Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 7 mars 2007

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 [L'accusé Milutinovic est absent]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

6 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Cepic, à un moment donné au

10 cours de la session, et j'espère que cela sera avant la fin de votre

11 contre-interrogatoire, nous allons vous faire part de la décision que nous

12 avons prise par rapport aux objections qui ont été soulevées hier par

13 rapport aux éléments présentés par le biais de ce témoin. Il y a certains

14 passages, des passages spécifiques qui sont concernés, je vais vous en

15 parler. Quelqu'un est en train de travailler sur ce que j'ai à vous dire et

16 j'espère que ceci sera prêt avant la fin du contre-interrogatoire. En

17 attendant, veuillez continuer votre contre-interrogatoire.

18 M. CEPIC : [interprétation] Merci.

19 LE TÉMOIN : JOSEPH OMER MICHEL MAISONNEUVE [Reprise]

20 [Le témoin répond par l'interprète]

21 Contre-interrogatoire par M. Cepic : [Suite]

22 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

23 R. Bonjour.

24 Q. Bonjour, Monsieur Crosland -- excusez-moi, je me suis trompé de nom. Je

25 pensais, à cause de certains points à soulever, à un certain témoin

26 Crosland, mais bonjour Mon Général, Monsieur Maisonneuve.

27 R. Bonjour.

28 Q. Je vais reprendre là où je me suis arrêté hier. Il s'agit de la pièce

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1 MM/14 qui parle de la réunion qui a eu lieu le 23 janvier 1999 à laquelle

2 ont participé M. Drini, M. Smith, M. Lefever et une autre personne. Au

3 niveau du point 2 de ce document qui est annexé à la pièce MM/14, on donne

4 les détails d'une embuscade qui a été tenue à Bela Crkva à laquelle ont

5 participé les membres de l'UCK. Le véhicule apparemment était là tout à

6 fait par hasard. Il a été pris dans l'embuscade tout à fait par hasard,

7 mais il y avait tout de même les membres de l'UCK dans le véhicule. Est-ce

8 que vous pourriez me dire tout d'abord si vous saviez que Bela Crkva était

9 le chef-lieu de l'UCK ?

10 R. Je savais qu'il y avait une certaine présence de l'UCK à Bela Crkva.

11 Q. Merci. Vous connaissez aussi un autre membre de votre mission, M. Frank

12 Letvic ?

13 R. En effet.

14 Q. Il était sur place. C'est lui qui a découvert tout cela. Je pense que

15 c'est lui qui vous a fait le rapport de tout ce qui s'est passé là-bas.

16 R. Je ne sais pas si c'est possible de relire le texte de ce rapport,

17 parce que je ne me souviens pas exactement de tout ce qui a été écrit et de

18 tout ce qui s'est passé à Bela Crkva au sujet de cet incident. Si vous

19 voulez bien me rafraîchir la mémoire, ce serait utile.

20 Q. Dans les documents que nous avons reçus du bureau du Procureur ne

21 figure pas le rapport de ce monsieur, M. Letvic. On y voit juste les

22 minutes de cette réunion. Ce que j'ai voulu, c'était juste de vous

23 demander, c'est de me confirmer l'identité de votre vérificateur. Mon

24 collègue, M. Sepenuk, a parlé de ce même document. Il a dit que c'était une

25 menace menant vers le terrorisme urbain.

26 Pourriez-vous me dire si de telles menaces se sont matérialisées dans les

27 endroits comme Podujevo, Urosevac et Mitrovica et les endroits similaires

28 où il y a eu des attaques à l'explosif ? A ces occasions-là, neuf personnes

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1 ont été tuées. Je vais, par exemple, vous rappeler Mitrovica, qui a eu lieu

2 le 13 mars 1999, quand une bombe a explosé dans un match en tuant et

3 blessant plusieurs personnes. Vous avez été informé de cela ?

4 R. Oui, je me souviens de cet incident à Mitrovica.

5 Q. Dans ce même "set" de documents se trouve le document MM/14. On y voit

6 le procès-verbal d'une visite que vous avez faite dans une maison où vous

7 avez rencontré Drini. C'était le 28 janvier. Vous avez parlé de la

8 possibilité d'arranger un bureau pour vous dans le village de Planeja, qui

9 est tout près de la frontière. A cette occasion-là, Drini a dit, dans son

10 dernier paragraphe : "Ecoutez, je ne suis pas sûr si je sais quel est le

11 délai définitif ou le dernier délai pour évacuer ce village." Est-ce que

12 vous pourriez nous donner qui a donné ce délai pour l'évacuation du

13 village ?

14 R. A plusieurs reprises, l'UCK, notamment, mais aussi les autorités du

15 Kosovo ont essayé d'établir des dates limites et de les définir. Ils

16 voulaient qu'on respecte ces dates limites. Nous, on leur a expliqué que

17 l'OSCE ne travaillait pas avec des dates limites imposées par les parties

18 sur le terrain.

19 M. CEPIC : [interprétation] M. Marcussen a un mot à dire.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Marcussen.

21 M. MARCUSSEN : [interprétation] J'ai seulement une clarification par

22 rapport à ce document dont parle mon éminent collègue.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il a parlé du dernier paragraphe.

24 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui, mais là on ne parle pas de ces délais.

25 Dans le dernier paragraphe, le sixième plutôt, au niveau du sixième alinéa,

26 je ne pense pas qu'on y parle de l'évacuation du village. On y parle d'une

27 date limite pour la Mission des observateurs du Kosovo d'évacuer un endroit

28 dans l'éventualité d'une attaque, puisqu'on s'attendait à ce qu'il y ait

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1 une attaque. Peut-être que l'on ne s'est pas très bien compris.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Où est-ce que cela se trouve, Monsieur

3 Cepic ?

4 M. CEPIC : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Référez-vous au dernier paragraphe,

6 Monsieur Marcussen, où il y a l'intitulé, les notes sur les discussions. Au

7 niveau du dernier paragraphe, le paragraphe sous petit D, on peut lire :

8 "Inconnu, mais conscient des dates limites pour quitter le village." Ceci

9 figure à la feuille 5 717.

10 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je pensais que c'était dans la dernière

11 pièce jointe au document. Je me suis trompé.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est la pièce MM/14.

13 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui, mais ensuite il y a plusieurs

14 documents qui sont joints à cet intercalaire.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est pour moi le dernier document que

16 j'ai sous l'intercalaire MM/14. Peut-être que chez moi ce n'est pas

17 présenté dans le même ordre. Ensuite, le document suivant que j'ai, c'est

18 14A.

19 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je me suis peut-être trompé. Je vous

20 remercie, en tout cas.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Tout va bien.

22 Monsieur Cepic, vous pouvez continuer.

23 M. CEPIC : [interprétation]

24 Q. J'imagine, Mon Général, que vous savez que les villages albanais au

25 niveau de la zone frontalière ont reçu l'ordre de l'UCK de partir, surtout

26 avant l'opération Strela qui devait être lancée à partir de l'Albanie en

27 direction de Djakovica et Prizren.

28 R. Je ne suis pas au courant de cela.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous avez une date pour

2 cela ?

3 M. CEPIC : [interprétation] Nous avons entendu des éléments par rapport à

4 cette période relevant de l'opération Strela. J'ai parlé de cela quand j'ai

5 contre-interrogé M. Zyrapi. C'était au début du mois d'avril, à l'époque où

6 M. Maisonneuve n'était pas encore au Kosovo, mais puisqu'on parle de la

7 population qui se déplace de l'Albanie, je voudrais savoir si le général en

8 avait connaissance, puisqu'il était présent à l'époque en Albanie.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Répondez.

10 Passez à autre chose parce qu'apparemment le témoin n'est pas au

11 courant.

12 M. CEPIC : [interprétation]

13 Q. Nous avons beaucoup entendu parler de l'usage exagéré de la force. Au

14 paragraphe 18 de votre déclaration, vous dites qu'en principe les ripostes

15 de l'armée et de la police, à partir du moment où elles étaient provoquées

16 et quand elles étaient provoquées, étaient exagérées par rapport à la

17 provocation en question. Ceci figure au niveau du paragraphe 18 de votre

18 déclaration.

19 R. Oui, je le vois.

20 Q. Vous conviendrez avec moi que les activités de l'UCK au Kosovo souvent

21 ressemblaient à des activités de sabotage, à des embuscades. Hier, par

22 exemple, vous avez décrit cet incident qui s'est déroulé le 8 janvier et

23 qui ressemblait ou avait les caractéristiques d'une action menée par des

24 rebelles, des combats de tranchées, attaques contre des bâtiments et

25 installations; est-ce exact ?

26 R. Oui.

27 Q. Hier, au cours de votre déposition, quand vous avez répondu à une

28 question posée par le Procureur, au niveau du compte rendu d'audience 51, à

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1 la ligne 11, vous avez dit que quand il s'agit de combattre les forces

2 terroristes rebelles, on a recours aux unités spéciales ou unités avec un

3 armement léger. Mais si vous n'avez pas d'unités spéciales et vous avez une

4 activité omniprésente de forces rebelles, est-ce qu'il n'est pas exact qu'à

5 la place, il faudrait utiliser les forces conventionnelles, tel que prévu

6 dans les règlements de service FM3 de l'armée américaine au point 9-37, où

7 l'on peut lire : "Les attaques terroristes souvent ont des effets

8 disproportionnés même quand elles agissent contre les forces

9 conventionnelles."

10 Ensuite, l'article 9-38 : "Le commandant qui combat les forces terroristes

11 organisées par des forces conventionnelles dans sa zone de responsabilité

12 va mener à bien des offensives et des attaques conventionnelles, et pas des

13 luttes antiterroristes."

14 R. Je ne sais pas quel est ce règlement de l'armée américaine à laquelle

15 vous faites référence, mais en tant que militaire, je dirais que pour

16 riposter ou répondre à une attaque terroriste, à partir du moment où ils

17 sont identifiés, il faut se poser la question de savoir si la vengeance est

18 possible. Mais en tant qu'officier, je demanderais tout de même à mes

19 troupes, à mes hommes de répondre et de riposter de façon proportionnelle,

20 c'est-à-dire adéquate, quel que soit le règlement.

21 Q. Je vais vous donner une situation. L'adversaire est bien fortifié dans

22 les tranchées. Comment peut-on neutraliser un ennemi fortifié de la façon

23 dans une région comme Dulje Stibe [phon] où ils étaient dans les tranchées

24 bien fortifiées, dans des bâtiments aussi, et ils tiraient sur des unités ?

25 Devant ces bâtiments, vous aviez un champ de mines, donc vous ne pouvez pas

26 demander aux forces d'infanterie de percer dans cette région. Dans cette

27 situation, vous devez avoir recours aux unités de blindés pour neutraliser

28 justement cette attaque dont vous êtes l'objet ?

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1 R. Dans le scénario que vous venez de décrire, il est hors de question

2 qu'on utilise des forces blindées, mais de toute façon ce n'est pas le

3 genre de scénario que j'ai jamais vu. Je n'ai jamais vu des ennemis dans

4 les tranchées comme cela. Ce que je voyais, c'étaient des tactiques

5 d'attaques suivies par des fuites. Ils étaient cachés, embusqués, bien sûr,

6 mais il n'est pas question de tranchées classiques. Là, je fais référence à

7 l'incident du 8 janvier.

8 Q. Puisque nous avons parlé des embuscades, je voudrais vous rappeler la

9 situation du 18 janvier 1999 qui a eu lieu à Dulje. Vous parliez d'un char,

10 il y avait ce char qui tirait sur le --

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourriez-nous donner le numéro de la

12 page ? Parce que vous allez un peu vite.

13 M. CEPIC : [interprétation] Il s'agit du compte rendu d'audience 5 784,

14 ligne 8.

15 Q. Vous avez dit qu'il y avait un char, hier, à la page 61 de votre

16 déclaration, et vous avez dit qu'il y avait plusieurs chars qui étaient en

17 activité.

18 M. CEPIC : [interprétation] En même temps, pourriez-vous, s'il vous plaît,

19 présenter au témoin la pièce P733 et la mettre sur l'écran ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Quelle est la date ?

21 M. CEPIC : [interprétation]

22 Q. Le 8 janvier 1999, trois policiers ont été tués et vous avez décrit

23 cette situation, cet incident. Vous avez dit hier qu'il y avait un char.

24 Avant, vous aviez parlé des trois chars, mais ce n'est pas cela que je

25 conteste, ce n'est pas la question que je me pose.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Attendez, on va vraiment procéder par

27 étapes.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je suis désolé, mais je

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1 ne me souviens même pas, vraiment pas s'il y avait un char ou plusieurs

2 chars. Je me souviens que mes hommes parlaient des chars qui tiraient sur

3 la ville ou sur la cité.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Comment est votre mémoire aujourd'hui

5 par rapport à ce quelle était en 2002 ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Evidemment, à l'époque, je me souvenais mieux.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

8 Continuez, Monsieur Cepic.

9 M. CEPIC : [interprétation] Je voudrais demander que le greffier d'audience

10 nous présente le document P733 et la page suivante, s'il vous plaît.

11 Q. Mon Général, nous avons le rapport de votre mission justement au sujet

12 de cet incident. Il s'agit de cet incident-là, mais aussi d'une action de

13 l'UCK qui a été condamnée. On parle aussi de la prise d'otages quand un

14 soldat a été kidnappé dans un autre endroit. Ce que j'essaie d'accentuer

15 ici, c'est le fait que l'armée yougoslave n'a pas riposté par la force. Au

16 contraire, on dit même qu'elle s'est restreinte d'agir. Est-ce que vous

17 acceptez la possibilité que l'information qui vous est parvenue du terrain

18 n'était pas exacte ?

19 R. En ce qui concerne les chars qui tiraient sur la ville, c'est

20 certainement vrai, puisque j'ai parlé avec le vérificateur qui s'est

21 entretenu effectivement avec le commandant qui se trouvait dans le char, il

22 lui a demandé d'arrêter. Les tirs se sont arrêtés. Ensuite, moi-même je

23 suis allé dans le village vérifier quels étaient les dégâts et j'ai parlé

24 avec les gens qui étaient dans le village.

25 M. CEPIC : [interprétation] Je vais demander que l'on présente en attendant

26 la pièce à conviction du Procureur P638.

27 M. MARCUSSEN : [interprétation] Est-ce que nous avons été prévenu de la

28 présentation de ce document ? Parce que je ne me souviens pas l'avoir vu

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1 hier. Je me souviens de quelques vidéos que vous avez mentionnées.

2 M. CEPIC : [interprétation] Je ne m'en souviens pas, mais en tout cas,

3 c'est une pièce du Procureur qui a été utilisée déjà en l'espèce.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous nous sommes mis d'accord que vous

5 alliez tout de même avertir le Procureur des documents que vous alliez

6 utiliser pour qu'il puisse se préparer. Vous savez, il y a beaucoup de

7 documents et il ne peut pas les avoir lus tous.

8 M. CEPIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

9 Q. J'imagine que votre vérificateur a prévenu un des officiers de l'armée.

10 Est-ce que vous savez que, sur la base de cette information sur ce

11 projectile de char qui aurait été tiré, le 3e Corps d'armée de l'armée

12 yougoslave a mené à bien une enquête pour vérifier si l'on avait

13 effectivement ouvert le feu ? Ceci a été fait au niveau du centre militaire

14 de Pristina. Ils en ont informé le quartier général de l'armée yougoslave,

15 et le résultat de cette enquête qui était vraiment complète et approfondie

16 a démontré qu'aucun projectile n'a été tiré. Ceci a été le résultat d'une

17 enquête approfondie ?

18 R. Je ne me souviens pas avoir reçu cette information.

19 Q. Merci.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Comment cette information vous est-

21 elle parvenue ? Est-ce que vous pouvez le montrer au général ?

22 M. CEPIC : [interprétation] Malheureusement, je ne peux pas lui présenter

23 ce document maintenant. Il n'est pas dans le système, mais je vais le

24 préparer pour la présentation des moyens de preuve de la Défense.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

26 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

27 Q. A présent, je voudrais aborder le paragraphe 18 de votre déclaration

28 préalable dans laquelle vous dites qu'il était clair que la police et

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1 l'armée yougoslave agissaient de façon séparée, mais qu'il était clair et

2 évident qu'il y avait une coopération élevée et soutenue entre les deux

3 entités. Là, je voudrais faire référence aux règlements de l'armée de terre

4 américaine, point 445, où on dit dans cette règle : "Dans le cadre des

5 opérations de lutte contre le terrorisme, quand il n'existait pas

6 suffisamment d'autorité et de commandement, les commandants collaborent,

7 négocient et élaborent des consensus pour aboutir à un effet suite aux

8 efforts coordonnés."

9 Est-ce que vous seriez d'accord que dans le cadre des activités de lutte

10 contre le terrorisme, il est absolument nécessaire que l'armée et la police

11 coopèrent ?

12 R. Absolument, absolument.

13 Q. Merci, Mon Général. Vous avez reçu beaucoup d'informations dans votre

14 centre régional. Je voudrais savoir si vous avez reçu des informations

15 quant à l'existence des camps d'entraînement militaire pour entraîner les

16 membres de l'UCK sur le territoire albanais le long de la frontière juste

17 en face de Prizren où on a formé ces membres de l'UCK par des formateurs

18 étrangers que l'on a infiltrés par la suite au Kosovo le long de la

19 montagne de Pastrik. Est-ce que vous avez appris cela ?

20 R. C'étaient des rumeurs, c'étaient des allégations. On disait que ces

21 camps existaient. Quand je suis allé en Albanie par la suite, je n'ai pas

22 eu la possibilité de visiter ou confirmer cette information.

23 Q. Mon Général, j'imagine que vous savez que dans un grand nombre de

24 villages, des municipalités de Prizren, Orahovac et Suva Reka qui se

25 trouvaient dans votre zone de responsabilité, on y a trouvé de grandes

26 quantités d'armes qui avaient été au préalable distribuées aux villageois

27 par l'UCK; il s'agit de plus que 50 villages ?

28 R. Je ne me souviens pas de cela de façon précise.

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1 Q. Est-il exact que les vérificateurs membres de votre mission se

2 rendaient souvent dans les villages habités par des Albanais pour discuter

3 avec la population dans les villages d'Orcusa, Zub-Damjane, Zub-Vrbnica, et

4 cetera, et que dans ces villages, ils parlaient surtout avec la population

5 de la stabilité qui était le problème principal ?

6 R. Mes vérificateurs se sont efforcés d'être très actifs, de parler avec

7 les deux parties pour déterminer le plus précisément quel était le contexte

8 dans le secteur sous ma responsabilité.

9 Q. Merci. Un de vos vérificateurs était M. Trevor Wilson, n'est-ce pas, un

10 Britannique ?

11 R. C'est possible. Ce nom ne me dit rien, car c'est le nom de David Wilson

12 qui me dit quelque chose, en revanche.

13 Q. Dans ce cas, nous n'allons pas insister. Est-il exact, Mon Général, que

14 vous dirigiez l'une des équipes qui s'est rendue auprès de toutes les

15 équipes de combat, de tous les groupes de combat dans votre secteur,

16 groupes de combat de l'armée yougoslave qui se trouvaient dans la région de

17 Dulje [phon] et Lapusnik et qu'aucun commentaire n'a été fait par ces

18 vérificateurs à la date du 24 janvier 1999 ?

19 R. En effet, je me suis rendu dans ces lieux en compagnie des autorités.

20 Q. Merci.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La vraie question était que les

22 vérificateurs n'ont pas eu de commentaires à faire. Que répondez-vous à

23 cela ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] En fait, les équipes de combat étaient

25 déployées dans le respect de l'accord, dans des lieux qui étaient

26 autorisés. Nous avons eu toute liberté de circulation pour nous rendre en

27 ces lieux en compagnie de commandants de l'armée yougoslave. C'est le

28 colonel Kotur qui m'a accompagné ce jour-là.

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1 M. CEPIC : [interprétation]

2 Q. Merci. Hier, il a été question de la zone frontalière. Vous savez que

3 pour se rendre dans la zone frontalière, il fallait au préalable obtenir

4 une autorisation officielle et avoir annoncé sa visite à l'officier de

5 liaison en raison des possibilités d'embuscades qui avaient lieu

6 fréquemment, de sorte que des mesures de sécurité soient mises en place;

7 ceci est-il exact ?

8 R. C'était la démarche que nous adoptions. Nous l'annoncions par le biais

9 de notre officier de liaison.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Là encore vous ne répondez pas à la

11 question. Je crois savoir que vous avez critiqué les dispositions prises

12 pour ce voyage dans la zone frontalière, et la question de Me Cepic vise à

13 laisser entendre que ces dispositions étaient justifiées en raison des

14 risques d'embuscades et de la nécessité de mettre en place des mesures de

15 sécurité. Que répondez-vous à cela ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Mon commentaire, c'est que sans aucun doute,

17 où qu'on soit au Kosovo, il y avait des risques d'embuscades, mais ce que

18 je pensais, c'était que la MVK était là pour vérifier la situation. Nous

19 circulions toujours à bord de véhicules de couleur orange, et j'estimais

20 que la sécurité des vérificateurs dans la zone frontalière était aussi

21 bonne que dans les autres régions du Kosovo. Je comprenais mal. En fait, je

22 pensais que les raisons avancées n'étaient pas conformes à la réalité de la

23 mission qui était la nôtre.

24 M. CEPIC : [interprétation]

25 Q. Merci. Mon Général, avez-vous appris que l'armée yougoslave et plus

26 précisément ces unités qui se trouvaient dans votre zone de responsabilité

27 n'avaient pas l'autorisation de leur hiérarchie supérieure pour organiser

28 cette visite dans la zone frontalière sans que l'officier de liaison en ait

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1 été informé ? Est-ce que peut-être vous avez été informé de cela ?

2 R. Oui.

3 Q. Vous savez que toute armée, y compris l'armée yougoslave, travaille sur

4 la base d'une hiérarchie, n'est-ce pas ?

5 R. Oui.

6 Q. Merci. Je pense aussi que vous saviez qu'une procédure conjointe était

7 en cours de préparation de la part de l'unité de l'armée yougoslave et de

8 la Mission de vérification du Kosovo, procédure censée régir les visites

9 dans cette zone particulière qui était la zone frontalière. C'est le

10 colonel Ciaglinski qui nous en a parlé. Est-ce que vous étiez au courant de

11 la préparation de cette procédure ?

12 R. Oui.

13 Q. Merci. Vous saviez, n'est-ce pas aussi, que vos vérificateurs ont

14 assisté à un grand nombre d'actions militaires, comme par exemple des

15 exercices de tir, des exercices de combat dans le but de sécuriser la zone

16 frontalière, des cérémonies diverses et des exercices et manœuvres

17 conjoints s'agissant de bien déterminer la nature de cette procédure qui

18 allait être mise en place, n'est-ce

19 pas ?

20 R. Il y a eu pas mal de coopération entre les vérificateurs et l'armée

21 yougoslave, en effet.

22 Q. Est-ce que vous avez eu l'impression que l'armée yougoslave

23 s'inquiétait de la sécurité de votre mission ?

24 R. Absolument.

25 Q. Merci. Reparlons maintenant du village de Planeja. Suis-je en droit de

26 dire qu'il était assez fréquent que vous receviez des informations erronées

27 et qu'ensuite vos patrouilles, une fois qu'elles se rendaient sur place,

28 constataient que la situation était tout à fait différente de celle qui

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1 était décrite par ces renseignements ? J'ai à votre intention l'exemple du

2 village de Planeja au sujet duquel les renseignements reçus étaient que le

3 20 janvier, le village avait été pilonné et pillé alors que vos

4 vérificateurs - cela est écrit dans le rapport de votre centre régional,

5 rapport d'activités quotidiennes pour le 29 janvier 1999 - il est dit dans

6 ce rapport qu'une patrouille de votre centre régional s'est rendue dans le

7 village, a circulé dans le secteur et a constaté que la vie se déroulait

8 tout à fait normalement et qu'il n'y avait eu aucun blessé, pas plus que la

9 moindre violation, contrairement à ce que j'ai dit tout à l'heure ?

10 R. Je pense que d'une façon générale, il arrivait très souvent que nous

11 recevions des renseignements qui étaient particulièrement précis et qu'au

12 moment où nous envoyions une patrouille sur place, nous n'avions pas encore

13 eu la possibilité de confirmer ces renseignements. Parfois, il n'y avait

14 pas de rapport de proportionnalité entre les renseignements et la réalité.

15 Dans les renseignements, la situation était édulcorée. Cela s'est passé à

16 plusieurs reprises. Dans le cas précis de Planeja le 29 janvier dont il est

17 question dans le rapport d'activités quotidiennes, je suis sûr que ce qui

18 est écrit dans ce texte correspond exactement à la réalité.

19 Q. Merci, Mon Général. Encore quelques questions. Ce qui m'intéresse,

20 c'est la chose suivante. Dans votre déclaration écrite ainsi que dans votre

21 déposition dans l'affaire Milosevic, il a été question de fusion entre la

22 KDOM et la Mission de vérification du Kosovo. Serais-je en droit de dire

23 que les membres de la KDOM américaine et de la KDOM européenne n'ont pas

24 été complètement intégrés à la MVK avant le 20 mars 1999, date à laquelle

25 la mission a quitté le Kosovo, et que ces deux instances agissaient

26 indépendamment de la Mission de vérification du Kosovo ?

27 R. Je crois que c'est une affirmation tout à fait exacte. Lorsque j'étais

28 sur place, certains membres de la KDOM américaine ont intégré mon

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1 commandement, mais je pense que d'autres ne l'ont pas fait. Vous avez

2 raison.

3 Q. Avez-vous reçu un rapport de la KDOM américaine signalant que durant

4 l'automne 1998 celle-ci avait procédé à une vérification des armes au sein

5 du Corps de Pristina et que tout s'était très bien passé ? Est-ce que vous

6 avez reçu ce rapport ?

7 R. Non.

8 Q. Merci. Hier, page 69 du compte rendu d'audience, il a été fait mention

9 de M. Delic et M. Loncar. Durant votre déposition, vous avez dit à

10 plusieurs reprises que l'armée yougoslave était une armée professionnelle

11 et que Delic et ses hommes n'agissaient que sur ordre. Vous avez, dans le

12 paragraphe 29 de votre déclaration écrite, dit également que Delic se

13 comportait de façon professionnelle, ainsi qu'en page 69 du compte rendu

14 d'audience où Delic dit que Loncar n'est pas son commandant, mais qu'il est

15 un officier de liaison. Dans votre armée existe-t-il une procédure

16 particulière à cet effet ?

17 R. S'agissant des officiers de liaison, Maître Cepic ?

18 Q. Un instant, laissez-moi finir ma question parce que ce qui m'intéresse

19 est autre chose. Existait-il une procédure au sein de votre armée et

20 d'autres armées également, notamment les armées de l'OTAN, une procédure

21 indiquant que les officiers ne peuvent pas décider de leur propre chef des

22 activités qui se dérouleront dans le secteur sous leur responsabilité et

23 qu'ils ne peuvent prendre leurs ordres qu'auprès des autorités faisant

24 partie de leur hiérarchie supérieure, qu'ils ne peuvent pas prendre leurs

25 ordres auprès de civils, donc que la chaîne de commandement doit demeurer

26 intacte ?

27 R. Je dirais que ce n'est pas toujours absolument le cas. De façon

28 générale, vous avez raison. La chaîne de commandement, bien sûr, doit

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1 demeurer intacte, et la raison pour laquelle j'émets quelques réserves,

2 c'est qu'il arrive de temps en temps que des officiers reçoivent ce qu'on

3 pourrait appeler des ordres provenant de la hiérarchie locale de la région

4 pour opérer dans certains secteurs. Est-ce que je suis clair ?

5 Q. Mais la chaîne de commandement est inviolée, en tout état de cause,

6 comme c'est le cas dans toutes les armées, n'est-ce pas ? C'était cela, ma

7 question.

8 R. Je dirais que de façon générale, cette affirmation s'applique.

9 M. CEPIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Poursuivez, j'aimerais entendre la

11 question suivante.

12 M. CEPIC : [interprétation]

13 Q. Dans ce cas particulier, la chaîne de commandement est demeurée

14 intacte, n'est-ce pas ? Elle n'a pas été violée. Je parle de la situation

15 que vous avez décrite s'agissant de Delic et de Loncar. Veuillez répondre

16 avec des mots pour le compte rendu d'audience, je vous prie.

17 R. Oui, je pense que c'était le cas. Je pense que ce que le colonel Delic

18 me disait, c'est que le général Loncar n'avait pas compétence, n'était pas

19 habilité à prendre ce genre de décision.

20 Q. Merci beaucoup, Général Maisonneuve.

21 R. Merci.

22 Q. Je termine mon interrogatoire en anglais, puisque vous aviez commencé

23 en serbe, pour votre part.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Hier, sur ce même sujet, j'ai eu

25 l'impression que vous estimiez que Loncar avait sa place quelque part dans

26 la chaîne de commandement.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Mon impression, ce que je pensais, c'est peut-

28 être une erreur que j'ai commise à l'époque, j'avais l'impression que le

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1 général Loncar s'était vu déléguer le pouvoir de coordonner les actions de

2 l'armée yougoslave sur le théâtre des opérations du Kosovo. Par conséquent,

3 je pensais que sans doute par la chaîne de commandement normale à partir du

4 commandant de Corps d'armée, il pouvait prendre des décisions ou garantir

5 un certain nombre d'autorisations.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais c'est la première fois, je dois

7 dire, que j'entends quelqu'un dire qu'il avait l'impression qu'il faisait

8 partie de la chaîne de commandement. Jusqu'à présent, j'avais l'impression

9 qu'un officier de liaison était un intermédiaire et n'avait pas de

10 responsabilités particulières. La plupart du temps, on nous parle d'un

11 officier de liaison comme étant - comment est-ce que je pourrais appeler

12 cela - une espèce de médiateur. En tout cas, on me dit que son rôle est

13 exclusivement un rôle de liaison.

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, nous appelons cela,

15 dans mon armée en tout cas, un rôle de coordination. S'il a le même grade

16 que le commandant du Corps d'armée, manifestement il ne dirige pas le Corps

17 d'armée. Dans mon armée en tout cas, qui est une armée de métier, il est

18 chargé d'une action en rapport direct avec la chaîne de commandement. Il

19 doit transmettre les renseignements, assurer la coordination avec la MVK,

20 transmettre les renseignements au commandant du Corps d'armée de façon à ce

21 que les décisions soient prises en bonne et due forme. Beaucoup dépend du

22 pouvoir qui lui est délégué et de la nature exacte de son mandat.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais Delic vous a dit : "Je suis

24 colonel, mais c'est tout de même ma parole qui prévaut sur celle de

25 Loncar."

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Delic m'a dit quel était le rôle de Loncar,

27 qu'il n'était qu'officier de liaison et qu'il ne pouvait pas donner

28 d'ordres directs à Delic.

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1 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'aimerais maintenant que nous

3 parlions des objections soulevées hier par rapport à certains passages de

4 cette déposition. J'aimerais vous communiquer la décision de la Chambre.

5 Une requête a été déposée par écrit par la Défense, requête que nous

6 n'avons reçue qu'après le début de la matinée hier et qui nous demandait

7 d'exclure un certain nombre de passages de la déposition de ce témoin. Nous

8 avons également entendu des arguments oraux sur cette question de la part

9 des deux parties. J'ai rendu une décision temporaire pour que le contre-

10 interrogatoire puisse se mener selon certaines consignes en signalant que

11 la décision définitive serait formalisée durant la soirée et serait rendue

12 ce matin. A l'heure actuelle, la Chambre est en mesure de rendre sa

13 décision sur la recevabilité du témoignage de ce témoin.

14 Parlons d'abord de la déclaration préalable du témoin. La déclaration

15 préalable du témoin est admise, à l'exception du paragraphe 34. Je parle

16 maintenant du compte rendu d'audience de l'affaire Milosevic qui est admis,

17 moins les passages suivants qui ne sont pas admis : page 5 768, lignes 8 à

18 10; page 5 787, lignes 9 à 18; page 5 795, ligne 8 à page 5 796, ligne 23;

19 page 5 797, lignes 14 à 25; page 5 800, ligne 8 à 5 805, ligne 14; page

20 5 840, ligne 22, à page 5 848, ligne 11; page 5 849, ligne 8 à page 5 853,

21 ligne 16; page 5 855, ligne 15 à page 5 892, ligne 5; et page 5 903, ligne

22 23 à page 5 909, ligne 19.

23 S'agissant des pièces à conviction, les décisions que j'ai rendues se

24 limitaient à celles qui faisaient l'objet d'une mesure d'exception, ce qui

25 est décrit au paragraphe 4(B) de la requête aux fins d'exclusion de

26 certaines portions de la déposition. MM/7 n'est pas admis; MM/8 est admis;

27 MM/13 n'est pas admis; MM/13A est admis, à l'exception du passage

28 d'évaluation que l'on trouve en page 2 et qui lui, n'est pas admis; MM/13B

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1 n'est pas admis.

2 S'agissant de MM/15 et MM/16, la Chambre accepte les arguments de la

3 Défense stipulant que ces documents sont très comparables à "As Seen, As

4 Told" et "Under Orders", que la Chambre a considérés utiles sur le plan

5 juridique, mais dont elle a tout de même rejeté la recevabilité en tant que

6 pièces à conviction au titre de son pouvoir discrétionnaire établi par

7 l'article 89(C) du Règlement en vertu d'un défaut de fiabilité s'agissant

8 d'éléments de preuve par ouï-dire. Cette décision a été rendue le 1er

9 septembre 2006. Pour des raisons tout à fait comparables, la Chambre, après

10 avoir examiné les documents ci-dessus, en refuse l'admission en tant

11 qu'éléments de preuve.

12 Je tiens maintenant à donner quelques détails au sujet du raisonnement qui

13 a précédé à cette décision. Comme cela est écrit dans la décision relative

14 à l'application de l'article 73 bis émise le 12 juillet, la Chambre a

15 retiré les accusations relatives à Racak de l'acte d'accusation et ne

16 rendra donc pas un verdict au sujet des meurtres présumés en ce lieu au

17 moment du prononcé de son jugement définitif. Par conséquent, les parties

18 devraient ajuster leur présentation d'éléments de preuve sur cette décision

19 de la Chambre, notamment s'agissant de supprimer les références aux

20 meurtres présumés de Racak le 15 janvier 1999.

21 Les questions potentiellement pertinentes par rapport à l'acte

22 d'accusation eu égard à Racak peuvent inclure les éléments qui suivent : la

23 coordination entre l'armée yougoslave et le MUP dans les alentours de Racak

24 en janvier 1999, le commandement et le contrôle de l'armée yougoslave et du

25 MUP dans le même secteur pour la même période, les activités de l'OSCE et

26 de la MVK dans le même lieu et dans la même période et le recours

27 disproportionné à la force dans ce secteur en janvier 1999, ainsi que,

28 s'agissant de cette dernière question, la présence et les effectifs de

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1 l'UCK dans les environs de Racak en janvier 1999. En d'autres termes, les

2 parties sont invitées par la Chambre à traiter de questions pertinentes et

3 appelées à explorer ces questions pour, si tout va bien, ajouter aux

4 connaissances que la Chambre peut en avoir de façon significative quant à

5 déterminer qui a été ou n'a pas été tué à Racak le 15 janvier 1999.

6 Si les parties décident de présenter d'autres éléments de preuve par

7 rapport à Racak, il faut que ces éléments, si possible, correspondent le

8 plus exactement possible aux questions que je viens de citer.

9 Ayant dit cela et étant donné que nous avons regardé de près les comptes

10 rendus d'audience en particulier, il est possible qu'il y ait des passages

11 qui aient fait l'objet d'objections et que la Défense souhaite rétablir

12 dans le texte pour en assurer un meilleur équilibre. Nous avons beaucoup

13 pensé à cela en détaillant le texte avant de définir notre position de la

14 façon la plus équitable qui soit. Il est possible qu'il y ait des passages

15 que nous avons exclus - j'ai des passages très précis à l'esprit - il est

16 possible qu'il y en ait donc que nous ayons exclus et qui puissent avoir

17 l'air d'être favorables à la Défense, mais qui sont davantage des discours

18 que des réponses précises. Nous nous sommes efforcés au plus près d'assurer

19 un équilibre équitable dans ce que nous rejetions et ce que nous

20 admettions, mais nous acceptons toute demande de restauration d'un passage

21 dont l'exclusion pourra être jugée préjudiciable à la Défense si celle-ci

22 est de cet avis.

23 Ayant dit cela, Maître Cepic, est-ce que vous avez d'autres questions

24 pour votre contre-interrogatoire de M. Maisonneuve ?

25 M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre autorisation,

26 j'aimerais au préalable pouvoir relire le compte rendu du contre-

27 interrogatoire mené par Me Ivetic par moi-même, mais je crois que je

28 n'aurai pas d'autres questions. Cela étant, je préférerais vérifier.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quand nous aurons terminé le contre-

2 interrogatoire de l'autre conseil de la Défense, je vous donnerai la

3 possibilité de vous exprimer à nouveau sur ce sujet. Est-ce que vous êtes

4 le seul conseil qui a encore des questions ?

5 M. CEPIC : [interprétation] Je ne crois pas.

6 M. FILA : [interprétation] J'ai quelques questions, Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic ou Maître Fila,

8 d'abord ?

9 M. FILA : [interprétation] C'est moi qui commencerai.

10 Contre-interrogatoire par M. Fila :

11 Q. [interprétation] Monsieur, bonjour. Je m'appelle Toma Fila. Je suis le

12 conseil de la Défense de Nikola Sainovic. Au paragraphe 9 de votre

13 déclaration écrite ainsi que durant votre déposition orale hier, compte

14 rendu d'audience, page 36, lignes 1 à 5, vous affirmez avoir rencontré une

15 fois Sainovic et avoir été accompagné à cette rencontre par M.

16 l'Ambassadeur Keller qui présidait cette réunion, n'est-ce pas ?

17 R. C'est exact.

18 Q. La réunion a été très brève, elle a duré moins d'une heure, n'est-ce

19 pas ?

20 R. D'après mon souvenir, c'est le cas, en effet.

21 Q. Sainovic n'a pas été le seul à prendre la parole; tous les participants

22 se sont exprimés, n'est-ce pas ?

23 R. Exact.

24 Q. Sur la base de cette courte rencontre et de cette brève prise de

25 parole, vous dites avoir acquis le sentiment que Sainovic était un homme

26 très policé, bien informé et qu'il était autorisé à agir. C'est à peu près

27 ce que vous avez dit et c'est ce dont nous allons parler maintenant. Vous

28 avez dit, répondant à une question du Procureur, page 36, lignes 16 à 20 du

Page 11163

1 compte rendu d'audience, que vous ne vous rappeliez pas l'avoir vu

2 consulter qui que ce soit durant cette réunion; est-ce que c'est exact ?

3 R. C'est exact. Je m'efforçais de me faire une impression de cet homme.

4 Q. Merci. Est-ce que vous êtes au courant que suite à l'accord Milosevic-

5 Holbrooke que personne n'a eu sous les yeux jusqu'à présent, mais

6 apparemment il existe, donc êtes-vous au courant que suite à cet accord et

7 par décision du gouvernement yougoslave signée par son président Momir

8 Bulatovic, Nikola Sainovic a été nommé président de la Commission fédérale

9 chargée de la coopération avec l'OSCE, autrement dit de la coopération avec

10 vous, et qu'à l'article 2 de ce document qui est le document de la Défense

11 2D108 -- je l'ai montré tellement souvent que vous allez tous en avoir

12 assez, je pense.

13 Mais en tout cas, ce document signale que Sainovic est bien informé,

14 qu'il est capable de suivre l'évolution de la situation et qu'il est chargé

15 d'assurer votre sécurité. Cette commission a ces attributions, pas lui

16 personnellement. Cela, c'était le 16. Le document est signé par le ministre

17 des Affaires étrangères, le ministre de l'Intérieur, et cetera, et le

18 général Loncar est également signalé comme faisant partie, comme étant

19 membre de cette commission. Etes-vous au courant de l'existence de cet

20 organisme et savez-vous que Nikola Sainovic présidait cette commission ?

21 R. Pas dans le détail, mais je sais que M. Sainovic avait pour

22 responsabilité particulière la coordination sur le théâtre des opérations

23 du Kosovo.

24 Q. Je voulais vous demander la chose suivante : est-ce que ceci explique

25 l'impression que vous avez eue quant aux attributions qui étaient les

26 siennes et au poste qu'il occupait ?

27 R. Sans aucun doute, en effet, oui.

28 Q. Merci. Monsieur, en tant qu'officier, vous vous battez avec des

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1 munitions. Pour notre part, nous nous battons avec des mots, et les mots

2 peuvent parfois tuer plus sûrement que des balles. C'est la raison pour

3 laquelle je vous pose ces questions; pas parce que j'ai plaisir à vous les

4 poser, mais parce que j'en ai le devoir. Le Procureur a souhaité créer une

5 impression différente, bien entendu.

6 Je suppose que vous savez que ce n'était pas la première réunion que

7 présidait Keller, celle où il a rencontré Sainovic, et que les deux hommes

8 ont eu des contacts nombreux. Je parle de Keller et de Sainovic.

9 R. J'imagine que c'était le cas, en effet.

10 Q. Je suppose et j'espère que vous savez que l'ambassadeur Keller était

11 davantage au courant des attributions exactes de Sainovic que vous-même.

12 R. Je suis sûr de cela, en effet.

13 Q. Par conséquent, conviendrez-vous avez moi, sans perdre de vue ce que

14 savait l'ambassadeur Keller en tant que président de la réunion,

15 conviendrez-vous avec moi que ces deux hommes connaissaient leurs

16 attributions respectives et qu'au cours de ces réunions, Sainovic n'avait

17 aucune nécessité de consulter qui que ce soit, n'est-ce pas ?

18 R. Je pense que c'est exact, en effet.

19 Q. Je vous remercie. J'aimerais maintenant vous interroger au sujet de

20 quelque chose d'autre qui porte sur le contexte. Par pure curiosité, à un

21 certain moment hier, vous avez dit que vous aviez rencontré deux Albanais

22 et qu'il y avait des Albanais qui assuraient votre sécurité personnelle,

23 des réfugiés. Pouvez-vous nous dire dans quelle mesure concrète ils

24 assuraient votre sécurité ? Quand vous aurez répondu à cela, pourriez-vous

25 me dire si d'autres représentants internationaux avaient des Albanais comme

26 agents de sécurité ? Si oui, est-ce que ces Albanais étaient armés ? Je

27 vous remercie.

28 R. Non, ils n'étaient pas armés. C'étaient des gens de la région qui

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1 étaient chargés d'assurer la sécurité physique de nos bâtiments.

2 Q. Je vous prie de m'excuser, je me suis assis. C'était discourtois à

3 votre égard. Veuillez poursuivre.

4 R. Non, non, ils n'étaient pas armés. Ils étaient chargés de la sécurité

5 physique des bâtiments, ils patrouillaient, voyez-vous, autour du QG,

6 davantage pour des raisons de sécurité physique que pour s'opposer à une

7 quelconque attaque armée. C'étaient des gens de la région qui étaient là

8 pour empêcher les vols et ce genre de chose, des civils de la région qui

9 étaient employés par nous dans ce but.

10 M. FILA : [interprétation] Monsieur le Président, j'en ai terminé. Je vous

11 remercie.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Maître Fila.

13 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, à vous.

15 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

16 Contre-interrogatoire par M. Ivetic :

17 Q. [interprétation] Bonjour, Général. Je m'appelle Dan Ivetic et je

18 représente Sreten Lukic. J'ai quelques questions à vous poser aujourd'hui

19 et je vais vous demander de prêter une attention précise à mes questions de

20 façon à y répondre le plus exactement et de la façon la plus véridique qui

21 soit. Puisque nous parlons la même langue, les interprètes m'ont demandé de

22 me rappeler et de vous rappeler qu'il nous faut absolument ménager une

23 pause entre la fin des questions et le début des réponses de façon à leur

24 permettre de travailler. Je m'efforcerai de ne pas perdre cette nécessité

25 de vue.

26 D'abord, Monsieur, nous avons entendu parler de votre carrière militaire

27 avant que vous ne deveniez le numéro deux de la Mission de vérification de

28 l'OSCE au Kosovo-Metohija. Suis-je en droit de dire que votre carrière ne

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1 comporte aucun moment où vous ayez travaillé en tant qu'officier de police

2 civile, à quelque titre que ce soit ?

3 R. C'est exact.

4 Q. Merci, Monsieur. Par ailleurs, suis-je en droit de dire que vous n'avez

5 pas eu de formation de policier ou de formation ultérieure à l'enseignement

6 secondaire ?

7 R. C'est exact.

8 Q. Lors de votre formation pour participer à la Mission de l'OSCE, de la

9 MVK, vous n'aviez pas l'intention d'être un vérificateur policier ? Vous

10 n'avez reçu aucune formation de policier particulière lorsqu'on vous a

11 préparé à votre envoi au Kosovo, n'est-ce pas ?

12 R. Non, en effet.

13 Q. D'accord. Est-ce qu'il y avait d'autres personnes au sein de la MVK de

14 l'OSCE qui étaient des observateurs et vérificateurs plus particulièrement

15 policiers ? Il y en avait, n'est-ce pas ?

16 R. C'est exact.

17 Q. Est-ce que vous savez quel était le pourcentage de vérificateurs

18 policiers de la MVK et s'ils avaient eu une formation ou en entraînement

19 particulier à la loi et aux règlements de police, au préalable ?

20 R. Je ne saurais vous dire un pourcentage, mais j'en avais plusieurs dans

21 mon centre régional.

22 Q. Merci. J'attends que le compte rendu d'audience rattrape mes propos.

23 J'aimerais que nous parlions maintenant de l'accord que vous avez eu

24 pour tâche de vérifier, accord conclu aux environs du mois d'octobre 1998.

25 S'agissant de ces accords, suis-je en droit de dire qu'ils ont été négociés

26 surtout avant l'arrivée de la MVK et votre arrivée, disons au moment de

27 l'arrivée de la KDOM américaine qui a participé au processus de

28 négociation ?

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1 R. C'est exact.

2 Q. S'agissant de l'accord et du nombre des policiers et du personnel du

3 MUP dont la présence serait autorisée au Kosovo, suis-je en droit de dire

4 que le chiffre central qui a été établi tournait aux environs de 10 000

5 pour les effectifs du MUP autorisés sur place ?

6 R. Je dois dire que je ne me rappelle pas le chiffre exact qui a été

7 négocié ou qui a fait l'objet de l'accord, mais c'est un chiffre que j'ai

8 entendu à plusieurs reprises avant cette date.

9 Q. [aucune interprétation]

10 R. En tout état de cause, il y avait un chiffre fixé.

11 Q. D'accord. Vous rappelez-vous si ce chiffre fixé par la KDOM américaine

12 qui avait participé au processus de négociation avec les autorités serbes,

13 est-ce que c'est la KDOM américaine qui a déterminé ce chiffre et est-ce

14 qu'il a été communiqué à la MVK ?

15 R. Encore une fois, je crois que cela a été le cas. Cela semble

16 raisonnable.

17 Q. Bien. Sur la base des renseignements que vous avez obtenus ou que la

18 MVK a obtenus après la mise en œuvre de l'accord, le MUP serbe a respecté

19 cet accord et réduit le nombre de troupes au Kosovo, n'est-ce pas ?

20 R. Ce que je puis vous dire, c'est qu'alors que je me trouvais sur le

21 terrain moi-même, je n'ai personnellement vu aucun renforcement de la

22 présence du MUP au Kosovo venant de l'extérieur du Kosovo.

23 Q. Je vous remercie. S'agissant des observateurs de la MVK, ai-je raison

24 de dire, puisque vous avez parlé de rapports qui étaient parfois exagérés,

25 modifiés, mais s'agissant des observateurs, est-ce que vous avez constaté

26 que certains d'entre eux manquaient d'expérience et se fondaient sur des

27 informations indirectes ? Est-ce que cela posait des problèmes ?

28 R. Je dirais que cela n'arrivait pas fréquemment. En fait, dans le cadre

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1 de la formation que nous avons dispensée aux observateurs dans le cadre de

2 nos rapports quotidiens, nous avons fait en sorte qu'ils ne soient pas

3 émotionnellement impliqués et qu'ils ne cherchent pas à édulcorer la

4 situation.

5 Q. Je vous remercie, Monsieur. Je souhaiterais maintenant que nous

6 parlions brièvement de Racak. Je m'efforcerai de limiter mes questions aux

7 consignes données par la Chambre de première instance.

8 Tout d'abord, en ce qui concerne les activités de la MVK, avant

9 l'opération menée à Racak visant à arrêter, à démanteler les groupes de

10 l'UCK et ayant participé à des attaques ou à des meurtres dans la région,

11 il est dit que les policiers de la région à Stimlje non seulement ont

12 informé à qui de droit que l'opération allait être menée, mais ont indiqué

13 qu'ils allaient procéder à l'arrestation de certaines personnes à Racak.

14 Cela a donné lieu à des débats avec le personnel de la MVK local, y compris

15 David Meyer. Est-ce que vous avez connaissance de cela ?

16 R. Non, mais ceci ne relevait pas de mes attributions. Si des négociations

17 avaient eu lieu, c'était avec le centre régional compétent.

18 Q. Vous deviez vous fier à ceux qui prenaient part à ce processus ?

19 R. Oui.

20 Q. Merci. Si ces notifications et discussions étaient en cours, c'était

21 conformément à l'accord dont la MVK vérifiait la mise en œuvre, n'est-ce

22 pas ?

23 R. Cet aspect de coordination avait bien lieu. Les observateurs étaient de

24 la communauté internationale, étaient impliqués, et je pense que tout cela

25 se déroulait dans le respect de l'accord conclu.

26 Q. Nous avons entendu certains témoignages en l'espèce et vu certains

27 éléments de preuve dont nous disposons d'une pièce qui a été mentionnée

28 dans le cadre de votre contre-interrogatoire par Me Sepenuk, il s'agit d'un

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1 élément de preuve présenté par l'adjudant Christopher Clark, l'un des

2 observateurs sur le terrain qui a parlé des notifications et de la

3 notification qui a été communiquée avant Racak. Il a dit que la MVK avait

4 l'intention d'installer plusieurs véhicules à bord desquels se trouvaient

5 des observateurs sur le théâtre des opérations afin d'observer la

6 situation. Ces ordres ont bien été donnés, mais deux véhicules de la MVK

7 n'ont pas quitté le poste de police de Stimlje, et on a donc désobéi aux

8 instructions qui avaient été données. Est-ce que vous êtes au courant de

9 cela ?

10 R. Non.

11 Q. Merci.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Maisonneuve, comment vous

13 êtes-vous retrouvé à participer aux événements de Racak, étant donné que

14 cela ne relevait pas de vos attributions, cela ne se trouvait pas dans

15 votre secteur ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela se trouvait à la frontière entre mon

17 secteur de responsabilité le centre régional. A l'époque, le centre

18 régional en question n'avait qu'un adjoint. Le général DZ m'a donc demandé

19 de me rendre sur les lieux en compagnie de certains de mes propres

20 vérificateurs afin de prendre le contrôle de la situation.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Une autre question à laquelle vous

22 avez peut-être répondu hier. A quelle date êtes-vous parti en permission ?

23 Vous n'étiez pas présent lorsque la mission s'est retirée aux alentours du

24 20 mars ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que c'est le 15 mars ou vers cette

26 date, quelques jours avant la fin.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous êtes resté sur place jusqu'au 15

28 mars environ ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Selon vous, il n'y a pas eu renfort

3 des forces du MUP à l'extérieur du Kosovo ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas au courant de cela.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

6 Maître Ivetic, poursuivez.

7 M. IVETIC : [interprétation] Merci.

8 Q. Savez-vous que le colonel Mijatovic, l'officier de liaison du MUP

9 auprès de la MVK, a été chargé de surveiller les notifications ou vérifier

10 les notifications concernant Racak et informer le QG de la MVK le matin de

11 l'opération ?

12 R. Je n'étais pas au courant de cela.

13 Q. Si une notification a été envoyée au QG de la MVK à Pristina, en

14 principe vous n'étiez pas censé en être informé ?

15 R. Au centre régional de Pristina, centre numéro 5.

16 Q. Merci. Je souhaiterais que l'on précise votre déposition au sujet de

17 l'incident qui s'est déroulé à Rogovo, dans la municipalité de Djakovica.

18 Tout d'abord, ai-je raison de dire que vous avez pu vérifier avec

19 certitude le fait que la plupart des morts étaient des combattants de l'UCK

20 actifs ?

21 R. Oui.

22 Q. Les tirs opposant l'UCK et les forces serbes se sont produits vers 6

23 heures du matin ou à l'aube, en tout cas ?

24 R. Je pense que dans les rapports, il est question d'échanges de coups de

25 feu. Tout cela a été constaté par les observateurs ou les vérificateurs

26 eux-mêmes. Vers 10 heures du matin, une action était en cours. Les

27 vérificateurs sur le terrain, je pense, n'étaient pas sur les lieux à 6

28 heures et demie du matin, mais ils ont entendu de la bouche des villageois

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1 qu'une action avait été menée ce matin également.

2 Q. En tout état de cause, ces combats se sont prolongés.

3 R. Oui. Je pense que oui.

4 Q. Savez-vous à quelle heure vous êtes arrivé sur place ?

5 R. Oui, je suis arrivé vers midi ou juste après-midi, vers une heure de

6 l'après-midi.

7 Q. Lorsque vous êtes arrivé et par la suite, une enquête détaillée qui

8 s'est prolongée pendant le restant de la journée a été menée par les

9 autorités serbes, n'est-ce pas ?

10 R. C'est exact.

11 Q. Est-ce que vous savez grosso modo combien de temps cette enquête a eu

12 lieu ?

13 R. Toute la journée, c'est certain. Peut-être que l'enquête s'est

14 poursuivie ultérieurement. Nous avons cherché à obtenir les résultats de

15 cette enquête nous-mêmes.

16 Q. La MVK a reçu un rapport détaillé de l'officier de liaison du MUP et du

17 général Loncar au sujet de cet incident et de l'enquête qui avait été menée

18 à ce sujet, n'est-ce pas ?

19 R. Je pense que le général Loncar se trouvait sur le terrain à Rogovo à ce

20 moment-là en même temps que moi. Je pense qu'un rapport a effectivement été

21 communiqué, mais je ne me souviens pas l'avoir vu personnellement.

22 Q. Bien. Encore, cette transmission de rapport de la part du MUP serbe au

23 sujet de l'incident était conforme aux différents accords en vigueur à ce

24 moment-là ?

25 R. Oui.

26 Q. Merci. S'agissant de cet incident et de vos observations personnelles à

27 ce sujet -- ou plutôt, je me reprends.

28 Vous ne pouviez pas distinguer entre les différentes forces en

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1 présence, les forces du MUP, j'entends, vous ne pouviez pas dire quelles

2 étaient les différentes unités impliquées, n'est-ce pas ?

3 R. J'ai pu constater qu'ils portaient différentes tenues. Certains

4 portaient des tenues camouflées bleu foncé, d'autres des tenues marron, des

5 sortes de combinaisons de couleur grisâtre. Voilà tout ce que j'ai pu

6 constater sur le terrain.

7 Q. S'agissant de ces combinaisons de couleur grise, suis-je en droit de

8 dire que les personnes qui déplaçaient les corps et prenaient des

9 photographies étaient celles qui portaient ces combinaisons de couleur

10 grise ainsi que des gants jetables en plastique ?

11 R. Certaines de ces personnes étaient présentes également sur les lieux.

12 Mes vérificateurs ont vu le cadavre d'un membre du MUP qui portait lui

13 aussi une combinaison de couleur grise.

14 Q. Dans votre déclaration préalable, page 3, Mon Général, vous dites qu'à

15 l'époque, au sein de la MVK, le général DZ avait rencontré plusieurs fois

16 le général Sreten Lukic. Vous avez remplacé le général DZ à trois occasions

17 au cours desquelles le général Lukic avait lui-même été remplacé par le

18 général Mijatovic. Voilà ma question : savez-vous, comme l'a indiqué le

19 général DZ dans le cadre de sa déposition, que le général Loncar et le

20 général Ciaglinski se rencontraient à l'occasion de réunions portant sur la

21 coopération avec la MVK ? Le général Lukic n'assistait pas à ces réunions,

22 il n'était pas membre de cette commission, le saviez-vous ?

23 R. Je ne sais pas pourquoi il n'était pas présent. Je me contentais d'être

24 en rapport avec le colonel Mijatovic. Cela me suffisait.

25 Q. Lorsque vous avez rencontré Mijatovic, est-ce que vous avez trouvé

26 qu'il faisait montre d'un esprit de coopération ?

27 R. Oui.

28 Q. Merci. Dans votre déclaration, vous parlez du général Lukic. Vous dites

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1 qu'il était général de Corps d'armée, mais je pense qu'il était seulement

2 général de division ou général de brigade, à l'époque. En fait, vous ne

3 saviez pas vraiment qui était M. Lukic, n'est-ce pas ?

4 R. Vous avez raison.

5 Q. Merci. S'agissant du MUP, annexe MM/23 et plus particulièrement annexe

6 A, inutile d'entrer dans les détails, j'essaie simplement de déterminer

7 d'où viennent ces informations.

8 A l'annexe A, je constate que les informations concernant le MUP à

9 l'extérieur de Prizren ne sont pas très détaillées. On trouve seulement le

10 nom de quelques individus. Est-ce que vous conviendrez avec moi qu'hormis

11 les personnes avec lesquelles vous étiez en contact à Prizren, vous

12 connaissiez mal les personnes à l'extérieur de ce secteur et le rôle

13 qu'elles jouaient au sein du MUP ?

14 R. Vous avez raison de dire cela.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, excusez-moi, mais je

16 n'ai pas de document portant la réponse MM/23.

17 M. IVETIC : [interprétation] Excusez-moi, c'est peut-être MM/2B.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] 2B.

19 M. IVETIC : [interprétation] Excusez-moi, mais je n'arrive pas à relire mon

20 écriture.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

22 M. IVETIC : [interprétation]

23 Q. Revenons quelques instants à Sreten Lukic, si vous le voulez bien. Vous

24 le connaissiez mal. Ai-je raison de dire que vous n'avez jamais eu

25 l'occasion de voir de documents officiels dans lesquels ont été décrites

26 les fonctions et les attributions du général Lukic ?

27 R. C'est exact.

28 Q. Pour autant que vous le sachiez, vous n'avez jamais rencontré Sreten

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1 Lukic ?

2 R. C'est exact.

3 Q. Merci. Dans l'annexe MM/2 de votre déclaration, au paragraphe 6 de

4 cette même déclaration, vous dites que vous faisiez rapport en détail à la

5 MVK de Pristina, notamment au centre Fusion. Vous dites que c'était un trou

6 noir. Qu'entendez-vous par là ?

7 Est-ce que vous avez pensé que les informations concernant les

8 agressions de l'UCK ou les violations de la part de l'UCK étaient

9 ignorées ?

10 R. Non, ce n'est pas ce que je voulais dire. Je voulais dire que parfois,

11 nous avons constaté qu'il n'y avait pas vraiment de retour par rapport aux

12 informations que nous avions communiquées. Il s'agissait essentiellement

13 d'un échange d'informations unilatéral.

14 Q. A la page 6 de votre déclaration, au troisième paragraphe en partant du

15 haut, vous dites que votre homologue au sein du MUP à Prizren, le colonel

16 Vojnovic, était préfet adjoint et chef de la police. Sur quoi vous fondez-

17 vous pour affirmer cela ?

18 R. En fait, je ne sais pas où j'ai obtenu cette information. J'ai appris

19 cela entre le moment où les faits se sont déroulés et 2002 lorsque j'ai

20 témoigné pour la première fois, en tout cas en 2000 lorsque j'ai fait ma

21 déclaration préalable.

22 Q. S'agissant du MUP, nous savons que des grades semblables aux grades

23 donnés dans l'armée ont été donnés aux membres du MUP. Ai-je raison de dire

24 que sur la base de votre expérience au sein de l'armée, vous pensiez que

25 les grades étaient les mêmes au sein de l'armée et de la police, mais en

26 fait vous ne le savez pas ?

27 R. Vous avez tout à fait raison.

28 Q. Est-ce que vous vous souvenez du nom de l'officier de liaison de la

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1 police à Prizren pour la MVK ?

2 R. Je pense que c'était le lieutenant-colonel Petrovic.

3 Q. Pour la MVK ?

4 R. Non, mon officier de liaison côté MVK, je ne me souviens pas de son

5 nom, son nom m'échappe.

6 Q. Il y avait quelqu'un qui était chargé de cela ?

7 R. Quelqu'un avait été nommé, mais son nom figure dans mes notes.

8 Q. Excusez-moi, le nom m'échappe.

9 R. Les House, je pense.

10 Q. S'agissant de M. House, ai-je raison de dire qu'en tant qu'officier de

11 liaison, il était en contact quotidien avec la police et qu'il avait

12 également des contacts quotidiens avec le MUP, la police à Prizren ?

13 R. Oui.

14 Q. Côté SUP, vous dites que M. Petrovic était chargé de la liaison. Je

15 connais également un certain M. Vukobrat. Peu importe qui était l'officier

16 de liaison pour le MUP, ai-je raison de dire que la coopération était

17 pleine et entière avec la MVK au cours de la période où ils se trouvaient

18 sur place ?

19 R. Oui.

20 Q. Vous avez estimé que c'étaient des professionnels, dans le cadre de vos

21 rapports avec eux ?

22 R. Oui.

23 Q. S'agissant de l'officier de liaison qui avait été nommé à ce poste, le

24 colonel Vojnovic, vous l'avez rencontré de façon officieuse et il vous a

25 également aidé, n'est-ce pas ?

26 R. Oui.

27 Q. Est-ce que vous avez estimé qu'il se montrait professionnel dans ses

28 rapports avec vous ?

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1 R. Tout à fait.

2 Q. Merci. Je ralentis une fois de plus pour le compte rendu d'audience.

3 Excusez-moi.

4 Hier, dans le cadre de votre déposition, vous avez dit que vous étiez

5 allé une fois à un poste de police. Je ne sais pas si vous avez mentionné

6 l'endroit. Vous dites que vous avez vu des Albanais qui faisaient la queue

7 et qui avaient l'air intimidés. Hormis votre présence à côté du poste de

8 police, vous n'avez pas été témoin oculaire de la présence de policiers à

9 cet endroit qui auraient maltraité quiconque ?

10 R. Non.

11 Q. En fait, vous n'avez personnellement constaté aucun abus de la part des

12 policiers au cours de votre séjour au Kosovo, n'est-ce pas ?

13 R. Non, pas personnellement.

14 Q. Merci. En ce qui concerne vos rencontres avec le commandant Drini de

15 l'UCK, dans deux rapports ou notes que vous avez prises au cours de ces

16 réunions, il est fait référence à des Serbes portés disparus. La MVK a

17 demandé au commandant Drini ce qu'il était advenu de ces personnes. Dans

18 vos notes, il est dit que Drini a répondu que ces personnes étaient portées

19 disparues dans sa zone de responsabilité et qu'elles étaient sans doute

20 mortes. Est-ce que, selon vous, cela signifie que l'UCK exécutait des

21 civils serbes dans votre zone de responsabilité ?

22 R. Soit il s'agissait d'exécutions, soit ces personnes étaient décédées

23 dans le cadre d'actions militaires.

24 Q. Pour terminer, Suva Reka se trouvait dans votre zone de responsabilité,

25 n'est-ce pas ?

26 R. Oui.

27 M. IVETIC : [interprétation] Page 38, ligne 15 du compte rendu d'audience,

28 la réponse du général a mal été consignée. Le général a répondu par

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1 l'affirmative.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Effectivement.

3 M. IVETIC : [interprétation] C'est une erreur facile à corriger.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

5 M. IVETIC : [interprétation]

6 Q. Passons du QG de la MVK à Suva Reka, ai-je raison de dire qu'il a été

7 réinstallé de l'hôtel Boss où il se trouvait précédemment vers une

8 résidence privée appartenant à des Albanais au cours de votre mission ?

9 R. Je crois que oui.

10 Q. Est-ce que vous vous souvenez de la raison de cette réinstallation ?

11 R. Non.

12 Q. Vous ne vous êtes jamais rendu au QG du MUP à Pristina, n'est-ce pas ?

13 R. A Pristina, non.

14 Q. Hier, M. Marcussen a laissé entendre que votre déposition porterait sur

15 les modalités de la coordination au sein du QG du MUP de Pristina et sur

16 l'ensemble de la province du Kosovo-Metohija. Mais dans votre déclaration,

17 page 10, vous déclarez que vous n'avez pas entendu dire qu'il y avait une

18 telle coordination de la part du MUP à Pristina. Est-ce que vous maintenez

19 ce que vous dites ?

20 R. Qu'est-ce que vous entendez par QG du MUP ? En fait, si c'est ce qu'ils

21 essayaient de mettre en place, je dirais que je n'ai pas entendu parler de

22 coordination entre le centre et les installations à l'extérieur du QG du

23 centre.

24 Q. Il s'agit de conjectures de votre part. En fait, vous n'avez aucune

25 information concrète à ce sujet.

26 R. Je n'y suis jamais allé, donc je ne peux pas confirmer cela.

27 Q. Une dernière question. Au sujet de l'UCK, est-ce que vous avez des

28 informations ou est-ce que vous disposez de certains éléments que vous avez

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1 obtenus directement ou par le biais de vos agents au sein de la MVK selon

2 lesquels l'UCK avait ordonné aux villageois des villages albanais,

3 notamment autour de la zone frontalière, de quitter leurs villages en

4 février et mars 1999 ?

5 R. Non.

6 Q. Merci d'avoir répondu à mes questions.

7 R. Je vous en prie.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Des questions supplémentaires,

9 Monsieur Marcussen ?

10 M. MARCUSSEN : [interprétation] Sur certains points seulement.

11 Nouvel interrogatoire par M. Marcussen :

12 Q. [interprétation] Mon Général, hier et aujourd'hui aussi, me semble-t-

13 il, on a parlé des renseignements qui vous avaient été fournis par Drini.

14 Il a dit qu'il comptait faire en sorte que les combats se déroulent en

15 ville. Au sein de votre centre régional, qu'est-ce que l'on considérait

16 comme étant des villes ?

17 R. C'est une question sémantique. La différence entre les villages, les

18 villes -- je suppose qu'une ville est un peu plus grande qu'un village. Les

19 municipalités pouvaient parfois être considérées comme des villes.

20 Q. D'après vous, alors que vous vous trouviez au Kosovo, est-ce que l'UCK

21 était présente, par exemple, à Suva Reka, Djakovica, Orahovac, Prizren ?

22 R. Il y avait une présence de l'UCK. Je ne peux pas énumérer toutes les

23 villes, mais je peux vous dire qu'il y avait une présence de l'UCK.

24 Parfois, on ne savait pas qui étaient membres de l'UCK, où se trouvait

25 l'UCK, s'ils portaient des tenues de camouflage ou non. En tout cas pas

26 dans les secteurs où il y avait une forte présence des autorités serbes.

27 Dans ces secteurs-là, je ne pense pas qu'il y ait eu une forte présence de

28 l'UCK. L'UCK préférait se déployer dans certaines régions, certains petits

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1 villages perdus au milieu de la forêt. C'est là qu'ils préféraient se

2 trouver.

3 Q. Pendant que vous étiez au Kosovo, il n'y a pas eu de combats dans les

4 villes, donc le plan de Drini n'a pas été mis en oeuvre ?

5 R. C'est exact.

6 Q. S'agissant de l'incident concernant les 35 cadavres qui s'est produit

7 juste après votre arrivée ou avant votre arrivée --

8 R. Avant mon arrivée.

9 Q. -- vous avez contribué à rendre les corps aux familles ?

10 R. Oui.

11 Q. Vous ne savez pas exactement où cet incident s'était produit ?

12 R. Non.

13 Q. Nous avons parlé des fonctions exercées par certaines personnes, de

14 l'autorité qu'avaient les officiers de liaison, et à ce sujet il y a un

15 point supplémentaire que j'essaierai de préciser avec vous. Si un officier

16 de liaison conclut un accord avec la personne ou l'instance avec qui il est

17 en rapport, est-ce que cela signifie que l'officier de liaison en question

18 s'était vu conférer une certaine autorité, comme nous l'avons dit, ou qu'il

19 avait reçu l'aval de la chaîne de commandement dont il relevait ?

20 R. Effectivement.

21 Q. S'agissant de Rogova, vous dites que vous êtes arrivé dans l'après-midi

22 vers 13 heures peut-être. A ce moment-là, lorsque vous êtes arrivé, est-ce

23 que l'on avait déplacé les corps des victimes ?

24 R. Oui. On les avait alignés dans l'enceinte.

25 Q. Est-ce que vous avez pu constater que certaines de ces victimes avaient

26 été déplacées de cet endroit vers un autre endroit ?

27 R. Pour certaines de ces victimes, elles avaient déjà été transportées

28 ailleurs, mais je ne me souviens pas du nombre exact de corps qui avaient

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1 été ainsi alignés en rangée.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Marcussen, de quelle partie

3 de la déclaration est-il question ?

4 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je pense qu'il a été question de cela dans

5 le compte rendu de la déposition faite par le témoin dans l'affaire

6 Milosevic, dans les parties qui ont été autorisées, mais je ne sais pas si

7 c'est dans la déclaration, c'est seulement dans le compte rendu de la

8 déposition.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

10 M. MARCUSSEN : [interprétation]

11 Q. On vous a demandé également si vous aviez été témoin d'abus des membres

12 du MUP au poste de police ou au poste de contrôle, et vous avez dit que

13 non. Est-ce que vous avez des doutes concernant l'exactitude des

14 informations qui vous ont été rapportées par vos vérificateurs, lorsque ces

15 derniers vous ont dit qu'ils avaient été témoins de ce type d'incidents ?

16 R. Je n'ai aucun doute à ce sujet.

17 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

19 [La Chambre de première instance se concerte]

20 Questions de la Cour :

21 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Excusez-moi, Mon Général, j'ai une

22 question à vous poser. C'est une question qui découle de votre déclaration

23 écrite, plus précisément c'est au paragraphe 43. Il s'agit de la date du 29

24 janvier 1999. Quelle est l'impression que vous avez eue au sujet de cette

25 coopération que vous avez mentionnée aussi bien au niveau du paragraphe 43

26 qu'au niveau du paragraphe 42, celui qui le précède, en disant que ces

27 rapports étaient cordiaux, les rapports avec ces institutions, et on y voit

28 différentes abréviations correspondant à ces institutions ? Pourriez-vous

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1 être plus précis quant à l'impression que vous avez eue par rapport à ces

2 rapports, puis aussi nous donner éventuellement des noms correspondant aux

3 abréviations de ces institutions qui faisaient preuve de coopération, parce

4 que c'est important puisque vous venez d'un bureau, d'une agence qui était

5 présente sur place, et vous y étiez vraiment physiquement, vous étiez là.

6 R. Monsieur le Juge, je dirais que cette coopération était une coopération

7 professionnelle très nécessaire. Dans toute activité comprenant la police

8 et les militaires, les activités de coopération devaient être très

9 rapprochées pour faire en sorte qu'il n'y ait pas de feu venant de leurs

10 propres rangs, par exemple, ou qu'il n'y ait pas de chevauchement, si vous

11 voulez. J'ai bien vu qu'ils coopéraient, qu'ils faisaient acte de

12 coopération, et ils connaissaient les plans des uns et des autres. On

13 voyait exactement quelle était la responsabilité de chacun au sein de cette

14 organisation, et pour qu'il n'y ait pas de perte de responsabilités, pour

15 que tout cela se fasse de la meilleure façon possible, il fallait limiter

16 les responsabilités de chacun, de tout un chacun, et avoir une bonne

17 coordination préalable. C'est mon expérience sur le terrain.

18 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Bien. Encore un petit point au niveau

19 du paragraphe 36. Vous parlez du rapport qui prévalait, mais par rapport

20 aux paragraphes 42 et 43, pourriez-vous nous dire quels sont les incidents

21 extraordinaires, exceptionnels qui vous ont marqué au niveau de cette

22 coopération pour dire que ce rapport était extraordinaire, exceptionnel ?

23 R. Je ne dirais pas qu'il s'agissait de quelque chose d'extraordinaire ou

24 d'exceptionnel. L'armée yougoslave donnait son appui, son aide sur le

25 terrain, et ensuite les forces de police menaient à bien l'opération au

26 niveau des combats rapprochés, si vous voulez, ou au niveau tactique ou

27 stratégique. Par exemple, quand on nous a dit qu'il y avait des obusiers

28 qui étaient dirigés en direction de Racak, pour moi qui suis un officier de

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1 carrière, pour moi cela voulait dire que l'artillerie était prête à appuyer

2 l'opération sur le terrain en cas de problème pour par exemple leur

3 permettre de se retirer, ce genre-là de coopération, ce genre-là

4 d'hostilité. Ce n'est pas quelque chose d'extraordinaire ou d'exceptionnel,

5 c'est tout simplement un accord, cela correspond à un accord et à une

6 délimitation de responsabilité de tout un chacun.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie de votre déposition,

8 Monsieur Maisonneuve. Je vous remercie d'être venu encore une fois au

9 Tribunal pour déposer. Je vous remercie de votre patience quand il

10 s'agissait de répondre à toutes les questions qui vous ont été posées. Avec

11 ceci se termine votre déposition, et vous pouvez partir.

12 [Le témoin se retire]

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Marcussen, le prochain

14 témoin ?

15 M. MARCUSSEN : [interprétation] C'est M. Kickert, et je pense qu'il est sur

16 le point de me rejoindre, et c'est Mme Moeller qui va lui poser des

17 questions.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mme Moeller.

19 Nous allons prendre une pause à présent et nous allons reprendre nos

20 travaux à 11 heures 15.

21 --- L'audience est suspendue à 10 heures 42.

22 --- L'audience est reprise à 11 heures 15.

23 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Monsieur Kickert.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourriez-vous prononcer la déclaration

27 solennelle pour indiquer que vous allez dire la vérité ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

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1 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

2 LE TÉMOIN : JAN KICKERT [Assermenté]

3 [Le témoin répond par l'interprète]

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Vous pouvez vous asseoir.

5 Madame Moeller.

6 Interrogatoire principal par Mme Moeller :

7 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Kickert.

8 R. Bonjour.

9 Q. Pourriez-vous vous présenter, pour le compte rendu d'audience ?

10 R. Jan Kickert.

11 Q. Quelle est votre appartenance ethnique ?

12 R. Je suis Autrichien.

13 Q. Quelle est votre profession ?

14 R. Je suis diplomate dans la diplomatie autrichienne.

15 Q. Où est-ce que vous travaillez ?

16 R. En Autriche, à Vienne.

17 Q. Depuis quand travaillez vous au sein de la diplomatie ?

18 R. Depuis 1995.

19 Q. Avant cela, est-ce que vous avez été en poste en Serbie-et-Monténégro ?

20 R. Oui, c'est vrai. J'ai eu une mission à Belgrade. J'ai commencé au mois

21 de novembre 1997.

22 Q. Vous êtes resté pendant combien de temps ?

23 R. Jusqu'en 1999, c'était au début du bombardement de l'OTAN.

24 Q. Je pense qu'il faut faire attention aux pauses entre les questions et

25 les réponses parce que nous parlons tous les deux en anglais et les

26 interprètes ont du mal à suivre.

27 R. Oui.

28 Q. Pourriez-vous nous dire quel était le poste que vous aviez lors de la

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1 mission que vous aviez en Serbie-et-Monténégro ?

2 R. J'étais le deuxième secrétaire de l'ambassade autrichienne à Belgrade.

3 Q. Quelle était votre mission et quelles étaient vos responsabilités ?

4 R. J'étais chargé d'une part des questions des médias et des questions

5 culturelles, puis de l'autre côté, j'étais aussi en charge des questions

6 politiques de la question du Kosovo.

7 Q. Qui était le chef de la mission à l'époque, Monsieur Kickert ?

8 R. C'était l'ambassadeur Petritsch.

9 Q. Pendant que vous étiez à Belgrade, est-ce que vous êtes jamais allé au

10 Kosovo ?

11 R. Oui, j'ai commencé à y aller au mois de janvier 1998. Ensuite, cela

12 s'est accéléré, en fait les fréquences ont accru à partir du mois de

13 janvier 1998, et d'autant plus au cours de la deuxième moitié de 1998,

14 quand l'Autriche était à la tête de la présidence rotative de l'Union

15 européenne, où j'ai été pratiquement à 50 % de mon temps au Kosovo et 50 %

16 à Belgrade.

17 Q. Pendant que vous étiez au Kosovo, vous étiez où, exactement ?

18 R. Au début, c'était en général des voyages d'un jour. Je descendais de

19 Belgrade en voiture à Pristina. Au début, j'ai été surtout à Pristina,

20 ensuite j'ai été ailleurs dans le Kosovo. J'ai passé la nuit dans un hôtel

21 à Pristina. Ensuite, l'ambassade autrichienne avait loué une maison à

22 Pristina qu'on a utilisée comme la base pour mon séjour.

23 Q. Pourriez-vous nous dire comment se fait-il que l'ambassade autrichienne

24 a loué une maison au Kosovo ?

25 R. L'Union européenne a toujours souhaité avoir une représentation à

26 Pristina. Ce n'était pas bien vu par les autorités de Belgrade, donc c'est

27 au moment où l'Autriche était à la tête de la présidence européenne, nous

28 avons pris l'initiative de louer une maison sur la base bilatérale, pour y

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1 avoir une base. Ensuite, on invitait les représentants de la Communauté

2 européenne qui étaient présents sur le terrain, notamment ECHO, le

3 programme ECHO - c'est une organisation humanitaire de la Communauté

4 européenne - ou les membres de la commission européenne qui travaillaient

5 dans un programme d'éducation, et cetera. Ils nous joignaient dans cette

6 maison qui était devenue une espèce de maison de base de l'Union

7 européenne, à la fin.

8 Q. Vous avez dit que l'Union européenne a toujours voulu avoir sa

9 représentation là-bas, mais ce n'était pas bien vu par les autorités de

10 Belgrade. Est-ce que vous savez pourquoi ?

11 R. Je pense qu'ils ne voulaient pas avoir beaucoup trop de présence

12 internationale à Pristina. Les Américains avaient un bureau là-bas. Pour

13 l'historique, je ne sais pas quelles étaient les raisons essentielles, les

14 véritables raisons de cela. Nous, nous voulions avoir notre représentation,

15 la représentation de l'Union européenne là-bas aussi, et les autorités de

16 Belgrade ne voulaient pas que la question du Kosovo soit internationalisée.

17 Puis, voilà, ils ne voulaient pas qu'il y ait une présence internationale à

18 Pristina.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] "Ils ne voulaient pas que la question

20 du Kosovo soit internationalisée." C'est mal noté au niveau du compte rendu

21 d'audience.

22 Mme MOELLER : [interprétation]

23 Q. Vous aviez une maison à Pristina, mais quel était le drapeau qui était

24 sur la maison ?

25 R. C'est un peu le problème, parce qu'on hissait aussi bien le drapeau

26 autrichien que le drapeau de la Communauté européenne. Vers la fin du mois

27 de juillet 1998, quand la troïka de l'Union européenne a visité le Kosovo

28 de Belgrade, ils ont eu une réunion avec le secrétaire général autrichien,

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1 M. Albert Rohan, avec deux autres dirigeants au niveau politique,

2 l'Allemagne et le Royaume-Uni, et ils allaient et venaient dans cette

3 maison.

4 Je pense qu'ils avaient aussi une réunion avec le premier ministre

5 Jovanovic, et il y a eu un petit peu de discussions par rapport à ce

6 drapeau, et on s'est mis d'accord que ceci allait se faire de façon

7 bilatérale. Sur une base bilatérale, on a enlevé le drapeau de la

8 Communauté européenne et on a gardé le drapeau autrichien.

9 Q. Pendant que l'Autriche avait sa résidence à Pristina, est-ce qu'il y

10 avait des problèmes au niveau de l'ambassade ?

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais pourquoi on s'attarde là-dessus ?

12 Quelle est la pertinence par rapport à l'acte d'accusation ?

13 Mme MOELLER : [interprétation] J'ai voulu voir quels étaient les intérêts

14 de la Serbie en 1998.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous comprenons très bien qu'il

16 n'était pas dans l'intérêt de la Serbie de rendre la question du Kosovo

17 internalisée en 1998. Nous le comprenons.

18 Mme MOELLER : [interprétation] Je pense que M. Petritsch a dit que la

19 Serbie voulait contrôler cela et il insistait pour qu'il y ait un petit peu

20 plus d'internalisation et que la Serbie n'était pas vraiment d'accord.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, tous les pays du monde se

22 demandent dans quelle mesure la communauté internationale puisse intervenir

23 dans leurs affaires ou les affaires intérieures. Je viens d'un pays

24 semblable moi aussi et je comprends absolument que la Serbie ait été

25 préoccupée de cela. Ecoutez, occupez-vous des questions qui figurent dans

26 l'acte d'accusation.

27 Mme MOELLER : [interprétation] Il y a aussi une autre question par rapport

28 à cette maison. Je voudrais peut-être poser encore cette question-là.

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1 Ensuite, j'en finirai.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

3 Mme MOELLER : [interprétation]

4 Q. Monsieur Kickert, est-ce que l'ambassade autrichienne a eu d'autres

5 problèmes par rapport à ce lieu de résidence à cette maison à l'époque ?

6 R. A part cette question du drapeau qui s'est posée au début, ce n'est que

7 plus tard au cours de l'année, je pense au mois de décembre, il semble que

8 nous avons eu quelques problèmes avec l'électricité parce que l'électricité

9 a été coupée parce qu'ils nous ont accusés de traficoter les compteurs de

10 l'électricité, donc ils nous ont présenté une amende de 10 000 ou 20 000

11 deutsche marks.

12 Q. Qu'est-ce que vous avez fait pour résoudre ce problème ?

13 R. Nous avons essayé de résoudre cela au niveau local. Je suis allé

14 personnellement voir ElektroKosovo, l'agence, et je n'ai pas pu résoudre le

15 problème.

16 Q. Est-ce que vous avez fini par résoudre cette question ?

17 R. C'est l'ambassadeur Petritsch qui en a parlé avec M. Sainovic.

18 Q. Que s'est-il passé ?

19 R. Peu de temps après, on a restauré l'électricité et on n'avait pas à

20 payer l'amende.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Moeller, je dois vous dire que

22 je ne suis absolument pas impressionné par l'argument que vous essayez de

23 faire valoir ici. Si vous voulez prouver par là dans quelle mesure M.

24 Sainovic contrôlait la situation au Kosovo, je suis tout à fait étonné que

25 le Procureur ait eu l'idée de penser que c'est quelque chose qui est

26 pertinent en l'espèce.

27 Mme MOELLER : [interprétation] Ce n'est qu'un petit bout de la mosaïque,

28 une petite pièce que nous essayons d'incorporer pour voir le tableau. Je

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1 vais passer à un autre sujet.

2 Q. Pendant que vous étiez à Pristina, est-ce que vous êtes allé sur le

3 terrain ?

4 R. Comme j'ai dit lors de mon premier voyage à Pristina, il s'agissait de

5 rencontrer les personnalités politiques localisées à Pristina. Ce n'est

6 qu'au mois de juin que je suis allé sur le terrain pour participer à un

7 voyage organisé par le ministère des Affaires étrangères du Kosovo

8 occidental et ce n'est qu'après que j'ai commencé à organiser moi-même mes

9 visites sur le terrain.

10 Q. De façon générale, pourriez-vous nous dire quelles sont les régions que

11 vous avez visitées au cours de l'année 1998 ?

12 R. C'était le Kosovo central, le Kosovo appelé Metohija par les Serbes et

13 Dukagjin par les Albanais, puis je suis allé dans la région de Drenica qui

14 est au centre.

15 Q. Maintenant, je voudrais parler plus en détail de ces visites sur le

16 terrain.

17 Mme MOELLER : [interprétation] J'ai des documents que je voudrais présenter

18 et ils sont aussi bien en anglais qu'en allemand. Le témoin a demandé de

19 pouvoir faire référence aux originaux en allemand pendant sa déposition.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

21 Mme MOELLER : [interprétation]

22 Q. Je vais présenter ces documents dans l'ordre. Vous avez dit que votre

23 première visite a eu lieu au mois de juin. Avant cela, est-ce qu'il y a eu

24 des visites d'organisées auxquelles vous n'avez pas participé ?

25 R. Oui, c'était après l'incident à Prekaz qui a eu lieu au début du mois

26 de mars 1998 qu'un voyage a été organisé par le ministère des Affaires

27 étrangères pour visiter le site de Prekaz, donc au début du mois de mars

28 1998, quelques jours après l'incident.

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1 Q. Est-ce qu'il y a eu des représentants de l'ambassade autrichienne ?

2 R. Non.

3 Q. Pourquoi ?

4 R. Nous avions peur. La plupart des pays européens étaient de mon avis,

5 ils pensaient que ceci allait être utilisé pour des buts de propagande.

6 Q. Qu'est-ce que vous voulez dire par là, quand vous avez dit utiliser

7 pour la propagande ? Qu'est-ce que vous voulez dire ?

8 R. Qu'ils allaient nous montrer l'endroit en disant que c'est une lutte

9 légitime contre les terroristes, comme ils les appelaient. En nous montrant

10 à la télé, nous, les diplomates occidentaux, avec ceci on sous-entendrait

11 qu'on est d'accord avec leurs actions, qu'on approuvait.

12 Mme MOELLER : [interprétation] A présent, je voudrais vous demander la

13 pièce P2666 en version anglaise.

14 Q. Là, il s'agit du premier document dans la série que vous avez, Monsieur

15 Kickert, en date du 8 juin 1998. Je vous prie de bien vouloir examiner ce

16 document. Est-ce que c'est un des rapports que vous avez écrit ?

17 R. Oui, en effet, puisqu'en haut à droite on peut lire : "SB" en allemand,

18 mais cela veut dire que c'est moi qui ai écrit cela.

19 Q. Dans ce rapport, on parle de ces voyages organisés pour les attachés

20 militaires et politiques. Ils se sont rendus le 7 juin dans les zones de

21 combat autour de Decani dans le Kosovo occidental, et il y est dit que

22 c'est vous qui avez représenté l'ambassade à l'époque.

23 R. C'est exact.

24 Q. On y lit également que les participants étaient pour la plupart des

25 diplomates relativement jeunes ?

26 R. S'agissant des diplomates des Etats européens, en effet.

27 Q. Il est dit finalement que l'itinéraire était ce qui figure au troisième

28 paragraphe du texte. Pourriez-vous commenter le fait que l'itinéraire suivi

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1 n'était pas le plus direct pour se rendre en ces lieux ?

2 R. L'itinéraire le plus direct aurait consisté à emprunter la route allant

3 de Pristina à Pec, alors que nous avons fait un détour important par le

4 nord en allant aussi loin que Rozaje au Monténégro pour atteindre

5 finalement Pec.

6 Q. Pourquoi ce détour, à l'époque ?

7 R. La question a également été posée, si je me souviens bien, par

8 l'ambassadeur japonais qui participait à ce groupe. La raison était une

9 raison liée à la sécurité. En effet, selon l'évaluation de la situation

10 faite par nous, les autorités de Belgrade ne contrôlaient pas totalement la

11 route directe reliant Pristina à Pec, à l'époque.

12 Q. J'aimerais que nous passions à la page 2 de votre rapport --

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais dans le rapport, il est écrit que

14 les autorités serbes ne contrôlent pas la route reliant Pristina à Pec.

15 Est-ce que ce qui est écrit dans ce rapport diffère de votre impression

16 personnelle ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que j'ai écrit, c'est qu'apparemment les

18 autorités serbes ne contrôlaient pas la route. Si vous regardez le premier

19 tiret en haut de la page --

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pouvons-nous revenir à la page

21 précédente, je vous prie ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Au niveau du récapitulatif, on lit en allemand

23 "apparemment non contrôlé par", donc je n'avais pas de renseignements de

24 première main, mais le fait que nous avons fait ce détour important et que

25 nous n'avons pas emprunté la route directe était à nos yeux une indication

26 du fait que les autorités ne se sentaient pas suffisamment sûres pour nous

27 amener sur la route directe.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

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1 Mme MOELLER : [interprétation]

2 Q. Revenons à la première page. J'aimerais traiter de l'un des tirets qui

3 se trouvent à cette page, troisième tiret à partir du bas, où nous lisons

4 ce qui suit, je cite : "La situation à Decani semble indiquer que la

5 majorité des habitants ont quitté la localité."

6 Dans quelles conditions avez-vous tiré cette conclusion ou avez-vous fait

7 cette constatation ?

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense qu'il faut que nous revenions

9 à la page 2 du document. Merci.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous sommes arrivés à cet endroit avec notre

11 convoi, deux autobus en d'autres termes, et nous sommes descendus de ces

12 autobus à Decani. Les seules personnes que nous avons rencontrées se

13 trouvaient dans un café, assises à l'extérieur. Nous avons un peu bavardé

14 avec ces personnes. Certaines venaient d'un village plus au sud qui

15 s'appelait Baboloc où se trouvaient des réfugiés venant de diverses régions

16 situées hors du Kosovo. On ne voyait personne dans la rue, on ne voyait

17 personne aux fenêtres des maisons. Selon toute apparence, cette ville,

18 Decani, était pratiquement déserte.

19 Mme MOELLER : [interprétation]

20 Q. Vous décrivez cela à la page 2 de votre rapport sous le titre Decani.

21 Un peu plus bas, nous lisons ce que suis, je cite : "Village suivant

22 Prilep." Qu'en était-il des habitants de Prilep ? En avez-vous vu dans le

23 village ?

24 R. Nous sommes descendus de l'autobus également dans ce village, si je me

25 souviens bien, et nous avons circulé dans les alentours. Je ne me souviens

26 pas avoir vu des habitants dans ce village non plus ou si j'en ai vus, ils

27 n'étaient que très peu nombreux.

28 Q. Vous parlez également dans votre rapport de destructions importantes au

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1 paragraphe relatif à Decani, le troisième de la page 2. Vous dites, je cite

2 : "Destructions importantes, mais en aucun cas aussi draconiennes que

3 celles décrites par la LDK".

4 Pouvez-vous commenter ce passage ?

5 R. L'un des problèmes que nous avions en permanence, c'était comment

6 obtenir des informations précises. Qu'il s'agisse d'informations reçues des

7 autorités de Belgrade ou reçues du Kosovo, de la LDK qui avait un bulletin

8 d'informations quotidien, c'était notre problème. L'une des raisons pour

9 laquelle nous avons décidé de participer à ce voyage sur place, c'était

10 pour voir de nos yeux les effets des actions militaires dans le secteur de

11 Decani. Ce que j'ai décrit dans ce rapport, c'est ce que la LDK disait à

12 Vukovar. Je suis allé à Vukovar, j'ai vu les destructions à Vukovar et je

13 pense qu'elles n'étaient pas comparables aux destructions que j'ai pu voir

14 à Decani.

15 Q. Quel genre de destructions appelez-vous destructions importantes et

16 avez-vous vu de vos yeux ? Est-ce que vous pourriez les décrire, décrire

17 l'aspect des villes qui, selon vous, auraient subi ces destructions

18 importantes ?

19 R. Comme je l'ai écrit dans le rapport, il y avait diverses conséquences

20 négatives. Je ne suis pas un expert militaire, mais j'avais des attachés

21 militaires auxquels je pouvais poser des questions. Plusieurs rafales

22 d'armes lourdes, principalement des mitrailleuses, avaient laissé des

23 traces. Ce qui est intéressant et ce qui est tout à fait remarquable, c'est

24 qu'il y avait également des signes importants de destructions par le feu.

25 Q. Dans la dernière phrase de ce paragraphe, vous parlez toujours de

26 Decani et vous faites référence à des collègues à vous qui se seraient

27 rendus dans la région de Drenica en mars et qui auraient rendu compte de

28 destructions relativement limitées. "Pas de pilonnage à l'arme lourde",

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1 est-il écrit dans le texte.

2 Qui étaient ces collègues qui s'étaient rendus à Drenica en mars ?

3 R. C'étaient sans doute mes attachés militaires.

4 Q. En quels termes décrivaient-ils les destructions constatées à Drecani

5 en mars ?

6 R. Ils parlaient sans doute de Prekaz où il y avait eu utilisation d'armes

7 lourdes, puis apparemment ils parlent de la région de Decani par la suite.

8 Q. En bas de la page 2, nous voyons un titre, je cite : "Informations

9 fournies par le ministère des Affaires étrangères yougoslave ainsi que le

10 ministère de l'Intérieur yougoslave." Vous rappelez-vous qui a fourni ces

11 informations au groupe de diplomates en cette occasion ?

12 R. Non, je ne me souviens pas exactement de l'identité de ces personnes.

13 Ce dont je me souviens, c'est qu'elles étaient accompagnées de

14 représentants du ministère des Affaires étrangères et du ministère de

15 l'Intérieur, mais je ne saurais dire avec une quelconque certitude qui

16 étaient ces personnes.

17 Q. Deuxième tiret, nous y voyons un passage que j'aimerais mieux

18 comprendre grâce à vous. Je cite : "La visite a pour tâche de rectifier des

19 renseignements erronés quant au nombre total de réfugiés ayant fui vers

20 l'Albanie." Pouvez-vous vous expliquer sur ce point ?

21 R. En 1998, premier semestre 1998, en raison d'incidents importants et de

22 ripostes à ces incidents qui ont mis en cause la sécurité, nous avions un

23 certain nombre de personnes déplacées à l'intérieur des frontières un peu

24 partout au Kosovo. Apparemment, il était présumé qu'un grand nombre de ces

25 personnes avaient fui vers l'Albanie. Or, les autorités de Belgrade

26 réfutaient cet élément d'information.

27 Q. J'aimerais maintenant --

28 Mme MOELLER : [interprétation] A moins que les Juges de Chambre n'aient des

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1 questions ?

2 Q. -- passer à une autre pièce, la pièce P2665. Il s'agit d'un rapport

3 datant du 1er juillet 1998. Est-il exact, Monsieur Kickert, que vous êtes

4 l'auteur de ce texte, puisque nous lisons les mots : "SB : Kickert" en haut

5 de la page ?

6 R. Oui.

7 Q. Dans le récapitulatif, nous lisons, je cite : "Confirmation officielle

8 pour la première fois de la participation d'unités de l'armée à des

9 opérations à l'intérieur des frontières." J'aimerais d'abord vous poser la

10 question suivante. Avant le 1er juillet, est-ce que vous avez, à quelque

11 moment que ce soit, été informé d'une participation éventuelle de l'armée

12 yougoslave à des opérations antiterroristes au Kosovo ? Si oui, avez-vous

13 été informé de leur éventuelle importance ?

14 R. Non, nous ne recevions pas de tels renseignements. C'est une question

15 que nous avons soulevée dans nos contacts avec l'attaché militaire

16 autrichien à de nombreuses reprises durant le premier semestre 1998. Son

17 appréciation était que l'armée yougoslave ne participait pas à de telles

18 actions. Il était possible qu'elle ait fourni un soutien logistique, des

19 camions ou d'autres équipements, mais elle n'était pas impliquée

20 directement dans ces combats.

21 Q. Dans ce rapport, au deuxième paragraphe, sous le récapitulatif, on lit

22 les mots : "Rapport de presse HO." Pourriez-vous nous dire ce que cela

23 signifie ?

24 R. C'est une abréviation diplomatique qui concerne des rapports relatifs à

25 la presse locale.

26 Q. Ceci ne concerne que des articles de la presse locale exclusivement ou

27 est-ce que vous aviez des éléments d'information sur les mêmes faits qui

28 vous étaient fournis dans d'autres documents publiés à l'époque ?

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1 R. Je cite Reuters qui est la seule source d'informations dont je

2 disposais et dont je fais état dans ce paragraphe.

3 Q. Est-ce que par la suite, vous avez eu des informations supplémentaires

4 quant à l'importance quantitative de la participation de l'armée yougoslave

5 aux opérations au Kosovo à partir du 1er juillet ?

6 R. Pas que je me souvienne.

7 Q. Très bien. Pièce à conviction suivante, la pièce P2664, s'il vous

8 plaît.

9 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai une objection

10 par rapport à l'utilisation de la pièce P2665 au cours de ce procès, car

11 c'est un document qui n'est qu'une série d'articles de presse. Cela ne

12 repose pas sur des connaissances de première main. Je sais que, selon la

13 décision de la Chambre, tout dépend de ce qu'en dira le témoin. Je rappelle

14 que cette pièce P2665 n'est rien de plus qu'une synthèse d'articles de

15 presse trouvés dans la presse locale par M. Kickert.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelle est la pièce à conviction que

17 nous avons maintenant sur les écrans ? Je demande que l'on affiche une

18 nouvelle fois la pièce 2665, je vous prie.

19 Y a-t-il un problème pour afficher ce document ?

20 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais il est possible que vous ayez

22 déjà vous-même utilisé ce document, Maître O'Sullivan.

23 Mme MOELLER : [interprétation] En effet, c'est exact.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai une merveilleuse mémoire, voyez-

25 vous.

26 M. O'SULLIVAN : [interprétation] J'ai utilisé ce document pour m'enquérir

27 de la véracité de certaines informations contenues dans ce document. J'ai

28 soumis ce document au témoin précédent.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il est permis de penser qu'un élément

2 preuve qui n'est qu'un article de presse traitant de l'implication de

3 l'armée yougoslave dans certaines opérations n'aura aucun poids pour les

4 Juges de la Chambre.

5 Vous pouvez maintenant passer au document 2664.

6 Mme MOELLER : [interprétation]

7 Q. Monsieur Kickert, le document 2664 est un rapport qui date du 6 juillet

8 1998 et dont l'objet est : "Le voyage inaugural de la Mission des

9 observateurs au Kosovo." Pourriez-vous expliquer le contexte dans lequel se

10 situaient ce voyage et la rédaction de ce document ?

11 R. J'ai rédigé ce document en anglais parce que l'Autriche avait obtenu la

12 présidence de l'Union européenne. Elle avait commencé à présider l'Union

13 européenne le 1er juillet, donc nous avions pour obligation entre autres

14 d'informer les autres Etats membres de l'Union européenne de ce qui se

15 passait sur place. J'ai rédigé ce document en anglais sous la forme d'un

16 CorEu, qui est la forme de communication courante sur le plan diplomatique

17 entre les différents Etats de l'Union européenne. L'événement dont il était

18 question était l'inauguration de la Mission des observateurs diplomatiques

19 au Kosovo sur la base d'un accord conclu avec les autorités de Belgrade qui

20 prévoyait que l'on répartisse ces observateurs sur le terrain pour obtenir

21 des renseignements de première main quant à la situation au Kosovo.

22 Q. Avez-vous participé à ce voyage ?

23 R. Oui.

24 Q. Ainsi que M. Petritsch, peut-être ?

25 R. Oui. Il y a participé également. Nous sommes partis de Belgrade et nous

26 avons participé à cette excursion sur le terrain, si on peut l'appeler

27 ainsi, après quoi nous sommes revenus le même jour à Belgrade.

28 Q. En page 2 de ce document, on voit la description de l'itinéraire que

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1 vous avez suivi, à savoir départ de Pristina pour arriver à la ferme

2 Jashari en passant par le nord, c'est-à-dire Kosovska Mitrovica, Gornja

3 Klina, Srbica, Donji Prekaze, et j'aimerais que vous nous disiez quelles

4 sont les observations que vous avez pu faire durant ce voyage ?

5 R. Comme je le dis dans la phrase suivante, nous n'avons pénétré dans

6 aucun secteur contrôlé par l'UCK. Je me souviens que nous nous sommes

7 arrêtés à Srbica où se trouvait non pas un poste de contrôle de la police,

8 mais en tout cas c'était un endroit où la police tentait de se protéger

9 contre d'éventuelles attaques. Nous avons bavardé avec les policiers qui

10 nous ont parlé de fusillades ponctuelles, mais qui ne semblaient pas trop

11 inquiets par rapport à l'éventualité de telles attaques, finalement.

12 Q. Savez-vous pourquoi le convoi a évité les secteurs contrôlés par

13 l'UCK ?

14 R. C'est l'explication que j'apporte par écrit à la fin du texte en

15 allemand, et ceci était dû à l'insistance ou en tout cas au désir de

16 l'ambassadeur russe de ne pas pénétrer dans un secteur contrôlé par l'UCK.

17 En tout cas, il ne voulait pas rencontrer les membres de l'UCK.

18 Q. D'accord. Durant ce même mois, le mois de juillet 1998, est-ce que vous

19 avez participé à d'autres voyages sur le terrain ?

20 R. Au mois de juillet, j'ai commencé à travailler plus intensément, et le

21 mois de juillet c'est également le mois où nous sommes allés voir M. Rohan

22 dans la ville où il se trouvait en compagnie des directeurs politiques de

23 la troïka européenne. C'est également le mois où je suis allé à Malisevo

24 pour rencontrer pour la première fois M. Thaqi.

25 Q. Bien. Prenons ces diverses questions l'une après l'autre. Nous n'avons

26 pas tous les documents relatifs à ces différents voyages. Le voyage en

27 compagnie des directeurs politiques de la troïka européenne, qui a

28 participé à ce voyage ?

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1 R. Chronologiquement, c'est le dernier des trois voyages dont j'ai parlé,

2 mais comme je l'ai dit tout à l'heure, ont participé à ce voyage le

3 directeur politique du Royaume-Uni, Emmyr John Perry, ainsi que Wolfgang --

4 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu le nom.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] -- et le secrétaire général Albert Rohan. Ce

6 sont les trois principaux participants.

7 Q. Où êtes-vous allé durant ce déplacement ?

8 R. Nous avons emprunté la route normale, c'est-à-dire la route qui part de

9 l'ouest, qui va vers l'ouest en direction de Pec.

10 Q. Avez-vous fait des observations particulières pendant ce déplacement

11 sur les lieux ?

12 R. Nous avons été arrêtés à un poste de contrôle de la police. On ne

13 voulait pas nous laisser passer et je me souviens que nous avons essayé de

14 parler au policier qui se trouvait là. Nous avons dit que nous faisions

15 partie d'une délégation importante et que nous allions rencontrer M.

16 Milosevic le lendemain. Mais cela n'a pas semblé impressionner les

17 policiers qui se trouvaient là. Ils ont simplement communiqué par radio

18 avec leur QG, et M. Rohan leur a dit que nous venions de rencontrer M.

19 Odalovic et que ce dernier nous avait garanti notre liberté de circulation

20 sur tout le territoire du Kosovo.

21 Q. Qui était M. Veljko Odalovic ?

22 R. Il était préfet de Pristina, mais nous le considérions comme le préfet

23 de tout le Kosovo. Tout diplomate qui voulait se rendre à Pristina pour

24 rencontrer des Albanais du Kosovo le faisait normalement après avoir

25 rencontré Veljko Odalovic.

26 Q. Par rapport aux secteurs que vous avez traversés durant ce voyage, est-

27 ce que vous avez fait des constatations ou des observations particulières ?

28 R. C'était une époque où on ne cessait de voir des maisons en feu, des

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1 champs non moissonnés qui étaient en feu également. C'est avec cette

2 impression que les directeurs politiques sont retournés à Belgrade pour

3 rencontrer M. Milosevic.

4 Q. Vous avez vu tout cela de vos yeux ?

5 R. Oui.

6 Q. Vous avez également parlé d'un voyage à Malisevo.

7 R. Oui.

8 Q. Pourriez-vous donner des détails ?

9 R. Deux voyages ont eu lieu, l'un avec M. Ruan qui était venu seul ce

10 jour-là, c'était avant l'arrivée de la troïka de l'Union européenne et par

11 l'intermédiaire de la MOCE, à savoir de la Mission de vérification de la

12 Communauté européenne. A ce sujet j'aimerais apporter quelques mots

13 d'explication. La Mission des observateurs européens en ex-Yougoslavie

14 existait déjà depuis pas mal de temps. Elle avait déjà travaillé en

15 République fédérale de Yougoslavie. A partir du mois de mai, nous avions

16 une équipe au Kosovo qui rendait compte de ce qui s'y passait, et par

17 l'intermédiaire de ces personnes, nous avons été bien informés de ce qui se

18 passait dans la région et nous avons pu organiser un voyage à Malisevo pour

19 une première rencontre avec les responsables de l'UCK.

20 Q. Qu'est-ce qui avait motivé cette volonté de rencontrer les responsables

21 de l'UCK ?

22 R. La motivation, c'était le désir de les inclure dans le processus

23 politique. Nous craignions que la violence ne se développe et que

24 finalement elle ne l'emporte. L'initiative a été prise par M. Ruan, le

25 secrétaire général, de déployer des efforts pour organiser une rencontre

26 avec les dirigeants de l'UCK de façon à les inclure dans le processus

27 politique de règlement de la situation.

28 Cela n'a pas été facile parce que nous ne connaissions pas la structure de

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1 l'UCK à ce moment-là, mais nous avons essayé d'organiser cette rencontre.

2 Q. Vous avez dit que c'était la première fois qu'une telle rencontre était

3 organisée. Y a-t-il eu d'autres rencontres en 1998, d'autres rencontres

4 avec l'UCK auxquelles vous auriez participé ?

5 R. Pour être tout à fait précis, je dirais que c'était notre première

6 rencontre avec l'UCK. Les Américains les avaient déjà rencontrés même s'ils

7 ne parlaient que de rencontres sporadiques. Je me souviens que M. Holbrooke

8 a eu une telle rencontre à Junik. On le voit même sur des photos accompagné

9 d'hommes armés de l'UCK, mais à notre connaissance, la personne qui l'avait

10 rencontré ce jour-là n'avait plus la moindre importance dans la période

11 ultérieure au sein de la direction de l'UCK. Mais il y a eu également de la

12 part des Américains d'autres rencontres avec des représentants de l'UCK à

13 d'autres niveaux.

14 Q. D'accord. Merci de cet éclaircissement.

15 De votre côté, du côté du gouvernement autrichien, y a-t-il eu des

16 rencontres de suivi après cette première rencontre de juillet 1998 avec des

17 représentants de l'UCK ?

18 R. Plus tard au mois de juillet, vers la fin du mois de juillet, je suis

19 allé en compagnie de mon collègue britannique David Slinn à Klecka pour

20 rencontrer celui qui était présenté comme le porte-parole de l'UCK, Jakup

21 Krasniqi. Ont participé à cette rencontre également Ram Buja et Fatmir

22 Limaj.

23 Q. D'accord. Pourriez-vous éventuellement parler d'autres rencontres

24 auxquelles vous avez participé avec des représentants de l'UCK ?

25 R. Cette réunion dont je viens de parler a été la dernière pendant quelque

26 temps, étant donné que lui a succédé le début de l'offensive d'été lancée

27 par les forces de sécurité serbes. L'UCK s'est efforcée à ce moment-là de

28 s'emparer d'Orahovac, après quoi elle a abandonné Malisevo, puis a investi

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1 les collines environnantes, donc il nous a été impossible d'organiser la

2 moindre rencontre avec les représentants de l'UCK pendant quelque temps,

3 compte tenu de ces circonstances.

4 Q. Reparlons de Malisevo. Vous venez de dire que l'UCK avait abandonné

5 Malisevo. Mais Malisevo avait-il une importance particulière pour l'UCK ?

6 R. A l'époque, au mois de juillet, l'UCK décrivait Malisevo comme la

7 capitale du "territoire libre", selon les termes utilisés par elle.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais vous avez parlé d'Orahovac, et le

9 compte rendu d'audience n'est pas très compréhensible. Pourriez-vous redire

10 ce que vous avez dit au sujet d'Orahovac ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ce que j'ai dit au sujet d'Orahovac,

12 c'est que l'UCK avait présumé un peu de ses forces et s'était efforcée de

13 s'emparer d'Orahovac, mais que dans cette tentative, l'UCK a été repoussée

14 par les forces de sécurité serbe. L'UCK parlait de cet événement en disant

15 qu'elle avait été provoquée et que suite à une provocation, elle s'était

16 rendue à Orahovac. Mais pour ma part, j'estime que l'UCK avait simplement

17 présumé de ses forces à l'époque.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

19 Madame Moeller.

20 Mme MOELLER : [interprétation]

21 Q. Est-ce que vous vous êtes rendu à Orahovac durant l'année 1998 ?

22 R. Très souvent.

23 Q. Dans quel but, si vous aviez un but précis ?

24 R. Suite à la contre-offensive qui a eu lieu à cette époque-là, notre

25 objectif principal était d'assurer le retour des personnes déplacées à

26 l'intérieur des frontières de l'Etat, et Orahovac était au cœur d'une des

27 régions où nous souhaitions que ces personnes déplacées puissent rentrer.

28 Les tensions étaient extrêmes à ce moment-là. La ville d'Orahovac était

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1 habitée par une population ethniquement mixte composée de Serbes et de

2 Kosovars albanais. Nous souhaitions favoriser le retour de tous ces

3 habitants à Orahovac et dans les villages environnants, donc pas seulement

4 dans la ville.

5 C'est ce que nous avons fait à l'époque, et notre initiative a fini par

6 être qualifiée officiellement d'initiative Kinkel-Vedrine, puisqu'elle a

7 été lancée sous l'égide du ministère des Affaires étrangères allemand et du

8 ministère des Affaires étrangères français. Tout cela, grâce à

9 l'intervention et à la présence sur place de la Mission des observateurs de

10 l'Union européenne qui pouvait octroyer un certain degré de confiance au

11 renseignement selon lequel la situation à Orahovac s'était calmée. Nous

12 avions pris soin de ne donner à personne le sentiment que nous étions

13 responsables de leur sécurité, mais d'augmenter le degré de confiance par

14 la présence de représentants internationaux et d'observateurs qui pouvaient

15 rendre compte de ce qui se passait sur place. Ceci a produit un certain

16 effet; la population est rentrée à Orahovac. Nous avons essayé par la suite

17 de reproduire ce modèle dans d'autres régions, mais cela s'est avéré plus

18 difficile que dans cette ville. Nous avons essayé de faire de même plus

19 tard à Kishna Reka --

20 Q. Bien. Pour l'instant, nous en resterons là.

21 A peu près à cette époque, est-ce que des initiatives particulières ont été

22 prises au cours de l'année 1998, si vous vous en souvenez ?

23 R. On pourrait peut-être parler de ce qui a commencé au mois d'août 1998.

24 Q. Est-ce que vous parlez de représentants de l'ambassade autrichienne et

25 de membres de la MOCE qui ont essayé de se rendre librement dans le secteur

26 d'Orahovac ?

27 R. De temps en temps, nous devions rebrousser chemin après avoir été

28 arrêtés à des postes de contrôle, et en revanche il y avait d'autres

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1 moments où nous n'avions aucun problème à nous rendre là où nous voulions

2 aller. La situation était très variable de ce point de vue, de la liberté

3 de circulation. Cela dépendait de la chance ou de la malchance qu'on avait.

4 Quelquefois, une opération était en cours, et ils nous refusaient le

5 passage pour des raisons de sécurité. Cela, c'est vrai.

6 Q. Vous avez dit il y a quelques instants que vous étiez allé deux fois à

7 Malisevo, et nous avons également parlé de votre voyage en compagnie de

8 représentants de la troïka européenne. Quel est le deuxième voyage que vous

9 avez fait ?

10 R. Malisevo est une petite ville qui se trouve à un carrefour de routes,

11 donc il est facile de traverser Malisevo pour aller n'importe où où on veut

12 aller, que ce soit au nord, à l'est, à l'ouest ou au sud. Pour ce faire, on

13 traverse Malisevo très souvent si on circule beaucoup au Kosovo. Pendant

14 l'été, nous sommes passés très souvent par Malisevo.

15 Q. Qu'avez-vous vu à Malisevo durant cet été, si vous y avez vu quelque

16 chose de particulier ?

17 R. Ce qui était frappant, c'était qu'immédiatement après avoir été

18 abandonné par l'UCK, je parle de la ville de Malisevo et de la population

19 qui l'habitait, cette ville est devenue une ville déserte avec un poste de

20 police serbe qui se trouvait là, et il n'y restait en fait que quelques

21 personnes âgées. C'est ce qu'on pouvait observer chaque fois qu'on passait

22 par là, et cette ville était de plus en plus détruite au fil du temps pour

23 finalement devenir une ville rasée.

24 Q. D'accord. Si on vous demandait de résumer vos observations par rapport

25 aux différentes villes et villages que vous avez traversés durant vos

26 divers voyages du mois de juillet et du début du mois d'août 1998, que

27 diriez-vous ?

28 R. Mes observations personnelles et plus particulièrement les observations

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1 faites par nos vérificateurs sur le terrain étaient que les maisons le long

2 des routes et dans les villes étaient incendiées assez systématiquement.

3 Q. Est-ce que vous avez reçu des renseignements quant à l'identité des

4 responsables de ces destructions et de ces incendies ?

5 R. Si on traversait un village ou une localité où il n'y avait plus

6 d'habitants, mais simplement des forces de sécurité serbe, on se demandait

7 : qui peut bien être responsable de cela ? Nos observateurs, les

8 observateurs de la MOCE même également ont vu des policiers mettre le feu à

9 une maison. C'était un policier qui portait l'uniforme. Ils ont mis cela

10 par écrit dans l'un de leurs rapports.

11 Q. D'accord. J'aimerais que nous passions maintenant à la pièce P2655.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant de passer à cette autre pièce,

13 est-ce que je vous ai bien compris ? Est-ce que vous avez vraiment dit que

14 votre dernière visite se situe au mois de juillet ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Ma dernière visite qui m'a donné l'occasion de

16 rencontrer des représentants de l'UCK.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Au mois d'août, vous avez encore

18 effectué des visites locales dans la région ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

21 [La Chambre de première instance se concerte]

22 Mme MOELLER : [interprétation] Pièce 2655.

23 Q. Monsieur Kickert, j'aimerais que vous vous penchiez sur ce document. Au

24 premier paragraphe, j'indique que nous avons déjà vu ce document avec M.

25 l'Ambassadeur Petritsch. Les Juges de la Chambre ont déjà eu ce document

26 sous les yeux. J'aimerais vous demander quelques détails complémentaires au

27 sujet de ce qui est écrit au premier paragraphe. Nous y voyons mention de

28 la liberté d'accès pour les organisations non gouvernementales

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1 humanitaires. Est-ce qu'il y avait un problème pour ces organisations à se

2 rendre là où elles voulaient au début du mois d'août et plus

3 particulièrement le 4 août 1998 ?

4 R. Oui, comme je l'ai déjà dit, nous avions de temps en temps des

5 problèmes de circulation. Nous ne pouvions pas aller sur le terrain tous

6 les jours. Les ONG humanitaires se sont adressées à nous pour nous demander

7 un appui politique à plusieurs reprises. Comme je peux le lire ici dans les

8 divers tirets de ce texte, il y est question de démarches diplomatiques. On

9 voit également que des protestations ont été formulées par rapport à la

10 confiscation de postes radio, des problèmes de ce genre. Tout cela, c'est

11 le signe que les ONG humanitaires s'adressaient à nous pour obtenir un

12 appui politique afin de mieux pouvoir faire leur travail sur le terrain.

13 Q. Pouvez-vous donner le nom de certaines de ces organisations

14 humanitaires qui ont éprouvé ce genre de problèmes ?

15 R. Nos principaux interlocuteurs sur le terrain étaient le CICR, le HCR,

16 mais il y avait aussi des organisations non gouvernementales occidentales

17 très actives sur le terrain, Médecins sans frontières, OXFAM puis d'autres

18 organisations qui étaient présentes au Kosovo avant notre arrivée et qui

19 sont restées pendant notre séjour.

20 Q. Passons maintenant à la page 2 de cette pièce. La liste des points à

21 discuter fait état d'inquiétudes importantes. Est-ce que cela signifie que

22 vous-même et vos collègues de l'ambassade aviez entendu parler de certaines

23 accusations que vous reprenez dans ce fax ? Quels étaient les éléments

24 d'information qui étaient à l'origine des accusations que vous portez par

25 écrit dans ce document et qui provoquaient votre grande inquiétude ?

26 R. Nos observateurs et nos moniteurs sur le terrain. Nous avions une base

27 de données de la MOCE qui s'enrichissait des quotidiens et hebdomadaires

28 qui étaient établis. Cette mission des rapports observateurs diplomatiques

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1 du Kosovo effectuait des voyages sur le terrain. Il y avait aussi une

2 composante américaine, une composante russe, des rapports conjoints, mais

3 nous nous appuyions principalement sur nos moniteurs de l'Union européenne.

4 Q. Lequel des points qui sont énumérés ici était connu également de vos

5 observateurs pendant vos voyages sur les lieux ?

6 R. Comme je l'ai déjà dit, ils avaient vu des champs non moissonnés en

7 feu, des maisons en feu. Je ne sais pas si à l'époque j'avais déjà vu des

8 personnes déplacées à l'intérieur des frontières de l'Etat, mais nous nous

9 appuyions en tout cas sur des organisations internationales et

10 principalement le HCR pour ce genre de questions. Nous ne nous appuyions

11 pas sur des sources locales pour ce genre de questions.

12 Q. Pourquoi est-ce que vous ne faisiez pas confiance aux sources locales

13 s'agissant de déterminer le nombre des réfugiés ?

14 R. Parce que nous avions déjà vécu ce genre d'expérience et nous

15 craignions une exagération des chiffres.

16 Q. Pourquoi ne vous appuyiez-vous pas sur les organisations locales qui

17 pouvaient vous fournir des chiffres ? Est-ce que vous pourriez donner le

18 nom de l'une ou l'autre de ces organisations ?

19 R. Il y avait l'Association Mère Teresa, le Conseil chargé de la défense

20 des droits de l'homme et des libertés. Mais, comme je l'ai déjà dit, nous

21 faisions davantage confiance aux ONG internationales et aux organisations

22 internationales.

23 Q. Je vous remercie. En août 1998, est-ce que vous avez participé à

24 d'autres voyages sur le terrain ?

25 R. De temps en temps, il y a eu plusieurs voyages sur le terrain au mois

26 d'août et également au mois de septembre.

27 Q. Est-ce que vous avez rencontré Emma Bonino à quelque moment que ce soit

28 au Kosovo ?

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1 R. Oui, elle est arrivée au cours de la deuxième quinzaine du mois d'août.

2 Elle représentait la commission européenne, plus précisément le commissaire

3 européen chargé de l'aide humanitaire. Elle voulait effectuer un certain

4 nombre de voyages au Kosovo. J'ai assuré la coordination de ces différents

5 voyages, nous lui avons assuré certains éléments d'infrastructure, comme

6 par exemple la maison dans laquelle elle était logée et dans laquelle elle

7 organisait également ses conférences de presse. Nous avons fait une tournée

8 au Kosovo en sa compagnie. L'ambassadeur Petritsch a participé également à

9 cette tournée. Il était à ses côtés à Belgrade et j'étais également présent

10 à Pristina, après quoi nous avons effectué ensemble ce voyage sur le

11 terrain organisé principalement par le bureau de l'Union européenne chargé

12 de l'aide humanitaire en coordination avec le HCR des Nations Unies.

13 Q. Où êtes-vous allé lors de ce voyage en compagnie de Mme Bonino ?

14 R. Nous sommes allés à Malisevo encore une fois. Nous voulions visiter un

15 camp de personnes déplacées à l'intérieur des frontières de l'Etat qui se

16 trouvait à l'est de Malisevo. Si vous prenez la route de l'est à partir de

17 Malisevo, vous tournez ensuite à gauche, vous vous dirigez donc vers le

18 nord, à cet endroit notre convoi n'a pas été autorisé à franchir un poste

19 de contrôle de l'UCK. Nous avons rebroussé chemin et au lieu de nous

20 diriger vers le nord, nous sommes allés vers Drenica dans la région de

21 Cirez.

22 Q. Qu'avez-vous vu à Cirez, si vous y avez vu quelque chose de

23 particulier ?

24 R. Pour être honnête, je ne m'en souviens pas. Il est possible qu'ils s'y

25 soient trouvées quelques personnes déplacées à l'intérieur des frontières,

26 ce qui justifiait la présence du commissaire à cet endroit, mais je n'ai

27 pas de souvenir précis.

28 Mme MOELLER : [interprétation] D'accord, pièce suivante, pièce 564, s'il

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1 vous plaît.

2 Q. Si j'ai bien compris vous êtes également l'auteur de ce rapport ?

3 R. Oui.

4 Q. Nous sommes maintenant en septembre 1998. Vous avez participé à ce

5 voyage sur le terrain, n'est-ce pas ?

6 R. Oui, il y a eu une visite de l'ambassadeur Parak, qui était le chef de

7 la MOCE à l'époque. Chaque présidence dirigeait le MOCE dont le siège pour

8 l'ensemble de l'ex-Yougoslavie se trouvait à Sarajevo, le siège se trouvait

9 donc à Sarajevo. Il est venu se rendre compte de la situation par lui-même.

10 Avec l'appui logistique de la MOCE, nous nous sommes rendus sur le terrain.

11 Q. L'itinéraire que vous décrivez au premier paragraphe, Pristina-Pec-

12 Decani-Junik-Pec-Pristina, c'est l'itinéraire que vous avez emprunté,

13 n'est-ce pas ?

14 R. C'est exact.

15 Q. Ce document contient certaines observations. Au premier point, on peut

16 lire : "Les villages situés le long de la route principale entre Pristina

17 et Pec, à l'exception des villages serbes, ne sont plus habités."

18 Comment pouviez-vous savoir quels étaient les villages albanais et

19 quels étaient les villages serbes ?

20 R. On peut facilement le savoir vu la construction des maisons ou des

21 propriétés. S'il y a une mosquée, cela signifie que ce n'est pas un village

22 serbe. Dans un village serbe, il y a une église orthodoxe. Vu le niveau de

23 destruction, le nombre de villageois présents sur les lieux, on pouvait

24 savoir si le village était Albanais ou non. Si le village avait été détruit

25 et que tous les habitants en étaient partis, on pouvait en déduire avec un

26 degré important de certitude qu'il s'agissait d'un village albanais. Dans

27 les villages serbes, on trouvait des Serbes. Je me souviens qu'à un

28 carrefour sur la route qui menait de Pristina à Pec, nous avons vu des

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1 villageois en tenue civile portant des kalachnikovs; je suppose que c'était

2 pour se protéger. Cela nous donnait une indication selon laquelle il

3 s'agissait d'un village serbe, si ces personnes se déplaçaient ouvertement

4 armées de kalachnikovs.

5 Q. Vous dites : "Ils se déplaçaient ouvertement armés de kalachnikovs."

6 Est-ce qu'il y avait présence des forces de sécurité serbes dans ces

7 secteurs ?

8 R. Lorsque j'ai vu ce villageois, non. Mais comme je l'ai indiqué dans ce

9 rapport, nous avons vu là un convoi de la police.

10 Q. Il s'agit en réalité du point suivant dans le document. Le 20

11 septembre, vous avez vu un convoi de véhicules militaires transportant des

12 unités spéciales de l'armée au sud de Pec. Vous avez déjà déclaré que vous

13 n'étiez pas versé dans la chose militaire. Comment en avez-vous déduit

14 qu'il s'agissait d'une unité spéciale de l'armée ?

15 R. Sur la base de l'évaluation faite par les observateurs de la MOCE -

16 nombreux de ces observateurs étaient des soldats - je m'appuyais sur ce

17 qu'ils me disaient, car je ne reconnais pas les insignes qu'ils portent sur

18 leurs uniformes, je n'avais aucune idée.

19 Q. Certains des observateurs se trouvaient avec vous à l'occasion de ce

20 voyage sur le terrain que vous avez fait en compagnie de l'ambassadeur

21 Parak ?

22 R. Tout à fait. Il devait y avoir deux voitures. Le chauffeur était un

23 membre de l'armée autrichienne, nous étions toujours accompagnés des

24 militaires.

25 Q. Pour revenir à une question que je vous ai posée au sujet du premier

26 point de ce document. Concernant les villages situés le long de la route

27 qui sépare Pristina de Pec, combien de villages se trouvaient là, d'après

28 vos souvenirs ?

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1 R. Je ne sais pas combien il y a de villages sur cette route, je l'ignore,

2 une dizaine peut-être. Je ne peux que formuler que des conjectures.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans ce document, il s'agit de vos

4 propres observations, n'est-ce pas ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais nombre de ces éléments ressortent

6 des conversations que j'ai eues avec des gens qui se trouvaient dans le

7 secteur. Par exemple, j'ai cité les propos de l'attaché militaire

8 néerlandais.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quand c'est le cas, vous l'indiquez.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

11 Mme MOELLER : [interprétation]

12 Q. Passons au troisième point de ce document, Junik. Vous dites : "Des 1

13 000 personnes qui sont revenues du côté serbe, on ne voit personne." Est-ce

14 que vous pourriez commenter cela ? De qui s'agit-il ?

15 R. Je pense que ceci est en rapport avec l'affirmation selon laquelle 1

16 000 personnes seraient rentrées chez elle. Je ne pense pas qu'il y ait eu

17 beaucoup d'habitant serbes à Junik, il devait s'agir d'un village albanais.

18 D'après l'interprétation que je peux faire aujourd'hui, s'ils affirment que

19 1 000 personnes sont entrées chez elles, j'indique ici que je n'ai pas vu

20 ces 1 000 personnes. Je poursuis en disant que selon la KDOM américaine, il

21 est question du retour d'environ 2 000 personnes et nous avions chargé les

22 membres de l'équipe de la MOCE basée à Pec de vérifier la véracité de ces

23 rapports.

24 Q. Au paragraphe suivant, il est question du centre humanitaire serbe de

25 Decani. Vous parlez de sa mise en place, de son ouverture, mais : "Personne

26 ne s'y est rendu. La population albanaise n'est pas rentrée chez elle."

27 Comment expliquez-vous cela ?

28 R. Par méfiance, les gens étaient réticents à avoir à s'adresser au centre

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1 humanitaire serbe, non seulement à Decani, mais je vous ai dit également ce

2 qu'il en était pour ce qui est du projet concernant le retour des personnes

3 déplacées à Orahovac. Il y avait un centre là-bas également et les Albanais

4 ne s'y rendaient pas.

5 Q. Est-ce qu'il y avait des observateurs de la MOCE à cet endroit ou près

6 de ce centre humanitaire de Decani ?

7 R. Oui. La MOCE avait un concept différent. Nous n'avions pas les mêmes

8 problèmes de sécurité que les Américains. Les Américains font cela toujours

9 de façon très concentrée pour des raisons de sécurité. Nous, nous étions

10 éparpillés sur le territoire, le bureau de la MOCE le plus proche se

11 trouvait à Pec. Il y en avait un à Sremska Mitrovica, à Pristina et plus

12 tard je crois qu'il y en a eu un à Orahovac également et à Urosevac

13 également, appelé Ferizaj.

14 Q. Mais pas à Decani, si je vous ai bien compris ?

15 R. Pas à ma connaissance. C'était à proximité de Pec, on pouvait s'y

16 rendre facilement en voiture et il y avait des patrouilles dans le secteur.

17 Elles s'y rendaient donc. Chaque poste de la MOCE était pourvu de deux

18 équipes. Je suppose qu'ils passaient quotidiennement par Decani.

19 Q. Passons à la page 2 de ce document. Premier point, vous faites mention

20 d'un convoi d'aide humanitaire du CICR auquel on a refusé l'accès le 10

21 septembre près de Krusevac. Est-ce que vous pouvez nous en dire davantage ?

22 R. Il s'agissait d'avoir accès aux personnes déplacées. C'était toujours

23 la question. Il y avait des opérations de nettoyage et de ratissage en

24 cours. Il fallait avoir accès à ces personnes afin de leur fournir une aide

25 humanitaire. Il fallait retrouver ces personnes, car elles se déplaçaient.

26 La MOCE s'est rendue à Krusevac, il n'y avait plus personne à cet endroit.

27 On a supposé que ces personnes s'étaient déplacées plus avant vers le sud.

28 Q. Dans le résumé de ce document, il est dit que le nombre de personnes

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1 déplacées à l'intérieur des frontières de l'Etat n'a pas chuté. Ces

2 personnes sont déplacées localement en raison des actions menées par les

3 forces de sécurité. Sur quoi vous êtes-vous appuyé pour parvenir à cette

4 conclusion ?

5 R. Sur les renseignements que nous avons obtenus de la MOCE et des

6 organisations humanitaires présentes sur le terrain.

7 Q. Début septembre, avez-vous évoqué ce problème avec les autorités

8 serbes, je parle de l'ambassade autrichienne ?

9 R. C'est un sujet qui était régulièrement évoqué avec les autorités de

10 Belgrade. Comme vous l'avez souligné, l'initiative prise début août, selon

11 laquelle il convenait de poursuivre le dialogue avec les autorités de

12 Belgrade, car nous craignions que la situation ne se prolonge jusqu'à

13 l'hiver et que l'on arriverait à une situation où les personnes déplacées

14 se retrouvaient dehors, à geler dans la neige. Nous voulions éviter cela.

15 Je pense que Belgrade comprenait également notre point de vue et nos

16 efforts tels que ceux que nous avions déployés à Orahovac pour favoriser le

17 retour des personnes déplacées et permettre leur accès aux organisations

18 humanitaires.

19 Q. S'agissant des chiffres que vous avez communiqués aux autorités serbes,

20 quelle a été leur réaction ?

21 R. En général, je pense qu'ils minimisaient la situation. Pour ce qui est

22 de la partie albanaise du Kosovo, les Albanais avaient tendance à exagérer

23 les chiffres. Il nous a fallu trouver un compromis, et pour ce faire nous

24 nous sommes beaucoup appuyés sur le HCR des Nations Unies.

25 Q. Au dernier point de ce document, il est dit que l'accès à des

26 organisations humanitaires sera désormais plus difficile.

27 R. Non, ce n'est pas ce qui est dit en allemand. En allemand, il est dit

28 que l'accès des organisations humanitaires est continuellement entravé.

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1 C'est une erreur de traduction.

2 Mme MOELLER : [interprétation] Etant germanophone, je peux confirmer que

3 comme l'a dit M. Kickert à l'instant, "l'accès est continuellement

4 entravé", et non pas "l'accès désormais plus difficile".

5 En fait, cela résout mon problème parce que je voulais demander

6 pourquoi les choses étaient désormais plus difficiles.

7 Q. Pièce suivante, P558. Il s'agit d'un document daté de la fin du mois de

8 septembre. Là encore, Monsieur Kickert, vous êtes l'auteur de ce document ?

9 R. C'est exact.

10 Q. Sur quoi se fonde ce rapport ? Sur votre expérience personnelle ou est-

11 ce que ce rapport reflète autre chose ?

12 R. Non, il s'agit d'un rapport qui se fonde sur les observations de mon

13 collègue britannique avec qui nous avons partagé beaucoup d'expériences au

14 Kosovo. Il m'a dit que je ne pouvais pas participer à ce voyage, mais je

15 m'étais déjà rendu avec lui dans ce secteur au début septembre. J'en ai

16 parlé dans le rapport établi le 7 septembre.

17 Q. Pour bien comprendre le contexte, de quoi est-il question dans ce

18 document lorsqu'on parle d'une force de police locale ?

19 R. Il fallait que les gens aient un sentiment de sécurité et faire en

20 sorte que les gens s'approprient en quelque sorte cette sécurité. Dans les

21 villages albanais du Kosovo, il fallait qu'il y ait présence de forces de

22 sécurité albanaises du Kosovo pour remplacer la police serbe, ce qui aurait

23 permis de renforcer la confiance de la population et le désir de rester sur

24 place ou de revenir chez soi.

25 Q. D'où venait cette initiative ?

26 R. De Belgrade, vraisemblablement sur la base de discussions entre les

27 Américains et les autorités de Belgrade.

28 Q. Avant de revenir à ce document, vous dites que vous vous êtes rendu à

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1 l'endroit mentionné dans ce document, Djakovica, précédemment.

2 R. Hm-hm.

3 Q. En rapport avec une question relative à la police locale ?

4 R. Tout à fait. Nous voulions constater quelle était la situation par

5 nous-mêmes. Après avoir appris que cela s'était fait dans le secteur de

6 Djakovica, mon collègue britannique David Slinn et moi-même nous sommes

7 rendus sur place. Nous avons parlé à un adjoint du préfet de Djakovica à

8 l'époque. Il a confirmé cela. Il y avait une certaine incertitude qui

9 régnait quant au fait de savoir si ces personnes seraient en uniforme ou

10 armées. Il s'agit d'un rapport de suivi établi sur la base ce que m'avait

11 raconté mon collègue britannique, de ce qu'il avait vu quand il était dans

12 le secteur.

13 Q. Qu'est que le préfet adjoint de Djakovica vous a dit lors de cette

14 réunion qui avait eu lieu précédemment ? Quelles étaient leurs intentions ?

15 R. Il s'agissait d'assurer la sécurité sur place, de créer une force de

16 police locale dans plusieurs villages de la région de Djakovica. Ils ne

17 savaient, comme je l'ai déjà dit, si ces personnes seraient en uniforme ou

18 armées d'armes de poing. Le préfet, celui qui abritait les fonctions de

19 préfet de Djakovica à l'époque, a dit à mon collègue britannique que ces

20 personnes se verraient attribuer des uniformes, des armes de poing et des

21 munitions le lendemain, le 25 septembre.

22 Q. [aucune interprétation]

23 R. [aucune interprétation]

24 Q. Dans le paragraphe qui précède le paragraphe relatif à l'évaluation, il

25 est fait mention d'une inspection de Djakovica via Ponosevac et Junik. On

26 n'a trouvé personne dans ces villages, même si on s'est enquis leur sort.

27 R. Il s'agit d'un voyage sur les lieux de mon collègue britannique. On lui

28 a remis une liste de coordinateurs chargés de la sécurité. Il a pris la

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1 route et s'est rendu dans les villages où ces personnes étaient censées se

2 trouver, mais il ne les a pas trouvées.

3 Q. Au cours de cette mission, on n'a trouvé personne. Est-ce que c'est

4 votre collègue britannique qui s'est rendu sur place tout seul ou est-ce

5 que vous l'avez accompagné ?

6 R. Non, je suis resté là où j'étais. Je devais rédiger un rapport sur la

7 mise en œuvre de l'accord sur l'éducation.

8 Q. L'observation selon laquelle la plupart des villages étaient désertés

9 et que seul un petit nombre de personnes étaient rentrées à Junik, c'est

10 une observation de votre collègue britannique ?

11 R. C'est exact.

12 Q. Venons-en au passage intitulé "évaluation". Parlons d'abord de la

13 dernière phrase, car une erreur de traduction s'est également glissée à cet

14 endroit. Vous l'avez relevée lorsque vous avez examiné ce document dans le

15 cadre de la séance de récolement, dernière phrase. "Pour le moment, on ne

16 peut considérer cela que comme une opération de dissimulation."

17 R. En fait, on a simplement annoncé certaines choses, mais il n'y a eu

18 aucune incidence sur le terrain. J'ai dit que les représentants locaux de

19 la LDK avaient affirmé qu'il s'agissait de personnes recrutées localement,

20 des informateurs de la police. Cela ne pouvait pas contribuer à restaurer

21 la confiance au sein de la population locale, bien au contraire.

22 Q. Il s'agissait d'une opération alibi. C'est votre évaluation ou celle de

23 votre collègue britannique ?

24 R. Il s'agit d'une évaluation partagée.

25 Q. Cette évaluation ou cet avis partagé se fonde uniquement sur le rapport

26 présenté par votre collègue britannique ou sur d'autres informations

27 également ?

28 R. Lors de la mission précédente qui avait eu lieu au début de septembre

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1 avec lui, c'était le 6 ou le 7 septembre, me semble-t-il.

2 Q. Est-ce que vous êtes revenu sur cette évaluation plus tard ? Est-ce que

3 vous avez appris d'autres choses au sujet de la police locale par la

4 suite ?

5 R. Fin septembre, les choses se sont précipitées. En septembre 1998, il y

6 a eu le rapport du secrétaire général sur l'application de la résolution du

7 Conseil de sécurité numéro 1 199. Il se passait beaucoup de choses, fin

8 septembre, début octobre. Des pourparlers étaient en cours et Richard

9 Holbrooke se trouvait à Belgrade, et cela a donné lieu à la création de la

10 MVK. Mais pour autant que je le sache, il n'y a pas eu de suivi, et la MVK

11 a ensuite été élargie.

12 Mme MOELLER : [interprétation] Passons à la pièce P557, si vous le voulez

13 bien.

14 Q. Il s'agit d'un document portant la date du 30 septembre 1998. A droite,

15 on voit "SB", ce qui signifie "auteur". "MC", donc auteur, "MC, M.

16 Kickert". Que signifie ce sigle "MC" ?

17 R. Chef de mission.

18 Q. [aucune interprétation]

19 R. En fait, il s'agit d'un rapport conjoint. Même si j'en étais l'auteur,

20 il l'a également signé, et lorsque c'était nécessaire il apportait des

21 changements ou des modifications. Mais dans ce rapport, il s'agit d'une

22 compilation. Il y a trois auteurs à ce rapport. Je n'étais pas présent lors

23 de la rencontre entre l'ambassadeur Petritsch et les ambassadeurs du Groupe

24 de contact avec le président Milosevic.

25 Q. Vous avez déjà répondu à la question que j'allais vous poser. Vous

26 n'avez pas participé à cette rencontre avec Milosevic, mais je souhaiterais

27 malgré tout que vous examiniez le dernier point intitulé "Entretiens avec

28 le président Milosevic", qui, d'après ce rapport, ont eu lieu le 28

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1 septembre. Au dernier point, il est dit : "Il y a peut-être au maximum 700

2 personnes déplacées à l'intérieur des frontières de l'Etat qui se trouvent

3 à l'extérieur." Il s'agit d'informations qui vous ont été communiquées par

4 le président Milosevic à l'époque, n'est-ce pas ?

5 R. Oui, c'est ce que j'ai cru comprendre. C'est le président Milosevic qui

6 a parlé de "700 personnes".

7 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Objection. Le témoin a affirmé lui-même

8 qu'il n'était pas présent à cette rencontre. La personne qui a assisté à

9 cette rencontre a témoigné il y a quelques jours, et c'est à lui qu'il

10 aurait fallu poser la question, et pas à ce témoin.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois que la question lui a

12 effectivement été posée, Maître O'Sullivan, ou n'était-ce pas le cas ?

13 M. O'SULLIVAN : [aucune interprétation]

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je comprends ce que vous voulez dire,

15 mais on n'a pas posé cette question à M. Petritsch.

16 Mme MOELLER : [interprétation] En fait, on a présenté ce document par le

17 truchement de M. Petritsch.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Alors pourquoi on pose la question au

19 témoin ?

20 Mme MOELLER : [interprétation] Je souhaiterais simplement qu'il parle de ce

21 chiffre de 700 personnes déplacées à l'intérieur des frontières de l'Etat

22 afin de savoir s'il a des informations à ce sujet.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Posez-lui la question, mais inutile de

24 lui demander cela si la source de cette information est M. Milosevic, car

25 le témoin qui pouvait parler de cela vient de déposer.

26 Mme MOELLER : [interprétation] Je voulais simplement déterminer d'où cela

27 venait.

28 Q. Monsieur Kickert, ce nombre, ce chiffre de 700 personnes déplacées à

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1 l'intérieur des frontières de l'Etat qui a été avancé à cette occasion,

2 qu'avez-vous à dire à ce sujet ?

3 R. Dans le rapport, il est dit que dès le lendemain, nous étions

4 accompagnés des ambassadeurs du Groupe de contact lorsque nous sommes

5 rendus dans un camp de personnes déplacées à Kishna Reka. J'en ai déjà

6 parlé. J'étais présent sur les lieux. Il y avait selon mes estimations

7 environ 1 000 personnes déplacées dans ce camp. C'était un camp en plein

8 air.

9 Q. Ceci a été mentionné dans le rapport au point 2, deuxième camp.

10 R. Oui.

11 Q. Ce camp, depuis combien de temps se trouvait-il à Kishna Reka ?

12 R. Tout l'été. Sans doute à partir du moment où l'UCK avait quitté le

13 secteur, donc je suppose fin juillet, début août.

14 Mme MOELLER : [interprétation] Pièce suivante, P561.

15 Q. Faisons un petit saut en arrière dans le temps pour parler du 8

16 septembre, et vous êtes l'auteur de ce document, n'est-ce pas, Monsieur

17 Kickert ?

18 R. Effectivement.

19 Q. Il est question d'une réunion d'information à laquelle ont assisté

20 l'ambassadeur Petritsch et le secrétaire adjoint américain chargé de la

21 démocratie des droits de l'homme et du travail, M. Shattuck. Avez-vous

22 assisté à cette réunion ?

23 R. Sans doute, puisque j'ai rédigé ce rapport, mais cela ne m'a pas laissé

24 un souvenir impérissable.

25 Mme MOELLER : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait voir ensemble le

26 paragraphe qui se trouve à la fin de ce document ? Parce qu'il est question

27 "d'experts de la police scientifique".

28 Q. "Shattuck a fait preuve d'un optimisme prudent; Milosevic avait laissé

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1 entendre que l'on pourrait envisager la présence d'experts internationaux

2 et il a exclu l'envoi de telles organisations." Ensuite, on dit : "Shattuck

3 a montré de l'intérêt concernant l'équipe finlandaise ou l'équipe

4 hollandaise."

5 De quoi est-il question, ici ?

6 R. Pour obtenir des informations crédibles au sujet des incidents, des

7 allégations de massacres, nous voulions avoir des experts internationaux

8 capables d'examiner ces incidents et de les analyser. Wolfgang Schuessel,

9 le ministre allemand des affaires étrangères, lorsqu'il a effectué une

10 visite le 5 juin 1998, avait déjà demandé la présence d'experts de la

11 police scientifique internationaux pour mener des enquêtes et analyser les

12 incidents en question afin d'obtenir des informations objectives, car il y

13 avait certaines allégations et contre-allégations au sujet de ces incidents

14 et nous voulions mieux comprendre les choses.

15 Nous avons donc proposé qu'une équipe de policiers scientifiques finlandais

16 - et lorsque je dis nous, je veux parler de l'Autriche - se rendent sur

17 place. Ils connaissaient bien la situation et ils avaient travaillé en

18 Bosnie, et nous avons compris la réticence de Belgrade qui ne voulait pas

19 qu'il y ait une enquête du TPIY. Nous avons pensé que ce serait peut-être

20 une solution que d'envoyer des experts internationaux d'un pays neutre qui

21 n'avait absolument aucun intérêt, aucun enjeu au Kosovo ou en République

22 fédérale de Yougoslavie.

23 Q. Quelle a été la réaction de Belgrade à cette proposition faite en juin

24 1998 ?

25 R. De l'ignorance. En fait, ils nous ont ignorés et il n'y a pas eu de

26 suivi. Ils nous ont dit : nous avons nos propres enquêtes en cours, nous

27 sommes un Etat souverain, nous avons nos propres juges d'instruction, nos

28 propres pathologistes, nos propres experts qui se chargent de cela.

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1 Mme MOELLER : [interprétation] Je vois l'heure. Est-ce qu'il conviendrait

2 de faire une pause ?

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Kickert, nous devons faire

4 une pause d'une heure. L'huissier va vous raccompagner et vous indiquer où

5 vous pouvez passer cette heure de pause. Nous vous reverrons tout à

6 l'heure, mais dans l'intervalle je vous invite à suivre l'huissier qui va

7 vous raccompagner hors de ce prétoire.

8 [Le témoin se retire]

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Nous reprendrons nos travaux à

10 13 heures 45.

11 --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 45.

12 --- L'audience est reprise à 13 heures 45.

13 [Le témoin vient à la barre]

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Moeller.

15 Mme MOELLER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

16 Q. Monsieur Kickert, avant la pause, nous parlions de cette équipe

17 d'experts en médecine légale. Est-ce que cette équipe d'experts est arrivée

18 au Kosovo ? D'ailleurs, est-ce qu'une équipe d'experts est arrivée,

19 d'experts en médecine légale ?

20 R. Oui.

21 Q. D'où venaient-ils ?

22 R. De Finlande.

23 Q. A quel moment sont-ils arrivés ?

24 R. Ils ont reçu le feu vert de Belgrade au début octobre et ils sont venus

25 pour la première mission concernant la situation au cours de la deuxième

26 moitié du mois d'octobre, le 20 ou 25 à peu près.

27 Q. Comment se fait-il qu'ils aient été invités à venir au Kosovo ?

28 R. Cela faisait partie de ce paquet, comme on dit, Holbrooke. Belgrade

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1 considérait comme un moindre mal d'avoir cette équipe d'experts en médecine

2 légale que d'avoir des experts du TPIY. Nous avons parlé beaucoup des

3 circonstances de leur arrivée, les modalités. Tout d'abord, Belgrade

4 voulait qu'ils soient invités par un autre institut équivalent. Ensuite,

5 nous avons réussi à convaincre Belgrade qu'une invitation formelle venant

6 du ministre des Affaires étrangères demandant au ministre finnois d'envoyer

7 leur équipe serait la façon appropriée d'agir.

8 Q. Quel était le mandat de cette équipe d'experts ?

9 R. Il s'agissait de leur donner vraiment mains libres par rapport au

10 mandat. Ils pouvaient faire les enquêtes comme ils le souhaitaient. Ils

11 l'ont fait d'ailleurs dès qu'ils sont arrivés. Nous nous sommes mis

12 d'accord sur le nombre des sites et des incidents qu'il fallait étudier.

13 Vous aviez à Belgrade les allégations concernant différentes atrocités à

14 Klecka, Glodjane, et cetera. Puis, il y avait des incidents du côté des

15 Albanais du Kosovo qui disaient aussi qu'il y a eu des atrocités, si vous

16 voulez.

17 Q. Quel rôle avez-vous joué par rapport à l'équipe d'experts finlandais ?

18 R. J'étais une espèce d'intermédiaire. J'étais le représentant de la

19 présidence de la Communauté européenne. Ils ont commencé à travailler au

20 niveau bilatéral. Tout d'abord, il y a eu la visite du gouvernement

21 finlandais, ensuite une action conjointe de la Communauté européenne,

22 l'Union européenne à l'époque, et tout ceci a été payé par l'Union

23 européenne.

24 Q. Après leur arrivée au Kosovo, qu'est-ce qu'ils ont fait ?

25 R. Ils ont établi leur quartier général là-bas. Ils avaient des contacts

26 au Kosovo avec différentes autorités. Ils ont eu des contacts avec les

27 experts en médecine légiste du côté serbe pour essayer d'éclairer une

28 espèce de base de données des sites dont ils devaient enquêter.

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1 Q. Vous avez dit que la question s'est posée quant aux incidents qu'il

2 fallait qu'ils étudient. Est-ce qu'ils ont commencé à un moment donné à

3 faire leurs enquêtes sur certains incidents ?

4 R. Oui, mais ils avaient des problèmes. Ils ne pouvaient pas faire le

5 travail comme ils voulaient le faire parce qu'ils avaient des problèmes

6 avec les exhumations et ils avaient des problèmes avec les victimes qui se

7 trouvaient à Gornje Obrinje.

8 Q. Quelle était la nature des problèmes ?

9 R. C'était une question d'accès aux sites combinée aux questions de

10 sécurité. Il n'y avait pas de problèmes à ce qu'ils y aillent tout seuls ou

11 avec les représentants des observateurs de la Communauté européenne. Mais à

12 partir du moment où les exhumations devaient commencer, c'était à peu près

13 le 10 novembre, il n'y avait pas seulement le juge d'instruction serbe qui

14 faisait partie du convoi, mais vous aviez aussi plein de voitures du MUP.

15 Il y avait même des blindés. Gornje Obrinje, à l'époque, était dans une

16 région tenue par l'UCK, la région de Drenica. Cela voulait dire qu'il

17 allait y avoir des tirs, c'était sûr, et nous, les Finlandais et moi-même,

18 on s'est dit qu'on allait être pris entre deux feux, donc j'ai décidé que

19 nous ne pouvions pas y aller, on ne pouvait pas aller travailler là-bas.

20 Q. Vous étiez présent au moment où l'équipe finlandaise, l'équipe des

21 experts finlandais s'est rendue dans Gornje Obrinje ?

22 R. Oui, oui. Tout était prêt du point de vue de la logistique. La veille

23 déjà, ils sont allés sur le site. Ils ont commencé déjà les exhumations.

24 Quand nous y sommes allés pour commencer vraiment les exhumations

25 proprement dites, on s'est rendu compte qu'on devait se retirer parce qu'on

26 allait faire l'objet d'incidents.

27 Q. Merci.

28 Mme MOELLER : [interprétation] Maintenant, je voudrais vous présenter la

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1 pièce P2820.

2 Q. Monsieur Kickert, c'est un document en date du 16 décembre.

3 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je suis contre la présentation de ce

4 document. C'est un document qui nous a été communiqué hier à 16 heures 25.

5 Vous avez ce document en anglais et en allemand. La traduction anglaise

6 n'est pas complète. Nous n'avons pas de traduction en B/C/S pour nos

7 clients. Ce document n'a pas été indiqué dans le résumé en vertu de

8 l'article 65 ter. Nous considérons que nous n'avons pas eu suffisamment de

9 temps pour nous préparer.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Moeller.

11 Mme MOELLER : [interprétation] C'est exact de dire que le document a été

12 communiqué qu'hier. La raison, c'est je les ai prévenus d'un autre document

13 qui très similaire, c'est le document P2657. Il s'agit d'un document

14 intitulé : "Les obstacles présentés à l'équipe de médecine légiste

15 finlandaise." On y parle de tout, sauf de cette équipe proprement dite.

16 Hier, en parlant avec M. Kickert, j'ai demandé s'il existait d'autres

17 documents qui parlaient des problèmes rencontrés par cette équipe. C'est un

18 document dont je n'avais pas connaissance avant cela.

19 C'est pour cela que nous ne l'avons communiqué que tardivement. J'ai

20 pensé que ce que M. Kickert a dit à ce sujet est tout à fait acceptable

21 puisqu'on en parle dans sa déclaration préalable. Il en parle dans sa

22 déclaration préalable dans deux paragraphes à la page 5, il parle du

23 travail des experts finlandais en médecine légale et des problèmes qu'ils

24 ont rencontrés. Nous souhaitons présenter ce document vraiment pour

25 corroborer, appuyer et supporter sa déposition si vous voulez. C'est pour

26 cela que nous demandons que ce document soit admis en dépit d'une

27 notification assez tardive.

28 Quant aux versions anglaise et allemande du texte, je souhaite me

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1 baser uniquement sur le texte en anglais. C'est juste le titre et peut-être

2 une phrase qui sont en allemand, mais on peut le lire ici en anglais et il

3 y a quelques paragraphes à la fin qui sont en allemand, mais ici on parle

4 d'autre chose.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourquoi vous n'avez pas demandé à

6 amender, à modifier votre liste de pièces en vertu de l'article 65 ter ?

7 Mme MOELLER : [interprétation] J'ai voulu en parler plus tard parce que

8 j'ai compris en voyant le témoin, avec ce qui s'est passé avec le dernier

9 témoin, on peut être amenés à demander par écrit le versement du dossier et

10 à changer la liste initiale. J'aurais dû en fait en parler plus tôt.

11 [La Chambre de première instance se concerte]

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Puisque vous n'avez pas respecté la

13 règle de base que nous vous avons demandé à respecter, vous avez fait

14 preuve aussi d'absence de courtoisie de base par rapport aux Juges de la

15 Chambre de première instance, et parce que ce document a été communiqué

16 très tardivement, nous ne vous permettons pas de verser ce document.

17 Mme MOELLER : [interprétation] Je vous comprends.

18 Est-ce que je peux tout de même lui poser quelques questions au sujet

19 de l'incident ?

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne vois pas du tout pourquoi vous

21 voulez absolument verser ce document puisque vous m'avez dit que le témoin

22 a parlé de la même chose dans sa déclaration préalable. Si vous voulez,

23 j'accepte ce que vous dites au sujet du contenu, mais je ne vous permets

24 pas d'utiliser le document proprement dit.

25 Mme MOELLER : [interprétation] Je vous remercie.

26 Q. Monsieur Kickert, par rapport à cet incident dont nous avons parlé,

27 c'est-à-dire cette tentative avortée de se rendre à Gornje Obrinje ce jour-

28 là, est-ce qu'il y a eu des discussions conséquentes avec les autorités

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1 serbes ?

2 R. Oui, oui. On a évoqué ces problèmes aussi bien à Belgrade qu'ailleurs

3 avec le ministre de la Justice.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Cepic.

5 M. CEPIC : [interprétation] Je voudrais vous poser une autre question par

6 rapport à ce que vient de dire le Procureur. La déclaration préalable de ce

7 témoin n'a pas été versée au dossier. Elle n'a proposé de verser que les

8 pièces jointes, donc il n'y a aucune base pour que l'on évoque cet

9 incident.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Moeller.

11 Mme MOELLER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Effectivement,

12 il ne s'agit pas là d'un témoin en vertu de l'article 92 ter, il s'agit

13 d'un témoin qui témoigne de vive voix. Nous nous sommes dit que cette

14 déclaration préalable n'est pas une pièce à conviction, elle a été tout

15 simplement communiquée en vertu de l'article 66(A)(ii), l'article régissant

16 la communication de pièces.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Elle ne fait pas partie du résumé.

18 Mme MOELLER : [interprétation] Si, elle fait partie du résumé, mais ce

19 n'est pas une pièce à conviction enregistrée dans la présentation

20 électronique des documents, puisque nous n'avions pas l'intention de verser

21 au dossier cette déclaration préalable puisqu'il s'agit d'un témoin qui

22 témoigne de vive voix.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] A quel moment vous y faites référence

24 au niveau du résumé 65 ter ?

25 Mme MOELLER : [interprétation] C'est un résumé assez bref et c'est pour

26 cela que j'ai averti en plus la Défense en indiquant que le Procureur avait

27 l'intention de poser des questions par rapport à toutes les informations

28 figurant dans sa déclaration préalable du 14 mai, et cetera.

Page 11233

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien. Monsieur Cepic, comme vous

2 pouvez voir, on y a fait référence dans la déclaration.

3 M. CEPIC : [interprétation] Oui, mais ceci ne figure pas dans la liste

4 d'origine et dans le résumé proprement dit.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Moeller.

6 Mme MOELLER : [interprétation] J'ai dit que ce résumé est assez général,

7 quand il a dit : "J'étais responsable des questions politiques au Kosovo."

8 C'est un aspect de cela. Si vous voulez, la Défense a été prévenue de cela.

9 C'est spécifiquement ce qui est dit dans sa déclaration préalable.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourquoi vous me demandez

11 l'autorisation de modifier la liste en bonne et due forme et à temps ?

12 Pourquoi vous ignorez les décisions qui ont été prises ?

13 Mme MOELLER : [interprétation] De modifier la liste en vertu de l'article

14 65 ter ?

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Pourquoi vous ne demandez pas

16 tout simplement aux Juges de la Chambre de vous permettre de modifier cette

17 liste ? Vous aviez une date limite pour faire cela. C'était au mois de juin

18 et vous savez que pour modifier cette liste, il fallait demander la

19 permission.

20 Mme MOELLER : [interprétation] J'avais l'impression que c'était déjà décrit

21 dans les missions du témoin qui figurent dans le résumé du 65 ter. On n'a

22 pas donné vraiment beaucoup de détails. C'est une description d'ordre

23 général, mais on a dit de quoi il allait témoigner de façon générale.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourriez-vous, s'il vous plaît, me

25 montrer cette phrase ou cet élément dans ce résumé ?

26 Mme MOELLER : [interprétation] Au niveau de la deuxième phrase, on peut

27 lire : "Le témoin était responsable des questions politiques et a concentré

28 son travail sur le Kosovo."

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1 [La Chambre de première instance se concerte]

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] On va vous permettre de continuer

3 cette ligne de questionnement d'une façon assez restreinte, mais sans le

4 document. Cela ne veut pas dire que nous venons d'accepter votre

5 argumentation.

6 Si vous avez raison pour dire que dans la deuxième phrase du résumé en

7 vertu de l'article 65 ter, ils ont été avertis de cela, dans ce cas-là

8 c'est incompréhensible que vous n'ayez pas attiré notre attention davantage

9 sur ce sujet, puisqu'au moment où vous avez écrit cela, c'était assez clair

10 que vous ne pensiez pas toutes ces différentes questions qu'il a abordées

11 dans cette déclaration. Je vais vous demander de faire attention à

12 l'avenir, de nous avertir et de demander l'autorisation de modifier vos

13 listes. Ce n'est pas du tout acceptable de dire que ce qui figure dans la

14 deuxième phrase est suffisant pour nous avertir que vous allez parler de

15 l'attitude obstructionniste des autorités serbes par rapport aux

16 exhumations.

17 Ne faites pas en sorte que les Juges soient amenés à penser que vous ne

18 savez pas qu'on ne comprend pas -- que vous pensez qu'on ne comprend pas ce

19 qui doit figurer dans un résumé en vertu de l'article 65 ter. Mais en ce

20 qui concerne cette question précise, on vous laisse continuer et vous

21 pouvez continuer à poser les questions que vous avez commencé à poser.

22 Mme MOELLER : [interprétation] Très bien. Je vous remercie, Monsieur le

23 Président, et je vous présente mes excuses si vous m'avez mal comprise.

24 C'est comme cela que nous avons interprété l'article 65 ter, quand on parle

25 du résumé. Mais je comprends ce que vous avez voulu dire.

26 Q. [aucune interprétation]

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Cepic.

28 M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais tout de même

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1 revenir sur cette question. Je ne pense pas qu'on parle du tout

2 d'exhumations et je vais demander à Mme Moeller de me corriger si j'ai

3 tort.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous n'avons pas la déclaration sous

5 nos yeux, donc on ne peut pas décider à ce sujet. Pourriez-vous me dire où

6 cela figure ?

7 Mme MOELLER : [aucune interprétation]

8 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]

9 Mme MOELLER : [interprétation] Il a été dit que le témoin avait affaire

10 avec Zoran Andjelkovic quand il a travaillé pour faciliter l'accès à

11 l'équipe finlandaise de la police scientifique et qu'il a aussi rencontré

12 le ministre de la Justice serbe quand il a essayé de se rendre au site à

13 Gornje Obrinje et que cet accès leur a été refusé. Effectivement, le mot,

14 le terme "exhumations" ne figure pas dans la déclaration, je suis tout à

15 fait d'accord de le dire.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Cepic, il y a déjà eu une

17 référence de faite aux exhumations, et à ce moment-là vous n'avez pas

18 soulevé d'objection. On ne va pas revenir là-dessus, on va laisser Mme

19 Moeller poser la question.

20 Mme MOELLER : [interprétation]

21 Q. Monsieur Kickert, vous avez essayé de vous rendre sur le site à Gornje

22 Obrinje, et cette tentative n'a pas été couronnée de succès. Est-ce que

23 vous en avez parlé avec les autorités serbes ?

24 R. Ma dernière intervention auprès du ministre de la Justice s'est

25 produite à Pristina, et ce jour-là nous avons réussi à le rencontrer et

26 nous avons parlé avec lui dans le bâtiment du gouvernement à Pristina. J'ai

27 parlé de cette question-là et je lui ai dit qu'il s'agissait d'une

28 infraction à la convention diplomatique de Vienne et qu'on a confisqué un

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1 appareil photographique de Timo Lehelma, qui faisait partie de l'équipe

2 d'experts, alors qu'il était dans notre véhicule. Nous en avons parlé avec

3 le ministre de la Justice serbe. Plus tard, aussi, nous avons envoyé un

4 email à Belgrade, mais l'équipe de la police scientifique finlandaise n'a

5 pas pu commencer ces exhumations avant la trêve de Noël. Ensuite, ils sont

6 rentrés chez eux. A partir du 1er janvier 1999, je n'étais plus responsable

7 puisque ce n'était pas nous, mais les Allemands qui assuraient la

8 présidence de l'Union européenne à partir de cette date-là.

9 Q. Très bien. Nous allons passer à la pièce P560. C'est le document du 7

10 octobre 1998. On peut lire : "Rapport spécial Kickert".

11 SB, est-ce que vous pouvez me dire de quoi il s'agit ? On parle de la

12 réunion qui a eu lieu entre l'ambassadeur Petritsch et Sainovic. Est-ce que

13 vous avez été présent ?

14 R. Oui.

15 Q. Je vais vous demander d'examiner la deuxième phrase, au niveau du

16 premier paragraphe, où on peut lire que Sainovic est considéré comme être

17 un associé très proche du président yougoslave Milosevic et qu'on considère

18 qu'il est responsable de la coordination des forces de sécurité au Kosovo,

19 et ceci depuis l'été. Est-ce que c'est ce que vous vouliez dire ? Est-ce

20 que c'est comme cela que vous voyiez les choses, vous et le personnel de

21 l'ambassade autrichienne, puisque vous en parlez dans votre rapport ?

22 R. C'est comme cela qu'ils nous ont alloué ce rôle tout au long de l'été.

23 M. Sainovic était très souvent à Pristina dans le bâtiment du gouvernement.

24 Nous savions que l'ambassadeur, Christopher Hill, l'a rencontré aussi une

25 fois à Pristina, nous le savions pour sûr, au niveau du bâtiment

26 gouvernemental. D'après nous, c'est avec lui que les Américains abordaient

27 les questions de sécurité. Pour nous, la réunion du 7 octobre était une des

28 premières réunions que nous, nous avons eue avec M. Sainovic.

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1 Q. Est-ce que vous avez appris à un moment donné des informations qui

2 indiqueraient que ce que vous avez écrit dans votre rapport au sujet de M.

3 Sainovic n'était pas vrai ?

4 R. Nous, nous ne parlions pas de questions de sécurité avec M. Sainovic,

5 pas de questions vraiment essentielles proprement dites liées à la question

6 de sécurité. Notre impression était basée sur le fait qu'ils en ont parlé

7 avec les Américains.

8 Q. Pourquoi alors cette réunion sur les questions de sécurité a été

9 organisée, dirigée, plutôt, par les Américains ?

10 R. Vous devez comprendre que l'Union européenne n'avait pas à l'époque

11 vraiment une véritable politique de sécurité ou surtout de sécurité au

12 niveau étranger, la politique étrangère. L'ambassadeur Petritsch a été

13 vraiment le premier envoyé spécial. A l'époque, c'était une position tout à

14 fait nouvelle. Ce poste a été formalisé en tant que tel uniquement le 5

15 octobre, et ceci au niveau du consulat des affaires générales. Peu de temps

16 après cela, on nous a fait savoir que M. Sainovic était prêt à voir

17 l'ambassadeur Petritsch, mais nous avions à l'époque aussi des problèmes de

18 la présidence de l'Union européenne, et on avait des problèmes par rapport

19 à l'accès - et là, je vous parle vraiment grossièrement des problèmes que

20 nous avions - le pouvoir des Européens n'était pas pris au sérieux à

21 l'époque, et pas de la même façon que le pouvoir, l'influence des

22 Américains.

23 Q. Est-ce que du côté yougoslave, il y avait des références par rapport

24 aux interlocuteurs privilégiés ? Est-ce qu'ils préféraient discuter avec

25 l'Union européenne ou avec les Américains ?

26 R. Les questions essentielles, ils traitaient avec les Américains, je

27 dirais. Par exemple, le projet, on l'appelait le projet de Hill, c'étaient

28 des accords intermédiaires, des accords politiques qui circulaient, qu'on

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1 distribuait des deux côtés. C'est toujours les Américains qui discutaient

2 de ces projets avec les interlocuteurs serbes; ce n'est pas nous, ce n'est

3 pas les Européens.

4 Q. Pourriez-vous nous parler un petit plus de ces réunions avec Sainovic,

5 de la réunion que vous avez eue ?

6 R. Je pense que je vous ai pratiquement tout dit. On a dit que

7 l'offensive, que l'action des forces de sécurité s'était terminée. Je pense

8 que ceci était étroitement lié avec les dates limites décidées par le

9 Conseil de sécurité, par la résolution, qui figurait dans la Résolution du

10 Conseil de sécurité #1199.

11 Q. Ensuite, vous voyez le troisième alinéa, en partant d'en bas dans la

12 version en anglais : "Actions par les forces de sécurité auraient été

13 annulées le 28 septembre parce qu'il n'y a pas eu de conflits sérieux."

14 Ensuite : "Etait-il possible d'accepter l'argument des Américains…"

15 Je ne comprends pas très bien ce que vous voulez dire.

16 R. Je le lis en anglais. Ce qu'on dit ici, c'est qu'ils n'acceptaient que

17 les combats ne se sont terminés qu'il y a cinq jours, mais il était tout

18 simplement impossible que les activités s'arrêtent d'un moment à l'autre et

19 de reculer les forces de sécurité du jour au lendemain, pratiquement. Même

20 si vous avez fixé une date limite pour faire cela, et là je vous interprète

21 les choses, et que cette date est fixée au 28 septembre, vous ne pouvez pas

22 arrêter tous les combats d'un coup à cette date-là précisément.

23 Q. Est-ce que vous aviez d'autres sources d'informations indépendantes par

24 rapport à la situation ce jour-là ? Là, je parle du dernier jour du mois de

25 septembre, et ceci, par rapport à la fin de l'opération.

26 R. Il y avait un rapport des observateurs européens qui a été aussi

27 partagé avec les Nations Unies et qui a servi de base au rapport envoyé au

28 secrétaire général, et ceci, sur la base de la résolution #1199 du Conseil

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1 de sécurité, et je pense qu'il a été envoyé par nous à New York.

2 Q. Une dernière pièce que je souhaiterais examiner avec vous, il s'agit de

3 la pièce P562.

4 Mme MOELLER : [interprétation] Pourrait-on d'abord voir la troisième page,

5 qui est la dernière page du document ?

6 Q. Il s'agit d'un courrier électronique en date du 20 février 1999. Votre

7 nom apparaît à la fin du texte, Petritsch/Kickert. C'est ce qu'on peut

8 lire, n'est-ce pas ?

9 R. Oui.

10 Q. A la première page de ce document, on voit SB, c'est-à-dire auteur, M.

11 Senfter. Est-ce que vous pouvez nous expliquer comment ce rapport a vu le

12 jour ?

13 R. Il s'agit d'un rapport que j'ai préparé depuis le château de

14 Rambouillet. C'est un peu compliqué, mais j'avais un appareil de codage

15 dont je me servais au Kosovo, car nous avions un autre appareil de décodage

16 à Belgrade. C'est la raison pour laquelle j'ai envoyé ce rapport à

17 Belgrade. Mon collègue, M. Senfter, devait le transmettre à Vienne.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous voyons plusieurs communications

19 antérieures avec M. Petritsch. Nous voyons la date et l'heure, parfois 3

20 heures du matin. Au cours de ces négociations, était-il habituel de

21 communiquer de façon rapide ou est-ce un hasard que l'on voie ces heures-là

22 sur le télégramme ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, nous avions l'intention, lorsque cela

24 était possible, de faire rapport tous les jours. Parfois, il n'était

25 possible de rédiger ces rapports que pendant la nuit. C'est là que je les

26 envoyais.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Madame Moeller, poursuivez.

28 Mme MOELLER : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait maintenant examiner

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1 la deuxième page du document, troisième paragraphe en partant du bas ?

2 Q. Il est question de longues discussions avec le soussigné et le

3 président Milutinovic.

4 R. Oui, l'ambassadeur Petritsch.

5 Q. Monsieur Kickert, étiez-vous présent lors de cette réunion ?

6 R. Pas à ma connaissance. Ce paragraphe a dû être rajouté par

7 l'ambassadeur Petritsch lorsque nous rédigions des rapports. Je me

8 chargeais de la teneur général du rapport; lui apportait éventuellement des

9 modifications ou ajoutait quelque chose. Ce paragraphe, c'est lui qui a dû

10 le rajouter.

11 Q. De façon plus générale, s'agissant de Rambouillet, vous avez mentionné

12 votre présence. Quel rôle avez-vous joué à Rambouillet ?

13 R. J'étais l'assistant de M. Petritsch. C'est moi qui me chargeais des

14 rapports. Dans le cadre de mes fonctions, de façon générale, je devais

15 assurer le lien avec les Albanais du Kosovo, et c'est ce que j'ai fait à

16 Rambouillet.

17 Q. Merci, Monsieur Kickert.

18 Mme MOELLER : [interprétation] Monsieur le Président, j'en ai terminé de

19 mon interrogatoire principal.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

21 Maître O'Sullivan.

22 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Nous suivrons l'ordre de l'acte

23 d'accusation.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

25 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Veuillez m'accorder un instant, je vous

26 prie.

27 Merci, Monsieur le Président.

28 Contre-interrogatoire par M. O'Sullivan :

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1 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur.

2 R. Bonjour.

3 Q. Je pense que vous avez toujours sous les yeux le document qui vous a

4 été remis par ma consoeur de l'Accusation.

5 R. Oui.

6 Q. Est-ce que vous pouvez retrouver le document P564, s'il vous plaît ?

7 R. Oui.

8 Q. J'attends quelques instants que ce document soit affiché à l'écran pour

9 que tout le monde puisse le lire. Bien. Le document P564 est daté du 11

10 septembre 1998.

11 Q. Est-ce que vous voyez cela ?

12 R. Oui.

13 Q. C'est vous qui êtes l'auteur de ce document, n'est-ce pas ?

14 R. Oui.

15 Q. L'ambassadeur Petritsch l'a signé, n'est-ce pas ?

16 R. Effectivement.

17 Q. Il nous a dit, me semble-t-il, qu'il arrivait souvent que vous

18 prépariez des documents, l'ambassadeur Petritsch les relisait, ensuite --

19 R. Oui.

20 Q. Est-ce qu'il arrivait que vous prépariez des documents vous-même et que

21 l'ambassadeur Petritsch ne les relise pas, que ces documents étaient

22 envoyés tels quels ?

23 R. C'était la règle de mon service. Si j'envoyais ce document et que

24 personne ne l'avait relu, j'apposais simplement mon nom à la fin du

25 rapport. Mais lors de ce voyage, l'ambassadeur Petritsch n'était pas

26 présent, donc il a sûrement examiné le document, il l'a lu, et il a été

27 envoyé.

28 Q. Il y a deux personnes qui l'ont examiné pour vérifier son exactitude ?

Page 11243

1 R. Comme il n'était pas présent, il ne pouvait rien dire sur le fond du

2 rapport.

3 Q. Bien. Examinons le troisième point ensemble, si vous le voulez bien. On

4 peut lire : "Junik n'a pas été beaucoup endommagé, et pourtant on n'a pas

5 vu les 1 000 personnes qui sont censées être rentrées du côté serbes." Est-

6 ce que vous voyez cette phrase ?

7 R. Oui.

8 Q. Aujourd'hui, vous avez proposé une interprétation. Vous avez dit : "Je

9 ne pense pas qu'il y avait beaucoup de militants serbes à Junik. Ce devait

10 être un village albanais. Je dis maintenant qu'ils avaient affirmé que 1

11 000 personnes étaient rentrées chez elles, je dis que je n'ai pas vu autant

12 de personnes entrer, en tout cas il n'y en avait pas 1 000." Il y a quelque

13 chose d'inexact qui s'est glissé dans ce rapport, n'est-ce pas ?

14 R. Il est arrivé parfois que je rédige très rapidement ces rapports. Il y

15 avait des phrases qui n'étaient même pas terminées. De mon point de vue, je

16 me suis peut-être trompé. Vu la manière dont j'interprète les choses

17 maintenant, cette phrase parait absurde.

18 Q. Passons maintenant au document P558. Est-ce que vous avez la copie

19 papier de ce document ?

20 R. Oui.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que c'est 2 558 ou 558 ?

22 M. O'SULLIVAN : [interprétation] C'est 558.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Excusez-moi.

24 M. O'SULLIVAN : [interprétation]

25 Q. Le "28 septembre 1998", vous voyez cela ?

26 R. Oui.

27 Q. Vous avez apporté une correction. Vous avez dit qu'il fallait remplacer

28 "verdict" par "évaluation". Vous dites que vous étiez allé à Djakovica

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1 début septembre 1998 ?

2 R. Oui.

3 Q. Au cours de cette visite qui a eu lieu au début du mois de septembre,

4 en fait cette visite était en rapport avec la mise en place de forces de

5 police locales ?

6 R. Oui.

7 Q. Il y avait des Albanais qui devaient être intégrés dans les forces de

8 sécurité ?

9 R. Oui.

10 Q. L'objectif de cela, comme vous l'avez déjà indiqué, me semble-t-il,

11 était de créer des rapports de confiance mutuelle au sein des communautés

12 ou entre les communautés ?

13 R. Oui, de façon à ce qu'ils se sentent plus en sécurité, de favoriser

14 leur retour.

15 Q. Votre collègue britannique vous a dit qu'à l'époque, fin septembre

16 1998, comme il est indiqué dans la pièce P558, il y avait des gens en

17 uniforme au poste de police et il était prévu qu'on leur remettre des armes

18 de poing, n'est-ce pas ?

19 R. Oui.

20 Q. Quelques mesures avaient été prises en ce sens, n'est-ce pas ? Il

21 s'agissait de commencer à mettre en place cette force albanaise ?

22 R. Oui.

23 Q. Vous nous avez dit que les choses s'étaient détériorées rapidement

24 après, donc il y a eu l'accord conclu entre Holbrooke-Milosevic, si bien

25 que cette initiative n'a pas vraiment pu être en mise en place.

26 R. C'est ce que j'ai compris.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Manifestement, je n'ai pas compris ce

28 qui avait été dit plus tôt. Lorsque vous avez dit qu'ils portaient déjà des

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1 uniformes et des insignes, j'ai compris que c'est ce que votre collègue

2 vous avait dit, mais en fait il s'agit de son interprétation.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce qu'il avait vu. En fait, il ne les a

4 pas vus armés avec des armes de poing, mais on lui avait annoncé qu'il

5 était prévu que ces personnes se voient remettre des armes de poing et des

6 munitions dès le lendemain.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Plus tard, lorsque vous vous êtes

8 rendu sur les lieux vous-même, vous n'avez rien constaté de tel ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais allé là-bas avant cette visite. Le

10 préfet adjoint de Djakovica à l'époque ne savait pas bien si ces personnes

11 seraient en uniforme ou pas.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci d'avoir précisé les choses.

13 J'avais mal compris.

14 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Pour enchaîner sur la question qui vous a

15 été posée par le Président de la Chambre, nous pourrons examiner la pièce

16 159 qui devrait apparaître à l'écran incessamment sous peu.

17 Q. Je pense que vous pouvez voir ce document. Il s'agit d'un document

18 portant la date du 7 septembre 1998, n'est-ce pas ?

19 R. Oui.

20 Q. Dans ce document, on décrit une visite que vous avez déjà mentionnée

21 qui a eu lieu un peu plus tôt au mois de septembre ?

22 R. Oui.

23 Q. Ce qui m'intéresse, c'est le dernier paragraphe. Je vous invite à

24 l'examiner et ensuite je vous poserai quelques questions à ce sujet. Dans

25 les conclusions, vous soulignez les problèmes, les risques que cela pose

26 d'un côté. Les Serbes remettaient aux Albanais de souche des armes et

27 d'autre part, les Albanais de souche qui étaient d'accord pour être

28 intégrés à cette force de police locale pouvaient être perçus comme des

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1 traîtres ?

2 R. Oui.

3 Q. Vous dites qu'ils pouvaient faire l'objet de persécutions de la part de

4 l'UCK ?

5 R. Oui.

6 Q. Il s'agissait d'une situation très difficile, n'est-ce pas ?

7 R. Je suis d'accord.

8 Q. Je souhaiterais passer à autre chose quelques instants. Dans le cadre

9 de votre déposition, vous mentionnez certains des premiers contacts que

10 vous avez eus avec l'UCK et vous dites qu'avant cela, les Américains,

11 notamment M. Holbrooke, avaient eu des rapports, des contacts avec l'UCK.

12 J'examine le compte rendu d'audience et vous dites qu'à un moment donné,

13 lorsque M. Holbrooke était à Junik, des photos ont été prises de lui en

14 présence de membres de l'UCK. Vous vous souvenez de cela ?

15 R. Tout à fait.

16 Q. Je pense aux photos qui ont été ou des images que l'on a vues à la

17 télévision et dans la presse. On voit M. Holbrooke, et je pense que

18 l'ambassadeur Hill dans une maison albanaise traditionnelle, et ils ont

19 enlevé leurs chaussures et ils sont assis le long du mur. Il y a un homme

20 barbu portant un uniforme de l'UCK et une kalachnikov qui se déplace dans

21 la pièce et vient s'asseoir juste à côté de M. Holbrooke. C'est de cela que

22 nous parlons, maintenant ?

23 R. C'est l'image que j'ai à l'esprit.

24 Q. Ce matin, vous nous avez dit qu'il y avait eu des contacts entre les

25 Américains et l'UCK à d'autres niveaux.

26 R. Oui.

27 Q. Vous souvenez-vous avoir dit cela ?

28 R. Oui, je pense que c'était au niveau de l'attaché militaire ou en dehors

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1 du territoire du Kosovo.

2 Q. Bien.

3 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Voyons la pièce 5D, le document 5D121.

4 Q. Ce document 5D121 porte la date du 27 juin 1998. On voit votre nom en

5 haut à droite.

6 R. Est-ce que l'on pourrait voir la version allemande, s'il vous plaît ?

7 Car je ne fais pas vraiment confiance à la traduction.

8 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je ne sais pas si ce document est

9 disponible.

10 [La Chambre de première instance se concerte]

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi. Il n'y a pas de

12 germanophone ici aujourd'hui. Vous allez devoir vous appuyer sur ce

13 document.

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais essayer.

15 M. O'SULLIVAN : [interprétation]

16 Q. Penchons-nous sur la teneur de ce document. En première page, au point

17 numéro 1, il est question des "initiatives prises par les Etats-Unis et la

18 fédération russe", n'est-ce pas ?

19 R. Non. Sur mon écran, je peux lire : "Réunion en date du 27 juin, chef

20 des missions ou Groupe de contact."

21 Q. Est-ce que vous avez le document du 27 juin 1998 sous les yeux ?

22 R. Oui.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai sous les yeux la version

24 allemande.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, il s'agit du rapport de la police locale

26 à gauche, nous en avons déjà parlé.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, effectivement il est question de

28 Vienne.

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1 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je parle du document daté du 27 juin 1998,

2 5D121, où il est dit : "Ambassade autrichienne à Sarajevo, veuillez

3 transmettre dans les plus brefs délais", et cetera.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vois cela à l'écran.

5 M. O'SULLIVAN : [interprétation]

6 Q. En fait, on peut voir qu'il est question d'une "réunion tenue le 27

7 juin sous les auspices de la présidence allemande à laquelle participe pour

8 la première fois le soussigné", à savoir l'ambassadeur Petritsch. Est-ce

9 que vous voyez cela ?

10 R. Oui.

11 Q. Au point numéro 1 : "Etat d'avancement des initiatives prises par les

12 Etats-Unis et la fédération russe."

13 R. Oui.

14 Q. Au troisième point : "Les Américains informent les participants à la

15 réunion, en fait minimisent l'étendue des contacts entre Holbrooke et l'UCK

16 en disant qu'il s'agit de rencontres occasionnelles et il n'y a pas de

17 négociations au plan politique, il n'est question que de l'aide humanitaire

18 et de l'approvisionnement. Un homme portant un uniforme de l'UCK est

19 apparu." Nous en avons parlé.

20 R. Oui.

21 Q. Au point suivant dont nous avons parlé tout à l'heure, on peut lire :

22 "D'un autre côté de leur propre initiative, il y a depuis longtemps des

23 contacts avec les représentants de l'UCK au niveau de l'attaché militaire

24 américain." Qu'est-ce que vous entendez par là ?

25 R. Cela a été mentionné à l'occasion de cette réunion, sinon je ne

26 l'aurais pas noté.

27 Q. Que saviez-vous à ce sujet à l'époque et qu'avez-vous appris dans le

28 cadre, dans l'exercice de vos fonctions à Belgrade ?

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1 R. Pour nous, il s'agissait d'une reconnaissance. On reconnaissait pour la

2 première fois qu'il y avait eu des contacts à ce niveau-là, car avant cela

3 notre politique consistait à éviter les contacts avec l'UCK. Par exemple,

4 mon collègue britannique dont j'ai parlé tout à l'heure n'était pas

5 autorisé à rencontrer l'UCK avant la fin du mois de juillet.

6 Q. Que saviez-vous au sujet des contacts entre l'UCK et l'attaché

7 militaire américain ?

8 R. Je n'en savais rien.

9 Q. Tout à l'heure, vous avez dit que vous aviez entendu parler de contacts

10 entre l'UCK et les Américains à l'extérieur du territoire de la RFY. Que

11 savez-vous à ce sujet ? Que pouvez-vous nous dire ?

12 R. L'UCK avait des représentants à l'étranger, principalement à Genève.

13 Les Américains ont eu des contacts avec eux avant nous.

14 Q. Au niveau militaire ?

15 R. Non, au niveau politique.

16 Q. Qui en particulier, côté américain ?

17 R. Je pense qu'il s'agissait de M. Larry Rossin, qui était responsable de

18 --

19 Q. Savez-vous qui il a rencontré ?

20 R. Je pense que c'était Badima Mahmuti.

21 Q. Quel rôle jouait-il au sein de l'UCK ?

22 R. Il se présentait comme étant le porte-parole de l'UCK à l'étranger.

23 Q. Bien. Dans la version papier, je pense que vous avez le document P562,

24 c'est le dernier document que vous avez examiné.

25 R. Oui.

26 Q. Pour les besoins du compte rendu, je pense que vous avez dit que

27 c'était Larry Rossin qui était responsable pour l'Europe du sud-est ?

28 R. R-o-s-s-i-n.

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1 Q. Merci. Vous avez sous les yeux le document P562. Nous l'avons à

2 l'écran. Il s'agit d'un document daté du 20 février 1999. Est-ce que vous

3 voyez cela ?

4 R. Oui.

5 Q. Ma consoeur de l'Accusation vous a montré une demi-page de ce document,

6 troisième paragraphe en partant du bas, deuxième page. M. Petritsch a

7 témoigné ici il y a quelques jours. Il nous a dit que c'était vous qui

8 étiez l'auteur de ce document. Il n'a jamais dit qu'il avait ajouté ce

9 paragraphe. Pourquoi dites-vous cela ?

10 R. Je ne me souviens pas avoir été présent à cette réunion, donc ce n'est

11 pas moi qui ai pu écrire ce paragraphe.

12 Q. Mais il nous a dit que c'était vous qui l'aviez écrit. Qu'avez-vous à

13 répondre ?

14 R. J'ai rédigé ce rapport --

15 Mme MOELLER : [aucune interprétation]

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant, Monsieur Kickert, un

17 instant. Un instant, merci.

18 Madame Moeller.

19 Mme MOELLER : [interprétation] Je me souviens que M. Petritsch a déclaré

20 que c'est M. Kickert qui était l'auteur des rapports; il lui arrivait de

21 les relire, de les corriger, de rajouter quelque chose. Je ne me souviens

22 pas qu'on lui ait demandé si M. Kickert avait rédigé ce paragraphe --

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense qu'une erreur s'est glissée

24 au compte rendu d'audience. C'est M. Petritsch qui a affirmé cela, et non

25 pas M. Kickert, comme il est indiqué maintenant dans le compte rendu.

26 Mme MOELLER : [interprétation] Tout à fait. Est-ce que vous voulez que je

27 répète ce que je viens de dire ?

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, attendez un instant. Est-ce que

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1 vous contestez l'affirmation de Me O'Sullivan selon laquelle M. Petritsch

2 aurait dit que M. Kickert avait été l'auteur de ce document ?

3 Mme MOELLER : [interprétation] Tout à fait. Selon moi, il soumet à M.

4 Kickert uniquement la moitié de ce que M. Petritsch a dit et ne précise pas

5 que M. Petritsch a ajouté qu'il révisait, qu'il avait révisé ou relu ce

6 document, qu'il lui arrivait parfois de raccourcir certains documents,

7 parfois de rajouter certaines choses, parfois d'en supprimer. Par ailleurs,

8 on n'a pas demandé expressément à M. Petritsch si c'est M. Kickert qui

9 était l'auteur de ce paragraphe précis.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous avez la référence dans

11 le compte rendu d'audience ?

12 M. O'SULLIVAN : [interprétation] C'est 10 957, compte rendu d'audience du 2

13 mars, ligne 22. Je peux donner lecture de ce passage. Je vous le lis.

14 L'ambassadeur Petritsch s'exprime en disant, je cite --

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant, un instant.

16 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Page 10 957 du compte rendu d'audience,

17 ligne 22.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Voilà ce qu'il a dit, je cite : "Cela

19 a été rédigé par M. Kickert."

20 Mme MOELLER : [interprétation] Mais il a ajouté -- en fait : "Il y a

21 d'abord un projet, ensuite" -- je relis --

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que nous en avons entendu

23 assez. Il s'agit là encore d'une objection dénuée de fondement, car on peut

24 déterminer auprès du témoin ce qui s'est réellement passé. Vous aurez la

25 possibilité lors des questions supplémentaires de préciser ce point, ce qui

26 sans doute n'aura aucune valeur puisque cet échange a eu lieu devant le

27 témoin. Veuillez ne pas interrompre lorsqu'il s'agit manifestement d'un

28 point litigieux qui pourra être abordé dans le cadre des questions

Page 11253

1 supplémentaires. Je rejette votre argument selon lequel on a déformé les

2 propos tenus par M. Petritsch. Maître O'Sullivan, vous avez la parole.

3 Veuillez poursuivre.

4 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je pense que je vais passer à autre chose,

5 pour les raisons que vous venez de mentionner.

6 Q. Première page de ce document, vous pouvez voir que ce document porte la

7 date du 20 février 1999, 6 heures.

8 R. Oui.

9 Q. Dans le cadre de sa déposition, à la page 10 884 du compte rendu

10 d'audience, M. l'Ambassadeur Petritsch a déclaré que ce document, c'est

11 vous qui l'aviez préparé justement, avant de l'envoyer peu avant 6 heures

12 du matin. En fait, vous avez travaillé sur ce document pendant la nuit,

13 n'est-ce pas ?

14 R. Très certainement.

15 Q. A la première page, nous voyons une entrée concernant l'après-midi du

16 19 février : M. l'Ambassadeur Petritsch a travaillé avec les Kosovars sur

17 le remaniement de l'accord de Rambouillet. Est-ce que vous voyez cela ?

18 R. Non, avant cela, il est question de 6 heures, c'est ce qui a été

19 rajouté par l'ambassade à Belgrade. Ensuite, il y a une observation entre

20 guillemets, donc à partir de la date du 19 février, tout le passage

21 concernant le 19 février, en ce qui concerne ce passage entre guillemets,

22 on ne sait pas quand je l'ai envoyé à Belgrade.

23 Q. Est-ce que vous avez des raisons de contester les propos tenus par M.

24 Petritsch à ce sujet, ce que je viens de vous lire ?

25 R. Non. Je me demande simplement pourquoi on lit 6 heures du matin en haut

26 du document et pourquoi ce n'est pas entre guillemets.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, je comprends ce que vous dites.

28 Mais si l'on examine le titre de ce document, en tout cas dans la version

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1 anglaise, on croit comprendre qu'il s'agit de la situation dans le cadre

2 des pourparlers de Rambouillet --

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, à 6 heures du matin.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] "A 6 heures du matin." A mes yeux, ce

5 n'est pas l'heure à laquelle Belgrade a envoyé ce télégramme à Vienne.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous avez raison.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître O'Sullivan, poursuivez.

8 M. O'SULLIVAN : [interprétation]

9 Q. Deuxième paragraphe sur cette page : "Dans l'après-midi du 19 février,

10 les Kosovars ont fait des propositions concrètes."

11 R. Oui, des propositions de remaniement du texte.

12 Q. Est-ce que vous vous souvenez de cette rencontre cet après-midi-là avec

13 la délégation kosovare ?

14 R. J'étais sans doute présent, parce que s'il y avait des rencontres avec

15 des délégations plus importantes ou des délégations serbes, j'étais

16 généralement présent. Mais en fait il s'agit apparemment d'une rencontre

17 officielle importante, donc j'étais sans doute présent.

18 Q. Passons à la page 2 dans laquelle nous voyons le récit d'un certain

19 nombre de choses qui se sont passées dans la soirée du 19 février. Je peux

20 vous dire que ce jour était un vendredi, d'accord ? Je peux vous le

21 prouver, le cas échéant. En haut de la page 2, nous avons quelques premiers

22 paragraphes qui traitent de réunions tenues entre les membres de la

23 délégation kosovare et l'OTAN. Vous vous rappelez ces réunions en présence

24 du général Clark, n'est-ce pas ?

25 R. Je ne saurais confirmer que je m'en souviens.

26 Q. D'accord. Puis, nous passons au troisième paragraphe --

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître O'Sullivan, la vitesse de vos

28 échanges pose quelques problèmes, semble-t-il. Je vous demanderais de

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1 veiller à ménager une pause entre les questions et les réponses.

2 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

3 Q. Paragraphe 3, il y est toujours question de la soirée, et dans le début

4 de ce paragraphe 3, nous lisons ce qui suit, à savoir que M. Cook, M.

5 Petritsch et M. l'Ambassadeur Mayorski se sont réunis pour parler de la

6 procédure à mettre en place, d'accord ?

7 R. Oui.

8 Q. Après quoi des pourparlers se sont tenus avec un certain nombre de

9 Kosovars triés sur le volet dans le but de les inciter à adopter ces

10 projets de texte, n'est-ce pas ?

11 R. Oui.

12 Q. Au paragraphe suivant, il est question d'une rencontre à laquelle ont

13 participé M. Hill, M. Petritsch et M. Thaqi. Est-ce que vous voyez ce

14 passage ?

15 R. Oui.

16 Q. "Dans la soirée du 19", dans la deuxième moitié du paragraphe, vous

17 voyez ce passage ?

18 R. Oui.

19 Q. Vous vous rappelez que Thaqi était à Ljubljana ce jour-là pour

20 rencontrer Demaqi ?

21 R. Oui.

22 Q. Et que Hill était allé à Belgrade ?

23 R. Oui.

24 Q. Cela devait se passer tard dans la soirée, je suppose, cette réunion ?

25 R. Je suppose.

26 Q. Il est question ensuite de la rencontre avec M. Milutinovic en présence

27 des ambassadeurs Petritsch et Mayorski et il n'y a aucune indication de

28 l'heure de la journée à laquelle cette réunion s'est tenue, n'est-ce pas ?

Page 11256

1 R. Elle a eu lieu le 19 février, mais il n'y a pas d'indication d'heure,

2 en effet.

3 Q. D'accord. Ensuite, le paragraphe suivant traite d'un calendrier

4 provisoire centré sur la journée du 20 février. Vous vous rappellerez que

5 le 20 février, c'est le deuxième samedi des pourparlers de Rambouillet.

6 C'est le jour où les ministres des Affaires étrangères du Groupe de contact

7 se sont entretenus individuellement avec chaque délégation. Vous rappelez-

8 vous ces entretiens ? Cela devait être normalement le dernier jour des

9 pourparlers de Rambouillet ?

10 R. En effet, je me souviens que tous les ministres des Affaires étrangères

11 du Groupe de contact étaient arrivés, semble-t-il, le même jour.

12 Q. Vous vous rappellerez peut-être qu'à Rambouillet, les pourparlers ont

13 été prolongés de trois jours après cette journée du 20, n'est-ce pas ?

14 R. Exact.

15 Q. Vous voyez ce calendrier provisoire, on lit "CG, 7 heures 30, Groupe de

16 contact au niveau PS", ce qui signifie quoi ?

17 R. Il est écrit PD, ce qui signifie au niveau des directeurs politiques

18 allemands.

19 Q. A huit heures du matin arrivent les premiers ministres. Chaque

20 délégation arrive également avant, semble-t-il, les ministres des Affaires

21 étrangères du Groupe de contact, n'est-ce pas ?

22 R. Oui. Ils sont arrivés, après quoi il y a eu des rencontres bilatérales

23 avec les délégations --

24 Q. D'accord.

25 R. -- ou avec des membres individuels de ces délégations.

26 Q. D'accord. Reportez-vous, si vous le pouvez, à la journée du 19 et à la

27 journée du 20. Nous sommes à un moment où la conférence aurait pu se

28 terminer le 20. Le lendemain, nous ne savons pas encore si elle va être

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1 prolongée. Il y a toute cette activité de la nuit précédente qui permet de

2 penser, en tout cas c'est mon avis, que les Albanais ont rencontré Clark,

3 votre ambassadeur a rencontré M. Cook et M. Mayorski en présence de la

4 délégation kosovare. Puis, M. Petritsch rencontre M. Hill et M. Demaqi --

5 R. Non, pas Demaqi, Thaqi.

6 Q. Excusez-moi, Thaqi. Selon votre souvenir, vous avez travaillé à

7 l'élaboration de ce document pendant la nuit de façon à ce qu'il donne une

8 idée globale de ce qui s'est passé à 6 heures du matin le 20, n'est-ce pas

9 ?

10 R. Exact.

11 Q. Voyons le paragraphe suivant, je cite : "Pendant la matinée un

12 rapprochement des positions s'est fait sur le plan politique parmi les

13 parties."

14 R. Hm-hm.

15 Q. Manifestement. Bon, je poursuis la lecture, je cite : "La partie la

16 plus importante est l'accord sur les annexes relatives à la mise en œuvre."

17 Il importe de parler d'abord du "stationnement des troupes de l'OTAN. Hill

18 et le soussigné conviennent que l'ultimatum peut être étendu de deux ou

19 trois jours peut-être, au maximum. La partie yougoslave est la seule à

20 confirmer sans ambiguïté son acceptation de la présence des troupes

21 internationales." Cette réunion a eu lieu avant 6 heures du matin ?

22 R. Oui. Vous me dites que c'était la nuit précédente que les ministres des

23 Affaires étrangères du Groupe de contact sont arrivés et il y a eu des

24 discussions. Je me souviens que Jim O'Brien et les juristes sont arrivés

25 pour rencontrer la délégation serbe dans leur chambre. Cela a duré toute la

26 nuit et je me souviens que nous avons rencontré l'ambassadeur Hill dans les

27 premières heures de la matinée du lendemain en présence de la délégation

28 kosovare albanaise.

Page 11258

1 Q. Nous parlons d'une nuit très animée, n'est-ce pas, très chargée ?

2 R. Nous parlons d'une nuit très intense.

3 Q. Oui.

4 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions, Monsieur

5 le Président.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Fila ?

7 M. FILA : [interprétation] J'ai quelques questions.

8 Contre-interrogatoire par M. Fila :

9 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Kickert, je m'appelle Toma Fila. Je

10 représente Nikola Sainovic. Je vais vous poser quelques questions au sujet

11 de la pièce P560 --

12 M. FILA : [interprétation] -- dont je demande l'affichage à l'écran.

13 Q. Il s'agit du télégramme que Mme Moeller a utilisé pour vous poser de

14 nombreuses questions. Avant d'en arriver là, je signale que nous avons reçu

15 le 6 mars votre déclaration supplémentaire. Je ne sais pas si elle vous a

16 été soumise par l'Accusation. Mais s'agissant de la pièce P560, il existe

17 une dépêche rédigée par vous et M. Petritsch, soit ensemble, soit

18 consécutivement. Nous lisons dans cette pièce P560 que Kickert a assisté à

19 la rencontre avec Sainovic. Cette rencontre était une rencontre de travail.

20 Sans aucune relation avec ce télégramme en tant que tel, vous dites ce qui

21 suit, je cite : "Sainovic en 1998 se rendait régulièrement à Pristina et

22 Chris Hill le rencontrait dans le bâtiment du gouvernement de Pristina.

23 L'Union européenne n'était pas l'interlocuteur principal. Les Serbes

24 préféraient traiter avec les Américains," et cetera.

25 Monsieur Kickert, ce que je souhaite savoir, c'est la chose suivante. Cette

26 phrase, "M. Sainovic se rendait régulièrement à Pristina pour rencontrer M.

27 Hill," qu'est-ce qu'elle a à voir avec le télégramme ? Pourquoi est-ce que

28 vous dites cela ? Si je n'ai pas été clair, je me répète. Dans ce

Page 11259

1 télégramme dont vous êtes l'auteur vous ne faites aucune mention de Chris

2 Hill ou de M. Sainovic ou de quelconques entretiens de quelque nature que

3 ce soit. Pourquoi est-ce que vous parlez de Chris Hill en rapport avec le

4 télégramme qui constitue la pièce P560, puisque Mme Moeller ne nous a pas

5 expliqué quelles étaient les voies mystérieuses de Dieu qui pouvaient nous

6 amener à cette conclusion ? Voilà la question que je souhaitais vous poser.

7 R. L'explication de la raison pour laquelle, lorsque j'ai cité M.

8 Sainovic, j'ai dit qu'il avait parlé à M. Petritsch durant cette réunion du

9 7 octobre et j'ai décrit M. Sainovic comme je l'ai fait dans notre

10 évaluation. Ce qui s'est passé, c'est que M. Hill est entré dans tout cela

11 parce que nous savions qu'il avait déjà rencontré M. Sainovic à Pristina.

12 Q. Très bien. Très bien. Sur la base de tout cela, vous tirez la

13 conclusion que M. Hill était responsable de la sécurité et que M. Sainovic

14 lui parlait de cette zone, n'est-ce pas ?

15 R. M. Hill nous informait régulièrement de ses entretiens avec des

16 interlocuteurs serbes. Il nous parlait aussi des rencontres qu'il avait, au

17 moins une rencontre sinon plus, avec M. Sainovic dans le bâtiment du

18 gouvernement de Pristina.

19 Q. D'accord. Je vous comprends. M. Petritsch, lorsqu'il a témoigné ici il

20 y a quelques jours, s'est vu soumettre la même phrase par un représentant

21 différent du bureau du Procureur. A ce moment-là, M. Petritsch - ceci

22 figure en page 10 767 du compte rendu d'audience, lignes 14 et antérieures

23 - donc cette phrase lui est soumise parce qu'il avait lu quelque chose

24 allant dans le même sens dans les journaux ou qu'il y avait eu un article

25 de presse publié par le gouvernement yougoslave, mais il n'a pas un

26 souvenir très clair de tout cela, il n'est pas très sûr, et il ajoute la

27 phrase suivante, je cite : "Dans les milieux diplomatiques, ce que nous

28 pensions savoir, c'est que M. Sainovic était responsable du Kosovo," sans

Page 11260

1 préciser quelle région du Kosovo. Comment est-ce que vous commentez cette

2 affirmation de M. Petritsch ? Il n'a pas mentionné M. Hill ou quoi que ce

3 soit de ce genre. Il a expliqué quelque chose de très différent avec des

4 termes très différents.

5 R. J'ai simplement répondu à une question qui m'était posée en m'appuyant

6 sur mon souvenir. Je ne peux commenter ce qu'a dit M. Petritsch, car il

7 était peut-être motivé par des motivations différentes dans sa réponse.

8 Q. Très bien, très bien. Cette dépêche a été expédiée, c'est un travail

9 que vous avez accompli de même que M. Petritsch, parce que si je vois bien,

10 c'est M. Petritsch qui a signé la dépêche et qui est responsable de son

11 contenu, n'est-ce pas ? Ce n'était pas vous.

12 R. J'ai écrit ce que j'ai écrit --

13 Q. Je vous remercie. Mais c'est lui qui a signé ?

14 R. Il a signé oui.

15 Q. C'est exact. Bien. Vous conviendrez avec moi que vous n'avez pas

16 assisté à ces réunions, à cette réunion unique ou à ces réunions multiples

17 entre M. Hill et M. Sainovic à Pristina. Vous n'avez pas la moindre idée de

18 ce dont ils ont parlé, n'est-ce pas ?

19 R. Je n'ai pas assisté à la rencontre entre M. Hill et M. Sainovic à

20 Pristina, pas à une seule.

21 Q. Savez-vous que M. Hill était en fait le représentant politique

22 principal des Etats-Unis dans toutes les négociations avec la Serbie, aussi

23 bien à Pristina qu'à Belgrade, et qu'en fait c'était également le cas à

24 Rambouillet ? Est-ce que vous êtes d'accord avec moi sur ce point ?

25 R. C'est vrai, mais il avait également des gens qui travaillaient avec lui

26 et qui participaient à des réunions avec M. Burns de la KDOM américaine

27 pour parler de sécurité et qui ont signé des accords en octobre selon

28 lesquels la police serbe devait se retirer ou il devait y avoir des

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1 retraits mutuels, et cetera.

2 Q. M. Petritsch, dans sa déposition, nous a dit que la nuit la plus

3 importante, vous avez dit que M. Hill était arrivé avec une exigence de

4 référendum dans trois ans. Je cite : "Il voulait que ces mots soient

5 introduits dans le texte de l'accord." C'est ce que M. Petritsch a dit.

6 Est-ce que vous vous rappelez cela ?

7 R. Je pense que le mot "référendum" a été évité. A ma connaissance, il

8 fallait prendre en compte la volonté du peuple --

9 Q. Plus tard --

10 R. -- pour éviter précisément le mot "référendum".

11 Q. Je suis tout à fait d'accord avec ce que vous avez dit, mais ce

12 que j'ai dit est également vrai, vous avez parlé, vers la fin de ces

13 entretiens, je ne parle pas du début. Au début, M. Hill est arrivé en

14 exigeant que les mots "référendum dans trois ans" soient introduits dans le

15 texte. M. Petritsch s'y est opposé, comme d'ailleurs l'Union européenne.

16 C'est la raison pour laquelle le mot "référendum" n'a pas été introduit

17 dans le texte. Mais M. Hill a utilisé au début le mot référendum. Vous vous

18 en souvenez, n'est-ce pas ?

19 R. Je ne sais pas si M. Hill a utilisé le mot référendum, mais c'est

20 certainement ce que voulaient les Kosovars albanais. Ils voulaient que ce

21 mot soit introduit dans le texte. Nous souhaitions davantage d'équilibrage

22 du texte. Nous souhaitions que le mot "référendum" n'y figure pas.

23 Q. Je vérifie quelque chose. Vous avez utilisé les mots suivants. Vous

24 avez dit que la réunion à laquelle vous aviez assisté était une réunion de

25 travail, avant de dire qu'il était allé voir Hill à Pristina. Qu'est-ce que

26 cela veut dire "de travail" ? Parce que cette expression ne figure pas dans

27 votre télégramme. Qu'est-ce que vous aviez à l'esprit ? Est-ce qu'en

28 utilisant cette expression, vous vouliez dire qu'il n'avait pas été

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1 question de problèmes de sécurité durant cette réunion, mais que c'était un

2 entretien politique ?

3 R. Nous ne discutions jamais des questions de sécurité, ni à Rambouillet

4 ni avant. Nous sommes des diplomates venus d'un pays neutre. Ce n'était pas

5 un sujet dans lequel nous nous investissions. J'ai parlé de réunion de

6 travail sans doute parce que c'était la première réunion entre ces deux

7 hommes et qu'il n'y avait aucune exigence particulière qui avait été

8 définie au départ. C'était une réunion destinée à permettre à ces deux

9 hommes de se connaître et d'ouvrir la voie à d'autres réunions à l'avenir.

10 Q. M. Petritsch a dit ensuite qu'ils s'étaient rencontrés à de nombreuses

11 reprises - je ne sais pas à combien de ces réunions vous avez participé -

12 et qu'il estimait Sainovic comme étant un homme de grande qualité, qu'il

13 souhaitait la paix, et qu'à Rambouillet il a fait tout ce qu'il pouvait

14 pour obtenir le rétablissement de la paix, mais qu'ensuite quelqu'un

15 d'autre a empêché cela. Est-ce que vous êtes d'accord avec ce jugement de

16 M. Petritsch ?

17 R. Nous avons certainement eu de très bons rapports avec M. Sainovic. Nous

18 le décrivions comme un homme avec qui nous pouvions travailler. Nous

19 n'avons jamais eu de combats difficiles avec lui. C'était un homme que nous

20 considérions comme quelqu'un à qui il était tout à fait possible de parler,

21 avec qui il était possible de discuter, en effet.

22 Q. Merci, Monsieur. Si nous n'avions pas parlé de tout cela, il aurait pu

23 apparaître que Sainovic était simplement quelqu'un dont la tâche a consisté

24 à intervenir pour que le courant électrique soit rétabli dans vos locaux,

25 et ce, après deux jours seulement. Merci beaucoup, je n'ai plus de

26 questions.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Visnjic -- excusez-moi, Maître

28 Sepenuk.

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1 M. SEPENUK : [interprétation] Pas de questions, Monsieur le Président.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Aleksic.

3 M. ALEKSIC : [interprétation] Pas de questions, Monsieur le Président.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Cepic.

5 M. CEPIC : [interprétation] Quelques petites questions simplement, Monsieur

6 le Président.

7 Contre-interrogatoire par M. Cepic :

8 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Kickert. Je suis Djuro Cepic.

9 J'interviens en tant que conseil de la Défense du général Lazarevic.

10 M. CEPIC : [interprétation] J'aimerais vous demander de vous pencher sur la

11 pièce 5D119 pour commencer et j'en demande l'affichage à l'écran.

12 Q. Monsieur Kickert, malheureusement, à l'heure actuelle -- je retire mon

13 malheureusement parce que le texte est affiché aussi bien en allemand qu'en

14 anglais; c'est tout à fait parfait. Il s'agit d'un rapport datant du 24

15 juillet 1998 dans lequel nous lisons, en haut à droite, les mots : "Agent

16 responsable Kickert." Est-ce que c'est vous qui êtes l'auteur de ce

17 rapport ?

18 R. Oui.

19 Q. Merci.

20 M. CEPIC : [interprétation] Je demande qu'on déroule un peu vers le bas.

21 Merci. Très bien.

22 Q. Nous sommes en bas de page et on y lit, je cite : "La réunion organisée

23 le 23 juillet à Malisevo", puis un peu plus bas, nous lisons que cette

24 réunion s'est tenue en présence de Gani Krasniqi, l'un des commandants de

25 l'UCK, et l'on décrit le profil de son poste sur le plan hiérarchique. Est-

26 ce que vous avez assisté à cette réunion avec M. Krasniqi ?

27 R. Ce rapport concerne la réunion de suivi au cours de laquelle j'ai

28 rencontré le numéro 3 qui était Hashim Thaqi et, si je ne m'abuse, c'est la

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1 veille que j'ai également assisté à une autre réunion durant laquelle le

2 secrétaire général Albert Rohan, devait aller à Malisevo pour rencontrer le

3 numéro 7 ainsi que Gani Krasniqi, et à cette réunion j'ai assisté.

4 Q. Je vous remercie.

5 Est-ce que suite à ce jour-là, vous avez eu d'autres rencontres avec

6 l'UCK à Malisevo ?

7 R. Comme je l'ai dit la première réunion a eu lieu en présence simplement

8 du numéro 7 et le lendemain, j'ai rencontré les numéros 3 et 7. Mais à

9 cette réunion-ci, j'y étais seul en l'absence de tout autre représentant de

10 l'ambassade autrichienne ou du ministère des Affaires étrangères

11 autrichiennes. J'étais simplement accompagné d'un Kosovar albanais, d'un

12 journaliste qui a facilité l'organisation de cette réunion.

13 Q. Est-ce que le nom de ce journaliste est peut-être Baton Haxhiu ?

14 R. Baton Haxhiu était présent à la réunion avec le numéro 7, mais ce n'est

15 pas lui qui a facilité l'organisation de la réunion qui s'est tenue sous

16 l'égide de la MOCE. La rencontre que j'ai eue avec le numéro 3 a été

17 facilitée par un autre journalise Dukagjin Gorani qui venait également du

18 journal Koha Ditore. Baton Haxhiu a facilité la réunion suivante que j'ai

19 eue avec mon collègue britannique, David Slinn, à Klecka, réunion dans

20 laquelle nous avons rencontré Ram Buja et Fatmir Limaj.

21 Q. Merci. Vous savez qu'à ce moment-là, des crimes étaient commis à

22 Klecka, n'est-ce pas ?

23 R. C'était une accusation, et c'est la raison pour laquelle nous avons mis

24 ce point sur la liste des sites qui pouvaient être explorés par les experts

25 médico-légaux finlandais.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le catalogue que vous venez de faire

27 des réunions que vous avez eues avec les représentants de l'UCK n'est pas

28 particulièrement clair à la lecture du compte rendu d'audience. Est-ce que

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1 vous avez assisté à deux réunions uniquement ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] En juillet, j'ai participé à trois réunions.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Trois. C'était la première qui se

4 déroulait en présence de quelqu'un que l'on connaît également en tant que

5 numéro 7 ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais aujourd'hui, je connais son nom, il

7 s'agit de Kadri Veseli.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La réunion du milieu, c'est sans doute

9 celle à laquelle a assisté Krasniqi, n'est-ce pas ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais essayer de m'expliquer.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il a également participé à

12 la troisième réunion avec Thaqi ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] M. Krasniqi a assisté à la toute première

14 rencontre qui a sans doute eu lieu le 22 juillet, lors de la visite du

15 secrétaire général qui revenait de Belgrade, et nous sommes allés à

16 Malisevo avec les représentants de la MOCE à ce moment-là. Nous avons

17 ensuite rencontré le numéro 7, Kadri Veseli, et le lendemain je suis parti

18 seul. M. Rohan était déjà rentré à Belgrade. Par l'intermédiaire de ce

19 journaliste kosovar, j'ai pu rencontrer le numéro 3, M. Hashim Thaqi, le 23

20 juillet, et plus tard durant le mois de juillet, après l'abandon de

21 Malisevo par l'UCK, nous voulions maintenir nos contacts avec l'UCK pour

22 qu'ils soient inclus dans le processus politique. Je suis allé à Klecka,

23 mais j'ai rencontré d'autres représentants de l'UCK à ce moment-là. Comme

24 je l'ai dit, il y a Jakup Krasniqi, le porte-parole intérieur de l'UCK. Je

25 l'ai rencontré à ce moment-là en présence également de Ram Buja et de

26 Fatmir Limaj.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Kickert.

28 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

Page 11266

1 Q. Nous avons parlé de M. Baton Haxhiu. Vous avez dit qu'il avait facilité

2 la réunion de Klecka avec Limaj, Krasniqi et Buja. M. Haxhiu était en

3 excellents termes avec la direction supérieure de l'UCK, n'est-ce pas ?

4 R. Il avait toute possibilité à tout moment de parler de cette direction

5 suprême de l'UCK dans son journal. Il avait toute latitude pour faciliter

6 nos rencontres avec l'UCK.

7 M. CEPIC : [interprétation] J'aimerais que nous passions à la page 3 de ce

8 document. J'en demande l'affichage à l'écran.

9 Q. Monsieur Kickert, vous avez parlé d'Orahovac et de l'attaque d'Orahovac

10 par l'UCK. Ici, dans les premières phrases de ce texte qui est un rapport,

11 un article d'un journaliste qui s'appelle Enver Maloku, à la ligne 4, nous

12 lisons qu'il avait récemment été victime d'une mystérieuse tentative

13 d'assassinat. Il n'a pas eu autant de chance que M. Haxhiu, il ne pouvait

14 pas dire tout ce qu'il voulait dans son journal au sujet de l'UCK.

15 Pourriez-vous, je vous prie, commenter ces accusations selon lesquelles des

16 centaines de civils auraient été tués et selon lesquelles M. Maloku aurait

17 été assassiné ? Les quatre premières phrases concernent Orahovac dans ce

18 texte. "Dans l'article d'Enver Maloku, le dirigeant, le chef du centre

19 d'information du Kosovo au sein de LDK, on voit qu'il accuse l'UCK d'un

20 comportement irresponsable à Orahovac, qui a causé la mort de centaines de

21 civils et a contribué également à une fracture plus profonde des rapports

22 entre l'UCK et la LDK."

23 R. La LDK.

24 Q. "Maloku a récemment été victime d'une mystérieuse tentative

25 d'assassinat." C'est ce qu'on lit dans le texte.

26 R. Il a nié l'existence de l'UCK, et dans cet article il s'agit d'éléments

27 d'information dont j'ai déjà parlé, qui provenaient du centre d'information

28 du Kosovo. En effet, ce centre s'efforçait de présenter sa version de la

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1 situation au publique, et je cite un élément qui provient de ce centre

2 d'information. Nous étions en train d'essayer d'établir des contacts avec

3 cette organisation, dont nous ne connaissions pas la structure et que nous

4 considérions comme un interlocuteur potentiel qu'il fallait sans doute

5 intégrer au processus politique. Apparemment, j'ai écrit qu'il semble y

6 avoir des diverses fractions au sein de l'UCK, et je fais référence à un

7 commandement central à Malisevo en parlant de tentatives de la part de

8 l'UCK pour rétablir l'ordre au sein de sa structure.

9 Q. Est-ce que vous avez peut-être une idée de l'identité de celui ou de

10 ceux qui sont à l'origine de cet attentat ? Est-ce que vous pensez qu'il y

11 a réellement eu un attentat contre M. Maloku ou pas ? Est-ce que vous avez

12 peut-être appris davantage de choses à ce sujet par la suite ? Vous avez un

13 souvenir à ce sujet; oui ou non ?

14 R. Pas la moindre idée.

15 Q. Vous venez de parler du commandement central de Malisevo. Est-ce que

16 vous savez ou est-ce que vous vous souvenez peut-être du fait que le

17 commandement central avait ordonné aux villageois de Malisevo de quitter

18 les lieux, à moins que ce ne soit les villageois de Malisevo qui aient

19 quitté l'endroit de leur propre volonté ?

20 R. Je ne sais pas ce qu'il en était exactement, mais cela ne m'aurait pas

21 surpris.

22 Q. En fait, c'était souvent la pratique de l'UCK d'ordonner aux civils de

23 quitter un lieu déterminé en compagnie de l'UCK, n'est-ce pas ?

24 R. Je ne saurais dire si la population a reçu un ordre ou si elle est

25 partie parce qu'elle craignait pour sa sécurité dès lors que l'UCK partait.

26 Q. Merci. Vous avez parlé de la visite faite par Mme Emma Bonino, page 69

27 du compte rendu d'audience, la visite à Drenica et Malisevo, et vous avez

28 dit que l'UCK ne vous avait pas permis de pénétrer dans ce secteur en

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1 raison du grand nombre de représentants des médias qui vous accompagnaient.

2 Vous saviez peut-être pourquoi ils ne vous ont pas autorisé à pénétrer dans

3 la zone, la raison véritable pour laquelle ils vous ont interdit l'accès à

4 cette zone ?

5 R. Je ne saurais en dire davantage que le simple fait qu'ils ne nous ont

6 pas autorisés à entrer dans ce secteur. C'est tout ce que je peux dire. Je

7 n'ai pas la moindre raison du motif qui les a poussés à nous interdire

8 l'accès. Personne ne m'en a parlé.

9 Q. Merci, Monsieur Kickert.

10 M. CEPIC : [interprétation] Je n'ai plus de questions. Merci, Monsieur le

11 Président.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Maître Cepic.

13 Maître Lukic.

14 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai quelques questions

15 à poser à M. Kickert.

16 Contre-interrogatoire par M. Lukic :

17 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Kickert.

18 R. Bonjour.

19 Q. Je m'appelle Branko Lukic et j'aurais quelques petites questions à vous

20 poser cet après-midi pour que vous nous aidiez à certainement mieux

21 comprendre un certain nombre de choses. Dans la pièce à conviction de

22 l'Accusation P2666, il est fait état d'une localité qui s'appelle Baboloc.

23 Dans ce document, il est dit qu'il s'agit d'un centre d'aide aux réfugiés

24 d'origine slave en Albanie.

25 R. Oui. Dans la version allemande, nous lisons d'origine slave. Je ne sais

26 pas quelle est la source de renseignement quant à l'origine albanaise, mais

27 en tout cas, nous communiquions en serbe avec ces personnes, et je me

28 souviens que dans les premiers jours de la présence de la MOCE, au moment

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1 où nous avions des collègues du ministère des Affaires étrangères au sein

2 de la MOCE et qu'il n'y avait qu'une seule équipe de la MOCE, ces personnes

3 ont été physiquement attaquées par des gens qui étaient à Baboloc, lorsque

4 les vérificateurs se sont rendus à Baboloc. C'est la raison pour laquelle

5 j'évoque l'existence de nombreuses frictions dans cette localité, parce que

6 les gens qui s'y trouvaient ne se sentaient pas en sécurité et avaient de

7 grandes craintes par rapport à l'action de l'UCK.

8 Q. Merci. Un peu plus bas dans le texte, nous lisons : "Une réunion

9 d'information a eu lieu entre le ministre des Affaires étrangères et un

10 autre ministre." Au point 1 de l'ordre du jour, il est question d'"actions

11 de la police en riposte à des assassinats et à des enlèvements d'officiers

12 de police de la part de groupes terroristes, notamment qui veulent bloquer

13 la route".

14 Par rapport à cela, j'aimerais vous demander si vous avez vécu

15 personnellement ces tentatives de blocage de route par l'UCK au Kosovo et

16 si vous savez si l'UCK réussissait à bloquer les routes.

17 R. Parfois, nous devions franchir des postes de contrôle de l'UCK. Lorsque

18 nous avons participé à cette réunion de Malisevo, la première fois nous

19 avons dû franchir un poste de contrôle de l'UCK aux abords de Suva Reka, et

20 j'ai déjà dit que parfois le passage ne nous était pas autorisé à ces

21 postes de contrôle de l'UCK. C'est arrivé, c'est arrivé des deux côtés.

22 Rien n'était noir et blanc.

23 Q. Je vous remercie. Par rapport à cela, vous nous avez dit qu'en juillet,

24 vous avez circulé sur la route Pristina-Pec et que vous avez été arrêté par

25 la police qui n'a pas voulu vous laisser passer et que c'est seulement

26 après que vous ayez mentionné le nom d'Odalovic que vous avez été autorisé

27 à poursuivre votre chemin. Je vous demande donc si peut-être vous avez un

28 souvenir plus précis de la date du jour où cela s'est passé et un souvenir

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1 plus précis de la localité dans laquelle cet incident a eu lieu.

2 R. C'était lorsque j'étais accompagné des directeurs de la troïka de

3 l'Union européenne, donc sans doute à la fin du mois de juillet. Ce n'était

4 pas le grand poste de contrôle qui se trouvait au carrefour de Komorane.

5 C'était sans doute un peu avant ce carrefour ou un peu après, parce que je

6 sais que c'était sur la route menant à Pec et que nous étions au sud de

7 Malisevo, en tout cas nous allions vers le sud. C'est quelque part sur

8 cette route, mais je ne me souviens pas où exactement. Mais j'ai l'image du

9 poste de contrôle de Komorane dans la tête et je ne pense pas que c'était à

10 ce poste de contrôle-là.

11 Q. Merci. Vous rappelez-vous, puisque vous avez dit que cela se passait

12 vers la fin du mois de juillet, à un moment où les combats étaient très

13 intenses entre les forces serbes et l'UCK, vous rappelez-vous si on vous a

14 dit quelle était la raison pour laquelle on vous interdisait le passage ?

15 Est-ce que vous avez été arrêté pour des motifs de sécurité personnelle,

16 votre sécurité et la sécurité des membres de votre mission ?

17 R. Ils nous ont dit qu'ils avaient reçu l'ordre de ne laisser passer

18 personne et, en bons policiers, ils n'ont pas voulu entrer dans un débat.

19 Ils avaient reçu des ordres et il fallait les appliquer. Finalement, ils

20 sont restés là une demi-heure ou trois quart d'heure et ils ont fini par

21 nous laisser passer.

22 Q. Merci. En réponse aux questions posées par l'Accusation, vous avez

23 expliqué que Malisevo était la capitale de l'UCK. Est-ce que par là vous

24 vouliez dire que pour eux, c'était la capitale du Kosovo, de la République

25 du Kosovo ?

26 R. Non. Ils nous disaient que c'était la capitale du territoire libre à

27 leurs yeux, c'était un endroit où la police serbe ne pouvait pas pénétrer.

28 Q. Merci. Vous souvenez-vous qu'avant Malisevo, l'UCK avait érigé des

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1 barrages routiers dans toutes les directions et qu'ils contrôlaient la

2 circulation, les entrées et les sorties ?

3 R. Comme je l'ai déjà dit, la première fois que je me suis rendu sur le

4 terrain, c'était à l'occasion de ce voyage organisé le 8 juin. Par

5 conséquent, je ne peux pas vous dire si c'était le cas. Je me souviens que

6 cette route était bloquée. Je me souviens que M. Holbrooke a dit qu'à

7 Kijevo où il y avait des Serbes et des Rom. Il a dit que c'était l'endroit

8 le plus dangereux sur Terre à un moment donné, car l'endroit était

9 complètement isolé et il n'y avait aucune communication possible.

10 Q. Merci. Est-ce que vous savez que dans le secteur de Malisevo, même

11 après le retrait de l'UCK, il y avait des combats fréquents opposant l'UCK

12 d'une part et les forces de sécurité serbe d'autre part ?

13 R. Il y a eu des combats dans la région de Drenica pendant tout l'été

14 jusqu'à l'arrivée ou le déploiement de la MVK. La situation s'est alors un

15 peu calmée, mais vers la fin de l'année 1998, les affrontements ont

16 recommencé.

17 Q. Je vous remercie. Je vais vous interroger au sujet de Malisevo, mais au

18 fur et à mesure que les destructions se sont poursuivies, d'après ce que

19 vous avez pu constater, nous affirmons, nous, qu'à Malisevo les combats

20 n'ont jamais cessé entre l'UCK et les forces serbes. Les hostilités étaient

21 incessantes. Est-ce que vous conviendrez que c'était la raison principale

22 de ces incendies et ces destructions occasionnées aux bâtiments ?

23 R. Non. Un bâtiment ne peut pas être complètement détruit par des échanges

24 de tirs sporadiques. Cela ne suffit pas à provoquer l'effondrement d'une

25 maison.

26 Q. Merci. Mais vous n'êtes pas un expert militaire. Nous avons entendu des

27 témoignages d'autres témoins ici qui affirment que des balles incendiaires

28 peuvent mettre le feu à une maison. Peu importe, je vais passer à un autre

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1 sujet.

2 Pièce P2655 -- excusez-moi. Je vais parler de la pièce 2665. Dans ce

3 document, il est fait mention -- excusez-moi. Excusez-moi, je suis un peu

4 perdu. En fait, j'ai deux cotes, mais aucune de ces cotes ne semble être la

5 bonne. En fait, c'est bien le document 2655, où il est dit que certaines

6 organisations internationales se sont vu confisquer leur matériel de

7 transmission. Est-ce que vous vous rappelez quand ces émetteurs radio ont

8 été confisqués et pourquoi ?

9 R. Cela nous a été signalé par des ONG internationales. On nous a informés

10 de ce matériel confisqué. Il y avait également des problèmes relatifs à la

11 prorogation des autorisations d'utiliser certaines fréquences radio. Mais

12 je ne saurais vous dire de quelle organisation il s'agissait ni de la date

13 précise.

14 Q. Merci. Vous avez mentionné des fréquences radio. Est-ce que vous avez

15 reçu des renseignements concrets selon lesquels l'organisation concernée se

16 servait de fréquences habituellement utilisées par le MUP même si elle

17 n'était pas autorisée à le faire et que c'est la raison pour laquelle on a

18 confisqué ce matériel de transmission ?

19 R. Non, je n'ai pas entendu parler de cela, mais j'ai entendu dire de la

20 bouche de policiers qu'ils communiquaient par radio avec l'UCK, par moment.

21 Mais je n'ai rien entendu d'autre au sujet de l'utilisation des fréquences

22 radio par la police.

23 Q. Est-ce que vous avez jamais entendu dire à une autre occasion que le

24 matériel radio avait été confisqué à d'autres organisations

25 internationales ?

26 R. Je pense que la MVK disposait de son propre matériel de transmission.

27 Nous nous servions de téléphones par satellite pour communiquer sur le

28 terrain. Il s'agissait pour nous également d'une mesure de sécurité, car

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1 les téléphones cellulaires ne fonctionnaient pas. Mais des organisations

2 internationales plus importantes telles que le HCR des Nations Unies, le

3 CICR et certaines ONG plus importantes se servaient de ce type de

4 communication.

5 Q. Vous n'avez jamais entendu dire que d'autres personnes se seraient vu

6 confisquer leur matériel ?

7 R. Non, pas pour autant que je m'en souvienne.

8 Q. Merci. Il est également fait référence à un tract qui appelle les

9 citoyens à rentrer chez eux. Dans ce rapport, il est dit que ce n'était pas

10 une bonne méthode pour inciter les gens à rentrer chez eux. Est-ce que vous

11 pensez que c'était insuffisant ou que ce n'était pas une bonne manière de

12 procéder ? Est-ce que vous pensez que c'était une erreur que d'appeler la

13 population à rentrer chez elle ?

14 R. Si les gens avaient fui le secteur en raison de leur crainte du MUP et

15 que le MUP ensuite faisait circuler des tracts ou larguait des tracts en

16 disant : "La sécurité est assurée, vous pouvez rentrer chez vous," je ne

17 pense pas que cela suffisait de convaincre les gens de rentrer chez eux.

18 C'est la raison pour laquelle nous avons déployé des efforts pour que les

19 observateurs internationaux soient là, et les rassurer, leur permettre de

20 rentrer.

21 Q. Nous allons devoir faire une pause. Je n'aurai qu'une question à vous

22 poser pour aujourd'hui. Savez-vous que l'UCK tuait ceux qui rentraient chez

23 eux ?

24 R. Le problème qui se posait à nous, essentiellement, c'est qu'il y avait

25 des allégations et des contre-allégations, et nous, nous essayions de nous

26 appuyer sur les observations de nos observateurs et des organisations

27 internationales. Nous voulions nous pencher sur ces questions. J'ai parlé

28 de Glodjane, où on avait des informations contradictoires. Nous voulions

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1 également faire en sorte que les experts de la police scientifique

2 examinent les victimes de cet incident.

3 Q. Je ne suis pas sûr que vous ayez répondu à ma question. Est-ce que vous

4 saviez que l'UCK tuait les Albanais qui rentraient chez eux parce qu'ils ne

5 voulaient pas que ces Albanais rentrent chez eux ? Ils voulaient perpétrer

6 le chaos au Kosovo.

7 R. Non, je n'avais pas de telles informations à ma disposition.

8 Q. Merci.

9 M. LUKIC : [interprétation] Vu l'heure, il est 15 heures 30 passé, en fait

10 je n'ai besoin que de 15 minutes supplémentaires.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous avez des questions

12 supplémentaires, Madame Moeller ?

13 Mme MOELLER : [interprétation] Non, pas pour le moment.

14 [La Chambre de première instance se concerte]

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Kickert, malheureusement nous

16 allons devoir interrompre votre audition. Il y a une autre audience qui

17 doit se tenir dans ce même prétoire à 16 heures. Il faut prévoir 30 minutes

18 entre les audiences. Même si vous ne devriez pas rester longtemps avec nous

19 demain, je crains qu'il n'y ait pas grand-chose à faire. Vous devrez

20 revenir. Je vous rappelle simplement que vous ne devez parler à personne,

21 dans l'intervalle, de votre déposition. Soyez patient, et veuillez à être

22 prêt à poursuivre votre déposition demain matin à 9 heures. L'huissier va

23 vous raccompagner.

24 [Le témoin quitte la barre]

25 --- L'audience est levée à 15 heures 32 et reprendra le jeudi 8 mars 2007,

26 à 9 heures 00.

27

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