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1 Le mercredi 13 mars 2013
2 [Audience d'appel]
3 [Audience publique]
4 [Les appelants sont introduits dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 29.
6 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes.
7 Madame la Greffière, veuillez, je vous prie, citer l'affaire, je vous prie.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges.
9 Il s'agit de l'affaire IT-05-87-A, le Procureur contre Nikola Sainovic,
10 Nebojsa Pavkovic, Vladimir Lazarevic et Sreten Lukic. Merci.
11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Grand merci.
12 Comme indiqué, si l'une quelconque des parties n'est pas capable de suivre
13 la procédure à quelque phase que ce soit, je vous demande de porter ceci à
14 mon attention immédiatement.
15 Est-ce qu'on peut avoir les présentations, et on va commencer par
16 l'Accusation, je vous prie.
17 M. KREMER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,
18 Messieurs les Juges. Peter Kremer en tant que représentant de l'Accusation.
19 A mes côtés j'ai Mathias Marcussen, Ingrid Elliott et Francois Boudreault,
20 et une fois de plus, notre commis à l'affaire, Colin Nawrot. Merci.
21 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.
22 Les représentants de la Défense.
23 M. FILA : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,
24 Messieurs les Juges. Je m'appelle Toma Fila, et en compagnie de M.
25 Petrovic, je représente ici la Défense de M. Sainovic. Merci.
26 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.
27 M. ACKERMAN : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges. Je
28 m'appelle John Ackerman, et avec Aleksandar Aleksic, je représente ici la
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1 Défense du général Pavkovic.
2 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci.
3 M. BAKRAC : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges. Pour la
4 Défense du général Lazarevic, ici nous avons dans le prétoire Mihajlo
5 Bakrac; Djuro Cepic; notre conseiller juridique, Milos Cvijic; et un
6 interne, Milan Petrovic. Merci.
7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] C'est moi qui vous remercie.
8 M. LUKIC : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges. Branko
9 Lukic et Dan Ivetic en tant que conseils de la Défense de M. Sreten Lukic.
10 Merci.
11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Grand merci.
12 Avant que de commencer, il y a quelques mises au point à effectuer pour ce
13 qui est de nos sessions d'aujourd'hui et de demain. Notre première session
14 va durer une heure 45 minutes à la place de deux heures. Après la pause, la
15 Défense va continuer pendant 15 minutes afin d'en terminer avec sa
16 présentation. Il en va de même pour ce qui est de la session que nous
17 allons avoir demain au départ.
18 Alors, Monsieur Bakrac, nous voudrions à présent entendre votre exposé.
19 M. BAKRAC : [interprétation] Grand merci, Madame, Messieurs les Juges. Avec
20 votre autorisation, Madame, Messieurs les Juges, nous nous proposons de
21 présenter notre exposé des moyens d'appel, nous allons le faire avec un
22 PowerPoint pour présenter les choses. Ce n'est pas de nouveaux éléments de
23 preuve, mais nous souhaitons faire en sorte que les présentations verbales
24 soient suivies d'une présentation sur les écrans afin que les choses soient
25 mieux suivies. Et par le biais de cette présentation, Madame, Messieurs les
26 Juges, nous voudrions essayer de fournir des réponses pour ce qui est des
27 questions qui sont contenues dans votre ordonnance du 20 février et faire
28 en sorte que certaines questions que nous estimons être tout à fait
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1 importantes pour notre client soient abordées afin de recevoir des réponses
2 pour ce qui est de questions qui sont restées sans réponse dans le jugement
3 rendu en première instance. Alors, avec votre autorisation, Madame,
4 Messieurs les Juges, je me proposerais à présent de céder la parole à mon
5 confrère, M. Cepic, qui va parler du premier moyen d'appel et répondre à la
6 première des questions posées par vous. Et avec votre autorisation, je me
7 proposerais par la suite d'enchaîner pour parler du deuxième, troisième et
8 quatrième moyens d'appel et deuxième et troisième questions par les Juges
9 de la Chambre à la date du 20 février de cette année.
10 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, vous pouvez commencer.
11 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Madame, Messieurs les Juges. Bonjour à
12 tous et à toutes. Je m'appelle Djuro Cepic et je suis co-conseil de la
13 Défense, comme m'a présenté mon confrère. Alors, je voudrais commencer avec
14 une présentation. J'aimerais qu'on nous montre la première diapo, et
15 j'aimerais que des copies soient distribuées aux membres de la Chambre
16 d'appel.
17 M. LE JUGE LIU : [aucune interprétation]
18 M. CEPIC : [interprétation] C'est bien cela. Merci.
19 Quand il s'agit de la base de crime, nous voudrions dire que nous avons
20 expliqué dans le détail le fait que les membres de l'armée se sont
21 conformés aux lois et à la constitution, et ceux qui ont fait les
22 violations des dispositions légales ont été poursuivis en justice par les
23 instances compétentes. Il y a une question d'importance qui s'impose, c'est
24 la prétendue transmission des ordres verbalement donnés concernant la
25 perpétration de crimes. Mon confrère, M. Kremer, avant-hier a précisément
26 mentionné cette question-là, qui se trouve abordée au paragraphe 43 de la
27 troisième partie du jugement rendu par la Chambre de première instance.
28 La Défense, dans son mémoire en appel, a indiqué qu'il y avait des
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1 contradictions pour ce qui est des propos de ce témoin et a souligné le
2 manque de crédibilité et l'inacceptabilité [phon] de son témoignage. Alors,
3 je voudrais ici indiquer aux Juges de la Chambre quelques exemples qui sont
4 des plus flagrants. Nous avons sous les yeux la diapo numéro 1, on voit
5 qu'il s'agit du témoignage du Témoin K90. Il dit qu'on ne lui a jamais
6 donné l'ordre de commettre des crimes à l'égard des gens du cru.
7 Diapo numéro 2, s'il vous plaît. Comme vous pouvez le voir ici, ceci
8 est confirmé par d'autres dépositions, et le Président de la Chambre, le
9 Juge Bonomy, a tiré une conclusion tout à fait claire, chose qu'on peut
10 voir en bas de la diapo; je vous renvoie vers la page du compte rendu 9
11 489. Donc, partant de ces parties du compte rendu d'audience, on voit que
12 le Témoin K90 n'est pas crédible, n'est pas fiable et que sa déclaration
13 écrite a été substantiellement modifiée au cours de son témoignage oral.
14 Par conséquent, les Juges de la Chambre auraient dû rejeter la déposition
15 de ce témoin. Et d'autre part, si l'on venait à analyser son témoignage, on
16 aurait dû tirer des conclusions autres que celles qui ont été adoptées lors
17 du prononcé du jugement en première instance, à savoir faire en sorte que
18 ces conclusions disent qu'il n'y a pas eu de modèle de comportement de ce
19 type.
20 Le manque de logique dans ce témoignage de ce témoin est le suivant :
21 c'était un simple soldat et il ne pouvait, par conséquent, pas savoir
22 comment l'on faisait descendre les ordres le long de la filière. Et les
23 ordres descendaient d'une filière conformément à la loi, la chose se trouve
24 clairement confirmée par le fait qu'un enquêteur de l'Accusation, Philip
25 Coo, qui est venu à Belgrade, ait trouvé une documentation complète de
26 l'armée de Yougoslavie datant de l'époque pertinente. Référence au compte
27 rendu 12 075. Partant de la documentation complète des ordres, des rapports
28 de combat et autres documents fournis par écrit, l'Accusation et les Juges
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1 de la Chambre auraient pu, avec les pièces à conviction présentées,
2 procéder à une analyse complète et substantielle des événements sans pour
3 autant faire en sorte que les conclusions des Juges de la Chambre se basent
4 sur des éléments de preuve indirects suivant un principe "choisir ce qui
5 nous arrange"; et il y a d'autres éléments de preuve qui permettent de
6 tirer des conclusions qui vont à l'avantage de la Défense qui n'ont pas été
7 pris en considération lors des conclusions adoptées.
8 Je tiens à préciser et souligner le fait que devant le Corps de
9 Pristina, il y avait quelque 30 filières de commandement. Un tel fait nous
10 indique de façon claire qu'au cas où l'on faisait descendre les ordres par
11 la filière verbale, il y aurait une confusion pure et simple qui porterait
12 atteinte à toutes les chaînes de commandement. J'aimerais qu'on nous
13 présente maintenant la diapo suivante, s'il vous plaît.
14 Je voudrais à présent parler de la base de crime et de certaines des
15 conclusions des Juges de la Chambre à ce sujet. Les Juges de la Chambre
16 commettent une erreur lorsqu'ils disent que dans ces rapports des unités
17 subordonnées où il est question d'un grand nombre d'Albanais du Kosovo
18 déplacés et pour ce qui est des déplacements de ces Albanais et des abris
19 qu'on leur a fournis, tout ceci ne se rapporte pas aux emplacements ou aux
20 sites pour lesquels, d'après l'opinion des Juges de la Chambre de première
21 instance, il a été prouvé des déplacements forcés. La référence c'est le
22 Volume III, paragraphe 912.
23 Une telle conclusion est tout à fait infondée et contradictoire avec
24 les conclusions des Juges de la Chambre de première instance dans le même
25 jugement rendu et contraire à bon nombre d'autres éléments de preuve
26 présentés. Comme vous pouvez le voir sur la diapo devant vous, vous voyez à
27 gauche la conclusion tirée par les Juges de la Chambre, et à droite, la
28 conclusion des Juges de la Chambre au paragraphe 905, où il est question
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1 précisément de la façon dont se comporte l'armée de Yougoslavie sur le
2 territoire entre les villages de Turicevac, Izbica, Vocnjak et Cirez en fin
3 du mois de mars 1999.
4 J'ai dit fin mars 1999. Merci.
5 La Yougoslavie a interrompu ses activités justement pour des raisons
6 de protection de civils, et les responsables du commandement, les officiers
7 du commandement du Corps de Pristina sont venus porter aide à ce type
8 d'activité humanitaire.
9 Ceci se trouve être confirmé par des témoignages et un rapport de
10 combat de l'unité de l'armée de Yougoslavie sur ce territoire qui porte la
11 référence P2046. Diapo suivante, s'il vous plaît.
12 On continue avec la municipalité de Srbica. Alors, il y a la
13 conclusion tirée par les Juges de la Chambre, et j'indique qu'il y a
14 d'autres conclusions qui ont été tirées au sujet de ce territoire et au
15 sujet de la période pertinente, et ce, notamment à l'avantage des thèses
16 défendues par la Défense. Nous avons expliqué dans notre mémoire en clôture
17 que les forces de l'armée de Yougoslavie ne sont pas entrées dans le
18 village de Cirez pendant la période où l'on a constaté qu'il y avait
19 prétendument des crimes commis dans ce villages. Et dans la diapo, vous
20 voyez que suite à l'arrivée de l'armée sur ce territoire, on voit de façon
21 claire comment les membres de l'armée se sont comportés à l'égard des
22 civils. Ce sont des propos qui ont été tenus par des témoins de
23 l'Accusation, aide fournie sous forme de vivres, de médicaments et autres
24 fournitures, là où les soldats étaient à même de fournir de l'aide.
25 Diapo suivante, s'il vous plaît. On voit qu'il y a les ordres donnés
26 par l'armée de Yougoslavie sur le territoire de Srbica qui montrent comment
27 les soldats de l'armée de Yougoslavie ont fait preuve de comportement
28 humain à l'égard des civils qui se trouvaient là. Comme vous pouvez le voir
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1 sur cette diapo - dans le jugement rendu, on cite cela d'ailleurs, et nous
2 l'avons souligné dans notre mémoire en clôture - on parle du 5D1033,
3 rapport de la 37e Brigade pour ce qui est de la protection de civils sur ce
4 territoire; puis ensuite, la pièce 5D1083, un rapport de l'armée de
5 Yougoslavie demandant des mesures de protection de civils pour ce qui est
6 des fournitures en vivres et autres nécessités; 5D1037, rapport relatif à
7 la situation à Glogovac qui convie la Croix-Rouge pour que celle-ci apporte
8 de l'aide; 5D1059, où l'armée procède à des distributions de ses propres
9 réserves de vivres pour aider les civils. Aider tous les civils qui se
10 trouvent sur ce territoire indépendamment de leur appartenance ethnique ou
11 confessionnelle, et je précise que Glogovac, en fonction de tous les
12 recensements, était à 99 % peuplé d'Albanais.
13 Je dois intervenir, excusez-moi. Page 7, ligne 1, on aurait dû
14 entendre 5D1059. Merci.
15 Alors, je vais vous demander la diapo suivante. Nous avons là
16 certaines cartes qui ont été présentées pour étayer le témoignage d'un
17 lieutenant-colonel qui s'appelait Bislim Zyrapi, chef du QG de l'UCK à la
18 période concernée. De l'autre côté, nous avons une carte qui est la pièce
19 IC157, présentée par le colonel Dikovic, qui se trouvait sur ce territoire.
20 La carte du colonel Zyrapi porte la référence IC105. Alors, ces cartes
21 coïncident l'une avec l'autre et les propos tenus par Bislim Zyrapi nous
22 indiquent de façon claire que sur ce territoire il y a eu des combats entre
23 les forces de l'ordre de la Serbie et de la Yougoslavie d'un côté, et les
24 forces de l'UCK de l'autre côté. Le colonel Zyrapi, de par son témoignage
25 crédible, a expliqué que ce territoire a été contrôlé par ses propres
26 forces à lui. Et en sus, il a souligné la chose suivante, je vais citer,
27 page du compte rendu 6 003, lignes 5 et 6 :
28 "Il était normal pour eux d'ordonner des déplacements de la
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1 population mais aussi de l'UCK…"
2 Alors, si les Juges de la Chambre, concernant l'exemple de Belanica,
3 ont constaté qu'il n'y a pas eu de crime de guerre de commis, c'est
4 précisément grâce à ces propos tenus par le colonel Zyrapi que ça s'est
5 fait, et nous savons que le colonel Zyrapi a témoigné que ceci a été un
6 principe valable pour le territoire entier du Kosovo. Alors, du fait de cet
7 élément de preuve, nous pouvons conclure quel a été le modèle de
8 comportement général. Je tiens à remercier notamment les Juges de la
9 Chambre d'avoir rendu une ordonnance datée du 20 février pour souligner
10 qu'il y avait une question de posée au sujet du site, du village de
11 Tusilje, pour la journée du 29 mars 1999.
12 En effet, l'acte d'accusation ne mentionne pas ce village, ce qui fait
13 qu'il n'y a aucun fondement d'en parler dans le jugement qui est rendu
14 parce que ceci outrepasse la teneur de l'acte d'accusation en tant que tel.
15 Je vais demander à présent à mon confrère, M. Cvijic, de passer un clip
16 vidéo que l'on a déjà eu l'occasion de visionner pendant le procès. Il
17 s'agit de Pristina, l'une des nombreuses nuits de bombardement, et il
18 s'agit du 7 avril 1999.
19 [Diffusion de la cassette vidéo]
20 M. CEPIC : [interprétation] 5D -- voilà. Vous voyez des bâtiments en
21 flammes. Vous voyez des bâtiments d'habitation qui ont été frappés. La
22 question qui se pose, c'est celle de savoir si quelqu'un serait resté parmi
23 les locataires à habiter là après un tel bombardement. Et je vais préciser
24 que sur la ville de Pristina pendant les bombardements, il est tombé 199
25 projectiles sur des bâtiments civils.
26 Lorsque nous parlons de Pristina, je tiens à répéter ce que mon confrère,
27 M. Ackerman, a indiqué lui-même. A Pristina, il n'y avait pas d'unités de
28 combat de l'armée de Yougoslavie. Tous les effectifs étaient à leurs tâches
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1 de défense du pays à l'extérieur de cette ville. Ça a fait l'objet de
2 témoignages de commandants de guerre. C'est le commandant de la garnison,
3 le témoin de la Défense Filipovic, qui l'a dit, et bon nombre d'éléments de
4 preuve matériels de l'armée de Yougoslavie le démontrent aussi. Comme je
5 l'ai dit, les archives de l'armée de Yougoslavie étaient complètes. Tout
6 rapport de combat pouvait s'y retrouver. Et il était très aisé de
7 reconstituer tous les déplacements des unités. Ce que je voudrais ici
8 indiquer auprès des Juges de la Chambre d'appel, c'est que sur le
9 territoire autour de Pristina, il a été apporté de l'aide humanitaire là où
10 il y avait les effectifs de l'armée de Yougoslavie, ce qui a montré que
11 l'on a fait preuve de soins à apporter aux civils. Ceci est illustré par
12 une partie des documents cités que vous avez ici, à savoir le 5D499, la
13 354e Brigade de l'armée qui prend soin de 15 000 Albanais de souche qui
14 s'en revenaient chez eux, aux villages de Ladovac et Sajkovac. Ensuite,
15 5D615, la 211e Brigade de l'armée de Yougoslavie qui apporte une aide
16 humanitaire et autres fournitures pour la population albanaise. Et le
17 témoin de l'Accusation, le colonel Zlatomir Pesic, commandant du KVOK à
18 Pristina, a dit qu'il avait essayé de retenir un groupe de civils pour les
19 convaincre de ne pas quitter leurs logis. Et nous avons là pièce à
20 conviction 5D592, où l'on voit que les ressortissants de la 211e Brigade
21 avaient apporté une aide médicale à la population civile.
22 Diapo suivante, s'il vous plaît.
23 Je tiens à me référer brièvement aussi à la municipalité de Prizren.
24 On voit qu'il y a plusieurs ordres et rapports de combat pour illustrer les
25 choses telles qu'elles se présentaient. M. Ackerman a souligné hier que
26 certaines colonnes de réfugiées avaient péri suite aux bombardements de
27 l'OTAN. Et vous pouvez le voir au rapport 5D1158, il y a des projectiles de
28 l'OTAN qui sont tombés sur une colonne de civils et de réfugiées sur le
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1 territoire de Lipaj [phon] et Djakovica. Enormément de victimes et de
2 blessés. Un membre de l'armée de Yougoslavie a témoigné, à savoir Franjo
3 Gloncak, qui a dit qu'il s'était porté au secours de ces victimes. Un autre
4 exemple à proximité du village de Korisa. Je précise que le premier exemple
5 c'est Pirane, et au sujet de la base de crime, on a dit que Pirane, c'est
6 un site de crime d'expulsion et de déplacement forcé de civils. On a une
7 déclaration du Témoin Gloncak qui se trouve à la pièce 5D1395.
8 Le même témoin décrit une situation où une colonne de civils avait
9 été touchée avec 15 projectiles de l'OTAN. Et c'étaient des réfugiés
10 albanais qui s'en revenaient chez eux, près du village de Korisa, dans la
11 municipalité de Prizren. Comme vous pouvez le voir, des centaines de
12 blessés et de tués. Ce témoin Gloncak est allé donné son sang pour aider de
13 la sorte les civils qui étaient blessés et qui en avaient besoin. Tout ceci
14 illustre ce qui s'est passé. Il y a la pièce 5D914 qui est présenté par la
15 549e Brigade de l'armée de Yougoslavie au sujet de ces frappes de l'OTAN.
16 Diapo suivante.
17 On voit le Témoin K79 qui a dit que l'armée avait demandé aux civils
18 de rentrer chez eux, là où elle pouvait le faire. Page du compte rendu
19 d'audience 9 721. Le général Maisonneuve avait vanté le comportement de la
20 VJ et son attitude humanitaire à cette occasion. Diapo suivante.
21 La situation se présente de façon identique sur le territoire de
22 Djakovica, 5D1158, pour ce qui est de cette colonne de blessés. On envoie
23 des équipes médicales de l'armée, quoique ce ne soit pas la tâche de
24 l'armée. La tâche de l'armée c'est de défendre le pays, et les blessés,
25 c'est les structures civiles qui doivent s'en occuper. Mais ceci a été
26 fait. La pièce 5D1147 parle également des soins apportés aux civils. Diapo
27 suivante, s'il vous plaît.
28 5D1144 et 5D1155 pour illustrer la même chose. Nous allons passer
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1 maintenant à la municipalité d'Orahovac. Ici, il est question également des
2 comportements et de l'attitude humanitaire de l'armée de Yougoslavie où
3 l'on dit que l'armée s'est conformée à la loi. Diapo suivante. Bon nombre
4 de documents de la 252e Brigade. Le 5D963, qui parle de l'aide humanitaire
5 apportée à l'intention des civils. 5D964, 5D1071, où l'on indique que les
6 civils sur ce territoire ont été protégés de façon complète.
7 Bon nombre d'autres documents l'illustrent : le 5D1072, 5D965, 5D973,
8 5D974, et cetera. Merci.
9 Comme je l'ai expliqué sur l'exemple de Srbica, la même chose s'est
10 produite pour ce qui est du territoire de Djakovica, Prizren et Orahovac.
11 Et ici, vous avez la carte du colonel Delic, le IC151, et à droite, la
12 carte du colonel Zyrapi, chef d'état-major de l'UCK. Il s'agit de la
13 référence P2447. Les déplacements des unités coïncident sur les deux
14 cartes, et c'est le colonel Zyrapi qui a expliqué qu'il y avait eu des
15 combats de façon analogue à Srbica. Il l'a souligné dans son témoignage, et
16 témoignage que nous avons cité dans notre mémoire en appel, c'est que c'est
17 précisément à Pirane et Celine, à proximité de ces villages, qu'il y a eu
18 des combats qui se sont déroulés entre les effectifs de l'UCK d'un côté et
19 les effectifs de la Serbie et de la Yougoslavie de l'autre côté. La
20 référence au compte rendu d'audience, c'est le 5 991, 5 992.
21 Pièce suivante, s'il vous plaît. Il s'agit d'une carte, 52447. Cela
22 émane du colonel Zyrapi. Il a dessiné les zones qu'ils ont contrôlées à la
23 date du 27 mars, et c'est précisément dans ces zones-là que l'on a indiqué
24 la base de crime à l'origine, et il a dit qu'ils avaient donné l'ordre à la
25 population civile de se déplacer du fait des combats qui avaient lieu entre
26 les deux parties belligérantes. Et j'ajoute à tout ceci que pendant tout ce
27 temps il y avait en permanence des bombardements de l'OTAN et des centaines
28 et des centaines de projectiles étaient tombés à ce moment-là sur le
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1 territoire du Kosovo-Metohija.
2 Tout ceci nous indique de façon claire que tout ceci a visé
3 concrètement la défense du pays par l'armée dans une situation fort
4 difficile en circonstances de frappes aériennes de l'OTAN en parallèle avec
5 les combats qui se déroulaient contre l'UCK.
6 Madame, Messieurs les Juges, avec votre permission, je souhaiterais aborder
7 la première question qui a été posée dans le cadre de votre ordonnance du
8 20 février de cette année, il s'agit des sanctions disciplinaires et autres
9 mesures à l'encontre des membres de la VJ. Je voudrais que nous passions à
10 la diapositive suivante --
11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Maître Cepic, puis-je me permettre de
12 vous donner un conseil ?
13 M. CEPIC : [interprétation] Oui.
14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je crois que ce que vous devez nous
15 présenter, c'est à quel endroit la Chambre de première instance se serait
16 fourvoyée, en commettant une erreur de droit ou une erreur de fait, plutôt
17 que de nous proposer une répétition de ce que vous avez présenté lors de la
18 phase du procès.
19 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous avons, dans
20 notre mémoire en appel, mis en avant tous les paragraphes pertinents du
21 jugement ainsi que les pièces à conviction pertinentes. Je crois que dans
22 le cadre de l'audience d'aujourd'hui nous avons souhaité, en fait, jeter
23 davantage de lumière sur les arguments déjà présentés. C'est l'intérêt de
24 la présentation. Et nous avons déjà tout couvert dans notre mémoire en
25 appel.
26 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Très bien. Mais veuillez garder à
27 l'esprit la remarque que je viens de faire. Veuillez poursuivre.
28 M. CEPIC : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.
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1 Je souhaiterais maintenant répondre précisément à votre question figurant
2 dans l'ordonnance du 20 février et qui portait sur la question de savoir si
3 la Chambre de première instance a commis une erreur en concluant que
4 Vladimir Lazarevic n'avait pas pris suffisamment de mesures, notamment
5 concernant les crimes d'expulsion et autres actes inhumains par rapport
6 auxquels il aurait dû prendre les mesures adéquates aux fins d'enquêter sur
7 les crimes graves commis par la VJ. Ceci figure au Volume III du jugement,
8 paragraphe 900. J'espère que ceci pourra être utile à la Chambre d'appel.
9 En fait, une telle conclusion de la Chambre ne résiste tout simplement pas
10 à l'examen, pour rester mesuré, car le général Lazarevic a tout simplement
11 fait tout ce qui était en son pouvoir. Sur la diapositive, nous avons ici
12 une disposition de la Loi sur les forces armées de l'ancienne Yougoslavie -
13 c'est la pièce P984 - et l'article 159 prévoit très clairement la prise de
14 sanctions disciplinaires. Je souhaiterais également que l'on présente le
15 paragraphe 133 de l'arrêt Gotovina et Markac sur ce même sujet, où la
16 Chambre d'appel a conclu que les accusés avaient engagé des mesures
17 disciplinaires contre un grand nombre de soldats et que cela jouait en leur
18 faveur. Je vais justement vous montrer que le général Lazarevic a pris
19 précisément ce type de mesures à une échelle encore plus importante et
20 conformément avec les moyens qui ont été les siens. Nous devons cependant
21 d'abord préciser une question essentielle pour nous, pénalistes, et qui
22 concerne la responsabilité en matière disciplinaire : il s'agit d'une forme
23 de responsabilité essentiellement inférieure, et ce, largement inférieure à
24 la responsabilité pénale.
25 En matière disciplinaire, on ne peut pas tenir quelqu'un responsable
26 pour des actes de meurtre, de viol, d'expulsion ou tout autre crime ou
27 crime de guerre. En fait, Aleksandar Vasiljevic a expliqué cela dans un
28 exemple spécifique; page 8 968 du compte rendu. C'est la planche suivante.
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1 Nous voyons les sanctions qui pouvaient être prises contre des
2 soldats, définies dans les articles 163 et 164, et la sanction
3 disciplinaire la plus sévère qui pouvait être prise était de 20 jours de
4 prison. Et nous conviendrons que ce n'est pas avec une sanction
5 disciplinaire de 20 jours d'emprisonnement que nous allons pouvoir punir
6 quelqu'un qui a commis un crime. En outre, l'article 181 prévoit que pour
7 pouvoir faire siéger un tribunal militaire disciplinaire, il faut que la
8 procédure soit engagée à l'échelon d'un commandant d'armée, au moins.
9 De même, l'alinéa de l'article 204 sur la Loi sur les forces armées
10 disposent qu'en cas de guerre, on ne prononce pas des peines ou des
11 sanctions disciplinaires si la mise en œuvre, la réalisation des sanctions
12 en question n'est pas possible en situation de guerre. Cependant, même en
13 présence de dispositions de cette nature, le général Lazarevic a fait tout
14 ce qui était dans son pouvoir pour que les soldats puissent être
15 sanctionnés sur le plan disciplinaire, conformément à la loi. Alors,
16 j'attire votre attention sur l'ordre du 12 mars 1999 du commandement du
17 Corps de Pristina qui demande la prise systématique de mesures
18 disciplinaires sévères. Ensuite, nous voyons que le 29 mars, le général
19 Lazarevic redemande cela, pièce 5D1144, ensuite la pièce P2029 du 1er avril
20 1999, puis la pièce 4D237 du 7 mai 1999.
21 Nombre de documents émanant de structures subordonnées témoignent du
22 fait que ces ordres ont été appliqués. Je vous donne comme exemple les
23 pièces 5D1293, 5D554, 5D387, 5D388, 5D365, 5D315, 5D550, 5D798, 5D1142,
24 5D1151, 5D1154. Alors, je voudrais que l'on affiche la planche suivante.
25 Ce qui est le plus important, comme je l'ai dit, on prend des mesures
26 disciplinaires pour des infractions de faible gravité : si quelqu'un est
27 arrivé en retard, s'il a commis une infraction de la discipline militaire
28 sans gravité, et cetera. Mais ce qui compte en l'espèce, c'est la poursuite
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1 au pénal des auteurs de crimes, d'infractions au pénal. Mon confrère, Me
2 Bakrac, en dira un peu plus à ce sujet. Je me contenterai de souligner que
3 les officiers et le commandant du corps lui-même se sont acquittés de leur
4 obligation en soumettant des plaines au pénal, parce que les juges et les
5 procureurs étaient indépendants dans leurs travaux, tout comme les Juges du
6 présent Tribunal sont indépendants dans leur travail. Eh bien, de la même
7 façon, la loi et la constitution définissaient le cadre dans lequel
8 intervenaient les juges et les procureurs dans l'ancienne Yougoslavie, et
9 garantissaient leur indépendance. Devant nous, nous avons l'article 143 de
10 la constitution qui affirme clairement cette indépendance.
11 Je voudrais dire que les membres du Corps de Pristina pendant la
12 période pertinente en l'espèce ont soumis 2 382 plaintes au pénal, sur
13 lesquelles près d'un cinquième, un cinquième donc de ces plaintes
14 concernent des violations du droit international humanitaire. Concrètement,
15 il s'agit de 482 plaintes au pénal. J'ai essayé de retrouver dans la
16 jurisprudence du présent Tribunal ainsi que d'autres tribunaux ayant à
17 juger de crimes de guerre des exemples similaires qui pourraient témoigner
18 d'un nombre à peu près comparable de mises en accusation et de mesures
19 éminemment humaines et humanitaires prises au regard des besoins des
20 civils; je n'ai réussi à trouver quoi que ce soit d'équivalent, ce qui joue
21 clairement en faveur du général Lazarevic, qui a subordonné le principe de
22 l'efficacité militaire à celui d'humanité. En toute chose, il a respecté la
23 loi et la constitution qui lui imposait de tenir compte de leurs
24 dispositions dans ces actions. Je voudrais vous remercier pour votre
25 attention, et mon collègue, Me Bakrac, assurera la suite.
26 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci beaucoup.
27 M. CEPIC : [interprétation] Je voudrais juste apporter une correction au
28 compte rendu. Page 15, ligne 14, il convient de lire non pas "l'article
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1 143", mais "l'article 138" de la constitution.
2 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci, Maître Cepic.
3 M. CEPIC : [interprétation] Merci beaucoup à vous.
4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Maître Bakrac, à vous.
5 M. BAKRAC : [interprétation] Merci, Madame et Messieurs les Juges. Je vais
6 revenir sur la substance de nos moyens d'appel numéro 2 et 3. Concernant
7 ces moyens d'appel, la Défense dans cette partie de sa présentation, se
8 tournera tout particulièrement vers les questions soulevées par la Chambre
9 d'appel, questions 2 et 3 figurant dans l'ordonnance du 20 février 2013.
10 Avec le respect que je dois à la Chambre de première instance, notre
11 Défense estime que cette Chambre a commis une erreur lorsqu'elle a conclu
12 que le général Vladimir Lazarevic avait participé à l'aide et à
13 l'encouragement apportés à l'expulsion et aux transferts forcés de la
14 population albanaise, et lorsqu'elle a conclu que l'élément moral le
15 caractérisant comprenait : a) la participation à la planification et à la
16 mise en œuvre d'opérations conjointes de la VJ et du MUP; deuxièmement, le
17 fait d'émettre des ordres correspondant à Grom 3 et Grom 4, et les ordres
18 du commandement conjoint constitué par le Corps de Pristina par lesquels la
19 VJ a été déployée dans les localités où il y a eu déplacement forcé
20 d'Albanais; troisièmement, le séjour sur le terrain et l'inspection des
21 unités qui renforçaient le moral des soldats; et quatrièmement, son
22 manquement à prendre des mesures adéquates en vue d'assurer les enquêtes
23 réglementaires qu'appelaient les crimes graves commis par la VJ. Vous
24 pouvez retrouver ces éléments, Madame et Messieurs les Juges, dans le
25 jugement de première instance, Volume III, paragraphe 925.
26 La Défense réitère que selon elle une telle conclusion de la Chambre
27 de première instance est tout à fait erronée au vu de l'ensemble des
28 éléments de preuve en l'espèce. Pour conclure, le général Lazarevic a aidé
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1 et encouragé l'expulsion et le transfert forcé de la population albanaise,
2 selon les modalités que je viens de citer, la Chambre de première instance
3 avait l'obligation d'établir ce qu'il convient d'appeler le caractère de
4 visant spécifiquement conformément à la jurisprudence du Tribunal en tant
5 qu'élément essentiel de l'élément matériel lorsqu'il s'agit d'aider et
6 d'encourager. L'établissement explicite de ce caractère de visant
7 spécifiquement était selon nous indispensable afin d'établir le lien requis
8 entre le fait d'aider et d'encourager et les auteurs principaux. La Chambre
9 de première instance, à cette fin, avait également l'obligation d'établir
10 de façon adéquate le contexte plus large dans lequel les actions auxquelles
11 elle se réfère ont été commises. Et justement dans cette étape essentielle,
12 la Chambre de première instance a commis une erreur. Dans son
13 interprétation des éléments de preuve, elle n'a pas conclu que le général
14 Lazarevic en tant qu'officier honorable et professionnel a agi en
15 conformité avec la constitution, les dispositions de la loi en vigueur, et
16 l'obligation morale qui était la sienne de défendre son propre pays contre
17 l'ALK et la campagne de l'OTAN, au lieu de cela la Chambre de première
18 instance a conclu que le général Lazarevic aurait aidé et encouragé
19 l'expulsion et le transfert forcé de la population albanaise.
20 Cette compréhension erronée du contexte dans son ensemble et des
21 obligations et droits découlant de la constitution et de la loi en vigueur
22 pour Lazarevic en tant que commandant du Corps de Pristina a très fortement
23 influencé le raisonnement, lui aussi entaché d'erreur, de la Chambre de
24 première instance, et de cela, les pièces présentées lors du procès
25 témoignent le mieux. Des erreurs ont été commises dans l'établissement de
26 faits essentiels, ce qui a à son tour entraîner la commission d'erreur de
27 droit.
28 Ici, nous allons tout d'abord nous efforcer d'examiner chacun de ces
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1 éléments de l'élément matériel auquel la Chambre de première instance a
2 conclu concernant le général Lazarevic. Pour commencer nous allons examiner
3 la planification et l'exécution d'opérations conjointes de la VJ et du MUP.
4 La Défense souligne que dans le contexte des événements au Kosovo pendant
5 la période pertinente, la participation et la mise en œuvre des opérations
6 conjointes de la VJ et du MUP n'était pas uniquement légale mais également
7 logique et nécessaire. La Défense ne voit pas en quoi ni à quel endroit la
8 Chambre de première instance dans son jugement serait parvenue à établir
9 une distinction claire entre cette forme d'actions nécessaire, logique et
10 légale de l'appelant et ce que constituerait un manquement et ce qui
11 constituerait des actions dont on aurait établi au-delà de tout doute
12 raisonnable qu'ils peuvent être assimilés à des omissions et à une
13 contribution à une forme d'aide et d'encouragement. Le devoir premier de
14 l'appelant était de planifier des opérations visant à la défense du pays
15 contre l'ALK et la campagne de l'OTAN conformément aux ordres qui lui
16 parvenaient des structures supérieures hiérarchiquement. La Chambre de
17 première instance avait l'obligation d'établir une distinction claire entre
18 l'exécution et l'accomplissement de ces tâches prévues par la loi et qui
19 étaient des tâches régulières d'une part, et d'autre part les actions dont
20 on aurait éventuellement pu déterminer qu'elles contribuaient à la
21 commission de crimes et dont l'appelant aurait eu également conscience.
22 Donc dans tout travail, et dans celui de général également, celui de
23 général de corps d'armée, il y a toujours une description des tâches et des
24 obligations de la personne intéressée. Pour un commandant de corps, eh
25 bien, nous trouvons en tout premier plan l'obligation de planifier des
26 opérations, et notamment en situation de guerre. C'est un aspect
27 particulièrement important de ce poste.
28 Je voudrais maintenant que vous examiniez une diapositive dans laquelle
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1 nous nous contenterons de résumer les opinions, les positions des témoins à
2 charge, des témoins qui, compte tenu des postes qu'ils ont occupés et de
3 l'expérience qui était la leur, avaient quelque chose à dire à ce sujet.
4 Donc un grand nombre de témoins étaient des fonctionnaires haut placés
5 d'organisations internationales, qui ont dit que ces actions ou opérations
6 dont la Chambre de première instance a conclu qu'elles constituaient des
7 parties de l'élément matériel de l'accusé, ces témoins ont donc dit qu'il
8 s'agissait d'actions légales. Qui plus est, il s'agissait d'actions
9 nécessaires dans le cadre de la défense de l'Etat contre l'ALK et la
10 campagne de l'OTAN. Le Témoin Maisonneuve dit même, je cite : La
11 coordination entre le VJ et le MUP était plus que nécessaire, elle a été
12 hautement professionnelle. Toute opération impliquant la participation tant
13 de la VJ que du MUP doit être conduite en coopération étroite afin que les
14 formations respectives soient au courant des plans de l'autre structure
15 afin d'éviter des incidents ou le tir contre des effectifs amis. Vous
16 pouvez retrouver ceci, Madame et Monsieur les Juges, en page 11 183 du
17 compte rendu.
18 En page 9 815 du compte rendu d'audience, le colonel Crosland dit en ses
19 propres termes, sur la base de son expérience très riche acquise dans le
20 monde entier que, je cite : Il était tout à fait à prévoir qu'il existe
21 différentes formes de coopération et de coordination entre les différents
22 effectifs du MUP et de la VJ au Kosovo dans le but d'éviter des tirs visant
23 des effectifs amis. Page 9 815 donc du compte rendu.
24 Outre ces témoignages, la loi en vigueur à l'époque en RSFY faisait
25 obligation au général Lazarevic de se conformer à ces dispositions, à
26 savoir dans le cadre de cette loi faire intervenir des unités de la VJ dans
27 des opérations contre des groupes terroristes était tout à fait légitime et
28 légale. Et vous retrouverez ceci dans la pièce P1085.
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1 Madame, Monsieur les Juges, juste une intervention au compte rendu, ligne
2 8, l'expérience du colonel Crosland a été acquise pendant qu'il était en
3 service dans le monde entier.
4 Les éléments de preuve sur lesquels nous venons d'attirer l'attention des
5 Juges de la Chambre d'appel montrent clairement que la planification et la
6 participation à des opérations conjointes du MUP et de la VJ contre des
7 opérations de groupes terroristes est non seulement légitime et légale mais
8 également nécessaire, notamment dans des situations où on recourt à la
9 force armée pour essayer d'obtenir la cessation d'une partie d'un
10 territoire d'un Etat internationalement reconnu. Le MUP et la VJ avaient
11 une obligation constitutionnelle de protéger l'intégrité territoriale et la
12 souveraineté de l'Etat.
13 La Chambre de première instance poursuit en concluant que l'élément moral
14 de l'appelant est confirmé par les ordres qu'il a émis au titre de Grom 3
15 et Grom 4 ainsi que ceux du Corps de Pristina par lequel la VJ a été
16 déployée dans des localités où il y a eu transfert forcé d'Albanais. La
17 Défense souhaite ici souligner que les unités du Corps de Pristina ont été
18 déployées dans toutes les localités du territoire du Kosovo, où l'on n'a
19 pas établi qu'il y ait eu expulsion ou transfert forcé.
20 Ce qui est intéressant aussi, c'est que la Chambre de première
21 instance se réfère à des ordres dans lesquels on voit qu'il est question
22 indubitablement d'un plan de grande envergure visant à faire intervenir la
23 VJ au Kosovo, et ceci aux fins de défendre, d'assurer la défense terrestre
24 de l'Etat contre l'agression. La teneur même de ces ordres nous montre que
25 ce plan ne prenait pas pour cible la population civile mais qu'il résultait
26 bien plutôt de l'effort de guerre visant à défendre le territoire de
27 l'Etat.
28 Ceci figure sur la planche actuellement à l'écran. La pièce 3D690 est
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1 un ensemble d'instructions de l'état-major général de la VJ du 16 janvier
2 1999 avec Grom 3 en en-tête. Par ces instructions, on enjoint aux
3 commandements subordonnés, en premier lieu au 3e Corps d'armée et donc
4 également au Corps de Pristina, de recourir à la VJ sur le terrain pour
5 s'opposer aux actions terroristes de l'ALK et à la campagne de l'OTAN.
6 Sur la base de ces instructions de l'état-major général de la VJ qui
7 reflétaient le plan pour la défense du pays, le 27 janvier 1999, le 3e
8 Corps d'armée a émis l'ordre relatif à Grom 3, définissant les tâches
9 incombant au Corps de Pristina aux fins d'empêcher les brigades de l'OTAN
10 de se déployer et d'opérer une jonction avec l'ALK. Parallèle avec ceci,
11 cet ordre relatif à la défense du pays a fait que le Corps de Pristina ait
12 fait de cet ordre un ordre en soi pour bloquer et détruire l'ALK dans le
13 secteur de Drenica, Laba, Petit Kosovo et Malisevo. Pour ce qui est de la
14 3e Armée, elle a donné un ordre pour que ce plan soit réalisé au plus tard
15 le 15 février, ou avant le 15 février 1999. 5D249.
16 Le commandement du Corps de Pristina s'est conformé à cet ordre, et à la
17 date du 16 février 1999, elle a donné un ordre pour ce qui était de briser
18 et détruire l'ALK dans le secteur de Drenica, Lab, Malo Kosovo et Malisevo.
19 C'est la pièce P2808. Si ces ordres-là avaient constitué des plans mis en
20 place pour la défense du pays, c'est confirmé par un document confidentiel
21 du renseignement, un document confidentiel.
22 Le 6D1671, où l'on donne instruction de suivre les activités de l'ALK sur
23 le terrain. Excusez-moi. La référence du document, c'est le 6D1671 du mois
24 de novembre 1998. Partant de ce rapport du renseignement envoyé par le
25 biais de l'ambassade à Belgrade vers le pays concerné, il est dit qu'il y a
26 des activités déployées par l'organisation de l'ALK, et on souligne que
27 l'ALK est en train de renouveler, de mobiliser dans le secteur de Malisevo,
28 Drenica et Podujevo, c'est-à-dire Lab et Malo Kosovo, et c'est là que l'on
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1 a constaté la présence des plus grandes et des mieux organisées des unités
2 de l'ALK. L'ALK procède à la mobilisation et à l'entraînement de nouvelles
3 troupes.
4 Devant ce Tribunal, on a pu entendre le témoin Radojko Stefanovic,
5 page du compte rendu 21 817, a déclaré que l'ordre donné par le Corps de
6 Pristina, daté du 16 février 1999, découle de l'ordre donné par la 3e
7 Armée. On a également estimé que le secteur de Malo Kosovo, Drenica et
8 Malisevo avait comporté une haute concentration d'unités fortes et
9 puissamment armées de l'ALK, et que cela était tout à fait propice à une
10 descente parachutée des forces multinationales de l'OTAN basées en
11 Macédoine.
12 Alors, tous ces éléments de preuve qui se trouvent être corroborés
13 par les ordres que je viens de citer indiquent tout à fait clairement que
14 la conclusion à tirer est celle de dire que ce sont là des actions et des
15 ordres donnés pour la défense du pays, dans l'objectif de réaliser ce qui
16 avait constitué l'effort de guerre du pays. Si l'on analyse la teneur, on
17 peut déterminer ceci à part entière pour constater quel a été l'objectif
18 poursuivi par l'armée de Yougoslavie, et comment on a fait pour préserver
19 la chaîne de commandement. Ce sont des ordres pour la défense du pays. Il
20 n'y a aucune chose ou aucun élément contraire au droit. L'appelant était
21 tenu de réaliser les ordres du commandement supérieur qu'il avait reçus, et
22 donc tous ces éléments de preuve qui corroborent ce qui vient d'être dit
23 font conclure de façon non ambiguë que ceci n'est pas un paravent ou une
24 façon de masquer, dissimuler l'intention qui aurait été celle de
25 prétendument combattre l'ALK, et la campagne de l'OTAN pour procéder à la
26 perpétration de crimes contre la population albanaise. Si déjà ce n'est pas
27 la seule conclusion raisonnable à tirer, c'est certainement la conclusion
28 raisonnable alternative à tirer par rapport à ce que la Chambre de première
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1 instance a tiré comme conclusion. Et je répète que la Chambre de première
2 instance a considéré que les ordres donnés avaient constitué l'élément
3 matériel de la responsabilité du général Lazarevic. D'après moi, lorsque
4 l'on analyse ces ordres-là, la seule conclusion raisonnable à tirer c'est
5 que ceci a été exécuté dans le cadre de l'effort de guerre du pays pour
6 défendre le pays. Alors, si vous voulez maintenant rabaisser les normes
7 vers le bas pour, par exemple, raisonner comme la Chambre par le biais
8 d'éléments de preuve indirects, la chose qui serait indirectement
9 raisonnable c'est de conclure que ce sont là des ordres donnés dans le
10 cadre de l'effort de guerre pour défendre le pays, notamment lorsque l'on
11 prend en considération le fait que les territoires concernés c'étaient des
12 territoires où il y avait une forte concentration des forces de l'ALK avec
13 une grande population civile.
14 Ce qui indique qu'il y a également erreur des Juges de la Chambre
15 sans se référer à des éléments de preuve concrets, c'est le fait d'avoir
16 affirmé que le général Lazarevic avait illustré son élément matériel de
17 responsabilité pour ce qui est des départs ou des déplacements de la
18 population, où l'on a dit que c'était l'objectif poursuivi de transfert
19 forcé et d'expulsion. Mais il faut savoir qu'il y ait eu de violentes
20 frappes aériennes et des attaques réitérées par l'ALK sur le territoire du
21 Kosovo et Metohija dans son ensemble. Dans ce type de circonstance, il est
22 absolument logique de voir un commandant du corps se déplacer vers ses
23 propres unités. Chaque commandant est censé le faire, quelle que soit
24 l'armée en question dans le monde. Les Juges de la Chambre de première
25 instance n'ont aucun élément de preuve, ni direct ni indirect, pour dire
26 que cette inspection des unités avait été faite dans l'intention
27 d'encourager ou de susciter la perpétration de crimes de guerre. Et ces
28 éléments de preuve indirects devraient nous montrer que la seule conclusion
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1 raisonnable à tirer par les Juges de la Chambre devrait être celle-là,
2 chose qui n'est pas le cas.
3 Diapo suivante, s'il vous plaît. Pour ce qui est -- excusez-moi. Vous
4 avez là, ici, la conclusion tirée par les Juges de la Chambre de première
5 instance et les positions qui sont celles de la Défense pour ce qui est des
6 éléments de preuve à décharge. Alors, si vous vous penchez sur la pièce
7 P2004, Madame, Messieurs les Juges, vous allez voir qu'au point 4 de cet
8 élément de preuve, où on parle du moral, le général Lazarevic informe la 3e
9 Armée et l'état-major principal de l'armée de Yougoslavie de la chose
10 suivante. Il s'agit d'un rapport de combat daté du 13 avril 1999, donc 20
11 jours après le début de la campagne aérienne de l'OTAN. Le général
12 Lazarevic dit le moral du corps est très bon et stable. Le moral est
13 positivement influencé par les positions de plus en plus manifestes des
14 facteurs politiques internationaux disant que la question du Kosovo-
15 Metohija devrait être abordée et résolue par des moyens politiques.
16 Voilà la résultante du séjour de Lazarevic sur le terrain. Il est là-bas
17 pour encourager, il en informe ses supérieurs de la 3e Armée et l'état-
18 major principal du fait que l'armée sur le terrain est tout à fait prête à
19 aborder ou à passer à une solution pacifique de la situation. Alors, est-ce
20 que quelqu'un qui est conscient de crimes d'expulsion et de transfert forcé
21 est censé informer son commandement du fait que la conscience et le moral
22 des troupes étaient plutôt portés vers une solution politique et non pas
23 militaire des choses, et il l'écrit à ses supérieurs hiérarchiques ?
24 Il y a un témoin qui est particulièrement important, le Témoin K73,
25 on l'a mentionné avant-hier dans les propos qui ont été tenus par mon
26 éminent confrère, M. Kremer, et par M. Ackerman également, ce Témoin K73.
27 M. Cepic a parlé du Témoin K90, et moi, je me propose de me référer à ce
28 Témoin K73. Notre confrère, M. Ackerman, a indiqué que le témoignage de ce
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1 témoin devant la Chambre de première instance a été tel, et on a convié la
2 Chambre de première instance à se pencher dans le détail sur le témoignage
3 de celui-ci. Je convie les Juges de la Chambre d'appel à se pencher aussi
4 sur les détails de son témoignage pour voir que ce témoin, bien qu'il ait
5 parlé d'un incident d'expulsion, il indique qu'il n'a jamais reçu d'ordre
6 d'expulsion ou de transfert forcé de façon directe. Quand il a témoigné
7 ici, ce témoin a parlé d'un incident. Mon éminent confrère, M. Kremer, a
8 dit avant-hier que ce témoin avait lui-même un problème pour ce qui était
9 de faire face à ce qu'il aurait prétendument fait lui-même dans le cadre
10 d'une opération. Ce qui est évident, toutefois, c'est que ce témoin n'a pas
11 reconnu le général Lazarevic comme étant un co-perpétrateur, un assistant
12 ou quelqu'un qui lui aurait apporté son soutien dans ce qu'il avait fait.
13 Il le reconnaît en sa qualité de commandant sous le commandement duquel il
14 avait défendu son pays. Et pour lui, comme il l'a dit, ça avait été un
15 grand honneur que d'avoir défendu son pays sous le commandement du général
16 Lazarevic.
17 Vous allez retrouver ceci au TT341, où le Témoin K73 dit : Tous les
18 officiers avaient une opinion très bonne du général Lazarevic. Ils avaient
19 considéré que c'était un militaire de carrière, un homme bon, honnête et
20 honorable qui a défendu son pays. Et ça a été l'un des commandants dans la
21 filière de commandement. Le témoin a estimé que Lazarevic était un
22 responsable militaire et qu'il avait été honoré d'avoir défendu son pays
23 sous son commandement.
24 A la fin, et ce n'est pas la mission d'un témoin, mais je tiens quand
25 même à préciser que ce témoin avait personnellement estimé que le général
26 Lazarevic n'avait pas sa place dans un prétoire de tribunal.
27 Pourquoi est-ce que je le dis ? Parce que c'est incompatible avec ce
28 que la Chambre de première instance a constaté. Si celle-ci a constaté que
Page 411
1 les inspections effectuées par le général Lazarevic sur le terrain avaient
2 eu pour objectif d'encourager et d'inciter des auteurs de crimes, pourquoi
3 les témoins de l'Accusation, étant des soldats sur le terrain eux-mêmes,
4 avaient perçu le général Lazarevic comme je viens de l'exposer ? C'est là
5 absolument un élément de preuve disant que le général Lazarevic avait été
6 perçu comme un comandant digne de ce nom chargé de la défense de son pays
7 sans influence aucune pour ce qui est de tout agissement qui serait
8 contraire à la loi ou au droit. Je me réfère maintenant à la page du compte
9 rendu 3 415. Parce que là, c'est une erreur du compte rendu que nous avons
10 un peu plus haut.
11 Je tiens à préciser que le témoin de l'Accusation Dusan Loncar,
12 lorsqu'il a témoigné au sujet du général Lazarevic, a indiqué qu'il pouvait
13 déclarer ce que la grande majorité des officiers de l'armée de Yougoslavie
14 avait dit que c'était un général par excellence. Le témoin de l'Accusation
15 Zlatomir Pesic a indiqué qu'il n'avait jamais obtenu du général Lazarevic,
16 ni oralement ni par écrit, des ordres qui seraient contraires à la loi ou
17 aux dispositions élémentaires relatives à l'utilisation de la VJ. C'est
18 également un témoin de l'Accusation qui l'a affirmé. Et un autre témoin de
19 l'Accusation, Ratomir Tanic, est venu dire que Lazarevic n'avait pas une
20 idée complète de ce qui était en train de se passer sur le territoire du
21 Kosovo-Metohija. Je précise qu'il s'agit du compte rendu -- pour Zlatomir
22 Pesic, compte rendu d'audience 7 267; pour Dusan Loncar, là c'est la page 7
23 687; et pour Ratomir Tanic, la page du compte rendu d'audience afférente
24 est 6 756.
25 Il est conclu de façon erronée que le manquement de prise de mesures
26 pour diligenter des enquêtes au sujet des crimes commis par des membres de
27 l'armée de Yougoslavie avait permis à ces effectifs de poursuivre une
28 campagne de terreur, de violence et de transfert forcé. Or, l'appelant
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1 indique qu'il y a bon nombre d'éléments de preuve que les Juges de la
2 Chambre n'ont pas pris à juste titre en considération et qui montrent que
3 le général Lazarevic, à chaque fois qu'il avait eu vent d'un crime commis
4 par un membre de l'armée de Yougoslavie, avait entrepris toute mesure à sa
5 disposition pour enquêter et pour faire en sorte que l'intéressé soit
6 poursuivi en justice. Il y a des éléments de preuve qui prouvent et
7 démontrent au-delà de tout doute raisonnable que les Juges de la Chambre de
8 première instance ont fait une erreur en affirmant que le général Lazarevic
9 avait omis de prendre des mesures pour ce qui était d'enquêter les crimes
10 graves commis par des membres de la VJ. J'attire l'attention des Juges de
11 la Chambre d'appel sur la pièce 5D84, il s'agit du rapport de combat de
12 Lazarevic daté du 3 avril 1999. Il s'agit d'un rapport sur sept -- sept ou
13 huit jours après le début des frappes aériennes de l'OTAN. Le général
14 Lazarevic, dans ce rapport, informe son commandement supérieur ainsi que
15 l'état-major principal du fait que le jour d'avant, c'est-à-dire le 2
16 avril, il a été présenté 32 plaintes au pénal contre des auteurs de crimes,
17 à savoir huit pour meurtre, un dépôt de plainte pour mauvais traitement et
18 trois pour tentative de meurtre, deux pour vol, et cetera, et cetera.
19 Donc, au tout début des bombardements, le général Lazarevic, chaque
20 fois qu'il a été informé de ceci, envoie un rapport au commandement
21 supérieur pour informer de la chose. Cet élément de preuve a été montré au
22 témoin de l'Accusation, le général Vasiljevic, qui était l'autorité du
23 renseignement situé au niveau de l'état-major principal de l'armée --
24 c'était l'instance chargée de la sécurité, plutôt, à l'état-major principal
25 de l'armée de Yougoslavie. Et ce général Vasiljevic, je vais le résumer -
26 aux pages de compte rendu 8 968 à 8 970 - il indique que c'est un exemple
27 de rapport de combat tout à fait classique et régulier qui comporte la
28 totalité des éléments qu'il est censé comporter. On a montré ensuite au
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1 Témoin Vasiljevic la pièce 5D85, un rapport de combat du jour d'après, du 4
2 avril, où le général Lazarevic, au paragraphe 5, parle de la situation au
3 niveau sécuritaire, et il indique que le jour d'avant il y a eu six dépôts
4 de plaintes au pénal contre des auteurs de crimes.
5 Diapo suivante, s'il vous plaît. Lorsque, une fois de plus, le général
6 Vasiljevic a vu ce document, il a dit - et vous voyez ceci sur vos écrans -
7 il a répondu que dans ce rapport de combat, il y a tout ce qu'un rapport de
8 combat émanant du commandant de corps est censé comporter. Il a ajouté
9 qu'il y avait une obligation de l'instance chargée de la sécurité, à savoir
10 sa propre filière du renseignement, pour ce qui est de rapporter à qui de
11 droit la perpétration de ce type de crimes. Et quand on lui a posé la
12 question de savoir si ce que le général Lazarevic avait indiqué dans son
13 rapport de combat constituait tout ce qu'il devait entreprendre, il a
14 répondu de façon explicite oui. Le général Lazarevic a fait ce qu'il a
15 fait, et ceci met un terme à ce qui avait constitué son obligation. Tout
16 autre enquête relève de l'autorité des instances supérieures. Ce sont les
17 instances supérieures qui sont censées demander en cas de besoin des
18 rapports plus détaillés. Vous pouvez retrouver ceci aux pages du compte
19 rendu 8 967 à 8 968.
20 On a également reproché au général Lazarevic un comportement qui a été
21 caractérisé de façon erronée par les Juges de la Chambre de première
22 instance pour ce qui est de son élément matériel qui devrait être pris en
23 considération. Mais son comportement était celui de la conduite d'une
24 guerre. Dans le contexte réel de la situation, il y avait un effort de
25 guerre d'un Etat qui visait à se défendre d'une insurrection armée et d'une
26 tentative de sécession violente par l'ALK, et ils se défendaient en même
27 temps de la campagne aérienne de l'OTAN.
28 Compte tenu de la totalité des éléments de preuve montrés aux Juges de la
Page 414
1 Chambre, il est clair qu'un Juge raisonnable des faits doit forcément tirer
2 ce type de conclusion-là. L'Accusation aurait dû démontrer au-delà de tout
3 doute raisonnable que les omissions du général Lazarevic, telles
4 qu'énoncées, auraient eu pour objectif d'apporter une aide pratique à des
5 auteurs de crimes et que ces agissements auraient de façon considérable
6 contribué à la perpétration de crimes. Mais lorsque ce type de conclusion
7 se base de sur des éléments de preuve indirects, la seule conclusion à
8 tirer serait autre. Il est évident que les éléments de preuve que nous
9 avons cités et bon nombre de preuves que nous avons citées dans notre
10 mémoire en appel ne fournissent en aucune façon à la Chambre d'appel la
11 possibilité de tirer la conclusion qui aurait été celle de dire que le
12 général Lazarevic aurait eu pour actus reus ce type de comportement et ces
13 omissions. L'explication raisonnable du comportement de Lazarevic est
14 celle-ci : il a entrepris des mesures légales et prescrites par la
15 constitution pour conduire la guerre et défendre son pays, et non pas pour
16 ce qui est d'une perpétration de crimes quelle qu'elle soit.
17 A la lumière de la pratique la plus récente en date, la Défense
18 estime que dans ce cas concret il faudrait qu'il y ait de mis en œuvre un
19 principe d'objectif spécifique de poursuivi, parce que tout le territoire
20 du Kosovo-Metohija ne pouvait pas être pris en considération comme un seul
21 et unique lieu de perpétration de crimes, notamment si l'on ne perd pas de
22 vue les circonstances spécifiques du bombardement quotidien de grande
23 envergure réalisé en ce temps-là par l'OTAN et les attaques lancées au
24 quotidien par l'ALK contre les unités de l'armée de Yougoslavie et du MUP.
25 Dans ce type de circonstances, il convenait donc de déterminer si le
26 général Lazarevic avait pu être présent à tout site concret où il y a eu
27 des crimes de commis. Si le général Lazarevic avait réagi à chaque fois
28 qu'il avait eu connaissance d'un crime de commis, ça, c'est une chose qui
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1 est démontrée par les exemples qui suivent : 5D379, c'est une demande
2 formulée par le général Lazarevic en date du 26 avril 1999 où il a demandé
3 à ses supérieurs d'envoyer au Kosovo d'urgence une équipe ou alors un
4 pathologiste pour exhumer des cadavres parce qu'il y a eu des allégations
5 disant que des membres de l'armée de Yougoslavie avaient été impliqués dans
6 des meurtres commis à Mali Alas et à Slovinje. Si vous vous penchez sur la
7 pièce 5D383, vous pourrez voir que le jour d'après l'académie médical
8 militaire a envoyé le Dr Ivica Milosavljevic pour aider à enquêter au sujet
9 de ces crimes.
10 Ce qui est particulièrement intéressant - et je vais demander aux
11 Juges de la Chambre de prêter une attention toute particulière à la pièce
12 5D383 - où l'on indique qu'un expert pathologiste, c'est-à-dire un médecin
13 pathologiste de l'armée, procéderait à des exhumations sur le territoire
14 entier couvert par le Corps de Pristina tant que nécessité il y aurait de
15 le faire. Ceci n'est donc pas un appel pour élucider un acte concret. Ceci
16 est une invitation qui dit que ce pathologiste devrait rester au Kosovo
17 pour se pencher sur le territoire entier du Kosovo et rester là-bas autant
18 de temps qu'il le faudra.
19 Au bout de quelques jours, ou plus exactement début mai, je tiens à
20 préciser -- excusez-moi, Madame, Messieurs les Juges, je voudrais attirer
21 l'attention sur le 5D1315. C'est précisément un rapport de médecine légale
22 du Dr Milosavljevic pour ce qui est du travail effectué par lui à Mali Alas
23 et Slovinje. Ce rapport montre, premièrement, que cette convocation n'est
24 pas restée lettre morte sur papier.
25 Ce n'est pas seulement une convocation qui était censée permettre au
26 général Lazarevic de dire j'ai écrit quelque chose. Cette convocation était
27 réelle, elle était sincère. Elle a été envoyée dans l'intention de faire en
28 sorte que la totalité des crimes fassent l'objet d'enquête et que des
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1 auteurs éventuels dans les rangs de l'armée de Yougoslavie soient punis. Le
2 5D1315, relatif aux exhumations et à l'analyse des cadavres récupérés suite
3 à exhumation, montre qu'enquête il y a eue. Et ce 5D1315 montre aussi qu'au
4 bout d'un certain nombre d'années, c'est précisément sur la base de ces
5 éléments de preuve à l'origine desquels se trouvait le général Lazarevic,
6 que la MINUK a pu conduire ses propres enquêtes au sujet des crimes commis
7 sur ces sites-là. J'attire votre attention à présent sur la pièce 5D421,
8 qui permet de voir que tout de suite après, c'est-à-dire le 8 mai 1999, le
9 général Lazarevic a une fois de plus envoyé une lettre à son commandement
10 supérieur pour demander à ce que l'on envoie encore deux équipes de
11 pathologistes et d'experts en médecine légale pour procéder à des enquêtes
12 complémentaires. Et je vous demande de vous pencher sur ce document, sur
13 notamment la partie où le général Lazarevic dit que tous ces pathologistes
14 vont effectuer leur travail suite aux ordres et instructions donnés par le
15 tribunal militaire. On peut voir donc que toute ingérence de sa part au-
16 delà de ceci s'arrête.
17 Par conséquent, compte tenu de la situation telle qu'elle se
18 présente, compte tenu d'éléments de preuve clairs qui montrent qu'à chaque
19 fois qu'il a eu vent de la perpétration de crimes le général Lazarevic a
20 entrepris des mesures adéquates, des mesures appropriées qui étaient les
21 seules mesures qu'il était à même d'entreprendre. Il est donc tout à fait
22 clair que compte tenu des circonstances spécifiques de temps de guerre, de
23 manque d'information complète, l'impossibilité aussi de voir directement et
24 par lui-même tout ceci, il importait pour les Juges de la Chambre de
25 première instance de faire en sorte que s'agissant de chacun des sites
26 concrets d'expulsion et de transfert forcé détermine si oui ou non le
27 général Lazarevic s'était trouvé à cet endroit ou près de cet endroit ou
28 avait eu à connaître du fait que des membres de la VJ auraient commis des
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1 expulsions ou des transferts forcés. Alors, nous estimons pour toutes ces
2 raisons-ci que même dans la situation où l'on voit que le général Lazarevic
3 est le commandant du Corps de Pristina, il faut qu'il y ait cette
4 orientation ou cette responsabilité ou cette direction spécifique qui
5 aurait dû faire en sorte que le général Lazarevic ait été prouvé présent ou
6 à proximité des endroits où des membres de la VJ auraient commis des
7 expulsions et transferts forcés.
8 Et je vous rappelle la jurisprudence de ce Tribunal-ci qui dit la
9 chose suivante -- excusez-moi, mais je me dois de revenir un petit peu en
10 arrière. J'essaie de terminer mon exposé dans les délais impartis. Et je
11 voudrais attirer votre attention sur le fait que le général Bojovic, un
12 témoin de la Défense, a dit que les instances de justice militaire ont
13 tranché dans 601 cas de meurtres à 11 sites; vous avez ceci à la page du
14 compte rendu 16 687. Geza Farkas, un autre témoin de la Défense, a dit que
15 lorsqu'à l'état-major ils ont récapitulé la situation, ils ont réalisé
16 qu'au Kosovo-Metohija, à l'époque pertinente, on avait poursuivi en justice
17 les 95 % des délits au pénal où l'on avait jugé que les auteurs étaient des
18 membres de l'armée de yougoslave. J'attire votre attention sur la pièce
19 5D550 où l'on indique que la 175e Brigade, au sujet de laquelle on avait
20 affirmé qu'il n'y avait pas eu de crimes de poursuivis, il y a eu bel et
21 bien des dépôts de plaintes au pénal de déposées. Concernant le Témoin Geza
22 Farkas, la page du compte rendu pertinente est 16 304.
23 Madame, Messieurs les Juges, tous ces éléments de preuve, lorsque
24 vous les évaluerez, eh bien, je me permettrais de vous rappeler quelque
25 chose que vous savez pertinemment. La jurisprudence de ce Tribunal affirme
26 que la simple présence sur les lieux du crime ne présuppose pas en soi une
27 aide ou un encouragement à la commission au crime à moins que l'on n'arrive
28 à établir que la présence de cette personne n'ait pu contribuer de façon
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1 significative à rendre plus légitime ou à encourager les auteurs principaux
2 dans leur action. C'est là le paragraphe 402 du jugement en première
3 instance contre Boskovski et Tarculovski. Donc, j'estime qu'il est
4 absolument nécessaire en l'espèce d'établir ce caractère de visant
5 spécifiquement à pour le général Lazarevic en matière d'aide et
6 d'encouragement.
7 Je souhaite également attirer votre attention sur la conclusion de la
8 Chambre d'appel dans l'affaire Perisic qui conclut que le simple fait
9 d'apporter une aide à caractère général, qui peut être utilisée pour mener
10 des activités tant légales qu'illégales ne saurait être considéré comme
11 suffisant pour démontrer la participation aux crimes commis par des auteurs
12 directs.
13 Il est indispensable en la matière d'établir un lien entre la
14 personne qui fournit une aide et l'auteur matériel du crime, un lien
15 direct. C'est pourquoi ceci nous fait entièrement défaut pour ce qui est de
16 l'élément matériel pour le général Lazarevic dans les conclusions de la
17 Chambre de première instance. Ceci figure au paragraphe numéro 44 de
18 l'arrêt dans l'affaire Perisic.
19 Dans le dossier de l'espèce, nous ne trouvons absolument aucun
20 élément de preuve permettant d'établir un lien direct avec le général
21 Lazarevic au sens que je viens d'indiquer. Au contraire, dans l'arrêt
22 Perisic, on met en avant également le fait que les éléments de preuve
23 indiquant une connaissance de la commission de crime n'est pas suffisant
24 pour établir le caractère de visant spécifiquement à au titre de l'élément
25 matériel, et ce, de façon distincte de l'élément moral. Ceci figure au
26 paragraphe 68 de ce même arrêt.
27 Madame et Messieurs les Juges, je vois la remarque des interprètes. Nous
28 fournirons le texte original.
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1 Avec votre permission, je souhaiterais maintenant passer à la partie qui
2 concerne les questions suivantes, à savoir a-t-on rempli les critères
3 requis pour établir l'élément moral de l'aide et d'encouragement dans les
4 actions de Vladimir Lazarevic. Il serait peut-être opportun à ce stade que
5 j'essaie de répondre peut-être à la question soulevée par la Chambre
6 d'appel, à savoir la question de savoir si l'élément matériel et l'élément
7 moral au titre de l'aide et de l'encouragement en tant que participation à
8 une entreprise criminelle commune peuvent être établies avant l'existence
9 de l'objectif de l'entreprise criminelle commune. Nous estimons que cela
10 n'est pas possible.
11 De mon humble avis, en tant que représentant de la Défense, est que
12 si l'objectif de l'entreprise criminelle commune n'existe pas, l'accusé
13 n'est absolument pas en position d'apporter une aide ou un encouragement à
14 la commission des crimes sous-jacents à cette entreprise criminelle
15 commune. Avant la mise en place de cet objectif commun à l'entreprise
16 criminelle commune, il n'est pas possible de réaliser l'élément matériel ni
17 l'élément moral. Celui qui apporte une aide ou un encouragement doit être
18 au courant de l'existence d'un crime et doit également savoir que ses actes
19 contribuent de façon significative à la commission du ou des crimes. Mais
20 celui qui aide ou qui encourage n'accepte pas le but éventuel de
21 l'entreprise criminelle comme étant le sien; ce que j'affirme en l'espèce,
22 c'est qu'il ignore son existence et ne partage pas d'intention commune avec
23 les autres participants à l'entreprise criminelle commune. C'est pourquoi
24 j'estime que ni l'élément moral ni l'élément matériel ne peuvent être
25 établis en l'espèce pour des expulsions ou des transferts forcés avant le
26 début de la réalisation de ce plan.
27 Si vous estimez que c'est suffisant, je vais poursuivre. Merci.
28 La Chambre de première instance a conclu de façon erronée à
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1 l'existence de l'élément matériel de l'appelant pour expulsion et transfert
2 forcé de civils albanais au motif qu'il aurait été au courant de crimes
3 commis par des membres de la VJ en coordination avec le MUP et qu'il aurait
4 été au courant du fait que son comportement aurait aidé à la commission de
5 ces crimes. Paragraphe 927 du jugement.
6 Avant de m'aventurer dans l'examen des éléments de preuve qui, au
7 contraire, nous montre au-delà de tout doute raisonnable que le général
8 Lazarevic n'était pas au courant de la commission de ces crimes, qu'il
9 ignorait tout d'une éventuelle forme d'aide apportée par son comportement à
10 la commission de ces crimes, nous souhaitons dire qu'en l'espèce, dans ce
11 cas concret et compte tendu des spécificités de l'espèce, il est, selon
12 nous, indispensable d'appliquer des critères qui sont reconnus par
13 l'article 25, alinéa (3)(C) du Statut de Rome, appuyé par une majorité
14 d'états. Pourquoi est-ce que je fais mention de ces spécificités de
15 l'espèce ? Eh bien, la campagne aérienne de l'OTAN, simultanée à la
16 campagne d'expulsion et de transfert forcé allégués montre, comme tous les
17 éléments de preuve cités précédemment, qu'il est indispensable pour évaluer
18 les éléments de preuve de tenir compte de ces circonstances. Ceci, selon
19 nous, n'a pas été fait à un degré suffisant. La Défense estime que la
20 Chambre de première instance avait l'obligation d'établir que l'appelant a
21 agi dans le but de rendre possible la commission des crimes, puisque la
22 simple connaissance n'est pas, en la matière, suffisante.
23 D'autre part, même si l'on ne devait pas accepter notre position,
24 nous estimons que l'accusé doit avoir la connaissance que ces actes ou son
25 omission vont venir en aide aux auteurs principaux des crimes. Il doit
26 savoir que certains de ces crimes vont être commis, et c'est malgré tout,
27 là, une exigence qui est supérieure à celle consistant à dire qu'il avait
28 des raisons de savoir. La Défense sait par ailleurs que tout soldat
Page 422
1 professionnel, tout militaire de métier et même tout laïc sait pertinemment
2 que dans toute guerre il y a des risques de voir commettre des crimes
3 contre des civils, crimes que l'on ne pourra pas empêcher et qui sera le
4 fait d'individus. La Défense considère qu'à partir du moment où la campagne
5 de l'OTAN a été lancée, la Chambre de première instance avait l'obligation
6 d'établir au-delà de tout doute raisonnable un lien avec l'accusé. Même si
7 certaines informations portant sur les expulsions et les transferts forcés
8 émanant de la VJ étaient de notoriété publique et avaient été diffusés
9 largement, ceci ne vient pas étayer une présomption quant à la connaissance
10 qu'avait l'accusé en l'espèce, le général Lazarevic.
11 La Chambre de première instance a commis une erreur en établissant
12 que le général Lazarevic par la connaissance qu'il avait des événements
13 aurait apporté une aide à la campagne de transfert forcé de la population
14 albanaise. La Défense n'a pas réussi à déterminer quel était cet élément de
15 preuve au moyen duquel la Chambre de première instance aurait établi cela
16 et qui aurait permis de démontrer au-delà de tout doute raisonnable que le
17 général Lazarevic savait que par son comportement il apportait son concours
18 à cette campagne de transfert forcé. Et même si le général Lazarevic savait
19 que les Albanais du Kosovo quittaient la province, il n'existe pas
20 d'éléments de preuve démontrant au-delà de tout doute raisonnable que
21 Lazarevic aurait été au courant du fait que cela aurait été le résultat de
22 contraintes exercées par ses subordonnés. Il existe encore moins des
23 éléments de preuve montrant au-delà de tout doute raisonnable que Lazarevic
24 ait su que son comportement était une forme de concours apporté à la
25 campagne d'expulsions et de transferts forcés. Par ailleurs, Madame et
26 Messieurs les Juges, vous pourrez vous convaincre qu'une grande majorité de
27 Serbes ont, eux aussi, quitté la province dès les premiers jours du
28 bombardement de l'OTAN.
Page 423
1 Madame et Messieurs les Juges, je ne sais pas si c'est déjà le moment
2 de faire une pause d'après le calendrier que vous avez fixé ?
3 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, je crois que c'est le cas.
4 Nous allons faire une pause de 30 minutes, et nous reprendrons à 11 heures
5 45.
6 --- L'audience est suspendue à 11 heures 13.
7 --- L'audience est reprise à 11 heures 46.
8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Oui, Maître Bakrac, veuillez
9 poursuivre.
10 M. BAKRAC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
11 Avant de prendre la pause, Madame et Messieurs les Juges, j'ai donné mon
12 humble opinion concernant l'élément moral du général Lazarevic en l'espèce.
13 Dans un effort visant à appuyer ce que j'affirme, je souhaiterais attirer
14 votre attention sur la constatation de la Chambre de première instance
15 figurant au paragraphe 906 du Volume III du jugement, où il est indiqué --
16 en fait, paragraphes 901 à 906 de ce Volume III, c'est là que nous trouvons
17 la conclusion. Il y est question des mesures prises par le général
18 Lazarevic concernant les civils. La Défense souligne que selon elle, la
19 conclusion de la Chambre de première instance au paragraphe 906 où il est
20 indiqué que Lazarevic a pris des mesures aux fins d'apporter de l'aide à la
21 population civile, mais que les mesures prises montrent en fait qu'il était
22 au courant du déplacement de masse des Albanais du Kosovo par la VJ d'une
23 part, mais que d'autre part ces ordres montrent également que Lazarevic a
24 essayé de mettre en œuvre cela de façon non violente.
25 Alors, Madame et Messieurs les Juges, à cause du temps limité dont je
26 dispose, je vais attirer votre attention sur certains de ces ordres. Donc
27 la pièce P2029, ordre du 1er avril 1999, c'est-à-dire six jours après les
28 bombardements. Il est ordonné de prendre des mesures aux fins de prévenir
Page 424
1 le pillage, le vol et d'autres crimes. Donc il est manifeste que dès le
2 début des bombardements, le général Lazarevic, en sa qualité d'officier
3 expérimenté, émet des ordres par lesquels il souhaite agir de façon
4 préventive, prévenir les crimes. Il demande que l'on protège les civils
5 contre toute forme de vol et autres actes illégaux. C'est là quelque chose
6 de tout à fait compréhensible et qui, selon notre défense, ne signifie pas
7 que le général Lazarevic sait que de telles choses se produisent, et encore
8 moins qu'elles se produisent de façon systématique et organisée. Ce que
9 cela signifie, c'est qu'on a là affaire à une possibilité, une simple
10 possibilité en situation de guerre lorsque des bombes de l'OTAN détruisent
11 les logements, les locaux des citoyens, et cetera.
12 Autre ordre, la pièce P1306, il s'agit d'un ordre qui, justement, s'oppose
13 directement - et de façon très claire - à la position prise par la Chambre
14 de première instance au paragraphe 906. Si vous vous reportez à cet ordre
15 du 16 avril 1999, pièce P1306, vous verrez en en-tête que le général
16 Lazarevic dit ce qui suit :
17 "Les forces de l'OTAN et les autres forces terroristes siptar, y compris en
18 utilisant des forces aériennes, soumettent quotidiennement la population
19 civile à des attaques, ce par quoi la sécurité de cette population civile
20 est menacée au plus haut degré. Afin de protéger la population civile,
21 j'ordonne…," et cetera.
22 Et il ordonne ensuite qu'au sein de toutes les unités du corps,
23 indépendamment du lieu - puisque la Chambre de première instance affirme
24 que les ordres sont liés aux localités où il y a eu expulsion - eh bien,
25 nous voyons ici qu'il ordonne que toutes les unités du corps affectent des
26 éléments qui seront retirés de leurs affectations de guerre pour être
27 chargés uniquement de la protection de la population civile.
28 Donc, ici, on voit quel est le sens des ordres émis par le général
Page 425
1 Lazarevic. Il perçoit et comprend les mouvements de la population civile
2 comme étant le résultat des frappes aériennes et des attaques de groupes
3 terroristes. Je vous prie également de vous reporter à la P -- la pièce
4 5D201, datée du 1er avril 1999. Excusez-moi, Madame et Messieurs les Juges,
5 l'erreur est la mienne. 5D201, datée du 19 avril 1999. Egalement dans la
6 partie introductive ou l'en-tête, on retrouve "signé en personne par le
7 général Lazarevic." Et je cite :
8 Etant donné que du fait des frappes aériennes de l'OTAN on a observé des
9 mouvements très importants de population civile dans la zone de
10 responsabilité du Corps de Pristina, j'ordonne…. Donc, dès l'en-tête, dès
11 l'introduction de cet ordre, on trouve exposée la raison pour laquelle cet
12 ordre est donné. On a observé des mouvements importants de population
13 civile. A chaque fois qu'il est possible de procéder de façon à protéger la
14 population civile en question, à chaque fois qu'il est possible d'empêcher
15 de tels mouvements et débordements de population civile, le général
16 Lazarevic indique ce qu'il convient de faire. Il indique également ce qu'il
17 considère être comme la raison de ces déplacements, il parle des frappes
18 aériennes intenses. Il exige de ses collaborateurs qu'ils trouvent des
19 lieux et qu'ils trouvent des moyens et qu'ils détachent certains de leurs
20 effectifs afin d'assurer cette protection des civils et, comme il le dit,
21 dans le but d'empêcher la poursuite de tels mouvements et débordements de
22 population civile. Le général Lazarevic, donc, ordonne ici, en réalité, que
23 l'on empêche toute forme d'expulsion de la population civile.
24 Dans la pièce 5D372 également, le général Lazarevic, à la date du 22 avril
25 1999, c'est-à-dire presque un mois après le début des frappes aériennes,
26 sait déjà, comme nous l'avons indiqué, que suite aux frappes aériennes et
27 aux attaques de l'ALK, il y a eu déplacement très important de la
28 population civile. Et il dit :
Page 426
1 "Accélérer le retour des civils qui reviennent dans les villages et les
2 villes d'où ils sont partis. Ne pas permettre que dans les zones de défense
3 des brigades il y ait regroupement de population civile. Assurer aux civils
4 en question un retour en toute sécurité vers les lieux qu'ils ont quittés."
5 C'est donc un ordre explicite montrant que le général Lazarevic exige de
6 ses subordonnés que tous ceux qui, suite aux frappes aériennes de l'OTAN et
7 aux attaques de l'ALK, ont quitté leurs foyers puissent revenir dans leurs
8 foyers. Alors, est-ce que ceci est un motif suffisant pour considérer que
9 le général Lazarevic est au courant des expulsions et des transferts forcés
10 et qu'il apporte une contribution significative à la réalisation et à la
11 commission de tels actes ?
12 Je vous prie également de vous reporter à la pièce 5D374. Le 23 avril 1999,
13 donc le lendemain de l'ordre que nous venons d'examiner, le général
14 Lazarevic, au point numéro 3, ordonne :
15 "L'hébergement et la sécurisation de la population civile en conformité
16 avec les ordres déjà émis par le commandement du Corps de Pristina.
17 Héberger la population dans des lotissements, en assurer la sécurité.
18 Empêcher tout acte arbitraire notamment de la part des structures de
19 commandement placées plus bas dans la chaîne de commandement concernant
20 cette population civile."
21 C'est la pièce 5D374. Et ceux qui sont chargés de cela sont les commandants
22 de cette brigade.
23 Alors, nous avons de nombreux éléments de preuve qui vont en ce sens,
24 Madame et Messieurs les Juges. Il n'est pas nécessaire de revenir sur ces
25 éléments. Nous n'avons souhaité attirer votre attention que sur certains
26 d'entre eux. Dans notre mémoire en appel, vous trouverez des références
27 complètes, et plus important encore, vous y trouverez des rapports sur la
28 base desquels on voit clairement que les unités subordonnées rendaient
Page 427
1 compte au général Lazarevic concernant les mesures prises. Ceci prouve
2 encore une fois que ces ordres ne sont pas restés lettre morte mais qu'ils
3 ont été le résultat d'un effort entrepris en situation de guerre aux fins
4 de protéger la population civile, et que c'était bien là le souhait réel et
5 l'intention réelle du général Lazarevic.
6 Madame et Messieurs les Juges, je crois que je bénéficie encore de quatre
7 ou cinq minutes. Je voudrais vous demander de pouvoir maintenant passer à
8 la troisième question que vous avez posée, si je peux me permettre. La
9 question était la suivante : examiner si et dans quelles circonstances
10 l'élément moral des crimes d'expulsion et autres actes inhumains, à savoir
11 transfert forcé, peut être déduit de la connaissance qu'avait l'accusé des
12 crimes commis en 1998, y compris des crimes autres que l'expulsion et le
13 transfert forcé.
14 Alors, Madame et Messieurs les Juges, la Défense souligne que dans son
15 mémoire en appel elle a déjà pris position concernant la connaissance
16 qu'avait le général Lazarevic des crimes que les unités de la VJ avaient
17 commis en 1998. Nous avons également cité de nombreux exemples à l'appui
18 montrant qu'il y avait différents points de vue, différentes perceptions du
19 comportement de la VJ, notamment de la part des différents observateurs
20 internationaux, de la KDOM ou de la MVK. Ce qui est crucial, à notre sens,
21 c'est qu'entre les crimes allégués commis en 1998 et les crimes allégués
22 comme ayant été commis en 1999, il n'y a pas d'identification possible en
23 substance, donc entre les crimes de 1998 et ceux de 1999. En raison de
24 cette impossibilité de les considérer comme équivalents, de les assimiler
25 les uns aux autres, la connaissance éventuelle que quelqu'un pouvait avoir
26 des crimes de 1998 n'a, selon nous, aucune influence substantielle sur
27 l'élément moral des crimes d'expulsion et de transfert forcé, ni sur l'aide
28 et l'encouragement à de tels crimes.
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1 A notre sens, nous avons eu l'occasion d'entendre en l'espèce toute une
2 série d'éléments mais nous n'avons pas eu la possibilité de verser des
3 éléments de preuve concernant les activités de la VJ en août et septembre
4 1998, activités contrant celles de l'ALK. Après les accords d'octobre, les
5 observateurs étrangers sont arrivés. Et jusqu'à ce stade, il n'y a pas eu
6 d'activités de combat. Il y a eu, tout au plus, des incidents sporadiques,
7 peut-être un ou deux.
8 Nous estimons, quant à nous, qu'il y a eu une interruption fondamentale
9 dans l'enchaînement des événements, une pause en quelque sorte.
10 Selon notre humble avis, l'existence de facteurs qui interrompent
11 l'enchaînement des événements appuie la conclusion selon laquelle
12 l'enchaînement des causes et des effets s'interrompt elle aussi. Si la
13 notion de viser spécifiquement à est comprise dans la conclusion portant
14 sur l'aide conséquente à apporter par l'accusé, alors il y a une obligation
15 incombant à l'Accusation de démontrer au-delà de tout doute raisonnable un
16 lien entre le comportement de l'accusé et les crimes. En raison de
17 l'interruption de cet enchaînement des événements, il est impossible de
18 tirer cette conclusion selon laquelle l'élément moral de l'aide et
19 l'encouragement aux crimes d'expulsion et de transfert forcé pourrait être
20 déduit de la connaissance qu'avait l'accusé des crimes en 1998. En 1998, on
21 allègue qu'il y a eu recours excessif à la force, alors qu'en 1999, ce en
22 présence de quoi nous étions, c'étaient des déplacés internes. Il n'y a eu
23 ni expulsion ni transfert forcé. Nous parlons des déplacés internes dans
24 notre mémoire en appel. Nous y consacrons une partie toute entière de notre
25 de notre mémoire en appel.
26 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Eh bien, j'aimerais demander des
27 éclaircissements. Au compte rendu, page 42, ligne 17, il est dit que : "En
28 substance, c'est identique." Mais je me demande si c'est pas "non
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1 identique" qu'il fallait entendre ?
2 M. BAKRAC : [interprétation] Non, il n'y a pas d'identité. Ce n'est pas
3 identique. C'est ce que j'avais dit.
4 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci. Je pense que votre temps est
5 révolu, mais je vais vous accorder encore une minute pour que vous puissiez
6 terminer votre exposé.
7 M. BAKRAC : [interprétation] Grand merci, Monsieur le Président. Je ne suis
8 pas un meilleur avocat que M. Ackerman, c'est certain, mais je suis un
9 mauvais estimateur du temps nécessaire. Je vais vous demander pour cette
10 raison de m'accorder cette minute, justement, pour que je puisse dire que
11 les conseils de la Défense sont convaincus du fait que dans cette multitude
12 d'éléments de preuve que nous avons proposés à votre attention, vous
13 constaterez qu'il y a eu erreur des Juges de la Chambre de première
14 instance pour ce qui est de la détermination des faits qui ont fait qu'il y
15 a eu erreur de mise en œuvre du droit applicable. Et je suis convaincu que
16 vous n'allez pas manquer de le faire, ce qui fait que le général Lazarevic
17 trouvera prononcé de justice. Grand merci de votre attention.
18 M. LE JUGE LIU : [interprétation] C'est moi qui vous remercie.
19 Il me semble que les Juges de la Chambre n'ont pas de questions à poser
20 pour leur part. Nous allons à présent entendre ce que l'Accusation a à nous
21 dire en réplique.
22 M. MARCUSSEN : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, merci.
23 Madame, Messieurs les Juges, le général Lazarevic a été l'une des chevilles
24 ouvrières les plus importantes pour la mise en œuvre de l'objectif criminel
25 commun. En tant que commandant tactique le plus haut gradé des forces de la
26 VJ au Kosovo, le général Lazarevic a apporté son soutien et son assistance
27 qui étaient requis pour planifier les opérations conjointes de la VJ et du
28 MUP et pour déployer les soldats de la VJ et le matériel sur le terrain.
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1 Lazarevic a agi avec Pavkovic, le commandant de la 3e Armée, ainsi qu'avec
2 d'autres pour planifier et coordonner les opérations conjointes par le
3 biais desquelles la campagne des expulsions forcées a été déclenchée. Dans
4 le cadre de ce plan et au vu des ordres du commandement conjoint du général
5 Lazarevic, les troupes de la VJ ont utilisé les armes et les ressources de
6 la VJ et ont systématiquement et brutalement expulsé plus de 700 000
7 Albanais du Kosovo de leurs foyers pour les envoyer de l'autre côté de la
8 frontière en Albanie en un peu plus de trois mois. Alors que la campagne de
9 terreur gagnait du terrain, les soldats du général Lazarevic présentaient
10 des rapports et des comptes rendus en utilisant la chaîne de commandement,
11 rapports suivant lesquels les opérations s'étaient déroulées conformément
12 au plan et lui-même présentait des rapports au général Pavkovic au sein de
13 la 3e Armée.
14 Malgré sa participation personnelle et sa longue participation aux
15 opérations qui ont visé la population albanaise du Kosovo, la Chambre de
16 première instance a prononcé une déclaration de culpabilité extrêmement
17 circonspecte pour le général Lazarevic pour avoir aidé et encouragé le
18 déplacement forcé par ses forces de la VJ, et pour ce faire, la Chambre de
19 première instance a étudié par le menu et de façon extrêmement détaillée la
20 globalité des éléments de preuve. Le général Lazarevic n'a détecté aucune
21 erreur dans ces conclusions extrêmement circonspectes et son appel devrait
22 être rejeté.
23 Et je devrais, pour être clair, vous dire dans un premier temps que nous
24 allons vous expliquer le point de vue de l'Accusation par rapport à
25 certaines des conclusions de la Chambre qui, en fait, ont été beaucoup trop
26 circonspectes, et nous reviendrons là-dessus vendredi.
27 Pour vous donner une idée, je vais vous donner le plan que nous allons
28 utiliser. Dans un premier temps, je vous expliquerai pourquoi la peine du
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1 général Lazarevic devrait être rejetée; deuxièmement, je répondrai aux
2 questions que vous nous avez posées, que nous avons étiquetées ou appelées
3 questions cinq, six et sept; et puis ensuite j'aborderai des questions
4 émanant du dernier arrêt dans l'affaire Perisic. Et je pense que je
5 parlerai pendant une heure et demie, ce qui fait que vous aurez la
6 possibilité de me poser des questions.
7 Dans un premier temps, pourquoi rejeter l'appel du général Lazarevic. Parce
8 que je vous dirais tout simplement que pour présenter l'essentiel de son
9 appel, le général Lazarevic s'est contenté de procéder à un copier-coller
10 de son mémoire en clôture. Son appel en fait n'est ni plus ni moins que le
11 fait qu'il marque son désaccord avec les évaluations qui ont été faites des
12 éléments de preuve, son désaccord par rapport à l'évaluation de la Chambre
13 de première instance. Il n'a indiqué aucune erreur dans le jugement. Il n'a
14 pas montré le caractère déraisonnable du jugement, et pourquoi il a
15 entraîné une erreur judiciaire. Il n'a pas indiqué comment il avait
16 respecté le critère d'examen, ce qui fait que les arguments du général
17 Lazarevic peuvent se scinder dans un certain nombre de catégories que nous
18 avons étudiés dans notre mémoire en clôture.
19 Je ne vais pas aborder ces détails, mais j'aimerais indiquer que les
20 références qui ont été faites aux conclusions de la Chambre de première
21 instance doivent être véritablement prises en considération. A la page 6,
22 par exemple, il est question des événements de Srbica. Il est indiqué que
23 les éléments de preuve ainsi que les conclusions dans le jugement sont --
24 il a été indiqué en fait qu'il y avait toute une gamme de rapports à
25 décharge, mais les événements qui font l'objet de discussions dans le
26 jugement se sont déroulés en mars. Si vous prenez les pièces auxquelles la
27 Défense a fait référence, il s'agit des rapports du mois de mai, ou plutôt
28 il s'agit de rapports qui vont du 20 avril aux 3, 5 et 16 mai. Donc, ça n'a
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1 absolument aucune incidence sur les conclusions de la Chambre de première
2 instance à propos de ce qui s'est passé au mois de mars.
3 Il y a également d'autres conclusions de la Chambre de première
4 instance qui ont été évoquées ici aujourd'hui. A la page 38 du compte rendu
5 d'audience, il est question du paragraphe 906 du jugement. Il a été indiqué
6 que la Chambre de première instance avait conclu que le général Lazarevic
7 n'avait absolument pas l'intention de déplacer les civils, et cela a été
8 avancé comme s'il s'agissait de la conclusion de ce paragraphe, ce qui
9 n'est pas le cas. Car dans le paragraphe il est indiqué qu'il avait eu
10 certes cette intention, mais qu'il y avait également des éléments de preuve
11 présentés et qui indiquaient qu'il avait essayé de déployer des efforts
12 pour que cela soit fait de façon non violente, ce qui est tout à fait
13 différent. Les conclusions donc, ou la conclusion était qu'il avait bel et
14 bien l'intention de déplacer ces personnes, comme nous le savons d'après le
15 jugement, mais il n'y a pas eu suffisamment d'éléments de preuve pour
16 prononcer une déclaration de culpabilité pour les autres crimes. Nous
17 reviendrons là-dessus vendredi.
18 Nous avançons également ce que nous avons déjà avancé dans notre
19 réplique, à savoir que la peine du général Lazarevic devrait tout
20 simplement être renvoyée sans examen sur la base de la jurisprudence
21 constante de la Chambre d'appel dans les affaires Krajisnik, Martic,
22 Strugar et Brdjanin.
23 Ce qui m'amène à répondre à votre cinquième question, où il nous a
24 été demandé en fait si les conclusions de la Chambre de première instance
25 relatives à la contribution de Lazarevic pour ce qui est de la commission
26 des crimes d'expulsion et d'autres actes inhumains, étant donné qu'il n'a
27 pas pris des mesures adéquates, peuvent constituer une complicité pour
28 avoir aidé et encouragé, une complicité par omission.
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1 En fait, ce que nous avançons, c'est qu'il n'est pas nécessaire que
2 la Chambre d'appel détermine que ce devoir est imposé par le droit interne
3 seulement. Le devoir d'un commandant consiste à prévenir ou à punir toute
4 violation du droit humanitaire international lorsque ces violations étaient
5 commises par ses subordonnées, et c'est l'une des obligations les plus
6 fondamentales imposées par le droit et les coutumes de guerre. L'étude du
7 CICR sur le droit humanitaire international coutumier a fait référence à
8 une règle longuement établie, une règle du droit international coutumier,
9 règle 153 ou étude de la règle 153.
10 Ce devoir est pris en considération dans les dispositions du
11 protocole additionnel, du premier protocole additionnel, articles 86 et 87,
12 et a été utilisé comme fondement pour condamner les commandants à la suite
13 de la Seconde Guerre mondiale. Il s'agissait en fait de l'affaire
14 Yamashita, et l'affaire du haut commandement, et cela a été également
15 reconnu dans la jurisprudence du TPIY comme un devoir international, ce qui
16 fait qu'une responsabilité criminelle pénale, conformément à l'article
17 7(1), peut être prise en considération pour infraction. J'en veux pour
18 preuve les paragraphes 663 et 664 de l'arrêt dans l'affaire Blaskic.
19 Donc, la complicité par omission se fondant sur un manquement au
20 devoir et aux obligations n'est absolument pas remise en question. Cela a
21 été établi aux paragraphes 151 de l'appel dans l'affaire Mrksic.
22 La Chambre de première instance a reconnu que les obligations et le
23 devoir d'un commandant, lorsqu'il s'agit de prévenir ou de punir des crimes
24 commis par ses subordonnés, sont pris en compte et pris en considération
25 par la responsabilité au titre de l'article 7(1), Volume 1, paragraphe 90,
26 et Volume III, paragraphe 622. Qui plus est, à propos de l'article 7(3), la
27 Chambre a déclaré que :
28 "Le devoir en droit international, l'obligation de prévenir et celle
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1 de punir entraînent des responsabilités distinctes, et le manquement à
2 l'une ou à l'autre peut donner lieu à une accusation distincte."
3 Et cela fait l'objet du paragraphe 116, Volume I de l'arrêt dans l'affaire
4 Hadzihasanovic, paragraphe 259, et paragraphe 83 de l'arrêt Blaskic.
5 Alors, il faut savoir que la Chambre de première instance a analysé
6 les lois et réglementations de la justice militaire nationale. Cela, en
7 fait, il s'agit d'éléments de preuve pertinents pour ce qui est de la
8 capacité matérielle du général Lazarevic à agir, et pour ce qui est des
9 types de mesures qu'il pouvait prendre afin de prévenir et de punir des
10 crimes commis par ses subordonnés. Paragraphe 518 à 523 du premier volume.
11 Ces législations nationales ont été intégrées dans les devoirs et ont été
12 assimilées aux devoirs des commandants conformément au droit international.
13 Maintenant pour aborder la sixième question qui a été posée aux
14 parties. Il s'agit de savoir si les conclusions de la Chambre de première
15 instance eu égard à l'actus reus et à la mens rea pour avoir aidé et
16 encouragé et s'inscrivant dans le cadre de l'entreprise criminelle commune,
17 si cela doit être satisfait avant l'existence de l'objectif commun de
18 l'entreprise criminelle commune.
19 Je vous dirais qu'en droit, le cadre temporel de l'existence de
20 l'objectif commun en l'espèce n'a absolument rien à voir avec la
21 déclaration de culpabilité du général Lazarevic pour avoir aidé et
22 encouragé. Car la personne qui aide et encourage doit apporter sa
23 contribution à la commission du crime, et non pas à l'entreprise criminelle
24 commune. Paragraphe 91 de l'arrêt dans l'affaire Kvocka.
25 Il a été établi par la jurisprudence que la complicité pour aide et
26 encouragement peut avoir lieu avant, pendant, et après qu'un crime soit
27 commis. Et j'aimerais, en fait, vous renvoyer à l'arrêt dans l'affaire
28 Nahimana, au paragraphe 482; dans les arrêts Blagojevic et Jokic; au
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1 paragraphe 85 de l'arrêt Simic; et au paragraphe 48 de l'arrêt Blaskic.
2 Pour ce qui est de notre affaire, les crimes de déplacement forcé ont
3 été commis entre les mois de mars et de juin 1999, tel que cela est énoncé
4 par le menu dans le premier tome du jugement. Les crimes ont été commis à
5 la fois par les membres de l'entreprise criminelle commune, mais également
6 par les auteurs physiques des crimes qui avaient l'intention d'expulser ces
7 personnes. Je vous dirais qu'à la fin de chaque chapitre s'intéressant aux
8 faits incriminés, il y a les conclusions relatives à l'intention des
9 auteurs. J'aimerais vous renvoyer aux conclusions générales qui se trouvent
10 dans le Volume III, paragraphes 92 et 95. Si vous le souhaitez, je peux
11 également vous fournir les références à tous les paragraphes du deuxième
12 volume, mais il se peut que cela ne soit pas nécessaire.
13 Toutefois, ni l'identité des auteurs, ni le fait qu'ils aient partagé une
14 intention avec quelque chose d'autre, à savoir qu'ils constituent une
15 entreprise criminelle commune, n'a de pertinence pour le crime de
16 complicité par aide et encouragement. En fait, "un défendant peut être
17 condamné pour avoir aidé et encouragé les crimes même si les auteurs
18 principaux de ce crime n'ont pas été identifiés."
19 Cela figure au paragraphe 355 de l'arrêt dans l'affaire Brdjanin et
20 au paragraphe 143 dans l'arrêt Krstic.
21 La coïncidence entre l'actus reus et la mens rea du général Lazarevic
22 s'est produite avant et pendant les expulsions en 1999. Le général
23 Lazarevic était informé des crimes de déplacement forcé, il savait que cela
24 allait probablement être commis par les forces de la VJ, et il a fourni une
25 assistance en toute connaissance de cause à la commission de ces crimes.
26 Son assistance a contribué de façon considérable au crime de déplacement
27 forcé pour lequel il a été condamné. C'est tout ce qui était requis pour
28 qu'il soit considéré responsable pour avoir aidé et encouragé. Ce qui
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1 m'amène maintenant à répondre à la question numéro 7.
2 Cette question numéro 7 étant comme suit : il s'agissait d'analyser
3 si, au vu des circonstances, la mens rea pour avoir aidé et encouragé le
4 crime d'expulsion et les autres actes inhumains peut être déduite de la
5 connaissance qu'avait l'accusé des crimes commis en 1998, et notamment de
6 crimes autres que le crime d'expulsion et d'autres actes inhumains.
7 Alors, je vous dirais en un mot comme en cent que nous répondons par
8 l'affirmative à cette question, car le général Lazarevic était informé des
9 crimes commis en 1998, et nous pensons que cela est pertinent pour
10 déterminer et établir sa mens rea pour avoir aidé et encouragé les crimes
11 qui se sont passés en 1999. Mme Monchy vous a déjà indiqué quel était le
12 fondement juridique d'une telle approche. Et, en fait, ce sont des éléments
13 de preuve qui ont été adoptés et approuvés dans de nombreux procès en
14 première instance et en appel devant ce Tribunal. En droit, je vous dirais
15 qu'il n'y a pas de circonstances précises pour lesquelles cela n'est pas
16 autorisé. Il s'agit d'une question factuelle et d'une question relative aux
17 éléments de preuve.
18 J'aimerais maintenant vous parler des faits relatifs au général Lazarevic.
19 La connaissance qu'avait le général Lazarevic des déplacements de masse,
20 des déplacements forcés en 1998 est directement pertinente pour sa
21 connaissance qu'il y avait une réelle probabilité que ces mêmes crimes
22 allaient être commis en 1999.
23 De surcroît, la nature de certains de ces crimes, tels que par exemple
24 meurtre, assassinat, incendie, et l'ampleur de ces crimes en 1998 sont
25 également pertinents pour sa connaissance qu'il existait une réelle
26 probabilité que des déplacements forcés aient lieu en 1999.
27 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à M. Marcussen d'avoir l'amabilité
28 de ralentir son rythme.
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1 M. MARCUSSEN : [interprétation] Excusez-moi une fois de plus.
2 Vous avez déjà entendu citées les nombreuses sources pour la
3 connaissance des crimes établis en 1998; mes confrères vous en ont parlé
4 cette semaine. Je vous distribuerai un peu plus tard des documents auxquels
5 je vais faire référence, et dans ce jeu de documents vous trouverez des
6 tableaux qui sont semblables à ceux que vous avez reçus hier. Mon intention
7 n'est pas d'examiner de façon détaillée ces tableaux -- ah, je vois que ces
8 documents sont en train de vous être distribués maintenant. Peu importe.
9 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je suppose que la Défense n'a pas
10 d'objection à ce que nous recevions ce jeu de documents --
11 M. BAKRAC : [interprétation] A moins que cela ne soit versé au dossier et
12 retenu comme élément de preuve.
13 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Non, bien sûr que cela ne sera pas fait.
14 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je vous remercie.
15 Madame, Messieurs les Juges, dans ce jeu de documents, vous trouverez deux
16 tableaux. Dans l'un de ces tableaux, nous indiquons quelles sont les
17 différentes sources qui permettent d'établir la connaissance que le général
18 Lazarevic avait des crimes en 1998, et dans l'autre tableau, nous indiquons
19 la liste des sources qui permettent d'établir la connaissance du général
20 Lazarevic pour les crimes de 1999. Bon, je pense qu'il y a une petite
21 coquille sur la première page du jeu de documents, mais le reste se passe
22 d'explication. Je ne vais pas entrer dans les détails aujourd'hui parce que
23 toutes ces sources ont déjà fait l'objet de moult discussions lors de
24 l'appel. Alors, bien entendu, je suis tout à fait disposé à répondre à vos
25 questions si vous en avez.
26 Mais le fait est que d'après ces sources il a été indiqué que le général
27 Lazarevic était au courant de toute cette gamme de crimes, tels que des
28 crimes de pillage, d'incendie et de meurtre et assassinat, qui ont été
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1 commis de façon répétée par la VJ et les forces du MUP contre les Albanais
2 du Kosovo en 1998. En outre, le général Lazarevic avait été informé de la
3 fuite en masse des civils à la suite des crimes et des très lourdes
4 tactiques utilisées dans le cadre des opérations conjointes de la VJ et du
5 MUP.
6 C'est conscient de tous ces éléments que le général Lazarevic est
7 devenu le commandant du Corps de Pristina en 1999. Il savait que ses forces
8 de la VJ avaient très fréquemment ou fréquemment commis des crimes violents
9 qui avaient entraîné des déplacements forcés et des déplacements de masse
10 de la part des Albanais du Kosovo pendant l'année 1998. Il savait qu'il y
11 avait une réelle probabilité que ces mêmes troupes, agissant dans le cadre
12 d'opérations semblables et conjointes avec le MUP, risquaient de continuer
13 à avoir recours aux mêmes tactiques lourdes et à cette violence extrême
14 contre la population albanaise du Kosovo et que les Albanais du Kosovo, de
15 ce fait, seraient contraints de fuir. La Chambre de première instance a
16 indiqué de façon raisonnable qu'en 1999 le général Lazarevic était "informé
17 que de semblables recours disproportionnés à la force et aux déplacements
18 forcés risquaient de se produire s'il donnait l'ordre à la VJ d'opérer au
19 Kosovo en 1999." Paragraphe 923 du Volume III.
20 Donc, si nous nous en tenons aux faits en l'espèce, le général
21 Lazarevic était informé des crimes en 1998, notamment des crimes
22 d'expulsion et de transfert forcé, et cela a une pertinence directe par
23 rapport aux mêmes crimes commis pendant l'année 1999. Toutefois,
24 l'Accusation avance que si le général Lazarevic était informé des
25 événements de l'année 1998 et savait donc que les forces de la VJ
26 risquaient probablement de commettre des crimes généralisés, notamment des
27 crimes de pillage et d'incendie de foyers et de maisons, et s'il savait que
28 cette violence extrême allait être infligée à la population civile en 1999,
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1 il savait également que la population civile allait probablement être
2 contrainte à s'enfuir pour échapper à cela. Par conséquent, sa connaissance
3 de ces crimes généralisés incluait sa connaissance de la violence et a une
4 pertinence par rapport à sa connaissance de la probabilité de déplacement
5 forcé.
6 Et en dernier lieu, j'aimerais insister sur la conclusion de la Chambre de
7 première instance à propos de cette connaissance. Ce n'est qu'un des
8 éléments qui a permis d'établir sa connaissance et sa mens rea pour avoir
9 aidé et encouragé, et ce, pendant les événements de l'année 1999. Ce qui,
10 d'ailleurs, est illustré par le deuxième tableau dont je vous ai parlé
11 lorsque j'ai commencé à répondre à la question que vous nous avez posée. Et
12 je ne vous suggère pas de nous intéresser à cela maintenant aujourd'hui.
13 J'aimerais en fait vous dire, puisque je suis à la fin de la réponse
14 apportée à la question numéro 7, que mes estimés confrères étaient en
15 train, en fait, de présenter un nouveau moyen d'appel aujourd'hui, car il a
16 été dit que le Statut de Rome de la CPI avait déterminé une norme pour le
17 crime de complicité par aide et encouragement et que cette norme devrait
18 être utilisée par cette Chambre d'appel dans cette affaire. Comme vous le
19 savez, ici au sein de ce Tribunal, les critères pour déterminer la mens rea
20 sont très, très clairs. Le critère est le critère de la connaissance qu'il
21 existe une réelle probabilité. Il ne s'agit pas d'un critère par rapport à
22 l'objectif recherché. Et deuxièmement, le Statut de Rome n'est pas
23 contraignant pour le TPIY et ne reprend pas forcément le droit
24 international coutumier, et dans ce cas, en ce qui nous intéresse, il ne le
25 fait pas. Nous aimerions vous renvoyer à la décision de confirmation dans
26 l'affaire Katanga et Ngudjolo, paragraphes 507 et 508 relatifs à la nature
27 contraignante du Statut de la CPI, ainsi qu'à l'article 10 du Statut de la
28 CPI.
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1 Madame, Messieurs les Juges, voilà la réponse aux trois questions
2 posées par Mme et MM. les Juges, à moins que vous n'ayez d'autres questions
3 à nous poser. Ce qui ne semble pas être le cas.
4 Je vais donc maintenant m'intéresser à l'arrêt Perisic. Premièrement,
5 je vais démontrer qu'il existe des raisons impérieuses qui militent pour
6 que la Chambre d'arrêt s'écarte de l'arrêt Perisic, et je vous parlerai
7 notamment des conclusions tirées à propos du fait qui vise précisément à
8 faciliter telle et telle chose. Et deuxièmement, j'indiquerai que même si
9 la Chambre d'appel n'estime pas qu'il existe des raisons impérieuses de le
10 faire, les déclarations de culpabilité du général Lazarevic ne doivent pas
11 être altérées ou modifiées à cause de l'arrêt rendu dans l'affaire Perisic.
12 Premièrement, j'aimerais m'intéresser aux raisons impérieuses, qui
13 sont au nombre de quatre. Car je dirais, dans un premier temps, que l'arrêt
14 Perisic a créé un nouvel élément qui vise précisément à avoir aidé et
15 encouragé, que l'on ne retrouve pas dans le droit international coutumier.
16 Deuxièmement, l'arrêt Perisic interprète de façon inexacte la jurisprudence
17 de la Chambre d'arrêt. Troisièmement, cet arrêt a introduit des notions
18 très, très vagues qui aboutissent en fait à de grandes incertitudes et,
19 dans la pratique, qui va poser des problèmes. Quatrièmement, cet arrêt
20 sape, en quelque sorte, le droit humanitaire international et va à
21 l'encontre des intérêts de la justice internationale.
22 Alors, premièrement, le droit international coutumier n'a pas besoin
23 de cette notion qui vise précisément comme étant un élément pour avoir aidé
24 et encouragé. Alors, je ne vais pas me lancer dans une étude approfondie du
25 droit international coutumier aujourd'hui, ce qui n'est pas nécessaire,
26 d'ailleurs, parce que cela a déjà été fait par ce Tribunal il y a 15 ans.
27 Il faut savoir que le droit coutumier international pour complicité pour
28 avoir aidé et encouragé a été examiné dans le jugement Furundzija. Nous
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1 avons une analyse de 20 pages qui portent sur les instruments
2 internationaux pertinents et la jurisprudence pertinente, et la Chambre de
3 première instance dans l'affaire Furundzija a conclu que la mens rea pour
4 avoir aidé et encouragé conformément au droit coutumier est constituée par
5 la connaissance. Et cette Chambre a indiqué que "l'actus reus pour avoir
6 aidé et encouragé en droit pénal international nécessite une assistance
7 pratique, un encouragement ou un soutien moral qui a une incidence
8 considérable sur la commission du crime." Paragraphes 249 et 235 dans
9 l'affaire Furundzija.
10 Sept mois après le jugement en première instance dans l'affaire
11 Furundzija, la Chambre d'appel a rendu son jugement dans l'affaire Tadic.
12 Dans ce jugement ne figuraient aucune analyse ou aucune référence au droit
13 coutumier international pour ce qui était de la complicité pour avoir aidé
14 et encouragé. Et c'est dans ce jugement, justement, que pour la première
15 fois dans la jurisprudence du Tribunal nous trouvons la formule "specific
16 direction" en anglais, à savoir "qui vise précisément". Et le contexte dans
17 lequel figure cette formule indique que la Chambre d'appel ne souhaitait
18 pas ajouter un nouvel élément aux critères de complicité pour avoir aidé et
19 encouragé. Sous-paragraphe (iii) du paragraphe 229 dans l'arrêt Tadic.
20 Cela a seulement été utilisé pour expliquer certaines différences
21 entre le fait d'aider et d'encourager et l'entreprise criminelle commune.
22 Il ne s'agissait absolument pas d'ajouter un nouvel élément. La Chambre
23 d'appel n'a pas expliqué quelle était l'origine de cette formule "qui vise
24 précisément à". Elle n'a fourni aucune raison pour expliquer pourquoi cette
25 condition était nécessaire. Ce qu'elle aurait très certainement fait si
26 elle avait eu l'intention de modifier le sens des éléments de cette notion
27 que l'on trouve dans le jugement Furundzija ou si elle avait souhaité
28 donner une orientation à ce sujet.
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1 Qui plus est, les conclusions de la Chambre de première instance dans
2 l'affaire Furundzija ont été approuvées par la Chambre d'appel de façon
3 très explicite, et ce, dans le paragraphe 162 de l'arrêt Aleksovski. Et
4 nous reviendrons par la suite là-dessus. Mais lorsque nous prenons en
5 considération l'explication fournie par la Chambre d'appel dans l'affaire
6 Aleksovski, explication qui porte sur l'arrêt Tadic, il est évident que la
7 Chambre n'a pas compris l'élément "qui vise précisément" comme étant un
8 élément nécessaire pour le fait d'avoir aidé et encouragé. Dans les
9 jugements qui ont été rendus par la suite, qui ont reproduis la formule de
10 l'affaire Tadic, nous ne retrouvons aucune discussion, aucune référence au
11 droit coutumier et à cette condition requise de cette notion "qui vise
12 précisément", qu'il s'agisse d'ailleurs d'actus reus ou de mens réa.
13 Et j'aimerais indiquer --
14 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Le Juge Pocar a une question à vous
15 poser.
16 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui, Monsieur, j'aimerais vous poser
17 une question. Vous nous avez dit qu'aucun des jugements qui ont repris la
18 formule dans l'affaire Tadic n'a fait de référence à cette formule. Mais à
19 quels jugements faites-vous référence exactement lorsque vous dites qu'il y
20 a des jugements qui ont repris la formule que l'on trouve dans l'arrêt
21 Tadic ?
22 M. MARCUSSEN : [interprétation] En fait, vous trouvez ces références dans
23 la note de bas de page numéro 100 de l'arrêt Perisic, mais il y a de
24 nombreux jugements qui ont repris, en quelque sorte, la formule que l'on
25 trouve dans l'arrêt Tadic et qui ont énoncé quels étaient les éléments du
26 crime de complicité par aide et encouragement. Mais aucun de ces jugements
27 n'a répété la notion en quelque sorte. Il n'y a jamais eu une nouvelle
28 interprétation de cette formule. C'est ce que j'ai essayé de démontrer. Et
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1 nous vous fournirons une liste de ces affaires. Nous vous fournirons une
2 liste de ces affaires précises --
3 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Donc, ce que vous nous dites en
4 d'autres termes, c'est que le seul jugement où l'on trouve une
5 interprétation de cette notion c'est le jugement Aleksovski, n'est-ce pas ?
6 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui, c'est tout à fait cela.
7 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci.
8 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Monsieur, puis-je vous poser une
9 question.
10 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui, oui, tout à fait.
11 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Vous avancez que cette notion qui vise
12 précisément n'est pas un élément permettant l'aide et l'encouragement, mais
13 comment est-ce que vous pouvez faire la différence entre le soutien fourni
14 par la référence juridique et une action militaire légitime ? Est-ce que
15 vous pensez que les éléments qui composent l'aide et l'encouragement sont
16 nécessaires ?
17 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui, tout à fait. Et je reviendrai là-
18 dessus lorsque je serai à la fin et que je vous présenterai la quatrième
19 raison. Mais en fait, en un mot comme en cent, ce que nous avançons, c'est
20 qu'on ne peut pas parler de la position de l'auteur précis ou du scénario
21 factuel précis pour analyser de façon juridique les éléments de l'aide et
22 de l'encouragement. Ça, c'est l'un des ensembles d'éléments pour avoir aidé
23 et encouragé qui, d'ailleurs, est un élément qui est utilisé à tout le
24 monde et qui permet de déterminer s'il y a eu assistance de la part d'une
25 organisation militaire vers une autre ou si le scénario était tel que les
26 éléments qui correspondent à l'aide et à l'encouragement sont satisfaits
27 sur la base de la connaissance et du critère de la contribution importante
28 apportée. Je ne sais pas si j'ai ainsi répondu à votre question.
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1 Mais ce que je voulais vous dire, et c'est un peu une digression,
2 mais ce que je voulais vous dire c'est que lorsque l'on pense à l'affaire
3 Tadic, lorsque l'on pense au jugement dans l'affaire Furundzija, ou -- il y
4 a aucune référence à cela dans ces deux jugements. En fait, je voulais
5 faire référence - excusez-moi - au jugement dans l'affaire Furundzija et à
6 l'arrêt dans l'affaire Aleksovski.
7 Donc l'arrêt Perisic ne fait pas référence au droit coutumier
8 international à l'exception d'une référence que nous trouvons à la note de
9 bas de page 115, et il s'agit d'une référence à une affaire de la Deuxième
10 Guerre mondiale, l'affaire du gaz Zyklon B, et il est indiqué de façon
11 inexacte que cela, en fait, permet d'étayer cette notion qui vise
12 précisément. Il est question d'une affaire, "deux accusés ont été jugés
13 coupables pour avoir aidé à tuer les détenus du camp de concentration en
14 fournissant du gaz en dépit du fait qu'il avait été avancé que ce gaz
15 devait être utilisé pour des fins tout à fait licites…," et ce, "…après que
16 les éléments de preuve ont été examinés suivant lesquels les accusés en
17 question avaient fait en sorte que les unités S.S. soient formées pour
18 l'utilisation de ce gaz qui tuait des êtres humains."
19 Je vous dirais à ce sujet que nous avons inclus un extrait de cette
20 affaire du gaz Zyklon. Et je souhaiterais maintenant vous demander de bien
21 vouloir vous pencher sur cette affaire avec moi. J'aimerais dans un premier
22 temps attirer votre attention sur la deuxième page du document que je vous
23 ai présenté, il s'agit de la page numéro 100.
24 Et vous verrez comment l'Accusation a présenté ses arguments lors de
25 son réquisitoire. Vous voyez que j'ai écrit à la main 1, 2, 3, 4. Voilà ce
26 qu'a dit l'Accusation : la question essentielle était de savoir si les
27 accusés savaient à quelles fins était utilisé le gaz.
28 Par la suite dans ce rapport, vous voyez qu'il est indiqué que :
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1 "Le conseil avait dit qu'il n'était pas crédible que le Dr Tesch ne
2 savait pas qu'il y avait des problèmes dans les camps de concentration."
3 Et puis, l'Accusation a également avancé que :
4 "Il n'était … pas crédible non plus d'avancer que le Dr Tesch ne
5 savait pas quelles étaient les quantités de gaz qui étaient fournies aux
6 S.S. et au camp d'Auschwitz en particulier, et ce, par une société qui lui
7 appartenait entièrement."
8 Mais il faut également savoir que lorsque le juge a résumé l'affaire,
9 et cela correspond à mon petit 4, il a indiqué qu'il y avait trois faits
10 qu'il fallait prendre en considération. Le troisième fait est comme suit :
11 "Et troisièmement, que les accusés savaient que le gaz allait être
12 utilisé pour tuer des êtres humains."
13 Alors, il est vrai qu'il y avait des éléments de preuve indiquant
14 qu'il y avait eu formation, mais ce sont des éléments de preuve qui font
15 l'objet -- qui sont évoqués au paragraphe 95. Cela était réfuté par la
16 Défense. Mais vous voyez que l'Accusation, en fait, ne s'est pas appuyée
17 là-dessus. Je n'ai pas inclus ces extraits, mais ils se trouvent aux pages
18 95, 97 et 99.
19 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
20 M. MARCUSSEN : [interprétation] Cette interprétation par la Chambre d'appel
21 Perisic du jugement dans l'affaire du gaz Zyklon B est d'autant plus
22 étonnante que cette affaire fait l'objet d'une analyse assez détaillée aux
23 paragraphes 222 et 223 dans l'affaire Furundzija. C'est un jugement qui a
24 été approuvé par l'arrêt Aleksovski.
25 Donc, Madame, Messieurs les Juges, le Tribunal a été créé pour poursuivre
26 les personnes les plus responsables de graves crimes internationaux
27 conformément au droit coutumier international. Si l'on s'en tient au droit
28 coutumier international, il n'y avait pas d'élément qui vise précisément,
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1 qu'il s'agisse de l'actus reus ou des éléments de la mens rea pour avoir
2 aidé et encouragé. Par conséquent, l'arrêt Perisic s'est écarté du droit
3 coutumier international, que ce Tribunal a été créé pour appliquer. Voilà
4 une raison impérieuse, s'il en fut, pour s'écarter de l'arrêt Perisic.
5 Avant de poursuivre, si vous me le permettez, je vais revenir à la question
6 posée par M. le Juge Pocar concernant les affaires qui portent sur la
7 notion de visée précisément. Ça se trouve dans l'arrêt Perisic à la note en
8 bas de page numéro 70, et non pas 100, comme je l'ai indiqué de façon
9 erronée. Je m'en excuse.
10 Le deuxième motif ou raison impérieuse justifiant de s'écarter de l'arrêt
11 Perisic est qu'il ignore et interprète de façon erronée les jugements
12 antérieurs ou les arrêts antérieurs de la Chambre d'appel qui ont
13 explicitement rejeté l'élément de visée précisément. Premièrement, l'arrêt
14 Furundzija ignore complètement, comme je l'ai dit -- pardonnez-moi, je ne
15 cesse de commettre la même erreur.
16 Premièrement, l'arrêt Perisic ignore complètement l'arrêt Aleksovski
17 lorsqu'elle a pris cette décision lorsque la formulation de visée
18 précisément dans Tadic se rapportait à son contexte.
19 Madame, Messieurs les Juges, on trouve une analyse de ceci aux paragraphes
20 162 à 164 de l'arrêt Aleksovski sur ce point. Je vais tenter de parcourir
21 ceci dans le détail maintenant.
22 Au paragraphe 162, l'arrêt Aleksovski reprend la décision rendue par le
23 jugement de première instance dans l'affaire Furundzija sur les éléments
24 constitutifs de la complicité par aide et encouragement qui est le critère
25 de la connaissance et de la contribution importante. Ensuite, au paragraphe
26 163, que, Madame et Messieurs les Juges, vous avez à l'écran actuellement.
27 C'est un paragraphe assez compliqué, mais c'est un paragraphe néanmoins
28 très clair. Donc, après avoir abordé et approuvé l'arrêt Furundzija, il
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1 explique que :
2 "Par la suite, dans le jugement Tadic, la Chambre d'appel a brièvement
3 considéré la question de la responsabilité d'une personne commis par une
4 autre personne lorsque la première personne a été accusée de complicité par
5 aide et encouragement que cette autre personne a commis, et ce, dans le
6 contexte d'établir un contraste entre la responsabilité d'une personne et
7 la responsabilité d'une personne accusée d'avoir agi conformément à un
8 objectif commun ou un dessein commun avec une autre personne en vue de
9 commettre un crime. Et c'est pour ce motif que ce jugement ne prétend pas
10 être une déclaration définitive de la question de la responsabilité d'une
11 personne accusée d'avoir aidé et encouragé."
12 Ensuite, au paragraphe suivant, au paragraphe -- pardonnez-moi, 164,
13 l'arrêt Aleksovski reprend la formulation de l'élément matériel constitutif
14 de complicité par aide et encouragement qui n'englobait pas la notion de
15 visée précisément ou la condition de visée précisément. Elle n'a pas
16 considéré que la notion de visée spécifiquement était un élément
17 constitutif. Cela est visible également car elle n'a pas appliqué le
18 critère de notion de visée spécifiquement aux faits. Paragraphes 168 et
19 169.
20 La Chambre d'appel à l'époque n'a pas constaté qu'il y avait contradiction
21 entre le jugement Furundzija et l'arrêt Tadic concernant les éléments
22 constitutifs de la complicité par aide et encouragement. Elle n'a pas
23 compris que l'arrêt Tadic constituait une décision définitive sur la
24 question de la complicité par aide et encouragement. Elle n'a pas compris
25 que l'arrêt Tadic rajoutait une condition distincte qui était la notion de
26 visée précisément.
27 L'arrêt Perisic, cependant, revient sur Tadic et propose une autre
28 interprétation de la formulation de visée précisément qui est celle qui a
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1 été exclue dans l'arrêt Aleksovski. De même, l'arrêt Perisic revient sur
2 l'arrêt Blagojevic et propose une interprétation qui a été rejetée de façon
3 explicite par la Chambre d'appel dans l'affaire Mrksic et Lukic et Lukic.
4 Et ensuite, il interprète de façon erronée l'arrêt rendu par la Chambre
5 d'appel dans les affaires Mrksic et Lukic, malgré le rejet explicite de la
6 notion de visée précisément en tant qu'élément constitutif de la complicité
7 par aide et encouragement.
8 L'arrêt Perisic interprète l'arrêt Blagojevic, au paragraphe 189,
9 comme reprenant l'existence de la notion de visée précisément comme élément
10 constitutif de l'élément matériel de la complicité par aide et
11 encouragement. Confer paragraphes 31 et 32 de l'arrêt Perisic. L'arrêt
12 Perisic et son interprétation a été cependant rejeté par la Chambre d'appel
13 dans Mrksic et Lukic, dans lesquels les appelants ont fait valoir que la
14 notion de visée précisément était exigée comme élément et que ceci n'avait
15 pas été réuni en l'espèce. Cette question, par conséquent, a fait l'objet
16 des écritures dans Mrksic et Lukic. L'appelant a déclaré qu'il ne pouvait
17 être condamné pour avoir aidé et encouragé parce que ses omissions visaient
18 précisément à faciliter, encourager ou apporter un soutien moral aux crimes
19 qui lui ont été reprochés précisément.
20 L'arrêt Perisic interprète de façon erronée l'arrêt Mrksic lorsqu'au
21 paragraphe 33 il déclare que la Chambre d'appel dans Mrksic n'a jamais
22 abordé la question de la notion de visée précisément dans le contexte de
23 l'élément matériel. Ceci est inexact. Pardonnez-moi -- qu'elle n'a abordé
24 cette notion que dans le contexte de l'élément matériel. Ceci est inexact.
25 Tandis que Sljivancanin avait soulevé la question - il s'agissait
26 d'une question relative à l'élément matériel - la Chambre d'appel a insisté
27 pour dire que "Sljivancanin a mal interprété le critère de l'élément
28 matériel applicable à la complicité par aide et encouragement" et a précisé
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1 que cette question aurait dû être soulevée et devait porter sur la question
2 de l'élément matériel. La Chambre d'appel a ensuite expressément rejeté cet
3 argument en déclarant que la notion de visée précisément "ne constituait
4 pas un élément déterminant de l'élément matériel de la complicité par aide
5 et encouragement", arrêt Mrksic, paragraphe 159. Il n'y a rien d'ambigu
6 dans ce rejet express. En outre, la question de savoir si la notion de
7 visée précisément était un élément constitutif de la complicité par aide et
8 encouragement était la question posée et devait être tranchée par la
9 Chambre d'appel. Son rejet de la notion de visée précisément était une
10 partie essentielle de son raisonnement, et il ne s'agissait pas d'une
11 simple référence en passant, comme cela a été précisé dans l'arrêt Perisic,
12 parce qu'il fallait trancher cette question pour pouvoir prononcer une
13 déclaration de culpabilité.
14 Cette question a encore été confirmée dans l'arrêt Lukic au
15 paragraphe 424, où la Chambre d'appel a déclaré que :
16 "Dans Mrksic et Sljivancanin, la Chambre d'appel a précisé la notion
17 de visée précisément et a indiqué que cette notion ne constituait pas un
18 élément déterminant de l'élément matériel constitutif de la complicité par
19 aide et encouragement" et ensuite a constaté qu'il n'y a pas de raison
20 impérieuse justifiant qu'on ne s'écarte de cette jurisprudence.
21 L'arrêt Perisic tente de faire la distinction ou de concilier ces
22 jugements en reprenant l'interprétation du droit qui a sa préférence aux
23 paragraphes 32 à 36. Ceci est indéfendable compte tenu du fait que la
24 formulation simple utilisée par la Chambre d'appel dans Mrksic, Lukic et
25 Lukic, rejette cette notion de visée précisément.
26 En outre, comme dans Blagojevic, la Chambre d'appel dans Mrksic et
27 Lukic n'ont pas mené d'analyse sur la question de savoir si oui ou non la
28 notion de visée précisément était en réalité implicite dans la notion
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1 d'effet important et de connaissance. En outre, les opinions dissidentes du
2 Juge Guney, aux paragraphes 10 et 11, et du Juge Agius dans l'affaire Lukic
3 ont confirmé les arrêts des Chambres d'appel dans ces deux affaires qui ont
4 manifestement rejeté la notion de visée précisément en tant qu'élément
5 constitutif de la complicité par aide et encouragement.
6 En résumé, Madame, Messieurs les Juges, la conclusion rendue dans
7 l'arrêt Perisic, à savoir que la notion de visée précisément est un élément
8 constitutif de l'élément matériel de la complicité par aide et
9 encouragement ignore les constatations faites dans l'arrêt Aleksovski au
10 sens de Tadic et interprète de façon erronée Blagojevic, qui a été rejeté
11 de façon explicite par la Chambre d'appel dans les affaires Mrksic et
12 Lukic. Et, par conséquent, il faut s'écarter de l'analyse de la Chambre
13 d'appel, qui est erronée.
14 Madame, Messieurs les Juges, la Chambre d'appel doit conclure que des
15 interprétations erronées graves de ce Tribunal par rapport à la
16 jurisprudence établie du Tribunal devraient leur enjoindre de rejeter la
17 notion de visée précisément, car il s'agit d'une raison impérieuse pour le
18 faire.
19 La troisième raison impérieuse --
20 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je me demande si le moment est opportun
21 pour faire une pause, étant donné que vous avez abordé la troisième raison
22 impérieuse.
23 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui, tout à fait, nous pouvons procéder
24 ainsi et reprendre après.
25 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Merci. Nous reprendrons à 14 heures 30.
26 --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 58.
27 --- L'audience est reprise à 14 heures 29.
28 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Monsieur Marcussen, c'est à vous. Vous
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1 pouvez poursuivre.
2 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
3 Donc, Madame, Messieurs les Juges, je vais maintenant aborder la troisième
4 raison impérieuse. Comme l'a indiqué la Chambre d'appel dans Aleksovski :
5 "Le mandat fondamental du Tribunal de poursuivre les personnes
6 présumées responsables de violations graves du droit international
7 humanitaire ne peut être mené à bien si l'accusé et l'Accusation n'ont pas
8 garanti que l'application du droit répond au besoin de sécurité de
9 prévisibilité juridique." Paragraphe 113(ii).
10 Une troisième raison impérieuse justifiant de s'écarter de l'arrêt
11 dans Perisic permet d'introduire -- une des raisons à cela, se sont les
12 concepts vagues qui ont été présentés qui conduisent à un nombre
13 considérable d'incertitudes, comme je l'ai évoqué ce matin. L'arrêt rendu
14 dans l'affaire Perisic introduit de nouveaux éléments dans le droit
15 concernant la complicité par aide et encouragement, la notion de visée
16 précisément et la notion de proximité et d'éloignement d'un accusé dont il
17 ne faisait pas partie auparavant. Les parties, l'Accusation, les Chambres
18 de ce Tribunal ainsi que d'autres instances auront à se débattre avec cette
19 application. Ces nouveaux concepts ne sont pas clairs et posent problème.
20 L'arrêt rendu dans l'affaire Perisic n'explique pas en quoi consiste
21 la notion de visée précisément en tant qu'élément objectif constitutif de
22 l'infraction, mais déclare simplement qu'il doit y avoir un lien de
23 culpabilité. Paragraphes 37, 38, 44.
24 En outre, il semble qu'il y ait des désaccords considérables entre
25 les Juges au niveau de leur opinion individuelle et dissidente. Quatre des
26 cinq Juges de la Chambre d'appel dans l'affaire Perisic semblent indiquer
27 que la notion de visée précisément est plus proche de l'élément constitutif
28 de l'élément moral, les Juges Meron et Agius, opinions individuelles
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1 paragraphe 4; le Juge Liu opinion dissidente paragraphe 2; le Juge
2 Ramaroson, opinion individuelle paragraphes 7 et 9.
3 Et, en appliquant la notion de visée précisément aux faits de
4 l'affaire Perisic, la Chambre d'appel semble prendre en compte un élément
5 cognitif qui va au-delà de la connaissance de l'aide à la recherche d'un
6 objectif, paragraphe 69.
7 Ce qui est impliqué dans l'arrêt Perisic est que le lien de
8 culpabilité requiert des éléments de preuve indiquant que le complice ou
9 que l'élément moral du complice va au-delà du simple critère de la
10 connaissance et que cela se rapproche de l'objectif, en tout cas, pour les
11 complices éloignés. Cependant, l'arrêt Perisic réaffirme que l'élément
12 moral pour complicité par aide et encouragement est la connaissance et non
13 pas l'objectif, paragraphe 48, tel qu'établi de longue date par la
14 jurisprudence de ce Tribunal. Les contradictions apparentes sont difficiles
15 à comprendre ou à concilier dans la pratique.
16 L'arrêt Perisic brouille la frontière entre aider et encourager et
17 l'entreprise criminelle commune minimisant ainsi la responsabilité au titre
18 d'un objectif dans le cadre de la complicité par aide et encouragement. Si
19 un complice doit dorénavant viser précisément à faciliter un crime, dans ce
20 cas il n'y a pas de différence entre l'élément moral d'un complice et les
21 membres d'une entreprise criminelle commune qui partage le même objectif
22 commun.
23 L'arrêt Perisic donne lieu à de nombreuses incertitudes parce qu'il
24 introduit une nouvelle notion qui est celle de caractère éloigné sans aucun
25 fondement jurisprudentiel pour faire la distinction entre ce jugement et
26 les jugements antérieurs qui n'ont pas appliqué de façon explicite la
27 condition de visée précisément. L'arrêt Perisic déclare que l'accusé dans
28 ces jugements antérieurs étaient des complices proches, de sorte que la
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1 notion de visée précisément aurait pu être implicite lorsque les
2 conclusions ont été rendues s'agissant de la complicité par aide et
3 encouragement, paragraphe 38, note en bas de page numéro 100.
4 En agissant ainsi, il énonce deux critères relatifs aux éléments de
5 preuve différents dans le cadre de la complexité par aide et encouragement
6 : la première est la notion de proximité ou le fait qu'un complice est
7 proche qui ne requiert pas une considération explicite et un raisonnement
8 explicite pour l'un des éléments, et un autre élément qui porte sur le fait
9 que le complice est éloigné.
10 Madame, Messieurs les Juges, cette confusion a été illustrée ce matin
11 par mon confrère lorsqu'il a évoqué la notion de visée précisément,
12 l'élément constitutif qui doit indiquer que l'accusé était présent au
13 moment où les crimes ont été commis. Nous faisons valoir que cela n'est pas
14 le cas. Quelqu'un comme Krstic, qui a été condamné en tant que complice,
15 n'était pas présent au moment où les crimes ont été commis, mais cette
16 question a été soulevée et cela montre que la situation est maintenant
17 devenue extrêmement confuse.
18 Cela porte à confusion également, parce que la proximité n'a pas été
19 ou n'est pas déterminante quant au caractère ou à l'incidence de l'aide, ni
20 de la connaissance de celui qui contribue au crime. Par exemple, un auteur
21 éloigné peut reconnaître qu'il y a un scénario au sens large des crimes ou
22 est au courant du caractère systématique des crimes auxquels il apporte une
23 aide où il est susceptible également d'apporter des contributions
24 importantes ou de faciliter ces crimes.
25 En outre, la Chambre d'appel n'a pas précisé où se situait la
26 frontière entre le caractère éloigné et la proximité. La Chambre d'appel a
27 simplement indiqué qu'il s'agissait d'une analyse fondée sur des faits "qui
28 dépend des circonstances individuelles de chaque cas", et que les facteurs
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1 pertinents comprennent une distance temporelle significative et une
2 distance au plan géographique. Cependant, la Chambre d'appel a également
3 indiqué que cette liste n'est pas exhaustive, paragraphe 40.
4 Ces incertitudes sont susceptibles d'occasionner de graves problèmes
5 dans la pratique étant donné que des individus ne seront pas en mesure de
6 comprendre à quel moment leurs actes sont susceptibles de donner lieu à la
7 responsabilité. Les Chambres de première instance ont également du mal à
8 appliquer le critère imposé par l'arrêt Perisic. La Chambre d'appel devrait
9 constater que les problèmes et incertitudes découlant de l'arrêt Perisic
10 justifient que l'on s'écarte de celui-ci. Il s'agit-là d'une raison
11 impérieuse.
12 Veuillez m'accorder quelques instants, s'il vous plaît, Madame,
13 Messieurs les Juges.
14 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
15 M. MARCUSSEN : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je vais
16 maintenant aborder la quatrième raison impérieuse, et je vais revenir sur
17 la question posée par M. le Juge Liu également -- peut-être qu'il y au une
18 question avant ?
19 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Avant cela, car j'ai une question à vous
20 poser. Je crois que ce matin l'appelant a fait valoir qu'il était
21 nécessaire d'établir que l'accusé était présent dans chaque lieu précis où
22 un crime a été commis, de façon à pouvoir établir la complicité par aide et
23 encouragement de l'accusé. Et je comprends que votre position consiste à
24 parler du caractère éloigné ou de la proximité, et que ceci ne constitue
25 pas un élément essentiel de l'élément matériel de la complicité par aide et
26 encouragement. Simplement parce que -- ou en raison de la question posée eu
27 égard au caractère éloigné, la Chambre d'appel dans l'affaire Perisic a
28 introduit la "notion de visée précisément" dans cet égard. Avez-vous
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1 quelque chose à dire sur ce point ?
2 M. MARCUSSEN : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je suis tout à
3 fait d'accord pour dire que l'arrêt Perisic pourrait être interprété de la
4 sorte, et je ferais valoir que cela soulève une autre question d'importance
5 concernant ce jugement. Il fait valoir que des critères juridiques
6 différents ne peuvent pas être appliqués à différents accusés à différents
7 échelons, à différents niveaux ou différentes distances géographiques. Il
8 doit y avoir un seul et unique critère juridique qui soit appliqué au tout.
9 Ceci est un principe fondamental qu'applique ce Tribunal également.
10 Mais je suis d'accord pour dire que l'arrêt Perisic pourrait être
11 compris comme un arrêt qui introduit cet élément pour des affaires précises
12 comme celles-ci ou dans des cas précis comme celui-ci, et ceci poserait
13 beaucoup de problèmes, et il ne peut y avoir des critères différents
14 appliqués à différentes accusés. Tel est notre point de vue. Je vais
15 revenir dessus un petit peu lorsque j'aborderai la raison impérieuse numéro
16 4. Nous faisons valoir également qu'il y a des raisons impérieuses pour
17 introduire de nouveaux critères de ce genre pour aborder les problèmes
18 précis, car les éléments constitutifs de la complicité sont des garants
19 contre des condamnations déraisonnables. Le fait qu'il y ait des éléments
20 présentés et qui fixent un seuil aussi élevé, qui permettent d'empêcher un
21 tel risque, n'importe qui ne peut pas être condamné. Par exemple, si on
22 fournit une aide à un gouvernement ou à des insurgés, que cette personne
23 soit raisonnablement condamnée. Nous savons malheureusement que dans de
24 nombreux conflits armés, il y a des éléments qui peuvent ou qui sont
25 susceptibles de commettre des crimes. Je crois que nous comprenons tous
26 qu'il s'agit là d'un sujet de préoccupation, ce n'est pas que quelqu'un est
27 susceptible de commettre un crime, mais c'est quelqu'un qui fournit une
28 aide qui peut être tenu responsable pour complicité par aide et
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1 encouragement par rapport à ce crime. Mais le niveau très élevé que nous
2 avons par rapport à la complicité devrait nous protéger contre ce type de
3 situations, comme quelqu'un par exemple qui, de façon tout à fait légitime,
4 vent des armes de poing, ce n'est pas quelqu'un qui est jugé complice dans
5 chaque cambriolage qui est fait à l'aide de cette arme qui a été vendue.
6 J'espère que cela a répondu à votre question.
7 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous remercie. Oui, vous pouvez
8 poursuivre.
9 M. MARCUSSEN : [interprétation] Merci.
10 Donc, Madame, Messieurs les Juges, la quatrième raison impérieuse est
11 la suivante : l'arrêt Perisic nuit au respect du droit international
12 humanitaire. Permettre à des personnes de se livrer à un comportement dont
13 elles savent qu'elles vont contribuer de façon importante à des crimes,
14 simplement parce que cela n'est pas dans leur objectif de le faire, risque
15 de gravement nuire au respect du droit international humanitaire.
16 L'arrêt Perisic occasionne, comme je l'ai dit, deux choses importantes qui
17 sont : premièrement, le jugement déclare de façon expresse que le complice
18 doit viser spécifiquement des crimes lorsqu'il agit; et deuxièmement,
19 d'après les constatations en l'espèce lorsque la Chambre d'appel a appliqué
20 la notion de visée précisément au cas Perisic, il semblerait qu'un complice
21 éloigné qui sait ou était courant de la réelle probabilité que ses actes
22 vont faciliter les crimes et dont le comportement, en réalité, facilite de
23 façon importante ces crimes, ne répond pas aux éléments de la notion de
24 visée précisément.
25 Alors, quelle est l'issue de tout ceci ? Cela signifie qu'un complice
26 éloigné qui sciemment, et qui contribue de façon importante à des crimes
27 généralisés et systématiques, échappera à sa responsabilité en tant que
28 complice pour aider et encourager. Ce fossé d'impunité ne peut être
Page 458
1 accepté.
2 Et ce qui est encore pire, l'arrêt Perisic semble exiger que l'aide
3 soit fournie à des organisations purement criminelles pour qu'un complice
4 puisse être jugé responsable au plan pénal. Mais des gouvernements, des
5 armées, des forces chargées de la sécurité, des mouvements d'insurgés et
6 des mouvements rebelles ne seront que rarement purement criminels. En
7 introduisant une condition qui exige que les contributions doivent être
8 apportées à des organisations purement criminelles, le fossé de l'impunité
9 se creuse tellement qu'il reste peu d'éléments pour établir la
10 responsabilité d'un complice dans le cas d'auteurs éloignés dans la
11 pratique.
12 Le critère en droit international coutumier retenu dans le cas de la
13 complicité par aide et encouragement encourage le respect du droit
14 international humanitaire. Les deux éléments en droit international
15 coutumier constitutifs de la complicité par aide et encouragement
16 garantissent qu'il n'y a pas de risque que quelqu'un ne soit condamné de
17 façon déraisonnable. Ce n'est que lorsque cela a été prouvé au-delà de tout
18 doute raisonnable que l'accusé est au courant d'une probabilité réelle que
19 son comportement pourrait faciliter la commission de crimes graves,
20 internationalement parlant, que cela a été prouvé au-delà de tout doute
21 raisonnable, que son aide a en réalité eu un effet important sur la
22 commission des crimes, ce n'est que dans ce cas-là qu'il peut être tenu
23 responsable en tant que complice par aide et encouragement.
24 Voici la question, me semble-t-il, que Monsieur le Juge Liu vous avez
25 posée. Donc, le fait qu'il y a un risque, à savoir que d'envoyer des
26 troupes et du matériel peut conduire à des crimes ne signifie pas pour
27 autant qu'une personne ait empêché de contribuer à un effort de guerre ou
28 de participer à des opérations de guerre légitime, et ne sera pas tenu
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1 responsable en tant que complice s'il agit de la sorte.
2 Il y a différents garde-fous en matière de droit international
3 coutumier et de critères retenus en termes de ce droit sur l'effet
4 important et la connaissance visant à faciliter les crimes pour éviter
5 cela. Premièrement, le critère de la connaissance est assez élevé. Il ne
6 suffit pas de savoir qu'il existe un risque que des crimes soient connus.
7 L'accusé doit savoir que des crimes vont sans doute être commis. Et, en
8 particulier, si une personne prend des mesures nécessaires pour garantir ou
9 s'assurer que son aide ne sera pas employé pour commettre des crimes, il ne
10 sait pas que ces crimes sont susceptibles d'être commis, il ne sait pas que
11 son aide va sans doute faciliter de tels crimes. De telles mesures peuvent
12 varier d'une affaire à l'autre, obtenir des garanties, par exemple, que
13 cette aide ne sera pas utilisée pour commettre des crimes, obtenir des
14 garanties pour indiquer que les forces qui réceptionnent cette aide
15 prendront toutes les mesures nécessaires pour punir les crimes avant que
16 l'aide ne soit fournie, et on peut également prévoir une formation sur le
17 droit international humanitaire auparavant comme condition préalable à la
18 fourniture de l'aide. Il peut s'agir d'arrêter ou de cesser la fourniture
19 d'aide si des crimes sont commis mais ne sont pas punis, et ceci peut être
20 assimilable à une demande de renvoi de personnel ou de matériel si ceci est
21 utilisé pour commettre des crimes ou si la personne qui a reçu l'aide a
22 omis de prendre les mesures nécessaires pour empêcher ces crimes. Il y a de
23 nombreuses mesures qui peuvent être prises par quelqu'un qui fournit l'aide
24 pour s'assurer que les crimes ne soient pas commis et prendre les mesures
25 qui feront en sorte qu'il sera très raisonnable de constater que les crimes
26 ne sont pas commis avec l'aide des ressources fournies par ladite aide.
27 Donc, il existe suffisamment de garde-fous qui permettent d'échapper à ces
28 résultats déraisonnables.
Page 460
1 Mais ce qui est encore plus important, c'est que ces mesures
2 pourraient diminuer les niveaux de criminalité et permettraient d'adhérer
3 mieux au droit international humanitaire. Si ces mesures ne sont pas
4 couronnées de succès et si ces personnes qui utilisent cette aide s'en
5 servent toujours pour commettre des crimes, les personnes qui fournissent
6 de l'aide sciemment dans ces circonstances pourraient être tenues
7 responsables de complicité par aide et encouragement pour avoir facilité la
8 commission de ces crimes. Egalement, si quelqu'un sait qu'aucune ressource
9 ne serait jamais suffisante pour empêcher des crimes à très grande échelle,
10 crimes systématiques, il devrait dans ce cas s'abstenir de fournir l'aide
11 ou de courir le risque d'être tenu responsable pénalement en tant que
12 complice.
13 Le droit international coutumier et le critère sur le point de la
14 complicité encouragent l'emploi du droit international humanitaire, confer
15 l'arrêt Perisic. Tous les éléments susmentionnés démontrent qu'il y a des
16 raisons impérieuses qui justifient que l'on s'écarte de l'arrêt rendu dans
17 l'affaire Perisic. Il est erroné au terme du droit international coutumier,
18 il interprète de façon erronée la jurisprudence de la Chambre d'appel, et
19 il est clair qu'il donne lieu à des grandes incertitudes et des problèmes
20 qui nuisent à l'adhésion au droit international humanitaire et est
21 contraire aux intérêts de la justice internationale.
22 La Chambre d'appel devrait redire que la notion de visée précisément
23 ne constitue pas une condition distincte de la condition de la complicité
24 ou que si c'est impliqué dans l'élément matériel, cela doit nécessairement
25 être inclus à l'élément effet important.
26 Bien, dans tous les cas, la Chambre d'appel exige que davantage
27 d'éléments soient présentés s'agissant des raisons impérieuses,
28 l'Accusation peut préparer un mémoire supplémentaire à cet effet si les
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1 Juges le souhaitent.
2 Si tel n'est pas le cas, je vais aborder la dernière partie de ma
3 présentation.
4 Madame, Messieurs les Juges, si la Chambre d'appel décide qu'il n'y a pas
5 de raisons impérieuses qui justifient de s'écarter de l'arrêt Perisic, dans
6 ce cas la Chambre d'appel devra peut-être prendre en compte les éléments
7 suivants : premièrement, si la Chambre de première instance aurait dû faire
8 des constatations explicites concernant la notion de visée précisément,
9 élément constitutif de l'élément matériel de la complicité par aide et
10 encouragement, et dans le cas où elle n'aurait pas à faire de telles
11 constatations, à savoir si la Chambre de première instance, dans ses
12 constatations, a inclus cet élément de façon implicite. Je crois, Madame,
13 Messieurs les Juges, que vous devriez faire ces déterminations parce
14 qu'elles ont été soulevées par mes confrères ce matin.
15 Contrairement à ce que mon éminent confrère a fait valoir ce matin,
16 la Chambre de première instance n'a pas dû faire de constatation explicite
17 s'agissant de la notion de visée précisément comme élément constitutif de
18 l'élément matériel de la complicité par aide et encouragement. Ceci, c'est
19 parce que le général Lazarevic est un complice proche plutôt qu'un complice
20 éloigné, arrêt Perisic, paragraphe 39.
21 Premièrement, alors que le général Perisic était éloigné dans la
22 mesure où c'était un officier dans une armée étrangère à l'extérieur de la
23 chaîne de commandement où se trouvaient ceux qui avaient commis les crimes
24 à Sarajevo et à Srebrenica, le général Lazarevic était le commandant du
25 corps des soldats de la VJ qui commettaient les déplacements forcés au
26 Kosovo. Il avait autorité sur tous les membres du Corps de Pristina et le
27 pouvoir de planifier les actions de la VJ et les opérations de la VJ au
28 Kosovo. Volume III, paragraphe 925. Il est comparable à Krstic, un
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1 commandant qui a permis aux troupes et aux ressources placées sous son
2 commandement de faciliter les crimes, qui a été reconnu par la Chambre
3 d'appel dans Perisic comme étant un complice proche, note en bas de page
4 100, arrêt Perisic.
5 Effectivement, la Chambre de première instance dans l'affaire Perisic
6 a accordé une très grande importance au fait que Perisic n'avait ni
7 commandement de jure ni de facto sur la VRS en Bosnie, permettant d'établir
8 le caractère éloigné de Perisic, arrêt Perisic, paragraphes 42 et 46.
9 Deuxièmement, l'arrêt Perisic, au paragraphe 38, a considéré que la
10 proximité est établie lorsque l'accusé est présent matériellement pendant
11 la planification ou la commission d'un crime. Lazarevic était
12 matériellement présent et a contribué de manière importante à la
13 planification et à l'exécution des opérations conjointes qui ont
14 complètement nettoyé des villages de civils albanais au Kosovo. La période
15 allant du mois de janvier au mois de mars 1999 était consacrée à la
16 planification des opérations conjointes entre la VJ et le MUP, Volume I,
17 paragraphe 1 017. Lazarevic a travaillé étroitement avec Pavkovic dans
18 l'élaboration de ces plans, ce qui a donné lieu aux ordres du commandement
19 conjoint, Volume I, paragraphes 1 037 à 1 038. La campagne visant à chasser
20 par la force la population albanaise du Kosovo a été menée du fait de ces
21 opérations conjointes.
22 Le général Lazarevic a également donné au moins 16 ordres émanant du
23 commandement conjoint entre les mois de mars et avril 1999. Je vais vous
24 citer des exemples pour indiquer comment ces ordres conjoints ont été mis
25 en œuvre -- comment ces ordres conjoints ont mis en œuvre le plan criminel
26 commun aux fins de chasser par la force les Albanais du Kosovo. Comme l'a
27 constaté la Chambre de première instance, plusieurs de ces ordres
28 correspondent aux lieux de crime dans l'acte d'accusation, Volume I,
Page 463
1 paragraphes 1 122 et 1 123.
2 En outre, le général Lazarevic était présent sur le terrain, "au cœur
3 de l'action", comme il l'a dit, Volume III, paragraphe 924. Il se rendait
4 régulièrement sur le lieu où se trouvaient les troupes, les encourageaient
5 avant et après les opérations conjointes qu'il avait planifiées et
6 commandées et qu'il a mises en œuvre avec une force excessive, en prenant
7 pour cible des villages entiers où se trouvaient des civils albanais du
8 Kosovo et en les chassant. Lui et Pavkovic étaient "la plupart du temps",
9 Volume III, paragraphe 838. Il est -- on peut le comparer à Brdjanin et
10 Simic, il s'agissait de dirigeants civils dans leurs régions et
11 municipalités respectivement, et l'arrêt Perisic a reconnu également pour
12 complicité par aide et encouragement s'agissant de la notion de visée
13 précisément, arrêt Perisic, paragraphe 73.
14 Et, en réalité, compte tenu de la participation proche et personnelle
15 dans la planification et l'exécution de ces opérations conjointes, vous
16 pouvez constater que les conclusions de la Chambre de première instance
17 concernant la contribution du général Lazarevic comprenait de façon
18 implicite la notion de visée précisément. La Chambre de première instance a
19 noté "les dirigeants politiques et militaires de la RFY et de la Serbie …
20 traitaient la population albanaise du Kosovo dans son intégralité comme des
21 ennemis de l'Etat malgré le fait que l'ALK ne représentait qu'une toute
22 petite partie de la population," Volume III, paragraphe 91. Les opérations
23 conjointes entre la VJ et le MUP ne faisaient pas de différence entre l'ALK
24 et la population albanaise du Kosovo. Deux exemples, les opérations
25 conjointes de la VJ et du MUP à Orahovac et dans la vallée de Reka,
26 illustrent le fait que les contributions de Lazarevic visaient précisément
27 les opérations qui avaient été planifiées et exécutées aux fins de nettoyer
28 des villages entiers et des régions des Albanais du Kosovo.
Page 464
1 Orahovac se trouve au sud-ouest du Kosovo. Un des villages pris pour
2 cible par l'opération d'Orahovac était le village de Celine. En mars 1999,
3 le village de Celine comprenait environ 250 foyers situés non loin du poste
4 de commandement avancé de Djakovica, Volume II, paragraphes 303, 333 à 335.
5 Cela a été mentionné de façon explicite, et ceux-ci ont été pris pour cible
6 par l'ordre du commandement conjoint donné par Lazarevic le 23 mars 1999,
7 Volume II, paragraphe 296.
8 Le général Lazarevic a ordonné à la 549e Brigade motorisée d'être
9 déployée à l'endroit où il y avait le blocus ensemble avec le MUP pour
10 attaquer et détruire l'ALK à Celine et d'autres villages. L'ordre du
11 général Lazarevic a été transmis le long de la chaîne de commandement. La
12 549e Brigade motorisée, le même jour, a donné l'ordre à ses unités de
13 couper et de détruire le village de l'ALK de Celine, Volume II, paragraphe
14 297.
15 Il y avait, cependant, peu ou pas de présence ou de menace de la part
16 de l'ALK dans ce village, Volume II, paragraphe 304. Et, en réalité, ces
17 ordres étaient des ordres destinés à lancer l'attaque contre la population
18 albanaise du Kosovo à Celine, comme l'indiquent les constatations au sujet
19 de l'attaque.
20 Dès les premières heures le 25 mars 1999, le village de Celine était
21 encerclé par les chars de la VJ, des véhicules blindés et des véhicules
22 blindés de transports de troupes. Entre 5 heures et 5 heures 30 du matin,
23 la VJ a commencé à pilonner le village et a poursuivi son pilonnage de
24 façon sporadique jusqu'à 9 heures du soir. Une journée constante de
25 bombardements de 250 [comme interprété] foyers. Les soldats de la VJ et les
26 forces du MUP sont entrés dans le village. Leurs opérations étaient
27 coordonnées. Les soldats disposaient de radios manuelles et les ordres
28 étaient transmis par le moyen de ces radios, Volume III [comme interprété],
Page 465
1 paragraphes 310 à 314.
2 Les forces de la VJ et du MUP ont pillé et incendié le village et ont
3 mis le feu à la mosquée également. Ils ont établi des points de contrôle
4 tenus par leurs hommes autour du village et ont tirés des coups de feu
5 pendant la nuit pour faire peur aux habitants du village, Volume II,
6 paragraphe 311. Les forces sont allées d'une maison à l'autre en fouillant
7 ces maisons et en faisant sortir toute personne qu'ils y trouvaient.
8 Certaines de ces personnes trouvées ont été tuées, notamment des femmes et
9 des enfants, Volume II, paragraphes 315, 321, 329 et 335.
10 Un groupe important de civils ont été retrouvés dans les bois là où
11 ils se cachaient. Des policiers l'ont trouvé. Les hommes ont été séparés
12 des femmes et des enfants. Les policiers ont pris leurs effets personnels
13 et leurs cartes d'identité. Les cartes d'identité ont été jetées sur une
14 pile et brûlées. Ces groupes ont été contraints à traverser le village à
15 pied en direction de Prizren sous la menace d'un fusil. Plus tard, ces
16 civils ont été placés à bord d'autocars, conduits jusqu'à la frontière, où
17 on les a contraints à marcher jusqu'en Albanie, Volume II, paragraphes 323
18 à 325 et paragraphe 334.
19 Après ces opérations, des rapports ont été envoyés tout au long de la
20 chaîne de commandement. Par exemple, pièce de l'Accusation P2019 qui
21 confirme que les forces de la VJ "ont bloqué et nettoyé" Celine, Volume II,
22 paragraphe 364; Volume II, paragraphe 301; et Volume III, paragraphe 857.
23 L'opération avait été planifiée et ordonnée, et il en a été fait
24 rapport où l'on a indiqué que ceci avait été fait conformément auxdits
25 plans et ordres.
26 Malgré un nombre très important de civils tués au cours de cette
27 opération conjointe, Volume II, paragraphes 335, 381 à 382 et 433, et le
28 nombre très important d'Albanais du Kosovo qui ont fui car ils avaient peur
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1 ou à qui on avait ordonné de passer la frontière, chose que Lazarevic
2 savait, Volume III, 849, personne n'a été poursuivi suite à cela, Volume
3 III, paragraphes 864 à 869. Et les mêmes soldats, encore une fois, ont été
4 utilisés dans des opérations conjointes à l'avenir. Inévitablement, le même
5 schéma ou scénario se reproduisait.
6 Par exemple, des unités de la 549e Brigade motorisée, un mois plus
7 tard, ont participé à l'opération dans la vallée de la Reka au cours de
8 laquelle la VJ et le MUP ont traversé la vallée en chassant tous les
9 Albanais. Ceci constitue mon deuxième exemple. Je crois que je me suis mal
10 exprimé, il s'agit en fait d'unités de la 549e Brigade motorisée qui ont
11 participé à l'opération.
12 Les deux Témoins Peraj et Kotur étaient des soldats de la VJ et ont
13 dit dans leur déposition qu'il y avait eu des réunions aux fins d'organiser
14 et de coordonner l'opération visant à nettoyer la vallée de la Reka. Les
15 deux témoins ont parlé d'ordres verbaux qu'ils ont reçus concernant cette
16 opération, Volume II, paragraphes 169 et 173. En outre, les Témoins K90 et
17 K73, encore une fois deux fois des soldats de la VJ, ont dit également
18 avoir reçu des ordres verbalement aux fins de nettoyer la vallée de la Reka
19 en chassant la population albanaise du Kosovo, Volume II, paragraphes 176
20 et 230.
21 Madame, Messieurs les Juges, ce matin, mes confrères ont abordé la
22 question de la déposition de ces deux témoins, K90 et K73. Contrairement
23 aux arguments présentés par mon confrère, les questions qui ont été
24 soulevées par rapport au Témoin K90, à savoir l'allégation qui consistait à
25 dire qu'il avait modifié sa déposition, c'est quelque chose qui a été
26 précisément abordé par la Chambre de première instance. La Chambre a
27 constaté qu'il avait tenté de minimiser sa déposition, et il a donné les
28 raisons pour lesquelles elle était parvenue à la conclusion à laquelle elle
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1 est parvenue. Mes confrères n'ont pas démontré que ces constatations
2 n'étaient pas raisonnables; ils ont simplement demandé aux Juges de la
3 Chambre d'accepter leur version des éléments de preuve. Je vais vous
4 demander, Madame, Messieurs les Juges, de vous reporter au Volume II,
5 paragraphe 64 et paragraphe 133 -- 53, pardonnez-moi, où ces questions sont
6 abordées -- à savoir, relatives au Témoin K90.
7 Et contrairement aux arguments présentés ce matin, le Témoin K73 a
8 effectivement parlé d'ordres qui visaient à nettoyer des régions des
9 Albanais du Kosovo, et ceci est clairement indiqué dans le jugement, dans
10 le Volume II, paragraphe 176.
11 Pendant ces opérations, la VJ et le MUP ont traversé la vallée de la Reka
12 du nord au sud en deux jours, en terrorisant et chassant tous les
13 habitants. Madame, Messieurs les Juges -- Madame, Messieurs les Juges, sur
14 vos écrans, vous trouverez maintenant la pièce de l'Accusation, le P326.
15 Ceci a été utilisé en présence de plusieurs témoins. Ceci a été versé au
16 dossier par le truchement du Témoin Nike Peraj. Comme vous pouvez le
17 constater, il s'agissait là d'une opération conjointe. Sur les flancs de la
18 vallée, il y avait les positions de la VJ et du MUP, et l'opération s'est
19 déroulée directement devant le poste de commandement avancé de la VJ. Il y
20 avait le poste de commandement du MUP. Et des groupes ou des unités de
21 soldats de la VJ et du MUP sont descendus en la vallée en l'espace de deux
22 jours. Et sur la carte, vous pouvez constater à quel endroit l'opération
23 s'est arrêtée le 27 avril 1999, et ensuite s'est poursuivie le 28 en
24 forçant les civils à descendre dans la vallée.
25 Le premier jour, l'unité de K73 "a chassé des centaines d'Albanais du
26 Kosovo et a mis le feu à leurs maisons," Volume II, paragraphe 229. La VJ
27 et les forces du MUP ont encerclé des villages, ordonnant aux femmes de
28 partir pour se rendre en Albanie, et ensuite ils ont abattu les garçons et
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1 les hommes. Leurs maisons ont été brûlées. Et aux points de contrôle de la
2 VJ et du MUP qui avaient été installés dans la partie sud de la vallée,
3 tout homme restant a été séparé, et les cartes d'identité des femmes et des
4 enfants ont été saisies avant que ces derniers ne soient forcés à se rendre
5 en Albanie, et leur vie était menacée.
6 Madame, Messieurs les Juges, comme vous pouvez le lire, j'ai parlé des
7 postes de contrôle. J'ai indiqué ceci par un cercle sur la carte, et les
8 lignes rouges indiquent les deux colonnes de réfugiés. Comme je l'ai
9 décrit, il s'agissait d'Albanais du Kosovo.
10 Le faut de nettoyer complètement ces villages s'est déroulé malgré le fait
11 qu'il n'y avait pas de présence significative de l'ALK, Volume II,
12 paragraphe 230. Quatre soldats de la VJ qui ont été impliqués ont dit dans
13 leur déposition qu'ils avaient reçu des ordres aux fins de chasser par la
14 force la population civile albanaise du Kosovo de la vallée. Ceci est
15 abordé au Volume II, paragraphes 169, 173, 176 et 230.
16 La déposition de K73, qui est citée au Volume II, paragraphe 1 172,
17 confirme que les ordres précisaient ce qu'on demandait de lui lors de ces
18 opérations conjointes et qu'il s'agissait de ne pas prendre pour cible
19 l'ALK. Pardonnez-moi, je dois me reprendre, il s'agit du Témoin K73. Je
20 dois corriger mon erreur.
21 Les consignes qui avaient été reçues par le Témoin K73 étaient comme suit :
22 "…nous les avons tous chassés, depuis le bébé qui se trouvait dans son
23 berceau jusqu'aux personnes âgées qui étaient dans leurs chaises
24 roulantes."
25 Le général Lazarevic a rendu visite à la 125e Brigade motorisée le 29 avril
26 1999, donc immédiatement après leur participation à l'opération de la
27 vallée de la Reka. Zivanovic a fait un rapport à Lazarevic à propos de
28 cette opération, paragraphes 842 et 856 du Volume III. Lazarevic n'a pris
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1 aucune mesure contre les forces de la VJ qui avaient participé aux
2 expulsions complètes et forcées dans la vallée de la Reka, paragraphe 870
3 du Volume III. Et une fois de plus, après cette opération de la vallée de
4 la Reka, les opérations conjointes ont continué sans aucune modification,
5 sans aucune entrave. Par exemple, nous avons eu l'action conjointe menée
6 par la VJ et le MUP contre le village de Dubrava en mai 1999 pour laquelle
7 nous retrouvons exactement le même comportement. Les villageois ont soit
8 fui, pris par la peur, ou ont été tués, et notamment ont été tués une femme
9 et un enfant, paragraphes 1 141 et 1 149 du Volume II.
10 Les opérations à Orahovac et dans la vallée de la Reka ne sont que deux
11 exemples qui illustrent mon propos, à savoir comment, en fait, les
12 opérations conjointes menées par la VJ et le MUP avaient pour objectif
13 d'attaquer la population albanaise. Le Volume II est truffé de ce type
14 d'exemples et couvre 13 municipalités sur tout le territoire du Kosovo.
15 L'assistance considérable, l'encouragement et le soutien moral du général
16 Lazarevic visaient ces opérations conjointes qui traitaient l'ensemble de
17 la population albanaise du Kosovo comme l'ennemi. Lorsque le général
18 Lazarevic a planifié et exécuté ces opérations, lorsqu'il a envoyé des
19 troupes et des armes dans ces zones où il n'y avait pas de présence de
20 l'ALK ou très peu de présence de l'ALK, lorsqu'il a inspecté les troupes
21 sur le terrain, troupes qui venaient juste de mener à bien des expulsions
22 forcées, lorsqu'il n'a pas pris de mesures contre ces déplacements forcés,
23 paragraphe 925 du Volume III, il était absolument manifeste ce qui était
24 visé par son assistance. Il n'y a aucune façon de penser qu'il aurait pu
25 croire qu'il aidait une guerre légitime. Il savait que son assistance
26 facilitait de façon considérable la campagne d'expulsions forcées.
27 Pour ces raisons, la Chambre d'appel ne devrait pas accepter les arguments
28 présentés par le général Lazarevic suivant lesquels il n'a fait que
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1 contribuer à l'effort de guerre de son pays. Il est absolument manifeste
2 qu'en tant que commandant de la VJ sur le terrain, ses contributions
3 visaient précisément à faciliter la commission de ces crimes pour lesquels
4 il a été condamné. Le général Lazarevic a participé de façon personnelle et
5 a été très proche, il y a un lien direct, un lien de culpabilité entre ses
6 contributions et les crimes.
7 Madame, Messieurs les Juges, mon estimé confrère ce matin a présenté une
8 suggestion, à savoir que le général Lazarevic se contentait tout simplement
9 de s'acquitter de ses fonctions. Et je souhaiterais indiquer que dans le
10 paragraphe 189 de l'arrêt Blagojevic, la Chambre d'appel a précisément
11 indiqué que lorsque quelqu'un contribue sciemment à la commission d'un
12 crime, le fait que cela se fait dans le cadre d'un devoir ou d'une
13 obligation ou d'une fonction ne signifie pas pour autant que cette personne
14 n'est pas responsable.
15 Je dois rectifier quelque chose que j'ai dit ce matin, je parlais de ce que
16 mon estimé confrère avait dit à propos du paragraphe 906 du jugement. Il se
17 peut que j'ai dit -- il s'agit du Volume III, je le précise. Alors, il se
18 peut que j'aie fait allusion à une conclusion d'intention qui se trouverait
19 dans ce paragraphe, ce qui n'est pas exact. Ce dont il s'agit en fait, et
20 ce qui est indiqué, c'est que le général Lazarevic était informé des actes
21 de violence et d'expulsions. Et pour ce qui est également de l'évaluation
22 des éléments de preuve ou de la déposition du Témoin K90, cela se trouve
23 non pas au paragraphe 34, comme je l'avais dit, mais au paragraphe 74 du
24 Volume II.
25 Voilà pour ce qui est de ces rectifications, mais je dois vous dire
26 que j'en ai terminé avec la réponse de l'Accusation. J'ai également répondu
27 aux questions que vous nous avez posées. S'il y a des questions que je n'ai
28 pas abordées aujourd'hui, je vous renvoie aux réponses très détaillées que
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1 vous trouverez dans le mémoire de l'Accusation pour le général Lazarevic.
2 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.
3 Y a-t-il une réplique ?
4 M. BAKRAC : [interprétation] Oui, Madame et Messieurs les Juges, avec votre
5 permission.
6 Mon estimé confrère M. Marcussen a traité pour une bonne partie de sa
7 présentation de la jurisprudence du Tribunal, ainsi que de la jurisprudence
8 concernant une question précise, celle de la notion de visée précisément à.
9 Il a abordé la question de savoir si l'élément matériel attribué à l'accusé
10 pour aide et encouragement devait comprendre ou non cette notion. Alors, il
11 est évidemment très difficile, juste après une telle présentation au cours
12 de laquelle mon confrère M. Marcussen a fait tant de citations et a analysé
13 en détail la jurisprudence, il est donc très difficile au débotté de
14 répondre avec des arguments de jurisprudence. Je vais malgré tout essayer
15 de vous faire part de ma position sur ces points de façon évidemment
16 limitée, puisque je n'ai d'autre choix que de prendre position
17 immédiatement après la fin de la présentation de M. Marcussen.
18 Alors j'ai l'impression, et peut-être que je me trompe, auquel cas je vous
19 prie de m'en excuser, mais il me semble que la jurisprudence du TPIY, ainsi
20 que celle du droit international coutumier en ce qui concerne la notion de
21 visée précisément à est unique, et qu'il en découle justement l'arrêt dans
22 l'affaire Perisic, et il me semble sur la base de l'ensemble de la
23 présentation de M. Marcussen que c'est la position qui est en ressort, et
24 je ne peux pas être d'accord avec cette position, parce que la
25 jurisprudence n'est pas monolithique à cet égard. L'arrêt de la Chambre
26 d'appel dans l'affaire Perisic n'est pas le seul arrêt ou jugement qui se
27 soit penché sur cette question. Et avec votre permission, je voudrais
28 brièvement me pencher sur des exemples qui n'ont pas été cités par mon
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1 estimé confrère. Donc, la Chambre d'appel à plusieurs reprises a défini
2 l'élément matériel de la complicité par aide et encouragement comme étant
3 des actes visant précisément à aider, à encourager ou à fournir un soutien
4 moral aux auteurs principaux d'un crime, actes qui ont eu un effet
5 important sur l'exécution du crime. En disant ceci, je me réfère au
6 paragraphe numéro 229 de l'arrêt dans l'affaire Tadic; au paragraphe 102 de
7 l'arrêt Vasiljevic; au paragraphe 127 de l'arrêt Blagojevic; et au
8 paragraphe 49 de l'arrêt Kvocka; ainsi qu'au paragraphe 45 de l'arrêt
9 Blaskic; au paragraphe 52 de l'arrêt Rukundo, et -- alors, excusez-moi.
10 Mais je suis passé à un examen de la jurisprudence d'où l'on voit
11 émerger une approche cohérente de la Chambre d'appel en ce qui concerne ce
12 critère, ce critère de visée précisément à. Il a été précisé, défini pour
13 la première fois dans l'arrêt Tadic, mais cette notion de visée précisément
14 à continue d'être incluse dans le raisonnement à l'appui de l'élément
15 matériel de la complicité pour aide et encouragement, tel qu'il figure dans
16 d'autres jugements et arrêts. Par ailleurs, la Cour pénale internationale,
17 elle aussi nous donne des indications, et j'attire votre attention en fait
18 sur l'arrêt Rukundo, paragraphe 52, qui aborde également la question de
19 visée précisément à, ainsi que l'affaire Kalimanzira, arrêt, paragraphes 74
20 et 86, l'affaire Muguniya [phon] - et excusez-moi si je prononce peut-être
21 mal les noms - arrêt, paragraphe 79; l'affaire Seromba, arrêt, paragraphe
22 numéro 47; affaire Nahimana, arrêt, paragraphe 482; et affaire
23 Ntakirutimana, arrêt, paragraphe 530. Excusez-moi, encore une fois, si j'ai
24 mal prononcé le nom de l'affaire Ntakirutimana.
25 Donc, il a de nombreux arrêts rendus par la Chambre d'appel qui se
26 sont penchés sur cette question de visée précisément à, et ont traité ce
27 sujet.
28 Alors, mon estimé confrère, M. Marcussen, a en fait même essayé de
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1 simplifier l'un des critères requis en la matière, celui de la distance
2 entre le complice allégué et l'auteur matériel, en suggérant que tout
3 auteur qui se trouverait éloigné du lieu de la commission du crime serait
4 par là, même, en quelque sorte exonéré de sa responsabilité. J'affirme
5 qu'une telle position est pour le moins simpliste, car la distance n'est
6 que l'un des éléments qu'il convient de déterminer. Il est tout à fait
7 clair que même quelqu'un qui se trouve loin du lieu de la commission d'un
8 crime peut remplir les critères requis, tant du point de vue de l'élément
9 matériel que de l'élément moral pour le crime de complicité par aide et
10 encouragement.
11 Cependant, il est nécessaire d'établir également tous les autres
12 éléments constitutifs de l'élément matériel et de l'élément moral.
13 L'application de ce principe serait complètement privée d'effet si l'on
14 considérait que la simple distance au lieu de commission du crime
15 permettait d'exonérer quelqu'un, d'exonérer un auteur de sa responsabilité.
16 M. Marcussen a même dit en parlant de -- excusez-moi, Madame et Messieurs
17 les Juges. Concernant la jurisprudence portant sur ce principe de visée
18 précisément à, sauf le respect dû, j'estime que M. Marcussen n'a pas
19 présenté une argumentation adéquate compte tenu du fait que ce sujet est
20 largement traité par les tribunaux internationaux et qu'il s'agit d'une
21 institution très bien connue du droit international coutumier qui doit donc
22 être appliquée dans les situations d'infraction au pénal, dont la présente
23 Chambre d'appel a à connaître.
24 Par ailleurs, mon confrère, M. Marcussen, a également abordé le fait
25 que nous, dans notre présentation orale, nous avons fait une référence à la
26 question du critère de la finalité dans le cadre de l'élément moral en nous
27 référant au Statut de Rome, article 25, alinéa 3(C). La Défense estime
28 qu'elle n'a pas outrepassé les moyens d'appel qu'elle avait déjà présentés
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1 parce que l'un de nos moyens d'appel concerne précisément la conclusion
2 erronée de la Chambre de première instance selon laquelle l'élément moral
3 de l'accusé Lazarevic concernant la complicité par aide et encouragement
4 aux crimes d'expulsion et de transfert forcé prend en compte cela. Le
5 critère de la finalité a été appliqué dans d'autres jugements et arrêts,
6 par exemple, l'administration transitoire des Nations Unies en 2000, qui a
7 introduit une jurisprudence nouvelle, et je crois que c'était tout à fait
8 justifié que la Défense se réfère à cet élément dans le cadre de la mens
9 rea et que cela va également dans l'intérêt de la justice, que cela
10 n'excède pas, ne sort pas du cadre de ce que nous avons présenté dans notre
11 mémoire de l'appelant.
12 Ensuite, mon confrère, M. Marcussen, a dit au tout début que Me
13 Cepic, en présentant l'appel, aurait fait état d'éléments de preuve non
14 pertinents en avançant l'exemple de Srbica, et en avançant des dates aux
15 mois d'avril et de mars 1999. Il a avancé également que nous aurions commis
16 une erreur quant à la période pertinente pour ces événements. Mais Me Cepic
17 a présenté ce qu'il y avait précisément de contradictoire pendant la
18 période pertinente couverte par l'acte d'accusation. Par exemple, le
19 paragraphe 905 du Volume III cite en exemple le 28 mars 1999, et le secteur
20 de Srbica précisément. Cet argument du Procureur ne résiste pas à l'examen.
21 Tous les autres éléments de preuve cités concernent des extraits tout à
22 fait pertinents du jugement. L'Accusation n'a donc fourni aucun argument
23 par lequel elle aurait étayé ses affirmations au sujet des sanctions
24 disciplinaires et des mesures visant à faire la lumière sur les crimes
25 commis. Nous vous avons présenté de nombreux éléments de preuve directs
26 dont il est difficile de retrouver l'équivalent dans tout autre affaire
27 devant ce Tribunal. Ces éléments de preuve montrent clairement que le
28 général Lazarevic a entrepris tout ce qui était en son pouvoir afin de
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1 traduire en justice tous les auteurs de crimes présumés appartenant à la
2 VJ. Quant à la responsabilité pour faire diligence et engager les
3 procédures nécessaires, la suite des procédures judiciaires nécessaires,
4 elle incombait aux organes du système judiciaire, ce qui ne peut mener qu'à
5 une conclusion raisonnable, à savoir que le général Lazarevic a fait tout
6 ce qu'il pouvait pour agir conformément à la loi et à la constitution.
7 Lorsque l'on prend ainsi toutes les mesures possibles pour que soient
8 traduits en justice les auteurs de crimes et que de telles procédures au
9 pénal sont censées être engagées par les organes judiciaires, eh bien, dans
10 une telle configuration, l'affirmation de mon confrère, M. Marcussen, selon
11 laquelle les mesures prévues par le droit international coutumier n'ont pas
12 été appliquées par le général Lazarevic ne résiste pas à l'examen.
13 Mon éminent confrère, M. Marcussen, a également dit que le général
14 Lazarevic assumait une responsabilité, entre autres parce qu'il a eu vent
15 des crimes qui avaient été commis en 1998. Il était au courant de
16 déplacements massifs et des transferts forcés en 1998, il a été au courant
17 du fait que des membres de la VJ qu'il avait prétendument utilisés en 1999
18 avaient coutume de commettre des crimes, chose qui a eu pour conséquence
19 des déplacements considérables de personnes. Ce type de constatations ne
20 tiennent pas debout, absolument pas. Je vais à ce titre vous renvoyer vers
21 quelques témoins de l'Accusation, des observateurs étrangers notamment,
22 dont la mission avait consisté justement en 1998 d'observer et d'assurer un
23 suivi de la situation sur le terrain. Et nous avons un témoin de
24 l'Accusation, M. Ciaglinski qui, en page 6 910 du compte rendu d'audience,
25 a dit que les activités de l'armée de Yougoslavie en zone limitrophe
26 étaient conduites de façon correcte. Je rappelle que la zone limitrophe,
27 c'est la zone où a séjourné le général Lazarevic en 1998 à l'époque en sa
28 qualité de chef d'état-major du Corps de Pristina.
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1 Ce Témoin Ciaglinski a dit qu'il a eu l'opportunité de lire bon
2 nombre de rapports établis par des membres de sa propre mission, et ces
3 rapports-là n'ont comporté aucune observation de faite à l'égard du
4 comportement de l'armée. Vous pouvez trouver cela en pages 6 894 à 6 895.
5 En janvier 1999, le Témoin Ciaglinski a témoigné pour dire qu'il a eu
6 l'occasion de s'entretenir avec des Albanais du cru à Junik, un village du
7 coin, qui lui ont dit personnellement qu'ils n'avaient eu aucun problème
8 avec les membres de l'armée. Vous pouvez trouver cela en page 6 896 du
9 compte rendu d'audience. Le Témoin Ciaglinski termine par une conclusion
10 qui est celle de dire que -- rétrospectivement, il peut dire que :
11 "Pendant tout mon séjour au Kosovo, l'armée de Yougoslavie avait eu
12 un comportement correct. Il n'y a pas eu d'utilisation disproportionnée de
13 la force jusqu'à ces quelques dernières semaines de mars 1999."
14 Ça se trouve en page du compte rendu 6 929.
15 Le Témoin Maisonneuve, un autre témoin de l'Accusation, a dit que son
16 expérience était celle d'avoir vu l'armée de Yougoslavie se comporter de
17 façon tout à fait professionnelle.
18 Le Témoin Shaun Byrnes, membre de la mission américaine, lorsqu'on
19 lui a demandé s'il y avait eu usage disproportionné de la force, mise à feu
20 de maisons, bombardements, et ce, notamment des cas de 1998, a répondu que
21 son impression était claire et qu'il pouvait le dire de façon tout à fait
22 claire, à savoir que l'armée de Yougoslavie n'était pas impliquée dans ce
23 genre d'activité. Il a ajouté que pendant la période de temps passé au
24 Kosovo par lui, s'agissant de l'année 1998 - je précise que c'était août et
25 tout le mois de septembre - personnellement, il n'a jamais eu l'occasion de
26 voir l'armée de Yougoslavie impliquée dans ce genre d'activité, et il n'a
27 jamais obtenu d'information en ce sens par ses subordonnés; je vous renvoie
28 vers la page 12 150 du compte rendu d'audience.
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1 Nombre d'éléments de preuve ont été avancés qui montrent qu'il n'y a
2 point de pièce à conviction qui, au-delà du doute raisonnable, ferait
3 conclure du fait que le général Lazarevic, en 1998, du fait de ses
4 fonctions de chef d'état-major du Corps de Pristina séjournant au poste de
5 commandement avancé à proximité de la frontière albanaise, aurait eu des
6 informations relatives à des exemples particuliers de recours
7 disproportionné à la force en 1998. Il n'y a pas d'élément de preuve qui
8 indiquerait que le général Lazarevic avait connaissance ou aurait dû avoir
9 connaissance de la teneur de cette Résolution 1199 qui, en octobre,
10 novembre 1998, avait mis en garde contre le recours à la force par les
11 forces de la RFY. Ce qui aurait été pertinent pour ce qui est du général
12 Lazarevic, c'était l'appréciation faite par le général Perisic au sujet
13 duquel l'Accusation avait dit que c'était un général renégat qui s'était
14 opposé à Milosevic et qui, dans la pièce à conviction 3D757, avait souligné
15 le 29 septembre 1998 qu'à l'occasion des opérations au Kosovo, l'armée de
16 Yougoslavie avait réalisé ses obligations pour combattre les terroristes,
17 et ce, de façon professionnelle. Il a ajouté que l'armée de Yougoslavie,
18 par le biais de son Corps de Pristina, avait entrepris toutes les mesures
19 nécessaires pour procéder à la défense du pays.
20 Madame, Messieurs les Juges, lorsque mon éminent confrère, M. Marcussen, a
21 parlé du général Lazarevic qui, en 1999, aurait utilisé l'armée, celle qui
22 en 1998 avait commis ce dont je viens de donner lecture à propos des
23 appréciations faites par des observateurs étrangers, il a commis une fois
24 de plus une erreur de taille. Parce que dans notre mémoire en appel, nous
25 avons proposé à la Chambre d'appel une quantité innombrable d'éléments de
26 preuve démontrant justement le fait qu'en 1999, lorsqu'on s'attendait à
27 voir le début de l'agression des forces de l'OTAN contre la RFY, l'état-
28 major principal de l'armée de Yougoslavie a pris la décision de procéder au
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1 complètement des effectifs du Corps de Pristina. Je précise que c'est un
2 témoin de l'Accusation, le colonel Zyrapi, qui était chef d'état-major de
3 l'ALK, qui a dit lui-même qu'en début des frappes aériennes de l'OTAN,
4 l'ALK avait compté deux fois plus d'effectifs que le Corps de Pristina. Le
5 Corps de Pristina, en 1998, comptait 10 000 soldats. Par un complètement
6 des effectifs suite à décision de l'état-major principal de l'armée de
7 Yougoslavie, ce chiffre a augmenté à 50 000. Donc ce fait ne saurait étayer
8 la thèse avancée par l'Accusation qui serait celle d'affirmer que le
9 général Lazarevic avait utilisé des effectifs pour lesquels il savait que
10 c'étaient des gens qui avaient commis des crimes en 1998. D'abord, il ne
11 pouvait pas, de par ses fonctions et de par ses compétences, le faire; et
12 deuxièmement, en 1999, lorsque la campagne de l'OTAN a été lancée, l'état-
13 major principal de l'armée de Yougoslavie - chose que nous avons précisé
14 dans le détail dans notre mémoire en appel - a procédé à des complètements
15 considérables en effectifs de ce Corps de Pristina. Il a démultiplié ces
16 effectifs.
17 Pour ce qui est de ce que mon éminent confrère Marcussen a également
18 précisé vers la fin de son exposé, à savoir un incident qui s'est produit
19 au village de Celine et la participation alléguée de l'armée de Yougoslavie
20 dans la perpétration de crimes à ce site. Dans notre mémoire en appel,
21 paragraphe 952, nous analysons de façon détaillée les éléments de preuve
22 liés à l'incident en question. Et je voudrais renvoyer les Juges de la
23 Chambre d'appel vers un fait : M. Zyrapi, chef d'état-major de l'ALK, avait
24 précisé que c'étaient des attaques qui étaient lancées contre des positions
25 de l'ALK, site de Pirane, un village voisin de Celine. Je cite :
26 "Dans ce secteur commençant par Pirane allant vers le carrefour de
27 Djakovica et Bela Crkva, l'attaque a été lancée tôt le matin le 25 mars
28 1999, et il y a eu des activités de combat. Je tiens à préciser ceci. Avant
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1 que les attaques à l'artillerie n'aient commencé" -- non. "Suite à
2 l'attaque à l'artillerie," je me corrige, "nous avons souhaité que la
3 population de cette région soit déplacée de là pour des raisons de
4 sécurité. Les effectifs de l'ALK avec la population ont commencé à se
5 retirer."
6 Donc le chef de l'état-major de l'ALK, au sujet de l'incident
7 mentionné par mon éminent confrère - pour dire que ça avait été dirigé
8 uniquement contre la population civile - lui, dit que c'étaient là des
9 effectifs de l'ALK et qui ont commencé à se retirer ensemble avec la
10 population civile. Et pour finir, puisque le temps ne me le permet peut-
11 être pas, mais j'espère avoir quand même cinq minutes encore à ma
12 disposition.
13 Je dirais donc en ce peu de temps que la Défense, dans son mémoire en
14 appel --
15 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je crois que vous devez terminer en
16 l'espace de cinq minutes parce que nous allons devoir lever l'audience. Et
17 nous allons lever l'audience à 4 heures moins 5.
18 M. BAKRAC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Non, non,
19 j'avais pris peur de ne pas vous avoir volé quelques minutes de votre temps
20 par inadvertance. Mais là, ça va.
21 Le dernier des arguments que mon éminent confrère, M. Marcussen, a
22 présenté, c'est cette opération dans la vallée de la Reka. Et dans cette
23 opération-là, il y a des analyses détaillées de fournies par la Défense
24 dans son mémoire en appel. Et pour ce qui est du temps qu'il me reste
25 encore, je voudrais juste encore évoquer ce que mon confrère Marcussen a
26 dit. Il a dit que suite à cette opération, le général Lazarevic est parti
27 vers la 125e Brigade motorisée qui se trouvait avoir assuré un blocus
28 partiel dans cette opération. Alors, il a précisé que le commandant
Page 480
1 Zivanovic lui avait présenté son rapport mais que le général Lazarevic
2 n'avait entrepris aucune mesure pour sanctionner les auteurs de crimes.
3 Alors, dans le dossier de l'affaire, vous allez retrouver le rapport
4 du commandant Zivanovic et vous allez remarquer que dans ce rapport il n'y
5 a pas un seul mot qui indiquerait que la 125e Brigade motorisée aurait pris
6 part à un crime. On ne mentionne pas qu'il y ait eu perpétration de crime
7 du tout. Le général Lazarevic, donc, n'a pas obtenu de la part de ce
8 commandant en charge de ce secteur d'information qui dirait que dans cette
9 opération de blocus réalisée par la 125e Brigade motorisée il y aurait eu
10 des crimes de commis. Par conséquent, il n'avait pas pu savoir que des
11 actions auraient ou devaient être entreprises par ses soins.
12 Enfin, mon confrère, M. Marcussen, a réitéré ses allégations pour dire que
13 le général Lazarevic avait étroitement collaboré dans l'élaboration des
14 plannings avec le commandant Pavkovic. Est-ce que vous pouvez imaginer une
15 armée au monde, quelle qu'elle soit, où le commandant d'un corps d'armée ne
16 coopère pas avec le commandant de l'armée -- ou où le commandant de l'armée
17 ne coopèrerait pas avec le chef de son état-major ? Mais c'est une chose
18 tout à fait logique. La question qui se pose est seulement celle de savoir
19 quel est le segment de cette coopération qui se trouverait être contraire à
20 la loi ou à la constitution, quel segment de cette coopération se
21 trouverait être orienté contre des personnes civiles ? C'est la question à
22 laquelle n'a pas répondu le jugement en première instance. Et c'est la
23 question à laquelle l'Accusation n'a pas pu nous pointer du doigt dans sa
24 réponse. Alors, suffit-il de dire seulement que le général Lazarevic a
25 étroitement coopéré avec le général Pavkovic ? Mais bien sûr qu'il l'a
26 fait. Le général Pavkovic était le commandant de la 3e Armée et le général
27 Lazarevic était son subordonné à la tête du 3e Corps. Est-ce que le fait de
28 faire partie d'une hiérarchie est un délit au pénal ? Est-ce que conduire
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1 la guerre est un délit au pénal ? Et je crois que là, l'Accusation, dans sa
2 réponse à notre mémoire en appel, ne vous a pas aidés à trouver des
3 arguments pour ce qui est du jugement en première instance qui
4 indiqueraient que la seule conclusion raisonnable à tirer, au vu de la
5 totalité des éléments de fait, indiquerait que le général Lazarevic aurait
6 aidé, aurait apporté son soutien aux crimes d'expulsion ou de transfert
7 forcé.
8 Merci, Madame et Messieurs les Juges.
9 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, Maître Bakrac.
10 M. CEPIC : [interprétation] Juste une petite rectification à apporter au
11 compte rendu d'audience. Ligne 15 de la page 24 [sic], il faudrait en fait
12 remplacer le mot "supérieur" par "subordonné".
13 M. LE JUGE LIU : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.
14 Et je pense que nous sommes arrivés au terme de cette audience pour
15 aujourd'hui. Nous allons donc lever l'audience jusqu'à demain matin, 9
16 heures 30.
17 --- L'audience est levée à 15 heures 55 et reprendra le jeudi, 14 mars
18 2013, à 9 heures 30.
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