentre chez moi ?" Il m'a dit, "Si tu veux, je

 15   vais te raccompagner. A eux deux ils m'ont raccompagné jusqu'à pas loin,

 16   jusqu'à peu près 100 mètres de chez moi, pas de chez moi, de la maison où

 17   j'avais déménagé."

 18   Q.  Est-ce qu'à un moment donné vous avez essayé de quitter Visegrad ?

 19   R.  Oui, j'ai essayé deux fois. Une fois j'ai essayé de m'en aller, et la

 20   deuxième fois que j'ai essayé c'était dans des circonstances tout à fait

 21   autres. Mais si vous pensez à ma toute première tentative de partir, je

 22   vais vous le dire. J'ai décidé --

 23   Q.  Est-ce que je puis attirer votre attention sur ce qui

 24   suit ? Est-ce qu'à un moment donné vous avez essayé de partir et est-ce

 25   qu'on vous a ramené au poste de contrôle une fois que vous avez essayé de

 26   quitter le quartier ? Pourquoi vous a-t-on ramené au poste de contrôle ?

 27   R.  Excusez-moi, mais j'avais commencé justement à parler de ça. J'ai

 28   essayé de tenter le tout pour le tout et de partir après cet avertissement

Page 1156

  1   du jeune homme, et la seule façon c'était de monter à bord d'un autocar et

  2   de risquer le tout pour le tout, et d'aller à Uzice.

  3   Je suis allé à la gare routière et je me suis mis à bord d'un autocar et

  4   tout s'est bien passé jusqu'à Dobrun, un poste de contrôle là-bas. Ils ont

  5   demandé les cartes d'identité, ils ont demandé les autorisations de quitter

  6   la ville. Etant donné que je n'avais pas d'autorisation pour ce qui était

  7   de quitter la ville, ils m'ont dit que je ne pouvais pas aller plus loin et

  8   qu'il fallait que je rentre, que je rebrousse mon chemin. Ils m'ont fait

  9   sortir tout simplement de l'autocar et ils m'ont dit de rentrer. J'étais à

 10   26 kilomètres. La seule façon de rentrer pour moi était d'aller à pied. Au

 11   bout de 500 mètres, 1 kilomètre peut-être, une voiture est arrivée, j'ai

 12   levé la main, la voiture s'est arrêtée et une dame très aimable était au

 13   volant de la voiture. C'est elle qui m'a transporté jusqu'à Visegrad, et je

 14   lui en suis très reconnaissant.

 15   Q.  A ce poste de contrôle, vous a-t-on dit où est-ce qu'il faudrait aller

 16   pour obtenir une autorisation de quitter la ville ?

 17   R.  Oui. Ils m'ont dit, "Tu n'as pas d'autorisation pour quitter la ville."

 18   J'ai dit, "Non, je n'en ai pas. Où est-ce que je vais me procurer cela ?"

 19   Ils m'ont dit, "Au poste de police. Vous devez disposer d'une autorisation

 20   émise par la police. On ne peut pas vous laisser partir." Ils ont été tout

 21   à fait corrects au poste de contrôle. Ils ont dit que c'était la règle et

 22   que malheureusement il fallait que je rebrousse chemin.

 23   Q.  Est-ce que vous êtes allé à ce poste de police de Visegrad pour essayer

 24   d'obtenir cette autorisation de quitter la ville ?

 25   R.  Etant donné que cette dame qui m'avait ramené à la ville habitait à

 26   côté de ma maison et que cet appartement se trouvait non loin du poste de

 27   police, à quelques centaines de mètres, je m'étais dit, puisque je suis là,

 28   je vais essayer de l'obtenir. Donc je suis allé au poste de police. Devant

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  1   le poste de police, il y avait pas mal de gens. Pour l'essentiel c'étaient

  2   des femmes et des enfants, et il était presque impossible de se frayer un

  3   passage jusqu'à l'entrée. Tous étaient là devant à attendre. Alors je me

  4   suis mis à attendre aussi. Croyez-moi bien que je ne savais pas trop ce que

  5   j'attendais, et à ce moment-là, un employé du poste de police, un très bon

  6   ami à moi du reste, est arrivé et m'a demandé, "Mais qu'est-ce que tu fais

  7   là ?" Je lui ai dit que j'étais venu obtenir cette autorisation pour

  8   quitter la ville. Alors il m'a dit, "Allez, viens." Il m'a fait entrer au

  9   poste de police. Je suis peut-être resté une demi-heure dedans. Il a

 10   arrangé les choses pour moi, et il a dû aller voir le chef du poste pour

 11   que celui-ci signe. Et j'ai obtenu une attestation autorisant mon départ de

 12   la ville émise par ces autorités de police officielles. Je suis donc sorti.

 13   C'est lui qui m'a fait sortir. Il m'a dit, "Bonne chance," et je suis sorti

 14   du bâtiment du poste de police.

 15   Q.  J'aimerais maintenant attirer votre attention sur la date du 7 juin

 16   1992. C'est la date qui est contenue dans l'acte d'accusation dressé à

 17   l'encontre des accusés ici présents. Vous souvenez-vous de cette date ?

 18   R.  Oui, je me souviens très bien de cette journée.

 19   Q.  Est-ce que je peux vous prier de nous décrire ce qui s'est passé dans

 20   l'après-midi de cette journée-là ?

 21   R.  J'ai dit que la dernière semaine, j'étais en train de me cacher. Je

 22   n'allais plus au travail, je me cachais dans la maison de mon beau-père. Il

 23   y avait un ami à moi à côté de moi. Nous nous cachions dans la cave de la

 24   maison de mon beau-père. C'était une petite cave plutôt sombre, et dans une

 25   partie de la cave il y avait une vieille armoire où l'on gardait des

 26   affaires, je ne sais trop quoi. Et c'est derrière cette armoire que nous

 27   nous cachions. Il entrait d'abord puisqu'il était un peu plus costaud que

 28   moi, puis j'y allais aussi.

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  1   Le 7 juin, je ne peux pas vous dire l'heure, c'était dans l'après-

  2   midi, j'ai entendu arriver une voiture devant cette maison, et nous sommes

  3   entrés dans la cave. Etant donné que depuis la cave on peut voir le

  4   carrefour derrière la maison, il y avait un chemin qui allait tout droit,

  5   un autre à gauche et un autre à droite. C'était un carrefour de quatre

  6   chemins. La voiture a ralenti et a continué tout droit dans la direction de

  7   Ban Polje. Et j'ai pu remarquer que c'était ma voiture à moi.

  8   On n'osait pas sortir, on ne savait pas non plus combien de temps ces gens-

  9   là allaient rester là. Je ne sais pas combien nous avons attendu jusqu'à ce

 10   que le véhicule revienne. Et le véhicule a fini par revenir, mais le moteur

 11   était éteint. Puisque c'était une descente, il avait éteint le moteur et il

 12   a roulé en roues libres, le moteur éteint.

 13    Cet homme est sorti de la voiture, et une vieille femme passait juste à ce

 14   moment-là. Je dois vous dire que dans la région il y avait pas mal de

 15   réfugiés venus des villages environnants, donc des environs de la ville de

 16   Visegrad, et ils étaient venus s'abriter là. C'était une femme assez âgée.

 17    On lui a posé des questions à mon sujet. Elle a dit, "Je ne sais pas." Et

 18   l'autre a dit, "Mais il doit forcément être par ici." Puis il s'est remis

 19   au volant de la voiture et ils sont repartis à bord de la voiture.

 20    Quand je sortais de la cave, je pouvais voir le reste de la rue dans la

 21   direction de l'hôtel Visegrad, et au travers d'un rideau, j'ai observé pour

 22   voir où la voiture était partie. La voiture s'est arrêtée à la maison

 23   suivante, à 50 ou 100 mètres de là. Ils sont ressortis et ils ont frappé

 24   contre la porte du garage, puis ils sont remontés à bord de la voiture et

 25   ils sont partis.

 26   Q.  Monsieur, à qui appartenait la voiture.

 27   R.  Je viens de vous dire que c'était ma voiture à moi.

 28   Q.  Dites-nous ce qui s'est passé après, une fois que ces hommes sont

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  1   partis.

  2   R.  Quand j'ai vu la voiture s'éloigner, je me suis assis sur un petit banc

  3   qui était devant et j'ai allumé une cigarette. Mon ami était encore dans la

  4   cave. Il n'était pas sorti. Il s'est passé peut-être quelques minutes entre

  5   l'un et l'autre. 

  6   Il y avait mon beau-père aussi, et je lui ai demandé, "Ils sont

  7   partis ?" Il m'a dit, "Ils sont partis." Et on s'est dirigés vers un

  8   bâtiment auxiliaire, une étable. Il s'est dirigé, lui, vers cette étable,

  9   et comme moi j'étais assis sur le chemin vers ce bâtiment, j'ai pu le voir

 10   et il avait les mains dans le dos. Et il m'a fait un petit signe de la main

 11   dans le dos pour que je m'abrite, et j'ai dû m'abriter. Parce que je n'ai

 12   pas vu, moi, qui il avait vu, lui. Pour entrer dans la cave, il fallait que

 13   je passe par cet espace à découvert, et quand j'ai essayé de traverser

 14   jusqu'à la cave, j'ai vu que depuis Mejdan, il y avait quatre hommes qui

 15   venaient, déployés, marchant l'un à côté de l'autre, à une certaine

 16   distance l'un de l'autre. Il y avait peut-être 2 ou 3 mètres d'écart entre

 17   chaque homme. Et j'ai compris qu'on m'avait vu. J'ai donc décidé de ne pas

 18   aller jusqu'à la cave en me disant, s'ils m'ont vu, moi, ils ne vont

 19   probablement pas trouver mon ami dans la cave - puisque je lui avais fait

 20   signe de se cacher. Je ne sais pas quelles sont les raisons pour lesquelles

 21   il était sorti aussi devant.

 22   Q.  Monsieur VG-32, j'aimerais que vous arrêtiez afin que nous passions à

 23   huis clos partiel pour quelques instants.

 24   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

 25   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes en audience à huis clos

 26   partiel.

 27   [Audience à huis clos partiel]

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 17   [Audience publique]

 18   M. GROOME : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur VG-32, vous venez de nous décrire ce qui s'est passé lorsque

 20   votre ami est sorti de la cave. Est-ce que vous pouvez continuer de nous

 21   dire ce qui s'est passé par la suite ?

 22   R.  J'ai dit que j'ai vu ces quatre hommes approcher. L'une de ces

 23   personnes est passée à côté de nous, est entrée dans la cave, non pas dans

 24   la cave où nous nous cachions nous-mêmes, mais dans les sous-sols de la

 25   maison. Il y avait un appartement au rez-de-jardin et une personne s'est

 26   approchée à côté de nous. Le troisième homme s'est arrêté à 5 ou 6 mètres

 27   de nous, donc cet homme ne s'est pas approché du tout. Et l'homme que j'ai

 28   mentionné aujourd'hui et que j'avais vu devant le centre médical est

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  1   également passé à côté de nous pour aller à l'étage de la maison.

  2   Je ne sais pas exactement combien de temps il a bien pu se passer, quelques

  3   minutes peut-être. Ils sont revenus. Celui qui était parti à la cave est

  4   revenu, celui de l'étage est descendu, et donc nous étions là devant la

  5   maison. Et j'ai dit que cette personne que j'ai mentionnée aujourd'hui,

  6   Milan Lukic, était parti à l'étage. Une fois revenu - et il était évident

  7   que c'est lui qu'ils attendaient les autres - une fois qu'il est

  8   redescendu, il a demandé nos cartes d'identité. On les lui a données. Dans

  9   ma carte d'identité il y avait mon autorisation de quitter la ville. Il a

 10   regardé cela et il m'a demandé, "Pourquoi tu te caches ?" Je lui ai dit que

 11   je ne me cachais pas puisque j'étais là. "Tu m'as trouvé ici, donc je ne me

 12   cache pas."

 13   Il a regardé mon attestation ou autorisation de quitter la ville et il l'a

 14   déchirée. Il a mis un bout entre ses dents et il a tiré sur le bout de

 15   papier et l'a déchiré.

 16   Q.  Au moment où vous avez eu cette conversation avec cette personne que

 17   vous avez identifiée comme étant Milan Lukic, est-ce que vous étiez en face

 18   de lui ?

 19   R.  Oui, nous étions face-à-face.

 20   Q.  Je sais que vous avez dit que ceci s'est passé dans l'après-midi, mais

 21   pourriez-vous nous dire comment était la lumière cet après-midi-là ? Est-ce

 22   qu'il y avait suffisamment de lumière pour vous permettre de voir son

 23   visage ?

 24   R.  Oui. Non, ce n'était pas tard dans l'après-midi, c'était tôt. C'était

 25   avant 17 heures, pour le moins, et c'était l'été et c'était au grand jour.

 26   Q.  Pourriez-vous nous décrire son apparence physique, que portait-il et à

 27   quoi ressemblait son visage ?

 28   R.  Il portait un uniforme de camouflage, mais ce n'était pas l'uniforme

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  1   dans lequel je l'avais vu quelques jours auparavant. Cette fois-ci il

  2   portait l'uniforme de camouflage communément porté par la police, qui est

  3   un uniforme de camouflage bleu et violet. Il portait un béret sur la tête

  4   qui arborait l'aigle bicéphale, et il avait également l'aigle bicéphale sur

  5   les manches de ses deux bras et sur une de ses manches il y avait marqué

  6   "Police." Son visage avait été peint, comme on peut le voir dans les films

  7   à la télévision.

  8   Q.  Vous venez de nous décrire ceci, vous dites que pendant que vous nous

  9   faisiez cette description, vous étiez en train de vous frotter les mains

 10   l'une contre l'autre sur votre joue et du côté du nez et en direction des

 11   oreilles. Etait-ce cette partie-là de son visage qui était peinte ?

 12   R.  Oui. Des deux joues.

 13   Q.  Vous vous souvenez de quoi d'autre le concernant ?

 14   R.  Je me souviens qu'il portait des chaussures de tennis. Etant donné que

 15   je travaillais au centre médical, c'est une question que vous m'avez déjà

 16   posée, vous m'avez demandé ce qui m'avait frappé. Bien, ce qui m'avait

 17   frappé à l'époque c'était un petit bandage qu'il avait au bras, ou plutôt,

 18   c'était de la gaze recouverte d'un bandage et c'est quelque chose que

 19   j'avais remarqué à l'époque.

 20   Q.  Lorsque vous avez parlé de la gaze, vous avez indiqué le coude droit de

 21   votre propre bras. Etait-ce à cet endroit-là qu'il y avait cela ?

 22   R.  Oui. C'était à cet endroit-là qu'il y avait ce pansement.

 23   Q.  Vous avez une formation médicale. Dans quel cas est-ce que quelqu'un

 24   aurait de la gaze comme cela avec un bandage par-dessus ? Ce serait un

 25   signe de quoi, d'après vous ?

 26   R.  C'est quelque chose que j'ai dit plus tôt. Lorsque j'ai vu le bandage

 27   pour la première fois, je pensais que la personne prenait peut-être des

 28   drogues. En général, on porte ce genre de bandage si on a reçu une piqûre

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  1   de quelque chose ou si on reçoit une perfusion, intraveineuse, par exemple,

  2   ou quelque chose comme ça. C'est en général ce genre de bandage que l'on

  3   porte dans ce cas-là.

  4   Q.  Aviez-vous l'impression qu'il était intoxiqué ou aviez-vous

  5   l'impression que son état d'esprit était quelque peu modifié à ce moment-là

  6   ?

  7   R.  Non. Non, je n'étais pas en mesure de remarquer cela. Je n'avais pas

  8   l'impression qu'il était sous l'influence de drogues.

  9   Q.  Au moment où il a eu cette conversation avec vous, est-ce qu'il vous

 10   regardait ?

 11   R.  Nous nous regardions, nous étions proches. Je me souviens encore de cet

 12   incident-là aujourd'hui et je vois très bien ce visage devant moi. Je ne

 13   pense pas qu'il y ait quelqu'un au monde qui a passé autant de temps avec

 14   quelqu'un qui souhaite le tuer sans se souvenir des contours du visage et

 15   de ce visage. C'est quelque chose qu'on ne peut jamais oublier.

 16   Q.  Vous souvenez-vous si oui ou non il portait une arme ?

 17   R.  Oui, il portait une arme. Laissez-moi vous dire que tous les soldats

 18   qui sont venus ce jour-là étaient armés de fusils automatiques, quoique

 19   Milan avait un fusil à lunette avec un silencieux.

 20   Q.  Que s'est-il passé après cette conversation qu'il a eue avec vous ?

 21   R.  Après cette conversation, il a dit que nous devions le suivre. Nous

 22   nous sommes mis en route, nous avons commencé à gravir la colline en

 23   direction de Grad qui est une colline aussi. J'ai parlé du croisement, nous

 24   avons tourné à droite au niveau du croisement, en direction de Grad. Il est

 25   parti en premier, je l'ai suivi, ensuite mon ami m'a suivi. Il y avait un

 26   autre homme derrière lui qui portait un fusil.

 27   Q.  Qu'est-il arrivé ensuite ?

 28   R.  Environ 200 mètres, en ville nous nous sommes arrêtés sur la route. Il

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  1   nous a signalé que nous devions nous arrêter. Il a ouvert une grille, est

  2   entré dans une cour et est entré dans la maison, a fouillé le rez-de-

  3   chaussée, il est sorti en disant, "Continuons, poursuivons."

  4   Laissez-moi vous dire simplement que les autres soldats qui se trouvaient

  5   là n'étaient pas plus de huit ou dix, d'après moi. Donc il n'y en avait que

  6   huit et dix et les autres soldats sont restés pour fouiller les maisons.

  7   Nous nous sommes dirigés vers Megdan, nous avons traversé un champ qui se

  8   trouvait à droite de la maison devant laquelle nous nous étions arrêtés.

  9   Comme nous marchions dans le champ, quelque part à mi-chemin, je souhaite

 10   vous dire qu'entre la colline de Grad et Milavici, il y avait un poste de

 11   contrôle de la Défense territoriale. Et c'est précisément le chemin qu'ils

 12   empruntaient tous les jours pour parvenir au poste de contrôle, ils

 13   passaient devant cette maison. Donc c'était l'armée serbe officielle, ou la

 14   Défense territoriale régulière de Visegrad. Et ils passaient régulièrement

 15   devant cet endroit-là.

 16   On entendait les coups de feu, cela ne signifie pas pour autant

 17   qu'ils nous tiraient dessus, mais on nous a dit de nous arrêter à nouveau,

 18   et ils ont crié à notre intention, "Arrêtez de nous tirer dessus." Ensuite

 19   nous avons poursuivi notre marche. Nous nous sommes arrêtés 500 mètres plus

 20   loin, devant une maison. On nous a dit de nous arrêter, c'est lui qui est

 21   entré, il est entré dans la maison, il a fouillé toutes les pièces, en haut

 22   également, et en sortant il nous a dit que nous devions entrer dans cette

 23   maison.

 24   Q.  Témoin VG-32, lorsque vous parlez de "il," qui voulez-vous dire ?

 25   R.  Je vais référence à Milan.

 26   Q.  Veuillez poursuivre.

 27   R.  Il nous a dit d'entrer dans la maison. Je me souviens bien que la

 28   maison avait un grand vestibule à partir duquel un escalier montait à

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  1   l'étage, et à partir de ce vestibule on entrait dans un salon qui était

  2   très grand. Il y avait un homme âgé dans la maison dont je ne me rappelle

  3   pas le nom. Soit il était là dans la maison, soit c'était le propriétaire

  4   de la maison.

  5   Milan est parti, a laissé un soldat devant la maison. C'était le même

  6   soldat qui nous avait escortés tout le long du chemin jusqu'à cette maison.

  7   Q.  Est-ce que vous dites que Milan est parti, est-ce qu'à aucun moment il

  8   est revenu à cet endroit-là ?

  9   R.  Lorsque nous nous trouvions dans le vestibule, je me suis assis sur les

 10   marches qui menaient à l'étage. Si cela intéresse quelqu'un de savoir

 11   comment je me sentais, je me sentais un petit peu chose, c'est lorsque

 12   quelqu'un vous dit que vous avez une maladie incurable. Vous vous sentez

 13   peu en forme. Et moi, je pensais à cela et je me disais, mais mon Dieu,

 14   qu'est-ce que j'ai fait ? Est-ce que j'ai mal agi dans ma vie pour mériter

 15   cela ? Je n'avais jamais fait quelque chose qui aurait fait que quelqu'un

 16   aurait pu m'en vouloir ou quelque chose comme ça.

 17   Q.  Qu'est-il arrivé ensuite ?

 18   R.  Le soldat qui se trouvait dans l'entrebâillement de la porte était, je

 19   dois dire, très courtois. Il a même échangé quelques paroles avec mon ami

 20   alors que nous étions en présence de cet homme âgé, et il lui a demandé

 21   s'il avait des enfants. Il a répondu par l'affirmative, en disant que oui,

 22   il avait deux fils, deux enfants. Alors, il lui a dit, "Pourquoi avez-vous

 23   attendu si longtemps, pourquoi ne vous êtes pas caché quelque part,

 24   pourquoi ne vous êtes-vous pas mis en sécurité quelque part ?" Il a

 25   répondu, "Je ne sais pas. Est-ce que je peux parler à Branimir Savovic ? Et

 26   il a dit, "Je ne sais pas. Je ne peux rien vous dire avant d'avoir demandé

 27   à Milan."

 28   Q.  Qui était Branimir Savic ?

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  1   R.  Branimir Savovic était un ami très proche de mon ami, ils se voyaient.

  2   A l'époque, il occupait un certain poste, il avait été le président du SDS,

  3   et à l'époque, c'était le président de la présidence de Guerre de la

  4   municipalité de Visegrad, ils étaient très proches.

  5   Q.  Est-ce qu'à moment donné, ce soldat a transmis le message de votre ami

  6   à Milan Lukic ?

  7   R.  Oui, mais un peu plus tard. Si vous le permettez, lorsque j'arriverai à

  8   ce moment-là, je raconterai l'histoire.

  9   Après un certain temps, je ne sais pas combien de temps s'était écoulé, je

 10   vous ai dit que le temps ne voulait plus rien dire pour moi à ce moment-là,

 11   et c'était une des choses qui me préoccupait le moins, essayer de tenir

 12   compte du temps qui passait ou de l'heure.

 13   A un  moment donné, Hasan Mutapcic est entré dans la maison, accompagné de

 14   son fils qui était un garçon de 13 ans, je crois, et il portait un short

 15   bleu et un tee-shirt noir. Cet enfant avait extrêmement peur, il tremblait

 16   des pieds à la tête. Je ne sais pas qui a accompagné Mutapcic à l'entrée de

 17   la maison, parce que depuis l'endroit où j'étais assis je ne pouvais voir

 18   que la porte et le soldat qui se trouvait devant. Donc je ne peux pas vous

 19   dire qui les avait fait venir.

 20   Peu de temps après, deux autres personnes sont venues, nous étions au

 21   total dix ou 13 à ce moment-là dans la maison. Honnêtement, en fait, je ne

 22   comptais pas le nombre de gens qui arrivaient.

 23   Parmi ceux qui sont arrivés, il y avait Meho Dzafic et Ekrem Dzafic, le

 24   père et le fils. Je ne les connaissais pas bien, mais ils étaient fort

 25   connus de toutes les personnes qui habitaient dans le village, les deux.

 26   Un peu plus tard, Milan est revenu, il nous a ordonné de nous mettre en

 27   demi-cercle dans cette pièce, de placer tous nos objets de valeur au

 28   centre, d'enlever nos chaussures et nos chaussettes. Il a dit, "Si je

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  1   trouve quelque chose sur vous, je vous tuerai."

  2   Nous avons donc obéi. Nous avons placé tous ces objets de valeur sur le

  3   sol, ensuite il s'est accroupi, il a pris les portefeuilles et il a sorti

  4   les billets de banque un par un.

  5   Il a pris mon portefeuille dans la main. Il a trouvé plusieurs noms

  6   et adresses. Il m'a demandé, "Qui sont ces personnes ?" Et j'ai répondu en

  7   disant que c'était des membres de ma famille de Sarajevo. Je pense que tout

  8   le monde garde un objet fétiche. Moi, j'avais un dollar dans ma poche. Je

  9   gardais ceci comme fétiche, peut-être qu'on peut parler de superstition,

 10   mais c'est vrai.

 11   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Groome, je vois que vous

 12   avez prévu deux heures et demie pour ce témoin.

 13   Le témoin utilise le temps de la narration lorsqu'il raconte son

 14   récit, ce que je comprends fort bien. Mais je crois que nous irions plus

 15   vite si vous posiez des questions précises au témoin.

 16   Je crois que le temps de la narration peut être quelque peu modifié

 17   et ceci pourrait être utile pour tout un chacun.

 18   M. GROOME : [interprétation] Oui.

 19   Q.  Je vais poser quelques questions maintenant. Vous avez parlé de

 20   Milan Lukic. Vous avez dit que vous avez trouvé votre dollar qui portait

 21   bonheur, votre objet fétiche. Après que toutes les personnes aient posé

 22   leurs biens personnels par terre, qu'a-t-il fait après cela ?

 23   R.  Il a pris tout l'argent et il a dit, "Vous nous avez dit que vous

 24   n'aviez pas de devises étrangères, mais je constate que vous en avez." Et

 25   avec mépris, il m'a dit ça. Il a mis l'argent dans la poche et a demandé

 26   qui était le propriétaire de la Jugo garée derrière. Meho a dit que c'était

 27   la voiture de son fils Osman. Ensuite il lui a demandé les clés.

 28   Q.  Qu'est-il arrivé aux papiers d'identité ?

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  1   R.  Il a donné un coup de pied dans tous les papiers d'identité derrière la

  2   porte.

  3   Q.  Est-ce qu'à aucun moment un soldat a transmis la demande de votre ami à

  4   Milan Lukic concernant Branimir Savovic ?

  5   R.  Oui. J'ai dit que Milan Lukic est sorti avec Meho Dzafic pour aller

  6   chercher les clés de la voiture. Lorsqu'il est revenu dans

  7   l'entrebâillement de la porte qui menait à cette pièce, le soldat qui se

  8   trouvait là a dit à Milan ceci, "Cet homme aimerait parler à Branimir

  9   Savovic." Et sa réponse était très discourtoise. Il a dit que sa mère aille

 10   se faire foutre." Il a simplement, d'un geste de la main, dit, "Vous, vous,

 11   vous, sortez d'ici. Sortez." Et nous avons obéi. Et quand il voulait dire

 12   vous, vous, vous, il voulait parler de nous quatre.

 13   Q.  Pourriez-vous nous dire qui sont ces personnes à qui il a dit :

 14   "Sortez" ?

 15   R.  C'était Ekrem Dzafic, Hasan Mutapcic, moi et mon ami.

 16   Q.  Où êtes-vous allés lorsque vous avez quitté la maison ?

 17   R.  Nous sommes sortis de la maison dans la direction de l'hôtel Bikavac.

 18   Il y avait une Jugo qui était garée là, c'était la voiture du fils de

 19   Dzafic, et devant cette voiture il y avait la Passat qui était garée là,

 20   celle que nous avons évoquée un peu plus tôt.

 21   Q.  De quelle couleur était la Jugo ?

 22   R.  La Jugo était de couleur vert olive.

 23   Q.  Est-ce que vous vous êtes approchés des deux voitures ?

 24   R.  Oui. Nous sommes arrivés à la hauteur de la voiture, ensuite il a

 25   demandé qui était en possession du permis de conduire, et j'ai répondu,

 26   "C'est moi." Je voulais m'asseoir derrière le volant, mais il a dit, "Non,

 27   pas vous." Ensuite Ekrem a dit, "Moi aussi, j'ai un permis." Il avait l'air

 28   assez agité, mais a pu se mettre derrière le volant. Moi, je me suis assis

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  1   derrière, derrière le conducteur.

  2   Je souhaite simplement vous dire que la Jugo n'a que deux portes.

  3   C'est comme cela que l'on entre à l'arrière.

  4   A côté de moi, il y avait Meho Dzafic. Il fallait que nous nous

  5   poussions un petit peu. Et on m'a demandé de me pousser, c'est ce que j'ai

  6   fait. Il était assez corpulent et la Jugo est une petite voiture.

  7   A côté de nous, il y avait le même soldat qui nous a accompagnés tout

  8   du long et qui était resté devant la maison. Il s'est assis avec nous à

  9   l'arrière, et mon ami s'est assis à côté du conducteur, dans le siège du

 10   passager avant. Et les deux autres personnes que je ne connaissais pas à ce

 11   moment-là et Hasan Mutapcic se sont assis dans la Passat.

 12   M. GROOME : [interprétation] Est-ce que vous souhaitez faire la pause à 10

 13   heures ? Il y a une question brève que je souhaite aborder. Est-ce que nous

 14   pouvons faire sortir le témoin et est-ce que je peux aborder cette question

 15   maintenant ?

 16   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Vous pouvez disposer, Monsieur

 17   le Témoin, mais vous allez revenir à 10 heures 20.

 18   [Le témoin quitte la barre]

 19   M. GROOME : [interprétation] Il y a quelques semaines, l'Accusation a

 20   déposé une requête afin d'ajouter à notre liste en réplique un document

 21   pour réfuter les éléments de preuve de Milan Lukic. C'est un livre de

 22   protocole du centre médical de Visegrad. Me Alarid a répondu, je crois, il

 23   y a quelques jours. Il m'est venu à l'esprit le fait que quelqu'un du

 24   centre médical de Visegrad a montré une photocopie de cet ouvrage et il est

 25   en mesure d'authentifier cet ouvrage et d'interpréter l'ouvrage et les

 26   colonnes qui s'y trouvent. Il me semblait prudent d'évoquer cette question

 27   devant les Juges de la Chambre si avant la déposition de ce témoin on peut

 28   tenir compte de cet élément-là et rendre une décision orale. Je demanderais

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  1   à ce que le témoin évoque cet ouvrage et s'il pouvait authentifier -- et

  2   peut-être je trouverais un autre témoin qui pourrait authentifier cet

  3   ouvrage un peu plus tard au cours de ce procès. Je crois que nous gagnerons

  4   beaucoup de temps et de ressources. Je demande si nous pouvons le faire ?

  5   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je crois que c'est très raisonnable.

  6   Nous allons faire cela.

  7   Monsieur Groome, je voulais vous dire qu'il vous faut avancer plus

  8   rapidement, je crois que vous allez devoir consacrer plus de deux heures et

  9   demie avec ce témoin si vous continuez ainsi. Nous avons également la

 10   Défense qui doit contre-interroger. Nous sommes en train de perdre du temps

 11   et je serai obligé de prendre des mesures pour compenser le temps ainsi

 12   perdu.

 13   M. GROOME : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Il est vrai, je

 14   suis tout à fait conscient de l'heure, mais quelquefois, avec certains de

 15   ces témoins, il est difficile d'interrompre les témoins au cours de leur

 16   récit, mais je vais m'efforcer d'être plus bref.

 17   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La même chose vaut pour les conseils

 18   de la Défense. Nous devons avancer rapidement et en même temps avec

 19   justesse.

 20   --- L'audience est suspendue à 10 heures 00.

 21   --- L'audience est reprise à 10 heures 25.

 22   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien, je vais rendre la décision

 23   relative à la demande présentée par l'Accusation et qui a été présentée. Je

 24   crois qu'il faut que nous allions en audience à huis clos partiel.

 25   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes en audience à huis clos

 26   partiel, Monsieur le Président.

 27   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 1172-1173 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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 18   [Audience publique]

 19   M. GROOME : [interprétation]

 20   Q.  VG-32, dans l'intérêt de gagner du temps, Me Alarid m'informe qu'il va

 21   présenter votre déclaration ou qu'il va essayer de présenter votre

 22   déclaration comme élément de preuve. Donc en ce qui concerne les détails de

 23   ce qui s'est passé avant l'arrivée à la rivière, ce sera porté à la

 24   connaissance de la Chambre, et je voudrais savoir ce qui s'est passé la

 25   rivière aussi rapidement que possible. Mais il y a certaines questions

 26   qu'il faut que je vous pose, donc pouvez-vous me donner des réponses

 27   précises aux quelques questions que je vais vous poser. Je vous laisserai

 28   expliquer en détails ce qui s'est passé lorsque vous êtes arrivés sur la

Page 1175

  1   rive.

  2   La première question que je vais vous poser c'est quand vous avez quitté le

  3   secteur de Bikavac, où êtes-vous allés ? Où vous êtes-vous rendus ?

  4   R.  Nous sommes allés à l'hôtel Vilina Vlas à Visegrad.

  5   Q.  Lorsque vous étiez en route vers l'hôtel Vilina Vlas, est-ce que vous

  6   êtes passés près des deux mosquées en ville ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Pourriez-vous décrire pour les membres de la Chambre ce que vous avez

  9   vu en ce qui concerne les deux mosquées ?

 10   R.  Quand on va vers Bikavac, vers le centre de la ville, à ma gauche, il y

 11   a la première mosquée, la vieille mosquée de Visegrad ou du vieux Visegrad,

 12   et j'ai vu qu'elle avait été incendiée, brûlée jusqu'au sol. Nous avons

 13   poursuivi en direction de l'hôtel Vilina Vlas, nous avons passé, traversé

 14   le pont sur la Rzava, et j'ai vu l'autre mosquée, j'ai vu qu'elle avait

 15   également été incendiée, entièrement brûlée.

 16   Q.  Lorsque vous êtes arrivé à l'hôtel Vilina Vlas, avez-vous eu

 17   l'impression que l'hôtel fonctionnait en tant que tel ?

 18   R.  Non, il n'y avait rien qui puisse indiquer que l'hôtel était ouvert et

 19   fonctionnait.

 20   Q.  Je vais demander à la greffière d'utiliser le système informatique

 21   Sanction, et ce que je vais vous présenter - donc je l'appellerai le

 22   programme 360. Reconnaissez-vous l'image que l'on voit maintenant à l'écran

 23   devant vous ?

 24   R.  Oui, c'est l'entrée de l'hôtel Vilina Vlas.

 25   Q.  Je voudrais demander à M. Hooydonk [comme interprété] de nous faire

 26   maintenant entrer dans le hall. VG-32, je vais demander donc à M. Hooydonk

 27   simplement de faire un tour d'horizon à l'intérieur du hall. Je ne vous

 28   demande pas de faire des commentaires, mais je vous demanderai vos

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  1   observations concernant des endroits précis. A ce moment-là, je poserai mes

  2   questions.

  3   M. GROOME : [interprétation] Voilà, excusez-moi. Peut-être qu'on pourrait

  4   revenir un petit peu vers la gauche. On arrête là, s'il vous plaît.

  5   Q.  Qu'est-ce qu'on voit là maintenant, VG-32 ?

  6   R.  Cette partie de l'entrée où se trouve la réception est l'endroit où

  7   Mitar Vasiljevic se trouve au moment où nous sommes entrés dans l'hôtel.

  8   Q.  Nous pouvons voir une personne qui est debout sur cette image. Est-ce

  9   que cette personne était debout à la réception ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Est-ce que je pourrais demander -- excusez-moi --

 12   R.  Nous nous tenions ici sauf que nous regardions dans l'autre direction.

 13   Q.  Vous vous teniez donc contre le banc de la réception et vous regardiez

 14   vers l'extérieur ?

 15   R.  Oui, nous regardions vers l'entrée.

 16   Q.  Maintenant je demande qu'on fasse tourner un peu, et arrêtons-nous là.

 17   Qu'est-ce que l'on voit ici à droite de la réception ?

 18   R.  C'est l'entrée à la salle à manger.

 19   Q.  Revenons maintenant vers la droite, s'il vous plaît. Arrêt sur image.

 20   Que voit-on là ?

 21   R.  Je crois que c'est l'ascenseur et l'escalier qui montent aux étages.

 22   Q.  Encore un petit peu, maintenant vers la droite. Stop.

 23   R.  Ça c'est l'entrée de l'hôtel vue de la réception.

 24   Q.  Merci.

 25   M. GROOME : [interprétation] Pourrais-je maintenant demander à la greffière

 26   de nous présenter le numéro 101 de la liste 65 ter.

 27   Q.  Pendant qu'on fait cela, lorsque vous prépariez votre déposition dans

 28   l'affaire Mitar Vasiljevic, est-ce que vous avez tracé un croquis indiquant

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  1   où se trouvaient la plupart des participants au moment où vous vous

  2   trouviez tous dans l'entrée de l'hôtel Vilina Vlas ?

  3   R.  Oui. On m'a demandé de dessiner de mémoire un croquis de l'entrée de

  4   l'hôtel, un croquis de la réception et de désigner les endroits où nous

  5   nous tenions ainsi qu'où se tenaient les autres personnes présentes.

  6   Q.  Le numéro 101 de la liste 65 ter est maintenant à l'écran. Est-ce que

  7   vous pouvez bien voir ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Est-ce que c'est bien le croquis que vous avez vous-même dessiné pour

 10   indiquer où se trouvaient, où se tenaient les gens ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Il y a sept cercles laissés en blanc en haut du croquis. Qu'est-ce que

 13   ça représente ?

 14   R.  Ces sept cercles, ce sont nous sept, les sept personnes qui

 15   s'appuyaient sur le banc de la réception.

 16   Q.  Le cercle qui comporte les initiales ML là, qu'est-ce que ça indique ?

 17   R.  Comme je l'ai dit, c'est Milan Lukic, qui est allé derrière le banc de

 18   la réception, il cherchait des clés. Et la flèche qui va vers la droite

 19   c'est la réception proprement dite, et la flèche qui monte c'est derrière

 20   la réception.

 21   Q.  Le cercle qui comporte les initiales MV, qu'est-ce que ça représente ?

 22   R.  Ça c'est Mitar Vasiljevic, c'est l'endroit où il était.

 23   Q.  Et le cercle qui est vide juste de l'autre côté de la réception par

 24   rapport à Mitar Vasiljevic ?

 25   R.  Ceci représente la personne où se trouvait ce soldat qui braquait son

 26   fusil vers nous.

 27   Q.  Combien de temps avez-vous passé dans l'entrée de l'hôtel Vilina Vlas ?

 28   R.  Je l'ai déjà dit, il est très difficile pour moi de juger si c'était

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  1   cinq ou dix minutes, guère plus.

  2   Q.  Pendant ce temps, est-ce que vous avez pu voir clairement Milan Lukic

  3   et son visage ?

  4   R.  Oui, parce que Milan Lukic est entré avec nous dans l'entrée de

  5   l'hôtel. Je pouvais clairement le voir lorsqu'il est allé derrière le banc

  6   de la réception.

  7   Q.  Lorsque vous avez quitté l'hôtel où vous êtes-vous rendus ?

  8   R.  Comme je l'ai dit, quand nous avons quitté l'hôtel on nous a ordonné de

  9   retourner dans les véhicules et de nous y asseoir exactement comme nous

 10   étions assis précédemment, et à ce moment-là on a pris la route pour Sase.

 11   Q.  Que s'est-il passé lorsque vous êtes arrivés à Sase ?

 12   R.  Lorsque nous sommes arrivés au croisement à Sase, nous avons tourné non

 13   pas vers Visegrad, comme nous nous y attendions, mais vers la droite pour

 14   aller en direction de Visegradska Zupa.

 15   Q.  Que s'est-il passé lorsque vous avez tourné à droite à

 16   Sase ?

 17   R.  Quand nous avons tourné à droite à Sase, on s'est arrêtés à environ 500

 18   mètres plus loin, près d'un bâtiment qui, je crois, était un entrepôt qui

 19   appartenait à Purisa Markovic. Je sais que sur la droite de ce bâtiment il

 20   y avait quelques maisons, et ce petit groupe de maisons s'appelait

 21   Jasarevic. C'est là qu'on s'est arrêté.

 22   Q.  Lorsque vous vous êtes arrêtés à cet endroit, que s'est-il passé ? Que

 23   s'est-il passé alors ?

 24   R.  Une fois que nous nous sommes arrêtés ici, la Passat se trouvait

 25   devant. Nous étions derrière, et ils ont continué à partir du croisement à

 26   Sase un peu plus rapidement, et nous les avons rattrapés, Mitar Vasiljevic,

 27   Lukic, et la personne qui se trouvait tout le temps dans la Passat était

 28   déjà sortie de son véhicule. On nous a ordonné de sortir également, c'est

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  1   ce que nous avons fait.

  2   Q.  Dites-nous ce qui s'est passé ensuite.

  3   R.  Alors que nous sortions de la voiture, l'attitude des soldats a changé

  4   de façon spectaculaire. Comme j'ai dit dans ma première déclaration, j'ai

  5   dit que le soldat qui était avec nous avait été assez aimable, mais tout

  6   ceci a brusquement changé. On nous a ordonné d'aller vers la Drina juste à

  7   gauche, à gauche de la route.

  8   A quelque 100 mètres de la Drina se trouvait un pré, nous avons

  9   traversé ce pré. Et s'il y avait eu le moindre espoir que tout ceci puisse

 10   finir bien, cet espoir a disparu au moment où nous avons traversé le pré.

 11   Nous n'avancions pas en groupe, mais selon un dispositif. J'étais au

 12   milieu. Si je me souviens bien, à ma gauche, il y avait VG-14. Et à

 13   l'extrême gauche mon ami, et à un moment donné j'ai essayé d'aller vers la

 14   gauche pour me rapprocher de lui, parce que pour moi on voyait clairement

 15   ce qui allait se passer, mais ma tentative a été brutalement stoppée.

 16   Après une minute ou deux nous sommes parvenus à la rive, et il y

 17   avait des arbres qui se trouvaient le long de la rive, c'était des saules.

 18   Q.  Que s'est-il passé à partir du moment où vous êtes arrivés à ces arbres

 19   à la rive ?

 20   R.  A la rive, lorsque nous sommes arrivés aux saules le long de la

 21   rivière, j'ai vu que le niveau de l'eau était bas et qu'entre l'eau et

 22   l'endroit où nous nous trouvions sur une sorte de petit plateau, il y avait

 23   environ une dizaine de mètres, à peu près la longueur de cette pièce -- ou

 24   plutôt, la largeur de cette pièce. Nous nous sommes arrêtés à un endroit

 25   herbeux, quelques mètres carrés.

 26   Quand nous nous sommes arrêtés, Milan a demandé, "Qui sait

 27   nagé ?" Et je ne sais vraiment pas pourquoi j'ai répondu ce que j'ai

 28   répondu, mais j'ai dit que je pouvais. Je sais que beaucoup d'autres

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  1   pouvaient également nager, mais à ce moment-là je savais très clairement ce

  2   qui allait arriver, et j'ai pensé que puisque j'étais forcé de regarder, il

  3   faudrait que je passe en premier pour ne pas voir le reste qui arriverait

  4   ensuite.

  5   Et il a dit, "Alors, vas-y." J'ai commencé à me rapprocher de l'eau, et à

  6   ce moment-là j'ai entendu Meho dire, "Au nom du Christ, Mitar, qu'est-ce

  7   que tu fais ?" Et à gauche j'ai entendu mon ami supplier, "Allons, écoutez

  8   les gars, ne nous tuez pas. Qu'est-ce qu'on vous a fait ?" Mais tout ceci

  9   était comme dans une sorte de brume en ce qui me concerne. Après que j'ai

 10   fait les quelques premiers pas, j'étais comme à moitié figé. J'étais figé

 11   et je voulais que ces dix derniers mètres -- je voulais les franchir en

 12   ayant à l'esprit que l'image de ma fille. A partir de ce moment-là, plus

 13   rien autour de moi n'existait. Je ne pensais qu'à elle, je la voyais jouer

 14   dans sa chambre.

 15   Je ne sais vraiment pas combien de temps il m'a fallu pour arriver juste au

 16   bord de la rivière, mais à un moment donné lorsque je suis parvenu au bord,

 17   j'ai entendu une voix disant, "Stop," et je me suis arrêté. Puis ils ont

 18   donné l'ordre aux autres d'aller jusqu'à la rivière et de s'aligner à côté

 19   de moi, ce qu'ils ont fait. Ils ont commencé à se rapprocher. Sur ma

 20   droite, il y avait Ekrem. A côté de lui, son père. A ma gauche, il y avait

 21   Hasan Mutapcic. Je crois qu'à côté de lui, il y avait VG-14, et après lui,

 22   un homme que je ne connaissais pas, et à l'extrême gauche mon ami. A ce

 23   moment-là, lorsque nous nous sommes arrêtés, j'ai entendu une question,

 24   "Comment allons-nous tirer ?" Et j'ai entendu la réponse, "Au coup par

 25   coup." Ensuite j'ai entendu armer les fusils et le bruit du mécanisme pour

 26   tirer un coup à la fois. J'ai entendu ce bruit de trois côtés différents.

 27   A partir de ce moment-là, j'ai vaguement eu une lueur d'espoir. J'ai

 28   pensé que puisque les quatre en question allaient tirer un coup à la fois,

Page 1181

  1   il y avait peut-être une chance minuscule que si je n'étais pas tué du

  2   premier coup je pourrais plonger dans la rivière et essayer de nager sous

  3   l'eau. C'est la première pensée qui m'est venue.

  4   C'est un peu comme un film qu'on fait passer de façon accélérée.

  5   C'est l'instinct de survie. Les choses vont à la vitesse de l'éclair. En

  6   pensant à cela, j'ai entendu le cri de Meho qu'il n'avait même pas pu

  7   achever. Lui-même a été figé. Et je dois dire que je n'ai même pas entendu

  8   le coup de feu à ce moment-là. Je me suis jeté dans la rivière et alors que

  9   je tombais dans l'eau, là entre le sable et l'eau, j'ai vu clairement des

 10   taches de sang.

 11   En tombant dans l'eau, j'ai entendu des coups de feu et des cris des

 12   autres. Je précise qu'ils n'ont pas tous été touchés mortellement sur le

 13   coup. Je dois reconnaître qu'à ce moment-là, autour de moi, ça a été une

 14   espèce de chaos, une espèce d'enfer. Je ne sais pas si je pourrais décrire

 15   ou illustrer cela pour quelqu'un d'autre par des mots. On ne peut pas le

 16   raconter, il faut l'avoir vécu.

 17   Lorsque je suis tombé dans l'eau, je me suis dit que je ne pourrais

 18   pas plonger, et j'ai essayé de manoeuvrer pour me retourner, parce que le

 19   niveau d'eau était à à peu près 1 mètre en dessous de la rive, donc étant

 20   dans l'eau je ne pouvais plus voir.

 21   J'ai décidé de me tourner vers la rive, et voyez-vous, l'eau avait

 22   fait une espèce de petite plateforme d'une trentaine de centimètres, une

 23   espèce de marche. J'ai mis ma tête sur cette marche. Je ne sais pas si je

 24   l'ai fait d'une façon consciente ou subconsciente. J'avais plongé mes bras

 25   dans le sable jusqu'ici. Je ne sais pas si je l'ai fait consciemment. Je

 26   pense que j'ai dû le faire inconsciemment. Et étant donné que j'ai d'abord

 27   mis la tête dans le sable, j'ai compris que je ne pourrais pas rester

 28   longtemps comme cela. Alors j'ai tourné ma tête à demi de côté, moi œil

Page 1182

  1   droit et la moitié droite de la tête étaient à l'extérieur du sable. C'est

  2   ce qui m'a permis de regarder vers la droite, et à ce moment j'ai vu que

  3   Hasan était blessé et qu'il essayait le plus possible de se rapprocher de

  4   la rive, et il grattait avec ses mains. Il essayait de monter et le sable

  5   tombait sur moi. Je me suis posé la question de savoir si un homme mort

  6   avait les yeux forcément ouverts ou forcément fermés. Et j'ai décidé de

  7   fermer les yeux en me disant advienne que pourra.

  8   J'ai entendu des pas de quelqu'un qui s'approchait. Puis j'ai senti

  9   tout simplement que comme si quelqu'un avait pris un corps, l'avait apporté

 10   et l'avait fait tomber sur moi. J'ai senti la tête de cet autre homme

 11   derrière mon cou. Mon corps était couvert par ce corps-là. Le poids de ce

 12   corps par lui-même me tirait sous l'eau. Heureusement, comme je vous l'ai

 13   dit, j'avais les bras profondément entrés dans le sable, et l'appui était

 14   suffisamment bon pour que je puisse tenir mon corps et le poids de ce corps

 15   sur moi.

 16   Ensuite j'ai entendu un coup de feu de mon côté gauche. Ekrem s'est

 17   tu, on n'a plus entendu sa voix. J'ai entendu un autre coup de feu à

 18   droite, et là le silence a régné, et un dernier coup de feu tout à fait à

 19   droite vers l'endroit où se trouvait mon ami, et là aussi le silence est

 20   revenu, le silence était total.

 21   Q.  VG-32, est-ce que les hommes qui ont fait cela à un moment donné ont

 22   quitté le secteur ?

 23   R.  Juste quelques mots pour que je finisse et je vous répondrai.

 24   Celui qui s'était approché, j'avais entendu l'un des hommes dire, "Il y en

 25   a un qui est vivant." Et j'ai pensé vraiment que ça ne pouvait être que

 26   moi. Et pendant ces quelques secondes, j'ai encore revu ma fille, mais ce

 27   n'était pas moi. Il y a eu un coup de feu dans l'autre corps et un coup de

 28   feu dans l'eau. Les pas se sont alors éloignés.

Page 1183

  1   Au bout de quelques minutes j'ai rouvert mes yeux, et ce que je

  2   pouvais voir devant moi, c'était un jeune homme qui levait la main et qui

  3   regardait autour, c'était VG-14. Je lui ai demandé s'il était blessé. Il

  4   m'a dit non. Il m'a demandé si j'étais blessé, j'ai dit non. - "Que fait-on

  5   ?" J'ai dit, "Attends qu'ils s'en aillent". Et lorsqu'on a entendu les

  6   moteurs des voitures tourner et les voitures s'éloigner, on est remonté sur

  7   la rive.

  8   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Témoin. Merci

  9   beaucoup.

 10   Monsieur Groome, ce récit est très émouvant et c'est la raison pour

 11   laquelle je ne l'ai pas interrompu, mais vous devez savoir quel est le type

 12   de témoignage dont vous avez besoin de la part de ce témoin, et nous savons

 13   que la plupart des conseils ont reçu pour instructions de contrôler les

 14   dires de leurs témoins. Donc il faut que nous sachions qu'il convient de

 15   respecter le principe de l'interrogatoire, enfin, de l'audition

 16   contradictoire. Je sais que ce récit est intéressant mais on est déjà à 11

 17   heures, enfin, vous, à 11 heures 20, vous allez épuiser votre temps et vous

 18   aurez déjà utilisé deux heures et demie.

 19   M. GROOME : [interprétation] Oui, je suis conscient de la chose, Monsieur

 20   le Président, pour les besoins du compte rendu d'audience, je précise que

 21   je n'ai pas voulu interrompre le témoin avec des questions plus précises.

 22   Il me semble qu'il a bien raconté le tout, enfin, tout ce qu'il avait à

 23   raconter.

 24   Q.  Monsieur VG-32, si vous pouvez répondre à quelques questions de suivi.

 25   Pouvez-vous nous dire combien de détenus ont été tués au bord de la rivière

 26   ?

 27   R.  Cinq. Mon premier réflexe a été de voir si quelqu'un était vivant,

 28   personne ne l'était. On est parti de l'autre côté et par la suite je suis

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  1   allé de l'autre côté de la rivière sur une colline et avec des jumelles

  2   j'ai observé ce site et tous les jours ils venaient à ce site.

  3   Q.  Donc pendant cinq jours vous avez pu voir les dépouilles de ces autres

  4   hommes qui ont été tués à la rivière ?

  5   R.  [[aucune interprétation]

  6   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin a été en

  7   contact et de nos jours encore en contact avec les victimes et les familles

  8   de ces victimes, et la description de cette chose, de ces événements en

  9   public lui serait plutôt pénible. Donc si vous demandez à ce que ce soit

 10   fait, nous pouvons le faire à huis clos partiel.

 11   J'aimerais qu'on lui montre la pièce 102 de la liste 65 ter.

 12   Q.  Une fois de plus, Monsieur VG-32, dans les préparatifs de votre

 13   témoignage dans l'affaire Vasiljevic, auriez-vous préparé un diagramme avec

 14   le descriptif des sites où vous vous êtes trouvé en présence de ces autres

 15   hommes au bord de la rivière ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Est-ce que ce dessin ou ce schéma est ce que vous avez eu l'occasion de

 18   voir sur la pièce 102 en application du 65 ter ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Et les initiales qu'on voit ML et MV, est-ce que cela est placé pour

 21   Milan Lukic et MV pour Mitar Vasiljevic comme cela a été le cas de ce

 22   schéma précédent ?

 23   R.  Oui, Mitar Vasiljevic.

 24   Q.  Et les initiales que nous pouvons voir dans les petits cercles à côté

 25   de l'eau, est-ce que ce sont les initiales des personnes qui ont été

 26   abattues ? Est-ce que vous vous en souvenez ?

 27   R.  C'est à peu près de la sorte que j'ai décrit l'ordre dans lequel nous

 28   étions placés.

Page 1185

  1   Q.  Est-ce qu'à un moment donné après l'événement en tant que tel, il vous

  2   a été donné d'aller au village de Medjedja ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Quand vous êtes allé là-bas, est-ce qu'un autre collègue de ce centre

  5   médical de Visegrad vous a demandé de monter un établissement de santé à

  6   Medjedja ?

  7   R.  Oui.

  8  (expurgé)

  9  (expurgé)

 10  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15  (expurgé)

 16   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce bien le cas, Monsieur Groome

 17   ?

 18   M. GROOME : [interprétation] Oui, c'est exact, mais nous n'allons pas cité

 19   ce témoin à comparaître.

 20   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Fort bien.

 21   M. GROOME : [interprétation] Il y a une erreur. J'ai oublié de faire

 22   officiellement verser ce diagramme au dossier. Est-ce qu'on peut le verser

 23   au dossier.

 24   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons le verser au dossier.

 25   M. GROOME : [interprétation] Est-ce qu'à un moment donné --

 26   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce 102 qui deviendra la

 27   pièce à conviction P65.

 28   M. GROOME : [interprétation]

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  1   Q.  Est-ce qu'à un moment donné on vous a demandé de soigner une jeune

  2   femme, que c'était quelqu'un que vous connaissiez bien ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Nous allons nous servir de la feuille des pseudonymes que vous avez

  5   sous les yeux pour vous demander d'identifier cette personne, cette jeune

  6   femme ?

  7   R.  Oui. C'est la personne qui porte le pseudonyme VG-114. Je précise que

  8   nous étions de très bons amis, amis proches tant moi que ma femme, enfin,

  9   les deux avaient grandi ensemble.

 10   Q.  Est-ce que vous pouvez décrire son état au meilleur de vos souvenirs ?

 11   R.  Vous décrire l'état dans lequel elle se trouvait. C'est  une chose très

 12   difficile. Il est difficile, il est impossible de décrire cela. Aucun film

 13   d'horreur ne saurait vous montrer chose pareille. C'était une personne que

 14   je connaissais très bien et je n'ai pas pu la reconnaître. Le visage entier

 15   était noir, tuméfié et brûlé par le feu. Les deux mains étaient pansées. Ce

 16   n'était pas des pansements médicaux, c'était des pansements improvisés. On

 17   m'a mis cinq ou six bouts de chiffon pour - et c'était infecté à tel point

 18   que lorsque j'ai essayé de panser un bras et chaque pansement que

 19   j'enlevais il y avait des vers en dessous. Quand j'ai réussi à panser l'un

 20   des bras, j'ai perdu connaissance. Je me suis évanoui. Au bout de quelques

 21   minutes je suis revenu, enfin, j'ai repris connaissance et j'ai continué à

 22   panser cette personne. Je précise que la personne en question --

 23   Q.  Excusez-moi, finissez votre phrase.

 24   R.  Je voulais juste dire que cette personne avait des cheveux très longs,

 25   jusqu'à mi-dos. Et au moment où je l'ai vue cette fois-là elle avait des

 26   cheveux très courts, coupés très courts. Les cheveux étaient plein de poux,

 27   des millions, des millions de poux. Et j'ai proposé, enfin, je n'avais pas

 28   les moyens qu'il fallait --

Page 1187

  1   Q.  VG-32.

  2   R.  -- et nous avons convenu qu'elle se rase la tête.

  3   Q.  Je voudrais vous montrer la pièce à conviction 174 en application du 65

  4   ter. Il y a trois photos et ce ne sera pas montré en public. Donc je

  5   voudrais que vous - enfin, ça ne sera vu que des personnes présentes dans

  6   le prétoire et j'aimerais que vous nous disiez si vous reconnaissez ce qui

  7   est montré.

  8   R.  Oui. C'est bien la personne VG-114. Ce que vous voyez en noir c'est ce

  9   que j'ai décrit tout à l'heure, tout son visage avait cette apparence.

 10   Cette photo a été prise à un moment où les cheveux avaient déjà repoussés,

 11   et le jour où elle était chez moi on avait rasé ses cheveux. Vous pouvez

 12   voir combien les cheveux ont pu pousser, donc c'est deux ou trois semaines.

 13   C'est donc au bout de deux ou trois semaines que cette photo a été prise

 14   suite au moment où je l'ai vue moi-même.

 15   Q.  Cette photo porte un numéro qui est le 4153 [comme interprété]. Donc il

 16   faut que nous nous entendions bien de quelle photo vous êtes en train de

 17   parler pour ce qui est de la série.

 18   Maintenant au passe au 4614. Est-ce que vous pouvez nous décrire dans quel

 19   état se trouvaient ses mains ?

 20   R.  J'ai dit que c'est une photo qui n'a pas été prise au moment où je l'ai

 21   vue moi-même. Ses mains avaient cette apparence-là, les deux mains. Et ça

 22   c'est écorché à vif, et l'autre main avait la même apparence, la main avait

 23   la même apparence de l'autre côté.

 24   Q.  Pouvez-vous nous montrer la troisième photo, s'il vous plaît. C'est la

 25   photo 4615. Une fois de plus, est-ce que c'est l'apparence de VG-14 [comme

 26   interprété] telle que vous l'avez vue au moment où vous avez soigné ses

 27   brûlures ?

 28   R.  Oui.

Page 1188

  1   Q.  Est-ce que vous étiez présent lorsqu'une interview filmée avec une

  2   caméra vidéo a été enregistrée avec le témoin VG-114 ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  En réalité, étiez-vous présent ou avez-vous essayé de la soigner

  5   pendant qu'on avait tourné cette vidéo de l'interview de

  6   VG-114 ?

  7   R.  Oui. Les gens qui ont tourné la vidéo voulaient filmer les blessures,

  8   il fallait bien que j'enlève les pansements pour que ça soit fait. Alors,

  9   si vous allez montrer cette vidéo dans la suite de la procédure et s'il y a

 10   une séquence avec ma photo, j'aimerais que ce soit expurgé, ou qu'on mette

 11   quelque chose pour que l'on ne voie pas mon visage. Parce que la vidéo est

 12   assez longue et on peut enlever la séquence où l'on voit ma personne.

 13   Q.  Je veux juste vous montrer un arrêt sur image de cette vidéo et nous

 14   allons passer à ce système d'affichage électronique pour nous montrer le

 15   173.

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Est-ce que c'est la vidéo dont vous parliez tout à

 18   l'heure ?

 19   R.  Oui. Et j'aimerais que ce ne soit pas diffusé à l'extérieur.

 20   Q.  Nous n'allons pas le diffuser à l'extérieur.

 21   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais verser au

 22   dossier la 174 de la liste 65 ter, et sa série de trois photos.

 23   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, ce sera fait.

 24   M. GROOME : [interprétation] Donc le numéro 173 de la vidéo en tant que

 25   telle.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce 173 de la liste 65 ter devient la

 27   pièce P66 sous pli scellé ainsi que le 174 qui devient la pièce P67.

 28   M. GROOME : [interprétation] Merci.

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  1   Q.  Nous allons maintenant demander au greffier de vous montrer une pièce à

  2   conviction de la Défense de Mitar Vasiljevic dans son affaire à lui. Il

  3   s'agit de la pièce D26. Je demanderais donc d'enlever cette image de

  4   l'écran et de nous mettre sur l'affichage électronique, ou plutôt, de

  5   mettre sur rétroprojecteur la pièce que vous avez en main afin que tout le

  6   monde puisse la voir.

  7   Pendant que ceci est en train d'être fait, je voudrais vous demander si

  8   pendant votre travail professionnel au centre médical de Visegrad il y

  9   avait un registre qui était utilisé qu'on appelait le registre ou le

 10   protocole ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Quelle était l'utilisation ou l'affectation de ce protocole ou de ce

 13   registre ?

 14   R.  C'était destiné à l'enregistrement des visiteurs, à savoir des clients.

 15   On y inscrivait les noms de toutes les personnes qui venaient à

 16   l'infirmerie pour demander une aide médicale quelconque, c'est donc le

 17   protocole du jour de l'infirmerie, de l'accueil.

 18   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, le registre qui est sur

 19   le rétroprojecteur contient des informations médicales sur les gens qui

 20   sont placés en corrélation avec ce procès. Donc je voudrais que ce ne soit

 21   pas diffusé, qu'on ne diffuse pas ce qui se trouve sur la partie gauche du

 22   rétroprojecteur.

 23   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Certes.

 24   M. GROOME : [interprétation]

 25   Q.  J'aimerais que vous vous penchiez maintenant sur ce que vous avez sous

 26   les yeux, sur le rétroprojecteur. Est-ce que vous reconnaissez le registre

 27   ?

 28   R.  D'habitude, dans cette première colonne on mettait le nom du patient.

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  1   Q.  Avant que de vous demander ce que ceci contient, j'aimerais que vous

  2   nous disiez d'abord si vous reconnaissez le registre que vous avez sous les

  3   yeux ?

  4   R.  Oui, je le reconnais parfaitement. Nous avons utilisé la même chose

  5   avant la guerre. Je ne voudrais pas retourner les pages pour remonter dans

  6   le temps, mais on voit qu'ici on arrive à la fin du registre. Nous avions

  7   le même. C'est le registre qui était utilisé à l'époque dans toute la

  8   Bosnie-Herzégovine à cette fin.

  9   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais que cette

 10   pièce D26 de l'affaire Mitar Vasiljevic soit versée au dossier de ce

 11   procès.

 12   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est versé au dossier.

 13   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce P68 sous pli scellé.

 14   M. GROOME : [interprétation]

 15   Q.  Puis-je vous demander maintenant de trouver les entrées relatives à la

 16   date du 7 juin 1992, je vous prie ?

 17   R.  Vous voulez que moi je les retrouve ?

 18   Q.  Oui, j'aimerais que vous alliez, que vous parcouriez et que vous

 19   retrouviez la page avec les noms des personnes qui ont été soignées le 7

 20   juin, là où ça commence.

 21   Est-ce que vous avez trouvé la page ?

 22   R.  Voici l'endroit où commence la date du 7 juin.

 23   Q.  J'aimerais que l'Huissier [comme interprété] remette des post-it jaunes

 24   et j'aimerais que l'on en mette un sur la page pour qu'on puisse retrouver

 25   la page plus facilement par la suite.

 26   R.  Est-ce que vous voulez que je vous indique l'endroit du début de la

 27   date ? La date commence exactement ici.

 28   Q.  Oui, justement. Serait-il exact de dire que les gens qui ont été

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  1   soignés ce jour-là sont indiqués dans la liste dans l'ordre des soins

  2   dispensés ?

  3   R.  Oui, c'est la façon dont on procédait.

  4   Q.  Est-ce que les entrées relatives à la date du 7 juin se poursuivent sur

  5   les deux pages qui suivent ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  J'aimerais que vous tourniez la page et que vous placiez à un autre

  8   post-it sur cette page-là aussi.

  9   Quand je vous ai demandé de vous pencher sur une photocopie de ce livre

 10   hier, avez-vous vu le nom de Milan Lukic pour la date du

 11   7 juin ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  J'aimerais que vous montriez cela du doigt afin que les Juges de la

 14   Chambre puissant voir où se trouve cette entrée.

 15   R.  [Le témoin s'exécute]

 16   Q.  Est-ce qu'on y a inscrit sa date, voire son année de naissance ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Les lettres TO qu'on voit dans la deuxième colonne à partir de la

 19   droite, qu'est-ce que cela vous indique ?

 20   R.  Pendant que je travaillais nous inscrivions Défense territoriale. Donc

 21   tous ceux qui étaient impliqués d'une certaine façon dans l'armée, la

 22   police n'avaient pas de livret de soins médicaux avec leur numéro de

 23   matricule individuel, on mettait alors TO comme inscription.

 24   Q.  Est-ce qu'on pourrait déplacer le registre vers la droite pour voir un

 25   peu ce qui a été consigné au niveau de cette entrée pour les soins

 26   dispensés ce jour-là ?

 27   R.  Etant donné qu'à la page 2 on indique d'habitude le diagnostic, c'est

 28   cette première colonne de la page de droite, c'est le médecin qui remplit

Page 1193

  1   cette case avec le diagnostic. La colonne d'après indique ce que le médecin

  2   a prescrit. D'après ce que je vois, glucose 50 %, lincocine [phon] et

  3   garamicine [phon]. D'après ce que je puis lire de ce qui y est écrit, et

  4   enfin, là où il y a remarque.

  5   Q.  Est-ce que cela dit de quelle façon les médicaments ont été administrés

  6   ?

  7   R.  Oui. J'allais justement vous le dire. La dernière colonne, là où l'on

  8   voit intitulé "Remarque", c'est là que le médecin indique les modalités

  9   d'administration du médicament. Et d'après ce que je puis voir ici, on y

 10   dit que c'est intramusculaire et intraveineux comme administration, donc ce

 11   glucose et les autres médicaments ont été administrés de façon

 12   intraveineuse, donc dans la veine, alors que la lincocine ou la garamicine,

 13   je ne sais pas quel est le médicament qui a été prescrit, a été administré

 14   de façon intramusculaire, par injection dans le muscle.

 15   Q.  Monsieur VG-32, je n'ai plus que trois questions pour vous. Quand est-

 16   ce que votre équipe a commencé ? A quel jour avez-vous vu les premiers

 17   patients ?

 18   R.  D'après mon souvenir, le 7 juin était un dimanche. Si c'est

 19   effectivement un dimanche, nous commencions à 7 heures du matin et on était

 20   de garde pendant 24 heures. A l'époque, c'était cela notre régime.

 21   Q.  En fait, je souhaite vous demander ceci : la consultation d'un patient

 22   par le médecin durait combien de temps ?

 23   M. ALARID : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Ceci fait

 24   appel à la conjecture. Ce témoin n'était pas présent à l'hôpital, et en

 25   général il ne travaillait pas à la date en question. Je pense que c'est un

 26   avis peu approprié.

 27   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne suis pas d'accord, en fait. Il

 28   travaille à l'extérieur. Il travaille à l'hôpital.

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  1   Est-ce que vous pouvez répondre à cette question, Monsieur le Témoin,

  2   et nous dire sur quoi se fonde votre connaissance ? Etes-vous en mesure de

  3   nous donner votre estimation du temps que prendrait un médecin avec un

  4   patient dans le centre médical ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, ces patients,

  6   lorsqu'ils viennent voir un médecin, ne viennent pas seulement pour

  7   demander une ordonnance de médicament. Je crois qu'il n'y a pas un seul

  8   médecin qui fonctionne ainsi. Tout d'abord, on échange des vœux, on se

  9   parle. Le médecin souhaite savoir ce dont souffre le patient, et ensuite

 10   les données sont saisies.

 11   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Simplement une estimation du temps

 12   que consacre un médecin à son patient ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Soit 15 et 20 minutes.

 14   M. GROOME : [interprétation]

 15   Q.  Ma dernière question : combien de patients ont été vus avant que Milan

 16   Lukic ne soit soigné ce jour-là ?

 17   R.  On peut les compter. Un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit,

 18   neuf, 10, 11, 12, 13, 14 -- c'était le quinzième patient.

 19   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas d'autres

 20   questions à poser à ce témoin. Etant donné que ceci comporte des éléments

 21   confidentiels, il s'agit de renseignements médicaux, j'ai demandé à M. Van

 22   Hooydonk de préparer une photocopie des deux pages sur la question, mais le

 23   nom de tous les autres patients a été expurgé. Je souhaite que ceci reste

 24   sous pli scellé par conséquent. Il s'agit d'une pièce qui peut être rendue

 25   publique, mais je ne souhaite pas mettre en danger les éléments

 26   d'information médicaux qui sont confidentiels concernant d'autres personnes

 27   qui se sont rendues à l'hôpital ce jour-là.

 28   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Soit.

Page 1195

  1   M. GROOME : [interprétation] Est-ce que j'ai besoin d'avoir un numéro de

  2   cote pour ce document, Madame la Greffière ?

  3   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Savez-vous, Madame la Greffière, ce

  4   qu'il vous reste à faire ?

  5   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pardonnez-moi. Est-ce que nous n'avons

  6   pas déjà un numéro de pièce pour ce registre ?

  7   M. GROOME : [interprétation] C'est peut-être quelque chose que nous pouvons

  8   préciser après la pause.

  9   Q.  Ceci termine les questions que j'ai à vous poser, Monsieur le Témoin

 10   VG-32.

 11   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, il y a un document que

 12   je n'ai pas versé au dossier de façon officielle, numéro 65 ter 101. Je

 13   crois en avoir fourni le fondement, donc je demande l'admission de cette

 14   pièce.

 15   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

 16   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le numéro 101 sur la liste 65 ter aura

 17   le numéro P69.

 18   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Alarid.

 19   Contre-interrogatoire par M. Alarid :

 20   M. ALARID : [interprétation] Bonjour, Témoin VG-32. Je m'appelle Jason

 21   Alarid, et je représente les intérêts de Milan Lukic. Je souhaite vous

 22   poser des questions à propos de votre déposition d'aujourd'hui et peut-être

 23   à propos de déclarations antérieures. Puis-je vous poser des questions ?

 24   Vous avez hoché la tête en signe d'affirmation, mais la sténotypiste ne

 25   peut pas consigner cela au compte rendu, donc je souhaite que vous le

 26   disiez à voix haute.

 27   R.  Allez y.

 28   Q.  Voilà. Maintenant pour que ceci puisse être évoqué et que l'on puisse

Page 1196

  1   passer à autre chose, nous venons de voir ce registre ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Vous avez dénombré 14 entrées avant de voir le nom de Milan Lukic ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Est-ce qu'il est exact de dire qu'il y environ neuf entrées de noms de

  6   patients après celui-ci ?

  7   R.  Oui. Non, pardonnez-moi. Je n'ai pas compté le nombre de patients après

  8   Milan Lukic. Si vous vous rappelez, je n'ai compté que les patients

  9   jusqu'au numéro 15. Peut-être que nous pourrions les compter.

 10   Q.  S'il vous plaît, oui, je souhaite faire cela rapidement.

 11   R.  Neuf. Oui, neuf exactement.

 12   Q.  Si vous regardez les neuf entrées suivantes, on peut dire qu'en

 13   l'espace de 24 heures, ce jour-là 23 patients ont été vus. C'est exact,

 14   n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui, il semblerait que ce soit le cas.

 16   Q.  Vous avez indiqué que le dimanche matin vous commencez à

 17   7 heures du matin, mais n'est-il pas exact de dire que l'hôpital en temps

 18   de guerre était ouvert 24 heures sur 24 ?

 19   R.  Oui. J'ai dit que les équipes commençaient -- ou plutôt, je vais vous

 20   expliquer ceci simplement. Si vous êtes l'équipe qui commence, vous

 21   commencez à 7 heures du matin, vous êtes là pendant 24 heures, et c'est

 22   l'autre équipe qui prend la relève le lendemain matin à 7 heures. Donc si

 23   on commence à 7 heures le samedi, l'autre équipe revient le dimanche matin

 24   à 7 heures, et ainsi de suite jusqu'à lundi matin 7 heures. J'ai expliqué

 25   que c'était comme ça qu'ils travaillaient en tout cas lorsque j'étais là.

 26   Q.  Ça me paraît logique, donc est-ce qu'il est exact de dire que la

 27   personne qui était là la veille inscrivait la date et vous inscriviez

 28   l'heure qui devait être minuit -- lorsqu'il y avait le changement de date ?

Page 1197

  1   R.  Oui, ce serait logique de la façon dont vous avez dit cela. Mais au

  2   centre médical de Visegrad on procédait différemment, la nouvelle équipe

  3   arrivait le matin. C'est à ce moment-là qu'elle commençait à travailler. La

  4   nouvelle équipe a peut-être inscrit quelque chose à minuit, mais je ne sais

  5   pas. En général, nous faisions cela à 7 heures du matin lorsque la nouvelle

  6   équipe arrivait.

  7   Q.  Est-ce que vous dites que si on adopte l'hypothèse qui consisterait à

  8   dire qu'à 2 heures du matin quelqu'un arriverait, en fait, il serait

  9   inscrit dans le registre pour la veille ? Cela ne paraît pas très logique.

 10   R.  Non, ce n'est pas logique, mais cela pouvait arriver en réalité. A vrai

 11   dire, lorsque je travaillais entre minuit et le matin, nous dormions un

 12   petit peu à moins qu'il y ait une urgence. Et s'il y avait une véritable

 13   urgence, à ce moment-là nous appelions le médecin. C'était tout à fait

 14   autorisé et ça n'était pas du tout interdit.

 15   Q.  Par exemple, une injection de glucose, en fait, c'est peut-être une

 16   infirmière ou un --

 17   R.  Ils ne sont pas autorisés à rédiger les ordonnances en fait. Il y avait

 18   une nomenclature pour le diagnostic. Et seul le médecin est habilité à

 19   faire cela. Il n'y a que lui qui peut le faire. Et de surcroît, il faut le

 20   cachet du médecin. C'était en général le médecin qui était de garde ce

 21   jour-là. C'est comme ça que l'on sait.

 22   Q.  Pour ce qui est du médecin, il y avait juste un médecin de permanence ?

 23   R.  En général il y avait un seul médecin de permanence.

 24   Q.  Si on ne changeait pas la date à l'heure juste à minuit, cela veut dire

 25   qu'on pouvait enregistrer quelqu'un le lendemain ?

 26   R.  Je ne comprends pas très bien votre question.

 27   Q.  Bien, si la nouvelle équipe arrivait à 7 heures du matin et si la

 28   nouvelle équipe inscrivait la date du 7 juin, les patients qui étaient

Page 1198

  1   arrivés avant, qui ont été vus le 7, figurent en général sur le registre de

  2   la veille, cela signifie que les patients n'ont pas forcément été

  3   enregistrés à la bonne date s'ils arrivaient entre minuit et 7 heures du

  4   matin ?

  5   R.  Non. S'ils ont été auscultés entre minuit et 7 heures du matin, comme

  6   vous semblez le dire, c'est l'équipe qui l'a vu qui enregistrait le nom du

  7   patient. On ne pouvait pas inscrire une nouvelle date le matin et dire,

  8   "Nous avons déjà vu trois patients. Avançons la date." Donc l'entrée de la

  9   date se faisait entre minuit et 7 heures en fait, c'est comme ça que nous

 10   travaillions. Tout le reste n'est que pure abstraction. Je vous parle

 11   simplement de la façon dont nous procédions.

 12   Q.  Vous n'étiez pas là ce jour-là pour surveiller les entrées du registre

 13   ni les patients qui arrivaient ce jour-là.

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Donc il se peut que les entrées soient erronées à moins, bien sûr, que

 16   vous n'ayez pu le vérifier ?

 17   R.  C'est exact. Comment voulez-vous que je vérifie cela si je vous disais

 18   que je n'étais pas là ? En réalité, on ne m'a demandé que de faire des

 19   commentaires à propos de cette liste. Je l'ai vue et je vous ai dit ce que

 20   j'avais à vous dire.

 21   Q.  Dans le secteur de Visegrad dans la région en Bosnie et en Serbie, est-

 22   ce que Milan est un nom assez répandu ?

 23   R.  Oui, on pourrait dire cela.

 24   Q.  Est-ce que Lukic est un nom de famille assez répandu ?

 25   R.  Oui, on pourrait dire cela. C'est assez répandu.

 26   Q.  Est-ce que Milan Lukic est un nom très répandu ?

 27   R.  Oui, on pourrait dire cela.

 28   Q.  Pourquoi les dates de naissance et les moyens d'identifier les patients

Page 1199

  1   ne sont-ils pas traités avec plus de précision ? Je souhaite recueillir de

  2   vous des commentaires au sujet des pratiques adoptées à l'hôpital.

  3   R.  En général, l'année de naissance était inscrite dans la première

  4   colonne, mais lorsque quelqu'un avait une carte de sécurité sociale, à ce

  5   moment-là on inscrivait ce nom dans le registre, il y avait donc un numéro

  6   d'identification personnel. Et comme je vous l'ai dit, à chaque fois que

  7   vous avez l'acronyme TO, cela signifie qu'il s'agissait de soldats ou de

  8   membres de la Défense territoriale qui n'avaient pas de cartes de sécurité

  9   sociale, à ce moment-là, on n'inscrivait que les lettres TO.

 10   Q.  Je sais que pour certains patients vous n'avez aucun renseignement ni

 11   de carte de sécurité sociale ni de date de naissance, rien.

 12   R.  En fait, il faut poser la question directement aux personnes qui ont

 13   inscrit ces noms dans le registre. Comme je vous l'ai dit déjà, ils n'ont

 14   peut-être pas fait leur travail comme il faut. Ou alors ils n'avaient peut-

 15   être pas les cartes ou les papiers d'identité à disposition. Si, par

 16   exemple, un homme qui a la cinquantaine et qui vient à l'hôpital, on l'a

 17   ramassé, il n'a pas de carte de sécurité sociale, ce n'est pas un membre de

 18   la Défense territoriale, et il dit, "Docteur, j'ai un problème," est-ce que

 19   vous pensez que le docteur va le renvoyer simplement parce qu'il n'a pas de

 20   couverture médicale ? Bien, non ceci n'arrivait jamais. Tous les patients

 21   étaient admis à l'hôpital. Personne n'était renvoyé à mon sens en tout cas.

 22   Q.  Est-ce que vous reconnaissez l'écriture du médecin, ou est-ce que ceci

 23   pourrait être l'écriture d'une infirmière ou l'écriture du personnel

 24   médical ?

 25   R.  C'est très peu probable. Le diagnostic et l'administration de la

 26   thérapie ou l'ordonnance étaient toujours consignés par le médecin.

 27   Q.  Est-ce que deux personnes différentes pouvaient inscrire quelque chose

 28   à propos d'un patient dans le même registre, par exemple, si le personnel

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  1   médical enregistre le patient et ensuite le médecin écrit quelque chose à

  2   propos du diagnostic et du traitement du patient en question ?

  3   R.  Cela pouvait également arriver. L'infirmière pouvait inscrire le nom et

  4   le médecin pouvait inscrire le diagnostic et la thérapie préconisée. Comme

  5   je vous l'ai dit déjà, je ne peux pas en parler davantage étant donné que

  6   je n'étais pas là.

  7   Q.  En temps de guerre, pensez-vous que certaines personnes auraient pu

  8   être admises à l'hôpital en donnant un autre nom ?

  9   R.  Bien, maintenant nous nous sommes éloignés et nous sommes dans le

 10   domaine du théorique, de ce qui est possible et impossible. Honnêtement je

 11   ne peux pas répondre à votre question.

 12   Q.  Est-ce qu'il y avait des médecins musulmans qui travaillaient dans les

 13   équipes à l'hôpital ?

 14   R.  Est-ce que vous voulez parler de ce moment précis ? Je ne le pense pas,

 15   je n'étais pas là la dernière semaine. Comme je vous l'ai dit, je n'ai pas

 16   travaillé la dernière semaine, et je l'ai déjà évoqué. Je ne sais pas si

 17   des Musulmans y travaillaient encore. Peut-être qu'il y avait des

 18   dentistes, mais honnêtement, je ne le pense pas.

 19   Q.  Savez-vous combien de médecins serbes étaient là pour traiter les

 20   patients à ce moment-là ?

 21   R.  Il y avait un ou deux médecins serbes, et il y en avait même qui

 22   étaient allés à Uzice avant la guerre pour aller y travailler, et on les a

 23   fait revenir. J'en connais quelques-uns. Encore une fois, je dois vous

 24   répéter que je ne sais pas combien de médecins travaillaient à l'hôpital à

 25   ce moment-là et je ne sais pas combien d'entre eux étaient Serbes.

 26   Q.  De toute façon, avant le début de la situation chaotique l'hôpital

 27   était mixte. Il y avait parmi les membres du personnel de l'hôpital des

 28   personnes des deux groupes ethniques, n'est-ce pas ?

Page 1201

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Donc pour repartir un petit peu en arrière, je souhaite parler de vos

  3   échanges avec VG-114. Est-ce qu'elle vous a dit comment elle avait été

  4   brûlée, brûlée à l'huile ou au gaz ou par le biais d'un dispositif ou d'un

  5   engin explosif ?

  6   R.  Oui, elle m'a dit comment elle avait été brûlée. Elle m'a dit qu'elle

  7   avait vécu une tragédie, que dans une maison - je ne sais pas exactement

  8   combien de personnes elle a citées, je ne connais pas le chiffre - mais

  9   qu'il y avait beaucoup de gens que l'on a brûlés dans cette maison, sa

 10   mère, sa sœur, et un des deux enfants de sa sœur. Vous devez essayer

 11   d'imaginer l'état dans lequel elle se trouvait. Je n'avais aucun droit sur

 12   un plan moral de lui demander de raconter son histoire. De temps en temps,

 13   au cours de notre conversation, certains éléments remontaient à la surface

 14   par bribe, mais je ne pouvais pas lui demander cela.

 15   Q.  Est-ce qu'elle vous a dit qui avait aidé cette jeune femme à Visegrad ?

 16   R.  Oui. C'est une femme musulmane qui l'a aidée, qui habitait dans cette

 17   villa à ce moment-là, et elle a également dit qu'un médecin était venu

 18   accompagné d'une infirmière du centre médical pour l'ausculter. Ensuite, à

 19   une occasion, elle m'a dit qu'elle s'était rendue à un poste de contrôle

 20   une fois pour aller demander aux soldats de la tuer parce qu'elle ne

 21   pouvait plus continuer ainsi.

 22   Q.  Donc on l'a filmée après cela. Est-ce que vous avez remis une

 23   déclaration ou donné une interview à la télévision concernant votre épreuve

 24   ou l'épreuve que vous avez vécu le long de la Drina ?

 25   R.  Non, ce n'était pas une émission à la télévision, cela aurait pu être

 26   une simple vidéo.

 27   Q.  Qui décrivait les incidents au bord de la Drina ? Je crois qu'en fait

 28   c'était une vidéo filmée par un journaliste ou quelque chose ?

Page 1202

  1   R.  Oui. J'en ai parlé, je sais, je l'ai décrit.

  2   Q.  Avez-vous indiqué qu'il y avait un soldat de l'autre côté du fleuve qui

  3   a interrompu cette exécution, parce qu'il a tiré et ceci a provoqué la

  4   fuite des Chetniks ou le départ des Chetniks ?

  5   R.  C'est une illusion ici dont vous parlez, vous ne parlez pas de moi. La

  6   personne qui a parlé des tirs de l'autre côté de la rue n'a rien à voir

  7   avec cet incident. Je sais de qui vous voulez parler, cela concerne deux

  8   frères qui ont traversé à la nage le fleuve et qui sont passés de l'autre

  9   côté. Je n'ai jamais rien dit de la sorte. J'ai dit en toute connaissance

 10   de cause devant cette Chambre que je n'ai jamais déclaré que quelqu'un

 11   avait tiré de l'autre côté.

 12   Q.  Donc qui est cette personne qui a fait cette déclaration à propos de

 13   quelqu'un qui a tiré de l'autre côté ?

 14   R.  Je peux donner une déclaration écrite sur cela si vous voulez. Je ne

 15   souhaite pas dire en public qui est cette personne et je ne sais pas si

 16   cette personne va venir devant ce Tribunal. Je peux, en revanche, remettre

 17   une déclaration écrite au Procureur qui identifiera cette personne.

 18   Est-ce que nous pouvons passer à huis clos partiel ?

 19   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

 20   [Audience à huis clos partiel]

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 13   [Audience publique]

 14   M. ALARID : [interprétation]

 15   Q.  Est-ce que nous pouvons avoir la pièce P56 à l'écran s'il vous plaît.

 16   R.  Est-ce que nous sommes à huis clos partiel, s'il vous

 17   plaît ?

 18   Q.  Non.

 19   R.  Nous avons déjà montré cette pièce à huis clos partiel. Si je me

 20   souviens bien, ce document a été abordé en audience à huis clos partiel.

 21   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ceci n'est pas diffusé, ceci n'est

 22   pas diffusé, donc cela n'a pas d'importance.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je comprends, mais je souhaite savoir si

 24   nous sommes en audience publique ou à huis clos partiel.

 25   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous sommes en audience publique.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque le Procureur a montré ce document à

 27   l'écran, nous en avons parlé à ce moment-là à huis clos partiel, c'est ce

 28   que le Procureur avait demandé. En tout cas c'est ce dont je me souviens.

Page 1204

  1   Et j'ai préféré ne pas diffuser ce document.

  2   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Passons alors à huis clos partiel.

  3   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

  4   [Audience à huis clos partiel]

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  8   [Audience publique]

  9   M. GROOME : [interprétation] Je voudrais juste qu'on apporte quelques

 10   corrections rapides au compte rendu. En ce qui concerne la pièce 67

 11   présentée par l'Accusation, une série de trois photographies, le compte

 12   rendu dit que je parle de la première photographie comme étant la 4153. En

 13   fait, c'est un numéro à huit chiffres qui se termine par 4513. Et en ce qui

 14   concerne la deuxième photographie, le compte rendu dit que j'ai dit 4614,

 15   en fait, c'est un numéro à huit chiffres qui se termine par 4514. Et enfin,

 16   la dernière photographie, il est dit que j'ai mentionné 4615, et je demande

 17   que l'on modifie cette troisième photographie, ça a huit chiffres également

 18   et ça se termine par 4515.

 19   En ce qui concerne la pièce 68 de l'Accusation, à savoir un grand volume

 20   des consultations, il n'y a que deux pages qui sont nécessaires, pour

 21   éviter d'avoir à numériser des centaines de pages qui sont comprises dans

 22   ce registre, donc je voudrais faire la suggestion suivante à la Chambre :

 23   on peut renvoyer l'exemplaire dans le dossier Vasiljevic comme étant D26 et

 24   qu'il y soit conservé de sorte que si jamais il doit y avoir un examen

 25   nécessaire par des légistes, on puisse retrouver rapidement ce registre, et

 26   nous savons que la chaîne de conservation fonctionne, et le P68 pourrait

 27   maintenant être remplacé par des images des 2 pages contenant les

 28   renseignements pertinents sur le 7 juin 1992, et que ce document ne soit

Page 1206

  1   pas expurgé, et demeure sous pli scellé. La pièce 70 de l'Accusation est

  2   une version expurgée pour les deux mêmes pages, et actuellement est une

  3   pièce qui est publique.

  4   [La Chambre de première instance se concerte]

  5   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Cepic.

  6   M. CEPIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

  7   voudrais juste ajouter quelque chose en ce qui concerne le numéro P68, la

  8   pièce en question, c'est le registre de l'hôpital de Visegrad. M. Groome a

  9   demandé que l'on admette seulement deux pages, et je voudrais demander,

 10   moi, des pages supplémentaires, en fait, simplement deux pages de plus qui

 11   ont trait au 14 juin 1992 sous le numéro 5353, et qui a trait à Mitar

 12   Vasiljevic, de sorte que

 13   --

 14   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Et Maître Alarid ?

 15   M. ALARID : [interprétation] Monsieur le Président, nous voulons demander,

 16   du point de vue de la chaîne de conservation et également pour l'utilité

 17   des membres de la Chambre, que le document tiré du registre lui-même soit

 18   transféré au dossier de Milan Lukic et Sredoje Lukic entièrement, notamment

 19   parce que l'affaire Vasiljevic est terminée. Donc il n'est pas nécessaire

 20   que ça fasse partie du dossier, par exemple, s'il y avait un appel ou

 21   quelque chose de ce genre. Mais en ce qui concerne ceci, nous pensons que

 22   le fait que la Chambre ait parlé d'environ 400 pages de PDF, à ce moment-là

 23   nous voudrions avoir l'intégralité, il pourrait y avoir autre chose qui

 24   soit pertinent dans ce document.

 25   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons prendre un peu de temps

 26   pour examiner les différentes propositions et nous rendrons notre décision

 27   par la suite. Poursuivons avec le procès au niveau du contre-

 28   interrogatoire.

Page 1207

  1   M. ALARID : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   Q.  Témoin 32, nous étions en train de regarder votre croquis, et vous avez

  3   indiqué que vous ne regardiez pas derrière vous pour voir exactement où se

  4   trouvaient les tireurs, mais que ceci représentait plutôt l'endroit où

  5   chacun se trouvait lors que la progression dans le pré de 1 à 200 mètres;

  6   est-ce bien cela ?

  7   R.  Non, ce n'est pas exact.

  8   Q.  Bien, n'est-il pas vrai que vous avez traversé ce champ avec des

  9   personnes qui se trouvaient à la fois à votre gauche et à votre droite ?

 10   R.  Oui. J'ai dit exactement tout à l'heure, qu'alors que je progressais en

 11   traversant le pré, à ma gauche il y avait le

 12   Témoin 014. Vous pouvez voir sur le croquis que ce témoin n'est pas à ma

 13   gauche. Je voudrais le répéter. On m'a demandé de dessiner ceci avec la

 14   place où se trouvent les quatre cercles et où je me trouvais à ce moment-là

 15   lorsque j'ai commencé à marcher vers la rive. Je ne me suis pas retourné et

 16   je ne peux pas vous dire quelle était exactement la position au moment où

 17   j'étais en train de progresser vers la rive. Ça c'est quelque chose que

 18   j'ai dit et je m'y tiens.

 19   Q.  Donc vous n'avez pas traversé le champ deux par deux mais plutôt sur un

 20   rang.

 21   R.  C'est ce que j'ai dit.

 22   Q.  Et du point de vue de la description de chacune de ces personnes, vous

 23   avez décrit Milan Lukic comme portant un uniforme de camouflage bleu et un

 24   béret ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Quelle était la couleur du béret ?

 27   R.  Bleu. Bleu clair.

 28   Q.  Donc de la même couleur, pourrait-on dire, que les rideaux qui se

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  1   trouvent derrière les Juges de la Chambre ?

  2   R.  Oui. Peut-être un peu plus foncé.

  3   Q.  Comment est-ce que Mitar Vasiljevic était vêtu ?

  4   R.  Mitar Vasiljevic portait l'uniforme de la Défense territoriale que j'ai

  5   décrit, à savoir d'un gris vert olive. C'est l'uniforme de camouflage.

  6   Q.  Et que --

  7   R.  Et il portait un couvre-chef noir sur la tête.

  8   Q.  Et ce couvre-chef noir, quel type de couvre-chef est-ce que c'était ?

  9   R.  Bon, quel type. C'était un couvre-chef plus large, pas la coiffure

 10   classique occidentale. Ça avait une bordure plus large. C'était en fait un

 11   couvre-chef américain typique. Je ne suis pas vraiment suffisamment au

 12   courant et très bon pour décrire des chapeaux. Vous en avez des millions de

 13   sortes. Je pourrais peut-être essayer de faire un dessin. Je ne sais pas

 14   comment vous l'expliquer.

 15   Q.  Et quelle était la couleur de cette coiffure ?

 16   R.  Noire.

 17   Q.  Noir. Bien. Et les deux autres hommes, les deux soldats, que portaient-

 18   ils ?

 19   R.  Ils portaient des uniformes de camouflage ordinaires. Autrement dit, ce

 20   n'était pas des uniformes de camouflage de la police, c'était des uniformes

 21   de camouflage habituels.

 22   Q.  Que portaient-ils sur la tête ?

 23   R.  Je crois que le soldat dont j'ai parlé, qui se trouvait à Visegrad

 24   Banja, ne portait rien sur la tête. Je me rappelle ça bien. Tandis que

 25   l'autre soldat portait un béret, je crois, mais je ne suis pas sûr. Je ne

 26   me rappelle pas exactement.

 27   Q.  Pouvez-vous vous rappeler sa couleur ? Si c'était un béret ou non,

 28   pouvez-vous vous rappeler de quelle couleur était ce couvre-chef ?

Page 1209

  1   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je n'arrive pas

  2   vraiment à me rappeler maintenant quelle était la couleur de ce béret. Vous

  3   devez garder à l'esprit la situation dans laquelle je me trouvais à ce

  4   moment-là. La couleur du béret, pour moi, ça ne m'intéressait pas

  5   particulièrement.

  6   Q.  Est-ce que vous pouvez vous rappeler si l'uniforme de camouflage bleu

  7   avait les manches courtes ou les manches longues ?

  8   R.  Je pense que c'était des manches courtes. Je crois l'avoir déjà dit.

  9   Vous voulez parler de l'uniforme de camouflage de la police ou est-ce que

 10   vous parlez des soldats ? Pour ce qui est de la police, c'était des manches

 11   courtes.

 12   Q.  Y avait-il des tatouages sur les bras ?

 13   R.  Non, je n'ai pas remarqué.

 14   Q.  Et pour ce qui est du visage de la personne, vous dites qu'il s'agit de

 15   Milan Lukic, vous avez dit que seules les joues avaient été noircies ou

 16   est-ce que le nez, le menton ou le front l'avaient été aussi ?

 17   R.  J'ai dit qu'il portait du teint sur cette partie de son visage. Il se

 18   peut qu'il y ait eu une sorte de maquillage également sur le front.

 19   Q.  Est-ce que vous avez remarqué s'il y avait un grain de beauté visible

 20   prononcé sur cette personne ?

 21   R.  Non.

 22   Q.  N'est-il pas vrai que la première fois que vous avez vu Milan Lukic,

 23   c'était avec d'autres soldats dans un café ?

 24   R.  Oui, c'est vrai.

 25   Q.  Et avant cela, vous ne connaissiez pas Milan Lukic ou qui que ce soit

 26   qui pouvait être nommé Milan Lukic.

 27   R.  Non.

 28   Q.  Donc même si vous étiez depuis longtemps habitant de Visegrad, vous

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  1   n'aviez pas eu l'occasion d'entrer en contact avec le Milan Lukic local ou

  2   qui que ce soit d'autre nommé Milan Lukic ?

  3   R.  Non.

  4   Q.  Et à ce moment-là même, lorsque vous vous trouviez dans le café, vous

  5   ne saviez pas le nom de cet homme. C'était seulement les gens qui vous ont

  6   dit quel était son nom, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Et quand s'est-il produit qu'il y ait eu quelqu'un qui vous ait dit de

  9   qui il s'agissait, pouvez-vous me dire quel était le contexte de cette

 10   identification ?

 11   R.  J'ai dit que je l'ai vu pour la première fois dans l'entrée du café que

 12   nous appelions Kod Pipe près de l'entrée de Panos. J'ai dit qu'il portait

 13   un fusil avec un silencieux. Il m'a frappé comme étant quelqu'un qui était

 14   remarquable et ça m'intéressait de savoir qui il était. Et on m'a dit que

 15   c'était Milan Lukic, bien que, je dois dire, je n'ai pas prêté tant

 16   d'attention à cela à ce moment-là. Quand plus tard j'ai revu cette

 17   personne, j'ai remarqué que c'était lui, que c'était la même personne qui

 18   se trouvait hors du centre médical et plus tard avec nous.

 19   Q.  Donc c'est uniquement parce que quelqu'un d'autre vous a dit que

 20   c'était Milan Lukic que vous avez établi le lien mais pas parce que vous le

 21   connaissiez personnellement pendant un certain temps.

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Et même cette fois-là, bien que vous ayez dit que cette personne avait

 24   été assez remarquable ou distinguable, il n'y avait rien qui vous aurait

 25   permis de le prendre pour un membre des Aigles Blancs ou quelque chose de

 26   ce genre ?

 27   R.  Oui, mais il n'y avait rien d'autre qui montrerait que ce serait là un

 28   membre de l'armée régulière.

Page 1211

  1   Q.  Que portait-il lorsqu'il était dans cette cafétéria ?

  2   R.  Il portait un uniforme de camouflage ordinaire, et c'était le même

  3   uniforme que celui qu'il avait lorsque je l'ai revu.

  4   Q.  Etait-ce un uniforme de camouflage vert ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Et quand portait-il un fusil à lunette, cette fois-là dans la cafèt ou

  7   la fois d'après ?

  8   R.  Cette fois-là. C'est ce qui m'a fait le remarquer. Je n'aurais pas

  9   prêté attention. Il n'y avait pas beaucoup de soldats à porter à l'époque

 10   des fusils à lunette avec des silencieux dessus.

 11   Q.  Mais d'autres soldats encore étaient à porter des fusils à lunette avec

 12   des silencieux, n'est-ce pas ?

 13   R.  Probablement que si.

 14   Q.  Et vous n'avez jamais été plus près de lui à un moment donné à la cafèt

 15   ?

 16   R.  Non.

 17   Q.  Pendant que vous étiez dans cette cafétéria personne ne vous aurait dit

 18   que c'était ce Milan Lukic, on ne vous aurait pas dit d'où il venait, qui

 19   était ses parents ?

 20   R.  Non.

 21   Q.  A quelle date a-t-elle eu lieu cette rencontre fortuite dans la

 22   cafétéria ?

 23   R.  Je ne sais pas vraiment. Je vous avais dit que je l'avais dit avant et

 24   que c'était du temps où le Corps d'Uzice était là-bas et que je suis revenu

 25   le 5, 6, donc c'était -- le 25 ou le 26, donc cela a pu se passer à peu

 26   près vers le 19 mai. Mais je n'arrive pas à me souvenir de la date exacte.

 27   Q.  Donc vous ne pouvez pas définir plus exactement dans le temps ce moment

 28   au fil de cette période de trois semaines; ça peut se situer au début de

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  1   cette période tout comme à la fin, n'est-ce pas ?

  2   R.  C'est cela.

  3   Q.  Et à l'époque de l'hôpital, quand est-ce que Behija Zukic a été

  4   apportée dans la morgue ?

  5   R.  Je pense que ça s'est passé un jour après ou deux jours après le départ

  6   du Corps d'Uzice. Là vraiment je ne suis pas certain de la date exacte.

  7   Q.  Etes-vous bien certain que c'est le jour où Behija Zukic

  8   a été tuée, ou est-ce que cela a pu se passer quelque temps après ?

  9   R.  Je ne pense pas. Je ne sais pas si ça s'est passé le même soir ou le

 10   même jour, mais je ne pense pas que quelqu'un ait acheminé le corps trois

 11   ou quatre jours après à la morgue. Je ne sais pas combien de temps il a pu

 12   se passer avant que l'on ne prenne quelqu'un pour l'emporter à la morgue.

 13   Q.  Donc vous n'avez pas une idée du temps qui s'est passé entre le moment

 14   où Mme Zukic a été tuée et le moment où son corps a été apporté à la morgue

 15   ?

 16   R.  Ça, non vraiment pas.

 17   Q.  Lorsque vous avez identifié -- excusez-moi, quand on vous a dit que

 18   cette personne dans la cafétéria s'appelait Milan Lukic, qui est-ce qui

 19   vous l'a dit ?

 20   R.  J'étais avec plusieurs de mes connaissances. Mais je ne sais pas vous

 21   dire exactement un tel m'a dit que c'était Milan Lukic. Ce n'était pas un

 22   grand patelin cet endroit. Je vous ai dit que j'étais avec des

 23   connaissances et c'est ce que je maintiens.

 24   Q.  Bien, quand vous dites que la dépouille de Mme Zukic a été apportée à

 25   la morgue, pouvez-vous nous dire qui est-ce qui l'a apportée ?

 26   R.  Je vous ai dit que je n'étais pas présent. Je n'ai jamais dit qui est-

 27   ce qui avait apporté le corps, le cadavre, j'ai dit que le cadavre a été

 28   apporté.

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  1   Q.  C'est justement la raison pour laquelle je vous pose la question, pour

  2   savoir si vous le savez ou pas.

  3   Vous avez dit que la personne que vous saviez désormais être Milan Lukic

  4   était venue au volant d'une Volkswagen Passat ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Dans votre déclaration auprès des représentants du bureau du Procureur,

  7   vous avez indiqué, qu'à votre avis, il s'était procuré cette Passat après

  8   l'avoir prétendument tuée ?

  9   R.  Je n'ai pas dit que je le pensais. J'ai dit que je l'ai entendu dire.

 10   Q.  Donc dans la réalité vous ne savez pas vraiment qui est-ce qui a tué

 11   Mme Zukic et vous ne savez pas non plus qui est-ce qui a pris la Passat ?

 12   R.  Je n'ai jamais dit ou je n'ai jamais affirmé que je savais qui est-ce

 13   qui avait tué Mme Zukic. J'ai juste dit que j'ai ouï-dire.

 14   Q.  Et vous avez ouï-dire cela avant l'incident de la Drina, et de façon

 15   évidente après que son corps ait été emmené ?

 16   R.  Est-ce que vous pouvez répéter votre question ? Je n'ai pas très bien

 17   compris.

 18   Q.  Quand avez-vous appris de la part de cette personne que l'on croyait

 19   bien que Mme Zukic avait été tuée et que sa Passat avait été prise par

 20   Milan Lukic ?

 21   R.  C'est entre les deux moments. J'ai compris ce que vous voulez dire.

 22   Donc c'est entre l'incident de la Drina et -- oui, entre les deux.

 23   Q.  N'est-il pas vrai de dire que la police avait saisi bon nombre de

 24   véhicules, y compris le vôtre ?

 25   R.  Je n'ai jamais dit que c'était la police qui avait pris ma voiture. Il

 26   est vrai qu'ils ont saisi des voitures. Je pense et il est vrai de dire que

 27   bon nombre de véhicules ont été saisis parmi les véhicules qui étaient

 28   garés devant l'hôtel de Visegrad.

Page 1214

  1   Q.  Et c'était le cas de bon nombre de véhicules qui étaient garés devant

  2   le poste de police également, n'est-ce pas ?

  3   R.  Je n'ai jamais dit que j'avais vu des véhicules garés devant la police

  4   alors que c'était des véhicules qui avaient été saisis. J'ai dit que j'ai

  5   vu des véhicules qui étaient saisis et qui se trouvaient garés devant

  6   l'hôtel Visegrad. Mais là il n'y avait pas,  enfin, là ne se trouve pas le

  7   poste de police. Ce n'est pas là qu'il se trouve le poste.

  8   Q.  Avez-vous vu des véhicules saisis à proximité du poste de police ?

  9   R.  Non.

 10   Q.  Est-ce que cela veut dire que vous n'avez pas vu ou que vous ne saviez

 11   pas ?

 12   R.  Je ne sais vraiment pas à quoi vous faites allusion, Monsieur, est-ce

 13   que vous voulez dire est-ce que j'ai vu des voitures garées devant le poste

 14   de police ou est-ce que j'ai vu un policier stopper quelqu'un pour lui

 15   confisquer sa voiture.

 16   Q.  Avez-vous vu chose pareille, des policiers stopper des véhicules pour

 17   les confisquer ?

 18   R.  Non, je n'ai pas vu cela.

 19   Q.  Lorsque vous êtes retourné au travail, lorsque vous êtes retourné à

 20   Visegrad, avez-vous appris qu'il y avait pas mal de Musulmans de rassemblés

 21   au stade une fois que le Corps d'Uzice est entré dans la ville ?

 22   R.  Je ne peux vraiment pas vous répondre à cette question. Il se peut

 23   qu'il y ait des Musulmans de rassemblés, mais moi, je n'étais pas en ville

 24   à ce moment. Je ne sais pas quand est-ce qu'il y a eu rassemblement en

 25   ville, à quelle date, et si rassemblement il y a eu. Je n'y étais pas.

 26   Q.  Mais avez-vous entendu parler de cela ? Est-ce que vos compatriotes

 27   entre eux ont parlé de cela ?

 28   R.  Je n'ai vraiment pas entendu parler de la bouche de quelqu'un de ce

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  1   rassemblement. J'ai ouï-dire qu'il y a eu rassemblement, mais pour ce qui

  2   est des détails au sujet du rassemblement, je ne les connais pas.

  3   Q.  Vous avez dit que quand vous êtes revenu il a fallu passer par cinq

  4   points de contrôle ou postes de contrôle, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Ces postes de contrôle étaient tenus par qui, la police, les armées ou

  7   les uns et les autres ?

  8   R.  Si vous prenez le premier, au premier c'était les soldats, au deuxième

  9   c'était les soldats, au troisième aussi. Je pense qu'au tout dernier poste

 10   de contrôle c'était des policiers.

 11   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Alarid.

 12   M. ALARID : [interprétation] Oui, Monsieur.

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pouvez-vous nous expliquer la

 14   pertinence de tout ceci ?

 15   M. ALARID : [interprétation] J'essaie d'expliquer la façon dont s'est

 16   présenté la situation politique et la situation au niveau du contrôle et

 17   que j'essaie de démontrer que c'était la police qui avait contrôlé les

 18   accès à la ville.

 19   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais de quelle façon ceci peut-

 20   il déterminer la responsabilité au pénal de

 21   l'accusé ?

 22   M. ALARID : [interprétation] Bien, Monsieur le Président, ceci nous fournit

 23   un accès qui nous permet d'étudier les types de responsabilités

 24   alternatives.

 25   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais cela me semble comme étant

 26   un refrain que vous reprenez à chaque fois.

 27   M. ALARID : [interprétation] Je comprends, Monsieur le Président, mais je

 28   vais rassembler mes arguments et par la suite ce sera plus compréhensible.

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  1   M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

  2   M. ALARID : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  3   Mme LE JUGE VAN DEN WYNGAERT : [interprétation] Je voulais vous dire aussi

  4   quelque chose. Gardez vos efforts, ménagez vos efforts pour parler non pas

  5   de la situation et non pas des faits qui ont fait l'objet de constats

  6   judiciaires, c'est-à-dire de choses jugées. Et je vous demande de garder à

  7   l'esprit l'heure qui passe.

  8   M. ALARID : [interprétation] Oui, Madame.

  9   Q.  Vous nous avez dit que pendant que le Corps d'Uzice était dans la

 10   ville, vous aviez vu des gens qui sont allés au poste de police et qui

 11   n'ont plus été revus ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Et ceci s'est passé en dépit du fait ou de la présence du Corps d'Uzice

 14   et qu'il était censé de protéger les Musulmans, et il est arrivé que des

 15   représentants officiels aient été emmenés; est-ce bien exact ?

 16   R.  Oui, c'est bien exact.

 17   Q.  Et en dépit du fait que le Corps d'Uzice était en ville, c'est ce que

 18   vous avez remarqué, vous avez remarqué qu'il y a eu des groupes de

 19   paramilitaires que vous aviez coutume d'appeler les Aigles blancs, n'est-ce

 20   pas ?

 21   R.  Exact.

 22   Q.  Et vous avez dit que cela avait constitué plusieurs groupes et non pas

 23   un seul groupe, n'est-ce pas ?

 24   R.  C'est bien ce que j'ai dit. Je vais préciser brièvement.

 25   Nous étions convaincus du fait que lorsque le Corps d'Uzice serait parti,

 26   eux aussi s'en iraient, mais cela n'a pas été le cas.

 27   Mme LE JUGE VAN DEN WYNGAERT : [interprétation] Monsieur Alarid, je vais

 28   vous interrompre une deuxième fois. J'essaie de comprendre la réponse que

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  1   vous avez apportée à la question du Juge Robinson. Vous avez parlé de la

  2   situation politique et du commandement, et cetera, mais est-ce que les

  3   accusés ne sont pas accusés en application de l'article 7.1 et je ne vois

  4   pas quelle est la pertinence de l'image générale que vous essayez de nous

  5   apporter. Vous êtes en train d'explorer les types de responsabilités

  6   alternatives mais je ne comprends pas où cela nous mène.

  7   M. ALARID : [interprétation] Bien, dans l'acte d'accusation, Madame le

  8   Juge, l'Accusation affirme que M. Lukic était un leader et qu'il est leader

  9   des Aigles blancs, et peut-être que je suis en train de donner des coups

 10   d'épée dans l'eau, mais ceci me semble être la théorie qu'ils ont défendue.

 11   Donc on l'a identifié comme étant plus ou moins le leader des Aigles

 12   blancs, et je ne pense pas que ce soit une question à mettre de côté.

 13   Mme LE JUGE VAN DEN WYNGAERT : [interprétation] Je vous saurais gré de vous

 14   concentrer davantage sur les formes de responsabilités en application du

 15   7.1 qui découle de l'acte d'accusation. Je vous en remercie.

 16   M. ALARID : [interprétation] Oui, Madame le Juge.

 17   Q.  Lorsque le Dr Safet était en ville -- ou plutôt, lorsqu'on l'a tué,

 18   est-ce que le Corps d'Uzice se trouvait encore en ville ?

 19   R.  Je n'ai pas dit que le Dr Safet a été tué à ce moment-là et le Corps

 20   d'Uzice se trouvait en ville. J'ai dit que suite à une initiative du

 21   directeur de l'hôpital et du commandement de la ville, que Safet a accepté

 22   de retourner dans la ville de Visegrad.

 23   Q.  Ces autorités de la ville englobaient la cellule de Crise aussi ?

 24   R.  Je ne sais vraiment pas qui est-ce qui avait géré la ville. Je n'étais

 25   pas même à proximité d'éléments qui permettraient de faire savoir qui est-

 26   ce qui gérait la ville. Donc ma réponse est toute simple, je ne sais pas.

 27   Q.  N'est-il pas vrai dire - enfin, un peu plus loin dans votre témoignage,

 28   vous avez indiqué qu'un de vos amis avait mentionné le nom de Brane

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  1   Savovic.

  2   R.  Oui, Monsieur, j'ai mentionné le nom de Brane Savovic, mais vous êtes

  3   en train de me poser des questions du temps où le Corps d'Uzice était là-

  4   bas. J'ai dit que Brane Savovic était à la tête de, enfin, maire de la

  5   ville d'Uzice, mais c'était après le départ du Corps d'Uzice.

  6   Q.  Je comprends. Mais était-il membre du SDS, président du

  7   SDS ?

  8   R.  Oui, c'est bien ce que j'ai dit.

  9   Q.  N'est-il pas vrai que Risto Perisic commandait la police ?

 10   R.  Oui, c'est ce que j'ai entendu dire.

 11   Q.  Et Dragomir Gavrilovic était également un membre de la cellule de Crise

 12   ?

 13   R.  Cela je ne le sais pas.

 14   Q.  Et Savovic a été placé à ce poste-là au moment où le Corps d'Uzice est

 15   parti ?

 16   R.  Je ne sais pas quand il a pris ce poste, je le suppose simplement.

 17   Q.  Et lorsque un Aigle blanc vous a contacté, qui souhaitait acheter votre

 18   tête, comme vous nous l'avez dit, qu'est-ce qui vous faisait dire que cette

 19   personne était un Aigle blanc ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Comment saviez-vous que c'était un Aigle blanc ? Est-ce qu'il vous l'a

 22   dit ou est-ce qu'il avait un uniforme particulier ou quelque chose dans sa

 23   manière d'être qui vous l'aurait suggéré ?

 24   R.  Je vais répéter. J'ai dit qu'à la première audience, ainsi qu'à celle

 25   d'aujourd'hui, toutes les fois où dans ma déclaration j'ai évoqué les

 26   Aigles blancs, je fais référence à tous les paramilitaires. On les appelait

 27   les Aigles blancs. Les deux garçons qui m'ont contacté pour acheter ma

 28   tête, bien, j'étais là par hasard. Je ne sais pas s'ils étaient venus

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  1   chercher le véhicule et il y en avait un qui avait un béret rouge sur la

  2   tête avec l'aigle bicéphale. L'autre avait un béret vert sur la tête avec

  3   l'aigle bicéphale. J'ai dit que c'étaient sans doute des membres des Aigles

  4   Blancs.

  5    Lorsque j'ai posé la question à celui qui portait le béret rouge, je lui

  6   ai dit, "D'où venez-vous ?" Il a répondu, "Raki, il nous demande d'où nous

  7   venons. Est-ce qu'on devrait lui dire. Si je vous dis d'où je suis, je

  8   serais obligé de vous tuer." Et j'ai répondu, "Non, non, Monsieur. Vous

  9   n'êtes pas obligé de me le dire." En réalité, on plaisantait, parce qu'ils

 10   étaient assez courtois, malheureusement, je devais leur acheter ma tête.

 11   Puisque vous me parlez de cela, je vais vous dire autre chose. Celui qui

 12   portait le béret rouge m'a dit, "De qui devrais-je répondre si je vous tue

 13   maintenant ?" J'ai réfléchi en me disant que l'homme avait raison. Il

 14   serait responsable devant qui. Et il m'a dit, "Garçon, je ne tue pas les

 15   Chetniks. Je pille les Chetniks." C'était sa réponse, celui qui portait le

 16   béret rouge.

 17   Q.  Et cette personne vous a dit qu'il allait vous remettre aux hommes

 18   d'Obrenovac; c'est cela ?

 19   R.  Oui, Obrenovac. C'est ce que j'ai dit.

 20   Q.  Dans votre déclaration, vous avez dit que Milan Lukic travaillait à

 21   Obrenovac, quelle preuve avez-vous à cet effet ?

 22   R.  J'ai dit que j'avais entendu dire qu'il travaillait à Obrenovac.

 23   Q.  Et vous avez entendu ceci de qui ? C'était une rumeur qui s'était

 24   répandue, ou est-ce que c'est quelqu'un qui en avait une connaissance

 25   particulière ?

 26   R.  Si je vous dis que c'était de notoriété publique, vous allez comprendre

 27   qu'il s'agissait d'une rumeur très répandue, mais je connaissais des gens

 28   qui le connaissaient personnellement et qui savaient qu'il travaillait à

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  1   Obrenovac.

  2   Q.  Donc le nom de Milan Lukic était le thème du jour et tous les gens que

  3   vous connaissiez en parlaient ?

  4   R.  Je ne sais pas ce que vous voulez dire, à ce moment-là.

  5   Q.  Milan Lukic -- est-ce qu'on parlait de ce que faisait Milan Lukic à

  6   Obrenovac ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Est-ce qu'on évoquait l'âge de la personne qui s'appelait Milan Lukic ?

  9   R.  On disait qu'il est né entre 1965 et 1968. D'aucuns disaient 1967. Oui,

 10   c'est exact. Peut-être 1969. Tout dépend des personnes qui participaient à

 11   cette conversation et du contexte.

 12   Q.  Lorsque vous avez essayé de quitter Visegrad, vous avez fini par

 13   obtenir un permis; c'est exact ?

 14   R.  C'est exact.

 15   Q.  Et on vous a fait revenir à un poste de contrôle à Dobrun. Qui était à

 16   ce poste de contrôle ?

 17   R.  C'était un poste de contrôle de la police. C'est la police qui était

 18   là.

 19   Q.  Est-ce que vous avez entendu dire qu'il fallait payer pour ces permis ?

 20   R.  Honnêtement, je n'avais rien entendu dire de ce genre, mais compte tenu

 21   des conditions dans lesquelles on vivait et de la façon dont les choses

 22   fonctionnent encore aujourd'hui, c'est plausible que les gens aient dû

 23   payer ou qu'on leur demande de payer Personnellement, ce n'était pas mon

 24   cas.

 25   Q.  Parce que vous étiez en rapport avec l'officier de police que vous avez

 26   rencontré à l'extérieur du poste de police, n'est-ce pas ?

 27   R.  Ce n'était pas un policier. C'était un employé, c'était un clerc.

 28   Q.  Vous voulez parler en fait d'un employé de bureau au poste de police ?

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  1   R.  Il a peut-être commandé le poste de police avant la guerre. Il faisait

  2   partie des forces de police. Ce n'était pas un policier d'active sur le

  3   terrain.

  4   Lorsque je parle "d'employé," je ne veux pas dire par là que c'était

  5   un civil qui travaillait au poste de police. Non, il avait un bureau.

  6   C'était un employé de bureau au poste de police.

  7   Q.  Et Dobrun se trouve à quelle distance de Visegrad ?

  8   R.  A 26 kilomètres environ. Je ne suis pas tout à fait sûr; 20, 26

  9   kilomètres environ.

 10   Q.  Comment s'appelait le commandant de la police que vous connaissiez ?

 11   R.  Il s'appelait Ceho Mikan.

 12   Q.  Et sur votre autorisation, c'était la signature de qui ?

 13   R.  Pardon ?

 14   Q.  Vous souvenez-vous de la signature qui se trouvait apposée sur votre

 15   autorisation, la personne qui l'a signée de façon à ce que vous puissiez

 16   quitter Visegrad ?

 17   R.  Honnêtement, je ne m'en souviens pas, Madame, Messieurs les Juges. Je

 18   ne sais pas qui a signé ces papiers, mais je sais que mon ami a dû emmener

 19   le papier à la signature. Il fallait que quelqu'un le signe, mais ce qui

 20   est important, c'est qu'il ne l'a pas signé lui-même. Il devait attendre

 21   une demi heure avant. Et cela devait être signé par la personne qui était

 22   responsable de toutes ces questions-là. Mais je ne me souviens pas qui

 23   c'était.

 24   Q.  Nous allons passer à la date du 7 juin. Vous avez dit avoir vu votre

 25   voiture passer, c'est ce qui a attiré votre attention et c'est pour ça que

 26   vous êtes sorti, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Et qui avait pris votre voiture, vous le savez ?

Page 1223

  1   R.  Honnêtement, je ne sais pas.

  2   Q.  Donc ce quelqu'un l'a prise dans votre garage, c'était l'endroit où

  3   vous l'aviez laissée pour la dernière fois ?

  4   R.  Non. Je dois souligner le fait que je ne gardais pas ma voiture dans

  5   mon garage. Lorsque l'homme est venu pour emmener la Mercedes, ma voiture

  6   se trouvait à l'extérieur du garage, et on m'a demandé de déplacer ma

  7   voiture. Ce n'est pas une voiture très intéressante, m'ont-ils dit, donc

  8   ils ne l'ont pas prise. Et j'ai déplacé ma voiture de façon à ce qu'ils

  9   puissent sortir à bord de la Mercedes et c'est là que j'avais laissé ma

 10   voiture.

 11   Q.  La personne qui a pris la Mercedes, c'était un officier de police ou un

 12   soldat ?

 13   R.  Je vous ai déjà dit, il y a quelques instants et au début de l'audience

 14   d'aujourd'hui, que c'est la personne qui m'a obligé à lui verser une rançon

 15   pour que je puisse rester en vie. Je vous ai déjà expliqué tout cela

 16   aujourd'hui.

 17   Q.  Je n'ai pas l'intention d'insister, mais je regarde mes notes, et

 18   pardonnez-moi si je dois parler à nouveau de certains éléments de votre

 19   déposition.

 20   Après que ces deux hommes vous aient emmené et placé en détention, vous

 21   êtes parti et vous dites être passé devant un poste de contrôle de la

 22   Défense territoriale, et qui était géré par l'armée régulière serbe ou par

 23   des officiers de police locaux ?

 24   R.  Pourriez-vous préciser votre question, s'il vous plaît ? Est-ce que

 25   vous voulez parler du poste de contrôle qui se trouvait au croisement en

 26   direction de Sase ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Oui. C'étaient les policiers qui se trouvaient à ce poste de contrôle,

Page 1224

  1   ce n'était pas l'armée.

  2   Q.  Et ces officiers de police vous ont permis de passer avec ceux qui vous

  3   avaient capturé ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  A propos de Branimir Savovic, n'est-il pas vrai que le SDS est un parti

  6   extrémiste ?

  7   R.  C'est sans doute ainsi qu'on les qualifiait. Si vous dites que c'est un

  8   parti extrémiste, il faut à ce moment-là dire de même à propos du SDS

  9   actuel, car c'est toujours un parti politique en Bosnie-Herzégovine. C'est

 10   un parti politique qui existe et qui est actif, donc je ne suis pas tout à

 11   fait d'accord avec vous. Si on parle du SDS en Bosnie-Herzégovine, je ne

 12   peux pas parler d'un parti extrémiste étant donné qu'il siège au

 13   gouvernement de mon pays.

 14   Q.  Et en 1992 ?

 15   R.  Je ne sais pas si tous les membres du SDS étaient des extrémistes, et

 16   l'homme qui m'a, pour finir, aidé, était peut-être aussi un membre du SDS,

 17   mais je ne peux pas dire que c'était un extrémiste. On peut consacrer trois

 18   jours à ce débat-là. C'est quelque chose qui peut vraiment être débattu

 19   longuement.

 20   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais nous n'avons pas trois jours.

 21   M. ALARID : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 22   Q.  Lorsque votre ami et ceux qui avaient été capturés souhaitaient

 23   s'entretenir avec Savovic, c'est parce qu'ils pensaient que comme c'était

 24   un chef cela pourrait peut-être être différent, n'est-ce pas ?

 25   R.  Monsieur, je l'ai expliqué comme il faut aujourd'hui et un peu plus tôt

 26   dans la matinée. Ces deux hommes étaient proches, c'étaient des amis. Je

 27   peux dire de même en ce qui me concerne, l'homme que j'ai cité, c'était mon

 28   ami, il travaillait à l'assemblée municipale, il faisait un représentant

Page 1225

  1   des autorités municipales quelques jours avant l'incident, il avait sans

  2   doute vu et rencontré M. Savovic fréquemment, c'est ce que j'ai dit.

  3   C'étaient des amis proches.

  4   Q.  N'est-il pas vrai que la seule façon dont vous auriez pu savoir que

  5   c'était Milan, c'est parce que l'autre soldat a dit qu'il devait

  6   s'entretenir avec Milan avant de pouvoir transmettre le message de votre

  7   ami qui précisait qu'il souhaitait parler à M. Savovic ?

  8   R.  Je souhaite que ceci soit très clair aux yeux des Juges de la Chambre.

  9   La situation dans laquelle nous nous trouvions à l'époque et les soldats

 10   qui montaient la garde à l'entrée, tout ceci ne nous permettait pas de

 11   penser qu'il allait ou pouvait tirer sur nous. Il a même demandé à mon ami

 12   s'il avait des enfants, et cetera.

 13   Nous ne le voyions pas comme un bourreau, mais il devait savoir quel sort

 14   allait nous être réservé. Même si c'est lui qui m'avait donné le nom de

 15   Milan, ceci ne m'aurait pas permis de sauver ma peau, donc cela n'est pas

 16   très important de savoir qu'il a mentionné le nom de Milan.

 17   Q.  La question néanmoins que je vous ai posée : N'est-il pas vrai que la

 18   seule raison pour laquelle vous saviez que cette personne masquée en

 19   uniforme de camouflage bleu s'appelait Milan, c'est uniquement comme cela.

 20   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, à mon sens, je ne sais

 21   pas si le témoin dans sa déposition a parlé du fait qu'il portait un

 22   masque.

 23   M. ALARID : [interprétation] En fait, c'était avec de la peinture noire.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas entendu la question.

 25   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Répétez la question.

 26   M. ALARID : [interprétation]

 27   Q.  En fait, la seule raison qui vous avait permis de connaître

 28   l'identité de cette personne qui portait un uniforme de camouflage bleu et

Page 1226

  1   un masque peint sur le visage et savoir qu'il s'appelait Milan, c'est parce

  2   que ce soldat vous l'a dit.

  3   M. GROOME : [interprétation] En fait, le témoin n'a jamais dit que le

  4   visage était caché. Je crois que si vous souhaitez reprendre les propos du

  5   témoin, il faut les citer finalement.

  6   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez reprendre votre question.

  7   M. ALARID : [interprétation]

  8   Q.  La peinture noire qui recouvrait le visage de ce monsieur qui portait

  9   un uniforme de camouflage bleu, est-ce que cela lui masquait les traits du

 10   visage ?

 11   R.  Non.

 12   Q.  N'est-il pas vrai que la seule raison pour laquelle vous saviez que

 13   cette personne était Milan, c'est parce que l'autre soldat vous l'avait dit

 14   ?

 15   R.  Je ne dirais pas que c'était la seule raison. Je dirais plutôt que ceci

 16   confirmait tout le reste.

 17   Q.  Et c'est également parce que vous pensiez que la Passat rouge se

 18   trouvait là et dans votre esprit, la Passat rouge et Milan Lukic, c'était

 19   la même chose ?

 20   R.  J'ai dit que jusqu'à ce moment-là et cette conversation dans la maison,

 21   je n'avais jamais vu la Passat rouge avant ce moment-là. J'ai dit que

 22   lorsqu'ils nous ont fait sortir de la maison et lorsque nous sommes arrivés

 23   dehors, c'est à ce moment-là que j'ai vu la Passat rouge.

 24   Q.  Et ce n'est qu'à ce moment-là qu'entre ce monsieur qui vous disait que

 25   c'était Milan et que vous avez vu la Passat rouge, c'est ce qui vous a fait

 26   croire que c'est Milan Lukic qui a tué Behija Zukic ?

 27   R.  Il ne me l'a pas dit à moi, personnellement. La façon dont vous posez

 28   la question, c'est comme si le soldat m'avait donné le nom. Il a dit le nom

Page 1227

  1   à mon ami, en réalité. De même pourriez-vous répéter votre dernière

  2   question, s'il vous plaît.

  3   Q.  Ce qui me préoccupe davantage, c'est ceci : lorsque vous vous êtes

  4   rendu compte que c'était Milan Lukic, en tout cas, vous le pensiez, n'est-

  5   il pas vrai qu'il s'agit d'un ensemble de facteurs conjugués ? Dans ce cas,

  6   vous avez entendu le nom de Milan et vous avez vu la Passat rouge en même

  7   temps, donc en associant ces deux facteurs, vous avez supposé qu'il

  8   s'agissait de Milan Lukic dont vous aviez entendu parler avant cela.

  9   R.  C'est comme cela que vous comprenez les choses. Mais je ne suis pas

 10   d'accord avec vous.

 11   Q.  Lorsqu'on vous a placé dans la Yugo, il y avait tout d'abord un

 12   désaccord, parce que le soldat qui s'est assis à l'arrière a obligé la

 13   personne qui se trouvait au milieu à s'asseoir plus ou moins sur vos

 14   genoux, ou en tout cas à se serrer au milieu, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Et les autres personnes sont allées dans la Passat; c'est exact ?

 17   R.  Mon ami était devant, Ekrem était au volant, Hasan Mutapcic était dans

 18   la Passat. J'ai déjà dit que les deux personnes étaient déjà debout devant

 19   la Passat. Ils sont entrés dans la voiture et Hasan Mutapcic est entré avec

 20   eux.

 21   Q.  Est-ce que cela veut dire qu'il y avait cinq personnes dans la Yugo et

 22   cinq personnes dans la Passat ?

 23   R.  En tout. Cinq dans la Yugo et cinq dans la Passat. C'est exact.

 24   Q.  Lorsque vous êtes allé à l'hôtel Vilina Vlas et que Mitar Vasiljevic

 25   s'est joint à vous, comment cela s'est-il présenté au niveau des voitures ?

 26   R.  Je vous l'ai expliqué dans le détail dans le procès Vasiljevic. Il a

 27   quitté l'hôtel et est entré dans la Passat aussi. Comment ils ont réussi à

 28   se serrer à l'intérieur tous les six, je l'ignore. Et je crois qu'il est

Page 1228

  1   clair que seul M. Vasiljevic qui pourrait répondre à la question.

  2   Q.  En fait, je suppose que ma question porte sur le fait, est-ce que vous

  3   avez remarqué que c'était difficile de s'engouffrer dans la Passat comme

  4   ça, est-ce que les soldats peut-être étaient en colère ou criaient peut-

  5   être parce qu'ils étaient obligés de se serrer ou quelque chose comme ça,

  6   que vous auriez peut-être

  7   remarqué ? 

  8   R.  Je vous l'ai déjà dit. Au moment où nous avons quitté Banja, il y avait

  9   Yugo devant la Passat. Et étant donné que j'étais assis derrière le

 10   conducteur, logiquement, je suis entré dans la Yugo en premier. J'avais le

 11   dos tourné et je ne pouvais pas voir la Passat vu l'endroit où j'étais

 12   assis, et comme j'étais assis dans la Yugo je ne pouvais pas voir ce qui

 13   s'est passé dans la Passat et comment ils se sont engouffrés dedans.

 14   Q.  N'est-il pas vrai de dire que dix personnes pouvaient plus facilement

 15   s'installer dans ces voitures que 11 ?

 16   R.  Nous étions 11.

 17   Q.  Et vous en êtes tout à fait sûr ?

 18   R.  J'en suis sûr à 100 %.

 19   Q.  Est-ce que vous connaissez les deux autres noms de ces personnes

 20   lorsqu'il y a eu cette fusillade ?

 21   R.  Non. Je n'ai jamais appris leurs noms, je l'ai toujours dit. Je ne les

 22   connaissais pas.

 23   Q.  En route vers Vilina Vlas, vous avez remarqué qu'il y avait deux

 24   mosquées qui avaient été incendiées. Est-ce que ça avait eu lieu avant ou

 25   après que le Corps d'Uzice soit parti ?

 26   R.  Après.

 27   M. ALARID : [interprétation] Un instant, je vous prie, Monsieur le

 28   Président. J'ai presque fini.

Page 1229

  1   Monsieur le Président, je n'ai plus de questions à poser. Nous voulons

  2   simplement demander le versement au dossier de la déclaration du témoin du

  3   30 septembre et du 1er octobre 1998 qui a été téléchargée comme étant 1D100-

  4   0191, la version non expurgée. Et nous voudrions également demander le

  5   versement au dossier de la déposition de ce témoin au procès, qui avait été

  6   téléchargé comme étant le

  7   1D10-0239, la déposition du procès le 11 septembre 2001, tout ceci est

  8   l'élément de preuve déposé sous pli scellé.

  9   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, nous allons l'admettre.

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, le 1D100-239

 11   devient la pièce 1D13, la déclaration du témoin devient la pièce 1D-31 sous

 12   pli scellé.

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Cepic.

 14   M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. On n'a pas de

 15   questions à poser.

 16   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Groome.

 17   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai juste une question

 18   à évoquer mais avant que je ne me hâte de terminer à l'heure, j'ai par

 19   inadvertance oublié de demander à ce témoin s'il avait reconnu qui que ce

 20   soit dans la salle d'audience. Pourrais-je présenter une demande afin de

 21   rouvrir mon interrogatoire principal pour le faire. Bien entendu, je ne

 22   m'opposerai pas à ce que Me Alarid ait la possibilité de contre-interroger

 23   le témoin sur les résultats de ma question.

 24   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, sur la base du fait que la

 25   Défense peut elle-même poser des questions qui se feraient jour.

 26   Nouvel interrogatoire par M. Groome :

 27   Q.  [interprétation] Témoin VG-32, je voudrais vous demander de regarder

 28   attentivement dans la salle d'audience et de nous dire si vous reconnaissez

Page 1230

  1   quelqu'un dans cette salle aujourd'hui à part moi.

  2   R.  Le premier à partir de la gauche est M. Lukic et je reconnais également

  3   l'homme qui est juste à côté de lui, mais le premier qui est sur la gauche

  4   avec une cravate rouge ou rougeâtre c'est lui.

  5   Q.  Est-ce que je pourrais vous demander d'utiliser à la fois le prénom et

  6   le nom de famille de la personne que vous reconnaissez ?

  7   R.  Milan Lukic.

  8   Q.  Vous êtes certain de cela ?

  9   R.  Oui, Monsieur le Président. C'est le même sourire que je me rappelle

 10   très bien.

 11   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais que le

 12   compte rendu indique que le témoin a identifié Milan Lukic.

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

 14   M. GROOME : [interprétation]

 15   Q.  Témoin VG-32, vous dites que vous reconnaissez également une autre

 16   personne dans la salle d'audience. Pouvez-vous nous dire le nom complet de

 17   la personne que vous reconnaissez ?

 18   R.  C'est M. Sredoje Lukic.

 19   Q.  Comment le reconnaissez-vous ?

 20   R.  Je le connaissais. Il était policier à Visegrad avant la guerre. Je

 21   n'ai jamais beaucoup entendu parler de lui et je ne l'ai jamais mentionné

 22   dans mes déclarations mais vous venez juste de me demander si je le

 23   connaissais et si je vous répondais, Non, je ne connais pas cet homme, ce

 24   serait un mensonge.

 25   Q.  Je vous remercie.

 26   M. GROOME : [interprétation] Pourrais-je demander que l'on montre au témoin

 27   la pièce 70 de l'Accusation.

 28   Q.  Et pendant qu'on attend qu'elle apparaisse à l'écran, Me Alarid dans

Page 1231

  1   son interrogatoire vous avait évoqué le fait qu'il y avait plus d'un Milan

  2   Lukic étant donné le côté très fréquent de ce nom. Et la question que je

  3   veux vous poser maintenant, la question que je vais vous poser maintenant

  4   concerne le registre du centre médical, et je crois que vous avez dit à ce

  5   moment-là qu'il y a une colonne où c'est indiqué l'année de naissance et

  6   dès que nous verrons cette pièce à l'écran je voudrais vous demander de

  7   regarder la colonne où apparaît le nom de Milan Lukic et que vous nous

  8   disiez si oui ou non l'année de naissance y est inscrite.

  9   M. ALARID : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais soulever

 10   une objection à cela. Ceci suggère beaucoup trop une réponse, c'est

 11   directif, sinon, les éléments de preuve, enfin, se passe de commentaires.

 12   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, apparemment --

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Groome.

 14   M. GROOME : [interprétation] Dans mon effort pour essayer de replacer le

 15   livre intégral dans sa version numérisée, apparemment ça cause peut-être

 16   quelques confusions maintenant. Donc je voudrais demander que pour le

 17   moment le registre entier soit rendu au témoin afin que le témoin puisse le

 18   regarder et peut-être que ça pourrait être également placé sur le

 19   rétroprojecteur.

 20   M. ALARID : [interprétation] Monsieur le Président, j'élève à nouveau la

 21   même objection.

 22   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne la retiens pas.

 23   M. GROOME : [interprétation]

 24   Q.  Encore une fois pourrais-je vous demander de retrouver l'entrée

 25   concernant Milan Lukic et je voudrais vous demander si ça vous dit l'année

 26   de sa naissance, pourriez-vous, s'il vous plaît, indiquer et pointer où ça

 27   se trouve et nous répondre sur ce point.

 28   R.  Je pense avoir déjà dit, lorsque j'ai expliqué ces rubriques, j'ai

Page 1232

  1   indiqué qu'il y avait le nom, la date de naissance ou l'année de naissance,

  2   l'origine, le lieu de séjour, le numéro de la pièce d'identité et on dit

  3   ici que l'année de naissance est 1967.

  4   M. GROOME : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions à poser,

  5   Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Monsieur le Témoin, ceci

  7   conclut votre déposition et nous vous remercions d'être venu jusqu'au

  8   Tribunal international pour faire cette déposition. Vous pouvez maintenant

  9   vous retirez.

 10   [Le témoin se retire]

 11   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Témoin suivant.

 12   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation cite

 13   maintenant à la barre le Témoin VG-84. C'est Mme Marcus qui va interroger

 14   ce témoin qui entre maintenant en salle d'audience.

 15   Monsieur le Président, tandis que nous attendons que le témoin entre,

 16   il y a deux jours j'avais présenté une photographie selon le programme 360

 17   et elle avait été marquée aux fins d'identification, mais n'avait pas été

 18   officiellement présentée pour versement au dossier, et il a été convenu

 19   entre moi-même et le conseil que je la présenterais officiellement, un jour

 20   ou deux plus tard, pour leur donner la possibilité de l'examiner

 21   entièrement, de sorte que maintenant je voudrais officiellement demander

 22   que la pièce 175 de la ligne 65 ter devienne une pièce à conviction

 23   publique. Il s'agit donc du programme 360 qui comporte des photos de

 24   Visegrad et autour de Visegrad.

 25   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, nous l'acceptons. Nous

 26   l'admettons au dossier.

 27   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ça devient la pièce P71, Monsieur le

 28   Président. Excusez-moi. MFI va devenir la pièce P64.

Page 1233

  1   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je dois appeler votre attention sur

  2   le fait que nous avons dépassé le temps imparti et j'envisage de prendre

  3   les mesure qui convient pour rattraper le dépassement de façon à accélérer

  4   les choses.

  5   Que le témoin fasse la déclaration officielle, solennelle.

  6   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  8   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  9   LE TÉMOIN: Témoin VG-84 [Assermenté]

 10   [Le témoin répond par l'interprète]

 11   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Marcus, combien de temps

 12   pensez-vous utiliser pour votre interrogatoire principal ?

 13   Mme MARCUS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Mesdames,

 14   Messieurs les Juges. Je pense avoir besoin d'une trentaine de minutes.

 15   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Veuillez commencer.

 16   Interrogatoire principal par Mme Marcus :

 17   Mme MARCUS : [interprétation] Peut-on placer la feuille à pseudonymes

 18   devant le témoin. Je l'ai juste ici, en mains.

 19   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

 20   R.  Bonjour.

 21   Q.  On vous a accordé des mesures de protection par les soins de cette

 22   Chambre à des fins d'audition au procès. Nous allons utiliser un pseudonyme

 23   plutôt que votre nom. Alors pouvez-vous nous confirmer que c'est bien votre

 24   nom et votre date de naissance qu'on voit sur la feuille qui vous est

 25   montrée ?

 26   R.  Tout ceci est exact.

 27   Q.  Ayez l'obligeance de signer cette feuille de papier, je vous prie.

 28   R.  [Le témoin s'exécute]

Page 1234

  1   Q.  Merci. Je voudrais que l'huissier montre la feuille à pseudonymes au

  2   conseil de la Défense, ainsi qu'aux Juges de la Chambre, et j'aimerais que

  3   ce soit versé au dossier.

  4   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, cette feuille de

  5   papier sera versée au dossier sous la cote P71 sous pli scellé.

  6   Mme MARCUS : [interprétation] Merci.

  7   Q.  Monsieur VG-84, je vais vous fournir une feuille à références avec

  8   l'aide de Mme l'Huissière, avec les noms des personnes que vous voudrez

  9   peut-être mentionner à l'occasion de votre témoignage d'aujourd'hui. Et

 10   j'aimerais que vous vous reteniez de l'utilisation de leur nom. Plutôt que

 11   de le faire, utilisez les pseudonymes qui figurent en face de leurs noms

 12   sur la même feuille. M'avez-vous bien compris ?

 13   R.  Fort bien.

 14   Q.  Merci. Monsieur le Témoin VG-84, en juin 1992, quel âge aviez-vous ?

 15   R.  Je n'avais pas 14 ans encore.

 16   Q.  Quel est le niveau d'éducation que vous avez réalisé, que vous avez

 17   obtenu ?

 18   R.  J'ai un diplôme de formation secondaire.

 19   Q.  Avez-vous déjà témoigné dans l'affaire Vasiljevic les 8 et 9 octobre de

 20   l'an 2001 ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Avez-vous eu l'occasion de revoir ce témoignage en langue bosniaque

 23   avant de comparaître dans ce prétoire aujourd'hui ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Y aurait-il quoi que ce soit que vous souhaiteriez modifier dans votre

 26   déclaration préalable ?

 27   R.  Il y a des tout petits détails, mais à mes yeux, ce sont vraiment de

 28   tout petits détails. Pour l'essentiel, je maintiendrais tout tel quel.

Page 1235

  1   Q.  Donc pour des raisons de clarification, nous parlons de votre

  2   témoignage préalable, non pas de votre déclaration préalable. C'est ce que

  3   je veux tirer au clair. Donc avez-vous des éclaircissements à apporter pour

  4   ce qui est du témoignage que vous avez déjà fourni ?

  5   R.  Non.

  6   Q.  Si je vous posais les mêmes questions aujourd'hui, comme lorsque vous

  7   avez témoigné la fois passée, apporteriez-vous les mêmes réponses ?

  8   R.  Je dirais entièrement la même chose.

  9   Mme MARCUS : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, en application

 10   de l'article 92 ter, je voudrais verser au dossier le témoignage précédent

 11   de ce témoin à l'affaire Vasiljevic aux numéros 146 et 147 de la liste 65

 12   ter, qui se réfèrent donc au témoignage précédent de VG-84, fait aux dates

 13   du 8 et 9 octobre sous pli scellé.

 14   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Certes.

 15   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, cette

 16   pièce 1464 deviendra la pièce P72, et la 147 deviendra la pièce 73 sous pli

 17   scellé.

 18   Mme MARCUS : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur 84, avez-vous fourni une déclaration aux enquêteurs du

 20   Tribunal à la date du 20 janvier 2001 ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Avez-vous eu l'occasion de relire cette déclaration dans la langue

 23   bosniaque avant que de venir témoigner en prétoire

 24   aujourd'hui ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  A l'occasion de la séance de récolement, vous avez fait et apporté

 27   quelques éclaircissements à cette déclaration. J'aimerais, au greffier

 28   d'audience, de demander au greffier d'audience de nous montrer la pièce 65-

Page 1236

  1   ter qui porte le nom 179, et ce, notamment la page numéro 1.

  2   VG-84, voyez-vous cette déclaration sur l'écran qui se trouve en face de

  3   vous ?

  4   R.  Oui, oui, je le vois.

  5   Q.  Oui. Alors j'éclaire votre lanterne et je vous dis que ce n'est pas

  6   diffusé à l'extérieur. Merci. Est-ce que vous voudriez corriger quoi que ce

  7   soit sur la page que vous avez devant vous ?

  8   R.  Ici, on dit 11 ans, alors que moi, j'avais un peu moins de 14 ans.

  9   Q.  J'aimerais que la greffière d'audience nous montre maintenant la page

 10   numéro 2. Si nous parlons maintenant du paragraphe 4 de la version anglais,

 11   le voyez-vous ?

 12   R.  Oui, je vois ça.

 13   Q.  Y a-t-il là des éclaircissements que vous voudriez

 14   apporter ?

 15   R.  Bien, ici on dit 10 à 15 000 personnes, alors que c'était 1 000 à 1

 16   500. C'est la seule chose que je contesterais ici.

 17   Q.  Merci. J'aimerais maintenant qu'on nous montre sur l'affichage

 18   électronique la page 3, paragraphe 4. Ce paragraphe commence par "A la fin

 19   mai." Monsieur VG-84, y a-t-il quelque chose dans ce paragraphe que vous

 20   souhaiteriez corriger ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Faites.

 23   R.  Oui. Ici il y a Jasmina, or c'est Jasmina Vila. Il se peut que je me

 24   sois trompé ou qu'il y ait une confusion, parce que ce sont des noms de

 25   famille dans ce village qui se ressemblent, et la personne en question

 26   s'appelle Jasmina Vila.

 27   Q.  Merci. Trois paragraphes plus loin de la même page sur la même page on

 28   dit : "A la date du 13 juin 1992."

Page 1237

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Y a-t-il quoi que ce soit que vous souhaiteriez rectifier ?

  3   R.  Oui. Il faut qu'il soit inscrit à la date du 14 juin 1992.

  4   Q.  Passons maintenant à la page 4, s'il vous plaît, en affichage

  5   électronique. Le paragraphe 2 de la page 4, à peu près vers la ligne 2, ça

  6   commence par : "Il a dit qu'il était président de la Croix-Rouge." Y a-t-il

  7   quoi que ce soit au niveau de cette ligne ou des lignes suivantes que vous

  8   aimeriez corriger ?

  9   R.  Mujo Halilovic. On dit ici Jasarevic, mais en réalité c'est Halilovic.

 10   Q.  Merci. Le dernier éclaircissement se situe trois paragraphes plus loin.

 11   Parce qu'avec la phrase : "Pendant tout ce temps nous avons pu entendre." Y

 12   a-t-il là des choses à tirer au clair s'agissant de cette ligne ?

 13   R.  De quelle partie parlez-vous ?

 14   Q.  Oui. Le paragraphe commence par : "Lorsque je suis arrivé à la maison,

 15   je suis allé au milieu du sous-sol," et la ligne se trouve un peu plus loin

 16   vers la fin du paragraphe.

 17   Q.  Ici il est question "de soldats ivres," j'ai fait ma déclaration auprès

 18   des enquêteurs. De là à savoir s'ils étaient vraiment saouls ou pas, je ne

 19   l'ai pas déterminé, je ne pense pas avoir dit qu'ils étaient saouls. Ils

 20   ont peut-être posé la question et on leur a transmis la chose de la sorte,

 21   mais moi, je n'ai jamais déclaré chose pareille dans ma déposition.

 22   Q.  Merci. Monsieur VG-84, si nous prenons en considération ces

 23   éclaircissements, si je devais vous poser les mêmes questions aujourd'hui

 24   que celles qui vous ont été posées lors de la prise de votre déclaration,

 25   apporteriez-vous les mêmes réponses ?

 26   R.  Je dirais la même chose sur tout.

 27   Mme MARCUS : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je voudrais que

 28   cette déclaration soit versée au dossier sous pli scellé.

Page 1238

  1   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

  2   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, cette

  3   pièce 179 en application du 65 ter devient la pièce P74 sous pli scellé.

  4   Mme MARCUS : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je voudrais

  5   continuer et verser les pièces annexes auxquelles s'est référé le témoin

  6   pour ce qui est de son témoignage précédent. Il s'agit du numéro 65 ter qui

  7   porte les numéros 144 et 145. Ce sont des photos que le témoin avait

  8   annotées pendant son témoignage précédent.

  9   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Allez-y.

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, ça deviendra la

 11   pièce P75 et P76 respectivement.

 12   Mme MARCUS : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être le moment

 13   serait-il opportun pour lever l'audience. Mais je pourrais continuer.

 14   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Combien de temps avez-vous besoin

 15   encore ?

 16   Mme MARCUS : [interprétation] Je dirais encore une vingtaine de minutes.

 17   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] De combien de temps pensez-vous

 18   avoir besoin, Monsieur Alarid ?

 19   M. ALARID : [interprétation] Monsieur le Président, je ne suis pas tout à

 20   fait sûr, pour être sincère. C'est, avec chaque témoin, différent.

 21   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bon. Nous allons lever l'audience et

 22   nous allons reprendre demain.

 23   --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le vendredi 5

 24   septembre 2008, à 8 heures 50.

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