Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 9 décembre 2015

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 32.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de commencer, je souhaite la

  6   bienvenue à chacun dans cette salle et autour de cette salle.

  7   Madame la Greffière, pouvez-vous citer le numéro de l'affaire.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

  9   Messieurs les Juges. Il s'agit de l'affaire IT-09-92-T, le Procureur contre

 10   Ratko Mladic.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.

 12   Je crois savoir que nous avons une visioconférence, qui est déjà prête à

 13   démarrer, mais il y a avant quelques questions que j'aimerais traiter. Nous

 14   avons un certain nombre de question à voir - cela prendra un peu plus de

 15   cinq minutes - avant que nous ne commencions à entendre la déposition du

 16   témoin, qui est appelé par la Défense aujourd'hui. Donc, je vais traiter de

 17   ces questions d'abord.

 18   La première, c'est la déposition du témoin actuel. S'agissant du nombre de

 19   pièces associées dont le versement sera demandé par le biais de la

 20   déposition de Jose Cutileiro, la Chambre redit à la Défense qu'elle ne doit

 21   pas éviter de demander le versement au dossier des pièces associées dans le

 22   cadre de l'audition d'un témoin dans le prétoire ou par visioconférence. La

 23   Chambre, par conséquent, invite la Défense à réduire le nombre des pièces

 24   associées qu'elle souhaite faire verser au dossier par le biais de ce

 25   témoin.

 26   Ça, c'est un point.

 27   Et puis, ensuite, il y a un autre point que nous voudrions traiter à huis

 28   clos partiel; par conséquent, il faudrait déconnecter la connexion audio.


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  1   Cela ne sera pas long.

  2   Passons à huis clos partiel.

  3   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

  4   Monsieur le Président.

  5   [Audience à huis clos partiel]

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  8   [Audience publique]

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

 10   Je souhaiterais d'abord vérifier que la liaison vidéo fonctionne bien. A

 11   cette fin, je demanderais au représentant du Greffe sur le lieu d'où part

 12   la vidéoconférence de nous dire s'il nous voit et s'il nous entend.

 13   M. LE GREFFIER [via vidéoconférence] : [interprétation] Bonjour, Monsieur

 14   le Président. Bonjour, Messieurs les Juges. Nous vous voyons et vous

 15   entendons très bien. Je vous remercie.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous vous voyons et vous entendons

 17   également.

 18   Avant que je n'invite le témoin à prononcer sa déclaration solennelle,

 19   j'aimerais d'abord savoir qui est présent, qui se trouve sur le lieu d'où

 20   démarre la vidéoconférence.

 21   M. LE GREFFIER [via vidéoconférence] : [interprétation] Oui, Monsieur le

 22   Président. Tout à fait à ma gauche se trouve Mme Cristina Moniz, qui est

 23   représentante du gouvernement du Portugal et qui est présente en vertu d'un

 24   ordre oral de la Chambre; et puis directement sur ma gauche se trouve le

 25   témoin; ensuite, vous me voyez moi, et nous avons également une assistance

 26   technique dans une pièce attenante en cas de nécessité.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 28   Alors, Madame Moniz, vous êtes représentante du gouvernement portugais. La


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  1   Chambre attend de vous que vous n'interveniez pas dans l'audition du

  2   témoin, mais je crois savoir que vous êtes ici en qualité d'observateur, à

  3   moins que vous n'ayez vous-même une autre perception de votre rôle, auquel

  4   cas nous aimerions vous entendre sur ce point.

  5   Mme MONIZ : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je suis tout à

  6   fait d'accord avec votre définition de mon rôle.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

  8   Eh bien, dans ces conditions, Monsieur Cutileiro, nous pouvons maintenant

  9   procéder à votre audition. Mais avant que celle-ci ne commence, le

 10   Règlement du Tribunal exige de vous que vous prononciez une déclaration

 11   solennelle, dont le texte vous est tendu par écrit en ce moment. Je vous

 12   invite donc à prononcer cette déclaration solennelle et si vous avez des

 13   difficultés à vous tenir debout, vous pouvez rester assis; dans le cas

 14   contraire, je vous prierais de bien vouloir vous lever pour prononcer cette

 15   déclaration.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 17   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 18   LE TÉMOIN : JOSE CUTILEIRO [Assermenté]

 19   [Le témoin répond par l'interprète]

 20   [Le témoin dépose par vidéoconférence]

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie de tout cœur, Monsieur

 22   Cutileiro.

 23   Monsieur Cutileiro, vous serez d'abord interrogé par Me Ivetic, que vous

 24   allez voir dans quelques instants sur vos écrans. Pour ma part, je ne le

 25   vois pas encore à l'écran. Me Ivetic fait partie de l'équipe de Défense de

 26   M. Mladic.

 27   Maître Ivetic, vous pouvez procéder.

 28   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.


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  1   Interrogatoire principal par M. Ivetic :

  2   Q.  [interprétation] Bonjour, votre Excellence.

  3   R.  Bonjour.

  4   Q.  Monsieur, je vous demanderais d'abord de décliner vos nom et prénom, en

  5   commençant par votre prénom, de façon à ce que votre nom soit consigné au

  6   compte rendu d'audience.

  7   R.  Jose Cutileiro.

  8   Q.  Dans l'intérêt du compte rendu d'audience, il est exact, n'est-ce pas,

  9   que vous êtes ici en vertu d'une injonction à comparaître émanant de la

 10   Chambre de première instance ?

 11   R.  Oui, en effet. Je suis ici dans ces conditions, car si je n'avais pas

 12   été enjoint à comparaître, je ne pense pas que je serais venu.

 13   Q.  D'accord.

 14   R.  Pour une raison qui est de nature générale. Je pense que les gens qui

 15   sont appelés à agir en qualité de médiateurs, si l'on peut leur donner ce

 16   nom, dans le cadre de ce qu'il est convenu d'appeler des négociations de

 17   paix ne devraient pas comparaître en qualité de témoins si par la suite,

 18   pour telle ou telle raison, des affaires se présentent devant la justice.

 19   Je ne pense pas que ce soit approprié que nous soyons convoqué en qualité

 20   de témoin, mais puisque j'ai été enjoint à comparaître, je me trouve ici.

 21   Q.  Je vous remercie, Monsieur. J'apprécie.

 22   Aujourd'hui, j'aurais quelques questions à vous poser et je souhaiterais

 23   m'assurer que si vous ne comprenez pas parfaitement une question ou ne

 24   l'entendez pas parfaitement, vous nous le fassiez savoir et, dans ce cas,

 25   je reformulerai ma question. Vous m'avez bien compris ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et puisque nous parlons tous les deux l'anglais, il est important que

 28   nous ménagions une pause entre les questions et les réponses et vice versa


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  1   de façon à ce que les Juges de la Chambre et les interprètes puissent faire

  2   leur travail convenablement. Ceci est bien compris également ?

  3   R.  Absolument.

  4   Q.  Dans ce cas, nous allons commencer. Je vous demanderais d'abord si vous

  5   avez déjà témoigné devant le TPIY dans le cadre d'autres procès ?

  6   R.  Oui. En 2012, sur injonction à comparaître encore une fois, j'ai

  7   témoigné dans l'affaire intentée contre Radovan Karadzic.

  8   Q.  Et à cette occasion, Monsieur, est-ce que vous avez eu la possibilité

  9   de fournir une déclaration de témoin écrite à la Chambre chargée du procès

 10   Karadzic ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Je demande l'affichage grâce au prétoire électronique du document

 13   1D04306. Monsieur, j'espère que les responsables administratifs qui se

 14   trouvent à vos côtés peuvent vous fournir une copie papier de ce document.

 15   R.  C'est déjà fait.

 16   Q.  D'accord. Monsieur, ce document porte le titre de déclaration de témoin

 17   et ce témoin n'est autre que votre personne. Pouvez-vous nous dire si vous

 18   vous rappelez avoir fourni cette déclaration ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Je voudrais maintenant que nous passions à la dernière page de ce

 21   document, aussi bien grâce au prétoire électronique que dans la version

 22   papier, et dans le coin inférieur droit, vous voyez une signature. Pouvez-

 23   vous nous dire si vous reconnaissez à qui appartient cette signature ?

 24   R.  C'est ma signature.

 25   Q.  Si nous regardons à gauche de la signature, nous voyons une date en

 26   2012. Je crois que ce que nous voyons, c'est les chiffres romains IV,

 27   2012 ?

 28   R.  C'est exact.


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  1   Q.  Est-ce bien la date ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Est-ce que cette date est bien celle à laquelle vous vous rappelez

  4   avoir signé cette déclaration pour l'affaire Karadzic ?

  5   R.  Oui, et j'écris toujours le mois en chiffres romains de façon à ce

  6   qu'il n'y ait aucun doute sur la réalité de cette date.

  7   Q.  Je vous remercie, Monsieur.

  8   Alors, Votre Excellence, est-ce que vous avez reçu une copie de la

  9   déclaration intégrale, est-ce que vous l'avez relue avant le début de la

 10   présente audience de façon à vérifier son exactitude et sa véracité ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Est-ce que vous avez eu la possibilité d'examiner cette déclaration

 13   pour y apporter éventuellement les corrections nécessaires, le cas

 14   échéant ?

 15   R.  Si je me souviens bien, aucune correction n'est nécessaire.

 16   Q.  D'accord. Nous pourrions maintenant nous pencher sur un paragraphe

 17   ensemble, le paragraphe 30 qui se trouve en page 4 dans les deux versions

 18   linguistiques.

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Et j'aimerais appeler votre attention sur les documents qui sont

 21   énumérés dans ce paragraphe --

 22   R.  Ah, oui, excusez-moi. Je pense qu'il y a une petite erreur,

 23   effectivement, car la dernière lettre citée ne provenait pas du Dr

 24   Karadzic, mais était adressée au Dr Karadzic par mes soins, si je ne me

 25   trompe.

 26   Q.  Bien, donc cela concerne le document 1D4314.

 27   Maintenant, en dehors de cette petite correction que nous venons

 28   d'apporter au paragraphe 30 de la déclaration de témoin, est-ce que vous


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  1   maintenez ce que vous déclarez dans le reste de cette déclaration comme

  2   étant exacte ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Votre Excellence, si je devais vous poser aujourd'hui les mêmes

  5   questions que celles qui vous ont été posées au sujet d'un certain nombre

  6   de thèmes dans votre déclaration, est-ce que vos réponses seraient

  7   fondamentalement les mêmes que celles que nous trouvons par écrit dans

  8   cette déclaration de témoin ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Monsieur, vous avez été prié de prononcer une déclaration solennelle

 11   selon laquelle vous direz la vérité. Pouvez-vous nous dire si les

 12   déclarations écrites provenant de vous sont véridiques ?

 13   R.  En dehors des points que nous venons d'aborder, la lettre de M.

 14   Karadzic qui n'était pas de lui mais de moi, donc ma lettre au Dr Karadzic.

 15   J'ai relu la déclaration et je pense qu'elle l'est, oui.

 16   Q.  D'accord. Je vous remercie.

 17   M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le versement

 18   au dossier du document 1D04306 en tant que pièce à conviction publique de

 19   la Défense.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

 21   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce document devient la pièce D1371.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui est admise au dossier en tant

 23   qu'élément de preuve.

 24   M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, en ce moment, je

 25   voudrais donner lecture d'un bref résumé de la déclaration du témoin aux

 26   fins d'information du public.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que M. Cutileiro est informé de

 28   l'objectif de cette lecture ?


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  1   M. IVETIC : [interprétation] Oui, j'ai parlé avec lui et c'est la même

  2   procédure qui a été déjà suivie lors de sa comparution antérieure.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Nous allons donc écouter le résumé

  4   qui n'est pas un élément de preuve, mais qui consiste tout simplement à

  5   informer le public au sujet du contenu de la déclaration de M. Cutileiro.

  6   Veuillez procéder.

  7   M. IVETIC : [interprétation] Le témoin a rejoint le service chargé de

  8   l'étranger du Portugal en 1974. L'ambassadeur Cutileiro a servi dans un

  9   certain nombre de postes depuis ce moment-là, y compris en tant que

 10   représentant permanent du Portugal auprès du Conseil de l'Europe; en tant

 11   qu'ambassadeur, d'abord, au Mozambique, et ensuite en Afrique du sud; en

 12   tant que chef de la délégation portugaise à la conférence de Stockholm; en

 13   tant que directeur politique auprès du ministère des Affaires étrangères;

 14   et en 1992, en tant que conseiller spécial auprès du ministère des Affaires

 15   étrangères; en 1994, il est devenu secrétaire général de l'Union européenne

 16   occidentale; et en 2001-2004, il a été représentant spécial de la

 17   Commission des droits de l'homme des Nations Unies pour la Bosnie-

 18   Herzégovine et la Serbie- Monténégro.

 19   En février 1992, Lord Carrington, président de la conférence de la

 20   Commission européenne sur l'ex-Yougoslavie, a demandé à l'ambassadeur

 21   Cutileiro de présider les pourparlers portant sur les futurs arrangements

 22   constitutionnels pour la Bosnie-Herzégovine. L'ambassadeur a participé à

 23   plusieurs cycles de pourparlers et a servi en cette qualité jusqu'au 14

 24   août 1992.

 25   En conséquence de ces pourparlers, le 18 mars 1992, les parties se sont

 26   mises d'accord sur une Déclaration de principes qui prévoyait, entre

 27   autres, un Etat composé de trois unités constitutives à l'intérieur des

 28   frontières existantes de la Bosnie-Herzégovine. Un groupe de travail devait


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  1   être créé, qui était chargé de définir le territoire des unités

  2   constitutives, et une carte géographique a été annexée à la déclaration qui

  3   montrait les majorités relatives existant dans chaque municipalité et

  4   servirait de base au travail du groupe de travail. La Déclaration de

  5   principes a été rédigée après de longues et intenses négociations. Les

  6   Serbes de Bosnie ont accepté la déclaration et se sont engagés à avoir des

  7   minorités religieuses et ethniques à l'intérieur de leur unité constitutive

  8   et à respecter les droits de celles-ci. La déclaration a été acceptée par

  9   toutes les parties et devait servir de base à des négociations ultérieures

 10   qui ont, effectivement, eu lieu.

 11   Dans la période qui a suivi l'adoption de la Déclaration de principes, les

 12   dirigeants des Serbes de Bosnie ont souhaité de nouvelles négociations sur

 13   des questions non résolues pendant que les dirigeants du gouvernement

 14   bosnien traînaient des pieds. Peu après l'accord des parties sur la

 15   Déclaration de principes, le témoin a commencé à entendre le président

 16   Izetbegovic désavouer son acception de celle-ci dans des déclarations

 17   publiques. En juin 1992, le gouvernement bosnien a officiellement rejeté la

 18   Déclaration de principes.

 19   La déclaration de l'ambassadeur passe également en revue un certain nombre

 20   de notes relatives à des réunions avec l'ambassadeur Okun et d'autres

 21   représentants dont il déclare qu'elles rendent compte de façon exacte de

 22   ses propres propos et de ses convictions. En voici quelques exemples :

 23   Izetbegovic est un menteur et est très peu digne de confiance. Il revient

 24   toujours sur ce qu'il a accepté au préalable. Toutes les parties ont menti,

 25   mais les Serbes ont menti le moins.

 26   Le 28 mai 1992, l'ambassadeur a reçu une lettre de Momcilo Krajisnik,

 27   c'est-à-dire des Serbes, qui faisait remarquer qu'une équipe de médias

 28   musulmans se trouvait sur les lieux juste après la tuerie commise dans la


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  1   rue Vase Miskina, et dans laquelle il était déclaré :

  2   "S'il existe une bonne volonté favorable à une enquête, il est possible

  3   d'atteindre la vérité grâce à des expertises balistiques et médicales."

  4   Quelque temps après cette tuerie qui a fait de nombreuses victimes parmi

  5   les personnes qui faisaient la queue pour le pain dans la rue Vase Miskina,

  6   l'ambassadeur a parlé avec un officier artilleur de l'armée portugaise qui

  7   avait participé à l'enquête relative à ce pilonnage et est convaincu que

  8   l'obus avait été envoyé à partir des positions tenues par le gouvernement

  9   bosnien.

 10   L'ambassadeur Cutileiro déclare que c'est une tragédie que la paix n'ait

 11   pas pu être obtenue, grâce à la Déclaration de principes négociée en mars

 12   1992. Une comparaison de la carte annexée à la Déclaration de principes,

 13   avec celle qui a été annexée à l'accord de Dayton, montre qu'après trois

 14   ans et demi de guerre, le résultat est resté à peu près le même.

 15   D'innombrables vies humaines auraient pu être sauvées.

 16   Le président Izetbegovic et ses assistants étaient encouragés à conclure

 17   l'accord présenté par la Déclaration de principes et à se battre pour un

 18   Etat bosniaque unitaire qui était proposé par des personnes extérieures de

 19   bonne volonté.

 20   Fin de la lecture du résumé de la déclaration.

 21   Q.  Votre Excellence, j'ai quelques questions de suivi à vous poser. Nous

 22   pourrions peut-être nous tourner d'abord sur la première page de votre

 23   déclaration, aussi bien dans la version papier que dans le prétoire

 24   électronique, paragraphe 6, où nous lisons :

 25   "Le 2 mars 1992, j'ai reçu une lettre des dirigeants serbes de Bosnie qui

 26   demandaient qu'une conférence se réunisse dans les plus brefs délais, 'au

 27   vu des événements malheureux de Sarajevo qui affectent également toute la

 28   Bosnie-Herzégovine.' Dans cette lettre les mots 'événements malheureux'


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  1   sont cités. Ils ont servi de déclencheur pour le président Izetbegovic pour

  2   affirmer que la transformation du pays en trois unités constitutives était

  3   hors de question, et l'attaque des Serbes s'est poursuivie au moment d'une

  4   fête de mariage."

  5   A l'époque de cette lettre que vous recevez de Karadzic, le 2 mars 1992,

  6   est-ce que Izetbegovic vous avait déjà parlé de ces nouvelles positions

  7   dans le cadre des négociations, c'est-à-dire de son avis selon lequel la

  8   création de trois unités constitutives dans le pays était hors de

  9   question ?

 10   R.  Non, il ne l'a pas dit à moi. Je ne sais pas ce qu'il avait fait avec

 11   d'autres. Mais à moi, non, à ma connaissance.

 12   Q.  Monsieur, en général, comment décririez-vous la position d'Izetbegovic

 13   dans ces négociations qui ont conduit à l'acceptation de la Déclaration de

 14   principes ?

 15   R.  Eh bien, les trois parties s'efforçaient d'obtenir le plus possible

 16   pour leurs propres intérêts, et nous avons discuté longtemps puisque nous

 17   avions commencé ces pourparlers au début du mois de février. Nous avons

 18   fait quelques progrès à Lisbonne un peu plus tard. Les réunions se tenaient

 19   alternativement à Sarajevo et à Lisbonne. A l'époque, le Portugal détenait

 20   la présidence de la Communauté européenne. Et d'ailleurs, je voudrais dire

 21   que c'est une conférence de la Commission européenne qui a eu lieu, et pas

 22   une conférence de l'Union européenne, comme indiqué dans le résumé ma

 23   déclaration lorsqu'il est question de la réunion présidée par Lord

 24   Carrington. Mais, en tout cas, il y a eu toutes sortes de négociations de

 25   toutes espèces. Mais lorsque Izetbegovic se trouvait autour de la table

 26   dans le cadre d'une réunion commune qui s'est déroulée le soir du 17 et qui

 27   s'est terminée aux premières heures du matin le 18 mars, tout le monde

 28   était présent. Je veux dire, Izetbegovic et son ministre des Affaires


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  1   étrangères, ainsi que Karadzic et Koljevic, et pour la partie croate, M.

  2   Bubanj était également présent. Donc, jusqu'à ce moment-là des

  3   négociations, je ne pense pas qu'on pourrait dire qu'il y avait des

  4   divergences de ce genre.

  5   Q.  D'accord. J'aimerais maintenant que nous passions à la page 2 de la

  6   déclaration aussi bien version papier que "e-court".

  7   R.  Oui.

  8   Q.  J'appelle votre attention sur le paragraphe 11 qui se trouve au milieu

  9   de la page, où il est question de la Déclaration de principes --

 10   R.  Mm-mm.

 11   Q.  -- qui a été acceptée. Vous parlez d'un groupe de travail qui a été

 12   créé pour définir exactement l'étendue du territoire des unités

 13   constitutives. Qui était chargé de réaliser ce travail au sein du groupe de

 14   travail, qui en faisait partie ?

 15   R.  Des représentants des trois parties aux pourparlers relatifs à la

 16   Bosnie, et je rappellerais à la Chambre, si je puis me le permettre, qu'à

 17   l'époque les trois parties faisaient également partie d'un gouvernement de

 18   coalition de la Bosnie. Donc, ce n'était pas des pourparlers entre le

 19   gouvernement de Bosnie et d'autres, et des tiers. Il s'agissait des trois

 20   parties qui composaient la coalition gouvernementale de la Bosnie à cette

 21   époque-là. Mais, en dehors de cela, nous avions l'espoir que la Commission

 22   européenne pourrait apporter une certaine expertise, qu'il y aurait des

 23   spécialistes de ce genre de problèmes au sein de la communauté, c'est-à-

 24   dire des spécialistes de géographie; mais malheureusement, la Communauté

 25   européenne n'a pas présenté de tels experts, et ce comité n'a jamais vu le

 26   jour.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, je vous demanderais si

 28   c'était un lapsus de votre part lorsque vous avez parlé du paragraphe 11,


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  1   alors qu'il s'agit du paragraphe 13, apparemment.

  2   M. IVETIC : [interprétation] Toutes mes excuses. Je voulais dire l'un et

  3   j'ai dit l'autre. Vous avez raison.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Veuillez procéder.

  5   M. IVETIC : [interprétation]

  6   Q.  Vous dites que la Communauté européenne n'a pas fourni de tels experts.

  7   Est-ce que vous savez pour quelle raison ?

  8   R.  Il n'y avait pas une intention délibérée. La Communauté européenne n'a

  9   pas fourni ces experts simplement en raison d'un sujet qui était en

 10   discussion. Ces choses ne sont pas aisées, il est difficile de trouver des

 11   experts de cette nature. Ce n'est pas facile à organiser. Et je ne pense

 12   pas qu'il existe aujourd'hui une organisation internationale qui pourrait

 13   immédiatement, en cas de besoin, fournir ce haut niveau d'expertise en

 14   quelques semaines ou même en un mois. Mais à l'époque, la situation s'est

 15   pas mal dégradée et il s'est avéré très difficile de mettre en place cette

 16   solution.

 17   Je le regrette. Je pense que cela aurait été une bonne chose que nous ayons

 18   réussi à faire en sorte que les parties s'engagent par rapport à ce

 19   qu'elles avaient convenu ensemble, mais la situation était ce qu'elle a

 20   été.

 21   Q.  Monsieur, la Déclaration de principes qui a été acceptée le 18 mars

 22   1992, portait-elle peut-être un autre nom qui lui a été donné par les

 23   médias ?

 24   R.  Dès que l'accord a été conclu, son autre nom est devenu l'accord

 25   Carrington-Cutileiro. C'était une déclaration de principes, mais parfois

 26   dans les médias, ce caractère de déclaration de principes n'était pas

 27   présenté aussi clairement qu'il l'aurait fallu. Je ne sais pas ce que vous

 28   avez à l'esprit. Est-ce que vous pensiez à une autre dénomination ?


Page 42394

  1   Q.  Vous venez d'expliquer ce qui est une parfaite réponse à ma question,

  2   Monsieur.

  3   Alors, passons maintenant à la page 3 de votre déclaration sur copie papier

  4   et dans le prétoire électronique. Je propose que nous regardions le

  5   paragraphe 19, qui se trouve en haut de la page, où on peut lire

  6   qu'Izetbegovic a commencé à désavouer la Déclaration de principes dans les

  7   médias de Bosnie et que le gouvernement de Bosnie a officiellement rejeté

  8   la Déclaration de principes en juin 1992.

  9   Quelle a été la réaction, premièrement, des négociateurs lorsqu'ils ont

 10   entendu cette information, à savoir qu'Izetbegovic a désavoué la

 11   Déclaration de principes; et ensuite que le gouvernement de Bosnie a rejeté

 12   ladite Déclaration de principes ?

 13   R.  Alors, que j'ai entendu, eh bien, c'est quelque chose que j'ai entendu

 14   peu de temps après l'accord et suite à certaines choses qu'Izetbegovic

 15   avait dit auparavant, notamment qu'il ne pensait pas qu'un accord de ce

 16   type pouvait être conclu, à savoir une fédération en quelque sorte, il ne

 17   croyait pas à la faisabilité de cela. C'était son sentiment au début des

 18   pourparlers, et il était d'accord sur la déclaration. Ensuite, j'ai

 19   commencé à entendre, en partie, du côté des Serbes, qui assistaient encore

 20   aux pourparlers mais des personnes qui se trouvaient à Sarajevo à l'époque,

 21   que dans les médias locaux Izetbegovic avait dit que quelque chose comme

 22   cela ne marcherait jamais ou quelque chose de ce genre, on ne m'a pas

 23   montré les citations exactes de ces propos.

 24   Je me souviens d'être revenu le voir pour lui demander s'il acceptait

 25   toujours la Déclaration de principes, il m'a toujours dit oui. Moi,

 26   personnellement, il ne m'a jamais dit - que dans le cadre de cette

 27   conversation - il ne m'a jamais dit qu'il allait dénoncer ou rejeter cet

 28   accord; et ensuite au moins de juin, ils ont officiellement rejeté


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  1   l'accord, si vous voulez. Mais avant cela, j'ai entendu d'un côté qu'il

  2   pouvait en public dans les médias de Bosnie dire qu'il était contre, mais à

  3   moi et à d'autres personnes qui participaient directement à la conférence,

  4   il n'a jamais dit cela.

  5   Q.  Quelle a été la réaction des Serbes et des Croates qui prenaient part à

  6   ces négociations lorsqu'ils ont entendu pour la première fois

  7   qu'Izetbegovic a désavoué la déclaration et ensuite lorsque cela a été

  8   rejeté par cette partie-là ?

  9   R.  Lorsqu'ils ont entendu cela pour la première fois, je crois que ces

 10   personnes étaient parmi les personnes qui m'ont dit que ceci avait été

 11   révélé par les médias. Mais la confiance n'était pas vraiment une commodité

 12   disponible à l'époque lors de ces pourparlers. Les trois côtés se

 13   soupçonnaient les uns et les autres, se soupçonnaient mutuellement; et, en

 14   réalité, il était difficile d'obtenir un accord, et c'était bon signe, ils

 15   étaient en train d'essayer d'améliorer leur attitude les uns envers les

 16   autres. Mais, en réalité, un gouvernement de coalition était quelque chose

 17   de difficile, puisqu'ils n'avaient pas confiance entre eux. Mais il

 18   s'agissait là encore d'une illustration du caractère faux d'Izetbegovic.

 19   Et, comme je l'ai dit, Izetbegovic m'a toujours dit qu'il a peut-être dit

 20   telle ou telle chose, mais il a insisté pour avoir cette conversation. Je

 21   me souviens, il est venu à Lisbonne une fois, et il a participé directement

 22   à la définition de frontières sur une carte, sur la base de cette

 23   Déclaration de principes. Et devant moi et à la conférence, il a continué à

 24   travailler comme si cela relevait du domaine du possible.

 25   Q.  Et, à l'époque, vous et les autres négociateurs, aviez-vous une

 26   explication à fournir ou une raison pour comprendre pourquoi Izetbegovic et

 27   le gouvernement de Bosnie avaient désavoué et rejeté la Déclaration de

 28   principes ?


Page 42396

  1   R.  Eh bien, je crois que cela n'est pas inhabituel en politique de dire à

  2   certaines personnes certaines choses et à d'autres personnes d'autres

  3   choses. Ce que nous avions entre les mains, c'était un accord signé le 18

  4   mars, et il fallait faire avec cela. Et Izetbegovic était le dirigeant du

  5   côté bosniaque, c'était le président de la Bosnie à l'époque, et des

  6   assurances ou un engagement indiquant qu'il allait suivre cette voie. Peut-

  7   être qu'il avait besoin de calmer ses partisans, je ne sais pas.

  8   Q.  Alors, passons maintenant à la page 20. Je souhaite que nous regardions

  9   la première partie du paragraphe 20, qui se lit comme suit :

 10   "Pendant la période qui a suivi la Déclaration de principes et après

 11   l'accord sur cet accord, les dirigeants bosno-serbes souhaitaient que

 12   d'autres négociations soient menées sur les questions non résolues alors

 13   que les dirigeants du gouvernement de Bosnie traînaient les pieds."

 14   Je souhaite vous poser cette question-ci : est-ce que vous pouvez nous

 15   expliquer ou, en tout cas, nous donner un exemple de ce que vous entendez

 16   par là lorsque vous dites que les dirigeants du gouvernement de Bosnie ont

 17   traîné les pieds ?

 18   R.  Ecoutez, si vous avez des déclarations qui sont faites en public et

 19   qu'ensuite je dois aller demander à Izetbegovic, je devais aller le

 20   rencontrer et il me disait que je ne devais pas y prêter attention, je

 21   devais prêter attention à ce qu'il me disait, lui. Donc, il y avait

 22   forcément des -- j'avais des doutes quant à l'engagement de la partie

 23   musulmane de Bosnie à l'époque, leur niveau d'engagement par rapport aux

 24   travaux que nous avions menés pour pouvoir passer des principes à la

 25   signature d'un accord définitif, et c'est effectivement manifestement ce

 26   que l'on sentait.

 27   Q.  Je souhaite que nous passions maintenant à la dernière page dans la

 28   version papier et dans ce que nous avons dans le prétoire électronique. Je


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  1   souhaite consacrer du temps à une discussion sur le paragraphe 35, qui est

  2   le dernier paragraphe. Et dans ce paragraphe, encore une fois, vous parlez

  3   de la déclaration de principes, et vous dites :

  4   "Dans une lettre envoyée à "L'Economiste" en décembre 1995, j'ai écrit

  5   que:

  6   "'Après plusieurs cycles de pourparlers, nos, 'principes portant sur des

  7   dispositions en vertu de la constitution pour la Bosnie-Herzégovine ont

  8   fait l'objet d'un accord entre les trois parties (musulmane, serbe et

  9   croate) à Sarajevo, le 18 mars 1992, qui devait constituer la base de

 10   négociations futures. Ces négociations se sont poursuivies, des cartes et

 11   tout, jusqu'à l'été lorsque les Musulmans ont tourné le dos à l'accord.

 12   S'ils n'avaient pas agi ainsi, la question de la Bosnie aurait pu être

 13   réglée plus tôt, avec moins de pertes en vies humaines (essentiellement

 14   musulmanes) et de territoires. Pour être juste, le président Izetbegovic et

 15   ses collaborateurs ont été encouragés à faire capoter cet accord et pour se

 16   battre pour un Etat bosniaque unitaire par des personnes extérieures bien

 17   intentionnées qui pensaient mieux connaître la situation.'

 18   "Je pense que ceci est vrai. Je l'ai pensé à l'époque et je le pense

 19   aujourd'hui."

 20   Veuillez nous expliquer pourquoi vous pensez que le président Izetbegovic

 21   et ses collaborateurs ont été encouragés à faire capoter l'accord ?

 22   R.  Par exemple, moi, j'ai rencontré un haut représentant du Département

 23   d'Etat au début du mois d'avril à Sarajevo. Et il a rencontré Izetbegovic,

 24   il a conseillé Izetbegovic de ne pas accepter le plan tripartite que nous

 25   avions préparé. Il a suggéré que s'il souhaitait avoir des unités

 26   constitutives, qu'il était préférable d'en avoir plus de trois. Mais il l'a

 27   fortement conseillé de ne pas accepter ou, en tout cas, les trois unités

 28   n'étaient pas là par hasard ou par un simple calcul mathématique. C'est


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  1   parce qu'il s'agissait des trois peuples constitutifs et ceci était inscrit

  2   dans la constitution du pays.

  3   Donc, le fait qu'un haut représentant officiel américain soit venu

  4   conseiller Izetbegovic pour lui dire qu'il ne devait pas accepter ce plan,

  5   je crois que c'est une raison suffisante pour justifier que j'envoie cet

  6   article à "L'Economiste". Ils ont été encouragés à faire capoter l'accord

  7   et se battre pour une Bosnie unitaire. Comme je l'ai dit il y a trois ans,

  8   je pense que cela correspondait à la vérité à l'époque il y a trois ans, et

  9   encore aujourd'hui. Alors, si vous lisez une publication récente, par

 10   exemple, du Conseil de l'Europe dans le cadre des relations internationales

 11   - il s'agit d'un petit livre - d'un livre écrit par Carl Bildt, il commence

 12   par dire exactement la même chose, et il dit ce qu'il appelle le plan

 13   Carrington-Cutileiro, si ceci avait été accepté et si ceci avait été mis en

 14   œuvre, des milliers de vies auraient été sauvées.

 15   Q.  Monsieur, sur quoi vous fondez-vous en terme de connaissance pour dire

 16   ce haut représentant du gouvernement américain a participé à ce processus

 17   et a recommandé à Izetbegovic de ne pas accepter l'accord tripartite et

 18   l'accord de principes ? Comment savez-vous cela ?

 19   R.  A l'époque, l'ambassadeur américain à Lisbonne, lorsque je me suis

 20   entretenu avec lui de la question bosniaque, c'est un homme qui m'a apporté

 21   son concours, il m'a envoyé des documents et cela m'a été très utile. J'ai

 22   effectivement lu cela, je ne lui pas renvoyé ces documents, mais je les ai

 23   lus, un télégramme dans lequel ceci a été clairement dit, c'était un

 24   télégramme américain.

 25   Q.  Et avez-vous pu constater une différence dans la manière dans laquelle

 26   les Européens percevaient la guerre en Bosnie et la manière dont les

 27   Américains percevaient la guerre en Bosnie ?

 28   R.  C'est une question de taille. Comment les Américains, et comment tous


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  1   les Américains, comment tous les Européens, il m'est difficile de répondre

  2   à cette question-là. Parmi les Américains, il y avait parfois une tendance

  3   ou, en tout cas, du côté des hommes politiques qui n'ont pas participé

  4   directement avec la question yougoslave, et dès qu'ils le pouvaient, ils

  5   tentaient de le formuler sous la forme d'un combat entre le bien et le mal.

  6   Et le mal était du côté des Serbes d'après ces personnes. Il y avait des

  7   Américains qui avaient plus d'expérience en Yougoslavie et je pense, par

  8   exemple, à deux personnes que je connaissais fort bien. Il y en a un,

  9   heureusement, Brent Scowcroft, qui est encore en vie, et Larry Eagleburger.

 10   Ces deux personnes ont été mutées à différentes qualités en ex-Yougoslavie,

 11   et ces personnes savaient que les choses étaient --

 12   L'INTERPRÈTE : Inaudible.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] -- si vous le souhaitez, je peux vous dire,

 14   les Américains en raison de leur histoire ont tendance quelquefois --

 15   encore une fois, il y a beaucoup d'exceptions à cela, je viens de

 16   mentionner ces deux personnes que j'ai rencontrées, et ces deux personnes

 17   ont tendance à simplifier les choses un petit peu. Les Européens ont une

 18   histoire plus ancienne de combats et de luttes au niveau des frontières,

 19   nous avons -- bon, cette notion qui consiste à croire que les choses ne

 20   sont pas aussi difficiles que cela semble être le cas. Il y a de nombreuses

 21   nuances de gris, par exemple si vous regardez, si vous vous penchez sur la

 22   question des relations internationales, il n'y a pas -- je ne pense pas

 23   qu'il y ait une façon "scientifique" de distinguer les points de vue

 24   américains et les points de vue européens. Comme je l'ai dit, il y a une

 25   perception qui est bonne et mauvaise de part et d'autre.

 26   Q.  Très bien. Est-ce que nous pouvons regarder le paragraphe 33, s'il vous

 27   plaît, qui se trouve sur la même page, en haut de la page. Nous devons

 28   faire défiler le document vers le haut. Ici, vous comparez les accords de


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  1   Dayton avec la Déclaration de principes, et vous regrettez le fait de

  2   pertes d'innombrables nombre de vies puisque la paix n'a pas été conclue en

  3   mars 1992. Vous avez déjà évoqué cette question lorsque vous avez répondu à

  4   mes questions. Est-ce que vous souhaitez commenter davantage cette partie-

  5   là de votre déclaration ?

  6   R.  Pas vraiment. La grande différence entre ce qui a été réalisé à Dayton

  7   et signé à Paris et ce qui avait fait l'objet d'un accord à Sarajevo, la

  8   grande différence c'est que la Fédération musulmane et croate avait été

  9   définie. A mes yeux, cela n'est pas forcément un point positif, ce n'est

 10   pas une amélioration. Le fait est qu'il y a encore ce partage, division du

 11   pays auquel on est arrivés après une guerre violente qui n'a pas

 12   véritablement permis de donner lieu à un esprit de compromis. Si nous

 13   avions pu parvenir à un accord avant, et si les parties s'étaient tenues

 14   aux dispositions de l'accord, bon, les principes sont des principes, il y

 15   avait beaucoup de choses encore à négocier, et nous avions mis en place ce

 16   groupe de travail pour mettre en place cette unité, ce n'était pas une

 17   tâche facile ni pour eux ni pour les tiers, les personnes de l'extérieur,

 18   autrement dit, la Communauté européenne. Mais s'il n'y avait pas eu de

 19   pression de l'extérieur, nous aurions réussi peut-être à conclure quelque

 20   chose qui ressemblait fort à Dayton, et je dois dire en plus qu'avec

 21   beaucoup de moins de mauvaise volonté qui s'est manifestée dans les années

 22   qui ont suivi.

 23   Q.  Je souhaite maintenant que nous passions à la page 4, la page

 24   précédente de votre déclaration dans les deux exemplaires, donc copie

 25   papier et version électronique.

 26   R.  Merci. Oui.

 27   Q.  Je souhaite que nous regardions le paragraphe 26. Et là, vous évoquez

 28   les meurtres commis dans la rue Vase Miskina. Et ensuite au paragraphe 27,


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  1   vous parlez du pilonnage des personnes qui faisaient la queue pour du pain

  2   dans la rue Vase Miskina. Y a-t-il un lien entre ces deux paragraphes ?

  3   S'agit-il d'un seul et même événement ou s'agit-il de deux événements

  4   distincts ?

  5   R.  Il s'agit du même événement.

  6   Q.  Merci. Et au paragraphe 26 [comme interprété], vous dites qu'un

  7   officier de l'artillerie de l'armée portugaise qui a participé à l'enquête

  8   vous a dit qu'il était convaincu que l'obus provenait de la partie du

  9   gouvernement de Bosnie.

 10   Pouvez-vous nous donner des précisions sur le grade et l'identité de cet

 11   officier d'artillerie de l'armée portugaise ?

 12   R.  Il n'a pas participé à cela. Il faisait partie des observateurs de

 13   l'Union européenne. C'était un officier d'artillerie, il était là, et il a

 14   vu ce que d'autres personnes ont vu, et il y a réfléchi, et il savait où se

 15   trouvaient les positions des différentes parties en présence. Et il m'a dit

 16   qu'il était convaincu que cet obus avait été tiré depuis la partie

 17   musulmane, depuis le camp musulman, et je n'avais aucune raison de mettre

 18   en doute son jugement.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Cutileiro, je souhaite

 20   simplement préciser que vous avez corrigé un peu plus tôt une erreur au

 21   niveau des lettres. Est-ce que je dois comprendre que vous prenez du recul

 22   par rapport au paragraphe 27, votre déclaration se lit comme suit :

 23   "Il me dit qu'il avait pris part à l'enquête", donc il ne s'agit pas là

 24   d'un passage véridique ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Il a participé en tant qu'observateur, il

 26   n'était pas enquêteur pour les autorités musulmanes. C'est cela que je

 27   voulais dire.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci a été précisé.


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  1   Et ensuite, je vous demande d'expliquer davantage, dans ce cas, quel rôle

  2   a-t-il joué en tant qu'observateur au moment où les enquêtes ont été

  3   diligentées ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était un observateur. La Communauté

  5   européenne disposaient d'observateurs sur place, qui étaient là pour

  6   assurer le maintien de la paix. Et il a dit qu'il avait enquêté sur la

  7   question, mais je ne pense pas qu'il faisait officiellement partie d'une

  8   équipe d'enquêteurs du gouvernement de Bosnie à l'époque.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et, techniquement, il n'était pas équipé

 10   pour analyser la scène du crime à l'endroit où l'obus avait atterri et pour

 11   procéder aux analyses techniques qui sont communément menées dans un cas

 12   comme celui-là ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois qu'il s'y est rendu, et il disposait

 14   de son propre niveau d'expertise, mais je n'en sais pas davantage.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 16   Veuillez poursuivre, Maître Ivetic.

 17   M. IVETIC : [interprétation] Je crois qu'il est l'heure de faire la pause.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Cutileiro, nous allons avoir

 19   une pause de 20 minutes. Nous souhaitons vous revoir après la pause.

 20   Et, à ce stade, je vais m'enquérir auprès des parties. Est-ce que du point

 21   de vue de temps nous sommes dans les temps ?

 22   M. IVETIC : [interprétation] Tout à fait.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Car, je m'adresse maintenant aux deux

 24   parties. Nous avons un calendrier serré aujourd'hui, nous ne savons pas si

 25   nous serons en mesure d'entendre la fin de la déposition du témoin

 26   aujourd'hui. Je crois, qu'en réalité, nous devrions essayer de le faire

 27   pour éviter d'avoir à revenir demain pour dix ou 15 minutes, voire une

 28   demi-heure. Je demande aux parties de bien vouloir réaliser cela.


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  1   M. IVETIC : [interprétation] Pour vous mettre à jour. Quand je vous dis que

  2   je suis dans les temps, je pense pourvoir terminer avant l'heure et demie

  3   prévue, et donc 15 minutes de moins.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

  5   Nous allons reprendre à 11 heures moins cinq.

  6   --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.

  7   --- L'audience est reprise à 10 heures 56.

  8   [La Chambre de première instance se concerte]

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaite simplement vérifier si la

 10   communication par vidéoconférence fonctionne correctement. Et le Greffier

 11   d'audience qui se trouve à l'endroit où se déroule la vidéoconférence, je

 12   vais lui demander s'il nous voit et s'il nous entend.

 13   M. LE GREFFIER [par vidéoconférence] : [interprétation] Je vous vois et je

 14   vous entends.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce qui vaut aussi pour la partie qui se

 16   trouve de l'autre côté.

 17   Maître Ivetic, c'est à vous.

 18   M. IVETIC : [interprétation]

 19   Q.  Je vais vous poser encore quelques questions au sujet de cet officier

 20   d'artillerie de l'armée portugaise qui vous a parlé de l'incident dans la

 21   rue Vase Miskina. A quel moment avez-vous eu l'occasion de lui parler sur

 22   ce sujet, si vous vous en souvenez ?

 23   R.  Je crois que c'était à Sarajevo même car je me suis rendu à Sarajevo

 24   encore une ou deux fois, je l'avais rencontré avant, et c'est tout, oui. Je

 25   ne peux pas vous dire exactement à quelle date.

 26   Q.  Pas de problème. Est-ce que vous vous souvenez de son grade à

 27   l'époque ?

 28   R.  Je crois qu'il était soit colonel, soit lieutenant-colonel, je le


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  1   crois. Mais, encore une fois.

  2   Q.  Pourriez-vous nous dire comment vous avez estimé la fiabilité des

  3   propos de ce soldat ?

  4   R.  Alors, écoutez, il m'a impressionné. Pour moi, c'était un homme

  5   honnête, un soldat de l'armée portugaise avec d'excellentes références. Ce

  6   n'était pas un homme pompeux, une personne discrète, un homme posé, et je

  7   n'avais aucune raison de mettre en doute ce qu'il me disait.

  8   Q.  Alors, exception de cet événement qui s'est déroulé dans la rue Vase

  9   Miskina, y a-t-il eu d'autres actions qui ont été menées ou qui, à votre

 10   connaissance, ou d'après ce qui vous a été rapporté par les membres des

 11   Nations Unies que la responsabilité en incombait au gouvernement de Bosnie

 12   plutôt qu'aux Serbes ?

 13   R.  Alors, l'histoire de la file d'attente pour le pain est quelque chose

 14   dont nous avons parlé, il s'agit, en fait, d'une affaire sérieuse et cet

 15   officier que j'ai évoqué m'a dit, ainsi que d'autres personnes, étaient

 16   convaincus que ceci avait été présenté comme s'il s'était agi d'une attaque

 17   serbe, alors que cela n'était pas le cas, il y avait une équipe de la

 18   télévision qui était sur place. Et donc, il y a eu d'autres exemples d'une

 19   ampleur analogue. Je ne me souviens pas maintenant, honnêtement, non, je ne

 20   m'en souviens pas.

 21   Q.  Bien. Et ensuite, que pouvez-vous nous dire au sujet de remarques - que

 22   vous auriez faites vous-même ou d'autres personnes -  concernant la

 23   position du gouvernement de Bosnie concernant l'approvisionnement en

 24   électricité et en eau à Sarajevo ou la réparation des équipements de

 25   service public ?

 26   R.  Je ne me souviens pas de cela aujourd'hui. Je ne me souviens pas de

 27   quelque chose de particulier. Je crois qu'il y a eu des discussions sur la

 28   question, mais moi je n'ai pas traité de cela directement, donc je ne m'en


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  1   souviens pas.

  2   Q.  Bien. Et avez-vous une quelconque connaissance quant à la mise en place

  3   de zones protégées en Bosnie-Herzégovine, à savoir des efforts visant à

  4   démilitariser ces secteurs ?

  5   R.  Les zones protégées se sont mises en place après que j'ai cessé de

  6   traiter de la Bosnie, donc je n'ai rien entendu directement. Je crois que

  7   c'est exact, ce que j'ai entendu dire alors, parce que j'ai encore assisté

  8   à une ou deux réunions dans le cadre de l'accord Vance-Owen, de la

  9   conférence qui s'est déroulée au début de l'année 1993, mais comme je l'ai

 10   dit, les zones protégées n'étaient pas à notre ordre du jour à l'époque.

 11   Mais ce que j'ai entendu dire, encore une fois j'ai du mal à vous rapporter

 12   les paroles exactes, mais ce que j'ai entendu dire, c'est que très souvent

 13   dans les zones protégées les gens pouvaient sortir la nuit et faire la

 14   guerre, si vous voulez, ou attaquer des personnes dans le cas où des

 15   personnes serbes qui vivaient à proximité pouvaient être attaquées ou

 16   pensaient pouvoir être attaquées par des personnes qui se trouvaient dans

 17   les zones protégées et dont ceux qui rentraient après dans ces zones

 18   protégées. Encore une fois, je ne peux pas vous citer une conversation

 19   particulière que j'aurais eue à ce sujet avec quelqu'un.

 20   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, je vous remercie pour votre patience et d'avoir

 21   répondu à mes questions.

 22   M. IVETIC : [interprétation] Messieurs les Juges, j'ai terminé mon

 23   interrogatoire principal.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Ivetic.

 25   Monsieur Cutileiro, vous allez maintenant être interrogé par M. Tieger, que

 26   vous verrez bientôt sur votre écran. C'est un conseil de l'Accusation.

 27   Monsieur Tieger, c'est à vous.

 28   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.


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  1   Contre-interrogatoire par M. Tieger :

  2   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur l'Ambassadeur.

  3   R.  Bonjour à vous.

  4   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, nous souhaiterions terminer votre déposition

  5   aujourd'hui, donc je vais demander, à cet égard, que vous vous en teniez

  6   dans vos réponses aux questions que je vous pose et répondez par oui ou par

  7   non, faites en sorte de vous concentrer sur la question plutôt que de

  8   développer le sujet en termes généraux.

  9   R.  Je vais faire de mon mieux.

 10   Q.  Merci. Dans votre déclaration au paragraphe 28, vous parlez de la

 11   lettre du Pr Karadzic datée du 5 juin 1992, et cette lettre dit, en partie

 12   que :

 13   "Si vous ne pouvez pas honorer vos promesses qui ont été annoncées

 14   publiquement par la Communauté européenne, nous devons protéger le peuple

 15   serbe sur leurs territoires ethniques."

 16   Votre déclaration n'évoque pas la réponse que vous avez fournie au Pr

 17   Karadzic, donc c'est sur quoi je souhaite me pencher maintenant.

 18   M. TIEGER : [interprétation] Est-ce que nous pouvons afficher le numéro 65

 19   ter 08886, intercalaire numéro 43 du classeur, dont dispose Mme Doraiswamy.

 20   Q.  Comme nous pouvons le lire ici, vous avez répondu, entre autres, en

 21   disant, tout d'abord, dans le dernier paragraphe de votre lettre :

 22   "Permettez-moi d'ajouter une chose faisant référence au dernier

 23   paragraphe de votre lettre. La Communauté européenne ne vous a fait aucune

 24   promesse."

 25   Et ensuite, vous poursuivez en expliquant que ce qui s'est passé en lieu et

 26   place de cela c'est qu'il y a eu un accord sur une série de principes qui

 27   ne peuvent être honorés que s'il y a un consensus négocié et que ceci n'est

 28   pas forcé ou obtenu sous la contrainte.


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  1   Donc, dans cette lettre, vous précisez la teneur de la lettre du Pr

  2   Karadzic, vous dites que ceci n'était pas exact et que la Communauté

  3   européenne n'avait fait aucune promesse ?

  4   R.  C'est écrit dans la lettre.

  5   Q.  Bien.

  6   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement au dossier de cette

  7   lettre, s'il vous plaît.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Numéro 65 ter 08886 reçoit la cote

 10   P7767, s'il vous plaît.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce document est versé au dossier.

 12   M. TIEGER : [interprétation]

 13   Q.  Et vous avez abordé avec Me Ivetic dans le cadre de l'interrogatoire

 14   principal le paragraphe 33 [comme interprété] de votre déclaration, qui

 15   fait état, entre autres, de personnes extérieures qui avaient leurs points

 16   de vue sur les négociations. Pouvons-nous passer à l'intercalaire 47 du

 17   classeur, numéro 65 ter 1D06136, s'il vous plaît. Je pense que ceci

 18   s'affiche pour vous avant que cela ne s'affiche pour les Juges de la

 19   Chambre. Il s'agit d'un article publié dans le "New York Times", intitulé :

 20   "Les Américains qui définissent la politique en Bosnie reconnaissent avoir

 21   fait une erreur lorsqu'ils se sont opposés à la partition en 1992."

 22   L'ambassadeur américain, Warren Zimmermann, en Yougoslavie, a noté ce qui

 23   suit :

 24   "D'après nous, nous allons peut-être pouvoir écarter une prise du pouvoir

 25   par les Serbes en faisant en sorte que le problème soit un problème à

 26   caractère international … nous espérons que les Serbes se retiennent s'il

 27   est clair que la Bosnie est reconnue par les pays occidentaux. Il se trouve

 28   que nous nous sommes trompés."


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  1   Ensuite, en bas de la page :

  2   "D'autres spécialistes de la Bosnie, ils sont sceptiques et ne

  3   pensent pas que le partage aurait fonctionné à ce moment-là ou que cela

  4   fonctionne maintenant sans qu'il y ait des combats supplémentaires. S'il y

  5   avait une faille au niveau de la politique des Etats-Unis, cela avait plus

  6   trait avec le fait de ne pas soutenir la reconnaissance internationale de

  7   la Bosnie avec un appui dans ce sens lorsque les Serbes et les Croates ont

  8   commencé à pilonner le centre des villes musulmanes et à se saisir du

  9   territoire par des tactiques de terreur et de nettoyage ethnique."

 10   Monsieur l'Ambassadeur, saviez-vous qu'il y avait ces autres

 11   perceptions de la situation quant au fait de savoir comment il fallait

 12   gérer la situation en Bosnie à l'époque ?

 13   R.  Il y avait toujours, en fait, des points de vue différents. Ce que je

 14   peux vous dire à l'époque, c'est que les principes proposés par mon équipe

 15   que je dirigeais, qui ont été acceptés, eh bien, sur le marché --

 16   Q.  Pardonnez-moi, si je vous interromps.

 17   J'insiste sur vos réponses. Je ne vous demande pas de défendre les

 18   négociations qui se sont déroulées. Je vous demande simplement si à

 19   l'époque vous saviez qu'il y avait ces autres avis sur la question ?

 20   R.  J'ai dû entendre des personnes dire que cela existait, mais aucune

 21   proposition ne m'a été transmise dans ce sens. Et permettez-moi de vous

 22   dire qu'il ne s'agit pas de défendre ma position. Il s'agit de vous dire

 23   que la solution qui finalement a été conclue à Dayton est une solution qui

 24   est très, très semblable à ce qui avait été abordé lors des discussions

 25   trois ans auparavant.

 26   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, vous avez déjà fait état de cette opinion qui

 27   est la vôtre dans votre déclaration ce matin. Je vous demande de bien

 28   vouloir aller plus avant et ne pas répéter des éléments que vous avez déjà


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  1   présentés aux Juges de la Chambre dans vos réponses.

  2   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

  3   document.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

  5   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le numéro 65 ter 1D6137 [comme

  6   interprété] reçoit la cote P7768, Messieurs les Juges.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce document est versé au dossier.

  8   M. TIEGER : [interprétation]

  9   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, dans votre déclaration au niveau du paragraphe

 10   29, vous avez dit que vous avez reçu une lettre du Dr Karadzic dans

 11   laquelle il disait qu'il était "fermement pour le respect des principes sur

 12   lesquels reposait l'accord conclu le 18 mars 1992."

 13   R.  Hm-mm.

 14   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, est-ce que vous avez jamais pensé que Karadzic

 15   ne faisait que prétendre qu'il allait respecter ces principes puisqu'il

 16   voulait avoir des avantages au niveau tactique ?

 17   R.  Qui que ce soit d'autre qui aurait été dans ma position aurait pu voir

 18   dans quelle mesure les parties aux procès de négociation étaient impliquées

 19   et avec quel degré de sérieux. Nous avons déjà parlé de M. Izetbegovic

 20   aujourd'hui, ce matin. Moi, je n'avais pas de raison particulière de croire

 21   que le Dr Karadzic n'allait pas respecter les principes qui étaient la base

 22   de l'accord qui était conclu.

 23   Q.  Regardons certains des principes dont il a été question aujourd'hui et

 24   regardons ce que le Dr Karadzic a dit par rapport à cela à d'autres

 25   personnes, peut-être pas nécessairement à vous, mais à d'autres personnes.

 26   L'un de ces aspects-clés de la Déclaration de principes était l'aspect

 27   concernant la Bosnie qui allait être un Etat.

 28   R.  [aucune interprétation]


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  1   Q.  [aucune interprétation]

  2   R.  [aucune interprétation]

  3   Q.  En d'autres termes, la destruction de la Bosnie n'était pas considérée

  4   comme faisant partie de la Déclaration de principes, n'est-ce pas ?

  5   R.  Certainement.

  6   M. TIEGER : [interprétation] Est-ce qu'on peut voir maintenant à

  7   l'intercalaire 20. Dans votre classeur, c'est la pièce P7023, page 2 dans

  8   le prétoire électronique, page 2 dans la version en serbe.

  9   Q.  Il s'agit d'une partie de la transcription de la 49e Session de

 10   l'assemblée de la Republika Srpska qui s'était tenue le 13 février 1995.

 11   Dans cette partie de la transcription de cette session de l'assemblée, le

 12   Dr Karadzic parle et on y voit ses remarques. Il a dit ce qui suit :

 13   "La première position pour ce qui est de tous les principes de Cutileiro,

 14   si vous vous souvenez de cela, était que la Bosnie était un Etat composé de

 15   ceci ou de cela, et il est toujours dit que la Bosnie était un Etat, mais

 16   nous n'avons jamais accepté cela. Nous avons demandé que la Bosnie soit une

 17   confédération. Et, selon nous, notre Etat doit être un Etat et on ne peut

 18   pas retirer la souveraineté à moins qu'on ne parle de la souveraineté de la

 19   République de Serbie, même pas de la Yougoslavie, puisque si la Yougoslavie

 20   reste et continue à exister, nous voulons avoir le statut d'une unité au

 21   niveau de la Fédération, et notre priorité est que cette unité devienne

 22   partie de la Serbie."

 23   Monsieur l'Ambassadeur, est-ce que je peux supposer que le Dr Karadzic

 24   n'avait pas exprimé ce point de vue pendant les négociations --

 25   R.  Certainement pas. D'abord, la première position des Serbes était la

 26   position selon laquelle ils ne voulaient pas avoir une Bosnie indépendante.

 27   Ils ne voulaient pas que la Bosnie soit partagée. Ils voulaient que la

 28   Bosnie fasse partie de la Serbie. Et c'était la position au début des


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  1   négociations. Mais, plus tard, ils ont accepté les principes selon lesquels

  2   cela devait être un Etat. Cette séance a eu lieu en février 1995 et nos

  3   négociations ont eu lieu en 1992. Et pour ce qui est des accords de paix de

  4   Dayton, c'était en été 1995.

  5   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, je pense que nous sommes tous conscients de

  6   cela, nous connaissons ces dates-là, donc l'accord sur les principes ne

  7   prévoyait pas que l'entité des Serbes de Bosnie fasse partie de la Serbie ?

  8   R.  Absolument.

  9   M. TIEGER : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant regarder

 10   l'intercalaire 11 et regardez donc votre intercalaire 11, et pour ce qui

 11   est du documents65 ter, il faut afficher la page 64 dans le prétoire

 12   électronique et la page 81 dans la version en serbe.

 13   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pourriez-vous nous dire quel est le

 14   numéro 65 ter du document.

 15   M. TIEGER : [interprétation] C'est 02345 sur la liste 65 ter.

 16   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, il s'agit de la transcription de la 8e Session

 17   de l'assemblée du peuple serbe qui a eu lieu en février 1992. C'est un

 18   sténogramme, en fait, de cette session. Et si nous nous penchons sur la

 19   quatrième page, vous pouvez voir que c'est M. Krajisnik qui a pris la

 20   parole. Et vers la fin de la page en anglais --

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'avons toujours pas cela en

 22   anglais sur nos écrans.

 23   M. TIEGER : [interprétation] C'est la page 64 dans le prétoire électronique

 24   en anglais.

 25   Q.  Monsieur Krajisnik s'adresse aux membres de l'assemblée. Il y dit :

 26   "Nous avons l'occasion de préserver le peuple serbe dans un seul Etat, de

 27   préserver tout le peuple serbe en Bosnie-Herzégovine, et que ce peuple

 28   serbe fasse partie de l'empire serbe."


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  1   Je suppose, Monsieur l'Ambassadeur, que ce n'était pas la position que M.

  2   Krajisnik ou le Dr Karadzic ont présentée pendant les négociations ?

  3   R.  Certainement pas. Est-ce que je peux poser une question ? M. Krajisnik

  4   avait des points de vue qui, d'après moi, parfois -- par exemple, en stade

  5   des négociations, il pensait que si on allait conclure l'accord sur les

  6   principes, la Bosnie devait avoir trois voix au sein des Nations Unies et

  7   trois drapeaux; mais le Dr Karadzic lui a dit de se taire pendant cette

  8   réunion concrète.

  9   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement de cet extrait,

 10   Monsieur le Président. Certains autres extraits de ce document avaient déjà

 11   été versés au dossier en tant que pièce P7005.

 12   M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, il n'est pas clair de

 13   quels extraits il s'agit. Les extraits qui ont été lus ou tous les

 14   commentaires faits par M. Krajisnik ?

 15   M. TIEGER : [interprétation] Nous pouvons faire l'un ou l'autre. C'est

 16   comme Me Ivetic veut. Mais j'ai fait référence seulement à cette page.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

 18   M. IVETIC : [interprétation] Nous n'avons pas besoin de nous occuper de

 19   cela maintenant.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous voulez juste une page, qu'une seule

 21   page soit versée au dossier.

 22   M. IVETIC : [interprétation] Nous pouvons parler de cela plus tard.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Procédons de la façon suivante, la

 24   Chambre peut ajouter ce document à la pièce P7005. Et les parties doivent

 25   tomber d'accord là-dessus et nous dire quel est l'extrait à être versé au

 26   dossier.

 27   Madame la Greffière, vous allez être informée de cela pour ajouter cet

 28   extrait à la pièce P7005.


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  1   M. TIEGER : [interprétation] Merci.

  2   Q.  Est-ce que vous pouvez maintenant trouver l'intercalaire 8 dans votre

  3   classeur, Monsieur l'Ambassadeur, il s'agit du document 65 ter 02345. Dans

  4   le prétoire électronique, c'est la page 17.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et c'est en anglais… ?

  6   M. TIEGER : [interprétation] En serbe, c'est la page 20, excusez-moi.

  7   Q.  Ici, nous voyons que pendant la même séance, le Dr Karadzic a dit :

  8   "Les aspirations du peuple serbe", et cela se trouve dans le

  9   paragraphe en bas.

 10   "Les aspirations du peuple serbe sont très fortes et le peuple serbe

 11   ira jusqu'à ce qu'ils n'obtiennent ce qu'il avait pendant le règne de la

 12   dynastie de Nemanjic, à savoir, leur propre Etat."

 13   Une question pour vous, Monsieur l'Ambassadeur : ce n'était pas la

 14   position qui vous a été présentée pendant les négociations ?

 15   R.  Certainement pas. Si cela avait été dit, il n'y aurait pas eu d'accord.

 16   Cette séance a eu lieu le 25 février. L'accord -- mon accord a été conclu

 17   le 18 mars, donc avant cette date-là. Bien sûr, sur la base de ce document,

 18   nous n'aurions pas pu du tout conclure un accord.

 19   Q.  Merci.

 20   M. TIEGER : [interprétation] Je demande que cet extrait soit versé dans la

 21   même pièce, qui porte la cote P.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, cet extrait doit être ajouté à la

 23   pièce P7005. Mais pas maintenant puisque nous attendons que les parties

 24   tombent d'accord pour ce qui est de cet extrait.

 25   M. TIEGER : [interprétation]

 26   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, l'accord sur les principes ou la Déclaration

 27   portant sur les principes n'était pas quelque chose qui aurait dû être le

 28   signe pour l'une ou l'autre partie de prendre le contrôle du territoire


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  1   qu'ils considéraient comme étant le leur ou qu'ils voulaient qu'il soit les

  2   leurs ?

  3   R.  Absolument.

  4   Q.  Pouvez-vous maintenant trouver l'intercalaire 24 dans votre classeur,

  5   Monsieur l'Ambassadeur, et il s'agit de la pièce P4580, page 13, et cela

  6   continue à la page 14 en anglais, et cela correspond à la page 18 en serbe.

  7   Monsieur l'Ambassadeur, il s'agit du sténogramme de la 11e Séance de

  8   l'assemblée du peuple serbe en Bosnie-Herzégovine qui a eu lieu le 18 mas

  9   1995 [comme interprété], donc cela veut dire que cela a eu lieu à la même

 10   date que la Déclaration portant sur les principes avait été adoptée.

 11   Pendant cette séance, il était beaucoup question de négociations et de la

 12   Déclaration portant sur les principes. Nous voyons que M. Krajisnik a pris

 13   la parole pour dire ce qui suit :

 14   "Je pense que le problème est le suivant, la Bosnie-Herzégovine veut être

 15   reconnue au niveau international à tout prix. Ils veulent que la Bosnie-

 16   Herzégovine soit un Etat.

 17   "Dans ce sens-là, il serait bien de faire une chose pour des raisons

 18   stratégiques, nous pouvons commencer par parler de la division ethnique sur

 19   le terrain. Nous pouvons commencer par déterminer le territoire et, une

 20   fois le territoire déterminé, on peut passer à des négociations

 21   supplémentaires pour voir à qui appartiendrait le pouvoir et comment le

 22   pouvoir allait fonctionner. Je ne sais pas si cela serait honnête du point

 23   de vue politique, puisqu'il n'y a pas beaucoup d'honnêteté pour ce qui est

 24   des affaires politiques et, si cela n'est pas le cas, le peuple serbe en

 25   sera accusé. Mais nous ne pouvons pas accepter un Etat qui est conçu dans

 26   l'esprit des personnes qui sont membres du SDA."

 27   Ai-je raison, Monsieur l'Ambassadeur, de dire que M. Krajisnik ou M.

 28   Karadzic ne vous ont pas dit ce même jour, le jour lorsque la Déclaration


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  1   portant sur les principes avait été adoptée, qu'ils avaient l'intention de

  2   commencer la division ethnique sur le terrain ?

  3   R.  Non.

  4   Q.  J'aimerais que vous regardiez maintenant --

  5   Monsieur l'Ambassadeur, je vous ai posé plusieurs questions eu égard à ce

  6   que le Dr Karadzic ou M. Krajisnik vous ont dit pendant les négociations et

  7   plusieurs questions également portaient sur leurs positions dans d'autres

  8   contextes.

  9   Est-ce que vous étiez au courant du fait que le Dr Karadzic vous a

 10   dit qu'il était pour la Déclaration portant sur les principes puisqu'il

 11   pensait que la Bosnie était détruite et qu'il ne restait qu'à voir de

 12   combien de territoires de la Bosnie allaient leur appartenir ? Est-ce qu'il

 13   vous a dit cela pendant les négociations ?

 14   R.  L'accord pour détruire la Bosnie ?

 15   Q.  Il considérait que c'était le cas et c'est la raison pour laquelle il

 16   pensait qu'il pouvait respecter cette Déclaration sur les principes ?

 17   R.  Il n'a pas dit cela, il n'a pas dit que l'accord avait pour but de

 18   faire détruire la Bosnie. Je ne me souviens pas cela.

 19   Q.  Passons maintenant à l'intercalaire 5 dans votre classeur, et cela

 20   correspond à la pièce P02391.

 21   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 22   M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi, l'intercalaire 5 est le document

 23   65 ter 02391, la page 86 dans le prétoire électronique en anglais.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est le numéro 65 ter et non pas le

 25   numéro ou la cote P.

 26   M. TIEGER : [interprétation] Merci. Excusez-moi, Monsieur le Juge. C'est le

 27   document 65 ter 02391, oui. Il faut afficher la page 86 en anglais dans le

 28   prétoire électronique, et la page 70 en serbe.


Page 42417

  1   Q.  Il s'agit de l'enregistrement audio de la 39e Séance de l'assemblée de

  2   la Republika Srpska qui s'est tenue le 24 et le 25 mars 1994, et on voit

  3   qu'encore une fois c'est le Dr Karadzic qui parle. Et vers le milieu de la

  4   page, il dit ce qui suit :

  5   "Il y avait une carte de Lisbonne et les Musulmans l'ont rejetée. Nous

  6   étions contents qu'ils l'ont rejetée. Nous avons accepté cette carte pour

  7   pouvoir la faire intégrer au processus de Lisbonne. Et c'était la sagesse

  8   et l'habileté de M. Krajisnik qui les a fait dire trois choses, qui les a

  9   fait accepter trois choses; d'abord, qu'il y aurait un partage entre les

 10   trois sur la base de l'appartenance ethnique, et qu'il y aurait un

 11   référendum. Et c'était au moment où ils ont dit : Nous acceptons ce partage

 12   ou cette division en trois parties sur la base de l'appartenance ethnique.

 13   La Bosnie était finie pour la communauté internationale à ce moment-là, et

 14   c'était un grand accomplissement. Les cartes peuvent être comme ceci ou

 15   comme cela, les cartes peuvent être annulées après la signature."

 16   Et, encore une fois, Monsieur l'Ambassadeur, dites-nous si le Dr

 17   Karadzic vous a dit pendant les négociations qu'il pensait que la

 18   Déclaration sur les principes en finissait avec la Bosnie pour ce qui est

 19   de la communauté internationale ?

 20   R.  Il ne m'a jamais dit cela.

 21   M. TIEGER : [interprétation] Je demande que cet extrait soit versé au

 22   dossier, Monsieur le Président.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il faut que cet extrait soit

 24   ajouté à une pièce ?

 25   M. TIEGER : [interprétation] Non.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, est-ce que vous avez téléchargé

 27   cet extrait ? Non, pas encore.

 28   Madame la Greffière, pouvez-vous réserver une cote pour cet extrait qui va


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  1   être téléchargé dans le prétoire électronique ultérieurement pour ce qui

  2   est de cette séance.

  3   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la cote P7769.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Lorsque vous aurez téléchargé cet

  5   extrait, dites-le-nous sous quel numéro 65 ter c'est. Merci.

  6   Continuez, Monsieur Tieger.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Est-ce que vous pouvez maintenant tourner à

  8   l'intercalaire 6. C'est le document 65 ter 02397, la page dans le prétoire

  9   électronique est la page 7, et dans la version en serbe, c'est la page 5.

 10   Monsieur le Président, ce document a été déjà versé au dossier en tant que

 11   pièce à conviction P4582. Bien que le témoin ne puisse pas voir cela et que

 12   cela ne soit pas dans le prétoire électronique --

 13   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 14   M. TIEGER : [interprétation] -- nous avons téléchargé la version revue et

 15   corrigée, puisque nous avons remarqué que ce document -- dans la traduction

 16   du document qui a été versée au dossier, trois mots manquaient. Et il ne

 17   s'agit pas d'une traduction revue et corrigée, mais seulement d'une

 18   omission de trois mots dans la traduction.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que c'est la partie pertinente

 20   sur laquelle vous allez vous reposer ?

 21   M. TIEGER : [interprétation] Oui.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 23   M. TIEGER : [interprétation] Je peux montrer ces trois mots à Me Ivetic.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Me Ivetic peut lire les deux langues,

 25   donc vous pouvez faire cela.

 26   Maître Ivetic, M. Tieger va attirer votre attention sur la partie qui a été

 27   modifiée.

 28   M. TIEGER : [interprétation] Ce sont les mots "je bosna gotova" [phon]


Page 42419

  1   "parce que la Bosnie est finie". Et je vais vous dire où se trouve

  2   exactement cette partie en anglais. Maître Ivetic, vous allez pouvoir ainsi

  3   voir cela.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La version B/C/S n'est toujours pas

  5   disponible dans le prétoire électronique.

  6   M. TIEGER : [interprétation] C'est à la page 5, ça commence au milieu de la

  7   page.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Juste un instant, s'il vous plaît,

  9   puisqu'il s'agit peut-être d'une page qui n'est pas la bonne page…

 10   [La Chambre de première instance se concerte]

 11   M. TIEGER : [interprétation] Mme Stewart me dit que la page affichée dans

 12   la version en serbe est la page correcte.

 13   Mais ce n'est pas le cas dans la version en anglais. Est-ce qu'on peut

 14   passer à la page 6 dans la version en anglais dans le prétoire

 15   électronique. Bien. Je sais où est le problème et ce qui a porté à

 16   confusion. Il faut la cote P, si c'est le document 65 ter, il s'agit du

 17   document entier et non pas de l'extrait du document qui se trouve dans la

 18   pièce P4582.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Permettez-moi de vérifier cela parce que

 20   j'avais quelque chose qui était complètement différent. Excusez-moi, non,

 21   c'est moi qui ai fait une erreur.

 22   Vous pouvez poursuivre.

 23   M. TIEGER : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher la page 6 en

 24   anglais et la page 5 en serbe.

 25   Q.  C'est en bas de la page en anglais. C'est le Dr Karadzic qui parle, et

 26   il dit --

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Et où cela se trouve sur la page en

 28   B/C/S ?


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  1   M. TIEGER : [interprétation] C'est également en bas de la page. Il faut

  2   afficher la page 74. Cela commence en bas de la page 74 dans la version en

  3   serbe.

  4   Oui. C'est la partie dont nous avons besoin.

  5   Q.  Le Dr Karadzic dit :

  6   "Alors, Alija a dit pour les premières fois que pour ce qui est de trois

  7   Bosnie et sur la base de l'appartenance ethnique, et c'était fatal pour

  8   lui, il nous a montré des cartes tout à fait inacceptables pour nous, mais

  9   Cutileiro a dit que nous pouvons accepter cela comme étant une base pour

 10   des négociations ultérieures. Et nous avons accepté cela comme étant la

 11   base pour des négociations ultérieures, oui."

 12   M. IVETIC : [interprétation] Non, ce n'est pas la partie dont nous avons

 13   besoin.

 14   M. TIEGER : [interprétation] Alors, passons à la page 5 en B/C/S.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, si cela peut vous

 16   aider, c'est à la page 7 dans le prétoire électronique, dans la quatrième

 17   ligne, et cela correspond à peu près milieu de la page 75. Je pense que

 18   cela commence à la quatorzième ligne en partant du haut de la page.

 19   C'est-à-dire sept ou huit lignes avant la partie que vous venez de lire.

 20   Vous pouvez commencer à lire.

 21   M. TIEGER : [interprétation] Je pense que c'est quelque neuf ou dix lignes

 22   un peu plus bas, Maître Ivetic, où il y a la référence à Alija au milieu de

 23   la phrase. Je vais lire cela encore une fois.

 24   "C'est alors qu'Alija a dit la première fois, oui, les trois Bosnie sur la

 25   base de la division ethnique, et c'était fatal pour lui. Ils nous ont

 26   montré des cartes qui étaient tout à fait inacceptables pour nous, mais

 27   Cutileiro nous a dit vous pouvez accepter cela comme étant une base pour

 28   des négociations ultérieures, et nous avons accepté cela, oui. Il nous


Page 42421

  1   était important de voir que c'était une division sur les trois parties sur

  2   la base territoriale, et qu'il y avait une carte qui existait et par

  3   laquelle nous pourrions faire valoir notre droit, avoir 45 ou 50 % du

  4   territoire, vous savez, c'est ce qui était prévu par la carte de Cutileiro.

  5   La Bosnie a explosé, et nous avons été une partie au conflit. Mais la

  6   communauté internationale a commis une erreur sérieuse puisqu'elle a envoyé

  7   Cutileiro et Carrington à nous avant la guerre et ils ont accepté que nous

  8   soyons une partie au conflit. Ils nous ont complètement ignorés et ils ont

  9   reconnu la Bosnie, et ensuite ils ont dit qu'il y aurait de sérieuses

 10   difficultés, personne n'allait nous parler; et nous, puisque nous étions

 11   disposés à négocier, puisque pour eux c'était cela, ils pensaient que les

 12   Serbes allaient conclure l'accord à partir du début jusqu'à aujourd'hui.

 13   Ils pensaient que les Serbes allaient accepter l'accord, mais les Serbes --

 14   ils les ont  induit en erreur parce qu'ils pensaient que cela aurait un

 15   succès, qu'ils auraient pu mettre au plan international le conflit en

 16   Bosnie … puisque la Bosnie était finie au moment où le conflit a été porté

 17   sur le plan international, et lorsque nous avons été reconnus comme une

 18   partie au conflit, bien qu'ils aient dit le gouvernement à Sarajevo et le

 19   gouvernement à Pale…"

 20   Ensuite, il parle du statut du gouvernement à Sarajevo et du fait ce que le

 21   gouvernement allait dire aux diplomates ou pas.

 22   Q.  Ambassadeur --

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce que vous avez lu --

 24   M. TIEGER : [interprétation] "La Bosnie est finie" n'a pas été consigné au

 25   compte rendu.

 26   M. IVETIC : [interprétation] Je ne sais pas si --

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faudrait lire cela encore une fois,

 28   bien que habituellement nous ne nous appuyons pas sur ce qui figure dans


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  1   l'interprétation, s'il y a des mots qui manquent --

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, en effet, ces mots

  3   manquent et il semble qu'il y ait d'autres choses qui manquent dans cette

  4   partie tout entière --

  5   M. TIEGER : [interprétation] Oui, j'ai vu que ces choses manquaient, mais

  6   je ne pouvais pas, du point de vue linguistique, dire cela, mais je pense

  7   que les interprètes ont dit qu'il ne s'agit pas de quelque chose qui est

  8   très, très important, mais il faut tenir compte de cela.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais nous pourrions procéder de la

 10   façon suivante : quelqu'un pourrait lire la partie pertinente en B/C/S pour

 11   obtenir l'interprétation la plus exacte possible avant d'obtenir une

 12   version définitive de la traduction.

 13   Maître Ivetic, pouvez-vous nous aider là-dessus.

 14   M. IVETIC : [interprétation] Je ne lis pas le texte en cyrillique assez

 15   vite. Je pense qu'il vaut mieux que vous vous adressiez aux interprètes.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc la partie que vous venez de lire

 17   doit être révisée, et vous pouvez poser vos questions sur la base de la

 18   partie que vous venez de lire.

 19   M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Merci.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et, en même temps, nous savons, surtout

 21   pour ce qui est de la fin de ce que vous avez lu, qu'il y a beaucoup plus

 22   de corrections à faire.

 23   Continuez.

 24   M. IVETIC : [interprétation] J'ai une question, Monsieur le Président. Le

 25   conseil s'est arrêté au milieu de la phrase dans les deux versions. Est-ce

 26   qu'on peut en finir avec cette phrase ?

 27   M. TIEGER : [interprétation] Pas de problème, je vais lire cela.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.


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  1   M. TIEGER : [interprétation] Je vais le faire et je peux donc faire

  2   référence à la discussion que nous avons eue.

  3   "Accepter que les Serbes n'ont pas donné leur accord et que nous les

  4   avons emmenés à cela de sorte qu'ils leur semblaient qu'ils réussiraient,

  5   qu'ils entreraient dans le processus, qu'ils internationaliseraient la

  6   question bosniaque, car à ce moment même, la Bosnie était … internalisée …

  7   la Bosnie était finie et lorsque nous avons été reconnus en tant que partie

  8   au conflit même s'ils parlent de 'gouvernement à Sarajevo' et de

  9   'gouvernement à Pale,' le gouvernement de Sarajevo est musulman et n'est

 10   pas universellement bosniaque. Cela signifie ce que dit M. Micic, à savoir

 11   que nous devons faire tout notre possible pour dire à ces diplomates en

 12   confiance ce qui pourrait peut-être survenir et ce qui ne le pourrait pas."

 13   Q.  Alors, Monsieur l'Ambassadeur, avec les excuses au sujet des précisions

 14   que j'ai dû apporter à mes propos, le Dr Karadzic n'a pas exprimé ce point

 15   de vue à votre intention durant les négociations --

 16   R.  Il ne l'a pas fait, non.

 17   Q.  Je vous remercie.

 18   M. TIEGER : [interprétation] Et je pense que nous avons traité des extraits

 19   dont le versement va être demandé, Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, ceci était déjà au dossier, et ces

 21   extraits étaient déjà des éléments de preuve. Il n'y a donc plus rien

 22   d'autre à faire qu'à demander la révision de la traduction, en particulier

 23   page 5 de la version papier.

 24   M. TIEGER : [interprétation] D'accord.

 25   Q.  Maintenant, Monsieur l'Ambassadeur, nous ne parlons plus de la façon

 26   dont le Dr Karadzic a exprimé sa position, mais je vous pose la question

 27   suivante : étiez-vous au courant de la position du Dr Karadzic, à savoir

 28   que la Bosnie était "finie" ou "terminée", la question consistait à savoir


Page 42424

  1   combien les Serbes de Bosnie obtiendraient de la Bosnie ?

  2   R.  Je ne comprends pas tout à fait votre question. Je suppose que nous

  3   avions un accord sur les préliminaires, que les cartes allaient être

  4   dessinées par les trois parties avec une assistance technique, et

  5   qu'éventuellement des frontières seraient définies. Donc je ne comprends

  6   pas votre question.

  7   Q.  Eh bien, peut-être puis-je devenir plus cohérent en situant le problème

  8   dans le contexte de ce qui se passait et de ce que disait le Dr Karadzic.

  9   J'appelle votre attention sur l'intercalaire 21 du classeur, c'est la pièce

 10   P4580, et dans le prétoire électronique, ce sont les pages 43 et 44 en

 11   anglais, ainsi que 63 et 64 en serbe. Pour la version serbe, le texte

 12   commence à peu près à la deuxième phrase du quatrième paragraphe complet.

 13   Alors, encore une fois, nous avons là un propos du Dr Karadzic,

 14   l'intervention du Dr Karadzic lors de la séance de l'assemblée qui s'est

 15   tenue le 18 mars 1992, à savoir le jour où la Déclaration de principes a

 16   été adoptée. En page 43 de la version anglaise, dans le dernier paragraphe,

 17   nous voyons que le Dr Karadzic dit ce qui suit :

 18   "Nous avons préservé le peuple serbe en tant que corpus, dans son

 19   intégralité, en Bosnie-Herzégovine, nous l'avons détaché en tant qu'entité,

 20   et maintenant la seule question qui demeure est la question de la quantité.

 21   Nous avons accompli notre travail sur la qualité. C'est ce qu'a reconnu

 22   l'Europe : la Bosnie serbe et l'Herzégovine existent. La seule question qui

 23   demeure, c'est la question de quantité, qui fait l'objet d'une

 24   confrontation au sujet de laquelle de nouveaux éléments vont apparaître.

 25   Nous l'avons emporté, nous avons tiré la corde le plus fort jusqu'à un

 26   certain point et nous n'allons pas revenir en arrière. Il n'y aura pas de

 27   retour sur le concept d'une Bosnie-Herzégovine unitaire, nous pouvons aller

 28   de l'avant, obtenir davantage de pouvoir pour les unités constitutives.


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  1   Donc, nous les avons emmenés dans les eaux où nous souhaitions qu'ils

  2   aillent. Le fait que ça n'est pas allé jusqu'ici, (et il fait un signe pour

  3   montrer son cou) mais seulement jusqu'à la taille, ça c'est une question de

  4   quantité."

  5   Ensuite, il poursuit en anglais -- en serbe je demande l'affichage de la

  6   page suivante, dans les termes suivants :

  7   "Et cela se passera conformément à notre volonté politique, à notre droit à

  8   l'autodétermination et à l'organisation, cela se passera conformément aux

  9   conditions présentes qu'il vous appartient de créer."

 10   Alors, Monsieur l'Ambassadeur, vous avez déjà fait allusion aux questions

 11   difficiles de définition des territoires des unités constitutives qui

 12   figuraient dans la Déclaration de principes. Est-ce que le Dr Karadzic a

 13   insisté pendant les négociations lorsqu'il s'adressait à vous sur sa

 14   position selon laquelle il existait une Bosnie-Herzégovine serbe, et que la

 15   seule question qu'il restait à régler était une question de quantité,

 16   c'est-à-dire quelle serait la dimension de celle-ci, et est-ce qu'il a

 17   insisté à l'égard de ses partisans qu'il leur appartiendrait dans les

 18   conditions présentes de créer cette quantité ?

 19   R.  Est-ce que vous me posez la question ?

 20   Q.  Oui, Monsieur. Est-ce que c'est un élément d'information sur lequel le

 21   Dr Karadzic a insisté lorsqu'il s'adressait à vous à l'époque ?

 22   R.  Nous étions parvenus à un accord et, désormais, chaque partie devait

 23   convaincre son propre peuple d'accepter cet accord. Il n'est pas allé dans

 24   des détails aussi infimes lorsqu'il s'adressait à moi. Il est retourné

 25   devant son peuple, et voilà ce qui s'est passé.

 26   Q.  Très bien. Encore un extrait avant la pause. L'intercalaire 27 dans

 27   votre classeur, Monsieur, document 65 ter numéro 02345, page 20 en anglais

 28   et page 24 en serbe dans le prétoire électronique.


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  1   M. TIEGER : [interprétation] Et j'appelle votre attention, Votre

  2   Excellence, sur le quatrième paragraphe complet en serbe et sur la

  3   traduction de ce paragraphe, bien entendu.

  4   Q.  Donc, c'est le Dr Karadzic qui s'exprime durant une session de

  5   l'assemblée. J'ai déjà appelé votre attention sur la 8e Session, et voici

  6   les mots qu'il prononce devant l'assemblée :

  7   "Nous acceptons, et je dis que la Bosnie-Herzégovine doit demeurer à

  8   l'intérieur de ces frontières-là. Bien. Alors maintenant, parlons des

  9   frontières intérieures. Et une fois que cela sera fait, une fois qu'elles

 10   seront plus éloignées que ne le sont les frontières actuelles, alors nous

 11   pourrons dire que nous n'en avons plus rien à faire des frontières

 12   extérieures. Ce qui importe c'est que les frontières à l'intérieur de la

 13   Bosnie-Herzégovine englobent un territoire aussi vaste que possible. Comme

 14   le dit le dicton populaire, si on nous chasse par la porte, on peut revenir

 15   par la fenêtre. Vous continuerez à occuper la même place à l'issue des

 16   négociations."

 17   Alors, pendant ces négociations, est-ce que le Dr Karadzic a mis

 18   l'accent à votre intention sur la nécessité de veiller à ce que les

 19   frontières soient le plus éloignées possible, englobent le territoire le

 20   plus important possible ?

 21   R.  Certainement pas.

 22   Q.  D'accord.

 23   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement au dossier de cet

 24   extrait, Monsieur le Président, et il faut l'ajouter à la pièce P7005.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est l'extrait qui est en train d'être

 26   téléchargé ? Non, pas encore. Donc, par conséquent, une fois que l'extrait

 27   aura été téléchargé, il sera ajouté à la pièce P7005.

 28   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, je vois que nous sommes


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  1   presque à l'heure de la pause. C'est un bon moment pour interrompre nos

  2   travaux.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'heure de la pause est arrivée.

  4   Monsieur Cutileiro, nous aimerions vous revoir dans cette salle dans 20

  5   minutes. Nous allons faire une courte pause.

  6   Monsieur Tieger, pour être sûr que nous pourrons conclure votre déposition

  7   aujourd'hui, n'est-ce pas ?

  8   M. TIEGER : [interprétation] Sur la base de ce qui s'est déroulé jusqu'à

  9   présent, oui; mais, bien entendu, je ne voudrais pas préjuger de la

 10   progression de nos travaux en étant trop optimiste.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 12   Monsieur Cutileiro, chacun dans ce prétoire a bonne confiance que nous

 13   pourrons conclure votre audition aujourd'hui, s'il ne survient pas des

 14   circonstances imprévues.

 15   Nous allons faire une pause, et reprendrons nos travaux à midi et quart.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 17   --- L'audience est suspendue à 11 heures 55.

 18   --- L'audience est reprise à 12 heures 16.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais une nouvelle fois vérifier

 20   que la liaison vidéo fonctionne bien en ce moment. Je demanderais au

 21   représentant du Greffe sur le lieu d'où part la vidéoconférence de

 22   confirmer qu'il nous voit et qu'il nous entend.

 23   M. LE GREFFIER [via vidéoconférence] : [interprétation] Oui, Monsieur le

 24   Président, nous vous voyons et vous entendons très bien. Merci.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Nous vous entendons et vous voyons

 26   également.

 27   M. Tieger va poursuivre son contre-interrogatoire.

 28   M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Avant


Page 42429

  1   de commencer, permettez-moi de faire remarquer ce qui suit et, ce faisant,

  2   je vais essayer de maîtriser ma nature suspicieuse dans le but de faire

  3   remarquer que la perspective de conclure la session aujourd'hui est

  4   réaliste. J'ai parlé avec Me Ivetic quelques instants à ce sujet. Je ne

  5   pense pas qu'il aura beaucoup de questions à poser dans les questions

  6   supplémentaires, donc je souhaitais simplement dire à la Chambre ce qui se

  7   passe afin que la Chambre ne soit pas prise par surprise et n'entreprenne

  8   pas quoi que ce soit en vue de palier à un retard éventuel.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Donc, nous pouvons penser que vous

 10   ferez ce qu'il faut dans votre temps de repos, Monsieur Tieger ?

 11   M. TIEGER : [interprétation] J'allais proposer cela, mais j'en laisse la

 12   décision à la Chambre.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Veuillez procéder.

 14   M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie.

 15   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, avant la pause, nous étions en train de parler

 16   de la question de quantité et du vaste territoire englobé par les

 17   frontières intérieures. A cet égard, je souhaitais vous demander si M.

 18   Karadzic ou M. Krajisnik durant les négociations ont mis l'accent sur un

 19   certain nombre de facteurs que je vais porter à votre attention en ce

 20   moment qui portaient sur le territoire englobé par les frontières.

 21   La Chambre devant laquelle vous parlez aujourd'hui a reçu des

 22   éléments de preuve, par exemple, la pièce P3006, j'indique à l'intention

 23   des parties et des Juges de la Chambre qu'il s'agit de la déclaration de

 24   proclamation de l'Etat, qui indique que les territoires de la République

 25   serbe de Bosnie étaient considérés comme devant inclure des zones dans

 26   lesquelles le peuple serbe était désormais en minorité en raison du

 27   génocide commis contre ce peuple durant la Seconde Guerre mondiale. Et

 28   puis, nous pouvons aussi citer la pièce P3007, qui constitue l'article 2 de


Page 42430

  1   la constitution de la République serbe de Bosnie-Herzégovine, dans laquelle

  2   il est indiqué que le territoire était considéré comme devant inclure des

  3   régions dans lesquelles un génocide avait été commis contre le peuple serbe

  4   durant la Seconde Guerre mondiale.

  5   Alors, est-ce que M. Karadzic vous a indiqué ou a même insisté sur

  6   cette question à votre intention pendant les négociations, question qui est

  7   la suivante, à savoir qu'il considérait que l'entité serbe de Bosnie devait

  8   inclure des territoires dans lesquels le peuple serbe de Bosnie était

  9   minoritaire en nombre ?

 10   R.  Pas que je m'en souvienne. Mais je ne l'exclus pas. Voyez-vous, nous

 11   avons discuté des principes, et ensuite nous nous sommes occupés pendant un

 12   certain temps des cartes, et la base de notre travail sur les cartes était

 13   à l'époque la réalité démographique du moment. Or, il n'y avait absolument

 14   pas de recensement récent à notre disposition, si je ne me trompe pas, nous

 15   travaillions sur la base du dernier recensement disponible. Et si je puis

 16   me permettre un commentaire au sujet d'une notion historique relative au

 17   territoire, à savoir que dès lors qu'un territoire était peuplé par l'un

 18   des groupes ethniques, et que pour une raison ou pour une autre

 19   éventuellement liée à la guerre, ce groupe avait cessé d'être majoritaire,

 20   je ne pense pas que nous aurions admis cet argument. Je sais que nous ne

 21   l'avons pas admis en tant qu'argument. Donc, à l'époque où nous avons

 22   commencé à discuter des cartes, ce n'était plus une question en discussion.

 23   Q.  Bien. En rapport avec la mention de la nature mythique de cette

 24   considération relative aux droits que les uns et les autres pouvaient avoir

 25   sur un territoire, j'aimerais que nous nous penchions brièvement sur

 26   l'intercalaire 46 de votre classeur, à savoir le document 65 ter numéro

 27   02366, qui correspond dans le prétoire électronique aux pages 32 en serbe

 28   [comme interprété] et 23 en anglais [comme interprété].


Page 42431

  1   Il s'agit de l'enregistrement audio de la 24e Session de l'assemblée du

  2   peuple de la Republika Srpska qui s'est tenue le 8 janvier 1993. C'est un

  3   délégué de Prijedor, dans le nord-ouest de la Bosnie, qui s'exprime, un

  4   certain M. Srdic, qui dit ce qui suit :

  5   "Depuis la place où je me trouve aujourd'hui, je souhaite également dire

  6   que j'ai été choqué par la carte qui nous a été présentée par notre

  7   respecté président, M. Karadzic. Qu'est-ce que ces renégats pensent ?

  8   Pensent-ils que nous avons versé notre sang et conquis ce qui nous

  9   appartient pour rien ? Nous n'avons demandé qu'une chose, c'est-à-dire

 10   restaurer ce droit des Serbes qui nous a été repris en 1941 lorsqu'un

 11   massacre a été commis contre le peuple serbe. Messieurs et Mesdames, je

 12   puis vous dire ceci, et je crois que je partage l'avis des municipalités

 13   voisines de Bosanski Novo, Bosanska Krupa et Sanski Most, pas un seul bout

 14   de terrain ne sera donné à ces traîtres et à ces escrocs. C'est le vœu que

 15   nous formons à partir de Kozara. Nous nous battrons jusqu'au dernier homme"

 16   --

 17   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Veuillez ralentir votre lecture, je

 18   vous prie.

 19   M. TIEGER : [interprétation]

 20   Q.  "C'est le vœu que nous formons depuis le pied du mont Kozara. Nous nous

 21   battrons jusqu'au dernier homme et pas un seul pouce de terrain ne sera

 22   donné par nous."

 23   Alors, Monsieur l'Ambassadeur, nous allons dans quelques instants examiner,

 24   par exemple, les cartes dont vous avez parlé, les cartes de Dayton, et voir

 25   ce qui s'est passé durant le conflit sur le plan des cartes, mais je

 26   souhaitais pour le moment me contenter d'appeler votre attention sur ce qui

 27   suit et vous demander si vous saviez à l'époque -- parce que, bien sûr, je

 28   vous ai déjà interrogé au sujet des dispositions figurant dans la


Page 42432

  1   déclaration, ainsi que dans la proclamation de l'Etat et dans la

  2   constitution, donc j'aimerais vous demander si à l'époque vous étiez au

  3   courant du fait que ces points de vue historiques ou mythiques quant à un

  4   droit sur un certain territoire étaient reflétés non seulement dans des

  5   documents de nature juridique, mais mentionnés également dans des échanges

  6   de vues menés au Parlement ou dans les positions prises par des

  7   représentants de la Republika Srpska ?

  8   R.  Encore une fois, votre question me pose une certaine difficulté. Bien

  9   entendu, les questions que vous posez sont difficiles, en particulier

 10   s'agissant d'un endroit où l'histoire a une importance tout à fait capitale

 11   - bien souvent une importance plus grande que les aspects juridiques -

 12   s'agissant de ce que ressentait la population. Mais, comme vous le savez,

 13   je n'étais pas membre de l'assemblée populaire de la Republika Srpska, et

 14   en janvier 1993, je ne m'occupais plus de la Bosnie. Donc, je suis sûr que

 15   c'est ce qui s'est passé, et je suis sûr que bien d'autres personnes

 16   avaient ce genre de positions. Mais, au moment où les cartes étaient en

 17   négociations, les morceaux de territoires dont nous parlons, bien sûr, ce

 18   n'était pas un argument que nous pouvions admettre, donc il est probable

 19   que c'est la raison pour laquelle Karadzic -- enfin, si j'ai bien compris

 20   ce que vous avez dit, c'est la raison pour laquelle vous avez montré la

 21   citation que vous venez de montrer, les négociateurs serbes avaient des

 22   difficultés sur ce point face à leur propre assemblée. Mais, c'était une

 23   partie des discussions, en tout état de cause.

 24   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement au dossier de cet

 25   extrait, Monsieur le Président.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et l'extrait dont vous parlez, c'est

 27   celui qui a été téléchargé ?

 28   M. TIEGER : [interprétation] Il faudrait que ce soit annexé à la pièce


Page 42433

  1   P6921 -- non, il n'a pas encore été téléchargé, Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, l'extrait sera téléchargé et

  3   ajouté à la pièce P6921 comme requis, Madame la Greffière.

  4   Veuillez procéder, Monsieur Tieger.

  5   M. TIEGER : [interprétation] D'accord.

  6   Q.  Je souhaitais que nous nous penchions sur un autre fondement ou un

  7   autre motif qui concernait l'étendue de territoire enfermée dans les

  8   frontières intérieures et les prétentions territoriales. A cet égard, je

  9   souhaitais appeler votre attention sur l'intercalaire 26 de votre classeur,

 10   à savoir la pièce P4584, qui correspond aux pages 5 et 6 du prétoire

 11   électronique en anglais et aux pages 6 et 7 en serbe.

 12   Il s'agit d'une intervention du Dr Karadzic devant la 53e Session de

 13   l'assemblée de la Republika Srpska qui s'est tenue en 1995, il a parlé de

 14   ce qui s'est passé et il en a donné les raisons. Et il dit, en bas de la

 15   page de la version anglaise et vers le bas de la page à la page 7 en

 16   serbe:

 17   "A vrai dire, il y a des villes dont nous nous sommes saisis" - page

 18   suivante en anglais - "et nous ne représentions que 30 %" --

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela ne figure pas encore sur notre

 20   écran. Apparemment, en B/C/S non plus. La version anglaise, non. Le bas de

 21   la page, s'il vous plaît.

 22   M. TIEGER : [interprétation] C'est le bas de la page de la version

 23   anglaise, s'il vous plaît.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est tout en bas, il me semble.

 25   M. TIEGER : [interprétation] Et la page suivante en B/C/S. Veuillez

 26   agrandir le dernier quart de page.

 27   Q.  Encore une fois, le Dr Karadzic dit :

 28   "A vrai dire, il y a des villes dont nous nous sommes emparés et nous ne


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  1   représentions que 30 %. Je peux citer autant d'endroits que vous voulez."

  2   M. TIEGER : [interprétation] Page suivante en anglais, s'il vous plaît.

  3   En B/C/S, s'il vous plaît.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez revenir en arrière en B/C/S,

  5   s'il vous plaît. Oui.

  6   Veuillez poursuivre, s'il vous plaît.

  7   M. TIEGER : [interprétation]

  8   Q.  "Je peux citer autant de noms que vous le souhaitez, mais nous ne

  9   pouvons pas abandonner les villes où nous représentons 70 %. Faites en

 10   sorte que ceci se ne sache pas, mais souvenez-vous du nombre de personnes

 11   ou combien d'entre nous il y avait à Bratunac, combien d'entre nous il y

 12   avait à Srebrenica, à Visegrad, à Rogatica, à Vlasenica, à Zvornik, et

 13   cetera. En raison de l'importance stratégique que ces villes revêtaient,

 14   ces villes devaient nous appartenir, et quasiment personne ne remet plus

 15   ceci en doute."

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tieger, quand cette séance

 17   s'est-elle tenue ?

 18   M. TIEGER : [interprétation] En 1993 -- pardonnez-moi, le 28 août 1995.

 19   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.

 20   M. TIEGER : [interprétation]

 21   Q.  Je vais vous demander de vous souvenir de ces villes ou de ces régions

 22   dont je vous ai parlé, parce que je vais vous demander de vous pencher

 23   dessus lorsque je vous présenterai un autre document. Et je vais vous

 24   demander si à l'époque des négociations, étant donné que vous avez envisagé

 25   la possibilité de négocier par rapport aux territoires, si le Pr Karadzic a

 26   insisté pour dire qu'il y avait des raisons stratégiques qui justifiaient

 27   l'obtention de nombreuses régions par les Bosno-serbes où les Musulmans de

 28   Bosnie étaient, en réalité, majoritaires ?


Page 42435

  1   R.  D'après mon souvenir, non.

  2   Q.  Merci, Monsieur.

  3   Monsieur l'Ambassadeur, même si on met de côté pendant quelques instants

  4   ces facteurs en jeu concernant la partie du territoire que les dirigeants

  5   bosno-serbes estimaient devoir être serbe, les négociateurs de la

  6   communauté internationale avaient compris que les cartes ne parlaient pas

  7   en faveur d'une division ethnique ?

  8   R.  Je ne comprends pas votre question.

  9   Q.  Alors, si je vous montre un passage précis de notes prises au cours de

 10   ces discussions, cela sera peut-être plus clair pour vous. A cet égard,

 11   permettez-moi de vous demander de regarder l'intercalaire numéro 10 de

 12   votre document. Il s'agit là du numéro 65 ter 0958.

 13   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 14   M. TIEGER : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, j'espère que ces documents vous sont

 16   familiers ?

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois qu'il manque un chiffre, ce qui

 18   nous permettrait de retrouver le document.

 19   M. TIEGER : [interprétation] Pardonnez-moi. 07958, j'ai dû omettre un de

 20   ces chiffres.

 21   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, je disais justement que j'espère que ces

 22   documents vous sont familiers, que vous avez eu l'occasion de les lire

 23   lorsque M. Hayden et moi-même nous vous avons rencontré en 2009, je

 24   crois --

 25   R.  Hm-hm.

 26   Q.  -- et vous avez précisé à ce moment-là qu'ils semblaient être le reflet

 27   exact de ce qui s'était déroulé au cours des négociations, mais bien

 28   évidemment, vous n'avez pas pu les analyser de façon exhaustive. Vous avez


Page 42436

  1   dit ce qui suit, me semble-t-il. Vous avez pu vérifier les documents en ce

  2   qui concerne les dates et que les dates reflétaient les dates réelles des

  3   pourparlers et que cela semble constituer une tentative authentique visant

  4   à reconstituer ce qui s'était passé.

  5   "Les thèmes abordés concordent avec mes souvenirs quant aux sujets

  6   évoqués par M. Karadzic et les autres Bosno-serbes lors des pourparlers

  7   différents."

  8   Ceci coïncide-t-il avec la manière dont vous comprenez ce document ?

  9   R.  Alors je signale encore que ce document est daté du 6 février

 10   1992, ma première visite à Sarajevo, où j'ai accompagné Lord Carrington. Et

 11   c'est au cours de cette réunion-là que Lord Carrington a dit aux Bosniaques

 12   en général - Izetbegovic, Karadzic, et les représentants des Croates

 13   également - que nous allions organiser des négociations pour trouver une

 14   solution politique pour la Bosnie. Ce sont des négociations que j'ai

 15   présidées. Donc, ceci s'est passé avant. Nous avons commencé nos

 16   pourparlers 15 jours plus tard, me semble-t-il, donc ceci ne correspond pas

 17   exactement. Oui, j'étais là, lors de cette conversation entre Lord

 18   Carrington et le Pr Karadzic. Oui, ce qui est dit là figure, effectivement,

 19   dans le document. Mais nous n'avions même pas commencé à négocier la

 20   question bosniaque encore.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, Monsieur Tieger, je

 22   vois que dans l'original il y a une page de garde, quelque chose qui semble

 23   être un livre. Mais dans la traduction anglaise, il y a un commentaire en

 24   haut, je ne sais pas, un commentaire sur qui appartient ce livre et sur

 25   quoi il porte, mais je ne vois pas ceci dans l'original.

 26   M. TIEGER : [interprétation] Oui, je pense que cela doit figurer entre

 27   parenthèses.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Lorsque nous avons une traduction, je


Page 42437

  1   m'attends à ce qu'il y ait une traduction de ce qui figure dans l'original

  2   et pas des commentaires ou quelque chose entre parenthèses qui semble

  3   affirmer ce que le document contient. Donc si vous souhaitez verser par la

  4   suite ce document, il faut enlever le commentaire qui figure sur ce qui est

  5   présenté comme étant la traduction anglaise.

  6   M. TIEGER : [interprétation] Je suis tout à fait disposé à le faire. Alors,

  7   si vous êtes inquiet quant à la source de ce document, ce document a été

  8   versé par le Pr Karadzic comme correspondant aux notes prises par son chef

  9   de cabinet dans le cadre des négociations avec l'ambassadeur Cutileiro --

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, nous sommes tout à fait curieux

 11   de savoir ce que disent ces documents, mais c'est la partie de la

 12   traduction qui ne correspond pas à l'original, et c'est le seul commentaire

 13   que j'ai à faire là-dessus.

 14   M. TIEGER : [aucune interprétation]

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic.

 16   M. IVETIC : [interprétation] Je remarque que la traduction en B/C/S, nous

 17   n'entendons pas l'interprétation en B/C/S. Peut-être que les micros ne sont

 18   pas ouverts.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous entendez maintenant

 20   l'interprétation en B/C/S ?

 21   M. IVETIC : [interprétation] On me dit que oui.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il faut répéter ce qui vient

 23   d'être dit ? Il s'agissait simplement d'une question technique concernant

 24   une traduction.

 25   M. STOJANOVIC : [interprétation] Cela n'est pas nécessaire, Messieurs les

 26   Juges.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas, nous allons poursuivre.

 28   C'est à vous, Monsieur Tieger.


Page 42438

  1   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   Q.  Je veux tout simplement attirer votre attention, Monsieur

  3   l'Ambassadeur, sur deux passages. Le premier se trouve à la page 3 du

  4   document, et c'est au cours de cette réunion qui est dirigée par Lord

  5   Carrington et qui rend visite au Pr Karadzic. Lord Carrington a dit,

  6   d'après ce qui a été consigné :

  7   "La carte de la BiH" - et ceci se trouve au milieu de la page - "ne parle

  8   pas en faveur d'une division de la Bosnie."

  9   Ceci reflétait le fait, n'est-ce pas, que la question de la division de la

 10   Bosnie était déjà sur la table et que le point de vue de Lord Carrington, à

 11   savoir que la carte de la Bosnie - par là j'entends la répartition de la

 12   population en Bosnie - autrement dit, n'était pas favorable à cette

 13   division ?

 14   R.  Alors, c'est ce qui était écrit ici, il a certainement dit cela. Il y a

 15   certainement des régions du monde où des cartes sont le reflet d'eux ou, en

 16   fait, représentent autre chose en faveur ou en défaveur d'une division,

 17   mais, donc, il y avait une possibilité; il y en avait d'autres, d'autres

 18   personnes en présence, d'autres parties. Nous souhaitions trouver un accord

 19   entre les Serbes, les Croates, et les Musulmans, la division sur les unités

 20   constitutives. Je ne peux pas y consacrer trop de temps - car je souhaite

 21   terminer à temps - mais les Musulmans souhaitaient qu'il n'y ait aucune

 22   division. Les Serbes ne souhaitaient pas que la Bosnie existe. Les Serbes

 23   souhaitaient qu'il y ait un découpage et que les Serbes puissent rester en

 24   Serbie. C'est un cas extrême d'élasticité au niveau des frontières, si vous

 25   voulez. Les Croates étaient plus discrets, mais en auraient profité si la

 26   Bosnie avait disparu et si la Serbie était restée et les Croates en

 27   Herzégovine seraient allés en Croatie. Alors finalement ce à quoi nous

 28   sommes parvenus lorsque tout le monde -- lorsqu'il y avait encore des


Page 42439

  1   pourparlers en cours avec un gouvernement de coalition, c'était cet accord

  2   tripartite - si je me souviens bien - avec l'ajout de la Fédération

  3   musulmane et croate et c'est ce que vous retrouvez dans les accords de

  4   Dayton.

  5   Je dis cela parce que, bien évidemment, d'emblée, sans évoquer la question

  6   des peuples concernés, vous auriez pu imaginer une autre façon de trouver

  7   une solution à la question bosniaque, et c'est ce qui a fait l'objet d'un

  8   accord finalement entre les parties. Donc le commentaire de Lord Carrington

  9   ici est normal et figure dans ce document. Encore une fois, nous parlons

 10   d'une période qui précède la question posée des trois unités constitutives,

 11   entre les trois parties, les Musulmans, les Croates, et les Serbes.

 12   Q.  Merci, Monsieur l'Ambassadeur. Pour le moment, j'essaie de me

 13   concentrer sur la question de la division et les revendications

 14   territoriales. Je vais vous montrer un passage de ce compte rendu lors des

 15   négociations, alors que les négociations avaient avancées, en particulier,

 16   le 27 février - page 8 - où la même question semble avoir été posée. Et

 17   nous allons regarder le bas de la page. Nous voyons que le Dr Karadzic dit

 18   que :

 19   "Ils nous sortent de la Yougoslavie pour toujours et nous enferment en

 20   Bosnie-Herzégovine."

 21   M. Koljevic prend la parole :

 22   "Est-ce que les Musulmans vont accepter des principes ethniques ?

 23   Et une référence à "Darvin", Henry Darwin ?

 24   R.  Oui, tout à fait.

 25   Q.  "Il déclare :

 26   "'Je ne peux pas accepté que cela se transformera en entités ethniquement

 27   pures car ceci n'est pas possible sur le terrain.'"

 28   Encore une fois, l'illustration, Monsieur l'Ambassadeur, de l'opinion que


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  1   la répartition démographique en Bosnie ne favorisait pas une division

  2   ethnique ?

  3   R.  Alors, tout dépend de la manière dont vous procédez, car ce que nous

  4   appelons la communauté internationale, et dans le terme assez vague -

  5   autrement dit, il s'agissait de l'Europe et des Etats-Unis - ils

  6   souhaitaient voir une Bosnie indépendante. Et les trois peuples qui étaient

  7   les peuples qui vivaient dans cette région n'ont pas trouvé d'autre

  8   solution à cette difficulté que d'obtenir indépendance de la Bosnie en

  9   ayant trois unités constitutives avec une protection adéquate pour les

 10   groupes minoritaires. Ceci était le cas en 1992 et ceci était le cas depuis

 11   cette date et en 1995. Ça toujours été le cas. Des tentatives ont été

 12   menées par Owen et Vance, et ensuite par Owen et Stoltenberg aux fins de

 13   négocier des accords différents. Ceci n'a pas fonctionné. Et pour finir,

 14   Holbrooke a repris la question et nous sommes revenus à l'accord préalable.

 15   Et ni l'un ni l'autre n'était satisfaisant, mais c'est ce qui était

 16   possible. Bon, c'est en tout cas, c'est ce que le marché nous permettait de

 17   faire, et nous étions confrontés aux mêmes difficultés dès le début.

 18   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement au dossier de cet

 19   extrait, s'il vous plaît. Je ne pense pas qu'il y ait de cote pour ce

 20   document encore.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Apparemment, il n'y a pas d'objection.

 22   Est-ce que la Chambre peut être informée, s'il vous plaît -- je comprends,

 23   Monsieur Tieger, que ceci a été versé dans l'affaire Karadzic par M.

 24   Karadzic, et ceci a été présenté comme étant le carnet de notes du

 25   secrétaire de Pr Karadzic.

 26   M. TIEGER : [interprétation] Non, le chef de cabinet de M. Karadzic.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si l'origine ou la source de ce document

 28   n'est pas contestée.


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  1   Madame la Greffière, s'il vous plaît.

  2   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le numéro 65 ter 07958 reçoit la cote

  3   P7770, s'il vous plaît.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci est versé au dossier.

  5   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons versé ce document au dossier,

  7   mais nous attendons la traduction anglaise -- autrement dit, que vous allez

  8   supprimer le commentaire dans la version anglaise.

  9   M. TIEGER : [interprétation]

 10   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, nous avons analysé un certain nombre de

 11   concepts de points de vue qui portaient sur les revendications

 12   territoriales et sur les éventuels dessins sur les cartes annexées à la

 13   Déclaration de principes, et vous avez dit que cette carte était le reflet

 14   de la répartition démographique en Bosnie-Herzégovine municipalité par

 15   municipalité.

 16   A cet égard, je souhaite que nous regardions la pièce 7294, s'il vous

 17   plaît. Pages du compte rendu d'audience 1 et 2 en anglais et en serbe, mais

 18   je souhaite que nous regardions -- il s'agit là d'un enregistrement audio

 19   [comme interprété] et c'est M. Karadzic qui parle de la carte, et je

 20   souhaite que vous entendiez cela, à l'intention de vous, Monsieur le

 21   Témoin, et à l'intention des Juges de la Chambre et les parties.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci a déjà été versé au dossier ?

 23   M. TIEGER : [interprétation] Oui, tout à fait.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

 25   [Diffusion de la cassette vidéo]

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'entendons pas la traduction

 27   anglaise. Est-ce que vous avez distribué la transcription ?

 28   Est-ce que nous pouvons recommencer, s'il vous plaît.Les interprètes


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  1   savent-ils où est elle ? Je vois le geste de la main entre les cabines des

  2   interprètes.

  3   L'INTERPRÈTE : Monsieur le Président, nous essayons de mettre la main sur

  4   la transcription.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez nous dire quand vous la

  6   trouvez.

  7   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

  8   M. TIEGER : [interprétation] Nous avons fourni une transcription ce matin

  9   qui précise qu'il s'agit de ce document en rapport avec ce témoin-ci.

 10   L'INTERPRÈTE : Nous disposons d'un exemplaire.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons un exemplaire. Je vois que

 12   tout le monde sourit, donc nous pouvons poursuivre.

 13   Est-ce que nous pouvons recommencer, en réalité. Merci.

 14   [Diffusion de la cassette vidéo]

 15   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 16   "Monsieur le Président, depuis que s'est déroulée la conférence de

 17   Lisbonne, nous avons eu une période incroyable avec des cartes. Les hommes

 18   politiques du monde entier n'ont pas utilisé de cartes autant que jusqu'à

 19   ce moment-là. Veuillez nous expliquer au public serbe ces questions qui ne

 20   sont toujours pas expliquées. Est-ce que nous allons commencer ? Que se

 21   passe-t-il avec ce plan Cutileiro ?

 22   Karadzic : Vous avez raison, le fait est que le problème essentiel

 23   portait toujours sur la carte et pendant cette guerre, il s'agit d'une

 24   question de territoire. Avant cette première carte Cutileiro, nous avons

 25   reconnu qu'environ 50 % du territoire avant la guerre portait là-dessus et

 26   d'une agression ou d'une attaque comme cela a été appelé s'est produit, ce

 27   qui n'était pas très satisfaisant pour nous, mais nous avons accepté la

 28   logique de la carte et c'est la raison pour laquelle nous avons accepté


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  1   parce que pour la première fois a été évoquée la séparation de la Bosnie en

  2   trois parties. Voyez-vous, par exemple, souvenez-vous de ceci, c'est très

  3   important, si vous pensez à ce qui s'est passé après en ce qui concerne la

  4   partie occidentale, ils ont accepté la frontière au niveau de la rivière

  5   Una. Ils ont reconnu qu'il y avait des Musulmans au pied de mont Grmec et

  6   du mont Kozara, mais ils s'attendaient à ce que nous échangions cela pour

  7   quelque chose, ils pensaient que nous allions procéder à un échange pour

  8   une autre région que le mont Kupres, une partie du mont Kupres pour la

  9   Posavina et la vallée de la Save. Cependant, cette carte-ci montre que les

 10   cartes qui vous seront montrées par la suite indiquent qu'il était

 11   nécessaire de couper le territoire serbe à Brcko, que les intérêts

 12   occidentaux s'assuraient que l'Etat serbe ne soit pas créé.

 13   Journaliste : Par conséquent, c'est comme si vous aviez la corde

 14   autour du cou dès le début pour les Serbes, et c'était le cas à terme,

 15   n'est-ce pas ?

 16   "Radovan Karadzic : Oui, tout à fait. Nous ne souhaitions pas accepter la

 17   carte, parce que nous avons décidé qu'il s'agissait d'une étape très

 18   importante, parce que les Musulmans pensaient que nous ne souhaitions pas

 19   l'accepter. Nous avons donné des garanties pour dire que par écrit de

 20   "façon préliminaire", nous acceptions ce qui était inscrit dessus, et

 21   c'était la première fois que les Musulmans et les Croates avaient accepté

 22   la division de la Bosnie en trois parties. Nous n'étions pas satisfaits de

 23   la situation en Bosnie orientale, avec Sarajevo, même si nous pouvions

 24   constater que Sarajevo était divisée entre les Serbes et les Musulmans.

 25   Nous n'étions pas satisfaits avec la vallée de la rivière Neretva, et pas à

 26   cet endroit-là. Nous étions satisfaits avec le fait qu'il y a une frontière

 27   au niveau de l'Una, et cela, nous pouvions l'accepter. Regardez cette carte

 28   ici, ce qui est en fait la carte du plan Vance-Owen qui montre en noir, les


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  1   champs noirs représentent ce que nous devions abandonner si nous acceptions

  2   le plan Vance-Owen, ce à quoi nous devions renoncer. Voyez-vous, encore une

  3   fois, vous remarquez qu'il y a ici cette coupure à Brcko.

  4   Journaliste : Pour la sortie ?

  5   Radovan Karadzic : Non, pas seulement à Brcko. Dans ce scénario-là, nous

  6   aurions perdu le mont Ozren, Doboj, et toute la Posavina, et ensuite un

  7   secteur plus important en Bosnie orientale et, bien sûr, ici en Bosnie

  8   occidentale. Voyez-vous, Vance et la table -- et ce qui a été posé sur la

  9   table lors des plans Vance. Il y avait ces cartes particulières où se

 10   trouvaient les ressources minérales ainsi que d'autres ressources qui ont

 11   été fournies par l'Agence du renseignement américain, le CIA, et c'est là

 12   que nous avons constaté que l'on accordait beaucoup d'attention à la mine

 13   de Ljubija, de la mine de charbon de Kamengrad, et de toutes les mines

 14   centrales ici et des centrales hydroélectriques sur la Drina et la Neretva.

 15   C'est la raison pour laquelle l'Occident s'était toujours assuré que cela

 16   soit donné aux Croates, et je dois dire il n'y a que les Croates qui ont un

 17   véritable ami, et c'est l'Allemagne. Et les amis américains des Musulmans

 18   ni les Russes n'ont fait quoi que ce soit pour nous, alors que les Croates

 19   pouvaient toujours accepter ce qui était proposé, étant donné que

 20   l'Allemagne était là pour faire en sorte que ce qui devait être fait devait

 21   être fait.

 22   Journaliste : Vous avez parlé de Ljubija. Il est intéressant de constater

 23   que Goerring avait exploité cette même idée pendant la Deuxième Guerre

 24   mondiale. Je pense que la CIA avait utilisé la plupart des cartes des

 25   Allemands. C'est en fait mon point de vue ici.

 26   Radovan Karadzic : A cet égard, vous comprenez pourquoi il y a ici une

 27   tache verte qui apparaît. Un autre Allemand -- en réalité un Autrichien,

 28   Waldheim, a organisé un génocide ici. Par exemple, ici à Sanski Most, plus


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  1   de 5 300 Serbes ont été tués, massacrés et abattus en une seule journée.

  2   Dans ce secteur aussi à Bosanska Krupa, même à Bihac, et dans le comté de

  3   Bihac, nous étions complètement majoritaires dans ce secteur, nous

  4   représentons plus des deux tiers de la population. Quelque part entre 70 et

  5   77 % de la population était Serbe. Et maintenant, vous dites de quelqu'un

  6   qui vient du pied des monts Grmec et Kozarac, qu'une partie du mont Kozarac

  7   et une partie du mont Grmec, la vallée de la Sana, qui était exclusivement

  8   serbe et essentiellement serbe, que cela appartiendra à quelqu'un d'autre,

  9   vous pensez que vous pouvez vous attendre à une réponse négative, non

 10   seulement de la part de la population mais de la part de tout un peuple ici

 11   qui ne permettra pas que ceci arrive aux Serbes à cet endroit. Une

 12   solidarité au niveau national et une prise de conscience ici, tout un

 13   chacun était inquiet de savoir à quoi ressemblerait cet Etat par la suite."

 14   [Fin de la diffusion vidéo]

 15   M. TIEGER : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, vous avez entendu les propos du Pr Karadzic ici

 17   au sujet de la carte et le fait qu'il était peu satisfait du fait que la

 18   carte reflète la Bosnie orientale, Sarajevo, la Neretva, donc cette "tache

 19   verte" dans le nord-ouest de la Bosnie. Le Pr Karadzic a exprimé son

 20   mécontentement quant à cette partie importante du territoire qui figurait

 21   sur la carte Cutileiro présentée au cours des négociations.

 22   R.  Ecoutez, je suppose que la carte Cutileiro était la carte d'origine qui

 23   a servi de base à la discussion.

 24   Q.  Pardonnez-moi, j'ai fait la même chose que Me Ivetic un peu plus tôt.

 25   La carte annexée à la Déclaration de principes.

 26   R.  Eh bien, oui. La carte, c'était le point de départ des discussions, et

 27   toutes les parties avaient leurs propres arguments à présenter d'une

 28   manière ou d'une autre. Mais, je n'ai pas entendu parler de choses de ce


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  1   genre. Ce n'est certainement pas quelque chose qui est apparu à ce moment-

  2   là. Nous savions que c'était difficile - vous-même, vous avez dit que

  3   c'était difficile - nous faisions ce que nous pouvions. Les cartes -- nous

  4   étions finalement d'accord pour dire que les cartes sont les cartes sur

  5   lesquelles nous sommes tombés d'accord à Dayton, donc vous devriez

  6   probablement demander aux personnes qui étaient à Dayton si ce genre

  7   d'arguments ou de réserves existaient encore à ce moment-là. Je ne me

  8   souviens pas que cela ait eu une telle importance parce qu'à l'époque nous

  9   ne sommes pas parvenus à dessiner une carte générale détaillée de la

 10   Bosnie-Herzégovine comprenant les trois unités constitutives. Nous étions

 11   dans la phase préliminaire.

 12   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, comme vous l'avez écrit vous-même, une fois que

 13   la Bosnie avait été reconnue comme Etat indépendant, les négociations d'un

 14   point de vue bosno-serbe -- les négociateurs bosno-serbes estimaient que

 15   cela ne fonctionnait pas, que les négociations n'étaient pas couronnées de

 16   succès et estimaient qu'ils avaient une vue paranoïaque de l'histoire et

 17   finalement sont passés à l'offensive de façon violente ?

 18   R.  Ecoutez, j'ai écrit cet article à l'époque dont je vous parle, à

 19   l'époque de cette carte préliminaire avec la Déclaration de principes. Je

 20   ne pense pas que vous pouvez citer cette carte à titre d'exemple parce que

 21   d'autres cartes ont été négociées par la suite, en particulier dans le

 22   cadre des accords de Dayton.

 23   Q.  Ecoutez, je vais regarder ces cartes et vous dire en partie sur quoi

 24   celles-ci étaient fondées.

 25   M. TIEGER : [interprétation] Mais je demande à ce que nous affichions

 26   l'intercalaire numéro 42, page 40 des documents énumérés ici, numéro 65 ter

 27   1D04315. Veuillez agrandir le dernier paragraphe, s'il vous plaît, de la

 28   colonne de gauche. C'est l'article auquel on vous avez renvoyé, en fait,


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  1   c'est correct. Vous dites que :

  2   "Les Serbes avaient la confirmation de leur vision paranoïaque et

  3   sont brusquement passés à l'offensive de façon violente."

  4   R.  Hm-hm.

  5   M. LE GREFFIER : [Via vidéoconférence] [interprétation]  Nous n'avons

  6   pas --

  7   M. TIEGER : [interprétation] Page 40, intercalaire numéro 42, bas de la

  8   page, c'est marqué au crayon. Cela devrait être l'avant-dernier document

  9   dans cet intercalaire.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit d'un document manuscrit ?

 11   M. TIEGER : [interprétation]

 12   Q.  Non, Monsieur l'Ambassadeur, c'est --

 13   R.  C'est alors quelque chose d'autre.

 14   M. LE GREFFIER [via vidéoconférence] : [interprétation] Je pense que nous

 15   n'avons pas le bon intercalaire.

 16   M. TIEGER : [interprétation]

 17   Q.  L'intercalaire 42. Il devrait y avoir 40 pages dans ce document. C'est

 18   l'avant-dernière page, c'est la copie d'un article de presse.

 19   R.  Ah, oui, maintenant je le vois.

 20   M. IVETIC : [interprétation] Oui.

 21   M. TIEGER : [interprétation] Merci. Et je demande le versement de ce

 22   document.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

 24   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] 1D04315 sur la liste 65 ter reçoit la

 25   cote P7771.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette pièce est versée au dossier.

 27   M. TIEGER : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, est-ce que vous saviez avant ces


Page 42449

  1   opérations d'offensive que les responsables des Serbes de Bosnie pensaient

  2   faire cela, pensaient procéder de cette façon-là avant le début des

  3   négociations ou avant l'accord qui a été conclu pour ce qui est des

  4   principes ?

  5   R.  Nous espérions que cela n'allait pas se passer, et je n'étais pas

  6   au courant des plans serbes, d'aucun plan. La reconnaissance était

  7   nécessaire pour que la Bosnie soit placée sur la carte des relations

  8   internationales, et nous nous attendions à ce que les trois parties

  9   continuent les négociations.

 10   Q.  Permettez-moi d'attirer votre attention sur plusieurs documents,

 11   si vous le voulez. Le premier document se trouve à l'intercalaire 8 dans

 12   votre classeur, 65 ter 02345, page 21 dans le prétoire électronique, page

 13   25 en serbe, il faut afficher le bas de la page.

 14   Dans votre classeur, Monsieur l'Ambassadeur, cela se trouve à la page

 15   numéro 5 -- non, la page 21. C'est en fait la page qui porte le numéro 21,

 16   mais c'est la cinquième page du document.

 17   R.  Je l'ai trouvée, donc la page 21. Est-ce que c'est où M.

 18   Krajisnik parle.

 19   Q.  Où il est dit :

 20   "Etant donné que j'ai participé aux négociations à Lisbonne,

 21   j'aimerais ajouter quelques remarques". Et j'attire votre attention qu'il

 22   s'agit de la 8e Séance de l'assemblée du peuple serbe qui a eu lieu le 25

 23   février 1992. Krajisnik dit :

 24   "Comme j'étais participant aux négociations à Lisbonne, j'aimerais

 25   ajouter quelques remarques. Aujourd'hui, il faut qu'on discute du premier

 26   point qui est déterminant pour le sort du peuple serbe. Nous, Messieurs,

 27   nous avons deux options : la première option c'est la lutte politique, et

 28   c'est la première étape où il faut qu'on accomplisse le maximum; ou bien


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  1   d'interrompe les négociations et de faire ce qu'on avait déjà fait pendant

  2   des siècles : d'obtenir nos territoires par la force."

  3   Il faut maintenant passer à la page suivante, c'est la page 64 dans

  4   le prétoire électronique dans la version en anglais, et la page 81 dans la

  5   version en serbe.

  6   R.  C'est dans le même document ?

  7   Q.  Oui, il faut juste tourner la page.

  8   R.  Je suis sur la page 21.

  9   Q.  Si vous tournez la page, vous allez voir qu'à la page suivante, il y a

 10   le numéro 64.

 11   R.  Mais je n'ai pas cela.

 12   M. LE GREFFIER [via vidéoconférence] : [interprétation] C'est la dernière

 13   page du document, Monsieur Tieger.

 14   M. TIEGER : [interprétation]

 15   Q.  Je vais lire cela puisqu'il ne s'agit que d'une seule phrase, si mes

 16   collègues me permettent de le faire. Donc, c'est à la page 64 en anglais, à

 17   la page 81 dans la version en serbe. M. Krajisnik dit :

 18   "Messieurs, nous voulons rester dans un même Etat avec la Serbie, le

 19   Monténégro, avec la SAO de Krajina, qui est maintenant l'Etat de la

 20   Krajina, et avec les autres, mais il faut juste tomber d'accord sur la

 21   méthode qu'il faut appliquer pour accomplir cela.

 22   "Si nous ne voulons pas appliquer cette méthode, nous pouvons passer

 23   à l'autre option, ce qui était depuis toujours notre profession, de faire

 24   la guerre."

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Est-ce que M. Krajisnik ou le Dr Karadzic pendant les négociations ont

 27   mis l'accent sur le fait qu'ils étaient en train de réfléchir à la

 28   possibilité que si les résultats des négociations n'étaient pas


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  1   satisfaisants pour eux, de commencer à gagner leurs territoires par la

  2   force ?

  3   R.  Non, ils ne m'ont pas dit cela. Ils essayaient de continuer les

  4   négociations. Ils voulaient -- en fait, ils disaient qu'ils voulaient que

  5   les négociations continuent, et que cela leur importait. Et si je me

  6   souviens bien, c'est les Musulmans qui ne voulaient pas que les

  7   négociations continuent. 

  8   Q.  Merci.

  9   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement de cet extrait.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour autant que je me souvienne. Et, encore

 11   une fois, je n'étais pas présent à l'assemblée de la  Republika Srpska.

 12   M. TIEGER : [interprétation]

 13   Q.  J'ai compris cela, Monsieur.

 14   M. TIEGER : [interprétation] Il faut ajouter cet extrait à la pièce P7005.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc cet extrait doit être téléchargé,

 16   et vous allez nous fournir le numéro 65 ter de cet extrait. Cet extrait va

 17   par la suite être ajouté à la pièce P7005.

 18   M. TIEGER : [interprétation] Oui.

 19   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, j'attire votre attention à présent sur les

 20   remarques faites par M. Krajisnik. Et permettez-moi d'attirer votre

 21   attention également sur les remarques faites par le Dr Karadzic, cela se

 22   trouve à l'intercalaire 5 dans votre classeur, c'est le document 65 ter

 23   2391.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En attendant que cela soit affiché,

 25   Monsieur Tieger, j'aimerais attirer votre attention sur l'une des pièces

 26   qui a été présentée précédemment, c'est le cahier de notes du chef du

 27   cabinet de M. Karadzic. Vous n'avez utilisé qu'une seule page, et dans le

 28   prétoire électronique, on voit qu'il y a 64 pages.


Page 42452

  1   M. TIEGER : [interprétation] Bien sûr. Il ne faut pas que je discute de

  2   cela, puisque vous avez raison, il s'agit que d'un extrait de ce cahier de

  3   notes.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais cela n'a pas été téléchargé dans le

  5   système du prétoire électronique, et le Greffier attend que cela soit

  6   téléchargé puisqu'il ne faut pas que le document tout entier soit versé au

  7   dossier pour le moment.

  8   [La Chambre de première instance et la Greffière concertent]

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous nous donner le numéro du

 10   document.

 11   M. TIEGER : [interprétation] C'est 2391 65 ter, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 13   M. TIEGER : [interprétation] Mais ce n'est pas le document tout entier. Il

 14   s'agit de la page 88 en anglais, ce qui correspond à la page 72 dans la

 15   langue serbe. Cela commence dans la dixième ligne en partant du haut de la

 16   page.

 17   Q.  Il s'agit de l'enregistrement audio de la 39e Séance de la Republika

 18   Srpska. Nous vous avons déjà mentionné cette séance aujourd'hui. Et, encore

 19   une fois, c'est le Dr Karadzic qui prend la parole. Et il dit ce qui suit.

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Où exactement cela se trouve ?

 21   M. TIEGER : [interprétation] C'est au milieu de la page, Monsieur le Juge.

 22   Nous essayons de voir ce qui se trouve dans cette phrase. On voit la

 23   remarque [sic] entre parenthèses, à la fin d'une phrase au milieu de la

 24   page.

 25   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vois cela.

 26   M. TIEGER : [interprétation] Mais il y a --

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais cela se apparaît à deux reprises.

 28   M. TIEGER : [interprétation] Et c'est à peu près dix lignes en partant du


Page 42453

  1   bas de la page en B/C/S. Non -- oui, oui, dix lignes en partant du bas de

  2   page. C'est ce que j'ai dit la première fois. Ou plutôt, du haut de la

  3   page. C'est du côté droit où je pense que je vois le nom Milojevic. C'est à

  4   peu près huit lignes en partant du haut de la page, à peu près.

  5   Q.  C'est où le Dr Karadzic a pris la parole :

  6   "Avant la guerre, le Pr Milojevic, en anticipant ce qui allait se passer

  7   pour ce qui est de la BiH, nous avons fait des plans et nous réfléchissons

  8   à la possibilité de prendre la montagne Zvijezda, et que cela serait la

  9   frontière et que le défilé de la Drina serve de couloirs entre Sarajevo et

 10   Banja Luka pour les connecter et pour qu'on puisse y arriver de Sarajevo à

 11   Banja Luka en une heure et demie, en utilisant une bonne route. C'est un

 12   Etat. C'est une nation bien intégrée. C'était notre plan, beaucoup de temps

 13   avant la guerre."

 14   Donc, Monsieur l'Ambassadeur, est-ce que le Dr Karadzic pendant les

 15   négociations vous a dit que ces plans existaient avant les négociations et

 16   que ces plans prévoyaient la prise de certaines parties du territoire de la

 17   Bosnie-Herzégovine ?

 18   R.  Non.

 19   Q.  Merci.

 20   M. TIEGER : [interprétation] Je demande ce document soit versé au dossier

 21   et que ce document soit ajouté à la pièce --

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] P7769.

 23   M. TIEGER : [interprétation] Oui, P7769.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cet extrait doit d'abord être téléchargé

 25   sous le numéro 65 ter qui va être annoncé et, par la suite, cela sera

 26   ajouté à la pièce P7769.

 27   M. TIEGER : [interprétation] Oui.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger.


Page 42454

  1   M. TIEGER : [interprétation] Je vais maintenant passer à un sujet qui est

  2   un peu différent, et cela demande la présentation d'un certain nombre de

  3   cartes, et je pense qu'il vaut mieux qu'on fasse la pause maintenant.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous nous dire de combien de

  5   temps vous allez avoir encore besoin ?

  6   M. TIEGER : [interprétation] Je vais finir certainement avant la fin du

  7   volet suivant d'audience, à moins que quelque chose d'imprévu n'arrive.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Volet suivant de l'audience.

  9   Maître Ivetic et vous, je pense que vous avez dit que vous --

 10   M. TIEGER : [interprétation] Eh bien, c'est notre exemple que nous avons

 11   travaillé à une cadence plus lente par rapport à celle du premier volet de

 12   l'audience. Je vais essayer de procéder le plus vite possible. 

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous voir avec Me Ivetic de

 14   combien de temps il va avoir besoin pour les questions supplémentaires pour

 15   que nous puissions finir aujourd'hui concernant le témoignage de ce témoin.

 16   Et nous pourrions peut-être travailler un peu plus longtemps. Je vais

 17   demander à Mme la Greffière de voir si c'est possible de continuer encore

 18   15 ou 20 minutes, à moins que M. Mladic insiste à ce qu'on finisse à 14

 19   heures 15.

 20   Monsieur Cutileiro, nous allons faire la pause de 20 minutes maintenant, et

 21   nous allons reprendre à 13 heures 35.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 23   --- L'audience est suspendue à 13 heures 15.

 24   --- L'audience est reprise à 13 heures 36.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que les parties se sont mises

 26   d'accord pour ce qui est de la fin de l'audience aujourd'hui ?

 27   M. TIEGER : [interprétation] Pas tout à fait. Donc, j'ai réduit le nombre

 28   de sujets que je vais aborder, et je pense que je vais avoir besoin de


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  1   moins de temps.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est parce que la Chambre a une

  3   décision à rendre aujourd'hui. Cela prendra quatre à cinq minutes.

  4   Procédons, Monsieur Tieger.

  5   M. TIEGER : [interprétation] Merci.

  6   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, je vais essayer d'être le plus rapide possible.

  7   Au paragraphe 32 de votre déclaration qui a été versée au dossier dans

  8   cette affaire, vous avez dit que le Dr Karadzic a exprimé la volonté pour

  9   rendre les territoires aux Musulmans.

 10   Et cette Chambre de première instance a vu les moyens de preuve où se

 11   trouvaient, entre autres, les notes prises lors de la réunion entre le Dr

 12   Karadzic et le général Mladic en août 1992 - c'est la pièce P354, page 22

 13   en anglais, et page 29 en serbe - pendant cette réunion le Dr Karadzic a

 14   dit au général Mladic :

 15   "La Communauté européenne va accepter la situation factuelle et c'est pour

 16   cela que nous devons faire des concessions sur le plan militaire."

 17   De la même façon, j'ai voulu attirer votre attention sur un autre

 18   document sur lequel je vais vous poser des questions. C'est à

 19   l'intercalaire 33 dans votre classeur. La pièce P7357, page 5 en anglais et

 20   pages 4 et 5 en serbe, cela commence dans la quatrième ligne en partant du

 21   bas de la page 4 en serbe. En anglais, cette partie commence dans la

 22   troisième ligne en partant de la partie qui est au-dessus du chiffre 29 :

 23   "Notre objectif est de créer un Etat. Nous ne savons pas de quelle taille

 24   sera cet Etat, mais cet Etat doit être en une seule pièce. Pour que cela

 25   soit fait, nous devons maintenir cette réalité, le temps nécessaire pour

 26   que le monde accepte cette idée.

 27   "Nous avons créé de nouvelles réalités. Par exemple, Zvornik, était 60:40

 28   pour les Musulmans, mais les Serbes de Zenica sont arrivés, ils ont occupé


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  1   Kozluk, les Musulmans sont partis en Europe et à d'autres pays. Et ensuite,

  2   ce monsieur nous a dit - qui vous donne le droit de demander Zvornik ? Nous

  3   avons dit que toute la Bosnie-Herzégovine était un pays serbe. C'est

  4   l'histoire, mais nous ne nous intéressons pas à cela. Qui vous donne le

  5   droit de demander Zvornik maintenant ? Nous demandons Zvornik sur la base

  6   de notre droit qui provient d'une nouvelle réalité. Cette guerre a fait de

  7   nouvelle réalité, et jamais dans l'histoire il n'est arrivé qu'une guerre

  8   n'ait provoqué de nouvelle réalité. Cette guerre a créé une nouvelle

  9   réalité. Et là-bas se trouvent à présent les Serbes de Zenica. Si vous

 10   voulez donner Zvornik aux Musulmans, vous devez faire la guerre à nouveau

 11   pour que ces Serbes soient chassés à Zenica. Nous demandons Zvornik sur la

 12   base de ce droit-là."

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, pouvez-vous nous

 14   fournir la date de cette séance pour le témoin ? Je ne pense pas que vous

 15   ayez fait cela jusqu'ici.

 16   M. TIEGER : [interprétation] Non. C'est l'année 1994, je pense que c'est le

 17   9, le 10 et le 11 novembre, ainsi que le 23 novembre 1994.

 18   Q.  Donc, lorsque le Dr Karadzic vous a dit, ce que vous avez fait figurer

 19   dans votre déclaration, qu'il était disposé à prendre des territoires, est-

 20   ce qu'il vous a également dit, est-ce qu'il vous a également parlé de son

 21   point de vue concernant la création d'une nouvelle réalité et l'effet de

 22   fait accompli pour ce qui est des territoires qu'il était disposé de

 23   rendre ?

 24   R.  Non.

 25   Q.  Merci, Monsieur l'Ambassadeur.

 26   Ensuite, j'aimerais attirer votre attention sur un certain nombre

 27   d'extraits. D'abord, le premier extrait se trouve à l'intercalaire 39 dans

 28   votre classeur. C'est le document 65 ter 02388, pages 126 et 127; en serbe,


Page 42457

  1   c'est la page 94, et c'est le troisième paragraphe entier.

  2   C'est la 37e Séance de l'assemblée qui a eu lieu le 10 janvier 1994.

  3   Le premier intervenant est M. Maksimovic, nous voyons qu'il est président

  4   du Club des députés, et à la page 126, en bas de la page 126, il dit :

  5   "Ce que j'aimerais voir ici, c'est" --

  6   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Il nous est difficile de suivre cela.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Est-ce qu'on peut agrandir la dernière page.

  8   "Ce que j'aimerais voir ici est l'attitude déterminée selon laquelle les

  9   Musulmans et les Croates ne seront pas permis de retourner sur les zones

 10   qui sont sous notre contrôle. Après cela, nous ne devrions pas rendre les

 11   territoires qui seront sous le contrôle croate. Je pense que nous devrions

 12   être décisifs, déterminés. Sinon, j'ai peur que les gens du Sandzak

 13   occupent et entourent ces zones, puisqu'il y en a beaucoup dans cette

 14   zone."

 15   M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense qu'on n'a plus

 16   de liaison avec l'endroit où se déroule la visioconférence.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Il faut que cela soit rétabli.

 18   M. LE GREFFIER [via vidéoconférence] : [interprétation] Monsieur le

 19   Président, je pense que nous pouvons vous entendre.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais nous ne pouvons vous voir. Nous

 21   pouvons vous entendre.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai le document papier devant moi et je peux

 23   suivre la lecture de M. Tieger.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous ne pouvons toujours pas voir ce qui

 25   se passe dans la pièce où se déroule la visioconférence, mais nous pouvons

 26   entendre les gens qui sont là-bas.

 27   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons attendre pour voir si la


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  1   liaison peut être établie sous peu.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tieger, est-ce que la page

  3   en B/C/S est la bonne page ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, bien, je pense qu'on ne

  5   pourra pas finir aujourd'hui.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous dire quelques mots pour que

  7   nous puissions voir si nous sommes en mesure de vous entendre, et j'espère

  8   que vous pouvez confirmer que vous êtes en mesure de nous entendre et de

  9   nous voir.

 10   M. LE GREFFIER [via vidéoconférence] : [interprétation] Oui, Monsieur le

 11   Président.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, nous pouvons continuer.

 13   M. TIEGER : [interprétation] C'est la page 94 dans la version en serbe. Le

 14   document porte le numéro ERN 02152154.

 15   Q.  Nous avons parlé des remarques faites par M. Maksimovic, et il a

 16   continué à parler, et c'est en bas de la page en anglais :

 17   "Nous devrions avoir une position déterminée pour éviter que les

 18   territoires que nous avions réussi à placer sous notre contrôle soient

 19   rendus par le biais de ces combinaisons au niveau international" --

 20   M. TIEGER : [interprétation] Passons à la page suivante. Nous sommes à la

 21   page 126 en B/C/S. Et il continue :

 22   "Il n'est pas important de voir où les Musulmans vivront et s'ils auront

 23   leur Etat. Ce qui m'intéresse, c'est mon peuple et le territoire où mon

 24   peuple vit. Par conséquent, n'importe quelle idée disant que nous avons

 25   plus de 500 Musulmans dans le cadre de notre pays futur est hors de

 26   question."

 27   Ensuite, à la page 132 en anglais et la page 98 en serbe, le Dr Karadzic

 28   répond :


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  1   "Pour ce qui est des demandes concernant le retour des réfugiés, j'ai déjà

  2   répondu à la question de Vojo. D'après le droit international, nous n'avons

  3   pas le droit d'interdire le retour de réfugiés. En principe, tous les

  4   réfugiés doivent pouvoir retourner, et j'aimerais ajouter une phrase : Cela

  5   peut être un processus à deux directions.

  6   "Les Musulmans et les Croates ont accepté ce processus. Lord Owen m'a

  7   demandé pourquoi j'ai insisté sur ce processus à deux directions, alors que

  8   les Serbes reviennent à Zenica et les Musulmans à Prijedor ? C'est un

  9   processus à deux sens. D'après le droit international, on ne peut pas

 10   interdire le retour de réfugiés."

 11   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, à l'intercalaire 40, la même question a été

 12   soulevée dans le document 65 ter 02418.

 13   M. TIEGER : [interprétation] Et je vais demander le versement de ces

 14   extraits, Monsieur le Président, et ces extraits seront ajoutés à la pièce

 15   P7306.

 16   Dans le document 65 ter 02418, il faut afficher la page 29 en

 17   anglais, et cela correspond au bas de la page 36 en serbe; le document 65

 18   ter 02418, page 29 en anglais.

 19   Au point 5, nous voyons, et il s'agit donc de la partie qui est affichée au

 20   numéro 5, c'est le Dr Karadzic qui parle --

 21   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Nous n'avons pas cela en B/C/S.

 22   M. TIEGER : [interprétation] C'est à la page 36 en B/C/S, en bas de la

 23   page, et cela continue à la page 37.

 24   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Donc, il faut afficher la page

 25   suivante.

 26   M. TIEGER : [interprétation] Voilà, c'est au bas de cette page.

 27   Q.  "Un catalogue complet des droits de l'homme dans lequel nous lisons :

 28   Les libertés telles qu'énumérées dans les instruments internationaux, et


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Page 42461

  1   cetera, y compris le droit des réfugiés et des personnes déplacées à

  2   pouvoir rentrer, nous avons à présent ajouté que cela doit être un

  3   processus global. Ils ne savent pas ce que c'est, donc ils n'ont cessé de

  4   revenir à la première partie de la phrase. C'est notre intention de dire,

  5   eh bien, toute personne a le droit de rentrer à son domicile après la

  6   guerre, s'il s'agit d'un processus global. Qu'est-ce que cela signifie,

  7   processus global ? Cela signifie que les Musulmans de Kozluk pourront

  8   retourner à Kozluk si les Serbes de Kozluk rentrent à Zenica. S'ils ne

  9   souhaitent pas rentrer, alors, il nous faut, et s'ils ne peuvent pas

 10   retourner, alors, il nous faudra une nouvelle guerre pour procéder à des

 11   échanges, et c'est la raison pour laquelle je pense que nous devrions

 12   insister sur ce point. Donc, processus global, global ou aucun processus du

 13   tout.

 14   "Nous pouvons agir et leur dire tout cela face-à-face, ou alors faire

 15   preuve d'un peu de ruses, car nous sommes capables d'un peu de ruses."

 16   Monsieur l'Ambassadeur, est-ce que le Dr Karadzic vous a dit que vous vous

 17   efforciez d'appliquer des méthodes fondées sur la ruse pour vous assurer

 18   que la situation de facto qui avait été créée à Kozluk, par exemple,

 19   demeure en l'état ?

 20   R.  Certainement pas. Mais comment vous l'avez remarqué, ce document date

 21   de 1995, il date d'après la signature des accords de Dayton. Ou d'à peu

 22   près le moment où les accords ont été signés. Non, à moi, il ne m'a rien

 23   dit de ce genre.

 24   Q.  Je vous remercie.

 25   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le versement

 26   de ces extraits au dossier.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 28   M. TIEGER : [interprétation] A ajouter à la pièce 4584.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et vous n'avez pas encore téléchargé

  2   l'extrait, donc vous nous donnerez le numéro 65 ter et nous donnerons

  3   instruction à Mme la Greffière de l'ajouter à la pièce en question.

  4   Veuillez procéder.

  5   M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie.

  6   Q.  Enfin, Monsieur l'Ambassadeur, vous avez parlé pendant votre déposition

  7   aujourd'hui ainsi que dans le paragraphe 33 de votre déclaration écrite des

  8   accords de Dayton en indiquant qu'il y avait eu une comparaison de la carte

  9   de Dayton à la carte annexée à la Déclaration de principes, et vous avez

 10   indiqué que le résultat final était le même. Je souhaitais que nous nous

 11   penchions très rapidement sur deux cartes que nous trouvons à

 12   l'intercalaire 29 de votre classeur et qui constitue le document 65 ter

 13   numéro 17597.

 14   Monsieur l'Ambassadeur, je parle de cette représentation en couleur de la

 15   carte de Dayton qui vous a été montrée dans l'affaire Karadzic et que vous

 16   avez entérinée dans votre déposition dans l'affaire Karadzic. Elle donne

 17   une description visuelle --

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, il est écrit plan

 19   Cutileiro, mars 1992. C'est ce que nous voyons à présent sur nos écrans.

 20   M. TIEGER : [interprétation] Effectivement.

 21   Q.  Vous voyez, Monsieur l'Ambassadeur, que cette carte comporte des champs

 22   rouges et des champs bleus et qu'elle date de mars 1992, et derrière on

 23   voit la carte de Dayton.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois que le témoin hoche du chef.

 25   Donc apparemment, il voit ce que vous décrivez.

 26   M. TIEGER : [interprétation] C'est exact.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Serait-il possible peut-être d'afficher

 28   ces cartes côte à côte sur les écrans ?


Page 42463

  1   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, le numéro sur la liste

  2   65 ter de la carte de Dayton est 17982.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour l'instant, ce n'est pas très utile.

  5   Ah, voyons ce qui va suivre. Bien.

  6   M. TIEGER : [interprétation]

  7   Q.  Eh bien, regardons ces cartes rapidement. Nous voyons que les champs en

  8   vert représentent les zones musulmanes, c'est-à-dire selon le plan

  9   Cutileiro et la carte qui y est annexée, les secteurs qui avaient une

 10   majorité musulmane à l'époque; et sur la carte de Dayton, nous voyons que

 11   les zones correspondant à la Fédération croato-musulmane sont représentées

 12   en rose et que les zones représentant les Serbes sont représentées en

 13   orange.

 14   Alors, si nous nous penchons sur la Bosnie orientale, nous voyons des

 15   champs verts qui représentent donc des secteurs majoritairement peuplés par

 16   des Musulmans, qui ont été remplacés par des champs en orange, à savoir des

 17   zones totalement peuplées par des Serbes, n'est-ce pas ?

 18   R.  Je suis en train de regarder les cartes, oui.

 19   Q.  Donc, des secteurs qui par le passé étaient majoritairement peuplés par

 20   des Musulmans sont désormais des secteurs qui font partie de l'entité

 21   serbe, n'est-ce pas ?

 22   R.  Sur quelle carte ?

 23   Q.  Des secteurs qui étaient majoritairement musulmans et décrits comme

 24   tels sur la carte correspondant au plan Cutileiro de mars 1992 --

 25   R.  Oui.

 26   Q.  -- sont désormais des secteurs serbes dans le cadre des accords de

 27   Dayton, n'est-ce pas ?

 28   R.  Exact.


Page 42464

  1   Q.  Et si nous regardons avec plus de précision les secteurs représentés

  2   sur la carte Cutileiro, et que nous revenons aux remarques du Dr Karadzic

  3   devant la 53e Session de l'assemblée s'agissant des secteurs qui avaient

  4   une importance stratégique et qui devaient être serbes, eh bien, le Dr

  5   Karadzic a fait référence à Bratunac, Srebrenica, Visegrad, Rogatica,

  6   Vlasenica et Zvornik. Et toutes ces municipalités sont des municipalités

  7   qui en 1992 étaient à majorité musulmane et qui sont devenues partie

  8   intégrante de l'entité serbe en vertu des accords de Dayton, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Et ceci était dû au fait -- en tout cas, ceci rendait compte, reflétait

 11   le fait que la majorité démographique musulmane n'était plus présente dans

 12   ces secteurs, n'est-ce pas ? Que les personnes qui constituaient

 13   anciennement la majorité démographique avaient été déplacées ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Et puis, l'Ambassadeur --

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais simplement -- je pense qu'un

 17   léger problème est dû au fait que plusieurs orateurs parlent en même temps

 18   et il est possible que vous ayez des problèmes à l'audition, n'est-ce pas ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, tout à fait, je suis d'accord.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Merci.

 21   Veuillez procéder, Monsieur Tieger.

 22   M. TIEGER : [interprétation]

 23   Q.  Et puis, il y avait une différence entre les deux cartes, donc cette

 24   différence reflète la destruction de centaines de groupes humains et le

 25   déplacement de centaines et de milliers de personnes ainsi que la mort de

 26   plusieurs milliers de personnes, n'est-ce pas ?

 27   R.  Il est très difficile de comparer ce que vous appelez la carte du plan

 28   Cutileiro, qui était un plan préliminaire et qui était une carte liée à des


Page 42465

  1   principes faisant encore l'objet de négociations et l'autre carte qui a été

  2   établie plus de trois ans plus tard après une guerre particulièrement

  3   violente entre les communautés, et il faudrait, pour ce faire, se pencher

  4   sur chaque zone, zone après zone, afin de voir comment les choses avaient

  5   évoluées. Donc, je pense qu'il est impossible de comparer exactement ces

  6   deux cartes. C'est tout.

  7   Q.  Je ne pensais pas qu'elles étaient comparables non plus, Monsieur, mais

  8   je répondrais simplement à un argument et, faute de temps, je vous rappelle

  9   que c'est vous qui avez donné cet argument, à savoir que la situation

 10   finale était la même.

 11   M. TIEGER : [interprétation] Dans l'intérêt du temps, je mets un terme à

 12   mon interrogatoire.

 13   M. IVETIC : [interprétation] Est-ce que vous demandez le versement au

 14   dossier de ces deux cartes ?

 15   M. TIEGER : [interprétation] Oui.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Deux cartes, Madame la Greffière.

 17   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 65 ter numéro 17597 devient

 18   la pièce P7772.

 19   Et le document 65 ter numéro 17892 devient la pièce P7773.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les deux pièces sont versées au dossier

 21   en tant qu'éléments de preuve.

 22   Avant que nous ne poursuivions, Monsieur le Juge Moloto a quelque chose à

 23   dire.

 24   [La Chambre de première instance se concerte]

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Tieger, vous avez indiqué que

 26   le document numéro 02388, vous souhaitiez qu'il soit ajouté à la pièce

 27   P3076. Est-ce que vous abandonnez cette requête ou est-ce que vous la

 28   maintenez ?


Page 42466

  1   M. TIEGER : [interprétation] Je n'abonne pas ma demande de versement au

  2   dossier, Monsieur le Juge.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais vous aviez dit que vous

  4   souhaitiez que ce document soit ajouté à la pièce P3076.

  5   M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi, vous avez raison. Ma requête

  6   demeure, Monsieur le Juge. Mais nous devons encore télécharger ce document,

  7   cet extrait.

  8   [La Chambre de première instance se concerte]

  9   M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Maître Ivetic, j'ai remarqué que

 11   par rapport au paragraphe 28, le document 65 ter numéro 1D02721, qui figure

 12   sur notre liste de pièces connexes constitue la pièce P7767 désormais. Et

 13   ayant entendu le témoin au sujet d'un certain nombre d'extraits de cette

 14   lettre qui lui ont été lus, est-ce que vous envisageriez de demander le

 15   versement au dossier de ce document, non pas en tant que pièce connexe,

 16   mais si vous le souhaitez à présent, dans ce prétoire en tant que pièce à

 17   conviction ?

 18   M. IVETIC : [interprétation] Oui, je vais le faire maintenant.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est là qu'on trouve une référence aux

 20   promesses auxquelles le témoin avait répondu.

 21   Madame la Greffière, pour le document 65 ter 1D02721, quel est le numéro

 22   qui a été assigné, un numéro en D ?

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] D1372, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D1372 est versée au dossier à

 25   part entière.

 26   Je vous prie de procéder, Maître Ivetic.

 27   M. IVETIC : [interprétation] D'accord.

 28   Puisque nous parlons des pièces à conviction, je peux vous donner des


Page 42467

  1   informations plus actuelles en vous annonçant que nous retirons deux pièces

  2   connexes, à savoir le document 1D04316 et le document 1D04309. Car, après

  3   les avoir pris en considération en même temps que les pièces à conviction

  4   et sous un autre angle, nous avons maintenu dix pièces connexes, et je

  5   demande le versement au dossier de ces dix pièces connexes sous le contrôle

  6   de la Chambre, Monsieur le Président, donc pièces connexes aux déclarations

  7   du témoin.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Nous allons répondre à cette

  9   requête. Nous avons établi une liste.

 10   M. IVETIC : [interprétation] Je sais. Je sais.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et les numéros devraient être assignés

 12   pendant que nous en discutons.

 13   Veuillez procéder.

 14   M. IVETIC : [interprétation] Je vous remercie.

 15   Nouvel interrogatoire par M. Ivetic :

 16   Q.  [interprétation] Monsieur l'Ambassadeur, je serai très bref et nous

 17   devrions en finir aujourd'hui.

 18   J'aimerais demander l'affichage --

 19   R.  Je vous remercie.

 20   M. IVETIC : [interprétation] Je demande l'affichage des pièces qui vont

 21   jusqu'à la pièce P4580. C'était un document qui aurait dû se trouver dans

 22   le classeur du Procureur puisqu'il a été utilisé aujourd'hui, et nous

 23   aimerions examiner la page 14 en anglais, qui correspond à la page 18 en

 24   serbe pour vous rafraîchir éventuellement la mémoire, Monsieur.

 25   M. TIEGER : [interprétation] L'intégralité des documents relatifs aux

 26   sessions de l'assemblée n'ont pas été transportés car la liaison vidéo ne

 27   le permettait pas, donc il est possible que cet extrait particulier que

 28   vous avez à l'esprit se trouve dans le classeur que je souhaitais vous


Page 42468

  1   montrer maintenant.

  2   M. IVETIC : [interprétation] J'apprécie, mais ce sont les lignes qui

  3   suivent la citation qui a déjà été lue qui m'intéresse. Puis-je en donner

  4   lecture maintenant ?

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous pouvez les lire, lisez-les.

  6   M. IVETIC : [interprétation]

  7   Q.  Eh bien, je vais les lire à votre intention, Monsieur.

  8   R.  Oui, je vous en prie.

  9   Q.  Après l'extrait dont M. Tieger a donné lecture, M. Karadzic poursuit

 10   son propos en disant ce qui suit :

 11   "Je me suis aussi rendu compte que le SDA avait été informé du fait qu'ils

 12   avaient été défaits et que s'ils acceptaient l'idée de trois Etats

 13   nationaux, ils pourraient essayer de s'en sortir mais qu'en dehors d'un

 14   grand succès sur le plan militaire, ce serait impossible d'une autre façon.

 15   "De nombreuses questions demeurent non résolues, telles que les questions

 16   économiques et autres. Nous avons tout commencé, mais nous n'avons rien

 17   terminé. Si nous travaillions très dur et conservons notre force et notre

 18   stabilité, j'espère que nous pourrons nous voir octroyer un certain nombre

 19   de fonctions au sein des entités nationales sans que rien ne soit admis en

 20   tant que définitif tant que nous n'aurons pas atteint notre objectif. C'est

 21   la raison pour laquelle vos propositions sont tout à fait bienvenues.

 22   "Si je puis dire ceci, j'ai été plus satisfait à l'issue de ces

 23   pourparlers que je ne l'ai été après les réunions de Bruxelles parce que

 24   j'ai ressenti qu'ils comprenaient que cette assemblée souhaitait des

 25   décisions définitives, ce qui n'avait pas été le cas de la Communauté

 26   européenne."

 27   Et il dit : "Telles sont mes impressions."

 28   Est-ce que ceci contredit ce qui figurait dans la Déclaration de principes,


Page 42469

  1   à savoir qu'il y avait encore du travail à faire sur le plan économique,

  2   les questions militaires, et cetera ?

  3   R.  C'est parfaitement acceptable, à mon avis. Ceci implique que nous avons

  4   encore du travail à faire et pas mal d'autres questions à examiner que ce

  5   qu'il a déjà, qui constitue la base.

  6   Q.  On vous a interrogé à de nombreuses reprises aujourd'hui au sujet

  7   d'extraits selon lesquels différents responsables politiques serbes avaient

  8   déclaré un certain nombre de choses à diverses réunions politiques.

  9   J'aimerais que nous nous penchions sur un autre document qui figure dans le

 10   classeur de l'Accusation. Ça devrait être le dernier des classeurs, numéro

 11   65 ter 33529, et c'est la transcription de votre déposition dans l'affaire

 12   Karadzic.

 13   M. TIEGER : [interprétation] Cela devrait être le premier intercalaire du

 14   classeur.

 15   M. IVETIC : [interprétation] Toutes mes excuses. Donc, premier intercalaire

 16   du classeur. La page qui m'intéresse, c'est la page 18 qui concerne la page

 17   33 958 du compte rendu d'audience de l'affaire Karadzic qui va apparaître à

 18   l'écran en haut à droite, je crois -- enfin à droite ou à gauche. Mais en

 19   haut. Voilà

 20   Q.  Est-ce que vous voyez cette page, Monsieur ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  J'aimerais appeler votre attention -- enfin la question et la réponse

 23   figurent aux lignes 2 à 7 de cette page. Et la question était :

 24   "Et c'est une destruction de la Bosnie-Herzégovine en tant qu'Etat qui ne

 25   correspondait pas à l'accord établi sur les principes, n'est-ce pas ?

 26   "Réponse : On ne peut pas prendre des petits bouts de discours politiques

 27   durant une réunion de l'assemblée en passant d'un côté à l'autre en

 28   permanence. Quand je vois cela, je ne suis pas surpris. Je pense que les


Page 42470

  1   trois parties avaient un discours qui compliquait l'acceptation d'une base,

  2   si vous voulez."

  3   Et puis ils ont été interrompus.

  4   La première question qui suit est la suivante : est-ce que vous

  5   maintenez cette partie de ce que vous avez dit dans l'affaire Karadzic ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Et aujourd'hui, Monsieur l'Ambassadeur, je vous demanderais de bien

  8   vouloir - si je vous donne la possibilité de terminer votre réponse puisque

  9   vous avez été interrompu dans l'affaire Karadzic - de bien vouloir terminer

 10   cette réponse, si vous le souhaitez.

 11   R.  Eh bien, les trois parties devaient négocier d'un côté avec nous, les

 12   négociateurs, à savoir Lord Carrington, d'autres personnes, et moi-même, et

 13   présenter ces pourparlers à leurs partisans. Et parfois au cours des

 14   négociations, cela a dû leur créer des difficultés. Nous avons passé un

 15   certain nombre d'éléments en revue aujourd'hui comme, par exemple, le fait

 16   que le président Izetbegovic disait à son peuple une chose et, qu'en même

 17   temps il me disait que je devrais prendre cela en compte, que c'était ce

 18   qu'il m'avait dit qui importait. Et, mutatis mutandis, la même chose à peu

 19   près se passait du côté serbe. Je soupçonne que le négociateur croate avait

 20   le même genre de difficulté avec sa base, en particulier en Herzégovine

 21   occidentale.

 22   Donc, je trouve qu'il est parfaitement normal que ce genre de

 23   discussions qui a donné lieu aux lectures faites aujourd'hui ou à ce qui a

 24   été entendu aujourd'hui, et qui venait de l'assemblée serbe ait eu lieu, et

 25   je suis sûr que ces discussions ont eu lieu également au sein des organes

 26   équivalents qui discutaient des positions des négociateurs également.

 27   Le Dr Karadzic m'a dit qu'il pouvait donner son accord de principe

 28   mais qu'il lui fallait voir ce qu'il en était auprès de son peuple, et j'ai


Page 42471

  1   pensé qu'il essayait de gagner du temps. Mais, au fur et à mesure, je me

  2   suis rendu qu'il l'a effectivement fait, il s'est adressé à son peuple, et

  3   parfois ce que son peuple lui a dit ne correspondait pas à ce qui était

  4   nécessaire pour les internationaux dans notre affaire, la communauté

  5   internationale, et éventuellement les propos tenus au sein de la conférence

  6   Vance-Owen avec les Nations Unies et les communautés européennes.

  7   Donc, c'est tout ce que j'ai à dire. Je ne suis pas étonné qu'il y

  8   ait eu des contradictions dans les propos tenus devant le Parlement.

  9   Q.  Ma dernière question concerne la page 23 de ce même document, qui

 10   correspond à la page 33 963 du compte rendu de l'affaire Karadzic, et

 11   j'aimerais que nous nous penchions sur les lignes 8 à 14 de cette page.

 12   Selon ce qui est consigné par écrit ici, vous avez répondu -- ceci renvoie

 13   au livre publié par le chef du cabinet du Pr Karadzic. Et vous avez répondu

 14   en disant :

 15   "Ni Henry Darwin ni moi-même aurions accepté un nettoyage ethnique,

 16   que ce soit du côté serbe ou que ce soit du côté croate ou de quel que côté

 17   que ce soit. L'idée, c'est que cela ne devait pas être effectué, et pour

 18   nous, à la conférence, je crois que c'est le Pr Karadzic lui-même qui était

 19   d'accord pour dire que si nous trouvions une solution définitive à cette

 20   question, il y a des personnes qui auraient été chassées des endroits où

 21   ils habitaient et ces personnes reviendraient."

 22   Est-ce que vous maintenez cette partie-là de votre déposition dans

 23   l'affaire Karadzic, Monsieur ?

 24   R.  Eh bien, c'est ce que j'ai dit à l'époque, et je faisais

 25   référence à ce que je savais et ce qui se passait en 1992, et

 26   effectivement, je maintiens ce que j'ai dit.

 27   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, je vous remercie vivement pour votre

 28   temps, et pour avoir tenu compte de mes questions et d'y avoir répondu.


Page 42472

  1   M. IVETIC : [interprétation] J'en ai terminé.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant d'inviter M. Tieger ou demander à

  3   M. Tieger s'il a d'autres questions à poser, moi, j'ai une question à vous

  4   poser, Monsieur Cutileiro.

  5   Si je vous ai bien compris, vous estimez que si toutes les parties avaient

  6   maintenu cet accord de principes, de nombreuses vies auraient été sauvées.

  7   Est-ce que je vous ai bien compris ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Il faut comprendre comment les choses se

  9   sont passées alors. Nous étions d'accord sur les principes, il aurait fallu

 10   négocier sur la base de ces principes, et ensuite des milliers de vies

 11   auraient été sauvées.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, la question suivante que j'ai à

 13   vous poser : comment pensiez-vous que les vies auraient pu être sauvées,

 14   cela était-il fondé sur vos attentes, autrement dit que les parties

 15   devaient mettre en œuvre de façon loyale ce sur quoi ils s'étaient mis

 16   d'accord, en tout cas, en principe.

 17   R.  Certainement, parce que sinon il eut été tout à fait inutile de

 18   négocier avec qui que ce soit, si les parties en présence ne font pas ce

 19   qu'elles disent qu'elles feront, cela est frustrant.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Dans votre déposition, vous nous

 21   dites que si on avait pu arrêter la guerre, les vies auraient pu être

 22   sauvées, donc c'étaient des attentes positives de votre part. A ce moment-

 23   là, la guerre aurait cessé ou la guerre n'aurait même pas commencé si les

 24   principes généraux auraient été appliqués.

 25   Lorsque vous parlez de pertes de vies humaines, est-ce que vous

 26   pensez aux victimes de la guerre lorsque vous dites cela, lorsque vous

 27   parlez de vos attentes, est-ce que vous englobez dans cela d'éventuelles

 28   victimes de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité ?


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, dans cette guerre, comme vous le

  2   savez, Monsieur le Président, là où vous êtes assis où vous êtes, il y a eu

  3   de nombreuses violations des droits de l'homme et des lois de la guerre, et

  4   je ne pense pas -- à mon sens, je n'ai pas la différence entre les deux,

  5   autrement dit, des gens qui auraient été tués légalement et les gens qui

  6   auraient été tués illégalement. Ce que je pense, c'est si les négociations

  7   avaient pu se poursuivre en respectant les principes, il y aurait eu moins

  8   de guerre, et donc moins de pratiques illicites pendant la guerre.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous d'autres questions à poser,

 10   Monsieur Tieger ?

 11   M. TIEGER : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci conclut votre déposition à moins

 13   que la Défense ait des questions de suivi à poser par rapport aux questions

 14   posées par les Juges de la Chambre.

 15   M. IVETIC : [interprétation] Rien du tout.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci met un terme à votre déposition. Je

 17   vous remercie beaucoup d'être venu à l'endroit où s'est déroulée la

 18   visioconférence. Je vous remercie d'avoir répondu aux questions pendant un

 19   certain nombre d'heures, questions qui vous ont été posées par les parties,

 20   par rapport aux questions qui vous ont été posées par les Juges de la

 21   Chambre. Je vous souhaite un bon voyage de retour.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur. Je souhaite vous remercier

 23   plus particulièrement parce que je crois que sans votre façon de gérer les

 24   débats, nous n'aurions pas pu terminer à temps.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est bien la première fois qu'un témoin

 26   fait des éloges de ma personne sur cette question, et je me mets à rougir

 27   un petit peu. Je crois que toutes les personnes dans ce prétoire sont

 28   satisfaites du fait que nous pouvons conclure votre déposition aujourd'hui.


Page 42474

  1   Eh bien, la façon dont je dirige les débats est une chose, mais cela se

  2   fait avec les parties en présence. Si cela ne vous ennuie pas, je souhaite

  3   également faire l'éloge des parties, si cela ne vous ennuie pas.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Pas du tout.

  5   M. IVETIC : [interprétation] Nous devrions également vérifier nos hôtes qui

  6   se trouvent aussi dans la salle de la visioconférence.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaite également vous remercier la

  8   représentante du gouvernement portugais, et si j'ai bien compris, le

  9   gouvernement portugais a donné son soutien et a facilité cette

 10   visioconférence. Nous apprécions cela beaucoup. Les Juges de ce Tribunal

 11   apprécient beaucoup, ainsi que ce Tribunal. Je vous remercie.

 12   Nous pouvons maintenant déconnecter la visioconférence.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 14   [Fin de la déposition du témoin par vidéoconférence]

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Ivetic pour

 16   votre concours. Je dois dire que je n'étais pas tout à fait au courant de

 17   la façon dont la visioconférence avait été organisée, et je vous remercie

 18   beaucoup de m'avoir rappelé cela.

 19   Il y a une décision que je souhaite lire avant que nous ne levions

 20   l'audience, et étant donné que j'ai reçu des informations comme quoi je

 21   pouvais dépasser le temps d'audience de 20 minutes, j'abuse de ce temps

 22   maintenant. Voici la décision, c'est une décision qui porte sur l'expertise

 23   de Dusan Pavlovic.

 24   Le 5 octobre 2015, la Défense a déposé une notification de

 25   communication du rapport d'expert de Dusan Pavlovic en vertu de l'article

 26   94 bis du Règlement de procédure et de preuve.

 27   Le 2 novembre, l'Accusation a déposé sa notification en vertu de

 28   l'article 94 bis (B) du Règlement dans lequel elle conteste le statut de


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  1   Pavlovic en qualité d'expert s'agissant de retrouver les traces de

  2   procédures aux exhumations et aux identifications des victimes de guerre.

  3   L'Accusation fait valoir que le curriculum vitae du témoin ne permet

  4   pas d'étayer sa qualification en tant qu'expert et que son rapport ne fait

  5   aucunement état de l'expertise qu'il fait valoir. L'Accusation fait valoir,

  6   en outre, que si la Chambre qualifie le témoin d'expert, elle n'accepterait

  7   pas les conclusions qu'il tire dans son rapport et, par conséquent,

  8   souhaiterait le contre-interroger.

  9   Le 13 novembre, la Défense a déposé son écriture en fournissant d'autres

 10   détails sur les travaux du témoin et son expérience dans le domaine qu'il

 11   revendique comme étant son domaine d'expertise, tout en ne s'opposant pas à

 12   la demande de l'Accusation pour contre-interroger le témoin.

 13   Pour ce qui est du droit applicable concernant les dépositions d'expert, la

 14   Chambre rappelle et renvoie à sa décision du 19 octobre 2012 concernant

 15   Richard Butler.

 16   Pour ce qui est de l'argument de l'Accusation, à savoir que le témoin ne

 17   peut être qualifié d'expert dans le domaine du fait de retrouver les

 18   traces, de procéder aux exhumations et l'identification des victimes de

 19   guerre, compte tenu du raisonnement de la Chambre dans sa décision rendu eu

 20   égard à Milan Tutoric et son expertise le 22 mai 2015, la Chambre de

 21   première instance estime que la situation actuelle est différente de la

 22   situation de la soi-disant expertise de Milan Tutoric.

 23   Le curriculum vitae de Pavlovic ainsi que les arguments de la Défense

 24   montrent qu'il a de l'expérience sur le terrain dans le domaine des traces,

 25   de l'exhumation et l'identification des victimes de guerre. Pavlovic a

 26   travaillé, en particulier, pendant cinq ans à la tête des services chargés

 27   de retracer les victimes de guerre, les exhumations, et les identifications

 28   à l'Institut des personnes portées disparues en Bosnie-Herzégovine dans le


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  1   secteur du département de l'archivage central, et actuellement il travaille

  2   comme collaborateur expérimenté dans le domaine des exhumations, des

  3   traitements ou des analyses médico-légales et l'identification et la

  4   compilation de fichiers, il travaille sur le terrain sur les personnes

  5   portées disparues pour le centre gouvernemental en Republika Srpska chargé

  6   de procéder aux recherches de personnes pendant la guerre, les crimes de

  7   guerre, et de retrouver les personnes portées disparues.

  8   Il s'est occupé de documentations et d'analyses de listes de

  9   personnes portées disparues autour de Srebrenica en juillet 1995; il a

 10   proposé des plans d'exhumations et il a participé aux visites des fosses,

 11   aux exhumations, d'analyses médico-légales et des restes humains; il a

 12   rédigé les rapports pour les personnes identifiées et exhumées.

 13   Il n'y a pas eu de preuve manifeste de l'expertise de Pavlovic dans

 14   les arguments de la Défense. Néanmoins, cette information est suffisante

 15   qui permet à la Chambre d'accepter qu'il dispose d'une connaissance de

 16   spécialiste et d'expertise en matière d'exhumations, de traces, et

 17   d'identification des victimes de guerre et qu'une telle connaissance et

 18   expertise peut être utile aux Juges de la Chambre s'agissant d'apprécier

 19   les éléments de preuve présentés par les deux parties.

 20   Compte tenu de ce qui précède, la Chambre de première instance

 21   décide, en vertu de l'article 94 bis, que Pavlovic peut être cité à la

 22   barre pour témoigner en tant que témoin expert dans le domaine des traces,

 23   exhumations, et d'identification des victimes de guerre, et qu'il devra se

 24   rendre disponible pour le contre-interrogatoire.

 25   S'agissant des arguments portant sur la méthodologie appliquée dans

 26   le rapport de Pavlovic, la Chambre de première instance estime que ces

 27   questions-là doivent être abordées lors de l'interrogatoire du témoin. Par

 28   conséquent, la Chambre de première instance renvoie sa décision sur le


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  1   versement au dossier du rapport jusqu'au moment de sa déposition.

  2   La Chambre de première instance porte à l'attention de la Défense à

  3   une observation complémentaire concernant le rapport de Pavlovic.

  4   Dans son rapport, Pavlovic comprend un certain nombre d'avis

  5   d'experts qui semblent ne pas relever de son domaine d'expertise. De

  6   nombreuses pages de son rapport se concentrent sur ou portent sur la

  7   situation politique et militaire à Srebrenica entre 1993 et 1995. En outre,

  8   le témoin propose des conclusions qui portent sur le nettoyage ethnique des

  9   Serbes et du génocide qui, encore une fois, semble ne pas relever de son

 10   domaine d'expertise. En outre, le témoin apprécie les documents, notamment

 11   des déclarations et des déclarations de témoins. Le rapport ne précise pas

 12   avec exactitude quels sont les documents qu'a utilisés Pavlovic et on ne

 13   sait pas si ces documents ont été versés au dossier. Sur cette question-là,

 14   le témoin tire des conclusions qui ne relèvent pas de son domaine

 15   d'expertise.

 16   La Chambre insiste pour dire qu'elle autorise Pavlovic à être cité à la

 17   barre en tant qu'expert pour parler des traces, exhumations, et

 18   identification des victimes de guerre, mais non pas en tant qu'expert sur

 19   les questions militaires, sur les questions de droit, sur les questions

 20   militaires, ou tout autre domaine pour lequel il n'est pas qualifié. La

 21   Chambre de première instance s'attend donc à ce que les parties concentrent

 22   leur interrogatoire du témoin sur les aspects du rapport qui porte sur le

 23   domaine d'expertise du témoin.

 24   Ceci conclut la décision de la Chambre de première instance.

 25   Avant de lever l'audience, je souhaite vivement remercier toutes les

 26   parties qui nous assistent, et j'aurais dû également faire l'éloge de vous,

 27   toutes les personnes qui nous assistent et qui nous ont permis de conclure

 28   la déposition de M. Cutileiro. Et ceci est fort apprécié par les Juges de


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  1   la Chambre.

  2   Nous levons l'audience pour aujourd'hui, nous reprendrons demain matin,

  3   jeudi, 10 décembre, à 9 heures 30, dans le même prétoire.

  4   --- L'audience est levée à 14 heures 28 et reprendra le jeudi, 10 décembre

  5   2015, à 9 heures 30.

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