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1 Le vendredi 10 novembre 2006
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.
5 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, nous avons décidé que
7 dans l'intérêt de la justice il était souhaitable d'entendre le témoin sur
8 la première partie de la déclaration. Il était donc souhaitable de déclarer
9 recevable cette première partie de la déclaration de la pièce. Quelle pièce
10 déjà, la pièce P2480 ?
11 M. HANNIS : [interprétation] Oui.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Paragraphes 1 à 45. Toutefois, nous ne
13 sommes pas convaincus qu'il soit dans l'intérêt de la justice de présenter
14 le reste de cette déclaration de la manière dont vous attendez la
15 présenter. Ce qui est plus important encore c'est que nous sommes
16 convaincus de la nécessité d'entendre ce témoignage en raison de son
17 importance éventuelle. Ce n'est peut-être qu'une maigre consolation pour
18 vous, mais voilà la décision que nous avons prise sur le témoignage de M.
19 Tanic.
20 Si, bien entendu, quelque chose se produit de nature à modifier la nature
21 précisément de ces documents écrits, vous pourriez faire une nouvelle
22 tentative, mais je ne pense pas que ceci soit tout à fait probable. Les
23 choses sont très segmentées, vous avez de nombreux épisodes, de nombreuses
24 parties de cette déclaration dans lequel le lien entre les informations
25 dont ils disposent, et la source de ces informations n'est pas tout à fait
26 claire. Je pense qu'il est dans l'intérêt global de la présentation
27 d'arguments fondés que ces liens soient établis de manière plus claire.
28 M. HANNIS : [interprétation] Je comprends, Monsieur le Président, je me
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1 conformerai à votre décision.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas -- j'ai une critique de
3 la Défense. Si nous sommes absolument certains que le contre-interrogatoire
4 ne se fera pas de manière appropriée, nous ne modifierions rien. Mais, bien
5 entendu, ceci ne va pas nécessairement dans l'intérêt des équipes chargées
6 du contre-interrogatoire de clarifier absolument tout. Nous aurions alors à
7 passer un temps considérable à le faire. Donc, dans l'ensemble, nous avons
8 décidé que la manière de procéder que nous proposons est la meilleure.
9 M. HANNIS : [interprétation] Très bien.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je parle ici du paragraphe 46 et
11 suivants.
12 M. HANNIS : [interprétation] Merci.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, de teneurs 46 et des suivants.
14 Bien entendu, nous laisserons de côté la déclaration des paragraphes 1 à
15 45, et nous aimerions obtenir de votre part un document éliminant ces
16 paragraphes.
17 M. HANNIS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Nous procéderons
18 de la sorte.
19 LE TÉMOIN: BISLIM ZYRAPI [Reprise]
20 [Le témoin répond par l'interprète]
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Monsieur Zyrapi.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons poursuivre votre
24 déposition et le contre-interrogatoire de Me Lukic, n'oubliez pas que la
25 déclaration solennelle que vous avez prononcée continue de s'appliquer.
26 Monsieur Lukic, bonjour.
27 M. LUKIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.
28 Contre-interrogatoire par M. Lukic : [Suite]
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1 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Zyrapi.
2 R. Bonjour.
3 Q. Etes-vous bien reposé.
4 R. Je crois.
5 Q. Très bien. Dans le droit, vous savez qu'il existe une règle selon
6 laquelle personne ne peut promettre quoi que ce soit au nom d'une autre
7 personne sans que cette personne ne donne son aval. Il y a une exception à
8 cette règle toutefois, le Président de la Chambre peut promettre quelque
9 chose au nom du conseil de la Défense et le conseil de la Défense doit s'y
10 tenir. C'est la raison pour laquelle nous allons tenter d'en terminer le
11 plus rapidement possible.
12 J'aimerais revenir aux brigades de l'UCK et à la question de leur zone de
13 responsabilité. A Drenica, il y avait les 112e, 113e et 114e Brigades,
14 n'est-ce pas ?
15 R. Les 111e, 112e et 113e à Drenica. Il y avait également la 114e à Drenica.
16 Q. Merci. Je vais tenter de ne plus faire d'erreur. Dans la zone
17 opérationnelle de Pastrik, quelles brigades trouvait-on ?
18 R. 121e, 122e, 123e, 124e et 125e.
19 Q. Dans la zone opérationnelle de Dukagjin, quelles brigades trouvait-on ?
20 R. Dans la zone opérationnelle de Dukagjin, il y avait la 131e, la 132e, la
21 133e et la 134e. Je n'ai plus le souvenir d'autres brigades également
22 présentes.
23 Q. Il y avait la 35e, la 36e, la 37e et la 38e également, n'est-ce pas ?
24 R. Oui, oui, 136e, 137e et 138e. Je crois qu'elles sont arrivées plus tard.
25 Q. Dans la zone opérationnelle de Shala, quelles brigades trouvait-on ?
26 R. Dans la zone opérationnelle de Shale, il y avait les 141e et 142e
27 Brigades.
28 Q. Dans la zone opérationnelle de Lapi ?
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1 R. Dans la zone opérationnelle de Llap, il y avait les 151e, 152e et 153e
2 Brigades.
3 Q. Dans la zone opérationnelle de Nerodimlje ?
4 R. Dans la zone opérationnelle de Nerodime, il y avait les 161e et 162e
5 Brigades.
6 Q. Dans la zone opérationnelle de Karadak ?
7 R. Il y avait la 171e Brigade.
8 Q. Seules les brigades des zones opérationnelles de Drenica et de Pastrik
9 se trouvaient dans la zone que vous avez entourée d'un cercle sur la carte,
10 n'est-ce pas ?
11 R. Dans la zone opérationnelle de Pashtrik, celles que j'ai mentionnées
12 sur la carte sont précisément les brigades qui opéraient dans cette zone. A
13 Drenice, il y avait donc la Brigade de la zone opérationnelle de Drenica et
14 les brigades de Shale, les 141e et 142e, je crois, dans la zone G.
15 Q. Très bien, merci. Les autres brigades, les quatre autres -- ou plutôt
16 celles des quatre autres zones opérationnelles étaient mobilisées et
17 opéraient dans le cadre d'opérations militaires au même moment au sein de
18 leur zone de combat, n'est-ce pas ?
19 R. Oui.
20 Q. Merci. Au sein de l'état-major des zones opérationnelles, il y avait le
21 service de Sécurité qui était composé d'Unités de Police, police militaire
22 et police civile et d'Unités spéciales également, n'est-ce pas ?
23 R. Au niveau des zones il y avait une police militaire, c'est exact,
24 tandis que les unités spéciales, les unités d'intervention rapides
25 n'étaient pas composées de membres de la police civile, par opposition à
26 militaire. En tout cas, pas au moment où je m'y trouvais.
27 Q. Très bien. Au sein des rangs de la police, il y avait des policiers
28 chargés de la circulation, des policiers affectés aux questions de
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1 détention et une police chargée de la sécurité, n'est-ce pas ?
2 R. Je ne me souviens plus de ces différents services au sein de la police.
3 Je sais qu'il y avait une police militaire.
4 Q. Merci. Est-il exact qu'au sein de la police militaire de l'UCK, on
5 trouvait les manoirs qui portaient des uniformes noirs et qui prenaient
6 part aux actions menées dans -- sur le territoire du Kosovo ?
7 R. Pas que me sache au moment où je me trouvais là-bas, non et que j'étais
8 au sein des rangs de l'UCK.
9 Q. Très bien, merci. L'UCK avait-elle des prisons ?
10 R. Je ne sais pas ce qu'il en était avant que je rejoigne l'état-major.
11 Lorsque j'ai pris mes fonctions, oui, il y avait une prison qui était
12 utilisée lorsque des sanctions disciplinaires étaient prises contre
13 différents membres de l'UCK.
14 Q. Par conséquent, vous n'êtes pas au courant du fait que l'UCK avait au
15 moins 30 prisons dans au moins 13 municipalités du Kosovo.
16 R. Je n'ai aucune information dans ce sens sur ce que vous dites, à savoir
17 la présence de prisons sur les territoires où opérait l'UCK. Mais je vous
18 l'ai dit. Je ne sais pas ce qu'il en était avant de prendre mes fonctions.
19 Q. Très bien. Merci. Je vous demande simplement de me dire ce que vous
20 savez. Nous disposons également d'informations, ou plus précisément, nous
21 avons le document qui précise que dans la zone opérationnelle de Pastrik,
22 125e Brigade, numéro 24-40, Fejzula Abdulah Ahmeti est invité à se rendre à
23 Korisa, le 12 mars 1999, afin d'y être mobilisé au sein de l'UCK. Ce
24 document dit également qu'un manquement à cette convocation entraînerait la
25 prise de sanctions, conformément au décret en vigueur et aux règles
26 militaires.
27 Vous souvenez-vous si l'UCK a procédé à la mobilisation de certains
28 individus et ne s'est donc pas limité à l'intervention de volontaires ?
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1 R. A l'époque où j'occupais mes fonctions, je n'ai pas le souvenir d'une
2 quelconque mobilisation. Je sais que par la suite, cela s'est produit, oui.
3 Les gens ont été mobilisés au sein du territoire du Kosovo et à l'extérieur
4 de ses frontières.
5 Q. Merci. Le 13 mars 1999, au marché à Kosovska Mitrovica à Podujevo, des
6 explosifs ont été utilisés par l'UCK. L'explosion a provoqué la mort de
7 civils exclusivement, à la fois des Serbes, des Albanais et des Rom. A
8 Kosovska Mitrovica, trois femmes ont été tuées et 39 personnes ont été
9 blessées. A Podujevo, trois personnes ont été tuées et 26 personnes ont été
10 blessées. Ces opérations ont-elles été ordonnées par le Grand état-major de
11 l'UCK ?
12 R. Si mon souvenir est bon, l'état-major de l'UCK n'a jamais donné l'ordre
13 d'utiliser des explosifs.
14 Q. Par conséquent, cette opération n'a jamais été approuvée par l'état-
15 major de l'UCK, même à une date ultérieure ?
16 R. Non.
17 Q. Avez-vous jamais eu vent de ces opérations ?
18 R. Oui. J'ai appris qu'elles avaient eu lieu, mais je n'en ai plus les
19 détails en tête, parce que beaucoup de temps a passé depuis.
20 Q. Merci. Shaban Shala faisait partie des commandants de l'UCK. Il était
21 également vice-président du comité chargé de la protection des droits de
22 l'homme et de la liberté au Kosovo -- protection des droits de l'homme et
23 des libertés au Kosovo. Savez-vous quel était le lien de coopération entre
24 l'UCK et le comité chargé de la protection des droits de l'homme et des
25 libertés au Kosovo ?
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Marcussen.
27 M. MARCUSSEN : [interprétation] Quelle est la base de la question qui est
28 posée, à savoir que Shaban Shala était à la fois commandant et vice-
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1 président ?
2 M. LUKIC : [interprétation] Oui. Monsieur le Président, c'est un document
3 qui a été communiqué à la Défense par le bureau du Procureur. Zone
4 opérationnelle de Drenica. Numéro ERN 00100164 --
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Lukic, quoi qu'il en soit, je
6 pense que vous devriez d'abord essayer de déterminer dans quelle mesure le
7 témoin dispose de quelconque information sur les postes occupés par M.
8 Shaban Shala.
9 M. LUKIC : [interprétation] Oui. J'essayais simplement de gagner du temps.
10 Je suis un peu assis entre deux chaises ici.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je comprends, mais il y a une
12 objection. Il faudrait que vous procédiez avec un peu plus de rigueur et de
13 prudence.
14 M. LUKIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je vais m'y
15 attacher.
16 Q. Monsieur Zyrapi, vous savez que M. Shaban Shala était l'un des
17 commandants de l'UCK ?
18 R. Shaban Shala était dans la zone opérationnelle de Pashtrik.
19 Q. Savez-vous qu'il était également au même moment vice-président du
20 comité de protection des droits de l'homme et des libertés au Kosovo ?
21 R. Je sais que, par le passé, il s'était intéressé à ce genre de question,
22 mais au cours de la période dont vous parlez, je ne dispose d'aucune
23 information me permettant de confirmer ce que vous dites.
24 Q. Merci.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous poursuivez sur ce point ?
26 M. LUKIC : [interprétation] Oui.
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, allez-y. Poursuivez.
28 M. LUKIC : [interprétation]
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1 Q. Savez-vous si le comité de protection des droits de l'homme et des
2 libertés au Kosovo et l'UCK coopéraient ? Si oui, selon quelles modalités ?
3 R. Je ne dispose d'aucune information sur une éventuelle coopération entre
4 eux.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Zyrapi, dans la zone
6 opérationnelle de Pastrik, Shaban Shala occupait quelle fonction ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] M. Shaban Shala n'était pas dans la zone de
8 Pashtrik, mais dans la zone opérationnelle de Drenice.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais il y a un instant seulement, vous
10 nous avez dit qu'il était dans la zone opérationnelle de Pastrik. Vous
11 voulez modifier cette première déclaration ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Oui, oui. C'est peut-être un lapsus de ma
13 part.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Alors, quelles étaient ses fonctions ?
15 Quel poste occupait-il ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Il était chargé des rapports entre civils et
17 militaires. Mais après les changements survenus en mars, il est devenu
18 commandant-adjoint de la zone de Drenice.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
20 Monsieur Lukic.
21 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
22 Q. Monsieur, vous nous avez dit que de l'avis de nombreux Albanais, la
23 guerre avait débuté lorsque l'incident s'était produit à Jashari, enfin
24 dans l'enceinte de la famille Jashari. D'autres interprétations et points
25 de vue sont possibles. Lors de nos enquêtes et au cours de conversations
26 que nous avons eues avec la partie adverse, nous en sommes arrivés à la
27 conclusion selon laquelle les Serbes pensaient que la guerre avait débuté
28 lors de l'attaque contre Orahovac et les villages avoisinants. Je ne vais
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1 pas évoquer de noms. Je sais et j'en suis convaincu que vous n'avez pas
2 d'informations directes sur ce point. Toutefois, j'aimerais vous poser la
3 question suivante : lorsque vous êtes arrivé au Kosovo et, plus
4 particulièrement, lorsque vous êtes devenu chef de l'état-major de l'UCK,
5 avez-vous entendu de la bouche d'autres personnes qu'une attaque avait eu
6 lieu contre Orahovac et qu'au cours de cette attaque 80 civils environ
7 avaient été enlevés puis tués ?
8 R. On avait - puisque vous me parlez de la période au cours de laquelle
9 j'ai chef d'état-major - j'ai entendu parler de cela au travers des médias
10 et au cours de la période du procès. Mais, lorsque j'ai posé des questions,
11 lorsque j'ai creusé la question, je n'ai pas obtenu d'information précise,
12 notamment auprès des Serbes d'Orahovac.
13 Q. Cet incident a eu lieu à l'été 1998, n'est-ce pas ?
14 R. Les combats à Orahovac ont eu lieu au cours de l'été 1998, juillet, je
15 crois.
16 Q. Merci. Je n'ai plus de questions sur ce point précis. J'aimerais
17 obtenir une explication géographique de votre part. Il y a quelque chose
18 qui reste vague. Le village de Klecka se trouve-t-il sur les monts Berisa ?
19 R. Le village de Klecke se trouve oui dans les monts Berisha.
20 Q. J'en arrive à ma dernière question, je crois. L'UCK comptait des
21 membres non pas seulement dans les villages, mais également dans les
22 villes, n'est-ce pas ?
23 R. Je ne sais pas ce qu'il en ait de la période qui a précédé ma
24 nomination au poste de chef d'état-major. Je vous parle de la période qui a
25 suivi ma nomination. Je ne pense pas qu'il y avait des unités de l'UCK dans
26 les villes mais je ne sais pas ce qu'il en ait de 1998, peut-être que
27 c'était le cas en ce moment-là.
28 Q. Lorsque vous êtes venu chef d'état-major et même avant cela, avez-vous
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1 entendu dire que certaines parties de la ville ou certaines villes telle
2 qu'Orahovac et Suva Reka étaient même contrôlées par l'UCK. Sans entendre
3 je vous poserais une autre question, il y avait aussi des parties d'Unités
4 de l'UCK qui se trouvaient à Djakovica sans aucun doute, n'est-ce pas ?
5 R. Si ma mémoire est bonne et au cours de la période au cours de laquelle
6 j'ai exercé mes fonctions de chef d'état-major à Rahovec même il n'y avait
7 pas d'unités de l'UCK mais il y en avait en périphérie, même chose pour
8 Suva Reka, il y avait des Unités de l'UCK dans les villages de la
9 municipalité de Suhareke dans la municipalité de Gjakova, oui. Dans les
10 villages avoisinants Gjakova, mais pas dans la ville à proprement parler.
11 Il n'y avait pas d'Unités de l'UCK qui opéraient en tout cas au cours de la
12 période au cours de laquelle j'étais chef d'état-major.
13 Q. Merci, Monsieur Zyrapi, je vous présente mes excuses de vous avoir fait
14 venir ici à l'audience du fait d'avoir dû poursuivre mon contre-
15 interrogatoire. Je n'ai pas d'autres questions à vous poser. Merci
16 beaucoup.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Lukic.
18 M. MARCUSSEN : [interprétation] Merci. Je pense que rien n'émerge sur la
19 base du document qui a été divulgué hier. Je pensais que ce serait peut-
20 être nécessaire d'éclaircir ce point avant de commencer.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Aleksic, vous voulez répondre
22 à cette question ?
23 M. ALEKSIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.
24 Malheureusement, non, dans la mesure où M. Ackerman a traité de cette
25 question et nous avons besoin -- je crois que M. Ackerman a besoin d'un peu
26 plus de temps et je ne crois pas que nous ayons d'autres questions à
27 soulever. Je n'ai pas suffisamment de temps pour le faire.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Lukic.
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1 M. LUKIC : [interprétation] J'ai pris lecture du document et j'ai couvert
2 indirectement ce que je devais couvrir à partir de ce document, donc, la
3 Défense n'a pas de questions à soulever sur la base de ce document.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Je pense que vous voudriez
5 procéder sur cette base, Monsieur Marcussen, sur le fait qu'il n'y a pas
6 d'autres questions qui aient été identifiées jusqu'à présent.
7 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je le ferais.
8 Contre-interrogatoire par M. Marcussen :
9 Q. [interprétation] Monsieur Zyrapi, j'aimerais vous demander un
10 éclaircissement sur un certain nombre de points qui ont été soulevés au
11 cours de votre témoignage.
12 M. MARCUSSEN : [interprétation] Tout d'abord, je crois que si nous pouvons
13 peut-être présenter la pièce 4D38.
14 Q. Monsieur Zyrapi, c'est un document qui va apparaître à l'écran qui date
15 du 18 janvier 1999 et qui concerne l'état de préparation et la localisation
16 des forces de l'UCK au plus haut niveau d'alerte. Voilà. Le document est
17 affiché. J'aimerais que vous vous penchiez à nouveau sur ce document. Vous
18 souvenez-vous de ce document ?
19 R. Oui.
20 Q. Y a-t-il une raison particulière qui explique cet ordre ait été émis à
21 ce moment-là ?
22 R. Pour autant que je m'en souvienne, j'ai déjà donné les explications sur
23 ce point hier. Il y avait des activités de combat qui se déroulaient dans
24 la zone opérationnelle de Nerodime au cours de cette période, et à mon
25 souvenir c'était justement l'incident de Recak qui s'est produit.
26 Q. Merci. Un autre point sur lequel j'aimerais apporter des
27 éclaircissements est relatif aux fonctions que vous occupiez en tant que
28 chef d'état-major. Pendant la période où vous étiez chef d'état-major qui
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1 dirigeait la direction des opérations ou la G3 ?
2 R. Comme je l'ai dit dans ma déclaration, cette division, cette direction,
3 la direction des opérations - j'avais exercé cette fonction précédemment
4 jusqu'en mars 1999 mais c'était mon adjoint qui exerçait ces fonctions au
5 sein de la direction.
6 Q. Vous étiez chef d'état-major et également directeur des opérations;
7 est-ce exact ?
8 R. Oui. Pendant une certaine période de temps jusqu'à une date donnée
9 parce qu'il y avait pénurie d'officiers.
10 Q. Pourriez-vous nous décrire la différent entre vos fonctions donc chef
11 d'état-major et les fonctions que vous exerciez au cours de la période
12 concernée en tant que directeur des opérations et décrire cette différence
13 brièvement pour que nous comprenions en quoi consistait les deux
14 responsabilités ?
15 R. Il s'agissait de deux fonctions bien distinctes. La direction des
16 opérations était donc faite -- gérée par mon adjoint et je m'occupais -- et
17 j'étais à l'époque chef d'état-major. La direction opérationnelle traitait
18 de la partie opérationnelle en commençant par l'instruction des recrus, la
19 mise en place des structures et des opérations de l'UCK. Au cours de cette
20 période donc j'étais essentiellement chef d'état-major et c'était mon
21 adjoint qui dirigeait la direction des opérations jusqu'au moment où on a
22 pu recruter de nouveaux officiers, des officiers qui pouvaient eux-mêmes
23 exercer ces fonctions.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela répond à une partie de la
25 question, n'est-ce pas ?
26 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui, oui. Je pense --
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense qu'il serait utile d'avoir
28 une déclaration générale sur le rôle de chef d'état-major.
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1 M. MARCUSSEN : [interprétation]
2 Q. Pourriez-vous nous décrire -- enfin, répondre à la question du
3 président : en quoi consistait la fonction de chef d'état-major ?
4 R. La fonction de chef d'état-major consistait à gérer, à diriger l'état-
5 major général ainsi qu'à diriger différentes directions aux seins de
6 l'état-major général.
7 Q. Pourriez-vous être un peu plus concret, en quoi consistait ces tâches
8 de direction et de gestion ?
9 R. En tant que chef d'état-major, je devais assumer un certain nombre de
10 responsabilités concrètes, notamment la préparation de nouveaux recrus pour
11 accroître le niveau de formation de l'état-major et de l'UCK de manière
12 générale -- et de l'UCK dans des opérations générales. Autres fonctions
13 prises de sanctions disciplinaires, gestion des questions logistique, des
14 questions d'approvisionnement au niveau de préparation de l'état-major et
15 de l'ensemble du personnel de l'UCK. Voilà en bref en quoi consistaient mes
16 fonctions.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Serait-il exact également de vous
18 décrire en tant que dirigeant ou chef de l'administration du QG ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Mes fonctions couvraient aussi en partie
20 l'administration de l'état-major général également.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
22 M. MARCUSSEN : [interprétation]
23 Q. Je crois que les choses sont relativement claires, mais il y a un autre
24 point auquel j'aimerais revenir qui a été abordé hier et qui concerne les
25 états-majors locaux. Je résume les éléments que nous avons pu dégager des
26 moyens présentés. Il y avait des états-majors locaux avant que vous ne
27 deveniez chef d'état-major. Puis, ensuite, ces états-majors locaux ont été
28 incorporés à la structure que vous avez mise en place qui comprenait des
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1 brigades, des compagnies, des sections, des bataillons, et cetera; est-ce
2 que c'est exact ?
3 R. Oui. Ces états-majors locaux existaient avant que je n'assume mes
4 fonctions. Puis, ces états-majors locaux ont été réorganisés et intégrés
5 dans la nouvelle structure qui comprenait, compagnies, brigades, sections
6 et autres structures au cours de la période 1998, 1999.
7 Q. Vous nous avez parlé de vos activités relatives à la formation ou à
8 l'instruction des recrus. Toutes les sections ont-elles pu bénéficier de
9 formation au cours de la période qui a précédée le début des bombardements
10 de l'OTAN ?
11 R. Je dirais que c'est le cas pour la majorité des sections qui ont
12 bénéficié de préparation et de formation.
13 Q. Une fois que les états-majors locaux ont été intégrés à une structure
14 plus militaire, les membres des états-majors locaux précédents demeuraient-
15 ils dans leurs villages ou étaient-ils cantonnés dans d'autres lieux ?
16 R. Cela dépendait des fonctions assurées par ces unités, ces sections, ces
17 brigades ou ces compagnies. Certains d'entre eux restaient sur place, cela
18 dépendait des fonctions qu'ils devaient assurer.
19 Q. Si une section était par exemple cantonnée dans un village. A votre
20 connaissance, cette section construisait-elle une sorte de ligne de défense
21 entourant le village ou est-ce que ce n'était pas le cas à votre
22 connaissance ?
23 R. Toutes les unités avaient leur ligne de défense et leur position de
24 défense placée en fonction de la configuration du terrain, et ces lignes,
25 ces positions se trouvaient de manière générale à la limite extérieure du
26 village ou en dehors du village.
27 Q. Vous nous avez également expliqué qu'au cours de cette période où l'UCK
28 était en cours d'organisation, vous avez obtenu plus d'équipements,
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1 d'uniformes et autres équipements de ce type. Quel est le pourcentage de
2 simples soldats qui étaient -- qui disposaient d'un uniforme en mars 1999,
3 disons ?
4 R. En mars 1999, je dirais que 85, 90 % des simples soldats disposaient
5 d'un uniforme, les autres revêtaient des uniformes improvisés en quelque
6 sorte, ce n'était pas l'uniforme standard mais cela pouvait passer pour un
7 uniforme.
8 Q. Ceux qui utilisaient cet uniforme de fortune, revêtaient-ils aussi
9 l'emblème de l'UCK sur leur uniforme ?
10 R. Oui. Tous les soldats portaient l'emblème de l'UCK, ils étaient revêtus
11 de l'uniforme ordinaire ou de l'uniforme improvisé.
12 Q. Merci.
13 M. MARCUSSEN : [interprétation] J'en ai terminé avec mon interrogatoire
14 supplémentaire.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Marcussen.
16 [La Chambre de première instance se concerte]
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Zyrapi, nous arrivons au
18 terme de votre témoignage, merci d'être venu au Tribunal pour apporter ce
19 témoignage et pour votre aide. Vous pouvez quitter la salle.
20 [Le témoin se retire]
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.
22 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Le témoin
23 suivant, Ratomir Tanic. Donc, il nous faut dix minutes environ pour prendre
24 et mettre en place les mesures de protection, distorsion de l'image,
25 transformation de la voix.
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] De combien de temps avons-nous besoin
27 pour ce faire ?
28 M. HANNIS : [interprétation] On m'a indiqué 20 minutes. C'était le cas par
Page 6271
1 le passé.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bon. Nous allons recalculer nos
3 horaires.
4 Bien. Monsieur Hannis, je pense que nous allons prendre une pause de 20
5 minutes. Nous reprendrons à 10 heures 10, puis, nous serons à nouveau en
6 séance jusqu'à 11 heures 40. Nous aurons ensuite une pause d'une demi-heure
7 et nous reprendrons à 12 heures 10 et poursuivrons nos travaux jusqu'à 13
8 heures 40. Ainsi, nous réduirons au minimum la perte de temps. Nous allons
9 donc lever la séance jusqu'à 10 heures 10.
10 M. HANNIS : [interprétation] Merci.
11 --- L'audience est suspendue à 9 heures 48.
12 [Audience à huis clos]
13 (expurgé)
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16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
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20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 [Audience publique]
23 Monsieur Tanic, veuillez vous lever, pouvez-vous prêter une déclaration
24 solennelle disant que vous direz la vérité en lisant la déclaration qui se
25 trouve devant vous.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
27 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
28 LE TÉMOIN: RATOMIR TANIC [Assermenté]
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1 [Le témoin répond par l'interprète]
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir.
3 Nous allons commencer par l'interrogatoire de l'Accusation. C'est M.
4 Hannis qui vous interrogera.
5 Monsieur Hannis.
6 M. HANNIS : [interprétation] Merci. Je dois indiquer que ce témoin
7 témoignage en tant que témoin viva voce, mais qu'une partie de sa
8 déclaration relèvera de l'article 92 ter. Il apporte des moyens à charge
9 qui relèvent des paragraphes 17 à 69, 77, 79 et 101.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La pièce P2480 sera versée jusqu'au
11 paragraphe 45.
12 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, si j'ai bien compris
13 c'est la version dont nous avons discuté, avec les paragraphes dont nous
14 avons estimé qu'ils sont couverts par cet article, et qui ce sont ces
15 paragraphes donc qui sont maintenant disponibles en version électronique.
16 J'aimerais remettre au témoin une copie, une copie en version B/C/S de sa
17 déclaration, pour pouvoir lui poser des questions au titre de l'article 92
18 ter en lui demandant de témoigner du fait que le témoignage qu'il apportera
19 aujourd'hui va dans le même sens.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Cela c'est la version qui était
21 saisie dans le système ?
22 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas de copie de
23 cette version en B/C/S, mon assistant me dit qu'il y a une copie en B/C/S.
24 Si je peux demander à l'Huissier d'échanger des copies avec le témoin.
25 C'est une erreur.
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que cette copie a un numéro
27 différent ?
28 M. HANNIS : [interprétation] Non, Monsieur le Président, nous proposons de
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1 le soumettre au titre du numéro précédent.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] D'accord. Merci.
3 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Est-ce que je peux demander que tous les
4 autres documents soient déplacés et retirés de la table du témoin, à part
5 la déclaration qui lui a été remise par Me Hannis, s'il vous plaît ?
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne savais pas qu'il y avait
7 d'autres documents.
8 Quels sont les autres documents qui sont là, Maître Hannis, est-ce que vous
9 le savez ?
10 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas. Peut-
11 être certains documents que le témoin a apporté avec lui.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tanic, donnez-moi juste une
13 seconde.
14 Monsieur Tanic, dans cette salle d'audience, nous n'allons traiter que des
15 documents qui vous sont présentés au cours de votre témoignage. Si vous
16 avez besoin de vous référer à d'autres documents, alors à ce moment-là la
17 question sera soulevée et sera traitée au moment où elle est soulevée.
18 Pouvez-vous retirer de la table devant vous tout autre document que celui
19 qui vous a été remis par l'Huissier.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était ma déclaration en serbo-croate, mais
21 d'accord.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, je crois que nous
23 pouvons commencer.
24 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
25 Interrogatoire principal par M. Hannis :
26 Q. [interprétation] Monsieur Tanic, ce que vous avez devant vous sur la
27 table est une copie de la version en B/C/S de votre déclaration, reprenant
28 les paragraphes 1 à 47 et je crois les 11 premières pages de votre
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1 déclaration que vous avez vues dans sa version complète. Pouvez-vous jeter
2 un bref regard pour nous dire si vous reconnaissez ce document ?
3 R. Oui. C'est le cas.
4 Q. Pour le compte rendu, je crois que je me suis mal exprimé. Il s'agit du
5 paragraphe 1 à 45. Avant de venir déposer ici ce matin et plutôt dans la
6 semaine, avez-vous eu l'occasion de passer en revue votre déclaration ?
7 R. Oui.
8 Q. Ayant passé en revue votre déclaration et ayant noté un certain nombre
9 de changements mineurs, pensez-vous que cette information est exacte et
10 vous permet d'attester devant cette Chambre que vous apporteriez des
11 réponses identiques si les mêmes questions vous étaient posées
12 aujourd'hui ?
13 R. Oui.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Hannis, est-ce que je peux vous
15 demander d'éteindre votre micro à chaque fois que vous avez terminé votre
16 question ou est-ce qu'on a un système différent ?
17 M. HANNIS : [interprétation] Je comprenais que lorsqu'il y avait des
18 mesures de distorsion de la voix, effectivement j'ai besoin d'éteindre mon
19 micro. Mais je ne sais pas si c'est exact.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bon. Pour l'instant, cela n'avait pas
21 été fait, mais je me demandais si cela pourrait être effectivement la
22 marche à suivre par la suite.
23 M. HANNIS : [interprétation] C'est ce que j'ai cru comprendre qui était
24 nécessaire de mettre en place et, donc, je le ferais aussi souvent que je
25 me souviendrai de le faire.
26 Q. Un des deux changements que vous avez mentionnés, je crois, par rapport
27 aux 11 premières pages, concernaient pour l'un les noms des personnes
28 présentes au cours des entretiens qui ont eu lieu, je crois, au début juin
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1 1999, qui ont terminé en juillet 2000. Vous avez également indiqué qu'il y
2 avait une autre personne supplémentaire qui était présente à l'une des deux
3 premières séances; est-ce exact ?
4 R. Oui, mais les entretiens ou les conversations ont eu lieu à partir de
5 juin 1999. Oui, un autre individu était présent.
6 Q. Sans donner le nom de cet individu, pouvez-vous nous dire quelle agence
7 ou quelle organisation cet individu représentait ?
8 R. Cet individu représentait les services secrets britanniques, mais
9 l'individu n'était là que pour confirmer l'identité des personnes en
10 provenance du Tribunal de La Haye d'un côté et pour confirmer également mon
11 identité de l'autre, dans la mesure où nous ne nous étions pas rencontrés
12 auparavant. Nous ne nous connaissions pas. C'est la seule raison qui
13 justifiait la présence de cet individu supplémentaire, dans la mesure où
14 cet individu n'a participé n'a participé à aucune autre des conversations.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pouvez-vous m'aider avec un exemple de
16 paragraphe de cette -- de ce paragraphe où ce point est abordé ?
17 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, en fait, il ne s'agit
18 que du premier paragraphe. Il n'y a pas de numéro de paragraphe. C'est
19 simplement au bas de la page et il y a une liste de personnes, les
20 personnes qui ont participé à l'entretien, notamment Tim Kelly, Dennis
21 Milner, et Alexandra Milenov.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
23 M. HANNIS : [interprétation]
24 Q. Donc, l'autre changement que vous avez souligné, Monsieur Tanic, a
25 trait, je pense, au paragraphe 10 et dans votre déclaration, il est dit :
26 "Je fais un rapport." Vous aviez des réunions hebdomadaires avec SDB et je
27 pense que vous vouliez indiquer le nom de votre contact initial. Pouvez-
28 vous nous dire qui était cette personne au SDB ?
Page 6276
1 R. Je ne pourrais dire cela qu'en audience à huis clos. Pour autant que je
2 sache, cette personne est toujours en service actif et l'identité de cette
3 personne n'est pas connue, mais je pensais au chef adjoint des services de
4 Sécurité, Mijatovic, et Jovica Stanisic. Ces individus sont connus et je
5 suggère que cette personne soit nommée en audience à huis clos, afin de
6 protéger sa sécurité.
7 Q. Merci, Monsieur Tanic.
8 M. HANNIS : [interprétation] Pouvons-nous le faire, Monsieur le Président,
9 afin de pouvoir donner le nom de ce contact, donc, en audience à huis clos
10 partiel ?
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, cela me semble approprié. Passons
12 à huis clos partiel pour cette raison.
13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant en séance à huis
14 clos partiel.
15 [Audience à huis clos partiel]
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24 [Audience publique]
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
26 M. HANNIS : [interprétation]
27 Q. Monsieur, donc. Je vous réfère en fait de ces changements. Pouvez-vous
28 donc attester devant la Chambre que votre déclaration, reflétée dans ces
Page 6278
1 dix ou 11 pages, paragraphes 1 à 45, est exacte et véridique, à votre
2 connaissance, et dans la mesure des informations dont vous disposez ?
3 R. Oui. Absolument.
4 Q. Merci. Monsieur, pourriez-vous nous parler un peu de vous, nous
5 expliquer où vous êtes né ?
6 R. Je suis né en 1956 à Belgrade.
7 Q. Quelle est votre appartenance ethnique ?
8 R. Je suis Yougoslave. Je suis né en Yougoslavie, mais naturellement, je
9 suis Serbe, du fait des événements malheureux qui ont eu cours dans mon
10 pays.
11 Q. Avez-vous fait des études secondaires à Belgrade ?
12 R. Oui. Je peux résumer mon cursus en disant que, bon, effectivement, j'ai
13 terminé mes études en partie dans mon propre pays et en partie à
14 l'étranger. J'ai terminé mes études secondaires d'économie. J'ai passé
15 l'équivalent d'un diplôme secondaire en économie et par la suite j'ai
16 étudié la sociologie, l'économie, la philosophie, et j'ai passé toutes
17 sortes d'examens à l'étranger. J'ai terminé le lycée ou le gymnasium et
18 j'ai obtenu donc une licence en sciences politiques. J'ai un billet et un
19 MA en sciences politiques et je suis également diplômé dans une université
20 en sciences politiques. Mon cursus est relativement vaste et double dans la
21 mesure où j'ai fait une grande partie de mes études en Occident.
22 Q. Par rapport à vos diplômes en sciences politiques, est-ce que vous avez
23 obtenu ces diplômes depuis la fin de la guerre et depuis que vous avez été
24 transféré dans un autre pays ?
25 R. Oui, en fait, j'ai commencé mon MA en sciences politiques et j'ai
26 obtenu un diplôme de sciences policières sous un nom différent après avoir
27 été réinstallé une fois que j'ai pu me concentrer un peu plus sur ma
28 formation.
Page 6279
1 Q. Lorsque vous étiez en Serbie, avez-vous effectué votre service national
2 comme c'était exigé ?
3 R. Oui.
4 Q. A quel moment était-ce ?
5 R. Bien, j'avais 27 ans. Je suis né en 1956 donc j'avais 26 ou 27 ans.
6 C'était au début des années 80, ou en 81, aux alentours de ces années.
7 J'avais 25 ans ou 26 ans lorsque je suis allé faire mon service militaire.
8 Q. Entre le milieu des années 70 et le début des années 90, à part votre
9 année de service national obligatoire, quelles étaient vos fonctions ? Quel
10 était votre travail ?
11 R. J'étais commercial dans une institution fédérale. Je m'occupais des
12 affaires commerciales.
13 Q. Au cours de cette période est-ce que vous avez commencé à occuper des
14 fonctions ou à vous occupez d'opération en lien avec le SDB ?
15 R. Oui, à l'époque j'étais en lien avec le SDB serbe, depuis l'âge de 22
16 ou 23 ans, je travaillais avec le SDB. Il ne s'agissait que de relation
17 professionnelle. Petit à petit je commençais à assumer un certain nombre de
18 tâches au départ relativement insignifiantes.
19 Q. Pouvez-vous expliquer peut-être le sigle et son sens ? Nous avons
20 parfois utilisé le terme SDB, parfois le terme RDB, pouvez-vous nous
21 éclairer sur le sens de ces sigles ?
22 R. Aucun des sigles n'est vraiment exact dans la mesure où le nom officiel
23 du service et le secteur du service de Sécurité de l'Etat, le sigle correct
24 serait le RSDB, néanmoins le sigle SDB était largement répandu dans son
25 utilisation même si le sigle officiel était celui que je viens de vous
26 dire. Le service faisait partie du MUP, du système policier. C'est la
27 raison pour laquelle ce service était intitulé secteur pour la Sécurité de
28 l'Etat ou secteur pour le service de Sécurité de l'Etat.
Page 6280
1 Q. Est-ce que vous étiez associé au SDB ? Est-ce que c'était l'instance --
2 est-ce que c'était une instance qui dépendait de la République serbe ou de
3 la République fédérale de Yougoslavie ?
4 R. C'était une instance qui dépendait de la République de Serbie. Nous
5 n'avions que de très rares contacts avec les services de Sécurité de l'Etat
6 au niveau fédéral. Le service dont nous parlons ici était bien un service
7 serbe. Je tiens à préciser ici qu'il ne s'agissait pas d'espionnage, il
8 s'agissait simplement de procéder au processus routinier de recrutement et
9 de formation du personnel.
10 Q. Une autre question sur la durée de vos relations professionnelles avec
11 le SDB. Vos relations se sont étendues de quelle date à quelle date ?
12 R. Je vais peut-être éclairer le sens de relations professionnelles. Je
13 n'étais pas employé par les services de Sécurité de l'Etat en tant que tel.
14 J'étais en fait un adjoint associé et par la suite j'ai été promu dans le
15 cadre de ces relations de coopération, mais nos contacts professionnels
16 néanmoins ont duré pour moi depuis l'âge de 22, 23 ans à plus tard même si
17 ces contacts n'étaient qu'intermittents et lorsqu'il n'y avait pas de
18 tâches à accomplir notre coopération s'interrompait.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Serait-il erroné de déduire de la
20 déclaration que vous étiez une source d'information, de renseignement pour
21 eux ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, cela ne serait pas erroné. La seule
23 différence était qu'il s'agissait d'un flux d'information dans les deux
24 sens. J'ai reçu également une formation pratique assurée par le SDB et très
25 souvent nous avons évalué l'information plutôt que simplement l'échanger.
26 Mais votre impression n'est pas du tout erronée, il recevait des
27 informations de moi-même.
28 M. HANNIS : [interprétation]
Page 6281
1 Q. Je suppose étant donné la situation dans laquelle vous vous trouvez
2 aujourd'hui que votre relation avec le SDB a été interrompue à un moment
3 donné. Est-ce que vous pouvez nous préciser la date à laquelle
4 l'interruption des relations a eu lieu ?
5 R. Est-ce que vous faites référence à l'interruption de la fin des années
6 80 ou celle de 99 ?
7 Q. Parlez-nous des deux interruptions.
8 R. A la fin des années 80 au début des années 90, comme vous le savez, le
9 système multipartite a été mis en place en Yougoslavie et je voulais
10 simplement veuillez à ce que ma coopération avec le service de Sécurité de
11 l'Etat ne soit pas utilisée contre mes amis, ceux qui avaient été mes amis
12 dans ma vie politique. Il y a eu une brève interruption au terme de
13 laquelle j'ai reçu toutes les assurances sur le fait que mes contacts qui
14 se trouvaient dans l'affaire internationale et au Kosovo ne seraient jamais
15 utilisés contre mes amis et qu'on ne me demanderait jamais de fournir des
16 informations à ce sens, même après la mise en place d'un système
17 multipartite. Après avoir reçu cet élément d'information la coopération
18 s'est poursuivie et la deuxième interruption en 99 a eu lieu après que ma
19 femme et moi-même avons été kidnappés -- nous avons été capturés dans la
20 rue, nous avons été torturé et à mon sens c'était en fait une préparation à
21 mon meurtre. Heureusement, pour moi, cela s'est produit en même temps que
22 la tentative d'assassinat sur Raskovic et après cela nous avons utilisé ces
23 événements pour quitter le pays. Nous avions un gros malentendu sur la
24 question du Kosovo et s'en était la raison.
25 Q. Je vous arrête. Nous reviendrons à ce point, et je vous poserais des
26 questions sur ces événements par la suite. Après cette rupture initiale
27 dans vos relations, est-ce que vous avez commencé à mener des activités
28 politiques activement après la mise en place du système multipartite ?
Page 6282
1 R. Oui, effectivement j'enseignais moi-même le système multipartite. Dans
2 la mesure où j'ai commencé à devenir actif politiquement, j'ai demandé de
3 recevoir des assurances sur le fait que mon travail, mon travail de
4 renseignement de serait pas utilisé contre moi dans mon travail politique,
5 mais, néanmoins, il n'était pas très intéressé par cet aspect des choses.
6 Q. Donc, à quoi avez-vous tout d'abord participé, est-ce que vous avez
7 rejoint un parti politique ou un groupe politique particulier ?
8 R. Au début je suis devenu l'un des co-fondateurs si je peux le dire
9 ainsi. Donc, je dirais que tout simplement je les ai rejoints, il
10 s'agissait donc d'une association pour l'initiative démocratique
11 yougoslave, et puis, ensuite, je suis devenu co-fondateur mais à un rang de
12 responsabilité très élevé de l'un des partis politiques, néanmoins j'ai
13 commencé à m'engager tout d'abord dans l'association pour l'initiative
14 démocratique yougoslave. Puis, ensuite, je suis devenu co-fondateur, mais
15 pas à un rang de responsabilité très élevé de l'un des parties politiques,
16 néanmoins j'ai commencé à m'engager tout d'abord dans l'Association pour
17 l'initiative démocratique yougoslave. Il s'agissait d'un parti d'opposition
18 non nationaliste, le premier de ce type en Yougoslavie.
19 Q. A quelle époque était-ce, et combien de temps êtes-vous resté avec
20 eux ?
21 R. Cela s'est fait vers la fin de -- plutôt, au tout début des années
22 1990. Oui, au début 1990, je ne me souviens pas exactement de l'année, mais
23 c'était peut-être en 1991, mais, en tout cas, pas plus tard que 1991. J'ai
24 travaillé avec eux pendant deux ans sur les questions de relations
25 internationales, et puis, ensuite, avec des membres de l'opposition qui
26 étaient relativement connus. J'ai commencé à prendre part à la mise en
27 place d'une alliance civique en Serbie. Je peux dire, je crois, sans me
28 tromper, que j'étais l'un des co-fondateurs à un poste de responsabilité
Page 6283
1 peu important de ce parti.
2 Q. Brièvement, en quoi consistait l'alliance civique ?
3 R. Il s'agissait d'un autre parti d'opposition non nationaliste,
4 extrêmement respectable qui regroupait beaucoup de gens qui, en 2000 et par
5 la suite -- donc, en 2000, ont contribué au renversement du gouvernement en
6 Serbie. Certains d'entre eux étaient mes étudiants en science politique et
7 pas seulement mes étudiants, bien entendu.
8 Q. Combien de temps avez-vous participé aux activités de l'alliance
9 civique ?
10 R. J'étais vice-président de l'alliance civique de Serbie, l'un des deux
11 ou trois vice-présidents qui était responsable des relations
12 internationales, et j'ai occupé ces fonctions jusqu'en 1994, 1995, date à
13 laquelle j'ai accepté le poste de conseiller spécial auprès du président de
14 la Nouvelle Démocratie.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous venez de décrire les deux partis
16 auxquels vous étiez associé comme étant des partis d'opposition non
17 nationalistes, n'avez-vous jamais envisagé d'accéder au pouvoir ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans le cadre de la Nouvelle Démocratie, quand
19 j'ai rejoint Nouvelle Démocratie, nous sommes entrés en coalition avec le
20 parti de Milosevic, et donc, de 1994 à 1995, je n'étais plus dans
21 l'opposition, j'étais en fait devenu un consultant, un conseiller auprès du
22 président. Donc, je travaillais avec -- j'étais dans l'un des trois partis
23 au pouvoir en Serbie.
24 Q. Merci. Qui était votre patron, Monsieur. Qui était le chef de la
25 Nouvelle Démocratie ?
26 R. Dusan Mihajlovic.
27 Q. Quelle était au juste la position de Nouvelle Démocratie dans les
28 années 1990 ?
Page 6284
1 R. Tout comme la JUL, Gauche unie yougoslave, nous étions pour ainsi dire
2 un partenaire junior du gouvernement, un gouvernement tripartite dont nous
3 faisions partie. Nous étions des partenaires mais subalternes dans ce
4 gouvernement de coalition. Donc, Nouvelle Démocratie, d'une part, et JUL,
5 d'autres parts. Nous avions nos premiers ministres adjoints, nous avions
6 des responsables de relations internationales, des personnes impliquées
7 dans les affaires du Kosovo, mais l'équilibre du pouvoir, la répartition du
8 pouvoir, disons n'était pas équilibrée parce qu'il en restait une partie
9 majoritaire entre les mains du parti de Milosevic, pour autant que c'était
10 une vrai coalition. Nous avions tout de même gagné des sièges dans les
11 élections.
12 Q. En ce qui concerne cette coalition, qui dirigeait le Parti JUL, ce
13 fameux Parti de la Gauche unie yougoslave ?
14 R. Mira Markovic, l'épouse de Milosevic.
15 Q. Vous souvenez-vous de la taille relative de ces trois partis au sein de
16 la coalition, en terme de nombre de sièges au parlement ?
17 R. Vous savez comment ce genre de chose marche, cela n'est pas si simple
18 en Serbie. Si vous prenez le nombre de sièges au parlement, finalement il
19 était assez faible, notre nombre de siège au parlement, nous n'avions je
20 crois pas plus de six ou sept sièges dans la chambre du député. C'était
21 important parce qu'il fallait -- on avait besoin de nous pour parvenir à
22 une majorité. Mais, en terme absolu, nous avions un tout petit nombre de
23 sièges. Mais il faut tenir compte de l'influence dont disposaient les
24 partis en question sur le terrain. Le pouvoir en Serbie doit être distingué
25 disons du pouvoir qui réside dans les institutions. C'est ainsi en tout cas
26 que les choses se dessinaient à l'époque de Milosevic.
27 Q. Quelle était la taille relative du JUL par rapport au Parti socialiste,
28 SPS ?
Page 6285
1 R. Le JUL, je crois que vous devriez éteindre votre --
2 Q. Excusez-moi --
3 R. Le JUL était partenaire junior, subalterne comme nous. Mais dans les
4 affaires intérieures et dans les affaires commerciales, leur pouvoir était
5 très élevé par rapport à leur présence au parlement à cause de leur poids
6 politique. En terme de poids politique, il y avait d'abord le SPS, puis une
7 Nouvelle Démocratie qui avait plus de poids politique que JUL. Mais, dans
8 les affaires économiques, comme je l'ai dit, le JUL était dominant en
9 Serbie. Notre poids était par contre important en ce qui concerne les
10 affaires du Kosovo, nous avions une certaine influence en la matière.
11 Q. En ce qui concerne la répartition du pouvoir au sein de la coalition,
12 Nouvelle Démocratie disposait de quoi, quelle domaine particulier étiez-
13 vous responsable ?
14 R. Mis à part les sièges au parlement républicain et fédéral, Nouvelle
15 Démocratie et JUL cherchaient à atteindre un certain seuil dans le
16 processus de paix. En effet, Milosevic est certain de ses associés,
17 Milutinovic notamment avait promis, principalement Milosevic qu'il n'y
18 aurait pas de guerre, qu'il ne voulait plus de guerre. Qu'il se rendait
19 compte que par des moyens pacifiques on pouvait faire beaucoup plus pour la
20 Serbie.
21 Il voulait donc prendre un tournant en direction de la paix, il avait
22 besoin pour cela de conseillers politiques qui lui prépareraient une
23 transition progressive, des politiques serbes vers le -- de la guerre vers
24 la paix. En Serbie, le problème principal c'était le Kosovo, c'est une
25 chose que les partenaires de -- les amis de Milosevic ont répété plus tard.
26 Donc, il va demander spécifiquement à la nouvelle démocratie et en partie
27 aussi au JUL de préparer un règlement politique sur la question du Kosovo
28 et nous a impliqués dans certains domaines internationaux. Il s'agissait
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1 notamment du travail avec le Conseil de l'Europe, de nos relations, et la
2 mise en place d'ententes avec les partenaires occidentaux.
3 Moi-même, j'étais impliqué dans un certain nombre de ces activités,
4 avec le président de mon parti, naturellement. C'est pourquoi on peut dire
5 que ces fonctions étaient strictement autorisées par Milosevic. Par
6 ailleurs, elles étaient en accord avec nos convictions intimes, parce que
7 Nouvelle Démocratie était, de toute façon, convaincue du bien fondé des
8 politiques pacifiques, tout comme d'ailleurs l'Alliance civique de la
9 Serbie.
10 Q. Vous nous aviez dit -- vous avez, antérieurement, donné témoignage dans
11 l'affaire Milosevic, n'est-ce pas ?
12 R. En effet.
13 Q. Vous souvenez-vous que M. Milosevic avait contesté votre position,
14 questionnant le fait que vous ayez été un véritable de Nouvelle Démocratie,
15 suggérant que vous ayez pu n'être qu'un simple sympathisant. Vous vous en
16 souvenez ?
17 R. Oui, mais c'était un effet de son imagination.
18 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je suis désolé, mais cette question est
19 directive.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi.
21 M. O'SULLIVAN : [interprétation] J'objecte à la forme directive de cette
22 question. On est pratiquement dans la contestation du témoignage du témoin.
23 [La Chambre de première instance se concerte]
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous ne sommes pas d'accord avec vous,
25 Monsieur O'Sullivan. Nous n'estimons pas que ce soit une question infondée
26 et donc nous la permettons.
27 Maître Hannis.
28 M. HANNIS : [interprétation] Je vous remercie.
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1 Q. Puis-je avoir une réponse ? J'aimerais montrer au témoin la pièce P695.
2 Monsieur Tanic, lorsque vous avez quitté Alliance civique et que vous avez
3 rejoint Nouvelle Démocratie, y a-t-il eu un article à ce sujet, publié dans
4 une feuille locale ?
5 R. L'événement en question a fait l'objet de beaucoup d'encre dans la
6 presse locale. Il n'y a pas eu simplement un article. On en a parlé dans au
7 moins une trentaine, dans une quarantaine d'articles. A cette époque-là,
8 j'étais devenu un membre assez visible de l'Alliance civique. J'étais une
9 personne qui défendait la paix de Dayton. Pour eux, pour la presse, c'était
10 quelque chose d'important que j'aie quitté Alliance civique et rejoint
11 Nouvelle Démocratie. Cela n'était pas si important que cela en réalité.
12 C'était plutôt technique. Il n'empêche qu'il y a eu 30 à 40 articles qui en
13 parlaient. A ce moment-là, c'était d'ailleurs le premier transfert d'un
14 parti politique à un autre qui n'ait pas été l'objet de transactions disons
15 douteuses ou de calomnies. Personne ne s'est vexé, parce que je n'ai rien
16 dit de négatif sur mon ancien parti. Il n'y a pas eu d'affaire autour de ce
17 changement d'allégeance.
18 Q. Monsieur Tanic, voyez-vous l'article sur l'écran devant vous ou faut-il
19 que nous descendions un peu ? Je ne vois pas le texte -- je ne peux pas
20 lire le texte en cyrillique.
21 R. Oui. Il faudrait descendre un petit peu. Maintenant, je le vois.
22 M. HANNIS : [interprétation] Pourrait-on avoir la version anglaise ?
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Tout ceci a-t-il un but, Maître
24 Hannis ?
25 M. HANNIS : [interprétation] Il y a un objectif, Monsieur le Président, et
26 j'espère que vous allez le décerner -- le déceler sous peu.
27 Q. Monsieur Tanic, dans quel journal cet article est-il paru ?
28 R. Oui. C'est Politika, l'organe officiel du parti de Milosevic, du régime
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1 Milosevic. Cela n'avait -- Ce n'était pas du tout un journal indépendant.
2 Q. Je lis que vous avez rejoint le conseil exécutif de Nouvelle
3 Démocratie; cela est-il exact ?
4 R. Oui. Dès le début, je me suis trouvé membre du noyau directif. J'étais
5 membre du conseil exécutif et conseiller spécial. Ce n'est peut-être pas
6 très modeste de ma part de le dire, mais je l'avoue. J'étais une sorte de
7 star en politique et j'étais passé d'un parti à un autre et cela s'était
8 passé de façon tout à fait transparente. Les raisons de ce déplacement
9 avaient été claires. Je défendais la paix de Dayton. Je défendais un agenda
10 pacifique pour la Serbie, basé sur la paix de Dayton. Cela n'a pas été un
11 transfert lié à des échanges financiers ou quoi que ce soit de ce genre. Il
12 s'agissait pour moi de la survie de la Serbie.
13 Q. Merci. Je vais vous demander, dans la mesure du possible, de limiter
14 vos réponses à ma question.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, il est assez
16 difficile de considérer ceci comme authentique. Cela ne ressemble en rien à
17 un article de journal. Ce n'est pas la langue dans laquelle cela a été
18 publié pour commencer. Je ne sais pas si vous pouvez vous fonder sur ce
19 texte. La réponse du témoin traite du sujet de la question. Le document me
20 semble n'avoir rien de pertinent -- particulièrement pertinent, sauf si
21 vous nous dites qu'il s'agit d'autre chose que ce que le témoin nous dit
22 que c'est.
23 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, n'avez-vous pas vu la
24 version en cyrillique ?
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Normalement, je la vois sur l'écran,
26 mais là, elle n'apparaît pas. Je vous demande pardon. Cela aurait dû être
27 sur l'écran. Pardon.
28 M. HANNIS : [interprétation] C'était à l'écran au départ. C'est moi qui ai
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1 demandé l'anglais pour que je puisse suivre.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous demande pardon. Maintenant, je
3 comprends mieux.
4 M. HANNIS : [interprétation] Je vous remercie.
5 Q. A présent, Monsieur Tanic, si vous permettez, j'aimerais regarder
6 certaines parties de votre déclaration, pièce 2480. Il s'agit simplement
7 d'éclaircir quelques points. Dans le paragraphe 2 de votre déclaration,
8 vous nous parlez d'un ouvrage que vous prépariez en 1999 qui avait pour
9 thème la politique yougoslave dans le cadre de la crise du Kosovo. Avez-
10 vous terminé ce livre ?
11 R. En ce qui concerne le rôle serbe dans l'affaire du Kosovo et dans le
12 déclenchement du conflit, ma foi, je n'ai rien terminé du tout. Parce que
13 je recueille de la documentation pour ce livre et si j'avais l'intention de
14 lire ce livre, cela a précisément été la raison de l'enlèvement dont j'ai
15 été victime. Donc, non, je n'ai pas pu le terminer et maintenant, je ne
16 pourrai pas le terminer, puisque je suis couvert par le programme de
17 protection des témoins et je ne suis donc plus censé publier quoi que ce
18 soit.
19 Q. Dans le paragraphe 4, vous nous dites que vous aviez été autorisé à
20 participer à ce que vous appelez des négociations discrètes concernant le
21 Kosovo. Vous nous dites que cette autorisation vous avait été donnée par
22 Milosevic dans une réunion que vous avez -- dans laquelle vous étiez
23 présent, ainsi que Dusan Mihajlovic. Pouvez-vous nous dire où s'est passée
24 cette réunion ?
25 R. Cette réunion s'est passée dans le bureau de M. Milosevic, où se
26 trouvaient Mihajlovic et moi-même. Nous avons parlé de notre plan à M.
27 Milosevic, un plan pour le règlement des problèmes du Kosovo. Le plan était
28 l'un des points de départ -- ou plus exactement le point de départ de tous
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1 les plans de règlement du conflit qui se sont -- qui ont émergé par la
2 suite. Comme d'habitude dans ce genre de réunion, Milosevic était d'accord.
3 Le plan était un plan en trois phases qui a d'ailleurs réapparu dans
4 différentes autres occasions. L'idée de base, c'était de résoudre la
5 question du Kosovo de façon politique, avant que cela ne dégénère en
6 conflit armé.
7 Q. Dans ce même paragraphe, vous nous dites que cette proposition, que
8 vous puissiez participer à de telles négociations, avait été dûment
9 acceptée par le SDB du point de vue de la sécurité. Alors, quand cet accord
10 a-t-il été donné et comment ?
11 Q. Tout de suite. L'accord a été donné tout de suite en 1995. Le SDB était
12 alors dirigé par Jovica Stanisic et le SDB désirait tout à fait trouver un
13 Règlement politique afin d'éviter la guerre au Kosovo. Il était tout à fait
14 satisfait de me mettre en contact avec les personnes qui dirigeraient ces
15 négociations.
16 Il ne s'agissait pas simplement de moi. Il y avait cinq ou six autres
17 personnes qui allaient être impliquées dans ces négociations, et le SDB l'a
18 autorisé par le biais de la direction du service en 1995. Leur angle était
19 l'angle de la sécurité naturellement, c'était ce qui les concernait. Il
20 s'agissait d'éviter un conflit armé au Kosovo. Pour eux, il était de toute
21 évidence préférable d'avoir un règlement politique et d'éviter la guerre.
22 Q. Dans le paragraphe suivant qui est le paragraphe 5, vous nous dites que
23 d'autres participants serbes aux négociations incluaient notamment M. Ratko
24 Markovic, premier ministre adjoint de la République de Serbie et M. Dojcilo
25 Maslovaric, qui était attaché yougoslave auprès du Vatican, vous nous dites
26 que vous étiez le principal négociateur mais vous étiez inférieur à ces
27 deux personnes pourquoi vous donnez-vous le titre de principal dans ces
28 négociations discrètes ?
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1 R. C'est une différence terminologique entre le serbe et l'anglais en
2 fait. Evidemment que le négociateur principal était Ratko Markovic, mais
3 lui n'arrivait à rien. Il ne prenait pas ces négociations au sérieux. Il se
4 contentait de les mener de façon docile en appliquant les ordres de
5 Milosevic et de ses associés. Maslovaric lui avait obtenu beaucoup plus de
6 résultats. Si je dis que j'étais le négociateur principal, ce n'est pas
7 vrai de façon officielle, mais avec le président de mon parti, Dusan
8 Mihajlovic, j'étais celui qui négociait avec le plus de succès. C'est nous
9 qui avons obtenu le plus de résultats en terme de solutions politiques aux
10 problèmes du Kosovo, en terme de solutions politiques satisfaisantes du
11 point de vue des Serbes.
12 Je parle de moi, là. J'ai eu suffisamment de liberté pour parler
13 ouvertement avec les envoyés des pays occidentaux, avec les Russes, et
14 j'avais également le soutien des services de Sécurité de l'Etat ce que
15 n'avaient pas d'autres membres de l'équipe de négociations. C'est pourquoi
16 si l'on se base sur les résultats alors mes résultats étaient les
17 meilleurs, enfin les miens et ceux du président, Dusan Mihajlovic. C'est
18 dans ces termes-là qu'on peut dire que j'étais le meilleur des
19 négociateurs. A terme la répartition du pouvoir faisait que lorsqu'un
20 problème se posait, il devait être réglé par Milosevic, alors, Milosevic le
21 réglait soit seul avec Milutinovic, soit avec moi et Mihajlovic. Les autres
22 négociateurs n'avaient pas tellement de résultats et, en gros, ils seraient
23 principalement de messagers. Cela ne veut pas dire qu'il n'avait aucun
24 résultat du tout ou qu'ils ne servaient à rien. Formellement et légalement
25 juridiquement parlant, jusqu'à 1997, le négociateur principal était bien
26 Ratko Markovic.
27 Q. Concernant vos efforts dans ces négociations vous nous dites dans le
28 paragraphe 11, que vous aviez progressé que tous les problèmes que vous
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1 aviez rencontré avaient été présentés à Milosevic par voix différentes, il
2 y avait d'une part les rapports régulièrement fréquemment présentés par le
3 SDB. Savez-vous quelle était au juste la fréquence de ces rapports fait sur
4 vos travaux à
5 M. Milosevic ?
6 R. Pour autant que je sache, c'est une estimation, j'imagine tous les deux
7 ou trois mois, peut-être même tous les trois ou quatre mois qu'un rapport
8 était communiqué à M. Milosevic. En tout cas, il y en avait plusieurs par
9 an, je travaillais de façon assez intense sur ces questions. J'avais obtenu
10 des résultats significatifs. Le SDB en était tout à fait satisfait, et
11 j'avais des contacts directs par l'intermédiaire de Mijatovic et Stanisic,
12 plus exactement Mijatovic envoyait les rapports à Stanisic qui les faisait
13 parvenir par la suite à Milosevic. Je sais que Milosevic se servait de ce
14 qui lui était envoyé non seulement lui mais aussi ses associés, ces
15 informations faisaient l'objet d'un retour, qui revenaient à mes services
16 par l'intermédiaire du chef de mon parti, Dusan Mihajlovic.
17 Q. Vous nous dites que vous receviez un retour sur ces informations. Quel
18 était ce retour qui vous parvenait sur les progrès réalisés dans les
19 négociations ?
20 R. Ma foi, il y avait des louanges des expressions de satisfaction pour
21 moi et pour Mihajlovic. Là, je parle en mon nom donc je parle que de moi.
22 Mais nous avions réalisé des progrès sur trois ou quatre ans. Milosevic
23 lui-même était convaincu qu'il y avait certains points sur lesquels nous ne
24 progressions jamais, et pourtant nous avions réussi. Donc, j'avais pour
25 ainsi dire carte blanche pour examiner toutes les solutions possible,
26 Cela c'est la mesure de notre succès. Naturellement, ultérieurement il a
27 fallu en payer le prix. Mihajlovic recevait également un retour. Si les
28 circonstances avaient été différentes, nous n'aurions pas pu travailler
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1 comme nous l'avons fait pendant ces trois années. Si nous n'avions pas eu
2 de soutien et si nous n'avions pas eu l'aval des autorités et le soutien
3 s'il n'y avait pas eu ce fonctionnement, nous n'aurions pas pu avancer.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pouvez-vous nous donner un exemple de
5 ces succès dans vos négociations ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, pour commencer, nous avons introduit une
7 tierce partie dans les négociations. Ce problème était assez complexe parce
8 que Milosevic ne voulait pas de tierce partie dans les négociations il ne
9 voulait pas que cette tierce partie en tout cas soit un Etat ou même un
10 groupe d'Etat. Mihajlovic et moi-même - encore une fois, je peux dire "je",
11 mais c'est parce que je ne peux parler qu'en mon nom - j'ai essayé de
12 trouver des ONG disposant d'une certaine influence ou d'autres groupes qui
13 puissent être liés à un gouvernement mais restés non gouvernementaux dans
14 leur nature.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai lu cela dans votre déclaration.
16 Je me demandais s'il y avait eu des réussites dans les négociations elles-
17 mêmes plutôt que dans l'établissement disons du cadre de ces négociations,
18 des partis impliquées dans ces négociations ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Des succès concrets, je crois que le principal
20 succès de notre parti était que les activités terroristes du côté albanais
21 étaient minimisées pendant l'époque de ces négociations. Cela peut se
22 constater en lisant les documents pertinents. Il n'y a eu que quelques
23 incidents, quelque chose de très intermittent. Puis, deuxièmement, du côté
24 albanais, on a jamais abandonné l'idée d'indépendance mais on a accepté de
25 la remettre à plus tard et d'accepter les conditions d'une sorte de phase
26 de transition qui devait durer une quinzaine d'années.
27 Finalement, l'accord lui-même était notre principal succès, je projet
28 d'accord, qui ressemblait à l'accord Holbrooke-Milosevic, l'accord qui fut
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1 signé. Tout le monde s'était préparé à cette solution qui n'a jamais été
2 mise en œuvre. Il y a des exemples de réussites politiques, mais, Monsieur
3 le Président, n'oubliez pas que nous faisions tout notre possible pour
4 éviter une guerre. Donc si nous estimons être en train de trouver une
5 solution politique qui permet d'éviter la guerre alors nous aurons le
6 sentiment d'avoir réussi.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai peut-être été distrait, mais nous
8 dites-vous qu'il y avait un document signé par le côté albanais qui
9 acceptait cette phase de transition de 15 ans ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, aucun document n'a été signé. Mais il
11 existe des documents qui montrent clairement que, du côté albanais, il y
12 avait des intentions -- que l'on avait l'intention d'accepter une phase de
13 transition, un accord politique qui ne serait pas limité à une période de
14 trois mois. Cela se voit, cela est clairement indiqué par des documents.
15 M. HANNIS : [interprétation] Permettez-vous que je montre au témoin un
16 document qui, je pense serait pertinent pour répondre à la question du
17 Président. Il s'agit de la pièce 24 -- P2481.
18 Q. Puisque nous sommes sur ce sujet, Monsieur Tanic, je voulais vous
19 demander, vous nous avez parlé de l'importance de l'introduction d'une
20 tierce partie dans les négociations entre vous même et les Albanais du
21 Kosovo. Dites-moi, au début de votre entrée en fonction dans ce domaine, je
22 crois savoir que vous nous disiez dans votre déclaration qu'il y avait des
23 points qui étaient importants pour Milosevic, pour ses négociations
24 discrètes. Pouvez-vous nous dire quelles étaient ces deux considérations
25 importantes pour Milosevic ?
26 R. Bien. La première condition qu'il y mettait était que la solution
27 politique ne devait pas mener à une sécession, ni à l'indépendance du
28 Kosovo, deuxième, une indépendance complète, l'existence d'un Etat séparé.
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1 La deuxième condition était qu'une tierce partie participant aux
2 négociations ne pouvait être qu'une ONG. Pour Milosevic et ses associés,
3 pour -- ce qu'ils en ont dit permettait de penser que toute autre tierce
4 partie était possible -- que tout autre solution était possible, y compris
5 une autonomie substantielle, et cetera, et cetera. Nous avons constaté plus
6 tard que cela n'était pas vrai, mais c'est une autre histoire.
7 Q. En ce qui concerne cette tierce partie, quelle était la position des
8 Albanais du Kosovo quant à l'introduction d'une tierce partie dans les
9 négociations ?
10 R. Ils acceptaient, et c'était là de fait avec réticence, mais ils
11 l'acceptaient, ils n'y pouvaient rien. Les négociations c'est toujours
12 difficile sur ce genre de questions. Je ne peux pas dire que tout ce qui se
13 passait les satisfaisaient, mais ils étaient -- mais ils acceptaient, ils
14 auraient préféré que des gouvernements soient impliqués dans les
15 négociations, mais ils ont accepté que des -- de se contenter d'ONG
16 disposant d'une certaine influence dans les négociations.
17 Q. Savez-vous pourquoi ils ont préféré que cela soit un gouvernement
18 plutôt qu'une ONG ?
19 R. Ils auraient préféré avoir des garanties plus solides pour les
20 négociations politiques. Les garanties que peut fournir un gouvernement
21 sont forcément plus solides. D'autre part, comme je l'ai déjà expliqué,
22 comme je l'ai expliqué aux éléments occidentaux avec qui j'en ai parlé,
23 trouver une solution pacifique au Kosovo cela n'a rien de simple. Il faut
24 préparer ces négociations longuement pour avoir des résultats. On ne peut
25 pas préparer les négociations avec le gouvernement, cela ne se fait pas.
26 Cela n'existe pas. Une négociation -- les négociations commencent toujours
27 à un niveau moins officiel. Donc ils ont accepté, naturellement, mais ils
28 ont accepté avec une certaine réticence.
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1 Q. Savez-vous pourquoi M. Milosevic préférait une ONG à un gouvernement
2 tiers ou une tierce partie qui aurait pris la forme d'un gouvernement, d'un
3 pays étranger ?
4 R. De manière à ce qu'il puisse dire par la suite que les négociations qui
5 avaient été menées ne l'avaient pas de manière sérieuse. Qu'il s'était agi
6 simplement d'une discussion entre intellectuels mais que rien d'officiel
7 n'avait eu lieu. C'était une manière pour lui de se mettre en position de
8 rejeter le fruit des négociations, négociations dans lesquelles ses plus
9 proches alliés et lui-même avait participé parce qu'en réalité, ce
10 processus a duré trois ou trois ans et demi.
11 Q. Bien, regardez le document.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Permettez-moi --
13 M. HANNIS : [interprétation] Oui.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] -- avant de poursuivre.
15 N'est-il pas normal et commun dans le monde que les gouvernements résistent
16 à l'intervention d'un gouvernement tiers ou d'autres pays dans leurs
17 affaires intérieures ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est courant. Toutefois, le problème du
19 Kosovo revêtait une forte dimension internationale. A ma connaissance en
20 outre, Milosevic ne s'intéressait pas particulièrement à la question de la
21 souveraineté, ce qui ressortait, c'est que pour lui bien sûr il était
22 difficile de faire face à cette question. Mais évidemment le problème de la
23 souveraineté s'opposait.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais, ce qui m'intéresse c'est le
25 raisonnement que suivez lorsque vous dites que c'était un choix délibéré de
26 sa part de manière à faire échouer les négociations. Ce n'est pas vraiment
27 un sceau logique dans leur raisonnement. Notamment compte tenu des
28 informations que vous avez présentées jusqu'à présent.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai pas dit que les négociations
2 capoteraient, j'ai dit que Milosevic avait fait cela pour pouvoir les
3 brosser de la main par la suite ou sans distancier s'ils le souhaitaient.
4 Si les négociations aboutissaient, Milosevic et ses acolytes en seraient
5 félicités et si les négociations n'aboutissaient pas, il n'aurait qu'à dire
6 à ce moment-là qu'il s'agissait simplement de conversations entre
7 intellectuels. C'est une technique assez courante employée aux quatre coins
8 du monde.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais vous voyez ceci totalement
10 différente sur votre témoignage parce que la manière dont vous aviez
11 répondu à la question au départ, d'après ce que j'avais compris, vous le
12 faisiez sur la base qu'il n'y avait qu'un résultat potentiel, à savoir que
13 les négociations seraient ignorées de lui. Maintenant, vous dites qu'il
14 n'aurait souhaité que s'en distancer s'il y avait eu échec, et ceci me
15 permet de mieux comprendre ce que vous avez dit, je comprends la position.
16 Merci.
17 M. HANNIS : [interprétation]
18 Q. Monsieur Tanic, j'aimerais maintenant que vous regardiez ce document
19 qui est à l'écran et que vous nous disiez si vous le reconnaissez ?
20 R. Oui, je le reconnais.
21 Q. Qu'est-ce que c'est ?
22 R. C'est un document qui est intitulé : "Positions ayant fait l'objet d'un
23 consensus." Cela concerne la partie serbe et la partie albanaise, c'est un
24 document de New York, c'est un de nombreux documents qui a été signé.
25 Q. Bien. Je vous réfère au paragraphe 32 de votre déclaration à présent.
26 Vous dites que ceci a été le fruit des négociations que vous aviez menées
27 jusqu'à présent, et que ceci, en réalité, était un des règles de base
28 devant -- aux négociations entre les partis ?
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1 R. Oui. Effectivement, il s'agit là de certains des résultats obtenus.
2 Evidemment nous avons obtenu des résultats plus importants, mais ce
3 document montre néanmoins que les Albanais étaient disposés à accepter une
4 solution politique. Toutefois, je dois signaler quelque chose d'autre.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Fila.
6 M. FILA : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai reçu ce document
7 mais il n'y a pas de signature, il n'y a rien sur ce document. Alors, ce
8 n'est pas vraiment un document. On ne peut pas accepter ce document. Je
9 peux rentrer chez moi et je peux taper un document et le présenter en
10 disant : "Voilà c'est document." Mais, sans signature, personne n'en
11 voudra. Alors, j'aimerais savoir moi si le document qui vient de nous être
12 présenté a un signature ou un titre. Est-ce qu'on peut vraiment le
13 considérer comme étant un document véridique ? Si c'est le cas très bien,
14 mais je pose juste la question, c'est une question de principes.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. La différence ici c'est que le
16 témoin, lui-même, a identifié ce document, document qu'il a contribué à
17 réaliser. Par conséquent, la signature n'est plus une exigence fondamentale
18 afin d'établir l'authenticité.
19 M. FILA : [interprétation] Non, je comprends bien. Mais il s'agit ici
20 semble-t-il de positions ayant fait l'objet de consensus entre plusieurs
21 partis, donc cela concerne plusieurs individus, c'est la raison pour
22 laquelle je soulève cette objection. Si c'était un document qui émanait
23 seulement de M. Tanic, il n'y aurait pas de problème.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] J'aimerais tirer au clair ce point-ci.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] On va vous poser d'autres questions
26 sur ce point dans un instant, Monsieur.
27 Maître Fila, si toutefois vous doutez de l'authenticité de ce document, M.
28 Hannis va pouvoir poser les questions nécessaires au témoin pour clarifier
Page 6299
1 les choses, mais il me semble que le témoin a participé aux négociations
2 qui ont abouti à la préparation de ce document.
3 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
4 Q. Vous avez entendu les observations du Président. Avez-vous participé à
5 la rédaction de ce document ?
6 R. Oui. Effectivement. J'ai contribué à la préparation du document. Je
7 n'étais pas New York, mais Dusan Mihajlovic, le président de mon parti, lui
8 y était. J'ai également contribué à la préparation d'autres documents. Les
9 négociations ont eu lieu à huis clos, bien sûr, et évidemment, tous les
10 documents liés à ces négociations n'ont pas été signés.
11 Q. Et --
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais la question fondamentale, c'est :
13 qu'est-ce que ce document ?
14 C'est une question que je vous adresse, Monsieur Tanic. En quoi consiste ce
15 document ? De quoi s'agit-il ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. D'accord. C'est un document parmi
17 d'autres qui montre que la partie albanaise est prête à rechercher une
18 solution pacifique et politique au problème au Kosovo.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Comment l'avez-vous obtenu ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Mihajlovic me l'a donné lorsqu'il est revenu
21 de New York. Des représentants du ministère des Affaires étrangères
22 américain étaient là, Agani y était aussi. C'était le numéro 2 au Kosovo.
23 [La Chambre de première instance se concerte]
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce document présente suffisamment de
25 signes d'authenticité pour être recevable. Il s'agira d'une pièce portant
26 la cote P2480 dans ce document.
27 M. HANNIS : [interprétation] Je vous ferais remarquer, Monsieur le
28 Président, également que ce document est déjà identifié. S'agissant de sa
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1 version anglaise comme étant la pièce TX-7. C'est ce à quoi il est fait
2 référence au paragraphe 32 de la déclaration du témoin.
3 M. LE JUGE CHOWHAN : [hors micro]
4 M. HANNIS : [interprétation] Le terme TX-7 ou l'acronyme figure au
5 paragraphe 32 de sa déclaration.
6 Q. Monsieur Tanic, si j'ai bien compris, ces trois paragraphes sont le
7 fruit de négociations qui étaient en cours depuis déjà un certain temps,
8 n'est-ce pas ?
9 R. Oui, c'est exact. Ceci renvoie également un document beaucoup plus
10 large. Il y a au moins 20 témoins qui pourraient dire que ceci a fait
11 l'objet d'un accord entre les Serbes et les Albanais présents à New York.
12 Il y a Madeleine Albright, elle-même, et il y a eu quelqu'un d'autre dans
13 l'après-midi également. Je peux vérifier mon agenda. Il y avait Mihajlovic,
14 Raskovic de notre côté, Vesna Pesic, je crois, puis plein d'autres témoins,
15 autant que vous voulez. Ce document est tout à fait authentique.
16 Q. Je vous arrête. Vous dites au paragraphe 32, que
17 M. Mihajlovic et Fehmi Agani sont allés à New York pour officialiser en
18 quelque sorte cet accord. Y a-t-il eu un autre document qui a été signé ou
19 du fait de la nature de ces négociations discrètes il n'y a pas eu de
20 signature. Avez-vous une réponse à cela ?
21 R. Non, il n'y a pas eu de signature de document parce que je l'ai dit les
22 négociations étaient discrètes. A l'époque les Américains voulaient quelque
23 chose de plus concret, quelque chose qui soit couché sur le papier.
24 Mihajlovic représentant la coalition au pouvoir et Agani au nom du
25 gouvernement sont allés à New York pour se plier à cette exigence, mais il
26 n'y a pas d'autre document qui ait été signé. Je ne veux pas anticiper
27 quelque chose dont nous parlerons cet après-midi.
28 Q. J'aimerais que nous avancions dans les négociations.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant cela, vous avez dit que le
2 deuxième point de ce document était en réalité un accord des Albanais du
3 Kosovo qui acceptaient de s'éloigner de l'idée du concept d'indépendance.
4 J'aimerais savoir comment vous arrivez à cette interprétation-là de ce
5 deuxième paragraphe.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] On ne le voit pas dans le document. Je sais
7 qu'ils ont accepté d'abandonner l'idée ou en tout cas de reporter
8 l'indépendance pour une période de temps donnée. Je le sais sur la base des
9 conversations qui ont eu lieu. Mais je suis d'accord avec vous pour
10 reconnaître que l'on ne le voit pas dans ce document.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Merci.
12 M. Hannis.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Les Albanais n'ont pas pu faire figurer cela
14 dans aucun de leurs documents de même que nous n'avons pas pu mettre tout
15 ce que nous souhaitions dans les documents non plus. Les questions étaient
16 complexes, sensibles. Les positions des deux camps étaient extrêmement
17 éloignées les unes des autres et, par conséquent, certains éléments n'ont
18 pas été couchés sur le papier en raison notamment de la réaction que ceci
19 aurait provoqué au sein du public dans nos pays. Ce qui était assez
20 compréhensible.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Mais vous poursuivez ensuite en
22 disant dans votre déclaration que Milosevic avait accepté cet accord
23 préalable. Etes-vous en train de nous dire qu'il avait accepté le deuxième
24 point qui figure dans ce document ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, tout à fait. Entre la période allant
26 de 1994 à 1997, Milosevic s'est conduit comme s'il tentait véritablement de
27 parvenir à trouver une solution à la question du Kosovo avec ses acolytes.
28 Ceci n'est vrai que pour la période évoquée, à savoir 1994, 1997. A
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1 certaines occasions seulement au cours de l'année 1997 il a commencé --
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il a commencé à quoi ? Voulez-vous
3 terminer votre réponse ? Pourriez-vous répéter, s'il vous plaît, la fin de
4 votre réponse ? Il semblerait que les interprètes ne l'aient pas entendu
5 puisque dans le compte rendu on voit : "Ce n'est qu'occasionnellement ou à
6 certains reprises au cours de l'année 1997 qu'il a commencé à --" et puis,
7 on n'a pas la suite. Pourriez-vous compléter ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Au cours de la deuxième partie de l'année
9 1997, qu'il a commencé à montrer certains signes révélateurs tout comme ses
10 amis acolytes d'ailleurs montrant qu'une solution politique ne verrait pas
11 le jour. Alors qu'en 1998, lui et ses acolytes ont, définitivement,
12 favorisé une solution fondée sur la guerre et sur le début de la guerre au
13 Kosovo.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Peut-être que vous n'avez pas tout à
15 fait bien compris ma question. La deuxième partie ou le deuxième point dans
16 ce document prévoit des négociations, le paragraphe commence par : "No
17 preconditions" - "Sans conditions préalables." Etes-vous donc en train de
18 nous dire que M. Milosevic avait accepté l'absence de conditions
19 préalables ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, j'ai bien compris votre question. Il
21 a accepté l'absence de conditions préalables alors que partout ailleurs
22 dans le monde oui, pardon --
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela ne veut dire aucune condition
24 préalable, à savoir que le Kosovo n'était pas censé rester au sein de la
25 Serbie.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] A l'époque personne ne croyait que le Kosovo
27 demeurait au sein de la Serbie. D'abord, la discussion a porté sur le fait
28 qu'il resterait au sein de la Yougoslavie.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. D'accord. C'est utile mais, s'il
2 vous plaît, tenez-en-vous, à la question que je vous ai posée. Pourquoi les
3 choses sont-elles un peu confuses ? Parce que vous décrivez dans votre
4 déclaration que le deuxième point consiste en réalité en un accord donné
5 par les Albanais du Kosovo, accord les éloignant en quelque sorte de
6 l'indépendance. Ce qui suggère semble-t-il qu'il ait accepté une condition
7 préalable. C'est là que les choses deviennent compliquer.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Au cours des négociations sur ce genre de
9 chose il y a toujours un certain nombre de malentendus. Bien entendu, à la
10 lecture du point 2 on pourrait se dire qu'ils ont abandonné leur exigence
11 parce qu'au départ ils avaient dit que c'était l'indépendance ou rien.
12 Lorsque l'on lit ici qu'ils ont accepté de s'éloigner de le seul
13 aboutissement qui pouvait pour nous un aboutissement des négociations,
14 effectivement, on pourrait en conclure qu'ils avaient à accepter de revenir
15 sur leur exigence d'indépendance. D'où ma conclusion dans la déclaration.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.
17 M. HANNIS : [interprétation]
18 Q. Monsieur Tanic, au début des négociations n'y a-t-il pas eu une
19 première pierre au départ même de ces négociations, c'est-à-dire la
20 question du statut du Kosovo ?
21 R. [hors micro]
22 Q. Je vois que vous faites un geste de la main, mais je ne sais pas ce que
23 cela veut dire.
24 R. Pourriez-vous éteindre votre micro, s'il vous plaît ? Oui, le simple
25 fait d'aborder la question pose des problèmes, au début des négociations.
26 Autre difficulté, les positions des partis étaient très éloignées les unes
27 des autres, et il fallait faire en sorte au moins de les rapprocher. Cela
28 c'était indispensable avant même d'envisager, d'entamer des négociations.
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1 Q. Les positions étaient très éloignées s'agissant du statut du Kosovo
2 mais comment cela ? Quelle était, par exemple, la position des Albanais du
3 Kosovo sur le statut du Kosovo ? Que voulaient-il alors que vous tentiez de
4 lancer les négociations ?
5 R. Je demande à la Chambre de bien vouloir comprendre la nécessité pour
6 moi d'apporter davantage d'explications. Au cours du processus de
7 négociations, chaque partie tente d'en tirer le plus profit possible et de
8 gagner le plus possible de terrain par rapport à l'autre partie. Les
9 Albanais ne parlaient que d'indépendance du Kosovo, alors que nous, la
10 partie serbe, nous parlions d'une autonomie limitée. Au cours du processus
11 de négociations, il est apparu clairement qu'aucune des parties ne
12 pourraient maintenir de positions extrêmes et ne pourraient s'attendre à
13 obtenir le plus de résultats possibles. Je sais que les Albanais le
14 savaient. Je le sais parce que je leur ai parlés que je savais que la
15 communauté occidentale était opposée à une position aussi extrême, telle
16 que celle qui était défendue par les Albanais, ce qui veut dire que les
17 deux partie ont dû abandonner leur position extrême.
18 Q. Ils ont dû le faire de manière provisoire ou permanente, de manière à
19 ce que les discussions aient lieu ?
20 R. Je vais être assez sincère avec vous. Ce que Mihajlovic et moi-même
21 avons dit à Milosevic, et ce que j'ai dit au service de Sécurité de l'Etat,
22 et c'était la seule tactique appropriée pour la Serbie, c'était que nous
23 devions être plus malin, être plus intelligent que les Albanais, être plus
24 malin qu'eux, et pas nécessairement essayer de gagner directement. Nous
25 avons donc préparé, rédigé un plan dont nous avons promu l'adoption, l'idée
26 étant de mettre en place un accord, un règlement politique provisoire sur
27 une période de 10 à 15 ans. Dans l'intervalle, nous deviendrions membre de
28 l'Union européenne. A l'époque, en 1997, 1998, l'Union était fortement en
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1 faveur de cela, contrairement à aujourd'hui. Nous avons dit : "Okay. Si les
2 Albanais voulaient quitter la Serbie et la Yougoslavie, il faudrait qu'ils
3 quittent l'Union européenne, s'ils le voulaient, ils n'avaient qu'à
4 essayer." Nous voulions simplement tendre aux Albanais une carotte, une
5 carotte économique, ce qui les mènerait à abandonner leurs exigences
6 politiques. Ils le savaient et ils savaient que c'était la réalité dans
7 laquelle ils se trouvaient. Ils préféraient devenir membre de l'Union
8 européenne plutôt que de créer le chaos sur la question de l'indépendance
9 parce que la réalité politique deviendrait autre. Nos négociations
10 consistaient à être plus malin que les Albanais sur le plan politique.
11 C'est la démarche que nous avons suivie. C'est la raison pour laquelle les
12 Albanais ont acquiescé. Si c'est la voie vers l'Union européenne, que peut-
13 on faire ? C'est notre destin. A ce moment-là, l'Occident -- les pays
14 occidentaux exerçaient de fortes pressions sur les Albanais, afin qu'ils
15 abandonnent leur position ultranationaliste et ils ont accepté de le faire
16 à l'époque avec réticence, avec hésitation, je dois le dire. Ceci allait-il
17 être une solution durable ou pas ? J'ai l'impression que, si les choses
18 avaient fonctionné, cela aurait pu être un règlement politique permanent. A
19 l'époque, les Albanais l'UCK, ils n'étaient pas organisés. Ils étaient
20 surtout à l'étranger. Toutefois, à ce moment-là, Milosevic a décidé de
21 laisser tomber le processus politique et a commencé à provoquer des
22 incidents et des conflits au Kosovo, lui et ses acolytes.
23 Q. Merci.
24 M. HANNIS : [interprétation] Je crois que l'heure est venu de faire la
25 pause.
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.
27 Nous devons faire une pause, Monsieur Tanic.
28 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons devoir passer en audience
2 à huis clos pour permettre au témoin de quitter le prétoire.
3 [Audience à huis clos]
4 (expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 (expurgé)
10 (expurgé)
11 (expurgé)
12 (expurgé)
13 (expurgé)
14 (expurgé)
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 [Audience publique]
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
23 Monsieur Hannis.
24 M. HANNIS : [interprétation] Merci.
25 Q. Avant la pause, nous parlions d'une sorte de préaccord de négociation,
26 qui, d'une certaine manière, traitait de cette pierre d'achoppement
27 concernant le statut de Kosovo. Pourriez-vous nous décrire le processus des
28 négociations à partir de ce moment-là ? Quelle était votre stratégie ?
Page 6307
1 Quelle était votre démarche ? Sur quoi étiez-vous d'accord quant au
2 processus de négociations ?
3 R. Non. Les négociations étaient déjà complètement en cours. Il y avait eu
4 la période de préparation, des négociations très brèves où Milosevic et
5 Rugova participeraient et élaboreraient un accord complet. Donc cette
6 période avait déjà eu lieu, donc il s'agissait là de négociations à part
7 entière et non pas de la phase préparatoire à ces négociations, parce que
8 nous avions déjà vécu cette phase préliminaire. On ne pouvait pas
9 s'attendre à ce que Milosevic et Rugova se rencontrent à 30 reprises avant
10 de parvenir à un accord.
11 Milosevic avait eu ce texte où il savait déjà que l'Union européenne
12 et les Etats-Unis apportaient leur soutien au document en question et ils
13 devaient élaborer, avec ses acolytes, il devait se préparer avec ses
14 acolytes à la signature de l'accord avec Rugova. Nous, nous n'étions pas du
15 tout impliqué, parce que nous avions déjà eu cet accord en trois phases
16 entre les mains. Nous en avons déjà parlé à maintes occasions par la suite.
17 A d'autres occasions, lors de l'accord Holbrooke-Milosevic également.
18 Q. Vous parlez de cette approche en trois phases dans votre déclaration au
19 paragraphe 16.
20 M. HANNIS : [interprétation] Pouvons-nous montrer au témoin la pièce 704,
21 s'il vous plaît ?
22 Q. Est-ce que vous vous rappelez maintenant du déroulement de ces trois
23 phases et pouvez-vous nous les décrire ?
24 R. La première phase comprenait un nombre de mesures visant à créer la
25 confiance dans le domaine de l'éducation, des soins de santé, des sports et
26 de la sécurité conjointe. Il s'agissait de mesures traditionnelles
27 d'établissement de la confiance, qui comprenaient l'éducation, les soins de
28 santé et les sports. La deuxième phase prévoyait donc un règlement
Page 6308
1 politique temporaire de la crise, qui était en fait la phase la plus
2 sensible et, bien entendu, prévoyait également la mise en œuvre de
3 l'accord.
4 La troisième phase était le statut définitif du Kosovo, mais, bien entendu,
5 cette étape-là devait être franchie à une phase ultérieure, après l'accord
6 politique. Il fallait que cette phase-là figure dans le document pour que
7 les deux parties en présence puissent garder la face et puissent défendre
8 l'accord au niveau interne, dans les termes et avec le sens que cet accord
9 avait en termes politiques.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, à quel endroit cela
11 se trouve-t-il dans la déclaration ? A quel paragraphe ?
12 M. HANNIS : [interprétation] Paragraphe 16, Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] S'agit-il de ce document ?
14 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, dois-je poser la
15 question au témoin ?
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, s'il vous plaît.
17 M. HANNIS : [interprétation]
18 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous voyez ce document à l'écran ?
19 R. A l'écran, je vois le texte rédigé par M. Surroi, mais je ne vois rien
20 qui ait trait à ce que j'ai défendu dans les négociations comme étant notre
21 démarche officielle en quelque sorte, c'est-à-dire ce règlement en trois
22 phases.
23 M. HANNIS : [hors micro]
24 L'INTERPRÈTE : Microphone, s'il vous plaît.
25 M. HANNIS : [interprétation] Je suis désolé. Donc, est-ce qu'on peut avoir
26 l'anglais à l'écran ? Je pense que nous avons la mauvaise traduction en
27 B/C/S de ce document. Donc, c'est la traduction anglaise que j'avais à
28 l'esprit.
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1 Q. Monsieur Tanic, vous pouvez lire et comprendre l'anglais ?
2 R. Oui, oui. J'ai obtenu mes diplômes d'études supérieures en anglais.
3 Q. D'accord. Donc, sur ce document, pouvez-vous le lire en anglais et nous
4 dire de quoi il s'agit ?
5 R. Oui. Bien sûr. Il s'agit du document qui était produit sous l'égide de
6 l'une des ONG qui participait au processus. Il s'agit de la fondation
7 Bertelsmann. Le document a été adopté suite à des négociations qui ont eu
8 lieu à Hakija et à Munich. Kinkel et Vedran, les ministres des Affaires
9 étrangères allemand et français, ont apporté leur soutien à ce document et
10 l'ont présenté à l'Union européenne, qui l'a accepté sur cette base. Mgr
11 Paglia participait également à l'époque en tant que représentant du Groupe
12 de contact pour le Kosovo et il était parfaitement informé de la teneur du
13 document et y apportait son plein soutien. Ce document donc a été traité à
14 ce niveau-là. Cela veut dire que cela n'était pas simplement le document
15 émanant d'une ONG, mais c'était le document qui servait de fondement pour
16 des négociations auxquelles la communauté internationale participait. Ce
17 document proposait une solution en trois phases.
18 Q. Pouvons-nous passer à la page suivante de la pièce, s'il vous plaît ?
19 Donc ce document, sur la page de couverture --
20 M. ZECEVIC : [interprétation] Excusez-moi. Je suis désolé, Messieurs les
21 Juges, de cette interruption, mais il semble y avoir à nouveau un problème
22 avec le compte rendu parce que j'ai entendu clairement dire le témoin qu'il
23 y avait quelque chose sur le fait que ce n'était pas de haut profil, mais
24 cela ne figure pas dans le transcript, dans le compte rendu. Il l'a dit en
25 anglais. C'est la raison pour laquelle cela a attiré mon attention. Donc,
26 il a dit - c'était autour des lignes 54, 55, 56 : "Tout cela était traité à
27 un niveau" - a-t-il dit en anglais - "low-key," donc, à un niveau
28 relativement réservé.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tanic, avez-vous utilisé
2 l'expression "low-key" dans votre réponse ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, parce que depuis le début, je précise
4 bien que les négociations étaient à moitié secrètes. J'ai dit aussi qu'afin
5 que -- qu'elles l'étaient parce que cela permettait à Milosevic par la
6 suite de les écarter ou de faire comme si elles n'avaient pas existé si ces
7 négociations ne lui paraissaient pas parvenir à un aboutissement
8 satisfaisant.
9 Mais afin d'éviter la confusion, je voulais dire aussi très
10 clairement, pour Messieurs les Juges, qu'il ne s'agissait pas seulement
11 d'un document émanant d'une ONG, mais qu'il s'agissait d'un document qui a
12 été défendu devant l'Union européenne par Kinkel et par Vedran, afin de
13 servir de base à des associations à venir, un document qui a aussi obtenu
14 le soutien de Mgr Paglia, et nous négocions toujours à ce niveau peu élevé.
15 Lorsque je dis "niveau peu élevé," j'entends par là que c'était un niveau à
16 moitié secret. Donc, en ce sens, si quelqu'un faisait une démarche erronée
17 ou allait dans le mauvais sens, Milosevic et ses acolytes pouvaient --
18 enfin bon. C'est ce qui se fait dans le monde entier. De toute façon, c'est
19 la manière dont les choses fonctionnent à l'étranger. M. Milutinovic est un
20 diplomate professionnel et il sait qu'elle est la pratique en la matière et
21 il peut d'ailleurs en donner confirmation et je crois qu'il est devenu
22 ministre des Affaires étrangères en 1997, donc, il était informé de tout
23 cela au moment où la communauté internationale a donné son accord.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi, je dois vous interrompre,
25 Monsieur Tanic. Vous devez limiter vos réponses aux questions précises qui
26 vous sont posées. Nous avons beaucoup de documents à examiner. Nous avons
27 trois points ici et votre témoignage va prendre encore beaucoup de temps,
28 donc essayez d'être bref dans vos réponses et de vous en tenir aux
Page 6311
1 questions posées.
2 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges. Nous pouvons donc
3 passer maintenant à la page 4 de ce document. Donc, il s'agit de deux
4 pages. Plus loin, c'est donc le document deux pages plus loin. Non,
5 excusez-moi, je me suis trompé. J'ai un extrait. C'est à la page 69. Donc,
6 j'ai dans ma version un extrait particulier qui concerne la contribution de
7 M. Tanic à ce document.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Effectivement, il en est fait
9 état dans sa déclaration et nous allons donner lecture de ce passage
10 particulier en temps voulu.
11 Maître Hannis.
12 M. HANNIS : [interprétation] Merci.
13 Q. Une page plus tard. Je vais me contenter de vous poser une question sur
14 cette page. Monsieur Tanic, est-ce là le document que vous avez rédigé et
15 qui faisait partie de ce papier lors de la conférence de Munich d'août 1999
16 ou 1997 ? J'ai fait erreur sur la date.
17 R. Oui, oui. C'est l'un des documents que j'ai rédigés.
18 Q. Merci. Dans ce document, vous y décrivez le processus en trois phases
19 que vous et d'autres aviez engagé pour les négociations et avait déployé
20 pour gérer le problème.
21 R. Oui. Effectivement, c'est le même document que Mihajlovic et moi-même
22 avons montré à Milosevic en 1995 et ce document, nous l'avons familiarisé
23 avec. Donc, c'est exactement le même type de document. Ce n'est pas le même
24 document mot pour mot, mais c'est le document initial que nous avons ici.
25 Q. Merci. Donc, j'aimerais passer au paragraphe 19 de votre déclaration.
26 Vous parlez des participants aux négociations. Vous avez dit qu'il y avait
27 eu de nombreuses réunions avec Fehmi Agani lors de ce processus. Ces
28 réunions étaient-elles toujours en face à face ?
Page 6312
1 R. Cinq à six réunions ont eu lieu effectivement en tête à tête, notamment
2 à l'époque où on essayait de trouver une formule selon laquelle les
3 Albanais renonceraient à leur autonomie sans pour autant saper leur
4 position vis-à-vis des extrémistes albanais. Donc, ces négociations ont
5 effectivement été conduites et les réunions ont eu lieu à Pristina, alors
6 qu'il y avait d'autres réunions aussi où d'autres personnes étaient
7 présentes. La plupart du temps -- bon, enfin, je vous ai répondu.
8 Q. Merci. Donc, vous dites également, dans ce paragraphe, que 5-97, M.
9 Milosevic a annulé ces négociations discrètes. Pouvez-vous expliquer à la
10 Chambre de quelle manière Milosevic a procédé pour annuler ces
11 négociations.
12 R. Il n'a pas simplement annulé les négociations, mais ce qui s'est passé,
13 c'est que le régime de Milosevic, les acolytes de Milosevic ont rejeté
14 l'intégralité du processus auquel nous apportions notre soutien et auquel
15 nous avions travaillé entre 1994 et 1997. Il l'a fait de plusieurs
16 manières. Tout d'abord, il a prononcé un discours à Pristina, où il a dit
17 qu'il n'y avait aucun moyen de rétablir l'autonomie. Puis, plusieurs mois
18 plus tard, il est revenu sur ses positions. Par la suite, pendant les
19 conversations avec des ambassadeurs étrangers, il disait que cette
20 déclaration répondait à des objectifs internes et que les négociations se
21 poursuivaient par ailleurs.
22 Néanmoins, Dusan Mihajlovic et moi-même, dans la mesure où on savait
23 en Serbie que nous étions les principaux acteurs de cet accord serbe sur le
24 Kosovo, Dusan Mihajlovic et moi-même, donc, nous avons été invités à ne pas
25 du tout participer. On nous a dit qu'il n'y aurait plus de discussions, que
26 la solution politique dans son intégralité allait en terminer là et qu'il y
27 aurait une guerre. Milosevic et certains de ses acolytes ont présenté des
28 arguments assez incompréhensibles en faveur du conflit armé,
Page 6313
1 incompréhensibles parce qu'un règlement par la voie pacifique était dans
2 l'intérêt de la Serbie, donc, on pourra en reparler. En tout cas, j'ai reçu
3 personnellement de la Milosevic, par l'au truchement des services de
4 Sécurité, par l'intermédiaire de Mihajlovic, j'ai reçu des signaux ou en
5 fait même des ordres m'en joignant de renoncer à ce projet politique et
6 m'annonçant qu'il y aurait un conflit armé. Donc, c'est à ce moment-là que
7 la situation a commencé à se détériorer et que cette détérioration a abouti
8 à la guerre.
9 Q. Pouvez-vous expliquer à Messieurs et Mesdames les Juges un certain
10 nombre de détails sur la manière dont vous avez reçu ces ordres pour
11 arrêter de négocier un règlement politique et la date à laquelle vous avez
12 reçu ces ordres ?
13 R. C'est très difficile de préciser cela, cela s'est produit à plusieurs
14 occasions et cela a été plutôt un processus qu'un événement ponctuel. Je
15 sais, par exemple, assurément que Mihajlovic m'a convoqué un jour, et m'a
16 dit : "Ratko - bon, mais c'est comme cela qu'ils se sont adressés à moi -
17 "cela y est, c'est fini. Milosevic ne veut rien négocier, il veut la
18 guerre. Je lui ai parlé," et cetera, et cetera." J'ai vu Milosevic à une
19 réception et il m'a dit, il était furieux que rien n'allait déboucher,
20 qu'on allait rien pouvoir tirer de ces négociations, qu'il montrerait qu'il
21 y avait moins d'un million d'Albanais au Kosovo. Tout à coup, cette
22 question du nombre d'Albanais devenait pertinente. C'était une conversation
23 informelle. Je n'ai pas eu l'occasion à ce moment-là de lui demander
24 d'éclaircir ce qu'il me disait. Par la suite dans mes discussions avec --
25 dans nos discussions avec M. Milutinovic, nous avons pu voir que l'on ne
26 pouvait rien en tirer parce que M. Milutinovic souhaitait, non pas du fait
27 des souhaits de M. Milutinovic, mais du fait des ordres donnés par M.
28 Milosevic.
Page 6314
1 Enfin, les services de Sécurité m'ont également dit de garder la tête
2 sur les épaules plutôt que d'essayer de m'impliquer dans ces questions.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Petrovic.
4 M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons un
5 problème de traduction. Cette discussion entre le témoin -- enfin,
6 Milosevic était à une réception organisée en juillet et je ne crois pas que
7 cela figure dans le compte rendu, et je pense que c'est très important pour
8 que nous puissions vraiment remettre le témoignage apporté par le témoin
9 dans son contexte.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, vous dites que c'est la
11 date qui manque.
12 M. PETROVIC : [interprétation] C'est exact, Messieurs et Mesdames les
13 Juges, cela n'est pas simplement la date, mais également l'occasion à
14 laquelle cette discussion a eu lieu.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] L'occasion - ligne 5, page 58 - doit
16 être définie.
17 M. PETROVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, JUL, J-U-L, est
18 un parti politique, il ne s'agit pas du mois de juillet, c'est la Gauche
19 unie yougoslave. Donc, c'était une réception au siège de la Gauche unie
20 yougoslave. Ce qui signifie, en fait, le Parti politique JUL, et non pas
21 "Jul", comme nous le disons chez nous, c'est-à-dire qui est le mois de
22 juillet.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, effectivement, les réceptions de la JUL
25 avaient lieu généralement en juillet. Les réceptions de la JUL avaient lieu
26 en juillet, donc, nous pensions tous que c'était une heureuse coïncidence
27 dans la mesure où des réceptions de la JUL avaient lieu en juillet.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] S'il vous plaît, Monsieur Tanic, le
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1 point qui doit être éclairci ici, c'est de savoir si les moyens que vous
2 venez de présenter sur la discussion avec Milosevic attestent du fait que
3 cette discussion a eu lieu lors d'une réunion
4 -- d'une réception organisée par le parti JUL.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, le parti de coalition qui était au
6 pouvoir, ensemble avec nous et Milosevic, c'est exact.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
8 Maître Hannis.
9 M. HANNIS : [interprétation]
10 Q. Pouvez-vous nous donner la date approximative de la réception ?
11 R. C'était en juillet 1997, mais comme je l'ai déjà dit, Milosevic l'avait
12 remise à plus tard, il avait dit : "Bon, négocions un peu, et puis, ne
13 négocions plus." Puis, il lui a fallu un petit peu de temps pour écarter
14 les négociations comme solution politique. Il n'a pas pris cette décision
15 du jour au lendemain ou en 24 heures, il avait des problèmes avec ses
16 acolytes également. Donc, il ne pouvait pas écarter cette solution du
17 revers de la main ou de manière légère. Il lui a fallu un certain temps et
18 cela s'est fait au cours de l'année 1997.
19 Q. Vous nous dites qu'à la réception il a dit quelque chose sur le nombre
20 d'Albanais. Cela concernait quoi ?
21 R. Le problème a surgi tout à coup et Milosevic et ses acolytes dont
22 certains sont aujourd'hui décédés malheureusement, ont commencé à dire
23 qu'il y avait moins d'un million d'Albanais, donc, cela représentait moins
24 de 10 % de la population totale de la Serbie. Il prétendait donc qu'ils
25 n'avaient pas le droit de se considérer comme une population à part entière
26 de la Serbie et de la Yougoslavie. Ils ne pouvaient se considérer que comme
27 une minorité. Seselj a dit à cette occasion cela et certains des acolytes
28 de Milosevic ont repris ces propos, tout à coup, cette question des
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1 chiffres est devenue importante alors qu'on n'en avait jamais parlé
2 auparavant, mais ce n'était exact.
3 Il y avait bien plus d'un million d'Albanais. Lorsque je dis qu'il y
4 avait bien plus, il n'y en avait pas deux millions, mais au moins un
5 million et demi ou un million 300 000. Entre un million 300 000 et un
6 million et demi. Puis, ensuite, il a dit : "Bon, je vais montrer, je vais
7 prouver qu'il y a moins d'un million d'Albanais." Mais bon, cela c'était
8 Milosevic aucun des individus qui sont présents ici dans le prétoire n'a
9 jamais mentionné ce problème.
10 Q. Alors, pouvez-vous nous expliquer un petit peu le sens que cela -- est-
11 ce que cela a un grand impact qu'il y ait eu un million d'Albanais ou un
12 million et demi ou 800 000 ? Quelle était l'importance de ce chiffre ?
13 R. Tout d'abord, je dois dire qu'au début je n'ai pas compris l'importance
14 de ce chiffre et puis, ensuite, on m'a fourni quelques explications selon
15 lesquelles si les Albanais représentaient moins de 10 %. Ils ne pouvaient
16 pas être considérés comme une partie de la population constitutive et donc,
17 à ce titre, ils ne pouvaient pas revendiquer d'autonomie, ils ne pouvaient
18 être considérés que comme une minorité. Donc, les Albanais étaient perçus
19 comme une minorité ethnique. Tout à coup, ils ont commencé à parler du
20 problème du Kosovo et des Albanais du Kosovo.
21 Je ne me suis pas penché sur ce dossier en détail parce que pour moi,
22 c'était clair que les représentants du régime de Milosevic, et Milosevic,
23 lui-même, essayaient de trouver une justification ou un prétexte au conflit
24 parce que peu importe qu'il y ait un million ou deux millions d'Albanais du
25 Kosovo, pour moi, je ne voyais pas vraiment la différence. Ensuite, ils ont
26 commencé à parler d'autres choses du fait que le régime de Broz leur avait
27 donné 200 000 passeports qu'ils étaient venus d'Albanie. Puis, ces
28 arguments avancés étaient tout à fait caractéristiques du régime de
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1 Milosevic lorsqu'il souhaitait provoquer le conflit. Il n'y avait aucun
2 argument rationnel exposé ici.
3 Q. Pour ceux d'entre nous qui ne sont peut-être pas très bien informés
4 vous parlez du régime de Broz à quoi vous référez-vous ?
5 R. Bien, je me réfère à l'ancien président de la Yougoslavie et au
6 dirigeant du parti, Josip Broz Tito. Il était décidé à l'époque. Ils ont
7 commencé à dire que le régime de Broz avait été émis énormément de
8 passeports à des Albanais pour qu'ils puissent se déplacer vers le Kosovo
9 et pour qu'ils puissent gonfler artificiellement le nombre d'Albanais
10 vivants au Kosovo. Il présentait les choses comme si Broz était une sorte
11 de traite. C'était quelque chose qui sortait d'un roman de sciences
12 fictions.
13 Q. Je vous arrête ici. Passons au paragraphe 27 de votre déclaration même
14 si vous indiquez que ces négociations étaient de nature discrète et
15 confidentielle. De temps à autre il y avait des articles dans la presse
16 relatifs à des événements liés aux négociations; est-ce exact ?
17 R. Oui, effectivement, graduellement nous préparions l'opinion publique au
18 fait qu'il y avait des négociations en cours, qu'une solution politique
19 était possible, et en quelque sorte nous laissions transpirer un certain
20 nombre d'articles vers la presse et l'opinion public et cela pouvait
21 inclure des entretiens que j'avais avec la presse.
22 M. HANNIS : [interprétation] Pour le compte rendu, je pourrais montrer les
23 pièces, mais celles qui sont mentionnées dans le paragraphe 27, c'est-à-
24 dire TX2, TX3, TX4, qui sont les pièces P705, 706, et 707 respectivement
25 pour que vous puissiez les examiner ultérieurement.
26 Q. Au paragraphe 28, vous décrivez l'aboutissement de ces négociations
27 discrètes et vous faites référence aux recommandations conjointes sur le
28 conflit au Kosovo.
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1 M. HANNIS : [interprétation] Si nous pouvons avoir la pièce P709.
2 Q. Monsieur Tanic, pouvez-vous nous dire brièvement quelle était la nature
3 de ces recommandations conjointes qui émanaient des négociations ?
4 R. Bien, en fait, elles étaient identiques à la solution politique
5 initiale que Mihajlovic et moi-même avions présenté à Milosevic et que
6 Milosevic avaient approuvées. Ces recommandations conjointes étaient
7 presque identiques. Cela veut dire que la communauté internationale avait
8 souscrit à notre position et il avait accepté. L'idée était qu'il devait y
9 avoir des mesures visant à rétablir la confiance, donc, organisation
10 d'élections, mise en place d'Unités de Sécurité commune ou conjointe sur
11 une base tripartite ou bilatérale avec les Serbes, les Albanais ou les
12 Serbes, les Albanais. Ce qui s'imposait pour assurer la sécurité, améliorer
13 la sécurité dans la région. Il fallait organiser des élections, y trouver
14 une solution temporaire. Il fallait, effectivement, peut-être accorder
15 aussi un peu plus d'autonomie qu'en 74, mais cette autonomie devait être
16 rétablie, puis par la suite leur statut devait trouver une solution
17 définitive. Mais, bien entendu, ces recommandations étaient également de
18 nature pratique. Il y avait toute une série de recommandations de pratique
19 et je ne vais pas les passer en revue mais certaines de ces
20 recommandations, d'ailleurs échappent à ma mémoire, donc, je devrais pour
21 ce faire examiner les documents pertinents.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le numéro de paragraphe pour ce point,
23 Monsieur Hannis.
24 M. HANNIS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. C'est le
25 paragraphe 28.
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est un document ?
27 M. HANNIS : [interprétation] Oui, c'est le document TX6, la pièce P709.
28 Q. Monsieur Tanic, vous nous dites dans votre déclaration que ces
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1 recommandations conjointes résultaient de deux réunions qui s'étaient
2 tenues sur l'île de Halki.
3 R. Ce n'était pas simplement le résultat de ces deux réunions. Cela
4 représentait en fait l'issu de toute une série de rencontres et de
5 concertations. Au moins une trentaine qui s'étaient tenues avec la
6 participation de la fondation Bertelsmann, de Mgr Paglia, de représentants
7 de l'Union européenne. Paglia d'ailleurs avait également rencontré
8 Milosevic et Milutinovic, je crois, mais cela s'est passé plus tard pas à
9 ce moment-là, puisque M. Milutinovic n'était pas encore ministre des
10 Affaires étrangères à ce moment-là. Ils se sont peut-être rencontrés en
11 Grèce, je ne sais pas. En tout cas, cela résultait d'une trentaine de
12 rencontres et en termes techniques vous pouvez dire que cela résultait de
13 deux réunions principales, une à Halki et l'autre à New York. C'est une
14 version concise.
15 Q. Pouvez-vous nous dire si M. Milosevic a appliqué une quelconque de ces
16 recommandations de ce document ?
17 R. Bien, il avait auparavant signé un accord sur l'éducation qui faisait
18 partie des mesures initiales censées rétablir la confiance. D'autres
19 mesures étaient censées être prises ultérieurement et nous avions déjà des
20 projets de mesures mais cela n'a pas été signé avec moi ni en ma présence
21 mais bien avec Rugova, avec -- par l'intermédiaire de Mgr Paglia, d'une
22 association para diplomatique, la communauté de San Edigio. Il avait là un
23 groupe de contacts qui s'était impliqué dans ce travail. Il nous avait
24 rencontré avec Milosevic, il nous avait rencontré à plusieurs reprises,
25 donc c'est à cette occasion qu'ils ont signé un accord sur l'éducation.
26 C'est cette simple mesure qui a été, effectivement, appliquée dans le cadre
27 d'un effort de rétablissement de la confiance.
28 Q. Merci.
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1 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, pour le compte rendu je
2 précise qu'il s'agit là de la pièce 715 qui a déjà présentée devant la Cour
3 avec d'autres témoins, y compris M. Surroi. Merci.
4 Q. Maintenant, j'aimerais que nous avancions un peu dans votre déclaration
5 jusqu'aux paragraphes 43 et 44. Nous approchons à présent du mois d'octobre
6 1998. Vous nous parliez de l'accord Holbrooke-Milosevic, d'octobre 1998.
7 Vous décrivez comme ayant mise en œuvre certaines des dispositions prévues
8 dans votre accord. Dans le paragraphe 44, vous dites après avoir conclu cet
9 accord avec Holbrooke, Milosevic a envoyé des négociateurs serbes au Kosovo
10 13 fois en vue de débattre de l'autonomie de la province et donc pas des
11 Albanais du Kosovo. Pouvez-vous expliquer aux Juges quelle est la
12 signification, si signification il y a là, de cette distinction entre
13 l'autonomie de la province et l'autonomie des Albanais du Kosovo ?
14 R. Bien. Une province autonome cela n'allait pas signifier grand-chose
15 pour les Albanais du Kosovo. Ce n'était pas cela qu'ils voulaient. Ils
16 voulaient eux un droit à l'autodétermination d'une certaine mesure après le
17 démantèlement de l'ancienne Yougoslavie. Sans pouvoir déterminer jusqu'où
18 ils voulaient aller -- jusqu'à mi-chemin ou aller jusqu'au bout de la façon
19 la plus rigide. En tout cas, l'autonomie du Kosovo ne leur donnait pas --
20 ne répondait pas à leur besoin d'autodétermination. En fait, créer les
21 circonstances propices à une certaine manipulation. Mais l'accord Holbrooke
22 est en effet quasiment identique à l'esprit de ces accords. Holbrooke
23 naturellement connaissait les avancés réalisés par les négociations. Nous
24 étions en contact avec l'ambassadeur des Etats-Unis. Quand je dis "nous",
25 je veux dire Mahajlovic et moi-même. Nous étions également en tout cas avec
26 des représentants du Département d'Etat. Il était donc facile pour eux et
27 pour Milosevic de signer parce qu'ils savaient que l'accord existait, mais
28 ce n'était pas son intention de le faire appliquer. Brusquement, il s'est
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1 posé le problème de l'autonomie des Albanais du Kosovo, qui l'a transformé
2 en l'autonomie de la province du Kosovo.
3 Q. Alors, je vous arrête. Vous nous dites que c'était facile pour lui de
4 le signer, mais qu'il n'avait aucune intention de l'appliquer. Sur quoi
5 basez-vous cette idée ? Comment pouvez-vous le savoir qu'il n'était pas de
6 son intention de l'appliquer ?
7 R. D'après les informations dont nous disposions, par les renseignements
8 politiques et les contacts personnels, c'est d'ailleurs la raison pour
9 laquelle nous avons fini par quitter la coalition gouvernementale. Le Parti
10 de Nouvelle Démocratie a quitté la coalition formée avec Milosevic parce
11 que nous avons constaté qu'avec ses acolytes, il se rendait coupable
12 d'hypocrisie, qu'il nous trompait -- qu'il voulait qu'il nous trompe ainsi
13 qu'il trompait son peuple et les pays étrangers. Il faisait semblant de
14 vouloir une solution politique alors qu'en fait, il faisait croire qu'il
15 n'y avait pas de solution politique à ceux avec qui il travaillait, alors
16 qu'il y en avait une.
17 Il essayait de -- il se servait de nous pour retarder les choses,
18 pour voir ce que nous allions faire. Cela nous rappelait une rhétorique
19 dont il avait fait usage par le passé et donc en tant que parti, nous,
20 c'est-à-dire moi-même, Mihajlovic et les autres du noyau du parti, quand
21 nous avons constaté qu'avec son régime, il était disposé à entamer une
22 guerre supplémentaire, nous avons -- nous nous sommes dits que, si
23 l'intention était de provoquer une autre guerre, il n'avait pas besoin de
24 nous pour cela. Il y a un accord politique. Si vous voulez une guerre, vous
25 pouvez la faire tout seul ou avec le JUL.
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous ne répondez pas exactement à la
27 question, Monsieur Tanic. M. Hannis voudrait savoir comment vous êtes venu
28 à la conclusion qu'il n'avait pas l'intention d'appliquer, qu'il n'allait
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1 pas appliquer ces accords. C'est facile à dire, mais comment le savez-
2 vous ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me basais sur les informations dont je
4 disposais. Ce n'est pas que j'ai déduit quoi que ce soit. C'est que les
5 informations nous permettaient de constater qu'il n'y avait pas d'accord.
6 Il avait signé un accord avec Holbrooke. C'était simplement pour gagner du
7 temps. L'information que l'on nous procurait, par la sécurité d'Etat et par
8 l'établissement politique.
9 Puis, étant donné le comportement de Milosevic, nous voyions qu'il
10 s'était mis d'accord avec Holbrooke pour l'autonomie des Albanais du Kosovo
11 et puis, immédiatement, il a envoyé des négociateurs pour discuter de
12 l'autonomie du Kosovo. Puis, c'était clair à partir de là qu'en fait, il
13 n'avait pas l'intention d'accepter cet accord. Puis, troisièmement, nous
14 avons obtenu des informations parfaitement clair montrant qu'il se
15 préparait à la guerre. Il accumulait de l'équipement, il commençait à
16 travailler sur des modèles de chars, sur des modèles d'artillerie, et
17 cetera, et cetera. Enfin, vous feriez cela, vous, si vous étiez en train de
18 préparer un accord pacifique ?
19 Puis, en fin de compte, à plusieurs occasions, Milosevic m'a dit,
20 ainsi qu'a Mihajlovic : "Si cela ne vous convient pas," il me l'a dit
21 lorsque Mihajlovic ou lorsque j'étais en train de le critiquer, il a dit
22 plus précisément à Mihajlovic, mais je crois que j'étais là : "Et bien, si
23 cela ne vous plaît, et bien, vous n'avez qu'à vous en aller." Ce qui
24 signifiait : si vous ne voulez pas faire la guerre, allez-vous-en. Toute
25 cette information-là est fiable.
26 Ce n'est pas une chose qui s'est passé le mardi 24 juillet. C'est une
27 évolution qui n'est pas daté d'un certain jour. C'était un processus qui a
28 duré un certain nombre de mois. Il a fallu à Milosevic et à ses comparses
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1 une certaine durée pour pouvoir mettre en place leur décision de faire la
2 guerre. C'est pour cette raison que Milosevic avait également des problèmes
3 avec Stanisic et Perisic, qui étaient également opposés à cette option.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous demande de ne pas essayer
5 d'éluder la question qui vous est posée. Vous avez répondu à cette question
6 de la façon dont je vous parle, c'est-à-dire que vous tirez de
7 l'information des documents sur lesquels vous avez tiré des conclusions,
8 vous êtes référé à l'information que vous avez reçue. A présent, nous
9 comprenons mieux la position et j'ai une meilleure réponse à la question
10 qui a été posée.
11 Nous entrons dans un territoire que, je dois avouer, trouve difficile,
12 celui de la théorie politique. Sur les peuples constitutifs ayant droit à
13 l'autodétermination, je sais que, dans la constitution de la République
14 fédérale de Yougoslavie -- excusez-moi, de la République socialiste
15 fédérale de Yougoslavie, il était un concept, le concept des peuples
16 constitutifs. Ce concept existait-il dans la constitution de la République
17 fédérale de Yougoslavie ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour autant que je sache, non. Il n'y était
19 pas présent.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans ce cas, je vous arrête. Mais
21 comment -- d'où vient cette idée que si vous représentez 10 % de la
22 population, et non pas de la constitution.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai déjà dit, c'était là une
24 justification rationnelle dont j'avais entendu Milosevic se servir.
25 Milosevic et ses collaborateurs avaient des raisonnements de ce genre. Cela
26 me surprenait.
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Hannis.
28 M. ZECEVIC : [interprétation] Veuillez m'excuser, Monsieur le Président,
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1 mais c'est encore une question de compte rendu. Il me semble que le témoin
2 a dit des "justifications irrationnelles," et non pas des rationalisations,
3 comme je le lis.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tanic, avez-vous parlé de
5 justifications rationnelles ou irrationnelles ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Irrationnelles. Irrationnelles. M. LE JUGE
7 BONOMY : [interprétation] Je vous remercie pour cet éclaircissement.
8 M. HANNIS : [interprétation] Merci.
9 Q. Vous dites "nous", le Parti Nouvelle Démocratie, avons quitté. C'est à
10 ce moment-là que vous avez quitté la coalition avec le SPS et le JUL ?
11 R. Oui. Lorsque nous avons atteint la conviction, sur la base
12 d'informations que nous avions tous reçues, pas simplement des informations
13 dont je disposais que -- donc, des informations qu'avaient reçues notre
14 chef de parti et d'autres membres du parti, que Milosevic et ses
15 collaborateurs désiraient, en fait, déclencher une nouvelle guerre au
16 Kosovo et faisait croire qu'il n'y avait pas de solution politique, alors
17 qu'il en existait une. Alors, nous avons quitté la coalition. Je suis
18 désolé. Vous semblez penser que certaines de mes réponses sont élusives,
19 mais ce sont des questions assez sensibles pour moi, parce que mon pays a
20 tout de même énormément souffert et à mon sens, sans raison.
21 Q. Permettez que je vous demande. Vous nous avez fait référence à
22 plusieurs reprises dans vos dernières, à des collaborateurs de Milosevic.
23 Pouvez-vous nous dire plus précisément de qui vous parlez dans le contexte
24 de ces récentes réponses ?
25 R. Quand j'en parle, je pense à -- en ce qui me concerne, il s'agissait de
26 Jovica Stanisic. Par l'intermédiaire de Zoran Mijatovic, j'ai reçu un
27 message de M. Stanisic, qui était à l'époque chef de la sécurité d'Etat et
28 ce message -- la substance du message était : "Le patron ne veut pas le
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1 savoir. Nous en avons fini avec la solution politique," me disait-il. Il
2 pensait que Jovica Stanisic avait des problèmes avec Milosevic parce que
3 celui-ci voulait provoquer une guerre au Kosovo et Stanisic s'y opposait.
4 On me disait donc d'être prudent et de me distancier, dans la mesure du
5 possible, de cette option. Jovica Stanisic, c'était donc l'un des
6 collaborateurs de Milosevic et il m'a confirmé, par l'intermédiaire de
7 Zoran Mijatovic, ce qu'il en était.
8 En ce qui me concerne, ainsi que Mihajlovic, et je ne sais pas quels
9 étaient les canaux par lesquels Mihajlovic recevait son information. J'ai
10 présumé qu'il avait lui aussi des sources directes. Je sais qu'à plusieurs
11 occasions, M. Milutinovic nous a également dit, d'une façon peut-être plus
12 civilisée, certainement plus civilisée, dans la mesure où M. Milutinovic
13 est un personnage tout à fait différent de Milosevic, qui, à mon sens,
14 n'était pas particulièrement heureux de la guerre. Mais lui aussi nous a
15 laissé entendre que la solution politique ne fonctionnait pas.
16 M. Milutinovic a essayé de nous démontrer que les forces occidentales
17 essayaient de nous tromper, qu'elles ne nous laisseraient jamais entrer
18 dans l'Union européenne, même si nous parvenions à mettre en place une
19 solution politique pour les Albanais du Kosovo. Donc, quand je parle de ses
20 collaborateurs, voilà à qui je pense : M. Jovica Stanisic, Zoran Mijatovic,
21 Milutinovic, et cetera, et cetera.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le problème, pour moi, Monsieur, c'est
23 que chacune des personnes dont vous nous parlez avait un point de vue
24 différent de celui de Milosevic. Or, ce que M. Hannis aimerait savoir,
25 c'est qui sont -- qui étaient les collaborateurs de Milosevic qui étaient
26 d'accord avec lui pour avoir envie de faire la guerre ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Milosevic nous a donné cette information, nous
28 n'obtenions pas beaucoup d'informations de ses collaborateurs. C'est de lui
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1 qu'est venu cette information.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais c'est vous qui nous parlez de ses
3 collaborateurs. Vous nous dites : "Milosevic et ses collaborateurs
4 voulaient encore faire la guerre." Qui sont ses collaborateurs ? Vous
5 comprenez pourquoi je vous pose cette question, n'est-ce pas ? Etant donné
6 les personnes des accusés et la substance de l'affaire qui nous préoccupe
7 aujourd'hui ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] En ce qui concerne les accusés, les
9 collaborateurs étaient Milutinovic et Sainovic, naturellement. Milutinovic
10 n'était pas d'accord avec le raisonnement de Milosevic, de ses raisons,
11 mais il soutenait l'idée d'un conflit armé. Quant à M. Sainovic, il était
12 activement impliqué dans le déclenchement de cette guerre, je n'ai pas eu
13 d'informations directes concernant -- d'eux venant de M. Sainovic à ce
14 sujet, pourtant j'avais des informations tout à fait fiables venant du
15 système de service de Sécurité d'Etat, qu'il y avait toute sorte de
16 problèmes relatives à M. Sainovic.
17 D'après eux, il était profondément impliqué dans le déclenchement de
18 la guerre du Kosovo. Voilà en ce qui concerne les personnes sur le banc des
19 accusés aujourd'hui. D'autres personnes sont concernées également,
20 certaines sont décédées aujourd'hui, Vlajko Stojiljkovic, par exemple. Des
21 collègues à moi avec qui je me suis entretenu, l'amiral Jokic, qui a été
22 jugé ici même et qui admis avoir pilonné Dubrovnik, qui était membre du
23 Conseil de la Nouvelle Démocratie. Il y avait aussi des chefs de service de
24 Renseignements et de service militaire, tous membres de notre conseil --
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tanic, je vais vous demander
26 si vous le voulez bien de vous limiter. Les événements de Dubrovnik se sont
27 produits de longues années avant ce qui nous préoccupe aujourd'hui. En
28 revenir à ce genre de conclusions sans fondement n'est pas utile dans le
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1 contexte de cette affaire.
2 Monsieur Hannis vous pouvez expliciter la situation si vous le désirez.
3 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
4 Q. Oui, je vais vous poser une question concernant ce sujet. Vous nous
5 parlez de l'amiral Jokic; en l'occurrence, avait-il quelque chose à voir
6 avec ce que vous décrivez comme le désir de Milosevic et de ses
7 collaborateurs de déclancher la guerre au Kosovo ?
8 R. Pour autant que je sache, il n'avait rien à voir avec cela, mais il
9 avait des informations fiables, des membres du conseil présidentiel étaient
10 parmi d'autres. Aleksandar Vasiljevic, qui allait devenir chef de la
11 sécurité d'Etat; Milanovic, l'ancien chef de l'armée serbe. Je dois dire
12 que nous avions une série de sources d'informations, M. Mihajlovic et moi-
13 même. Il y en avait beaucoup, nous ne basions pas sur une seule personne.
14 C'est pour cela que je vous parle des "collaborateurs de Milosevic." A part
15 cela, je dois préciser que M. Jokic n'a rien à voir avec le Kosovo, je vous
16 demande pardon sur ce point-là, j'ai parlé de lui comme un exemple.
17 Q. Alors, pour clarifier, vous avez parlé de l'amiral Jokic comme une
18 personnes qui était source d'information pour vous. Concernant Milosevic et
19 certains de ses autres collaborateurs, si bien compris cette fois ?
20 R. En effet, M. Jokic, comme les autres collaborateurs de Milosevic, il
21 écrivait la stratégie de provocation de conflit armé de Milosevic assez tôt
22 d'ailleurs. Dans ma déclaration, je vous ai dit comment je me procurais ces
23 informations. J'avais trois sources, trois niveaux d'informations. Ce
24 n'était pas une coïncidence, je n'écoutais pas des conversations qui ne me
25 concernaient pas dans un hall de gare.
26 Q. Je vous remercie. Maintenant revenons à ce dont nous parlions il y a un
27 instant. Vous nous parlez donc du jour où vous avez quitté la coalition.
28 Pouvez-vous nous donner la date plus précise de cet événement ?
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1 R. Nous avons quitté la coalition, encore une fois par un processus
2 progressif. Il y a eu des séances à huis clos, une séance publique, M.
3 Mihajlovic et moi-même avons écrit une plate forme nationale dans laquelle
4 nous décrivions le régime de Milosevic tel que nous le décrivons
5 aujourd'hui, donc cela se passait en 1997. Après nous avons pris des
6 décisions au sein des organes du parti visant à ne plus faire partie de la
7 coalition et nous avons effectivement quitté celle-ci, puis, se sont
8 ensuivies des élections auxquelles nous n'avons pas participé parce qu'il y
9 avait une liste conjointe des Partis du SPS, de Nouvelle Démocratie et du
10 JUL qui avaient déjà été déterminés. Donc, nous avons -- nous nous sommes
11 quittés disons, de façon civilisée, dans le cadre des réunions dont je vous
12 ai parlé.
13 Q. Au cours de processus, comme vous dites, vous-même ou
14 M. Mihajlovic ou Nouvelle Démocratie en tant que parti, avez-vous expliqué
15 à M. Milosevic pourquoi vous partiez à savoir parce qu'à votre avis, il
16 était en train de préparer un conflit armé ?
17 R. Mais oui et à plusieurs reprises. Nous l'avons expliqué à Milosevic
18 comment Milutinovic - je ne sais pas si Mihajlovic a parlé à Sainovic
19 directement ou s'il est passé par un intermédiaire - cela je ne saurais le
20 dire. Je crois qu'il lui a parlé directement, mais je ne peux pas le
21 confirmer. En tout cas, je sais que nous avons parlé à Milosevic à
22 plusieurs reprises, que nous lui avons envoyé des messages, des faxes, que
23 nous avons également parlé à Milutinovic. Par l'intermédiaire des services
24 de Sécurité d'Etat, j'ai également fait parvenir des informations en
25 anticipation de cet événement. J'avais également anticipé l'attaque de
26 l'OTAN contre la Serbie parce que je constatais que la situation des
27 Albanais du Kosovo s'exacerbait. Milosevic et Milutinovic n'étaient pas du
28 tout d'accord sur ce point, mais de façon tout à fait différente.
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1 Milutinovic avait une toute autre façon, une façon beaucoup plus polie de
2 nous dire que nous faisions d'erreurs, alors que Milosevic était tout à
3 fait brutal.
4 En ce qui concerne Sainovic, je crois savoir que Mihajlovic avait
5 essayé de lui parler à plusieurs reprises, c'est ce qu'il m'a
6 -- c'est ce que je crois qu'il m'a dit, mais je ne peux pas confirmer qu'il
7 ait, effectivement, fait, je n'en suis pas sûr.
8 Q. Nouvelle démocratie a-t-elle fait à l'époque une décision publique, une
9 conférence de presse, déclaration média sur la raison pour laquelle il
10 quittait la coalition ?
11 R. Je crois savoir que oui. Il y a eu toute une série de conférences de
12 presse dans le cadre desquelles, dans la mesure où cela nous était
13 autorisé, nous donnions la liste des raisons pour lesquelles - bon si nous
14 avions tout dit nous aurions, nous y aurions probablement péri. Mais j'ai
15 dit que Mihajlovic et moi-même avions écrit un pamphlet dans lequel nous
16 expliquions très clairement ce que faisait le régime de Milosevic. Nous
17 avons organisé des conférences de presse, et j'ai organisé plusieurs
18 entretiens publiés. C'était une séparation publique, tout le monde savait
19 que Nouvelle Démocratie n'était pas d'accord avec les préparatifs de
20 Milosevic et le déclenchement d'une nouvelle guerre. Cette fois au Kosovo
21 nous étions convaincu que cela mènerait à une intervention de l'OTAN, ce
22 qui s'est révélé exact, j'ai attiré son attention là-dessus par
23 l'intermédiaire des services de Sécurité de l'Etat et on m'a répondu qu'on
24 l'on m'avait donné de fausses informations de façon à ce je passe ces
25 fausses informations à mon tour.
26 Milutinovic était convaincu qu'il n'y aurait pas d'intervention, mais il y
27 a une différence entre eux. Il soutenait les idées de Milosevic, mais je ne
28 pense pas que c'étaient ses idées, qu'il en était l'origine ou qu'il
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1 souhaitait que les choses se passent comme cela.
2 Q. Passons maintenant à un autre sujet. En 1997-1998, avez-vous pris
3 conscience qu'il existait des propositions d'origine internationale à
4 l'intention de la Serbie visant à l'aider à gérer le problème du terrorisme
5 albanais ou de l'UCK ? D'abord répondez-moi oui ou non.
6 R. Oui, mais en 1997. A cette époque mais avant -- à cette époque, oui,
7 mais aussi avant 1997.
8 Q. Comment ces propositions vous sont-elles parvenues, par quel
9 intermédiaire ?
10 R. Par des sources diplomatiques tout à fait accréditées de la Grande-
11 Bretagne, les Etats-Unis, l'Italie, l'Allemagne, puis il y a eu les sources
12 des services de renseignement notamment le service de Renseignement
13 britannique. Puis lorsque nous recoupions l'information dont disposaient
14 nos propres services de renseignement, bien, le confirmaient, il y avait
15 également la diplomatie russe, qui nous ont tous contacté parce que nous
16 étions partenaires du gouvernement leur objectif étant de nous aider à
17 résoudre le problème du terrorisme au Kosovo.
18 Q. Vous nous parlez de "nos services," c'est-à-dire que le SDB en
19 l'occurrence ?
20 R. Oui, tout à fait, le SDB avait des informations qui étaient tout à fait
21 conformes à celles dont je disposais, à savoir que les pays occidentaux
22 étaient disposés à aider Milosevic à résoudre le problème du terrorisme en
23 échange d'un règlement du problème des Albanais du Kosovo.
24 Q. Quelles informations vous ont permis de vous faire une idée de la
25 nature de cette proposition qui a été faite à M. Milosevic pour parvenir à
26 un accord politique avec les Albanais du Kosovo ?
27 R. Bien, cela me ramène aux trois phases dont j'ai parlé tout à l'heure.
28 Les mesures destinées à ramener la confiance. On parlait d'une autonomie
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1 importante ou substantielle. Ils proposaient également des contrôles aux
2 frontières par des moyens électroniques et ils proposaient également
3 d'autres solutions permettant de réduire le risque de terrorisme albanais.
4 N'oubliez pas qu'en 1995/1996, les terroristes étaient toujours à
5 l'étranger. Les propositions étaient assez crédibles, elles sont parvenues
6 à M. Milosevic par d'autres voies, mais également de manière personnelle,
7 donc pas seulement par mon intermédiaire. Je ne veux pas que vous pensiez à
8 tort que j'essaie d'exagérer le rôle que j'ai pu jouer à l'époque. Les
9 propositions ne lui sont pas seulement parvenues par mon truchement.
10 Q. Savez-vous quelle a été la réaction de M. Milosevic devant de telles
11 offres ?
12 R. Je peux vous faire part de ce que j'ai vécu, moi. Il a choisi de faire
13 fi de la plupart d'entre elles. A une ou deux reprises, il les a même
14 rejetées directement. S'agissant des autres propositions, je ne peux vous
15 dire ce que je sais, de manière indirecte de la bouche de diplomates qui
16 m'ont confirmé cela. Lors des discussions, des conversations ces
17 propositions semblaient susciter son agrément, mais lorsque nous en
18 arrivions au stade de la mise en œuvre il rejetait tout cela. Il ne voulait
19 même pas que les services de Sécurité tentent de trouver, de localiser les
20 terroristes de l'UCK qui se trouvaient à l'étranger. Il a même fait
21 obstacle à ce genre d'activité.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Fila.
23 M. FILA : [interprétation] Je n'ai pas d'objection. Je ne sais plus si M.
24 Hannis suit la déclaration ou autre chose parce que je ne trouve pas cela
25 dans la déclaration. Est-ce que nous en sommes encore au paragraphe 45 de
26 la déclaration ou sommes-nous passés à autre chose ?
27 M. HANNIS : [interprétation] Non, nous sommes passés à autre chose,
28 Monsieur le Président. Je traite maintenant de parties de la déclaration
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1 qui n'ont pas été versées au dossier. Si M. Fila veut suivre, je peux lui
2 dire où j'en suis, j'en suis au paragraphe 47 de la déclaration dans son
3 intégralité.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Fila, nous sommes repartis en
5 arrière, chronologiquement parlant.
6 M. HANNIS : [interprétation] C'est exact.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. J'aimerais obtenir cette
8 déclaration complète. Je n'ai que les 45 premiers paragraphes de ma
9 déclaration.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La Chambre de première instance a
11 décidé de permettre à l'Accusation de présenter votre déclaration écrite du
12 paragraphe 1er au paragraphe 45 pour ce qui est du reste de votre
13 déclaration nous souhaitions entendre les informations que vous teniez
14 directement. C'est la raison pour laquelle ce dont nous parlons à l'heure
15 actuelle ne fait pas partie de la déclaration que vous avez.
16 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
17 Q. Dans votre dernière réponse vous disiez que vous aviez obtenu une
18 certaine partie de vos informations auprès de diplomates, qui vous en ont
19 confirmé la véracité. Pouvez-vous nous dire qui étaient ces personnes ?
20 R. Des ambassadeurs de pays dont j'ai déjà parlé. J'étais en liaison
21 régulière avec eux. Bien entendu, il y avait également des gens qui se
22 trouvaient à l'étranger, et pour des raisons que vous comprendrez aisément
23 puisqu'il s'agissait de membres des services secrets britanniques, je ne
24 peux pas divulguer leurs noms.
25 M. HANNIS : [interprétation] Un instant, Monsieur le Président, s'il vous
26 plaît.
27 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
28 M. HANNIS : [interprétation]
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1 Q. Savez-vous si le SDB avait une position particulière vis-à-vis de
2 ces propositions qui venaient de pays occidentaux et qui avaient pour objet
3 d'aider à apporter une solution au problème du terrorisme albanais ou en
4 tout cas du terrorisme albanais du Kosovo ?
5 R. Bien sûr. Le SDB était pleinement en faveur de ces propositions;
6 toutefois, Milosevic a fait obstacle à ces derniers et Sainovic l'aidait
7 dans cette entreprise et d'autres collaborateurs ou acolytes encore. Je
8 pourrais donner leurs noms. Il leur a lié les mains de multiples manières.
9 Je peux vous le dire. C'est l'une des raisons pour lesquelles Jovica
10 Stanisic a commencé à soupçonner Milosevic de ne pas vouloir résoudre du
11 tout le problème du Kosovo, mais plutôt de vouloir qu'une nouvelle guerre
12 éclate. Le régime de Milosevic semblait avoir être protégé les terroristes
13 albanais et semblait leur éviter tous problèmes.
14 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
15 M. HANNIS : [interprétation]
16 Q. Vous dites que M. Sainovic l'aidait dans cette entreprise. De quelle
17 manière aidait-il Milosevic à faire obstacle à ces propositions de la
18 communauté internationale pour qu'elles ne soient ni acceptées ni mises en
19 oeuvre ?
20 R. D'après les informations que j'ai reçues du service - et je n'ai aucune
21 raison de douter de la crédibilité de ces informations - M. Sainovic a
22 tenté d'entraver le travail du service de la Police de deux ou trois
23 manières. D'abord, il transmettait des messages personnels de Milosevic qui
24 n'étaient pas conformes à la situation véritable sur le terrain et souvent
25 ses messages allaient à l'encontre de la législation en vigueur. Lorsqu'il
26 était mis au courant d'actions entreprises par le SDB, il essayait de
27 déformer les rapports du service, ou en tout cas, d'influencer ces
28 rapports. C'est des informations que j'ai obtenues auprès du SDB. Je
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1 n'avais pas affaire personnellement avec M. Sainovic. Je n'ai jamais eu
2 affaire à lui, mais je ne mets nullement en doute l'authenticité des
3 informations qui m'ont été communiquées, puisqu'elles sont extrêmement
4 crédibles. Il y a un nombre -- un certain nombre d'incidents.
5 L'établissement de la situation sur le terrain au Kosovo. Plusieurs
6 enregistrements ont été faits. Sainovic était l'une des personnes qui
7 tentait d'entraver le travail du service de Sécurité et de la Police, sur
8 ordre de Milosevic, afin de donner l'impression que la situation au Kosovo
9 ne pouvait être résolue par d'autres moyens que la guerre.
10 L'INTERPRÈTE : L'interprète signale que lorsqu'il s'agit d'incidents qui
11 viennent d'être évoqués dans les dernières lignes, il s'agissait
12 d'incidents concernant des hélicoptères.
13 M. HANNIS : [interprétation]
14 Q. Je vous interromps un instant. J'aimerais savoir ce dont vous parlez
15 lorsque vous parlez des incidents ayant impliqués des hélicoptères ?
16 R. Perisic et Sainovic voulaient organiser une mission de vérification au
17 Kosovo. Ils s'opposaient tous deux à la volonté de Milosevic de provoquer
18 une guerre et ils espéraient qu'eux, et par le biais de Lenic, ils
19 pourraient empêcher cela. Ils auraient donc, pensaient-ils, la possibilité
20 d'influencer la position de Milosevic. Au moment où ils étaient sur le
21 point de partir, de mener à bien cette mission, Sainovic est monté dans
22 l'hélicoptère et d'après l'information que j'ai reçue, à la fois de la
23 bouche de Perisic et de celle de Stanisic, la situation était tout autre.
24 Soudain, les rapports concernant la situation sur le terrain ont changé.
25 Sainovic, par la suite, avec Milosevic, ont accusé les services de Sécurité
26 du chaos qui régnait au Kosovo. Il a même été question que le service de
27 Sécurité et la police aient participé à un trafic de stupéfiants avec les
28 Albanais du Kosovo. Ils voulaient simplement étudier la situation qui
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1 régnait sur le terrain et ils proposaient des mesures qui permettraient de
2 mettre le ola au terrorisme albanais, parce qu'à ce moment-là, le
3 terrorisme albanais avait pris une plus grande ampleur. En réalité, on ne
4 le maîtrisait plus. Mais c'est un exemple, simplement.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Il y a deux questions qui sont
6 soulevées par le compte rendu. Page 78, ligne 18. Je crois qu'il y a une
7 référence à Perisic et Stanisic, pas à Sainovic. Autre chose - et
8 j'aimerais que l'on tire cela au clair, Monsieur Tanic - vous avez dit que
9 Sainovic faisait partie des gens qui avaient essayé d'entraver le travail
10 de votre service de Sécurité sur ordre de Milosevic, de manière à donner
11 l'impression que quelque chose ne pourrait pas se faire par d'autres moyens
12 que par la guerre. Je n'ai pas très bien compris ce que vous avez dit à ce
13 moment-là.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] D'abord, c'est vrai. Oui.
15 L'INTERPRÈTE : Avec un micro, pour les interprètes.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est vrai. J'ai parlé de Perisic et Stanisic.
17 Maintenant, s'agissant de Sainovic. Les informations que j'ai --
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, alors que les choses soient
19 aussi simples que possible. Est-ce que vous avez parlé de la situation du
20 terrorisme au Kosovo, qui ne pourrait pas se résoudre autrement que par la
21 guerre ? Est-ce que c'est cela dont vous parliez dans votre réponse ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. Pas du tout.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
24 Monsieur Hannis.
25 M. HANNIS : [interprétation] Je ne suis pas tout à fait sûr que ceci
26 réponde à votre question.
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tanic, vouliez-vous dire que
28 la situation en matière de terrorisme au Kosovo ne pourrait se résoudre par
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1 d'autres moyens que par la guerre ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas -- ce n'était pas là mon opinion,
3 ni celle de Perisic ou de Stanisic, mais Sainovic tentait de donner
4 l'impression qu'il n'y avait pas d'autres solutions que la guerre. En ce
5 sens, il a déformé les informations qui parvenaient à Milosevic.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, je comprends, Monsieur Tanic.
7 Mais dans le transcript, on lit : "Le problème ou la question du Kosovo --
8 la situation au Kosovo." Je voulais savoir si vous aviez fait mention du
9 terrorisme dans votre réponse ou pas. Je voulais que les choses soient tout
10 à fait claires. Je voulais savoir si vous aviez utilisé le terme
11 "terrorisme" ou "terroriste."
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. Oui, oui. Bien sûr.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Voilà, les choses sont claires
14 maintenant. Vous attribuez cette idée à Sainovic. Nous l'avons compris.
15 Mais c'était le terme que vous aviez utilisé ou pas qui était important aux
16 fins du compte rendu. Merci, Monsieur Hannis.
17 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
18 Q. Nous parlions de propositions émanant de pays occidentaux, visant à
19 contribuer à la résolution du problème du terrorisme albanais au Kosovo et
20 visant à aider la Serbie dans ce sens. Vous avez dit que le SDB était en
21 faveur de ces propositions, mais que celles-ci étaient rejetées par M.
22 Milosevic. Ma question est donc la suivante : le SDB avait-il un autre
23 plan, à l'époque, envisageait-il un autre moyen pour régler la question du
24 terrorisme albanais ?
25 R. Oui. Le SDB et l'armée.
26 Q. Qu'envisageaient-ils, si vous le savez ?
27 R. A l'époque, il s'agit de 1998 maintenant, alors que la situation avait
28 empiré par rapport à la période des négociations au Kosovo, les services,
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1 donc le SDB et l'armée, ainsi que la police, bien entendu, étaient en
2 faveur de la déclaration d'un état d'urgence au Kosovo parce que ceci
3 permettrait de faire intervenir la police et l'armée, légalement, dans la
4 lutte antiterroriste.
5 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à ce que le témoin répète la
6 dernière partie de sa réponse.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Ensuite, les négociations finales avec la
8 communauté internationale se sont ouvertes. Milutinovic a commencé lui
9 aussi à transmettre des informations déformées, erronées. C'est ce que
10 Sainovic avait fait dans le pays et c'est ce que faisait Milutinovic à
11 l'étranger. Il voulait donc l'ouverture d'un processus de négociations
12 définitive avec les Américains et l'Union européenne. Un règlement
13 politique n'était plus de mis parce qu'ils avaient dit qu'en l'absence d'un
14 règlement politique, les terroristes se multiplieraient. Ils avaient donc
15 un prétexte tout trouvé et personne ne pourrait gagner contre eux. Le
16 service et l'armée proposaient aussi des solutions techniques
17 particulières, mais je ne voudrais pas en parler en audience publique. Ce
18 ne sont pas des solutions très agréables à entendre, bien sûr, mais lorsque
19 l'on fait face aux terroristes, elles le sont rarement. Milosevic refusait
20 ces solutions, quel qu'elles soient. En outre, le SDB et l'armée voulaient
21 élargir la zone qui serait soumise à leur contrôle de dix kilomètres.
22 Milosevic s'y est opposé. Ils ont demandé à pouvoir disposer de matériel
23 électronique pour surveiller les frontières, mais Milosevic y était opposé
24 également. Aucun matériel n'a été livré. Pour dire les choses simplement,
25 lui et ses collaborateurs, donc Milosevic et ses collaborateurs ont soulevé
26 la question du terrorisme albanais ou l'ont décrit d'une manière qui ne
27 correspondait pas à la réalité. Sainovic et Milutinovic n'étaient pas
28 étranger à cela. Le premier y avait contribué au sein du pays et le second,
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1 à l'étranger.
2 M. HANNIS : [interprétation]
3 Q. Bien. J'aimerais revenir sur ce que vous avez dit plus tôt par rapport
4 à cet incident avec un hélicoptère. Vous avez parlé d'une mission de
5 vérification. En février ou en mars 1998, y a-t-il eu des efforts consentis
6 par le gouvernement afin de mieux comprendre la nature du problème du
7 terrorisme au Kosovo ? Qui a organisé cela et quel était l'objectif ?
8 Comment le but devait-il être accompli? Nous en sommes maintenant aux
9 paragraphes 52 et 53.
10 R. L'Etat ou le régime de Milosevic devrais-je plutôt dire, a pris
11 quelques mesures mais il s'agissait surtout de paroles plutôt que d'actes.
12 Il a mis en place une Commission d'Etat chargée d'étudier la question du
13 Kosovo - il y avait Sainovic, Lukic et d'autres - et ce faisant, il a en
14 fait retiré des mains des organes juridiques, à savoir la police, la Sûreté
15 de l'Etat, l'armée, la question des mesures à prendre en vue de lutter
16 contre le terrorisme au Kosovo. Mais je ne peux pas vraiment dire agi
17 d'efforts parce que certaines opérations de police menées sur ordre de
18 Belgrade ont été menée de telle sorte qu'il y a eu des pertes dans les
19 rangs de la police, et que des civils albanais ont été tués ou blessés. On
20 ne peut pas vraiment qualifier cela d'effort. C'est vrai qu'en constituant
21 la commission --
22 Q. Je vous interromps un instant. Je n'ai peut-être pas bien formulé ma
23 question. Vous avez parlé de l'incident avec cet hélicoptère lors de la
24 mission de vérification à laquelle allaient participer M. Stanisic et M.
25 Perisic, je crois. C'est sur cela que portait ma question. Je voulais
26 savoir si à l'époque vous avez été mis au courant de cet incident ?
27 R. Stanisic et Perisic, en tant que chef de service de Sécurité, et chef
28 de l'armée, souhaitaient se rendre compte de la situation sur terrain,
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1 l'analyser et formuler des suggestions à Milosevic. Ils auraient ainsi une
2 base de travail à partir de laquelle l'Etat pourrait tenter de résoudre le
3 problème. Mais ils n'ont rien fait avec M. Sainovic. Oui, j'avais quelques
4 informations sur cette mission, pas grand-chose. Je savais que Perisic et
5 Stanisic avaient entrepris certains efforts, j'avais entendu parler du
6 conflit entre Stanisic et Milosevic par l'intermédiaire du service j'avais
7 quelques détails là-dessus. En ce qui concerne l'incident de l'hélicoptère,
8 j'ai entendu quelques éléments là-dessus à l'époque qui ont ensuite été
9 confirmés par Perisic.S'agissant des problèmes militaires et de Milosevic,
10 j'ai appris tout cela par la suite. Mais en ce qui concerne le service,
11 oui, j'ai des informations détaillées là-dessus.
12 Q. Vous avez dit que Stanisic et Perisic ne pouvaient rien faire en
13 compagnie de Sainovic. Qu'est-ce qui vous a permis de tirer une telle
14 conclusion ?
15 R. C'était leur opinion et la mienne aussi évidemment. S'agissant de la
16 situation sur le terrain, dès que Sainovic était là, les conclusions
17 étaient les conclusions souhaitées par Milosevic, mais elles ne reflétaient
18 pas la situation telle qu'elle prévalait sur le terrain. Les conclusions
19 présentées sous l'influence de Sainovic étaient désastreuses. D'après ces
20 conclusions, nos soldats au sein de la sûreté du service de Sécurité
21 étaient, en fait, à l'origine du terrorisme au Kosovo. Je dis cela de
22 manière un peu cavalière, mais c'est exactement ce à quoi les choses
23 ressemblaient.
24 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je vais faire objection, Monsieur le
25 Président. Regardez les dernières lignes, les dix ou 15 dernières lignes du
26 compte rendu. Le témoin nous parle de récit de seconde main, de troisième
27 main. Qu'il a de détails, qu'il n'a pas eus, il fait référence de l'opinion
28 de quelqu'un qui a une opinion un peu similaire à la sienne. Tout ceci est
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1 de l'ouï-dire et c'est irrecevable, il ne s'agit que ces conjonctures, de
2 spéculations et on devrait faire cesser le témoin ou le témoignage.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Lui-même il le dit, Monsieur Hannis,
4 le témoin dit qu'il parle un peu de manière cavalière de tout cela.
5 M. HANNIS : [interprétation] Je pourrais peut-être poser quelques autres
6 questions au témoin.
7 Q. Monsieur, je vous ai posé une question sur ce qui vous a amené à
8 conclure que Stanisic et Perisic ne pouvaient rien faire en compagnie de M.
9 Sainovic, en tout cas s'agissant de cette mission de vérification. Vous
10 avez répondu que c'était leur opinion; c0omment savez-vous cela ?
11 R. Vous connaissez le chef de sécurité de l'état, vous connaissez le chef
12 de l'armée. Il ne s'agit pas d'informations de seconde main, voir de
13 troisième main. Nous échangions constamment nos avis et Jovica Stanisic,
14 par Zoran Mijatovic, m'a dit, à un certain nombre de reprises, qu'ils
15 avaient de nombreux problèmes avec Sainovic et que Sainovic essayait de
16 déformer des informations qui étaient transmises ensuite à Milosevic -- ou
17 qui allaient de Milosevic à la police et aux Serbes, vice versa.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tanic, concentrons-nous sur
19 la question qui vous a été posée. Il s'agit d'une question particulière
20 portant sur -- cette mission qui allait être faite et qui vraisemblance
21 n'en valait pas la peine. Alors, j'aimerais que vous vous concentriez là-
22 dessus.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr, bien sûr. Jovica Stanisic, par
24 Zoran Mijatovic, m'a parlé de cette mission, Mihajlovic aussi. Mais nous ne
25 sommes pas entrés dans les détails à l'époque parce que nous n'étions pas
26 au pouvoir. Je ne décrivais pas quelque chose à propos duquel je n'avais
27 aucune information. Par la suite le général Perisic a confirmé tous les
28 détails de tout cela.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Vous dites que ce ne sont pas
2 des informations de deuxième main et de troisième main, mais en réalité si.
3 Ce sont des informations de deuxième et de troisième main.
4 Alors, Maître O'Sullivan, vous avez les informations fondamentales,
5 le témoin nous dit que ces informations viennent de deux sources, une
6 source de deuxième main en quelque et une de troisième. Maintenez-vous
7 votre objection puisque maintenant vous avez tous les détails ? N'oubliez
8 pas non plus que vous aurez possibilité de contre interroger le témoin.
9 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Mais ce n'est pas le genre de
10 dépositions que l'on devrait entendre. Je crois que les choses ont été
11 tirées au clair et oui nous aurons, effectivement, la possibilité de
12 procéder au contre-interrogatoire, mais il s'agit davantage d'une remarque
13 préliminaire. La question est à mon avis plutôt de savoir si oui ou non ce
14 type de dépositions devrait être entendu ou pas par la Chambre de première
15 instance, aucun fondement ne le justifie.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous me dites qu'il y aurait
17 justification à ce qu'on exclut ce témoignage-là ?
18 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui, effectivement. Je vous renvois à
19 l'arrêt de la Chambre d'appel dans l'affaire Aleksovski, nous l'avons cité
20 dans notre requête par rapport à ce témoin déjà. Nous savons que de manière
21 générale l'ouï-dire est irrecevable. Si vous me donnez un moment je vais
22 vous trouver cette référence, l'arrêt, la Chambre d'appel dans l'affaire
23 Aleksovski dit que la Chambre de première instance a tout pouvoir pour
24 décider si oui ou non elle souhaite recevoir des éléments de preuve
25 indirect. Mais il faut qu'il y ait des indices de fiabilité, il faut qu'il
26 y ait un fondement. Qu'il s'agisse d'ouï-dire de première, seconde ou
27 troisième main. En outre, la Chambre d'appel, et maintenant cela y est j'ai
28 trouvé la référence à cet arrêt, c'est donc le Procureur contre Aleksovski,
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1 décision relative à l'appel du bureau du Procureur sur la recevabilité des
2 éléments de preuve, 16 février 1999, paragraphe 14, IT-95-14/1A, et la
3 Chambre de première instance dit ici qu'il faut étudier à la fois la teneur
4 et la fiabilité des circonstances dans lesquelles les éléments de preuve
5 ont été obtenus. Ici par le biais de ce témoin, et étant donné cette
6 catégorie d'ouï-dire particulière qu'il nous présente ici aujourd'hui. Il
7 n'y aucune preuve ou il n'a pas été établi par l'Accusation qu'il y ait le
8 moindre fondement permettant de juger qu'il s'agit là d'une information
9 digne de foi.
10 Le contexte dans Tadic, puisque c'est de là qu'est né tout le début
11 du débat sur l'ouï-dire, était tout à fait différent. Il y avait des
12 personnes qui avaient des expériences semblables, des gens qui ont vécu
13 ensemble les mêmes événements, certains y ont survécu, d'autres pas. A ce
14 moment-là, il était possible effectivement pour une personne de faire le
15 récit de ce qui s'était passé. Quelqu'un qui avait vécu partageait une même
16 expérience. Ce n'est pas le cas avec ce témoin-ci. Il me semble que l'arrêt
17 rendu dans l'affaire Aleksovski vous donne une base suffisante pour exercer
18 votre pouvoir discrétionnaire et ne pas permettre que l'on entende ce type
19 de déposition.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
21 M. HANNIS : [interprétation] Bien, Monsieur le Président, l'un de ses
22 réponses a été que le général Perisic a par la suite confirmé ces faits. Je
23 dirais que c'est là de l'ouï-dire de première main et que c'est tout ce que
24 l'on peut espérer obtenir à part évidemment si l'on fait venir le général
25 Perisic. Je sais que le général Perisic était dans l'armée. Nous avons des
26 preuves montrant qu'il a bien participé à cette mission. Nous avons une
27 pièce émanant de lui où il se plaint de ce qui est fait vis-à-vis de
28 l'armée et des choses qui se font au Kosovo. Ce qui tente à montrer
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1 qu'effectivement, il a été déçu de cette mission de vérification. Lui et M.
2 Stanisic ont été démit de leurs fonctions peu de temps après cela, et selon
3 nous, en raison de désaccords qu'il y a eus entre eux ou du fait qu'il ne
4 souscrivait pas à ce que faisait M. Milosevic. Ceci va da le même sens.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous dites que vous avez une pièce de
6 Perisic
7 M. HANNIS : [interprétation] Oui, nous avons une lettre qu'il a écrite.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien.
9 M. HANNIS : [interprétation] M. Milosevic qui a été publié dans un ouvrage
10 et qui a été présenté dans l'affaire Milosevic. Il me semble qu'elle n'est
11 pas remise en cause. On ne remet pas en cause qu'il s'agit bien d'une
12 lettre qu'il a écrite à M. Milosevic et qui fait état de la situation.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
14 [La Chambre de première instance se concerte]
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons étudier les références qui
16 viennent d'être évoquées puisque cette observation porte sur l'ensemble de
17 la déposition et non pas seulement sur ce passage-ci. Nous rendrons notre
18 décision dès notre retour lundi matin.
19 Monsieur Fila.
20 M. FILA : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation vient de
21 dire -- le bureau du Procureur a une pièce qui a trait à ce vol en
22 hélicoptère. Perisic, Stanisic et Sainovic vraisemblablement se trouvaient
23 à bord de cet hélicoptère, or cela n'a jamais eu lieu. J'aimerais voir
24 cette pièce dont il est question.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, ce n'est pas ce qu'il a dit.
26 M. FILA : [interprétation] Il a dit qu'il y avait une lettre écrite par
27 Perisic qui n'avait rien à voir avec l'hélicoptère. On ne fait pas état de
28 cet hélicoptère dans cette lettre.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne crois pas que c'est qu'a dit M.
2 Hannis.
3 M. HANNIS : [interprétation] Non, pas du tout. Elle porte sur les
4 recommandations qui ont été faites après la mission de vérification.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quoi qu'il en soit, nous n'avons pas
6 le temps maintenant de traiter de tout point émanant de cette évocation.
7 Monsieur Tanic, nous allons devoir interrompre votre déposition et nos
8 travaux de cette semaine, vous devrez revenir lundi pour poursuivre votre
9 déposition. A quelle heure ? A 9 heures, donc à 9 heures, lundi matin soyez
10 prêt à reprendre votre déposition. Nous allons maintenant passer en
11 audience à huis clos afin que vous puissiez quitter le prétoire.
12 Dans le cours du week-end, il est essentiel, Monsieur Tanic, que vous
13 n'entreteniez aucunes discussions avec qui que ce soit concernant quelques
14 aspects que ce soit de votre témoignage, que ce soit le témoignage que vous
15 avez déjà fait ou celui qui vous reste à faire, vous pouvez parler de ce
16 que vous voudrez avec qui vous voulez sauf de cela, absolument ne pas
17 toucher au sujet de votre témoignage.
18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en séance à huis clos,
19 Monsieur le Président.
20 [Audience à huis clos]
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18 --- L'audience est levée à 13 heures 44 et reprendra le lundi 13 novembre
19 2006, à 9 heures 00.
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