Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 24362

  1   Le lundi 21 juillet 2014

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 32.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes dans la salle

  6   d'audience et au personnel qui nous assiste dans nos travaux.

  7   Madame la Greffière, veuillez annoncer la cote de l'affaire.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Ceci est

  9   l'affaire IT-09-92-T, le Procureur contre Ratko Mladic.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

 11   Les Juges de la Chambre viennent d'apprendre que l'Accusation souhaite

 12   soulever une question préliminaire.

 13   M. TRALDI : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Bonjour.

 14   J'aimerais que nous passions brièvement à huis clos partiel.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Passons à huis clos partiel, s'il vous

 16   plaît.

 17   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

 18   Messieurs les Juges.

 19   [Audience à huis clos partiel]

 20  (expurgé)

 21  (expurgé)

 22  (expurgé)

 23  (expurgé)

 24  (expurgé)

 25  (expurgé)

 26  (expurgé)

 27  (expurgé)

 28  (expurgé)


Page 24363

  1  (expurgé)

  2  (expurgé)

  3  (expurgé)

  4  (expurgé)

  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

  7  (expurgé)

  8  (expurgé)

  9  (expurgé)

 10  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13   [Audience publique]

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière. Et veuillez,

 15   s'il vous plaît, faire entrer le témoin dans le prétoire.

 16   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Simovic. Avant

 18   de commencer à témoigner, conformément au Règlement, vous êtes censé

 19   prononcer la déclaration solennelle. Le texte vous sera remis par

 20   l'huissier. Veuillez, s'il vous plaît, la prononcer maintenant.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 22   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 23   LE TÉMOIN : VESELINKO SIMOVIC [Assermenté]

 24   [Le témoin répond par l'interprète]

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Simovic. Veuillez vous

 26   asseoir.

 27   Monsieur Simovic, vous allez d'abord être interrogé par Me Ivetic, qui se

 28   trouve à votre gauche. M. Ivetic fait partie de la Défense de M. Mladic.


Page 24364

  1   Vous avez la parole, Maître Ivetic.

  2   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   Interrogatoire principal par M. Ivetic :

  4   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur.

  5   R.  Bonjour.

  6   M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche dans le système du

  7   prétoire électronique le document portant la cote 1D01656. Et pendant que

  8   nous attendons l'affichage du document, on peut remettre un exemplaire

  9   imprimé de ce document qui ne comporte pas d'annotations. Je serais

 10   reconnaissant à l'huissier de son aide à cet égard. La première page vient

 11   d'être affichée dans le système du prétoire électronique.

 12   Q.  Monsieur, veuillez bien examiner la signature qui figure à la première

 13   page du document et me dire si vous la reconnaissez.

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Qui a signé le document ?

 16   R.  C'est moi.

 17   M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais que nous passions maintenant à la

 18   dernière page de la déclaration préalable dans les deux versions

 19   linguistiques.

 20   Q.  Pouvez-vous nous dire qui a signé cette dernière page du document ?

 21   R.  C'est moi.

 22   Q.  Monsieur, après avoir signé cette déclaration préalable destinée à la

 23   Défense du général Mladic, avez-vous eu l'occasion d'examiner cette

 24   déclaration en serbe pour vérifier s'il y a des corrections à apporter ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Et au cours de la séance du récolement, m'avez-vous informé de certains

 27   éclaircissements ou de certaines modifications à apporter?

 28   R.  Oui.


Page 24365

  1   M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais que nous nous penchions d'abord sur

  2   la page 2 de la déclaration préalable dans les deux versions linguistiques,

  3   et je m'intéresse plus particulièrement au paragraphe 2.

  4   Q.  Lorsque vous parlez du mariage qui a fait l'objet d'une attaque à

  5   Sarajevo, est-ce qu'il y a un éclaircissement que vous souhaitez apporter,

  6   une précision ?

  7   R.  Oui. Il est indiqué ici que plusieurs participants au mariage

  8   d'appartenance ethnique serbe ont été tués. Mais, en fait, il s'agit d'une

  9   personne.

 10   Q.  Examinons à présent le paragraphe 5, qui figure à la même page. Avez-

 11   vous des précisions à apporter concernant ce paragraphe ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Allez-y, dites-nous de quoi il s'agit.

 14   R.  Eh bien, on a ajouté quelques mots ici, et, par conséquent, la phrase a

 15   perdu son sens. On dit : Vers le mois d'avril 1992, la cellule de Crise a

 16   été mise sur pied dans la municipalité de Foca. Les Musulmans de Donje

 17   Polje, non loin de Foca, ont été les premiers à ouvrir le feu en ciblant la

 18   population serbe.

 19   Alors, j'aimerais demander à MM. les Juges, parce que les réfugiés ici,

 20   vous voyez que ça continue et ça continue, et on dit ici : Des réfugiés

 21   sont arrivés à Foca et il y avait aussi des réfugiés de Konjic et Sarajevo,

 22   donc des régions où la population était surtout musulmane. Alors, ce qui a

 23   été souhaité ici, c'est que les Musulmans de Donje Polje ont été les

 24   premiers à ouvrir le feu en ciblant la population serbe. Et puis, il y a

 25   aussi les réfugiés de Konjic et de Sarajevo, qui se trouvent à 200

 26   kilomètres de distance par rapport à Foca, donc c'est impossible. Ça n'a

 27   aucun sens.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ces quelques mots qui ont été prononcés


Page 24366

  1   tout à l'heure, "j'aimerais bien demander aux Juges de la Chambre," est-ce

  2   que c'est le témoin qui a prononcé ces mots ou était-ce une intervention

  3   des interprètes ?

  4   L'INTERPRÈTE : Les interprètes de la cabine anglaises signalent qu'il

  5   s'agissait bien des mots du témoin.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon, très bien. Alors, tout est clair.

  7   M. IVETIC : [interprétation]

  8   Q.  Alors, pour que tout soit un peu plus clair, vous dites, si je vous ai

  9   bien compris, qu'à la ligne 15 de la page 4, vous souhaitez éliminer

 10   quelques mots ?

 11   R.  Oui. J'aimerais que l'on élimine les mots suivants, "Ce qui a eu pour

 12   résultat que."

 13   M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais passer à la page suivante dans les

 14   deux versions linguistiques pour nous pencher sur le paragraphe numéro 12.

 15   Q.  Qu'est-ce que vous pouvez nous dire à ce sujet ?

 16   R.  Au paragraphe 12, il est dit : Je me souviens qu'une fois, un officier

 17   de police militaire, Malis, qui est un commandant de la police militaire du

 18   VRS, est venu à Foca. Alors, je serais reconnaissant aux Juges de la

 19   Chambre de modifier quelque chose ici -- excusez-moi.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, veuillez, s'il vous

 21   plaît, ralentir et répéter votre réponse. Par ailleurs, j'aimerais que tous

 22   les microphones qui ne sont pas utilisés soient débranchés.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je me souviens qu'une fois, un officier de

 24   police militaire, Malis, est venu à Foca. Il venait des rangs de la VRS et

 25   il était un commandant au sein de la police militaire. Alors, ici, tout

 26   simplement, on a inversé l'ordre des mots. Malis a été nommé commandant de

 27   la police militaire de la VRS au moment où la VRS a été mise sur pied. Il

 28   est n'est pas venu de Sarajevo. Il est venu à Foca. Il a été nommé


Page 24367

  1   commandant de la police militaire et il est resté à Foca. Or, ici,

  2   j'indiquais : "Je ne l'ai pas vu, mais j'ai entendu dire qu'il était venu

  3   pour régler le problème avec ces individus." Mais, en fait, il n'est pas

  4   reparti. Il est venu à Foca et il y est resté. Donc, Malis a été nommé

  5   officier au sein de la police militaire de la VRS à Foca. Il est venu à

  6   Foca et il y est resté.

  7   M. IVETIC : [interprétation] Merci.

  8   Q.  Et, Monsieur, mis à part ces précisions que vous venez de citer ici

  9   dans la salle d'audience, est-ce que vous confirmez que tout ce qui est

 10   enregistré dans votre déclaration préalable correspond à la vérité et ne

 11   nécessite plus de nouvelles modifications ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Et si je venais à vous poser des questions relatives aux mêmes sujets

 14   qui sont traités dans votre déclaration préalable, vos réponses à mes

 15   questions seraient-elles les mêmes en substance que les réponses que nous

 16   trouvons dans la déclaration préalable ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Compte tenu du fait qu'aujourd'hui vous avez prononcé la déclaration

 19   solennelle vous engageant à dire la vérité, est-ce que ces réponses

 20   enregistrées dans votre déclaration préalable correspondent à la vérité ?

 21   R.  Oui.

 22   M. IVETIC : [interprétation] Messieurs les Juges, la Défense souhaite

 23   demander le versement au dossier du document 1D01656.

 24   M. TRALDI : [interprétation] Nous n'avons pas d'objection à soulever,

 25   Messieurs les Juges.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de continuer, Monsieur le Témoin,

 27   pouvez-vous nous dire ce qui est reproché à M. Mladic dans l'acte

 28   d'accusation au sujet de Foca ?


Page 24368

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] M. le Général est accusé d'avoir commis un

  2   certain nombre de crimes à Foca, mais je ne sais pas de quoi il s'agit.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais pourriez-vous nous préciser de

  4   quels crimes il s'agit ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais dans votre déclaration préalable,

  7   nous lisons que vous ne savez pas quels sont les incidents reprochés à

  8   l'accusé dans l'acte d'accusation. Mais si vous n'êtes pas au courant de

  9   cela, alors comment pouvez-vous nous dire que vous ne savez rien à ce sujet

 10   ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Parce qu'à mon avis, Monsieur, à Foca, il n'y

 12   a pas eu de crimes de commis.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous entendu dire qu'un certain

 14   nombre de personnes ont été détenues au KP Dom ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, il se peut que vous en sachiez

 17   quelque chose. Il se peut que vous ayez des connaissances au sujet des

 18   détentions qui sont pertinentes en l'espèce.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que j'en sais, de la bouche des personnes

 20   qui ont été détenues au KP Dom, en fait, on y a détenu des personnes

 21   capturées au cours des activités de combat.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez une opinion quant à ce qui

 23   s'est produit au KP Dom.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et sur la base de quoi est-ce que vous

 26   dites que vous n'avez pas de connaissances relatives à ces incidents ou à

 27   ces événements, si vous ne savez même pas de quels événements il s'agit ?

 28   Comment pouvez-vous savoir que vous n'en savez rien ? Est-ce que quelqu'un


Page 24369

  1   vous a donné lecture de l'acte de l'accusation, l'avez-vous lu vous-même ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Monsieur le Président, moi, je suis un

  3   soldat. J'ai fait ce que j'étais censé faire en ma qualité de soldat. Mais

  4   je n'ai jamais pris connaissance de quelque document que ce soit, et, par

  5   conséquent, je n'ai rien lu sur le plan de documents.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, lorsque vous dites que vous n'avez

  7   pas de connaissances, que vous n'êtes pas au courant des événements

  8   reprochés à l'accusé, en fait, c'est une déclaration qui n'a aucun sens,

  9   puisque de toute manière vous ne savez même pas de quels événements il

 10   s'agit ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas très bien compris votre question.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et si vous dites, Je ne sais pas dans

 13   quelles circonstances un tel et tel événement s'est produit, cela n'a aucun

 14   sens si déjà, pour commencer, vous ne savez même pas de quel événement il

 15   s'agit, quel est l'événement reproché à l'accusé. N'êtes-vous pas d'accord

 16   avec moi ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je ne sais pas de quels événements il

 18   s'agit ou de quels incidents il s'agit ici.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Néanmoins, dans votre déclaration

 20   préalable, vous indiquez que vous ne savez pas dans quelles circonstances

 21   ils se sont produits. Alors, si vous ne savez rien au sujet d'un certain

 22   nombre d'événements, alors bien sûr que vous ne pouvez pas avoir de

 23   connaissances à ce sujet puisque, pour commencer, vous ne savez même pas de

 24   quels événements il s'agit.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais, bien sûr. J'ai dit que je ne sais rien

 26   au sujet de ces événements puisque je ne sais même pas de quels événements

 27   il s'agit.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.


Page 24370

  1   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 1D1656 recevra la cote

  2   D583, Messieurs les Juges.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D583 est admise au dossier.

  4   Maître Ivetic, à vous.

  5   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges. Je vais maintenant

  6   donner lecture d'un résumé public de la déclaration préalable du témoin.

  7   J'ai expliqué au témoin la raison pour laquelle on donne lecture de ce

  8   résumé.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.

 10   M. IVETIC : [interprétation] Dans sa déclaration préalable, le témoin

 11   explique qu'avant le mois d'avril 1992, des barrages ont été érigés dans la

 12   ville de Foca. Dans les villages musulmans, on avait l'habitude de monter

 13   la garde et on pouvait voir les sentinelles qui se déplaçaient dans les

 14   villages en portant des armes. Effrayés qu'on avait entamé des préparatifs

 15   visant à éliminer toute la population serbe de la région, les Serbes locaux

 16   se sont organisés par le biais de la Défense territoriale pour défendre

 17   leurs foyers.

 18   Les Musulmans ont été les premiers à ouvrir le feu en ciblant la population

 19   serbe de Donje Polje.

 20   Avant la mise sur pied de la VRS, la population s'est organisée elle-même

 21   conformément aux principes respectés par la Défense territoriale. C'est la

 22   cellule de Crise de Foca qui avait toutes les compétences, tous les

 23   pouvoirs de facto.

 24   Mis à part le Groupe tactique de Foca, d'après le témoin, plusieurs groupes

 25   armés et plusieurs individus armés circulaient dans la région alors qu'ils

 26   n'étaient contrôlés par personne. Ils fonctionnaient de façon indépendante

 27   et engageaient des escarmouches avec la population de Foca.

 28   Le témoin sait qu'un commandant de police militaire des rangs de la VRS est


Page 24371

  1   venu à Foca pour essayer de résoudre les problèmes soulevés par ces

  2   individus. Le témoin n'a jamais reçu un ordre illégal et n'en a jamais

  3   entendu parler.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Si vous avez d'autres questions à

  5   poser au témoin, allez-y, s'il vous plaît.

  6   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   Q.  Monsieur, j'aimerais maintenant étudier avec vous quelques autres

  8   paragraphes de votre déclaration préalable.

  9   M. IVETIC : [interprétation] Pour commencer, j'aimerais que nous nous

 10   penchions sur la page 2 dans les deux versions linguistiques, le paragraphe

 11   numéro 4.

 12   Q.  Dans ce paragraphe, vous indiquez :

 13   "Je savais que rien de bon ne s'annonçait, que les choses ne resteraient

 14   plus les mêmes. Et certains estimaient qu'on avait entamé des préparatifs

 15   visant à éliminer toute la population serbe de la région."

 16   Sur la base de quoi êtes-vous arrivé à ces conclusions ou sur la base de

 17   quoi est-ce que vous êtes inquiété à ce sujet ? Pourquoi avez-vous été

 18   préoccupé ?

 19   R.  Oui. C'était bien mon opinion. C'est bien ce que j'ai indiqué. J'ai

 20   passé beaucoup de temps à Sarajevo à l'époque, j'y ai passé pratiquement

 21   chaque week-end, et je voyais les Bérets verts se promener dans la ville,

 22   alors que nous étions censés vivre dans un Etat de droit. Il y avait aussi

 23   la Ligue patriotique de Sulejman Ugljanin, et il annonçait leur arrivée à

 24   Foca avec 50 000 hommes de Sandzak pour tout régler. Et je me suis dit :

 25   Nous serons complètement éliminés. C'est la façon dont je réfléchissais à

 26   l'époque. Nous n'étions pas organisés --

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, veuillez reprendre

 28   votre réponse, s'il vous plaît, à partir du moment où vous avez entendu ce


Page 24372

  1   discours où il était question de 50 000 hommes censés venir de Sandzak à

  2   Foca pour tout régler. Pouvez-vous répéter votre réponse à partir de ce

  3   moment-là ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous présente mes excuses, Monsieur le

  5   Juge. Lors d'une assemblée du SDA, qui s'est tenue à Foca, Sulejman

  6   Ugljanin, le président du SDA pour la région de Sandzak, a promis d'amener

  7   50 000 hommes de Sandzak qui allaient tout régler. Il a répété que ce qui

  8   s'est produit à Foca en 1942 ne se reproduira plus. Alors, toutes les

  9   choses que je viens de vous raconter ont été racontées dans un gros village

 10   qui était habité surtout par les Musulmans. A l'époque, moi, j'étais un

 11   citoyen de la Yougoslavie et c'était la façon dont je réfléchissais à

 12   l'époque. Je me disais : Mais nous n'avons rien du tout. Nous n'avons que

 13   des vêtements sur notre dos, alors qu'eux, ils ont des formations

 14   paramilitaires, les Bérets verts, la Ligue patriotique, ils sont 

 15   50 000 hommes de Sandzak. Ils ont déjà monté les gardes autour de la ville

 16   de Foca. Donc, si jamais la guerre devait éclater, alors que je croyais que

 17   cela n'arriverait tout de même pas, mais si la guerre devait éclater, nous

 18   serions totalement éliminés.

 19   M. IVETIC : [interprétation]

 20   Q.  Merci, Monsieur. Examinons maintenant le paragraphe 7 de votre

 21   déclaration préalable. Il devrait figurer à la même page dans les deux

 22   versions linguistiques. Ici, vous dites que vous avez rejoint les rangs du

 23   5e Bataillon vers le 15 avril 1992. Ce 5e Bataillon faisait-il partie de la

 24   VRS ou d'une autre formation militaire que vous avez rejointe à ce moment-

 25   là ?

 26   R.  Le 5e Bataillon faisait partie de la Défense territoriale à l'époque.

 27   Q.  Et ce 5e Bataillon a-t-il été intégré par la suite à la VRS?

 28   R.  Oui.


Page 24373

  1   Q.  A l'époque où vous faisiez partie de la Défense territoriale, ou plus

  2   tard de la VRS, vous souvenez-vous d'avoir reçu des consignes relatives au

  3   droit de la guerre et à la façon dont il faut traiter, d'une part, les

  4   civils, et d'autre part, les prisonniers de guerre ?

  5   R.  Oui.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi.

  7   M. TRALDI : [interprétation] Messieurs les Juges, je pense que la même

  8   question s'est posée vendredi dernier. Ceci est un témoin qui dépose à

  9   titre d'exception. On s'était, au départ, mis d'accord sur le fait que

 10   seulement les témoins qui avaient déjà déposé pouvaient être cités à la

 11   barre avant les vacances judiciaires puisque la communication des documents

 12   a été tardive, je parle des déclarations préalables préparées par la

 13   Défense. Alors, peut-être ai-je tort de l'affirmer, mais ces consignes

 14   relatives au droit de la guerre, est-ce que c'est un sujet qui est couvert

 15   dans la déclaration du témoin ?

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic.

 17   M. IVETIC : [interprétation] Oui, je pense que c'est une question qui

 18   découle du paragraphe 13, où le témoin indique qu'il n'a jamais entendu ou

 19   vu quoi que ce soit d'illégal dans les rangs des formations militaires dont

 20   il faisait partie. Donc, je pense que sur la base de ce paragraphe, je peux

 21   poser des questions supplémentaires pour préciser si le témoin a reçu des

 22   consignes de ce type.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais les consignes données et ce qui

 24   arrive en réalité sont deux choses différentes, n'est-ce pas ?

 25   M. IVETIC : [interprétation] Je ne comprends pas ce que vous entendez par

 26   "ce qui se passe réellement," Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais je veux dire, je n'ai peut-être

 28   jamais fait une infraction au niveau du code de la route, mais cela ne me


Page 24374

  1   dit rien quant aux instructions que j'ai reçues pendant que je me formais à

  2   conduire. Bien sûr, on peut toujours établir des liens, mais ici le lien

  3   que vous établissez n'est pas tout à fait clair.

  4   En revanche, Monsieur Traldi, le problème ne me semble pas tellement

  5   dramatique. Je ne vais pas demander à Me Ivetic de ne pas poser sa

  6   question. Mais je comprends votre désir de signaler aux fins du compte

  7   rendu d'audience que d'après Me Ivetic ces deux questions sont liées alors

  8   que vous en pensez autrement.

  9   M. TRALDI : [interprétation] Je pense que vous avez bien décrit la

 10   situation, Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Vous pouvez poursuivre.

 12   M. IVETIC : [interprétation] Merci.

 13   Q.  Monsieur, à l'époque où vous étiez un membre de la Défense

 14   territoriale, ou par la suite de la VRS, avez-vous reçu des instructions

 15   relatives au droit de la guerre et à la façon dont il fallait traiter,

 16   d'une part, les civils, et d'autre part, les prisonniers de guerre ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Et quelles instructions, quelles consignes avez-vous reçues?

 19   R.  Chaque unité de la Défense territoriale, et plus tard de l'armée de la

 20   Republika Srpska, avait un ordre qui avait été remis et chaque soldat

 21   pouvait le lire, et d'ailleurs on en a donné lecture de nombreuses fois aux

 22   soldats, et voilà ce qui est indiqué dans cet ordre, je cite -- bon, je ne

 23   vais peut-être pas citer mot à mot puisque la chose s'est passée il y a 20

 24   ans, mais je vais vous citer au moins quelques termes utilisés dans cet

 25   ordre. Donc, voilà :

 26   "J'ordonne que tous les officiers, tous les sous-officiers, tous les

 27   soldats de la Republika Srpska se comportent en conformité avec les

 28   conventions de Genève.


Page 24375

  1   "J'interdis d'incendier et de détruire la propriété, qu'il s'agisse de

  2   l'immobilier ou du mobilier."

  3   Ensuite :

  4   "Tout mauvais traitement de la population civile est interdit. Il faut

  5   apporter son assistance aux soldats de l'ennemi et aux personnes blessées.

  6   Et les soldats qui sont pris comme prisonniers doivent être traités avec

  7   toute la dignité qui leur est due."

  8   Et il y avait aussi d'autres consignes dans cet ordre, mais,

  9   Messieurs les Juges, je ne m'en souviens plus. Cela s'est passé, après

 10   tout, il y a 20 ans.

 11   Q.  Merci. Et vous nous avez parlé d'une Unité d'intervention de Dragan

 12   Nikolic. Pouvez-vous nous préciser de quelle unité il s'agit ?

 13   R.  C'est une unité de la Défense territoriale qui fonctionnait comme la

 14   police militaire. Son objectif était donc de protéger la population serbe

 15   et musulmane pendant les opérations de guerre.

 16   Q.  Et pourquoi appelait-on cette unité l'Unité d'intervention de Dragan

 17   Nikolic ? Qui était Dragan Nikolic ?

 18   R.  Dragan Nikolic était le premier commandant de cette unité, et il a été

 19   tué dans le cadre des heurts avec les forces musulmanes à Foca.

 20   Q.  Et vous avez dit que c'était une unité de la Défense territoriale créée

 21   en tant que police militaire dont l'objectif était de protéger la

 22   population serbe et musulmane pendant les opérations de guerre. Comment

 23   est-ce que cet objectif devait se réaliser ?

 24   R.  Je n'ai pas vraiment bien compris votre question.

 25   Q.  Comment est-ce que l'Unité d'intervention de Dragan Nikolic agissait

 26   pour essayer de protéger les populations serbe et musulmane?

 27   R.  Eh bien, ils venaient -- en fait, si quelqu'un disait que la population

 28   serbe avait été maltraitée, ils agissaient en conformité avec la loi et


Page 24376

  1   emmenaient les gens au KP Dom, indépendamment de qui il s'agissait, qu'il

  2   s'agisse de Serbes, de Musulmans ou de Croates, et indépendamment de leur

  3   religion.

  4   Q.  Maintenant, aux paragraphes 7 et 8 de votre déclaration préalable, vous

  5   parlez de paramilitaires. D'où venaient-ils ?

  6   R.  Eh bien, pour autant que je puisse m'en souvenir, il y avait une

  7   formation paramilitaire d'environ 70 hommes qui est venue de Serbie et qui

  8   s'appelait les Aigles noirs. Il y avait également une autre unité venant du

  9   Monténégro composée d'environ 35 hommes. Il y avait beaucoup de gens qui

 10   sont venus à cette époque, mais je me souviens très bien de ces unités, de

 11   ces deux unités.

 12   Q.  Que faisaient ces diverses unités paramilitaires dans la ville de Foca

 13   ?

 14   R.  Je vais vous donner mon avis. Ils ont apporté la honte et la disgrâce

 15   aux combattants honnêtes de Foca.

 16   Q.  Et au paragraphe 9 de votre déclaration --

 17   M. IVETIC : [interprétation] Page suivante dans la version anglaise.

 18   Q.  -- vous parlez des incidents qu'ils ont provoqués et des conflits avec

 19   la population civile. Que pouvez-vous nous dire concernant donc les

 20   échanges entre les paramilitaires et les autorités civiles à Foca ?

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, il y a peut-être un

 22   problème de traduction, mais je n'ai pas vu de référence à la "population

 23   civile" dans le texte.

 24   M. IVETIC : [interprétation] Je m'excuse. On parle ici de "population", et

 25   non de population civile, effectivement.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre.

 27   M. IVETIC : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur, que pouvez-vous nous dire à propos des échanges entre les


Page 24377

  1   paramilitaires et les autorités civiles à Foca ?

  2   R.  Ces échanges étaient très désagréables, très mauvais.

  3   Q.  Avez-vous vous-même rencontré personnellement les paramilitaires, et si

  4   tel est le cas, dans quelles circonstances ? Pouvez-vous nous les expliquer

  5   ?

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Traldi.

  7   M. TRALDI : [interprétation] Je pense que ceci va au-delà de la déclaration

  8   préalable du témoin et ne figurait pas non plus dans les notes de

  9   récolement. Et par rapport à notre accord et les exceptions limitées que

 10   nous avons accordés dans cette affaire, je suis juste préoccupé, je me

 11   demande s'il est nécessaire de questionner le témoin de cette façon si ce

 12   type de questions devait se poursuivre.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic.

 14   M. IVETIC : [interprétation] Je pense que ceci découle du paragraphe 11. Je

 15   vais essayer de préciser les choses et de reformuler ma phrase.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie.

 17   M. IVETIC : [interprétation]

 18   Q.  Au paragraphe 11 de votre déclaration, vous avez dit que ces

 19   volontaires indisciplinés ne pouvaient être contrôlés et que :

 20   "Ils ont dit qu'ils devaient se placer sous contrôle mais qu'ils le

 21   refusaient en même temps."

 22   Etiez-vous présent lorsque ceci a été communiqué à ces personnes ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Pourriez-vous nous expliquer tout d'abord les circonstances et comment

 25   se fait-il que vous étiez présent lorsque cela a été communiqué à ce groupe

 26   de volontaires ou de paramilitaires indisciplinés ?

 27   R.  J'étais à une vingtaine de kilomètres de Foca. J'avais été convié à

 28   venir par le commandant du 5e Bataillon. Il m'a dit, et je cite : "Simovic,


Page 24378

  1   prenez dix hommes avec vous, allez en ville, faites rapport au commandant

  2   de la police militaire, et vous y recevrez des instructions. Les criminels

  3   de Belgrade semblent avoir commencé à créer des problèmes une fois de

  4   plus." J'ai donc pris avec moi dix soldats. Je me suis rendu sur place, je

  5   me suis présenté à la police militaire, et environ une cinquantaine d'entre

  6   nous, des soldats, nous sommes rendus dans cette région où ils étaient

  7   stationnés. Et le commandant de la police militaire a dit : "Si vous ne

  8   vous mettez pas sous notre contrôle, vous avez deux heures pour partir.

  9   Pour vous en aller." Cela ne leur a pas plu, et ils nous ont dit qu'ils

 10   sont venus sur place pour se battre pour la population serbe. Et l'un

 11   d'entre eux dans les premiers rangs a dit quelque chose, et je lui ai

 12   répondu parce que j'étais là en lui disant : "Eh bien, vous n'êtes pas venu

 13   vous battre pour la population mais pour la piller." Et les ordres que

 14   j'avais reçus étaient de les tuer s'ils refusaient d'obéir. Ils ont vu ce

 15   groupe de 50 soldats positionné un petit peu plus loin, et j'étais là, moi,

 16   juste devant eux. Et ils m'ont dit : "Eh bien, nous allons partir, nous ne

 17   fonctionnerons pas selon nos règles. Nous partons, mais nous reviendrons.

 18   Vous avez tué un de nos soldats et nous allons le venger." Et ensuite, je

 19   leur ai dit, et je cite : "Partez, et si vous revenez, nous serons là à

 20   vous attendre."

 21   Q.  Et enfin, je voudrais me concentrer sur le paragraphe --

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, est-ce que vous me

 23   permettez, je voudrais poser une question Vous avez dit que vous aviez reçu

 24   l'ordre de les tuer s'ils refusaient d'obéir. Est-ce que vous n'avez

 25   simplement pas respecté cet ordre, si j'ai bien compris votre déclaration ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous n'avons pas obéi à cet ordre parce que

 27   l'ordre était le suivant : s'ils refusaient de quitter la ville, nous

 28   devions les tuer; mais s'ils s'en allaient, il est évident que cet ordre ne


Page 24379

  1   pouvait s'appliquer.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre.

  3   M. IVETIC : [interprétation]

  4   Q.  Je voudrais maintenant que l'on s'intéresse au paragraphe 12, où vous

  5   parlez d'un officier de la police militaire, Malis. Pourriez-vous nous

  6   donner des détails sur ce qu'il a fait pour essayer de résoudre le problème

  7   que posaient ces personnes ?

  8   R.  Le 30 juin 1992, la Brigade de Foca de la VRS a été créée. Et jusque-là

  9   nous n'avions que la Défense territoriale. M. Malis avait été nommé

 10   commandant de la police militaire et de nouvelles tâches ont été attribuées

 11   au détachement de Dragan Nikolic. Je sais cela, mais je n'ai rien vu moi-

 12   même car c'était à lui de s'occuper de ces choses. Et après le mois de

 13   juin, en juillet ou juin, je ne me souviens pas exactement, il y a une

 14   autre formation qui est arrivée dans la ville de Foca, probablement dans le

 15   même objectif que les précédents. Il était là, prêt à les recevoir, et il

 16   leur a dit qu'ils ne devraient pas se trouver à Foca et qu'ils n'avaient

 17   que le temps de remballer leurs affaires et de partir. Je sais qu'ils ont

 18   tiré sur sa voiture et que trois de ces hommes ont été arrêtés et emmenés

 19   au KP Dom. Et sept ou huit autres personnes qui étaient là ont disparu, se

 20   sont enfuies, et elles sont jamais revenus dans la ville.

 21   Q.  Monsieur, au nom de mon client et de mon équipe, je vous remercie

 22   d'avoir répondu à ces questions. Cela termine votre interrogatoire.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Ivetic.

 24   Monsieur Traldi, avant que vous ne commenciez votre contre-interrogatoire,

 25   j'aurais quelques questions à poser au témoin.

 26   Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez connaissance, là où vous nous

 27   dites que vous portiez des jeans et rien d'autre, est-ce que vous aviez

 28   connaissance de Serbes qui auraient été armés et à qui on aurait distribué


Page 24380

  1   des armes dans la région de Foca ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne comprends pas vraiment votre question,

  3   Monsieur le Président.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit : Je portais des jeans, et

  5   nous n'avions rien. Et vous avez expliqué dans le contexte de

  6   l'organisation, de l'organisation militaire des Musulmans, ce qui était la

  7   situation. Ma question est la suivante : est-ce que vous étiez au courant

  8   du fait que des armes auraient été distribuées à des Serbes et/ou que des

  9   Serbes auraient été armés ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Deuxième question : avez-vous jamais

 12   arrêté qui que ce soit en tant que prisonnier de guerre ? Soit vous-même,

 13   soit votre unité ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous nous donner les détails ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans le cadre de nombreuses opérations de

 17   combat, nous nous sommes battus contre les soldats de l'ennemi à diverses

 18   occasions, et quelquefois nous avons fait des prisonniers.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et qu'est-ce que vous avez fait des ces

 20   prisonniers ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai déjà dit, nous avions donc un

 22   ordre qui nous avait été donné, à savoir que les prisonniers de guerre

 23   devaient être traités avec dignité, indépendamment du fait qu'ils étaient

 24   des ennemis. C'est ce que j'ai dit. Le commandement Suprême avait donné cet

 25   ordre. Et nous devions les traiter conformément à la convention de Genève.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous nous donner un exemple d'une

 27   personne qui aurait été fait prisonnier de guerre et ce que vous avez fait

 28   de cette personne ?


Page 24381

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je suis un soldat. Nous

  2   faisions des prisonniers parmi les soldats -- et c'est plus ou moins une

  3   estimation --

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous arrête tout de suite. Je vous ai

  5   posé une question concernant un exemple particulier.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, vous me demandez ce qui se passait

  7   lorsque nous faisions des prisonniers. Mon devoir, lorsqu'un soldat ennemi

  8   était fait prisonnier, était de le traiter correctement.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous arrête tout de suite. Je vous ai

 10   posé une question en vous demandant un exemple particulier, où, qui, quand.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien. Je m'excuse. Bien, permettez-moi de vous

 12   donner un exemple. Il y a eu des heurts à Treskavica. Nous avons, donc, dû

 13   adopter un site qui était d'une importance stratégique pour les deux côtés.

 14   Nous avons capturé environ 18 combattants musulmans.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quand est-ce que cela s'est passé ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] En 1993 ou 1994. Je pense que c'était fin

 17   1993.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez des exemples pour

 19   l'année 1992 ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous vous êtes jamais rendu

 22   au KP Dom à Foca ? En avril, mai ou juin 1992 ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez connaissance

 25   personnellement de qui était détenu là ? Et j'ai bien avez-vous

 26   personnellement connaissance de cela ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, vous ne pourriez pas nous dire


Page 24382

  1   exactement qui étaient détenus là-bas, s'il s'agissait de prisonniers de

  2   guerre ou de criminels ou autres --

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur, je ne sais pas ce qui s'est produit

  4   au KP Dom. En tant que soldat, je n'avais pas le droit même de m'y rendre.

  5   Je pense qu'en grande partie, les soldats qui avaient tiré sur nous y

  6   étaient emprisonnés.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce qui m'intéresse, c'est ce dont vous

  8   aviez personnellement connaissance.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais rien du tout sur le KP Dom,

 10   malheureusement.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci de vos réponses.

 12   Monsieur Traldi, êtes-vous prêt à contre-interroger le témoin ?

 13   M. TRALDI : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez donc poursuivre.

 15   Monsieur Simovic, vous allez maintenant être interrogé par M. Traldi,

 16   qui est du bureau du Procureur, et qui se trouve à votre droite.

 17   Contre-interrogatoire par M. Traldi :

 18   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur.

 19   R.  Bonjour.

 20   Q.  Vous êtes membre d'une association de vétérans de guerre, n'est-ce pas

 21   ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Est-ce que vous aviez un poste dans cette association ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Quel poste occupiez-vous ?

 26   R.  Je suis président de l'association des vétérans de guerre dans une des

 27   associations locales à Foca.

 28   Q.  Et vous avez signé votre déclaration préalable le 8 juin cette année.


Page 24383

  1   Où l'avez-vous signée ?

  2   R.  A l'association des vétérans.

  3   Q.  Y avait-il d'autres personnes de présentes en dehors des membres de

  4   l'équipe de la Défense ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  De qui s'agissait-il ?

  7   R.  La secrétaire. Elle travaille à l'association des vétérans.

  8   Q.  J'ai deux questions concernant votre déposition de ce matin. Est-ce que

  9   vous avez informé la Défense que vous aviez des échanges personnels avec

 10   les membres des forces paramilitaires à Foca?

 11   R.  Je n'ai pas très bien compris votre question.

 12   Q.  Je vais la reformuler. Avez-vous informé un des membres de l'équipe de

 13   la Défense que vous-même aviez personnellement eu des échanges avec des

 14   membres des forces paramilitaires serbes, que vous les aviez rencontrés et

 15   que vous leur aviez demandé de partir, comme vous nous l'avez dit ce matin

 16   ?

 17   R.  Je ne m'en souviens pas.

 18   Q.  Concernant cette réunion dont vous nous avez parlé ce matin, quand

 19   s'est-elle déroulée ? A quel moment en 1992 ?

 20   R.  Elle s'est déroulée devant la salle des sports de Foca parce que cette

 21   unité paramilitaire était stationnée dans l'école secondaire de Foca. Nous

 22   nous y sommes rendus et leur avons donné l'ordre de partir.

 23   Q.  Monsieur, peut-être que la question n'était pas tout à fait claire,

 24   mais est-ce que vous savez à quel moment en 1992, quel mois, cette réunion

 25   s'est déroulée, et non pas où elle s'est déroulée ? Donc, est-ce que vous

 26   vous souvenez à quel moment de l'année 1992 cette réunion s'est déroulée ?

 27   R.  Non. Cela fait déjà 20 ans, Monsieur. Et il y a certaines choses qui ne

 28   sont plus très claires dans mon esprit.


Page 24384

  1   Q.  Et vous avez dit que les paramilitaires avaient jeté l'opprobre et la

  2   disgrâce sur les combattants honnêtes à Foca. Comment ?

  3   M. TRALDI : [interprétation] Il s'agit donc du compte rendu d'audience

  4   provisoire à la page 14.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur, nous les appelions les chiens de

  6   guerre. Ils n'avaient aucun idéal. Ils n'avaient rien. Leur objectif

  7   principal était de faire de l'argent. Je les considérais comme des

  8   criminels. Bien, je n'étais pas le seul à le penser. Il s'agissait en fait

  9   de criminels qui souhaitaient simplement faire de l'argent, gagner de

 10   l'argent, et peu importe par quel moyen. Ils maltraitaient la population,

 11   et pas uniquement les Musulmans, mais également les Serbes. Et puis, nous

 12   en avons eu assez, et ils ont dû partir.

 13   Q.  Dans le compte rendu provisoire d'aujourd'hui, à la page 7, lignes 7 et

 14   8, vous avez dit :

 15   " … à Foca, à mon sens, Monsieur, il n'y avait eu aucun crime."

 16   Or, maintenant, vous nous dites qu'il y a eu des crimes qui ont

 17   été commis en 1992 à Foca ?

 18   R.  Je vous parlais là des criminels qui volaient, qui pillaient et qui

 19   maltraitaient non seulement les Musulmans, mais également les Serbes. Leur

 20   objectif principal était de trouver de l'argent et rien d'autre.

 21   Q.  Monsieur, pour être parfaitement précis et clair, vous ne vous en tenez

 22   pas à votre déposition à savoir qu'il n'y avait pas eu de crimes commis par

 23   les forces armées serbes à Foca en 1992. Vous dites maintenant qu'il y a eu

 24   des crimes, n'est-ce pas ?

 25   M. IVETIC : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir une référence

 26   de cela, car je pense que cela va à l'encontre de ce que le témoin a

 27   réellement dit.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous peut-être dire au témoin


Page 24385

  1   exactement à quoi vous faites référence, Monsieur Traldi.

  2   M. IVETIC : [interprétation] Je pense que je viens d'y faire référence et

  3   qu'il a dit lui-même : A mon sens, à Foca, en 1992, il n'y avait pas eu de

  4   crimes de commis. Et cela couvrait les crimes de toutes sortes de

  5   personnes. Cela figure dans le compte rendu d'audience à la page 7, lignes

  6   7 et 8. Monsieur le Président, vous lui avez demandé s'il avait

  7   connaissance d'incidents qui étaient reprochés à l'accusé dans l'acte

  8   d'accusation, et il a clairement indiqué que : A mon sens, à Foca, il n'y

  9   avait pas eu de crimes de commis." Donc, c'est la raison pour laquelle je

 10   lui ai dit que cela est incohérent avec sa déposition.

 11   M. IVETIC : [interprétation] Et il a parlé également d'autres crimes en

 12   dehors de ceux qui figurent dans l'acte d'accusation et qui faisaient

 13   l'objet de votre échange avec lui, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La déclaration du témoin était de nature

 15   générale, même si la question elle-même portait sur les crimes qui étaient

 16   reprochés dans l'acte d'accusation, donc c'est la raison pour laquelle je

 17   comprends que vous souhaitiez avoir une précision.

 18   M. TRALDI : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Et étant

 19   donné que le témoin a déposé en disant qu'il n'était pas au courant des

 20   crimes qui étaient reprochés dans l'acte d'accusation, je ne comprends pas

 21   comment il était possible que, dans sa réponse, il ait pu se limiter à ces

 22   crimes uniquement.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ces circonstances, vous pouvez

 24   poser des questions sur ce point. Veuillez poursuivre.

 25   M. TRALDI : [interprétation]

 26   Q.  Donc, je répète ma question : votre déposition stipule qu'il y avait eu

 27   des crimes commis par les forces armées serbes en 1992 à Foca; est-ce exact

 28   ?


Page 24386

  1   R.  Je m'excuse. Monsieur le Président, Monsieur le Procureur, je vous ai

  2   peut-être mal compris. Vous me posiez une question et vous m'avez demandé

  3   s'il y avait eu des crimes de commis, vous ne m'avez pas parlé d'actes

  4   criminels. Si ce que j'entends par là c'est le fait d'incendier une maison,

  5   le fait de frapper quelqu'un, et je pense qu'en fait dans la ville ils ont

  6   incendié des maisons, ils ont frappé des gens, je ne l'ai pas vu de mes

  7   propres yeux, mais j'en ai entendu parler par d'autres personnes. Je vous

  8   ai peut-être mal compris. Vous m'avez demandé s'il y avait eu des crimes de

  9   commis en 1992. Je vous ai peut-être mal compris. Vous ne m'avez pas parlé

 10   d'actes criminels, parce qu'un acte criminel consisterait à maltraiter un

 11   soldat ennemi, à incendier une maison, à frapper quelqu'un au cours de la

 12   guerre indépendamment de sa religion. Pour moi, cela serait un délit, un

 13   acte criminel. Et je suis sûr qu'il y a eu de tels délits commis.

 14   Q.  [hors micro]

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Votre microphone, Monsieur Traldi.

 16   M. TRALDI : [interprétation] Merci. Toutes mes excuses, Monsieur le

 17   Président, Messieurs les Juges.

 18   Q.  Si j'ai bien compris votre déposition il y a quelques instants, vous

 19   aviez connaissance de tels délits commis par les forces serbes à Foca; est-

 20   ce exact ? Je fais référence, donc, à la déposition.

 21   M. IVETIC : [interprétation] Une fois de plus, ceci n'est pas fidèle à la

 22   déposition du témoin. Pourrais-je avoir une décision des Juges sur ce point

 23   ?

 24   M. TRALDI : [interprétation] Je ne pense pas que ce soit exact.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Comprenez-vous l'anglais, Monsieur le

 26   Témoin ? Est-ce que vous comprenez l'anglais ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez retirer vos écouteurs quelques


Page 24387

  1   secondes.

  2   Maître Ivetic, pourriez-vous nous expliquer dans quelle mesure les propos

  3   tenus sont contraires à la déposition ?

  4   M. IVETIC : [interprétation] A deux reprises, le conseil pour l'Accusation

  5   nous a dit que le témoin avait établi un lien entre crimes et forces

  6   serbes, ce qui n'est pas ce qu'a dit le témoin, et je demande à ce que vous

  7   preniez une décision en ce sens.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien. Cette fois, les choses sont

  9   claires. J'ai bien compris la référence qui a été faite à plusieurs

 10   reprises aux forces paramilitaires serbes, qui sont les forces serbes,

 11   Maître Ivetic. Si vous n'êtes pas d'accord --

 12   M. IVETIC : [interprétation] Mais s'il s'agit de forces paramilitaires

 13   serbes, eh bien, ce sont des forces paramilitaires, non pas des forces

 14   serbes. C'est quelque chose de différent, plus général. Parce que les

 15   forces serbes, ça peut aussi signifier autre chose.

 16   M. TRALDI : [interprétation] Non.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je rejette cette objection parce que,

 18   pour autant que nous le comprenions, l'explication fournie par le témoin

 19   avait trait à des forces militaires serbes.

 20   Monsieur Traldi, je vous invite, par conséquent, à continuer d'utiliser ce

 21   terme, mais les forces paramilitaires serbes restent des forces serbes.

 22   M. IVETIC : [interprétation] Oui, mais vous comprendrez mon objection.

 23   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 24   M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, vous venez de dire

 25   forces militaires serbes à la ligne 16, ce qui est complètement différent.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, si c'est le cas --

 27   M. IVETIC : [interprétation] Vous l'avez dit. Vous avez dit : Il est

 28   possible qu'il y ait une certaine confusion, c'est la raison pour laquelle


Page 24388

  1   je demande à l'Accusation d'être plus précise et de s'en tenir à la

  2   déposition.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, je voulais dire forces armées

  4   lorsque j'ai dit forces militaires. J'ai sans doute mal cité la question

  5   posée par M. Traldi, qui avait parlé, lui, de forces militaires.

  6   Quoi qu'il en soit, Monsieur Traldi, je vous inviterais à établir un lien

  7   entre votre question et la déposition du témoin, et toutes mes excuses si

  8   j'ai utilisé le terme "militaire". Je voulais dire forces armées et non

  9   militaires. Veuillez poursuivre.

 10   M. TRALDI : [aucune interprétation]

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De toute façon, le moment est venu de

 12   faire une petite pause.

 13   Monsieur le Témoin.

 14   L'INTERPRÈTE : Le Président Orie fait un geste indiquant au témoin qu'il

 15   devrait rechausser ses écouteurs.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le moment est venu de faire une pause de

 17   20 minutes, et nous nous retrouverons ici même après la pause. Vous pouvez

 18   suivre l'huissier.

 19   [Le témoin quitte la barre]

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous reprendrons à 11 heures moins cinq.

 21   --- L'audience est suspendue à 10 heures 34.

 22   --- L'audience est reprise à 10 heures 59.

 23   [Le témoin vient à la barre]

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi, je vous invite à

 25   poursuivre.

 26   M. TRALDI : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 27   Q.  Je souhaiterais revenir à la dernière question que je vous posais avant

 28   la pause, Monsieur. N'est-il pas exact d'affirmer que vous n'estimez pas


Page 24389

  1   qu'aucun crime n'ait été commis à Foca mais que vous savez ou vous avez eu

  2   connaissance de crimes commis par les forces paramilitaires serbes à

  3   l'encontre de populations non serbes à Foca ? Est-ce exact, Monsieur ?

  4   R.  Non. Non, je n'ai pas eu connaissance de crimes. En revanche, ce que je

  5   sais, c'est que des délits ont été commis. Les crimes, c'est autre chose.

  6   Il y a eu les actes de vol, il y a eu des entrées par effraction,

  7   cambriolages, incendies criminels. Ce sont des délits, pour autant que je

  8   le sache, délits au pénal, et c'est au tribunal qu'il appartient de décider

  9   s'il s'agit de crimes ou pas également.

 10   Q.  Je vais poursuivre et je ne vais pas me livrer à un débat de sémantique

 11   pour l'instant.

 12   Je propose que nous revenions à un autre élément de votre déposition

 13   de ce matin. Vous avez indiqué dans votre déposition que 50 000 personnes

 14   venues de Sandzak allaient être envoyées à Foca. C'est ce que vous

 15   affirmiez. Mais ça n'a jamais eu lieu, ce déplacement de 50 000 personnes,

 16   n'est-ce pas ?

 17   R.  Non.

 18   Q.  Je souhaiterais en revenir à présent à la structure de vos propres

 19   forces. Vous indiquez au paragraphe 13 de votre déclaration au préalable --

 20   M. TRALDI : [interprétation] D583.

 21   Q.  -- que votre commandant était Marko Kovac. Il était commandant du

 22   Groupe tactique de Foca, n'est-ce pas ?

 23   R.  A vrai dire, Monsieur, je sais que Marko Kovac était commandant de la

 24   Brigade de Foca, qui faisait partie de l'armée de la Republika Srpska.

 25   Maintenant, en ce qui concerne ce groupement tactique, moi, je dois dire

 26   que je ne sais pas exactement ce que cela signifie. Je ne sais pas comment

 27   il a été établi. En revanche, ce que je sais, c'est que Marko Kovac était

 28   commandant de la Brigade de Foca, et je le sais parce que je fais partie de


Page 24390

  1   l'association des vétérans. Et celle-ci a été établie au mois de juin 1992.

  2   Q.  Il est donc devenu votre commandant en juin 1992; est-ce exact ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Entre-temps, vous aviez été transféré à l'Unité d'intervention de

  5   Dragan Nikolic; est-ce exact ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Au paragraphe 13, vous indiquez que le colonel Kovac était votre

  8   commandant et que le commandant au sein de votre unité qui était votre

  9   supérieur hiérarchique direct était Brane Cosovic; est-ce exact ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Mais les ordres intimés à votre unité provenaient bien du colonel

 12   Kovac, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui, c'est exact.

 14   Q.  Et le colonel Kovac faisait rapport des activités de votre détachement

 15   à son supérieur hiérarchique, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Je souhaiterais examiner un exemple de rapport.

 18   M. TRALDI : [interprétation] Pièce 65 ter 30982.

 19   Q.  Nous voyons ici à l'écran un rapport du colonel Kovac portant la date

 20   du 2 août 1992, qui semble avoir été envoyé au commandement du Corps

 21   d'Herzegovine depuis le Groupement tactique de Foca, reçu par lien radio et

 22   également au centre d'information de Trebinje.

 23   M. IVETIC : [interprétation] Manifestement, cela semble venir du centre

 24   pour l'information de Trebinje et non pas du groupement tactique.

 25   M. TRALDI : [interprétation] En fait, il s'agit d'un document provenant du

 26   colonel Kovac. Vous l'avez vu sur un autre document de la semaine dernière,

 27   le P6680. C'est le cas également de la pièce à conviction 2835, 2839 et

 28   2942 [comme interprété] qui ont été versées au dossier. Donc,


Page 24391

  1   manifestement, cela apparaît dans les documents et figure au compte rendu,

  2   il ne s'agit pas d'un véhicule de communication inhabituel pour le

  3   Groupement tactique de Foca. Mais j'indique en me fondant sur ceci qu'en

  4   fait, il s'agit d'un document qui provient du Corps d'Herzégovine. Cela me

  5   semble relativement clair.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il semblerait que la référence à

  7   Trebinje soit une référence à ce qui semble être un transfert du contenu

  8   par quelque moyen technique que ce soit, qui n'est pas tout à fait

  9   identique; c'est-à-dire que l'origine de cet exemplaire-ci en l'espèce --

 10   mais là, je vais examiner cela de plus près -- non, en fait, je m'aperçois

 11   qu'il est dit Trebinje sur la page.

 12   M. TRALDI : [interprétation] Il est dit que cela a été reçu par

 13   communication radio, avec indication de la date et de l'heure. Au point de

 14   vue technique, c'est ainsi que les choses se présentent.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien. Manifestement, l'on peut

 16   interpréter l'origine du document de différentes manières. Je vous invite à

 17   poursuivre, Monsieur Traldi.

 18   M. TRALDI : [interprétation]

 19   Q.  Veuillez reporter votre attention au point 2. Le colonel Kovac indique

 20   que :

 21   "Les Détachements spéciaux Dragan Nikolic, Zaga et Elez ont libéré Rogoj en

 22   imposant des fortes pertes aux Oustachi. Les unités de la TG restantes ont

 23   repoussé les attaques des Oustachi."

 24   "Des pertes de notre côté : deux soldats tués et deux blessés et deux

 25   femmes massacrées."

 26   Il s'agit de votre détachement, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Il utilise le terme "Oustacha" pour décrire les forces ennemies. Est-ce


Page 24392

  1   que c'est un terme qu'on avait coutume d'utiliser dans vos unités ?

  2   R.  Excusez-moi, mais je ne comprends pas très bien votre question.

  3   Q.  Eh bien, je vais la reformuler. Le colonel Kovac utilise le terme

  4   "Oustacha" pour décrire les forces ennemies. Est-ce que c'est un terme

  5   qu'on avait coutume d'utiliser dans votre unité et les autres unités avec

  6   lesquelles votre unité coopérait, pour autant que vous le sachiez ?

  7   R.  Moi, je ne sais qu'une seule chose, nous appelions les soldats ennemis

  8   Oustachi.

  9   Q.  Il fait référence à Rogoj. Le col de Rogoj, c'est un point stratégique

 10   d'importance, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Son importance est liée au fait que cela permet de maîtriser ou de

 13   contrôler le passage de Sarajevo à Foca ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Il fait état du fait que votre détachement a participé à cette action.

 16   Y avez-vous participé vous-même également à titre personnel ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Ayant entendu la réponse que vous apportée à la question posée par le

 19   président il y a quelques instants, pour autant que vous le sachiez, votre

 20   détachement n'a pas pris de prisonniers au cours de cette opération; est-ce

 21   exact ?

 22   R.  Oui.

 23   M. TRALDI : [interprétation] Je demande le versement au dossier de la pièce

 24   à conviction 30982, 65 ter.

 25   M. IVETIC : [interprétation] Pas d'objection.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame l'Huissière [comme interprété].

 27   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 30982 portera la pièce

 28   P6684, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.


Page 24393

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le document est versé au dossier.

  2   M. TRALDI : [interprétation]

  3   Q.  Je souhaiterais à présent vous poser quelques questions à propos du

  4   détachement à proprement parler. Où avait-il son QG ?

  5   R.  A l'hôtel Zelengora, à Foca, dans une pièce.

  6   Q.  Dans quel quartier cela se trouve-t-il ?

  7   R.  Au centre de la ville.

  8   Q.  Radomir Kovac était membre de votre unité; est-ce exact ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  On le surnommait Klanfa ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Dans le dernier document que nous avons vu, nous avons vu que votre

 13   unité avait participé à des opérations avec le détachement de Zaga, dont le

 14   commandant était Dragomir Kunarac; est-ce exact ?

 15   R.  Je ne connais que son surnom, Zaga. Je ne connais pas son patronyme.

 16   Q.  Ce détachement incluait certains combattants venus du Monténégro,

 17   n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Il était établi au 16 Ulica Osmana Dikica. Désolé si s'écorche le nom,

 20   mais j'espère que vous arrivez à en faire lecture au compte rendu. Est-ce

 21   que c'est exact, c'est bien là qu'était établi ce détachement ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Est-ce que vous avez eu l'occasion d'y être vous-même ?

 24   R.  Non.

 25   Q.  M. Kunarac a été condamné par ce Tribunal pour des crimes à Foca, y

 26   compris des crimes à l'encontre de femmes commis dans cette maison-là.

 27   Aviez-vous connaissance de ce fait ?

 28   R.  Je ne savais pas à ce moment-là ce que cette unité appelée Zaga


Page 24394

  1   faisait. Rien de tout cela me semble inédit, mais il est apparu que cet

  2   homme-là a été condamné par ce Tribunal-ci. Je ne sais pas quelle a été sa

  3   condamnation, mais j'aimerais vous livrer mon avis, si vous m'y autorisez.

  4   Q.  Non. Tout ce que je vous demande, c'est si vous étiez au courant du

  5   fait qu'il avait été condamné. Mais ayant entendu votre réponse,

  6   manifestement vous étiez au courant. Et dans le dernier document, il

  7   apparaissait que son unité, tout comme la vôtre, recevait ses ordres du

  8   colonel Kovac, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Donc, ça n'était pas un de ces détachements qui n'avaient aucun

 11   commandement ? Il était bien commandé par la Brigade ou le Groupement

 12   tactique de Foca, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Dans ce même document, nous avons pu voir que votre unité avait

 15   participé à des opérations conjointement avec le Bataillon Elez, commandé

 16   par Pero Elez; est-ce exact ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Le Bataillon de Miljevina, ou bien le 7e Bataillon; est-ce exact ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Un de ses hommes était Radovan Stankovic; est-ce exact ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Son surnom était Rasa ?

 23   R.  Je ne connaissais pas son surnom.

 24   Q.  Et lui, vous le connaissiez ?

 25   R.  De vue uniquement.

 26   Q.  M. Stankovic a été condamné en Bosnie pour crimes commis à Foca, y

 27   compris des crimes à l'encontre de femmes commis à la maison Karaman à

 28   Miljevina. Etiez-vous au courant de cette condamnation ?


Page 24395

  1   R.  Je n'ai pas connaissance de crimes commis à Miljevina. Je sais qu'il a

  2   été condamné par ce Tribunal-ci.

  3   Q.  M. Kovac, dont nous avons parlé il y a quelques instants, de votre

  4   unité, il vivait bien dans le bloc Lepa Brena à Foca; est-ce exact ?

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il s'agit de Dragomir ou de Marko ?

  6   M. TRALDI : [interprétation] Toutes mes excuses.

  7   Q.  Radomir Kovac faisait partie de votre unité, il vivait dans les

  8   appartements de Lepa Brena à Foca; est-ce exact ?

  9   R.  Là, quelque part, pas loin du centre. Je ne sais pas exactement où,

 10   mais là, autour du centre.

 11   Q.  Est-ce que vous avez eu l'occasion de vous rendre à l'endroit où il

 12   résidait en 1992 ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  Et vous savez également, n'est-ce pas, que M. Kovac a été condamné par

 15   ce Tribunal pour crimes commis à l'encontre de femmes à Foca dans son

 16   appartement, entre autres; est-ce exact ?

 17   R.  Moi, je n'avais pas connaissance de ces crimes. Ils ont très

 18   probablement été condamnés, mais nos supérieurs n'en savaient rien

 19   probablement. C'était strictement interdit pour nous en tant que soldats.

 20   Ce Kovac est retourné en ville, et j'ai dit que je ne le laisserais jamais

 21   partir. J'avais demandé, ils ne l'avaient pas condamné, avais-je dit, une

 22   peine suffisamment lourde. Connaissant nos supérieurs. Je veux dire, après

 23   tout ce qu'il a fait, c'est une honte pour moi, une infamie pour moi en

 24   tant que soldat, mes officiers, mes commandants. Et je le lui ai dit,

 25   d'ailleurs, personnellement, droit dans les yeux. Il est en ville. J'ai dit

 26   : Si j'étais ton juge, je t'aurais mis sur la chaîne électrique, et

 27   j'aurais non pas appuyé sur le bouton une fois mais plusieurs fois. J'ai

 28   dit qu'aucun supérieur ne savait de ses crimes. Pas 70 mais 95 % des


Page 24396

  1   soldats étaient --

  2   Q.  Nous n'avons pas entendu la fin de votre intervention. Quatre-vingt-

  3   quinze pour cent des soldats étaient, disiez-vous.

  4   L'INTERPRÈTE : Les interprètes signalent que rien d'autre n'a été dit.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que j'essaie de vous dire, c'est que les

  6   soldats comme lui-même étaient une infamie pour les soldats honorables de

  7   la ville de Foca et pour les officiers, ils ne respectaient pas le

  8   commandement. Et si moi, on m'avait demandé --c'est ce que je lui ai dit

  9   d'ailleurs, hein, droit dans les yeux, et je peux vous le jurer ici devant

 10   le Seigneur, je lui ai dit : "Tu en es vraiment bien sorti. Parce que si

 11   j'avais été moi ton juge, j'aime autant dire que je t'aurais mis dans la

 12   chaise électrique et j'aurais appuyé trois fois sur le bouton, pas une

 13   seule fois," parce que vraiment c'était une honte pour nous tous en tant

 14   que guerriers ce qu'il a fait. Il n'a pas suivi les ordres de nos

 15   supérieurs hiérarchiques, de nos officiers, et il a jeté le discrédit et

 16   l'infamie sur les combattants honorables de l'armée de la Republika Srpska

 17   en général. Certains combattants comme Kovac. Et il n'a pas été condamné

 18   comme ça à la légère à ce Tribunal. Connaissant nos supérieurs, sachant à

 19   quel point ils étaient rigoureux quand il s'agissait de prendre des

 20   mesures, manifestement ça s'est fait en secret. Et connaissant le

 21   commandant Branimir Cosovic, si l'on avait eu connaissance de ces crimes,

 22   je peux jurer devant ce Tribunal et devant Dieu, que si j'avais été son

 23   juge et bourreau, je l'aurais fait même si ça m'aurait entraîné à passer le

 24   reste de mes jours en prison.

 25   M. TRALDI : [interprétation]

 26   Q.  Manifestement, les crimes de M. Kovac suscitent chez vous de fortes

 27   émotions. J'aurais deux questions spécifiques qui ont trait à la réponse

 28   que vous venez de nous apporter. La première question, vous avez dit dans


Page 24397

  1   votre déposition tout à l'heure que les paramilitaires avaient jeté le

  2   discrédit et la honte sur les autres combattants honorables de la VRS dans

  3   la municipalité de Foca. Il ne s'agissait pas simplement de paramilitaires,

  4   n'est-ce pas ? Il y avait également des membres de la VRS qui avaient jeté

  5   le discrédit et l'infamie sur les combattants honorables; est-ce exact ? En

  6   commettant des crimes ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Deuxièmement, vous nous avez livré l'avis que vous aviez du commandant

  9   Cosovic, j'en prends bonne note, mais vous ne savez pas à titre personnel

 10   ce qu'il savait ou ne savait pas des crimes commis par M. Kovac en 1992,

 11   n'est-ce pas ?

 12   R.  Non, mais connaissant cet homme, mon commandant, sachant le nombre de

 13   fois qu'il nous a dit qu'il fallait que nous ne fassions rien de

 14   critiquable, aucune infraction au code de la guerre, je ne peux rien dire.

 15   Donc, on ne peut pas dire que je ne l'ai pas remarqué. Parce que,

 16   connaissant mon général, sa personnalité, connaissant mes officiers, mes

 17   généraux, si l'on avait su, et encore une fois, je jure devant Dieu, moi je

 18   crois en Dieu -- je crois en Dieu, et lui, il a purgé sa peine, la peine

 19   qui lui a été imposée par le Tribunal de La Haye, il devait bien y avoir

 20   une raison pour qu'on lui inflige cette peine. Si moi j'avais su, si nous

 21   avions su ce qui s'était passé, excusez-moi, je m'emporte, je m'emporte,

 22   mes émotions prennent le pas sur la raison, mais il doit faire face au

 23   jugement du Tout Puissant comme tout le monde. Le destin qu'il a connu ici

 24   sur terre et ensuite devant Dieu, eh bien, nous verrons bien ce qu'il

 25   adviendra, ainsi soit-il.

 26   Q.  Il n'a pas été puni pendant la guerre par ses commandants, n'est-ce pas

 27   ?

 28   R.  Monsieur le Procureur, nous à l'unité, vous disais-je, ne savions pas


Page 24398

  1   qu'il commettait ces crimes.

  2   Q.  En fait, j'ai mentionné plusieurs personnes qui ont été condamnées

  3   après la guerre des unités de Foca de la VRS. Aucun n'a été puni pour les

  4   crimes commis pendant la guerre, puni ni par les commandants ni par les

  5   tribunaux militaires pour les crimes commis ?

  6   R.  Toutes mes excuses, mais est-ce que vous pourriez expliquer votre

  7   question ?

  8   Q.  Oui. Je vais essayer d'être plus précis. M. Stankovic, M. Kunarac, M.

  9   Kovac, j'ai cité leurs noms. Ils ont été condamnés après la guerre. Ils

 10   faisaient partie des unités de la VRS à Foca pendant la guerre. Aucun

 11   d'entre eux n'a été puni pendant la guerre, que ce soit par leurs

 12   supérieurs hiérarchiques ou par des tribunaux militaires, pour des crimes

 13   qu'ils ont commis. C'est exact d'affirmer cela, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui. Si nous avions su qu'ils avaient fait cela -- bon, ça n'avait

 15   probablement pas été porté à la connaissance de nos supérieurs. Mais si ça

 16   avait été le cas, pour que quelqu'un fasse un truc de ce genre, bien

 17   entendu, il faut qu'il le fasse sous le sceau du secret, parce que mauvais

 18   traitement à la population civile c'était quelque chose qui était

 19   strictement interdit. Les ordres étaient affichés sur les murs. Et ils

 20   violaient ces règles. Moi, je n'en ai pas eu connaissance, et je pense que

 21   mes supérieurs hiérarchiques ne le savaient pas non plus. Mes supérieurs

 22   hiérarchiques étaient très rigoureux. Manifestement, ils ont fait cela de

 23   manière secrète, et c'est pour cela que je vous disais que des gens comme

 24   ça - comment est-ce que je peux les appeler ? - ici, en public dans ce

 25   prétoire, ces gens, je les décrirais sans âme, ils ont fait honte pour moi,

 26   pour l'armée de la Republika Srpska. Et pour les trois hommes que je vois

 27   ici, vous ne pouvez pas dire que tous les combattants de Foca et le

 28   commandement étaient du même acabit que ces trois types-là. Toutes mes


Page 24399

  1   excuses, hein. Mais bon, voilà, j'ai dit ce que j'avais à dire et je l'ai

  2   dit au Procureur. Et toutes mes excuses, Messieurs les Juges, s'il y a eu

  3   un malentendu, si l'on a mal compris mes propos.

  4   Q.  Exception faite de ces individus, aucun autre membre de votre unité n'a

  5   été sanctionné au cours de la guerre pour actes illicites commis à

  6   l'encontre de populations musulmanes; est-ce exact?

  7   R.  Ces trois-là n'ont pas été sanctionnés. On ne savait pas qu'ils avaient

  8   commis ces délits. Croyez-moi, les soldats, on les punissait quand on

  9   savait qu'ils s'étaient rendus coupables de violation des ordres,

 10   s'agissant notamment des cessez-le-feu. Parfois, ils étaient condamnés à

 11   deux mois ou autre pour ce genre de crime. En tout cas, ils devaient rendre

 12   des comptes auprès de la chaîne hiérarchique. Si mes supérieurs

 13   hiérarchiques en avaient eu connaissance, ils auraient été amenés à leur

 14   rendre des comptes.

 15   Q.  Je propose à présent que nous passions à un autre sujet.

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Permettez-moi, Monsieur Traldi, de

 17   poser une question à propos du sujet que vous évoquiez il y a quelques

 18   instants.

 19   Monsieur le Témoin, permettez-moi de revenir à votre déposition à propos de

 20   M. Kunarac. Il s'agit de la page 31, lignes 20 et 21 du compte rendu. Vous

 21   dites :

 22   "A ce moment-là, je ne savais pas ce que cette unité, l'unité appelée Zaga,

 23   faisait."

 24   J'ai compris la phrase suivante comme voulant dire aucun de ses supérieurs

 25   ne le savait. Ça n'est pas ce qui figurait au compte rendu, mais c'est ce

 26   que j'ai entendu. Est-ce que je répète fidèlement ce que vous nous avez dit

 27   ? Aucun de ses supérieurs à lui ne le savait ? C'est bien ce que vous avez

 28   dit, Monsieur ?


Page 24400

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Lorsque -- enfin, excusez-moi, mais…

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Permettez-moi de vous poser ma

  3   question. Comment savez-vous qu'aucun des supérieurs hiérarchiques de M.

  4   Kunarac n'avait connaissance des crimes commis par lui ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais si l'un de nos supérieurs hiérarchiques

  6   avait su qu'il avait commis ces crimes, alors cela revient à dire que nos

  7   supérieurs hiérarchiques étaient des criminels eux aussi. Or, nos

  8   supérieurs hiérarchiques interdisaient très strictement toutes sortes

  9   d'actes de ce type. Alors, bien sûr, moi, je n'ai pas assisté à leurs

 10   conversations, mais je peux vous dire qu'à mon avis, aucun de nos

 11   supérieurs hiérarchiques n'a jamais été mis au courant de ses actes.

 12   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci beaucoup de cette précision.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Une autre question, s'il vous plaît.

 14   Est-ce que vous pouvez citer quelqu'un qui a été sanctionné par vos

 15   supérieurs hiérarchiques pour une infraction au pénal commise ? Vous pouvez

 16   répondre toute simplement par "oui" ou par "non".

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 19   M. TRALDI : [interprétation]

 20   Q.  J'aimerais maintenant passer au sujet des prisonniers. Vous avez

 21   déclaré à la page du compte rendu d'audience provisoire 19 que votre unité

 22   a capturé un certain nombre de prisonniers pendant une opération qui s'est

 23   déroulée à Treskavica en 1993. Cela est-il exact?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Où avez-vous emmené ces prisonniers ?

 26   R.  Nous les avons emmenés au QG, puisqu'ils avaient été pris prisonniers

 27   au cours des opérations sur le terrain. Nous avons capturé, me semble-t-il,

 28   quelque 22 soldats. Nous avons fait savoir à la police militaire que nous


Page 24401

  1   avions capturé quelque 22 soldats, puisque c'était là la procédure prévue.

  2   Si tu captures un soldat, il faut le signaler à la police militaire. Donc,

  3   nous avons remis ces prisonniers entre les mains de la police militaire et

  4   elle les a emmenés au KP Dom. Donc, voilà, moi, j'ai fait mon devoir de

  5   soldat. Si jamais je capturais un soldat, j'étais censé le signaler à la

  6   police militaire, qui alors reprenait ce prisonnier et s'occupait de lui,

  7   et c'est ce que j'ai fait.

  8   Q.  Vous avez déclaré ne pas avoir capturé de prisonniers pendant les

  9   opérations qui se sont déroulées à Foca. Aviez-vous un ordre similaire à

 10   cet égard, à savoir que si vous veniez à prendre des prisonniers, il

 11   fallait les remettre entre les mains de la police militaire pour que celle-

 12   ci les amène au KP Dom à Foca ?

 13   R.  Mais il ne s'agissait pas uniquement de la police militaire. Toute

 14   unité ayant capturé un soldat était censée le remettre entre les mains de

 15   la police militaire, et puis la police militaire les transférait sans doute

 16   sur un ordre émanant de nos supérieurs hiérarchiques au KP Dom ou ailleurs

 17   en fonction des ordres donnés.

 18   Q.  Les Juges de la Chambre se sont vus présenter des éléments de preuve

 19   émanant de l'Accusation comme de la Défense et montrant que les personnes

 20   détenus au KP Dom comprenaient des personnes âgées, des femmes et des

 21   enfants, entre autres. Cela est vrai, n'est-ce pas ?

 22   R.  Je ne suis jamais entré dans l'enceinte du KP Dom. L'entrée m'était

 23   strictement interdite. Je n'avais même pas le droit de m'approcher du KP

 24   Dom. J'étais un soldat et mon devoir consistait à exécuter des ordres.

 25   Alors, je ne sais vraiment pas qui se trouvait au KP Dom, mais je n'ai pas

 26   pris ces catégories de personnes comme prisonniers, et je serais fort

 27   étonné d'apprendre que des vieillards aient été amenés au KP Dom. Tout ce

 28   que je peux vous dire, tout ce dont je peux parler, ce sont ces soldats que


Page 24402

  1   nous avons capturés pendant les opérations de combat. Moi, j'ai rejoint les

  2   lignes lorsque la ville est tombée. Je ne sais pas, je ne sais rien au

  3   sujet de ces personnes âgées.

  4   Q.  Très bien. Penchons-nous, alors, sur le document 14066 de la liste 65

  5   ter. Nous voyons une liste énumérant des prisonniers de guerre

  6   d'appartenance ethnique musulmane. Ces personnes sont relâchées du KP Dom

  7   de Foca. Ils sont censés être échangés contre des Serbes capturés. La date

  8   de ce document c'est le 8 décembre 1992. Alors, j'aimerais que vous preniez

  9   connaissance de cette liste pendant quelques instants, et une fois que vous

 10   l'aurez lue, veuillez me le signaler, s'il vous plaît.

 11   R.  J'ai lu la liste.

 12   Q.  Ces personnes échangées, à en juger par l'année de leur naissance,

 13   toutes ces personnes ont plus de 50 ans, n'est-ce pas ?

 14   R.  Je ne connais pas ces personnes. Je ne sais pas qui les a faites venir.

 15   Q.  Mais vous voyez l'année de naissance qui est indiquée pour chaque

 16   personne et vous êtes d'accord avec moi pour dire qu'à l'époque chacune de

 17   ces personnes avait plus de 50 ans ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Et voyez-vous le texte qui figure au-dessous, où il est indiqué :

 20   approuvé par le commandant du Groupement tactique de Foca, Kovac ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Par ailleurs, nous voyons que le tampon de la poste militaire,

 23   Groupement tactique de Foca, est apposé sur le document ?

 24   R.  Oui.

 25   M. TRALDI : [interprétation] Messieurs les Juges, je souhaite demander le

 26   versement au dossier de ce document.

 27   M. IVETIC : [interprétation] Messieurs les Juges, le témoin a déclaré

 28   n'avoir aucune connaissance de ce document ou de sa teneur, et, par


Page 24403

  1   conséquent, je ne pense pas qu'il y ait de base pour admettre le document

  2   par le biais de ce témoin.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que cela vous poserait problème

  4   si le document était versé au dossier directement, Maître Ivetic ? Cela se

  5   fait souvent lorsqu'un témoin a parlé des choses liées au document.

  6   M. IVETIC : [interprétation] Je pense que la procédure à suivre est quelque

  7   peu différente, mais j'aimerais que nous nous pliions aux orientations que

  8   vous aviez données précédemment.

  9   M. TRALDI : [interprétation] Mais moi, je les interprète un peu

 10   différemment. Ici, le document met en doute directement la crédibilité de

 11   la déposition faite par le témoin, par exemple, sa croyance que les

 12   personnes du KP Dom étaient toutes des combattants. C'est pourquoi le

 13   document peut être admis au dossier pendant le contre-interrogatoire. Ce

 14   procédé a été suivi pendant la présentation des moyens de l'Accusation.

 15   M. IVETIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je pense que la façon

 16   dont l'Accusation caractérise le document n'est pas correcte. A la première

 17   ligne du document, il est indiqué qu'il s'agit des "prisonniers de guerre"

 18   qui sont censés être échangés. Il faut être combattant pour être échangé,

 19   donc, par conséquent, ce document ne mine pas la crédibilité du témoin.

 20   M. TRALDI : [interprétation] Mon argument est le suivant : l'ABiH n'était

 21   sans doute pas composée des hommes qui avaient plus de 50 ans, et donc,

 22   l'âge des personnes énumérées ici est important et c'est pourquoi je mets

 23   l'accent dans ma question sur ce point.

 24   M. IVETIC : [interprétation] Mais, Messieurs les Juges, cela ne revient pas

 25   à remettre en question la crédibilité du témoin. Donc, le document n'a pas

 26   été présenté aux fins indiquées par l'Accusation.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi, est-ce que vous êtes

 28   d'accord pour dire que ce document, peut-être ne met pas directement en


Page 24404

  1   doute la crédibilité du témoin, mais qu'il concerne les sujets liés à la

  2   teneur de sa déposition ?

  3   M. TRALDI : [interprétation] Je suis d'accord avec cette façon de formuler

  4   la chose. Et, en fait, l'un des liens qui existent, c'est justement le

  5   manque de crédibilité du témoin.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'objection est rejetée.

  7   Madame la Greffière.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 14066 recevra la cote

  9   P6685, Messieurs les Juges.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce P6685 est admise au dossier.

 11   M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais que les Juges de la Chambre se

 12   prononcent sur le sujet : est-ce que les Juges estiment que ces documents

 13   minent la crédibilité du témoin et est-ce que des documents de ce type

 14   peuvent être versés directement au dossier ?

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, nous n'allons pas rendre une

 16   décision à ce sujet. On a demandé le versement au dossier du document, les

 17   deux parties ont présenté leurs arguments sur la chose, et l'objection a

 18   été rejetée.

 19   M. IVETIC : [interprétation] Mais est-ce que je peux avoir des motifs de

 20   votre décision aux fins du compte rendu d'audience pour quelle raison mon

 21   objection a-t-elle été rejetée ?

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons étudier votre requête,

 23   Maître Ivetic.

 24   Vous pouvez poursuivre maintenant.

 25   M. TRALDI : [interprétation]

 26   Q.  Maintenant, j'aimerais passer à quelques autres questions qui

 27   concernent la municipalité de Foca. Avant la guerre, la municipalité de

 28   Foca avait une majorité musulmane au niveau des habitants ?


Page 24405

  1   R.  [aucune interprétation]

  2   L'INTERPRÈTE : Les interprètes de la cabine anglaise demande au témoin de

  3   se rapprocher du micro.

  4   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, les interprètes ont

  6   du mal à vous entendre. Pouvez-vous, s'il vous plaît, vous rapprocher du

  7   micro. Et veuillez répéter votre réponse.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous présente mes excuses. D'après mes

  9   connaissances, suite au recensement qui a été fait en 1991, 51 % de la

 10   population étaient des Musulmans et 49 % étaient des Serbes.

 11   M. TRALDI : [interprétation] Peut-on afficher, s'il vous plaît, le document

 12   02559B de la liste 65 ter. C'est justement un extrait du recensement qui a

 13   été fait. Une fois le document affiché à l'écran, je vais demander que l'on

 14   présente au témoin la page 2 dans la version B/C/S. Quant à la version

 15   anglaise, seul le texte qui figure dans les colonnes a été traduit. Nous

 16   n'avons pas demandé au service de traduction de traduire les chiffres, cela

 17   ne semblait pas utile. Alors, j'aimerais que l'on agrandisse le milieu de

 18   la page où l'on voit le sous-titre "Foca", et peut-être sera-t-il utile de

 19   n'afficher que la version en B/C/S.

 20   Q.  Alors, voyez-vous le sous-titre "Foca" ?

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faut faire monter le document un

 22   petit peu, s'il vous plaît, pour que nous puissions voir justement les

 23   sous-titres et le texte qui figure dans les colonnes. Voilà.

 24   M. TRALDI : [interprétation]

 25   Q.  Voyez-vous le mot "Foca" qui figure en bas de l'écran ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et si vous regardez à droite de l'écran, vous y verrez le numéro 24,

 28   n'est-ce pas ?  C'est la ligne 24 ?


Page 24406

  1   R.  Oui.

  2   M. TRALDI : [interprétation] J'aimerais que nous passions à la page 3, tout

  3   en gardant la ligne 24. Et il nous faudra encore voir le texte qui figure

  4   dans les colonnes.

  5   Q.  Alors, sur votre gauche, vous voyez : nombre total, 40 513, dont 20 790

  6   Musulmans, 18 315 Serbes et un nombre peu important de personnes

  7   appartenant à d'autres groupes ethniques. Cela concorde avec vos souvenirs

  8   à savoir que la municipalité comptait quelque 51 % des Musulmans à l'époque

  9   ?

 10   R.  Je suis désolé si je me suis trompé au niveau des chiffres. J'avais cru

 11   qu'il y a eu 51 % des Musulmans et 49 % des Serbes. Peut-être que je me

 12   suis trompé, je ne connais pas ces pourcentages cités ici, 23, 18 puis

 13   48,52. Il faudrait faire des calculs mentalement.

 14   Q.  Ce n'est pas ce que je vous demande de faire, Monsieur. Je vous suggère

 15   qu'en fait, les chiffres sont conformes à vos souvenirs et correspondent

 16   plus ou moins aux chiffres que vous avez cités, à savoir 51 % des Musulmans

 17   et 49 % des autres, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui.

 19   M. TRALDI : [interprétation] Messieurs les Juges, je souhaite demander le

 20   versement au dossier de cet extrait.

 21   M. IVETIC : [interprétation] Nous n'avons pas d'objection à soulever.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 02559B recevra la cote

 24   P6686, Messieurs les Juges.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce P6686 est admise au dossier.

 26   M. TRALDI : [interprétation]

 27   Q.  Avez-vous remarqué, à quelque moment que ce soit, que la plupart des

 28   Musulmans ont quitté Foca ?


Page 24407

  1   R.  Je n'étais pas présent au moment où la ville a été prise. Je pense

  2   qu'une partie de la ville a été libérée vers -- je ne me souviens plus.

  3   Est-ce que cela s'est passé vers la fin du mois de mars ? Je sais que les

  4   forces musulmanes à Foca étaient très puissantes, et la plupart de ces

  5   forces sont entrées en combat avec nos forces. Et au moment où les

  6   Musulmans ont compris qu'ils allaient perdre ce combat, ils se sont repliés

  7   vers Ustikolina, où la plupart des habitants étaient Musulmans. Mais

  8   beaucoup de Musulmans honnêtes sont restés dans la ville même après le

  9   repli des forces musulmanes.

 10   Q.  Mais même la grande majorité des Musulmans que vous décrivez comme des

 11   Musulmans honnêtes ou de braves hommes, ils sont partis de Foca pendant la

 12   guerre, ils ont quitté Foca, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Et pourtant, ce n'est pas un fait que vous évoquez dans votre

 15   déclaration préalable, n'est-ce pas ?

 16   R.  Ici ?

 17   Q.  Oui, dans ce texte.

 18   R.  Non.

 19   Q.  Les Juges se sont vus présenter des éléments de preuve montrant que les

 20   dirigeants serbes de Foca -- à savoir, Miroslav Stanic, puisque c'est lui

 21   qui a été le président de la cellule de Crise et par la suite le président

 22   du Comité de guerre, n'est-ce pas?

 23   R.  Je n'ai pas très bien compris votre question.

 24   Q.  C'est parce que je n'ai pas terminé ma phrase. Miroslav Stanic a exercé

 25   les fonctions du président de la cellule de Crise à Foca et par la suite il

 26   a occupé le poste du président de la Commission de guerre, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui. Il a été président de la cellule de Crise.

 28   Q.  Et Petko Cancar, il faisait lui aussi partie des dirigeants serbes à


Page 24408

  1   Foca, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui, il a exercé des fonctions d'un type ou d'un autre, mais croyez-

  3   moi, je ne sais pas exactement quel poste il a occupé. Moi, j'étais un

  4   soldat. Et eux, ils étaient des civils.

  5   Q.  Vous dites : Ils étaient des civils, et nous, nous étions des soldats.

  6   Mais pendant la période où c'était la Défense territoriale qui existait à

  7   Foca, M. Stanic avait son mot à dire quand il s'agissait de ces forces,

  8   n'est-ce pas ?

  9   R.  Je pense que ce monsieur, Miroslav Stanic, a exercé les fonctions du

 10   président de la cellule de Crise à Foca.

 11   Q.  Lorsque les unités de la VRS ont été mises sur pied, il y a eu cette

 12   distinction : lui et les autres représentants des autorités civiles était

 13   une chose, et vous, vous étiez soldats, c'était autre chose ?

 14   R.  Oui. Je ne sais pas exactement quels types de fonctions ces gens

 15   exerçaient. Ils étaient assis dans leurs bureaux sans doute. Je n'ai jamais

 16   même eu l'occasion de les voir.

 17   Q.  Monsieur, veuillez, s'il vous plaît, répéter votre réponse. Les

 18   interprètes ne vous ont pas très bien entendu.

 19   R.  Je vous dis que moi, j'ai fait la guerre. J'ai été dans les rangs de la

 20   VRS. Alors, quel rôle ont-ils eu à jouer pendant la mise sur pied de la

 21   VRS, je ne le sais pas. Je sais tout simplement que Stanic a été le

 22   président de la cellule de Crise. Et je sais que Petar Cancar exerçait, lui

 23   aussi, des fonctions, mais je ne sais pas exactement quels types de

 24   fonctions il exerçait. Moi, j'étais un soldat et je ne m'occupais pas de le

 25   savoir. Mais je sais pour Miroslav Stanic. Je me souviens très bien de

 26   cela.

 27   Q.  Les Juges de la Chambre ont étudié des éléments de preuve montrant que

 28   les dirigeants serbes de Foca, y compris ces deux hommes-là, parlaient


Page 24409

  1   ouvertement du départ de la grande majorité des Musulmans du territoire de

  2   la municipalité de Foca, voire du départ de tous les Musulmans. Donc, les

  3   Musulmans ont continué à quitter le territoire de la municipalité, y

  4   compris les Musulmans que vous avez décrits comme étant des Musulmans

  5   honnêtes, et ce processus s'est poursuivi bien après la prise du pouvoir au

  6   mois d'avril, n'est-ce pas ?

  7   R.  Je dois présenter mes excuses aux Juges de la Chambre. Moi, je n'ai

  8   jamais dit que ces deux hommes-là ont chassé la population musulmane de

  9   Foca, comme le suggère le Procureur, si j'ai bien compris ses propos.

 10   Q.  Peut-être qu'il y a eu un problème au niveau de l'interprétation. Je

 11   vais tout simplement répéter ma question, si vous êtes bien d'accord avec

 12   moi.

 13   Voilà ce que j'ai dit : Les Juges de la Chambre se sont vus présenter

 14   des éléments de preuve, qu'il s'agisse de témoignages ou de preuves

 15   documentaires, montrant que les dirigeants serbes de Foca, y compris M.

 16   Stanic et M. Cancar, ont parlé ouvertement du départ de la grande majorité

 17   des Musulmans de la municipalité de Foca, du départ de pratiquement tous

 18   les Musulmans de la municipalité de Foca. Ils en ont parlé, et puis les

 19   Musulmans sont vraiment partis. Cela s'est réalisé. Les Musulmans ont

 20   continué à quitter la municipalité, y compris les Musulmans que vous avez

 21   décrits comme étant honnêtes, bien après le mois d'avril 1992.

 22   R.  D'après mes connaissances, de nombreux Musulmans ont exprimé le souhait

 23   de quitter la ville. Et tout le monde était libre de partir, les Serbes

 24   tout comme les Musulmans. A mon avis -- bon, je ne sais pas s'ils ont

 25   débattu ce départ entre eux ou non, mais ce que je sais des conversations

 26   que j'ai eues avec eux, c'est qu'ils souhaitaient retrouver les familles et

 27   se regrouper. Certains étaient partis. C'était la guerre qui régnait. Et la

 28   plupart des gens souhaitaient retrouver leurs familles, parce que beaucoup


Page 24410

  1   de personnes combattaient du côté opposé, et personne ne savait comment les

  2   choses allaient se terminer, si c'est eux ou si c'est nous qui allions

  3   remporter. Une partie des Musulmans sont restés.

  4   Mais je pense que de nombreux Musulmans ont exprimé le souhaite de

  5   partir. Je sais qu'on avait fait venir des autobus ou des autocars à cet

  6   effet. Je me souviens d'avoir parlé avec des amis à moi, des Musulmans, qui

  7   heureusement pour la plupart sont restés en vie. Et je les fréquente même

  8   au jour d'aujourd'hui. Et ce sont eux qui ont exprimé le désir de partir,

  9   parce qu'ils souhaitaient retrouver les membres de leur famille qui étaient

 10   disséminés un peu partout dans le chaos de la guerre. Je sais qu'on leur a

 11   assuré des autocars à cet effet. Je le sais parce que je me trouvais dans

 12   les parages au moment où la chose a été faite. Mais personne ne les a

 13   chassés. Tout le monde était libre de partir. Les Serbes aussi. Tout comme

 14   les Musulmans. Ils n'ont pas subi de mauvais traitements au moment de leur

 15   départ. Bien au contraire. Nous leur avons dit au revoir comme cela se

 16   doit. Et je vous le promets devant Dieu, nous ne les avons pas chassés.

 17   Alors, il est vrai que nos jeunes hommes ont commencé à être tués. Peut-

 18   être craignaient-ils une vengeance. Peut-être est-ce pour cela qu'ils ont

 19   souhaité partir. Et puis, il y avait ce groupe d'individus qui a été

 20   condamné. Mais s'il y a eu d'autres crimes et d'autres criminels, je

 21   l'aurais dit là maintenant devant les tribunaux. Chacun doit être tenu

 22   responsable des crimes commis. Mais il ne s'agit pas de tous les soldats de

 23   la VRS et de tous les officiers. Ce n'est pas à nous tous d'assumer la

 24   honte.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi, je regarde l'horloge.

 26   Nous avons repris nos débats depuis une heure.

 27   M. TRALDI : [interprétation] Je pense que c'est un moment important de

 28   prendre une pause, Monsieur le Président. Et je pense qu'il ne me resterait


Page 24411

  1   plus que dix à 15 minutes après la pause, puisque je serai plus court que

  2   prévu dans mon contre-interrogatoire.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, nous allons faire

  4   une pause de 20 minutes. Et nous vous reverrons une fois la pause terminée.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  6   [Le témoin quitte la barre]

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous reprenons nos travaux à 12 heures

  8   15.

  9   --- L'audience est suspendue à 11 heures 57.

 10   --- L'audience est reprise à 12 heures 18.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pendant que nous attendons que le témoin

 12   entre dans le prétoire, Maître Ivetic, pour vous aider, je vais vous lire

 13   ce que la Chambre avait donné comme conseil le 29 octobre 2012.

 14   "Néanmoins, la Chambre précise que la valeur probante d'un document

 15   peut également être établie en ayant un témoin qui dépose à propos

 16   d'événements décrits dans un document. Si le contenu du document utilisé

 17   lors de l'interrogatoire d'un témoin est suffisamment lié au contenu de la

 18   déposition de ce témoin, le document peut être versé au dossier et admis

 19   avec ce témoin, même si le témoin ne connaît pas bien ce document."

 20   Bien, le témoin a déposé en disant qu'il ne pouvait pas croire que

 21   des personnes âgées soient détenues au KP Dom et, indépendamment des dates

 22   de naissance de ces témoins, qu'on pourrait dire que cela est bien, mais le

 23   lien est suffisamment établi avec cette déposition du témoin. Et ça,

 24   c'était -- au moins, en tous les cas, les conseils que la Chambre avait

 25   donnés à l'époque.

 26   M. IVETIC : [interprétation] Et, Monsieur le Président, là où j'ai un

 27   problème, c'est que vous avez demandé -- vous avez élevé une objection

 28   concernant le document à verser autrement que par le truchement du témoin,


Page 24412

  1   à le verser directement. Vous avez conseillé à l'Accusation de présenter et

  2   de demander à ce que ce document soit versé au dossier dans le cadre de

  3   l'interrogatoire en chef. Pour rouvrir la présentation des moyens de

  4   l'Accusation pour permettre aux documents d'être présentés directement est,

  5   je pense --

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, je vais vous interrompre. Il

  7   s'agit donc du versement d'un document. Et lorsque je dis le verser

  8   directement, j'entends par là que le témoin n'a pas de connaissances

  9   personnelles de ce document, et que l'expression est souvent utilisée pour

 10   admettre un document lorsque le témoin lui-même dit qu'il n'y connaît rien

 11   et que ce n'est pas la même chose que d'avoir une partie du document

 12   présenté directement, donc une requête pour présenter le document

 13   directement qui n'est pas directement lié à une partie spécifique de la

 14   déposition du témoin. Mais, donc, j'ai peut-être utilisé des termes qui ont

 15   créé la confusion dans votre esprit, je m'en excuse.

 16   [Le témoin vient à la barre]

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur Traldi.

 18   M. TRALDI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Q.  Monsieur, je vais reprendre là où nous nous étions arrêtés juste avant

 20   la pause. Vous avez dit que les Musulmans et les Serbes pouvaient tous deux

 21   quitter Foca. En fait, les personnes qui sont réellement parties étaient en

 22   majorité des Musulmans, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  La Chambre a des éléments lui permettant de dire qu'il y avait des

 25   gardes autour des maisons musulmanes dans la ville de Foca à l'époque, des

 26   gardes serbes. Etiez-vous au courant de cela ?

 27   R.  Non.

 28   Q.  La Chambre a également reçu des éléments de preuve lui permettant de


Page 24413

  1   dire que des femmes, des enfants et des personnes âgées des villages

  2   musulmans ont été amenés à Foca et détenus dans des centres de détention

  3   gardés par des gardes armées. Etiez-vous au courant de cela ?

  4   M. IVETIC : [interprétation] Je pense que ce serait peut-être quelque chose

  5   qui a été présenté de manière incorrecte. La référence, donc, à cet élément

  6   de preuve. Je pense que les "centres de détention", ce n'est peut-être pas

  7   le terme.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Centres de réception, Monsieur.

  9   M. TRALDI : [interprétation] Je pense que Me Ivetic a à l'esprit un terme

 10   particulier utilisé par le témoin, et je pense que plusieurs témoins ont

 11   déjà utilisé différents termes, y compris dans le cadre de la présentation

 12   des moyens de preuve de l'Accusation, donc je n'insisterai pas là-dessus.

 13   Je vais reformuler cela pour la Chambre et Me Ivetic.

 14   Q.  La Chambre a reçu des éléments de preuve permettant de dire que des

 15   femmes, des enfants et des personnes âgées venant des villages musulmans

 16   ont été amenés à Foca et détenus des bâtiments gardés par des gardes

 17   armées. Etiez-vous au courant de cela ?

 18   R.  Pourriez-vous être plus précis dans votre question ? Où ? Quoi ? Je

 19   suis au courant des gardes dont vous parliez. Je sais que nous avons reçu

 20   des ordres de mettre en place des points de contrôle dans des régions où il

 21   y avait des majorités de populations musulmanes, et qu'il y avait un

 22   couvre-feu également à ces points de contrôle, et après 20 heures personne

 23   n'était autorisé à entrer dans ces parties de la ville qui étaient gardées

 24   par les gardes armées. C'est peut-être là la raison de cette confusion.

 25   Donc, je suis au courant de ces points de contrôle dans la partie de la

 26   ville où je vivais.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous arrêter là. Ecoutez bien la

 28   question. Des femmes, des enfants et des personnes âgées amenés à Foca et


Page 24414

  1   détenus dans des bâtiments. On voit qu'un point de contrôle n'est pas un

  2   bâtiment. Donc, un bâtiment avec des gardes armées autour du bâtiment. Il y

  3   a également un couvre-feu. Là, ce n'est pas, également, un couvre-feu. On

  4   parle d'un bâtiment. Est-ce que vous pourriez nous répondre sur ce point ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] En partant de ce que je sais, je peux dire que

  6   certains habitants avaient demandé au commandement et à la police militaire

  7   -- ce serait une explication assez longue, et je m'en excuse. Le territoire

  8   de la municipalité de Foca est une des plus municipalités les plus

  9   importantes en termes de superficie.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur, si vous pouviez d'abord

 11   répondre à la question. Si l'on a besoin d'autres explications, M. Traldi

 12   vous le demandera. Là encore, je reprends, étiez-vous au courant du fait

 13   que les personnes auxquelles j'ai fait référence étaient amenées à Foca et

 14   étaient détenues dans des bâtiments avec des gardes armées ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi, vous pouvez poursuivre.

 17   M. TRALDI : [interprétation]

 18   Q.  La Chambre a également des éléments de preuve lui permettant de dire

 19   que les crimes ont été commis contre les personnes se trouvant dans ces

 20   bâtiments. Je suppose que vous n'étiez pas non plus au courant de cela ?

 21   R.  La seule chose que je sais, c'est que les résidents musulmans -- en

 22   fait, la police militaire -- en fait, je ne peux pas vraiment expliquer

 23   cela de manière très concise. Si vous voulez entendre ma réponse et si vous

 24   voulez obtenir une réponse précise, je ne peux pas répondre par "oui" ou

 25   par "non".

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est simple : êtes-vous au courant de

 27   crimes commis à l'encontre des personnes dans ces bâtiments ? Et pour

 28   l'instant, si vous me répondez, "Je n'étais pas au courant de la commission


Page 24415

  1   de tels crimes dans ces bâtiments," alors, à la fin de votre déposition,

  2   s'il y a quelque chose que vous souhaitez ajouter, vous aurez la

  3   possibilité de le faire.

  4   Maître Ivetic.

  5   M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, le problème c'est quels

  6   sont ces bâtiments ? Lorsque le témoin a répondu, il ne savait pas de quels

  7   bâtiments il s'agissait.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. En fait, il n'était même pas au

  9   courant qu'il y avait des personnes détenues dans ces bâtiments.

 10   Monsieur Traldi --

 11   M. TRALDI : [interprétation] C'est la raison pour laquelle j'ai inclus les

 12   termes "Je suppose que vous n'étiez pas au courant de cela" dans ma

 13   question, Monsieur le Président, et je m'attendais à ce que la réponse soit

 14   brève.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Si vous ne saviez pas qu'il y

 16   avait des personnes, des personnes âgées et des enfants détenus dans les

 17   bâtiments gardés, alors M. Traldi suppose que vous n'étiez pas au courant

 18   de crimes commis dans ces circonstances. A-t-il raison ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Traldi.

 21   M. TRALDI : [interprétation]

 22   Q.  Bien. Je vous dis que toutes ces choses pourraient expliquer ou

 23   pourraient donner l'impression à quelqu'un qu'ils devaient partir, n'est-ce

 24   pas ? Avoir des gardes armés autour de votre maison, cela peut donner à

 25   quelqu'un le sentiment qu'il doit partir, n'est-ce pas ?

 26   R.  Je n'ai jamais vu de gardes armés autour de l'un des bâtiments. Et sur

 27   la base de votre question, je peux en conclure qu'il y avait quelques

 28   bâtiments, mais si vous dites qu'il y avait des gardes armés postés autour


Page 24416

  1   des maisons, des soldats armés, je ne comprends simplement pas, s'agissait-

  2   il d'un bâtiment, s'agissait-il d'une maison ? Et en me basant sur ce que

  3   vous avez dit, il semblerait qu'il y avait des gardes postés devant toutes

  4   les maisons musulmanes. C'est comme cela que je comprends votre question,

  5   c'est ce que vous impliquiez, à savoir qu'il y avait des gardes armés

  6   postés devant les maisons, les maisons musulmanes.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi, vous demandez d'abord

  8   un avis, et, deuxièmement, vous posez une question sur ce qui, pour le

  9   témoin, est une situation hypothétique. Ça n'aidera pas beaucoup la

 10   Chambre.

 11   Veuillez poursuivre.

 12   M. TRALDI : [interprétation]

 13   Q.  Bien. Je vais vous poser la question de la façon suivante : vous ne

 14   savez pas pourquoi, en réalité, les Musulmans à qui l'on aurait demandé de

 15   quitter Foca, vous ne savez pas pourquoi une telle demande leur a été

 16   faite, n'est-ce pas ?

 17   R.  Non.

 18   Q.  Et ils devaient faire cette demande et devaient quitter la ville dans

 19   les autocars qui avaient été fournis et avec l'escorte qui leur avait été

 20   fournie parce qu'il y avait des points de contrôle sur la route que vous

 21   avez décrits, n'est-ce pas ?

 22   M. IVETIC : [interprétation] Objection. Ce sont là des hypothèses, et cela

 23   ne découle pas du témoignage du témoin. Si le témoin dit qu'il n'était pas

 24   au courant, alors pourquoi faire cette déclaration qui, en fait, présente

 25   des arguments ?

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, en réalité, Monsieur Traldi, peut-

 27   être -- je dirais que si une telle requête devait être faite, à savoir que

 28   les questions qui sont posées doivent être basées sur le témoignage que la


Page 24417

  1   Chambre a entendu, est-ce que vous pourriez reformuler la façon dont vous

  2   avez présenté les choses au témoin ?

  3   M. TRALDI : [interprétation] Je pense -- c'est peut-être de là que vient le

  4   problème. Je vais reformuler ma phrase un peu différemment.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, essayez.

  6   M. TRALDI : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur, il n'était possible de partir qu'en autocars qui avaient été

  8   fournis, avez-vous dit, aux Musulmans, avec une escorte qui, vous l'avez

  9   dit, avait été fournie aux Musulmans parce que, comme vous l'avez dit, il y

 10   avait des points de contrôle militaires sur la route; est-ce exact ?

 11   R.  Oui, mais ils sont partis sous escorte parce que beaucoup d'entre nous,

 12   et nos supérieurs, étions préoccupés de ce qui pourrait leur arriver, parce

 13   que beaucoup de nos hommes avaient été tués et il se peut que quelqu'un

 14   aurait souhaité les venger et tirer depuis la forêt sur l'autocar. Et c'est

 15   la raison pour laquelle --

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, là encore, qu'ils

 17   aient de bonnes raisons ou pas n'est pas le problème. La question était la

 18   suivante : il n'était possible de partir que dans ces autocars, et que l'on

 19   ne pouvait pas partir par d'autres moyens.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, s'ils le souhaitaient, ils pouvaient

 21   partir comme ils le souhaitaient, en utilisant les moyens qu'ils

 22   souhaitaient. Mais il n'y a avait pas de voitures, il n'y avait pas

 23   d'essence; il y avait une guerre.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, on pouvait partir sans utiliser

 25   les moyens de transport qui avaient été fournis, c'est-à-dire les autocars

 26   ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Mais --

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est une réponse.


Page 24418

  1   Veuillez poursuivre, Monsieur Traldi.

  2   M. Traldi, s'il a d'autres questions, il vous les posera.

  3   M. TRALDI : [interprétation]

  4   Q.  Bien, j'en ai deux, en fait. Vous avez d'abord témoigné un peu plus

  5   tôt, et je voulais m'assurer que je vous ai bien compris, lorsque les

  6   Musulmans sont partis dans les autocars, vous pensiez qu'ils étaient peut-

  7   être en danger parce que l'on pouvait tirer sur ces autocars au moment où

  8   ils quittaient la municipalité, et que c'est la raison pour laquelle une

  9   escorte leur avait été fournie, n'est-ce pas ?

 10   R.  Non. Je n'ai pas dit cela. Certains voulaient aller à Pljevlja. C'est à

 11   75 kilomètres à travers les bois entre Foca et Pljevlja, et nous étions

 12   préoccupés. Nous avions peur que, en se déplaçant dans les bois, quelqu'un

 13   que l'on ne pouvait voir aurait fait quelque chose que nous ne voulions pas

 14   voir arriver. Ils auraient pu tirer sur les autocars et faire ce que nous

 15   ne voulions pas voir se produire. C'est la raison pour laquelle nous avions

 16   fourni une escorte militaire. Pour leur permettre de voyager en toute

 17   sécurité. Parce que nous avions peur que, malheureusement, quelque chose

 18   puisse se produire. Un grand nombre de nos hommes avaient été tués et je

 19   pensais que quelqu'un aurait pu leur tirer dessus depuis les bois, et nous

 20   pensions qu'avec une escorte nos soldats pouvaient faire quelque chose,

 21   capturer cette personne, et que cette personne aurait été tenue

 22   responsable. Et c'est la raison pour laquelle ils sont partis sous escorte.

 23   Non pas parce que nous ne les aimions pas. Certaines personnes sont parties

 24   avec les autocars et ont pu revenir, et je peux aujourd'hui m'asseoir et

 25   prendre un café avec ces personnes. Et je suis très content qu'elles aient

 26   pu s'en sortir.

 27   Q.  Monsieur, je pense que vous avez mal compris ma question. Je pense que

 28   vous avez fini par y répondre, mais je ne vous ai pas posé la question de


Page 24419

  1   savoir si vous aimiez les Musulmans ou si vous preniez un café avec eux

  2   après la guerre. Simplement, je voulais que vous puissiez nous confirmer

  3   les raisons pour lesquelles une escorte militaire avait été fournie.

  4   Donc, la deuxième question qui en découle et que je souhaitais vous

  5   poser est la suivante : n'était-il en fait pas possible de partir par

  6   d'autres moyens, n'est-ce pas ? Vous avez dit qu'ils pouvaient partir comme

  7   ils le souhaitaient, mais pas en voiture; puisqu'il n'y avait pas

  8   d'essence, il n'y avait donc pas de voitures. C'était donc la seule façon

  9   de partir, n'est-ce pas ?

 10   R.  Bien, pour les Musulmans qui souhaitaient quitter la ville, c'est ce

 11   qu'ils pensaient. Et je partage leur opinion à l'heure actuelle. Si vous

 12   partiez à pied, vous pouviez passer les points de contrôle, les combattants

 13   vous auraient laissé passer, mais vous auriez pu rencontrer des personnes

 14   un peu dérangées. Mais comme ils savaient que ces personnes bénéficiaient

 15   d'une escorte de combattants, elles savaient qu'ils pouvaient être en

 16   sécurité. Et si vous sortez d'une ville où il y a des forces serbes qui

 17   sont positionnées, eh bien, vous pouviez rencontrer quelqu'un de pas très

 18   net qui aurait pu vous tirer dessus simplement parce que vous êtes

 19   Musulman, et c'est la raison pour laquelle il fallait les escorter sur la

 20   route vers Pljevlja, afin d'éviter de telles conséquences que nous ne

 21   voulions pas voir se produire et pour que des femmes, des enfants et des

 22   personnes honnêtes puissent retrouver leurs familles de l'autre côté. Nous

 23   ne voulions pas qu'on puisse leur tirer dessus et que quelqu'un qui se

 24   trouvait dans les bois leur tire dessus. C'était quelque chose que nous ne

 25   voulions pas voir se produire.

 26   Q.  Et après le départ de ces personnes, Foca a été renommée et on lui a

 27   donné comme nom Srbinje, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui.


Page 24420

  1   Q.  Et l'appeler Srbinje en fait, bien entendu, une ville serbe, n'est-ce

  2   pas ?

  3   R.  Non. Pas vraiment, Monsieur. Comment l'expliquer ? Certains poètes ont

  4   inventé cela. On a Trebinje, Ljubinje [phon], Nevesinje, ce sont toutes des

  5   villes d'Herzégovine. Et c'est la raison pour laquelle certains poètes ont

  6   considéré que Srbinje, ça sonnait mieux que Foca. Chaque fois que les gens

  7   me demandaient d'où je venais, je disais que je venais de Foca. Donc,

  8   Srbinje, Ljubinje, Nevesinje, Trebinje. C'est juste un truc de poète pour

  9   que cela rime. Foca avait été appelée Foca pendant des siècles et des

 10   siècles, et rien n'avait changé. Rien ne s'est amélioré dans notre ville

 11   après qu'elle ait été renommée Srbinje. Pour moi, elle reste Foca. C'était

 12   simplement une idée de poète.

 13   Q.  Eh bien, une de ces âmes de poètes était le président de la cellule de

 14   Crise, M. Stanic, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Et la Chambre a vu des éléments de preuve selon lesquels Momcilo

 17   Krajisnik, qui est le président de l'assemblée, a également commencé à

 18   faire référence à Foca sous le nom de Srbinje. S'agissait-il également

 19   d'une âme de poète ?

 20   R.  Bien, je ne connais pas Momcilo Krajisnik. C'était un homme politique.

 21   En fait, non, je ne le connais pas. Je ne sais pas si c'était une âme de

 22   poète ou pas. Mais pour Stanic, oui, là je sais. Pour lui, une hirondelle

 23   était plus importante et plus forte que n'importe quel faucon.

 24   M. TRALDI : [interprétation] Monsieur le Président, cela termine mon

 25   interrogatoire.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Traldi.

 27   Maître Ivetic.

 28   M. IVETIC : [interprétation] J'ai quelques questions, Monsieur le


Page 24421

  1   Président.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

  3   Nouvel interrogatoire par M. Ivetic :

  4   Q.  [interprétation] Monsieur, à la page 27 du compte rendu d'audience

  5   provisoire, il vous a été demandé si 50 000 personnes de Sandzaklije sont

  6   venues, des personnes féroces, et vous avez répondu non. Mais est-ce que

  7   quelques personnes de Sandzaklije sont venues à Foca, c'est-à-dire des

  8   personnes qui disaient venir de Sandzaklije ?

  9   R.  Je n'ai vu aucune personne, aucun homme venant de Sandzakli à Foca. Je

 10   sais qu'ils ont participé à la réunion du SDA à Foca. Et pendant la guerre,

 11   pendant les combats, je n'ai rencontré aucun homme de Sandzakli. J'ai

 12   rencontré un certain nombre de personnes venant de mouvements radicaux. Il

 13   se peut qu'il y ait eu des personnes venant de Sandzakli.

 14   Q.  Bien. On vous a posé une question concernant Zaga, qui a été condamné.

 15   Avait-il, lui et son unité, reçu les mêmes instructions et les mêmes

 16   consignes concernant le droit de la guerre et le traitement des civils que

 17   votre unité, à savoir, donc, les consignes dont vous nous avez parlé un peu

 18   plus tôt aujourd'hui ?

 19   R.  Oui. Chaque combattant, et je le dis en toute responsabilité, aurait pu

 20   lire les ordres qui étaient affichés là à chaque poste de commandement. On

 21   aurait pu le lire des milliers de fois. Je l'ai déjà dit et je le répète :

 22   le tribunal l'a condamné et c'était une condamnation trop légère, et je

 23   n'ai pas besoin de répéter ce que j'ai dit et ce que j'aurais fait, moi.

 24   Mais si vous le permettez, aucun des membres de l'armée de la Republika

 25   Srpska, une fois sous son commandement, n'ont reçu d'ordres de leurs

 26   officiers supérieurs ou des supérieurs hiérarchiques ou des généraux et des

 27   commandants de faire ce genre de choses. Je ne devrais pas devoir répéter

 28   cela à maintes et maintes reprises, mais si j'avais été le juge, il aurait


Page 24422

  1   été envoyé sur la chaise électrique et j'aurais pressé le bouton trois fois

  2   plutôt qu'une.

  3   Q.  Monsieur, vous avez dit que chaque combattant aurait pu lire ces

  4   consignes et que cela était affiché dans chaque poste de commandement. De

  5   qui émanaient les ordres qui étaient affichés dans chaque poste de

  6   commandement ?

  7   R.  La signature était celle du général de l'armée de la Republika Srpska.

  8   L'officier qui lisait cela devant un groupe de soldats dirait que c'était

  9   quelque chose qui avait été ordonné par le général de l'armée de la

 10   Republika Srpska, Ratko Mladic.

 11   M. IVETIC : [interprétation] Et je voudrais maintenant demander à ce que la

 12   pièce P6685 soit affichée à l'écran.

 13   Q.  Monsieur, l'Accusation vous a montré ce document et il a vous a été

 14   demandé si ces hommes semblaient tous avoir plus de 50 ans. La première

 15   question que je vous poserais est la suivante : y avait-il des soldats dans

 16   la VRS à Foca qui avaient plus de 50 ans ?

 17   R.  Oui. Je vais vous dire une chose pour répondre à cette question du

 18   Procureur : je voudrais que Dieu préserve tout pays et toute personne de la

 19   guerre. Monsieur, si quelqu'un veut porter une arme, il peut le faire à

 20   l'âge de 80 ans s'il le souhaite. Mon premier commandant, Dragan Nikolic, a

 21   été tué par un soldat qui avait 73 ans. Il lui a tiré dessus. Il est rentré

 22   dans la maison, il a vu cette personne âgée, et cette personne âgée lui a

 23   tiré dessus. Le jeune qui voulait le faire sortir a également été tué par

 24   cet homme de 73 ans.

 25   Vous ne -- en fait, je ne voulais pas interrompre le Juge Président. Même

 26   une femme de 80 ans peut porter une arme et un fusil si elle le souhaite.

 27   Donc, je n'ai pas été autorisé à expliquer cela, tout le monde avait le

 28   droit de porter une arme. Dragan Nikolic, et je dis cela en public, a été


Page 24423

  1   tué par un soldat qui avait 73 ans.

  2   Q.  Merci. Et lorsque vous capturiez des prisonniers de guerre au combat,

  3   vous connaissiez l'âge des combattants à ce moment-là ?

  4   R.  Ce n'est pas à moi de poser des questions aux témoins. Ce sont d'autres

  5   constellations qui s'en chargent. Moi, mon rôle consistait à agir

  6   conformément aux ordres de mes supérieurs. Voyez-vous, en période de

  7   guerre, lorsque vous capturez les prisonniers, eh bien, cela suscite

  8   beaucoup de crainte, et moi, je les traite de manière très équitable, très

  9   juste. Je leur dis que personne ne touchera à un seul de leurs cheveux, une

 10   fois que je le emmènerais au poste de police. Ensuite, c'est à la police

 11   qu'il appartient de les prendre en charge. Notre poste de commandement

 12   décide s'il faut les conduire vers une prison ou ailleurs. Ou dans un

 13   établissement où les prisonniers de guerre étaient hébergés.

 14   Q.  La défense du peuple de Yougoslavie contenait -- dans l'armée

 15   population de Yougoslavie, quel était l'âge moyen des citoyens qui étaient

 16   appelés sous les drapeaux ?

 17   R.  D'après les informations militaires, moi, j'ai fait mon service

 18   militaire dans l'ancienne armée yougoslave, et l'âge de conscription était

 19   de 18 à 50 ans. Je ne suis pas sûr, 18 à 50, je pense. Donc, c'est le

 20   devoir de réserve dans l'armée yougoslave. Moi, je vous parle de l'ancien

 21   système, celui que je connaissais. Maintenant, le nouveau système, je n'ai

 22   jamais eu l'occasion de le connaître de toute façon. Donc, je dirais à

 23   partir de l'âge de 18 ans et jusqu'à 50 ans. Oui, 50 ans. Jusqu'à cet âge-

 24   là, on pouvait être appelé sous les drapeaux.

 25   Q.  Vous nous avez parlé de points de contrôle. Quel était l'objectif de

 26   ces postes de contrôle ? Est-ce qu'il s'agissait d'empêcher les gens de

 27   sortir ou de rentrer ?

 28   R.  Bien, ces postes de contrôle étaient là parce qu'il y avait des


Page 24424

  1   endroits habités par des Musulmans et puis des criminels, des criminels

  2   venus de Belgrade, la plupart étaient des criminels, et ils essayaient

  3   d'entrer justement pour essayer d'en tirer quelque avantage. Ensuite, la

  4   cellule de Crise a décidé de mettre en place des postes de contrôle, et

  5   après 19 heures 30 on ne pouvait tout simplement plus passer par ces postes

  6   de contrôle. Pendant la journée, on pouvait agir rapidement; mais après,

  7   une fois la nuit tombée, eh bien, une fois que les criminels de Belgrade

  8   essayaient de passer, on ne les laissait pas passer. Et il essayait de

  9   passer quand même, et alors on le tuait. Et alors, on le tuait parce qu'il

 10   voulait passer par le poste de contrôle.

 11   Q.  Vous dites un de ces criminels de Belgrade, mais de qui parlez-vous ?

 12   De quelle formation, de quelle entité faisait-il partie, cet individu ?

 13   R.  Bien, c'était l'unité dont je vous ai parlé il y a quelques instants.

 14   Il n'y avait pas d'unité. C'étaient des chiens de guerre. Des chiens, c'est

 15   comme ça qu'on les appelait. Ils n'avaient pas d'unité. Ils n'avaient

 16   aucuns idéaux. Ils n'avaient strictement rien. Tout ce qu'ils voulaient,

 17   c'était gagner des marks allemands. C'était la seule chose qui les

 18   intéressait, rien d'autre.

 19   Q.  On vous a posé des questions à propos des crimes dans les bâtiments de

 20   Foca à l'encontre des Musulmans. Quelle était la procédure retenue par

 21   votre unité de police militaire pour répondre à des griefs vous ayant été

 22   adressés par des Musulmans et ayant trait à des mauvais traitements à Foca

 23   ?

 24   R.  La tâche de notre unité était d'apparaître sur le terrain sur-le-champ,

 25   dès lors que l'on avait fait état de quoi que ce soit, un mauvais

 26   traitement pour des citoyens, quand, à quelle heure, à quel endroit, et

 27   ensuite on procédait à des arrestations.

 28   Q.  Et durant la guerre, votre unité de police militaire, l'Unité Dragan


Page 24425

  1   Nikolic, a-t-elle répondu à des plaintes déposées par des résidents

  2   musulmans de Foca ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Monsieur, une fois de plus, au nom de mon client et de mes confrères,

  5   merci pour votre déposition.

  6   M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

  7   n'ai pas d'autres questions.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

  9   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi, souhaitez-vous poser

 11   d'autres questions ?

 12   M. TRALDI : [interprétation] Oui, quelques questions supplémentaires, si

 13   vous le permettez.

 14   Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Traldi :

 15   Q.  [interprétation] Au compte rendu provisoire, page 59, il est fait état

 16   des propos suivants tenus par vous. Vous disiez Dragan Nikolic était votre

 17   commandant, disiez-vous. Est-ce une transcription exacte de vos propos,

 18   Monsieur ?

 19   R.  Dragan Nikolic était le commandant de la police militaire à la Défense

 20   territoriale. Il était mon commandant, mais il a été tué. Donc, il n'était

 21   pas mon commandant. Mais j'ai essayé de dire, peut-être me suis-je trompé,

 22   mais peut-être que je n'ai pas dit ce que je voulais dire.

 23   Q.  [aucune interprétation]

 24   M. TRALDI : [interprétation] C'était la seule question que je souhaitais

 25   poser. Merci.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Traldi.

 27   Monsieur Simovic, nous sommes arrivés au terme de votre déposition.

 28   Permettez-nous de vous remercier d'être venu à La Haye et d'avoir répondu à


Page 24426

  1   toutes les questions qui vous ont été posées par l'Accusation, la Défense

  2   et les Juges de la Chambre. Un bon retour chez vous. Et je vous invite à

  3   présent à suivre l'huissier.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant cela. En réponse à une des

  6   questions posées par Me Ivetic, vous avez dit : Mais c'est exactement ce

  7   que je souhaitais expliquer. Précédemment, je vous avais promis de vous

  8   donner l'occasion d'ajouter quelque chose à votre déposition, quoi que ce

  9   soit. Est-ce que la réponse que vous avez apportée aux questions de Me

 10   Ivetic vous a permis d'ajouter ces informations ou estimez-vous qu'il y a

 11   des choses que vous auriez souhaité dire et qui ne vous a pas été possible

 12   de dire, auquel cas je vous invite à le faire maintenant ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Non, non. Je souhaitais simplement

 14   répondre à la question que M. le Procureur avait posée. Mais je viens d'y

 15   répondre, donc pas de problème.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Encore une fois, bon retour chez vous.

 19   Et cette fois je vous invite à vraiment à suivre l'huissier.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 21   [Le témoin se retire]

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Défense est-elle prête à appeler le

 23   témoin suivant ?

 24   M. IVETIC : [interprétation] Oui, nous sommes prêts.

 25   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 26   M. IVETIC : [interprétation] Il s'agit de M. Nenad Deronjic.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Traldi.

 28   M. TRALDI : [interprétation] Je souhaiterais, moi aussi, quitter le


Page 24427

  1   prétoire maintenant que le témoin que nous attendions l'a quitté.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien. Je vous y autorise.

  3   M. TRALDI : [interprétation] Merci beaucoup.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Prochain témoin, Nenad Deronjic. Pas de

  5   mesures de protection prévues pour 30 minutes pour l'interrogatoire

  6   principal --

  7   M. IVETIC : [interprétation] Nous avions adressé un courrier électronique

  8   indiquant qu'il s'agirait plutôt de 50 minutes d'interrogatoire avec trois

  9   preuves documentaires supplémentaires, Monsieur le Président.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien. Eh bien, cela change-t-il

 11   l'évaluation que nous avons faite, deux heures et demie, pour l'Accusation,

 12   tel que cela avait été demandé ?

 13   M. McCLOSKEY : [interprétation] Non, pas vraiment. A vrai dire, je pense

 14   que, ayant étudié les différents documents, nous devrions avoir besoin de

 15   pas mal moins que cela.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous vous en sommes

 17   reconnaissants. Attendons à présent l'arrivée dans le prétoire du témoin.

 18   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Deronjic. Avant de

 20   faire votre déposition, nous vous invitons à prononcer la déclaration

 21   solennelle. Nous vous invitons à donner lecture de cette déclaration

 22   solennelle. Le texte vous est présenté.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 24   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 25   LE TÉMOIN : NENAD DERONJIC [Assermenté]

 26   [Le témoin répond par l'interprète]

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Deronjic. Je

 28   vous invite à bien vouloir vous asseoir.


Page 24428

  1   Monsieur Deronjic, vous entendrez tout d'abord les questions en

  2   interrogatoire principal de Me Ivetic, qui est à votre gauche. Il fait donc

  3   partie de l'équipe de la Défense de M. Mladic.

  4   Maître Ivetic, vous avez la parole.

  5   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   Interrogatoire principal par M. Ivetic :

  7   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur.

  8   R.  Bonjour.

  9   M. IVETIC : [interprétation] Permettez-moi tout d'abord d'évoquer le

 10   document 1D0168. Peut-on l'afficher sur e-court.

 11   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Maître Ivetic, peut-être s'agit-il du

 12   1638 et non du 0168 ?

 13   M. IVETIC : [interprétation] Oui, oui. 1638. Désolé si j'ai fait une

 14   erreur.

 15   Q.  Monsieur, reconnaissez-vous la signature apposée à la première page de

 16   l'original en langue serbe de cette déclaration ?

 17   R.  Oui. Il s'agit de ma signature qui figure sur cette déclaration.

 18   M. IVETIC : [interprétation] Et si vous reportez votre attention à la

 19   dernière page du document, dont je demande l'affichage à e-court.

 20   Q.  Et là encore, la question que je vous pose, Monsieur : que pouvez-vous

 21   nous dire de la signature figurant sur la page affichée du document ? A qui

 22   appartient cette signature ?

 23   R.  Je confirme également que la signature qui figure sur la dernière page

 24   du document est la mienne, et j'y ai également fait figurer la date.

 25   Q.  Après avoir signé cette déclaration préalable, avez-vous eu l'occasion

 26   d'examiner le document en question et de le lire en langue serbe afin d'en

 27   vérifier l'exactitude ?

 28   R.  Eh bien, à vrai dire, je n'ai pas lu immédiatement cette déclaration


Page 24429

  1   préalable après l'avoir signée. Mais avant de venir ici à La Haye, je l'ai

  2   lue de manière détaillée et j'ai indiqué un certain nombre de choses,

  3   c'est-à-dire les endroits où j'ai estimé qu'il y avait lieu d'apporter

  4   quelques précisions ou quelques ajouts d'une manière générale.

  5   Q.  Page 2 dans les deux langues, s'il vous plaît, veuillez vous y

  6   reporter, et au paragraphe 3. Et puisqu'il apparaît à l'écran, Monsieur, je

  7   vous pose la question suivante : souhaitez-vous apporter des corrections ou

  8   des précisions eu égard au paragraphe numéro 3 ?

  9   R.  Oui. Au paragraphe 3, je souhaiterais apporter quelques précisions,

 10   effectivement. Vous permettez que je le fasse ?

 11   Q.  Oui, oui, je vous en prie. Allez-y.

 12   R.  Alors, il s'agit de la chose suivante : au paragraphe 3, il est dit

 13   qu'avant l'éclatement du conflit à Srebrenica en 1992, j'ai été transféré

 14   au poste de police de Bratunac, où j'ai également exercé les fonctions de

 15   policier pendant la guerre jusqu'à 1996. Toutefois, à partir du 1er juillet

 16   1995 et jusqu'en 1996, je travaillais au poste de police de Srebrenica. Par

 17   conséquent, cette information ne figure pas dans ce paragraphe. Or, c'est

 18   exact, ça ne fait aucun doute.

 19   Q.  Question supplémentaire : est-ce qu'il y a eu un suivi auquel devait se

 20   plier la police après la conclusion de la guerre conforme à une

 21   certification des Nations Unies ?

 22   R.  Oui, effectivement. Tous les agents de police d'active travaillant sur

 23   le territoire de la Republika Srpska après la guerre devaient effectivement

 24   se conformer à certaines vérifications par la police internationale, c'est-

 25   à-dire l'IPTF.

 26   Q.  Et vous avez bénéficié de certification au titre de ce processus ?

 27   R.  Oui, bien sûr. J'ai été certifié par les [imperceptible], et j'ai

 28   d'ailleurs les certificats qui en témoignent.


Page 24430

  1   Q.  Je vous invite à examiner le paragraphe 6 à présent --

  2   M. IVETIC : [interprétation] Il figure sur la même page de la version

  3   anglaise et sur la quatrième page de la version en langue serbe. Troisième

  4   page, version serbe. Toutes mes excuses.

  5   Q.  Alors, au paragraphe 11, vous dites : "Je ne sais pas où ils se situent

  6   maintenant, mais je sais qu'ils étaient archivés au poste de police de

  7   Bratunac." A quoi faites-vous référence ?

  8   Toutes mes excuses. Au paragraphe 6, vous parlez de poste de contrôle à

  9   Konjevic Polje. Est-ce que vous souhaitez apporter des précisions quant au

 10   poste de contrôle à Konjevic Polje ?

 11   R.  Pour le paragraphe 6, je souhaiterais apporter des précisions qui

 12   seraient les suivantes. Au poste de contrôle à Konjevic Polje, ce n'était

 13   pas la 2e Compagnie de l'unité de police spéciale du centre des services de

 14   Sécurité de Zvornik, mais plutôt le travail qui était effectué par les

 15   agents de police de la PS de Bratunac, parce que Konjevic Polje faisait

 16   partie de la territorialité de la municipalité de Bratunac, et, par

 17   conséquent, c'est ainsi que ça s'est fait. Ce n'était pas la 2e Compagnie

 18   des PJP, par conséquent, mais plutôt les responsables de la police de

 19   Bratunac.

 20   Q.  Merci.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey.

 22   M. McCLOSKEY : [interprétation] Toutes mes excuses, Monsieur le Président,

 23   je sais que Me Ivetic est au courant. Mais lorsqu'il fait état de son

 24   unité, Maître Ivetic, peut-on inviter le témoin à utiliser le terme PJP,

 25   parce qu'il est très difficile de faire la distinction avec les autres

 26   unités si l'on change de manière de décrire les choses et si l'on commence

 27   à les décrire en précisant davantage.

 28   M. IVETIC : [interprétation] Oui, je l'ai bien compris, Monsieur McCloskey.


Page 24431

  1   Q.  Monsieur, lorsque vous faites état de la 2e Compagnie de la "posebna

  2   jedinica policije" du poste de police de Zvornik, auriez-vous l'obligeance

  3   de bien vouloir, lorsque vous décrivez cette unité, de la décrire en

  4   utilisant les lettres PJP ?

  5   R.  Fort bien. J'utiliserai le terme PJP dorénavant.

  6   M. IVETIC : [interprétation] Page suivante en anglais, et puis en serbe

  7   également c'est la page suivante. Il s'agit cette fois du paragraphe 11.

  8   Q.  Où vous dites :

  9   "Je ne sais pas où ils se situent maintenant, mais je sais qu'ils étaient

 10   archivés au poste de police de Bratunac."

 11   A quoi faites-vous référence dans ce paragraphe ?

 12   R.  Ce paragraphe a trait aux ordres de patrouille. En fait, il s'agissait

 13   de rapports que nous rédigions quotidiennement. Une fois le travail de la

 14   journée effectué, nous les amenions au poste de police de Bratunac. Il

 15   s'agissait de dire combien de véhicules et combien de personnes ont été

 16   contrôlés, est-ce qu'il y a eu des problèmes au poste de contrôle au cours

 17   de cette journée et dans cette tranche horaire-là.

 18   Q.  Fort bien.

 19   M. IVETIC : [interprétation] Paragraphe 20, même page, que je ne souhaite

 20   pas voir affichée, page 4 en anglais, page 5 en B/C/S.

 21   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous fournir des explications plus

 22   détaillées quant à ce que vous dites à propos de la différence entre les

 23   dates pour le document. Pourriez-vous nous expliquer en quoi il n'est pas

 24   inhabituel d'avoir des différences de dates telles que dans ce document ?

 25   R.  En ce qui concerne les désignations, les nominations pour le travail de

 26   policier, c'est-à-dire le travail que j'effectuais au poste de sécurité

 27   publique à Srebrenica, cela pouvait se faire sur base d'ordre ou de dépêche

 28   provenant du chef des services de sécurité publique. Les documents relatifs


Page 24432

  1   à mon embauche pouvaient être remis plus tard. C'est ce qui se passe encore

  2   aujourd'hui. L'ordre était important. Il fallait pouvoir s'y plier très

  3   rapidement. Ensuite, la désignation proprement dite, elle pouvait

  4   intervenir ultérieurement.

  5   Q.  Outre les précisions apportées au document, est-ce que vous vous en

  6   tenez à la teneur de la déclaration écrite préalable telle qu'elle l'a été

  7   présentée ? Est-elle exacte ?

  8   R.  Oui. Exception faite de ces modifications et précisions. Je considère

  9   que le reste de la déclaration préalable est correct.

 10   Q.  Si je devais vous poser des questions à propos des mêmes questions

 11   évoquées dans votre déclaration écrite, est-ce que les réponses que vous

 12   apporteriez à ces mêmes questions correspondraient à la teneur de la

 13   déclaration préalable ?

 14   R.  Oui, je répondrais de la même manière sur le fond que je l'ai fait dans

 15   la déclaration préalable.

 16   Q.  Vous avez prononcé une déclaration solennelle indiquant que vous direz

 17   la vérité. Est-ce que les réponses apportées dans votre déclaration écrite

 18   sont conformes à la réalité ?

 19   R.  Oui. Mes réponses sont conformes à la réalité.

 20   M. IVETIC : [interprétation] Je demande, Monsieur le Président, Messieurs

 21   les Juges, le versement au dossier de la pièce à conviction 1D1638 sous pli

 22   scellé, en raison de ces deux paragraphes dont je ne suis pas sûr que les

 23   informations qu'ils contiennent ont trait à des questions qu'il

 24   conviendrait d'évoquer à huis clos partiel avec mesures de protection pour

 25   le témoin.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

 27   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 1D1638 se verra attribuer

 28   la cote D584, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.


Page 24433

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D584 est versé au dossier sous pli

  2   scellé.

  3   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges.

  4   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Maître Ivetic, permettez-moi de poser

  5   une question à propos de cette déclaration préalable, question à l'adresse

  6   du témoin.

  7   M. IVETIC : [interprétation] Entendu.

  8   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur, on vous a demandé si vous

  9   aviez eu l'occasion de lire en serbe cette déclaration préalable. Vous nous

 10   avez répondu :

 11   "Cette déclaration -- eh bien, à vrai dire, non, je ne l'ai pas lue

 12   immédiatement après l'avoir signée."

 13   C'est ce que vous nous avez répondu. Est-ce que vous avez eu l'occasion de

 14   la lire avant de la signer ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. J'ai signé cette déclaration préalable,

 16   et ensuite, parce que j'avais des engagements professionnels, je n'avais

 17   tout simplement pas eu le temps de la lire. Mais avant de venir à La Haye,

 18   je l'ai lue de manière détaillée, et c'est à ce moment-là que je me suis

 19   rendu compte qu'il y avait lieu d'apporter quelques précisions pour

 20   certains des paragraphes.

 21   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce que ça n'est pas inhabituel de

 22   lire [comme interprété] un document sans en avoir lu le contenu au

 23   préalable ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Si. Mais j'avais beaucoup à faire à ce moment-

 25   là. J'avais des engagements professionnels. J'ai signé ma déclaration

 26   écrite. Je ne l'ai pas lue immédiatement. Mais ultérieurement, je l'ai lue.

 27   C'est ce que je vous ai dit. Avant de partir pour La Haye, je l'ai lue de

 28   manière détaillée et me suis aperçu qu'il y avait lieu d'apporter des


Page 24434

  1   précisions.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci beaucoup.

  3   Maître Ivetic.

  4   M. IVETIC : [interprétation] Merci.

  5   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je souhaiterais lire le

  6   résumé --

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, le Juge Fluegge peut-être

  8   va souhaiter poser quelques questions supplémentaires.

  9   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Très brièvement, quand et dans

 10   quelles circonstances avez-vous signé cette déclaration préalable ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai signé cette déclaration préalable à

 12   Bratunac pendant les heures de travail, alors que j'étais d'astreinte. Je

 13   l'ai signée dans un établissement de restauration, en présence de Nenad

 14   Petrusic, qui m'a présenté cette déclaration écrite. Je ne suis pas resté

 15   très longtemps. J'ai fait ça très brièvement, parce que j'avais beaucoup à

 16   faire. J'avais d'autres engagements professionnels. Je ne l'ai pas lue et

 17   je l'ai signée, et c'est tout.

 18   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] M. Petrusic est venu vous voir. Est-

 19   ce qu'il vous avait dit qu'il avait l'intention de venir vous voir ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je n'ai pas très bien compris ce que vous

 21   m'avez dit. Qu'est-ce que vous voulez dire, qu'il allait venir me voir ?

 22   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Il est venu vous voir au poste de

 23   police, à la cantine. Est-ce que vous vous attendiez à ce qu'il vienne vous

 24   voir ? Est-ce qu'il vous a passé un coup de fil avant, ou comment les

 25   choses se sont-elles passées ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Il m'a passé un coup de fil. Il m'a téléphoné.

 27   Quand il est arrivé, il m'a dit : Il faut que tu viennes -- en fait, c'est

 28   un café. Il faut que tu viennes au café et que je prenne la déclaration et


Page 24435

  1   que je la signe, et voilà.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Quel café ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est un café bar, vous savez, Nap [phon].

  4   C'est là que l'on s'est vu. Il avait dit qu'on allait s'y voir. Moi, je

  5   travaillais. C'était pendant les heures de travail. J'y suis allé cinq ou

  6   dix minutes, je l'ai signée, ensuite les choses ont suivi leur cours, comme

  7   je vous les ai expliquées.

  8   L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète : Le café s'appelle Napoli.

  9   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une question 

 11   supplémentaire : est-ce que vous avez eu l'occasion de voir un premier jet

 12   de cette déclaration ou est-ce que c'était la première fois, même si vous

 13   n'avez pas eu le temps de le lire, que vous le voyiez ? C'était la première

 14   fois que vous le voyiez ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était la première fois que je la voyais,

 16   mais je me suis entretenu avec lui à trois reprises avant cela. Nous avons

 17   eu des discussions chez moi, et sur la base de nos entretiens, il a rédigé

 18   ces déclarations.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Et M. Petrusic a-t-il accepté le

 20   fait que vous n'ayez pas suffisamment de temps pour lire et a-t-il tout

 21   simplement accepté que vous signiez la déclaration préalable sans l'avoir

 22   lue, ou a-t-il insisté pour que vous la lisiez d'abord ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Il a accepté la situation telle qu'elle. Je

 24   n'avais tout simplement pas suffisamment de temps, j'étais très pressé, et

 25   voilà, les choses se sont passées comme elles se sont passées.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et vous aviez suffisamment de confiance

 27   en lui pour croire que cette déclaration préalable, que vous n'aviez pas

 28   lue, correspondra à ce qui a été dit au cours de ces entretiens que vous


Page 24436

  1   avez eus avec lui ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais bien sûr, évidemment, je lui faisais

  3   confiance, puisqu'on s'était déjà rencontré à trois reprises, comme je vous

  4   l'ai déjà expliqué, et nous avons discuté de tous les sujets qui devaient

  5   figurer dans la déclaration préalable.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci de vos réponses.

  7   Maître Ivetic, je pense que je vous ai interrompu au moment où vous

  8   aviez l'intention de donner lecture du résumé, mais peut-être que vous

  9   feriez mieux de procéder après la pause.

 10   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, nous allons prendre

 12   une pause. Nous vous reverrons dans quelque 20 minutes. Veuillez, s'il vous

 13   plaît, suivre M. l'Huissier.

 14   [Le témoin quitte la barre]

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous reprenons nos travaux à 2 heures

 16   moins 25.

 17   --- L'audience est suspendue à 13 heures 17.

 18   --- L'audience est reprise à 13 heures 37.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pendant que nous attendons que l'on

 20   fasse venir le témoin dans la salle d'audience…

 21   [Le témoin vient à la barre]

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Deronjic, nous allons d'abord

 23   entendre Me Ivetic, qui va donner lecture d'un résumé de votre déclaration

 24   préalable.

 25   Maître Ivetic, à vous.

 26   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges.

 27   Le témoin est un agent de police de profession qui a travaillé au poste de

 28   police de Bratunac puis au poste de police de Srebrenica avant d'être muté


Page 24437

  1   à la police frontalière. Il a également été membre de la 2e Compagnie des

  2   PJP du poste de police de Zvornik  -- il semblerait qu'il y ait un problème

  3   d'interprétation, Messieurs les Juges.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le problème a-t-il été réglé ? Alors,

  5   vous pouvez suivre.

  6   M. IVETIC : [interprétation] Tout va bien.

  7   Le témoin est un agent de police de profession qui a travaillé au poste de

  8   police de Bratunac puis au poste de police de Srebrenica avant d'être muté

  9   à la police frontalière. Il a également été membre de la 2e Compagnie des

 10   PJP du poste de police de Zvornik, ainsi que quelques autres de ses

 11   collègues provenant du poste de police de Bratunac.

 12   Au début du mois de juillet 1995, le témoin a travaillé la plupart du temps

 13   en tant que membre du poste de police de Bratunac. Il était affecté à un

 14   point de contrôle qui se situait à Konjevic Polje, au croisement des routes

 15   menant respectivement à Vlasenica et à Zvornik. Le 11 juillet 1995, le

 16   témoin a exécuté les tâches qui ont été confiées à cet endroit-là et il a

 17   quitté son poste à 8 heures le 12 juillet 1995, une fois sa relève

 18   terminée.

 19   Par la suite, il est devenu membre d'active au sein de la 2e Compagnie des

 20   PJP de Zvornik, et on lui a dit de se tenir en alerte compte tenu de la

 21   situation qui prévalait à Srebrenica. Le 12 juillet 1995, à 15 heures, lui

 22   et quelques autres membres de la même compagnie PJP ont été envoyés à

 23   Srebrenica pour faire des patrouilles dans la ville et protéger les biens

 24   du pillage pendant que l'on mettait sur pied le poste de sécurité publique

 25   à Srebrenica. Le témoin est resté à Srebrenica pendant huit jours en tant

 26   que membre des PJP. Il a été officiellement muté en tant que salarié du SJB

 27   Srebrenica nouvellement créé le 21 juillet 1995. Le témoin réfute la

 28   déposition de Momir Nikolic suivant laquelle il a été présent au poste de


Page 24438

  1   contrôle à Konjevic Polje le 13 juillet 1995, compte tenu du fait qu'il

  2   exécutait des tâches différentes en tant que membre des PJP dans la ville

  3   de Srebrenica à ce moment-là.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous avez d'autres questions à poser

  5   au témoin, allez-y, Maître Ivetic.

  6   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   Q.  Monsieur, j'aimerais que nous nous penchions sur le paragraphe 23 de

  8   votre déclaration préalable.

  9   M. IVETIC : [interprétation] Qui figure à la page suivante dans les deux

 10   versions linguistiques. Cette page-là ne doit pas être diffusée.

 11   Q.  Ici, dans ce paragraphe, au paragraphe 23, qu'est-ce que vous voulez

 12   dire lorsque vous dites qu'il était généralement connu que Momir Nikolic a

 13   dit toute une série de contrevérités sur vous et sur d'autres personnes

 14   aussi ?

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-il possible d'afficher la version

 16   anglaise sur la partie droite de l'écran ?

 17   M. IVETIC : [interprétation] Toutes mes excuses.

 18   Q.  Monsieur, veuillez, s'il vous plaît, répondre à la question posée.

 19   Lorsque vous avez dit, je cite, "à Bratunac, il est bien connu que lors de

 20   sa déposition Momir Nikolic a prononcé toute une série de contrevérités,

 21   non seulement sur mon compte, mais aussi sur le compte des autres personnes

 22   habitant dans la région de Bratunac," qu'est-ce que vous vouliez dire par

 23   là ?

 24   R.  Eh bien, comme je l'ai déjà indiqué, dans la ville de Bratunac, c'est

 25   un fait notoire. Et je le sais sur la base de mes contacts avec des

 26   différentes personnes à Bratunac, Momir Nikolic a prononcé toute une série

 27   de contrevérités ou de mensonges, non seulement sur mon compte, mais aussi

 28   sur le compte d'autres personnes habitant à Bratunac ou y ayant vécu.


Page 24439

  1   Q.  Et vous parlez de façon générale ou est-ce que vous avez des

  2   informations concrètes sur le sujet ?

  3   R.  Je ne peux rien vous dire de concret. C'est un point de vue

  4   généralement adopté et dont j'ai pris connaissance lors de mes contacts et

  5   de mes entretiens avec différentes personnes provenant de Bratunac.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si le témoin n'est pas capable de citer

  7   des faits concrets, nous pouvons passer à un autre sujet.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Permettez-moi de poser une question,

  9   Maître Ivetic.

 10   Pourriez-vous nous donner une raison quelconque pour les agissements de M.

 11   Nikolic ? Quel intérêt avait-il à mentir sur vous et sur d'autres personnes

 12   ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, vraiment, je ne peux rien vous dire

 14   avec certitude. Mais, à mon avis, il a menti pour se placer dans une

 15   meilleure position lui-même, pour se protéger, et aussi pour écarter des

 16   accusations qui lui ont été reprochées.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 18   M. IVETIC : [interprétation]

 19   Q.  Puis-je poursuivre --

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je me demande. Sur ce que vous avez dit,

 21   à savoir que vous ne pouvez citer rien de concret, et pourtant, vous avez

 22   utilisé le terme de mensonges. Vous avez parlé au pluriel. Est-ce qu'il a

 23   prononcé plusieurs mensonges sur votre compte?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, je sais très précisément qu'il a

 25   menti sur mon compte quand il a dit que je me trouvais sur place, alors que

 26   je n'y étais pas. Et d'autres personnes m'ont dit qu'il a également menti

 27   sur leurs comptes.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais est-ce que vous pouvez citer


Page 24440

  1   d'autres mensonges qu'il a prononcés sur votre compte ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas de connaissances à ce sujet.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Maître Ivetic.

  4   M. IVETIC : [interprétation] Merci.

  5   Q.  J'aimerais maintenant vous poser quelques autres questions. Pour

  6   commencer, qu'est-ce que vous pouvez nous dire au sujet des PJP? Qui était

  7   mobilisé pour faire partie des unités PJP ?

  8   R.  En ce qui concerne les PJP qui dépendaient du centre de la sécurité

  9   publique de Zvornik, tous les agents de police de différents postes de

 10   police dépendant de ce centre faisaient partie des unités PJP; autrement

 11   dit, le poste de police de Bratunac, les salariés de ce poste d'active

 12   étaient automatiquement des membres des unités PJP. Tout le monde faisait

 13   partie de ces unités PJP. Un poste de police envoyait deux hommes pour en

 14   faire partie, un autre poste de police envoyait quatre hommes pour faire

 15   partie des unités PJP, mais en tout cas les membres de ces unités

 16   provenaient de tous les postes différents.

 17   Q.  Et votre engagement au sein des PJP, était-ce un emploi en plein temps

 18   ou était-ce un emploi provisoire ou temporaire ?

 19   R.  C'était temporaire. Nous étions convoqués pour exécuter des tâches

 20   spéciales.

 21   Q.  Et lorsqu'un agent de police tel que vous a été mobilisé au sein des

 22   PJP, et cela a été le cas entre 1992 et 1995, avez-vous continué à exercer

 23   vos devoirs réguliers au sein du poste de police mis à part les devoirs que

 24   vous aviez au sein des PJP ?

 25   R.  Lorsque nous étions engagés au sein des PJP, nous avions des tâches

 26   spéciales à exécuter sur un ordre du centre de Sécurité, donc nous

 27   laissions de côté nos tâches quotidiennes et régulières que nous avions à

 28   notre poste de police en tant qu'agents de police réguliers.


Page 24441

  1   Q.  Où est-ce que vous receviez votre salaire à l'époque où vous étiez

  2   engagé en tant que membre des PJP et que vous effectuiez également votre

  3   devoir en tant que membre des PJP ?

  4   R.  Je recevais mon salaire qui m'était payé par le MUP de la Republika

  5   Srpska à travers le poste de police de Bratunac pendant un certain temps.

  6   Et ensuite, lorsque je suis passé au poste de police de Srebrenica, mon

  7   salaire m'a été payé par le poste de police de Srebrenica lorsque j'étais

  8   dans les PJP.

  9   Q.  Bien. Est-ce que vous deviez toujours rendre compte au commandant de ce

 10   poste de police pendant la période où vous étiez un membre d'actif des PJP

 11   ou est-ce que vous deviez rendre compte à quelqu'un d'autre ?

 12   R.  Pendant que nous étions membres des PJP, nous n'avions aucun rapport à

 13   remettre parce que nous étions accompagnés par les commandants de la

 14   compagnie. Je parle là des compagnies des PJP.

 15   Q.  Et par votre expérience, combien de temps est-ce que l'engagement dans

 16   les PJP pouvait durer, combien de jours ?

 17   R.  Sept à dix ou 15 jours. Et quelquefois, nous participions à des combats

 18   pendant une quinzaine de jours sur le terrain.

 19   Q.  Et pendant la période 1992 à 1995, quelle est la tâche la plus

 20   fréquente pour laquelle on pouvait se retrouver membre d'active des PJP ?

 21   R.  Le plus souvent, les tâches qui étaient confiées aux membres des PJP

 22   consistaient à surveiller les lignes de combat. Nous étions à Treskavica,

 23   Bandijerka, et cetera.

 24   Q.  Bien. Vous avez dit un peu plus tôt qu'en travaillant au poste de

 25   contrôle de Konjevic Polje, vous remplissiez vos devoirs en tant que

 26   policier du poste de police de Bratunac. Et pour être clair, je

 27   souhaiterais que vous nous disiez à quel moment en juillet 1995 vous avez

 28   été appelé ou vous vous êtes engagé en tant que policier des PJP ?


Page 24442

  1   R.  J'ai été intégré le 12 juillet 1995 en tant que membre des PJP.

  2   Q.  Et après le 12 juillet 1992 [comme interprété], à quel moment cela

  3   s'est terminé, que votre engagement dans les PJP s'est terminé ?

  4   R.  Cet engagement a pris fin avec les activités à Srebrenica le 20 juillet

  5   1995.

  6   Q.  Pendant les huit jours où vous vous trouviez à Srebrenica en tant que

  7   membre de la 2e Compagnie des PJP de Zvornik, où est-ce que vous deviez

  8   dormir ?

  9   R.  Pendant que nous étions à Srebrenica à effectuer ces tâches, nous

 10   étions logés au poste de police de Srebrenica, et pendant un certain temps

 11   nous avons dormi dans les bâtiments qu'on appelait les bâtiments

 12   auxiliaires, qui sont un petit peu plus loin que le poste de police.

 13   Q.  Et où est-ce que vous obteniez votre nourriture pendant cette période,

 14   pendant ces huit jours ?

 15   R.  Les denrées alimentaires nous étaient livrées, ou plutôt, pendant la

 16   période où nous étions intégrés dans les PJP, nous étions nourris.

 17   Q.  Pendant cette période, ces huit jours à Srebrenica, est-ce qu'il y

 18   avait des transports publics qui fonctionnaient dans la ville de

 19   Srebrenica, où vous vous trouviez ?

 20   R.  Non. Il n'y avait pas de transport public à ce moment-là.

 21   Q.  Comment pouviez-vous vous déplacer depuis le poste de police jusqu'au

 22   poste qui vous était confié et retour ?

 23   R.  Donc, nous partions du poste de police jusqu'au lieu où nous étions

 24   affectés à pied. Je parle des différents secteurs et des différents postes

 25   de contrôle.

 26   Q.  Et les 12 et 13 juillet 1995 à Srebrenica, où aviez-vous été affecté,

 27   par exemple ? Dans quelle partie de la ville ?

 28   R.  Le 12 juillet, j'étais dans le 1er secteur, qui couvre la ville elle-


Page 24443

  1   même, depuis l'hôtel jusqu'au centre culturel, le grand magasin, le

  2   bâtiment municipal et le poste de police lui-même.

  3   Q.  Est-ce que vous avez, à un moment donné, quitté la ville de Srebrenica

  4   pendant la période du 12 au 20 juillet 1995 ?

  5   R.  Non. Je n'ai jamais quitté Srebrenica pendant cette période. En fait,

  6   je n'ai pas atteint le poste de contrôle sur la route vers Bratunac, qui

  7   est situé près du terrain de football.

  8   Q.  Bien. Le paragraphe 17 de votre déclaration --

  9   M. IVETIC : [interprétation] Et il s'agit de la page 4 de la version

 10   anglaise et 5 de la version serbe. Et je demande à ce que le document ne

 11   soit pas diffusé. J'attends simplement que la page soit affichée.

 12   Q.  -- vous dites que votre tâche était d'essayer de protéger les biens des

 13   différents groupes qui venaient là pour piller les bien abandonnés. Qui ou

 14   de quoi parlez-vous lorsque vous parlez de ces groupes ?

 15   R.  Pour être plus précis, il ne s'agissait pas de groupes. Il s'agissait

 16   de personnes individuelles. Il y avait des habitants de Srebrenica, des

 17   civils, des femmes, qui se sont rendus dans leurs maisons, mais il y avait

 18   également des personnes armées.

 19   Q.  Bien. Et maintenant, je voudrais passer au paragraphe 11 de votre

 20   déclaration préalable.

 21   M. IVETIC : [interprétation] Qui devrait figurer à la page 3 des deux

 22   versions linguistiques.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce que je pourrais demander une

 24   précision concernant la dernière réponse du témoin.

 25   M. IVETIC : [interprétation] Bien entendu.

 26   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Dans votre déclaration, vous dites

 27   qu'il y avait différents groupes qui sont venus là pour piller les biens

 28   abandonnés. Maintenant, vous parlez d'habitants de Srebrenica, de civils,


Page 24444

  1   de femmes, qui sont rentrés chez eux. Et il y avait également des personnes

  2   armées. Je ne comprends pas votre réponse. Est-ce que vous pourriez

  3   préciser ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, je peux vous expliquer. Par exemple, si

  5   quelqu'un vient pour piller des biens, il conduirait donc un tracteur. Ils

  6   n'y vont jamais seuls parce qu'il faut charger beaucoup de choses et il

  7   faut donc qu'il y ait trois ou quatre personnes.

  8   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Donc, votre tâche était de protéger

  9   les biens de ces différents groupes. Qui vous parlait de ces différents

 10   groupes ? Est-ce que c'étaient vos supérieurs qui vous avaient demandé de

 11   protéger les biens ? Ou est-ce que vous diriez que c'étaient ces groupes ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, c'étaient probablement nos supérieurs

 13   qui nous le demandaient, et cela se savait. C'était la tâche qui nous était

 14   donnée lorsque nous sommes arrivés à Srebrenica, mais il ne s'agissait pas

 15   là de gros organisés. Et ceci ne nous amenait pas à effectuer d'autres

 16   activités.

 17   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Qu'est-ce que vous entendez par "cela

 18   a transpiré", "cela s'est su" ? Est-ce que ces groupes sont apparus sur la

 19   scène ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, il n'y avait pas de groupes organisés.

 21   Ce que j'essaie de dire, c'est que lorsque l'on parle de groupe, cela peut

 22   signifier trois ou quatre personnes sur un tracteur qu viennent piller,

 23   prendre des choses importantes. Donc, il s'agit d'un groupe. On ne peut pas

 24   emmener un réfrigérateur ou un meuble de taille importante seul.

 25   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur le Témoin, le terme "groupe"

 26   ou "différents groupes" apparaît dans votre déclaration. Ce sont là vos

 27   termes. Donc, ce sont bien les termes que vous avez utilisés.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est bien ce que j'ai dit. C'est la


Page 24445

  1   tâche qui nous avait été confiée. C'était conforme aux ordres que nous

  2   avions reçus. Et cet ordre parlait spécifiquement de "groupes", mais je

  3   peux vous dire que nous n'avons vu aucun groupe. J'ai reçu ces ordres de

  4   nos supérieurs. Notre tâche était de nous occuper de ces groupes, et c'est

  5   ce que j'ai cité dans ma déclaration.

  6   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Mais il y a quelques instants, vous

  7   avez dit "et cela a transpiré", "cela s'est su". Qu'est-ce qui a transpiré

  8   ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, comme je l'ai déjà dit, je n'ai vu aucun

 10   groupe organisé faire ce genre de choses. Il y avait des civils, il y avait

 11   des résidents de Srebrenica qui étaient de retour et il y avait également

 12   ces personnes qui arrivaient sur de petits tracteurs, il y en avait quatre

 13   ou cinq sur les tracteurs. Je ne sais pas si on peut vraiment y faire

 14   référence en parlant de groupes. Mais voilà ce qui s'est produit.

 15   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce que vous voulez dire que ce

 16   sont des résidents de Srebrenica qui sont revenus en pillant les biens

 17   d'autrui ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, il y a eu des cas où ils l'ont fait

 19   parce que leurs appartements avaient été détruits, leurs bien avaient été

 20   pris, saisis, et ils devaient donc rentrer dans les maisons des autres pour

 21   prendre des biens.

 22   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Maître Ivetic.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai une autre question à ce propos.

 24   Monsieur le Témoin, vous avez donc vu des hommes armés en train de piller ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je les ai vus à certains moments, et il y

 26   a eu même un cas où il y a eu un problème. J'ai vu un homme qui avait un

 27   fusil et qui avait pris des biens.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez répondu à ma question.


Page 24446

  1   Qu'est-ce que vous avez fait à ce moment-là ? Vous l'avez arrêté ? Vous

  2   l'avez fait savoir à vos supérieurs ? Qu'est-ce que vous avez fait ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour être tout à fait honnête, nous n'avons

  4   rien fait; nous avions un problème. Il a dirigé son fusil vers nous, et

  5   pour éviter les problèmes, nous l'avons simplement laissé passer.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, vous étiez là en tant qu'officiers

  7   de police, armés, pour protéger les biens des autres, et puis vous dites :

  8   Eh bien, ils utilisaient des armes et nous n'avons rien fait. Est-ce que

  9   c'est vraiment votre témoignage concernant la façon dont vous avez rempli

 10   vos devoirs ou pas ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, ça a été le seul cas. En fait, nous

 12   souhaitions simplement éviter qu'il y ait des problèmes. On ne voulait pas

 13   tirer, on ne voulait pas abattre cette personne. Nous savions que cet

 14   homme-là avait du bétail avant la guerre, et on l'a laissé filer. C'était

 15   tout ce que nous pouvions faire.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, pendant toute cette période, tous

 17   ces jours-là, vous n'avez vu qu'une personne piller, et puis vous avez

 18   décidé de ne pas arrêter cette personne-là ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a eu d'autres cas aussi, mais je ne me

 20   souviens pas vraiment de tous les cas, mais je suis sûr qu'il y en avait

 21   d'autres, des cas où l'on confisquait les biens, on les mettait dans des

 22   entrepôts spéciaux. Certains étaient stockés au poste de police et d'autres

 23   étaient entreposés au grand magasin où il y avait un entrepôt où tous les

 24   objets confisqués étaient stockés.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez rédigé un document

 26   décrivant ce qui avait été saisi, confisqué, ce qui avait été remis aux

 27   supérieurs hiérarchiques, de manière à ce qu'on puisse faire état de

 28   l'ensemble de vos activités et en faire rapport ?


Page 24447

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Nous ne rédigions aucun document. Nous

  2   remettions les objets à celui qui était en poste à l'entrepôt, et c'est lui

  3   ensuite qui dressait une liste de tous les objets qui leur étaient remis.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et que faisiez-vous de ceux qui

  5   s'étaient rendus coupables de ces actes de pillage ? Les arrêtiez-vous ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, nous ne les arrêtions pas. Nous ne

  7   faisions que confisquer les objets.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous invite, Maître Ivetic, à

  9   poursuivre.

 10   Monsieur McCloskey.

 11   M. McCLOSKEY : [interprétation] Puisque nous en sommes presque à la fin de

 12   cette audience, est-ce qu'on pourrait savoir quelle est l'origine ethnique

 13   des personnes qui revenaient, pour éviter tout malentendu.

 14   M. IVETIC : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur, vous avez entendu la question de M. McCloskey. Est-ce que

 16   vous pourriez nous fournir des informations quant à l'origine ethnique des

 17   personnes qui revenaient vers Srebrenica pendant la période au cours de

 18   laquelle vous étiez en patrouille, c'est-à-dire cette période de huit jours

 19   ?

 20   R.  Les personnes qui revenaient à Srebrenica, qui étaient à Srebrenica à

 21   ce moment-là, étaient d'origine ethnique serbe.

 22   Q.  Merci.

 23   M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 24   vous aviez d'autres questions ?

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. Nous n'avons pas d'autres

 26   questions.

 27   M. IVETIC : [interprétation]

 28   Q.  Au paragraphe 11 de votre déclaration, vous parlez d'un carnet de bord


Page 24448

  1   dont était responsable --

  2   R.  Ce registre ou ce tableau reprenant les différentes équipes du

  3   personnel était au poste de sécurité publique de Bratunac.

  4   M. IVETIC : [interprétation] Je souhaiterais que nous examinions le

  5   document 65 ter 31002.

  6   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

  7   Juges, le document n'est pas disponible sur e-court.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic.

  9   M. IVETIC : [interprétation] Nous examinerons donc la version de la Défense

 10   de ce même document. Un petit instant. Peut-on essayer à nouveau, il s'agit

 11   du 31002 ?

 12   Q.  Monsieur, vous reconnaissez le document qui apparaît à l'écran ? Si

 13   c'est le cas, est-ce que vous pourriez nous dire de quoi il s'agit ?

 14   R.  Oui, je le reconnais. Je reconnais le document. Il s'agit d'une liste

 15   de personnel employé au poste de police de Bratunac. On y voit la date au

 16   haut du texte, il s'agit de juillet 1995. C'est à cet endroit-là que l'on

 17   saisit les informations relatives aux activités de l'officier de

 18   permanence, les tâches accomplies au cours de cette période-là.

 19   Q.  Si nous examinons la version anglaise qui est plus lisible, on voit

 20   certaines annotions, là, des sigles "PR" et "BD". Que signifient ces deux

 21   abréviations et qu'est-ce qui les distingue, PR et BD ?

 22   R.  Ces abréviations font référence à d'astreinte pour PR, et pour BD, cela

 23   signifie que l'officier en question est en activité de combat.

 24   M. IVETIC : [interprétation] Et si l'on examine la deuxième page de la

 25   version anglaise, ça devrait être la même page dans la version B/C/S.

 26   Q.  Il s'agit de la ligne 36 de ce document qui fait référence à vous,

 27   Monsieur.

 28   M. IVETIC : [interprétation] Et si l'on fait défiler le texte jusqu'à la


Page 24449

  1   colonne correspondant aux 10 et 11 juillet. Si l'on fait un gros plan de

  2   l'original en B/C/S, peut-être, s'il vous plaît.

  3   Q.  Monsieur, il y a une autre abréviation en cyrillique pour ces deux

  4   dates remplies pour vous. Est-ce que vous voulez bien donner lecture de

  5   cette abréviation en cyrillique, donc, pour les deux dates que sont le 10

  6   juillet et le 11 juillet 1995 ?

  7   R.  10 et 11 juillet, Konjevic Polje, de 8 à 8, le 10, et puis le 11, il

  8   est dit là aussi de 8 à 8, KP. Konjevic Polje.

  9   Q.  KP, ça correspond à quoi ? Histoire que les choses soient parfaitement

 10   claires.

 11   R.  KP correspond à Konjevic Polje, le poste de contrôle de Konjevic Polje.

 12   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Et la période de temps, de 8 à 8, en

 13   dessous de ce 8 heures à 8 heures, il y a quelque chose en dessous. A quoi

 14   cela correspond-t-il ?

 15   M. IVETIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut faire un gros plan de ces

 16   deux cases.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est difficile à lire.

 18   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous arrivez à le voir maintenant ?

 19   Vous voyez la case ou la ligne 36 ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est probablement l'heure, ou plutôt, le

 21   temps passé au poste de contrôle. Vingt-quatre, j'imagine que ça veut dire

 22   24 heures. Je pense que c'est ça, hein. Ça a l'air d'être 24.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.

 24   M. IVETIC : [aucune interprétation]

 25   M. McCLOSKEY : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais

 26   c'est la lecture que nous faisons nous-mêmes de ce document. C'est ainsi

 27   que nous l'interprétons. Et je sais qu'il y a des points d'interrogatoire

 28   sur la version anglaise, mais tous ceux qui arrivent à déchiffre l'original


Page 24450

  1   sont d'accord.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, ça serait KP 08-08, souligné, et

  3   ensuite une mention. C'est à cela que vous faites référence, la mention en

  4   dessous de la barre ?

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, et en dessous de la barre, 24.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Et donc, d'après votre

  7   interprétation, les deux références concernent le cadre temporel, donc de 8

  8   à 8, 24 heures ? Ou y a-t-il une autre signification à ce deuxième chiffre

  9   ?

 10   Je ne sais pas, Maître Ivetic, avez-vous une interprétation à fournir ?

 11   M. IVETIC : [interprétation] C'est bien ce qui semble être écrit. Bien sûr,

 12   ces annotations manquent dans la version anglaise, c'est pourquoi nous

 13   étudions ces entrées en B/C/S, telle qu'obtenue de la part de l'Accusation.

 14   Et nous avons aussi une version de la déposition, la version utilisée dans

 15   l'affaire Karadzic, qui était dépourvue de l'original en B/C/S. Et M.

 16   McCloskey a été très obligeant et nous a fourni la version B/C/S dont

 17   disposait l'Accusation.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Donc, les parties au procès se sont

 19   mises d'accord pour constater qu'il s'agit d'un 8, puis d'un 8 qui est

 20   souligné et suivi du numéro 24.

 21   M. IVETIC : [interprétation] Oui. Et nous avons aussi les lettres KP en

 22   cyrillique qui figurent au-dessus.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre.

 24   M. IVETIC : [interprétation] Mais, Monsieur le Président, je vois que

 25   l'heure de lever la séance est passée.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez raison.

 27   Maître Ivetic, vous aurez besoin de quelque 15 à 20 minutes demain,

 28   j'imagine ?


Page 24451

  1   M. IVETIC : [interprétation] Environ 15 minutes. Plutôt 15 minutes.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

  3   Monsieur Deronjic, nous allons lever la séance pour aujourd'hui. Nous

  4   allons vous revoir demain matin à 9 heures 30. Entre-temps, je vous donne

  5   la consigne de ne parler ni de communiquer avec qui que ce soit au sujet de

  6   votre déposition, qu'il s'agisse de la partie de la déposition que vous

  7   avez déjà fournie aujourd'hui ou de celle qu'il vous reste à fournir

  8   demain.

  9   Si vous avez bien compris cette consigne, vous pouvez suivre M.

 10   l'Huissier.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 12   [Le témoin quitte la barre]

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous levons la séance pour aujourd'hui.

 14   Nous reprenons nos travaux demain, mardi, le 22 juillet, à 9 heures 30 du

 15   matin, dans cette même salle d'audience, la salle d'audience numéro I.

 16   --- L'audience est levée à 14 heures 17 et reprendra le mardi, 22 juillet

 17   2014, à 9 heures 30.

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28