Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 12 juillet 2006

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 22.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Visnjic, est-ce que vous-même

6 ou M. Sepenuk, est-ce que vous avez d'autres requêtes à nous présenter ?

7 M. SEPENUK : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Allez-y, Monsieur.

9 M. SEPENUK : [interprétation] Concernant la recevabilité de ce rapport - on

10 va l'appeler comme cela pour l'instant - la pièce 473, on va l'appeler

11 comme cela aussi.

12 Je voudrais aborder cette question, et cela sur la base de l'ordre

13 concernant la procédure et les moyens de preuve que la Chambre a communiqué

14 hier. Il y a trois domaines de cette ordonnance qu'il convient de

15 considérer. Tout d'abord, la recevabilité des éléments par ouï-dire;

16 ensuite, la recevabilité de ce livre; et troisièmement, la recevabilité du

17 rapport, puisque votre ordonnance concerne ces trois éléments.

18 Je voudrais d'abord aborder la question des éléments présentés par ouï-

19 dire. Mais avant cela, je voudrais parler de la recevabilité du livre.

20 Comme on le dit en principe dans votre ordonnance, le livre et d'autres

21 documents semblables, très longs, ne vont pas être versés en totalité, mais

22 uniquement leurs portions, si les Juges de la Chambre jugent que ceci

23 convient d'être fait.

24 Dans ce cas précis, le bureau du Procureur n'a pas du tout dit qu'il

25 souhaitait uniquement présenter des parties de ce livre. Je n'ai vu aucune

26 requête allant dans ce sens. Ils souhaitent, au contraire, verser la

27 totalité de ce livre. Ils vont encore en parler, j'imagine, mais je suppose

28 pour l'instant qu'ils demandent que l'intégralité de ce document soit

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1 versée au dossier, et je pense que ceci n'est tout simplement admissible.

2 La deuxième partie concernant l'ordonnance récente de la Chambre de

3 première instance concerne la pièce 473 qui est intitulée l'analyse des

4 droits de l'homme et les observations de la Mission des vérificateurs au

5 Kosovo de l'OSCE. Il est clair qu'il ne s'agit là pas d'un véritable

6 rapport parce que dans votre ordonnance, vous parlez effectivement de

7 rapports, mais ceci ne concerne pas ce rapport-là puisqu'il s'agissait de

8 rapports des témoins experts. Mme Michel n'était pas là en tant que témoin

9 expert et elle n'est pas qualifiée pour l'être.

10 Ce rapport est un exemple classique des moyens de preuve de troisième main

11 ou par ouï-dire. Puisqu'il s'agit d'une déclaration anonyme, il ne convient

12 pas de contre-interroger les personnes qui sont à l'origine de ces

13 déclarations. Il existe peut-être une jurisprudence à ce sujet, mais cela

14 ne clôt pas l'affaire. En vertu de l'article 89(C), il convient de décider

15 si un document est suffisamment fiable, s'il s'agit donc d'un document par

16 ouï-dire. Comme vous avez déjà dit : "Les Juges de la Chambre vont vérifier

17 la fiabilité des éléments présentés par ouï-dire, et c'est une condition

18 sine qua non pour évaluer la valeur probante de ces éléments en vertu de

19 l'article 89(C)."

20 Tout d'abord, comme vous l'avez bien dit hier, ici, nous avons aussi

21 les instructions de la Chambre d'appel dans l'affaire Aleksovski. Vous avez

22 cité ceci dans votre ordonnance. Il convient d'examiner de près cette

23 décision de la Chambre d'appel où il est dit : "Il existe des circonstances

24 infiniment différentes concernant les éléments par ouï-dire."

25 La première chose qu'il faudrait faire, je suggère, avec tout le respect

26 que je vous dois, c'est de voir quel est le cas de cette pièce, la pièce

27 473. Quand on ouvre ce document-là, la première chose que l'on voit à la

28 sixième page, c'est une petite reconnaissance de la part de l'ambassadeur

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1 Gerard Staudmann --

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Attendez, un instant. J'ai un

3 exemplaire de cela, c'est tout à fait par hasard que je l'ai, mais les

4 autres Juges ne l'ont pas puisque ce document n'existe pas dans sa version

5 papier. Donc, veuillez nous montrer cela aussi --

6 M. SEPENUK : [interprétation] Oui, Monsieur le Président --

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] -- par voie électronique.

8 Vous avez dit que ceci figurait sur la page 6 [comme interprété]?

9 M. SEPENUK : [interprétation] Effectivement, à la page 6.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Page 6.

11 M. SEPENUK : [interprétation] La pièce du Procureur 473.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je l'ai effectivement sur l'écran de

13 mon ordinateur, mais -- voilà, cela y est.

14 M. SEPENUK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous pouvez continuer, Maître Sepenuk.

16 M. SEPENUK : [interprétation] Comme l'ambassadeur Staudmann l'a dit dans sa

17 déclaration où il remercie tout d'abord l'aide financière des pays

18 européens de l'Europe de l'Ouest et des Etats-Unis, il continue pour dire

19 que : "L'OSCE est reconnaissante de l'aide et des conseils du personnel du

20 Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie dans le développement de

21 ce rapport."

22 Au cours de la déposition de Mme Mitchell, nous avons compris que le

23 Tribunal pénal international et l'OSCE avaient des contacts quotidiens

24 quand il s'agissait d'écrire ce rapport et de recueillir les informations

25 pour l'élaboration de ce rapport. Le Procureur a manifestement utilisé ces

26 informations, et ces informations ont également servi à écrire ce rapport.

27 Si vous voulez bien vous référer à la septième page du rapport, et je vais

28 vous demander de nous montrer cela sur l'écran. Comme vous pouvez voir, le

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1 préambule a été écrit par le Juge Louise Arbour. Elle était le Procureur de

2 ce Tribunal. Elle avance quelques louanges dans ce préambule, mais il ne

3 faut pas oublier que Mme Arbour était le Procureur qui a signé cet acte

4 d'accusation en 1999, au moment où pour la première fois cet acte

5 d'accusation avait été dressé contre les accusés.

6 Si techniquement l'OSCE n'a pas travaillé pour le compte du bureau du

7 Procureur, pratiquement parlant, il faut dire que le procureur principal,

8 le procureur à l'époque du bureau du Procureur de ce Tribunal, était aussi

9 celui qui a fait écrire l'introduction de ce rapport. Ce rapport, si les

10 Juges de la Chambre considèrent que cet élément est recevable, dans ce cas-

11 là, on pourrait tout aussi bien verser au dossier le mémoire préalable au

12 procès de M. Hannis. Je pense que l'analogie est tout à fait convenable,

13 puisque ce rapport ne devrait tout simplement pas être versé au dossier. Ce

14 rapport est une série d'allégations qui n'est pas basée sur des éléments

15 fiables ou sur des preuves.

16 Finalement, pour déterminer la fiabilité de ce rapport, nous demandons aux

17 Juges de la Chambre de prendre en considération la déposition de Mme Sandra

18 Mitchell. Quelle est l'importance de cette déposition ? Ce que je voudrais

19 vous dire très brièvement est ce qui suit. Dans le résumé qui a été

20 présenté avant la déposition de Mme Mitchell, il va comme suit : "Toutes

21 les informations utilisées pour préparer, 'Comme vu, Comme dit,'" donc le

22 livre, "ont été créées sous la supervision directe du témoin. A tout

23 moment, elle était la responsable de la crédibilité des informations

24 concernant les droits de l'homme et l'intégrité des conclusions qui ont été

25 tirées de cela."

26 Que savons-nous de Mme Mitchell ? Ce que nous savons c'est qu'elle est

27 extrêmement engagée. Elle a eu un engagement très important pour les

28 Albanais du Kosovo. Au jour d'aujourd'hui, elle est à la tête de la mission

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1 des Nations Unies pour le retour des réfugiés au Kosovo. Ensuite, elle

2 était le "premier officier de liaison" du OSCE chargée des liens avec le

3 bureau du Procureur et elle avait quotidiennement affaire avec le bureau du

4 Procureur. Elle leur fournissait des informations de façon régulière. Elle

5 avait aussi des rapports spéciaux, privilégiés avec les Albanais du Kosovo;

6 il s'agit là des rapports qui persistent au jour d'aujourd'hui.

7 Pour l'instant, je vais m'éloigner de ce thème. Je ne veux pas dire que le

8 travail de Mme Mitchell n'est pas important. J'apprécie grandement le

9 travail des humanitaires. Mais pour faire ce travail, il faut de la

10 passion. Il faut une certaine passion, ce qui peut faire que les acteurs de

11 l'humanitaire peuvent parfois être subjectifs. La passion, l'amour du

12 travail font que ces gens parfois pensent qu'ils sont les seuls qui sont

13 bien. Il n'y a qu'eux qui sont les gens bien et que tous les autres ne sont

14 pas des gens bons. Je pense que ces qualités ne permettent pas à un témoin

15 de faire une analyse objective et fiable.

16 Il est clair que Mme Mitchell - et je pense que ceci a été démontré ici - a

17 fait preuve d'un certain manque d'objectivité, et ceci de plusieurs façons,

18 au cours de sa déposition ici. Par exemple, je vais vous en citer quelques-

19 uns. Elle n'était pas vraiment prête à avouer que le bombardement de l'OTAN

20 aurait pu être responsable du départ de la Mission des vérificateurs au

21 Kosovo le 20 mars 1999. Il a fallu lui poser plusieurs questions pour

22 qu'elle accepte cela.

23 Ensuite, la question des milliers d'interviews, et c'est exactement

24 ce qu'elle a dit dans l'affaire Milosevic. Ici, elle a diminué ses

25 chiffres. Elle a dit qu'il s'agissait d'un chiffre qui est un petit peu

26 moindre que 10 000. Ensuite, elle a dit 3 300, 4 300. Donc, ce chiffre a

27 évolué. Je le mentionne ici parce que ce fait à lui seul est suffisant. La

28 Défense est extrêmement préoccupée par les témoins semblables, par ce type

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1 de témoin. Je dois dire qu'au jour d'aujourd'hui, nous n'avons encore reçu

2 un seul rapport de la Commission des vérifications au Kosovo, et c'est

3 quelque chose que nous devons encore recevoir. Nous ne savons pas quelle

4 était la situation avec des milliers d'autres interviews et qu'est-ce qui

5 s'est passé vraiment là-bas.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Peut-être que je ne vous ai pas très

7 bien compris ou je n'ai pas très bien compris M. Visnjic hier. Parce

8 qu'hier, il a dit que vous en avez reçu un petit nombre.

9 M. SEPENUK : [interprétation] Non, nous n'avons pas reçu les formulaires

10 proprement dit. Vous vous souvenez qu'elle avait dit que ces formulaires

11 avaient été remplis à la main. Nous n'avons rien reçu de cela.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Rien de cela ?

13 M. SEPENUK : [interprétation] Non, rien. Tout ce que nous avons reçu ce

14 sont les rapports portant sur le prétendu contenu de ces formulaires.

15 Enfin, je vais demander aux Juges de la Chambre de première instance

16 de se remémorer de la déposition de Mme Mitchell au sujet de cette

17 ressemblance mot pour mot des rapports entre le Groupe de crise

18 international et le rapport de l'OSCE. Je lui ai posé la question à deux

19 reprises. A deux reprises, je lui ai dit que ce qui figure dans ces deux

20 rapports est absolument identique mot pour mot. Je voudrais aussi attirer

21 votre attention sur le fait que mon collègue M. Visnjic a trouvé trois

22 autres rapports de ce style qui sont aussi identiques mot pour mot. "La

23 seule conclusion à laquelle je peux aboutir" - et vous allez vous rappeler

24 que j'ai dit - "qu'il fallait que ce groupe international dispose des

25 informations."

26 Elle a répondu : "Non. Je vous ai déjà dit qu'il existait des mesures

27 qui assuraient la confidentialité de ces informations. Il y avait beaucoup

28 de gens qui ont travaillé là-dessus, qui ont suivi ces rapports, et il

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1 était de règle que ces informations ne soient transmises qu'au Tribunal

2 pénal international." La question que je lui ai posée était : "Si vous

3 savez que quelqu'un avait bafoué cette règle, il s'agit là d'une règle qui

4 a été bafouée." Et là, Monsieur le Juge, vous avez posé la question :

5 "Donc, vous dites qu'il semble que vos enquêteurs ont communiqué un

6 certain nombre d'informations au Groupe de crise en dépit des règles qui

7 existaient, en dépit des règles de confidentialité."

8 Et la réponse : "Oui, c'est une possibilité. Il existe aussi la

9 possibilité que cette personne a été interviewée à nouveau par quelqu'un

10 qui se trouvait sur le terrain et qu'on lui a raconté exactement la même

11 histoire."

12 Question que j'ai posée : "Mot pour mot ?"

13 Mme Mitchell a dit : "Oui."

14 Question que j'ai posée : "Est-ce bien ce que vous affirmez ici ?"

15 Réponse qu'elle m'a fournie est comme suit : "Tout est possible. Je vous ai

16 donné les raisons de la meilleure façon que je pouvais, mais s'ils ont

17 partagé cette information, si ceux-là ont refilé, ils n'ont pas respecté la

18 règle, et c'est tout."

19 Je trouve que ceci est très, très perturbant. C'est une personne qui est là

20 qui nous assurait que ce rapport est crédible. Elle a déposé sous serment

21 et elle nous parle d'une situation extrêmement chaotique. Les Albanais ont

22 été interviewés dans cette situation terrible, dans un camp de réfugiés, et

23 elle a dit qu'il était possible que cette ressemblance mot pour mot relève

24 de deux interviews différentes. Ceci n'est absolument pas crédible. Ce

25 n'est pas crédible du tout, et je pense que ceci jette un doute sur la

26 fiabilité de ce document et de ses capacités de jugement aussi.

27 Donc, elle nous dit qu'il y a eu peut-être de règles qui n'ont pas

28 été respectées. Mais combien de règles exactement n'ont pas été

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1 respectées ? Est-ce qu'il y avait, par exemple, un marché noir là-bas ? Ce

2 n'est pas à la légère que je parle de cela. Mais est-ce qu'il y a eu un

3 marchandage avec ces formulaires ? Parce qu'il y avait pas mal

4 d'organisations qui oeuvraient sur le terrain, et si un membre de son

5 organisation a bafoué une règle, quelles autres règles ont pu être

6 bafouées ? Est-ce que la règle d'objectivité, de crédibilité, de justesse,

7 d'impartialité, est-ce que ces règles-là ont été respectées, oui ou non ?

8 C'est pour cela que je vous demande de ne pas accepter ce rapport.

9 Je pense qu'il n'est pas admissible. Nous considérons que ceci serait une

10 erreur, que ceci ne serait pas juste, tout simplement pas juste.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien, Monsieur Sepenuk, je vous

12 remercie.

13 Monsieur O'Sullivan.

14 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

15 Je vais vous demander de ne pas verser au dossier, de ne pas accepter la

16 pièce du Procureur P473, "Comme vu, Comme dit," intitulée comme cela, et

17 j'ai plusieurs raisons pour cela. Tout d'abord, il s'agit là d'un ouï-dire

18 qui n'est absolument pas recevable, et aussi parce que le Procureur n'a pas

19 respecté les règles de la communication des pièces.

20 Je ne veux pas répéter ce que M. Sepenuk a dit, même si je suis

21 parfaitement d'accord avec lui. Il y a aussi une décision qui relève de

22 l'affaire Kordic qui va peut-être vous aider à prendre votre décision. Il

23 s'agit de l'affaire IT-95-14/2, AR 73.5. C'est une décision de la Chambre

24 d'appel du 21 juillet 2000, où la Chambre d'appel a constaté que l'article

25 89(C) doit être interprété de la sorte que toutes les garanties sont

26 assurées pour que la Chambre puisse être convaincue que les éléments

27 présentés sont fiables.

28 Il s'agit d'un seuil de recevabilité, et la Chambre d'appel dit, dans le

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1 paragraphe 22 de ladite décision, que : "La fiabilité d'un ouï-dire est

2 pertinente pour décider de l'admissibilité d'un élément de preuve et pas

3 seulement pour décider du poids à lui accorder."

4 C'est pour cela que nous considérons que ce manque de fiabilité, et

5 ceci relève de la façon dont ont été utilisées ces sources par ouï-dire,

6 est tel que cet élément de recevabilité tout simplement n'est pas complet,

7 n'est pas tel qu'il permet de verser cette pièce à conviction, ce document.

8 Et surtout à cause de la méthode qui a été adoptée pour recueillir

9 ces dépositions.

10 Il y a encore un élément. Nous ne pouvons pas accepter les

11 qualifications, les compétences et l'impartialité des personnes qui ont

12 rempli ces formulaires qui ont servi de base pour ce document. Nous avons

13 entendu ici que les échantillons ont été choisis de façon sélective. Nous

14 osons même dire que ces échantillons ont été manipulés de la part des

15 individus qui étaient peut-être favorables à l'UCK. Mme Mitchell a accepté

16 l'argument que les personnes qui se sont acquittées de cette mission ont

17 été formées sur le terrain, qu'ils n'ont pas reçu une formation préalable

18 et que pour le moins, il s'agissait d'une formation sporadique et

19 chaotique.

20 Nous devons aussi vous dire qu'en plus de l'article 89(C), il faut

21 aussi prendre en considération l'article 95 de notre Règlement de procédure

22 et de preuve. C'est un article très bref qui dit : "aucun moyen de preuve

23 ne sera recevable s'il a été obtenu par les méthodes qui jettent

24 suffisamment de doute sur sa fiabilité ou sur sa recevabilité, ou qu'il

25 mettrait en danger de façon sérieuse l'intégrité de la procédure."

26 C'est là que je vais m'arrêter. M. Sepenuk en a assez dit, lui aussi,

27 et j'accepte tout ce qu'il a dit.

28 Le deuxième point que je voudrais faire par rapport à notre requête pour ne

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1 pas verser au dossier ou recevoir cet élément, il s'agit là d'une violation

2 flagrante de l'article 68(ii), et ceci par le Procureur. Le Procureur nous

3 a dit qu'il existe un grand nombre de documents qui n'ont jamais été

4 communiqués à la Défense.

5 Je pense qu'il est important de dire que le Procureur nous a dit que

6 c'est la Défense qui doit exiger du Procureur de lui communiquer les

7 articles en vertu de l'article 66(B). L'article 68(ii) oblige le Procureur

8 à mettre à la disposition de la Défense, sous forme électronique, tous les

9 documents qu'elle possède. Nous avons entendu de Mme Mitchell que le

10 Procureur possédait ces documents depuis des années.

11 Alors, pourquoi ici l'article 66(B) ne s'applique pas ? Les Juges de la

12 Chambre connaissent certainement l'histoire législative de ces articles et

13 de l'article 66(B). Il s'agit là de quelque chose qui découle de l'ancien

14 principe de la communication réciproque. Elle fait plus partie de cette

15 procédure. En revanche, l'article 66(B) dit bien que la Défense peut faire

16 des requêtes concernant certains documents. Effectivement, ceci est dit.

17 Mais l'article, dans son sens primaire, reste une obligation pour le

18 Procureur, comme il est indiqué dans l'article 68(ii). C'est une obligation

19 positive du Procureur qui doit communiquer en vertu de cet article de tels

20 documents en utilisant le système de communication des pièces

21 électroniques.

22 Nous considérons que cet article a été violé, mais dans l'article 68

23 bis il est dit quelles sont éventuellement les sanctions s'il y n'y a pas

24 eu de communication ou si l'article n'a pas été respecté. Il y est dit :

25 "La Chambre de première instance peut décider d'office sur la demande d'une

26 partie des sanctions infligées à une partie qui ne s'acquitte pas des

27 obligations en communication qu'imposent les Règlements."

28 Nous voulons avancer l'argument que le seul remède à cette violation

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1 serait de ne pas accepter ces documents qui ont été présentés en violant

2 l'obligation du Procureur en vertu de l'article 66 (ii). Ici aussi

3 l'article 95 s'applique, et nous considérons que toute admission de ces

4 reports serait une flagrante injustice.

5 Donc, nous considérons que vous devriez accepter notre demande et ne

6 pas accepter, ne pas recevoir la pièce du Procureur P473.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur O'Sullivan.

8 Je voudrais soulever un point. Peut-être que ce n'est pas important, cela

9 peu vous sembler peu important, mais dans l'article, quand on voit les

10 petites lettres (ii), par exemple, là il s'agit des chiffres romains. Quand

11 vous parlez ici, Monsieur O'Sullivan, on voit très bien de quoi il s'agit,

12 mais ceci peut rendre les choses plus compliquées quand on parle aussi de

13 l'acte d'accusation, parce que dans l'acte d'accusation, en revanche, les

14 paragraphes sont marqués par les petites lettres, et là il peut y avoir des

15 problèmes. Je pense qu'il faudrait qu'on se mette d'accord sur un principe

16 théorique, à savoir que l'on lise cela comme des chiffres romains et qu'on

17 les prononce comme cela.

18 Monsieur Petrovic, vous vouliez dire quelque chose ?

19 M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne vais pas

20 rappeler ce que vient de dire ou reprendre les mots de mon collègue,

21 puisque notre position est d'adopter tout ce qui a été présenté par nos

22 collègues. Nous avions l'intention de mentionner plusieurs aspects, mais en

23 raison du manque de temps, nous allons nous limiter à des objections très

24 fondamentales que nous avons à l'égard de ce document.

25 Je voulais d'abord appeler votre attention sur plusieurs décisions

26 déjà prises au Tribunal qui pourraient être pertinentes à mon avis aux fins

27 de votre délibération.

28 Dans l'affaire Tadic, c'était une décision concernant une requête,

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1 concernant le ouï-dire en date du 5 août 1996, et dit que notamment le

2 Règlement de procédure et de preuve exige de façon implicite que la

3 fiabilité soit l'élément nécessaire à l'admissibilité. Dans cette décision,

4 on peut lire aussi que de façon à ce que la Chambre de première instance

5 soit en mesure d'examiner les circonstances, il est nécessaire d'apprécier

6 la fiabilité de tous les éléments présentés et faire tirer des conclusions

7 sur cette base.

8 L'INTERPRÈTE : Les interprètes notent qu'ils n'ont pas reçu le texte

9 des décisions.

10 M. PETROVIC : [interprétation] Une autre décision, qui est datée du 19

11 janvier 1998, dit que la fiabilité est un élément implicite de

12 l'admissibilité des éléments de preuve dans le cas où il est clair que

13 toute pièce à conviction qui a été présentée n'est pas fiable, c'est

14 évident, ne peut pas être pris en considération comme ayant une valeur

15 probante. Sur la base de tout ce qui a été précisé par mes collègues et sur

16 la base de la jurisprudence du Tribunal, à notre avis, conformément aux

17 dispositions de l'article 89(D) montre, plutôt mentionne les remarques que

18 je viens de faire en ce qui concerne l'admissibilité du présent rapport. A

19 notre avis, il ne devrait pas être au dossier ni admis.

20 Merci.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Petrovic, quel était le nom de

22 l'affaire pour le 19 janvier 1998 ?

23 M. PETROVIC : [interprétation] C'était le Procureur contre Delalic et

24 consorts.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

26 Maître Aleksic, est-ce que vous avez des arguments à présenter à ce sujet ?

27 M. ALEKSIC : [interprétation] Non, pas en ce qui concerne ce point,

28 Monsieur le Président. Mais mon conseil principal m'a demandé de lire le

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1 texte de nos objections, si je peux être autorisé à le faire. Je pense que

2 ce serait peut-être le moment qui convient avant de passer au témoin

3 suivant.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est une objection à quoi ?

5 M. ALEKSIC : [interprétation] Monsieur le Président, ceci concerne le droit

6 pour le conseil du général Pavkovic. Je voudrais, avec permission, évoquer

7 un certain nombre de points que je souhaiterais voir figurés au compte

8 rendu.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas le moment qui convient

10 pour que vous présentiez un argument de caractère général en ce qui

11 concerne le procès. Si vous avez un argument à présenter ou une conclusion,

12 à ce moment-là vous devez le faire par écrit. Si vous avez une conclusion

13 particulière à présenter sur la question de l'admissibilité de ces éléments

14 de preuve, à ce moment-là, je peux vous entendre sur cette question.

15 M. ALEKSIC : [interprétation] Non. Je vous remercie, Monsieur le Président.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

17 M. ALEKSIC : [interprétation] Je suis simplement les instructions de mon

18 conseil principal.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Bakrac.

20 M. BAKRAC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

21 pense que tout a été dit et nous appuyons ce qui a été dit.

22 Ce que je voudrais ajouter c'est que le document qui a été discuté

23 ici contient également des arguments ou des prises de positions juridiques

24 qui ne sont pas admissibles, à notre avis, et cela porte sur une grande

25 partie du rapport proprement dit.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien, merci.

27 Monsieur Stamp.

28 M. STAMP : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

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1 Brièvement, je souhaiterais commencer par répondre à certaines des

2 objections qui étaient élevées aujourd'hui.

3 On a dit que le bureau du Procureur a joué un rôle important dans

4 l'assemblage des renseignements, et ceci est cité à partir de l'un des

5 arguments. Il n'y a absolument aucun élément de preuve selon lequel, aucune

6 preuve, que le bureau du Procureur ait participé enfin de recueillir ces

7 renseignements. Il y a des éléments, et ceci est reconnu, que lorsque l'on

8 procédait à l'analyse des conseils et de l'aide du Tribunal en ce qui

9 concernait la documentation brute telle qu'elle se présentait, les

10 formulaires concernant les réfugiés ont été présentés au Tribunal, ont été

11 livrés au Tribunal et qu'il y a eu des contacts très fréquents avec le

12 Tribunal. Le simple fait que le Procureur de l'époque ait écrit une préface

13 qui louait ce rapport ne peut pas, en aucune manière, ôter quoi que ce soit

14 à sa fiabilité ou à son objectivité. Le Tribunal pénal international pour

15 l'ex-Yougoslavie a été constitué par les Nations Unies pour poursuivre les

16 crimes de la nature indiquée dans cette acte d'accusation. La mission du

17 MVK au Kosovo était une mission qui agissait sous les hospices d'une

18 résolution des Nations Unies, et il est normal, il est pratique, il est

19 même effectivement souhaitable qu'il y ait des rapports amicaux, une

20 coopération et des conseils de l'aide entre les parties. Et le fait qu'il y

21 ait ce type de relations n'ôte rien à l'indépendance de la mission de

22 l'OSCE du MVK, et ceci ne donne nullement à penser qu'il y ait eu des

23 ingérences ou qu'il ne devait pas y avoir de la part du Tribunal.

24 Il a été dit en plus que le témoin, Sandra Mitchell, ait pu avoir son

25 jugement orienté peut-être à cause du fait qu'elle continuait à travailler

26 dans le domaine des droits de l'homme ou sur les questions humanitaires. On

27 a suggéré que comme elle est actuellement engagée dans les questions qui

28 concernent le bien des Albanais kosovars, et il y a une autre citation à ce

Page 661

1 sujet. Il n'y a aucun élément en ce sens. Elle est directrice d'une entité

2 qui s'occupe du retour des réfugiés. Il y a des réfugiés de différentes

3 origines ethniques qui avaient quitté le Kosovo. Effectivement, elle a

4 déposé en disant qu'elle avait préparé un rapport concernant les

5 infractions qui avaient été commises contre les Serbes au Kosovo après le

6 mois de janvier 1999, et les éléments pertinents concernant le retour --

7 selon ces travaux de directrice chargée des retours des réfugiés est une

8 indication de ces travaux concernant notamment le retour des réfugiés

9 serbes. Il n'est donc pas exact de dire qu'elle est encore engagée à

10 s'occuper du bien-être des Albanais kosovars. En fait, elle s'occupe à mon

11 avis -- le fait qu'elle s'occupe de cela n'ôte rien à sa fiabilité d'une

12 façon telle que le rapport ne serait pas admissible.

13 La question qui se pose en ce qui concerne l'article 95(F). On a dit

14 que l'article 95(F) était pertinent au regard des questions touchant ce

15 rapport. L'avis de l'Accusation est que l'article 95 du Règlement, dont je

16 suis en train de discuter, visait essentiellement à assurer l'intégrité des

17 débats et des procédures devant le Tribunal de façon à ce que des éléments

18 de preuve inadmissibles ne puissent pas être reçus s'ils avaient été

19 obtenus par un comportement oppressif. La méthode d'obtention des éléments

20 de preuve est évidemment un aspect essentiel lorsque l'on prend en

21 considération l'article 95 du Règlement. Par exemple, des éléments de

22 preuve qui auraient pu être obtenus sur une base involontaire. Donc, le

23 simple fait de se référer à l'article 95 dans ce contexte, à mon avis, ne

24 suffit pas pour évoquer dans la mesure où nous parlons d'un rapport de

25 cette nature, de ce caractère.

26 Il y a également eu une question posée en ce qui concernait la

27 communication. La question de la communication, comme vous le savez bien,

28 Monsieur le Président, est une affaire complexe. Il s'agit de l'article 68,

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1 ce que le bureau du Procureur a à sa connaissance. Il y a eu des critiques

2 formulées par la Défense à de nombreuses reprises en l'espèce sur le fait

3 que de la documentation leur était communiquée qui avait une valeur

4 marginale du point de vue de l'article 68, et qu'en revanche, ils étaient

5 inondés de documents qui leur étaient communiqués au titre de l'article 68

6 et qu'ils trouvaient totalement inutiles. J'ai entendu de nombreux griefs à

7 ce sujet. L'une des approches qui pourrait être prise en ce qui concerne

8 les immenses bases de données des documents, c'est qu'une personne de la

9 Défense soit mise au courant de cela et puisse voir s'il s'agit bien de

10 matériel relevant de l'article 68 ou s'il pense que c'est utile pour la

11 préparation de leur Défense au titre de l'article 66, instant d'ainsi

12 prévenu qu'ils ont une responsabilité pour ce qui est de demander des

13 renseignements à ce sujet.

14 Comme je l'ai indiqué, ce dont nous parlons ici, c'est de données

15 brutes, de documents bruts, des milliers de formules provenant de sources

16 diverses qui ont été réunies sur le terrain, certaines qui ont été à la

17 suite traitées par le système EDS et qui sont par conséquent disponibles

18 pour la Défense; et celles qui ne le sont pas. Le témoin précédent -- pour

19 une liste de témoins précédents qui a été déposée tandis que cette

20 déclaration qui est maintenant présentée, dans sa déclaration qui est

21 maintenant présentée devant le Tribunal avait -- c'est que la documentation

22 avait été communiquée au bureau du Procureur et que c'était de la

23 documentation brute. D'une façon générale, ces données brutes, comme les

24 résultats des enquêtes qu'ont révélés, ne sont pas des documents envisagés

25 par l'article 68. C'est même le contraire lorsqu'il est envisagé par

26 l'article 68.

27 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]

28 M. STAMP : [aucune interprétation]

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1

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Voulez-vous me rappeler ce que vous

3 avez dit que la Défense devrait être prévenue de l'existence de toutes ces

4 déclarations ?

5 M. STAMP : [interprétation] La pièce à conviction elle-même, qui se

6 trouvait sur la liste des pièces à conviction, indique ces déclarations ont

7 été faites -- les originaux ont été remis au bureau du Procureur en 1999,

8 de sorte que la Défense devait savoir cela. Mais la déclaration de témoins

9 qui a été communiquée à la Défense plusieurs fois au cours des années, au

10 cours des derniers mois, dit clairement que ces documents que j'appelle des

11 données brutes ont été remis au bureau du Procureur après avoir été

12 photocopiés.

13 Je voudrais dire que la Défense, en se préparant pour le procès,

14 aurait pu, s'ils avaient jugé bon de le faire, s'ils y avaient pensé, c'est

15 peut-être un aspect que la Chambre voudrait également envisager, regarder

16 ces milliers de formules, voir ce qui aurait utile pour les délibérations.

17 Ils ont demandé ceci pour les personnes qui allaient déposer. Nous avons

18 fait des efforts pour leur remettre les formules en question. Nous leur

19 avons donné les rapports concernant les données -- je ne devrais pas dire

20 "les rapports des données," mais des imprimés de la base de données. Nous

21 recherchons maintenant les originaux concernant ces personnes, parce que

22 cela fait partie des lots, de lots immenses de documents que nous avons

23 reçus il y a quelques six ans. Ce n'est qu'hier qu'une demande de caractère

24 général a été présentée pour la première fois pour l'ensemble de la

25 documentation, et maintenant nous sommes en train d'essayer de réunir tous

26 ces documents. C'est un processus qui implique beaucoup de travail et

27 d'efforts et de déploiements du personnel.

28 Donc, la communication de ces documents est un aspect que la Défense

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1 aurait pu réalisé, aurait pu obtenir, s'ils avaient jugé pertinent aux fins

2 du procès depuis longtemps avant que nous ne soyons entrés dans ce prétoire

3 pour commencer le procès. Sans vouloir me montrer critique ou quoi que ce

4 soit, je voudrais dire que ce n'est plus le moment maintenant au cours du

5 procès d'utiliser cette enceinte pour critiquer l'Accusation pour ne pas

6 avoir communiqué des documents de cette nature. Effectivement, je soupçonne

7 que si cette documentation avait été communiquée, à ce moment-là nous

8 aurions été susceptible d'être critiqués pour avoir inonder la Défense de

9 documents. Je pense que c'était suffisant pour les aviser de façon adéquate

10 que l'ensemble de ces documents existait, et par conséquent, qu'ils étaient

11 appropriés pour eux de l'utiliser pour se préparer. S'ils en avaient voulu

12 certain, ils auraient pu les demander.

13 On a dit beaucoup de choses également concernant les ouï-dire. Il est

14 convenu, il est accepté que -- je pense par tout le monde que les éléments

15 par ouï-dire sont admissibles au Tribunal. Bien entendu, la fiabilité de

16 ces ouï-dire est une question importante en ce qui concerne l'admissibilité

17 de ce qui est recueilli par ouï-dire. Je ne pense pas que nous ayons besoin

18 de citer la jurisprudence ou une autorité à ce sujet.

19 Il y a un très grand nombre d'éléments de preuve devant le Tribunal

20 en ce qui concerne la fiabilité des méthodes pour recueillir les éléments

21 de preuve indépendamment des critiques qui peuvent avoir été faites par la

22 Défense. A mon avis, vous voudrez peut-être examiner les réponses qui ont

23 été données par les témoins lors du contre-interrogatoire d'hier, lorsque

24 le conseil a évoqué des documents qui apparemment allaient dans le sens des

25 -- pour la Défense par rapport aux faits qui étaient évoqués. Cette

26 documentation suggère que le témoin, en s'acquittant de sa responsabilité

27 de réunir le matériel et de rédiger ce rapport, a conçu son travail avec

28 objectivité. Les éléments de preuve sont qu'elle a pris les mesures

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1 appropriées pour former le personnel à réunir les éléments nécessaires au

2 rapport; pour employer, dans toute la mesure du possible - compte tenu des

3 circonstances qui semblent avoir été assez chaotiques au début -

4 d'employer, autant que possible, les personnes ayant eu l'expérience

5 adéquate. Et après que ces renseignements aient été réunis, lorsqu'ils ont

6 été autorisés à retourner au Kosovo, comme le rapport l'indique, et comme

7 le témoin l'indiquait dans sa déposition, ils ont pris les mesures, les

8 mesures qui leur étaient possibles, pour vérifier l'exactitude et la

9 fiabilité des renseignements qu'ils avaient utilisés pour concevoir et

10 rédiger le rapport.

11 Comme le rapport l'indique, lorsqu'il y a des incohérences ou des

12 incompatibilités, lorsqu'il y a certaines carences ou faiblesses, ils en

13 ont rendu compte. Et ce rapport, en ce sens, il parle de lui- même. Ce

14 rapport, en fait, est une analyse bien documentée avec des citations

15 appropriées des rapports des victimes, et ceci est très important. Ceci

16 n'est pas du ouï-dire de deuxième main. Il y a des victimes qui sont

17 identifiables. Ceci a été effectué en vertu du mandat qui leur avait été

18 donné par une résolution de l'organisation des Nations Unies.

19 Donc, les objections qui sont évoquées en ce qui concerne la

20 déposition de ce témoin et sur le point de savoir si elle est ou non de

21 partie pris, si elle est pro albanais ou antiserbe sont en fait des

22 objections qui concernent l'appréciation. Ce sont des objections qui ont

23 trait, à notre avis, à des aspects qui relèvent du bon jugement de la

24 Chambre lorsqu'il faudra examiner quel poids attribuer à ce document. Mais

25 nous soutenons que ce ne sont pas des questions qui devraient être

26 considérées lors des délibérations initiales en ce qui concerne

27 l'admissibilité des documents.

28 L'affaire Strugar a été évoquée hier. Il s'agissait d'une affaire

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1 dans laquelle un rapport qui, selon la Défense, était de caractère analogue

2 à celui-ci a été rejeté. Le point de vue de l'Accusation est que ce rapport

3 dans l'affaire Strugar est tout à fait différent du rapport dans l'affaire

4 qui nous occupe. Je vais simplement donner deux autres raisons qui sont des

5 raisons importantes pour lesquelles cette différence existe vraiment.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Qui a fait référence à l'affaire

7 Strugar, Monsieur Stamp ?

8 M. STAMP : [interprétation] Je pense que c'était Me Robinson.

9 M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'était moi qui l'ai

10 évoquée, cette affaire.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

12 M. STAMP : [interprétation] Me Robinson n'est pas là. Je pense que je me

13 suis trompé.

14 Le point essentiel dans la décision Strugar, dans laquelle on a rejeté ce

15 rapport, c'était que la date de l'incident auquel ce rapport avait trait

16 n'a pas pu être vérifiée. Ou pour dire les choses d'une autre manière, ce

17 rapport se référait à des incidents qui se sont produits entre le mois

18 d'octobre et le mois de décembre, et la question qui se posait en l'espèce,

19 c'était celle d'un incident qui s'était passé un certain jour de décembre,

20 et il n'a pas été possible de discerner de façon claire si oui ou non le

21 rapport portait sur cette période assez large et qu'on ait pu restreindre

22 les choses à cet aspect devant le Tribunal. En l'occurrence, il s'agissait

23 d'un événement de décembre.

24 Il y avait également le fait que dans cette affaire Strugar, il y a

25 une autre indication que ce rapport était un rapport préliminaire ou

26 provisoire, et c'est la raison essentielle pour laquelle ce rapport n'a pas

27 été accepté. Il avait pour titre rapport préliminaire dans la mesure où le

28 consultant qui avait eu à en connaître pour préparer ce rapport, lorsqu'il

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1 est venu témoigner dans l'affaire Strugar, ne pouvait même pas donner son

2 aval pour ce qui était de l'exactitude du rapport, de sorte que ce rapport

3 dans l'affaire Strugar peut être clairement distingué de celui que nous

4 avons ici, qui nous occupe maintenant.

5 Le même rapport, "As Seen, As Told," a été reçu comme élément de

6 preuve dans l'affaire Milosevic. Je ne suggère pas un instant ceci, parce

7 que cela a été reçu dans une autre affaire, je ne veux pas du tout suggérer

8 que vous soyez tenus par cela.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, nous serions vraiment aidés

10 si quelqu'un pouvait nous expliquer comment ce rapport a été reçu dans

11 l'affaire Milosevic, et peut-être que vous pourriez vous inquiéter de

12 regarder comment cela s'est fait. J'ai essayé moi-même de voir sur quelle

13 base il l'avait été, mais vous avez raison, on lui a attribué un numéro de

14 pièce.

15 M. STAMP : [interprétation] Oui, j'étais en train d'essayer de retrouver

16 cela moi-même, et je crois --

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que dans ces circonstances,

18 cela s'était glissé lorsqu'un accusé n'était pas adéquatement au stade

19 nécessaire, peut-être qu'il y avait quelque chose qui n'était pas allumé et

20 que plus tard, cela l'a été pour la suite de la procédure.

21 M. STAMP : [interprétation] Dans ce cas, je pense que la Chambre a

22 distingué, "As Seen, As Told," ce rapport, de la documentation qui n'aurait

23 pas été acceptable comme élément de preuve parce que --

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, nous n'avons pas réussi à

25 trouver la décision par laquelle ce rapport a été admis. De sorte que, si

26 vous pouvez la retrouver, je vous en serais reconnaissant, ceci nous

27 aiderait.

28 M. STAMP : [interprétation] Je vais m'efforcer de retrouver la décision par

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1 laquelle ce rapport a été admis. Mais il y a été fait référence dans le

2 compte rendu par la Chambre à la page 5 643, dans lequel la Chambre indique

3 -- et là, je vais essayer de retrouver la référence. Il a été question dans

4 un arrêt d'appel dans cette même affaire Milosevic, une décision sur

5 l'admissibilité des éléments présentés par les enquêteurs pour le compte de

6 l'Accusation, décision du Jugement du 30 septembre 2002. C'était distinct

7 d'un document qui n'a pas été considéré comme admissible parce qu'il

8 n'avait pas été préparé aux fins du procès en question et qu'il avait été

9 préparé par un organe indépendant des parties, et donc avait cette qualité

10 d'indépendance.

11 Comme on l'a exposé précédemment, cette association très proche et amicale

12 de relations de coopération entre le Tribunal et la mission de l'OSCE, ne

13 retire rien au caractère indépendant de ce rapport et n'avait pas été

14 d'ailleurs préparé spécifiquement pour ce procès.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que votre référence au compte

16 rendu s'agit d'une référence au procès Milosevic ?

17 M. STAMP : [interprétation] Il s'agit du compte rendu des débats au procès.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, la décision en appel, il s'agit

19 du compte rendu -- vous avez la page du compte rendu où cette décision en

20 appel a été discutée ?

21 M. STAMP : [interprétation] La décision en appel dont je viens de parler --

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

23 M. STAMP : [interprétation] -- se référait à la décision prise dans

24 l'affaire Milosevic concernant le rapport "As Seen, As Told" et qui est

25 citée par ce numéro du compte rendu.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien.

27 M. STAMP : [interprétation] Il a également été admis comme élément de

28 preuve dans l'affaire Limaj, où l'accusé était représenté, et ceci a été

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1 reçu comme pièce à conviction numéro 150. Puisque je parle de l'affaire

2 Limaj, le rapport sur Human Rights Watch a également été reçu comme élément

3 de preuve dans cette affaire, et effectivement cité dans le Jugement.

4 Comme je le dis, je ne soutiens pas que la Chambre soit, en quoi que

5 soit, liée par ces décisions. Je sais que la Chambre est en droit d'exercer

6 son pouvoir discrétionnaire sur la base des faits qui lui sont soumis en

7 l'espèce. Je voudrais soutenir le fait que cet élément de preuve présenté

8 par Mme Mitchell, non seulement indique - et nous ne parlons même pas d'au-

9 delà d'un doute raisonnable - que le personnel qui a obtenu ces

10 renseignements les a obtenus sur une base fiable, objective. Il y a

11 suffisamment d'indices de fiabilité pour que ce rapport puisse être admis.

12 A la différence du rapport précédent, ceci n'est pas un rapport basé sur un

13 double ouï-dire. Il s'agit ici d'un rapport qui est fondé sur des victimes

14 qui sont identifiables, qui sont véritablement les vraies victimes. La

15 Chambre est en droit, dans l'exercice de son bon jugement, d'utiliser

16 l'ensemble du rapport - et ici, je voudrais évoquer l'objection qui était

17 fondée sur l'idée que l'ensemble du rapport ne devrait pas être versé, on

18 ne devrait pas utiliser l'ensemble du rapport dans ses délibérations.

19 Je m'arrête ici un instant pour demander à la Chambre d'examiner les

20 objections concernant les opinions exprimées dans le rapport du point de

21 vue du droit. Il y a de nombreux endroits dans ce rapport où il est

22 question de droit. Alors, il est clair que pour toute partie au présent

23 procès, il doit y avoir présentation à la Chambre de ce que l'on peut

24 reprendre, comme cela est discuté dans "As Seen, As Told," et à ce moment-

25 là, la Chambre, dans l'exercice de son appréciation, pourra trancher la

26 question de façon appropriée. Toutefois, la discussion des points de droit

27 dans ce rapport est pertinente pour ce qui est du contexte dans lequel les

28 personnes qui ont procédé à ces analyses se sont acquittées de leurs

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1 tâches. L'ensemble du rapport fournit le contexte dans lequel les

2 différentes parties de l'analyse ont été effectuées. L'Accusation a

3 confiance dans le jugement du Tribunal, dans le jugement de la Chambre de

4 première instance. Donc, les arguments à ce sujet doivent être présentés

5 plus tard quant à la façon de savoir comment ces parties du rapport

6 devraient être utilisées. L'Accusation ne présente pas ce rapport comme

7 étant des éléments de preuve directs de tel ou tel incident spécifique ou

8 des lieux de crimes qui sont évoqués dans l'acte d'accusation, mais fait

9 valoir -- ou fera valoir, au moment approprié, que si, comme nous le

10 prévoyons, des éléments de preuve directs que nous présenterons peuvent

11 établir à la satisfaction de la Chambre que ces infractions ont

12 effectivement été commises, à ce moment-là, le rapport pourra aider la

13 Chambre de première instance à attribuer le poids qui convient et le poids

14 que la Chambre elle-même estime approprié.

15 Ceci pourra permettre de collaborer, pour ce qui est de la présentation des

16 éléments de preuve, en ce qui concerne la preuve des lieux où ces crimes

17 ont été commis. Ceci pourrait aider la Chambre de première instance dans

18 ses délibérations sur la question du caractère très étendu et systématique

19 des infractions qui font l'objet de l'acte d'accusation. Ce rapport peut

20 aider la Chambre de première instance sur la question de la notification ou

21 le fait de remarquer le niveau élevé des personnalités politiques et

22 militaires qui sont liées aux crimes commis, pas seulement en 1998, mais

23 également en 1999. Et ce rapport pourra aider la Chambre de première

24 instance en ce qui concerne son analyse des éléments de preuve qui ont

25 trait au contexte du conflit et de toutes les parties qui sont impliquées

26 dans le conflit.

27 Dans tous ces domaines, le degré dans lequel ceci pourra aider la Chambre,

28 à mon avis, est une question qui relève du jugement de la Chambre de

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1 première instance.

2 Mais l'ensemble du document doit être versé, si vous le voulez bien.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai un certain nombre de questions à

4 vous poser.

5 Dans un premier temps, j'aimerais savoir si vous souhaitez répondre à

6 l'élément soulevé par Me Ivetic à propos de l'article 92 bis ?

7 M. STAMP : [interprétation] Pour ce qui est de l'article 92 bis,

8 l'Accusation, pour le moment, ne présente pas les moyens de preuve eu égard

9 à ces 2 000 personnes. Les déclarations forment la base du rapport. Si nous

10 avions voulu présenter directement les moyens de preuve de ces personnes,

11 nous aurions soit convoqué les témoins en question, soit nous aurions

12 demandé à ce que cela soit versé au titre de l'article 92 bis. Le témoin

13 appelé a été Sandra Mitchell --

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il se peut que je n'ai pas compris,

15 parce que je pensais qu'il y en avait 12 qui devaient présenter des moyens

16 de preuve.

17 M. STAMP : [interprétation] C'est exact.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, 12 vont présenter des moyens de

19 preuve. Mais vous n'allez pas présenter leurs déclarations ?

20 M. STAMP : [interprétation] Pour certains, nous avons demandé à ce que cela

21 soit versé au titre de l'article 92 bis. Ils viendront témoigner eu égard à

22 la décision récente du Tribunal.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais Me Ivetic avance que c'est une

24 façon de contourner l'article 92 bis. Parce que lorsque vous fondez sur une

25 déclaration pour avancer certaines choses, il y a certains critères qu'il

26 faut respecter. Et vous pouvez court-circuiter cela en disant que quelqu'un

27 d'autre présentera un rapport à propos de ce que le témoin en question a

28 dit.

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1 M. STAMP : [interprétation] Il est avancé que - et j'espère que je ne me

2 répète pas trop - que l'article 92 bis est l'article pour les moyens de

3 preuve présentés directement par un témoin si la déposition du témoin est

4 présentée devant le Tribunal ou si une tentative est faite pour présenter

5 la déposition du témoin au Tribunal. Mais là, nous avons une analyse qui a

6 été faite pour les déclarations des témoins qui ne vont pas être convoqués

7 à la barre, et il est indiqué que l'ouï-dire a suffisamment d'indices de

8 fiabilité, et ce dans un contexte très limité.

9 Par exemple, si la Chambre accepte d'autres moyens de preuve eu égard à

10 d'autres crimes incriminés, la Chambre devra, à un moment donné, délibérer

11 à propos du caractère systématique, et sur une grande échelle, pour ce qui

12 est de ces infractions. Alors qu'il faut savoir que le rapport pourrait

13 prouver quelque chose de cette nature. Le Tribunal peut faire référence à

14 ces différentes déclarations utilisées dans le rapport et décider du poids

15 qu'il souhaitera leur accorder. Combien de témoins doit-on convoquer pour

16 prouver qu'il y a eu attaques systématiques et sur une grande échelle ?

17 Certainement pas les 800 000 qui ont, d'après ce qui est indiqué, quitté le

18 Kosovo. Nous allons convoquer une partie de ces personnes. Mais est-ce

19 qu'un rapport qui englobe un bon nombre de ces personnes peut aider le

20 Tribunal dans ses délibérations ? L'Accusation avance que ce rapport est

21 d'une utilisation tout à fait légitime.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans le rapport, il y a une table des

23 matières et il y a 30 municipalités.

24 M. STAMP : [interprétation] 30 ?

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] 30. Il y en a 13 dans l'affaire.

26 Alors, que doit faire la Chambre de première instance pour ce qui est des

27 municipalités qui ne sont pas mentionnées dans l'acte d'accusation ?

28 M. STAMP : [interprétation] Pour ce qui est de celles qui ne sont pas

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1 mentionnées dans l'acte d'accusation, le rapport ne fournit pas de

2 corroboration en la matière parce que nous n'allons pas présenter ces

3 moyens de preuve.

4 Toutefois, dans l'acte d'accusation, c'est l'ensemble du Kosovo qui est

5 visé. Il y a des incidents qui sont précisés dans l'acte d'accusation,

6 certes, et qui sont représentatifs de certaines choses. La Chambre, en

7 fait, a diminué cela. Il ne serait pas pragmatique d'essayer de prouver

8 tout. Mais à un moment donné, le Tribunal devra prendre en considération

9 toutes les allégations de l'acte d'accusation et devra se demander s'il

10 s'agit d'un effort qui a été mené à bien dans l'ensemble du Kosovo et qui

11 ne se limite pas à l'échantillon représentatif qui est identifié dans

12 l'acte d'accusation.

13 Nous avançons que ce rapport peut être utilisé par la Chambre de

14 première instance lors de ses délibérations à propos des moyens de preuve

15 présentés pour les sites ou les lieux de crimes précis, et je pense aux

16 discussions également portant sur l'analyse que l'on a dans le rapport et

17 qui porte sur des régions qui ne sont pas prises en considération par

18 l'acte d'accusation. Mais cela peut aider la Chambre de première instance

19 lorsqu'elle délibèrera et se demandera en fait s'il y a eu des infractions

20 systématiques sur une grande échelle, lorsqu'elle se demandera ce qu'a été

21 la situation d'ensemble.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous pouvez me rappeler ce

23 qui est indiqué dans l'acte d'accusation de façon précise. Comment est-ce

24 que cela est présenté, parce que je veux voir comment est-ce que cela

25 correspond aux moyens de preuve.

26 Monsieur Stamp.

27 M. STAMP : [interprétation] Sans faire référence à des extraits bien précis

28 de l'acte d'accusation, je dirais que l'acte d'accusation a trait ou

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1 indique que les infractions et crimes ne sont pas limités à ce qui est

2 précisé dans l'acte d'accusation mais il y a eu persécution systématique et

3 sur une grande échelle de l'ensemble de la population albanaise kosovare au

4 Kosovo. Il fait référence à plusieurs endroits dans l'acte d'accusation,

5 acte d'accusation que je n'ai pas pour le moment.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est quelque chose auquel je n'avais

7 pas prêté attention, parce que je pensais que c'était un acte d'accusation

8 qui portait sur 13 municipalités, que c'était la base qui permettait

9 d'établir qu'il y avait eu comportement généralisé et systématique. Je

10 pense qu'il serait utile de montrer dans quelle mesure l'acte d'accusation

11 dépasse ces régions précises ou englobe davantage que ces régions précises.

12 M. STAMP : [interprétation] Juste un instant. Je suis en train de consulter

13 la version électronique. Je vais pouvoir répondre à la Chambre dans un

14 petit moment.

15 Par exemple, le paragraphe 26 : "Partout au Kosovo, les forces de la RSFY

16 et de la Serbie ont entrepris une campagne délibérée et généralisée ou

17 systématique de destruction de biens appartenant aux civils albanais du

18 Kosovo."

19 Paragraphe 27 : "Non contentes de détruire délibérément leurs biens, les

20 forces de la RSFY et de la Serbie ont commis sur une grande échelle ou

21 systématiquement des actes de brutalité, de violence contre les civils

22 albanais du Kosovo."

23 Il y a également le paragraphe 25, par exemple, qui illustre mon propos :

24 "Les forces de la RSFY et de la Serbie ont, délibérément et sur une grande

25 échelle ou systématiquement, expulsé par la force de la province et déplacé

26 à l'intérieur de celle-ci des centaines de milliers d'Albanais du Kosovo

27 dans tout le Kosovo."

28 Ce que j'avance, ce n'est pas que l'Accusation va présenter des éléments de

Page 676

1 preuve précis et directs, et le Tribunal ne pourra pas dégager des

2 conclusions à propos des incidents et des sites qui ne sont pas mentionnés,

3 mais ou qui ne font pas partie de l'acte d'accusation, mais qui sont

4 mentionnés dans le rapport, mais la Chambre pourra délibérer sur la nature

5 systématique et généralisée et pour citer l'acte d'accusation, ces actes se

6 sont déroulés dans "tout le Kosovo." Le rapport, au vu de ces

7 circonstances, pourra être très utile à la Chambre dans ses délibérations.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous dites que vous n'allez pas

9 présenter des moyens de preuve directs en posant des questions au témoin ?

10 Vous dites que cela ne serait pas suffisant pour tirer une conclusion de

11 comportement systématique et généralisé ?

12 M. STAMP : [interprétation] Non, ce n'est pas ce que je dis. Ce que je dis

13 c'est que le rapport étayera en quelque sorte une conclusion, parce que

14 l'Accusation pense que le Tribunal ou que la Chambre pourra tout à fait,

15 d'après les éléments de preuve directs, j'entends, apportés par les

16 témoins, tirer ce genre de conclusion.

17 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Il a été indiqué ici qu'il y a des

18 rapports de fac-similé, au moins deux, et que ce rapport -- c'est un peu

19 comme si ce rapport n'était pas original. Mais qu'il y avait deux autres

20 rapports du même style. Est-ce que vous pourriez nous préciser cela ?

21 M. STAMP : [interprétation] Oui, tout à fait, puis j'aurais dû le faire,

22 parce que j'avais bien l'intention de présenter cet aspect de la question.

23 Je souhaitais -- parce qu'en fait Me Visnjic a raison. Il y en a d'ailleurs

24 peut-être plus que deux. Il y a des informations identiques, verbatim, qui

25 sont apparemment présentées par différentes entités ayant compilé les

26 informations.

27 Permettez-moi de vous expliquer cela.

28 On a demandé au témoin des questions à propos de ce fait, et elle a

Page 677

1 été placée dans une position qui était telle qu'elle ne pouvait que se

2 livrer à des conjectures. Parce qu'en fait, elle ne savait pas comment cela

3 s'est passé parce que cela aurait été une infraction de la procédure.

4 Toutefois, les documents qui ont été montrés au Tribunal ont été

5 imprimés à partir d'une base de données, et la question qui a été posée

6 lors des questions supplémentaires, je pense, aurait indiqué à la Chambre

7 qu'elle ne savait pas comment est-ce que les documents ont été préparés,

8 structurés, agencés, probablement fusionnés à des fins de compilation

9 informatique. C'est quelque chose qu'elle ne sait absolument pas. Cela,

10 d'ailleurs, n'a aucune incidence sur son objectivité.

11 Premièrement, on lui a posé une question qui l'a incité à se livrer à

12 des spéculations et elle a dit qu'elle ne savait pas parce que cela aurait

13 pu être fait de telle, et de telle et de telle manière. Les documents ont

14 été reçus et des efforts ont été déployés pour les intégrés dans une base

15 de données. Lorsqu'il y a eu fusion d'informations pour obtenir un seul et

16 même document, parce qu'il y en avait apparemment un du GCI et l'autre qui

17 venait de l'OSCE, et ils ont essayé de créer en quelque sorte une base de

18 données utilisable dans laquelle on pouvait mener à bien des recherches

19 facilement avec ces milliers de rapports. Donc, cela n'a aucune incidence

20 sur les éléments de preuve présentés par le témoin, mais c'est quelque

21 chose qui pourrait être précisé. Mais, il est absolument manifeste, d'après

22 les quelques recherches que j'ai déjà faites, que c'est quelque chose qui a

23 été fait pour faciliter la recherche électronique de ces différents

24 rapports. Mais il y a une personne qui se trouve encore au bureau du

25 Procureur qui pourrait nous donner ces détails, mais qui n'est pas présente

26 cette semaine.

27 Il est évident que je vais continuer mon enquête et que je vous

28 fournirai la réponse à ce sujet lorsque je l'aurai.

Page 678

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Stamp.

2 J'aimerais maintenant revenir à la teneur du rapport, car la première

3 partie est une partie historique et politique suivie par ce qui est appelé

4 opération relative aux droits de l'homme. Ce qui est de la première partie

5 donc, le contexte historique, contexte politique, le témoin a indiqué

6 qu'elle n'avait pas de compétence particulière en la matière d'ailleurs, et

7 elle n'a pas non plus indiqué qu'en sus du fait qu'elle s'était trouvée

8 dans cette région à plusieurs et pendant plusieurs années, elle n'avait pas

9 davantage de compétence.

10 Donc, est-ce que vous allez lui poser des questions par le truchement

11 de ce rapport à propos du prince Lazar et des forces ottomanes et de la

12 bataille de Kosovo Polje ? Est-ce que vous allez lui poser des questions ou

13 est-ce que vous allez en quelque sorte limiter les éléments de preuve ?

14 M. STAMP : [interprétation] Il faut qu'il ait des limites qui soient

15 posées. C'est ce qu'avance l'Accusation en tout cas, car nous pourrons voir

16 quel poids accorder ou ne pas accorder à cela. Lorsqu'on évalue la

17 crédibilité des autres parties du rapport avec des analyses qui sont

18 beaucoup plus pertinentes, je pense qu'il serait peut-être utile que la

19 Chambre de première instance ait une certaine connaissance du contexte afin

20 de pouvoir évaluer, apprécier ce contexte.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons entendre de nombreux

22 moyens de preuve à ce sujet. J'espère que ce sont de moyens de preuve qui

23 seront présentés par une source fiable. C'est la même chose pour ce qui est

24 du chapitre 3, les forces yougoslaves au Kosovo et l'Armée de libération du

25 Kosovo. Vous allez présenter des moyens de preuve par le truchement d'un

26 témoin, M. Coo, que vous avez décrit comme témoin expert. Est-ce que cela

27 ne suffit pas ? Que se passe-t-il s'il y a des divergences entre les deux

28 rapports ? Que devrons-nous faire ? Comment est-ce que nous allons évaluer

Page 679

1 la fiabilité, parce que nous ne savons pas qui a compilé ce paragraphe, ou

2 ce chapitre plutôt ?

3 M. STAMP : [interprétation] Je suis d'accord pour dire qu'il n'y a pas

4 suffisamment d'indices de fiabilité pour ce qui est de certaines parties du

5 rapport. Je pense que j'ai concédé cela déjà.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

7 M. STAMP : [interprétation] Je pense, dans une certaine mesure, à la

8 première partie et à la deuxième partie. Comme je l'ai indiqué un peu plus

9 tôt, c'est une question de contexte. La Chambre ne sera pas seulement

10 intéressée par le contexte dans lequel se sont déroulés ces infractions et

11 ces crimes, et cela est indiqué directement par certaines parties du

12 rapport, mais il faut savoir dans quel état d'esprit cela a été écrit et

13 analysé. C'est la raison pour laquelle lors du contre-interrogatoire un

14 conseil de la Défense a posé plusieurs questions à propos des feuilles, de

15 déclarations que l'on retrouve dans certaines parties du rapport. Parce que

16 parfois lorsque l'on essaie de comprendre de façon honnête une certaine

17 partie de l'analyse, je pense qu'il est judicieux que la Chambre puisse

18 comprendre le contexte dans lequel opéraient les rédacteurs de ce rapport.

19 Bien entendu, qu'il est intéressant de -- risque avance l'Accusation en

20 tout cas, et nous pensons que l'intégralité du rapport est utile, mais il y

21 a certaines parties de ce rapport qui manifestement auront une valeur

22 probante plus importante que d'autres, ou pour lesquelles la fiabilité sera

23 plus importante.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais si vous prenez le chapitre

25 7, par exemple, viols et autres formes de violence sexuelle, que sommes-

26 nous censés dégager comme conclusion de ce chapitre ?

27 M. STAMP : [interprétation] Il y aura une certaine quantité importante de

28 moyens de preuve, notamment, je pense à des moyens de preuve présentés par

Page 680

1 des experts qui parleront des viols commis et comment cela faisait partie

2 intégrante de la campagne de persécution; c'est ce que nous avançons. Si la

3 Chambre venait à accepter ces moyens de preuve directs, et je pense au viol

4 de ces témoins, l'Accusation avance ainsi que cette partie ou ce chapitre

5 de l'ouvrage peut être extrêmement utile à la Chambre lors de ses

6 délibérations pour ce qui est de toute la question du viol avec une

7 campagne systématique et généralisée, notamment avec ces infractions ou ces

8 crimes de viol tel que cela est avancé dans l'acte d'accusation.

9 Je pourrais peut-être formuler cela, parce que j'aimerais revenir sur

10 quelque chose que j'ai dit un peu plutôt, parce que ce chapitre ne serait

11 pas un chapitre qui pourrait être présenté tout seul. L'Accusation ne

12 demanderait évidemment pas à la Chambre d'utiliser ce genre de chapitre

13 s'il était présenté tout seul. Mais il y a des éléments de preuve qui vont

14 être présentés à la Chambre par des personnes, par des experts à propos de

15 viols qui se sont déroulés lors de certains événements, et l'acte

16 d'accusation fait référence à cela. Si la Chambre accepte qu'il s'agit de

17 moyens de preuve directs, c'est ce qu'avance l'Accusation, nous pensons que

18 le Tribunal pourrait utiliser ce chapitre du livre pour pouvoir lui

19 permettre de déterminer la nature généralisée de ces viols.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] D'un côté, il s'agit d'utiliser ce

21 type de moyens de preuve pour un objectif qui est très important. Un viol a

22 peu d'impact sur l'acte d'accusation, et si vous prouvez qu'il y en a deux

23 ou trois, cela aura peu d'impact sur cet acte d'accusation. Bien entendu,

24 je ne suis pas en train de suggérer l'ombre d'une seconde que chacun de ces

25 événements n'est pas un événement effroyable, mais il vous appartient de

26 montrer la nature systématique et généralisée de cela. C'est ce que la

27 Chambre de première instance -- ou plutôt, vous inviterez la Chambre de

28 première instance à tirer cette conclusion d'après ces documents.

Page 681

1 M. STAMP : [interprétation] Oui.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je suppose que pour ce qui est par

3 rapport au viol, il se peut que cela soit différent par rapport à d'autres

4 crimes.

5 M. STAMP : [interprétation] C'est exact. Mais vous pouvez le dire de cette

6 façon : Nous inviterons le Tribunal à utiliser ces documents pour étayer

7 d'autres documents. Nous n'allons pas demander au Tribunal de dégager ce

8 genre de conclusions à propos de ce genre de documents seulement.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais si je vous suis ainsi dans

10 ce contexte, je suppose que vous allez quand même utiliser l'essentiel de

11 ces moyens de preuve et que cela est une partie importante des moyens de

12 preuve que vous présentez.

13 M. STAMP : [interprétation] Non. Ce n'est pas ce que j'avance.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

15 [La Chambre de première instance se concerte]

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Juste une toute dernière question que

17 j'aimerais vous poser, Monsieur. Il ne s'agit pas d'un rapport mais de deux

18 rapports, et le deuxième rapport porte sur la période qui va du mois de

19 juin au mois d'octobre 1999. Donc, ce n'est pas la période visée par l'acte

20 d'accusation. Quel est l'objectif de ce rapport ? Pourquoi le présenter ?

21 M. STAMP : [interprétation] C'est une pièce à conviction qui a été versée.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais c'est seulement la première

23 partie.

24 M. STAMP : [interprétation] Oui, la première partie seulement.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien. La première partie.

26 M. STAMP : [interprétation] Bien qu'il ait certains éléments de preuve que

27 l'on trouve dans la deuxième partie qui pourraient être utiles à la Chambre

28 lors de ces délibérations portant sur l'intégrité et l'objectivité du

Page 682

1 témoin, parce que même elle a indiqué la deuxième partie correspond aux

2 enquêtes qu'elle a menées à bien à propos de crimes commis contre les

3 Serbes par l'UCK et les Albanais du Kosovo après l'intervention de l'OTAN.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Qui est votre prochain témoin ?

5 M. STAMP : [hors micro]

6 M. HANNIS : [interprétation] Goran Stoparic.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien. Le témoin sera prêt à la

8 fin de pause ?

9 M. HANNIS : [interprétation] Cela fait un moment qu'il attend.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Maître.

11 M. SEPENUK : [interprétation] Excusez-moi, est-ce que vous souhaitez

12 entendre l'intervention de la Défense ?

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] A propos de quoi ?

14 M. SEPENUK : [interprétation] A propos de la recevabilité de ce rapport.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais donnez-moi un exemple.

16 M. SEPENUK : [interprétation] M. Stamp nous dit qu'ils n'ont pas

17 l'intention de présenter le rapport en tant qu'élément de preuve direct

18 relatif aux sites et aux lieux de crimes, mais ils ont l'intention de

19 l'utiliser pour permettre à la Chambre de première instance de délibérer et

20 d'évaluer les personnalités policières et militaires qui ont commis des

21 crimes, non seulement en 1998 mais en 1999. Cela concerne ou préoccupe la

22 Défense, parce que c'est une question absolument essentielle, centrale,

23 parce qu'il faut savoir si pour ces six défenseurs il peut être prouvé au-

24 delà de tout doute raisonnable qu'ils ont fait partie d'un plan afin de

25 créer ces sites, ces lieux de crimes, un citation, et cetera.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il faut savoir que si dans son

27 rapport, s'il est suggéré que les moyens de preuve qui sont présentés

28 indiquent que les accusés étaient au courant, de toute façon, ce n'est pas

Page 683

1 quelque chose qui peut être établi et présenté à la suite de ce rapport.

2 Mais, j'accepte ce que vous dites; cela permettra à la Chambre de première

3 instance de déterminer si les accusés étaient au courant. Il va falloir

4 évaluer cela.

5 M. SEPENUK : [interprétation] L'OSCE est quasiment présentée à la Chambre

6 de première instance comme un amicus curiae, et je pense qu'ils n'ont pas

7 le droit d'être considéré comme cela dans cette affaire en l'espèce. Il

8 appartient aux parties d'orienter la Chambre en la matière, afin de

9 déterminer ce qu'il en est, mais ce n'est certainement pas à l'OSCE de le

10 faire.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

12 M. SEPENUK : [interprétation] Je vous remercie.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons prendre en considération

14 tout ce qui vient d'être dit. Nous n'allons pas répondre de façon

15 instantanée. Je pense que nous pouvons vous donner une réponse rapide qui

16 sera un peu sommaire, et je peux vous assurer que nous n'allons pas

17 véritablement trancher, tant que nous n'aurons pas eu une délibération en

18 privé à ce sujet.

19 Nous allons lever l'audience, et nous reprendrons à 16 heures 15.

20 --- L'audience est suspendue à 15 heures 52.

21 --- L'audience est reprise à 16 heures 16.

22 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

23 M. STAMP : [interprétation] Monsieur le Président, avant de poursuivre avec

24 le témoin, je ne sais pas si le moment est opportun pour parler des pièces

25 que nous souhaitons demander par rapport -- nous voudrions demander le

26 versement par rapport à la déposition de Sandra Mitchell.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il y a des doutes par

28 rapport à une quelconque pièce ?

Page 684

1 M. STAMP : [interprétation] Oui, je pense qu'il serait convenable de dire

2 cela pour le compte rendu d'audience. Je pense qu'il serait bien, puisqu'il

3 s'agit des pièces du Procureur, de faire précéder ces cotes par la lettre

4 P.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

6 M. STAMP : [interprétation] Tout d'abord, l'accord entre l'Organisation de

7 la sécurité et de la coopération en Europe et sa Mission de vérification,

8 signé par le président de l'OSCE et le ministre des Affaires extérieures de

9 la RFY; ensuite P456, c'est la Résolution 1199 des Nations Unies, de son

10 Conseil de sécurité, elle a été adoptée le 23 septembre 1998; ensuite,

11 P473, Tel vu, Tel raconté; et pièce 615, c'est l'atlas du Kosovo. C'est

12 vrai que ce n'est peut-être pas très clairement exposé, mais même si ce

13 n'est pas exactement cette pièce que nous allons verser, en attendant une

14 meilleure, je vais vous demander de la verser pour besoin d'identification.

15 P761, c'est la revue des missions et des tâches de la Mission de

16 vérification au Kosovo pour les mois de novembre et décembre 1998; P763,

17 c'est la Mission OSCE-MVK, les procédures standardisées des opérations,

18 allégations des violations graves du droit humanitaire de novembre 1999;

19 P763, c'est le plan opérationnel du MVK --

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous nous avez donné ce chiffre deux

21 fois.

22 M. STAMP : [interprétation] 763.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] A nouveau, vous le faites.

24 M. STAMP : [interprétation] Le prochain numéro, P764, c'est le plan

25 d'observation des réfugiés du MVK-OSCE. Ensuite P765, c'est le formulaire

26 d'observation des réfugiés OSCE-MVK. Ensuite P766, OSCE-MVK, les

27 instructions sur les classifications.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et pour qu'il n'y ait pas de doute, le

Page 685

1 numéro P473, c'est tout simplement la première partie, n'est-ce pas ?

2 M. STAMP : [interprétation] Effectivement.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

4 M. STAMP : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Stoparic, pourriez-vous vous

6 lever, s'il vous plaît. Je vais vous demander de prononcer la déclaration

7 solennelle.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

9 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

10 LE TÉMOIN: GORAN STOPARIC [Assermenté]

11 [Le témoin répond par l'interprète]

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir.

13 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vais vous expliquer ce qui va se

15 passer maintenant. Un certain nombre de personnes vont vous poser des

16 questions, à commencer par le Procureur. Il est debout, il est sur votre

17 droite. Ensuite, aux noms des accusés, d'autres personnes vont vous poser

18 leurs questions. On va vous demander de répondre aux questions posées. Vous

19 n'êtes pas ici pour raconter ce qui s'est passé tout simplement comme vous

20 le voulez. On vous demande de répondre précisément aux questions qui vont

21 vous être posées.

22 Parfois, vous allez trouver ces questions faciles, parfois, vous allez

23 trouver ces questions difficiles ou directives. Je voudrais qu'il soit

24 clair dès le début que le Tribunal ici fonctionne comme cela, et c'est en

25 cela qu'il diffère des tribunaux que vous connaissez peut-être dans votre

26 pays. C'est dans l'intérêt de tout le monde, et surtout des accusés, de

27 vous concentrer sur les questions qui vous sont posées et d'y répondre de

28 façon précise. Je vous remercie.

Page 686

1 Monsieur Hannis, je vous donne la parole.

2 M. HANNIS : [interprétation] Merci.

3 Interrogatoire principal par M. Hannis :

4 Q. [interprétation] Monsieur Stoparic, pourriez-vous vous présenter et

5 épeler votre nom de famille, s'il vous plaît.

6 R. Je m'appelle Goran Stoparic, S-t-o-p-a-r-i-c.

7 Q. La première chose que je voudrais faire, c'est de vous montrer une

8 copie de votre déclaration. Il s'agit de la pièce 2224. Je vais demander

9 que l'on vous montre la version en B/C/S de cette déclaration, et nous, les

10 autres, nous allons utiliser la version en anglais.

11 Est-ce que vous la voyez sous l'écran, Monsieur Stoparic ?

12 R. Oui.

13 Q. Reconnaissez-vous ce document ?

14 R. C'est la première page sans doute de ma déclaration.

15 Q. Fort bien.

16 M. HANNIS : [interprétation] Je voudrais vous demander d'avancer un petit

17 peu cette page pour voir le bout de la page, la dernière partie.

18 Q. Est-ce que vous voyez ici la date, qui était la date du 6 juillet, et

19 est-ce que vous voyez ici la marque du bureau du Procureur ?

20 R. Oui.

21 Q. Est-ce que vous avez à l'époque eu la possibilité de relire cette

22 déclaration ?

23 R. Oui.

24 Q. Est-ce qu'on vous a donné lecture de cette déclaration avant de la

25 signer ?

26 R. Oui, j'ai pu le faire en langue B/C/S.

27 Q. Maintenant que vous êtes ici sous serment, est-ce que vous pouvez

28 confirmer que cette déclaration correspond à ce que vous avez raconté ?

Page 687

1 R. Monsieur, ici je vois la première page, et effectivement ce qui est

2 écrit sur la première page correspond à ce j'ai dit.

3 Q. Est-ce que vous souhaitez voir le reste ?

4 R. Vous m'avez demandé de vous donner une confirmation. Je vous dis qu'en

5 ce qui concerne la première page, oui effectivement, je suis en mesure de

6 le confirmer.

7 M. HANNIS : [interprétation] Peut-on montrer la prochaine page, s'il vous

8 plaît.

9 D'ailleurs, Monsieur le Président, je pense qu'il serait plus facile de

10 montrer la version papier au témoin, parce que je pense que c'est plus

11 facile d'examiner une version papier tout simplement, et je peux vous

12 confirmer qu'il s'agit exactement du même document.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

14 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, je m'attendais à

16 avoir un témoin qui vient ici déposer en vertu de l'article 89(F) et je me

17 suis dit que nous allions recevoir une photocopie de cette déclaration.

18 Vous avez dit que c'est une déclaration tout à fait récente qui date du

19 mois de juillet, le 6 juillet.

20 M. HANNIS : [interprétation] Oui, effectivement. C'est la compilation de

21 trois autres déclarations préalables qui ont eu lieu respectivement en

22 2003, 2004 et 2005.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il existe une ordonnance --

24 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

25 M. HANNIS : [interprétation] Si j'ai bien compris, on vous a envoyé

26 cela par e-mail. On l'a envoyé à votre Juriste le 6 ou le 7 juillet.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai vérifié cela cet après-midi

28 et je ne l'ai pas reçu. Si je ne m'abuse, dans l'ordonnance, on demande de

Page 688

1 recevoir une copie papier de cela. Je veux bien que vous ayez envoyé un e-

2 mail, mais ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Il s'agit de communiquer

3 directement aux Juges de la Chambre une version papier de ce document. Il

4 ne s'agit pas seulement de l'envoyer par voie électronique.

5 M. HANNIS : [interprétation] Je pense qu'on vous a envoyé cela avant

6 d'avoir connaissance de votre ordonnances.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, bien.

8 M. HANNIS : [interprétation] Nous pouvons effectivement vous fournir

9 une version papier, Monsieur le Président.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui effectivement, puisque nous ne les

11 avons pas encore vues. Ceci sera fort utile.

12 M. HANNIS : [interprétation] Nous en avons un exemplaire supplémentaire et

13 nous pouvons vous les communiquer.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous pouvez continuer avec la

15 vérification de cette déclaration préalable.

16 M. HANNIS : [interprétation] Merci.

17 Je dois aussi vous fournir la version en langue anglaise -- ou

18 plutôt, la fournir à l'Huissier pour qu'il la communique au témoin.

19 Q. Monsieur Stoparic, pourriez-vous, s'il vous plaît, examiner ces deux

20 documents et nous dire si, en bas de chacune des pages de ces documents,

21 figure oui ou non votre signature.

22 R. Oui.

23 Q. Est-ce qu'à présent vous pouvez dire qu'il s'agit bel et bien de votre

24 déclaration préalable ?

25 R. Oui effectivement, c'est la déclaration que j'ai faite.

26 Q. Merci.

27 M. HANNIS : [interprétation] Je voudrais verser au dossier cette

28 déclaration. J'ai un exemplaire supplémentaire en anglais, de sorte que

Page 689

1 vous puissiez garder cet exemplaire.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

3 M. HANNIS : [interprétation]

4 Q. Monsieur Stoparic, vous avez un exemplaire en B/C/S de cette

5 déclaration, et de temps en temps, je vais vous demander de vous référer à

6 des paragraphes spécifiques. Si vous le faites librement, je vais vous

7 demander de nous le faire savoir. Mais pour l'instant, je voudrais vous

8 demander de déposer de votre mémoire et pas de nous donner lecture de votre

9 déclaration.

10 M. HANNIS : [interprétation] Avec votre permission, je voudrais poser

11 quelques questions qui guideront le témoin.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, faites-le. Pour les questions

13 générales concernant son passé, la formation, et cetera.

14 M. HANNIS : [interprétation] Oui, effectivement.

15 Q. Monsieur Stoparic, je vais vous poser quelques questions brèves.

16 Tout d'abord, vous êtes né en 1968 en Sid en Serbie. Vous avez fini

17 vos études secondaires en 1986. En 1987, vous avez rejoint les rangs de la

18 JNA pour faire votre service militaire obligatoire. Vous avez été en

19 Pristina, où vous avez fait de la reconnaissance au niveau de l'infanterie,

20 et vous avez passé une année en l'armée, et vous habitez, au jour

21 d'aujourd'hui, à Pristina; est-ce exact ?

22 R. Oui, tout sauf le lieu de naissance. Je suis né à Sremska Mitrovica et

23 j'habite Sid.

24 Q. Après votre service militaire en 1987, vous pourriez nous dire s'il est

25 exact que vous avez travaillé avec votre père dans une entreprise de

26 bâtiment, et ceci jusqu'au mois de mai 1991 ?

27 R. Oui, c'est exact.

28 Q. Dans votre déclaration, vous dites qu'en 1991, au mois de juillet, vous

Page 690

1 vous êtes porté volontaire pour faire partie du bureau local de la Défense

2 territoriale; est-ce exact ?

3 R. Oui effectivement, je faisais partie de la Défense territoriale de la

4 Slavonie, de la Baranja et du Srem occidental.

5 Q. Au niveau du cinquième paragraphe de votre déclaration, vous dites :

6 "J'ai adopté cette idéologie nationaliste comme des milliers d'autres

7 Serbes."

8 Quelle est cette idéologie nationaliste dont vous parlez ?

9 R. Si un jeune homme ressent le besoin de partir à la guerre pour se

10 battre contre quelqu'un, ici, le cas échéant, il s'agissait des Croates, il

11 s'agit là d'un sentiment nationaliste, bien entendu.

12 Q. D'où vous venait cette idéologie nationaliste ? Qui l'a propagée à

13 l'époque ?

14 R. Dans les médias, en parlant avec les autres. Cela venait de partout.

15 Q. Vous vous êtes porté volontaire pour faire partie de la Défense

16 territoriale et peu de temps après, vous avez eu la possibilité de

17 rejoindre une autre unité. Quelle était cette unité ?

18 R. Après les opérations de guerre en Slavonie, à Baranja, à Vukovar,

19 c'est de cela que vous parlez ?

20 Q. Tout d'abord, vous vous êtes porté volontaire pour faire partie de la

21 Défense territoriale. Est-ce que vous avez continué à être là-dedans ?

22 R. Non, non.

23 Q. Poursuivez.

24 R. Après cela, nous faisions partie de la 1ère Brigade de la Garde.

25 Q. Etait-ce une unité de la JNA ?

26 R. Oui. Oui, à l'époque, c'était une unité de la JNA.

27 Q. Et vous êtes resté combien de temps ?

28 R. Jusqu'à la chute de Vukovar.

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1 Q. Est-ce que vous vous souvenez quand était-ce, à peu près ?

2 R. Non. C'était au mois de novembre 1991, mais je ne me souviens pas de la

3 date exacte.

4 Q. Après cela, avez-vous quitté la JNA pour rejoindre une autre

5 formation ?

6 R. Oui. Après cela, je suis rentré chez moi.

7 Q. A Sid ?

8 R. Oui.

9 Q. Que s'est-il passé là-bas ?

10 R. A Sid ?

11 Q. Oui. Avez-vous rejoint une autre unité ?

12 R. Oui. Par la suite, j'ai rejoint l'unité des Skorpions. C'était à

13 Djeletovci.

14 Q. Qui étaient les Skorpions ?

15 R. Ce que je savais à l'époque, -- j'ai rejoint les rangs des Skorpions à

16 l'appel du commandant de cette unité. Ce que je savais à l'époque c'est que

17 les Skorpions se trouvaient au niveau du village de Djeletovci, que leur

18 mission à l'époque était de garder les frontières -- enfin, la frontière de

19 leur zone de responsabilité au niveau de la rivière, et de garder aussi la

20 raffinerie de Krajina, qui existait déjà à l'époque.

21 Q. Qui était ce commandant, celui qui vous a invité ?

22 R. Medic, Slobodan.

23 Q. Connaissez-vous son surnom ?

24 R. Oui. Tout le monde l'appelait Boca.

25 Q. Quel était ce groupe, cette formation ? Etait-ce une unité militaire,

26 sociale, de l'armée ? De quoi il s'agissait ?

27 R. Les Skorpions comptaient deux compagnies. Ils avaient un peloton de

28 reconnaissance et un peloton de travail. C'était une unité qui était bien

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1 équipée du point de vue de l'infanterie, les uniformes, pas mal de

2 véhicules de terrain. Au début, il est vrai que je ne savais pas ce que

3 c'était. C'était, bien entendu, une unité militaire.

4 Je n'ai pas très bien compris votre question. De quoi vous parlez

5 vraiment ? Vous avez demandé si c'était une unité militaire ?

6 Q. Oui, c'était bien ma question. Vous avez parlé d'uniformes. Quels

7 étaient ces uniformes ?

8 R. Ce n'était pas toujours les mêmes. Mais leurs uniformes étaient

9 toujours mieux que ceux qu'arboraient les soldats de l'armée yougoslave à

10 l'époque, plus modernes.

11 Q. Les Skorpions, faisaient-ils partie de la JNA ?

12 R. Non.

13 Q. Ils appartenaient à quelle unité?

14 R. Officiellement, que je sache, ils dépendaient de l'armée de la

15 République serbe de Krajina. Mais, ce que je sais aussi, c'est qu'il y

16 avait pas mal d'influence au niveau de ces unités. Je ne sais pas qui

17 exactement exerçait ces influences, mais c'est vrai qu'il y avait pas mal

18 d'influence venant du MUP serbe au niveau des unités.

19 Q. Vous avez dit "officiellement" quand vous avez parlé de l'appartenance

20 de ces unités à l'armée de la République de Serbie. Est-ce qu'il y avait un

21 lien de parenté officieux par rapport à un autre groupe ou à une autre

22 formation ?

23 M. LUKIC : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît, Monsieur le

24 Président.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Monsieur Lukic.

26 M. LUKIC : [interprétation] Il y avait une erreur au niveau de la

27 transcription. Le témoin n'a pas dit l'armée de la République de Serbie,

28 mais l'armée de la République serbe de la Krajina.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

2 Je pense que l'interprétation était bonne; c'est au niveau du compte

3 rendu d'audience, apparemment, qu'il y a une erreur.

4 M. HANNIS : [interprétation] Oui, j'ai entendu cela aussi.

5 Q. Vous avez dit qu'officiellement ils dépendaient de l'armée de la

6 Republika Srpska Krajina. Est-ce que d'une façon officieuse il y avait

7 d'autres liens, d'autres affiliations ?

8 R. Avec un autre groupe ? Ce que je sais, puisqu'il y a eu des réunions

9 avec les commandants, au moment où on nous donnait des ordres, et des

10 conversations que j'ai pu avoir avec d'autres officiers de cette unité,

11 tout le monde disait toujours que c'était la sûreté de l'Etat serbe qui

12 dirigeait dans les coulisses cette unité.

13 Q. Vous avez utilisé dans votre déposition préalable une abréviation

14 désignant les services de la sûreté de l'Etat. Quelle est cette

15 abréviation ?

16 R. Il n'y a pas que moi; tout le monde utilise cette abréviation. C'est

17 DB.

18 Q. Au niveau du paragraphe 10 de votre déclaration, vous avez mentionné

19 les Bérets rouges. Vous avez dit que les Bérets rouges étaient vraiment le

20 squelette de toutes les unités spéciales de la DB. Vous dites que les

21 Skorpions étaient un satellite. Est-ce que vous savez s'il existait

22 d'autres unités satellites ?

23 R. D'après ce qu'on disait et d'après ce que je sais, les Tigres d'Arkan

24 étaient aussi une unité satellite, et il y en avait d'autres. Il y avait

25 d'autres unités aussi en Bosnie, ou dans la Republika Srpska.

26 Q. Au niveau du paragraphe 16 de votre déclaration, c'est la page 4 en

27 B/C/S, vous avez dit, je cite : "Un ordre est venu du haut ordonnant que 60

28 % de nos hommes doivent être originaires de la Republika Srpska et de la

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1 Republika Srpska Krajina et 40 % de Serbie, de sorte que les gens qui sont

2 situés au top niveau en Serbie peuvent toujours nier l'existence d'un lien

3 entre les Skorpions et la Serbie."

4 Quand vous parlez de la RS et la RSK dans votre déclaration préalable, en

5 réalité vous parlez de la Republika Srpska et de la Republika Srpska

6 Krajina ?

7 R. Oui, en effet.

8 Q. Qui vous a parlé de cet ordre venant du haut, du sommet ?

9 R. Une fois j'ai posé une question à Srdjan Manojlovic, qui était le

10 numéro deux au niveau des Skorpions. C'est lui qui nous distribuait notre

11 solde et qui achetait l'équipement. Ce que nous savions aussi c'est

12 qu'avant il était officier ou sous-officier au niveau de l'armée populaire

13 yougoslave et il a quitté ces rangs pour rejoindre les Skorpions.

14 Une fois je lui ai posé la question au sujet de deux ou trois de mes amis

15 qui voulaient rejoindre les rangs des Skorpions, et il m'a dit ce que vous

16 venez de lire, à savoir qu'un ordre était venu du sommet ordonnant qu'il

17 n'y est pas plus de 40 % des Serbes dans cette unité, que de nouvelles

18 recrues ne pouvaient venir que de la Krajina.

19 Q. Sur la base de ce qu'il vous a dit, d'après vous, qui se trouvait au

20 sommet ? Cet ordre qui venait du sommet, est-ce qu'il y avait un individu

21 particulier qui se trouvait là-bas ?

22 R. Le sommet, pour moi, c'était Belgrade à l'époque. Certainement ce

23 n'était pas Vukovar ou autre chose. Comment j'ai compris cela, c'était un

24 ordre venant de Belgrade.

25 Q. Est-ce que vous avez un nom ou un organe à Belgrade à donner ?

26 R. D'après ce qu'on disait dans l'unité, s'il est vrai, c'est que l'on

27 disait tout le temps que nous étions dirigés par le Service de la Sûreté de

28 l'Etat. C'est quelqu'un qui était là-bas. Je ne sais pas qui il était, pas

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1 précisément. Je ne peux vous dire que ce que ce Manojlovic m'a raconté.

2 C'est tout.

3 Q. Très bien.

4 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que vous avez

5 reçu un exemplaire en anglais ?

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

7 M. HANNIS : [interprétation] Merci.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, je pense qu'il serait

9 judicieux d'avancer et d'en arriver à 1998 ou 1999.

10 M. HANNIS : [interprétation] Dans peu de temps, dans peu de temps, Monsieur

11 le Président. Je n'ai juste deux ou trois petites questions au sujet de

12 1995 et ensuite, me voilà en 1999.

13 Q. Au niveau du paragraphe 17, vous avez mentionné un certain nombre de

14 personnes et vous avez dit que certaines personnes, Slobodan Medic, Boca,

15 notamment, vous répondait. Est-ce que vous pourriez me donner les noms en

16 entier de ces personnes ? Vous avez parlé de Legija, Mrgud, Frenki et

17 Stanisic. De qui s'agit-il exactement ?

18 R. Legija, même sans être dans la guerre, évidemment que je connaîtrais

19 son nom. Milodrag Dulovic. Je sais que Boca répondait à ses ordres quand

20 nous étions sur le terrain à Velika Kladusa. Ensuite, la personne suivante,

21 Mrgud, je ne sais pas comment il s'appelait, mais je sais qu'il est venu

22 populaire au moment où l'on a signé l'accord avec l'Europe. Puis ensuite,

23 vous avez Frenki Simatovic, et ensuite il y avait Stanisic.

24 Q. Donc, vous ne savez pas qui était Mrgud ?

25 R. Il était ministre dans le gouvernement à Krajina, mais je ne me

26 souviens pas de son nom, pas pour l'instant. Cela va peut-être me revenir.

27 Il était soit ministre de la Défense, soit autre chose.

28 Q. Entre la fin de 1991 et 1995, quand vous avez rejoint les Skorpions,

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1 est-ce qu'en tant que membre de Skorpions, est-ce que vous avez participé

2 aux opérations de combat en Croatie ou en Bosnie? Répondez-moi par un oui

3 ou par un non ?

4 R. Pour la Croatie, je vous ai déjà répondu. Notre base était à

5 Djeletovci. On avait une mission permanente à Djeletovci. En ce qui

6 concerne les opérations militaires, il n'y en avait pas, mis à part la pose

7 des mines, la reconnaissance et la garde de la zone dont nous avions la

8 responsabilité.

9 En ce qui concerne la Bosnie, oui, nous sommes allés sur le front de

10 Bihac, de Velika Kladusa. Je pense qu'à Velika Kladusa, notre base était

11 dans le village de Podzuvic [phon], et nous sommes allés aussi sur le

12 terrain à Treskavica.

13 Q. Merci. Vous avez dit que vous avez quitté les Skorpions en 1995 et que

14 vous avez ouvert un café à Sid ?

15 R. Oui, avec ma copine de l'époque. Ce n'était pas 1995; un petit peu plus

16 tard que cela.

17 Q. Je vais passer au paragraphe 31 de votre déclaration. Vous avez dit que

18 quelques ex-membres des Skorpions et les membres du MUP venaient souvent

19 dans votre café, et vous avez dit que les sujets principaux de discussion

20 étaient la situation au Kosovo.

21 Vers la fin de 1998, pourriez-vous nous dire ce que l'on racontait

22 parmi les Skorpions et la police au sujet de la situation à Kosovo ?

23 R. Les Skorpions n'existaient pas à l'époque. Après les accords européens,

24 cette unité était dissoute. Les policiers qui retournaient du Kosovo et qui

25 étaient originaires de mon coin, ils disaient qu'il y avait de plus en plus

26 d'attaques terroristes de l'UCK, c'est une organisation terroriste

27 albanaise, et que la situation était très difficile. Personne ne l'a dit

28 officiellement, mais on pouvait entrevoir déjà les ficelles tirées par

Page 698

1 l'OTAN. On pouvait voir déjà ce que l'OTAN allait faire.

2 Q. Au niveau du 32e paragraphe, vous avez dit que vous avez vu un certain

3 nombre des officiers du MUP revenir de leurs tours de garde au Kosovo, et

4 qu'ils avaient beaucoup d'argent, beaucoup de bijoux, et vous avez dit

5 qu'il était clair que ces bijoux venaient des vols, des pillages au Kosovo.

6 Mais qu'est-ce qui vous fait dire cela ? Qu'est-ce que vous saviez de ces

7 gens ? Qu'est-ce que vous saviez de ces policiers pour dire cela ?

8 R. Est-ce que vous parlez de "beaucoup" d'officiers ou vous parlez de

9 "quelques" officiers ?

10 Q. Vous avez dit que vous en avez vu, et que vous avez compris très vite

11 qu'il s'agissait de l'argent et des bijoux volés.

12 R. Oui. Oui, il y a quelques cas qui me sont connus. C'est sans doute une

13 réponse que j'ai donnée à une question posée, mais c'est vrai qu'il y avait

14 des gens qui se ventaient d'avoir volé cela.

15 Mais en ce qui concerne l'argent, ils avaient sans doute des soldes

16 plus importants qu'ailleurs, mais je n'exclus pas la possibilité qu'il y a

17 eu des vols sur le terrain.

18 Q. Au niveau du cinquième paragraphe, vous avez parlé de Boca. Vous avez

19 dit que Boca a à nouveau créé les Skorpions, et qu'il vous a dit que si

20 vous vouliez à nouveau rejoindre les Skorpions, que vous alliez être

21 rattaché à la SAJ du MUP. Pourriez-vous nous dire de quoi il s'agit

22 exactement, SAJ ?

23 R. Jusqu'alors, jusqu'à cette visite de Boca, lorsqu'il est venu chez moi

24 pour m'inviter à l'accompagner au Kosovo, je savais très peu de choses. Je

25 savais que son quartier général se trouvait à Batajnica et que c'était une

26 unité d'élite. C'était parmi les meilleures forces dont disposait la

27 Serbie. Pour moi, c'était un honneur de combattre à ses côtés.

28 Q. Est-ce que vous savez de quelle sorte d'unité il s'agissait, à quel

Page 699

1 organe ou à quelle institution elle appartenait ?

2 R. Ce que je sais, c'est que c'était une unité antiterroriste du MUP serbe

3 qui était chargée de la sécurité publique.

4 Q. Pourriez-vous nous dire ce que c'est que le MUP ? Je ne sais pas si

5 nous en avons parlé jusqu'à présent. Qu'est-ce que c'était que le MUP en

6 Serbie ?

7 R. C'est le ministère de l'Intérieur.

8 Q. Et le SAJ était du côté de la sécurité publique du MUP ?

9 R. Pour autant que je sache, oui.

10 Q. Est-ce que vous connaissez un autre groupe appelé le PJP ?

11 R. C'est une abréviation pour les unités de police spéciale ou distincte.

12 Q. A qui était-elle rattachée ?

13 R. Au ministère de l'Intérieur.

14 Q. Quelle était la différence entre le PJP et le SAJ, si vous le savez ?

15 R. Comme je l'ai dit, le SAJ, c'était une unité spéciale antiterroriste du

16 MUP serbe fondée dans les années 1990, pour autant que je sache. C'était

17 l'unité d'élite du MUP.

18 Le PJP, c'était ceci : A partir de chaque OUP, c'est-à-dire, poste de

19 police en Serbie, il y avait des personnes que l'on prenait qui étaient

20 très entraînées, qui étaient très fortes, et elles étaient à ce moment-là

21 désignées pour le OUP. Ils avaient, bien entendu, leurs fonctions

22 régulières, leurs obligations régulières, mais en plus elles recevaient une

23 formation spéciale, et elles étaient membres du PJP, qui serait activé dans

24 des circonstances extraordinaires.

25 En tout état de cause, c'était des policiers du secteur de la

26 sécurité publique.

27 Q. Si j'ai bien compris, le PJP, à l'époque, c'était des policiers

28 ordinaires qui avaient été envoyés pour recevoir une formation spécialisée

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1 ?

2 R. C'était des policiers normaux, mais ils avaient reçu une formation

3 spéciale, peut-être un peu plus intense que les autres, que la formation

4 qu'ils auraient reçue chez eux, dans leurs villes d'origine.

5 Q. Après qu'ils aient reçu cette formation spéciale pour être des

6 policiers de la PJP, où allaient-ils ? Est-ce qu'ils recevaient des

7 missions différentes ? Est-ce qu'ils retournaient dans leurs postes de

8 police d'origine ? Comment est-ce que cela fonctionnait ?

9 R. Je n'ai jamais été un policier d'active ou de métier; par conséquent,

10 je ne peux que donner une opinion.

11 Pour autant que je sache, ils étaient toujours employés avec leurs

12 unités d'origine, à savoir, le OUP. Mais dans des circonstances

13 extraordinaires, il y avait une nécessité pour l'état de prendre des jeunes

14 très forts, des éléments très jeunes et très forts de ces unités

15 régulières, et de les réunir de façon à pouvoir intervenir là où c'était

16 nécessaire. Ce n'était pas nécessairement au Kosovo-Metohija proprement

17 dit, mais partout où l'état -- partout dans l'état, ou même dans leurs

18 villes d'origine respectives.

19 Q. Je suis en train d'essayer de comprendre la différence entre le PJP et

20 le SAJ. Je sais que vous avez dit que le SAJ était une unité spéciale

21 antiterroriste. De la façon dont je l'ai compris, il y avait également des

22 policiers qui avaient reçus une formation spéciale, mais qu'est-ce qui leur

23 arrivait après qu'ils aient reçu cette formation spéciale pour pouvoir être

24 dans le SAJ ? Est-ce qu'ils retournaient au poste de police d'origine où

25 qu'ils appartenaient ou est-ce qu'ils avaient une sorte de poste distinct ?

26 R. Ce que je sais du SAJ, c'est ceci: le SAJ ne prenait pas des gens du

27 secteur civil, je veux dire des civils. Pour que quelqu'un puisse devenir

28 membre du SAJ et recevoir leur formation, il fallait que cette personne ait

Page 701

1 déjà été policier avant cela, ou tout au moins ait fini l'école de police.

2 Q. Est-ce qu'un civil pouvait aller directement au PJP pour recevoir une

3 formation ?

4 R. Non. Peut-être dans des cas où ils recevaient une formation spéciale

5 avec les réserves de la police.

6 Q. Entre ces deux, entre le SAJ et le PJP, est-ce que l'un des deux

7 étaient mieux équipés ? Est-ce qu'il y en a une qui était considérée comme

8 plus spéciale ou une unité qui était davantage d'élite que l'autre, à votre

9 connaissance ?

10 R. Tous les policiers sont bien entraînés. Le PJP était bien équipé aussi,

11 mais ceux du SAJ, c'est ceux qu'on avait choisis. Probablement, ils

12 recevaient une formation plus dure, plus lourde. C'était une unité spéciale

13 antiterroriste, comme le nom l'indique, mais ils n'étaient pas nombreux.

14 Q. Il y a un autre acronyme, je crois, que vous avez mentionné dans votre

15 déclaration quelque part, le JSO. Pourriez-vous nous dire ce que c'était ?

16 R. Le JSO, c'était l'unité chargée des opérations spéciales, appelée par

17 beaucoup les Bérets rouges.

18 Q. Est-ce qu'ils faisaient également partie du ministère de l'Intérieur ?

19 R. Bien sûr.

20 Q. Est-ce qu'ils appartenaient au secteur de sécurité publique du

21 ministère de l'Intérieur ?

22 R. Non. Ils faisaient partie de la sécurité d'Etat.

23 Q. Pourriez-vous nous dire quel était l'acronyme ou l'abréviation pour la

24 sécurité d'Etat ? Vous nous avez parlé de DB, je crois, comme acronyme;

25 est-ce que c'est exact ? Ou comme abréviation ?

26 R. Oui. DB veut dire "drzavna bezbednost," sécurité d'Etat.

27 Q. Bien. Y a-t-il également une abréviation pour la sécurité publique ?

28 R. Je ne sais pas. Je suppose que oui.

Page 702

1 Q. Je voudrais maintenant qu'on passe -- laissez-moi résumer un peu, et je

2 vous poserai une question.

3 Aux paragraphes 39 à 49, c'est-à-dire des pages 7 à 9 de la version B/C/S

4 et de la page 7 à 9 de la version anglaise, vous décrivez comment vous-même

5 et un groupe d'environ 120 volontaires Skorpions sont allés de Sid au

6 Kosovo. Je remarque, au paragraphe 45 de votre déclaration, je crois que

7 c'est la page 8, vous dites qu'environ 50 % des volontaires de ce groupe

8 n'avaient aucune expérience des combats.Savez-vous s'ils avaient une

9 expérience antérieure du service de police ?

10 R. Je ne sais pas. Pour autant que je le sache, cela n'était pas le cas.

11 Q. Vous dites dans votre déclaration que ce groupe de volontaires allait

12 constituer un détachement du SAJ, de l'unité spéciale antiterroriste,

13 l'unité d'élite. Sur la base de votre expérience, est-ce que vous pensez

14 que c'était inhabituel que des hommes ayant si peu d'expérience puissent

15 être désignés pour cette unité d'élite ?

16 R. J'ai été très surpris par cela.

17 Q. Vous dites qu'en fait vous leur avez donné une certaine formation sur

18 les combats de rue et les combats dans des maisons pendant les quelques

19 jours où vous êtes arrivé au Kosovo. Est-ce que pendant cette période, vous

20 avez reçu ou est-ce qu'ils ont reçu une formation ou des instructions

21 concernant les conventions de Genève, sur la façon de traiter les

22 prisonniers de guerre ou des civils rencontrés dans les zones des combats ?

23 R. Je n'ai donné aucune instruction à qui que ce soit à ce sujet et je

24 n'avais moi-même reçu d'instruction de personne. La seule formation que

25 j'avais concernant cette question remontait à 1987, lorsque j'avais fait

26 mon temps comme militaire dans les forces armées, mon service militaire.

27 Q. Monsieur Stoparic, je voudrais qu'ensuite nous allions au Kosovo. Dans

28 votre déclaration, paragraphes 50 jusqu'à 64, c'est-à-dire les pages 9 à

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1 11, vous décrivez de façon détaillée un événement à Podujevo Kosovo dans

2 lequel Sasa Cvetan et trois autres Skorpions ont tiré sur un groupe de

3 civils albanais et ont tué 19 civils albanais, y compris 12 enfants de

4 moins de 14 ans. Vous parlez de la façon dont vous avez tous été envoyés en

5 Serbie et qu'on vous a dit de prendre dix jours de permission. Vous dites

6 ensuite que vers la mi-avril, vous-même et un grand nombre de ce groupe à

7 l'origine qui étaient partis les premiers sont retournés au Kosovo. Quand

8 vous êtes retournés là-bas, est-ce que Sasa Cvetan, qui faisait partie de

9 ce groupe, est retourné là-bas ?

10 R. Sasa Cvetan n'y était pas.

11 Q. Qu'en est-il des trois autres qui avaient tiré ? Est-ce qu'ils se

12 trouvaient dans ce groupe qui est retourné là-bas ?

13 R. Tous sont retournés au Kosovo, l'ensemble de l'unité, sauf Sasa Cvetan.

14 Q. Est-ce que les identités des trois autres qui avaient participé à la

15 fusillade étaient connues des supérieurs des Skorpions à l'époque ?

16 R. Il est probable que oui.

17 Q. Est-ce que ces trois-là ont jamais été punis ou accusés, autant que

18 vous le sachiez ?

19 R. Un de ces hommes a été accusé, mais a été acquitté par la suite.

20 Q. Savez-vous pourquoi les deux autres n'ont pas été accusés ?

21 R. Il est probable que quelqu'un ait dû faire des obstacles à l'enquête.

22 Peut-être le commandant lui-même.

23 Q. Passons maintenant aux paragraphes 64 à 79 de votre déclaration. Je

24 crois qu'il s'agit des pages 11 à 13. Vous décrivez comment vous avez dû

25 retourner au Kosovo à la mi-avril et vous parlez de la participation à des

26 opérations visant à chasser l'UCK ou ALK et "s'emparer des villages et des

27 hameaux. C'est ce qui était appelé un nettoyage." Vous dites que ceci a eu

28 lieu dans le secteur de Jezerce, dans la municipalité de Suva Reka, puis au

Page 704

1 nord de Strpce. Au cours de ces opérations, est-ce que vous avez vu des

2 Albanais du Kosovo ? Je voudrais ajouter d'abord, est-ce que vous avez vu

3 des civils albanais du Kosovo ?

4 R. A distance, j'ai vu des groupes qui s'en allaient.

5 Q. Est-ce que vous avez rencontré une opposition de la part de l'UCK ?

6 R. Oui.

7 Q. Vous avez continué vos activités dans cette opération jusqu'au moment

8 où vous avez reçu un coup de feu. Vous avez été blessé le 2 mai 1999 par un

9 coup de feu de l'UCK ?

10 R. Oui.

11 Q. Je comprends qu'alors vous avez été hospitalisé, d'abord à Pristina,

12 puis envoyé à l'hôpital de l'Académie militaire de Belgrade, où il y a eu

13 des interventions chirurgicales pour votre bras et votre coude, et que

14 cette blessure a fait que vous ne pouviez plus porter les armes ?

15 R. Oui.

16 Q. En mai 2000, vous avez reçu une récompense pour votre travail comme

17 membre du SAJ du MUP de Serbie ?

18 R. Je ne vois pas cela comme une récompense. J'avais été blessé et j'ai

19 reçu une citation spéciale pour mon travail exceptionnel dans la lutte

20 contre le terrorisme dans le secteur du Kosovo et Metohija.

21 Q. De qui cela ?

22 R. C'est Vlajko Stojiljkovic qui l'a signée.

23 Q. Il était ministre de l'Intérieur de la Serbie à l'époque ?

24 R. Je pense que oui.

25 Q. Est-ce que les Serbes qui étaient des volontaires avec vous lorsque

26 vous êtes retourné au Kosovo, étaient-ils -- c'étaient des volontaires,

27 vous-mêmes, les volontaires Skorpions, qui étaient rattachés au SAJ; c'est

28 bien cela ?

Page 705

1 R. Je n'ai pas compris votre question.

2 Q. Qui était les Skorpions qui vous étaient rattachés lorsque vous êtes

3 retournés au Kosovo à la mi-avril ?

4 R. Pour autant que je le sache, ils étaient rattachés aux forces de

5 réserve de la SAJ.

6 Q. Je vous remercie. Je voudrais maintenant que nous allions aux

7 paragraphes 83 à 87 de votre déclaration, c'est-à-dire aux pages 13 et 14

8 de l'anglais, et à la page 14 de la version en B/C/S. Dans ces paragraphes,

9 Monsieur Stoparic, vous décrivez les procès au pénal contre Sasa Svetan

10 pour la tuerie de 1999 de ces civils à Podujevo. Vous avez été cité comme

11 témoin dans ces deux procès. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre, en

12 décrivant vous-même, ce qui s'est passé la première fois que vous avez été

13 cité à comparaître comme témoin en l'espèce. Est-ce que quelqu'un de la

14 Défense vous a parlé avant que vous n'ayez comparu pour cette affaire ?

15 R. Non. J'ai parlé à l'avocat de la Défense --

16 L'INTERPRÈTE : L'interprète demande que le témoin veuille bien répéter sa

17 réponse.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Stoparic, on vous demande de

19 bien vouloir répéter votre réponse.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] On m'a demandé si, avant de faire ma

21 déposition dans ces procès, j'avais parlé à quelqu'un, si j'avais parlé à

22 la Défense, et j'ai dit non seulement que j'avais parlé au conseil de la

23 Défense, mais j'ai reçu également des visites de la famille de l'accusé

24 ainsi que du commandant des Skorpions et de plusieurs de ses hommes qu'il

25 employait comme gardes du corps. En total, près de 20 personnes m'ont

26 parlé.

27 M. HANNIS : [interprétation]

28 Q. Que vous ont dit ces personnes ou que vous ont-ils demandé ?

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1 R. Que nous devions défendre Sasa.

2 Q. Et rien d'autre ? Comment alliez-vous faire cela ?

3 R. J'étais censé comparaître à une audience à Prokuplje, je crois. J'ai

4 rencontré à plusieurs reprises les conseils de la Défense. Et le jour où je

5 devais faire ma déposition avec deux autres témoins, nous avons pris une

6 seule et même voiture et nous sommes allés vers le sud de la Serbie. Boca,

7 le commandant, a donné l'ordre que nous venions tous trois chez lui dans sa

8 propriété. Il a dit : Faites attention à ce que vous faites là-bas. Si vous

9 mettez les pieds dans le plat, vous ne vivrez pas longtemps. J'ai reçu un

10 papier de l'avocat contenant une déclaration, ou comportant des réponses

11 que j'étais censé fournir. C'était assez bref, la façon dont il avait conçu

12 ce texte. Il l'a donné non seulement à moi, mais aux autres témoins aussi.

13 Q. Donc, que s'est il passé lorsqu'en fait vous êtes allé déposer à ce

14 premier procès ? Qu'est-ce que vous avez fait ?

15 R. On m'a demandé de dire qu'à partir du moment où la fusillade avait

16 commencé et qu'une fois que nous nous étions dirigés vers l'endroit où les

17 tirs avaient lieu, que Sasa courait à côté de moi et que la seule chose

18 qu'il avait faite était de tirer une rafale quelques minutes plus tôt, ce

19 qui voulait simplement dire que c'était un signal pour accélérer les choses

20 alors que l'on marchait. C'était en fait ma déclaration à ce procès.

21 Q. Est-ce que c'était la vérité ?

22 R. Non, cela ne l'était pas.

23 Q. Alors, comment vous êtes-vous senti après cela, sachant que vous aviez

24 menti à ce sujet ?

25 R. Bien sûr, j'avais des sentiments très désagréables, en particulier

26 sachant que tant d'enfants avaient été tués. Mais néanmoins, ma vie était

27 en danger. C'était terrible.

28 Q. Qu'est-ce que vous avez fait à la suite de cela ? Est-ce que vous avez

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1 fait quelque chose ?

2 R. Un grand nombre de témoins oculaires de ces incidents qui vivaient dans

3 ma ville, nous en avons beaucoup parlé, et nous étions tous d'accord que

4 quiconque avait tué ces enfants méritait d'être puni. Toutefois, il était

5 dangereux pour nous de parler ouvertement et de dire ces choses au procès.

6 Pour commencer, un homme était en train de subir son procès, et nous

7 savions tous que cette personne ne pouvait pas tuer 19 personnes en une

8 minute, même si ces victimes étaient des enfants.

9 Je ne sais pas. Je voulais dire la vérité, mais je n'ai tout

10 simplement pas eu la possibilité de le faire avant le procès à Belgrade.

11 Q. Bien. Vous avez parlé du premier procès, et je pense que vous avez dit,

12 ou vous avez dit dans votre déclaration, que c'était à Prokuplje. Où se

13 trouve Prokuplje ? Excusez ma prononciation.

14 R. C'est dans le sud de la Serbie.

15 Q. Vous venez de mentionner qu'il y a eu un deuxième procès à Belgrade.

16 Vous rappelez vous où il a eu lieu ?

17 R. Le deuxième procès a duré assez longtemps. Je me souviens que j'ai

18 déposé au mois de décembre 1993, je crois.

19 Q. 1993 ?

20 R. Ou 1994. Je ne sais pas. Je dois l'avoir oublié. En tous les cas, il y

21 a deux ou trois ans, quoi qu'il en soit.

22 Q. Excusez-moi. Mais il est dit "1993" au compte rendu, et puisque les

23 événements ont eu lieu en 1999, je suppose que c'était simplement une

24 erreur.

25 R. 2003, excusez moi.

26 Q. Bien. Alors comment se fait-il que vous ayez été appelé comme témoin

27 dans ce deuxième procès ?

28 R. Voyez-vous, la première fois j'étais témoin de la Défense. Toutefois,

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1 lorsque l'affaire a été renvoyée de la cour de Prokuplje à Belgrade, le

2 Procureur dans cette affaire a rappelé tous les témoins qui avaient comparu

3 dans le premier procès comme témoins de l'Accusation, et j'en faisais

4 partie.

5 Q. Est-ce que vous avez narré une version différente la deuxième fois ?

6 R. Lors du deuxième procès, j'ai relaté les choses telles qu'elles

7 s'étaient passées.

8 Q. A savoir que Sasa et les trois autres avaient tiré, étaient

9 responsables de cela ?

10 R. Pendant ce procès, j'ai confirmé que les Skorpions étaient responsables

11 de cet acte et que j'avais vu Sasa et d'autres sortir de cette cour. Je

12 n'ai jamais dit que je les avais vu tirer.

13 Q. Je comprends. Est-ce que cela correspondait à la vérité ?

14 R. Monsieur, à ce procès, M. Tutinac a dit la même chose. Oui, les

15 Skorpions ont tiré sur les enfants, et cela est la vérité.

16 Q. Pourquoi avez-vous changé d'avis ? Pourquoi est-ce que vous avez été en

17 mesure de dire la vérité cette fois-là ? Est-ce que vous craigniez toujours

18 pour vos jours ?

19 R. Bien sûr que j'avais peur. Même lors de ce procès à Belgrade, lorsque

20 j'ai reçu la convocation, je suis entré dans le prétoire et j'ai dit au

21 Juge que je ne me sentais pas très, très bien, que je devrais être convoqué

22 une autre fois, et par tout cela -- parce que juste avant d'entrer dans le

23 prétoire, dans le couloir, j'ai rencontré Boca qui, une fois de plus, m'a

24 proposé de l'argent, un véhicule, et ce, en échange d'une déclaration qui

25 aurait permis à Sasa de se défendre.

26 De surcroît, à l'entrée du tribunal j'avais vu deux de ses hommes

27 qui, lorsqu'ils m'ont vu, sont partis. Probablement que lorsqu'il avait

28 entendu que les gens seraient convoqués à nouveau pour témoigner, il

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1 voulait s'assurer que les gens racontent ce que lui voulait qu'ils

2 racontent. Donc, c'est pour cela que je suis parti ce jour-là et je suis

3 revenu témoigner, mais sous la protection de la police.

4 Q. Je pense que dans votre déclaration vous avez indiqué que Boca vous

5 avez proposé une somme d'argent assez coquette. Vous vous souvenez du

6 montant ?

7 R. Je pense qu'il avait parlé de 100 000, mais de toute façon il aurait pu

8 parler ou proposer n'importe quelle somme.

9 Q. Mais en quelle devise parlait-il ?

10 R. En marks, en euros, je n'en sais rien.

11 Q. Je suppose non seulement vous aviez peur pour votre vie, mais qui plus

12 est on vous a offert une somme de 100 000 marks allemand, alors, d'après

13 vous, qu'est-ce que qui allait se passer si vous relatiez la vérité, et je

14 pense à votre relation avec les Skorpions ou avec les ex-Skorpions ?

15 R. Il y a de nombreux Skorpions qui ne m'en veulent pas et qui ne m'en ont

16 pas voulu. Ceux qui m'en veulent étaient en quelque sorte liés à ces

17 événements et ils avaient peur d'être incarcérés. Bien sûr que j'ai eu peur

18 de ce qui allait m'advenir, et après ma déposition lors de ce procès, on

19 m'a offert une protection de la police pendant un mois supplémentaire.

20 Q. En dépit de tout cela, vous avez décidé de dire la vérité. Pourquoi ?

21 Il me semble qu'il aurait été beaucoup plus facile de réitérer les mêmes

22 mensonges ?

23 R. Je me sentais insulté. D'abord, il m'a offert de l'argent;

24 deuxièmement, il m'a menacé, bien qu'il ne l'ait pas toujours fait

25 personnellement. Je recevais ses messages qu'il me communiquait par

26 l'entremise d'autres membres des Skorpions, et il s'agissait de messages

27 menaçants, je peux vous le dire.

28 Mais quoi qu'il en soit, j'avais décidé de dire la vérité six mois

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1 plutôt, et j'ai dit la vérité à ce procès. On m'a donné une protection de

2 la police pendant cette journée-là, mais après on m'a véritablement offert

3 cette protection de la police. Je témoignais dans ce tribunal de district à

4 Belgrade, ainsi que dans un tribunal spécial, et j'ai été en fait un témoin

5 qui coopérait.

6 Q. Je m'excuse. Vous avez dit que six mois auparavant vous aviez décidé de

7 dire la vérité. Quel fut le facteur, le paramètre décisif qui fait que vous

8 avez décidé de dire la vérité ?

9 R. J'aurais souhaité que vous soyez le témoin oculaire de l'assassinat ou

10 des assassinats de tant d'enfants et si cela avait été le cas, c'est moi

11 qui vous aurais posé la question vous venez de me poser.

12 Q. Je pense comprendre.

13 M. HANNIS : [interprétation] Est-ce que nous allons faire la pause à 17

14 heures 30, Monsieur le Président ?

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, non. A 17 heures 45, pas 17

16 heures 30. Je pense que nous avions commencé à 16 heures 15.

17 M. HANNIS : [interprétation] Oui, non, très bien. Très bien.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais peut-être au vu des

19 circonstances, nous pourrions interrompre ou suspendre l'audience

20 maintenant.

21 M. HANNIS : [interprétation] J'ai quelques questions à poser.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, nous allons

23 interrompre maintenant et nous nous retrouverons dans 20 minutes, à 17

24 heures 50.

25 --- L'audience est suspendue à 17 heures 25.

26 --- L'audience est reprise à 17 heures 53.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.

28 M. HANNIS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

Page 711

1 Premièrement, j'aimerais demander à Monsieur l'Huissier de donner au témoin

2 deux documents papier.

3 Je souhaiterais que ce soit affiché à l'écran dans un premier temps

4 le document P951.

5 Q. Monsieur Stoparic, je vous demanderais de consulter dans une premier

6 temps le plus volumineux de ces documents qui a la date du 28 juin, me

7 semble-t-il ? Il s'agit d'une question relative au tribunal de district à

8 Belgrade.

9 Lorsque vous avez préparé votre déclaration au titre de l'article 89

10 [comme interprété] la semaine dernière lorsque nous nous sommes rencontrés,

11 est-ce que vous avez eu la possibilité de consulter ce document ?

12 R. Oui.

13 Q. Est-ce que vous reconnaissez qu'il s'agit d'un document qui a trait au

14 procès dans lequel vous avez témoigné, procès intenté à M. Cvetan, et je

15 parle du deuxième procès à Belgrade ?

16 R. Oui. Oui, je peux le voir.

17 M. HANNIS : [interprétation] Je souhaiterais maintenant que soit affiché à

18 l'écran le 952.

19 Q. Monsieur Stoparic, je vous demanderais de prendre maintenant le moins

20 volumineux des deux documents qui porte la date du 3 mars 2006.

21 Je vais vous reposer la même question : est-ce que vous avez eu la

22 possibilité de consulter ce document également ?

23 R. Oui.

24 Q. Il semblerait qu'il s'agit d'un appel dans la même affaire. Il s'agit

25 toujours des poursuites judiciaires intentées à Sasa Cvetan, n'est-ce pas ?

26 Je m'excuse, je ne sais pas si vous avez entendu ma question. Je n'ai pas,

27 en tout cas, entendu votre réponse. Je vous ai posé, à propos du deuxième

28 document, s'il s'agissait d'un document qui était relatif aux poursuites

Page 712

1 judiciaires ou plutôt au procès intenté à Sasa Cvetan ? Je parle du procès

2 à Belgrade dans lequel vous avez témoigné.

3 R. Oui.

4 Q. Je vous remercie.

5 M. HANNIS : [interprétation] J'aimerais que ces deux documents soient

6 versés au dossier.

7 Avant que le contre-interrogatoire ne commence, je souhaiterais que

8 nous passions brièvement à huis clos partiel, car j'aimerais soulever une

9 question à propos de ce témoin.

10 [La Chambre de première instance se concerte]

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien. Huis clos partiel.

12 Maître O'Sullivan.

13 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je me demande si vous allez soulever cette

14 question en présence du témoin ? Monsieur Hannis, c'est ce que vous

15 souhaitez faire ?

16 M. HANNIS : [interprétation] Je n'ai pas de problème que le témoin soit

17 absent du prétoire lorsque je soulève cette question, mais peut-être qu'à

18 un moment donné il faudra que les Juges posent des questions au témoin à

19 propos de ce que je vais dire. Donc, je ne sais pas quelle est la procédure

20 la plus efficace. Peut-être que nous pourrions le faire sortir et peut-être

21 que nous pourrons relever la question ainsi.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous craignez qu'il y a un problème au

23 niveau des dépositions du témoin si la question est posée en présence du

24 témoin ?

25 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui, je pense que M. Hannis peut également

26 prévoir cela. C'est ma seule préoccupation.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

28 M. HANNIS : [interprétation] Je pense que le mieux c'est qu'il sort

Page 713

1 brièvement du prétoire pendant que nous abordions cette question.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Stoparic, vous avez entendu

3 ce qui vient d'être dit. Il s'agit d'une question de droit qui va être

4 posée. Je vous demanderais de vous absenter du prétoire pendant que nous

5 aurons cette discussion, ensuite vous pourrez revenir.

6 [Le témoin se retire]

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous devons maintenant passer à huis

8 clos partiel.

9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

10 le Président.

11 [Audience à huis clos partiel]

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11 Pages 714-718 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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1 (expurgé)

2 (expurgé)

3 [Audience publique]

4 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Voilà comment nous allons procéder. Dans

5 un premier temps, le conseil pour Lukic; Pavkovic; Milutinovic; Sainovic;

6 Ojdanic; et Lazarevic.

7 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Stoparic, vous allez

9 maintenant répondre aux questions dans le cadre du contre-interrogatoire.

10 Ce sont les conseils pour l'accusé qui vont poser ces questions, et le

11 premier conseil à mener le contre-interrogatoire sera Me Lukic, qui

12 représente l'accusé Lukic.

13 Maître Lukic, je vous prie.

14 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Mais avant que je

15 ne m'adresse au témoin, je devrais vous poser une question de procédure, et

16 je m'excuse de ne pas avoir soulevé cette question un peu plus tôt. Est-ce

17 que vous voulez que les déclarations préalables de ce témoin soient

18 considérées comme des pièces à conviction ou est-ce que vous préférez que

19 je pose des questions à propos de ces pièces sans les considérer comme

20 pièces à conviction ? La pratique dans ce Tribunal diffère de Chambre à

21 Chambre.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit des pièces à

23 conviction de l'Accusation ?

24 M. LUKIC : [interprétation] Non, ce ne sont pas des pièces à conviction de

25 l'Accusation.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, vous les présentez comme faisant

27 partie de votre jeu de pièces à conviction ?

28 M. LUKIC : [interprétation] Je n'en suis pas sûr. Est-ce que je devrais le

Page 720

1 faire ou pas ?

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que ces documents ont été

3 insérés dans le système électronique ?

4 M. LUKIC : [interprétation] Je n'en sais rien. Certains, certainement. Mais

5 je ne suis pas sûr d'avoir les versions anglaises pour tous ces documents.

6 Nous avons des versions anglaises qui ont été préparées pour les Juges.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, à l'avenir, je pense qu'il

8 serait quand même utile de suivre la procédure et de la respecter,

9 procédure qui a été mentionnée dans l'ordonnance, à savoir, ces documents

10 doivent être intégrés au système électronique à moins qu'il n'y ait une

11 raison qui soit invoquée pour que cela ne puisse pas être fait. Je pense

12 qu'il faudrait montrer des raisons valables à la Chambre pour que vous

13 puissiez utiliser ces documents.

14 Je n'envisage pas véritablement de raisons qui vous auraient empêché

15 d'intégrer certains documents dans le système électronique, conformément à

16 notre décision d'ailleurs. Parce qu'à partir du moment où vous faites

17 référence à ces documents, vous lui donnez une cote, et ensuite ce sera un

18 document qui fera partie du procès, à moins que quelqu'un n'ait soulevé une

19 objection pour ce qui est de sa recevabilité et que nous ayons statué pour

20 que le document soit recevable. Mais tout document qui fait partie de la

21 bibliographie de l'affaire fera partie du dossier tel qu'il a été utilisé.

22 Donc, pour le moment, vous n'avez besoin de rien faire officiellement.

23 Contentez-vous de présenter ces documents et vous verrez bien s'il y a des

24 objections qui sont soulevées lorsque vous présenterez ces documents au

25 témoin et lorsque vous lui poserez des questions.

26 M. LUKIC : [interprétation] Nous avons hésité parce que nous ne savons pas

27 ce qui a été fait par cette Chambre lorsqu'il y avait des documents

28 préalables pour témoins. Est-ce que ces documents sont considérés comme des

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1 pièces à conviction ou non ?

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous nous dites cela parce qu'il y a

3 une raison qui fait que vous ne devez pas communiquer cela par avance, ou

4 est-ce que c'est un principe général, pour savoir s'il s'agit d'une pièce à

5 conviction ou non ?

6 M. LUKIC : [interprétation] Non, c'est une question de principe.

7 D'ailleurs, il s'agit des déclarations données au Procureur par le même

8 témoin.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si vous les présentez et qu'ils ne

10 font pas partie de la liste des pièces à conviction de l'Accusation, ils

11 doivent faire partie de votre liste de pièces à conviction.

12 M. LUKIC : [interprétation] Très bien. Nous les avons insérés dans le

13 système, donc ils peuvent être --

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, ils se trouvent dans le système,

15 n'est-ce pas ?

16 M. LUKIC : [interprétation] C'est exact.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

18 M. LUKIC : [interprétation] Oui, mais le problème que nous avons, c'est que

19 la première déclaration qui a été faite par ce témoin date de l'année 2003.

20 Nous n'avons pas la version anglaise dans le système. Mais nous pouvons

21 vous présenter une version papier pour que vous puissiez suivre, et dès que

22 nous aurons trouvé la version anglaise, nous la présenterons dans le

23 système.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien. Nous allons commencer avec

25 le contre-interrogatoire, et lorsque nous arriverons aux déclarations, il

26 est évident que vous tirerez sur la sonnette d'alarme.

27 M. LUKIC : [interprétation] C'est déjà fait, Monsieur le Président, parce

28 qu'il va falloir que nous examinions les déclarations.

Page 722

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela prête à confusion. Il faut

2 maintenant qu'on repasse à huis clos partiel ?

3 M. LUKIC : [interprétation] Vous n'êtes pas le seul qui a à être perplexe.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais c'est vous qui êtes censé diriger

5 tout cela quand même et maîtrisez la situation.

6 M. LUKIC : [interprétation] Non, ce n'est pas la peine de passer maintenant

7 à huis clos partiel --

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

9 M. LUKIC : [interprétation] Je ne suis pas encore arrivé à ce point-là.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Allez-y donc.

11 M. LUKIC : [interprétation] Et avec votre permission, Monsieur le

12 Président, je souhaiterais poser les questions en B/C/S parce que je pense

13 que je serai plus à même de contrôler la situation. Je vous remercie.

14 Contre-interrogatoire par M. Lukic :

15 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Stoparic.

16 R. Bonjour.

17 Q. Je m'appelle Branko Lukic, et avec Dragan Ivetic et M. Ogrizovic, je

18 suis ici pour représenter la Défense de Goran Lukic.

19 Je voudrais tout d'abord --

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant. Je viens de recevoir un

21 message des interprètes qui indiquent ne pas avoir le document qui va être

22 utilisé.

23 Monsieur Sabbah, est-ce que les interprètes ont la possibilité de suivre le

24 e-court ? Parce que si tous les documents sauf un peuvent être sur le e-

25 court, ceci ne devrait pas être un problème pour les interprètes.

26 Le message suivant : les interprètes apparemment n'ont pas accès au bouton

27 e-court du système informatique, donc ils ne peuvent pas accéder à ce qui

28 figure sur nos écrans quand on appuie sur le bouton e-court.

Page 723

1 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] On vient de m'informer, apparemment

3 cela va arriver, mais pour l'instant effectivement, les interprètes n'ont

4 pas accès à e-court. Donc, si vous avez les copies papier de ces documents,

5 je pense que ceci pourrait les aider. On pourrait peut-être placer cela sur

6 le rétroprojecteur. Notre assistant pourrait nous aider avec cela avant que

7 vous ne commenciez votre contre-interrogatoire.

8 M. LUKIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

9 Q. Monsieur Stoparic, nous revenons sur le contre-interrogatoire.

10 Tout d'abord, je vais vous poser quelques questions brèves concernant

11 la déclaration que vous avez faite le 6 juillet 2006, il y a quelques jours

12 seulement. Je voudrais savoir si vous avez fait cette déclaration devant

13 l'enquêteur ou si c'est l'enquêteur qui l'a compilée, créée. Je parle de la

14 déclaration du 6 juillet 2006. Est-ce que vous parlez spontanément et ils

15 prenaient notes ou est-ce qu'ils ont fait une compilation de vos

16 déclarations précédentes ?

17 R. Je pense que c'est plutôt la deuxième possibilité.

18 Q. [aucune interprétation]

19 R. Je pense que cette déclaration préalable a été faite à partir des deux

20 ou trois autres déclarations que j'ai déjà faites auparavant.

21 Q. Mais qui a décidé des morceaux à intégrer dans cette nouvelle

22 déclaration ? Vous ou eux ?

23 R. Qu'est-ce que vous voulez dire par là ?

24 Q. Est-ce que ce sont les enquêteurs ou les représentants du bureau du

25 Procureur qui ont décidé ce qu'ils devaient prendre dans vos précédentes

26 déclarations préalables ou est-ce que c'est vous qui avez attiré leur

27 attention sur les paragraphes pertinents des précédentes déclarations ?

28 R. J'ai lu cette déclaration et j'ai dit que c'était exact. Peut-être

Page 724

1 qu'il y a eu des petites erreurs au niveau de la traduction, mais je n'ai

2 pas vraiment insisté là-dessus.

3 Q. Donc, nous pouvons en arriver à la conclusion que vous vous êtes

4 contenté d'avoir lu et signé cette déclaration ?

5 R. Non. J'ai aussi participé à sa composition, à savoir que parfois si je

6 n'étais pas d'accord je suis intervenu pour éventuellement changer quelque

7 chose.

8 Q. Dans cette déclaration préalable, on peut voir que c'est Philip Caine

9 qui vous a interviewé. Quel était le rôle de Philip Caine dans la prise de

10 cette déclaration préalable ?

11 R. Je ne connais pas cette personne.

12 Q. Mais qui était là au moment où vous avez signé cette déclaration

13 préalable ?

14 R. L'interprète, et quelqu'un mais je ne connais pas son nom, le

15 Procureur, quelques collaborateurs du Procureur, l'interprète.

16 Q. Je vais parcourir quelques paragraphes qui se trouvent dans votre

17 dernière déclaration préalable, et ensuite nous allons parcourir dans

18 l'ordre la première et la deuxième.

19 Dans la dernière déclaration préalable que vous avez fournie au

20 niveau du paragraphe 47, vous décrivez l'immeuble du MUP, et vous dites que

21 cet immeuble a été touché par les bombes de l'OTAN. Au cours de votre

22 séjour à Podujevo, avez-vous entendu dire que l'OTAN avait bombardé

23 d'autres endroits de la ville à cette époque-là ou avant cette époque ?

24 R. Non, je ne m'en souviens pas. De toute façon, l'OTAN ne cessait pas de

25 bombarder. Elle bombardait sans cesse.

26 Q. Dans cette déclaration du 6 juillet 2006, dans le paragraphe 59 de

27 cette déclaration, vous dites que Tutinac était furieux et qu'il vous a

28 grondé. Vous aviez peur qu'il allait tous vous tuer. Il nous a dit qu'il

Page 725

1 nous renvoie -- j'ai imaginé qu'il nous renvoyait du Kosovo. Là, vous

2 parlez de cette tuerie quand 19 civils ont été tués à Podujevo.

3 Ensuite, au niveau du paragraphe 60, vous dites : "Une demi-heure plus

4 tard, tous les membres des Skorpions, mis à part un peloton, étaient dans

5 le bus. Ils ont quitté Podujevo et se sont dirigés vers Prolom Banja."

6 Voici la question : Est-ce que vous pensez que ce comportement, le

7 comportement de vos supérieurs, empêchait que d'autres massacres se

8 produisent à l'avenir, massacres de civils, bien entendu ?

9 R. Oui, c'est tout à fait possible.

10 Q. Dans la même déclaration du 6 juillet 2006, au niveau du paragraphe 67,

11 vous mentionnez l'opération à Jezerce, et vous dites : "C'est là que nous

12 avons commencé l'opération de la chasse des terroristes albanais, l'UCK, et

13 nous avons essayé de prendre le contrôle des villages et des hameaux. On

14 appelait cela le 'nettoyage.'"

15 Pourriez-vous nous dire ce que faisaient exactement les unités qui ont

16 participé à cette action de nettoyage ?

17 R. On utilise ce terme de nettoyage chaque fois que l'on commence une

18 action. Qu'est-ce que faisaient ces unités; elles ont essayé de prendre le

19 contrôle du terrain. S'il y a résistance, il s'agit d'éliminer les

20 terroristes de l'UCK.

21 Q. Au cours de cette action à Jezerce, est-ce que vous avez tué des

22 civils ?

23 R. Non, on ne les a même pas vus, à part de très, très loin, d'une très

24 grande distance.

25 Q. Mais ce terme "nettoyage," dans le sens dans lequel vous l'avez utilisé

26 dans votre unité au cours des opérations, est-ce que ce terme comprend le

27 meurtre et la persécution des civils ?

28 R. Pendant toute la période où je portais une arme, pour moi ce terme veut

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1 dire l'attaque sur les forces ennemies, en essayant de prendre le contrôle

2 de leurs territoires et de leurs installations.

3 Q. Dans votre déclaration --

4 M. LUKIC : [interprétation] Une correction pour le compte rendu d'audience.

5 A la page 78, ligne 20, on peut lire "les forces ennemies," mais je pense

6 que le témoin a parlé des "soldats de l'ennemi."

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

8 [Le conseil de la Défense se concerte]

9 M. LUKIC : [interprétation]

10 Q. Dans votre déclaration, vous parlez souvent d'un certain Tutinac.

11 Connaissez-vous son nom et son prénom ?

12 R. Une fois, j'ai même parlé avec lui au téléphone et j'ai appris son nom,

13 mais pour moi, il restera toujours Tuta ou Tutinac. C'est un grand

14 professionnel, un homme que j'admire.

15 Q. Est-ce qu'il ne s'appelle pas Simovic ?

16 R. C'est tout à fait possible.

17 Q. Dans la déclaration du 6 juillet 2006, au niveau du paragraphe 79, vous

18 avez dit que vous avez passé entre 15 et 16 jours à Kosovo, et ceci en

19 faisant partie des forces de réserve du SAJ. En réalité, vous faisiez

20 partie des forces de la police en tant que réserviste ?

21 R. Oui, c'est ce que j'étais pendant toute période-là.

22 Q. En tant que membre de réserve des forces de la police, vous auriez pu

23 être rattaché à n'importe quel autre unité de réserve ?

24 R. Je ne le savais pas, mais cela étant dit, cela ne m'étonne pas non

25 plus.

26 Q. Dans la déclaration du 24 février 2004, dans le paragraphe 53, vous

27 dites ne jamais avoir reçu l'ordre de tuer des civils; est-ce exact ?

28 R. Absolument.

Page 727

1 Q. Merci.

2 [Le conseil de la Défense se concerte]

3 M. LUKIC : [interprétation] A présent, je voudrais demander à l'Huissier de

4 faire venir un exemplaire de cette déclaration préalable au témoin aussi.

5 Q. Monsieur Stoparic, je pense que vous avez devant vous votre déclaration

6 du 21 novembre 2003.

7 R. C'est une déclaration qui date du 21, 22, enfin jusqu'au 24.

8 Q. Oui, mais la première date, c'est la date du 21.

9 R. Oui.

10 Q. Au niveau du dixième paragraphe --

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce document doit avoir un numéro e-

12 court, n'est-ce pas ?

13 M. LUKIC : [interprétation] Oui, effectivement, Monsieur le Président. Il

14 s'agit du document 6D7 --.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

16 M. LUKIC : [interprétation] -- mais nous ne l'avons qu'en B/C/S.

17 Q. Monsieur Stoparic, dans la déclaration du 21 novembre 2003, dans la

18 version en langue serbe au niveau du dixième paragraphe, qui se poursuit

19 sur la quatrième page - en bas de la page vous pouvez voir le chiffre 4 sur

20 30 - on peut lire au niveau de la deuxième ligne : "Je n'ai blessé

21 personne. J'ai vu que (expurgé) tuait des civils."

22 Est-ce exact ?

23 R. Si cela est exact ?

24 Q. Oui.

25 R. Oui.

26 Q. Est-ce que vous avez informé qui que ce soit de cela ?

27 R. Non.

28 M. LUKIC : [interprétation] Mes confrères ont certaines objections à

Page 728

1 élever, donc si vous voulez m'accorder un instant, Monsieur le Président,

2 il faut que nous nous consultions.

3 Je vous prie de m'excuser. Maintenant, je comprends. C'est qu'au

4 compte rendu on lit : "Je n'ai jamais entendu," "heard", en anglais, et

5 cela devrait être "I never hurt," "je n'ai jamais blessé personne."

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

7 M. LUKIC : [interprétation] Ou le verbe "harm," c'est-à-dire, faire

8 du mal, blesser.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

10 M. LUKIC : [interprétation]

11 Q. Au paragraphe 12 de la même déclaration, on lit : "J'ai vu un

12 grand nombre de cadavres, de civils croates dans les rues de Tovarnik. J'ai

13 aussi vu le cadavre de la grand-mère d'un de mes amis de Sid, qui était une

14 Serbe, une dame serbe. Elle a probablement été tuée au moment où elle

15 essayait de protéger des Croates."

16 Monsieur Stoparic, est-ce que vous savez cela ou est-ce que c'est une

17 hypothèse de votre part ?

18 R. Est-ce que c'est cela vous avez à l'esprit ?

19 Q. Oui.

20 R. J'ai dit ici un de mes amis de Sid, c'est ce que lui m'a dit et c'est

21 ce qu'il pensait que s'était passé.

22 Q. Pour vous ce n'est pas un fait. Vous ne savez pas de quelle façon cela

23 s'est vraiment passé.

24 R. Non, bien sûr, je ne le sais pas. Tout ce que j'ai vu c'était son

25 cadavre.

26 M. LUKIC : [interprétation] Passons au paragraphe 21. Pour la version

27 B/C/S, c'est à la page 6. Je n'ai pas de version anglaise, donc je ne sais

28 pas quel est le numéro de la page.

Page 729

1 M. HANNIS : [interprétation] C'est à la page 5 en anglais.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Page 5, oui.

3 M. LUKIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

4 Q. Monsieur Stoparic, au paragraphe 21, vous dites : "Le capitaine

5 chetnik, Ljuba Ivanovic, nous a dit pendant la formation que nous devions

6 compenser pour les 750 Serbes qui avaient été tués pendant la Deuxième

7 guerre mondiale, ce qui voulait dire que nous devions tuer un nombre égal

8 de Croates."

9 Avez-vous consenti à de telles conditions ?

10 R. Non.

11 Q. Vous êtes resté dans cette unité ?

12 R. Bien, pas longtemps, Maître. Ce capitaine chetnik, Ljuba Ivanovic, a

13 lui-même rencontré la mort subite par la même méthode qu'il employait dans

14 ses actions. C'était un capitaine chetnik -- tout au moins, c'est ainsi

15 qu'il se désignait. J'ai participé à ces obsèques à Nis, et il y a eu une

16 lettre du Parti radical serbe qui a été lue par Seselj. Il remerciait le

17 capitaine chetnik pour ses combats vigoureux pour la libération des

18 territoires serbes. Pour ce qui est écrit ici et ce qui est dit ici, c'est

19 précisément ce que cet homme a dit.

20 Q. Mais vous n'avez jamais accepté de telles conditions préalables ?

21 R. Je n'ai pas tué de civils.

22 Q. Est-ce que d'autres membres de votre unité ont accepté de telles

23 conditions ?

24 R. Cette unité a été rapidement -- enfin, tout au long on les a appelé des

25 militaires au cours de cette guerre. Je n'ai pas vraiment suivi ce qu'il

26 faisait, mais j'ai vu certaines de ces personnes plus tard, et ils ne m'ont

27 jamais dit qu'ils avaient senti besoin de faire cela.

28 Q. Au paragraphe 25, vous dites que vous étiez le commandant de la 1ère

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1 Section de la 1ère Compagnie.

2 R. Je crois que je commandais la 2ème Section de la 1ère Compagnie.

3 Q. En tout état de cause, vous commandiez une section ?

4 R. Oui.

5 M. LUKIC : [interprétation] Passons au paragraphe 30, à la page 9 du

6 texte B/C/S, et à la page 7 du texte anglais.

7 Q. La dernière phrase se lit comme suit : "Les membres de l'unité

8 Leva Supoderica ont souvent tué des civils croates."

9 Pour commencer, pourriez-vous me dire ce que c'est que Leva Supoderica ?

10 R. Leva Supoderica est une partie de Vukovar, un quartier de Vukovar, et

11 ce détachement avait été appelé Leva Supoderica. Je suppose que c'est parce

12 qu'ils étaient originaires de cette partie de la ville, y compris leur

13 commandant.

14 Q. Est-ce que vous étiez membre de cette unité ?

15 R. Oui. J'étais membre de l'unité de Leva Supoderica.

16 M. HANNIS : [interprétation] Excusez-moi d'interrompre, Monsieur le

17 Président, mais je me rends compte que maintenant nous sommes passés à la

18 déclaration 2004 et je ne sais pas si nous avons mentionné le numéro de la

19 pièce pour cette déclaration. Nous avons évoqué le numéro de pièce pour la

20 déclaration de 2003.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Celle-ci est, je crois, le 6D7.

22 M. HANNIS : [interprétation] Bien. Excusez-moi. Mais nous n'avons pas donné

23 de numéro pour l'autre lorsque nous avons brièvement parlé de la

24 déclaration de 2003.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois que c'est exact, Monsieur

26 Hannis.

27 Maître Lukic, avez-vous un numéro pour la déclaration de 2003 ?

28 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'espère que je suis

Page 731

1 encore en train de regarder la même déclaration du 1er [comme interprété]

2 novembre 2003, au paragraphe 30, 3-0.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, excusez-moi.

4 Monsieur Hannis, la déclaration que nous examinons est celle du 21 --

5 en fait, elle est signée le 24 novembre 2003.

6 M. HANNIS : [interprétation] Oui, il faut que je corrige cela, Monsieur le

7 Président.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il me semble que ce soit la seule que

9 nous avions examinée.

10 M. HANNIS : [interprétation] Je crois que c'est exact.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien. Merci.

12 Maître Lukic.

13 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

14 Q. Monsieur le Témoin, nous avons établi que des membres de votre unité

15 avaient à nouveau tué des civils. Avez-vous pris part à ces meurtres de

16 civils ?

17 R. Non.

18 Pourrais-je donner une explication ? Basé sur mon expérience, dans

19 chaque unité -- ou plutôt peut-être pas dans toutes les unités en vérité,

20 pas dans les unités comportant de vrais professionnels, mais dans des

21 unités composées de volontaires où ont eu lieu des tueries de civils,

22 c'était toujours commis par un groupe de personnes qui devaient retourner

23 maintes fois à la ligne de front. Mais vous ne pouvez pas dire parce qu'une

24 personne était membre d'une unité qu'automatiquement il faisait ce que les

25 autres membres de cette unité faisaient.

26 Q. Je vous remercie et j'accepte votre explication. Toutefois, nous avons

27 dit que vous étiez commandant de section. Qu'est-ce que vous avez fait pour

28 punir les personnes qui avaient tué ?

Page 732

1 R. Je vous dirai, je parle pour ma section. C'étaient des membres de la

2 section Leva Supoderica, et ils étaient nombreux. Il n'y a eu qu'un seul

3 cas dans lequel un homme m'a rendu compte et m'a dit : Oh, mon Dieu, il

4 faut que tu saches ce que nous avons fait hier. Je ne peux pas exactement

5 citer ses paroles, mais en tout état de cause, il m'a dit qu'il avait tué

6 certaines personnes, qu'il les avait transpercées avec un couteau. Je pense

7 que c'étaient des gens à Ovcara. Je lui ai dit : Va-t-en, tu es en train

8 de mentir.

9 Toutefois, lorsque le procès d'Ovcara à Belgrade a commencé, cette même

10 personne a été condamnée pour ce crime. Vous voyez, je vous ai dit tout

11 simplement que je ne l'avais pas cru à ce moment-là.

12 Q. Est-ce que vous avez jamais rendu compte de ce que vous saviez pour ce

13 qui est de la tuerie de civils à Vukovar ? Avez-vous rendu compte à

14 quelqu'un ?

15 R. A qui étais-je censé rendre compte de cela ? Si ces civils qui avaient

16 été tués avaient en même temps été vus par mon supérieur, mon commandant, à

17 qui étais-je censé m'adresser alors ?

18 Q. Je vous remercie. Je voudrais qu'on passe maintenant au paragraphe 41

19 de la même déclaration. Vous y parlez de Vojislav Seselj, et vous dites que

20 l'effet qu'il a eu sur les volontaires était l'effet d'une drogue. Cela

21 avait une force pour les enivrer. Je ne veux pas m'attarder sur le cas de

22 M. Seselj maintenant, mais je voudrais vous poser la question suivante.

23 Est-ce que vous avez une expérience directe de l'effet des drogues sur les

24 gens ?

25 R. Non. Personnellement, non. Mais j'ai pu voir les effets sur d'autres

26 personnes et j'ai beaucoup appris en lisant des livres, comme tout le

27 monde.

28 Q. Je voudrais passer au paragraphe 65 de la même déclaration, qui est à

Page 733

1 la page --

2 R. Je l'ai retrouvé.

3 Q. Très bien. C'est à la page 13 de la version anglaise. Dans ce

4 paragraphe, vous dites : "J'en avais assez de Brcko et j'étais malheureux

5 du comportement de certains membres de mon unité. L'un de mes soldats avait

6 tué un couple de Musulmans, de mariés, d'une façon sauvage, de façon à les

7 voler. J'ai aidé la police à arrêter ce soldat."

8 Pourriez-vous nous dire le nom de ce soldat ? Si vous le voulez, nous

9 pouvons aller à huis clos partiel.

10 R. J'essaie de me souvenir de son nom, mais pour plusieurs raisons, je

11 préfèrerais prononcer son nom à huis clos partiel.

12 M. LUKIC : [interprétation] Nous pouvons passer à huis clos partiel ?

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien. Nous allons passer à huis

14 clos partiel, du fait de la question qui a été posée au témoin, le témoin

15 qui ne souhaiterait pas présenter ce moyen de preuve en audience publique.

16 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

17 le Président.

18 [Audience à huis clos partiel]

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16 [Audience publique]

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Lukic.

18 M. LUKIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

19 Q. Monsieur Stoparic, j'aimerais maintenant que nous nous concentrions sur

20 le paragraphe 66 de cette déclaration. Vous déclarez : "Lorsque j'ai été

21 démobilisé à Brcko, pendant le printemps de 1993, j'ai pris certains des

22 soldats qui partageaient les mêmes sentiments que moi ou qui avaient des

23 sentiments semblables, et nous nous sommes rendus à Teslic afin de

24 travailler avec le HVO dans le cadre d'une opération conjointe contre les

25 Musulmans."

26 Quels étaient ces sentiments que vous partagiez avec ces soldats ?

27 R. Des sentiments -- peut-être que je ne me suis pas bien exprimé, mais

28 quoi qu'il en soit, je vais expliquer ce que j'entendais lorsque je disais

Page 735

1 que nous partagions les mêmes sentiments.

2 Ce que je souhaitais dire, c'est qu'un soldat est un soldat, et un

3 soldat doit tuer un autre soldat. Si nous avions pris feu Ljuba Ivanovic à

4 Zepce avec le HVO. Est-ce que vous comprenez ce que je veux dire ? Nous

5 devons avoir des liens strictement professionnels. Si on nous donne l'ordre

6 de faire quelque chose, il faut obtempérer, il faut s'exécuter. J'étais là-

7 bas. C'est pour cela que j'ai décidé de choisir certaines personnes dont je

8 savais qu'elles ne provoqueraient pas d'incidents, et c'est ce que je

9 souhaitais dire.

10 Q. Est-ce que vous étiez à Teslic lorsque les Mica opéraient là-bas ?

11 R. Je n'en ai pas entendu parler.

12 Q. Voilà une réponse fort légitime.

13 Je vous ai demandé quels étaient vos sentiments parce que je voulais vous

14 poser d'autres questions à ce sujet. Est-ce que ce sont les mêmes personnes

15 qui s'étaient battues contre les Croates avec vous à Vukovar ?

16 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas entendu la réponse du témoin.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Stoparic, on vous a demandé

18 de répéter cette réponse, je vous prie.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] La réponse était oui. Pour la plupart, oui.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

21 M. LUKIC : [interprétation]

22 Q. Pourrions-nous passer au paragraphe 69, page 18. Dans ce paragraphe,

23 vous parlez de la création des Skorpions, et vous dites : "J'ai appris que

24 les Skorpions étaient une unité spéciale de la Sûreté de l'Etat qui avait

25 été mis sur pied en tant qu'unité satellite des Bérets rouges lors d'une

26 réunion à Novi Sad, entre Slobodan Grahovac, Mihalj Kertes, Radovan

27 Stojicic et Bozovic. Il y avait peut-être également d'autres personnes qui

28 étaient présentes."

Page 736

1 Comment est-ce que vous avez entendu parler de cette réunion ?

2 R. J'étais invité à me rallier aux Skorpions par Medic, qui était

3 accompagné de son garde du corps, ou de ces personnes qui faisaient office

4 de gardes du corps. Il y en avait beaucoup qui faisaient partie de sa

5 famille. J'ai voulu avoir d'autres informations à propos des Skorpions. Il

6 a dit : Ecoutez, je pense qu'il faudrait que tu te tiennes à l'écart des

7 unités de Seselj ou d'autres unités de ce style, s'il faut être un peu plus

8 professionnel. Si tu veux te battre, autant te battre avec quelqu'un qui

9 est plus professionnel. Il voulait se présenter comme le grand expert de

10 ces unités.

11 Il y a un autre nom qu'il a mentionné que j'ai omis de dire, et c'est

12 le nom de Zivko Sokolovacki, qui était directeur à l'époque; c'est quelque

13 chose de ce style-là.

14 Q. Donc, c'est Medic qui vous a parlé de cette réunion ?

15 R. Oui, tout à fait. C'est exactement comme je l'ai dit. Et maintenant,

16 j'ai ajouté Zivko Sokolovacki. C'est lui qui m'en a parlé. J'ai posé des

17 questions. Je voulais savoir quel était le type d'équipement qu'ils

18 avaient, parce que je voulais m'assurer d'avoir un meilleur poste. J'en

19 avais assez de ces unités de type volontaire qui n'avaient même pas un

20 uniforme. Je dois dire que ce qu'il m'a raconté m'a plutôt séduit. J'ai

21 pensé à un certain poste, un poste qui était offert par l'Etat, et je me

22 suis dit : Pourquoi pas ?

23 Q. Donc, la seule source d'information à ce sujet, c'était Medic ?

24 R. Oui.

25 Q. Est-ce que vous avez obtenu d'autres informations à propos des

26 Skorpions ou est-ce que vous avez reçu tous les renseignements de sa part à

27 lui ?

28 R. J'avais reçu tous mes ordres de lui, et tout ce que je devais savoir,

Page 737

1 officieusement ou officiellement, je l'ai appris de lui. C'est lui qui m'en

2 a informé.

3 Q. Merci. Au paragraphe 70 de la même déclaration, ainsi que le paragraphe

4 10 de la déclaration du 6 juillet 2006. Vous déclarez, dans ces

5 paragraphes, qu'il y avait le CSB de Doboj qui était l'une des autres

6 unités satellites. Est-ce que vous savez ce qu'est le CSB ?

7 R. D'après ce que j'avais entendu, le CSB, c'est le service de Sûreté

8 central, quelque chose de ce goût-là. Je sais qu'il avait dit que Mladen

9 Kuzemka [phon] était le commandant. Dans ce paragraphe, vous avez tous les

10 renseignements qui m'ont été donnés.

11 Q. Est-ce que vous voulez dire que le CSB de Doboj était une unité

12 satellite, une unité auxiliaire ?

13 R. Non, probablement seulement une section spéciale ou une compagnie

14 spéciale.

15 Q. Une partie seulement du CSB ?

16 R. Je m'excuse si j'ai commis des erreurs au niveau de tout ceci. Parce

17 que lorsque j'entendais par les transmissions le CSB, je pensais qu'ils

18 faisaient référence à leurs spécialistes. Je sais qu'en règle générale,

19 lorsqu'on pense à la police, le CSB est un organe beaucoup plus large.

20 Q. Au paragraphe 73 de la page 19 - et il s'agit de la page 14 de la

21 version anglaise - vous dites : "La Sûreté d'Etat de la RSK n'existait pas.

22 Il n'y avait que la Sûreté d'Etat de la Serbie."

23 Vous parlez de la structure du MUP dans la République de la Krajina

24 serbe ?

25 R. De quel paragraphe s'agit-il ?

26 Q. Du paragraphe 73, troisième ligne du paragraphe 73. "Il n'y avait pas

27 de Sûreté d'Etat en RSK."

28 R. Oui, d'après ce que je savais.

Page 738

1 Q. Est-ce que vous êtes sûr de ce fait ou est-ce que c'était un bruit qui

2 courait ?

3 R. Vous savez, je n'avais pas de fonction responsable là. On pourrait dire

4 que j'ai entendu cela.

5 Q. Par conséquent, vous n'avez jamais été au QG, au bureau principal du

6 ministère de l'Intérieur de la République de la Krajina serbe, et par

7 conséquent vous ne pouvez pas avancer qu'il y avait un secteur qui manquait

8 complètement ?

9 R. Je suis absolument sûr de ce que j'ai dit dans ma déclaration. Je l'ai

10 bien déclaré, cela. Mais le contexte était différent. Car il faudrait peut-

11 être ajouter ici qu'il ne s'agit pas d'une opinion personnelle de ma part,

12 mais qu'il s'agissait des informations ou des renseignements que j'avais

13 reçus.

14 Q. Monsieur Stoparic, c'est assez clair. Je veux tout simplement établir

15 le fait que vous n'aviez pas de connaissance directe de cela, mais que vous

16 vous êtes contenté de transmettre ce que vous aviez entendu.

17 R. Oui, tout à fait.

18 Q. Très bien.

19 R. Est-ce que je pourrais fournir une explication supplémentaire ?

20 Q. Bien sûr.

21 R. Voyez-vous, Maître, si quelque chose est dit 100 fois, même s'il s'agit

22 d'un mensonge, cela fini par devenir une vérité. Moi, en tant que personne

23 tout à fait ordinaire, en tant que soldat, je dirais que j'ai dû saisir ici

24 et là des éléments d'information et tirer des conclusions.

25 Q. C'est justement ce que nous craignons, des témoignages où nous voyons

26 que les gens transmettent des renseignements dont ils ne sont pas sûrs, et

27 c'est pour cela que nous vous sommes reconnaissants de le dire très

28 clairement.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Lukic, est-ce que ce serait

2 peut-être le moment opportun pour lever l'audience ?

3 M. LUKIC : [interprétation] Tout moment est toujours le bienvenu pour faire

4 une pause, Monsieur le Président.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

6 Monsieur Stoparic, nous devons lever l'audience pour le moment. Cette

7 audience reprendra demain. Il faudra que vous soyez ici pour poursuivre

8 cette déposition demain à 14 heures 15. Entre-temps, il est absolument

9 essentiel que vous ne parliez pas de votre déposition, soit de ce vous avez

10 déjà dit, soit de la déposition de demain. Vous ne pouvez en parler à

11 personne. Vous comprenez cela ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je comprends

13 parfaitement cela. Après tout, il s'agit d'une déposition en audience

14 publique. Je n'ai besoin de parler à personne de ce qui va être dit demain.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Mais ce que j'essaie de vous dire

16 c'est qu'il ne faut pas que vous en parliez à quiconque. Il ne faut pas que

17 vous en parliez ce soir à personne. Donc, je vous demanderais de revenir

18 demain ici pour être prêt à poursuivre votre déposition à 14 heures 15.

19 L'audience est levée.

20 --- L'audience est levée à 19 heures 00 et reprendra le jeudi 13 juillet

21 2006, à 14 heures 15.

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