Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 30 mars 2015

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 34.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes les personnes dans ce

  6   prétoire et à l'extérieur.

  7   Monsieur le Greffier, veuillez citer l'affaire.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, je vous

  9   souhaite bonjour. Il s'agit de l'affaire IT-09-92-T, le Procureur contre

 10   Ratko Mladic.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 12   A cause des circonstances malheureuses que nous n'avons pas pu prévoir, le

 13   Juge Fluegge n'est pas avec vous ce matin. Il a eu des problèmes avec le

 14   voyage. Et c'est pour cela qu'il n'a pas pu être ici avec nous aujourd'hui.

 15   Nous allons donc siéger en vertu de l'article 15 bis comme nous l'avons

 16   fait vendredi dernier. Et il va être là demain à nouveau, donc le Juge

 17   Fluegge n'a pas été en mesure de s'assister au procès aujourd'hui. Et moi-

 18   même et le Juge Moloto, nous pensions qu'il en est dans l'intérêt de la

 19   justice que de continuer en son absence.

 20   Entre-temps, je vais aborder quelques points. Tout d'abord, il s'agit d'une

 21   carte qui a été introduite par le biais du Témoin Jevdjevic. D909. Au cours

 22   de la déposition de ce témoin, une carte a été annotée par le témoin, elle

 23   a été téléchargée dans le système du prétoire électronique, et ensuite

 24   versée au dossier en tant que pièce D909. Les Juges précisent que la carte

 25   proprement dite n'est pas la même chose que la copie scannée qui fait

 26   partie de la pièce à conviction et le Greffe devrait donc garder la filière

 27   de conservation de cette pièce.

 28   [Le témoin vient à la barre]


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Pelemis.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Pelemis, avant de poursuivre,

  4   je voudrais vous rappeler que vous êtes toujours tenu par la déclaration

  5   solennelle que vous avez prononcée au début de votre déposition, à savoir

  6   que vous allez dire la vérité, toute la vérité, et rien que la vérité. M.

  7   McCloskey va continuer avec son contre-interrogatoire.

  8   Monsieur McCloskey.

  9   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 10   LE TÉMOIN : MILORAD PELEMIS [Reprise]

 11   [Le témoin répond par l'interprète]

 12   Contre-interrogatoire par M. McCloskey : [Suite]

 13   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Pelemis.

 14   R.  Bonjour.

 15   Q.  Avant le week-end, mon collègue, Me Lukic, a signalé une erreur qui

 16   s'est glissée dans la question que je vous ai posée. Et je voudrais vous en

 17   parler. A la page 33 796, je vous ai demandé :

 18   "Vous savez qu'Erdemovic a déposé que vous avez donné l'ordre pour qu'ils

 19   tuent les gens donc -- vous n'étiez pas intéressé ?

 20   "Réponse : Je n'ai jamais donné cet ordre."

 21   Et la question, quand j'ai posé la question de la façon dont je l'ai posée,

 22   je n'ai pas été très précis. Parce que je vais vous dire exactement ce

 23   qu'Erdemovic a dit, comme ça, je ne vous induis pas en erreur. A la page 13

 24   756 de sa déposition en l'espèce, ligne 6, il a dit :

 25   "Comme je l'ai déjà dit, Brano Gojkovic, est venu dans nos dortoirs et il

 26   m'a dit ainsi qu'à Franc Kos et Zoran Gorenje de nous préparer, que nous

 27   allons partir en mission et que c'est Pelemis qui en avait donné l'ordre."

 28   Et ensuite, il a dit qu'il a reçu l'ordre de tuer, que c'est Brano Gojkovic


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  1   qui lui a communiqué cet ordre. Donc, nous considérons que la mission pour

  2   laquelle Erdemovic a dit que vous lui avez ordonné de partir en mission,

  3   cette mission-là, en passant par Gojkovic, nous considérons que vous avez

  4   donc donné l'ordre et que vous saviez qu'il fallait tuer les gens, que de

  5   cela qu'il s'agissait. Et est-ce que vous niez toujours cela ?

  6   R.  Oui, je nie cela, car je n'ai pas été en mesure de donner cet ordre. Il

  7   s'agit de Brano Gojkovic, c'était un soldat, il n'avait aucun pouvoir de

  8   commander, ni à Erdemovic, ni à Franc Kos, surtout pas à Erdomovic et à

  9   Franc Kos, d'ailleurs. Et si j'avais été présent, je n'aurais pas donné mes

 10   ordres comme cela, et pas dans cet ordre-là.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La seule chose que l'on vous a demandée,

 12   c'est si vous niez avoir donné cet ordre. Il ne s'agit pas de savoir si

 13   ceci aurait dû être fait, si vous auriez pu le faire. C'en est une autre

 14   question. Veuillez répondre aux questions posées telles que posées par M.

 15   McCloskey.

 16   Vous pouvez poursuive, Monsieur McCloskey.

 17   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, vous dites : "Je n'aurais pas pu

 19   donner cet ordre." Autrement dit, cela veut dire : "Je ne l'ai pas

 20   ordonné." C'est cela que vous dites, n'est-ce pas ? Est-ce que je vous ai

 21   bien compris ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuez.

 24   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 25   Q.  Et vous avez aussi contesté le nombre de victimes de la ferme de

 26   Branjevo, et je voudrais tirer cela au clair. P01673, la déposition à

 27   l'occasion de l'audience en vertu de l'article 61 en 1996, Erdemovic a

 28   dit:


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  1   "Le 16, à peu près 1 200 personnes, je ne connais pas le nombre exact, mais

  2   je pense que c'était cela le chiffre exact. Je fonde mon évaluation sur le

  3   nombre de bus arrivés, donc je suppose que c'était le nombre de civils

  4   tués."

  5   M. McCLOSKEY : [interprétation] Et maintenant, je vais demander d'examiner

  6   la pièce P01987. Dans le système de prétoire électronique, page 41 et 45 en

  7   B/C/S.

  8   Q.  Donc, ici, nous avons un rapport qui a été fait par un enquêteur, Dusan

  9   Janc, qui a fait le compte de gens des corps déterrés de la ferme de

 10   Branjevo, des tombes dans la ferme, et ainsi que des corps qui venaient des

 11   fosses secondaires de la ferme de Branjevo.

 12   Et après ces nombreuses années, des nombreuses tombes associées avec les

 13   massacres de la ferme de Branjevo ont fait l'objet d'exhumations. On a

 14   procédé aux analyses ADN. On a identifié et compté le nombre de personnes,

 15   de victimes. Et ce rapport qui se trouve au niveau de la page du compte

 16   rendu d'audience, 41 en anglais et 45 en B/C/S, on voit donc -- et on

 17   attend donc de voir qu'au moment où on a exhumé pour la première fois ces

 18   fosses en 1996, l'on avait trouvé 140 corps, et au cours des nombreuses

 19   années qui ont suivi, on a trouvé des nombreuses fosses secondaires par

 20   rapport à cette fosse-là. Et le chiffre total auquel on est arrivés, comme

 21   on peut le voir ici en B/C/S, donc Branjevo Pilica, donc on regarde le

 22   total pour Branjevo Pilica : 1 751 corps. Et vous savez sans doute

 23   qu'Erdemovic a dit aussi qu'il y avait à peu près 500 hommes musulmans

 24   gardés dans le centre culturel de Pilica et que ceux-là aussi ont exécutés.

 25   Et nous avons reçu les éléments de preuve indiquant qu'eux aussi, ils ont

 26   été enterrés dans la ferme de Branjevo.

 27   Donc, si vous faites l'addition de deux évaluations avancées par

 28   Erdemovic, 500 à Pilica et 1 000 à 1 200 à la ferme, eh bien, vous arrivez


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  1   à un chiffre qui est très proche du chiffre exact que l'on a établi 18 ans

  2   après le début de la guerre, après le début des événements. Donc, vous

  3   devez avouer qu'Erdemovic a été assez précis dans ses estimations, n'est-ce

  4   pas ?

  5   R.  Ecoutez, je ne peux rien vous dire, ni au sujet d'Erdemovic ni au sujet

  6   de cinq autres personnes à Sarajevo qui ont dit que ces chiffres étaient

  7   bien moindres. Mais si nous avons les statistiques aussi, donc moi, je veux

  8   bien accepter vos données. Est-ce que ces six hommes du 10e Détachement ont

  9   tué ces gens, je ne sais pas. Mais cela me semble peu probable, vu qu'ils

 10   n'étaient que six.

 11   Q.  Est-ce que vous saviez qu'ils ont été aidés par une unité de Bratunac,

 12   ce qu'Erdemovic a dit ?

 13   R.  Oui, les gars qui ont donné leur déclaration préalable à Sarajevo et

 14   qui ont déposé dans cette affaire ont dit cela. Et moi, j'ai posé la

 15   question aussi au mois de février et au mois de mars 1996, j'ai posé la

 16   question, je leur ai demandé cela, mais ils ne savaient pas qui étaient ces

 17   hommes.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey, à quoi vous faites

 19   référence exactement ? Vous dites que le témoin a avancé un autre chiffre,

 20   mais cela se trouvait où exactement dans sa déclaration ?

 21   M. McCLOSKEY : [interprétation] Ecoutez, je n'ai pas la référence exacte,

 22   parce qu'il a dit au cours de sa déposition, il a dit que ce chiffre était

 23   un peu trop grand pour lui.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais cela se trouve où exactement ?

 25   M. McCLOSKEY : [interprétation] Il l'a dit oralement au moment de sa

 26   déposition.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, quand vous demandez à une

 28   personne qui n'a pas de connaissances directes, si vous lui demandez de


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  1   vous dire quel chiffre est le bon chiffre et quel chiffre n'est pas bon,

  2   c'est difficile de se fier à une telle déposition si la personne n'a pas

  3   participé directement aux événements. Il vaudrait mieux lui montrer des

  4   documents, il vaudrait mieux se baser sur des pièces, de éléments de preuve

  5   documentaire. Et dans ce cas, s'il procède à une telle analyse, cela

  6   faciliterait le travail des Juges.

  7   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci.

  8   Pourrions-nous voir le document D320.

  9   Q.  Et je vais vous demander, Monsieur Pelemis, de penser à la date du 11

 10   juillet. Ce que vous devriez voir ici, c'est un ordre. Et je pense qu'on

 11   peut voir votre signature ici en serbe dans le document original en serbe.

 12   C'est vous qui avez signé cela ou c'est quelqu'un d'autre qui a signé pour

 13   vous ?

 14   R.  C'est Kos Franc qui a signé pour moi.

 15   Q.  Est-ce un document authentique ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Et au numéro 19 sur la liste, on voit un dénommé Zoran Obrenovic.

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Il y a eu une erreur, n'est-ce pas, la semaine dernière quand j'ai

 20   mentionné le surnom d'une personne qui a égorgé le Musulman dans la

 21   déposition de M. Erdemovic. M. Stojanovic a attiré mon attention là-dessus.

 22   Donc, à la page 13 741 de sa déposition, il a dit :

 23   "L'incident où l'on a tué un homme dont vous avez parlé qui s'appelait

 24   Maljic, eh bien, cela s'est produit avant que le général Mladic n'arrive;

 25   est-ce exact ?"

 26   Et vous avez dit :

 27   "Oui."

 28   Le surnom en question concerne le surnom de Zoran Obrenovic, Maljic,


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  1   c'était le surnom, il était connu sous ce surnom ?

  2   R.  Oui, Maljic.

  3   Q.  Donc, ça, c'était le surnom de Zoran Obrenovic ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Et c'est l'homme qui a égorgé ce Musulman sur vos ordres à Srebrenica;

  6   est-ce exact ?

  7   R.  Ce n'est pas cet homme-là. Cet homme était dans le commandement de la

  8   division, il n'était pas présent dans le centre. Et moi, je n'ai pas donné

  9   l'ordre de tuer ce civil.

 10   Q.  On va maintenant parler d'autre chose. Il s'agit d'une opération à

 11   laquelle vous avez participé, vous avec votre unité, dans la ville de

 12   Srebrenica au mois de juin 1995. Vous avez traversé le tunnel pour vous

 13   rendre dans la ville de Srebrenica. Avez-vous fait cela ?

 14   R.  Oui.

 15   M. McCLOSKEY : [interprétation] Et maintenant, nous allons examiner la

 16   pièce P1585. Deuxième page. Page suivante, s'il vous plaît. Page 3 en

 17   B/C/S. En anglais, c'est au milieu de la page, et je vais vous demander

 18   d'agrandir cela.

 19   Q.  Ici, nous avons un rapport de la FORPRONU concernant votre mission.

 20   "Un groupe d'une force inconnue a établi des positions de tir à deux

 21   endroits" --

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Cela se trouve où exactement dans le

 23   texte, Monsieur McCloskey ?

 24   M. McCLOSKEY : [interprétation] Au milieu, c'est vraiment le gros

 25   paragraphe au milieu sous l'intitulé "Reconstruction des événements."

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 27   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 28   Q.  "…(là où se trouvaient les canons des lanceurs). Ils ont tiré leurs


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  1   projectiles de façon simultanée sur Srebrenica. Un homme a été blessé quand

  2   ce projectile a touché sa maison. Après l'attaque, les soldats qui ont

  3   procédé au tir se sont retirés vers l'entrée de la mine sous le feu des

  4   mortiers. Il n'est pas sûr si un autre mortier de l'extérieur de l'enclave

  5   a tiré pour appuyer ce tir. Les gens ont quitté leurs maisons à Vitlovac

  6   près de la mine en direction de Srebrenica. Ils ont sans doute surpris

  7   certaines gens qui attendaient à l'entrée de la mine. On leur a tiré

  8   dessus. On a tué la femme, on a blessé l'homme. Le groupe qui a effectué

  9   l'attaque s'est sans doute retiré en passant par la mine."

 10   Donc vous êtes entrés par cette mine, vous avez tiré des obus, des Zolja,

 11   sur la ville même, vous avez tué une femme et vous êtes sortis.

 12   R.  Nous ne sommes pas entrés dans Srebrenica pour tirer sur la ville de

 13   Srebrenica. Nous avons voulu cibler le poste de police, le commandement de

 14   la brigade et le centre de communications, autrement dit, le bureau de la

 15   poste. Et après l'opération, personne ne m'a dit qu'il y avait qui que ce

 16   soit dans la rue, et je ne sais pas comment cette femme s'est-elle fait

 17   tuer. On nous a dit qu'il fallait surtout faire attention à ne pas toucher

 18   les maisons des civils. Donc nous avons tiré sur les bâtiments, les

 19   installations de la 28e Division et des positions militaires à Srebrenica.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de continuer, dans la deuxième

 21   ligne de votre citation, on peut lire :

 22   "Ils ont tiré leur projectile."

 23   Au pluriel. Parce qu'on ne voit pas bien le "s", mais il s'agit bien du

 24   pluriel, mais il s'agit bien du pluriel…

 25   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, effectivement. Merci, Monsieur le

 26   Président, d'avoir remarqué cela.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Après, on peut lire des gens ont fui.

 28   Donc ce n'est pas des gens, c'est "deux personnes ont pris la fuite," cet


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  1   homme et cette femme. C'est bien cela ?

  2   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, oui.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On peut poursuivre.

  4   M. McCLOSKEY : [interprétation] Nous allons examiner la pièce 65 ter 32371.

  5   Q.  Pourriez-vous nous dire quel a été l'objectif de cette mission qui

  6   s'est déroulée à Srebrenica ?

  7   R.  Vu que les forces de la 28e Division sortaient en permanence de la zone

  8   pour tuer des civils et des gens aux alentours de Srebrenica, nous avons

  9   reçu l'ordre d'agir pour neutraliser leur commandement, pour réduire le

 10   nombre de victimes du côté de la population serbe.

 11   Q.  Et est-ce que vous reconnaissez l'écriture ici dans ce document ? Nous

 12   avons eu cela de la cour d'Etat.

 13   R.  C'est mon écriture.

 14   Q.  Et qu'est-ce que vous avez fait ici, ça représente quoi exactement ?

 15   R.  C'est cette opération que nous avons menée à bien, une opération de

 16   sabotage, que nous avons effectuée dans le cadre de notre détachement. Donc

 17   vous avez "Franc Kos". Erdemovic Drazen, Marinovic Matija et Aris Leferis.

 18   Donc il s'agissait d'un groupe de sabotage, c'est la composition de ce

 19   groupe, et ceci comptait à peu près sept, huit personnes.

 20   Q.  On voit différents noms, Orkan -- décembre 1994. Ensuite, quelque chose

 21   qui n'est pas très lisible, 1995. Ensuite, on voit le 20 février 1995. De

 22   quoi s'agit-il ? Parce qu'on voit des dates, des noms. Est-ce qu'il s'agit

 23   des différentes opérations ? Nous pouvons aussi regarder la page suivante.

 24   R.  Oui, oui, montrez-moi la page suivante, s'il vous plaît. Oui, donc, il

 25   s'agit des opérations de sabotage et les gens qui ont pris part à ces

 26   opérations, et tout cela est chiffré. C'est la façon habituelle d'écrire

 27   cela.

 28   Q.  Et on peut lire en haut, "L'adduction en eau de la région…"


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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Ce document, vous l'avez écrit à quel moment exactement ?

  3   R.  Après la guerre. Après la signature des accords de Dayton. J'ai fait

  4   une analyse des documents qui se trouvaient dans les archives, et donc j'ai

  5   fait cela sur la base de la documentation.

  6   Q.  Où avez-vous trouvé les archives de la 10e Unité de Sabotage ? A quel

  7   endroit avez-vous fouillé ces archives ?

  8   R.  Non, ces documents émanent de chez moi, de mon appartement, dans lequel

  9   les services de Sécurité de l'Etat de la Serbie ont procédé à une fouille.

 10   Q.  Je pensais vous avoir entendu dire à l'instant que vous aviez rédigé ce

 11   document après la guerre en vous appuyant sur les archives du 10e

 12   Détachement de Sabotage. Ma question a consisté, par conséquent, à vous

 13   demander : à quel endroit vous avez pu avoir accès aux archives de ce 10e

 14   Détachement de Sabotage ?

 15   R.  Ces documents étaient au sein du 10e Détachement de Sabotage lorsque

 16   j'en étais le commandant. Et j'ai écrit ce que vous voyez ici au moment du

 17   transfert de responsabilité, lorsque j'ai été démis de mes fonctions. Mais

 18   toutes les archives se trouvaient au commandement du 10e Détachement de

 19   Sabotage. Ce qui manque ici, ce sont les rapports financiers, par exemple,

 20   les compensations financières que chacun des membres du détachement a

 21   reçues en termes de montants, et le rapport du commandant de groupe relatif

 22   au succès de chacune des actions engagées. L'ensemble constitue tous les

 23   documents disponibles.

 24   Q.  Donc cette adduction d'eau était destinée à quelle ville ?

 25   R.  Il s'agissait de l'adduction d'eau régionale relative à Tuzla. Mais,

 26   parce que les civils étaient concernés, il a été décidé de ne pas faire

 27   sauter les canalisations d'eau en tant que telles mais le pont qui menait à

 28   ce centre d'adduction d'eau afin d'éviter des pertes humaines et des dégâts


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  1   matériels importants.

  2   Q.  Pourquoi faire sauter une adduction d'eau destinée à une ville habitée

  3   par des civils, pour commencer ? Bien sûr, à l'intérieur de la ville, il y

  4   a aussi des militaires.

  5   R.  Je ne sais pas quelles étaient les informations dont disposaient la

  6   direction et le service de renseignements. Est-ce que vous m'entendez ? Je

  7   ne suis pas en mesure de discuter de ce que savait ou ne savait pas

  8   l'administration ou des raisons pour lesquelles l'adduction d'eau était

  9   importante en tant que telle. Je ne suis pas davantage en mesure de

 10   discuter, pas plus que qui que ce soit d'autre d'ailleurs, à quel moment

 11   l'immeuble de la télévision de Belgrade a été bombardé en 1999.

 12   Q.  Voyons la page suivante du document.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais un éclaircissement au sujet

 14   de la dernière réponse du témoin.

 15   Le bombardement de l'immeuble de la télévision de Belgrade; vous parlez du

 16   bombardement de l'OTAN ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourquoi est-ce que vous ne sauriez pas

 19   en discuter ? D'ailleurs, vous n'êtes pas prié d'en discuter ici, mais

 20   pourquoi est-ce que vous avez jugé utile de dire que vous ne sauriez pas en

 21   discuter ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, je ne sais pas pourquoi celui qui a

 23   reçu l'ordre de bombarder le siège de la télévision n'a pas pu en discuter

 24   ou parler de cet ordre. Moi, je suis dans la même situation. J'ai reçu un

 25   ordre m'imposant de faire sauter l'adduction d'eau régionale à condition de

 26   réduire au minimum le nombre des pertes humaines. Et cette action,

 27   finalement, n'a pas eu lieu. Mais je ne saurais vraiment pas dire pourquoi

 28   ce système d'adduction d'eau semblait poser problème.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites que vous avez reçu l'ordre de

  2   faire sauter le centre d'adduction d'eau en évitant les pertes humaines, et

  3   vous ne l'avez pas fait. C'est bien cela, n'est-ce pas ? Donc, apparemment,

  4   vous étiez en mesure de vous faire votre propre avis quant au fait de

  5   savoir si cette action était légale ou pas.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Exactement. D'ailleurs, c'était le cas pour

  7   toutes les actions, pas seulement celle-ci. Il y a eu des actions qui

  8   étaient demandées qui visaient des cibles civiles, qui auraient donc causé

  9   des pertes parmi les cibles civiles, et ces actions étaient arrêtées avant

 10   d'avoir commencé. Cela s'est passé à plusieurs reprises.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, ce n'est pas exactement la même

 12   chose que ce que vous nous avez dit il y a un instant, à savoir que vous

 13   n'étiez pas en mesure de discuter de ce genre de sujets. Vous rappelez-vous

 14   quelle a été la réaction de vos supérieurs lorsque, apparemment, selon ce

 15   que vous dites, vous avez refusé d'obtempérer à leur ordre ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Aucune réaction. Etant donné que l'ordre

 17   demandait de ne pas nuire aux civils et qu'il y avait une petite maison

 18   juste à côté du centre d'adduction d'eau dans laquelle se trouvaient des

 19   civils et sans doute des réfugiés, nous avons dit à nos supérieurs quelle

 20   était la situation. Il n'y a pas eu de commentaire. La seule réaction que

 21   nous avons reçue de leur part a été : Eh bien, dans ces conditions, ça va.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais pourquoi faire sauter le pont ? Je

 23   veux dire, quel était l'objectif poursuivi ? Si vous aviez reçu l'ordre de

 24   faire sauter l'adduction d'eau et que finalement vous avez fini par faire

 25   sauter le pont, pour quelle raison ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que la route qui menait au pont était

 27   utilisée par des unités militaires.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous n'avez pas reçu l'ordre de détruire


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  1   cette route ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, mais il y a toujours un ordre secondaire

  3   : si la cible primaire est impossible à atteindre, alors on cherche à

  4   déterminer quelle cible secondaire peut être choisie qui correspond à la

  5   cible primaire, de façon à créer une diversion. C'est donc la deuxième

  6   cible qui doit être prise en compte dans ce cas.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, vous avez précisément reçu l'ordre

  8   de faire sauter le pont au cas où vous ne parviendriez pas à faire sauter

  9   le centre de l'adduction d'eau ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. L'ordre était de faire sauter le

 11   château d'eau. Et au cas où le château d'eau ne pouvait pas être atteint,

 12   il était ordonné de choisir une cible mineure qui était désignée afin

 13   d'infliger quelques dommages à l'ABiH.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cet ordre a été donné par écrit ou

 15   autrement ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, nous n'avions pas d'ordre écrit à ce

 17   moment-là.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder, je vous prie.

 19   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 20   Q.  Eh bien, nous voyons dans ce document au regard du numéro 9 une mention

 21   de l'incursion dans le tunnel de Srebrenica en juin 1995. Et je rappelle

 22   qu'il s'agit des notes rédigées par vous. Donc, ceci a bien été écrit

 23   également par vous ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Nous voyons dans un rapport des Nations Unies que vous êtes parvenu à

 26   toucher des structures civiles lorsque vous avez tiré vos roquettes ou vos

 27   Zolja ou les obus de vos lance-roquettes multiples, quelle que soit l'arme

 28   utilisée. De quelles armes exactement s'agissait-il lorsque vous avez tiré


Page 33818

  1   sur la ville ?

  2   R.  Je vois ici qu'une maison a été touchée par une Zolja de 64

  3   millimètres.

  4   Q.  Nous voyons dans ce document vous êtes entré dans la ville et que votre

  5   action a provoqué une grande panique et un grand émoi au sein de la

  6   population civile, n'est-ce pas ?

  7   R.  Non, pas au sein de la population civile, mais au sein du commandement

  8   de la 28e Division et de la brigade. C'était un avertissement qui leur

  9   était destiné afin qu'ils cessent leurs incursions et qu'ils cessent de

 10   tuer les Serbes dans les environs de Srebrenica.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey, lorsque vous dites

 12   "nous voyons ici", en tout cas, d'après ce que je suis capable de lire moi-

 13   même, rien dans ce document n'évoque une quelconque "panique et émoi au

 14   sein de la population civile". Donc, vous devriez établir une distinction

 15   claire entre ce que nous voyons, comme vous le dites au témoin dans le

 16   document, et ce qui pourrait être la position de l'Accusation, mais que

 17   nous ne voyons pas écrit dans le document. Nous devrions agir ainsi de

 18   façon à éviter toute confusion et que tout soit clair.

 19   Veuillez procéder.

 20   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 21   Q.  Monsieur, vous avez tiré vos Zoljas sur la ville, dans des quartiers

 22   habités, et vous avez touché une maison. L'objectif de cette action

 23   consistait à effrayer les habitants, les civils, et à provoquer désarroi et

 24   panique au sein des civils, des militaires ou de qui que ce soit d'autre,

 25   n'est-ce pas ?

 26   R.  Non, Monsieur le Procureur. Cinquante personnes sont passées à travers

 27   ce tunnel et les maisons civiles n'ont jamais été notre objectif, les

 28   maisons habitées par les Musulmans. Il n'a jamais été dans notre intention


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  1   de tuer un seul civil. Si telle avait été notre intention, nous aurions pu

  2   tuer toutes les personnes qui se trouvaient dans le quartier. Nous avons

  3   pénétré dans un quartier où il se trouvait au moins 300 ou 400 personnes et

  4   nous sommes revenus par le même chemin. Personne n'a été touché. Nous avons

  5   visé les installations qui avaient été désignées à notre intention sur une

  6   carte, et dont nous savions où elles se trouvaient. Si un seul Zolja a raté

  7   sa cible à 3 heures du matin, ça, c'est une autre histoire. Je ne sais pas

  8   qui pouvait tirer et comment les choses se sont passées exactement, mais

  9   cela n'était pas intentionnel.

 10   Q.  Donc, le Zolja a été tiré par accident. Est-ce que c'est ce que vous

 11   dites ? Il n'a pas été délibérément tiré ?

 12   R.  Ce Zolja a été tiré dans l'intention de toucher l'une des trois ou

 13   quatre cibles dont je viens de parler.

 14   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je demande le versement au dossier du

 15   document 65 ter 32371.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document devient la pièce P7272.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et est versé au dossier.

 19   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 20   Q.  Passons maintenant à un autre sujet. Revenons sur votre déclaration

 21   préliminaire qui constitue la pièce D978.

 22   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je demande l'affichage de la page 2 dans

 23   les deux langues, sur les écrans.

 24   Q.  Nous voyons ici ce que vous dites au paragraphe 2 :

 25   "Entre le 20 mai et le mois d'août 1992, je faisais partie d'une compagnie

 26   indépendante qui avait ses positions aux environs de Kladanj.

 27   "Au mois d'août 1992, un détachement d'assaut a été créé, dont la

 28   base se trouvait à Vlasenica, et j'ai fait partie de ce détachement


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  1   jusqu'au mois de mars 1993", et le texte se poursuit.

  2   Où vous trouviez-vous exactement au sein de cette compagnie indépendante

  3   dont vous dites avoir fait partie jusqu'au mois d'août 1992 ?

  4   R.  La Compagnie indépendante Pelemis comptait 90 hommes et était déployée

  5   sur la ligne de front dans la direction de Kladanj. Notre ligne de défense

  6   s'étendait sur 4 ou 5 kilomètres. Nous nous trouvions dans le seul village

  7   de la municipalité de Kladanj qui était encore debout, c'est-à-dire dans

  8   lequel tous les civils n'avaient pas été encore tués et où toutes les

  9   maisons n'avaient pas encore été incendiées.

 10   Q.  Pour être clair, de quel village êtes-vous en train de parler en disant

 11   que vous le défendiez ?

 12   R.  Le village se trouvait à Pelemisi, à un kilomètre à peu près de la

 13   route reliant Tuzla à Kladanj.

 14   Q.  Donc, lorsque vous avez décrit votre compagnie indépendante, c'était la

 15   compagnie indépendante de Pelemisi qui comptait 90 hommes ?

 16   R.  Exact. Et elle faisait partie de la 1ère Brigade de Birac Sekovici.

 17   Q.  Qui commandant cette unité ?

 18   R.  Vous parlez de la compagnie ou de la Brigade de Birac ?

 19   Q.  Je parle de l'unité de Pelemisi.

 20   R.  Entre le 24 mai et le 20 août, à peu près, c'est-à-dire pendant deux

 21   mois à peu près, c'est moi qui en étais le commandant.

 22   Q.  Qui commandait la Brigade de Birac pendant cette même période ?

 23   R.  Je crois que c'était Svetozar Andric.

 24   Q.  Très bien. Passons maintenant à l'examen d'une carte, le document 65

 25   ter numéro 32342. Pourriez-vous décrire ce village de Pelemisi ? Je vous

 26   demande d'ailleurs en préambule si ce village était relié à votre famille

 27   d'une quelconque façon.

 28   R.  Oui. Ce village comptait 30 maisons et se trouvait sur la ligne de


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  1   front même. C'était un village dans lequel résidaient tous les membres de

  2   ma famille. Ma mère même habitait sur la ligne de front à une centaine de

  3   mètres à peine des premières tranchées. Nous avons été attaqués cinq ou six

  4   fois et avons eu une douzaine de morts de notre famille tués avant le 1er

  5   août.

  6   Q.  Très bien. J'aimerais simplement que nous nous orientions un peu mieux

  7   à l'aide de cette carte, qui date de 1992.

  8   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je demanderais qu'on agrandisse la carte à

  9   l'écran, la version serbe en tout cas. Malheureusement, le titre de la

 10   carte n'a pas été traduit en anglais.

 11   Q.  Pourriez-vous donner lecture du titre en serbe, écrit en cyrillique ?

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si, je crois que le titre est bien

 13   traduit dans la version anglaise. Je ne le vois pas bien sur mon écran.

 14   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 15   Q.  Pourriez-vous lire le titre en cyrillique ?

 16   R.  "Déploiement des deux côtés à partir du 1er novembre 1992."

 17   Q.  D'accord.

 18   M. McCLOSKEY : [interprétation] Ceci est une carte qui couvre une grande

 19   région. J'aimerais maintenant que nous passions à une autre carte, le

 20   document 65 ter numéro 32343, qui couvre une région plus circonscrite. Nous

 21   nous contenterons de la version serbe de la carte sur l'écran, ce qui

 22   permettra de l'agrandir suffisamment en plein écran. Encore un peu

 23   d'agrandissement, je vous prie.

 24   Q.  Vous conviendrez qu'au centre de la carte à peu près, dans cette

 25   étiquette rouge, on lit les mots Brigade d'infanterie Sekovici de Birac,

 26   n'est-ce pas ?

 27   R.  Exact.

 28   M. McCLOSKEY : [interprétation] Pourrait-on agrandir un peu l'image à


Page 33822

  1   l'écran. Encore un peu, je vous prie. Très bien. Merci.

  2   Q.  Est-ce que vous voyez Pelemisi sur la carte, qui se trouve entre les

  3   lignes bleue et rouge ?

  4   R.  Je le vois.

  5   Q.  Je vous demanderais de tracer un cercle autour du nom de Pelemisi.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-on donner un stylet au témoin.

  7   LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

  8   M. McCLOSKEY : [interprétation]

  9   Q.  Très bien. Et un peu plus à droite, au-delà de la ligne rouge, on voit

 10   Trnovo. Est-ce que Pelemisi était considéré comme faisant partie

 11   généralement de la région de Trnovo ?

 12   R.  Non. Avant la guerre, Pelemisi faisait partie de la municipalité de

 13   Kladanj et Trnovo faisait partie de la municipalité de Sekovici.

 14   Q.  D'accord.

 15   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je demande au versement au dossier de cette

 16   carte.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] La carte devient la pièce à conviction

 19   P7273.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui est admise au dossier de l'espèce.

 21   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 22   Q.  Pendant que vous exerciez votre commandement sur cette unité de 90

 23   hommes, est-ce que vous avez fait des prisonniers parmi les Musulmans de

 24   Pelemisi ? Dans le village de Pelemisi même ou au voisinage immédiat ?

 25   R.  Au mois de juin, le chef du poste de police de Kladanj, Stanimir

 26   Pelemis, et d'autres membres de ma famille, je dis cela parce que quatre

 27   officiers de police ont été faits prisonniers à Kladanj le 23 mai, avant la

 28   fin du conflit, donc les 24 et 25 mai, au moment où les Musulmans ont


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  1   occupé tous les villages serbes et au moment où tous les Serbes ont pris la

  2   fuite, nous n'avions plus aucun endroit où loger des gens, et nous les

  3   avons envoyés à Sekovici. Stanimir Pelemis et les autres membres de ma

  4   famille dont je viens de parler ont été sollicités par les proches de ceux

  5   qui étaient portés disparus, 28 au total à peu près, qui se sont adressés

  6   au poste de police de Vlasenica et ont emmené six ou sept femmes et quatre

  7   ou cinq hommes pour procéder à un échange. Je n'ai pas pu les renvoyer. Je

  8   leur ai donné la possibilité de procéder à cet échange.

  9   Je sais qu'à deux reprises ils ont envoyé des femmes musulmanes à Kladanj

 10   pour parler d'un échange, mais rien de cela n'est parvenu à réalisation. Et

 11   puis, à ce moment-là, j'ai dit à Radenko Zoranovic, parce que son frère et

 12   deux autres proches à lui se trouvaient parmi ces personnes, je lui ai dit

 13   que si l'échange ne réussissait pas, il fallait renvoyer tous les Musulmans

 14   à l'endroit d'où ils étaient venus. Je sais que les femmes musulmanes

 15   retournaient à Vlasenica et que les hommes sont restés à Trnovo et ont

 16   rejoint le bataillon.

 17   Le 20 août, je suis resté dans le secteur. Et par la suite, je n'ai plus eu

 18   aucun pouvoir sur ce genre de questions et je ne sais pas ce qui s'est

 19   passé.

 20   Mais je dois dire quelque chose d'autre également. Au cours du mois de

 21   juillet, à partir de Vlasenica, pendant la nuit deux autobus sont arrivés à

 22   bord desquels se trouvaient des Musulmans, et ces personnes de Trnovo et de

 23   Pelemisi ont escorté ces 120 personnes à peu près qui allaient dans la

 24   direction de Kladanj. Par la suite, j'ai appelé le commandant Andric à qui

 25   j'ai demandé d'avertir les personnes de Vlasenica d'arrêter de faire venir,

 26   de faire traverser la ligne à des personnes, parce qu'il y avait une

 27   autoroute qui conduisait de Vlasenica à Kladanj. C'est tout ce que je sais

 28   de cet événement.


Page 33824

  1   Q.  Donc votre commandant, M. Andric, était également au courant du fait

  2   qu'il y avait des femmes à ce moment-là à Pelemisi ?

  3   R.  Je ne sais pas s'il le savait. Je crois que tout cela était organisé

  4   par la hiérarchie policière et que le poste de police de Sekovici a

  5   participé à cela. Il y avait tous les autres policiers qui étaient

  6   concernés. Je ne suis jamais allé à Kladanj, donc je ne sais pas ce qui

  7   s'est passé exactement. Les arrestations ont eu lieu la veille du début de

  8   l'opération, et il y a eu une tentative de procéder à un échange qui ne

  9   s'est jamais matérialisé. En 1997, nous avons découvert ces personnes dans

 10   le village de Bretelovici [phon] près de Kladanj. Elles auraient toutes été

 11   tuées.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais une précision. Que voulez-

 13   vous dire lorsque vous avez dit "amener quelqu'un dans le but d'un échange"

 14   ? Est-ce que c'est vous qui proposiez vos hommes pour un échange ou est-ce

 15   que vous faisiez venir des personnes de la partie adverse en proposant

 16   qu'elles soient échangées contre les vôtres ? Qu'est-ce que cela veut

 17   dire ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Les policiers qui ont quitté Kladanj et se

 19   sont retrouvés à Vlasenica ont proposé aux Musulmans d'être échangés contre

 20   des Serbes qui étaient restés à Kladanj. C'est comme cela que j'ai compris

 21   toute cette histoire. Monsieur le Président, nous n'avions pas de

 22   conditions particulières. Nous avions déjà vécu des situations du même

 23   genre.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous auriez pu les relâcher, n'est-

 25   ce pas ? Je veux dire, faire venir des civils pour procéder à un échange

 26   signifie que vous les proposiez pour un échange même si leur désir allait

 27   dans le sens inverse ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je dis simplement qu'on a fait venir ces


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  1   personnes qui ont dit qu'elles souhaitaient sortir de la ville pour se

  2   rendre en territoire tenu par l'ABiH. Ces personnes souhaitaient bénéficier

  3   de cet échange contre les civils serbes qui étaient restés à Kladanj.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais "échange" signifie que l'on

  5   souhaite obtenir quelque chose en retour de ce que l'on propose. Si des

  6   gens veulent partir, pourquoi est-ce qu'il est nécessaire de procéder à un

  7   échange ? Il suffit de relâcher ces civils parce qu'on ne peut plus les

  8   garder en détention ou qu'on est dans une situation complexe, de façon à ce

  9   que ces personnes redeviennent indépendantes, mais il n'est pas nécessaire

 10   de procéder à un échange.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Si on m'avait posé la question, je ne les

 12   aurais pas fait venir. Je n'aurais pas agi de cette façon. Mais il

 13   s'agissait de personnes qui m'étaient proches et d'amis à moi qui étaient

 14   restés sur place. Donc il fallait tenter quelque chose. J'ai compris que si

 15   les choses n'allaient pas plus vite, elles risquaient de rentrer à

 16   Vlasenica parce qu'elles étaient un fardeau pour le village situé sur le

 17   front. Je n'avais plus de nourriture pour les miens, et encore moins pour

 18   d'autres.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais les vôtres méritaient de la

 20   nourriture et les autres pas ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Ce que je dis, c'est que même les miens

 22   n'avaient pas suffisamment à manger. En même temps, les autres avaient la

 23   même chose que les miens. A ce moment-là, nous n'avions pas d'appui

 24   logistique. Sekovici est une municipalité très désirée. Et le peu de bétail

 25   que nous avions a été très rapidement utilisé. Ce que j'essaie de dire,

 26   c'est que même mes hommes n'avaient pas suffisamment à manger.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et dans la suite de votre propos, vous

 28   avez ajouté que, par conséquent, les autres devenaient un fardeau.


Page 33826

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Une seule bouche supplémentaire à nourrir

  2   était un fardeau. J'ai tenté à plusieurs reprises de faire partir mes

  3   hommes de Pelemisi, en particulier les plus âgés et les infirmes. Tout le

  4   monde se tournait vers moi pour demander assistance, et je n'avais pas

  5   suffisamment à ma disposition. Sekovici était une municipalité très pauvre.

  6   Donc j'ai mendié autour de moi pour voir si quelqu'un pouvait me donner de

  7   la farine, du sel ou d'autres ingrédients.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder, Monsieur McCloskey.

  9   Ou, plutôt, je jette un coup d'œil à l'horloge. Nous allons faire d'abord

 10   une pause.

 11   Nous aimerions, Monsieur, vous revoir dans cette salle dans 20 minutes.

 12   Vous pouvez maintenant sortir de la salle en suivant M. l'Huissier.

 13   [Le témoin quitte la barre]

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous reprendrons nos travaux à 11 heures

 15   moins dix.

 16   --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

 17   --- L'audience est reprise à 10 heures 58.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous attendons l'entrée du témoin dans

 19   le prétoire. Nous allons donc utiliser ce temps pour le D920, qui avait

 20   reçu une cote provisoire MFI le 2 mai [comme interprété], en attendant la

 21   traduction. Et le 10 mars, la Défense a envoyé un e-mail à la Chambre et à

 22   l'Accusation pour faire savoir que la traduction avait été téléchargée dans

 23   le prétoire électronique, et la Chambre voudrait savoir si l'Accusation a

 24   des objections.

 25   [Le témoin vient à la barre]

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et ne serait pas surpris de recevoir ces

 27   informations après la pause.

 28   Monsieur McCloskey, vous pouvez poursuivre.


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  1   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci.

  2   Q.  Monsieur Pelemis, à la page 18 du compte rendu provisoire, je vous ai

  3   demandé la chose suivante :

  4   "Et pendant que vous étiez commandant de cette unité de 90 personnes, est-

  5   ce que vous avez eu des prisonniers musulmans à Pelemisi ? Ou dans le

  6   village de Pelemisi ou dans son voisinage immédiat ?"

  7   Et vous avez indiqué que:

  8   "…environ 28 d'entre eux se sont rendus au poste de police à Vlasenica et

  9   ont amené quatre ou cinq hommes, et six ou sept femmes pour échange. Et je

 10   n'ai pas pu les renvoyer, je leur ai donné la possibilité de faire cet

 11   échange."

 12   Et combien de temps ces six ou sept femmes et quatre ou cinq hommes sont-

 13   ils restés à Pelemisi ?

 14   R.  Je pense que les femmes sont restées deux mois, et les hommes sont

 15   restés plus longtemps et ne voulaient pas repartir à Vlasenica. Ils sont

 16   restés à Trnovo.

 17   L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine anglaise demande à ce que le

 18   témoin répète ce qu'il a dit concernant le bataillon.

 19   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 20   Q.  Pourriez-vous répéter ce que vous avez dit concernant le bataillon si

 21   tant est que vous ayez dit quelque chose. Les interprètes n'ont pas

 22   entendu.

 23   R.  Oui. Par la suite, lorsque la situation s'est apaisée, la compagnie est

 24   devenue ou a été intégrée dans le Bataillon de Trnovo. Je pense que c'est

 25   comme cela qu'il s'appelait.

 26   Q.  Bien. Pourriez-vous me donner le nom de l'une ou de plusieurs de ces

 27   femmes ou de ces filles ?

 28   R.  Je ne connais aucun de ces noms. Croyez-moi, je ne m'en souviens pas du


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  1   tout.

  2   Q.  Vous ne connaissez même pas le prénom de l'une d'entre elles ?

  3   R.  Non. Non, honnêtement, je ne m'en souviens pas. En fait, je ne

  4   m'occupais pas de cela. Tout ce que je voulais, c'est m'assurer qu'elles

  5   étaient en sécurité pendant qu'elles étaient là, qu'elles avaient

  6   suffisamment à manger et les médicaments nécessaires. Et j'avais d'autres

  7   problèmes, parce qu'à ma droite, dans un périmètre de 4 kilomètres, tout

  8   était vide, et ils attaquaient, et j'avais donc une cinquantaine d'hommes,

  9   jusqu'à même 200 hommes dont je devais m'occuper.

 10   Q.  Bien, en tant que commandant, il était de votre devoir de protéger ces

 11   femmes ?

 12   R.  C'est exact.

 13   Q.  Et quelle était la tranche d'âge à laquelle ces femmes appartenaient ?

 14   R.  Si je me souviens bien, il y avait trois ou quatre femmes âgées, il y

 15   en avait trois ou quatre qui étaient jeunes, donc l'âge, eh bien, cela

 16   allait de 20 et quelques années à 70 ans.

 17   Q.  Et que diriez-vous de quelqu'un qui aurait eu 16 ans ? Y avait-il

 18   quelqu'un ou des personnes qui avaient 16 ans ?

 19   R.  Non, il y avait simplement un enfant de 2 ou 3 ans, qui est resté, et

 20   la mère n'a pas voulu revenir pour l'enfant.

 21   Q.  Certaines de ces femmes, lorsqu'elles étaient à Pelemisi, ont-elles été

 22   violées à plusieurs reprises par vous-même et par vos troupes ?

 23   R.  Non. Sauf un homme qui est venu en provenance d'une autre unité et que

 24   nous avons remis à une unité différente. Je pense qu'il s'agissait de la

 25   compagnie Pekic, pendant que nous étions en mission sur le terrain, et

 26   ensuite nous avons appris ce qu'il avait fait lorsque nous sommes revenus.

 27   Et tout ce que nous avons pu faire, ça a été de le renvoyer dans une autre

 28   unité.


Page 33829

  1   Q.  Bien. Pendant que vous étiez en mission sur le terrain, quelqu'un est

  2   venu et a violé certaines de ces femmes ?

  3   R.  Une, je pense, celle dont nous avions connaissance s'est plainte. Nous

  4   avons trouvé le responsable et l'avons arrêté, et l'avons remis à Trnovo.

  5   Il ne venait pas de notre unité.

  6   Q.  Bien. Quel était le nom de la femme qui avait indiqué avoir été violée

  7   pendant qu'elle était sous votre protection ?

  8   R.  Je ne sais pas exactement, je ne m'en souviens pas. Stanimir Pelemis

  9   était responsable, il était le chef du poste de police à Kladanj, et il

 10   était responsable de ces personnes, a pris soin d'elles, et préparé

 11   l'échange.

 12   Q.  Est-ce qu'il l'a violée à maintes reprises ?

 13   R.  Pour autant que je m'en souvienne, je pense que ce n'était qu'une seule

 14   fois. Je sais que mes hommes l'ont passé à tabac, ça, je m'en souviens,

 15   c'est pour cela que je m'en souviens d'ailleurs.

 16   Q.  Lequel de vos hommes gardait l'endroit où cette femme, donc la victime,

 17   habitait ?

 18   R.  Je pense qu'il ne s'agissait pas d'un homme jeune. Je pense qu'il

 19   s'appelait Momir.

 20   Q.  Bien, en fait, Momir était un de vos hommes ?

 21   R.  Non, il faisait partie de la compagnie Pelemisi. Momir Pelemis, et il a

 22   fait un rapport avec eux.

 23   Q.  Lequel de vos hommes était responsable de la sécurité du logement où se

 24   trouvait la victime pendant que vous étiez parti ?

 25   R.  Je pense personne, parce que tout le monde était parti, tout le monde

 26   était sur le terrain pour protéger la ligne le long de l'autoroute où nous

 27   avions dressé les embuscades.

 28   Q.  Donc, il y avait six ou à sept femmes dont vous étiez responsable et


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  1   qui étaient détenues dans une résidence entourée de soldats, et il n'y

  2   avait personne pour les protéger; est-ce exact ?

  3   R.  Non, je n'étais pas directement responsable d'elles. Mais j'ai laissé

  4   le chef du poste de police les amener pour un échange. Elles se trouvaient

  5   dans ce logement, non pas avec des troupes armées mais avec d'autres

  6   civils. Il s'agissait d'une maison normale qui appartenait à un commerçant,

  7   et c'est là qu'elles logeaient au milieu de nos installations.

  8   Q.  Bien. Je ne vais pas essayer d'avoir plus de détail sur qui était cet

  9   homme à qui appartenait la maison. Ce que nous avons compris, c'est qu'il

 10   s'agissait du village dont vous étiez responsable, c'était un petit

 11   village, donc dites-nous qui était responsable -- enfin, qui appartenait

 12   cette maison ?

 13   R.  Cela était peut-être Radan. Ce n'était pas un homme jeune. Mais cela

 14   fait déjà 25 ans et je ne m'en souviens pas vraiment. Je pense que c'était

 15   Radan.

 16   Q.  La maison se trouve toujours à Pelemisi, n'est-ce pas, elle est

 17   toujours là ?

 18   R.  Non, elle a été détruite en 1993, comme toutes les maisons.

 19   Q.  Les troupes musulmanes ont pris le village, et ensuite ?

 20   R.  Ils l'ont pris à cinq reprises.

 21   Q.  Quel était le nom de Radan.

 22   R.  Pelemis, je suppose.

 23   Q.  Bien.

 24   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je voudrais maintenant que nous prenions la

 25   pièce 11377 de la liste du 65 ter. Ceci fait partie d'un rapport du Conseil

 26   de sécurité. C'est une annexe à laquelle il est fait référence sous le

 27   titre "Annexe au rapport final de la Commission des experts des Nations

 28   Unies mis en place suite à la Résolution 780 de 1992 du Conseil de


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  1   sécurité." J'aimerais que nous allions à la page 2 dans les deux langues.

  2   Et nous voyons qu'il s'agit là d'une annexe portant sur les viols et les

  3   attaques sexuelles en date du 27 mai 1994.

  4   Si nous pouvions passer à la page 37 [comme interprété]de la version B/C/S,

  5   qui correspond à la page 34 de la version anglaise, et si l'on pouvait voir

  6   le paragraphe 139 -- oui -- c'est bien ça, 139, intitulé "Kladanj".

  7   Q.  Et il y a une brève description au début qui indique où cela se trouve

  8   avant et quelle était la population avant la guerre : 16 028 personnes.

  9   D'après le recensement de 1991, les Musulmans étaient en majorité et

 10   représentaient 73,3 % [comme interprété] de la population; les Serbes, 23,9

 11   %.

 12   Et je vais vous lire la suite :

 13   "D'après une femme de Vlasenica, elle-même et 42 autres hommes, femmes et

 14   enfants ont été emmenés du camp de Susica à Vlasenica le 10 août 1992. Il

 15   leur a été dit qu'ils feraient l'objet d'un échange à Tuzla. Néanmoins, les

 16   femmes et les enfants ont été placés dans une pièce dans une maison à

 17   Pelemis, Kladanj. Il y avait environ 15 femmes et 10 hommes dans le sous-

 18   sol de la maison. Il y avait également sept filles âgées de 14 à 16 ans qui

 19   étaient violées deux ou trois fois par semaine, quelques fois même en plein

 20   jour. Les autres femmes n'ont pas été maltraitées."

 21   Etiez-vous au courant de cela ?

 22   R.  Non. Les chiffres que vous avez cités n'ont réellement rien à voir avec

 23   ce qui s'est passé pendant que j'étais là. Je vous ai dit qu'il y avait

 24   sept à huit femmes et qu'il y avait un enfant de 3 ans. Je suis au courant

 25   d'un viol, et je vous ai dit ce que j'ai fait à ce propos et comment j'ai

 26   géré le problème.

 27   M. McCLOSKEY : [interprétation] Passons maintenant au document 32355 de la

 28   liste du 65 ter.


Page 33832

  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que je pourrais demander une

  2   précision avant de poursuivre.

  3   Monsieur, vous avez dit qu'il y avait un enfant de 3 ans et que la mère n'a

  4   pas voulu revenir chercher l'enfant. Qu'est-ce qu'il est advenu de cet

  5   enfant de 3 ans ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] L'enfant par la suite a été renvoyé dans sa

  7   famille. Nous l'avons ramené un an et demi plus tard.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Où ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, près de Tuzla, là où l'échange avait eu

 10   lieu.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] A qui avez-vous remis l'enfant ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] De l'autre côté, c'est une famille qui gardait

 13   l'enfant. Et au bout d'un an, lorsqu'il y a eu cet échange près de Tuzla,

 14   l'enfant a été probablement remis à sa mère. Je sais que l'enfant est

 15   maintenant auprès de sa mère et que tout s'est bien terminé.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous ne répondez pas à ma question. Ma

 17   question était de savoir à qui l'enfant a-t-il été remis ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] A la mère, en personne.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et quel est le nom de la famille qui

 20   s'est occupé de cet enfant pendant un an et demi ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Vucenovic.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et quel était le nom de la mère à qui

 23   l'enfant a été remis ? Vous devriez savoir cela ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Alors, comment est-ce que vous pouvez

 26   savoir que l'enfant a été remis à sa mère ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Jerko Vucenovic, qui avait été capturé en

 28   1995, me l'a dit, et ensuite la mère et l'enfant sont venus lui rendre


Page 33833

  1   visite à Tuzla.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous n'avez aucune connaissance

  3   personnelle de cela ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey, qu'est-ce que vous

  7   voulez faire avec le rapport d'expert ?

  8   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je pense que je n'ai pas besoin de le

  9   présenter comme élément de preuve pour l'instant.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois que les chiffres auxquels il est

 11   fait référence et qui ne font pas partie de ce qui a été téléchargé dans le

 12   prétoire électronique, je vois le chiffre 278 à la fin du paragraphe de

 13   Kladanj, alors que le titre, en fait, est 277 et non 278. Est-ce que c'est

 14   la déclaration d'une personne à laquelle il fait référence ou à quoi est-il

 15   fait référence ?

 16   Vous voyez, il semble que ce soient des notes en bas de page, mais je ne

 17   les vois pas dans le document tel qu'il est téléchargé. Et ceci, à ce

 18   propos, semble être une annexe au rapport des experts ou une annexe à

 19   quelque chose. Mais…

 20   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, je pense qu'il est indiqué qu'il

 21   s'agissait d'une annexe dans ma question sur le rapport d'expert.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Bien entendu, c'est évidemment un

 23   résumé, et s'il y a quelque chose d'autre que vous aviez et qui concerne ce

 24   qui était apparemment le 278, peut-être qu'à ce moment-là on pourrait

 25   regarder -- ou ça dépend de quoi que cela nous dira.

 26   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui. Nous regarderons les choses un peu

 27   plus loin.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En particulier, parce que rapport, je


Page 33834

  1   considère que vous vous basez dessus et que vous en avez donc lu des

  2   parties, Ce n'est pas un élément de preuve, mais, bien entendu, cela

  3   pourrait faire la différence en fonction de qui a fait cette déclaration,

  4   si c'est une déclaration, si cette déclaration sous-tend ce qui est résumé

  5   ici plutôt que de considérer d'emblée qu'il s'agit donc d'un résumé.

  6   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui. Nous allons essayer d'obtenir plus

  7   d'informations, Monsieur le Président.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Donc, nous attendrons cela. Je

  9   suis quelques fois à certains moments un peu impatient.

 10   Veuillez poursuivre.

 11   M. McCLOSKEY : [interprétation] Pas de problème. Est-ce que nous pourrions

 12   maintenant avoir le document 32355 de la liste 65 ter.

 13   Q.  Monsieur, il s'agit là du rapport d'une organisation intitulée l'ICMP,

 14   qui est la Commission internationale pour les personnes disparues et qui

 15   s'intitule "Rapport sur les excavations". Et il est dit en anglais qu'il y

 16   a eu des excavations à Pelemisi, Sekovici, en BiH, entre le 16 et 23 août

 17   2004." Et je ne vais pas passer en revue tout cela, mais je voudrais

 18   simplement vous montrer très brièvement une carte et vous poser deux ou

 19   trois questions sur la base des informations figurant dans ce rapport. Il

 20   s'agit donc du document 32345 de la liste du 65 ter.

 21   Et pendant que nous attendons l'affichage de cette carte, je peux vous dire

 22   qu'il s'agit là du rapport concernant l'exhumation de deux fosses communes.

 23   Il s'agit là d'une carte à l'échelle 1:25 000, et nous pouvons voir ici en

 24   bas chaque carré représentant 1 kilomètre. Vous voyez là Pelemisi. Est-ce

 25   que cela ressemble à votre Pelemisi ?

 26   R.  Le village, oui.

 27   Q.  Et je peux vous dire que ce petit point vert, là où nous trouvons les

 28   coordonnées de la carte 34TCQ2217 [comme interprété], et cetera, qui se


Page 33835

  1   trouve à environ 1 kilomètre du village de Pelemisi, c'est un site où l'on

  2   a procédé à des exhumations et où l'on a trouvé 49 cadavres de personnes,

  3   parmi lesquels six femmes, la plus jeune ayant 16 ans. Les autres

  4   exhumations plus au nord ont permis de retrouver le cadavre de neuf

  5   personnes, des hommes. Il s'agissait de femmes musulmanes et d'une jeune

  6   fille. Est-ce qu'il s'agit là des six femmes dont vous nous avez parlé ?

  7   D'après vous, est-ce que ce sont bien ces six femmes ?

  8   R.  Concernant ces fosses communes, j'ai procédé à une enquête auprès de

  9   mes hommes qui se trouvaient sur le front pour voir ce qui s'était passé.

 10   Et à un moment donné aux alentours du mois de septembre ou octobre, ils ont

 11   remarqué qu'il y avait des cars qui sont arrivés de nuit. Ils ont fait

 12   rapport au commandement supérieur, demandant d'empêcher ces paramilitaires

 13   de Vlasenica de se rendre sur les lieux. Je ne sais vraiment pas qui a

 14   enterré ces corps dans ces fosses communes.

 15   Avant le 22 août, j'étais le commandant de la Compagnie Pelemisi, et

 16   personne n'a été tué parce que je n'aurais pas permis que ce genre de chose

 17   puisse se produire. Mais je suis tout à fait prêt à coopérer avec le bureau

 18   du procureur du tribunal de la BiH dans leur enquête pour voir qui est

 19   responsable de cela.

 20   Q.  Bien, vous étiez le commandant du Détachement de Pelemisi en octobre

 21   1992, n'est-ce pas ?

 22   R.  Non.

 23   M. McCLOSKEY : [interprétation] Passons maintenant au document 32372 de la

 24   liste du 65 ter. Et aux fins de mon interrogatoire, Monsieur le Président,

 25   je ne pense pas qu'il soit nécessaire de demander le versement de ces

 26   documents. Je pense que ce que je demande est clair et, à moins que la Cour

 27   ne le souhaite, ce n'est pas nécessaire.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, la carte en tant que telle, nous


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  1   n'en avons pas besoin. Je ne sais pas de quels documents il s'agit et ce

  2   que sont ces documents, donc j'ai quelque difficulté à vous répondre. C'est

  3   à vous finalement, Monsieur McCloskey, d'en demander le versement ou pas.

  4   Si vous en demandez le versement, nous l'inclurons avec tous les détails et

  5   l'évaluation des éléments de preuve. Si vous ne le faites pas, donc tout ce

  6   que vous dites est basé sur ce que vous avez lu.

  7   Et nous considérons que ce qui est lu, Maître Lukic, si vous n'avez

  8   pas d'objection, reflète ce que le document nous dit.

  9   M. McCLOSKEY : [interprétation] A bien y réfléchir -- bien, je vais peut-

 10   être revoir cela à la fin. Je ne sais pas.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

 12   M. McCLOSKEY : [interprétation] Et je suis presque au terme de mon

 13   interrogatoire, Monsieur le Président. Merci.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Veuillez poursuivre.

 15   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 16   Q.  Comme vous le savez, les Musulmans ont repris vos positions, et nous

 17   pensons que cela figure dans les documents qui ont été retrouvés. Et comme

 18   vous pouvez le voir, il s'agit d'un document du Détachement Pelemisi, et

 19   votre nom y figure, imprimé, ainsi qu'une signature. Il s'agit bien de

 20   votre signature, n'est-ce pas ? On peut agrandir un petit peu si vous

 21   voulez voir un peu mieux.

 22   R.  Non. Non, ce n'est pas ma signature. Néanmoins, j'ai effectivement émis

 23   de tels certificats. Je peux vous donner une explication. Le 1er septembre,

 24   j'ai été nommé commandant du détachement d'assaut. Je me trouvais à

 25   Vlasenica. Ce sont là des certificats pour mes hommes qui voulaient

 26   profiter de mon influence en allant voir les autorités de Vlasenica ou

 27   ailleurs pour trouver des appartements parce que leurs maisons avaient été

 28   détruites par les bombardements.


Page 33837

  1   Et le 23 octobre, le Détachement Pelemisi était une compagnie, et non pas

  2   un détachement, et j'ai été le commandant du détachement d'assaut. Et là,

  3   je dis que j'ai effectivement apposé ma signature sur les certificats parce

  4   que mon nom ouvrait les portes et leur permettait d'obtenir un endroit où

  5   loger.

  6   Q.  Donc il s'agit de votre signature ?

  7   R.  Non, non. Ce n'est pas ma signature là, non. Ce que je disais, c'est

  8   que cette signature ici en particulier n'est pas la mienne mais que j'ai

  9   effectivement signé des certificats de cette nature pour ma famille et pour

 10   d'autres. Je ne refuse pas de reconnaître que j'ai effectivement émis des

 11   certificats comme celui-ci parce que j'ai essayé d'aider tous ceux qui

 12   avaient besoin de se loger, mais ce n'est pas comme ça que je signe. Peut-

 13   être que quelqu'un a essayé d'imiter ma signature, quelqu'un qui avait

 14   besoin de se loger. Mais je ne nie pas avoir signé des documents similaires

 15   à celui-ci pour mon père, mon oncle et pour d'autres personnes du village

 16   parce qu'ils avaient tout perdu dans le village et avaient besoin de se

 17   loger quelque part sur le territoire de la Republika Srpska.

 18   Q.  Donc vous prétendez que vous êtes le commandant du détachement pour

 19   avoir ce genre de document ?

 20   R.  Non, j'étais le commandant du détachement d'assaut. Cela ne ressort

 21   peut-être pas clairement dans ce document particulier, à partir du 1er

 22   septembre --

 23   Q.  Mais ce qui est tout à fait clair dans ce document, c'est que c'est un

 24   document qui émane du Détachement de Pelemisi, c'est ce que nous voyons en

 25   haut à droite, et tout à fait en bas il est dit "Commandant du détachement,

 26   Milorad Pelemis." Donc vous dites dans ce document que vous prétendez être

 27   le commandant du détachement ? Et nous avons entendu qu'il y avait donc un

 28   détachement d'assaut.


Page 33838

  1   R.  Non, je ne peux pas prétendre cela. Tout ce que je peux dire, c'est que

  2   j'étais le commandant du détachement d'assaut à Vlasenica. J'ai arrêté le

  3   20 août. Et il ne s'agit pas là de ma signature. Quelqu'un a utilisé ma

  4   signature. Mais j'ai effectivement émis des certificats de ce type que j'ai

  5   remis à des personnes qui avaient besoin de se loger. Mais là, il ne s'agit

  6   pas de ma signature.

  7   Si l'on m'avait demandé de signer ce document, j'aurais signé pour aider

  8   ces personnes qui n'avaient pas de toit au-dessus de leur tête. Ma mère,

  9   par exemple, vivait dans un 100 mètres carrés, beaucoup plus loin que les

 10   lignes du front. Elle avait passé six mois à vivre dans une cave. Pourquoi

 11   pas, pourquoi est-ce que je n'aurais pas signé un document pour ma mère.

 12   Cela ne me dérange pas que quelqu'un ait signé ou imité ma signature pour

 13   un document pour obtenir un document pour sa mère. Qu'est-ce que je pouvais

 14   faire, laisser ma mère dans une cave, la laisser mourir de faim dans une

 15   cave ou la laisser se faire violer par les Musulmans lorsqu'ils

 16   arrivaient ?

 17   Q.  Pouvez-vous me dire si vous deviez aider votre mère ou d'autres Serbes,

 18   pourquoi ne pas rédiger un tel certificat dans votre poste à l'époque, qui,

 19   je suppose, était une promotion ? Pourquoi est-ce qu'il fallait que ce soit

 20   imité ?

 21   R.  Ce que je dis c'est qu'il ne s'agit pas de ma signature. C'est une

 22   signature qui a été imitée, et je disais que lorsque je signe un document

 23   comme celui-ci, je signe en tant que commandant du détachement d'assaut, et

 24   je comprends que de tels documents puissent être signés. Je ne le refuse

 25   absolument pas, j'en ai déjà signé, et cela a été signé par quelqu'un

 26   d'autre que moi, parce que Borislav Milosevic d'une maison. Mais si l'on

 27   m'avait donné ce document à signer, je l'aurais signé. Et je répète que je

 28   l'aurais fait parce que je voulais que les gens aient un toit au-dessus de


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  1   leurs têtes et soient logés.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey, est-ce que je

  3   pourrais poser quelques questions concernant tout cet exercice que nous

  4   avons commencé et concernant donc son poste en octobre.

  5   Monsieur le Témoin, vous dites que vous avez mené quelques enquêtes avec

  6   l'homme qui se trouvait sur le front concernant ce qui s'est produit au

  7   niveau des fosses communes. Vous dites que :

  8   "…vous aviez remarqué des cars qui arrivaient de nuit. Cela vous a été

  9   indiqué par le commandant supérieur…"

 10   A quel commandant supérieur ont-ils fait rapport concernant l'arrivée de

 11   cars au cours de la nuit ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne dis pas que j'ai dit cela. Mais lorsque

 13   ces fosses communes ont été ouvertes en 2004, j'ai parlé aux commandants

 14   des détachements et des bataillons qui se trouvaient  là, ceux qui étaient

 15   sur le front à l'époque, et ils m'ont dit qu'à l'époque ils avaient vu des

 16   véhicules arrivés de Vlasenica au cours de la nuit. Il s'agissait

 17   d'officiers de police qui étaient à bord de ces autocars, ils ont exécuté

 18   des personnes de Vlasenica.

 19   L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine anglaise demande à ce que le

 20   témoin ralentisse.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils ont demandé de l'aide -

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous ralentir et poursuivre. Et

 23   vous reprendrez à partir du moment où vous avez dit :

 24   "…ils ont exécuté des gens de Vlasenica," est-ce que vous pourriez

 25   reprendre là ? Qui a demandé de l'aide ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Nos commandants et les personnes qui se

 27   trouvaient sur les lignes ont demandé de l'aide au commandement supérieur.

 28   Ils voulaient empêcher la police de Vlasenica de faire ce genre de choses


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  1   derrière nos lignes.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question était de savoir quel était

  3   le commandement supérieur auquel ils ont fait leur rapport, comme vous le

  4   dites, quel était ce commandement supérieur ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était le poste de police de Sekovici ainsi

  6   que le commandement de la 1ère Brigade de Montagne de Sekovici.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit que vous avez fait une

  8   enquête avec vos hommes qui ont été sur les lignes. Autrement dit, vous

  9   étiez à ce moment le commandant supérieur, pas la police ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourquoi vous dites alors "mes hommes",

 12   si ce ne sont pas vos hommes ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce sont les hommes qui ont commencé la guerre

 14   avec moi, et ils vont rester pour toujours mes hommes. Ce sont mes voisins,

 15   les membres de ma famille, les gens qui ont défendu leurs foyers, leurs

 16   maisons, et toute ma vie, je les considérerai comme les miens. Ce sont des

 17   gens qui sont allés défendre leur village de l'ennemi, son village, mon

 18   village. Ils vont rester toujours mes hommes. Ce sont mes cousins de mon

 19   village. Je les considère comme des frères, ce sont mes hommes, tout court. 

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Et qui était leur commandement

 21   supérieur si ce n'était pas vous ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait un bataillon à Trnovo et aussi le

 23   commandement à Sekovici. C'est la ligne que l'on a toujours suivie, la

 24   Compagnie de Pelemisi fait un rapport au Bataillon de Trnovo, et ensuite,

 25   le Bataillon de Trnovo fait son rapport à Sekovici.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'ils ont fait leurs rapports

 27   par écrit ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. Ce sont les commandants des


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  1   bataillons qui font leurs rapports par écrit. Je ne connais pas cela.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Quand vous ne savez pas quelque

  3   chose, vous nous le dites. Mais qu'avez-vous fait avec ces informations une

  4   fois que vous les avez reçues, après donc l'exhumation ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Après l'exhumation, j'ai parlé avec les

  6   enquêteurs qui travaillaient sur cette affaire. Je leur ai dit que je

  7   voulais leur communiquer tout ce que je savais, tout ce j'ai appris des

  8   gens présents sur le terrain concernant ces fosses que l'on a découvertes.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Des enquêteurs de quelles autorités ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] De Bosnie-Herzégovine.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Est-ce qu'on vous a demandé une

 12   déclaration, une déposition ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils m'ont dit que j'allais avoir un entretien

 14   officiel à Belgrade.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, les enquêteurs de Bosnie-

 16   Herzégovine vous invitent à faire un entretien à Belgrade; est-ce que vous

 17   habitiez en Serbie à l'époque ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, vous n'avez pas compris. Moi,

 19   j'habite en Serbie depuis 1982, mais j'ai fait ma déclaration en Bosnie, et

 20   j'ai dit aux enquêteurs que j'étais prêt à aider à élucider ces crimes sur

 21   la base des informations qui m'ont été confirmées et données par mes hommes

 22   sur la ligne de front à l'époque, en automne 1992.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Est-ce que vous y êtes allé, est-

 24   ce qu'ils vous ont appelé ? Est-ce que vous leur avez parlé ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, on m'a dit que cet entretien allait avoir

 26   lieu, et que j'allais être informé de cela, mais ils ne m'ont pas encore

 27   contacté.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, cela n'a jamais eu lieu ?


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous nous sommes parlés, il y a à peu près

  2   deux ans, et on m'a dit qu'ils allaient venir me parler officiellement à

  3   Belgrade, et je me tiens à leur disposition.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être que je n'ai pas très bien

  5   compris.

  6   Est-ce que les parties ont des informations quant à la date de cette

  7   exhumation ? Parce que moi, j'ai l'impression que c'était il y a bien

  8   longtemps.

  9   Monsieur le Témoin, est-ce que vous, vous vous souvenez de la date de

 10   l'exhumation suite à laquelle vous avez fait cette enquête ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, sur le document, on peut voir que

 12   c'était en 2004, je parle de l'exhumation. C'était dans le document, le

 13   document qu'on a vu tout à l'heure.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et cela correspond à vos souvenirs

 15   aussi, que cette exhumation a eu lieu donc en 2004 ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais non, j'avais complètement oublié la date

 17   de l'exhumation. C'est le document qui a rafraîchi ma mémoire.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et vous dites leur avoir parlé il y a

 19   deux ans, en 2013. A quel moment avez-vous proposé d'aider l'enquête ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était il y a deux ans.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous étiez au courant de cela

 22   depuis au moins 2004, parce que vous nous avez dit qu'après avoir entendu

 23   dire qu'il y a eu cette exhumation, vous vous êtes renseigné, vous avez

 24   fait votre propre enquête pour voir où étaient ceux que vous appeliez vos

 25   hommes.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je voulais savoir si quelqu'un de mes

 27   hommes a pris part à cela. Ils ont tous dit de façon catégorique que non,

 28   que c'étaient les gens de Vlasenica et des paramilitaires qui ont pris part


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  1   à cela. C'étaient des policiers de Vlasenica.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, neuf ou dix années se sont

  3   écoulées avant que vous ne fassiez cette enquête, comme vous dites, avant

  4   que vous ne parliez avec ces enquêteurs. Je vous ai demandé tout à l'heure

  5   ce que vous avez fait avec ces informations et vous m'avez répondu que vous

  6   aviez parlé avec les enquêteurs. Mais est-ce que je vous ai bien compris,

  7   vous leur avez parlé dix années plus tard, plutôt que de leur parler

  8   immédiatement après avoir appris cela ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne leur ai pas parlé tout de suite. Il

 10   n'était pas besoin de leur parler tout de suite, parce que mes hommes ont

 11   bien dit qu'ils n'ont jamais pris part à cela. Moi, je ne peux pas faire

 12   d'enquête. J'habite à Belgrade, et je ne peux pas faire une enquête depuis

 13   Belgrade alors que tout cela s'est passé en Bosnie.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, entre-temps, vous avez entendu

 15   dire que ce sont les policiers de Vlasenica qui étaient responsables de ces

 16   meurtres. Vous ne pensiez pas que c'était important de le dire aux

 17   enquêteurs ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Cela fait dix ans que je ne suis pas allé en

 19   Bosnie. Donc je ne voyais pas comment je pouvais aider l'enquête alors que

 20   j'étais encore à Belgrade. Moi, je les ai contactés par le biais de mon

 21   avocat. Je leur ai proposé de leur fournir des informations par rapport à

 22   cela. Mais, Monsieur le Juge, ce qui m'importait le plus, c'était de savoir

 23   qu'aucun de mes hommes faisant partie de la compagnie qui était sur la

 24   ligne de front n'a pris part à cela. Mais moi, je suis sans emploi. Je n'ai

 25   jamais pu faire d'enquête, et ne parlons pas d'une enquête en Bosnie.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, mais vous pouviez

 27   passer un coup de fil, appeler qui de droit, pour dire que vous disposiez

 28   des informations supplémentaires pour dire que vous saviez que ce sont les


Page 33844

  1   policiers de Vlasenica qui avaient commis ces crimes et que les corps des

  2   victimes ont été exhumés en 2004. Vous n'avez pas besoin d'avoir beaucoup

  3   d'argent pour passer un coup de fil. Et apparemment, vous avez eu

  4   suffisamment d'argent pour contacter vos hommes.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je savais où étaient mes hommes à

  6   l'époque. En revanche, qui étaient vraiment les auteurs de ces crimes,

  7   quelles sont ces personnes de Vlasenica qui ont commis ces crimes, cela, je

  8   ne le savais pas. Ils m'ont dit tout simplement qui c'étaient des

  9   paramilitaires et des policiers de Vlasenica. Et je ne voyais pas ce que je

 10   pouvais ajouter, quelle information supplémentaire je pouvais donner par

 11   rapport aux auteurs de crimes. Bon, moi, je pouvais tout simplement leur

 12   indiquer des témoins, des gens se trouvant sur la ligne de front qui

 13   pouvaient éventuellement fournir des informations supplémentaires. Et là,

 14   j'aurais pu éventuellement aider l'enquête.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais pourquoi neuf ou dix années plus

 16   tard vous parlez avec les enquêteurs, alors que pendant neuf ou dix années

 17   vous pensez qu'il n'est absolument pas besoin de vous entretenir avec eux ?

 18   Pourquoi alors, il y a deux ans, vous … que s'est-il passé ? Pourquoi êtes-

 19   vous entré en contact avec eux ? Pourquoi avez-vous proposé de les aider ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai parlé avec un avocat de la Republika

 21   Srpska. Il m'a dit que si je le voulais, je pouvais communiquer mes

 22   informations concernant ce crime. Il m'a donné un numéro de téléphone, il

 23   m'a dit que je pouvais appeler ce numéro. J'ai appelé et j'ai dit --

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Mais pourquoi êtes-vous entré

 25   en contact avec cet avocat de la Republika Srpska ? Pourquoi êtes-vous

 26   entré en contact avec lui ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que si on parle, par exemple, d'une

 28   fosse à Pelemisi; mais non, la fosse n'était pas à Pelemisi. Elle était


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  1   entre les villages de Pelemisi et Trnovo, dans la montagne. Donc je ne

  2   voulais pas que l'on dise que c'est à Pelemisi que cela a eu lieu. C'est

  3   pour cela que je l'ai fait.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous le saviez depuis neuf, dix

  5   ans, n'est-ce pas. Pourquoi alors être allé voir un avocat dans la

  6   Republika Srpska alors que vous déteniez cette information depuis neuf ou

  7   dix années ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais non, je ne suis pas allé dans la

  9   Republika Srpska. Cet avocat était à Belgrade.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous parliez d'un avocat de la Republika

 11   Srpska. Donc vous ne l'avez peut-être pas vu dans la Republika Srpska, mais

 12   là vous répondez à côté de la question. Je vous ai demandé pourquoi êtes-

 13   vous allé consulter un avocat de la Republika Srpska ou venu de la

 14   Republika Srpska ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est cet avocat qui est venu officiellement,

 16   et nous avons parlé. Je lui ai demandé si je pouvais l'aider pour jeter la

 17   lumière sur le crime commis par le poste de police de Vlasenica parce qu'on

 18   a trouvé des corps. Et il m'a dit : Voilà, tu les appelles et ils vont te

 19   parler.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Donc, si je vous ai bien compris,

 21   c'est tout à fait par hasard que vous rencontrez un avocat de la Republika

 22   Srpska à Belgrade, vous avez tout à fait par hasard un entretien avec lui,

 23   ensuite vous lui dites quelque chose que vous savez depuis neuf ou dix

 24   années, et ensuite il vous dit qu'ils vont sans doute vouloir parler avec

 25   vous. Est-ce que cela a quoi que ce soit à voir avec le fait que l'on a

 26   mentionné votre nom dans un procès dans la Republika Srpska, que c'est pour

 27   cela peut-être que vous avez fait l'objet de cette enquête et que c'est

 28   pour cela peut-être que vous avez consulté cet avocat ? Est-ce que l'on


Page 33846

  1   peut interpréter les choses comme cela ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. Tout simplement, j'avais des

  3   informations que d'autres personnes ont commencé à m'accuser, mais cela n'a

  4   pas pu se faire. Ce n'est pas passé --

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Et c'est pour cela, donc, que vous

  6   vous adressez à l'avocat et que vous lui parlez. Est-ce que c'est cela ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] A peu près.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais pourquoi n'avez-vous pas dit cela

  9   il y a une demi-heure ? Pourquoi vous n'avez pas dit tout de suite que vous

 10   avez consulté un avocat "parce que d'autres personnes ont mentionné mon

 11   nom, et à cause de cela je suis allé voir un avocat" ? Parce que vous nous

 12   dites autre chose. Vous dites : "Eh bien, j'ai rencontré un avocat, et tout

 13   à fait par hasard nous nous sommes entretenus", et cetera, et cetera, alors

 14   que, si je vous ai bien compris, vous avez cherché à contacter cet avocat

 15   parce que votre nom a été mentionné. D'autres personnes vous ont accusé de

 16   quelque chose. Pourquoi n'avez-vous pas dit cela tout de suite ? Je ne vois

 17   pas où est le problème.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, non. Moi, je n'ai pas demandé à les

 19   rencontrer. Moi, j'ai rencontré par hasard un avocat qui était en mission

 20   officielle à Belgrade. Et au gré de la conversation, en lui demandant ce

 21   que je pouvais faire, il m'a dit ce que je pourrais faire, il m'a donné un

 22   conseil.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Comment avez-vous appris qu'on vous

 24   avait accusé de quoi que ce soit ? Qui vous a dit cela ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, des gars de Vlasenica, ceux qui ont

 26   fait l'objet des interrogatoires. Ils voulaient savoir où j'étais à

 27   l'époque, ils voulaient savoir quelle était l'unité que je commandais à

 28   l'époque, et cetera.


Page 33847

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. On les a interrogés quand ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a trois ou quatre années. Bon, deux,

  3   trois, quatre années. Ecoutez, je ne m'en souviens pas. Au cours des trois

  4   dernières années en tout cas.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, peu de temps après s'être

  6   entretenu avec cet avocat ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez payé l'avocat pour

  9   sa consultation ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous avez eu une consultation

 12   gratuite ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quel est le nom de cet avocat ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Golic.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous savez pourquoi il a été

 17   à l'époque à Belgrade ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Il représentait une entreprise dans la

 19   Republika Srpska, des questions juridiques. Bon, je ne lui ai pas vraiment

 20   posé de questions. Il est originaire de Vlasenica.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous l'avez contacté ou est-

 22   ce qu'il vous a contacté ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est lui qui m'a contacté.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et pour quelle raison ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour que l'on puisse se voir. Il est venu à

 26   Belgrade, et on s'est retrouvés autour d'une table. Et on se connaît depuis

 27   la guerre. Pas très bien, mais…

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre.


Page 33848

  1   M. McCLOSKEY : [interprétation] On est pas loin de la pause.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais je vous rappelle que vous

  3   m'avez signalé que vous étiez tout près de la fin de votre contre-

  4   interrogatoire.

  5   M. McCLOSKEY : [interprétation] Ecoutez, je voudrais demander que ce

  6   document soit versé au dossier. C'est le document 65 ter 32372.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P7274.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Versé au dossier.

 10   M. McCLOSKEY : [interprétation] J'ai encore un ou deux documents puis un

 11   enregistrement vidéo tout court, pas très long, mais on va terminer en

 12   l'espace de dix minutes…

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Maître Lukic, on pourrait

 14   continuer pendant dix minutes, ce qui vous permettrait donc de poser vos

 15   questions d'un coup; mais de l'autre côté, si M. Mladic le souhaite, on

 16   pourrait aussi continuer pendant dix minutes.

 17    M. LUKIC : [interprétation] Et M. McCloskey, comment souhaite-t-il

 18   procéder ?

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, quand M. McCloskey annonce dix

 20   minutes, ce n'est pas forcément dix minutes, pas toujours.

 21   Donc, Monsieur McCloskey, que souhaitez-vous faire ?

 22   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je vais continuer après la pause.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

 24   M. McCLOSKEY : [interprétation] Et comme cela, je vais organiser mes

 25   questions.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais j'étais quand même content

 27   d'entendre les dix minutes, donc je vous demanderais quand même d'essayer

 28   de faire cela en dix minutes.


Page 33849

  1   Nous allons prendre une pause, et nous allons reprendre à midi dix, mais on

  2   va attendre que le témoin quitte le prétoire.

  3   [Le témoin quitte la barre]

  4   --- L'audience est suspendue à 11 heures 53.

  5   --- L'audience est reprise à 12 heures 20.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les parties avaient un sujet à discuter,

  7   mais pas immédiatement, si j'ai bien compris, n'est-ce pas ?

  8   M. TIEGER : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. J'ai cru

  9   comprendre aussi que la Défense avait un sujet à évoquer. M. le Greffier a

 10   proposé que les deux parties attendent jusqu'à la conclusion du témoignage

 11   du témoin.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et puis, il y avait encore une autre

 13   question en suspens, je crois qu'il s'agissait de la pièce D920, déterminer

 14   s'il y avait des objections par rapport à la nouvelle traduction.

 15   M. TIEGER : [interprétation] Oui. C'est l'une des questions en suspens.

 16   Comme la Chambre l'évoque en ce moment, je puis vous dire que nous n'avons

 17   aucune objection par rapport à la traduction en tant que telle. Toutefois,

 18   en dépit de nos efforts, nous n'avons pas été capables de déterminer le

 19   moment exact dans la déposition du témoin où celui-ci a discuté du document

 20   en question et nous demanderions, par conséquent, à la Défense une page de

 21   référence par rapport à ce document en particulier.

 22   [Le témoin vient à la barre]

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je suppose que vous fournirez cette

 24   page, Monsieur Lukic, à l'Accusation.

 25   Entre-temps, Monsieur McCloskey, vos dix minutes ont commencé, je crois.

 26   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 27   Q.  Monsieur le Témoin, vous veniez de parler, je suppose, de ce que l'on

 28   trouve en page 40 à 41 du compte rendu :


Page 33850

  1   "D'autres personnes de Vlasenica ont essayé de me reprocher ceci."

  2   Vous reprocher quoi ?

  3   R.  La situation relative à ces fosses qui ont été découvertes à Kladanj,

  4   derrière Pelemisi.

  5   Q.  Donnez-nous les noms des personnes dont vous croyez qu'elles vous

  6   reprochent les crimes associés à ces fosses.

  7   R.  Je ne veux pas donner les noms. Je les donnerai aux enquêteurs.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez répondre à la question qui vous

  9   a été posée par M. McCloskey, Monsieur. S'il y a une raison précise

 10   justifiant que vous refusiez de fournir ces noms dans une audience

 11   publique, vous pouvez demander à ce que l'on passe à huis clos partiel.

 12   Mais vous devez répondre à la question.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas certain à 100 % du nom de

 14   toutes ces personnes. Quand je le serai, je donnerai les noms. Pour le

 15   moment, je ne suis pas sûr que ce soit bien ces personnes qui aient fait

 16   porter des responsabilités sur moi.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, nous n'allons pas attendre

 18   jusqu'à ce que vos certitudes existent, puisque vous souhaitez déterminer

 19   ces certitudes. Les noms que vous connaissez, même si vous n'en êtes pas

 20   encore tout à fait certain, nous souhaiterions les entendre de votre

 21   bouche.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que l'un de ces noms est Kraljevic,

 23   un habitant de Vlasenica, dont je suis à peu près sûr. C'est à son sujet

 24   que j'ai entendu dire qu'il avait fait une déclaration officielle et qu'il

 25   souhaite me faire porter la responsabilité.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites : "Lorsque j'obtiendrai des

 27   certitudes, je fournirai leurs noms" au pluriel. Donc, apparemment, vous

 28   avez d'autres noms à l'esprit. Pourriez-vous nous donner ces autres noms


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  1   maintenant, même si vous n'en êtes pas certain ? Mais ce dont vous avez

  2   connaissance en ce moment s'agissant des noms des personnes qui vous ont

  3   reproché quelque chose, nous souhaiterions les entendre.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas vous les dire maintenant. Je me

  5   rappelle uniquement le nom de ce Kraljevic, habitant de Vlasenica, qui a

  6   essayé de me faire porter une responsabilité. Mais lorsque je rentrerai

  7   chez moi, j'essayerai d'obtenir tous les noms, parce que je ne connais

  8   vraiment pas ces gens de Vlasenica. Nous n'avons pas de bons contacts du

  9   tout les uns avec les autres. Par exemple, à partir de 1993 et jusqu'à

 10   aujourd'hui, ma mère n'a reçu un hébergement qu'il y a trois mois. Jusqu'à

 11   présent, elle vivait dans une maison communautaire. Et elle a obtenu un

 12   appartement à présent uniquement parce qu'elle avait subi une attaque. Si

 13   j'avais le moindre contact là-bas, je lui aurais garanti un appartement il

 14   y a au moins dix ans.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelle que soit l'importance de tout

 16   cela à vos yeux, ce n'est pas directement lié à mes questions. Je vous ai

 17   proposé de fournir les noms à huis clos partiel ou pour, qu'en tout cas au

 18   moins, nous puissions les prendre en considération et nous pourrions

 19   accorder le huis clos partiel si vous le demandiez. Vous avez préféré ne

 20   pas le faire. Je répète que si quel qu'autre nom existe, et vous nous avez

 21   parlé de noms au pluriel, et si vous souhaitez passer à huis clos partiel

 22   pour donner ces autres noms, nous envisagerons cette possibilité.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas nécessaire. Pour le moment, je ne

 24   dispose que d'un seul nom, celui de Mico Kraljevic. Je ne peux pas me

 25   permettre de commettre une erreur. Il y a eu pas mal de rumeurs. Mais au

 26   sujet de ce nom unique, j'ai entendu prononcer ce nom de la bouche de

 27   plusieurs personnes. J'ai même essayé de discuter avec lui, mais il évite

 28   de me rencontrer. Je suis sûr qu'il a essayé de me faire porter une


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  1   responsabilité.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourrais-je relire une partie de vos

  3   réponses précédentes ? Vous avez déclaré :

  4   "Je ne suis pas certain à 100 % de tous les noms. Lorsque j'aurai des

  5   certitudes sur ce point, je fournirai leurs noms." Et "leurs noms" est au

  6   pluriel.

  7   Dans votre dernière réponse, vous dites ne pas vous rappeler les autres

  8   noms. Ceci exige au moins quelques explications de votre part étant donné

  9   vos réponses précédentes. Si vous souhaitez apporter ces explications, vous

 10   pouvez le faire maintenant. Dans le cas contraire, j'inviterais M.

 11   McCloskey à procéder.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Honnêtement, Monsieur le Président, je n'ai de

 13   certitude qu'au sujet de ce seul homme. Quant aux autres, c'est une autre

 14   question. J'aimerais procéder à mes propres vérifications. Je ne voudrais

 15   pas reprocher quelque chose à quelqu'un par erreur. Je suis certain

 16   uniquement de ce seul nom et j'ai invité cet homme à venir parler avec moi.

 17   Quant aux autres, je ne sais pas. Pour l'instant, je n'ai qu'un seul nom.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites "Je ne souhaite pas reprocher

 19   quoi que ce soit à quelqu'un par erreur." Si vous n'avez pas d'autres noms,

 20   vous ne pourriez pas faire cela. Je vous ai demandé une explication.

 21   L'explication que vous avez donnée est consignée au compte rendu.

 22   Monsieur McCloskey, vous pouvez procéder.

 23   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 24   Q.  Est-ce que vous refusez de nous donner les noms de ces autres

 25   personnes, en particulier des noms de Musulmans, de façon à avoir la

 26   liberté de les intimider ou pire, au cas par cas, pour les empêcher de

 27   comparaître dans un procès contre vous ?

 28   R.  Je n'ai pas compris. De quels Musulmans parlez-vous ? La question ne me


Page 33853

  1   semble pas claire.

  2   Q.  Vous n'êtes pas au courant du fait que des Musulmans ont formulé des

  3   allégations à votre encontre qui impliquent des meurtres et des viols à

  4   Pelemisi ?

  5   R.  Non. Je n'ai vraiment aucun contact avec eux, et je ne connais personne

  6   de Vlasenica qui me connaîtrait.

  7   Q.  Donc, pendant toutes ces années, depuis 1992, avec toutes les

  8   déclarations qui ont été faites et tous les rapports qui ont été rédigés et

  9   les plaintes qui ont été déposées, vous ne savez pas qu'un quelconque

 10   Musulman aurait dit quoi que ce soit à votre encontre qui concernerait des

 11   crimes commis durant l'été et l'automne de 1992 à Pelemisi ?

 12   R.  Non.

 13   M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, étant donné la

 14   situation, j'aimerais demander le versement au dossier de la déposition

 15   concernant les excavations, le petit résumé de déposition relatif aux

 16   excavations, à savoir le document 65 ter numéro 32355.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 18   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 19   M. McCLOSKEY : [interprétation] Et nous en ferons faire une traduction en

 20   B/C/S.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous lisez dans l'esprit du

 22   greffier en tout cas.

 23   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je vous remercie.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons enregistrer ce document aux

 25   fins d'identification.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce P7275, enregistrée

 27   aux fins d'identification.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Enregistrée aux fins d'identification.


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  1   Veuillez procéder, Monsieur McCloskey.

  2   M. McCLOSKEY : [interprétation] J'aimerais également demander le versement

  3   au dossier du document 65 ter numéro 32345, à savoir la carte dans laquelle

  4   on trouve les coordonnées de la fosse commune dont l'une se situe à 1

  5   kilomètre à peine de Pelemisi. Ce sont les coordonnées que l'on trouve dans

  6   le rapport.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, quel sera le

  8   numéro de pièce ?

  9   M. McCLOSKEY : [interprétation] Il s'agit de la pièce P7276, Monsieur le

 10   Président, Monsieur le Juge.

 11   M. McCLOSKEY : [interprétation] Et --

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et donc, c'est la carte. C'est la seule

 13   carte qui ait été annotée par le témoin.

 14   M. McCLOSKEY : [interprétation] La carte annotée est déjà versée au

 15   dossier.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc les annotations sont versées au

 17   dossier ?

 18   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, c'est la seule carte qui comporte des

 19   annotations.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, la pièce P7276 est

 21   admise en tant qu'élément de preuve au dossier.

 22   Veuillez procéder, Monsieur McCloskey.

 23   M. McCLOSKEY : [interprétation] Enfin, en tant que document constituant un

 24   élément de preuve, un bref segment de l'annexe au rapport Bassiouni,

 25   document 65 ter numéro 11377, et nous continuerons -- nous verrons s'il y a

 26   plus d'information sur cet incident en particulier dans le corps principal

 27   du rapport.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Ce bref segment a été téléchargé,


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  1   n'est-ce pas ? Parce que le document intégral est assez long, l'intégralité

  2   de l'annexe, et nous n'avons besoin que… enfin, nous allons réserver un

  3   numéro pour la page -- ou bien, Maître Lukic.

  4   M. LUKIC : [interprétation] Objection, Monsieur le Président, à l'admission

  5   d'une partie de ce rapport puisqu'il n'y a aucun moyen pour nous en ce

  6   moment de vérifier quoi que ce soit dans ce rapport. Il n'y a pas de noms,

  7   rien n'est disponible. Donc, s'il y a des documents de suivi, nous les

  8   examinerons. Mais pour le moment, verser au dossier uniquement ce

  9   paragraphe, que pouvons-nous en faire ? Il y a quelqu'un qui prend une

 10   déposition de la bouche d'une autre personne. Et il est présumé que --

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, j'étais sur le point de

 12   parler de cela lorsque j'ai dit que nous avons évoqué une seule page. Donc

 13   la première question que j'ai posée consistait à demander si cette seule

 14   page avait été téléchargée, et ensuite, bien entendu, nous allons examiner

 15   si le document est prêt pour versement au dossier ou pas. Et il est

 16   possible que vous ayez remarqué que la Chambre, en demandant des

 17   explications au sujet des notes de bas de page, avait une idée qui va dans

 18   la même direction que la vôtre.

 19   Ce que nous pourrions faire, c'est réserver un numéro et ensuite laisser

 20   les parties échanger leurs positions plus tard au sujet du versement au

 21   dossier. Et ceci serait sans doute préférable, le problème de la note de

 22   bas de page, Monsieur McCloskey, devrait être précisé.

 23   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. C'est une bonne

 24   idée.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Défense, ensuite, saurait quels

 26   documents sont associés au rapport et sur quoi s'appuie le rapport. Je

 27   pense qu'il y avait deux notes de bas de page dans le paragraphe pertinent.

 28   Nous venons de réserver un numéro pour le moment, et plus tard nous


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  1   entendrons les parties sur le versement au dossier de cette partie du texte

  2   et éventuellement d'autres documents sous-jacents.

  3   Monsieur le Greffier, le numéro réservé pour l'extrait du rapport, donc de

  4   l'annexe de ce rapport des Nations Unies, rapport d'experts, sera lequel ?

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] P7277, Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce numéro est réservé à cette fin.

  7   Monsieur McCloskey, veuillez procéder.

  8   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je vous remercie.

  9   Q.  Monsieur Pelemis, vous rappelez-vous avoir assisté à la célébration du

 10   premier anniversaire du 10e Détachement de Sabotage à Vlasenica ? Le

 11   général Krstic a assisté à cette cérémonie, ainsi que Vujadin Popovic et

 12   d'autres.

 13   R.  Oui, j'y ai assisté.

 14   M. McCLOSKEY : [interprétation] J'arrive à la dernière pièce à conviction.

 15   Document 65 ter numéro 26123C. On pourrait nous le diffuser. Il devrait y

 16   avoir des sous-titres, donc la diffusion ne devrait se faire qu'une fois.

 17   Je demanderais de l'arrêter à plusieurs reprises.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les sous-titres sont anglais ?

 19   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est un commentaire ou --

 21   M. McCLOSKEY : [interprétation] Cela devrait être un dialogue.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce serait un dialogue. Donc, bien sûr,

 23   savoir si les sous-titres ont bien été traduits par les traducteurs doit

 24   encore être vérifié.

 25   Par conséquent, puisqu'il y a des sous-titres et qu'il y a une

 26   interprétation simultanée, Maître Lukic, je vous demanderais d'examiner

 27   attentivement la diffusion, les images, de façon à nous dire si vous avez

 28   le moindre souci par rapport à la précision du texte anglais, et à ce


Page 33857

  1   moment-là nous tiendrons compte de ce qui est écrit après que nous vous

  2   aurons entendu pour déterminer la possibilité de verser ce document

  3   intégralement ou en partie au dossier.

  4   Vous avez une transcription des images dont vous demanderez le versement

  5   plus tard ?

  6   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui. Les cabines ont ce texte. Je sais que

  7   M. Lukic peut contacter M. Stojanovic. Cela fait un moment que cette vidéo

  8   circule.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Eh bien, voyons-la.

 10   [Diffusion de la cassette vidéo]

 11   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 12   Q.  Qui sont les hommes que l'on voit sur ces images ?

 13   R.  Les membres du 10e Détachement de Sabotage.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous nous sommes arrêtés à 13.7

 15   secondes.

 16   Veuillez poursuivre.

 17   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 18   [Diffusion de la cassette vidéo]

 19   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 20   Q.  Est-ce que vous pourriez -- nous sommes maintenant à 26.1 secondes.

 21   Est-ce que vous pourriez identifier les personnes que l'on voit sur l'écran

 22   ? Si cela ne vous ennuie pas, vous pourriez commencer par le premier à

 23   l'écran qui porte une moustache.

 24   R.  Je me rappelle que son prénom était Savo, il se contentait d'un travail

 25   administratif au sein de l'unité. A sa gauche, on voit le général Krstic,

 26   et ensuite moi-même.

 27   M. McCLOSKEY : [interprétation] Très bien. Poursuivons.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous nous sommes arrêtés à 26.1.


Page 33858

  1   [Diffusion de la cassette vidéo]

  2     M. McCLOSKEY : [interprétation]

  3   Q.  Nous voyons sur la base des sous-titres en anglais qu'il s'agit dans ce

  4   passage d'une promotion au rang de sergent d'infanterie de réserve de

  5   Drazen Erdemovic, n'est-ce pas ?

  6   R.  C'est exact.

  7   M. McCLOSKEY : [interprétation] Bien. Nous poursuivons à partir de 47.5

  8   secondes.

  9   [Diffusion de la cassette vidéo]

 10   M. McCLOSKEY : [interprétation] Nous nous arrêtons à 1:00.8 secondes.

 11   Q.  Donc est-ce qu'il s'agit bien sur ces images de l'annonce d'une

 12   promotion à l'intention d'Erdemovic ?

 13   R.  Oui, oui.

 14   M. McCLOSKEY : [interprétation] Poursuivons.

 15   [Diffusion de la cassette vidéo]

 16   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 17   Q.  Pouvez-vous nous dire qui l'on voit à l'image au "time code" 1:08.6 ?

 18   R.  Le sous-lieutenant Franc Kos.

 19   [Diffusion de la cassette vidéo]

 20   M. McCLOSKEY : [interprétation] Nous sommes maintenant au "time code"

 21   2:28.1.

 22   Q.  Nous venons d'entendre le général Krstic qui vous transmet les

 23   acclamations du commandant, qui était à l'époque le général Ratko Mladic,

 24   n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui, à ce moment-là, le général Krstic représentait le commandement,

 26   parce que tous les hommes étaient engagés en Krajina occidentale, donc

 27   Krstic est venu représenter le commandement dans le cadre de la

 28   participation à cette célébration.


Page 33859

  1   Q.  Donc, en octobre 1995, lorsque le général Krstic transmet ces paroles

  2   du général Mladic, tous les Musulmans avaient déjà été tués et enterrés à

  3   la ferme de Branjevo, et ce, depuis de nombreux mois, n'est-ce pas ?

  4   R.  Eh bien, depuis trois mois à peu près, quatre mois, trois à quatre

  5   mois.

  6   Q.  Et ce fait est un fait que le général Mladic connaissait parfaitement

  7   en octobre 1995, n'est-ce pas ?

  8   R.  Je ne sais pas ce que savait le général Mladic.

  9   M. McCLOSKEY : [interprétation] Pas d'autres questions, Monsieur le

 10   Président. Et je demande le versement au dossier de ce segment de la vidéo.

 11   Nous déterminerons exactement la longueur du segment dont nous demanderons

 12   le versement au dossier.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas de discours à voix haute, Monsieur

 14   Mladic.

 15   Apparemment, M. Mladic souhaite consulter son conseil, ce qu'il peut faire

 16   à condition de ne pas parler de façon audible dans le prétoire. Nous

 17   attendrons pour la reprise des questions supplémentaires jusqu'à la fin de

 18   cette consultation.

 19   [Le conseil de la Défense se concerte]

 20   M. LUKIC : [interprétation] Je vous demande quelques instants de patience,

 21   une demi-minute.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous l'avez.

 23   M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, cette vidéo

 24   constitue le document 65 ter numéro 26123C. Nous aimerions un numéro de

 25   pièce à conviction pour ce document.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, et je suis toujours un peu

 27   préoccupé lorsque des portions qui n'ont pas été diffusées dans le prétoire

 28   font l'objet d'une demande de versement au dossier. Pourriez-vous nous dire


Page 33860

  1   ce qui n'a pas été diffusé, Monsieur McCloskey ?

  2   M. McCLOSKEY : [interprétation] Quarante cinq secondes simplement. Si cela

  3   rentre dans mes dix minutes, nous pouvons les diffuser.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, je crains que toute autre

  5   vérification prenne beaucoup plus de temps, donc regardons ces 45 secondes.

  6   [Diffusion de la cassette vidéo]

  7   M. McCLOSKEY : [interprétation]

  8   Q.  A gauche de l'écran, on voit d'abord Svetozar Kosoric, qui est le chef

  9   du renseignement du Corps de la Drina ?

 10   R.  Non, Kosoric travaillait au sein du renseignement radio du Corps de la

 11   Drina.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais je croyais que nous allions

 13   simplement regarder les 45 secondes de la fin de cette portion de vidéo

 14   sans aucune question. Si vous souhaitez identifier les personnes, restons-

 15   en là. Moi, cela me suffit personnellement.

 16   M. McCLOSKEY : [interprétation] Pour certaines personnes, je ne peux pas

 17   résister, Monsieur le Président.

 18   Q.  Monsieur le Témoin, pourriez-vous nous dire le nom de la personne

 19   suivante sur l'écran, le deuxième à partir de la gauche ?

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous voulez dire au deuxième rang ?

 21   M. McCLOSKEY : [interprétation] Il donne l'impression d'être au deuxième

 22   rang.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, c'est Popovic, responsable de la

 25   sécurité du Corps de la Drina.

 26   M. McCLOSKEY : [interprétation] Très bien. Nous nous sommes arrêtés au

 27   "time code" 02:44.7, et nous pouvons poursuivre la diffusion.

 28   [Diffusion de la cassette vidéo]


Page 33861

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Voyons si un numéro a déjà été --

  2   non, aucun numéro n'a été affecté à ce document jusqu'à présent.

  3   Monsieur le Greffier, le document 65 ter numéro 26123C devient la pièce à

  4   conviction numéro ?

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Numéro P7278, Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce document est désormais une pièce à

  7   conviction à part entière.

  8   Maître Lukic.

  9   M. LUKIC : [interprétation] Puis-je commencer ?

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, vous pouvez procéder.

 11   M. LUKIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 12   Nouvel interrogatoire par M. Lukic :

 13   Q.  [interprétation] Monsieur Pelemis, bonjour.

 14   R.  Bonjour.

 15   M. LUKIC : [interprétation] Je demande l'affichage de la pièce D320.

 16   Q.  Monsieur Pelemis, l'Accusation vous a interrogé aujourd'hui au sujet de

 17   ce document. Vous avez dit que c'était Franc Kos qui avait signé cet ordre

 18   de marche. Combien de groupes voyez-vous évoquer sur cette liste, et qui

 19   sont les chefs de ces groupes ?

 20   R.  Moi, je vois trois groupes; le premier groupe, donc premier escadron,

 21   dirigé par le sous lieutenant Franc Kos, et qui compte sept hommes.

 22   Deuxième groupe, Drazen Erdemovic en est le chef, il est sergent, et il a

 23   sous ses ordres dix hommes. Et le troisième groupe de combat est dirigé par

 24   Luka Jokic, sergent, qui a sous ses ordres une dizaine d'hommes.

 25   Q.  Est-ce que vous avez ôté son grade à Drazen Erdemovic ?

 26   R.  Ce n'est pas moi qui aie accordé son grade à Drazen Erdemovic et je ne

 27   pouvais pas non plus le lui retirer. C'est l'administration chargée du

 28   personnel de l'état-major principal qui l'a fait.


Page 33862

  1   Q.  Le 10 juillet 1995, c'est-à-dire au moment où les événements dont nous

  2   sommes en train de parler se sont déroulés pour l'essentiel, est-ce que

  3   Drazen Erdemovic était sergent, comme il est indiqué dans ce document, ou

  4   est-ce qu'il ne l'était pas, comme il le prétend ?

  5   R.  Il a signé son contrat avec le ministère de la Défense, c'est-à-dire

  6   l'état-major principal de la Republika Srpska, et c'est dans ce contrat que

  7   lui était octroyé un grade. Et ensuite, il a été promu, comme nous avons pu

  8   le voir sur la séquence vidéo qui vient d'être diffusée, en devenant sous-

  9   lieutenant. Le 10 juin en question, il était sergent. C'est ce que je

 10   réponds à votre question précise.

 11   Q.  Vous avez parlé de "juillet" ou de "juin" ?

 12   R.  Juillet, juillet. Le 10 juillet 1995.

 13   M. LUKIC : [interprétation] Nous allons maintenant examiner un document,

 14   une pièce, à savoir la pièce P1585, dont je demande l'affichage.

 15   Q.  Et que je vous laisse parcourir. Il s'agit d'un rapport officiel du

 16   DutchBat, le Bataillon néerlandais.

 17   M. LUKIC : [interprétation] C'est la page 2 qui nous intéresse en anglais.

 18   Page 3 en B/C/S.

 19   Q.  Regardez le titre, "Reconstitution des événements". Comme vous avez pu

 20   l'entendre, une femme a été tuée et un homme a été blessé.

 21   Je voudrais également vous montrer un autre document sur le même sujet, il

 22   s'agit de la pièce 1588. Nous pouvons voir que ceci a été envoyé par

 23   l'administration du renseignement du secteur du renseignement et de la

 24   sécurité de l'état-major principal de l'armée de la Republika Srpska en

 25   date du 21 juin 1995. Il s'agit là d'un ordre pour l'engagement du 10e

 26   Détachement de Sabotage.

 27   M. LUKIC : [interprétation] Dans la version B/C/S, nous sommes sur la bonne

 28   page, ce qui correspond à la page suivante de la version anglaise. La


Page 33863

  1   partie qui nous intéresse, c'est le point 6.

  2   Q.  Qui dit, au point 6 :

  3   "En effectuant cette tâche, veuillez vous conformer strictement à ce qui

  4   suit :"

  5   Le premier tiret :

  6   "Il ne faut pas que cela présente un danger pour les membres de la

  7   FORPRONU;"

  8   Deuxième tiret :

  9   "Eviter des blessés, les femmes et les enfants."

 10   Et ceci se rapporte à quelle opération ?

 11   R.  Le passage à travers la mine à Sase et les tirs qui ont été ouverts sur

 12   les cibles de la 28e Division le 23 juin 1995.

 13   Q.  Est-ce que les hommes étaient au courant de cela ?

 14   R.  Oui. Avant d'entrer dans la mine à Sase, j'ai lu cela à mes hommes.

 15   Q.  Au troisième tiret, je peux voir qu'au cas où il y aurait des blessés

 16   ou des morts parmi les membres du détachement, il faut absolument sauver

 17   les corps à tout prix. Aucun des nôtres ne doit tomber aux mains des

 18   ennemis.

 19   R.  C'était une règle pour l'ensemble des unités. Même s'il y avait cinq

 20   personnes de tuées, il fallait absolument sauver leurs corps, tous les

 21   corps.

 22   Q.  On nous a montré la carte de Pelemisi et le voisinage. Je pense qu'il y

 23   a certaines choses qui n'ont pas été enregistrées de manière très précise à

 24   la page 16, ligne 25, où vous mentionnez le nombre de personnes décédées.

 25   Lorsque vous étiez chargé de la défense du village de Pelemisi, combien de

 26   personnes ont été tuées ?

 27   R.  Quarante-neuf ou 50, entre le 24 mai et le 20 août. Et ceci concerne

 28   l'ensemble des combattants dans mon unité et également ceux qui sont venus


Page 33864

  1   nous aider. Dans l'ensemble, il y a eu à peu près 50 personnes qui ont été

  2   tuées pendant cette période.

  3   Q.  Au compte rendu d'audience à la page 20, ligne 12, vous avez commencé

  4   par dire quelque chose concernant les personnes qui étaient logées dans le

  5   village et qui avaient été amenées dans ce village pour faire l'objet d'un

  6   échange. Vous avez dit qu'aucune condition n'avait été mise en place. Vous

  7   n'aviez même pas -- et le reste de votre réponse n'a pas été enregistré.

  8   R.  Nous n'avions aucune logistique de mise en place. C'est ce que je

  9   voulais dire.

 10   Q.  Est-ce que vous aviez des cellules vous pouviez mettre les gens dans ce

 11   village ?

 12   R.  Non, nous avions simplement des logements, des maisons normales, qui

 13   étaient toutes habitées par la population locale.

 14   Q.  En d'autres termes, les personnes qui avaient été amenés dans le

 15   village, étaient-elles logées ces personnes dans des maisons vides, ou est-

 16   ce qu'elles allaient dans des maisons où vivaient les Serbes ?

 17   R.  Je pense que la personne qui vivait dans la maison partait ensuite

 18   vivre avec son frère ou sa famille, et que d'autres personnes pouvaient

 19   être logées dans sa maison.

 20   Q.  Eh bien, combien de temps les gens pouvaient rester là ?

 21   R.  Je pense 15 ou 20 jours pendant que j'y étais. Ou peut-être même

 22   jusqu'à un mois. Et ensuite, une fois que toutes les tentatives d'échange

 23   avaient échoué, elles ont été ramenées ces personnes à Vlasenica. À

 24   l'époque, nous avions 220 Serbes dans divers camps à Kladanj, et nous ne

 25   savions pas ce qu'il est advenu d'eux. Et cette tentative d'échanger ces

 26   personnes et de les sauver, c'est ce dont était responsable l'ancien poste

 27   de police de Kladanj.

 28   Q.  Et les personnes qui étaient logées dans cette maison, qui est-ce qui


Page 33865

  1   leur apportait de la nourriture ?

  2   R.  Bien, un jour c'était une maison, un autre jour c'était une autre

  3   maison. Au fur et à mesure que les gens apprenaient à connaître les autres,

  4   on leur apportait à manger, et les militaires en faisaient autant à

  5   l'époque. Tout le monde faisait de son mieux.

  6   Q.  Et je vais maintenant faire une autre intervention sur le compte rendu

  7   d'audience. Cela ne vous dira rien pour vous, mais lorsque je dis à la page

  8   23, ligne 23, vous avez dit 50 hommes dans une escadrille. Au total combien

  9   d'hommes est-ce que vous aviez ?

 10   R.  Eh bien, je dirais que nous avions 90 hommes sur la liste, 45 étaient à

 11   divers postes, 45 se reposaient pendant deux heures ou sept heures, et cela

 12   signifie que le front qui faisait 5 kilomètres de long était défendu par 45

 13   hommes à la fois, et cela signifie qu'il y avait peu d'opportunités de

 14   défense. C'est la raison pour laquelle à la ligne 24/7, j'ai dit que nous

 15   essayons de faire en sorte que mes hommes restent vigilants pour nous

 16   assurer que nous ne soyons pas surpris par l'ennemi.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, je voudrais revenir à

 18   votre point précédent sur lequel il semblerait que vous ayez conclu.

 19   Vous avez répondu aux questions concernant un nombre et qui devait faire

 20   l'objet d'un échange, et ensuite vous avez demandé où est-ce qu'elles

 21   étaient logées, s'il s'agissait d'une maison ou d'un logement vide, et est-

 22   ce qu'il y avait des Serbes qui vivaient dans ces maisons. Et vous avez

 23   répondu :

 24   "Je pense que cet homme vivait là-bas et qu'ensuite il est parti vivre avec

 25   son frère, donc ces gens ont été logés dans sa maison."

 26   Donc, dois-je comprendre que l'homme qui vivait là-bas était un Musulman ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, c'était un Serbe.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. La personne qui habitait là-bas,


Page 33866

  1   et qui était son frère, était également un Serbe ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, j'avais compris que les gens dont

  4   nous parlions étaient des Musulmans qui devaient faire l'objet d'un

  5   échange, donc je suis quelque peu surpris de vos réponses, tout d'abord,

  6   parce que vous faites référence à une seule personne alors que nous parlons

  7   d'un certain nombre de personnes; et deuxièmement, parce que je ne

  8   comprends pas lorsque l'on vous pose une question concernant le logement de

  9   ces personnes qui étaient là pour faire l'objet d'un échange, comment est-

 10   ce qu'il peut s'agir de Serbes. Est-ce que vous avez une réponse aux deux

 11   questions; tout d'abord, parce que vous ne parlez que du logement d'une

 12   seule personne, et deuxièmement, comment est-ce qu'un Serbe pouvait faire

 13   partie de ceux qui devaient faire l'objet d'un échange ? Vous pourriez

 14   peut-être commencer par la première question.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Permettez-moi de préciser. Lorsque les six ou

 16   sept femmes ont été emmenées à Pelemisi pour faire l'objet d'un échange,

 17   l'homme, qui était un Serbe et qui était propriétaire de la maison, a

 18   abandonné sa maison pour la laisser aux personnes qui devaient faire

 19   l'objet d'un échange, et il est celui qui est ensuite allé habiter chez son

 20   frère dans la maison adjacente à celle-ci. Il a quitté sa maison parce

 21   qu'il ne voulait pas être le seul homme au milieu de femmes, mais il les a

 22   néanmoins aidées à nettoyer la maison et leur a fourni tous les articles

 23   d'hygiène dont ils pouvaient avoir besoin, enfin ce genre de choses.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Et je pense que cela permet de

 25   mieux comprendre la deuxième question également. Donc maintenant tout est

 26   clair.

 27   Une autre question : ils voulaient, ces personnes, ces femmes voulaient se

 28   rendre de l'autre côté de la ligne de combat ?


Page 33867

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Elles voulaient soit se rendre -- enfin

  2   retourner dans leurs maisons, et on nous a laissés les échanger une par

  3   une. Mais l'objectif principal du poste de police était d'apprendre ce qui

  4   était arrivé aux 220 personnes, au tour des Serbes, comme je l'avais dit,

  5   parce que l'on ne savait pas qui était arrivé à ces Serbes.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon. Donc, en fait, ces femmes, comme

  7   vous l'avez expliqué, dépendaient d'un éventuel échange, à la condition que

  8   l'autre partie soit d'accord sur cet échange. Et si ce n'était pas le cas,

  9   elles n'étaient pas autorisées à aller où elles voulaient, n'est-ce pas ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Les Musulmans de leur côté ont refusé

 11   l'échange.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et ces femmes ont donc dû payer le prix

 13   de cela ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Pour autant que je sache, elles ont été

 15   autorisées à retourner à Vlasenica, ou plutôt, le chauffeur, Radenko

 16   Zoranovic et un autre homme les ont ramenées à Vlasenica.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais j'ai cru comprendre qu'elles sont

 18   restées pendant deux mois en attendant le résultat des négociations

 19   concernant l'échange ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas entendu l'interprétation de votre

 21   question, ou plutôt, je n'en ai entendu que la moitié.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, je vais répéter ma question. J'ai

 23   dit : Mais je crois comprendre qu'elles sont restées deux mois dans un

 24   lieu, et j'entends par là la maison, en attendant les résultats des

 25   négociations concernant l'échange ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous aviez envisagé tout

 28   simplement les laisser partir de l'autre côté, si c'est ce qu'elles


Page 33868

  1   souhaitaient ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Cela était décidé en consultations avec

  3   Stanimir de les ramener à Vlasenica parce que lorsque nos hommes ont

  4   compris qu'il n'en ressortirait rien, ils ont offert cela comme solution,

  5   et elles étaient d'accord pour rentrer chez elles.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous leur avez offert de se

  7   rendre de l'autre côté même s'il n'y avait pas d'échanges, simplement parce

  8   qu'elles voulaient se rendre de l'autre côté ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, lorsque nos hommes ont appris qu'elles

 10   ne serviraient à rien, ils leur ont dit qu'elles pouvaient se rendre à

 11   Kladanj ou à Vlasenica, et c'est là qu'elles ont choisi de retourner à

 12   Vlasenica. Messieurs les Juges, j'avais trois ou quatre prisonniers, et par

 13   la suite j'ai pris la décision de les laisser partir au bout de quelque

 14   temps. Tout d'abord, nous avions parlé de deux ou trois mois, et ensuite

 15   ils n'ont pas voulu échanger leurs soldats contre nos hommes.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ces trois ou quatre prisonniers dont

 17   vous parlez, de qui s'agissait-il ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agissait de membres de l'ABiH. L'un avait

 19   été fait prisonnier à Kalesija, l'autre à Olovo, et un autre à Zvornik. Ils

 20   sont toujours en vie et travaillent dans la Fédération de Bosnie-

 21   Herzégovine.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous pose cette question parce qu'il

 23   semblerait que vous ayez fait la comparaison entre une situation au cours

 24   de laquelle il y avait donc six femmes civiles qui attendaient les

 25   résultats des négociations pour un éventuel échange et une autre situation

 26   où vous parlez, là, de prisonniers de guerre. Est-ce que vous avez une

 27   explication pour nous dire pourquoi est-ce que vous comparez ces deux

 28   situations, ce qui laisse entendre que leur situation est dans une certaine


Page 33869

  1   mesure similaire ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que je voulais dire, c'est que l'autre

  3   partie ne voulait pas nous parler. J'ai également dit que j'avais moi-même

  4   trois prisonniers, trois soldats de l'ABiH, et j'ai offert de les échanger

  5   contre un seul membre de l'armée serbe et cette offre a été refusée. Donc

  6   j'ai tout simplement été forcé de les laisser partir.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, veuillez continuer.

  8   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Si nous pourrions

  9   revenir au document D320.

 10   Q.  Monsieur Pelemis, nous allons revenir sur le document qui établit la

 11   liste des hommes ayant participé à la marche de votre unité. Après cette

 12   opération et l'entrée dans Srebrenica, où est-ce que vos hommes ont été

 13   déployés ? Qui est resté ? Qui est parti ?

 14   R.  Quel jour ?

 15   Q.  Le 12, lorsque cela s'est terminé.

 16   R.  Aux alentours de 10 heures le 12, j'ai reçu des ordres du Corps de la

 17   Drina stipulant que mes activités concernant cette resubordination au Corps

 18   de la Drina devraient s'arrêter à 12 heures. J'ai alors appelé

 19   l'administration à Crna Rijeka, et l'officier qui m'a répondu m'a dit que

 20   Salapura était absent et qu'il essayerait de voir ce qui suivra. Et un

 21   petit peu plus tard, il m'a appelé et m'a dit que l'unité devrait rester

 22   encore quelques jours et ensuite se retrouver à Bijeljina pour se rendre

 23   ensuite dans la région où se trouvait le Corps d'Herzegovine à Kalesija.

 24   Lorsque nous étions à Srebrenica, nous nous sommes rassemblés près du dépôt

 25   de la Croix-Rouge, et j'ai dit à mes hommes : "Bien, maintenant, nous

 26   allons nous rendre le long de l'axe de Srebrenica-Zeleni Jadar-Milici, et

 27   cetera, et nous allons déposer nos équipements. Et je leur ai dit qu'ils

 28   étaient tous libres de partir jusqu'au 12 juillet où nous devrions nous


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  1   rassembler dans les casernes."

  2   L'INTERPRÈTE : L'interprète demande à ce que le témoin puisse ralentir.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, est-ce que vous

  4   pourriez ralentir pour les interprètes.

  5   M. LUKIC : [interprétation]

  6   Q.   Juste un instant. Ce que nous avons dans le compte rendu d'audience,

  7   c'est qu'ils étaient libres jusqu'au 12 juillet.

  8   R.  Jusqu'au 22.

  9   Q.  Veuillez poursuivre, mais je vous demanderais de bien vouloir ralentir.

 10   M. McCLOSKEY : [interprétation] Objection à ce type de question. Continuez,

 11   mais quoi ? On pourrait continuer comme cela indéfiniment.

 12   M. LUKIC : [interprétation] J'avais simplement interrompu le témoin pour

 13   corriger la date. Il parlait du 22 juillet, date à laquelle il leur a été

 14   demandé de se rassembler dans les casernes. Mais à partir du 12, il doit

 15   continuer. J'ai demandé qui était là après le 12. C'était là ma question à

 16   l'origine.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Permettez-moi de retrouver votre

 18   question. La question a été :

 19   "Où est-ce que vos hommes ont été déployés ? Qui est resté ? Qui a

 20   avancé ?"

 21   Et ensuite, vous l'avez interrompu. Il était en train de répondre à cette

 22   question. Vous auriez peut-être pu rapidement ramener le témoin à la

 23   question, qui est resté et qui a continué, plutôt que de laisser le témoin

 24   expliquer exactement quel chemin était suivi, et cetera, et cetera. Donc,

 25   si vous pouviez reprendre le contrôle des questions.

 26   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais du fait de cette interruption, en

 28   fait, cela ne pose aucun problème de poser la question et de dire


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  1   simplement "Veuillez continuer". Mais veuillez donner un petit plus

  2   d'éléments au témoin.

  3   M. LUKIC : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur Pelemis, veuillez nous dire si vous savez qui est allé où

  5   après le 12 ?

  6   R.  D'après ce que je sais, tous les hommes dont les noms figurent sur

  7   cette liste, les 26 que nous voyons sur la liste, en tout cas la plupart

  8   d'entre eux étaient partis à Bijeljina puis Vlasenica le soir du 12. Ils

  9   ont été mis au repos. Lorsque Dragan Todorovic a essayé d'organiser

 10   l'enterrement et le départ de Trebinje, un peu plus tard il a trouvé trois,

 11   quatre ou cinq hommes qui étaient disponibles pour aller à l'enterrement.

 12   Et les quatre ou cinq hommes qui sont restés ont été envoyés dans les

 13   villages environnants de Srebrenica pour essayer de collecter des vivres et

 14   des équipements pour la maison. C'est ce qu'on m'a dit.

 15   Par exemple, qu'est-ce qui s'est passé le 16 ? Eh bien, c'est seulement le

 16   16 que cette équipe était présente sur place. Ils étaient revenus de

 17   l'enterrement ou ils étaient revenus des différents trajets qu'ils ont

 18   effectués vers des villages où ils collectaient des vivres. Mais 80 % des

 19   hommes ont été en repos comme on leur avait dit de l'être.

 20   Q.  A la date du 16, les hommes qui étaient partis pour Branjevo, est-ce

 21   qu'ils faisaient partie d'un groupe déterminé ? Ou bien, dans quelles

 22   conditions se sont-ils regroupés ?

 23   R.  Eh bien, regardez. Franc Kos, responsable du 1er Groupe; ensuite on a

 24   Brano Gojkovic, 2e Escadron, 1er Peloton; Drazen Erdemovic, 1er Escadron, 1er

 25   Peloton; ensuite on en a un du 2e Escadron du 2e Peloton; Stanko Simatovic,

 26   1er Escadron, 2e Peloton; Blasto Veremovic [phon], 1er Escadron, 2e Peloton.

 27   Donc c'étaient des hommes qui ont été regroupés mais qui venaient de

 28   différents groupes.


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  1   M. LUKIC : [interprétation] Je vois que l'heure de la pause est arrivée,

  2   Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez besoin de combien de temps

  4   encore, Maître Lukic ?

  5   M. LUKIC : [interprétation] Je crois que je devrais en terminer en 15

  6   minutes.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quinze minutes. Monsieur McCloskey, dans

  8   l'ignorance de ce que deviendront ces 15 minutes, pouvez-vous nous dire

  9   quelle pourrait être votre estimation du temps ?

 10   M. McCLOSKEY : [interprétation] J'aurais une précision importante à

 11   demander encore au témoin.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Donc je pense que vous ne devriez

 13   pas encore préparer le témoin suivant à entrer dans le prétoire. Nous

 14   reprendrons l'audition du témoin suivant après la conclusion de la

 15   déposition de celui-ci.

 16   Nous allons faire une pause, Monsieur le Témoin. Vous pouvez sortir de la

 17   salle en suivant Mme l'Huissière. Nous reprendrons à 13 heures 40.

 18   --- L'audience est suspendue à 13 heures 20.

 19   --- L'audience est reprise à 13 heures 40.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder, je vous prie, Maître

 21   Lukic.

 22   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je demanderais

 23   l'affichage de la pièce P1673. C'est une déclaration -- ou, plus

 24   précisément, la déposition de Drazen Erdemovic dans l'audience tenue en

 25   vertu de l'article 61 du Règlement. J'aurais besoin de commencer par la

 26   page 9, ligne 20, je vous prie. 

 27   Q.  Je vous demanderais, Monsieur Pelemis, de nous dire, selon ce que vous

 28   savez, ce qu'a dit M. Erdemovic. Pour l'instant, je lis ce qui figure dans


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  1   cette page du compte rendu à partir de la ligne 20, il s'agit d'une

  2   question :

  3   "Question : Monsieur Erdemovic, j'aimerais maintenant appeler votre

  4   attention sur la date du 16 juillet en vous demandant si ce jour-là, vous-

  5   même ainsi que d'autres soldats de votre unité avez reçu des ordres

  6   impliquant votre participation dans une mission spéciale ?"

  7   Et ensuite --

  8   M. LUKIC : [interprétation] J'aimerais que nous passions à la page

  9   suivante, ligne 10.

 10   Q.  Je cite :

 11   "Question : Avez-vous reçu des ordres toute la journée de quelqu'un qui

 12   avait un rapport à une tâche ou à une mission pour laquelle vous avez

 13   finalement pris le départ ?

 14   "Réponse : Oui.

 15   "Question : De qui avez-vous reçu ces ordres ?

 16   "Réponse : Du commandant de groupe, Brano Gojkovic."

 17   Je passe maintenant à la ligne 7 :

 18   "Question : Est-ce que dans les conditions normales il donnait des ordres à

 19   l'unité concernant l'exécution de certaines missions ou est-ce qu'il

 20   s'agissait d'une exception ?

 21   "Réponse : Oui, c'était une exception."

 22   Monsieur Pelemis, voici maintenant ma question : selon vous, à l'intérieur

 23   du groupe dont faisaient partie Franc Kos et Drazen Erdemovic, et je vous

 24   demande de vous appuyer sur l'ensemble de vos souvenirs, donc, à

 25   l'intérieur de groupe, est-ce que les hommes membres de ce groupe pouvaient

 26   être commandés par Brano Gojkovic ?

 27   R.  Jamais.

 28   Q.  Au mieux de vos souvenirs, qui pouvait commander ce groupe dont


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  1   faisaient partie Franc Kos et Drazen Erdemovic ?

  2   R.  Eh bien, dans le respect de notre hiérarchie, c'est Franc Kos qui était

  3   responsable de tout.

  4   Q.  Je vous remercie. Voyons maintenant la suite du compte rendu que je

  5   citais, à partir de la ligne 18, qui commence par une question :

  6   "Question : En réponse aux ordres que vous avez reçus le 16 juillet,

  7   Monsieur Erdemovic, où êtes-vous ensuite allé ?

  8   "Réponse : Nous sommes allés à Zvornik, et Brano Gojkovic ainsi que

  9   le chauffeur ont rendu compte à un lieutenant-colonel dont je ne connais

 10   pas le nom."

 11   M. LUKIC : [interprétation] Ensuite, je demande que l'on passe sur

 12   l'écran à la page suivante. A partir de la ligne 9 de la page suivante.

 13   "Question : Après quelques conversations entre Brano et le

 14   lieutenant-colonel, que s'est-il passé ?

 15   "Réponse : Ils nous ont dit de prendre place dans la voiture et

 16   d'accompagner le véhicule avec le lieutenant-colonel et deux policiers

 17   militaires. Nous sommes allés de Zvornik dans la direction de Bijeljina, et

 18   sur la route nous nous sommes arrêtés au niveau d'une ferme qui

 19   représentait un hameau appelé Pilica."

 20   A présent, j'aurais besoin de la page suivante à l'écran, à partir de la

 21   ligne 10, je vous prie. 

 22   "Question : Après votre arrivée à la ferme, Monsieur Erdemovic, avez-vous

 23   reçu des ordres supplémentaires de vos supérieurs ?

 24   "Réponse : Moi personnellement, non, mais j'ai entendu les mots de Brano et

 25   du lieutenant-colonel pendant qu'ils discutaient ensemble, qui disaient que

 26   des autobus allaient arriver à la ferme.

 27   "Question : Par rapport à ces autobus, avez-vous reçu des renseignements

 28   supplémentaires ?


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  1   "Réponse : Après le départ du lieutenant-colonel, Brano a dit que des

  2   autobus allaient arriver avec des Musulmans de Srebrenica.

  3   "Question : A-t-il dit ce que vous-même et les membres de votre unité étiez

  4   censés faire au sujet de ces Musulmans venant de Srebrenica ?

  5   "Réponse : Oui.

  6   "Question : Qu'a-t-il dit ?

  7   "Réponse : Que nous devions exécuter ces personnes, par balle."Question :

  8   Lorsque vous dites 'il', qu'il vous a dit que vous deviez les abattre par

  9   balle, je vous demande pour le compte rendu d'audience d'indiquer qui est

 10   ce 'il'.

 11   "Réponse : Brano Gojkovic."

 12   Q.  Monsieur Pelemis, je vous demande de vous appuyer sur ce que vous savez

 13   et de nous dire qui a donné l'ordre de mouvement, qui s'est procuré les

 14   moyens matériels et qui a commandé le groupe après réception des ordres à

 15   Zvornik ?

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur --

 17   M. McCLOSKEY : [interprétation] Objection. Cette question comporte trois

 18   parties. Il y a aussi un manque de fondement. D'où tient-il ces

 19   renseignements ?

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, pourriez-vous établir le

 21   fondement de la connaissance de ce témoin et peut-être diviser la question

 22   en plusieurs questions différentes.

 23   M. LUKIC : [interprétation]

 24   Q.  Vous nous avez dit que Brano Gojkovic, à votre avis, ne pouvait pas

 25   exercer son commandement sur le groupe dont faisaient partie Franc Kos et

 26   Drazen Erdemovic. Vous nous avez dit que ce groupe ne pouvait être commandé

 27   que par Franc Kos. Avez-vous connaissance de l'identité de la personne qui

 28   a émis un ordre à l'intention de ce groupe, un ordre de mouvement, ce


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  1   groupe qui était composé d'hommes venus de différents escadrons de votre

  2   détachement ?

  3   R.  L'ordre venait de Dragan Todorovic, le responsable logistique du 10e

  4   Détachement de Sabotage qui était au sein de l'unité à la date du 16. J'ai

  5   appris que le véhicule et le matériel qui normalement étaient destinés à un

  6   escadron ont été repris par le sous-lieutenant Franc Kos et que leur

  7   affectation consistait à se rendre au QG de la 2e Brigade pour y recevoir

  8   des ordres complémentaires.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pourrions-nous comprendre ce que vous

 10   entendez par matériel ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Le matériel standard d'un escadron

 12   d'infanterie, c'est-à-dire des munitions, un fusil mitrailleur et huit

 13   fusils automatiques.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 15   M. LUKIC : [interprétation] Nous avons essayé hier de diffuser la pièce

 16   P1147, qui était une vidéo. Je vais remplacer cette diffusion par un cliché

 17   tiré de cette vidéo, qui représente le document 1D5380, dont je demande

 18   l'affichage à l'écran. Je demanderais que l'image soit agrandie à l'écran.

 19   Q.  Hier, lorsque nous avons regardé les images de la vidéo, vous nous

 20   aviez dit que vous aviez vu un homme blessé au dos. La qualité de la vidéo

 21   n'est pas parfaite, mais est-ce que vous diriez au vu de ce cliché que la

 22   tache que l'on voit sur le dos de cet homme est une tache de sang ?

 23   R.  Oui, je maintiens mon affirmation selon laquelle l'homme était blessé

 24   au dos.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question qui vous était posée

 26   consistait à vous demander d'identifier une tache de sang sur le dos de la

 27   personne que l'on voit maintenant sur ce cliché. C'est cela qui était le

 28   but de la question, et pas de savoir si vous pensez toujours qu'il avait


Page 33877

  1   été blessé dans le dos.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je crois qu'il a été touché au dos, et je

  3   fonde mon propos sur les taches de sang que l'on voit dans son dos.

  4   M. LUKIC : [interprétation]

  5   Q.  Si on lui avait tiré dans la poitrine, est-ce qu'il aurait pu présenter

  6   ces blessures au dos ?

  7   R.  Oui, s'il s'agissait d'une plaie traversante.

  8   M. LUKIC : [interprétation] Nous demandons le versement au dossier de ce

  9   cliché, Monsieur le Président.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, bien sûr, si vous

 11   souhaitez poursuivre sur votre lancée, c'est à vous de décider comment vous

 12   utilisez le temps qui vous est imparti. Mais, bien entendu, si l'on me tire

 13   dans la poitrine, on ne peut pas dire si cela produira un orifice dans mon

 14   dos, car la balle peut être arrêtée sur son trajet, elle peut avoir dévié.

 15   Il y a de très nombreuses explications qui sont en général traitées par les

 16   experts auxquels il est demandé d'examiner des cadavres --

 17   M. LUKIC : [interprétation] Hier, le témoin a déclaré : Je ne suis pas sûr

 18   de cela car -- c'est ce que je conclus d'une photographie, et --

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous lui demandez maintenant si, au cas

 20   où l'homme en question aurait été touché à la poitrine, il présenterait

 21   toujours les mêmes blessures dans le dos. Il n'y a aucun moyen pour ce

 22   témoin de répondre à cette question. Si vous lui aviez demandé : au cas où

 23   l'on vous tire dans la poitrine, est-ce que cela signifie nécessairement

 24   qu'il n'y a pas d'orifice de sortie de la balle sur le dos ? Ce serait une

 25   question différente, pour un expert, mais je pense que nombreuses parmi les

 26   personnes qui traitent de ce genre de questions, y compris s'il s'agit

 27   d'experts, pourraient produire la même réponse que le témoin. Mais essayons

 28   de rester sérieux.


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  1   Je vous prie de procéder.

  2   M. LUKIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

  3   demande tout de même le versement au dossier de cette photographie.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est un cliché de la vidéo.

  5   M. LUKIC : [interprétation] C'est la même vidéo, oui.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais avant cela, est-ce que l'on

  8   pourrait demander au témoin --

  9   M. LUKIC : [interprétation] Je puis vous dire que ce cliché a été extrait

 10   par l'Accusation, et introduit dans l'affaire Tolimir.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est --

 12   M. McCLOSKEY : [interprétation] C'est dans l'affaire qui nous intéresse,

 13   effectivement aussi. Dans l'album de cliché.

 14   M. LUKIC : [interprétation] Peut-être.

 15   M. McCLOSKEY : [interprétation] Pièce P01148.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Par conséquent, il n'est pas besoin d'en

 17   demander le versement au dossier.

 18   M. LUKIC : [interprétation] Absolument aucun besoin dans ce cas.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, avançons.

 20   M. LUKIC : [interprétation] Je vous remercie.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais avant de retirer la photographie

 22   de l'écran, est-ce que le témoin pourrait identifier à notre attention la

 23   tache de sang qui se trouve sur le dos de cet homme et comment peut-on

 24   déterminer où est son dos ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Au milieu du dos…

 26   M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge,

 27   quelqu'un devrait aider le témoin en lui donnant un stylet. Il a appuyé sur

 28   un bouton mais cela n'a fait qu'agrandir l'image.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin a annoté la photographie, et

  2   je suppose que vous voulez en demander le versement au dossier, Maître

  3   Lukic ?

  4   M. LUKIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

  6   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce D979.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le cliché tiré de la vidéo et annoté par

  8   le témoin a été versé au dossier en tant qu'élément de preuve.

  9   M. McCLOSKEY : [interprétation] On vient de m'informer que nous nous étions

 10   trompés, mais ce n'était pas le cas. Ce cligné figure dans l'album Tolimir,

 11   mais pas dans l'album Mladic. Donc voilà ce qu'il en est.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Nous sommes maintenant dans le

 13   vrai.

 14   M. LUKIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 15   Deuxième partie de la question du Juge Moloto, comment peut-on déterminer

 16   que cette personne présentée sur le cliché repose sur le ventre, cela est

 17   beaucoup plus visible dans la vidéo, nous l'avons vue hier --

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous regardons à présent ce cliché. Je

 19   suis au courant de ce qui s'est passé. Mais je pose ma question au sujet de

 20   ce cliché.

 21   M. LUKIC : [interprétation] Si vous voulez poser la question au témoin il

 22   pourrait répondre à cette partie de la question.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'ai posé la question.

 24   Souhaitez-vous que je la répète, Monsieur ? Comment déterminez-vous que

 25   cette personne repose sur le ventre ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, je le vois sur la photographie, je

 27   vois qu'il repose sur le ventre.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Comment le voyez-vous ?


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vois les taches de sang au milieu du dos,

  2   qui indiquent qu'il a été blessé dans le dos.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais vous répondez à une question

  4   différente de la mienne. Vous nous avez dit qu'il présentait des taches de

  5   s'agissant sur le dos. Je vous demande comment vous déterminez que c'est

  6   bien son dos que l'on voit sur le cliché. On peut pas reconnaître le dos

  7   parce qu'il recouvert de sang.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] En regardant cette photo, je dirais que je

  9   pense que cet homme repose sur le ventre.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup. C'est tout.

 11   Merci, Maître Lukic.

 12   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je pense que j'ai

 13   encore un autre sujet et je pense qu'ensuite je devrais finir dans pas

 14   longtemps.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Cela signifie que le prochain

 16   témoin peut de toute façon être excusé parce que nous n'allons pas

 17   commencer sa déposition aujourd'hui.

 18   M. LUKIC : [interprétation] Mon collègue, Me Ivetic, va informer le commis

 19   à l'affaire, ce sera fait. Merci, Monsieur le Président.

 20   Est-ce que nous pourrions maintenant demander l'affichage de la pièce

 21   1D5378, s'il vous plaît.

 22   Q.  Un peu plus tôt aujourd'hui, Monsieur Pelemis, vous avez parlé d'une

 23   personne du nom de Stanimir Pelemis.

 24   R.  Oui, effectivement.

 25   Q.  Nous pouvons voir sa déclaration ici. C'est une déclaration faite

 26   devant le CSB de Zvornik. Il a parlé d'attaques contre le village de

 27   Pelemisi.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]


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  1   M. LUKIC : [interprétation] On n'entend pas la traduction anglaise. Nous

  2   avons besoin de la page suivante de cette déclaration, s'il vous plaît.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait peut-être

  4   demander au témoin d'identifier ce qu'il a sous les yeux et ce que nous

  5   voyons également en ce moment ?

  6   M. LUKIC : [interprétation] Oui, merci. Est-ce que nous pouvons revenir en

  7   arrière.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voyons si le témoin a -- avez-vous déjà

  9   vu ce document, Monsieur le Témoin ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez, s'il vous plaît, alors

 12   présenter ce document, Maître Lukic.

 13   M. LUKIC : [interprétation] C'est ce que je vais faire. Merci.

 14   Q.  C'est une déclaration faite le 11 juillet 1994 par Stanimir Pelemis,

 15   fils de Stevan, dont la mère s'appelait Danica. Il parle de crimes de

 16   guerre, des crimes de guerre qui se sont produits à Pelemisi et Jelacici et

 17   il fait une déclaration. Et aujourd'hui, un peu plus tôt, vous nous avez

 18   dit que le village avait attaqué à cinq reprises ou qui, en fait, c'est un

 19   village qui était tombé à cinq reprises; est-ce que c'est exact ?

 20   R.  Oui.

 21   M. LUKIC : [interprétation] Est-ce que nous pourrions voir la page suivante

 22   de ce document.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Qui a répondu "oui" ?

 24   L'INTERPRÈTE : C'est le témoin qui a dit "oui." Dit l'interprète de la

 25   cabine anglaise.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien, merci.

 27   M. LUKIC : [interprétation]

 28   Q.  Nous pouvons voir ici une liste de noms. Il est dit que la première


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  1   attaque sur le village serbe de Pelemisi s'est produite en 1993 à l'époque

  2   de Pâques. Le village a été mis à feu. Et les 35 maisons ont été

  3   incendiées. La deuxième fois que le village a été attaqué c'était en mars

  4   1994. Et cette fois, les personnes suivantes ont été tuées. Et vient une

  5   liste de dix noms. La troisième fois que le village serbe de Pelemisi a été

  6   attaqué, c'était le 20 avril 1994, à l'époque de Pâques, les attaques

  7   venaient de Kladanj et Stanova.

  8   Et parmi les personnes dont vous voyez le nom ici, est-ce qu'il y a des

  9   gens que vous connaissiez personnellement ?

 10   R.  Je connaissais Milos Pepic, qui figure ici en première position. Je

 11   connaissais également Nenad Vidovic, au 2. Je connaissais également la

 12   personne qui figure sous le numéro 5, Miroljub. Et je connaissais

 13   personnellement également des personnes dans la deuxième série de noms, je

 14   connaissais la personne 1, 2 et 4.

 15   Q.  Est-ce que vous pourriez nous donner leurs noms.

 16   R.  Milos Pepic, il était mon voisin, il a été décapité. Nous avons trouvé

 17   sa tête à 200 mètres de son corps. Nenad Vidovic était un enseignant, il

 18   enseignait l'éducation physique. Et Miroljub Milicic était de Popovici. Il

 19   était un forestier. Ljubisa Radojcic de Sekovici était un chauffeur. Ce

 20   sont des gens dont je me souviens encore aujourd'hui ici.

 21   Q.  Merci. Pour ce qui est de votre 10e Détachement de Sabotage, est-ce

 22   qu'il y a eu des membres du 10e Détachement de Sabotage qui ont participé

 23   aux attaques contre Pelemisi ?

 24   R.  Le 18 avril 1993, Zijad Zigic et Franc Kos ont participé à l'attaque.

 25   Q.  En tant que membres de quelles unités à l'époque ?

 26   R.  Les unités d'assaut de la 2e Brigade de Tuzla.

 27   Q.  De quelle armée ?

 28   R.  De l'ABiH.


Page 33883

  1   Q.  Etiez-vous au courant de ce fait lorsqu'ils ont rallié votre unité, le

  2   10e Détachement de Sabotage ?

  3   R.  Oui, ils avaient admis cela et avaient reconnu les faits lorsque j'ai

  4   rallié le 10e Détachement de Sabotage. Je n'ai jamais retenu cela contre

  5   eux. Je ne les détestais pas. J'ai essayé de les aider autant que je

  6   pouvais lorsqu'ils se trouvaient dans mon unité. Et je suis toujours l'ami

  7   de Zijad Zigic. Et permettez-moi simplement de vous dire qu'à cette

  8   occasion, ils ont tué une personne de 70 ans, Stojan Vucinovic, qui était

  9   mon kum. Stojan Vucinovic. Et à ce jour encore, nous n'avons pas réussi à

 10   retrouver les restes de son corps, après qu'il ait été brûlé.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne comprends pas très bien comment

 12   cela est abordé dans un contre-interrogatoire. J'ai remarqué que le témoin,

 13   quelquefois, donne, alors qu'il ne lui a pas été demandé, des informations

 14   sur des questions qui ne lui ont pas été posées. J'ai également remarqué

 15   qu'en tous les cas, dans la déclaration, au paragraphe 5, la question est

 16   abordée. Et cela aurait été plus facile, donc, de poser la question au

 17   cours de l'interrogatoire principal.

 18   Bien, j'ai laissé faire pendant un certain temps, Maître Lukic, mais je

 19   pense qu'il faudrait peut-être avancer --

 20   M. LUKIC : [interprétation] Bien. J'aurais encore une question sur ce

 21   point.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poser votre question au témoin.

 23   M. LUKIC : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur Pelemis, est-ce que vous pourriez me dire combien de membres

 25   de votre famille ont été tués pendant la guerre ?

 26   R.  Onze, aussi bien du côté de mon épouse que de mon côté.

 27   Q.  Merci, Monsieur Pelemis. C'est tout ce que je souhaitais vous poser

 28   comme questions.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de donner la possibilité de poser

  2   d'autres questions à l'Accusation.

  3   Questions de la Cour : 

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Pelemis, qu'est-ce que vous

  5   pourriez nous dire concernant les doutes et les suspicions et les activités

  6   en cours devant les tribunaux de Bosnie-Herzégovine contre vous ?

  7   R.  Rien. Si le tribunal m'invite à me présenter, je suis tout à fait prêt

  8   à aller y prouver mon innocence. Personnellement, je n'ai jamais tué un

  9   homme et je n'ai jamais donné l'ordre à qui que ce soit de le faire.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous êtes prêt à vous rendre devant

 11   les tribunaux s'ils souhaitent vous poser des questions ? Ou si les

 12   tribunaux sont prêts à vous considérer comme un suspect, vous êtes prêt,

 13   donc, à y aller et à vous défendre ?

 14   R.  Oui, certainement. Tout à fait. Je sais que je suis innocent et je suis

 15   tout à fait prêt à prouver mon innocence.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais s'il y a un jugement d'arrêt

 17   contre vous, pourquoi n'y allez-vous donc pas ?

 18   R.  Il faut que j'en parle avec mes avocats et que je les consulte pour

 19   voir ce que je suis supposé faire. En termes juridiques, j'entends.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, vous nous avez dit que vous étiez

 21   prêt à vous rendre devant les tribunaux. Vous n'avez pas besoin d'un avocat

 22   pour vous dire de vous rendre devant les tribunaux. Il semblerait que pour

 23   l'instant, vous n'êtes pas tout à fait prêt à vous rendre devant les

 24   tribunaux ?

 25   M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président --

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une seconde, s'il vous plaît.

 27   M. LUKIC : [interprétation] -- il n'est pas vrai qu'il ait besoin d'un

 28   avocat ou un juriste pour savoir s'il veut y aller ou pas. Je ne suis pas


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  1   d'accord avec vous.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, Maître Lukic, ce n'est pas avec

  3   vous que je suis en train de discuter. Tout accusé ou toute personne

  4   suspecte --

  5   M. LUKIC : [interprétation] Oui.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- peut décider de lui-même ou

  7   d'elle-même s'il souhaite se rendre ou pas. Et s'il veut s'y rendre, il

  8   peut voir un avocat pour voir, bien entendu, ce qu'il doit faire. Mais pour

  9   décider de ce qu'il voulait faire, j'ai demandé donc au témoin s'il était

 10   prêt à s'y rendre. Il a dit : "Oui." En fait, je lui ai demandé ensuite

 11   pourquoi il ne s'y rendait pas, et la réponse a été qu'il avait besoin de

 12   voir un avocat. Donc votre bonne volonté, votre volonté de vous rendre

 13   devant les tribunaux, est tout à fait conditionnelle. Et c'est exactement

 14   la raison, Maître Lukic, pour laquelle je considère votre intervention

 15   inappropriée.

 16   Donc votre bonne volonté est conditionnelle.

 17   R.  C'est la première fois que je suis devant un tribunal. Je ne sais pas

 18   exactement quels sont les motifs d'accusation qui pèsent sur moi et si ce

 19   sont des motifs réels ou faux. Ce n'est pas une affaire où je risque une

 20   pénalité de 50 euros. J'ai besoin d'un avocat car il se peut que je me

 21   trouve face de fausses accusations et que cela puisse avoir un impact sur

 22   toute ma vie.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit que vous êtes prêt à y

 24   aller et à prouver votre innocence. C'est en général face à de fausses

 25   accusations que l'on peut dire que l'on est innocent, n'est-ce pas ?

 26   Autrement, il n'est pas nécessaire -- enfin, si vous êtes innocent, il

 27   n'est pas nécessaire de prouver votre innocence. En fait, vous avez dit que

 28   vous êtes prêt à vous y rendre pour prouver votre innocence. Bien entendu,


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  1   vous devez prouver votre innocence, vous devez le faire devant un tribunal,

  2   si quelqu'un vous accuse à tort, que ce sont des accusations fausses.

  3   Autrement, s'il n'y a pas d'élément de preuve, alors il n'est pas

  4   nécessaire de prouver son innocence.

  5   R.  Je sais ce que j'ai fait. Et je sais qu'il n'y a rien dans ce que j'ai

  6   fait qui pourrait justifier que j'aie des craintes. Mais ce que je crains,

  7   ce sont les fausses déclarations, les faux témoins, le genre de chose qui

  8   se passe à Sarajevo. Je ne peux pas être certain à ce sujet.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est la raison pour laquelle jusqu'à

 10   présent vous n'avez pas voulu aller là-bas, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Lukic.

 13   M. LUKIC : [interprétation] Afin de participer à ce débat, il est important

 14   de connaître les lois du pays. Il y a un accord qui lie la Bosnie et la

 15   Serbie. Mais le témoin est ici, il est en Serbie. Et selon cet accord, s'il

 16   se trouve en Bosnie ou en Serbie, il est de toute façon ici. Donc --

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic --

 18   M. LUKIC : [interprétation] -- à quel que moment --

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, la seule chose que je

 20   sais, c'est que la Défense a porté à notre attention une déclaration dans

 21   laquelle le témoin exprime clairement ses préoccupations eu égard à la

 22   nécessité de comparaître devant un tribunal en Bosnie-Herzégovine, n'est-ce

 23   pas ? Et je laisse les choses en l'état. Si vous souhaitez à quel que

 24   moment que ce soit, afin de prouver la crédibilité du témoin, porter

 25   quelque chose à notre attention, vous avez la possibilité de le faire, mais

 26   pas dans le cadre de mon audition du témoin sur ce sujet. C'est aussi

 27   simple que cela.

 28   M. LUKIC : [interprétation] En qualité de citoyen --


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'en resterais là.

  2   M. LUKIC : [interprétation] En qualité de citoyen serbe, il ne peut pas

  3   être jugé en Bosnie. Il doit être jugé en Serbie conformément à cet accord.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, encore une fois, si cela

  5   ne pose pas problème, il peut être jugé en Serbie parce que c'est ce que

  6   vous nous dites --

  7   M. LUKIC : [interprétation] Oui, parce que --

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- pourquoi est-ce que vous vous

  9   inquiétez --

 10   M. LUKIC : [interprétation] -- il ne peut pas être extradé de Bosnie vers

 11   la Serbie [comme interprété]. C'est ce que stipule un accord conclu entre

 12   les deux Etats.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Par conséquent, je m'en tiendrais

 14   là, Maître Lukic. Si à quel que moment que ce soit vous souhaitez

 15   poursuivre sur cette question, vous pouvez le faire, mais pas dans le cadre

 16   de l'interrogatoire de ce témoin, ce témoin qui nous a dit qu'il était prêt

 17   à comparaître devant le tribunal qui a prononcé des charges à son encontre.

 18   M. LUKIC : [interprétation] Parce qu'il n'a pas d'éducation juridique. Il

 19   ne sait pas.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, tenons-nous-en là.

 21   D'autres questions, Monsieur McCloskey ?

 22   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui. Ce sera très court, je l'espère.

 23   Contre-interrogatoire supplémentaire par M. McCloskey :

 24   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, vous avez dit en page 56 du compte

 25   rendu d'audience provisoire, lorsqu'il était question d'Erdemovic -- page

 26   57, ligne 1, pour être tout à fait précis :

 27   "Il a signé son contrat avec le ministère de la Défense, à savoir l'état-

 28   major principal de la Republika Srpska, et c'est ainsi qu'il a obtenu son


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  1   grade, après quoi il a été promu, comme nous l'avons vu sur les images de

  2   la vidéo, pour devenir sous-lieutenant."

  3   Avez-vous dit cela ? Avez-vous dit que vous aviez vu sur les images de la

  4   vidéo qu'il était devenu sous-lieutenant, ou est-ce qu'il s'agissait d'un

  5   autre grade ?

  6   R.  Non, non, non. J'ai dit sergent.

  7   Q.  Bien. Donc ---

  8   M. McCLOSKEY : [interprétation] Il s'agit simplement d'une erreur -- d'une

  9   erreur importante au compte rendu d'audience. Nous résoudrons ce problème.

 10   C'est sûrement une erreur de traduction. Et je n'ai pas d'autres questions

 11   pour le témoin.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 13   Monsieur Pelemis, ceci met un point final à votre déposition devant ce

 14   Tribunal. Je tiens à vous remercier d'avoir parcouru une longue distance

 15   pour venir à La Haye et répondre aux questions qui vous ont été adressées

 16   par les deux parties et par les Juges de la Chambre. Et je vous souhaite un

 17   bon retour à votre domicile.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 19   [Le témoin se retire]

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic et Monsieur McCloskey, si

 21   l'un ou l'autre d'entre vous pense que les réponses faites par le témoin

 22   quant au fait de savoir s'il a quelque chose à craindre des poursuites

 23   engagées à son encontre ou pense que les documents - qu'il s'agisse d'actes

 24   législatifs ou de documents informatifs au sujet de cette affaire -

 25   provenant apparemment de Bosnie -- donc, si l'un ou l'autre d'entre vous

 26   estime que ces documents pourraient permettre de préciser les réponses

 27   faites au témoin, et plus particulièrement sa volonté ou non de comparaître

 28   devant un tribunal qui l'a mis en accusation, ou en tout cas qui a émis un


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  1   mandat d'arrêt à son encontre, veuillez nous le faire savoir.

  2   Monsieur McCloskey.

  3   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Comme vous vous

  4   en souviendrez, je crois que c'était jeudi dernier, le témoin a déclaré

  5   qu'il avait fourni une déclaration au bureau du procureur de la cour d'Etat

  6   de Bosnie-Herzégovine. Nous avons été en contact avec la cour d'Etat afin

  7   de vérifier ce qu'il en était, si quelque chose avait eu lieu, et je

  8   dispose de quelques renseignements. Je viens de les recevoir ce matin, en

  9   fait.

 10   Donc, après ce que vous venez de demander, il apparaît -- je ne sais

 11   pas, parce que je n'ai pas eu la possibilité encore de tout comprendre,

 12   mais cela semble être une lettre d'un juriste qui pourrait avoir représenté

 13   cet homme en 2010, et il semble qu'il s'agisse d'une déclaration d'une

 14   espèce ou d'une autre qui existe dans son écriture.

 15   Donc il semble qu'une espèce de déclaration judiciaire provenant de

 16   ce témoin ait été envoyée à la cour d'Etat de Bosnie. Je ne suis pas

 17   exactement sûr de la nature de ce document, donc je ne veux pas engager le

 18   témoin sur ce point. Mais étant donné la question précise posée par vous --

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je pense qu'il serait bon que ces

 20   renseignements, vous les partagiez avec Me Lukic. S'il y a la moindre

 21   raison d'appeler l'attention de la Chambre sur ce sujet, les parties auront

 22   la possibilité de le faire, en particulier suite aux questions que je viens

 23   d'adresser directement au témoin quant à sa bonne volonté ou non. Je crois

 24   l'avoir entendu dire qu'il souhaitait prouver son innocence, et en général

 25   c'est ce que l'on fait devant un Tribunal. J'en resterais là pour le

 26   moment.

 27   Mes excuses à toutes les personnes présentes.

 28   Vous aurez la possibilité de vous consulter après la suspension de


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  1   l'audience.

  2   M. LUKIC : [interprétation] Merci.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic.

  4   M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, il y avait une autre

  5   question dont l'examen a été retardé par l'audition de ce témoin. Je ne

  6   sais pas si vous souhaitez que j'en traite maintenant. Il y avait une date

  7   limite fixée par vous à la Défense pour répondre à certains points

  8   aujourd'hui. Je peux le faire par courriel si c'est plus facile.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce serait plus facile --

 10   M. IVETIC : [interprétation] Très bien.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons dépassé l'heure et je dois

 12   lever l'audience.

 13   M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, de façon à ne pas

 14   déformer les mots prononcés par vous, vous venez de formuler un commentaire

 15   en disant : "Je crois, comme il l'a dit, qu'il voulait prouver son

 16   innocence, et c'est en général ce que l'on fait devant un tribunal." Je

 17   sais ce que vous vouliez dire, à savoir que la possibilité était donnée à

 18   une personne de prouver son innocence mais que tel n'était pas le fardeau

 19   juridique présent.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, je pense que j'ai souligné ceci par

 21   le passé déjà. Mais certaines personnes sont mises en examen devant un

 22   tribunal et adoptent la position de dire qu'elles se défendront seules en

 23   prouvant leur innocence, alors qu'il va sans dire que ce n'est pas ce qu'il

 24   convient de faire. Mais, bien entendu, vous n'avez pas interdiction de le

 25   faire. Mais même si vous n'avez pas prouvé votre innocence, si l'accusation

 26   n'a pas prouvé votre culpabilité, dans ce cas il faut acquitter parce que -

 27   - mais ce n'est pas une condition sine qua non pour un acquittement. Est-ce

 28   que c'est bien compris suffisamment de façon à éviter toute confusion à


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  1   l'avenir ?

  2   M. McCLOSKEY : [interprétation] Absolument. J'apprécie.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous suspendons l'audience jusqu'à

  4   demain matin, 9 heures 30, dans la même salle.

  5   --- L'audience est levée à 14 heures 26 et reprendra le mardi, 31 mars

  6   2015, à 9 heures 30.

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