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1 Le mercredi 9 juillet 2008
2 [Audience publique]
3 [Déclaration liminaire de l'Accusation]
4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 11 heures 36.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous reprenons notre audience afin
7 d'entendre la déclaration liminaire de M. Groome. Combien de temps pensez-
8 vous --
9 M. GROOME : [interprétation] Je pense pas plus d'une heure et demie,
10 Monsieur le Président.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est un peu étonnant, mais M.
12 Alarid souhaite avoir une deuxième occasion de parler, si je puis dire,
13 croquer deux fois la cerise.
14 M. ALARID : [interprétation] Croquer deux fois la cerise ?
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, en effet, c'est-à-dire au début
16 de la Défense.
17 M. ALARID : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite faire une
18 déclaration liminaire, car je pense qu'il est important pour la Défense de
19 pouvoir partir d'un point de référence, et que ce ne soit pas que la
20 déclaration de l'Accusation qui soit entendue au début de l'affaire. Il me
21 semble que c'est difficile pour moi de le faire, étant donné mon état de
22 préparation qui ne me permet pas de recouvrir l'ensemble des points. Mais à
23 part cela, je voudrais avoir l'occasion de faire quelques remarques
24 liminaires aujourd'hui.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous n'êtes pas obligé de demander
26 la permission. C'est votre droit.
27 M. ALARID : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Combien de temps ?
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1 M. ALARID : [interprétation] Je ne pense pas que ce soit beaucoup plus tard
2 que ce qu'a indiqué M. Groome. Je pourrais commencer demain matin.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Groome.
4 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, au cours de cette
5 déclaration liminaire, je vais diffuser un certain nombre de documents sur
6 le e-court. Je vous ai également remis une copie papier des diapositifs que
7 je vais afficher pour que vous puissiez vous y référer au cas où
8 l'affichage se fasse trop vite, pour vous permettre de lire le contenu
9 complet de ces documents.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Continuez, s'il vous plaît.
11 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, à cet étape dans
12 l'histoire du Tribunal, le Tribunal et les Chambres ont entendu maintes
13 fois des récits d'atrocités perpétrées dans les conflits qui se sont
14 produits dans l'ex-Yougoslavie, des atrocités perpétrées à l'encontre
15 d'innocents, qu'ils soient Serbes, Musulmans, Croates ou Albanais. Nous
16 avons maintenant tous l'habitude d'entendre le récit des souffrances
17 infligées sur les victimes pour la simple raison de leur ethnicité. Mais
18 même les juges les plus expérimentés, les procureurs et les conseils
19 doivent reprendre leur respiration en quelque sorte lorsque l'on entend
20 parler des crimes perpétrés à Visegrad, des crimes qui ont atteint un
21 niveau particulièrement élevé de cruauté. Aujourd'hui, au démarrage de ce
22 procès, nous commençons l'examen de ces crimes, et vous devez commencer
23 votre tâche qui consiste à juger pour savoir si les deux hommes accusés ici
24 devant la Chambre sont responsables de ces crimes.
25 Cette affaire, à la différence de certaines autres affaires traitées
26 actuellement par le Tribunal, porte sur la responsabilité de ces deux
27 hommes qui avaient perpétré de leurs propres mains selon les crimes
28 mentionnés dans l'acte d'accusation. Ils ont versé eux-mêmes le sang des
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1 victimes. Je pense qu'au cours de ce procès nous allons entendre un examen
2 détaillé et soigné, afin de comprendre les actes et l'esprit de ceux qui
3 ont perpétré parmi les crimes les plus graves commis pendant le conflit.
4 Avant la dissolution de la Yougoslavie, Visegrad était une petite ville
5 dans la partie sud-est de Bosnie-Herzégovine, là où coule la rivière Drina,
6 qui fait partie de la République Srpska. Le cliché numéro 3 montre une vue
7 de la position de Srebrenica et de Visegrad. La Drina représente la
8 frontière entre la République de Serbie et traverse la municipalité de
9 Visegrad dès deux côtés de la Drina.
10 En 1991, environ 21 000 personnes d'ethnicité mixte vivaient dans la
11 municipalité de Visegrad. Plus de 9 000 dans le village lui-même. Avant le
12 conflit, environ 63 % de la population était d'ethnicité musulmane, alors
13 que les autres citoyens étaient d'ethnicité serbe. A l'intérieur de la
14 ville [comme interprété], la rivière Drina est rejointe par la rivière
15 Rzav, qui est une petite rivière ensablée. Le cliché numéro 4 vous montre
16 les deux rivières de la ville et plusieurs ponts.
17 La Drina en bleue coule vers le nord. Vous voyez que le Rzav rejoint
18 la Drina à droite. A travers la Drina, vous trouvez le vieux pont, le Stari
19 Most, que vous voyez en bas du cliché; les résidents parlent aussi du
20 nouveau pont qui se trouve au-dessus. Puis le Rzav comporte plusieurs
21 parties qui relient les différents quartiers du village le long des rives.
22 Lorsque Ivo Andric, prix Nobel de littérature en 1961 pour son livre, "Le
23 pont sur la Drina", cela a attiré l'attention internationale à ce village.
24 C'est un roman historique qui relate la construction du pont au XVIe
25 siècle, par le Grand Vizier Mehmed Pasa Sokolovic, le long de la fracture
26 entre la culture chrétienne, la culture musulmane.
27 A certaines époques, il y a eu des actes extrêmement violents qui se
28 sont produits.
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1 En juin 2007, ce pont a été inscrit à la liste du patrimoine mondial
2 de l'UNESCO. Le village est connu dans la région en raison de son barrage
3 sur la Drina ainsi que pour la centrale hydroélectrique. Comme vous allez
4 l'entendre, ce barrage a joué un rôle important dans les événements qui se
5 sont produits au cours du printemps et de l'été 1992.
6 Au début de l'année 1992, plusieurs mois après que les tensions ethniques
7 ont eu pour résultat des conflits terribles en Croatie, les tensions ont
8 atteint un point d'ébullition à Visegrad. Les Musulmans à Visegrad ont été
9 désarmés de façon systématique de leurs fusils de chasse. Les Serbes se
10 sont vus donner des armements de type militaire de sources diverses.
11 D'autres, des Serbes et des Musulmans, dont les enfants qui jouaient côte à
12 côte, qui travaillaient ensemble dans les quelques entreprises de Visegrad,
13 n'ont pas pensé qu'il était possible que des tensions atteignent la
14 violence.
15 Des unités serbes locales ont commencé le bombardement par mortier du
16 village et des environs le 6 avril 1992. En riposte, un petit groupe de
17 Musulmans bosniaques ont pris le contrôle du barrage dont je viens de vous
18 parler et ont menacé de le faire exploser. Le 13 avril 1992, l'un de ces
19 hommes, Murat Sabanovic, afin de montrer sa détermination, a ouvert les
20 écluses du barrage en envoyant ainsi des torrents d'eau à travers la ville.
21 Certains Musulmans ont considéré qu'il s'agissait d'un acte de désespoir,
22 alors que les Serbes considéraient que c'était une grave menace à leurs
23 vies et à leurs biens.
24 Cet événement a attiré énormément d'attention des médias, et les
25 responsables des deux côtés ont entamé des négociations intenses. De
26 nombreux résidents, Serbes et Musulmans, se sont enfuis afin d'attendre le
27 résultat de la crise. La crise du barrage a été désamorcée lorsque l'armée
28 yougoslave ou des commandos de la JNA ont saisi le barrage. Le jour
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1 suivant, un contingent important du Corps d'Uzice de l'armée yougoslave a
2 suivi en traversant la frontière avec la Serbie.
3 Le Corps d'Uzice n'a pas eu beaucoup de difficultés à prendre le contrôle
4 de la ville. Après avoir pris le contrôle absolu du village, les officiers
5 de la JNA ainsi que les chefs musulmans, persuadés par les assurances
6 données par l'armée yougoslave, ont mené une campagne dans les médias afin
7 d'encourager les Musulmans à sortir de leurs cachettes, à retourner à leurs
8 maisons et à reprendre le travail.
9 De nombreux Musulmans sont rentrés puisqu'ils ont crû les assurances qu'on
10 leur avait données et pensé naïvement que la vie à Visegrad pouvait, en
11 effet, revenir à la normale.
12 Peu après leur retour, ils se sont rendu compte que Visegrad était
13 actuellement beaucoup plus menaçante qu'auparavant. Le lieutenant-colonel
14 Jovanovic, commandant des troupes de la JNA qui s'y trouvait, a réuni tous
15 les non-Serbes, par la force, dans le stade de foot de la ville. Parmi la
16 JNA et en coopération avec la JNA, il y avait des unités paramilitaires non
17 formées, peu disciplinées, ou indisciplinées, des criminels dangereux qui
18 ont enlevé, de façon totalement capricieuse, des Musulmans, des gens qui
19 ont disparu à tout jamais.
20 Au stade, les non-Serbes ont été -- on a cherché des armements. Jovanovic a
21 dit aux Musulmans qui étaient assemblés, que les Aigles blancs étaient sous
22 son commandement. Il leur a dit qu'ils pouvaient revenir à la rive gauche
23 puisque ces zones avaient été purifiées des militants musulmans. Il a dit à
24 ceux qui se trouvaient à la rive droite qu'ils ne pouvaient revenir, que la
25 JNA recherchait toujours des Musulmans qu'ils estimaient être encore une
26 menace potentielle.
27 De nombreux Musulmans ont compris qu'il fallait alors fuir, ils ont compris
28 ça comme un signal.
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1 La situation s'est empirée lorsque le Corps Uzice a quitté la ville aux
2 environs du 9 mai 1992. Lors de leur départ, les chefs serbes locaux ont
3 établi la municipalité serbe de Visegrad et ont pris le contrôle des
4 bureaux municipaux. Peu après, les Serbes locaux, la police et les unités
5 paramilitaires ont lancé une des campagnes de purification ethnique les
6 plus brutales du conflit bosniaque. Le but était de débarrasser, de façon
7 permanente, la ville des 3 000 résidents musulmans bosniaques.
8 Pendant la période qui a suivi, les Serbes et les forces serbes bosniaques
9 ont attaqué et détruit un nombre de villages musulmans bosniaques. Des
10 centaines de Musulmans ont été tuées, ceux qui n'ont pas été tués ont été
11 détenus dans plusieurs lieux dans la ville. Les deux mosquées de la ville
12 ont été complètement détruites.
13 Au cours du printemps 1992, un ancien habitant de Visegrad, Milan Lukic,
14 est rentré à Visegrad et a pris le contrôle d'une unité paramilitaire qui
15 travaillait avec les unités de police et militaire en organisant le règne
16 de la terreur par rapport à la population civile musulmane. Cette
17 organisation paramilitaire était appelée par les locaux, les Aigles blancs,
18 les Justiciers chetniks ou le groupe d'Obrenovac, et ce groupe comprenait
19 le cousin de Milan Lukic, Sredoje Lukic, qui était membre de la police de
20 Visegrad.
21 Du mois d'avril 1992 à octobre 1994, Milan Lukic et son groupe ont commis
22 des centaines de crimes dans la municipalité de Visegrad à l'encontre de la
23 population non-serbe. Tristement, l'histoire de Visegrad est l'une des
24 histoires les plus réussies de la purification ethnique au cours de la
25 crise balkanique. Plus de 13 000 personnes ont été enlevées de force ou
26 tuées au cours du printemps et de l'été 1992. Etant donné cette éradication
27 de la population musulmane de Visegrad en termes statistiques, si l'on
28 prend le pourcentage de Musulmans enlevés, c'est en deuxième position,
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1 malheureusement, seulement derrière Srebrenica par rapport à l'importance
2 du déplacement de population.
3 Monsieur le Président, je voudrais maintenant passer quelques instants à
4 orienter la Chambre par rapport à la ville de Visegrad et afin de vous
5 familiariser avec les lieux dont on va parler pendant les témoignages. Ici,
6 sur le fichier numéro 8, vous voyez une carte de Visegrad et la rivière
7 Drina, et vous voyez que la Drina coule au milieu du village qui se trouve
8 des deux bords.
9 Sur le cliché numéro 9, nous avons marqué un certain nombre de lieux-clés.
10 En commençant par le nord, vous avez l'hôtel Vilina Vlas. C'est un spa. Au
11 cours du printemps et de l'été 1992, cet hôtel a été utilisé comme quartier
12 général du groupe Lukic. Ils se réunissaient là-bas, ils y dormaient et ils
13 détenaient des Musulmans ainsi que de jeunes femmes musulmanes. La route du
14 Vilina Vlas vers la ville de Visegrad croise en T au lieu de Sase. A gauche
15 de ce croisement, vous avez une des routes principales et c'est à ce
16 croisement que se sont produits les meurtres des hommes près de la rivière
17 Drina.
18 Le cliché numéro 10 représente une photo aérienne de Visegrad
19 superposée sur la carte. L'Accusation va montrer un certain nombre de
20 photographies aériennes afin d'aider la Chambre à comprendre les
21 déplacements des accusés et des victimes des crimes.
22 Ensuite, vous voyez, la légende indique la rue Pionirska dans le
23 quartier Mahala de Visegrad, au nord du centre. C'est ici que le 14 juin
24 environ 70 personnes ont été brûlées vives dans une maison.
25 Le cliché numéro 11 vous montre l'emplacement du commissariat de police.
26 Les témoins vont parler du fait qu'ils ont été emmenés ici pour être
27 interrogés et abusés. C'est ce commissariat où travaillait Sredoje Lukic et
28 dont parle Milan Lukic dans ses déclarations portant sur son alibi comme
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1 étant le lieu où il avait emmené les Musulmans à partir de l'usine Varda.
2 Pas loin du commissariat, on trouve le stade où le général Jovanovic a
3 réuni environ 4 000 Musulmans après que la JNA soit entrée dans la ville.
4 Pas loin du commissariat, on trouve le pont Stari Most ou le vieux pont
5 turc. Cette photo montre ce que l'on appelle le banc dont Ivo Andric a
6 parlé comme étant un lieu où les voisins s'asseyaient pour parler. Ensuite,
7 le prochain lieu marqué, c'est la zone Bikavak de Visegrad. Au sud du
8 centre, c'est un lieu perché sur une colline avec vue sur le pont et la
9 ville.
10 C'est ici que les hommes qui ont été tués le long de la Drina près de Sase
11 ont été capturés.
12 C'est également ici où le 27 juin, Milan et Sredoje Lukic ont barricadé des
13 Musulmans dans une maison pour ensuite y mettre le feu.
14 Au sud de Bikavak, le long de la Drina, se trouve l'usine Varda. C'est une
15 usine de meubles et une scierie qui est également le lieu de certains des
16 crimes qui figurent dans l'acte d'accusation.
17 Les deux derniers lieux marqués dans cette photo aérienne sur le cliché 12
18 sont la centrale hydroélectrique et le camp militaire Uzamnica, là où selon
19 les allégations de l'Accusation, les Musulmans ont été détenus pendant des
20 mois afin d'être assujettis à des traitements cruels et inhumains.
21 Je voudrais maintenant décrire plus en détail les crimes pour lesquels les
22 accusés se trouvent devant cette Chambre. Nous allons présenter des
23 témoignages de témoins oculaires crédibles et fiables qui permettront de
24 prouver que le 7 juin 1992, Milan Lukic et Mitar Vasiljevic et d'autres
25 membres du groupe Lukic ont détenu sept hommes musulmans, tous civils, les
26 ont emmenés au bord de la Drina à Sase et les ont tirés. Cinq des victimes
27 sont mortes, deux en sont réchappées.
28 Les événements qui ont précédé les tirs ont commencé vers
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1 5 heures 30 le soir du 7, lorsque Milan Lukic et ses hommes faisaient des
2 perquisitions dans les maisons en recherchant des civils musulmans
3 bosniaques dans le quartier de Bikavac.
4 L'un des premiers hommes a été pris de force de sa propre maison. Lorsqu'on
5 l'emmenait, il a demandé timidement s'il pouvait embrasser sa fille de 3
6 ans. Milan Lukic a dit non. Lorsque Lukic lui a tourné le dos, il est
7 retourné et a embrassé sa petite fille. Les deux hommes qui ont été pris
8 prisonniers ont été mis à l'arrière d'une Passat Volkswagen rouge foncée
9 que conduisait Milan Lukic. C'était connu, il était le seul à avoir une
10 telle voiture. Cette voiture avait été volée auprès de Behija Zukic, une
11 femme d'affaires musulmane qui était une des premières personnes qui a été
12 assassinée. Aux environs de la même période, deux autres hommes dans le
13 groupe Lukic se trouvaient dans d'autres maisons musulmanes près de l'hôtel
14 Bikavac. Deux des hommes qui ont été capturés vivaient pendant plusieurs
15 semaines au sous-sol d'une maison, se cachant dans un placard à chaque fois
16 qu'ils entendaient une voiture passer dans la rue.
17 Lorsqu'un de ces hommes est sorti quelques instants, il n'a pas vu
18 que les hommes de Milan Lukic montaient la colline juste derrière lui.
19 Lorsque Milan Lukic est arrivé, ils ont été arrêtés et les prisonniers
20 bosniaques ont été fouillés. Leurs objets de valeur ont été confisqués
21 ainsi que leurs papiers d'identité. Sans doute, la première indication des
22 intentions de Lukic est révélée par le fait que lorsqu'il a confisqué les
23 papiers d'identité, il les a jetés. On les a mis dans deux voitures, une
24 Passat et une Yugo qui appartenait à l'un des détenus.
25 Les deux voitures sont passées ensuite en direction de l'hôtel Vilina
26 Vlas, vers le nord-est de la ville. En chemin, Milan Lukic a arrêté des
27 gens. Il a demandé aux passants de lui dire leurs noms pour savoir s'ils
28 étaient Musulmans. Lorsqu'il est arrivé au point de contrôle devant l'hôtel
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1 Vilina Vlas, Milan Lukic a déclaré à la police, j'ai chassé quelques
2 balija, mot dérogatoire utilisé pour décrire des Musulmans.
3 Ici, le cliché numéro 13 vous montre en jaune le chemin qu'ils ont
4 suivi, en bas de la photo où vous voyez indiqué Bikavak au nord de la ville
5 jusqu'au croisement en T de Sase, jusqu'à l'hôtel Vilina Vlas. Lorsque les
6 deux voitures remplies de prisonniers musulmans bosniaques sont arrivées à
7 l'hôtel Vilina Vlas, c'est Mitar Vasiljevic qui les a reçus et d'autres
8 membres du groupe Lukic. Vasiljevic se trouvait près du comptoir dans le
9 hall de l'hôtel. L'une des victimes, Meho Dzafic, avait été le chef de
10 Vasiljevic au restaurant Panos [phon].
11 Ici, le cliché numéro 14 vous montre une photo aérienne de l'hôtel
12 Vilina Vlas. L'entrée de l'hôtel se trouve au milieu du bâtiment, juste en
13 face de la pelouse, vous voyez que plusieurs véhicules sont garés. Lorsque
14 les hommes ont été alignés dos à la réception de l'hôtel, Mitar Vasiljevic
15 s'est trouvé à leur droite alors qu'un autre garde serbe se trouvait à leur
16 gauche. Milan Lukic a cherché à la réception en cherchant un certain
17 trousseau de clés. Lorsqu'il n'a pas pu trouver les clés qu'il cherchait,
18 il a exclamé fâché : "Revenons." A ce moment-là, il était clair à tous
19 qu'on allait emmener les hommes afin de les tuer.
20 Les sept hommes ont été forcés à monter dans les deux voitures. Les
21 deux véhicules ont repris la même route qu'à l'allée vers Sase. Ici, le
22 cliché numéro 15 vous montre le croisement à Sase. Lorsque les véhicules
23 sont parvenus à ce croisement, ils ont tourné à droite en s'éloignant du
24 centre de la ville vers Prelovo. A peu de distance de ce croisement, Milan
25 Lukic a garé la voiture le long de la route. Le chemin qu'a pris la voiture
26 est marqué en jaune sur la photo. A la fin du trait, c'est le lieu
27 approximatif où les véhicules ont été garés le long de la route.
28 Milan Lukic et Vasiljevic et d'autres ont quitté la voiture et ils se sont
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1 positionnés autour des voitures et ont ordonné aux Musulmans bosniaques de
2 descendre. Lorsque les captifs sont descendus des voitures, on les a
3 obligés à avancer à pied vers la Drina, qui se trouvait à environ 100
4 mètres. Le long du chemin, Milan Lukic et Mitar Vasiljevic gardaient les
5 hommes à côté et les paramilitaires les gardaient de l'autre. Il était
6 clair pour ces hommes ce qui les attendait.
7 Le chemin parcouru par ces hommes est marqué en flèche rouge sur le cliché
8 numéro 15. C'est bien évidemment approximatif, mais je demanderai au témoin
9 de vous indiquer avec plus de précisions exactement quel était le chemin
10 parcouru.
11 L'un d'entre eux voulait s'approcher de son beau-frère afin de lui dire un
12 dernier au revoir. Lorsqu'ils sont arrivés au fleuve, on a ordonné aux sept
13 hommes de s'aligner le long de la rive. Les hommes ont avancé du pas
14 lentement vers la rivière, car ils savaient qu'ils allaient être assassinés
15 lorsqu'ils parvenaient à la rivière.
16 Lorsque les sept hommes se sont trouvés au bord de la rivière, Vasiljevic,
17 Milan Lukic et les autres paramilitaires ont pris position à environ 10
18 mètres derrière eux. Après une discussion brève pour savoir s'ils allaient
19 utiliser les fusils automatiques ou semi-automatiques, on a entendu
20 retentir les fusils en mode semi-automatique. Les paramilitaires, en
21 commençant par Milan Lukic, ont tiré à répétition dans le dos des hommes et
22 dans leur tête jusqu'à ce qu'ils soient persuadés qu'ils étaient tous
23 morts. Deux des victimes se sont jetées à l'eau lorsque les tirs ont
24 commencé, et ont désespérément essayé de faire semblant d'être morts. Ils
25 se trouvaient dans les eaux peu profondes, lorsque d'autres tirs ont été
26 tirés sur les corps au-dessus de leur tête afin de s'assurer que l'ensemble
27 des victimes avaient été tuées.
28 Ils entendaient le son des balles qui frappaient les corps de leurs amis.
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1 Ils entendaient les hommes mourir, qui se trouvaient près d'eux, qui
2 bougeaient encore.
3 Lorsque les paramilitaires étaient satisfaits qu'ils aient tué les sept
4 hommes, Vasiljevic, Milan Lukic et les autres sont remontés en voiture et
5 ils sont partis. Les deux survivants des tirs sont restés sans bouger
6 jusqu'à ce qu'ils aient entendu que les voitures étaient parties et
7 ensemble ils ont pu se sauver.
8 Pour ces crimes, Milan Lukic est accusé de meurtre, de crime contre
9 l'humanité et de violation des lois et coutumes de la guerre. En ce qui
10 concerne les crimes perpétrés à l'encontre des deux survivants, VG-014 et
11 VG-032, tentative de meurtre et crime d'actes inhumains, crime contre
12 l'humanité et enfin crime de traitements cruels en tant que violation des
13 lois et coutumes de la guerre.
14 Milan Lukic est également accusé de persécutions dans le cas du chef
15 d'accusation numéro 1, cet incident étant l'un des actes de persécution sur
16 lequel ce chef est fondé.
17 L'Accusation estime que Milan Lukic, de concert avec Mitar Vasiljevic et
18 d'autres membres du groupe Lukic a détenu ces sept hommes contre leur gré,
19 les a fait marcher jusqu'à la Drina et les a tués.
20 L'un des employeurs le plus important à Visegrad était l'usine Varda qui
21 produisait des meubles. C'est un complexe composé de plusieurs bâtiments,
22 de petits et grands bâtiments qui se trouvaient le long de la berge ouest
23 et est de la rivière Drina qui employait environ 200 employés de toutes
24 ethnicités.
25 Autour de cette ville, il était devenu très fréquent pour Milan Lukic et
26 les hommes du groupe Lukic de se rendre aux usines tout comme était Varda
27 et Terpentine, d'identifier les employés musulmans et de les amener jusqu'à
28 un endroit où ils allaient trouver la mort. L'acte d'accusation allègue que
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1 Milan Lukic s'est rendu à l'usine Varda à plusieurs reprises au cours du
2 printemps de 1992. Il ne conteste pas ceci. Si vous prenez l'une des
3 écritures au 65 ter [comme interprété], il est dit qu'il s'était rendu là-
4 bas et qu'il avait pris et amené ces hommes au poste de police.
5 L'Accusation va se pencher sur une journée particulière, une journée en
6 juin 1992. Tout juste avant le déjeuner le 10 juin, juste avant que Milan
7 Lukic n'entre dans l'usine. Lui et ses complices sont entrés dans l'usine,
8 ils se sont approchés de deux employés musulmans de l'usine Varda. Un autre
9 homme musulman a été approché par l'un des complices de Lukic. Milan Lukic
10 a trouvé deux autres Musulmans et les a amenés ensemble. Ensemble, ils
11 avaient sept employés musulmans, employés de l'usine. Lukic les a escortés
12 en deux groupes jusqu'aux berges de la Drina et les a exécutés
13 sommairement. Le premier groupe composé de trois hommes avait été tué alors
14 qu'ils étaient debout tout près de la rivière. Lukic est retourné à la
15 berge et a tué les quatre autres. Sept vies avaient été prises en quelques
16 minutes par des tirs de fusil semi-automatiques de Lukic.
17 Des amis et des membres de la famille se sont rendus sur place, ils ont vu
18 à l'endroit où ces derniers avaient été tués des pièces d'identité
19 appartenant aux personnes. Leur seul crime était de porter un nom musulman.
20 Et leur seul procès était un regard bref lancé sur les cartes d'identité.
21 Milan Lukic est accusé de meurtre, au chef 6 on parle de crime contre
22 l'humanité et meurtre, en vertu de l'article 7 en tant que violation des
23 lois ou coutumes de la guerre. La perpétration de ces meurtres commis
24 compose l'un des actes de persécution sur lequel repose la thèse de
25 l'Accusation, la première charge de l'acte d'accusation.
26 Des témoins oculaires crédibles et fiables établiront au-delà de tout doute
27 raisonnable que le 14 juin 1992, environ 70 personnes musulmanes de Bosnie,
28 la plupart d'entre eux étant des femmes et des enfants avaient été
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1 emprisonnés dans une maison de la rue Pionirska par Milan Lukic et Sredoje
2 Lukic et d'autres membres de leur groupe, et par la suite, ont été brûlés
3 vifs. Un autre événement qui a mené à cet incendie est un autre groupe de
4 personnes, la plupart étaient des femmes et des enfants d'un petit hameau
5 qui s'appelait Koritnik, se trouvant environ à 6 kilomètres au nord de
6 Visegrad, ils s'étaient rassemblés au centre de la ville de Visegrad
7 demandant la protection de la Croix-Rouge et cherchant une façon de quitter
8 la ville.
9 Un peu plus tôt au cours de cette journée, l'un de leurs voisins serbes
10 leur a dit de façon très claire que le village allait faire l'objet d'un
11 nettoyage ethnique.
12 Ici, sur la diapositive numéro 19, vous pouvez voir de nouveau une
13 photographie aérienne de Visegrad. En haut de la photographie vous verrez
14 la route de Koritnik qui est en jaune. Vous pouvez voir qu'elle descend le
15 long de la rivière Drina, elle passe la jonction de Sase et se rend
16 jusqu'au centre de la ville.
17 Ici, sur la diapositive numéro 20, vous pouvez voir une photo aérienne du
18 centre de la ville. Encore une fois, le parcours que les Musulmans de
19 Koritnik ont pris est indiqué en jaune. Ils sont arrivés au centre-ville
20 jusqu'au square. La photographie qui se trouve dans l'encadré en haut à
21 gauche de la diapositive qui porte le numéro 20 démontre qu'il y a un
22 groupe qui est resté à l'hôtel cette journée-là.
23 En dernier lieu, le bureau de la Croix-Rouge a fermé, le groupe s'est rendu
24 dans un quartier musulman aux abords de la ville appelée Mahala où ces
25 derniers ont passé la nuit. Vous pouvez voir sur la diapositive 20
26 l'endroit qui est indiqué en jaune, c'est là que se trouve cette partie de
27 la ville qui s'appelle Mahala. La route qu'ils ont prise est indiquée en
28 jaune.
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1 Alors quand ils se sont rapprochés de cette partie-là de la ville,
2 quelqu'un s'est approché d'eux et il s'est présenté comme étant Mitar
3 Vasiljevic. Vasiljevic a dit aux femmes d'entrer dans une maison qui avait
4 fait l'objet de fouille, la maison de Jusuf Memic de la rue Pionirska. Il a
5 parlé à Mujo Halilovic, qui se trouvait dans ce groupe de Musulmans, et
6 Vasiljevic leur a donné un papier leur donnant l'assurance qu'ils allaient
7 tous être en sécurité dans la maison de Memic.
8 Sur la diapositive numéro 21, vous pouvez voir une photo aérienne de la
9 partie de la ville qui s'appelle Mahala. En jaune, vous pouvez voir le
10 trajet qu'a pris le groupe alors qu'ils sont entrés. Vous verrez dans la
11 partie en haut à gauche de la photographie une école avec une cour de jeu
12 devant. Les deux maisons Memic se trouvaient juste en face de la maison, et
13 vous pouvez voir sur la diapositive ces maisons. C'est devant ces maisons-
14 là que le groupe a rencontré Mitar Vasiljevic et c'est là qu'il les a
15 convaincus de rester dans les maisons de Memic. Tout comme le jugement dans
16 l'affaire Vasiljevic, il est dit au paragraphe 187 :
17 "La Chambre de première instance est satisfaite de tous les éléments
18 selon lesquels l'accusé, Mitar Vasiljevic, a tout fait pour s'assurer que
19 le groupe reste ensemble. Il l'a fait en insistant, en leur disant de se
20 plier à ses demandes et il leur a donné le sentiment d'une assurance qu'ils
21 seraient sains et saufs s'ils restaient ensemble, car la garantie que Mujo
22 Halilovic avait donné les assurait que rien ne leur arriverait. La Chambre
23 de première instance est également satisfaite que l'accusé le savait
24 puisqu'il savait très bien que quelque chose de mal allait survenir."
25 Un peu plus tard dans la journée, Milan et Sredoje Lukic sont arrivés. Ils
26 ont volé des objets de valeur appartenant aux membres du groupe, ils ont
27 posé des questions sur les hommes, en fait ils ont fait en sorte que les
28 femmes enlèvent leurs vêtements, ils les ont humiliées en les fouillant.
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1 Ensuite, lorsqu'ils ont terminé, ils leur ont dit de rester dans la maison
2 de Vasiljevic, car c'est là qu'ils seraient sûrs jusqu'au lendemain matin.
3 Un peu plus tard, Milan et Sredoje Lukic ont contraint les personnes
4 sans chaussures de se déplacer vers une autre maison qui se trouvait à
5 l'arrière de cette propriété, une maison qui appartenait à Adem Omeragic.
6 Cette maison ne se trouvait qu'à 40 ou 50 mètres de là. De nouveau, vous
7 pouvez voir sur la diapositive 21, en jaune, la trajectoire qu'ont
8 entreprise les victimes pour se rendre de la maison de Memic à la maison
9 d'Omeragic qui se trouvait à l'arrière de la propriété. La maison
10 d'Omeragic n'était pas construite sur la route, mais derrière les maisons
11 sur un terrain qu'on n'avait rien construit et où il y avait des rigoles
12 pendant qu'il pleuvait.
13 Les personnes qu'on a placées dans la maison de Memic devaient se
14 déplacer dans la maison d'Omeragic et ils étaient entassés physiquement
15 dans cette maison. Un des témoins a dit qu'il était tout à fait clair que
16 le tapis avait été imbibé de produit chimique volatile et les fenêtres
17 étaient fermées, barricadées, et l'odeur de ce produit chimique faisait
18 penser à de la colle. Il était difficile de respirer. Vous pouvez voir sur
19 la diapositive numéro 23 un zoom de la maison d'Omeragic. Elle était
20 composée de trois étages. L'étage inférieur avait été construit du côté de
21 la rigole, de la ravine. Cette maison était composée d'une seule pièce,
22 avec une porte que vous pouvez voir sur la photo. Sur le côté, il y avait
23 deux fenêtres.
24 Trente minutes plus tard environ, Milan et Sredoje Lukic, et d'autres
25 membres du groupe, sont retournés dans la maison et ont ouvert la porte
26 principale. Alors que Sredoje Lukic était debout à côté de Milan Lukic,
27 empêchant toute personne de fuir, Milan Lukic a placé un engin explosif sur
28 le tapis et a allumé la brèche. Alors que le tapis explosait, les flammes
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1 se sont rapidement propagées et les chaussettes des victimes qui étaient
2 imbibées de ce liquide ont pris feu très rapidement. Les Lukic sont restés
3 à l'extérieur de la maison tirant sur chaque personne essayant de fuir.
4 Une maison [comme interprété] a fracassé la fenêtre jusqu'à ce
5 qu'elle ait pu fuir avec son fils. Un autre jeune homme a montré à sa mère
6 cette fenêtre. Il a sauté d'abord et ensuite tous les deux ont couru le
7 plus rapidement qu'ils ont pu le faire -- il a couru. Il n'a pas vu sa mère
8 sauter par la fenêtre. Il ne l'a pas vue non plus se faisant tirer par
9 Milan Lukic. Elle était tombée dans la rigole car elle était blessée. Elle
10 attendait là pendant des heures, elle entendait des cris horribles
11 provenant des victimes qui étaient à l'intérieur de la maison incendiée.
12 Son fils ne savait pas où elle était. Il entendait des cris de
13 personnes qui se trouvaient à l'intérieur de la maison. Il entendait des
14 cris des membres de sa famille croyant que sa mère était à l'intérieur de
15 la maison. Ce n'est qu'en 1995, trois ans plus tard, que cette mère et son
16 fils ont appris qu'ils étaient tous les deux en vie et qu'ils avaient
17 survécu à cet holocauste.
18 A la diapositive 25, vous pouvez voir des photos de quelques-unes des
19 victimes. Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, il y avait
20 environ 66 personnes sans défense qui ont péri dans cet incendie ce jour-
21 là. La personne la plus âgée de ce groupe à l'époque était âgée de 75 ans,
22 et il y avait également un bébé qui n'était âgé que de 3 jours. Ce bébé de
23 2 jours, en fait, faisait partie des 51 membres de la maison Kurspahic qui
24 avait été incendiée. Donc une famille composée de 51 membres, toutes les
25 personnes avaient été ainsi tuées et incendiées.
26 La pièce où ces Musulmans avaient été incendiés par la suite avait
27 été transformée en un endroit où l'on gardait des cochons, pour les
28 humilier encore plus.
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1 En 1992, Milan et Sredoje Lukic sont chargés d'extermination et de
2 crimes contre l'humanité.
3 Pour ce qui est des personnes qui ont survécu, s'agissant des Lukic
4 qui ont essayé de tuer ces personnes, ils sont accusés d'actes inhumains en
5 tant que crime contre l'humanité, de traitements cruels en tant que
6 violation des lois aux coutumes de la guerre.
7 Les crimes qu'ils ont commis le 14 juin constituent également l'un
8 des actes de persécution qui se trouvent au chef 1 de l'acte d'accusation.
9 Milan et Sredoje Lukic, agissant de concert, ensemble avec d'autres
10 groupes et avec d'autres membres du groupe Lukic présents cette nuit-là,
11 ont rassemblé ces personnes, ces victimes dans la maison d'Omeragic dans
12 l'intention de les tuer. Ils ont travaillé ensemble pour les barricader
13 dans la maison, les enfermer dans la maison, et ensuite ils ont incendié
14 cette maison.
15 Toutes les souffrances qu'ont causées Milan et Sredoje Lukic le 14
16 juin 1992, lorsqu'ils ont incendié ces 70 personnes vivantes dans cette
17 maison, s'est répété une semaine et demie plus tard.
18 Alors que la population de Visegrad continuait, le fait de chercher,
19 d'aller d'une maison à l'autre, les hommes de ce dernier sont entrés dans
20 les maisons pour voler les objets des personnes, des objets de valeur et
21 l'argent. Ils ont travaillé ensemble à Bikavac.
22 Encore une fois, un très grand nombre de femmes, enfin, un très grand
23 nombre de Musulmans de Bosnie, pour la plupart des femmes, des enfants et
24 des personnes âgées ont été contraints à entrer dans une maison appartenant
25 à Meho Aljic, et ces personnes ont été incendiées vivantes.
26 Les événements de cette nuit vous seront relatés par le seul
27 survivant de cet incendie, le témoin VG-114. Milan Lukic est entré dans la
28 maison où elle se trouvait avec d'autres femmes musulmanes. Alors qu'ils
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1 fouillaient la maison, VG-114 s'est cachée sur le balcon en s'entourant
2 d'un rideau, entourant soi-même et sa sœur de 9 ans. Milan la connaissait.
3 Il connaissait son nom. Le témoin VG-114, il la connaissait depuis l'école.
4 Lorsqu'il l'a trouvée, il l'a emmenée dans la maison d'Aljic. Lorsque tous
5 les Musulmans avaient été rassemblés à cet endroit-là, vers 9 heures du
6 soir environ, la maison était barricadée depuis l'extérieur, fermée depuis
7 l'extérieur. Mais avant que ceci ne se passe, Milan Lukic sélectionnait
8 environ six jeunes femmes et les a mises à bord d'un véhicule, une
9 camionnette. On a barricadé les fenêtres et lorsque l'horreur a commencé,
10 un engin incendiaire a été tiré à l'intérieur et la jeune fille ne
11 comprenait pas pourquoi ceci avait lieu, ne pouvait pas non plus comprendre
12 pourquoi quelqu'un qu'elle connaissait pouvait faire quelque chose contre
13 elle et contre d'autres personnes.
14 Des éclats d'obus qui avaient été jetés à l'intérieur de la maison ont
15 percé leur peau. Les flammes se sont dispersées très rapidement, d'abord
16 sur les vêtements des victimes, et ensuite les victimes. Alors que les
17 flammes faisaient rage, elle estimait que la dernière chose qu'elle pouvait
18 faire pour se sauver c'était d'essayer de fuir par la fenêtre et c'est ce
19 qu'elle a fait. Ceci la hante, bien sûr, jusqu'à ce jour. Elle a abandonné
20 sa sœur qui la tenait très fermement, qui se tenait fermement à ses
21 vêtements, et elle s'est enfuie. Elle a réussi à fuir le feu cette nuit-là,
22 mais d'abord sa peau avait été incendiée, ses cheveux également avaient
23 pris feu. Elle se déplaçait dans les rues de ce quartier musulman et elle
24 disait aux personnes de fuir, son corps qui était enflé de ses blessures
25 très graves.
26 Lorsqu'elle a terminé sa tâche, la tâche selon laquelle elle a averti les
27 personnes, elle s'est rendue directement au QG de la Défense territoriale,
28 l'endroit où les paramilitaires serbes se rassemblaient. Elle est allée
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1 voir deux paramilitaires serbes qui étaient là, qui portaient des armes, et
2 elle leur a dit : Tuez-moi.
3 L'un d'eux était tellement affligé par ce qu'il voyait qu'il l'a amenée
4 dans la maison d'un couple âgé où on a essayé de lui apporter des soins. Le
5 Dr Vasiljevic de l'hôpital de Visegrad était amené pour venir dans la
6 maison. Il l'a regardée brièvement, il lui a donné quelques analgésiques et
7 il lui a dit trois choses : D'abord, puisqu'elle était Musulmane, il
8 n'allait pas l'amener à l'hôpital; deuxièmement, il lui a dit qu'elle
9 allait mourir dans un jour ou deux; et troisièmement, il n'allait plus
10 revenir pour lui prodiguer des soins.
11 Milan Lukic, après avoir appris qu'elle avait survécu, avait placé un prix
12 sur sa tête. Il était prêt à payer qui que ce soit, quelque personne que ce
13 soit qui réussirait à la trouver et à la tuer.
14 Cette personne qui est une personne extraordinaire vous dira comment elle a
15 pris la décision de quitter Visegrad, elle vous dira de quelle façon elle
16 est sortie de cette ville, elle a marché par les forêts de la Bosnie
17 orientale, par des forêts remplies de mines antipersonnel, et comment elle
18 s'est rendue, comment elle a passé la ligne de confrontation et comment
19 elle s'est rendue sur le territoire tenu par les Bosniens. Elle viendra
20 ici. Elle a abandonné les mesures de protection. Elle viendra vous
21 témoigner en audience publique sur ce qui s'est passé, sur ce qui lui est
22 arrivé à elle, sa famille, sa communauté et son peuple, pour dire au monde
23 entier ce que c'est que d'être brûlé vif. Avec la même intégrité et son
24 caractère assez exemplaire, elle vous dira que Milan Lukic, le garçon
25 qu'elle connaissait des bancs d'école, que c'est lui qui lui a fait ceci.
26 Elle n'aura pas peur de le regarder dans les yeux et de l'identifier.
27 S'agissant des crimes qui avaient été commis contre les personnes qui
28 avaient été incendiées vives le 27 juin 1992, Milan et Sredoje Lukic ont
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1 été accusés d'extermination en tant que crime contre l'humanité et meurtre
2 et violation des lois ou coutumes de la guerre. Pour ce qui est de la
3 tentative d'essayer de tuer ces personnes, ils sont accusés d'actes
4 inhumains et de crimes contre l'humanité, de traitements cruels en guise de
5 violation des lois ou aux coutumes de la guerre.
6 Les crimes qu'ils ont commis dans la nuit du 27 juin 1992 constituent
7 également l'un des actes persécutoires dont ils sont accusés.
8 Vous entendrez des témoins qui vous diront que Milan et Sredoje Lukic font
9 partie du groupe de Lukic et sont responsables d'un très grand nombre de
10 meurtres qui ont été perpétrés dans cette ville. L'Accusation produira des
11 éléments de preuve vous permettant de voir de quelle façon une femme
12 musulmane, Hajrija Koric, a été tuée. Peu de temps après Bikavac,
13 certainement quelques [comme interprété] semaines après cet incendie, un
14 groupe de femmes et d'enfants se cachaient dans une maison dans la région
15 de Potok à Visegrad, une région qui était près de la gare routière se
16 trouvant au centre de la ville.
17 Parmi les personnes du groupe, il y avait une femme qui portait le nom de
18 Hajrija Koric. On a dit à la femme qu'il y aurait peut-être des autobus
19 faisant partie d'un convoi de réfugiés qui passaient par la ville le
20 lendemain. Ils ont espéré de fuir Visegrad sur ce convoi.
21 Plus tard dans l'après-midi lorsqu'elle a été tuée, Milan Lukic est arrivé
22 avec d'autres membres du groupe Lukic et se sont promenés par le quartier
23 de Potok cherchant les Musulmans. Le témoin vous dira de quelle façon il
24 lui a semblé que les membres du groupe de Milan Lukic se pliaient à ses
25 ordres. Ces quelque huit hommes sont entrés dans les maisons et lorsque
26 Hajrija Koric a vu ce groupe, elle s'est cachée sous une table. Elle a été
27 découverte très rapidement et elle, tout comme d'autres femmes et enfants
28 dans la maison, avait été contrainte de sortir à l'extérieur de la maison
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1 dans la rue. Mme Koric se trouvait au bout d'une ligne de femmes et
2 d'enfants qui étaient placés debout devant la maison.
3 Lukic a regardé chaque personne le long de cette file, essayant de trouver
4 une personne. Lorsqu'il est arrivé au bout de cette ligne, il a choisi Mme
5 Koric et lui a dit : "Toi, Hajrija, je t'ai dit que je te trouverais et que
6 je te tuerais."
7 Ensuite, il lui a posé des questions sur l'endroit où se trouvaient son
8 mari et son fils pendant quelques moments et ensuite il lui a tiré à bout
9 portant dans sa poitrine. Ensuite, elle est tombée. Milan Lukic a tiré de
10 nouveau. Il s'est mis à rire et il a demandé au groupe : "Mais qu'est-ce
11 qui lui arrive" ?
12 Il ordonnait au reste, aux autres femmes et enfants, de rester dans cette
13 maison car il allait revenir dans la soirée. Ayant peur, craignant pour
14 leur vie, plusieurs d'entre eux ont fui lorsque Milan Lukic et son groupe
15 sont partis.
16 Pour le meurtre de Hajrija Koric, Milan Lukic est accusé de meurtre en tant
17 que crime contre l'humanité et crime de violation des lois ou coutumes de
18 la guerre. C'est un acte de persécution également selon le Règlement.
19 Maintenant, je vais vous parler du camp de détention à Uzamnica.
20 Cette installation appartenant à l'armée yougoslave se trouve tout près de
21 la Drina, au sud de la ville près du barrage hydro-électrique. Sur la
22 diapositive numéro 30, vous allez pouvoir voir la carte dont je me suis
23 servi pour vous montrer une photo aérienne du camp et pour vous montrer où
24 il se trouvait par rapport au barrage. La photo qui se trouve dans le coin
25 supérieur droit est une des photographies du bâtiment qui était une
26 installation où les détenus musulmans avaient été placés. Pour ce qui est
27 des Musulmans de Visegrad qui n'avaient pas été tués et qui n'avaient pas
28 fui, ils se trouvaient là, au camp d'Uzamnica.
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1 Les conditions du camp étaient déplorables. Il y avait simplement un seul
2 endroit qu'on pouvait utiliser en tant que toilette; un autre seau dont on
3 se servait comme toilette, un autre seau pour se laver. A plusieurs
4 reprises, entre le mois d'août 1992 et le mois d'octobre 1994, Milan et
5 Sredoje Lukic se sont rendus régulièrement au camp de détention, et c'est
6 là qu'ils se sont adonnés à des coups sporadiques et des passages à tabac
7 des détenus. Les détenus, on donnait des coups, des coups de pied, on les
8 battait avec des crosses de fusil et des bâtons. L'un des détenus qui
9 témoignera devant vous a été détenu pendant 26 mois. Il vous donnera ses
10 observations concernant ces passages à tabac réguliers et les abus dont il
11 a fait l'objet et qui avaient eu lieu.
12 Le chemin de Milan Lukic et de Sredoje Lukic était très simple. Ils se
13 rendaient à la prison et de temps en temps, ils torturaient les détenus
14 avec des chocs électriques dans le but de les interroger. Le témoin VG-008
15 vous décrira ces passages à tabac que lui a administrés Sredoje Lukic. Il
16 vous décrira qu'à une reprise Milan Lukic l'a battu avec un tronc d'arbre,
17 il lui a asséné des coups tellement fort qu'il avait cassé son bras à trois
18 endroits. Et pendant 42 jours il était incapable de bouger. Il était là à
19 Uzamnica. Le témoin VG-016 vous dira qu'à plusieurs reprises entre le mois
20 de juin et septembre 1992, il a fait l'objet de passages à tabac répétitifs
21 administrés par Milan Lukic, Sredoje Lukic et Milos Lukic.
22 Il lui est arrivé à une reprise qu'il a dû se tenir debout devant une
23 colonne avec ses arms [comme interprété] autour de cette colonne, et il
24 s'est fait battre par Milan et Sredoje Lukic.
25 Vous entendrez des témoins vous décrire la journée où Sredoje Lukic, ivre,
26 a tenu un couteau à la gorge d'un détenu le menaçant de le tuer, et il a
27 demandé quel autre détenu devrait être tué ce jour-là. Plus tard; cette
28 même journée, Sredoje Lukic a pris son fusil et a tiré sur VG-003, mais il
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1 l'a manqué. Lors d'une occasion, Milan Lukic a déplacé plusieurs détenus du
2 camp et les a enlevés du camp. Il leur a dit qu'ils n'auraient pas besoin
3 de chaussures là où ils allaient. Ces hommes, tout comme d'autres hommes,
4 ne sont plus jamais revenus.
5 Pour les crimes qui sont commis par Milan Lukic et Sredoje Lukic au camp de
6 détention d'Uzamnica, ils sont accusés d'agir en concert ensemble avec
7 d'autres personnes pour des crimes d'actes inhumains en tant que crimes
8 contre l'humanité et traitements cruels en tant qu'une violation des lois
9 ou coutumes de la guerre.
10 Mon fardeau juridique consiste à établir, à démontrer que les actes ou ce
11 qu'ont fait Sredoje et Milan Lukic ne s'inscriraient pas dans le cadre
12 d'activités de criminels, de voyous, mais s'inscriraient bien dans le cadre
13 d'une opération de nettoyage ethnique à l'encontre de la population.
14 L'Accusation a l'intention de présenter plusieurs éléments de preuve sur
15 cette question et je vais vous décrire un de ces éléments de preuve.
16 Vous entendrez déposer un homme qui était un membre éminent de la
17 communauté musulmane, un Musulman. Il vous décrira un événement qui fait
18 froid dans le dos lorsqu'il a été emmené à un poste de commandement de la
19 JNA afin de se réunir avec un colonel de l'armée. Et alors qu'il était
20 assis à une table, trois officiers qu'il ne connaissait pas sont entrés, se
21 sont attablés en face de lui. Ils ne se rendaient pas compte qu'il était
22 Musulman, et donc ne lui ont prêté aucune attention. Ils ont déroulé une
23 carte de la ville et ont indiqué les endroits de la ville qui avaient déjà
24 été nettoyés.
25 Cet homme s'est senti paralysé alors que l'officier montrait du doigt un
26 village où vivait toute sa famille sur la berge gauche de la rivière, et a
27 dit que cet endroit allait être nettoyé le lendemain. Dans d'autres
28 affaires devant ce Tribunal concernant des hauts responsables politiques,
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1 militaires et de la police, l'Accusation a fait valoir et dans certains cas
2 obtenu des condamnations sur la base de la thèse d'après laquelle tout ce
3 qui a eu lieu en Bosnie-Herzégovine constituait une entreprise criminelle
4 commune dont l'objectif était d'expulser de nombreux non-Serbes, notamment
5 des Musulmans et des Croates de leurs maisons et du territoire par la
6 force, et la commission de crimes, de meurtres et de persécutions.
7 Cet acte d'accusation ne prétend pas que Milan et Sredoje Lukic aient
8 participé à cette entreprise criminelle commune ni d'ailleurs qu'ils aient
9 rencontré les personnes qui étaient les principaux architectes des crimes
10 perpétrés, mais l'Accusation affirme que Milan et Sredoje Lukic, de concert
11 avec un petit groupe de criminels, ont délibérément commis les crimes de
12 meurtre et de persécution à l'encontre des Musulmans et [comme interprété]
13 Visegrad, et que ces crimes-là s'inscrivent dans le cadre de l'offensive
14 généralisée menée contre la population civile.
15 Certains hauts responsables politiques seront accessoirement mentionnés
16 dans le cadre des dépositions, et j'aimerais brièvement les décrire ainsi
17 que leurs rôles. Nous voyons sur cette diapositive quatre des hauts
18 responsables politiques qui ont œuvré au niveau stratégique afin de
19 perpétrer les crimes en Bosnie-Herzégovine. Slobodan Milosevic, à l'époque,
20 était le président de la Serbie. Radovan Karadzic était le premier
21 président du gouvernement de la Serbie de Bosnie [comme interprété], plus
22 tard connu sous le nom de Republika Srpska. Il a été mis en accusation par
23 ce Tribunal, est fugitif à l'heure actuelle. Momcilo Krajisnik était membre
24 de l'équipe dirigeante des Serbes de Bosnie. Il a été condamné de
25 persécutions, crime contre l'humanité, et fait appel à l'heure actuelle de
26 ce jugement. Biljana Plavsic était un haut responsable politique serbe de
27 Bosnie, connue pour son idéologie nationaliste extrême, membre de la
28 présidence collective de Bosnie et de la présidence collégiale de la
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1 République serbe. Elle a plaidé coupable au crime de persécution, et a été
2 condamnée à 11 ans d'emprisonnement. L'offensive menée contre la population
3 musulmane civile de Visegrad s'inscrivait dans le cadre d'une offensive de
4 plus grande envergure visant la population civile non-serbe de Bosnie. Ce
5 plan comportait six objectifs stratégiques énoncés officiellement lors de
6 la 16e Session de l'assemblée de la République serbe de Bosnie-Herzégovine
7 en date du 12 mai 1992. Le cliché 33 illustre le premier objectif, la
8 séparation du peuple serbe des autres ou des deux autres communautés
9 nationales.
10 Objectif réalisé à Visegrad en bonne partie grâce aux crimes commis
11 par Milan et Sredoje Lukic.
12 Le deuxième objectif stratégique était de créer un couloir entre Semberija
13 et la Krajina afin de relier les territoires serbes en Bosnie orientale et
14 occidentale. Ce n'est pas vraiment pertinent pour cette affaire.
15 Puis ici au cliché 34, l'établissement un corridor dans la vallée de la
16 Drina, éliminant toute frontière entre les Serbes. En fait, ce corridor
17 constituait une large étendue de territoire recouvrant presque toute la
18 Bosnie orientale, et Visegrad se trouvait en plein centre de ce territoire.
19 Les quatrième, cinquième et sixième objectifs n'ont aucune incidence
20 directe sur cette affaire. Vous y voyez ces objectifs à la diapositive 35.
21 Quatrième objectif, établir une frontière le long de l'Una et de la
22 Neretva; cinq, la division de Sarajevo; et en sixième lieu, sixième
23 objectif stratégique, fournir aux Serbes un accès à la mer.
24 Ce projet a été mené à bien de manière rapide et brutale au printemps et en
25 été 1992. Le plan criminel dans son ensemble fut couronné de succès. De
26 nombreuses municipalités sont tombées aux mains des Serbes au printemps
27 1992. Pour donner à la Chambre une idée, un aperçu du plan dans son
28 ensemble, j'aimerais vous montrer une série de diapositives, 36 à 42, qui
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1 vous montrent dans l'ordre chronologique la prise de contrôle du
2 territoire. Le processus commence lorsque Arkan est entré à Bijeljina
3 pendant la nuit du 31 mars au 1er avril. Pendant cette première semaine,
4 plus de 12 municipalités ont été prises par les Serbes.
5 Pendant la deuxième semaine, les prises de contrôle se sont
6 concentrées dans la vallée de la Drina et se sont étendues en Bosnie
7 orientale à des endroits tels que Visegrad, Foka et Sekovici. Visegrad
8 comportait certaines caractéristiques qui expliquent son importance
9 stratégique lors du conflit. Tout d'abord, le grand barrage
10 hydroélectrique, l'usine hydroélectrique déjà mentionnée; et en deuxième
11 lieu, le fait que la ville est une plaque tournante qui se trouve sur l'axe
12 principal reliant Belgrade et Sarajevo. Puis à la diapositive 39, on voit
13 les prises de contrôle qui se poursuivent pendant la troisième semaine avec
14 Bratunac et Kalinovic. Vogosca allait également tomber aux mains des Serbes
15 pendant cette semaine. Les Serbes se sont également emparés de force de
16 Bosanski Novi et de Sanski Most. L'avancée serbe s'est poursuivie dans la
17 Krajina de Bosnie pendant les derniers jours du mois d'avril, à Prijedor
18 notamment, où quelques-uns des crimes les plus atroces ont été commis. La
19 campagne dans la vallée de la Drina s'est poursuivie et a abouti à la prise
20 de Vlasenica.
21 A la fin du mois d'avril, donc au cours de cette période de 30 jours, 35
22 municipalités avaient été prises, c'est-à-dire en moyenne une municipalité
23 par jour.
24 Le rythme de ces prises de contrôle s'est ralenti au cours des mois
25 qui ont suivi, mais le rythme des crimes n'a fait que s'accélérer. L'on a
26 fini d'encercler Sarajevo grâce à la prise de contrôle de Hadzici, Trnovo
27 et Ilidza au mois de mai. Et grâce à la chute de Rogatica et Rudo, toutes
28 les municipalités le long de la frontière orientale de la Bosnie se sont
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1 trouvées aux mains des Serbes à l'exception de Srebrenica. Et la Krajina de
2 la Bosnie était entièrement sous le contrôle des Serbes fin juin grâce à la
3 prise de Prnjavor et de Kotor Varos. Vous verrez que l'essentiel des crimes
4 commis par les deux accusés et dont il est fait état dans cet acte
5 d'accusation ont été commis pendant le mois de juin.
6 A la fin de l'été, grâce à la prise de contrôle de Derventa et d'Odzak,
7 plus de 50 municipalités se trouvaient sous contrôle serbe afin de garantir
8 le bon fonctionnement du couloir Posavina.
9 Les deux cartes que vous voyez à l'écran, la diapositive 43 sont des cartes
10 démographiques, l'une date de 1991, avant la campagne de nettoyage ethnique
11 menée en 1992, et l'autre date de 1997. Vous verrez à quel point le plan
12 d'ensemble était couronné de succès grâce à ces statistiques qui montrent
13 des changements démographiques spectaculaires. Tout au long du corridor de
14 Posavina, c'est-à-dire l'oval horizontal tout au haut de la carte,
15 l'objectif donc du deuxième objectif stratégique, vous verrez un
16 déplacement spectaculaire de population, comme indiqué dans le fait que
17 cette zone est devenue rouge. L'oval vertical à droite de la carte
18 représente la vallée de la Drina. Encore une fois, vous voyez un changement
19 spectaculaire de couleur reflétant la restructuration démographique. Les
20 municipalités qui étaient mixtes ou à majorité musulmane sont devenues des
21 municipalités serbes que l'on voit en rouge.
22 Et vous verrez aussi, que de façon tout aussi spectaculaire Visegrad ayant
23 été une municipalité avec une nette majorité musulmane se transformant en
24 une municipalité où il y a très peu de Musulmans valides, voire aucun.
25 Ces prises de contrôle et des crimes commis ont abouti à un déplacement de
26 centaines de milliers de personnes, près de 40 000 personnes expulsées de
27 force de leurs maisons.
28 Les deux accusés dans l'affaire ont informé la Chambre et le bureau du
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1 Procureur qu'ils ont l'intention de faire valoir pendant la présentation de
2 leurs moyens de preuve qu'ils n'étaient pas présents à Visegrad au moment
3 où les crimes ont été commis. Milan Lukic prétend qu'il n'était pas présent
4 à Sase près de la Drina le 7 juin 1992 lorsque les cinq hommes ont été
5 abattus.
6 Il dit avoir été à Belgrade avec des amis et il nous a dit que ces
7 amis ont accepté de venir témoigner devant la Chambre pour confirmer ses
8 propos. Sredoje Lukic n'est pas accusé de ces meurtres.
9 Pour ce qui est du meurtre des sept employés de l'usine de Varda,
10 autre crime dont seul Milan Lukic est accusé, il reconnaît avoir expulsé
11 les employés de force mais nie avoir été la personne qui les a conduits à
12 la rivière et les a abattus.
13 Les deux hommes sont accusés d'avoir mis le feu aux 70 personnes dans
14 la rue Pionirska. Milan Lukic affirme qu'il était engagé ou participait à
15 des actions militaires ailleurs entre le 13 et le 15 juin, donc ne pouvait
16 pas être présent en ville. Sredoje Lukic affirme qu'il était à Obrenovac en
17 Serbie, encore une fois entre les 13 et 15 juin. Au moment de l'incendie à
18 Bikavac, Sredoje Lukic prétend encore une fois qu'il se trouvait à
19 Obrenovac. Il s'apprêtait à célébrer la fête serbe de Vivodan le 28 juin.
20 Milan Lukic prétend qu'il était au sein de sa famille à Rujiste à
21 l'extérieur de Visegrad et dit que des voisins musulmans viendront
22 témoigner de ce fait.
23 En ce qui concerne le meurtre de Hajrija Koric et les sévices
24 infligés à Uzamnica aucun alibi n'a été avancé, en tout cas, à ce jour. Ces
25 alibis vont forcément nous amener à nous interroger sur la véracité de
26 l'identification effectuée par les victimes et les témoins, identification
27 de ces hommes, et que ces identifications soient ou non suffisamment
28 fiables pour justifier une condamnation par cette Chambre, sera l'une des
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1 questions principales qu'il faudra trancher. Nous sommes en train
2 d'enquêter sur ces alibis et nous espérons en dépit de tout le temps qui
3 s'est écoulé pouvoir réunir suffisamment d'éléments de preuve pertinents
4 concernant les lieux où ils se trouvaient lorsque ces crimes ont été commis
5 et nous espérons pouvoir les présenter lors de notre réplique.
6 Mais j'aimerais déjà vous dire quelque chose à ce stade. Concernant
7 ces alibis, je m'attends à ce que les éléments de preuve concernant leur
8 présence sur les lieux du crime se répartissent en trois grandes
9 catégories.
10 Tout d'abord, les témoignages des victimes et d'autres témoins
11 d'après lesquels on voit qu'ils ont eu tout le temps de voir les hommes qui
12 ont commis les crimes à leur encontre, mais que dans de nombreux cas ils
13 connaissaient bien Milan et Sredoje Lukic. A de nombreuses reprises, Milan
14 et Sredoje Lukic ont choisi les victimes qu'ils connaissaient dans la
15 ville, qu'ils connaissaient, parce qu'ils avaient été à l'école ensemble ou
16 parce qu'ils étaient voisins.
17 Le premier témoin que vous entendrez aujourd'hui est né la même année
18 que Milan Lukic et a été à la même école secondaire que lui à Visegrad, une
19 école technique. Il vous dira quel métier Milan Lukic avait appris et aussi
20 à quel moment il a quitté Visegrad pour se rendre à Obrenovac. Il vous
21 décrira comment il a reconnu Milan Lukic sur le champ lorsque Lukic est
22 entré dans son appartement le 7 juin.
23 Il vous décrira que lors de ce long voyage qui les a menés à Sase, il
24 était à côté de lui dans la voiture, et tout cela s'est passé en plein
25 jour.
26 En même temps, vous entendrez des témoins qui vous décriront Sredoje
27 Lukic qui était un des policiers en ville pendant des années. On l'a vu
28 régulièrement lors de ses patrouilles, des gens l'ont vu alors que même il
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1 faisait leurs courses en ville.
2 Les témoins vous décriront le fait que parfois les accusés avaient de
3 la peinture noire sur les visages et on les voyait très clairement. Mais de
4 toute manière, dans l'esprit des accusés cela importait peu, puisque leur
5 intention était de tuer toutes ces personnes. Lorsque nous avons commencé à
6 être informés de certains détails des alibis indiqués, invoqués par les
7 deux accusés, nous avons étudié quelques anciens dossiers pour glaner des
8 informations qui pourraient nous éclaircir quelque peu quant aux lieux où
9 se trouvaient ces deux accusés.
10 Nous avons décelé un schéma troublant et persistent de crimes graves
11 commis par ces deux hommes. Messieurs les Juges, Madame et Messieurs les
12 Juges, nous allons, enfin, l'Accusation va démontrer que ces hommes ont
13 commis de nombreux crimes pendant la période où ils prétendent ne pas avoir
14 été sur place.
15 Il y avait notamment des viols. Et nous démontrerons - donc plusieurs
16 de ces crimes étaient des viols, plusieurs victimes viendront vous dire que
17 ces hommes ne pouvaient pas se trouver à Obrenovac à ce moment-là
18 participant à des opérations militaires, parce qu'à ce moment-là ils
19 étaient en train de les violer, ils se trouvaient à quelques centimètres.
20 Les témoins décriront ou un témoin vous décrira la manière dont elle
21 a été violée par Milan Lukic au moment même où il prétend avoir été dans sa
22 famille, et elle vous montrera ces tuméfactions, sa poitrine brutalisée,
23 les blessures qui lui ont été infligées en raison de la violence à son
24 encontre par Milan Lukic et d'autres hommes à qui Lukic a demandé de la
25 violer.
26 Vous entendrez aussi de la part de VG-63, qu'au moment où ces hommes
27 prétendent qu'ils n'étaient pas à Visegrad, elle était violée à l'école
28 primaire au centre de Visegrad, un endroit régulièrement utilisé pour
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1 détenir les Musulmans. Milan l'a fait monter et l'a violée de force alors
2 que Sredoje et Lukic étaient en bas et empêchaient les autres détenus
3 d'intervenir.
4 Une autre jeune femme vous décrira le fait qu'elle était une des victimes
5 de l'incendie de la rue Pionirska et vous verrez, vous entendrez des
6 témoins vous dire ce qu'elle leur a raconté, ce que Milan lui a fait, comme
7 ils ont tenté de venir à son secours, comment son corps était tuméfié, son
8 vagin saignait, et que la dernière nuit où il l'a violée, c'est la nuit où
9 il prétend avoir participé à une mission militaire à l'extérieur de la
10 ville. Certaines femmes ont refusé de collaborer avec le Tribunal il y a
11 quelques années, car leur douleur était trop grande, leur traumatisme était
12 trop aigu, elles ne voulaient que penser à l'avenir. Certaines n'ont jamais
13 raconté tout cela à leur famille. Il n'y a qu'un mois qu'une des femmes en
14 parlant à un enquêteur de l'Accusation a accepté de nous raconter son
15 histoire, comment elle a vu Milan et Sredoje Lukic le 27 juin à Bikavac, le
16 jour de l'incendie.
17 Après l'avoir violée, Milan lui a dit, "Maintenant tu auras des enfants
18 chetniks."
19 Un autre témoin, qui, récemment, a accepté de témoigner décrira la manière
20 dont elle a été violée tant par Sredoje que par Milan Lukic. Elle vous dira
21 comment elle a vu dans la matinée du 28 juin, Milan Lukic, elle a vu des
22 cendres sur son visage dans la matinée qui a suivi la nuit de l'incendie à
23 Bikavac.
24 Outre ces viols vous entendrez d'autres témoins vous parler de crimes
25 perpétrés pendant la période où Milan et Sredoje Lukic prétendent ne pas
26 avoir été en ville, par exemple, VG-11, qui vous décriront qu'ils ont été
27 emmenés en car avec d'autres hommes musulmans vers un bois et avoir été
28 abattus par des tirs de fusil automatique.
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1 Un homme a pu fuir dans la forêt, il avait les bras ligotés et le bus
2 s'était arrêté un moment devant l'hôtel de Visegrad et Milan Lukic est
3 monté dans le bus, cherchait certains hommes musulmans et ce jour-là où il
4 est monté dans le bus c'était bien le 14 juin 1992, le jour de l'incendie
5 dans la rue Pionirska.
6 Je présenterai à la Chambre des déclarations des auteurs eux-mêmes,
7 qui contredisent ce qui est maintenant affirmé devant la Chambre, Mitar
8 Vasiljevic a été condamné pour les meurtres de plusieurs hommes musulmans
9 près de Sase, et pendant son procès il a témoigné pendant plusieurs jours
10 au sujet des événements à Visegrad et l'Accusation soutient qu'une bonne
11 partie de son témoignage était inexacte. Et vous verrez une brève séquence
12 où vous entendrez Mitar Vasiljevic vous parler du fait que Milan Lukic
13 était présent à Sase le 7 juin 1992 et qu'il a tué ces cinq hommes.
14 [Diffusion de la cassette vidéo]
15 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
16 "Question. Donc vous avez quitté Vilina Vlas en voiture ?
17 Réponse. Oui, c'est exact.
18 Question. Quelle était la première voiture dans la colonne ?
19 Réponse. La voiture de Lukic, une Passat.
20 Question. A un moment donné, vous êtes arrivés à un carrefour à Sase.
21 Qu'est-il advenu à ce moment-là ?
22 Réponse. Quelque 500 mètres plus loin après le carrefour vers la droite en
23 direction de Prelovo, il s'est arrêté.
24 Question. Est-ce qu'il est sorti de la voiture ?
25 Réponse. Oui.
26 Question. Et d'autres passagers dans sa voiture ?
27 Réponse. Oui. Nous sommes tous descendus de la voiture, y compris les
28 personnes qui étaient dans la Yugo, ils sont également descendus de la
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1 voiture conformément aux ordres qu'il a donnés.
2 Question. Ensuite que s'est-il passé ?
3 Réponse. Il nous a dit d'aller vers la Drina. A ce moment-là, les gens
4 commençaient à paniquer, la situation manifestement n'était pas normale, et
5 j'ai dit à Milan, 'Mais enfin laisse ces gens tranquille.' Mais il a dit,
6 'Je vous ai dit de descendre vers la Drina.' Donc les gens se sont
7 exécutés, se sont rapprochés de la berge. Meho est resté à mes côtés, il
8 pleurait, et j'ai vu à un moment donné Milan qui a mis son bras autour de
9 Meho, l'a pris dans ses bras, je me suis dit qu'il allait avoir de la
10 compassion pour lui, et il a dit, 'Mitar, est-ce que tu voudrais bien
11 m'aider ?' Et j'ai dit, 'Milan, je t'en prie, laisse ces gens tranquille,
12 ils ne t'ont rien fait.' Ces autres Musulmans ont commencé à supplier mais
13 cela n'a eu aucun effet sur Milan. Il a dit, 'Je ne discute pas, allez-y et
14 descendez vers la Drina.' Et ces gens continuaient à le supplier. Il y
15 avait des gens qui ne savaient même pas nager, mais il était inébranlable.
16 Question. Qui a dit, qui sait nager ?
17 Réponse. C'est Milan.
18 Question. D'après ce que vous nous avez dit, on peut en conclure que vous-
19 même, vous vous rendiez compte du danger, vous vous rendiez compte que
20 Milan allait tuer ces gens ?
21 Réponse. Oui, et c'est bien ce qui est arrivé, ils ont été tués peu après,
22 sauf les deux personnes qui ont réussi à fuir. C'est en effet exact.
23 Question. Pensez-vous que vous auriez été en mesure d'empêcher ces
24 meurtres ?
25 Réponse. J'ai fait ce que j'ai pu. Je l'ai supplié, mais je ne pouvais pas
26 lui donner d'ordre, on ne pouvait rien lui demander. Il était cruel. Il
27 n'écoutait pas ces suppliques.
28 Question. Donc vous avez accompagné ces personnes en direction de la Drina
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1 ?
2 Réponse. Oui.
3 Question. Jusqu'où êtes-vous allé, jusqu'au bord de la rivière ou est-ce
4 que vous vous êtes arrêté en chemin ?
5 Réponse. Je me suis arrêté quelque 10 ou 15 mètres avant la rivière,
6 puisque je me suis rendu compte qu'il n'y avait rien à faire, tout était
7 perdu.
8 Question. Est-ce que Milan ou quelqu'un d'autre a obligé ces gens à
9 s'aligner au bord de la rivière ?
10 Réponse. Ils sont allés jusqu'à la rivière. Je suis resté à quelque 10 ou
11 15 mètres près des buissons. J'entendais les bruits, j'entendais les gens
12 qui pleuraient, qui suppliaient, mais en vain. Ensuite les tirs ont
13 commencé. J'ai entendu ces coups de feu, j'ai entendu le gens gémir,
14 c'était atroce, le cris des personnes qui se noyaient.
15 Question. Combien de coups de feu ont été tirés, combien ont été fusillés
16 ?
17 Réponse. Trois d'entre eux ont été jusqu'à la rivière.
18 Question. Y compris Milan Lukic ?
19 Réponse. Oui."
20 Madame et Messieurs les Juges, vous entendrez également une déclaration
21 faite par Milan Lukic lui-même, au sommet de sa brutalité on pense qu'il a
22 même tué des Serbes qui d'après lui avaient une sympathie pour les
23 Musulmans. L'un de ces Serbes assassinés, Stanko Pecikoza aurait été tué
24 sur le territoire de la République serbe. Suite à une enquête du ministère
25 de l'Intérieur, mais dans un long entretien avec la police sur place, il a
26 nié avoir tué M. Pecikoza, mais il a dit ce qui suit, il avait l'air de
27 s'en vanter :
28 "J'ai personnellement liquidé de nombreux Musulmans. Des extrémistes dans
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1 le secteur de Visegrad dont on savait qu'ils avaient maltraité la
2 population serbe. Je refuse tout compromis vis-à-vis des soldats musulmans.
3 A la différence des Serbes de Visegrad, lorsque je m'y suis rendu, j'étais
4 prêt à tuer qui que ce soit qui menaçait les Serbes. J'avais renoncé à
5 toute forme de tolérance et le groupe que je commandais a fait de même."
6 Le mois passé, la traduction en anglais du premier roman de Sasha Stanisic
7 a été publiée en anglais, il avait 13 ans et il vivait à Visegrad lors du
8 début du conflit. J'aimerais vous donner brièvement lecture d'un passage
9 d'un extrait de ce livre intitulé, "Comment le soldat réparait le
10 gramophone." On y voit que toutes les victimes des Aigles blancs ne sont
11 pas faciles à identifier et cela reflète l'importance du travail que la
12 Chambre aura à effectuer dans le cas de ce procès.
13 "Je déteste le pont, je déteste les coups de feu qu'on entend dans la nuit
14 et je déteste le fait que l'on entend le bruit que font les corps jetés
15 dans la rivière. Je déteste d'être aussi éloigné du courage, de ne pas
16 avoir la force nécessaire. Je déteste ce qu'ils font aux filles dans les
17 hôtels à Vilina Vlas et Bikavac. Je déteste le poste de police, les
18 pompiers, les camions chargés de jeunes filles et de femmes qui les amènent
19 à Vilina Vlas et à Bikavac. Je déteste les bâtiments incendiés, les gens
20 qui sautent par la fenêtre afin de fuir les fusils. Je déteste la manière
21 dont les travailleurs continuent à travailler, les enseignants à enseigner.
22 Avant tout je déteste la neige, cette neige qui est hypocrite dans sa
23 pureté parce qu'elle ne recouvre rien. Et je déteste le fait que nous
24 arrivons si bien à tourner les yeux, comme si nous n'avions rien appris au
25 cours de toutes ces années."
26 Aujourd'hui, à l'orée de ce procès, nous commençons justement à déblayer
27 cette neige hypocrite pour étudier de près les crimes et les souffrances
28 qui se cachent sous cette neige. Et peut-être ce procès sera-t-il
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1 l'occasion à permettre à toutes ces personnes qui se sont détournées, qui
2 ont gardé le silence de commencer à parler de manière véridique des
3 événements qui ont eu lieu à Visegrad en juin 1992.
4 Madame, Messieurs les Juges, à la fin de ce procès, je m'attends à ce que
5 les éléments de preuve crédibles et fiables vont démontrer au-delà de tout
6 doute raisonnable le rôle joué par Sredoje et Milan Lukic dans la
7 préparation de quelques-uns des crimes les plus atroces et odieux commis à
8 Visegrad.
9 Cela m'amène à la conclusion du résumé de l'Accusation des éléments de
10 preuve et des raisons pour lesquelles nous affirmons que Milan et Sredoje
11 Lukic sont pénalement responsables des crimes reprochés dans l'acte
12 d'accusation. Je vous remercie de votre temps et de l'attention que vous
13 nous avez accordée. En commençant à présenter nos éléments de preuve, je
14 donne à la Chambre ainsi qu'à Milan et à Sredoje Lukic toutes les garanties
15 d'après lesquelles l'Accusation mènera sa présentation des éléments de
16 preuve conformément aux critères les plus rigoureux d'équité et de justice
17 qui permettront à la Chambre de statuer de manière équitable quant aux
18 actes reprochés aux accusés. Maintenant, nous sommes prêts à citer notre
19 premier témoin, VG-014. Merci.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La Chambre s'attend en effet à cela,
21 Monsieur Groome.
22 Et nous allons faire une pause de 20 minutes.
23 --- L'audience est suspendue à 13 heures 05.
24 --- L'audience est reprise à 13 heures 28.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]
26 M. ALARID : [aucune interprétation]
27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Alarid, les interprètes
28 indiquent qu'ils ne pourront vous entendre convenablement si vous tournez
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1 le dos au micro.
2 M. ALARID : [interprétation] J'ai l'impression d'être obligé de me baisser.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]
4 M. ALARID : [aucune interprétation]
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] N'avons-nous pas un microcravate qui
6 pourrait faciliter les choses à M. Alarid ?
7 M. ALARID : [interprétation] Est-ce que vous m'entendez maintenant ?
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Allez-y. Nous faisons un essai pour
9 les sténotypistes. Est-ce que les sténotypistes entendent suffisamment ?
10 Est-ce que les interprètes entendent suffisamment ?
11 M. ALARID : [aucune interprétation]
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Commencez.
13 M. ALARID : [interprétation] Je m'appelle Jason Alarid, et j'ai rencontré
14 Milan Lukic il y a cinq mois seulement. Je l'ai rencontré le 1er février et
15 lorsque l'on rencontre quelqu'un pour la première fois, contrairement à ce
16 que disait M. Groome, on ne discute pas tout de suite d'alibis. On doit
17 d'abord faire connaissance avec l'individu, savoir qui il était comme être
18 humain pour essayer de comprendre son parcours et de comprendre les chefs
19 d'accusation qui sont portés à son encontre. Je suis venu ici, étant donné
20 les idéaux que représente le Tribunal et, en effet, c'est pour les victimes
21 que nous luttons, pour défendre les victimes, mais je crois que défendre
22 les victimes n'enlève en rien les droits de l'accusé.
23 C'est ce que représente tous les Tribunaux, les droits à un procès
24 juste et équitable, le droit de ne pas être jugé d'avance, et l'on puisse
25 entendre l'ensemble des éléments de preuve afin d'être jugé à la lumière de
26 ces éléments de preuve. Je dois dire, Monsieur le Président, que j'ai peur.
27 J'ai peur pour Milan Lukic. C'est vrai que je ne connais pas très bien ce
28 Tribunal.
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1 J'ai le sentiment que la manière dont les éléments de preuve sont
2 présentés à l'encontre de cet accusé, qu'il y a une sorte de tendance à
3 préjuger, à juger d'avance l'accusé, car on fait lire et relire les actes
4 d'accusation à l'encontre de mon client. A chaque fois que le Tribunal
5 entend et voit ces accusations, en effet ça vous envoie quelque chose au
6 plus profond de vous-même. Ça vous donne envie de quelque chose. Ça vous
7 donne envie de faire respecter les droits des victimes comme le disent nos
8 textes.
9 Mais il y a plusieurs histoires, et pas seulement l'histoire de deux
10 ou trois témoins de l'Accusation qui disent pouvoir identifier M. Lukic
11 dans chacun de ces incidents, et je pense que lorsque vous verrez la
12 totalité de l'histoire, vous allez pouvoir déterminer que M. Lukic n'est
13 pas coupable. Je n'ai pas dit pour autant qu'il est innocent. L'innocence
14 est un mot qui ne s'applique pas à tous ceux qui ont participé à la guerre.
15 Lorsque l'on parle de la guerre, la guerre est toujours quelque chose
16 d'horrible qui produit des choses horribles. Mais je pense qu'en effet M.
17 Lukic n'est pas coupable des crimes tels que décrits dans l'acte
18 d'accusation. Je vais vous dire pourquoi. D'abord, il faut commencer avec
19 l'homme, Milan Lukic. Qui est-il ? Comment est-ce qu'il peut arriver à un
20 stade où il puisse être accusé de crimes terribles à l'encontre de ses
21 propres voisins, dans la petite ville de Visegrad ?
22 Milan Lukic a à peu près le même âge que moi-même, donc à l'époque il avait
23 23 ans. Il n'avait pas été à Visegrad depuis le lycée puisqu'il en était
24 parti après l'école secondaire. Après le lycée, il est d'abord allé faire
25 des études à Belgrade, ensuite il est allé en Allemagne avec un ami,
26 ensuite il s'est rendu en Suisse. Mais avant d'en arriver là, il était tout
27 simplement Milan Lukic, fils de Milo et de Kata Lukic. Pourquoi est-ce que
28 c'est important ? C'est important pour montrer où est-ce qu'il a grandi. Il
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1 était le plus jeune enfant. Il a deux frères et sœurs. Son père était
2 orphelin à l'âge de 3 ans, lorsque son père a été amené par les Nazis. Donc
3 lorsqu'il s'agit de fascisme et d'Aigles blancs et le sens de tout cela, M.
4 Milan Lukic a quelque chose à dire. Il n'est pas fasciste.
5 Ses parents étaient des agriculteurs. Il était berger, il s'est occupé des
6 champs, des animaux. Il a grandi avec des Musulmans tout autour. Il avait
7 des amis musulmans à l'école. Son premier professeur était Musulman. Ses
8 premiers amis étaient Musulmans. Ses premières petites amies étaient
9 Musulmanes. Donc pourquoi pourrait-on l'accuser de ces faits ? Tout
10 simplement, parce que le nom de Milan Lukic est un des noms les plus
11 courants en Serbie ou en Bosnie. Lukic est un nom courant, Milan est très
12 courant et l'association des deux noms est très commune. Lorsque j'ai
13 abordé cette affaire, j'ai essayé de comprendre, par rapport à ma propre
14 expérience, comment est-ce que je pourrais en faire du sens ? Chez moi,
15 dans la petite ville de Las Vegas, au Nouveau-Mexique, qui est un village
16 de personnes d'origine mixte, avec des latinos et des anglos et à
17 l'université, ils s'y retrouvent, en effet. Parmi cette population de 30
18 000 habitants, il existe encore aujourd'hui des tensions ethniques. Vous
19 avez des latinos qui n'aiment pas les anglos, comme on les appelle, et
20 vice-versa, et vous rencontrez des préjugés dans les deux communautés. J'ai
21 essayé de comprendre ce qui se passerait si la ville de Las Vegas, Nouveau-
22 Mexique, s'explosait comme Visegrad en 1992 ?
23 Quel rôle Milan Lukic, Sredoje Lukic ou d'autres joueraient ? Mitar
24 Vasiljevic, quel rôle jouerait-il ? Je pense ce qui est le plus grave et
25 qui peut leur faire du tort, c'est que tout simplement ils auraient été
26 faussement accusés parce que c'était des locaux. C'était des gens connus.
27 Imaginez des gens qui vous connaissent depuis toute votre vie, dire de
28 Milan Lukic : "Je ne comprends cela. Il était l'ami des Musulmans et il les
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1 saluait dans la rue. Je ne comprends pas." Mais le problème c'est qu'une
2 fois que l'on commence à faire des accusations de la sorte et une fois que
3 l'on porte en quelque sorte cette étiquette et que le nom est si courant,
4 n'est-ce pas facile de détester Milan Lukic sans savoir qui il est ? Il y a
5 de nombreux cas où l'Accusation n'a pas de témoins oculaires. Tout est basé
6 sur l'ouï-dire.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] L'interprète demande à ce que le
8 conseil ralentisse.
9 M. ALARID : [interprétation] Désolé, mais comme le temps qui m'est imparti
10 est bref, je me dépêche, Monsieur le Président.
11 Vous savez, la rumeur contribue à condamner les gens, n'est-ce pas ? Ça
12 arrive dans les lycées lorsqu'on raconte que telle ou telle n'est pas
13 innocente, n'est plus vierge. C'est une rumeur qui se propage, et même les
14 gens qui ne la connaissent pas diront ces choses-là. Donc il y a des
15 individus, des Musulmans que l'on va amener ici dans ce Tribunal qui diront
16 qu'ils ne croient pas que Milan Lukic a fait ces choses-là et c'est cela
17 qui est tellement puissant, si vous voulez, dans un pays où il y a
18 tellement de divisions ethniques.
19 Cela paraît insurmontable. Comment est-ce que nous pouvons prouver
20 que c'est le cas ? Le cas de Mitar Vasiljevic, son parrain, le parrain de
21 ses enfants, comment est-ce qu'on peut explique cela ? C'est tout
22 simplement parce que Mitar Vasiljevic s'est vu obligé de mentir au Tribunal
23 pour se défendre. Il avait besoin d'impliquer Milan. Il n'avait pas d'autre
24 choix pour sauver sa propre vie. Songez que Mitar était présent et peut-
25 être que Milan ne l'était pas. Le problème c'est que parmi les deux
26 premiers témoins qui seront cités à témoigner, il va y avoir une cohérence
27 dans leurs déclarations indiquant que Milan Lukic se trouvait le long de la
28 Drina.
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1 Vous allez devoir décider si M. Mitar Vasiljevic avait une véritable
2 motivation à mentir à ce Tribunal afin d'affaiblir les chefs d'accusation
3 qui étaient portés à son encontre.
4 Il l'a fait à un moment où Milan Lukic n'était pas détenu. Donc il n'avait
5 pas grand-chose à perdre à ce moment-là.
6 Il est important de passer au chef suivant : l'incendie de la rue de
7 Pionirska. C'est une accusation terrible. J'entends moi-même les voix des
8 victimes qui crient. En effet, c'est horrible et cela paraît insurmontable,
9 y compris pour le conseil de la Défense. Qu'est-ce que l'on peut invoquer
10 pour acquitter Milan Lukic ? D'abord, il est accusé d'être le chef des
11 Aigles blancs. Si vous regardez le jugement en appel -- pardon, le jugement
12 en première instance dans l'affaire Vasiljevic en ce qui concerne les
13 autres individus mentionnés dans les éléments de preuve. Ils sont basés sur
14 les éléments de preuve de ce procès et non pas afin de condamner d'autres
15 individus, y compris les deux co-accusés, Milan Lukic et Sredoje Lukic, qui
16 n'ont pas été arrêtés et qui n'ont pas été jugés coupables sans doute
17 raisonnable des chefs d'accusation.
18 Ils ne sont pas liés par les conclusions de ce procès et pourront
19 remettre en cause tous éléments de preuve présentés dans le cadre de ce
20 procès qui les implique si ces éléments sont présentés lors de leur propre
21 procès devant ce Tribunal.
22 C'est une déclaration d'une grande profondeur, mais qui a été totalement
23 ignorée, y compris par la Chambre Vasiljevic dans le paragraphe 46, qui
24 indique que les paramilitaires serbes étaient dirigés par le co-accusé,
25 Milan Lukic. Il s'agit d'un rapport présenté en 1992-1993, le dernier
26 rapport de la Commission des Nations Unies, la Commission d'experts. Je me
27 suis référé à ce document, parce que pour un tel document, il doit y avoir
28 des éléments de preuve conséquents. Je me suis dit je ne peux pas gagner si
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1 on a pu prouver qu'il était le chef des Aigles blancs, quelque 124 pages et
2 il n'y a qu'un paragraphe et un tableau qui sont consacrés à Milan Lukic.
3 Ce qui est intéressant c'est qu'ils n'ont même pas parlé des chefs
4 d'accusation devant ce Tribunal en tant que crimes dont on a allégué qu'il
5 était coupable.
6 Pourquoi ce n'est pas fiable comme théorie de dire qu'il était le chef des
7 Aigles blancs ? Il avait 23 ans à l'époque, Milan Lukic. Il était étranger
8 à la communauté à l'époque. Qui pourrait croire que quelqu'un qui revient
9 au village va être appelé aux forces de réserve de police, et au bout de
10 quelque 30 jours devient le chef ? C'est quelque chose d'important. On
11 nomme chef une personne qui a une certaine expérience, et bien souvent
12 l'expérience va de pair avec l'âge. Le général Jovanovic, dans un stade
13 rempli de 4 000 Musulmans, a annoncé que les Aigles blancs étaient sous son
14 commandement. C'est M. Groome qui nous l'a dit aujourd'hui même.
15 Songez que le VG-032 qui va témoigner - son témoignage a déjà été présenté
16 sous serment dans Vasiljevic - il a dit que pour les Musulmans, tout le
17 monde était considéré comme Aigles blancs. Tous les paramilitaires étaient
18 considérés comme des Aigles blancs.
19 Par la suite, il s'est rendu compte que certains étaient les hommes de
20 Seselj. Il s'est rendu compte que d'autres étaient les hommes d'Arkan. Mais
21 pour les Musulmans, c'étaient tous des Aigles blancs. Pourquoi ? Parce que
22 l'aigle blanc, à savoir le symbole de la nationalité serbe, le drapeau, les
23 deux aigles blancs qui se font face, pour les Musulmans c'est comme le
24 "swastika" pour un Juif, et ça, ça été dit par VG-032. C'est une analogie
25 puissante, parce que l'on peut toujours invoquer la revanche comme
26 motivation au mensonge, surtout si la rumeur publique indiquait que Milan
27 Lukic était un criminel. Vous savez, si je connaissais un serveur de café
28 ou quelqu'un au Nouveau-Mexique, tout le monde le connaîtrait. On
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1 connaîtrait pas forcément le commandeur, on ne connaîtrait pas forcément
2 les brigades, toutes les brigades qui rentrent et qui sortent de la ville
3 ni d'ailleurs les autres forces qui rejoignent les locaux. A l'époque,
4 c'était un combat noble. Pourquoi ? Parce que les deux parties avaient
5 souffert. Il y avait eu des atrocités de part et d'autre. Toutes ces
6 atrocités avaient été racontées de part et d'autre, si bien, qu'il y avait
7 une véritable ferveur antiethnique. Selon l'endroit où vous vous trouviez,
8 les Serbes étaient victimes, les Croates étaient victimes, les Bosniaques
9 étaient victimes.
10 Comment peut-on prétendre qu'il serait facile de revenir et de dire
11 que les trois locaux que l'on connaissait, Mitar Vasiljevic, Sredoje Lukic
12 et Milan Lukic étaient les seuls responsables des crimes ? Tout simplement,
13 parce que si vous êtes du coin, ce sont les seuls que vous connaissez. Ce
14 sont les seuls noms dont vous vous souvenez, et après tout, puisqu'il y
15 avait la rumeur publique qui en parlait, pourquoi ne pas alors décider que
16 c'est bien le Milan ou le Lukic que vous connaissiez ?
17 L'événement de la rue Pionirska est très important. Pourquoi ? Parce
18 qu'un témoin oculaire a été totalement discrédité. Il disait que Mitar
19 Vasiljevic avait souffert d'une référence, puisqu'on l'avait vu soûl le
20 matin même, et qu'il était tombé de son cheval. En fait, il y a eu des
21 mensonges, il y a eu des suppositions. Si un témoin dit, "J'ai vu deux
22 copains ensemble, des gens que je connais depuis que j'étais jeune puisque
23 j'ai grandi avec eux, j'ai été à l'école à eux, ou que c'est un serveur que
24 je connaissais qui m'a servi au café," et si l'on peut prouver que l'un
25 d'eux n'était pas présent, il me semble que cela remet en cause la
26 crédibilité de ce témoin.
27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Alarid, je suis
28 désolé, nous avons dépassé la durée de notre session.
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1 M. ALARID : [aucune interprétation]
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si vous voulez continuer, vous
3 allez devoir reprendre demain à 2 heures 15.
4 M. ALARID : [interprétation] J'ai bien compris, Monsieur le
5 Président.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il vous faut encore combien de temps
7 ?
8 M. ALARID : [aucune interprétation]
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons lever la séance jusqu'à
10 demain à 14 heures 15.
11 --- L'audience est levée à 13 heures 47 et reprendra le jeudi 10
12 juillet 2008, à 14 heures 15.
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