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1 Le mardi 22 août 2006
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Monsieur Kabashi.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez prononcé au début de votre
9 déclaration une déclaration solennelle disant que vous alliez dire la
10 vérité. Est-ce que vous comprenez que cela s'applique toujours ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
12 LE TÉMOIN: EMIN KABASHI [Reprise]
13 [Le témoin répond par l'interprète]
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ackerman, en avez-vous terminé
15 ou avez-vous encore des questions à poser ?
16 M. ACKERMAN : [interprétation] Maintenant, il ne me reste plus que quelques
17 questions.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.
19 M. ACKERMAN : [interprétation] Mais un point de procédure si la Chambre
20 peut trouver un moment qui conviendrait une fois que ce témoin en aura
21 terminé de sa déposition.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ackerman, je voudrais que l'on
23 m'informe à l'avance de ce genre de question, lorsque vous souhaitez
24 aborder des points particuliers. Est-ce que vous pourriez en parler pendant
25 la pause pour qu'on me le communique et pour qu'on voie quelle est la
26 meilleure marche à suivre ?
27 M. ACKERMAN : [interprétation] Merci. Dans la même veine, si j'ai
28 l'impression que quelque chose doit être consigné au compte rendu
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1 d'audience, je vais le signaler.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il y a plusieurs manières de procéder
3 devant ce Tribunal, bien entendu, Maître Ackerman.
4 M. ACKERMAN : [interprétation] Je ne connais pas toutes les approches
5 possibles, donc je suis un petit peu confus.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.
7 Contre-interrogatoire par M. Ackerman : [Suite]
8 Q. [interprétation] Monsieur, hier à la fin, nous parlions de la
9 déposition que vous avez donnée dans l'affaire Milosevic, page 4 039 de
10 votre déposition.
11 On vous a demandé si les personnes qui ont lancé la grenade ou la bombe sur
12 votre maison y sont entrées. Ce que vous avez dit, c'est : "Ils n'ont pas
13 pénétré dans la maison, ils ne sont pas venus pour entrer dans la maison,
14 mais pour tuer." Alors, vous maintenez qu'ils sont venus pour vous tuer
15 vous-même ?
16 R. Oui.
17 Q. Je n'ai pas entendu la question, mais c'est parce que je n'ai pas
18 appuyé sur le bon bouton.
19 R. Oui.
20 Q. Vous nous avez dit hier qu'il y en a eu un nombre plutôt important, je
21 pense que vous avez parlé de huit ou dix personnes devant votre maison et
22 davantage dans le voisinage. Pourquoi est-ce qu'ils ne vous ont pas tué
23 s'ils sont venus pour faire cela ? Etiez-vous lourdement armé ? Est-ce que
24 vous ripostiez ? Est-ce que la maison a été farouchement défendue ? Qu'est-
25 ce qui les a empêchés de mener à bien leur projet ?
26 R. Moi aussi, je suis étonné qu'ils ne m'aient pas tué. A ce moment-là, je
27 n'étais pas armé.
28 Q. Je suppose que vous devez admettre qu'il est possible que vous vous
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1 trompiez, qu'ils ne sont pas venus pour vous tuer. Si tel avait été le cas,
2 ils l'auraient fait. Etes-vous d'accord ?
3 R. Ils ne sont certainement pas venus prendre un café, vu qu'ils étaient
4 armés de Kalachnikovs et de grenades.
5 Q. Je suppose que ceci est exact, mais que la seule chose qui les ait
6 empêchés de vous tuer, c'est parce qu'ils en ont décidé ainsi, ce n'est pas
7 parce que vous les en auriez empêchés ?
8 R. Je ne sais pas. Vous devriez leur demander ce qu'ils avaient à
9 l'esprit. Je ne sais pas ce qu'ils avaient à l'esprit.
10 Q. Oui, mais vous, vous êtes en train de nous dire ce qu'ils avaient à
11 l'esprit. Vous nous dites qu'ils sont venus vous tuer, donc c'est vous qui
12 nous en parlez.
13 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, il a dit qu'il ne
14 savait pas ce qu'ils avaient à l'esprit.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Tout à fait, Maître Ackerman.
16 M. ACKERMAN : [interprétation] Oui, c'est ce qu'il dit aujourd'hui. Dans
17 l'affaire Milosevic, il a dit qu'ils sont venus le tuer, donc il semblait
18 savoir ce qu'ils avaient à l'esprit.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.
20 M. ACKERMAN : [interprétation] J'en ai terminé avec ce point.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que vous avez épuisé le
22 sujet.
23 M. ACKERMAN : [interprétation] Peut-être que je pourrais poser quelques
24 questions supplémentaires, mais je suis d'accord avec vous que ceci
25 n'apporterait pas de fruits.
26 Q. Je voudrais maintenant vous poser des questions au sujet de la zone de
27 Drenica. Tout d'abord, il est exact, n'est-ce pas, que pendant un moment la
28 municipalité de Drenica s'est trouvée sous le contrôle de l'UCK ?
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1 R. Je ne sais pas. Je n'étais pas à ce moment-là dans la municipalité de
2 Drenica. Je n'y suis allé que lorsque j'avais quelque chose à faire là-bas.
3 Q. Dans l'affaire Milosevic, page 4 046, on vous a demandé si pendant un
4 moment, toute Drenica s'est trouvée sous le contrôle de l'UCK, et vous avez
5 dit que oui. Donc, à l'époque, vous le saviez, nécessairement ?
6 R. Vous m'avez posé votre question au sujet de la municipalité de Drenica.
7 En fait, il y a deux municipalités. Pour ce qui est du territoire de
8 Drenica, je sais que pendant quelque temps, il s'est trouvé sous le
9 contrôle de l'UCK, oui.
10 Q. Est-ce que vous savez pendant quelle période c'est l'UCK qui l'a
11 contrôlé ?
12 R. A partir de septembre, octobre 1998, jusqu'au début de 1999, je crois.
13 Q. Il est également vrai, n'est-ce pas, que le territoire de Drenica,
14 comme vous l'appelez, constituait à peu près 27 % du territoire de Kosovo;
15 est-ce exact ?
16 R. C'est ce que j'ai lu dans les manuels de géographie.
17 Q. Vous n'avez aucune raison de penser qu'ils vous induisent en erreur,
18 ces livres, n'est-ce pas ?
19 R. Je n'ai jamais douté de la véracité de ce qui est écrit.
20 Q. A partir du moment où vous avez rejoint l'UCK en 1997, jusqu'à la fin,
21 vous portiez des vêtements civils, n'est-ce pas ?
22 R. Oui.
23 Q. D'autres membres de l'UCK de même, ils étaient en civil, n'est-ce pas ?
24 R. Certains, oui. Certains n'avaient pas besoin de porter d'uniformes,
25 donc ils étaient en civil.
26 Q. Il y avait des femmes dans les rangs de l'UCK, n'est-ce pas ?
27 R. Oui, il y avait des femmes et des jeunes filles.
28 Q. Certaines d'entre elles étaient armées, certaines étaient en
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1 uniformes ?
2 R. Oui, celles qui étaient sur le front, elles étaient armées, elles
3 avaient des uniformes, tandis que d'autres s'occupaient d'autres choses. Il
4 n'y avait pas lieu qu'elles portent un uniforme ou une arme.
5 Q. Vous aviez quatre fils qui étaient eux aussi combattants dans l'UCK,
6 n'est-ce pas ?
7 R. Vous parlez de mes enfants, de mes fils ?
8 Q. Oui.
9 R. Pour autant que je le sache, ma femme n'a donné naissance qu'à un fils.
10 Q. Très bien, alors l'information que j'ai est erronée. Je vous présente
11 mes excuses.
12 Connaissez-vous Nusret Pilana [phon] ?
13 R. Nusret Plana [phon], plutôt, pas Pilana.
14 Q. Oui, c'est exact. Mon albanais est plutôt mauvais.
15 R. Oui.
16 Q. Connaissez-vous cette personne ?
17 R. Oui, je la connais.
18 Q. Est-ce que vous avez participé à la rédaction son livre ? Est-ce que
19 vous avez eu quelque chose à voir avec cela ?
20 R. J'ai été l'éditeur de ce livre.
21 Q. En grandes lignes, est-ce que vous pouvez nous dire de quoi il s'agit
22 dans ce livre ?
23 R. Je ne sais pas exactement de quel livre vous parlez maintenant, parce
24 qu'il en a rédigé plusieurs.
25 Q. Vous voulez le titre ? Je pense que c'est "La terreur de l'invasion
26 serbe contre les Albanais de 1844 à 1999". Vous connaissez ce livre ?
27 R. Oui. En fait, j'ai fait une relecture de ce livre. Je n'étais pas le
28 seul, et c'est ce qui est rédigé sur la couverture du livre, qui a été le
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1 réviseur.
2 Q. Ce serait vous, alors ?
3 R. Oui. J'ai aussi autorisé la publication de ce livre.
4 Q. Qu'entendez-vous par là ? Comment avez-vous autorisé la publication du
5 livre ?
6 R. Mais c'est ce que fait un éditeur, c'est son travail.
7 Q. De quoi parle ce livre ?
8 R. Ce n'est pas d'une manière générale, mais d'une manière précise que le
9 livre parle de l'occupation serbe et des massacres commis depuis 1844
10 jusqu'en 1999. C'est un livre en trois langues. Les chapitres sont
11 intitulés en trois langues ainsi que la préface. C'est un livre illustré
12 également, il comporte un grand nombre de photographies.
13 Q. Très bien. Je pense que j'en ai terminé avec mes questions. Je vous
14 remercie de m'avoir répondu.
15 R. Je vous en prie.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Fila ?
17 M. FILA : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai été convaincu que ce
18 témoin avait quatre fils et que les quatre faisaient partie de l'UCK. C'est
19 ce qui figure dans les notes de l'Accusation. Maintenant, je découvre que
20 ce monsieur n'en a qu'un seul. Enfin, moi, je n'en ai aucun, donc
21 j'aimerais mieux en avoir ne serait-ce qu'un seul.
22 Contre-interrogatoire par M. Fila :
23 Q. [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Kabashi. Je vais vous poser
24 quelques questions. Je suis l'avocat Toma Fila, je représente ici Nikola
25 Sainovic. C'est juste pour tirer au clair certaines choses que je vais vous
26 poser des questions; sinon, je n'ai pas de questions. Vous n'aviez qu'un
27 seul fils; était-il membre de l'UCK ou non ?
28 R. Non, il ne l'était pas.
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1 Q. Non, ce n'est pas moi qui invente ce chiffre. Le Procureur nous a
2 communiqué l'information disant que vous aviez quatre fils.
3 Un autre point : vous êtes né en 1941, c'est ce que j'ai vu, 1941,
4 c'est bien à ce moment-là que vous êtes né ?
5 R. Non, en 1949.
6 Q. Voyez-vous, ce qui est écrit ici, c'est 1941. Je n'ai plus de questions
7 à vous poser, maintenant. Vous savez pourquoi ? Parce qu'il est dit là que
8 vous êtes sorti de la faculté à ce moment-là. Vous auriez donc été diplômé
9 à trois ans. Enfin, ces traductions sont vraiment épouvantables. Je n'ai
10 pas d'autres questions.
11 R. Est-ce que je peux apporter quelques précisions, si je puis ? Dans la
12 presse belgradoise et à la télévision serbe, une fois qu'on a lancé cette
13 grenade ou cette bombe dans ma maison, il a été écrit qu'un certain
14 terroriste a été tué et que cet homme avait mon nom et quatre enfants. Il a
15 été écrit qu'un certain terroriste avec 11 membres de sa famille a été tué.
16 Puis, dans la version de Tanjug, on disait qu'un certain terroriste a été
17 tué qui portait mon nom et que huit membres de sa famille ont été tués
18 également et qu'ils étaient tous membres de l'UCK, donc ma mère et tous les
19 autres. C'est l'information qui a été donnée à mon sujet en mars 1999 dans
20 la presse serbe.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Kabashi.
22 M. FILA : [interprétation] Puis-je prendre la parole ?
23 Q. Monsieur Kabashi, puisque vous connaissez le serbe, donc ce ne sont pas
24 les informations que nous avons, nous, trouvées, ce sont les informations
25 qui nous ont été communiquées par le Procureur. Donc, il est dit que vous
26 êtes né en 1941, tout comme moi, et que vous avez quatre fils. Cela ne
27 vient pas de la presse de Belgrade. Je me demande vraiment où on va ?
28 J'allais vous demander si on a fait des études en même temps, nous deux.
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1 R. [aucune interprétation]
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ackerman, vous avez un
3 problème.
4 M. ACKERMAN : [interprétation] C'est un mystère pour moi. On nous a donné
5 une feuille supplémentaire de la part du bureau du Procureur --
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] A quel moment ?
7 M. ACKERMAN : [interprétation] Le 17 août. On a supposé qu'il y avait là
8 des informations supplémentaires avec le témoin, mais maintenant, je ne
9 sais plus d'où viennent ces informations. Est-ce que cela vient de la
10 presse ou est-ce que c'est quelque chose qui leur a été communiqué par le
11 témoin ? Je ne sais pas. Il serait important de savoir si cela vient du
12 témoin; à ce moment-là, cela pourrait être très important.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, est-ce que vous
14 pouvez préciser cela ?
15 M. HANNIS : [interprétation] D'après ce qu'on me dit, c'était une erreur de
16 notre part que de dire que ce témoin avait quatre fils. Je ne sais pas
17 comment cela s'est produit, pourquoi on en est venu à commettre cette
18 erreur, mais c'était une erreur. Pour ce qui est de sa date de naissance,
19 il semblerait que dans la traduction serbe, il y a une erreur dans la date
20 où la date indiquait 1941. Dans notre version, c'est 1949. Je ne sais pas
21 comment cette erreur s'est produite.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous semblez répondre à la question.
23 Alors, Monsieur Bakrac ?
24 Monsieur Cepic ?
25 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
26 Contre-interrogatoire par M. Cepic :
27 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Kabashi. Je suis Djuro Cepic, je
28 suis l'un des conseils du général Vladimir Lazarevic. Je vais vous poser
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1 quelques questions.
2 Hier, il a été question du bombardement de Pristina, et il en a également
3 été question dans votre déclaration préalable, la déclaration du 24 avril
4 1999.
5 En fait, vous avez confirmé ce que vous aviez déjà dit préalablement,
6 à savoir que le bombardement de l'OTAN n'a pas occasionné de dégâts dans
7 des quartiers résidentiels de Pristina et qu'il n'y avait pas
8 d'installations militaires à Pristina, qu'on a bombardé uniquement la
9 prison, la police et le tribunal. Est-ce que cela est exact ?
10 R. Quant à la prison, je ne suis pas certain si elle a été endommagée ou
11 pas, pas le bâtiment de la police, mais le bâtiment de sécurité publique.
12 Ce sont deux bâtiments distincts. Donc, le bâtiment de la sûreté d'Etat où
13 on menait des enquêtes et où on plaçait des gens en détention, c'est ce
14 bâtiment-là qui a été bombardé. Si vous me montrez des photos, je peux vous
15 dire de quel bâtiment il s'agit.
16 Q. Merci. Saviez-vous qu'entre le 24 et le 25 mars 1999, on a bombardé de
17 nuit les mines de Gavalija [phon] et le quartier de Gracanica, qui est un
18 quartier résidentiel ?
19 R. Non, je ne sais rien de tout cela. Je ne sais pas où vous avez trouvé
20 ce nom, Aja [phon].
21 Q. Merci. Ajvalija.
22 R. Oui, Hajvalija [phon] existe, c'est un quartier.
23 Q. Excusez-moi, mais on ne trouve pas dans le compte rendu d'audience
24 quelque chose, à savoir, on ne trouve pas le nom de la localité Ajvalija :
25 A-j-v-a-l-i-j-a.
26 Merci.
27 Savez-vous que le 26 mars 1999, dans le village de Gornji Dobrovo,
28 qui se trouve sur la municipalité de Kosovo Polje, six personnes ont perdu
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1 la vie dû aux bombardements de l'OTAN, dont quatre femmes, donc il s'agit
2 de six civils en tout ?
3 R. Je n'étais pas là à ce moment-là. Je ne peux rien vous en dire.
4 Q. Savez-vous qu'à Pristina, on a détruit la poste et quatre bâtiments de
5 logements et que plusieurs personnes ont été tuées le 7 avril 1999 ?
6 R. Je le sais, mais je n'étais pas au Kosovo le 7 avril.
7 Q. Merci. Est-ce que vous savez que dans le quartier de Dardania, il y a
8 eu plusieurs bâtiments d'appartements, de logements qui ont été détruits,
9 ainsi que l'usine de matières plastiques à Pristina et la gare routière de
10 Pristina, le 12 et le 13 avril 1999 ?
11 R. J'ai lu là-dessus. L'arrêt de bus et l'usine de matières plastiques et
12 le quartier de Dardania sont en parfait état, comme ils l'ont toujours été.
13 Rien de tout cela n'a été touché. En fait, vous pouvez encore voir des
14 inscriptions en cyrillique là-bas, comme il y en a toujours eu sur ces
15 bâtiments.
16 Q. Merci, Monsieur Kabashi.
17 Mais savez-vous que pendant les bombardements de l'OTAN, Pristina et ses
18 environs ont été bombardés 406 fois, et plus de 1 000 projectiles sont
19 tombés sur Pristina et ses environs ? Le savez-vous ?
20 R. Je ne suis pas certain des chiffres que vous citez. Je ne sais pas.
21 Mais autour de Pristina, on a bombardé des installations militaires parce
22 que Pristina était l'une des cités les plus militarisées des Balkans. Tout
23 le monde le sait, oui. Donc, on a bombardé autour de Pristina tous les
24 bâtiments militaires.
25 Q. Dr Kabashi, je ne vous ai pas posé de questions sur des installations
26 militaires. Je vous ai posé des questions sur des bâtiments civils. Jusqu'à
27 présent, je ne vous ai interrogé qu'au sujet des bâtiments civils.
28 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]
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1 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous êtes en train de dire que les 406
3 bombardements aériens et plus de 1 000 projectiles concernent les bâtiments
4 civils ?
5 M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'est la somme de tous
6 les projectiles dans les raids sur Pristina.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais dans ce cas-là, la réponse a été
8 tout à fait appropriée. Le témoin ne vous a pas mal compris.
9 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
10 Q. Hier, ainsi que dans le dernier paragraphe de votre déclaration, page 4
11 en version B/C/S, page 7, paragraphe 2 en version albanaise, tout comme
12 dans le transcript d'hier, page 71, lignes 13 et 14, vous avez souligné que
13 pendant que vous faisiez partie de cette colonne qui avançait vers la gare
14 ferroviaire, qu'il y avait un char arrêté sur le pont, et que ceci a divisé
15 la colonne en deux. S'il y a eu tant de bombardements, et vous-même, vous
16 avez dit que ce sont des installations militaires qui ont été prises pour
17 cibles, alors comment est-ce qu'il est logique qu'un char se retrouve au
18 milieu d'un pont, au milieu de ce genre de bombardements ?
19 M. HANNIS : [interprétation] Je ne pense pas que l'on vient de nous
20 représenter les dires du témoin de manière adéquate. Je ne pense pas qu'on
21 nous ait dit que le bombardement était en cours pendant qu'il avançait vers
22 la gare ferroviaire.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous avez des faits pour
24 étayer cette question, Maître Cepic ?
25 M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin parle du
26 moment où les bombardements de l'OTAN étaient en cours, et je viens
27 d'énumérer les bombardements qui ont été menés sur Pristina.
28 M. HANNIS : [interprétation] Je ne pense pas qu'on nous a dit dans la
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1 déposition qu'il y a eu des bombardements 24 heures sur 24, tous les jours,
2 ou si c'était seulement de nuit.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais tout à fait, ce n'est pas une
4 question à poser au témoin. C'est quelque chose que vous pouvez présenter
5 comme étant votre thèse, le soumettre, le faire soumettre, mais je ne pense
6 pas que ce genre de question va vous apporter une réponse utile, à moins
7 que vous ne lui soumettiez qu'effectivement il y avait des bombardements en
8 même temps.
9 M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense qu'on reviendra
10 à cela pendant ce procès. Mais maintenant, je vais aborder un autre point,
11 si vous m'y autorisez.
12 Q. Monsieur Kabashi, savez-vous que le 29 janvier 1999, une attaque
13 terroriste a été menée à Pristina, à savoir, un engin explosif a été jeté
14 dans le café Galleria, huit personnes ont été blessées à ce moment-là, et
15 la mission de vérification, la mission de l'OSCE, a confirmé l'existence de
16 cet incident ? Est-ce que vous êtes au courant de cela ?
17 R. Je n'étais pas à Pristina à l'époque, donc je ne le sais pas.
18 D'ailleurs, cela ne m'intéressait pas de savoir qui était tué dans
19 différents cafés de Pristina.
20 Q. Donc, cela ne vous intéresse pas ? Je parle du mois de janvier 1999. Où
21 étiez-vous au mois de janvier 1999, Monsieur Kabashi ?
22 R. Vous voulez dire le mois de janvier après le début de la guerre ?
23 Q. Non. Le mois de janvier 1999, avant le bombardement de l'OTAN.
24 R. J'étais occupé. J'avais du travail. Je m'occupais de mon travail au
25 sein de l'UCK.
26 Q. Mais vous étiez où exactement au mois de janvier 1999, en tant que
27 membre de l'UCK ?
28 R. J'aurais pu être à Drenica, Malisheva, Dukagjin, à Lap. J'aurais pu
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1 être à Zllashe, à Pristina.
2 Q. Vous, en tant que membre de l'UCK, vous n'êtes pas intéressé de savoir
3 que l'on tue les civils à Pristina; est-ce exact ?
4 R. Ce que j'ai voulu dire, c'est que je ne prêtais pas attention à cela.
5 Je ne m'intéressais pas de savoir qui était tué dans différents cafés de la
6 ville.
7 Q. Merci. Vos opinions ne m'intéressent pas.
8 Est-ce que vous savez que le 31 janvier 1990, il y a eu une autre attaque
9 terroriste ? En 1999, c'est de cela que je parlais.
10 Donc, l'attaque terroriste sur le restaurant de Beca, donc une
11 personne a été tuée et deux personnes ont été blessées. Est-ce que vous
12 êtes au courant de cela ?
13 R. Je ne sais pas où se trouve ce restaurant, le restaurant de Beca, comme
14 vous dites, le restaurant de --
15 Q. Pour conclure, Monsieur Kabashi, en ce qui concerne les incidents où
16 les civils ont péri à Pristina, vous n'êtes absolument pas au courant de
17 ces incidents ?
18 M. HANNIS : [interprétation] Je ne pense pas que la question soit bien
19 posée. Il lui a posé la question au sujet de deux incidents, et ensuite, il
20 en arrive à la conclusion qu'il n'est pas au courant d'aucun incident qui
21 impliquait les civils.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Cepic, vous avez peut-être
23 raison, mais je vous demande si vous n'êtes pas un peu trop directif. Je ne
24 veux pas suivre l'intervention de M. Hannis pour vous demander de parler de
25 toutes les morts des civils à Pristina, pour vous demander quel est
26 vraiment l'argument que vous voulez tirer de ces questions. Est-ce que vous
27 pourriez dire qu'est-ce que vous voulez conclure ?
28 M. CEPIC : [interprétation] Bien, justement.
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1 Je ne veux pas perdre du temps, le temps du Tribunal. Je me suis dit
2 que j'allais poser une question au sujet des quelques morts des civils ou
3 des attaques qui ont eu lieu à Pristina au cours desquelles des civils ont
4 été tués, et le témoin a dit qu'il n'était pas au courant de cela.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, vous avez parlé de deux
6 incidents, si je ne m'abuse ?
7 M. CEPIC : [interprétation] Oui. J'ai mentionné des incidents aussi qui ont
8 eu lieu pendant les bombardements.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Cepic, les arguments, vous
10 allez pouvoir nous les présenter plus tard, Monsieur Cepic. Pour l'instant,
11 vous avez les réponses, les réponses aux questions que vous avez posées, et
12 ensuite, si vous voulez, vous pourrez construire votre argument là-dessus.
13 M. CEPIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
14 Q. Monsieur Kabashi, est-ce que vous êtes au courant d'un incident qui a
15 eu lieu avant le 24 mars 1999 au cours duquel des civils ont été tués, ceci
16 suite à des attaques terroristes à Pristina ?
17 R. Non.
18 Q. Merci. Je n'ai pas d'autres questions.
19 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Cepic. Monsieur
21 Ivetic ?
22 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
23 Contre-interrogatoire par M. Ivetic :
24 Q. [interprétation] Monsieur Kabashi, Docteur Kabashi, plutôt. Je
25 m'appelle Dragan Ivetic. Avec M. Lukic et M. Ozren Ogrizovic, je suis ici
26 pour représenter les intérêts de M. Sretan Lukic, un des accusés en
27 l'espèce. Donc, je voudrais vous poser un certain nombre de questions. Je
28 vais vous demander de prêter bien attention aux questions que je vous pose
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1 pour que l'on puisse aller le plus rapidement possible, pour que nous
2 puissions progresser. Est-ce que vous m'avez compris ?
3 R. Oui.
4 Q. Tout d'abord, M. Cepic vous a posé quelques questions au sujet d'une
5 attaque contre des civils à Pristina. Dans l'affaire Milosevic, vous avez
6 déposé sous serment au niveau de la page 4 019, lignes 20 à 25, en disant
7 qu'il n'y avait pas d'opérations entreprises à Pristina par l'UCK au cours
8 desquelles il y a eu des morts de civils. Est-ce que vous vous souvenez de
9 cela ?
10 R. Oui, c'est exact.
11 Q. Bien. Les incidents que M. Cepic vient d'énumérer concernant les
12 attaques contre les civils qui ont eu lieu et qui ont été présentées en
13 guise de bombardements, ce sont exactement les types d'incidents dont M.
14 Milosevic vous a posé des questions, et vous avez dit à l'époque que ces
15 opérations n'ont pas eu lieu; est-ce exact ?
16 R. Oui, bien sûr.
17 Q. Donc, dans cette partie de votre déposition dans l'affaire Milosevic,
18 vous ne disiez pas la vérité, ceci n'était pas exact, n'est-ce pas,
19 Monsieur Kabashi ?
20 R. Quelle partie de la déposition ?
21 Q. Vous avez dit qu'il n'y a pas eu d'attaques contre les civils à
22 Pristina. Maintenant, nous avons entendu dire qu'il y a eu plusieurs
23 attaques contre les civils, et plusieurs de ces attaques ont été
24 identifiées par mon confrère, M. Cepic ?
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que nous avons des éléments de
26 preuve au sujet de cela ?
27 M. IVETIC : [interprétation] Non, pas pour l'instant.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, cet argument, vous pourrez le
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1 dire un peu plus tard, une fois que nous aurons entendu toute l'histoire.
2 M. IVETIC : [interprétation] Très bien.
3 Q. Monsieur Kabashi, je vais aborder quelques détails techniques. Quand on
4 regarde votre déclaration en date du 24 avril 1999, c'est une déclaration
5 qui vous a été lue en albanais avant que vous ne l'ayez signée; est-ce
6 exact ?
7 R. Oui.
8 Q. Vous avez entendu cette déclaration en langue albanaise qui vous a été
9 lue, et ensuite vous avez signé la déclaration et vous certifiez que les
10 éléments qui s'y trouvent étaient exacts, véridiques, d'après votre
11 meilleur souvenir; est-ce exact ?
12 R. Oui.
13 Q. Ensuite, le Procureur nous a aussi présenté des extraits de votre
14 déposition, le procès-verbal de votre déposition dans l'affaire Milosevic.
15 Est-il exact qu'avant de déposer dans cette affaire, vous avez fait une
16 déclaration solennelle indiquant que vous alliez dire la vérité, toute la
17 vérité, rien que la vérité, tout comme hier, d'ailleurs, en l'espèce ? Est-
18 ce exact ?
19 R. Oui.
20 Q. Bien. Pendant votre déposition dans l'affaire Milosevic, au niveau du
21 compte rendu d'audience page 4 047, lignes 15 et 16, vous avez confirmé que
22 non seulement vous étiez un membre de l'UCK à l'époque, mais qu'à l'époque
23 vous étiez aussi armé et que vous étiez dans le terrain comme rebelle de
24 l'UCK; est-ce exact ?
25 R. Oui.
26 Q. Maintenant, vous nous dites qu'en tant qu'un membre armé de l'UCK, vous
27 n'avez pas participé aux attaques armées entreprises par l'UCK à Pristina
28 et qui visaient les civils ?
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1 R. Ni contre des civils, ni contre des soldats armés.
2 Q. Merci. Quelle était votre unité ou formation, l'unité à laquelle vous
3 apparteniez dans le cadre de l'UCK ?
4 R. C'était une unité de logistique qui avait son QG à Pristina,
5 responsable des actions ou activités de la guérilla à Pristina.
6 Q. Quand vous parlez de ces activités, est-ce que cela veut dire la
7 guerre, guérilla ?
8 R. Oui.
9 Q. Et la base de logistique de l'UCK à Pristina avait beaucoup de membres,
10 n'est-ce pas ?
11 R. Oui, plusieurs.
12 Q. Vous avez dit tout à l'heure que vous avez été à Drenica à un moment
13 donné, et je pense que vous avez dit que dans le cadre de vos fonctions au
14 sein de l'UCK, que vous étiez dans plusieurs endroits. N'est-il pas exact
15 qu'à un moment donné, avant le début du bombardement de l'OTAN en 1999,
16 dans le cadre de vos fonctions au sein de l'UCK, vous avez visité le
17 commandement de l'UCK à Drenica avec quelques autres membres importants de
18 l'UCK de Pristina, y compris les représentants de la Ligue des femmes
19 albanaises et votre ami, un bon ami à vous, M. Brovina, et quelques autres
20 personnes ? Est-ce exact ?
21 R. Oui.
22 Q. Quand on parle de ce groupe, groupuscule de l'UCK qui se trouvait à
23 Pristina, dans la région de Pristina, est-ce que vous pourriez nous dire où
24 exactement se trouvait la base de ce groupe ?
25 R. A plusieurs endroits, mais avant tout dans la clinique du Dr Brovina,
26 mais aussi dans d'autres endroits à Pristina.
27 Q. Pouvez-vous nous donner le nom des quartiers de Pristina où il y avait
28 des bases, les bases de l'UCK, ou bien où l'UCK était en activité ?
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1 R. Il n'y avait pas vraiment de QG, mais il y avait des groupes de gens
2 qui étaient chargés de différentes missions. Il s'agissait d'aider avec la
3 logistique, et là, ces bases se trouvaient dans différents quartiers de
4 Pristina, Sofali, Vellushi, peut-être d'autres quartiers aussi. Mais en ce
5 moment, aucun nom ne me vient à l'esprit.
6 Q. Est-ce qu'il y avait un groupe de l'UCK dans le quartier de Vranjevac,
7 par exemple le groupe l'UCK qui s'appelle G-o-l-a-k ?
8 R. Je ne sais pas combien il y avait de groupes de l'UCK à Pristina. Je
9 sais qu'il y avait par exemple à Vranjevac, un groupe de logistique, oui.
10 Q. Ce groupe de Vranjevac préparait des uniformes pour les combattants de
11 l'UCK, n'est-ce pas, parmi d'autres fonctions ?
12 R. Oui, il s'occupait des uniformes parmi d'autres missions, oui.
13 M. IVETIC : [interprétation] Je vois une erreur au niveau du compte rendu
14 d'audience, page 19, ligne 14, on peut lire "franities", alors que le
15 témoin a dit "Vranjevac". Je lui ai posé d'ailleurs une question à ce
16 sujet.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Ivetic.
18 L'INTERPRÈTE : Le témoin a dit Vranjevc.
19 M. IVETIC : [interprétation]
20 Q. J'ai l'impression qu'on parle du même endroit, n'est-ce pas ?
21 Vranjevac est le nom en serbe ?
22 R. Oui, effectivement.
23 Q. Vous avez dit qu'il y avait plusieurs groupes qui étaient en activité
24 et que ces groupes s'occupaient de leurs missions, et je pense que parmi
25 ces missions, il y avait la mission d'organiser, participer aux attaques
26 terroristes contre l'Etat serbe; est-ce exact ?
27 R. Non. Je ne pense pas qu'il s'agissait là des attaques terroristes
28 contre l'Etat. Il s'agissait là d'une guerre ouverte.
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1 Q. Mais vous conviendrez, n'est-ce pas, que l'UCK, votre groupe tout au
2 moins, a participé aux combats armés avec différentes composantes de l'Etat
3 serbe; n'est-ce pas ?
4 R. Non, je n'ai pas dit cela.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, la guerre ouverte ?
6 Qu'est-ce que vous avez dit exactement, Monsieur Hannis ?
7 M. HANNIS : [interprétation] Cela, c'est exactement la signification de la
8 guerre ouverte.
9 M. IVETIC : [interprétation] Oui, je me suis dit exactement la même chose,
10 mais vous savez, parfois, les témoins ont des interprétations quelque peu
11 différentes, donc j'essaye d'obtenir quelques clarifications.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous pouvez continuer M. Ivetic.
13 M. IVETIC : [interprétation]
14 Q. Monsieur Kabashi, est-il exact que pendant la période allant entre 1998
15 jusqu'à la fin de 1999 dans la région de Pristina, votre groupe de l'UCK a
16 mené des attaques de la guérilla dans la région ?
17 R. Que voulez-vous dire par les attaques de la guérilla, et dirigées
18 contre qui ?
19 Q. Dirigées contre qui que soit, peu importe.
20 R. S'il y avait eu des attaques de la guérilla, ces attaques étaient
21 dirigées contre les installations militaires et les soldats arborant un
22 uniforme. Je n'ai pas participé à cela, je ne faisais pas partie de groupe-
23 là.
24 Q. Mais vous avez des connaissances des activités des autres volets de
25 votre organisation ?
26 R. Non. Je faisais partie d'un groupe, et au sein de ce groupe, je me suis
27 occupé des questions de la logistique, c'est tout.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Kabashi, la logistique,
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1 d'après moi, veut dire que vous vous occupiez du matériel, de l'aide
2 matérielle aux membres actifs de l'UCK, donc que votre seule raison
3 d'existence était de supporter l'activité armée, n'est-ce pas, les
4 activités armées ? Est-ce que j'ai raison ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, mais nous ne pouvions pas fournir
6 des armes à l'UCK puisque nous n'en avions pas. En revanche, nous leur
7 fournissions des papiers, des médicaments, et cetera.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pas d'uniformes, puisqu'on en a parlé
9 tout à l'heure ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. Des uniformes, mais pas d'armes, pas
11 les armes.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La nourriture ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Les vêtements, la nourriture,
14 l'équipement sanitaire, et cetera.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et tout ceci, n'était-ce pas fait pour
16 qu'ils puissent poursuivre leurs activités armées ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le conseil de la Défense souhaite
19 savoir si vous saviez que l'UCK procédait à ces attaques. Oubliez tous les
20 adjectifs qui ont été utilisés : guérilla, terroristes, et cetera. De toute
21 façon, on a l'impression que ces termes ont pour but de déstabiliser un peu
22 les gens dans ce prétoire. Ce que je veux savoir, ce sont vraiment les
23 faits, les faits de base.
24 Il veut savoir si vous saviez que les gens de l'UCK attaquaient
25 d'autres gens dans la région de la Pristina. Quelle est la réponse ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans la région de la Pristina, il n'y a pas eu
27 de combats. Je n'ai pas d'informations que l'UCK ait attaqué qui que ce
28 soit.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Ivetic ?
2 M. IVETIC : [interprétation]
3 Q. Très bien. Parmi vos activités au sein de ce groupe de logistique, vous
4 deviez aussi préparer les cartes d'identification pour les membres de
5 l'UCK ?
6 R. Non.
7 Q. Donc, vous n'aviez pas à faire de fausses cartes d'identité ou de faux
8 documents, des laissez-passer des différentes organisations humanitaire
9 pour permettre aux combattants de l'UCK de passer librement à travers le
10 territoire ?
11 R. Non, ce n'est pas exact.
12 Q. Au cours de votre déposition dans l'affaire Milosevic, vous avez dit
13 que les rapports concernant le kidnapping des Serbes et des Albanais par
14 l'UCK ne sont pas exacts, qu'il s'agit là d'une invention, pure invention
15 de la propagande serbe. Est-ce que vous continuez à le dire aujourd'hui, à
16 l'affirmer aujourd'hui ?
17 M. HANNIS : [interprétation] Est-ce que nous pouvons avoir la page ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je continue à le dire.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pouvez-vous nous donner le numéro de
20 la page, s'il vous plaît ? Si vous n'arrivez pas à le trouver, vous allez
21 pouvoir nous le fournir plus tard, mais je vous prie de nous donner à
22 l'avance les numéros de page des différentes citations avant de les citer.
23 M. IVETIC : [interprétation] Je suis désolé. C'est vrai que le témoin a
24 déjà confirmé que c'était bien sa déposition, mais les propos exacts se
25 trouvent à la page 4 041, lignes 9 à 40 du compte rendu d'audience dans
26 l'affaire Milosevic. Je peux peut-être reposer la question au témoin.
27 Q. Est-il exact que vous avez dit que les rapports concernant les
28 kidnappings, aussi bien de Serbes que des Albanais en 1998, étaient d'après
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1 vous les inventions de la propagande serbe ? Là, je parle des kidnappings
2 qui auraient été l'œuvre de l'UCK. Est-ce que vous continuez à le dire ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
4 M. IVETIC : [interprétation]
5 Q. Vous voulez dire que l'UCK n'avait pas pour but d'enlever ou kidnapper
6 des personnes sur le territoire du Kosovo jusqu'en 1998 -- on va s'arrêter
7 1998 ? Est-ce exact ?
8 R. Que je sache, ceci s'est passé.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous ai laissé un petit peu de
10 temps et je vous ai laissé la liberté de procéder comme vous vous voulez,
11 mais vous savez, nous n'avons pas suffisamment de temps, ici. Nous ne
12 pouvons pas nous permettre le luxe de surligner et répéter les réponses
13 assez claires que vous avez déjà reçues, puisque vous n'avez pas affaire
14 avec un jury, un jury, ici. Nous devons progresser le plus rapidement
15 possible, tout simplement.
16 M. IVETIC : [interprétation] Je vais m'y efforcer.
17 Q. Monsieur, nous avons eu des éléments, des informations venant de
18 l'OSCE, c'est l'Organisation de la sécurité de la coopération en Europe, et
19 des différentes missions des observateurs, des missions des droits de
20 l'homme, et cetera, et même des porte-parole politiques de l'UCK qui ont
21 dit que de tels enlèvements ont été l'œuvre de l'UCK pendant cette période
22 de temps. Est-ce que vous acceptez cela ?
23 R. Vous devez poser cette question-là à Adem Demaqi. Il est toujours
24 vivant. Vous pouvez lui demander de venir déposer ici.
25 Q. Très bien. N'est-il pas exact qu'une grande partie de votre déposition
26 n'est pas exacte quand il s'agit de l'UCK ou que vous êtes plus que partial
27 là-dessus ?
28 M. HANNIS : [interprétation] Je suis tout à fait contre cela.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que cette question, vraiment,
2 ne sert à rien, et surtout pas dans la situation où nous en sommes. Peut-
3 être que devant d'autres institutions, vous auriez pu la poser.
4 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur --
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons passer à un autre sujet,
6 s'il vous plaît, Monsieur Ivetic.
7 M. IVETIC : [interprétation]
8 Q. Donc, vous étiez membre de l'UCK, et d'après votre déposition au cours
9 des deux derniers jours, vous étiez un membre assez actif de l'UCK, et
10 cette information ne figure nulle part dans votre déclaration, dans la
11 déclaration que vous avez fournie au bureau du Procureur ?
12 M. HANNIS : [interprétation] Est-ce qu'on lui a posé cette question ? Est-
13 ce que nous avons une preuve qu'on lui a posé cette question ?
14 M. IVETIC : [interprétation] Il y a beaucoup de confusion quant aux
15 questions qu'on lui a posées et qu'on ne lui a pas posées. Nous avons reçu
16 les notes de préparation de ce témoin du bureau du Procureur, de M. Hannis
17 --
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, Monsieur Ivetic. Là, nous
19 avons exactement le même problème que tout à l'heure, la même catégorie que
20 tout à l'heure. Soit c'est vrai, soit ce n'est pas vrai, et c'est la
21 déclaration qui nous le démontrer.
22 M. IVETIC : [interprétation] J'ai voulu tout simplement confronter le
23 témoin pour vérifier s'il est vraiment crédible, si on peut vraiment
24 accorder une valeur probante à ses déclarations.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela dépend du fait si cette question
26 a été posée pendant l'interrogatoire, si cette question s'est présentée.
27 Parfois, vous pouvez montrer une partie de la déclaration où quelque chose
28 aurait dû être dit, mais de l'autre côté, à ce moment-là, nous ne savons
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1 pas quelle était la question qui lui a été posée à l'époque. Nous savons ce
2 qu'il a dit dans l'affaire Milosevic il y a quatre ans maintenant, et je
3 voudrais que maintenant, vous lui posiez les questions au sujet de ce qu'il
4 pense maintenant.
5 M. IVETIC : [interprétation] Très bien, je vais le faire.
6 Q. Nous allons parler de votre déclaration, dans le deuxième paragraphe de
7 la déclaration où vous parlez de ces policiers que vous décrivez comme
8 policiers qui portaient un uniforme plutôt militaire, de "style militaire",
9 portant un aigle blanc sur la manche de leurs uniformes. Est-ce que vous
10 dites que les membres du MUP portaient de tels emblèmes sur leurs
11 uniformes ?
12 R. Non, je n'ai pas dit cela.
13 Q. Je voudrais à présent attirer votre attention sur le deuxième
14 paragraphe de votre déclaration que vous avez donnée sous serment et qui
15 est datée du 24 avril 1999.
16 M. HANNIS : [interprétation] Je peux fournir au témoin une copie papier de
17 cette déclaration.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas dit qu'il était --
19 M. IVETIC : [interprétation]
20 Q. Très bien. J'ai donc la version en anglais de ce compte rendu, et au
21 milieu du deuxième paragraphe de cette déclaration en anglais, il est écrit
22 la chose suivante : "Il y avait des policiers en uniforme standard, des
23 policiers en uniforme de type militaire. Certains d'entre eux avaient un
24 insigne avec un aigle blanc sur leurs épaules et un béret avec ce fameux
25 insigne à aigle blanc."
26 Tout d'abord, j'aimerais savoir si vous avez bel et bien dit cela au
27 Procureur dans le cadre de votre déclaration.
28 R. Oui.
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1 Q. Ma question précédente était la suivante. Je voulais savoir si vous
2 aviez déposé pour dire que les membres du ministère de l'Intérieur avaient
3 ce type d'emblème sur leurs uniformes. Enfin, je reprends ma question.
4 Voici la question. Est-ce bel et bien votre déposition que de dire que les
5 membres du ministère de l'Intérieur ou du MUP avaient ce type d'emblème ?
6 R. Non, je ne l'ai pas dit, d'ailleurs. Je ne sais pas exactement ce
7 qu'arboraient les membres du MUP, en tout cas en ce qui concerne leurs
8 emblèmes. Je ne sais pas s'ils étaient membres de la police ou non.
9 Q. Très bien. Cette réponse est assez claire. Je poursuis.
10 Vous dites aussi dans ce même paragraphe qu'il y avait des civils armés.
11 L'avez-vous vu de vos yeux ?
12 R. Non seulement je les ai vus de mes yeux, mais je les ai sentis, si je
13 puis dire, parce que ma maison a été attaquée. Tout le monde le sait.
14 Q. Vous dites que votre maison a été attaquée par des civils armés ?
15 R. Parmi ceux qui ont attaqué ma maison, il y avait des civils armés.
16 Q. Très bien. Vous dites que le 25 mai 1999, vous avez reçu un coup de fil
17 de la part de quelqu'un qui vous disait à peu près ce qui suit. Enfin, il y
18 avait une référence à l'OTAN. Je vais vous poser des questions sur cette
19 conversation téléphonique. D'après vous, est-ce que vous avez ressenti cela
20 comme étant une menace contre votre vie, une réaction venant de quelqu'un
21 et qui aurait trait aux bombardements de l'OTAN ?
22 R. Je l'ai ressenti comme étant une menace, menace sur ma vie, vie
23 de ma famille aussi, menace contre la vie de ma famille. D'ailleurs, avec
24 le temps, je me suis rendu compte que j'avais raison.
25 Q. Mais vous n'avez pas été en faire rapport à la police ou à d'autres
26 autorités chargées du maintien de l'ordre ? Vous n'avez pas fait rapport de
27 ces menaces qui pesaient sur votre vie ?
28 R. Bien, j'aimerais vous demander si vous étiez au Kosovo en 1999, parce
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1 que si vous y étiez, vous pourriez savoir qu'on ne pouvait pas faire
2 rapport à qui que soit. Il n'y avait pas de commissariat de police, tout se
3 faisait à la pointe du fusil. On essayait tous de s'abriter, de s'abriter
4 dans un endroit sûr, un endroit sûr où on serait à l'abri des fusils et des
5 balles.
6 Q. Très bien, donc vous n'avez pas fait rapport de ces menaces sur votre
7 vie aux autorités chargées du maintien de l'ordre ?
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Ivetic, enfin, c'est bien
9 évident de la part de sa réponse. On voit bien quelle est la réponse
10 exacte. C'est exactement les mêmes problèmes que ceux que nous avons
11 abordés précédemment.
12 M. IVETIC : [interprétation] Je veux que tout soit extrêmement clair. Je
13 veux avoir des réponses qui sont simples, oui ou non.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais écoutez, vous pouvez vous
15 dire que nous avons quand même un certain bon sens. La Chambre de première
16 instance a du bon sens et est capable de faire quelques déductions, quand
17 même.
18 M. IVETIC : [interprétation] Très bien. Je poursuis.
19 Q. Dans votre deuxième paragraphe dans toutes les versions, vous parlez de
20 deux policiers et vous dites que vous les aviez déjà vus, vous les
21 connaissiez, vous saviez qui c'étaient. Je crois qu'ils s'appelaient Simic
22 et Pedza. En tout cas, ce sont les noms que vous avez donnés. Dans votre
23 témoignage, vous avez dit que vous les avez vus en train de patrouiller
24 dans les villes l'après-midi et qu'ils n'ont pas pris part à l'attaque
25 contre votre maison ?
26 R. Oui.
27 Q. Ensuite, au milieu de la page 3 de la version albanaise de votre
28 déposition, qui est le paragraphe 3 de la page 2 de la version en anglais
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1 et en B/C/S, vous dites que quand il y a eu l'explosion dans votre maison,
2 vous avez dit à deux de vos parents qui étaient dans la pièce avec vous de
3 se coucher. Est-ce que vous vous êtes aussi couché pour vous protéger ?
4 R. J'étais assis près de la porte. J'étais en train de parler au téléphone
5 quand la bombe a explosé.
6 Q. Vous êtes resté dans cette position après l'explosion ? Vous êtes resté
7 assis derrière la porte à poursuivre votre conversation téléphonique ?
8 R. Evidemment que non, bien sûr. Comment est-ce que j'aurais pu rester
9 assis ? La porte m'est tombée dessus, le téléphone a été coupé. Enfin, vous
10 pouvez quand même imaginer ce qui s'est passé. Vous pouvez imaginer quel
11 est l'effet d'une bombe quand elle explose.
12 Q. Tout à fait, je le peux, et c'est pour cela que je vous demande si vous
13 vous êtes retrouvé à terre avec les autres membres de votre famille après
14 l'explosion de la bombe ?
15 R. Alors en effet, je vous réponds, oui je me suis retrouvé à terre.
16 Q. Où se trouvait exactement cette pièce dans votre maison, à quel étage,
17 par exemple ?
18 R. C'est au rez-de-chaussée, à droite de la porte principale.
19 Q. Votre maison est-elle entourée de portes, de murs, d'un portail ? Y a-
20 t-il une clôture ?
21 R. Il y avait un portail en fer et un grillage, enfin, une grille,
22 d'ailleurs, qui entourait la maison, qui entourait la cour à l'époque.
23 Q. Les rues étaient-elles éclairées cette nuit-là, le 25 mars 1999 ?
24 R. Non. Il n'y avait jamais eu, d'ailleurs, d'éclairage public.
25 Q. Dans votre maison, y avait-il du courant, le 25 mai 1999 ? Est-ce qu'au
26 soir du 25 mai 1999, le courant fonctionnait dans votre maison ?
27 R. Non. L'électricité était coupée de temps en temps, surtout dans les
28 quartiers qui n'étaient pas en ville. Ce n'était pas la seule nuit où nous
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1 n'avions pas d'électricité. C'est arrivé très souvent.
2 Q. Oui, donc il y a eu cette coupure d'électricité de façon fréquente à
3 partir du moment où l'OTAN a commencé à bombarder; c'est bien cela ?
4 R. Oui, même avant les bombardements de l'OTAN, il y avait souvent des
5 coupures d'électricité.
6 Q. Vous avez dit dans votre déclaration qu'après l'explosion, il y avait
7 beaucoup de fumée dans l'air, suite bien sûr à l'explosion; c'est bien
8 cela ? Il y avait beaucoup de fumée ?
9 R. Oui.
10 Q. Mais il faisait nuit, quand même, quand l'explosion a eu lieu. Je crois
11 que vous avez dit que cela s'est passé à 10 heures moins le quart du soir.
12 Est-ce qu'il faisait nuit à ce moment-là ?
13 R. Oui.
14 Q. Quand avez-vous vu le véhicule que vous avez décrit tout d'abord comme
15 étant une voiture et ensuite comme une jeep ? Quand l'avez-vous vu pour la
16 première fois ? J'aimerais savoir où vous vous trouviez quand vous avez vu
17 ce véhicule pour la première fois.
18 R. J'étais à l'intérieur de ma maison. J'allais de pièce en pièce. Comme
19 je vous l'ai déjà dit, ma mère était malade; j'essayais de faire les
20 courses, j'essayais de l'aider. Donc, je l'ai vu plusieurs fois, mais je
21 l'ai aussi vu après le crépuscule ce même jour.
22 Q. Est-ce que vous pouvez convenir qu'étant donné qu'il faisait nuit
23 dehors, qu'il n'y avait pas d'éclairage public, qu'il n'y avait pas
24 d'éclairage dans votre maison non plus, qu'il y avait énormément de
25 poussière et de fumée suite à l'explosion, que vous étiez en plus très
26 certainement en état de choc, vous pouvez convenir avec moi, quand même,
27 qu'il vous serait très difficile de reconnaître de façon certaine un
28 véhicule très sombre, et ce, par une nuit très sombre ?
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1 R. Lors de l'explosion, l'explosion dans ma maison, je ne sais pas si ce
2 véhicule était là. Mais après l'explosion et après les tirs, ce véhicule
3 est arrivé. Une partie des personnes qui avaient encerclé la maison sont
4 montées à bord.
5 Q. Vous ne pouvez pas confirmer que ce véhicule avait bel et bien pris
6 part à l'attaque à la bombe qui a été dirigée contre votre maison ?
7 R. C'était une petite rue très étroite, donc je ne pense même pas que le
8 véhicule aurait pu y passer.
9 Q. Très bien. Ensuite, dans le même paragraphe, vous dites que votre
10 maison a été incendiée le vendredi soir. Vous n'avez pas vu les personnes
11 qui ont incendié votre maison et vous n'avez d'ailleurs pas vu comment on a
12 mis feu à votre maison ?
13 R. Non, je ne l'ai pas vu.
14 Q. Ensuite, en bas de la page 3 de votre version albanaise, paragraphe 1
15 de la page suivante; et pour ce qui est donc des versions en B/C/S et en
16 anglais, il s'agit du paragraphe 1 de la page 3, vous énumérez toutes
17 sortes de meurtres de personnes, et voici ce dont j'aimerais m'assurer :
18 vous n'avez été témoin d'aucune de ces morts violentes, n'est-ce pas ?
19 R. C'est arrivé la nuit suivante, quand j'ai quitté Fushe Kosova. Au cours
20 de cette nuit-là, les gens dont j'ai parlé dans ma déposition ont trouvé la
21 mort et ont été tués.
22 Q. Oui, vous n'avez pas vu de vos propres yeux aucune de ces morts
23 violentes, n'est-ce pas ? Vous en avez juste entendu parler; c'est bien
24 cela ?
25 R. Mais comment aurais-je pu être témoin de cela?
26 Q. Oui, je vous comprends. Paragraphe suivant de votre déposition, vous
27 parlez de votre séjour à Dragodan. Vous dites qu'il a été interrompu quand
28 l'armée et la police spéciale ont défoncé votre porte. Hier, vous avez
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1 convenu que vous aviez entendu parler de paramilitaires qui empruntaient à
2 des fins illégales des uniformes et des insignes de l'armée, et voici ce
3 que je vous demande : il se pourrait très bien que cela soit la même chose
4 en ce qui concerne des criminels qui emploient à mauvais escient des
5 uniformes de la police et des insignes de la police pour se faire passer
6 pour ce qu'ils n'étaient pas ?
7 R. Je n'en ai jamais entendu parler parce que je n'ai jamais entendu
8 parler d'actions qui auraient été conduites de façon séparée par ces deux
9 groupes. En fait, ils travaillaient ensemble, l'armée et ces forces. Ces
10 forces paramilitaires travaillaient exactement de concert avec l'armée et
11 la police. Mais il y aurait pu y avoir en effet une utilisation illégale
12 des uniformes, mais je n'en sais rien.
13 Q. Donc, vous faites des spéculations, mais vous n'en savez rien; c'est
14 bien cela ?
15 R. Quant à savoir si oui ou non ces uniformes ont été empruntés pour être
16 utilisés de façon illégale, je n'en sais rien. Mais ce que je sais, c'est
17 que toutes ces forces coopéraient entre elles.
18 Q. Maintenant, en ce qui concerne l'entretien du 15 août 2006 avec M.
19 Hannis et les personnes du bureau du Procureur, on m'a dit que vous avez
20 décrit la police spéciale comme étant une police qui portait des badges,
21 des insignes sur leurs manches sur lesquelles était inscrit "Police
22 spéciale". Ces personnes qui ont défoncé votre porte, dans votre
23 déposition, avez-vous bien dit qu'elles portaient ces insignes avec ces
24 mots en serbe ?
25 R. Oui, sur leurs manches, ils portaient ce badge avec les initiales, et
26 on reconnaissait ces initiales comme étant les initiales de la police
27 spéciale.
28 Q. Très bien. Quelles étaient ces initiales dont vous nous parlez,
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1 initiales qu'ils arboraient sur leurs manches ?
2 R. SJ, ou quelque chose dans ce style.
3 Q. Bien. Au paragraphe suivant de votre déclaration, vous nous parlez de
4 vos cartes d'identité qui ont été prises à votre femme et à votre belle-
5 sœur, qui ont été déchirées et qui ont été jetées sur le plancher, alors
6 qu'une autre femme a donné une carte qui, elle, lui a été rendue. Votre
7 femme et votre belle-sœur avaient-elles des papiers d'identité aussi émis
8 par l'Etat serbe ou avaient-elles des cartes d'identité qui avaient été
9 émises par l'UCK ou un autre organe non officiel ?
10 R. Elles avaient des papiers, elles avaient des papiers officiels qui
11 étaient valides au Kosovo à l'époque.
12 Q. Est-ce que ces cartes ou ces papiers d'identité avaient été émis par
13 l'Etat serbe ?
14 R. Oui.
15 Q. Très bien. A la fin mars, début avril 1999, n'est-il pas vrai que l'UCK
16 était présente et engagée dans des combats actifs contre les forces serbes
17 dans le quartier de Vranjevc à Pristina ?
18 R. Je ne sais si c'étaient eux qui étaient organisés dans les combats à
19 Vranjevc ou si c'était plutôt Kodra e Trimave. Mais tout ce que je sais,
20 c'est que les gens étaient en train de se défendre et défendaient leurs
21 propres maisons.
22 Q. Très bien. Savez-vous que des bombes de l'OTAN sont tombées sur les
23 quartiers de Dragodan, Ciglani et Vinogradi le 26 et le 27 mars 1999 ?
24 R. Je ne sais pas s'il y a une usine de briques à Dragodan. Il me semble
25 qu'à Dragodan, ce sont plutôt des vignobles.
26 Q. Ma question n'était pas celle-là. Ma question était de savoir si vous
27 saviez qu'il y avait eu des bombes de l'OTAN qui étaient tombées sur les
28 quartiers de Dragodan le 26 et le 27 mars 1999. Voici la première question,
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1 et ensuite, je vous poserai des questions à propos des autres quartiers.
2 R. Non, je ne me souviens pas de cela. Je ne me souviens pas que cela soit
3 arrivé.
4 Q. Mais selon votre témoignage, il me semble que vous étiez à Dragodan à
5 peu près à ce moment-là ?
6 R. Oui.
7 Q. Et Stara Ciglana est quand même aussi un quartier de Pristina ?
8 R. Non, je ne crois pas que cela soit un quartier de Pristina.
9 Q. Très bien, nous allons poursuivre et passer à autre chose.
10 J'ai encore quelques points que je souhaiterais éclaircir. Au
11 paragraphe 2 de la page 8 de votre déclaration, donc de la page 5 de la
12 version anglaise et la version en B/C/S, vous nous avez dit que les
13 policiers sont venus et vous ont dit de partir immédiatement de là où vous
14 étiez parce qu'il y avait des combats à Dragodan et vous risquiez d'être
15 tué. Tout d'abord, quels étaient les uniformes ou les insignes arborés par
16 cette personne, qui vous ont permis de dire que c'était un policier ?
17 R. La police était venue dans tout le quartier, ils passaient de maison en
18 maison. Ils obligeaient les gens à sortir de chez eux.
19 Q. Je vous ai posé une question sur la personne qui vous a dit que vous
20 deviez partir de là où vous étiez parce qu'il y avait des combats à
21 Dragodan. Je vous demande ce que cette personne arborait en matière
22 d'emblème.
23 R. Si je me souviens bien, je n'ai pas dit qu'il n'y avait qu'une seule
24 personne qui soit venue me dire cela. Il me semble bien que j'ai dit que
25 nous avons été obligés de quitter notre maison, on nous a chassés et on
26 nous a dit de partir vers la grande rue parce que soi-disant il y avait des
27 combats, notre vie était en danger. On nous a dit : il faut partir, il faut
28 quitter cet endroit.
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1 Q. Pourriez-vous nous dire le type d'uniformes que portaient les personnes
2 qui vous ont dit tout cela ?
3 R. Les uniformes de la police.
4 Q. Pourriez-vous nous les décrire, s'il vous plaît, nous donner au moins
5 leur couleur ?
6 R. Les policiers qui nous ont chassés dans la rue étaient vêtus
7 d'uniformes sombres, d'uniformes foncés, des uniformes de police très
8 foncés, presque noirs. Ils avaient des masques et ils portaient des armes.
9 Q. Arboraient-ils des emblèmes sur leurs manches ?
10 R. Je n'ai pas remarqué cela.
11 Q. Ces uniformes étaient-ils différents des uniformes normaux de la police
12 dont vous nous avez parlé précédemment ?
13 R. Non.
14 Q. Vous nous dites que tous les policiers dans Pristina portaient ces
15 uniformes très foncés, ces uniformes presque noirs, et portaient aussi des
16 masques -- enfin, avaient les visages cachés ?
17 R. Je ne sais pas. Je ne peux pas vous répondre en ce qui concerne tous
18 les policiers. En tout cas, tous ceux qu'on a vus avaient des uniformes
19 foncés, alors que les soldats, eux, étaient en uniformes plus clairs.
20 Q. Oui, nous parlons des policiers. J'aimerais savoir le type d'emblèmes
21 qu'arboraient ces policiers. Ces policiers avaient-ils les mêmes uniformes
22 que ceux que vous nous avez décrits comme étant ceux de la police spéciale,
23 ces unités que vous avez identifiées comme étant la SJ ?
24 R. Ce jour-là, j'ai vu trois patrouilles de police.
25 Q. Je ne vous demande pas de questions à propos de ces patrouilles de
26 police.
27 R. Oui, mais ils portaient les mêmes uniformes.
28 Q. Donc, ils avaient les mêmes uniformes que la police spéciale que vous
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1 avez identifiée précédemment et qui arborait un insigne portant SJ sur la
2 manche ?
3 R. Non, je n'ai pas vu l'insigne avec SJ sur l'épaule.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez obtenu cette réponse il y a
5 à peu près deux minutes et la réponse était très claire.
6 M. IVETIC : [interprétation] La réponse était sur le SJ, mais maintenant,
7 je pose une question à propos des uniformes. Est-ce que c'étaient les mêmes
8 uniformes que ceux qui étaient munis d'un emblème SJ ?
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, cela fait dix minutes, cinq
10 minutes que vous avez déjà eu cette réponse, et par deux fois, d'ailleurs.
11 M. IVETIC : [interprétation] Très bien.
12 Q. Donc, je passe à autre chose. J'aimerais vous parler de l'ambiance
13 générale à Pristina, surtout après les bombardements de l'OTAN. Peut-on
14 dire qu'il y avait énormément d'hostilité de façon très ouverte de la part
15 des civils, surtout les civils serbes contre les civils albanais, et ce,
16 après les bombardements de l'OTAN, après que ceci ait commencé ?
17 R. Cela, je n'en sais rien puisqu'à ce moment-là, je ne m'occupais pas
18 tellement des différences culturelles de ce type, quant à savoir quelle
19 était l'ambiance entre les gens. Je ne peux pas vraiment vous parler de
20 choses dont je ne sais rien.
21 Q. Très bien.
22 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais faire juste
23 regarder un petit peu mes notes, parce qu'il me semble que j'en ai fini
24 avec ce témoin, mais s'il me reste une ou deux questions à poser,
25 j'aimerais bien en finir avant la pause. Donc, si vous me le permettez, je
26 regarde mes notes et je vous informe dans une seconde de l'évolution de mon
27 contre-interrogatoire.
28 Q. Oui, j'ai encore quelques questions à poser. A la gare, quelle était
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1 l'atmosphère ? Quelle était l'ambiance à la gare ? Y avait-il des civils
2 serbes en train d'harceler ou en train d'insulter les civils albanais
3 kosovars ?
4 R. Non. Je n'ai pas assisté à cela.
5 Q. Très bien. Combien de temps êtes-vous resté à la gare ce jour-là ? La
6 majeure partie de la journée ? Pouvez-vous nous donner un ordre d'idée ?
7 R. Pas ce jour-là. Mais en tout, je suis quand même resté deux à trois
8 jours et trois nuits.
9 Q. Au cours de ce séjour, vous n'avez vu aucun civil dans la gare ?
10 R. Non, je n'en ai pas vu et je ne pense pas qu'il y en avait.
11 Q. Pourriez-vous nous donner les dates exactes de votre séjour à la gare,
12 s'il vous plaît ?
13 R. Les 27, 28 et peut-être 29 mars.
14 Q. Merci. Je vous remercie d'avoir répondu à mes questions.
15 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de
16 questions.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Ivetic.
18 Monsieur Kabashi, vous êtes monté à bord du train à Pristina, n'est-ce pas
19 ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En se rendant en Macédoine, est-il
22 passé par Fushe Kosova ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est d'ailleurs la seule voie qui
24 existe.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
26 Monsieur Sepenuk ?
27 M. SEPENUK : [interprétation] J'en ai encore pour cinq à dix minutes.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'aimerais que l'on puisse en terminer
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1 avant la pause, et ce serait bien que l'on puisse en terminer avec ce
2 témoin avant la pause, puisque notre témoin suivant sera un témoin protégé.
3 Mais non, je me trompe, je me trompe. Il n'y a aucune raison en fait
4 de faire la pause maintenant, puisque l'ordre des témoins a été changé.
5 Donc, nous pouvons faire la pause et nous reprendrons donc à 16 heures
6 cinq.
7 --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.
8 --- L'audience est reprise à 16 heures 06.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Sepenuk ?
10 M. SEPENUK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
11 Contre-interrogatoire par M. Sepenuk :
12 Q. [interprétation] Docteur Kabashi, je suis Norman Sepenuk, avec M.
13 Visnjic je représente ici le général Ojdanic.
14 Je n'ai que quelques questions à vous poser, et ceci pour préciser le
15 compte rendu d'audience, mais je pense que vous nous avez déjà précisé
16 d'autres choses. La question est de savoir à ce qu'il en est de quelques
17 commentaires que vous avez prononcés après avoir été interrogé par Me Fila.
18 Me Fila vous a demandé au sujet de votre âge et quand est-ce que vous êtes
19 sorti diplômé de la faculté. Vous vous en souvenez ?
20 R. C'est en 1973 et 1974 que j'ai terminé mes études. Je pense que j'avais
21 23 ou 24 ans.
22 Q. C'est bon, ce n'est pas très important, c'était juste pour
23 essayer de vous rafraîchir la mémoire, de vous replacer dans le contexte de
24 votre déposition. Je cite maintenant ce qu'a dit Me Fila à la fin de ses
25 questions et ce que vous avez dit en enchaînant, à savoir, vous avez dit :
26 "Si je puis, je souhaite faire une petite explication, apporter quelques
27 précisions dans la presse de Belgrade et à la télévision serbe à partir du
28 moment où la bombe a été jetée dans ma maison, ils ont écrit qu'un certain
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1 terroriste a été tué et il portait mon nom et qu'il avait quatre enfants.
2 Il a été également dit qu'un certain terroriste a été tué avec 11 membres
3 de sa famille. Dans une autre version, celle de Tanjug, il était question
4 d'un terroriste qui portait mon nom, qui avait huit membres de sa famille."
5 Vous vous rappelez cette partie de votre déposition ?
6 R. Oui.
7 Q. Lorsque vous avez vu ces articles, et lorsque vous avez entendu ou vu
8 ce qui était diffusé à la télévision serbe, comment avez-vous réagi ?
9 Etiez-vous fier que l'on vous appelle terroriste, est-ce que c'était une
10 offense, ou ni l'un ni l'autre ? Pourriez-vous nous dire ce que vous avez
11 pensé à ce moment-là lorsque les médias ont relaté ceci à votre égard ?
12 R. J'ai ri parce que j'étais habitué à ce genre d'article.
13 Q. Parce qu'il y a eu d'autres articles sur vous dans la presse serbe ou
14 kosovare ? Etes-vous un personnage qui fait l'objet d'une couverture des
15 médias ?
16 R. Oui, de temps à autre il y a eu des articles mais je ne les ai pas
17 nécessairement tous lus.
18 Q. Est-ce qu'il y avait des articles dans lesquels ont vous appelait
19 terroriste ?
20 R. Non.
21 Q. Pour autant que vous le sachiez, c'était le premier article où il a été
22 dit qu'un certain Dr Kabashi était terroriste. Est-ce bien cela, Monsieur ?
23 R. Oui. C'est le premier article. Mais ils n'ont pas dit un certain Dr
24 Kabashi. Ils ont dit Emin Kabashi a été tué avec quatre de ses enfants, et
25 il y avait d'autres versions où mon nom, mon prénom ont été mentionnés
26 ainsi que divers nombre d'enfants.
27 Q. Voilà. Je reviens à ma question. Est-ce que vous étiez fier d'être
28 qualifié de terroriste ou offensé ou ce n'était ni l'un ni l'autre ? Je
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1 voudrais vous entendre vous, vous exprimer par vos propres mots.
2 R. Je l'ai déjà dit, je n'avais aucune raison d'être inquiet du fait
3 qu'ils m'appelaient terroriste. Je n'étais pas nécessairement fier. J'ai
4 ri. J'étais heureux d'avoir survécu à l'attaque.
5 Q. La presse et les médias ont-ils fait une erreur lorsqu'ils vous ont
6 appelé terroriste ?
7 R. Bien entendu, c'était une erreur. Je n'ai jamais été un terroriste, je
8 n'ai jamais tué personne.
9 Q. Mais dans votre déposition dans l'affaire Milosevic, vous avez dit que
10 vous étiez quelqu'un qui estimait que c'est uniquement par la voie armée
11 qu'il était possible que votre peuple devienne libre ?
12 R. Oui.
13 Q. Je voudrais maintenant qu'on réexamine votre déclaration préalable qui
14 a été versée au dossier de l'espèce. Je vais vous inviter à examiner le
15 deuxième paragraphe, page 2 de votre déclaration. Vous avez dit que deux
16 policiers, Simic et Pedza, vous ont interrogé. Vous vous en souvenez ?
17 R. Oui.
18 Q. Il est dit dans cette déclaration : "Pedza m'a emmené au poste de
19 police vers 4 heures du matin en 1998 pour m'interroger avec deux autres
20 policiers que je ne connaissais pas. J'étais accusé de fournir des
21 médicaments et de la nourriture à l'UCK. Il m'ont retenu pendant sept
22 heures." Est-ce que vous vous souvenez avoir dit cela ?
23 R. Oui.
24 Q. Qu'avez-vous répondu aux questions posées par Pedza lorsqu'il vous a
25 demandé s'il était vrai ou non que vous auriez fourni des médicaments et
26 des vivres à l'UCK ?
27 R. Le policier Pedza m'a simplement escorté au poste de police. Les deux
28 autres policiers ont dit que je n'étais pas la personne qu'ils
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1 recherchaient -- bien entendu, je leur ai dit que je n'étais pas la
2 personne qu'ils recherchaient.
3 Q. Mais, j'ai une question très précise. D'après votre déclaration, Pedza
4 vous a accusé de fournir des médicaments et des vivres à l'UCK. C'est lui
5 qui vous a accusé de faire cela. Qu'avez-vous répondu à Pedza à ce moment-
6 là ?
7 R. J'ai dit que je n'étais pas la personne qui s'occupait de ce genre de
8 choses.
9 Q. Etait-ce vrai ?
10 R. Non.
11 Q. Donc vous avez menti à Pedza ?
12 R. Mais oui, bien sûr.
13 Q. Puisque vous travailliez au sein de l'Armée de libération du Kosovo, et
14 vous vouliez que ceci reste un secret ?
15 R. Oui, bien sûr.
16 Q. Pour revenir maintenant à cet article publié dans la presse
17 immédiatement après qu'on ait lancé cette bombe. Tout simplement, on vous a
18 révélé du jour au lendemain, au grand jour comme étant un terroriste.
19 Qu'est-ce que ceci a eu à voir avec votre travail au sein de l'UCK ? Est-ce
20 que vous avez reçu des commentaires au sujet de cela ?
21 R. Non, rien. Je n'ai pas eu l'occasion de formuler de commentaires au
22 sujet de cela. Il n'y avait pas de journaux publiés à ce moment-là, et je
23 n'avais aucune possibilité de lire tous les journaux qui paraissaient à
24 Belgrade, et je n'étais pas vraiment pas intéressé à faire des
25 commentaires, à réagir. Je vous ai dit, peut-être ai-je ri, j'étais heureux
26 que l'information n'était pas véridique et que j'étais en vie. Tout ceci
27 n'était pas très important pour moi.
28 Q. Qu'en est-il du reste de la couverture médiatique, de ces rapports
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1 publiés par la presse, comment est-ce que vous avez appris leur existence ?
2 R. Un des articles a été repris en langue albanaise, dans un journal en
3 langue albanaise de manière très succincte. L'un de ces jours où les
4 journaux paraissaient, j'étais en train de me cacher avec ma famille et je
5 l'ai entendu par le biais de l'agence Tanjug de Belgrade, la TVS, et aussi
6 j'ai entendu l'info grâce aux medias albanais qui diffusaient depuis
7 Tirana.
8 Q. Vous avez entendu cela peu de temps après que la bombe ait été lancée
9 le 25 mars 1999 ? Il ne s'est passé que quelques jours avant que vous ne
10 l'entendiez, l'info ?
11 R. J'en ai entendu parler peut-être trois ou quatre jours après
12 l'événement.
13 Q. Le 24 avril 1999, à peu près trois semaines plus tard, lorsque M. Tim
14 Kelly du bureau du Procureur vous interroge, vous auditionne -- c'est bien
15 lui qui vous a interrogé ce jour-là ?
16 R. Oui.
17 Q. Nous savons qu'il n'y a rien de particulier dans cette déclaration au
18 sujet de votre participation au sein de l'UCK.
19 R. Oui.
20 Q. En fait, un peu plus loin, à la page 6, dernier paragraphe de votre
21 déclaration, vous dites : "On m'a posé précisément la question au sujet des
22 circonstances du moment lorsque j'ai été forcé de quitter le Kosovo en mars
23 1999. J'ai d'autres éléments d'information au sujet des événements qui se
24 sont produits à ce moment-là et avant ces événements au Kosovo et je peux
25 les fournir si nécessaire."
26 Est-ce que je viens de reproduire fidèlement ce que vous avez dit
27 dans votre déclaration ?
28 R. Oui.
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1 Q. Pendant cet entretien, est-ce qu'il vous est venu à l'esprit que le
2 fait que vous étiez membre de l'UCK aurait pu être un élément pertinent par
3 rapport aux questions posées par M. Kelly ? Est-ce que vous pensez qu'il
4 aurait souhaité entendre cet élément d'information de vous ?
5 R. Il ne m'a pas posé de questions au sujet de mes activités, et je ne lui
6 ai pas répondu à ce sujet lorsque j'ai parlé des différents événements dans
7 ma déclaration.
8 Q. Il ne vous a pas posé de questions, et vous, vous ne vouliez pas
9 spontanément lui fournir des éléments; est-ce bien comme cela que cela
10 s'est passé ?
11 R. Je n'ai pas estimé que ce fût une information importante, en ma qualité
12 de membre.
13 Q. Vous n'avez pas estimé que cela ait un impact sur l'objectivité de vos
14 déclarations à donner à M. Kelly, à savoir que vous étiez plutôt un membre
15 du haut niveau de l'Armée de libération du Kosovo ?
16 M. HANNIS : [interprétation] Objection à la forme. Pourquoi est-ce qu'il a
17 dit qu'il occupait un niveau plutôt élevé ?
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous pouvez étayer cette
19 question, Maître Sepenuk ?
20 M. SEPENUK : [interprétation] Mais tout simplement, c'est dans le contexte
21 de ce qui a déjà été dit. Il était membre depuis longtemps, membre d'un
22 groupe qui fournissait des ravitaillements à la guérilla, à leurs
23 combattants, et cetera. Donc, ce n'est pas essentiel que je garde cette
24 qualification.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que vous ne pouvez pas
26 qualifier son activité d'une telle manière.
27 M. SEPENUK : [interprétation] Je vais modifier ma question.
28 Q. Vous ne pensez pas qu'il aurait été pertinent quant à l'objectivité de
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1 vos réponses apportées à M. Kelly, que de signaler que vous étiez membre de
2 quelque échelon que ce soit de l'UCK ?
3 M. HANNIS : [interprétation] Alors maintenant, mon objection concerne la
4 nature juridique de la conclusion, à savoir, est-ce qu'il s'agit de quelque
5 chose de pertinent ou non.
6 M. SEPENUK : [interprétation]
7 Q. Ne pensiez-vous pas que c'était quelque chose que les enquêteurs
8 auraient souhaité savoir, Monsieur ?
9 R. Je ne pense pas que c'était important.
10 Q. Mais en tant que membre de l'UCK, vous vouliez garder l'anonymat,
11 n'est-ce pas, Monsieur ?
12 R. Non, pas du tout. Je me contentais de faire ce que j'avais à faire en
13 tant que citoyen.
14 Q. Mais le policier Pedza, vous ne lui avez pas dit la vérité lorsqu'il
15 vous a demandé si vous aviez fourni des médicaments et des vivres à l'UCK ?
16 Nous savons d'après votre déposition ici que vous l'avez fait, alors
17 pourquoi vous ne lui avez pas dit la vérité ?
18 R. Mais je ne suis pas suffisamment fou pour m'offrir dix années de
19 prison.
20 Q. Donc, vous vouliez préserver l'anonymat ?
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Sepenuk, je pense que vous avez
22 couvert ce point.
23 M. SEPENUK : [interprétation] Très bien, alors deux autres questions. Je
24 vais changer de sujet.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien.
26 M. SEPENUK : [interprétation]
27 Q. N'est-il pas vrai qu'on vous a posé des questions au sujet des crimes
28 éventuellement commis par l'UCK, et que vous vous êtes rendu compte à ce
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1 moment-là qu'un témoin qui décide de déposer au sujet des crimes commis par
2 l'UCK est quelqu'un qui s'expose à un risque considérable ?
3 R. Ils ne m'ont pas posé de questions et je n'avais pas d'information sur
4 ce genre de crime. Si j'en avais eu, j'aurais dit tout ce que je savais.
5 Q. Est-ce que cela s'applique à toute la période allant jusqu'à
6 aujourd'hui ?
7 R. Oui.
8 Q. Est-ce que vous savez qui est Zekerijah Qana ?
9 R. Oui.
10 Q. Qui est Zekarijah Qana ?
11 R. Zekerijak Qana est un professeur d'histoire à l'institut des études
12 albanologiques [phon] et c'est un confrère, c'est un collègue.
13 Q. C'est un ami ?
14 R. Non, c'était mon professeur.
15 Q. Est-ce que vous avez gardé contact avec lui ?
16 R. Oui. Nous travaillons ensemble, nous sommes collègues. Nous travaillons
17 dans le même institut.
18 Q. Vous avez de l'estime pour lui ? Quelle est votre opinion à son sujet ?
19 M. HANNIS : [interprétation] Objection. Nous avons ici bien plus que deux
20 questions. Je ne vois pas où on va.
21 M. SEPENUK : [interprétation] Je vous assure que j'ai des bases solides
22 pour poser ces questions.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Allons-y, alors.
24 M. SEPENUK : [interprétation] Merci.
25 Q. Est-ce un homme qui est un honnête homme ?
26 R. Je ne me suis jamais posé la question en ces termes-là. Je ne vois pas
27 la pertinence.
28 Q. Est-ce que vous avez une raison de douter du fait qu'il s'agit de
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1 quelqu'un qui est un honnête homme intègre ?
2 R. J'ai dit que je ne me suis jamais posé la question.
3 Q. Mais tout simplement, je vous demande si vous avez une raison de penser
4 que votre collègue ou votre professeur est quelqu'un qui n'est pas tout à
5 fait intègre.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense qu'il vous a répondu à la
7 question, Maître Sepenuk. Il n'y a aucune raison pourquoi il ne serait
8 jamais venu à formuler un jugement, d'après ce qu'il dit.
9 M. SEPENUK : [interprétation]
10 Q. "Au Kosovo, tout témoin qui décide de déposer pour témoigner contre les
11 crimes commis par l'UCK s'expose à un grand risque." Si M. Qana avait dit
12 cela, aurait dit cela, est-ce que d'après vous, ce serait la vérité ?
13 R. J'ai dit que je n'ai jamais eu l'occasion de me pencher sur ce genre de
14 sujet avec lui.
15 M. SEPENUK : [interprétation] J'en ai terminé.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.
17 Monsieur Hannis, est-ce que vous avez des questions supplémentaires ?
18 M. HANNIS : [interprétation] Non.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le Juge Chowhan a une question pour
20 vous.
21 Questions de la Cour :
22 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Bonjour, Docteur Kabashi.
23 R. Bonjour.
24 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Tout d'abord, je voudrais savoir si
25 vous savez ce que signifie votre nom, le nom Kabashi. Qu'est-ce que cela
26 signifie ou est-ce que cela fait très longtemps que c'est un nom de
27 famille ?
28 R. Vous voulez dire mon prénom ? Cela veut dire fidèle, et mon deuxième
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1 nom vient de la région de Kabashi, entre Shkodra et Ucin [phon].
2 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Je vous remercie. Ma deuxième
3 question est de savoir pourquoi est-ce que les tziganes se sont-ils trouvés
4 avec vous pendant un événement vous concernant ? Pourquoi étaient-ils là
5 avec vous ?
6 R. Ils étaient nos voisins, et c'étaient des familles qui n'ont pas
7 accepté que leurs enfants aillent dans les écoles où l'enseignement se
8 faisait en serbe. Ils ont refusé de porter l'uniforme de la police et de
9 travailler pour la police.
10 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Très bien. Alors dites-moi maintenant
11 qu'est-ce qui a fait l'objet de votre thèse de troisième cycle ?
12 R. Ma thèse de troisième cycle, son sujet, c'était la poésie de Jeronim De
13 Rada. C'est un écrivain de l'époque romantique, écrivain albanais très
14 important. Je cherchais à faire ressortir les traits principaux de la
15 poésie de la période romantique.
16 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Je vous en félicite. Comment est-ce
17 que vous vous êtes trouvé sympathisant de l'idéologie de l'UCK ? Je veux
18 dire, vous vous intéressiez à la poésie romantique, à un poète romantique.
19 Alors comment est-ce que ceci vous a attiré ? De quelle nature était cette
20 philosophie ?
21 R. Ce n'est pas particulièrement l'idéologie de l'UCK qui m'a attiré,
22 c'est plutôt l'idéologie de la liberté qui a semblé importante à mes yeux.
23 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Est-ce que vous avez détenu des
24 fonctions officielles au sein de l'UCK ?
25 R. Non.
26 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Très bien. Pouvez-vous nous dire
27 quelle devise ou quel programme de l'UCK vous a attiré ?
28 R. Liberté pour le Kosovo.
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1 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Très bien. A un moment donné, vous
2 avez vu une liste, et ceci comportait divers noms. Qui étaient ces gens,
3 ces gens dont les noms figuraient dans cette liste dressée ?
4 R. Pour la plupart, c'étaient des militants ou des gens qui travaillaient
5 dans la logistique ou des intellectuels. J'en connaissais quelques-uns.
6 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Excusez-moi de vous avoir posé autant
7 de questions. Ma dernière question est la suivante. Vous-même, vous vous
8 occupiez de quoi au sein de l'UCK ? Pourriez-vous nous le dire, s'il vous
9 plaît ?
10 R. Des choses qui avaient à voir avec la guerre : les fournitures en
11 vêtements, vivres, médicaments, des déplacements pour aider les blessés,
12 les femmes qui allaient accoucher, diverses situations de guerre ou
13 secourir les gens qui essayaient de s'extraire de cette situation de guerre
14 pour s'en aller ailleurs.
15 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Donc, vous ne vous déplaciez pas
16 beaucoup, en fait. Vous restiez sur place pour vous occuper de ces
17 différentes activités que vous venez de citer. Bien. Est-ce que vous vous
18 déplaciez pour aller à différents endroits, là où il fallait, avec d'autres
19 personnes ?
20 R. De temps à autre, il m'est arrivé de me déplacer pour m'occuper des
21 choses que je ne pouvais pas faire à Pristina même.
22 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Je vous remercie.
23 R. Je vous en prie.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous en avez terminé de votre
25 déposition, Monsieur Kabashi. Vous pouvez disposer. Je vous remercie d'être
26 venu déposer.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est moi qui vous remercie.
28 [Le témoin se retire]
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je voudrais aborder les conseils de la
2 Défense, leur adresser quelques propos de façon assez générale et de façon
3 gentille. Nous avons entendu beaucoup de témoins qui parlent des événements
4 qui se sont déroulés au Kosovo sur le terrain, comment ces événements les
5 ont touchés, comment ils ont affecté les autres personnes, et vous avez eu
6 la possibilité d'évaluer les résultats des contre-interrogatoires de ce
7 témoin. Je suis sûr qu'à présent, vous avez le sentiment, l'intuition, pour
8 ainsi dire, de la façon dont vous devez vous y prendre pour contre-
9 interroger ce témoin afin d'obtenir les informations les plus importantes.
10 J'espère qu'à la lumière de cela, vous allez évaluer la situation pour
11 essayer de voir quelles sont les questions qui sont vraiment les questions
12 essentielles, les questions importantes, et quelles sont en revanche les
13 questions moins importantes ou d'une importance plutôt marginale. Je
14 commence à avoir l'impression que nous avons besoin de dépouiller certaines
15 questions, certains contre-interrogatoires. Mais d'un autre côté, je suis
16 également convaincu qu'il vaut mieux vous faire confiance et vous laisser
17 juger vous-même plutôt que de prendre des mesures pour m'assurer que ceci
18 soit fait.
19 Evidemment, si vous avez besoin de plus de temps pour faire une meilleure
20 évaluation de la façon dont vous pourriez dépouiller vos contre-
21 interrogatoires, pourquoi pas ? Nous sommes prêts à accepter cela puisque
22 nous sommes au début du procès. C'est peut-être mieux de vous donner du
23 temps à présent, et j'espère que vous allez commencer donc à m'écouter et
24 pratiquer cet exercice dès à présent pour voir si tout ceci est possible.
25 Ceci nous permettrait aussi de présenter peut-être quelques témoins
26 supplémentaires au cours de ce mois.
27 Donc, Monsieur Ackerman, vous vouliez aussi aborder une question ?
28 M. ACKERMAN : [interprétation] Oui, je parle, je pense, aussi au nom de
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1 plusieurs de mes collègues ou presque tous. Nous essayons de nous préparer
2 à l'avance pour être prêts pour chaque témoin qui vient. Donc, nous
3 prévoyons un certain temps pour chaque témoin, ceci sur la base des
4 interrogatoires principaux par le Procureur, et nous ne sommes pas préparés
5 pour chaque témoin qui pourrait venir et nous ne pourrions pas être prêts
6 pour tous.
7 Les choses se compliquent quand les témoins viennent dans le prétoire
8 comme aujourd'hui. J'ai entendu pour la première fois que le Procureur a
9 changé l'ordre de la comparution des témoins et que les témoins pour
10 lesquels je suis prêt aujourd'hui, ils ne vont pas déposer aujourd'hui,
11 mais d'autres pour lesquels nous ne sommes pas prêts. Si j'ai bien compris,
12 il y a un e-mail qu'un certain nombre de mes collègues ont reçu pour les
13 informer de cela, mais je ne l'ai pas appris parce que je n'ai pas regardé,
14 je n'ai pas vérifié mon e-mail.
15 C'est vrai que mon système n'a pas fonctionné, que je n'ai pas eu
16 accès à internet; qu'est-ce que vous voulez, ceci arrive et il faut bien
17 s'y faire. Donc, mon système, apparemment, crashe plus souvent que
18 possible, c'est un des problèmes.
19 Ensuite, c'est le prochain témoin. Je pense que nous avons tous reçu
20 des documents concernant ce témoin. Nous avons aussi reçu des documents
21 nouveaux, c'est une déclaration, des matériaux nouveaux, c'est une
22 déclaration d'un témoin qui va venir, le témoin prochain. Je ne l'ai jamais
23 vu auparavant, je ne pense pas que qui que ce soit d'autre l'ait déjà vu,
24 et on me l'a donné pour la première fois aujourd'hui. J'ai vraiment du mal
25 à commencer le contre-interrogatoire avec un témoin qui va venir d'ici
26 quelques minutes, alors que je n'ai même pas eu une demi-heure ou 45
27 minutes pour regarder de quoi il s'agit dans cette nouvelle déclaration
28 parce que je ne l'ai pas eue. Je suis sûr que pour mes collègues, il en va
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1 de même parce qu'eux non plus, ils n'ont pas examiné cette nouvelle
2 déclaration, ce nouveau document qui est arrivé. Je pense que nous avons eu
3 une déclaration plus ancienne qui, aussi, vient d'être communiquée.
4 Mais ce sont les problèmes qui se présentent, je veux bien, mais pour
5 les résoudre, il faudrait accorder plus de temps pour nous préparer. Je
6 pense qu'un avocat préparé, c'est toujours utile, et quand on est préparé,
7 on est plus efficace que quand on n'est pas du tout préparé, donc je vous
8 demande de nous accorder ce supplément de temps pour bien nous préparer
9 pour le contre-interrogatoire de ce témoin.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne vais pas faire de commentaires
11 sur cette dernière observation, mais est-ce que vous parlez de la
12 déclaration du 16 août ?
13 M. ACKERMAN : [interprétation] Je ne sais pas. C'est sur un CD ? Je ne sais
14 même pas quelle est la date. C'est une déclaration préalable qui a été
15 prise ailleurs, pas ici, le 17 mai -- enfin, non, le 14 avril 1999. Donc
16 cette déclaration préalable existe depuis longtemps, et je ne sais pas
17 pourquoi on nous l'a présentée uniquement aujourd'hui alors qu'elle est
18 vraiment ancienne.
19 Mme MOELLER : [interprétation] Monsieur le Président ?
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Moeller ?
21 Mme MOELLER : [interprétation] Si je peux vous être utile, il s'agit là des
22 notes de l'enquêteur qui a fait un interrogatoire de ce témoin dans les
23 camps en Macédoine en 1999. Il s'agit donc des notes privées, il ne s'agit
24 pas d'une déclaration. Nous venons de les communiquer uniquement pour que
25 tout ceci, tous les documents soient au complet. La Défense peut décider si
26 elle veut comparer cette déclaration avec les notes prises quelques années
27 plus tard par un autre enquêteur, puisqu'on parle exactement de la même
28 chose, donc nous n'avons pas communiqué ces documents en vertu de l'article
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1 66, mais juste pour information. Nous avons fait cela avec les autres
2 témoins, avec d'autres témoins aussi; pour nous, il ne s'agit pas du tout
3 d'une déclaration préalable proprement dite.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, ce n'est pas cette déclaration ?
5 Mme MOELLER : [interprétation] Ce sont les notes de l'enquêteur qui, à
6 l'époque, s'est entretenu avec le témoin. Donc, vous avez vraiment des
7 notes, un résumé point par point, et c'est un document de travail, un
8 document interne du bureau du Procureur. Maintenant, nous avons adopté
9 cette pratique qui consiste à communiquer tous les documents que nous
10 avons, mais évidemment, à condition que ceci ne relève pas de l'article
11 66(A)(i) ou (ii).
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le problème est très simple. Si vous
13 donnez les documents juste avant que le témoin ne pénètre dans le prétoire,
14 ceci provoque les réactions comme celles que nous venons d'entendre. C'est
15 vraiment surprenant que vous n'ayez pas pu communiquer cela plus tôt,
16 puisque vous auriez pu fournir ces documents en même temps que vous avez
17 fourni la déclaration préalable proprement dite de ce témoin.
18 Mme MOELLER : [interprétation] Oui, cette déclaration a été prise le 16
19 août, et c'est vrai que nous l'avons traduite immédiatement et nous l'avons
20 communiquée à la Défense. C'est vraiment la déclaration --
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais tout ce que je veux dire, c'est
22 que vous auriez pu aussi communiquer à l'époque ces notes. Ceci aurait été
23 utile pour tout le monde. Nous, nous l'avons reçu aujourd'hui, les conseils
24 de la Défense ont reçu ce document, mais ils sont préoccupés par le fait
25 qu'ils n'ont pas eu le temps de le lire. Si je voyais, si je connaissais ce
26 document, je pourrais vous donner ma réponse.
27 Mme MOELLER : [interprétation] Nous allons essayer aussi de vous donner une
28 copie de ce document, nous ne l'avons pas donnée aux Juges de la Chambre
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1 parce que nous n'avions pas l'intention de demander le versement au
2 dossier. Pour nous, ce n'est pas une déclaration, ce n'est pas signé, cela
3 n'a pas été relu pour le témoin. C'est vraiment un document interne, un
4 document de travail.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il va y avoir aussi une autre pause,
6 et peut-être que vous auriez pu donner ce document -- il y a eu des pauses
7 aussi avant et vous auriez pu donner ce document pendant ces pauses-là, et
8 M. Ackerman a quand même besoin d'un minimum de temps pour lire cela. Peut-
9 être qu'il va pouvoir quand même le lire même pendant que le témoin dépose.
10 Mais ensuite, il y a aussi la question du changement d'ordre de la
11 comparution des témoins, et ceci ne nous aide pas du tout, et je pense
12 qu'il faudrait éviter cela.
13 M. HANNIS : [interprétation] Je suis tout à fait d'accord, mais une des
14 raisons pour cela réside dans le fait que nous ne savions pas combien de
15 temps va durer le contre-interrogatoire des témoins, parce que parfois,
16 ceci dure plus longtemps que possible. Nous avons des témoins qui ont des
17 obligations, qui doivent rentrer plus tôt, et c'est pour cela que nous
18 avons changé l'ordre de comparution des témoins puisqu'il y avait des gens
19 qui ne pouvaient pas attendre, qui ne pouvaient pas attendre ici cinq jours
20 avant de rentrer chez eux. Donc. nous essayons aussi de minimiser ces
21 problèmes aussi, ceci s'est déjà produit à plusieurs reprises, et cette
22 façon de procéder est la plus simple possible. Nous avons changé les
23 témoins 62 et 36, et il témoignent sur des faits qui sont très semblables.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Ackerman, est-ce qu'il y a
25 quelque chose que vous souhaitez ajouter ?
26 M. ACKERMAN : [interprétation] Je viens d'apprendre qu'il y a aussi un
27 document adjoint, enfin, un document qui a été ajouté à sa déclaration. Je
28 ne l'ai pas eu.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il a été communiqué vendredi.
2 M. ACKERMAN : [interprétation] C'est peut-être ma faute, mais je ne l'ai
3 pas eu.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'était vendredi, peut-être tard, mais
5 vendredi.
6 M. ACKERMAN : [interprétation] Toujours est-il que je ne l'ai pas vu.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne pense pas que ceci va vraiment
8 vous causer des difficultés. Peut-être que vous allez pouvoir tout
9 simplement jeter un coup d'oeil, et c'est une question de toute façon
10 différente à présent, et nous ne pouvons pas en traiter pour l'instant.
11 M. ACKERMAN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Votre prochain témoin.
13 Mme MOELLER : [interprétation] Nous demandons que soit introduite Mme
14 Nazlie Bala. C'est notre prochain témoin. Nous la convoquons en vertu de
15 l'article 92 bis (B), et sa déposition concerne les paragraphes 72(G) et
16 77(A) de l'acte d'accusation.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.
18 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Madame Bala.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourriez-vous lire la déclaration
22 solennelle en lisant le document qui est placé sous vos yeux ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
24 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
25 LE TÉMOIN : NAZLIE BALA [Assermentée]
26 [Le témoin répond par l'interprète]
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, vous pouvez vous asseoir.
28 Madame Bala, nous avons ici la déclaration que vous avez fournie au bureau
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1 du Procureur au mois de juin 2001. Nous avons beaucoup d'informations
2 concernant votre déposition. Aujourd'hui, vous êtes convoquée pour que l'on
3 puisse vous poser des questions supplémentaires, aussi bien de la part du
4 bureau du Procureur que de la part des conseils des accusés.
5 Ces questions vont être posées justement pour mettre en doute ce que
6 vous dites, enfin, pour vous provoquer, en quelque sorte. C'est tout à fait
7 normal. C'est comme cela que nous opérons, que nous fonctionnons. D'autres
8 chercheront d'autres informations de clarification. Ce que je vous demande,
9 c'est de vous concentrer sur les questions posées pour essayer de répondre
10 le plus précisément possible.
11 Interrogatoire principal par Mme Moeller :
12 Q. [Interprétation] Bonjour, Madame Bala. Pourriez-vous, s'il vous plaît,
13 nous donner votre nom et votre prénom ?
14 R. Je m'appelle Nazlie Bala. Je suis née à Pristina au mois de mai 1967.
15 J'ai fait des études secondaires …
16 Q. Excusez-moi de vous interrompre, mais essayez de répondre tout
17 simplement aux questions posées pas par pas.
18 Madame Bala, où habitiez-vous en 1999 ?
19 R. En 1999, j'habitais à Pristina.
20 Q. Est-ce que vous avez donné une déclaration préalable au bureau du
21 Procureur, et ceci, le 30 juin 2001 ?
22 R. Oui.
23 Q. Est-ce que vous avez donné une déclaration supplémentaire au bureau du
24 Procureur le 16 août 2006 ?
25 R. Oui, en effet.
26 Mme MOELLER : [interprétation] Je voudrais demander que l'on présente cette
27 déclaration au témoin.
28 Q. Madame Bala, pourriez-vous, s'il vous plaît, examiner cette
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1 déclaration ? Est-ce que vous pourriez nous dire si c'est bien votre
2 déclaration ainsi que la déclaration solennelle que vous avez faite ?
3 R. Oui, c'est bien cela.
4 Q. Pourriez-vous nous confirmer si c'est bien la déclaration, votre
5 déclaration préalable, qui va servir de base pour votre déposition ici ?
6 R. Oui. J'ai dit cela en toute responsabilité.
7 Mme MOELLER : [interprétation] Nous voudrions demander le versement de
8 cette pièce en tant que pièce P02262.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et la déclaration supplémentaire est
10 aussi couverte par le même numéro ?
11 Mme MOELLER : [interprétation] Oui.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
13 Mme MOELLER : [interprétation]
14 Q. Madame Bala, je voudrais avec vous parcourir quelques informations
15 figurant dans cette déclaration préalable, dans vos déclarations.
16 Dans le paragraphe 3 de cette déclaration additionnelle, vous parlez
17 un peu de votre expérience professionnelle, et je voudrais vous demander
18 d'en parler un petit peu aux Juges.
19 R. Comme je l'ai déjà dit, je suis allée à l'école secondaire où j'ai eu
20 mon bac à Pristina. C'est là aussi que j'ai fait des études universitaires
21 et j'ai fait une maîtrise en relations internationales et affaires
22 culturelles, et depuis 1997, j'ai travaillé pour le Conseil chargé de la
23 défense des droits de l'homme et des libertés au Kosovo, se concentrant sur
24 les violences contre les jeunes, les femmes et les enfants.
25 Vers la fin de 1998, j'ai rejoint la mission de l'OSCE de Pristina. C'est
26 le bureau des droits de l'homme, cette organisation. Au début, je faisais
27 partie du département principal de cette organisation. Mais deux ou trois
28 semaines plus tard, j'ai commencé à travailler dans le bureau régional, qui
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1 s'appelait RC 5 Pristina, et ceci jusqu'au 20 mars 1999. Après le 20 mars,
2 je suis allée en Macédoine. J'étais réfugiée, mais j'ai toujours travaillé
3 pour la même mission, l'OSCE, et ceci dans les camps des réfugiés Cegran,
4 Neprosten, Sanokos, Stenkovac, 1, 2, 3, Ohrid, Dibra, et autres endroits en
5 Macédoine.
6 Après cela, je suis retournée au Kosovo. J'ai été la première employée
7 recrutée localement qui a rejoint l'équipe de l'OSCE. Je pense que c'était
8 le 15 ou le 16 juin 1999. J'ai continué à travailler pour eux jusqu'au mois
9 de septembre 1999 dans le département des droits de l'homme. Je travaillais
10 surtout sur les fosses communes et différentes localités à Pristina et
11 autour de Pristina. Au mois d'octobre 1999, j'ai commencé à travailler
12 comme la coordinatrice des organisations non gouvernementales qui
13 s'occupent des droits de l'homme, et ceci, jusqu'en 2001. Ensuite, j'ai
14 commencé mes études et j'y suis au jour d'aujourd'hui.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il y a un point que nous pourrions
16 peut-être qualifier. Dans votre déclaration, dans la déclaration
17 additionnelle que vous nous avez fournie, vous dites que vous avez commencé
18 à travailler pour le Conseil chargé de la défense des droits de l'homme et
19 des libertés en 1989.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Oui, c'est vrai, j'ai commencé en 1989.
21 C'est à ce moment que cette organisation a été créée au Kosovo.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est peut-être un problème de
23 traduction, mais il est écrit que vous avez commencé à travailler en 1997.
24 Oui, c'est ce que vous avez écrit dans votre déclaration préalable; c'est
25 exact, n'est-ce pas ?
26 Madame Moeller ?
27 Mme MOELLER : [interprétation]
28 Q. Madame Bala, concernant votre travail pour l'OSCE, vous en avez parlé,
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1 est-ce que vous pouvez nous dire si vous connaissez Mme Sandra Mitchell ?
2 R. Sandra Mitchell était la directrice du département chargé des droits de
3 l'homme au niveau de la mission de l'OSCE.
4 Q. Dans votre déclaration supplémentaire, vous dites que vous avez pris
5 quelque 300 interviews pour le compte de l'OSCE, est-ce exact ?
6 R. Oui, c'est vrai. Au cours de mon travail pendant deux mois et demi en
7 Macédoine, j'ai travaillé pour l'OSCE, pour la mission de l'OSCE. Pendant
8 cette période, j'ai recueilli quelque 300 déclarations préalables de
9 différents témoins. C'est un chiffre approximatif.
10 Mme MOELLER : [interprétation] Ceci se réfère au paragraphe 5 de la
11 déclaration supplémentaire.
12 Q. Madame Bala, pourriez-vous dire aux Juges de quelle façon vous avez
13 recueilli ces déclarations ?
14 R. [aucune interprétation]
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Lukic ?
16 M. LUKIC : [interprétation] Je soulève une objection, et je voudrais
17 demander au conseil du Procureur de nous dire si ces déclarations ont été
18 communiquées à la Défense, oui ou non. Si elle va poser des questions au
19 sujet de ces déclarations, je voudrais avoir un exemplaire de cela.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si elle ne veut pas répondre ceci ne
21 me surprendrait pas du tout puisqu'elle a posé une question concernant la
22 méthodologie. Ensuite, il faut voir ce qu'elle veut faire par la suite.
23 Est-ce qu'elle veut continuer à poursuivre sur ce sujet ?
24 Mme MOELLER : [interprétation] Oui, je voudrais continuer effectivement
25 parce qu'il s'agirait d'une expérience de première main. Le témoin a pris
26 ces déclarations.
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais M. Lukic va sans doute
28 renouveler son objection. Est-ce que vous avez l'intention de poser des
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1 questions au sujet du contenu de ces déclarations ?
2 Mme MOELLER : [interprétation] Non, ce n'est pas cela que je veux faire.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que M. Lukic pour l'instant
4 votre objection est prématurée. Vous devriez attendre de voir s'il convient
5 de reformuler la même objection par la suite si l'occasion se présente au
6 fur et à mesure que les questions sont posées.
7 Mme MOELLER : [interprétation]
8 Q. Madame Bala, pouvez-vous nous dire comment vous avez recueilli ces
9 déclarations pour le compte de l'OSCE ?
10 R. Comme j'ai dit, l'OSCE avait sa mission en Macédoine, c'était le
11 département des droits de l'homme qui travaillait directement sur le
12 terrain dans les camps de réfugiés. J'ai travaillé à Cegran, Sanokos,
13 Stenkovec 1, 2, 3, mais aussi nous sommes allés dans les maisons où se
14 trouvaient les réfugiés. Les équipes qui recueillaient ces dépositions
15 étaient des professionnels expérimentés. Dans chacun de ces camps nous
16 avions nos tentes. Dans ces camps, il y avait des tentes et nous allions
17 dans une tente à l'autre pour recueillir les informations pour savoir ce
18 qui s'est passé et ce qui est arrivé à ces gens jusqu'au moment où ils
19 arrivent dans les camps de réfugiés.
20 Q. Avant de commencer à recueillir ces dépositions pour le compte de
21 l'OSCE, est-ce que vous avez subi une formation ?
22 M. LUKIC : [interprétation] Excusez-moi, je me vois obliger d'interrompre à
23 nouveau.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Monsieur Lukic.
25 M. LUKIC : [interprétation] Nous avons reçu du bureau du Procureur le
26 résumé de la déposition de ce témoin. Dans ce résumé, on ne parle pas de la
27 méthodologie, quant à la prise de cette déposition.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Moeller ?
Page 2127
1 Mme MOELLER : [interprétation] Il s'agit de la déclaration supplémentaire
2 de ce témoin où, dans les paragraphes 4 et 5, elle parle de son travail au
3 sein de l'OSCE, où elle dit qu'elle a participé personnellement à ces
4 interviews, qu'elle a interviewé quelque 300 personnes.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais ce n'est pas cela qu'il veut
6 dire, M. Lukic. M. Lukic dit que les communications des pièces se font
7 conformément aux articles. Vous avez donné le résumé de la déposition de ce
8 témoin et ces informations ne figurent pas dans ce résumé.
9 Mme MOELLER : [interprétation] Nous parlons des paragraphes 4 et 5.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, M. Lukic parle de l'article 65
11 ter et de votre obligation de fournir un résumé. Vous êtes obligée en vertu
12 de l'article 65 ter de faire un résumé de la déposition future du témoin et
13 dans ce résumé, on ne laisse pas entendre que vous allez poser les
14 questions que vous êtes en train de poser.
15 Mme MOELLER : [interprétation] Je vois effectivement. Nous avons envoyé ce
16 résumé avant de préparer ce témoin, et c'est uniquement pendant cette
17 préparation que le témoin a écrit sa déclaration additionnelle. Nous
18 l'avons ensuite communiquée à la Défense. Effectivement, dans ce résumé en
19 vertu de l'article 65 ter, nous n'avions pas la possibilité de parler de
20 cela et d'inclure ces thèmes.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Autrement dit, vous n'avez pas saisi
22 la possibilité de lui poser ces questions auparavant. Ce n'est pas la même
23 chose.
24 Mme MOELLER : [interprétation] Je peux rajouter une chose, s'il vous
25 plaît ? Madame Bala travaillait pour l'OSCE, elle a travaillé assez
26 longtemps pour l'OSCE. Ceci est contenu dans sa première déclaration de
27 témoin dans son premier paragraphe.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, je suis en train de voir où il
Page 2128
1 est écrit qu'elle ait effectué quoi que ce soit entre mars et juin 1999. Je
2 ne trouve rien.
3 Mme MOELLER : [interprétation] En effet, cela ne se trouve que dans la
4 déclaration supplémentaire. Nous avons prévu dès que nous nous sommes
5 rendus compte au cours du récolement qu'elle avait fait ces travaux nous
6 avons donc immédiatement procédé à la déclaration supplémentaire que nous
7 avons communiquée.
8 M. LUKIC : [interprétation] Mais je n'ai jamais vu cette déclaration
9 supplémentaire.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Lukic, écoutez, laissez-nous
11 réfléchir cinq minutes.
12 M. LUKIC : [interprétation] Très bien.
13 M. VISNJIC : [interprétation] Si je puis vous donner des informations
14 supplémentaires, nous n'avons jamais reçu --
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Laissez-moi réfléchir une minute,
16 Monsieur Visnjic. J'essaie de comprendre un peu où nous en sommes.
17 Monsieur Lukic, que vouliez-vous ajouter ?
18 M. LUKIC : [interprétation] Je voulais ajouter que cette déclaration
19 supplémentaire a été copiée sur e-court, mais nous n'avons pas été avertis.
20 Personnellement, je n'en ai pas été averti, donc je ne savais absolument
21 pas que ce document existait.
22 J'ai appris son existence il y a cinq minutes. Notre commis aux affaires
23 vient juste de me le montrer.
24 LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Visnjic, qu'avez-vous à
25 ajouter ?
26 M. VISNJIC : [interprétation] Oui, tout à fait. Voici ce qui s'est passé
27 exactement. L'Accusation devait nous informer qu'il y avait une déclaration
28 supplémentaire ou une information supplémentaire, nous informer soit par e-
Page 2129
1 mail, soit autrement. Ainsi, on obtiendrait l'information, soit par écrit,
2 soit par e-mail, mais cette fois-ci nous n'avons reçu aucune information.
3 Je viens juste d'apprendre que ce document existe sur le système
4 électronique, et il faut quand même au moins nous prévenir que le document
5 existe, au moins par le biais d'un e-mail, pour nous dire que c'est sur e-
6 court. Comme M. Ackerman vous a expliqué précédemment, au cours du week-end
7 nous avons eu un problème parce que nous n'avons pas eu accès à internet.
8 M. Petrovic vient de me rappeler que si quelque chose de nouveau
9 apparaît sur e-court, il faut que nous le retrouvions, mais on ne sait
10 jamais quels sont les derniers documents qui sont apparus sur e-court. Il
11 aurait au moins fallu nous prévenir par téléphone ou par e-mail, j'imagine
12 que la réciproque s'applique.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je tiens à entendre les avis des
14 autres conseils, si ces avis sont différents, s'ils ont quelque chose
15 d'autre à m'annoncer.
16 M. ACKERMAN : [interprétation] Oui, pour rajouter des choses, en fait je
17 vais sans doute encore compliquer tout cela. J'ai essayé de travailler sur
18 e-court dimanche. Malheureusement, e-court s'est complètement planté
19 dimanche matin très tôt et n'a pas recommencé à marcher avant lundi matin,
20 lundi matin vers 7 heures 30, voir 8 heures.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais qu'est-ce que cela peut
22 faire, puisque de toute façon vous ne saviez même pas que ce document était
23 sur e-court ?
24 M. ACKERMAN : [interprétation] Oui, mais quand même, parfois quand on
25 parcourt e-court pour se tenir au courant, on peut trouver par accident ou
26 par chance le document. Cela peut arriver, par exemple, comme le document
27 qui nous a été communiqué que nous avons perdu pour le retrouver sur e-
28 court.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Monsieur O'Sullivan. Qu'avez-vous
2 à dire ?
3 M. O'SULLIVAN : [interprétation] La même chose que ce qui a déjà été dit,
4 mais il me semble quand même qu'en l'espèce, ce qui vient d'être fait est
5 une violation de l'article 65 ter du Règlement, et le mémoire préalable au
6 procès de l'Accusation doit normalement nous fournir un résumé de tous les
7 faits portant sur tout ce qui va être dit par les témoins qui sont cités.
8 Or, dans ce procès, nous avons été quand même été en phase préalable
9 au procès pendant quatre ans. Il y a eu une Conférence de mise en état
10 après la Conférence de mise en état. Ce qui est étrange quand même, c'est
11 que tout d'un coup, on se rend compte que cette déclaration supplémentaire
12 a été incluse. Normalement, ce qui est dans le mémoire préalable au procès
13 de l'Accusation doit être la chose qui reste, et on ne doit pas continuer à
14 ajouter des documents supplémentaires, et cetera. Sinon, ce n'est pas juste
15 et c'est une violation des droits des accusés.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais comment allez-vous faire
17 cela ? Qu'est-ce qu'on fait si tout d'un coup on a des éléments pertinents
18 qui arrivent au dernier moment ?
19 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Il y a une obligation de l'Accusation de
20 bien préparer quand même ses arguments. Normalement, dans le mémoire
21 préalable au procès, on sait exactement à quoi s'attendre.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, pas du tout, parce que je vous
23 demande de répondre à ma question. Je comprends très bien ce que vous nous
24 dites, mais quand même, parfois il y a des informations qui arrivent tout
25 d'un coup au dernier moment. Or, ce que dont vous me parlez, c'est que ces
26 documents ne se trouvent pas dans le résumé 65 ter.
27 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Néanmoins, il faut qu'ils puissent montrer
28 des motifs raisonnables comme quoi la partie citée vient d'apporter de
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1 nouvelles informations, et il faut aussi qu'ils montrent qu'ils sont
2 coopératifs, et qu'ils veulent absolument nous communiquer les
3 informations, s'ils ont eu ces informations au dernier moment.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous suggérez ici qu'il s'agit du
5 témoin en application de cette procédure ?
6 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Tout à fait.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Parce que vous êtes en train d'avancer
8 qu'ils n'ont pas réalisé et n'ont pas accompli exactement ce qu'il leur
9 était demandé au titre du Règlement en ce qui concerne les déclarations
10 supplémentaires ajoutées au dernier moment.
11 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Tout à fait.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.
13 [La Chambre de première instance se concerte]
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Moeller, voulez-vous ajouter
15 quoi que ce soit avant que nous ne donnions notre décision ?
16 Mme MOELLER : [interprétation] J'aimerais ajouter qu'on essayait juste de
17 savoir ce qui s'est passé pour ce qui concerne sa déclaration
18 supplémentaire. Malheureusement, jusqu'à présent n'arrivons pas à retrouver
19 un e-mail qui montrerait que ce document était communiqué à la partie
20 adverse par ce biais, alors que c'est la pratique normale. Il y a des
21 instructions bien claires qui disent que l'on doit suivre cette pratique,
22 mais il semblerait en effet que la partie adverse n'a pas été notifiée par
23 e-mail de l'existence de cette déclaration supplémentaire, et nous nous en
24 excusons, et nous en sommes fort marris.
25 C'est tout ce que j'avais à rajouter.
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, il y a quand même deux points
27 bien différents à traiter ici. Tout d'abord, la déclaration supplémentaire,
28 elle semble être bien ce qu'elle déclare être, une déclaration
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1 supplémentaire. Ce n'est en fait qu'une légère amplification de ce qui est
2 déjà dit dans la déclaration principale. On a quelques détails
3 supplémentaires sur le vécu de ce témoin, sur d'où venait le témoin, et
4 cetera. Il n'y a rien vraiment de spectaculaire dans cette déclaration
5 supplémentaire. Cela dit, l'autre point qui est à traiter est quand même
6 assez essentiel, suite aux objections qui ont déjà été soulevées en
7 l'espèce, et qui à l'heure actuelle sont étudiées de très près par les
8 Juges de cette Chambre. Certes, dans les documents existants, il n'y a rien
9 qui permette de dire que l'on va poser des questions à un témoin d'une
10 telle importance en l'espèce qui ferait que la partie interrogeant le
11 témoin doive demander ou exempter d'accomplir toutes les obligations dues
12 au titre de l'article 65 ter. Cela c'est la première chose. Avec cela, nous
13 répondons à ce qu'a dit Me O'Sullivan. Il faut bien sûr que la partie qui
14 est en faute, si je puis dire, montre un petit peu quels sont les motifs
15 convaincants qui l'excuse, et ceci doit être fait sous la forme d'une
16 demande à la Chambre de première instance. Bien sûr cette demande peut être
17 fait par oral, mais il faut évidemment aussi en prévenir la Défense en
18 temps normal et ce normalement par écrit.
19 Pour ce qui est de cela, il semble que l'Accusation n'a pas prévenu
20 la Défense qu'il y avait cette déclaration supplémentaire, et n'a pas
21 prévenu qu'il y avait un document supplémentaire au titre de la liste 65
22 ter, et rien de ce qui nous a apporté jusqu'à présent par l'Accusation ne
23 peut justifier cela. Au titre de la méthodologie, la Chambre de première
24 instance considère qu'il ne serait pas juste pour la Défense que l'on
25 permette à ce témoin de continuer à témoigner, du moins tant que ces
26 problèmes portant sur la notification n'ont pas été résolus. Certes, si
27 l'Accusation arrivait à nous prouver qu'il fallait absolument traiter de
28 tout ce qui était dans la déclaration supplémentaire avec le témoin, elle
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1 pourrait à un moment ultérieur demander l'exemption qui est nécessaire et
2 faire revenir ainsi le témoin dans le but de l'interroger sur ce qui est
3 dans cette fameuse déclaration supplémentaire.
4 Etant donné la façon dont les choses ont été présentées à la Défense,
5 à notre avis il ne faut pas continuer, il serait injuste pour la Défense de
6 continuer à poursuivre l'interrogatoire, et nous voulons que
7 l'interrogatoire de ce témoin ne porte que sur ce qui est sur la
8 déclaration principale et non sur la déclaration supplémentaire.
9 Madame Moeller ?
10 Mme MOELLER : [interprétation] Oui, pour clarifier les choses, pour ce qui
11 est de tous les points qui sont dans la déclaration supplémentaire, est-ce
12 que vous nous permettez quand même de poser des questions là-dessus ?
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela a déjà été versé quand même sans
14 objection, vous avez eu de la chance sans doute et il est évident que ce
15 qui est dans la déclaration supplémentaire clarifie uniquement ce qui est
16 dans la déclaration principale et ne va pas vraiment plus loin.
17 Mme MOELLER : [interprétation] En effet, c'est cela.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est pour cela que c'est des éléments
19 de preuve puisque cela a déjà été versé, et nous vous avons bien fait
20 remarquer que si vous aviez voulu le verser, même s'il y avait des
21 objections, nous l'aurions quand même accepté.
22 Mme MOELLER : [interprétation] Merci.
23 M. ACKERMAN : [interprétation] Je tiens quand même à dire que ce n'est pas
24 qu'une clarification car il y a un point où dans la déclaration
25 supplémentaire il y a plus qu'une clarification, il y a vraiment une
26 modification de la déclaration principale. Il y a en a peut-être d'autres
27 en tout cas.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui mais, quand un témoin, Monsieur
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1 Ackerman, dit quelque chose qui est différent de ce qui a été dit
2 auparavant c'est une clarification, il faut absolument le porter à
3 l'attention de tous.
4 M. ACKERMAN : [interprétation] Non, ce n'est pas uniquement une
5 clarification, c'est une modification substantive de la déclaration. En
6 tout cas c'est mon opinion.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais à quoi faites-vous référence ? Je
8 ne vais pas modifier mon point de vue, mais j'aimerais quand même savoir de
9 quoi vous parlez.
10 M. ACKERMAN : [interprétation] Je vous le dirais mais il faudrait que le
11 témoin n'écoute pas.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En effet, nous serons mis au courant
13 de ce dont vous parlez lors de votre contre-interrogatoire.
14 M. ACKERMAN : [interprétation] Merci.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous pouvons continuer.
16 Mme MOELLER : [interprétation]
17 Q. Dans la clarification, les éclaircissements que vous avez apportés à
18 votre déclaration, Madame Bala, nous allons en revenir au 26 mars 1999.
19 Vous dites que ce jour-là vous avez noté quelques observations, vous avez
20 regardé un peu ce qui se passait, et vous avez observé ce qui se passait
21 dans différents quartiers, Dragodan et autres. Pourriez-vous expliquer à la
22 Chambre exactement d'où vous avez observé la situation ?
23 R. Dans ma déclaration du 26 juin 1999, j'ai observé les choses sous trois
24 angles. Je pouvais voir Dragodan, Vranjevc et Kolavic. Ma maison se trouve
25 dans la partie ancienne de Pristina. C'est une maison qui a cinq étages.
26 Sans toit, enfin avec une terrasse, une grande terrasse. C'est de la
27 terrasse que je pouvais observer ces quatre endroits, et je les voyais très
28 bien, je voyais les mouvements, la façon dont les gens se déplaçaient, ce
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1 qui était en train de se passer. Quand j'avais du mal à voir, j'ai pu
2 utiliser des jumelles afin de mieux observer ce qui se passait dans des
3 différents quartiers de Pristina. Je n'ai pas vraiment pu voir les zones
4 très éloignées de Pristina qui se trouvaient très loin de là où j'habitais.
5 Mme MOELLER : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, afficher la
6 pièce P13 sur l'écran.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La P13.
8 Mme MOELLER : [interprétation] Oui, il s'agit d'une carte de Pristina.
9 M. LUKIC : [interprétation] Je suis désolé. Je voudrais vous dire quelque
10 chose. Il faut clarifier quelque chose, c'est peut-être une erreur. Mais le
11 témoin a dit à la page 69, ligne 4. "Dans ma déclaration du 26 juin 1999,"
12 or nous n'avons jamais vu cette déclaration du 26 juin 1999.
13 Mme MOELLER : [interprétation] Puis-je vous assister ici ?
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Allez-y.
15 Mme MOELLER : [interprétation]
16 Q. Madame Bala, vous avez compris ce qu'a dit le conseil de la Défense,
17 vous avez fait référence à une date du 26 juin 1999. En tout cas c'est ce
18 qui est écrit sur le compte rendu. Etes-vous en train de faire référence à
19 une déclaration que vous auriez fait ce jour-là, ou est-ce que vous faisiez
20 référence à une déclaration du 30 juin 2001 ou du 16 août 2006 ?
21 R. Le 26, je parlais des observations que j'ai faites, les observations
22 sur ce qui s'est passé le 26 juin 1999. C'est cela qui se trouve dans ma
23 déclaration. Cette déclaration a été faite aussi en juillet et en juin
24 2001.
25 Q. Il faut que je vous repose la question parce que là vous nous parlez
26 d'événements qui auraient eu lieu le 26 juin de 1999.
27 L'INTERPRÈTE : L'interprète se corrige, il s'agit des événements du 26 mars
28 1999.
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1 Mme MOELLER : [interprétation] Bien, je crois que l'interprète a corrigé
2 l'erreur, donc le problème est résolu.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Tout à fait.
4 Mme MOELLER : [interprétation]
5 Q. Donc vous dites que depuis la terrasse de votre maison, enfin le toit
6 quoi, vous voyiez très bien. Où se trouvait exactement votre maison ?
7 Pourriez-vous nous dire quel était le quartier ?
8 R. J'habitais à Ruga e Llapi, numéro 30. C'est dans la vieille ville près
9 du vieux marché de Pristina.
10 Q. Il s'agirait du centre-ville ?
11 R. Non, pas tout à fait. Ce n'est pas au centre de la ville, c'est au
12 nord-ouest, dans la partie nord-ouest de la ville.
13 Mme MOELLER : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, zoomer sur
14 la carte pour que le témoin puisse mieux nous indiquer où se trouvait sa
15 maison. Il faudrait remonter un peu la --
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce qu'on peut zoomer exactement sur
17 le quartier concerné sur la carte de Pristina.
18 Mme MOELLER : [interprétation]
19 Q. Pourriez-vous maintenant marquer l'endroit avec le stylo que va vous
20 donner l'huissier ?
21 R. Oui, ma maison se trouve ici. Ce n'est pas extrêmement clair. Vous avez
22 différents quartiers de Pristina. Ma maison se trouverait ici, et depuis ma
23 maison, je voyais Dragodan, Vranjevc, Kolovica, qui se trouve à l'arrière
24 de ma maison, et Taslixhe.
25 Q. Merci.
26 Mme MOELLER : [interprétation] Pourrions-nous prendre un cliché maintenant
27 de cette carte et donner à cette carte un numéro IC ?
28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit de la
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1 pièce IC 15.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
3 Mme MOELLER : [aucune interprétation]
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Moeller, il nous faut prendre
5 une nouvelle pause, mais est-ce que vous en avez pour longtemps en ce qui
6 concerne votre interrogatoire principal ?
7 Mme MOELLER : [interprétation] Non, il me semble que dans 10 à 15 minutes,
8 j'en aurai terminé.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans ce cas, nous reprendrons à 18
10 heures.
11 --- L'audience est suspendue à 17 heures 29.
12 --- L'audience est reprise à 18 heures 00.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Moeller ?
14 Mme MOELLER : [interprétation] Avant de poursuivre avec Mme Bala, peut-on
15 savoir s'il est possible de commencer avec le témoin suivant aujourd'hui ?
16 Sinon, on lui permettra de partir. Il attend ici.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur O'Sullivan est celui qui est
18 très bien placé pour nous dire combien de contre-interrogatoires il y aura.
19 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Il n'y en aura pas beaucoup, d'après ce
20 que j'en sais maintenant.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, si c'est vers 18 heures 15 ou 20
22 que vous commencez, est-ce qu'il nous faut garder le témoin suivant ?
23 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Non.
24 Mme MOELLER : [interprétation] Merci.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, le témoin peut disposer. En
26 fait, ce serait vraiment très utile si nous pouvions en terminer avec ce
27 témoin aujourd'hui, puisqu'il faudra prendre des dispositions pour entendre
28 le témoin suivant. Ceci nous permettrait de ne pas perdre de temps demain
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1 matin. Allez-y, Madame Moeller.
2 Mme MOELLER : [interprétation]
3 Q. Madame Bala, nous parlions du 26 mars 1999. Vous avez dit que
4 vous avez pu voir la VJ, le MUP et des civils serbes en train de détruire
5 des maisons albanaises, des commerces albanais dans votre localité. Comment
6 est-ce que vous pouviez savoir qu'il s'agissait bien de la VJ, du MUP et
7 des civils serbes ?
8 R. Je vis au Kosovo. C'est là que j'ai grandi. Par conséquent, je sais
9 bien comment il faut faire pour faire la différence entre les policiers,
10 les soldats, les civils. L'armée avait des uniformes vert foncé, la police
11 avait des uniformes de camouflage bleu foncé, et il y avait des civils qui
12 portaient parfois des anoraks ou des vestes de la police. Parfois, ils
13 avaient des armes, divers types d'armes.
14 Q. Le 29 mars, je voudrais qu'on en parle. Vous avez dit que c'est le jour
15 où vous avez été chassée de chez vous ?
16 R. Oui.
17 Q. Dans votre déclaration, vous avez dit que l'officier de la VJ et un
18 tzigane sont venus à votre maison. Savez-vous qui était le tzigane ?
19 R. Oui, je le sais. C'était Ivica, son prénom. Je ne me rappelle pas de
20 son nom de famille. Il vivait dans la ville. Sa maison était dans mon
21 quartier. Il était policier chargé de la circulation et il avait sous son
22 contrôle la zone où nous vivions, notre quartier.
23 Q. Dans votre déclaration, vous dites qu'on vous a emmenée à la gare
24 ferroviaire, qu'on vous a fait embarquer à bord d'un train et que ce train
25 est arrivé à la frontière Hani i Elezit. Vous dites que des forces serbes
26 étaient là pour vous surveiller. Est-ce que vous pouvez nous préciser ce
27 que vous entendez par les "forces serbes" ?
28 R. C'était une après-midi. Il est difficile de se rappeler l'heure où
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1 différentes choses se sont produites. Je pense que nous sommes arrivés à
2 Pristina à la gare ferroviaire vers 17 heures, et depuis la matinée jusqu'à
3 ce moment-là, nous avions marché dans les rues de Pristina pendant tout ce
4 temps-là, à Fushe Kosova, à Lipijan [phon], Ferizaj, Hani i Elezit, le
5 train s'est arrêté, il s'est arrêté partout. On a pu reconnaître toutes les
6 stations. Il y avait là des policiers, des paramilitaires ou des soldats.
7 Pendant tout ce temps, ils pointaient leurs fusils sur nous, sur la
8 direction du train. A chaque fois que le train s'est arrêté, on nous a
9 empêchés de les regarder directement.
10 M. ACKERMAN : [interprétation] Mais je ne comprends pas pourquoi elle
11 raconte son histoire. Elle ne répond pas vraiment à la question. La
12 question était : "Qui étaient les forces serbes ?"
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne suis pas d'accord.
14 Allez-y, poursuivez.
15 M. ACKERMAN : [interprétation] Mais s'il vous plaît, examinez ce qu'elle
16 est en train de dire.
17 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]
18 M. ACKERMAN : [interprétation] La question était : "Qu'entendez-vous par
19 forces serbes ?" Maintenant, le témoin est en train de raconter sa journée.
20 Elle ne dit jamais ce qu'elle entend par l'expression "forces serbes". Tout
21 simplement, elle ne répond pas à la question.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] S'il vous plaît, poursuivez.
23 M. ACKERMAN : [aucune interprétation]
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous ai entendu, Maître Ackerman.
25 Madame Bala, s'il vous plaît, allez-y et répondez à la question.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai dit, pendant tout ce temps, à
27 Fushe Kosova, Lipijan, à Ferizaj, à Hani i Elezit, à chaque fois que le
28 train s'est arrêté, il a été entouré de forces serbes, la police, l'armée
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1 et les forces que je n'avais jamais vues de ma vie, jamais auparavant, du
2 moins pas à Pristina. Ils portaient des uniformes noirs avec des drapeaux
3 blanc, rouge, bleu. Ils avaient des insignes à différents endroits de leurs
4 uniformes. C'étaient des uniformes serbes. C'étaient la police, l'armée et
5 ces autres forces qui ne faisaient pas partie des forces régulières ou
6 légales de Serbie.
7 Mme MOELLER : [interprétation]
8 Q. Ces forces que vous venez de décrire, elles travaillaient de concert ?
9 Vous les avez vues ensemble ?
10 R. Oui, partout où nous nous sommes arrêtés, partout où le train s'était
11 arrêté, ils étaient ensemble.
12 Q. Une dernière question, Madame Bala, pour ma part. Etes-vous partie de
13 Pristina et du Kosovo parce que vous aviez peur des bombardements de
14 l'OTAN ?
15 R. Que ce soit moi-même ou ma famille, aucun d'entre nous n'est parti de
16 Pristina à cause du bombardement de l'OTAN. Nous avons été forcés à partir
17 par l'armée, la police et ces autres forces qui se sont trouvées sur place
18 à Pristina à ce moment-là.
19 Mme MOELLER : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le
20 Président.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Moeller, je vous remercie.
22 Maître O'Sullivan ?
23 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je n'ai pas de
24 questions à poser. L'ordre dans lequel nous allons aller : général
25 Pavkovic, général Lazarevic, général Lukic, M. Sainovic, le général
26 Ojdanic.
27 [La Chambre de première instance se concerte]
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ackerman ?
Page 2142
1 M. ACKERMAN : [interprétation] C'est la journée de toutes les surprises,
2 Monsieur le Président. Je suis vraiment très surpris de l'ordre dans lequel
3 se déroulera le contre-interrogatoire; c'est différent de ce que j'avais
4 demandé.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien --
6 M. ACKERMAN : [interprétation] Je suppose qu'on m'a simplement désigné pour
7 essayer le plâtre.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais allons-y, alors.
9 M. ACKERMAN : [interprétation] C'est l'un de ces jours où rien ne semble
10 fonctionner.
11 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Excusez-moi d'intervenir, mais en
12 perse, "Bala" signifie : quelqu'un qui est au-dessus de tout le reste.
13 C'est cela, la signification de ce nom.
14 M. ACKERMAN : [interprétation] Je vous remercie.
15 Contre-interrogatoire par M. Ackerman :
16 Q. [interprétation] Madame Bala, je suis John Ackerman, je représente le
17 général Pavkovic et j'ai quelques questions à vous poser. Si vous écoutez
18 attentivement la question et si vous y apportez une réponse précise, nous
19 en aurons terminé rapidement.
20 Vous êtes quelqu'un qui est très intelligente, d'après ce que je peux voir,
21 et aussi qui fait preuve d'une grande prudence par rapport à ce que vous
22 faites, à ce que vous dites. L'une des observations que vous avez faites
23 lorsqu'on vous a remis votre déclaration pour vous demander si c'était bien
24 votre déclaration, cela a été de bien vérifier si c'était le cas. Ai-je
25 raison ?
26 R. Oui, c'est ce que j'ai fait.
27 Q. C'est avec cette même attention minutieuse que vous avez parcouru tout
28 ce processus ici, à savoir que vous avez fourni toutes vos déclarations en
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1 l'espèce et aujourd'hui également ?
2 R. Oui.
3 Q. Vous dites que vous travaillez pour l'OSCE à Pristina, ou plutôt que
4 vous y avez travaillé jusqu'au départ de l'OSCE du Kosovo. De toute
5 évidence, vous n'êtes pas partie avec eux, vous êtes restée sur place
6 lorsqu'ils sont partis. Est-ce que vous avez demandé de partir avec l'OSCE
7 ou est-ce que votre travail s'est terminé à ce moment-là ? Votre contrat
8 était terminé ?
9 R. Lorsque la mission de l'OSCE a été évacuée, tout le personnel local
10 s'est vu offrir la possibilité d'être évacué en Macédoine avec la mission,
11 parce qu'ils avaient peur que le personnel local ne fasse l'objet de
12 meurtres, d'enlèvements, ce genre de chose. On m'a proposé, on m'a donné la
13 possibilité de partir, mais j'avais ma famille là-bas et je voulais être
14 avec mon peuple.
15 Q. Donc, l'OSCE a procédé à l'évacuation parce qu'ils étaient préoccupés
16 par le danger éventuel et imminent, et c'est pour cela qu'ils ont donné
17 possibilité à toute personne qui a travaillé pour eux de partir avec eux;
18 c'est bien cela ?
19 R. Comme je l'ai dit, le personnel local s'est vu offrir la possibilité de
20 partir, et moi aussi, on m'a proposé cela, mais je n'ai pas accepté. Encore
21 une fois, l'OSCE a proposé ceci à tous les membres de son personnel local.
22 Q. Voyez-vous, c'est comme cela qu'on perd du temps. Vous avez répété
23 votre réponse alors que vous auriez pu dire simplement oui.
24 Allant dans ce même sens, le 30 juin 2001, vous avez fait une
25 déclaration au bureau du Procureur, et cette déclaration couchée par écrit,
26 rédigée en anglais, vous a été lue, relue, et vous avez eu l'occasion de
27 signer cela dans votre langue après avoir bien examiné son exactitude. Vous
28 avez confirmé que cette déclaration était exacte et véridique au mieux de
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1 vos souvenirs. Vous avez paraphé ou signé cette déclaration sur chacune de
2 ses pages ?
3 R. Oui.
4 Q. Vous qui faites preuve de cette extraordinaire prudence, qui cherchez à
5 être toujours précise et à dire bien la vérité, vous avez certainement
6 entendu dire qu'il figure dans votre déclaration la chose suivante : "Je me
7 suis adressée à un certain nombre de civils albanais qui m'ont dit qu'ils
8 se préparaient à l'invasion serbe et que c'est à cause de cette peur qu'ils
9 envoyaient leur famille à l'extérieur, hors de Pristina." C'est ce qui y
10 figure, n'est-ce pas ?
11 R. Dans le cadre de mes préparatifs à cette déposition à La Haye, j'ai
12 découvert un malentendu. Je ne voulais pas dire que les gens se préparaient
13 à l'invasion, j'ai dit que -- en fait, je voulais dire qu'ils ne savaient
14 pas quoi faire. Je pense que c'était cela, le malentendu entre moi et la
15 personne à qui j'ai donné mon entretien.
16 Q. Mais vous auriez pu signaler ce malentendu. Or, vous avez dit que
17 c'était véridique et vous l'avez signée. Est-ce que vous pouvez me répondre
18 par un oui ou par non ?
19 R. Vous pouvez répéter votre question, s'il vous plaît ?
20 Q. On vous a donné cette possibilité de préciser d'éventuels malentendus
21 parce qu'on vous a donné lecture de la déclaration, et vous n'avez pas
22 précisé la déclaration, vous avez dit qu'elle était véridique et vous
23 l'avez signée, n'est-ce pas ?
24 R. Oui.
25 Q. Vous avez aussi signé la page où apparaît ce texte. La signature qui
26 apparaît en bas en droite, c'est bien votre signature, n'est-ce pas ?
27 R. Oui.
28 Q. Quand vous êtes venue faire cette déclaration supplémentaire ici le 16
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1 août, je pense vous avez fait cette déclaration supplémentaire à ce moment-
2 là ? Vous avez dit que ce qui figure au paragraphe 4, ce n'est pas vraiment
3 cela, que le 20 mars, vous avez parlé à ces gens de la communauté
4 albanaise, ces civils, et qu'ils ne vous ont pas dit qu'ils se préparaient
5 à envoyer leur famille de Pristina. Donc, vous avez modifié ce passage,
6 n'est-ce pas ?
7 R. J'ai dit qu'il y a eu un malentendu, ici. Ce malentendu réside dans la
8 manière dont ils ont interprété mon anglais, puisque j'ai fait ma
9 déclaration en anglais. Tout simplement, c'est un malentendu. J'ai dit
10 qu'ils avaient peur, qu'ils redoutaient de ce qui allait advenir à leur
11 famille, mais je ne voulais pas dire par là que les familles se préparaient
12 à envoyer leurs membres ailleurs. C'est simplement une mauvaise
13 interprétation de mon anglais.
14 Q. Mais si vous avez fait votre déclaration en anglais, je suppose qu'on
15 vous a donné la possibilité de la relire en anglais avant de confirmer sa
16 véracité et de la signer; est-ce bien cela ?
17 R. Oui. J'ai eu la possibilité de la lire et de la voir. Tout ce que je
18 peux dire encore une fois, c'est qu'il y a eu un malentendu sur ce point.
19 J'ai fait une erreur lorsque j'ai laissé passer cela, lorsque je ne l'ai
20 pas vu. Je n'avais pas l'intention de dire que les familles se préparaient
21 à envoyer leurs membres ailleurs.
22 Q. C'est en albanais qu'on vous en a donné lecture ?
23 R. La déclaration à Pristina, cette déclaration m'a été lue en anglais,
24 puisque je l'ai donnée en anglais, tandis qu'à La Haye, j'ai fait ma
25 déclaration en albanais, et de là probablement ce malentendu entre ces deux
26 langues, ces deux versions, malentendu.
27 Q. Donc, à la fin de la déclaration que vous avez donnée à Pristina qui
28 porte votre signature ainsi que la date, d'après ce que je vois, vous
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1 confirmez qu'on vous a lu ces six pages en albanais, mais ceci ne serait
2 pas vrai non plus; alors ce serait une autre erreur, ici ?
3 R. Pourriez-vous répéter la question ?
4 Q. Est-ce que vous avez sous vos yeux votre déclaration ?
5 R. Oui.
6 Q. Veuillez s'il vous plaît regarder la dernière page, la page intitulée
7 "Confirmation du témoin", où l'on peut lire : "Les six pages de cette
8 déclaration m'ont été lues dans la langue albanaise," et ensuite vous avez
9 signé cela. Maintenant, vous nous dites que ce n'est pas exact, que cette
10 déclaration vous a été lue en anglais.
11 R. La déclaration en albanais, c'est celle que j'ai donnée à La Haye,
12 alors que celle de Pristina, je l'ai donnée en anglais.
13 Q. [aucune interprétation]
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Essayez, s'il vous plaît, de répondre
15 à la question précise que l'on vous pose. Ecoutez-là attentivement.
16 M. ACKERMAN : [interprétation]
17 Q. La question que je vous ai posée, c'est de savoir si la déclaration à
18 Pristina -- est-ce que vous êtes en train de la regarder, de regarder cette
19 déclaration préalable ? On peut y lire comme suit : "Cette déclaration
20 consistant de six pages m'a été lue en langue albanaise." Ensuite, vous
21 avez signé cette déclaration préalable. Maintenant, vous nous dites que ce
22 n'est pas vrai, puisque vous nous avez dit que cette déclaration n'a pas
23 été lue en albanais, donc vous avez signé quelque chose qui ne correspond
24 pas à la vérité. Est-ce que c'est bien cela que vous êtes en train de me
25 dire ?
26 R. Non, je n'ai jamais menti dans ma déclaration. Je pense que, tout
27 simplement, il y a une confusion, ici. La déclaration en albanais, je l'ai
28 faite ici, à La Haye. C'est pour cela qu'elle m'a été relue en langue
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1 albanaise. Mais je ne sais pas de quelle déclaration vous parlez
2 exactement. Je l'ai relue, et c'est la même. Rien n'a été ajouté.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas exact. Ce ne peut pas
4 être exact. On vous demande d'examiner une page précise de la déclaration
5 préalable que vous avez faite le 30 juin 2001. A la fin, on peut lire un
6 paragraphe intitulé : "La confirmation du témoin". On peut y lire comme
7 suit : "Cette déclaration préalable consistant de six pages m'a été lue en
8 langue albanaise." On vous dit que ce n'est pas exact, tout simplement.
9 C'est ce que vous dit M. Ackerman.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Six années après, on peut toujours se rappeler
11 des événements, mais si j'ai bien dit cela à la dernière page, cela veut
12 dire qu'on me l'a relue en albanais. Je n'avais pas vu la dernière page.
13 Donc, il y avait peut-être un problème. C'est vrai que j'ai fait cette
14 déclaration en anglais, je l'ai faite en anglais. Mais il s'est passé
15 tellement de temps entre-temps que maintenant, je ne suis pas sûre s'ils me
16 l'ont relue en anglais ou en albanais. Ce que je sais, en revanche, c'est
17 que j'ai vérifié toute cette déclaration. Je suis désolée s'il y a un
18 malentendu. C'est que tout simplement, je ne me rappelle pas exactement de
19 comment cela s'est passé.
20 M. ACKERMAN : [interprétation]
21 Q. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Il y a six ans, vous l'avez
22 examinée de près, et à l'époque, vous avez dit que si quelque chose était
23 exact, c'était exact. Depuis, vous avez peut-être oublié des éléments.
24 Donc, quand à l'époque vous dites : "J'ai parlé avec un certain nombre de
25 civils albanais qui m'ont dit qu'ils se préparaient pour l'invasion serbe à
26 cause de leur peur et qu'ils renvoyaient leur famille en dehors de la
27 Pristina, c'était exact," c'est tout simplement que depuis, vous avez
28 oublié tout cela. C'est pour cela que vous avez fait une déclaration
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1 supplémentaire dans laquelle vous dites que ce n'était pas exact. Est-ce
2 que j'ai raison ?
3 R. Moi, les discussions avec les gens que je décris, donc avec les
4 gens que j'ai rencontrés, sont vraies. Je n'oublierai jamais ce qu'ils
5 m'ont dit. Je n'oublierai jamais leur peur, leur horreur, l'expression de
6 leur visage. Laissez-moi terminer.
7 Q. Mais les -- répondez à ma question. Je ne vous demande pas de faire un
8 discours.
9 R. Je ne fais pas de discours, je suis en train d'expliquer ce qui
10 s'est passé. Les Albanais avec lesquels j'ai discuté --
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je suis désolé, Monsieur Ackerman,
12 mais je ne suis pas du tout d'accord avec votre approche. Je ne pense pas
13 du tout que le témoin dépasse les limites raisonnables de la question que
14 vous lui avez posée.
15 Vous pouvez continuer, Madame.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Au cours des entretiens que j'ai pu avoir, le
17 20 mars 1999, quand je suis allée dans la ville, dans différentes parties
18 de Pristina, j'ai parlé avec beaucoup de gens et j'ai vu la peur, l'horreur
19 sur leur visage. Ils avaient peur de ce qui pourrait arriver à leur
20 famille, parce qu'ils étaient laissés à la merci de leur sort. Ils
21 n'étaient pas préparés pour la situation. Ils n'étaient pas préparés à
22 renvoyer leur famille. Je ne savais pas quoi faire avec eux. Je me souviens
23 de ces conversations et de ces situations puisque j'avais à l'époque autant
24 peur qu'eux.
25 M. ACKERMAN : [interprétation]
26 Q. Ces conversations, elles ont eu lieu le 20 mars, n'est-ce pas ?
27 R. Oui.
28 Q. Et vous vous en souvenez très bien aujourd'hui, c'est inscrit dans
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1 votre mémoire ?
2 R. Ces événements, cette horreur, cette peur, c'est vivant. Ce sont des
3 images qui vivent dans les esprits de tous les Albanais, pas seulement dans
4 mon esprit. Si d'ici 700 ans, si vous me demandiez de vous en parler à
5 nouveau, je serais prête à le faire, si j'étais vivante, évidemment.
6 Q. Est-ce que vous vous souvenez donc de ces images aussi bien aujourd'hui
7 qu'à l'époque où vous avez fait votre déclaration à Pristina en 2001. Vous
8 ne pouviez pas les oublier. Vous vous en rappelez très bien, n'est-ce pas ?
9 R. Oui, je m'en souviens très bien. J'ai devant mes yeux toutes ces
10 choses-là, parce que là, il s'agit de la vie ou de la mort et on ne peut
11 pas oublier des événements comme cela. Je vous ai dit que j'ai peut-être
12 fait une erreur, une petite erreur technique, mais je confirme ma
13 déclaration, ce que j'y ai dit, et je le répèterai dans l'avenir.
14 Q. Vous voulez nous dire que c'était une époque terrible. Vous voulez dire
15 que tout cela était terrible, que c'était une période terrible, et je suis
16 tout à fait d'accord avec vous, donc je n'ai pas besoin d'entendre tout
17 cela et je pense que les Juges de la Chambre comprennent. Tout ce que vous
18 devez faire, c'est de répondre aux questions que je vous pose. Je vous ai
19 demandé si cette déclaration vous a été relue en albanais ou non, et vous
20 avez dit : oui, peut-être que je me suis trompée, peut-être que cela a été
21 relu en albanais.
22 Quand je parle du paragraphe 4 et quand je vous dis : vous êtes sûre
23 que vous ne vous êtes pas trompée là-dessus non plus; puisque vous ne
24 pouvez pas tout simplement répondre à la question que je vous ai posée. A
25 l'époque, quand vous avez signé cette déclaration, vous avez revu tout cela
26 et vous avez dit que c'était exact.
27 Mme MOELLER : [interprétation] Monsieur le Président --
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Si j'ai signé cette déclaration le 16 août
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1 2006 et au mois de juin 2001, tout est vrai, ce qui s'y trouve aussi bien
2 dans la déclaration en albanais que dans la déclaration en anglais.
3 M. ACKERMAN : [interprétation]
4 Q. Les deux déclarations sont exactes, sont correctes ? Tout est exact
5 dans les deux déclarations; oui ou non ?
6 R. Oui.
7 Q. Bien. Je vais vous dire ce que je pense, et vous avez la possibilité de
8 me répondre. Je vous dis que vous avez changé votre déclaration ici, au
9 niveau du paragraphe 7 de votre déclaration additionnelle, parce que vous
10 avez dit à Pristina, dans la déclaration de Pristina, vous avez dit que
11 vous avez parlé avec un certain nombre de civils le 20 mars qui se
12 préparaient pour l'invasion, et à cause de cette peur, ils renvoyaient leur
13 famille à l'extérieur de Pristina. Vous avez très bien compris que ce
14 n'était pas "politically" correct, donc politiquement correct, et
15 qu'aujourd'hui personne ne soutient cette ligne politique et qu'il faut
16 dire que personne n'est parti de son propre chef. Donc, en venant ici, en
17 arrivant ici, vous avez changé cette portion de votre déclaration. Ce que
18 vous avez dit ici dans votre déclaration ici à La Haye, ce n'est tout
19 simplement pas vrai.
20 R. Monsieur, je devrais peut-être vous répéter. J'ai vraiment discuté avec
21 ces gens-là. On parlait de leur peur, de la peur de ce qui allait se passer
22 avec leur famille. Ils n'étaient pas en train de se préparer pour envoyer
23 leur famille à l'extérieur du Kosovo. C'était peut-être une erreur de ma
24 part. Je n'ai peut-être pas relu cela avec beaucoup d'attention. Peut-être
25 que je n'ai tout simplement pas perçu cela. L'essentiel y est. Ils avaient
26 peur pour le futur de leur famille, pour la vie de leur famille.
27 Q. Très bien. J'en ai terminé de ce thème. Je vais aborder un autre thème.
28 Dans votre déclaration, vous parlez surtout des observations que vous avez
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1 faites par rapport à ce qui s'est passé à Pristina pendant les quelques
2 journées qui vont suivre et vous avez observé tout cela de chez vous.
3 R. Oui.
4 Q. Bien.
5 M. ACKERMAN : [interprétation] C'est une portion qui est très difficile
6 pour le contre-interrogatoire, puisque moi, je n'ai pas pu visiter
7 Pristina, donc pour moi, il est très difficile de lui poser des questions à
8 ce sujet parce que je ne sais pas si elle a pu vraiment voir les choses
9 qu'elle dit avoir vues. J'ai été conseillé, donc je vais poser des
10 questions en me basant sur ce que l'on m'a dit.
11 Q. Cet endroit que vous avez noté sur la carte, l'endroit où se trouvait
12 votre maison où vous auriez aperçu, vu toutes ces choses-là partout dans la
13 ville, n'est-il pas exact qu'il y a beaucoup de bâtiments très hauts qui
14 devaient normalement vous empêcher de voir ? Il y a la municipalité, il y a
15 un dépôt, il y a une banque, il y a un grand hôtel, il y a la radio
16 Pristina, il y a beaucoup de bâtiments très hauts qui auraient pu ou
17 auraient dû obstruer votre vue.
18 R. La maison où j'habite se trouve dans la vieille partie de la ville,
19 près du marché. A cet endroit, il n'y a pas de gros immeubles, il n'y a pas
20 de banque. Il n'y a pas de bâtiments de 15 ou 20 étages. C'est dans la
21 vallée, vous pouvez voir Vranjevc, Kolovica, Taslixhe, Dragodan, Paslija
22 [phon], Kolevica [phon]. Tous ces quartiers-là, ce sont les quartiers avec
23 les maisons de particuliers et ce sont les quartiers qui sont sur les
24 collines. Je n'étais pas la seule à avoir pu observer le mouvement des
25 forces de la police à Pristina. D'autres personnes ont pu voir cela. Ma
26 maison n'est pas dans le centre de Pristina. C'est dans le centre Pristina
27 que vous trouvez ces bâtiments dont vous avez parlé : le dépôt, la radio
28 Pristina, et cetera. Dans ma déclaration, je n'ai pas dit que j'ai vu ces
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1 choses-là à Dardanija, Lakrish et d'autres quartiers où il est impossible
2 d'observer, de voir de chez moi. Donc, je pouvais voir Dragodan, je pouvais
3 voir tout le quartier de Vranjevc, puisque c'est du côté de la colline que
4 je peux voir. Je pouvais voir Kolovica, qui se trouve à l'est, donc à l'est
5 de la maison où j'habite, et Taslixhe, qui est en face de la maison où
6 j'habite. Donc, autour de l'endroit où j'habite, il y a plein de collines.
7 Q. Vous pouviez observer ce qui se passe aussi bien pendant le jour que
8 pendant la nuit, n'est-ce pas ?
9 R. Oui.
10 Q. [aucune interprétation]
11 R. Aussi bien le jour comme la nuit.
12 Q. La nuit, vous observiez tout cela, vous regardiez tout cela à travers
13 les jumelles de nuit avec lesquelles vous pouvez regarder la nuit ?
14 R. Oui.
15 Q. Comment vous avez trouvé ces jumelles infrarouges ? Ce n'est pas
16 vraiment facile à trouver, cela. Ce n'est pas commun que d'avoir des
17 jumelles infrarouges.
18 R. Oui. C'est vrai que ce n'est pas facile, avoir cela. Quand le personnel
19 de l'OSCE est parti en quittant le Kosovo, ils avaient le droit d'apporter
20 20 kilos et ils pouvaient prendre leurs affaires, en gros. Donc, ces
21 jumelles sont restées dans ma voiture. Parfois, enfin, quand j'ai emmené en
22 voiture un certain nombre de membres de la mission de l'OSCE dans le centre
23 général de Pristina qui se trouvait dans le building de Kosova Film, donc
24 dans ce bâtiment-là, c'est là que quelqu'un a laissé ces jumelles.
25 Q. Est-ce que vous savez quelle était la marque de ces jumelles
26 infrarouges ?
27 R. Non, c'était la première fois que j'ai utilisé des jumelles comme cela.
28 Q. Qu'est-ce que vous pouviez voir avec ces jumelles ? Cela ressemblait à
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1 quoi ?
2 R. Avec ces jumelles, la nuit, quand il n'y avait pas d'électricité, on
3 pouvait entendre les détonations, des explosions, des tirs dans différents
4 endroits que j'ai mentionnés : Dragodan, Vranjevc, Kolovica et Taslixhe.
5 Avec ces jumelles, j'ai pu observer les mouvements des forces de la police,
6 l'armée, les véhicules, et cetera.
7 Q. Cela ressemblait à quoi ? Est-ce que vous pouviez discerner les
8 couleurs comme s'il faisait jour ? A quoi cela ressemblait ?
9 R. Les couleurs que je pouvais voir, c'étaient des couleurs plutôt
10 verdâtres. Enfin, tout était un peu vert, mais je pouvais clairement voir
11 un char, le mouvement des personnes armées, les blindés, les jeeps, et
12 cetera.
13 Q. Tout cela se trouvait à quelle distance par rapport à l'endroit où vous
14 étiez pendant que vous étiez en train de les regarder à travers ces
15 jumelles infrarouges ?
16 R. Je ne sais pas, je n'ai pas mesuré tout cela. Tout ce que je peux dire,
17 c'est que les quartiers que j'ai mentionnés, ces quartiers sont assez près
18 de l'endroit par rapport à l'endroit où je suis, où j'habite.
19 Q. Est-ce que la carte est toujours sur l'écran devant vous, la carte de
20 Pristina ?
21 R. Oui, effectivement.
22 Q. Pourriez-vous me montrer sur cette carte --
23 M. ACKERMAN : [interprétation] Je ne sais pas très exactement quelles sont
24 les règles qui s'appliquent, je ne sais pas si le témoin a le droit de
25 dessiner sur cette carte, puisque c'est une pièce de l'Accusation. Je ne
26 sais pas si j'ai le droit de lui faire apposer le moindre signe.
27 Visiblement, oui, j'ai le droit.
28 Q. Montrez-moi sur la carte ce que vous pouviez observer à propos de ces
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1 déplacements de chars et de blindés, de troupes, et cetera.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais je crois qu'il vous faut une
3 autre carte, parce que celle-ci a déjà été marquée, elle a reçu une cote.
4 M. ACKERMAN : [interprétation] Oui, je m'en doutais.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il faut retourner à la pièce P13, qui
6 est la carte sans aucune annotation. Pourrions-nous la voir affichée à
7 l'écran ?
8 Mme MOELLER : [interprétation] Oui, il faut peut-être que l'on zoome un
9 peu, enfin, que l'on fasse -- qu'on agrandisse un peu moins la carte pour
10 avoir une meilleure vue de la carte dans sa quasi-totalité -- enfin, de ce
11 quartier-là, en tout cas.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Allez-y.
13 M. ACKERMAN : [interprétation]
14 Q. Tout d'abord, pourriez-vous marquer sur cette carte l'emplacement de
15 votre maison ?
16 R. Je pouvais voir cette partie par ici --
17 Q. Non, je vous ai demandé d'abord de marquer l'emplacement de votre
18 maison et vous l'avez fait. Maintenant, montrez-nous sur la carte les zones
19 que vous pouviez observer, mais vous n'avez observé de choses importantes
20 qu'en utilisant ces jumelles infrarouges. Si vous pouviez mettre des croix
21 sur les emplacements où vous avez observé des choses à l'aide des jumelles
22 infrarouges, et vous nous dites ensuite ce que vous avez observé.
23 R. Il faudrait arriver à montrer un petit peu ce qui est plus en bas.
24 Mme MOELLER : [interprétation] Peut-être qu'on pourrait prendre un cliché
25 maintenant et puis modifier la carte, ensuite modifier l'affichage de la
26 carte ?
27 M. ACKERMAN : [interprétation] Cela ne sert à rien. La carte peut être un
28 petit peu relevée, cela devrait suffire.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais cela ne sert à rien, parce
2 que si on fait cela, la marque de la maison va disparaître -- enfin, vous
3 reprendrez tout.
4 M. ACKERMAN : [interprétation] Très bien. Dans ce cas-là, on fait un
5 cliché, on en fait une pièce de la Défense.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous en êtes sûr ? Mais cela me paraît
7 un peu stupide, quand même, comme exercice.
8 M. ACKERMAN : [interprétation] En effet, c'est un exercice tout à fait
9 stupide. Donc, on va plutôt agrandir -- réduire la carte pour avoir une
10 meilleure vue de plus de quartiers. Je suis désolé, Monsieur le Président,
11 mais je pense que nous n'arriverons jamais à terminer à 19 heures.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas à l'ordre du jour de
13 toute façon.
14 Madame Bala, est-ce que l'affichage qu'il y a à l'écran vous convient,
15 maintenant ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ça va, je vais essayer de marquer.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, si vous pouviez marquer votre
18 maison avec un cercle et si vous pouviez mettre des croix aux emplacements
19 que vous pouviez voir avec les jumelles.
20 Il se passe quelque chose, l'affichage se modifie sans cesse. Que se
21 passe t-il ? Mais il suffit d'attendre et tout va rentrer dans l'ordre.
22 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
23 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'arrivent pas à entendre le témoin.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourriez-vous parler dans le micro ?
25 On n'arrive pas à vous entendre.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Ma maison se trouve exactement ici, là où j'ai
27 donc marqué un cercle. Les emplacements que je pouvais voir avec mes
28 jumelles sont Dragodan, le côté du cimetière, là où il y a la grande route.
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1 Je n'arrive pas à voir Vranjevc ici, il faudrait encore afficher la carte
2 différemment pour que je puisse le voir.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, visiblement, on n'y arrive pas.
4 Donc, l'affichage qui est là ne convient pas du tout pour l'exercice auquel
5 nous essayons de nous plier, mais ce n'est pas grave. Dans ce cas-là, nous
6 avons sans doute une copie papier ? Une copie papier, enfin, c'est vraiment
7 terrible, la technique nous trahit totalement.
8 M. ACKERMAN : [interprétation] Ecoutez, je voudrais quand même avoir un
9 cliché de cet écran, qu'il soit marqué en tant que pièce.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il faut que l'on soit efficace, donc
11 il faut être juste et discipliné, on en terminera avec ce témoin, c'est
12 certain. Donc, prenez votre cliché maintenant, et on poursuit l'exercice
13 rapidement. Très bien, maintenant, on reprend à nouveau. Affichez la carte
14 vierge.
15 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce cliché sera donc la pièce IC 16.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Nous avons maintenant la carte
17 vierge. Il faut à nouveau que vous nous marquiez l'emplacement de votre
18 maison avec un cercle.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Ma maison se trouve ici, là où j'ai mis un
20 cercle. Avec les jumelles infrarouges, je voyais la zone de Dragodan, donc
21 je l'ai marquée avec une croix, la zone de Vranjevc, qui est de l'autre
22 côté de Dragodan, donc sans doute par ici, Kolovica se trouve ici sur le
23 côté, et Vranjevc, lui, est au-dessus. Taslixhe est l'autre croix qui se
24 trouve en bas.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que le cliché montrera bien
26 toutes ces cartes ? Il semble que oui. Dans ce cas-la, prenez donc ce
27 cliché.
28 M. ACKERMAN : [interprétation] Ces clichés vont-ils montrer les cartes qui
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1 ne sont pas exactement sur la carte, mais en dehors ?
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons voir un peu ce que la
3 technique nous réserve. En effet, ces marques se voient bien sur les
4 clichés que nous avons pris, donc nous pouvons poursuivre.
5 Il nous faudrait quand même une cote.
6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la cote IC 17.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
8 Monsieur Ackerman, poursuivons.
9 M. ACKERMAN : [interprétation]
10 Q. Ce que vous avez marqué sur la pièce IC 17 sont des zones que vous ne
11 pouviez observer qu'à l'aide de jumelles infrarouges, n'est-ce pas ?
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais ce n'est pas du tout la réponse
13 qu'elle vous a donnée. Elle vous a dit qu'elle pouvait voir des choses à
14 l'aide de ses jumelles infrarouges, elle ne vous dit pas que ce ne sont que
15 des endroits qu'elle ne pouvait voir qu'avec cet équipement. Ce n'est pas
16 comme cela que vous avez posé votre question.
17 M. ACKERMAN : [interprétation] Mais regardez, si on revient en arrière et
18 que l'on regarde exactement ma question, vous voyez que je lui ai vraiment
19 dit, je lui ai vraiment demandé de ne mettre des croix que dans les
20 endroits qu'elle ne pouvait voir qu'à l'aide de ses jumelles infrarouges.
21 C'est ce que je lui ai posé; le reste ne m'intéresse pas, de toute façon.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Montrez-moi donc sur la carte les
23 endroits où vous observiez les blindés et les chars, ainsi que les
24 mouvements de troupes, et cetera.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai déjà dit --
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais je ne veux pas une réponse, je ne
27 veux pas de réponse de votre côté. Bon, je vois la question de M. Ackerman
28 qui est en effet : "Les zones que vous pouviez observer, les choses que
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1 vous pensez qui semblaient être importantes et que vous n'observiez que
2 grâce à ces jumelles infrarouges." C'est bien, c'est bien, Monsieur
3 Ackerman, vous avez raison sur ce point. Vous pouvez maintenant continuer à
4 clarifier ce point avec le témoin.
5 M. ACKERMAN : [interprétation]
6 Q. Tous ces emplacements où vous avez fait des croix sont à plus de 100,
7 voire 150 mètres de votre maison. Vous êtes d'accord avec moi à ce propos ?
8 R. Ils sont à plus de 150 mètres de ma maison, mais ce sont des collines,
9 et on voit très clairement depuis ma maison toutes ces collines. On les
10 voit très bien de jour, et la nuit, quand il était difficile de voir,
11 j'utilisais les jumelles infrarouges. Mais pendant la journée, je voyais
12 cela très bien et sans jumelles. Je le voyais très bien à l'œil nu. J'ai vu
13 des maisons qui brûlaient à Dragodan, j'ai vu des voitures, mais comme je
14 vous l'ai dit, c'est à plus de 150 mètres de ma maison, mais ce sont des
15 maisons sur des coteaux, donc c'est très clair de là où je me trouve
16 puisque ce sont des maisons qui se trouvent sur des coteaux avoisinants.
17 Q. Vous nous avez dit que vous ne saviez pas très bien comment
18 fonctionnaient des jumelles infrarouges, que c'étaient des jumelles qui
19 avaient été laissées dans votre voiture; c'est bien cela ?
20 R. Non seulement les jumelles, il y a même des vêtements qui ont été
21 laissés dans ma voiture ainsi que des vêtements, des chaussures, des blocs-
22 notes. On a laissé beaucoup de choses dans ma voiture, entre autres ces
23 jumelles. Or, je n'avais jamais utilisé ce type de jumelles auparavant,
24 c'est la première fois que je les ai utilisées. Quand j'ai quitté ma
25 maison, j'ai laissé les jumelles derrière moi et je ne les ai jamais
26 retrouvées quand je suis rentrée chez moi.
27 M. ACKERMAN : [interprétation] Monsieur le Président, si on répond à une
28 question aussi simple avec un discours aussi long, on va rester ici toute
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1 la nuit.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais je n'ai pas bien pu comprendre
3 votre question, d'ailleurs.
4 M. ACKERMAN : [interprétation] Mais la question était très simple, c'était
5 une question où je lui ai demandé : "Vous ne saviez pas très bien utiliser
6 les jumelles à infrarouges, elles étaient laissées dans votre voiture." La
7 réponse que je voulais était oui, c'est tout, à savoir qu'elle n'était pas
8 très habituée à utiliser ce type de jumelles.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais cela. on le savait déjà.
10 Enfin, continuez.
11 M. ACKERMAN : [interprétation]
12 Q. Je pense que vous le savez, quand même -- vous ne savez pas que la
13 portée maximum de jumelles infrarouges est de 50 mètres, donc vous n'auriez
14 jamais pu distinguer quoi que ce soit à plus de 150 mètres. Mais cela, vous
15 ne le saviez pas, n'est-ce pas ?
16 R. Pourriez-vous répéter la question, s'il vous plaît ?
17 Q. Puisque vous n'étiez pas très habituée à utiliser -- même pas habituée
18 du tout à utiliser des jumelles infrarouges, vous ne savez pas donc que la
19 portée maximum de ce type d'équipement est de 50 mètres. Donc, vous ne
20 pourriez discerner à plus de 150 mètres, même à 100.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame.
22 Ne répondez pas à la question, Madame le Témoin, il y a une
23 objection.
24 Mme MOELLER : [interprétation] Je me demande sur quelle base M. Ackerman se
25 fonde pour dire que ces jumelles n'ont une portée que de 50 mètres. Est-ce
26 que ce fait a déjà été versé au dossier ?
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, absolument pas, mais je pense que
28 c'est une bonne question à poser, étant donné que nous savons quand même
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1 pour qui travaille en ce moment M. Ackerman. Donc, je rejette l'objection.
2 Vous pouvez répondre à la question.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous ai dit que je n'avais jamais utilisé
4 ce type de jumelles parce que je n'avais jamais eu besoin de m'en servir.
5 La distance à vol d'oiseau, comme je l'ai dit, d'ici à ces collines, je ne
6 peux pas vous la dire. C'est très certainement plus de 150 mètres. Je ne
7 sais pas quel genre de jumelles existent, s'il y en a qui vous permettent
8 de voir à différentes portées; tout ce que je sais, c'est que celles que
9 j'avais me permettaient de voir différents objets, différents bâtiments,
10 mais de voir aussi les déplacements de chars et les déplacements de
11 personnes.
12 M. ACKERMAN : [interprétation]
13 Q. Bien. Je vais m'arrêter là pour l'instant et je vais parler d'autre
14 chose. Vous avez employé la phrase suivante. Vous l'avez employée, je
15 crois, plus de cinq fois. Vous avez dit : "VJ, MUP et civils serbes." Dans
16 le premier paragraphe de la troisième page, par exemple, vous dites :
17 "Toutes les routes allant et sortant de Pristina étaient bloquées par la
18 VJ, le MUP et les civils serbes." Ensuite, un peu plus loin dans ce
19 paragraphe, vous nous dites : "Je pouvais voir la VJ, le MUP et les civils
20 serbes." Au paragraphe suivant, vous dites : "On m'a aussi dit qu'il y
21 avait la VJ, le MUP et les civils serbes." Page suivante : "Le 29 mars, la
22 VJ, le MUP et les civils serbes," et cette fois-ci, vous ajoutez aussi les
23 Tziganes. Ensuite, au dernier paragraphe de cette page, vous nous dites :
24 "Les premières et les dernières voitures avaient à leur bord le MUP armé
25 ainsi que la VJ et des civils armés."
26 Donc, vous l'utilisez sans cesse, vous utilisez sans cesse ce morceau
27 de phrase. J'ai l'impression que c'est un petit peu générique chez vous;
28 chaque fois que vous voyez des troupes, vous dites : "VJ, MUP et civils
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1 serbes" sans vraiment savoir si ce sont bel et bien des civils serbes ou si
2 ce sont peut-être le MUP ou si ce sont peut-être des gens qui, selon vous,
3 sont des soldats de la VJ. Ai-je raison ?
4 R. Quand j'ai identifié la VJ, le MUP et les civils armés ainsi que les
5 Rom, ce sont des gens que j'ai vus de mes yeux. Je ne les ai pas vus de
6 façon séparée, dans un endroit, certains, et dans un endroit, d'autres. Ils
7 étaient en groupe, ensemble. Ils étaient ensemble aux points de contrôle,
8 ils étaient ensemble aux points principaux sur les routes. Il y avait
9 l'armée, la police et les civils armés, les civils serbes armés. Je sais
10 les reconnaître, je sais reconnaître les soldats. La police, les civils
11 serbes, les Tziganes. Je sais à quoi ressemble l'uniforme de la police,
12 l'uniforme de la VJ. Je sais à quoi ressemble la civile serbe, aussi. Ils
13 étaient toujours ensemble dans différents quartiers de Pristina, et le jour
14 où nous sommes partis, ils étaient ensemble. Il y avait l'armée, la police
15 et les Serbes partout. Chaque fois qu'on était arrêtés, ils étaient
16 ensemble, à Fushe Kosova aussi.
17 Q. Mais au paragraphe 9 de votre déclaration d'août, donc la déclaration
18 supplémentaire, vous dites que vous avez réussi à identifier ces gens qui
19 selon vous étaient de la VJ parce qu'ils avaient des insignes, des emblèmes
20 sur leurs uniformes qui disaient "armée yougoslave" ou "Vojska
21 Jugoslavija", et ce, en serbe, n'est-ce pas ?
22 R. Pendant tout mon séjour à Pristina, quand j'y ai habité, quand j'y ai
23 travaillé, je savais où se trouvait le commissariat, je savais où était la
24 caserne.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Bala, on vous a posé une
26 question très spécifique sur l'armée et uniquement l'armée, qui n'a rien à
27 voir avec la police.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais tout cela est très simple. J'essayais de
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1 vous dire que j'avais déjà vu des soldats et que pendant ces jours-là, j'ai
2 vu des soldats, donc je savais les reconnaître.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je comprends bien. Vous êtes en train
4 de me dire que vous savez reconnaître un soldat quand vous le voyez. Vous
5 savez reconnaître aussi un policier quand vous le voyez. Cela dit, il est
6 quand même difficile, avec les années qui ont passé, de savoir exactement à
7 quoi ressemble un emblème bien spécifique. Mais ici, on vous a posé une
8 question bien spécifique. On vous a demandé si vous avez réussi à
9 identifier les personnes comme étant de la VJ parce qu'elles arboraient des
10 badges sur leurs uniformes; c'est bien cela ?
11 R. Oui, et --
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ces badges arboraient les mots "Vojska
13 Jugoslavija" en serbe ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
15 M. ACKERMAN : [interprétation]
16 Q. Mais je pense que tout le monde sait qu'il n'y avait jamais eu ce type
17 d'emblème dans l'armée yougoslave. Il n'y en a jamais eu, d'ailleurs. Donc,
18 si vous voyez des gens qui arborent des emblèmes qui disent "Vojska
19 Jugoslavija", cela prouve justement qu'ils ne sont pas ce qu'ils disent
20 être. Vous en êtes d'accord, n'est-ce pas ?
21 R. Ils avaient des emblèmes qui étaient soit sur la manche gauche ou sur
22 la manche droite, mais en haut de la manche. C'étaient des emblèmes avec
23 VJ, et moi, je me disais que cela voulait dire VJ, "Vojska Jugoslavija",
24 armée yougoslave.
25 Q. Je vais vous dire quelque chose, je vais vous le dire très fermement
26 qu'il n'y a pas ce type d'emblème dans l'armée yougoslave, ce type de badge
27 qui porterait les lettres VJ. Donc, si vous voyez un emblème arborant les
28 lettres VJ pour armée yougoslave, cela signifie très certainement que c'est
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1 quelqu'un d'autre qui les porte.
2 R. C'étaient des soldats, à ma connaissance. Qu'auraient-ils pu être ? Je
3 n'en sais rien, c'est la première fois que j'entends parler de tout cela.
4 Mais je voyais bien qu'ils étaient des soldats de l'armée régulière. Ils
5 étaient prêts de leurs chars, prêts de leurs voitures. Ils avaient des
6 drapeaux yougoslaves. Enfin, c'était une armée, c'était net.
7 Q. Passons maintenant au dernier paragraphe de la page 3 de votre
8 déclaration.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Ackerman, avez-vous encore
10 beaucoup de questions à poser ?
11 M. ACKERMAN : [interprétation] Il me faudra encore dix à 15 minutes, et je
12 pense que d'autres conseils auront des questions à poser.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans ce cas-là, il va falloir que nous
14 levions la séance jusqu'à demain.
15 Madame Bala, malheureusement, nous devons nous arrêter maintenant et nous
16 reprendrons demain après-midi, 14 heures 15. Il faut donc que soyez là
17 demain à 14 heures 15 pour continuer à déposer. Il est essentiel que vous
18 ne parliez à personne dans l'intervalle de votre déposition, c'est-à-dire
19 vous ne parlerez pas de la déposition que vous avez faite jusqu'à présent
20 et vous ne devez pas parler non plus de la déposition que vous allez donner
21 demain. Vous pouvez parler de tout le reste, mais surtout pas de votre
22 déposition. Nous vous reverrons demain à 14 heures 15.
23 --- L'audience est levée à 19 heures 05 et reprendra le mercredi 23
24 août, à 14 heures 15.
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