Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 22 août 2006

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Monsieur Kabashi.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez prononcé au début de votre

9 déclaration une déclaration solennelle disant que vous alliez dire la

10 vérité. Est-ce que vous comprenez que cela s'applique toujours ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

12 LE TÉMOIN: EMIN KABASHI [Reprise]

13 [Le témoin répond par l'interprète]

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ackerman, en avez-vous terminé

15 ou avez-vous encore des questions à poser ?

16 M. ACKERMAN : [interprétation] Maintenant, il ne me reste plus que quelques

17 questions.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

19 M. ACKERMAN : [interprétation] Mais un point de procédure si la Chambre

20 peut trouver un moment qui conviendrait une fois que ce témoin en aura

21 terminé de sa déposition.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ackerman, je voudrais que l'on

23 m'informe à l'avance de ce genre de question, lorsque vous souhaitez

24 aborder des points particuliers. Est-ce que vous pourriez en parler pendant

25 la pause pour qu'on me le communique et pour qu'on voie quelle est la

26 meilleure marche à suivre ?

27 M. ACKERMAN : [interprétation] Merci. Dans la même veine, si j'ai

28 l'impression que quelque chose doit être consigné au compte rendu

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1 d'audience, je vais le signaler.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il y a plusieurs manières de procéder

3 devant ce Tribunal, bien entendu, Maître Ackerman.

4 M. ACKERMAN : [interprétation] Je ne connais pas toutes les approches

5 possibles, donc je suis un petit peu confus.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

7 Contre-interrogatoire par M. Ackerman : [Suite]

8 Q. [interprétation] Monsieur, hier à la fin, nous parlions de la

9 déposition que vous avez donnée dans l'affaire Milosevic, page 4 039 de

10 votre déposition.

11 On vous a demandé si les personnes qui ont lancé la grenade ou la bombe sur

12 votre maison y sont entrées. Ce que vous avez dit, c'est : "Ils n'ont pas

13 pénétré dans la maison, ils ne sont pas venus pour entrer dans la maison,

14 mais pour tuer." Alors, vous maintenez qu'ils sont venus pour vous tuer

15 vous-même ?

16 R. Oui.

17 Q. Je n'ai pas entendu la question, mais c'est parce que je n'ai pas

18 appuyé sur le bon bouton.

19 R. Oui.

20 Q. Vous nous avez dit hier qu'il y en a eu un nombre plutôt important, je

21 pense que vous avez parlé de huit ou dix personnes devant votre maison et

22 davantage dans le voisinage. Pourquoi est-ce qu'ils ne vous ont pas tué

23 s'ils sont venus pour faire cela ? Etiez-vous lourdement armé ? Est-ce que

24 vous ripostiez ? Est-ce que la maison a été farouchement défendue ? Qu'est-

25 ce qui les a empêchés de mener à bien leur projet ?

26 R. Moi aussi, je suis étonné qu'ils ne m'aient pas tué. A ce moment-là, je

27 n'étais pas armé.

28 Q. Je suppose que vous devez admettre qu'il est possible que vous vous

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1 trompiez, qu'ils ne sont pas venus pour vous tuer. Si tel avait été le cas,

2 ils l'auraient fait. Etes-vous d'accord ?

3 R. Ils ne sont certainement pas venus prendre un café, vu qu'ils étaient

4 armés de Kalachnikovs et de grenades.

5 Q. Je suppose que ceci est exact, mais que la seule chose qui les ait

6 empêchés de vous tuer, c'est parce qu'ils en ont décidé ainsi, ce n'est pas

7 parce que vous les en auriez empêchés ?

8 R. Je ne sais pas. Vous devriez leur demander ce qu'ils avaient à

9 l'esprit. Je ne sais pas ce qu'ils avaient à l'esprit.

10 Q. Oui, mais vous, vous êtes en train de nous dire ce qu'ils avaient à

11 l'esprit. Vous nous dites qu'ils sont venus vous tuer, donc c'est vous qui

12 nous en parlez.

13 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, il a dit qu'il ne

14 savait pas ce qu'ils avaient à l'esprit.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Tout à fait, Maître Ackerman.

16 M. ACKERMAN : [interprétation] Oui, c'est ce qu'il dit aujourd'hui. Dans

17 l'affaire Milosevic, il a dit qu'ils sont venus le tuer, donc il semblait

18 savoir ce qu'ils avaient à l'esprit.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

20 M. ACKERMAN : [interprétation] J'en ai terminé avec ce point.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que vous avez épuisé le

22 sujet.

23 M. ACKERMAN : [interprétation] Peut-être que je pourrais poser quelques

24 questions supplémentaires, mais je suis d'accord avec vous que ceci

25 n'apporterait pas de fruits.

26 Q. Je voudrais maintenant vous poser des questions au sujet de la zone de

27 Drenica. Tout d'abord, il est exact, n'est-ce pas, que pendant un moment la

28 municipalité de Drenica s'est trouvée sous le contrôle de l'UCK ?

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1 R. Je ne sais pas. Je n'étais pas à ce moment-là dans la municipalité de

2 Drenica. Je n'y suis allé que lorsque j'avais quelque chose à faire là-bas.

3 Q. Dans l'affaire Milosevic, page 4 046, on vous a demandé si pendant un

4 moment, toute Drenica s'est trouvée sous le contrôle de l'UCK, et vous avez

5 dit que oui. Donc, à l'époque, vous le saviez, nécessairement ?

6 R. Vous m'avez posé votre question au sujet de la municipalité de Drenica.

7 En fait, il y a deux municipalités. Pour ce qui est du territoire de

8 Drenica, je sais que pendant quelque temps, il s'est trouvé sous le

9 contrôle de l'UCK, oui.

10 Q. Est-ce que vous savez pendant quelle période c'est l'UCK qui l'a

11 contrôlé ?

12 R. A partir de septembre, octobre 1998, jusqu'au début de 1999, je crois.

13 Q. Il est également vrai, n'est-ce pas, que le territoire de Drenica,

14 comme vous l'appelez, constituait à peu près 27 % du territoire de Kosovo;

15 est-ce exact ?

16 R. C'est ce que j'ai lu dans les manuels de géographie.

17 Q. Vous n'avez aucune raison de penser qu'ils vous induisent en erreur,

18 ces livres, n'est-ce pas ?

19 R. Je n'ai jamais douté de la véracité de ce qui est écrit.

20 Q. A partir du moment où vous avez rejoint l'UCK en 1997, jusqu'à la fin,

21 vous portiez des vêtements civils, n'est-ce pas ?

22 R. Oui.

23 Q. D'autres membres de l'UCK de même, ils étaient en civil, n'est-ce pas ?

24 R. Certains, oui. Certains n'avaient pas besoin de porter d'uniformes,

25 donc ils étaient en civil.

26 Q. Il y avait des femmes dans les rangs de l'UCK, n'est-ce pas ?

27 R. Oui, il y avait des femmes et des jeunes filles.

28 Q. Certaines d'entre elles étaient armées, certaines étaient en

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1 uniformes ?

2 R. Oui, celles qui étaient sur le front, elles étaient armées, elles

3 avaient des uniformes, tandis que d'autres s'occupaient d'autres choses. Il

4 n'y avait pas lieu qu'elles portent un uniforme ou une arme.

5 Q. Vous aviez quatre fils qui étaient eux aussi combattants dans l'UCK,

6 n'est-ce pas ?

7 R. Vous parlez de mes enfants, de mes fils ?

8 Q. Oui.

9 R. Pour autant que je le sache, ma femme n'a donné naissance qu'à un fils.

10 Q. Très bien, alors l'information que j'ai est erronée. Je vous présente

11 mes excuses.

12 Connaissez-vous Nusret Pilana [phon] ?

13 R. Nusret Plana [phon], plutôt, pas Pilana.

14 Q. Oui, c'est exact. Mon albanais est plutôt mauvais.

15 R. Oui.

16 Q. Connaissez-vous cette personne ?

17 R. Oui, je la connais.

18 Q. Est-ce que vous avez participé à la rédaction son livre ? Est-ce que

19 vous avez eu quelque chose à voir avec cela ?

20 R. J'ai été l'éditeur de ce livre.

21 Q. En grandes lignes, est-ce que vous pouvez nous dire de quoi il s'agit

22 dans ce livre ?

23 R. Je ne sais pas exactement de quel livre vous parlez maintenant, parce

24 qu'il en a rédigé plusieurs.

25 Q. Vous voulez le titre ? Je pense que c'est "La terreur de l'invasion

26 serbe contre les Albanais de 1844 à 1999". Vous connaissez ce livre ?

27 R. Oui. En fait, j'ai fait une relecture de ce livre. Je n'étais pas le

28 seul, et c'est ce qui est rédigé sur la couverture du livre, qui a été le

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1 réviseur.

2 Q. Ce serait vous, alors ?

3 R. Oui. J'ai aussi autorisé la publication de ce livre.

4 Q. Qu'entendez-vous par là ? Comment avez-vous autorisé la publication du

5 livre ?

6 R. Mais c'est ce que fait un éditeur, c'est son travail.

7 Q. De quoi parle ce livre ?

8 R. Ce n'est pas d'une manière générale, mais d'une manière précise que le

9 livre parle de l'occupation serbe et des massacres commis depuis 1844

10 jusqu'en 1999. C'est un livre en trois langues. Les chapitres sont

11 intitulés en trois langues ainsi que la préface. C'est un livre illustré

12 également, il comporte un grand nombre de photographies.

13 Q. Très bien. Je pense que j'en ai terminé avec mes questions. Je vous

14 remercie de m'avoir répondu.

15 R. Je vous en prie.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Fila ?

17 M. FILA : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai été convaincu que ce

18 témoin avait quatre fils et que les quatre faisaient partie de l'UCK. C'est

19 ce qui figure dans les notes de l'Accusation. Maintenant, je découvre que

20 ce monsieur n'en a qu'un seul. Enfin, moi, je n'en ai aucun, donc

21 j'aimerais mieux en avoir ne serait-ce qu'un seul.

22 Contre-interrogatoire par M. Fila :

23 Q. [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Kabashi. Je vais vous poser

24 quelques questions. Je suis l'avocat Toma Fila, je représente ici Nikola

25 Sainovic. C'est juste pour tirer au clair certaines choses que je vais vous

26 poser des questions; sinon, je n'ai pas de questions. Vous n'aviez qu'un

27 seul fils; était-il membre de l'UCK ou non ?

28 R. Non, il ne l'était pas.

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1 Q. Non, ce n'est pas moi qui invente ce chiffre. Le Procureur nous a

2 communiqué l'information disant que vous aviez quatre fils.

3 Un autre point : vous êtes né en 1941, c'est ce que j'ai vu, 1941,

4 c'est bien à ce moment-là que vous êtes né ?

5 R. Non, en 1949.

6 Q. Voyez-vous, ce qui est écrit ici, c'est 1941. Je n'ai plus de questions

7 à vous poser, maintenant. Vous savez pourquoi ? Parce qu'il est dit là que

8 vous êtes sorti de la faculté à ce moment-là. Vous auriez donc été diplômé

9 à trois ans. Enfin, ces traductions sont vraiment épouvantables. Je n'ai

10 pas d'autres questions.

11 R. Est-ce que je peux apporter quelques précisions, si je puis ? Dans la

12 presse belgradoise et à la télévision serbe, une fois qu'on a lancé cette

13 grenade ou cette bombe dans ma maison, il a été écrit qu'un certain

14 terroriste a été tué et que cet homme avait mon nom et quatre enfants. Il a

15 été écrit qu'un certain terroriste avec 11 membres de sa famille a été tué.

16 Puis, dans la version de Tanjug, on disait qu'un certain terroriste a été

17 tué qui portait mon nom et que huit membres de sa famille ont été tués

18 également et qu'ils étaient tous membres de l'UCK, donc ma mère et tous les

19 autres. C'est l'information qui a été donnée à mon sujet en mars 1999 dans

20 la presse serbe.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Kabashi.

22 M. FILA : [interprétation] Puis-je prendre la parole ?

23 Q. Monsieur Kabashi, puisque vous connaissez le serbe, donc ce ne sont pas

24 les informations que nous avons, nous, trouvées, ce sont les informations

25 qui nous ont été communiquées par le Procureur. Donc, il est dit que vous

26 êtes né en 1941, tout comme moi, et que vous avez quatre fils. Cela ne

27 vient pas de la presse de Belgrade. Je me demande vraiment où on va ?

28 J'allais vous demander si on a fait des études en même temps, nous deux.

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1 R. [aucune interprétation]

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ackerman, vous avez un

3 problème.

4 M. ACKERMAN : [interprétation] C'est un mystère pour moi. On nous a donné

5 une feuille supplémentaire de la part du bureau du Procureur --

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] A quel moment ?

7 M. ACKERMAN : [interprétation] Le 17 août. On a supposé qu'il y avait là

8 des informations supplémentaires avec le témoin, mais maintenant, je ne

9 sais plus d'où viennent ces informations. Est-ce que cela vient de la

10 presse ou est-ce que c'est quelque chose qui leur a été communiqué par le

11 témoin ? Je ne sais pas. Il serait important de savoir si cela vient du

12 témoin; à ce moment-là, cela pourrait être très important.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, est-ce que vous

14 pouvez préciser cela ?

15 M. HANNIS : [interprétation] D'après ce qu'on me dit, c'était une erreur de

16 notre part que de dire que ce témoin avait quatre fils. Je ne sais pas

17 comment cela s'est produit, pourquoi on en est venu à commettre cette

18 erreur, mais c'était une erreur. Pour ce qui est de sa date de naissance,

19 il semblerait que dans la traduction serbe, il y a une erreur dans la date

20 où la date indiquait 1941. Dans notre version, c'est 1949. Je ne sais pas

21 comment cette erreur s'est produite.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous semblez répondre à la question.

23 Alors, Monsieur Bakrac ?

24 Monsieur Cepic ?

25 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

26 Contre-interrogatoire par M. Cepic :

27 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Kabashi. Je suis Djuro Cepic, je

28 suis l'un des conseils du général Vladimir Lazarevic. Je vais vous poser

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1 quelques questions.

2 Hier, il a été question du bombardement de Pristina, et il en a également

3 été question dans votre déclaration préalable, la déclaration du 24 avril

4 1999.

5 En fait, vous avez confirmé ce que vous aviez déjà dit préalablement,

6 à savoir que le bombardement de l'OTAN n'a pas occasionné de dégâts dans

7 des quartiers résidentiels de Pristina et qu'il n'y avait pas

8 d'installations militaires à Pristina, qu'on a bombardé uniquement la

9 prison, la police et le tribunal. Est-ce que cela est exact ?

10 R. Quant à la prison, je ne suis pas certain si elle a été endommagée ou

11 pas, pas le bâtiment de la police, mais le bâtiment de sécurité publique.

12 Ce sont deux bâtiments distincts. Donc, le bâtiment de la sûreté d'Etat où

13 on menait des enquêtes et où on plaçait des gens en détention, c'est ce

14 bâtiment-là qui a été bombardé. Si vous me montrez des photos, je peux vous

15 dire de quel bâtiment il s'agit.

16 Q. Merci. Saviez-vous qu'entre le 24 et le 25 mars 1999, on a bombardé de

17 nuit les mines de Gavalija [phon] et le quartier de Gracanica, qui est un

18 quartier résidentiel ?

19 R. Non, je ne sais rien de tout cela. Je ne sais pas où vous avez trouvé

20 ce nom, Aja [phon].

21 Q. Merci. Ajvalija.

22 R. Oui, Hajvalija [phon] existe, c'est un quartier.

23 Q. Excusez-moi, mais on ne trouve pas dans le compte rendu d'audience

24 quelque chose, à savoir, on ne trouve pas le nom de la localité Ajvalija :

25 A-j-v-a-l-i-j-a.

26 Merci.

27 Savez-vous que le 26 mars 1999, dans le village de Gornji Dobrovo,

28 qui se trouve sur la municipalité de Kosovo Polje, six personnes ont perdu

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1 la vie dû aux bombardements de l'OTAN, dont quatre femmes, donc il s'agit

2 de six civils en tout ?

3 R. Je n'étais pas là à ce moment-là. Je ne peux rien vous en dire.

4 Q. Savez-vous qu'à Pristina, on a détruit la poste et quatre bâtiments de

5 logements et que plusieurs personnes ont été tuées le 7 avril 1999 ?

6 R. Je le sais, mais je n'étais pas au Kosovo le 7 avril.

7 Q. Merci. Est-ce que vous savez que dans le quartier de Dardania, il y a

8 eu plusieurs bâtiments d'appartements, de logements qui ont été détruits,

9 ainsi que l'usine de matières plastiques à Pristina et la gare routière de

10 Pristina, le 12 et le 13 avril 1999 ?

11 R. J'ai lu là-dessus. L'arrêt de bus et l'usine de matières plastiques et

12 le quartier de Dardania sont en parfait état, comme ils l'ont toujours été.

13 Rien de tout cela n'a été touché. En fait, vous pouvez encore voir des

14 inscriptions en cyrillique là-bas, comme il y en a toujours eu sur ces

15 bâtiments.

16 Q. Merci, Monsieur Kabashi.

17 Mais savez-vous que pendant les bombardements de l'OTAN, Pristina et ses

18 environs ont été bombardés 406 fois, et plus de 1 000 projectiles sont

19 tombés sur Pristina et ses environs ? Le savez-vous ?

20 R. Je ne suis pas certain des chiffres que vous citez. Je ne sais pas.

21 Mais autour de Pristina, on a bombardé des installations militaires parce

22 que Pristina était l'une des cités les plus militarisées des Balkans. Tout

23 le monde le sait, oui. Donc, on a bombardé autour de Pristina tous les

24 bâtiments militaires.

25 Q. Dr Kabashi, je ne vous ai pas posé de questions sur des installations

26 militaires. Je vous ai posé des questions sur des bâtiments civils. Jusqu'à

27 présent, je ne vous ai interrogé qu'au sujet des bâtiments civils.

28 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]

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1 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous êtes en train de dire que les 406

3 bombardements aériens et plus de 1 000 projectiles concernent les bâtiments

4 civils ?

5 M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'est la somme de tous

6 les projectiles dans les raids sur Pristina.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais dans ce cas-là, la réponse a été

8 tout à fait appropriée. Le témoin ne vous a pas mal compris.

9 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

10 Q. Hier, ainsi que dans le dernier paragraphe de votre déclaration, page 4

11 en version B/C/S, page 7, paragraphe 2 en version albanaise, tout comme

12 dans le transcript d'hier, page 71, lignes 13 et 14, vous avez souligné que

13 pendant que vous faisiez partie de cette colonne qui avançait vers la gare

14 ferroviaire, qu'il y avait un char arrêté sur le pont, et que ceci a divisé

15 la colonne en deux. S'il y a eu tant de bombardements, et vous-même, vous

16 avez dit que ce sont des installations militaires qui ont été prises pour

17 cibles, alors comment est-ce qu'il est logique qu'un char se retrouve au

18 milieu d'un pont, au milieu de ce genre de bombardements ?

19 M. HANNIS : [interprétation] Je ne pense pas que l'on vient de nous

20 représenter les dires du témoin de manière adéquate. Je ne pense pas qu'on

21 nous ait dit que le bombardement était en cours pendant qu'il avançait vers

22 la gare ferroviaire.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous avez des faits pour

24 étayer cette question, Maître Cepic ?

25 M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin parle du

26 moment où les bombardements de l'OTAN étaient en cours, et je viens

27 d'énumérer les bombardements qui ont été menés sur Pristina.

28 M. HANNIS : [interprétation] Je ne pense pas qu'on nous a dit dans la

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1 déposition qu'il y a eu des bombardements 24 heures sur 24, tous les jours,

2 ou si c'était seulement de nuit.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais tout à fait, ce n'est pas une

4 question à poser au témoin. C'est quelque chose que vous pouvez présenter

5 comme étant votre thèse, le soumettre, le faire soumettre, mais je ne pense

6 pas que ce genre de question va vous apporter une réponse utile, à moins

7 que vous ne lui soumettiez qu'effectivement il y avait des bombardements en

8 même temps.

9 M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense qu'on reviendra

10 à cela pendant ce procès. Mais maintenant, je vais aborder un autre point,

11 si vous m'y autorisez.

12 Q. Monsieur Kabashi, savez-vous que le 29 janvier 1999, une attaque

13 terroriste a été menée à Pristina, à savoir, un engin explosif a été jeté

14 dans le café Galleria, huit personnes ont été blessées à ce moment-là, et

15 la mission de vérification, la mission de l'OSCE, a confirmé l'existence de

16 cet incident ? Est-ce que vous êtes au courant de cela ?

17 R. Je n'étais pas à Pristina à l'époque, donc je ne le sais pas.

18 D'ailleurs, cela ne m'intéressait pas de savoir qui était tué dans

19 différents cafés de Pristina.

20 Q. Donc, cela ne vous intéresse pas ? Je parle du mois de janvier 1999. Où

21 étiez-vous au mois de janvier 1999, Monsieur Kabashi ?

22 R. Vous voulez dire le mois de janvier après le début de la guerre ?

23 Q. Non. Le mois de janvier 1999, avant le bombardement de l'OTAN.

24 R. J'étais occupé. J'avais du travail. Je m'occupais de mon travail au

25 sein de l'UCK.

26 Q. Mais vous étiez où exactement au mois de janvier 1999, en tant que

27 membre de l'UCK ?

28 R. J'aurais pu être à Drenica, Malisheva, Dukagjin, à Lap. J'aurais pu

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1 être à Zllashe, à Pristina.

2 Q. Vous, en tant que membre de l'UCK, vous n'êtes pas intéressé de savoir

3 que l'on tue les civils à Pristina; est-ce exact ?

4 R. Ce que j'ai voulu dire, c'est que je ne prêtais pas attention à cela.

5 Je ne m'intéressais pas de savoir qui était tué dans différents cafés de la

6 ville.

7 Q. Merci. Vos opinions ne m'intéressent pas.

8 Est-ce que vous savez que le 31 janvier 1990, il y a eu une autre attaque

9 terroriste ? En 1999, c'est de cela que je parlais.

10 Donc, l'attaque terroriste sur le restaurant de Beca, donc une

11 personne a été tuée et deux personnes ont été blessées. Est-ce que vous

12 êtes au courant de cela ?

13 R. Je ne sais pas où se trouve ce restaurant, le restaurant de Beca, comme

14 vous dites, le restaurant de --

15 Q. Pour conclure, Monsieur Kabashi, en ce qui concerne les incidents où

16 les civils ont péri à Pristina, vous n'êtes absolument pas au courant de

17 ces incidents ?

18 M. HANNIS : [interprétation] Je ne pense pas que la question soit bien

19 posée. Il lui a posé la question au sujet de deux incidents, et ensuite, il

20 en arrive à la conclusion qu'il n'est pas au courant d'aucun incident qui

21 impliquait les civils.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Cepic, vous avez peut-être

23 raison, mais je vous demande si vous n'êtes pas un peu trop directif. Je ne

24 veux pas suivre l'intervention de M. Hannis pour vous demander de parler de

25 toutes les morts des civils à Pristina, pour vous demander quel est

26 vraiment l'argument que vous voulez tirer de ces questions. Est-ce que vous

27 pourriez dire qu'est-ce que vous voulez conclure ?

28 M. CEPIC : [interprétation] Bien, justement.

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1 Je ne veux pas perdre du temps, le temps du Tribunal. Je me suis dit

2 que j'allais poser une question au sujet des quelques morts des civils ou

3 des attaques qui ont eu lieu à Pristina au cours desquelles des civils ont

4 été tués, et le témoin a dit qu'il n'était pas au courant de cela.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, vous avez parlé de deux

6 incidents, si je ne m'abuse ?

7 M. CEPIC : [interprétation] Oui. J'ai mentionné des incidents aussi qui ont

8 eu lieu pendant les bombardements.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Cepic, les arguments, vous

10 allez pouvoir nous les présenter plus tard, Monsieur Cepic. Pour l'instant,

11 vous avez les réponses, les réponses aux questions que vous avez posées, et

12 ensuite, si vous voulez, vous pourrez construire votre argument là-dessus.

13 M. CEPIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

14 Q. Monsieur Kabashi, est-ce que vous êtes au courant d'un incident qui a

15 eu lieu avant le 24 mars 1999 au cours duquel des civils ont été tués, ceci

16 suite à des attaques terroristes à Pristina ?

17 R. Non.

18 Q. Merci. Je n'ai pas d'autres questions.

19 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Cepic. Monsieur

21 Ivetic ?

22 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

23 Contre-interrogatoire par M. Ivetic :

24 Q. [interprétation] Monsieur Kabashi, Docteur Kabashi, plutôt. Je

25 m'appelle Dragan Ivetic. Avec M. Lukic et M. Ozren Ogrizovic, je suis ici

26 pour représenter les intérêts de M. Sretan Lukic, un des accusés en

27 l'espèce. Donc, je voudrais vous poser un certain nombre de questions. Je

28 vais vous demander de prêter bien attention aux questions que je vous pose

Page 2081

1 pour que l'on puisse aller le plus rapidement possible, pour que nous

2 puissions progresser. Est-ce que vous m'avez compris ?

3 R. Oui.

4 Q. Tout d'abord, M. Cepic vous a posé quelques questions au sujet d'une

5 attaque contre des civils à Pristina. Dans l'affaire Milosevic, vous avez

6 déposé sous serment au niveau de la page 4 019, lignes 20 à 25, en disant

7 qu'il n'y avait pas d'opérations entreprises à Pristina par l'UCK au cours

8 desquelles il y a eu des morts de civils. Est-ce que vous vous souvenez de

9 cela ?

10 R. Oui, c'est exact.

11 Q. Bien. Les incidents que M. Cepic vient d'énumérer concernant les

12 attaques contre les civils qui ont eu lieu et qui ont été présentées en

13 guise de bombardements, ce sont exactement les types d'incidents dont M.

14 Milosevic vous a posé des questions, et vous avez dit à l'époque que ces

15 opérations n'ont pas eu lieu; est-ce exact ?

16 R. Oui, bien sûr.

17 Q. Donc, dans cette partie de votre déposition dans l'affaire Milosevic,

18 vous ne disiez pas la vérité, ceci n'était pas exact, n'est-ce pas,

19 Monsieur Kabashi ?

20 R. Quelle partie de la déposition ?

21 Q. Vous avez dit qu'il n'y a pas eu d'attaques contre les civils à

22 Pristina. Maintenant, nous avons entendu dire qu'il y a eu plusieurs

23 attaques contre les civils, et plusieurs de ces attaques ont été

24 identifiées par mon confrère, M. Cepic ?

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que nous avons des éléments de

26 preuve au sujet de cela ?

27 M. IVETIC : [interprétation] Non, pas pour l'instant.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, cet argument, vous pourrez le

Page 2082

1 dire un peu plus tard, une fois que nous aurons entendu toute l'histoire.

2 M. IVETIC : [interprétation] Très bien.

3 Q. Monsieur Kabashi, je vais aborder quelques détails techniques. Quand on

4 regarde votre déclaration en date du 24 avril 1999, c'est une déclaration

5 qui vous a été lue en albanais avant que vous ne l'ayez signée; est-ce

6 exact ?

7 R. Oui.

8 Q. Vous avez entendu cette déclaration en langue albanaise qui vous a été

9 lue, et ensuite vous avez signé la déclaration et vous certifiez que les

10 éléments qui s'y trouvent étaient exacts, véridiques, d'après votre

11 meilleur souvenir; est-ce exact ?

12 R. Oui.

13 Q. Ensuite, le Procureur nous a aussi présenté des extraits de votre

14 déposition, le procès-verbal de votre déposition dans l'affaire Milosevic.

15 Est-il exact qu'avant de déposer dans cette affaire, vous avez fait une

16 déclaration solennelle indiquant que vous alliez dire la vérité, toute la

17 vérité, rien que la vérité, tout comme hier, d'ailleurs, en l'espèce ? Est-

18 ce exact ?

19 R. Oui.

20 Q. Bien. Pendant votre déposition dans l'affaire Milosevic, au niveau du

21 compte rendu d'audience page 4 047, lignes 15 et 16, vous avez confirmé que

22 non seulement vous étiez un membre de l'UCK à l'époque, mais qu'à l'époque

23 vous étiez aussi armé et que vous étiez dans le terrain comme rebelle de

24 l'UCK; est-ce exact ?

25 R. Oui.

26 Q. Maintenant, vous nous dites qu'en tant qu'un membre armé de l'UCK, vous

27 n'avez pas participé aux attaques armées entreprises par l'UCK à Pristina

28 et qui visaient les civils ?

Page 2083

1 R. Ni contre des civils, ni contre des soldats armés.

2 Q. Merci. Quelle était votre unité ou formation, l'unité à laquelle vous

3 apparteniez dans le cadre de l'UCK ?

4 R. C'était une unité de logistique qui avait son QG à Pristina,

5 responsable des actions ou activités de la guérilla à Pristina.

6 Q. Quand vous parlez de ces activités, est-ce que cela veut dire la

7 guerre, guérilla ?

8 R. Oui.

9 Q. Et la base de logistique de l'UCK à Pristina avait beaucoup de membres,

10 n'est-ce pas ?

11 R. Oui, plusieurs.

12 Q. Vous avez dit tout à l'heure que vous avez été à Drenica à un moment

13 donné, et je pense que vous avez dit que dans le cadre de vos fonctions au

14 sein de l'UCK, que vous étiez dans plusieurs endroits. N'est-il pas exact

15 qu'à un moment donné, avant le début du bombardement de l'OTAN en 1999,

16 dans le cadre de vos fonctions au sein de l'UCK, vous avez visité le

17 commandement de l'UCK à Drenica avec quelques autres membres importants de

18 l'UCK de Pristina, y compris les représentants de la Ligue des femmes

19 albanaises et votre ami, un bon ami à vous, M. Brovina, et quelques autres

20 personnes ? Est-ce exact ?

21 R. Oui.

22 Q. Quand on parle de ce groupe, groupuscule de l'UCK qui se trouvait à

23 Pristina, dans la région de Pristina, est-ce que vous pourriez nous dire où

24 exactement se trouvait la base de ce groupe ?

25 R. A plusieurs endroits, mais avant tout dans la clinique du Dr Brovina,

26 mais aussi dans d'autres endroits à Pristina.

27 Q. Pouvez-vous nous donner le nom des quartiers de Pristina où il y avait

28 des bases, les bases de l'UCK, ou bien où l'UCK était en activité ?

Page 2084

1 R. Il n'y avait pas vraiment de QG, mais il y avait des groupes de gens

2 qui étaient chargés de différentes missions. Il s'agissait d'aider avec la

3 logistique, et là, ces bases se trouvaient dans différents quartiers de

4 Pristina, Sofali, Vellushi, peut-être d'autres quartiers aussi. Mais en ce

5 moment, aucun nom ne me vient à l'esprit.

6 Q. Est-ce qu'il y avait un groupe de l'UCK dans le quartier de Vranjevac,

7 par exemple le groupe l'UCK qui s'appelle G-o-l-a-k ?

8 R. Je ne sais pas combien il y avait de groupes de l'UCK à Pristina. Je

9 sais qu'il y avait par exemple à Vranjevac, un groupe de logistique, oui.

10 Q. Ce groupe de Vranjevac préparait des uniformes pour les combattants de

11 l'UCK, n'est-ce pas, parmi d'autres fonctions ?

12 R. Oui, il s'occupait des uniformes parmi d'autres missions, oui.

13 M. IVETIC : [interprétation] Je vois une erreur au niveau du compte rendu

14 d'audience, page 19, ligne 14, on peut lire "franities", alors que le

15 témoin a dit "Vranjevac". Je lui ai posé d'ailleurs une question à ce

16 sujet.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Ivetic.

18 L'INTERPRÈTE : Le témoin a dit Vranjevc.

19 M. IVETIC : [interprétation]

20 Q. J'ai l'impression qu'on parle du même endroit, n'est-ce pas ?

21 Vranjevac est le nom en serbe ?

22 R. Oui, effectivement.

23 Q. Vous avez dit qu'il y avait plusieurs groupes qui étaient en activité

24 et que ces groupes s'occupaient de leurs missions, et je pense que parmi

25 ces missions, il y avait la mission d'organiser, participer aux attaques

26 terroristes contre l'Etat serbe; est-ce exact ?

27 R. Non. Je ne pense pas qu'il s'agissait là des attaques terroristes

28 contre l'Etat. Il s'agissait là d'une guerre ouverte.

Page 2085

1 Q. Mais vous conviendrez, n'est-ce pas, que l'UCK, votre groupe tout au

2 moins, a participé aux combats armés avec différentes composantes de l'Etat

3 serbe; n'est-ce pas ?

4 R. Non, je n'ai pas dit cela.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, la guerre ouverte ?

6 Qu'est-ce que vous avez dit exactement, Monsieur Hannis ?

7 M. HANNIS : [interprétation] Cela, c'est exactement la signification de la

8 guerre ouverte.

9 M. IVETIC : [interprétation] Oui, je me suis dit exactement la même chose,

10 mais vous savez, parfois, les témoins ont des interprétations quelque peu

11 différentes, donc j'essaye d'obtenir quelques clarifications.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous pouvez continuer M. Ivetic.

13 M. IVETIC : [interprétation]

14 Q. Monsieur Kabashi, est-il exact que pendant la période allant entre 1998

15 jusqu'à la fin de 1999 dans la région de Pristina, votre groupe de l'UCK a

16 mené des attaques de la guérilla dans la région ?

17 R. Que voulez-vous dire par les attaques de la guérilla, et dirigées

18 contre qui ?

19 Q. Dirigées contre qui que soit, peu importe.

20 R. S'il y avait eu des attaques de la guérilla, ces attaques étaient

21 dirigées contre les installations militaires et les soldats arborant un

22 uniforme. Je n'ai pas participé à cela, je ne faisais pas partie de groupe-

23 là.

24 Q. Mais vous avez des connaissances des activités des autres volets de

25 votre organisation ?

26 R. Non. Je faisais partie d'un groupe, et au sein de ce groupe, je me suis

27 occupé des questions de la logistique, c'est tout.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Kabashi, la logistique,

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1 d'après moi, veut dire que vous vous occupiez du matériel, de l'aide

2 matérielle aux membres actifs de l'UCK, donc que votre seule raison

3 d'existence était de supporter l'activité armée, n'est-ce pas, les

4 activités armées ? Est-ce que j'ai raison ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, mais nous ne pouvions pas fournir

6 des armes à l'UCK puisque nous n'en avions pas. En revanche, nous leur

7 fournissions des papiers, des médicaments, et cetera.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pas d'uniformes, puisqu'on en a parlé

9 tout à l'heure ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. Des uniformes, mais pas d'armes, pas

11 les armes.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La nourriture ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Les vêtements, la nourriture,

14 l'équipement sanitaire, et cetera.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et tout ceci, n'était-ce pas fait pour

16 qu'ils puissent poursuivre leurs activités armées ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le conseil de la Défense souhaite

19 savoir si vous saviez que l'UCK procédait à ces attaques. Oubliez tous les

20 adjectifs qui ont été utilisés : guérilla, terroristes, et cetera. De toute

21 façon, on a l'impression que ces termes ont pour but de déstabiliser un peu

22 les gens dans ce prétoire. Ce que je veux savoir, ce sont vraiment les

23 faits, les faits de base.

24 Il veut savoir si vous saviez que les gens de l'UCK attaquaient

25 d'autres gens dans la région de la Pristina. Quelle est la réponse ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans la région de la Pristina, il n'y a pas eu

27 de combats. Je n'ai pas d'informations que l'UCK ait attaqué qui que ce

28 soit.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Ivetic ?

2 M. IVETIC : [interprétation]

3 Q. Très bien. Parmi vos activités au sein de ce groupe de logistique, vous

4 deviez aussi préparer les cartes d'identification pour les membres de

5 l'UCK ?

6 R. Non.

7 Q. Donc, vous n'aviez pas à faire de fausses cartes d'identité ou de faux

8 documents, des laissez-passer des différentes organisations humanitaire

9 pour permettre aux combattants de l'UCK de passer librement à travers le

10 territoire ?

11 R. Non, ce n'est pas exact.

12 Q. Au cours de votre déposition dans l'affaire Milosevic, vous avez dit

13 que les rapports concernant le kidnapping des Serbes et des Albanais par

14 l'UCK ne sont pas exacts, qu'il s'agit là d'une invention, pure invention

15 de la propagande serbe. Est-ce que vous continuez à le dire aujourd'hui, à

16 l'affirmer aujourd'hui ?

17 M. HANNIS : [interprétation] Est-ce que nous pouvons avoir la page ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je continue à le dire.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pouvez-vous nous donner le numéro de

20 la page, s'il vous plaît ? Si vous n'arrivez pas à le trouver, vous allez

21 pouvoir nous le fournir plus tard, mais je vous prie de nous donner à

22 l'avance les numéros de page des différentes citations avant de les citer.

23 M. IVETIC : [interprétation] Je suis désolé. C'est vrai que le témoin a

24 déjà confirmé que c'était bien sa déposition, mais les propos exacts se

25 trouvent à la page 4 041, lignes 9 à 40 du compte rendu d'audience dans

26 l'affaire Milosevic. Je peux peut-être reposer la question au témoin.

27 Q. Est-il exact que vous avez dit que les rapports concernant les

28 kidnappings, aussi bien de Serbes que des Albanais en 1998, étaient d'après

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1 vous les inventions de la propagande serbe ? Là, je parle des kidnappings

2 qui auraient été l'œuvre de l'UCK. Est-ce que vous continuez à le dire ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

4 M. IVETIC : [interprétation]

5 Q. Vous voulez dire que l'UCK n'avait pas pour but d'enlever ou kidnapper

6 des personnes sur le territoire du Kosovo jusqu'en 1998 -- on va s'arrêter

7 1998 ? Est-ce exact ?

8 R. Que je sache, ceci s'est passé.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous ai laissé un petit peu de

10 temps et je vous ai laissé la liberté de procéder comme vous vous voulez,

11 mais vous savez, nous n'avons pas suffisamment de temps, ici. Nous ne

12 pouvons pas nous permettre le luxe de surligner et répéter les réponses

13 assez claires que vous avez déjà reçues, puisque vous n'avez pas affaire

14 avec un jury, un jury, ici. Nous devons progresser le plus rapidement

15 possible, tout simplement.

16 M. IVETIC : [interprétation] Je vais m'y efforcer.

17 Q. Monsieur, nous avons eu des éléments, des informations venant de

18 l'OSCE, c'est l'Organisation de la sécurité de la coopération en Europe, et

19 des différentes missions des observateurs, des missions des droits de

20 l'homme, et cetera, et même des porte-parole politiques de l'UCK qui ont

21 dit que de tels enlèvements ont été l'œuvre de l'UCK pendant cette période

22 de temps. Est-ce que vous acceptez cela ?

23 R. Vous devez poser cette question-là à Adem Demaqi. Il est toujours

24 vivant. Vous pouvez lui demander de venir déposer ici.

25 Q. Très bien. N'est-il pas exact qu'une grande partie de votre déposition

26 n'est pas exacte quand il s'agit de l'UCK ou que vous êtes plus que partial

27 là-dessus ?

28 M. HANNIS : [interprétation] Je suis tout à fait contre cela.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que cette question, vraiment,

2 ne sert à rien, et surtout pas dans la situation où nous en sommes. Peut-

3 être que devant d'autres institutions, vous auriez pu la poser.

4 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur --

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons passer à un autre sujet,

6 s'il vous plaît, Monsieur Ivetic.

7 M. IVETIC : [interprétation]

8 Q. Donc, vous étiez membre de l'UCK, et d'après votre déposition au cours

9 des deux derniers jours, vous étiez un membre assez actif de l'UCK, et

10 cette information ne figure nulle part dans votre déclaration, dans la

11 déclaration que vous avez fournie au bureau du Procureur ?

12 M. HANNIS : [interprétation] Est-ce qu'on lui a posé cette question ? Est-

13 ce que nous avons une preuve qu'on lui a posé cette question ?

14 M. IVETIC : [interprétation] Il y a beaucoup de confusion quant aux

15 questions qu'on lui a posées et qu'on ne lui a pas posées. Nous avons reçu

16 les notes de préparation de ce témoin du bureau du Procureur, de M. Hannis

17 --

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, Monsieur Ivetic. Là, nous

19 avons exactement le même problème que tout à l'heure, la même catégorie que

20 tout à l'heure. Soit c'est vrai, soit ce n'est pas vrai, et c'est la

21 déclaration qui nous le démontrer.

22 M. IVETIC : [interprétation] J'ai voulu tout simplement confronter le

23 témoin pour vérifier s'il est vraiment crédible, si on peut vraiment

24 accorder une valeur probante à ses déclarations.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela dépend du fait si cette question

26 a été posée pendant l'interrogatoire, si cette question s'est présentée.

27 Parfois, vous pouvez montrer une partie de la déclaration où quelque chose

28 aurait dû être dit, mais de l'autre côté, à ce moment-là, nous ne savons

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1 pas quelle était la question qui lui a été posée à l'époque. Nous savons ce

2 qu'il a dit dans l'affaire Milosevic il y a quatre ans maintenant, et je

3 voudrais que maintenant, vous lui posiez les questions au sujet de ce qu'il

4 pense maintenant.

5 M. IVETIC : [interprétation] Très bien, je vais le faire.

6 Q. Nous allons parler de votre déclaration, dans le deuxième paragraphe de

7 la déclaration où vous parlez de ces policiers que vous décrivez comme

8 policiers qui portaient un uniforme plutôt militaire, de "style militaire",

9 portant un aigle blanc sur la manche de leurs uniformes. Est-ce que vous

10 dites que les membres du MUP portaient de tels emblèmes sur leurs

11 uniformes ?

12 R. Non, je n'ai pas dit cela.

13 Q. Je voudrais à présent attirer votre attention sur le deuxième

14 paragraphe de votre déclaration que vous avez donnée sous serment et qui

15 est datée du 24 avril 1999.

16 M. HANNIS : [interprétation] Je peux fournir au témoin une copie papier de

17 cette déclaration.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas dit qu'il était --

19 M. IVETIC : [interprétation]

20 Q. Très bien. J'ai donc la version en anglais de ce compte rendu, et au

21 milieu du deuxième paragraphe de cette déclaration en anglais, il est écrit

22 la chose suivante : "Il y avait des policiers en uniforme standard, des

23 policiers en uniforme de type militaire. Certains d'entre eux avaient un

24 insigne avec un aigle blanc sur leurs épaules et un béret avec ce fameux

25 insigne à aigle blanc."

26 Tout d'abord, j'aimerais savoir si vous avez bel et bien dit cela au

27 Procureur dans le cadre de votre déclaration.

28 R. Oui.

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1 Q. Ma question précédente était la suivante. Je voulais savoir si vous

2 aviez déposé pour dire que les membres du ministère de l'Intérieur avaient

3 ce type d'emblème sur leurs uniformes. Enfin, je reprends ma question.

4 Voici la question. Est-ce bel et bien votre déposition que de dire que les

5 membres du ministère de l'Intérieur ou du MUP avaient ce type d'emblème ?

6 R. Non, je ne l'ai pas dit, d'ailleurs. Je ne sais pas exactement ce

7 qu'arboraient les membres du MUP, en tout cas en ce qui concerne leurs

8 emblèmes. Je ne sais pas s'ils étaient membres de la police ou non.

9 Q. Très bien. Cette réponse est assez claire. Je poursuis.

10 Vous dites aussi dans ce même paragraphe qu'il y avait des civils armés.

11 L'avez-vous vu de vos yeux ?

12 R. Non seulement je les ai vus de mes yeux, mais je les ai sentis, si je

13 puis dire, parce que ma maison a été attaquée. Tout le monde le sait.

14 Q. Vous dites que votre maison a été attaquée par des civils armés ?

15 R. Parmi ceux qui ont attaqué ma maison, il y avait des civils armés.

16 Q. Très bien. Vous dites que le 25 mai 1999, vous avez reçu un coup de fil

17 de la part de quelqu'un qui vous disait à peu près ce qui suit. Enfin, il y

18 avait une référence à l'OTAN. Je vais vous poser des questions sur cette

19 conversation téléphonique. D'après vous, est-ce que vous avez ressenti cela

20 comme étant une menace contre votre vie, une réaction venant de quelqu'un

21 et qui aurait trait aux bombardements de l'OTAN ?

22 R. Je l'ai ressenti comme étant une menace, menace sur ma vie, vie

23 de ma famille aussi, menace contre la vie de ma famille. D'ailleurs, avec

24 le temps, je me suis rendu compte que j'avais raison.

25 Q. Mais vous n'avez pas été en faire rapport à la police ou à d'autres

26 autorités chargées du maintien de l'ordre ? Vous n'avez pas fait rapport de

27 ces menaces qui pesaient sur votre vie ?

28 R. Bien, j'aimerais vous demander si vous étiez au Kosovo en 1999, parce

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1 que si vous y étiez, vous pourriez savoir qu'on ne pouvait pas faire

2 rapport à qui que soit. Il n'y avait pas de commissariat de police, tout se

3 faisait à la pointe du fusil. On essayait tous de s'abriter, de s'abriter

4 dans un endroit sûr, un endroit sûr où on serait à l'abri des fusils et des

5 balles.

6 Q. Très bien, donc vous n'avez pas fait rapport de ces menaces sur votre

7 vie aux autorités chargées du maintien de l'ordre ?

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Ivetic, enfin, c'est bien

9 évident de la part de sa réponse. On voit bien quelle est la réponse

10 exacte. C'est exactement les mêmes problèmes que ceux que nous avons

11 abordés précédemment.

12 M. IVETIC : [interprétation] Je veux que tout soit extrêmement clair. Je

13 veux avoir des réponses qui sont simples, oui ou non.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais écoutez, vous pouvez vous

15 dire que nous avons quand même un certain bon sens. La Chambre de première

16 instance a du bon sens et est capable de faire quelques déductions, quand

17 même.

18 M. IVETIC : [interprétation] Très bien. Je poursuis.

19 Q. Dans votre deuxième paragraphe dans toutes les versions, vous parlez de

20 deux policiers et vous dites que vous les aviez déjà vus, vous les

21 connaissiez, vous saviez qui c'étaient. Je crois qu'ils s'appelaient Simic

22 et Pedza. En tout cas, ce sont les noms que vous avez donnés. Dans votre

23 témoignage, vous avez dit que vous les avez vus en train de patrouiller

24 dans les villes l'après-midi et qu'ils n'ont pas pris part à l'attaque

25 contre votre maison ?

26 R. Oui.

27 Q. Ensuite, au milieu de la page 3 de la version albanaise de votre

28 déposition, qui est le paragraphe 3 de la page 2 de la version en anglais

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1 et en B/C/S, vous dites que quand il y a eu l'explosion dans votre maison,

2 vous avez dit à deux de vos parents qui étaient dans la pièce avec vous de

3 se coucher. Est-ce que vous vous êtes aussi couché pour vous protéger ?

4 R. J'étais assis près de la porte. J'étais en train de parler au téléphone

5 quand la bombe a explosé.

6 Q. Vous êtes resté dans cette position après l'explosion ? Vous êtes resté

7 assis derrière la porte à poursuivre votre conversation téléphonique ?

8 R. Evidemment que non, bien sûr. Comment est-ce que j'aurais pu rester

9 assis ? La porte m'est tombée dessus, le téléphone a été coupé. Enfin, vous

10 pouvez quand même imaginer ce qui s'est passé. Vous pouvez imaginer quel

11 est l'effet d'une bombe quand elle explose.

12 Q. Tout à fait, je le peux, et c'est pour cela que je vous demande si vous

13 vous êtes retrouvé à terre avec les autres membres de votre famille après

14 l'explosion de la bombe ?

15 R. Alors en effet, je vous réponds, oui je me suis retrouvé à terre.

16 Q. Où se trouvait exactement cette pièce dans votre maison, à quel étage,

17 par exemple ?

18 R. C'est au rez-de-chaussée, à droite de la porte principale.

19 Q. Votre maison est-elle entourée de portes, de murs, d'un portail ? Y a-

20 t-il une clôture ?

21 R. Il y avait un portail en fer et un grillage, enfin, une grille,

22 d'ailleurs, qui entourait la maison, qui entourait la cour à l'époque.

23 Q. Les rues étaient-elles éclairées cette nuit-là, le 25 mars 1999 ?

24 R. Non. Il n'y avait jamais eu, d'ailleurs, d'éclairage public.

25 Q. Dans votre maison, y avait-il du courant, le 25 mai 1999 ? Est-ce qu'au

26 soir du 25 mai 1999, le courant fonctionnait dans votre maison ?

27 R. Non. L'électricité était coupée de temps en temps, surtout dans les

28 quartiers qui n'étaient pas en ville. Ce n'était pas la seule nuit où nous

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1 n'avions pas d'électricité. C'est arrivé très souvent.

2 Q. Oui, donc il y a eu cette coupure d'électricité de façon fréquente à

3 partir du moment où l'OTAN a commencé à bombarder; c'est bien cela ?

4 R. Oui, même avant les bombardements de l'OTAN, il y avait souvent des

5 coupures d'électricité.

6 Q. Vous avez dit dans votre déclaration qu'après l'explosion, il y avait

7 beaucoup de fumée dans l'air, suite bien sûr à l'explosion; c'est bien

8 cela ? Il y avait beaucoup de fumée ?

9 R. Oui.

10 Q. Mais il faisait nuit, quand même, quand l'explosion a eu lieu. Je crois

11 que vous avez dit que cela s'est passé à 10 heures moins le quart du soir.

12 Est-ce qu'il faisait nuit à ce moment-là ?

13 R. Oui.

14 Q. Quand avez-vous vu le véhicule que vous avez décrit tout d'abord comme

15 étant une voiture et ensuite comme une jeep ? Quand l'avez-vous vu pour la

16 première fois ? J'aimerais savoir où vous vous trouviez quand vous avez vu

17 ce véhicule pour la première fois.

18 R. J'étais à l'intérieur de ma maison. J'allais de pièce en pièce. Comme

19 je vous l'ai déjà dit, ma mère était malade; j'essayais de faire les

20 courses, j'essayais de l'aider. Donc, je l'ai vu plusieurs fois, mais je

21 l'ai aussi vu après le crépuscule ce même jour.

22 Q. Est-ce que vous pouvez convenir qu'étant donné qu'il faisait nuit

23 dehors, qu'il n'y avait pas d'éclairage public, qu'il n'y avait pas

24 d'éclairage dans votre maison non plus, qu'il y avait énormément de

25 poussière et de fumée suite à l'explosion, que vous étiez en plus très

26 certainement en état de choc, vous pouvez convenir avec moi, quand même,

27 qu'il vous serait très difficile de reconnaître de façon certaine un

28 véhicule très sombre, et ce, par une nuit très sombre ?

Page 2096

1 R. Lors de l'explosion, l'explosion dans ma maison, je ne sais pas si ce

2 véhicule était là. Mais après l'explosion et après les tirs, ce véhicule

3 est arrivé. Une partie des personnes qui avaient encerclé la maison sont

4 montées à bord.

5 Q. Vous ne pouvez pas confirmer que ce véhicule avait bel et bien pris

6 part à l'attaque à la bombe qui a été dirigée contre votre maison ?

7 R. C'était une petite rue très étroite, donc je ne pense même pas que le

8 véhicule aurait pu y passer.

9 Q. Très bien. Ensuite, dans le même paragraphe, vous dites que votre

10 maison a été incendiée le vendredi soir. Vous n'avez pas vu les personnes

11 qui ont incendié votre maison et vous n'avez d'ailleurs pas vu comment on a

12 mis feu à votre maison ?

13 R. Non, je ne l'ai pas vu.

14 Q. Ensuite, en bas de la page 3 de votre version albanaise, paragraphe 1

15 de la page suivante; et pour ce qui est donc des versions en B/C/S et en

16 anglais, il s'agit du paragraphe 1 de la page 3, vous énumérez toutes

17 sortes de meurtres de personnes, et voici ce dont j'aimerais m'assurer :

18 vous n'avez été témoin d'aucune de ces morts violentes, n'est-ce pas ?

19 R. C'est arrivé la nuit suivante, quand j'ai quitté Fushe Kosova. Au cours

20 de cette nuit-là, les gens dont j'ai parlé dans ma déposition ont trouvé la

21 mort et ont été tués.

22 Q. Oui, vous n'avez pas vu de vos propres yeux aucune de ces morts

23 violentes, n'est-ce pas ? Vous en avez juste entendu parler; c'est bien

24 cela ?

25 R. Mais comment aurais-je pu être témoin de cela?

26 Q. Oui, je vous comprends. Paragraphe suivant de votre déposition, vous

27 parlez de votre séjour à Dragodan. Vous dites qu'il a été interrompu quand

28 l'armée et la police spéciale ont défoncé votre porte. Hier, vous avez

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1 convenu que vous aviez entendu parler de paramilitaires qui empruntaient à

2 des fins illégales des uniformes et des insignes de l'armée, et voici ce

3 que je vous demande : il se pourrait très bien que cela soit la même chose

4 en ce qui concerne des criminels qui emploient à mauvais escient des

5 uniformes de la police et des insignes de la police pour se faire passer

6 pour ce qu'ils n'étaient pas ?

7 R. Je n'en ai jamais entendu parler parce que je n'ai jamais entendu

8 parler d'actions qui auraient été conduites de façon séparée par ces deux

9 groupes. En fait, ils travaillaient ensemble, l'armée et ces forces. Ces

10 forces paramilitaires travaillaient exactement de concert avec l'armée et

11 la police. Mais il y aurait pu y avoir en effet une utilisation illégale

12 des uniformes, mais je n'en sais rien.

13 Q. Donc, vous faites des spéculations, mais vous n'en savez rien; c'est

14 bien cela ?

15 R. Quant à savoir si oui ou non ces uniformes ont été empruntés pour être

16 utilisés de façon illégale, je n'en sais rien. Mais ce que je sais, c'est

17 que toutes ces forces coopéraient entre elles.

18 Q. Maintenant, en ce qui concerne l'entretien du 15 août 2006 avec M.

19 Hannis et les personnes du bureau du Procureur, on m'a dit que vous avez

20 décrit la police spéciale comme étant une police qui portait des badges,

21 des insignes sur leurs manches sur lesquelles était inscrit "Police

22 spéciale". Ces personnes qui ont défoncé votre porte, dans votre

23 déposition, avez-vous bien dit qu'elles portaient ces insignes avec ces

24 mots en serbe ?

25 R. Oui, sur leurs manches, ils portaient ce badge avec les initiales, et

26 on reconnaissait ces initiales comme étant les initiales de la police

27 spéciale.

28 Q. Très bien. Quelles étaient ces initiales dont vous nous parlez,

Page 2098

1 initiales qu'ils arboraient sur leurs manches ?

2 R. SJ, ou quelque chose dans ce style.

3 Q. Bien. Au paragraphe suivant de votre déclaration, vous nous parlez de

4 vos cartes d'identité qui ont été prises à votre femme et à votre belle-

5 sœur, qui ont été déchirées et qui ont été jetées sur le plancher, alors

6 qu'une autre femme a donné une carte qui, elle, lui a été rendue. Votre

7 femme et votre belle-sœur avaient-elles des papiers d'identité aussi émis

8 par l'Etat serbe ou avaient-elles des cartes d'identité qui avaient été

9 émises par l'UCK ou un autre organe non officiel ?

10 R. Elles avaient des papiers, elles avaient des papiers officiels qui

11 étaient valides au Kosovo à l'époque.

12 Q. Est-ce que ces cartes ou ces papiers d'identité avaient été émis par

13 l'Etat serbe ?

14 R. Oui.

15 Q. Très bien. A la fin mars, début avril 1999, n'est-il pas vrai que l'UCK

16 était présente et engagée dans des combats actifs contre les forces serbes

17 dans le quartier de Vranjevc à Pristina ?

18 R. Je ne sais si c'étaient eux qui étaient organisés dans les combats à

19 Vranjevc ou si c'était plutôt Kodra e Trimave. Mais tout ce que je sais,

20 c'est que les gens étaient en train de se défendre et défendaient leurs

21 propres maisons.

22 Q. Très bien. Savez-vous que des bombes de l'OTAN sont tombées sur les

23 quartiers de Dragodan, Ciglani et Vinogradi le 26 et le 27 mars 1999 ?

24 R. Je ne sais pas s'il y a une usine de briques à Dragodan. Il me semble

25 qu'à Dragodan, ce sont plutôt des vignobles.

26 Q. Ma question n'était pas celle-là. Ma question était de savoir si vous

27 saviez qu'il y avait eu des bombes de l'OTAN qui étaient tombées sur les

28 quartiers de Dragodan le 26 et le 27 mars 1999. Voici la première question,

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1 et ensuite, je vous poserai des questions à propos des autres quartiers.

2 R. Non, je ne me souviens pas de cela. Je ne me souviens pas que cela soit

3 arrivé.

4 Q. Mais selon votre témoignage, il me semble que vous étiez à Dragodan à

5 peu près à ce moment-là ?

6 R. Oui.

7 Q. Et Stara Ciglana est quand même aussi un quartier de Pristina ?

8 R. Non, je ne crois pas que cela soit un quartier de Pristina.

9 Q. Très bien, nous allons poursuivre et passer à autre chose.

10 J'ai encore quelques points que je souhaiterais éclaircir. Au

11 paragraphe 2 de la page 8 de votre déclaration, donc de la page 5 de la

12 version anglaise et la version en B/C/S, vous nous avez dit que les

13 policiers sont venus et vous ont dit de partir immédiatement de là où vous

14 étiez parce qu'il y avait des combats à Dragodan et vous risquiez d'être

15 tué. Tout d'abord, quels étaient les uniformes ou les insignes arborés par

16 cette personne, qui vous ont permis de dire que c'était un policier ?

17 R. La police était venue dans tout le quartier, ils passaient de maison en

18 maison. Ils obligeaient les gens à sortir de chez eux.

19 Q. Je vous ai posé une question sur la personne qui vous a dit que vous

20 deviez partir de là où vous étiez parce qu'il y avait des combats à

21 Dragodan. Je vous demande ce que cette personne arborait en matière

22 d'emblème.

23 R. Si je me souviens bien, je n'ai pas dit qu'il n'y avait qu'une seule

24 personne qui soit venue me dire cela. Il me semble bien que j'ai dit que

25 nous avons été obligés de quitter notre maison, on nous a chassés et on

26 nous a dit de partir vers la grande rue parce que soi-disant il y avait des

27 combats, notre vie était en danger. On nous a dit : il faut partir, il faut

28 quitter cet endroit.

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1 Q. Pourriez-vous nous dire le type d'uniformes que portaient les personnes

2 qui vous ont dit tout cela ?

3 R. Les uniformes de la police.

4 Q. Pourriez-vous nous les décrire, s'il vous plaît, nous donner au moins

5 leur couleur ?

6 R. Les policiers qui nous ont chassés dans la rue étaient vêtus

7 d'uniformes sombres, d'uniformes foncés, des uniformes de police très

8 foncés, presque noirs. Ils avaient des masques et ils portaient des armes.

9 Q. Arboraient-ils des emblèmes sur leurs manches ?

10 R. Je n'ai pas remarqué cela.

11 Q. Ces uniformes étaient-ils différents des uniformes normaux de la police

12 dont vous nous avez parlé précédemment ?

13 R. Non.

14 Q. Vous nous dites que tous les policiers dans Pristina portaient ces

15 uniformes très foncés, ces uniformes presque noirs, et portaient aussi des

16 masques -- enfin, avaient les visages cachés ?

17 R. Je ne sais pas. Je ne peux pas vous répondre en ce qui concerne tous

18 les policiers. En tout cas, tous ceux qu'on a vus avaient des uniformes

19 foncés, alors que les soldats, eux, étaient en uniformes plus clairs.

20 Q. Oui, nous parlons des policiers. J'aimerais savoir le type d'emblèmes

21 qu'arboraient ces policiers. Ces policiers avaient-ils les mêmes uniformes

22 que ceux que vous nous avez décrits comme étant ceux de la police spéciale,

23 ces unités que vous avez identifiées comme étant la SJ ?

24 R. Ce jour-là, j'ai vu trois patrouilles de police.

25 Q. Je ne vous demande pas de questions à propos de ces patrouilles de

26 police.

27 R. Oui, mais ils portaient les mêmes uniformes.

28 Q. Donc, ils avaient les mêmes uniformes que la police spéciale que vous

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1 avez identifiée précédemment et qui arborait un insigne portant SJ sur la

2 manche ?

3 R. Non, je n'ai pas vu l'insigne avec SJ sur l'épaule.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez obtenu cette réponse il y a

5 à peu près deux minutes et la réponse était très claire.

6 M. IVETIC : [interprétation] La réponse était sur le SJ, mais maintenant,

7 je pose une question à propos des uniformes. Est-ce que c'étaient les mêmes

8 uniformes que ceux qui étaient munis d'un emblème SJ ?

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, cela fait dix minutes, cinq

10 minutes que vous avez déjà eu cette réponse, et par deux fois, d'ailleurs.

11 M. IVETIC : [interprétation] Très bien.

12 Q. Donc, je passe à autre chose. J'aimerais vous parler de l'ambiance

13 générale à Pristina, surtout après les bombardements de l'OTAN. Peut-on

14 dire qu'il y avait énormément d'hostilité de façon très ouverte de la part

15 des civils, surtout les civils serbes contre les civils albanais, et ce,

16 après les bombardements de l'OTAN, après que ceci ait commencé ?

17 R. Cela, je n'en sais rien puisqu'à ce moment-là, je ne m'occupais pas

18 tellement des différences culturelles de ce type, quant à savoir quelle

19 était l'ambiance entre les gens. Je ne peux pas vraiment vous parler de

20 choses dont je ne sais rien.

21 Q. Très bien.

22 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais faire juste

23 regarder un petit peu mes notes, parce qu'il me semble que j'en ai fini

24 avec ce témoin, mais s'il me reste une ou deux questions à poser,

25 j'aimerais bien en finir avant la pause. Donc, si vous me le permettez, je

26 regarde mes notes et je vous informe dans une seconde de l'évolution de mon

27 contre-interrogatoire.

28 Q. Oui, j'ai encore quelques questions à poser. A la gare, quelle était

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1 l'atmosphère ? Quelle était l'ambiance à la gare ? Y avait-il des civils

2 serbes en train d'harceler ou en train d'insulter les civils albanais

3 kosovars ?

4 R. Non. Je n'ai pas assisté à cela.

5 Q. Très bien. Combien de temps êtes-vous resté à la gare ce jour-là ? La

6 majeure partie de la journée ? Pouvez-vous nous donner un ordre d'idée ?

7 R. Pas ce jour-là. Mais en tout, je suis quand même resté deux à trois

8 jours et trois nuits.

9 Q. Au cours de ce séjour, vous n'avez vu aucun civil dans la gare ?

10 R. Non, je n'en ai pas vu et je ne pense pas qu'il y en avait.

11 Q. Pourriez-vous nous donner les dates exactes de votre séjour à la gare,

12 s'il vous plaît ?

13 R. Les 27, 28 et peut-être 29 mars.

14 Q. Merci. Je vous remercie d'avoir répondu à mes questions.

15 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de

16 questions.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Ivetic.

18 Monsieur Kabashi, vous êtes monté à bord du train à Pristina, n'est-ce pas

19 ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En se rendant en Macédoine, est-il

22 passé par Fushe Kosova ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est d'ailleurs la seule voie qui

24 existe.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

26 Monsieur Sepenuk ?

27 M. SEPENUK : [interprétation] J'en ai encore pour cinq à dix minutes.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'aimerais que l'on puisse en terminer

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1 avant la pause, et ce serait bien que l'on puisse en terminer avec ce

2 témoin avant la pause, puisque notre témoin suivant sera un témoin protégé.

3 Mais non, je me trompe, je me trompe. Il n'y a aucune raison en fait

4 de faire la pause maintenant, puisque l'ordre des témoins a été changé.

5 Donc, nous pouvons faire la pause et nous reprendrons donc à 16 heures

6 cinq.

7 --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.

8 --- L'audience est reprise à 16 heures 06.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Sepenuk ?

10 M. SEPENUK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

11 Contre-interrogatoire par M. Sepenuk :

12 Q. [interprétation] Docteur Kabashi, je suis Norman Sepenuk, avec M.

13 Visnjic je représente ici le général Ojdanic.

14 Je n'ai que quelques questions à vous poser, et ceci pour préciser le

15 compte rendu d'audience, mais je pense que vous nous avez déjà précisé

16 d'autres choses. La question est de savoir à ce qu'il en est de quelques

17 commentaires que vous avez prononcés après avoir été interrogé par Me Fila.

18 Me Fila vous a demandé au sujet de votre âge et quand est-ce que vous êtes

19 sorti diplômé de la faculté. Vous vous en souvenez ?

20 R. C'est en 1973 et 1974 que j'ai terminé mes études. Je pense que j'avais

21 23 ou 24 ans.

22 Q. C'est bon, ce n'est pas très important, c'était juste pour

23 essayer de vous rafraîchir la mémoire, de vous replacer dans le contexte de

24 votre déposition. Je cite maintenant ce qu'a dit Me Fila à la fin de ses

25 questions et ce que vous avez dit en enchaînant, à savoir, vous avez dit :

26 "Si je puis, je souhaite faire une petite explication, apporter quelques

27 précisions dans la presse de Belgrade et à la télévision serbe à partir du

28 moment où la bombe a été jetée dans ma maison, ils ont écrit qu'un certain

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1 terroriste a été tué et il portait mon nom et qu'il avait quatre enfants.

2 Il a été également dit qu'un certain terroriste a été tué avec 11 membres

3 de sa famille. Dans une autre version, celle de Tanjug, il était question

4 d'un terroriste qui portait mon nom, qui avait huit membres de sa famille."

5 Vous vous rappelez cette partie de votre déposition ?

6 R. Oui.

7 Q. Lorsque vous avez vu ces articles, et lorsque vous avez entendu ou vu

8 ce qui était diffusé à la télévision serbe, comment avez-vous réagi ?

9 Etiez-vous fier que l'on vous appelle terroriste, est-ce que c'était une

10 offense, ou ni l'un ni l'autre ? Pourriez-vous nous dire ce que vous avez

11 pensé à ce moment-là lorsque les médias ont relaté ceci à votre égard ?

12 R. J'ai ri parce que j'étais habitué à ce genre d'article.

13 Q. Parce qu'il y a eu d'autres articles sur vous dans la presse serbe ou

14 kosovare ? Etes-vous un personnage qui fait l'objet d'une couverture des

15 médias ?

16 R. Oui, de temps à autre il y a eu des articles mais je ne les ai pas

17 nécessairement tous lus.

18 Q. Est-ce qu'il y avait des articles dans lesquels ont vous appelait

19 terroriste ?

20 R. Non.

21 Q. Pour autant que vous le sachiez, c'était le premier article où il a été

22 dit qu'un certain Dr Kabashi était terroriste. Est-ce bien cela, Monsieur ?

23 R. Oui. C'est le premier article. Mais ils n'ont pas dit un certain Dr

24 Kabashi. Ils ont dit Emin Kabashi a été tué avec quatre de ses enfants, et

25 il y avait d'autres versions où mon nom, mon prénom ont été mentionnés

26 ainsi que divers nombre d'enfants.

27 Q. Voilà. Je reviens à ma question. Est-ce que vous étiez fier d'être

28 qualifié de terroriste ou offensé ou ce n'était ni l'un ni l'autre ? Je

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1 voudrais vous entendre vous, vous exprimer par vos propres mots.

2 R. Je l'ai déjà dit, je n'avais aucune raison d'être inquiet du fait

3 qu'ils m'appelaient terroriste. Je n'étais pas nécessairement fier. J'ai

4 ri. J'étais heureux d'avoir survécu à l'attaque.

5 Q. La presse et les médias ont-ils fait une erreur lorsqu'ils vous ont

6 appelé terroriste ?

7 R. Bien entendu, c'était une erreur. Je n'ai jamais été un terroriste, je

8 n'ai jamais tué personne.

9 Q. Mais dans votre déposition dans l'affaire Milosevic, vous avez dit que

10 vous étiez quelqu'un qui estimait que c'est uniquement par la voie armée

11 qu'il était possible que votre peuple devienne libre ?

12 R. Oui.

13 Q. Je voudrais maintenant qu'on réexamine votre déclaration préalable qui

14 a été versée au dossier de l'espèce. Je vais vous inviter à examiner le

15 deuxième paragraphe, page 2 de votre déclaration. Vous avez dit que deux

16 policiers, Simic et Pedza, vous ont interrogé. Vous vous en souvenez ?

17 R. Oui.

18 Q. Il est dit dans cette déclaration : "Pedza m'a emmené au poste de

19 police vers 4 heures du matin en 1998 pour m'interroger avec deux autres

20 policiers que je ne connaissais pas. J'étais accusé de fournir des

21 médicaments et de la nourriture à l'UCK. Il m'ont retenu pendant sept

22 heures." Est-ce que vous vous souvenez avoir dit cela ?

23 R. Oui.

24 Q. Qu'avez-vous répondu aux questions posées par Pedza lorsqu'il vous a

25 demandé s'il était vrai ou non que vous auriez fourni des médicaments et

26 des vivres à l'UCK ?

27 R. Le policier Pedza m'a simplement escorté au poste de police. Les deux

28 autres policiers ont dit que je n'étais pas la personne qu'ils

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1 recherchaient -- bien entendu, je leur ai dit que je n'étais pas la

2 personne qu'ils recherchaient.

3 Q. Mais, j'ai une question très précise. D'après votre déclaration, Pedza

4 vous a accusé de fournir des médicaments et des vivres à l'UCK. C'est lui

5 qui vous a accusé de faire cela. Qu'avez-vous répondu à Pedza à ce moment-

6 là ?

7 R. J'ai dit que je n'étais pas la personne qui s'occupait de ce genre de

8 choses.

9 Q. Etait-ce vrai ?

10 R. Non.

11 Q. Donc vous avez menti à Pedza ?

12 R. Mais oui, bien sûr.

13 Q. Puisque vous travailliez au sein de l'Armée de libération du Kosovo, et

14 vous vouliez que ceci reste un secret ?

15 R. Oui, bien sûr.

16 Q. Pour revenir maintenant à cet article publié dans la presse

17 immédiatement après qu'on ait lancé cette bombe. Tout simplement, on vous a

18 révélé du jour au lendemain, au grand jour comme étant un terroriste.

19 Qu'est-ce que ceci a eu à voir avec votre travail au sein de l'UCK ? Est-ce

20 que vous avez reçu des commentaires au sujet de cela ?

21 R. Non, rien. Je n'ai pas eu l'occasion de formuler de commentaires au

22 sujet de cela. Il n'y avait pas de journaux publiés à ce moment-là, et je

23 n'avais aucune possibilité de lire tous les journaux qui paraissaient à

24 Belgrade, et je n'étais pas vraiment pas intéressé à faire des

25 commentaires, à réagir. Je vous ai dit, peut-être ai-je ri, j'étais heureux

26 que l'information n'était pas véridique et que j'étais en vie. Tout ceci

27 n'était pas très important pour moi.

28 Q. Qu'en est-il du reste de la couverture médiatique, de ces rapports

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1 publiés par la presse, comment est-ce que vous avez appris leur existence ?

2 R. Un des articles a été repris en langue albanaise, dans un journal en

3 langue albanaise de manière très succincte. L'un de ces jours où les

4 journaux paraissaient, j'étais en train de me cacher avec ma famille et je

5 l'ai entendu par le biais de l'agence Tanjug de Belgrade, la TVS, et aussi

6 j'ai entendu l'info grâce aux medias albanais qui diffusaient depuis

7 Tirana.

8 Q. Vous avez entendu cela peu de temps après que la bombe ait été lancée

9 le 25 mars 1999 ? Il ne s'est passé que quelques jours avant que vous ne

10 l'entendiez, l'info ?

11 R. J'en ai entendu parler peut-être trois ou quatre jours après

12 l'événement.

13 Q. Le 24 avril 1999, à peu près trois semaines plus tard, lorsque M. Tim

14 Kelly du bureau du Procureur vous interroge, vous auditionne -- c'est bien

15 lui qui vous a interrogé ce jour-là ?

16 R. Oui.

17 Q. Nous savons qu'il n'y a rien de particulier dans cette déclaration au

18 sujet de votre participation au sein de l'UCK.

19 R. Oui.

20 Q. En fait, un peu plus loin, à la page 6, dernier paragraphe de votre

21 déclaration, vous dites : "On m'a posé précisément la question au sujet des

22 circonstances du moment lorsque j'ai été forcé de quitter le Kosovo en mars

23 1999. J'ai d'autres éléments d'information au sujet des événements qui se

24 sont produits à ce moment-là et avant ces événements au Kosovo et je peux

25 les fournir si nécessaire."

26 Est-ce que je viens de reproduire fidèlement ce que vous avez dit

27 dans votre déclaration ?

28 R. Oui.

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1 Q. Pendant cet entretien, est-ce qu'il vous est venu à l'esprit que le

2 fait que vous étiez membre de l'UCK aurait pu être un élément pertinent par

3 rapport aux questions posées par M. Kelly ? Est-ce que vous pensez qu'il

4 aurait souhaité entendre cet élément d'information de vous ?

5 R. Il ne m'a pas posé de questions au sujet de mes activités, et je ne lui

6 ai pas répondu à ce sujet lorsque j'ai parlé des différents événements dans

7 ma déclaration.

8 Q. Il ne vous a pas posé de questions, et vous, vous ne vouliez pas

9 spontanément lui fournir des éléments; est-ce bien comme cela que cela

10 s'est passé ?

11 R. Je n'ai pas estimé que ce fût une information importante, en ma qualité

12 de membre.

13 Q. Vous n'avez pas estimé que cela ait un impact sur l'objectivité de vos

14 déclarations à donner à M. Kelly, à savoir que vous étiez plutôt un membre

15 du haut niveau de l'Armée de libération du Kosovo ?

16 M. HANNIS : [interprétation] Objection à la forme. Pourquoi est-ce qu'il a

17 dit qu'il occupait un niveau plutôt élevé ?

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous pouvez étayer cette

19 question, Maître Sepenuk ?

20 M. SEPENUK : [interprétation] Mais tout simplement, c'est dans le contexte

21 de ce qui a déjà été dit. Il était membre depuis longtemps, membre d'un

22 groupe qui fournissait des ravitaillements à la guérilla, à leurs

23 combattants, et cetera. Donc, ce n'est pas essentiel que je garde cette

24 qualification.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que vous ne pouvez pas

26 qualifier son activité d'une telle manière.

27 M. SEPENUK : [interprétation] Je vais modifier ma question.

28 Q. Vous ne pensez pas qu'il aurait été pertinent quant à l'objectivité de

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1 vos réponses apportées à M. Kelly, que de signaler que vous étiez membre de

2 quelque échelon que ce soit de l'UCK ?

3 M. HANNIS : [interprétation] Alors maintenant, mon objection concerne la

4 nature juridique de la conclusion, à savoir, est-ce qu'il s'agit de quelque

5 chose de pertinent ou non.

6 M. SEPENUK : [interprétation]

7 Q. Ne pensiez-vous pas que c'était quelque chose que les enquêteurs

8 auraient souhaité savoir, Monsieur ?

9 R. Je ne pense pas que c'était important.

10 Q. Mais en tant que membre de l'UCK, vous vouliez garder l'anonymat,

11 n'est-ce pas, Monsieur ?

12 R. Non, pas du tout. Je me contentais de faire ce que j'avais à faire en

13 tant que citoyen.

14 Q. Mais le policier Pedza, vous ne lui avez pas dit la vérité lorsqu'il

15 vous a demandé si vous aviez fourni des médicaments et des vivres à l'UCK ?

16 Nous savons d'après votre déposition ici que vous l'avez fait, alors

17 pourquoi vous ne lui avez pas dit la vérité ?

18 R. Mais je ne suis pas suffisamment fou pour m'offrir dix années de

19 prison.

20 Q. Donc, vous vouliez préserver l'anonymat ?

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Sepenuk, je pense que vous avez

22 couvert ce point.

23 M. SEPENUK : [interprétation] Très bien, alors deux autres questions. Je

24 vais changer de sujet.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien.

26 M. SEPENUK : [interprétation]

27 Q. N'est-il pas vrai qu'on vous a posé des questions au sujet des crimes

28 éventuellement commis par l'UCK, et que vous vous êtes rendu compte à ce

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1 moment-là qu'un témoin qui décide de déposer au sujet des crimes commis par

2 l'UCK est quelqu'un qui s'expose à un risque considérable ?

3 R. Ils ne m'ont pas posé de questions et je n'avais pas d'information sur

4 ce genre de crime. Si j'en avais eu, j'aurais dit tout ce que je savais.

5 Q. Est-ce que cela s'applique à toute la période allant jusqu'à

6 aujourd'hui ?

7 R. Oui.

8 Q. Est-ce que vous savez qui est Zekerijah Qana ?

9 R. Oui.

10 Q. Qui est Zekarijah Qana ?

11 R. Zekerijak Qana est un professeur d'histoire à l'institut des études

12 albanologiques [phon] et c'est un confrère, c'est un collègue.

13 Q. C'est un ami ?

14 R. Non, c'était mon professeur.

15 Q. Est-ce que vous avez gardé contact avec lui ?

16 R. Oui. Nous travaillons ensemble, nous sommes collègues. Nous travaillons

17 dans le même institut.

18 Q. Vous avez de l'estime pour lui ? Quelle est votre opinion à son sujet ?

19 M. HANNIS : [interprétation] Objection. Nous avons ici bien plus que deux

20 questions. Je ne vois pas où on va.

21 M. SEPENUK : [interprétation] Je vous assure que j'ai des bases solides

22 pour poser ces questions.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Allons-y, alors.

24 M. SEPENUK : [interprétation] Merci.

25 Q. Est-ce un homme qui est un honnête homme ?

26 R. Je ne me suis jamais posé la question en ces termes-là. Je ne vois pas

27 la pertinence.

28 Q. Est-ce que vous avez une raison de douter du fait qu'il s'agit de

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1 quelqu'un qui est un honnête homme intègre ?

2 R. J'ai dit que je ne me suis jamais posé la question.

3 Q. Mais tout simplement, je vous demande si vous avez une raison de penser

4 que votre collègue ou votre professeur est quelqu'un qui n'est pas tout à

5 fait intègre.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense qu'il vous a répondu à la

7 question, Maître Sepenuk. Il n'y a aucune raison pourquoi il ne serait

8 jamais venu à formuler un jugement, d'après ce qu'il dit.

9 M. SEPENUK : [interprétation]

10 Q. "Au Kosovo, tout témoin qui décide de déposer pour témoigner contre les

11 crimes commis par l'UCK s'expose à un grand risque." Si M. Qana avait dit

12 cela, aurait dit cela, est-ce que d'après vous, ce serait la vérité ?

13 R. J'ai dit que je n'ai jamais eu l'occasion de me pencher sur ce genre de

14 sujet avec lui.

15 M. SEPENUK : [interprétation] J'en ai terminé.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

17 Monsieur Hannis, est-ce que vous avez des questions supplémentaires ?

18 M. HANNIS : [interprétation] Non.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le Juge Chowhan a une question pour

20 vous.

21 Questions de la Cour :

22 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Bonjour, Docteur Kabashi.

23 R. Bonjour.

24 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Tout d'abord, je voudrais savoir si

25 vous savez ce que signifie votre nom, le nom Kabashi. Qu'est-ce que cela

26 signifie ou est-ce que cela fait très longtemps que c'est un nom de

27 famille ?

28 R. Vous voulez dire mon prénom ? Cela veut dire fidèle, et mon deuxième

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1 nom vient de la région de Kabashi, entre Shkodra et Ucin [phon].

2 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Je vous remercie. Ma deuxième

3 question est de savoir pourquoi est-ce que les tziganes se sont-ils trouvés

4 avec vous pendant un événement vous concernant ? Pourquoi étaient-ils là

5 avec vous ?

6 R. Ils étaient nos voisins, et c'étaient des familles qui n'ont pas

7 accepté que leurs enfants aillent dans les écoles où l'enseignement se

8 faisait en serbe. Ils ont refusé de porter l'uniforme de la police et de

9 travailler pour la police.

10 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Très bien. Alors dites-moi maintenant

11 qu'est-ce qui a fait l'objet de votre thèse de troisième cycle ?

12 R. Ma thèse de troisième cycle, son sujet, c'était la poésie de Jeronim De

13 Rada. C'est un écrivain de l'époque romantique, écrivain albanais très

14 important. Je cherchais à faire ressortir les traits principaux de la

15 poésie de la période romantique.

16 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Je vous en félicite. Comment est-ce

17 que vous vous êtes trouvé sympathisant de l'idéologie de l'UCK ? Je veux

18 dire, vous vous intéressiez à la poésie romantique, à un poète romantique.

19 Alors comment est-ce que ceci vous a attiré ? De quelle nature était cette

20 philosophie ?

21 R. Ce n'est pas particulièrement l'idéologie de l'UCK qui m'a attiré,

22 c'est plutôt l'idéologie de la liberté qui a semblé importante à mes yeux.

23 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Est-ce que vous avez détenu des

24 fonctions officielles au sein de l'UCK ?

25 R. Non.

26 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Très bien. Pouvez-vous nous dire

27 quelle devise ou quel programme de l'UCK vous a attiré ?

28 R. Liberté pour le Kosovo.

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1 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Très bien. A un moment donné, vous

2 avez vu une liste, et ceci comportait divers noms. Qui étaient ces gens,

3 ces gens dont les noms figuraient dans cette liste dressée ?

4 R. Pour la plupart, c'étaient des militants ou des gens qui travaillaient

5 dans la logistique ou des intellectuels. J'en connaissais quelques-uns.

6 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Excusez-moi de vous avoir posé autant

7 de questions. Ma dernière question est la suivante. Vous-même, vous vous

8 occupiez de quoi au sein de l'UCK ? Pourriez-vous nous le dire, s'il vous

9 plaît ?

10 R. Des choses qui avaient à voir avec la guerre : les fournitures en

11 vêtements, vivres, médicaments, des déplacements pour aider les blessés,

12 les femmes qui allaient accoucher, diverses situations de guerre ou

13 secourir les gens qui essayaient de s'extraire de cette situation de guerre

14 pour s'en aller ailleurs.

15 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Donc, vous ne vous déplaciez pas

16 beaucoup, en fait. Vous restiez sur place pour vous occuper de ces

17 différentes activités que vous venez de citer. Bien. Est-ce que vous vous

18 déplaciez pour aller à différents endroits, là où il fallait, avec d'autres

19 personnes ?

20 R. De temps à autre, il m'est arrivé de me déplacer pour m'occuper des

21 choses que je ne pouvais pas faire à Pristina même.

22 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Je vous remercie.

23 R. Je vous en prie.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous en avez terminé de votre

25 déposition, Monsieur Kabashi. Vous pouvez disposer. Je vous remercie d'être

26 venu déposer.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est moi qui vous remercie.

28 [Le témoin se retire]

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je voudrais aborder les conseils de la

2 Défense, leur adresser quelques propos de façon assez générale et de façon

3 gentille. Nous avons entendu beaucoup de témoins qui parlent des événements

4 qui se sont déroulés au Kosovo sur le terrain, comment ces événements les

5 ont touchés, comment ils ont affecté les autres personnes, et vous avez eu

6 la possibilité d'évaluer les résultats des contre-interrogatoires de ce

7 témoin. Je suis sûr qu'à présent, vous avez le sentiment, l'intuition, pour

8 ainsi dire, de la façon dont vous devez vous y prendre pour contre-

9 interroger ce témoin afin d'obtenir les informations les plus importantes.

10 J'espère qu'à la lumière de cela, vous allez évaluer la situation pour

11 essayer de voir quelles sont les questions qui sont vraiment les questions

12 essentielles, les questions importantes, et quelles sont en revanche les

13 questions moins importantes ou d'une importance plutôt marginale. Je

14 commence à avoir l'impression que nous avons besoin de dépouiller certaines

15 questions, certains contre-interrogatoires. Mais d'un autre côté, je suis

16 également convaincu qu'il vaut mieux vous faire confiance et vous laisser

17 juger vous-même plutôt que de prendre des mesures pour m'assurer que ceci

18 soit fait.

19 Evidemment, si vous avez besoin de plus de temps pour faire une meilleure

20 évaluation de la façon dont vous pourriez dépouiller vos contre-

21 interrogatoires, pourquoi pas ? Nous sommes prêts à accepter cela puisque

22 nous sommes au début du procès. C'est peut-être mieux de vous donner du

23 temps à présent, et j'espère que vous allez commencer donc à m'écouter et

24 pratiquer cet exercice dès à présent pour voir si tout ceci est possible.

25 Ceci nous permettrait aussi de présenter peut-être quelques témoins

26 supplémentaires au cours de ce mois.

27 Donc, Monsieur Ackerman, vous vouliez aussi aborder une question ?

28 M. ACKERMAN : [interprétation] Oui, je parle, je pense, aussi au nom de

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1 plusieurs de mes collègues ou presque tous. Nous essayons de nous préparer

2 à l'avance pour être prêts pour chaque témoin qui vient. Donc, nous

3 prévoyons un certain temps pour chaque témoin, ceci sur la base des

4 interrogatoires principaux par le Procureur, et nous ne sommes pas préparés

5 pour chaque témoin qui pourrait venir et nous ne pourrions pas être prêts

6 pour tous.

7 Les choses se compliquent quand les témoins viennent dans le prétoire

8 comme aujourd'hui. J'ai entendu pour la première fois que le Procureur a

9 changé l'ordre de la comparution des témoins et que les témoins pour

10 lesquels je suis prêt aujourd'hui, ils ne vont pas déposer aujourd'hui,

11 mais d'autres pour lesquels nous ne sommes pas prêts. Si j'ai bien compris,

12 il y a un e-mail qu'un certain nombre de mes collègues ont reçu pour les

13 informer de cela, mais je ne l'ai pas appris parce que je n'ai pas regardé,

14 je n'ai pas vérifié mon e-mail.

15 C'est vrai que mon système n'a pas fonctionné, que je n'ai pas eu

16 accès à internet; qu'est-ce que vous voulez, ceci arrive et il faut bien

17 s'y faire. Donc, mon système, apparemment, crashe plus souvent que

18 possible, c'est un des problèmes.

19 Ensuite, c'est le prochain témoin. Je pense que nous avons tous reçu

20 des documents concernant ce témoin. Nous avons aussi reçu des documents

21 nouveaux, c'est une déclaration, des matériaux nouveaux, c'est une

22 déclaration d'un témoin qui va venir, le témoin prochain. Je ne l'ai jamais

23 vu auparavant, je ne pense pas que qui que ce soit d'autre l'ait déjà vu,

24 et on me l'a donné pour la première fois aujourd'hui. J'ai vraiment du mal

25 à commencer le contre-interrogatoire avec un témoin qui va venir d'ici

26 quelques minutes, alors que je n'ai même pas eu une demi-heure ou 45

27 minutes pour regarder de quoi il s'agit dans cette nouvelle déclaration

28 parce que je ne l'ai pas eue. Je suis sûr que pour mes collègues, il en va

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1 de même parce qu'eux non plus, ils n'ont pas examiné cette nouvelle

2 déclaration, ce nouveau document qui est arrivé. Je pense que nous avons eu

3 une déclaration plus ancienne qui, aussi, vient d'être communiquée.

4 Mais ce sont les problèmes qui se présentent, je veux bien, mais pour

5 les résoudre, il faudrait accorder plus de temps pour nous préparer. Je

6 pense qu'un avocat préparé, c'est toujours utile, et quand on est préparé,

7 on est plus efficace que quand on n'est pas du tout préparé, donc je vous

8 demande de nous accorder ce supplément de temps pour bien nous préparer

9 pour le contre-interrogatoire de ce témoin.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne vais pas faire de commentaires

11 sur cette dernière observation, mais est-ce que vous parlez de la

12 déclaration du 16 août ?

13 M. ACKERMAN : [interprétation] Je ne sais pas. C'est sur un CD ? Je ne sais

14 même pas quelle est la date. C'est une déclaration préalable qui a été

15 prise ailleurs, pas ici, le 17 mai -- enfin, non, le 14 avril 1999. Donc

16 cette déclaration préalable existe depuis longtemps, et je ne sais pas

17 pourquoi on nous l'a présentée uniquement aujourd'hui alors qu'elle est

18 vraiment ancienne.

19 Mme MOELLER : [interprétation] Monsieur le Président ?

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Moeller ?

21 Mme MOELLER : [interprétation] Si je peux vous être utile, il s'agit là des

22 notes de l'enquêteur qui a fait un interrogatoire de ce témoin dans les

23 camps en Macédoine en 1999. Il s'agit donc des notes privées, il ne s'agit

24 pas d'une déclaration. Nous venons de les communiquer uniquement pour que

25 tout ceci, tous les documents soient au complet. La Défense peut décider si

26 elle veut comparer cette déclaration avec les notes prises quelques années

27 plus tard par un autre enquêteur, puisqu'on parle exactement de la même

28 chose, donc nous n'avons pas communiqué ces documents en vertu de l'article

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1 66, mais juste pour information. Nous avons fait cela avec les autres

2 témoins, avec d'autres témoins aussi; pour nous, il ne s'agit pas du tout

3 d'une déclaration préalable proprement dite.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, ce n'est pas cette déclaration ?

5 Mme MOELLER : [interprétation] Ce sont les notes de l'enquêteur qui, à

6 l'époque, s'est entretenu avec le témoin. Donc, vous avez vraiment des

7 notes, un résumé point par point, et c'est un document de travail, un

8 document interne du bureau du Procureur. Maintenant, nous avons adopté

9 cette pratique qui consiste à communiquer tous les documents que nous

10 avons, mais évidemment, à condition que ceci ne relève pas de l'article

11 66(A)(i) ou (ii).

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le problème est très simple. Si vous

13 donnez les documents juste avant que le témoin ne pénètre dans le prétoire,

14 ceci provoque les réactions comme celles que nous venons d'entendre. C'est

15 vraiment surprenant que vous n'ayez pas pu communiquer cela plus tôt,

16 puisque vous auriez pu fournir ces documents en même temps que vous avez

17 fourni la déclaration préalable proprement dite de ce témoin.

18 Mme MOELLER : [interprétation] Oui, cette déclaration a été prise le 16

19 août, et c'est vrai que nous l'avons traduite immédiatement et nous l'avons

20 communiquée à la Défense. C'est vraiment la déclaration --

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais tout ce que je veux dire, c'est

22 que vous auriez pu aussi communiquer à l'époque ces notes. Ceci aurait été

23 utile pour tout le monde. Nous, nous l'avons reçu aujourd'hui, les conseils

24 de la Défense ont reçu ce document, mais ils sont préoccupés par le fait

25 qu'ils n'ont pas eu le temps de le lire. Si je voyais, si je connaissais ce

26 document, je pourrais vous donner ma réponse.

27 Mme MOELLER : [interprétation] Nous allons essayer aussi de vous donner une

28 copie de ce document, nous ne l'avons pas donnée aux Juges de la Chambre

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1 parce que nous n'avions pas l'intention de demander le versement au

2 dossier. Pour nous, ce n'est pas une déclaration, ce n'est pas signé, cela

3 n'a pas été relu pour le témoin. C'est vraiment un document interne, un

4 document de travail.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il va y avoir aussi une autre pause,

6 et peut-être que vous auriez pu donner ce document -- il y a eu des pauses

7 aussi avant et vous auriez pu donner ce document pendant ces pauses-là, et

8 M. Ackerman a quand même besoin d'un minimum de temps pour lire cela. Peut-

9 être qu'il va pouvoir quand même le lire même pendant que le témoin dépose.

10 Mais ensuite, il y a aussi la question du changement d'ordre de la

11 comparution des témoins, et ceci ne nous aide pas du tout, et je pense

12 qu'il faudrait éviter cela.

13 M. HANNIS : [interprétation] Je suis tout à fait d'accord, mais une des

14 raisons pour cela réside dans le fait que nous ne savions pas combien de

15 temps va durer le contre-interrogatoire des témoins, parce que parfois,

16 ceci dure plus longtemps que possible. Nous avons des témoins qui ont des

17 obligations, qui doivent rentrer plus tôt, et c'est pour cela que nous

18 avons changé l'ordre de comparution des témoins puisqu'il y avait des gens

19 qui ne pouvaient pas attendre, qui ne pouvaient pas attendre ici cinq jours

20 avant de rentrer chez eux. Donc. nous essayons aussi de minimiser ces

21 problèmes aussi, ceci s'est déjà produit à plusieurs reprises, et cette

22 façon de procéder est la plus simple possible. Nous avons changé les

23 témoins 62 et 36, et il témoignent sur des faits qui sont très semblables.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Ackerman, est-ce qu'il y a

25 quelque chose que vous souhaitez ajouter ?

26 M. ACKERMAN : [interprétation] Je viens d'apprendre qu'il y a aussi un

27 document adjoint, enfin, un document qui a été ajouté à sa déclaration. Je

28 ne l'ai pas eu.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il a été communiqué vendredi.

2 M. ACKERMAN : [interprétation] C'est peut-être ma faute, mais je ne l'ai

3 pas eu.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'était vendredi, peut-être tard, mais

5 vendredi.

6 M. ACKERMAN : [interprétation] Toujours est-il que je ne l'ai pas vu.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne pense pas que ceci va vraiment

8 vous causer des difficultés. Peut-être que vous allez pouvoir tout

9 simplement jeter un coup d'oeil, et c'est une question de toute façon

10 différente à présent, et nous ne pouvons pas en traiter pour l'instant.

11 M. ACKERMAN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Votre prochain témoin.

13 Mme MOELLER : [interprétation] Nous demandons que soit introduite Mme

14 Nazlie Bala. C'est notre prochain témoin. Nous la convoquons en vertu de

15 l'article 92 bis (B), et sa déposition concerne les paragraphes 72(G) et

16 77(A) de l'acte d'accusation.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

18 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Madame Bala.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourriez-vous lire la déclaration

22 solennelle en lisant le document qui est placé sous vos yeux ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

24 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

25 LE TÉMOIN : NAZLIE BALA [Assermentée]

26 [Le témoin répond par l'interprète]

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, vous pouvez vous asseoir.

28 Madame Bala, nous avons ici la déclaration que vous avez fournie au bureau

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1 du Procureur au mois de juin 2001. Nous avons beaucoup d'informations

2 concernant votre déposition. Aujourd'hui, vous êtes convoquée pour que l'on

3 puisse vous poser des questions supplémentaires, aussi bien de la part du

4 bureau du Procureur que de la part des conseils des accusés.

5 Ces questions vont être posées justement pour mettre en doute ce que

6 vous dites, enfin, pour vous provoquer, en quelque sorte. C'est tout à fait

7 normal. C'est comme cela que nous opérons, que nous fonctionnons. D'autres

8 chercheront d'autres informations de clarification. Ce que je vous demande,

9 c'est de vous concentrer sur les questions posées pour essayer de répondre

10 le plus précisément possible.

11 Interrogatoire principal par Mme Moeller :

12 Q. [Interprétation] Bonjour, Madame Bala. Pourriez-vous, s'il vous plaît,

13 nous donner votre nom et votre prénom ?

14 R. Je m'appelle Nazlie Bala. Je suis née à Pristina au mois de mai 1967.

15 J'ai fait des études secondaires …

16 Q. Excusez-moi de vous interrompre, mais essayez de répondre tout

17 simplement aux questions posées pas par pas.

18 Madame Bala, où habitiez-vous en 1999 ?

19 R. En 1999, j'habitais à Pristina.

20 Q. Est-ce que vous avez donné une déclaration préalable au bureau du

21 Procureur, et ceci, le 30 juin 2001 ?

22 R. Oui.

23 Q. Est-ce que vous avez donné une déclaration supplémentaire au bureau du

24 Procureur le 16 août 2006 ?

25 R. Oui, en effet.

26 Mme MOELLER : [interprétation] Je voudrais demander que l'on présente cette

27 déclaration au témoin.

28 Q. Madame Bala, pourriez-vous, s'il vous plaît, examiner cette

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1 déclaration ? Est-ce que vous pourriez nous dire si c'est bien votre

2 déclaration ainsi que la déclaration solennelle que vous avez faite ?

3 R. Oui, c'est bien cela.

4 Q. Pourriez-vous nous confirmer si c'est bien la déclaration, votre

5 déclaration préalable, qui va servir de base pour votre déposition ici ?

6 R. Oui. J'ai dit cela en toute responsabilité.

7 Mme MOELLER : [interprétation] Nous voudrions demander le versement de

8 cette pièce en tant que pièce P02262.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et la déclaration supplémentaire est

10 aussi couverte par le même numéro ?

11 Mme MOELLER : [interprétation] Oui.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

13 Mme MOELLER : [interprétation]

14 Q. Madame Bala, je voudrais avec vous parcourir quelques informations

15 figurant dans cette déclaration préalable, dans vos déclarations.

16 Dans le paragraphe 3 de cette déclaration additionnelle, vous parlez

17 un peu de votre expérience professionnelle, et je voudrais vous demander

18 d'en parler un petit peu aux Juges.

19 R. Comme je l'ai déjà dit, je suis allée à l'école secondaire où j'ai eu

20 mon bac à Pristina. C'est là aussi que j'ai fait des études universitaires

21 et j'ai fait une maîtrise en relations internationales et affaires

22 culturelles, et depuis 1997, j'ai travaillé pour le Conseil chargé de la

23 défense des droits de l'homme et des libertés au Kosovo, se concentrant sur

24 les violences contre les jeunes, les femmes et les enfants.

25 Vers la fin de 1998, j'ai rejoint la mission de l'OSCE de Pristina. C'est

26 le bureau des droits de l'homme, cette organisation. Au début, je faisais

27 partie du département principal de cette organisation. Mais deux ou trois

28 semaines plus tard, j'ai commencé à travailler dans le bureau régional, qui

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1 s'appelait RC 5 Pristina, et ceci jusqu'au 20 mars 1999. Après le 20 mars,

2 je suis allée en Macédoine. J'étais réfugiée, mais j'ai toujours travaillé

3 pour la même mission, l'OSCE, et ceci dans les camps des réfugiés Cegran,

4 Neprosten, Sanokos, Stenkovac, 1, 2, 3, Ohrid, Dibra, et autres endroits en

5 Macédoine.

6 Après cela, je suis retournée au Kosovo. J'ai été la première employée

7 recrutée localement qui a rejoint l'équipe de l'OSCE. Je pense que c'était

8 le 15 ou le 16 juin 1999. J'ai continué à travailler pour eux jusqu'au mois

9 de septembre 1999 dans le département des droits de l'homme. Je travaillais

10 surtout sur les fosses communes et différentes localités à Pristina et

11 autour de Pristina. Au mois d'octobre 1999, j'ai commencé à travailler

12 comme la coordinatrice des organisations non gouvernementales qui

13 s'occupent des droits de l'homme, et ceci, jusqu'en 2001. Ensuite, j'ai

14 commencé mes études et j'y suis au jour d'aujourd'hui.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il y a un point que nous pourrions

16 peut-être qualifier. Dans votre déclaration, dans la déclaration

17 additionnelle que vous nous avez fournie, vous dites que vous avez commencé

18 à travailler pour le Conseil chargé de la défense des droits de l'homme et

19 des libertés en 1989.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Oui, c'est vrai, j'ai commencé en 1989.

21 C'est à ce moment que cette organisation a été créée au Kosovo.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est peut-être un problème de

23 traduction, mais il est écrit que vous avez commencé à travailler en 1997.

24 Oui, c'est ce que vous avez écrit dans votre déclaration préalable; c'est

25 exact, n'est-ce pas ?

26 Madame Moeller ?

27 Mme MOELLER : [interprétation]

28 Q. Madame Bala, concernant votre travail pour l'OSCE, vous en avez parlé,

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1 est-ce que vous pouvez nous dire si vous connaissez Mme Sandra Mitchell ?

2 R. Sandra Mitchell était la directrice du département chargé des droits de

3 l'homme au niveau de la mission de l'OSCE.

4 Q. Dans votre déclaration supplémentaire, vous dites que vous avez pris

5 quelque 300 interviews pour le compte de l'OSCE, est-ce exact ?

6 R. Oui, c'est vrai. Au cours de mon travail pendant deux mois et demi en

7 Macédoine, j'ai travaillé pour l'OSCE, pour la mission de l'OSCE. Pendant

8 cette période, j'ai recueilli quelque 300 déclarations préalables de

9 différents témoins. C'est un chiffre approximatif.

10 Mme MOELLER : [interprétation] Ceci se réfère au paragraphe 5 de la

11 déclaration supplémentaire.

12 Q. Madame Bala, pourriez-vous dire aux Juges de quelle façon vous avez

13 recueilli ces déclarations ?

14 R. [aucune interprétation]

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Lukic ?

16 M. LUKIC : [interprétation] Je soulève une objection, et je voudrais

17 demander au conseil du Procureur de nous dire si ces déclarations ont été

18 communiquées à la Défense, oui ou non. Si elle va poser des questions au

19 sujet de ces déclarations, je voudrais avoir un exemplaire de cela.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si elle ne veut pas répondre ceci ne

21 me surprendrait pas du tout puisqu'elle a posé une question concernant la

22 méthodologie. Ensuite, il faut voir ce qu'elle veut faire par la suite.

23 Est-ce qu'elle veut continuer à poursuivre sur ce sujet ?

24 Mme MOELLER : [interprétation] Oui, je voudrais continuer effectivement

25 parce qu'il s'agirait d'une expérience de première main. Le témoin a pris

26 ces déclarations.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais M. Lukic va sans doute

28 renouveler son objection. Est-ce que vous avez l'intention de poser des

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1 questions au sujet du contenu de ces déclarations ?

2 Mme MOELLER : [interprétation] Non, ce n'est pas cela que je veux faire.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que M. Lukic pour l'instant

4 votre objection est prématurée. Vous devriez attendre de voir s'il convient

5 de reformuler la même objection par la suite si l'occasion se présente au

6 fur et à mesure que les questions sont posées.

7 Mme MOELLER : [interprétation]

8 Q. Madame Bala, pouvez-vous nous dire comment vous avez recueilli ces

9 déclarations pour le compte de l'OSCE ?

10 R. Comme j'ai dit, l'OSCE avait sa mission en Macédoine, c'était le

11 département des droits de l'homme qui travaillait directement sur le

12 terrain dans les camps de réfugiés. J'ai travaillé à Cegran, Sanokos,

13 Stenkovec 1, 2, 3, mais aussi nous sommes allés dans les maisons où se

14 trouvaient les réfugiés. Les équipes qui recueillaient ces dépositions

15 étaient des professionnels expérimentés. Dans chacun de ces camps nous

16 avions nos tentes. Dans ces camps, il y avait des tentes et nous allions

17 dans une tente à l'autre pour recueillir les informations pour savoir ce

18 qui s'est passé et ce qui est arrivé à ces gens jusqu'au moment où ils

19 arrivent dans les camps de réfugiés.

20 Q. Avant de commencer à recueillir ces dépositions pour le compte de

21 l'OSCE, est-ce que vous avez subi une formation ?

22 M. LUKIC : [interprétation] Excusez-moi, je me vois obliger d'interrompre à

23 nouveau.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Monsieur Lukic.

25 M. LUKIC : [interprétation] Nous avons reçu du bureau du Procureur le

26 résumé de la déposition de ce témoin. Dans ce résumé, on ne parle pas de la

27 méthodologie, quant à la prise de cette déposition.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Moeller ?

Page 2127

1 Mme MOELLER : [interprétation] Il s'agit de la déclaration supplémentaire

2 de ce témoin où, dans les paragraphes 4 et 5, elle parle de son travail au

3 sein de l'OSCE, où elle dit qu'elle a participé personnellement à ces

4 interviews, qu'elle a interviewé quelque 300 personnes.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais ce n'est pas cela qu'il veut

6 dire, M. Lukic. M. Lukic dit que les communications des pièces se font

7 conformément aux articles. Vous avez donné le résumé de la déposition de ce

8 témoin et ces informations ne figurent pas dans ce résumé.

9 Mme MOELLER : [interprétation] Nous parlons des paragraphes 4 et 5.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, M. Lukic parle de l'article 65

11 ter et de votre obligation de fournir un résumé. Vous êtes obligée en vertu

12 de l'article 65 ter de faire un résumé de la déposition future du témoin et

13 dans ce résumé, on ne laisse pas entendre que vous allez poser les

14 questions que vous êtes en train de poser.

15 Mme MOELLER : [interprétation] Je vois effectivement. Nous avons envoyé ce

16 résumé avant de préparer ce témoin, et c'est uniquement pendant cette

17 préparation que le témoin a écrit sa déclaration additionnelle. Nous

18 l'avons ensuite communiquée à la Défense. Effectivement, dans ce résumé en

19 vertu de l'article 65 ter, nous n'avions pas la possibilité de parler de

20 cela et d'inclure ces thèmes.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Autrement dit, vous n'avez pas saisi

22 la possibilité de lui poser ces questions auparavant. Ce n'est pas la même

23 chose.

24 Mme MOELLER : [interprétation] Je peux rajouter une chose, s'il vous

25 plaît ? Madame Bala travaillait pour l'OSCE, elle a travaillé assez

26 longtemps pour l'OSCE. Ceci est contenu dans sa première déclaration de

27 témoin dans son premier paragraphe.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, je suis en train de voir où il

Page 2128

1 est écrit qu'elle ait effectué quoi que ce soit entre mars et juin 1999. Je

2 ne trouve rien.

3 Mme MOELLER : [interprétation] En effet, cela ne se trouve que dans la

4 déclaration supplémentaire. Nous avons prévu dès que nous nous sommes

5 rendus compte au cours du récolement qu'elle avait fait ces travaux nous

6 avons donc immédiatement procédé à la déclaration supplémentaire que nous

7 avons communiquée.

8 M. LUKIC : [interprétation] Mais je n'ai jamais vu cette déclaration

9 supplémentaire.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Lukic, écoutez, laissez-nous

11 réfléchir cinq minutes.

12 M. LUKIC : [interprétation] Très bien.

13 M. VISNJIC : [interprétation] Si je puis vous donner des informations

14 supplémentaires, nous n'avons jamais reçu --

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Laissez-moi réfléchir une minute,

16 Monsieur Visnjic. J'essaie de comprendre un peu où nous en sommes.

17 Monsieur Lukic, que vouliez-vous ajouter ?

18 M. LUKIC : [interprétation] Je voulais ajouter que cette déclaration

19 supplémentaire a été copiée sur e-court, mais nous n'avons pas été avertis.

20 Personnellement, je n'en ai pas été averti, donc je ne savais absolument

21 pas que ce document existait.

22 J'ai appris son existence il y a cinq minutes. Notre commis aux affaires

23 vient juste de me le montrer.

24 LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Visnjic, qu'avez-vous à

25 ajouter ?

26 M. VISNJIC : [interprétation] Oui, tout à fait. Voici ce qui s'est passé

27 exactement. L'Accusation devait nous informer qu'il y avait une déclaration

28 supplémentaire ou une information supplémentaire, nous informer soit par e-

Page 2129

1 mail, soit autrement. Ainsi, on obtiendrait l'information, soit par écrit,

2 soit par e-mail, mais cette fois-ci nous n'avons reçu aucune information.

3 Je viens juste d'apprendre que ce document existe sur le système

4 électronique, et il faut quand même au moins nous prévenir que le document

5 existe, au moins par le biais d'un e-mail, pour nous dire que c'est sur e-

6 court. Comme M. Ackerman vous a expliqué précédemment, au cours du week-end

7 nous avons eu un problème parce que nous n'avons pas eu accès à internet.

8 M. Petrovic vient de me rappeler que si quelque chose de nouveau

9 apparaît sur e-court, il faut que nous le retrouvions, mais on ne sait

10 jamais quels sont les derniers documents qui sont apparus sur e-court. Il

11 aurait au moins fallu nous prévenir par téléphone ou par e-mail, j'imagine

12 que la réciproque s'applique.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je tiens à entendre les avis des

14 autres conseils, si ces avis sont différents, s'ils ont quelque chose

15 d'autre à m'annoncer.

16 M. ACKERMAN : [interprétation] Oui, pour rajouter des choses, en fait je

17 vais sans doute encore compliquer tout cela. J'ai essayé de travailler sur

18 e-court dimanche. Malheureusement, e-court s'est complètement planté

19 dimanche matin très tôt et n'a pas recommencé à marcher avant lundi matin,

20 lundi matin vers 7 heures 30, voir 8 heures.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais qu'est-ce que cela peut

22 faire, puisque de toute façon vous ne saviez même pas que ce document était

23 sur e-court ?

24 M. ACKERMAN : [interprétation] Oui, mais quand même, parfois quand on

25 parcourt e-court pour se tenir au courant, on peut trouver par accident ou

26 par chance le document. Cela peut arriver, par exemple, comme le document

27 qui nous a été communiqué que nous avons perdu pour le retrouver sur e-

28 court.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Monsieur O'Sullivan. Qu'avez-vous

2 à dire ?

3 M. O'SULLIVAN : [interprétation] La même chose que ce qui a déjà été dit,

4 mais il me semble quand même qu'en l'espèce, ce qui vient d'être fait est

5 une violation de l'article 65 ter du Règlement, et le mémoire préalable au

6 procès de l'Accusation doit normalement nous fournir un résumé de tous les

7 faits portant sur tout ce qui va être dit par les témoins qui sont cités.

8 Or, dans ce procès, nous avons été quand même été en phase préalable

9 au procès pendant quatre ans. Il y a eu une Conférence de mise en état

10 après la Conférence de mise en état. Ce qui est étrange quand même, c'est

11 que tout d'un coup, on se rend compte que cette déclaration supplémentaire

12 a été incluse. Normalement, ce qui est dans le mémoire préalable au procès

13 de l'Accusation doit être la chose qui reste, et on ne doit pas continuer à

14 ajouter des documents supplémentaires, et cetera. Sinon, ce n'est pas juste

15 et c'est une violation des droits des accusés.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais comment allez-vous faire

17 cela ? Qu'est-ce qu'on fait si tout d'un coup on a des éléments pertinents

18 qui arrivent au dernier moment ?

19 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Il y a une obligation de l'Accusation de

20 bien préparer quand même ses arguments. Normalement, dans le mémoire

21 préalable au procès, on sait exactement à quoi s'attendre.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, pas du tout, parce que je vous

23 demande de répondre à ma question. Je comprends très bien ce que vous nous

24 dites, mais quand même, parfois il y a des informations qui arrivent tout

25 d'un coup au dernier moment. Or, ce que dont vous me parlez, c'est que ces

26 documents ne se trouvent pas dans le résumé 65 ter.

27 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Néanmoins, il faut qu'ils puissent montrer

28 des motifs raisonnables comme quoi la partie citée vient d'apporter de

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1 nouvelles informations, et il faut aussi qu'ils montrent qu'ils sont

2 coopératifs, et qu'ils veulent absolument nous communiquer les

3 informations, s'ils ont eu ces informations au dernier moment.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous suggérez ici qu'il s'agit du

5 témoin en application de cette procédure ?

6 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Tout à fait.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Parce que vous êtes en train d'avancer

8 qu'ils n'ont pas réalisé et n'ont pas accompli exactement ce qu'il leur

9 était demandé au titre du Règlement en ce qui concerne les déclarations

10 supplémentaires ajoutées au dernier moment.

11 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Tout à fait.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

13 [La Chambre de première instance se concerte]

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Moeller, voulez-vous ajouter

15 quoi que ce soit avant que nous ne donnions notre décision ?

16 Mme MOELLER : [interprétation] J'aimerais ajouter qu'on essayait juste de

17 savoir ce qui s'est passé pour ce qui concerne sa déclaration

18 supplémentaire. Malheureusement, jusqu'à présent n'arrivons pas à retrouver

19 un e-mail qui montrerait que ce document était communiqué à la partie

20 adverse par ce biais, alors que c'est la pratique normale. Il y a des

21 instructions bien claires qui disent que l'on doit suivre cette pratique,

22 mais il semblerait en effet que la partie adverse n'a pas été notifiée par

23 e-mail de l'existence de cette déclaration supplémentaire, et nous nous en

24 excusons, et nous en sommes fort marris.

25 C'est tout ce que j'avais à rajouter.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, il y a quand même deux points

27 bien différents à traiter ici. Tout d'abord, la déclaration supplémentaire,

28 elle semble être bien ce qu'elle déclare être, une déclaration

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1 supplémentaire. Ce n'est en fait qu'une légère amplification de ce qui est

2 déjà dit dans la déclaration principale. On a quelques détails

3 supplémentaires sur le vécu de ce témoin, sur d'où venait le témoin, et

4 cetera. Il n'y a rien vraiment de spectaculaire dans cette déclaration

5 supplémentaire. Cela dit, l'autre point qui est à traiter est quand même

6 assez essentiel, suite aux objections qui ont déjà été soulevées en

7 l'espèce, et qui à l'heure actuelle sont étudiées de très près par les

8 Juges de cette Chambre. Certes, dans les documents existants, il n'y a rien

9 qui permette de dire que l'on va poser des questions à un témoin d'une

10 telle importance en l'espèce qui ferait que la partie interrogeant le

11 témoin doive demander ou exempter d'accomplir toutes les obligations dues

12 au titre de l'article 65 ter. Cela c'est la première chose. Avec cela, nous

13 répondons à ce qu'a dit Me O'Sullivan. Il faut bien sûr que la partie qui

14 est en faute, si je puis dire, montre un petit peu quels sont les motifs

15 convaincants qui l'excuse, et ceci doit être fait sous la forme d'une

16 demande à la Chambre de première instance. Bien sûr cette demande peut être

17 fait par oral, mais il faut évidemment aussi en prévenir la Défense en

18 temps normal et ce normalement par écrit.

19 Pour ce qui est de cela, il semble que l'Accusation n'a pas prévenu

20 la Défense qu'il y avait cette déclaration supplémentaire, et n'a pas

21 prévenu qu'il y avait un document supplémentaire au titre de la liste 65

22 ter, et rien de ce qui nous a apporté jusqu'à présent par l'Accusation ne

23 peut justifier cela. Au titre de la méthodologie, la Chambre de première

24 instance considère qu'il ne serait pas juste pour la Défense que l'on

25 permette à ce témoin de continuer à témoigner, du moins tant que ces

26 problèmes portant sur la notification n'ont pas été résolus. Certes, si

27 l'Accusation arrivait à nous prouver qu'il fallait absolument traiter de

28 tout ce qui était dans la déclaration supplémentaire avec le témoin, elle

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1 pourrait à un moment ultérieur demander l'exemption qui est nécessaire et

2 faire revenir ainsi le témoin dans le but de l'interroger sur ce qui est

3 dans cette fameuse déclaration supplémentaire.

4 Etant donné la façon dont les choses ont été présentées à la Défense,

5 à notre avis il ne faut pas continuer, il serait injuste pour la Défense de

6 continuer à poursuivre l'interrogatoire, et nous voulons que

7 l'interrogatoire de ce témoin ne porte que sur ce qui est sur la

8 déclaration principale et non sur la déclaration supplémentaire.

9 Madame Moeller ?

10 Mme MOELLER : [interprétation] Oui, pour clarifier les choses, pour ce qui

11 est de tous les points qui sont dans la déclaration supplémentaire, est-ce

12 que vous nous permettez quand même de poser des questions là-dessus ?

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela a déjà été versé quand même sans

14 objection, vous avez eu de la chance sans doute et il est évident que ce

15 qui est dans la déclaration supplémentaire clarifie uniquement ce qui est

16 dans la déclaration principale et ne va pas vraiment plus loin.

17 Mme MOELLER : [interprétation] En effet, c'est cela.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est pour cela que c'est des éléments

19 de preuve puisque cela a déjà été versé, et nous vous avons bien fait

20 remarquer que si vous aviez voulu le verser, même s'il y avait des

21 objections, nous l'aurions quand même accepté.

22 Mme MOELLER : [interprétation] Merci.

23 M. ACKERMAN : [interprétation] Je tiens quand même à dire que ce n'est pas

24 qu'une clarification car il y a un point où dans la déclaration

25 supplémentaire il y a plus qu'une clarification, il y a vraiment une

26 modification de la déclaration principale. Il y a en a peut-être d'autres

27 en tout cas.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui mais, quand un témoin, Monsieur

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1 Ackerman, dit quelque chose qui est différent de ce qui a été dit

2 auparavant c'est une clarification, il faut absolument le porter à

3 l'attention de tous.

4 M. ACKERMAN : [interprétation] Non, ce n'est pas uniquement une

5 clarification, c'est une modification substantive de la déclaration. En

6 tout cas c'est mon opinion.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais à quoi faites-vous référence ? Je

8 ne vais pas modifier mon point de vue, mais j'aimerais quand même savoir de

9 quoi vous parlez.

10 M. ACKERMAN : [interprétation] Je vous le dirais mais il faudrait que le

11 témoin n'écoute pas.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En effet, nous serons mis au courant

13 de ce dont vous parlez lors de votre contre-interrogatoire.

14 M. ACKERMAN : [interprétation] Merci.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous pouvons continuer.

16 Mme MOELLER : [interprétation]

17 Q. Dans la clarification, les éclaircissements que vous avez apportés à

18 votre déclaration, Madame Bala, nous allons en revenir au 26 mars 1999.

19 Vous dites que ce jour-là vous avez noté quelques observations, vous avez

20 regardé un peu ce qui se passait, et vous avez observé ce qui se passait

21 dans différents quartiers, Dragodan et autres. Pourriez-vous expliquer à la

22 Chambre exactement d'où vous avez observé la situation ?

23 R. Dans ma déclaration du 26 juin 1999, j'ai observé les choses sous trois

24 angles. Je pouvais voir Dragodan, Vranjevc et Kolavic. Ma maison se trouve

25 dans la partie ancienne de Pristina. C'est une maison qui a cinq étages.

26 Sans toit, enfin avec une terrasse, une grande terrasse. C'est de la

27 terrasse que je pouvais observer ces quatre endroits, et je les voyais très

28 bien, je voyais les mouvements, la façon dont les gens se déplaçaient, ce

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1 qui était en train de se passer. Quand j'avais du mal à voir, j'ai pu

2 utiliser des jumelles afin de mieux observer ce qui se passait dans des

3 différents quartiers de Pristina. Je n'ai pas vraiment pu voir les zones

4 très éloignées de Pristina qui se trouvaient très loin de là où j'habitais.

5 Mme MOELLER : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, afficher la

6 pièce P13 sur l'écran.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La P13.

8 Mme MOELLER : [interprétation] Oui, il s'agit d'une carte de Pristina.

9 M. LUKIC : [interprétation] Je suis désolé. Je voudrais vous dire quelque

10 chose. Il faut clarifier quelque chose, c'est peut-être une erreur. Mais le

11 témoin a dit à la page 69, ligne 4. "Dans ma déclaration du 26 juin 1999,"

12 or nous n'avons jamais vu cette déclaration du 26 juin 1999.

13 Mme MOELLER : [interprétation] Puis-je vous assister ici ?

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Allez-y.

15 Mme MOELLER : [interprétation]

16 Q. Madame Bala, vous avez compris ce qu'a dit le conseil de la Défense,

17 vous avez fait référence à une date du 26 juin 1999. En tout cas c'est ce

18 qui est écrit sur le compte rendu. Etes-vous en train de faire référence à

19 une déclaration que vous auriez fait ce jour-là, ou est-ce que vous faisiez

20 référence à une déclaration du 30 juin 2001 ou du 16 août 2006 ?

21 R. Le 26, je parlais des observations que j'ai faites, les observations

22 sur ce qui s'est passé le 26 juin 1999. C'est cela qui se trouve dans ma

23 déclaration. Cette déclaration a été faite aussi en juillet et en juin

24 2001.

25 Q. Il faut que je vous repose la question parce que là vous nous parlez

26 d'événements qui auraient eu lieu le 26 juin de 1999.

27 L'INTERPRÈTE : L'interprète se corrige, il s'agit des événements du 26 mars

28 1999.

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1 Mme MOELLER : [interprétation] Bien, je crois que l'interprète a corrigé

2 l'erreur, donc le problème est résolu.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Tout à fait.

4 Mme MOELLER : [interprétation]

5 Q. Donc vous dites que depuis la terrasse de votre maison, enfin le toit

6 quoi, vous voyiez très bien. Où se trouvait exactement votre maison ?

7 Pourriez-vous nous dire quel était le quartier ?

8 R. J'habitais à Ruga e Llapi, numéro 30. C'est dans la vieille ville près

9 du vieux marché de Pristina.

10 Q. Il s'agirait du centre-ville ?

11 R. Non, pas tout à fait. Ce n'est pas au centre de la ville, c'est au

12 nord-ouest, dans la partie nord-ouest de la ville.

13 Mme MOELLER : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, zoomer sur

14 la carte pour que le témoin puisse mieux nous indiquer où se trouvait sa

15 maison. Il faudrait remonter un peu la --

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce qu'on peut zoomer exactement sur

17 le quartier concerné sur la carte de Pristina.

18 Mme MOELLER : [interprétation]

19 Q. Pourriez-vous maintenant marquer l'endroit avec le stylo que va vous

20 donner l'huissier ?

21 R. Oui, ma maison se trouve ici. Ce n'est pas extrêmement clair. Vous avez

22 différents quartiers de Pristina. Ma maison se trouverait ici, et depuis ma

23 maison, je voyais Dragodan, Vranjevc, Kolovica, qui se trouve à l'arrière

24 de ma maison, et Taslixhe.

25 Q. Merci.

26 Mme MOELLER : [interprétation] Pourrions-nous prendre un cliché maintenant

27 de cette carte et donner à cette carte un numéro IC ?

28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit de la

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1 pièce IC 15.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

3 Mme MOELLER : [aucune interprétation]

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Moeller, il nous faut prendre

5 une nouvelle pause, mais est-ce que vous en avez pour longtemps en ce qui

6 concerne votre interrogatoire principal ?

7 Mme MOELLER : [interprétation] Non, il me semble que dans 10 à 15 minutes,

8 j'en aurai terminé.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans ce cas, nous reprendrons à 18

10 heures.

11 --- L'audience est suspendue à 17 heures 29.

12 --- L'audience est reprise à 18 heures 00.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Moeller ?

14 Mme MOELLER : [interprétation] Avant de poursuivre avec Mme Bala, peut-on

15 savoir s'il est possible de commencer avec le témoin suivant aujourd'hui ?

16 Sinon, on lui permettra de partir. Il attend ici.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur O'Sullivan est celui qui est

18 très bien placé pour nous dire combien de contre-interrogatoires il y aura.

19 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Il n'y en aura pas beaucoup, d'après ce

20 que j'en sais maintenant.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, si c'est vers 18 heures 15 ou 20

22 que vous commencez, est-ce qu'il nous faut garder le témoin suivant ?

23 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Non.

24 Mme MOELLER : [interprétation] Merci.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, le témoin peut disposer. En

26 fait, ce serait vraiment très utile si nous pouvions en terminer avec ce

27 témoin aujourd'hui, puisqu'il faudra prendre des dispositions pour entendre

28 le témoin suivant. Ceci nous permettrait de ne pas perdre de temps demain

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1 matin. Allez-y, Madame Moeller.

2 Mme MOELLER : [interprétation]

3 Q. Madame Bala, nous parlions du 26 mars 1999. Vous avez dit que

4 vous avez pu voir la VJ, le MUP et des civils serbes en train de détruire

5 des maisons albanaises, des commerces albanais dans votre localité. Comment

6 est-ce que vous pouviez savoir qu'il s'agissait bien de la VJ, du MUP et

7 des civils serbes ?

8 R. Je vis au Kosovo. C'est là que j'ai grandi. Par conséquent, je sais

9 bien comment il faut faire pour faire la différence entre les policiers,

10 les soldats, les civils. L'armée avait des uniformes vert foncé, la police

11 avait des uniformes de camouflage bleu foncé, et il y avait des civils qui

12 portaient parfois des anoraks ou des vestes de la police. Parfois, ils

13 avaient des armes, divers types d'armes.

14 Q. Le 29 mars, je voudrais qu'on en parle. Vous avez dit que c'est le jour

15 où vous avez été chassée de chez vous ?

16 R. Oui.

17 Q. Dans votre déclaration, vous avez dit que l'officier de la VJ et un

18 tzigane sont venus à votre maison. Savez-vous qui était le tzigane ?

19 R. Oui, je le sais. C'était Ivica, son prénom. Je ne me rappelle pas de

20 son nom de famille. Il vivait dans la ville. Sa maison était dans mon

21 quartier. Il était policier chargé de la circulation et il avait sous son

22 contrôle la zone où nous vivions, notre quartier.

23 Q. Dans votre déclaration, vous dites qu'on vous a emmenée à la gare

24 ferroviaire, qu'on vous a fait embarquer à bord d'un train et que ce train

25 est arrivé à la frontière Hani i Elezit. Vous dites que des forces serbes

26 étaient là pour vous surveiller. Est-ce que vous pouvez nous préciser ce

27 que vous entendez par les "forces serbes" ?

28 R. C'était une après-midi. Il est difficile de se rappeler l'heure où

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1 différentes choses se sont produites. Je pense que nous sommes arrivés à

2 Pristina à la gare ferroviaire vers 17 heures, et depuis la matinée jusqu'à

3 ce moment-là, nous avions marché dans les rues de Pristina pendant tout ce

4 temps-là, à Fushe Kosova, à Lipijan [phon], Ferizaj, Hani i Elezit, le

5 train s'est arrêté, il s'est arrêté partout. On a pu reconnaître toutes les

6 stations. Il y avait là des policiers, des paramilitaires ou des soldats.

7 Pendant tout ce temps, ils pointaient leurs fusils sur nous, sur la

8 direction du train. A chaque fois que le train s'est arrêté, on nous a

9 empêchés de les regarder directement.

10 M. ACKERMAN : [interprétation] Mais je ne comprends pas pourquoi elle

11 raconte son histoire. Elle ne répond pas vraiment à la question. La

12 question était : "Qui étaient les forces serbes ?"

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne suis pas d'accord.

14 Allez-y, poursuivez.

15 M. ACKERMAN : [interprétation] Mais s'il vous plaît, examinez ce qu'elle

16 est en train de dire.

17 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]

18 M. ACKERMAN : [interprétation] La question était : "Qu'entendez-vous par

19 forces serbes ?" Maintenant, le témoin est en train de raconter sa journée.

20 Elle ne dit jamais ce qu'elle entend par l'expression "forces serbes". Tout

21 simplement, elle ne répond pas à la question.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] S'il vous plaît, poursuivez.

23 M. ACKERMAN : [aucune interprétation]

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous ai entendu, Maître Ackerman.

25 Madame Bala, s'il vous plaît, allez-y et répondez à la question.

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai dit, pendant tout ce temps, à

27 Fushe Kosova, Lipijan, à Ferizaj, à Hani i Elezit, à chaque fois que le

28 train s'est arrêté, il a été entouré de forces serbes, la police, l'armée

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1 et les forces que je n'avais jamais vues de ma vie, jamais auparavant, du

2 moins pas à Pristina. Ils portaient des uniformes noirs avec des drapeaux

3 blanc, rouge, bleu. Ils avaient des insignes à différents endroits de leurs

4 uniformes. C'étaient des uniformes serbes. C'étaient la police, l'armée et

5 ces autres forces qui ne faisaient pas partie des forces régulières ou

6 légales de Serbie.

7 Mme MOELLER : [interprétation]

8 Q. Ces forces que vous venez de décrire, elles travaillaient de concert ?

9 Vous les avez vues ensemble ?

10 R. Oui, partout où nous nous sommes arrêtés, partout où le train s'était

11 arrêté, ils étaient ensemble.

12 Q. Une dernière question, Madame Bala, pour ma part. Etes-vous partie de

13 Pristina et du Kosovo parce que vous aviez peur des bombardements de

14 l'OTAN ?

15 R. Que ce soit moi-même ou ma famille, aucun d'entre nous n'est parti de

16 Pristina à cause du bombardement de l'OTAN. Nous avons été forcés à partir

17 par l'armée, la police et ces autres forces qui se sont trouvées sur place

18 à Pristina à ce moment-là.

19 Mme MOELLER : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le

20 Président.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Moeller, je vous remercie.

22 Maître O'Sullivan ?

23 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je n'ai pas de

24 questions à poser. L'ordre dans lequel nous allons aller : général

25 Pavkovic, général Lazarevic, général Lukic, M. Sainovic, le général

26 Ojdanic.

27 [La Chambre de première instance se concerte]

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ackerman ?

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1 M. ACKERMAN : [interprétation] C'est la journée de toutes les surprises,

2 Monsieur le Président. Je suis vraiment très surpris de l'ordre dans lequel

3 se déroulera le contre-interrogatoire; c'est différent de ce que j'avais

4 demandé.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien --

6 M. ACKERMAN : [interprétation] Je suppose qu'on m'a simplement désigné pour

7 essayer le plâtre.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais allons-y, alors.

9 M. ACKERMAN : [interprétation] C'est l'un de ces jours où rien ne semble

10 fonctionner.

11 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Excusez-moi d'intervenir, mais en

12 perse, "Bala" signifie : quelqu'un qui est au-dessus de tout le reste.

13 C'est cela, la signification de ce nom.

14 M. ACKERMAN : [interprétation] Je vous remercie.

15 Contre-interrogatoire par M. Ackerman :

16 Q. [interprétation] Madame Bala, je suis John Ackerman, je représente le

17 général Pavkovic et j'ai quelques questions à vous poser. Si vous écoutez

18 attentivement la question et si vous y apportez une réponse précise, nous

19 en aurons terminé rapidement.

20 Vous êtes quelqu'un qui est très intelligente, d'après ce que je peux voir,

21 et aussi qui fait preuve d'une grande prudence par rapport à ce que vous

22 faites, à ce que vous dites. L'une des observations que vous avez faites

23 lorsqu'on vous a remis votre déclaration pour vous demander si c'était bien

24 votre déclaration, cela a été de bien vérifier si c'était le cas. Ai-je

25 raison ?

26 R. Oui, c'est ce que j'ai fait.

27 Q. C'est avec cette même attention minutieuse que vous avez parcouru tout

28 ce processus ici, à savoir que vous avez fourni toutes vos déclarations en

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1 l'espèce et aujourd'hui également ?

2 R. Oui.

3 Q. Vous dites que vous travaillez pour l'OSCE à Pristina, ou plutôt que

4 vous y avez travaillé jusqu'au départ de l'OSCE du Kosovo. De toute

5 évidence, vous n'êtes pas partie avec eux, vous êtes restée sur place

6 lorsqu'ils sont partis. Est-ce que vous avez demandé de partir avec l'OSCE

7 ou est-ce que votre travail s'est terminé à ce moment-là ? Votre contrat

8 était terminé ?

9 R. Lorsque la mission de l'OSCE a été évacuée, tout le personnel local

10 s'est vu offrir la possibilité d'être évacué en Macédoine avec la mission,

11 parce qu'ils avaient peur que le personnel local ne fasse l'objet de

12 meurtres, d'enlèvements, ce genre de chose. On m'a proposé, on m'a donné la

13 possibilité de partir, mais j'avais ma famille là-bas et je voulais être

14 avec mon peuple.

15 Q. Donc, l'OSCE a procédé à l'évacuation parce qu'ils étaient préoccupés

16 par le danger éventuel et imminent, et c'est pour cela qu'ils ont donné

17 possibilité à toute personne qui a travaillé pour eux de partir avec eux;

18 c'est bien cela ?

19 R. Comme je l'ai dit, le personnel local s'est vu offrir la possibilité de

20 partir, et moi aussi, on m'a proposé cela, mais je n'ai pas accepté. Encore

21 une fois, l'OSCE a proposé ceci à tous les membres de son personnel local.

22 Q. Voyez-vous, c'est comme cela qu'on perd du temps. Vous avez répété

23 votre réponse alors que vous auriez pu dire simplement oui.

24 Allant dans ce même sens, le 30 juin 2001, vous avez fait une

25 déclaration au bureau du Procureur, et cette déclaration couchée par écrit,

26 rédigée en anglais, vous a été lue, relue, et vous avez eu l'occasion de

27 signer cela dans votre langue après avoir bien examiné son exactitude. Vous

28 avez confirmé que cette déclaration était exacte et véridique au mieux de

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1 vos souvenirs. Vous avez paraphé ou signé cette déclaration sur chacune de

2 ses pages ?

3 R. Oui.

4 Q. Vous qui faites preuve de cette extraordinaire prudence, qui cherchez à

5 être toujours précise et à dire bien la vérité, vous avez certainement

6 entendu dire qu'il figure dans votre déclaration la chose suivante : "Je me

7 suis adressée à un certain nombre de civils albanais qui m'ont dit qu'ils

8 se préparaient à l'invasion serbe et que c'est à cause de cette peur qu'ils

9 envoyaient leur famille à l'extérieur, hors de Pristina." C'est ce qui y

10 figure, n'est-ce pas ?

11 R. Dans le cadre de mes préparatifs à cette déposition à La Haye, j'ai

12 découvert un malentendu. Je ne voulais pas dire que les gens se préparaient

13 à l'invasion, j'ai dit que -- en fait, je voulais dire qu'ils ne savaient

14 pas quoi faire. Je pense que c'était cela, le malentendu entre moi et la

15 personne à qui j'ai donné mon entretien.

16 Q. Mais vous auriez pu signaler ce malentendu. Or, vous avez dit que

17 c'était véridique et vous l'avez signée. Est-ce que vous pouvez me répondre

18 par un oui ou par non ?

19 R. Vous pouvez répéter votre question, s'il vous plaît ?

20 Q. On vous a donné cette possibilité de préciser d'éventuels malentendus

21 parce qu'on vous a donné lecture de la déclaration, et vous n'avez pas

22 précisé la déclaration, vous avez dit qu'elle était véridique et vous

23 l'avez signée, n'est-ce pas ?

24 R. Oui.

25 Q. Vous avez aussi signé la page où apparaît ce texte. La signature qui

26 apparaît en bas en droite, c'est bien votre signature, n'est-ce pas ?

27 R. Oui.

28 Q. Quand vous êtes venue faire cette déclaration supplémentaire ici le 16

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1 août, je pense vous avez fait cette déclaration supplémentaire à ce moment-

2 là ? Vous avez dit que ce qui figure au paragraphe 4, ce n'est pas vraiment

3 cela, que le 20 mars, vous avez parlé à ces gens de la communauté

4 albanaise, ces civils, et qu'ils ne vous ont pas dit qu'ils se préparaient

5 à envoyer leur famille de Pristina. Donc, vous avez modifié ce passage,

6 n'est-ce pas ?

7 R. J'ai dit qu'il y a eu un malentendu, ici. Ce malentendu réside dans la

8 manière dont ils ont interprété mon anglais, puisque j'ai fait ma

9 déclaration en anglais. Tout simplement, c'est un malentendu. J'ai dit

10 qu'ils avaient peur, qu'ils redoutaient de ce qui allait advenir à leur

11 famille, mais je ne voulais pas dire par là que les familles se préparaient

12 à envoyer leurs membres ailleurs. C'est simplement une mauvaise

13 interprétation de mon anglais.

14 Q. Mais si vous avez fait votre déclaration en anglais, je suppose qu'on

15 vous a donné la possibilité de la relire en anglais avant de confirmer sa

16 véracité et de la signer; est-ce bien cela ?

17 R. Oui. J'ai eu la possibilité de la lire et de la voir. Tout ce que je

18 peux dire encore une fois, c'est qu'il y a eu un malentendu sur ce point.

19 J'ai fait une erreur lorsque j'ai laissé passer cela, lorsque je ne l'ai

20 pas vu. Je n'avais pas l'intention de dire que les familles se préparaient

21 à envoyer leurs membres ailleurs.

22 Q. C'est en albanais qu'on vous en a donné lecture ?

23 R. La déclaration à Pristina, cette déclaration m'a été lue en anglais,

24 puisque je l'ai donnée en anglais, tandis qu'à La Haye, j'ai fait ma

25 déclaration en albanais, et de là probablement ce malentendu entre ces deux

26 langues, ces deux versions, malentendu.

27 Q. Donc, à la fin de la déclaration que vous avez donnée à Pristina qui

28 porte votre signature ainsi que la date, d'après ce que je vois, vous

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1 confirmez qu'on vous a lu ces six pages en albanais, mais ceci ne serait

2 pas vrai non plus; alors ce serait une autre erreur, ici ?

3 R. Pourriez-vous répéter la question ?

4 Q. Est-ce que vous avez sous vos yeux votre déclaration ?

5 R. Oui.

6 Q. Veuillez s'il vous plaît regarder la dernière page, la page intitulée

7 "Confirmation du témoin", où l'on peut lire : "Les six pages de cette

8 déclaration m'ont été lues dans la langue albanaise," et ensuite vous avez

9 signé cela. Maintenant, vous nous dites que ce n'est pas exact, que cette

10 déclaration vous a été lue en anglais.

11 R. La déclaration en albanais, c'est celle que j'ai donnée à La Haye,

12 alors que celle de Pristina, je l'ai donnée en anglais.

13 Q. [aucune interprétation]

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Essayez, s'il vous plaît, de répondre

15 à la question précise que l'on vous pose. Ecoutez-là attentivement.

16 M. ACKERMAN : [interprétation]

17 Q. La question que je vous ai posée, c'est de savoir si la déclaration à

18 Pristina -- est-ce que vous êtes en train de la regarder, de regarder cette

19 déclaration préalable ? On peut y lire comme suit : "Cette déclaration

20 consistant de six pages m'a été lue en langue albanaise." Ensuite, vous

21 avez signé cette déclaration préalable. Maintenant, vous nous dites que ce

22 n'est pas vrai, puisque vous nous avez dit que cette déclaration n'a pas

23 été lue en albanais, donc vous avez signé quelque chose qui ne correspond

24 pas à la vérité. Est-ce que c'est bien cela que vous êtes en train de me

25 dire ?

26 R. Non, je n'ai jamais menti dans ma déclaration. Je pense que, tout

27 simplement, il y a une confusion, ici. La déclaration en albanais, je l'ai

28 faite ici, à La Haye. C'est pour cela qu'elle m'a été relue en langue

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1 albanaise. Mais je ne sais pas de quelle déclaration vous parlez

2 exactement. Je l'ai relue, et c'est la même. Rien n'a été ajouté.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas exact. Ce ne peut pas

4 être exact. On vous demande d'examiner une page précise de la déclaration

5 préalable que vous avez faite le 30 juin 2001. A la fin, on peut lire un

6 paragraphe intitulé : "La confirmation du témoin". On peut y lire comme

7 suit : "Cette déclaration préalable consistant de six pages m'a été lue en

8 langue albanaise." On vous dit que ce n'est pas exact, tout simplement.

9 C'est ce que vous dit M. Ackerman.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Six années après, on peut toujours se rappeler

11 des événements, mais si j'ai bien dit cela à la dernière page, cela veut

12 dire qu'on me l'a relue en albanais. Je n'avais pas vu la dernière page.

13 Donc, il y avait peut-être un problème. C'est vrai que j'ai fait cette

14 déclaration en anglais, je l'ai faite en anglais. Mais il s'est passé

15 tellement de temps entre-temps que maintenant, je ne suis pas sûre s'ils me

16 l'ont relue en anglais ou en albanais. Ce que je sais, en revanche, c'est

17 que j'ai vérifié toute cette déclaration. Je suis désolée s'il y a un

18 malentendu. C'est que tout simplement, je ne me rappelle pas exactement de

19 comment cela s'est passé.

20 M. ACKERMAN : [interprétation]

21 Q. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Il y a six ans, vous l'avez

22 examinée de près, et à l'époque, vous avez dit que si quelque chose était

23 exact, c'était exact. Depuis, vous avez peut-être oublié des éléments.

24 Donc, quand à l'époque vous dites : "J'ai parlé avec un certain nombre de

25 civils albanais qui m'ont dit qu'ils se préparaient pour l'invasion serbe à

26 cause de leur peur et qu'ils renvoyaient leur famille en dehors de la

27 Pristina, c'était exact," c'est tout simplement que depuis, vous avez

28 oublié tout cela. C'est pour cela que vous avez fait une déclaration

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1 supplémentaire dans laquelle vous dites que ce n'était pas exact. Est-ce

2 que j'ai raison ?

3 R. Moi, les discussions avec les gens que je décris, donc avec les

4 gens que j'ai rencontrés, sont vraies. Je n'oublierai jamais ce qu'ils

5 m'ont dit. Je n'oublierai jamais leur peur, leur horreur, l'expression de

6 leur visage. Laissez-moi terminer.

7 Q. Mais les -- répondez à ma question. Je ne vous demande pas de faire un

8 discours.

9 R. Je ne fais pas de discours, je suis en train d'expliquer ce qui

10 s'est passé. Les Albanais avec lesquels j'ai discuté --

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je suis désolé, Monsieur Ackerman,

12 mais je ne suis pas du tout d'accord avec votre approche. Je ne pense pas

13 du tout que le témoin dépasse les limites raisonnables de la question que

14 vous lui avez posée.

15 Vous pouvez continuer, Madame.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Au cours des entretiens que j'ai pu avoir, le

17 20 mars 1999, quand je suis allée dans la ville, dans différentes parties

18 de Pristina, j'ai parlé avec beaucoup de gens et j'ai vu la peur, l'horreur

19 sur leur visage. Ils avaient peur de ce qui pourrait arriver à leur

20 famille, parce qu'ils étaient laissés à la merci de leur sort. Ils

21 n'étaient pas préparés pour la situation. Ils n'étaient pas préparés à

22 renvoyer leur famille. Je ne savais pas quoi faire avec eux. Je me souviens

23 de ces conversations et de ces situations puisque j'avais à l'époque autant

24 peur qu'eux.

25 M. ACKERMAN : [interprétation]

26 Q. Ces conversations, elles ont eu lieu le 20 mars, n'est-ce pas ?

27 R. Oui.

28 Q. Et vous vous en souvenez très bien aujourd'hui, c'est inscrit dans

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1 votre mémoire ?

2 R. Ces événements, cette horreur, cette peur, c'est vivant. Ce sont des

3 images qui vivent dans les esprits de tous les Albanais, pas seulement dans

4 mon esprit. Si d'ici 700 ans, si vous me demandiez de vous en parler à

5 nouveau, je serais prête à le faire, si j'étais vivante, évidemment.

6 Q. Est-ce que vous vous souvenez donc de ces images aussi bien aujourd'hui

7 qu'à l'époque où vous avez fait votre déclaration à Pristina en 2001. Vous

8 ne pouviez pas les oublier. Vous vous en rappelez très bien, n'est-ce pas ?

9 R. Oui, je m'en souviens très bien. J'ai devant mes yeux toutes ces

10 choses-là, parce que là, il s'agit de la vie ou de la mort et on ne peut

11 pas oublier des événements comme cela. Je vous ai dit que j'ai peut-être

12 fait une erreur, une petite erreur technique, mais je confirme ma

13 déclaration, ce que j'y ai dit, et je le répèterai dans l'avenir.

14 Q. Vous voulez nous dire que c'était une époque terrible. Vous voulez dire

15 que tout cela était terrible, que c'était une période terrible, et je suis

16 tout à fait d'accord avec vous, donc je n'ai pas besoin d'entendre tout

17 cela et je pense que les Juges de la Chambre comprennent. Tout ce que vous

18 devez faire, c'est de répondre aux questions que je vous pose. Je vous ai

19 demandé si cette déclaration vous a été relue en albanais ou non, et vous

20 avez dit : oui, peut-être que je me suis trompée, peut-être que cela a été

21 relu en albanais.

22 Quand je parle du paragraphe 4 et quand je vous dis : vous êtes sûre

23 que vous ne vous êtes pas trompée là-dessus non plus; puisque vous ne

24 pouvez pas tout simplement répondre à la question que je vous ai posée. A

25 l'époque, quand vous avez signé cette déclaration, vous avez revu tout cela

26 et vous avez dit que c'était exact.

27 Mme MOELLER : [interprétation] Monsieur le Président --

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Si j'ai signé cette déclaration le 16 août

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1 2006 et au mois de juin 2001, tout est vrai, ce qui s'y trouve aussi bien

2 dans la déclaration en albanais que dans la déclaration en anglais.

3 M. ACKERMAN : [interprétation]

4 Q. Les deux déclarations sont exactes, sont correctes ? Tout est exact

5 dans les deux déclarations; oui ou non ?

6 R. Oui.

7 Q. Bien. Je vais vous dire ce que je pense, et vous avez la possibilité de

8 me répondre. Je vous dis que vous avez changé votre déclaration ici, au

9 niveau du paragraphe 7 de votre déclaration additionnelle, parce que vous

10 avez dit à Pristina, dans la déclaration de Pristina, vous avez dit que

11 vous avez parlé avec un certain nombre de civils le 20 mars qui se

12 préparaient pour l'invasion, et à cause de cette peur, ils renvoyaient leur

13 famille à l'extérieur de Pristina. Vous avez très bien compris que ce

14 n'était pas "politically" correct, donc politiquement correct, et

15 qu'aujourd'hui personne ne soutient cette ligne politique et qu'il faut

16 dire que personne n'est parti de son propre chef. Donc, en venant ici, en

17 arrivant ici, vous avez changé cette portion de votre déclaration. Ce que

18 vous avez dit ici dans votre déclaration ici à La Haye, ce n'est tout

19 simplement pas vrai.

20 R. Monsieur, je devrais peut-être vous répéter. J'ai vraiment discuté avec

21 ces gens-là. On parlait de leur peur, de la peur de ce qui allait se passer

22 avec leur famille. Ils n'étaient pas en train de se préparer pour envoyer

23 leur famille à l'extérieur du Kosovo. C'était peut-être une erreur de ma

24 part. Je n'ai peut-être pas relu cela avec beaucoup d'attention. Peut-être

25 que je n'ai tout simplement pas perçu cela. L'essentiel y est. Ils avaient

26 peur pour le futur de leur famille, pour la vie de leur famille.

27 Q. Très bien. J'en ai terminé de ce thème. Je vais aborder un autre thème.

28 Dans votre déclaration, vous parlez surtout des observations que vous avez

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1 faites par rapport à ce qui s'est passé à Pristina pendant les quelques

2 journées qui vont suivre et vous avez observé tout cela de chez vous.

3 R. Oui.

4 Q. Bien.

5 M. ACKERMAN : [interprétation] C'est une portion qui est très difficile

6 pour le contre-interrogatoire, puisque moi, je n'ai pas pu visiter

7 Pristina, donc pour moi, il est très difficile de lui poser des questions à

8 ce sujet parce que je ne sais pas si elle a pu vraiment voir les choses

9 qu'elle dit avoir vues. J'ai été conseillé, donc je vais poser des

10 questions en me basant sur ce que l'on m'a dit.

11 Q. Cet endroit que vous avez noté sur la carte, l'endroit où se trouvait

12 votre maison où vous auriez aperçu, vu toutes ces choses-là partout dans la

13 ville, n'est-il pas exact qu'il y a beaucoup de bâtiments très hauts qui

14 devaient normalement vous empêcher de voir ? Il y a la municipalité, il y a

15 un dépôt, il y a une banque, il y a un grand hôtel, il y a la radio

16 Pristina, il y a beaucoup de bâtiments très hauts qui auraient pu ou

17 auraient dû obstruer votre vue.

18 R. La maison où j'habite se trouve dans la vieille partie de la ville,

19 près du marché. A cet endroit, il n'y a pas de gros immeubles, il n'y a pas

20 de banque. Il n'y a pas de bâtiments de 15 ou 20 étages. C'est dans la

21 vallée, vous pouvez voir Vranjevc, Kolovica, Taslixhe, Dragodan, Paslija

22 [phon], Kolevica [phon]. Tous ces quartiers-là, ce sont les quartiers avec

23 les maisons de particuliers et ce sont les quartiers qui sont sur les

24 collines. Je n'étais pas la seule à avoir pu observer le mouvement des

25 forces de la police à Pristina. D'autres personnes ont pu voir cela. Ma

26 maison n'est pas dans le centre de Pristina. C'est dans le centre Pristina

27 que vous trouvez ces bâtiments dont vous avez parlé : le dépôt, la radio

28 Pristina, et cetera. Dans ma déclaration, je n'ai pas dit que j'ai vu ces

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1 choses-là à Dardanija, Lakrish et d'autres quartiers où il est impossible

2 d'observer, de voir de chez moi. Donc, je pouvais voir Dragodan, je pouvais

3 voir tout le quartier de Vranjevc, puisque c'est du côté de la colline que

4 je peux voir. Je pouvais voir Kolovica, qui se trouve à l'est, donc à l'est

5 de la maison où j'habite, et Taslixhe, qui est en face de la maison où

6 j'habite. Donc, autour de l'endroit où j'habite, il y a plein de collines.

7 Q. Vous pouviez observer ce qui se passe aussi bien pendant le jour que

8 pendant la nuit, n'est-ce pas ?

9 R. Oui.

10 Q. [aucune interprétation]

11 R. Aussi bien le jour comme la nuit.

12 Q. La nuit, vous observiez tout cela, vous regardiez tout cela à travers

13 les jumelles de nuit avec lesquelles vous pouvez regarder la nuit ?

14 R. Oui.

15 Q. Comment vous avez trouvé ces jumelles infrarouges ? Ce n'est pas

16 vraiment facile à trouver, cela. Ce n'est pas commun que d'avoir des

17 jumelles infrarouges.

18 R. Oui. C'est vrai que ce n'est pas facile, avoir cela. Quand le personnel

19 de l'OSCE est parti en quittant le Kosovo, ils avaient le droit d'apporter

20 20 kilos et ils pouvaient prendre leurs affaires, en gros. Donc, ces

21 jumelles sont restées dans ma voiture. Parfois, enfin, quand j'ai emmené en

22 voiture un certain nombre de membres de la mission de l'OSCE dans le centre

23 général de Pristina qui se trouvait dans le building de Kosova Film, donc

24 dans ce bâtiment-là, c'est là que quelqu'un a laissé ces jumelles.

25 Q. Est-ce que vous savez quelle était la marque de ces jumelles

26 infrarouges ?

27 R. Non, c'était la première fois que j'ai utilisé des jumelles comme cela.

28 Q. Qu'est-ce que vous pouviez voir avec ces jumelles ? Cela ressemblait à

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1 quoi ?

2 R. Avec ces jumelles, la nuit, quand il n'y avait pas d'électricité, on

3 pouvait entendre les détonations, des explosions, des tirs dans différents

4 endroits que j'ai mentionnés : Dragodan, Vranjevc, Kolovica et Taslixhe.

5 Avec ces jumelles, j'ai pu observer les mouvements des forces de la police,

6 l'armée, les véhicules, et cetera.

7 Q. Cela ressemblait à quoi ? Est-ce que vous pouviez discerner les

8 couleurs comme s'il faisait jour ? A quoi cela ressemblait ?

9 R. Les couleurs que je pouvais voir, c'étaient des couleurs plutôt

10 verdâtres. Enfin, tout était un peu vert, mais je pouvais clairement voir

11 un char, le mouvement des personnes armées, les blindés, les jeeps, et

12 cetera.

13 Q. Tout cela se trouvait à quelle distance par rapport à l'endroit où vous

14 étiez pendant que vous étiez en train de les regarder à travers ces

15 jumelles infrarouges ?

16 R. Je ne sais pas, je n'ai pas mesuré tout cela. Tout ce que je peux dire,

17 c'est que les quartiers que j'ai mentionnés, ces quartiers sont assez près

18 de l'endroit par rapport à l'endroit où je suis, où j'habite.

19 Q. Est-ce que la carte est toujours sur l'écran devant vous, la carte de

20 Pristina ?

21 R. Oui, effectivement.

22 Q. Pourriez-vous me montrer sur cette carte --

23 M. ACKERMAN : [interprétation] Je ne sais pas très exactement quelles sont

24 les règles qui s'appliquent, je ne sais pas si le témoin a le droit de

25 dessiner sur cette carte, puisque c'est une pièce de l'Accusation. Je ne

26 sais pas si j'ai le droit de lui faire apposer le moindre signe.

27 Visiblement, oui, j'ai le droit.

28 Q. Montrez-moi sur la carte ce que vous pouviez observer à propos de ces

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1 déplacements de chars et de blindés, de troupes, et cetera.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais je crois qu'il vous faut une

3 autre carte, parce que celle-ci a déjà été marquée, elle a reçu une cote.

4 M. ACKERMAN : [interprétation] Oui, je m'en doutais.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il faut retourner à la pièce P13, qui

6 est la carte sans aucune annotation. Pourrions-nous la voir affichée à

7 l'écran ?

8 Mme MOELLER : [interprétation] Oui, il faut peut-être que l'on zoome un

9 peu, enfin, que l'on fasse -- qu'on agrandisse un peu moins la carte pour

10 avoir une meilleure vue de la carte dans sa quasi-totalité -- enfin, de ce

11 quartier-là, en tout cas.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Allez-y.

13 M. ACKERMAN : [interprétation]

14 Q. Tout d'abord, pourriez-vous marquer sur cette carte l'emplacement de

15 votre maison ?

16 R. Je pouvais voir cette partie par ici --

17 Q. Non, je vous ai demandé d'abord de marquer l'emplacement de votre

18 maison et vous l'avez fait. Maintenant, montrez-nous sur la carte les zones

19 que vous pouviez observer, mais vous n'avez observé de choses importantes

20 qu'en utilisant ces jumelles infrarouges. Si vous pouviez mettre des croix

21 sur les emplacements où vous avez observé des choses à l'aide des jumelles

22 infrarouges, et vous nous dites ensuite ce que vous avez observé.

23 R. Il faudrait arriver à montrer un petit peu ce qui est plus en bas.

24 Mme MOELLER : [interprétation] Peut-être qu'on pourrait prendre un cliché

25 maintenant et puis modifier la carte, ensuite modifier l'affichage de la

26 carte ?

27 M. ACKERMAN : [interprétation] Cela ne sert à rien. La carte peut être un

28 petit peu relevée, cela devrait suffire.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais cela ne sert à rien, parce

2 que si on fait cela, la marque de la maison va disparaître -- enfin, vous

3 reprendrez tout.

4 M. ACKERMAN : [interprétation] Très bien. Dans ce cas-là, on fait un

5 cliché, on en fait une pièce de la Défense.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous en êtes sûr ? Mais cela me paraît

7 un peu stupide, quand même, comme exercice.

8 M. ACKERMAN : [interprétation] En effet, c'est un exercice tout à fait

9 stupide. Donc, on va plutôt agrandir -- réduire la carte pour avoir une

10 meilleure vue de plus de quartiers. Je suis désolé, Monsieur le Président,

11 mais je pense que nous n'arriverons jamais à terminer à 19 heures.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas à l'ordre du jour de

13 toute façon.

14 Madame Bala, est-ce que l'affichage qu'il y a à l'écran vous convient,

15 maintenant ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ça va, je vais essayer de marquer.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, si vous pouviez marquer votre

18 maison avec un cercle et si vous pouviez mettre des croix aux emplacements

19 que vous pouviez voir avec les jumelles.

20 Il se passe quelque chose, l'affichage se modifie sans cesse. Que se

21 passe t-il ? Mais il suffit d'attendre et tout va rentrer dans l'ordre.

22 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

23 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'arrivent pas à entendre le témoin.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourriez-vous parler dans le micro ?

25 On n'arrive pas à vous entendre.

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Ma maison se trouve exactement ici, là où j'ai

27 donc marqué un cercle. Les emplacements que je pouvais voir avec mes

28 jumelles sont Dragodan, le côté du cimetière, là où il y a la grande route.

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1 Je n'arrive pas à voir Vranjevc ici, il faudrait encore afficher la carte

2 différemment pour que je puisse le voir.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, visiblement, on n'y arrive pas.

4 Donc, l'affichage qui est là ne convient pas du tout pour l'exercice auquel

5 nous essayons de nous plier, mais ce n'est pas grave. Dans ce cas-là, nous

6 avons sans doute une copie papier ? Une copie papier, enfin, c'est vraiment

7 terrible, la technique nous trahit totalement.

8 M. ACKERMAN : [interprétation] Ecoutez, je voudrais quand même avoir un

9 cliché de cet écran, qu'il soit marqué en tant que pièce.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il faut que l'on soit efficace, donc

11 il faut être juste et discipliné, on en terminera avec ce témoin, c'est

12 certain. Donc, prenez votre cliché maintenant, et on poursuit l'exercice

13 rapidement. Très bien, maintenant, on reprend à nouveau. Affichez la carte

14 vierge.

15 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce cliché sera donc la pièce IC 16.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Nous avons maintenant la carte

17 vierge. Il faut à nouveau que vous nous marquiez l'emplacement de votre

18 maison avec un cercle.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Ma maison se trouve ici, là où j'ai mis un

20 cercle. Avec les jumelles infrarouges, je voyais la zone de Dragodan, donc

21 je l'ai marquée avec une croix, la zone de Vranjevc, qui est de l'autre

22 côté de Dragodan, donc sans doute par ici, Kolovica se trouve ici sur le

23 côté, et Vranjevc, lui, est au-dessus. Taslixhe est l'autre croix qui se

24 trouve en bas.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que le cliché montrera bien

26 toutes ces cartes ? Il semble que oui. Dans ce cas-la, prenez donc ce

27 cliché.

28 M. ACKERMAN : [interprétation] Ces clichés vont-ils montrer les cartes qui

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1 ne sont pas exactement sur la carte, mais en dehors ?

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons voir un peu ce que la

3 technique nous réserve. En effet, ces marques se voient bien sur les

4 clichés que nous avons pris, donc nous pouvons poursuivre.

5 Il nous faudrait quand même une cote.

6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la cote IC 17.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

8 Monsieur Ackerman, poursuivons.

9 M. ACKERMAN : [interprétation]

10 Q. Ce que vous avez marqué sur la pièce IC 17 sont des zones que vous ne

11 pouviez observer qu'à l'aide de jumelles infrarouges, n'est-ce pas ?

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais ce n'est pas du tout la réponse

13 qu'elle vous a donnée. Elle vous a dit qu'elle pouvait voir des choses à

14 l'aide de ses jumelles infrarouges, elle ne vous dit pas que ce ne sont que

15 des endroits qu'elle ne pouvait voir qu'avec cet équipement. Ce n'est pas

16 comme cela que vous avez posé votre question.

17 M. ACKERMAN : [interprétation] Mais regardez, si on revient en arrière et

18 que l'on regarde exactement ma question, vous voyez que je lui ai vraiment

19 dit, je lui ai vraiment demandé de ne mettre des croix que dans les

20 endroits qu'elle ne pouvait voir qu'à l'aide de ses jumelles infrarouges.

21 C'est ce que je lui ai posé; le reste ne m'intéresse pas, de toute façon.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Montrez-moi donc sur la carte les

23 endroits où vous observiez les blindés et les chars, ainsi que les

24 mouvements de troupes, et cetera.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai déjà dit --

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais je ne veux pas une réponse, je ne

27 veux pas de réponse de votre côté. Bon, je vois la question de M. Ackerman

28 qui est en effet : "Les zones que vous pouviez observer, les choses que

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1 vous pensez qui semblaient être importantes et que vous n'observiez que

2 grâce à ces jumelles infrarouges." C'est bien, c'est bien, Monsieur

3 Ackerman, vous avez raison sur ce point. Vous pouvez maintenant continuer à

4 clarifier ce point avec le témoin.

5 M. ACKERMAN : [interprétation]

6 Q. Tous ces emplacements où vous avez fait des croix sont à plus de 100,

7 voire 150 mètres de votre maison. Vous êtes d'accord avec moi à ce propos ?

8 R. Ils sont à plus de 150 mètres de ma maison, mais ce sont des collines,

9 et on voit très clairement depuis ma maison toutes ces collines. On les

10 voit très bien de jour, et la nuit, quand il était difficile de voir,

11 j'utilisais les jumelles infrarouges. Mais pendant la journée, je voyais

12 cela très bien et sans jumelles. Je le voyais très bien à l'œil nu. J'ai vu

13 des maisons qui brûlaient à Dragodan, j'ai vu des voitures, mais comme je

14 vous l'ai dit, c'est à plus de 150 mètres de ma maison, mais ce sont des

15 maisons sur des coteaux, donc c'est très clair de là où je me trouve

16 puisque ce sont des maisons qui se trouvent sur des coteaux avoisinants.

17 Q. Vous nous avez dit que vous ne saviez pas très bien comment

18 fonctionnaient des jumelles infrarouges, que c'étaient des jumelles qui

19 avaient été laissées dans votre voiture; c'est bien cela ?

20 R. Non seulement les jumelles, il y a même des vêtements qui ont été

21 laissés dans ma voiture ainsi que des vêtements, des chaussures, des blocs-

22 notes. On a laissé beaucoup de choses dans ma voiture, entre autres ces

23 jumelles. Or, je n'avais jamais utilisé ce type de jumelles auparavant,

24 c'est la première fois que je les ai utilisées. Quand j'ai quitté ma

25 maison, j'ai laissé les jumelles derrière moi et je ne les ai jamais

26 retrouvées quand je suis rentrée chez moi.

27 M. ACKERMAN : [interprétation] Monsieur le Président, si on répond à une

28 question aussi simple avec un discours aussi long, on va rester ici toute

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1 la nuit.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais je n'ai pas bien pu comprendre

3 votre question, d'ailleurs.

4 M. ACKERMAN : [interprétation] Mais la question était très simple, c'était

5 une question où je lui ai demandé : "Vous ne saviez pas très bien utiliser

6 les jumelles à infrarouges, elles étaient laissées dans votre voiture." La

7 réponse que je voulais était oui, c'est tout, à savoir qu'elle n'était pas

8 très habituée à utiliser ce type de jumelles.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais cela. on le savait déjà.

10 Enfin, continuez.

11 M. ACKERMAN : [interprétation]

12 Q. Je pense que vous le savez, quand même -- vous ne savez pas que la

13 portée maximum de jumelles infrarouges est de 50 mètres, donc vous n'auriez

14 jamais pu distinguer quoi que ce soit à plus de 150 mètres. Mais cela, vous

15 ne le saviez pas, n'est-ce pas ?

16 R. Pourriez-vous répéter la question, s'il vous plaît ?

17 Q. Puisque vous n'étiez pas très habituée à utiliser -- même pas habituée

18 du tout à utiliser des jumelles infrarouges, vous ne savez pas donc que la

19 portée maximum de ce type d'équipement est de 50 mètres. Donc, vous ne

20 pourriez discerner à plus de 150 mètres, même à 100.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame.

22 Ne répondez pas à la question, Madame le Témoin, il y a une

23 objection.

24 Mme MOELLER : [interprétation] Je me demande sur quelle base M. Ackerman se

25 fonde pour dire que ces jumelles n'ont une portée que de 50 mètres. Est-ce

26 que ce fait a déjà été versé au dossier ?

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, absolument pas, mais je pense que

28 c'est une bonne question à poser, étant donné que nous savons quand même

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1 pour qui travaille en ce moment M. Ackerman. Donc, je rejette l'objection.

2 Vous pouvez répondre à la question.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous ai dit que je n'avais jamais utilisé

4 ce type de jumelles parce que je n'avais jamais eu besoin de m'en servir.

5 La distance à vol d'oiseau, comme je l'ai dit, d'ici à ces collines, je ne

6 peux pas vous la dire. C'est très certainement plus de 150 mètres. Je ne

7 sais pas quel genre de jumelles existent, s'il y en a qui vous permettent

8 de voir à différentes portées; tout ce que je sais, c'est que celles que

9 j'avais me permettaient de voir différents objets, différents bâtiments,

10 mais de voir aussi les déplacements de chars et les déplacements de

11 personnes.

12 M. ACKERMAN : [interprétation]

13 Q. Bien. Je vais m'arrêter là pour l'instant et je vais parler d'autre

14 chose. Vous avez employé la phrase suivante. Vous l'avez employée, je

15 crois, plus de cinq fois. Vous avez dit : "VJ, MUP et civils serbes." Dans

16 le premier paragraphe de la troisième page, par exemple, vous dites :

17 "Toutes les routes allant et sortant de Pristina étaient bloquées par la

18 VJ, le MUP et les civils serbes." Ensuite, un peu plus loin dans ce

19 paragraphe, vous nous dites : "Je pouvais voir la VJ, le MUP et les civils

20 serbes." Au paragraphe suivant, vous dites : "On m'a aussi dit qu'il y

21 avait la VJ, le MUP et les civils serbes." Page suivante : "Le 29 mars, la

22 VJ, le MUP et les civils serbes," et cette fois-ci, vous ajoutez aussi les

23 Tziganes. Ensuite, au dernier paragraphe de cette page, vous nous dites :

24 "Les premières et les dernières voitures avaient à leur bord le MUP armé

25 ainsi que la VJ et des civils armés."

26 Donc, vous l'utilisez sans cesse, vous utilisez sans cesse ce morceau

27 de phrase. J'ai l'impression que c'est un petit peu générique chez vous;

28 chaque fois que vous voyez des troupes, vous dites : "VJ, MUP et civils

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1 serbes" sans vraiment savoir si ce sont bel et bien des civils serbes ou si

2 ce sont peut-être le MUP ou si ce sont peut-être des gens qui, selon vous,

3 sont des soldats de la VJ. Ai-je raison ?

4 R. Quand j'ai identifié la VJ, le MUP et les civils armés ainsi que les

5 Rom, ce sont des gens que j'ai vus de mes yeux. Je ne les ai pas vus de

6 façon séparée, dans un endroit, certains, et dans un endroit, d'autres. Ils

7 étaient en groupe, ensemble. Ils étaient ensemble aux points de contrôle,

8 ils étaient ensemble aux points principaux sur les routes. Il y avait

9 l'armée, la police et les civils armés, les civils serbes armés. Je sais

10 les reconnaître, je sais reconnaître les soldats. La police, les civils

11 serbes, les Tziganes. Je sais à quoi ressemble l'uniforme de la police,

12 l'uniforme de la VJ. Je sais à quoi ressemble la civile serbe, aussi. Ils

13 étaient toujours ensemble dans différents quartiers de Pristina, et le jour

14 où nous sommes partis, ils étaient ensemble. Il y avait l'armée, la police

15 et les Serbes partout. Chaque fois qu'on était arrêtés, ils étaient

16 ensemble, à Fushe Kosova aussi.

17 Q. Mais au paragraphe 9 de votre déclaration d'août, donc la déclaration

18 supplémentaire, vous dites que vous avez réussi à identifier ces gens qui

19 selon vous étaient de la VJ parce qu'ils avaient des insignes, des emblèmes

20 sur leurs uniformes qui disaient "armée yougoslave" ou "Vojska

21 Jugoslavija", et ce, en serbe, n'est-ce pas ?

22 R. Pendant tout mon séjour à Pristina, quand j'y ai habité, quand j'y ai

23 travaillé, je savais où se trouvait le commissariat, je savais où était la

24 caserne.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Bala, on vous a posé une

26 question très spécifique sur l'armée et uniquement l'armée, qui n'a rien à

27 voir avec la police.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais tout cela est très simple. J'essayais de

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1 vous dire que j'avais déjà vu des soldats et que pendant ces jours-là, j'ai

2 vu des soldats, donc je savais les reconnaître.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je comprends bien. Vous êtes en train

4 de me dire que vous savez reconnaître un soldat quand vous le voyez. Vous

5 savez reconnaître aussi un policier quand vous le voyez. Cela dit, il est

6 quand même difficile, avec les années qui ont passé, de savoir exactement à

7 quoi ressemble un emblème bien spécifique. Mais ici, on vous a posé une

8 question bien spécifique. On vous a demandé si vous avez réussi à

9 identifier les personnes comme étant de la VJ parce qu'elles arboraient des

10 badges sur leurs uniformes; c'est bien cela ?

11 R. Oui, et --

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ces badges arboraient les mots "Vojska

13 Jugoslavija" en serbe ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

15 M. ACKERMAN : [interprétation]

16 Q. Mais je pense que tout le monde sait qu'il n'y avait jamais eu ce type

17 d'emblème dans l'armée yougoslave. Il n'y en a jamais eu, d'ailleurs. Donc,

18 si vous voyez des gens qui arborent des emblèmes qui disent "Vojska

19 Jugoslavija", cela prouve justement qu'ils ne sont pas ce qu'ils disent

20 être. Vous en êtes d'accord, n'est-ce pas ?

21 R. Ils avaient des emblèmes qui étaient soit sur la manche gauche ou sur

22 la manche droite, mais en haut de la manche. C'étaient des emblèmes avec

23 VJ, et moi, je me disais que cela voulait dire VJ, "Vojska Jugoslavija",

24 armée yougoslave.

25 Q. Je vais vous dire quelque chose, je vais vous le dire très fermement

26 qu'il n'y a pas ce type d'emblème dans l'armée yougoslave, ce type de badge

27 qui porterait les lettres VJ. Donc, si vous voyez un emblème arborant les

28 lettres VJ pour armée yougoslave, cela signifie très certainement que c'est

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1 quelqu'un d'autre qui les porte.

2 R. C'étaient des soldats, à ma connaissance. Qu'auraient-ils pu être ? Je

3 n'en sais rien, c'est la première fois que j'entends parler de tout cela.

4 Mais je voyais bien qu'ils étaient des soldats de l'armée régulière. Ils

5 étaient prêts de leurs chars, prêts de leurs voitures. Ils avaient des

6 drapeaux yougoslaves. Enfin, c'était une armée, c'était net.

7 Q. Passons maintenant au dernier paragraphe de la page 3 de votre

8 déclaration.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Ackerman, avez-vous encore

10 beaucoup de questions à poser ?

11 M. ACKERMAN : [interprétation] Il me faudra encore dix à 15 minutes, et je

12 pense que d'autres conseils auront des questions à poser.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans ce cas-là, il va falloir que nous

14 levions la séance jusqu'à demain.

15 Madame Bala, malheureusement, nous devons nous arrêter maintenant et nous

16 reprendrons demain après-midi, 14 heures 15. Il faut donc que soyez là

17 demain à 14 heures 15 pour continuer à déposer. Il est essentiel que vous

18 ne parliez à personne dans l'intervalle de votre déposition, c'est-à-dire

19 vous ne parlerez pas de la déposition que vous avez faite jusqu'à présent

20 et vous ne devez pas parler non plus de la déposition que vous allez donner

21 demain. Vous pouvez parler de tout le reste, mais surtout pas de votre

22 déposition. Nous vous reverrons demain à 14 heures 15.

23 --- L'audience est levée à 19 heures 05 et reprendra le mercredi 23

24 août, à 14 heures 15.

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