Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 3 septembre 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 33.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous dans ce

  6   prétoire et autour de ce dernier.

  7   Monsieur le Greffier, veuillez appeler l'affaire, je vous prie.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,

  9   Messieurs les Juges. Affaire IT-09-92-T, le Procureur contre Ratko Mladic.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'il n'y a pas de question préliminaire,

 11   je vous demanderais que l'on fasse entrer le témoin dans le prétoire.

 12   Oui, Madame Lee.

 13   Mme LEE : [interprétation] J'ai deux documents, Monsieur le Président, que

 14   vous avez mentionnés hier. Je crois qu'il s'agissait de D349 et de D353. Et

 15   je voulais dire, pour vous informer, que nous n'allions pas soulever

 16   d'objection quant à ces documents.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien. D0 -- D349 et D353 sont

 18   versées au dossier.

 19   Mme LEE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 20   [Le témoin vient à la barre]

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Baraybar. Veuillez

 22   prendre place.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour et merci.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais vous rappeler que vous êtes

 25   encore tenu par la déclaration solennelle que vous avez présentée hier

 26   avant donner votre témoignage. Me Stojanovic continuera maintenant son

 27   contre-interrogatoire.

 28   Vous avez dit, Maître Stojanovic, avoir besoin d'une demi-heure. Est-ce


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  1   toujours le cas ? Fort bien. Alors, vous pouvez commencer.

  2   M. STOJANOVIC : [interprétation] C'est exact.

  3   LE TÉMOIN : JOSE BARAYBAR [Reprise]

  4   [Le témoin répond par l'interprète]

  5   Contre-interrogatoire par M. Stojanovic : [Suite]

  6   Q.  [interprétation] Professeur, avant la fin de l'audience hier, nous

  7   avions abordé le sujet de Konjevic Polje 1 et 2. Il s'agit du document

  8   P2086 et c'est un document que je demanderais que l'on affiche de nouveau.

  9   C'est un rapport et c'est la page 24 qui m'intéresse tout particulièrement.

 10   Il y a une référence à Konjevic Polje 1, et il s'agit d'un site

 11   d'enfouissement. Nous avons la version anglaise à la page 24 [comme

 12   interprété]. Pourriez-vous, je vous prie, nous faire un commentaire sur

 13   l'avant-dernier paragraphe se trouvant sur cette page dans lequel vous

 14   constatez qu'après avoir dit dans le paragraphe précédent que certains

 15   corps; sinon, pas tous les corps ont été récupérés à l'aide d'une chargeuse

 16   pelleteuse et placée à une -- dans une autre fosse, vous avez remarqué la

 17   présence d'une poudre blanche n'appartenant pas à ce site et vous avez dit

 18   qu'il s'agissait fort probablement de -- qu'il s'agissait probablement de

 19   la chose.

 20   J'aimerais savoir si vous pouvez nous dire d'où pourrait provenir cette

 21   poudre blanche dans le site Konjevic Polje.

 22   R.  Nous avons recueilli cette poudre blanche. Nous n'étions pas

 23   responsables personnellement pour l'analyse de cette poudre. La poudre

 24   blanche a été remise aux officiers de la scène de crime et j'aimerais vous

 25   rappeler que la poudre blanche telle que celle-ci ressemblait à la chaux et

 26   que ce type de poudre blanche a été trouvée sur d'autres sites également,

 27   tels par exemple, Glogova, je crois et en fait, il s'agissait d'un poudre

 28   qui avait été trouvée dans une -- dans un sac qui a été jeté dans la fosse.


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  1   Q.  Est-ce que la présence de la chaux pourrait porter à croire que l'on a

  2   essayé de désinfecter l'espace en question ?

  3   R.  Nous croyons que la chaux, en fait, neutralise la puanteur des corps en

  4   décomposition. Et certaines personnes pensent qu'il s'agit de désinfection,

  5   mais c'est simplement quelque chose que l'on croit de manière populaire,

  6   mais ça n'a rien à voir avec cela, parce que la chaux, en fait, détruit les

  7   corps en les brûlant. Et il ne s'agit pas de combustion de feu, mais il y a

  8   un élément commun chimique et en fait, il est -- la chaux est utilisée de

  9   manière -- souvent, mais en réalité, c'est pour détruire l'odeur. Et en

 10   fait, la chaux peut former [inaudible] une croûte par-dessus les corps et

 11   les corps qui se trouvent en dessous des corps supérieurs sont mieux

 12   préservés grâce à une série de processus. Mais en fait, la chaux crée une

 13   croûte solide et les corps sont mieux préservés à l'intérieur. Mais d'autre

 14   part, on pourrait également dire que les Corps ne vont pas sentir autant.

 15   Mais la vraie utilisation de la chaux, dans ce contexte, est

 16   vraisemblablement utilisée pour brûler les restes humains, parce qu'il

 17   s'agit d'une chaux active. Et c'est vraiment la raison principale. Il

 18   s'agit d'une chaux rapide et c'est cela qui est la raison de l'utilisation

 19   de cette chaux à cet endroit-là.

 20   Q.  Avez-vous réfléchi à la possibilité que justement, cette chaux ait pu

 21   être utilisée pour ratisser ou nettoyer ce secteur, mais également les

 22   fosses ?

 23   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète : Veuillez remplacer "chaux rapide" par

 24   "chaux vive". Reprise des débats.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans mon expérience à moi, la chaux est

 26   utilisée comme un accélérateur pour décomposer les corps. Et les gens, dans

 27   ma partie du monde à moi, de toute façon, utilisent la chaux normalement

 28   pour essayer de neutraliser l'odeur et je ne crois pas que en réalité, la


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  1   chaux soit utilisée pour nettoyer ou pour désinfecter l'endroit en

  2   question. Il s'agit plutôt d'une question d'odeur, plus qu'autre chose.

  3   M. STOJANOVIC : [interprétation]

  4   Q.  Et maintenant, prenons la page 6 de ce document en anglais et en B/C/S.

  5   Professeur, j'aimerais que l'on se penche sur Glogova 2. Est-ce que vous

  6   êtes d'accord avec moi pour dire qu'il s'agit d'une fosse commune primaire

  7   identifiée qui se trouve tout prêt de l'axe de communication Konjevic

  8   Polje-Bratunac ? Pourriez-vous, je vous prie, afficher la page 6 en B/C/S

  9   et en anglais.

 10   La question est la suivante : Seriez-vous d'accord pour dire qu'il s'agit

 11   d'une fosse commune primaire identifiée et qu'elle se trouve non loin de

 12   l'axe de communication menant à Bratunac, l'axe de communication Konjevic

 13   Polje-Bratunac ?

 14   R.  Oui. Il y a des sites ou plutôt des fosses primaires trouvées à cet

 15   endroit-là, effectivement.

 16   Q.  Est-ce qu'à quelque moment que ce soit, vous avez pu analyser ou vous

 17   a-t-on informé des sites où ces personnes ont trouvé la mort et liés à

 18   cette fosse Glogova 2 ? Vous a-t-on dit d'où provenaient les corps enterrés

 19   à cet endroit et où ces personnes ont été tuées ?

 20   R.  A l'époque, je n'avais pas été informé de ce genre de détails. Mais

 21   maintenant, je sais, plusieurs années plus tard, qu'il existe un lien entre

 22   Glogova et d'autres sites. Mais à l'époque, je ne savais pas -- je n'avais

 23   pas plus d'éléments d'information que cela. Je savais simplement qu'il y

 24   avait des fosses dans la région et c'est tout.

 25   Q.  Et nous voyons maintenant un détail, si vous pouvez voir ce détail vers

 26   le milieu de la page, troisième paragraphe à partir du haut de la page, que

 27   l'on a retrouvé chez une personne, une montre indiquant vendredi 15, le

 28   vendredi -- et vous nous avez dit hier qu'à d'autres endroits, vous avez


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  1   également rencontré ce genre de situation.

  2   R.  Et c'est tout à fait vrai, mais je voudrais ajouter que, dans le même

  3   rapport, quelques pages plus bas, vous trouvez que d'autres montres ont

  4   également été retrouvées dans la même fosse, des montres ayant une

  5   combinaison de journée et de date montrant samedi le 15. Et donc ce que je

  6   veux dire, c'est que nous avons la même date mais nous n'avons pas la même

  7   journée, et dans certains cas, nous avons retrouvé la même marque de

  8   montre, ce sont des montres Seiko.

  9   Q.  Vous avez tout à fait raison, Professeur, nous avons vu de tels

 10   rapports effectivement en parlant des fosses sur lesquelles vous avez

 11   travaillé. Mais ce qui m'intéresse d'un point de vue de votre profession

 12   c'est ce qui figure au paragraphe suivant où vous avez constaté que 73

 13   entiers ou presque entiers ont été retrouvés, et que la plupart des corps

 14   montrent des fractures d'os multiples, et que chez certains corps il y

 15   manque que des membres inférieurs ou supérieurs.

 16   Donc d'un point de vue professionnel, pourriez-vous nous dire quel

 17   type d'armes cause ce genre de blessures normalement ?

 18   R. D'un point de vue de ma profession, et lorsque je me penche sur

 19   l'analyse de ces restes, car cela n'est pas indiqué dans le rapport, je

 20   n'ai pas indiqué dans le rapport le mécanisme qui a causé les blessures, je

 21   dirais que ce type de blessures correspondent aux blessures d'explosion.

 22   Donc un explosif est la cause de ce type de blessure. Il s'agit

 23   d'amputation, si vous voulez, d'amputation traumatique de membre, et il

 24   s'agit également de membres ayant été détruits de cette manière-là.

 25   Q.  Pourrait-il s'agir de mine antipersonnel, par exemple,

 26   d'infanterie, aurait-on pu par exemple marcher sur une mine antipersonnel

 27   et se retrouver avec de telles blessures ?

 28   R. Lorsque je fais référence aux blessures par explosion, je fais


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  1   référence à une série de choses, je parle de grenades à main, de mines

  2   antipersonnel ou d'autres types d'explosifs. Toutefois, je m'en livrerais à

  3   des conjectures si je disais qu'un seul, un seul objet explosif est

  4   responsable pour ce type de blessures, parce que je ne me penche pas sur un

  5   seul rapport. Mais toutefois, ce dont je me souviens c'est que, je me

  6   souviens que dans ce rapport, il y a, on parle d'une amputation qui n'est

  7   pas chirurgicale pour l'une de ces personnes, donc que les membres ont été

  8   amputés de manière traumatique et non pas chirurgicale, et que la fracture

  9   a été causée par une explosion. Donc il ne s'agit pas seulement d'une

 10   explosion, il y a un élément d'explosion mais il y a également une

 11   explosion de feu, parce que certains membres ont été brûlés. Donc

 12   l'incendie, le feu aurait pu être causé par une explosion. Je ne fais pas

 13   allusion au fait que, le fait que certaines parties du corps aient été

 14   brûlées soit en lien avec l'explosion mais il pourrait s'agir de deux

 15   événements différents. Donc je peux répondre par l'affirmative à votre

 16   question, mais je me livrerais à des conjectures si je ne regarde pas le

 17   rapport particulier pour chacune de ces personnes. Vous savez lorsqu'on

 18   parle de blessures, c'est un mécanisme qui veut dire beaucoup de choses.

 19   Donc une explosion est un mécanisme générique si vous voulez. Lorsque je

 20   parle de blessures par balle, je ne mentionne pas non plus de quel type

 21   d'arme il s'agit.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Baraybar, je suis quelque

 23   peu perplexe. La question qui vous a été posée était la suivante :

 24   "La plupart des corps représentaient des os fracturés à de multiples

 25   endroits, et certains corps, pour certains corps des membres inférieurs et

 26   supérieurs étaient manquants."

 27   Donc vous avez donné une explication concernant ce qui aurait pu

 28   causer le fait que des membres soient manquants, mais vous n'avez pas


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  1   répondu à la question quant aux blessures aux os, car vous avez dit que

  2   certains os étaient fracturés à de multiples endroits. Donc je ne sais pas

  3   comment comprendre votre question ? Vous êtes très prudent lorsque vous

  4   donnez vos conclusions, et presque pour dire que ces blessures ont fort

  5   probablement été causées par une explosion.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, effectivement, il y a un lien entre

  7   les os fracturés de manière multiple, et les membres manquants. Par

  8   exemple, vous voyez une partie de l'arme qui est fracturée, qui n'est pas

  9   brûlée mais il n'y a pas d'arme, et donc l'agent explosif n'a pas une

 10   causalité entre la fracture et l'absence de membre.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et le fait de retrouver des os

 12   fracturés, est-ce que cela aurait pu être causé par le transport de l'engin

 13   lourd ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsqu'on a examiné d'autres sites secondaires

 15   et tertiaires, et lorsqu'on nous avons vu que des membres ont été ou que

 16   des restes humains ont été brisés par un engin, il s'agit d'une machine qui

 17   ne se déplace pas rapidement, et donc il s'agit de différents types de

 18   fractures. Par exemple, lorsqu'il s'agit d'un explosif, c'est un engin à

 19   haute vélocité, et les blessures causées par une explosion sont

 20   différentes.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 22   Veuillez poursuivre, je vous prie.

 23   M. STOJANOVIC : [interprétation]

 24   Q.  Professeur, est-ce que vous avez appris que la fosse Glogova 2 était

 25   liée aux événements s'étant déroulés autour de l'entrepôt de Kravica ?

 26   R.  Oui, c'est exact.

 27   Q.  Professeur, le paragraphe suivant dit que d'autres corps ont été

 28   retrouvés dans un sol riche en végétation. Vous avez donc parlé de la


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  1   présence de ces corps dans ce sol. En particulier, pourriez-vous nous dire

  2   si cela correspond avec la structure du sol qui a été trouvé dans le site ?

  3   R.  Le Dr Brown a rédigé un rapport concernant le sol, et je sais que, dans

  4   le rapport, on a parlé d'une analyse de sol qui a été faite sur les

  5   sédiments par le Dr Brown, et l'on parle d'argile. 

  6   Q.  Et dites-moi, s'il vous plaît, Professeur, si s'agissant de l'argile,

  7   a-t-on trouvé l'argile autour de l'entrepôt de Kravica ?

  8   R.  Je ne le sais pas. Je peux vous parler de l'argile qui a été trouvée

  9   dans la fosse, mais je n'ai pas pris d'échantillon de sol autour de Kravica

 10   et Kravica. Je me suis rendu à cet endroit plusieurs années plus tard, mais

 11   je n'ai pas établi de lien avec ceci et je n'ai pas fait une analyse

 12   médico-légale de l'entrepôt même. Comme je l'ai dit, l'argile a été

 13   retrouvée dans la fosse et c'était déjà quelque chose qui était étranger au

 14   sédiment dans lesquelles les fosses ont été creusées pour y placer des

 15   corps. Et donc les corps sont déjà arrivés avec l'argile, mélangés à

 16   l'argile. Et c'est une conclusion à laquelle on est arrivé après avoir

 17   analysé le site. L'argile ne correspond pas du tout à cette zone.

 18   S'agissant maintenant du lien entre Kravica, et l'argile, je n'ai pas mené

 19   ce type d'enquête. Toutefois, j'ai les résultats du Dr Brown qui ont été

 20   utilisés pour parler justement de la présence de l'argile.

 21   Q.  Professeur, vous ne pouvez pas non plus, encore une fois, déterminer le

 22   moment où la mort de ces personnes a eu lieu ?

 23   R.  Je crois que nous en avons parlé à plusieurs reprises. Il est

 24   absolument impossible à l'examen des restes de dire si ces personnes sont

 25   mortes également six mois ou moins. Nous, sur une scène de crime, par

 26   exemple, récente vous avez un cadavre vous pouvez vous servir d'un certain

 27   nombre d'éléments pour établir le moment de la mort. Toutefois, ici il

 28   s'agit simplement d'une date approximative que l'on peut donner. Alors on


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  1   associe les cartes d'identité avec les noms qui ont été trouvés dans le

  2   livre du CICR des personnes portées disparues, et l'on compare le tout avec

  3   la date de disparition, si je ne m'abuse ceci figure au rapport, et que

  4   c'étaient des personnes qui étaient disparues entre le 11 et le 15 juillet

  5   1995. Et en archéologie on appelle cela un datage relatif. Et ceci est

  6   devenu un outil commun pour établir une date relative, comme je l'ai

  7   mentionné, par exemple, vous pouvez dire que des personnes n'aient pas pu

  8   manquer après le 15 juillet parce que ces personnes avec ces noms-là ont

  9   été vues pour la dernière fois le 15 juillet.

 10   Mais pour répondre à votre question, je réponds par la négative. Il

 11   n'est pas possible de dire à prime abord ces personnes sont mortes vendredi

 12   ou samedi ou dimanche. Non, ce n'est pas le cas.

 13   Q.  Merci, Professeur.

 14   M. STOJANOVIC : [interprétation] Je demanderais maintenant que l'on prenne

 15   la pièce P2090. Et je demanderais que l'on prenne la page 7 en B/C/S, page

 16   11 en anglais.

 17   Q.  Professeur, nous parlons du résumé du rapport sur les excavations

 18   menées à Zeleni Jadar 6. Vous parlez de ce que vous venez de dire là dans

 19   votre rapport et vous nous avez parlé que vous vous servez d'éléments qui

 20   vous permettent d'établir la mort de ces personnes, le moment approximatif

 21   de la mort de ces personnes. Et vous vous êtes également utilisé de ceci

 22   dans votre analyse.

 23   R.  Je ne sais pas. Vous vous souvenez dans le rapport nous avons parlé du

 24   moment de la mort et nous avons dit que les personnes avaient été enterrées

 25   à une certaine date, par exemple. Maintenant concernant les montres, nous

 26   avons pu déterminer la mort en regardant les montres qui fonctionnent avec

 27   l'oscillation du poignet. Mais il est exact de dire que l'identification

 28   des documents qui auraient été trouvés dans la fosse, auraient été recoupés


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  1   avec les livres des personnes portées disparues du CICR. Et si l'on

  2   retrouvait le nom de ces personnes dans le livre, des personnes portées

  3   disparues du CICR, ce livre permettait d'obtenir des informations quant à

  4   l'endroit et au moment où cette personne a été vue pour la dernière fois.

  5   Et c'était cette information qui nous permettait d'établir la chronologie

  6   relative des faits.

  7   Q.  Professeur, donc il s'agit de l'exemple que vous mentionnez ici dans

  8   votre rapport, vous avez également évoqué un nom car vous avez trouvé des

  9   données, et dans la base de données vous avez pu obtenir les informations

 10   que cet homme a été vu pour la dernière fois en vie le 12 juillet 1995 à

 11   Baljkovica, municipalité de Zvornik. Si je vous disais que Baljkovica se

 12   trouve à une distance d'au moins 50 kilomètres de Zeleni Jadar, est-ce que

 13   l'objet de votre enquête faisait état de l'analyse géographique ? Alors

 14   comment quelqu'un qui aurait pu être vu à Baljkovica le 12 juillet aurait

 15   pu être retrouvé ou ces fosses auraient pu être retrouvées dans une fosse

 16   secondaire tel Zeleni Jadar ?

 17   R.  N'oubliez pas que Zeleni Jadar, si je ne m'abuse, était un site

 18   secondaire en lien avec un des sites de [inaudible]. Autrement dit, le

 19   reste primaire viendrait de Glogova, ils avaient été enlevés de Glogova et

 20   déplacés à Zeleni Jadar. Donc ces personnes avaient été d'abord enterrées à

 21   Glogova et ensuite emmenées et apportées à Zeleni Jadar. Je ne sais pas

 22   quelle est la distance qui sépare la municipalité de Zvornik ou bien ces

 23   villages, et Glogova. En tout cas, il s'agit d'un site secondaire.

 24   Autrement dit, les corps ont été apportés d'un site dans un autre. Et puis

 25   je ne peux pas vous expliquer comment ces restes ont pu être transportés

 26   sur une distance de 50 kilomètres ceci dépasse complètement mes capacités.

 27   Je peux vous donner quelques possibilités. Je ne [inaudible] pas me lancer

 28   dans des conjectures. Cela étant dit, je ne pense pas que ceci a un intérêt


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  1   quelconque dans ce contexte.

  2   Q.  Merci, Professeur. Je vais terminer avec une question brève concernant

  3   le site Ravnice 1.

  4   Et je vais demander que l'on examine la pièce 52088, page 14 en

  5   anglais et en B/C/S. Vu que c'est un rapport, une analyse qui fait partie

  6   de votre rapport et qui date du mois de février 2001. Bon, d'après ce

  7   document, si j'ai bien compris, vous n'avez jamais été physiquement présent

  8   à cet endroit, ce site; est-ce exact ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Pouvez-vous nous dire si Ravnice 1 sont un site primaire ou secondaire,

 11   d'après les critères que vous avez adoptés ?

 12   R.  Je ne saurais vous répondre d'emblée. N'oubliez pas que Ravnice à

 13   l'époque était un site qui, si je ne m'abuse, a fait l'objet d'une enquête

 14   préliminaire. Donc moi, j'ai seulement eu affaire avec les restes sans

 15   avoir accès à d'autres informations. C'est quelque chose qui s'est produit

 16   en 2000 au retour de Kosovo et je suis allé en Bosnie, et j'ai effectué des

 17   travaux de laboratoire. Ravnice était un site d'exhumation préliminaire si

 18   mes souvenirs sont exacts. Et je pense qu'ils ont creusé une partie de

 19   cette tombe mais je n'ai pas suffisamment de détails. Et même au jour

 20   d'aujourd'hui, je ne saurais affirmer si Ravnice était lié à un autre site

 21   ou non.

 22   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Stojanovic, vous avez

 23   demandé une pièce, à voir une pièce. Est-ce que vous avez demandé à voir la

 24   pièce P52088 ou bien autre chose ?

 25   M. STOJANOVIC : [interprétation] P52088, et j'ai demandé à voir la page 14.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce bien une cote d'une pièce à

 27   conviction ? Parce que heureusement on n'en est pas encore arrivé au

 28   chiffre 52.


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a eu une erreur au niveau du compte rendu

  2   d'audience. Il s'agit de la pièce P2088.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Je suis rassuré.

  4   Page 14 de ce rapport.

  5   Q.  La question que j'ai voulu vous poser concerne cette analyse que vous

  6   avez effectuée. Avez-vous reçu des informations concernant le caractère

  7   même de ce site d'enterrement Ravnica 1, à savoir qu'il s'agissait d'un

  8   site d'enterrement en surface ?

  9   R.  Non.

 10   Q.  Est-ce que sur la base des restes que vous avez analysés, vous avez pu

 11   affirmer qu'il s'agissait de corps qui étaient enterrés ou bien des corps

 12   qui étaient restés à la surface.

 13   R.  Si mes souvenirs sont exacts, il n'y avait pas de différence entre ces

 14   corps-là et d'autres corps. Il n'y avait pas de caractéristiques

 15   particulières de ces corps qui m'auraient incité à le noter dans ce

 16   rapport. Mais là, il s'agissait d'un rapport préliminaire d'anthropologue.

 17   S'il y avait eu d'autres points d'intérêt, ce sont les éléments

 18   d'information qu'on aurait pu aller chercher dans le rapport de médecins

 19   légistes. Parce que ici, nous avons tous simplement les tranches d'âges et

 20   les catégories de tranches d'âge qui sont -- devaient déterminer ainsi que

 21   le sexe des victimes.

 22   Q.  Et puis, après avoir effectué les analyses ADN, est-ce que la méthode

 23   dont on a parlé hier, qui consistait à déterminer le nombre d'individus

 24   minimal, est-ce que cette analyste qui était [inaudible] ne serait pas

 25   devenu caduc si nous avions une bonne analyse ADN ?

 26   R.  Non, pas vraiment, car une bonne analyse ADN, quelque soit sa

 27   pertinence, peut toujours bénéficier d'autres éléments pertinents, d'autres

 28   types d'analyse. Donc, si vous avez l'analyse ADN, cela ne vous permet pas


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  1   toutefois de savoir quel est le nombre exact d'individus. Certaines

  2   personnes, par exemple, feraient des échantillons de tout. C'est une

  3   possibilité, bien sûr. Vous vous rendez dans une tombe, vous comptez tout

  4   ce que vous y trouvez, vous prenez un échantillon de chaque reste, vous

  5   l'envoyez pour faire des analyses et ensuite, vous essayez d'établir des

  6   rapports. Mais imaginez que vous trouvez des milliers de morceaux de restes

  7   humains ou de personnes dans une tombe ou dans une fosse et vous essayez de

  8   voir quel est vraiment le travail que cela représentait -- que cela

  9   représente, car vous ne pouvez pas avoir à extraire l'ADN de chaque morceau

 10   de restes humains. Par exemple, si vous retrouvez un pied, cela ne va pas

 11   forcément vous donner un échantillon ADN. Donc, mon opinion est que le

 12   nombre minimal d'individus, c'est un point de départ. Ce n'est pas le point

 13   -- ce n'est pas le résultat définitif, mais c'est un bon point de départ

 14   [inaudible],  c'est logique et je ne peux pas dire que c'est une méthode

 15   qui serait désuète aujourd'hui et qui n'a plus lieu d'exister.

 16   Q.  Merci, Professeur. Je vais essayer de conclure. D'après les règles qui

 17   régissent votre profession, est-ce que vous êtes en mesure d'arriver à la

 18   conclusion que les corps d'un certain nombre de personnes tuées au cours de

 19   combats ont été apportés dans les fosses primaires et enterrés dans ces

 20   fosses avec les corps des personnes exécutées de façon illégale ?

 21   R.  Il est clair que, dans certaines tombes, on trouve les corps de

 22   personnes qui ont décédé dans des circonstances disons particulières. Une

 23   de ces circonstances que l'on trouve dans la tombe de Glogova dont on a

 24   parlé tout à l'heure, on trouve, par exemple, des personnes mortes à cause

 25   ou suite aux explosions. Et il faut faire la différence entre ces corps-là

 26   et les corps de personnes qui ont été tuées par balle. Il ne m'appartient

 27   pas, bien sûr, de déterminer si ces blessures provoquées par des explosifs

 28   proviennent des combats. Il en va de même pour les blessés par balle. Mais


Page 16098

  1   il est clair que dans certaines occasions, vous avez les personnes qui ont

  2   été tuées alors qu'elles étaient -- qu'elles gisaient dans la tombe. Et

  3   ceci exclut définitivement, à mon opinion, la possibilité d'une mort au

  4   combat, car si vous avez quelqu'un qui gît dans une tombe, eh bien, et vous

  5   lui tirez dessus, il est évident que vous souhaitez le tuer et l'enterrer

  6   ensuite. C'est une conclusion tout à fait logique.

  7   Ensuite, en ce qui concerne les possibilités, évidemment, tout est

  8   possible, mais tout n'est pas probable. Evidemment, quand on parle de

  9   possibilités, il y a toujours une possibilité que et on va dire que c'est

 10   de l'ordre de 50 %, mais quelle est la raison probable ? C'est possible que

 11   les corps de ces personnes ont été apportés d'ailleurs, par exemple suite à

 12   une bataille. Mais, moi, j'en n'ai pas parlé dans mon rapport. Et puis moi,

 13   je peux vous donner un contre argument : Si tel a été le cas, pourquoi a-t-

 14   on dépensé autant de temps et autant d'énergie pour détruire certains sites

 15   d'enterrement ? Parce que dans mon rapport, je parle de toute cette

 16   tentative de détruire, de terrasser certains sites avec des engins de

 17   terrassement. Et là, il s'agit d'une tentative de dissimuler ces tombes. Et

 18   s'il s'agissait des tombes des personnes mortes au combat, eh bien, vous

 19   n'aviez aucune raison de le faire. Mais c'est mon opinion, évidemment.

 20   Q.  Mais vous conviendrez que cette opinion, c'est une opinion personnelle.

 21   Ce n'est pas vraiment une opinion basée sur votre expérience de

 22   scientifique --

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout d'abord, le témoin vient de le

 24   dire. Et puis, là, vous êtes en train de nous poser la troisième question

 25   finale. Je pense que le témoin a été très clair à ce sujet. Il a dit

 26   clairement, très clairement, que c'était son opinion personnelle.

 27   M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai plus

 28   d'autres questions. Je vous remercie.


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  1   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Lee, des questions ?

  3   Mme LEE : [interprétation] Oui, des questions très brèves.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.

  5   Mme LEE : [interprétation] Je vais demander à voir la pièce P2086, la page

  6   41 de cette pièce.

  7   Nouvel interrogatoire par Mme Lee :

  8   Q.  [interprétation] Donc, le premier paragraphe. Aujourd'hui, vous avez

  9   mentionné le rapport du Dr Brown par rapport aux deux sites de Glogova. Et

 10   vous avez fait référence à l'analyse du sol faite par le Dr Brown et

 11   intitulé 1999A.

 12   Mme LEE : [interprétation] Et je vais demander à voir la page 43 de ce

 13   rapport, le même rapport.

 14   Q.  Donc, le premier point, 1999A, et c'est bien le document que vous

 15   citez.

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Très bien.

 18   Mme LEE : [interprétation] Et maintenant je vais demander à voir le

 19   document D4503.

 20   Q.  Le premier document c'était une déclaration qui a été faite pour le

 21   bureau du Procureur du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie

 22   en date du 29 novembre 1999.

 23   R.  Oui.

 24   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 25   Mme LEE : [interprétation] Je vais demander à voir, enfin le document 65

 26   ter 04503, s'il vous plaît.

 27   Q.  Donc là nous avons le rapport du Dr Brown de 1999.

 28   Mme LEE : [interprétation] Et c'est la page 4 que je voudrais voir, s'il


Page 16100

  1   vous plaît.

  2   Q.  Monsieur Baraybar, est-ce bien le rapport auquel vous avez fait

  3   référence donc l'analyse du sol qui contient du maïs, on parle du site de

  4   Glogova ?

  5   R.  Oui.

  6   Mme LEE : [interprétation] Je vais demander à verser au dossier ce

  7   document.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic.

  9   M. STOJANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, mais c'est un

 10   rapport d'expert, si j'ai bien compris, de l'expert Brown.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce que c'est, Maître Stojanovic, c'est

 12   un document qui est en cinq pages. C'est la déclaration d'un témoin, c'est

 13   ce que dit l'intitulé du document, et il fait référence en effet au

 14   rapport.

 15   Mme LEE : [interprétation] Cela fait référence à Glogova et à Nova Kasaba.

 16   Il s'agit d'un rapport dont on a parlé avec le témoin, on lui a posé des

 17   questions, et le témoin a dit qu'il s'est appuyé sur ce rapport

 18   effectivement.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Donc vous nous avons donné un

 20   fondement factuel.

 21   Mais est-ce que c'est contesté, est-ce que l'on conteste l'existence d'un

 22   tel rapport qui a servi de base pour les conclusions ?

 23   M. STOJANOVIC : [interprétation] Non, ceci n'est pas contesté. Mais vous

 24   nous avez très bien dit qu'il n'était pas possible en vertu de l'article 92

 25   bis d'accepter les déclarations des témoins de cette façon-là. C'est une

 26   question de méthode. Je me réfère aussi à l'article 92 ter, car il

 27   s'agirait de la déclaration de ce témoin dans ce cas.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Lee, quand on recueille une


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  1   déclaration ici, dans ce Tribunal, là je ne dirais pas que c'est une

  2   question de méthode mais une question de procédure d'ailleurs, et c'est Me

  3   Stojanovic qui soulève cette question de procédure.

  4   Mme LEE : [interprétation] Sur cette page, on fait référence à Glogova mais

  5   aussi à Zeleni Jadar, et on voit bien les liens entre les deux, c'est

  6   quelque chose qui a été contesté le long du contre-interrogatoire.

  7   M. STOJANOVIC : [interprétation] Avec votre permission, Monsieur le

  8   Président. Je voudrais tirer au clair un point. Nous ne contestons pas le

  9   rapport qui prévaut entre Glogova en tant que site primaire et Zeleni Jadar

 10   en tant que site secondaire. La question qui se posait c'était la question

 11   du hangar de Kravica, comme lieu d'exécution, et Glogova comme site

 12   primaire [inaudible]. Et, dans ce rapport, on n'évoque pas ce lien du tout.

 13   On ne trouve pas un mot à ce sujet, et de toute façon, on ne peut pas

 14   verser au dossier une déclaration de cette façon-là.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Lee, quelle que soit la

 16   pertinence de ce document, cela ne change pas la règle 92 ter, n'est-ce pas

 17   ?

 18   Mme LEE : [interprétation] Oui, mais là, c'est plutôt un rapport qu'une

 19   déclaration proprement dite que l'on faite pour le bureau du Procureur, et

 20   que nous recevons. Là, c'est vraiment le rapport du Dr Brown. Et on en

 21   parle comme d'un rapport --

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais comment traite-on des rapports en

 23   vertu du Règlement ? Parce que là on a l'impression que c'est un rapport

 24   d'expert. Quelle est la façon habituelle de traiter des rapports d'expert

 25   ou de l'expertise qui se trouve dans ces rapports ?

 26   Mme LEE : [interprétation] Eh bien, nous n'avons pas eu l'impression de

 27   citer le Dr Brown comme un témoin, mais c'est un rapport dont le témoin a

 28   déposé. Il a fait référence, et la Défense avait contesté un point précis


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  1   justement concernant la culture de maïs.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La référence concerne la conclusion

  3   numéro 3 :

  4   "La matrice GL03 vient d'un environnement ouvert, sans doute d'un

  5   pré, qui d'un passé avait été utilisé pour la culture de céréale y compris

  6   le maïs."

  7   Donc c'est la seule référence que le témoin a faite à ce rapport, au

  8   rapport de M. Brown, n'est-ce pas ?

  9   Mme LEE : [interprétation] Et nous avons entendu aussi des dépositions au

 10   sujet du pré de Sandici.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais là, à nouveau, vous vous occupez du

 12   fond, alors que moi je suis encore, du contenu, alors que moi je suis

 13   encore dans la procédure. Le témoin a dit que la base de cette réponse,

 14   c'est-à-dire pour répondre il fait référence au rapport du Dr Brown. Est-ce

 15   qu'on conteste, là ? Il s'agit de son rapport, du rapport du Dr Brown, car

 16   si ceci n'est pas contesté, eh bien, le fait auquel se réfère le témoin

 17   n'est pas contesté.

 18   Maître Stojanovic, est-ce que vous contestez le fait que c'est bien cela

 19   qui figure dans le rapport du Dr Brown ?

 20   M. STOJANOVIC : [interprétation] Non, je ne conteste pas cela. C'est bien

 21   quelque chose qui est écrit dans le rapport du Dr Brown, et ici on parle du

 22   rapport qui prévaut entre Glogova et Zeleni Jadar, et pas Kravica.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Autrement dit, les parties sont d'accord

 24   quant à la référence qui a été faite à l'analyse de sol effectuée par le Dr

 25   Brown, autrement dit quelles étaient les cultures présentes dans ce pré, à

 26   savoir la culture de maïs.

 27   [La Chambre de première instance se concerte]

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les Juges vont réfléchir à ce sujet,


Page 16103

  1   mais on va vous demander de nous lire à nouveau le contexte précis par

  2   rapport auxquelles Me Stojanovic a posé la question, et on voudrait le lire

  3   avant de prendre notre décision. Et ensuite, nous allons la prendre. Mais

  4   maintenant, dans le compte rendu d'audience, de toute façon, on voit que

  5   les parties se sont mis d'accord par rapport au contenu du rapport du Dr

  6   Brown.

  7   Mme LEE : [interprétation] Merci.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous n'avez pas d'autres questions ?

  9   Mme LEE : [interprétation] Normalement, non, mais permettez-moi un instant,

 10   s'il vous plaît.

 11   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 12   [Le conseil l'Accusation se concerte]

 13   Mme LEE : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le

 14   Président.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas d'autres questions. Eh bien, dans ce

 16   cas, nous sommes tout près du moment de la pause. Un instant, s'il vous

 17   plaît.

 18   [La Chambre de première instance se concerte]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vu que le témoin va dans quelques

 20   instants quitter ce prétoire, il serait mieux de lire tout de suite le

 21   compte rendu d'audience pour pouvoir prendre notre décision.

 22   [La Chambre de première instance se concerte]

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, le témoin, à la page 8, dans sa

 24   réponse, fait référence au rapport du Dr Brown. Nous parlons de l'analyse

 25   du sol et il a parlé du fait que l'on cultivait donc le maïs sur ce sol.

 26   Donc, il n'y a pas de compensation [inaudible] là-dessus. Les parties sont

 27   d'accord que rapport -- sont d'accord que le rapport existe et les

 28   souvenirs du témoin reflètent justement le contenu du rapport. Et donc dans


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  1   ces circonstances, les Juges n'acceptent pas le versement au dossier de ce

  2   rapport, car ceci demanderait l'application de la règle 92 bis ou 92 ter

  3   qui concerne le rapport d'expert avant de pouvoir verser au dossier cette

  4   pièce. Et ce rapport a été fait pour les besoins précis du Tribunal.

  5   Maître Stojanovic, est-ce que vous avez besoin de poser d'autres questions

  6   ?

  7   M. STOJANOVIC : [interprétation] Non, merci, Monsieur le Président.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, mes collègues non plus.

  9   Et donc, avec ceci se termine votre déposition, Monsieur le Témoin. Je vous

 10   remercie d'avoir effectué ce long voyage pour venir déposer à La Haye. Je

 11   vous remercie aussi d'avoir répondu à toutes les questions, les questions

 12   des parties et des Juges de la Chambre et je vous souhaite un bon voyage de

 13   retour.

 14   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 15   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 16   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 17   [Le témoin se retire]

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons prendre une pause de 20

 19   minutes et nous allons reprendre nos travaux à 10 heures 40 [comme

 20   interprété]. Et le Procureur va à ce moment-là introduire son nouveau

 21   témoin.

 22   --- L'audience est suspendue à 10 heures 29.

 23   --- L'audience est reprise à 10 heures 53.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey, le témoin suivant

 25   serait M. Butler, n'est-ce pas ?

 26   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons donc demander qu'on le fasse

 28   entrer, à moins qu'il n'y ait une raison d'attendre.


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  1   M. McCLOSKEY : [interprétation] Non. Non, non. Aucune raison particulière.

  2   J'essaie simplement de retrouver mes repères, de vérifier que tout

  3   fonctionne et que j'entends bien. Il y a longtemps que je ne suis pas

  4   intervenu dans ce prétoire.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-on faire venir le témoin, M. Butler

  6   ?

  7   M. McCLOSKEY : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Comme vous

  8   avez pu le voir, j'ai estimé le temps nécessaire à mon interrogatoire de M.

  9   Butler à une dizaine d'heures. J'ai fait tout mon possible pour réduire au

 10   maximum la durée de cet interrogatoire, comme j'ai pu le faire par le passé

 11   d'ailleurs dans d'autres cas. Mais, en tout cas, cette estimation de dix

 12   heures est de loin plus courte que ce que j'ai pratiqué dans le passé, donc

 13   je vous encourage à poser des questions de suivi, parce qu'il est possible

 14   que je sois emmené à passer d'un sujet à l'autre alors que -- surtout s'il

 15   s'agit de sujets où j'ai déjà abordé les choses relativement en détail par

 16   le passé. Mais je suis plutôt optimiste.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, les estimations de temps sont

 18   un exercice difficile, notamment lorsqu'on va au-delà des -- de deux ou

 19   trois heures. En tout cas, nous vous encourageons à vous en tenir à votre

 20   estimation. Et ne vous faites pas de soucis, les Juges poseront des

 21   questions s'ils estiment nécessaire, donc vous avez à ce stade je crois

 22   l'expérience nécessaire pour savoir que nous ne privons pas de poser des

 23   questions lorsqu'il y a quelque chose de pertinent.

 24   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci. Je sais qu'il n'y a aucun besoin

 25   pour moi de vous encourager. Mais en tout cas, de mon point de vue, c'est

 26   questions seront plus que bienvenues.

 27   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Butler, je présume.


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  1   Alors, avant que vous ne commenciez votre déposition, vous devez prononcer

  2   en application du règlement le texte de la déclaration solennelle qui vous

  3   est remis.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous y invite.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  7   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  8   LE TÉMOIN : RICHARD BUTLER [Assermenté]

  9   [Le témoin répond par l'interprète]

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir.

 11   Monsieur Butler, vous allez tout d'abord être interrogé par M. McCloskey.

 12   Je n'ai pas besoin de vous dire qu'il se trouve à votre droite, puisque

 13   vous le connaissez.

 14   A vous, Monsieur McCloskey.

 15   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 16   Interrogatoire principal par M. McCloskey :

 17   Q.  [interprétation] Pourriez-vous décliner votre identité, s'il vous plaît

 18   ?

 19   R.  Oui, Monsieur. Je me nomme Richard Butler.

 20   Q.  Je dois me rappeler qu'il faut faire des pauses et je vous le rappelle

 21   aussi, Monsieur Butler. Alors, quelle est votre profession et votre poste

 22   actuel ?

 23   R.  Je suis chercheur dans le domaine du renseignement. Concrètement,

 24   j'occupe un poste de directeur -- ou plutôt, de responsable des opérations

 25   en matière de renseignement dans le domaine des violations -- ou plutôt, au

 26   centre des crimes de guerre et violations des droits de l'homme qui fait

 27   partie du département de la sécurité intérieure des Etats-Unis, au sein de

 28   l'administration chargée des questions d'immigration et douanières.


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  1   M. McCLOSKEY : [interprétation] Alors, je voudrais demander l'affichage du

  2   document 26039 de la liste 65 ter.

  3   Q.  C'est votre CV en principe. Pendant combien de temps avez-vous

  4   travaillé pour les autorités fédérales des Etats-Unis sans compter le temps

  5   que vous avez passé dans l'armée des Etats-Unis ?

  6   R.  Eh bien, j'ai quitté le Tribunal en novembre 2003 et les -- le

  7   gouvernement fédéral m'a employé en février 2004.

  8   Q.  Très bien. Alors, nous avons en première page de votre CV, qui date du

  9   10 juin 2011, les informations qui s'affichent à l'écran, mais y a-t-il le

 10   moindre ajout significatif que vous souhaiteriez y faire par rapport à ce

 11   qui est arrivé entre juin 2011 et aujourd'hui ?

 12   R.  Non.

 13   Q.  Pouvez-vous nous dire brièvement en quoi consiste ce travail que vous

 14   accomplissez au ministère de la sécurité intérieure ?

 15   R.  Eh bien, dans une grande -- dans une large mesure, c'est un travail

 16   assez similaire à celui que je faisais ici au Tribunal. En ce cas précis,

 17   je procède à ma propre analyse et en même temps, je dirige une équipe

 18   d'analyses qui apporte son soutien à des enquêteurs du gouvernement des

 19   Etats-Unis travaillant sur des violations des Droites de l'homme commisses

 20   à l'étranger et dont nous vérifions si elles tombent sous la compétence des

 21   Etats-Unis en vue de poursuites au pénal ou bien s'il s'agit d'une affaire

 22   d'immigration.

 23   Q.  [aucune interprétation]

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit "qui ont commis", mais

 25   vous vouliez peut-être dire "qui sont suspectés d'avoir commis" ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, dans certains cas, il y a des

 27   individus qui sont suspectés d'avoir des violations des Droits de l'homme;

 28   dans d'autres cas, il s'agit de personnes, qui ont été mises en accusation


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  1   ou même condamnées par "contumas" [inaudible], et qui ont pris la fuite, se

  2   sont réfugiés au Etats-Unis pour éviter d'être condamnés ou tout autre

  3   chose, qu'elles souhaitaient éviter ailleurs à l'étranger.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Donc, dans le cas de

  5   poursuites au pénal, il s'agit de suspect et pour l'autre catégorie, ils

  6   peuvent avoir déjà été condamnés.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

  9   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 10   Q.  Et en cette qualité, est-ce que vous travaillez avec des enquêteurs et

 11   des procureurs fédéraux ? Est-ce que vous êtes parfois amené à déposer dans

 12   le cadre de telles poursuites ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Alors, pour le gouvernement fédéral, vous travaillez maintenant, mais

 15   avant cela, vous avez travaillé pour le bureau du Procureur du TPIY.

 16   Pendant combien d'années ?

 17   R.  Eh bien, j'y ai travaillé d'avril 1997 à novembre 2003, donc presque

 18   sept ans.

 19   Q.  Nous y reviendrons un peu plus en détail. Pour le moment, je souhaite

 20   vous poser quelques questions au sujet de votre parcours dans les forces

 21   armées des années des Etats-Unis, comme nous pouvons le voir dans votre CV.

 22   Il semble que vous aillez été officier du renseignement pendant l'essentiel

 23   de cette période. Est-ce que vous pouvez nous dire quand vous vous êtes

 24   enrôlé dans l'armée des Etats-Unis ?

 25   R.  En août 1991 [comme interprété].

 26   Q.  Etait-ce après avoir achevé vos études secondaires ?

 27   R.  Oui, à peu près deux ans après.

 28   Q.  Quand êtes vous devenu officier du renseignement ?


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  1   R.  Eh bien, j'ai passé presque les sept premières années de ma carrière

  2   militaire comme soldat et puis ensuite comme sous-officier dans le domaine

  3   du renseignement. Puis, en 1988, j'ai été nommé adjudant au sein de l'armée

  4   des Etats-Unis, encore une fois dans le domaine du renseignement. Et puis,

  5   j'ai été nommé officier en 1990.

  6   L'INTERPRÈTE : Correction de la cabine française : Remplacez "1991" par

  7   "1981" dans la réponse précédente du témoin. Reprise des débats.

  8   M. McCLOSKEY : [interprétation]

  9   Q.  Pourriez-vous nous décrire rapidement votre progression dans le domaine

 10   du renseignement ?

 11   R.  Eh bien, je me suis enrôlé comme simple soldat, puis je suis passé sous

 12   officier. J'ai exercé différentes activités, différents postes au sein de

 13   l'unité militaire où j'ai appris comment mener différents types de travaux

 14   et d'entrée aux renseignements. Mais au cœur de mon travail se trouvaient

 15   les tâches dévolues à un analyste. Donc, on m'a confié toute une série de

 16   missions pendant ces années. Certaines d'entres elles avaient un caractère

 17   stratégique avec les structures militaires chargées du renseignement.

 18   D'autres missions étaient de nature tactiques au côté de formations de

 19   combat et c'est ainsi que pour l'essentiel, j'ai appris mon métier, à

 20   savoir comment mener à bien des tâches relatives aux renseignements en

 21   soutien au commandant militaire.

 22   Q.  Dans votre CV, nous voyons que juste avant de venir travailler ici,

 23   vous avez travaillé en tant que technicien du renseignement. Est-ce que

 24   vous pourriez nous dire en quoi consistait votre travail, quel type de

 25   documents vous analysiez, puisque vous étiez technicien du renseignement

 26   chargé des documents provenant de tous les types de sources différentes ?

 27   R.  Eh bien, oui, en 1988, j'ai été nommé adjudant dans l'armée des Etats-

 28   Unis et les adjudants sont considérés comme les experts techniques dans


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  1   toute une série de domaines. Dans mon cas, en tant qu'officier du

  2   renseignement -- ou plutôt, adjudant dans le domaine du renseignement,

  3   j'étais expert technique dans le domaine en question et j'ai continué à

  4   utiliser mes compétences dans le domaine de -- dans le domaine de la

  5   collecte de renseignements et de l'analyse du renseignement en qualité

  6   d'expert, mais à l'échelon d'une division ou d'un corps d'armée et à

  7   d'autres échelons plus élevés dans la hiérarchie, avec plusieurs

  8   responsabilités.

  9   Q.  Et je sais que vous ne pouvez pas nous parler en détail votre

 10   participation à ce type d'activité dans des zones de combat, mais vous avez

 11   travaillé en zone de combat également ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Pourriez-vous nous dire quel type de documents vous avez eu à examiner

 14   en tant qu'officier de renseignements et à analyser exactement ? Est-ce

 15   qu'il y avait quoi que ce soit de similaire au document que vous avez

 16   analysé ici ?

 17   R.  Eh bien, dans le domaine du renseignement et de l'analyse, on procède à

 18   un découpage en plusieurs disciplines du renseignement. On s'y réfère

 19   généralement sous les acronymes de "HUMINT", donc renseignements humains,

 20   les différents types d'informations qui proviennent de sources humaines.

 21   Ceci comprend, par exemple, les entretiens de personnes, de réfugiés, des

 22   prisonniers de guerre, de transfuges, et cetera. Ceci comprend également le

 23   débriefing des sources d'information clandestine, également d'origine

 24   humaine. Ceci comprenait également l'exploitation des documents, c'est-à-

 25   dire l'examen et l'analyse des documents militaires saisis, des cartes, et

 26   cetera. Il y avait également l'exploitation des renseignements du domaine

 27   public, c'est-à-dire les documents qui n'étaient pas classés confidentiels

 28   mais qui pouvaient présenter une importance du point du renseignement,


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  1   comme les publications militaires, les magazines, les articles relatifs à

  2   différentes forces armées rédigées par des experts indépendants.

  3   Alors le deuxième domaine ou la deuxième spécialisation est connue

  4   sous l'acronyme de "SIGINT", il s'agit de l'utilisation et de

  5   l'exploitation des renseignements et des informations interceptées dans les

  6   communications électroniques de l'ennemi. En termes techniques, donc il

  7   s'agit d'interception des communications par radio entre les combattants de

  8   l'ennemi, ceci implique également l'interception et l'exploitation des

  9   informations collectées à partir d'émetteurs qui n'ont pas vocation à être

 10   utilisées pour des transmissions comme les radars, et aujourd'hui, comme

 11   vous n'êtes pas sans le savoir, c'est un domaine qui est devenu

 12   considérablement plus large puisqu'il inclut également l'internet et les

 13   ordinateurs. Donc c'est un domaine particulièrement large.

 14   Et troisième est le renseignement spécialisé en imagerie,

 15   l'exploitation des informations qui se présentent sous forme d'image, afin

 16   de pouvoir en extraire des renseignements. Il peut s'agir de photographies

 17   prises au niveau du sol, mais également de photographies aériennes, de

 18   photographies ou d'images numériques. Encore une fois, il y a une toute

 19   variété de sources différentes, et en tant que technicien du renseignement

 20   devant intervenir, indépendamment de la source du document, je devais être

 21   en mesure de connaître tout cela.

 22   [La Chambre de première instance se concerte]

 23   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 24   Q.  Est-ce que les règlements intérieurs ou les textes législatifs d'un

 25   ennemi ou d'une force armée ennemie, les processus que celle-ci utilisait

 26   en interne auraient présenté un intérêt pour vous, ou auriez-vous laissé

 27   ceci à d'autres ?

 28   R.  Eh bien, non. Manifestement c'est quelque chose qui en tant qu'analyste


Page 16113

  1   militaire professionnel m'aurait intéressé. En fin de compte, mon rôle en

  2   soutien au commandant était d'être en mesure de les conseiller quant à ce

  3   que l'armée ennemie faisait, et d'apporter mon concours, mon aide dans la

  4   réalisation de leur objectif qui était en fait de vaincre l'ennemi ou

  5   l'adversaire armé. A cette fin, il est évident que je devais pouvoir

  6   comprendre aussi bien et précisément que possible la capacité que cette

  7   armée ou cette armée ennemie ou cet adversaire armé avait d'opérer sur le

  8   théâtre de guerre ou dans la zone de combat. Par exemple, de comprendre

  9   comment fonctionnait leur système de commandement ou des contrôles ou le

 10   contexte ou les parcours professionnels de leurs commandants les plus haut

 11   placés. Donc il était important que je comprenne comment les forces armées

 12   concernées s'approvisionnaient également en vivres, en carburant, en

 13   munition, en service technique, toute chose qu'une bonne compréhension

 14   permettait de toucher de façon beaucoup plus efficace dans le cadre d'une

 15   attaque en vue de diminuer la capacité de l'ennemi.

 16   Q.  Comment communiquez-vous votre analyse, vos points de vue à vos

 17   supérieurs ?

 18   R.  Eh bien, cela dépendait des circonstances du moment. Si j'étais

 19   officier du renseignement dans le cadre d'une petite unité qui était

 20   engagée dans des opérations de combat de façon très directe, eh bien, la

 21   plupart de mes conclusions ou de mes analyses était transmis de façon orale

 22   ou alors de façon très schématique par écrit, couché de façon très

 23   schématique par écrit. Alors que lorsque j'étais en mission dans un

 24   environnement où j'avais la possibilité de rédiger des rapports beaucoup

 25   plus détaillés, eh bien, je procédais ainsi.

 26   Q.  Pourriez-vous peut-être préciser ce que en argot américain on entend

 27   par "sketchy", puisque c'est le terme que vous avez utilisé ?

 28   R.  Encore une fois, ce n'est pas une question de qualité de mon travail,


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  1   il s'agit du temps dont on dispose. Donc dans certains contextes ou dans

  2   certains lieux, il n'y a tout simplement pas suffisamment de temps pour

  3   entrer dans les détails. Donc vous deviez tenir compte du temps dont vous

  4   disposiez, et du temps dont disposait également votre commandant pour être

  5   en mesure de lui transmettre les faits les plus importants et les plus

  6   saillants.

  7   Q.  Eh bien, je voudrais que vous puissiez nous en dire plus au sujet de ce

  8   que vous avez fait dans l'armée des Etats-Unis, de votre travail, et

  9   notamment que vous nous disiez si c'était d'une façon ou d'une autre

 10   similaire à votre travail ici ? Mais tout d'abord, lorsque vous êtes arrivé

 11   au bureau du Procureur, avez-vous été employé par les Nations Unies ou par

 12   l'armée des Etats-Unis, et comment cela a-t-il fonctionné ?

 13   R.  Eh bien, je n'étais pas encore employé par les Nations Unies, à

 14   l'époque, j'étais toujours adjudant dans l'armée des Etats-Unis, et en

 15   fait, le Département d'état m'a détaché, ce qui veut dire concrètement que

 16   j'ai été prêté au bureau du Procureur du TPY. Encore une fois, du point de

 17   vue officiel, j'étais détaché par le gouvernement des Etats-Unis au bureau

 18   du Procureur. J'ai conservé ce statut pendant cinq ans. Lorsque j'ai pris,

 19   lorsque mon contrat au sein de l'armée des Etats-Unis a pris fin en 2001,

 20   les Nations Unies m'ont proposé un contrat en bonne et due forme qui était

 21   le contrat de fonctionnaire habituel, et donc mes deux dernières années à

 22   La Haye, je les ai passées en tant que fonctionnaire des Nations Unies.

 23   Q.  Et avez-vous travaillé dans une enquête en particulier pendant

 24   l'essentiel du temps que vous avez passé au bureau du Procureur ?

 25   R.  Oui, c'est bien le cas. Je suis arrivé en avril 1997, et si ma mémoire

 26   est bonne, dès le mois de juin 1997, j'ai été affecté en soutien à

 27   l'enquête sur Srebrenica.

 28   Q.  Très bien. Donc pendant ces sept années au cours desquelles vous avez


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  1   apporté votre concours à l'enquête sur Srebrenica, est-ce que vous pourriez

  2   nous donner une brève vue d'ensemble du type de travail qui était le vôtre,

  3   notamment au regard des tâches que vous venez de nous décrire, et qui

  4   étaient les vôtres au sein de l'armée des Etats-Unis ?

  5   R.  Oui. L'une des premières tâches, qui m'ont été confiées par les

  6   enquêteurs qui travaillaient sur Srebrenica, consistait à essayer de

  7   parvenir à mieux comprendre à l'époque quelle sorte d'entité pouvait être

  8   le Corps de la Drina. Parce que sur la base de l'enquête qu'ils avaient

  9   déjà mené, il y avait déjà des éléments de preuve suggérant que certains

 10   membres ou certains éléments du Corps de la Drina de l'armée de la

 11   Republika Srpska auraient pu participer à des crimes parmi ceux qui étaient

 12   de la plus grande ampleur. Donc la première partie de mon travail a

 13   consisté à comprendre comment fonctionnait la VRS et comment elle était

 14   organisée en juillet 1995.  Je me suis penché sur ce travail de la même

 15   façon que je l'aurais fait au sein de l'armée des Etats-Unis en

 16   m'intéressant à d'autres adversaires.

 17   J'ai donc étudié les règlements et règles de l'ex-JNA qui avaient été

 18   traduits afin de déterminer si la VRS continuait d'appliquer ces mêmes

 19   règles ainsi que les procédures opérationnelles qui y étaient associées.

 20   Ensuite j'ai commencé à étudier le peu de documents dont nous disposions à

 21   l'époque qui exposaient l'organisation et la structure de la VRS telle

 22   qu'elle existait en 1995.

 23   En 1998, le bureau du Procureur a procédé à un certain nombre de

 24   perquisitions en Republika Srpska. Deux d'entre elles ont concerné les

 25   brigades subordonnées au Corps de la Drina, la Brigade de Zvornik et celle

 26   de Bratunac, et lors de ces perquisitions, le bureau du Procureur a saisi

 27   quelque 17 000 documents de ces deux unités, ce qui m'a permis de faire un

 28   pas de géant dans ma compréhension et ma connaissance de l'organisation du


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  1   Corps de la Drina, et l'organisation des différentes brigades et bataillons

  2   qui le constituait, ainsi que le fonctionnement des rapports -- le

  3   fonctionnement du commandement à l'intérieur de ces structures.

  4   À peu près à la même époque, le bureau du Procureur a commencé à se

  5   procurer des conversations interceptées ce que nous appelons des

  6   conversations interceptées dans le contexte du renseignement, donc des

  7   transmissions radio interceptées par l'ABiH et que celle-ci avait

  8   collectées en interceptant les transmissions de la VRS pendant le conflit

  9   et notamment en Bosnie orientale dont le mois de juillet 1995. J'ai donc

 10   été en mesure d'analyser tout ceci et d'intégrer le résultat dans l'analyse

 11   à laquelle j'étais en train de procéder quant à la participation de

 12   l'armée, du Corps de la Drina et de ces structures subordonnées, à ce qui

 13   allait constituer les faits incriminés pour les événements de Srebrenica en

 14   1995.

 15   Q.  Je vais vous interrompre à ce stade. Est-ce que vous avez tenu compte

 16   de la valeur littérale de ces conversations interceptées ou bien est-ce que

 17   vous avez également pris en considération la question de leur fiabilité ?

 18   R.  Non. Manifestement les conversations interceptées en question ont été

 19   fournies au bureau du Procureur par une tierce partie, et donc je devrais

 20   procéder exactement de la même manière que je l'aurais fait avec toute

 21   information provenant d'une tierce partie, nous étions et j'étais

 22   personnellement très sceptique quant à ces informations.

 23   Q.  Je vais encore vous interrompre. Ce n'était pas juste une tierce partie

 24   comme une autre, n'est-ce pas ?

 25   R.  Non, c'était l'autre partie au conflit.

 26   Q.  Très bien. Et pourriez-vous nous dire de qui il s'agissait ?

 27   R.  La plupart des conversations interceptées provenaient des services des

 28   unités d'interception radio du 2e Corps de l'ABiH qui, bien entendu, était


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  1   directement impliqué dans les combats au sol contre ces adversaires du

  2   Corps de la Drina.

  3   Q.  Très bien. Et dans votre examen de ces documents, est-ce que vous avez

  4   constaté qu'ils étaient d'une grande valeur ?

  5   R.  Eh bien, j'ai fini par trouver ces documents assez utiles parce que

  6   nous avons grâce à eux été en mesure de corroborer une grande partie des

  7   informations que contenaient les interceptions.

  8   Q.  Très bien. Nous n'allons pas nous attarder sur les détails. Donc vous

  9   avez parlé de votre examen de documents, et maintenant de conversations

 10   interceptées. Y a t-il eu quoi que ce soit d'autre que vous avez été en

 11   mesure d'examiner au fur et à mesure que l'enquête progressait ?

 12   R.  Au fur et à mesure de l'enquête, et notamment à la fin de 1998 et

 13   pendant 1999 lorsque l'enquête a véritablement décollée et pour ainsi dire,

 14   le bureau du Procureur a commencé à être autorisé par le gouvernement de la

 15   Republika Srpska à avoir accès à toute une série d'officiers et de soldats

 16   de la VRS qui avaient été membres du Corps de la Drina en juillet 1995

 17   ainsi qu'un certain nombre d'officiers de l'état-major. Donc une fois que

 18   nous avons pu contacter ces personnes, nous avons eu la possibilité de

 19   reprendre ma propre analyse de ma situation ainsi que les documents dont

 20   nous disposions et de demander à ces officiers quel était leur point de vue

 21   personnel quant à ces documents et si, à ce moment-là, à ce stade des

 22   événements, ils continuaient d'appliquer les procédures opérationnelles et

 23   les règlements qui avaient été en vigueur au sein de la JNA en dépit du

 24   fait qu'ils faisaient partie en ce moment-là de la nouvelle armée de la

 25   Republika Srpska. Et de façon très majoritaire, ces officiers ont confirmé

 26   que les règlements qui avaient été en vigueur au sein de la JNA et dans le

 27   cadre de l'ancienne RSFY étaient toujours appliqués au sein de la VRS en

 28   juillet 1995.


Page 16118

  1   Q.  Vous avez parlé de votre accès à des membres de la VRS, l'accès qu'a

  2   obtenu le bureau du Procureur. Est-ce que ceci comprenait également la

  3   possibilité de contacter les officiers de la police, donc du MUP, ainsi que

  4   des civils dans une certaine mesure ?

  5   R.  Oui. Concernant la police et le MUP, eh bien, nous avons eu un intérêt

  6   particulier à pouvoir les contacter puisqu'ils ont été subordonnés à la

  7   direction de l'armée en juillet 1995. Ils étaient subordonnés à ceci. Donc

  8   j'ai pu contacter également des civils, soit personnellement, soit j'ai

  9   participé à l'entretien ou à la collecte de déclarations d'un certain

 10   nombre de responsables politiques, mais de façon générale je me suis

 11   concentré sur les rapports entre l'armée et la police, et les liens de

 12   nature militaire et ensuite l'interaction avec les différentes branches de

 13   la police, donc pas nécessairement le volet politique de la chose.

 14   Q.  [aucune interprétation]

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey, je voudrais revenir

 16   avec le témoin sur l'une de ses réponses précédentes.

 17   On vous a demandé, Monsieur le Témoin, et je cite :

 18   "Est-ce que vous avez pris à la lettre ces conversations interceptées ou

 19   bien avez-vous également pris en considération la question de leur

 20   fiabilité ?"

 21   Et votre réponse a consisté à dire, je cite :

 22   "Non. Manifestement les conversations interceptées provenaient de … et

 23   cetera"

 24   Et vous avez dit ensuite que vous étiez particulièrement sceptique.

 25   Alors, tout d'abord, est-ce que nous pouvons considérer que votre réponse

 26   négative "non" ne correspond qu'à la première partie de la question, à

 27   savoir que vous ayez pris littéralement le contenu de ces conversations

 28   interceptées --


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] En effet.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- et alors et non pas la question de

  3   savoir si vous aviez soulevé ou non la question de leur fiabilité ? Parce

  4   que dans ce deuxième volet de la question je suppose que votre réponse

  5   aurait été "affirmative."

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Non seulement moi-même mais aussi les autres

  7   analystes qui participaient à l'époque ont passé plusieurs années à étudier

  8   la question de la fiabilité des conversations interceptées, donc c'est

  9   exact.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc non seulement vous étiez sceptique,

 11   mais il y a eu beaucoup de temps consacré à étudier ces sources. Alors est-

 12   ce que vous avez jamais rencontré une conversation interceptée pour

 13   laquelle vous auriez été amené à dire : Eh bien, ceci n'est pas fiable dans

 14   la mesure où il pourrait s'agir d'une contrefaçon de quelque chose qui a

 15   été monté de toutes pièces ou alors d'une erreur dans les dates, je

 16   voudrais savoir si ceci s'est présenté ou bien avez-vous toujours pu

 17   conclure que ce dont on faisait état dans ces communications interceptées

 18   était conforme à la réalité ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque vous vous penchez sur la question de

 20   la fiabilité de communications interceptées, il ne faut pas oublier, j'ai

 21   déjà déposé à ce fait qu'il y a deux critères pertinents; le premier est

 22   celui de la fiabilité d'un point de vue purement technique. Est-ce que

 23   l'individu ou l'entité chargée de la collecte de ces informations disposait

 24   des capacités techniques nécessaires à la collecte des informations en

 25   question, qu'elle affirme à présent posséder ? Donc ceci a fait partie de

 26   l'enquête qui a permis d'établir que le 2e Corps de l'ABiH et ses

 27   structures chargées du renseignement disposaient bien de la capacité

 28   technique requise pour intercepter les transmissions de la VRS. En ce sens,


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  1   ceci était fiable. Ce qu'ils ont donc intercepté et reproduit a fini par

  2   être intégré au rapport d'interception qu'ils fournissaient à leur propre

  3   commandant.

  4   Le deuxième volet de la fiabilité, c'est la fiabilité du point de vue

  5   du renseignement, à savoir, est-ce que l'information contenue dans

  6   l'interception est factuelle ou non. Je crois que ce sera le cas peut-être

  7   de certaines pièces qu'on me présentera ici, dans certaines situations où

  8   une interception est exacte du point de vue factuel par rapport à ce qui a

  9   été entendu et transcrit par l'opérateur. Eh bien, il a pu s'avérer que par

 10   exemple que les interlocuteurs dans cette communication ou cette

 11   transmission n'avaient pas des informations exactes ou véridiques quant à

 12   la situation. Donc dans ce contexte particulier, je peux vous dire que j'ai

 13   été en mesure d'établir la fiabilité des interceptions, que ce ne sont pas

 14   des interceptions montées de toute pièce en l'espèce ou dans les procès qui

 15   nous intéressent. Cependant, il apparaît tout aussi manifestement dans

 16   certains cas que les échanges interceptés se fondent sur des informations

 17   qui sont inexactes.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Et vous n'avez jamais

 19   rencontré un document qui était un faux, vous n'avez jamais non plus

 20   trouver des documents qui auraient été la consignation écrite de quelque

 21   chose qui n'avait jamais été écouté ou procédé et donc qui n'a jamais pu

 22   être intercepté.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Ceci répond à ma question.

 25   A Vous, Monsieur McCloskey.

 26   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 27   Q.  Au sujet de cette même question, les Juges disposent d'élément de

 28   preuve au sujet d'information erronée qui était transmise de façon


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  1   délibérée, de fausses informations au sujet des couloirs aériens, et elles

  2   étaient émises, ces informations fausses en sachant pertinemment que

  3   l'ennemi était en train d'écouter. C'est quelque chose que les armées font

  4   parfois; est-ce exact ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Alors est-ce que vous avez rencontré une situation de cette nature, de

  7   fausses informations émises par la VRS ?

  8   R.  Je ne m'en souviens pas. C'est manifestement quelque chose que je

  9   recherchais activement, c'est quelque chose que nous faisons au sein de

 10   l'armée des Etats-Unis. Évidemment cela présuppose que vous compreniez la

 11   finalité même de ce genre de désinformation. Dans un contexte militaire, il

 12   s'agit évidemment d'attirer l'attention de l'armée adverse donc de ses

 13   services de renseignements des généraux et des commandants, et de détourner

 14   plutôt l'attention de ces personnes d'une partie du théâtre de guerre

 15   pendant une phase critique d'une opération, et une campagne de

 16   désinformation en fait ne saurait durer trop longtemps, parce qu'à un

 17   moment ou à un autre, le service du renseignement adverse comprend ce qui

 18   est en train de se passer. Donc si l'on imagine par exemple la mise en

 19   place d'un faux réseau de communication permettant à l'ennemi d'imaginer

 20   qu'il a affaire à une division d'infanterie supplémentaire, active dans le

 21   secteur, eh bien, tôt ou tard, les informations de renseignements

 22   confirmeront ou infirmeront l'existence réelle de cette division. Donc ce

 23   que vous essayez en fait c'est de gagner du temps, 24 ou 48 heures avant

 24   qu'un vol de reconnaissance, par exemple, n'aille voir ce qu'il en est sur

 25   le terrain et ne constate que là où on pensait qu'il y avait des centaines

 26   de chars, il n'y a en fait que le vide du désert.

 27   Deuxièmement, l'examen d'un grand nombre de ces interceptions porte sur

 28   leur contenu, qui dans ce cas-là, est destiné à attirer l'attention de la


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  1   personne qui l'intercepte, en l'espèce il s'agissait du 2e Corps de l'ABiH,

  2   et de détourner l'attention de ses opérateurs de certains secteurs clé du

  3   théâtre de guerre. Alors si on examine l'ensemble du corpus de ces

  4   conversations interceptées, il apparaît clairement que les interceptions

  5   faites par les Musulmans de Bosnie ne visent pas à attirer leur attention

  6   sur certains secteurs moins importants du théâtre de guerre. En fait, les

  7   interceptions reflètent bien les communications de la VRS dans certains

  8   secteurs particulièrement critiques du théâtre de guerre, et dans certains

  9   cas même au sujet de l'exécution de crimes de guerre en 1995. Donc il ne

 10   s'agit manifestement pas de détourner l'attention de l'adversaire en

 11   utilisant des transmissions de façon peu rigoureuse, en fait, ils attirent

 12   l'attention de l'ABiH, du 2e Corps de l'ABiH sur les questions et les

 13   sujets mêmes qui à des niveaux plus hauts ils essayaient de dissimuler.

 14   Q.  Très bien. Alors pourriez-vous nous dire quel a été votre rôle dans

 15   l'enquête, notamment vous avez mentionné le processus par lequel il a été

 16   possible de contacter les officiers de la VRS. Est-ce que vous avez à jouer

 17   un rôle dans cette enquête et dans les entretiens ?

 18   R.  Oui. Encore une fois, dans le contexte de mon rôle militaire du poste

 19   que j'occupais dans l'armée, mon travail consistait à analyser les

 20   informations de nature militaire et à fournir ces informations aux

 21   enquêteurs et aux procureurs qui ensuite examinaient les points de vue

 22   juridiques et le volet pénal de tout cela. Ce qui constitue maintenant les

 23   faits incriminés pour les crimes de Srebrenica. Compte tenu de la

 24   participation très importante du Corps de la Drina et de l'état-major

 25   principal, ainsi que des unités associées de la police de la Republika

 26   Srpska dans l'exécution de ce crime, mon travail a manifestement joué un

 27   rôle important, en tout cas c'est ce que je suis porté à croire, en ce sens

 28   qu'il a aidé les enquêteurs et les procureurs à se concentrer sur les


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  1   événements clé, et a leur permis également de comprendre le fonctionnement

  2   des autorités et différents commandements sur le terrain, ceux en tout cas

  3   qui contrôlaient la situation au moment où ces événements sont produits.

  4   Q.  Quel a été votre rôle en particulier dans le cadre des entretiens,

  5   pourquoi y avez-vous participé ?

  6   R.  Eh bien, de nombreux enquêteurs n'avaient pas d'expérience militaire

  7   préalable. Ils étaient des enquêteurs professionnels, parfaitement

  8   qualifiés mais ils n'avaient pas d'expérience au sens où ils auraient dans

  9   le passé eu l'occasion d'interroger des officiers de l'armée. Ces officiers

 10   souvent étaient amenés à expliquer, comme je le fais maintenant, des

 11   questions de nature particulièrement technique, et en tant que militaire de

 12   carrière moi-même, l'un de mes rôles était de conseiller les enquêteurs en

 13   leur disant, voilà, maintenant il est en train de vous dire ceci ou cela,

 14   ou c'est ce qu'il a voulu dire c'est ceci. J'ai été également chargé de

 15   suggérer dans quel domaine il était possible de poser des questions de

 16   suivi ou d'envisager un entretien potentiel pour jeter la lumière sur

 17   certains points.

 18   Q.  Très bien. Et pendant votre participation à cette enquête, est-ce qu'on

 19   ne vous a jamais demandé de rédiger des rapports quant à votre analyse ?

 20   R.  Non, on ne m'a demandé de rédiger des rapports à proprement parler. En

 21   me fondant sur mon expérience précédente, et encore une fois compte tenu du

 22   fait que les juristes et les enquêteurs du bureau du Procureur et l'équipe

 23   d'enquête ne disposaient pas d'une expérience militaire, ce que j'ai décidé

 24   de faire donc consistait à rédiger un certain nombre de récits ou de

 25   rapports portant sur différents aspects du Corps de la Drina. Donc l'état-

 26   major principal, les différentes brigades, et les documents militaires

 27   relatifs à leur participation aux événements sur le terrain en juillet 1995

 28   afin que les juristes et les procureurs et enquêteurs disposent de


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  1   documents de référence et qui puissent les guider dans leur travail en ce

  2   qui concernait le Corps de la Drina, concernant la signification précise de

  3   chaque document ou ce que les documents signifiaient dans le contexte des

  4   événements, qui étaient les signataires des documents, tous les sujets et

  5   tous les documents qui demandaient que ces collègues parviennent à une

  6   compréhension plus détaillée et même exhaustive du rôle de l'armée dans ces

  7   événements de juillet 1995. Et je garde à l'esprit également ce que je

  8   continue à faire des années plus tard dans la commission chargée des crimes

  9   de guerre.

 10   Alors il s'est avéré après que l'acte d'accusation contre le général Krstic

 11   a été dressé, que l'une des options possibles consistait à reprendre ces

 12   récits que j'avais rédigés à les transformer en rapports officiels qui

 13   pourraient être présentés par le bureau du Procureur à la Chambre de

 14   première instance en tant que pièces à conviction.

 15   Q.  Alors vous avez parlé de récits concernant les événements. Est-ce que

 16   vous avez séparé d'un côté les rapports et un autre que vous avez appelé

 17   rapport de commandement ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Est-ce que vous pourriez expliquer brièvement ceci ? La Chambre dispose

 20   de ces rapports et je ne veux pas que nous entrions trop dans les détails.

 21   Quelle est la différence ?

 22   R.  Les rapports de commandement, puisqu'il s'agit de généraux, de

 23   colonels, d'officiers de l'armée qui agissaient en vertu de l'autorité dont

 24   ils avaient été investis par leurs gouvernements, Etats respectifs, j'ai

 25   estimé qu'il serait utile pour nos enquêteurs et pour nos juristes, des

 26   procureurs d'avoir une liste de toutes les compétences et attributions en

 27   vertu desquelles ces officiers agissaient dans le cadre légal qui était les

 28   leurs. Donc les rapports de commandement exposaient principalement les


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  1   différents échelons de structure de commandement, les types de compétence

  2   et de responsabilités que chaque individu portait au terme des

  3   réglementations et les textes en vigueur, quelles étaient compétences d'un

  4   commandant de brigade en application des procédures et des lois régissant

  5   la VRS, qui était responsable de nomination de ces commandants; quelle

  6   était la limite de leur autorité des différents échelons du commandement.

  7   Donc c'est cela que j'appelle les rapports au sujet de la responsabilité de

  8   commandement, à savoir exposer le cadre juridique et réglementaire qui

  9   était en vigueur et au sein duquel les différents postes de commandement de

 10   l'armée de la Republika Srpska fonctionnaient et ce que cela signifiait au

 11   terme des règlements en vigueur dans ces structures.

 12   Q.  Pourriez-vous nous dire quels rapports de commandement distincts

 13   particuliers vous avez rédigés ? Je les présenterai plus tard pour

 14   versement, mais juste pour être tout à fait clair, quel était leur titre,

 15   de quoi s'agissait-il en une ou deux phrases ?

 16   R.  Oui. Il y en a un qui porte sur le commandement des corps de la VRS. Il

 17   y en a un qui s'intéresse au commandement à l'échelon des brigades. Il y en

 18   a un autre qui s'intéresse au commandement à l'échelon de l'état-major

 19   principal.

 20   Q.  Très bien. Quant aux récits, aux rapports qui consistaient en un récit,

 21   combien y en avait-il ?

 22   R.  Il y a deux versions différentes : Un rapport initial était rédigé et

 23   soumis en tant qu'élément de preuve par le bureau du Procureur dans

 24   l'affaire Krstic en 2000, et ensuite j'ai revu et corrigé ce rapport, je

 25   l'ai augmenté en 2002 pour utilisation dans l'affaire le Procureur contre

 26   Blagojevic et Jokic.

 27   Q.  Très bien. Et dans le récit, vous en avez parlé, vous utilisez, vous

 28   étudiez de nombreuses informations du renseignement que vous venez juste de


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  1   nous décrire, des interceptions, des documents, et cetera ?

  2   R.  Oui. Et dans le rapport sous forme de récit, j'ai essayé de façon aussi

  3   détaillée que possible d'utiliser ces informations et d'exposer, le

  4   détailler en fait le contexte militaire des événements survenus en Bosnie

  5   orientale notamment à Srebrenica en juillet 1995 en me fondant sur mon

  6   analyse des documents militaires et des interceptions en ma disposition.

  7   Q.  Et quant au renseignement humain dont vous disposiez les entretiens

  8   avec les survivants, les victimes survivantes et les témoins, nous savons

  9   tous que cela représente des milliers et des milliers de cas, comment avez-

 10   vous utilisé ce type de renseignement ?

 11   R.  En règle générale, je n'utilisais pas ces informations relatives à des

 12   témoins et issues d'entretiens avec ces témoins, lorsque j'avais des

 13   entretiens avec des officiers. Il y a peut-être un côté un tout petit peu

 14   artificiel dans mon travail sous forme de récit couché par écrit, et je

 15   reconnais c'est parce que nous sommes dans un contexte judiciaire en fin de

 16   compte. Et en sachant que nombre de ces personnes seraient appelées à

 17   déposer devant le Tribunal, je n'avais certainement pas l'intention de

 18   m'aventurer sur le terrain de l'exactitude ou de la crédibilité de leur

 19   témoignage; c'était manifestement à la Chambre de première instance de s'y

 20   intéresser.

 21   Lorsque j'ai inclus des dépositions de témoin c'était avant tout celle de

 22   survivant d'exécutions de masser et c'était uniquement dans le but d'écrire

 23   le contexte de l'événement en question afin que les documents militaires

 24   que nous avions collectés en la matière puissent être insérés dans un

 25   contexte et être interprétés correctement. Par exemple, dans mon rapport,

 26   je m'engage dans une discussion d'une portée assez limitée au sujet du

 27   récit d'un survivant de l'exécution d'Orahovac, mais uniquement dans le but

 28   que le lecteur de ce rapport puisse comprendre ce que peuvent signifier des


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  1   documents du génie ou des documents relatifs à des engins ou la présence

  2   des engins de terrassement et de bulldozers à Orahovac dans le contexte de

  3   ce qui s'y passait à l'époque.

  4   Q.  Très bien. Je voudrais maintenant que nous passions à l'un de ces

  5   récits, vous avez déjà déposé à ce sujet, vous l'avez inclus au fil du

  6   temps dans vos différents rapports, donc je voudrais en venir assez

  7   rapidement à l'été de 1995.

  8   M. McCLOSKEY : [interprétation] Le premier document concerné est le P338.

  9   "Analyse du degré de préparation au combat et des activités de la VRS en

 10   1992."

 11   En fait, excusez-moi. Je voudrais d'abord demander le versement du

 12   curriculum vitae numéro 26039.

 13   M. IVETIC : [interprétation] Pas d'objection.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P2094.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] P2094 est versé au dossier.

 17   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 18   Q.  Nous voyons que la date de ce rapport est le mois d'avril 1993.

 19   Pourriez-vous nous décrire très brièvement qui a élaboré ce rapport, et que

 20   représente-t-il ?

 21   R.  Certainement. Même si la VRS était bien évidemment une force

 22   relativement jeune en 1992/1993 lorsque ce rapport a été élaboré, et

 23   qu'elle a émané de la JNA, les officiers étaient bien formés et il

 24   s'agissait d'officiers de carrière, de militaires de carrière. Et l'une des

 25   choses qu'ils ont reconnu en tant que fonction supérieure du travail des

 26   soldats militaires c'était de faire un travail rigoureux, une analyse de

 27   leurs opérations afin de mieux pouvoir tirer des leçons des opérations afin

 28   de pouvoir mieux travailler à l'avenir. Et c'est justement l'un de ces


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  1   documents qu'ils ont élaboré, après avoir fait une analyse de leurs propres

  2   opérations et activités en 1992, et je crois que ce document a été publié

  3   au mois d'avril 1993, et justement comme le dit la date, par l'état-major

  4   principal. Il s'agit donc d'une évaluation annuelle pour l'année 1992 qui

  5   parle -- en fait qui est composée d'environ 160 pages, et il s'agit d'une

  6   autocritique de leur propre performance pendant à la première période de la

  7   guerre.

  8   Q.  Il n'est pas nécessaire de parcourir ce rapport, mais nous pouvons

  9   apercevoir, au 137 en B/C/S et la page 157 en anglais, que la première

 10   partie a été signée par le commandant suprême Radovan Karadzic. Est-ce que

 11   cela modifie votre analyse quant à la personne qui a élaboré ce rapport, ou

 12   bien dites-nous pourquoi son nom figure sur ce rapport ?

 13   R.  Non, non pas du tout, puisque ce rapport a été élaboré par plusieurs

 14   personnes de l'état-major principal. Le président Karadzic, le commandant

 15   en chef des forces armées, et il est approprié que ce rapport lui soit

 16   présenté afin qu'il puisse y apporter sa signature.

 17   Q.  Vous savez, le commandant en chef, c'est un terme américain. J'aimerais

 18   vous demander si vous savez quel serait le terme pour la Republika Srpska,

 19   de son titre.

 20   R.  Eh bien, dans plusieurs règlements ou lois, commandant en chef ou

 21   commandant suprême, et dans ce contexte, il s'agirait du commandant

 22   suprême.

 23   Q.  Je sais qu'il s'agit d'un sujet, que ceci fait l'objet de votre rapport

 24   et d'autres rapports également. Je ne vais pas entrer dans trop de détail,

 25   mais j'aimerais vous poser néanmoins quelques questions quant à un

 26   commentaire qui figure à la page 9 en anglais, et à la page 9 en B/C/S. Je

 27   vais très lentement vous donner lecture de ce commentaire.

 28   "Nous avons conféré une attention toute particulière afin de contrôler et


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  1   de donner l'aide au commandement subordonné afin que ces activités

  2   importantes soient menées à temps, et conformément aux questions qui ont

  3   été déjà établies par avance et conformément aux règlements. L'inspection a

  4   été menée à bien en utilisant la méthode des inspections d'équipe et des

  5   observations ont été faites immédiatement. Dans la plupart des cas, les

  6   organes de l'état-major principal ont corrigé personnellement les erreurs

  7   au sein des commandements immédiatement. Nous avons présenté nos

  8   observations par la suite, et nous avons décidé d'éliminer les déficiences

  9   observées, l'implication de différents organes de l'état-major principal

 10   dans les brigades, les autres unités ont donné de très bons résultats parce

 11   que de cette manière les directives, les commandements et les ordres ont

 12   rejoint ceux qui les ont exécutés de la manière la plus rapide possible, et

 13   l'action concerté, planifiée a été faite de manière relativement rapide".

 14   Et ceci figure sous l'intitulé : "Commandement et contrôle".

 15   Vous en avez déjà parlé, vous avez déjà parlé de l'importance de cette

 16   déclaration, mais qu'est-ce que cela vous dit à vous ?

 17   R.  L'un des principes fondamentaux du commandement et du contrôle consiste

 18   à donner des ordres, et à suivre le processus afin de s'assurer que l'on

 19   respecte les ordres. Les militaires à divers niveaux ont diverses manières

 20   pour s'assurer que ceci est bien respecté. L'une des manières les plus

 21   efficaces afin que la hiérarchie militaire puisse s'assurer que l'on obéit

 22   aux ordres est d'établir ces inspections fréquentes du quartier supérieur,

 23   du niveau supérieur en fait du quartier général supérieur aux formations

 24   subordonnées pour s'assurer qu'ils ont bien reçu les ordres, et que les

 25   ordres sont respectés et exécutés de façon rapide, et ce qui est surtout

 26   important c'est de s'assurer que l'intention de l'ordre est clairement

 27   comprise par les formations subordonnées et les soldats qui doivent

 28   exécuter ces ordres. Donc le fait que les équipes de l'état-major principal


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  1   se sont rendues de façon régulière au corps subordonné et même au-delà de

  2   cela, au commandement des brigades subordonnées afin d'évaluer leur

  3   processus, et afin de s'assurer que les ordres qui sont émis au niveau

  4   supérieur ont été compris clairement et menés à bien de manière la plus

  5   rapide que possible, et ceci représente un signe d'une opération mature et

  6   bien gérée.

  7   Q.  Fort bien. Passons maintenant à un passage qui se situe à la fin de ce

  8   document. Et c'est ce qui figure à la page, ce passage figure à la page 158

  9   en anglais, et à la page 138 en serbe. L'intitulé de cette section

 10   s'appelle : "Caractéristique élémentaire de l'opération et de l'utilisation

 11   tactique de l'armée de la Republika Srpska".

 12   Le document est signé par Dragutin Ilic. Je voudrais que l'on se

 13   penche sur la page 260 en anglais, et sur la page 139 en serbe. J'aimerais

 14   vous donner lecture d'un paragraphe qui porte sur différentes, quelques

 15   différentes régions. Le paragraphe commence par ce qui suit, il s'agit du

 16   deuxième paragraphe à partir du haut :

 17   "A Posavina et en Bosnie occidentale, nous avons mis l'emphase sur le

 18   regroupement des forces du soutien aérien et de l'artillerie".

 19   Je ne vais pas vous poser des questions bien préciser sur la Posavina

 20   ou la Bosnie occidentale, mais j'aimerais maintenant vous donner lecture en

 21   fait de la raison pour laquelle je vous pose cette question. Je poursuis ma

 22   lecture :

 23   "Et à Podrinje, de manière très spécifique, les dépenses ont augmenté

 24   quant à la manière dont la munition a été utilisée, le matériel et

 25   l'équipement, ainsi que l'utilisation des soldats de réserve de l'armée de

 26   la RS. La présence du commandant de l'état-major principal ou d'un

 27   représentant de l'état-major principal, les unités qui sont en train de

 28   mener une mission en vue de libérer Podrinje d'une manière spécifique


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  1   donnent un certain poids, et mènent le combat, les opérations de combat

  2   vers un objectif unique".

  3   Donc j'aimerais maintenant vous poser la question suivante :

  4   S'agissant de Podrinje, dans quel secteur est-ce que Podrinje est situé ?

  5   R.  Podrinje en fait dans le contexte du Corps de la Drina,

  6   géographiquement parlant se trouve dans la partie occidentale de la vallée

  7   de la Drina, et ce secteur englobe ce qui est connu sous le nom des

  8   municipalités de Zvornik, Vlasenica, une partie de Birac oriental, Milici,

  9   Bratunac. Et également une partie de la région orientale de Romania, elle

 10   comprend Rogatica et Visegrad. Donc Podrinje correspond normalement à la

 11   zone géographique du Corps de la Drina.

 12   Q.  Excusez-moi, est-ce que vous avez dit "Srebrenica" ?

 13   R.  Oui, Srebrenica est situé au centre du corps, au centre du secteur du

 14   Corps de la Drina.

 15   Q.  Fort bien. J'aimerais maintenant vous demander si vous êtes au courant

 16   si des opérations avaient été conçues afin de libérer Podrinje à une date

 17   en fait avant le mois d'avril 1993, lorsque ce document a été rédigé ?

 18   R.  Oui. Même les informations du Corps de la Drina, en novembre 1992, il

 19   était devenu clair ou plutôt il a été reconnu que les forces militaires

 20   musulmanes de Bosnie contrôlaient une grande partie du territoire de

 21   Zvornik, Vlasenica, Milici, Bratunac, et les secteurs de Srebrenica. Donc

 22   au début du mois de novembre 1992, il y avait un très grand nombre

 23   d'opérations d'envergure militaire qui avaient été entamées par l'état-

 24   major principal, desquelles s'est divisé le Corps de la Drina pour éliminer

 25   la présence des Musulmans de Bosnie dans ce secteur, dans ces régions.

 26   Q.  Maintenant j'aimerais poser une question concernant la "présence du

 27   commandant de l'état-major principal ou d'un représentant de l'état-major

 28   principal", c'est ce qu'on y lit pour apporter son concours à l'exécution


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  1   de cette opération.

  2   J'aimerais savoir si, dans le contexte du mois de juillet 1995, de par les

  3   documents et ce genre de matériel, est-ce que vous avez vu si le commandant

  4   Ratko Mladic ou ces officiers supérieurs étaient présents.

  5   R.  Oui, tout à fait. Le général Mladic ainsi que ces officiers de l'état-

  6   major principal et d'autres colonels de l'état-major principal étaient

  7   physiquement présents en juillet 1995 pendant les différentes étapes de

  8   l'opération militaire de Srebrenica.

  9   Q.  Et juste avant la pause : Je vais vous donner un exemple. Si, par

 10   exemple, nous prenons la date du 10 juillet et de l'opération de

 11   Srebrenica, qu'en est-il ?

 12   R.  Pour vous donner un exemple, un rapport serait élaboré de la Brigade

 13   légère d'infanterie de Bratunac qui établit que le 10 juillet, non

 14   seulement le chef de l'état-major principal du Corps de la Drina, le

 15   général Krstic est présent, dans la zone de la brigade mais que Ratko

 16   Mladic est également physiquement présent sur le terrain. Il y a également

 17   d'autres documents qui reflètent le fait que les commandants de l'état-

 18   major principal sont en train de recevoir physiquement des ordres du

 19   général Mladic et qu'ils sont en train d'exécuter ses ordres.

 20   Q.  Et qu'en est-il de Gvero, le commandant adjoint chargé du moral des

 21   troupes, des questions religieuses et des questions juridiques pour l'état-

 22   major principal, qu'en est-il de lui ?

 23   R.  Oui. C'est un officier qui représentait l'état-major principal, le

 24   général Gvero, il était présent, je crois, entre le 7 et le 8 juillet, le 7

 25   et 8 juillet, et il était en présence du général Krstic.

 26   Q.  Qu'en est-il du général Milovanovic, le chef de l'état-major principal

 27   et le commandant adjoint de l'état-major principal, où se trouvait-il à

 28   l'époque, pendant l'opération de Srebrenica ?


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  1   R.  Le général Milovanovic ne se trouvait pas en Bosnie orientale en

  2   juillet 1995 d'après mes sources, d'après mes connaissances. Je crois

  3   comprendre - d'après les informations et d'après l'enquête - que pendant

  4   cette période il effectuait le contrôle personnel sur l'opération militaire

  5   du 1er et 2e Corps de la Krajina en Bosnie occidentale à la suite d'une

  6   menace croissante à l'encontre de la partie occidentale de la Republika

  7   Srpska.

  8   Q.  Alors ce document figure déjà au dossier.

  9   M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que le

 10   moment est opportun pour prendre la pause.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien, veuillez, je vous prie,

 12   escorter le témoin hors du prétoire.

 13   Et par la suite nous prendrons une pause de 20 minutes.

 14   [Le témoin quitte la barre]

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous reprendrons nos travaux à midi 20.

 16   --- L'audience est suspendue à 11 heures 57.

 17   --- L'audience est reprise à 12 heures 22.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez faire entrer M. Butler dans la

 19   salle d'audience.

 20   [Le témoin vient à la barre]

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey, vous pouvez

 22   continuer.

 23   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 24   Q.  Monsieur Butler, j'ai oublié de vous demander que représente ce

 25   classeur que vous avez sous les yeux : qu'est-ce que c'est et que vous

 26   consultez ?

 27   R.  Avant de venir déposer, pendant plusieurs jours, j'ai eu l'occasion de

 28   m'asseoir avec vous et de passer en revue une série de documents pour mon


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  1   témoignage. Et il s'agit de copies papier de documents qui sont affichées à

  2   l'écran. Il y a trois classeurs au total.

  3   Q.  Pourriez-vous confirmer, je vous prie, que vous avez déposé en tant que

  4   témoin de l'Accusation dans les affaires reliées à Srebrenica, et il

  5   s'agissait des affaires Krstic, Blagojevic, Popovic, Tolimir, Perisic,

  6   Karadzic, et que vous avez également déposé dans le cadre d'un appel

  7   interjeté par M. Krstic ?

  8   R.  Oui, c'est cela, vous avez raison.

  9   Q.  Et j'aimerais vous demander si vous avez déposé également en qualité de

 10   témoin de la Défense devant le tribunal ?

 11   R.  Oui, c'est assez étrange. Mais je dois avouer que oui, au cours des 18

 12   derniers mois, j'ai déposé au nom de défendeur qui se trouvait au tribunal

 13   de l'Etat bosnien à Sarajevo.

 14   Q.  Et est-ce que c'était en rapport à l'affaire Srebrenica ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Et quelles sont les questions sur lesquelles vous avez déposées et sur

 17   lesquelles on vous a posé des questions ?

 18   R.  Je crois que l'objectif de mon témoignage consistait à essayer de

 19   définir le lien entre la subordination et la hiérarchie et d'essayer de

 20   comprendre de quelle manière ou dans quelle circonstance l'armée ou la VRS

 21   exerçait-elle le commandement sur les forces du MUP de la RS en juillet

 22   1995, et tout ceci en rapport avec Srebrenica.

 23   Q.  Très bien. Nous allons aborder ce sujet très bientôt ici aussi.

 24   M. McCLOSKEY : [interprétation] Mais j'aimerais, tout d'abord, demander que

 25   l'on affiche la pièce P1968.

 26   Q.  Il s'agit de la directive 4. La Chambre de première instance a entendu

 27   des éléments de preuve concernant ceci. Vous vous souviendrez qu'à la

 28   dernière page, vous verrez le nom du général Ratko Mladic, que le document


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  1   a été élaboré par son chef d'état-major, le commandant Milovanovic. Et vous

  2   vous rappellerez qu'il s'agit d'une directive envoyée à divers corps

  3   d'armée, dont le Corps de la Drina.

  4   Et si on passe à la page 5 en anglais, et c'est la page 11 en B/C/S,

  5   j'aimerais vous demander de nous dire qu'en à cette directive envoyée au

  6   Corps de la Drina. Je cite :

  7   "Des positions actuelles, ses forces principales consistent à défendre

  8   Visegrad (le barrage), Zvornik et le corridor, alors que -- pour pousser

  9   les forces de l'ennemi et d'effectuer le plus de pertes possibles sur les

 10   forces de l'ennemi afin qu'ils puissent quitter Birac, Zepa, Gorazde, et

 11   les autres secteurs habités par une population musulmane."

 12   D'après votre analyse, qu'est-ce que ça veut dire "population musulmane" ?

 13   R.  Il ne faut pas oublier que les forces militaires musulmanes de Bosnie

 14   étaient complètement encerclées par les forces serbes de Bosnie. Et donc,

 15   les forces musulmanes bosniennes obtenaient leur soutien de la population

 16   musulmane qui résidait à cet endroit-là. Et, bien évidemment, l'ordre porte

 17   sur les forces militaires, mais l'ordre reflète également le fait qu'ils

 18   devaient également s'efforcer de faire en sorte que la population musulmane

 19   quitte le secteur afin que les forces militaires musulmanes ne puissent pas

 20   obtenir un soutien de la population musulmane.

 21   Q.  Est-ce qu'il s'agit là d'un objectif militaire conforme ?

 22   R.  Le fait d'attaquer les forces musulmanes est clairement un objectif

 23   militaire approprié, donc le fait d'attaquer les forces militaires

 24   musulmanes de Bosnie, oui. Mais le fait d'attaquer une population, pas du

 25   tout.

 26   Q.  Et qu'en est-il de la ligne qui suit :

 27   "Tout d'abord, désarmer les hommes en âge de porter les armes, et s'ils

 28   refusaient, de les détruire."


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  1   Est-ce que vous trouvez qu'il y a quelque chose d'inapproprié dans ce terme

  2   de "les détruire", détruire les hommes ?

  3   R.  Non. Dans le contexte où les hommes en âge de porter les armes font

  4   partie d'une organisation militaire, il n'y a absolument rien d'incorrect

  5   lorsqu'on dit de lancer une attaque, de détruire une force armée, et mis

  6   dans ce contexte.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais poser une question.

  8   Alors, tout d'abord, le fait de désarmer les hommes en âge de porter les

  9   armes et les hommes armés, alors comment pouvez-vous désarmer quelqu'un qui

 10   n'est pas armé ? Voilà ce que je ne comprends pas. Est-ce que vous pouvez

 11   nous expliquer cela, s'il vous plaît, comment peut-on désarmer les hommes

 12   en âge de porter les armes, qui ne sont pas armés ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, Monsieur le Juge, lorsqu'on parle

 14   d'une personne comme étant un combattant, cela ne veut pas dire

 15   nécessairement qu'une personne est armée. Le combattant ne doit pas

 16   nécessairement être armé. Il y a plusieurs critères qui s'appliquent, par

 17   exemple, si ces personnes sont des membres des forces armées. Par exemple,

 18   vous pouvez être un membre de l'ABiH à l'époque, qui soit un membre

 19   militaire, mais qui n'est pas armé parce qu'il n'y a pas suffisamment

 20   d'armes. Et l'on peut également être un soldat sans arme parce que, par

 21   exemple, il n'y a pas suffisamment d'armes pour tous. Mais cette personne

 22   est néanmoins armée.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends, mais comment peut-on

 24   désarmer quelqu'un qui n'a pas les armes ? Je comprends qu'on peut être un

 25   membre de l'armée, ne portant pas d'arme sur soi, on peut être un

 26   combattant. Mais comment peut-on désarmer une personne qui ne porte pas

 27   d'arme ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, tout d'abord, la phrase qui dit "tout


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  1   d'abord offrir de désarmer des hommes aptes à combattre, les hommes

  2   armés…", pour moi, il s'agit de la première offre faite aux soldats, aux

  3   hommes, donc leur possibilité qu'on leur donne de se rendre et de partir;

  4   eh bien, peut-être que la traduction n'est pas parfaite.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, je ne sais pas si c'est une

  6   question de traduction. Parce que, vous comprenez que désarmer les gens qui

  7   ne sont pas armés, peut poser un problème. Mais évidemment, les hommes

  8   aptes à combattre peuvent faire partie des forces armées, mais aussi ne pas

  9   faire partie des forces armées ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Et quand on situe cela dans le contexte

 11   du mois de juillet 1995, il va y avoir des distinctions entre les civils,

 12   qui sont les hommes aptes à combattre, parce qu'ils sont dans un groupe

 13   d'âge, et puis des hommes qui ne sont pas armés, mais qui faisaient partie

 14   de la 28e Division, mais qui ne sont pas armés. Donc, c'est selon que vous

 15   êtes présent sur le champ de bataille ou non, que vous allez être dans la

 16   catégorie de civils ou bien des soldats non armés.

 17   [La Chambre de première instance se concerte]

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Eh bien, je voudrais faire suite à la

 19   question posée par le Juge Orie. Donc, la première option, ne serait-ce pas

 20   de les arrêter en tant que prisonniers de guerre, avant de les détruire ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr, ça serait la première option. Si

 22   vous regardez le contexte de 1992, quand les forces des Musulmans de Bosnie

 23   et la population ont été plus nombreux que la population civile et les

 24   militaires serbe dans la zone, il n'aurait pas été surprenant de voir que

 25   les Serbes de Bosnie, même avant le début des combats, offre à ces forces

 26   la possibilité de quitter la zone, donc de les désarmer, et de les laisser

 27   partir, et sans pour autant entrer en opérations de combat avec eux.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et quel est votre commentaire par


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  1   rapport à la question posée par Me McCloskey, vu que vous êtes d'accord que

  2   la première option aurait été de les désarmer et pas de les détruire ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, les Musulmans de Bosnie avaient leur

  4   propres objectifs militaires à l'époque; et cela n'était pas de quitter la

  5   zone parce qu'il contrôlait ses hommes et il voulait contrôler ces hommes.

  6   Moi, quand je lis cette ligne où c'est écrit "sinon les détruire", eh bien,

  7   je l'examine de la façon dont je regarde et examine la plupart des

  8   documents. Je le regarde de façon rigoureuse et conservatrice. Autrement

  9   dit, les commandants militaires demandent aux forces de faire ou d'infliger

 10   les dégâts maximaux à ces unités de militaires pour les forcer à se rendre

 11   ou bien les forcer à quitter la zone. Eh bien, je ne lis pas forcément

 12   qu'on demande -- on leur demande de tuer s'ils se rendent.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais comment les -- comment ils peuvent

 14   se rendre si vous ne leur donnez -- si vous ne leur donnez pas la

 15   possibilité de se rendre, parce qu'ici, la première option, elle disait

 16   détruire ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, quand vous placez cela dans le

 18   contexte et surtout par rapport à la phrase qui précède, pendant que le

 19   reste des forces dans la zone de Podrinje, au sens large du terme, doit

 20   épuiser l'ennemi, leur infliger les pertes les plus lourdes possible et les

 21   forcer de quitter Bihac, Zepa et la zone de Gorazde.

 22   Donc, quand vous placez cela dans le contexte, je le comprends comme

 23   cela. Donc, il y avait une campagne, toute une série de petites batailles

 24   qui progressivement, au cours des jours, des semaines des mois, l'on a

 25   dégradé les capacités militaires des Musulmans de Bosnie de sorte qu'ils

 26   étaient nombreux à avoir quitté la zone, pas seulement les zones

 27   militaires, mais aussi la population civile qui les a suivi. Donc, pour

 28   moi, il ne s'agit pas d'un ultimatum que l'on donne une seule fois.


Page 16140

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

  2   Vu que vous avez dit qu'il allait -- qu'il y avait peut-être un problème de

  3   réduction et un de mes collègues m'a indiqué qu'il lisait ceci

  4   différemment, est-ce que je peux demander aux parties et peut-être après

  5   avoir consulté le CLSS si je dois lire cette ligne comme : Tout d'abord,

  6   proposer de désarmer les armes -- les hommes aptes à combattre et les

  7   hommes armés. Ou bien : Tout d'abord, proposer de désarmer les hommes qui

  8   sont aptes à combattre et qui son armés. Parce que moi, je le comprends

  9   dans le sens de la première phrase et mon collègue comprend le sens de la

 10   deuxième phrase que je viens de vous donner. C'est peut-être un problème de

 11   traduction. Est-ce que les parties peuvent essayer de voir si elles

 12   comprennent de la même façon ceci ? Et sinon, eh bien, qu'ils nous le

 13   disent pour que l'on puisse demander au CLSS de résoudre ce problème de

 14   traduction.

 15   Monsieur McCloskey.

 16   M. McCLOSKEY : [interprétation] Bien sûr, Monsieur le Président.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et puis, je vais vous demander de

 18   poursuivre.

 19   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui.

 20   Q.  Monsieur Butler, on a vu que cette directive envoyée au Corps de la

 21   Drina était datée du 19 novembre 1992. Maintenant, on va examiner un

 22   document du Corps de la Drina du 24 novembre 1992.

 23   M. McCLOSKEY : [interprétation] 65 ter 5807. Je pensais que ce document

 24   figurait parmi les pièces à conviction, mais je n'ai pas le numéro --

 25   enfin, la cote commençant par la lettre P pour ce document.

 26   Q.  En tout cas, c'est un document qui suit de quelques jours seulement la

 27   réception de la directive numéro 4 par le Corps de la Drina. Vous pouvez

 28   voir que c'est un document qui a été envoyé à la Brigade d'infanterie


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  1   légère de Zvornik. Son commandement est en mains propres du commandant ou

  2   chef d'état-major, Milenko Zivanovic -- donc, envoyé par Milenko Zivanovic,

  3   le commandant du Corps de la Drina.

  4   Et on peut lire :

  5   "Sur la base de la directive de l'état-major principal de l'armée de la

  6   Republika Srpska, strictement confidentiel, 025 [inaudible] du 19 novembre

  7   1992 et l'évaluation de la situation, j'ai décidé."

  8   Et là, je cite :

  9   "Lancer une attaque utilisant le gros des troupes et l'équipe -- et le gros

 10   de l'équipement pour infliger à l'ennemi les pertes les plus importantes

 11   possibles, l'épuiser, le casser et le forcer à se rendre et forcer la

 12   population locale musulmane de quitter la zone de Cerska, Zepa, Srebrenica

 13   et Gorazde."

 14   Est-ce que vous faites un rapport entre cet ordre, cette décision et la

 15   directive numéro 4 du général Mladic ?

 16   R.  Oui, cela correspond.

 17   Q.  Et cet elle où on demande [inaudible] qu'on force la population locale

 18   musulmane de quitter les zones de Cerska, Zepa, Srebrenica et Gorazde. Est-

 19   ce c'est là, d'après vous, correspond à un objectif militaire légitime ?

 20   R.  Eh bien, à nouveau, dans le contexte de droit international, vous ne

 21   pouvez pas prendre pour cible la population civile en tant que soit, dans

 22   leur contexte de leur compréhension de la situation militaire, parce qu'il

 23   faut dire que toutes ces forces sont en train d'opérer derrière les lignes

 24   de l'ennemi et il était reconnu qu'ils étaient aidés par la population

 25   locale civile. Et c'était la seule aide qu'ils pouvaient recevoir. Et donc,

 26   à partir du moment où vous déplacez cette population civile, eh bien, vous

 27   créez les circonstances dans lesquelles les forces musulmanes de Bosnie ne

 28   peuvent plus mener à bien des opérations dans la région avec succès.


Page 16142

  1   Q.  Est-ce que les opérations militaires étaient dirigées contre les zones

  2   ou l'armée musulmane était -- essuyait une défaite et les zones désertées

  3   par la population musulmane ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Bon, je ne veux pas entrer dans le détail.

  6   M. McCLOSKEY : [interprétation] Mais je voudrais demander que ce document

  7   soit versé au dossier.

  8   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  9   M. IVETIC : [interprétation] Pas d'objection.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ce document va

 12   recevoir la cote P2095.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il est versé au dossier.

 14   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je vais demander le document 65 ter 4651.

 15   Donc, c'est Drinski magazine, une publication en date du mois de juin 1995.

 16   Q.  Et on va voir que, là, on a reçu journalistique [inaudible] de la

 17   Brigade de Zvornik. Et vous avez dit que, de temps en temps, vous avez

 18   utilisé des sources publiques comme celles-ci. Est-ce que vous pourriez

 19   nous dire ce que c'est [inaudible] ?

 20   R.  Oui, en effet.

 21   Q.  Est-ce que vous pouvez dire ce que c'est que ce Drinski magazine ?

 22   R.  Eh bien, c'était une publication mensuelle de la Brigade de Zvornik qui

 23   était disponible à tous les soldats de la brigade dans un effort qui visait

 24   à améliorer le moral des troupes, informer les soldats, leur faire

 25   comprendre quels sont les objectifs de la guerre, et cetera. De nombreuses

 26   organisations militaires ont des magazines -- des publications similaires

 27   qui servent à souder les troupes.

 28   Q.  [aucune interprétation]


Page 16143

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître McCloskey, je voudrais demander

  2   un point de clarification par rapport à la réponse précédente, à savoir

  3   forcer la population musulmane d'abandonner les zones de Cerska, Zepa,

  4   Srebrenica et Gorazde. On vous a demandé si ceci consistait à un objectif

  5   militaire approprié. Et vous avez répondu en deux parties. Vous avez dit

  6   tout d'abord que dans le contexte du droit international, vous ne pouvez

  7   pas prendre pour cible la population civile. Ensuite, dans le deuxième

  8   volet de la réponse, vous avez expliqué quelle était la situation militaire

  9   à l'époque, et vous avez dit qu'en forçant la population musulmane à

 10   quitter la zone, eh bien, que vous alliez couper l'aide, l'appui fourni par

 11   cette population locale à leurs forces armées. Vous avez consacré pas mal

 12   de temps à la deuxième option, au deuxième volet de votre réponse,

 13   autrement dit que du point de vue militaire, il y avait une raison, une

 14   logique dans cet effort de se débarrasser de la population civile donc de

 15   l'appui de la population civile. Est-ce que vous, vous savez quel était le

 16   cas exactement, quel était vraiment l'objectif ? Est-ce que l'objectif

 17   était de mettre une fin à l'aide fournie par la population civile aux

 18   militaires ou bien dans la mesure où vous puissiez répondre à la question ?

 19   Bien sûr, est-ce qu'il s'agissait tout simplement de prendre pour cible la

 20   population civile et c'est peut-être pas légitime, mais c'était peut-être

 21   l'intention de faire [inaudible] ? Donc est-ce que vous pouviez nous dire

 22   laquelle des deux options d'après vous est la plus probable ? Parce que

 23   pour l'instant, vous nous avez donné que deux possibilités sans vous

 24   prononcer pour autant, ou bien est-ce que vous n'avez pas répondu, est-ce

 25   que vous

 26    LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, tout simplement je reconnais le fait

 27   que vous pouvez avoir une activité qui a une utilité, qui suit un

 28   raisonnement militaire même s'il s'agit d'une activité, d'une action qui


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  1   n'est absolument pas légitime. Je vais vous faire une analogie, par

  2   exemple, la campagne qui a été menée contre les rebelles à Guatemala, au

  3   début des années 1980, où les forces qui opéraient derrière les lignes

  4   contre le gouvernement recevaient un support important de la population

  5   locale. L'armée de Guatemala a tout simplement dit que la meilleure façon,

  6   l'appel lancé était la meilleure façon de procéder, c'est de tuer le

  7   poisson pour assécher lac, et le lac c'était la population civile.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vois, je vois l'exemple. Mais

  9   qu'est-ce que vous nous dites exactement ? Parce que j'essaie de répondre

 10   [comme interprété] la réponse.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, quand on a écrit ce qu'on a écrit la

 12   directive numéro 4, je ne peux pas exclure cela comme possibilité. Car la

 13   doctrine de la défense de la République socialiste de Yougoslavie dépendait

 14   lourdement de l'idée qu'au cours de la Guerre froide, ils envisageaient une

 15   invasion éventuelle soit du bloc soviétique soit de l'OTAN. Et donc tout

 16   comme leur expérience au cours de la Deuxième Guerre mondiale, la plupart

 17   de la doctrine militaire est la préparation donc a été basé sur cette

 18   guerre de libération. Donc les gens comme le général Mladic et les

 19   officiers de l'état-major principal étaient bien au courant de tout cela,

 20   de cette doctrine. Ils ont compris quelles étaient les conséquences du fait

 21   d'avoir permis à la population civile de rester dans ces zones. Et ils

 22   comprenaient que les forces armées allaient dépendre de leur aide.

 23   Et quand vous regardez comment se déroulait la campagne dans Cerska,

 24   en 1993, moi, je pense que quand on regarde le contexte, il est clair que

 25   la VRS ne fait pas de différence entre les militaires qu'ils attaquent et

 26   la population civile. Ils se rendent dans une zone, et puis qu'est-ce

 27   qu'ils font, eh bien, ils brûlent un village, et il n'y a rien qui reste

 28   derrière. Donc à nouveau au mois de novembre 1992, moi, je ne peux pas


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  1   exclure quelle était la signification de ce langage. Mais quand vous

  2   regardez ce qui s'est passé après, je pense que la signification est bien

  3   plus claire.

  4   L'INTERPRÈTE : L'interprète demande que l'on corrige le propos

  5   précédent, il s'agissait de assécher le lac pour tuer le poisson. Le lac

  6   étant la population civile. Merci.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

  8   M. McCLOSKEY : [interprétation] Donc là, on est en train de regarder

  9   Drinski magazine, cette publication.

 10   Je vais vous demander de venir à la deuxième page en anglais, c'est peut-

 11   être encore la première page. Et je vais vous demander donc de vous

 12   concentrer sur les premiers paragraphes de cet article.

 13   Q.  "La libération de Podrinje". Je ne vais pas vous lire tout cela, mais

 14   si on lisait c'est le début de cet article, on verrait que Vinko Pandurevic

 15   en tant que commandant de brigade parle de la possibilité, de la nécessité

 16   de libérer les villages serbes placés sous le contrôle musulman. Ensuite on

 17   parle de cette opération qui va du 7 janvier au 20 février. Ensuite ils

 18   parlent de ce territoire libéré qui s'étend sur une zone de 30 kilomètres

 19   le long de la route Zvornik, Drinjaca. Ensuite, ils parlent de membres de

 20   la brigade qui ont aidé à libérer Cerska, Konjevic Polje et Kravica, et qui

 21   avaient été détruits et brûlés, et qui attendaient à être libérés le 15

 22   mars 1993. Et puis ensuite je cite, on dit :

 23   "La victoire militaire était là, mais la communauté internationale a exposé

 24   la Republika Srpska à de grandes pressions, et a arrêté, a mis une fin à

 25   cette campagne victorieuse …"

 26   Tout d'abord, est-ce que ceci a quoi que ce soit à voir avec la directive

 27   numéro 4, où on voit Zivanovic parle de l'arrêt de la campagne, et on le

 28   voit aussi au printemps 1993; est-ce que ces événements ont un lien ?


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  1   R.  Oui. Entre le mois de décembre et le mois d'avril 1993, le Corps de la

  2   Drina et la VRS ont participé à une toute série d'opérations, une grande

  3   campagne ayant pour but de relever ces objectifs. Vous avez deux grands

  4   groupes de population, ensuite les forces armées, au nord de Konjevic Polje

  5   et Nova Kasaba, Milici et Cerska, vous avez la population musulmane, et

  6   puis vous avez le sud de cette zone. Ce qui se passe au cours de cette

  7   campagne c'est qu'un grand nombre d'individus sont tout simplement forcés à

  8   se déplacer dans deux directions. Un groupe, la population des Musulmans de

  9   Bosnie, migre vers l'ouest, pour gagner à la fin le territoire libre à

 10   Tuzla. Et puis le deuxième groupe migre vers le sud pour se retrouver dans

 11   la ville tenue par les Musulmans de Bosnie, la ville de Srebrenica. Donc ce

 12   qu'ils décrivent c'est qu'au fur et à mesure que l'armée progresse, la

 13   poche des Musulmans de Bosnie se réduit de plus en plus au territoire de

 14   Srebrenica, et ses alentours. Et donc dans le rapport des Nations Unies on

 15   trouve ces informations là, et au mois d'avril 1993, on parle dans ces

 16   rapports et ailleurs d'ailleurs de cette imminente crise humanitaire, car

 17   tous ces gens ne pouvaient tout simplement pas continuer à survivre dans

 18   une zone aussi petite. Le général Morillon des Nations Unies, ces forces de

 19   protection, déclarait Srebrenica zone sûre, mais pour les forces des Serbes

 20   de Bosnie il s'agissait là de victoire militaire qui a été fortement niée

 21   par la communauté internationale en créant justement cette enclave, cette

 22   zone sûre.

 23   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je vais proposer que ce document soit versé

 24   au dossier.

 25   M. IVETIC : [interprétation] Pas d'objection.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P2096.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui est versé au dossier.

 28   M. McCLOSKEY : [interprétation]


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  1   Q.  Quand vous avez parlé de cette population qui a été forcée pour quitter

  2   ces zones, vous avez parlé de "migration". Vous avez dit "migrer" mais

  3   aussi "forcée", mais "migrer" et "forcée" la population qui migre et la

  4   population qui est forcée de se déplacer, ce n'est pas la même chose. Donc

  5   est-ce que vous pouvez dire ce qui s'est passé exactement, est-ce qu'ils

  6   ont décidé de se déplacer, d'immigrer eux-mêmes de leur propre gré, ou bien

  7   est-ce qu'ils ont été forcés ?

  8   R.  Mais il ne s'agissait pas d'une migration volontaire. Il s'agissait là

  9   d'un mouvement de population forcé qui était le résultat d'un conflit armé.

 10   Au mois de juillet 1995, et c'est quelque chose qui relève de leur propre

 11   document, la VRS reconnaît que des milliers de gens qui vivaient dans

 12   l'enclave de Srebrenica depuis 1993, à partir du moment où elle a été

 13   créée, que c'était, en réalité les réfugiés musulmans de Bosnie venus

 14   d'autres zones.

 15   Q.  Très bien. Maintenant on va passer à un autre document. P1505. Vous

 16   avez déjà vu ce document. C'est le document qui vient du commandant de la

 17   1ère Brigade de Bratunac datant du 4 juillet 1994. Donc on avance dans le

 18   temps c'est un rapport qui a été envoyé à la brigade. Les Juges ont entendu

 19   beaucoup d'information à ce sujet, de ce document, donc je ne vais pas

 20   vraiment entrer dans le détail. Mais vous pouvez voir dans la première

 21   ligne que :

 22   "Au cours de la première visite effectuée au commandant du corps d'armée de

 23   la VRS il a indiqué qu'il allait bientôt visiter quelques unités du corps

 24   d'armée y compris la Brigade de Bratunac …"

 25   Et puis le lieutenant-colonel Slavko Ognjenovic qui était à l'époque le

 26   commandant de la Brigade de Bratunac, parle de différentes choses, du moral

 27   des troupes et cetera. Et vous, vous avez étudié ce document, est-ce que

 28   vous pouvez faire un lien entre ces informations, le document qui y figure,


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  1   et la visite effectuée par Ognjenovic à laquelle il fait référence ? Est-ce

  2   que vous arrivez à faire un lien entre ce qu'il est dit ici et la visite du

  3   général Mladic ?

  4   R.  Eh bien, ici, la Brigade d'infanterie légère de Bratunac c'est

  5   clairement une formation qui est subordonnée au Corps de la Drina. Donc

  6   dans ce contexte, en tant que commandant de la brigade, il devait savoir

  7   que le commandant de l'état-major principal de la VRS avait récemment

  8   visité le corps d'armée et qu'il y allait y avoir une directive. Et c'est

  9   quelque chose qu'on retrouve en partie dans le "Drinski" magazine, une des

 10   positions-clés au niveau de l'état-major principal était la position de

 11   l'assistant commandant chargé du moral et des questions religieuses et les

 12   professionnels militaires comprenaient que c'était une tâche importante que

 13   de garder le moral de troupes de soldats, de leur donner un cadre général

 14   de compréhension des objectifs de la guerre, des raisons de la guerre,

 15   c'était un objectif important que de savoir -- que de leur faire comprendre

 16   à quoi servait leur combat. Et ce que vous voyez dans ce document c'est que

 17   par le biais des différentes chaînes de commandement et d'autres moyens de

 18   communication, la direction essaie de faire comprendre aux soldats leur

 19   vison.

 20   Q.  On va regarder la page 3 en anglais. En B/C/S la page 2. Ognjenovic dit

 21   :

 22   "Nous devons réaliser notre objectif définitif - Podrinje entièrement

 23   serbe. Les enclaves de Srebrenica, Zepa, et Gorazde doivent subir une

 24   défaite militaire.

 25   "Nous devons continuer à armer, entraîner, discipliner, et préparer l'armée

 26   de la Republika Srpska pour l'exécution de cet objectif crucial -

 27   l'expulsion des Musulmans de l'enclave de Srebrenica."

 28   De quoi s'agit-il là ? Est-ce un objectif militaire approprié qui consiste


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  1   donc à expulser les Musulmans de l'enclave de Srebrenica ?

  2   R.  Je vais tout d'abord répondre à la deuxième question que vous m'avez

  3   posée, l'expulsion de la population ne représente pas un objectif militaire

  4   légitime ou approprié. Ensuite je réponds à la première question, par

  5   rapport au contexte, la Brigade de Bratunac était à l'époque responsable

  6   surtout de maintenir un périmètre de sécurité autour d'à peu près la moitié

  7   de l'enclave de Srebrenica, et a sans cesse participé aux opérations

  8   militaires contre la 28e Division, qui était à l'intérieur de l'enclave.

  9   Ils ont suivi pas mal de pertes des deux côtés d'ailleurs depuis le début

 10   de la guerre. Surtout à Bratunac, où ils ont essuyé des pertes importantes.

 11   Donc ceci est un effort continu qui vise à faire comprendre aux soldats que

 12   tous les sacrifices qu'ils font, toutes les difficultés par laquelle ils

 13   passent sont importantes et qu'ils ne devraient pas perdre de vue cet

 14   objectif important, et qui est d'ailleurs l'objectif définitif ultime de la

 15   direction de dirigeant politique, à savoir que la ville de Srebrenica

 16   deviendrait à nouveau une ville serbe.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le but final c'était l'expulsion des

 18   Musulmans de Srebrenica, de l'enclave.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, je n'ai pas entendu la totalité

 20   de votre question.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le but ultime, c'était, n'est-ce pas,

 22   l'expulsion des Musulmans de Srebrenica, de l'enclave ?

 23   Je cite le document.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je crois que c'était bien le cas, et que

 25   d'autres documents si vous avancez de 1995 à 1995 [comme interprété]

 26   montrent la continuité de cet objectif.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 28   M. McCLOSKEY : [interprétation]


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  1   Q.  Si nous avançons dans ce document, nous lisons :

  2   "Il n'y aura pas de retraite concernant l'enclave de Srebrenica. Nous

  3   devons avancer. Il faut rendre intolérable la vie de l'adversaire et son

  4   séjour temporaire dans l'enclave doit être rendu impossible afin qu'ils

  5   quittent l'enclave en masse dès que possible. Or après avoir compris qu'ils

  6   ne pourront survivre à cet endroit."

  7   Donc le terme "en masse" qu'est-ce que cela comprend ? Est-ce que -- à qui

  8   cela se réfère quand il s'agit de quitter l'enclave ?

  9   R.  Je pense qu'il s'agit de tout le monde. Je ne l'interprète pas en

 10   faisant de distinction entre les forces de la 28e Division qui seraient

 11   censées partir à la différence de l'interprétation consistant à dire que

 12   tous les Musulmans de Bosnie étaient censés partir.

 13   Q.  Nous nous approchons maintenant de l'année 1995. Alors, sur la base de

 14   ce que vous avez indiqué dans votre déposition au sujet de la 28e Division

 15   le fait pour elle de sortir de l'enclave pour attaquer les forces serbes et

 16   la conséquence pour cette dernière, à savoir les pertes essuyées, je pense

 17   que tout un chacun conviendra que ceci enfreignait l'idée même de l'enclave

 18   et les règles mises en place. Notamment la démilitarisation de l'enclave.

 19   Mais considérez-vous que sur la plan purement militaire il est quoi que ce

 20   soit de d'inapproprié dans les plans élaborés par la VRS en vue de briser,

 21   ou plutôt de contrecarrer l'armée musulmane au sein des enclaves, c'est

 22   elle-même qui se lançait dans ces attaques ?

 23   R.  Non. J'ai déjà déposé sur cette question à plusieurs reprises, et j'ai

 24   toujours la position suivante, à savoir que la VRS était militairement

 25   fondée à lancer une attaque contre l'enclave, contre la 28e Division

 26   d'infanterie de l'armée des Musulmans de Bosnie. L'enclave n'avait jamais

 27   été désarmée. La 28e Division d'infanterie participait ou menait même des

 28   opérations de combat contre l'armée des serbes de Bosnie, et dans certains


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  1   cas, des forces civiles ou des groupes de population civile dans des

  2   villages étaient également visées par cette 28e Division d'infanterie. Donc

  3   c'était pour la VRS une cible militaire absolument légitime.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais juste une précision. Dans la

  5   question qui vous a été posée par M. McCloskey, celui-ci parlait de sortie

  6   de l'enclave effectuée par la 28e Division d'infanterie qui attaquait les

  7   forces serbes, il est question également des forces serbes essuyant des

  8   pertes, et "Nous n'avons pas besoin de nous attarder sur cette partie des

  9   événements." Donc, un sujet qui nous a beaucoup occupé est le suivant : la

 10   28e Division serait sortie de l'enclave, non seulement pour attaquer les

 11   forces serbes, mais également pour attaquer des villages serbes et les

 12   incendier. Est-ce que la façon dont M. McCloskey a présenté ces victimes ou

 13   ces pertes est exacte, ou bien diriez-vous que non, ils ne sont pas

 14   contenter d'attaquer les forces serbes, mais également ils ont attaqué les

 15   villages et ont fait des victimes civiles ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] La 28e Division d'infanterie n'a pas

 17   uniquement attaquer les forces de police et les forces armées des Serbes de

 18   Bosnie autour de la garnison, ils ont également pris pour cible et attaquer

 19   les villages bosno-serbes et d'autres cibles civiles. J'ai déjà parlé dans

 20   différents procès à ce sujet, où de nombreux documents ont été versés en la

 21   matière. Je crois que M. McCloskey est, avant tout, soumis à des

 22   contraintes de concision, qu'il n'a pas le temps, et que c'est pour cela,

 23   peut-être, que son commentaire a été ainsi formulé, parce que, autrement,

 24   nous pourrions y passer des heures.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En effet.

 26   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 27   Q.  Je crois que, sur ce point, Monsieur Butler, je voudrais vous demander

 28   également si vous vous rappelez un document particulier de la 28e Division


Page 16153

  1   d'infanterie datant de juin ou juillet 1995 décrivant la politique suivie

  2   par la 28e Division d'infanterie consistant à lancer des attaques à

  3   l'extérieur de l'enclave afin de fixer sur place les forces serbes et les

  4   empêcher de se rendre sur le front de Sarajevo ?

  5   R.  Oui. Je me rappelle en avoir discuté.

  6   Q.  Mais sans entrer trop dans les détails, il y a deux versions de cette

  7   histoire ou de visions, n'est-ce pas ? Alors, n'y avait-il pas des éléments

  8   de preuve indiquant des tirs isolés et des attaques lancées par les Serbes

  9   de Bosnie et leurs forces visant des civils bosno-musulmans à l'intérieur

 10   de l'enclave, simultanément ?

 11   R.  Oui. Je veux dire, les deux parties ont mené continuellement ce type

 12   d'opérations et souvent les civils ont été pris pour cible, les villages

 13   civils également, que ce soit intentionnellement ou simplement par manque

 14   de distinction opérée.

 15   Q.  Avez-vous vu des documents qui faisaient état d'une population bosno-

 16   musulmane affamée et parfois d'une attaque lancée contre des villages

 17   serbes pour se procurer bétail et vivres ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Alors, passons à la directive 7, autre document présenté à plusieurs

 20   reprises, P1469, et je ne m'attarderai pas trop sur ce document, il porte

 21   la date du 10 mars 1995, envoyé le 17 par le général Milovanovic. Nous

 22   voyons qu'il s'agit là de la lettre jointe. Et à la dernière page, nous

 23   voyons le nom du commandant Suprême, Radovan Karadzic. Ceci est rédigé par

 24   le colonel Miletic.

 25   Alors, est-ce que vous pourriez nous rappeler qui était Miletic au mois de

 26   mars 1995 ?

 27   R.  Au mois de mars 1995, le colonel Miletic était le chef des opérations

 28   de l'état-major principal de la VRS.


Page 16154

  1   Q.  Très bien. Alors, passons au chapitre consacré au Corps de la Drina où

  2   l'on voit que le président -- c'est-à-dire le commandant Suprême et l'état-

  3   major principal donnent des instructions au Corps de la Drina. Page 17 en

  4   serbe. Nous pouvons y reconnaître la deuxième moitié de ce paragraphe :

  5   "Dans la direction des enclaves de Srebrenica et de Zepa, une disjonction

  6   complète de ces deux enclaves devraient être obtenue dès que possible pour

  7   empêcher la communication entre les individus se trouvant dans ces deux

  8   enclaves…"

  9   Alors, qu'est-ce que cela signifie concrètement ?

 10   R.  A ce moment particulier, à cause de la taille des enclaves et de la

 11   nature du terrain et du manque d'effectifs, il était toujours possible pour

 12   les Musulmans de Bosnie, aussi bien les civils que les militaires, de se

 13   déplacer assez librement entre la ville de Srebrenica et Zepa, qui se

 14   trouvait un peu plus loin au sud-est. Donc, manifestement, l'un des

 15   objectifs militaires qui était considéré comme indispensable, était la

 16   disjonction, la séparation physique de ces deux enclaves afin qu'elles ne

 17   puissent plus se soutenir mutuellement.

 18   Q.  Très bien. Alors, ligne suivante :

 19   "Par des opérations de combat bien planifiées et bien conçues, créer une

 20   situation intolérable d'insécurité totale, sans le moindre espoir de survie

 21   possible ni de vie pour les habitants de Srebrenica et de Zepa."

 22   Alors, je crois que ceci se passe de commentaires. Mais l'expression "créer

 23   une situation intolérable par des opérations de combat planifiées…" eh

 24   bien, lorsqu'on repense à la directive 4, la nature de [inaudible] était

 25   tout à fait claire. Nous avons vu qu'il s'agissait d'opérations de combat.

 26   Alors, est-ce que ceci créé une situation similaire ? En quoi cela diffère;

 27   et si oui, de ce que nous avons pu voir dans la directive 4, y a-t-il une

 28   différence avec l'impression qu'elle a pu nous laisser, cette directive 4,


Page 16155

  1   et qu'en est-il par rapport, également, à la version que nous avons

  2   entendue au sujet de cette directive 4 qui se concentre manifestement sur

  3   la population civile ?

  4   R.  Eh bien, selon moi, ceci s'inscrit encore une fois dans la poursuite de

  5   l'objectif ultime. D'un point de vue militaire, manifestement, il y a le

  6   problème que pose la 28e Division d'infanterie en apportant un appui

  7   militaire aux forces de Zepa, mais d'un point de vue plus général,

  8   notamment en 1995, nous voyons là qu'il ne s'agit pas uniquement d'une idée

  9   vague que caresserait la direction militaire selon laquelle la 28e Division

 10   et les forces militaires qui étaient associées à celle-ci allaient s'en

 11   aller et que ce groupe de 40 à 50 000 personnes restantes et de réfugiés

 12   bosno-musulmans qui résidaient à Srebrenica et Zepa, en tant que zones de

 13   sécurité, se verraient autoriser à rester sur place. Ils considéraient

 14   qu'au titre de leur objectif, ces zones de sécurité, telles qu'elles

 15   existaient, devaient être éliminées.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, nous

 17   étions en train d'examiner la partie consacrée au Corps de la Drina dans ce

 18   document, page 10 en anglais.

 19   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci.

 20   Q.  La page suivante :

 21   "Au cas où les forces de la FORPRONU quitteraient Zepa et Srebrenica, le

 22   commandant du Corps de la Drina planifiera une opération sous le nom de

 23   Jadar avec pour objectif de briser et de détruire les forces musulmanes des

 24   ces enclaves et de libérer définitivement la région de la vallée de la

 25   Drina."

 26   Qu'est-ce que cela nous dit, si cela nous dit quoi que ce soit, des

 27   intentions qui étaient les leurs de régler définitivement le cas de

 28   l'enclave en mars 1995 ?


Page 16156

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous sommes maintenant en page 11.

  2   Pouvez-vous répondre à la question ?

  3   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je vous remercie.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] En mars 1995, la situation était claire pour

  5   eux. Et lorsque je dis "eux", la VRS, je veux dire qu'il était clair pour

  6   eux qu'ils ne se trouvaient pas dans une situation, ni sur le plan

  7   politique ni militaire, dans laquelle ils pourraient simplement se

  8   contenter de lancer physiquement une attaque contre les enclaves et

  9   atteindre leurs objectifs uniquement en tant que conséquence de cette

 10   attaque. Ce qu'ils espéraient pouvoir faire - encore une fois, ceci ressort

 11   d'autres documents - c'est créer une situation dans laquelle ils

 12   contraindraient, en réalité, la communauté internationale à quitter les

 13   enclaves et à emporter, emmener avec elle tout le monde. Donc, ils

 14   reconnaissent qu'ils ne vont pas attaquer les enclaves en mars 1995 pour

 15   obtenir ceci, mais ils mèneront des opérations militaires dans le but

 16   d'isoler les enclaves jusqu'au point où il deviendra impossible d'y rester.

 17   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 18   Q.  Et comment faites-vous le lien entre ceci et ce qui s'est passé ou ce

 19   que nous avons vu et que les Juges de la Chambre ont pu voir dans cet

 20   enregistrement vidéo de 1993 et avec le général Morillon ?

 21   R.  Eh bien, à ma connaissance, encore une fois, ceci vient de cette vidéo

 22   et du rapport des Nations Unies décrivant la situation, ce qui se passait

 23   en 1993 était une situation dans laquelle les Nations Unies ont commencé à

 24   évacuer la population bosno-musulmane de ces sites, parce que les forces

 25   armées serbes se trouvaient tout près de Srebrenica, parce que les Bosno-

 26   Musulmans n'avaient pas la capacité de se défendre et qu'il y avait une

 27   population civile extrêmement nombreuse entassée dans des zones urbaines de

 28   petites tailles à Srebrenica. Je crois que pour autant que la direction


Page 16157

  1   politique et celle de la VRS étaient concernées en 1995, il y aurait été

  2   absolument idéal pour eux que la communauté internationale des Nations

  3   Unies soit en mesure d'évacuer la population civile et que celle-ci ne soit

  4   pas chassée par la VRS ou, en tout cas, pas ouvertement.

  5   Q.  Très bien.

  6   M. McCLOSKEY : [interprétation] Alors, passons à la page 23 en serbe; 14 en

  7   anglais, je crois. C'est sous l'intitulé "Appui aux opérations de combat"

  8   sous l'intitulé lui-même "Moral des troupes et appui psychologique". Et je

  9   vais lire lentement.

 10   Q.  "Les organes militaires et les organes d'Etat compétents, pour coopérer

 11   avec les FORPRONU et les organisations humanitaires, par l'intermédiaire

 12   d'une délivrance de permis et d'autorisations qui sera planifiée et qui ne

 13   sera pas ouvertement restrictive, réduiront et limiteront l'appui

 14   logistique de la FORPRONU aux enclaves et la fourniture de ressources

 15   matérielles à la population musulmane, rendant les uns et les autres

 16   dépendants de notre bonne volonté, tout en évitant d'être condamnés par la

 17   communauté internationale et l'opinion publique internationale."

 18   Alors, encore une fois, nous voyons que ceci se concentre sur la FORPRONU

 19   et la population musulmane. Qu'est-ce que vous pourriez nous dire

 20   brièvement à ce sujet, est-ce que nous voyons la moindre restriction

 21   imposée à l'aide humanitaire et à l'aide destinée à la FORPRONU au cours

 22   des semaines et mois suivant cette déclaration ?

 23   R.  Oui. D'un point de vue militaire, on remarque - je crois que j'en parle

 24   ailleurs dans ma déposition - que les demandes régulières des Nations Unies

 25   aux fins de réapprovisionnement des forces de la FORPRONU se trouvant dans

 26   l'enclave jouissent de la pleine attention des membres les plus hauts

 27   placés de la VRS au sein de l'état-major principal et que dans la majorité

 28   des cas, les convois de réapprovisionnement de la FORPRONU ne passent qu'au


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  1   prix de réductions significatives dans la quantité de carburant, de

  2   matériel ou de personnel qu'on les autorise à faire entrer dans l'enclave.

  3   Il y a d'autres documents qui montrent des événements similaires concernant

  4   l'approvisionnement en vivres et en matériel destinés aux civils et

  5   acheminés par des organisations internationales à destination de la

  6   population, également la politique en place au terme de laquelle les

  7   membres, notamment du Bataillon néerlandais à Srebrenica, utilisent un

  8   système de rotation pour pouvoir sortir de l'enclave pour des raisons

  9   médicales ou pour partir en permission et se reposer. Eh bien, on ne leur

 10   donne pas l'autorisation de revenir dans l'enclave une fois qu'ils sont

 11   partis. Donc, il y au une période de plusieurs mois pendant laquelle la

 12   possibilité purement matérielle de la FORPRONU, et notamment du Bataillon

 13   néerlandais dans l'enclave de Srebrenica, à assurer leurs propres besoins,

 14   sans même parler de la conduite d'activités de maintien de la paix, se

 15   dégrade considérablement.

 16   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je crois que nous approchons de l'heure de

 17   la pause, Monsieur le Président.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. On vous a bien informé.

 19   Alors, je voudrais qu'on accompagne le témoin hors du prétoire.

 20   [Le témoin quitte la barre]

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons prendre une pause, et nous

 22   reprendrons à 13 heures 40.

 23   --- L'audience est suspendue à 13 heures 20.

 24   --- L'audience est reprise à 13 heures 41.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, nous attendons que M. Butler nous

 26   rejoigne dans quelques instants.

 27   [Le témoin vient à la barre]

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur le


Page 16159

  1   Procureur.

  2   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   Q.  Monsieur Butler, nous venions de terminer d'examiner la directive

  4   numéro 7 émise au nom de Radovan Karadzic le 8 mars 1995, et rédigée par le

  5   colonel Miletic. Je voudrais maintenant que nous examinions la pièce P1470,

  6   il s'agit d'un document dont les Juges de la Chambre ont déjà eu vent, mais

  7   ce document-ci contient la directive 7 du 31 mars -- ou plutôt, la

  8   directive 7/1. C'est une différence essentielle. Elle est émise le 31 mars,

  9   également rédigée par le colonel Miletic, mais ceci est signé par le

 10   général Mladic. Alors, pourrions-nous afficher la page correspondante. Dans

 11   le coin droit, il est dit : "Défense nationale, secret d'Etat, Sadejstvo,"

 12   juste en dessous, "Sadejstvo 95" en B/C/S. Nous voyons que c'est envoyé à

 13   tous les corps d'armée.

 14   Alors, d'après vous, quel est le lien entre ceci et la directive

 15   numéro 7, en ayant bien à l'esprit que selon la Défense, ce document

 16   traduit la réserve qui aurait été celle de Mladic quant à la directive

 17   numéro 7 visant la population musulmane ?

 18   R.  Eh bien, selon moi, la directive 7/1 ne se substitue pas à la directive

 19   7 en l'annulant. Au contraire, elle la complète en fournissant des

 20   instructions plus explicites et de nature plus technique à l'intention des

 21   unités militaires sous la forme à laquelle celles-ci y étaient habituées.

 22   En fait, il y a un autre document dont je parlerais peut-être qui concerne

 23   également le Corps de la Drina. Il s'agit d'un ordre du Corps de la Drina

 24   concernant Srebrenica, et si je me rappelle bien, ce document se réfère

 25   tant à la directive 7 qu'à la directive 7/1. Cette dernière ne se substitut

 26   donc pas la directive 7, mais elle la complète avec des informations

 27   techniques supplémentaires.

 28   Q.  Très bien. Alors page 2 en anglais, et en B/C/S, nous voyons sous


Page 16160

  1   l'intitulé : "La tâche de la VRS". Je cite :

  2   "Sur la base de la directive numéro 7, la VRS a pour tâches de …" et

  3   cetera.

  4   Alors comment ceci cadre-t-il avec votre conclusion ?

  5   R.  Eh bien, encore une fois, je crois que cela l'appuie.

  6   Q.  Pourquoi ?

  7   R.  Eh bien, encore une fois, la référence à la directive 7, qui sur le

  8   plan opérationnel est le document-cadre, le document général. Et quand vous

  9   parcourez les différents paragraphes de ce document, vous y trouvez une

 10   partie des explications et des instructions un peu plus techniques quant

 11   aux modalités d'action, quant au terrain concerné, et aux unités

 12   militaires.

 13   Q.  Très bien. Alors voyons juste deux ou trois points où j'ai relevé qu'on

 14   fait mention des enclaves. Page 4 en anglais, page 3 en B/C/S. Second

 15   paragraphe. Il est indiqué que "la VRS devrait contribuer à la conduite de

 16   l'opération Sadejstvo 95 avec pour objectif …" et cetera, et cetera. Et

 17   puis il est indiqué plus bas, "conformément à la directive numéro 7" des

 18   opérations de combat visant différentes villes dans les alentours de

 19   Srebrenica, Zepa, et Gorazde, des enclaves de Srebrenica, Zepa, et Gorazde,

 20   et la poche de Bihac.

 21   Selon vous, est-ce que ceci se substitut à la formulation que nous avons

 22   déjà vue au sujet de créer une situation intolérable ?

 23   R.  Non.

 24   Q.  Alors passons au paragraphe numéro 5.3. Paragraphe 5 en anglais, c'est

 25   peut-être la page suivante en anglais et page 4 en B/C/S. Nous y lisons :

 26   "Le poste de commandement avancé du corps fera l'objet d'une décision du

 27   commandant de corps."

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ce serait la page suivante en B/C/S.


Page 16161

  1   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je vous remercie. Nous pouvons retrouver

  2   donc la référence 5.3.

  3   Q.  Donc nous lisons :

  4   "Le Corps de la Drina : Empêchez toute percée de l'ennemi le long d'axes

  5   opérationnels tactiques tels qu'ils ont été désignés en assurant une

  6   défense permanente et des opérations de combat actives dans la partie nord-

  7   ouest du front et autour des enclaves."

  8   Alors est-ce que ceci remplace quoi que ce soit que vous ayez pu lire dans

  9   [inaudible] ?

 10   R.  Non.

 11   Q.  Alors continuons à avancer dans le temps.

 12   M. McCLOSKEY : [interprétation] Pouvons-nous afficher le document 19552 de

 13   la liste 65 ter.

 14   Q.  Avez-vous retrouvé le moindre document correspondant au mois de mai et

 15   traduisant la moindre planification d'opérations visant les enclaves ?

 16   R.  Oui. Encore une fois, comme je l'ai indiqué, lorsque les conditions s'y

 17   prêtaient, dans ce cas précis vers le milieu du printemps en 1995, donc

 18   lorsque les conditions s'y sont prêtées le Corps de la Drina était censé

 19   commencer à planifier et entreprendre des opérations, et encore une fois

 20   pour revenir à la directive numéro 7 il était censé séparer les deux

 21   enclaves et couper les communications entre Srebrenica et Zepa. Ce document

 22   est daté du 12 mai 1995 il traduit un ordre de l'état-major principal

 23   adressé au Corps de la Drina et une autre unité de l'état-major principal,

 24   à savoir le 65 Régiment de Protection, ordre leur enjoignant de commencer à

 25   planifier et à mettre à exécution précisément [inaudible].

 26   Q.  Si nous voyons la fin du document page 2 en anglais, et en B/C/S, nous

 27   voyons que tout ceci est émis au nom au nom du général Mladic, et en

 28   première page, est intitulée : "Ordre aux fins de stabiliser la défense


Page 16162

  1   autour des enclaves de Zepa et Srebrenica et de créer les conditions de

  2   leur libération."

  3   Alors, encore une fois, ici on parle de créer des conditions. Est-ce que

  4   vous pourriez nous redire ce que vous en pensez pour ce moment particulier

  5   de mai 1995 ?

  6   R.  Compte tenu de la situation sur les lignes de front, il n'était pas

  7   possible pour la VRS de se lancer de but en blanc dans quelques opérations

  8   que ce soit visant les enclaves, en tout cas, pas avec la force requise. Il

  9   était tout à fait reconnu que certaines positions devaient être prises, par

 10   exemple, une route à proximité de Zeleni Jadar devait être consolidée afin

 11   de pouvoir appuyer des opérations militaires de plus grande envergure qui

 12   devaient finalement être conduites contre les enclaves. Donc vous voyez que

 13   fin mai et au début du mois de juin il y a une série d'attaques limitées

 14   dans leur portée qui ont pour objectif de prendre un certain nombre de

 15   positions dans un des cas de prendre une route afin de se préparer à des

 16   opérations de plus grande envergure à l'avenir.

 17   Q.  Merci.

 18   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je crois que je -- à ce stade demander le

 19   versement du document.

 20   M. IVETIC : [interprétation] Pas d'objection.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Monsieur le Greffier.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document numéro 19552 de la liste 65

 23   ter devient la pièce P2097.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il est versé au dossier.

 25   M. McCLOSKEY : [interprétation] Très bien. Je voudrais maintenant que nous

 26   affichons le document 5694 de la liste 65 ter.

 27   Q.  Il s'agit d'un document qui porte la date du 16 mai, quatre jours plus

 28   tard, il est émane cette fois-ci du commandement du Corps de la Drina et


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  1   adressé à l'état-major principal --

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, vous avez demandé

  3   le versement au dossier d'un document de quatre pages. Nous en avons vu la

  4   première partie dactylographiée, mais la dernière page, page 3 en B/C/S et

  5   page 4 en anglais, est un document manuscrit nous n'avons aucune certitude

  6   quant à la question de savoir si ce texte dans l'original figure au verso

  7   n'est pas dactylographié et d'où il vient.

  8   M. McCLOSKEY : [interprétation] Nous pouvons peut-être essayer de vous

  9   apporter des précisions à ce sujet.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 11   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur le Témoin, je sais que parfois vous avez consulté les

 13   documents originaux pour essayer de répondre à ce type de question, mais

 14   sur la page 4 en anglais, on peut voir la traduction de la partie

 15   manuscrite de l'original, nous voyons qu'il y a un cachet qui a été apposé

 16   sur ce document et qu'il provient du commandement du 65e Régiment de

 17   Protection motorisé; est-ce que vous pourriez nous donner votre point de

 18   vue quant à ce que pourraient ces mentions manuscrites sur un document

 19   comme celui-ci ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Pas sur le plan du contenu pour commencer, mais simplement le fait

 22   qu'il y ait un texte manuscrit sur ce document.

 23   M. McCLOSKEY : [interprétation] Et nous en retrouvons l'original, Monsieur

 24   le Président, afin que nous puissions déterminer avec précision ce qu'il en

 25   est.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Du point de vue de la planification militaire,

 27   lorsque vous recevez un ordre, en tant que commandant vous allez le lire,

 28   vous asseoir et commencer à réfléchir à ce qui doit être prévu, ce qui doit


Page 16164

  1   se passer, à ce dont vous avez besoin afin d'exécuter cet ordre. D'après le

  2   contexte de ceci et le lieu où cela a été retrouvé, qui, à qui ce document

  3   a été envoyé, il semblerait qu'il s'agisse ici de notes consignées par

  4   quelqu'un qui occupe un poste de direction au sein du 65e Régiment de la

  5   Protection. Il pourrait s'agir du commandant ou du chef d'état-major

  6   couchant simplement par écrit ses pensées quant à ce qui devra peut-être

  7   être prévu afin de se conformer à cet ordre. A mon avis, il s'agit

  8   simplement de notes de membres concernés par ceci au sein du 65e Régiment

  9   de la Protection, qui commencent à réfléchir et à coucher par écrit leur

 10   réflexion quant à ce qu'ils vont devoir faire afin d'exécuter l'ordre.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Vous vous êtes référé au

 12   Régiment de Protection, il semble que ce soit adressé également au 67e

 13   Régiment des Transmissions. Y a-t-il la moindre raison pour laquelle vous

 14   avez considéré que seul le 65e Régiment était ici possible.

 15   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je ne vois pas de référence au 65e.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, le document est envoyé au

 17   commandement du Corps de la Drina et au 65e Régiment de la Protection.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais je vois également le 67e Régiment

 19   des Transmissions.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Le 67e Régiment de Transmissions c'est

 21   justement cela, c'est un régiment qui s'occupe des questions relatives à la

 22   transmission de l'armée de la Republika Srpska. Et ce sont eux qui sont

 23   responsables de ceci. Ce ne sont pas des effectifs qui sont impliqués, qui

 24   sont responsables d'une opération militaire majeure. Alors que vous essayez

 25   de finir les commentaires, vous irez voir quelles sont les forces qui

 26   attaqueront Zepa, créer des conditions, déplacer les forces de diverses

 27   unités dans une manière ordonnée. De nouveau, je suis en train de lire ce

 28   qui figure de la main du commandant pour ce qui est du 65e Régiment de


Page 16165

  1   Protection, il ne s'agit pas de plan de combat d'active du 67e Régiment des

  2   Transmissions.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il semblerait qu'il s'agisse d'une

  4   demande. Est-ce que vous avez trouvé si une demande avait été faite qui

  5   correspondent avec celle qui est indiquée ici.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] De nouveau, dans cette note, il semblerait

  7   qu'ils sont en train de penser, de réfléchir en fait à la demande de

  8   l'état-major principal.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] De laisser leurs forces, de faire annoncer

 11   leurs forces. Et de nouveau, il s'agit d'un scénario dans lequel vous avez

 12   un commandant qui est en train de dire : Voilà, si je dois faire ceci, il

 13   va falloir que --

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ma question portait sur la question

 15   "demande de l'état-major principal", je voulais savoir si vous avez trouvé

 16   une demande de correspondante.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, excusez-moi, je vous ai mal compris. Non,

 18   je n'en ai pas vu rien de la sorte.

 19   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 20   Q.  J'ai remarqué à la page 3 en anglais, qu'il est indiqué étampe du

 21   commandant du 65e Régiment de Protection motorisé, voilà, je vois

 22   maintenant l'étampe, elle figure à l'original. Mais examinons ceci

 23   ensemble. Alors nous pouvons voir qu'à la dernière page, à la deuxième page

 24   en anglais, nous voyons :

 25   "Les combats vont commencer le 17 mai 1995 …"

 26   Et par la suite, nous voyons une description, et vous avez parlé

 27   d'opérations, et donc je ne sais pas si de nouveau, nous pouvons voir par

 28   exemple dans le paragraphe, le plus grand paragraphe en haut de la page,


Page 16166

  1   "créer des conditions" de nouveau.

  2   M. McCLOSKEY : [interprétation] Dans tous les cas, je demanderais que ce

  3   document soit versé au dossier. Excusez-moi, le document figure déjà au

  4   dossier.

  5   Q.  Très bien. Passons maintenant à un autre document. Je crois que vous le

  6   connaissez, il porte la date du 16 mai 1995, et le numéro du document est

  7   le 65 ter 5694. Cinq jours plus tard, comme je l'ai mentionné, c'est un

  8   document émanant du Corps de la Drina adressé à l'état-major principal, et

  9   au deuxième paragraphe, sous l'intitulé :

 10   "Aptitude au combat :

 11   "Toutes les unités du Corps de la Drina sont prêtes à engager des combats

 12   et tiennent les lignes qui ont été obtenues. Nous sommes en train de

 13   continuer avec des préparatifs au vu de la stabilisation de la défense

 14   autour des enclaves de Srebrenica et de Zepa, conformément à votre ordre."

 15   Est-ce que cette déclaration cadre avec l'ordre que nous venons de lire, ou

 16   bien est-ce que cela correspond à un autre ordre ?

 17   R.  Cela correspond à l'ordre que nous venons de lire.

 18   Q.  La terminologie "stabilisation de la défense" figure dans les deux

 19   ordres, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui, c'est cela.

 21   Q.  Par la suite :

 22   "Nous ne sommes pas en mesure de mettre en œuvre votre ordre pour fermer

 23   complètement l'enclave et de mener des attaques contre eux, car nous

 24   n'avons pas suffisamment d'effectifs. Mais nous sommes en train de

 25   continuer de prendre les mesures spécifiques pour découvrir les groupes

 26   ennemis, de détecter l'appui au combat, et cetera, et cetera.

 27   Donc c'est quelque chose que l'adjoint du commandant, le colonel Krstic dit

 28   à l'état-major principal. Pourriez-vous nous expliquer ce que cet ordre


Page 16167

  1   nous dit concernant, bon en nous plaçant dans le temps ?

  2   R.  Dans ce cas-ci, il s'agit d'un rapport de combat quotidien. Le chef de

  3   l'état-major principal du Corps de la Drina fait un rapport à ses

  4   supérieurs, et les informe que : [inaudible] que nous pouvons avec les

  5   ressources, nous ne sommes pas en mesure de nous plier à l'ordre précédent,

  6   et lui explique à lui ou à l'état-major principal quelles sont les raisons

  7   pour lesquelles il ne veut pas exécuter l'ordre qu'il lui a donné.

  8   Q.  Et à votre avis, le général Mladic saurait-il, aurait-il pu être au

  9   courant de ces développements s'agissant de la retenue de l'ordre pour

 10   Srebrenica ?

 11   R.  Oui, tout à fait, il aurait été certainement au courant de cela.

 12   Q.  Je vous remercie.

 13   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je demande que ce document soit versé au

 14   dossier.

 15   M. IVETIC : [interprétation] Aucune objection.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 05694 de la liste 65 ter sera

 18   versé au dossier sous la cote P2098.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. P2098 est versé au dossier.

 20   M. McCLOSKEY : [interprétation] Fort bien.

 21   Q.  Le document que nous avons vu, il n'y a pas très longtemps, le 25996.

 22   M. McCLOSKEY : [interprétation] Document 65 ter 25996.

 23   Q.  Donc ce document émane du centre du renseignement en date du 28 mai

 24   1995 donc du 410e Centre du renseignement. Et je crois que nous sommes en

 25   mesure de voir également le nom d'une personne qui s'appelle Pecanac. A la

 26   page 30 en anglais, capitaine de première classe, D Pecanac. Pourriez-vous

 27   nous dire le 410e Centre du renseignement qu'est-ce exactement ?

 28   R.  Le 410e Centre du renseignement pendant la guerre était un groupe


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  1   analytique dont la mission consistait à effectuer l'analyse du

  2   renseignement, et de fournir des rapports de renseignement pour l'état-

  3   major principal de l'armée de la Republika Srpska.

  4   Q.   Très bien. Et nous voyons ici que l'on parle de plusieurs enclaves,

  5   mais passons maintenant à la section intitulée "Srebrenica" page 21 en

  6   anglais, et en serbe, page 13. Au bas de la page, l'on peut retrouver les

  7   renseignements pour l'enclave de Srebrenica, et nous voyons :

  8   "Le secteur de l'enclave faisait environ 150 kilomètres carrés, peuplé de

  9   25 à 38 000 habitants". Et on peut lire, "les zones les plus densément

 10   peuplées Srebrenica …"

 11   M. McCLOSKEY : [interprétation] Mais je sais qu'il y a une erreur ici, on

 12   devrait lire Potocari, comme deuxième village.

 13   Q.  J'aimerais savoir si cette information cadre de manière générale avec

 14   l'information que vous avez reçue dans le cadre de votre enquête ?

 15   R.  Oui, c'est un fait. Alors qu'il n'y a jamais eu vraiment un recensement

 16   très précis du nombre de personnes qui se trouvaient à l'intérieur de

 17   l'enclave en tant que réfugiés, ces chiffres tombent dans les chiffres ou

 18   cadre avec les chiffres qui sont le plus souvent mentionnés.

 19   Q.  Nous voyons également une référence "concentration de personnes dans le

 20   secteur du village de Stapovici [phon] où un grand nombre de personnes …"

 21   et à la page 22, vous verrez le nombre en anglais. Et il s'agit d'une toute

 22   petite région dont la plupart sont des réfugiés émanant de plus petites

 23   municipalités. Alors, qu'est-ce que cela vous dit ? Donc, dans ce secteur

 24   où il y avait 35 --

 25   L'INTERPRÈTE : Inaudible.

 26   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 27   Q.  -- nombre de personnes ?

 28   R.  La plupart des personnes qui se sont trouvées dans l'enclave de


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  1   Srebrenica en juillet de 1995 n'étaient pas des résidents de la

  2   municipalité de Srebrenica et n'étaient pas originaires de cette

  3   municipalité. Et alors que la guerre faisait rage, la plupart d'entre eux,

  4   en 1993 par exemple, dans la -- dans cette période de 1993, était des

  5   personnes qui étaient en fait déplacées et qui s'y sont retrouvées

  6   provenant d'autres municipalités. Et alors, ces personnes se sont

  7   retrouvées à Srebrenica dans la zone des Nations Unies -- la zone de

  8   sécurité des Nations Unies.

  9   Q.  Très bien.

 10   M. McCLOSKEY : [interprétation] Est-ce que nous avons le tout à la même

 11   page ?

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que nous avons la page en anglais

 13   et en B/C/S ?

 14   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, en fait, il faudrait lire -- il

 15   faudrait prendre la page 14, en fait, en B/C/S.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Parce que nous sommes encore en train de

 17   regarder ce qui est intitulé Srebrenica. Donc, je ne sais pas quel est le

 18   passage que vous êtes en train de lire, Monsieur McCloskey.

 19   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je viens de donner la lecture du haut de la

 20   page. Lorsque j'ai parlé de petites zones, la plupart d'entre eux étant des

 21   réfugiés provenant d'autres municipalités.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Maintenant, je le vois. Je le

 23   vois et en B/C/S à l'écran. Bien.

 24   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 25   Q.  Et sous l'intitulé "installations possibles pour permettre aux réfugiés

 26   de s'y abriter dans l'enclave de Srebrenica", nous voyons une mention de

 27   tunnel et autres installations. Mais j'aimerais vous demander de nous dire

 28   ce que vous pensez à ce qui suit, cinq lignes plus bas :


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  1   "Civils et membres des organes musulmans ont été retirés de l'enclave de

  2   Srebrenica le long de l'axe Srebrenica-Slapovici-Podravanje-Stublici-Zepa."

  3   Et par la suite, nous pouvons lire :

  4   "Cet axe est sécurisé par les forces qui se trouvent le long de ces points

  5   …"

  6   Est-ce que c'est la direction également ou l'axe que les civils musulmans

  7   et les membres de la 28e Division ont emprunté lors de leur fuite, lorsque

  8   -- enfin, lors de la fuite du mois de juillet 1995 ?

  9   R.  Non. Il y avait certaines unités de la 28e, mais il y avait également

 10   des civils ayant emprunté cette route. Mais la majorité a pris une autre

 11   route complètement autre. Donc, dans ce cas-ci, les personnes de l'armée,

 12   donc les officiers chargés du renseignement de l'armée ont fait une

 13   mauvaise évaluation.

 14   Q.  Et pourriez-vous me dire quelle direction ont-ils -- quel prix, quel

 15   axe ont-ils emprunté ?

 16   R.  Ils ont reçu l'ordre de percer l'enclave le 10 juillet 1995 et l'axe

 17   qu'ils ont emprunté allait du village de Susnjari, Jaglici en passant par

 18   la route entre Konjevic Polje, Nova Kasaba pour se rendre dans la région de

 19   Cerska, Udrc, et ils ont essayé de percer les positions arrières de la

 20   Brigade de Zvornik et que traverser la ligne entre Baljkovica et Nezuk.

 21   Q.  Très bien.

 22   M. McCLOSKEY : [interprétation] Prenons maintenant la page 23 en anglais.

 23   Q.  A la page suivante, on voit la conclusion : 

 24   "Les forces du Bataillon hollandais [comme interprété], 550 éléments."

 25   Et puis un peu plus bas :

 26   "304 soldats de la FORPRONU dans l'enclave et 450 [comme interprété]

 27   soldats attendent de pouvoir y entrer. Ils sont en train d'attendre à

 28   Zagreb."


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  1   Donc, quand on fait l'addition, on voit bien qu'on n'arrive pas à 550, mais

  2   pourriez-vous nous dire que cela vous dit-il au sujet de ce qu'ils savaient

  3   au sujet des forces hollandaises ?

  4   R.  Il n'était dans l'intérêt du renseignement -- de leurs organes de

  5   renseignement de le savoir. Le fait est qu'ils essayent de savoir

  6   exactement le nombre de soldats du Bataillon hollandais [comme interprété]

  7   et de savoir qui est dans l'enclave et qui n'y est pas -- donc, ils

  8   essayent tout simplement d'avoir à jour toutes les informations concernant

  9   l'enclave de Srebrenica. Donc, ici, vous allez voir que vous aussi les

 10   informations concernant, dans un document plus large, Zepa et Gorazde et

 11   ces informations ont été représentées en grande priorité pour les organes

 12   de sécurité de l'état-major principal.

 13   Q.  On voit qu'ils notent aussi le fait qu'il y ait 150 soldats de la

 14   FORPRONU à Zagreb. Est-ce que vous saviez si la FORPRONU avait le droit

 15   d'introduire des soldats en renfort dans l'enclave, à partir du mois de

 16   mai, donc pendant cette période-là ?

 17   R.  Un nombre restreint a eu le droit d'y entrer, mais je pense que la

 18   meilleure source pour cette information, pour étayer cette information

 19   vient d'un rapport du mois d'août au mois de septembre 1995, qui vient du

 20   Bataillon hollandais [comme interprété], qui était à l'époque à Srebrenica.

 21   Et d'ailleurs, je cite cette source à mon rapport --

 22   L'INTERPRÈTE : L'interprète se reprend : Dont des soldats qui ont quitté

 23   l'enclave et ils disent qui -- dans ce rapport, ils racontent leurs

 24   difficultés de le faire re-rentrer dans l'enclave.

 25   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 26   Q.  Très bien. Et puis, un peu plus loin, il est écrit :

 27   "En plus de la FORPRONU, il y a aussi les représentants de l'UNHCR, de la

 28   Croix-Rouge internationale, des Médecins sans frontières, des observateurs


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  1   militaires, de la police civile de la FORPRONU."

  2   Est-ce que ces informations reflètent la réalité quant aux autres éléments

  3   internationaux présents dans l'enclave ?

  4   R.  Oui.

  5   M. McCLOSKEY : [interprétation] Eh bien, je veux demander que ce document

  6   soit versé au dossier.

  7   M. IVETIC : [interprétation] Nous soulevons une objection, car en observant

  8   l'original du document, le format du document ne correspond pas aux autres

  9   documents officiels de la VRS que nous avons déjà eu à voir. Les caractères

 10   ne sont pas les mêmes. On ne voit pas le récipient du document sur la page

 11   de garde. Il n'y a pas de seau officiel qui indiquerait qu'il s'agissait là

 12   d'un document envoyé officiellement par un organe de la VRS et puis, nous

 13   n'avons pas de seau de réception non plus par un autre organe officiel de

 14   la VRS. Et on ne sait pas d'où vient ce document et sans ces informations,

 15   nous soulevons une objection quand il s'agit d'établir la fiabilité de

 16   l'entente et celle de ce document.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître McCloskey, la première question

 18   logique qui se pose, c'est d'où vient ce document.

 19   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je pense que cela vient de la collection

 20   Pecanac, avec les autres documents. Et nous prenons bien note de ce que

 21   vient de dire Me Ivetic. Nous savons d'où cela vient et je peux donc vous

 22   fournir la filière de conservation de ce document dans un instant.

 23   [Le conseil l'Accusation se concerte]

 24   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Moi, j'ai -- je demanderais que l'on

 25   examine la dernière page du document en B/C/S.

 26   M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, vous avez déjà

 27   entendu des informations selon lesquelles Dragomir Pecanac était un

 28   officier de la VRS qui travaillait dans la branche de renseignements et on


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  1   a fait une fouille dans son domicile, on a obtenu un DVD avec des documents

  2   scannés en couleur et cela fait partie de cette collection. Il y a des

  3   documents qui figurent et qui ressemblent plus à ce que Me Ivetic appelle

  4   un document [inaudible] la VRS. Là, c'est un document unique et évidemment,

  5   je peux fournir d'autres informations quand il s'agit de l'authenticité.

  6   Nous avons eu la déposition de M. Pecanac, mais je ne me souviens pas s'il

  7   a dit quoi que ce soit au sujet de ce document, s'il a dit qu'il était

  8   fiable ou non, mais en tout cas, je peux fournir ces informations et je

  9   peux aussi prendre un café avec Me Ivetic et en parler avec lui et discuter

 10   de ce problème.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que ce document a déjà été versé

 12   dans une autre affaire ? Est-ce qu'il y a jamais eu d'objection concrète au

 13   sujet de l'authenticité de ce document ? Est-ce qu'il y a eu des décisions

 14   de prises à ce sujet ?

 15   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je pense que dans l'affaire Tolimir, on

 16   s'en est servi.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, on va attendre d'avoir

 18   davantage d'informations. Et ensuite, on va voir. Pour l'instant, on va

 19   donner une cote MFI à ce document, en attendant de recevoir d'autres

 20   informations.

 21   Le Greffier, s'il vous plaît.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Le document

 23   25996 va recevoir la cote MFI P2099.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Mais il est 2 heures et quart

 25   [comme interprété] donc …

 26   Monsieur Butler, avant de lever la séance, je vais vous demander de ne vous

 27   entretenir avec qui que ce soit au sujet de votre déposition, de ne

 28   communiquer avec quoi que ce soit au sujet de la déposition que vous avez


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  1   déjà faite ou bien de ce qu'il vous reste à dire au cours des journées à

  2   venir. Et je vais vous demander de revenir demain dans cette même salle

  3   d'audience, à 9 heures 30.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez suivre l'Huissier.

  6   [Le témoin quitte la barre]

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons lever la séance aujourd'hui.

  8   Nous allons reprendre nos travaux demain, le 4 septembre, à 9 heures 30,

  9   dans cette même salle d'audience.

 10   --- L'audience est levée à 14 heures 18 et reprendra le mercredi 4

 11   septembre 2013, à 9 heures 30.

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