Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 19 août 2008

  2   [Réquisitoires]

  3   [Audience publique]

  4   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

  7   Monsieur les Juges. Il s'agit de l'affaire IT-05-87-T, le Procureur contre

  8   Milan Milutinovic et consorts. Merci.

  9   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes. Cette

 10   audience d'aujourd'hui ainsi que les auditions qui suivront se mèneront

 11   dans le but de clore l'affaire et nous entendrons les mémoires en clôture

 12   et les arguments présentés par les parties. Maître Bakrac, nous avons été

 13   notifiés de l'état de santé de M. Lazarevic, qui est en train de se

 14   remettre d'un traitement, et nous remarquons également qu'il n'est pas

 15   présent dans le prétoire ce matin. Si je ne m'abuse, il est tout à fait

 16   d'accord pour que cette procédure se passe en son absence. Est-ce que vous

 17   pourriez nous confirmer, s'il vous plaît, si c'est bien le cas ?

 18   M. BAKRAC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, effectivement, je

 19   peux vous le confirmer. Hier, j'étais à l'hôpital du quartier pénitentiaire

 20   et mon client nous a donné son aval pour que cette séance d'aujourd'hui se

 21   poursuive en son absence.

 22   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Maître Bakrac, de l'avoir

 23   confirmé. Nous allons maintenant entendre le mémoire en clôture de

 24   l'Accusation.

 25   Monsieur Hannis, c'est à vous, je vous écoute.

 26   M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Madame,

 27   Monsieur les Juges. Pour le compte rendu d'audience, je m'appelle Tom

 28   Hannis, je suis substitut du Procureur et je suis accompagné de notre

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  1   assistant, M. Reid, ainsi que de notre collègue, M. Chester Stamp et

  2   Daniela Kravetz. C'est un honneur, effectivement, d'être devant vous ce

  3   matin et de présenter mon réquisitoire. Ce que j'ai à dire concernant

  4   l'affaire -- enfin, l'Accusation a un fardeau très lourd dans le cadre de

  5   son réquisitoire, mais nous espérons que nous allons pouvoir étayer le

  6   tout. J'ai un peu l'impression de me trouver, eu égard aux contraintes

  7   temporelles, j'ai l'impression de me trouver aux olympiades juridiques.

  8   Nous sommes ici pour parler des crimes commis au Kosovo en 1999.

  9   L'Accusation a dit dans l'acte d'accusation et tout au long du procès que

 10   les six accusés ici présents ont participé à une entreprise criminelle

 11   commune et le but de cette entreprise criminelle commune était de modifier

 12   ou de changer l'équilibre ethnique au Kosovo afin d'assurer un contrôle

 13   serbe continu dans cette province. Et avant que je ne vous parle de ceci,

 14   je voudrais peut-être vous parler de l'ordre dans lequel nous allons

 15   procéder.

 16   Je vais d'abord parler un peu du contexte en guise d'introduction, je

 17   vais parler aussi des événements qui ont mené à la commission de ces

 18   crimes. Ensuite, Mme Kravetz suivra et vous parlera du schéma, de la façon

 19   dont les crimes ont été commis et pourquoi les gens ont quitté le Kosovo au

 20   cours du printemps de 1999. Ensuite, ce sera le tour de M. Stamp qui vous

 21   parlera du corps essentiel des éléments de preuve qui ont été abordés dans

 22   cette affaire et vous parlera également de la responsabilité individuelle

 23   des MM. Milutinovic, Sainovic et du général Lukic. Ensuite, je reprendrai

 24   la parole de nouveau et je vais parler de la responsabilité criminelle

 25   pénale de nos accusés militaires qui sont les généraux Pavkovic, Ojdanic et

 26   Lazarevic. Ensuite, je vais conclure en vous présentant des observations

 27   générales sur les éléments de preuve. Alors je voudrais vous proposer de

 28   suivre, enfin, je vous propose de procéder de la sorte.

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  1   Alors, comme je l'ai déjà dit, l'entreprise criminelle commune qui a été

  2   menée dans le but d'altérer l'équilibre ethnique afin d'assurer le contrôle

  3   serbe au Kosovo devait être faite par des moyens criminels pénaux et ceci a été

  4   fait grâce à la mise en place d'une campagne de terreur et de violence

  5   systématique et généralisée dirigée à l'encontre de la population albanaise au

  6   Kosovo.

  7   L'homme qui avait un plan et qui avait pensé à ce plan était Slobodan

  8   Milosevic. L'un des exemples les plus terrifiants du fait qu'il avait un

  9   plan et de la nature de ce plan qu'il avait a été ou peut-être vu lors de

 10   la réunion du 24 octobre 1998, réunion à laquelle étaient présents M.

 11   Milosevic, le général Naumann et le général Clark. Au cours de cette

 12   réunion - et nous l'avons entendu par la bouche du général Naumann - après

 13   cette réunion, M. Milosevic est devenu agité, a dit qu'une solution finale

 14   au problème du Kosovo pouvait être ou sera faite au printemps, et Naumann

 15   et Clark ont demandé à M. Milosevic de leur expliquer ce qu'il voulait dire

 16   par là précisément, et il a dit : "Nous allons faire ce que nous avons fait

 17   à Drenica en 1946." Ils ne savaient pas ce qui s'était passé, et Milosevic

 18   leur a expliqué qu'il avait assemblé les personnes et les avait exécutées.

 19   En fait, effectivement, au mois de mai 1999 nous pouvons voir des exemples,

 20   retrouver des exemples de ce type de crimes faits à l'encontre de la

 21   population qui avait été emmenée et par la suite exécutée, et les gens qui

 22   ont dû être contraints à quitter leurs demeures. Ces crimes commis au mois

 23   de mai 1999, nous soutenons, sont une étape logique dans une série de

 24   mesures opprimantes qui avaient été prises pour essayer de résoudre le

 25   problème du Kosovo. Ceci, en fait, remonte à 10 ou 20 ans avant la

 26   commission de ces crimes en 1999.

 27   Pour ce qui est maintenant des participants, des personnes qui ont

 28   pris part à l'entreprise criminelle commune, je souhaiterais vous présenter

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  1   la diapositive suivante : nous voyons Milosevic et le président Milutinovic

  2   qui faisait partie du conseil suprême de la Défense qui, selon nous, plus

  3   tard était devenu le commandement Suprême en état de guerre. Le

  4   commandement Suprême dirigeait et contrôlait l'emploi de la VJ, de l'armée

  5   yougoslave au cours du conflit. A la tête de la VJ, à l'époque, se trouvait

  6   le général Ojdanic qui était le chef du commandement Suprême, appellation

  7   qui était connue pendant la guerre, avec le général Pavkovic, qui était le

  8   commandant de la 3e Armée. Son subordonné immédiat qui était le commandant

  9   du Corps de Pristina, le général Lazarevic. Il était en fait le commandant

 10   des brigades de la VJ et plus tard du district militaire de Pristina et il

 11   avait été resubordonné à ce dernier. Nous soutenons que les forces qui ont

 12   aidé à mener à bien ces crimes au Kosovo en 1999 étaient celles-ci.

 13   Nous soutenons également que M. Sainovic a pris part à cette

 14   entreprise criminelle commune. Il a joué un rôle important pour ce qui est

 15   de l'entreprise criminelle commune en 1998, et plus particulièrement

 16   pendant que le plan visant la suppression du terroriste avait été mené,

 17   nous disons également –- nous soutenons également qu'il y a pris part en

 18   1999.

 19   Il a aidé à –- enfin, il a pris part et il a emmené des gens à

 20   l'intérieur de l'entreprise criminelle commune et c'étaient des personnes

 21   qui ont pris part à cette entreprise criminelle commune, y compris le

 22   général Lukic qui était le chef du MUP au Kosovo.

 23   Je vais maintenant vous parler des effectifs qui ont pris part à

 24   l'armée, qui ont pris part à ces crimes. Si vous voulez voir tout ceci sur

 25   écran, je présente des diapositives sur le e-court, le prétoire

 26   électronique.

 27   Donc les forces serbes, l'armée yougoslave, les effectifs d'active et

 28   de réserve - en fait, il y avait le ministère de l'Intérieur, le MUP, la

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  1   police d'active et de réserve, ensuite le district militaire, les

  2   détachements territoriaux, militaires et d'autres, ou autres, ce qu'on

  3   appelle la population non-siptar armée. Nous les avons appelées ainsi et

  4   nous allons en parler sous peu.

  5   Voilà, cette diapositive vous montre le commandement et la structure

  6   en fait au sein de l'armée. Il s'agit du survol assez bref qui permettrait

  7   de voir toutes façons l'organigramme était organisé.

  8   J'ai encore une autre diapositive à montrer. C'est une diapositive

  9   qui vous montre le Kosovo et démontre les zones de responsabilité qui

 10   appartenaient, qui étaient placées sous la VJ qui était active au Kosovo à

 11   l'époque. Nous avons sur cette diapositive la 125e Brigade qui était placée

 12   sous le commandement du colonel Zivanovic, ensuite la 549e qui était placée

 13   sous les ordres du général Dalmatial [phon], 243e sous Krnojelac [phon] et

 14   la 15e Brigade blindée sous le colonel Gergar. Le MUP. Je vais vous montrer

 15   d'autres diapositives. Vous avez aussi la population siptar non armée, les

 16   volontaires militaires aussi.

 17   Donc de quelle façon ces derniers étaient engagés, de quelle façon

 18   ils étaient contrôlés et employés pour prendre part à ces crimes ? Voilà,

 19   alors il y avait d'abord une coordination et un contrôle qui était

 20   effectué. D'abord, nous avions d'une part le SDC, le conseil suprême de la

 21   Défense, et il y avait également une autre entité connue en tant que

 22   commandement Suprême pendant la guerre. Pour l'armée nous avons l'état-

 23   major principal de la VJ qui existait avant le début de la guerre et par la

 24   suite, pendant l'état de guerre c'était le commandement Suprême. Ensuite il

 25   y avait l'état-major du MUP aussi au Kosovo.

 26   Ensuite, il y avait une autre entité dont nous avons beaucoup parlé

 27   dans cette affaire et nous allons le mentionner au cours de ce

 28   réquisitoire. C'était le commandement conjoint et je vais en parler plus en

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  1   détail lorsque je reprendrai la parole vers la fin de la journée ou demain.

  2   S'agissant du plan ou du but commun de cette entreprise criminelle

  3   commune était de maintenir le contrôle serbe de la province en altérant

  4   l'équilibre ethnique, et ceci est arrivé, enfin, avait été fait d'abord en

  5   déplaçant les Albanais du Kosovo. Ce n'est pas un plan qui s'est développé

  6   en un jour. C'est quelque chose qui a duré un certain temps. Il y avait eu

  7   des problèmes, bien sûr, au Kosovo, et les efforts qui avaient été déployés

  8   au Kosovo n'avaient pas été couronnés de succès. En d'autres mots, le

  9   problème du Kosovo c'est qu'il y avait trop d'Albanais qui avaient des

 10   intentions séparatistes, et ceci avait un effet sur les Serbes qui vivaient

 11   au Kosovo.

 12   Dans notre mémoire en clôture aux paragraphes 28 à 33[comme

 13   interprété], nous en parlons plus, mais je voulais simplement mettre en

 14   exergue quelques points.

 15   Au cours de 1998 [comme interprété], les nationalistes serbes se

 16   plaignaient principalement de la constitution de la RSFY et de l'autonomie

 17   du Kosovo, et à la suite ceci, les Serbes du Kosovo étaient ou se sentaient

 18   vulnérables, étaient vulnérables à la discrimination par un gouvernement

 19   qui était dominé, à la tête de laquelle se trouvaient des Albanais

 20   ethniques au Kosovo, enfin, des Albanais au Kosovo.

 21   Au cours de 1990, nous avançons que le contrôle serbe était devenu un

 22   point essentiel pour Milosevic et la politique serbe. Il y a eu un certain

 23   nombre de changements qui avaient commencé à se faire voir au cours de la

 24   fin de l'année 1998. Au printemps de 1999, des mesures spéciales avaient

 25   été mises en place au Kosovo. Et en 1999, l'assemblée serbe avait proposé

 26   des amendements à la constitution du Kosovo qui enlèverait l'autonomie du

 27   Kosovo. Et vers la fin du mois de mars 1989, l'économie du Kosovo

 28   effectivement a été révoquée, l'autonomie donc du Kosovo a été révoquée.

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  1   Nous avons des éléments de preuve selon lesquels la répression de la police

  2   contre les Albanais du Kosovo avait augmenté. Nous avons entendu également

  3   Fred Abrahams, Veton Surroi, Ibrahim Rugova, et d'autres, nous ont dit de

  4   quelle façon les écoles au cours de 1990 avaient été fermées, les écoles

  5   qui enseignaient dans la langue albanaise. Un très grand nombre d'Albanais

  6   ont dû quitter les universités albanaises. Et malgré tout ceci au cours de

  7   cette période au cours des années 90, au début des années 90, les Albanais

  8   ont principalement tenu une politique de résistance civile et ils ont

  9   établi un système d'éducation et de santé parallèle.

 10   Les autorités serbes ont essayé de résoudre le problème du Kosovo en

 11   faisant venir plus de Serbes au Kosovo et certains réfugiés serbes qui

 12   venaient d'autres provinces de la Serbie ou d'autres lieux de la Serbie,

 13   mais ceci n'a pas non plus résolu le problème. Le problème s'est poursuivi.

 14   Pour ce qui est du côté albanais, les critiques qui parlaient de la

 15   politique serbe avaient commencé à envisager la violence pour résoudre le

 16   problème. M. Rugova et ses politiques n'étaient plus en faveur et la

 17   violence au Kosovo a commencé à se faire voir et à augmenter.

 18   Nous avons vu que ceci a fait en sorte qu'il y a eu un commandement

 19   conjoint de 1998 ainsi que la mise en place d'un plan pour supprimer le

 20   terrorisme en 1998. Et lorsque ceci n'a pas pu résoudre le problème de

 21   façon adéquate, nous soutenons que ceci a mené aux crimes de 1999 en

 22   parlant du conflit de l'OTAN.

 23   Maintenant, la Défense sous-tend qu'il n'y a pas eu de crimes d'entreprise

 24   criminelle conjointe. Mais nous espérons qu'en démontrant et en vous

 25   présentant des détails, en vous parlant d'exemples qui soutiennent notre

 26   argument principal qu'il y a eu un plan qui existait visant à changer

 27   l'équilibre ethnique au Kosovo. Je crois que vous allez pouvoir le voir

 28   également.

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  1   Maintenant, s'agissant du plan ou d'un but commun, il n'est pas nécessaire

  2   de l'écrire dans un document ou d'en parler lors d'un discours. Je dis –-

  3   enfin, selon moi, depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, les gens

  4   qui voulaient prôner certaines idées n'allaient pas le mettre sur papier.

  5   Donc nous avons, Monsieur le Président, eu une –- nous allons pouvoir

  6   présenter des éléments de preuve circonstanciels et je vais revenir plus

  7   tard là-dessus lorsque je vous présenterai mes commentaires en guise de

  8   clôture.

  9   Maintenant, en partie, s'agissant des arguments qui sont à l'appui de

 10   ce que je viens de dire, enfin, la seule conclusion qui peut être tirée

 11   c'est en suivant le schéma de la façon dont les crimes ont été commis, la

 12   déportation et les transferts forcés, les meurtres et les persécutions. Il

 13   y a effectivement un schéma selon lequel ces crimes ont été commis au mois

 14   de mars, avril et mai de 1999. Ceci peut être trouvé lorsque l'on examine

 15   la façon dont les ordres du commandement conjoint ont été donnés au début

 16   de la guerre. A l'écran, vous verrez un exemple des ordres du commandement

 17   conjoint entre le 23 mars et le 4 avril 1999 montrant les zones où la VJ et

 18   le MUP ont mené des actions conjointes, et nous allons vous parler de la

 19   façon dont ceci coïncide avec nos sites de crimes. Nous avons également

 20   entendu des témoignages de victimes, de témoins qui avaient été également

 21   témoins oculaires et qui ont assisté à certains meurtres et qui nous ont

 22   parlé des déportations. Mais très souvent, enfin, dans quelques cas ils

 23   nous ont également parlé du fait qu'ils ont survécu à des massacres.

 24   Ensuite, la diapositive suivante montre les ordres du commandement

 25   conjoint pour une période qu'on prend à la fin du mois d'avril 1999. Encore

 26   une fois, ceci coïncide avec les zones de crimes qui avaient été couvertes.

 27   Maintenant, ceci met fin à ma présentation de cette partie du

 28   réquisitoire et je vais maintenant donner le micro à Mme Kravetz.

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  1   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci beaucoup.

  2   Madame Kravetz, c'est à vous.

  3   Mme KRAVETZ : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Mesdames,

  4   Monsieur le Juge. La question qui se pose depuis le début de ce procès au

  5   cours des deux dernières années est la suivante : pourquoi est-ce que la

  6   population albanaise fuyait en grand nombre au cours de la période couverte

  7   par l'acte d'accusation. La Défense, dans cette affaire, ne conteste pas le

  8   fait qu'il y a eu départ de très grande envergure des Albanais du Kosovo

  9   pendant la période qui nous préoccupe en l'espèce. Mais les questions

 10   contestées sont les raisons pour ce départ en masse.

 11   Le bureau du Procureur sous-tend ou soutient qu'il y a eu plus de 800 000

 12   Albanais du Kosovo partis du Kosovo, et ceci a été plutôt le résultat des

 13   actions menées par les forces de la FRY de Serbie et les actions de la VJ

 14   et de la police de l'armée yougoslave, donc de la police, qui ont agi de

 15   façon coordonnée sous le commandement des accusés. Et ces forces et ces

 16   effectifs ont forcé la population à quitter la région.

 17   Et ceci, nous pouvons le présenter au-delà de tout doute raisonnable que

 18   c'était un départ forcé et que ce sont les raisons principales. Je vais

 19   maintenant vous parler des raisons pour lesquelles nous estimons qu'il

 20   s'agissait effectivement d'un départ forcé.

 21   Pour commencer avec le 24 mars 1999, commençons donc avec cette date-là,

 22   nous savons que c'est la date à laquelle l'OTAN a commencé à effectuer des

 23   bombardements sur le Kosovo et cela a duré au cours du mois d'avril et mai

 24   1999. Les forces de la FRY de la Serbie ont lancé une attaque systématisée

 25   sur les villages du Kosovo dans toute la province. Les accusés dans cette

 26   affaire se sont servis du bombardement de l'OTAN comme un prétexte pour

 27   mener à bien leur plan. M. Hannis vient de parler du but commun.

 28   Au cours des attaques qui avaient été menées dans la province, ces forces

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  1   ont systématiquement pillé des biens appartenant aux Albanais du Kosovo,

  2   ont massacré des civils. Nous avons entendu des preuves dans cette affaire

  3   nous parlant de meurtres de civils qui ont eu lieu au cours de ces

  4   attaques. Ils ont agressé sexuellement les femmes albanaises, pillant des

  5   maisons, des magasins dans le but de ne rien laisser derrière aux personnes

  6   qui souhaiteraient éventuellement revenir.

  7   Nous avons entendu que les forces de la VJ pilonnaient des villages

  8   forçant, contraignant les civils de partir. Par la suite, les forces du MUP

  9   menaient des perquisitions d'une maison à l'autre en expulsant les civils.

 10   Les civils avaient des lieux de rassemblement où on les plaçait à bord de

 11   véhicules divers où des fois ils devaient prendre leurs propres véhicules

 12   et il leur arrivait également d'être contraints à marcher pendant plusieurs

 13   heures, pendant plusieurs jours afin d'arriver à la frontière. Et nous

 14   avons entendu dans cette affaire des témoignages d'un très grand nombre de

 15   témoins qui nous ont parlé de leurs difficultés et du triste sort qu'ils

 16   ont eu et de ce qui leur est arrivé pour arriver jusqu'aux frontières.

 17   C'était une atmosphère de terreur qui régnait. Les résidants des villages

 18   fuyaient après avoir entendu que des attaques avaient été menées dans

 19   d'autres villages ou dans des villages avoisinants ou des villes

 20   avoisinantes de la municipalité. La population albanaise du Kosovo n'avait

 21   aucun choix, ne pouvait que fuir et partir de leurs demeures craignant ces

 22   attaques.

 23   Les éléments de preuve qui parlent du schéma et qui découlent des

 24   témoignages que nous avons entendus dans cette affaire est [comme

 25   interprété] très forte. Nous avons entendu que le 24 mars des villages

 26   avaient fait l'objet d'une attaque dans plusieurs municipalités du Kosovo,

 27   Orahovac, Suva Reka, Kosovska Mitrovica, Vucitrn, Kacanik, Urosevac, pour

 28   vous citer quelques exemples. Ces attaques avaient été menées de façon

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  1   répétitive.

  2   Je ne vais pas maintenant vous parler de chaque chef d'accusation de l'acte

  3   de l'accusation. Nous avons présenté un mémoire en clôture assez étoffé et

  4   je ne vais pas vous parler de chacun de ces éléments maintenant, mais

  5   j'aimerais vous parler d'un exemple pour vous illustrer les points. Je vais

  6   parler de Pristina, car ceci illustre très bien ce que je veux dire

  7   s'agissant du schéma.

  8   Comme vous le savez, Pristina était, et l'est encore d'ailleurs, la

  9   capitale de la province. Mais c'est également un lieu où plusieurs de nos

 10   accusés avaient des QG au cours de la période pertinente. Vous vous

 11   souviendrez avoir entendu le témoignage de plusieurs témoins qui ont parlé

 12   des événements qui se sont déroulés à Pristina, à Kabashi, Nazalie Bala,

 13   tel le témoin K62. Ces témoins nous ont parlé des expulsions qui ont eu

 14   lieu dans ces municipalités, l'expulsion de résidants albanais du Kosovo en

 15   commençant par le 24 mars, et ces expulsions se sont poursuivies jusqu'à la

 16   dernière semaine du mois de mars et la première semaine du mois d'avril.

 17   C'est la vague la plus importante de ces expulsions qui avait lieu.

 18   Ces expulsions avaient été menées de façon systématique en employant la

 19   force et l'intimidation. Nous avons entendu des témoins nous disant de

 20   quelle façon des groupes mixtes de soldats, de policiers et des Serbes du

 21   cru qui se joignaient à ces expulsions en allant d'une maison à une autre

 22   forçant les civils de quitter leurs demeures.

 23   Les habitants ont souvent quitté leurs foyers, leurs boutiques, leurs

 24   entreprises ont été détruites. Des témoins protégés, certains témoins

 25   protégés nous ont expliqué que des femmes avaient été agressées

 26   sexuellement par les hommes armés qui étaient venus les chassées.

 27   Quant aux habitants de la municipalité de Pristina, on les a envoyés vers

 28   le centre-ville, vers la gare ferroviaire. Là, on les a contraints à monter

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  1   à bord de trains les emmenant au sud de la frontière macédonienne. Il ne

  2   s'agissait pas d'une évacuation humanitaire ou d'une évacuation légitime.

  3   Vous vous souviendrez sans doute de la déposition d'Emin Kabashi. Il s'agit

  4   d'un de ceux qui se trouvaient à la gare. Nous avons ici un extrait à

  5   l'écran de sa déposition. Il est resté plusieurs jours sur place pour

  6   essayer d'organiser les choses. Il explique que les gens de Pristina ont

  7   été contraints de monter à bord des trains. Il explique que la police

  8   faisait monter les habitants à bord de ces trains et les traitait comme du

  9   bétail.

 10   Un autre témoin, M. Bala, par exemple, nous a expliqué quelle était la

 11   situation à l'intérieur de ces trains. Les gens étaient serrés comme des

 12   sardines, ne pouvaient pas se déplacer. Il n'y avait pas de fenêtres, et

 13   cetera.

 14   Et le témoin K62 nous a expliqué également qu'elle a eu peur de mourir à la

 15   gare parce qu'il y avait un monde fou.

 16   Ces civils ont été transportés en train vers la frontière avec la Macédoine

 17   et nombre d'entre eux, dont notamment M. Bucaliu, qui travaillait à la gare

 18   d'Urosevac, pendant cette première d'avril et cette dernière de mars, le

 19   nombre de trains venant de Pristina et partant vers la frontière

 20   macédonienne a beaucoup augmenté, ainsi d'ailleurs que le nombre de

 21   personnes qui s'y trouvaient, ceci afin d'expulser un maximum de gens de la

 22   province.

 23   Ces trains partaient à la frontière, ils étaient chargés de passagers et

 24   ils revenaient à vide. Au niveau du poste-frontière, on prenait les pièces

 25   d'identité, on les déchirait et on leur expliquait qu'ils allaient en

 26   Macédoine, que le territoire était devenu territoire serbe.

 27   Voilà donc des expulsions systématiques qui se sont reproduites dans

 28   toutes les municipalités du Kosovo. Ceci nous montre qu'il ne s'agissait

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  1   pas d'actes isolés, qu'il ne s'agit pas de coïncidences. Non, il s'agit

  2   d'opérations qui ont été planifiées, qui ont été organisées et dont le but

  3   obtenu était le but recherché. Il s'agissait de faire fuir la population de

  4   la province, la population civile de la province.

  5   Il y a d'autres exemples que M. Hannis va reprendre au cours de son

  6   intervention. Je ne vais donc pas revenir moi-même sur ces crimes, mais je

  7   souhaiterais répondre à certains arguments présentés par la Défense en

  8   l'espèce dans le prétoire ainsi que dans les mémoires en clôture.

  9   Les équipes de la Défense ont diverses explications sur les raisons qui ont

 10   conduit les gens à quitter la province du Kosovo. Certains nous ont dit que

 11   les gens sont partis à cause des bombardements de l'OTAN, que l'UCK les

 12   contraignait à fuir, parce que l'UCK voulait mettre en place une

 13   catastrophe humanitaire. Puis, on nous a expliqué aussi, du côté de la

 14   Défense, que les forces serbes n'ont pas expulsé la population, se

 15   contentant de les escortés jusqu'à la frontière pour les aider, pour

 16   protéger la population afin qu'elle ne reste pas dans des zones de combat.

 17   Nous avons également entendu les avocats de la Défense nous dire que les

 18   habitants de la région fuyaient, parce qu'il y avait à ce moment-là des

 19   combats légitimes qui opposaient les forces serbes à l'UCK.

 20   Selon nous, ces raisons ne nous expliquent pas pourquoi la population est

 21   partie. Je vais revenir sur l'argument selon lequel la population est

 22   partie à cause de l'OTAN.

 23   Ceci, c'est revenu comme une sorte de mantra du côté de la Défense malgré

 24   les preuves implacables qui disent exactement le contraire. On nous

 25   expliquait que la population a quitté la province à cause du bombardement

 26   de l'OTAN alors que les bombardements de l'OTAN, ils ont commencé bien

 27   après, au moment des attaques qui avaient lieu dans la province, au moment

 28   même de ces attaques.

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  1   Beaucoup de témoins qui ont survécu à ces événements, qui ont eu cette

  2   chance, sont venus ici pour nous expliquer que ce n'était pas ça qui les

  3   avait motivés. Ce n'était pas la raison pour laquelle ils avaient quitté la

  4   province. Nous avons ici un extrait de la déposition de Mme Bala. Voilà un

  5   exemple parmi d'autres de ces nombreux témoins qui nous ont parlé de cette

  6   problématique, qui nous dit, comme elle, que sa famille n'a pas quitté

  7   Pristina à cause des bombardements de l'OTAN. Je cite : "Nous avons été

  8   contraints à partir par l'armée, la police, ainsi que les autres forces qui

  9   se trouvaient à Pristina à l'époque." Vous vous souviendrez, Mesdames et

 10   Messieurs les Juges, des très nombreux témoins qui nous ont parlé de cela

 11   et qui ont tenu des propos semblables, qui ont répondu d'une manière

 12   semblable.

 13   Le général Smiljanic, nous avons son témoignage à l'écran, c'était le

 14   commandant de l'aviation serbe, il nous a dit que la zone du Kosovo

 15   bombardée par l'OTAN en premier lieu, c'était celle qui se trouvait au

 16   niveau de la frontière entre Albanie et Macédoine. Il a dit que 80 % des

 17   tirs avaient eu lieu dans cette zone, qu'elle avait été en priorité

 18   bombardée, détruite.

 19   Alors pourquoi est-ce que les gens auraient fui pour se rendre dans

 20   les zones où justement les bombardements étaient les plus violents ? Ça n'a

 21   aucun sens, ce n'est pas logique.

 22   On sait qu'au moment où le Kosovo était bombardé par l'OTAN, Belgrade

 23   aussi était bombardée. Or, nous n'avons pas assisté à des vagues de

 24   réfugiés comme celles qui ont eu lieu au Kosovo à Belgrade. On n'a pas du

 25   tout vu la même chose se produire. Et le fait est que les éléments du

 26   dossier nous montrent très clairement que ce n'est pas cela qui explique le

 27   départ de la population, ce n'est pas la raison de ce départ.

 28   Maintenant, je souhaiterais revenir sur l'argument selon lequel ces

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  1   départs, en fait, constituent une organisation humanitaire. Il s'agissait

  2   de faire partir ces civils qui se trouvaient dans une zone de combat. On

  3   sait que ce n'est pas vrai, nous qui avons écouté les dépositions des

  4   témoins qui ont expliqué que quand ils sont arrivés à la frontière, on leur

  5   a pris leurs papiers d'identité, ceux qui avaient des voitures se sont vu

  6   spolier des plaques d'immatriculation, on leur a pris leurs cartes grises,

  7   et cetera, et ensuite on les a forcés à traverser la frontière. Il s'agit

  8   de ce que nous avons appelé de nettoyage identitaire pour empêcher ces gens

  9   de rentrer chez eux ultérieurement. Donc on ne peut pas parler d'évacuation

 10   humanitaire.

 11   Il est exact que certains civils ont quitté certains secteurs, parce qu'il

 12   y avait à ces endroits des combats et ils avaient entendu que les forces

 13   serbes arrivaient vers leurs villages. Donc des témoins nous ont tenu de

 14   tels propos. Cependant, il ne faut pas oublier une chose, six mois

 15   seulement avant le début de cette campagne en mars 1999 - et je parle là de

 16   l'offensive de l'été qui a eu lieu entre août et octobre 1998 - il faut

 17   savoir que les forces serbes ont mené une campagne de grande envergure dans

 18   toute la province. Au cours de cette campagne, des milliers de civils ont

 19   été déplacés à l'intérieur de la province, des villages albanais ont été

 20   rasés et incendiés. Bien entendu, il y avait des civils qui ont fui en mars

 21   ou avril en apprenant que les forces serbes arrivaient, parce que six mois

 22   ou cinq mois auparavant, ils avaient connu déjà cette expérience. Ils

 23   avaient subi les conséquences de cette attaque et ils savaient quel était

 24   le sort qui les attendait s'ils restaient dans leurs villages. Ils avaient

 25   peur de mourir. Ils n'avaient pas de choix, pas d'autre option que de

 26   quitter leurs villages.

 27   Maintenant, je voudrais parler des meurtres qui sont visés à l'acte

 28   d'accusation. Je vais passer ici très brièvement en revue certains des

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  1   arguments de la Défense présentés au moment de l'examen de ces sites

  2   d'exécution ou de meurtres.

  3   La Défense, s'agissant des meurtres, nous a dit que les forces serbes

  4   étaient en train de mener une campagne légitime antiterroriste contre l'UCK

  5   et que les victimes de ces opérations c'étaient des gens qui s'étaient

  6   trouvés pris de manière tout à fait hasardeuse dans ces  incidents ou qui

  7   avaient été tués dans des combats légitimes.

  8   Il faut savoir qu'à Djakovica, au début avril, il n'y avait pas de

  9   membres de l'UCK lorsque la police a attaqué cette zone. Il n'y avait là

 10   que 20 civils dont 19 étaient des femmes et des enfants qui s'étaient

 11   réfugiés dans cette cave. La police les a fait sortir et les a abattus.

 12   Nous avons entendu un survivant qui à l'époque n'avait que 10 ans, qui a

 13   été témoin de ces faits. Il a vu sa mère se faire abattre, sa sœur être

 14   abattue également. Il a expliqué qu'il avait survécu uniquement pour une

 15   raison, c'est qu'il avait fait le mort et qu'ensuite il s'était enfui par

 16   la fenêtre. On sait que la maison a ensuite été incendiée par la police

 17   serbe.

 18   Puis il faut savoir qu'il n'y avait pas de police serbe à la pizzeria de

 19   Suva Reka. Trois branches de la famille Berisha s'étaient réunies à cet

 20   endroit. La police serbe les a contraints à sortir de cet établissement et

 21   quelque 40 personnes -– plus de 40 personnes ont été abattues. Il

 22   s'agissait de membres de la famille Berisha. Beaucoup d'entre eux étaient

 23   des femmes et des enfants. Ensuite, on sait que la police serbe a lancé des

 24   explosifs à l'intérieur de la pizzeria. Les examens médico-légaux montrent

 25   que les corps ont d'abord été enterrés à Pristina sur un champ de tirs pour

 26   être ensuite transportés non loin de Belgrade dans des charniers 

 27   clandestins.

 28   Alors s'il s'agissait de morts légitimes, pourquoi est-ce qu'on se serait

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  1   donné la peine de déplacer ces corps depuis Suva Reka pour les cacher dans

  2   des charniers ? Il ne s'agit indéniablement pas là de meurtres ou de morts

  3   légitimes, si l'on peut dire, mais de civils qui ont été exterminés parce

  4   qu'ils étaient Albanais du Kosovo.

  5   Parlant d'Izbica maintenant, on nous a expliqué que ceux qui sont morts

  6   étaient probablement des membres de l'UCK.

  7   Vous avez vu les images du Dr Liri Loshi, qui est arrivé sur place quelques

  8   jours seulement après le massacre et il est clair, quand on regarde ces

  9   images, que la plupart des victimes étaient des hommes âgés. On sait qu'il

 10   y avait beaucoup d'handicapés, il y a deux femmes qui ont été brûlées vives

 11   sur un tracteur par les forces serbes. C'étaient des gens qui s'étaient

 12   réunis avec des milliers d'autres qui avaient été chassés de chez eux, des

 13   villages de la municipalité. Tous ces gens-là s'étaient réunis dans une

 14   prairie. Ils espéraient qu'en restant tous ensemble à l'extérieur ils

 15   seraient protégés, que les forces serbes ne les attaqueraient pas. Ils

 16   avaient également fait en sorte de montrer qu'ils n'étaient pas des

 17   combattants, ils avaient des drapeaux blancs –- des sortes de drapeaux

 18   blancs faits avec des draps. Tout ce monde a été abattu. Ensuite, on a

 19   retrouvé ces corps dans des charniers à Petrovo Solo notamment, en Serbie.

 20   Dernier incident que je souhaite évoquer, il s'agit de l'incident de

 21   Kotlina. Beaucoup de témoins nous ont parlé de cet incident. Nous savons,

 22   grâce à la déposition d'un témoin oculaire des événements, que la police

 23   serbe, que l'armée serbe ont fait prisonnier un groupe d'hommes qui

 24   s'étaient enfuis et qui s'étaient cachés dans les collines, dans la forêt.

 25   Ils ont passé ces hommes à tabac et les ont emmenés vers des espèces de

 26   puits naturels qui se trouvaient à l'extérieur du village. Ces hommes ont

 27   été abattus et ensuite on a jeté les corps dans ces puits avant d'y jeter

 28   des engins explosifs.

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  1   Il ne s'agissait pas là d'opérations légitimes. Ces hommes n'étaient pas

  2   des combattants, et les éléments médico-légaux qui ont été versés à cet

  3   égard en l'espèce corroborent les dépositions que vous avez entendues, à

  4   savoir que ces personnes sont mortes à la fois de blessures par balles et

  5   des conséquences des explosifs. Ces corps ont été retrouvés dans le puits.

  6   Autre argument que nous avons entendu, c'est que ces meurtres sont le fait

  7   de personnes qui n'opéraient pas de manière légitime, mais pour des raisons

  8   et des motivations personnelles. On sait que ces meurtres ont généralement

  9   eu lieu au moment où les villages étaient attaqués, où on procédait au

 10   nettoyage de ces villages. Ce sont des termes que l'on retrouve dans

 11   certains documents militaires cités dans les mémoires en clôture. On

 12   constate un système semblable dans tous ces crimes, dans tous ces meurtres.

 13   On voit bien qu'il s'agissait d'une campagne qui avait pour objectif de

 14   semer la terreur au sein de la population civile. Il fallait, par là même,

 15   inciter d'autres à fuir. Beaucoup de victimes étaient des hommes et on les

 16   a tués pourquoi ? Pourquoi ? Parce que c'étaient des hommes aptes

 17   physiquement, des hommes qui avaient été faits prisonniers comme dans les

 18   exemples que je vous ai donnés précédemment et que l'on a ensuite tués.

 19   Beaucoup de victimes étaient également des femmes et des enfants, et ce

 20   sont des meurtres qui ont eu lieu au moment où on attaquait les villages,

 21   où on contraignait la population à fuir. 

 22   Tous ces éléments font l'objet d'un chef d'accusation de persécution qui

 23   inclut les meurtres et les expulsions. J'en ai déjà parlé. Il y a également

 24   eu des cas d'agressions sexuelles. Cela faisait partie de cette campagne

 25   destinée à faire peur à la population civile, à la contraindre, à l'inciter

 26   à quitter cette province. Nous avons présenté de nombreux exemples allant

 27   dans ce sens. Je ne vais pas y revenir parce que toute ceci se trouve dans

 28   notre mémoire.

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  1   Ces agressions sexuelles, elles ont également eu lieu au cours des

  2   expulsions. J'ai donné l'exemple de Pristina. Là, nous avons entendu la

  3   déposition d'un témoin protégé qui a fait l'objet d'une agression alors

  4   qu'elle se trouvait chez elle au moment où les forces serbes sont arrivées

  5   pour la chasser.

  6   D'autre part, au titre du chef de persécution, nous avons également parlé

  7   de la destruction des édifices religieux. Il s'agit de faits là qui ne sont

  8   pas seulement des faits à caractère criminel. Ce n'est pas seulement cela.

  9   Mais le fait qu'on ait détruit des édifices à caractère religieux, surtout

 10   des mosquées, reflète l'intention délictueuse dont j'ai parlé précédemment,

 11   qui était de ne rien laisser, de faire en sorte que ceux qui partaient

 12   n'aient aucun motif pour revenir. Les témoins qui sont venus nous parler

 13   ici refusent et rejettent l'argument de la Défense selon lequel les gens

 14   sont partis à cause des bombardements de l'OTAN. Beaucoup de témoins nous

 15   ont expliqué que ces mosquées, elles ont été détruites vers le 28 mars, et

 16   il ne s'agit pas là d'une coïncidence. Le 28 mars, c'était une fête

 17   musulmane importante, Bajram en l'occurrence, et on a vu ceci se produire

 18   dans plusieurs municipalités, les mosquées ont été détruites ce jour-là

 19   précisément.

 20   Il y a un argument qui a été soulevé par la Défense au sujet de tous les

 21   crimes commis. C'est celui de l'identité des auteurs de ces crimes. Qui

 22   étaient les auteurs de ces crimes, les auteurs physiques ? M. Hannis vous

 23   en a déjà parlé, vous a expliqué quelles sont les forces dont nous

 24   affirmons qu'elles se trouvaient sur le terrain. A l'époque, nous avons

 25   donné des éléments très détaillés sur ce point dans nos mémoires. Selon

 26   nous, les forces du MUP et de la VJ étaient les seules forces dignes de ce

 27   nom qui étaient déployées au Kosovo à l'époque, et toute organisation ou

 28   groupe armé qui se trouvait sur place opérait sous le contrôle, sous le

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  1   commandement des forces de la VJ et du MUP. Dans notre mémoire, nous avons

  2   donné de nombreux exemples pour chacun des sites où des crimes ont été

  3   commis. Nous avons donné de nombreux exemples d'éléments indiquant quelles

  4   étaient les unités qui se trouvaient sur place. D'autre part, des témoins

  5   nous ont expliqué quand ils sont venus ici, des témoins qui travaillaient

  6   dans ces organisations nous ont expliqué où ils étaient déployés à

  7   l'époque.

  8   C'est simple, il n'y avait pas d'autres forces dignes de ce nom sur le

  9   terrain en dehors des forces serbes. Il faut se souvenir d'une chose, le

 10   Kosovo c'est un territoire qui est tout petit. Je ne sais pas si vous vous

 11   souvenez du début de ce procès à l'époque. Nous avions montré le Kosovo

 12   superposé sur une carte de la Hollande et des Pays-Bas. Pour vous donner un

 13   petit peu une idée des dimensions assez restreintes de ce territoire, et

 14   notre position est la suivante : les forces serbes, les forces de la VJ et

 15   du MUP contrôlaient les zones où ils opéraient. Il n'y avait donc pas

 16   d'éléments incontrôlés qui opéraient dans la municipalité. Ces unités ont

 17   participé avec les forces de la VJ et du MUP à un plan commun qui fait

 18   l'objet de l'acte d'accusation en l'espèce.

 19   Maintenant, je vais passer à nos arguments juridiques sur les éléments

 20   des crimes et qui figurent dans notre mémoire préalable au procès,

 21   paragraphes 6 à 40 de notre mémoire préalable au procès, s'agissant des

 22   crimes contre l'humanité et des crimes de guerre et des éléments qui les

 23   constituent. Je ne vais pas revenir là-dessus parce que cela a été

 24   développé dans nos mémoires en clôture.

 25   M. Hannis a parlé de l'objectif commun de l'entreprise criminelle

 26   commune, et nous estimons, quant à nous, que les chefs 1 et 2, expulsion et

 27   transfert forcé, forment l'essentiel du dessein commun qui fait l'objet de

 28   l'acte d'accusation en l'espèce. En ce qui concerne les autres chefs

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  1   d'accusation 3 et 4, meurtre ou assassinat en tant que crime contre

  2   l'humanité et meurtre en tant que crimes de guerre et persécutions, nous

  3   estimons qu'ils faisaient partie du dessein commun de l'entreprise

  4   criminelle commune ou que cela en était une conséquence prévisible et que

  5   malgré tout, les accusés ont choisi de prendre le risque d'appliquer cette

  6   entreprise criminelle commune, ce plan commun.

  7   Au cours de l'espèce, vous vous êtes sans doute demandé pourquoi ces

  8   crimes, les crimes qui font l'objet de ce procès, ont eu lieu, surtout en

  9   écoutant les survivants, les survivants de ces événements atroces qui ont

 10   touché le Kosovo. Ces crimes, ils ont eu lieu parce que les dirigeants

 11   politiques, les dirigeants de la police et de la VJ ont fait que ces crimes

 12   se sont produits, ont causé ces crimes. Ce sont les accusés présents devant

 13   vous qui sont à l'origine de ces crimes.

 14   Je vais maintenant donner la parole à M. Stamp qui va poursuivre le

 15   réquisitoire pour l'accusation.

 16   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Auparavant, j'aimerais que vous

 17   m'apportiez une précision, si c'était possible, à un argument que vous nous

 18   avez présenté tout au début au sujet du plan commun. Votre argument c'est

 19   que ce plan, il existait au plus tard déjà au mois d'octobre 1998 ?

 20   Mme KRAVETZ : [interprétation] Oui. C'est ce que nous affirmons dans l'acte

 21   d'accusation.

 22   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que c'est également ce que vous

 23   dites maintenant au niveau du réquisitoire ?

 24   Mme KRAVETZ : [interprétation] Nous avançons, bien entendu, sachant que

 25   l'acte d'accusation a été modifié, que les incidents de Racak ont été

 26   supprimés, donc je ne parle pas des événements de juin [comme interprété],

 27   je parle du moment où les opérations de l'OTAN ont débuté. Donc selon nous,

 28   la campagne d'attaque, d'agression au Kosovo a commencé le 24 mars 1999.

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  1   Nous en avons parlé dans notre mémoire. Nous expliquons comment les forces

  2   se sont renforcées avant le début de cette campagne. M. Hannis en a parlé,

  3   j'en ai parlé moi aussi. Nous affirmons que les accusés se sont servis

  4   comme prétexte du bombardement de l'OTAN qui a commencé le 24 mars pour

  5   mettre en place leur plan, mais auparavant ils s'étaient préparés, ils

  6   avaient rassemblé des forces.

  7   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, justement, c'est l'objet de mes

  8   questions. Je ne pense pas que vous avez répondu quand vous dites que

  9   l'acte d'accusation a été limité dans sa portée. Je pense que quand vous

 10   présentez vos arguments, il faut que vous reveniez sur les preuves qui ont

 11   été présentées et sur ce qu'elles démontrent, selon vous. Moi, il y a une

 12   chose que j'aimerais bien comprendre. Est-ce que vous nous dites que même

 13   avant les négociations de Rambouillet à Paris, est-ce que vous nous dites

 14   que bien avant ces négociations le plan existait d'ores et déjà ? Est-ce

 15   que c'est ce que vous affirmez ?

 16   Mme KRAVETZ : [interprétation] Oui. Nous affirmons que l'entreprise

 17   criminelle commune, elle a vu le jour au moins déjà en octobre 1999 [comme

 18   interprété]. Le plan existait. Quand j'ai débuté mon intervention ce matin,

 19   j'ai dit - et je parle ici uniquement des faits visés à l'acte d'accusation

 20   - j'ai dit donc que ce plan, il  avait été mis en œuvre à partir du 24 mars

 21   1999. Bien entendu, auparavant il y a eu une augmentation des forces, une

 22   préparation de ces forces avant le bombardement de l'OTAN, et on va en

 23   parler plus tard.

 24   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais vu la manière dont vous avez

 25   présenté les choses - et c'est déjà la deuxième fois que vous le faites -

 26   j'ai l'impression que ce que vous nous dites c'est que les autorités se

 27   sont servies de la campagne de bombardement de l'OTAN comme une sorte de

 28   prétexte, de couverture pour dissimuler leur propre plan, pour le mettre en

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  1   œuvre. Est-ce que vous nous dites que c'est quelque chose qui s'est produit

  2   à cause de l'évolution des circonstances, ou est-ce que vous nous dites que

  3   quand ils sont allés participer aux opérations ou aux négociations de paix,

  4   ils se sont dits : "Bon, et bien, qu'en tout, ces négociations seront dans

  5   l'impasse, quand l'OTAN bombardera, à ce moment-là on va s'en servir pour

  6   faire partir la population" ? Et ça pourra m'amener à la question de savoir

  7   s'ils pensaient véritablement qu'ils pouvaient combattre l'OTAN, vaincre

  8   l'OTAN et faire partir tous les Albanais du pays ? Est-ce que c'est ce que

  9   vous affirmez véritablement ?

 10   Mme KRAVETZ : [interprétation] S'agissant des négociations de paix, de

 11   l'interruption de ces négociations, M. Stamp abordera la chose de manière

 12   plus approfondie. Mais notre argument ici, c'est que les autorités serbes,

 13   quand elles ont été participer à ces négociations, elles n'avaient pas

 14   véritablement l'intention sincère et légitime d'arriver à une solution

 15   pacifique de la situation du Kosovo.

 16   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne veux surtout pas vous engager à

 17   parler d'un sujet que vous n'aviez pas préparé vous-même. Je suis tout à

 18   fait prêt à limiter l'examen de cette question au sujet que vous êtes en

 19   train d'aborder en ce moment. Mais je voudrais revenir au début de cette

 20   question, à la première partie de cette question qui est devenue une

 21   question à plusieurs volets. Je voudrais savoir si vous nous dites

 22   véritablement la chose suivante : Est-ce que finalement ce plan, il a été

 23   mis en œuvre en mars à cause de l'évolution de la situation ? Est-ce que

 24   c'est ce que vous dites ou est-ce que cela a toujours été leur intention ?

 25   Mme KRAVETZ : [interprétation] Nous, ce que nous affirmons c'est que cela a

 26   toujours été leur intention de mener à bien cette campagne, la mettre en

 27   oeuvre. Comme je l'ai dit –-

 28   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais comment faites-vous le lien

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  1   avec la campagne de bombardements ? Voilà ce que j'essaie de comprendre.

  2   Est-ce que vous nous dites qu'ils avaient toujours pensé envisagé que

  3   l'OTAN allait attaquer et que ce serait le moment idéal pour faire partir

  4   la population, pour chasser la population, ou bien est-ce que vous dites

  5   qu'il y a coïncidence entre ces deux événements ?

  6   Mme KRAVETZ : [interprétation] Non, je ne dis pas qu'il y a coïncidence.

  7   Dans notre mémoire, nous avons parlé du fait qu'avant les bombardements de

  8   l'OTAN, dans les mois qui ont précédé, il y avait des planifications des

  9   mouvements du MUP et de la VJ, il y a une réunion qui a eu lieu le 17

 10   février au niveau du MUP. Il y a des ordres qui viennent de la VJ et qui

 11   montrent qu'ils avaient l'intention, c'est indéniable, de lancer une

 12   campagne au Kosovo. Les choses ne sont pas arrêtées en octobre, elles se

 13   sont interrompues au moment où ils ont lancé cette campagne de grande

 14   envergure dont j'ai parlé. Et on sait qu'en octobre il y a eu des accords,

 15   les forces internationales sont venues sur le terrain, et cetera. Mais ils

 16   avaient toujours cette intention, cette intention de mener à bien la

 17   campagne et de chasser la population civile. On a vu que les forces se sont

 18   renforcées auparavant, on va y revenir plus tard.

 19   Il y a aussi des forces qui sont restées sur place contrairement aux

 20   accords qui avaient été conclus. Et en février, nous en parlons dans notre

 21   mémoire, le MUP déjà planifiait ses opérations. Nous avons, d'autre part,

 22   la déclaration que je n'ai pas sous les yeux du ministre Stojiljkovic et de

 23   Lukic également qui disent qu'une fois que le bombardement de l'OTAN a

 24   commencé ou commencera, nous avons l'intention, je les cite : "De mener à

 25   bien des opérations au Kosovo." Je suis désolée, je n'ai pas la référence

 26   précise de ce document, mais je souhaiterais vous renvoyer à notre mémoire

 27   dans la partie de notre mémoire, où nous parlons de cette réunion du 17

 28   février dont nous estimons qu'elle est extrêmement importante, qu'elle

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  1   montre quelles étaient les intentions des autorités, elles avaient bel et

  2   bien l'intention de mener à bien une offensive. Il y est question, Madame,

  3   Messieurs les Juges, il est question de cette partie du QG du MUP ou les

  4   parties – il est question de la coordination entre la VJ et les effectifs

  5   du ministère de l'Intérieur.

  6   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Madame Kravetz.

  7   [La Chambre de première instance se concerte]

  8   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci de nous avoir aidés, Madame

  9   Kravetz. Nous allons entendre M. Stamp.

 10   Mme KRAVETZ : [interprétation] Juste brièvement, Monsieur le Président. Au

 11   paragraphe I où j'ai fait référence à des paragraphes, il s'agit des

 12   paragraphes 237 et 238, je voulais juste demander aux Juges de la Chambre

 13   de se référer auxdits paragraphes. Merci.

 14   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. A vous, Monsieur Stamp.

 15   M. STAMP : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Etant donné que

 16   nous en arrivons au terme, je tiens à d'abord exprimer ma gratitude d'avoir

 17   l'occasion de comparaître et de prendre la parole devant cette équipe de

 18   Juges et de m'adresser à la Chambre.

 19   Je ne vais pas être aussi rapide que M. Bolt, l'homme de la Jamaïque qui a

 20   couru dans l'équipe olympique.

 21   M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Est-ce que vous êtes en train de

 22   féliciter la Juge Nosworthy pour la Jamaïque ?

 23   M. STAMP : [interprétation] Je suis tout à fait certain du fait qu'elle

 24   doit se trouver fière de leur réalisation, parce qu'elle doit certainement

 25   se trouver impliquée. Alors je pense, Monsieur et Mesdames les Juges, que

 26   dans ce mémoire de clôture nous avons un document très complet avec des

 27   éléments de preuve pertinents que nous allons présenter de façon attentive.

 28   Il y a des arguments présentés par la Défense dans leur mémoire, chose qui

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  1   se trouve à être tout à fait naturelle étant donné que bon nombre

  2   d'arguments et de thèses et de questions dont il a été question ont pu être

  3   développés au fur et à mesure que l'affaire a été présentée.

  4   M. Bonomy a soulevé plusieurs questions et je me propose d'apporter

  5   des réponses moi-même, et M. Hannis lui aussi demandera à répondre à

  6   certaines des questions évoquées.

  7   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est tout à fait acceptable, Monsieur

  8   Stamp.

  9   M. STAMP : [interprétation] Nous allons parler maintenant de ce que Mme

 10   Kravetz a évoqué, à savoir les éléments de preuve concernant la base du

 11   crime, à savoir une espèce de modèle qui indiquerait que les crimes commis

 12   ont été systématiques et commis à une grande échelle. Parce que le Kosovo,

 13   bien qu'étant un territoire assez petit, est également un endroit où il y a

 14   eu des crimes massifs de commis. Il y a eu des centaines de milliers de

 15   gens expulsés de chez eux, des milliers de tués, et le tout s'est produit

 16   en fort peu de temps. L'échelle et la gravité des crimes dont il est

 17   question dans le mémoire de clôture de l'Accusation et dont vient de nous

 18   parler Mme Kravetz, sont des éléments qui touchent à chacun des aspects ou

 19   chacun des volets de l'affaire que nous avons présentés, à savoir la

 20   connaissance qu'ont eue les accusés et l'intention qu'ont eue les accusés

 21   de commettre ou de faire commettre ce qui s'est produit. Nous n'affirmons

 22   pas qu'il y a eu là une situation où il a pu y avoir quelques victimes et

 23   où on aurait pu dire que des renégats l'auraient fait ou que l'on n'aurait

 24   pas pu y faire quoi que ce soit. Nous affirmons ici qu'il s'agit d'une

 25   entreprise criminelle commune massive et organisée.

 26   Les éléments ou les arguments présentés par la Défense montrent qu'il y a

 27   eu des cas sporadiques ou fortuits de violence à l'égard d'Albanais du

 28   Kosovo, et cela n'est pas conforté par des éléments de preuve.

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  1   L'argumentation, à mon avis, a été – une argumentation de ce type a été

  2   présenté par la Défense de M. Ojdanic au paragraphe 18 où l'on dit que les

  3   meurtres et les expulsions ont été le résultat d'agissements d'individus ou

  4   de petits groupes qui sont intervenus pour se venger ou cela a été le fait

  5   d'une aide, voire encore la conséquence d'ordres émanant de leaders locaux.

  6   Et c'est une tentative de minimiser, de localiser les crimes dont il a été

  7   question.

  8   M. Milutinovic, dans son paragraphe 303 dans son mémoire de clôture, a

  9   présenté en page 145, à savoir la page 165 de sa version, où il est dit que

 10   l'on ne pourrait raisonnablement pas attirer la conclusion partant des

 11   éléments de crime relatifs à la base – des éléments de preuve relatifs à la

 12   base de crime pour ce qui est de l'existence d'un plan criminel.

 13   Le modèle de l'existence de ces crimes ou de la perpétration de ces crimes

 14   est typique, à savoir de villages ou de population où il y avait

 15   prédominance d'Albanais du Kosovo qui ont été expulsés, et pour la plupart

 16   des cas, c'est surtout les hommes qui ont été mis de côté et abattus.

 17   Il y a des éléments de preuve que, lorsqu'on les considère dans leur

 18   ensemble, nous montrent qu'il s'agit d'une compagne systématique à grande

 19   échelle. Pour ce qui est des éléments de preuve de la base de crime, à

 20   savoir éléments de preuve fondés sur ce que nous avons pu voir au niveau

 21   des victimes, se trouvent être renforcés par les transports clandestins et

 22   la dissimulation des cadavres de plus de 800 Albanais du Kosovo en Serbie

 23   même, et ces cadavres ont été découverts en 2001.

 24   C'est un élément qui n'a pas, pour l'essentiel, été contesté du tout.

 25   L'Accusation affirme que les Juges de la Chambre de première instance

 26   peuvent tirer toute une série de conclusions concernant les allégations en

 27   question qui n'ont pas été contestées. Il y en a qui sont tout à fait

 28   évidentes, à savoir les restes des dépouilles de ces victimes, de ces

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  1   personnes, se trouvent être des restes des victimes de meurtre, et les

  2   intervenants qui ont organisé ces transports étaient parfaitement

  3   conscients du fait qu'il s'agissait de victimes de meurtre, non pas de

  4   combattants tombés au combat mais de victimes de meurtres. Ils ont donc été

  5   conscients de leur culpabilité et ont participé à ces meurtres. Parce que

  6   sinon les cadavres n'auraient pas été cachés, dissimulés, on n'aurait pas

  7   investi autant d'efforts pour leur transport. On aurait procédé d'une façon

  8   plus habituelle.

  9   Alors, avant que de procéder plus en avant, je voudrais procéder à

 10   une petite rectification. Paragraphe 289 de l'Accusation, du mémoire

 11   préalable de l'Accusation, il est fait référence à un tableau, un avenant

 12   C, et il est question de corps exhumés en Serbie. En réalité, ici il s'agit

 13   d'un tableau reprenant les éléments de preuve relatifs aux victimes des

 14   sites de meurtre qui se trouvent être énumérés dans les annexes. Il ne

 15   s'agit pas de la totalité des cadavres exhumés en Serbie, mais seulement

 16   des victimes qui ont été évoquées par l'Accusation. Il s'agit de ce tableau

 17   qui a été communiqué le 27 juillet 2007. Ceci est dit pour aider les Juges

 18   de la Chambre pour ce qui est de pouvoir situer les éléments de preuve

 19   médico-légaux pour ce qui est des personnes décédées énumérées à l'acte

 20   d'accusation. Il y a également les éléments de preuve de médicine légale

 21   pour ce qui est des restes humains qui ont pu être identifiés grâce à

 22   l'ADN. Il y a également des témoignages de témoins oculaires d'exécutions

 23   de ces personnes.

 24   Le témoignage de M. Baraybar montre que la plupart des victimes de

 25   meurtre indiquées dans les listes et dont les cadavres ont été retrouvés en

 26   Serbie ont permis de déterminer que ces gens-là sont des victimes tombées

 27   suite à des tirs d'armes à feu, et de façon scientifique il a pu être

 28   déterminé que ces personnes n'avaient pas été impliquées dans des combats.

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  1   De façon analogue, il peut être tiré des conclusions de ce type

  2   partant des restes humains exhumés, qui proviennent d'emplacements

  3   différents. Donc il y a eu perpétration de crimes différents à des endroits

  4   différents et à des moments différents. Il y a eu des gens qui ont été

  5   enterrés à des endroits différents, puis exhumés systématiquement,

  6   rassemblés et transportés à des centaines de kilomètres pour être ensevelis

  7   dans des fosses communes tous ensemble. C'est ce que nous affirmons. Donc

  8   il ne s'est pas agi de meurtres perpétrés ça et là, comme on a voulu le

  9   présenter, mais il s'est agi d'une campagne à grande échelle et organisée

 10   visant à perpétrer ces exécutions.

 11   Les intervenants qui ont organisé le transfert de ces cadavres, et non pas

 12   seulement ce transfert mais la collecte de ces cadavres à différents

 13   endroits, puis leur transport vers la Serbie, bien, la plupart des gens qui

 14   avaient organisé, ils disaient cela, avaient connaissance, avaient

 15   participé aux exécutions à l'origine. Autrement, ils n'auraient pas su, ils

 16   n'auraient pas été capables de rassembler tous ces cadavres de sites si

 17   différents.

 18   Les annexes ou l'annexe C représente la somme des éléments de preuve

 19   concernant les victimes qui sont listées dans les différents avenants de

 20   l'acte d'accusation. Il y a plusieurs - enfin, il y a bon nombre de

 21   victimes, d'Albanais du Kosovo dont les restes ont pu être identifiés parmi

 22   ceux qui ont été retrouvés en Serbie et qui ne sont pas énumérés dans la

 23   liste qui fait état des personnes ayant fait l'objet de meurtres. Et parmi

 24   les listes de victimes qui ont été retrouvées en Serbie en 2001, on peut

 25   évoquer la pièce P2798, qui est un CD qui comporte une liste consolidée des

 26   personnes disparues au Kosovo et cela a été fourni par la mission des

 27   Nations Unies au Kosovo et le bureau chargé de la recherche des personnes

 28   disparues. Ce sont des éléments de preuve qui n'ont pas été contestés.

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  1   Nous pouvons voir les colonnes avec les listes de victimes qui sont

  2   décrites sous la colonne "State" et vous verrez à la colonne B l'état pour

  3   ce qui est de savoir si l'affaire a été close et si les restes humains ont

  4   été restitués aux familles respectives. M. Baraybar a témoigné à ce sujet.

  5   Si on se penche plus à droite vers la colonne I, on voit la date de la

  6   disparition telle que rapportée.

  7   Madame, Messieurs les Juges, vous allez voir plus tard dans les

  8   colonnes J et K quels sont les sites d'événements, donc de décès ou de

  9   disparition par municipalité. Et si vous vous penchez sur la colonne O, il

 10   y est fait référence des sites de fosse commune où les personnes en

 11   question ont été découvertes en l'an 2001.

 12   Toutes ces pièces à conviction reprennent plus de 5 000 personnes

 13   dont la disparition a été rapportée au bureau des Nations Unies chargé de

 14   la recherche des personnes disparues. Toutefois, il y en a quelque peu plus

 15   de 600 dont les cadavres ont été retrouvés en Serbie, et c'est sur cela que

 16   je souhaite me pencher. Je ne veux pas dire qu'il y a eu 5 000 cadavres

 17   d'évoqués dans cette pièce à conviction -- fait partie des éléments

 18   pertinents pour ce qui est de la thèse que nous défendons. Il s'agit des

 19   personnes disparues dont la disparition a été constatée par le bureau

 20   chargé de la recherche de ces personnes disparues.

 21   Alors la technologie utilisée est celle que vous avez sous les yeux

 22   et ne constitue qu'une partie de la pièce à conviction. La technologie de

 23   présentation de cette pièce à conviction nous permet de procéder à une

 24   répartition des victimes et M. Reid a présenté ici seulement celles des

 25   victimes dont les cadavres ont pu être identifiés dans les fosses communes

 26   en Serbie à Petrovo Selo et à Batajnica, chose que l'on peut retrouver dans

 27   la colonne O. Ce tableau peut être organisé de façon à faire mettre en

 28   valeur l'endroit où les victimes ont été tuées ou l'endroit où l'on suppose

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  1   où meurtre il y a eu. On peut le retrouver en cliquant sur la souris. Alors

  2   si vous vous penchez sur la colonne L pour le village, et si vous

  3   redescendez à partir de Bogicevii, Pec, Brestovac, Orahovac, Decani,

  4   Djakovica, Dobro Selo, Obilic, je dirais que bon nombre de ces cadavres ont

  5   pu être retrouvés à Batajnica. On a pu voir que des gens de Glogovac ont

  6   été retrouvés à Petrovo Selo, des gens de Decani et de Izbica, et de la

  7   municipalité de Serbica ont pu être retrouvés à Batajnica. Bon nombre

  8   d'hommes originaires de Korenica. Et à ce sujet, nous avons entendu bon

  9   nombre de témoignages au sujet, tant que de Korenica que d'Izbica. Certains

 10   de ces cadavres ont été retrouvés à Batajnica, d'autres encore à Petrovo

 11   Selo. Peut-être

 12   va-t-on quelque peu trop vite.

 13   On retrouvera bon nombre de victimes originaires de Meja. Ils seront

 14   au moins au nombre de 300, 300 personnes qui ont été identifiées et dont la

 15   disparition a été rapportée au site de Meja. On a déclaré que ces personnes

 16   étaient disparues vers le 27 avril. L'Accusation a présenté des éléments de

 17   preuve au sujet de l'incident de Meja lors d'une grande offensive conduite

 18   par les effectifs de la FR de Yougoslavie et de la Serbie qui s'est soldée

 19   par le meurtre de plus de 300 personnes. Les cadavres ont ultérieurement

 20   été retrouvés à Batajnica en Serbie.

 21   Si l'on descend un peu plus bas, on trouvera des gens originaires de

 22   Pec, puis de Ramoc, puis de Slovénie, - excusez-moi de ma prononciation.

 23   Je l'indique pour démontrer aux Juges de la Chambre qu'il ne s'agit

 24   pas là d'une situation où l'on aurait eu peut-être de voir quelques

 25   incidents où l'on aurait collecté quelques cadavres pour essayer de les

 26   dissimuler. Ici, nous avons une entreprise de grande taille. Et si l'on se

 27   pencher sur les dates auxquelles ces gens-là ont été exécutés, mis à part

 28   le fait que ces dates coïncident avec des incidents repris par l'acte

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  1   d'accusation, par exemple, les victimes de Meja ont été tuées le 27 avril,

  2   et on verra à l'acte d'accusation que c'est précisément la période

  3   reprenant les mois de mars et avril. A cet effet, je vous réfère à un

  4   incident survenu aussi en janvier 1999, puis un autre incident de juillet.

  5   Alors si l'on reprend les statistiques, il est possible que des erreurs

  6   occasionnelles aient été commises, mais il est question ici de milliers de

  7   victimes, donc un ou deux, plus ou en moins, n'influe pas sur le résultat.

  8   J'ai demandé à M. Reid de mettre sur la carte du Kosovo les

  9   emplacements où ces personnes ont été tuées, et on voit les petits cercles

 10   indiquant qu'il y a eu quelques personnes de tuées et les grands cercles

 11   qui nous indiquent des chiffres allant de 15 et au-delà. Et je pense qu'on

 12   pourrait se référer au sud-ouest de la carte, et je pense qu'il s'agit de

 13   Meja, et là il y a un chiffre énorme de victimes, de 600 victimes.

 14   Si vous vous penchez sur le centre de la carte vers le sud de Suva

 15   Reka, vous allez voir un tout petit point. Je tiens à préciser que les

 16   victimes de Suva Reka n'ont pas été intégrées à la liste des Nations Unies

 17   portant sur les personnes disparues. Ces personnes sont les toutes

 18   premières à avoir été déterrées de ces fosses communes en Serbie et qui se

 19   sont vues identifiées par le laboratoire espagnol conduit par le Dr Alonso.

 20   Je crois qu'il a témoigné à ce sujet. Alors si on avait intégré ceci, nous

 21   aurions eu un grand cercle en plein milieu de Suva Reka.

 22   Ce que je veux dire, Madame et Messieurs les Juges, c'est que

 23   l'analyse de ces éléments de preuve tend à rejeter la possibilité de

 24   pouvoir affirmer qu'il ne s'agissait pas là d'exécution organisée en masse,

 25   à une campagne d'exécution massive, et ce que nous pouvons voir ici n'est

 26   que la pointe d'un iceberg.

 27   Bien entendu, une campagne à si grande échelle sous-entend

 28   nécessairement un haut niveau d'organisation et la seule conclusion, à mon

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  1   avis, est de tirer précisément cette conclusion-là. Ceci se trouve être

  2   conforté par les témoignages disant qu'il y a eu implication de

  3   personnalités haut placées au ministère de l'Intérieur pour ce qui est de

  4   pouvoir donner des ordres aux chauffeurs s'agissant du déplacement des

  5   cadavres.

  6   On a dit qu'à Batajnica, pendant une période de 20 jours, début avril 1999

  7   et au-delà, il y a eu au moins six transports de grands camions réfrigérés

  8   remplis de cadavres.

  9   Donc ceci indique l'existence d'une campagne organisée visant à faire

 10   exécuter des personnes et cela n'est nullement des actes isolés. Mais comme

 11   l'a à juste titre indiqué Mme Kravetz, quand on parle d'exécutions, quand

 12   on se penche sur les sites où on a rassemblé ces corps, on ne peut tirer

 13   qu'une conclusion, à savoir celle d'affirmer qu'il y a eu déportations

 14   massives.

 15   Donc la question qui se pose est celle de savoir s'il s'agissait d'une

 16   campagne de meurtres ou de persécutions, voire d'exécutions qui, de façon

 17   évidente, se sont vu être organisées, systématisées et placées en

 18   corrélation avec les déportations. Nous affirmons, nous, à l'Accusation,

 19   que cela, bien entendu, était lié l'un à l'autre.

 20   Les éléments de preuve portant sur Meja se trouvent être les plus évidents.

 21   Il s'agissait là d'une opération conduite par la VJ et nous pouvons le voir

 22   partant des éléments de preuve pour ce qui est de ce que l'on présenté

 23   concernant l'accusé Lazarevic. Les éléments de preuve montrent que bien que

 24   les meurtres aient été commis par des membres de la police, les forces de

 25   la VJ et celles du MUP sont descendues dans la vallée à la date du 27

 26   avril. Et je fais référence  au témoignage du témoin Pnishi. Les forces du

 27   MUP sont descendues de la vallée, des points de contrôle. Des hommes

 28   avaient été séparés des femmes et ont été exécutés en grande quantité. Et

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  1   les corps de ces hommes sont disparus. Il y a un très grand nombre de

  2   personnes présumées mortes, mais portées disparues.

  3   De la même façon, Suva Reka, Izbica. Les meurtres ont eu lieu là où la

  4   population habitait dans ces régions. Et à Petrovo Selo et à Batajnica, il

  5   y a eu des exemples similaires de meurtres.

  6   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Stamp, je ne sais pas si

  7   c'est le compte rendu d'audience qui ne reflète pas vos propos

  8   adéquatement, mais il me semble que, pour revenir à Meja, qu'est-ce que

  9   vous avez dit effectivement concernant les auteurs ? Vous avez dit qu'il

 10   s'agissait d'une opération pour laquelle la VJ avait la responsabilité.

 11   Mais par la suite, vous dites que les meurtres avaient été commis

 12   principalement par des policiers. Vous dites que les forces du MUP

 13   contrôlaient la – ou étaient descendues plutôt de la vallée de la colline

 14   et que les gens y avaient été séparés et exécutés. Est-ce que vous pourriez

 15   élaborer sur ce point ?

 16   M. STAMP : [interprétation] Oui. Les preuves concernant Pnishi, Dedaj et

 17   Peraj démontrent que des gens avaient été tués par la VJ, les soldats et le

 18   MUP. Je me souviens d'avoir entendu des éléments de preuve concernant

 19   Pnishi. Il apparaît qu'un très grand nombre de meurtres avaient été commis

 20   aux points de contrôle contrôlés par le MUP et ce sont des éléments de

 21   preuve de Peraj, et ceci avait été vu à deux ou trois points de contrôle.

 22   Des dizaines d'hommes y avaient été assassinés, tués. Donc ce que je veux

 23   dire c'est que la plupart des personnes avaient été tuées sur ces points de

 24   contrôle. Les effectifs des deux parties sont descendus de la montagne et

 25   ont commis ces exactions. 

 26   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien. Merci.

 27   M. STAMP : [interprétation] Les éléments de preuve soutenus également par

 28   les éléments concernant les crimes sont également appuyés par des éléments

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  1   de preuve statistiques de la région. Cet élément de preuve nous montre une

  2   confirmation que les allégations de meurtres ont été liées à l'expulsion et

  3   à l'expulsion systématique et généralisée.

  4   Cet élément de preuve-là seul est une confirmation. C'est un élément

  5   de preuve qui permet de confirmer les éléments de preuve concernant les

  6   crimes commis. Le témoignage du Dr Ball nous le prouve.

  7   Le Dr Ball dit que les meurtres ne sont pas résultat d'actes de

  8   violence menés de façon aléatoire par les forces du gouvernement. Il a dit

  9   que les flux de migration et les meurtres avaient lieu pendant la même

 10   période et se sont déroulés dans les mêmes régions, aux mêmes endroits. Et

 11   il a indiqué que les deux phénomènes résultent de la même cause. Ceci

 12   correspond également à la période des bombardements de l'OTAN, mais cela ne

 13   correspond pas - en fait, ne s'est pas déroulé pendant les bombardements de

 14   l'OTAN, mais plutôt par les expulsions faites par les forces yougoslaves.

 15   En fait, ce qu'il dit très clairement c'est que les analyses ne

 16   prouvent pas que ces crimes avaient été commis par la force, les effectifs

 17   des forces yougoslaves. Ce qui nous prouve c'est que les témoins étaient là

 18   pour en parler.

 19   Et l'Accusation avait l'intention de venir en aide à la Chambre pour

 20   statuer sur des questions très techniques. La connaissance scientifique

 21   spécialisée est nécessaire et ce n'est pas une zone qu'une personne

 22   ordinaire peut comprendre ou peut saisir très rapidement.

 23   La démographie statistique est appliquée lorsqu'il s'agit de prouver

 24   tout ceci et il nous faut, bien sûr, entendre un démographe spécialisé afin

 25   de pouvoir donner des opinions leur permettant de tirer des conclusions

 26   afin de comprendre ce qui se passe et quelles sont les questions.

 27   Le rapport Ball et d'autres experts du domaine des statistiques et de

 28   la démographique [comme interprété] parlent d'une crise humanitaire

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  1   complexe. Ceci est apparent et découle du CV qui a été donné.

  2   Sur la base du travail du Dr Ball et en se basant sur le rapport du

  3   Dr Fruits, qui a également témoigné dans cette affaire, ceci se trouve dans

  4   les arguments présentés par le général Ojdanic au paragraphe 126.

  5   Le Dr Fruits, Monsieur le Président, n'est pas une personne qualifiée dans

  6   le domaine de la démographie statistique et de l'application des crises

  7   humanitaires. Il admet qu'il n'a publié qu'un seul article sur le domaine

  8   de la démographie et c'est un article qui parle de l'information

  9   démographique pour évaluer les dépenses gouvernementales. C'est à la page

 10   25 978 du compte rendu audience. Il dit également ne pas être un expert

 11   dans le domaine des statistiques, même s'il a travaillé dans la

 12   planification urbaine où il a dû employer des statistiques, mais il n'est

 13   pas un expert.

 14   Le président de l'Association américaine des statistiques est un expert et

 15   il a pris part à la rédaction du rapport Ball. C'est le Dr Fruits. Le Dr

 16   Fruits, dans son témoignage, lorsqu'on lui a posé la question, dit qu'il

 17   est d'accord pour dire qu'il ne connaissait que la méthodologie de base

 18   employée par le Dr Ball et les autres experts lorsqu'il s'agissait

 19   d'évaluer le nombre de personnes décédées. C'est  un système d'évaluation

 20   multiple et ce système avait été employé ou est employé partout dans le

 21   monde pour évaluer le nombre de victimes  de maladie, famine, et cetera,

 22   donc le nombre de victimes décédées à la suite de maladies et de famine. Le

 23   Dr Fruits nous parle de ceci à la page 25 980 du compte rendu d'audience.

 24   Lorsque contre-interrogé, le Dr Fruits a même dit qu'il ne connaissait

 25   absolument pas la terminologie de base employée dans le domaine telle que

 26   nous pouvons le voir lors de l'échange qui ait eu lieu, qui se trouve

 27   maintenant à l'écran. Alors vous pouvez le voir à l'écran. Lorsqu'on lui a

 28   posé des questions sur la terminologie employée dans le domaine, il ne

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  1   savait même pas ce que certains mots voulaient dire. Lorsqu'on lui a

  2   demandé quelle était son expertise dans le domaine s'agissant de la

  3   statistique et la démographie, il m'a dit : "Je ne suis pas un expert, même

  4   j'ai passé deux ans à travailler dans ce domaine."

  5   En fait, il a simplement passé un certain nombre d'heures ou de jours

  6   à préparer son rapport et se préparer, bien sûr, pour venir témoigner en

  7   l'espèce, mais c'est tout. Son expertise ne se limite qu'à ça. Son

  8   expertise également ne se limite qu'à sa préparation, qu'à la préparation

  9   qu'il a faite pour venir témoigner en tant que témoin de la Défense. 

 10   Ce qui est encore plus frappant - et j'insiste vraiment sur ce point, car

 11   c'est vraiment un point très technique relatif à l'expertise - lorsque la

 12   Chambre doit s'appuyer sur un témoin expert, sur les opinions de témoins

 13   experts, ce n'est pas très facile pour une personne qui n'est pas un expert

 14   de comprendre tout ceci. Ce qui est très important, c'est que le Dr Fruits,

 15   dans son rapport, au paragraphe 11,2, dit que : "l'analyse statistique

 16   pourrait donner un test objectif qui permet de vérifier les hypothèses du

 17   Dr Ball."

 18   Ceci aurait pu alors être vérifié par l'application de procédures

 19   statistiques.

 20   Il a également admis qu'au cours de la période de deux ans pendant laquelle

 21   il travaillait – vous pouvez voir le texte à la page 26 024 – il a admis

 22   qu'au cours d'une période de deux ans pendant laquelle il a travaillé dans

 23   cette affaire, il avait reçu des données du Dr Ball pour son analyse,

 24   telles qu'il le confirme à la page 25 299 [comme interprété], dans le but

 25   de tester l'hypothèse présentée par le Dr Ball. Toutefois, il n'a pas fait

 26   ce test lui-même. Il était doté pour les présenter, mais il n'a pas fait

 27   lui-même de vérifications. Il n'a pas non plus précisé quelles étaient les

 28   procédures qu'il aurait pu employer pour vérifier la méthodologie employée

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  1   par le Dr Ball, même si lui-même il nous a confirmé qu'il n'aurait eu

  2   besoin que d'une semaine au lieu de deux ans pour faire ce travail. Encore

  3   une fois, vous avez l'extrait du transcript à l'écran, relatif à ce que je

  4   viens de dire.

  5   Il est un peu arrogant dans la dernière réponse. Il dit que : "Cela

  6   m'aurait pris une semaine, mais je suis un peu plus prudent en tant que

  7   statisticien." C'est un peu ironique comme réponse, mais ce que je veux

  8   dire c'est que c'est une omission très sérieuse d'un expert lorsqu'il

  9   essaie de critiquer, outre les termes qu'il emploie, mais c'est une

 10   omission très sérieuse faite par un témoin expert qui essaie d'amoindrir le

 11   travail d'un autre témoin expert. Donc lui, il dit qu'il aurait pu faire un

 12   travail scientifique en une semaine au lieu de deux ans.

 13   Le Dr Fruits ne nous donne pas plus d'éléments qu'une critique d'un profane

 14   de l'expertise du Dr Ball, alors qu'il s'agit d'une analyse très complexe

 15   et très technique.

 16   Donc les éléments de preuve portant sur le crime correspondent avec les

 17   conclusions du Dr Ball, et c'est presque en se servant d'une analyse

 18   inverse que l'on peut, d'une certaine façon, confirmer sa méthodologie, et

 19   que c'est de cette façon-là que nous pouvons voir s'il s'agit d'une analyse

 20   scientifique et confirmée par lui. L'expertise du Dr Ball corrobore le fait

 21   que les bombardements de l'OTAN ne sont pas une cause principale des

 22   déportations.

 23   Nous soutenons qu'il y avait une campagne massive et que cette campagne

 24   avait été organisée et qu'elle était systématique. Je crois que lorsqu'on

 25   se pose la question, à savoir si les accusés avaient quelque chose à voir

 26   là-dedans, il faudrait également répondre par l'affirmative. Mais je ne

 27   sais pas s'il nous reste encore un peu de temps. Doit-on prendre la pause ?

 28   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si vous le voulez, nous pouvons

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  1   prendre une pause maintenant.

  2   M. STAMP : [interprétation] Je vais poursuivre après la pause, si vous le

  3   souhaitez.

  4   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous prendrons une pause d'une demi-

  5   heure et nous reprendrons nos travaux à onze heures et quart.

  6   --- L'audience est suspendue à 10 heures 46.

  7   --- L'audience est reprise à 11 heures 17.

  8   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Stamp, je vous écoute.

  9   M. STAMP : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 10   Mesdames, Messieurs les Juges, la Défense Milutinovic dit qu'il n'est pas

 11   criminellement ou pénalement responsable, car il n'a rien fait pour

 12   contribuer aux crimes qui ont été commis. Il n'a rien fait, disent-ils, car

 13   il n'avait pas d'autorité pour faire quoi que ce soit et/ou il avait une

 14   autorité limitée, et dans tous les cas, les rapports des médias avaient été

 15   contredits par des rapports officiels, à savoir qu'il ait commis quoi que

 16   ce soit. La Défense soutient qu'il n'a rien fait et qu'il n'avait aucune

 17   connaissance des crimes qui avaient été commis.

 18   Son autorité a fait l'objet d'une discussion dans le mémoire préalable au

 19   procès et ses pouvoirs également ont été –- les pouvoirs qu'il avait on

 20   également été inclus dans ce mémoire. La mise en œuvre de l'entreprise

 21   criminelle commune de cette échelle ne demandait pas seulement que des

 22   représentants très haut placés avaient pris des mesures nécessaires pour la

 23   mettre en œuvre, mais également des commandants d'une armée telle que cette

 24   armée-ci. Mais ils n'ont rien fait non plus pour empêcher que ces crimes

 25   soient commis, même si c'était leur obligation de le faire. L'une des

 26   questions que se pose, et cette Chambre de première instance devrait se

 27   poser, est la suivante : c'est que si la Chambre de première instance

 28   devait accepter qu'il y a eu un impact à la suite d'une campagne de

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  1   violence systématique et généralisée, y compris les meurtres qui ont été

  2   commis, des expulsions et des incendies causés au Kosovo, des milliers de

  3   meurtres et des centaines de milliers d'expulsions avaient eu lieu. Si la

  4   Chambre devait se poser cette question, est-ce que M. Milutinovic, en tant

  5   que président de l'Etat, avait pour obligation d'agir et de faire quelque

  6   chose pour protéger la population et est-ce que ce n'était pas son devoir

  7   de faire ceci ? Est-ce que le droit international le tient responsable

  8   selon un standard ou une norme, les normes existantes ?  

  9   Cette question de droit était abordée dans les mémoires dans les

 10   écritures et comme il est dit au paragraphe 602 et plus loin dans le

 11   mémoire de l'Accusation.

 12   L'un des éléments critiques de cette analyse est la question d'avis, de

 13   notice et de connaissance. Il devait savoir ce qui se passait, il doit

 14   savoir ce qui se passe et il devait avoir des raisons raisonnables de

 15   savoir qu'une enquête avait été menée concernant ces crimes généralisés. Il

 16   semblerait que le mémoire en clôture Milutinovic, au paragraphe 266,

 17   accepte le fait qu'il a dû recevoir un avertissement concernant la

 18   commission de ces crimes, y compris il savait également -– il avait

 19   connaissance de la gravité des crimes commis. Ceci lui avait été communiqué

 20   par les médias internationaux, mais ceci avait été contredit par les

 21   rapports qu'il avait reçus des sources officielles et la Défense soutient

 22   qu'il n'avait aucune raison de croire que ces rapports ne disaient la

 23   vérité. C'est ainsi que la Défense de M. Milutinovic est faite.

 24   Mais si l'on prend pour acquis que le président d'un Etat d'un pays ne s'en

 25   tient pas aux normes internationales, et même s'il avait reçu des

 26   informations des médias internationaux qui l'avisaient du nettoyage

 27   ethnique de son pays, ceci ne pouvait pas être ignoré, même s'il avait reçu

 28   des rapports officiels qui contredisaient ces allégations dans les médias

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  1   internationaux. Il avait une obligation de faire quelque chose, de

  2   s'enquérir si des crimes avaient été commis. Ces rapports provenant des

  3   médias internationaux devaient fournir une notice suffisante pour qu'il

  4   fasse quelque chose, pour qu'il empêche la commission de ces crimes à

  5   grande échelle.

  6   Il avait pour obligation et il avait également la capacité de

  7   demander au MUP de lui donner des comptes, à savoir pour ce qui est de ce

  8   qui se passait dans le pays, et M. Markovic a dit qu'effectivement ces

  9   moyens lui étaient disponibles et que c'était de cette façon-là qu'il

 10   pouvait exercer une pression publique sur le gouvernement. Il y a toutefois

 11   d'autres éléments de preuve très convaincants nous permettant de croire que

 12   M. Milutinovic avait connaissance des crimes qui avaient été commis ou des

 13   allégations de crimes commis en 1998 et 1999. Encore une fois, ceci est

 14   très bien décrit dans le mémoire préalable au procès, mais j'aimerais vous

 15   parler maintenant du Dr Rugova et des éléments de preuve que nous avons

 16   reçus de ce dernier et de M. Merovci, où ils disent que

 17   M. Milutinovic, au début du mois d'avril, savait très bien que des crimes

 18   avaient été commis à l'encontre de la population du Kosovo et qu'il y avait

 19   une campagne de violence qui faisait rage au Kosovo. Plus tard, il avait

 20   même reçu l'acte d'accusation dans cette affaire.

 21   A-t-il agi d'une façon selon laquelle il se serait plié à ses obligations

 22   ou a-t-il l préparé une entreprise criminelle commune ?

 23   La Défense marginalise M. Milutinovic et minimise également son application

 24   et les pouvoirs qu'il avait, son autorité en tant que président. Cette

 25   affaire a reposé principalement sur les faits et les éléments d'expert

 26   présentés par Ratko Markovic que l'on décrits dans le mémoire en clôture de

 27   la Défense.

 28   Monsieur le Président, j'aimerais dire que ceci n'est pas possible. Ce

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  1   n'est pas un témoin indépendant, et il minimise dans son témoignage le rôle

  2   et les pouvoirs qu'avait M. Milutinovic. Donc son témoignage devrait être

  3   pris avec beaucoup de prudence.

  4   Il ne faudrait pas oublier que M. Markovic avait des liens très étroits

  5   avec certains membres de l'entreprise criminelle commune alléguée et qu'il

  6   avait pris part de façon directe à certains éléments, certains crimes

  7   décrits concernant l'entreprise criminelle commune.

  8   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que ce que vous dites est très

  9   précis ? Je croyais qu'il n'était pas un membre du gouvernement.

 10   M. STAMP : [interprétation] Il n'était pas membre du gouvernement en tant

 11   que tel -–

 12   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Tout comme le président d'un pays ou

 13   la crème de la crème de pays n'était pas membre d'un gouvernement. Vous

 14   voulez dire qu'il avait une position au sein du gouvernement ?

 15   M. STAMP : [interprétation] Non, je ne disais pas qu'il était un membre du

 16   gouvernement dans le sens où on peut parler d'un gouvernement, qui fait

 17   partie des –- enfin, qui représente au moins le gouvernement. Des fois,

 18   lorsque je parle du "gouvernement," ceci couvre -– c'est un terme que

 19   j'emploie de façon assez large. Cela comprend également l'aspect

 20   présidentiel du gouvernement, l'aspect judiciaire. Mais je ne dis pas qu'il

 21   était membre de ce que l'on appelle des fois le gouvernement exécutif, si

 22   vous voulez.

 23   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous ai peut-être mal

 24   compris. C'est mon erreur, effectivement, Monsieur Stamp, mais à la page

 25   43, ligne 19, vous faites référence à Markovic.

 26   M. STAMP : [aucune interprétation]

 27   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En fait, non, j'avais cru

 28   comprendre que vous parliez de Milutinovic. Non, excusez-moi. Veuillez

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  1   poursuivre.

  2   M. STAMP : [interprétation] Non, Markovic est un membre du gouvernement

  3   exécutif, alors que M. Milutinovic ne l'était pas.

  4   Je disais justement que son implication personnelle, pour ce qui est des

  5   questions pertinentes, fait en sorte que ses opinions ne sont pas fiables

  6   puisqu'il avait un intérêt personnel dans tout ceci.

  7   Il était également un membre du parti, du SPS, le parti au pouvoir, et de

  8   son conseil exécutif. Il était député au parlement fédéral, et de 1994 à

  9   2000, il a été l'un des cinq vice-premiers ministres de la République de

 10   Serbie. Il a participé personnellement aux négociations en 1998 en tant que

 11   membre de la délégation serbe, même chose à Rambouillet en 1999. Il a été

 12   membre d'une commission constitutionnelle qui a rédigé des amendements à la

 13   législation en cours.

 14   Le fait qu'il ait rédigé ces documents, ces documents qui font

 15   controverse, fait qu'indéniablement il se trouve dans une position où il

 16   défend son travail, et ceci, d'autant plus que l'Accusation avance que ces

 17   modifications de la législation, elles ont été entreprises pour réduire,

 18   pour diminuer les droits des Kosovo. Donc on pense que lui, c'est dans son

 19   intérêt de dire non, de dire non. Ces modifications de la législation sont

 20   tout à fait légitimes.

 21   On peut donc penser que le Pr Markovic est susceptible d'être moins

 22   objectif que quelqu'un d'extérieur qui n'aurait pas eu un intérêt personnel

 23   dans toutes ces questions. Il a des raisons d'avoir un intérêt net quant à

 24   l'issue de cette affaire en raison de ces contacts. Ce n'est pas un expert

 25   indépendant. En fait, c'était de fait un subordonné de M. Milutinovic. On

 26   peut voir, par exemple, qu'au cours des négociations de 1998, M. Markovic

 27   était membre de la délégation serbe et M. Milutinovic a annoncé

 28   publiquement, le 14 novembre, qu'il allait personnellement présider à une

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  1   réunion où M. Markovic allait intervenir. Il s'agit de la pièce 1D88. Il

  2   pouvait parce que le Pr Markovic était son subordonné.

  3   On a également des éléments qui découlent des négociations de Paris

  4   en 1999. A ce moment-là, M. Milutinovic a pris le relais. C'est lui qui a

  5   pris la direction des négociations devant les autres membres de la

  6   délégation serbe.

  7   Dans son rapport, dans sa déposition, le Pr Markovic nous donne une

  8   vue éminemment hypothétique de l'autorité de M. Milutinovic. Par exemple,

  9   il affirme que la législation, la réglementation en cours ne permettait pas

 10   à M. Milutinovic de représenter la Serbie dans le cadre des affaires

 11   étrangères ou de mener à bien ou de s'occuper de ses relations avec les

 12   Etats étrangers, les organisations internationales. C'est peut-être ce que

 13   dit la législation, mais la question maintenant est de savoir ce qu'il

 14   faisait au cours de toutes ces réunions. Que faisait-il à Rambouillet ? Que

 15   faisait-il à Paris, puisque tout nous indique, tous les rapports indiquent

 16   que c'est lui qui a pris la direction des négociations ?

 17   Je pense qu'il faut que la Chambre en ait bien conscience il ne faut

 18   pas avoir adopté une approche simplistique [phon], exagérément technique du

 19   volet juridique de cette affaire. Non, il faut que les Juges de la Chambre

 20   examinent la réalité de la situation.

 21   Il y a d'autres exemples qui indiquent que M. Markovic s'est efforcé

 22   de minimiser le pouvoir dont jouissait M. Milutinovic. Pour ce qui concerne

 23   l'article 97 [comme interprété] (3) de la constitution, j'aimerais vous

 24   indiquer la chose suivante - j'aimerais que ce soit d'abord afficher à

 25   l'écran - et on sait que M. Markovic, dans son rapport et au début de son

 26   intervention dans ce prétoire, a déclaré que ce pouvoir conféré par

 27   l'article 87(3) en son alinéa 7, ce pouvoir est le suivant : pouvoir

 28   d'adopter des instruments juridiques sur sa propre initiative. M. Markovic

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  1   nous a affirmé que ça faisait partie des pouvoirs ou des compétences que le

  2   président ne pouvait exercer que si la Serbie devenait un Etat indépendant.

  3   Paragraphe 226 de son rapport.

  4   Mais quand on l'a interrogé sur la réalité de la situation en Serbie,

  5   il a répondu à des questions qui venaient même des Juges, et le témoin

  6   était contraint de reconnaître que Milutinovic pouvait exercer ces pouvoirs

  7   et il l'a même fait pendant la guerre.

  8   M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] En anglais vous avez dit Markovic.

  9   C'est bien ce que vous vouliez dire ?

 10   M. STAMP : [interprétation] Non, excusez-moi. Bien entendu, je voulais

 11   parler de l'accusé Milutinovic, et je suis en train de passer en revue la

 12   déposition du témoin Markovic.

 13   En adoptant une approche exagérément légaliste, on voit que le Pr Markovic

 14   essaie de minimiser la réalité des pouvoirs de

 15   M. Milutinovic. Je souhaiterais inviter les Juges à passer en revue la

 16   totalité de ces éléments, à examiner ce que dit M. Markovic à partir de la

 17   page 12 900 du compte rendu d'audience. Le Pr Markovic, une fois encore, a

 18   essayé de faire une distinction et ça, aussi bien dans son rapport qu'au

 19   cours de sa déposition, distinction entre ce que pouvait faire le conseil

 20   suprême de la Défense, véritablement entre le concret et le théorique. Il a

 21   dit que le conseil ne pouvait prendre aucune décision, qu'il pouvait

 22   simplement formuler une position, adopter des conclusions. Or, nous

 23   estimons que quand il tient de tels propos, sa crédibilité est grandement

 24   remise en cause, parce que ce qu'il dit, ça va complètement à l'encontre de

 25   ce qui figure à l'article 135 de la constitution de la RSFY, ça va à

 26   l'encontre de la Loi sur la VJ, de la Loi sur la Défense, du règlement

 27   intérieur de la SDC, où il est dit que le SDC peut prendre des décisions et

 28   que le président de la RSFY commande l'armée sous réserve où à partir de

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  1   décisions du SDC, conseil suprême de la Défense. Les Juges disposent

  2   d'éléments dans le dossier indiquant que concrètement dans la pratique, et

  3   indépendamment des arguties juridiques, il y a eu des cas où des personnes

  4   qui travaillaient avec le conseil suprême de la Défense ont parlé de sa

  5   capacité à prendre des décisions.

  6   Par exemple, on a entendu le témoin Dimitrijevic, le général

  7   Dimitrijevic, quelle que soit la nature de ses propos - on va y revenir -

  8   mais il a dit que cet organe c'était l'organe suprême qui contrôlait

  9   l'armée, qui prenait des décisions politiques. Nous avons également entendu

 10   Momir Bulatovic qui, à un certain moment, était président du Monténégro, et

 11   il est venu nous dire que le conseil suprême de la Défense prenait les

 12   décisions stratégiques les plus importantes. Même au cours des réunions du

 13   conseil, on peut constater en lisant les procès-verbaux, notamment dans la

 14   pièce 4D106, qu'à certaines reprises le chef d'état-major principal lui-

 15   même, le général Perisic, en appelait au conseil suprême de la Défense pour

 16   qu'ils prennent des décisions dont ils estimaient qu'elles étaient

 17   importantes pour que l'armée prenne les mesures dont il estimait qu'il

 18   fallait qu'elle les prenne.

 19   On voit donc ici un exemple de l'attitude de M. Markovic qui coupe

 20   les cheveux en quatre. Une fois encore, dans un seul objectif, celui de

 21   minimiser l'autorité dont jouissait M. Milutinovic.

 22   En ce qui concerne les questions personnelles, il est sans doute exact,

 23   comme ça figure au paragraphe 17 du mémoire en clôture de la Défense, que

 24   théoriquement les décisions relatives aux promotions des généraux, cela

 25   relevait des compétences prévues par la loi, les compétences du président

 26   Milutinovic –- ou plutôt, Milosevic. Mais Milosevic lui-même a reconnu

 27   qu'il devait consulter les autres membres, les membres du conseil suprême

 28   de la Défense. Il réunissait ce conseil pour en discuter même si, du point

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  1   de vue juridique, théoriquement, c'était un pouvoir qui lui incombait, qui

  2   lui revenait. M. Milosevic ne pouvait pas conformer l'armée à ses désirs, à

  3   en faire exactement ce qu'il voulait, parce qu'il faillait qu'il suive les

  4   lignes directrices définies par le conseil suprême de la Défense, ces

  5   paramètres stratégiques établis par ce conseil suprême de la Défense.

  6   En raison de la nature du pouvoir, de l'autorité de

  7   M. Milutinovic, ce qui est absolument essentiel pour ce qui concerne le

  8   conseil suprême de la Défense, ce qui est essentiel c'est qu'il faut se

  9   souvenir c'est qu'il avait la capacité concrète, matérielle d'organiser des

 10   réunions du conseil suprême de la Défense et de faire figurer à l'ordre du

 11   jour ce qu'il souhaitait.

 12   C'est une chose de -–

 13   M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Excusez cette interruption, mais

 14   pourriez-vous étayer votre argumentation en faisant référence à une règle,

 15   à un règlement, à une disposition juridique ou législative ?

 16   M. STAMP : [interprétation] Il y a deux articles -– enfin, il y a deux

 17   règlements qui s'appliquaient au conseil suprême de la Défense, règlement

 18   intérieur. Le premier a été modifié le 23 mars. Le règlement intérieur du

 19   conseil suprême de la Défense, c'est la pièce P2622. Le règlement a été

 20   modifié et c'est article 4 qui nous intéresse ici. Juste avant

 21   l'intervention de l'OTAN, le règlement qui était en vigueur à partir de ce

 22   moment-là, c'est la pièce P1738, article 4. Dans ce nouveau règlement, il y

 23   avait certaines modifications qui sont intervenues.

 24   Mais il y a une chose en tout cas qui n'a pas été modifiée. C'était

 25   la capacité d'un membre du conseil suprême à insister pour qu'une réunion

 26   soit organisée à titre exceptionnel et la capacité également de demander

 27   qu'une question soit ajoutée à l'ordre du jour.

 28   Donc c'est une chose pour la Défense de M. Milutinovic de dire que, oui, M.

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  1   Milutinovic était membre du conseil suprême, mais qu'il n'y a strictement

  2   rien fait concrètement –-

  3   M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Je pense qu'il serait bon que vous

  4   donniez lecture de cet article afin que nous l'ayons bien présent à

  5   l'esprit.

  6   M. STAMP : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche l'article 4 de la

  7   pièce P1738 grâce au système du prétoire électronique. Article 5. Il s'agit

  8   de la disposition aux termes de laquelle le président est autorisé à

  9   proposer l'ordre du jour, ce qui est également le cas des autres membres du

 10   conseil suprême ou des autres participants à ces réunions. Ils peuvent

 11   proposer qu'un point soit mis à l'ordre du jour.

 12   Maintenant, j'aimerais qu'on nous présente l'article 3. Excusez-moi. Quand

 13   j'avais commencé à parler de ce document, je ne l'avais pas sous les yeux.

 14   Je vois maintenant que c'est l'article 3 qui donne au président le pouvoir

 15   de composer la tenue d'une réunion, et c'est aux termes de l'article 5

 16   qu'il peut faire figurer à l'ordre du jour de la réunion toutes les

 17   questions qu'il souhaite.

 18   Nous savons également, vu ce qui figure au dossier, que dans les faits,

 19   bien que ce fut la guerre, M. Milutinovic rencontrait M. Milosevic au moins

 20   une fois par semaine. On nous a dit que c'était juste pour la galerie, pour

 21   montrer qu'il existait une continuité au sein du gouvernement. Donc rien

 22   n'empêche de penser que M. Milosevic, en tant que commandant en chef de la

 23   VJ, qu'il aurait pu s'entendre dire par M. Milutinovic : "Je suis allé au

 24   Kosovo, j'ai parlé avec les responsables, et apparemment tout ce qui figure

 25   dans la presse internationale c'est vrai, tout ce qu'on lit au sujet des

 26   Albanais qui sont tués, assassinés, expulsés, et cetera, en grand nombre.

 27   Deux dirigeants de premier plan me l'ont dit. Il est nécessaire de mettre

 28   en place une réunion du SDC, conseil suprême de la Défense de faire figurer

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  1   cette question à l'ordre du jour, la question du comportement de la VJ, la

  2   question de son comportement en temps d'hostilités." De cette intervention

  3   qu'il aurait pu faire, c'était son devoir de le faire et il avait la

  4   possibilité de le faire, il était en droit de le faire.

  5   M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Mais est-ce que vous êtes sûr qu'il

  6   ne l'a pas fait, qu'il n'a jamais tenu de tels propos ? En êtes-vous sûr ?

  7   M. STAMP : [interprétation] Je vais y revenir plus tard, mais je crois que

  8   la Défense l'a reconnu dans son mémoire. Elle a reconnu qu'il n'y a pas eu

  9   de réunion du conseil suprême de la Défense au cours de la période des

 10   hostilités et après les mois de mai, juin, juillet, après qu'ils aient pris

 11   connaissance de l'acte d'accusation élaboré par le TPIY. Donc ce n'est pas

 12   quelque chose qui est contesté ici, mais je pourrais vous donner les

 13   références précises sur ce point.

 14   M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Merci.

 15   M. STAMP : [interprétation] Il y a une autre question et je ne peux pas

 16   passer toutes ces questions en revue, il va falloir que j'accélère un petit

 17   peu le mouvement. Mais enfin, il y a une autre question qui est celle des

 18   déclarations publiques de M. Milutinovic qui avait affirmé qu'il allait

 19   être le garant des discussions, des négociations de paix ou du dialogue

 20   politique en 1998. Et j'aimerais inviter les Juges de la Chambre à se

 21   demander ce qu'il entendait par là. J'invite les Juges à examiner ce que

 22   Markovic entend par là, comment il interprète cette chose et à mettre ceci

 23   en regard avec ce qu'étaient ses obligations envers les Albanais du Kosovo.

 24   D'après ce qu'on lit au paragraphe 29 du mémoire en clôture de la Défense

 25   de Milutinovic, Milutinovic pouvait agir en tant que garant de ces

 26   négociations, en tant que président pour organiser des réunions,

 27   accompagner les délégations de l'Etat rencontrer des diplomates, des

 28   dirigeants politiques, et cetera. Mais le

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  1   Pr Markovic, lui aussi a donné une explication sur ce point, sur ce que

  2   cela signifiait. L'extrait de sa déposition qui s'y rapporte, vous l'avez

  3   maintenant à l'écran. J'aimerais qu'on fasse défiler la page pour qu'on

  4   voie le bas de ce passage. En réponse à une question des plus évidentes

  5   posée par les Juges de la Chambre, si je puis me permettre, le témoin,

  6   quand il a vu quelles étaient les implications de ce rôle de garant, le

  7   témoin s'est efforcé à ce moment-là d'en limiter la signification et de le

  8   réduire, ce rôle, à une position d'ordre moral.

  9   Encore une fois donc, nous avons un exemple de ce que fait le Pr Markovic.

 10   Il parle des pouvoirs de M. Milutinovic, mais tout de suite il essaie d'en

 11   réduire la portée. Je ne vais pas donner lecture de ces extraits du compte

 12   rendu d'audience.

 13   Les obligations qui découlent du serment prononcé par le président au

 14   moment où il prend ses fonctions sont manifestes malgré tous les arguments

 15   de la Défense Milutinovic selon lesquels ce serment n'a pas de valeur

 16   constitutionnelle juridique et que le fait de ne pas respecter ce serment

 17   n'entraîne aucune sanction. Markovic a déposé que le président était tenu

 18   de prêté serment au moment où il devenait président, où il prenait ses

 19   fonctions. Il ne pouvait pas lui-même choisir les termes de ce serment,

 20   comme ça a été indiqué par un membre du Tribunal. Et le simple fait qu'il

 21   était tenu de prononcer ce serment lui donne une valeur juridique. Page

 22   12 963 du compte rendu d'audience.

 23   Au paragraphe 4.5 de son rapport, le Pr Markovic en donne un résumé, il

 24   résume l'impact de ce serment. Et là, je pense qu'il y a une chose qu'il

 25   convient de garder à l'esprit. Il s'agissait d'une garantie de respect de

 26   la constitution de la législation et des droits humains et civiques.

 27   Donc non seulement il avait l'obligation, le rôle de garantir et de

 28   préserver l'unité et l'intégrité de l'Etat, mais il avait également pour

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  1   rôle de protéger la population, surtout si celle-ci était menacée par

  2   certains organes de l'Etat. Son rôle en tant que président, ce n'était pas

  3   simplement un rôle de potiche.

  4   Nous pouvons voir clairement, Messieurs et Mesdames les Juges, que quand il

  5   a estimé que c'était justifié, il a joué son rôle de garant, il a

  6   publiquement condamné les dirigeants albanais du Kosovo en disant qu'ils

  7   n'avaient pas participé à une réunion que lui-même avait organisée. Il les

  8   a qualifiés d'amateurs, de transparents dans leurs actes. C'est une

  9   déclaration qu'il a faite publiquement. Et l'extrait de la pièce 1D83 qui

 10   se rapporte à ce que je viens de vous dire est actuellement affiché à

 11   l'écran et les Juges en ont connaissance, ça figure au dossier.

 12   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La question de se porter garant de

 13   l'issue des négociations, est-ce que vous en parlez dans votre mémoire,

 14   Monsieur Stamp ?

 15   M. STAMP : [interprétation] Non, je ne pense pas que cette question soit

 16   abordée. Il y a certains documents qui sont mentionnés, mais pas dans ce

 17   cadre.

 18   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien.

 19   M. STAMP : [interprétation] Donc si on applique les impacts ou l'incidence

 20   concrète de ce rôle du président en tant que garant, si on applique cela

 21   concrètement au fait de l'espèce, on doit se demander ce qu'il aurait dû

 22   faire pour assurer le respect de la loi, le respect du droit, le respect

 23   des droits de l'homme, des droits civiques quand Merovci et Rugova lui ont

 24   parlé des violations des droits de l'homme, des actes d'oppression dont

 25   étaient victimes les Albanais du Kosovo. Est-ce qu'à ce moment-là, il

 26   n'aurait pas pu exiger que les dirigeants du MUP viennent lui faire

 27   rapport ? Est-ce qu'il n'aurait pas pu faire cette demande ? Et s'il

 28   n'avait pas reçu de réponse satisfaisante, est-ce qu'il n'aurait pas pu

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  1   s'exprimer publiquement dans le même sens ? S'il avait pris cette mesure,

  2   s'il avait sonné l'alarme, est-ce que ces crimes auraient pu être commis ?

  3   S'il avait, de manière publique et systématique, fait pression sur les

  4   auteurs de ces crimes pour qu'ils mettent fin à leurs activités, est-ce

  5   qu'au moins, pendant cette période, certains de ces auteurs, certains de

  6   ces criminels n'auraient pas pu être arrêtés et traduits en justice devant

  7   les tribunaux compétents ?

  8   Le pouvoir qui était le sien en tant que garant, allait même au-delà

  9   de l'autorité qu'il avait de garantir un dialogue politique. Il avait le

 10   pouvoir constitutionnel d'exiger des membres du gouvernement, d'exiger du

 11   MUP des rapports. Et nous savons qu'il le savait pertinemment et qu'il l'a

 12   fait à certains moments lors de l'incident Jashari. La Défense affirme

 13   qu'il n'a pas suivi cette affaire, que ça n'a pas eu de retombée, parce

 14   qu'il avait reçu un rapport selon lequel les meurtres qui avaient eu lieu

 15   sur le terrain de Jashari avaient eu lieu lors d'une opération de police

 16   légitime. Cependant, je demande aux Juges de la Chambre d'appliquer le

 17   principe de manière systématique à tous ces cas de crimes commis de manière

 18   généralisée pendant une période de 78 jours.

 19   Nous affirmons que M. Markovic, quand il tient les propos qu'il tient

 20   à la page 13 333 du compte rendu d'audience, ne dit pas la vérité. Il

 21   affirme que le président n'avait aucun instrument à sa disposition lui

 22   permettant de modifier la position du gouvernement. Tout ce qu'il pouvait

 23   faire c'était de démissionner. Mais nous savons que ce n'est pas la voie

 24   qui a été choisie par M. Milutinovic. Il est resté au pouvoir. Mais il

 25   aurait pu en faire encore beaucoup plus.

 26   L'évolution de l'entreprise criminelle commune sera étudiée, comme je l'ai

 27   dit, ultérieurement, et les négociations de Rambouillet se trouvent être

 28   pertinentes également. Aussi, allons-nous y revenir à ces négociations de

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  1   Rambouillet. Il y a un aspect dont j'aimerais que nous traitions, car cela

  2   se rapporte à l'accusé Milutinovic et cela ne concerne pas seulement

  3   l'entreprise criminelle commune.

  4   M. Milutinovic, dans les services diplomatiques autrichiens se trouve être

  5   mentionné comme ayant dit que le bombardement en Serbie conduirait à des

  6   massacres.

  7   Les Juges de la Chambre ont entendu le témoignage de l'ambassadeur

  8   Petritsch qui a parlé des circonstances dans lesquelles cela s'est passé et

  9   il a parlé également de toute l'attention consacrée à ces dépêches. La

 10   Défense a affirmé qu'il y a eu erreur de commise à ce niveau. Mais j'ai

 11   présenté aux Juges de la Chambre le passage dans lequel cet élément se

 12   trouve être évoqué et j'affirme que la possibilité d'une erreur dans ce qui

 13   a été rapporté comme étant ce que M. Milutinovic aurait dit se trouve être

 14   minime, voire inexistant.

 15   Au 216, la Défense a laissé entendre que lorsqu'il y avait erreur, et cela

 16   pouvait survenir dans ce type de rapport, cela s'était produit dans une

 17   période d'activité intense avec négociations difficiles. Peut-être

 18   faudrait-il le lire, en donner lecture, mais je ne pense pas devoir le

 19   faire. La seule erreur que la Défense a pu trouver jusqu'à présent c'est la

 20   mauvaise orthographe d'un nom. On voit au paragraphe 216 du mémoire en

 21   clôture où l'on voit le prénom de Rossin écrit comme Rosen, et cela se

 22   trouve être au troisième paragraphe de l'une des dépêche, pièce à

 23   conviction P556.

 24   Le point que je souhaite mettre en exergue, peut-être pas de façon tout à

 25   fait directe, est celui-ci. Lorsque la Défense affirme qu'en raison de

 26   l'intensité des événements dans cette situation où l'on avait envoyé ces

 27   rapports et ces dépêches diplomatiques lors de la rédaction, étant donné

 28   que cela a été rédigé tôt le matin suite à des négociations intenses, il y

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  1   a eu possibilité de commission d'erreurs. Alors je voudrais évoquer ce que

  2   M. l'ambassadeur Petritsch et M. Kickert avaient dit au sujet de la façon

  3   dont étaient rédigées ces dépêches. Vous n'avez qu'à vous penchez sur le

  4   texte desdites dépêches pour voir que dans la réalité il n'y a guère de

  5   possibilité d'erreurs. J'affirme également que l'exemple d'erreur avancé

  6   par la Défense au paragraphe 256 de ce mémoire en clôture est bel et bien

  7   le cas d'une erreur, mais ce n'est pas une erreur substantielle. Il s'agit

  8   d'une mauvaise orthographe d'un nom que l'on retrouve au troisième

  9   paragraphe de la même dépêche portant la cote P556.

 10   La Défense affirme plus loin aussi que ce que M. Petritsch a évoqué dans

 11   son rapport ne se trouve pas être fiable, puisque cela n'avait pas été

 12   évoqué à l'occasion de son interview avec le bureau du Procureur en mai.

 13   Mais je pense que les Juges de la Chambre ont déjà eu des situations

 14   faisant preuve du fait qu'en cas d'absence d'une chose qu'il n'y ait pas eu

 15   événement de ce type. Parce qu'on a vu à bien des reprises, tant avec les

 16   témoins de la  Défense que ceux de l'Accusation, que les points importants

 17   ont été évoqués lors du témoignage qui n'avaient pas été évoqués

 18   auparavant, mais qui sont survenus comme étant des informations

 19   supplémentaires par la suite.

 20   Et à l'occasion de l'interview du mois de mai concernant ces circonstances

 21   d'activités intenses, bien, de l'avis de l'Accusation, il s'agit d'un

 22   enregistrement contemporain des événements, et cela a été fait à peine

 23   quelques heures suite aux événements, dans les circonstances telles que

 24   décrites par M. Petritsch, qui ont été qualifiées par ce dernier comme

 25   étant probablement exactes et cela se trouve être en corrélation avec

 26   d'autres éléments dans cette affaire. Cela est donc précis.

 27   Ce qui est dit au paragraphe 218 par les soins de M. Kickert nous fait dire

 28   ce qui suit : rien durant son interview n'a été présenté en la présence de

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  1   M. Petritsch au mois de mai concernant Milutinovic et ce ne serait pas ce

  2   qui pourrait être tiré comme conclusion, parce que M. Kickert a dit qu'il

  3   n'a pas été présent à la réunion lorsque M. Milutinovic a fait ces

  4   déclarations.

  5   Au paragraphe 221, la Défense semble dire que Petritsch ne se serait jamais

  6   entretenu avec Milutinovic. Je ne pense pas que cette allégation ait été

  7   présentée devant M. Petritsch lorsqu'il est venu témoigner. La Défense a eu

  8   l'opportunité de le faire consigner au compte rendu si ce fait se trouvait

  9   être si important.

 10   Un autre point évoqué par la Défense au sujet de cette déclaration, à

 11   savoir au 220 du mémoire en clôture, est ce qui suit : M. Petritsch

 12   transmettrait les propos de M. Stambuk à l'égard de

 13   M. Milutinovic. Et si les Juges de la Chambre s'en souviennent, M.

 14   Milutinovic aurait affirmé que Stambuk avait dit telle et telle chose et le

 15   point a été évoqué dans le procès Milosevic. Lorsque celui-ci est venu ici,

 16   il a déclaré qu'il a rafraîchi sa mémoire en consultant le PV de l'époque

 17   concernée, puisqu'il a vu une dépêche au sujet de laquelle il a déclaré

 18   qu'il ne l'avait pas vue à l'époque puisqu'on ne le lui a rendu disponible

 19   que récemment et il ne se souvient pas de ce que Milutinovic avait dit.

 20   Mais compte tenu des normes et des critères d'utilisés lors de la rédaction

 21   de ces dépêches, la possibilité que cela ait été inexact se trouve être

 22   négligeable.

 23   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Rappelez-moi ceci, Monsieur

 24   Stamp. Est-ce que M. Petritsch a bel et bien dit qu'il aurait entendu de la

 25   bouche de l'accusé les propos de cette déclaration --

 26   M. STAMP : [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] -- Par M. Milutinovic ? 

 28   M. STAMP : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

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  1   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

  2   M. STAMP : [interprétation] Non. Il a dit que ce qui est consigné l'a fait

  3   se souvenir de l'avoir entendu.

  4   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il a dit qu'il ne s'en souvenait pas.

  5   M. STAMP : [interprétation] Il a dit qu'il ne s'en souvenait pas, mais

  6   qu'il était disposé à accepter ce qui était consigné au compte rendu, parce

  7   qu'il se fiait au compte rendu.

  8   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

  9   M. STAMP : [interprétation] Donc ceci et il s'est appuyé entièrement, donc

 10   à part entière sur ce PV.

 11   Il s'agit d'une spéculation lorsqu'on veut laisser entendre que M.

 12   Petritsch aurait transmis à M. Milutinovic ce qu'en réalité Stambuk aurait

 13   dit, et on essaie de faire entendre que Petritsch était dans la confusion

 14   1orsqu'il a pris des notes au sujet de ce qui s'était dit.

 15   Madame et Messieurs les Juges, il n'y a pas d'absence de connaissance

 16   ou de mystère pour ce qui est de voir deux représentants éminents de cet

 17   Etat serbe pour ce qui est d'allégations de cette nature-là. Les Juges de

 18   la Chambre ont pu entendre une déclaration de Seselj très similaire. Il en

 19   a été question au mémoire préalable de l'Accusation en page 406. Rugova,

 20   dans son témoignage dans l'affaire Milosevic, a bien dit que Milosevic en

 21   substance lui avait dit la même chose. La raison du problème avec les

 22   Albanais était en réalité les frappes de l'OTAN.

 23   Et ce type de commentaire était devenu une espèce de slogan, une

 24   espèce de leitmotiv réitéré par bon nombre de personnes de la direction de

 25   la République fédérale de Yougoslavie, et je pense que M. Rugova en a parlé

 26   lors de son témoignage au cours du procès Milosevic. Ce ne serait donc pas

 27   une chose dont il aurait entendu parler pour la première fois.

 28   Il y a d'autres aspects de ce qui concernerait M. Milutinovic et que

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  1   j'aimerais évoquer avec l'autorisation des Juges de la Chambre  si le temps

  2   que j'ai à ma disposition nous le permet aussi. Je convierais les Juges de

  3   la Chambre de se pencher sur les éléments de preuve dont il est question

  4   dans le mémoire de clôture de l'Accusation, et j'affirme que ces éléments

  5   de preuve se trouvent être cohérents, qu'ils permettent de tirer des

  6   conclusions et que ce sont là des éléments de preuve permettant aux Juges

  7   de la Chambre de s'y référer.

  8   Pour ce qui est maintenant des allégations avancées au sujet de

  9   l'accusé, M. Sainovic.

 10   Il y a une quantité fort importante d'éléments de preuve relative au

 11   comportement de M. Sainovic et à sa participation dans la mise en œuvre de

 12   cette entreprise criminelle commune. La thèse de la Défense se ramène à ce

 13   que suit : premièrement, son rôle au Kosovo en 1998, et ce, allant jusqu'à

 14   l'intervention de l'OTAN, aurait découlé uniquement de ses fonctions de

 15   premier ministre adjoint au niveau fédéral avec des responsabilités en

 16   matière d'affaires étrangères. C'est donc pour ce rôle-là, ou du fait de ce

 17   rôle-là, qu'il se serait trouvé là en premier lieu.

 18   On a affirmé qu'il a été impliqué dans les questions du Kosovo et

 19   envoyé là-bas pour travailler avec les affaires étrangères du fait du

 20   nombre croissant de diplomates étrangers au Kosovo suite au 16 juin 1998.

 21   La deuxième partie de la thèse avancée par la Défense au sujet de M.

 22   Sainovic est celle où l'on dit que, partant de 1999, et pour ce qui est de

 23   la période couverte par l'acte d'accusation, mis à part quatre événements

 24   et le lien qu'il a eu au sujet d'activités concernant M. Rugova, sont les

 25   seuls où l'on pourrait établir un lien entre lui et le Kosovo. La Défense

 26   s'efforce donc de façon artificielle de procéder à une séparation entre ces

 27   différentes périodes, comme si la conduite et les circonstances prévalant

 28   dans une période ne pouvaient pas avoir un impact sur la période qui a

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  1   suivi, mais j'y reviendrai plus tard.

  2   La première affirmation disant qu'il se serait rendu au Kosovo et

  3   qu'il y aurait été impliqué qu'en 1998, jusqu'aux frappes de l'OTAN, était

  4   une présence en raison de la présence étrangère, et cela sonne creux

  5   1orsqu'on se penche sur l'autre partie des éléments de preuve dont les

  6   conseils de la Défense ont omis de s'occuper.

  7   Sainovic, dans une phase ultérieure, avant que les diplomates étrangers

  8   n'arrivent - et il s'agit de diplomates de la KDOM et de la MVK - disent

  9   qu'il a été envoyé au Kosovo et qu'il a été impliqué dans toutes les

 10   activités relatives au Kosovo, et ces activités n'avaient rien à voir avec

 11   la présence des diplomates étrangers ou des représentants des affaires

 12   étrangères d'autres pays.

 13   Par exemple, dans son interview avec le bureau du Procureur, P605, il

 14   dit qu'après l'incident Jashari en début 1998, il aurait participé à une

 15   réunion avec la présence de cinq ou six représentants albanais dans les

 16   locaux de l'Alliance démocratique du Kosovo à Pristina. C'est le QG du

 17   parti à Rugova. Cela s'est passé un peu avant le déplacement qu'il a fait

 18   au mois de juin vers la mission de la KDOM.

 19   La délégation albanaise à cette époque-là se trouvait être dirigée

 20   par Agani, et la délégation serbe était dirigée, du moins de façon

 21   officielle, par Ratko Markovic. On peut le voir en page 26 de son entretien

 22   avec le bureau du Procureur, pièce P605. En page 28, il confirme qu'aucune

 23   présence internationale n'a été enregistrée à l'occasion de la tenue de

 24   cette réunion, mais il y a eu un intérêt évident de la part des facteurs

 25   internationaux au sujet du Kosovo. Il y a eu donc un élément étranger pour

 26   ce qui est des préparatifs de ladite réunion.

 27   Il ne s'agit pas d'un argument de principe, mais je dirais que la

 28   Défense, de fait, a présenté les choses de façon incorrecte, erronée.

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  1   Parce qu'en page 29 de l'interview, Sainovic dit que lui et l'ex-

  2   président Lilic se trouvaient être chargés d'un déplacement vers le Kosovo,

  3   et je cite : "Nous avons été chargés d'aller au Kosovo pour observer la

  4   situation et pour nous faire une idée de la situation par nous-mêmes."

  5   D'après M. Sainovic, ils se seraient déplacés à deux reprises au

  6   Kosovo, deux visites d'un jour dans les secteurs les plus critiques au

  7   Kosovo, à savoir Pec, Djakovic. Et ils se seraient rendus en visite aux

  8   postes-frontières militaires de la région. A Pec, ils ont rencontré

  9   différents représentants des départements de Klina et Istok. Alors des

 10   déplacements avec M. Lilic ont eu lieu après les réunions de Pristina en

 11   avril 1998. Or, ces réunions, il les décrit aux pages 29 à 33 de sa

 12   déclaration.

 13   Pour ce qui est du rôle de Sainovic au Kosovo en 1998, nous dirions que ce

 14   rôle a été quelque peu plus important que la Défense veut bien le laisser

 15   entendre.

 16   Ensuite, la Défense souhaite laisser entendre que Bulatovic, premier

 17   ministre fédéral à l'époque, a pris une décision indépendante qui était

 18   celle de l'envoyer au Kosovo en raison de la présence étrangère là-bas. Et

 19   Madame, Messieurs les Juges savent que la thèse de l'Accusation, comme M.

 20   Hannis l'a dit plus tôt ce matin, c'est que l'esprit qui a conçu dans son

 21   ensemble cette entreprise criminelle commune se trouve être celui de

 22   Milosevic qui détenait toutes les ficelles en main, c'est lui qui

 23   embauchait, qui renvoyait, qui nommait, qui plaçait les individus là où il

 24   pensait devoir les placer.

 25   M. Sainovic, lui, d'après ses dires, paragraphe 44 et au-delà, parce qu'il

 26   y a plusieurs paragraphes qui se rapportent à cet élément-là, veut nous

 27   dire que le déplacement de Sainovic vers le Kosovo-Metohija a été une

 28   décision que M. Bulatovic aurait prise de façon indépendante. M. Bulatovic

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  1   a dit la chose suivante au sujet de ce déplacement de Sainovic au Kosovo-

  2   Metohija et il l'a dit dans son propre livre, je cite : "Slobodan Milosevic

  3   s'est vu adresser deux requêtes concrètes au sujet du personnel.

  4   "La deuxième des requêtes à Milosevic était de celle de charger Nicolas

  5   [phon] Sainovic de la conduite des activités politiques liées au Kosovo-

  6   Metohija."

  7   Donc c'est ce que l'on nous dit ici concernant les requêtes de Milosevic.

  8   Alors, M. Bulatovic est venu témoigner ici et il a dit que cette décision

  9   se trouvait être tout à fait autonome et que c'était uniquement lui qui

 10   avait pris cette décision. Plus tard, dans le contexte politique de

 11   l'époque, il nous dit que Milosevic a été d'accord une fois qu'il a pris

 12   cette décision. M. Hannis, dans son contre-interrogatoire, nous a donné

 13   lecture d'une partie de ce livre. Je ne sais comment décrire tout ceci. Je

 14   peux demander aux Juges de la Chambre de relire les réponses en page 138

 15   968 [comme interprété]. Il a dit que ce qui se trouvait être indiqué dans

 16   le livre était vrai. Milosevic avait bel et bien demandé la chose, mais que

 17   la décision a été prise par lui-même, parce qu'il a expliqué que sur le

 18   plan officiel il avait les attributions, il était le seul à avoir les

 19   attributions nécessaires pour ce qui était de la prise d'une telle

 20   décision.

 21   Ça, on le sait. Je tiens à demander aux Juges de la Chambre de garder

 22   à l'esprit une chose, à savoir la réalité de la configuration et du partage

 23   du pouvoir et de l'exercice du pouvoir sur tous les champs, et non pas ce

 24   que le cadre légal disait. Nous avons eu une situation où on nous a montré

 25   comment M. Milosevic, lorsqu'il se trouvait être président de la Serbie,

 26   avec les mêmes attributions constitutionnelles, comment lui, a-t-il pu

 27   avoir tous ces

 28   pouvoirs-là ? Il a pu avoir ces pouvoirs en raison des réalités tout à fait

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  1   variées qui étaient celles du moment. Donc je demande aux Juges de la

  2   Chambre de se pencher sur la réalité des faits.

  3   L'influence de Milosevic et le rôle prédominant qu'il avait pour ce

  4   qui est de la nomination des cadres pour le Kosovo se trouvent être

  5   confirmés par le témoignage effectué au sujet de la nomination de M.

  6   Loncar. Si on se penche maintenant sur le paragraphe 15 de sa déclaration,

  7   page 2 571 – excusez-moi, paragraphe 14 plutôt, il est question ici des

  8   circonstances de sa nomination. Dans la dernière phrase, qui est celle qui

  9   nous intéresse, il est dit : "Etant donné que Milosevic voulait que je

 10   fasse partie de ce conseil, il a dit qu'il donnerait instruction à

 11   Bulatovic de faire en sorte que je sois nommé aussi au sein de cette

 12   instance."

 13   Bien entendu, le général Loncar s'est bel et bien vu nommé.

 14   L'Accusation veut bien croire que M. Bulatovic, une fois qu'il a nommé le

 15   général Loncar, avait les pouvoirs constitutionnels pertinents pour ce

 16   faire. Mais la nomination en tant que telle a été l'œuvre de M. Milosevic

 17   dans la réalité des faits.

 18   Ce qui est intéressant- et je tiens à le mettre en exergue pour les

 19   besoins des Juges de la Chambre - c'est de dire que de façon analogue, pour

 20   ce qui est de M. Bulatovic, lorsque M. Loncar est venu témoigner ici, il

 21   s'est efforcé de diluer la signification tout à fait claire de ce qu'il

 22   avait dit dans sa déclaration et chose dont on lui a donné lecture une fois

 23   de plus. Si l'on se penche sur sa déclaration donc, on peut voir qu'il

 24   s'est efforcé d'exprimer des éléments d'incertitude au sujet de Milosevic

 25   au sujet du terme "d'instruire," il a essayé de diluer. Mais le témoignage

 26   et les éléments de preuve montrent que tout ceci s'était fait suite à un

 27   encouragement effectué par M. Milosevic et les différentes personnes se

 28   sont vu nommées aux différents postes qu'ils ont eus au Kosovo suite à

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  1   instructions de sa part, suite à initiative prise par M. Milosevic.

  2   Ceci nous amène à une autre question que je voudrais évoquer quelque

  3   peu plus tard, mais je voulais mettre ceci en exergue pour deux exemples.

  4   Il n'a pas été inhabituel de voir dans cette affaire des témoins qui sont

  5   venus témoigner en essayant de diluer ou de nier même des éléments de

  6   témoignage qu'ils avaient fournis ou qu'ils avait fait auparavant, pour ce

  7   qui est donc des PV officiels ou pour ce qui est des déclarations

  8   consignées qu'ils auraient faites dans des circonstances tout à fait

  9   officielles. Nous avons récemment entendu le général Dimitrijevic nier

 10   qu'il ait dit à M. Crosland qu'il n'avait pas été d'accord avec les actions

 11   entreprises par les forces de sécurité au Kosovo depuis la prise des

 12   fonctions qui étaient celles de M. Sainovic. Or, M. Sainovic l'aurait donc

 13   emporté vis-à-vis des souhaits qui auraient été ceux du QG général.

 14   Nous avons vu des PV officiels des réunions de la direction collégiale de

 15   la VJ où le général Dimitrijevic avait eu le rôle et la responsabilité de

 16   présenter des rapports tout à fait précis, parce que cela impliquait la vie

 17   de ses hommes, de ses troupes. Le rapport montre qu'il n'aurait pas dit à

 18   Sainovic que l'on se servait des troupes à la légère. C'est un autre

 19   exemple est celui où on l'a vu venir ici devant le Tribunal pour dire que

 20   le PV était inexact.

 21   De façon analogue, Djakovic a voulu minimiser ou limiter la

 22   signification et la portée véritable des mots utilisés lorsqu'il a consigné

 23   les propos tenus à ces réunions du commandement conjoint. Ceci est une

 24   pièce à conviction importante, c'est un document donc important rédigé par

 25   un haut gradé du commandement du corps d'armée. C'est lui qui était chargé

 26   de la consignation des dires à l'occasion de cette réunion et il a voulu

 27   dire qu'il s'était efforcé de se servir de mots qui étaient ceux d'un

 28   profane pour parler d'une manière militaire.

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  1   L'Accusation affirme, compte tenu des circonstances en l'affaire, que

  2   ces PV étaient fiables et qu'il fallait s'y référer et non pas les rejeter

  3   comme l'a demandé la Défense à M. Sainovic. On peut donc s'y référer

  4   indépendamment des témoignages faits ultérieurement par bon nombre de

  5   témoins. Il s'agit de notes prises à l'époque par des officiels, des

  6   représentants officiels dans le cadre des missions officielles de ceux qui

  7   les ont faites. Donc il n'y aurait rien qui indiquerait que pour des

  8   raisons personnelles ou autre les auteurs des documents auraient présenté

  9   la vérité de façon erronée lorsqu'ils ont consigné ce qu'ils ont consigné.

 10   Cela dit, je souhaiterais que l'on examine la pièce P1468, un

 11   document qui a fait l'objet de discussion lors de la présentation de M.

 12   Hannis lorsqu'il a parlé de l'entreprise criminelle commune. Il s'agit d'un

 13   registre ou d'une note qui fait état des réunions du commandement conjoint

 14   par M. Djakovic.

 15   La Défense dit que le but de ces réunions était un échange

 16   d'information - c'est ce qui figure au paragraphe 74 – et que le président

 17   Sainovic ne parlait que de questions parlant ou portant sur les affaires

 18   étrangères, portant sur des questions politiques. Je souhaiterais inviter

 19   les Juges de la Chambre de réfléchir sur cette pièce, de tenir compte de la

 20   pièce P1468, nonobstant les éléments ou le témoignage de Djakovic selon

 21   lequel il ne faisant qu'interpréter ce qu'un homme profane peut dire dans

 22   un langage militaire. Mais l'Accusation affirme que ce compte rendu, que ce

 23   PV parle pour soi. Que c'est ces exemples-ci qui prouvent de façon non

 24   ambiguë que

 25   M. Sainovic ne parlait pas que de politique et d'affaires extérieures – ou

 26   que de questions portant sur les affaires extérieures et que ceci ne peut

 27   pas représenter un registre ou un PV erroné ou une erreur si ce n'est pas

 28   une erreur.

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  1   Djakovic n'aurait pas pu faire de telles erreurs lorsqu'il a pris

  2   note de ce que disait M. Sainovic. C'étaient des ordres, des ordres qui

  3   avaient été donnés pour mener à bien des exercices militaires. Ceci

  4   confirme la thèse de l'Accusation selon laquelle le rôle de Sainovic au

  5   Kosovo a été d'exercer un pouvoir politique et d'avoir également un pouvoir

  6   sur les forces de la RSFY.

  7   A l'examen de tout ceci, nous pourrions tirer des –

  8   M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Excusez-moi. Lorsque vous dites qu'il

  9   a fait une omission politique, qu'est-ce que vous voulez dire par là ? Sous

 10   son pouvoir ?

 11   M. STAMP : [interprétation] Le rôle qu'il avait lui avait été confié par M.

 12   Milosevic c'était de donner des ordres. C'était lui qui avait le

 13   commandement des forces de la RSFY au Kosovo. Ce n'était  pas simplement

 14   qu'un soldat, un fantassin. Il n'était pas impliqué directement dans la

 15   chaîne de commandement ou de la police ou de l'armée. Mais il avait la

 16   possibilité d'approuver les opérations qu'il allait mener à bien. Il avait

 17   le pouvoir d'insister pour que certaines opérations aient lieu, même si lui

 18   n'avait pas pris part directement, même s'il n'était pas nécessaire pour

 19   qu'il tienne part à ces opérations et qu'il participe au mécanisme de ces

 20   opérations. Nous avançons que cela donne lieu à certaines questions

 21   rhétoriques dans le mémoire en clôture de Sainovic. Nous pouvons retrouver

 22   la question suivante : pourquoi est-ce que Sainovic était un commandement

 23   alors qu'il n'a pas pris part, il n'a pas assisté à ces réunions

 24   politiques, et cetera, et cetera. Mais la réponse est il n'était pas un

 25   soldat, il n'était un policier, il n'était pas sur le terrain en train de

 26   mener des opérations. C'était quelqu'un d'autre. C'était d'autres éléments

 27   qui s'occupaient de ceci, qui étaient responsables de ceci, de cette

 28   partie-là de l'entreprise criminelle commune, mais qu'il avait un contrôle

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  1   général, car il était le confident du président Milosevic pour ce qui est

  2   des affaires du Kosovo. Je n'ai pas le paragraphe pour vous citer ce qui a

  3   été dit dans le mémoire en clôture, mais un très grand nombre de personnes

  4   ont dû travailler au Kosovo pendant cette période et c'est ce qu'ils

  5   avaient cru comprendre, c'est ainsi qu'ils avaient vu les choses.

  6   Nous devons nous rappeler lorsqu'on évalue le témoignage de Djakovic, à

  7   savoir qu'il y aurait peut-être des rapports [comme interprété] dans le PV

  8   qu'il aurait rédigé lui-même et en tenant compte des arguments de la

  9   Défense selon lequel ceci doit être –- ce rapport devrait être mis de côté,

 10   que l'on ne devrait pas tenir compte de ce rapport, mais Djakovic était

 11   également un membre du commandement conjoint et il avait également un

 12   intérêt de minimiser le rôle du commandement conjoint pour ce qui est des

 13   opérations. Le commandement conjoint à l'époque n'était pas une entité qui

 14   avait été mise en place ou qui avait été créée de façon juridique ou

 15   légale. Elle n'avait pas non plus une autorité constitutionnelle.

 16   J'inviterais les Juges de la Chambre de relire le témoignage de Loncar

 17   lorsqu'il parle de Sainovic. Je pourrais peut-être demander aux Juges de la

 18   Chambre de m'écouter, enfin, brièvement.

 19   Loncar, dans sa déclaration qui porte la cote P2521, paragraphe 28, si l'on

 20   prend le premier paragraphe - c'est le paragraphe 30 pour les Juges de la

 21   Chambre - c'est un général de la VJ au Kosovo, un ancien général de la VJ

 22   au Kosovo, et il dit : "Je ne connais pas la nature, je ne sais pas quelle

 23   est la nature du comportement de Sainovic lorsqu'il s'agissait de cette

 24   personne, mais je présume que ceci a dû à voir quelque chose avec le fait

 25   que Sainovic était responsable du Kosovo, et j'avais présumé que c'était

 26   Milosevic qui lui avait conféré cette autorité."

 27   Lorsqu'il est venu déposer, je lui ai demandé si l'expression "de facto"

 28   pouvait être employée pour décrire la responsabilité de

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  1   M. Sainovic, et dans son témoignage aux numéros 7 603 à 4, il confirme de

  2   façon très claire cela, que la situation de facto était que Sainovic avait

  3   reçu l'autorité de Milosevic pour ce qui est du Kosovo.

  4   Donc Loncar donne un témoignage crédible pour ce qui est de

  5   l'autorité de Sainovic et de son travail au Kosovo, et cette preuve

  6   contredit ce qu'avance la Défense au paragraphe 64 de son mémoire en

  7   clôture, à savoir que Sainovic -- que les pouvoirs de Sainovic découlent

  8   de son rôle en tant que ministre chargé des Affaires extérieures. C'est

  9   ce que Loncar dit. Sainovic a essayé de faire beaucoup plus, c'est-à-

 10   dire il a plusieurs fonctions juridiques qui lui avaient été conférées.

 11   Des attaques ont été menées contre M. Ciaglinski. On a attaqué en

 12   fait ce qu'a dit M. Ciaglinski, M. Ciaglinski et sa capacité de juger ce

 13   qu'a dit M. Sainovic.

 14   On a également essayé de contredire ce que dit le général DZ pour ce

 15   qui est du Kosovo. Je ne vais pas en parler en détail puisque ceci se

 16   trouve dans le mémoire en clôture, mais je souhaiterais simplement rappeler

 17   les Juges de la Chambre que le général DZ a parlé des incidents très précis

 18   selon lesquels il peut démontrer que Sainovic avait un contrôle effectif au

 19   Kosovo.

 20   Donc je crois que ceci, que cette analyse très précise de ce qu'a dit

 21   la Défense contredit la thèse de cette dernière.

 22   Maintenant je vais parler des bombardements de l'OTAN. Comme je l'ai

 23   déjà dit il s'agit d'une séparation tout à fait artificielle. Nous ne

 24   devrions pas découper ces laps de temps, de périodes différentes, car il

 25   faudrait considérer le tout comme un ensemble car le tout a un impact sur

 26   tout. L'un des éléments fondamentaux de l'Accusation, c'est que les

 27   participants savaient très bien qu'une force excessive avait été employée

 28   par les forces de la RSFY en 1998 avaient un impact très précis sur l'état,

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  1   sur l'esprit, et sur ce qui s'est passé en 1999, car ce qui s'est passé en

  2   1998 s'est donc passé en 1999 aussi. On ne peut pas parler de deux

  3   séparations très distinctes de ces deux périodes, car ces événements sont

  4   liés d'une certaine façon.

  5   J'aimerais vous parler de Sainovic en 1999, je le ferai - en fait,

  6   tout comme M. Fila l'a dit au début pour ce qui est de

  7   M. Sainovic au compte rendu d'audience à la page 13 791, il a dit que M.

  8   Sainovic a passé beaucoup de temps à l'extérieur du Kosovo, mais qu'il

  9   serait absurde de penser qu'il aurait pu avoir une influence ou un contrôle

 10   sur les événements du Kosovo.

 11   J'aimerais vous rappeler de ce qui a été dit au mémoire préalable au

 12   procès que Sainovic n'avait pas pris part dans des opérations directes pour

 13   ce qui est des opérations menées par -- enfin, des opérations menées sur le

 14   terrain. Si vous examiniez la fréquence de sa présence au Kosovo, vous

 15   pourriez conclure que son rôle politique, le rôle politique qu'il a joué,

 16   il était là-bas suffisamment souvent pour pouvoir avoir une autorité. Les

 17   éléments de preuve présentés par la Défense diront qu'il était

 18   principalement occupé dans la municipalité de Bor au cours de cette période

 19   et qu'il s'y trouvait, mais ceci, nous ne pouvons pas tenir compte de cela,

 20   ou tout du moins il a pu se déplacer, il était là au Kosovo et pendant des

 21   moments très importants au cours de la guerre.

 22   Monsieur le Président, Mesdames, Monsieur le Juge, il y a eu d'autres

 23   réunions. Nous avons déjà vu le cahier de travail de

 24   M. Obrad Stevanovic, pièce P1898, dans laquelle il parle d'une autre

 25   réunion qui s'est tenue au bureau de Milosevic et où étaient présents M.

 26   Stevanovic et Sainovic au mois de mai 1999, où le ratissage et le nettoyage

 27   du terrain avaient été discutés. Et je voudrais vous parler des réunions du

 28   14 [comme interprété] et 17 mai, c'était deux réunions qui s'étaient tenues

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  1   à Belgrade. En fait, je crois que la réunion du 14 mai, pour me corriger,

  2   était une réunion qui s'est tenue au Kosovo et c'est là que M. Sainovic a

  3   escorté M. Rugova à Belgrade et la réunion du 17 mai a eu lieu à Belgrade.

  4   M. Sainovic avait suffisamment de temps contrairement à ce que

  5   prétend la Défense.

  6   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il faudrait peut-être continuer

  7   après la pause déjeuner.

  8   M. STAMP : [interprétation] Oui, certainement, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons donc faire une pause d'une

 10   heure et nous reprendrons nos travaux à 13 heures 45.

 11   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 47.

 12   --- L'audience est reprise à 13 heures 46.

 13   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Stamp.

 14   M. STAMP : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Madame, Monsieur

 15   les Juges.

 16   La question qui se pose pour ce qui est de la période de l'intervention est

 17   de savoir ce que M. Sainovic faisait pendant ces réunions auxquelles il

 18   prenait part. Selon les rapports ou les PV des réunions que nous avons, le

 19   rôle de Sainovic était celui d'une personne qui était un officier de la

 20   sécurité au Kosovo et il avait un contrôle sur les civils au Kosovo.

 21   Si l'on prend la réunion du 4 avril 1999, de l'état-major du MUP,

 22   nonobstant ce qu'avance la Défense dans son mémoire en clôture, à savoir

 23   que la visite de Sainovic n'avait aucune implication pour ce qui est du

 24   travail du MUP, vous pouvez voir ce qui a été dit en repassant en revue ce

 25   PV du 4 avril 1999. Il s'agira, bien sûr, de la pièce P1989. Parmi

 26   certaines choses qu'a dit Sainovic, il a dit : "Il est nécessaire pour que

 27   la première étape des activités antiterroristes soit complétée ou terminée

 28   aujourd'hui pour le but d'une défense active et la protection du territoire

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  1   et des frontières dans le cas d'une percée effectuée par l'agresseur en

  2   profondeur du territoire de la RSFY."

  3   Cvetic, qui était présent à cette réunion, a dit à la

  4   page 8 081 du compte rendu d'audience, il dit que -- ceci correspond, bien

  5   sûr, au PV que je viens de mentionner, ça se reflète également dans le PV -

  6   - il dit que Sainovic a indiqué que toutes les opérations qui ont déjà été

  7   planifiées devaient prendre fin ce jour-là et que le MUP allait ensuite

  8   passer à d'autres tâches. Donc Sainovic donnait des directives pendant ces

  9   réunions.

 10   Si nous analysons la réunion du MUP du 17 mai [comme interprété] et si nous

 11   prenons le PV de la réunion qui porte la cote P1996, nous pouvons voir que

 12   Sainovic ne fait pas un -- il a donné un discours assez long qui portait

 13   sur les questions politiques, les questions impliquant d'autres zones à

 14   l'extérieur de la sécurité, mais il a également fait une déclaration. Il ne

 15   s'agit pas seulement d'une personne qui était très intimement impliquée

 16   dans les opérations des forces de la sécurité et qui avait une capacité ou

 17   la responsabilité de diriger leur travail.

 18   Nous pouvons le voir à la page 2 de la pièce P1996. Il a dit que

 19   l'UCK avait été détruite dans le cadre des opérations antiterroristes

 20   menées par les forces policières. Il dit : "Après l'opération Jezerce, il

 21   n'y aura plus d'activités terroristes et les secrétariats eux-mêmes

 22   allaient être détruits."

 23   Plus loin, il ajoute : "Après l'opération de Jezerce, toutes les unités du

 24   PJP vont devoir revenir à leurs secrétariats en coopération avec la VJ et

 25   leur travail sera détruit pour ce qui est -- le travail des groupes

 26   terroristes sera détruit. De plus, l'objectif principal des groupes

 27   antiterroristes sera d'assurer la paix au Kosovo-Metohija."

 28   Encore une fois, à la page 3 il parle de la relation qui existe entre la VJ

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  1   et la police et que tout ceci fonctionne bien et que les détachements

  2   reviennent à l'endroit où ils étaient cantonnés pour maintenir la loi et la

  3   paix."

  4   A la page 4, il parle de l'armée yougoslave et il dit que : "L'armée

  5   yougoslave a reçu pour ordre que toutes les unités soient subordonnées et

  6   que toutes les unités de la VJ -- VTO -- toutes les unités de la VTO

  7   doivent être subordonnées aux brigades de la VJ avec pour objectif d'œuvrer

  8   dans le but de protéger les routes, les installations, et cetera, et

  9   cetera, à l'extérieur des villes."

 10   Alors voici c'est un PV qui parle de sa participation à cette réunion qui

 11   va bien au-delà des questions relatives -- qu'aux questions des affaires

 12   extérieures. Il était intimement lié, il donnait des directives et il a

 13   prouvé, tout du moins, les plans qui lui étaient présentés pour ce qui est

 14   des activités futures. Ceci faisait partie de son rôle en tant que

 15   directeur politique, en tant que personne qui avait un rôle opérationnel

 16   dans la vie politique.

 17   Plusieurs personnes ont témoigné quant à sa présence et sa participation

 18   dans cette réunion du 17 mai. Il y a trop d'éléments pour les passer tous

 19   en revue ici, mais j'aimerais demander à la Chambre de première instance de

 20   se poser la question. Que faisait-il à cette réunion du 17 mai ? Quelle a

 21   été son rôle ?

 22   Cette réunion a eu lieu au poste de commandement du commandement Suprême de

 23   Belgrade et d'autres participants étaient le président Milosevic, général

 24   Ojdanic, Rade Markovic qui était le chef de la DB -- RDB, le général

 25   Pavkovic, le général Farkas, le colonel Gajic et le général Vasiljevic.

 26   Toutes ces personnes étaient présentes à cette réunion. Ce sont des membres

 27   les plus notables pour ce qui est des membres des forces de la sécurité et

 28   du président Milosevic.

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  1   Sainovic n'était pas seulement un homme politique présent aux côtés

  2   de Milosevic, mais on ne peut pas dire que sa présence ne pouvait se

  3   définir qu'à la présence de quelqu'un qui parle des questions relatives aux

  4   affaires extérieures. Il a effectivement eu une responsabilité pour ce qui

  5   est des opérations des forces de la sécurité. Et on voit qu'il était très

  6   bien informé et qu'il savait  tout à fait bien ce qui se passait, quelle

  7   était son autorité et quelle était l'influence. Vous pouvez tirer les

  8   conclusions nécessaires, à savoir de sa participation.

  9   D'après Vasiljevic et d'après les notes qu'il a prises, Sainovic a

 10   dit : "Nous avons donné l'ordre pour que des rapports soient présentés dans

 11   tous les secteurs concernant ce qui se passe et concernant ce qui doit être

 12   enquêté." Il a également parlé de la tâche du travail concernant le

 13   ratissage du terrain. Il a également parlé qu'il serait bien d'engager

 14   quelqu'un d'autre comme superviseur, par exemple. Ensuite, il a parlé

 15   également, d'après Vasiljevic, des problèmes qui existaient quant aux

 16   uniformes, que certains groupes avaient des difficultés, qu'il était enfin

 17   difficile de contrôler certains groupes qui portaient certains uniformes.

 18   Ceci figure à la pièce P2592.

 19   Pour ce qui est des rapports, à savoir que les hommes d'Arkan avaient

 20   été envoyés à Kosovo Polje, M. Sainovic avait dit qu'il allait vérifier la

 21   véracité de ces rapports.

 22   Pavkovic, pour sa part, a dit qu'il fallait créer un corps qui

 23   pourrait mener des enquêtes quant aux allégations faites contre le MUP et

 24   la VJ, et Sainovic était d'accord, d'après Vasiljevic, pour que ceci se

 25   fasse.

 26   Lorsque Vasiljevic écrit ce jour-là que la SAJ était intégrée  dans ce

 27   groupe tel que les Skorpions qui, auparavant, n'avait pas rencontré les

 28   critères nécessaires pour faire partie du MUP et qu'il ne pouvait pas être

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  1   emmené au Kosovo. Sainovic a fait un commentaire là-dessus.

  2   En dernier lieu, d'après Vasiljevic, il a eu un réunion préliminaire

  3   le 16 mai 1998 [comme interprété], et pour ce qui est de cette réunion-là,

  4   Pavkovic a dit qu'il avait informé Sainovic qu'un groupe de Skorpions et

  5   Boca à Prolom Banja portaient des uniformes du type d'OTAN et qu'ils

  6   portaient des insignes de la SAJ et qu'ils étaient actifs dans la région.

  7   Pavkovic a également dit qu'il avait reçu des ordres pour que les organes

  8   militaires établissent une responsabilité pour ce qui est de ces groupes et

  9   qu'il avait informé Sainovic sur tout ce qui se passait.

 10   Alors la question qui se pose est de savoir : est-ce que Pavkovic

 11   avait la responsabilité d'informer Sainovic de ce type d'opérations ?

 12   De nombreux témoins nous ont parlé de la réunion du 1er juin 1999. Le

 13   général Vasiljevic nous en a parlé et ceci figure à la pièce P2600. Avant,

 14   nous avons 2D387, j'y viendrai. Mais j'aimerais qu'on parle de la pièce

 15   2600. Il s'agit de la déclaration de M. Vasiljevic au sujet de cette

 16   réunion dont il a reconnu la véracité. Il a expliqué que c'était une

 17   réunion au cours de laquelle le général Lazarevic et le général Lukic ont

 18   fait rapport, ont rendu compte de ce qui se passait. La réunion était

 19   présidée par le général Pavkovic. Non, je me répète, je répète, je

 20   reprends.

 21   Voilà une réunion où nous avions notamment le général Lazarevic et le

 22   général Lukic qui ont fait des rapports et ils ont également présenté des

 23   plans, des propositions. M. Sainovic était là, c'est lui qui présidait la

 24   réunion, et M. Sainovic a approuvé ce qui lui était proposé, le plan qui

 25   lui était proposé. Les éléments qui figurent à la pièce P2500 [comme

 26   interprété]  au sujet de cette réunion sont sans équivoque.

 27   Il est exact qu'ultérieurement on a tenté, enfin, la Défense nous a

 28   présenté une autre déclaration du général Vasiljevic au sujet de cette

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  1   réunion et dans cette déclaration, en ce qui concerne le rôle de Sainovic

  2   n'est pas aussi frappant que dans la précédente. Cette déclaration, elle a

  3   été communiquée à la Chambre. Cependant, dans cette dernière déclaration,

  4   le général Vasiljevic a néanmoins reconnu que Sainovic avait accepté et

  5   avait déclaré que tout ce qui venait de lui être présenté devait être suivi

  6   d'effet, devrait être mis en œuvre. Donc comme on le voit, ce n'est pas

  7   rare, on voit que les éléments de preuve ont été un peu édulcorés, mais

  8   malgré cela nous avons toujours ce qui reste, c'est-à-dire les éléments

  9   essentiels pour cette partie de mon argumentation.

 10   Dans le mémoire préalable au procès, nous avons un élément au sujet

 11   de la réunion avec Rugova. C'est assez clair, mais permettez-moi simplement

 12   d'y revenir brièvement avec la déposition de Merovci qui a dit que tout au

 13   cours de ces réunions, il y en a plusieurs, il était clair que M. Sainovic

 14   recevait des instructions de la part de M. Milutinovic.

 15   Il y a quelques éléments que je souhaiterais aborder rapidement au

 16   sujet de M. Sainovic maintenant.

 17   La Défense affirme que M. Sainovic a été constructif, qu'il a essayé

 18   de contribuer à la réussite des négociations à Rambouillet et ailleurs, au

 19   nom de la Serbie et de la RSFY. Et il renvoie aux éléments fournis par M.

 20   Byrnes. La Défense essaie de nous faire croire que M. Byrnes estime que M.

 21   Sainovic est sincère. Et ce qu'ils essaient aussi de démontrer c'est que M.

 22   Sainovic ne contrôlait rien du tout.

 23   Or, si on regarde ce que déclare M. Byrnes - et ceci se retrouve aux

 24   paragraphes 550 à 551 du mémoire en clôture de

 25   Sainovic - M. Byrnes déclare qu'il se souvient clairement qu'il avait

 26   encouragé M. Sainovic à pousser la délégation serbe à faire preuve de plus

 27   de flexibilité, puisqu'il estimait que la menace de l'OTAN de bombarder la

 28   Serbie ce n'était pas du bluff et que la Serbie ne pourrait sans doute

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  1   probablement pas obtenir beaucoup plus que ce qu'on leur offrait à

  2   Rambouillet. Et il se souvient que M. Sainovic, il s'en souvient très bien,

  3   a réfléchi à la question et que finalement il a répondu en disant qu'il

  4   n'avait pas l'autorité nécessaire pour faire preuve de flexibilité, qu'il y

  5   avait trop de contraintes qui lui étaient imposées depuis Belgrade et qu'au

  6   bout du compte il ne pouvait rien faire dans ce sens.

  7   Or, ceci montre, selon nous, comme nous l'avons dit dans le mémoire

  8   préalable et dans l'acte d'accusation, que c'était un dirigeant politique.

  9   Il parle de ce qu'il peut faire, de ce qu'il ne peut pas faire, des

 10   instructions qui lui sont données. Au cours des discussions de Rambouillet,

 11   il a eu la permission de partir, de retourner à Belgrade pour consultation

 12   avec M. Milosevic. De plus, nous avons les éléments fournis par M.

 13   Petritsch dans sa déposition. Ceci est accepté dans son mémoire par M.

 14   Sainovic, mémoire préalable, page 535, et selon lequel M. Sainovic c'était

 15   celui à qui on pouvait s'adresser si on estimait que les négociations

 16   étaient confrontées à des obstacles insurmontables, et ceci en particulier

 17   à deux reprises, au début d'abord des négociations, puis tout à la fin

 18   quand il fallait obtenir que le groupe serbe fasse des concessions. C'est

 19   M. Sainovic à qui on s'est adressé, c'est lui qui a fait un petit miracle,

 20   si l'on peut dire.

 21   La Défense soulève trois arguments. La Défense évoque ceci. Elle

 22   estime cependant que M. Sainovic était malléable. Mais selon nous, selon

 23   l'Accusation, il était aux commandes du point de vue politique et il

 24   pouvait faire changer les choses.

 25   On a beaucoup parlé du témoin Cvetic, de sa personnalité. C'est le

 26   seul témoin, le seul chef du SUP qui a déposé à charge et il a parlé de M.

 27   Sainovic, de son rôle et du rôle de M. Lukic. Et nous avançons que ce qu'il

 28   a dit au cours de sa déposition c'est très important.

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  1   Sa crédibilité a été remise en cause essentiellement au sujet de ce

  2   qu'il a déclaré au sujet d'une réunion du 22 juillet ou juin 1998. Il a dit

  3   que soit M. Djordjevic soit M. Obrad Stevanovic avait annoncé la mise en

  4   place d'un commandement conjoint avec notamment M. Sainovic parmi ses

  5   membres. Cvetic a déclaré que lors d'une réunion du MUP du 22 juillet 1998,

  6   Djordjevic avait annoncé la création du commandement conjoint et que

  7   Sainovic, Minic, Lukic et Pavkovic ont compose le commandement.

  8   Sa crédibilité est remise en question. On nous dit que ceci ne figure

  9   pas des le procès-verbal de la réunion du MUP en question. J'invite les

 10   Juges de la Chambre à se pencher sur le procès-verbal de cette réunion. Il

 11   s'agit de la pièce 6D798. Ce soi-disant compte rendu, ce soi-disant procès-

 12   verbal ne fait qu'une page et demie. Or, nous avons déjà pu consulter des

 13   procès-verbaux de réunions du MUP, et il est manifeste que nous avons

 14   affaire ici à un document qui est incomplet. Lorsque ce document a été

 15   présenté au témoin, d'ailleurs au témoin Mijatovic, Mijatovic, même si on

 16   peut se poser des questions sur sa crédibilité à lui, c'est lui qui a dit

 17   que manifestement, manifestement ce document était "incomplet," c'est ce

 18   qu'il a dit en réponse à une question  qu'on lui a posée au sujet de ce

 19   document, pages 22 315 à 23 316 du compte rendu d'audience.

 20   Cvetic a été également critiqué, parce que Mijatovic qui était à

 21   cette réunion a dit que lui n'avait jamais rien entendu de tel au cours de

 22   la réunion. Beaucoup de témoins ont été cités à la barre par la Défense,

 23   beaucoup d'anciens membres de la police au Kosovo. Beaucoup sont venus

 24   déposer dans ce prétoire, et beaucoup ont tout oublié du commandement

 25   conjoint. Beaucoup ont fait des déclarations très douteuses au sujet de la

 26   manière dont fonctionnait le commandement conjoint. M. Hannis va y revenir.

 27   Mais je souhaiterais insister sur le fait que M. Mijatovic n'est vraiment

 28   pas le témoin à utiliser pour contester la crédibilité de M. Cvetic. Vous

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  1   vous souviendrez que M. Mijatovic c'est le témoin qui, au cours de sa

  2   déposition, a dû être mis en garde par la Chambre qui lui a rappelé qu'il

  3   s'était engagé à dire toute la vérité. On l'a mis en garde au sujet des

  4   conséquences que pouvait avoir le non-respect de cet engagement. Et

  5   justement il parlait à ce moment-là du procès-verbal de la réunion.

  6   Nous avons également Vucurevic et Dusko Adamovic qui sont venus

  7   déposer ici, qui nous ont parlé de cette réunion, et ils affirment qu'ils

  8   n'ont jamais rien entendu de tel. Or, ici encore nous avons affaire à des

  9   témoins qui sont dénués de toute crédibilité. Je souhaiterais engager les

 10   Juges de la Chambre à relire le contre-interrogatoire de grande qualité

 11   mené par le conseil de M. Pavkovic, contre-interrogatoire de M. Adamovic

 12   donc. M. Adamovic a commencé par dire qu'il en savait très peu des

 13   relations existant entre le MUP et la VJ. Et il a fallu tous les efforts

 14   extrêmement habiles du conseil de la Défense pour qu'au bout du compte ils

 15   reconnaissent qu'il était au courant, mais surtout que c'était lui le

 16   principal vecteur des communications, des cartes entre ces deux

 17   institutions. Donc, selon nous, c'est un témoin qui n'est pas un témoin

 18   crédible.

 19   Nous avons un autre témoin, Bogunovic, qui lui n'était pas présent lors de

 20   la réunion en question, mais qui est venu déposer ici et qui, en réponse à

 21   des questions éminemment directrices des conseils, a reconnu que Cvetic

 22   c'était un supérieur très médiocre, quelqu'un qui n'était pas respecté. Il

 23   faut se souvenir que Bogunovic oubliait ou ne se souvenait plus d'une

 24   réunion à laquelle il a participé au MUP, pièce P1996 et au cours de cette

 25   réunion, il a fait un rapport. Or, il nie avoir fait ce rapport. Pourtant,

 26   si on regarde le procès-verbal, on voit que c'était le cas. On voit qu'il a

 27   participé à cette réunion.

 28   Beaucoup de ces témoins, beaucoup des déclarations des témoins à

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  1   décharge, qui étaient des subordonnés de M. Lukic, de M. Lazarevic ou du

  2   général Pavkovic, beaucoup de ces témoignages viennent de personnes qui ne

  3   sont pas crédibles.

  4   Il y a une série de questions rhétoriques que l'on trouve au paragraphe 617

  5   du mémoire en clôture de Sainovic. J'avais l'intention de parler, mais je

  6   vous dirais ceci : si l'on part du principe que M. Sainovic n'était pas un

  7   soldat, n'était pas un policier, si l'on dit il n'était pas présent et

  8   qu'il ne participait pas au fonctionnement au jour le jour sur le terrain,

  9   à ce moment-là ces questions deviennent redondantes. Et l'autre question,

 10   c'est de savoir s'il était véritablement là en tant que politicien,

 11   pourquoi à ce moment-là il y avait des problèmes de rattachement du MUP,

 12   pourquoi il y avait des problèmes de coordination comme le montrent les

 13   preuves versées au dossier. Je réponds à cette question. M. Milosevic dont

 14   tous reconnaissent ici que c'est lui qui exerçait le pouvoir en premier

 15   lieu, lui aussi avait des difficultés et rencontrait des problèmes en ce

 16   qui concerne la subordination. Il a dû lui aussi, donner un ordre à ce

 17   sujet. Or, pendant longtemps cet ordre n'a pas été suivi d'effet. Il y

 18   avait donc des problèmes s'agissant de la resubordination des unités, mais

 19   cela en soi ne signifie pas que Sainovic n'avait pas un rôle à jouer,

 20   n'avait pas une autorité, puisque même Milosevic rencontrait les mêmes

 21   difficultés quand il s'est trouvé confronté à la guerre, à la situation de

 22   guerre.

 23   Je pense que les questions que je viens d'évoquer ne sont pas des questions

 24   auxquelles il est finalement très difficile de répondre. Les éléments

 25   présentés au sujet de M. Sainovic montrent que très clairement qu'il avait

 26   une véritable autorité, et tout comme M. Milutinovic, je demande aux Juges

 27   avec tout le respect que je leur dois, de se pencher sur la réalité des

 28   faits telle qu'elle nous a été présentée par les témoins. Je vous demande

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  1   de ne pas vous arrêter aux détails techniques ou théoriques qui nous ont

  2   été présentés par la Défense.

  3   J'avais précisé avant d'intervenir que nous allions tout de suite

  4   passer à M. Lukic ensuite, mais finalement nous allons garder l'ordre

  5   initial, parler des témoins militaires, ensuite on en reviendra à M. Lukic,

  6   puis un certain nombre de questions d'ordre général au sujet des preuves du

  7   dossier.

  8   M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] J'ai un certain nombre de questions

  9   d'ordre général à vous poser. Je voudrais être sûr de bien vous comprendre.

 10   Vous nous dites qu'il était investi du pouvoir, d'un pouvoir non seulement

 11   politique, mais un pouvoir qui lui permettait aussi de faire des

 12   changements, de faire changer les choses. J'aimerais que vous m'aidiez à

 13   mieux vous comprendre sur ce point. Est-ce que vous pourriez nous donner

 14   des éléments de référence à ce sujet ? Vous avez parlé des changements, des

 15   changements qu'il pouvait mettre en œuvre.

 16   M. STAMP : [interprétation] Quant j'ai parlé de changements –-

 17   M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Excusez mon interruption, mais voyez-

 18   vous, on nous a présenté un extrait d'une déclaration où on lui dit, où la

 19   VJ, le MUP, l'informe d'un certain nombre de choses, et apparemment il

 20   donne son accord. Mais ensuite vous avez dit en commentant cet extrait

 21   qu'il aurait même pu faire changer les choses. Et là, je suis un petit peu

 22   perplexe. Est-ce que vous pourriez préciser les choses pour moi en me

 23   donnant des références tangibles ?

 24   M. STAMP : [interprétation] Quant j'ai dit qu'il aurait pu faire changer

 25   les choses, je parlais de son rôle lors des négociations de Rambouillet. La

 26   Défense dans son mémoire en clôture a tenté de faire croire que M. Sainovic

 27   a été un négociateur très diligent au cours des négociations justement.

 28   M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Oui, mais vous avez dit que c'était

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  1   son rôle, puisqu'il était chargé des affaires étrangères. Mais quand vous

  2   avez parlé de changements, que ce n'était pas plutôt des changements de

  3   planification dans le cadre de plans, d'organisation concernant la VJ et le

  4   MUP ? Ce n'est pas ce que vous vouliez dire, alors ?

  5   M. STAMP : [interprétation] Non, non, pas du tout. Je parlais de

  6   Rambouillet.

  7   M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Merci. D'accord. Si vous parliez

  8   uniquement de cela, c'est bien. Vous ne parlez donc pas  d'autres

  9   changements.

 10   M. STAMP : [interprétation] Oui, oui.

 11   M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] En fait, votre argument c'est qu'il

 12   était d'accord avec des plans qui lui étaient présentés. Est-ce que vous

 13   souhaiteriez ajouter quoi que ce soit à ce sujet, à ce qu'il aurait pu

 14   faire à ce sujet, ce qu'il a fait ?

 15   M. STAMP : [interprétation] Etant donné le rôle qu'il a joué en 1998, et ça

 16   s'est poursuivi ensuite, j'avais présenté à la Chambre certains des propos

 17   qu'il a tenus lors de ces réunions conjointes. Selon nous, lors de ces

 18   réunions, lors de ces interventions, on peut parler sans équivoque

 19   d'instructions, de consignes relatives à ce que devaient entreprendre les

 20   forces de sécurité.

 21   M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Est-ce qu'il a dit qu'il fallait

 22   faire telle ou telle chose ou mener à bien telle ou telle opération dans

 23   tel ou tel délai ?

 24   M. STAMP : [interprétation] Oui.

 25   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Stamp.

 26   Oui, Monsieur Hannis.

 27   M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais

 28   maintenant parler du général Ojdanic.

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  1   Le général Ojdanic, c'était le militaire numéro un, c'était l'homme

  2   en uniforme numéro un de la VJ à partir de sa nomination à la tête de

  3   l'état-major général de la VJ le 24 novembre 1998. Il était également chef

  4   de l'état-major du commandement Suprême à partir du 4 [comme interprété]

  5   mars 1999, pendant la guerre. Il a été présent lors de réunions du conseil

  6   de la Défense pour représenter la VJ et il commandait de fait et de droit

  7   les unités subordonnées à la VJ. Selon nous, il a contribué à l'entreprise

  8   criminelle commune de plusieurs manières. Il a dirigé des opérations de

  9   combat menées par la VJ. Il a participé à la distribution d'armes aux non-

 10   Siptar. Il a joué un rôle au sein du conseil suprême de la Défense et au

 11   sein du commandement Suprême également. Il a participé à des opérations qui

 12   constituaient des violations des accords d'octobre, et il a également

 13   apporté son concours à l'entreprise criminelle commune en ne prenant pas

 14   certaines mesures concernant le général Pavkovic.

 15   D'abord, j'aimerais parler de certaines des consignes qui ont été

 16   données par le général Ojdanic et l'état-major général, puis l'état-major

 17   du commandement Suprême avant la guerre et pendant la guerre. La première

 18   directive que je souhaiterais vous présenter,  c'est celle qui est

 19   intitulée Grom 3 et qui date du 16 janvier 1999. Pièce 3D690. Je

 20   m'intéresserai ensuite à la directive du 9 avril 1999, puis celle du 29 mai

 21   également. Commençons par Grom 3, 3D690.

 22   Il s'agit d'une directive qui vient du général Ojdanic en date du 16

 23   janvier 1999, qui est décrite comme ayant pour objectif, je

 24   cite : "Prévenir l'intervention d'une force ou d'une brigade multinationale

 25   de l'OTAN." On voit que la mission qui est confiée à la 3e Armée, en ce qui

 26   concerne en tout cas la deuxième étape de sa directive, c'est de "détruire

 27   les forces terroristes siptar au Kosovo". Après cette directive du général

 28   Ojdanic, on voit que le commandant de la 3e Armée, le général Pavkovic,

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 13  pagination anglaise et la pagination française.

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  1   donne son propre ordre Grom 3 le 27 janvier 1999. Il s'agissait là non

  2   seulement d'empêcher la mise en place d'une brigade de l'OTAN, son

  3   intervention, mais il s'agissait également, je cite : "de détruire les

  4   forces terroristes siptar au Kosovo."

  5   Si on regarde la pièce 5D245 qui a trait à Grom 3, donc opération

  6   Tonnerre 3, qui vient du général Pavkovic, comme j'ai dit, c'est un

  7   document qui date du 27 janvier. Dans la deuxième étape ou dans la deuxième

  8   phase de cette opération qui est confiée au Corps de Pristina du général

  9   Pavkovic, on voit qu'il s'agit de "détruire les terroristes siptar au

 10   Kosovo." Au point 5.1 de cet ordre, on voit que le Corps de Pristina devait

 11   "procéder à l'engagement de la population non-siptar armée afin de

 12   s'assurer le contrôle de points militaires et de voies de communication

 13   afin de défendre les zones peuplées par des non-Siptar."

 14   Après cet ordre dit Grom 3, quatre jours plus tard environ, on voit

 15   un ordre du général Pavkovic destiné au Corps de Pristina et au général

 16   Lazarevic. Il s'agit pour ce dernier de mener à bien un certain nombre de

 17   missions. Il y a une de ces missions que l'on trouve au point 5 de la pièce

 18   5D49, et le Corps de Pristina reçoit l'ordre d'élaborer un plan pour, je

 19   cite : "détruire les forces terroristes siptar dans les secteurs de

 20   Drenica, Malisevo et Drame [phon]." Il s'agit également d'assurer une

 21   coordination pleine et entière avec les unités du MUP, et tout ceci doit

 22   être réalisé au plus tard le 15 février.

 23   Au dossier, nous avons la pièce 2808. Selon nous, il s'agit là de la

 24   version de Lazarevic de Grom 3 et qui suit l'ordre donné par le général

 25   Pavkovic. Vous vous souviendrez que cette pièce P2808, c'est un ordre qui

 26   est assez long qui vient du général Lazarevic. Il s'agit d'annihiler, de

 27   détruire les forces siptar terroristes dans le secteur de Malo Kosovo,

 28   Drenica et Malisevo. Cette pièce porte le numéro strictement confidentiel

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  1   455-1. Vous vous souviendrez, nous en avons parlé longuement du nom de la

  2   numérotation des documents venant du Corps de Pristina, et si on regarde

  3   l'ordre du commandement conjoint qui date du 22 mars, de ces différents

  4   ordres et qui date du 22 mars et des dates suivantes, on voit qu'ils

  5   portent tous ce numéro 455. Nous avons donc ici le premier ordre de la

  6   série qui a débouché sur les crimes que l'on sait, les crimes qui sont

  7   visés à l'acte d'accusation.

  8   Dans cet ordre, il est précisé que les subordonnés qui reçoivent l'ordre

  9   doivent engager des forces siptar non armées pour assurer le contrôle des

 10   installations militaires et des voies de communication et défendre les

 11   lieux habités par la population non-siptar.

 12   Un petit exemple sur la mise en œuvre effective de cet ordre sur le

 13   terrain, au point 5.5 nous avons la mission qui est confiée à la Brigade

 14   motorisée 549 qui est placée sous le commandement du colonel Delic. Il

 15   s'agit d'assurer ou de mettre en place un blocus autour des formations du

 16   Groupe 21, et vous avez ensuite la pièce 981 [comme interprété], pièce

 17   P2015, la pièce 1995 qui vous permettent de voir exactement la manière dont

 18   tous ces ordres se sont traduits effectivement sur le terrain.

 19   A cet égard, du coté du MUP, nous trouvons une autre pièce en date du 19

 20   février, c'est-à-dire trois jours plus tard. Il s'agit de la pièce 6D716,

 21   qui est intitulée : "Etat-major du MUP." Il s'agit d'un ordre, et je

 22   cite : "de détruire et anéantir les forces des terroristes albanais dans le

 23   secteur de Malo Kosovo, Drenica et Malisevo." Si vous comparez les deux

 24   documents de façon synoptique, avec les ordres donnés par le général

 25   Lazarevic qui sont contenus dans la pièce P2808, vous verrez que l'on y

 26   reprend les missions confiées là-bas.

 27   C'est quelque peu, pour nous tous – cela a toujours été un mystère pour

 28   nous jusqu'à l'arrivée du colonel Djakovic qui nous a dit que c'était un

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  1   document qu'il avait rédigé lui-même. Vous pouvez voir cela au compte rendu

  2   d'audience en page 26 930. C'est lui qui nous a dit qu'il avait rédigé ce

  3   document et qu'il l'avait donné à Dusko Adamovic, qui se trouvait être

  4   membre du MUP. En répondant à une question posée par le Président de la

  5   Chambre, il a dit qu'il s'agissait là d'une sorte d'ordre, car pour finir

  6   il fallait bien admettre que l'armée était mieux entraînée du point de vue

  7   de la rédaction de ce type de documents. Aussi avons-nous souhaité, a-t-il

  8   dit, aider les membres du MUP afin qu'ils puissent formuler ces documents

  9   comme cela se devait.

 10   Si vous vous penchez sur les missions concrètes contenues dans ce document,

 11   par exemple, au point 1 vous allez voir la mission confiée au 22e

 12   Détachement des PJP qui avait l'appui du Groupe de combat 211 du colonel

 13   Gergar. Là vous verrez aux points 5.13 et 5.14 qu'il s'agissait de conduire

 14   à bien des missions dans le secteur de Bela Crkva avec la participation de

 15   la 549e Brigade, de la 243e, et du 37e Détachement des PJP, ce qui coïncide

 16   avec les crimes qui se sont produits au tout début de la campagne de

 17   l'OTAN.

 18   Une confirmation ultérieure de la chose a été obtenue par le biais du

 19   témoignage du colonel Zivaljevic des PJP qui a parlé d'avoir vu la teneur

 20   de cet ordre au sujet de la réunion avec le colonel Gergar dont il a reçu

 21   un extrait de la carte dressée. Il a reconnu tous les détails lors de la

 22   présentation de la pièce à conviction qu'il avait par la suite utilisée

 23   lorsqu'il a été impliqué dans les opérations au Kosovo.

 24   La pièce P1966 est l'un des premiers ordres du commandement conjoint au

 25   tout début des conflits où l'on a demandé à ce que soient détruits les

 26   terroristes siptar dans le secteur de Malisevo et de Malo Kosovo,

 27   conformément aux ordres contenus dans Grom 3, ce qui est le numéro

 28   confidentiel 455-56. Vous vous souviendrez qu'il s'agit là d'un document au

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  1   sujet duquel le général Lazarevic a procédé à un amendement, pièce à

  2   conviction P1967, et qu'il l'a signé de sa main.

  3   Quand vous vous penchez sur ces documents, vous pouvez suivre l'ordre qui a

  4   été suivi depuis la directive du commandement -– enfin, de l'état-major du

  5   commandant Suprême, à l'époque de la VJ, en provenance du général Ojdanic

  6   et dirigée ou destinée au général Pavkovic qui donne des ordres Grom 3 à

  7   Lazarevic pour ce qui est de la mise en œuvre. Ensuite, on voit les ordres

  8   de Lazarevic portant la référence P2808, ensuite on voit la mise en œuvre

  9   des actions conjointes de la VJ et du MUP sur le terrain confiées au

 10   colonel Gergar, aux colonels Zivaljevic, Delic, Vukovic et Mitrovic fin

 11   mars 1999. Tout ceci étant placé en corrélation avec les sites des crimes

 12   et les crimes eux-mêmes tels qu'allégués à l'acte d'accusation.

 13   Comme je l'ai déjà dit, ces éléments de preuve peuvent être trouvés dans

 14   les pièces à conviction P2015, P1981 et P1995. Avec votre autorisation, je

 15   voudrais maintenant attirer votre attention sur certains éléments qui

 16   découlent desdits documents.

 17   Le P2015 est un ordre du commandement conjoint portant le numéro 455-63,

 18   daté du 23 mars 1999, et donnant instruction aux unités subordonnées de la

 19   VJ de fournir assistance au MUP pour ce qui est de la destruction des

 20   terroristes siptar dans plusieurs sites.

 21   Cette action conjointe du MUP doit être dirigée depuis Bela Crkva et

 22   vise à détruire les terroristes siptar dans Celina, Mala Krusa et Pirane,

 23   et cetera. Tous ceux-là sont des sites qui sont énumérés dans l'acte

 24   d'accusation et au sujet de quoi nous avons présenté des éléments de

 25   preuve. Il est dit que ces activités seront prises en charge et dirigées

 26   par un commandement conjoint.

 27   La pièce à conviction P1981 est un ordre émanant du colonel Delic

 28   découlant de l'ordre du commandement conjoint portant la cote P2015. C'est

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  1   daté du 23 mars 1999. Le général Delic donne ordre à son Groupe de combat

  2   numéro 1, qui a pour mission, paragraphe 5.4 de l'ordre en question, de

  3   procéder à une intervention, en coopération et accompagné du 37e

  4   Détachement de la PJP et de deux pelotons du MUP, pour attaquer, détruire

  5   et anéantir les terroristes siptar de Mala Krusa et du village de Pirane.

  6   Le Groupe de combat numéro 2, en coopération avec la 549e Unité de la 4e

  7   Compagnie des PJP, consistait à "conduire une attaque énergique, à une

  8   fouille de Bela Crkva, et à destruction des terroristes siptar dans le

  9   village de Celine et de Nogavac." Une fois de plus, on voit la date du 23

 10   mars. On parle d'aptitudes au combat et on parle du 25 mars 1999, avec un

 11   début à 7 heures du matin.

 12   Nous affirmons que ces opérations et l'ordre en question coïncident

 13   avec les crimes allégués à l'acte d'accusation au sujet de ce secteur et

 14   dont nous avons pu entendre les témoignages de villageois originaires de

 15   ces sites de crimes. Mais ce n'est pas tout. Nous avons ensuite une analyse

 16   qui suit l'opération, envoyée par le colonel Delic, en corrélation avec

 17   l'ordre en question, pièce à conviction P1995. C'est daté du 30 mars 1999.

 18   L'intitulé est "Présentation d'analyse au sujet de l'opération réalisée par

 19   la 549e Brigade motorisée pour ce qui est de l'anéantissement des

 20   terroristes siptar dans le secteur de Rotimlje et concernant la levée du

 21   blocus sur la route en direction d'Orahovac. Il y indique qu'à partir du 25

 22   au 29 mars 1999, conformément aux ordres émis par le commandant de la 549e

 23   Brigade et les ordres du Corps de Pristina, numéro confidentiel 455-63,

 24   pièce à conviction P2015, précisant que les terroristes siptar ont été

 25   chassés de ce secteur et qu'un contrôle plein et entier a été établi sur le

 26   territoire depuis cette route reliant Pristina et Zrze et Suva Reka-

 27   Orahovac.

 28   Je tiens à vous montrer maintenant un extrait et vous présenter de façon

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  1   graphique comment la situation se présentait sur le terrain. Vous allez

  2   voir sur vos écrans l'extrait dont j'ai donné lecture. Maintenant

  3   j'aimerais que nous nous penchions sur la carte. Il est question de la

  4   carte du Kosovo. J'ai besoin de faire zoomer et j'ai besoin qu'on passe à

  5   la photo suivante. Vous allez voir en rose la route entre Prizren et Zrze

  6   et la route entre Suva Reka et Orahovac. Nous tenons donc à montrer quelles

  7   sont les frontières extérieures du territoire au sujet duquel le colonel

  8   Delic nous avait indiqué qu'un contrôle plein et entier a été établi

  9   pendant l'opération.

 10   J'aimerais maintenant qu'on nous montre le cliché suivant. Nous avons tracé

 11   une ligne de délimitation qui se trouve à être cohérente avec les deux

 12   autres lignes menant de Zrze à Orahovac et Pristina-Suva Reka afin que nous

 13   puissions voir quel est exactement le secteur que l'on a qualifié comme

 14   étant placé sous le contrôle plein et entier.

 15   Le cliché suivant, je vous prie. Là, nous avons tous les différents sites

 16   qui sont énumérés à l'acte d'accusation où il y a eu commission de crimes,

 17   Bela Crkva, Nogavac, Celina, Mala Krusa, Pirane, et Landovica. Tous ces

 18   secteurs ou tous ces sites se trouvent dans le secteur où l'armée de la

 19   Yougoslavie, la VJ, a conduit des opérations sous le commandement du

 20   colonel Delic lorsque cette VJ a apporté un soutien au MUP.

 21   Après les actions, il y a eu analyse, et à ce sujet je tiens à attirer

 22   votre attention sur plusieurs éléments. Le colonel Delic nous a dit qu'il y

 23   a eu participation d'environ 2 200 [comme interprété] hommes. Il y avait à

 24   peu près 1 000 membres du MUP et quelque 1 000 membres de la VJ. Puis il a

 25   précisé qu'il y a eu 21 chars, 22 obusiers de 60-millimètres [comme

 26   interprété] et toute une série de véhicules blindés et armes lourdes. Le

 27   colonel Delic nous indique que la mission a été conduite de "façon

 28   fructueuse" et que c'est le "commandement conjoint du MUP et de la VJ qui a

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  1   été chargé du commandement."

  2   Une autre note intéressante sur laquelle j'aimerais attirer votre attention

  3   est la suivante, et j'en ai parlé avec le général Delic lorsqu'il est venu

  4   témoigner ici. Je ne pense pas que cela ait concerné seulement cette

  5   activité ou action spécifique, mais aussi quelques autres opérations datant

  6   de mars, avant le début de la guerre. Page 2, pièce à conviction P1995. Il

  7   a estimé qu'environ 85 terroristes siptar ont été tués et qu'il n'y a pas

  8   eu de prisonniers. Je pense que dans les opérations décrites à la pièce à

  9   conviction P1998 et P1999, il nous est donné de voir qu'il y a eu toute une

 10   série de terroristes de tués sans qu'il y ait eu prise de prisonniers par

 11   la 549e Brigade dans ces actions conjointes avec le MUP.

 12   Le colonel Delic fait référence à des terroristes siptar. Il dit, "Pendant

 13   l'opération, les terroristes siptar n'ont pas abandonné leurs armes et leur

 14   matériel de combat avant le moment crucial. Lorsqu'ils ont commencé à se

 15   changer en civils pour essayer d'opérer une percée, pour se frayer un

 16   passage par des endroits où se trouvaient nos unités qui avaient bloqué le

 17   passage." Il ne parle pas de détails concernant ce qui s'est passé avec eux

 18   par la suite. Certains des terroristes siptar ont été tués. Certains ont

 19   essayé d'opérer une percée et ils sont tombés sur des blocus, mais nous

 20   n'avons aucune indication concernant ce qu'il est advenu d'eux. Tout ce que

 21   nous savons c'est qu'il n'y a pas eu de prisonniers de faits.

 22   J'aimerais vous demander d'examiner ces pièces à conviction pour les placer

 23   en corrélation avec le témoignage des témoins de la base de crime

 24   originaires de Bela Crkva, Nogavac, Celina, Mala Krusa, et cetera.

 25   J'aimerais que nous nous penchions sur une autre directive émanant du

 26   général Ojdanic. Il s'agit de la pièce P1481 –

 27   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Hannis, mais

 28   est-ce que tout ceci étant placé en corrélation avec la directive Grom

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  1   Tonnerre [phon] 3 ?

  2   M. HANNIS : [interprétation] Oui.

  3   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

  4   M. HANNIS : [interprétation] Alors je parle d'un autre sujet, d'une autre

  5   directive. Il s'agit du P1481, daté du 9 avril. Vous allez vous souvenir

  6   qu'il y a eu une autre réunion de la direction collégiale de la VJ pendant

  7   la guerre et qui a fait l'objet d'un PV à la date du 9 avril. Nous

  8   affirmons donc que cette directive a été donnée lors de la réunion en

  9   question. Elle a été rédigée pendant la réunion même. Il s'agit d'une

 10   directive demandant à ce que "soit utilisée la VJ dans la défense contre

 11   l'agression de l'OTAN." Dans ladite directive, l'utilisation de la VJ est

 12   analysée jusqu'à ce moment concret.

 13   En page 4 de la version anglaise, tout en haut, il est dit que la VJ a

 14   réalisé les missions suivantes avant le début de l'agression de l'OTAN. Il

 15   y avait augmentation des mesures de sécurité aux frontières de l'Etat, une

 16   opération de combat pour bloquer et détruire les forces terroristes siptar

 17   au Kosovo-Metohija, et il a été procédé à la mobilisation des unités de

 18   guerre pour l'utilisation au combat.

 19   Cette directive parle des objectifs généraux de la défense, et l'une des

 20   missions qu'il s'agissait de mener à son terme consistait à détruire les

 21   unités des terroristes siptar au Kosovo-Metohija.

 22   La 3e Armée s'est vu confier la mission d'anéantir et de détruire les

 23   forces terroristes siptar pour empêcher leur retraite vers la zone

 24   d'intervention de la 2e Armée.

 25   En page 9 de la version anglaise, il est dit que mis à part les unités de

 26   la VJ, "il serait procédé à l'utilisation d'autres unités organisées du

 27   fait de l'obligation en temps de guerre et de volontaires, enfin, d'une

 28   population organisée (volontaires) pour le maintien des positions."

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  1   Un autre élément qui nous intéresse ici et qui concerne autre chose, c'est

  2   le point numéro 6 de la directive, page 11, commandement et communications.

  3   Il est question du conseil suprême de la Défense et du Grand état-major de

  4   la VJ, ainsi que des communications et de la protection –- enfin, des

  5   communications cryptées "pour ce qui est du VSO et du conseil suprême de la

  6   Défense de l'état-major suprême pour protéger les informations et les

  7   communications entre le président de la République de la Serbie et le

  8   président de la République du Monténégro, et cetera."

  9   A cette date du 9 avril, dans cette directive, le général Ojdanic assure la

 10   fourniture de transmissions et fait référence au déploiement des membres de

 11   ce conseil suprême de la Défense.

 12   Nous n'avons pas de document intitulé réunion du conseil suprême de la

 13   Défense en 1999 après le début de la guerre, mais nous avons déjà parlé des

 14   éléments de preuve au sujet de ce commandement Suprême et du fait de savoir

 15   qui est-ce qui en faisait partie. On en parlera un peu plus tard.

 16   Maintenant, j'aimerais me référer à cette directive.

 17   Une fois que cette directive a été rédigée en date du 9 avril, ce

 18   même jour, dirais-je, le général Ojdanic a donné un ordre préparatoire à

 19   l'intention du général Pavkovic. Il s'agit de la pièce à conviction P1480.

 20   Il lui dit qu'il doit se conformer à la directive lui confiant mission

 21   d'avancer des propositions pour ce qui est d'en finir avec l'agression des

 22   terroristes siptar et de l'agression de l'OTAN. Alors ces propositions

 23   devaient être présentées au commandement Suprême avant 20 heures à la date

 24   du 10 avril. Ensuite, il s'agissait de préparer une proposition de prise de

 25   décisions afin que le l1 avril il puisse être décidé de ces questions-là à

 26   l'état-major du commandement Suprême.

 27   Donc il s'agit de la pièce à conviction 3D815 datée du 10 avril 1999. Il

 28   s'agit d'un ordre de combat émanant de l'état-major du commandement

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  1   Suprême. L'article 7, page 8, nous dit que la directive émane de l'état-

  2   major du commandement Suprême, ça a été renvoyé immédiatement au

  3   commandement de la 3e Armée afin que cet état-major se prépare et prenne

  4   les décisions à ce sujet.

  5   Par la suite on dit pour la date du 10 avril 1999, que le général Pavkovic,

  6   qu'en sa qualité de commandant de 3e Armée, délivre un document qui est

  7   intitulé Grom 4. Il s'agit d'un ordre portant utilisation de la 3e Armée

  8   pour la défense contre l'agression de l'OTAN. Le style et la teneur sont

  9   similaires à ce que nous avons déjà vu pour ce qui est de l'opération Grom

 10   3 dont le texte émane également du général Pavkovic. Il y a quand même un

 11   élément qui prête à confusion à ce sujet, comme je l'ai dit. Vous avez pu

 12   voir la directive du 9 avril émanant de l'état-major du commandant Suprême

 13   et l'ordre préparatoire destiné au général Pavkovic pour son opération Grom

 14   numéro 4 du 10 avril. Mais nous avons également la pièce à conviction

 15   5D175, qui est un ordre du Corps de Pristina en corrélation avec Grom 4. Il

 16   s'agit du numéro confidentiel 455-123. Donc il s'agit de la même série que

 17   pour les ordres du commandement conjoint. Mais cet ordre-là porte la date

 18   du 6 avril, donc trois jours avant la directive émanant de l'état-major du

 19   commandement Suprême, à savoir quatre jours avant que le général Pavkovic

 20   n'émette ses ordres intitulés Grom numéro 4.

 21   Je me suis penché sur les originaux pour m'assurer que la date était bonne.

 22   Il semble que cela est bien le cas. Il est difficile de dire comment se

 23   fait-il que le général Lazarevic ait eu vent de Grom 4 avant que la

 24   directive ne soit émise et avant que le général Pavkovic n'ait donné ses

 25   ordres de Grom 4. Alors j'attire l'attention des Juges de la Chambre pour

 26   qu'ils puissent garder cela à l'esprit.

 27   J'ai essayé de voir s'il y avait autre chose partant de quoi il

 28   pourrait être conclu d'une erreur, et je pense qu'en version anglaise il

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  1   est question du 6 avril 1998, mais l'original nous dit bien 1999, et

  2   d'autres détails du document nous disent clairement qu'il s'agit bel et

  3   bien du mois d'avril 1999.

  4   En outre, nous avons un PV ou un registre pour ce qui est de toutes

  5   les séries 455 et du document 455-123, qui se trouve être enregistré dans

  6   ce registre sous la date du 4 avril 1999. Donc cela ajoute probablement à

  7   la confusion. Je l'évoque, parce que l'une des choses qu'a évoquée le

  8   général Lazarevic 1orsqu'il a témoigné, c'est que 1orsqu'il a reçu la

  9   directive en provenance de Pavkovic, comme par exemple le cas de Grom 3, et

 10   1orsqu'il a donné son ordre Grom 3, ordre P2808, je lui ai demandé pourquoi

 11   avez-vous parlé du recours à la population non-siptar armée. Il a répondu

 12   que cela, il devait le mettre parce que cela venait de son commandement, il

 13   ne pouvait pas le changer. Or, dans le document P175 [comme interprété]

 14   émanant de Lazarevic, trois, quatre, voire six jours avant celui du général

 15   Pavkovic portant sur Grom 4, dans le texte de l'ordre, sous mission du

 16   Corps de Pristina, au paragraphe numéro 2, page 3, il dit ce qui suit : se

 17   servir de la population siptar non armée afin de sécuriser les

 18   installations militaires et les installations revêtant une importance

 19   particulière pour la défense de la RSFY, les routes et les secteurs

 20   peuplés. A ce sujet, je voudrais attirer votre attention sur d'autres

 21   documents pour ce qui est de la crédibilité du témoignage du général

 22   Lazarevic.

 23   Et je continue à parler à cet effet de la directive datée du

 24   9 avril.

 25   A la date du 11 avril il y a un briefing au soir qui s'est tenu à

 26   l'état-major du commandement Suprême, page 3, et je me réfère notamment à

 27   la pièce à conviction 3D728. Le général Ojdanic est en train de parler de

 28   la directive en question et il dit que : "Dans la soirée il convient de

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  1   procéder à l'amendement de la directive pour l'aligner sur la nôtre. Il

  2   établit un projet de planning et il dit que la réunion se tiendra à 9

  3   heures avec VK." Alors on a discuté pour savoir si cette abréviation

  4   voulait dire commandement Suprême ou commandant suprême. Il a été débattu

  5   de la question. Certains ont dit que c'est alors le commandement Suprême

  6   serait VK [comme interprété] avec un petit "a" à la suite du grand "BK." Et

  7   je crois que

  8   M. Zecevic et M. Branko Gajic ont dit que "BK" pouvait être l'un et

  9   l'autre, à savoir le commandant suprême ainsi que le commandement Suprême

 10   selon le contexte en question. Vous pouvez trouver la référence en question 

 11   en page 15 415 où M. Zecevic et le général Gajic vous ont dit que cela

 12   pouvait fort bien indiquer l'un et l'autre.

 13   Moi, j'affirme que dans le contexte de cette réunion il fait

 14   référence au commandement Suprême. Parce que la première des choses

 15   suivantes qui figure dans ce document, page 3, c'est apparemment la liste

 16   des personnes qui seraient présentes à la réunion du jour d'après, à savoir

 17   il y a le commandant adjoint chargé des affaires du QG, le chef

 18   d'administration des opérations, le chef de l'état-major du commandement

 19   Suprême, le général Smiljanic, le général Grga, le président Milosevic et

 20   le président Milutinovic, ainsi que Sreten, l'adjudant du MUP de cette

 21   unité du Kosovo, et j'imagine qu'il s'agit de Sreten Lukic. Ici dans la

 22   version anglaise on dit sous-lieutenant, mais en fait cette abréviation

 23   veut dire vice-président et non pas sous-lieutenant pour parler de Sainovic

 24   et du général Pavkovic.

 25   Par conséquent, c'est ce qu'il convenait de prendre en considération

 26   lors de la réunion du jour d'après. L'information suivante concerne la

 27   directive en original du 9 avril datée du

 28   12 avril 1999. C'est la pièce à conviction P1483. Il s'agit d'un document

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  1   émanant de l'état-major du commandement Suprême signé par le général

  2   Ojdanic. C'est intitulé complément à la directive DT numéro 22-1 du 9 avril

  3   1999, et cela comporte une modification que nous considérons importante et

  4   nous attirons votre attention là-dessus. Il s'agit de la page 6 qui dit que

  5   cela doit se lire comme suit : "Les forces du MUP et de la Défense civile

  6   seront placées sous le commandement de la 3e Armée pendant les opérations

  7   et ne seront utilisées uniquement que suite à votre décision à vous."

  8   Par conséquent, le général Ojdanic à la date du 9 avril propose à ce

  9   que les forces du MUP et de la Défense civile soient placées sous le

 10   commandement du général Pavkovic pour la conduite de ces actions -- plutôt

 11   pour la conduite de cette opération-là.

 12   Une autre directive que je voudrais évoquer est la pièce P1465. Il

 13   s'agit d'un document émanant de l'état-major du commandement Suprême daté

 14   du 29 mai 1999, et il s'agit là d'une mise en garde ou d'un aide-mémoire

 15   selon la façon dont le document a été traduit. Penchez-vous sur le premier

 16   paragraphe, on y lit : "Utilisation intensive du Corps de Pristina pour

 17   l'anéantissement des forces terroristes siptar qui a empêché leur

 18   engagement massif en préparation de soutien des opérations de l'OTAN sur

 19   terre."

 20   Le général Ojdanic fait savoir qu'avant le 29 mai 1999, plutôt que de

 21   voir les forces de la VJ s'engager en vue des préparatifs pour s'opposer à

 22   une attaque terrestre de l'OTAN, se sont consacrées à l'anéantissement des

 23   forces terroristes siptar. Cela vient de l'état-major du commandement

 24   Suprême et cela est reflété dans l'ordre donné par le commandement de la 3e

 25   Armée le jour d'après, à savoir le

 26   30 mai 1999, qui est la pièce à conviction P1614 émanant du général

 27   Pavkovic et destiné au Corps de Pristina, à savoir au général Lazarevic qui

 28   parle d'utilisation intensive de vos unités pour l'anéantissement des

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  1   forces terroristes siptar pour empêcher leur utilisation au maximum en vue

  2   de l'opération de l'OTAN.

  3   Donc, on voit que le général Ojdanic a contribué à cette entreprise

  4   criminelle commune en armant les non-Siptar. Vous vous souviendrez des

  5   références faites à plusieurs endroits à cet armement des non-Siptar, du

  6   nombre des Serbes armés au Kosovo, et cela a été évoqué à des réunions de

  7   la direction collégiale de la VJ. La première des références est faite à la

  8   pièce P928, réunion du 30 décembre 1998. C'est là que le général

  9   Dimitrijevic parle de la situation au Kosovo, et à la page 9 du compte

 10   rendu en anglais, il dit : "Je parle d'environ 60 [comme interprété] Serbes

 11   armés qui pourraient être mobilisés à l'extérieur des organes officiels."

 12   Le 21 janvier 1990 [comme interprété], à la pièce P939, de nouveau le

 13   général, ce même général, dans son rapport, dit à la page 16 en anglais :

 14   "D'autre part, il faut tenir compte du nombre de personnes à qui on a

 15   distribué des armes. Il y a une possibilité tout à fait réaliste du côté

 16   serbe et monténégrin pour que la population serbe s'autoorganise pour

 17   offrir une résistance, et il faut tenir compte de l'émergence des forces

 18   radicales."

 19   De nouveau, c'est une réunion du collegium de la VJ, présidée par le

 20   général Ojdanic qui était le chef de l'état-major principal.

 21   Je crois que ce qui est encore plus clair, c'est la pièce P931, le PV

 22   du collegium de la VJ du 2 février 1999. Vous vous souviendrez que nous en

 23   avons déjà parlé. Je voudrais évoquer la page 23 en anglais. Le général

 24   Ojdanic dit, je cite : "J'avais entendu dire qu'il y a 50 000 Serbes

 25   armés." Le général Samardzic n'était plus le commandant du 3e Corps

 26   d'armée, mais il occupait un poste au sein de l'inspectorat de la VJ. Il

 27   dit : "En tenant compte du nombre d'armes, il y a 47 000 armes qui ont été

 28   délivrées. Il faut également se poser la question : "Quel est le plan,

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  1   quelle est la raison pour laquelle on arme tous ces Serbes ?" Samardzic

  2   dit : "C'était mon ordre à moi et nous avons organisé le tout pour la

  3   défense des villages serbes. Les commandants de tous les niveaux y ont été

  4   envoyés armés et on a également déployé deux sets [phon] de combat de

  5   munitions. Leur rôle était de défendre les villages et de participer

  6   ensemble avec les unités de l'armée dans toute opération qui se trouvait

  7   dans les environs immédiats. Il faut mener à bien des opérations

  8   policières. On ne peut pas procéder d'autre façon. Nous allons également

  9   déployer les unités du MUP s'il faut en venir à cela."

 10   Mais il dit : "C'était mon ordre," et nous pouvons voir où se trouvait cet

 11   ordre, où était cet ordre. Si vous prenez la pièce P1450 [comme

 12   interprété], dans cet ordre qui est un document qui porte la date du 26

 13   juin 1998, donc quelques mois plus tard, ce document est un ordre qui émane

 14   du général Pavkovic en tant que commandant du Corps de Pristina à l'époque.

 15   On dit : "Conformément au 3e Corps d'armée, numéro strictement confidentiel

 16   et cetera, et cetera," c'était le général Samardzic qui était le commandant

 17   du 3e Corps d'armée à l'époque. Ceci, on appelle à la distribution des

 18   armes et de la munition avec deux groupes de munitions. Il dit que sur la

 19   base de la liste il faut appeler les conscrits militaires en de petits

 20   groupes et dans des casernes militaires organiser la distribution et de la

 21   délivrance des armes dans les villages serbes et monténégrins et dévouer

 22   une attention toute particulière aux mesures de sécurité. Il est important

 23   de garder la discipline, le camouflage et le caractère secret de

 24   l'opération. Au point 6, on peut lire : "Compléter la distribution,

 25   préparer, organiser le lieu de la défense. Les commandants des départements

 26   militaires ont la responsabilité et il faut les mettre en coordination avec

 27   le MUP et des organes locaux du gouvernement."

 28   Donc nous avons la VJ, le MUP, les sections territoriales et militaires et

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  1   l'autogouvernement local et tous. Ils sont tous là ensemble pour mener à

  2   bien ceci.

  3   Un officier supérieur d'active de la VJ devrait être placé à la tête de

  4   chaque hameau, et la responsabilité de ces tâches, au point 9, à la page 2,

  5   les commandants des unités ont la responsabilité de la distribution des

  6   armes et les commandants du département militaire doivent procéder à la

  7   formation et à l'entraînement des unités.

  8   Donc nous soutenons qu'à la pièce P1415 de ce document, on peut voir que

  9   c'est un ordre émis par Samardzic en février 1999.

 10   Je vais parler de trois aspects du général -- je vais en venir au général

 11   Pavkovic, mais d'abord -- qui d'une autre façon parle de la contribution du

 12   général Ojdanic à l'entreprise criminelle commune. Même si c'était un

 13   membre ou non qui ne votait pas au sein du SDC, il a néanmoins fait des

 14   propositions importantes à titre personnel. Certaines des propositions

 15   qu'il a faites de l'état-major principal en tant que membre du SDC

 16   concernent le général Pavkovic et le général Lazarevic et le général

 17   Farkas.

 18   Dans le PV de la 8e Session du 25 décembre 1998, il y a eu une réunion, une

 19   réunion à laquelle a participé M. Sainovic également. Parmi les points à

 20   l'ordre du jour, on a parlé des nominations, des promotions et de nouvelles

 21   assignations de plusieurs généraux. On propose que le général Pavkovic soit

 22   promu en tant que chef du 3e Corps d'armée et que le général Lazarevic

 23   doive être nommé au poste de chef du Corps de Pristina.

 24   Nous avons aussi eu une réunion lors de laquelle le président Djukanovic

 25   émet des réserves quant à la proposition relative à la promotion du général

 26   Pavkovic a causé des informations conflictuelles qui provenaient du Kosovo

 27   et du Corps de Pristina. Il y avait une indication, à savoir que le Corps

 28   de Pristina n'était pas toujours en conformité avec la constitution et les

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  1   décisions prises par le conseil suprême de la Défense.

  2   Vous vous souviendrez que M. Milosevic n'était pas d'accord avec les

  3   préoccupations de Djukanovic et il a dit : Mais non, non, non, non, ce

  4   n'est rien. Il n'y a pas eu de plaintes formulées à l'encontre du Corps de

  5   Pristina, ni de l'étranger ni de l'intérieur, mais Milutinovic était peut-

  6   être un peu plus honnête et il a dit que quelques rapports concernant le

  7   manque de discipline allégué était "un peu exagéré."  

  8   Le général Ojdanic était également présent et il a fait une proposition,

  9   une entente à ces griefs. Il faut tenir compte de ceci, car plus tard nous

 10   allons parler du fait que le général Ojdanic savait qu'il y avait des

 11   problèmes avec le général Pavkovic et nous avançons qu'il a omis de prendre

 12   des mesures nécessaires concernant ceci, mais nous allons en parler un peu

 13   plus tard.

 14   De plus, concernant son rôle au sein du commandement Suprême pendant la

 15   guerre, Ojdanic a rencontré régulièrement le commandant suprême pour

 16   obtenir des instructions, et ceci pour donner des tâches à la VJ. Vous avez

 17   entendu des éléments de preuve relatifs à ceci et plus de détails vous

 18   seront donnés un peu plus tard.

 19   Un autre point qui porte sur ce lien est la pièce P1010, 1010. C'est un

 20   article de la Politika qui reflète un entretien avec le général Ojdanic au

 21   mois d'avril 1999. Dans cet article, on peut voir que l'on parle de l'armée

 22   yougoslave et du très haut moral de cette armée. A la page 3 en anglais, au

 23   paragraphe suivant, le général Ojdanic dit, je cite : "Je suis tout à fait

 24   certain qu'à l'avenir nous allons mener à bien des tâches qui nous sont

 25   confiées par le commandement Suprême à la tête de lequel se trouve Slobodan

 26   Milosevic, tout comme nous l'avons fait jusqu'à maintenant avec beaucoup de

 27   succès." Nous avançons qu'un très grand nombre d'éléments de preuve nous

 28   permettent de croire que l'existence du commandement Suprême veut dire

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  1   qu'il existait un système plus large que M. Milosevic pendant la guerre.

  2   Une autre façon pour dire que le général Ojdanic a contribué à l'entreprise

  3   criminelle commune est de parler des accords du mois d'octobre. Nous

  4   avançons que le général Ojdanic avait tout à fait connaissance de certaines

  5   violations de la VJ de ces accords, y compris lorsqu'il s'agissait de

  6   placer des forces supplémentaires au Kosovo, le non-retour d'équipement

  7   lourd que l'on a prêté au MUP, mais il y a également d'autres détails.

  8   Mais brièvement, l'un des ces aspects se trouve à la pièce P941, le

  9   collegium de la VJ –- en fait, au PV du collegium de la VJ au mois de

 10   février 1999. Vous vous rappellerez que le général Dimitrijevic parle dans

 11   cette réunion du bataillon anti-terroriste et que la 72e Brigade spéciale

 12   avait été déployée, apparemment d'abord, au début alentour du Kosovo et par

 13   la suite au Kosovo même. Le général Ojdanic dit, à la page 16 en anglais,

 14   s'agissant de cette réunion, que l'idée principale n'était pas de ramener

 15   cette unité à l'intérieur du Kosovo. Alors voici un autre exemple des

 16   actions du général Pavkovic qui pourraient causer quelques préoccupations

 17   pour lesquelles il pourrait se poser des questions.

 18   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, un instant, s'il vous plaît.

 19   Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Avec la permission du Président,

 20   je souhaiterais vous poser une question concernant les accords du mois

 21   d'octobre et ces violations alléguées. Les accords du mois d'octobre, ont-

 22   ils été basés sur la prémisse pour ce qui est du comportement de l'UCK et

 23   des Albanais et de la façon dont ils auraient agi pour ce qui est de

 24   l'accord d'octobre ? J'aimerais savoir si vous pensez que l'on aurait dû –-

 25   enfin, de quelle façon est-ce que ceci pourrait affecter ou avoir une

 26   incidence sur les arguments que vous avancez ? Est-ce qu'il y a eu vraiment

 27   une incidence ?

 28   M. HANNIS : [interprétation] L'UCK n'était pas une partie signataire de

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  1   l'accord.

  2   Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Oui, même si c'est le cas,

  3   j'aimerais avoir votre opinion là-dessus.

  4   M. HANNIS : [interprétation] C'est un concours de circonstances assez

  5   étrange, mais ils n'étaient pas inclus dans la situation. Je sais que nous

  6   avons entendu Shaun Byrnes témoigner là-dessus, et lui et KDOM, et d'autres

  7   représentants internationaux ont essayé de convaincre l'UCK de ne pas

  8   revenir dans cette région, de ne pas faire preuve d'agressivité. Mais ils

  9   n'avaient pas de force derrière outre que d'essayer de les convaincre en

 10   employant la raison et de leur dire que si vous continuez de vous comporter

 11   de la sorte, vous n'obtiendrez pas ce que vous voulez, vous n'aurez pas

 12   notre soutien. Mais ils n'avaient pas de mécanisme réel dans l'accord selon

 13   lequel on pouvait s'attendre à ce que ceci se passe.

 14   Si l'on dit que du point de vue des droits, lorsqu'on rédige des contrats,

 15   est-ce que c'est quelque chose que l'on pourrait évoquer. Maintenant, en

 16   regardant en arrière, il me semblerait que c'était -– il me semble que si

 17   l'on regarde en arrière, on se dit qu'il n'y avait pas de mécanisme qui a

 18   été mis en place pour contrôler l'UCK. Il semblerait que c'était déjà voué

 19   au désastre, mais je comprends tout à fait votre question. Il m'est bien

 20   difficile tout à fait de répondre à votre question, mais il me semble tout

 21   à fait clair que le côté yougoslave avait tout à fait connaissance de ceci

 22   lorsqu'ils ont ratifié l'accord. Je ne sais pas s'il y avait une solution

 23   réellement optimiste. Je ne le sais pas. Je ne pourrais pas répondre à

 24   cette question.

 25   Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Je vous remercie de m'avoir donné

 26   cette réponse, mais j'aimerais soulever une autre question qui me

 27   préoccupe.

 28   M. HANNIS : [aucune interprétation]

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  1   Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Dans le cas d'une provocation, de

  2   circonstances dans lesquelles on pourrait s'attendre à ce qu'il soit

  3   nécessaire de répondre, de quelle façon est-ce que le bureau du Procureur

  4   réagit et comment est-ce qu'on explique le fait, selon vous, de quelle

  5   façon est-ce que les forces auraient dû répondre selon l'accord ?

  6   J'aimerais que vous me l'expliquiez de façon un peu plus claire.

  7   M. HANNIS : [interprétation] D'après les éléments de preuve entendus, j'ai

  8   cru comprendre que tout le monde avait compris que dans le cas où il y

  9   avait une provocation de l'UCK, si l'UCK avait attaqué, par exemple, un

 10   policier ou la VJ ou la police, qu'ils avaient le droit de répondre à cette

 11   attaque, de se défendre, de répondre avec une force appropriée, mais à

 12   savoir ce que cela voulait réellement dire dans une situation très précise,

 13   je crois que les parties avaient des points de vue divergents. Mais je

 14   crois que tout le monde était d'accord pour dire qu'ils avaient le droit de

 15   le faire. Mais ce que nous disons, ce que nous avançons, c'est qu'il

 16   arrivait des fois que l'on parle d'une provocation, mais en réalité c'était

 17   plutôt une question de timing. Car si j'ai bien compris, si l'on marche

 18   dans la rue et qu'on est attaqué par l'UCK, il est certain que nous pouvons

 19   nous défendre, que nous avons le droit de le faire, s'il s'agit d'une

 20   réponse immédiate. Mais ce que nous avons vu, c'est que s'il y avait eu une

 21   attaque menée contre le MUP ou la VJ la semaine dernière, alors une semaine

 22   plus tard, nous allons nous organiser, nous, VJ et MUP, et nous allons

 23   attaquer les gars qui nous ont attaqués il y a une semaine. Donc c'est trop

 24   tard. Voilà ce que nous avançons. Ce n'est pas une riposte, c'est une

 25   initiative indépendante.

 26   Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Hannis.

 27   M. HANNIS : [interprétation] Je vous en prie.

 28   Violation suivante, des accords d'octobre - c'est la façon dont nous

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  1   désignons les choses - on trouve ça dans une pièce qui est la suivante :

  2   3D557, page 19, réunion du collège de la VJ du 3 décembre 1998. Le général

  3   Obradovic parle d'équipement prêté par le MUP à la VJ dont 20 transports de

  4   troupes, des APC et des mortiers qui tombaient sous le coup de l'accord. Il

  5   dit qu'il faut indiquer que ces équipements appartiennent à la VJ. Mais en

  6   cas d'inspection, il est possible qu'ils découvrent que ce n'est pas nous

  7   qui avons cet équipement, mais que c'est le MUP qui l'a. A ce moment-là,

  8   dit-il, on pourrait dire qu'il s'agit de documents du MUP, mais il faut

  9   qu'il y ait des documents qui indiquent comment le transfert d'équipement

 10   s'est effectué. Puis, il parle également de deux hélicoptères du MUP, est-

 11   ce qu'il faut dire que ces hélicoptères appartiennent à l'armée ou

 12   appartiennent au MUP. Voilà ce qu'il évoque dans ce document.

 13   Apparemment, on n'est pas trop sûr sur la manière dont il faut procéder. Le

 14   général Dimitrijevic intervient. Il fait une observation. Il dit qu'il est

 15   contre tout mensonge dans les documents, mais il dit qu'il faut que les

 16   équipements soient restitués et que si nous voulons garder cet équipement,

 17   il faut dire que c'était l'équipement du MUP. Ensuite, il parle de

 18   convention. On ne sait pas trop bien ce que cela veut dire. Mais il en va

 19   de même pour les hélicoptères. Il n'y a pas simplement deux hélicoptères,

 20   il y en a plus. Ojdanic dit qu'il va commencer à voir avec le ministre. Je

 21   pense qu'il s'agit du ministre en l'occurrence, Stojiljkovic. "Ensuite, je

 22   verrai ce qu'il en est de la position du président. Moi non plus, je ne

 23   suis partisan a priori ni d'une solution ni de l'autre parce qu'il y aura

 24   une équipe d'inspection. Même chose pour les hélicoptères, parce que dans

 25   les contacts avec les représentants militaires et internationaux, ils nous

 26   interrogent au sujet des tirs effectués sur tel ou tel point à tel ou tel

 27   endroit, et cetera. Voilà donc des questions qu'il faut évoquer. J'en

 28   informerai le président."

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  1   On voit qu'Ojdanic, a priori, n'est pas opposé à ce que l'on prenne des

  2   mesures qui consisteraient à donner des informations fausses à l'OSCE sur

  3   la situation réelle sur le terrain et au sujet de cet équipement.

  4   Dernier point, dernière chose que je souhaiterais évoquer, c'est

  5   l'entreprise criminelle commune. Nous avons parlé de Pavkovic, des

  6   manquements qui sont les siens, et nous avons dit que le général Ojdanic

  7   avait des raisons de penser que Pavkovic ne faisait pas des rapports exacts

  8   et précis sur les activités de la VJ au Kosovo. Le général Ojdanic savait

  9   également que le général Pavkovic, parfois, avait des contacts directement

 10   avec le président Milosevic sans en informer Ojdanic avant ou après.

 11   Ceci est détaillé dans notre mémoire, paragraphes 757 à 766. Vous vous

 12   souviendrez de certaines des discussions que nous avons eues avec les

 13   témoins, notamment avec le général Dimitrijevic, au sujet de ce qui se

 14   passait au collège de la VJ. La première de ces réunions a eu lieu en

 15   juillet 1998. Le général Pavkovic, à l'époque, commandait encore le Corps

 16   de Pristina, et le général Perisic s'est déclaré préoccupé à ce moment-là

 17   au sujet de l'interdiction de l'emploi des unités de la VJ au Kosovo sans

 18   sa permission expresse. Il a dit que cette interdiction faisait l'objet de

 19   contravention. Ça s'est poursuivi pendant plusieurs mois. On en a parlé au

 20   moins à trois reprises. Généralement, c'était le général Dimitrijevic qui

 21   évoquait la question, et le général Ojdanic, lui, a reconnu au moins à une

 22   reprise qu'il y avait eu un problème, qu'il y avait quelque chose qui

 23   n'allait pas et qu'il fallait que le général Pavkovic vienne en parler,

 24   mais rien n'indique que cela se soit produit ou que quoi que ce soit ait

 25   été entrepris.

 26   J'en parlerai un peu plus longuement demain quand on évoquera le général

 27   Pavkovic. On voit clairement qu'il n'y a pas de rapports précis qui sont

 28   faits, que parfois les rapports qui sont faits vont à l'encontre des

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  1   accords d'Octobre, aucune mesure de correction n'est prise, et tout ceci se

  2   fait avec l'accord tacite du général Ojdanic. J'en parlerai un peu plus

  3   longuement demain.

  4   Ensuite l'intention partagée. Selon nous, le général Ojdanic est animé de

  5   l'intention qui sous-tend l'entreprise criminelle commune, parce qu'il

  6   avait connaissance des crimes commis par les forces de la RSFY en Serbie au

  7   Kosovo en 1998 et en 1999. Or, malgré cela, il a continué à participer à

  8   l'organisation et à la planification des opérations de combat, et ces

  9   opérations ont débouché sur des crimes supplémentaires, commis par les

 10   mêmes crimes [comme interprété]. Nous l'évoquons aux paragraphes 783 à 807

 11   de notre mémoire en clôture.

 12   Nous disons que le général Ojdanic était au courant des allégations qui

 13   étaient faites au sujet de crimes commis par le Corps de Pristina en 1998.

 14   Puis, on sait bien que la communauté internationale avait protesté en 1999;

 15   c'était bien connu. Puis, le général Ojdanic était au courant des problèmes

 16   mentionnés par Pavkovic appelant à des mesures plus énergiques que celles

 17   qu'il avait prises jusqu'à ce moment-là. De plus, il existe des

 18   statistiques produites par la VJ au sujet des crimes commis, et ceci

 19   conforte la thèse selon laquelle les mesures qu'il a prises sont venues

 20   trop tard et ont été insuffisantes.

 21   Je n'ai pas le temps de passer en revue toutes les pièces que j'aurais

 22   souhaité vous présenter, mais vous vous souviendrez, s'agissant des

 23   tribunaux militaires et des procès dans ces tribunaux, il y a un certain

 24   nombre de pièces que nous avons présentées, P953, P954, P955. Le général

 25   Gojevic a été le témoin par l'intermédiaire duquel ces pièces ont été

 26   présentées. La pièce P962, le colonel Delic fait un rapport sur les mesures

 27   prises contre les membres de la 549e Brigade. La pièce P1011, un rapport du

 28   Pr Markovic –- non, ce n'est pas le Pr Markovic, c'est un autre Markovic,

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  1   un rapport sur le respect par la VJ du droit international, et cetera. Et

  2   dans ces documents, vous avez des statistiques, des chiffres. Quand on lit

  3   avec attention tous ces documents, quand on relit le contre-interrogatoire

  4   des témoins, on voit qu'il y a beaucoup d'incohérences dans ces documents

  5   qui devraient poser question aux Juges, qui devraient se demander quelle

  6   était véritablement l'efficacité des procureurs militaires des tribunaux

  7   militaires. Est-ce que c'est parce que c'était la guerre que c'était si

  8   difficile de mener à bien ces procès, ou est-ce que c'était la conséquence

  9   d'une volonté insuffisante de mener à bien ces procédures ?

 10   Pour la plupart de ces poursuites, on nous a dit qu'il y avait eu des

 11   milliers de procédures, mais on voit que la plupart de ces procédures

 12   portent sur des gens qui ont fait preuve d'insubordination par rapport à

 13   leur supérieur, qui n'ont pas répondu à l'appel à la mobilisation, et

 14   cetera. Mais pour ce qui est des crimes qui nous intéressent ici, crimes,

 15   meurtres, pillages, et cetera, il y a très peu de poursuites. Et quand on

 16   regarde le pourcentage d'affaires qui concernent des Serbes, qui ont été

 17   l'auteur des crimes, et des victimes non-serbes, le pourcentage de ces

 18   crimes est encore plus faible.

 19   Je vois que l'heure est bientôt venue de nous interrompre. J'allais

 20   justement parler d'un autre sujet, parler du général Pavkovic. Donc je me

 21   demande si le mieux ce ne serait pas de nous interrompre tout de suite,

 22   cinq minutes avant l'heure prévue.

 23   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien, Monsieur Hannis, nous

 24   allons donc nous interrompre et nous reprendrons demain à

 25   9 heures.

 26   --- L'audience est levée à 15 heures 26 et reprendra le mercredi 20

 27   août 2008, à 9 heures 00.

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