Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 4 mars 2008

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 8 heures 59.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour à tout le monde. Nous avons

6 devant nous une longue journée, mais j'espère que cette journée sera

7 productive et efficace. Nous allons continuer avec le témoignage du juge

8 Marinkovic.

9 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Madame Marinkovic.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Me Ivetic n'a pas fini son

13 interrogatoire principal si j'ai bien compris, donc nous allons commencer

14 la dernière partie de son interrogatoire principal.

15 Maître Ivetic.

16 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je pense que je

17 vais en finir avec mon interrogatoire principal en peu de temps

18 aujourd'hui.

19 LE TÉMOIN: DANICA MARINKOVIC [Reprise]

20 [Le témoin répond par l'interprète]

21 Interrogatoire principal par M. Ivetic : [Suite]

22 Q. [interprétation] Juge Marinkovic, vous avez des classeurs avec vous,

23 des classeurs que nous avons utilisés la semaine dernière, n'est-ce pas ?

24 R. Oui.

25 Q. Bien. Maintenant j'aimerais qu'on affiche 6D625 dans le prétoire

26 électronique et j'aimerais que vous parcouriez ce document qui se trouve

27 dans les classeurs qui sont devant vous. Pourriez-vous nous dire si vous

28 avez joué un rôle dans cette instruction et ce que vous pouvez nous dire à

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1 propos de cette instruction ?

2 R. Dans ce document, il s'agit d'une plainte au pénal qui a été déposée

3 par le SUP de Pristina. Il s'agit de l'infraction pénale de meurtre qui a

4 été commis contre Fazlia Murtezi de Pristina. Dans la plainte au pénal, je

5 peux voir que cela s'est passé le 13 avril 1999.

6 Q. Très bien. Est-ce que --

7 R. Par rapport à cet événement, je peux dire qu'avec les autres membre de

8 l'équipe de l'instruction, je me suis rendue sur place pour mener une

9 enquête sur place, pour procéder aux constatations sur les lieux du crime.

10 M. IVETIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant afficher 6D338 ?

11 Q. En attendant que le document soit affiché, je vais vous poser des

12 questions de nature préliminaire. D'abord de quoi vous souvenez-vous pour

13 ce qui est du meurtre de M. Kelmendi et ses fils ? Est-ce que l'instruction

14 a été complète par rapport à cela ? Est-ce que l'instruction a été menée

15 conformément aux lois et règlements ?

16 R. Ce que je vois sur l'écran ce sont des annexes. Ici on peut voir que

17 cela a été mené conformément au code de procédure pénale, lorsqu'on

18 constate qu'une infraction pénale a été commise. La plainte au pénal a été

19 dressée, le compte rendu pour ce qui est de l'enquête sur les lieux du

20 crime a été rédigé, cela a été envoyé aux instances du ministère de

21 l'Intérieur pour qu'elles procèdent à toutes les mesures nécessaires pour

22 retrouver l'auteur du crime. Et aux 6, 7 et 8, ce sont les informations

23 concernant les personnes qui ce jour-là ont été retrouvées sur les lieux

24 une fois les constatations sur les lieux finies.

25 Q. Est-ce que la pièce à conviction 6D338 reflète toutes les mesures qui

26 ont été prises au cours de l'instruction officielle ?

27 R. Oui. A ce moment-là, on a pris tout ce qui a été possible par les

28 organes compétents qui ont pris des mesures nécessaires et qui étaient

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1 possible de prendre en état de guerre. Dans cette lettre je ne vois pas une

2 chose, il manque que dans ce cas-là, après avoir retrouvé des cadavres,

3 j'ai ordonné une autopsie, il s'agit encore d'une mesure d'instruction qui

4 a été possible vu les circonstances. Il s'agit de mesures d'instruction qui

5 ont pu être faites par le SUP, le procureur et le juge d'instruction.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Marinkovic, pouvez-vous nous

7 rappeler, s'il vous plaît, qui était Kelmendi ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Bajram Kelmendi était avocat et il

9 travaillait à Pristina. Il était parmi les meilleurs avocats au pénal. Il

10 connaissait très bien le droit pénal. J'ai coopéré avec lui pendant que je

11 travaillais à Pristina. On coopérait de façon professionnelle et correcte.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

13 Maître Ivetic, poursuivez.

14 M. IVETIC : [interprétation] Merci.

15 Q. Madame le juge Marinkovic, sur la base de votre expérience et de votre

16 travail quotidien en 1999 pendant la guerre menée par l'OTAN, comment

17 décririez-vous le niveau de coopération dont vous étiez témoin, la

18 coopération avec le MUP serbe pour faciliter les constatations sur les

19 lieux et pour procéder aux instructions au pénal -- aux instructions menées

20 par les juges d'instruction ?

21 R. En tant que juge d'instruction, j'ai coopéré avec les instances du

22 ministère de l'Intérieur, les constatations sur les lieux étaient

23 professionnelles et correctes. Les instances du ministère de l'Intérieur,

24 selon mes ordonnances, ont toujours pris toutes les mesures nécessaires,

25 dépendant de la situation qui prévalait à l'époque; mais bien que la

26 situation ait été difficile et les conditions aient été difficiles pour

27 procéder aux constatations sur les lieux, ils ont pris tout ce qui était

28 possible selon mes ordonnances pour que les moyens de preuves matérielles

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1 soient conservées et pour que tout cela soit enregistré par la suite dans

2 leurs registres et dans les registres du procureur ainsi que du tribunal,

3 après quoi ils ont procédé conformément à l'ordonnance du procureur pour

4 retrouver les auteurs d'infractions pénales. Tout cela a été fait

5 conformément au code de procédure pénale.

6 Q. Pourriez-vous nous dire, conformément au système qui fonctionnait en

7 1998 et 1999, de la compétence de quelle entité relevaient les centres de

8 détention, les prisons, et cetera ?

9 R. Les centres dans lesquels se trouvaient des détenus relevaient de la

10 compétence du ministère de la Justice. Je ne peux vous dire que pour ce qui

11 est de l'étape d'instruction, si les personnes détenues ont voulu

12 bénéficier de l'un de leurs droits, ils s'adressaient à moi en tant que

13 juge d'instruction, cela concernait leur statut personnel ou cela

14 concernait des visites dans des centres de détention.

15 Q. J'ai encore deux questions pour vous, Madame. La première question :

16 pendant que vous faisiez votre travail en 1998 et 1999, y avait-il

17 quelqu'un au ministère de l'Intérieur serbe qui aurait pu influer sur votre

18 travail ou qui aurait pu contrôler votre travail d'une façon ou d'une autre

19 ?

20 R. Non. Dans mon travail j'ai été indépendante, autonome et

21 professionnelle. Personne ne pouvait influer sur mon travail. Concernant le

22 contrôle de mon travail lors des instructions, on pouvait voir au stade de

23 l'acte d'accusation, au stade du procès et au stade de savoir comment on

24 pouvait voir les tribunaux de deuxième instance, à savoir la cour Suprême à

25 Belgrade aurait pu contrôler mon travail en tant que juge d'instruction.

26 Q. C'est ma dernière question pour vous, en 1998 et en 1999, le travail de

27 juge d'instruction était-il indépendant par rapport aux autres organes, y

28 compris le MUP serbe ?

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1 R. Oui. Tout le monde qui travaillait au tribunal était indépendant et

2 autonome dans son travail. Le MUP ne pouvait influer aucunement sur notre

3 travail, et d'autres organes officiels ne pouvaient pas non plus influer

4 sur le travail des tribunaux.

5 Q. Merci, Madame le juge Marinkovic. Vous avez répondu à toutes les

6 questions que j'ai voulu vous poser.

7 M. IVETIC : [interprétation] Je n'ai plus de questions pour ce témoin.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Maître Ivetic.

9 Maître Aleksic, avez-vous des questions à poser à ce témoin ? Est-ce qu'un

10 autre conseil de la Défense voudrait procéder au contre-interrogatoire ?

11 Non. Bien.

12 Maintenant au nom du bureau du Procureur, Mme Carter procèdera au

13 contre-interrogatoire.

14 Madame Carter.

15 Contre-interrogatoire par Mme Carter :

16 Q. [interprétation] Bonjour, Madame Marinkovic.

17 R. Bonjour.

18 Q. J'aimerais commencer mon contre-interrogatoire avec des informations de

19 nature générale pour ce qui est du contexte de votre travail quotidien au

20 tribunal. Vous avez dit dans l'interrogatoire principal que vous êtes

21 devenue juge en 1984. Pouvez-vous me dire quel était votre poste

22 exactement, quel type de juge vous êtes devenue en 1984 ?

23 R. Oui. Mais avant de vous répondre, avant d'être devenue juge, j'ai

24 travaillé en tant qu'assistant à la cour Suprême du Kosovo à Pristina de

25 1976 jusqu'en 1984. En tant qu'assistant, j'ai travaillé dans le domaine de

26 contentieux administratifs. Une fois élue juge du tribunal régional de

27 Pristina, j'ai commencé à travailler au civil, et c'était de 1984 jusqu'à

28 1994 où j'ai commencé à travailler en tant que juge d'instruction au sein

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1 du même tribunal.

2 Q. Vous dites qu'entre 1984 jusqu'en 1994, vous vous occupiez des procès

3 au civil. Pouvez-vous nous dire ce que cela veut dire et quelles étaient

4 vos fonctions ?

5 R. En tant que juge dans le domaine de procès au civil, je m'occupais des

6 dommages et intérêts sur n'importe quel fondement, par exemple, des

7 accidents de la route, des dettes, de constatations de la propriété, et

8 cetera. Ensuite, je m'occupais de divorce et de la répartition des biens

9 acquis lors du mariage.

10 Q. Vous avez dit qu'en 1994, vous êtes devenue juge d'instruction. Y a-t-

11 il différents types ou catégories de juge d'instruction au tribunal

12 régional de Pristina ?

13 R. Non. Au tribunal régional de Pristina il n'y a qu'un seul type de juge

14 d'instruction ou une seule catégorie de juge d'instruction qui s'occupe de

15 toutes les affaires. Cela dépend du programme adopté au tribunal et du

16 registre des affaires qui sont enregistrées au greffe du tribunal.

17 Q. Dans l'affaire Milosevic vous avez témoigné par rapport au programme et

18 des affaires confiées aux juges d'instruction. Vous avez dit que le

19 président du tribunal s'occupait de la répartition des affaires à des juges

20 d'instruction, et décidait qui serait affecté à quel type d'affaires au

21 pénal ou au civil, ainsi qui deviendrait juge d'instruction. Quelle

22 catégorie de juges d'instruction existe, qui s'occupent de différents types

23 d'affaires au pénal ou au civil ?

24 R. J'ai expliqué cela vendredi dernier lorsque j'ai commencé à témoigner.

25 Je ne sais pas si cela a été consigné au compte rendu. Le président du

26 tribunal a le pouvoir, au début de l'année, lorsqu'il procède à la

27 répartition des juges, et cela est conformément aux règlements internes du

28 tribunal --

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Marinkovic, juste un instant,

2 s'il vous plaît. J'aimerais vous dire que la question qui vous a été posée

3 est beaucoup plus spécifique. Compte tenu du fait qu'il y a des juges

4 d'instruction qui s'occupent des affaires au pénal et qui s'occupent des

5 instructions aux affaires qui relèvent du droit civil notamment.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Les juges d'instruction ne s'occupent que des

7 affaires au pénal.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

9 Mme CARTER : [interprétation]

10 Q. Une fois devenue juge d'instruction, étiez-vous en mesure, en tant que

11 juge au tribunal régional, lorsque vous vous êtes occupée de différentes

12 affaires, étiez-vous en mesure de vous occuper des affaires au pénal, au

13 civil; ou vous n'avez travaillé qu'en tant que juge d'instruction -- ou

14 vous avez travaillé exclusivement en tant que juge d'instruction ?

15 R. Lorsque j'ai été nommée d'instruction, je ne m'occupais que des

16 instructions aux affaires au pénal. Parfois, je devenais membre de la

17 chambre de première instance au pénal pour ce qui est des affaires dans

18 lesquelles je ne travaillais pas en tant que juge d'instruction, et c'est

19 le président qui en décidait après cela. Après cette période pendant

20 laquelle j'ai été juge d'instruction je ne travaillais plus en tant que

21 juge aux affaires civiles.

22 Q. Lorsque vous avez été nommée juge d'instruction aux affaires au pénal,

23 de quel type de formation vous avez bénéficié ?

24 R. Cela n'a pas été nécessaire, parce que j'ai étudié le pénal et le code

25 de procédure pénale avant de prendre mes fonctions de juge d'instruction,

26 parce que pour ce qui est du droit civil et des contentieux relevant du

27 droit civil, ce sont des dispositions tout à fait différentes qui

28 s'appliquent.

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1 Q. Pour ce qui est des affaires relevant de la sûreté d'Etat, parce que

2 cela a été indiqué dans des rapports des Nations Unies, dans un rapport du

3 rapporteur spécial qui faisait des enquêtes pour ce qui est des droits de

4 l'homme, il y a des règles du droit coutumier qui s'appliquent à ces

5 affaires relevant de la sûreté d'Etat, et il y a le procureur public qui

6 intervient, et normalement c'est une chambre qui est saisie de ces

7 affaires. Est-ce que cela arrivait à Pristina à l'époque où vous étiez juge

8 d'instruction ?

9 R. Je m'excuse. Je n'ai pas suivi l'interprétation depuis le début et je

10 n'ai pas compris la question posée.

11 Q. Lorsqu'il s'agit des affaires relevant de la sûreté d'Etat, est-ce que

12 le tribunal régional de Pristina était saisi de toutes ces affaires ?

13 R. Je ne comprends pas cette expression des "affaires relevant du domaine

14 de la sûreté d'Etat". A quoi pensez-vous lorsque vous dites la sûreté

15 d'Etat ?

16 Q. Les affaires relevant d'infractions pénales du terrorisme, est-ce que

17 ces affaires, est-ce que le tribunal régional de Pristina était saisi de

18 ces affaires, et exclusivement ce tribunal régional ?

19 R. Le terrorisme et les organisations terroristes, donc toutes ces

20 affaires ont été jugées par tous les autres tribunaux régionaux au Kosovo-

21 Metohija parce que ces tribunaux avaient ce type de compétence, il ne

22 s'agissait pas uniquement du tribunal régional de Pristina qui s'occupait

23 de ces affaires.

24 Q. Est-ce qu'il y avait un procureur désigné spécialement pour s'occuper

25 de ce type d'affaires au sein de ces tribunaux régionaux ?

26 R. Je ne sais pas. Il existe des procureurs régionaux et des substituts de

27 procureurs régionaux qui s'occupent de ces affaires selon l'ordre

28 d'enregistrement de ces affaires au greffe. Je ne sais pas s'il y avait un

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1 procureur spécial qui était en charge de ces affaires.

2 Q. Maintenant, j'aimerais qu'on parle de la composition des tribunaux.

3 Est-ce vrai que de 756 juges et procureurs au Kosovo, seulement 30 d'entre

4 eux étaient des Albanais du Kosovo ?

5 R. Je ne peux pas confirmer cette donnée parce que je ne sais pas quel

6 était le nombre exact de juges et de procureurs au Kosovo-Metohija. Je ne

7 peux parler que du tribunal régional de Pristina. Pour ce qui est des

8 autres tribunaux et de leur composition, je ne peux pas en parler, et je ne

9 peux pas confirmer ce chiffre.

10 Q. Au tribunal régional de Pristina, quel était le nombre de juges et de

11 procureurs ?

12 R. Je ne sais pas à quelle période vous pensez parce que la composition a

13 changé avec le temps, pouvez-vous m'indiquer la période à laquelle vous

14 vous intéressez ?

15 Q. D'abord 1998. En 1998, quel était le nombre de procureurs et de juges

16 au sein du tribunal régional de Pristina ?

17 R. Au tribunal régional de Pristina, avec le procureur régional, je pense

18 qu'ils étaient sept au total. Et pour ce qui est des juges au tribunal

19 régional de Pristina avec le président, je pense qu'ils étaient 19.

20 Q. Et parmi eux quel était le nombre d'Albanais du Kosovo ?

21 R. Au sein de notre tribunal, il y avait trois juges albanais.

22 Q. En 1999, est-ce que cela a changé, est-ce que la composition des

23 tribunaux a changé ?

24 R. Au début lorsque la guerre a commencé, nous étions tous présents là-bas

25 et j'ai déjà mentionné que l'un de nos collègues qui est mort d'infarctus,

26 nous a quitté donc, après un mois à peu près, un collègue albanais qui

27 était juge d'instruction qui travaillait avec moi a quitté Pristina avec sa

28 famille. Après quoi, pendant tout ce temps-là, il y avait un autre Albanais

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1 qui était membre de la chambre du tribunal régional de Pristina et qui

2 s'occupait des affaires au civil.

3 Q. Maintenant, j'aimerais --

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il faut qu'on tire cela au clair, pour

5 ce qui est de vos réponses concernant les chiffres eu égard aux juges et

6 aux procureurs albanais du Kosovo, ces trois Albanais du Kosovo et 19

7 juges; est-ce que cela englobe des procureurs également ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, seulement les juges.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous n'avons pas reçu de réponse

10 claire, Madame Carter, vous pouvez peut-être poser d'autres questions pour

11 clarifier cela.

12 Mme CARTER : [interprétation] Certainement, je serai brève.

13 Q. Vous avez indiqué qu'il y avait 19 personnes, c'est-à-dire 19

14 procureurs et juges, est-ce que cela englobait des procureurs et des juges

15 ?

16 R. Il s'agissait de 19 juges.

17 Q. Quel était le nombre de procureurs là-bas ?

18 R. Au tribunal régional de Pristina, il y avait un procureur qui était

19 d'appartenance ethnique turque.

20 Q. Bien. Donc, il y avait 19 juges dont trois étaient Albanais du Kosovo

21 et il n'y avait qu'un seul procureur qui était Turc, n'est-ce pas ?

22 R. Oui.

23 Q. Merci.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pour que cela ait du sens, il faut que

25 nous sachions quel était le nombre de procureurs au total.

26 Mme CARTER : [interprétation]

27 Q. Quel était le nombre de procureurs ?

28 R. J'ai déjà dit, je ne sais pas si cela a été interprété avec le

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1 procureur, ils étaient sept; un procureur et six employés du greffe.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, oui. Vous nous avez donné ce

3 chiffre, merci.

4 Mme CARTER : [interprétation]

5 Q. Maintenant, j'aimerais qu'on parle de votre travail quotidien. Vous

6 avez dit qu'avant les frappes de l'OTAN, vous vous êtes occupée des

7 constatations sur les lieux conformément aux instructions du procureur;

8 est-ce vrai ?

9 R. Oui, mais concernant les constatations sur les lieux, en tant que juge

10 d'instruction, je décidais s'il fallait aller sur les lieux de concert avec

11 le procureur. Donc, je décidais des instructions en tant que juge

12 d'instruction, la relevée de ma compétence, la décision portant sur les

13 instructions sur les lieux.

14 Q. Pourtant, avant les frappes de l'OTAN, des constatations sur les lieux

15 ont été menées exclusivement selon les instructions du procureur, n'est-ce

16 pas ?

17 R. Non. Moi, je pouvais procéder aux constatations sur les lieux avec

18 autorisation ou sans autorisation du procureur.

19 Q. Comment une affaire vous avait-elle été confiée pour ce qui est de

20 l'instruction si cela ne passait pas par le bureau du procureur ?

21 R. Il ne fallait pas avoir une demande pour procéder à des constatations

22 sur les lieux. Parce qu'en tant que juge d'instruction si j'étais de

23 service le dimanche, si quelque chose s'est passé et s'il y a des soupçons

24 suffisants qu'il s'agissait d'une infraction au pénal, en tant que juge

25 d'instruction je suis tenue de me rendre sur les lieux avec une équipe pour

26 qu'on procède aux constatations sur les lieux et c'est le service de

27 permanence du SUP de Pristina qui m'informe de ces événements. Le SUP en

28 informe en même temps le procureur de permanence.

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1 Q. Qu'en dehors du SUP et du procureur, ce sont les deux seuls moyens pour

2 vous d'être informée du besoin de vous rendre sur un lieu pour mener

3 l'enquête ?

4 R. Non, c'est le SUP qui m'informe d'un incident. Ensuite, c'est moi qui

5 décide, en consultation avec le procureur, s'il faut effectuer les

6 constatations sur les lieux. Le procureur peut me dire qu'il ne peut pas,

7 par exemple, qu'il a un empêchement, qu'il ne peut pas s'y rendre et je

8 peux le faire toute seule dans ce cas-là, si j'en décide ainsi. Ce qui est

9 important c'est que l'inspecteur du service opérationnel chargé des

10 constatations ainsi qu'un membre de la police judiciaire service

11 scientifique soit présent, ainsi que les membres de la police chargés de

12 sécuriser les lieux afin que je puisse effectuer les constatations, ainsi

13 qu'en attendant que l'équipe chargée des constatations arrive sur les lieux

14 pour empêcher que des personnes tiers s'y introduisent.

15 Q. Vous venez de dire que ce sont les membres de la police locale qui

16 sécurisaient les lieux, et vous avez également déclaré lors de

17 l'interrogatoire principal que parfois vous deviez renoncer à effectuer des

18 constatations sur les lieux pour des raisons liées à la sécurité, cela

19 arrivait-il souvent de renoncer à effectuer ces constatations pour des

20 raisons liées à la sécurité ?

21 R. En 1998, oui, pendant les bombardements, mais pas si fréquemment que

22 ça. Cela est arrivé parfois au moment où notre sécurité était menacée ou

23 parce que je n'avais tout simplement pas suffisamment de temps, soit parce

24 que j'étais déjà ailleurs pour effectuer des constatations, soit que

25 j'auditionnais des personnes dans le cadre d'une autre enquête. Dans une

26 telle situation, il pouvait arriver qu'une équipe se rende sur les lieux

27 sans juge d'instruction. Ou si le juge d'instruction est empêché de s'y

28 rendre pour une raison quelconque, les organes de l'intérieur, conformément

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1 à la loi, étaient autorisés à mener eux-mêmes cette phase de l'enquête

2 seuls et d'en informer le juge et le procureur.

3 Q. Si le MUP conduit son enquête seul, y a-t-il une limite s'agissant des

4 tâches qu'ils peuvent effectuer ?

5 R. Lors des constatations, ils établissent les traces matérielles, ils les

6 fixent à l'aide du technicien ou du membre de la police scientifique. Ils

7 devaient conserver ces traces et les transmettre au juge compétent. La

8 seule chose qu'ils n'étaient pas autorisés à faire, c'était de donner

9 l'ordre d'inspection du corps; ça, c'est quelque chose que ne peut faire

10 que le juge. S'il y avait des témoins sur les lieux ou si quelqu'un a été

11 retrouvé sur les lieux, alors ils étaient autorisés à les arrêter en

12 attendant l'arrivée du juge d'instruction. Si jamais le juge ne peut pas

13 venir, alors les personnes en question devaient se rendre au tribunal voir

14 le juge.

15 Q. Etes-vous au courant de cas où le MUP devait se rendre sur les lieux

16 effectuer des constatations dans les cas où l'auteur de l'infraction était

17 membre du MUP et que le MUP ensuite devait mener les constatations seul au

18 sujet de cette infraction ?

19 M. IVETIC : [interprétation] Pour les besoins du compte rendu, je vous

20 rappelle qu'on en a déjà parlé la semaine dernière --

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, on va laisser Mme

22 Marinkovic essayer de se rappeler elle-même de cet événement.

23 Mme CARTER : [interprétation]

24 Q. Avez-vous eu connaissance d'un cas où le MUP a dû mener l'enquête seul

25 sur une infraction comprenant l'implication d'un membre du MUP, c'est-à-

26 dire que le MUP était libre de faire ce qu'il voulait lors de cette enquête

27 parce que vous n'étiez pas là-bas vous ou un autre juge pour surveiller ?

28 R. L'enquête fait partie d'une procédure pénale. Les constatations sur les

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1 lieux en font partie, le SUP était habilité à mener les constatations sur

2 les lieux. Pendant le bombardement par exemple, je connais un cas où une

3 plainte au pénal a été déposée contre X et, conformément à l'ordre du

4 procureur, ils ont continué à recueillir les informations afin d'identifier

5 l'auteur.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que vous n'avez pas bien

7 compris la question. La question porte sur les cas d'implication d'un

8 membre du MUP où les constatations sur les lieux auraient été effectuées

9 par le MUP seul ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Le MUP ne pouvait pas mener l'enquête tout

11 seul. Ils pouvaient recueillir des informations sur la base desquelles ils

12 pouvaient dévoiler l'identité de l'auteur, mais c'est tout ce qu'ils

13 pouvaient faire.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais vous avez dit qu'ils

15 pouvaient le faire si vous étiez occupée ailleurs.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pensais aux constatations sur les lieux qui

17 font partie d'une enquête tout simplement. Avant l'établissement d'un acte

18 d'accusation, s'agissant de l'enquête, il n'y avait que moi qui pouvais la

19 diriger sur la base d'une demande ou d'un rapport déposé par le procureur

20 quand l'auteur est connu.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Maître Zecevic.

22 M. ZECEVIC : [interprétation] Lignes 15, 22, tout cela commence à être un

23 peu troublant. Le témoin a dit que l'enquête faisait partie d'une procédure

24 pénale et que les constatations sur les lieux n'étaient qu'une partie des

25 mesures d'enquête que le juge peut décider de prendre ou pas.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que ce que vous venez de nous

27 dire, Maître Zecevic, que ça découle clairement de ce que nous avons

28 entendu jusqu'à maintenant dans l'interprétation.

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1 Pourriez-vous mettre au clair quelles sont les mesures liées aux

2 constatations sur les lieux qu'ils pouvaient effectuer ou est-ce que cela

3 dépassait le cadre des constatations ?

4 Mme CARTER : [interprétation]

5 Q. Quelles sont les activités que le MUP était habilité à conduire,

6 constatations sur les lieux ou autre chose ?

7 R. S'agissant des constatations sur les lieux, ce n'est qu'un début,

8 ça veut dire que la procédure pénale en soi n'a pas encore démarré. Les

9 organes de l'intérieur pouvaient sous mon autorité conduire des

10 constatations sur les lieux.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Carter, je pense qu'il y a un

12 problème de langue ici. Je pense que ce que vous considérez être une

13 enquête, Madame Carter, au sein du bureau du Procureur ne correspond pas

14 tout à fait à ce qui est considéré comme une enquête dans le système serbe.

15 Peut-être que si vous posiez la question si les membres du MUP devaient

16 agir en tant que détectives pour établir s'il y avait un fondement pour

17 démarrer l'enquête, peut-être que Mme Marinkovic alors comprendrait la

18 question différemment et pourrait vous donner une réponse appropriée. Je

19 pense que le problème découle de la différence de signification du terme

20 "enquête" dans les deux systèmes.

21 Mme CARTER : [interprétation] Très bien. Merci, Monsieur le Président

22 Q. Est-ce que le MUP agissait en tant que détective, c'est-à-dire au nom

23 de quelqu'un qui accusait un membre du MUP d'un meurtre ou d'un autre acte

24 répréhensible, ou pas ?

25 R. S'agissant de l'auteur d'une infraction, quel qu'il soit, le MUP est

26 autorisé conformément à l'ordre du procureur public à recueillir les

27 informations, d'auditionner les témoins afin de dévoiler l'identité de

28 l'auteur quel qu'il soit, civil, policier, femme, homme, mineur, majeur. Il

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1 le faisait dans le cadre de ses attributions et cela comprend évidemment

2 les policiers. Je me suis occupée d'un grand nombre d'affaires où les

3 auteurs étaient des policiers, s'agissant du crime de meurtre par exemple.

4 Je ne peux pas vous donner plus de détails comme ça, mais il y a eu de

5 telles affaires ?

6 Q. En dehors de cet exemple singulier qui vous a été présenté vendredi

7 dernier portant sur deux policiers qui ont été arrêtés, y a-t-il eu

8 d'autres affaires où des policiers étaient les auteurs des infractions ?

9 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je soulève une

10 objection cela ne relève pas de la juridiction de ce juge. Nous avons

11 entendu déjà dire qu'il y a eu des tribunaux à Prizren et ailleurs --

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais peut-être que le juge peut

13 nous répondre sur la base de ses connaissances et expériences personnelles.

14 Mme CARTER : [interprétation]

15 Q. Madame Marinkovic, vous nous avez indiqué dans votre réponse précédente

16 qu'il y a eu "un certain nombre d'affaires" que vous avez conduites où vous

17 vous êtes "occupée de la phase d'enquête et où étaient impliqués des

18 policiers en tant qu'auteurs d'infractions…"

19 En dehors des exemples mentionnés vendredi dernier, y a-t-il eu d'autres

20 cas semblables où vous avez mené l'enquête ?

21 R. Oui, je me souviens pendant les bombardements, un meurtre a été commis.

22 J'ai effectué les constatations sur les lieux et j'ai mené l'enquête. Il

23 s'agissait d'un policier de réserve, un certain Marusic Slobodan, alias

24 Boban. Une personne a été tuée dans un café. Quand il est arrivé dans ce

25 café, il a retrouvé sur place beaucoup de personnes parmi lesquelles un

26 militaire en permission blessé qui a succombé à ses blessures lors de son

27 transfert vers l'hôpital. Cette personne a été arrêtée, j'ai mené les

28 constatations sur les lieux, et si je me souviens bien, cette personne a

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1 été condamnée.

2 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Juste une précision, Madame le juge.

3 Vous nous avez dit que le MUP ou d'autres forces pouvaient arrêter

4 quelqu'un s'ils le retrouvent en train de perpétrer un acte ou s'ils

5 établissent que c'est l'auteur de l'infraction en question. Quelle est la

6 période de temps pendant laquelle il peut être détenu avant de comparaître

7 devant le juge pour être formellement arrêté ou mis en accusation ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Avant la guerre et la déclaration d'état de

9 guerre conformément au code de procédure pénale, le MUP pouvait arrêter

10 quelqu'un et le garder en détention provisoire jusqu'à ce que l'acte

11 d'accusation contre cette personne soit --

12 M. FILA : [interprétation] Je pense que vous avez fait ici un lapsus,

13 vous avez dit quand le MUP pouvait tuer quelqu'un, vous vouliez dire quand

14 le MUP arrêtait quelqu'un.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr. La personne pouvait rester en

16 détention provisoire pendant trois jours, 72 heures, et pendant cette

17 période-là, ils devaient déposer une plainte contre la personne en

18 question, soit devant le juge d'instruction, soit devant le procureur

19 public. Pendant la guerre un décret a été adopté qui modifiait certaines

20 dispositions du code de procédure pénale notamment en ce qui concerne les

21 délais, et la détention provisoire pouvait alors durer jusqu'à 30 jours.

22 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Que se passait-il alors par la suite,

23 est-ce que vous rédigiez une ordonnance ? Comment vous faisiez ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Après son arrestation et sa détention

25 provisoire quand il comparaît devant le juge d'instruction, après son

26 audition, conformément à la demande de mise en examen, je décide si cette

27 demande de mise en examen émanant du procureur public est fondée et je

28 décide de prolonger sa détention provisoire. Si tel est le cas,

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1 conformément à la décision que je prends - la prolongation de la détention

2 provisoire - la personne en question est maintenue en détention pendant

3 toute la durée de l'enquête.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Carter.

5 Mme CARTER : [interprétation]

6 Q. Vous nous avez parlé de ce meurtre commis par Slobodan Marusic, et

7 vendredi dernier nous avons parlé de Nikolic et de Djeletovic. Y a-t-il

8 d'autres cas, à votre connaissance, d'implication des membres du MUP dans

9 des meurtres et d'autres actes de telle nature ?

10 R. Oui, il y a eu d'autres cas. J'ai mené l'enquête contre Dragan Matic ou

11 Mitic, également policier, s'agissant du meurtre d'un civil.

12 Q. Quand est-ce que cela s'est passé ?

13 R. Peut-être fin 1997 ou -- je ne sais pas à quel moment cela s'est passé;

14 mais je me souviens bien que c'était une affaire impliquant un policier.

15 Puis il y a eu une autre affaire concernant un policier, je crois qu'il

16 s'appelait Milenkovic. Il s'agissait-là également du meurtre d'un civil;

17 les deux incidents ont eu lieu avant 1998. Pour toutes les trois affaires,

18 je sais que les auteurs ont été mis en accusation et qu'à l'issue d'un

19 procès au pénal, ils ont été condamnés. Mais je ne sais pas exactement

20 quelle était la peine prononcée à leur égard.

21 Q. Savez-vous s'il y a eu d'autres meurtres commis en 1998 et 1999 par des

22 policiers, en dehors de ceux que vous venez de mentionner ?

23 R. En dehors des affaires que je viens de mentionner qui concernent le

24 crime de meurtre, dans mon tribunal je ne me souviens pas qu'il y en ait

25 eu. Il y en a eu d'autres infractions, mais s'agissant de meurtres, je ne

26 me souviens pas d'autres affaires en dehors de celles que je viens de

27 mentionner.

28 Q. S'agissant d'actes ou de crimes contre l'intégrité physique, les

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1 injures graves, est-ce que vous avez eu de tels cas, ou des vols qualifiés,

2 des cas de violence qualifiée, et cetera ?

3 R. Oui, je me souviens d'une affaire de banditisme.

4 Q. A quel moment ?

5 R. Je pense que cela s'est passé à peu près au début de la guerre. La

6 procédure a été engagée, une plainte au pénal a été déposée auprès du

7 procureur régional, mais l'affaire est restée à Pristina. Il n'y a pas eu

8 de suite pour des raisons que je vous ai expliquées et comme l'auteur

9 n'était pas en détention provisoire, alors le procureur ne pouvait passer

10 que par des canaux réguliers et mener l'enquête de la manière prescrite

11 dans de tels cas. S'agissant des crimes, des crimes contre les biens, cela

12 relevait des cours municipales. Il y a eu beaucoup de plaintes déposées

13 portant sur ces infractions-là, mais elles ne comprenaient pas la détention

14 provisoire.

15 Q. Bien. Nous avons entendu des dépositions et beaucoup de preuves portant

16 sur les pillages en temps de guerre commis par des membres de la VJ et du

17 MUP, est-ce que vous avez eu affaire à des membres du MUP impliqués dans

18 les crimes contre les biens, qui donc devaient comparaître devant les cours

19 municipales ?

20 R. Quand vous dites "pillage", c'est un terme très général. Il faudrait

21 être un peu plus précis, il s'agit du vol, du vol qualifié, tout cela sont

22 des crimes contre les biens ainsi que le vol, et tout cela relève de la

23 compétence des cours municipales.

24 Q. Pourriez-vous nous décrire ce que c'est le vol aggravé pour vous ? Quel

25 élément doit comprendre cet acte pour relever de la cour municipale ?

26 R. Si je me souviens bien le vol simple n'est pas prévu par le code pénal.

27 M. ZECEVIC : [interprétation] Juste un problème de traduction, parce qu'on

28 parle ici du vol et non pas de pillage. Il s'agit donc du simple vol ou du

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1 vol qualifié.

2 Mme CARTER : [interprétation] Bien.

3 Q. En général, dans beaucoup de systèmes quand on dit que l'infraction est

4 "aggravée" ou "qualifiée," cela veut dire que l'infraction elle-même a été

5 commise avec violence. Est-ce que cela correspond à la notion d'"aggravé"

6 ou "qualifié" du code pénal serbe ?

7 R. Voilà, par exemple, l'exemple du vol simple ou vol qualifié, le vol

8 c'est tout simplement l'acte de s'approprier la propriété de quelqu'un

9 d'autre, les biens de quelqu'un d'autre. Le vol aggravé, par exemple, c'est

10 quand il y a le vol avec effraction.

11 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Bien. Le mieux serait d'illustrer ça

12 par des exemples. Imaginons qu'une voiture est arrêtée sur l'autoroute où

13 les personnes dans la voiture sont blessées, qu'on leur arrache leurs

14 affaires, comment on appellerait cela, est-ce que ce serait le vol aggravé

15 et comment ça serait jugé ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] L'exemple que vous venez de citer pour nous

17 représente l'acte de banditisme, parce que le banditisme pour nous comprend

18 le vol par la force.

19 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Oui, c'est ce que Mme Carter essaie

20 de vous expliquer. Jusqu'à maintenant elle ne parlait pas de vol, vol

21 simple.

22 N'est-ce pas, Madame Carter ?

23 Mme CARTER : [interprétation] Oui, exactement.

24 Q. Nous essayons de voir quel type d'infractions relève de quelles

25 instances. Alors, quels sont les crimes contre les biens qui relèvent des

26 cours municipales ? Est-ce qu'il peut arriver qu'un vol qui est effectué

27 avec l'usage de force contre la victime, est-ce qu'il peut arriver qu'une

28 telle infraction soit jugée devant une cour municipale ?

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1 R. Les vols et les vols qualifiés relevaient des cours municipales, et

2 cela tout simplement à cause de la sanction encourue. Les tribunaux

3 municipaux sont habilités de connaître des affaires sanctionnées d'une

4 peine de prison de --

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Zecevic.

6 M. ZECEVIC : [interprétation] Tout d'abord, le témoin parle très vite. Il

7 serait bien qu'elle ralentisse parce que ce que l'on entend en

8 interprétation n'est pas exactement ce qu'elle est en train de dire. En

9 fait, le code de procédure pénale dont on parle ici est très strict, et

10 j'essaierai maintenant de vous expliquer comme cela se passe. Les cours

11 municipales sont habilitées --

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Essayez d'utiliser le terme que nous

13 avons utilisé jusqu'à maintenant, n'introduisez pas de nouveaux termes.

14 M. ZECEVIC : [interprétation] Bien. Les tribunaux de district sont

15 habilités de juger dans les affaires portant sur des crimes sanctionnés de

16 peine de prison de dix ans ou plus. Les cours municipales sont habilitées

17 de juger, de connaître des affaires où l'auteur encoure une peine

18 inférieure à dix ans.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. C'est peut-être la théorie, mais

20 on parlait ici également des cours municipalités et des affaires où la

21 détention provisoire n'est pas prévue, par exemple, pour le vol ou pour les

22 crimes contre les biens. Je sais qu'en théorie c'est différent, mais --

23 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, mais ce n'est pas ce que le témoin a

24 dit, c'est pour ça que je me suis levé.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourriez-vous peut-être en poser des

26 questions concrètes, illustrer cela de quelques exemples concrets pour que

27 le témoin puisse nous expliquer comment cela se passait en pratique ?

28 Mme CARTER : [interprétation] Monsieur le Président, la raison pour

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1 laquelle cette question a été posée est parce que nous avons eu jusqu'ici

2 une série de documents que la Défense a proposés au versement au dossier et

3 qui ont été versés au dossier pour ce qui est des instructions et des

4 tribunaux au pénal qui ont été saisis de certaines affaires. Jusqu'ici le

5 témoin a indiqué qu'il y a deux tribunaux séparés, et la plupart des

6 infractions pénales sont des infractions pénales contre les biens, à savoir

7 vol, vol à main armée, et cetera, ce type d'infraction pénale, et il a été

8 indiqué qu'il y avait un système judiciaire qui fonctionnait. J'essaie

9 d'explorer cela pour voir s'il y a une différence entre les tribunaux

10 municipaux et régionaux et comment ils fonctionnent.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais tout cela se trouve dans les

12 documents, n'est-ce pas ?

13 Mme CARTER : [interprétation] Non, pas vraiment Monsieur le Président. Il

14 n'y avait jamais eu d'indications selon lesquelles il y avait deux systèmes

15 judiciaires séparés parce que cela est toujours indiqué dans des résumés

16 que des crimes, des infractions pénales contre les biens et contre

17 l'intégrité physique, les coups et blessures relèvent de même pièces à

18 conviction. Et si c'est comme cela, on peut en conclure qu'il s'agissait du

19 même système judiciaire qui s'occupait de cela, mais il semble maintenant

20 qu'il y a deux systèmes judiciaires séparés, et j'essaie d'explorer ce

21 point.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais nous n'avons pas de documents par

23 rapport aux procédures pénales en Serbie où il est dit qu'il y a des

24 tribunaux municipaux et des tribunaux régionaux et qu'ils ont des pouvoirs

25 différents pour ce qui est du prononcé des peines.

26 Mme CARTER : [interprétation] Il est indiqué qu'il y a des différents

27 pouvoirs et compétences pour ce qui est du prononcé des peines; mais il y a

28 une différence entre les qualifications juridiques des infractions pénales,

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1 vol, vol à main armée, comment cela dépend de l'interprétation de ces

2 infractions pénales. J'essaie d'explorer cela avec ce témoin, ce qui est

3 envisagé, ce qui est visé dans les lois pour ce qui est des tribunaux

4 municipaux et des tribunaux régionaux.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc vous avez à poser questions

6 simples pour que tout cela soit clair, sinon la confusion sera semée pour

7 ce qui est de l'interprétation.

8 M. FILA : [interprétation] Les tribunaux en Serbie, les tribunaux

9 municipaux s'occupent des vols à la tire ou des infractions pénales

10 commises par les personnes en état d'ébriété, et cetera, et cetera --

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Fila, il faut que je vous

12 interrompe et je m'en excuse parce que je pense que ce n'est pas le moment

13 approprié pour soulever de tels arguments. Si nous considérons que les

14 questions ne nous seront pas utiles à la fin de l'affaire, nous allons

15 intervenir, mais l'un des éléments de la thèse de l'Accusation est le

16 suivant : le système ne fonctionnait pas comme il fallait qu'il fonctionne.

17 Que vous nous dites cela et que vous nous dites ce qu'était la situation,

18 vous, vous n'êtes pas témoin conformément à la liste 65 ter, et vous n'êtes

19 pas expert sur le terrain. Si nous avons besoin de consulter des conseils,

20 nous allons nous adresser à vous. Il ne faut pas maintenant porter

21 préjudice au contre-interrogatoire, on va s'occuper de cela plus tard,

22 merci.

23 [La Chambre de première instance se concerte]

24 Mme CARTER :

25 Q. [aucune interprétation]

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Juste un instant, Madame Carter.

27 [La Chambre de première instance se concerte]

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Carter, vous pouvez poursuivre.

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1 Mme CARTER : [interprétation]

2 Q. Il faut qu'on essaie de tirer un point au clair. Pour cela je vais vous

3 poser une série de questions hypothétiques après quoi vous pourriez me

4 donner des réponses pour dire si les tribunaux régionaux ou municipaux ont

5 été saisis de telles affaires. Par exemple, si une personne entre dans la

6 cour d'une maison et vole un bien, d'abord quelle est la qualification

7 juridique de cette infraction pénale et quel tribunal serait saisi de cela

8 ?

9 R. "Les biens d'autrui" c'est une expression qui englobe beaucoup de

10 biens, immobiliers, mobiliers et d'autres objets parce qu'il s'agit d'un

11 élément constitutif de l'infraction pénale en question; la propriété

12 qu'est-ce que cela englobe.

13 Q. Bien. Si une personne entre dans la cour d'une autre maison et vole une

14 voiture, comment s'appelle cette infraction pénale et quel tribunal serait

15 saisi de cette affaire.

16 R. S'il s'agit d'un véhicule à moteur, cela peut être l'infraction pénale

17 du vol ou on peut lui donner une autre qualification juridique. Il s'agit

18 du tribunal municipal qui est compétent dans cette affaire. Si le véhicule

19 n'est pas ouvert et si l'auteur de l'infraction pénale ouvre la portière du

20 véhicule par la force, ensuite met la machine en route en utilisant un

21 moyen approprié, il s'agirait d'un vol qualifié parce qu'il s'agit du vol à

22 effraction pour s'introduire dans le véhicule. Il s'agit dans ce cas-là du

23 vol qualifié, mais encore une fois c'est le tribunal municipal qui serait

24 saisi de cette affaire.

25 Q. Maintenant parlons des maisons. Si je m'introduis par effraction dans

26 une maison, j'enfonce la porte, j'entre dans la maison et vole la télé.

27 Est-ce qu'il s'agirait d'un vol qualifié ?

28 R. Oui.

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1 Q. Et cela relèverait de la compétence du tribunal municipal encore une

2 fois ?

3 R. Oui.

4 Q. Maintenant le même scénario avec des éléments complémentaires.

5 J'enfonce la porte de la maison, je m'introduis avec effraction, je suis

6 dans la maison, il y a des gens dans la maison et je leur prends leurs

7 bijoux par la force. De quelle infraction pénale il s'agit et quel est le

8 tribunal qui est compétent pour juger cette affaire ?

9 R. Si c'était "par la force", il faut déterminer si c'était par coercition

10 en utilisant la violence, la force, et cetera, il s'agirait de vol à main

11 armée ou de vol avec l'utilisation de la violence ou de la force, et cette

12 affaire relèverait de la compétence du tribunal régional.

13 Q. La différence est si la violence est utilisée contre une personne, cela

14 est qualifié d'infraction pénale de vol avec utilisation de violence et

15 cela relève de la compétence du tribunal régional ?

16 R. Il y a trois ou quatre alinéas qui prévoient la qualification juridique

17 de cette infraction au pénal et il y a des peines différentes qui sont

18 prévues pour cette infraction au pénal dépendant de la qualification

19 juridique visée à ces alinéas.

20 Q. Vous avez dit avant que lorsqu'il s'agit du tribunal municipal qui est

21 saisi d'une affaire, la détention provisoire n'est pas prévue lorsqu'il n'y

22 a pas de violence ou de force utilisée contre une victime ?

23 R. Non, ce n'est pas vrai. La détention est une mesure pour assurer la

24 présence du prévenu. Cela n'a rien à voir avec la qualification juridique

25 de l'infraction pénale commise.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Permettez-moi d'intervenir parce que

27 ce n'était pas la question, bien que j'aie compris pourquoi vous avez

28 répondu de cette façon à cette question. A un moment donné, on allait avoir

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1 une expression en anglais différente que vous avez utilisée dans l'une de

2 vos réponses. Si une personne est responsable de vol qualifié, est-ce que

3 cette personne peut être condamnée à une peine d'emprisonnement ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. S'il y a des bases légales pour pouvoir

5 rendre une décision concernant la détention, par exemple, pour que ces

6 personnes ne s'évadent pas et ensuite n'influent sur les témoins ou des

7 complices --

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Arrêtez-vous. Je ne comprends pas ce

9 point. Je ne vous ai pas posé la question concernant la détention

10 provisoire, j'ai utilisé l'expression "peine d'emprisonnement", prononcé de

11 la sentence. Si une personne est déclarée coupable de vol qualifié, est-ce

12 que contre cette personne on peut prononcer une peine d'emprisonnement.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelle est la peine maximale qu'on

15 peut prononcer devant le tribunal municipal, est-ce que c'est la peine

16 d'emprisonnement de dix ans ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et si c'est le tribunal régional qui

19 prononce la peine pour le vol avec l'utilisation de la force ou de la

20 violence, comme vous nous avez dit avant, est-ce qu'une peine

21 d'emprisonnement de moins de 10 ans peut être prononcée contre les auteurs

22 de telles infractions pénales ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

25 Madame Carter, poursuivez.

26 Mme CARTER : [interprétation]

27 Q. Maintenant j'aimerais qu'on parle du concept de dépôt direct, je vais

28 utiliser cette expression. Hier vous nous avez dit que les instances du

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1 ministère de l'Intérieur qui déposaient des plaintes au pénal pour des

2 infractions pénales, des plaintes au pénal pouvaient être déposées par

3 d'autres organes d'Etat ainsi que par des citoyens, personnes physiques.

4 Donc tous les citoyens avaient le droit de déposer une plainte au pénal ?

5 R. Oui.

6 Q. Est-ce qu'une plainte au pénal déposée par un citoyen aurait été

7 déposée à vous ou au MUP ?

8 R. Le citoyen qui sait à quel organe il faut qu'il dépose la plainte au

9 pénal peut le faire directement au MUP ou au procureur public. Après quoi

10 le procureur public peut renvoyer la plainte au pénal au MUP pour que le

11 MUP explore plus les allégations figurant dans la plainte au pénal. Selon

12 les dispositions légales, la plainte au pénal n'est pas déposée au juge

13 d'instruction, mais si le citoyen n'est pas au courant de la procédure et

14 s'il dépose la plainte au pénal au juge d'instruction, le juge

15 d'instruction transmet la plainte au pénal, soit au procureur public soit

16 au SUP.

17 Q. Si la personne ne connaît pas suffisamment bien la procédure à

18 appliquer et si vous avez appris qu'une infraction au pénal avait été

19 commise, est-ce que cela relèverait de votre responsabilité en tant que

20 juge d'instruction de déposer une plainte au pénal ?

21 R. Non, j'envoie la plainte au pénal au procureur public, parce que c'est

22 le procureur public qui est le seul compétent pour examiner la plainte au

23 pénal et pour voir si une infraction au pénal a été commise et qui est

24 l'auteur de l'infraction pénale.

25 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] J'ai besoin de savoir un peu plus sur

26 ce point. Supposons que personne ne dépose une plainte au pénal et qu'une

27 infraction pénale a été effectivement commise. Qui dans de telles

28 circonstances dépose une plainte au pénal ? Est-ce que c'est la police --

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1 comment le procès au pénal est intenté ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] La police qui a appris qu'une infraction

3 pénale a été commise est tenue de déposer une plainte au pénal au procureur

4 public indépendamment du fait que l'auteur est connu ou inconnu. Mais s'il

5 s'agit d'une infraction pénale contre laquelle un procès doit être intenté

6 officiellement, dans ce cas-là le MUP a une obligation de déposer une

7 plainte au pénal.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Carter, continuez.

9 Mme CARTER : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher la pièce P3095

10 dans le système du prétoire électronique ?

11 Q. Madame, saviez-vous que le 10 avril 1986 le président du tribunal,

12 Djordje Aleksic - il s'agit du tribunal régional de Pristina - a émis un

13 mandat qui indique qu'il faut donner la priorité aux affaires dans

14 lesquelles les victimes étaient Serbes et Monténégrins ? Saviez-vous cela ?

15 R. Djordje Aksic était le président du tribunal à l'époque, et non pas

16 Djordje Aleksic.

17 Q. Etiez-vous au courant de cette décision au moment où vous êtes devenue

18 juge là-bas à ce tribunal en 1984 ?

19 R. Beaucoup de temps s'est écoulé depuis, mais je me souviens qu'on a reçu

20 de telles instructions données par le président du tribunal.

21 Q. Saviez-vous que ces instructions ont été révoquées au tribunal régional

22 de Pristina ?

23 R. Je ne sais pas. Les instructions ne concernaient peut-être que cette

24 année-là parce qu'au début de chaque année de nouvelles instructions nous

25 étaient données. Ces instructions ont été données parce que pendant cette

26 période-là, un grand nombre de Serbes et de Monténégrins ont commencé à

27 quitter le Kosovo-Metohija parce qu'ils ont subi différentes pressions et

28 on nous a donné des instructions comment procéder dans de tels cas.

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1 Q. Vendredi dernier, vous avez déclaré que --

2 R. Je lis dans le document qu'il y avait un délai pour rédiger des

3 rapports. Tous les juges jusqu'au 18 avril 1986 devaient rédiger des

4 rapports spéciaux concernant ces affaires.

5 Q. Vous dites que ce type d'instruction au tribunal régional de Pristina a

6 été donné seulement en 1986 et que cette instruction n'a pas été appliquée

7 plus tard ?

8 R. Je ne sais pas, je ne me souviens pas, je n'ai pas fait beaucoup

9 attention à ce type de documents.

10 Q. Je vous pose cette question parce que lors de l'interrogatoire

11 principal vous avez déclaré qu'il s'agissait d'une région où les Serbes et

12 les Albanais étaient en bons termes, mais ici il semble que certaines

13 victimes aient bénéficié d'un statut préférentiel. J'essaie de voir quand

14 ce traitement préférentiel a été appliqué ?

15 R. Je ne suis pas d'accord avec vous pour dire qu'il s'agissait d'un

16 traitement privilégié parce qu'il s'agissait d'une sorte de mise à jour

17 d'un certain nombre de tels cas. Pour ce qui est de mes déplacements et du

18 milieu où j'habitais, il n'y avait pas de problèmes concernant mes contacts

19 avec les membres appartenant à d'autres groupes ethniques.

20 Q. Pourquoi cette instruction existait au tribunal régional de Pristina

21 portant sur la mise à jour des affaires impliquant des Serbes et des

22 Monténégrins exclusivement par rapport aux affaires qui impliquaient les

23 Albanais du Kosovo ?

24 R. Je vais vous dire pourquoi. A l'époque, il y avait beaucoup plus de

25 menaces des droits de l'homme des Serbes et des autres que des Albanais au

26 Kosovo. Je suppose que c'était la raison pour laquelle l'instruction a été

27 donnée pour empêcher les gens de partir et pour accélérer un peu le travail

28 pour ce qui est des affaires où des Serbes et des Monténégrins étaient les

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1 victimes.

2 Q. Tout cela s'est passé à peu près en même temps où le discours à Kosovo

3 Polje a été tenu et où Milosevic a dit : Personne ne vous battra. Est-ce

4 vrai ?

5 R. Je ne me souviens pas de cela. Vous disposez peut-être du document où

6 cela est indiqué, mais je ne m'occupais jamais d'affaires politiques et je

7 ne peux pas vous en dire plus là-dessus.

8 Q. Pourtant les membres de votre ménage ont été impliqués aux activités

9 politiques, n'est-ce pas ? Votre mari en effet a pris part dans ces choses,

10 n'est-ce pas ?

11 R. Si vous disposez du document dans lequel cela est indiqué, alors

12 c'était ainsi.

13 Q. En fait, vous avez témoigné à cet égard dans l'affaire Milosevic,

14 n'est-ce pas ? Vous avez témoigné que votre mari avait pris part dans des

15 protestations pour que les Serbes obtiennent le statut qu'ils méritaient au

16 Kosovo-Metohija, c'était votre témoignage dans l'affaire Milosevic, il

17 s'agit de vos propos à la page 37 931, lignes 17 à 19 ?

18 R. Si j'ai dit cela, cela devrait être exact. Je maintiens le témoignage

19 que j'ai donné.

20 Q. Très bien.

21 Mme CARTER : [interprétation] Maintenant j'aimerais qu'on affiche 6D586.

22 Q. Il s'agit d'une pièce à conviction qui a été versée au dossier en tant

23 que votre déclaration 92 ter et ce résumé a été utilisé dans de nombreux

24 cas. Vous avez indiqué qu'il y avait des affaires dans ce résumé, que vous

25 avez essayé de les sauvegarder au moment où vous avez quitté le Kosovo et

26 qui étaient en votre possession. Est-ce qu'il s'agit de 6D586, est-ce que

27 ce sont les documents originaux du tribunal ?

28 R. Je n'ai pas dit cela. Il ne s'agit que de certains éléments de ces

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1 affaires, des actes d'accusation ou d'autres pièces à conviction parce que

2 les autres documents concernant mon travail et le travail de mes collègues

3 sont restés au tribunal régional de Pristina après la signature de l'accord

4 de Kumanovo. Les représentants du Tribunal de La Haye, en présence des

5 Albanais et des soldats de la KFOR - au moins ils se sont présentés comme

6 tels - ont saisi tous les dossiers d'affaire du tribunal et dont une liste

7 n'a pas été dressée. Je ne sais pas si ces dossiers ont été retournés ou se

8 trouvent ici au Tribunal.

9 Q. Madame, j'aimerais vous indiquer que dans l'affaire Milosevic à la page

10 du compte rendu 37 727, c'est dans le système du prétoire électronique à la

11 pièce P3115, page 15, vous avez dit que ce sont des dossiers que vous avez

12 essayé de sauvegarder lorsque vous avez quitté le Kosovo, c'est à la page

13 16, et vous avez dit que c'est quelque chose qui est resté en votre

14 possession, et cela a été dit dans l'affaire Milosevic lorsque vous avez

15 témoigné de l'origine de ces documents. J'essaie de déterminer si ces

16 documents étaient des dossiers d'affaire du tribunal ?

17 R. Oui.

18 Q. Est-ce qu'il s'agissait des originaux des dossiers d'affaire du

19 tribunal qui se trouvaient en votre possession ou de copies ?

20 R. Ce sont des photocopies. J'avais des originaux en ma possession.

21 Q. Donc dans vos archives personnelles, vous avez gardé des originaux de

22 dossiers d'affaire qui sont mentionnées dans la pièce 6D586 ?

23 R. Oui.

24 Q. Pourquoi n'auriez-vous pas laissé des dossiers officiels d'affaire au

25 tribunal et non pas les prendre avec vous ?

26 R. J'ai dit que les dossiers officiels sont restés au tribunal. Là il

27 s'agit d'un exemplaire seulement parce que l'acte d'accusation est

28 dactylographié en plusieurs exemplaires et mes collègues m'ont donné un

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1 exemplaire parce que j'ai mené l'instruction dans cette affaire, et j'ai

2 voulu suivre l'évolution de ces affaires, cela est permis.

3 Q. J'ai une brève question concernant des dossiers d'affaire du tribunal.

4 Dans des dossiers d'affaire officiels du tribunal, quel est le nom utilisé

5 pour les Albanais ? Pouvez-vous nous dire ce nom et l'épeler ?

6 R. C'était le nom Albanais. Comment autrement ? Je n'ai pas compris cette

7 question.

8 Q. Dans ce prétoire nous avons entendu le terme Siptar et d'autres termes

9 tels Albanais. J'aimerais savoir pour ce qui est des dossiers d'affaire

10 officiels du tribunal quel était le terme utilisé pour désigner des membres

11 du groupe ethnique albanais ?

12 R. C'était Albanais, et il y avait des interprètes assermentés auprès du

13 tribunal pour les Albanais.

14 Q. Très bien. Pouvez-vous épeler ce nom qui a été pour désigner des

15 Albanais dans des dossiers d'affaire officiels du tribunal.

16 M. ZECEVIC : [interprétation] Je m'excuse. Monsieur le Président, il faut

17 que je soulève une objection à ce stade, parce que je pense que mon

18 éminente collègue devrait poser des questions pour savoir de quelle langue

19 il s'agit parce que nous savons que l'albanais et le serbe sont des langues

20 utilisées au Kosovo en tant que langues officielles.

21 Mme CARTER : [interprétation] Je vais poser des questions plus spécifiques.

22 Q. Dans la pièce 6D588, c'est pour l'année 1993, je vais vous dire que le

23 nom utilisé dans des dossiers d'affaire originaux du tribunal pour désigner

24 les Albanais est Albanac, A-l-b-a-n-a-c, et non pas Siptar. Etes-vous au

25 courant de cela ? Pouvez-vous regarder la première page du document ? Tous

26 ces prévenus ou accusés sont d'appartenance ethnique albanaise et il est

27 indiqué qu'il s'agit des Albanais, et c'est au début de la troisième ligne.

28 R. Oui.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce que vous devriez faire, c'est ce

2 qu'a proposé Me Zecevic pour que le compte rendu soit clair, Madame Carter.

3 Déjà en quelle langue est ce document ?

4 Mme CARTER : [interprétation]

5 Q. Quelle est la langue officielle du tribunal utilisée ici ?

6 R. Les deux langues étaient des langues officielles, le serbe et

7 l'albanais, donc on utilisait les deux langues. Si on rédigeait un document

8 en albanais et si l'intéressé le demandait on traduisait en albanais.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et quelle est la langue ? Non, non.

10 Poursuivez.

11 Mme CARTER : [interprétation]

12 Q. Pourriez-vous nous dire en quelle langue est rédigé le document 6D588 ?

13 R. L'acte d'accusation ci-présent est rédigé en serbe, mais il a également

14 été rédigé en albanais et remis aux personnes accusées dans leur langue.

15 Q. Oui, mais dans ce document en serbe le terme désignant la nationalité

16 et l'appartenance ethnique des accusés est "Albanac" l'albanais, n'est-ce

17 pas ?

18 R. Oui.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelle est la langue qu'on voit ici à

20 l'écran ?

21 Mme CARTER : [interprétation] Le serbe.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je demande au témoin.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais l'acte d'accusation qu'on voit à gauche

24 il est en serbe, et je suppose que ce qui est à droite que c'est en

25 anglais.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Et cet acte d'accusation en serbe

27 qu'on voit à gauche est écrit en caractère latin, c'est parce que les

28 accusés sont des Albanais ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Ça dépend tout simplement de la machine à

2 écrire qu'on utilisait pour dactylographier ces documents. Alors, à

3 l'époque on avait des machines à écrire à caractères latins.

4 Mme CARTER : [interprétation]

5 Q. J'attire votre attention sur le document 6D589. C'est un document de

6 1995. Tout d'abord, pourriez-vous nous dire quelle est la langue utilisée

7 dans ce document ?

8 R. Vous allez afficher le document à l'écran ?

9 Q. Il sera affiché à l'écran, mais il se trouve également dans le

10 classeur.

11 R. Le 589, n'est-ce pas ?

12 Q. Oui. Quelle est la langue de ce document, 6D589 ?

13 R. Serbe.

14 Q. Encore une fois le mot désignant l'appartenance ethnique albanaise dans

15 ce document serbe est le mot "Albanac", dans ce document officiel émanant

16 d'un tribunal en 1995, n'est-ce pas ?

17 R. Oui.

18 Q. Passons maintenant à l'acte d'accusation datant de 1997, 6D587. Quelle

19 est la langue utilisée dans ce document ?

20 R. Serbe, la langue serbe.

21 Q. Ici on ne dit pas "Siptar", mais "Albanac"; donc pas "Siptar," mais

22 "Albanais" pour indiquer l'appartenance ethnique des accusés ?

23 R. Oui.

24 Q. Bien. Nous ne disposons pas de document postérieur à 1997, alors je

25 dois maintenant vous poser une question directe, c'est-à-dire y a-t-il eu

26 des changements concernant les documents émanant du tribunal régional de

27 Pristina s'agissant de la manière d'indiquer l'appartenance ethnique

28 albanaise ? A-t-on commencé à utiliser le terme "Siptar" au lieu du terme

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1 "Albanac", "Siptar" au lieu de "Albanais" ?

2 R. Non, jamais.

3 Q. Est-ce que vous vous attendriez à retrouver le terme "Siptar" dans un

4 document de nature juridique ?

5 R. Je ne sais pas. Je ne comprends pas votre question.

6 Q. On a entendu des personnes ici dire que le terme "Siptar" est un terme

7 comme un autre, qu'il n'y a aucune notion péjorative liée à ce terme.

8 Alors, moi je vous demande si vous vous attendriez à voir le terme "Siptar"

9 dans un document officiel, un document juridique, un acte d'accusation, une

10 ordonnance, et cetera.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic.

12 M. IVETIC : [interprétation] Je laisserai le témoin répondre, et après je

13 ferai un commentaire.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

15 Madame Carter.

16 Mme CARTER : [interprétation]

17 Q. Madame le Témoin, pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, si vous

18 trouvez normal de voir le terme "Siptar" utilisé dans un document officiel

19 juridique, c'est-à-dire un acte d'accusation, un arrêt, une ordonnance, et

20 cetera ?

21 R. Ce que je peux vous dire c'est basé sur mon expérience et le temps très

22 long que j'ai passé à Pristina depuis 1976, les personnes originaires de

23 cette région.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non. On ne vous demande pas de votre

25 expérience dans votre vie en dehors du travail de juge. Cette question

26 porte exclusivement sur les documents de nature juridique, donc les actes

27 d'accusation, les ordonnances, et cetera, et cetera.

28 Mme CARTER : [interprétation]

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1 Q. Je vais répéter la question : dans des documents émanant du tribunal

2 qu'il s'agisse des actes d'accusation, des arrêts, des ordonnances ou un

3 autre document, est-ce que vous trouveriez normal de voir le terme "Siptar"

4 ?

5 R. Dans le cadre de mon travail nous inscrivions toujours "Albanais",

6 c'est ce qu'ils disaient, mais lors des audiences quand on posait la

7 question : quelle est votre nationalité, ils disaient Siptar. Par exemple,

8 ils ne considéraient pas le terme "Siptar" comme un terme péjoratif.

9 Q. Vous avez dit : "Dans le cadre de votre travail, on utilisait toujours

10 le terme "Albanais", est-ce que ça veut dire que vous inscriviez dans les

11 documents le mot "Albanac", A-l-b-a-n-a-c c'est ça bien le mot ?

12 R. Oui.

13 Q. Merci. J'aimerais maintenant aborder un cas dont vous vous êtes occupée

14 personnellement, 6D589.

15 M. IVETIC : [interprétation] Il y a une erreur, page 40, lignes 15 à 17 du

16 compte rendu, il y a une faute là, c'était la fin de la réponse donnée par

17 le témoin qu'il ne s'agissait pas d'un terme péjoratif, que eux ils

18 s'appelaient comme cela préalablement, et cetera.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourriez-vous préciser le paragraphe,

20 Maître Ivetic.

21 M. IVETIC : [interprétation] Oui, page 40, paragraphes 14 à 18, c'est la

22 réponse entière, donc il y a une partie de sa réponse qui a été omise.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien, bien, j'ai compris, ce n'est pas

24 la peine. Si vous dites "il avait fait ça", c'est évident que cela concerne

25 le temps passé, non.

26 M. IVETIC : [aucune interprétation]

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il serait bien que de nous dire quelle

28 est la page de l'acte d'accusation à laquelle vous faites référence où on

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1 peut trouver cela.

2 M. IVETIC : [interprétation] La version albanaise dans son intégralité, si

3 je me souviens bien; mais je peux vérifier et vous remettre des écritures à

4 cet effet.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Moi, je pense que cela peut se régler

6 en posant des questions au témoin. Un acte d'accusation est un document

7 qu'on peut tout à fait légitimement utiliser dans le prétoire lors de

8 l'interrogatoire du témoin.

9 M. IVETIC : [interprétation] Oui, c'est pour ça que j'ai retiré mon

10 objection.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais est-ce qu'il est vrai que --

12 j'ai pensé que vous référiez en posant votre question à la version anglaise

13 officielle où le terme "Siptar" a été utilisé, mais si j'ai bien compris

14 encore une fois, c'était seulement concernant la traduction en albanais et

15 pas en serbe ?

16 M. IVETIC : [interprétation] Je pense que je n'ai jamais examiné le

17 document en serbe.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien, on va faire la pause, on

19 reprendra en 11 heures et quart.

20 [Le témoin quitte la barre]

21 --- L'audience est suspendue à 10 heures 45.

22 --- L'audience est reprise à 11 heures 17.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, je pense que vous avez

24 fait votre remarque au moment où je n'étais pas tout à fait en pleine

25 possession de mes capacités de réflexion en sortant du prétoire, évidemment

26 je me suis posé la question au sujet de votre remarque et je me suis dit

27 que je le terme Siptar serait un terme normalement utilisé dans un document

28 en albanais pour désigner les Albanais du Kosovo, n'est-ce pas ?

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1 M. IVETIC : [interprétation] Oui, bien sûr, mais je voulais tout simplement

2 attirer votre attention sur le fait que ce n'est pas un terme péjoratif.

3 [Le témoin vient à la barre]

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais on en a déjà parlé et la

5 question qui se pose est la question de l'utilisation du terme Siptar dans

6 un document serbe, et ce n'est pas du tout la même chose quand on utilise

7 ce terme-là dans un document qui est rédigé en albanais. Je pense que je me

8 suis laissé induire en erreur par vous, Maître Ivetic, tout à l'heure,

9 mais maintenant les choses sont claires.

10 Madame Carter.

11 Mme CARTER : [interprétation]

12 Q. Madame le juge Marinkovic, j'attire votre attention sur le document

13 6D589 qui se trouve dans le classeur préparé pour vous. Nous avons discuté

14 d'une affaire en détail lundi dernier, page du compte rendu 23 516, à

15 partir de la ligne 14. C'est en substance une affaire qui porte sur l'UCK

16 et le MUP illégal.

17 R. Non. Il s'agit du MUP illégal. Il n'y a pas de membres de l'UCK ici.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Juste un instant, s'il vous plaît.

19 [La Chambre de première instance se concerte]

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Carter, toutes mes excuses,

21 nous avions une question à régler. Vous pouvez poursuivre maintenant.

22 Mme CARTER : [interprétation] Vous n'avez pas à vous excuser, Monsieur le

23 Président. C'est vous qui portez l'habit rouge dans ce prétoire. Vous

24 faites ce que vous voulez dans ce prétoire.

25 Q. Madame le Témoin, est-ce que vous pensez que cette affaire du MUP a été

26 menée d'une manière professionnelle ?

27 R. Est-ce que vous faites référence ici à l'arrêt 590 ?

28 Q. Oui. L'acte d'accusation c'est la pièce 589 et l'arrêt c'est la pièce

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1 590. Est-ce que vous considérez que cette affaire a été menée d'une manière

2 professionnelle par les personnes impliquées ?

3 R. Oui.

4 Q. Saviez-vous que dix de ces 70 personnes mises en accusation par l'acte

5 d'accusation, pièce 6D589, ont été battues alors qu'elles se trouvaient en

6 détention provisoire pendant l'enquête ?

7 R. Non, je ne le sais pas. Si vous avez un document indiquant cela, vous

8 pouvez me le présenter.

9 Q. Absolument. Et je souhaite vous rappeler que vous en avez déjà parlé

10 lors de votre déposition dans l'affaire Milosevic, page 37 937, pièce P3115

11 de la version électronique, à partir de la page 225, mais ce sur quoi je

12 souhaite attirer votre attention maintenant, c'est un certificat médical

13 concernant le premier accusé, c'est la pièce P3101 qui concerne Avdija

14 Mehmedovic. C'est vous qui avez signé une ordonnance demandant d'examiner

15 cette personne. Il a été indiqué qu'il avait des blessures sur ses paumes

16 droite et gauche, ensuite sur ses mollets devant et du côté, et que la peau

17 sur ces parties du corps était sèche et qu'on voyait des blessures causées

18 par un objet contondant lourd. Vous souvenez-vous de cela ?

19 R. Oui, c'est une opinion de médecin, mais vous savez les coups, c'est un

20 terme général. Ça peut couvrir tout un tas de situations différentes. Je ne

21 suis pas d'accord avec leur opinion qu'il s'agit là de blessures légères.

22 Q. De quelle manière qualifieriez-vous des blessures infligées par un

23 objet contondant lourd sinon des blessures provoquées par des coups ?

24 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que cette

25 question-là ne ressort pas de la compétence de ce juge. Elle n'est pas

26 médecin et je pense qu'elle serait amenée à s'occuper de telles questions

27 dans le cadre de la procédure pénale en ex-Yougoslavie.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais le témoin elle même a

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1 soulevé cette question en disant que les coups et les blessures, c'est un

2 terme de nature générale.

3 [La Chambre de première instance se concerte]

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne pense que ça ne sert pas à

5 grand-chose d'approfondir cette question-là sauf s'il existe une définition

6 technique de cela. Du moment où le témoin dit qu'il s'agit d'un terme de

7 nature générale, d'après l'expérience de ce témoin, je pense que ce n'est

8 pas la peine. Mais vous pouvez peut-être essayer de mettre cela au clair.

9 Mme CARTER : [interprétation]

10 Q. Il s'agit d'un terme de nature générale parce que ce type de blessures

11 infligées par des coups, par un objet lourd, un objet contondant, ont été

12 subies à dix reprises concernant dix accusés dans cette affaire.

13 R. Je ne m'en souviens pas. Si vous avez des documents, si cela est

14 indiqué dans les documents, alors c'est certainement le cas; s'agissant du

15 type de blessures infligées par quel instrument et quel est le type de

16 blessures, ça je ne suis pas expert dans ce domaine. C'est pour cette

17 raison-là que j'ai donné une ordonnance demandant l'expertise des médecins

18 légistes. Je ne suis pas compétente pour établir de quel type de blessures

19 il s'agit et comment elles ont été infligées.

20 Q. Pour compléter la première ligne, je vais vous dire que l'accusé numéro

21 7, Bljerim Oloni, le dossier médical le concernant est la pièce P3102

22 [comme interprété]; ensuite le troisième [comme interprété] accusé c'est

23 également la même pièce et c'était quelque chose qui s'est passé le 14

24 décembre. Ensuite ce qui s'est passé le 15 décembre, cela figure dans des

25 dossiers médicaux de l'accusé numéro 21, il s'agit de 6D589, Bejtulah;

26 ensuite 38, Tahir Caka; ensuite Seremet -- P3133 [comme interprété], c'est

27 la pièce à conviction le concernant. Une semaine plus tard, il y a des

28 termes similaires qui ont été utilisés en disant que des blessures et des

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1 coups ont été infligés en utilisant des objets lourds contondants, c'est

2 l'accusé 10 Murat Sahiti; ensuite l'accusé Kemalj Aliu; l'accusé 39, Sali

3 Bruti, c'est la pièce P3097.

4 Vu que vous avez eu dix accusés dans la même affaire qui ont reçu des

5 blessures, des coups et des blessures qui ont été infligés par le même

6 objet contondant; est-ce qu'il y avait des poursuites au pénal qui ont été

7 engagées ?

8 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Madame Carter, vous essayez de dire

9 qu'il y a un modèle à suivre.

10 Mme CARTER : [interprétation] Absolument.

11 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] C'est si vous voulez vous prononcer

12 ainsi.

13 Mme CARTER : [interprétation]

14 Q. Oui, il y a un type en fait de coups et blessures; est-ce que ce type

15 de coups et de blessures infligés par un objet contondant ont fait l'objet

16 d'une instruction et est-ce que les accusés ont fait l'objet de procès ?

17 R. Il ne s'agit de type de blessures et coups. A l'époque, si vous

18 regardez la date de l'acte d'accusation et les dates de détention, vous

19 pouvez voir que j'ai auditionné ces personnes en tant que juge

20 d'instruction. On pose la question quand et où ces coups et blessures ont

21 été infligés, ensuite le degré de gravité des coups et blessures parce que

22 toutes les dates sont les dates du mois de décembre 1994. Concernant ces

23 conclusions et ces dossiers médicaux, il est probable que l'accusé même se

24 serait adressé à cette instance ou peut-être son conseil en son nom parce

25 que lui, il était en prison. Son conseil ou lui-même s'est plaint de son

26 état de santé. Et concernant cela, j'ai demandé à l'institut de médecine

27 légale de procéder à l'examen de ces personnes pour en tirer des

28 conclusions après avoir reçu le dossier médical et les conclusions de cet

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1 examen médico-légal --

2 Q. Madame, permettez-moi de vous arrêter. Encore une fois, je vais répéter

3 ma question. Est-ce qu'il y avait des instructions menées contre qui que ce

4 soit; est-ce qu'il avait des procès intentés contre qui que ce soit vu les

5 coups et blessures infligés à ces dix accusés ?

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Maître Ivetic.

7 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, il faut qu'on permette

8 au témoin de continuer sa réponse. Parce qu'elle essaie d'expliquer quelles

9 étaient ses compétences et je crois que ce que j'ai mentionné déjà avant,

10 qu'il s'agit d'un système qui a été mis en place en ex-Yougoslavie peut-

11 être que tout le monde ne connaît pas cela et, par exemple, on pourrait y

12 comparer cela à la question d'un policier pour savoir ce qu'est une brigade

13 de pompiers. Si l'Accusation n'est pas contente de la réponse donnée par le

14 témoin cela ne veut pas dire que cette réponse n'est pas pertinente.

15 Mme CARTER : [interprétation] J'objecte par rapport à des commentaires par

16 le conseil de la Défense et j'avance que le témoin n'a pas répondu à ma

17 question. Ma question était spécifique : est-ce qu'il y avait des personnes

18 contre lesquelles des procès au pénal auraient été intentés ? Vendredi

19 dernier, le témoin a dit qu'elle avait travaillé dans cette affaire, qu'il

20 y a des documents qu'elle a rédigés dans cette affaire y compris le

21 jugement définitif rendu contre ces accusés, elle est certainement en

22 mesure de répondre à la question.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien, elle nous a donné la réponse

24 dans laquelle elle a dit qu'elle avait ordonné un examen de médecins

25 légistes.

26 Mme CARTER : [interprétation] Elle nous a dit, parce que je peux voir cela,

27 qu'elle a ordonné à ce que ces examens médicaux soient faits.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

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1 Mme CARTER : [interprétation] Mais j'essaie de voir si elle a fait quoi que

2 ce soit après ou est-ce que quelque chose s'est passé après.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais vous l'avez interrompue dans sa

4 réponse, ce que Me Ivetic a dit parce qu'elle a dit qu'elle a fait des

5 choses après.

6 Pouvez-vous nous dire ce que vous avez fait après ces dossiers

7 médicaux ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Après avoir reçu ces dossiers médicaux,

9 j'ai remis un exemplaire au conseil. Je suppose que l'accusé en a eu par le

10 biais de son conseil et j'ai transmis ces documents au procureur public qui

11 était en charge de cette affaire. Après quoi, cela ne relevait plus de ma

12 compétence. Le procureur public, vu les documents reçus, estime s'il est

13 nécessaire de continuer l'instruction dans cette affaire. S'il considère

14 qu'il existe une infraction pénale il essaie de prendre des mesures

15 appropriées pour voir si un procès serait intenté contre l'auteur de

16 l'infraction pénale. Mais pour ce qui est de ce cas précis, je ne sais pas

17 s'il y a eu un procès contre ces personnes.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Carter, poursuivez.

19 Mme CARTER : [interprétation] Merci.

20 Q. Eu égard à cette affaire, vous avez également déclaré vendredi dernier,

21 lors de votre témoignage que vous avez rendu une ordonnance pour interdire

22 aux conseils de la défense d'avoir accès au dossier d'affaire et de

23 participer à certaines mesures dans le cadre de l'instruction, n'est-ce pas

24 ?

25 R. Oui.

26 Q. Mais je vous avance que ce document a été rédigé cinq jours après que

27 vous aviez reçu des rapports définitifs pour ce qui est du passage à tabac

28 -- je m'excuse, des coups et blessures infligés dans cette affaire, n'est-

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1 ce pas ? Vous avez rendu votre ordonnance le 27 décembre 1997 et ces coups

2 et blessures se sont passés le 22 décembre, n'est-ce pas ?

3 R. Montrez-moi le document pour que je puisse comparer les dates. Je ne me

4 souviens pas des dates exactes.

5 Mme CARTER : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche maintenant la pièce

6 à conviction P3106.

7 Q. Reportez-vous à l'en-tête du document, on peut voir à droite en haut la

8 date qui est le 27 décembre 1994, et à la page 3 du document, c'est à la

9 page 2 en B/C/S, vous pouvez voir le texte de votre décision.

10 R. Je vois que c'est le document du 26 décembre.

11 Q. Madame le juge Marinkovic, je vous dis que vous avez déclaré devant

12 cette chambre qu'après avoir reçu les documents portant sur les coups et

13 blessures infligés à ces personnes, que vous avez transmis cela aux

14 conseils de la défense parce que cela ne relevait plus de votre compétence.

15 Mais cinq jours après vous avez rendu une ordonnance pour empêcher les

16 conseils de la défense d'avoir accès au dossier de l'affaire, n'est-ce pas

17 ?

18 R. Concernant cette affaire concrète, pouvez-vous me dire ce que vous

19 voudriez savoir.

20 M. IVETIC : [interprétation] Aux fins du compte rendu, je pense que nous

21 parlons de la phase avant que l'acte d'accusation n'ait été dressé, donc

22 nous parlons de ce stade de la procédure, je ne sais pas s'il s'agissait

23 tout simplement des documents réunis pour ce qui est de l'affaire ou du

24 dossier d'affaire.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Laissons cette question aux parties,

26 Maître Ivetic.

27 Madame Carter, continuez.

28 Mme CARTER : [interprétation]

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1 Q. Vous pouvez regarder la page 3 en anglais, la page en B/C/S --

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais cette ordonnance parle d'elle-

3 même pour poser votre question.

4 Mme CARTER : [interprétation]

5 Q. Madame, vous avez dit que vous avez ordonné à ce que ces coups et

6 blessures infligés dans dix affaires soient enquêtés, après vous n'avez pas

7 permis aux conseils d'avoir accès à ces dossiers. Pensez-vous que

8 l'instruction en question a été proprement menée d'une façon appropriée ?

9 R. Je n'ai pas compris votre question, mais ces dossiers médicaux ne

10 concernent pas des affaires concrètes pour ce qui est de leurs auteurs et

11 infractions pénales, et des pièces concernant ces affaires. Ces dossiers

12 médicaux parlent éventuellement d'une autre affaire qui serait ouverte

13 concernant le contenu de ces dossiers médicaux. Donc ma décision ou mon

14 ordonnance n'a rien à voir avec ces dossiers médicaux.

15 Q. Madame, vous avez indiqué que selon la procédure en vigueur, une fois

16 reçus, ces dossiers médicaux vous les transmettez au conseil de la défense,

17 après quoi on mène une enquête si nécessaire. Est-ce que vous me dites

18 maintenant qu'en interdisant ces mêmes conseils d'avoir accès à ces mêmes

19 dossiers que c'était une mesure appropriée ?

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Carter, mais vous devez d'abord

21 établir un lien entre les deux choses. D'un côté, il y a des dossiers

22 concernant des allégations et des instructions, et de l'autre côté il y a

23 des dossiers médicaux qui ont été transmis aux conseils et au procureur

24 pour qu'ils puissent voir s'il faut prendre des mesures appropriées. Le

25 témoin vous a dit que si cela est nécessaire, on procède à ces mesures,

26 donc où est le lien entre cela et l'affaire au stade d'instruction ?

27 Mme CARTER : [interprétation] Une fois que l'accès au dossier est défendu

28 aux conseils de la défense, ils ne peuvent pas participer à l'instruction,

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1 ils ne peuvent pas communiquer avec leurs clients lorsqu'il y a d'autres

2 coups et blessures infligés, c'est quelque chose qui a été relevé.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que cette ordonnance les

4 empêchait de communiquer avec leurs clients ?

5 Mme CARTER : [interprétation] Il est indiqué ici que --

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais cela n'a rien à voir avec des

7 coups et blessures qui ont été infligés lors de ce présumé passage à tabac

8 ?

9 Mme CARTER : [interprétation] Oui, mais il me semble --

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est quelque chose dont vous devriez

11 vous occuper plus tard, mais en ce moment je ne vois pas le lien entre les

12 deux choses. Pouvez-vous établir un lien, après quoi vous pourrez poser

13 d'autres questions ?

14 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Je m'excuse, Madame Carter, est-ce

15 que vous essayez de nous dire que vous pensez qu'ils ont été torturés

16 pendant qu'ils étaient en détention ?

17 Mme CARTER : [interprétation] Monsieur le Président, je dis ce qui est

18 décrit, pour ce qui est de ces affaires ou dans ces dossiers médicaux, peut

19 nous amener à la conclusion qu'il y avait de la torture.

20 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Vous pensez que d'autres coups et

21 blessures ultérieurs ont été infligés pendant qu'ils étaient en détention ?

22 Mme CARTER : [interprétation] Oui, c'est concevable.

23 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Mais ils auraient pu être examinés

24 par des médecins, ils auraient pu s'adresser à un organe pour se plaindre

25 d'autres coups et blessures ?

26 Mme CARTER : [interprétation] Je vais donc revenir à cela.

27 Q. Madame, vous avez indiqué que dans votre ordonnance, vous avez empêché

28 le conseil de la défense de participer dans certaines parties de

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1 l'instruction. Pouvez-vous être plus spécifique ? Qu'est-ce que vous avez

2 interdit au conseil de la défense le 27 décembre 1995 [comme interprété] ?

3 R. Conformément à mes attributions et c'est l'article 73, alinéa 2, et

4 l'article 168, alinéa 5 du code pénal, j'ai procédé et j'ai rendu ma

5 décision. Il ne s'agissait pas d'une ordonnance, et à la proposition du

6 procureur public, à un moment donné j'ai estimé que c'était dans l'intérêt

7 de l'Etat, de la défense et de la sécurité de l'Etat, de procéder ainsi,

8 que j'ai estimé qu'il y avait des raisons justifiées pour interdire aux

9 conseils de la défense --

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Encore une fois, Madame le juge

11 Marinkovic, ce n'était pas la question qu'on vous a posée. La question

12 était la question suivante : quelles étaient ces activités dans le cadre de

13 l'instruction auxquelles les conseils de la défense ne pouvaient pas

14 participer. On leur a interdit d'y participer parce que cela n'est pas

15 clair dans l'ordonnance ou en anglais, il a été interprété qu'il s'agissait

16 de "certaines" activités de l'instruction ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans le dispositif de la décision, c'est

18 énuméré toutes ces mesures, toutes ces activités dans le cadre de

19 l'instruction. On peut afficher cela sur l'écran. Ce que je vois sur mon

20 écran maintenant, c'est seulement la deuxième page, on ne peut pas voir le

21 dispositif de la décision que j'ai prise.

22 Mme CARTER : [interprétation] Pour faciliter la tâche du témoin je peux lui

23 remettre la copie papier de deux pages.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc nous ne disposons pas de la

25 version en anglais de l'ordonnance ou de la décision ?

26 Mme CARTER : [interprétation] Oui, c'est P3106.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais nous regardons la mauvaise page.

28 Mme CARTER : [interprétation] Non, la troisième page en anglais indique que

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1 le juge d'instruction a conclu --

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais nous avons besoin de voir le

3 dispositif de la décision.

4 Mme CARTER : [interprétation] A la page 2, il est indiqué qu'une demande a

5 été envoyée aux procureurs, après quoi le juge d'instruction a estimé qu'il

6 y avait des fondements pour ces propositions.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais cela ne figure pas sur la

8 page en anglais.

9 Mme CARTER : [interprétation] Oui, certainement. C'est la dernière chose

10 qui indique que : "Pour les raisons de sécurité les accusés à ce stade ne

11 peuvent pas avoir accès à des dossiers" --

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais je ne lis pas cela sur la page,

13 sur mon écran, Madame Carter. J'essaie de voir la page en anglais.

14 Mme CARTER : [interprétation] C'est la page 3 en anglais.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais c'est la page que nous avons eue

16 avant, et il ne s'agit pas d'activités spécifiques.

17 Mme CARTER : [interprétation] Oui, c'est la dernière phrase en bas, à

18 droite : "Par conséquent, à ce stade de la procédure, les accusés ne

19 peuvent pas avoir accès pour des raisons de sécurité."

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je comprends cela. Mais quelles sont

21 ces activités dans le cadre de l'instruction.

22 Mme CARTER : [interprétation] C'était à quoi portait ma question.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non. C'était ma question il y a

24 dizaine de minutes, Mme Marinkovic nous dit que cela se trouve quelque part

25 dans l'ordonnance.

26 Je m'excuse, il ne s'agit pas d'une ordonnance, il s'agit d'une

27 décision et où dans la décision on peut voir la partie où on a défendu, où

28 on a interdit aux conseils de participer dans certaines activités de

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1 l'instruction ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans le dispositif de la décision, et je

3 ne sais pas si vous disposez de cette partie en anglais, il est écrit, je

4 cite : "L'examen des dossiers et des objets qui ont été collectés dans le

5 cadre de l'instruction, et ainsi que certaines activités, -- a assisté à

6 certaines activités dans le cadre de l'instruction."

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelles sont ces activités

8 relevant de l'instruction auxquelles les conseils ne pouvaient pas

9 participer ? J'aimerais savoir cela.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] S'il s'agissait de l'audition d'un témoin dans

11 une affaire ou éventuellement s'il s'agissait des mesures d'instruction

12 outre que l'audition parce que dans cette affaire il y avait des objets qui

13 étaient des preuves matérielles --

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que cela veut dire qu'ils ne

15 peuvent pas participer à aucune des activités de l'instruction ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] A un moment donné, ils ne peuvent pas assister

17 à l'audition de l'accusé, ils peuvent assister à l'audition des accusés

18 pour ce qui est des autres activités, à ce stade de la procédure ils ne

19 pouvaient pas y participer.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et vous nous avez dit que les

21 auditions ou l'interrogatoire des accusés étaient déjà finis ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

24 Madame Carter, poursuivez.

25 Mme CARTER : [interprétation]

26 Q. Dites-nous ce que les accusés ont fait à ce stade de la procédure

27 précisément qui vous a poussée à rendre cette décision pour interdire les

28 conseils de participer à certaines activités dans le cadre de l'instruction

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1 ?

2 R. On a accusé ces personnes d'avoir formé l'organisation pour des

3 activités hostiles à l'Etat et pour nuire à l'intégrité de l'Etat. Ce sont

4 des infractions pénales contre l'ordre constitutionnel de l'Etat, c'est

5 pour cela qu'à la proposition du procureur public cette décision a été

6 prise parce que c'était dans l'intérêt du pays, de la sûreté et de la

7 défense du pays.

8 Q. S'il s'agissait de cette raison-là pour rendre cette décision, pourquoi

9 cette décision n'a-t-elle pas été rendue après que l'affaire a commencé ?

10 R. Je n'ai pas compris la question. Je ne vois pas quel est l'objectif de

11 votre question. Je pense que ma réponse précédente a été suffisamment

12 claire.

13 Q. Avec tout le respect que je vous dois, Madame le juge Marinkovic, je

14 vous dis que vous avez dressé l'acte d'accusation le 7 avril 1995, il

15 s'agit de la pièce 6D589, où il est indiqué que toutes ces personnes ont

16 été mises en détention vers la fin de novembre 1994, et qu'elles étaient en

17 détention plus d'un mois avant que vous ayez pris cette décision.

18 J'aimerais savoir ce qui s'est passé entre-temps qui vous a poussée à

19 rendre cette décision ?

20 R. Je ne peux pas répondre à cette question parce qu'à l'époque on a

21 estimé qu'il s'agissait de l'intérêt de la défense du pays. Quelles

22 activités d'enquête ont été prises à l'époque, je ne sais pas. Tout ce que

23 je peux vous dire, c'est ce qu'étaient les preuves matérielles concernant

24 cette affaire. Il y avait un bon nombre de disques compacts qui contenaient

25 de l'information et leur travail illégal qu'on devait examiner.

26 Q. Ma question est spécifique. Dites-moi ce qui s'est passé pendant que

27 ces personnes étaient en détention qui vous a menée à rendre la décision

28 portant sur l'interdiction aux conseils d'avoir accès de participer à

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1 certaines activités d'enquête ?

2 R. Les faits qu'on a établis lors de l'instruction nous ont menés à la

3 conclusion qu'il était nécessaire de rendre une telle décision, et que

4 c'était une situation provisoire qui devait durer jusqu'à ce que le

5 procureur public ait dressé l'acte d'accusation.

6 Q. Vous dites que l'acte d'accusation a été dressé le 7 avril 1995, donc

7 de la fin de décembre jusqu'à avril 1995 ces prévenus et leurs conseils ne

8 pouvaient pas avoir accès aux dossiers d'affaire et ne pouvaient pas

9 participer à des activités d'enquête ?

10 R. Je ne vois pas dans l'acte d'accusation quand j'ai conclu

11 l'instruction. Une fois l'instruction conclue, je transmets le dossier

12 d'affaire complet au procureur public qui a encore besoin d'un certain

13 temps pour dresser l'acte d'accusation. Cette période de temps coïncide

14 peut-être avec la période pendant laquelle les dossiers d'affaire étaient

15 chez le procureur public qui examinait ces dossiers pour décider contre

16 quelles personnes l'acte d'accusation serait dressé.

17 Q. Durant la phase d'instruction, avez-vous recueilli des déclarations de

18 ces prévenus; et si c'était le cas, quand c'était ?

19 R. Au cours de l'instruction concernant cette affaire, après qu'ils ont

20 été auditionnés par le procureur public, il n'était pas nécessaire de les

21 auditionner encore une fois, seulement s'il y avait complément d'enquête ou

22 des enquête concernant d'autres personnes, et ça dépendait du procureur, et

23 si cela était en liaison avec cette affaire. Ces autres personnes ont été

24 auditionnées par moi. Concernant cette décision, j'ajouterais que je ne

25 sais pas si le procureur a vu qu'on pouvait interjeter appel contre cette

26 décision. Toute personne qui n'était pas contente de la décision que j'ai

27 prise lors de l'instruction avait le droit d'interjeter appel auprès du

28 tribunal régional de Pristina. S'il s'agissait de ma faute ou si ma

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1 décision n'a pas été bien fondée --

2 Q. Madame, je vais réitérer ma question.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Juste un instant, s'il vous plaît,

4 Madame Carter.

5 Maître Zecevic.

6 M. ZECEVIC : [interprétation] Je m'excuse d'avoir interrompu, mais je pense

7 que je pourrais être utile là; à la page 59, ligne 14, il est consigné que

8 cela a été soumis à la chambre du conseil régional, il s'agit d'une chambre

9 précise qui décide sur un appel à ce stade de la procédure.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

11 La question qu'on vous a posée, Madame le juge Marinkovic, est de savoir

12 quand vous avez recueilli des déclarations de ces accusés ou quand vous les

13 avez auditionnés ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai recueilli les déclarations des accusés

15 dans le délai légal au moment où ils ont été privés de liberté et remis au

16 juge d'instruction. Ici il est indiqué quand ils ont été en détention

17 provisoire, mais les dates de leur détention provisoire respective sont

18 différentes.

19 Mme CARTER : [interprétation]

20 Q. Avez-vous auditionné ces personnes après avoir rendu la décision pour

21 interdire à leurs conseils de participer à certaines activités d'enquête ?

22 R. Non, parce que cela n'est pas permis.

23 Q. Vous avez mentionné que ces personnes sont arrivées, que le juge

24 d'instruction les a auditionnées, ensuite à la page 59, ligne 16, vous avez

25 dit : "Par conséquent, je les ai auditionnées à nouveau. Si ces personnes

26 se trouvaient en détention provisoire approximativement pendant une période

27 d'un mois avant de rendre votre décision --

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pouvez-vous me donner encore une fois

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1 le numéro de la ligne.

2 Elle avait dit qu'il n'était pas nécessaire de les auditionner encore

3 une fois.

4 Mme CARTER : [interprétation] A 59, ligne 11, Monsieur le Président, il est

5 dit : "Par conséquent, j'ai auditionné ces personnes encore une fois."

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais --

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais ce n'est pas ce que j'ai dit.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous pouvez voir quelles étaient les

9 circonstances dans lesquelles cela aurait été approprié, c'est-à-dire s'il

10 y avait eu modification de l'acte d'accusation, cela aurait été approprié.

11 Le témoin a dit à plusieurs reprises que les auditions avaient été finies

12 depuis longtemps avant que cela ait été fait.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous regardez la décision que j'ai rendue,

14 à droite où se trouve le numéro 161/94, ensuite ABVGDJ, il s'agit des

15 modifications concernant -- et le premier groupe commence par Avdija

16 Mehmedovic. Il s'agit ici d'autres groupes, il s'agissait d'amendements, et

17 j'ai travaillé là-dessus. Après que j'ai auditionné tous les prévenus, j'ai

18 pris la décision concernant toutes ces personnes.

19 Q. Madame Marinkovic, quand je vous pose des questions, elles portent sur

20 une seule affaire et non pas sur des affaires d'une manière générale. C'est

21 peut-être pour ça que nous sommes confrontés aux difficultés actuelles.

22 Vous nous avez dit qu'à aucun moment ces personnes n'ont été auditionnées

23 en l'absence de leurs conseils ?

24 R. Non, ce n'est pas ce que j'ai dit, ça ne peut pas être le cas. Je peux

25 vous expliquer quelles sont les situations où la présence du conseil est

26 obligatoire et dans lesquelles ce n'est le cas. Parfois le prévenu peut

27 décider s'il souhaite que son conseil soit présent ou pas. Il est arrivé

28 que des prévenus avaient trois ou quatre conseils. Et d'autres ne voulaient

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1 pas à en avoir pour des raisons financières ou autres. Si les prévenus ont

2 renoncé à la présence du conseil cela a été certainement consigné.

3 Q. S'agissant de ces dix personnes pour lesquelles nous disposons de

4 certificats médicaux, dites-nous si vous les avez jamais interrogées en

5 l'absence de leurs conseils ?

6 R. Il faut voir les comptes-rendus, les PV des auditions, parce que comme

7 ça je ne peux pas me souvenir. Je me souviens bien d'Avdija Mehmedovic

8 parce que la première fois où j'ai dû recueillir sa déclaration, lui et son

9 conseil avaient demandé de reporter l'audition d'une journée en disant

10 qu'il était fatigué, qu'il fallait qu'il dorme avant. C'est pour cette

11 raison-là que j'ai reporté son audition au lendemain, et il est venu le

12 lendemain à l'heure donnée pour l'audition. Chacun avait le droit aussi

13 s'il n'était pas capable, s'il ne se sentait pas en état le jour donné de

14 donner sa déclaration, de le faire ultérieurement.

15 Q. Page 61 à partir de la ligne 11 [comme interprété], il est indiqué que

16 vous pouvez "expliquer les droits à l'accusé, dans quelle situation la

17 présence du conseil est obligatoire et dans quels cas le prévenu peut

18 choisir s'il souhaite sa présence ou pas."

19 Est-ce que le tribunal était habileté à interdire d'une manière

20 générale au conseil d'être présent lors de l'audition du prévenu ou lors

21 d'autres activités d'enquête, notamment lors des entretiens ?

22 R. Je ne comprends pas votre question.

23 Q. Vous nous avez dit que parfois la présence du conseil est obligatoire

24 et parfois le prévenu peut renoncer à son droit d'avoir le conseil présent.

25 Je vous demande maintenant : est-ce que le tribunal a l'autorité

26 d'interdire le contact entre le conseil et le prévenu ?

27 R. Non, pas du tout. Le conseil a droit de communiquer avec son client.

28 Q. Est-ce que le tribunal a le droit --

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1 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Excusez-moi, Madame Carter, est-ce

2 que vous voulez dire que le juge d'instruction a le droit d'interdire au

3 conseil de participer dans des activités d'enquête ou autre chose.

4 Mme CARTER : [interprétation] Ce que je suis en train de dire concerne une

5 ordonnance que nous avons vue, pièce 6D589, ou toute autre ordonnance

6 similaire, interdisant la communication entre le conseil et le client ou

7 interdisant la présence du conseil lors de l'audition du client.

8 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Et vous pensez au juge d'instruction.

9 Mme CARTER : [interprétation] Oui.

10 Q. Madame le Témoin, en tant que juge d'instruction, avez-vous le droit

11 d'imposer la surveillance des contacts entre le client et son conseil ou

12 interdire ces contacts ?

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous prie, Madame, de reposer cette

14 question et de vous exprimer en anglais clair et compréhensible.

15 Mme CARTER : [interprétation] Bien. Je vais le faire.

16 Q. Vous avez déclaré que la cour ne peut pas empêcher ou mettre fin à la

17 communication entre un conseil et son client. Sur la base de cela, peut-on

18 poser la question suivante : la cour peut-elle imposer certains critères

19 s'agissant des modalités de cette communication, de ces contacts ?

20 M. IVETIC : [interprétation] Je ne sais pas ce qu'elle demande; est-ce

21 qu'elle demande quelle est la loi ou quoi ?

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais ça revient au même parce que

23 -- qu'est-ce que vous voulez demander maintenant, est-ce que vous parlez

24 d'empêchement de communication entre le conseil et le client ou vous passez

25 maintenant à autre chose.

26 Mme CARTER : [interprétation] D'abord, je parle de la communication entre

27 le client et son conseil. C'était la question donnée par le témoin, c'est

28 qu'on ne peut pas interrompre la communication entre les deux. Je veux

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1 maintenant établir s'il y a des limites à la communication imposées par la

2 cour.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela ne se réfère pas exclusivement à

4 l'audition menée par le juge d'instruction, c'est d'une manière générale

5 que cela vous intéresse.

6 Mme CARTER : [interprétation] Oui.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Posez la question simplement

8 pour qu'on puisse vous comprendre; peut-être que vous obtiendrez une

9 réponse si vous posez une question simple.

10 Mme CARTER : [interprétation]

11 Q. Est-ce que vous pouvez limiter la communication entre le conseil et le

12 client ?

13 R. Non, je ne peux pas limiter leur communication. Le conseil peut

14 communiquer avec son client quand il peut. Les seules limitations sont

15 celles découlant des règles internes de l'unité de détention, de la prison.

16 Tout simplement il y a des heures où les visites sont autorisées, ou par

17 exemple une règle interne disant que les conseils peuvent rendre visite à

18 leurs clients entre 10 heures du matin et deux heures de l'après-midi. Mais

19 c'est une question de règlement interne de l'unité de détention, autrement

20 on ne peut pas.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Carter, est-ce que la question

22 de communication entre le conseil et le prévenu albanais est contestée.

23 Nous avons déjà utilisé beaucoup de temps pour examiner cette question,

24 mais je ne sais pas si cette question a été soulevée jusqu'à maintenant.

25 Mme CARTER : [interprétation] Oui, nous parlons ici du fonctionnement du

26 système judiciaire --

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais une vie entière ne suffira

28 pas pour examiner le fonctionnement du système de la justice serbe et vous

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1 savez ici nous devons nous occuper des questions qui concernent l'affaire

2 en présence. Alors que maintenant vous parlez de choses qui ne sont même

3 pas passées en 1998 et en 1999.

4 Mme CARTER : [interprétation] Oui, mais dans notre mémoire préalable au

5 procès, paragraphe 145, nous avons indiqué que même si la justice serbe

6 fonctionnait, il y avait une différence entre le traitement dont faisaient

7 l'objet les prévenus albanais et les

8 prévenus serbes. C'est ce que j'essaie maintenant d'établir.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais on a déjà entendu des

10 preuves, des éléments de preuve présentés par l'Accusation à cet effet,

11 n'est-ce pas ?

12 Mme CARTER : [interprétation] Oui, mais c'est le premier juge qui s'est

13 occupé du MUP. Nous avons ici des éléments de preuve qui portent sur la VJ

14 et les relations entre la VJ et la justice mais c'est bien la première

15 occasion où nous pouvons examiner un témoin sur le système judiciaire et le

16 MUP. Et nous avons des documents, par exemple, P3109, qui démontrent qu'il

17 y a eu des violations de la procédure pénale.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Maître Ivetic.

19 M. IVETIC : [interprétation] C'est la manière dont Mme Carter présente

20 toute cette question qui me dérange le plus. J'ai l'impression qu'elle est

21 en train non pas de contre-interroger le témoin mais de présenter des

22 moyens à charge de nouveau. C'est peut-être une manière erronée

23 d'interpréter la situation actuelle, mais si vous lui autorisez à

24 poursuivre ainsi, je pense que c'est assez décourageant pour nous.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous savez, Maître Ivetic, qu'un des

26 risques de présentation d'éléments à décharge, c'est que l'Accusation a

27 l'occasion de renforcer les éléments à charge. C'est comme ça que les

28 interrogatoires fonctionnent, vous savez il n'y a rien qui interdit cela.

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1 Veuillez poursuivre, Madame Carter.

2 Mme CARTER : [interprétation] Bien.

3 Q. Pièce P3109, page 1 du B/C/S. Au milieu on parle d'une décision portant

4 sur un avocat dénommé Kelmendi. Est-ce que c'est le même dont vous avez

5 déjà parlé aujourd'hui, pour lequel vous avez dit qu'il était très

6 professionnel et correct ?

7 R. Oui. C'est ce que je vois ici.

8 Q. Alors dans beaucoup d'affaires dont vous avez connues, il y avait

9 plusieurs accusés, n'est-ce pas ?

10 R. Oui.

11 Q. Il est indiqué ici que les avocats, y compris celui que vous avez

12 qualifié d'un avocat très professionnel et correct, n'ont pas droit de

13 participer à l'exécution de certaines activités d'enquête, y compris

14 audition d'accusés, à l'exception de leurs propres clients, ensuite à la

15 confrontation entre le témoin et les accusés et aux auditions de témoins,

16 qu'ils ne peuvent pas examiner les documents et les documents versés au

17 dossier à l'exception de ceux qui concernent l'audition de leurs clients.

18 Alors, dans les affaires qui portaient sur plusieurs accusés, est-ce que

19 vous utilisiez les éléments de preuve apportés par l'un des accusés contre

20 ses coaccusés ?

21 M. IVETIC : [interprétation] Il s'agit ici d'un juge d'instruction et non

22 pas d'un juge de siège.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais elle a mené des procès, donc

24 elle peut répondre.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai mené des enquêtes et j'ai pris des

26 décisions telles que celle-ci dans des affaires sur les mêmes fondements

27 juridiques, mais je ne sais pas quoi vous dire. Peut-être que parce qu'il y

28 a un grand nombre d'accusés qui étaient en fuite et qu'on n'a même pas eu

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1 l'occasion d'auditionner.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais ce qui nous intéresse ici

3 c'est la chose suivante : les preuves obtenues lors de l'audition d'un des

4 accusés, pouvaient-elles être utilisées contre ses coaccusés dans le cas

5 des affaires à accusés multiples, à plusieurs coaccusés ? Comme par exemple

6 ici, regardez, nous avons ici six accusés, alors est-ce que par exemple il

7 vous est arrivé de recueillir la déclaration d'un accusé et que cette

8 personne-là dise des choses contre l'un de ses coaccusés. Est-ce qu'ensuite

9 vous pouvez utiliser cela contre son coaccusé ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Cela peut être fait lors de

11 l'établissement d'un acte d'accusation, le juge qui mène le procès compare

12 les déclarations respectives des coaccusés, et il peut utiliser chaque

13 élément de preuve disponible si l'on décide ainsi, qu'il s'agisse de

14 l'auteur du crime ou de ses complices.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

16 M. ZECEVIC : [interprétation] Je m'excuse, mais je pense qu'il faut

17 apporter quelques précisions supplémentaires à cela parce que notre loi

18 prévoit --

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas la pas la peine

20 d'apporter des explications, vous savez. Les connaissances de Mme

21 Marinkovic peuvent être question de contestation s'agissant de la fiabilité

22 de ce témoin. De toute façon, c'est une question qui peut être soulevée

23 lors des questions supplémentaires.

24 M. ZECEVIC : [interprétation] Je le comprends très bien, mais je ne voulais

25 pas que vous soyez induit en erreur.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, je comprends vos soucis, vos

27 préoccupations, mais ne vous inquiétez pas.

28 Mme CARTER : [interprétation]

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1 Q. Madame Marinkovic, est-ce que vous savez qu'en 1997 que des violations,

2 que ce qui se passait devant le tribunal du district de Pristina a fait

3 l'objet d'un rapport devant la Commission des droits de l'homme des Nations

4 Unies portant sur la situation des droits de l'homme sur le territoire de

5 l'ex-Yougoslavie ?

6 R. Non, personne ne me l'a jamais dit.

7 Mme CARTER : [interprétation] Alors, pièce P3090. Pour l'instant il est en

8 anglais exclusivement, la traduction est en cours de préparation.

9 Q. Est-ce que vous savez que dans ce rapport il est indiqué qu'au sein des

10 tribunaux de Pristina, dans plusieurs affaires qui ont eu lieu en 1997,

11 plusieurs clients ont pu rencontrer leurs conseils pour la première fois

12 seulement à la fin de l'enquête. Cela était-il une pratique établie au

13 tribunal du district de Pristina ?

14 M. IVETIC : [interprétation] Nous n'avons pas ce document en serbe et je

15 pense qu'il serait bien de permettre au témoin de lire les passages cités

16 par le Procureur.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, qu'avez-vous à dire, Madame

18 Carter ?

19 Mme CARTER : [interprétation] J'ai tout simplement demandé au témoin si

20 c'était une pratique répandue, établie, que les conseils rencontrent leurs

21 clients seulement à la fin de l'enquête ou après que les activités

22 d'enquête cruciales aient déjà été effectuées. Je peux lire le paragraphe

23 15.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien, ce serait peut-être utile.

25 Mme CARTER : [interprétation] Alors, ce qui est indiqué ici : "Le

26 rapporteur spécial conclut qu'un certain nombre de prévenus n'ont pas eu

27 droit à une défense ou au conseil pour plusieurs raisons. Tout d'abord,

28 plusieurs conseils ont rencontré leurs clients pour la première fois après

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1 la fin de la phase cruciale de l'enquête menée par le juge d'instruction.

2 Et c'est sur les résultats de cette phase d'enquête que l'accusation

3 fonctionnait, les avocats étaient confrontés à des difficultés de nature

4 juridique et pratique s'agissant d'accès aux clients au début des

5 procédures."

6 Q. Est-ce que c'était une pratique habituelle en 1997 que les avocats

7 rencontrent les clients seulement à l'issue des activités d'enquête

8 cruciales ?

9 R. Comme je vous ai dit déjà tout à l'heure, les conseils et les clients

10 peuvent communiquer, à chaque fois ils demandent l'autorisation et s'ils

11 ont du temps pour leur rendre visite dans l'unité de détention pendant les

12 horaires autorisés. Je ne sais pas quel est le fondement de ces

13 allégations.

14 Q. Oui, mais dans ce rapport des Nations Unies il est indiqué au

15 paragraphe 17 que l'accès à quasiment tous les documents pertinents pour

16 l'affaire était interdit au conseil de la défense jusqu'à très peu de temps

17 avant le début du procès. Ce qui faisait qu'ils ne disposaient pas du temps

18 suffisant pour préparer la défense de leurs clients. "Le 14 février 1997,

19 le juge d'instruction du tribunal du district à Pristina, Mme Danica

20 Marinkovic a pris la décision suivante s'agissant des prévenus et de leurs

21 conseils. Elle a décidé pour des raisons de sécurité d'Etat : 'Tous les

22 documents ainsi que les objets recueillis en tant qu'éléments de preuve,

23 ainsi que l'examination des prévenus et leur confrontation et l'audition

24 des témoins, que l'accès à tout cela sera interdit à la défense.' Donc ça

25 veut dire que pratiquement les conseils n'avaient pas accès aux documents

26 portant sur l'affaire. Cela signifie que l'accès aux déclarations des

27 coaccusés et d'autres documents et preuves documentaires nécessaires pour

28 préparer la défense a été autorisé au maximum une ou deux semaines avant le

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1 début du procès."

2 Est-ce que cela était une pratique établie ?

3 R. Je ne sais pas s'il s'agit d'un délai de deux, trois ou quatre

4 semaines, je ne m'en souviens pas, mais cela est régi par le code de

5 procédure pénale, il y est indiqué clairement quelle est la période dont

6 dispose le conseil pour préparer la défense après l'établissement d'un acte

7 d'accusation. Mes collègues et moi, nous avons tout simplement respecté les

8 délais prévus par la loi.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais est-ce que cela concerne

10 seulement cette affaire du MUP illégal ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne pense pas que cela concerne l'affaire du

12 MUP illégal. Il s'agit là du 14 février 1997, je pense qu'il s'agit là d'un

13 groupe de suspects liés à des activités de terrorisme.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que la manière dont votre

15 décision a été présentée ici, est-ce que la manière dont on l'a présentée

16 est correcte, précise ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, c'est une décision que j'ai prise

18 pendant l'enquête conformément à mes autorités légales.

19 Mme CARTER : [interprétation]

20 Q. Paragraphe 23 : "La pratique de ne pas autoriser les prévenus de

21 communiquer avec leurs conseils en privé est une violation flagrante des

22 standards, des normes du droit international et du droit à un procès juste

23 et équitable", c'est indiqué dans le rapport du Comité des droits de

24 l'homme.

25 Alors, y avait-il des limitations portant sur la confidentialité de la

26 communication entre le conseil et son client devant le tribunal du district

27 de Pristina ?

28 R. Après la mise en accusation, les conseils et leurs clients ont préparé

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1 leur défense, seuls. Ce qui signifie que la confidentialité de leur

2 communication était garantie. Les actes d'accusation étaient établis

3 seulement quand nous disposions de tous les éléments, de sorte qu'ils

4 connaissaient quelles étaient exactement les charges retenues à leur

5 encontre et quelles étaient les preuves dont nous disposions.

6 Q. Bien. Paragraphe 24, il est indiqué que : "L'un des conseils a dit aux

7 observateurs des Nations Unies que les auditions de quasiment tous les

8 prévenus dans cette affaire avaient commencé un soir au moment où il était

9 très difficile pour eux de trouver un conseil. Et dans cette affaire, la

10 plupart des prévenus ont retiré leurs déclarations préalablement faites le

11 moment où ils se sont trouvés devant le juge dans le prétoire en justifiant

12 cela par le fait que leurs déclarations leur ont été extorquées avec

13 l'usage de la force."

14 Est-ce que vous êtes d'accord avec ce qui est indiqué dans ce rapport ?

15 M. IVETIC : [interprétation] Je ne sais pas quel est le conseil qui a

16 déclaré cela.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Ecoutons la réponse du témoin.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux vous dire que la situation n'était pas

19 ainsi. J'espère que les conseils de la Défense ici n'auront rien contre ce

20 que je dis maintenant, qu'ils ne vont pas se sentir insultés, mais quand

21 une affaire commence, ensuite les conseils utilisent chaque moyen à leur

22 disposition pour obtenir des décisions en faveur de leurs clients. Vous

23 savez, c'était difficile de prouver une telle chose, et c'est assez facile

24 de faire une allégation. Par exemple, il m'est arrivé qu'un conseil

25 m'attaque moi pendant le procès. Je me souviens d'une affaire précise où

26 l'accusé avait déclaré qu'il avait mal au ventre, qu'il ne pouvait pas

27 continuer, alors je lui ai donné des médicaments. On a attendu, on a

28 attendu qu'il se sente mieux, et ils étaient tous là, le conseil de la

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1 défense, les gardiens, les gardes de sécurité, l'interprète, et cetera, et

2 cetera. Puis, qu'est-ce qui s'est passé ensuite plus tard ? J'ai demandé

3 s'il se sentait suffisamment bien pour continuer ? Il a dit : Oui, c'est

4 vrai. Ensuite, l'avocat a essayé de présenter cela d'une manière tout à

5 fait inappropriée. Il a déclaré que je lui avais donné ces médicaments pour

6 toute autre chose, et l'accusé même a dû se lever pour dire que ce que

7 racontait son conseil était faux, et que le médicament que je lui avais

8 donné lui a soulagé les douleurs de ventre. Vous savez les conseils ne

9 rechignent devant quasiment rien au moment du procès, mais c'est leur

10 travail aussi.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant, Madame Carter, s'il vous

12 plaît.

13 [La Chambre de première instance se concerte]

14 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] J'ai voulu savoir quelle était la

15 méthode adoptée pour enregistrer les déclarations des personnes qui

16 ultérieurement ont été accusées. Comment cela a été fait ? En quelle langue

17 ? Est-ce que les déclarations leur ont été relues ? Est-ce que leur avocat

18 était présent ? Comment cela s'est passé avec lui ? Est-ce que la police ou

19 le MUP étaient également présents lors du recueil de la déclaration et

20 l'enregistrement de la déclaration ? Est-ce que cette personne a été amenée

21 de la prison au tribunal pour recueillir ses déclarations ? Pouvez-vous

22 nous dire dans quelles conditions cela a été fait ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsqu'une personne est détenue et se trouve

24 en prison pour une détention provisoire de 72 heures. La police n'a plus

25 rien à voir avec. Lorsque la personne est auditionnée par moi en tant que

26 juge d'instruction, son conseil est présent. Dans la plupart du cas

27 lorsqu'il s'agissait des Albanais, un interprète assermenté pour l'albanais

28 était présent. Puisque je ne comprenais pas l'albanais et l'accusé ne

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1 comprenait pas le serbe, je lui posais des questions, il répondait à voix

2 haute. Moi, je dictais à voix haute et l'interprète assermenté lui

3 interprétait ce qui avait été enregistré au compte rendu. A la fin de

4 l'audition, on demande à l'accusé s'il veut lire la déclaration. Il y en

5 avait qui ont voulu faire ça pour dire que c'était bien leur déclaration et

6 qu'ils n'avaient pas de remarques à faire; et on entre une phrase dans

7 laquelle on dit qu'il confirme qu'il s'agit de sa déclaration. L'accusé,

8 l'interprète assermenté et le juge d'instruction et le greffier signent

9 cela.

10 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Et pour ce qui est de son conseil,

11 est-ce qu'il a signé lui aussi la déclaration ? Et est-ce que dans le

12 compte rendu d'audition, cela figurait également qu'il était présent.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans le compte rendu de l'audition, on ne met

14 pas qui était présent, on entre le nom du juge d'instruction, du greffier

15 et c'est seulement l'accusé qui signe tous les comptes rendus. Au cas où le

16 conseil ne voudrait pas bénéficier du droit à interjeter appel, dans ce

17 cas-là, c'est le conseil qui signe aussi cela.

18 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Est-ce qu'il a assez de possibilités

19 pour engager un conseil de son propre choix dans le cadre de ces 72 heures

20 avant qu'il ne soit amené à vous ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] La famille engage l'avocat habituellement et

22 l'avocat vient pour se présenter en disant qu'il est conseil de la défense

23 d'une personne. Ensuite, on fixe la date d'audience. Si l'accusé dit qu'il

24 veut bénéficier du droit d'avoir un conseil, on lui donne une liste

25 d'avocats et il sait au préalable quel avocat sera engagé pour lui. On

26 convoque cet avocat. S'il n'est pas en mesure de venir le même jour, on

27 reporte l'audience pour le jour suivant.

28 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Sur la base de quoi vous formulez les

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1 questions à l'accusé, sur la base de quelles informations ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dispose de la demande pour procéder à

3 l'instruction. Dans cette demande, il figure les inscriptions factuelles de

4 l'infraction pénale qui imputait à la personne soupçonnée d'avoir commis

5 cette infraction pénale.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

7 Madame Carter, pouvez-vous nous aider en nous indiquant des points dans

8 l'acte d'accusation pour ce qui est de vos questions ?

9 Mme CARTER : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit des

10 poursuites pénales qui sont indiquées dans l'acte d'accusation. Et

11 j'aimerais indiquer, avant tout, et c'est dans la ligne de mon contre-

12 interrogatoire, c'est que la juridiction n'a pas procédé de façon équitable

13 pour ce qui est des prévenus albanais.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que cela concerne le chef

15 d'accusation 5 où il est question de persécution sur la base politique,

16 raciale et religieuse ?

17 Mme CARTER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, et --

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai compris cela et je pense qu'on

19 peut s'occuper de cette question de façon limitée. Mais pour ce qui est du

20 contre-interrogatoire même, est-ce que vous dites que le système judiciaire

21 n'a pas fonctionné de façon appropriée ou a fonctionné sur la base

22 discriminatoire ?

23 Mme CARTER : [interprétation] Non, c'est seulement en termes généraux la

24 partie qui concerne les persécutions et des chefs d'accusation concernant

25 des persécutions.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Lorsque je me reporte au chef

27 d'accusation concernant des persécutions et je parle en mon nom; je dois

28 dire que cela a été de grande utilité pour moi.

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1 Vous pouvez poursuivre.

2 Mme CARTER : [interprétation] Monsieur le Président, je suis contente de

3 pouvoir aborder l'incident à Gornje Obrinje vers la fin de 1998. Le témoin

4 a dit vendredi dernier quelque chose sur cet incident, cela commence à la

5 page 23 526.

6 Q. Madame, vous avez indiqué dans votre témoignage vendredi dernier que

7 vous étiez juge d'instruction dans l'affaire Gornje Obrinje; est-ce vrai ?

8 R. Si vous pensez aux exhumations à être effectuées à Gornje Obrinje, oui.

9 Q. Avez-vous été également affectée pour ce qui est des affaires

10 concernant la zone de responsabilité de Golubovac ?

11 R. Golubovac, je ne sais pas à quelle municipalité Golubovac appartient.

12 Je ne sais pas si Golubovac appartenait à notre territoire.

13 Q. Et quant à Urosevac ? Ou Orahovac ?

14 R. Non, Orahovac ne se trouve pas dans la zone de ma responsabilité, de ma

15 compétence.

16 Q. Et Kleka ?

17 R. J'entends pour la première fois, Kleka. Il s'agit peut-être du mauvais

18 nom, d'un nom qui n'est pas correct pour indiquer ce toponyme.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Au moins l'une des réponses sème la

20 confusion, et peut-être qu'elle n'est pas correcte. La question est : "Et

21 pour ce qui est d'Urosevac ?" Et la réponse était : "Non, Orahovac ne

22 relevait pas de ma compétence."

23 Pour ce qui est d'Urosevac, quelle était la situation ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Cela relevait de ma compétence. Urosevac

25 relevait de ma compétence, de la compétence du tribunal régional.

26 Mme CARTER : [interprétation]

27 Q. Est-ce que Glodjane entrait dans la zone couverte par votre compétence

28 ou juridiction ?

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1 R. Glodjane, je ne sais pas à quelle municipalité il appartenait. Pouvez-

2 vous nous donner le nom de la municipalité ?

3 Q. Je vais le faire pendant la pause. Je vais apprendre cela pendant la

4 pause. Et pour ce qui est de Volujak ?

5 R. Volujak appartient au tribunal régional de Pec. Cela ne relevait pas de

6 notre juridiction.

7 Q. Madame, pour ce qui est des instructions menées par les autorités

8 finlandaises, saviez-vous que six localités que je viens de nommer, toutes

9 les six localités allaient être réexaminées par les Finlandais; Gornje

10 Obrinje, Golubovac, Orahovac, Kleka, Glodjane et Volujak ? Saviez-vous que

11 toutes ces six localités ont été examinées par les Finlandais ?

12 R. Je ne sais pas ce qui se passait à Urosevac pour ce qui est de l'équipe

13 finlandaise, pour ce qui est de Glodjane, je sais que les Finlandais y ont

14 participé parce qu'on s'est rendus sur les lieux ensemble pour procéder aux

15 constatations sur les lieux. Pour ce qui est de Kleka, je ne sais pas à se

16 rapporte cet endroit. Si on pense à Klecka, je peux dire que l'équipe

17 finlandaise a participé à l'instruction à Klecka. Pour ce qui est d'autres

18 localités, je n'en sais rien.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Carter, est-ce que vous pouvez

20 nous indiquer le moment propice à s'arrêter ?

21 Mme CARTER : [interprétation] Nous pouvons nous arrêter maintenant.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

23 Maintenant, nous allons faire la pause, Madame Marinkovic, pour déjeuner,

24 la pause d'une heure. Vous pouvez quitter le prétoire avec M. l'Huissier et

25 nous allons continuer nos travaux à 13 heures 45.

26 [Le témoin quitte la barre]

27 --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 46.

28 --- L'audience est reprise à 13 heures 46.

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1 [Le témoin vient à la barre]

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Carter, vous pouvez continuer

3 votre contre-interrogatoire.

4 Mme CARTER : [interprétation]

5 Q. Madame le juge Marinkovic, lorsque nous parlons de l'équipe de médecins

6 légistes finlandaise qui a été invitée au Kosovo, saviez-vous que cette

7 équipe a été invitée par les autorités de Belgrade, les autorités les plus

8 haut placées ?

9 R. Oui, j'ai entendu dire que ça s'est passé ainsi.

10 Mme CARTER : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher la pièce P441, les

11 pages de 98 à 100.

12 Q. Les six localités que j'ai déjà énumérées étaient les localités

13 choisies pour ce qui est de cette équipe de médecins légistes, il

14 s'agissait des atrocités commises par l'UCK à Klecka, Glodjane et Volujak,

15 et ainsi que des atrocités présumées à Gornje Obrinje, Golubovac et

16 Orahovac. Dans le rapport de "Human Rights Watch" cela était décrit comme

17 étant "la semaine de terreur semée à Drenica." Vous avez déclaré avant que

18 vous avez été le juge d'instruction pour ce qui est de ces infractions

19 pénales commises à Gornje Obrinje; n'est-ce pas ?

20 R. Oui.

21 Q. A la réunion du commandement conjoint lorsqu'il était question de

22 l'équipe de médecins légistes finlandaise le 22 octobre 1998, saviez-vous

23 qu'il a été dit qu'il s'agissait d'un groupe de cinq membres, cinq

24 observateurs -- c'est à la page 142 en B/C/S qui correspond à la page 157

25 en anglais, où il est dit la chose suivante : "Le groupe d'observateurs

26 composé de cinq personnes est arrivé de Finlande aujourd'hui pour mener

27 l'enquête concernant la situation au Kosovo-Metohija et pour exhumer des

28 cadavres." Je souligne la chose suivante : "Il a été ordonné à ce que les

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1 affaires à propos desquelles des enquêtes ont été ouvertes soient

2 transférées à cette équipe de Finlande."

3 Avez-vous fait cela pour ce qui est des affaires liées à Gornje

4 Obrinje ?

5 R. J'ai dit pour ce qui est de cette affaire que nous ne pouvions pas

6 aller sur les lieux pour procéder à l'enquête, je ne sais pas ce qui s'est

7 passé ce jour-là pour ce qui est des cadavres retrouvés sur les lieux. Moi,

8 j'ai été empêchée d'aller sur les lieux ce jour-là.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Maître Fila.

10 M. FILA : [interprétation] Ici il est indiqué "Joint Command." De quoi il

11 s'agit ? Saviez-vous qu'un ordre a été donné à une réunion --

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est assez clair. Il s'agit de

13 comptes rendus de la réunion du commandement conjoint qui a eu lieu le 22

14 octobre 1998 où il a fait référence à ce groupe de cinq membres, ce groupe

15 d'observateurs qui est arrivé de Finlande ce jour-là pour mener une enquête

16 concernant la situation au Kosovo-Metohija et pour procéder à l'exhumation

17 des cadavres, cette partie a été soulignée dans le compte rendu. Et on pose

18 la question si on leur a transmis cela, quelle est votre question ?

19 M. FILA : [interprétation] Il est écrit ici quelque chose sur le

20 commandement conjoint. Il faut qu'on voie si le témoin sait quelque chose

21 sur le commandement conjoint, donc il y a deux questions-là --

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, non, non, il n'y pas deux

23 questions. La question a été très soigneusement formulée : Avez-vous remis

24 l'affaire concernant Gornje Obrinje à l'équipe de médecins légistes

25 finlandaise ? C'est la seule question qui a été posée et Mme Marinkovic n'a

26 pas répondu à cette question, donc il n'y a aucun doute que la question

27 sera posée encore une fois.

28 M. FILA : [interprétation] Merci.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

2 Madame Carter, poursuivez.

3 Mme CARTER : [interprétation]

4 Q. Je vais répéter ma question : avez-vous remis ou cédé l'enquête pour ce

5 qui est de Gornje Obrinje à l'équipe de médecins légistes finlandaise ?

6 R. Comme je l'ai déjà dit ce jour-là on a été empêché d'aller à Gornje

7 Obrinje pour mener l'enquête sur place et pour exhumer les cadavres, donc

8 je ne pouvais pas transmettre ces cadavres --

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Répondez d'abord, s'il vous plaît, à

10 la question et après nous pourrons continuer. Avez-vous cédé cette affaire

11 à l'équipe de médecins légistes finlandaise ou est-ce que vous avez

12 continué à travailler sur cette affaire ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne l'avais pas, parce que je n'ai pas vu

14 ces cadavres, je n'ai pas pu aller sur les lieux. C'est ce que j'ai dit.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais vous n'avez pas pu arriver à ces

16 lieux parce que vous avez insisté à y aller et ayant eu l'équipe de

17 policiers du MUP en uniforme avec vous, il a été indiqué que vous avez

18 obstrué le processus entier. Essayons de ne pas contourner la chose et

19 tourner autour du pot.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas vrai de dire que j'ai obstrué le

21 processus de l'instruction. C'était les membres de l'OSCE et ceux qui

22 étaient avec l'équipe finlandaise qui en ont obstrué le processus de

23 l'instruction parce que nous étions prêts à aller sur les lieux, mais à

24 l'entrée de Gornje Obrinje ils nous ont dit que nous ne pouvions plus

25 continuer parce qu'il y avait des membres de l'UCK là-bas et qu'ils

26 allaient tirer sur nous. Je n'ai pas accepté d'aller avec eux à Gornje

27 Obrinje parce que c'était risqué, ils ne pouvaient pas me garantir la

28 sécurité.

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1 Et pour ce qui est de constatations sur les lieux, je ne pouvais pas

2 procéder à ces constatations sans présence d'autres membres de mon équipe,

3 et la police était là-bas pour sécuriser les lieux.

4 Mme CARTER : [interprétation]

5 Q. Madame le juge Marinkovic, je vous avance que cet ordre est arrivé de

6 Belgrade le 22 octobre 1998, plusieurs mois avant votre tentative d'aller à

7 Gornje Obrinje. Pourquoi avez-vous essayé d'y aller avec qui que ce soit vu

8 l'ordre qui existait déjà concernant la cessation de l'affaire à l'équipe

9 de médecins légistes finlandaise ?

10 R. J'ai été appelée par le président du tribunal et avant cela, la demande

11 concrète a été déposée par les familles de victimes de Gornje Obrinje pour

12 procéder à l'enquête, pour que le tribunal régional de Pristina procède à

13 l'enquête. Le président a contacté les représentants de l'OSCE et les

14 membres de l'équipe finlandaise à la réunion commune à laquelle je n'ai pas

15 assisté. Le président est donc arrivé à des conclusions, il m'a tout

16 simplement informé que ce jour-là, il fallait aller sur place pour procéder

17 aux constatations dans les lieux.

18 Q. Pour ce qui est de l'enquête menée par l'équipe finlandaise, dans le

19 rapport de "Human Rights Watch" il est indiqué dans les notes que vous

20 étiez juge d'instruction pour ce qui est de l'affaire Klecka aussi; est-ce

21 vrai ?

22 R. Klecka, oui.

23 Q. A l'époque, l'organisation "Human Rights Watch" vous a interpellée

24 parce que vous avez auditionné deux suspects albanais et c'était devant les

25 caméras de télévision que vous avez procédé à l'audition de ces deux

26 suspects albanais ?

27 R. L'un des deux a fait sa déclaration en présence de caméra et cette

28 caméra a été tenue par un technicien de la police technique et

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1 scientifique, et cela s'est passé dans mon bureau. Selon le code de

2 procédure pénale, cela est permis si l'accusé qui a auditionné donne son

3 autorisation à ce que cela soit fait.

4 Q. Bien. Je voudrais vous dire que dans le rapport de "Human Rights

5 Watch", il est indiqué que l'équipe de médecins légistes finlandaise qui a

6 mené l'enquête à Klecka sans que le gouvernement yougoslave ou l'UCK

7 n'intervienne, étiez-vous sur les lieux au moment où l'équipe de médecins

8 légistes finlandaise est allée à Klecka ?

9 R. Autant pour la première fois que l'équipe finlandaise était sur place

10 pour mener une enquête jusqu'au jour d'aujourd'hui, je n'étais pas au

11 courant de ce fait et je ne sais pas qui leur a permis de mener cette

12 enquête.

13 Q. Je voudrais avancer également que l'équipe finlandaise à la tête de

14 laquelle était Jan Kickert le président --

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Revenons un peu en arrière. Vous nous

16 avez répondu ce matin pour ce qui est de Klecka que, oui, ils ont participé

17 à cela et vous avez fait référence à l'équipe finlandaise. Maintenant vous

18 dites que selon vous, ils n'ont pas participé à cette enquête ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils y ont participé après que j'ai procédé à

20 des constatations sur les lieux et après que notre institut de médecine

21 légale ait procédé à des examens des ossements retrouvés à Klecka, mais je

22 ne sais pas si l'équipe finlandaise est allée sur place pour mener une

23 enquête sur place, ça je ne le sais pas.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

25 Madame Carter, continuez.

26 Mme CARTER : [interprétation]

27 Q. Laissons Klecka de côté et revenons à Gornje Obrinje, étiez-vous au

28 courant que l'équipe de médecins légistes finlandaise était déjà sur place

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1 le jour avant que vous n'ayez essayé d'aller sur place avec eux ?

2 R. Non, je ne le savais pas.

3 Q. En fait, Jan Kickert a témoigné dans cette affaire à la page du compte

4 rendu 11 278, à la ligne 16, qu'un jour, la veille où l'équipe finlandaise

5 s'est rendue sur place seule, sans présence du MUP, de juge ou de qui que

6 ce soit, et après il dit à la page 11 279, ligne 5, qu'il n'y avait pas de

7 risque pour ce qui est de leur sécurité parce que l'UCK a donné des

8 garanties pour leur sécurité et a voulu que l'exhumation de leurs proches

9 soit faite.

10 Etiez-vous au courant de cela ?

11 R. Non. On m'a présenté la situation différemment. A l'entrée de Gornje

12 Obrinje ils m'ont dit que là-bas il y a des soldats de l'UCK, et qu'il y a

13 une barrière et qu'ils ne pouvaient pas me garantir la sécurité si je me

14 rendais seule là-bas sans eux pour ce qui est de l'enquête menée sur place.

15 D'ailleurs, étant seule je ne pouvais pas mener l'enquête sur place. Et

16 troisièmement, je ne sais pas comment l'équipe finlandaise a pu aller sur

17 place pour mener une enquête sans avoir autorisation d'un organe parce

18 qu'il s'agissait de médecins légistes, du pathologiste, cela est contraire

19 au code de procédure pénale.

20 Q. Je vous ai déjà dit qu'à Belgrade, notamment au sein du commandement

21 conjoint qu'un ordre a été donné, que toutes les affaires en cours devaient

22 être référées à l'équipe finlandaise et c'est sur la base de cette

23 décision-là que l'équipe finlandaise s'était rendue sur ces sites. Est-ce

24 que vous êtes en train de nous dire que vous ne disposiez d'aucune

25 information selon laquelle les Finlandais étaient censés s'occuper de ces

26 lieux de crime ?

27 R. Tout d'abord, je ne suis pas au courant de l'existence d'un tel

28 document et qu'ils ont été autorisés à le faire, mais la seule chose qu'ils

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1 aient pu faire conformément à une autorisation, a été d'accéder aux

2 documents, de dossiers. Ensuite, sur la base de l'accès à ces documents, de

3 donner leur opinion, je ne pense pas du tout ou je ne suis pas au courant

4 du fait qu'ils aient obtenu une autorisation pour effectuer les

5 constatations sur les lieux. C'étaient des étrangers, ils ne pouvaient

6 qu'agir en tant qu'observateurs ou faire un examen de l'opinion déjà

7 avancée par nos médecins légistes dans leur rapport.

8 Q. [aucune interprétation]

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Fila.

10 M. FILA : [interprétation] Monsieur le Président, je ne comprends de

11 nouveau pas ce qui se passe. Regardez page 87, lignes 3 et 4, c'est quoi ce

12 commandement conjoint à Belgrade ? J'ai laissé le témoin répondre, bien

13 sûr, pour ne pas passer préjudice au Procureur, mais là quand même il faut

14 qu'on réagisse. Regardez la question posée par le substitut, lignes 3 et 4

15 de la page 87, commandement conjoint à Belgrade. De quoi s'agit-il ?

16 Qu'elle me le montre.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais vous avez le document. Vous

18 pouvez faire les recherches dans le document vous-même. A la limite elle

19 n'a pas besoin d'utiliser le document pour poser ses questions.

20 Vous pouvez toujours poser des questions à ce sujet-là lors de votre

21 interrogatoire.

22 M. FILA : [interprétation] Oui, j'ai attendu que le témoin finisse sa

23 réponse pour ne pas porter préjudice à l'Accusation.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien sûr, je ne pense pas du tout que

25 votre intervention était impolie ou quoi que ce soit de tel. Je vous ai

26 tout simplement dit qu'il s'agissait là d'une question que vous pourriez

27 soulever lors du contre-interrogatoire.

28 Mme CARTER : [interprétation]

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1 Q. Madame, j'avance également que Jan Kickert a témoigné que, d'après ce

2 qu'il avait compris s'agissant de toute cette procédure, le juge de

3 district, Mme Marinkovic, pouvait les accompagner, mais qu'il ne savait pas

4 qu'ils seront escortés par toute une colonne de 20 véhicules blindés, de

5 véhicules de transport de troupes blindés et de véhicules de police. Est-ce

6 que vous êtes en train de dire que Jan Kickert se trompe, que c'était eux

7 des invités, à la différence de vous-même ?

8 R. C'est moi qui étais en charge et autorisée à effectuer une constatation

9 sur les lieux à Gornje Obrinje. Ils étaient là pour observer, pour faire

10 des notes, pour soulever des questions supplémentaires, et cetera.

11 C'étaient des étrangers en fin de compte, et aucun étranger ne peut faire

12 des constatations sur les lieux, cela incombe seulement à des magistrats

13 autorisés. Cette histoire de véhicules blindés avancée par M. Kickert, bien

14 sûr, il y a eu des véhicules blindés, mais c'était tout à fait normal, ce

15 n'était pas une zone sûre.

16 Tout le monde savait qu'il y avait des membres de l'UCK dans cette

17 zone et que c'était risqué de s'y rendre. La police était là pour me

18 protéger, moi, mon équipe, ainsi que les gens de l'OSCE. A la limite,

19 c'était à la police d'évaluer quel était le nombre de véhicules, les forces

20 nécessaires pour sécuriser notre déplacement. Quand nous sommes arrivés

21 jusqu'aux collines, nous avons compris, moi et les autres, que les membres

22 de l'UCK ont commencé à nous encercler, ils portaient des uniformes noirs.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez dépassé le cadre de la

24 question qui vous a été posée. Essayez de répondre à la question portant

25 sur le nombre de véhicules.

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y a pas eu de véhicules blindés.

27 S'agissant de véhicules de police, des 4x4, et cetera, effectivement, il y

28 en a eu. Je pense que dans chaque véhicule, il pouvait y avoir quatre à

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1 cinq personnes, mais je suis sûre qu'il n'y a pas eu de véhicules blindés.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Carter.

3 Mme CARTER : [interprétation]

4 Q. Madame Marinkovic, vous avez indiqué lors de votre témoignage de

5 vendredi et d'aujourd'hui qu'il vous est arrivé de ne pas vous rendre sur

6 les lieux pour effectuer des constatations en cas de risques très élevés du

7 point de vue de la sécurité; cela est-il exact ?

8 R. Non, ce n'est pas parce qu'on y renonçait, ça veut tout simplement dire

9 que nous ne le faisons pas mais autorisions les membres du ministère de

10 l'Intérieur qui se trouvaient déjà sur place à effectuer cette activité

11 d'enquête.

12 Q. Très bien. Dans le rapport P441 et dans votre déposition, il y a des

13 indications que des négociations ont eu lieu mais que des activités

14 d'enquête n'ont jamais eu lieu s'agissant de Gornje Obrinje ?

15 R. Oui.

16 Q. Si les circonstances étaient telles vous les décrivez et si l'équipe

17 finlandaise était censée simplement observer les activités d'enquête,

18 pourquoi vous n'avez pas demandé au MUP ultérieurement de se rendre à

19 Gornje Obrinje et d'effectuer l'enquête de la manière appropriée ?

20 R. Parce que je n'étais pas autorisée à le faire. La situation sécuritaire

21 sur le terrain est quelque chose qui était évaluée par le MUP et non pas

22 par moi en tant qu'individu, en tant que personne physique, ou même pas en

23 tant que juge d'instruction. Deuxièmement, les constatations sur les lieux,

24 l'exhumation, ce n'est pas quelque chose que les membres du MUP étaient

25 autorisés à effectuer en mon absence.

26 R. On a fait appel à eux seulement pour sécuriser le site. Mais

27 l'exhumation devait être effectuée par le juge d'instruction et son équipe

28 de constatation.

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1 Q. Ça veut dire que si vous ne pouviez pas vous rendre là-bas, c'est que

2 vous n'alliez pas autoriser non plus quelqu'un d'autre à s'y rendre pour

3 s'occuper de ces corps ?

4 R. Il ne s'agit pas d'une question de vouloir ou ne pas vouloir; en temps

5 de guerre, on évalue la situation, on essaie de déterminer si objectivement

6 les activités d'enquête qu'on est censés faire peuvent être effectuées ou

7 pas. Il faut éviter les confrontations et les conflits, la mort des

8 personnes qui se rendent sur les lieux. Les membres de l'OSCE m'ont

9 informée de la présence des membres de l'UCK armés dans le village même.

10 Q. Oui, mais j'avance que la veille l'équipe finlandaise a pu se rendre

11 sur les lieux sans aucune entrave.

12 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense, pour que le

13 dossier soit complet, que nous avons également reçu des preuves selon

14 lesquelles la Croix-Rouge internationale avait établi l'existence de

15 plusieurs victimes pendant les quelques jours qui ont suivi le jour en

16 question.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce que vous venez de dire c'est un

18 commentaire, et il est tout à fait déplacé de faire des commentaires dans

19 cette phase du contre-interrogatoire.

20 Poursuivez, s'il vous plaît, Madame Carter.

21 Mme CARTER : [interprétation]

22 Q. Reprenons la question de l'équipe finlandaise, c'est-à-dire le

23 traitement dont bénéficiait l'ambassadeur des droits de l'homme. Vous vous

24 souvenez qu'un officier du MUP en civil lui a arraché sa caméra par force ?

25 R. Je ne suis pas au courant de cela. Je me souviens du fait que l'un des

26 membres de l'OSCE est arrivé sur place accompagné de son épouse et que nous

27 lui avons fourni les conditions nécessaires, nous avons extrêmement bien

28 coopéré avec lui, et c'était son épouse justement qui me priait

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1 littéralement, elle me priait de ne plus poursuivre, de ne pas aller plus

2 loin.

3 Q. Abordons maintenant l'enquête pour laquelle vous dites que vous l'avez

4 conduite s'agissant de Fehmi Agani. Vous nous avez dit, pages 23 495

5 jusqu'à 23 498. Pourriez-vous nous dire quel était votre rôle dans le cadre

6 de cette enquête ?

7 R. Quand le service de permanence du SUP de Pristina m'a informée de la

8 découverte d'un corps de sexe masculin non identifié à côté de la route, je

9 leur ai demandé s'ils en avaient informé le service de permanence du SUP et

10 le procureur public. Entre-temps l'inspecteur en charge des homicides a

11 pris contact avec moi et il a confirmé qu'ils avaient déjà entrepris des

12 activités d'enquête, et qu'ils n'ont rien trouvé sur le corps permettant

13 son identification. A ce moment-là ni le procureur ni moi ne pouvions nous

14 rendre sur les lieux.

15 Q. Madame Marinkovic, est-ce que vous voulez dire que vous étiez juge

16 d'instruction dans cette affaire ?

17 R. Oui, j'étais le juge d'instruction de permanence au moment où j'ai été

18 informée de ces faits. S'agissant des constatations sur les lieux, cela

19 s'est fait par mon équipe sans ma présence.

20 Q. C'est un peu bizarre étant donné que dans l'affaire Milosevic, page 37

21 921 et, dans la version électronique, page 209 du document 3115, vous avez

22 déclaré : "Je n'étais pas juge d'instruction dans cette affaire, je n'avais

23 rien à voir avec cette affaire.

24 Je n'ai pas rédigé le rapport sur les constatations sur les lieux ni

25 rien de semblable."

26 Ensuite, aujourd'hui : "S'agissant de l'affaire Fehmi Agani, ce que

27 je sais est la chose suivante : je sais que la vérité est différente, la

28 vérité établie par les autorités du SUP de Pristina --dispose des preuves

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1 et il y a un rapport qui a été établi."

2 Est-ce que vous voulez dire aujourd'hui que c'est le contraire de ce que

3 vous avez dit dans l'affaire Milosevic ?

4 M. IVETIC : [interprétation] Objection. La manière de citer les propos du

5 témoin est complètement erronée. Il s'agit de tout autre chose.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame, il y a une question de droit

7 qui se pose ici dont on doit discuter, et il serait approprié que cela se

8 fasse en votre absence. Pourriez-vous, s'il vous plaît, quitter le prétoire

9 pendant quelques instants ? Nous allons faire très rapidement. Merci.

10 [Le témoin quitte la barre]

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Maître Ivetic.

12 M. IVETIC : [interprétation] J'attends que la porte soit fermée.

13 J'ai perdu maintenant la ligne, l'autre jour le témoin n'a pas déclaré

14 qu'elle avait participé à l'enquête, mais qu'elle était juge de permanence,

15 c'est ce qu'elle vient de répéter. J'aimerais m'assurer que rien n'est

16 sorti de son contexte parce que sur la base de la déposition que nous avons

17 entendue jusqu'à maintenant, s'agissant de cette affaire du corps non

18 identifié retrouvé à côté de la route, qui a été ensuite identifié comme

19 celui de Fehmi Agani, et toute l'affaire maintenant on l'appelle l'affaire

20 Fehmi Agani -- il y a un document de la Défense 6D portant sur un corps non

21 identifié qui avait été découvert, je ne sais pas à quel moment le corps

22 non identifié est devenu Fehmi Agani, c'est-à-dire à quel moment on a

23 réussi à l'identifier. Je pense -- peut-être que Mme Carter pourrait donner

24 des dates ou quelque chose, ou un document au témoin, peut-être que le

25 témoin peut répondre sans document, mais --

26 [La Chambre de première instance se concerte]

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Attendez. De quoi s'agit-il ? Est-ce

28 que Mme le Procureur présente les dépositions précédentes de manière

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1 erronée ? Si j'ai bien compris, c'était une citation, ce qu'elle a dit.

2 M. IVETIC : [interprétation] Non, je ne parle pas de cette partie-là.

3 D'après ce que le témoin a déclaré hier et aujourd'hui, il est clair

4 qu'elle avait reçu un appel téléphonique, qu'elle ne pouvait pas se rendre

5 sur les lieux, que l'officier de police - elle a donné son nom - était

6 celui qui a effectué en fait ces consultations sur les lieux. Ce dossier-là

7 qui portait sur un corps non identifié trouvé au bord de la route est

8 devenu plus tard l'affaire Fehmi Agani, il s'agit de la pièce 6D142 - nous

9 pouvons le présenter au témoin - ce qui est erroné dans la manière de

10 présenter les propos du témoin, c'est qu'on dit maintenant que le témoin

11 avait déclaré avoir mené l'enquête ou les constatations sur les lieux elle-

12 même.

13 [La Chambre de première instance se concerte]

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Carter, peut-être que vous

15 devriez répéter au moins en partie vos questions au témoin. Nous ne voyons

16 rien de problématique dans cette question pour l'instant, donc nous

17 rejetons l'objection, mais évidemment vous allez être obligée de répéter

18 vos questions.

19 Veuillez introduire le témoin de nouveau dans le prétoire.

20 [Le témoin vient à la barre]

21 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Marinkovic, nous avons résolu

23 la question, maintenant vous pourriez répondre à la question posée si vous

24 le pouvez. Si vous avez besoin qu'on vous répète la question, vous pouvez

25 le dire à Mme Carter.

26 Mme CARTER : [interprétation]

27 Q. Est-ce que vous voulez que je vous répète la question ?

28 R. Oui.

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1 Q. Très bien. Vous avez déclaré aujourd'hui il y a quelques instants que

2 c'était vous le juge d'instruction de permanence et que c'était vous le

3 juge en charge de l'affaire Fehmi Agani ?

4 R. Non, je n'ai pas dit que j'étais en charge de cette affaire. J'ai tout

5 simplement été informée de la découverte d'un corps non identifié au bord

6 de la route. Au moment où j'ai reçu cette information, je n'étais

7 absolument pas au courant de l'identité de cette personne.

8 Q. Etiez-vous le juge d'instruction dans cette affaire de ce corps non

9 identifié qui a, par la suite, été identifié comme Fehmi Agani ?

10 R. S'agissant de cette affaire, en tant que juge d'instruction j'ai donné

11 l'ordre de conduire une abduction au centre de médecine légale parce que la

12 cause du décès était suspecte, et c'était seulement les médecins légistes

13 qui pouvaient établir quelle était la cause du décès; c'était le seul rôle

14 que j'ai joué là en tant que juge d'instruction.

15 Q. Mais je cite ce que vous avez déclaré dans l'affaire Milosevic, page 37

16 921, vous avez déclaré s'agissant de l'affaire Fehmi Agani : "Je n'avais

17 rien à faire avec cette affaire. Je n'étais pas le juge d'instruction."

18 Vous avez également dit : "Je n'ai pas rédigé de rapport sur le site,

19 aucune constatation sur les lieux, ni rien de tel."

20 Donc comment ça se fait que dans l'affaire Milosevic vous avez

21 déclaré que vous n'aviez rien à voir avec l'affaire Fehmi Agani alors

22 qu'aujourd'hui et maintenant vous êtes en train de nous dire que vous étiez

23 le juge d'instruction et que vous êtes en fait bien impliquée dans cette

24 affaire ?

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic.

26 M. IVETIC : [interprétation] Je suis désolé, mais je dois vraiment me

27 lever. Je ne souhaite pas influencer le témoin avec mes objections.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Marinkovic, est-ce que vous

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1 parlez l'anglais ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourriez-vous alors enlever vos

4 écouteurs pendant qu'on discute de cette question ?

5 M. IVETIC : [interprétation] Merci. Nous avons utilisé beaucoup de temps

6 pour examiner toutes les activités différentes comprises dans l'enquête --

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Attendez, avant de poursuivre

8 j'aimerais que vous entendiez la chose suivante : cette dame ici est

9 quelqu'un qui a des connaissances personnelles portant sur son implication

10 ou sa non-implication dans une affaire.

11 Je pense qu'étant donné qu'elle devrait être capable de répondre et de

12 situer son implication dans la phase où le corps était encore non identifié

13 ou la phase postérieure.

14 M. IVETIC : [interprétation] Oui, mais là on fait une confusion entre les

15 constatations sur les lieux et l'enquête et c'est pour ça que rien n'est

16 clair, elle ne peut pas répondre aux questions parce que tout simplement on

17 ne les pose clairement.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien, vous, vous allez avoir la

19 possibilité de poser des questions supplémentaires au témoin s'il y a

20 quelque chose d'insuffisamment clair qui ressort maintenant de cette phase

21 de l'interrogatoire.

22 [La Chambre de première instance se concerte]

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien, maintenant vous pouvez remettre

24 vos écouteurs et nous dire pourquoi avez-vous, dans l'affaire Milosevic,

25 déclaré que vous n'étiez pas juge d'instruction dans cette affaire et que

26 maintenant vous êtes en train de nous dire quelque chose de différent.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Quand j'ai témoigné dans l'affaire Milosevic,

28 j'ai dit qu'en tant que juge d'instruction, je n'ai pas mené l'enquête,

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1 parce que l'enquête ça comprend une procédure de pré-accusation, mais en

2 plus ce que je peux vous dire dans l'affaire Fehmi Agani, la seule activité

3 que j'ai enclenchée, c'était l'ordre d'abduction, mais ça ne veut pas dire

4 à ce moment-là que l'enquête n'a pas été encore enclenchée. Après il y a le

5 juge d'instruction qui démarre l'enquête, mais ce n'était pas moi. A ce

6 moment-là, c'était encore une plainte portant sur le corps non identifié,

7 c'est tout.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Madame Carter.

9 Mme CARTER : [interprétation]

10 Q. Mais j'avance que ni vous, ni d'autres n'avez fait distinction entre

11 ces deux cas au moment où vous avez présenté les déclarations liées à

12 l'affaire Agani, vous avez dit : "Je n'avais rien à faire avec cette

13 affaire."

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'espère que c'est utile ce que vous

15 allez vous dire.

16 M. IVETIC : [interprétation] Le fait que dans une autre affaire personne

17 n'a posé la question --

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Asseyez-vous et taisez-vous.

19 M. IVETIC : [interprétation] Je pense qu'il s'agit de quelque chose qui est

20 très important et je veux que ce soit consigné au compte rendu.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Asseyez-vous, c'est quelque chose que

22 vous pouvez faire lors des questions supplémentaires.

23 Mme CARTER : [interprétation]

24 Q. Bien. A la page 37 920, question posée par M. Nice s'agissant de la

25 déclaration de Natasa Kandic : "Regardons l'article. Ce qui est encore plus

26 important c'est le reste dont elle a pu se plaindre." J'aimerais qu'on

27 place ça sur le rétroprojecteur. Il s'agit d'un article du 8 mars 2002, où

28 il est indiqué que c'est vous "Le juge d'instruction du tribunal de

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1 district de Pristina --

2 L'INTERPRÈTE : Les interprètent prient le Procureur de ralentir. C'est

3 impossible de travailler avec cette vitesse.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] On vous a déjà demandé de ralentir

5 votre lecture, puis d'un autre côté, je ne vois pas à quoi sert ce

6 narratif-là.

7 Mme CARTER : [interprétation] Justement, j'essaie de faire une citation

8 exacte de ce qui est contesté par Me Ivetic.

9 Q. Il est indiqué ici : "J'aimerais que vous me disiez spécifiquement et

10 concrètement quelles sont les plaintes faites par rapport à mon travail et

11 si les personnes qui l'ont fait ont été enquêtées elles-mêmes et c'est pour

12 cette raison-là qu'elles ont déposé leurs plaintes."

13 Alors, on vous a demandé : "Est-ce que vous l'accusez de mensonge ?"

14 Vous avez dit : "S'agissant de votre question, j'ai des preuves concrètes

15 que je peux présenter à la Chambre. S'agissant de l'affaire Fehmi Agani, je

16 n'ai rien à voir avec cette affaire. Je n'étais pas juge d'instruction."

17 Alors, comment ça se fait que dans l'affaire Milosevic, vous avez dit que

18 vous n'étiez pas juge d'instruction dans cette enquête et que vous avez, en

19 fait, déclaré que Natasa Kandic était une menteuse, et dire toute autre

20 chose aujourd'hui ?

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Tout d'abord, Madame Carter, c'est

22 quoi ce que Natasa Kandic avait dit ? De quoi le témoin a été accusé par

23 Natasa Kandic ?

24 Mme CARTER : [interprétation] Monsieur le Président, dans le compte rendu

25 dans l'affaire Milosevic, il a été dit qu'elle faisait l'objet de beaucoup

26 de plaintes pendant qu'elle faisait son travail et que Natasa Kandic, c'est

27 à la page 37 919 --

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais quelles étaient ces plaintes ?

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1 Donnez-nous un exemple, je comprends pourquoi Mme Marinkovic a voulu savoir

2 à quoi portaient ces plaintes.

3 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pensais que cela

4 était placé sur le rétroprojecteur, il s'agit d'une pièce à conviction qui

5 a été utilisée dans l'affaire Milosevic.

6 Mme CARTER : [interprétation] Si j'ai bien compris, une série de questions

7 a été posée pour ce qui est de Mme Marinkovic et de son implication dans

8 l'affaire Agani.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais vous ne savez pas en quoi

10 consistaient ces plaintes, n'est-ce pas ? Où en sommes-nous ? Vous avez

11 répété cette question à plusieurs reprises pour savoir si elle était juge

12 d'instruction dans cette affaire. Qu'est-ce que vous voulez dire et montrer

13 parce que vous nous paraphrasez ce que les autres avaient dit.

14 Mme CARTER : [interprétation] Monsieur le Président, concrètement, je veux

15 dire que ce témoin qui a sous déclaration solennelle dit des non-vérités

16 dans l'affaire Milosevic et également dans cette affaire, vendredi dernier

17 on a beaucoup discuté de l'instruction menée dans cette affaire.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons -- mais où est la question

19 spécifique ?

20 Mme CARTER : [interprétation]

21 Q. Madame le juge Marinkovic, comment est-il possible que les deux

22 déclarations soient exactes, dans l'affaire Milosevic vous avez dit que

23 vous n'étiez pas juge d'instruction et que vous n'aviez rien à faire avec;

24 pourtant aujourd'hui, dans ce prétoire, vous dites que vous avez participé

25 à l'instruction en tant que juge d'instruction ? Comment c'est possible ?

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Eh bien, vous voyez il s'agit d'une

27 mauvaise représentation des choses. Pourquoi avez-vous besoin de cela, de

28 toutes ces histoires ? Pourquoi les questions, pourquoi ne pouvez-vous pas

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1 tout simplement poser des questions pour savoir quel était son rôle pour ce

2 qui est de l'autopsie à effectuer ? Si vous voulez dire qu'elle ment, vous

3 pouvez lui dire cela, mais il ne faut pas que vous disiez d'abord tout ce

4 que vous avez dit pour montrer qu'elle avait dit auparavant qu'elle n'avait

5 rien à voir avec cela.

6 Mme CARTER : [interprétation]

7 Q. Madame Marinkovic, je vais vous poser des questions concernant les

8 instructions du Président Bonomy. Comment est-il possible que dans

9 l'affaire Milosevic vous avez dit que vous n'aviez rien à voir avec cette

10 affaire, pourtant aujourd'hui vous dites que vous avez ordonné à ce que des

11 autopsies soient effectuées dans cette affaire ?

12 R. Je vais répéter la réponse que j'ai déjà donnée. L'instruction

13 concernant cette affaire n'a pas été menée parce que l'auteur était auteur

14 X, inconnu, et Monsieur le Président, je n'avais rien à ordonner dans cette

15 affaire, et pour ce qui est de l'instruction, je n'avais aucun rôle à

16 jouer. Pour ce qui est de l'autopsie, je répète qu'il s'agit d'une des

17 activités lors de l'instruction qui, mises à part les constatations sur les

18 lieux, il a été ordonné à ce que l'autopsie soit effectuée pour déterminer

19 la cause du décès. Il s'agit d'une des activités dans la phase

20 d'instruction qui est menée pour servir éventuellement au moment où

21 l'auteur de l'infraction pénale sera retrouvé.

22 Mme CARTER : [interprétation] Je n'ai plus de questions pour ce témoin.

23 M. IVETIC : [interprétation] Est-ce que le conseil de l'Accusation a

24 l'intention de retirer des commentaires pour ce qui est des mensonges parce

25 qu'il s'agit de commentaires sérieux concernant plusieurs témoins de

26 l'Accusation qui ont témoigné sous déclaration solennelle, il s'agit des

27 commentaires concernant de faux témoignages de ces témoins.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La Chambre de première instance va

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1 suspendre l'audience pour peu et nous allons continuer dans une dizaine de

2 minutes, à trois heures moins le quart. Donc tout le monde peut rester dans

3 le prétoire, les accusés également, et les conseils peuvent circuler

4 librement dans le prétoire, parce que nous avons besoin de considérer la

5 situation actuelle.

6 [Le témoin quitte la barre]

7 --- L'audience est suspendue à 14 heures 35.

8 --- L'audience est reprise à 14 heures 48.

9 [Le témoin vient à la barre]

10 [La Chambre de première instance se concerte]

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Carter, voulez-vous répondre à

12 Me Ivetic ?

13 Mme CARTER : [interprétation] Avec tout le respect que je vous dois,

14 Monsieur le Président, la façon que j'ai adoptée pour déclarer cela devant

15 la Chambre était parce qu'on m'a déjà dit que nous ne pouvons pas utiliser

16 le mot "menteur" ou "mentir" ou -- à moins que nous puissions utiliser le

17 mot utilisé par M. Hannis, c'est-à-dire un menteur non condamné. Tout

18 simplement, j'essaie de ne pas dire pour qui que ce soit qu'il soit menteur

19 ou qu'il dise la non-vérité.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense qu'il s'agit de sensibilité

21 de différentes personnes en partant de différentes cultures ou systèmes

22 juridiques. Parfois quelqu'un peut être offensé par une remarque ou par la

23 façon dont cette remarque a été proférée, et ces déclarations ont été

24 faites en tant qu'explication de la position de l'Accusation, mais Me

25 Ivetic a dit cela parce que cela devrait être retiré puisqu'il ne

26 s'agissait pas d'une question, mais plutôt d'un argument.

27 Maître Ivetic, nous avons demandé cette explication, nous l'avons

28 eue, et sans aucun doute nous allons avoir la possibilité de résoudre ce

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1 point si cela est nécessaire à la fin de l'affaire. Je pense que Mme le

2 juge Marinkovic comprendra qu'il s'agit d'une pratique qui est différente

3 par rapport à la pratique appliquée dans son tribunal, et il est tout à

4 fait habituel de dire qu'une assertion est mensonge ou bien l'autre devrait

5 être un mensonge. En tant que juristes, nous sommes habitués à entendre de

6 telles choses, mais jusqu'à ce que le tribunal ne rende sa décision, cela

7 fait tout simplement partie de la procédure pour contester des moyens de

8 preuve. Donc nous n'avons pas l'intention de prendre des mesures, Maître

9 Ivetic, dans ce sens-là, et nous avons pris note de ce que vous avez dit.

10 Maître Fila, avez-vous des questions --

11 [La Chambre de première instance se concerte]

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le Juge Chowhan voulait vous clarifier

13 une chose, c'est-à-dire à ce stade nous ne pouvons pas rendre de décision.

14 Vous pouvez être sûre que nous allons prendre en compte la façon à laquelle

15 vous avez répondu aux questions dans le contre-interrogatoire.

16 Maître Fila, voulez-vous poser des questions plutôt que d'affirmer

17 des choses que vous avez déjà affirmées lors de cette affaire ?

18 M. FILA : [interprétation] Je ne veux pas vous contredire, mais je voudrais

19 aider. D'abord, il y a un grand juriste académicien, Radomir Lukic, dans

20 notre pays, qui a affirmé constamment que 90 % des discussions entre les

21 juristes sont de nature terminologique. Aujourd'hui, on a beaucoup entendu

22 le mot instruction.

23 Pour vous, il ne s'agit que de vérifications dans votre système. Chez

24 nous, l'instruction est une sorte d'acte formel dont le juge d'instruction

25 s'occupe, où il y a le nom et le prénom de l'accusé. Lorsque vous dites à

26 un juge qu'il s'est occupé de l'instruction, cela veut dire qu'il a rendu

27 la décision portant sur l'instruction.

28 Dans la P1468, notes du commandement conjoint, le 22 novembre 1998, à

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1 la page 142, il est dit qu'un groupe de pathologistes finlandais - c'est

2 dans le témoignage de Mijatovic - était venu pour faire quelque chose.

3 C'était l'ordre venu de Belgrade, comme Mme Carter a dit, et nulle part il

4 n'est écrit qu'ils procéderaient à l'enquête parce que dans notre pays ce

5 sont seulement des juges qui peuvent procéder à des instructions, donc il

6 faut leur céder les dossiers de l'affaire, les cadavres, et c'est

7 l'instruction à laquelle vous avez pensé et non pas l'instruction dont le

8 témoin a parlé.

9 Et il n'y a pas de notes de réunion du commandement conjoint de

10 Belgrade. Cela n'existe pas.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] D'abord, Maître Fila, il faut que vous

12 soyez correct envers Mme Carter. Ce qu'elle a dit par rapport aux notes du

13 compte rendu de cette réunion est en fait que les Finlandais allaient mener

14 tout cela.

15 M. FILA : [interprétation] Voilà la quatrième chose. Cela vous a été

16 interprété de façon incorrecte. Vous pouvez demander à ce que quelqu'un

17 vous lise cela en serbe et vous allez voir que l'interprétation sera

18 différente.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher cette page

20 sur l'écran. Il s'agit de la pièce P1468 --

21 Mme CARTER : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas objection

22 à ce que cela soit affiché sur l'écran --

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que M. Fila a dit qu'il

24 s'agit de la page 142 dans le système du prétoire électronique.

25 Mme CARTER : [interprétation] Aux fins du compte rendu, Monsieur le

26 Président, j'aimerais souligner qu'on avait déjà fait cela à la page 22 231

27 pour ce qui est du témoin Stakic, pourtant si vous voulez que cela soit

28 fait encore une autre fois, c'est bien, mais la traduction écrite a été

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1 confirmée à cette date-là, c'est-à-dire le 12 février 2008.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il s'agit de la traduction en anglais

3 correct pour ce qui est de la personne qui a fait cette remarque, Me Fila a

4 dit que c'était Mijatovic, n'est-ce pas ?

5 Mme CARTER : [interprétation] M. Mijatovic a dit : "Dans le cadre des notes

6 de réunions du commandement conjoint" --

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est quoi la page en anglais ?

8 Mme CARTER : [interprétation] C'est à la page 157 en anglais.

9 M. FILA : [interprétation] Je pense qu'il serait utile que quelqu'un lise

10 cela en serbe. Il est très difficile, vous savez, c'est pour cela que j'ai

11 demandé que cela soit en serbe.

12 "Il leur a été ordonné que -- aujourd'hui -- aujourd'hui un groupe

13 est arrivé, un groupe de cinq membres est arrivé de Finlande pour examiner

14 la situation prévalant au Kosovo-Metohija, pour exhumer des cadavres. Il

15 leur a été ordonné que les affaires déjà entamées leur soient cédées." Oui,

16 c'est ça. Donc "Il a été ordonné que les affaires déjà ouvertes leur soient

17 cédées."

18 Nulle part il n'a été dit qu'ils devaient mener des instructions. Il leur a

19 été ordonné que leur soient remis les dossiers d'affaire pour qu'ils

20 puissent les examiner et non pas pour qu'ils puissent mener ces

21 instructions. Parce que selon les droits d'aucun pays cela n'est pas

22 possible. Voilà la chose essentielle. Ils n'étaient pas venus pour mener

23 des enquêtes, mais pour procéder à des exhumations des cadavres. Il s'agit

24 d'une question purement terminologique.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne pense pas que j'ai compris cela

26 d'une façon différente par rapport à ce que vous venez de nous expliquer,

27 Maître Fila, mais la réponse du Procureur à cela nous dira que si vous

28 essayez de voir une sorte d'enquête avec des éléments formels et la

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1 présence des policiers en uniforme, le résultat des efforts de ces

2 Finlandais peut être diminué. C'est tout ce qui a été dit à ce moment et

3 c'est quelque chose que nous avons à reconsidérer dans le contexte de

4 l'affaire.

5 Vous savez que lorsqu'il s'agit du terrorisme dans le monde entier, il

6 s'agit de situations où quelqu'un peut dire qu'on essaie d'obstruer les

7 efforts pour savoir la vérité. Mais lorsqu'on dit qu'il faut établir la

8 vérité, il s'agit toujours d'une question délicate, établir la vérité.

9 C'est un exercice délicat en fin de compte d'essayer de retrouver la vérité

10 indépendamment du fait de savoir ce que les parties belligérantes en

11 disent.

12 M. FILA : [interprétation] Pour ce qui est de la solution formelle, pour ce

13 qui est de l'ouverture officielle de l'instruction, je n'avais pas eu

14 l'intention d'offenser Mme Carter.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Même si vous avez déployé des efforts

16 pour le faire, je ne sais pas si vous avez réussi à l'offenser.

17 M. FILA : [interprétation] Tout cela chez nous s'appelle procédure

18 préalable au procès au pénal.

19 Mme Carter, j'aimerais qu'elle me montre les notes de Belgrade qu'elle

20 avait montrées à Mme Marinkovic parce qu'elle a mentionné les notes du

21 compte rendu de réunions du commandement conjoint de Belgrade où il est

22 question de l'équipe finlandaise de médecins légistes. S'il s'agit d'une

23 erreur, on peut l'oublier.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je suppose, Madame Carter, que vous

25 avez fait référence à ce que M. Mijatovic avait dit et cela a été

26 enregistré.

27 Mme CARTER : [interprétation] Maintenant, je comprends quelle est

28 l'objection de Me Fila. Lorsque j'ai commencé à poser des questions au

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1 témoin, j'ai voulu savoir si elle était au courant de ces instructions de

2 Belgrade, dans ce contexte j'ai mentionné le commandement conjoint eu égard

3 à cette équipe finlandaise, donc il est évident que les comptes rendus des

4 réunions du commandement conjoint ont été réunis à Pristina.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci pour votre assistance, Maître

6 Fila.

7 Maître Ivetic, avez-vous des questions supplémentaires ?

8 M. IVETIC : [interprétation] Oui. Je serai bref. Je pense qu'un autre

9 collègue à moi a voulu soulever une question -- non -- dans ce cas-là, je

10 vais commencer mes questions supplémentaires.

11 Nouvel interrogatoire par M. Ivetic :

12 Q. [interprétation] Madame Marinkovic, je serai bref et je vais en finir

13 avec mes questions supplémentaires aujourd'hui. J'aimerais vous poser

14 d'abord cette question : y a-t-il des circonstances dans le cadre

15 desquelles dans le système judiciaire serbe le juge d'instruction n'est pas

16 engagé, mais plutôt des procureurs qui directement procèdent sur la base de

17 plaintes au pénal - nous sommes sur la même page - peuvent dresser l'acte

18 d'accusation en s'appuyant sur ces plaintes au pénal ?

19 R. Oui. Dans le code de procédure pénale, on prévoit cette situation. Le

20 procureur public, sur la base de la plainte au pénal, sur la base des

21 informations y figurant et sur la base des pièces jointes à la plainte au

22 pénal, peut dresser un acte d'accusation immédiatement après avoir reçu une

23 plainte au pénal sans procéder à l'instruction au préalable.

24 Q. Merci. J'ai utilisé cette pause pour revenir au compte rendu à

25 l'endroit où on a parlé de Fehmi Agani parce que j'ai pensé que j'étais en

26 mesure de poser l'une de mes questions, mais malheureusement cela n'a pas

27 été le cas. Pour ce qui est de Fehmi Agani et l'affaire dans laquelle il a

28 été impliqué, à l'époque où vous avez rendu la décision portant sur

Page 23646

1 l'autopsie du cadavre, est-ce que le cadavre était déjà identifié ou pas,

2 probablement qu'il y avait des centaines de milliers de tels cas ?

3 R. C'était seulement à l'institut de médecine légale à l'époque que les

4 médecins légistes ont constaté l'identité du cadavre, après quoi ils ont

5 effectué l'autopsie sur le cadavre; c'était après que j'ai rendu ma

6 décision portant sur l'autopsie.

7 M. IVETIC : [interprétation] Aux fins du compte rendu, il faut que je dise

8 que 6D142 a déjà été présenté et je n'ai pas l'intention de l'utiliser

9 encore une fois, c'est le dossier concernant Fehmi Agani.

10 Q. Je vais procéder en posant d'autres questions. Madame Marinkovic,

11 lorsque vous avez posé des questions aux Albanais du Kosovo dans le cadre

12 de l'audition de ces Albanais, avez-vous eu la possibilité de parler aux

13 Albanais du Kosovo qui parlaient la langue serbe; et si oui, quel nom en

14 serbe ils ont utilisé pour parler de leur appartenance ethnique ?

15 R. J'ai eu l'occasion où certains Albanais qui arrivaient dans mon bureau

16 en tant que victimes ou en tant qu'accusés parlaient le serbe et ils

17 parlaient bien le serbe; mais cela se passait au moment où j'étais juge au

18 civil, pour ce qui est des contentieux au civil. Lorsque je leur demandais

19 quelle était leur appartenance ethnique, ils répondaient en utilisant le

20 mot "Siptar". C'était le terme habituel à utiliser. Il n'y avait rien de

21 péjoratif dans ce terme. Mon collègue albanais qui travaillait avec moi,

22 par exemple, a été appelé "Siptar" par nous tous, "Siptar, vient par là".

23 Il n'y avait pas de nuance péjorative dans cette appellation. C'était

24 plutôt parce que nous avons voulu être sympathiques.

25 Q. Merci. J'essaie de retrouver la pièce à conviction, mais je ne pense

26 pas qu'il soit nécessaire de se concentrer sur cette pièce. Lors du contre-

27 interrogatoire de Mme Carter, on a parlé du rapport des Nations Unies qui,

28 si je me souviens bien, a été rédigé par Stéphanie Rehn, en tant que

Page 23647

1 rapporteur spécial des Nations Unies. J'ai deux questions par rapport à ce

2 rapport. Est-ce que qui que ce soit des Nations Unies avant la publication

3 de ce rapport vous aurait contacté ou aurait contacté le président du

4 tribunal ou aurait contacté qui que ce soit d'autre pour mener une enquête

5 officielle ou procéder à l'examen officiel des dossiers d'affaire du

6 tribunal pour vérifier si les allégations y figurant sont vraies ?

7 R. Personne ne m'a parlé. Pour la première fois j'entends que le

8 représentant des Nations Unies était à Pristina au tribunal régional. S'il

9 avait parlé au président, le président du tribunal aurait dû m'appeler pour

10 vérifier le dossier d'affaire, pour procéder à la vérification de

11 l'exactitude des allégations dans ce dossier d'affaire.

12 Q. Je suppose alors que personne d'entre vous n'avez été demandé,

13 d'ailleurs ni le président du tribunal, de confirmer des allégations

14 contenues dans ce rapport, une fois ce rapport publié ?

15 R. Non, personne ne leur a demandé cela.

16 Q. Ma dernière question est peut-être redondante vu votre réponse dans la

17 page 113, ligne 16, lorsque vous avez dit que c'était pour la première fois

18 que vous avez entendu parler du représentant des Nations Unies. Est-ce que

19 vous-même ou quelqu'un d'autre auprès du tribunal de Pristina aurait reçu

20 une copie de ce rapport à n'importe quel moment pendant cette période, je

21 pense que cela a été publié en 1996 ou 1997, avez-vous jamais reçu une

22 copie de ce rapport, le rapport de Stéphanie Rehn, directement d'elle ou

23 des Nations Unies ?

24 R. Non, on ne m'a jamais remis ce rapport.

25 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, sauf si vous avez

26 d'autres questions pour le juge Marinkovic, on peut finir avec le témoin,

27 j'ai posé toutes mes questions supplémentaires.

28 Q. Merci, Madame le juge, de votre patience et toutes mes excuses de vous

Page 23648

1 avoir retenue ici pendant le week-end, c'était nécessaire pour l'intérêt de

2 la justice et de la vérité.

3 R. Merci.

4 [La Chambre de première instance se concerte]

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Marinkovic, votre déposition

6 est finie. Merci d'être venue témoigner devant ce Tribunal. Je vous prie

7 maintenant de quitter le prétoire. Merci.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie également de votre attitude

9 tout à fait correcte. Je comprends également que le Procureur a sa manière

10 de travailler, je dois vous dire maintenant qu'à mon retour à Kragujevac,

11 où mes collègues et mes confrères m'attendent avec impatience, je leur

12 expliquerai comment fonctionne ce Tribunal. Je vous remercie.

13 [Le témoin se retire]

14 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, votre témoin

16 suivant ?

17 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avions l'intention

18 de citer M. Pantic aujourd'hui, mais il est arrivé dimanche après-midi, et

19 comme j'étais très occupé ces deux derniers jours avec mes problèmes de

20 santé, je ne l'ai pas préparé. Me Lukic qui s'en occupe et qui est en train

21 de le préparer pour sa déposition, n'a pas encore réussi à finir son

22 travail. Avec l'indulgence de la Chambre, nous aimerions commencer son

23 interrogatoire demain, si possible. Je sais que nous avons aussi une

24 audience prévue pour cet après-midi, peut-être que nous pourrions commencer

25 l'audience suivante un peu plus tôt.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il faut qu'on fasse la pause, c'est ça

27 le problème.

28 Maître Zecevic.

Page 23649

1 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui. Le conseil principal de mon client

2 souhaite également être présent.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, et l'audience est prévue pour 16

4 heures.

5 On ne peut pas avancer dans nos travaux si on ne respecte pas les horaires

6 fixés.

7 M. IVETIC : [interprétation] Oui, c'est vrai. Mais avant la pause, j'avais

8 l'impression que je ne finirais pas avec mon interrogatoire avant et on a

9 fini plus vite que prévu.

10 [Le conseil de la Défense se concerte]

11 M. IVETIC : [interprétation] On ne sait pas si Me O'Sullivan pourrait

12 arriver ici avant 4 heures, ainsi que Me Ackerman. Afin d'éviter tout

13 problème, peut-être qu'il vaut mieux attendre à 16 heures, parce qu'il

14 s'agit d'une audience très importante et pour que chaque accusé soit

15 représenté comme il se faut.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien. Nous reprendrons nos

17 travaux à 16 heures.

18 --- L'audience est suspendue à 15 heures 16.

19 [Les accusés Pavkovic, Lazarevic et Lukic sont absents]

20 --- L'audience est reprise à 16 heures 01.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il s'agit ici d'une audience consacrée

22 à la procédure, car nous tenons à entendre les parties à propos de diverses

23 questions qui sont en grande partie liées à la dernière phase de ce procès.

24 Je relève que trois des accusés sont présents, ce qui veut dire que trois

25 sont absents.

26 Maître Ackerman, M. Pavkovic est absent. Je suppose qu'il est tout à fait

27 satisfait que nous procédions en son absence ?

28 M. ACKERMAN : [interprétation] Il a décidé de ne pas être ici. M. LE JUGE

Page 23650

1 BONOMY : [interprétation] C'est pareil pour vous, Maître Bakrac ?

2 M. BAKRAC : [interprétation] Exactement.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, pareil pour vous ?

4 M. IVETIC : [interprétation] Oui, je pense que c'est prévu par le

5 Règlement, il n'est pas nécessaire que l'accusé soit présent.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Tout à fait, je voulais simplement

7 m'assurer que tout se fait conformément aux souhaits des accusés.

8 Tout d'abord, nous aimerions je pense, donner la parole à M. Hannis. La

9 seule évolution qu'il faudra relever c'est que les parties ont eu

10 l'occasion de discuter du programme des événements intervenant en fin de

11 procès. M. Dawson, à la demande de la Défense, mais avec l'aval de la

12 Chambre en avait discuté. Nous nous sommes dits qu'il faudrait discuter de

13 ces divers sujets en audience publique devant la Chambre, ce qui est la

14 raison principale de la tenue de la présente audience.

15 Monsieur Hannis, avez-vous des propositions à faire eu égard à cette

16 dernière étape du procès ?

17 M. HANNIS : [interprétation] Au cours de cette réunion, c'est d'abord la

18 Défense qui est intervenue pour dire le temps qui lui semblait nécessaire,

19 et aussi le délai qui doit intervenir entre la fin de la procédure de ses

20 moyens et le dépôt des arguments de clôture. On a parlé de trois mois tout

21 d'abord, et puisqu'on a essayé de faire une surenchère du machisme, on a

22 dit trois mois c'est trop, deux mois suffisent, mais vous savez qu'il y a

23 énormément de pièces qui ont été présentées, beaucoup d'éléments de preuve.

24 Je pense qu'il serait utile que les parties disposent suffisamment de temps

25 pour essayer de vous présenter tous ces éléments de façon cohérente. Déjà

26 pour lire tous les procès-verbaux des réunions du MUP, du collège, du

27 commandement conjoint, il me faudrait plusieurs semaines. J'ai déjà fait

28 beaucoup de travail là-dessus, mais je n'ai pas encore tout maîtrisé le

Page 23651

1 dossier. Une des questions, j'en ai parlé avec M. Dawson, on ne savait pas

2 si la Chambre avait déjà l'intention de chercher à la présentation des

3 moyens supplémentaires par ses propres témoins. Vous ne le saurez peut-être

4 pas tant que vous ne savez ce qu'il en est de notre part.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il y aura peut-être certains, en

6 nombre limité, des témoins de la Chambre, nous devrons en parler sous peu,

7 savoir qui seraient ces témoins et quelle serait la procédure à leur

8 appliquer. Mais s'ils venaient, ces témoins ne prendraient pas beaucoup de

9 temps ?

10 M. HANNIS : [interprétation] Non, mais ceci s'intègre dans le calcul du

11 temps qu'il nous faut, une fois que tous les éléments seront présentés et

12 pour présenter les derniers mémoires. Si nous savons maintenant qu'il n'y

13 aura pas de témoins de la Chambre, nous connaissons déjà les témoins et les

14 éléments de preuve sur lesquels nous allons nous appuyer, mais en fonction

15 de témoins éventuels de la Chambre, ça risque d'avoir une incidence sur

16 nous, c'est pour ça que j'en parle. Je n'ai rien d'autre à ajouter, sinon

17 que nous ferons de notre mieux pour nous conformer au délai que vous allez

18 imposer. Trois mois ça semble beaucoup, mais vous savez que vous avez

19 beaucoup d'éléments de preuve et pour que notre travail soit utile, je

20 pense que nous tirerons partie de cette période.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Par ailleurs, nous avons eu beaucoup

22 de journées d'audience, lorsqu'elles présentent leurs moyens, les parties

23 doivent garder à l'esprit, disons, le cadre général qui les guide, ce

24 qu'ils essaient de prouver ou d'infirmer. Certains diraient qu'avant de

25 pouvoir avoir un procès utile on devrait déjà avoir en tête ces

26 réquisitions et plaidoiries. Je pense que nous l'avons déjà dit à plusieurs

27 reprises que les mémoires de clôture devraient déjà être en chantier au fil

28 du procès.

Page 23652

1 M. HANNIS : [interprétation] Effectivement, nous avons terminé la

2 présentation des moyens à charge il y a belle lurette de cela. Nous avons

3 pu organiser tout ceci et intégrer ceci dans les mémoires de clôture, mais

4 je pense l'avoir déjà dit de par le passé, vous nous comprenez, vous savez

5 que les éléments de preuve c'est un organisme vivant, donc quelquefois ça

6 change tous les jours.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Autre possibilité, bien entendu, c'est

8 que vous pensiez à la réfutation. Est-ce que vous pourriez nous dire si

9 vous allez demander des éléments de preuve en réplique, en réfutation ?

10 M. HANNIS : [interprétation] Je ne peux pas vous le dire, il y a peut-être

11 ici ou là tel ou tel petit élément, mais il n'y a pas vraiment un gros

12 argument pour lequel à notre avis nous aurions à vous demander une phase

13 supplémentaire sous forme de réplique.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

15 Maître O'Sullivan.

16 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, pour suivre

17 la discussion que nous avons eue avec M. Dawson, cette question qui a

18 surgi, c'est que nous avons proposé un échelonnement du dépôt des mémoires

19 ce qui nous donnerait l'occasion de voir le mémoire de clôture de

20 l'Accusation pour essayer de rationaliser les différents mémoires des

21 équipes de la Défense. Je ne sais pas si M. Hannis pense que deux mois

22 c'est beaucoup, ou s'il veut davantage pour avoir une période assez

23 conséquente, s'il peut s'en sortir en moins de deux mois, ça veut dire que

24 nous prendrons ces 30 jours de plus pour répondre.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous n'avons pas pour coutume dans ce

26 Tribunal d'échelonner le dépôt des mémoires de clôture, parce qu'on pense

27 que c'est une phase adéquate pour répondre à des questions qu'il faut à

28 votre avis aborder et creuser.

Page 23653

1 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Par exemple, dans l'affaire Celebici, ça

2 s'est fait et, par exemple, dans d'autres affaires. Vous voyez que la

3 pratique change et qu'il y a peut-être une certaine marge de manśuvre que

4 la Chambre peut choisir si elle le veut.

5 Je pense que de notre côté du prétoire nous sommes d'accord pour dire

6 que c'est un long procès, mais qui a été très efficace, nous avons

7 travaillé quatre journées, journées longues toutes les semaines. Donc je

8 pense que c'est beaucoup plus court que par rapport à certains autres

9 procès qui se tiennent ici. Mais une des conséquences qu'il y a quand on a

10 de longues heures d'audience, c'est que nous n'avons pas suffisamment de

11 temps à l'extérieur du prétoire pour travailler aux écritures, à nos

12 conclusions, tout en tenant compte des remarques que vous n'avez cessé de

13 faire. Nous avons organisé, étudié et révisé les éléments de preuve au fur

14 et à mesure.

15 Le fait qu'on a beaucoup utilisé le 92 ter veut dire qu'il faut

16 beaucoup plus de temps pour analyser chaque témoin. Nous avons entendu des

17 suggestions faites en prétoire. Il y en aura sans doute plus encore venant

18 d'Ojdanic et de Lazarevic et de Lukic. Il y a beaucoup d'arguments et

19 d'éléments de preuve qui ont été présentés par papier. Il y a encore

20 quelques témoins viva voce, mais le gros c'est fait.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous avez travaillé dans le

22 procès Celebici ?

23 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous savez que dans ce procès les

25 journées d'audience étaient plus longues que dans ce procès-ci ?

26 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] A l'époque, on utilisait une Chambre

28 qui à elle seule utilisait aussi bien la matinée que l'après-midi.

Page 23654

1 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui. Mais c'était aussi deux ou trois

2 semaines, et puis il y avait deux ou trois semaines --

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais --

4 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Il n'y avait qu'une salle d'audience et

5 deux procès.

6 M. ACKERMAN : [interprétation] Oui, il y avait une salle d'audience, donc

7 nous on siégeait deux ou trois semaines.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais ça veut dire que ça durait

9 combien de temps un procès ?

10 M. ACKERMAN : [interprétation] Un an.

11 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Ça a commencé en mars 1997, et ça s'est

12 terminé au cours de l'été 1998.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et c'était un gros procès ?

14 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Il y avait quatre accusés.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous semblez être un peu sur la

16 défensive, mais au fond quand on fait le point, ce procès n'est peut-être

17 pas si unique que ça, si unique que certains ont parfois laissé entendre.

18 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je suis un défenseur là, je ne veux pas

19 être à l'offensive, mais le procès Celebici c'était surtout sur un camp, et

20 il n'y avait eu qu'un accusé qui avait déposé, du moins si ce n'est que

21 pour un accusé il n'y avait pas autant de documents.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

23 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Bien sûr, ici c'est tout à fait différent,

24 nous avons beaucoup de documents et nous avons le système, le logiciel

25 électronique, l'équipement dont nous pouvons bénéficier.

26 Mais tout sera en fonction de la question de la réplique, de la

27 duplique. Il y a encore beaucoup de variables qui peuvent entrer en jeu en

28 fonction de ce qui va se passer, ce que me disait à l'instant M. Hannis,

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1 mais il y a eu vraiment une montagne de documents qu'il faut digérer, aussi

2 vu la façon dont l'acte d'accusation est établi il faut étudier tous les

3 éléments de preuve présentés à l'encontre de chacun des accusés.

4 Peut-être que mes collègues auront leurs propres arguments plus

5 propres à leurs dossiers, mais voilà les réflexions qui furent une

6 réflexion collective.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

8 Monsieur Hannis, j'aurais dû vous poser une question à propos de l'idée

9 d'échelonner les arguments de clôture, auriez-vous quelque chose à dire ?

10 M. HANNIS : [interprétation] Nous nous y opposons, Monsieur le Président.

11 C'est la seule chose que je dirai.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Fila, avez-vous quelque chose à

13 dire ?

14 M. FILA : [interprétation] Oui, j'ai des arguments dont je veux vous faire

15 part. Lorsque j'ai écrit des conclusions de 200 pages, je voudrais que vous

16 ne me forciez pas à lire ce que j'ai déjà présenté, parce que c'est une

17 pratique qui ne me plaît pas dans ce Tribunal. Une fois qu'on reçoit

18 quelque chose, je dois présenter les mêmes arguments oralement. Je crois

19 que ça me dérange, mais ce n'est pas bon pour vous non plus. Si j'ai

20 quelque chose à ajouter, de toute façon parce que je vais voir plus tard

21 les conclusions de M. Hannis ou d'autres conclusions, j'aurais peut-être

22 quelque chose à ajouter. Mais je l'avoue, c'est là que je fais preuve d'un

23 peu de paresse. J'aimerais que vous me forciez à ne pas agir de la sorte.

24 Je voudrais avoir l'occasion simplement de répondre à ce que dira M.

25 Hannis. C'est tout ce que j'ai à dire.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Fila, vous serez puni par nous

27 si vous essayez de dire quelque chose que vous avez déjà écrit. Parce qu'on

28 peut lire fort bien nous-mêmes en se passant de vous. La question qui se

Page 23656

1 pose véritablement c'est de savoir si les mémoires en clôture devraient

2 tous être déposés en même temps, ou est-ce qu'il faudrait les échelonner,

3 les étaler dans le temps. Je ne sais pas finalement l'idée qui vous plaît

4 le plus.

5 M. FILA : [interprétation] Moi je suis toujours favorable au concept qui

6 nuit le plus à l'Accusation, et là ce serait le délai de 30 jours, mais

7 n'oubliez pas après tout que je suis quand même conseil de la Défense. Donc

8 je veux dire que ça m'arrangerait mieux, mais je ne sais pas si ça

9 arrangerait M. Hannis. Mais je suis d'accord avec cette idée et, à ce

10 moment-là, nos conclusions véritables seraient encore plus courtes pour ce

11 qui est de nos plaidoiries puisque M. Hannis, sa réponse plus directement

12 sera déjà reprise dans notre mémoire. Ce qui veut dire que vous pourriez

13 donner pour les plaidoiries une heure, ça suffirait. C'est vrai

14 l'Accusation devrait avoir plus de temps pour répondre, c'est la justice la

15 plus élémentaire.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci beaucoup.

17 M. FILA : [interprétation] Merci.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Visnjic.

19 M. VISNJIC : [interprétation] Je ne serai pas long dans ce que je vais

20 ajouter, Monsieur le Président, pour enchaîner sur ce que dit Me

21 O'Sullivan. Voici comment nous avons compris la procédure jusqu'à présent à

22 l'inverse d'autres procès dont ce Tribunal a connu, nous avons essayé de

23 diminuer la durée du procès, la durée ou le nombre des audiences. C'est

24 pour ça que certains d'entre nous ont fait beaucoup de requêtes dans le

25 prétoire pour que soient versés les éléments de preuve. Par ailleurs, et ça

26 a été dit à maintes reprises au cours de ce procès, certaines choses

27 seraient expliquées plus tard au moment des conclusions que nous aurions le

28 loisir d'expliquer telle ou telle chose par le moyen de tel ou tel

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1 document, de mémoires. Et si vous reprenez le compte rendu d'audience, et

2 si vous faites une recherche, vous allez constater que c'est quelque chose

3 qui s'est souvent répété. En fin de compte, on se trouve face à une

4 situation, on voit la lumière qui pointe au bout du tunnel. Maintenant

5 s'annonce la fin de ce procès, mais nous n'avons pas assez de temps, en

6 tout cas on demande à avoir suffisamment de temps pour faire l'analyse de

7 tout ce qui s'est passé en l'espèce en dehors du prétoire. C'est la plus

8 grosse différence qu'il y a entre ce procès-ci et d'autres procès tenus en

9 ce Tribunal.

10 Jusqu'à présent, dans tous les procès même les plus anciens comme

11 Celebici, la plupart des éléments de preuve avaient été versés au dossier

12 en prétoire, mais avec le nouvel article, il est pratiquement impossible

13 d'avoir un tableau complet, une idée précise de tout ce qui a été admis en

14 prétoire par les autres équipes de la Défense ou par l'Accusation parfois,

15 car l'Accusation a souvent présenté des arguments conséquents de cette

16 sorte. C'est la raison pour laquelle nous demandons un délai supplémentaire

17 de façon à digérer et à analyser tout cela. Hélas, vu la cadence de ce

18 procès, nous avons eu trop peu temps, très peu de temps pour maîtriser tous

19 ces documents. Je parle en mon nom personnel et au nom de mon équipe, c'est

20 la raison pour laquelle nous demandons suffisamment de temps de façon à

21 analyser les documents qui ont été versés selon ces modalités.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

23 Maître Ackerman.

24 M. ACKERMAN : [interprétation] Je pense que je voudrais effleurer deux

25 sujets. Ça fait plus de dix ans que je travaille ici, j'ai vu passer

26 beaucoup de procès, et je pense que vous avez accompli quelque chose

27 d'inédit avec ce procès, vous avez réussi, Monsieur le Président, à vous

28 saisir d'une affaire particulièrement complexe et compliquée, et vous

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1 l'avez condensée en un temps record. Je le dis en pensant aux longues

2 journées d'audience que nous avons eues, semaine après semaine, et

3 l'utilisation intensive du 92 ter, aussi il a quelque chose d'inédit à ma

4 connaissance, l'utilisation très grande d'admissions sur demandes formulées

5 en prétoire. Ceci a entraîné un dossier de pièces et si vous regardez

6 quotidiennement, ça dépasse de loin tout ce qui a été présenté dans ce

7 Tribunal auparavant. Je pense que ceci fut un grand avantage pour ce

8 Tribunal puisque nous avons réussi à mener ce procès justement à belle

9 cadence.

10 Maintenant nous en arrivons du coup à un stade où nous, nous devons

11 essayer de vous présenter notre meilleur effort possible dans l'analyse que

12 nous devons faire de tous ces éléments de preuve qui ont été versés de

13 diverses manières. Il y a des documents du dossier, je sais que certains

14 d'entre nous ne les ont même pas encore vus, les documents présentés ici et

15 qui vont être présentés à la fin de la Défense Lukic. Personne ne sait

16 encore ce que seront ces documents et une fois que ce sera fait, il sera

17 peut-être nécessaire de les aborder d'une façon particulière. On ne le sait

18 pas encore. Donc nous avons un corpus d'éléments de preuve qui est quand

19 même très, très important et loin de moi l'idée de dire que nous n'avons

20 pas travaillé suffisamment dur pour essayer de résumer tout ceci et pour

21 présenter ces mémoires. Si je n'ai pas été souvent en prétoire c'est parce

22 que je m'y consacrais précisément. Mais ce faisant on ne cesse d'être

23 distrait par ce qui se passe ici dans ce prétoire tous les jours, il y a

24 des requêtes déposées, il faut y répondre, les requêtes qui sont présentées

25 par les parties, par les Juges, il faut essayer de savoir ce qu'ils veulent

26 dire. C'est difficile de consacrer toute une journée dans son bureau penché

27 sur un mémoire en clôture quand vous avez des choses qui se passent en

28 prétoire qui vous distraient. Pour bien faire son travail, pour vous aider

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1 grâce à des mémoires en clôture, il faut le faire, il faut préparer ce

2 mémoire au moment où on n'est pas distrait, à tête reposée, quand on peut

3 vraiment réfléchir, comme je disais à tête reposée, l'esprit tout à fait

4 concentré sur le sujet. Pour ce qui est des mémoires et du moment où ils

5 doivent être déposés, c'est l'Accusation qui a la charge de la preuve. Ce

6 qui veut dire que l'Accusation est celle qui doit déposer son mémoire en

7 tirant le meilleur parti possible des éléments; nous, nous n'avons pas

8 cette charge de la preuve ce qui veut dire que nous devrions avoir la

9 possibilité de répondre à ce mémoire de l'Accusation pour présenter les

10 meilleures défenses possibles. C'est de cette façon-là que vous aurez de la

11 part de la Défense les mémoires les plus efficaces. Ce ne seront pas des

12 mémoires qui vont essayer de devancer, de deviner ce que va présenter

13 l'Accusation, mais ce seront des mémoires qui répondront de façon ciblée et

14 pointue aux arguments qui semblent utiles à l'Accusation et par souci

15 d'équité envers l'Accusation, une fois que les mémoires de la Défense

16 seront déposés, il faudrait peut-être accorder un délai pour permettre à

17 l'Accusation de répliquer parce qu'il répondrait aux positions de la

18 Défense qui ne sont pas nécessairement des répliques à la position. Donc,

19 vu le droit qui s'applique, ça semblerait logique sachant que l'Accusation

20 doit apporter une preuve au-delà de tout doute raisonnable. Et il n'y a

21 aucun précédent dans ce Tribunal, et libre à vous de choisir la démarche la

22 plus logique, la meilleure. J'espère que la suggestion que je viens de

23 formuler sera effectivement la meilleure solution.

24 Comme ça, à première vue, de prime abord, il semble excessif de dire

25 qu'il nous faut trois mois pour ce faire, mais quand vous voyez cette

26 montagne de documents qu'il nous faut analyser, je pense que ce délai est

27 tout à fait raisonnable, d'autant plus raisonnable si on pense qu'on n'a

28 pas les ressources. Vous savez il y a eu ce procès IBM, un des plus gros

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1 procès, il y avait 25 avocats qui ont travaillé dans ce procès aux Etats-

2 Unis. Nous n'avons pas ce luxe ici, nous avons de toutes petites équipes,

3 alors qu'on a énormément d'éléments de preuve alors qu'on est loin d'avoir

4 autant de monde dans nos équipes que dans un procès normal.

5 Je comprends aussi pourquoi M. Hannis estime que deux mois suffisent.

6 En effet, le bureau du Procureur a plus de personnel que nous. Vous avez

7 des gens qui travaillent à ce procès, dans ce dossier, tous les jours. Je

8 sais, bien sûr, qu'ils ont l'impression qu'ils n'auront pas assez de

9 personnel, mais quand vous voyez le nombre de substituts qui viennent

10 représenter le bureau du Procureur.

11 Je vois que vous le regardez comme si vous attendiez une réponse de

12 la part de M. Hannis.

13 Mais c'est tout à fait vrai, le bureau du Procureur a plus de

14 personnel que nous, c'est tout simplement vrai.

15 Je pense que notre demande est raisonnable, on devrait y faire droit et je

16 pense que vous serez satisfait de la qualité du travail que vous allez voir

17 si vous nous donner ce temps pour faire le travail que nous sommes tous à

18 même de faire si nous avons le temps de le faire. Et je pense que nos

19 clients, nos clients seraient contents si nous avions la possibilité de les

20 défendre du mieux que nous pouvons. Je pense que ce serait fort utile. Je

21 vous remercie d'avance.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne sais pas si ça intéresse

23 quelqu'un, mais on m'a dit que dans le procès de Celebici, les mémoires de

24 la Défense, en tout cas trois d'entre eux ont été déposés trois jours après

25 le dépôt du mémoire de l'Accusation et l'autre, le dernier a été déposé

26 trois jours plus tard. Je ne sais pas s'il y a d'autres précédents, autre

27 qu'un dépôt simultané.

28 Mais c'est quand même une idée intéressante que nous allons étudier.

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1 Maître Bakrac, avez-vous quelque chose à ajouter ?

2 M. BAKRAC : [interprétation] Monsieur le Président, je suis d'accord avec

3 tout ce qui vient d'être dit, mais puisque vous me posez la question à moi

4 maintenant, que voudrait faire la Défense Lazarevic, je pense que la

5 proposition de Me O'Sullivan qui est d'avoir 30 jours supplémentaires pour

6 le dépôt de nos propres mémoires après le dépôt par l'Accusation, c'est une

7 proposition marquée du coin du bon sens. Si nous faisons un dépôt

8 simultané, il nous faudra plusieurs jours, suffisamment de temps pour

9 préparer des réponses au niveau des réquisitions et plaidoiries. Il nous

10 faudra du temps pour répondre au mémoire de clôture de l'Accusation. C'est

11 ça que je voulais dire à cet égard.

12 Au nom de la Défense du général Lazarevic, je voudrais dire à la Chambre de

13 première instance que nous venons de terminer la présentation de nos moyens

14 et maintenant nous entendons les témoins du général Lukic. Nous savons

15 qu'il y a une cinquième équipe de la Défense et la Défense Lazarevic, donc

16 la cinquième qui devra suivre de très près ce que diront les témoins de la

17 sixième équipe de la Défense, en d'autres termes, nous n'avons pas vraiment

18 le temps maintenant de vraiment nous atteler à la rédaction de notre

19 mémoire en clôture. Si l'on se souvient en particulier qu'il y a trois

20 équipes qui ont rejoint ce procès à une date plus tardive que les autres et

21 ça ne fait que corser la chose.

22 Je ne veux pas répéter tout ce que j'ai déjà dit, mais l'expérience

23 m'a toujours montré que c'est toujours mieux que ce soit vous qui

24 m'imposiez des délais. Donc moi, je me donnerais trois mois, vous voyez, en

25 l'occurrence. Merci.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

27 Monsieur Ivetic.

28 M. IVETIC : [interprétation] Je serai très rapide car tout le monde l'a

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1 dit, je n'étais pas là lorsqu'il y a eu l'audience avec M. Dawson, mais je

2 pense que beaucoup de choses ont été abordées lors de cette audience.

3 Mais ce que j'aimerais dire pour ce qui est en tout cas de l'équipe de la

4 Défense Lukic, c'est que nous allons être extrêmement occupés jusqu'à la

5 fin de la présentation des moyens de la Défense. Les autres équipes vont

6 pouvoir commencer à travailler à leur mémoire de clôture, mais pas nous.

7 Nous allons donc avoir besoin de tout le temps qui est disponible jusqu'à

8 présent pour se préparer pour présenter nos moyens de Défense. Nous allons

9 avoir besoin, par exemple, de la pause à venir pour Pâques, pour finaliser

10 le statut de nos témoins qui viennent d'Allemagne, d'Amérique, du Canada,

11 d'Espagne, et cetera. Donc de toute façon, nous voulons que ce soit deux ou

12 trois mois à partir du moment où on aura entendu le dernier témoin, que ce

13 soit le témoin de la Défense, un témoin de la Chambre ou un témoin en

14 réplique. Donc nous pensons vraiment que nous avons besoin de ces deux ou

15 trois mois pour défendre correctement notre client.

16 Bien sûr, après cette audience, s'il y a des éléments supplémentaires

17 qui arrivent, nous répondrons soit par écrit, soit oralement. Mais comme je

18 vous l'ai déjà dit, nous devons continuer à une cadence très rapide jusqu'à

19 la fin du circuit, si je puis dire, jusqu'à la fin de la course.

20 Nous n'allons pas essayer d'attendre à la dernière minute pour déposer un

21 grand nombre de requêtes dans le prétoire, parfois il y a cinq ou six

22 documents, dix documents, il faut savoir quand même si ces documents sont

23 traduits ou non. Mais je vais essayer de ne pas attendre la dernière heure,

24 la dernière minute pour déposer des requêtes dans le prétoire.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Pour ce qui est de votre

26 affaire, Monsieur Ivetic, je crois que vous avez beaucoup de plus de

27 travail que vous ne pensez en fait puisque vous nous avez parlé des

28 requêtes depuis le prétoire. Mais nous avons besoin de savoir exactement ce

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1 qu'il en est au niveau de votre activité de ce type afin de rendre une

2 ordonnance qui sera dans l'intérêt de tous, autant qu'il faut que nous

3 sachions un petit peu à quoi nous attendre de votre part.

4 M. IVETIC : [interprétation] Tous les jours nous devrions avoir des

5 requêtes venant du prétoire qui seront un peu plus courtes d'ici à une ou

6 deux semaines. Nous avons la requête pour modifier la liste 65 ter, on l'a

7 déjà fait. Enfin, nous verrons.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais il faut quand même que vous

9 le sachiez exactement pour combien de temps vous en avez. Nous avons besoin

10 de savoir exactement le temps qui vous est nécessaire. On vient juste de

11 déposer le rapport portant sur l'utilisation du temps.

12 M. IVETIC : [interprétation] Oui, c'était vendredi dernier.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, c'était hier. On voit que vous

14 avez dépensé près de la moitié du temps qui vous avait été imparti lorsque

15 nous avons rendu l'ordonnance. Donc normalement vous auriez dû avoir

16 terminé la présentation de vos moyens de preuve à la mi-avril. Ça ressemble

17 malheureusement à ce qui s'est passé du côté de l'équipe de Lazarevic. Je

18 ne sais pas du tout comment vous allez vous en sortir.

19 M. IVETIC : [interprétation] Il y a d'autres problèmes en cours dans le

20 cadre de la préparation de la présentation de nos moyens. Nous devons

21 préparer les 92 ter pour certains témoins, essayer de réduire le nombre de

22 témoins aussi, passer par des requêtes en prétoire, ne pas forcément

23 présenter tous les documents au témoin aussi.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il faut mieux utiliser votre temps

25 d'audience, tout simplement vous devez être plus efficace. Si je peux vous

26 donner un exemple dans des problèmes que nous trouvons en l'espèce -- M.

27 Lazarevic a eu besoin de 20 heures pour l'interrogatoire principal. Vous

28 nous avez fait une estimation de dix heures pour vous uniquement, mais ce

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1 n'était pas sur la dernière liste des témoins que vous nous avez présentée

2 pour mars et avril, mais en revanche ce témoin, qui a été interrogé 20

3 heures par l'équipe Lazarevic, vous considérez que vous n'aurez besoin que

4 de dix heures, mais il n'a même pas encore été cité. Où en êtes-vous à ce

5 propos ?

6 M. IVETIC : [interprétation] Nous essayons de voir quels sont les témoins

7 absolument essentiels, voir quels sont les témoins qui ont été déjà parlé

8 de choses, on espère, comme Djeneral Jankovic, par exemple. Donc là on aura

9 moins besoin de les interroger, puisqu'ils ont déjà été interrogés par

10 d'autres équipes, mais il faut absolument que nous arrivions à éclaircir un

11 petit peu ce qui s'est passé au niveau de l'opération et du fonctionnement

12 même de ces organismes. C'était déjà extrêmement confus en 1998 et 1999, à

13 savoir exactement comment fonctionnait le MUP.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est quelque chose qui est plus

15 fondamental qui m'intéresse en fait, Me Ivetic. J'ai l'impression que nous

16 allons peut-être avoir besoin de nous assurer que si M. Lukic dépose, il

17 doit commencer avec au moins 25 heures de votre part, au cas où; ce qui

18 veut dire dans ce cas-là que vous commencerez à présenter vos moyens, non

19 pas la semaine prochaine, mais la semaine suivante si M. Lukic commence à

20 déposer.

21 M. IVETIC : [hors micro]

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous voyez exactement quelle est la

23 situation ? Je n'ai pas l'impression que vous comprenez exactement

24 l'ampleur du problème.

25 M. IVETIC : [interprétation] Si, tout à fait.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous savez que vous devez nous dire

27 très rapidement si M. Lukic va, oui ou non, déposer. Il faut que vous

28 décidiez rapidement pour nous prévenir.

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1 Il y a d'autres points dont j'aimerais que l'on parle. J'aimerais que vous

2 nous parliez un petit peu des auditions pour ce qui est des témoins pour

3 les deux mois à venir. Dans votre dernière liste de témoins, il y a Radovan

4 Zlatkovic qui n'était pas sur votre liste 65 ter en revanche, alors que

5 dans votre liste 65 ter, il y a deux Radovan Zdravkovics. Nous aimerions

6 savoir exactement si l'un de ces deux Radovan ne serait pas tout simplement

7 le Zlatkovic en question; et si oui, nous aimerions savoir lequel c'est.

8 Ensuite, vous nous avez aussi donné sur la liste un Zoran Amplic,

9 mais est-ce Alimpic ou Amplic ?

10 M. IVETIC : [interprétation] Alimpic.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En effet.

12 M. IVETIC : [interprétation] Je pense que je pourrais répondre à votre

13 dernière question. La personne qui est sur la liste est Zlatkovic, le

14 problème c'est qu'ils avaient le même poste à Djakovica, donc il y a

15 toujours eu un petit peu de confusion puisqu'ils avaient non seulement les

16 mêmes noms, mais aussi les mêmes postes, mais je sais que celui que l'on va

17 entendre, c'est Zlatkovic.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais il nous faut -- lequel ? Quel est

19 le mauvais ?

20 M. IVETIC : [interprétation] Zdravkovics qui en fait s'appelle Zlatkovic.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, je comprends.

22 Il faut que ce soit pertinent et on ne sait pas exactement qui est

23 qui.

24 M. IVETIC : [interprétation] Nous ferons un addendum à notre liste 65 ter

25 avec les corrections au niveau des noms.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous attendons ça demain.

27 Nous avons aussi un autre témoin, un dénommé Pantic, Momir Pantic, qui est

28 sur votre dernière liste 65 ter -- non, votre liste 65 ter. Sur la liste

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1 des témoins pour les deux mois à venir, vous avez aussi un Pantovic, est-ce

2 le même, ce Pantic et ce Pantovic ?

3 M. IVETIC : [interprétation] Oui, je pense que c'est la même personne,

4 parce que je ne savais même pas qu'il y avait un Pantovic sur notre liste

5 65 ter, ni sur la liste, ni sur l'addendum, puisque je suis debout,

6 j'aimerais aussi que nous abordions le problème du commandant de la PJP à

7 propos duquel nous avons récemment eu des informations. Je crois que nous

8 allons rayer quelques-unes de ces personnes de la liste à ce propos.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Vous avez dit très clairement

10 qu'il y a une de ces personnes que vous avez rayée de votre liste, vous

11 allez en interroger une autre, donc il y en a encore un dernier qui est un

12 peu en suspens.

13 M. IVETIC : [interprétation] Comme je vous l'ai dit, nous allons vous tenir

14 au courant de tout cela.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il y a encore un problème pour ce qui

16 est de votre dernière notification, mais j'espère que tout va devenir clair

17 dans les trois semaines à venir, donc je n'ai pas besoin de rentrer dans

18 les détails là-dessus.

19 Cela dit, Maître Ivetic, il y a encore une chose qui me gêne. Je voulais

20 juste m'assurer que j'avais bien compris ce qu'il en était à propos de

21 votre thèse. Vous avez déposé une requête le 11 février soulevant une

22 objection au calendrier des audiences de ce procès en nous demandant de

23 l'amender. La décision a été prise à ce procès le 20 février. Dans la

24 décision du 20 février nous avons attiré votre attention sur une remarque

25 qui avait été faite dans la requête en tant que telle, tout dépend comment

26 elle est interprétée bien sûr, ce n'est pas certain mais il semble que ce

27 que vous avez dit dans votre requête était plutôt déplacé. Donc nous nous

28 demandons si vous ne feriez pas bien tout simplement de retirer ce

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1 commentaire qui était dans votre requête, mais jusqu'à présent vous n'avez

2 pas répondu.

3 Est-ce que cela signifie que vous avez décidé de ne rien faire tout

4 simplement à ce propos ?

5 M. IVETIC : [interprétation] J'en ai parlé avec Branko Lukic, nous faisons

6 très attention à tous les mots que nous mettons dans nos requêtes, et ce

7 passage était précisément rédigé pour exprimer en fait notre intérêt très

8 strict de s'assurer que cette procédure restait bien dans la limite de ce

9 qui était autorisé. Ce n'était pas du tout une critique, cela dit, loin de

10 nous de penser cela. Mais nous sommes là pour défendre les droits des

11 accusés, et je crois qu'il y a un passage du Statut et des Règlements que

12 j'ai cité, il y a aussi différents principes qui s'appliquent dans

13 différentes juridictions que je connais. En toute conscience, je pense que

14 professionnellement, je ne peux absolument pas retirer ce commentaire.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Soyons sûrs de cela, donc voici le

16 commentaire : "La procédure de ce procès en tant que telle doit être d'une

17 valeur substantielle plus importante que d'être uniquement une formalité

18 juridique devant être subie avant qu'un jugement soit rendu."

19 M. IVETIC : [interprétation] Tout à fait. Il y a aussi un autre passage, si

20 je me souviens bien, c'était une citation de l'article 12 à propos des

21 droits de l'accusé. Je considère que c'était absolument essentiel

22 d'inscrire cela, au vu surtout de la présomption d'innocence qui est un

23 principe essentiel. S'il est vrai que parfois les choses sont interprétées

24 un peu différemment quand on est dans le feu de l'action et si vous avez

25 entendu mon commentaire comme étant déplacé, j'en suis désolé.

26 [La Chambre de première instance se concerte]

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien, nous allons prendre acte

28 de tout ce qui a été dit à propos de tout ce qui a été abordé. Comme nous

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1 l'avons déjà dit la semaine dernière, nous ne pouvons pas vous donner des

2 décisions finales aujourd'hui, nous devons consulter Mme le Juge Kamenova,

3 il conviendra qu'elle prenne connaissance du compte rendu de cette

4 audience.

5 [La Chambre de première instance se concerte]

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous pensons rendre une ordonnance la

7 semaine prochaine après avoir délibéré entre nous et dans cette ordonnance

8 nous vous donnerons un calendrier, nous traiterons aussi de tous les sujets

9 qui doivent être résolus à cette étape pour s'assurer que le reste du

10 procès se déroulera de façon efficace comme je pense nous l'avons déjà fait

11 jusqu'à présent.

12 Demain nous reprenons nos travaux à 9 heures dans ce prétoire, et nous

13 siégerons jusqu'à 13 heures 45. Nous levons donc la séance maintenant

14 jusqu'à demain.

15 --- L'audience est levée à 16 heures 47 et reprendra le mercredi 5 mars

16 2008, à 9 heures 00.

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