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1 Le lundi 13 novembre 2006
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour. Nous allons passer à huis
6 clos en attendant que le témoin n'entre dans le prétoire.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos, Mesdames,
8 Messieurs les Juges.
9 [Audience à huis clos]
10 (expurgé)
11 (expurgé)
12 (expurgé)
13 (expurgé)
14 [Audience publique]
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.
16 Bonjour, Monsieur Tanic. J'aimerais aborder certains sujets avant que vous
17 ne repreniez votre déposition. Nous allons d'abord aborder ces questions.
18 Maître Visnjic, le Royaume-Uni a demandé que soit prorogé le délai de temps
19 qui lui est accordé avant de pouvoir répondre à votre requête au titre de
20 l'article 54 bis. Acceptez-vous qu'ils aient davantage de temps pour
21 répondre ?
22 M. VISNJIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Cela n'est pas un
23 problème. Nous avons déjà étudié les documents que nous avons reçus, et il
24 se peut que notre requête ait été entièrement prise en considération. Mais
25 pour le moment, je ne peux pas vous le dire parce que cela est encore à
26 l'étude.
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons peut-être proroger cette
28 période de façon indéfinie et il vous appartiendra d'attirer notre
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1 attention sur ce fait lorsque vous serez prêt à traiter cette requête, mais
2 il y aura une ordonnance écrite à cet égard.
3 M. VISNJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Deuxièmement, une requête a été
5 présentée pour la troisième fois pour des mesures de protection
6 supplémentaires pour le témoin K56. Au vu de la date qui a été proposée
7 pour la déposition du témoin, la Défense devrait réagir et répondre au plus
8 tard vendredi de cette semaine, à savoir le 17 novembre.
9 Puis, en dernier lieu, pour ce qui est des éléments de preuve que
10 nous étions en train d'examiner lorsque nous avons levé l'audience
11 vendredi, il s'agit de la recevabilité d'éléments de preuve par ouï-dire.
12 Il s'agit de savoir ce que d'aucuns ont dit à propos de l'accusé M.
13 Sainovic. La Chambre de première instance a estimé qu'il s'agissait là
14 d'une question particulièrement épineuse à élucider. Nous avons finalement
15 décidé que ces éléments de preuve sont recevables et admissibles, mais
16 lorsqu'il s'agit de ce genre d'éléments de preuve, pour ce qui est de la
17 présentation de ces éléments de preuve et lorsqu'il s'agit d'un élément
18 extrêmement important qui pourrait contribuer à présenter des éléments de
19 preuve eu égard à la responsabilité pénale de cet accusé, pour cela, pour
20 ce qui est de la présentation de ces éléments de preuve, c'est une autre
21 question. Nous pensons que cela va être pour nous matière à réflexion, et
22 en temps voulu, nous rendrons notre décision. Pour le moment, nous avons
23 décidé d'entendre ces éléments de preuve.
24 Monsieur Hannis, vous allez donc pouvoir reprendre, et M. Tanic, n'oubliez
25 pas que la déclaration solennelle que vous avez prononcée au début de votre
26 déposition est valable. Si vous devez revenir demain et après-demain, cette
27 déclaration sera toujours valable.
28 Monsieur Hannis, vous avez la parole.
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1 M. HANNIS : [interprétation] Merci.
2 LE TÉMOIN: RATOMIR TANIC [Reprise]
3 [Le témoin répond par l'interprète]
4 Interrogatoire principal par M. Hannis : [Suite]
5 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Tanic. Lorsque nous avons terminé
6 vendredi, je pense que nous étions en train de parler d'une mission
7 d'enquête diligentée au Kosovo; il s'agissait du général Perisic et de
8 Jovica Stanisic qui en faisaient partie. Vous souvenez-vous du moment où
9 cette mission a eu lieu ?
10 R. D'après mes souvenirs, cela s'est passé au début de l'année 1998. Je
11 pense que vous trouverez la période précise dans ma déclaration.
12 Q. Vous souvenez-vous si cela s'est passé avant l'attaque menée contre la
13 propriété de la famille Jashari ?
14 R. Pour autant que je m'en souvienne, oui, mais il faudrait peut-être que
15 vous vérifiiez cela dans ma déclaration. Je n'ai pas de dates que je
16 pourrais consulter ici.
17 Q. Vous avez indiqué que M. Sainovic a participé à cette mission. Avant
18 qu'il n'y participe, est-ce que le général Perisic ou M. Stanisic vous
19 avait dit s'ils avaient préalablement demandé à d'autres représentants du
20 gouvernement de les accompagner dans le cadre de ce déplacement ?
21 R. D'après ce que je sais, et je l'ai entendu de la part du général
22 Perisic, ils avaient prévu d'emmener M. Zoran Lilic. Ils voulaient qu'il
23 participe à cette mission, et ce, afin de renforcer les efforts déployés
24 pour essayer d'empêcher qu'il n'y ait une guerre au Kosovo.
25 Q. Savez-vous pourquoi ils préféraient M. Lilic par rapport à M.
26 Sainovic ?
27 R. M. Lilic est une personne honnête qui jouissait de la réputation d'être
28 l'une des personnalités les plus éminentes, qui préconisait qu'une solution
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1 soit trouvée pour empêcher la guerre, ce que l'on ne peut pas dire de M.
2 Sainovic. En tout cas, c'est ce que m'a dit M. Perisic.
3 Q. Après cette mission d'enquête, savez-vous si Perisic ou Stanisic a
4 présenté des recommandations à Slobodan Milosevic à propos du Kosovo ? Dans
5 un premier temps, répondez-moi par l'affirmative ou la négative.
6 R. Oui.
7 Q. Comment le savez-vous ? Quelle était votre source ?
8 R. Ce n'est pas seulement Perisic qui m'a relaté cela. Je l'ai appris à
9 l'époque par différentes filières, par le truchement, par exemple, de la
10 direction de mon parti et par d'autres sources. J'étais au courant de leurs
11 recommandations avant que je ne parle de la mission avec Perisic. C'était
12 une recommandation qui était publique.
13 Q. Pourriez-vous rappeler à l'intention de la Chambre de première instance
14 quelles étaient certaines de ces recommandations ?
15 R. La première recommandation fondamentale visait à ce que l'UCK soit
16 déclarée officiellement comme organisation terroriste, parce que jusqu'à ce
17 moment-là, l'UCK était appelée organisation terroriste de façon officieuse,
18 en quelque sorte. Cela était différent de l'appellation officielle donnée à
19 cette organisation. Puis, il y avait une autre recommandation qui visait
20 tout l'Etat du Kosovo où l'état d'urgence devait être déclaré, ce qui
21 aurait pu légitimer l'utilisation de l'armée des unités de police spéciale
22 parce qu'ils étaient capables de séparer les terroristes de la population
23 civile. Puis, la troisième recommandation visait en quelque sorte à mettre
24 en vigueur, et ce, le plus rapidement possible, les résolutions qui
25 existaient déjà et qui étaient des résolutions politiques qui visaient le
26 Kosovo.
27 Il fallait que Milosevic les signe. Tout le monde savait à Belgrade que
28 cela existait. Il s'agissait d'envisager une autonomie de base pour le
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1 Kosovo avec la convocation d'élections et la mise au point de mesures de
2 confiance. Ces mesures étaient censées faire partie d'un jeu d'un ensemble
3 de mesures, et l'on pensait qu'elles suffiraient pour régler le problème du
4 terrorisme. Il s'agissait de faire la part des choses par rapport à cela,
5 la situation politique au Kosovo, et d'essayer de gérer ces deux situations
6 en parallèle, cela afin de régler le problème pour la communauté
7 internationale, pour les Albanais du Kosovo, et afin de minimiser également
8 les victimes dans les deux camps. Cela, d'ailleurs, tenait compte de
9 certaines de mes recommandations, recommandations que j'avais présentées à
10 la direction de mon parti et à Mihajlovic.
11 Q. Est-ce que vous savez si ces recommandations ont été suivies par M.
12 Milosevic ?
13 R. Non, non. Ni lui ni ses associés les ont suivies. L'UCK n'a jamais été
14 déclarée officiellement organisation terroriste, à l'époque. L'état
15 d'urgence n'a jamais été mis en vigueur parce qu'il aurait ainsi permis
16 l'utilisation légitime de l'armée et la police. Certaines décisions ont été
17 prises ultérieurement, et ce, par la commission du Kosovo. Il s'agissait
18 par exemple de l'utilisation de forces spéciales de police. Je dois dire
19 que cela est passé en quelque sorte par une chaîne de commandement privée.
20 Pour ce qui est de la solution politique du problème, ni Milosevic ni ceux
21 qui l'entouraient ne voulaient absolument entendre parler de cet accord.
22 Ainsi, ils ont tout simplement fait en sorte que l'opinion populaire au
23 Kosovo devienne de plus en plus radicale.
24 Q. Vous avez mentionné que l'un des objectifs des recommandations visait à
25 minimiser le nombre des victimes dans les deux camps au Kosovo. Que se
26 passait-il au Kosovo qui signifie qu'il y avait comme conséquences des
27 victimes au Kosovo en 1998 ?
28 R. A ma connaissance, les unités de police étaient utilisées de façon peu
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1 professionnelle. Elles étaient utilisées pour combattre le terrorisme. Le
2 terrorisme albanais avait pour habitude de se mélanger avec la population
3 civile, ce qui est utilisé d'ailleurs comme stratégie dans le monde entier.
4 Mais il faut qu'il y ait des mesures qui soient prises pour faire en sorte
5 de faire la part des choses entre les terroristes et la population civile.
6 Au lieu de cela, malheureusement, très souvent nos unités ont pris des
7 mesures et ont mené à bien des opérations afin d'essayer d'éliminer ces
8 terroristes. Ils l'ont fait avec comme résultat un grand nombre de victimes
9 civiles, bien que la police ait su au départ qu'il y aurait peut-être des
10 victimes civiles. Alors bien entendu, il y a eu des victimes dans notre
11 camp et également au sein de la police, mais je l'ai dit, il y avait une
12 chaîne de commandement privée qui émanait de Milosevic, qui passait par
13 différents échelons, ce qui fait que cela s'est soldé par un véritable
14 chaos et avec un nombre qui augmentait de plus en plus pour ce qui est des
15 victimes dans les deux camps.
16 On ne savait pas comment l'armée aurait pu être utilisée puisqu'il
17 n'y avait pas d'état d'urgence. L'armée était utilisée ici et là, et cela,
18 contrairement à la constitution, ce qui a fait que le pays a plongé dans
19 une situation de plus en plus grave et qu'en même temps, cela ne faisait
20 qu'alimenter en quelque sorte l'extrémisme albanais. Je n'ai participé à
21 aucun combat là-bas, donc je ne peux pas parler de crimes précis, mais
22 c'est une impression quand même que je partageais et qui était partagée par
23 d'aucuns également. Je dois vous dire que je suis assez sûr que le chef de
24 la sécurité et le chef des forces armées partageaient ce point de vue. Le
25 problème le plus grave était justement cette chaîne de commandement qui
26 était absolument parallèle.
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Maître Fila.
28 M. FILA : [interprétation] Je dirais, Monsieur le Président, que je ne sais
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1 pas d'où vous viennent ces questions. Une fois de plus, il s'agit
2 d'impressions, d'avis, de points de vue. On ne nous donne aucune source
3 précise. Je n'ai jamais vu ce genre de témoignage jusqu'à présent,
4 d'ailleurs je ne sais pas très bien où cela va nous mener. J'aimerais
5 toutefois vous rappeler que M. le Juge May partageait mon point de vue. Il
6 a partagé mon point de vue lorsque ce témoin est venu déposer ici la
7 dernière fois. Regardez les mots qu'il utilise, les propos qu'il tient. Je
8 ne sais vraiment pas où cela nous conduit, et c'est pour cela que je
9 soulève une objection.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse, j'ai des sources d'information --
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous en prie, ne parlez pas tant
12 que nous n'ayons pas réglé le problème. Vous aurez la possibilité de vous
13 exprimer plus tard lorsque d'autres questions vous seront posées.
14 Vous avez autre chose à dire, Maître Fila ?
15 M. FILA : [interprétation] Non, non. Je voulais tout simplement vous
16 expliquer ce qui me dérange pour le moment.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.
18 M. HANNIS : [interprétation] Je peux tout à fait poser quelques questions.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais est-ce que vous pourriez peut-
20 être dans un premier temps répondre à cette objection, puisqu'il a été
21 suggéré que l'on demande de façon tout à fait aléatoire des questions au
22 témoin sans pour autant se concentrer sur les questions pertinentes à ce
23 procès ?
24 M. HANNIS : [interprétation] Non. C'est une question qui visait les
25 victimes civiles au Kosovo en 1998.
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela n'a pas donné beaucoup de
27 résultats. Puis, il est question de cette chaîne de commandement ou de
28 cette structure parallèle qui nous tombe du ciel, en quelque sorte.
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1 M. HANNIS : [interprétation] Il s'agissait d'une réponse qui n'était pas
2 véritablement une réponse à ma question.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, c'est vrai que cela ne nous
4 permet pas véritablement de procéder de façon méthodique. Je pense qu'il
5 faudrait envisager un interrogatoire un peu plus ciblé, Monsieur Hannis.
6 M. HANNIS : [interprétation] Je vais m'évertuer de le faire.
7 Q. Monsieur Tanic, à propos de ces victimes civiles parmi les Albanais du
8 Kosovo en 1998, est-ce qu'il s'agissait en quelque sorte d'un secret
9 d'Etat ?
10 R. Pour l'essentiel, oui.
11 Q. Est-ce que cela ne faisait quand même pas l'objet d'une certaine
12 publicité dans les médias; il en était question ?
13 R. Certains cas ont effectivement fait l'objet de publication dans les
14 médias.
15 Q. Cette question des victimes parmi la population albanaise du Kosovo,
16 est-ce que l'attention de M. Milosevic a été attirée sur ce problème ? Dans
17 un premier temps, répondez-moi tout simplement par oui ou par non.
18 R. Oui.
19 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire comment cela a été fait, qui a
20 attiré son attention là-dessus, comment est-ce que son attention a été
21 attirée sur ce problème ?
22 R. Dans un premier temps, nous l'avons fait, nous les membres de la
23 direction du partie, mais d'après ce que je sais, M. Stanisic et M. Perisic
24 lui ont indiqué cela, et au nom de leurs services officiels.
25 Q. Comment est-ce que vous avez attiré son attention là-dessus, vous qui
26 apparteniez à cette nouvelle démocratie ?
27 R. Nous l'avons fait de façon écrite, mais je pense qu'il y a également eu
28 des conversations à ce sujet.
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1 Q. Est-ce que vous avez jamais eu, vous personnellement, une conversation
2 avec M. Milosevic à ce sujet ?
3 R. Oui.
4 M. ACKERMAN : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Maître Ackerman.
6 M. ACKERMAN : [interprétation] Ecoutez, je reprends l'intervention de Me
7 Fila. La réponse qui a été apportée, la réponse à la ligne 14 : "Il y a eu
8 des conversations également," ce n'est pas très utile --
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais cela s'est passé, Maître
10 Ackerman. M. Hannis comprend cela, il va poser d'autres questions. Peut-
11 être que cela ne nous permettra pas véritablement d'élucider la question,
12 mais il a choisi dans le cadre du temps qui lui était imparti pour
13 l'Accusation d'essayer d'obtenir de la part du témoin des réponses à propos
14 de cela, et maintenant il se rend compte qu'il doit cibler certains
15 éléments essentiels et il essaie de le faire. S'il n'y arrive pas et que
16 nous nous retrouvons avec cette réponse qui est très évasive et très vague,
17 bien entendu que nous nous pencherons sur la question.
18 M. ACKERMAN : [interprétation] Oui, mais je vois qu'il est question de
19 beaucoup d'impressions et de choses qui se sont peut-être, peut-être pas
20 passées.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ackerman, je pense que M.
22 Hannis est parfaitement conscient de la situation.
23 Poursuivez, Monsieur Hannis.
24 M. HANNIS : [interprétation]
25 Q. Si vous avez eu une conversation avec M. Slobodan Milosevic à ce sujet,
26 est-ce que vous pourriez nous dire, Monsieur Tanic, quand est-ce que cela
27 s'est passé, comment est-ce que cette conversation s'est déroulée ?
28 R. Cela s'est passé avant l'année 1998 --
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ne poursuivez pas cette réponse, ne
2 continuez pas, parce que M. Hannis vous pose des questions à propos de
3 l'année 1998, donc il va vous poser d'autres questions.
4 M. HANNIS : [interprétation]
5 Q. Vous nous dites que vous avez eu une conversation avant l'année 1998.
6 Est-ce que c'était une conversation qui portait sur le problème des
7 opérations de police et de la population civile des Albanais du Kosovo ?
8 R. Non. Cette conversation portait sur la façon de résoudre le problème,
9 étant donné que pendant le second semestre de l'année 1997, le terrorisme a
10 commencé à s'aggraver, à devenir de plus en plus important. Déjà, il y
11 avait des discussions à propos de la façon de faire la part des choses
12 entre les terroristes et les civils. Il m'est très difficile de parler sans
13 les notes que j'ai prises, j'aimerais vérifier certaines dates. Ce sont des
14 événements qui se sont déroulés il y a plus d'une décennie. La Défense peut
15 véritablement utiliser cette faiblesse de ma part, mais sans ma propre
16 déclaration, il m'est difficile quand même de me souvenir des dates.
17 Q. Faites abstraction des dates pour le moment, mais j'aimerais que vous
18 nous indiquiez quand même quelle fut la quintessence de cette conversation,
19 puisqu'il était question de séparer la population civile des terroristes et
20 de faire la différence entre les deux.
21 R. Tout ce que j'ai dit, tout cela, toute cette histoire s'était répétée
22 depuis des années, depuis des mois, une solution politique, déclarer l'UCK
23 une organisation terroriste, l'envoi de forces spéciales, la proclamation
24 de l'état d'urgence. Voilà autant de facteurs qui, pour la vie politique
25 serbe --
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tanic, écoutez les questions
27 qui vous sont posées et répondez aux questions qui vous sont posées. Ce
28 n'est pas la peine de revenir sur des choses dont vous nous avez déjà parlé
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1 de façon générale, parce que M. Hannis essaie de préciser certains faits
2 afin que nous les prenions en considération. Je vous demanderais de nous
3 aider, Monsieur Tanic.
4 Monsieur Hannis, poursuivez.
5 M. HANNIS : [interprétation]
6 Q. Vous aviez déjà répondu, vous avez dit que c'était pendant le deuxième
7 semestre de l'année 1997, qu'il y avait déjà un débat à ce sujet et que le
8 problème consistait à séparer les terroristes des autres. Est-ce que vous
9 avez eu une conversation avec M. Milosevic à ce sujet, à propos de ce
10 problème ?
11 R. Oui, oui, une conversation brève.
12 Q. Pouvez-vous nous dire ce qu'il vous a dit à ce sujet ?
13 R. Il nous a tout simplement dit que la population albanaise se ralliait
14 aux terroristes et que le problème, c'était le nombre d'Albanais, qu'il
15 faudrait que ce chiffre soit ramené à un niveau raisonnable. Mais nous ne
16 parlons pas de Milosevic, ici, je pense.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense, Monsieur Tanic, qu'il va
18 falloir que je vous explique pourquoi vous avez été convoqué ici. Nous
19 voulons entendre ce que vous avez à dire à propos de questions qui vous
20 sont posées par les conseils. Il ne vous appartient pas de nous dire ce que
21 vous avez envie de nous dire et il ne vous appartient pas à vous de décider
22 si des questions afférentes à Milosevic sont pertinentes dans cette
23 affaire. Je vous demanderais de vous limiter à répondre aux questions qui
24 vous sont posées. Ainsi, nous effectuerons un certain progrès.
25 Parce qu'il ne faut pas oublier que l'Accusation s'est vu impartir un
26 certain temps, et vous savez qu'il y a quand même une certaine
27 préoccupation internationale à propos de la durée de ces affaires, des
28 affaires ici. Je vous demanderais de nous prêter main-forte pour que nous
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1 puissions véritablement régler les problèmes présentés par l'acte
2 d'accusation. Je vous demanderais de bien vouloir apporter votre
3 contribution à la Chambre de première instance.
4 Monsieur Hannis, je vous en prie.
5 M. HANNIS : [interprétation]
6 Q. Est-ce que vous avez eu des conversations avec le général Perisic à
7 propos des recommandations qu'il avait présentées à Slobodan Milosevic,
8 recommandations qui portaient sur le problème de la province du Kosovo ?
9 R. Oui.
10 Q. Est-ce que vous vous souvenez du moment où vous avez eu cette
11 conversation avec lui ? Est-ce que vous vous souvenez de l'endroit où vous
12 vous trouviez lorsque vous avez eu cette conversation ?
13 R. Cela s'est passé pendant le printemps de l'année 1999.
14 Q. Vous vous souvenez où a eu lieu cette conversation ?
15 R. Chez lui.
16 Q. Lors de cette conversation, est-ce qu'il vous a montré une lettre qu'il
17 avait rédigée à l'intention de M. Milosevic, lettre dans laquelle il
18 exposait ses griefs, ses doléances, et dans laquelle également il suggérait
19 des recommandations ?
20 R. Oui.
21 M. HANNIS : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche la pièce à
22 conviction P17, je vous prie. Je m'excuse, il s'agit de la pièce 717. Je
23 m'excuse, donc c'est la pièce 717, P717.
24 Q. Lorsque vous lui avez parlé de cette lettre, est-ce qu'il vous a dit si
25 Milosevic avait réagi de façon positive à l'une ou l'autre de ses
26 recommandations ?
27 R. Oui. Il m'a relayé les observations de M. Milosevic qui n'étaient pas
28 d'ailleurs positives.
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1 M. HANNIS : [interprétation] J'aimerais que soit affichée la version
2 anglaise sur l'écran pour nous et je souhaiterais que la version B/C/S soit
3 affichée pour le témoin. Je souhaiterais que l'on prenne la page 2 de ce
4 document pour la version B/C/S -- non, je m'excuse, je pense que c'est la
5 page 3 du document.
6 Q. Est-ce que vous voyez ceci apparaître à l'écran, Monsieur Tanic ?
7 R. Oui.
8 Q. Est-ce que vous reconnaissez ce document ?
9 R. Oui.
10 Q. De quoi s'agit-il ?
11 R. Il s'agit d'une lettre d'avertissement du général Perisic à l'époque où
12 il était chef d'état-major de l'armée de Yougoslavie. Ce document est
13 adressé à Milosevic et informe M. Milosevic de ce qui se passe vraiment et
14 des problèmes qui se présentent dans le contexte de ce conflit au Kosovo.
15 C'est une lettre qui est identique à d'autres lettres que nous avons
16 envoyées et que les services de Sécurité ont envoyées et auxquelles j'ai
17 déjà fait référence.
18 Q. Puis-je vous inviter à porter votre attention sur l'élément 126 décrit
19 par M. Perisic comme étant une liste de faits, y compris une tendance à
20 utiliser l'armée yougoslave à l'extérieur des institutions du système,
21 séparant les unités de l'armée yougoslave de l'armée et essayant de
22 commander des unités de l'armée yougoslave par des personnes qui n'y sont
23 pas autorisées ? Est-ce que vous avez discuté de chacun de ces points avec
24 le général Perisic ?
25 R. Oui, oui, c'est une liste très exhaustive.
26 M. HANNIS : [interprétation] Peut-on passer à la page suivante en version
27 B/C/S et garder la même page en version anglaise ?
28 Q. Monsieur Tanic, vous allez peut-être pouvoir nous apporter votre
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1 concours. Je crois qu'il y a eu une petite erreur de traduction dans la
2 version anglaise, ou en tout cas, un mot manque. Dans la version B/C/S, au
3 haut de la page, à l'intitulé 1(A), pourriez-vous faire lecture de cette
4 première ligne, paragraphe 1, alinéa A ?
5 R. "La situation au Kosovo-Metohija aurait pu être résolue." Il est dit :
6 "Premièrement, tendance de l'armée en dehors des institutions et du
7 système" --
8 L'INTERPRÈTE : L'interprète invite le témoin à lire plus lentement.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] -- "la situation au Kosovo-Metohija" --
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Veuillez lire plus lentement le texte,
11 parce que lorsque vous lisez un texte, vous avez tendance à lire beaucoup
12 plus vite et à parler beaucoup plus vite. Veuillez ralentir quelque peu.
13 Veuillez reprendre A, s'il vous plaît.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] "La situation au Kosovo-Metohija aurait pu
15 être résolue en introduisant un état d'urgence à temps, à savoir le 28
16 avril 1998, lorsque je vous ai envoyé la proposition écrite figurant dans
17 l'annexe numéro 1, dans la mesure où vous n'en avez pas pris compte" --
18 M. HANNIS : [interprétation] Je crois que le terme "urgence" manque dans la
19 version anglaise; le terme "emergency" manque dans la version anglaise.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
21 M. HANNIS : [interprétation]
22 Q. Monsieur Tanic, au point (a) [comme interprété], il y a une traduction
23 d'un texte, et il y est parlé de VSO. Est-ce que vous pourriez nous dire à
24 quoi correspond cette initiale VSO ? Il y a une explication dans la
25 traduction anglaise, mais je tiens à être absolument certain qu'il s'agit
26 bien de la bonne explication.
27 R. Conseil suprême de la Défense.
28 Q. Dans le compte rendu, il est indiqué BSO, mais je crois que c'est VSO,
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1 V pour Victor, et non pas B, lorsque je l'ai dit. Puis, au bas de ce
2 paragraphe, au paragraphe (b), le général Perisic évoque trois raisons pour
3 lesquelles l'utilisation de l'armée yougoslave de cette façon-là n'est pas
4 défendable. La façon dont il propose de résoudre le problème est --
5 pourriez-vous faire lecture du texte, s'il vous plaît ?
6 R. "La VJ, l'armée de Yougoslavie ne peut pas être utilisée, et ce,
7 pour trois raisons au moins."
8 Q. Pourriez-vous aller un peu plus bas et dire ce qu'il propose comme
9 solution, ce que le général Perisic propose comme solution au problème ?
10 R. Non, je ne le vois pas, donc je ne peux pas le lire.
11 Q. Pardon. Il va falloir que l'on passe un peu plus bas dans la version
12 B/C/S du texte à la projection.
13 R. "Proposition de solution : utiliser l'armée de Yougoslavie de façon
14 licite de manière à défendre la ceinture de frontière, les équipements
15 militaires et les unités militaires, ne pas l'utiliser pour quelque autre
16 tâche que ce soit ou ne pas déclarer la situation, tel cela est prévu par
17 la constitution, et l'usage de la force. La position est claire, mais il
18 faut que nous ayons une décision politique claire, parce que si l'assemblée
19 fédérale ou le cabinet de la République de Yougoslavie ne souhaite pas ou
20 n'est pas en mesure de parvenir à cette décision, qui a le droit d'assumer
21 une telle responsabilité.
22 "Point 2, séparer les unités de la VJ de l'armée yougoslave" --
23 Q. Point 2, il évoque quelques griefs quant à certaines brigades, des
24 Brigades des Gardes qui ont été séparées du fait de la décision de M.
25 Milosevic. Ces Brigades des Gardes, de quoi s'agit-il ? Est-ce que vous
26 pouvez nous le dire ? Est-ce que vous en savez quelque chose ?
27 R. Malheureusement, je n'ai pas les compétences requises pour répondre à
28 cette question.
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1 Q. Je vais vous poser une autre question.
2 M. HANNIS : [interprétation] La page suivante du texte en version B/C/S,
3 pourrait-on l'afficher, s'il vous plaît ? Restons sur la même page en
4 version anglaise, en revanche.
5 Q. Point 3, il s'agit d'un grief évoqué quant à la tentative visant à
6 commander l'armée yougoslave par une personne non autorisée à le faire. Au
7 paragraphe 3(a), on fournit un exemple qui fait référence à l'exemple de
8 Decani ou Orahovac. Est-ce que vous avez des informations sur ce qui a pu
9 se passer à Decani ou Orahovac, s'agissant de cette tentative visant à
10 commander par des personnes non autorisées qui ont décrit la volonté
11 d'apporter un appui à des unités de l'armée yougoslave ?
12 R. Oui. Pour cette chaîne de commandement privée, pour cette mission au
13 Kosovo qui ensuite s'est rebaptisée elle-même Commission pour la lutte
14 contre le terrorisme, du fait de cette chaîne de commandement parallèle,
15 les instructions parvenaient de Belgrade, instructions indiquant que
16 l'armée devait offrir plus de mortiers de 120 millimètres, de lance-
17 roquettes à la police, ainsi que d'autres équipements qui, au titre de
18 notre législation, pour ne même pas citer la convention de Genève, sont
19 interdits.
20 Il est interdit d'utiliser de telles armes contre les populations
21 civiles à moins que ne soit déclaré l'état d'urgence. Le général Perisic,
22 c'est en tout cas ce qu'il m'a dit au moment où il était confronté à des
23 problèmes de ce type, et cela s'est produit à plusieurs reprises, a
24 interdit cela. Puis, un fonctionnaire du service de Sécurité m'a indiqué
25 que le MUP avait demandé à l'armée d'intervenir et que l'armée s'était
26 exécutée, et ce, d'une façon qui ne servait strictement à rien dans la
27 lutte contre le terrorisme, mais qui avait eu pour conséquence des victimes
28 civiles.
Page 6363
1 Q. Au 3(b) --
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, est-ce que nous
3 allons en entendre davantage à propos de cette commission au Kosovo, cette
4 Commission pour la lutte contre le terrorisme ?
5 M. HANNIS : [interprétation] Oui, nous en parlerons davantage par la suite.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
7 M. HANNIS : [interprétation]
8 Q. Au 3(b), il est fait état de la tentative par la partie civile de
9 l'état-major de commander un Corps d'armée. Il indique que la
10 responsabilité du commandement du Corps d'armée est d'évaluer la situation,
11 de prévoir des opérations pour le MUP et l'armée yougoslave, et ce, en
12 coopération avec les membres civils de l'état-major et du MUP, et de faire
13 rapport à Sainovic et Minic.
14 Tout d'abord, pourriez-vous nous dire qui était Minic, Milomir Minic ?
15 R. Milomir Minic était également un des collaborateurs les plus proches de
16 Milosevic, tout comme M. Sainovic.
17 Q. Monsieur Minic occupait-il un poste de gouvernement ?
18 R. J'ai du mal à m'en souvenir. Il occupait sûrement un poste, mais il
19 m'est difficile de me souvenir très précisément duquel. M. Perisic les
20 décrivait tous deux comme étant membres de cette commission.
21 Q. Qu'en saviez-vous, de cette commission ? La source de vos informations
22 est-elle le général Perisic, de vos informations à propos de cette
23 commission ?
24 R. Non. J'avais entendu parler de cette commission précédemment, au moment
25 même où elle avait été établie.
26 Q. Vous souvenez-vous plus ou moins de la date à laquelle elle a été
27 établie et à quel moment vous en avez entendu parler pour la première
28 fois ?
Page 6364
1 R. J'ai entendu parler de son existence au moment où elle a été créée.
2 Pour autant que je puisse me souvenir, et je n'ai pas mes notes sous mes
3 yeux, donc il m'est difficile de me rappeler exactement quelle était la
4 date, mais je crois que c'était à la fin de 1997 ou au début 1998. Quoi
5 qu'il en soit, c'était à l'époque où Milosevic, avec ses collaborateurs,
6 avait rejeté une commission politique pour le Kosovo. Il n'était pas en
7 mesure d'assurer la mise en œuvre et l'exécution de ces politiques au
8 Kosovo par des canaux légaux parce qu'il y avait là une résistance qu'on y
9 opposait, puisque chacun savait qu'il y avait une solution politique
10 éventuelle.
11 Dans la mesure où il ne pouvait bénéficier d'appui pour les
12 institutions politiques, il a établi ces institutions parallèles dont la
13 Commission pour le Kosovo, dont les membres étaient Sainovic et Minic,
14 entre autres.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, où dans votre
16 déposition écrite faites-vous référence à cela ?
17 M. HANNIS : [interprétation] La commission, Monsieur le Président ?
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.
19 M. HANNIS : [interprétation] Je vais vérifier. Je crois que c'est entre les
20 paragraphes 81 et 85, si je ne m'abuse; début de 1982, création de la
21 commission, est-il dit.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est un autre intitulé, mais c'est la
23 même commission.
24 M. HANNIS : [interprétation] Oui, vous vous souviendrez que dans la
25 déclaration liminaire, il avait été dit qu'il y avait un organisme auquel
26 on faisait référence, mais en n'utilisant que deux ou trois noms
27 différents, mais il s'agit du même organisme.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Veuillez nous donner quelques
Page 6365
1 instants.
2 [La Chambre de première instance se concerte]
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tanic, à plusieurs
4 reprises vous avez indiqué que vous n'aviez pas accès ici à vos notes. Est-
5 ce que vous avez des notes manuscrites que vous auriez prises au moment où
6 se sont déroulés ces événements ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je faisais référence à ma déposition
8 écrite de 1999, début 2000.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
10 Maître O'Sullivan, les Juges estiment à titre provisoire que lorsque l'on
11 s'occupe d'un si grand nombre de questions sur une période aussi longue et
12 si longtemps après que se soient déroulés les événements, il y aurait peut-
13 être lieu de donner au témoin la possibilité d'avoir sous les yeux sa
14 déposition écrite, de manière à ce que nous puissions être informés de
15 façon complète du déroulement des événements, gardant bien entendu présent
16 à l'esprit qu'il sera aidé par des déclarations qu'il aurait faites par
17 d'autres occasions. Mais cela va peut-être à l'encontre de la justice
18 d'empêcher qu'interviennent les précisions qu'une référence faite à la
19 déposition écrite pourrait apporter. Est-ce que vous y auriez une
20 objection, avant que nous ne prenions notre décision finale ?
21 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Au
22 départ, ce témoin devait intervenir sans déclaration écrite sous les yeux,
23 puis ensuite il a été décidé qu'au titre du 92 ter, il pourrait avoir la
24 déclaration sous les yeux, les 45 paragraphes. Cela avait été dit dans les
25 intérêts de la justice.
26 Il a été décidé que ce témoin soit entendu en prétoire, et cela,
27 selon nous, fait partie du poids de la preuve, et sa crédibilité est
28 affectée. Nous estimons qu'il ne devrait pas avoir la déclaration écrite
Page 6366
1 sous les yeux.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ceci étant dit, nous demandons de nos
3 témoins qu'ils se souviennent d'événements qui, dans le cas de la
4 déposition dont nous discutons à présent, se sont déroulés il y a de cela
5 huit ans. A mesure que le temps passe, les souvenirs s'effacent peu à peu
6 de la période au cours de laquelle on lui a demandé de concentrer son
7 attention sur le souvenir qu'il avait gardé des événements et de le coucher
8 sur papier, et ce document pourra lui permettre de mieux se souvenir des
9 événements.
10 C'est là quelque chose de très différent de la décision que nous
11 avons prise précédemment, qui était qu'en remplacement à sa déposition
12 orale, nous n'allions pas reprendre l'ensemble de la déclaration écrite. Il
13 se pose donc la question de savoir si, effectivement, empêcher le témoin de
14 faire référence à quelque chose qui est après tout son propre document
15 irait à l'encontre de l'intérêt de la justice.
16 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je ne peux que répéter ce que je vous
17 disais tout à l'heure. Bien entendu, il y a eu récolement par le bureau du
18 Procureur les 4 et 5 novembre par ce document. Il est venu au Tribunal
19 vendredi avec ce document. Il se peut qu'il ait relu toute sa déclaration
20 écrite pendant le week-end, ce n'est pas impossible; vous pouvez le lui
21 demander.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tanic, le conseil m'invite à
23 vous demander si vous avez relu votre déclaration pendant le week-end.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais je n'ai pas essayé à dessein de
25 mémoriser les dates. J'ai regardé les processus et les événements, mais je
26 ne souhaiterais pas que la Défense me mette au défi parce que je me suis
27 trompé de date. Je parle d'événements politiques, mais je ne peux pas me
28 souvenir de chaque date ou de chaque heure. Je peux difficilement dire :
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1 non, la commission n'a pas été établie à la fin de 1997, mais au début de
2 1998; par conséquent, vous, Tanic, vous n'y connaissez rien, pourrait me
3 dire la Défense. Mais la raison pour laquelle je n'ai pas mémorisé les
4 dates, c'est parce que je ne savais pas que je n'allais pas pouvoir
5 consulter ma propre déclaration.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.
7 Maître Fila.
8 M. FILA : [interprétation] Toutes mes excuses, Monsieur le Président,
9 Monsieur et Mesdames les Juges, j'ai deux raisons. D'abord, le paragraphe
10 53 fait référence à la commission pour la première fois, mais il semblerait
11 que cela ne plaise pas beaucoup à M. Hannis parce que cela établit un lien
12 avec un certain nombre d'événements. Examinons le paragraphe 53 de très
13 près. Examinons ce qu'il y est dit à propos de cette mission qui est la
14 commission.
15 Deuxièmement, le témoin a eu l'occasion de revoir sa déclaration écrite
16 pendant le week-end, et à mesure que M. Hannis posait de nouvelles
17 questions à propos de ce sur quoi déposerait le témoin, nous avons des
18 demandes ou des requêtes complémentaires d'altération au titre du 65 ter.
19 Soyons précis. Il se peut que le témoin fasse quelques erreurs de quelques
20 mois, et si c'est le cas, nous l'accepterons. Personne ne pense qu'il doit
21 être à même de donner la date précise. De petits écarts avec la réalité
22 peuvent être tout à fait tolérés, mais il faut qu'il nous présente des
23 informations, et nous voulons vérifier que ces informations sont crédibles.
24 Si vous examinez le paragraphe 53, vous verrez où et à quelle date une
25 commission a été établie. Monsieur Hannis, il y a un autre paragraphe qui
26 correspond à ce que dit le témoin. Je m'oppose à ce que l'on donne au
27 témoin l'occasion d'avoir sous les yeux sa déclaration écrite.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
Page 6368
1 Maître Visnjic.
2 M. VISNJIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous essayons ici de
3 voir dans quelle mesure le témoin est capable de relayer de façon fiable ce
4 qu'il a entendu de la bouche d'autres. Je crois que nous voyons qu'il ne
5 peut même pas relayer de façon fiable ce que lui-même a dit simplement en
6 complément de ce qui a été dit par Me O'Sullivan et Me Fila.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, mais c'est une insulte. Je sais
8 bien qu'en tant que témoin, je n'ai pas le droit de me prononcer, mais je
9 crois que c'est une insulte que d'affirmer que je ne suis pas capable de
10 relayer fidèlement des informations.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tanic, je vous demanderais de
12 bien vouloir comprendre que le conseil doit - c'est là son devoir -
13 m'apporter des explications quant à la base sur laquelle il s'oppose à la
14 proposition que nous formulons.
15 [La Chambre de première instance se concerte]
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, vous souhaitiez
17 intervenir ?
18 M. HANNIS : [interprétation] Oui, si vous m'y autorisez. Il y a là un
19 certain nombre de questions qui me tiennent à cœur intellectuellement
20 aussi. Par le passé, j'avais une excellente mémoire en mesure, dit-on. Je
21 ne me souviens pas avoir eu une excellente mémoire. Parfois, je ne me
22 souviens même pas de ce qui s'est passé hier ou si j'ai bien frotté mes
23 aisselles au moment de prendre ma douche. Mais là, c'est un problème qui se
24 pose dans tous les tribunaux qui fonctionnent avec des témoins qui viennent
25 déposer pour des événements notamment qui se sont déroulés il y a si
26 longtemps. Aux Etats-Unis, il y a plusieurs façons de régler ce genre de
27 question.
28 Soit on rafraîchit la mémoire du témoin, ou l'on donne au témoin la
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1 possibilité d'examiner sa déclaration écrite, une déclaration qu'il aurait
2 faite à un moment plus proche des événements. Cela lui donne l'occasion de
3 l'examiner, éventuellement cela rafraîchit sa mémoire. S'il le fait, il
4 peut ensuite mettre de côté sa déclaration écrite; cela, c'est une
5 possibilité. L'autre possibilité, c'est de dire : "Je sais que j'ai fait
6 une déclaration écrite il y a de cela cinq, six ou huit ans, et si je
7 pouvais l'examiner, cela rafraîchirait ma mémoire. Mais même à la lecture
8 du document, cela ne rafraîchit rien. Mais je sais qu'à ce moment-là, ma
9 mémoire était fiable et je pense pouvoir l'utiliser."
10 On peut l'utiliser par opposition à la déposition, mais dans d'autres
11 situations et dans l'intérêt de la justice, dans l'intérêt de la recherche
12 de la vérité par ce Tribunal, il ne serait pas injuste à l'égard de la
13 Défense ou du Tribunal de permettre au témoin de revoir sa déclaration
14 écrite afin de s'assurer que cela rafraîchit bien ou ne rafraîchit pas sa
15 mémoire.
16 [La Chambre de première instance se concerte]
17 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous rendrons une décision sur ce
19 point en l'absence du témoin, donc nous allons passer en audience à huis
20 clos et inviter le témoin à quitter le prétoire jusqu'à ce que nous
21 rendions notre décision.
22 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos.
23 [Audience à huis clos]
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 (expurgé)
Page 6370
1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 [Audience publique]
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, donnez la déclaration
6 au témoin pour qu'il puisse la consulter, se rafraîchir la mémoire. Cela ne
7 va pas dans le sens de l'intérêt de la justice. Ce serait contraire à une
8 décision que nous avons rendue précédemment au sujet de la déclaration.
9 Cependant, il arrivera et il est peut-être déjà arrivé que par souci de
10 précision dans la relation de la chronologie des événements, il serait
11 peut-être utile à ce moment-là que le témoin puisse consulter sa
12 déclaration pour se rafraîchir la mémoire, donc nous allons faire preuve de
13 compréhension et nous accepterons qu'on lui permette de consulter des
14 passages précis dans les situations que vous avez vous-même définies. Mais
15 nous ne souhaitons pas que sur la base d'un défaut, d'une défaillance de sa
16 mémoire s'agissant d'un événement ou de toute une série d'événements, nous
17 ne souhaitons pas qu'il puisse à ce moment-là systématiquement consulter sa
18 déclaration.
19 Il faudra que ce soit lorsque le besoin s'en fera sentir pour une
20 raison bien précise, si bien que nous estimons que sa déposition aura plus
21 de valeur s'il s'exprime librement sans consulter sa déclaration ou en la
22 consultant le moins possible. Veuillez donc garder cela à l'esprit et
23 intervenir dès que vous estimez qu'il sera nécessaire pour lui ou utile de
24 consulter sa déclaration. Nous-mêmes, nous pourrons peut-être nous en
25 rendre compte nous-mêmes, mais nous ne pensons pas qu'il doive
26 systématiquement consulter sa déclaration.
27 M. HANNIS : [interprétation] Merci.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons retourner en audience à
Page 6371
1 huis clos pour faire rentrer le témoin.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos.
3 [Audience à huis clos]
4 (expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 (expurgé)
10 (expurgé)
11 (expurgé)
12 (expurgé)
13 [Audience publique]
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tanic, nous avons statué, et
15 c'est notre décision qui régira la suite de votre déposition.
16 M. HANNIS : [interprétation] Merci.
17 Nous avons une pièce actuellement à l'écran, et j'aimerais que nous
18 passions à la page suivante en anglais et qu'on descende un petit peu sur
19 la page en B/C/S.
20 Q. Monsieur Tanic, avant cette digression, nous étions en train de parler
21 de la lettre du général Perisic au paragraphe 3, où il émettait des
22 protestations parce que certaines parties ou intervenants civils voulaient
23 commander la VJ. Au paragraphe 3, il explique que le commandant du Corps de
24 Pristina doit planifier ce qu'on lui ordonne de faire, à la demande de
25 Sainovic, Minic et du MUP, la planification et la réalisation est entre ses
26 mains. Est-ce que Perisic vous a fait part de difficultés qui découlaient
27 de cette manière de faire ?
28 R. Il m'a dit ce qu'il avait écrit. Il m'a dit que le résultat, c'était
Page 6372
1 qu'on employait de manière inefficace l'armée de la Yougoslavie, qu'il y
2 avait beaucoup de victimes et que les résultats étaient médiocres.
3 S'agissant de Sainovic et Minic, ils donnaient également des ordres au MUP,
4 et je le savais avant que Perisic ne me le dise. Ces deux hommes
5 transmettaient les messages de Milosevic dans le cadre des décisions prises
6 par l'armée ou par la police. Je le savais précédemment, mais M. Perisic me
7 l'a confirmé.
8 Q. Quelle était la source de vos informations avant que le général Perisic
9 ne vous en fasse part ?
10 R. Les services de Sécurité de l'Etat ou de la Sûreté de l'Etat ainsi que
11 des collaborateurs bien intentionnés de Milosevic, le chef de mon parti
12 également. Il s'agit de plusieurs sources, trois ou quatre sources situées
13 à des échelons différents, mais tout le monde me confirmait exactement la
14 même chose, y compris le facteur relatif à la participation internationale,
15 mais je ne pense pas que le moment soit venu d'en parler.
16 Q. Je vais maintenant passer au paragraphe 4, où il s'agit de contourner
17 certains échelons de commandement dans le cadre des négociations
18 officielles et de la répartition des missions. Le général Perisic s'est
19 plaint du fait que Milosevic, même si en tant que chef de l'Etat, il avait
20 le droit de s'entretenir avec qui il voulait au sein de la VJ, le général
21 Perisic cependant proteste, parce que ceci se fait sans la connaissance du
22 chef d'état-major de l'armée. Qui était chef d'état-major à l'époque ?
23 R. Le général Perisic.
24 Q. Dans le même ordre d'idées, est-ce que le général Perisic vous a parlé
25 de démarches qu'il avait entreprises lui-même en 1998 pour maintenir son
26 contrôle sur les unités de la VJ et savoir ce que ces unités de la VJ
27 faisaient au Kosovo ?
28 R. Oui, il a émis un ordre écrit selon lequel aucun équipement de l'armée,
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1 y compris les pièces d'artillerie lourde, ne pouvait être déplacé d'un
2 centimètre à la demande de qui ce soit, que ce soit Sainovic, Minic ou le
3 MUP, si lui-même n'y avait pas consenti. Parce qu'on utilisait des
4 manigances. On disait : déplacez votre char d'un mètre. Comme cela, le char
5 pouvait viser une maison civile, alors que l'armée ne voulait pas le faire.
6 Voilà le genre de chose qui se passait.
7 Q. Est-ce que le général Perisic vous a dit si cette mesure avait porté
8 ses fruits, résolu le problème ?
9 R. Il a dit que cela a été efficace pendant un certain temps, mais ensuite
10 le général Perisic a été remplacé au moment où M. Stanisic a quitté son
11 poste, ainsi que Mijatovic, son adjoint. Tout ceci à cause des difficultés
12 semblables, et cela correspond à ce dont j'avais parlé avec Mijatovic au
13 sujet des services de la Sûreté de l'Etat. Ils avaient une prise de
14 position semblable à celle de l'armée de la Yougoslavie. Ils estimaient que
15 Milosevic était en train d'essayer de déclencher une guerre là-bas, en bas.
16 Sainovic et Minic, selon eux, participaient à tout cela.
17 Q. J'ai oublié les termes exacts que vous avez utilisés, mais vous nous
18 avez parlé précédemment d'une chaîne hiérarchique ou une chaîne de
19 commandement illégale ou du fait qu'on essayait de contourner la voie
20 hiérarchique habituelle. Vous en souvenez-vous ?
21 R. En Serbie, on appelle cela la chaîne de commandement privée. Bien
22 entendu, c'est illégal. On utilise le terme de "privée", mais tout le monde
23 connaissait son existence. Enfin, ceux qui connaissaient son existence
24 disaient que c'était la voie hiérarchique ou la chaîne de commandement
25 privée de Sloba.
26 Q. Pouvez-vous nous en parler, de cette chaîne de commandement privée ?
27 Pouvez-vous nous dire qui y participait ?
28 R. S'agissant des civils, il y avait Sainovic, Minic en ce qui concernait
Page 6374
1 les affaires intérieures, Milutinovic pour ce qui est des relations avec la
2 communauté internationale, mais cela, c'est encore autre chose. Etant donné
3 que Milosevic ne pouvait pas s'assurer le soutien des institutions
4 constitutionnelles pour la guerre au Kosovo, il a utilisé ses amis. Il a
5 donné des directives à la police, qui fournissait des informations fausses
6 ou prétendait qu'il y avait sur place des terroristes, qu'il fallait les
7 arrêter, ce qui augmentait le nombre de terroristes et le nombre de nos
8 policiers qui se faisaient tuer. Voilà la politique de traîtrise mentionnée
9 par Perisic.
10 Ces victimes, elles étaient utilisées par Milosevic pour accentuer la
11 spirale de violence, avec notamment l'incident de Jashari à Prekaz. Il y a
12 beaucoup d'autres exemples. Je n'ai participé à rien de tel, mais ces
13 informations étaient crédibles. C'est ainsi qu'on fonctionnait. On
14 provoquait des victimes serbes pour entraîner une réaction, ensuite
15 c'étaient les massacres qui s'ensuivaient. Les Albanais, eux, disaient
16 qu'il fallait bien qu'ils se battent pour garantir leur liberté. C'est
17 ainsi que Milosevic a fait des terroristes albanais des combattants de la
18 liberté.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un journaliste aurait pu nous dire la
20 même chose, et cela aurait eu exactement pour nous la même valeur que les
21 déclarations d'un journaliste. Il faudrait, pour que nous attachions une
22 valeur quelconque à ce que nous dit le témoin, que sa déposition soit un
23 peu plus substantielle.
24 M. HANNIS : [interprétation] Bien.
25 Q. Monsieur Tanic, M. Perisic vous a-t-il donné des exemples de cette
26 chaîne de commandement privée, de la manière dont elle fonctionnait avec la
27 VJ ?
28 R. C'est ce que j'ai dit. Il téléphonait pour dire qu'il fallait déplacer
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1 un char de deux mètres. C'est ce que j'ai dit. C'est vrai, le Président dit
2 qu'un journaliste aurait pu écrire tout cela, mais moi, mes informations
3 étaient beaucoup plus crédibles. Un agent des services de Sécurité m'a
4 donné des exemples qui allaient dans le même sens, à Decani.
5 Q. Je vous interromps. Est-ce que le général Perisic a appris que
6 certaines personnes placées sous ses commandements avaient fonctionné dans
7 le cadre de cette chaîne de commandement privée sans que lui-même le
8 sache ? Est-ce qu'il l'a appris ultérieurement ?
9 R. Oui, il a dit que c'était M. Pavkovic.
10 Q. Est-ce que le général Perisic vous a dit qu'il avait fait quoi que ce
11 soit pour prendre des mesures disciplinaires contre Pavkovic suite à ce
12 genre d'activités ?
13 R. Oui. Il n'est pas entré dans les détails s'agissant des mesures prises,
14 mais en tout cas, la personne en question a été démise de ses fonctions peu
15 après.
16 Q. Qui a été démis de ses fonctions ? Pavkovic ou Perisic ?
17 R. Perisic.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tanic, est-ce qu'on vous a
19 donné des exemples précis de réactions du général Pavkovic à l'existence de
20 cette chaîne de commandement officieuse ou informelle ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Il m'a dit qu'il avait réagi en mettant en
22 garde verbalement Milosevic, mais comme cela n'a pas porté ses fruits, il a
23 couché tout cela sur le papier. Mais il a été décidé qu'il s'agissait d'un
24 secret d'Etat, et cela n'a jamais été publié. On sait bien ce que cela a
25 donné ensuite; il a été démis de ses fonctions. Pendant un certain temps,
26 ses ordres écrits sont restés en vigueur, interdisant donc le déplacement
27 de tout équipement de l'armée, mais après qu'il ait été démis de ses
28 fonctions, cela n'a plus eu aucune valeur.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous m'avez peut-être mal compris,
2 mais apparemment, vous n'avez pas d'informations de ce type. Je voulais
3 savoir si vous pouviez donner des exemples de ce qu'aurait fait le général
4 Pavkovic ayant appris l'existence de cette chaîne de commandement
5 officieuse et s'il avait appris que quelqu'un avait ordonné quoi que ce
6 soit dans ce cadre-là.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas bien compris. Excusez-moi, j'avais
8 mal compris. Je croyais que vous parliez de Pavkovic, et pas de Perisic.
9 Excusez-moi. D'après ce que m'a dit Perisic, Pavkovic avait tendance à
10 obéir à Sainovic et à faire intervenir les unités militaires pour aider le
11 MUP. De cette façon, on utilisait, de manière limitée, certes, les mortiers
12 par exemple ou les chars. De manière limitée, certes, mais c'était quand
13 même de manière anticonstitutionnelle.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous n'avez pas d'exemples concrets,
15 précis à nous donner ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Il n'a pas été précis en la matière. Il
17 s'agissait dans notre conversation d'un échange d'information, mais il y a
18 d'autres sources qui m'ont donné des exemples relatifs à Decani.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.
20 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
21 Q. Au cours de 1998 ou de 1999, dans vos contacts avec le SDB, est-ce que
22 vous avez obtenu des informations au sujet de l'opération Fer à cheval; oui
23 ou non ?
24 R. Non, je n'ai pas reçu d'informations du SDB, mais en revanche, j'en ai
25 reçu de Perisic.
26 Q. Au moment où vous avez eu cette discussion et où il vous a montré la
27 lettre en question ?
28 R. Oui. Il s'agit de trois conversations extrêmement longues qui ont duré
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1 pour chacune cinq à six heures.
2 Q. En deux mots, que vous a-t-il dit au sujet de l'opération Fer à cheval
3 et de quoi s'agissait-il exactement ?
4 R. Il m'a dit ce que je savais déjà, à savoir que notre armée avait prévu
5 de faire des manœuvres pour simuler un certain nombre d'opérations, et le
6 surnom de cette opération, c'était l'opération Fer à cheval. C'était un
7 plan en cas d'urgence qui avait été développé par l'ex-JNA, cela datait de
8 Tito, avec par exemple l'éventualité d'une attaque venant du sud-est. Au
9 cas où la population albanaise prenne la partie de l'agresseur, on avait
10 défini des axes, cinq ou six axes pour éliminer les bastions éventuels
11 albanais qui auraient pu être contrôlés par l'ennemi. C'est le genre de
12 plan dont dispose toute armée en cas de situation d'urgence, et on avait
13 prévu diverses directions pour avancer. Si on les regardait, cela
14 ressemblait à un fer à cheval; c'est pour cela qu'on avait surnommé
15 l'opération de ce nom, mais ce n'était pas l'intitulé officiel de
16 l'opération en question.
17 Q. Vous connaissez cet intitulé officiel ?
18 R. Non. Il n'est pas entré dans les détails à ce point-là.
19 Q. Merci. J'aimerais qu'on parle ensemble d'octobre 1998. Vous souvenez-
20 vous avoir assisté à une réception à l'ambassade d'Allemagne ?
21 R. Si cela figure dans ma déclaration, c'est que j'y ai participé.
22 Q. Je vais vous poser la question de la manière
23 suivante : est-ce que vous connaissez un dénommé Vladimir
24 Stambuk ?
25 R. Oui. Je me souviens, maintenant. Oui, je connais ce monsieur et je vois
26 de quoi vous voulez parler. Il s'agissait effectivement d'une réception --
27 Q. Mais auparavant, expliquez aux Juges de la Chambre qui était ce
28 monsieur et quel était son poste.
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1 R. Vladimir Stambuk, c'est quelqu'un qui a fait une thèse. C'était le
2 principal idéologue de la gauche yougoslave unie, la JUL, J-U-L, qui était
3 sous la direction de Mira Markovic, la femme de Milosevic. C'était un de
4 ses collaborateurs les plus proches et c'était vraiment un de ses proches,
5 "un de ses proches les plus proches", quasiment un intime.
6 Q. Vous souvenez-vous s'il occupait un poste au gouvernement, et dans ce
7 cas, quel poste ?
8 R. Non, j'ai du mal à m'en souvenir parce que je connaissais plusieurs
9 centaines de personnes. Je crois qu'il a occupé plusieurs postes. Il me
10 semble que c'était un des adjoints ou un remplaçant au gouvernement. Sauf
11 erreur de ma part, je ne voudrais surtout pas qu'on me demande des comptes
12 parce que je me serais trompé. En tout cas, c'était quelqu'un qui avait
13 beaucoup d'influence, c'était un des Faucons en Serbie.
14 Q. Est-ce que vous vous souvenez s'il a fait une remarque un petit peu
15 inhabituelle au cours de cette réception ?
16 R. Oui, très inhabituelle puisqu'il a fallu que j'essaie d'intervenir pour
17 l'empêcher de continuer.
18 Q. Qui était présent lorsqu'il a tenu ces propos ?
19 R. Donelly, l'ambassadeur britannique, ainsi que l'ambassadeur allemand,
20 Gruber.
21 Q. Qu'est-ce qu'il a dit ?
22 R. Nous étions quatre; il y avait Stambuk, il y avait les deux
23 ambassadeurs que j'ai mentionnés précédemment, il y avait moi-même. J'ai
24 fait ce que j'ai pu. J'essayais de discuter avec les ambassadeurs pour les
25 convaincre de ne pas bombarder la Yougoslavie. A ce moment-là, Stambuk a
26 dit verbatim : "Peu nous importe quelques bombes de l'OTAN." Les deux
27 ambassadeurs étaient complètement stupéfaits, ils étaient pantois,
28 complètement surpris d'entendre un membre de l'élite politique déclarer que
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1 finalement, cela ne le gênait pas beaucoup. Il a dit que nos dirigeants ne
2 s'opposeraient pas finalement à quelques bombes. C'était complètement
3 incroyable.
4 Q. Est-ce que vous vous êtes entretenu en tête-à-tête plus tard, au cours
5 de la même réception, avec M. Stambuk ?
6 R. Oui. Je l'ai pris à part, dans la mesure du possible. J'ai demandé à
7 Gruber et à Donelly de ne tenir nullement compte de ces propos. Ils m'ont
8 regardé, un petit peu surpris, parce que d'après notre législation, ce
9 genre de chose était passible d'une peine de prison. J'ai demandé à Stambuk
10 ce qui lui prenait, ce qu'il voulait dire quand il avait affirmé que cela
11 ne le gênait pas, finalement, qu'il y ait un petit peu de guerre. A ce
12 moment-là, il m'a fait une petite explication sur la doctrine en vigueur.
13 Il m'a dit que j'étais un imbécile ainsi que le président de mon parti,
14 Mihajlovic. J'étais stupide parce que j'avais quitté le gouvernement. Il a
15 dit que quelques bombes du pacte de l'OTAN, cela ferait un excellent
16 prétexte pour éliminer notre position, pour nettoyer les Albanais.
17 Puisque nos usines ne fonctionnaient pas de toute façon, cela pouvait
18 aussi être utilisé comme une excuse. C'était une véritable doctrine. Il a
19 essayé de m'expliquer les avantages que nous pourrions retirer d'un
20 bombardement dont notre pays serait la cible. J'étais complètement
21 abasourdi. Je n'avais jamais entendu quoi que ce soit de ce genre, en tout
22 cas pas aussi explicitement. Je lui ai demandé s'il en avait déjà parlé à
23 quelqu'un, de tout cela, ou si c'était son opinion personnelle. Il m'a dit
24 que c'était l'opinion de la famille. Quand il a dit cela, il faisait
25 référence à Mira, à Milosevic, ainsi qu'à certains amis. Il a dit que Dusan
26 et moi-même, nous ne devions pas faire les imbéciles, que nous devions
27 retourner au gouvernement, que de toute façon il y aurait un peu de guerre
28 et que cela pourrait être quelque chose qui pourrait tourner à notre
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1 avantage. Une conversation vraiment hallucinante. J'ai établi un document
2 suite à cette conversation et je l'ai envoyé au service de Sûreté de l'Etat
3 parce qu'il s'agissait ni plus ni moins que de trahison.
4 Q. Est-ce que vous avez eu une réponse de la part du SDB, ou est-ce qu'il
5 s'est passé quelque chose suite à ce rapport ?
6 R. Rien. L'agent en question m'a dit qu'ils étaient au courant de propos
7 de ce type tenus par les collaborateurs de Milosevic, qu'il y avait des
8 gens qui circulaient en disant : "Bon, un petit peu de guerre, cela ne peut
9 pas nous faire de mal." Ils étaient stupéfaits aussi, mais à l'époque, je
10 crois que ce n'était plus Stanisic qui était à la tête du service, c'était
11 Markovic. Ils avaient les mains liées. Beaucoup de gens craignaient de
12 perdre leur poste, donc finalement, cela n'a strictement rien donné. Mais
13 ils m'ont confirmé le fait que ces informations, ils en avaient déjà reçu
14 de semblables de la part d'autres sources. Ce n'était pas quelque chose de
15 nouveau. Nous, on a été complètement surpris.
16 Q. A la fin du mois d'octobre 1998, un accord a été conclu entre M.
17 Milosevic et Holbrooke. Il s'agissait d'un accord au sujet de la mise en
18 place de la Mission de vérification du Kosovo également. Je voudrais savoir
19 si vers cette période, vous vous souvenez s'il y a eu des changements parmi
20 les collaborateurs les plus proches de M. Milosevic et les plus importants.
21 R. Je n'ai pas compris votre question, puis je n'ai pas mes notes sous les
22 yeux. Est-ce que vous pourriez reformuler votre question ?
23 Q. Vous nous avez dit qu'un certain nombre de personnes avaient été
24 remplacées. Est-ce que cela s'est passé à l'époque aussi ? Vous aviez déjà
25 parlé précédemment de M. Stanisic, de M. Perisic. Est-ce que vous vous
26 souvenez à peu près de la période où tout cela s'est produit ?
27 R. Oui, cela y est, maintenant, je comprends. C'était peu après l'accord
28 Milosevic-Holbrooke.
Page 6381
1 Q. Qui a-t-on choisi pour remplacer le général Perisic à la tête de
2 l'état-major de la VJ ?
3 R. Pavkovic, le général Pavkovic.
4 Q. En êtes-vous certain ? Est-ce lui vraiment qu'on a nommé au poste de
5 chef d'état-major ?
6 R. Non, excusez-moi. Vous avez raison. Pavkovic était chef du Corps de
7 Pristina. Il s'agit de Dragoljub Ojdanic; c'est lui qui a remplacé Pavkovic
8 --
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant de poursuivre, est-ce que vous
10 pourriez nous donner une date approximative, la date de la réception au
11 cours de laquelle vous avez eu cette conversation avec M. Stambuk ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela figure dans ma déclaration, me semble-t-
13 il, on peut le vérifier. Auriez vous l'amabilité de me rafraîchir la
14 mémoire sur ce point ? Je me souviens des événements dans leur suite
15 chronologique simplement.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous nous avez parlé d'une
17 conversation au cours de laquelle quelqu'un a dit que finalement, quelques
18 bombes de l'OTAN seraient les bienvenues. Cela s'est passé à quel moment
19 par rapport au début du bombardement de l'OTAN ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela y est, j'ai compris. Cela s'est passé à
21 la période pendant laquelle des tentatives désespérées étaient entreprises
22 pour empêcher les bombardements; cela s'est passé un ou deux mois avant le
23 conflit avec l'OTAN au maximum, un ou deux mois avant la guerre.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le moment est venu pour nous de nous
25 interrompre. D'abord, nous allons passer à huis clos avant que vous ne
26 quittiez le prétoire, Monsieur Tanic.
27 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos.
28 [Audience à huis clos]
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15 [Audience publique]
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.
17 M. HANNIS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
18 Monsieur le Président, au vu de la dernière question que vous avez posée au
19 témoin à propos du moment où s'est déroulé cet événement à la réception de
20 l'ambassade de l'Allemagne, j'aimerais avec votre permission pouvoir
21 montrer au témoin sa déclaration, lui montrer le paragraphe 94 et lui
22 demander si cela lui rafraîchit la mémoire à propos du moment où cela s'est
23 passé.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, je pense que vous pouvez
25 poser cette question au témoin en évoquant la déclaration.
26 M. HANNIS : [interprétation] Je vous remercie.
27 Q. Oui, Monsieur Tanic, au moment où vous avez fait cette déclaration, je
28 vous ai indiqué qu'il s'agissait du paragraphe 94, vous dites que cette
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1 réception à l'ambassade s'est passée en octobre 1998. Vous avez dit à M. le
2 Juge Bonomy un peu plus tôt que vous pensiez que cela s'était passé un ou
3 deux mois seulement avant le début des bombardements. Maintenant que vous
4 avez vu cette date, comment est-ce que vous réconciliez ces deux points de
5 vue ? D'après vous, laquelle des dates est exacte, et pourquoi ?
6 R. Ecoutez, j'y ai réfléchi pendant la pause et je suis sûr que la date du
7 mois d'octobre 1998 est plus exacte. J'avais évoqué une date qui aurait
8 précédé de deux mois les bombardements, alors que cela s'est passé trois ou
9 quatre mois avant les bombardements. Ecoutez, je m'excuse, mais nous avons
10 eu moult réunions et conversations à ce moment-là. Le mois d'octobre 1998
11 correspond à la date exacte, d'après ce dont je me souviens, mais cela
12 pourrait être vérifié, bien entendu.
13 Q. Est-ce que dès le mois d'octobre 1998, les gens en Serbie parlaient
14 d'une éventuelle campagne de bombardements de l'OTAN ?
15 R. J'avais obtenu ces renseignements de la part de sources occidentales
16 extrêmement crédibles, et ce, sept mois avant les bombardements. J'ai
17 transmis ce renseignement au service de la sûreté. D'ailleurs, ils l'ont
18 pris très au sérieux. Puis, par la suite, nous nous sommes rendu compte
19 qu'il y avait de plus en plus de renseignements de ce style, ce qui
20 signifie qu'en Serbie, l'élite politique à laquelle j'appartenais savait
21 que si aucune solution politique n'était trouvée au probable du Kosovo, il
22 était plutôt vraisemblable qu'il y ait une intervention de l'OTAN.
23 Bien entendu, ce n'était pas l'homme de la rue en Serbie qui évoquait
24 ce genre de chose, mais seulement un cercle d'initiés qui faisaient partie
25 du cercle des politiciens, des agents du renseignement, et cetera, et
26 cetera. L'homme de la rue, il avait peur, bien entendu, que ce conflit
27 n'éclate, mais il ne disposait pas de ces informations. Je m'excuse d'avoir
28 commis une erreur pour ce qui est de la date, mais il ne faut pas oublier
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1 qu'il y a quand même un certain nombre d'événements qui se sont déroulés à
2 ce moment-là.
3 M. HANNIS : [interprétation] Nous allons maintenant aborder le paragraphe
4 86 de votre déclaration, et je le dis à l'intention du conseil de la
5 Défense.
6 Q. J'aimerais savoir, Monsieur Tanic, si vous savez, vous personnellement,
7 si les accusés ou l'un des accusés aurait participé aux événements ou
8 aurait été partie prenante aux événements qui ont trait à l'incident qui
9 s'est déroulé à Racak à la mi-janvier 1999 ?
10 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. C'est un
11 point qui ne fait plus partie de l'acte d'accusation, donc il ne faudrait
12 pas poser des questions dans le cadre de la présentation des moyens à
13 charge à ce sujet.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.
15 M. HANNIS : [interprétation] Je n'aborde pas cette question pour parler de
16 --
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas la peine de poursuivre
18 cela. Je l'ai déjà lu, cela. J'ai pris en considération ce point. J'entends
19 Me O'Sullivan, je comprends ce qu'il nous dit, mais je dirais que cet
20 élément de preuve ou ces éléments de preuve sont pertinents pour ce qui est
21 de la responsabilité pénale. Je prends note de ce que vous nous avez
22 indiqué, Monsieur Hannis, puisque vous nous dites que vous n'allez pas
23 aborder l'épisode lui-même à proprement parler.
24 M. HANNIS : [interprétation] Je vous remercie.
25 Q. Monsieur Tanic, vous vous souvenez de ma question ?
26 R. Oui. Pour ce qui est de ce fâcheux incident, je dois dire que j'en ai
27 parlé avec le service de la Sûreté de l'Etat et j'en ai parlé également
28 avec le président de mon parti, Mihajlovic, car nous savions que cela
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1 représentait une escalade du conflit. Le service de la sûreté m'a indiqué,
2 d'après d'ailleurs les scénarios que j'ai déjà décrits, qu'il y avait des
3 renseignements qui prêtaient à confusion et où il était fait de M.
4 Sainovic, mais que les frères Jashari qui étaient des contrebandiers et des
5 criminels auraient pu être arrêtés par nos unités précédemment, mais qu'ils
6 n'avaient pas pu le faire --
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez. Je pense que là, vous n'êtes
8 pas véritablement sur la même longueur d'ondes que M. Hannis.
9 M. HANNIS : [interprétation] Je comprends votre intervention, Monsieur le
10 Président. Peut-être qu'il faudrait que je formule une autre question, mais
11 je comprends également la réponse que l'on essayait de me présenter.
12 Q. Monsieur Tanic, il faut savoir que l'événement relatif aux frères
13 Jashari s'est passé bien avant cet événement de Racak, n'est-ce pas ?
14 R. Oui, oui. C'est moi qui suis dans l'erreur. Je m'excuse. Vous savez, il
15 y a un grand nombre d'événements qui se sont déroulés. Mais pour Racak,
16 oui, là il y a une cassette, une cassette qui émane de sources serbes. Il
17 s'agit du service de la Sûreté d'Etat. C'est une cassette qui a été acquise
18 à la suite d'interception de communications, et l'on peut entendre sur
19 cette cassette que M. Sainovic échange des points de vue et donne des
20 instructions à M. Lukic à propos d'opérations de combat dans ce village,
21 puis ensuite il est question de suppression de traces.
22 J'ai pu écouter cette cassette, et par la suite, par le truchement de
23 sources serbes ou grâce au truchement de sources serbes, cela est devenu en
24 partie public, cette information afin de faire état des problèmes qui
25 provenaient justement de cette chaîne de commandement parallèle. Puis, par
26 la suite, j'ai reçu des confirmations de la part de sources occidentales
27 suivant lesquelles ils disposaient également de cassettes qui montraient
28 que M. Sainovic avait transmis des informations à M. Lukic, informations
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1 qu'il n'aurait pas dû lui transmettre, et M. Lukic n'aurait pas dû les
2 écouter ou l'écouter. Peut-être que M. Lukic se berçait d'illusions en
3 pensant que cela correspondait à la situation, mais il faut savoir que M.
4 Sainovic, lui, ne se berçait absolument d'aucune illusion. Cela a commencé,
5 bien entendu, avec Prekaz et Jashari, puis ensuite il y avait Racak, par la
6 suite.
7 Q. Est-ce que les services de Sûreté avaient placé sur écoute ou est-ce
8 qu'ils écoutaient les conversations téléphoniques de M. Sainovic ?
9 R. Le service de la Sûreté d'Etat supervisait ou contrôlait toutes les
10 conversations dans la mesure où il pouvait le faire du point de vue
11 technique. Pour ce qui est de M. Minic et de M. Sainovic, étant donné
12 qu'ils avaient tendance à relayer les ordres privés de Milosevic même
13 lorsqu'ils allaient à l'encontre ou lorsqu'ils desservaient les intérêts de
14 la Serbie, ils faisaient l'objet d'opérations de surveillance dans la
15 mesure du possible.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Moi aussi, j'ai quelques questions à
17 poser à ce sujet. Il en est peut-être que vous n'avez pas terminé vos
18 questions ?
19 M. HANNIS : [interprétation] Non, non. Je vous en prie --
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il y a des questions qui s'adressent à
21 vous, Monsieur Hannis. Est-ce que des efforts ont été faits pour identifier
22 ou localiser cette cassette ?
23 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, des efforts ont été
24 faits pour essayer de trouver une cassette, une cassette de cette
25 conversation à partir d'une source différente. Nous n'avons pas pu
26 l'obtenir. Lorsque je parle de source différente, je parle de la source qui
27 est à la base de l'interception, donc il ne s'agit pas de la SDB.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que des efforts ont été faits
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1 pour l'obtenir auprès de la République de la Serbie ?
2 M. HANNIS : [interprétation] Je ne sais pas si des efforts ont été faits
3 pour obtenir cette cassette bien précise, parce que ce n'est que lors de la
4 séance de récolement avec le témoin le week-end dernier qu'il nous a
5 indiqué qu'il avait écouté une cassette, un exemplaire de la cassette qui
6 avait été préparé par le SDB, par opposition à ce que nous croyions, à
7 savoir, nous pensions que c'était le fruit d'une interception.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela suit peut-être ce que vous avez
9 dit. Il y a des informations récentes qui vous ont été communiquées suivant
10 lesquelles des sources occidentales ont des cassettes montrant les
11 instructions qui ont été données par M. Sainovic à M. Lukic.
12 M. HANNIS : [interprétation] Oui. Pour ce qui est de cela, il s'agit
13 d'instructions à M. Lukic.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.
15 M. HANNIS : [interprétation] Oui.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si ces cassettes existent, il faudrait
17 peut-être faire des efforts pour essayer de les récupérer.
18 M. HANNIS : [interprétation] Nous sommes tout à fait conscients de ce qui a
19 été publié par un journal de New York en janvier 1999 à propos d'une
20 conversation interceptée entre M. Sainovic et au moins l'un des autres
21 accusés, mais il ne s'agit pas de M. Lukic, en l'occurrence. Des efforts
22 ont été déployés pour essayer d'abord de voir quelle était la véracité de
23 l'article du journal et pour essayer de voir si la cassette existe, où se
24 trouve-t-elle, mais nous n'avons pas été en mesure de le faire.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, vous avez au moins répondu à
26 la question principale que je me proposais de poser à M. Tanic, mais je
27 vais toutefois lui poser cette question.
28 Où avez-vous eu accès ou comment se fait-il que vous ayez eu accès à cet
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1 enregistrement ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans l'un des bureaux officiels du service de
3 la Sûreté de l'Etat, nous parlions du problème. Ils ont dit : "Ecoutez,
4 vous pouvez entendre vous-même quel est le chaos qui règne là-bas." J'ai
5 entendu une partie de la cassette, pas l'intégralité de la cassette, et ils
6 en avaient un certain nombre. Je dirais, à l'intention de l'Accusation et
7 de la Chambre de première instance, pour vous être utile, que je pense
8 qu'ils ont publié une partie de cette cassette sur la radio B-92, car je
9 sais que quelques mois plus tard, j'ai entendu quelque chose qui me
10 semblait familier. Je me suis dit : "Cela, c'est ce que j'ai déjà entendu."
11 Je savais que tous les problèmes venaient de cette chaîne de commandement
12 parallèle, et ils voulaient attirer l'attention là-dessus.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Limitez-vous aux questions que je vous
14 pose, parce que cela va entraîner ou avoir des répercussions sur d'autres
15 questions. Je vais aborder cela si M. Hannis a épuisé ce thème pour le
16 moment, car il semble supposer qu'il s'agissait d'un enregistrement d'une
17 conversation téléphonique. Est-ce que vous connaissez ou est-ce que vous
18 savez à quoi correspondait cet enregistrement ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, c'est le type d'enregistrement
20 habituel, lorsque des communications sont enregistrées ou sont placées sur
21 écoute. Je ne suis pas un expert technique de ce genre de chose et je suis
22 sûr que je n'ai pas entendu l'intégralité de la casette. Je suis sûr qu'il
23 y a beaucoup plus d'informations dans cet enregistrement, mais cela, je
24 l'ai dit afin d'illustrer mon propos.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais des conversations peuvent
26 être enregistrées dans des conditions différentes. Est-ce que vous savez
27 s'il s'agissait d'une conversation téléphonique ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, tout à fait. Il s'agissait d'une
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1 conversation téléphonique.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourriez-vous peut-être être un peu
3 plus précis pour ce qui est de la teneur de la conversation ? De quoi
4 s'agissait-il ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous savez, c'est difficile parce que cela
6 commençait par une conversation générale, et ils ne m'ont pas fait écouter
7 tout l'enregistrement. D'après la tournure de la conversation, il était
8 évident que Sainovic donnait certaines instructions à M. Lukic et qu'il
9 s'agissait d'enlever des cadavres, puis auparavant, il était question de
10 certaines activités de combat. J'ai été informé par le service qu'il
11 s'agissait d'une conversation entre Sainovic et Lukic. Je ne connaissais
12 pas M. Lukic à ce moment-là, je ne peux pas véritablement vous dire à qui
13 étaient les voix que l'on entendait.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que cela est valable pour les
15 deux voix de la conversation ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, parce que je n'ai qu'une connaissance
17 très superficielle de Sainovic. Je dois dire que cela est valable pour les
18 deux voix. Toutefois, ce qui est essentiel, c'est que cette partie de
19 l'enregistrement a ensuite fait l'objet d'une diffusion publique.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Qu'est-ce qui vous fait conclure que
21 la conversation avait quoi que ce soit à voir avec Racak ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Racak fut mentionné pendant la conversation.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.
24 Monsieur Hannis.
25 M. HANNIS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Nous
26 allons aborder un autre thème.
27 Q. Aux paragraphes 54 à 69. En mars 1999 et plus précisément le 22 et le
28 23 mars, un ou deux jours avant le début des bombardements de l'OTAN, est-
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1 ce que vous savez si Vuk Draskovic a essayé d'empêcher cette campagne
2 aérienne de l'OTAN qui était sur le point d'être déclanchée ?
3 R. Oui.
4 Q. Pourriez-vous, dans un premier temps, dire à l'intention des Juges de
5 la Chambre de première instance qui était Draskovic et quelle était sa
6 fonction à ce moment-là ?
7 R. A ce moment-là, il était le vice-président de la Yougoslavie, et
8 c'était une personnalité extrêmement connue. Ce n'est pas la peine
9 d'aborder les détails, mais à ce moment-là, il était vice-président.
10 Q. Qu'est-ce qu'il essayait de faire ? Quelles étaient ses propositions,
11 et ce, afin d'empêcher le début de la campagne de l'OTAN ?
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Zecevic.
13 M. ZECEVIC : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président. Peut-être
14 que les interprètes pourraient corriger, parce qu'il est écrit maintenant
15 au compte rendu d'audience qu'il était vice-président de la Yougoslavie,
16 alors que le témoin a dit vice-président du gouvernement de la Yougoslavie.
17 Je pense que cela justement correspond à la fonction de vice-premier
18 ministre, donc je pense que c'est la première traduction qui était la
19 bonne. Maintenant, nous avons un problème pour le compte rendu d'audience -
20 -
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie d'être intervenu,
22 mais je pense que cela pourra être corrigé ultérieurement.
23 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, je vous remercie.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maintenant, cela a été consigné au
25 compte rendu d'audience, donc il n'y aura pas de problème.
26 Monsieur Hannis, poursuivez.
27 M. HANNIS : [interprétation]
28 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire quelle était sa proposition et
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1 comment il se proposait d'empêcher la campagne de bombardements de l'OTAN ?
2 R. Il avait la même proposition que Mihajlovic et moi-même, mais nous ne
3 faisions pas partie du gouvernement. Mihajlovic lui a demandé de
4 s'intéresser au problème, mais Vuk Draskovic l'aurait fait de toute façon.
5 En quoi est-ce que cela consistait ? Nous savions que l'OTAN était prête à
6 intervenir en Yougoslavie sous les auspices des Nations Unies et du Conseil
7 de sécurité, étant donné que Milosevic était en train de leurrer la
8 population en Yougoslavie en disant que l'OTAN voulait intervenir en
9 Yougoslavie au nom de l'OTAN. Vuk Draskovic en a parlé avec Mihajlovic et
10 moi-même.
11 Il a préparé une proposition que son groupe de députés a présentée.
12 Il s'agissait d'accepter la présence des unités de l'OTAN, mais sous les
13 drapeaux des Nations Unies et avec un mandat des Nations Unies. Il fallait
14 ainsi signer la solution politique que j'ai mentionnée tant de fois, qui
15 d'ailleurs existait depuis tant d'années et que finalement Milosevic a fini
16 par accepter avec Holbrooke, d'ailleurs. Il s'agissait de présenter tout
17 cela à la session de l'assemblée qui fut une session décisive, et ce, avant
18 que ne se produise l'intervention de l'OTAN. Il y a eu toute une kyrielle
19 de réunions, des réunions avec Vuk Draskovic, avec d'autres personnes
20 également, et il en a parlé avec Milosevic. Milosevic a ajouté de sa propre
21 initiative que la souveraineté de la République fédérale de la Yougoslavie
22 devrait être respectée. Il était question de sécession, donc cela était
23 censé être adopté par l'assemblée. Holbrooke attendait à Belgrade la
24 décision de l'assemblée afin de voir s'il rentrerait à Washington armé de
25 la décision de la Serbie pour la paix ou armé de la décision du régime de
26 Milosevic en faveur de la guerre. Il faut savoir que Vuk Draskovic a
27 déployé des efforts énormes pour empêcher le conflit, mais je ne témoigne
28 pas en son nom. Toujours est-il que voilà, voilà quelle était la teneur de
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1 cela.
2 Q. Vous avez indiqué que M. Milosevic a apporté une modification à la
3 proposition de M. Draskovic, et il a ajouté une phrase qui portait sur le
4 respect de la souveraineté de la Yougoslavie et de la Serbie. Est-ce que ce
5 fut le seul changement qu'il a apporté à ce moment-là ?
6 R. Oui, ce fut le seul changement, car Milosevic a fait comme si tout
7 était bien. Il a même promis, d'ailleurs, d'émettre des instructions pour
8 que cela soit adopté à la séance de l'assemblée,et nous sommes tous rentrés
9 chez nous fort contents en pensant qu'il n'y allait pas y avoir de guerre,
10 mais le lendemain, les choses ont pris une autre tournure.
11 Q. La proposition préconisée par M. Draskovic envisageait la possibilité
12 de la présence des troupes des Nations Unies qui auraient ainsi, en quelque
13 sorte, supervisé la situation; est-ce bien cela ?
14 R. Oui. Oui, avec le mandat du Conseil de sécurité et au nom des Nations
15 Unies, ils auraient fait office de force de séparation, et d'ailleurs, ils
16 auraient même coordonné leurs efforts avec le Corps de Pristina, pour
17 conserver le Corps de Pristina là. Voilà.
18 M. HANNIS : [interprétation] Est-ce que nous pouvons maintenant afficher la
19 pièce à conviction P2483 et mettre les deux versions en parallèle ? Ce sera
20 très utile.
21 Q. Est-ce que vous avez vu ce document à ce moment-là, Monsieur Tanic ?
22 R. Oui, bien sûr. J'ai même participé à la rédaction de ce document. Ce
23 n'est pas moi qui étais l'auteur principal du document; c'étaient Draskovic
24 et Mihajlovic.
25 M. HANNIS : [interprétation] Est-ce que nous pouvons prendre la deuxième
26 page de la version en B/C/S, je vous prie ?
27 Q. Il s'agit d'un exemplaire qui a été dactylographié à partir du document
28 d'origine, où il y a eu des modifications apportées à la main; c'est cela ?
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1 R. Est-ce que je pourrais voir également la première page, je vous prie ?
2 Oui, oui. Cela m'a maintenant rafraîchi la mémoire et je peux maintenant
3 préciser ce qu'a ajouté Milosevic de sa propre main.
4 Q. Je pense qu'il faudrait que nous vous montrions une autre pièce à
5 conviction, la pièce P710, parce que je crois comprendre, d'après votre
6 déclaration, qu'il y avait une version dactylographiée qui a été établie à
7 partir de la télécopie d'origine parce qu'elle n'était pas tout à fait
8 lisible.
9 R. Oui, oui.
10 Q. Et si --
11 R. Sur la proposition de Rambouillet avec certaines corrections qui ont
12 été apportées, et Milosevic a ajouté une référence au respect, à la
13 souveraineté, à l'intégrité de la République fédérale de la Yougoslavie;
14 les soldats étrangers devraient être placés sous les drapeaux des Nations
15 Unies. Milosevic a adopté cela parce que nous faisions également partie des
16 troupes des Nations Unies, à savoir l'armée yougoslave. Il n'y aurait qu'un
17 obstacle à ce que cela se passe sur le territoire de la RFY.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que cela signifie qu'il s'agit
19 d'un document différent, lorsque vous dites il s'agit de la proposition de
20 Rambouillet ?
21 M. HANNIS : [interprétation]
22 Q. Est-ce que vous pourriez nous expliquer cela, Monsieur Tanic ?
23 R. Non. Ce n'est pas un document différent. Je viens juste de rappeler les
24 éléments essentiels du document, mais cela préconisait la signature de
25 l'accord de Rambouillet ainsi que la présence de troupes étrangères placées
26 sous le drapeau des Nations Unies avec un mandat du Conseil de sécurité.
27 C'est la présence des soldats étrangers qui posait problème. L'accord
28 politique lui-même n'était pas un problème ou, en tout cas, pas un problème
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1 essentiel.
2 C'est la modalité, les modalités d'application qui posaient problème.
3 Plus tard, lorsque cette formule a été trouvée, lorsqu'on a établi le lien
4 avec les Nations Unies, je pense qu'il y a eu un accord oral, d'après ce
5 que je sais en tout cas. Cela n'a pas été consigné par écrit, c'était tout
6 simplement une proposition suivant laquelle l'accord de Rambouillet devait
7 être signé, qu'il fallait supprimer les dispositions qui auraient miné la
8 souveraineté de la RSFY pour que les soldats étrangers arrivent sous les
9 auspices des Nations Unies et avec le drapeau des Nations Unies.
10 M. HANNIS : [interprétation] Si vous pouvez passer au bas des deux pages.
11 Q. Vous avez le paragraphe 6 où il est fait référence au fait que ce
12 projet d'accord a été proposé par M. Draskovic le 22 mars, indiquant que
13 les Serbes étaient tout à fait disposés à signer le projet d'accord qui
14 avait été établi à Rambouillet, mais que cela n'a jamais été signé; est-ce
15 que cela est exact ?
16 R. Premièrement, il ne s'agissait pas de la proposition de Vuk Draskovic,
17 c'était une proposition qui émanait de tous les dirigeants politiques de la
18 Serbie qui étaient pour la paix. Vuk Draskovic était le vice-premier
19 ministre de la RFY, et en tant que tel, il a eu le courage de le consigner
20 dans un document plutôt que de présenter cela comme une suggestion
21 individuelle. Il y avait beaucoup de personnes qui se sont ralliées à cette
22 proposition. Pour ce qui est de la deuxième partie de votre question, je
23 répondrai par l'affirmative en disant qu'effectivement, l'intention était
24 de signer l'accord de Rambouillet à condition que la disposition relative à
25 la troisième république soit supprimée. Cela ne faisait pas partie des
26 exigences à Rambouillet. Il faut savoir que la pomme de discorde portait
27 sur l'arrivée des soldats étrangers qui étaient censés faire partie de
28 l'accord de paix.
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1 M. HANNIS : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer à la page 2 des
2 versions anglaise et B/C/S, s'il vous plaît ?
3 Q. A la page 2 de la version en B/C/S --
4 M. HANNIS : [interprétation] Je souhaiterais que l'on affiche le haut du
5 document.
6 Q. Est-ce que vous pourriez nous indiquer où M. Milosevic a posé son
7 amendement manuscrit ? Est-ce que vous pourriez nous dire ce qui est dit
8 par cet amendement ?
9 R. Cela suit la phrase où il est question du Conseil de sécurité dans le
10 cadre d'un accord politique et cela inclut la garantie de l'accord, et il
11 est dit : en respectant la souveraineté de la Serbie et de la République
12 fédérale de la Yougoslavie. C'est l'écriture de Milosevic que nous avons
13 là.
14 Q. Merci. Que s'est-il passé le lendemain ? Est-ce que la proposition a
15 été acceptée ?
16 R. Comme vous pouvez le voir, il s'agit d'un projet de conclusion.
17 Milosevic avait promis que cela serait accepté, mais le lendemain, la
18 situation a pris une tournure tout à fait différente. Il faut savoir que
19 M. Milutinovic avait essayé de convaincre l'assemblée, ou plutôt, il a
20 indiqué à l'assemblée que l'accord politique n'était pas un problème, que
21 nous pourrions avoir un accord politique. Pour la première fois après tant
22 d'années, nous avons pu entendre que cela était possible, que l'on pourrait
23 avoir un accord politique positif au Kosovo --
24 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Ce qui est dit à l'assemblée, c'est une
25 question publique. Ce n'est pas la peine de poser des questions afin que
26 l'on demande des interprétations et qu'on demande de déchiffrer cela. C'est
27 un discours public qui fut prononcé, que vous pouvez tout à fait lire comme
28 tout le monde. Ce témoin n'est pas compétent pour faire des interprétations
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1 à propos de propos tenus par d'autres, et certainement pas ici dans ce
2 prétoire.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous pensez qu'il essayé de
4 fournir une opinion à propos de ses propos ? Je pense qu'il s'était écarté
5 de cela. D'ailleurs, Maître O'Sullivan, il est tout aussi vrai que vous
6 pouvez attirer son attention sur ces propos exacts si vous pensez qu'il n'a
7 pas pris cela en considération. En principe, vous avez raison, mais je ne
8 sais pas. Si jamais il faisait des efforts pour essayer en quelque sorte de
9 glorifier ce qui a été dit sans que cela soit fondé, nous interviendrons.
10 Je ne pense pas que cela se passe maintenant. Je n'accepte pas votre
11 objection.
12 Monsieur Hannis.
13 M. HANNIS : [interprétation]
14 Q. Monsieur Tanic, est-ce que vous aviez terminé ?
15 R. Oui, alors juste pour me remémorer ce que j'étais en train de dire,
16 j'étais en train de dire que l'accord politique n'était pas un problème, et
17 Milutinovic a indiqué que les troupes de l'OTAN insistaient et souhaitaient
18 pénétrer sur le territoire de la Serbie et du Kosovo seulement sous les
19 auspices des Nations Unies et en tenant compte d'un mandat des Nations
20 Unies. Cela n'était pas exact, car M. Milutinovic n'a tout simplement pas
21 dit la vérité. Pour la première fois, il a reconnu que l'accord politique
22 n'était pas un problème, et Milosevic était assez contrarié après, mais
23 ensuite il a repris avec la partie de la fin en essayant de divulguer des
24 informations erronées. Il a mentionné l'ultimatum et il n'a pas mentionné
25 le fait que le Corps de Pristina pourrait être autorisé à rester et à
26 coopérer avec les soldats des Nations Unies, et ce, afin de mettre en
27 vigueur ou de faire en sorte qu'il y ait la paix.
28 Puis, il a présenté cela comme un ultimatum militaire, la proposition a été
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1 rejetée, Holbrooke est reparti avec la décision de la Serbie qui était une
2 décision de guerre. Cela s'est basé sur une interprétation erronée et des
3 informations erronées. M. Milutinovic a participé à tout cela, parce qu'il
4 n'était pas exact que l'OTAN insistait pour avoir son propre drapeau et son
5 propre mandat. Il avait toujours été question du mandat du Conseil de
6 sécurité, du drapeau des Nations Unies et du Corps de Pristina qui auraient
7 eu l'autorisation de rester au Kosovo sur le terrain.
8 Q. Je vais vous interrompre et je vais passer à ce qui a suivi le début de
9 la campagne de l'OTAN. Après ce début de campagne, est-ce que vous-même,
10 est-ce que vous avez fait des efforts personnels pour essayer de parvenir à
11 un accord de paix et pour faire en sorte d'arrêter les bombardements; oui
12 ou non ?
13 R. Oui.
14 Q. Est-ce que vous pouvez dire à la Chambre ce que vous avez fait à ce
15 sujet ? Est-ce que vous avez eu l'autorisation de vous déplacer en dehors
16 de la Serbie pour pouvoir véritablement essayer de lancer ou d'amorcer ce
17 processus ?
18 R. Il ne faut pas oublier tous les contacts fort nombreux que j'avais eus
19 avec eux. Il faut savoir que M. Mihajlovic ainsi que la SDB étaient
20 extrêmement intéressés, car ils voulaient trouver une solution pacifique
21 pour mettre un terme à la guerre. Ils m'ont donc donné la possibilité de
22 quitter le pays, bien que cela ne soit pas autorisé à ce moment-là. Je dois
23 dire que c'est l'un de leurs fonctionnaires qui m'a permis de sortir du
24 pays, et on m'a donné un mandat, le service de Sûreté m'a octroyé un mandat
25 pour que grâce à mes contacts personnels avec l'ouest, j'essaie de mettre
26 un terme à la tragédie qui était une véritable tragédie pour notre peuple.
27 Par la suite, j'ai appris qu'une autre personne a été envoyée sur le
28 terrain avec la même mission. Si vous voulez que je vous dise exactement ce
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1 que j'ai fait, je dois vous dire que ma réponse sera plutôt longue. Bien
2 entendu, les services de Sûreté m'ont donné ce mandat avec l'aval de
3 Milosevic, parce que sinon, cela aurait été hors de question.
4 Q. Je vais vous poser cette question. Vous avez commencé votre réponse en
5 faisant référence à vos nombreux contacts et vous faisiez référence aux
6 contacts que vous aviez eus avec les services de Sûreté étrangers ou les
7 gouvernements occidentaux ?
8 R. Les gouvernements occidentaux, oui, et les services de Sûreté
9 occidentaux, et je travaillais activement sur le dossier du Kosovo, et ce,
10 depuis quatre ou cinq ans. Chacun le savait, chacun savait que j'étais un
11 personnage crédible dans le cadre des discussions, tant chez nous qu'à
12 l'étranger. Pour être plus précis, trois gouvernements occidentaux étaient
13 associés, et un service de Sûreté occidental l'était également, un service
14 de Renseignements.
15 M. HANNIS : [interprétation] Je demanderais à ce que l'on passe au
16 paragraphe 121, ceci a trait aux paragraphes 121 à 127 de sa déclaration
17 écrite.
18 Q. Suite à cela, est-ce que vous avez eu la possibilité, puisque vous
19 étiez engagé dans ce processus, de recevoir des propositions ou des ordres
20 dont vous auriez pu vous faire le relais en Serbie et que vous auriez pu
21 remettre à M. Milosevic ?
22 R. Oui. Deux sources occidentales très crédibles m'en ont apporté la
23 confirmation. J'ai reçu des propositions très précises, très précisément
24 définies, visant à mettre fin à la guerre, même si tout cela se faisait
25 dans le plus grand secret. Par la suite, M. Lilic a reçu de même, et je
26 peux décrire ces propositions de façon détaillée. Il s'agissait de
27 propositions occidentales dans lesquelles il est indiqué que l'OTAN ne
28 mettrait pas fin à ses attaques, mais il y est proposé une suspension
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1 progressive des attaque accompagnée simultanément d'un retrait de nos
2 forces du Kosovo. Il n'était pas prévu que le Corps de Pristina reste sur
3 le terrain. L'assemblée était la dernière possibilité offerte de rester au
4 Kosovo, donc nos troupes devaient simultanément se retirer du Kosovo,
5 simultanément avec la suspension et l'interruption des bombardements par
6 l'OTAN.
7 La période initiale devait se monter à 24 heures, et s'il y avait respect
8 des conditions, elle allait être prolongée de 24 heures de plus, puis de 48
9 heures, et ainsi de suite jusqu'à ce qu'il y ait cessation complète. L'on a
10 envisagé une diminution de la fréquence des bombardements, et il ne
11 s'agissait pas d'y mettre fin complètement. Grâce aux accords d'Holbrooke
12 dont tout le monde se souvient, on pouvait mettre en place tout cela dès
13 que les bombes ont commencé à tomber sur le pays. Cela incluait différents
14 pays, les Etats-Unis, l'Allemagne, l'Italie, et cetera, et plus
15 particulièrement le G8 était associé à cela. Cela aurait eu pour
16 conséquence la fin du conflit. Nous sommes au mois de mars, fin mars, début
17 avril. J'en suis certain, parce que mon anniversaire est au début du mois
18 d'avril.
19 Q. Vous dites que le message a été relayé à M. Milosevic. De quelle façon
20 ce message a-t-il été relayé ? Est-ce que vous l'avez fait vous-même ou par
21 le truchement d'un tiers ?
22 R. C'est là deux sources des plus élevées à l'ouest qui me l'ont indiqué.
23 Par les services de Sûreté officiels de l'Etat, j'ai relayé cette
24 information qui a été relayée ensuite à M. Milosevic. Puis, je me suis
25 rendu compte par la suite qu'au même moment, il avait présenté la même
26 proposition via Lilic par les canaux allemand et autrichien, et à l'époque,
27 j'ai informé Mihajlovic qui lui aussi a relayé le message à Milosevic. Je
28 l'ai relayé à Milutinovic, et ainsi de suite.
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1 Dans ce cas-là, quoi qu'il en soit, Milosevic savait très bien quelle était
2 ma mission, il était au courant, sinon il ne m'aurait pas laissé quitter le
3 pays et m'entretenir avec des acteurs de l'étranger. Ces personnages
4 étrangers ne se seraient pas entretenus avec nous, avec moi, pardon, sans
5 que Milosevic ne soit d'accord. C'était quelque chose qui se faisait dans
6 le plus grand secret, à l'époque. Cela ne relevait certainement pas de la
7 sphère publique. Puis, lorsque j'ai expliqué cela au TPIY, cela s'est fait
8 également dans le plus grand secret. En 1999, à la fin du mois de mars,
9 l'OTAN était prêt à mettre fin à ses attaques.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Au compte rendu, la traduction nous
11 dit que vous avez fait passer le message, relayé le message par le
12 truchement des canaux et des services de Sûreté à Milosevic. "Ensuite, je
13 me suis aperçu que dans le même temps, il offrait la même proposition via
14 Lilic par les canaux allemand et autrichien." Est-ce que c'est bien ce que
15 vous avez dit ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'a pas offert la même proposition, il a
17 reçu la même proposition.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
19 M. HANNIS : [interprétation]
20 Q. Savez-vous quelle a été la réponse de M. Milosevic à cette offre que
21 vous avez relayée par le truchement des canaux de la Sûreté d'Etat et à
22 cette même offre qu'il aurait reçue de la part de M. Lilic ? Est-ce que
23 vous savez quelle a été sa réponse à l'offre ?
24 R. Oui, absolument. Dans mon cas, il a dit : "Reporte à plus tard, reporte
25 à plus tard. Vérifie à nouveau. Vois si ce sont des mensonges." C'était
26 parfaitement irrationnel comme réponse. Puis, ensuite, j'ai entendu dire
27 que Lilic s'est retrouvé dans très exactement la même situation même s'il
28 était beaucoup plus proche de Milosevic. Encore une fois, je suis retourné
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1 à l'étranger plus tard, et là, la réponse était négative. Milosevic
2 n'entendait pas accepter la proposition, mais plutôt optait pour une
3 prolongation de la guerre.
4 Q. De ce point de vue-là, là il s'agit des paragraphes 108 à 117 et 118,
5 au cours de cette campagne de bombardements de l'OTAN, est-ce que vous avez
6 eu l'occasion d'avoir des entretiens personnels avec Milosevic à propos des
7 bombardements et à propos des victimes civiles serbes ?
8 R. J'ai eu un bref entretien. Je peux difficilement vous fournir des
9 informations spécifiques et détaillées, mais je me souviens qu'il avait dit
10 qu'il fallait des victimes civiles pour justifier tout cela. Il est mort,
11 maintenant, mais d'autres étaient présents, responsables des services de la
12 Sûreté de l'Etat, et c'est à ce Tribunal qu'il appartiendra de vérifier la
13 véracité des mes propos. Mais Milosevic, quoi qu'il en soit, a simplement
14 dit qu'il fallait bien qu'il y ait des victimes civiles parmi la population
15 serbe si l'on voulait justifier tout cela.
16 Il était parfaitement incapable d'accepter la proposition de paix ou
17 de trêve de l'OTAN, et l'OTAN s'est vu offrir la possibilité de lui tendre
18 la main pendant la guerre et après la guerre aussi. C'est une épouvantable
19 tragédie qui a eu lieu pour la population, du fait de Milosevic et des ses
20 amis, et c'était certainement une tragédie sans nom pour les victimes
21 albanaises du Kosovo. Les deux peuples souffriront longtemps, à l'avenir.
22 Q. En suivi, vous avez dit : il faudrait bien qu'il y ait des
23 victimes civiles parmi les Serbes pour justifier tout cela. Qu'est-ce qu'il
24 entendait par là, selon vous ? Est-ce que vous pouvez l'expliquer ? Est-ce
25 que lui-même a expliqué ce qu'il entendait par là ? Parce que je n'en
26 comprends pas le sens. Comment cela justifiera tout cela, selon vous ?
27 R. Il s'agissait de montrer que le pacte de l'OTAN, ce sont des criminels,
28 des animaux. Il avait la liste des cibles de l'OTAN. Il aurait pu évacuer
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1 les civils, et pourtant il ne l'a pas fait. Il savait très bien que la
2 radiotélévision serbe serait une cible trois ou quatre jours avant le
3 bombardement. Je le lui ai dit moi-même comme d'autres le lui ont dit, mais
4 il n'a pas procédé à l'évacuation du personnel. Bien au contraire, il a
5 retiré tout le mobilier du bâtiment dont était la propriétaire sa fille. Il
6 a simplement permis qu'il y ait des victimes serbes et il voulait qu'il
7 brosse un portrait indiquant que c'est bien l'OTAN qui est l'agresseur.
8 M. FILA : [interprétation] C'est la même chose, c'est toujours la même
9 chose. On parle, on parle, une histoire, une autre histoire. Je ne
10 comprends pas. De quels meubles, de quel mobilier parle-t-on ? Ce n'est pas
11 une réponse à la question qui a été posée. Je ne pense pas qu'il faudrait
12 poursuivre.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agissait simplement d'illustrer mes
14 propos.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tanic, une décision doit être
16 prise quant à l'objection qui a été formulée. Je crois que cela fait partie
17 du problème, le fait qu'il y ait eu une omission, et si j'ai bien compris,
18 il s'agit là de la question la plus pertinente en la matière.
19 Vous avez dit, Monsieur Tanic, il savait -- vous avez dit puisqu'il
20 savait à propos de la radiotélévision serbe deux ou trois jours avant que
21 la radiotélévision serbe soit bombardée. Je pense que ce que vous vouliez
22 dire très exactement, c'est qu'il savait que les bâtiments de la
23 radiotélévision serbe allaient être bombardés; est-ce exact ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact. Il le savait quatre jours
25 avant.
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Puis, ensuite, vous avez poursuivi en
27 indiquant que vous-même vous avez joué un rôle. Pourriez-vous répéter, s'il
28 vous plaît ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Quatre jours avant le bombardement prévu de la
2 radiotélévision serbe, j'étais moi-même à l'étranger, et des amis m'ont dit
3 - nous avions de nombreux amis à l'étranger qui pouvaient faire une
4 distinction entre la Serbie d'une part et le régime de Milosevic de l'autre
5 - on m'a dit, dans le cadre d'un entretien téléphonique sécurisé -- enfin,
6 d'abord, on m'a dit que cela allait se passer, et ensuite, dans un
7 entretien téléphonique sur une ligne sécurisée, je me suis fait le relais
8 de cette information à Belgrade. Ensuite, j'ai appris que d'autres sources
9 s'étaient faites le relais de cette information-là. La radiotélévision
10 serbe n'a pas été évacuée --
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Fila, cette déclaration du
12 témoin à propos de son association directe dans une chaîne d'événements
13 dont il prétend qu'ils ont conduit ensuite à l'évacuation du bâtiment avant
14 qu'il ne soit bombardé, cela me semble être parfaitement pertinent et cela
15 me semble être une question dont il a des connaissances à titre personnel.
16 Il ne s'agit pas simplement d'informations semblables aux informations
17 contre lesquelles vous avez formulé une objection précédemment.
18 M. FILA : [interprétation] Monsieur le Président, Mesdames, Monsieur
19 les Juges, je n'essaie pas de faire une distinction entre les éléments
20 importants et non importants. Je dis simplement la chose suivante : le
21 témoin doit répondre aux questions de M. Hannis. Or, M. Hannis aurait
22 certainement fini par poser la question, mais le témoin continue et
23 continue sans interruption. Puis, ensuite, nous avons les questions de
24 compte rendu, il y a le secret militaire, le secret d'Etat, quelqu'un lui
25 dit quelque chose, on ne sait pas qui c'est. Qu'est-ce qu'il a à voir avec
26 le secret d'Etat ? Cela, c'est quelque chose qui est l'affaire des
27 fonctionnaires publics. Pourquoi est-ce qu'il ne peut pas révéler la source
28 si c'était un secret d'Etat ? L'objection que je formule, elle est à
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1 l'encontre de la façon dont il formule ses réponses.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous prenons bonne note de vos
3 remarques. M. Hannis sait très bien que des informations dont on ne
4 communique pas le nom de l'auteur ne peuvent avoir aucune influence sur
5 l'opinion que se fera la Chambre et des détails supplémentaires qui lui
6 semblent être d'importance non plus.
7 M. Tanic, ce serait utile et cela restera utile pour nous si vous
8 pouviez vous limiter dans vos réponses à une réponse directe à la question
9 posée. Plus votre réponse sera spécifique, plus elle sera utile pour cette
10 Chambre.
11 M. HANNIS : [interprétation]
12 Q. Outre la radiotélévision serbe et les événements que vous avez
13 évoqués, les services de Sûreté SDB ont-ils également reçu des informations
14 ayant trait à d'autres cibles à venir des bombardements de l'OTAN ? Une
15 réponse très simple : oui ou non.
16 R. Oui.
17 Q. Ont-ils répercuté cette information et l'ont-ils relayée auprès de
18 Milosevic ?
19 R. Il m'est difficile d'imaginer qu'ils aient pu ne pas le faire. Je n'ai
20 rien vu. Je n'ai pas vu d'informations être remises ou relayées directement
21 auprès de M. Milosevic, mais j'ai du mal à imaginer que cette information
22 ne lui soit pas parvenue.
23 Q. Ils étaient tenus de relayer cette information, n'est-ce pas ?
24 R. Absolument, ils y étaient tenus. Il y a encore beaucoup de gens très
25 honnêtes qui travaillent encore là, notamment après l'élimination de
26 Stanisic, et même chose pour l'armée.
27 Q. Je souhaiterais passer au paragraphe 123 de votre déclaration écrite, à
28 présent. Avez-vous eu connaissance d'un effort qui aurait été fait à la fin
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1 du mois de mars ou au début du mois d'avril en 1999, effort déployé par le
2 Vatican et visant à aider à apporter une solution aux hostilités ?
3 R. Oui, j'en ai eu connaissance. J'ai été moi-même associé aux discussions
4 avec eux ainsi qu'avec le ministère des Affaires étrangères du Vatican, qui
5 a adressé le même message de paix à Milosevic, le cardinal Sodano.
6 Q. Est-ce que cette proposition contenait un cessez-le-feu ou un cessez-
7 le-feu provisoire, dans son texte ?
8 R. Oui, un cessez-le-feu unilatéral et le début du retrait de nos forces.
9 Par ailleurs, la fréquence des bombardements devait être revue à la baisse.
10 Le cessez-le-feu unilatéral devait intervenir au cours de la période
11 pascale catholique.
12 Q. Lorsque vous parlez d'un "cessez-le-feu unilatéral", oui, mais de quel
13 côté ? Quel était le côté qui devait cesser le feu ?
14 R. Notre côté, le côté yougoslave. Il s'agissait de mettre fin à toute
15 activité de combat, et l'on était censé commencer le retrait, tandis que
16 dans l'intervalle, l'OTAN devait mettre fin aux bombardements de manière à
17 permettre de créer des conditions préalables à l'entrée de la KFOR et de
18 ses troupes qui étaient déjà amassées aux frontières. Je souhaiterais tout
19 de même signaler à ce stade-ci que je n'ai rien lu à propos de tout cela
20 avant de venir au Tribunal à La Haye; par conséquent, le seul moyen que
21 j'avais de le savoir, c'était d'être associé à ces événements. Je
22 souhaiterais demander au conseil de la Défense de ne pas m'insulter
23 davantage en disant que les choses dont je me fais l'écho ici, je les ai
24 lues dans la presse.
25 Q. Monsieur Tanic, permettez-moi de vous poser quelques questions à propos
26 de ce qui était censé se produire au cours de la Pâques catholique. Est-ce
27 que vous savez si M. Milosevic avait accepté au départ cette proposition
28 visant à mettre en œuvre un cessez-le-feu devant commencer au cours de la
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1 Pâques catholique ?
2 R. Oui. Il aurait promis n'importe quoi, mais il n'a jamais rien fait.
3 Q. Est-ce que ce cessez-le-feu a eu lieu au cours de la Pâques catholique;
4 oui ou non ?
5 R. Non.
6 Q. Lorsque ce cessez-le-feu n'est pas intervenu, est-ce que vous avez
7 vous-même essayé d'apprendre pourquoi ce cessez-le-feu n'a pas été mis en
8 œuvre ce jour-là ?
9 R. Bien entendu, le président de mon parti, Mihajlovic et d'autres. Puis,
10 je souhaiterais dire quelque chose à propos de ma dernière réponse. Des
11 offres avaient été faites visant à libérer des soldats capturés. Cela
12 faisait partie de la proposition. Nous avons fait tout effort nécessaire,
13 Draskovic, Lilic et d'autres nombreux ont fait des efforts.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous parlez de prisonniers capturés; à
15 qui faites-vous référence ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il y avait deux ou trois pilotes
17 américains capturés à l'époque. Je souhaitais simplement préciser un petit
18 peu les choses parce qu'on pourrait voir apparaître une version écrite de
19 ceci demain, et on dira : "Vous voyez, Monsieur Tanic, il n'y connaît
20 rien."
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.
22 M. HANNIS : [interprétation] Merci.
23 Q. Qui avez-vous contacté pour essayer de savoir pourquoi le cessez-le-feu
24 n'avait pas été mis en œuvre à la Pâques catholique, comme vous aviez pensé
25 que cela allait être le cas ?
26 R. Le service de Sûreté, Milosevic lui-même; Mihajlovic a contacté
27 Milutinovic, et je suppose qu'il a contacté Milosevic également. Vous
28 pourriez peut-être vous-même rafraîchir ma mémoire, parce qu'à l'époque
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1 j'essayais de sauver ma propre peau. C'était un jeu risqué que je jouais.
2 Il était risqué pour moi ainsi que pour beaucoup d'autres. Peut-être
3 pourrait-on m'autoriser à relire ma déclaration écrite.
4 Q. Avant d'en arriver là, permettez-moi de vous poser une question
5 supplémentaire : M. Mihajlovic a-t-il participé aux entretiens avec qui que
6 ce soit quant aux raisons pour lesquelles les choses ne se sont pas faites
7 tel que cela avait été proposé ?
8 R. Bien, nous avons téléphoné à Milutinovic du cabinet, mais ce n'était
9 pas facile. On ne pouvait pas parler normalement au téléphone. Ensuite, il
10 y a eu la conversation avec Milutinovic quant aux raisons pour lesquelles
11 le cessez-le-feu n'avait pas été mis en œuvre. Milutinovic a répondu qu'il
12 y avait encore des questions en suspens là-bas au Kosovo et qu'il faudrait
13 attendre la Pâques orthodoxe. Selon moi, nous n'avions rien à faire là-bas,
14 si ce n'est commettre d'autres crimes, éliminer d'autres traces, tuer
15 d'autres personnes sans aucune raison parce qu'il y avait des bombardements
16 intenses à l'époque et on ne pouvait rien faire d'un point de vue
17 militaire, bien entendu.
18 Q. Est-ce qu'il s'agissait d'un entretien de visu ou bien est-ce qu'il
19 s'agissait d'un entretien téléphonique ?
20 R. Par des moyens de communication. Je vous l'avais dit, Milutinovic était
21 au poste de commandement. Je ne sais pas si Mihajlovic et Milutinovic ont
22 eu l'occasion de se rencontrer par la suite. Mihajlovic m'a dit qu'il avait
23 des choses à dire. Il avait dit qu'il avait eu des entretiens de visu, mais
24 je n'y étais pas présent. Je ne pouvais pas y être présent. Mihajlovic m'a
25 confirmé bien entendu qu'il avait eu d'autres réunions, mais je ne vais pas
26 essayer de vous dire des choses qui ne sont jamais que du ouï-dire, ici.
27 Pour autant que je le sache, M. Milutinovic était à un poste de
28 commandement, et nous, membres du cabinet, avions du mal à le retrouver.
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1 Draskovic essayait de trouver Bulatovic tandis que la situation était
2 véritablement chaotique, mais cela, vous pouvez bien l'imaginer.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Voilà qui soulève un certain nombre de
4 questions également pour moi.
5 M. HANNIS : [interprétation] Je ne suis pas sûr --
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si vous entendez poursuivre, veillez à
7 ce que --
8 M. HANNIS : [interprétation]
9 Q. Je ne comprends pas votre réponse. Vous évoquez la réponse de
10 Milutinovic qui indique qu'il y avait encore des questions en suspens ou
11 des choses non réglées là-bas, en bas. C'était une question à propos de M.
12 Milutinovic. Mais tout d'abord, qui a participé à cet entretien avec M.
13 Milutinovic ?
14 R. Mihajlovic, et j'ai eu l'occasion d'écouter par des moyens de
15 communication.
16 Q. Ces moyens de communication, quels étaient-ils ? Un téléphone, une
17 radio ?
18 R. C'était une ligne téléphonique spéciale. Je ne suis pas un expert en
19 technologie, mais c'est le souvenir que j'en ai gardé.
20 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, vous souhaitiez
21 intervenir à propos d'autre chose ?
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. On a fait référence au cabinet.
23 Vous avez indiqué la chose suivante : "Nous, au cabinet, nous avions du mal
24 à le trouver." Qu'entendez-vous par cabinet, lorsque vous y faites
25 référence ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Le bureau de Mihajlovic.
27 L'INTERPRÈTE : Les interprètes font noter que "cabinet" et "bureau" se
28 traduisent de la même façon en B/C/S.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais membre également du bureau --
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. On aurait pu avoir l'impression
3 qu'il avait encore un poste gouvernemental, mais à ce moment-là, Mihajlovic
4 n'est plus membre du gouvernement. Merci.
5 M. HANNIS : [interprétation] Merci.
6 Je vous propose de passer au paragraphe 143.
7 Q. Monsieur Tanic, du fait de votre relation avec les services de Sûreté
8 SDB, est-ce que vous avez eu connaissance du fait que M. Milosevic avait
9 quelque contrôle que ce soit sur les services de Sécurité, de Sûreté de
10 l'Etat ?
11 R. Il avait un contrôle complet, tant à l'époque de M. Stanisic qu'à
12 l'époque de M. Rade Markovic, mais c'étaient deux services différents.
13 Lorsque M. Rade Markovic en est devenu le chef, ce n'était plus le même
14 service de Sûreté que cela l'était à l'époque de M. Stanisic. Mais dans les
15 deux cas, M. Milosevic exerçait un contrôle complet.
16 Q. Comment le savez-vous ?
17 R. Excusez-moi, mais je ne comprends pas votre question, maintenant. Nous
18 nous connaissions depuis de si nombreuses années. Est-ce que vous souhaitez
19 un moyen de preuve spécifique ?
20 Q. Je vais commencer par une question à propos de la chaîne de
21 commandement au sein des services de Sûreté d'Etat. Qui était le chef des
22 services de Sûreté d'Etat en 1998 ? Vous nous l'avez dit précédemment.
23 R. Oui. Oui, c'est vrai, je vous l'ai dit. Après que M. Stanisic eut été
24 remplacé, ce fut M. Radomir Markovic qui devint chef de ces services. Il
25 était l'homme des services de Sécurité publique qui n'avait jamais
26 travaillé dans le domaine du renseignement, puis Uros Suvakovic, un des
27 idéologues du SDS qui ne connaissait strictement rien à quoi que ce soit en
28 matière de travail de renseignements, et il était l'homme principal en
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1 charge du service. Uros Suvakovic, tel était son nom.
2 Q. Qui était le supérieur hiérarchique ou le patron de M. Markovic et
3 précédemment de M. Stanisic ? S'agissait-il du ministre de l'Intérieur ?
4 R. Théoriquement, oui, mais dans la pratique en Serbie, cela n'était
5 jamais respecté. Formellement, juridiquement aussi, absolument, Vlajko
6 Stojiljkovic était son supérieur hiérarchique, mais on peut difficilement
7 imaginer Stanisic ou Markovic respecter quelque instruction que ce soit
8 venant de sa part. Dans les faits, Milosevic, c'est lui qui était le
9 supérieur hiérarchique, mais juridiquement parlant de jure, c'était
10 effectivement le ministre de la Police ou ministre de l'Intérieur.
11 Q. Savez-vous quel était le poste qu'occupait M. Stojiljkovic avant de
12 devenir ministre de l'Intérieur ?
13 R. Je le connaissais assez bien. Il a avait occupé le poste de président
14 de la chambre de commerce, et en cette qualité, nous avons eu l'occasion de
15 discuter d'un certain nombre de projets économiques. En fait, c'était un
16 homme d'affaires.
17 Q. Dans l'organigramme du gouvernement de Serbie et de Yougoslavie, qui
18 était le patron du ministère de l'Intérieur ? Qui désignait le ministre de
19 l'Intérieur, à supposer que vous le sachiez ?
20 R. Le ministre de l'Intérieur n'est pas élu, il est désigné. Je sais bien
21 qu'il y a une différence entre l'anglais et le serbe, ici, mais en
22 principe, cela devrait être le gouvernement serbe, pour autant que je
23 connaisse le droit. Mais cela n'était jamais respecté, personne n'y
24 accordait beaucoup d'attention, là-bas.
25 Q. Monsieur Tanic, je souhaiterais maintenant que nous passions à l'époque
26 où vous avez quitté la Serbie. Pouvez-vous nous dire très brièvement
27 pourquoi vous avez quitté la Serbie et comment il se fait que soyez devenu
28 témoin protégé vivant dans un autre pays ? Pourriez-vous le dire à la
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1 Chambre de première instance ?
2 R. Tout de suite après la capitulation de Kumanovo, je me suis tout à fait
3 bien rendu compte de ce qui était en train de se passer. J'ai commencé à
4 travailler sur un livre sur le Kosovo qui s'intitulait, "Conflit du Kosovo
5 : Une guerre fabriquée de toutes pièces." C'est ce que j'affirmais parce
6 que j'étais convaincu que Milosevic et ses acolytes avaient tout préparé à
7 l'avance. Mais je voulais, avant d'écrire mon livre, procéder à quelques
8 vérifications parce qu'il fallait que je vérifie tout cela. Je portais des
9 accusations extrêmement graves. A priori, cela pouvait relever du domaine
10 de la science-fiction, mes accusations. Je suis instruit, je suis un
11 intellectuel. Je m'en rendais compte, donc j'ai commencé à avoir des
12 entretiens avec les personnes adaptées qui savaient pour vérifier mes
13 conclusions une deuxième fois, pour ne pas me laisser induire en erreur par
14 la force de la tragédie.
15 J'ai donc commencé à m'entretenir avec des représentants des services
16 de Sécurité. J'ai essayé d'avoir accès aux documents figurant dans les
17 archives concernant les victimes des deux côtés. J'ai demandé à Perisic de
18 voir ce qu'il en était du point de vue militaire de la situation, pour voir
19 si cela correspondait avec mes informations reçues de la part des services
20 de Renseignements et autres. Je suis allé à Rome avec Monseigneur Paglia,
21 il représentait le Groupe de contact. Je voulais vérifier et voir ce que
22 Milosevic lui avait effectivement dit. Entre-temps, il était devenu évêque.
23 Je lui ai expliqué ce que je voulais vérifier, et nous avons parlé. J'ai
24 parlé également avec un certain nombre d'ambassadeurs. Tout de suite après
25 ma dernière conversation avec Perisic, la veille de la tentative
26 d'assassinat de Vuk Draskovic, sur la route principale d'Ibarska, j'ai été
27 enlevé en pleine rue, en plein jour. Je m'étais bien rendu compte qu'on
28 avait bloqué la rue, mais quand je me suis rendu compte, c'était trop tard.
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1 Ils m'ont attrapé. Ils m'ont poussé dans une fourgonnette. Ils m'ont fait
2 une piqûre pour m'endormir. Mon épouse aussi a été enlevée.
3 On s'est rendu compte plus tard que ceux qui avaient fait cela,
4 c'étaient les unités chargées des opérations spéciales, et nous avons été
5 torturés dans une prison privée pendant un jour et demi. Il ne s'agissait
6 pas d'une prison légale. Nous avons été interrogés. On m'a demandé ce que
7 j'étais en train de faire dans le cadre de la préparation de ce livre. On
8 m'a demandé si je me rendais compte de ce que c'était, ce que les
9 Britanniques avaient à faire là-dedans, est-ce que c'est la première fois
10 qu'ils en entendaient parler. On m'a demandé si Perisic voulait préparer un
11 coup d'Etat avec Stanisic. Je me suis retrouvé soumis à des pratiques de
12 torture dignes de ce qui se passe en Amérique du Sud. On voulait savoir si
13 Perisic voulait faire un coup d'Etat avec Stanisic.
14 Comme Curuvija avait été liquidé de la même manière et comme je
15 savais comment il fonctionnait, j'étais sûr qu'ils allaient me tuer.
16 Soudain, on nous a libérés, ma femme et moi. Elle, elle avait été enlevée
17 deux heures après moi, et par la suite, j'ai appris que ceci avait eu lieu
18 peu de temps avant une tentative d'assassinat menée contre Vuk Draskovic
19 sur la route principale d'Ibarska, une tentative d'assassinat qui avait
20 échoué. On était en train de tuer carrément des gens. J'essaie de vous
21 expliquer pourquoi j'ai quitté le pays.
22 M. ACKERMAN : [interprétation] Excusez-moi.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Ackerman.
24 M. ACKERMAN : [interprétation] Le témoin parle beaucoup trop vite pour que
25 les interprètes puissent suivre, j'en suis sûr. Si vous regardez la ligne
26 3, page 64, vous vous rendrez compte qu'il a parlé d'Amérique latine,
27 plutôt --
28 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]
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1 M. ACKERMAN : [interprétation] En tout cas, je pense que le compte rendu
2 d'audience ne reflète pas ses propos et je pense que le témoin devrait
3 ralentir.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, je vais demander à M. Tanic de
5 ralentir même si d'habitude, nous, quand c'est trop vite, on nous le fait
6 savoir d'une autre manière.
7 M. HANNIS : [interprétation]
8 Q. Monsieur Tanic, veuillez poursuivre. Je comprends bien que c'est une
9 événement marquant dans votre existence, mais essayez d'être concis et de
10 nous dire ce qui s'est passé après votre enlèvement et après cette torture
11 que vous avez subie. Que s'est-il passé après votre mise en liberté ?
12 R. J'ai été libéré et je me suis rendu compte à ce moment-là que tout ceci
13 était le fait des unités de la JSO et que nous avions été libérés du fait
14 de la chance, parce qu'ils n'avaient réussi à tuer Draskovic. Ils étaient
15 en train de me jouer un petit jeu, je ne veux pas entrer en détail.
16 Quelques heures plus tard, je me suis rendu compte qu'on nous avait mis, ma
17 femme et moi, en cage; c'est comme cela qu'on dit. C'est-à-dire que nous
18 étions soumis à une surveillance continue. Ma femme, par exemple, allait à
19 Bar, sur la côte du Monténégro, elle y est allée pour vendre des terrains.
20 Ils l'ont suivie, on s'en est rendu compte. C'était impossible de
21 boire un verre, de boire un coca-cola sans qu'on nous surveille. C'est ce
22 je voulais dire quand je dis qu'on était en cage. Cela avait été la même
23 chose pour M. Curuvija, qui était mort depuis lors. J'étais menacé, je m'en
24 suis rendu compte. Ils étaient au courant pour mon livre. Ils savaient que
25 j'avais coopéré avec le Tribunal de La Haye. Peut-être qu'ils avaient des
26 informations à ce sujet, cependant ils ne m'ont jamais posé de question sur
27 ce point, je dois dire. Je suis parti du pays pour sauver ma peau, c'est
28 tout. Je me suis servi d'un prétexte qui paraissait acceptable. Je me suis
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1 muni de quelques centaines de marks allemands, de deux valises. Sinon, cela
2 aurait pu susciter les soupçons.
3 Je dois ajouter que j'ai parlé de tortures. Si je l'ai fait, ce n'est
4 pas pour susciter votre pitié, mais nous avons véritablement été soumis à
5 des mauvais traitements. Ma femme a été frappée, étranglée, on l'a obligée
6 à se déshabiller. Ils venaient me voir en me disant : "On va violer ta
7 femme, on va vous tuer, à moins que tu admettes que Perisic, Stanisic et
8 Jovic veulent mener un coup d'Etat. Pourquoi est-ce que tu écris ce livre ?
9 Milosevic n'est pas un traître," et cetera. C'était n'importe quoi. Je me
10 suis rendu compte que Milosevic leur avait donné ces informations fausses.
11 Cet enlèvement, qui est le fait d'une unité de la JSO, est confirmé par un
12 livre de M. Mijatovic, chef adjoint des services de la Sûreté de l'Etat.
13 Il décrit la situation de manière un peu différente, mais il
14 reconnaît que j'ai été kidnappé avec ma femme par la JSO. Sous Rade
15 Markovic, c'était un escadron de la mort. Ensuite, ils ont liquidé ou tenté
16 de liquider beaucoup de monde, comme vous êtes peut-être au courant de ce
17 fait, et je le sais parce que pendant des années, j'avais été proche non
18 pas de cette unité-là, mais j'étais très au courant de ce type de
19 problèmes. J'ai quitté le pays parce que je ne voulais pas mourir, sinon on
20 m'aurait tué. Cela a été le cas, d'ailleurs, pour d'autres personnes plus
21 tard. Ou j'aurais échoué en prison alors que j'étais complètement innocent.
22 Q. Après votre départ du pays, sans entrer dans les détails, il est exact,
23 n'est-ce pas, que certains services de Sécurité occidentaux avec qui vous
24 aviez eu des contacts vous ont aidé ? Vous avez déposé dans l'affaire
25 Milosevic et vous avez bénéficié d'une réinstallation dans un pays tiers,
26 n'est-ce pas ?
27 R. Oui. J'ai immédiatement été accueilli par le gouvernement hongrois et
28 par les services de Renseignements occidentaux ou un service qui,
Page 6415
1 malheureusement, a été mentionné. Enfin, j'ai obtenu l'aval de ce service.
2 On m'a accueilli. Nous avons pu nous remettre physiquement, parce que nous
3 étions dans un état épouvantable. Ces gens me connaissaient depuis
4 longtemps. Ils savaient que je disais la vérité. On ne m'a pas accueilli
5 pour que je dépose, pour que je témoigne, mais pour que moi-même et ma
6 femme, nous puissions survivre. Si je suis venu déposer, c'est parce que je
7 suis convaincu que tout ce que j'ai à dire, c'est la vérité et que le
8 régime de Milosevic, c'est une poignée d'hommes qui sont à l'origine d'une
9 stratégie aussi bien pour les Serbes que pour les Albanais du Kosovo. Je
10 suis convaincu qu'il s'agit d'une trahison, une trahison envers leur propre
11 pays. Ils le savaient pertinemment, parce que je n'ai caché mon point de
12 vue à Belgrade. Je parlais publiquement de tout cela.
13 Q. Merci.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'aimerais que vous nous apportiez des
15 précisions au sujet d'une expression que vous avez utilisée au début de
16 cette réponse. Vous avez parlé de "la capitulation de Kumanova."
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Excusez-moi. De quel type d'explication
18 parlez-vous ?
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'aimerais savoir ce dont vous parlez
20 exactement quand vous utilisez cette expression.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Il avait rejeté toutes les propositions de
22 paix. A ce moment-là, il a signé la capitulation de Kumanovo, parce que
23 dans l'intervalle, le Tribunal de La Haye avait établi un acte d'accusation
24 contre lui. Il savait que les forces de l'OTAN allaient venir le chercher.
25 Il a signé la capitulation de Kumanovo. Ce n'était pas un accord de paix,
26 il s'agissait d'une capitulation par rapport aux solutions qui étaient
27 offertes précédemment. N'importe quel expert pourrait le démontrer. Cela
28 s'appelle l'accord de Kumanovo; c'est cela qui a mis un terme aux
Page 6416
1 bombardements de la République fédérale de Yougoslavie par les avions de
2 l'OTAN.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
4 M. HANNIS : [interprétation]
5 Q. Monsieur Tanic, encore deux sujets que je souhaiterais aborder avec
6 vous. Quand vous avez déposé dans l'affaire Milosevic, M. Milosevic a
7 avancé que vous n'étiez personne sur le plan politique, qu'il était
8 impossible que vous ayez vu, rencontré les personnes que vous dites avoir
9 rencontrées. Il vous est impossible de savoir ce que vous dites. J'aimerais
10 vous présenter une pièce, une photographie qui porte la cote P522.
11 J'aimerais que vous disiez aux Juges de la Chambre qui l'on peut voir sur
12 ces photographies. Sur la photographie du haut, pouvez-vous nous dire qui
13 l'on peut voir ? Quelles sont les personnes que vous reconnaissez ?
14 Veuillez nous indiquer si vous commencez la description des personnes que
15 l'on voit sur cette photographie à partir de la droite ou à partir de la
16 gauche.
17 R. Premièrement, nous avons ici M. Milosevic quand il était encore
18 président de la Serbie. Cette photographie a été prise à l'occasion d'une
19 réunion qui avait lieu chaque année entre tous les partis de la coalition.
20 M. Milosevic est au milieu. A droite, on me voit moi. On voit clairement
21 qu'il s'agit là d'une réunion officielle de la délégation de la nouvelle
22 démocratie --
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant, Monsieur Tanic.
24 Faites attention à bien parler dans le micro. C'est pour cela qu'on vous a
25 interrompu.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis à droite, complètement à droite.
27 C'est moi qui porte des lunettes. Je suis le seul à porter des lunettes. A
28 côté, il y a M. Karadjole, Goran Karadjole, l'adjoint Mihajlovic ou le
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1 conseil Mihajlovic; Ceda Mirkovic, du Parti de la démocratie libre; M.
2 Mihajlovic, à côté de Milosevic; M. Milosevic aujourd'hui décédé. Derrière
3 lui, nous avons M. Radulovic, et derrière, on voit le chef de cabinet de M.
4 Mihajlovic, Ivan Djordjevic. Nous avons ensuite deux dames dont j'ai oublié
5 les noms malheureusement, parce que personnellement, je ne faisais pas de
6 politique pour entretenir des amitiés particulières. Ensuite, nous avons M.
7 Zagorac, le comité exécutif de la nouvelle démocratie et deux conseillers
8 de M. Mihajlovic.
9 M. HANNIS :
10 Q. Est-ce que --
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, avant de
12 poursuivre, est-ce que vous vous rendez compte que cette photo, elle est
13 diffusée ?
14 M. HANNIS : [interprétation] Oui, mais elles ont déjà été rendues
15 publiques.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, ce que je veux vous rappeler,
17 c'est qu'on peut peut-être les voir à l'extérieur, ces photos.
18 M. HANNIS : [interprétation] J'en ai parlé avec le témoin.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien.
20 M. HANNIS : [interprétation] Cela ne le gêne pas, mais il serait encore
21 mieux que l'image ne soit pas diffusée.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Sous pli scellé, cette pièce ?
23 M. HANNIS : [interprétation] Oui. Oui, Monsieur, c'est ce que nous
24 demandons.
25 Maintenant, examinons la photographie qui se trouve en dessous de celle-ci.
26 Q. Pouvez-vous nous dire qui l'on voit, ici ? On va commencer par la
27 gauche.
28 R. Il y a là le cabinet de M. Milutinovic quand il était ministre des
Page 6418
1 Affaires étrangères. Je suis à gauche avec M. Goran Karadjole, M.
2 Mihajlovic, M. Milutinovic au milieu et Cedo Mirkovic. Photo prise à
3 l'occasion d'une réunion de travail. Vous voyez que l'atmosphère est
4 détendue, non pas parce qu'on avait bu, mais parce qu'on avait pu échanger
5 nos points de vue.
6 Q. C'est à peu près à quelle période ou à quel moment que cette photo a
7 été prise ?
8 R. Il m'est difficile de m'en souvenir, mais il y a beaucoup de photos sur
9 la nouvelle démocratie. Je crois que c'était lors de la première réunion
10 officielle avec Milutinovic. M. Mihajlovic le respectait beaucoup parce que
11 c'était un diplomate expérimenté, et nous essayions d'entretenir avec M.
12 Milutinovic de bonnes relations de travail, parce qu'il travaillait sur les
13 mêmes questions que M. Mihajlovic et moi-même. L'idée forte, là, c'était
14 d'utiliser ensemble nos forces dans l'intérêt du pays, parce que M.
15 Milutinovic avait beaucoup de connaissances, et le fait qu'il était un
16 partisan de Milosevic ne signifie que ce n'était pas un personnage
17 chevronné ni un homme intelligent. Je le respecte beaucoup.
18 Puis, à droite, nous avons M. Ricardo Sosa, ambassadeur italien.
19 C'est une photographie intéressante parce qu'à l'époque, M. Sosa, c'était
20 le seul ambassadeur qui restait, le seul ambassadeur d'un des pays de
21 l'OTAN qui était resté sur place alors que l'OTAN procédait aux
22 bombardements. Il est resté à Belgrade, et c'est par lui que se faisaient
23 des négociations secrètes. Il a eu des rencontres avec Draskovic, moi-même
24 et sans doute avec M. Milutinovic et d'autres. Il est sans doute à même de
25 confirmer tout ce qui a trait aux propositions de paix de l'OTAN, toute la
26 problématique de l'accord politique de Rambouillet. C'était un des acteurs
27 très présents dans cette tentative de résoudre les difficultés. Milutinovic
28 avait une très bonne opinion de lui et il était très heureux de la
Page 6419
1 nomination de Ricardo Sosa au poste d'ambassadeur de l'Italie à Belgrade.
2 Q. Merci. J'en ai terminé de mes questions au sujet des photographies.
3 M. HANNIS : [interprétation] Il y a encore un thème que je souhaiterais
4 aborder avec le témoin, mais j'aimerais que nous passions à huis clos
5 partiel pendant quelques instants. A ce sujet, je ne sais pas si vous
6 préférez que nous le fassions tout de suite, ou est-ce que cette
7 conversation devrait avoir lieu juste avant la pause, puisqu'au moment de
8 la pause, on passe à huis clos de toute manière ?
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, on va tout de suite en parler.
10 M. HANNIS : [interprétation] Bien, je vous remercie.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pour ce faire, huis clos partiel.
12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Huis clos partiel.
13 [Audience à huis clos partiel]
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20 [Audience publique]
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
22 Monsieur Hannis.
23 M. HANNIS : [interprétation]
24 Q. Monsieur Tanic, est-il exact qu'en 1977, vous avez été condamné par le
25 tribunal du district de Belgrade et vous avez été condamné à un an et deux
26 mois de prison, une peine qui a été réduite à six mois suite à une
27 procédure d'appel, ou plutôt sept mois ? Est-il vrai qu'au bout du compte,
28 vous avez purgé six mois de cette peine ?
Page 6421
1 R. Oui. J'ai été condamné à six mois de prison, ou plutôt sept mois de
2 prison. Le jugement de première instance n'a pas lieu d'être parce qu'il a
3 été annulé par la cour suprême. On m'a condamné à sept mois de prison en
4 recommandant ma remise en liberté au bout de cinq ou six mois, parce qu'il
5 s'agissait d'un délit qui n'avait pas été commis, mais il existait un
6 soupçon sur l'éventualité de la perpétration dudit acte. Mais tout cela
7 nous renvoie à l'année 1976, c'est-à-dire il y a 30 ans.
8 M. HANNIS : [interprétation] Il s'agit de la pièce 1D030565. En anglais,
9 cela a été traduit par le terme "pillage", mais quand je me suis entretenu
10 avec mes assistants linguistiques, ils m'ont expliqué que cela pouvait
11 également être traduit par "cambriolage" ou "attaque à main armée". Je ne
12 suis pas sûr.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous nous dites que c'est le document
14 1D, et cetera, donc c'est un document des accusés ?
15 M. HANNIS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
16 M. HANNIS : [interprétation] Cela ne peut pas être 30.565, enfin j'espère
17 que non.
18 M. HANNIS : [interprétation] Je vous ai donné lecture du numéro de
19 référence qui figure en bas de page --
20 Excusez-moi, je vous ai donné le numéro ERN.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] D'accord. C'est clair, maintenant,
22 c'est 1D34.
23 M. HANNIS : [interprétation] Je n'ai plus de questions à poser au témoin.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons passer à huis clos et nous
25 resterons à huis clos jusqu'au retour du témoin.
26 [La Chambre de première instance se concerte]
27 [Audience à huis clos]
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12 [Audience publique]
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Maître O'Sullivan.
14 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Voici l'ordre. Je serai le premier, M.
15 Sainovic ensuite, général Pavkovic, général Ojdanic, le général Lukic et le
16 général Lazarevic pour finir.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie et je vous en prie,
18 Maître O'Sullivan.
19 Contre-interrogatoire par M. O'Sullivan :
20 Q. [interprétation] Monsieur Tanic, vous connaissez Veton Surroi, n'est-ce
21 pas ?
22 R. Oui.
23 Q. Vous savez qu'il s'agit d'un rédacteur de journal et d'un intellectuel
24 extrêmement respecté ?
25 R. Oui, et c'est également une personnalité politique.
26 Q. Dans la déclaration que vous avez faite au bureau du Procureur, vous
27 avez déclaré avoir rencontré M. Surroi en 1989. Vous dites que vous l'avez
28 rencontré plusieurs fois et que vous êtes un de ses amis. Voilà la question
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1 que j'aimerais vous poser : quelle impression avez-vous de lui ? Est-ce
2 qu'il s'agit d'un homme honnête, d'un homme intègre ? Que pouvez-vous nous
3 dire à son sujet ?
4 R. A l'époque où je le connaissais, il s'agissait d'une personne
5 intelligente et honnête. Bien sûr, il représentait le point de vue des
6 Albanais. Je ne sais pas, je ne peux pas vous parler de lui maintenant
7 parce que maintenant, cela fait au moins sept ans que je ne le vois plus.
8 Q. Vous avez la pièce P2361 qui correspond à l'entretien du bureau du
9 Procureur avec Veton Surroi, et j'aimerais citer la page 9. A la page 9 de
10 sa déclaration, M. Surroi parle de la réunion de la fondation Bertelsmann à
11 Rhodos, en septembre 1996. Vous y avez assisté, ainsi que M. Surroi.
12 Monsieur Tanic, M. Surroi a déposé dans cette affaire, et voilà ce qu'il a
13 dit :
14 "Ratomir Tanic, conseiller de Mihajlovic, assistait également à cela.
15 Tanic a dit qu'il avait des contacts directs avec Milosevic, mais je ne
16 l'ai pas cru. Cela fait longtemps que je me méfie de M. Tanic."
17 Pourquoi est-ce que vous pensez que M. Surroi a dit cela à votre
18 sujet ?
19 R. Je pense que c'est une question que vous devriez poser à M. Surroi, et
20 non pas à moi. Je ne sais pas ce à quoi il pense.
21 Q. Est-ce qu'il a dit cela parce que cela fait longtemps que vous êtes
22 malhonnête et que vous ne dites pas la vérité ?
23 M. HANNIS : [interprétation] Là, on lui demande de se livrer à des
24 conjectures, on lui demande ce à quoi pensait M. Surroi.
25 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Non, je lui demande si cela fait partie de
26 son histoire personnelle. Est-ce que cela fait longtemps qu'il est
27 malhonnête ?
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître O'Sullivan, j'accepte votre
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1 question, mais je ne pense pas que la réponse va véritablement éclairer
2 notre lanterne.
3 Répondez à la question, Monsieur Tanic, la question que je vais
4 reformuler peut-être et qui sera comme suit : est-ce que vous avez
5 l'habitude d'être malhonnête et de ne pas faire l'objet de confiance ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, si vous écoutez les bruits qui courent et
7 les ragots, certes, mais si vous vous basez sur les faits, non.
8 M. O'SULLIVAN : [interprétation]
9 Q. Vous êtes né le 6 avril 1966 et vous êtes le fils de Lazar, n'est-ce
10 pas ?
11 R. Je vois qu'il est question de 1966 au compte rendu d'audience alors
12 qu'il s'agit de 1956.
13 Q. C'est moi qui ai fait l'erreur. Il s'agit de l'année 1956. Est-ce que
14 vous avez vécu à Belgrade pendant toute votre vie d'adulte jusqu'au moment
15 où vous êtes parti en 1999 ?
16 R. Oui, pour l'essentiel.
17 Q. J'aimerais vous poser une question à propos de vos antécédents
18 scolaires et de votre éducation. J'aimerais vous poser une question à
19 propos du moment où vous viviez encore en Serbie jusqu'en 1999. Au moment
20 de votre déposition dans l'affaire Milosevic, vous avez dit que vous avez
21 terminé l'école primaire et que vous saviez lire et écrire; est-ce que cela
22 est exact ?
23 R. Oui, puisqu'il a insisté pour avoir des renseignements sur mes
24 antécédents scolaires justement. Toutefois, je ne me suis pas senti dans
25 l'obligation de parler de l'enseignement dont j'avais bénéficié puisque je
26 n'étais pas là en tant qu'expert.
27 Q. Il est exact de dire que vous avez suivi les cours de l'école
28 élémentaire et que vous savez lire et écrire, n'est-ce pas ?
Page 6425
1 R. Oui, c'est exact, mais j'ai également terminé un ou deux autres cours
2 dans ma vie.
3 Q. Une fois de plus dans l'affaire Milosevic, il s'agit de la pièce à
4 conviction 1D27 du 15 mai 2002, page 5 027. Voilà la question qui vous est
5 posée : "Vous êtes en train de nous dire que vous avez un niveau d'école
6 secondaire jusqu'au lycée. Vous êtes allé jusqu'au lycée ?"
7 "Réponse : Non, je n'ai pas terminé les cours du lycée de l'école
8 secondaire.
9 "Question : Quels cours avez-vous suivis ?
10 "Réponse : J'ai suivi les cours d'une école secondaire en économie.
11 "Question : Ecole d'économie niveau secondaire; c'est cela ?
12 "Réponse : Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. Il faudra que nous
13 convoquions un expert pour évaluer ce niveau d'enseignement. Je n'ai pas à
14 répondre à des questions qui n'ont rien à voir avec ce procès."
15 Vous avez admis que vous avez un niveau d'enseignement qui correspond
16 à l'enseignement primaire; c'est cela ?
17 R. Oui. Par la suite, j'ai déclaré que j'avais obtenu un diplôme
18 d'économie de l'école secondaire.
19 Q. La semaine dernière, lorsque vous avez témoigné, vous avez dit qu'au
20 milieu des années 1970, et ce, jusqu'au début des années 1990, vous avez
21 travaillé comme commerçant dans une institution fédérale. Vous vous
22 souvenez avoir dit cela ?
23 R. Oui, bien sûr.
24 Q. Quelle était votre spécialité en tant que commerçant ?
25 R. Vous voulez dire quelle était ma spécialité professionnelle ou à la
26 suite de l'enseignement dont j'ai bénéficié ? J'ai une maîtrise de science
27 politique. Pour ce qui est de la profession, je ne peux répondre parce que
28 cela fait partie du programme de protection de témoins; on m'a forcé à
Page 6426
1 m'acquitter de certains emplois. J'ai étudié dans plusieurs écoles. J'ai
2 des diplômes universitaires.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] On vous a posé une question eu égard à
4 votre situation avant ce programme de protection.
5 M. O'SULLIVAN : [interprétation]
6 Q. C'est le milieu des années 1970, c'est cela qui m'intéresse. Parce que
7 vous avez dit au Procureur qu'à partir de la moitié des années 1970
8 jusqu'au début des années 1990, vous avez travaillé dans une institution
9 fédérale et vous avez dit que vous étiez en quelque sorte commerçant.
10 J'aimerais savoir quelle était votre spécialité.
11 R. A ce moment-là, j'avais un diplôme de l'école secondaire. J'étais agent
12 technique dans le domaine de l'économie. J'avais également commencé à
13 étudier dans d'autres cours. Au moment où j'ai été questionné par M.
14 Milosevic, je n'étais absolument pas disposé à répondre à ses questions. Je
15 pourrais le faire maintenant, si vous le souhaitez.
16 Q. Quelle était votre spécialité professionnelle ?
17 R. Je pense avoir répondu. J'ai dit que j'étais assistant technique en
18 économie. C'est comme cela que nous appelons cette profession en Serbie.
19 Toute personne qui a un diplôme en sciences économiques de l'école
20 secondaire a ce titre.
21 Q. Quelle était l'institution fédérale pour laquelle vous avez travaillé ?
22 R. C'était l'association des usines laitières de la Yougoslavie.
23 Q. Si vous étiez technicien, pourquoi est-ce que vous vous êtes présenté
24 dans l'affaire Milosevic comme étant homme d'affaires ?
25 R. Parce qu'après, je suis devenu homme d'affaires. J'ai commencé à
26 produire des biens à l'étranger. Ensuite, j'étais un petit industriel et je
27 n'ai pas travaillé pour cette institution au début des années 1980, mais
28 plutôt à la fin des années 1980. C'est pour cela que je me suis présenté
Page 6427
1 comme homme d'affaires.
2 Q. Est-ce que vous avez votre propre entreprise ?
3 R. Oui, tout à fait.
4 Q. Vous avez une entreprise ou vous en avez plusieurs ?
5 R. Cela n'intéresse absolument pas cette Chambre parce que ce qui est
6 essentiel, c'est que nous produisions des biens. Au départ, nous avons
7 fabriqué des biens et nous faisons partie d'une entreprise étrangère.
8 Ensuite, mon associé et moi-même avons établi d'autres entreprises.
9 Q. Est-ce que vous avez une entreprise ou plusieurs ? Comment répondez-
10 vous à cette question ?
11 R. Je pense que lors de ma carrière d'homme d'affaires, il y avait deux
12 entreprises. J'étais le propriétaire de l'une de ces entreprises; je n'y ai
13 pas véritablement accordé beaucoup d'attention parce que cela n'était pas
14 une carrière pour moi. Je faisais cela pour faire vivre ma famille. C'est
15 tout.
16 Q. Vous nous dites maintenant que vous aviez deux entreprises; c'est
17 cela ?
18 R. Oui, c'est ce que l'on pourrait dire.
19 Q. Pièce 1D2 --
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tanic, je pense qu'il est
21 assez facile de répondre de façon simple et directe à ce genre de question.
22 Jusqu'à présent, je dois dire que je suis très intrigué par les réponses
23 que vous avez apportées. Je ne comprends pas très bien quelles étaient vos
24 activités professionnelles. N'oubliez pas que la crédibilité et la
25 fiabilité des documents que vous avez donnés au Tribunal sont importantes.
26 C'est très important pour cette affaire. Tout ce que vous dites fait partie
27 de cette fiabilité, de cette crédibilité. Je pense qu'il faudrait essayer
28 de répondre de la façon la plus complète et la plus précise que possible
Page 6428
1 aux questions posées par Me O'Sullivan.
2 M. O'SULLIVAN : [interprétation]
3 Q. Vous avez la pièce 1D27. Il s'agit d'un compte rendu d'audience dans
4 l'affaire Milosevic, compte rendu du 15 mai 2002, et à la page 5 028,
5 Monsieur Tanic, vous avez dit que vous aviez trois entreprises. Pourquoi
6 avoir mentionné ce chiffre de trois si vous n'en aviez que deux ?
7 R. Parce que l'une des entreprises était appelée par Milosevic comme une
8 maison d'édition; ce qu'elle n'était pas, d'ailleurs. Je n'étais que l'un
9 des propriétaires de cette entreprise. Je ne peux pas dire que cette
10 entreprise m'appartenait.
11 Q. Vous possédiez deux entreprises et vous aviez en quelque sorte une
12 association avec cette troisième entreprise; c'est cela ?
13 R. Oui.
14 Q. Est-ce que vous pourriez me donner le nom de l'une ou l'autre de ces
15 entreprises, parmi les trois en question ?
16 R. L'une s'appelait Evropa Press. Il s'agissait de l'entreprise que
17 Milosevic appelait une maison d'édition. Il y avait une autre entreprise --
18 Q. Une question à propos d'Evropa Press. Quand est-ce que cette maison
19 d'édition a été établie ?
20 R. Je ne peux pas vous le dire. Je pense que cela s'est fait en 1996 ou
21 1997, peut-être 1997 ou peut-être un peu plus tard, enfin, pendant cette
22 période. Non, je suis sûr d'une chose, elle n'a pas été créée en 1996.
23 Q. Quel était le siège officiel de cette entreprise ? Quelle était son
24 adresse ? Dans quelle rue se trouvait-elle et à quel numéro de la rue ?
25 R. Elle se trouvait en plein centre-ville. J'oublie le nom de la rue,
26 maintenant. C'était une rue qui était en pente, qui était près de Zeleni
27 Venac, au troisième étage.
28 Q. Vous me dites que vous ne savez pas dans quelle rue se trouvait cette
Page 6429
1 entreprise, alors qu'il s'agit de la ville où vous avez grandi ?
2 R. Oui, j'ai oublié le nom de la rue. Vous savez, cela fait huit ans que
3 je n'habite plus dans cette ville. Toutefois, c'est une rue qui relie
4 Terazije vers le marché de Zeleni Venac et c'est une rue pentue.
5 Q. Est-ce que cette compagnie a été dissoute, et le cas échéant, quand ?
6 R. Cela s'est passé après trois ou quatre mois -- non, après six mois.
7 Q. Vous nous avez dit que vous étiez propriétaire de deux entreprises.
8 Donnez-nous le nom au moins de l'une de ces entreprises qui vous
9 appartenait.
10 R. Il y en avait une qui s'appelait Djils [phon]. C'était la filiale d'une
11 entreprise étrangère. Avec l'aide de l'entreprise en Italie, nous
12 fabriquions des produits de beauté. Ensuite, l'entreprise Djils a commencé
13 à fabriquer ses produits à Belgrade.
14 Q. Vous étiez le propriétaire de cette entreprise ?
15 R. Oui.
16 Q. Où se trouvait-elle à Belgrade, dans quelle rue, quel numéro ?
17 R. Pour autant que je puisse m'en souvenir, c'était à la même adresse
18 qu'Evropa Press. Nous avions des dispositions d'associés s'agissant du
19 loyer à payer. et je souhaitais aider l'autre entreprise, Evropa Press,
20 pour le paiement du loyer à payer pour les locaux.
21 Q. L'entreprise a-t-elle disparu, et si c'est le cas, à quel moment ?
22 R. Oui. Après quelques vols, puis il y a eu des problèmes qui sont
23 survenus et l'entreprise a cessé d'exister. A ce moment-là, je n'y avais
24 plus aucun intérêt de toute façon. Oui, elle a disparu, cette entreprise.
25 Q. Quand ?
26 R. Je ne m'en souviens pas. Je ne me souviens tout simplement pas. Je
27 n'essaie pas d'éviter votre question. C'est une entreprise qui n'a pas
28 existé très longtemps. Elle n'a existé que pendant un an, un an et demi. Je
Page 6430
1 crois que non, à vrai dire, non, je ne me souviens pas de la date.
2 Q. La deuxième entreprise dont vous étiez propriétaire, comment
3 s'appelait-elle ?
4 R. Non, cette autre entreprise, je n'en étais pas propriétaire. J'étais un
5 des membres fondateurs, et elle s'appelait Finestetik.
6 Q. Quand fut-elle fondée ?
7 R. 1988 à peu près.
8 Q. Est-ce qu'elle a été démantelée ? Si oui, à quel moment ?
9 R. Oui. Un des employés a commis un vol. Un rapport a été présenté, et la
10 décision des fondateurs a été de démanteler l'entreprise suite à cet acte
11 criminel, et la propriété s'est passée autour de l'acteur principal de
12 l'entreprise.
13 Q. En quelle année ?
14 R. 1998.
15 Q. Quel était le siège et quelle était son adresse ?
16 R. C'était la rue dont le nom était rue du 7 juillet, près d'une pizzeria.
17 Je ne sais pas exactement le nom actuel.
18 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je souhaiterais que les documents soient
19 distribués au bureau du Procureur ainsi qu'au témoin. Le nom figure en tête
20 du document, à la première page.
21 Q. Monsieur Tanic --
22 R. Oui, je vous en prie.
23 Q. -- vous parlez de 1977 et de la condamnation au pénal sous le coup de
24 laquelle vous êtes tombé.
25 R. Oui, effectivement.
26 Q. Cette condamnation, c'était une condamnation pourquoi ?
27 R. C'était une condamnation pour tentative de commettre un délit. Cela n'a
28 jamais été le cas, pour autant que je m'en souvienne. En fait, c'était une
Page 6431
1 tentative de vol. En tout cas, c'est ainsi qu'ils l'ont baptisée. Vous
2 savez, la peine a été commuée il y a de cela 25 ans, et je crois qu'il
3 faudrait que vous sachiez que cela n'a plus aucune valeur.
4 M. O'SULLIVAN : [interprétation] ID40, il s'agit de l'intercalaire 10 d'une
5 copie papier. Il y a deux documents à l'intercalaire 10, un document en
6 anglais et un document en B/C/S. Il s'agit du code pénal de la République
7 fédérale socialiste de Yougoslavie de 1973.
8 Q. Monsieur Tanic, vous allez peut-être préférer la suivre dans votre
9 langue. Il s'agit de la deuxième page dans la version en B/C/S du document.
10 Vous verrez l'article 16. Vous le voyez ? Article 16, à l'intercalaire 10,
11 vous avez le document, en principe, devant vous.
12 R. Oui. Je vous en prie.
13 Q. Référez-vous à la deuxième page de la version en serbe, en bas à
14 droite. Vous voyez ce texte ?
15 R. Oui.
16 Q. L'article 16, Pénalités pour tentatives de crimes. Voyez-vous cela ?
17 R. Oui. Cela confirme qu'il s'agissait bien d'une tentative, et non pas
18 d'un crime commis.
19 Q. Je vous propose maintenant d'examiner l'article 255 sur la page
20 suivante.
21 R. Oui, effectivement, il s'agit d'un délit sérieux, à savoir le vol.
22 Q. Pour plus de 30 000 dinars, c'est exact, sera puni, passible d'une
23 peine de cinq ans d'emprisonnement. Voyez-vous cela ?
24 R. Oui. Je le vois, mais j'ai été condamné à une peine de sept mois qui a
25 été annulée il y a de cela 25 ans. Vous parlez là d'un jugement non
26 existant. Vous savez très bien qu'est-ce que vous êtes en train de
27 faire ici; c'est un délit au pénal.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous demanderais de bien écouter
Page 6432
1 les questions. Répondez à ces questions comme si elles témoignaient d'un
2 minimum d'intelligence. N'essayez pas de faire le tri entre ce qui est
3 valable et ce qui ne l'est pas quant aux critiques adressées à votre
4 position.
5 M. O'SULLIVAN : [interprétation]
6 Q. Je vous demanderais de vous reporter à l'article 258 où il est dit
7 "fraude".
8 R. Oui. Vols, fraudes et le reste, mais on ne vous condamne pas à sept
9 mois pour cela. Il est dit qu'on aurait dû me condamner à cinq ans. J'ai
10 été condamné à sept mois. Je n'ai certainement pas commis de vols passibles
11 d'une peine de cinq ans par lesquels je n'aurais reçu que sept mois. Cela
12 confirme que je ne suis pas coupable.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tanic, vous ne lisez pas le
14 tout. Ce n'est pas à vous qu'il appartient d'interpréter pour nous tout
15 cela. Il n'est pas dit : pour le chef d'accusation tentative de vols, le
16 crime est passible de cinq ans de prison. Je vous demanderais donc de bien
17 vouloir vous concentrer sur les questions qui vous sont posées et de vous
18 contenter d'y répondre.
19 Maître O'Sullivan, je vous en prie, poursuivez.
20 M. O'SULLIVAN : [interprétation]
21 Q. Je propose de passer à la page suivante, l'article 306, "Falsifications
22 de documents officiels."
23 R. Oui.
24 Q. Revenons à l'intercalaire numéro 1, si vous le voulez bien à présent.
25 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Code 1D34.
26 Q. Il s'agit du certificat que M. Hannis vous a montré, et vous devriez
27 avoir sous les yeux les versions serbe et anglaise. Dans l'intercalaire 1,
28 le crime qui est décrit comme vous le voyez en serbe est "pljacke" qui
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1 s'écrit p-l-j-a-c-k-e, et "pljacke", c'est bien vol, n'est-ce pas ?
2 R. Non. Vol et vol à main armée, ce n'est pas la même chose. Vol à main
3 armée, c'est bien plus grave que simple vol, et "pljacke", c'est vol à main
4 armée.
5 Q. Dans le certificat, je ne vous demanderai pas de vous faire part de vos
6 commentaires. Vous voyez, vous avez été condamnée en vertu des articles que
7 nous avons examinés, les 255, 258 et 306. Vous le voyez, n'est-ce pas ?
8 R. Oui, je le vois parfaitement bien.
9 Q. 1D34, 1D31, pardon. Pièce à conviction 1D31 à l'intercalaire 2, là
10 encore, version anglaise et version serbe. Monsieur Tanic, vous avez là
11 sous les yeux la carte de membre de votre parti, Nouvelle démocratie. En
12 page 1 525 du compte rendu d'audience de l'affaire Milosevic, vous dites
13 que c'est un document : "C'est une photocopie de mon document d'adhésion.
14 La signature correspond à la mienne, mais le statut, non."
15 Maintenant, avec M. Milosevic, dans l'affaire Milosevic, vous avez
16 dit que vous n'étiez qu'un partisan de Nouvelle démocratie; est-ce exact ?
17 Vous vous souvenez que dans l'affaire Milosevic, vous avez indiqué que
18 votre statut n'était pas celui de membre, mais celui de sympathisant; c'est
19 exact ?
20 R. Oui, mais ce document est un faux.
21 Q. Mais il a été adopté dans l'affaire Milosevic, il a été reconnu, alors
22 pourquoi aviez-vous dit que vous aviez un diplôme universitaire alors que
23 vous n'en aviez pas ?
24 R. Non, je ne l'ai pas mis là. J'ai dit que ce document était un faux. La
25 signature, enfin, la signature ressemble à la mienne, mais le document dans
26 son intégralité est un faux. Je n'ai pas accepté ce document comme étant un
27 vrai, et je demanderais à la Défense de ne pas me faire dire des choses que
28 je n'ai pas dites, d'autant que tout le monde sait que je n'étais pas un
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1 sympathisant de Nouvelle démocratie, mais que j'étais un membre de l'équipe
2 dirigeante interne du parti et que j'ai coopéré de façon étroite avec M.
3 Mihajlovic. Ensuite, on a pu le lire dans les journaux.
4 Je n'étais pas un sympathisant. Je donnais des interviews à propos de
5 Nouvelle Démocratie à la télévision, dans les médias, j'étais un
6 conseiller. Je n'ai jamais prétendu être diplômé d'université par écrit
7 même si mes études étaient très complètes. J'ai fait de nombreuses études
8 universitaires.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avez-vous indiqué sur le formulaire
10 que vous étiez titulaire d'un diplôme universitaire ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, non. Je n'utilise pas
12 des caractères d'imprimerie pour remplir le formulaire. Je n'utilise jamais
13 les caractères d'imprimerie. J'ai même beaucoup de mal à utiliser les
14 caractères d'imprimerie.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous dites ceci, que le nom que vous
16 avez mis ou qui apparaît sur le formulaire n'a pas été écrit par vous ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. Le nom et le numéro de téléphone,
18 c'est la routine, mais il y a des choses qui ont été ajoutées. Pale, je
19 n'ai jamais été résident dans cette municipalité, puis après on a ajouté
20 des choses telles que mon diplôme universitaire. C'est la raison pour
21 laquelle je dis que c'est un faux. Il est dit que je suis inscrit à la
22 municipalité de Pale alors que je n'y ai jamais vécu. J'ai juste mis mon
23 nom, mon adresse et mon numéro de téléphone parce que cela se fait de façon
24 routinière. Vous les indiquez de manière à ce que les gens sachent quelle
25 est votre adresse.
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais c'est également votre signature,
27 ici.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela ressemble très probablement beaucoup à ma
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1 signature, donc oui, je peux reconnaître que c'est la mienne.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître O'Sullivan.
3 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Nous aurons besoin maintenant de
4 l'intervention de l'huissier afin que des exemplaires de la déposition ou
5 de la déclaration du témoin lui soient remis aussi bien en anglais qu'en
6 B/C/S. Il se peut que nous ayons à nous reporter à ces documents
7 ultérieurement.
8 Q. La semaine dernière, au cours de votre déposition, quand on vous a
9 interrogé au sujet de la pièce P2480, on vous a interrogé au sujet des
10 paragraphes 4 et 5 que je vais lire rapidement. Ensuite, je vais vous poser
11 des questions. Au paragraphe 4, page 2, je cite :
12 "En tant que membre du Parti ND et en tant que conseiller spécial de
13 Dusan Mihajlovic, le président de ND, Nouvelle démocratie, donc conseiller
14 en matière de relations internationales et pour ce qui était du Kosovo, on
15 m'a choisi afin de mener des négociations discrètes avec les Albanais du
16 Kosovo. J'ai reçu cette habilitation directement de Milosevic au cours
17 d'une réunion que j'ai eue avec lui et Dusa Mihajlovic vers 1995. Je pense
18 qu'on m'a choisi pour occuper ce poste parce que j'avais de bons contacts
19 et de bonnes relations avec des représentants albanais du Kosovo" --
20 R. Excusez-moi, cela se trouve à quelle page en version serbe ?
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que, dans la déclaration en
22 serbe, les paragraphes sont également numérotés ? Parce que si c'est le
23 cas, on peut dire au témoin que c'est le paragraphe numéro 4.
24 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Le témoin n'a pas la version où les
25 paragraphes sont numérotés, mais c'est la page 3 en B/C/S, premier
26 paragraphe.
27 M. HANNIS : [interprétation] Je dispose d'une version de la déclaration des
28 paragraphes numérotés.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Hannis.
2 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Toutes nos excuses.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai trouvé. Merci.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il fait bon que vous gardiez aussi
5 l'exemplaire que vous présente l'huissier parce que c'est une version où
6 les paragraphes sont numérotés. Si on lit d'autres paragraphes, cela pourra
7 vous aider.
8 M. O'SULLIVAN : [interprétation]
9 Q. Je poursuis la lecture de votre déclaration.
10 "Je crois que j'ai été choisi pour occuper ce poste parce que j'avais de
11 bons contacts et de bonnes relations avec des représentants en Albanie et
12 du Kosovo ainsi qu'avec des représentants de la communauté internationale,
13 et j'ai été homologué par le SDB, chargé des questions de sécurité. En
14 résumé, j'étais habilité à mener ces négociations, et cette autorisation en
15 politique venait de trois sources : premièrement, de Milosevic;
16 deuxièmement, du SDB; puis de mon parti, qui faisait partie officiellement
17 du gouvernement. Le gouvernement de la République de Serbie n'a jamais été
18 consulté au sujet de ces négociations." Fin de lecture du premier
19 paragraphe qui m'intéresse.
20 Première phrase du paragraphe suivant, je cite : "J'ai été le principal
21 négociateur au cours de ces négociations discrètes."
22 Je vous ai remis la version en B/C/S du document. Est-ce que vous avez sous
23 les yeux le paragraphe numéro 5 ?
24 R. Oui. Oui, j'ai vu cette déclaration, et le passage où j'explique
25 pourquoi on m'a choisi est tout à fait conforme à la réalité.
26 Q. Est-ce que vous avez trouvé le paragraphe 5 en serbe ? Oui ou non ?
27 R. Oui.
28 Q. Veuillez, je vous prie donner lecture lentement de la première phrase
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1 de ce paragraphe en langue serbe.
2 R. "J'étais le principal négociateur au cours de ces négociations
3 discrètes, le négociateur en chef." Est-ce qu'on va maintenant me demander
4 des comptes à cause des erreurs de traduction ? J'ai expliqué à l'envie ce
5 qu'il en était lors de ma déposition avec le président de mon parti.
6 J'étais un des négociateurs les plus heureux, dirons-nous, dans les
7 négociations.
8 Q. [aucune interprétation]
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tanic, il est manifeste que
10 vous souhaiteriez bien que nous échangions nos sièges respectifs, mais cela
11 ne se produira pas, donc je vais vous demander de répondre aux questions
12 qui vous sont posées, tout simplement.
13 M. O'SULLIVAN : [interprétation]
14 Q. Maintenant --
15 R. La traduction n'est pas exacte. Voilà ce que je voulais répondre. La
16 traduction ne correspond pas à l'essence de ce qui est dit en serbe, au
17 sens véritable, parce qu'il semble que j'ai dit à ce moment-là que j'étais
18 le chef négociateur en chef et que je mentais. Je ne suis pas responsable
19 de cette traduction qui change la signification du texte.
20 Q. Votre explication --
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant, Maître O'Sullivan.
22 Je ne comprends pas ce que vous nous dites. Vous venez de donner
23 lecture, donc justement, on vous a demandé d'en donner lecture dans votre
24 langue pour que cela puisse être traduit de la manière la plus exacte qui
25 soit afin de supprimer toute erreur de traduction. Mais ce que vous avez
26 lu, cela correspond exactement à ce qui a été traduit dans la version en
27 anglais dont nous disposons, donc je ne comprends pas très bien où vous
28 voulez en venir.
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1 M. HANNIS : [interprétation] Il y a une légère différence, parce que les
2 interprètes interprètent "négociateur en chef", alors que dans la
3 déclaration écrite, c'est écrit "négociateur principal".
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il y a vraiment une grande différence,
5 Monsieur Hannis.
6 M. HANNIS : [interprétation] Ce n'est pas tout à fait les mêmes mots, quand
7 même.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela se passe tout le temps quand on a
9 des traductions. Il y a pour exprimer un même concept plusieurs mots qui
10 peuvent être appliqués, et forcément, on ne va pas toujours traduire le
11 même concept, le même mot par le même mot dans la langue cible, donc le
12 sens quant à lui reste identique dans la traduction.
13 M. O'SULLIVAN : [interprétation]
14 Q. Peut-être pourriez-vous lire le document avec beaucoup d'attention ?
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Auparavant, j'aimerais bien savoir ce
16 que le témoin voulait dire quand il a dit que la traduction était
17 trompeuse.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai jamais dit que j'étais le négociateur
19 en chef, négociateur en chef au sens officiel, parce que cela aurait été
20 des élucubrations de ma part. On pourrait le vérifier en deux temps, trois
21 mouvements. J'ai dit que j'étais un des meilleurs négociateurs. Enfin,
22 j'étais le meilleur négociateur, c'est moi qui engrangeais les meilleurs
23 résultats. Mais je n'ai jamais dit que j'ai été le principal ou le
24 négociateur en chef. Cela aurait été complètement abusif de ma part, et la
25 Défense ne cesse de m'attribuer ce genre de déclarations fantasmatiques.
26 Tout le monde sait que le négociateur en chef, c'était Slobodan Milosevic,
27 et Ratko Markovic en son nom. Je ne suis pas fou.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Tanic, vous avez signé cette
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1 déclaration au moyen d'un pseudonyme, si bien que semblez avoir donné votre
2 aval à la manière dont on a consigné vos propos dans cette déclaration.
3 Nous savons maintenant que la version en anglais correspond de manière
4 précise aux termes qui avaient été employés en serbe. Vous avez déjà
5 expliqué que selon vous, vous étiez un des meilleurs négociateurs avec
6 Mihajlovic. Vous reconnaissez qu'il y avait cinq ou six autres négociateurs
7 en jeu, mais on en a déjà entendu parler. Vous avez eu tout le temps de
8 nous en parler.
9 Au cours du contre-interrogatoire, les conseils de la Défense sont
10 tout à fait en droit de vous poser des questions conformément à leurs
11 points de vue, et il serait bon que vous vous concentriez sur les questions
12 et que vous y répondiez au mieux. L'approche que vous adoptez, votre façon
13 de répondre entraîne la confusion, a entraîné la confusion, puisque vous
14 avez semblé vouloir dire qu'il y avait eu une erreur de traduction vers
15 l'anglais. Or, ce que vous nous dites, c'est que vous avez accepté que dans
16 votre langue on décrive de manière inexacte ce qu'il en était à ce moment-
17 là.
18 Continuez, Maître O'Sullivan.
19 M. O'SULLIVAN : [interprétation]
20 Q. Examinons un peu plus ce qu'il en est, Monsieur Tanic. Cette
21 déclaration, vous l'avez signée avec un pseudonyme et vous l'avez donnée en
22 anglais, n'est-ce pas ? Si on regarde la première page, la page de
23 couverture, on voit que la langue dans laquelle a été mené l'entretien,
24 c'est l'anglais ?
25 R. Oui.
26 Q. Le 4 et le 5 novembre 2006, vous avez rencontré les représentants du
27 bureau du Procureur ici à La Haye et vous avez passé en revue cette
28 déclaration en vous aidant également d'une traduction en serbe, et vous
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1 n'avez apporté aucun complément, aucune correction à cette phrase. Je cite
2 : "J'étais le principal négociateur dans ces négociations discrètes." Vous
3 n'avez apporté aucune correction à cette phrase, n'est-ce pas ?
4 R. Excusez-moi. J'ai attiré l'attention du Procureur sur ce fait, et il
5 peut le confirmer.
6 Q. A qui avez-vous signalé la chose ?
7 R. J'ai attiré l'attention de M. Hannis sur le fait qu'il risquait d'y
8 avoir une petite confusion s'agissant de celui qui était ou non le
9 négociateur principal et qu'en serbe, on peut dire que quelqu'un est le
10 principal auteur ou acteur de quelque chose si c'est celui qui obtient les
11 meilleurs résultats.
12 Q. Vous en avez parlé à M. Hannis, lui avez expliqué que c'était votre
13 position ?
14 R. Non. On a parlé de ce problème parce qu'il apparaît clairement dans ma
15 déclaration que j'ai dit qu'au sens officiel, c'était Ratko Markovic qui
16 était le négociateur en chef.
17 Q. Non, écoutez ma question. Vous nous dites que les 4 et 5 novembre,
18 quand vous avez rencontré M. Hannis, il y avait là erreur de formulation.
19 Ce terme de "négociateur principal" constituait une erreur de formulation.
20 Vous le lui avez dit ? C'est ce qui m'a semblé vous entendre dire.
21 R. Oui. M. Hannis lui-même a mis cela sur le tapis, et j'étais tout à fait
22 prêt à ce qu'on précise la chose. M. Hannis, je lui ai dit que selon moi,
23 il y avait une différence dans le sens profond dans la formulation dans les
24 deux langues.
25 Q. Monsieur Tanic, M. Hannis nous a versé un document que j'ai ici en
26 main, et veuillez me regarder. Je suis ici à votre gauche. Regardez-moi.
27 R. Je suis obligé d'être assis comme cela, dans ce sens-là.
28 Q. Monsieur, je vous demande de me regarder. J'ai un document ici dans ma
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1 main. C'est une feuille d'information supplémentaire qui nous a été remise
2 par le Procureur suite à la réunion que vous avez eue avec lui le 4 et le 5
3 novembre. Or, si je regarde cette déclaration, je vois qu'il n'y est fait à
4 aucun moment référence à une correction ou à un ajout conformément à ce que
5 vous venez d'évoquer. Est-ce que vous êtes en train de nous dire que
6 M. Hannis nous a induit en erreur, ou est-ce que vous êtes en train de
7 mentir ? Ce n'est pas plutôt cela, le cas ?
8 M. HANNIS : [interprétation] Je reconnais que cela ne figure pas dans la
9 feuille d'information supplémentaire, mais cela ne veut pas pour autant
10 dire que j'ai induit le Conseil en erreur ou que le témoin mente.
11 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Il y a une autre possibilité, c'est que M.
12 Hannis fait preuve de négligence. Allons un peu plus loin, ou plutôt
13 faisons la pause.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Cela vous donnerait également la
15 possibilité de réfléchir plus avant à cette question avant de poursuivre.
16 Monsieur Tanic, nous allons en terminer pour aujourd'hui. Malheureusement,
17 nous ne pouvons pas poursuivre parce qu'il y a une audience dans une autre
18 affaire dans le même prétoire cet après-midi. Il va donc falloir que vous
19 reveniez demain pour poursuivre votre déposition, demain à 9 heures du
20 matin. Rappelez-vous ce que je vous ai déjà dit vendredi. Il est essentiel
21 que vous ne discutiez avec strictement personne de votre déposition.
22 Je vais vous demander maintenant -- non, mais attendez avant de
23 quitter le prétoire, nous allons passer à huis clos.
24 M. LE GREFFIER : Nous sommes en audience à huis clos.
25 [Audience à huis clos]
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9 --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le mardi 14 novembre
10 2006, à 9 heures 00.
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