Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 16385

1 Le mercredi 26 septembre 2007

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Veuillez mettre votre casque, s'il

6 vous plaît, Monsieur Raider, voudriez-vous l'aider à mettre son casque.

7 Bonjour, Monsieur Andjelkovic.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Voulez-vous faire la déclaration

10 solennelle de dire toute la vérité en donnant lecture du document qui est

11 devant vous.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

13 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

14 LE TÉMOIN: LJUBOMIR ANDJELKOVIC [Assermenté]

15 [Le témoin répond par l'interprète]

16 [Le témoin dépose par vidéoconférence]

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Veuillez vous asseoir.

18 Vous allez être interrogé par Me Visnjic qui représente

19 M. Ojdanic.

20 Maître Visnjic.

21 Interrogatoire principal par M. Visnjic :

22 Q. [interprétation] Bonjour, Général.

23 R. Bonjour.

24 Q. Général, voudriez-vous bien dire aux Juges de la Chambre quelle a été

25 votre carrière, votre formation et vos responsabilités au sein de la VJ.

26 R. J'ai terminé l'école secondaire, ensuite je suis rentré à l'académie

27 militaire que j'ai terminée, je suis diplômé de la haute académie

28 militaire. Ensuite j'ai été commandant de section. J'étais responsable

Page 16386

1 d'autres choses et je suis finalement devenu directeur des communications

2 et des opérations électroniques de l'état-major, responsable des

3 communications, de l'informatique et des communications électroniques.

4 Q. Merci, Général. Quelles étaient vos responsabilités en

5 1999 ?

6 R. J'ai été chef du département des communications, informatique et

7 opérations électroniques. J'étais également chef d'état-major pour ce

8 département.

9 Q. Général, très souvent dans les documents on retrouve le mot VIED, je

10 suppose qu'il s'agit là de l'acronyme de votre département, le département

11 des communications, de l'informatique et d'opérations électroniques.

12 R. Oui.

13 Q. Pourriez-vous dire ce que recouvre ce département ?

14 R. Bien, le nom explique ce que cela veut dire : les communications,

15 l'informatique et les transmissions électroniques.

16 L'INTERPRÈTE : Est-ce qu'on pourrait éteindre le micro de Me Visnjic

17 lorsque le témoin parle.

18 M. VISNJIC : [interprétation]

19 Q. Quelles étaient les responsabilités du ministre du département

20 responsable de l'administration responsable dans le système de commandement

21 ?

22 R. Il était censé protéger les communications, les communications ou

23 transmissions avec les unités pour ce qui est des différents niveaux.

24 Evidemment, à chaque niveau, il y avait une unité responsable des

25 transmissions et de s'assurer qu'elle soit protégée.

26 Q. Qu'en est-il du département d'informatique responsable ?

27 R. Il était responsable de l'informatique pour le commandement, mais

28 jusqu'en 1998 ou 1999, cela remontait au niveau du corps d'armée et c'est

Page 16387

1 jusque-là que ça allait.

2 Q. En dernier, pour ce qui est des transmissions

3 électroniques ?

4 R. Il était responsable de rassembler des informations de surveillance

5 électronique, de radiosurveillance et de transmettre cette information aux

6 organes responsables de cela pour que les informations soient traitées et

7 analysées.

8 Q. Qu'en est-il de la surveillance électronique et de la

9 radiosurveillance; c'est ce que vous avez dit, n'est-ce pas ? Dans les

10 documents de renseignements, nous avons souvent cette explication.

11 L'information était reçue par radiosurveillance ou par surveillance

12 électronique, ou du département VIED, c'est donc votre département, et

13 cetera. Dites-moi, pour ce qui est des opérations, l'administration des

14 opérations électronique ou pour toute autre unité de moindre échelon en

15 1998 et en 1999, y avait-il de la surveillance et du traitement

16 d'information qui avait à voir avec l'UCK ?

17 R. Non, nous ne traitions pas l'information. Nous la recevions et la

18 transmettions aux organes qui étaient responsables du traitement de cette

19 information.

20 Q. Général, comment est-ce que les transmissions fonctionnaient, enfin je

21 veux dire le système utilisé par l'UCK en 1998 et 1999 ?

22 R. Pendant cette période, ils utilisaient des radiotransmetteurs. Les

23 responsables, ils parlaient ouvertement, pas dans un langage codé. Il y

24 avait une vingtaine de participants dans un réseau. Dès que le nombre

25 excédait 20 participants, ils passaient à un réseau différent. Ils

26 n'utilisaient pas de codes. Dès qu'ils utilisaient un endroit, ils le

27 commutaient à un autre code. Donc ils avaient un équipement très léger à

28 transporter, donc il était facile jusqu'à l'arrivée de la Mission de

Page 16388

1 vérification. Alors, je ne peux pas en être certain, mais ils ont utilisé

2 un équipement de meilleure qualité. Ensuite, dans les transmissions, il y

3 avait de l'encryptage était utilisé, il y avait du brouilleur, ce n'était

4 pas évidemment ce qu'il y avait de plus pointu, mais à un niveau de

5 commandement inférieur il était très difficile de les suivre. Voilà pour ce

6 qui est de leur système de communication. Mais si je puis ajouter quelque

7 chose --

8 Q. Général, un instant, s'il vous plaît.

9 M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre permission,

10 je crois que nous avons une erreur dans le compte rendu d'audience à la

11 page 2, à ligne 18. La question qui a été posée au témoin était : Quelles

12 étaient les responsabilités du département de l'administration. Je crois

13 que M. Visnjic a dit : Quelles étaient les tâches du département de

14 transmissions ?

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Visnjic, quelle était votre

16 question ?

17 M. VISNJIC : [interprétation] En effet, il s'agissait du département des

18 transmissions, comme l'a dit M. Cepic.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Veuillez poursuivre.

20 M. VISNJIC : [interprétation]

21 Q. Général, vous alliez ajouter quelque chose au sujet du système de

22 transmission, donc les caractéristiques du système utilisé par l'UCK.

23 R. Je voulais simplement dire qu'ils étaient en communication avec les

24 forces de l'OTAN en Albanie et en Macédoine. Je ne sais pas quel type

25 d'équipement ils avaient ni comment ils l'utilisaient ni d'où ils l'avaient

26 obtenu. Ils l'ont probablement obtenu quelque part d'un renforcement, mais

27 c'était un équipement un petit peu plus puissant.

28 Q. A quelle heure exactement était ou se passait -- ou y avait-il des

Page 16389

1 communications ? A quel moment était-ce qu'il y avait des communications

2 avec l'OTAN ?

3 R. Je crois que c'était au courant de la deuxième moitié de 1998.

4 Q. Général, maintenant que vous avez mentionné l'OTAN. Quels étaient les

5 systèmes de transmissions utilisés par l'OTAN quand ils opéraient sur le

6 territoire de la République fédérale de l'ex-Yougoslavie ?

7 R. Pour la plus grande partie, ils utilisaient des communications radio,

8 des transmissions radio. C'était un équipement très pointu. Il y avait

9 également l'option d'encrypter toutes formes de communications,

10 généralement par satellite au niveau tactique. Ils utilisaient des canaux

11 de communication avec des pilotes en l'air, des bases au sol, et avions de

12 chasse. Nous ne savons pas grand-chose au sujet des modulations de leur

13 équipement ni leurs paramètres techniques, mais nous surveillions leurs

14 communications. En grande partie, nous savions ce qu'ils faisaient.

15 Q. A un moment donné au cours de la guerre étiez-vous en train de

16 surveiller les communications et étiez-vous capable d'intercepter les

17 communications entre les pilotes de l'OTAN ?

18 R. Oui. Enfin, vous avez des réunions du collège ainsi que les

19 retranscriptions. On voyait que les conversations, leurs conversations

20 étaient interceptées, spécialement quand ils avaient des informations que

21 sur les lieux qui allaient être pris pour cibles. Donc nous étions en

22 position de -- en mesure d'informer nos unités en temps utile. A un moment

23 donné, nous avons révélé leur présence, ensuite ils ont passé en langage

24 crypté.

25 L'INTERPRÈTE : Les interprètes font remarquer qu'ils n'ont pas entendu la

26 dernière partie de la réponse du témoin.

27 M. VISNJIC : [interprétation]

28 Q. Pouvons-nous examiner la pièce P933, s'il vous plaît, Général.

Page 16390

1 L'INTERPRÈTE : Les interprètes font remarquer qu'ils n'entendent ni

2 l'avocat de la Défense ni le témoin à cause du bruit.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous semblons avoir des problèmes. Les

4 interprètes ont du mal à entendre à cause du bruit ambiant. Que pouvons-

5 nous faire ? Vous devriez avoir votre micro allumé, mais il n'y a pas

6 d'autre micro allumé.

7 Les interprètes, je ne sais pas ce que nous pouvons faire d'autre. M.

8 Visnjic éteindra son micro lorsqu'il aura terminé de poser sa question.

9 M. VISNJIC : [interprétation]

10 Q. Général, votre page est la page 6, le paragraphe en haut de page.

11 M. VISNJIC : [interprétation] Sur le prétoire électronique, il s'agit de la

12 page 9 -- ou plutôt, la page 7, sur e-court. Paragraphe 4 en anglais.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Visnjic, veuillez indiquer au

14 témoin la bonne page pour qu'il ne passe pas son temps à tourner les pages

15 et que nous puissions poursuivre avec votre question.

16 M. VISNJIC : [interprétation]

17 Q. Général, avez-vous trouvé la bonne page, la page 6 ?

18 R. Oui, les pages 6, 8 et 9.

19 Q. Non, seulement la page 6, s'il vous plaît. En haut de page, nous voyons

20 votre contribution à la réunion d'état-major général du

21 4 mars. Pourriez-vous, s'il vous plaît, expliquer la teneur de votre

22 contribution lors de cette réunion ?

23 R. A l'époque, ils avaient utilisé des avions individuels pour la

24 reconnaissance. C'était la première fois qu'il y avait tout un escadron.

25 Ces avions étaient utilisés pour la reconnaissance de cibles possibles au

26 Kosovo et nous donnions les coordonnées pour les avions de chasse.

27 Q. A partir du 4 mars, je crois jusqu'au 4 mars, la reconnaissance avait

28 été faite de façon individuelle par des avions individuels, mais c'est la

Page 16391

1 première fois qu'un escadron entier avait été envoyé pour appareiller au-

2 dessus du Kosovo ?

3 R. Oui, en effet.

4 Q. Général, lorsque nous parlons du 4 mars, il ne s'agit pas du 4 avril,

5 comme l'indique le compte rendu d'audience.

6 R. Oui.

7 Q. Vous nous avez dit que l'UCK était en communication avec l'OTAN. Est-ce

8 que c'était vrai pour 1999 aussi durant la guerre ?

9 R. Oui. Ils ont maintenu les transmissions avec le commandement de l'OTAN

10 en Macédoine et en Albanie.

11 Q. Merci.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'allais vous demander, Maître

13 Visnjic, où le témoin a indiqué les transmissions avec l'OTAN. Je sais

14 qu'il a parlé de transmissions avec l'Albanie et la Macédoine, mais je ne

15 sais pas s'il a parlé de l'OTAN jusqu'à présent.

16 M. VISNJIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne suivais pas le

17 compte rendu d'audience. Le témoin a dit cela. Il a dit qu'il était en

18 communication avec l'OTAN en Albanie, en Macédoine auparavant. Il a

19 mentionné 1998. C'était il y a quelques pages en arrière. Je crois que

20 c'était à la page 4 du compte rendu d'audience.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois que nous parlions des

22 transmissions entre l'UCK et l'Albanie et la Macédoine.

23 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, à la

24 page 5, à la ligne 8 jusqu'à la ligne 16, on parle d'intercepter les

25 communications, les transmissions, ensuite ils ont découvert qu'ils étaient

26 en train d'écouter les communications avec l'OTAN. Ils sont passés à un

27 langage crypté.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais cela ne veut pas dire

Page 16392

1 nécessairement qu'il y avait des transmissions entre l'OTAN et l'UCK. C'est

2 un point spécifique ici qui nous occupe.

3 M. IVETIC : [interprétation] C'était juste avant cela. Un instant, s'il

4 vous plaît. A la page 4, la ligne 22, il y a la question : "A l'époque,

5 est-ce que l'UCK était en communication avec l'OTAN ?"

6 Réponse : Je cite toujours : "Il s'agissait de la deuxième moitié de

7 1998."

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

9 M. VISNJIC : [interprétation]

10 Q. Général, à l'époque, lorsque vous écoutiez les communications radio

11 entre les avions ou les transmissions radio, est-ce que d'une manière ou

12 d'une autre cela vous a permis de suivre ou de savoir quelles étaient leurs

13 cibles potentielles ?

14 R. Oui, oui, ils donnaient les coordonnées de leurs cibles potentielles,

15 les lieux qu'ils allaient frapper. Nous avions assez de temps pour en

16 informer nos unités plus bas dans la chaîne de commandement et de dire

17 quels allaient être les lieux qui allaient être l'objet de cibles.

18 Q. Vous nous avez dit que cela durait jusqu'à un certain moment donné ?

19 R. Jusqu'à ce qu'ils réalisent que nous étions en train de surveiller leur

20 communication.

21 Q. Merci.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quand était-ce cela ?

23 M. VISNJIC : [interprétation]

24 Q. Je crois que M. le Président vous a demandé quand c'était.

25 R. Oui, j'ai entendu la question, mais je ne savais pas que c'était à moi

26 qu'elle était posée. Je crois que c'était à la mi-avril. Je ne me souviens

27 pas de la date exacte, mais à un moment donné à la mi-avril.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

Page 16393

1 M. VISNJIC : [interprétation] Pourrais-je, s'il vous plaît, voir la pièce

2 P929, à la page 28 de la version en B/C/S, la page 25 de la version

3 anglaise.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas la page 28. J'ai 454 et suivantes.

5 M. VISNJIC : [interprétation]

6 Q. Je vais vous aider, Général. Voyez-vous les chiffres jusque-là ? C'est

7 le dernier -- enfin, la page qui m'intéresse porte le numéro 744. Il s'agit

8 d'ailleurs de la dernière.

9 R. Voilà. Je l'ai trouvée.

10 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent aux avocats de la Défense

11 d'éloigner le micro, ou plutôt au témoin d'éloigner son micro de ces

12 documents parce que l'on entend les pages tourner.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que vous m'entendez, Maître Visnjic ?

14 M. VISNJIC : [interprétation] Oui, je vous entends, mais j'attends

15 simplement que le bruit cesse.

16 Q. Général, il s'agit de la réunion du collège qui s'est tenue en avril

17 1999. Nous avons devant nous votre présentation. Ce qui m'intéresse c'est

18 le dernier passage de votre contribution à la réunion, qui commence avec

19 les mots : "ensuite."

20 R. Oui.

21 Q. Ma question à ce propos est la suivante : disposiez-vous

22 d'informations selon lesquelles il y avait des activités sur le territoire

23 de la FRY avec différentes personnes qui essayaient de retrouver des avions

24 de l'OTAN ?

25 R. Tout d'abord, nous suspections que de telles activités étaient en

26 cours, mais en ce moment-là nous étions convaincus que c'était comme ça. En

27 particulier, nous avons intercepté des communications entre des pilotes en

28 vol qui disaient qu'il y avait un espion sur le toit, et il y avait des

Page 16394

1 gens qui étaient censés repérer les avions dans les aires urbaines. Ils les

2 plaçaient là -- ou, ils plaçaient des systèmes de localisation sur

3 certaines cibles. Il était plus facile pour les avions de l'OTAN de les

4 repérer en tant que cibles.

5 Q. Maintenant, ce qui m'intéresse c'est la situation au Kosovo. Qui,

6 d'après vos informations, menait ces activités ? Qui guettait les avions ?

7 R. C'était les AWACS. Je ne crois pas qu'au Kosovo il y avait des gens qui

8 mettaient des équipements de localisation, sauf quelques Siptars le

9 faisaient.

10 Q. Merci.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Visnjic, je ne suis pas sûr de

12 comprendre très bien ce que veut dire le témoin quand il parle d'"AWACS."

13 M. VISNJIC : [interprétation]

14 Q. Général, voulez-vous, s'il vous plaît, expliquer aux Juges de la

15 Chambre ce que sont les AWACS ?

16 R. Il s'agit d'un avion de l'OTAN, un avion américain utilisé pour des

17 missions de reconnaissance et pour guider les avions vers leurs cibles.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quand vous parlez de -- qu'en est-il

19 de ces localisateurs, Maître Visnjic ? C'est quelque chose qui était

20 utilisé dans certaines parties de la Serbie qui n'étaient pas au Kosovo,

21 puisque le témoin dit qu'il ne pensait pas qu'il y avait de localisateurs

22 utilisés au Kosovo ?

23 M. VISNJIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'est ça que j'ai

24 compris d'après ce que le témoin a dit.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Peut-être pourriez-vous essayer de

26 découvrir dans quelle partie de la Serbie ceci se passait puisque cela

27 semble un peu incongru.

28 M. VISNJIC : [interprétation]

Page 16395

1 Q. Général, je vous demande simplement que vous me disiez d'abord qu'est-

2 ce qu'un localisateur. Vous avez utilisé le terme.

3 R. C'était un équipement particulier qui émettait une certaine fréquence.

4 Les avions recevaient le signal et pouvaient alors localiser la cible et

5 tirer dessus. Voilà l'explication la plus simple.

6 Q. Le Juge vous a demandé si vous pourriez nous dire où vous pensiez que

7 ces localisateurs étaient utilisés ou, du moins, où vous en avez trouvés ?

8 R. Je ne sais pas si M. le Président m'a entendu, mais j'ai dit que ceci

9 était surtout utilisé dans les zones urbaines. Belgrade, évidemment, mais

10 aussi Nis, les ponts, les aéroports, et par la suite, des centrales

11 électriques, les transformateurs, les lignes de communication, et cetera.

12 Q. Merci.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Andjelkovic, comment est-ce

14 que ces localisateurs se fixent sur les cibles ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Une explication simple, c'est que les avions

16 civils utilisent des transmetteurs radio pour guider leurs avions pour

17 qu'ils puissent suivre un certain parcours et ceci est un transmetteur

18 radio qui est utilisé pour guider les avions vers leurs cibles.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si ceci a une importance, Maître

20 Visnjic, vous allez devoir me fournir des explications plus claires. Si

21 cela n'a pas d'importance, veuillez poursuivre. Je n'ai aucune idée de

22 comment fonctionnent ces localisateurs, comment ils sont placés ou comment

23 leur transmission ou leur signal est intercepté par les avions.

24 M. VISNJIC : [interprétation]

25 Q. Général, je crois que M. le Président voulait vous poser la question

26 suivante -- ou plutôt, laissez-moi vous la poser. Savez-vous comment ces

27 localisateurs étaient fixés sur les cibles ou d'où ils venaient ?

28 R. Je ne sais pas comment ils arrivaient sur notre territoire, mais ils

Page 16396

1 étaient simplement fixés sur les cibles potentielles. C'était un appareil

2 ou un équipement autonome. Ils étaient alimentés de façon autonome et ils

3 émettaient une certaine fréquence. Je l'ai expliqué. Je ne sais pas si vous

4 m'avez compris --

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je comprends maintenant. Je comprends.

6 Je voulais simplement que ce soit très clair qu'il s'agissait

7 d'infiltrateurs [phon] qui étaient suspectés d'installer l'équipement.

8 Veuillez poursuivre.

9 M. VISNJIC : [interprétation]

10 Q. Général, vous disiez que c'était des pièces d'équipement autonomes.

11 Pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, pendant combien de temps elles

12 pouvaient fonctionner avec l'alimentation dont ils disposaient ? Pendant

13 combien de temps pouvaient-ils émettre ce signal ?

14 R. C'était de l'équipement autonome. Ils pouvaient fonctionner pendant

15 assez longtemps pour permettre aux pilotes de recevoir le signal peut-être

16 une ou deux heures ou jusqu'à cinq heures. Ça dépendait de la quantité

17 d'énergie qu'ils utilisaient.

18 Q. Merci, Général. Pourriez-vous nous dire quelles étaient les

19 caractéristiques du système de transmission utilisé en 1998 et 1999 par

20 l'armée de Yougoslavie ?

21 R. Mais il n'y aucune différence entre 1998 et 1999. L'armée de

22 Yougoslavie avait un système qui était organisé selon les différents

23 échelons de commandement sur le plan des radios, des radiorelais, et sur le

24 plan des effectifs. Pratiquement 90 % des transmissions en temps de paix,

25 en temps de mobilisation et en temps de danger imminent de guerre

26 utilisaient le système par câble. Avec le début des opérations de guerre,

27 lorsque les unités étaient engagées, on passait à l'utilisation des radios.

28 Jusqu'au niveau des corps d'armée, c'était des communications par câbles

Page 16397

1 radio, radiorelais, mais à des échelons inférieurs, brigades jusqu'aux

2 sections, c'était uniquement les systèmes de communication par radio, qu'on

3 a très rapidement pu brouiller, et les communications sont devenues

4 pratiquement impossibles. Sur le plan opérationnel ou sur un niveau

5 stratégique opérationnel, on avait également la possibilité de communiquer

6 par écrit, mais cette possibilité n'existait pas à des échelons inférieurs.

7 Donc ce serait en quelques mots une manière de résumer ce qu'avait l'armée

8 de Yougoslavie.

9 Q. Je vous remercie, Général.

10 R. Je vous en prie.

11 Q. A plusieurs reprises lors de ces réunions collégiales, vous avez évoqué

12 ce système de transmissions. D'ailleurs, c'était votre domaine de

13 compétence. Je voudrais maintenant vous inviter, pour commencer, à examiner

14 de nouveau ce qui s'est passé lors de cette réunion du 4 mars, P933, page 9

15 en B/C/S, page 10 en anglais.

16 R. Je l'ai retrouvé.

17 Q. 3D -- excusez-moi, P933.

18 -- Q. Général, vous avez trouvé la page, 871 est le numéro que l'on peut

19 lire en haut.

20 R. Je l'ai trouvée.

21 Q. J'attends juste un instant. Très bien. Nous avons également le texte

22 qui s'affiche en anglais.

23 Dites-moi encore une fois, vous parlez des téléphones portables. Est-ce que

24 vous pouvez expliquer aux Juges de manière détaillée de quoi il s'agit ?

25 R. Certains officiers se servaient de téléphones portables lorsqu'ils

26 communiquaient avec leurs unités subalternes. C'était très dangereux.

27 C'était destructeur, dévastateur, parce qu'il est très facile de découvrir

28 les intentions et l'emploi des différentes unités à différents moments. Ce

Page 16398

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

12 versions anglaise et française

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

26

27

28

Page 16399

1 n'est pas uniquement les problèmes mobiles qui posaient problème, c'était

2 aussi les stations radio transportables. Nous sommes intervenus à plusieurs

3 reprises pour leur interdire le recours à ces téléphones portables, mais

4 sans aucun effet. Les officiers continuaient de s'en servir pour dire où

5 ils se trouvaient, pour dire quels effectifs ils avaient, pour dire ce qui

6 se passait dans leur unité et l'adversaire s'en est servi à profit.

7 Q. Général, si je vous ai bien compris, vous avez eu des éléments

8 d'information grâce à la surveillance des communications, grâce aux

9 écoutes. Donc vous saviez qu'ils se servaient de téléphones portables ou de

10 radios et que c'est ainsi que certaines données qui, normalement, étaient

11 des données, des informations confidentielles, pouvaient être interceptées.

12 R. Oui, c'est cela.

13 Q. Après vous, c'est le général Dimitrijevic qui prend la parole. Ici --

14 M. VISNJIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que c'est un

15 problème de traduction que nous avons ici, mais je vais m'adresser au

16 général Andjelkovic pour qu'il nous dise comment il interprète cette phrase

17 qui est commencée par le général Dimitrijevic.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que vous voulez que j'en donne lecture

19 ?

20 M. VISNJIC : [interprétation]

21 Q. Oui.

22 R. "Pratiquement, dans sa totalité, le Grom 3 a été révélé de cette

23 manière-là."

24 Q. Je vous remercie, Général. Nous voyons que dans la traduction il est

25 question de la 3e Armée, mais en fait le chiffre 3 ne concerne pas la 3e

26 Armée.

27 R. Non, non, non. C'est la directive aux fins de la préparation à la

28 défense en cas d'actions lancées par l'OTAN.

Page 16400

1 Q. Très bien. Si vous pouvez maintenant tourner la page.

2 R. Oui.

3 M. VISNJIC : [interprétation] En anglais, est-ce que l'on peut également

4 tourner la page, s'il vous plaît.

5 Q. Ce qu'on lit ici : "Ces attaques sur la colonne sont précisément la

6 conséquence d'une conversation non cryptée."

7 R. Oui.

8 Q. De quoi s'agit-il ici, Général ?

9 R. De toute évidence, une conversation a eu lieu en passant par le

10 téléphone portable ou par une station radio. L'autre partie l'a entendue et

11 notre colonne qui avançait le long d'un axe a été attaquée par l'OTAN. Ce

12 qui montre qu'on pouvait facilement intercepter nos communications qui se

13 passaient par téléphones portables ou par radios.

14 Q. A présent, P931, la pièce de l'Accusation, P931, page 13, s'il vous

15 plaît. Evitez, s'il vous plaît, de faire du bruit avec les feuilles, cela

16 pose un problème aux interprètes.

17 R. Quelle page ?

18 Q. Page 13 dans le prétoire électronique, page 12 pour vous 823 en haut de

19 la page en langue anglaise page 15.

20 R. Oui.

21 M. VISNJIC : [interprétation] Page 15 en langue anglaise. Là, c'est bien

22 maintenant.

23 Q. Général, c'est la réunion qui s'est tenue le

24 2 février 1999, là encore nous avons un exposé fait par vous. J'aimerais

25 que l'on passe au troisième paragraphe. C'est vous qui parlez, c'est la

26 page suivante.

27 R. Oui.

28 Q. En B/C/S et en langue anglaise, ce texte commence ici, sur cette page

Page 16401

1 que nous avons, il commence par des mots : "Le dilemme qui se pose par la

2 suite a à voir avec la professionnalité ou les compétences de l'armée."

3 R. Oui.

4 Q. Je vais vous donner lecture de la phrase qui suit.

5 "S'il est exact --"

6 R. "S'il est exact, les subalternes pensent qu'ils ne devraient pas faire

7 et s'ils nous font rapport disant qu'ils ne l'ont pas fait alors que nous

8 avons des données précises et exactes disant qu'ils l'ont fait, et si

9 personne n'en assume les conséquences, je pense qu'on a raison de poser la

10 question de notre compétence."

11 Q. Général, dites-nous de quoi vous avez parlé là ?

12 R. Il y a eu cette question préalable, donc la question de l'attaque sur

13 la colonne et le fait qu'on n'arrêtait pas d'utiliser les téléphones

14 portables. Précisément, cela avait à voir avec un emploi trop fréquent des

15 téléphones portables et les radios. A plusieurs reprises, on a mis en garde

16 les unités subalternes leur demandant d'empêcher l'usage abusif de ces

17 moyens de communication, mais il n'y a pas eu de réaction adéquate de la

18 part des subalternes. C'est ce que vous voyez à la réunion collégiale du 10

19 août 1998, si je ne me trompe pas, puis le 3 décembre 1998, ensuite de

20 nouveau en mars, avril 1999. Personne n'a donné suite, et en particulier

21 les unités du MUP n'ont pas réagi. Donc j'ai posé la question. Sommes-nous

22 suffisamment compétents, avons-nous la compétence nécessaire pour faire en

23 sorte que ces ordres soient exécutés. C'est cela le contexte de cette

24 phrase.

25 Q. Je vous remercie, Général. Pendant les opérations de guerre, quelles

26 ont été vos fonctions ? Où étiez-vous ?

27 R. J'étais au poste de commandement. J'avais les mêmes fonctions qu'en

28 1998. Donc en 1999 j'étais chef du secteur de l'informatique et des moyens

Page 16402

1 électroniques. J'étais le chef du secteur et je me trouvais au poste de

2 commandement.

3 Q. Très bien, Général. Est-ce que vous avez pris part aux réunions

4 d'information qui se tenaient le soir, pendant toute la durée de la guerre

5 ?

6 R. Oui, à cette exception près que je me suis absenté à de rares fois. Il

7 y a juste quelques réunions auxquelles je n'ai pas assisté.

8 Q. Merci. Vous venez de mentionner le MUP à l'instant. Pouvez-vous dire

9 dans ce système de transmissions que vous aviez au quartier général du

10 commandement Suprême, ou plutôt, est-ce que vous pourriez m'expliquer

11 comment ce système était organisé par rapport aux utilisateurs externes, à

12 savoir, y compris le MUP ?

13 R. Pour communiquer avec les unités et avec le MUP, il y avait des liens

14 de communication directs avec le chef du quartier général du commandement

15 Suprême et le chef du MUP fédéral. C'était des communications par

16 téléphone. On pouvait également communiquer par radio, mais en fait on n'a

17 pas activé cette possibilité. On allait activer cela si on n'allait pas

18 pouvoir communiquer par câble, et à tous les échelons, chaque niveau de

19 commandement a été relié par un certain nombre de canaux vers les échelons

20 supérieurs.

21 Q. Général --

22 R. Oui.

23 Q. J'allais vous poser une autre question. Les communications avec les

24 unités subalternes, comment étaient-elles organisées ? Quel était ce

25 système ? Et pendant la guerre, est-ce qu'il y a eu des interruptions de

26 communication entre les QG du commandement Suprême et les unités

27 subordonnées ?

28 R. Mais je vous ai dit dès le départ que le système de transmissions était

Page 16403

1 organisé selon les différents échelons de commandement. Le QG du

2 commandement Suprême avait des contacts -- des communications directes avec

3 les armées, donc les entités stratégiques, et également avec le

4 commandement des corps, donc c'est le niveau opérationnel. A des échelons

5 inférieurs, c'était uniquement si le besoin se faisait sentir. Donc ce

6 n'était pas une communication constante et directe depuis le QG du

7 commandement Suprême. Nous avions tout d'abord les communications par

8 câble, puis par radiorelais, ensuite par radio. Pour sa part, à chaque

9 niveau du commandement, il y avait un certain nombre de canaux vers les

10 unités subalternes jusqu'aux groupes ou sections, ça dépendait des

11 échelons. Et pour chacun de ces types de communication il y avait un

12 certain nombre de canaux. Vous en aviez de 12 à 24 pour les câbles, vous en

13 aviez pour les radiorelais de 8 à 12 canaux, puis un à deux canaux ou voire

14 trois éventuellement pour les radios. Et en fonction des niveaux de

15 commandement, ce niveau donc était réduit; au niveau le plus élevé, vous

16 n'aviez qu'un canal.

17 Q. Je vous remercie, Général. Pour enchaîner là-dessus, ma deuxième

18 question portant sur le même sujet : est-ce qu'il y a eu des interruptions

19 au niveau des communications entre le quartier général et du commandement

20 Suprême et les niveaux stratégiques pendant les opérations ?

21 R. Oui. Nous avions ce qu'on appelle les nœuds stationnaires de

22 transmissions. Le système de communication utilisable s'est vu décroître

23 de, disons, sur une échelle de 100, au niveau suprême des commandements,

24 jusqu'à 35 %, s'est réduit à 35 % de ce qu'on a pu utiliser. Et il y a eu

25 des moments où entre les niveaux stratégiques et le niveau suprême il y eu

26 des interruptions complètes de communication. Heureusement, ça n'a pas duré

27 longtemps, il nous a fallu un petit peu de temps pour réparer les dégâts.

28 Mais à des échelons inférieurs, ces interruptions étaient plus longues et

Page 16404

1 fréquentes. Il était très difficile d'assurer des communications avec les

2 échelons inférieurs.

3 Q. Général, revenons au QG du commandement Suprême, si vous voulez bien.

4 En quelques mots, pourriez-vous nous dire comment était organisé le

5 fonctionnement du QG, et en particulier ce sont les permanences qui

6 m'intéressent, opérationnelles.

7 R. Au QG du commandement Suprême, chaque direction disposait d'un bureau,

8 de locaux où elle pouvait se réunir, où elle pouvait exercer une partie de

9 son travail. Donc c'est là qu'on procédait à des évaluations, préparaient

10 des ordres, enfin tout ce qui relève des compétences de chacune des

11 directions. Puis le soir, sur la base des rapports qui nous étaient

12 parvenus, on proposait certaines mesures au chef du QG, qui préparait dans

13 ordres et dès le lendemain matin, ces ordres étaient communiquées aux

14 différentes unités subordonnées. Donc c'était un travail d'équipe, et en

15 particulier le chef du QG du commandement Suprême a insisté sur l'aspect

16 travail d'équipe. Souvent il disait que nous ne devions jamais proposer des

17 décisions, seuls ou de manière indépendante, qu'il fallait toujours qu'on

18 s'appuie sur les estimations des équipes entières, si c'est cela que vous

19 voulez savoir.

20 Q. Vous étiez également à la tête de l'équipe de permanence, l'équipe

21 opérationnelle de permanence ?

22 R. Oui.

23 Q. Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce que cela entraîne, ce poste,

24 cette fonction ?

25 R. Les assistants du chef du QG du commandement Suprême, donc les chefs

26 des différentes directions, de différents secteurs étaient à la tête de

27 l'équipe de permanence au QG du commandement Suprême. Cela veut dire que

28 chaque direction faisant partie de cette équipe est représentée par un

Page 16405

1 homme qui, sur une période de 24 heures assure le suivi de la situation,

2 prépare les informations pour la réunion d'information du soir et fait

3 rapport au chef du QG. En tant que chef de l'équipe, j'orientais le travail

4 de cette équipe et je demandais et je gérais les informations qui m'étaient

5 communiquées. L'équipe pouvait compter 18, 12, 15 hommes, cela variait.

6 C'était seulement au besoin.

7 Q. Je vous remercie. Général, sauriez-vous que dans les rangs de l'armée

8 de Yougoslavie, on a développé un plan afin de chasser la population

9 albanaise de souche, de les chasser du Kosovo ?

10 R. Non. En toute responsabilité, j'affirme que ce genre de plan non

11 seulement n'a jamais vu le jour, mais même dans nos esprits il n'y avait

12 pas l'idée, l'intention de créer ce genre de plan. A plusieurs reprises

13 lors des réunions, le chef du QG du commandement Suprême a insisté sur le

14 fait qu'il fallait respecter le droit de la guerre, qu'il convenait de

15 traiter de la manière la plus humaine les prisonniers et que jusqu'au

16 dernier soldat de l'échelon le plus subalterne, il fallait qu'il reçoive

17 les instructions sur le comportement des soldats sur le théâtre

18 d'opérations et tous les soldats étaient tenus d'avoir sur lui cette

19 feuille comportant ces instructions. Donc il ne fait aucun doute que ce

20 plan n'a pas existé.

21 M. VISNJIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'en ai terminé avec

22 l'interrogatoire de ce témoin. Je n'ai plus de questions.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie, Maître Visnjic.

24 Monsieur Andjelkovic, c'est Me Cepic qui va vous interroger au nom de M.

25 Lazarevic.

26 M. CEPIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Un

27 instant, s'il vous plaît, le temps que je me prépare.

28 Contre-interrogatoire par M. Cepic :

Page 16406

1 Q. [interprétation] Général, je suis Djuro Cepic. Je défends ici le

2 général Lazarevic. Bonjour.

3 R. Bonjour, Monsieur Cepic.

4 Q. Général, est-ce que vous pouvez nous expliquer une chose. Dans l'armée

5 de Yougoslavie, quelle est l'institution ou quelle est l'unité qui était

6 chargée d'assurer le fonctionnement du système stationnaire de transmission

7 pour la totalité du territoire de la RFY pendant la guerre en 1999 ?

8 R. C'était l'unité spéciale qui était exclusivement chargée d'assurer le

9 fonctionnement du système de transmissions. C'était le 235e centre de

10 communication stationnaire. C'était l'organe faîtier [phon] pour l'ensemble

11 des unités. Le 235e centre avait la responsabilité du système de

12 transmissions pour la totalité du territoire de la RFY en 1999, voire

13 avant.

14 Q. Je vous remercie, Général. Je vais juste vous demander de ralentir un

15 petit peu votre débit dans vos réponses pour que l'on puisse consigner tout

16 ce que vous dites dans le compte rendu d'audience.

17 R. Oui.

18 Q. Par conséquent, toutes les unités de transmission, y compris le 52e

19 centre situé au Kosovo-Metohija, étaient subordonnées à la 235e direction

20 de transmissions ?

21 R. Oui.

22 Q. Je vous remercie.

23 M. CEPIC : [interprétation] Dans le prétoire électronique, est-ce qu'on

24 peut afficher, s'il vous plaît, la pièce de la Défense, 5D1097.

25 Q. Général, est-ce que vous pouvez nous donner lecture de l'en-tête de ce

26 document ? Est-ce que vous savez de quelle unité il s'agit ?

27 R. Oui. Direction du 52e centre du corps d'armée, document strictement

28 confidentiel, 66-8, du 29 mars 1999. Il s'agit du centre de Pristina.

Page 16407

1 L'INTERPRÈTE : Ralentissez, s'il vous plaît.

2 M. CEPIC : [interprétation]

3 Q. Oui, oui. Allez-y, je vous en prie.

4 R. Il s'agit du centre du corps d'armée chargé des transmissions

5 stationnaires du Corps d'armée de Pristina qui était cantonné à Pristina.

6 Q. C'est cette direction qui était subordonnée au 235e

7 centre ?

8 R. Oui.

9 Q. Le point 2, s'il vous plaît, est-ce que vous pouvez vous y reporter,

10 l'état des transmissions et information KZ, puis le troisième alinéa :

11 Communications ou transmissions par radiorelais.

12 R. Oui.

13 Q. Est-ce que vous pouvez nous en donner lecture puisqu'on n'a pas la

14 traduction.

15 R. "Transmissions par radiorelais ne fonctionnent pas, l'axe radiorelais

16 1299, centre stationnaire de Djakovica, centre stationnaire Mokra Gora,

17 parce que le centre de Djakovica a été mis hors service, l'appareil 800,

18 radiorelais." Dites-moi quand je pourrai poursuivre.

19 Q. Oui, oui, vous pouvez, mais ralentissez, s'il vous plaît.

20 R. Oui, très bien. "Equipement radiorelais 800 ainsi que le VZ12K

21 dispersés dans la pièce et leurs câbles coupés. Trois blocs systémiques du

22 centre de communications Butovacki Breg, numéros 2303, 2968 ainsi que 2297,

23 deux appareils FM 200 qui se sont trouvés à l'atelier au MUP Pristina, la

24 section de transmissions, ils ont brûlé dans le bâtiment du MUP bombardé

25 par l'aviation de l'OTAN."

26 Q. Je vous remercie, Général. Maintenant, je vais vous demander une chose

27 : est-ce que vous pouvez nous expliquer quelles ont été les cibles de

28 l'attaque de l'OTAN menées depuis l'espace aérienne pendant la première

Page 16408

1 partie de la guerre ?

2 R. Les cibles prioritaires pendant la première partie de la guerre, les

3 cibles de l'OTAN ont été des systèmes de transmissions, des systèmes de

4 surveillance et d'alerte, des systèmes de radar. Dans le système de

5 transmissions, c'étaient des centres de communications stationnaire, SCV

6 l'abréviation, qu'ils soient situés au Kosovo ou en Serbie ou au

7 Monténégro. Donc pendant cette première phase de la guerre, on a détruit

8 tous ces centres de communications qui n'avaient que la partie terrestre,

9 Fruksa Gora, mais les centres enterrés, ils ont perdu leurs antennes, leurs

10 systèmes d'antennes dès le départ, tandis que la partie enterrée a continué

11 de fonctionner. Les centres de transmissions, c'est les casernes Pristina,

12 Djakovica, Urosevac, Pec, c'est là qu'étaient cantonnées les unités.

13 Pendant la première phase de la guerre, ils ont été pris pour cibles

14 également, et les centres stationnaires de Djakovica, c'est le premier qui

15 a été détruit.

16 Ensuite, les autres ont été détruits tous, et Pristina à la fin. Non

17 seulement les centres stationnaires de l'armée ont été pris pour cibles,

18 mais on a également tiré sur des systèmes des postes PTT, le poste de

19 télécommunications de Pristina était très endommagé, Djakovica également -

20 je ne vais pas tous les énumérer - avec l'objectif d'entraver et

21 complètement empêcher de fonctionner le système de commandement de l'armée.

22 Q. Je vous remercie, Mon Général.

23 M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, je crois qu'il y a une

24 erreur de transcript à la page 24, ligne 2. Je crois qu'il manque les mots

25 "dans la zone du Kosovo-Metohija." Est-ce qu'on pourrait demander au témoin

26 de compléter.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois que ce n'est pas nécessaire.

28 Les lieux qu'il a évoqués se trouvent bien au Kosovo.

Page 16409

1 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

2 Q. Général, je voudrais désormais vous demander de vérifier la pièce

3 PT1098.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il ne faudrait pas plutôt

5 que ce soit la cote 5D ?

6 M. CEPIC : [interprétation] Oui, c'est bien 5D1098.

7 Q. Mon Général, voulez-vous lire l'intitulé de ce document, l'unité et la

8 date.

9 R. "Administration du 52e centre de transmissions stationnaire,

10 extrêmement secret, numéro 66-15, daté du

11 5 avril 1999."

12 Q. Pourriez-vous avoir la gentillesse de nous lire la première phrase

13 après le premier point, le premier point intitulé ennemi.

14 R. "Les équipements ont été attaqués, les équipements à découvrir ont été

15 détruits, les poteaux, plus particulièrement."

16 Q. Merci, Mon Général. Pourriez-vous nous dire plus exactement où était

17 cet équipement ?

18 R. Au Kosovo-Metohija.

19 Q. Ai-je raison de penser que c'est à côté de la ville de Mitrovica, de

20 Kosovska Mitrovica ?

21 R. Oui.

22 Q. Merci.

23 M. CEPIC : [interprétation] Passons maintenant au document 5D1099.

24 Q. Mon Général, est-ce que j'ai raison de penser que ce document émane de

25 la même administration, la 52e ?

26 R. Oui.

27 Q. Pourriez-vous lire le deuxième paragraphe au point 2, qui commence par

28 les mots : "Transmission par radiorelais …"

Page 16410

1 R. "Les radiorelais suivants ont été perturbés" --

2 Q. Mon Général, ce n'est pas exactement cela que nous cherchons. Je vais

3 vous poser juste une question. Sur la base de ces informations et de ce que

4 vous pouvez voir sur ce document, est-ce que j'ai raison de penser que tous

5 les axes de communication entre le Corps de Pristina et les unités

6 déployées autour de Pristina avaient été perturbés ?

7 R. Oui.

8 Q. Merci.

9 M. CEPIC : [interprétation] Pourriez-vous nous proposer la pièce 5D349.

10 Q. Avez-vous ce document devant vous, Mon Général ?

11 R. Oui.

12 Q. Pourriez-vous m'en lire l'intitulé.

13 R. "Commandement de la 3e Armée, strictement confidentiel, numéro 3110-18,

14 daté du 31 mars 1999."

15 Q. Il est indiqué ici "urgent," ensuite il est indiqué qu'il y a des

16 "difficultés dans la collecte des données, rapport."

17 R. Oui.

18 Q. Pourriez-vous lire la première phrase puisque nous n'avons pas de

19 traduction en anglais.

20 R. "Les opérations de combat se sont intensifiées. Il y a des attaques

21 régulières depuis le sol et les airs, les unités sont déployées dans la

22 région, nous avons besoin d'adapter rapidement nos activités à la situation

23 tactique opérationnelle, plus particulièrement dans la zone de

24 responsabilité du Corps de Pristina. Cela a pour conséquence que le poste

25 de commandement doit se déplacer régulièrement, ce qui a pour conséquence

26 de rendre plus compliqué l'établissement de transmissions solides et

27 fiables et parfois même cause des difficultés à collecter et traiter de

28 façon adéquate les informations nécessaires et requises."

Page 16411

1 Q. Merci. Vous avez déjà dit - et je crois qu'on peut donc en tirer la

2 conclusion suivante - vous nous avez déjà dit que les communications dans

3 la zone du Kosovo-Metohija étaient en train de fonctionner dans une

4 situation très critique et qu'il était parfois difficile, parfois

5 impossible à certains moments de la guerre de communiquer et que cela

6 créait des difficultés ?

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, M. Cepic procède au

8 contre-interrogatoire. S'il pose des questions qui n'apportent absolument

9 rien et dont les réponses ne valent rien, c'est son problème.

10 Maître Cepic, ces questions ne servent à rien, mais je ne peux pas vous

11 empêcher de procéder à votre contre-interrogatoire.

12 M. CEPIC : [interprétation] Bien, je vais aller de l'avant, Monsieur le

13 Président, mais je crois qu'il y a une erreur dans le compte rendu

14 d'audience et dans sa transcription.

15 [Le conseil de la Défense se concerte]

16 M. CEPIC : [interprétation]

17 Q. Mon Général, ces perturbations que nous avons évoquées et que nous

18 avons vues dans les documents, pourriez-vous nous dire quel impact elles

19 ont eu sur la structure de commandement dans la zone du Kosovo-Metohija ?

20 R. Elles avaient un impact très négatif. Si l'on ne peut pas communiquer

21 avec les unités sur le terrain, on ne peut pas les commander, on ne peut

22 pas leur donner d'ordres. Ainsi donc, les documents que je viens de vous

23 lire nous montrent très bien qu'il y avait des vraies difficultés à

24 collecter des informations, c'était quasi même impossible, et donc il était

25 impossible de commander ces unités. Puisque si le poste de commandement se

26 déplace rapidement, il faut déplacer le poste de transmissions également,

27 installer un nouveau poste de transmissions. Ça prend du temps, tout

28 d'abord, ne serait-ce que pour le mettre en place, le stabiliser, et

Page 16412

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

12 versions anglaise et française

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

26

27

28

Page 16413

1 ensuite seulement, les structures de commandement peuvent reprendre leurs

2 travaux. C'est pourquoi, comme je l'ai déjà dit, je ne doute pas que vous

3 l'aurez déjà noté, je ne vois pas comment le système de commandement

4 arrivait à fonctionner à ce moment-là.

5 Q. Très bien. Merci, Mon Général.

6 M. CEPIC : [interprétation] Très bien. Je souhaiterais examiner désormais

7 la pièce 5D208.

8 Q. Mon Général, pourriez-vous nous lire l'intitulé de ce document.

9 R. "Commandement du Corps de Pristina, strictement confidentiel, numéro

10 692-1/13 …"

11 M. CEPIC : [interprétation] Je crois que nous avons perdu la liaison avec

12 Belgrade.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous entends, je vous entends.

14 Q. Merci, Mon Général. J'ai dû mélanger mes informations. Pourriez-vous

15 nous donner la lecture de la date de ce document.

16 R. 7 avril 1999.

17 Q. Merci. Pourriez-vous lire ce qui est indiqué au point 1.2, opérations

18 électroniques.

19 R. "A cause des bombardements aériens sur le poste de Pristina, un certain

20 nombre de moyens de communications et de transmissions dont dépend la VJ

21 ont été détruits, perturbant les communications avec les unités déployées

22 relevant du Corps de Pristina. Il y avait des perturbations pour chaque

23 groupe, sauf pour le groupe 21, pour lesquels les communications

24 fonctionnent bien."

25 Q. Est-ce que cela confirme ce que vous nous avez déjà dit ?

26 R. Oui.

27 Q. Merci. Ce sera ma dernière question, Mon Général. Pourriez-vous nous

28 dire si le secteur de l'état-major général de la VJ dont vous avez la

Page 16414

1 responsabilité a envoyé des équipes de réparation sur le terrain pour aider

2 et contrôler le Corps de Pristina ?

3 R. Oui. Nous avons envoyé des hommes sur place, plus particulièrement

4 auprès du Corps de Pristina, pour aider et contrôler, si nécessaire. Le

5 contrôle n'était pas la tâche principale.

6 Q. Merci, Mon Général. Merci beaucoup, Mon Général.

7 M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de

8 questions.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

10 Monsieur Andjelkovic, nous allons faire une pause de 20 minutes et

11 nous allons reprendre à 10 heures 35.

12 --- L'audience est suspendue à 10 heures 14.

13 --- L'audience est reprise à 10 heures 37.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, avez-vous des questions

15 à poser ?

16 M. IVETIC : [interprétation] Non.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Andjelkovic, l'Accusation va

18 maintenant procéder à votre contre-interrogatoire sous la conduite de M.

19 Hannis.

20 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

21 Contre-interrogatoire par M. Hannis :

22 Q. [interprétation] Bonjour, Mon Général.

23 R. Bonjour.

24 Q. Vous avez évoqué le secteur informatique et vous avez dit qu'ils

25 étaient responsables de l'IT. Qu'est-ce que cela veut dire ? Est-ce qu'IT,

26 cela veut dire technologie de l'information ?

27 R. Oui, IT ça veut bien dire technologie de l'information, mais ce n'est

28 pas un secteur, ce n'est pas une section, c'est une administration.

Page 16415

1 Q. Oui. Merci. J'ai parfois de la difficulté avec ces termes techniques.

2 Vous avez également informé de ce que votre groupe procédait à

3 l'interception d'informations, mais que vous ne la traitiez pas. Vous

4 disiez que c'était intercepté, ensuite transmis aux structures adéquates

5 pour traitement. Est-ce que vous pourriez nous dire ce que sont ces

6 structures adéquates, quelles organisations pouvaient procéder au

7 traitement de cette information ?

8 R. C'était le renseignement et parfois l'administration de la sécurité. Si

9 les données obtenues par la surveillance interne étaient pertinentes pour

10 d'autres administrations, bien, elles en recevaient alors une copie soit

11 l'original intégral, soit des extraits.

12 Q. Très bien. Mais alors qui décide et comment décidait-on que c'était au

13 service du Renseignement ou de la sécurité qu'il fallait envoyer ces

14 données ? Est-ce que cela était fondé sur ce qu'on entendait ou les

15 communications qui étaient interceptées, l'origine des communications

16 interceptées ?

17 R. Cela dépendait de l'origine des communications interceptées et de leur

18 contenu.

19 Q. Est-ce que je dois parler de votre secteur ou de vos activités sous le

20 mot "département," "administration," "secteur," je ne suis pas sûr, mais

21 est-ce que quelqu'un sous vos ordres était en charge de -- avait la

22 responsabilité de faire ce choix et ce tri ?

23 R. Oui, il y avait l'administration des opérations électroniques dans

24 laquelle il y avait une section qui analysait les données recueillies et

25 qui transmettait ces informations à qui de droit.

26 Q. Qui était le chef de l'administration pour les opérations électroniques

27 ?

28 R. C'était le colonel Radovanovic --

Page 16416

1 Q. [aucune interprétation]

2 R. Il a ensuite été élevé au rang de général.

3 Q. Pourriez-vous nous donner son prénom ?

4 R. Je crois que c'est Dobrosov ou Dobrosav.

5 Q. Merci. Vous avez dit que l'UCK était en contact avec l'OTAN. Est-ce que

6 vous pouvez nous dire clairement si c'était une information que vous aviez

7 ou si c'était votre interprétation des choses, que l'UCK était en contact

8 avec l'OTAN dès avant le conflit en 1999, et donc dès 1998 ?

9 R. Oui, il y avait des contacts avec l'OTAN en 1998, déjà, puisque l'OTAN

10 recueillait des informations sur les mouvements de nos troupes, et l'UCK ne

11 pouvait pas assurer seule le suivi de nos mouvements de troupes. Cela ne

12 pouvait se faire qu'avec l'aide d'autres structures de commandement, la

13 seule autre structure de commandement sur place était l'OTAN, ou à tout de

14 moins, une division de l'OTAN.

15 Q. Votre réponse, Mon Général, nous laisse à croire que ce n'est qu'une

16 interprétation, que vous n'avez pas de preuve. Le général Naumann de l'OTAN

17 a, dans sa déposition ici même, annoncé qu'il n'y avait pas de

18 communication et de contact avec l'UCK avant la guerre, puisqu'ils

19 considéraient que l'UCK était une organisation terroriste et qu'elle ne

20 pouvait pas traiter avec eux. Et justement, c'était pour cela qu'il était

21 très difficile de trouver un accord dès octobre, puisque l'OTAN ne pouvait

22 pas établir de contact avec l'UCK. Je comprends bien comment vous en êtes

23 arrivé à cette conclusion-là, mais je me demande si ce ne serait pas par

24 hasard qu'une interprétation personnelle ?

25 R. Ecoutez, vous pouvez soit croire ce que vous a dit Naumann ou soit ce

26 que je vous dis. Je vous dis ce que je sais.

27 Q. Mais comment le saviez-vous ? J'avais vraiment l'impression que vous

28 étiez en train d'arriver à cette conclusion et de l'exprimer et de dire

Page 16417

1 qu'effectivement la seule source qui aurait pu donner à l'UCK cette

2 information c'était l'OTAN ou une structure subordonnée de l'OTAN --

3 R. Monsieur, si vous aviez pris la peine d'écouter ce que je vous disais,

4 nous n'avions pas besoin d'obtenir d'information des autres. Je vous ai dit

5 --

6 Q. Mon Général, je crois que la communication avec Belgrade est un peu

7 erratique. Je ne vous vois plus très bien.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ne vous inquiétez pas, on envoie la

9 cavalerie pour vous sauver, Monsieur Hannis.

10 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] On nous a demandé de patienter quelque

12 peu en attendant de rétablir la connexion.

13 Nous vous avons, Général, mais nous n'avons pas eu la fin de votre dernière

14 phrase, donc M. Hannis va vous reposer la question.

15 Monsieur Hannis.

16 M. HANNIS : [interprétation]

17 Q. Monsieur, je vous ai demandé comment vous saviez, parce que j'ai

18 compris d'après votre dernière réponse que c'était votre présomption que

19 l'OTAN était en contact avec l'UCK, parce que l'UCK ne pouvait seulement

20 obtenir le genre d'information dont elle disposait que par l'OTAN ou par un

21 sous-groupe de l'OTAN. Une partie de votre réponse précédente disait - et

22 ici je vous cite : "Monsieur, si vous écoutiez attentivement ce que je vous

23 disais, et que nous n'avions pas besoin de recevoir de l'information de qui

24 que ce soit. J'espère que vous m'écoutiez." Vous aviez dit : "Nous n'avions

25 pas de…"

26 Ensuite on a perdu le signal. Pouvez-vous reprendre votre réponse à partir

27 de là ?

28 R. Avez-vous quoi que ce soit à ajouter ou est-ce là votre question ?

Page 16418

1 Q. C'est là ma question. Il semblait que vous n'aviez pas terminé votre

2 réponse avant que nous soyons interrompus, donc je voulais vous donner la

3 chance de finir votre réponse si vous aviez quoi que ce soit d'autre à

4 dire.

5 R. Oui, oui. C'est ce que j'ai dit auparavant. Nous avions une unité, ou

6 plutôt des unités qui étaient responsables de la surveillance radio, de

7 surveiller le trafic par communication radio. Nous avons retrouvé l'UCK et

8 nous avons réalisé qu'ils étaient en contact avec un certain commandement

9 en Macédoine et en Albanie. D'après le langage qu'ils utilisaient, nous

10 avons conclu qu'il s'agissait là de forces de l'OTAN.

11 Q. Quel langage utilisait-il qui vous a permis de conclure qu'il

12 s'agissait de forces de l'OTAN ? Utilisaient-elles la langue albanaise, ou

13 la langue de Macédoine, ou un langage particulier à l'OTAN ?

14 R. L'anglais et le siptar.

15 Q. Merci --

16 R. Cela dépendait de chaque cas en particulier.

17 Q. Je voudrais passer à un autre point. Me Visnjic vous a interrogé sur le

18 type d'équipement de transmission qui était utilisé par la VJ en 1998 et

19 1999, et vous nous avez expliqué cela. Vous avez dit comment, cependant, à

20 partir du niveau opérationnel et stratégique vous pouviez encrypter les

21 transmissions orales et écrites à hauts niveaux, mais qu'à partir du niveau

22 de brigade et plus, vous n'aviez pas cette possibilité. Pourquoi ne

23 pouviez-vous pas encrypter les transmissions à partir du niveau de la

24 brigade et vers le bas ?

25 R. C'est-à-dire, sur la base des plans d'équipement que nous avions, nous

26 avons envisagé que les niveaux supérieurs de commandement devraient être

27 équipés d'abord, ensuite en descendant la chaîne de commandement et quand

28 la guerre a éclaté nous avons simplement manqué de temps pour nous assurer

Page 16419

1 de tels équipements pour les niveaux inférieurs de commandement.

2 Q. Dans de telles situations, est-ce une possibilité alternative

3 d'utiliser des transmissions codées ou de parler en langage codé pour ce

4 qui est des niveaux de brigade et inférieurs ?

5 R. Oui, il y a l'option d'utiliser un livre de code pour maintenir la

6 confidentialité des transmissions. Ceci évidemment ralentit beaucoup le

7 processus de commandement, mais dans la mesure où c'était possible nous

8 avons essayé d'avoir des communications ouvertes indépendamment du

9 préjudice que cela peut provoquer.

10 Q. Bien. Est-ce que des communications codées étaient parfois utilisées à

11 des niveaux inférieurs durant la guerre ?

12 R. Cela dépendait de qui les utilisait. C'était chaque commandant qui

13 décidait individuellement de l'utiliser ou non, d'utiliser ou non ce

14 langage codé.

15 Q. Il me semble que je me souviens de certaines occasions au cours

16 desquelles les estafettes étaient utilisées pour transmettre les messages;

17 c'était également utilisé au cours de la guerre, n'est-ce pas ?

18 R. Oui, ou des officiers de liaison, des soldats ou des estafettes. Il y

19 avait également des officiers responsables des transmissions. Ceci

20 évidemment a considérablement ralenti la chaîne de commandement.

21 Q. Me Visnjic vous a parlé, je crois, d'une session collégiale, d'une

22 réunion au cours de laquelle vous avez parlé du problème de l'utilisation

23 de téléphones portables par les commandants, et nous avons lu une partie

24 dans laquelle, je crois, le général Dimitrijevic parlait de ce problème et

25 il disait : "Pratiquement tout le Grom 3 a été touché de cette manière."

26 Vous nous aviez dit que Grom 3 était un nom de code pour une opération qui

27 allait être lancée par l'OTAN si jamais elle lançait une invasion par le

28 sol. Etiez-vous au courant de plans avant cela qui auraient été appelés

Page 16420

1 Grom 2 et Grom 1 ?

2 R. Non.

3 Q. Vous n'avez jamais entendu aucun de ces deux noms ?

4 R. Non. J'ai entendu parler de Grom 3, mais pas de Grom 1 et Grom 2.

5 Q. Comment est-ce que vous avez entendu parler de Grom 3 ? Avez-vous eu ou

6 reçu une copie de ce plan ou est-ce que cela a été évoqué au sein d'une

7 réunion d'état-major ? Vous souvenez-vous ?

8 R. Personne n'a reçu de copie de Grom 3. C'est un document confidentiel,

9 et tout le monde peut l'utiliser dans la mesure où c'était nécessaire. Mais

10 comment ai-je entendu parler de Grom 3 ? Si vous regardez le dernier

11 paragraphe, le commandement et les transmissions, qui pensez-vous faisait

12 cela ?

13 Q. Bien, je pensais qu'il s'agissait probablement de vous, dans la mesure

14 où c'était nécessaire pour les transmissions pour Grom 1 et Grom 2, je

15 pensais que vous seriez au courant de cela aussi.

16 R. Grom 1 et Grom 2, je ne sais pas s'il s'agissait des mêmes questions.

17 Je ne suis pas sûr que c'était nécessaire pour le commandement des

18 transmissions. Je ne sais rien au sujet de ces deux là.

19 Q. Bien. Merci. Vous avez mentionné que vous étiez impliqué dans le

20 travail du collège de la VJ et que vous avez assisté à la plupart des

21 réunions d'information au cours de la guerre, sauf celles pendant

22 lesquelles votre présence était requise ailleurs. Y a-t-il quelqu'un qui

23 assistait aux réunions à votre place quand vous ne pouviez y être ?

24 R. Je ne peux pas vous entendre.

25 Q. Pour les réunions d'état-major ou ces réunions d'information du soir

26 pendant la guerre auxquelles vous ne pouviez assister parce que votre

27 présence était requise ailleurs, est-ce qu'il y avait quelqu'un d'autre qui

28 vous représentait, qui assistait à ces réunions quand vous ne pouviez pas y

Page 16421

1 être ?

2 R. Oui. Il s'agissait du chef de l'administration des transmissions ou un

3 autre commandant quand je n'étais pas là. Pour la plupart, il s'agissait du

4 colonel Brajovic, qui était le chef de l'administration des transmissions,

5 qui est devenu général par la suite.

6 Q. Vous évoquiez en page 18 aujourd'hui les problèmes causés par les

7 bombardements par l'OTAN du système de transmissions. Vous avez dit que

8 vous étiez à un moment donné, lorsque vous étiez au plus mal, à 35 %, et je

9 voulais vous poser la question de ce que ces 35 % voulaient dire en réalité

10 et comment cela affectait vos transmissions entre l'état-major du

11 commandement Suprême et des unités

12 subordonnées ? Est-ce que cela veut dire que vous étiez seulement en mesure

13 de communiquer avec eux pendant un tiers du temps ou que vous étiez

14 seulement en mesure de communiquer avec un tiers des unités ? Comprenez-

15 vous ma question ?

16 R. Oui. Ce n'était pas une question de temps ou de nombre d'unités, mais

17 c'était la capacité. Par exemple, vous prenez la vitesse -- ou un niveau de

18 100, par exemple. Si nous avions 100 canaux de communication, le lien avec

19 une certaine unité à un moment donné, quand il y avait des centres qui

20 avaient été bombardés, ceci est tombé à 35, 35 canaux, donc c'était 35 %

21 dans ce cas-ci. Et c'est pour ça que la disponibilité était moindre. Donc

22 il fallait, lorsque nous avions moins de canaux, établir des priorités sur

23 quels canaux utiliser.

24 Q. Bien. Quand vous étiez à une capacité maximale, est-ce que tous les

25 canons étaient utilisés tout le temps ?

26 R. Cela dépendait de l'intensité du trafic des transmissions. Certains

27 étaient disponibles. Je ne sais pas si nous les avons utilisés ou non.

28 Parfois, tous les canaux étaient utilisés, mais parfois aucun. Ça dépendait

Page 16422

1 beaucoup de l'intensité des transmissions.

2 Q. Bien. Lorsque vous étiez à cette capacité de 35 %, vous avez évoqué que

3 c'était seulement pendant un bref moment. S'agissait-il d'heures ou de

4 jours ? Quelle période ?

5 R. Cela dépend des dégâts soufferts par certains centres. Parfois, cela

6 pouvait prendre une ou deux heures, parfois 15 heures, parfois 24 heures,

7 parfois il y avait une panne de 48 heures.

8 Q. Combien de fois avez-vous eu des pannes de 24 heures ou plus pendant

9 les 78 jours qu'a duré le conflit ?

10 R. Je ne peux pas vous dire exactement combien de fois, mais certainement

11 une dizaine de fois. Je vous parle du niveau de commandement stratégique

12 maintenant.

13 Q. La raison pour la --

14 R. Au niveau tactique, cela était plus fréquent.

15 Q. Excusez-moi de vous avoir interrompu. La raison pour laquelle je vous

16 posais la question, c'est que j'ai vu les procès- verbaux de la plupart des

17 réunions d'information du soir, et vous aviez assisté à la plupart d'entre

18 elles, si vous n'y étiez pas, le colonel Brajovic vous remplaçait ou un

19 autre représentant de votre section. Et la plupart des rapports, au cours

20 de ces réunions d'information quotidiennes, disaient que malgré les dégâts

21 subis par les bombardements et malgré les problèmes, les transmissions

22 fonctionnaient correctement. Est-ce là une affirmation incorrecte que

23 j'avance ou est-ce qu'il y a généralement une certaine résistance à donner

24 des mauvaises nouvelles au général Ojdanic au sujet des transmissions ?

25 R. Tout d'abord, laissez-moi vous dire la chose suivante : ce genre de

26 chose ne se produisait jamais. Personne n'était terrifié par le général

27 Ojdanic puisque c'était un homme très raisonnable. Nous n'avons jamais

28 pensé qu'il était nécessaire d'assommer le collège avec tout ça lors de nos

Page 16423

1 réunions. C'était quelque chose que nous pouvions traiter entre nous. De

2 toute façon, ils ne pouvaient rien faire pour nous aider. Le travail du

3 collège était menacé à cause de ces pannes, donc j'aurais été responsable

4 de les informer au sujet de la situation générale des communications; si ce

5 n'était pas nécessaire, je ne le disais pas. Donc j'avais toute latitude

6 pour ce qui était des décisions à prendre. Pour ce qui est du système de

7 télécommunication, j'avais le général Ojdanic qui m'avait transféré ses

8 capacités.

9 Q. Merci. Pouvez-vous nous dire où le collège se réunissait, se trouvait

10 géographiquement pendant la guerre ? Pourriez-vous nous dire où se tenaient

11 vos réunions d'information vespérales entre le

12 24 mai et le début du mois de juin 1999 ?

13 R. Les réunions se tenaient toujours dans une salle du centre opérationnel

14 au poste de commandement.

15 Q. Où était situé le poste de commandement ?

16 R. A Belgrade.

17 Q. Où à Belgrade ?

18 R. Dans la rue Tejo Drajzera [phon].

19 Q. Nous avons eu des éléments de preuve indiquant qu'il y a eu une réunion

20 du collège le 9 avril 1999, réunion qui s'est tenue dans un autre lieu, je

21 crois à la VMA, et vous avez assisté à cette réunion-là, n'est-ce pas ?

22 R. Oui.

23 Q. Etait-ce là la seule occasion à laquelle la VMA s'est réunie dans un

24 endroit différent ?

25 R. C'était seulement pour cette réunion-là. L'objectif principal étant de

26 rendre visite aux blessés qui étaient traités métropolitains pour essayer

27 de remonter leur moral et de les soutenir, pour leur faire voir qu'ils

28 étaient vraiment suivis. Donc c'est pour ça que la réunion s'est tenue là.

Page 16424

1 Outre les réunions, nous avons pu rendre visite à nos blessés.

2 Q. D'après ce dont je me souviens du compte rendu de la réunion du

3 collège, cette réunion a duré trois heures et a donné lieu à la production

4 d'un document qui a été appelé directive pour, je crois, combattre l'OTAN.

5 Vous souvenez-vous de cela ?

6 R. Monsieur, non pas une seule réunion du collège n'était simplement une

7 question de courtoisie. Non, il y avait toujours quelque chose qui faisait

8 l'objet d'une discussion. Cela aurait été une perte de temps pour nous

9 d'aller à l'hôpital militaire et là juste nous y dispersés. Nous avons

10 décidé de tenir la réunion là et le sujet de cette réunion en particulier

11 était précisément ce que vous avez évoqué.

12 Q. Laissez-moi maintenant vous montrer la pièce P1481, qui est la

13 directive du 9 avril 1999, pour l'engagement de la VJ et de la défense

14 contre l'agression de l'OTAN. Je suis en train de regarder la page qui

15 porte le numéro 11. C'est l'avant-dernière page de la version en serbe, je

16 crois, Mon Général.

17 R. Oui, oui, poursuivez. Je crois qu'il s'agit du numéro 6.

18 Q. Oui. Commandement et transmissions, et ici je lis la version anglaise.

19 Je cite : "Déploiement de la VSO," qui, je comprends, veut dire le conseil

20 suprême de la Défense, "et la VJ GS," c'est-à-dire le chef d'état-major

21 général, "KM," je crois, veut dire poste de commandement, "dans les

22 secteurs actuels."

23 Est-ce exact ?

24 R. Oui.

25 Q. Où se trouvait le poste de commandement du conseil suprême de la

26 Défense le 9 avril 1999 ?

27 R. Le bâtiment se trouvait dans la ville Drajzer.

28 Q. Est-ce là le même endroit où s'est réuni le collège ?

Page 16425

1 R. Oui.

2 Q. A votre connaissance, qui faisait partie du conseil suprême de la

3 Défense à l'époque ?

4 R. Le président de la République fédérale de Yougoslavie et les présidents

5 des républiques. Si nécessaire, le ministre de la Défense, les chefs

6 d'état-major étaient également invités.

7 Q. Egalement sous le titre, il y a un acronyme, NPKM, dans le secteur de

8 Mataruska Banja. Pouvez-vous me dire ce que veut dire NPKM ?

9 R. Il s'agit du poste de commandement arrière, ou plutôt poste de

10 commandement adjacent.

11 Q. Bien. Parce que deux lignes plus haut je vois PKM, qui a été traduit

12 comme étant poste de commandement arrière. Pouvez-vous m'expliquer la

13 différence entre ces deux acronymes ?

14 R. Non. PKM, si vous regardez PKM, cela veut dire poste de commandement

15 arrière, et RPKM veut dire poste de commandement arrière de réserve. NPKM,

16 s'il est nécessaire de laisser un poste de commandement arrière, l'endroit

17 suivant vers lequel ils vont se diriger serait le NPKM, qui est à Mataruska

18 Banja.

19 Q. Donc il s'agit d'un autre poste de commandement arrière si le premier

20 n'est pas disponible ou pas approprié; est-ce exact ?

21 R. Oui.

22 Q. Merci. Maintenant, je ne suis pas tout à fait au clair quant à l'état-

23 major du commandement Suprême et le collège et l'état-major. Laissez-moi

24 d'abord vous expliquer et ensuite je vais vous poser la question. J'avais

25 compris que l'état-major de la VJ était le corps des généraux haut gradés

26 qui se rassemblaient en temps de paix, et une fois que la guerre avait

27 éclaté, cet état-major s'est transformé ou est devenu ce qu'on appelle

28 l'état-major du commandement Suprême; est-ce exact jusqu'à présent ?

Page 16426

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

12 versions anglaise et française

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

26

27

28

Page 16427

1 R. Oui.

2 Q. Quelle est la différence entre l'état-major général en temps de paix et

3 le collège ? Est-ce le même groupe de personnes ? Quelle est la différence

4 entre ces deux groupes ?

5 R. Le collège de l'état-major du commandement Suprême comprend les

6 présidents et d'autres personnes, alors que le collège du chef d'état-major

7 du commandement Suprême est comme l'état-major en temps de paix.

8 Q. Bien. Alors maintenant, je crois qu'il y a une réunion d'information du

9 soir en date du 29 mars. Il s'agit de la pièce 3D582. J'espère que vous

10 l'avez parmi vos documents, Mon Général.

11 R. Oui.

12 Q. Je voudrais vous demander de vous tourner à la page 4 de votre version

13 serbe, aux deux tiers de la page en descendant, quand le général Ojdanic

14 parle.

15 R. Oui.

16 Q. Ma traduction en anglais dit qu'il dit : "Le collège ne s'est pas réuni

17 parce que j'étais occupé ailleurs."

18 Ensuite, quelques lignes plus bas, il dit : "Je ne serai pas là tout le

19 temps, parce que je suis un membre de l'état-major du commandement

20 Suprême."

21 Cela me semble indiquer que l'état-major du commandement Suprême est un

22 autre organe qui se réunit ailleurs. Est-ce exact qu'il s'agissait de

23 quelque chose différent du collège ?

24 R. L'état-major du commandement Suprême est un autre organe. Ce n'est pas

25 le même que le collège.

26 Q. Bien. Et nous avons déjà entendu à plusieurs reprises le terme

27 commandant Suprême, qui tout le monde semble d'accord pour dire qu'il fait

28 référence au président Milosevic. Vous êtes d'accord avec cela ?

Page 16428

1 R. En termes généraux. Le commandement Suprême a un nombre de membres de

2 niveau égal, mais Milosevic était le plus ancien, donc il était appelé le

3 commandant suprême.

4 Q. A ses côtés, qui étaient les autres membres du commandement Suprême,

5 tel que vous l'entendez ?

6 R. Les présidents des républiques.

7 Q. Merci. Pendant que nous avons ce document sous les yeux, puis-je vous

8 demander d'aller à la page précédente, c'est-à-dire la page 3, en haut de

9 la page 3 de votre version serbe, qui fait référence à une question qui

10 vous a été posée par Me Cepic au sujet de la pièce 5D1097, qui parlait du

11 centre de transmissions à Djakovica qui avait été détruit. Ici, lors de

12 cette réunion d'information du soir le 29 mars, vous avez dit que le centre

13 avait été détruit, mais si je lis, il est dit : "Des 606 canaux, 531 sont

14 encore utilisables."

15 Est-ce que cela veut dire que vous aviez environ 85 % de capacité qui

16 n'avait pas été détruite à cet endroit-là; est-ce exact ?

17 R. Non. Quand je parlais de Djakovica, cela ne voulait pas dire qu'il y

18 avait 606 canaux de transmission, mais pour ce qui est du RR800 et 12K,

19 cela voulait simplement dire qu'à Djakovica, le centre de transmission, ils

20 avaient seulement 12 canaux.

21 Q. Bien. Mais avant que nous ne laissions ce document de côté, juste pour

22 en revenir à la question que je vous ai posée précédemment au sujet du

23 général Ojdanic, qui disait qu'il ne pouvait pas être là avec vous dans le

24 collègue tout le temps parce qu'il était membre de l'état-major du

25 commandement Suprême. Où se retrouvaient-ils ? Où se réunissaient-ils ?

26 Etaient-ils dans le même bâtiment ou était-ce de l'autre côté de la rue, si

27 vous le savez, à quelle distance ?

28 R. Parfois, ils étaient dans le même bâtiment que nous, et je n'ai aucune

Page 16429

1 idée où ils allaient, quand et s'ils quittaient le bâtiment.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Général, la question qui vous a été

3 posée il y a quelques instants au sujet de Djakovica en référence aux 606

4 canaux de transmission et aux 531 qui étaient encore utilisables, à quoi

5 cela fait-il référence ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela concerne un nombre de canaux que l'état-

7 major du commandement Suprême avait face aux unités subalternes dans leur

8 ensemble. A Djakovica, il n'y avait dans le centre qu'en tout 12 canaux, et

9 ces 12 canaux ont été détruits, mais non pas 600, dont les 531 seraient

10 toujours opérationnels. Djakovica est une petite caserne, trop petite pour

11 compter autant de canaux.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

13 M. HANNIS : [interprétation] Merci.

14 Q. Général, je vous en prie, M. Cepic vous a également demandé s'il était

15 en droit de dire que dans leur ensemble les voies de communication entre le

16 commandement du Corps de Pristina et les unités dans la zone de Pristina,

17 au sens large du terme, ont été interrompues, et vous avez dit : "Oui." A

18 mon sens, cela veut dire qu'il n'y avait plus de communication, mais de

19 quel laps de temps nous parlons ? Il s'agit d'une journée, d'une semaine ?

20 Est-ce que cela s'est produit une fois, à plusieurs reprises ? Lorsqu'il y

21 a "interruption" ou "coupure," lorsqu'il n'y a plus de communication, ou

22 lorsqu'il y a perturbation dans les communications, qu'est-ce que cela

23 signifie ?

24 R. Il y a eu une fois une interruption, mais là nous avons parlé des axes

25 vers les unités subalternes. Lorsqu'on a détruit le centre, on a détruit le

26 centre d'où partaient les communications et les unités subalternes avec qui

27 il n'y avait plus de communication. Mais je ne sais pas combien de fois

28 parce que ça ne relevait pas de mes compétences. A ce niveau de

Page 16430

1 commandement, c'est le corps d'armée. Je ne sais pas comment ils ont réagi,

2 je ne sais pas comment ils ont rétabli les communications.

3 Q. Est-ce que vous pouvez nous citer un exemple de ces perturbations ?

4 Est-ce qu'à un moment il y a eu un effondrement total de la chaîne de

5 commandement et de contrôle au sein du Corps de Pristina vers ces unités

6 subalternes ?

7 R. J'avais des informations à plusieurs reprises. Il y a eu interruption

8 de contacts entre le commandement du Corps de Pristina et les unités

9 subalternes. Je ne peux pas vous dire exactement combien de temps ça a

10 duré, mais j'ai compris qu'entre le commandement de l'armée et le Corps de

11 Pristina il y a eu interruption de communication. Quant à des

12 communications vers les unités subalternes, sur la base des informations

13 fournies par le

14 52e centre de communication, j'ai appris ces interruptions, mais je ne sais

15 pas combien de temps ça a pris. On nous a demandé d'apporter des renforts

16 en équipement et on les a envoyés, on a envoyé ces appareils, mais il faut

17 un petit peu de temps pour que ça arrive. Une journée ou deux, ça arrive

18 d'un entrepôt donné, là où c'est nécessaire.

19 Q. Me Cepic vous a également interrogé au sujet de la pièce 5D208, qui

20 porte la date du 7 avril 1999, et qui parle de l'attaque aérienne contre le

21 bureau de poste de Pristina et les dégâts qui ont été faits sur des

22 systèmes de communication de la VJ, et il y a eu une interruption de

23 communication avec certaines portions et certaines unités du Corps de

24 Pristina. Combien de temps est-ce que cela a duré, s'agissant de cet

25 événement en particulier, le savez-vous ? C'est quelque chose qui était

26 provisoire ?

27 R. Mais encore une fois, je ne peux pas vous dire combien de temps ça a

28 pris. Je n'ai pas ces informations-là. Je sais quand ça s'est produit. Ce

Page 16431

1 sont les communications par câble qui ont été coupées, donc il a fallu

2 créer des by-pass. Je ne sais pas combien de temps ça a pris. Je ne sais

3 plus quelle a été la portée des dégâts au bureau de poste de Pristina.

4 Q. [aucune interprétation]

5 R. [aucune interprétation]

6 Q. Vous aviez terminé ? Excusez-moi, je crois que je vous ai interrompu.

7 R. Non, non, j'avais terminé.

8 Q. Je crois que vous en conviendriez avec nous pour dire qu'en temps de

9 guerre il est naturel on peut s'attendre à ce que ce genre d'interruption

10 se produise sur le plan des communications; c'est exact ?

11 R. Oui, c'est normal. On est en droit de s'attendre à ce genre de chose.

12 Q. On a des plans prévus d'avance pour remédier à cela. Peut-être que cela

13 ne se situe pas au même niveau, donc les systèmes qui viennent remplacer ne

14 sont peut-être pas de la même qualité que ce qu'on pourrait souhaiter, mais

15 vous avez des plans et des méthodes pour préserver un minimum de

16 communication de base ?

17 R. Oui. Avant que les bombardements ne commencent, on a procédé à une

18 évaluation détaillée, on a anticipé sur les cibles les plus probables de

19 bombardement, donc nous avons créé des réserves en effectifs et en

20 équipement. Si tel ou tel site était touché, immédiatement on allait puiser

21 dans les réserves pour installer de nouveaux équipements, de nouveaux

22 appareils. En fonction du temps qu'il fallait pour les installer, une

23 interruption de communication pouvait durer plus ou moins longtemps.

24 Q. Monsieur, le 7 avril, à peu près 500 000 Albanais kosovars avaient déjà

25 été chassés du Kosovo vers l'Albanie et la Macédoine. Le saviez-vous ?

26 R. Mais je ne dirais pas qu'on les a "chassés." Je ne sais pas combien de

27 personnes sont parties, mais ils sont partis de leur propre chef. Personne

28 ne les a jetés dehors. Ils avaient peur des frappes aériennes.

Page 16432

1 Q. Certains sont venus déposer ici et ils ont dit qu'ils sont partis,

2 parce qu'on avait tué des membres de leur famille en leur présence et qu'on

3 les menaçait d'armes à feu, et que c'étaient des soldats ou des policiers

4 des forces de sécurité serbes qui les forçaient à partir en Albanie, ou

5 parfois à Pristina on les a fait monter à bord des trains qui partaient

6 vers la Macédoine. Vous êtes au courant de cela, n'est-ce pas ?

7 R. Je sais qu'il y a eu des gens qui ont perdu la vie au Kosovo. Il ne

8 s'agit cependant pas seulement de Siptars. Pourquoi ne donne-t-on pas le

9 chiffre des Serbes qui ont été tués ou internés. Je ne dis pas qu'on n'ait

10 pas menacé à bout portant des gens, ça a pu se produire, mais ce n'était

11 pas quelque chose qui était généralement répandu. C'étaient des cas isolés.

12 Q. C'étaient des centaines de milliers de cas isolés ?

13 R. C'est le chiffre que vous citez, vous. Je n'ai pas les chiffres qui se

14 montent à des centaines de milliers. Ça dépend de l'angle de vue.

15 Q. Très bien. Général, connaissiez-vous un organe qui d'après la thèse de

16 l'Accusation a existé en 1998 et 1999, et qui s'appelait le commandement

17 conjoint pour le Kosovo-Metohija ?

18 R. J'ai entendu parler de ce commandement conjoint, mais en toute

19 responsabilité je dois vous affirmer que ce commandement, à savoir cet

20 organe ne m'est absolument pas connu. Je ne sais pas qui a fait partie de

21 ce commandement, qui était à la tête, le chef de ce commandement, qui

22 assurait les transmissions pour ce commandement, qui étaient les

23 subalternes et les supérieurs de ce commandement. Normalement je devrais

24 connaître toutes ces informations, or je les ignore toutes.

25 Q. Voyons maintenant la pièce P1487. Ce document comporte une page,

26 Général, il porte la date du 17 mai [comme interprété] 1999 ?

27 R. Oui.

28 Q. Vous verrez qu'il provient de l'état-major du commandement Suprême, de

Page 16433

1 son département des opérations, adressé au commandement de la 3e Armée, à

2 remettre directement au commandant de la 3e Armée, à l'époque c'était le

3 général Pavkovic. Et nous avons des suggestions qui proviennent du général

4 Ojdanic. Vous voyez une ligne où il est dit : "Relier l'ordre du

5 commandement conjoint pour le Kosovo-Metohija, ordre strictement

6 confidentiel sous le numéro 455-148, du 15 avril 1999." Est-ce que vous

7 voyez cela ?

8 R. Oui.

9 Q. Vous avez déjà eu l'occasion de voir ce document avant aujourd'hui ?

10 R. Non.

11 Q. Vous voyez que l'on se réfère ici à un ordre précis émanant du

12 commandement conjoint, et vous voyez qu'il y a des suggestions formulées

13 par le général Ojdanic, et d'après ce que j'ai compris, c'était l'officier

14 le plus haut gradé dans les rangs de l'armée de la Yougoslavie de l'époque.

15 Est-ce que vous pouvez nous dire comment cela s'explique, pourquoi est-ce

16 qu'il faisait des suggestions au sujet d'un ordre qui aurait été émis par

17 un autre organe qui s'appelle le commandement conjoint. Ne devrait-il pas

18 leur ordonner des choses et ne pas faire des suggestions ?

19 R. Cela veut dire que cet organe n'était pas supérieur par rapport au

20 général Ojdanic, donc il n'était pas leur subalterne. Il n'avait pas le

21 droit de leur donner d'ordre, c'est la raison pour laquelle il leur donne

22 des suggestions. Et cet organe n'avait pas le droit de commander l'armée de

23 la Yougoslavie ou les forces au Kosovo.

24 Q. Mais il semblerait que cet ordre se réfère à un ordre en fonction

25 duquel le général Pavkovic, le commandant de la 3e Armée, devrait faire

26 quelque chose, et le général Ojdanic dans ce document semble faire des

27 suggestions au commandement conjoint, mais il ne -- qu'est-ce que doit

28 faire le général Pavkovic dans ce genre de situation, est-ce qu'il doit

Page 16434

1 exécuter l'ordre du commandement conjoint ou il doit se conformer aux

2 suggestions formulées par son supérieur, le général Ojdanic ?

3 R. Il doit dans tous les cas obéir ou écouter les suggestions de son

4 supérieur.

5 Q. Mais compte tenu de cette situation en l'occurrence, qui est-ce qui est

6 son supérieur, le général Ojdanic ou le commandement conjoint pour le

7 Kosovo-Metohija ?

8 R. Le général Ojdanic était le supérieur du commandement de l'armée,

9 d'après l'ordre du commandant supérieur. Donc le général Ojdanic était le

10 supérieur du commandement de la 3e Armée, ce n'était nullement ce

11 commandement conjoint pour le Kosovo-Metohija.

12 Q. Très bien, Monsieur. Mais je vous soumets que vous ne le savez pas,

13 puisque vous nous avez dit que vous ne saviez rien du commandement

14 conjoint. Est-ce que vous admettriez que M. Milosevic, le commandant

15 suprême, a créé cet organe appelé le commandement conjoint et qu'il lui a

16 conféré des attributions ?

17 R. Je n'exclus pas cette possibilité.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Andjelkovic, les interprètes

19 ne vous ont pas entendu, est-ce que vous pouvez répéter votre réponse.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, M. le Procureur m'a demandé si

21 j'admettais la possibilité que M. Milosevic ait créé ce genre d'organe et

22 qu'il ait transmis un certain nombre de responsabilités ou de pouvoirs à

23 cet organe. J'ai dit que je n'excluais pas cette possibilité. J'ai dit que

24 c'était possible.

25 M. HANNIS : [interprétation]

26 Q. Général, le 4 mars 1999, la réunion du collège, il s'agit de la pièce

27 P933. Je vais vous inviter à examiner la dernière page en version serbe.

28 R. Oui.

Page 16435

1 Q. L'avez-vous ?

2 R. Un instant, je l'ai en anglais. Oui, j'ai trouvé.

3 Q. Est-ce que vous voulez bien trouver le paragraphe où vous parlez ?

4 R. Oui.

5 Q. Je voudrais juste lire l'intervenant précédent. Vous verrez que c'est

6 le général Marjanovic qui était votre adjoint, et vous présidez cette

7 réunion. Il dit : "Je demanderais à Ljubo qui a pris l'obligation en tant

8 que quatrième mission d'écrire un ordre pour démanteler le commandement de

9 l'unité spéciale."

10 Est-ce qu'il se réfère à vous lorsqu'il parle de Ljubo ?

11 R. Non, ce n'est pas moi. Je n'avais pas l'autorité d'écrire ce genre de

12 choses ou d'émettre ce genre d'ordres.

13 Q. Très bien. Mais c'est vous qui prenez la parole par la suite, et vous

14 parlez des demandes de la part du Corps de Pristina et des effectifs de la

15 3e Armée. Est-ce que vous savez --

16 R. Oui, je suis celui qui parle par la suite, mais il y a d'autres

17 personnes qui s'appellent Ljubo, il n'y a pas que moi. Je peux vous

18 commenter le dernier paragraphe, mais ce qui précède, ça ne me concerne

19 pas, c'est certain.

20 Q. Est-ce que vous sauriez qui serait cette personne qui rédigerait cet

21 ordre afin de démanteler une unité ?

22 R. Les ordres étaient rédigés par la direction opérationnelle.

23 L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète : les voix se chevauchent.

24

25

26

27

28

Page 16436

1

2

3

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Tous les ordres provenaient du centre

5 opérationnel chargé des affaires de l'état-major. C'est peut-être le

6 général Obradovic, si je ne me trompe pas. Mais ça ne peut pas être moi.

7 M. HANNIS : [interprétation]

8 Q. Vous vous rappelez la décision ? Vous savez pourquoi le commandement de

9 l'unité spéciale a été démantelé ?

10 R. Non, je ne m'en souviens pas.

11 Q. Est-ce que vous voulez commenter ce que vous avez dit lors de cette

12 réunion au sujet des demandes d'obtenir du personnel -- la demande du Corps

13 de Pristina et la demande de la 3e Armée ?

14 R. Au moment des bombardements, des centres chargés de l'instruction et de

15 l'entraînement des soldats ont été créés. On envoyait un certain nombre de

16 soldats là-dedans et les soldats revenaient par la suite dans leurs unités

17 initiales. La 3e Armée a demandé un certain nombre de militaires et elle a

18 demandé d'augmenter ce nombre, autrement dit on aurait dû prélever les

19 effectifs dans les autres unités pour les affecter dans les rangs de la 3e

20 Armée.

21 Q. D'accord. Merci. Le dernier sujet sur lequel je voudrais vous poser des

22 questions se situe vers les dernières questions qui vous ont été posées par

23 Me Visnjic. Il vous a demandé si vous étiez au courant d'un plan qui aurait

24 été traduit dans les faits, à savoir que la VJ allait chasser la population

25 albanaise du Kosovo, et vous avez dit : "Non, je ne suis pas au courant de

26 l'existence de quelque chose de ce genre. Je peux affirmer avec certitude

27 que ce plan n'a jamais existé et que personne n'a jamais eu l'idée de

28 concevoir un tel plan."

Page 16437

1 Je vais vous demander : si personne n'a jamais eu l'idée de créer ça,

2 pourquoi est-ce qu'il a été nécessaire de émettre autant d'ordres

3 enjoignant les effectifs à respecter le droit international humanitaire ?

4 R. Je ne sais pas combien d'ordres ont été émis, mais on a mis en garde

5 tous les militaires au début des opérations militaires. On leur a envoyé ce

6 genre d'instruction ou de mise en garde, mais c'est tout à fait naturel,

7 normal. On ne peut pas exclure, Monsieur Hannis, qu'il y ait des gens qui

8 manquent aux règles. Quand vous avez un grand nombre de soldats déployés

9 quelque part, ça peut se produire, mais ce genre de plan n'a pas existé.

10 Q. Est-ce que vous savez ce que Slobodan Milosevic aurait dit aux généraux

11 Naumann et Clark en octobre 1998, lorsqu'ils ont signé leur accord, ce

12 qu'il a proposé, comment il fallait résoudre la question kosovare au

13 printemps 1999, à savoir qu'il fallait prendre les Albanais et leur tirer

14 dessus, comme cela a été fait à Drenica en 1945 et 1946. Est-ce que vous

15 êtes au courant de cela ?

16 M. HANNIS : [aucune interprétation]

17 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]

18 M. VISNJIC : [interprétation] Je pense que l'on cite de manière erronée à

19 l'attention du témoin. Je pense que M. Hannis sait quelle est la portion

20 qui est inexacte. Je me réfère au printemps 1999.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne comprends pas.

22 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, d'après mon souvenir,

23 il a dit qu'il allait avoir une solution au printemps. Il se peut que je me

24 trompe là-dessus, mais il me semble qu'on a entendu des témoignages là-

25 dessus, le général Naumann, soit dans sa déclaration, soit dans son

26 témoignage.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous dites que c'est erroné, Maître

28 Visnjic.

Page 16438

1 M. VISNJIC : [interprétation] Le printemps 1999 n'a pas été mentionné pour

2 autant que je m'en souvienne. Le reste ne me gêne pas. Je n'ai pas

3 d'objection.

4 M. HANNIS : [interprétation] Il se peut que je me trompe, parce que je

5 pense qu'il a dit en octobre "au printemps." Peut-être qu'il n'a pas dit au

6 printemps de 1999, mais il me semble qu'il a dit au printemps.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] De mémoire, j'aurais tendance à dire

8 que vous avez raison, Monsieur Hannis. Mais reformulez, s'il vous plaît.

9 M. HANNIS : [interprétation]

10 Q. Général, est-ce que vous avez jamais entendu cette allégation, à savoir

11 que M. Milosevic aurait dit à Clark et à Naumann qu'ils avait une solution

12 du problème kosovar dans les termes que je viens de citer, mais je ne me

13 réfère pas à l'année 1999 maintenant ?

14 R. C'est la première fois que je l'entends de votre bouche. Je ne suis pas

15 au courant de cela.

16 Q. Très bien. Si jamais ceci a été dit, comment est-ce que vous

17 expliqueriez le fait que jamais personne n'a songé à expulser les Albanais

18 kosovars ou à les tuer pour s'en débarrasser ?

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ne répondez pas à la question.

20 Avant que Me Visnjic ne s'y oppose, c'est une double hypothèse, Monsieur

21 Hannis.

22 M. HANNIS : [interprétation] Très bien.

23 Q. Général, je vais vous demander la chose suivante : vous êtes un expert

24 dans le domaine des transmissions, mais vous n'êtes pas quelqu'un qui peut

25 deviner ce que pensent les gens. Donc vous ne savez pas ce qui était à

26 l'esprit de tout un chacun haut placé au sein de l'armée et du MUP, n'est-

27 ce pas ?

28 R. Monsieur, lorsque je vous ai dit que ce plan n'a pas existé et que

Page 16439

1 jamais ce n'est venu à l'esprit de personne, ce genre de choses ressort des

2 réunions collégiales où j'étais présent. Je vous parle des échelons les

3 plus élevés de l'armée. Quant à savoir à quoi songeaient les citoyens et à

4 ce que pensaient d'autres personnes, vous avez raison. Je ne peux pas lire

5 les pensées des autres.

6 Q. Général, vous ne pensiez pas savoir ce qui était à l'esprit de tout un

7 chacun dans les rangs de la VJ en 1998 et 1999, n'est-ce pas ?

8 R. L'armée de Yougoslavie ne compte pas 18 personnes, elle en compte

9 plusieurs centaines de milliers. Je vous parle au nom du collège, Monsieur.

10 C'est de cela que je parle.

11 M. HANNIS : [interprétation] Je vous remercie. Monsieur le Président, je

12 n'ai plus de questions.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Hannis.

14 M. CEPIC : [interprétation] Juste une correction du compte rendu

15 d'audience, page 54, ligne 5. Il me semble que le témoin a dit également :

16 "A l'extérieur de l'armée." "Je ne sais pas ce que les gens pensent, les

17 gens qui ne font pas partie de l'armée.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

19 Maître Fila.

20 M. FILA : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre autorisation,

21 est-ce qu'on peut explorer un petit peu plus en avant cette spéculation de

22 M. Hannis ? Est-ce que Milosevic aurait créé une commission à laquelle il

23 aurait transféré certains pouvoirs. Le témoin n'a pas exclu cette

24 possibilité en répondant à la question sous cette forme-là. Si vous m'y

25 autorisez, je voudrais explorer cela un peu davantage. C'est l'année 1999,

26 nous parlons du commandement conjoint. Le témoin a été d'une certaine

27 manière orienté par cette question. Si vous m'y autorisez, je voudrais

28 poser quelques questions de suivi au témoin.

Page 16440

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

12 versions anglaise et française

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

26

27

28

Page 16441

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous parlez de quelle ligne ?

2 M. FILA : [interprétation] Page 48, ligne --

3 L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine française n'entend pas. Il y a

4 trop de bruit dans le prétoire.

5 M. FILA : [interprétation] La réponse se trouve page 49,

6 ligne 7, et la question, page 48, ligne 20. Donc c'est une réponse typique.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, est-ce que cela vous

8 pose problème ?

9 M. HANNIS : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

11 Allez-y, Maître Fila.

12 Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Fila :

13 Q. [interprétation] Bonjour, Mon Général. Je suis Toma Fila, je représente

14 ici Nikola Sainovic, et malheureusement je vais devoir vous poser quelques

15 questions.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur Fila.

17 Q. Vous avez dit que admettiez la possibilité que M. Milosevic ait

18 constitué un commandement conjoint et qu'il ait transféré certaines

19 attributions à ce commandement. C'est ce que vous avez répondu à une

20 question posée par M. Hannis. D'après vous, cette chose aurait-elle existé

21 ou c'est de la pure conjecture de votre part ?

22 R. Mais je n'ai absolument jamais eu la moindre idée que ce genre de chose

23 était créé ou ait existé, quelque chose de ce type-là. Je n'en sais rien.

24 Q. Très bien. Alors, sur la base de vos postes occupés au sein de l'armée

25 en 1998 et 1999, y compris pendant la période de la guerre, est-ce que vous

26 avez jamais remarqué que la chaîne de commandement n'ait pas fonctionné

27 correctement, où que ce soit, y compris dans le domaine de transmission où

28 vous travailliez, mais ailleurs également ?

Page 16442

1 R. Pour ce qui est de l'armée de Yougoslavie, je n'ai pas remarqué cela.

2 Il n'y a eu aucune entrave, aucune difficulté dans la chaîne de

3 commandement lorsqu'on parle de l'armée, au sens strict du terme.

4 Q. Oui. Nous venons de nous lancer dans des hypothèses. Alors, dites-nous

5 ?

6 [Le conseil de la Défense se concerte]

7 M. FILA : [interprétation]

8 Q. Vous aviez remarqué si jamais un commandement conjoint, pendant la

9 guerre, voire même en 1998, était devenu un organe supérieur de l'organe du

10 général Ojdanic et de vous ? Pas ipso facto. Est-ce que vous auriez pu ne

11 pas le remarquer, l'existence de cet organe ?

12 R. Non. Mais c'était absolument impossible et ça ne s'est pas produit.

13 Q. Merci. Auriez-vous pu remarquer que d'autres civils hormis M. Slobodan

14 Milosevic qui, d'une certaine façon, était civil mais il était surtout le

15 commandant Suprême de la VJ en temps de paix et en temps de guerre, que

16 donc d'autres civils quels qu'ils soient aient pu donner des ordres au

17 général Ojdanic ? L'avez-vous jamais

18 remarqué ?

19 R. Non, jamais, hormis le président Milosevic.

20 Q. Et d'autres officiers et subalternes qui donneraient des ordres à une

21 armée --

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, nous vous faisons une fleur

23 en vous accordant la possibilité de poser une question supplémentaire. Vous

24 poussez le bouchon un peu trop loin, peut-être, Maître.

25 M. FILA : [interprétation] J'avais, Monsieur le Président, la même

26 impression que le témoin, c'est pourquoi je m'en arrêterai là.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

28 Maître Visnjic, je crois que nous allons faire une pause bientôt.

Page 16443

1 M. VISNJIC : [interprétation] Il me reste deux questions à poser et nous

2 pourrons nous arrêter.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

4 Nouvel interrogatoire par M. Visnjic :

5 Q. [interprétation] Mon Général, l'Accusation vous a posé la question à

6 savoir si l'OTAN était en contact avec l'UCK dès 1998. On vous a demandé

7 quelle langue aurait pu être utilisée. Vous avez répondu en disant que

8 c'était l'anglais et l'albanais. Ma question est la suivante : quel type

9 d'information faisait l'objet de l'échange ?

10 R. Pour la plupart, c'était des informations qui traitaient de la position

11 de nos unités et leurs mouvements, de même que des commentaires sur les

12 équipements et le matériel que l'UCK, ou plus exactement les groupes

13 terroristes étaient.

14 Q. Très bien. Mon Général, qui aurait pu avoir cette information, qui

15 aurait pu connaître cette information, d'après

16 vous ?

17 R. Comment ça qui ? Est-ce que votre question est de savoir qui aurait pu

18 avoir une telle information ou qui détenait telle information une fois

19 qu'elle avait été diffusée, obtenue et

20 diffusée ?

21 Q. Ma question était la suivante : qui aurait pu avoir accès à cette

22 information ?

23 R. Le service de Renseignements l'aurait eue. Nous obtenions l'information

24 et nous la transmettions au service d'information et ils la traitaient et

25 l'utilisaient comme cela leur semblait pertinent. Quant à l'UCK, elle

26 diffusait ses informations à ses unités sur le terrain.

27 Q. Merci. Une dernière question si vous me le permettez.

28 M. Hannis a réduit la liste de personnes qui auraient pu - et dont vous

Page 16444

1 avez dit que ce n'était pas le cas - avoir l'intention d'expulser les

2 Albanais. Est-ce que le général Ojdanic faisait partie de ce groupe ?

3 R. Mais évidemment.

4 M. VISNJIC : [interprétation] Très bien. Merci. Monsieur le Président, je

5 n'ai plus de questions.

6 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Andjelkovic, nous en arrivons

8 donc à la fin de votre témoignage et de votre déposition.

9 Merci. Vous aurez la possibilité de quitter les lieux où nous nous trouvons

10 dès que nous aurons quitté le prétoire, et nous reprendrons à 13 heures 15.

11 [Le témoin se retire]

12 [Fin de la déposition du témoin par vidéoconférence]

13 --- L'audience est suspendue à 11 heures 50.

14 --- L'audience est reprise à 13 heures 47.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mes excuses à vous tous pour les

16 changements d'horaire qui ont été causés par la réunion à laquelle nous

17 avons assistée qui a duré plus que nous ne pensions. Nous allons donc

18 maintenant essayer de faire de notre mieux pour essayer de compenser dans

19 la mesure du possible.

20 Donc, Maître Visnjic, si vous voulez ajouter encore une heure à ce

21 que nous avons aujourd'hui, il suffit de nous le dire.

22 Votre témoin suivant, s'il vous plaît.

23 M. VISNJIC : [interprétation] Monsieur le Président, Mesdames, Monsieur les

24 Juges, notre témoin suivant est Nedjo Danilovic. Mais puis-je simplement

25 m'adresser aux Juges de la Cour très brièvement avant que le témoin ne

26 commence son témoignage. Peut-on demander au témoin de quitter le prétoire

27 s'il vous plaît, brièvement.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, s'il vous plaît, avez-vous un

Page 16445

1 problème que vous souhaitez soulever en son absence ?

2 M. VISNJIC : [interprétation] Oui.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Danilovic, nous pensions

4 pouvoir commencer sans plus tarder, mais il y une question de droit dont

5 nous devons traiter, donc je vous demandais si vous voulez bien quitter le

6 prétoire brièvement s'il vous plaît.

7 Oui, Maître Visnjic.

8 [Le témoin quitte la barre]

9 M. VISNJIC : [interprétation] Monsieur le Président, Mesdames, Monsieur es

10 Juges. Tout d'abord et ce qui est le plus important, étant donné qu'il y a

11 différentes indications qui sont, on peut dire que l'Accusation pourrait

12 soulever une objection, et aussi, d'après ce que vous avez dit au sujet de

13 Novkovic, ceci a trait au témoin. Nous avons examiné le résumé et nous

14 avons décidé de réduire son témoignage, considérablement en fait. Cela aura

15 trait aux questions suivantes…

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Visnjic, vous pouvez toujours

17 le faire, à n'importe lequel moment réduire le témoignage d'un témoin à

18 n'importe quel moment. Ce n'est pas la peine de le dire à l'avance si tout

19 le monde doit le savoir, si quelqu'un doit le savoir c'est M. Hannis, mais

20 je ne crois pas que nous devons passer du temps à ça maintenant.

21 M. VISNJIC : [interprétation] Tant que le témoin attend en dehors du

22 prétoire, il y a une autre question que je voudrais soulever. Ce n'est pas

23 au sujet de ce témoin, mais j'aimerais profiter de l'occasion de dire cela.

24 M. Hannis a proposé que notre expert apparaisse en fin de procès,

25 avec les autres experts --

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons soulever cela à la fin de

27 la journée avec les questions qui ont trait à aujourd'hui. Donc vous avez

28 ajouté un témoin cette semaine. Est-ce qu'il s'appelle Petkovic ?

Page 16446

1 M. VISNJIC : [interprétation] Oui c'est ça, Monsieur le Président.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il était difficile de comprendre de

3 premier abord quelle était la question dont il fallait traiter dans ce

4 témoignage. Mais si vous demandiez à M. Hannis s'il a accepté et que l'OTAN

5 a changé de position quant à l'usage de certaines armes, vous pourriez

6 obtenir une réponse. Je ne sais pas la manière sûre, mais vous pourriez

7 obtenir une réponse qui rend son témoignage redondant. Et vous pouvez lui

8 demander si ces armes incluaient des bombes à fragmentation et de

9 l'uranium. Vous pourriez aussi obtenir une réponse qui permettrait de

10 réduire le témoignage. Par ailleurs, vous pourriez tout aussi bien ne pas

11 recevoir de réponse. Je ne suis pas en train de dire que cela est sûr. Nous

12 ne sommes pas ici, comme vous le savez, pour traiter de la conduite de

13 l'OTAN, ce qu'elle a fait de bien, ce que l'OTAN a fait de bien ou de mal.

14 Nous sommes seulement ici pour traiter de la conduite de l'OTAN dans la

15 mesure où elle a une implication ou a une incidence sur les questions en

16 cours dans ce procès tel que le mouvement de population.

17 Donc réfléchissez quant à savoir si le témoignage obtenu de ce témoin est

18 nécessaire ou non.

19 Nous pouvons faire entrer M. Danilovic.

20 [Le témoin vient à la barre]

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Danilovic, nous avons

22 traité les questions qui ont été soulevées. Pourriez-vous maintenant donner

23 lecture de la déclaration solennelle qui est de dire la vérité en lisant le

24 document qui va vous être présenté.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

26 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

27 LE TÉMOIN: NEDJO DANILOVIC [Assermenté]

28 [Le témoin répond par l'interprète]

Page 16447

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous allez maintenant être interrogé

4 par Me Visnjic qui représente M. Ojdanic.

5 Interrogatoire principal par M. Visnjic :

6 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur.

7 R. Bonjour.

8 Q. Pourriez-vous nous donner une brève description de votre carrière

9 militaire, et en particulier détailler au Juges de la Chambre vos

10 différentes responsabilités en 1999.

11 R. Après avoir terminé mon éducation secondaire, j'ai rejoins l'académie

12 militaire. J'étais le troisième meilleur étudiant. J'étais le mieux placé

13 dans l'académie qui enseignait les questions de sécurité. En 1992 j'ai

14 obtenu le diplôme d'état-major de l'académie de la JNA. J'ai été lieutenant

15 de la JNA. J'ai obtenu mon degré de "Master" en Sciences politiques, et

16 j'ai obtenu mon doctorat, Ph.D. à l'académie militaire de la VJ. Ensuite un

17 autre Ph.D. doctorat de la Faculté de Sciences politiques de Belgrade au

18 début de 2005 à la JNA, et plus tard au sein de la VJ j'ai assuré un

19 certain nombre de postes. J'ai commencé par commandant de section, j'ai

20 terminé par commandant adjoint de l'armée durant mon travail au sein de

21 l'état-major. J'étais chef du département d'éthique, et ensuite chef

22 d'études stratégiques et de politique de défense. A l'époque des frappes

23 aériennes contre la FRY, le chef d'état-major du commandement Suprême a

24 introduit une demande le 1er janvier 1999 pour que je devienne chef du

25 département d'éthique de l'état-major de la VJ. Maintenant, je suis un

26 colonel en retraite. J'ai pris ma retraite l'année dernière et j'enseigne

27 maintenant à la première université privée américaine de Bijeljina. Je suis

28 le chef du département de sécurité de la faculté de droit et le directeur

Page 16448

1 général de cette université.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quand avez-vous obtenu votre doctorat

3 de l'académie militaire de la VJ ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 18 février 2002.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

6 Maître Visnjic.

7 M. VISNJIC : [interprétation] Merci.

8 Q. Vous étiez - je regarde le document - responsable ou chef du

9 département de moral des troupes en 1999; est-ce exact ? Que faisait votre

10 département, brièvement ?

11 R. Le département responsable du moral des troupes de l'état-major du

12 commandement Suprême était organisé sur l'organisation en temps de guerre

13 et il était destiné essentiellement à former les membres de l'armée à

14 surveiller et à évaluer constamment le moral des troupes durant les frappes

15 aériennes pour préparer les soldats physiologiquement pour ce qui était du

16 moral des troupes à affronter les difficultés avec lesquelles ils étaient

17 confrontés. Une autre tâche importante de notre département était de tirer

18 parti de la situation sociale différente pour appliquer différentes

19 questions scientifiques et étudier le comportement des personnes en

20 conditions difficiles.

21 Q. Merci beaucoup. Cet échange d'information, ce système d'information

22 interne, dans ce cadre-là, c'est-à-dire au sein de l'armée, y avait-il un

23 domaine qui traitait ou qui comprenait des phénomènes négatifs, ou plutôt,

24 des informations sur des crimes et des violations du droit international

25 commis par les membres de la VJ ?

26 R. Une des tâches du département d'information interne, mais pas la seule,

27 était de surveiller les soldats et les membres des unités, ainsi que des

28 commandements, de les garder informés de la situation au sein de leur

Page 16449

1 unité. Ceci est le troisième élément de la responsabilité de l'information

2 interne, informer les soldats sur la situation dans leur unité. Ceci aussi

3 traitait des phénomènes négatifs, tous phénomènes négatifs ou éléments

4 négatifs qui auraient pu se produire au cours des jours précédents dans la

5 zone de responsabilité d'une unité spécifique. Donc si un des membres d'une

6 unité particulière avait commis des actions négatives ou avait participé

7 dans certaines des actions négatives qui avaient constitué un crime, ceci

8 était lu devant toutes les unités et entendu par tout le monde. C'était

9 basé sur des cas individuels, et des avertissements étaient donnés aux

10 autres disant que de telles actions ou violations seraient punies.

11 Q. Maintenant laissons passer au dernier domaine. Je crois que vous avez

12 mentionné l'application de méthodes scientifiques dans l'étude du

13 comportement humain en conditions ou en situations difficiles. Est-il vrai

14 que vous avez mené différentes campagnes de recherche, c'est-à-dire votre

15 institut, durant la guerre ? Certaines méthodes scientifiques ont été

16 utilisées, des enquêtes ont été faites quant au moral des troupes de

17 combat. Pourriez-vous nous dire quels étaient les éléments que vous avez

18 étudiés ?

19 R. Oui, c'est vrai, un ordre a été donné par le chef d'état-major du

20 commandement Suprême, et nous avons lancé deux enquêtes empiriques. Nous

21 avons étudié tout le monde au sein de la VJ, mais on s'était concentré sur

22 la 3e Armée. La première campagne d'investigation était lancée entre le 16

23 et le 26 avril 1999, et 1 200 sujets ont été étudiés. On s'est concentré

24 sur la 3e Armée, en particulier sur le Corps de Pristina. L'échantillonnage

25 était environ de 40 %.

26 Q. [aucune interprétation]

27 R. Une autre étude a été menée à la fin des frappes aériennes après la

28 signature de l'accord de Kumanovo, et l'échantillonnage qui était utilisé

Page 16450

1 était de 1 600 individus. On s'est concentré encore une fois sur la 3e

2 Armée, le Corps de Pristina. Le pourcentage de 50,2 % était constitué des

3 membres de la 3e Armée.

4 Q. Voulez-vous maintenant examiner la pièce 3D7773, de la Défense.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Que voulez-vous dire quand vous parlez

6 de pourcentage ? Par rapport à l'étude menée en avril, vous avez dit que

7 l'échantillonnage était environ de 40 %, 40 % de quoi ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je parle de l'échantillonnage total par

9 rapport aux membres de l'armée qui ont été interviewés. Ensuite, le sous-

10 échantillon qui appartenait à la 3e Armée était de 40,2 %. La raison était

11 que la 3e Armée était au cœur des opérations de combat. Ils se trouvaient

12 vraiment au centre du théâtre de guerre et ils souffraient les attaques les

13 plus violentes des avions de l'OTAN. C'était dans ces conditions-là que

14 nous voulions mesurer l'état d'esprit des gens. Le chef d'état-major avait

15 un intérêt particulier pour ces résultats de manière à pouvoir prendre des

16 décisions bien informées pour savoir comment utiliser les soldats à partir

17 de là.

18 M. VISNJIC : [interprétation] La pièce 3D733, s'il vous plaît.

19 Q. Colonel, quel est ce document ? Il s'agit des états intitulés positions

20 et opinions du Corps de Pristina concernant certains indicateurs sur le

21 moral des troupes au combat.

22 R. C'est un des rapports militaires qui fait état des résultats obtenus

23 par la recherche. Il s'agit des membres du Corps de Pristina. Nous avons

24 utilisé les résultats préliminaires et nous les avons appliqués à

25 l'échantillonnage général. Pour ce qui est des résultats de cette

26 recherche, à la suite d'un ordre donné par le chef de l'état-major du

27 commandement Suprême, j'ai informé le commandement Suprême une fois que la

28 recherche était terminée. Nous avons décidé de traiter chaque

Page 16451

1 échantillonnage et sous-échantillonnage à la

2 3e Armée et du Corps de Pristina, ensuite il y avait un rapport spécial

3 préliminaire par rapport à chacun de ces individus avec lesquels nous

4 pourrions traiter avec tous les officiers de chaque corps, que nous

5 pourrions utiliser pour diriger leur travail quant aux décisions

6 ultérieures et quant à l'affectation de leurs unités.

7 Q. Si vous regardez le tableau à gauche, on voit là les responsabilités,

8 et ceci reflète la structure de l'échantillonnage qui a été interviewé,

9 ensuite le contexte social des individus interviewés.

10 R. Si vous regardez ce tableau, y compris l'échantillonnage, on voit que

11 l'échantillonnage comprenait les soldats à 37 %, les officiers à 17,3 %, et

12 des réservistes qui représentaient 45,7 %.

13 Q. Merci, Colonel. Passons à la page 4 du document maintenant. Avant que

14 cela n'apparaisse sur le prétoire électronique, c'est-à-dire la page 4,

15 pourriez-vous nous dire comment cette recherche a été menée ?

16 R. Pendant qu'il préparait cette recherche, l'assistant qui était

17 enregistré était le plus grand expert de psychologie sociale et de

18 recherches sociales de la faculté de Belgrade. Ça fait partie de

19 l'Université de Belgrade. J'ai essayé de rassembler une équipe autour de

20 moi d'experts éminents dans le domaine de la psychologie sociale pour que

21 nous puissions décider ensemble quel allait être l'instrument, un

22 instrument que nous pourrions utiliser pour mesurer ce que nous voulions

23 mesurer, c'est-à-dire ce qui reflétait les demandes qui nous avaient été

24 exprimées par le chef d'état-major du commandement Suprême. Un

25 questionnaire a été élaboré. Il a été vérifié avant d'être appliqué sur le

26 terrain. Un échantillonnage test a été utilisé avec les variables qui ont

27 été mesurées avec des caractéristiques mesurables, qui nous permettaient de

28 conclure que nous pouvions continuer puis l'utiliser comme un instrument

Page 16452

1 scientifique pour mesurer les positions, les attitudes et les convictions

2 des membres de l'armée.

3 Q. Si je vous comprends bien, cette recherche a été menée sur base d'un

4 questionnaire ou des questionnaires auxquels ont répondu les soldats

5 interviewés ?

6 R. Le questionnaire contenait 67 variables, avec des indicateurs qui

7 pouvaient varier de 1 à 4, et parfois de 1 à 5. Il y avait environ 1 000

8 indicateurs qui permettaient de mesurer le moral des troupes au combat, les

9 membres de l'armée. Nous avons mesuré et vérifié les attitudes et les

10 positions des membres de l'armée durant les frappes aériennes de l'OTAN.

11 Q. Pourriez-vous nous dire un peu plus à fond ce que l'on voit sur la page

12 4 de ce document 3D733, et on voit que le titre en est : "Causes de la

13 peur." On voit plus particulièrement dans ce tableau un certain nombre de

14 chiffres. J'aimerais que vous nous disiez quelles sont les conclusions

15 auxquelles vous en êtes arrivés et quelles sont les sources potentielles de

16 peur et de la crainte ?

17 R. C'est justement un des éléments que nous avons utilisé pour mesurer les

18 attitudes des uns et des autres, voire l'état émotionnel des uns et des

19 autres et l'impact psychologique que cela pouvait avoir. Nous voyons ici à

20 l'écran, un tableau qui nous a permis de mesurer les sources de la peur et

21 l'intensité de cette crainte parmi les membres de la VJ pendant les

22 bombardements de l'OTAN. Comme vous le voyez ici, les membres du Corps de

23 Pristina avaient légèrement plus peur que la moyenne de l'échantillon.

24 C'est relativement normal, puisque le Corps de Pristina avait passé près

25 d'un an en zone de combat. La pression et la tension physique et morale

26 étaient plus grandes chez eux. Ils avaient d'ailleurs fait l'objet des

27 bombardements de l'OTAN. Comme vous le voyez ici, il y a plusieurs niveaux

28 de crainte, niveau 3 et 4, grande peur et très grande peur, et cela était

Page 16453

1 présent parmi 26 ou 27 % des membres du Corps de Pristina, alors que

2 l'échantillon général de la VJ avait moins peur --

3 Q. [aucune interprétation]

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Visnjic, pouvez-vous nous

5 dire exactement de quoi on parle et à quoi on s'intéresse ici ?

6 M. VISNJIC : [interprétation] J'allais justement arrêter le témoin et en

7 venir à ma question. Si vous me le permettez, Monsieur le Président, je

8 vais poser directement la question au témoin qui répondra donc à votre

9 question pour régler le problème.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Une question plus ou moins.

11 M. VISNJIC : [interprétation]

12 Q. A ce tableau, au point 3, on voit les bombardements de l'OTAN, on voit

13 que 23 % de l'échantillon général semblaient ressentir une certaine crainte

14 des bombardements de l'OTAN, 39 % dans le Corps de Pristina. Vous avez dit,

15 cher Monsieur, que les membres du Corps de Pristina avaient de bonnes

16 raisons de craindre plus encore les bombardements de l'OTAN puisqu'ils y

17 avaient été soumis.

18 Je souhaiterais vous poser la question suivante : étant donné votre

19 carrière en tant que militaire, en tant que chercheur - et vous en

20 arriverez peut-être à la même conclusion que moi - est-il possible qu'il y

21 ait des chiffres différents quant à l'intensité de la peur entre les civils

22 et les militaires quant à leur réaction par rapport à la réaction de l'OTAN

23 ?

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ne répondez pas à cette question. Vous

25 ne faites d'objection ?

26 M. HANNIS : [interprétation] Mais si, évidemment, je fais objection.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Sur quelle base voulez-vous que le

28 témoin réponde ? D'abord, c'est un témoin expert qui pourrait peut-être y

Page 16454

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

12 versions anglaise et française

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

26

27

28

Page 16455

1 répondre.

2 M. VISNJIC : [interprétation] Monsieur le Président, je crois, en fait, que

3 les experts ne peuvent pas seuls répondre à cette question. Nous avons eu

4 un certain nombre de témoins de l'Accusation qui ont dit qu'ils n'avaient

5 pas peur des bombardements de l'OTAN, et là, ici, nous sommes en train

6 d'essayer de proposer une des recherches scientifiques empiriques conduite

7 au sein de la VJ, de gens qui, en fait, auraient dû avoir un seuil de

8 résistance plus élevé --

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître, je crois que vous ne répondez

10 pas à ma question. Je repose la question. Quel est le fondement, la base

11 sur laquelle vous espérez demander au témoin de répondre à cette question ?

12 Pourquoi est-il plus qualifié à y répondre que moi ?

13 M. VISNJIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'est un militaire.

14 J'imagine qu'il a participé à la formation de militaires et qu'il les a

15 sans doute préparés à réagir à ces situations particulières. Dans ce cadre-

16 là, j'imagine qu'il pourrait être en mesure de nous expliquer la différence

17 d'impact de ce genre d'événement entre quelqu'un qui a été préparé à y

18 réagir et ceux qui n'ont pas été préparés.

19 [La Chambre de première instance se concerte]

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Visnjic, il ne nous semble pas

21 que vous avez exposé les bases de la question que vous souhaitez poser.

22 Nous ne vous permettrons donc pas d'obtenir du témoin un avis à cet égard.

23 Si le témoin avait mené une étude sur des populations albanaises ou s'il

24 avait des formulaires qui traitaient justement de la réaction des Albanais,

25 la situation serait différente. Mais si vous souhaitez tirer des

26 conclusions de son étude menée sur les militaires, alors qu'il n'est pas

27 psychologue ou expert psychologue, je ne vois pas sur quelle base il

28 pourrait exprimer un avis. Je vous remercierais donc de passer à la

Page 16456

1 question suivante.

2 M. VISNJIC : [interprétation]

3 Q. Puisque nous en sommes à ce point, Mon Colonel, avez-vous passé un

4 certain temps au Kosovo ?

5 R. Oui, j'y suis allé à une occasion. A la fin des bombardements. Les

6 résultats de cette étude montrent que le moral des troupes fléchissait dans

7 certaines unités, et le chef d'état-major du commandement Suprême avait

8 demandé à une équipe d'officiers supérieurs de se rendre au Kosovo-Metohija

9 pour voir dans quelle mesure le moral des troupes pouvait être évalué,

10 amélioré, comment on pouvait l'aider à régler ces problèmes avec pour

11 objectif de finaliser un rapport soumis au chef d'état-major, à la 3e Armée

12 et au Corps de Pristina pour qu'ils leur permettent de prendre des mesures

13 adéquates.

14 Q. Très bien. Merci. Nous y reviendrons ultérieurement.

15 M. VISNJIC : [interprétation] Passons désormais à la page 2 de ce document

16 qui est toujours la pièce 3D733.

17 Q. Pourriez-vous nous dire très clairement, mais rapidement, à quoi

18 correspond ce graphique, et nous dire s'il y a, oui ou non, des différences

19 entre l'échantillon général et le Corps de Pristina ?

20 R. Vous voyez ici un camembert qui reflète le niveau de fatigue générale

21 du personnel de l'armée de terre. Nous avons également un échantillon et

22 les résultats préliminaires de l'échantillon du Corps de Pristina. Vous

23 pouvez voir ici - et c'est cohérent par rapport à la question de la crainte

24 et de la peur - nous voyons que cet échantillon souffrait d'une fatigue

25 accrue et d'une tension psychophysiologique accrue par rapport aux autres.

26 Le chiffre moyen pour l'échantillon total était de 3,18. Le sous-

27 échantillon du Corps de Pristina était à 2,84. Ce qui nous montrait que le

28 niveau de fatigue était moyen puisque la valeur moyenne était près de 3.

Page 16457

1 C'était la moyenne générale établie lorsque le questionnaire avait été

2 établi.

3 Q. Très bien. Passons désormais à une autre page, la page suivante, la

4 page 3.

5 Pourriez-vous avoir la gentillesse de commenter ce tableau et de nous dire

6 à quoi cela correspond et à quoi correspondent les chiffres, évidemment, en

7 comparant l'échantillon en général et le sous-échantillon du Corps de

8 Pristina ?

9 R. Ce que vous voyez ici à l'écran, Monsieur le Président, Mesdames,

10 Monsieur les Juges, c'est la mesure qui nous a permis d'évaluer le moral

11 des troupes sur la base de onze variables, que l'on pouvait noter de 1 à 4.

12 Comme vous le voyez ici, la valeur moyenne pour le personnel de

13 l'armée de terre était de 3,18, et de 2,89 pour le Corps de Pristina. Plus

14 le chiffre est élevé, plus la stabilité affective et psycho-émotionnelle de

15 l'individu est assurée. C'est une échelle Liker tout à fait classique qui

16 permet de mesurer au plus près l'objet mesuré. Sur la base de cette étude

17 on peut indiquer clairement et de façon fiable que le moral des troupes

18 dans le Corps de Pristina était relativement moins bon que dans la moyenne

19 des forces armées, ce qui est tout à fait normal et qui était également les

20 résultats que nous attendions en tant que chercheurs. Vous voyez néanmoins

21 que le moral des troupes n'était pas catastrophique, dans la mesure où le

22 moral, la moyenne à 2,89, était relativement correct. Lorsque l'on dit que

23 je ne suis pas d'accord de dire que mon état psychologique n'est pas

24 menacé, ça veut bien dire que c'est une évaluation positive.

25 Q. Veuillez ralentir légèrement.

26 R. Je crois également que le onzième facteur est analysé et tout à fait

27 pertinent pour les travaux de cette Chambre. La question était de savoir si

28 les répondants étaient obsédés par un désir de vengeance.

Page 16458

1 Comme vous pouvez le voir ici, la valeur pour le Corps de Pristina

2 est supérieure à celle correspondant à l'échantillon général. Je vous ai

3 dit tout à l'heure qu'un chiffre plus élevé transposait et exprimait une

4 stabilité émotionnelle plus élevée. Il apparaît donc que l'état d'esprit du

5 personnel du Corps de Pristina était en fait positif, légèrement meilleur

6 que celui du moral général des troupes. Cela s'explique. En effet, les

7 hommes du Corps de Pristina avaient subi une préparation socio-

8 psychologique pour leur permettre de gérer la situation particulière des

9 bombardements, des mines, des attaques, des embûches et embuscades

10 organisées par l'UCK. Alors que le reste des troupes était beaucoup plus

11 éloigné du lieu de combat et donc plus désireux de se venger. Ce panorama

12 montre que le personnel était dans un état relativement bon, ce qui montre

13 bien que la préparation socio-psychologique avait été bonne et leur

14 permettait de gérer le stress auquel ils étaient confrontés. Si vous me le

15 permettez, avec des hommes dans cet état - et je crois connaître assez bien

16 les guerres du 20e siècle que j'étudie depuis 20 ans - je crois qu'avec des

17 hommes, disais-je, dans cet état psycho-sociologique, il est difficile de

18 croire qu'aucun de ces hommes ait pu commettre des crimes.

19 Q. Merci. Je crois que d'autres mesures avaient été prises, par exemple,

20 mobiliser des psychologues et les intégrer dans les structures de

21 commandement. Pourriez-vous nous dire pourquoi ces psychologues avaient été

22 recrutés et quelle était leur mission ?

23 R. En temps de paix, nous avons évidemment des psychologues au niveau de

24 chaque régiment. Ces individus sont supposés évaluer constamment le moral

25 des troupes. Selon les recommandations de l'état-major général du

26 commandement Suprême, nous avons à ce moment-là rajouté un psychologue, un

27 ou deux psychologues dans chaque brigade, un pour chaque bataillon, et dans

28 les unités de base, les officiers en charge devaient gérer les

Page 16459

1 circonstances particulières qui se posaient, de façon à gérer au mieux les

2 circonstances de guerre dans lesquelles ils se trouvaient.

3 Q. Mon Colonel, vous nous avez dit que vous êtes passé au Kosovo pendant

4 la guerre. Vous nous avez dit que c'était à la fin des opérations. Cela

5 faisait-il partie de l'opération de contrôle et de vérification, telle que

6 projetée par le chef d'état-major général entre le 23 et le 26 mai 1999.

7 R. Oui.

8 Q. Qui était en charge de cette opération ?

9 R. C'était le major général Spasoje Djurovic, qui était le chef de

10 l'administration de l'infanterie. Nous avions tous deux des ordres du

11 commandement Suprême et nous avions dû rendre visite à la 7e Brigade

12 d'infanterie où un certain nombre de phénomènes négatifs s'étaient fait

13 jour, où le moral des troupes fléchissait.

14 Q. Quels sont ces phénomènes psychologiques mineurs ?

15 R. Vous voyez, cette unité vient d'autour de Krusevac et à côté.

16 Q. Oui, mais redites-nous quels sont ces phénomènes psychologiques

17 mineurs.

18 R. Il y a eu abandon de positions suite à une propagande très forte et des

19 rumeurs qu'ont fait circuler des centres de propagande situés à l'extérieur

20 de notre pays.

21 Q. Très bien. A l'issue de ce contrôle, toutes les équipes se sont-elles

22 réunies après avoir effectué leur mission de contrôle ?

23 R. Oui.

24 Q. Est-ce qu'on a comparé les résultats ?

25 R. Oui, c'est ce qu'on fait d'habitude. Après chaque contrôle effectué, on

26 agit de la même façon. Puisqu'au sein de la totalité du corps, on a procédé

27 au contrôle, donc il y a eu un rapport fait par les chefs d'équipe face au

28 commandant du corps et au commandant de l'armée. On a fait un rapport sur

Page 16460

1 la situation telle qu'elle se présentait à ce moment-là et on a décidé des

2 mesures énergiques à prendre afin de remédier à la situation.

3 Q. Merci. Pendant ce contrôle, vous aurait-on dit que suite au manquement

4 à exécuter des ordres sur le terrain, un certain nombre de membres du MUP

5 et une bonne partie des unités de moindre envergure, se rendaient coupables

6 de crimes graves contre la population kosovare dans les agglomérations, les

7 localités, dans les exodes, il y a eu des pillages, des pillages à main

8 armée, des viols, des incendies, et que ces crimes sont attribués ou que

9 l'on tente de les attribuer aux membres de l'armée de la Yougoslavie ?

10 R. Non, pendant les trois jours de séjour dans la zone de responsabilité

11 de la 7e Brigade d'infanterie, rien ne nous a permis d'arriver à cette

12 conclusion, aucun indice. Et du côté du commandement de cette brigade, on

13 n'a pas attiré notre attention là-dessus.

14 Q. Je vous remercie.

15 M. VISNJIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas d'autres

16 questions.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Visnjic.

18 D'autres Défenseurs souhaitent poser des questions ? Sinon, c'est M. le

19 Procureur, M. Hannis qui va poser des questions.

20 Monsieur le Témoin, vous serez interrogé par M. Hannis.

21 M. HANNIS : [interprétation] Merci.

22 Contre-interrogatoire par M. Hannis :

23 Q. [interprétation] Colonel, qui était votre supérieur direct en 1998 et

24 en 1999 ?

25 R. En 1999 uniquement - puisque je n'étais pas encore au quartier général

26 en 1998 - c'était le chef de l'administration de la direction chargée du

27 moral et de l'information.

28 Q. Qui était votre supérieur ?

Page 16461

1 R. Mon supérieur était le général de brigade -- jusqu'au début des

2 bombardements, c'était le général Gradimir Zivanovic, ensuite c'était le

3 colonel Novkovic, et pendant les bombardements c'était le général de

4 brigade Aleksandar Bakocevic.

5 Q. Dans les procès-verbaux des réunions du collège qui se tenaient le

6 soir, je vois que le colonel Novkovic était là pour faire rapport sur le

7 moral des troupes, mais il semblerait qu'à d'autres reprises vous faisiez

8 ce rapport. Est-ce qu'il est arrivé que vous soyez présents tous les deux ?

9 R. Non. Je remplaçais le colonel Novkovic en son absence.

10 Q. Vous nous avez parlé de votre thèse de troisième cycle soutenue en

11 2002, semble-t-il. Sur quoi portait-elle ?

12 R. L'objet de ma thèse portait sur la sociologie du moral. C'étaient des

13 études empiriques sur des facteurs du moral des troupes pendant la guerre

14 de défense contre l'OTAN.

15 Q. Vous avez dit que l'une des missions du service d'information interne

16 était d'informer sur la situation lorsqu'il y avait des manquements aux

17 règlements, des phénomènes négatifs qui se produisaient. Est-ce que vous

18 pourriez nous citer un exemple pour nous illustrer ce que c'est un

19 phénomène négatif.

20 R. L'information diffusée de manière interne au sein de l'armée de la

21 Yougoslavie porte sur quelque chose de plus large que le fait d'informer

22 uniquement sur les phénomènes négatifs. C'est une manière d'informer sur la

23 situation qui prévaut dans le pays, à l'étranger, dans notre société, des

24 aspects de la situation qui concernent l'armée. Ensuite, cela porte

25 concrètement sur la situation qui prévaut dans telle ou telle unité, porte

26 sur des choses qui sont pertinentes pour le moral des troupes. S'agissant

27 de la situation dans les différentes unités, un des sujets qui était

28 toujours abordé lors des informations qui étaient diffusées tous les jours,

Page 16462

1 dix à

2 15 minutes tous les jours, et aussi occasionnellement, portait sur des

3 phénomènes négatifs que l'on trouvait dans les unités. Ça pouvait être le

4 fait de s'absenter de son unité sans ordre, le fait de consommer des

5 boissons alcoolisées de manière abusive. C'étaient des manquements mineurs

6 à la discipline, donc des questions disciplinaires dans la zone de

7 responsabilité de l'unité. Dans ce genre de situation, c'était impossible

8 que le commandement n'en parle pas à tous ses effectifs. C'est ce qui lui

9 permettait d'encourager ses soldats à mieux exécuter les ordres, et c'était

10 aussi à titre d'exemple, une manière de leur montrer quelles étaient les

11 conséquences qu'ils allaient subir s'ils manquaient à la discipline.

12 Q. En 1999, pendant les combats, ces exemples ne portaient-ils pas avant

13 tout sur des crimes commis contre l'armée, à savoir la désertion,

14 s'absenter sans être en permission, des situations d'insubordination,

15 l'alcoolisme, les drogues, et cetera. Donc c'était ça les phénomènes

16 négatifs surtout, n'est-ce pas, qui étaient abordés de cette manière ?

17 R. A l'instant, je vous ai montré quelques exemples des résultats auxquels

18 on est arrivé lors de nos études empiriques. Aucun facteur ne pointait dans

19 la direction de crimes majeurs. Je vous dis donc qu'il n'y avait que

20 quelques phénomènes négatifs mineurs, qui se produisent nécessairement en

21 situation de guerre et dans toute armée. Surtout vers la fin des

22 bombardements, il faut dire que les gens étaient psychologiquement épuisés.

23 Les rumeurs diffusées depuis l'étranger avaient fait leur chemin. Il y a eu

24 des désertions et cela a fait l'objet des réunions d'information

25 quotidiennes afin de motiver le reste des effectifs à se conduire

26 conformément au droit de la guerre.

27 Q. Colonel, comment pouvez-vous nous dire qu'aucun indice ne pointait sur

28 des crimes plus graves ? Est-ce que vous avez revu les dossiers militaires

Page 16463

1 des tribunaux militaires ? Est-ce que vous avez recueilli l'avis du général

2 Vasiljevic ou peut-être du général

3 Farkas ? Est-ce qu'ils vous ont parlé sur les rapports faisant état de

4 crimes ayant été commis par les effectifs de la VJ pendant les

5 bombardements de l'OTAN ?

6 R. Mais si vous aviez bien écouté ce que je vous ai dit, Monsieur le

7 Procureur, vous vous seriez aperçu que c'est à partir du 16 avril jusqu'au

8 26 avril que nous avons mené notre étude. Les indices qui nous ont permis

9 de mesurer le moral des troupes, les 67 variables, où chacune se mesurait

10 sur une échelle de 1 à 5, n'ont absolument pas permis de signaler

11 l'existence de ce genre de problème. Si tel avait été le cas, on l'aurait

12 pris en considération. En outre, les 1 200 questionnaires, nous les avons

13 étudiés de manière approfondie. A la fin de chaque questionnaire, la

14 personne interviewée était libre d'ajouter ce qu'elle souhaitait. Dans

15 aucun jeu de formulaires, on a trouvé, ne serait-ce qu'un seul indice, nous

16 permettant de constater l'existence des phénomènes, donc des crimes que

17 vous venez d'évoquer dans leur zone de responsabilité.

18 Q. D'accord. Excusez-moi, je pense que je n'ai pas bien vu la date de

19 l'étude. Donc c'était du 16 au 26 avril, 1 200 questionnaires ont été remis

20 aux membres du Corps de Pristina; c'est cela ?

21 R. Non, non, non, il n'y avait pas que le Corps de Pristina, toute l'armée

22 de Yougoslavie. L'échantillon du Corps de Pristina comptait 352

23 interviewés.

24 Q. En page 1 de la pièce 3D733, il est question de

25 1 200 personnes de l'armée yougoslave et de 335 interviewés du Corps de

26 Pristina. Ces chiffres sont-ils exacts ?

27 R. Oui.

28 Q. Donc parmi les effectifs du Corps de Pristina, comment est-ce que cette

Page 16464

1 enquête a été menée, est-ce que c'était à titre

2 anonyme ? Parce que je vois une lettre d'autorisation qui figure à l'annexe

3 de la dernière page, c'est le colonel Ojdanic qui autorise un tel à mener

4 cette étude, le nom n'est pas mentionné et le numéro de la pièce d'identité

5 non plus. Donc c'est vous qu'il a autorisé ?

6 R. Monsieur le Procureur, j'étais à la tête de ce projet de recherche.

7 D'emblée je vous ai dit que j'avais rassemblé des experts, pour l'essentiel

8 c'étaient des civils, des universitaires de la faculté des lettres de

9 l'Université de Belgrade. Egalement, j'ai fait participé un certain nombre

10 de bénévoles, c'étaient des civils, des professeurs qui enseignaient à

11 l'Université de Belgrade, qui enseignaient la psychologie et

12 l'anthropologie à l'académie militaire, entre autres. Ensuite, nous avons

13 engagé tous les professeurs de l'académie militaire, tous ceux qui

14 enseignaient les sciences humaines. Nous avons engagé des psychologues

15 qualifiés et diplômés qui travaillaient dans les unités de la VJ. Lorsque

16 j'ai été chargé de mener ces études, j'ai mis sur pied 12 équipes. Dans

17 chacune des équipes, il y avait cinq --

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais vous ne répondez pas à la

19 question qui vous a été posée par M. Hannis. S'il souhaite que vous lui

20 parliez de cela, il va vous poser la question.

21 M. HANNIS : [interprétation]

22 Q. Je vais vous arrêter ici pour vous demander quelque chose plus

23 concrètement. Dites-nous, les interviewés du Corps de Pristina, comment

24 est-ce qu'ils ont été choisis, qui les a sélectionnés pour qu'ils répondent

25 à ce sondage ?

26 R. Les équipes que j'ai créées sur ordre du chef du Grand état-major se

27 sont rendues sur le terrain. C'était un échantillon choisi au hasard dans

28 les différentes zones de responsabilité des unités respectivement. Il n'y

Page 16465

1 avait aucun moyen de choisir intentionnellement telle ou telle personne.

2 C'était un échantillon aléatoire qui dépendait de la présence des

3 différents hommes sur le terrain. C'était à titre volontaire qu'on

4 remplissait le formulaire lorsqu'on se voyait remettre le formulaire de la

5 part de l'enquêteur qui avait sur lui un Bic, un crayon, qu'il remettait au

6 soldat. Il faut savoir que c'était dans les zones de combat et que c'est

7 sans précédent. Il s'agit d'une recherche qui est absolument sans précédent

8 et d'une grande importance, non seulement sur le plan de l'évolution des

9 sciences en Serbie, mais de manière générale, bien plus large sur le plan

10 des études psychologiques et sur le plan de l'histoire de la psychologie.

11 Q. Donc les différents soldats remplissaient les formulaires qui leur

12 avaient été remis, puis ils remettaient une fois rempli leur formulaire à

13 la personne qui menait l'enquête ?

14 R. Oui. Mes enquêteurs ont forcé la situation. On rassemblait 15 à 20

15 combattants là où ces combattants étaient affectés, ils diffusaient les

16 formulaires, expliquaient l'objectif, les raisons, la finalité de l'étude,

17 non seulement pour eux, mais également pour la société, l'armée, la science

18 en général. Ils leur demandaient de répondre de manière objective, leur

19 diffusaient des Bic, parce qu'on ne pouvait pas s'attendre à ce qu'ils

20 aient de quoi écrire sur les lignes de front, et après ils remplissaient

21 leurs formulaires et de nouveau, sous le contrôle des personnes qui

22 menaient l'enquête, on rassemblait les formulaires remplis. C'était

23 transporté à Belgrade. C'était rentré dans les ordinateurs. Les données

24 étaient traitées, analysées et les rapports préliminaires ont été rédigés.

25 Q. Je vais attendre la fin de l'interprétation, excusez-moi.

26 Pourriez-vous, s'il vous plaît, abréger vos réponses, si mes questions vous

27 le permettent. Dans ce questionnaire trouvait-on des questions demandant à

28 la personne interviewée s'il a éventuellement commis un crime contre la

Page 16466

1 population civile ?

2 R. Il y avait des séries de questions qui concernaient des phénomènes

3 négatifs se produisant au sein des unités. Je ne me souviens plus

4 exactement combien il y en avait, mais je pense que c'était dans la

5 troisième partie du questionnaire qu'on trouvait ces questions-là. Je viens

6 de vous dire d'ailleurs que dans les réponses des interviewés à ces

7 questions-là nous n'avons trouvé aucun indice nous permettant de penser, en

8 avril, puisqu'on se situe en avril, qu'il y ait eu des commissions de

9 crimes.

10 Q. Franchement, vous vous seriez attendu à ce que quelqu'un qui aurait

11 commis un crime, qu'il le déclarerait, qu'il le dirait ? Est-ce que ce

12 serait une manière naturelle de réagir pour un

13 individu ?

14 R. L'individu ne le dirait pas pour lui-même, mais son camarade, son

15 collègue de la même unité ou d'une unité voisine le ferait. Il faut savoir

16 qu'à plus de 50 % c'étaient des réservistes qu'on a mobilisés au Kosovo-

17 Metohija. C'est pratiquement impossible que, compte tenu du nombre

18 d'interviewés, qu'aucun d'entre eux ne signale des infractions aussi graves

19 à une discipline militaire, tel un crime. Sur 1 200 interviewés, ce serait

20 une hypothèse absolument absurde de dire qu'aucun ne l'aurait fait si ce

21 genre de chose s'était produit. Or, il faut savoir que tous ces

22 questionnaires ont été archivés. Ils sont disponibles à n'importe quel

23 expert qualifié du monde entier, et je suis convaincu - je le dis là devant

24 ces Juges honorables - qu'ils arriveraient aux mêmes conclusions, ou du

25 moins à des conclusions très semblables.

26 Q. Une réponse, évidemment, ce serait de dire qu'il n'y a pas eu de crimes

27 d'indiqués. Est-ce que ça ne pourrait pas être parce que justement, dans le

28 cadre d'une enquête et d'un questionnaire présenté à une quinzaine ou à une

Page 16467

1 vingtaine de personnes, qu'aucun d'entre eux ne souhaiterait justement

2 annoncer la commission d'un crime ?

3 R. Monsieur le Procureur, ce n'était pas à moi d'identifier les criminels

4 individuels. Notre objectif et notre mission étaient de produire une étude

5 scientifique, indépendante, et d'en tirer des conclusions scientifiques

6 pour le bien de la science et de réagir au mieux à cette situation qui

7 avait été imposée à la République fédérale de Yougoslavie. Honnêtement, et

8 je le redis, il était impossible que parmi les 1 200 répondants qui avaient

9 subi ces bombardements qui avaient duré 78 jours, ils n'aient pas réagi au

10 mieux et n'aient pas réagi en nous informant de leur état mental. Vous avez

11 bien vu, lorsque je vous en ai parlé tout à l'heure, le désir de vengeance.

12 On a vu la situation du Corps de Pristina. Il n'y avait pas de volonté, de

13 désir de vengeance exacerbé. C'étaient des soldats professionnels qui

14 avaient été bien formés. Ils savaient qu'il y avait des difficultés, des

15 situations de danger. Mais ce qui les inquiétait le plus, c'était leurs

16 familles, tous ceux qui étaient restés chez eux et qui n'étaient peut-être

17 pas en situation de sécurité. C'est ça qui les intéressait. Nous, ce qui

18 nous intéressait, encore une fois, c'était de permettre à la science de

19 progresser.

20 Q. Mais revenons là-dessus. Je vois que vous avez 11 variables ou 11

21 questions, et vous dites qu'il y en un - on a bien vu - dont la formulation

22 est la suivante "Le désir de vengeance m'obsède."

23 R. Je ne vois qu'une réponse. Nous ne sommes pas en train de parler de

24 réplique ou de revanche, mais plutôt de vengeance. C'est un sentiment

25 beaucoup plus fort et nous souhaitions évaluer ce sentiment plus fort dans

26 un échantillon d'hommes impliqués dans une guerre, en situation de guerre.

27 Nous savons parfaitement, de toutes les expériences et de toutes les

28 guerres du XXe siècle que la haine de l'ennemi est toujours un sentiment

Page 16468

1 très fort, et d'après les études dans les autres guerres du XXe siècle, 40

2 à 50 % des hommes haïssaient leurs opposants. Nous souhaitions le vérifier

3 encore une fois non pas tant pour nous-mêmes que pour le bien de la

4 science. Nous avons vu que les hommes de la VJ, et plus particulièrement

5 les hommes du Corps de Pristina, ressentaient que dans une certaine mesure

6 ce sentiment. J'ai essayé d'expliquer, c'est ce que j'ai essayé de faire

7 tout à l'heure, que ce sentiment de haine vis-à-vis de l'OTAN, suite à ces

8 bombardements, n'était pas si prononcé que ça. Il y avait certes une

9 certaine rage mais pas tant de haine. En ce qui concerne le rapport à l'UCK

10 et à la population civile, on voyait en fait une émotion relativement

11 positive, et je crois que les savants que nous sommes peuvent tirer la

12 conclusion de ce qu'il n'y avait pas de crimes sérieux qui aient pu être

13 commis. Alors, je ne dis pas qu'aucun crime n'a pu être commis ou qu'aucun

14 individu n'a commis ce genre de crimes. Je vous dis juste que dans notre

15 échantillon nous n'en avons pas trouvé. Je vous donne ces faits, les faits

16 tels que je les ai.

17 Q. Vous nous avez indiqué néanmoins que le chiffre était plus élevé et que

18 le moral des troupes était meilleur dans le Corps de Pristina que dans le

19 reste de l'armée par rapport à la question, n'est-ce pas, par rapport au

20 désir de vengeance; est-ce bien cela ?

21 R. Oui, tout à fait.

22 Q. Merci.

23 R. Mais c'est parce que c'est --

24 Q. Je vais vous poser une question.

25 R. [aucune interprétation]

26 Q. Est-ce que ce ne serait pas plutôt, parce que les hommes du Corps de

27 Pristina avaient vu certains de leurs camarades et des gens du MUP

28 commettre des crimes contre des Albanais et des Albanais du Kosovo, des

Page 16469

1 civils plus particulièrement, qui aient pu atténuer ce sentiment de désir

2 de vengeance, et du coup ils n'avaient pas ce sentiment et ce désir de

3 vengeance, parce qu'ils connaissaient la bêtise de la guerre bien mieux que

4 leurs concitoyens ne l'auraient fait, ceux qui étaient restés en Serbie, à

5 proprement parler ? Et ça c'est un élément que votre étude n'a pas pris en

6 compte, n'est-ce pas ?

7 R. Monsieur le Procureur, encore une fois, je commente les faits --

8 Q. [aucune interprétation]

9 R. -- les faits nous ont montré qu'il n'y avait aucune raison de penser

10 que cela --

11 Q. Ma question était très simple : est-ce que c'était une variable que

12 vous avez prise en compte, oui ou non ?

13 R. Comment ? Pourriez-vous avoir la gentillesse de répéter votre question.

14 Elle était relativement longue, votre question.

15 Q. Avez-vous pris en compte la possibilité de ce que les hommes du Corps

16 de Pristina avaient pu adopter une attitude particulière vis-à-vis du

17 crime, puisqu'ils avaient vu certains de leurs camarades ou des agents du

18 MUP commettre des crimes que leurs camarades en Serbie, à proprement

19 parler, n'auraient pas vu, et qu'ayant vu ces crimes être commis, leur

20 désir de vengeance était limité et réduit par la réalisation de la bêtise

21 de la guerre. Est-ce que c'est un fait et est-ce que c'est une variable que

22 vous avez prise en compte dans votre étude ?

23 R. Non, ce n'est pas un facteur que nous ayons pris en compte.

24 Q. Merci.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Visnjic.

26 M. VISNJIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais faire

27 objection à cette question. Je ne vois pas ce que

28 M. Hannis nous propose. Ce n'est pas une variable et au corps aurait pu

Page 16470

1 être annulée, mais plutôt une conclusion ou une évaluation. Peut-être que

2 M. Hannis devrait nous proposer une formulation hypothétique du

3 questionnaire. Encore une fois, le témoin nous indique qu'il fonctionnait

4 sur la base de faits.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, Monsieur Visnjic, vous avez

6 donné la réponse que le témoin devrait donner lorsque vous procéderez à vos

7 questions supplémentaires. Ce n'était pas ce qu'il fallait faire.

8 Monsieur Hannis, vous avez la parole.

9 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'on a le temps ? Je croyais

11 qu'on devait finir à moins le quart ?

12 M. HANNIS : [interprétation] Un instant, je vais vérifier avec le commis à

13 l'affaire. Je crois que je n'ai plus de questions. Je voudrais juste

14 vérifier deux petites choses.

15 Merci, Monsieur le Président. J'en ai fini.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

17 Maître Visnjic, vous avez la parole.

18 M. VISNJIC : [interprétation] Je n'ai pas de questions.

19 [La Chambre de première instance se concerte]

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Danilovic, vous en avez donc

21 terminé avec votre déposition. Merci d'avoir pris la peine de rejoindre le

22 Tribunal pour la donner. Vous avez la permission de quitter le prétoire.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

24 [Le témoin se retire]

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Visnjic, vous alliez évoquer la

26 question Radinovic.

27 M. VISNJIC : [interprétation] En effet, Monsieur le Président. J'ai ai

28 parlé avec l'Accusation et avec un certain nombre de mes collègues, et si

Page 16471

1 je comprends bien personne ne fait objection. Nous soutenons donc la motion

2 proposée, la requête proposée par l'Accusation permettant à ce témoin de

3 déposer à la fin de l'affaire. Je voulais juste vérifier.

4 [Le conseil de la Défense se concerte]

5 M. VISNJIC : [interprétation] Oui. Enfin, y a peut-être quelques

6 objections, mais ça devrait aller.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien, alors qui souhaite

8 s'exprimer à ce sujet ?

9 Monsieur Ackerman.

10 M. ACKERMAN : [interprétation] Monsieur le Président, je m'y oppose. Je

11 pense que le Témoin Radinovic devrait être entendu pendant les témoignages

12 du général Ojdanic. J'ai l'impression que j'en aurai de besoin pour

13 préparer mes papiers pour la défense du général Pavkovic et j'ai

14 l'impression également que je devrai avoir le droit d'accéder à ces

15 informations. Sinon, je devrai peut-être évaluer ma position. Je crois que

16 sinon, nous aurions un grand d'espace entre l'audition des premiers témoins

17 de Me Visnjic et la fin du témoignage.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous n'avons pas encore examiné la

19 possibilité d'avoir des témoins experts à la fin des auditions générales.

20 M. ACKERMAN : [interprétation] Ce sont des experts qui sont témoins, des

21 témoins experts dans toutes les affaires qui nous intéressent, alors que

22 celui-ci ne traite que de l'affaire Ojdanic.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.

24 M. HANNIS : [interprétation] Il me semble que l'expert de

25 Me Fila sera entendu à la fin des arguments généraux. Je ne crois pas que

26 nous devions nous trouver dans cette situation, parce que l'avocat de M.

27 Pavkovic et M. Ojdanic ne sont pas en accord.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais vous ne pouvez pas accuser Me

Page 16472

1 Ackerman dans cette situation.

2 M. HANNIS : [interprétation] Non, bien sûr, mais je crois que même si le

3 témoin expert est entendu à la toute fin, Me Ackerman pourra réexplorer un

4 certain nombre de points avec vous en le justifiant auprès de vous.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Une autre possibilité, Maître Visnjic,

6 ce serait d'avoir effectivement -- de l'entendre après les témoins entendus

7 dans l'affaire Ojdanic. C'est un compromis, mais ça permet à M. Hannis de

8 se préparer un peu plus et ça vous donne un peu plus de flexibilité.

9 Evidemment ni M. Ackerman ni l'Accusation ne peuvent être accusés d'être

10 responsables de cette situation.

11 M. VISNJIC : [interprétation] Monsieur le Président, l'ordre m'importe peu.

12 Je vous demande seulement de ne pas demander à

13 M. Ojdanic d'être entendu comme témoin avant cette période de sept jours.

14 Je pense avoir déjà justifié mes arguments. La semaine prochaine nous avons

15 trois ou quatre témoins, et j'imagine que nous tiendrons le calendrier.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois que nous avons déjà dit

17 clairement que nous n'étions pas convaincus que vos raisons pour avoir une

18 telle pause se justifiaient tout à fait et que vous aviez tant de temps

19 nécessaire à vos consultations. Nous allons donc y réfléchir et revoir

20 notre position sur les dépositions des témoins experts et nous vous

21 donnerons notre position demain.

22 Maître Ivetic, avez-vous dessiné votre position ?

23 M. IVETIC : [interprétation] Oui, nous allons revenir sur nos accusations

24 et nos requêtes quant au CLSS, et nous sommes convaincus que vous

25 connaissez bien la différence entre les deux mots, nous allons donc

26 utiliser les deux termes in extenso en serbe, le "Posebne Jedinice

27 Policije," et l'autre, le "service antiterroriste," de façon à ce que ça ne

28 se confonde pas.

Page 16473

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien, Maître. Donc vous êtes en

2 train de dire que vous retirez votre requête ?

3 M. IVETIC : [interprétation] En effet.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Etant donné le fait qu'un certain

5 nombre de jugements doivent être prononcés demain dans ce prétoire, nous

6 devrons commencer plus tôt, à 8 heures 30.

7 --- L'audience est levée à 15 heures 01 et reprendra le jeudi 27 septembre

8 2007, à 8 heures 30.

9

10

11

12

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

26

27

28