Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 5 mars 2008

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 [L'Accusé Milutinovic est absent]

5 --- L'audience est ouverte à 8 heures 59.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour à tous. Maître Zecevic, je

7 remarque que M. Milutinovic est absent. Je suppose qu'on peut poursuivre en

8 son absence.

9 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, il a renoncé à être présent aujourd'hui.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

11 Maître Lukic, votre témoin suivant ?

12 M. LUKIC : [interprétation] Oui. Notre témoin suivant sera Sladjan Pantic.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

14 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Monsieur Pantic.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous prie de lire la déclaration

18 que l'huissier est en train de vous remettre à haute voix, c'est votre

19 déclaration solennelle.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

21 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

22 LE TÉMOIN: SLADJAN PANTIC [Assermenté]

23 [Le témoin répond par l'interprète]

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est Me Lukic qui va vous interroger

27 maintenant.

28 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

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1 Interrogatoire principal par M. Lukic :

2 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Pantic.

3 R. Bonjour.

4 Q. Je vous prie de nous dire qui vous êtes pour les besoins du compte

5 rendu.

6 R. Je suis Sladjan Pantic, fils de Dragoljub, né en 1969, le 24 mars à

7 Pec.

8 Q. Pourriez-vous nous décrire brièvement votre parcours professionnel,

9 s'il vous plaît.

10 R. Mon parcours professionnel a débuté le 19 novembre 1990 où j'ai

11 commencé à suivre une formation, un cours pour devenir policier. Après

12 avoir terminé cette formation, j'ai été déployé au sein de l'unité

13 organisationnelle de Srbica et j'occupais le poste du policier, du policier

14 à la section de Srbica.

15 Q. Monsieur Pantic, je vous demanderais d'oublier l'écran. C'est vrai que

16 le service chargé des Témoins et des Victimes vous ont dit qu'il faut

17 suivre l'écran, mais ça vous déconcentre. Essayez tout simplement de parler

18 lentement et de répondre à mes questions, de me regarder, moi.

19 Où est-ce que vous avez travaillé à partir de mai 1992 ?

20 R. A partir de mai 1992, ou plutôt, en juillet 1992, j'ai été transféré à

21 la section de police de Rudnik, qui faisait partie du département des

22 affaires intérieures de Srbica.

23 Q. Qu'est-ce que cette section de police de Rudnik couvrait ? Quel était

24 le territoire couvert par cette station de police ?

25 R. Dix-huit villages et notre travail était de maintenir l'ordre public,

26 de renforcer la loi dans ces villages.

27 Q. Quels sont ces villages ?

28 R. Partant de Rudnik lui-même, ensuite Kostolac, Vocnjak, Radicevo, Vitak

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1 [phon], Kladernica. Est-ce que vous voulez que je les énumère tous ?

2 Q. Non. Ça suffit, c'est bon. Pourriez-vous nous dire quelle était la

3 composition ethnique de votre section de police ?

4 R. Nous étions une vingtaine dont trois Musulmans, Bahrudin Bandic, Ramis

5 Adrovic et Ruzdija Milatovic. Un autre qui était Rom, Ismet Kukac et les

6 autres, nous étions Serbes.

7 Q. Merci. Vous-même, entreteniez-vous de bonnes relations avec les

8 Albanais du coin ?

9 R. Oui, j'avais de très bonnes relations avec tout le monde qui habitait

10 dans cette région, y compris avec les Albanais.

11 Q. Les Albanais ont-il quitté Rudnik en 1998 ?

12 R. Oui.

13 M. LUKIC : [interprétation] Nous devrions passer peut-être à huis clos

14 partiel maintenant, très rapidement, parce qu'on risque de faire référence

15 aux noms de quelques personnes, tout simplement pour protéger ces

16 personnes.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Madame Gopalan, avez-vous

18 quelque chose à redire ? Très bien.

19 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

20 [Audience à huis clos partiel]

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15 [Audience publique]

16 M. LUKIC : [interprétation]

17 Q. Monsieur Pantic, les Albanais venaient-ils librement à la section de

18 police de Rudnik ?

19 R. Non, ils ne venaient pas librement et pour une raison simple. Ils

20 avaient peur les uns des autres. S'ils entretenaient de bonnes relations

21 avec la police, ils faisaient l'objet de boycott de la part du reste de

22 leur communauté, et parfois ils subissaient des conséquences encore plus

23 graves.

24 Q. Comment alors étiez-vous informés, preniez-vous connaissance des

25 infractions ?

26 R. Dans des conversations informelles, sur la route, dans des cafés, lors

27 des conversations officieuses, dans des conversations tout à fait

28 ordinaires avec des Albanais.

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1 Q. Vous souvenez-vous de quelques exemples marquant de personnes qui

2 avaient subi un mauvais sort à cause de leurs contacts avec les Serbes ?

3 R. Oui, dans le village de Vitak un homme a été tué, il s'appelait

4 Muhamet, il était propriétaire d'un café. Son surnom était Barber. Il a été

5 tué à la porte de sa maison, sur le seuil de sa maison. Nous avons appris

6 cela quelques jours plus tard quand sa femme et son fils sont venus dans

7 leur café à Rudnik pour emporter, réunir les affaires du café et les

8 emporter. Alors nous leur avons demandé à ce moment-là : Où est ce barbier

9 Drica ? Ils ont dit qu'il a été tué au seuil de sa maison par des personnes

10 portant des uniformes de l'UCK.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Pantic, quelle était la

12 composition nationale de la population de Rudnik en 1998 ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] En 1998 et même avant, la population était

14 mixte. Il y avait des Serbes, des Albanais et un petit nombre, peut-être

15 deux ou trois ménages en tout de Rom.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc l'idée que nous avons maintenant

17 de ce que vous nous racontez, c'est que les Albanais quittent le village,

18 que les Rom et les Serbes y restent seuls à habiter ce village ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais il y avait là une famille, famille

20 Jovanovic qui habitait, et encore deux, trois familles qui habitaient les

21 bords du village qui ont également quitté le village mues par la peur.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

23 Maître Lukic.

24 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

25 Q. En 1998, y a-t-il eu des attaques terroristes dans votre région ?

26 R. Oui, en 1998 au moment où l'autoroute Pec-Kosovska Mitrovica a été

27 bloquée.

28 Q. Quels sont les villages où habitaient des Serbes en 1998 parmi ces 18

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1 villages ?

2 R. Aux villages de Banje, Suvo Grlo, Rudnik, Radisevo, Kostrc et Leocina.

3 Q. Quand est-ce que les Serbes ont quitté certains de ces villages

4 couverts par votre station de police ?

5 R. En 1998, les Serbes de Radisevo, Kostrc et Leocina ont quitté leurs

6 villages après avoir subi des attaques de l'UCK.

7 Q. Vous avez fait une référence à une route qui avait été bloquée. De quel

8 type de route s'agissait-il ?

9 Q. Il s'agissait de l'autoroute Pec-Kosovska Mitrovica. C'est une

10 bifurcation de l'autoroute d'Ibar en direction de Pec. L'autoroute a été

11 bloquée, parce que des troncs d'arbres abattus à Rudnik même ont été posés

12 sur la chaussée.

13 Q. Y avait-il eu des attaques dirigées contre la police ?

14 R. Oui, sur la route nationale Radisevo-Rudnik, une famille serbe,

15 Deverdzic, a été attaquée. Un homme et sa sœur ont été blessés. Ensuite,

16 Blagaj Jovanovic a été tué juste devant sa maison du village de Kostrc.

17 Puis sur la route vers Leocina, à l'entrée même du village de Leocina a été

18 kidnappée Dostana Smigic.

19 Q. Y a-t-il eu des attaques dirigées contre la police ?

20 R. Sans cesse.

21 Q. Y a-t-il eu des endroits où vous ne vous rendiez plus pour y effectuer

22 des patrouilles ?

23 R. Oui, je m'en souviens.

24 Q. Pourriez-vous préciser la période, s'il vous plaît.

25 R. Oui, je me souviens bien de cette date du 15 août 1997. Lors d'une

26 patrouille régulière sur le terrain, nous sommes arrivés au village de

27 Vocnjak, hameau d'Ozren, l'une de mes connaissances, un ami albanais m'a

28 demandé par où on était venu ? Il m'a dit : Pour le retour, prenez autre

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1 itinéraire, parce que les membres de l'UCK vous y attendent sur la route

2 par laquelle vous êtes venus. Désormais, vous allez faire l'objet des

3 attaques. On vous y attend. A partir de ce moment-là, nous avons arrêté de

4 couvrir par nos patrouilles le territoire d'une dizaine de villages.

5 Q. Pourriez-vous énumérer quelques-uns de ces villages où vous ne vous

6 rendiez plus à partir d'août 1997, 15 août 1997 ?

7 R. Kostrc, Kladernica, Turicevac, Vocnjak, Izbica, Leocina, Donje Obilic.

8 Q. Merci. Quelqu'un d'autre a-t-il été attaqué lors des tentatives de se

9 rendre dans un de ces villages, quelqu'un représentant l'Etat ?

10 R. Oui, en automne 1997, deux employés des services d'impôt qui étaient

11 censés recueillir les impôts sont allés à Vocnjak, au village de Vocnjak et

12 ils ont été attaqués par l'UCK. Je ne sais pas comment ils ont réussi à

13 sauver leurs têtes.

14 Q. Y a-t-il eu des tentatives effectuées, des constatations sur les lieux

15 pour établir ce qui s'était passé exactement ?

16 R. Oui, il y a eu une tentative de le faire. Une équipe chargée des

17 constatations du poste de police de Srbica s'y est rendue, mais ils ont

18 subi une attaque venant de tous côtés, de sorte qu'ils n'aient pas pu

19 effectuer les constatations. A cette occasion-là, Ljubisa Ilic, le policier

20 de la police technique et scientifique de notre unité organisationnelle de

21 Srbica a été blessé.

22 Q. Bien. Essayons maintenant de nous concentrer sur la fin mars 1999. Vous

23 souvenez-vous avoir reçu une mission à cette époque-là ? De quel type de

24 mission s'agissait-il ? Le cas échéant, qu'est-ce qui vous l'a assignée ?

25 R. Oui, je me souviens de la mission que j'ai reçue. Cette mission m'a été

26 assignée par Branko Jadaric, le chef de notre unité organisationnelle. Il

27 m'a demandé de participer à une action visant à briser les forces

28 terroristes. Il m'a dit que j'allais être détaché au sein d'une unité

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1 venant de Belgrade qui comprenait également des membres de l'armée.

2 Q. Pourriez-vous nous décrire comment tout cela s'est passé ?

3 R. Si je me souviens bien c'était le 25. Ils sont arrivés au poste de

4 police. Notre point de départ se situait à une cinquantaine de mètres du

5 poste de police, c'est à la fois l'endroit de la route qui va vers

6 Kladrvac, Kostrc, Kladrvac et Turicevac. Il y avait là cette unité arrivée

7 de Belgrade, un char. Nous nous sommes dirigés vers le village de Kostrc,

8 nous sommes entrés dans le village de Kostrc, et au bout d'environ 700 à

9 800 mètres nous avons atteint des tranchées et c'est là que nous avons été

10 attaqués par l'UCK.

11 Q. C'est-à-dire à moins de 1 kilomètre de distance --

12 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] On a parlé ici des tranchées et des

13 tranchées communicantes. C'est quoi ça, pourriez-vous nous dire?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est des canons longs d'une vingtaine ou

15 trentaine de mètres qu'on utilise pour la défense. C'est le nom que je

16 connais, mais peut-être qu'il y a d'autres termes.

17 M. LUKIC : [interprétation]

18 Q. Il s'agit tout simplement d'une question liée à l'interprétation, ça ne

19 porte pas sur l'exactitude de ce que vous venez de dire, ce commentaire.

20 Vous avez fait référence au

21 25 mars 1999, n'est-ce pas ?

22 R. Oui, si je me souviens bien.

23 Q. A moins de 1 kilomètre de distance de l'endroit de votre point de

24 départ, vous avez été attaqué, n'est-ce pas ? Je vérifie tout simplement

25 les informations que vous nous avez annoncées.

26 R. Oui, c'est bien ça.

27 Q. Que s'est-il passé par la suite après cette attaque du 25 ?

28 R. Nous avons été attaqués, alors nous avons riposté de manière

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1 appropriée. Les combats ont duré environ une heure ou deux ou trois, puis

2 il y a eu une période d'accalmie. Ensuite, les tirs se sont poursuivis,

3 notamment des tirs embusqués. Puis, nous sommes entrés dans le village de

4 Kostrc et atteint le quartier de Dervisa et nous avons passé là-bas la

5 première nuit.

6 Q. Quelqu'un s'est-il joint à vous sur cette route le premier jour ou le

7 lendemain ?

8 R. Le lendemain, pas le premier jour.

9 Q. Qui est-ce qui s'est joint à vous ce deuxième jour ?

10 R. Le deuxième jour, nous nous sommes dirigés vers le village de

11 Kladernica et nous sommes arrivés jusqu'à l'entrée du village, nous avons

12 tourné à droite en direction de Leocina. Sur cette route qui était sur une

13 pente, un groupe d'hommes de la VJ s'est joint à nous.

14 Q. Quels étaient les uniformes portés par les hommes de votre groupe ?

15 R. Il s'agissait d'une unité de police et j'étais détaché auprès de cette

16 unité. Ils portaient des uniformes de camouflage verts avec des insignes

17 visibles indiquant "police." Les membres de l'armée portaient des uniformes

18 de camouflage verts. J'étais le seul à porter l'uniforme de camouflage bleu

19 que la police portait réglementairement.

20 Q. Bien. Que s'est-il passé le 26 mars 1999, c'est-à-dire, le lendemain ?

21 R. On a tourné à droite, on a atteint un plateau entre Kladernica et

22 Leocina. Ensuite, nous avons atteint le hameau d'Arije, puis nous y sommes

23 arrêtés, nous avons passé la nuit dans cet hameau.

24 Q. Y a-t-il eu des combats ce jour-là, le 26 ?

25 R. Ce jour-là, mon unité selon laquelle j'étais détaché n'était exposée

26 qu'à très peu d'activités, mais nous avons pu entendre à notre gauche et à

27 notre droite des tirs.

28 Q. Le 27, que s'est-il passé ?

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1 R. Nous nous sommes levés, nous nous préparions pour le départ. A ce

2 moment-là, nous avons fait l'objet d'une attaque venant du village

3 d'Izbica. Nous avons riposté et nous avons ensuite tourné à gauche, nous

4 avons pris des positions sur une colline, sur une élévation pour ne pas

5 être dominés par l'UCK. Après cette attaque, nous nous sommes dirigés tout

6 droit vers le village de Vocnjak. En nous déplaçant, en empruntant les

7 chemins sur ces élévations.

8 Q. Bien. La composition de votre groupe, a-t-elle changé par rapport au 26

9 ?

10 R. Non, jusqu'à notre arrivée à Vocnjak. C'est quand on est arrivé à

11 Vocnjak, que le groupe de la VJ et le char sont repartis ailleurs alors que

12 nous, nous avons poursuivi notre chemin vers Vocnjak.

13 Q. Avez-vous rencontré quelqu'un sur la route de Vocnjak ou vu quelqu'un ?

14 R. Sur notre route en direction du village de Vocnjak, sur cette première

15 élévation que nous avons empruntée, nous avons pu voir une colonne de

16 civils qui se dirigeait vers le sud. Je suppose que c'était bien le sud.

17 Nous les avons suivis lentement jusqu'à l'entrée du village de Brocnje. On

18 se déplaçait assez lentement. Je dois dire qu'à partir de notre entrée dans

19 le village de Vocnjak, nous n'avons plus fait l'objet d'attaques. Peut-être

20 parce qu'il y avait des civils. Nous sommes arrivés au village de Brocnje

21 et nous avons passé la nuit dans le quartier Mahala Salja.

22 Q. Le 28 au matin, que s'est-il passé ?

23 R. Le 28 au matin, nous nous sommes levés, c'est au conditionnel, il faut

24 le dire, parce que nous étions en état d'aptitude en permanence, nous

25 attendions des consignes. Pendant la matinée, je ne me souviens plus

26 exactement de l'heure, des cars sont arrivés et nous avons embarqué et on

27 nous a déplacés jusqu'à Klina Metrohijska Klina. En arrivant là-bas, je

28 suis descendu du car et par ceci, ma mission a été terminée.

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1 Q. Bien. Vous et le groupe avec lequel vous vous déplaciez, aviez-vous eu

2 des contacts avec les civils avant de vous retrouver sur la route en

3 direction de Vocnjak ?

4 R. Non, nous n'avons eu aucun contact avec des civils avant cela.

5 Q. Savez-vous quelle unité de la PJP était avec vous ?

6 R. Avec moi, il y avait l'unité pour laquelle on m'a dit qu'elle était de

7 Belgrade. Mais vous dire concrètement de quelle unité il s'agissait, je ne

8 peux pas vous aider. Cette unité était de Belgrade, c'est tout ce que je

9 sais.

10 Q. Merci, Monsieur Pantic. Je n'ai plus de questions pour vous.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maintenant c'est l'Accusation qui va

12 vous poser des questions.

13 M. CEPIC : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président, mais --

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Maître Cepic.

15 M. CEPIC : [interprétation] J'ai quelques questions à poser au témoin.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien. Me Cepic va vous poser des

17 questions d'abord.

18 Contre-interrogatoire par M. Cepic :

19 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Pandic, je m'appelle Djuro

20 Cepic et je représente le général Lazarevic.

21 R. Bonjour.

22 Q. Revenons à la fin du mois de mars. Vous avez dit que cette unité de la

23 PJP de Belgrade, un groupe de la PJP de Belgrade était avec vous. Pouvez-

24 vous me dire pour ce qui est du 27, au moment où vous vous rendiez en

25 direction de Vocnjak et pour ce qui est de tout ce déplacement; est-ce que

26 vous et ce groupe de l'armée de Yougoslavie qui vous suivait, est-ce que

27 vous êtes entré au village d'Izbica ?

28 R. Non. Nous ne sommes pas entrés au village d'Izbica. Nous sommes arrivés

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1 jusqu'à l'élévation, jusqu'à la colline qui se trouve entre Kladernica et

2 Izbica.

3 Q. Merci. Quelle est la distance de cette route que vous avez empruntée et

4 le village d'Izbica ?

5 R. La distance entre la route et le village d'Izbica est peut-être entre

6 800 mètres à 1 kilomètre. Il s'agit d'une région montagneuse, forestière.

7 On ne peut presque pas voir l'espace qui est sur le côté et qui est devant

8 la route.

9 Q. Par rapport à cette forêt, depuis la route, est-ce qu'il était possible

10 de voir le village d'Izbica ?

11 R. Non.

12 Q. Le groupe de l'armée et le char étaient derrière vous, n'est-ce pas ?

13 R. De temps en temps, le char devait se frayer la route et le groupe de

14 l'armée se trouvait par moment près de nous, par moment un peu plus loin de

15 nous, derrière nous. Cela changeait tout le temps.

16 Q. Vous avez dit que le 27 mars, sur cette route, une attaque a été lancée

17 de plusieurs directions contre les membres de l'unité dont vous faisiez

18 partie. Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que ces attaques ont été

19 dirigées contre l'unité de la police et que la police n'a fait que riposter

20 à ces attaques ?

21 R. L'attaque qui a été lancée, en fait, nous avons riposté à cette

22 attaque. Le char n'a pas riposté, n'a pas tiré, mais pour ce qui est du

23 groupe qui était avec nous, je ne pouvais pas voir si le groupe de l'armée,

24 le groupe d'infanterie aurait riposté. Mais je sais que le char n'a pas

25 riposté, n'a pas tiré ce jour-là.

26 Q. Monsieur Pantic, je vous remercie.

27 R. Je vous en prie.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il y a une question à tirer au clair,

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1 Monsieur Pantic. Vous avez dit que lorsque vous avez rencontré des civils,

2 que ces civils se trouvaient sur la route et que vous les avez suivis

3 jusqu'à l'entrée du village de Brocna. Ensuite au compte rendu il a été

4 consigné que vous avez dit, je

5 cite : "A partir du moment où nous sommes entrés au village de Vocnjak, il

6 n'y avait plus d'attaques contre nous."

7 Est-ce que cela a été correctement consigné au compte rendu ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque nous sommes arrivés à cet endroit-là,

9 nous étions sur la route toujours et nous ne suivions pas ces civils. Nous

10 les avons vus se déplacer sur la route et notre itinéraire passait par

11 cette route. Nous continuions lentement pour que les civils s'évadent de

12 cet endroit. Pendant tout ce temps-là, il n'y avait pas d'attaques lancées

13 contre nous.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Etiez-vous d'abord au village de

15 Vocnjak, et après vous êtes arrivés au village de Brocna ? C'était ma

16 question.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, nous sommes passés par le village de

18 Vocnjak et par la suite nous sommes arrivés au village de Brocna.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] A quel moment les attaques ont cessé,

20 les attaques contre vous ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas me souvenir exactement quand,

22 mais je peux vous dire que c'était à l'entrée même, au village de Vocnjak,

23 où les attaques ont cessé. C'était à peu près à ce moment-là.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

25 Maintenant, Mme Gopalan, au nom du bureau du Procureur procédera au contre-

26 interrogatoire.

27 Contre-interrogatoire par Mme Gopalan :

28 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Pantic.

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1 R. Bonjour.

2 Q. J'aimerais commencer par vous poser quelques questions concernant le

3 poste de police dans lequel vous avez travaillé à Rudnik. Vous avez

4 mentionné qu'il y avait là-bas encore 20 autres policiers qui travaillaient

5 avec vous dans ce poste de police. Pouvez-vous nous dire pourquoi vous avez

6 été choisi pour être à la tête des opérations de la VJ et du MUP vers la

7 fin du mois de mars ?

8 R. On m'a choisi pour ce travail parce que moi, pour utiliser l'expression

9 de la police, j'ai été à la tête du service de Sécurité plus de quatre ans

10 au sein de ce poste de police et concernant ce terrain. J'ai travaillé à

11 Rudnik depuis le mois de juillet 1992 jusqu'au 19 juin, à savoir -- oui,

12 jusqu'au 19 juin 1999.

13 Q. Etiez-vous le seul guide de ces unités de la VJ et du MUP à la fin du

14 mois de mars 1999 pendant cette opération, ou y avait-il d'autres guides ?

15 R. Pour autant que j'en sache, j'étais le seul guide lors de ces

16 opérations.

17 Q. En quoi consistait votre travail en tant que guide ?

18 R. En tant que guide, j'ai eu pour tâche de les guider, de les conduire en

19 leur montrant le chemin à suivre. Par exemple, par le village de Kostrc

20 jusqu'à l'entrée du village de Kladernica, je leur montrais le chemin pour

21 arriver à ce village. J'indiquais, par exemple, les routes pour aller

22 jusqu'à l'élévation, par exemple, de Vis, c'est une colline qui se trouve

23 dans la direction du village de Leocina, parce que je connaissais ce

24 terrain. Je connaissais tous les chemins menant vers ces villages.

25 Q. Merci. Lorsque vous avez dit : "Lorsqu'ils me disaient d'aller dans

26 cette direction ou dans cette autre direction…" qui vous donnait ces

27 instructions pour ce qui est des directions à suivre, à emprunter." ?

28 R. Je ne sais pas. Il y avait un officier supérieur dont je ne me souviens

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1 pas le nom de famille, avec qui j'étais. Il recevait des instructions de -

2 je ne sais pas quelle personne - et il ne me disait que la direction à

3 suivre, et je les guidais par la suite en empruntant cette direction.

4 Q. Est-ce qu'il s'agissait d'un officier de police ou

5 d'armée ?

6 R. C'était un officier de police.

7 Q. Pouvez-vous décrire quel était son uniforme, l'uniforme porté par cet

8 officier ?

9 R. Cet officier portait l'uniforme gris, vert olive et un gilet, un gilet

10 de combat. Sur le dos, il y avait une inscription "police," c'était

11 l'inscription sur le dos. L'uniforme était l'uniforme de camouflage, de

12 couleur verte.

13 Q. Vous avez mentionné que certains des officiers portaient des uniformes

14 de camouflage de couleur verte. Est-ce que quelqu'un d'entre eux avait sur

15 son uniforme le mot "milicija" ?

16 R. L'appelation "milicija" n'était plus utilisée depuis deux ou trois ans.

17 Mais je sais qu'à l'époque, nous nous appelions tous "policija" et nous

18 avions toujours sur nos uniformes l'inscription "policija" et nous étions

19 "policija" et non pas "milicija."

20 Q. Je m'excuse, Monsieur. Je suppose qu'à l'époque vous n'avez pas -- vous

21 n'avez vu personne portant de tels uniformes avec l'inscription "milicija"

22 ?

23 R. Non, je n'ai pas vu de tels uniformes.

24 Q. Quelle était la taille de cette unité que vous avez

25 guidée ? Quel était le nombre de membres de cette unité ?

26 R. Je ne me souviens pas du nombre exact de membres de cette unité, mais

27 j'ai pu remarquer qu'il s'agissait d'unités de taille d'une compagnie, à

28 peu près entre 90 et 100 membres. Je ne peux pas vous dire quel était le

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1 nombre exact, parce que je ne suis pas compétent pour vous dire quel était

2 le nombre de membres de cette unité, mais c'était à peu près la taille

3 d'une compagnie.

4 Q. L'unité que vous avez guidée était composée d'approximativement 90 à

5 100 personnes qui étaient soit membres de la police, soit membres de

6 l'armée, n'est-ce pas ?

7 R. Oui, c'était à peu près ainsi. Mais le premier jour, il y avait ce char

8 avec l'équipage; et le deuxième jour, un groupe de sept, huit ou dix

9 membres, un groupe de l'armée nous a rejoints.

10 Q. Est-ce que ces hommes étaient habillés différemment par rapport aux

11 autres membres de l'armée qui vous ont joints au début de l'opération ?

12 R. Non. Ils étaient tous habillés de la même façon, mais je n'ai pas vu

13 quels uniformes portaient les hommes qui se trouvaient dans le char.

14 Q. Donc lorsque vous vous déplaciez avec ces unités, comment se

15 déroulaient les communications avec eux ? Comment ils vous passaient des

16 instructions ? Est-ce que tout simplement quelqu'un vous disait oralement

17 ces instructions ?

18 R. Non. Je vous ai dit tout à l'heure qu'un officier supérieur qui, à mon

19 avis, était "komandir" d'une section. J'étais avec lui et il me disait

20 oralement ce que je devais faire; il me donnait des ordres oraux.

21 Q. Bien. Et c'était le seul moyen de communication, il n'y avait pas

22 d'émetteurs radio; vous receviez des instructions directement de lui ?

23 R. Oui.

24 Q. Pour ce qui est des armes portées par ces hommes, est-ce qu'ils avaient

25 des mitrailleuses ?

26 R. Il s'agissait des armes d'infanterie habituelles, classiques. J'ai vu

27 des fusils automatiques et des pistolets qui leur ont été distribués.

28 Q. Donc vous n'avez pas vu de mitrailleuses ?

Page 23685

1 R. Non.

2 Q. Avez-vous vu des grenades à main ? Est-ce qu'un des membres de ces

3 unités aurait porté des grenades à main ?

4 R. Je ne les ai pas vus. Je ne me souviens pas. Peut-être qu'ils les

5 auraient eues avec eux, mais je ne sais pas.

6 Q. Peut-être que vous ne pouvez pas vous souvenir de cela ?

7 R. Peut-être que je ne me rappelle pas cela, mais je n'ai pas vu des

8 grenades accrochées à leurs ceinturons. Peut-être qu'il est possible que

9 ces grenades se seraient trouvées dans les poches de leurs uniformes ou

10 dans leurs gilets pare-balles.

11 Q. Est-ce que c'était parce que vous vous déplaciez devant l'unité ou est-

12 ce que vous étiez avec eux, ensemble avec eux ?

13 R. Parfois j'étais avec eux, mais je n'étais jamais devant eux, parce que

14 je ne voulais pas être à la tête de cette unité parce qu'il y avait des

15 tirs de partout.

16 Q. Est-ce que c'était la seule occasion où vous avez travaillé en tant que

17 guide pour ces unités ou pour d'autres unités ?

18 R. Non. C'était juste à cette occasion-là.

19 Q. Bien que cela se soit passé à une seule occasion, vous n'êtes pas en

20 mesure de vous souvenir des armes utilisées par ceux que vous avez escortés

21 ?

22 M. LUKIC : [interprétation] Je pense qu'il faut que je soulève une

23 objection. Il s'agit de la mauvaise interprétation de ce que le témoin a

24 dit, parce que le témoin a expliqué exactement quel type d'armes ils

25 avaient.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il a dit ce qu'il a vu et vous avez la

27 déclaration du témoin dans laquelle il dit ce qu'il a vu d'après ses

28 souvenirs. Est-ce que vous, maintenant, contestez cela ?

Page 23686

1 Mme GOPALAN : [interprétation] Oui.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et le témoin a dit que ceux qui

3 étaient avec lui avaient des fusils automatiques et des pistolets. Qu'est-

4 ce que vous avancez, Madame Gopalan ?

5 Mme GOPALAN : [interprétation] Peut-être pourrais-je être plus spécifique.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, s'il vous plaît. Je pense que

7 cela serait mieux.

8 Mme GOPALAN : [interprétation]

9 Q. Monsieur, est-ce vrai que vous ne vous souvenez pas que ces hommes

10 portaient des grenades à main ?

11 R. Je ne vous ai pas dit qu'ils ne portaient pas de grenades à main. Je

12 vous ai dit que je ne les ai pas vus porter des grenades à main, ce qui ne

13 veut pas dire qu'ils ne les portaient pas. Mais je ne les ai pas vus, parce

14 qu'autour de leurs ceinturons je n'ai pas vu de grenades à main.

15 Q. Merci. Vous avez mentionné que -- je m'excuse. Avant de passer à un

16 autre sujet, savez-vous quelle unité de la VJ vous avez escortée pendant

17 cette opération ?

18 R. Je ne sais pas exactement de quelle unité de l'armée il s'agissait

19 parce que je ne savais pas. Je ne pouvais pas savoir cela, parce que je

20 n'ai pas eu de contacts avec eux. Je n'ai pas communiqué avec eux, je ne

21 savais pas d'où est venue cette unité et de quelle unité il s'agissait.

22 Q. Monsieur, vous avez dit que le 28 mars 1999, vous avez vu des civils

23 sur la route dans la direction du village de Vocnjak ou tout près du

24 village de Vocnjak. Pouvez-vous nous dire quel était le nombre de ces

25 civils que vous avez vus ?

26 R. Non, ce n'était pas le 28, c'était le 27 dans l'après-midi. Je ne peux

27 pas vous dire le nombre exact de civils, parce qu'ils se déplaçaient sur la

28 route. Je ne peux pas vous dire le nombre exact de civils. Je ne peux pas

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1 dire qu'il y en avait 100 ou peut-être 1 000, peut-être qu'il y en avait

2 plus ou moins. Tout simplement, je ne peux pas préciser cela.

3 Q. Est-ce que c'était la seule occasion où vous ayez rencontré des civils

4 pendant ce déplacement de trois jours ?

5 R. Oui, c'était la seule occasion pendant ces trois jours que nous avons

6 rencontré des civils.

7 Q. Monsieur, dans cette affaire, nous avons pu entendre des témoignages

8 selon lesquels des milliers de civils ont été vus dans la région de la

9 vallée d'Izbica vers la date du 26 mars, un grand nombre de civils, des

10 réfugiés civils --

11 Mme GOPALAN : [interprétation] Aux fins du compte rendu, j'aimerais dire

12 qu'il s'agit de la déclaration du témoin Liri Loshi.

13 Q. Est-ce que vous maintenez toujours que mis à part cette occasion, vous

14 n'avez pas vu d'autres civils empruntant cette route en grand nombre

15 pendant la période pendant laquelle vous étiez dans la vallée d'Izbica ?

16 R. Juste un instant, s'il vous plaît. Je n'ai pas dit que nous étions dans

17 la vallée d'Izbica ni je n'ai dit que nous étions là-bas. Nous étions sur

18 l'élévation entre Kladernica et Izbica et nous ne pouvions pas voir s'il y

19 avait des civils dans la vallée ou pas, parce qu'il y avait une forêt entre

20 nous et la vallée. Nous les avons vus pour la première fois le 27, au cours

21 de l'après-midi, je me souviens bien; les civils se déplaçaient sur la

22 route, c'est tout.

23 Q. De cet endroit où vous étiez le 27, vous n'avez vu qu'entre 100 et 1

24 000 civils, n'est-ce pas ?

25 R. Non, vous n'avez pas bien compris ce que j'ai dit. J'ai dit que je n'a

26 pas pu dire s'il y avait 100, 1 000 ou 5 000 civils. Je ne peux pas me

27 souvenir du nombre exact de civils. Il est possible qu'ils étaient entre 2

28 000 et 3 000. Ils se déplaçaient sur la route, et la route on pouvait la

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1 visionner sur une portion de peut-être 500 ou 600 mètres, parce qu'il y

2 avait des virages, il y avait d'autres forêts sur cette route. Je ne

3 pouvais pas les voir.

4 Q. Quel était le nombre de civils que vous avez vu ce

5 jour-là ?

6 R. Je vais vous dire que je ne peux pas être précis pour ce qui est du

7 nombre de ces civils, je ne pouvais pas savoir combien de civils il y avait

8 sur cette route. A mon avis, je ne suis pas compétent pour vous préciser ce

9 nombre, le nombre de ces civils qui se déplaçaient sur cette route. Tout ce

10 que je peux vous dire, c'est qu'il y avait des civils qui empruntaient

11 cette route.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Sur cette portion de la route que vous

13 pouviez voir, est-ce qu'il y avait plus de civils que de membres de la

14 police et de l'armée ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc nous pouvons dire qu'il y avait

17 au moins plus de 100 personnes. Pouvez-vous nous aider pour nous préciser

18 un peu plus ce chiffre ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous pouvons dire qu'il y en avait entre 1 000

20 et -- peut-être qu'il y en avait plus de 1 000, à peu près.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est pour ce qui est de la portion de

22 la route qui était visible pour vous ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pouvais voir cette portion depuis

24 l'élévation et il s'agissait d'une vallée qu'on pouvait voir et on pouvait

25 voir cette portion de la route de longueur de 500 à 600 mètres, si je me

26 souviens bien, et c'est cette portion de la route qu'on pouvait regarder

27 depuis cette élévation.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Gopalan, poursuivez.

Page 23689

1 Mme GOPALAN : [interprétation] Merci.

2 Q. Nous avons des moyens de preuve qui ont été utilisés dans cette affaire

3 et selon lesquels vers la date du 28 mars 1999, plusieurs milliers de

4 réfugiés civils se déplaçaient dans le secteur du village de Vocnjak et on

5 les attendait là-bas.

6 Mme GOPALAN : [interprétation] Aux fins du compte rendu, il faut que je

7 dise qu'il s'agit de la pièce P2046, c'est le rapport de combat daté du 28

8 mars 1999, signé le commandant de la 37e Brigade motorisée, colonel

9 Dikovic. Je ne veux pas présenter cette pièce à conviction au témoin, mais

10 tout simplement je voudrais dire que ce colonel avait déclaré que, je cite

11 : "Dans les opérations à venir dans le secteur du village de Vocnjak, nous

12 nous attendons à retrouver des abris avec plusieurs milliers de réfugiés

13 civils."

14 Q. Monsieur, savez-vous pourquoi on s'attendait à voir ces réfugiés civils

15 dans le secteur du village de Vocnjak ?

16 R. Je ne sais pas.

17 Q. Mais vous seriez d'accord avec moi pourtant pour dire que le village

18 d'Izbica se trouve à peu près à 2 kilomètres ou peut-être moins par rapport

19 au village de Vocnjak au nord du village de Vocnjak. Répondez-moi par un

20 oui ou par un non ?

21 R. Je ne sais pas ce qui se trouve nord. Mais Izbica se trouve à peu près

22 2 kilomètres de distance par rapport à Vocnjak.

23 Q. Vous étiez à l'entrée du village d'Izbica le 28 mars avec les unités

24 que vous guidiez ?

25 R. Non, ce n'était pas le 28. Le 28 nous étions au village de Blocnje.

26 Dans la matinée, ils étaient arrivés pour prendre des autocars et pour

27 aller à Gorjna Klina -- je m'excuse à Metrohijaska Klina.

28 Q. Je m'excuse, mais pourriez-vous répéter le nom du village où vous étiez

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1 le 28 ?

2 R. Brocna.

3 Q. Etiez-vous au village de Vocnjak ?

4 R. Nous sommes passés par la route au côté du village de Vocnjak et nous

5 sommes arrivés au village de Brocna. C'est ce que j'ai déjà dit. Donc nous

6 sommes passés par la route à côté du village de Vocnjak et nous sommes

7 arrivés au village de Brocna.

8 Q. Après le 28, où êtes-vous allé ?

9 R. Après le 28, quand ils m'ont laissé à Klina, je suis parti chez moi

10 dans le village de Siga, dans la municipalité de Pec, car ce jour-là mon

11 équipe se terminait. Car dans notre département, en raison de la situation

12 et des difficultés de déplacement, nous travaillions des semaines de cinq

13 jours. Donc je passais cinq jours au poste de police, ensuite cinq jours

14 chez moi. Après les cinq jours que j'ai passés chez moi, à la maison, très

15 normalement je suis retourné au poste de police pour m'acquitter des tâches

16 que nous avions à accomplir, donc je suis retourné à Rudnik.

17 Q. J'aimerais maintenant passer à un autre sujet.

18 M. LUKIC : [interprétation] Excusez-moi, page 33, ligne 6 du compte rendu

19 d'audience, une légère erreur qui pourrait créer la confusion, il ne faut

20 pas dire Junik, mais Rudnik.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Autre chose qui pourrait créer la

22 confusion dans l'esprit de tous, j'en suis sûr, c'est le nom de Brocna.

23 Pour autant que vous le sachiez, Monsieur Lukic, c'est le même village de

24 Blocnje ?

25 M. LUKIC : [interprétation] Non.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce sont deux villages différents.

27 M. LUKIC : [interprétation] On passe par Blocnje pour arriver à Brocna.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Malheureusement, au compte rendu

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1 d'audience il est écrit "qu'on passe par Vocnjak pour arriver à Blocnje."

2 M. LUKIC : [interprétation] Chaque fois, il faudrait dire Brocna.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais voyez page 22, ligne 16.

4 M. LUKIC : [interprétation] Oui, je ne voulais pas me lever chaque fois,

5 mais je l'ai vu.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Puis-je partir du principe que le nom

7 de Blocnji, B-l-o-c-n-j-i [comme interprété], n'est pas le nom d'un village

8 de la région ?

9 M. LUKIC : [interprétation] Chaque fois, au lieu de Blocnje, il faut lire

10 Brocna.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

12 Madame Gopalan.

13 Mme GOPALAN : [interprétation]

14 Q. J'aimerais maintenant que nous parlions de la mi-1998. Etes-vous au

15 courant d'opérations antiterroristes qui auraient été conduites dans la

16 zone englobant les 18 villages dont vous venez de parler, donc dans votre

17 zone entre la mi-juillet 1998 et le mois d'octobre 1998 ?

18 R. A ce moment-là, nous étions au poste de police. D'après mes souvenirs,

19 la route qui était coupée était coupée depuis près de deux mois. Je sais

20 qu'à ce moment-là il y a eu une opération qui a été menée pour nettoyer

21 cette route. Mais s'agissant d'autres opérations, y en a-t-il eu. Je ne

22 sais pas, car je n'étais pas dans les secteurs concernés qui m'auraient

23 permis d'être au courant.

24 Q. Cette action a-t-elle été menée par le MUP seul ou par le MUP et la JNA

25 ensemble ?

26 R. Pour l'action en question, je ne sais pas. La route, c'était la route

27 qui avait plus de 20 kilomètres de long. Nous, nous étions à Rudnik et

28 l'opération de déblocage de la route menant de Rudnik à Mitrovica, je ne me

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1 trouvais pas là, donc je ne sais pas quelles sont les unités qui y ont

2 participé. Pour ma part, je n'étais qu'un simple policier, je n'étais donc

3 pas informé de ce genre de chose.

4 Q. Je vous remercie, Monsieur.

5 Mme GOPALAN : [interprétation] Je n'ai plus de questions, Monsieur le

6 Président.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Madame Gopalan.

8 Questions de la Cour :

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Pantic, comment pouvait-on

10 distinguer un policier d'un soldat pendant l'action qui s'est déroulée

11 entre le 26 et le 28 mars ?

12 R. On pouvait les distinguer par l'inscription que ces hommes avaient dans

13 le dos. Les policiers portaient des gilets de combat, comme on les appelle,

14 et au dos de ces gilets figurait l'inscription "policija." Et devant au

15 niveau de la poche de poitrine, il y avait également l'inscription

16 "policija," toute petite en lettres blanches.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Y avait-il plus de policiers que de

18 soldats participant à cette action ?

19 R. Oui, il y avait davantage de membres de la police.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pouvez-vous nous dire à peu près quel

21 était le pourcentage de policiers ?

22 R. Bien, j'ai déjà dit que là où j'étais, là où je pouvais voir ce qui se

23 passait, il y avait à peu près une compagnie de police. Quant aux soldats,

24 je ne suis pas sûr du nombre d'hommes qui composait le groupe chargé des

25 chars car ce n'est pas ma spécialité. Mais à part ça il y avait à peu près

26 un détachement, c'est-à-dire, sept, huit, peut-être dix soldats.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Jusqu'à présent j'ai acquis le

28 sentiment qu'il y avait plus de soldats que simplement ceux qui

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1 s'occupaient des chars, n'est-ce pas ? Est-ce que je me suis trompé ?

2 R. Non, non. Vous ne vous êtes pas trompé. J'ai dit que le lendemain un

3 détachement de l'armée nous a rejoints, et un détachement, cela fait sept,

4 huit, jusqu'à dix hommes à peu près. Donc il y avait ce détachement en plus

5 des hommes qui s'occupaient des chars.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais j'ai également acquis le

7 sentiment que lorsque vous avez rencontré cette équipe pour la première

8 fois il y avait là des soldats qui n'étaient pas membres du groupe chargé

9 des chars. Est-ce que je me suis trompé ?

10 R. Oui, oui, ça c'est une erreur. A côté des chars ne se trouvaient que

11 les soldats qui servaient ces chars, et qui, ensuite, ont monté à bord du

12 char. D'ailleurs ils étaient déjà à bord du char. Simplement il y avait cet

13 homme un peu plus âgé, peut-être le commandant, je ne sais pas, qui était

14 debout à bord du char, les soldats, eux, étaient à côté du char. Mais les

15 autres soldats n'étaient pas là le premier jour.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quand vous avez rejoint le groupe, le

17 char était-il déjà là ?

18 R. Oui, oui. Le char était là d'ailleurs, c'est pour ça que nous avons

19 démarré, que nous nous sommes mis en marche.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Qui commandait ce groupe durant

21 l'action ?

22 R. Je ne sais pas, ça je ne suis pas au courant.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai du mal à admettre cela. Qui

24 commandait le groupe ?

25 R. Comme je l'ai déjà dit, je sais qu'il y avait là un homme de la

26 brigade, quelqu'un qui, je pense, était le commandant du détachement.

27 J'étais à ses côtés. Je ne sais pas qui lui donnait des ordres à lui, car

28 je n'étais pas au niveau hiérarchique suffisant pour savoir qui donnait les

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1 ordres, qui était au commandement.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le commandant de détachement dont vous

3 venez de parler, était-il un policier ou un soldat ?

4 R. Lui, était membre de la police.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Etait-ce l'unité PJP de la police ou

6 une compagnie PJP ?

7 R. Oui, oui. C'était un membre des unités "posebna" de Belgrade.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quel était le numéro de cette

9 formation ? Vous connaissez son numéro ?

10 R. Je ne sais pas, je n'ai pas vu de numéro. Sur les uniformes il n'y a

11 pas mention du numéro de l'unité. En tout cas, je ne l'ai pas vu ce numéro.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez indiqué un peu plus tôt que

13 les policiers présents étaient au nombre d'une compagnie à peu près, mais

14 vous avez parlé du commandant du détachement qui était responsable.

15 Pourriez-vous expliciter cela en mon intention ?

16 R. J'ai parlé de détachement. J'ai été rattaché à ce groupe, donc à ce

17 niveau-là, et il y avait un commandant de détachement qui était à la tête

18 d'effectifs équivalent à ce genre de formation, c'est-à-dire, une trentaine

19 d'hommes. Mais dans cette compagnie, nous avions trois commandants de

20 détachement et il n'y en a qu'un avec lequel j'ai eu des contacts, parce

21 que j'étais chargé de travailler avec lui, de lui apporter mon aide. Donc

22 c'est lui qui me disait où nous allions et qui me donnait des ordres quant

23 à ce qu'il fallait faire à cet endroit.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il donnait des ordres aux

25 deux autres détachements également ?

26 R. Non.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Qui commandait l'action ?

28 R. Toute l'action, comme je l'ai déjà dit, je ne sais pas qui la

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1 commandait. Je sais que c'était des gens de Belgrade. Les trois hommes dont

2 j'ai parlé avaient leur supérieur dont je ne connais pas le nom. Je ne les

3 voyais pas tout le temps visuellement, mais eux avaient les moyens de

4 communiquer les uns avec les autres par radio.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai peut-être donné un sens plus

6 important que son sens réel à votre réponse précédente, mais je pensais que

7 vous nous aviez dit que les communications se faisaient oralement ?

8 R. Oralement, s'agissant de la relation entre moi et lui, parce que la

9 question qui m'avait été posée, si je me souviens bien, consistait à me

10 demander comment je communiquais avec lui, ou plutôt, comment il me donnait

11 ces ordres.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quand vous avez été tiré de votre

13 bureau pour servir de guide, à qui vous a-t-on donné consigne de vous

14 présenter, avec qui vous a-t-on donné consigne de prendre contact quand

15 vous arriviez sur place ?

16 R. C'était juste devant le poste de police de Rudnik. Cet homme qui était

17 arrivé au poste et avec lequel je suis parti sur ordre de mon commandant.

18 Nous nous sommes dirigés à un endroit qui se trouvait à une cinquantaine de

19 mètres, juste devant le poste de police, et c'est là que nous avons fait

20 mouvement.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Qui était cet homme que vous avez

22 rencontré devant le poste de police ?

23 R. Cet homme c'était le commandant du détachement avec lequel j'ai passé

24 tout mon temps par la suite.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc c'est lui qui vous a dit le nom

26 des endroits où vous deviez vous rendre ? Mais il n'a pas dirigé les deux

27 autres détachements dans la bonne direction, simplement les choses se sont

28 passées comme elles se sont passées pour une raison ou pour une autre;

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1 c'est cela que vous dites ?

2 R. J'étais à ses côtés en tant que guide. J'avais été rattaché à toute

3 cette compagnie de Belgrade en qualité de guide. Donc nous avons fait

4 mouvement. Ils m'ont dit quel serait mon travail. Ils m'ont dit : Allons à

5 Kostrc, et je leur ai dit : Bien, nous allons y aller en passant par ce

6 chemin et par celui-là. Maintenant de qui eux recevaient leurs ordres quant

7 à l'endroit où il fallait se rendre, c'est ce que je ne sais pas.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais quand vous lui disiez à lui dans

9 quelle direction il fallait aller, est-ce que les autres vous suivaient,

10 est-ce qu'ils allaient dans la même direction ?

11 R. Oui, oui, c'est dans ces conditions que nous avons fait mouvement. Nous

12 nous sommes toujours déplacés ensemble, pratiquement en même temps.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Comment communiquait-il avec l'armée ?

14 R. Je ne sais pas. Ça je ne suis pas au courant.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le char avançait-il devant vous ou

16 derrière vous ?

17 R. Cela dépendait du terrain. Le premier jour, nous avions emprunté une

18 grande route, donc le char avançait à côté de nous; et les deuxième et

19 troisième jour il était en général légèrement en arrière, à moins qu'il

20 n'avance en allant de gauche à droite pour s'adapter au terrain.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Les soldats appartenaient à quelle

22 brigade ?

23 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas. Je ne sais pas à quelle brigade ils

24 appartenaient.

25 [La Chambre de première instance se concerte]

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Gopalan, des questions

27 supplémentaires après cet échange ?

28 Mme GOPALAN : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Questions supplémentaires, Maître

2 Lukic ?

3 M. LUKIC : [interprétation] Une question simplement, Monsieur le Président,

4 qui fait suite aux vôtres.

5 Nouvel interrogatoire par M. Lukic :

6 Q. [interprétation] Je n'aurai, Monsieur Pantic, qu'une seule question à

7 vous poser. M. le Juge Bonomy vous a demandé si le nombre des soldats était

8 supérieur à celui des policiers. Quand vous avez répondu, parliez-vous

9 uniquement de votre groupe ou parliez-vous des participants à toute

10 l'action ?

11 R. Pour toute l'action, je ne sais pas, mais dans le groupe dont je

12 faisais partie il y avait plus de policiers.

13 Q. Merci d'avoir répondu à mes questions. Merci d'être venu ici témoigner.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Maître Lukic.

15 Monsieur Pantic, ceci met un terme à votre déposition. Merci d'être venu

16 ici témoigner. Vous pouvez maintenant quitter le prétoire en compagnie de

17 M. l'Huissier.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

19 [Le témoin se retire]

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Lukic, votre témoin

21 suivant ?

22 M. LUKIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Notre témoin

23 suivant est M. Petar Damjanac.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

25 [La Chambre de première instance se concerte]

26 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Monsieur Damjanac.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

Page 23698

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous prierais de bien vouloir

2 prononcer la déclaration solennelle vous engageant à dire la vérité en

3 lisant le texte qui est inscrit sur le carton que vous tend M. l'Huissier à

4 l'instant.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

6 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

7 LE TÉMOIN: PETAR DAMJANAC [Assermenté]

8 [Le témoin répond par l'interprète]

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie. On me fait savoir

10 que vous préféreriez peut-être, pour des raisons de confort, rester debout

11 plutôt qu'assis. Que préférez-vous effectivement ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis près à essayer au départ de rester

13 assis et si j'en ai besoin je vous ferai savoir que j'ai besoin de me

14 lever.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est exactement ce qu'il convient de

16 faire. Veuillez vous asseoir, Monsieur.

17 Vous allez maintenant être interrogé par Me Lukic.

18 Maître Lukic, à vous.

19 M. LUKIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

20 Interrogatoire principal par M. Lukic :

21 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Damjanac.

22 R. Mes respects.

23 Q. J'ai ici quelques documents qui vous sont destinés. Nous ne les avions

24 pas encore mis en ordre hier. Je pense des documents sur papier nous

25 faciliteront la tâche et nous permettront de travailler plus vite que

26 d'attendre l'affichage des documents sur les écrans.

27 R. Oui, oui.

28 Q. Veuillez avoir l'obligeance de bien vouloir vous présenter, je vous

Page 23699

1 prie.

2 R. Je m'appelle Petar Damjanac, prénom du père, Savo, nom de la mère

3 Javanka Petricic, né dans le village de Novo Cikatovo, municipalité de

4 Glogovac. Je vivais avez mes parents en 1966, ou plutôt, 1969, quand ils

5 ont été forcés de quitter notre village d'origine. J'ai poursuivi mes

6 études secondaires dans la ville voisine et accompli mes études

7 universitaires à Pristina. J'ai trouvé un emploi en République de Serbie au

8 sein du secrétariat des affaires intérieures de Pristina. J'ai commencé à

9 travailler en qualité d'inspecteur de la police judiciaire du SUP de

10 Pristina. Au fil des années, je suis devenu un des inspecteurs les plus

11 versés dans la conduite des enquêtes criminelles. En 1991, lors des

12 incidents bien connus où les Albanais ont attaqué les forces de police,

13 j'ai envoyé à l'OUP de Lipljan, au département de l'intérieur de Lipljan,

14 en qualité de chef, des effectifs opérationnels. J'y ai travaillé dans ce

15 poste en 1990 et 1991, date à laquelle on m'a renvoyé dans mon poste

16 d'origine, et j'y suis resté membre d'une équipe de la police judiciaire

17 jusqu'à pratiquement la fin de 1997, donc au poste de chef de la police

18 judiciaire. A ce moment-là, j'ai été transféré au SUP de Glogovac, ma ville

19 natale, où j'ai travaillé au mieux de mes capacités jusqu'au 1er mai 1999 et

20 à ce moment-là, jusqu'au 16 juin pendant un mois à peu près, par

21 conséquent, je suis retourné à mon lieu d'origine, à la police judiciaire.

22 Après le 16 juin 1999, puisque notre SUP avait été transféré à Niska Banja,

23 c'est-à-dire, à 7 ou 8 kilomètres de Nis, puisque ma famille résidait à

24 Kragujevac à l'époque, depuis la fin juin jusqu'au début de l'an 2000, pour

25 des raisons familiales, j'ai travaillé à Kragujevac; après quoi j'ai été

26 transféré au SUP de Belgrade, où je suis resté jusqu'à mon départ en

27 retraite au mois d'août de l'année dernière. Voilà en bref l'évolution de

28 ma carrière.

Page 23700

1 Q. Je vous remercie, Monsieur Damjanac. Je pense que le moment est venu

2 pour la pause. On reprendra l'interrogatoire après la pause.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Damjanac, nous faisons

4 d'habitude une pause à peu près à cette heure-ci chaque jour, une pause de

5 20 minutes. Je vous prie maintenant de quitter le prétoire accompagné de

6 l'huissier d'audience.

7 [Le témoin quitte la barre]

8 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]

9 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

10 --- L'audience est reprise à 10 heures 50.

11 [Le témoin vient la barre]

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Lukic.

13 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

14 Q. Monsieur Damjanac, peut-on reprendre ?

15 R. Oui.

16 Q. Vous avez fait référence au fait que vos collègues, les Albanais, -- en

17 fait je retire cette question. Tout d'abord un autre commentaire s'agissant

18 du compte rendu, page 21, ligne 21. Il est consigné le SUP, le secrétaire

19 de l'intérieur de Glogovac. S'agissait-il du SUP ou de OUP, c'est-à-dire,

20 d'une unité organisationnelle de la police ?

21 R. Il s'agissait d'un OUP. J'étais employé au sein du secrétariat de

22 l'intérieur basé à Pristina, et ce SUP couvrait la municipalité de

23 Pristina, la ville de Pristina elle-même. Puis il y a eu dans le cadre de

24 l'organisation territoriale, plusieurs SUP au niveau des municipalités.

25 Ensuite, il y a eu un changement du nom et l'ancien OUP, unités

26 organisations de la police ont été renommées, sont devenues des centres de

27 sécurité. Voilà. Mais il n'y a pas eu d'autres changements à part le

28 changement de nom.

Page 23701

1 Q. Bien. Alors vous avez dit que vos collègues albanais avaient quitté

2 leurs postes en 1990 et 1991. Pour quelle raison ?

3 R. Très brièvement, je peux vous expliquer comment cela s'est passé. Je

4 connais cette question très bien, parce qu'à l'époque j'ai examiné les

5 données statistiques liées à cette question. A partir de 1964 jusqu'à la

6 fin de 1989, s'agissant de la composition nationale au sein du MUP de la

7 Serbie dans la région de Kosovo-Metohija, il y avait 90 % d'employés de

8 nationalité albanaise, comme on les appelait, ou des Siptar, comme on les

9 appelait jusqu'en 1969, et seulement 10 % étaient des employés de

10 nationalité non albanaise, c'est-à-dire, des Serbes, des Monténégrins, des

11 Turcs, des Musulmans, des Gorani, des Croates, des Rom, et cetera.

12 En 1989, le parti de Rugova a été créé, le DSK. C'est au moment où la

13 vie multipartite, un système multipartite a été introduit en Serbie. A ce

14 moment-là un plan de création d'une Grande-Albanie, par le biais des

15 institutions a commencé à naître. Ensuite il y a eu l'amnistie des

16 prisonniers politiques menée par Adem Demaqi et des centaines d'autres

17 extrémistes albanais qui profitaient du système multipartite pour légaliser

18 leurs organisations politiques souterraines.

19 En 1990, le DSK, le parti de Rugova a tenu une assemblée à Kacanik,

20 une assemblée illégale. Cela s'est passé en septembre 1990. A cette époque-

21 là a été adopté le document dénommé constitution de la République de

22 Kosovo. Ils ont créé toutes les institutions prévues par cette

23 constitution, le gouvernement, les ministères, l'armée et la police. Et à

24 ce moment-là, tous les membres de la communauté albanaise, de la minorité

25 nationale albanaise employée dans l'éducation, dans la santé, dans des

26 entreprises d'Etat, donc toutes ces personnes-là ont reçu l'ordre de

27 quitter les structures étatiques de la Serbie. A l'époque, il y avait

28 encore la RSFY, et les institutions parallèles ont été créées.

Page 23702

1 Je dois attirer votre attention sur un autre fait. Mes collègues

2 siptar - et je les appellerai comme ça - on les appelait comme ça

3 officiellement, et eux-mêmes ils se désignaient comme tels. En 1990 - ce

4 qui n'a pas attiré la grande attention de médias - ils ont exigé la

5 création des postes de police parallèles. Ce qui signifie qu'à l'intérieur

6 d'un même système, on introduise des rallonges tout simplement et que nous,

7 en tant que membres des services de Sécurité, ou de l'intérieur non

8 albanais, nous les Serbes et les autres, qu'on maintienne nos postes de

9 police et que les Albanais maintiennent en parallèle leurs propres postes

10 de police et leurs casernes. Tout cela dans l'intérêt du maintien de

11 l'ordre public, et cetera.

12 Alors, la minorité nationale albanaise, pour utiliser le terme, a

13 officiellement accepté. Au début de 1990 et 1991, ils ont, pour la plupart,

14 obéi à l'ordre de leur direction illégale de cette assemblée de la

15 République de Kosovo autoproclamée et ils ont quitté leurs postes au sein

16 du ministère de l'Intérieur de la République de Serbie, de la province

17 autonome de Kosovo-Metohija -- ou plutôt de la province de Kosovo. Je dis

18 Kosovo, parce que le terme Kosovo-Metohija a été remis en question après

19 les manifestations destructrices qui ont eu lieu en 1968.

20 Les Nations Unies ont adopté un document où il a été indiqué

21 s'agissant des services de santé, que bien qu'un certain nombre d'employés

22 ou bien que la majorité des employés albanais dans le secteur de santé

23 aient quitté leurs postes, et le pourcentage des Albanais à l'époque était

24 50,83, alors que le nombre d'utilisateurs de ceux qui bénéficiaient des

25 soins dispensés étaient à 90 % des Albanais de souche.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Oren.

27 M. OREN : [interprétation] Je ne vois pas quelle est la pertinence de ce

28 que le témoin est en train de raconter.

Page 23703

1 M. LUKIC : [interprétation] Je voulais moi-même m'occuper de cela.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien, vous êtes parvenu à votre

3 objectif, à votre but. Le témoin a été interrompu.

4 M. LUKIC : [interprétation]

5 Q. Oui, je sais comme ça fait beaucoup de temps à cette question et que

6 vous pourriez nous dire beaucoup de choses, mais nous ne disposons que d'un

7 temps très limité. C'est pour cette raison-là que je vous demande de vous

8 concentrer sur des questions que je vous pose. Alors, revenons à notre

9 question : pourriez-vous nous donner quelques exemples concrets, nous

10 donner des noms de personnes ayant quitté le MUP à l'époque ?

11 R. Comme je travaillais au SUP de Pristina pendant cette période-là et

12 comme nous avions de très bonnes relations, et professionnelles et

13 extraprofessionnelles, parce qu'on se rencontrait, on se fréquentait, on

14 assistait ensemble à des fêtes, également à des événements tels que des

15 funérailles, cela arrive aussi malheureusement, donc pour nous ce moment de

16 séparation était très difficile. Nous l'avons vécu. On a eu du mal à

17 l'accepter. J'en ai parlé à mes collègues siptar et ils m'ont dit : Ecoute,

18 toi, tu ne comprendras jamais pourquoi on le fait.

19 Maintenant des années ont passé. Je ne vais pas maintenant dire tout ce

20 qu'ils m'ont raconté, tout simplement pour eux, puis je ne me souviens plus

21 de beaucoup de noms. Je vais quand même vous donner un exemple, un des mes

22 très bons collègues, qui n'avait d'amis quasiment que parmi les Serbes, qui

23 était présent lors de toutes les fêtes, mariages, et cetera, et cetera. Il

24 s'appelait Fadil Abazi. Il était le chef du département de la Défense

25 populaire du SUP de Pristina. Son épouse travaillait également pour le SUP

26 de Pristina, au département d'analyse. Quand les gens ont commencé à

27 quitter le SUP, lui aussi, il l'a fait tranquillement, sans faire beaucoup

28 de bruit. Puis un jour je l'ai rencontré dans la rue et je lui ai demandé :

Page 23704

1 alors Fajo, pourquoi est-ce que tu as fait cela, pourquoi tu as quitté le

2 MUP ? Je le connaissais comme un citoyen loyal et son père aussi était

3 policier à Pec. Il m'a dit en réponse à cette question : On n'y peut rien

4 contre la force. C'était tout ce qu'il m'a dit en réponse à ma question. Ce

5 n'était pas la peine d'essayer de creuser davantage ce thème.

6 Moi-même j'ai été très touché par le fait qu'un grand nombre de mes

7 collègues, de mes amis avec lesquels j'ai partagé le bien et le mal ont

8 tout simplement quitté leurs postes. Alors j'ai essayé d'en apprendre

9 davantage.

10 Q. Monsieur Damjanac, si on poursuit de cette manière-ci nous

11 n'arriverons pas à faire le travail que nous sommes censés faire. Vous avez

12 mentionné qu'un seul nom en dix minutes.

13 R. Je peux vous donner d'autres noms, mais vous m'avez posé une autre

14 question à laquelle je n'ai pas répondu. Il y a un certain nombre, un bon

15 nombre d'Albanais qui sont restés, qui n'ont jamais abandonné leurs postes,

16 parmi lesquels un certain nombre qui avait reçu la mission d'y rester pour

17 pouvoir renseigner les autorités illégales de Kosovo-Metohija au détriment

18 du MUP. Cela a été confirmé par la suite. Il y a eu parmi eux des personnes

19 qui ont littéralement été identifiées comme des exécutants de l'UCK. Et si

20 vous souhaitez que je vous donne leurs noms, alors je le ferai. Je peux

21 vous décrire en détail les événements auxquels ils ont participé. Il

22 s'agissait là des inspecteurs d'une très, très grande qualité. C'est très

23 malheureux ce qui est arrivé.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc juste un instant. Vous avez dit

25 que l'UCK existait dès 1990 ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous le permettez, Monsieur le Président,

27 j'essayerai de vous expliquer la situation. Je suis né dans cette région,

28 au centre du Kosovo.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La question que je viens de vous poser

2 requiert une réponse simple, oui ou non. Alors l'UCK existait-il en 1990 ou

3 pas ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais il ne s'appelait pas ainsi, et je

5 peux vous dire à quel moment ils ont commencé à agir en tant qu'UCK

6 officiellement. J'étais engagé à mener l'enquête sur plusieurs meurtres qui

7 se sont passés sur le poste-frontière de Glogovac à un moment où l'actuel

8 premier ministre, Adem Thaqi, qui était la main droite d'Adem Demaqi, et

9 quelques extrémistes ont tué plusieurs de mes collègues qui allaient au

10 travail en camionnette. L'année d'après, en 1994 --

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il s'agissait là de 1993, n'est-ce pas

12 ? Bien.

13 Maître Lukic.

14 M. LUKIC : [interprétation]

15 Q. Nous allons y revenir, Monsieur le Témoin, le cas échéant, mais

16 pourriez-vous maintenant nous dire quelles sont les personnes qui sont

17 restées au sein de la police ?

18 R. La police judiciaire, par exemple, ou l'active de la police. Il y en a

19 eu partout. Je ne peux pas vous dire le nombre exact, mais je dirais

20 qu'environ 10 %. S'agissant de certains départements de la police, la

21 proportion était bien plus élevée, donc il y en a eu dans chaque

22 département. Leur nombre évidemment variait. Personne n'a été démis de ses

23 fonctions et certains ont même été promus.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Juste un instant, s'il vous plaît.

25 Bien. On y reviendra plus tard.

26 Poursuivez, s'il vous plaît.

27 M. LUKIC : [interprétation]

28 Q. Pourriez-vous nous donner quelques exemples pour la période après le

Page 23706

1 retrait des forces yougoslaves ? Quel était le sort de ces personnes qui

2 sont restées au sein de la police ?

3 R. Quelle est la période à laquelle vous vous référez plus précisément ?

4 Q. 1999.

5 R. La région de Glogovac, pour essayer de vous donner une réponse bien

6 précise, et si vous le souhaitez je peux essayer de vous donner une réponse

7 qui couvrirait également Pristina. Alors s'agissant de Glogovac, Djafer

8 Coric, le commandant adjoint ou le chef adjoint de la police a été tué

9 après plusieurs tentatives de l'UCK, de le tuer lui et sa famille. Peut-

10 être qu'on pourrait établir la date exacte à l'aide des documents. Je pense

11 qu'il a été tué le 11 ou le 12. Je ne sais pas quel jour.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, le 11 novembre, mais quelle année

13 ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] 1998.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais la question ne portait pas

16 sur cela. La question qui vous a été posée portait sur le destin des

17 policiers qui sont restés au sein de la police après 1999. Me Lukic a posé

18 une question relative à 1999 au sujet des policiers albanais qui sont

19 restés au sein de la police après cette année-là.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Après le retrait des forces serbes, pour ainsi

21 dire, et des événements bien connus de 1999, un certain nombre de policiers

22 de nationalité albanaise se cachaient principalement à Skopje pour éviter

23 les représailles de l'UCK. Une autre partie d'entre eux est partie en

24 Serbie et certains sont partis à la retraite. Ahmet Bruna, qui était

25 colonel de la police, il se cachait en Serbie pendant un moment, il est

26 parti à la retraite, il était également à Belgrade, ensuite il s'est rendu

27 aux pays nordiques, en Scandinavie. Donc toutes ces informations elles sont

28 des informations que j'ai reçues directement par lui, parce que je le

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1 connaissais, on était des amis. Hamza Kajra qui était un de mes inspecteurs

2 s'est caché pendant un moment à Skopje, ensuite à Bonstil [phon] --

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dites-nous quelque chose au sujet de

4 ceux qui ont été tués ou kidnappés parmi les policiers qui étaient restés

5 au sein de la police.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'allais le dire, vous m'avez interrompu,

7 Monsieur le Président. Alors Hamza Hajra, l'un de mes inspecteurs,

8 excellent par ailleurs, il y a eu trois tentatives de le tuer, et enfin, il

9 a été tué en 2001 sur la route de retour de Glogovac, sa ville natale. Il a

10 été tué avec sa femme et ses trois enfants dans ce véhicule. Ils ont été

11 massacrés, c'était un crime sanglant, c'était terrible, alors que c'était

12 un Albanais véritablement loyal, un excellent travailleur qui ne voulait

13 que retourner chez lui. Il a été tué avec toute sa famille. Et quand vous

14 dites "tué" ça ne décrit pas suffisamment la manière dont cela s'est fait.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourriez-vous nous décrire rapidement,

16 brièvement, comment il a été tué ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Un groupe de l'UCK a ouvert le feu depuis

18 plusieurs directions sur le véhicule où il se trouvait avec toute sa

19 famille. Je pense qu'il n'y a un qu'un enfant qui a survécu à cet incident.

20 Ils ont été tués au centre même de Glogovac. Il y a des documents qui

21 certifient cela et je crois que même les forces internationales ont vérifié

22 cet événement, qu'ils ont établi des constatations sur les lieux. Il y a eu

23 de rapports dans les médias également.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] D'autres, y a-t-il d'autres qui ont

25 été tués ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Xhafer Qorri a été tué avant la fin du

27 conflit. Il y a eu des tentatives de tuer toute sa famille également. Qerim

28 Qshishku, le chef adjoint, a réussi à se sauver en 1999 et il a quitté le

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1 Kosovo, je ne sais plus où il est aujourd'hui, dans quel coin du monde.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Qui est-ce qui encore a été tué après

3 juin 1999 ? Nommez-m'en.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] A Glogovac, parmi ceux qui sont restés, à

5 Glogovac où j'étais le chef, deux ont été tués, les autres ont fui avec

6 leurs familles. Si vous le voulez on peut y revenir.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ces deux personnes-là qui ont été

8 tuées, qui sont-elles ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] D'abord, Xhafer Qorri, le chef adjoint du

10 poste de police de Glogovac.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quand est-ce qu'il a été tué ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Novembre 1998 et --

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais on ne parle pas de 1998. On

14 parle de la période après juin 1999. Est-ce que vous comprenez cela ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je comprends.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Combien de personnes ont été tuées

17 après juin 1999, parce qu'ils ont décidé de rester au Kosovo et qu'ils ont

18 fait l'objet de représailles ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Hamza Hajra a été tué en 2001, si je ne me

20 trompe, et les autres ne sont jamais revenus. Ils ne sont jamais retournés

21 au Kosovo, puis il n'y en a pas eu beaucoup. Il y avait peu d'Albanais qui

22 sont passés au service à cette époque-là.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc vous avez un exemple de policier

24 qui est resté et qui a été tué après juin 1999. Maintenant j'aimerais vous

25 poser une autre question. Pourriez-vous nous dire - s'il le faut nous

26 pouvons passer à huis clos partiel - s'il y a eu des policiers albanais qui

27 ont quitté le Kosovo lors du retrait des forces en juin 1999 ? Si vous avez

28 des noms à nous dire et si vous souhaitez qu'on le fasse à huis clos

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1 partiel, dites-le, s'il vous plaît. Connaissez-vous le nom de telles

2 personnes ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Zenel Hoti --

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Juste un instant. Est-ce que vous

5 voulez nous dire ces noms en audience publique ou à huis clos partiel ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] On peut le dire en audience publique, il

7 s'agit de faits connus. Cette personne-là est retournée au Kosovo, je ne

8 sais pas où exactement au Kosovo-Metohija, mais il vit encore aujourd'hui.

9 Zenel Hoti a travaillé pendant un moment à Glogovac, il était inspecteur.

10 Pendant la dernière période, il a travaillé à Pristina jusqu'à la fin de

11 1999 et il s'est retiré ensemble avec nos unités. Je crois qu'il a continué

12 à travailler au sein du SUP de Belgrade.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous dites qu'il habite le Kosovo

14 maintenant ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, depuis deux ans.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Y en a-t-il qui ont quitté le Kosovo

17 d'une manière permanente à partir de mai, juin 1999 ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y en a eu beaucoup. Il y en a eu beaucoup.

19 Ce qui me pose problème maintenant, c'est le fait que cela s'est passé il y

20 a longtemps. Je ne peux pas me souvenir maintenant de tous ces noms, mais

21 par exemple, Tolaj, un policier chargé de la circulation, il est parti en

22 Serbie et il a atteint sa retraite en travaillant à Belgrade. Ce n'était

23 pas le seul. Il y a eu d'autres, beaucoup d'autres qui ont atteint leur

24 retraite en travaillant dans des SUP partout en Serbie.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais ils travaillaient au Kosovo

26 jusqu'en juin 1999; c'est bien le cas ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Après cela, ils ont quitté le Kosovo ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils se sont retirés avec nous.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. C'est un exemple. Avez-vous

3 d'autres exemples à nous citer ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà, j'ai oublié les noms, il y en a

5 beaucoup, vraiment. Mais dans tous les SUP il y avait certains des

6 représentants de la minorité albanaise, de Gorani qui sont d'appartenance

7 religieuse islamique, des Musulmans. Par exemple, il y en avait un Mujo

8 Kujovic, il est parti à la retraite du SUP de Belgrade, donc il était

9 Musulman. Ensuite il y avait un grand nombre --

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pour ce qui est de cet Albanais ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Ismet Tolaj était Albanais et ce précédent que

12 j'ai mentionné était Musulman.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous pose des questions pour ce qui

14 est des Albanais du Kosovo. Vous avez cité un nom. Pouvez-vous nous donner

15 d'autres noms ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Ceux que je fréquentais et qui travaillaient

17 avec moi, je ne connais pas leurs noms. Je les rencontrais là-bas.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

19 Maître Lukic, continuez.

20 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] J'ai une question à vous poser. Vous

21 avez dit qu'il y en avait qui étaient partis à la retraite. Lorsque vous

22 dites que les gens ont quitté leurs travaux, est-ce que cela veut dire

23 qu'ils se sont absentés de leurs travaux ou ils ont démissionné ? Et quand

24 vous parlez de retraite, est-ce que cela veut dire qu'ils étaient partis à

25 la retraite une fois donc acquérir les conditions, l'âge, par exemple, pour

26 y partir. Pouvez-vous clarifier ça ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Par exemple, l'un des policiers qui,

28 après le premier conflit à Likosane a été directement engagé, il était un

Page 23712

1 très bon policier, mais je ne me souviens pas de son nom. Peut-être que

2 dans les documents vous pouvez y retrouver son nom. Il est parti pour la

3 Suisse pour éviter la pression de la part de son peuple, parce que les

4 membres de sa famille, ses frères y travaillaient. Qerim Qshishku qui était

5 adjoint au commandant, il était inspecteur pendant plusieurs années, il

6 était un inspecteur expérimenté. En 1999, lorsqu'on le menaçait de lui

7 d'anéantir toute sa famille, on a essayé de le tuer. Donc il n'a dit

8 personne au moment où il est parti. Tout simplement il est parti dans une

9 direction inconnue, pour ainsi dire. Il y en avait qui ont quitté, par

10 exemple, Medo Agovic, il s'agissait d'un Musulman de Vito [phon] de Melica

11 près de Pec. D'ailleurs il était mon policier dans la base qui, pendant

12 cette période-là, puisque sa famille était à Pec, encourait des risques. Il

13 m'a dit : Je n'ose plus rester dans le service.

14 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Je m'excuse, je ne vous ai pas

15 demandé de me dire des raisons pour lesquelles ils étaient partis. Ce que

16 j'aimerais savoir c'est quelle était la façon dont ils quittaient cet

17 endroit, est-ce qu'ils ont démissionné sans avoir demandé la permission

18 pour cela ou est-ce qu'ils étaient partis à la retraite au moment où l'âge

19 leur permettait de partir à la retraite ou pas ? C'était ma question.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai compris votre question. Ceux qui sont

21 partis ne disaient à personne qu'ils allaient partir. Nous étions très

22 tolérants parce que nous leur permettions tout, parce que nous pensions

23 qu'ils retournaient, mais après avoir appris qu'ils étaient partis à

24 l'étranger, donc --

25 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] J'ai compris cela.

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Et ceux qui étaient partis à la retraite, il

27 s'agit du départ à la retraite une fois les conditions requises par la loi

28 réunies, donc il n'y a aucun cas, pour autant que j'en sache, où quelqu'un

Page 23713

1 serait parti à la retraite sans que les conditions requises par la loi ne

2 soient réunies ou d'une autre façon.

3 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Merci.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Lukic, vous pouvez poursuivre.

5 M. LUKIC : [interprétation]

6 Q. Monsieur Damjanac, je répète tout ce que vous avez dit en s'appuyant

7 sur votre expérience et sur vos connaissances. Vous n'avez répondu qu'à

8 deux de mes questions et si on continue ainsi vous allez répondre à quatre

9 de mes questions, après quoi nous allons devoir nous arrêter. Concentrez-

10 vous sur mes questions, s'il vous plaît, parce qu'il n'est pas possible de

11 continuer de cette façon. Le programme de travail de cette Chambre, de ce

12 Tribunal ne nous permet pas cela. Pouvez-vous continuer à répondre à mes

13 questions la façon que j'ai proposée ?

14 R. Oui.

15 Q. Vous nous avez dit que vous êtes né à Glogovac. Glogovac se trouve dans

16 quelle région ?

17 R. La région de Drenica. Il faut que je vous dise en quelques phrases que

18 la région de Drenica est mentionnée dans des documents écrits. Avant

19 l'arrivée des Ottomans, des conquérants ottomans sur le territoire du

20 Kosovo-Metohija, il y avait un monarque Vuk Brankovic qui a régné dans

21 cette région. Il est né à Trstenik qui se trouve à 5 kilomètres de

22 l'endroit où je suis né --

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je dois intervenir à ce moment-là,

24 parce que les règles qui s'appliquent ici sont très claires. Je ne sais pas

25 quelle est votre expérience pour ce qui est du fonctionnement des tribunaux

26 dans votre pays, mais devant cette Chambre vous devez répondre à des

27 questions qu'on vous pose. Une question simple vous a été posée, à savoir

28 dans quelle région se trouve Glogovac. Vous avez répondu en utilisant trois

Page 23714

1 mots. Glogovac se trouve dans la région de Drenica.

2 Me Lukic va vous poser sa question suivante.

3 Maître Lukic, poursuivez.

4 M. LUKIC : [interprétation]

5 Q. En trois ou quatre phrases, dites-nous de quel moment dans l'histoire

6 plus proche, des problèmes sont survenus dans cette région et qui combat

7 qui ?

8 R. La région de Drenica ou le district de Drenica, après la Deuxième

9 Guerre mondiale, le centre administratif de Drenica après la Deuxième

10 Guerre mondiale englobait Srbica et Glogovac. C'est le territoire actuel de

11 Srbica et de Glogovac. Il s'agit donc du centre de la région de Drenica.

12 Depuis la Deuxième Guerre mondiale jusqu'à l'année 1990 à Glogovac et à

13 Srbica, on peut dire qu'aux fonctions les plus élevées au sein de la

14 municipalité et au sein du district, il n'y avait que des Albanais et leurs

15 adjoints étaient Serbes. De la même façon, j'aimerais brièvement vous

16 parler de ce point. On ne peut pas considérer de façon isolée la

17 municipalité de Glogovac et la municipalité de Srbica, parce qu'au peuple

18 serbe, au peuple albanais, cela ne représente qu'une seule entité. Je vais

19 vous donner un exemple parlant.

20 Après la Deuxième Guerre mondiale, le premier président, Bajram

21 Trnavac, qui était le président du district de Drenica --

22 Q. Monsieur Damjanac, on ne peut pas continuer ainsi. Pourquoi le

23 commandant dans le OUP Glogovac a été remplacé ?

24 R. Dû à des attaques terroristes fréquentes contre les citoyens et contre

25 les organes d'Etat à Glogovac. Déjà en 1970 il n'y avait plus de commandant

26 dans le OUP de Glogovac. Il y avait la pénurie de commandants, de gens

27 responsables dans ce OUP. La municipalité de Glogovac englobe 37 villages

28 où il y a plus de 50 % Albanais de souche et il y a 27 Serbes enregistrés

Page 23715

1 qui y vivaient, qui vivaient sur le territoire de la municipalité de

2 Glogovac. Après 1995, il y avait une action terroriste de la soldatesque

3 croate qui s'appelait Oluja, après quoi 45 familles serbes ont quitté ce

4 territoire pour trouver un refuge dans des baraques des ouvriers -- dans

5 des cabanes des ouvriers --

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Lukic, vous pouvez attirer mon

7 attention sur cela et sur ce témoignage, mais votre question était :

8 Pourquoi les responsables dans le OUP Glogovac ont été remplacés ?

9 M. LUKIC : [interprétation]

10 Q. En 1997, pourquoi êtes-vous venu dans le OUP de Glogovac ?

11 R. En mars 1997, dans l'enceinte du poste de police de Glogovac on a

12 essayé de tuer "komandir" Svetozar Barjaktarvic, et il y avait des attaques

13 plus fréquentes contre le poste de police ou OUP de Glogovac. Déjà le

14 "komandir" de ce OUP, ses adjoints et ses policiers étaient exhaustés

15 [phon], et par écrit ils ont demandé qu'ils soient remplacés à ce poste de

16 police.

17 Q. Merci. Ils ont été remplacés par qui ?

18 R. Pour ce qui est du "komandir" du poste de police il y avait un nouveau

19 "komandir" expérimenté, plus âgé, Radovan Lakusic qui a travaillé dans

20 presque tous les postes de police à Pristina. Il était "komandir" de tous

21 les postes de police à Pristina. Après lui - et puisque je suis né à 1

22 kilomètre par rapport au poste de police de Glogovac et du OUP de Glogovac,

23 les responsables du SUP de Pristina m'ont donc envoyé dans cette région,

24 parce qu'ils ont estimé que moi j'étais capable de soutenir tout cela.

25 Q. En 1997, est-ce qu'il y avait des attaques contre les Albanais ?

26 Répondez brièvement, s'il vous plaît.

27 R. Oui, il y en avait beaucoup.

28 Q. Dites-nous tout simplement les noms des personnes qui étaient

Page 23716

1 impliquées. Dites-nous quelque chose sur ces attaques, brièvement.

2 R. Il a été enregistré que presque tous les jours ou un jour sur deux il y

3 avait des cas de pillage de véhicules à moteur, des armes. Il y avait des

4 cas où on attaquait les mœurs des gens sur le territoire de Glogovac parce

5 que c'était un milieu patriarcal. Donc je ne peux pas vous donner des noms

6 sans avoir des documents, parce que je ne veux pas commettre des erreurs en

7 mentionnant des noms qui ne sont pas des noms exacts.

8 Q. Très bien.

9 M. LUKIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher 6D1114 dans le

10 système du prétoire électronique.

11 Q. Dans votre classeur, vous pouvez retrouver ce document. Est-ce qu'on

12 peut afficher la première page de ce document, 6D1114, s'il vous plaît. Ce

13 document n'est pas traduit. Ce qui m'intéresse c'est le nom de la personne

14 indiquée ici, et pouvez-vous me dire si vous vous souvenez de cette attaque

15 ?

16 R. Oui -- je m'excuse. Compte tenu du fait que dans la stratégie de l'UCK

17 était de liquider tout d'abord toutes les personnes d'appartenance ethnique

18 albanaise qui travaillaient dans des institutions d'Etat, parce qu'ils les

19 ont traités de collaborateurs de nos services Par exemple, ici il est

20 mentionné Muja Sejdi, né en 1946, employé de l'entreprise forestière Sume

21 [phon] de la Serbie, département de Glogovac. Je me souviens très bien de

22 ce cas. Il a été tué le 12 janvier, dans la matinée du 12 janvier sur la

23 route villageoise tout près de sa maison familiale, au village de Gradica,

24 municipalité de Glogovac.

25 Q. Très bien. Le quatrième paragraphe, pouvez-vous nous dire de qu'il est

26 question dans ce quatrième paragraphe ?

27 R. [aucune interprétation]

28 Q. Il s'agit de la ligne 4.

Page 23717

1 R. Mustafa Kurtaj, je voudrais mentionner qu'il avait 12 enfants. Mustafa

2 Kurtaj est né en 1971, il travaillait au PTT de la Serbie, dans la

3 municipalité de Glogovac, on se connaissait très bien. Il a été tué au

4 village de Gornje Obrinje, dans son village natal, à l'arrêt de bus. Il a

5 été tué par un groupe de l'UCK qui l'a abordé, et à la vue de pas mal de

6 personnes qui ont fui la scène, ils l'ont criblé de balles.

7 Q. Merci.

8 M. LUKIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher maintenant 6D1108.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant de passer au document suivant,

10 saviez-vous, connaissiez-vous ce village de Gornje Obrinje ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] La plupart des ou presque tous les villages

12 sur le territoire de la municipalité de Glogovac m'étaient connus. Je dois

13 souligner que non seulement je suis né sur ce territoire, mais en tant

14 qu'inspecteur dans le service pour combattre les infractions pénales dans

15 le domaine d'économie, j'ai travaillé le plus de temps sur ce territoire et

16 je connaissais en personne beaucoup de familles qui vivaient dans cette

17 région, qui étaient les citoyens dévoués. Bien sûr, je connaissais beaucoup

18 de personnes qui étaient nos ennemis.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Lukic, vous pouvez poursuivre

20 M. LUKIC : [interprétation]

21 Q. Le document 6D1108, s'il vous plaît retrouvez-le dans votre classeur.

22 L'avez-vous retrouvé ?

23 R. Oui.

24 Q. Regardez les photos 4, 5 et 6.

25 R. Oui, je les vois.

26 Q. Par rapport à quelle attaque ces photos de ces membres de la police

27 sont montrées ici ?

28 R. Je me souviens de cet accident tragique. Je me suis rendu sur place et

Page 23718

1 j'étais présent sur le terrain pendant deux jours et deux nuits. Ce jour-

2 là, à savoir le 10 janvier -- je m'excuse, juste un instant, c'était le 28

3 février 1998. Dans la matinée de ce jour-là, j'aimerais vous expliquer un

4 peu plus la situation. Une patrouille de police s'est rendue sur le terrain

5 pour remettre une convocation judiciaire à Likosane. Ils sont tombés dans

6 une embuscade et ils ont demandé de l'aide. Il s'agissait d'un samedi - je

7 pense qu'il s'agissait d'un samedi - et le véhicule Niva qui était le plus

8 proche tout près de Vasiljevo est tombé dans une embuscade à Mahala Djelji.

9 A 3 mètres de distance, ils les ont criblés de balles dans ce véhicule de

10 type Niva, ils ont été tués. A ce moment-là, Miroslav Vukovic, c'est la

11 photo 5, Miroslav Vukovic de Pancevo, il était membre de l'unité qui est

12 venue à notre aide de Pancevo. Ensuite la photo numéro 5 --

13 Q. Il faut que la quatrième page soit affichée sur l'écran.

14 R. Dans mon classeur, dans le document je peux voir la photo de Miroslav

15 Vukovic de Pancevo.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il est nécessaire de savoir

17 plus sur cet incident ? Donc il y avait une embuscade et il y avait des

18 morts.

19 M. LUKIC : [interprétation]

20 Q. Regardons maintenant la page 5, paragraphe 1. Qui est mentionné là ?

21 R. Goran Radojcic. Je pense que je les ai sortis du véhicule, de cette

22 Niva, parce qu'à ce moment-là l'attaque ouverte contre la police, l'armée

23 et les institutions d'Etat a commencé, tout ce qui bougeait et qui

24 appartenait à la Serbie. Donc ce jour-là les terroristes ont commencé

25 ouvertement à nous attaquer. Goran Radojcic de Pancevo, il avait 20 ans et

26 Miroslav Vukovic, ils ont été tués dans ce véhicule, et grâce à Dieu - je

27 ne sais pas de quel paragraphe il s'agit où on peut retrouver Pavle

28 Damjanovic et Matajic [phon] - et encore deux autres de mes collègues qui

Page 23719

1 se trouvaient là-bas. Je ne vois pas leurs photos ici. Pouvez-vous m'aider

2 ?

3 Q. On va parler de cela plus tard.

4 R. Mais il faut que je les mentionne ces deux autres. Donc ils sont restés

5 en vie. Pavle Damjanovic a été blessé et il est tombé dans le canal et

6 Matajic, les Siptar ont pensé qu'il avait été tué, ils l'ont fouillé, ils

7 lui ont pris le fusil automatique et ils sont repartis. Au moment où je

8 suis arrivé, parce qu'on m'a informé par la communication radio que cela

9 s'est passé, je sais qu'il s'agissait du week-end, je suis arrivé avec un

10 groupe de mes policiers, l'ambulance est arrivée également et je dis, voilà

11 encore une fois qu'il s'agissait des jeunes hommes d'une vingtaine

12 d'années. Je les ai sortis tous de ce véhicule et pendant que je les

13 sortais du véhicule, les terroristes ont commencé à tirer de toutes parts.

14 Ils ont été commandés par Adem Jashari et nous avons dû demander de l'aide

15 des unités spéciales, qui étaient arrivées sur place dans quelques heures

16 avant la tombée de la nuit. Ces unités sont arrivées de Pristina jusqu'à

17 Likosane et dans le conflit avec ces bandes terroristes, deux membres des

18 unités spéciales ont été tués, Milan Jovanovic. En lisant cela dans le

19 document, c'est la quatrième photo et Radoica Ivanovic, c'est la sixième

20 photo dans le document. C'est la pièce 1108 dans le classeur, n'est-ce pas

21 ? Je ne sais pas quelle est la pièce affichée sur l'écran.

22 Q. Merci. Dans 6D1038, la page première, le troisième paragraphe. Ces deux

23 personnes blessées sont mentionnées, mais il ne faut pas qu'on affiche ce

24 document, vous les avez mentionnées. Je dis cela uniquement aux fins du

25 compte rendu. Pour ce qui est de ces quatre blessés et deux tués, la

26 référence se trouve dans la pièce à conviction de l'Accusation P437. Cela

27 non plus ne sera pas affiché sur l'écran. Encore une fois, est-ce qu'on

28 peut afficher 6D1114, la première page, l'avant-dernier paragraphe.

Page 23720

1 Connaissez-vous cette personne et étiez-vous au courant de cet incident ?

2 R. Je connais la personne en question avant cet incident tragique et

3 meurtrier. Il s'agit de Xhemal Krasniqi, né en 1940 à Klina. Il a été tué

4 au village de Grobor [phon], municipalité de Glogovac.

5 Q. Juste un instant, il faut qu'il soit consigné au compte rendu l'avant-

6 dernier paragraphe et non pas le premier paragraphe.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'on peut d'abord afficher ce

8 paragraphe. Il faut qu'on fasse défiler la page un peu plus vers le bas.

9 M. LUKIC : [interprétation] Nous avons besoin de la première page de

10 l'avant-dernier paragraphe sur la première page du document. C'est le

11 paragraphe dont nous avons besoin. C'est bien.

12 Q. Vous pouvez continuer, Monsieur Damjanac.

13 R. Compte tenu du fait que j'ai été appelé par la patrouille de police, je

14 me suis rendu sur les lieux et j'ai été présent, parce qu'il s'agissait des

15 attaques terroristes ouvertes, du début de ces attaques. Et je peux vous

16 dire qu'à l'époque j'étais une personne expérimentée et j'avais beaucoup

17 d'expérience, mais je n'avais jamais vu de cadavres autant massacrés que

18 c'était dans le cas de Xhemal Krasniqi.

19 Q. Quand c'était ?

20 R. Juste un instant.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'était en quelle année ?

22 M. LUKIC : [interprétation]

23 Q. [aucune interprétation]

24 R. Cela est arrivé au début de l'année 1998 au mois de janvier.

25 M. LUKIC : [interprétation]

26 Q. En janvier, les deux premiers sont arrivés --

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'était pas en avril ?

28 M. LUKIC : [interprétation]

Page 23721

1 Q. Xhemal Krasniqi, il a été tué quand ?

2 R. Ici on ne voit pas la date du meurtre.

3 Q. C'est dans la deuxième ligne, au moins son corps a été retrouvé à cette

4 date-là.

5 R. Je ne vois pas la date, il faut que je regarde à l'écran pour la voir -

6 - oui, c'était le 27 avril. Oui, mais je ne vois pas très bien même avec

7 mes lunettes, je ne vois pas très bien. Ça se rétracte sur l'écran. Je

8 m'excuse, c'était le 27 avril vers

9 11 heures.

10 Q. Le cadavre a été retrouvé à cette heure-là ?

11 R. Oui.

12 Q. Combien de jours le cadavre gisait-il là-bas ?

13 R. C'est sur le terrain entre Trstenik et Grobar et c'était pour plusieurs

14 jours que le cadavre se trouvait là-bas. Il a été jeté dans un fossé, ses

15 intestins étaient déjà sortis et les oiseaux prédateurs ont commencé à

16 picorer ses intestins. C'était une scène terrible.

17 Q. Est-ce qu'on peut afficher sur nos écrans 6D1113.

18 Vous pouvez également retrouver ce document dans votre classeur. Il s'agit

19 de la première page du document.

20 Est-ce qu'Ivan Bulatovic était votre employé ?

21 R. Ivan Bulatovic était mon employé.

22 Q. Qu'est-ce que vous pouvez nous dire à propos de son meurtre ?

23 R. Il était policier. Ivan Bulotovic était policier. Dans la même unité

24 organisationnelle de la police, travaillait son épouse en tant que femme de

25 ménage. Ils avaient trois enfants mineurs et leur résidence permanente

26 était justement à Glogovac. Des premières noces, il avait une fille de 18

27 ans --

28 Q. Concentrez-vous sur son meurtre.

Page 23722

1 R. Oui, mais j'ai dû dire la raison pour laquelle il a été kidnappé et

2 pourquoi il a été envoyé à Pec. Il a été envoyé à Pec, parce qu'il

3 s'agissait de l'enterrement de sa fille, de sa fille aînée. Je me souviens

4 de cet incident très bien, parce que j'ai été ému en tant qu'homme et en

5 tant que son collègue. Ici, on peut voir qu'il avait trois enfants mineurs

6 et Nikoleta [phon], sa fille, est née en 1991 et les obsèques allaient

7 avoir lieu dans son village natal qui se trouve dans la banlieue de Pec. Il

8 s'est présenté à moi pour me demander qu'il parte avec son épouse et ses

9 enfants aux obsèques et je lui ai dit que les terroristes siptar, sur la

10 route Pec-Pristina, se trouvaient sur la route et ont coupé la route et que

11 c'était risqué de voyager en train mais jusqu'alors il n'y avait pas de cas

12 d'attaques. Pour être bref, il est parti pour assister à ces obsèques avec

13 son épouse, avec ses enfants mineurs.

14 A bord du train, pour des raisons de sécurité, il n'y avait pas d'escorte

15 serbe. Les Siptar qui s'y trouvaient de façon illégale l'ont remarqué et

16 ils sont entrés dans le compartiment et lui ont ordonné de sortir. Il a

17 fait cela pour protéger son épouse et ses enfants. Ils l'ont fait descendre

18 du train à Banjica au premier arrêt, son épouse et ses enfants et les

19 autres voyageurs ont assisté au passage à tabac de cette personne. Ils

20 l'ont battu cruellement, et si vous insistez, je peux vous relater comment

21 cela s'est passé via Trnce [phon] et Obrinje [phon]. Ils les ont fait venir

22 à Likovac en prison, où malheureusement ils ont continué à le battre. Ils

23 l'ont mis dans une niche pour les chiens. Ils l'ont mis dans cette niche.

24 Il a été enchaîné comme un chien et quiconque passait à côté de cette

25 niche, il devait aboyer sur ces personnes. Malheureusement, il a continué à

26 aboyer jusqu'au moment où avec presque tous les prisonniers ou toutes les

27 personnes kidnappées il ne soit liquidé. Mais jusqu'au jour d'aujourd'hui,

28 il est porté personne disparue.

Page 23723

1 Q. Merci. Tomislav Fatic travaillait-il également sous vos ordres --

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant de parler de cela, j'aimerais

3 vous demander, Monsieur, qui est la source de vos renseignements au sujet

4 des mauvais traitements subis par Ivan Bulatovic à Likovac ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais vous l'expliquer.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dites-moi simplement qui est votre

7 source.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous me le permettez, c'est la même chose.

9 Il y avait cette Ruzica Dobric qui était emprisonnée, elle vient d'un

10 village qui est dans les environs. Si vous voulez que je vous explique tout

11 ce qui s'est passé, je vais vous l'expliquer.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, je voudrais que ce soit clair

13 pour moi, c'est tout. Vous avez dit tous les autres détenus ont été

14 liquidés, mais il apparaît que ce n'est pas le cas. J'essaie simplement

15 d'établir les faits. Nous parlons de faits ici et nous essayons d'être le

16 plus précis possible. Vous dites que les survivants de Lipovac sont la

17 source de vos informations; c'est bien cela ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Seulement des femmes âgées et des femmes du

19 village, des habitantes du village au milieu des Siptar. C'étaient de

20 vieilles femmes et les voisins albanais leur ont sauvé la vie parce que

21 c'étaient des gens très bien. Ils leur ont dit : Nous savons bien tout ce

22 que vous avez fait pour nous, donc nous… Ils ont donné leur "Besa" en

23 langue albanaise, ce qui signifie leur parole de les protéger. C'est de

24 cette façon que ces vieilles femmes ont sauvé leur tête.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

26 Maître Lukic à vous.

27 M. LUKIC : [interprétation] Merci.

28 Q. Je vous interrogeais au sujet de Tomislav Fatic en vous demandant s'il

Page 23724

1 travaillait pour vous. Qu'a-t-il vécu ?

2 R. Pouvez-vous me dire où est sa photo ?

3 Q. Elle ne figure pas dans le document.

4 R. Tomislav Fatic était également un homme qui travaillait pour moi. Il a

5 aussi été liquidé au mois de mai. Je ne me souviens pas de la date exacte,

6 mais elle figure dans les documents. Je ne voudrais pas supposer quel jour

7 il a été tué, mais en tout cas je sais que c'était au mois de mai, que

8 c'était un dimanche.

9 Q. Mais de quelle année ?

10 R. 1998, 1998, excusez-moi. C'était le mois de mai 1998, c'était un jour

11 férié, encore une fois, un dimanche. Du poste de police, on m'a téléphoné

12 pour me dire qu'un attentat terroriste avait eu lieu contre le commandant

13 en second, Nebojsa Trajkovic, et qu'on avait besoin de toute l'aide

14 possible, car on essayait d'exfiltrer les victimes et qu'entre temps dans

15 le village de Poklet [phon], Tomislav Fatic avait trouvé la mort. Cette

16 époque était pour moi une période de repos relatif, et cetera.

17 Q. Que s'est-il passé après cela ?

18 R. Après cela, ils ont essayé d'attaquer le poste de police, ils ont

19 pilonné et quand les policiers sont arrivés, quand je suis arrivé, c'est-à-

20 dire, assez tard, ils se sont retirés vers Vasiljevo. Vasiljevo, c'est un

21 hameau qui se trouve sur la colline si on part de l'endroit où a eu lieu

22 l'attentat et c'est là que les forces siptar avaient un fortin.

23 Q. Document 6D614, page 45 à présent, je vous prie.

24 R. Vous avez dit 6D --

25 Q. 6D614, page 45. C'est un document qui comporte beaucoup de pages et

26 nous avons besoin de la page 45, numéros 25 et 26. Ce sont ces deux

27 rubriques qui feront l'objet de mes questions. Arrivait-il que vous

28 découvriez des cadavres que vous étiez incapable d'identifier ?

Page 23725

1 R. Oui, tout à fait. Dans ce cas précis, il est tout à fait apparent que

2 les terroristes qui agissaient à l'époque utilisaient des personnes qui

3 venaient de la région de Glogovac, mais aussi d'autres régions. Après les

4 avoir enlevés ailleurs, ils les amenaient dans le secteur de Glogovac, et

5 les tuaient dans cette région en laissant leurs cadavres sur les grandes

6 routes ou aux carrefours importants pour intimider les autres habitants, et

7 ils infligeaient à leurs victimes la mort la plus horrible possible.

8 Q. Quelle est la date ici ?

9 R. 30 septembre 1998, dans le village de Glogovac où le cadavre a été

10 découvert avant d'être envoyé à l'institut de Médecine légale de Pristina

11 pour autopsie. L'identification n'a pas pu être réalisée.

12 Q. Même document, page 626 à présent.

13 R. [aucune interprétation]

14 Q. Document 6D614. Il nous faut le point 265. Vous rappelez-vous cet

15 attentat et pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit exactement ?

16 R. Excusez-moi, je ne m'y retrouve pas vraiment.

17 Q. Vous l'avez à l'écran, essayez de lire ce qui est présenté à l'écran.

18 Le point 265.

19 R. Oui.

20 Q. Quelle est la période concernée et de quoi s'agit-il exactement ?

21 R. Il s'agit de la journée du 17 octobre 1998. Je pourrais vous donner des

22 explications un peu plus longues. C'était une période qui faisait suite à

23 la libération de Malisevo des forces terroristes qui tenaient cette

24 localité depuis le printemps de la même année. Dans cette période, un poste

25 de contrôle a été créé près d'Orlate, qui était tenu par des réservistes de

26 la police car nous savons bien que le nombre des policiers d'active était

27 insuffisant pour tenir tout ce secteur qui était très vaste. Le nombre des

28 policiers, en revanche, était relativement limité. Donc il s'agissait

Page 23726

1 exclusivement de policiers de réserve qui n'étaient pas suffisamment formés

2 et n'étaient pas prêts pour un événement de ce genre.

3 Q. Mais il y a eu un attentat et que s'est-il passé ?

4 R. Le soir en question un groupe de terroristes s'est rapproché d'eux, ils

5 se trouvaient dans une pièce d'une maison. Les terroristes ont fait

6 irruption à l'intérieur et les ont criblés de balles de toutes parts. Etant

7 donné les circonstances, le hasard a voulu que trois hommes aient survécu,

8 les autres ayant été tués. Tout cela a été consigné dans des documents

9 après enquête sur les lieux par le juge d'instruction du tribunal régional

10 de Pristina. Mais ce n'est pas le seul cas de ce genre.

11 Q. Je vous remercie. Nous allons passer maintenant au document 6D586, page

12 13, point 17 en version anglaise et en version serbe, page 17, point 17. Je

13 vous demande encore une fois de nous dire quelle est la période concernée

14 et ce qui s'est passé.

15 R. Pourriez-vous me répéter votre question ?

16 Q. Le document, vous l'avez affiché à l'écran en ce moment.

17 R. Quel est son numéro ?

18 Q. Il nous faut la page 17 de la version serbe et la page 13 en version

19 anglaise car j'ai utilisé la version anglaise. Le point 17, c'est celui qui

20 nous intéresse.

21 R. Bien. D'accord.

22 Q. Quelle est la période et que s'est-il passé ?

23 R. Le 11 novembre 1998, un attentat - et c'est quelque chose qui se

24 passait très rarement à ce moment-là dans la région de Glogovac - donc à

25 l'aide d'armes d'infanterie de toutes sortes, très reconnaissables, le

26 poste de police a été attaqué dans le cadre d'un attentat et, notamment la

27 cantine, et cetera. Donc cet événement, si vous me permettez d'en parler de

28 façon très concrète, bien, je rappelle que l'attentat a eu lieu dans la

Page 23727

1 matinée et que c'était un acte de vengeance de la part des terroristes

2 siptar. Car sur la route Pristina-Pec, dans la localité de Negrovac, en

3 face de la maison de Jakup Krasniqi, qui était à l'époque porte-parole de

4 l'UCK et commandant dans la région de Malisevo de l'UCK, donc durant cette

5 attaque, un terroriste très connu parmi les Siptar avaient été tué. Il

6 était arrivé bien entraîné de Suisse. Son nom figure dans les documents.

7 Son identification a été confirmée, mais malheureusement je ne me rappelle

8 pas à l'instant même son nom. Quoi qu'il en soit son cadavre avait été

9 retrouvé un peu plus tôt. Dans l'après-midi, nous sommes rentrés de nos

10 constatations sur le terrain aux environs de 3 heures, les gens ont quitté

11 leur équipement et sont partis déjeuner, et 30 à 50 terroristes ont ouvert

12 le feu de toutes parts en utilisant des lance-roquettes portables, des

13 Zolja, des Osa, des fusils automatiques de fabrication chinoise et des

14 mitraillettes. Plusieurs grenades à main ont été lancées et Zlavko Amidzic,

15 ainsi que Srdjan Stefanovic, ont été tués durant cet attentat. Des employés

16 des PTT de Glogovac ont également subi des blessures légères.

17 Q. Quels autres bâtiments ont été attaqués en dehors du bâtiment de l'OUP

18 de Glogovac ?

19 R. Non loin de là se trouvaient le bureau de poste et la gare ferroviaire.

20 Ces deux bâtiments ont été criblés de balles. Dans le bureau de poste, des

21 gens qui étaient en train de sécuriser le bâtiment ont été blessés, il

22 s'agit des frères Krstic, et la maison de Xhafer Qorri a été criblée de

23 balles. L'intention des terroristes était de tuer toute la famille. Nous

24 avons procédé à certaines vérifications et confirmé que le groupe

25 terroriste était venu du village de Vasiljevo.

26 Q. Quelle est l'appartenance ethnique de Xhafer Gorri ?

27 R. Je n'ai pas vérifié les détails personnels de chacun des policiers, car

28 je crois que les Juges de la Chambre les reconnaîtront par leurs noms.

Page 23728

1 C'était un Albanais, il a été tué. Par la suite, les deux autres personnes

2 dont j'ai prononcé le nom étaient Serbes. C'étaient des policiers de

3 réserve qui travaillaient pour le poste de Glogovac et qui avaient été

4 envoyés sur les lieux. Slavko Amidzic était un habitant de Glogovac, et sa

5 mère --

6 Q. Passons au document 6D1038, page 12, je vous prie. Quelques jours après

7 l'attaque, qui a été attaqué ?

8 R. Je vous demande un instant.

9 Q. Page 12, vous avez le document de la page 1 à 12 dans votre classeur.

10 Nous avons besoin du premier point de la page, mais ce n'est pas la bonne

11 page qui est affichée en ce moment. La page affichée est la page 13, et

12 nous avons besoin de la page 12, paragraphe 1.

13 Vous voyez ce premier paragraphe ?

14 R. Oui, oui, oui.

15 Q. Connaissez-vous ce cas ?

16 R. Oui, oui.

17 Q. Quelle est la période concernée ?

18 R. Le 17 novembre 1998, aux environs de 11 heures 20 dans le village de

19 Trstenik, municipalité de Glogovac, Dejan Krstic a été blessé. La situation

20 était la suivante : nous nous efforcions à ce moment-là d'envoyer des

21 patrouilles sur cette route, ce que nous appelions des patrouilles

22 renforcées, car cette zone de Trstenik et toute la route qui va de Glogovac

23 à Srbica était une zone névralgique.

24 Q. Est-ce que la Mission de vérification du Kosovo était présente sur le

25 terrain ?

26 R. Malheureusement, sa présence avait été interrompue, et après cet

27 événement- et c'est quelque chose que je me dois de dire - un représentant

28 de la Mission de vérification est venu me voir. Si je me souviens bien,

Page 23729

1 c'était un Allemand. Je crois me rappeler que son prénom était Gerhard,

2 mais je ne me rappelle vraiment pas de son nom de famille. En tout cas il

3 m'a dit que désormais il convenait d'éviter de circuler sur cette route.

4 Avant, c'était déjà le cas, mais il m'a dit que c'était plus

5 particulièrement le cas à partir de maintenant, car Ljustaku [phon], le

6 commandant de la zone de Drenica, avait proféré des menaces. Il avait dit

7 que quelles que soient les circonstances, tout déplacement des forces de

8 police sur cette route serait considéré comme un acte hostile et que eux

9 interviendraient pour neutraliser les policiers en question.

10 Q. Nous allons parler de cela en examinant des documents plus tard.

11 M. LUKIC : [interprétation] J'aimerais maintenant vous soumettre le

12 document 6D614, page 640, point 331.

13 Q. Vous l'avez trouvé ?

14 R. 6D614 ?

15 Q. Oui. Page 640, elle est affichée sur les écrans actuellement. Point

16 331. Quelle est la période concernée et que est-il passé exactement, si

17 vous pouvez nous l'expliquer ?

18 R. Il s'agit de la journée du 11 décembre 1998, date à laquelle un

19 attentat a été commis contre le bâtiment de l'OSCE devant la gare

20 ferroviaire de Glogovac sur un carrefour. Les forces terroristes ont donc

21 commis cet attentat, et Xhafer Qorri, commandant en second du poste de

22 police de Glogovac, a été tué, deux autres membres de la minorité ethnique

23 albanaise ayant été tués en même temps que lui. Car il convient de ne pas

24 oublier que Xhafer Qorri faisait partie de cette minorité albanaise.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce l'homme dont vous avez déjà

26 parlé précédemment ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, Xhafer Qorri. Oui, maintenant je

28 parle des détails de l'affaire.

Page 23730

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais l'orthographe au compte rendu

2 d'audience est différent. Je le fais remarquer, car il importe que nous

3 sachions qu'il s'agit bien de la même personne.

4 Veuillez poursuivre.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Xhafer Qorri était un policier d'active,

6 travailleur de grande valeur, et il a été tué ce jour-là dans les locaux de

7 l'OSCE, je le rappelle, ou plus précisément dans un lieu qui était d'une

8 importance centrale pour toute la municipalité de Glogovac, car c'était

9 l'endroit d'où était dispatché l'électricité pour la ville.

10 Q. Un instant, je vous prie. On voit OSCE à l'écran. Quelle est cette

11 organisation que vous parlez, qu'est l'EPS ?

12 R. L'EPS, comme je l'ai déjà dit, c'est une entreprise publique de

13 distribution d'électricité, "Elektroprevedasobiaj". C'est donc la société

14 d'électricité de Serbie qui avait un poste à Glogovac.

15 Q. En-dehors du policier qui a été tué --

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais il ne faut plus penser à l'OSCE ?

17 L'OSCE disparaît.

18 M. LUKIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'était simplement une erreur.

20 M. LUKIC : [interprétation] Oui.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

22 M. LUKIC : [interprétation]

23 Q. En dehors du policier, qui d'autre a été tué ?

24 R. Deux électriciens de l'EPS, deux Albanais de souche. C'était des

25 employés dont le travail était de très grande qualité. C'est grâce à eux

26 que nous avions tous de l'électricité pendant la période où il était encore

27 possible d'en disposer au OUP de Glogovac. Ce sont ces hommes qui

28 assuraient la maintenance de nos équipements, postes de radio, dispositifs

Page 23731

1 de chauffage, et ils garantissaient les mêmes services à tous les habitants

2 de Glogovac. Les terroristes n'appréciaient pas du tout cela, puisqu'ils

3 voulaient couper tout approvisionnement en électricité et autres produits

4 de nécessité pour la population de Glogovac dans toute la municipalité afin

5 que la vie leur soit rendue la plus difficile que possible.

6 Q. Je vous remercie. Passons maintenant au document 6D202, page 3, point

7 3, paragraphe 3 également.

8 Encore une fois, je vous demande quelle est la période concernée, quels

9 sont les détails de l'événement et si vous en avez eu connaissance ?

10 R. Je prends rapidement connaissance du texte.

11 Q. Si vous ne trouvez pas la copie papier, vous l'avez à l'écran, le

12 troisième paragraphe.

13 R. Si je vois bien ce qui est écrit ici, la date exacte ne figure pas,

14 mais cela s'est passé durant l'automne 1998. Je le sais. Le jour de

15 l'assassinat de Zvonko Bojanic ne figure pas dans ce texte, si je ne me

16 trompe. Oui, je vois.

17 Q. Avant que vous ne poursuiviez, nous n'avons pas la date ici, donc je

18 demande l'affichage du document 6D586, page 13, point 18 de la version

19 anglaise; et la page 17, point 18 de la version serbe. 6D586, par

20 conséquent.

21 R. Je l'ai, oui. Je l'ai trouvée. C'est plus complet. Si vous me le

22 permettez --

23 Q. Allez-y.

24 R. Puisque le défunt Zvonko Bojanic était quelqu'un que je connaissais

25 personnellement très bien - d'ailleurs j'aurais beaucoup de choses à dire à

26 son sujet - je vais essayer de parler de lui le plus brièvement possible.

27 Il a été tué le 18 décembre 1998, dans un endroit qui se trouve entre

28 Vasiljevo et Gornja Koretica, à Careva Cesma. C'est là qu'était stationné

Page 23732

1 un groupe de terroristes qui, tout simplement, ont enlevé Zvonko Bojanic

2 qui se trouvait chez lui à son domicile. Il avait souvent l'habitude de

3 travailler chez lui à la maison à manipuler diverses matières premières. Il

4 était le seul Serbe qui restait dans le secteur de Slatina, ça il importe

5 que je le souligne. Il était donc d'appartenance ethnique serbe et avait

6 été vice-président de la municipalité du Kosovo Polje.

7 Q. Le point 19 dans ce même document, toujours la même question, quelle

8 est la période concernée, vous rappelez-vous l'incident ?

9 R. Oui, malheureusement. Je connais très bien cet événement, car j'ai été

10 le premier à me trouver face au cadavre. La personne concernée a plus tard

11 été identifiée comme étant Branislav Skulic de Belgrade et non Sekulic,

12 comme on peut le lire dans ce document. Cela s'est passé en janvier 1999,

13 lorsque je suis parti de Pristina pour aller à Glogovac en voiture, et j'ai

14 croisé, je me suis heurté à un cadavre sur la route tout près de Carevo

15 Cesma, donc sur la route de Vasiljevo. Il avait été tué et jeté sur le

16 bitume, après quoi un camion était passé sur le corps lui écrasant le

17 crâne. La seule chose qui restait de lui, du crâne, c'était une bouillie de

18 cervelle qui s'était répandue. J'étais donc debout à cet endroit à côté de

19 mon véhicule et j'ai essayé d'obtenir de l'aide par radio. J'ai demandé

20 qu'une équipe d'enquêteurs se forme et vienne sur les lieux. Entre-temps,

21 une jeep du CICR est arrivée, suivie par une jeep de la Mission de

22 vérification du Kosovo. Je les ai suppliés de s'arrêter pour voir ce qui

23 était en train de se passer. Ils ont tout simplement ignoré ma demande et

24 ne se sont même pas arrêtés, ils ont simplement sorti de la route un moment

25 pour éviter le cadavre et ont poursuivi leur chemin vers Pristina. Voilà

26 quel est le prix d'une vie humaine serbe au Kosovo.

27 Q. Merci. Merci. A titre de référence, je tiens à dire que c'est le même

28 incident qui est mentionné au document 6D614, page 48, point 43.

Page 23733

1 Monsieur Damjanac, l'heure de la deuxième pause est arrivée.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Encore une fois, Monsieur Damjanac, il

3 va nous falloir suspendre l'audience pendant une demi- heure, je vous

4 prierais donc de suivre M. l'Huissier pour quitter le prétoire.

5 [Le témoin quitte la barre]

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous reprendrons nos débats à midi

7 cinquante, 1 heure moins 10.

8 --- L'audience est suspendue à 12 heures 20.

9 --- L'audience est reprise à 12 heures 50.

10 [Le témoin vient à la barre]

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Lukic.

12 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

13 Q. Monsieur, est-ce qu'on peut poursuivre ?

14 R. Oui.

15 Q. Bien. Je vous prie, le document 6D614, page 51. Si vous avez du mal à

16 trouver la page en question, et le point 58, vous pouvez également attendre

17 que le document soit affiché à l'écran. Pourriez-vous nous dire de nouveau

18 de quoi il s'agit, si vous vous souvenez de cet incident, de quelle date et

19 de quel endroit il s'agit là ?

20 R. Pourriez-vous répéter quelle est la page qu'il me faut retrouver ?

21 Q. Page 51. C'est la pièce 6D614. C'est affiché à l'écran maintenant, le

22 point 58.

23 M. LUKIC : [interprétation] En anglais, c'est la page 51 et non pas

24 30 comme c'est le cas maintenant.

25 Q. Monsieur le Témoin, vous pouvez déjà commencer à répondre à ma question

26 en attendant que le texte en anglais soit affiché.

27 R. Bien. Il s'agit donc du 20 janvier 1999. Où ? Sur la route Pristina-Pec

28 à proximité du village Orlate, municipalité de Glogovac, lorsque le cadavre

Page 23734

1 d'Ahmet Elshani a été découvert, Ahmet Elshani né en 1975 dans le village

2 de Banjica, la municipalité de Glogovac.

3 Q. Quelle est la nationalité de la victime ?

4 R. Il est Albanais, membre d'une tribu très puissante du Kosovo. Ils sont

5 tous originaires de Banjica. Il a été tué et son corps a été simplement

6 jeté sur la route Pristina-Pec à l'endroit où se trouve la bifurcation pour

7 le village d'Orlate. Comme on peut le voir dans la suite de ce paragraphe,

8 les membres de la Mission de l'OSCE se sont rendus sur les lieux. Son corps

9 a été transféré au centre de médecine légale à Pristina pour une abduction.

10 Q. Merci. Passons maintenant au document 6D110, page 27. Troisième

11 photographie.

12 R. Bien. Il s'agit ici de Milorad Mitic, décédé. C'était un de mes

13 policiers. Il a été tué le 27 février à Krivovo par un groupe terroriste de

14 Vasiljevo; cela a été établi. Ce groupe a été conduit par Rexhepi Betush.

15 Rexhepi Betush est arrivé depuis la Suisse déjà formé pour des activités

16 terroristes avec 30 autres terroristes entraînés et ils ont formé un groupe

17 indépendant qui faisait partie du Bataillon de Fehmi Lladrovci.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quel est le numéro du document ? Ce

19 que vous avez dit tout à l'heure semble ne pas être correct.

20 M. LUKIC : [interprétation] Il s'agit du document 6D1110.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

22 M. LUKIC : [interprétation] Oui. Maintenant, on a la page qu'il nous faut.

23 Q. Veuillez poursuivre, Monsieur le Témoin. Monsieur Damjanac, en dehors

24 de Milorad Mitic qui a été tué ce jour-là, y a-t-il eu des blessés ?

25 R. Oui, celui qui était le passager dans son véhicule, Ljubomir Denic. Ils

26 sont allés à Pristina chercher quelques affaires et on leur a tendu un

27 piège sur la route à côté d'une gorge. Ce véhicule qu'ils utilisaient

28 c'était un véhicule qui était blindé sur les côtés, mais le toit n'était

Page 23735

1 pas blindé et les terroristes le savaient bien. C'est pour ça qu'ils ont

2 visé le toit du véhicule. Ainsi, ils ont tué Milorad Mitic et gravement

3 blessé Ljubisa Denic.

4 Q. Merci. Bien. Nous avons le document P1106 où il est fait référence de

5 la personne qui a été tuée à cette occasion et de celle qui a été blessée.

6 Nous n'allons pas examiner ce document à présent. Passons maintenant au

7 document 6D614, page 634. Vous pouvez également attendre que la page en

8 question soit affichée à l'écran. Le paragraphe qui nous intéresse

9 maintenant c'est le paragraphe 303. Alors nous avons parlé jusqu'à

10 maintenant, en général, des incidents qui ont eu pour conséquences des

11 morts. Dites-nous maintenant, s'il vous plaît, s'il y a eu des incidents

12 sans victimes, où il n'y a eu que des personnes blessées.

13 R. S'agissant de ce paragraphe qui concerne de nouveau Xhafer Qorri, c'est

14 le paragraphe 303 qui nous intéresse, n'est-ce pas ?

15 Q. Oui.

16 R. Bien, ce n'est pas le seul incident de ce type. Je vous ai déjà dit

17 tout à l'heure qu'il y a eu plusieurs tentatives d'assassinat de Xhafer

18 Qorri, tout simplement parce qu'il travaillait en tant que policier pour

19 l'OUP de Glogovac. Mais ces tentatives ont échoué. Vous pouvez voir ici

20 que, par exemple - je vais examiner le document, parce que comme il y a eu

21 plusieurs tentatives d'assassinat, il faut que je voie quelles sont les

22 circonstances de cette attaque-ci. Voilà. On voit que sa maison a été

23 attaquée à lance-roquettes. On y voit également que sa femme était Serbe,

24 originaire de Prijepolje. D'après ce que j'en sais, ils avaient trois

25 enfants; deux filles et un fils. Ils ont essayé de toute manière imaginable

26 de l'éliminer. Vous voyez ici, ils utilisaient des lance-roquettes. Ils ont

27 tiré sur sa maison. C'était une petite maison qui n'avait qu'un rez-de-

28 chaussée. C'est la maison typique des personnes pauvres. Ce sont des

Page 23736

1 maisons qu'on voit typiquement au Kosovo et en Serbie dans cette couche

2 sociale. Vous voyez, l'intention était clairement de détruire sa famille

3 entière.

4 Q. Merci. Dans le journal de permanence du poste de police, avez-vous

5 enregistré les morts des officiers, des policiers membres de la PJP ?

6 R. Oui, parce qu'il y a eu plusieurs policiers qui ont été détachés auprès

7 de l'unité de la PJP, qui étaient donc à l'origine policiers travaillant

8 pour notre poste de police. Il y a également eu un autre qui a été inscrit

9 dans notre registre, mais bon, certains qui ont été tués dans la zone n'ont

10 pas été inscrits ici. Puis il y en a un autre également qui s'est fait tué

11 au bord de la zone de Glogovac, qui faisait partie d'autres centres de

12 police, d'autres secrétariats de l'intérieur.

13 Q. Bien. Y a-t-il eu des cas de pillage commis par des terroristes, ou des

14 vols avec l'usage de violence ?

15 R. Dès le début de 1998 il y a eu des pillages ou des vols avec l'usage de

16 force, de violence, commis par des Albanais, visant la population ou les

17 entreprises d'Etat ou d'autres institutions d'Etat. Par exemple, s'agissant

18 de l'usine Feronikel. Ils sont venus et en portant des armes, ils se sont

19 saisis des équipements de construction, des machines, des camions, en bref,

20 de l'équipement utilisé par la suite pour construire, creuser des tranchées

21 et construire les abris, et cetera. A proximité de Drenica, dans le village

22 de Krikovo, ils ont, par exemple, pris le bétail, les vaches, puis ils ont

23 pris les armes qu'avaient les gardiens qui sécurisaient la ferme. Ensuite,

24 du site de construction Gradin [phon], ils ont pris toutes les machines,

25 tout l'équipement de construction. Ils ont volé ce qu'avaient les gardiens

26 sur eux. Ils leur ont pris les armes également. Ce que je vous dis

27 maintenant, ce n'est peut-être pas suffisamment précis, mais vous pouvez

28 trouver des informations très précises dans les documents. Le fait est que

Page 23737

1 - et vous pouvez l'établir à partir de ce journal de permanence - qu'à

2 partir de 1997, les pillages, les vols à main armée ou avec l'usage de

3 violence ont été quotidiens.

4 M. LUKIC : [interprétation] Pour les besoins du compte rendu, j'indique

5 page 68, ligne 19, le témoin a dit "les Albanais," et non pas "par les

6 Albanais".

7 Q. Bien. Pourriez-vous nous dire maintenant si l'UCK avait le contrôle sur

8 une partie du territoire de la municipalité de Glogavac en 1998 ?

9 R. Malheureusement, étant donné la situation sur le terrain, l'UCK a,

10 pendant la période allant de mars 1998 jusqu'en juillet 1998, l'UCK a donc

11 eu sous son contrôle, avec des fluctuations en fonction de l'évolution des

12 événements sur le terrain, donc ils tenaient sous leur contrôle environ 90

13 % de la municipalité de Glogovac. Cela est devenu particulièrement clair

14 après la liquidation d'Adem Jashari, le 5 mars 1998, et c'est à partir de

15 cet incident-là que les incidents de nature terroriste ont connu une

16 escalation [phon]. Ils ont pris contrôle sur quasiment toutes les routes à

17 commencer par celle entre Srbica et Glogovac, puis les routes vers

18 Komorane, Turtrisce, Crnoljevo, le mont Crnoljevo, puis la route vers

19 Lipljan-Prizren. Puis à plusieurs reprises ils se sont emparés de la route

20 Pristina-Pec. Ils commettaient des actes de sabotage au quotidien afin

21 d'empêcher la circulation sur les axes que je viens d'énumérer, et

22 d'autres. Ils effectuaient des attaques sur les forces de la police et de

23 l'armée. Ils tuaient des civils. On peut voir tout ça dans le journal du

24 poste de la police. Puis en profondeur du territoire de la municipalité,

25 ils ont fortifié leurs positions, creusé des tranchées. Ils ont engagé la

26 population civile pour qu'elle creuse ces tranchées et fortifie leurs

27 positions. Ils avaient établi des points de contrôle quasiment sur toutes

28 les routes, ce qui faisait que durant cette période, et à cause de nos

Page 23738

1 effectifs insuffisants, donc ils étaient malheureusement les maîtres sur le

2 territoire de la municipalité de Glogovac.

3 Q. Quels étaient vos effectifs à l'OUP de Glogovac ?

4 R. Malheureusement, qu'entre 25 et 30 policiers. C'était nos effectifs,

5 les policiers en uniforme. Vraiment, nos effectifs étaient largement

6 insuffisants.

7 Q. Les routes ont-elles été débloquées ?

8 R. Il y a des gens qui ont été tués. Il y a eu des incidents de pillage,

9 de vols à main armée, de vols avec usage de violence, des attaques sur les

10 institutions d'Etat, des attaques au quotidien contre tous qui

11 représentaient l'Etat de Serbie, et cela a conduit en juillet à une action

12 antiterroriste qui a été lancée, une action conjointe menée par l'armée et

13 la police. Et c'est pour la première fois entre mi-juillet et septembre que

14 les routes ont été débloquées et que tous les points forts tenus par les

15 terroristes siptar en profondeur derrière Drenica ont été libérés et que le

16 territoire a été libéré.

17 Je confirme en toute responsabilité que suite à cela la paix a enfin

18 commencé à régner parmi la plus grande partie de la population albanaise.

19 On a pu sentir à ce moment-là des relations amicales se rétablir entre

20 cette partie-là de la population albanaise et nous, les policiers, parce

21 qu'ils se sont mis à rendre leurs armes de leur initiative, les armes que

22 l'UCK leur avait données auparavant pour leur usage personnel, la

23 protection de leurs maisons.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Lukic, page 69, ligne 23,

25 est-ce que c'est bien ce que le témoin a dit, le mont de Crnoljevo ?

26 M. LUKIC : [interprétation]

27 Q. Avez-vous dit la montagne de Crnoljevo ?

28 R. Oui, j'ai dit jusqu'à la montagne de Crnoljevo ou jusqu'à la chaîne

Page 23739

1 montagneuse Crnoljevo. Si vous me permettez, la région de Drenica est

2 entourée de montagnes, Crnoljevo de ce côté-là; c'est de ce côté-là que

3 s'étendent les montagnes Goles jusqu'à Ibarski Kolasin. Tout cela

4 représente la région de Drenica. Cicavica est de l'autre côté vers le

5 Kosovo, et il s'agit de cette région de Metohija. Drenica sépare le Kosovo-

6 Metohija, et c'est pour cela qu'il s'agit de deux entités et non pas d'une

7 entité, ce que les extrémistes albanais ont essayé de prouver, qu'il

8 s'agissait d'un simple territoire du Kosovo. Même quand il s'agit de

9 Lapusnik, on peut voir dans ces documents que Lapusnik a été traité

10 séparément dans ce conflit. A Lapusnik, il y avait la prison et le reste. A

11 un moment donné, cela était isolé du territoire du Kosovo et représentait

12 une entité séparée, Lapusnik. Et les terroristes ont utilisé cette entité

13 en tant qu'entité isolée.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez déjà répondu à ma question.

15 Il faut que je permette à Me Lukic d'utiliser au mieux le temps qu'il lui a

16 été imparti. Je m'excuse, je ne vais pas intervenir à nouveau.

17 M. LUKIC : [interprétation]

18 Q. Est-ce que l'UCK, après les actions terroristes, a commencé à contrôler

19 à nouveau le territoire et les voies de communications ?

20 R. Malheureusement, comme j'ai déjà commencé à vous parler de cela, après

21 les activités de l'armée et de la police et après les pertes essuyées par

22 la police et l'armée, et lorsque la paix a commencé à être réétablie sur le

23 Kosovo-Metohija et lorsque les terroristes albanais devaient disparaître à

24 jamais de ce territoire, l'accord entre Holbrooke-Milosevic a été conclu.

25 Et au mois d'octobre, après le 16 octobre, dans notre pays l'OSCE est

26 arrivée, c'est-à-dire, les observateurs de la Commission de vérification au

27 Kosovo, il y en avait 20 000 qui ont commencé à collecter des

28 renseignements sur tout le territoire Kosovo-Metohija en particulier sur le

Page 23740

1 territoire des municipalités de Glogovac, Srbica. Et pour nous qui étaient

2 membres de ce service, c'était une mauvaise période ainsi que pour le

3 peuple de cette région.

4 Q. Pour ce qui est de --

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vais vous demander, Maître Lukic,

6 de tirer ce point au clair, est-ce que le témoin a pensé au chiffre de 20

7 000 personnes. Dans ce cas-là, ils étaient plus nombreux que les forces

8 serbes.

9 M. LUKIC : [interprétation]

10 Q. Pour ce qui est des membres de la Commission de vérification vous avez

11 dit qu'il y en avait 20 000 ?

12 R. Mais j'y ai compté tous les employés qui étaient les leurs -- non, je

13 m'excuse j'ai fait un lapsus linguae, il ne s'agissait pas de 20 000, mais

14 2 000 membres de la Commission de vérification au Kosovo.

15 Q. Merci. Est-ce que l'UCK a commencé à contrôler à nouveau ce territoire;

16 vous n'avez pas répondu à cette question ?

17 R. Oui. Après cela --

18 Q. Répondez par un oui ou par un non.

19 R. C'était la raison tout à fait simple, selon l'accord, toutes les forces

20 de la police et l'armée devaient retourner dans les casernes, c'est-à-dire,

21 dans leur siège en temps de paix et tout le monde a observé cette

22 disposition. Toutes nos forces ont été retirées et sur le territoire

23 abandonné, les forces terroristes sont entrées à nouveau et ils ont été

24 encore plus agressifs qu'auparavant. Ils ont donc réoccupé le territoire et

25 ils ont fait savoir aux membres de la communauté -- aux [inaudible] de la

26 communauté internationale qu'ils ne devaient plus se déplacer sur ce

27 territoire, et dans la municipalité de Glogovac, je pouvais me déplacer sur

28 un territoire de 100 mètres de long et de large littéralement ainsi que les

Page 23741

1 policiers.

2 Q. Saviez-vous que les membres de la Mission de l'OSCE auraient eu des

3 contacts avec les terroristes; et si c'était le cas, pouvez-vous nous dire

4 comment vous avez appris ce fait ?

5 R. Selon l'accord, l'OSCE pouvait contrôler et superviser la mise en œuvre

6 des dispositions de l'accord. Nous avons reçu des instructions selon

7 lesquelles les chefs et leurs adjoints devaient communiquer avec les

8 membres de la Mission de l'OSCE et coordonner nos activités, ce que nous

9 avons respecté au maximum. Quotidiennement, l'un des représentants de

10 l'OSCE venait me voir, des représentants de la Croix-Rouge internationale

11 ou d'autres organisations internationales et à toutes les questions qu'ils

12 m'avaient posées, parce que nous devions prendre des activités ensemble,

13 donc je les aidais.

14 Q. Monsieur Damjanac, ma question portait à vos connaissances concernant

15 les contacts entre l'OSCE et l'UCK. Est-ce qu'il y avait de tels contacts ?

16 R. Je fais une introduction un peu plus large, je m'en excuse. Les

17 représentants de l'OSCE venaient me voir, ils se trouvaient à 200 mètres

18 par rapport au bâtiment où j'étais. Ils me disaient ouvertement qu'ils

19 étaient en contact direct avec Sami Lushtaku, commandant de la région de

20 Drenica, et avec d'autres commandants locaux. Pour cette raison, ils nous

21 recommandent, puisqu'ils ont essayé de ne pas utiliser le terme interdire,

22 ils nous ont recommandé donc de ne pas aller sur certaines positions et

23 certaines routes dans cette région. C'était tout à fait évident qu'ils

24 avaient eu des contacts avec eux. Est-ce que je puis continuer à ce sujet ?

25 Gerhard, un Allemand, je ne me souviens pas de son prénom exact, il

26 s'agissait d'un agent de renseignement expérimenté qui avait à peu près 50

27 ans, il m'a invité à venir jusqu'à leurs bureaux de leur mission et je suis

28 venu chez eux de mon propre gré et j'ai pu remarquer que leur agents de

Page 23742

1 sécurité n'étaient composés que des Albanais extrémistes, pour ne pas dire

2 des membres de l'UCK. J'ai parlé de cela également. Je leur ai parlé de ce

3 que j'ai vu.

4 Q. Est-ce que sur le territoire de la municipalité de Glogovac, l'usine

5 Feronikel fonctionnait ?

6 R. L'usine Feronikel était le plus grand projet de l'ancienne Yougoslavie.

7 Q. Est-ce que cette usine fonctionnait à Glogovac ?

8 R. L'usine Feronikel n'a pas fonctionné à partir du mois de novembre 1997.

9 Il y avait la grève permanente jusqu'à la fin du mois de mai où on a

10 utilisé une partie des locaux pour héberger les forces qui nous ont été

11 envoyées. C'était en 1998, je m'excuse, non pas en 1997.

12 Q. A quel groupe ethnique appartenait les ouvriers de cette usine ?

13 R. A 90 % de cas il s'agissait des Albanais ou des Siptar. Et une

14 vingtaine de pourcent, pendant des dernières années, étaient les Serbes, 20

15 % étaient les Serbes de Kosovo-Polje, d'Obilic, de Pristina, qui ont été

16 envoyés pour travailler dans cette usine en tant qu'expert.

17 Q. Quand donc les hauts fourneaux de cette usine ont été éteints ?

18 R. Il y avait des grèves et l'usine ne fonctionnait pas vers la fin de

19 1997, en novembre et en décembre. Parce que le SUP a procédé aux enquêtes

20 pour savoir pourquoi les hauts fourneaux ne fonctionnaient plus et pourquoi

21 a été éteint et à cause des événements politiques au début de 1998. Encore,

22 je vais faire encore une dégression là. Dans l'usine Feronikel, Bali

23 Kamptari [phon], une organisation politique a été interdite, c'est-à-dire,

24 une organisation balistique. Il y avait des collaborateurs parmi les

25 directeurs de cette usine pendant la Deuxième Guerre mondiale.

26 Q. Est-ce que l'usine a été pilonnée pendant la guerre ?

27 R. A plusieurs reprises. En avril, je pense que c'était à trois reprises

28 que l'usine a été pilonnée et une fois en mai. C'était la dernière fois que

Page 23743

1 l'usine ait été pilonnée.

2 Q. Où avez-vous interrogé -- est-ce que les membres de votre poste de

3 police ont interrogé les personnes inculpées de terrorisme ?

4 R. Pour ce qui est du terrorisme et du crime de terrorisme, le seul

5 exclusif local pour interrogatoire concernant les personnes accusées de

6 tels crimes, était des locaux du département des affaires intérieures au

7 poste de police de Glogovac et nulle part ailleurs.

8 Q. Est-ce que vous ou les membres de votre poste de police auraient

9 interrogé des personnes dans l'enceinte de l'usine Feronikel en 1998 et

10 1999 ?

11 R. Il faut que je précise certains points. Le bâtiment de l'usine

12 Feronikel, c'est-à-dire, les gens qui se trouvaient hébergés dans certains

13 locaux de cette usine, avaient leurs commandants, nous, nous étions séparés

14 d'eux. Ils s'occupaient de leurs tâches et nous, des nôtres. Donc nous nous

15 occupions de nos tâches régulières pour prévenir la criminalité et les

16 autres, ils s'occupaient de la sécurité des bâtiments, des installations et

17 d'une partie des routes. Pour ce qui est des fonctions qui étaient les

18 nôtres, nous n'avions pas de coordination et nous ne pouvions pas utiliser

19 les locaux de l'usine Feronikel pour fonctionner en tant qu'unité de la

20 police. Je ne sais pas si j'ai été clair?

21 Q. Qui a été hébergé à l'usine Feronikel et quand ?

22 R. J'ai déjà dit que j'avais entre 25 et 30 policiers à ma disposition, il

23 s'agissait d'un endroit où les gens nous ont été hostiles et où le conflit

24 ouvert a éclaté, puisque nous ne pouvions pas avoir de communication avec

25 des institutions d'intérêt spécial. On a vu qu'il était nécessaire de

26 demander de l'aide pour la police -- demander de l'aide qui devait venir de

27 la Serbie pour éviter à ce que les biens d'Etat ne soient détruits.

28 Q. Qui était hébergé dans cette usine ?

Page 23744

1 R. C'était la police qui est venue de la Serbie.

2 Q. Est-ce que les Albanais ont contacté le poste de police de Glogovac; et

3 si oui, de quelle façon ?

4 R. Les Albanais ont contacté tous les jours le poste de police de Glogovac

5 et indépendamment de préjugés qui sont surgis ultérieurement, ils

6 contactaient le poste de police en particulier en 1997 et aussi en 1998.

7 Mais vu que les terroristes sont devenus plus forts et de la peur pour la

8 sécurité de leurs familles, ils ont contacté avec nous de façon discrète et

9 ils ont demandé de venir à des heures creuses pendant la journée pour

10 éviter qu'on ne les voie sur les routes. Ils ont demandé de contacter avec

11 les personnes auxquelles ils avaient le plus de confiance, et puisque je

12 suis né à Drenica, un grand nombre d'entre eux ont demandé de me parler

13 seulement à moi, en particulier, des sujets portant sur leur sécurité. Pour

14 ce qui est des activités pour prévenir la criminalité, ces activités ont

15 été faites conformément aux dispositions du code de procédure pénal.

16 Q. Nous avons vu que parfois on ne connaissait pas d'auteur d'infraction

17 pénale et on avait des soupçons que ces auteurs auraient pu être des

18 terroristes. Sur la base de quoi vous avez conclu que c'étaient les

19 terroristes qui auraient commis [phon] une personne si vous n'aviez pas su

20 qui était l'auteur de ce crime ?

21 R. En toute responsabilité, je confirme que pendant que j'étais là-bas,

22 aucun cadavre n'a été retrouvé qui avait une seule balle dedans ou

23 quelqu'un qui a été tué avec des coups de couteau. Je répète encore une

24 fois et je sais qu'il s'agissait de cadavres massacrés, et pour ce qui est

25 des traces de balles, c'est-à-dire, des douilles retrouvées sur les lieux,

26 on pouvait en conclure qu'il s'agissait des armes automatiques, des

27 mitrailleuses de production chinoise, qui ne se trouvaient pas dans la

28 police ni dans l'armée de l'ancienne Yougoslavie, ou si vous voulez, de la

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1 République de Serbie. Donc on a pu tirer des conclusions tout à fait

2 claires en se basant sur ce qu'on a trouvé sur les lieux.

3 Q. Est-ce que sur ce territoire il y avait des Serbes qui y habitaient ?

4 R. Glogovac, par exemple, c'est l'endroit où je suis né, jusqu'à la

5 Deuxième Guerre mondiale, il y avait 101 maisons serbes. Seulement dans ma

6 maison, il y avait 27 hommes. Pour les gens à l'ouest, ce n'est peut-être

7 pas concevable, mais jusqu'à la guerre, nous vivions tous ensemble, en

8 communauté.

9 Q. Est-ce que sur le territoire où on a retrouvé des cadavres, il y avait

10 des Serbes qui y vivaient ?

11 R. Aucun Serbe à partir de 1965, à l'exception faite d'une seule famille à

12 la gare ferroviaire à Glogovac. Sur tout le territoire de la municipalité

13 de Glogovac, il n'y avait pas de Serbes, et en toute responsabilité, je

14 peux dire que c'était également le cas pour la municipalité de Srbica et

15 dans la ville même de Srbica, il y avait à peu près 100 familles qui y

16 vivaient.

17 Q. A quelle unité du MUP appartenait le OUP de Glogovac sur le poste de

18 police de Glogovac ?

19 R. Le poste de police de Glogovac appartenait au SUP de Pristina et il

20 faisait partie, enfin, le poste de police à Glogovac représentait une unité

21 organisationnelle du SUP de Pristina.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Les policiers qui travaillaient dans

23 votre bureau ne vivaient-ils pas dans cette

24 région ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais vous dire --

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. C'est tout ce que j'ai voulu

27 entendre.

28 Maître Lukic.

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1 M. LUKIC : [interprétation]

2 Q. Il faut qu'on tire cela au clair. Où vivaient les policiers qui

3 travaillaient dans votre poste de police ?

4 R. Je vais vous expliquer cela. Puisqu'il n'y avait pas de conditions

5 normales de vie pour les policiers serbes sur le territoire de Glogovac,

6 mis à part feu Ivan Bulajic, qui vivait en effet à Glogovac avec sa

7 famille. Les autres se déplaçaient, la plupart d'entre eux étaient de

8 Pristina, de Kosovo Polje et d'autres endroits. Nous pouvions les héberger

9 pendant une période de sept jours à Glogovac, pour ce qui est des

10 policiers. Vous pouvez imaginer qu'un policier qui est enfermé pendant sept

11 jours sur -- enfin, qui ne pouvait pas quitter un territoire limité pendant

12 une semaine, vous pouvez imaginer comment c'était.

13 Q. Merci. Quelles étaient les tâches de base des policiers du poste de

14 police de Glogovac qui portaient des uniformes ?

15 R. Les tâches de base de ces policiers et des autres employés du ministère

16 de l'Intérieur étaient de prévenir la criminalité et de diverses

17 infractions pénales, pour ce qui est des accidents de la route, par

18 exemple, d'autres délits, et tout ce qui est lié à l'ordre publique. Dans

19 tous les manuels régissant le fonctionnement de la police, on peut

20 retrouver ces tâches et également dans les dispositions du code de

21 procédure pénal.

22 Q. Qui était votre supérieur immédiat ?

23 R. Dans la période dont nous parlons, il s'agissait de Bosko Petric. Et

24 Bozidar Filic le remplaçait s'il était absent.

25 Q. Où travaillaient-ils ?

26 R. Ils résidaient et travaillaient à Pristina.

27 Q. Quelle est la dénomination de cette structure du MUP ?

28 R. Il s'agit du SUP de Pristina qui est subdivisé en un certain nombre

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1 d'OUP et il y avait un OUP à Lipljan, à Glogovac, à Podujevo et à Obilic.

2 Q. Je vous remercie. Y avait-il des secteurs de l'OUP de Glogovac qui

3 coopéraient et communiquaient directement avec certaines structures du SUP

4 de Pristina ?

5 R. En ma qualité de chef, je dirigeais, bien sûr, quelque chose, comme ce

6 nom l'indique. Et ce quelque chose c'était l'OUP de Glogovac qui avait

7 entre autres pour tâche, de s'occuper de la bonne qualité du travail des

8 personnes qui étaient employées. Toutes les structures de l'OUP étaient

9 reliées à un point central à Pristina, et ce point c'était le département

10 des policiers en uniforme. Le cas échéant, selon les nécessités

11 correspondant à leur niveau hiérarchique, ce point était relié à la police

12 en uniforme du SUP de Pristina au niveau des départements administratifs

13 des deux structures qui étaient reliées l'un à l'autre. En dehors de la

14 délivrance de documents d'identité, nous étions également chargés de

15 délivrer des documents de voyage, les permis de conduire et un document de

16 voyage ne pouvait être délivré qu'avec l'accord de Pristina. Mais nous

17 étions responsables de leur délivrance; cependant, ces documents étaient

18 produits à Pristina.

19 Si vous me permettez de poursuivre, s'agissant du crime qui a affecté

20 l'OUP de Glogovac, nous ne disposions pas de techniciens de police

21 scientifique. Donc nous avons dû demander l'aide des responsables du SUP de

22 Pristina pour mener l'enquête sur l'incident.

23 Q. Qu'en est-il des ordres que vous receviez dans votre travail,

24 provenaient-ils du SUP de Pristina ?

25 R. En tant que structure intégrante divisant un certain nombre d'OUP, nous

26 étions autonomes dans une certaine partie de nos activités. Mais s'agissant

27 des tâches administratives en particulier, nous avions besoin de

28 collaboration avec d'autres structures et nous recevions nos ordres, par

Page 23748

1 exemple, du point central que constituait l'administration qui était

2 chargée de traiter les documents de travail, les documents d'identité, et

3 cetera. Mais s'agissant de la police judiciaire, nous recevions certains

4 ordres liés à cette activité de Pristina également, notamment lorsqu'il

5 s'agissait d'engagement des unités PJP de la police.

6 Q. Rendiez-vous compte de votre travail au SUP de Pristina ? Est-ce que

7 vous lui adressiez des rapports ?

8 R. Sur toutes les questions urgentes, j'informais tous les jours le SUP de

9 Pristina. Autrement dit, pour être plus précis, j'en informais mes

10 supérieurs directs.

11 Q. Je vous remercie. Vous arrivait-il parfois d'informer directement

12 l'état-major du MUP à Pristina ?

13 R. Je voudrais que ma réponse soit tout à fait complète. Selon la voie

14 hiérarchique verticale, nous rendions compte au chef et au chef en second

15 du SUP. Mais nous avions également une communication selon la voie

16 hiérarchique horizontale entre les différents OUP. Mais je n'avais pas

17 compétence ni nécessité de communiquer directement avec l'état-major du

18 MUP. Il n'y avait aucune nécessité que j'informe l'état-major du MUP.

19 Q. Je vous remercie. Parlons maintenant en termes de temps. Pouvez-vous

20 nous dire dans quelles conditions vous rendiez compte au SUP de Pristina,

21 avant les frappes aériennes et après les frappes aériennes ?

22 R. Jusqu'à l'agression de l'OTAN, nous avions une voie ce communication

23 habituelle qui dépendait beaucoup de moyens techniques à notre disposition,

24 c'est-à-dire, en premier lieu, de la disponibilité du téléphone, nous

25 utilisions aussi ce qu'il est convenu d'appeler des lignes téléphoniques

26 spéciales. Nous avions recours aux dépêches également, autrement dit, nous

27 recourions à tout ce qui était disponible dans le cadre des communications

28 pratiquées par tous les SUP du Kosovo-Metohija comme d'ailleurs en Serbie.

Page 23749

1 Mais après l'agression de l'OTAN, tous les émetteurs ont été détruits étant

2 donné les dangers de bombardements. D'ailleurs la menace avait été formulée

3 d'utiliser tous les moyens possibles pour répliquer à des communications

4 électroniques. Nous n'avions pas la possibilité de communiquer comme par le

5 passé, hormis le seul moyen qui était encore disponible, c'est-à-dire,

6 l'utilisation d'estafettes. On pouvait envoyer quelqu'un, un membre du

7 service qui s'asseyait à bord de sa voiture, allait à Pristina rendre

8 compte et ensuite revenait. Voilà. J'espère que j'ai été suffisamment

9 clair. J'ai essayé d'exprimer dans les termes les plus simples possibles ce

10 qu'il en était de façon à vous donner une idée complète de la situation à

11 l'époque.

12 Q. Penchons-nous, si vous le voulez bien, sur le document 6D614 du

13 prétoire électronique, page 6, point 7. Voilà. Le document s'affiche.

14 J'aimerais vous demander comment vous agissiez si vous découvriez que les

15 auteurs d'un acte criminel étaient des membres de la police ?

16 R. A l'OUP de Glogovac nous agissions avec une très grande qualité

17 professionnelle, quelles que soient les conditions concrètes de notre

18 existence au quotidien. Le Code de procédure pénal ainsi que d'autres

19 textes légaux régissant la façon dont nous devions travailler étaient

20 strictement respectés. Quelle que soit la personne concernée. Nous

21 n'autorisions aucun acte illégal de la part de qui que ce soit et nous ne

22 permettions à personne d'enfreindre l'autorité du service. S'il devait être

23 établi qu'un membre des forces de police, relevant de nos compétences,

24 avait commis un acte délictueux ou un crime, des mesures étaient

25 immédiatement prises. Dans l'exemple que vous m'avez soumis, il s'agissait

26 d'un groupe de réservistes relevant du secrétariat à l'intérieur de

27 Pristina, qui ont été déployés sur une zone relevant de notre

28 responsabilité. On les appelait les incendiaires et une plainte a été

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1 déposée au pénal à l'encontre de ces personnes. Nous avons d'ailleurs ici

2 le numéro de dossier qui commence par KU. Donc l'affaire a fait l'objet

3 d'une enquête. Ces hommes ont été traduits en justice suite à la plainte et

4 mis en examen pour avoir incendié huit maisons familiales dans le village

5 d'Orlate, maisons dont les propriétaires étaient inconnus.

6 Q. Mais il est écrit ici que les propriétaires étaient inconnus, toutefois

7 leur appartenance ethnique était-elle, elle, connue, peut-être ?

8 R. Il s'agissait dans tous les cas d'Albanais de souche, puisque dans ce

9 village ne résidaient que des Albanais. Il n'y avait dans ce village aucun

10 Serbe et aucun représentant d'un autre groupe ethnique. Dans toute la zone,

11 i y avait très peu de non-Albanais de souche, aucune minorité ethnique n'y

12 étant représentée.

13 Q. Puisque vous dirigiez l'OUP de Glogovac et que vous l'avez fait

14 jusqu'au 1er mai 1999, je vous demande s'il y a eu départs massifs de civils

15 de votre municipalité ?

16 R. Je peux affirmer en toute responsabilité qu'une telle chose ne s'est

17 pas produite et que personne n'y pensait même. Je justifierais cela en vous

18 évoquant un fait très concret, à savoir que notre poste de police se

19 trouvait dans la localité même, et qu'autour du poste se trouvaient des

20 maisons appartenant à des Albanais de souche. Nos voisins les plus proches

21 étaient à 2 mètres à peine de l'entrée du bâtiment du poste et il

22 s'agissait d'Albanais. Donc eux étaient la source de notre sécurité, nous

23 partagions, eux et nous, le même sort et nous collaborions pour le meilleur

24 ou pour le pire. En temps de paix, ils nous garantissaient une

25 collaboration parfaite. Nous utilisions leurs puits pour tirer de l'eau,

26 car il n'y avait pas de conduite d'eau dans la région; ça c'est peut-être

27 quelque chose que vous ne savez pas. Il n'y avait pas d'autres possibilités

28 d'obtenir de l'eau que de la tirer d'un puits dans une maison albanaise.

Page 23751

1 Lorsque les frappes aériennes de l'OTAN ont commencé, nous nous sommes mis

2 d'accord avec eux pour coexister tant que la coexistence était possible par

3 le biais de mon service à Glogovac. Voilà quelle était la situation.

4 Q. Je vous remercie. Je crois qu'il nous faut interrompre aujourd'hui,

5 nous reprendrons demain.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Maître Lukic.

7 Monsieur Damjanac, ceci met fin à l'audience d'aujourd'hui. Nous

8 reprendrons nos débats à 9 heures demain matin. D'ici là, il est tout à

9 fait capital que vous ne communiquiez avec personne de votre déposition en

10 l'espèce. Et lorsque je dis de votre déposition, je parle bien de quelque

11 aspect que ce soit de votre déposition. Il vous faut ne pas communiquer

12 avec qui que ce soit sur quelque élément de votre déposition. Nous nous

13 reverrons donc demain à 9 heures du matin. Je vous demanderais maintenant

14 d'accompagner, Monsieur l'Huissier pour sortir du prétoire.

15 [Le témoin quitte la barre]

16 --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le jeudi 6 mars 2008,

17 à 9 heures 00.

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