Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi, 12 décembre 2016

  2   [Plaidoiries]

  3   [Audience publique]

  4   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 33.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous dans le

  7   prétoire et à l'extérieur du prétoire.

  8   Monsieur le Greffier d'audience, s'il vous plaît, citez le numéro de

  9   l'affaire.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci. Bonjour, Monsieur le Président,

 11   Messieurs les Juges. C'est l'affaire IT-09-92-T, le Procureur contre Ratko

 12   Mladic.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 14   Il y a une question à soulever concernant le point qui a été abordé le mois

 15   dernier -- ou peut-être même quelques années auparavant, et j'aimerais

 16   qu'on parle de cela avant de continuer à présenter les plaidoiries de la

 17   Défense. Il s'agit du versement au dossier de la pièce D1086.

 18   Le 30 juin 2015, pendant le témoignage de Bruno Franjic, la Chambre de

 19   première instance a réservé une cote à la pièce D1086 pour une photographie

 20   qui a été montrée au témoin mais qui n'a toujours pas été téléchargée dans

 21   le prétoire électronique. Cela est consigné au compte rendu à la page

 22   36 500. La Défense a fait télécharger cette photographie et a demandé son

 23   versement au dossier le 15 [comme interprété] décembre 2016, et cela s'est

 24   passé après le rappel de la part du Greffe.

 25   Le 7 décembre 2016, l'Accusation a informé la Défense et la Chambre qu'elle

 26   ne soulève pas d'objection au versement de cette photographie.

 27   La Chambre rappelle que cette photographie a été montrée au témoin pendant

 28   la présentation des moyens à décharge de la Défense. Bien que la

 


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  1   présentation des moyens à décharge soit terminée, vu qu'il n'y a pas

  2   d'objection au versement de ce document et vu les circonstances spécifiques

  3   concernant ce document, la Chambre va faire verser à titre exceptionnel ce

  4   document à ce stade de la procédure.

  5   Et la Chambre doit assigner une cote à cette pièce à conviction, c'est la

  6   cote D1086, conformément à l'article 65 ter, il s'agit du document qui

  7   porte le numéro 1D05459a. Maintenant, c'est versé au dossier.

  8   Maître Ivetic, si vous êtes prêt à poursuivre vos plaidoiries, vous pouvez

  9   prendre la parole.

 10   M. IVETIC : [interprétation] Avant de poursuivre, j'aimerais parler de deux

 11   corrections concernant deux citations de la semaine dernière puisque vous

 12   avez posé des questions à moi vendredi dernier. Il s'agissait des pertes

 13   essuyées par la colonne et le témoignage de M. Butler. C'est aux

 14   paragraphes 2 738 jusqu'à 2 751 de notre mémoire en clôture, et non pas au

 15   paragraphe 2 264, ce que j'ai donc dit de façon erronée dans le prétoire.

 16   De même, pour ce qui est de la deuxième lettre de Mladic où il s'était

 17   plaint des activités d'Arkan à Sanski Most du mois de septembre et

 18   d'octobre 1995, elle devrait avoir une cote P3095, et non pas D929, ce que

 19   j'ai lu aux fins du compte rendu. Et vous, Monsieur le Président, vous avez

 20   eu raison de dire qu'il s'agit d'une déclaration de témoin.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, bien sûr, pendant les

 22   plaidoiries, nous ne pouvons pas vérifier toutes les sources, et vu qu'il y

 23   a un petit nombre de sources vérifiées par moi, et vu qu'il y avait

 24   beaucoup d'erreurs qui ont été commises également par l'Accusation, je vous

 25   prie de nous fournir des références exactes. Puisque maintenant il est

 26   facile de les corriger, mais plus tard, pour ce qui est de la communication

 27   avec les parties au procès après les réquisitoires et les plaidoiries,

 28   c'est quelque chose qui sera difficile.


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  1   M. IVETIC : [interprétation] Je comprends cela.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder.

  3   M. IVETIC : [interprétation] Je vais donc poursuivre avec mes arguments.

  4   Monsieur le Président, on ne peut pas établir qu'il ait eu un scénario de

  5   crime ou un plan coordonné en vue de commettre le génocide dans les

  6   municipalités, comme c'est présenté dans la section concernant les

  7   municipalités, puisque les événements se sont passés dans le contexte des

  8   circonstances locales et des crimes ont été commis par des auteurs

  9   différents. Le niveau de violence a été affecté par le degré de confiance

 10   qui existait au niveau local entre les différentes communautés. Pour ce qui

 11   est de Prijedor, les souvenirs de la Deuxième Guerre mondiale étaient

 12   toujours gravés à l'esprit de la plupart des résidents serbes de cette

 13   partie de la Bosnie, et pour ce qui est de ce degré de confiance entre les

 14   différents groupes ethniques, il était limité; nous fournissons des

 15   exemples, ce sont les pièces D859 et D62. Pourtant, dans d'autres endroits,

 16   tel que Srbac, la situation est restée calme, bien que les forces du groupe

 17   ethnique croate aient pilonné Srbac à plusieurs occasions en 1992; nous

 18   avons la déposition du Témoin Milincic aux pages du compte rendu 28 350 à

 19   28 352. Le général Mladic a déployé tous les efforts pour apaiser la

 20   situation et pour réprimer la montée de violence ou l'éclatement du

 21   conflit. Et cela est confirmé, par exemple, par le fait qu'il était

 22   absolument pour une approche résultant en une solution pacifique comme ceci

 23   a été adopté par Milincic à Srbac, et Mladic a répété cela lors d'une

 24   réunion où 500 personnes étaient présentes. C'est à nouveau le Témoin

 25   Milincic, les pages du compte rendu 28 350 jusqu'à 352, et également dans

 26   la pièce D783, paragraphes 15, 24 et 25.

 27   L'Accusation soutient en outre que des membres éminents des communautés

 28   musulmanes et croates de Bosnie ont été pris pour cible, c'est au


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  1   paragraphe 355 du mémoire en clôture de l'Accusation. N'est-il pas logique

  2   en temps de guerre que des individus du parti opposé, tels commandants ou

  3   hauts responsables de la communauté qui déclenchent des combats, soient

  4   arrêtés. L'intention de Mladic n'était pas l'intention de tuer ces gens

  5   mais de les arrêter, et c'était légitime. En d'autres termes, les

  6   combattants ennemis ont été emprisonnés de façon légitime. Il ne s'agit pas

  7   d'un crime qui aurait été basé sur leur appartenance ethnique, mais c'est

  8   une réaction aux agissements de ces combattants qui menaçaient la paix et

  9   la sécurité. Donc, ces meurtres n'ont pas été commis avec l'intention de

 10   tuer et n'ont certainement pas été ordonnés ou planifiés par Mladic. Mladic

 11   n'a pas été toujours informé de cela et ne pouvait pas toujours prendre des

 12   mesures contre ces auteurs. Le fait que les non-Serbes aient été intégrés

 13   dans les rangs de la VRS dans différentes municipalités et dans Prijedor

 14   montre qu'il n'y avait pas d'intention discriminatoire, encore moins

 15   l'intention de détruire des non-Serbes, en partie ou en tout. Ce n'était

 16   pas à l'esprit de l'accusé. Exemples : P7406, paragraphe 2; et ensuite,

 17   D767, 768, 769, entre autres.

 18   De plus, la Chambre d'appel dans l'affaire Tolimir a confirmé que la

 19   prise pour cible de façon sélective des dirigeants d'un groupe protégé peut

 20   constituer l'acte de génocide seulement si ces dirigeants sont choisis à

 21   cause de l'impact que leur disparition aurait eu sur le groupe en tant que

 22   tel. C'est le paragraphe 265 de cet arrêt dans l'affaire Tolimir.

 23   Dans cette affaire, il n'y a pas d'éléments de preuve montrant que

 24   les détenus qui ont été mis en détention de façon légitime ont eu un impact

 25   significatif sur la survie physique des Musulmans et des Croates de Bosnie.

 26   Dans son réquisitoire, l'Accusation prétend que la Défense fait abstraction

 27   de la jurisprudence concernant la prise pour cible des dirigeants des

 28   groupes; mais l'Accusation présente de façon erronée la position de la


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  1   Défense puisque nous ne contestons pas le droit. Au contraire, nous disons

  2   que dans ces exemples concrets qui ont été cités, comme c'est le cas de

  3   Prijedor, les circonstances factuelles ne montrent pas ce type de prise

  4   pour cible des gens avec l'intention spécifique de détruire, et cette

  5   intention est requise pour ce qui est de la jurisprudence citée par

  6   l'Accusation.

  7   L'Accusation a dit que le départ des gens des municipalités corrobore

  8   l'affirmation selon laquelle il s'agissait du transfert forcé et du

  9   génocide. Pourtant, lorsqu'on se penche sur les éléments de preuve dans

 10   leur intégralité, on voit que des gens choisissaient de quitter les

 11   différentes municipalités pour diverses raisons - comme c'était indiqué par

 12   Me Lukic la semaine dernière - ces raisons pour partir n'émanaient pas du

 13   tout de l'existence d'une entreprise criminelle commune ou des actes de

 14   l'accusé ou de la VRS. L'Accusation commence par une présupposition selon

 15   laquelle des gens partaient puisqu'il existait une entreprise criminelle

 16   commune et à cause des actes de la VRS. Et c'est pour cela que l'Accusation

 17   voit un scénario dans ces actes, puisque l'Accusation a fermé les yeux sur

 18   d'autres interprétations possibles. Les éléments de preuve concernant les

 19   municipalités ne montent pas que la VRS procédait au transfert forcé, et

 20   c'est la seule conclusion possible. Donc, l'allégation concernant le

 21   transfert forcé qui ne se base que sur ces éléments de preuve ne semble pas

 22   étayée par suffisamment d'éléments de preuve.

 23   De plus, comme a été noté dans le jugement dans l'affaire Prlic et

 24   consorts, pour étayer une telle allégation, l'Accusation doit montrer que

 25   des gens quittaient les municipalités à cause d'un acte criminel perpétré

 26   par Mladic. C'est le paragraphe 59 [comme interprété] de l'arrêt dans

 27   l'affaire Prlic et consorts. Et encore plus important, c'est que pour

 28   prouver des allégations concernant le génocide, l'Accusation doit montrer


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  1   qu'il y avait donc une intention spécifique génocidaire partagée par les

  2   auteurs. Montrer seulement que des gens partaient ne suffit pas. Il faut

  3   produire des éléments de preuve qui établissent un lien entre Mladic et

  4   l'intention de détruire ce groupe spécifique de la population. Là, on cite

  5   le jugement de la Cour internationale de justice dans l'affaire Bosnie-

  6   Herzégovine contre Serbie-et-Monténégro, paragraphe 190; le jugement de

  7   première instance dans l'affaire Stakic, paragraphes 519 et 533; ainsi que

  8   l'arrêt dans l'affaire Tolimir, paragraphe 231. Nous disons qu'il n'est pas

  9   possible d'établir cela puisque beaucoup de gens étaient partis avant que

 10   Mladic ne soit nommé commandant de l'état-major principal. Comment pouvait-

 11   il avoir cette intention de les détruire et de les faire partir par la

 12   force ? Et où sont les éléments de preuve concernant ces réunions où il se

 13   serait mis d'accord pour que ces crimes présumés soient commis ? De plus,

 14   comment ce plan grandiose criminel aurait pu être accompli dans de telles

 15   municipalités, ce nombre grand de municipalités, sans ordres écrits par

 16   rapport à cela ? Cela n'est pas possible. Et c'est pour cela que

 17   l'acquittement s'impose.

 18   De plus, lorsqu'il y a des combats entre deux forces opposées, ces

 19   deux forces ont pour obligation de faire partir de façon provisoire des

 20   gens pour les protéger, pour les mettre à l'abri d'un préjudice. C'est le

 21   Protocole additionnel, article 58(a) et l'article 49 de la Convention

 22   numéro IV. Et si cela était nécessaire vu les circonstances, l'armée de la

 23   VRS a respecté cette obligation. L'accomplissement de l'obligation qui est

 24   requis et qui est prévu par le droit international ne peut pas être utilisé

 25   en tant qu'élément de preuve pour corroborer l'allégation concernant le

 26   génocide, ce que l'Accusation a fait. En fait, si la VRS n'avait pas fait

 27   partir les civils, des gens auraient été laissés sans protection et exposés

 28   au risque d'être tués.


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  1   Monsieur le Président, plusieurs Chambres de première instance de ce

  2   Tribunal se sont penchées sur les allégations portant sur le génocide dans

  3   les municipalités. Dans chacun de ces cas, l'accusé a été acquitté de ce

  4   chef d'accusation. Par exemple, la Chambre d'appel dans l'affaire Stakic a

  5   confirmé la décision de la Chambre d'appel [comme interprété] pour

  6   acquitter l'accusé de ce chef d'accusation. Ils ont constaté qu'il n'y

  7   avait pas suffisamment d'éléments de preuve pour étayer l'affirmation selon

  8   laquelle les dirigeants civils élus de la Republika Srpska ont élaboré une

  9   campagne génocidaire. De même, par rapport à Prijedor, et c'est parce que

 10   l'Accusation s'est concentrée principalement sur cette municipalité, la

 11   Chambre de première instance dans l'affaire Brdjanin a constaté

 12   concrètement qu'il n'y avait pas d'escalade de génocide dans la RAK après

 13   avoir examiné les meurtres qui ont été commis à Koricanske Stijene et le

 14   traitement qui a été réservé aux prisonniers aux camps de Keraterm,

 15   Omarska, Trnopolje, ainsi que dans les villes de Prijedor, Kljuc et Sanski

 16   Most. Et même dans l'affaire qui est le plus étroitement liée à la nôtre,

 17   et c'est l'affaire Karadzic, la Chambre de première instance a constaté

 18   qu'après une approche globale et l'examen des déclarations dans leur

 19   contexte, on ne peut pas établir qu'il y ait eu une intention de détruire

 20   les Musulmans et les Croates de Bosnie en tout ou partie dans aucune de ces

 21   municipalités en Bosnie-Herzégovine.

 22   Dans cette affaire, l'Accusation n'a pas présenté de nouveaux

 23   éléments de preuve qui entraîneraient une conclusion différente. Si on

 24   considère les éléments de preuve dans leur intégralité, avec tous les faits

 25   et toutes les circonstances concernant cette affaire, on ne peut pas

 26   établir que l'intention de détruire les Musulmans et les Croates de Bosnie

 27   soit la seule conclusion raisonnable que la Chambre de première instance

 28   aurait pu faire. Cela, donc, ne peut conduire qu'à une seule conclusion


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  1   possible : l'accusé doit être acquitté de ce chef 1 de l'acte d'accusation.

  2   Nous allons parlé d'autres municipalités un peu plus tard, mais étant

  3   donné que l'Accusation a insisté sur Prijedor, je voudrais maintenant moi

  4   aussi me concentrer sur cette municipalité et les éléments de preuve la

  5   concernant pour montrer que l'Accusation n'élimine pas le doute raisonnable

  6   parce que, vu les éléments de preuve qui sont disponibles, on peut arriver

  7   à d'autres conclusions qui ne sont pas compatibles avec l'acte

  8   d'accusation.

  9   Nous avons présenté des arguments importants au sujet de Prijedor et

 10   Tomasica dans notre mémoire en clôture dans les sections III(B) et (C).

 11   L'Accusation veut prendre Prijedor comme modèle de municipalité pour les

 12   accusations de génocide dans les municipalités. Cependant, pour ce faire,

 13   l'Accusation a un raisonnement erroné et déforme les faits, tout en

 14   espérant que vous oubliiez ou ignoriez des conclusions alternatives qui

 15   découlent des moyens de preuve, et cela n'est pas correct. L'existence de

 16   conclusions alternatives découlant des preuves agit in dubio pro reo et

 17   démontre un doute raisonnable. Il montre que l'Accusation ne s'est pas

 18   acquittée de la charge de la preuve. Nous mettons en évidence que quelques

 19   facteurs significatifs pour Prijedor.

 20   L'Accusation prétend que le départ des civils de Prijedor faisait

 21   partie d'une entreprise criminelle commune visant à éliminer et détruire

 22   les non-Serbes, tous les non-Serbes. Et dans son mémoire en clôture, elle

 23   prétend que celle-ci a commencé avec la prise du pouvoir par les Serbes à

 24   Prijedor. Paragraphes 2 et 9, annexe A Prijedor. En outre, elle ajoute que

 25   tout cela a commencé avec les mesures visant à désarmer les villages non-

 26   serbes dans les régions de Hambarine et Kozarac, y compris Brdo, mémoire en

 27   clôture de l'Accusation, paragraphes 15 à 17 qui ont trait à Prijedor.

 28   L'Accusation passe sous silence que les conclusions alternatives


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  1   peuvent être trouvées dans les preuves, à savoir que l'absence

  2   d'électricité, l'absence de biens de consommation et la pénurie d'autres

  3   articles essentiels a eu pour conséquence que Prijedor fonctionnait à 10 à

  4   15 % de ses capacités, et que la population cherche à survivre dans ce

  5   contexte de pénurie. C'est la pièce de l'Accusation P4131 qui le prouve.

  6   Donc il ne s'agit pas que des non-Serbes, mais des Serbes aussi qui étaient

  7   confrontés à ces pénuries. D'autres documents et éléments de preuve

  8   montrent également des pénuries de médicaments, d'électricité, d'eau et de

  9   vivres à Prijedor. P338, page 146; P3278, page 17; il y a un témoin de

 10   l'Accusation qui a déposé à ce sujet à T2097; nous avons également P7847,

 11   page 11; et P7385, page 26.

 12   Dans une telle situation, le bon sens et la logique veulent que

 13   certaines personnes quittent une zone touchée par ces pénuries pour aller

 14   ailleurs où elles pensent que cela va mieux ou cela va effectivement mieux.

 15   Les preuves montrent que des quartiers et villages entiers à Prijedor, dont

 16   la population était non-serbe, eh bien, que dans ces villages les

 17   populations sont restées pendant toute la guerre, même ceux qui appellent

 18   la conclusion logique et raisonnable, qu'il n'existait aucune intention de

 19   détruire ou d'éliminer les non-Serbes.

 20   Qui plus est, même si l'Accusation prétend que les commandants de

 21   police non-serbes avaient été mis à l'écart après la prise du pouvoir en

 22   raison de leur appartenance ethnique, les preuves n'étayent pas cet avis.

 23   Les témoins de l'Accusation, au contraire, confirment que les non-Serbes

 24   ont conservé leur emploi jusqu'à l'attaque à Hambarine. Compte rendu

 25   d'audience page 3506, 3507, et P2585. Après l'attaque au poste de contrôle

 26   d'Hambarine, un grand nombre de Croates et Musulmans de Bosnie ont tout

 27   simplement cessé de se rendre au travail, et le Témoin RM206 nous en a

 28   parlé dans le P2585. Je vous demande : comment le général Mladic peut-il


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  1   être tenu responsable du fait que ces personnes aient cessé de se rendre au

  2   travail ?

  3   En outre, il existe des preuves démontrant que des policiers

  4   musulmans et croates de Bosnie se sont vu offrir la possibilité de

  5   conserver leurs postes, à condition qu'ils acceptent l'État, la Republika

  6   Srpska, et ses lois. On peut voir cela dans la pièce à conviction P3948,

  7   page 3. Et cela valait pour les Serbes aussi. Ceux qui refusaient, quelle

  8   que ce soit leur appartenance ethnique, étaient licenciés. Et cela, nous

  9   l'avons appris de la bouche du Témoin Merdzanic de l'Accusation, D61, D62.

 10   Et pour le premier témoin, le compte rendu d'audience, la référence c'était

 11   3394 à 3395. Est-ce cela un plan criminel ou une mesure légitime pour se

 12   protéger contre la sédition ?

 13   De plus, les policiers de la région de Prijedor d'origine croate et

 14   musulmane de Bosnie se sont vu offrir la possibilité de continuer à

 15   travailler pour le commissariat de Kozarac. Pour le dire simplement, les

 16   preuves ne soutiennent pas les dires de l'Accusation; au contraire si l'on

 17   se fonde sur le bon sens et la logique, ces preuves montrent qu'il n'y

 18   avait pas d'entreprise criminelle commune visant à commettre un génocide ou

 19   autre chose. Tout le monde essayait de rétablir la paix. Et je le répète,

 20   tout cela se produit avant même l'arrivée du général Mladic sur place, le

 21   général Mladic étant encore en Croatie. Pour être coupable de ce dont

 22   l'accuse l'Accusation, le général Mladic doit avoir eu des pouvoirs

 23   surhumains.

 24   Dans la même veine, nous avons aussi entendu les événements de preuve

 25   montrant qu'un nombre important de non-Serbes ont été mobilisés et ont

 26   servi dans la VRS après, même après les événements de Prijedor. D767, D768,

 27   D769, Javoric, témoin, compte rendu d'audience 31 402 à 403, et Sipovac,

 28   témoin, 28 143.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, il y a dix lignes, vous

  2   avez parlé de D171 [comme interprété]. Je ne sais pas si c'est une erreur

  3   dans le compte rendu d'audience ou si vous avez fait un lapsus, est-ce que

  4   vous pourriez vérifier votre référence, s'il vous plaît.

  5   M. IVETIC : [interprétation] Il doit s'agir de la pièce D1717, page 58.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Vous pouvez poursuivre.

  7   M. IVETIC : [interprétation] Merci. Alors la mobilisation et le service des

  8   non-Serbes dans la VRS montre que la VRS et le général Mladic ne visaient

  9   aucunement le génocide, la destruction ou l'élimination des non-Serbes,

 10   mais cherchaient au contraire à assurer la défense légitime de tous les

 11   citoyens loyaux à la République serbe contre des ennemis armés. D896 est

 12   une liste de conscrits, cette pièce démontre que 381 Croates, 108

 13   Bosniaques, 78 Ukrainiens et des soldats d'autres nationalités étaient

 14   présents, et nous parlons des unités de la VRS à Prijedor. Rodic a déjà

 15   expliqué comment il avait compilé ce document. Les Croates et Musulmans de

 16   Bosnie représentaient plus de 10 % des effectifs de la VRS dans la région

 17   de Prijedor pendant la guerre, et certaines unités comportaient jusqu'à 20

 18   à 30 % de Musulmans et de Croates de Bosnie. Sipovac a témoigné dans ce

 19   sens, compte rendu d'audience 28 145, nous avons également D767 et D896.

 20   Le témoin Rodic a déclaré que plus de 12 % des hommes des 6e et 2e

 21   Bataillons de la 43e Brigade motorisée étaient des non-Serbes, et que le

 22   commandant de garnison de Prijedor était déterminé à protéger de manière

 23   égale tous les citoyens sur le territoire de la municipalité de Prijedor,

 24   indépendamment de leur appartenance ethnique et les a invités à rejoindre

 25   les rangs de la VRS, D930, paragraphe 23. Le Témoin Javoric a confirmé que

 26   des unités de la VRS, avec des Croates et des Musulmans, ont également

 27   participé à la percée à travers le corridor, compte rendu d'audience page

 28   31 401. Et le Témoin Sipovac a déclaré, compte rendu d'audience 28 143 :


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  1   "Le Bataillon de Ljubija, le 6e Bataillon motorisé, comportaient des hommes

  2   d'une région multiethnique et dans leur composition on trouvait des Serbes,

  3   des Croates, et des Musulmans."

  4   Si l'on veut détruire quelqu'un, on ne les invite pas à rejoindre son armée

  5   et on ne les arme pas, et ces preuves appellent une conclusion toute autre.

  6   Est-ce que ces officiers et soldats de la VRS non-serbes commettent un

  7   génocide contre eux-mêmes, contre leurs familles ? Cela n'est pas logique.

  8   Et dès lors la thèse de l'Accusation n'est pas logique, et donc, vous devez

  9   prononcer l'acquittement.

 10   La théorie erronée de l'Accusation au sujet de la participation de la VRS à

 11   un génocide est même contraire aux preuves de l'Accusation. Prenons la

 12   pièce à conviction P2874, un ordre du 21 mai 1992 émanant du commandement

 13   du 1er Corps de la Krajina de la VRS qui couvre la zone de Prijedor.

 14   L'intention y apparaît clairement de faire de la VRS l'armée, pas seulement

 15   du peuple serbe, mais de tous les patriotes et de tous les citoyens, qui

 16   sont prêts à se battre dans ses rangs pour les objectifs justes du peuple

 17   serbe, la défense de l'intégrité territorial de la république, et la paix

 18   dans ces régions. Et plus important, cet ordre se termine ainsi :

 19   "Cette armée se bat pour la vérité, la liberté, et la patrie, pour la

 20   survie de son propre peuple, pour la paix et le progrès, et dès lors, sa

 21   conduite vis-à-vis de son propre peuple et vis-à-vis de l'ennemi doit être

 22   digne, moral, et chevaleresque."

 23   Cela ressemble-t-il à un ordre illégal de commettre des crimes ? Ou, au

 24   contraire, comme le voudrait le bon sens, s'agit-il d'un ordre correct et

 25   approprié compte tenu des circonstances ? Penchons-nous un instant sur ces

 26   circonstances, mais avant cela, vous devez vous demander comment

 27   l'Accusation peut prouver de façon irréfutable, comme il lui incombe,

 28   notamment pour ce qui est du dolus specialus du génocide, si elle ne peut


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  1   produire d'ordres émanant du commandement de la VRS, de Mladic lui-même, de

  2   commettre un génocide à Prijedor ? Si elle peut prouve aussi bien, si elle

  3   peut aussi bien prouver où sont ces ordres ? Si sa thèse est de nature à

  4   emporter la conviction, tout ce qu'elle peut faire est de vous demander de

  5   déformer les ambiguïtés dans des déclarations et ordres d'autres, mais pas

  6   de Mladic.

  7   Pour ce qui est des circonstances ou du contexte de Prijedor, qu'il faut

  8   connaître pour comprendre pourquoi les populations prenaient les victimes à

  9   la fuite à la suite d'actions légitimes de combat et pourquoi les actions

 10   armées contre les forces ennemies dans les villages étaient légitimes. Le

 11   29 avril 1992 est arrivé un récépissé d'un télégramme codé envoyé par le

 12   quartier général de la police de Bosnie à Sarajevo ordonnant aux Musulmans

 13   de Bosnie d'attaquer les Serbes.

 14   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous avez dit le 29 avril, n'est-ce

 15   pas ?

 16   M. IVETIC : [interprétation] C'est exact.

 17   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] A ce moment-là, il faut corriger le

 18   compte rendu d'audience.

 19   M. IVETIC : [interprétation] Ce télégramme avait été envoyé par la TO et le

 20   MUP musulman de Bosnie, Alija Delimustafic, Hasan Efendic, à Sarajevo à

 21   leurs frères à Prijedor et ailleurs et, par hasard, en raison d'un

 22   remplacement dans les équipes, ce télégramme a été découvert par un

 23   policier serbe qui avait remplacé un policier. Le Témoin Mandzic en a parlé

 24   à D826, paragraphe 9. A cause de cela, les politiciens serbes ont décidé -

 25   avec l'aide de la police locale - P288; P7634, page 1; P3917, page 4, de

 26   prendre le pouvoir dans la municipalité de Prijedor, ce qu'ils ont fait le

 27   30 avril 1992. D895, paragraphe 21; D826, paragraphe 9. Il convient donc de

 28   souligner une fois de plus que ces mesures ont été prises avant l'entrée en


Page 44675

  1   fonction du général Mladic en tant que commandant de l'état-major

  2   principal, donc comment peut-il être tenu pour responsable de quelque chose

  3   qui ne pouvait pas vraiment maîtriser ? Je répète, est-il un surhomme ?

  4   S'il y a plus que le sommet de la pyramide, je le répète, vous devez

  5   prononcer l'acquittement.

  6   Le bien-fondé de la peur chez les Serbes d'une attaque et l'authenticité de

  7   ce télégramme furent confirmés par des attaques contre la JNA les 2 et 3

  8   mai 1992, rue Dobrovoljacka à Sarajevo, lorsque la JNA a commencé à se

  9   retirer des casernes de Sarajevo, elle a été attaquée violemment par

 10   l'ABiH. Le Témoin Doyle, témoin de l'Accusation nous l'a dit, compte rendu

 11   d'audience page 1 599; pièce à conviction 711; paragraphe 2; pièce 622,

 12   paragraphes 19 à 21; pièce 645, paragraphe 7, et d'autres.

 13   Ces attaques et ces actions correspondent exactement avec ce que disait le

 14   télégramme. Regardez le télégramme, D625.

 15   On ne le répétera jamais assez, qu'après la prise du pouvoir par les Serbes

 16   à Prijedor, qui a eu lieu sans qu'un coup de feu ne soit tiré et sans la

 17   participation du général Mladic, la situation était calme et pacifique

 18   jusqu'au 22 mai 1992, P3617 ; Témoin Dragojevic, compte rendu d'audience

 19   pages 35 605 à 606. Les preuves montrent que plusieurs initiatives ont été

 20   prises par les Serbes afin de rencontrer les Croates et Musulmans de Bosnie

 21   pour empêcher un conflit armé. P4160, pages 1, 2; Témoin Vujic, page 35

 22   053.

 23   La situation n'a pas explosée à Prijedor jusqu'à ce que des événements

 24   hostiles et dus, causés par des forces paramilitaires musulmanes armées,

 25   qui étaient similaires aux actions préconisées par le télégramme codé dont

 26   je viens de parler. Le 22 mai 1992, six soldats de la VRS, dont deux

 27   étaient des Croates de Bosnie, ont été arrêtés et attaqués à Hambarine à un

 28   poste de contrôle musulman sans motif. D912; P482; P2900, page 15; D834,


Page 44676

  1   pages 2 à 9; D895, paragraphes 22, 23, notamment.

  2   Plusieurs soldats de la VRS ont été tués et blessés, dont parmi eux des

  3   non-Serbes. D912; P3987, paragraphes 2 et 10; P482, page 1; D863,

  4   paragraphe 9, notamment. Quelques jours plus tard, le 24 mai 1992, les

  5   forces musulmanes de Bosnie ont attaqué de nouveau, s'en prenant cette fois

  6   à une colonne militaire de la VRS à Kozarac; D895, paragraphe 25; Témoin

  7   Javoric, page 31 491; P4160; P3555. Comme il est normal, ces actes

  8   perpétrés par les Musulmans de Bosnie ont créé des tensions et des peurs

  9   légitimes pour la population serbe et la population non-serbe. Ici encore,

 10   il va sans dire que le général Mladic ne maîtrisait pas les forces

 11   musulmanes qui ont été à l'origine de ce chaos. Il faut également souligner

 12   que l'Accusation incrimine ces mesures visant à désarmer les paramilitaires

 13   non-serbes dans ces villages et suggère qu'il s'agit d'une partie de la

 14   prétendue entreprise criminelle commune. Pour le justifier, il y a un

 15   document de Zeljaja du 16 mai 1992, paragraphe 15 du mémoire de

 16   l'Accusation. Les forces des Musulmans de ces villages étaient lourdement

 17   armées, et nous avons plusieurs preuves qui le montrent : P2894, P4061,

 18   D7299, notamment. Mais ce qui est instructif, ce sont les mots utilisés par

 19   Zeljaja pour l'ultimatum. Donc, puisque l'Accusation utilise cet ultimatum

 20   pour justifier ses dires et ses affirmations, et je lis dans la déposition

 21   d'un témoin-clé de l'Accusation à la page 3 461 à 65 :

 22   "Si vous ne rendez pas 7 000 armes et si le drapeau serbe ne flotte

 23   pas sur Kozarac et si la police serbe n'exerce pas le contrôle, je raserai

 24   totalement Kozarac."

 25   Et à la fin, il a dit :

 26   "Quand vous rendrez ces armes, alors nous pourrons continuer à

 27   parler."

 28   Il ne dit pas : Je raserai la zone si vous rendez les armes. Pas du


Page 44677

  1   tout. Il dit : Si vous rendez des armes, nous pouvons négocier. De quoi

  2   s'agit-il ? Le sens commun veut que cette attitude puisse également être

  3   comprise comme un exemple légitime de ce que la doctrine militaire appelle

  4   la ville défendue. Lorsqu'une ville refuse d'ouvrir ses portes et d'évacuer

  5   ses forces militaires, c'est une ville défendue, ce qui en fait une cible

  6   légitime tant qu'elle oppose une défense. Si elle rend les armes, elle ne

  7   peut plus être attaquée. L'Accusation aime jouer sur les mots. Paragraphe

  8   18 de son mémoire, une partie sur Prijedor, elle décrit ces éléments armés,

  9   ces Musulmans armés, comme étant des membres de la "population".

 10   Mais, en droit, celui qui porte les armes n'est plus un civil, et si

 11   les unités armées commençant le combat sont dans une zone civile, c'est une

 12   ville défendue, ce qui en fait une cible légitime.

 13   Un autre témoin de l'Accusation, un témoin protégé dont je ne

 14   parlerai pas du nom, a témoigné au sujet de P3121, son souvenir des paroles

 15   du commandant de la VRS Zeljaja est encore plus édifiant, et nous parlons

 16   toujours de l'ultimatum du 16 mai 1992. Voici ce dont il se souvient :

 17   "Il ne peut pas y avoir de négociations. Il n'y a plus d'armée

 18   populaire de la Yougoslavie. Désormais, nous sommes l'armée serbe, et tous

 19   les membres de la Défense territoriale et des forces de police de réserve

 20   sont appelés à rendre toutes leurs armes. Tous les citoyens d'origine

 21   bosniaque déclareront leur loyauté à la République serbe et répondront à la

 22   mobilisation de l'armée serbe."

 23   Eh bien, c'est exactement ce que nous disions il y a un instant. Au

 24   cœur de cet affrontement, avec des tirs venant de partout, la VRS ne dit

 25   pas aux non-Serbes qu'ils doivent quitter Prijedor; mais bien au contraire,

 26   elle les implore de rendre les armes, de rester à Prijedor et de devenir

 27   des citoyens loyaux à la République serbe. Et ce qui est encore plus

 28   important, elle leur demande de rejoindre ses rangs, de se joindre à


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  1   l'armée. On ne doit pas déformer ces propos comme l'a fait l'Accusation

  2   pour en faire un appel à commettre un génocide contre ces mêmes personnes.

  3   Et ce qui est encore plus important, l'Accusation ne s'intéresse pas au

  4   contexte plus important qui entoure ces événements. Avant ce moment-là, en

  5   effet, la Bosnie-Herzégovine avait ordonné à la JNA de quitter la Bosnie et

  6   la JNA avait donné son accord quelques semaines auparavant; D1661, pages 9

  7   à 10, rapport d'un expert militaire de Kovac; P4412, 2e Région militaire de

  8   la JNA, rapport, page 1. D829, ordre concernant la mise en œuvre de la

  9   décision de la présidence de la République de Bosnie-Herzégovine, numéro

 10   0211327/92. Et puis, il y a le Conseil de sécurité des Nations Unies qui, à

 11   ce moment-là, avait décidé - quelques jours à peine auparavant, le 15 mai

 12   1992 - que l'armée yougoslave devait quitter la Bosnie-Herzégovine. Donc,

 13   cette partie de l'ultimatum de Zeljaja vient directement de ces éléments.

 14   P2052, pages 1 à 2, rapport du secrétaire général en vertu du paragraphe 4

 15   de la Résolution du Conseil de sécurité 752 de 1992, datant du 30 mai 1992,

 16   S/24049. Et puis, deuxième élément, quelques jours avant le prononcé de cet

 17   ultimatum dans le cadre de la même résolution, la Résolution du Conseil de

 18   sécurité des Nations Unies 752, divers documents versés au dossier évoquent

 19   la résolution du 15 mai 1992 : P2815, page 8; P1999, rapport de Donia, page

 20   85. Cette résolution énumère cinq réclamations du Conseil de sécurité. Au

 21   numéro 5, très instructif pour nous, nous lisons :

 22   "Toutes les forces irrégulières de Bosnie-Herzégovine doivent être

 23   démantelées et désarmées."

 24   Donc, au vu de ce contexte, l'ultimatum de Zeljaja prend un sens tout

 25   à fait différent. A moins que l'Accusation ne souhaite faire de cette

 26   résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies son fusil fumant,

 27   l'ordre de commettre un génocide - et si elle agit ainsi, le secrétaire

 28   général des Nations Unies, et ce ne sera pas le général Mladic, devrait


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  1   être assis dans le banc des accusés - mais au vu des éléments de preuve

  2   effectifs et de ces faits, il est raisonnable de conclure que les appels à

  3   désarmer émanant de Zeljaja étaient une tentative, peut-être maladroite,

  4   mais une tentative de respecter les résolutions des Nations Unies. Ou bien,

  5   est-ce que la thèse de l'Accusation consiste à dire que lorsque les Nations

  6   Unies disent ou font quelque chose, ce n'est pas un crime, mais lorsqu'un

  7   Serbe dit et fait la même chose, c'est un crime ? Pourquoi ? Parce qu'il

  8   est Serbe ?

  9   Le 30 mai 1992, une attaque a eu lieu contre la ville de Prijedor,

 10   elle a été menée par 80 hommes musulmans de Bosnie en armes environ; c'est

 11   ce qu'on lit dans la pièce à conviction P2876, page 2. Le même jour, très

 12   tôt le matin, ces Musulmans et Croates armés de Bosnie ont attaqué la ville

 13   de Prijedor, provoquant le chaos et surprenant tous les habitants. A ce

 14   moment-là, la VRS n'était pas encore présente sur les lieux. Nous avons le

 15   témoignage d'un témoin en page 29 918 [comme interprété] du compte rendu

 16   d'audience; pièce D826; D1041, paragraphe 5. D'où il ressort clairement que

 17   les forces musulmanes et croates de Bosnie avaient un plan bien structuré.

 18   Elles étaient déjà bien entraînées et avaient constitué de multiples

 19   groupes qui avaient reçu pour mission de s'emparer des lieux les plus

 20   importants. Leur but était de s'emparer des principaux bâtiments de

 21   Prijedor, tels que le siège du MUP et le bâtiment de la mairie. D930, le

 22   Témoin Rodic; D826, le Témoin Mandzic, ils l'ont dit. Et cette mission, ils

 23   ont d'abord réussi à la mener à bien en s'emparant du centre-ville et en

 24   essayant de mettre le feu à un hôtel et en engageant des combats devant le

 25   bâtiment de la municipalité. P2876, D930 et le Témoin Mandic évoquent ces

 26   faits.

 27   Alors que l'Accusation déclare que le centre-ville, également connu

 28   sous le nom de Stari Grad, avait été attaqué par les Serbes dans le cadre


Page 44680

  1   d'une entreprise criminelle commune, l'ensemble du contexte montre que des

  2   éléments de preuve existent selon lesquels les Musulmans et Croates armés

  3   de Bosnie, après l'attaque sur le centre-ville de Prijedor, ont retiré

  4   leurs forces vers Stari Grad et engagé des attaques à partir de cet

  5   endroit. D859, paragraphe 13; le Témoin Vujic, page 34 500 du compte rendu

  6   d'audience. Pendant toutes ces attaques, au moins 17 membres de la police

  7   serbe de Bosnie ont été tués et un grand nombre d'hommes ont été

  8   sérieusement ou légèrement blessés; D930, paragraphe 11. Y compris des

  9   particuliers innocents tels que Goran Dragojevic, un conducteur

 10   d'ambulance, et le Témoin Jesic ont essuyé des tirs des groupes armés

 11   musulmans et croates de Bosnie et ont été transformés en otages et utilisés

 12   en tant que boucliers humains; D1052, page 2; D1049, paragraphe 7; et

 13   transcript page 29 919 pour le Témoin Jesic.

 14   Alors, est-ce que le général Mladic est l'homme qui a donné l'ordre à

 15   ces Musulmans et Croates de Bosnie d'attaquer Prijedor ? Est-ce qu'il est

 16   responsable des actes commis par l'ennemi ? Non. Mais ces actes ont eu un

 17   effet grave sur Prijedor. Ils ont fait naître la crainte parmi les

 18   villageois de Prijedor qui se rappelaient les événements de la Seconde

 19   Guerre mondiale au moment où les Croates et Musulmans de Bosnie de ces

 20   mêmes villages avaient tenté un génocide contre les Serbes. Rappelez-vous

 21   les nombreux éléments de preuve qui évoquent les pertes sévères essuyées

 22   par les Serbes durant les différents actes d'hostilités armés commis à

 23   Hambarine, Kozarac, et cette attaque de Prijedor - ces trois événements

 24   impliquant des unités paramilitaires armées croates et musulmanes de Bosnie

 25   également - et l'effet a été, pour la population locale, de vivre la peur.

 26   Et suite à cela, elle a eu une réaction excessive, qui n'était due à aucun

 27   plan émanant de Ratko Mladic, mais bien d'une peur personnelle et

 28   individuelle vécue par la population locale et les dirigeants locaux qui


Page 44681

  1   était suscitée par ces actes d'hostilité commis par des non-Serbes portant

  2   les armes.

  3   Donc, les centres de détention ont été créés en tant qu'actions

  4   destinées à arrêter les hommes non-serbes suspectés d'avoir participé à ces

  5   attaques. Ils ont fait l'objet d'enquêtes, ils ont fait l'objet de

  6   vérifications et ont été libérées lorsqu'il est apparu clairement qu'ils

  7   n'avaient participé à aucune attaque. P4160, page 4; P2900, page 30; P480,

  8   page 76. Ces centres - je parle d'Omarska et de Keraterm en particulier -

  9   n'ont pas été créés par la VRS. Ils ont été établis et placés sous le

 10   contrôle de la cellule de Crise locale et de la police civile du MUP de

 11   Prijedor. D1041, paragraphe 8; P480, pages 20 et 21; P4160, pages 3 à 4;

 12   P2900, pages 11 et 30, entre autres.

 13   L'armée n'a pas participé à cela. Contrairement aux implications

 14   malvenues de l'Accusation selon lesquelles l'armée aurait eu un rôle à

 15   jouer des ces centres. Au paragraphe 33 du mémoire en clôture de

 16   l'Accusation concernant Prijedor, l'Accusation a même admis que Keraterm et

 17   Omarska étaient dirigés par le centre de sécurité publique, SJB, de

 18   Prijedor, c'est-à-dire par la police civile. Pour ces deux centres, la VRS

 19   avait été appelée à prendre la direction et l'opération des centres, mais

 20   la VRS a refusé et, par conséquent, n'a jamais eu la moindre participation

 21   à cette gestion; D1111; D852, paragraphe 43. A Keraterm, la VRS était

 22   stationnée uniquement à l'extérieur du périmètre dans une annexe du

 23   complexe de Keraterm, sans jamais pénétrer à l'intérieur du centre en tant

 24   que tel. Le Témoin Rodic a évoqué ce fait en page 33 067 du compte rendu

 25   d'audience. A Omarska, la VRS ne menait à bien que des services de garde,

 26   encore une fois, à l'extérieur du complexe. Le Témoin Rodic a évoqué cela à

 27   la page 33 110 du compte rendu d'audience.

 28   Le général Mladic ne peut donc pas être tenu responsable des actes


Page 44682

  1   des autorités civiles.

  2   Quant à Trnopolje, c'était un centre de réfugiés établi encore une

  3   fois par la cellule de Crise de Prijedor et géré par la Défense

  4   territoriale et la police locale. Nous avons le Témoin Kelecevic, page

  5   37 263 du transcript, qui le dit; nous avons la pièce P2900, page 2. Malgré

  6   l'affirmation de l'Accusation qui dit le contraire, un doute raisonnable

  7   existe quant au fait de savoir si et à quel moment ce Kelecevic [comme

  8   interprété] était membre de l'armée. L'Accusation, à cet égard, présente

  9   deux dates contradictoires auxquelles cet homme aurait été versé dans les

 10   rangs de l'armée.

 11   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Une précision sur le numéro de pièce.

 12   M. IVETIC : [interprétation] Le numéro de pièce exact est 2900.

 13   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.

 14   M. IVETIC : [interprétation] L'Accusation présente donc deux dates

 15   différentes auxquelles Zelecevic [comme interprété] aurait été versé dans

 16   les rangs de la VRS. Et dès lors que des éléments de preuve contradictoires

 17   soient présentés, souvenez-vous, il existe un doute raisonnable et la

 18   Chambre doit acquitter l'accusé. Les éléments de preuve sont clairs, ils

 19   montrent clairement qu'il existait une Défense territoriale municipale qui

 20   n'avait rien à voir avec la VRS. Ils montrent clairement que la Défense

 21   territoriale de Prijedor serbe a continué à exister jusqu'au moins le 16

 22   septembre 1992. D2179.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Suspension d'audience pour la pause.

 24   --- L'audience est suspendue à 10 heures 29.

 25   --- L'audience est reprise à 10 heures 54.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder, Maître Ivetic.

 27   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Avant de

 28   reprendre, j'ai quelques corrections que j'aimerais faire consigner au


Page 44683

  1   compte rendu d'audience.

  2   Compte rendu d'audience d'aujourd'hui, page 994 [comme interprété], ce qui

  3   est consigné comme étant la pièce P7487 [comme interprété], doit être la

  4   page P3847. A la page 15 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui, ligne

  5   13, on doit lire D930 [comme interprété] au lieu de D930. Et page 18 du

  6   compte rendu d'aujourd'hui, ligne 2, au lieu de la page 29 918 du compte

  7   rendu, il faut lire la page 29 928 pour le Témoin Jesic.

  8   A présent, je continue.

  9   Trnopolje n'était certainement pas un camp ou un centre de détention comme

 10   l'affirme l'Accusation, dans le paragraphe 41 de son mémoire en clôture. Au

 11   contraire, c'était un centre d'accueil ouvert qui assurait la sécurité des

 12   réfugiés qui avaient fui le conflit et les extrémistes musulmans, P3528,

 13   P5149, entre autres documents, ainsi que les témoins qui en ont parlé.

 14   En outre, des organisations telles que la Croix-Rouge internationale,

 15   Merhamet, les Médecins sans Frontières, les Pharmaciens sans Frontières

 16   rendaient visite régulièrement à ce centre, P5149. Ceci détruit les

 17   arguments de l'Accusation selon lesquels les Serbes avaient mis en place

 18   une entreprise criminelle commune en vue de commettre un génocide pour

 19   détruire ces populations; un doute raisonnable existe, vous devez donc

 20   acquitter.

 21   Dans ces centres, des officiers de police étaient chargés de procéder au

 22   traitement et aux enquêtes. Seul un membre de la VRS participait à ces

 23   équipes d'interrogatoire mixtes qui sont alléguées, et cet homme était le

 24   lieutenant-colonel Majstorovic. La participation de Majstorovic aux

 25   interrogatoires a été constatée, c'est ce qu'on voit dans la pièce P2895,

 26   dans laquelle Majstorovic a été évoqué comme étant responsable des

 27   personnes chargées des interrogatoires. Au paragraphe 4 de ce document,

 28   nous lisons qu'il ne pouvait s'absenter qu'après avoir reçu l'autorisation


Page 44684

  1   de le faire de Simo Drljaca. Et aux paragraphes 11 et 15, nous voyons qu'il

  2   n'avait autorisation à rendre compte qu'à Simo Drljaca et non à la VRS. Le

  3   général Kelecevic a même confirmé qu'il n'avait pas la moindre idée que

  4   Majstorovic se trouvait à Omarska avant la fin de la guerre. Compte tenu de

  5   ces éléments de preuve, il est démontré clairement que Majstorovic a agi de

  6   son propre chef et uniquement sur instruction de Drljaca et qu'il n'avait

  7   même pas autorisation de respecter les instructions de la VRS; ainsi le

  8   général Mladic ne peut pas être tenu responsable de ces faits.

  9   Alors, cette atmosphère de crainte et de chaos qui régnait à Prijedor a

 10   contribué au fait que les gens ont quitté Prijedor, est-ce que c'est le

 11   cas, probablement ? Et cela concernait toutes les populations. Est-ce que

 12   des excès regrettables, et y compris des décès qu'on peut appeler dommages

 13   collatéraux ou même des meurtres, ont eu lieu pendant les combats et les

 14   ratissages de terrains ou dans ces installations de détention gérées par

 15   les civils ? Probablement, mais ce n'était nullement prévu, nullement

 16   planifié, nullement ordonné par le général Mladic qui n'était pas au

 17   courant. Nous ne sommes pas ici aujourd'hui pour juger Simo Drljaca ou le

 18   MUP de Prijedor, nous ne sommes pas ici pour juger les autres dirigeants

 19   locaux. Le général Mladic ne peut répondre que de son comportement, de ses

 20   conduites et de ses crimes présumés, et non du comportement et des crimes

 21   commis par d'autres qui exerçaient effectivement le pouvoir.

 22   Maintenant, nous pouvons nous pencher sur les rapports qui arrivaient au

 23   général Mladic concernant les crimes présumés commis à Keraterm et Omarska.

 24   Il n'obtient pas autant d'informations que les centres de police. Nous

 25   avons des éléments de preuve qui le prouvent, par exemple, concernant

 26   l'infâme massacre de la salle numéro 3, comme on a l'habitude de le dire,

 27   nous avons la pièce P161, un rapport adressé à l'état-major principal où il

 28   est question d'une tentative d'évasion en masse, qui a été empêchée au prix


Page 44685

  1   de 50 prisonniers tués. Ce rapport n'évoque pas une quelconque absence de

  2   légalité concernant les décès s'agissant de la façon dont le général aurait

  3   été informé, et ne permet pas de créer un lien entre le général Mladic et

  4   les actes de la police qui exerçait le contrôle à Keraterm. Logiquement et

  5   raisonnablement, et conformément au principe que le doute doit profiter à

  6   l'accusé, nous pouvons conclure à des comportements bénins et non criminels

  7   à la lecture de ce rapport. De même la pièce P248, datant du jour suivant,

  8   évoque une nouvelle tentative d'évasion qui a été empêchée à temps. Il n'y

  9   est pas question du moindre décès.

 10   Le général Mladic n'avait pas le devoir de mener enquête lorsqu'il lisait

 11   dans un rapport exact ce que nous lisons dans ces deux rapports. Dans ces

 12   conditions, il n'y a aucun lien entre ces incidents et le général Mladic,

 13   qu'il s'agisse de crime ou pas.

 14   Quant à Omarska, les éléments de preuve sont clairs, ils indiquent

 15   clairement qu'aucun rapport n'arrivait à Mladic. Le chef du poste de

 16   sécurité publique, Drljaca, était responsable d'Omarska, pièce P4136, comme

 17   il était responsable de Keraterm. Dans les éléments de preuve, nous avons

 18   la pièce P2895 qui, dans ses pages 2 et 3, établit que le service de

 19   sécurité du centre de sélection devait être assuré par le poste de police

 20   d'Omarska. Ce document signé par Drljaca dit également ce qui suit :

 21   "J'interdis le plus strictement qui soit la fourniture de la moindre

 22   information concernant le fonctionnement de ce centre de regroupement. Tous

 23   les documents officiels doivent être conservés au centre de regroupement et

 24   ne peuvent être sortis de ce centre ou détruits que sur autorisation du

 25   chef du poste de sécurité publique de Prijedor. Telle sera la

 26   responsabilité du personnel chargé de la sécurité."

 27   L'implication de cet ordre devait être supervisé par le chef de la police

 28   Dusan Jankovic.


Page 44686

  1   Est-ce que nous pouvons afficher la diapositive suivante maintenant, s'il

  2   vous plaît. J'en ai peut-être parlé un peu plus tôt, mais l'Accusation dans

  3   son mémoire en clôture implique que le général Mladic a donné un ordre pour

  4   que ces camps soient nettoyés avant une visite du CICR. Ce que nous avons à

  5   l'écran, c'est le P2879, que l'Accusation utilise à cet effet. Et si vous

  6   regardez les destinataires, est-ce envoyé à Keraterm ou à Omarska ? Non, du

  7   tout. Cela porte-t-il uniquement sur Omarska et Keraterm ? Non, cela n'est

  8   pas le cas. Et cela est manifestement clair au vu du texte de cet ordre,

  9   Mladic demande à son commandant subordonné de rendre une visite à plusieurs

 10   endroits notamment, Manjaca, est une facilité de la VRS, pour que le

 11   commandant subordonné contacte le MUP pour ce qui est des autres facilités

 12   ou installations de la Défense territoriale. Si Mladic était à l'origine de

 13   ces actions à Omarska et Keraterm, à ce moment-là il aurait envoyé son

 14   ordre directement; chose qu'il n'a pas faite.

 15   Alors, regardons la diapositive suivante maintenant, s'il vous plaît. Un

 16   autre document qui est le P201, c'est un ordre émanant de Talic après avoir

 17   reçu l'ordre précédant de Mladic. Encore une fois, il peut l'envoyer

 18   directement à Manjaca parce que Manjaca est une installation de la VRS ou

 19   un centre de la VRS, mais il n'a aucune autorité sur Omarska, Keraterm, ou

 20   Trnopolje, et c'est la raison pour laquelle il doit envoyer cet ordre à un

 21   poste de la police civile de Prijedor. On ne peut pas confondre ces deux

 22   documents et de dire que la VRS a exercé un quelconque rôle à Omarska,

 23   Keraterm, et Trnopolje. C'est simplement dû au fait que la même visite

 24   comprenait une visite à Manjaca. Nous disposons également d'autres éléments

 25   de preuve qui indiquent que les médias et le CICR avaient recueilli des

 26   civils pour cette visite. P205 commémore ce film, le P200, également.

 27   Regardons maintenant quelle était la connaissance du général Mladic eu

 28   égard à toutes ces actions et de la VRS concernant le désarmement des


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  1   villages et le nettoyage du terrain. D'emblée, l'Accusation semble vouloir

  2   apporter une connotation négative sur ce terme de "ciscenje", que l'on

  3   appelle parfois le nettoyage du terrain, il y a une différence entre les

  4   deux, entre ce qui constitue "ciscenje", qui est enseigné par la JNA et

  5   militairement légitime, c'est-à-dire le déplacement forcé par les civils,

  6   comme avancé par le bureau du Procureur à la page du compte rendu

  7   d'audience 17 845 à 17 847. Il ne peut y avoir qu'un doute là-dessus

  8   "ciscenje", assainissement au sens militaire du terme, n'inclut pas le

  9   déplacement forcé que ce témoin avance dans sa déposition.

 10   Regardons maintenant le P2440 de la 6e Brigade des Partisans signé par le

 11   colonel Basara, et le même témoin protégé à charge dont nous avons parlé a

 12   confirmé qu'il s'agissait de la même opération dont il parlait à propos des

 13   villages de Prijedor, où il a vu cette action qui était différente de

 14   l'assainissement "ciscenje" normal. Nous voyons dans cet ordre, au

 15   point 2:

 16   "Détruire des groupes armés ennemis avec un feu soudain, et capturer les

 17   personnes non armées aptes à combattre dans la zone de Milin Birt, où ces

 18   personnes seront transportées par la suite. Ne rien faire avec les femmes,

 19   les enfants, et les personnes âgées dans leurs foyers."

 20   Page 3, ensuite,  d'un ordre complémentaire :

 21   "Ne mettez pas le feu aux maisons. Le pillage est interdit. Laissez la

 22   population tranquille si elle est pacifique. Ne capturez que les

 23   extrémistes. Et liquidez seulement les groupes armés."

 24   Messieurs les Juges, au vu de ces ordres, toute personne qui aurait été vue

 25   par un quelconque témoin et qui avance que la VRS force des civils de leurs

 26   foyers est contraire dans sa déclaration aux ordres express donnés par la

 27   VRS, et par conséquent il ne peut y avoir aucun fondement pour établir la

 28   responsabilité du général Mladic à moins qu'il ait eu connaissance de ces


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  1   actions.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pourriez-vous nous donner la date de

  3   ce document, s'il vous plaît ?

  4   M. IVETIC : [interprétation] Oui. Alors au cours de la pause suivante.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.

  6   M. IVETIC : [interprétation] Si nous regardons l'ensemble des preuves

  7   s'agissant des rapports qui ont été établis au sujet de ces actions, nous

  8   constatons qu'aucune information de ce type ou connaissance des crimes

  9   n'ont été rapportés à Mladic. L'Accusation insiste sur plusieurs rapports

 10   au paragraphe 19 de son mémoire en clôture s'agissant de Prijedor, mais si

 11   on lit les documents cités par l'Accusation dans ce paragraphe, tous les

 12   autres éléments de preuve également cités, nous constatons qu'aucun de ces

 13   éléments ne parle de crimes contre les civils, mais parle plutôt d'actions

 14   militaires légitimes contre les Bérets verts et les membres des formations

 15   paramilitaires.

 16   Monsieur le Juge, pour ce qui est de votre question, 2440 est daté du 18

 17   juin 1992.

 18   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.

 19   M. IVETIC : [interprétation] Encore une fois, si Mladic reçoit ce type de

 20   rapports, peut-être que ces rapports ne sont pas tout à fait exacts,

 21   néanmoins on ne peut lui faire porter la responsabilité de ces actes. Et

 22   pour finir sur ce thème, l'Accusation tente de présenter un écran de fumée

 23   en renvoyant la Chambre à un rapport de Talic au sujet de l'état-major

 24   principal, paragraphe 25 de leur mémoire en clôture, s'agissant de

 25   Prijedor, P3697. Talic annonce qu'ils avancent conformément à la directive

 26   numéro 1. L'Accusation tente de laisser entendre qu'il parle dans ce cas de

 27   crimes, mais si on se souvient de la directive numéro 1 et si nous

 28   réfléchissions à la façon dont Mladic connaissait la directive numéro 1, et


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  1   si les choses progressent conformément à cette directive numéro 1, si

  2   effectivement la pièce P474 correspond à la directive numéro 1, et sur le

  3   fait de traiter la population civile, comme nous l'avons vu la semaine

  4   dernière, qu'il n'est pas engagé dans la guerre et si cette population

  5   civile n'était pas traitée correctement et les prisonniers de guerre

  6   conformément à la loi non plus. Et si dans le rapport de Talic on a dit

  7   qu'il s'agit de la directive numéro 1, il ne peut y avoir aucun

  8   avertissement au sujet d'activité criminelle.

  9   Ce qui est tout à fait remarquable c'est que l'Accusation dans son mémoire

 10   en clôture consacre beaucoup de temps à prouver la participation de la VRS

 11   à ces événements et aux crimes commis à Koricanske Stijene, paragraphes 46,

 12   47. Je suis choqué encore une fois de voir que l'Accusation, je suppose,

 13   s'est rendu compte qu'elle n'a pu prouver aucun des faits répertoriés dans

 14   des annexes pour ce qui est de Mladic et donc a eu recours, encore une

 15   fois, à des faits non répertoriés pour essayer de relancer ces accusations

 16   et de les inclure dans ce procès, une accusation qui a été retirée de

 17   l'acte d'accusation est le 13.6, ce qui est tout à fait incorrect pour

 18   tenter de relancer cette accusation et de l'inclure dans son mémoire en

 19   clôture à une heure tardive. J'ai également parlé de l'application de

 20   l'article 73 bis (D) et d'un exemple particulièrement flagrant. En réalité,

 21   l'Accusation souhaite que soit condamné Mladic pour les événements de

 22   Koricanske Stijene. Messieurs les Juges, vous n'avez aucun autre choix que

 23   de prononcer un acquittement.

 24   Alors, indépendamment des aspects procéduraux et juridiques lorsque

 25   j'avance que cette accusation viole le respect de la procédure, les faits

 26   n'étayent même pas la tentative désespérée de l'Accusation d'invoquer la

 27   participation du général Mladic. Tous les éléments de preuve montrent que

 28   ce n'est pas la VRS, mais l'escouade d'intervention de la police, du MUP,


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  1   encore une fois, qui, ce qui peut paraître surprenant, était présente.

  2   Drljaca n'était pas impliqué dans Koricanske Stijene, P2432. C'est

  3   l'inverse, la VRS a agi contrairement à la police. Dès que le commandant de

  4   la VRS, à partir du moment où on a laissé -- le commandant de la VRS était

  5   impliqué dans cet événement, Peulic a envoyé des soldats directement sur

  6   les lieux. Il ne les a pas envoyés là-bas pour tuer des hommes ni pour

  7   dissimuler cette opération, mais constater ce qui pouvait être fait pour

  8   sauver les victimes. Et ceux qui ont survécu ont été emmenés à l'hôpital;

  9   page du compte rendu d'audience 2 075; P154, paragraphe 34; D887,

 10   paragraphe 19.

 11   Encore une fois, nous disposons d'éléments de preuve indiquant que Drljaca

 12   et le MUP ont entrepris de dissimuler ces crimes. Après Koricanske Stijene,

 13   il y a eu une réunion avec des représentants officiels de la police au SUP

 14   de Prijedor pour aborder ces événements. La VRS n'a pas assisté à cette

 15   réunion, P2432. Dès que Drljaca a remarqué qu'il y aurait une enquête au

 16   sujet de cet événement, il a essayé de le dissimuler et a répondu au

 17   service de sécurité de Banja Luka qu'il n'était pas possible de mener une

 18   enquête étant donné que les hommes avaient été envoyés à Han Pijesak.

 19   P2342 précise que la police du MUP a détruit tout document au sujet de

 20   Koricanske Stijene et d'autres crimes de la section d'intervention, pages

 21   52, 53 et 85. Ces méthodes ne peuvent pas être attribuées à Mladic.

 22   L'allégation de l'Accusation au paragraphe 47 de son mémoire en clôture

 23   indique que des hommes ont été tués à Han Pijesak et que le commandant de

 24   la VRS et des membres de la VRS se trouvaient à Koricanske Stijene au

 25   moment où les crimes ont été commis. Ceci n'est pas exact. La section

 26   d'intervention a été envoyée en mission par le SUP à Han Pijesak; RM97;

 27   P2432, page 86.

 28   Tout ce qui est évoqué au niveau des éléments de preuve ne peut conduire


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  1   qu'à une seule conclusion : le général Mladic n'est pas responsable du fait

  2   répertorié concernant Koricanske Stijene.

  3   Je souhaite passer à un autre domaine qui est proche, les éléments de

  4   preuve portant sur Tomasica, qui font partie de la réouverture des moyens à

  5   charge de l'Accusation. L'Accusation a présenté en tout six experts

  6   concernant Tomasica; néanmoins, ces éléments de preuve sont plutôt sans

  7   brio et minces s'agissant des conclusions sur la responsabilité pénale qui

  8   est censée en découler. Ceci a été reconnu par la Chambre de première

  9   instance eu égard à plusieurs témoins, notamment des experts en balistique

 10   comme Franjic.

 11   L'Accusation a également présenté toute une série de témoins de faits.

 12   Aucun d'entre eux n'a pu établir la participation du personnel de la VRS

 13   aux ensevelissements à Tomasica conformément aux ordres donnés par Ratko

 14   Mladic. Néanmoins, l'Accusation, au paragraphe 48 de son paragraphe sur

 15   Prijedor, avance dans son mémoire en clôture que :

 16   "Le rôle de la VRS et d'autres autorités dans l'utilisation des fosses

 17   communes pour dissimuler des crimes de Prijedor se retrouve, en fait, mis

 18   en œuvre dans les fosses communes de Tomasica et les sites connexes."

 19   Elle avance que les corps n'ont pas été exhumés de la fosse par des soldats

 20   de la VRS. L'Accusation, selon ses preuves, n'établit pas que la seule

 21   conclusion disponible était que la VRS a participé aux ensevelissements.

 22   Plutôt, les éléments de preuve montrent qu'une conclusion logique

 23   conduirait à dire que le MUP de la police civile a accompli cette tâche. Le

 24   témoin essentiel de l'Accusation a déclaré avoir reçu des ordres, mais non

 25   pas d'un membre de la VRS, compte rendu d'audience 36 210 à 36 211. Sur la

 26   base d'autres éléments de preuve, on peut voir que Ljesnjak n'était jamais

 27   membre de la VRS, et ce sont les pièces D1081 et D1359. Les éléments de

 28   preuve de la Défense indiquent qu'il aurait été membre du MUP, il s'agit


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  1   donc de la pièce D0181; et un témoin de l'Accusation a indiqué qu'il aurait

  2   pu être membre de la cellule de Crise, P7311, paragraphe 2.

  3   L'Accusation n'a pas présenté d'éléments de preuve montrant que Ljesnjak

  4   était membre de la VRS. Les éléments de preuve présentés par l'Accusation,

  5   en outre, indiquent que toutes les personnes impliquées aux

  6   ensevelissements, tels que le conducteur du bulldozer ainsi que des gens

  7   qui accompagnaient le camion transportant des corps, portaient des

  8   vêtements civils. Les pages du compte rendu 36 189 et 36 211, c'est le

  9   témoignage d'un témoin.

 10   Et les seules personnes en uniforme, qui portaient des uniformes de

 11   camouflage de la JNA, étaient Ljesnjak et Simo Drljaca du SJB de Prijedor,

 12   qui étaient tous les deux présents à ces ensevelissements, P7311,

 13   paragraphe 8. Il est clair d'après les éléments de preuve que c'est surtout

 14   la police - à Prijedor - qui portait des uniformes similaires, voire

 15   identiques, aux uniformes de l'armée et qu'un profane peut être induit en

 16   erreur en voyant ces uniformes.

 17   Regardons maintenant certains des éléments de preuve de l'Accusation en

 18   couleur, c'est la diapositive suivante. Il s'agit des arrêts sur image des

 19   séquences vidéo concernant Prijedor. Ce sont des vidéos de l'Accusation.

 20   Ici, nous voyons Drljaca --

 21   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Ivetic, je pense qu'il faut

 22   que vous ralentissiez votre débit puisque la sténotypiste ne peut pas vous

 23   suivre.

 24   M. IVETIC : [interprétation] Merci. Je m'excuse.

 25   Edward Vulliamy, un témoin de l'Accusation, a, entre autres, identifié des

 26   personnes apparaissant dans différentes séquences vidéo. Comme, par

 27   exemple, la personne au milieu, il s'agit de l'un des gardes d'Omarska qui

 28   porte l'uniforme militaire de camouflage. Ensuite, en haut à droite sur cet


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  1   arrêt sur image, nous voyons M. Drljaca en uniforme. Ensuite, en bas de

  2   l'arrêt sur image, nous voyons M. Stakic portant un uniforme de camouflage.

  3   Et l'arrêt sur image, le dernier, indique le plus où nous voyons M. Stakic,

  4   M. Kovacevic, M. Drljaca et le colonel Arsic. Sur cet arrêt sur image,

  5   toutes les personnes, sauf Kovacevic, portent le même type d'uniforme

  6   militaire, et Kovacevic porte un tee-shirt de l'armée des Etats-Unis. Ce

  7   qui montre que le MUP, les autorités civiles ainsi que la VRS à Prijedor

  8   portaient tous des uniformes de camouflage militaires. Etant donné qu'il y

  9   a donc un chevauchement pour ce qui est des personnes en uniforme à

 10   Prijedor -- bien sûr, il s'agit de la pièce P3278, P205 et P212.

 11   Donc, concernant ce chevauchement pour ce qui est des personnes en uniforme

 12   à Prijedor, les identifications basées uniquement sur les uniformes, qu'il

 13   s'agisse de Tomasica ou un autre événement qui s'est passé à Prijedor, ou

 14   Omarska, Keraterm ou Trnopolje, doivent être considérées avec réserve

 15   puisqu'il est toujours possible de conclure que le personnel du MUP aurait

 16   été identifié de façon erronée et aurait été confondu avec des membres de

 17   l'armée.

 18   Pour ce qui est de Tomasica, l'un des témoins de l'Accusation parle de la

 19   police militaire qui aurait aidé au transport des corps de Keraterm à

 20   Tomasica; sa déclaration est la pièce P7314, paragraphes 16 à 18. Mais il y

 21   a un petit problème concernant sa déposition puisque parmi les "policiers

 22   militaires" qu'il avait vus en uniforme et qui conduisaient un véhicule

 23   "militaire" qui appartenait à la police civile sont en fait les membres du

 24   MUP. Il les a identifiés en citant leurs noms; par exemple, Sikirica, qui

 25   était commandant de Keraterm, et Dosen, nous savons qu'il était l'un des

 26   chefs d'équipe; et il a dit qu'ils portaient des ceintures blanches et que,

 27   par conséquent, ils faisaient partie de la police militaire. L'Accusation a

 28   déjà admis que Keraterm était dirigé par le MUP, concrètement par le poste


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  1   de sécurité publique de Prijedor. La pièce P7313 montre que les gardes au

  2   camp de Keraterm portaient des uniformes militaires.

  3   Ce témoin de l'Accusation dont il s'agit ici peut être pardonné

  4   puisqu'il a identifié de façon erronée les membres du MUP à Keraterm comme

  5   étant les membres de la police militaire de la VRS. Mais on ne peut pas

  6   pardonner cela à l'Accusation, puisqu'ils ont poursuivi et ils ont condamné

  7   Dosen et Sikirica en tant que membres de la police devant ce même Tribunal.

  8   Par conséquent, ils ne peuvent pas feindre l'ignorance. Ils font référence

  9   à la condamnation de Sikirica dans la note de bas de page 349 de leur

 10   mémoire en clôture. Le moment même où ils disent que la VRS était impliquée

 11   et que Sikirica et Dosen étaient deux membres de la VRS qui étaient

 12   impliqués, leur devoir et leur obligation est de dire à ce Tribunal :

 13   Monsieur le Président, nous faisons remarquer que nous savons que Dosen et

 14   Sikirica sont membres du MUP et non pas de la VRS. Au lieu de faire cela,

 15   l'Accusation ose présenter cette déclaration erronée en tant qu'une preuve

 16   positive concernant l'implication de la VRS en tant qu'une preuve

 17   principale ou primordiale.

 18   Pendant leurs réquisitoires, ils ont mentionné d'autres témoins qui

 19   auraient vu des personnes en uniforme militaire lors des ensevelissements.

 20   Pourtant, cela n'est pas en conformité avec d'autres éléments de preuve

 21   disant qu'ils portaient des vêtements civils. Donc, là, il y a un doute

 22   raisonnable. Et on fait abstraction du fait dont on a parlé, à savoir que

 23   les civils et la police portaient des uniformes. Il s'agit encore une fois

 24   d'un doute raisonnable. Il y avait des gens qui ont été mobilisés pour leur

 25   obligation de travail, comme des conducteurs, et c'est corroboré par

 26   d'autres éléments de preuve de l'Accusation. Cela aussi est un doute

 27   raisonnable.

 28   Regardons maintenant comment l'Accusation a établi le lien entre les


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  1   ensevelissements à Tomasica et Ratko Mladic et la VRS. De façon désespérée,

  2   l'Accusation affirme que des engins de terrassement de la VRS ont été

  3   utilisés, mais les éléments de preuve montrent que l'équipement de la VRS a

  4   été trouvé à Gradacac, dans la municipalité de Modrica, et non pas à

  5   Prijedor. Donc, il s'agit d'une distance de 140 kilomètres par rapport à

  6   Prijedor. C'est le Témoin Vujic qui en a parlé, page du compte rendu

  7   41 507.

  8   Monsieur le Président, vous allez vous souvenir que l'Accusation a

  9   essayé de présenter des éléments de preuve d'un expert contenus dans le

 10   rapport, et c'est P7441, préparé par les policiers de la police

 11   scientifique et technique des autorités de Bosnie-Herzégovine. Mais ils ont

 12   fait citer à la barre seulement un expert de trois experts, c'était

 13   Karahasanovic. Après le contre-interrogatoire, ce témoin a dit qu'il

 14   n'était pas en mesure de parler de l'expertise faite par d'autres experts

 15   dans d'autres parties du rapport, et vous - Monsieur le Président, ainsi

 16   que les Juges Fluegge et Moloto - vous avez décidé de ne pas vous fonder

 17   sur la partie concernant l'expertise dactyloscopique ou chimique de ce

 18   rapport préparé par deux autres auteurs à moins que ces experts ne soient

 19   cités à la barre. C'est transcript 36 555 et 67. Mais ces témoins n'ont pas

 20   été emmenés ici pour témoigner, donc ces parties pertinentes de la pièce

 21   P7441 doivent êtres exclues de tout examen des éléments de preuve. Cela

 22   inclut l'identification présumée des masques à gaz de la JNA et de la VRS

 23   qui étaient déterrés lors de l'excavation à Tomasica. Donc, il est choquant

 24   de voir que, bien que l'Accusation n'ait pas cité à la barre ces experts

 25   qui étaient mis en question pour les contre-interroger pour ce qui est de

 26   l'identification de ces masques à gaz, l'Accusation veut toujours se fonder

 27   sur la même partie du rapport pour prouver la culpabilité de Ratko Mladic,

 28   et ceci, même après que vous, Monsieur le Président, vous ayez dit à deux


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  1   reprises que la Chambre ne se fonderait pas sur ce rapport d'enquête.

  2   Comment osent-ils le faire ? Ils citent donc ces éléments de preuve dans la

  3   note de bas de page 304 au paragraphe 50 de la partie qui concerne

  4   Prijedor.

  5   Et c'est lors du contre-interrogatoire du Témoin Karahasanovic que la

  6   question de l'identification de ces masques à gaz a été posée. Elle ne

  7   pouvait pas répondre à cette question puisque son collègue qui a fait cette

  8   partie du rapport était absent.

  9   Regardons la diapositive suivante.

 10   Et regardons ce que les éléments de preuve nous montrent, à savoir

 11   que le masque à gaz civil et militaire qui ont été versés au dossier tous

 12   les deux, c'est D1090.

 13   Est-ce que sur la base de ces deux images, sans expertise, vous

 14   pouvez deviner et conclure que le modèle de la VRS est presque identique au

 15   modèle civil de ce masque à gaz ? Et c'est après des décennies, parce que

 16   le masque se trouvait enterré pendant des décennies.

 17   Et les témoins ne pouvaient se mettre d'accord pour dire qui a ouvert

 18   ces sacs où se trouvaient les éléments de preuve, donc ils se montraient du

 19   doigt l'un l'autre.

 20   Mais si vous respectez le droit, si vous appliquez le principe in

 21   dubio pro reo et la charge de la preuve, on ne peut établir aucun lien avec

 22   Tomasica en se basant sur ces éléments de preuve. On ne peut établir aucun

 23   lien entre Tomasica et mon client, donc vous devez prononcer

 24   l'acquittement.

 25   Regardons maintenant une autre tactique que l'Accusation a appliquée

 26   concernant Tomasica. Au paragraphe 52 de leur mémoire en clôture concernant

 27   Prijedor, l'Accusation affirme que :

 28   "Les éléments de preuve concernant les autopsies des personnes le


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  1   plus récemment exhumées sont conformes avec des meurtres qui résultaient

  2   des exécutions."

  3   Et ils citent Dr John Clark. Ensuite, ils se concentrent sur le

  4   nombre de blessures à la tête en disant que cela indique qu'il s'agissait

  5   des exécutions. Mais le Dr Clark a été trop intelligent pour aller au-delà

  6   de ce que la médecine légale a reconnu et il a explicitement écarté cette

  7   position de l'Accusation sous serment. Au lieu de confirmer que la cause du

  8   décès était l'exécution, le Dr Clark a admis qu'il ne pouvait pas exclure

  9   le fait que ces gens auraient, en fait, pu être tués au combat; transcript

 10   36 651, 12 et 14. Et le Dr Clark, donc, a explicitement refusé de conclure

 11   sur la base du nombre élevé de blessures à la tête que les personnes

 12   décédées sont mortes à la suite d'une exécution, pages du compte rendu

 13   36 681 jusqu'à 84. Donc, pourquoi l'Accusation n'est-elle pas honnête et ne

 14   dit-elle pas la vérité ? Pourquoi l'Accusation veut-elle mettre les mots

 15   dans la bouche du Dr Clark, les mots avec lesquels il n'était pas

 16   d'accord ?

 17   Hormis le conseil de l'Accusation, Ewa Tabeau a désespérément voulu

 18   prouver qu'il s'agissait des exécutions. Elle a également attribué

 19   certaines déclarations au Dr Clark, des déclarations qu'il n'avait pas

 20   prononcées. Ewa Tabeau a dit que les personnes décédées ont été fusillées

 21   de mitrailleuses ou de pistolets. Cela veut dire, en fait, qu'ils ont été

 22   fauchés par des balles tirées de mitrailleuses; pièce P7449, page 23. Ewa

 23   Tabeau, au début, a affirmé qu'il s'agissait des conclusions du Dr Clark et

 24   qu'il avait étayé sa conclusion que ces gens avaient été victimes

 25   d'exécution. Page du compte rendu 36 808, 30, et 31.

 26   Pourtant, après qu'on lui avait montré ou présenté le fait que même le Dr

 27   Clark, sur le rapport duquel s'est appuyée, n'a pas mentionné mot

 28   "mitrailleuses", Ewa Tabeau a été forcée d'admettre que le Dr Clark a


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  1   utilisé le mot "fusil avec des balles à grande vitesse", mais elle, elle a

  2   interprété de façon erronée cela comme étant "des mitrailleuses" et c'est

  3   sur quoi elle a fondé sa conclusion.

  4   Donc, l'Accusation et Ewa Tabeau cherchent désespérément à vous convaincre,

  5   Messieurs les Juges, de condamner mon client, eux veulent que cela soit

  6   fait. Mais uniquement un acquittement peut remédier à ce mépris flagrant de

  7   la justice et de la procédure régulière de la part de l'Accusation et du Dr

  8   Tabeau. Je vais vous rappeler que le Dr Stankovic nous a fait comprendre

  9   qu'au combat, les parties du corps les plus souvent ciblés et touchés sont

 10   justement la tête et la cage thoracique.

 11   Et pour ce qui est de Tomasica, finalement, l'Accusation, au paragraphe 57

 12   de leur mémoire en clôture dans la partie concernant Prijedor, encore une

 13   fois déforme une référence de ce qui, comme ils prétendent, représentent le

 14   carnet de notes de Ratko Mladic en disant que Ratko Mladic était au courant

 15   du fait que Simo Drljaca était en train de dissimuler ce qui s'était passé

 16   à Tomasica. Et en supposant qu'il s'agisse du carnet de notes de Mladic,

 17   leurs éléments de preuve au mieux permettent d'arriver à une conclusion

 18   complètement différente. Et il y a un autre problème majeur, ce présumé

 19   carnet de notes de l'accusé montre que l'accusé n'avait pas donné d'ordres

 20   concernant l'aide aux ensevelissements ou ré-ensevelissements ou tentatives

 21   de dissimuler ce qui avait été fait à Tomasica. Au contraire, ce document

 22   contient la réponse de l'accusé ou enregistre la réaction de l'accusé, à

 23   savoir que : Ils ont été tués et, par la suite, ils voulaient s'en

 24   débarrasser et en fait cela indique que l'accusé voulait qu'une enquête

 25   soit menée et que les résultats de l'enquête soient bien préservés pour que

 26   ces résultats ne tombent pas entre les mains des gens non autorisés.

 27   Et, donc, pour ce qui est de ces éléments de preuve, il est clair que la

 28   VRS et l'accusé ont appris pour la première fois en 1993 ce qui s'était à


Page 44699

  1   Tomasica, l'accusé n'a pas approuvé d'ensevelissements de Tomasica, ni ré-

  2   ensevelissements, n'a pas autorisé ses subordonnés à apporter de l'aide

  3   pour ce qui est de tout cela, il a ordonné qu'une enquête appropriée soit

  4   menée concernant ces événements et que les résultats de ces enquêtes soient

  5   bien préservés et transmis aux organes autorisés et compétents.

  6   Donc au vu de ces éléments de preuve, tous les soldats de la VRS qui

  7   auraient pu prendre part à ces événements à Tomasica avaient fait cela sans

  8   autorisation, ils ont agi pour des raisons personnelles, et ils ont agi

  9   contrairement aux ordres pour lesquels il est dit qu'ils auraient été

 10   donnés par l'accusé, par Ratko Mladic. Donc, on peut pas imputer la

 11   responsabilité pénale à l'accusé sur la base de ces éléments de preuve.

 12   Il faut que nous disions que la semaine dernière, nous avons donc pu

 13   entendre que le général Mladic et M. Drljaca étaient assez proches. Donc,

 14   c'est la première fois que nous avons entendu cela lors du réquisitoire. Et

 15   pourquoi les éléments de preuve concernant Prijedor regorgent de références

 16   à Drljaca et il n'y a pas d'indication selon laquelle Mladic aurait été

 17   avec lui ? Et pour ce qui est de la situation de Tomasica, et nous avons

 18   discuté de cela, le général Mladic n'était pas en relation avec Drljaca.

 19   L'Accusation veut que nous croyions que des documents montrent qu'il y

 20   avait une animosité entre Mladic et Drljaca. Cela montre que Drljaca a

 21   caché ce qui s'était passé à Tomasica à Mladic. Et pour ce qui est de ces

 22   éléments de preuve, l'Accusation affirme que Mladic et Drljaca étaient des

 23   amis. Cela veut dire qu'il y a un doute raisonnable, et qui ne se sont pas

 24   acquittés de leur charge de la preuve et que vous devez prononcer

 25   l'acquittement.

 26   Passons à présent à la soi-disant entreprise criminelle commune principale.

 27   L'Accusation ne s'est pas acquittée de la charge de la preuve et donc ne

 28   peut en porter la condamnation du général Mladic pour les raisons


Page 44700

  1   suivantes.

  2   En vertu de la Constitution de la RSFY de 1974, la Bosnie-Herzégovine

  3   possédait un système de gouvernement tripartite comprenant les trois

  4   groupes ethniques, et plusieurs mécanismes de protection de l'égalité entre

  5   les groupes. Témoins Dodik et Kecmanovic, page 42 212 et 23 807. Les

  6   Musulmans et Croates de Bosnie ont violé cette constitution en demandant

  7   l'indépendance, alors que les Serbes de Bosnie oeuvraient de bonne foi pour

  8   une solution pacifique, estimant "qu'il était préférable de négocier

  9   pendant des années à faire la guerre quelques jours", Témoin Barasin,

 10   compte rendu d'audience page 28 773. Alors que les Serbes oeuvraient de la

 11   sorte, le SDA s'est mis à préparer la guerre en accumulant des armes et en

 12   s'armant; D619, D614, D790 - notamment.

 13   L'effet de voir les Musulmans et Croates de Bosnie former des groupes armés

 14   a créé la peur et la panique chez les Serbes, D675. Le climat de peur et

 15   d'insécurité s'est aggravé lorsque des groupes paramilitaires musulmans se

 16   sont mis à mener des attaques; D1690, page 8; D789, paragraphe 36, contre

 17   des villages serbes, notamment comme Vecici, D1030. Le climat s'est

 18   détérioré et les tensions se sont accrues et on a parlé de "catastrophe",

 19   "d'anarchie totale", et "de chaos et de terreur à l'encontre des membres de

 20   la JNA." D414, page 1.

 21   C'est à cette période, le 12 mai 1992, que l'accusé a été nommé commandant

 22   de l'état-major principal de la VRS. Le général Mladic a été chargé de

 23   créer une armée à partir d'une série de groupes, et par notamment des

 24   groupes militaires à base municipale, dont ces unités de la Défense

 25   territoriale, des conscrits civils, des officiers de réserve et des

 26   volontaires possédant chacun une expérience et des compétences en matière

 27   de combat variables. L'intégration de ces groupes structurellement séparés

 28   et distincts constituait un processus très long; le témoin Kovac a témoigné


Page 44701

  1   à ce sujet, compte rendu d'audience page 41 356 et 357.

  2   À l'accusé, il est reproché d'avoir contribué à l'entreprise

  3   criminelle commune principal par l'exercice compétent et effectif de son

  4   commandement et de son contrôle en tant que commandant de l'état-major

  5   principal de la VRS. Toutefois, lors de ces étapes initiales, le

  6   commandement et le contrôle du général Mladic étaient compromis par une

  7   série de facteurs.

  8   L'Accusation dans son mémoire en clôture prétend que le 2e District

  9   militaire de la JNA était une "armée tout à fait fonctionnelle qui a

 10   participé à l'entreprise criminelle commune en Bosnie", compte rendu

 11   d'audience page 44 389, et que Mladic a repris cette armée tout à fait

 12   fonctionnelle après sa désignation en tant que commandant de l'état-major

 13   principal de la VRS. Toutefois, l'Accusation omet de dire qu'au départ,

 14   l'état-major principal de la VRS comportait seulement 12 officiers, dont

 15   cinq étaient des généraux. Les experts militaires de l'Accusation nous

 16   l'ont dit, Butler, à la page 16 630, et Dannatt à la page 19 165. L'état-

 17   major principal de la VRS était également localisé dans un poste de

 18   commandement de réserve appartenant à la 1ere Armée de Belgrade; Theunens

 19   en a parlé, compte rendu d'audience page 20 513. Alors que quant à lui, la

 20   Brigade de Sarajevo, a reçu le bâtiment de l'ancien commandement du 4e

 21   Corps de la JNA, D608, paragraphe 21, qui était un poste de commandement

 22   bien mieux équipé. Mais l'Accusation veut vous faire croire que Ratko

 23   Mladic et ses 12 hommes étaient la ligue des super héros, prêts à en

 24   découdre avec l'ABiH et le monde entier.

 25   Le manque de soldats, d'officiers, et d'officiers subalternes formés

 26   professionnellement a nui à la stabilité de toute l'armée; Témoin de

 27   l'Accusation Milovanovic, compte rendu d'audience 17 110, P4381. Ce fait

 28   est longuement développé dans le mémoire en clôture de la Défense aux


Page 44702

  1   paragraphes 651 à 676. J'en donne quelques exemples : Milorad Sehovac,

  2   commandant de brigade du SRK, s'est plaint de ce que sa brigade était

  3   censée comporter 82 officiers, mais il n'en disposait que de trois, en ce,

  4   y compris lui-même; D559, paragraphe 31.

  5   Comment peut-on raisonnablement penser que trois officiers formés

  6   professionnellement étaient capables d'exercer un contrôle et un

  7   commandement complet sur à peu près 1 172 conscrits ? D566, page 5. De la

  8   même manière, le 5 mars 1993, le colonel Balic de la 1ere Brigade de Birac

  9   a signalé un manque grave d'officiers de l'active au niveau des pelotons,

 10   compagnies et bataillons; P5241, page 2.

 11   Un autre facteur important qui a compromis la capacité du général à

 12   exercer le commandement et le contrôle effectif des forces de la VRS était

 13   le refus des dirigeants civils de décréter l'état de guerre. Ce refus a

 14   créé, comme l'a indiqué dans son témoignage le général Sokanovic, de

 15   nombreux problèmes. Un état de guerre n'avait pas été décrété, si bien que

 16   l'armée fonctionnait selon les règles applicables en temps de paix, même si

 17   elle était dans les faits déjà en guerre. Cela rendait le commandement très

 18   difficile, ainsi que les autres activités et responsabilités des

 19   commandements. C'est ce qu'a dit le général Sokanovic, compte rendu

 20   d'audience 35 679, nous avons également cela dans la pièce à conviction

 21   P2201, paragraphes 4 à 9, et 11.

 22   Les soldats de la VRS profitaient de la situation pour abandonner

 23   leurs positions, P5241, et ignoraient les ordres de rester en place et de

 24   se battre, D1661.

 25   Alors que l'Accusation veut vous faire croire que l'accusé disposait

 26   de l'autorité absolue pour mener la guerre - c'est ce qui est indiqué dans

 27   le mémoire en clôture, au compte rendu d'audience pages 44 332 jusqu'à 336

 28   - les faits eux-mêmes témoignent d'un scénario radicalement différent.


Page 44703

  1   Pendant toute la guerre, le président Karadzic a concentré entre ses mains

  2   un pouvoir important, déposition de Milovanovic, compte rendu d'audience 16

  3   909. Et cela est indiqué dans le mémoire en clôture de la Défense, aux

  4   paragraphes 551 à 577, et au paragraphe 648. Le commandement Suprême,

  5   composé uniquement de dirigeants politiques, était l'organe décisionnel

  6   stratégique qui surplombait le commandement de la VRS; le général

  7   Milovanovic, compte rendu d'audience 16 909. Singulièrement, le général

  8   Mladic ne disposait pas du droit de vote pour les décisions du commandement

  9   Suprême, et n'était autorisé à participer aux sessions que "sur

 10   invitation", P3042.

 11   D'autres limitations de l'autorité du général comprennent son

 12   incapacité à influencer la sélection des commandants de corps, qui était le

 13   droit exclusif des dirigeants civils, P2200. Il ne pouvait non plus

 14   influencer l'élaboration des six objectifs stratégiques au-delà des

 15   opérations militaires normales; expert de l'Accusation Donia, compte rendu

 16   d'audience pages 15 525 à 526; et déposition du général Milovanovic, compte

 17   rendu d'audience 16 973 à 74.

 18   Si l'Accusation a cherché à convaincre le Tribunal que le général

 19   Mladic et le président Karadzic "discutaient comme des frères" et que leur

 20   objectif était "d'avancer ensemble vers le même objectif", compte rendu

 21   d'audience page 44 334, comment expliquer alors les moyens de preuve qui

 22   montrent les tentatives de Karadzic de déposer Mladic de son poste de

 23   commandant dans la VRS, une fois en septembre 1993 et une autre fois, le 4

 24   août 1995 ? Cela est abordé dans le mémoire de la Défense, paragraphe 565,

 25   et voir également témoin de l'Accusation Skrbic, pages 14 012 à 14 013.

 26   Bien loin d'une direction collégiale travaillant ensemble et oeuvrant au

 27   supposé projet criminel commun, le rapport entre Karadzic et Mladic

 28   n'allait pas au-delà d'une coopération opérationnelle normale. Cela révèle


Page 44704

  1   qu'aucune entreprise criminelle commune ne pouvait exister. Cela révèle un

  2   doute raisonnable.

  3   Dans son mémoire en clôture, l'Accusation prétend, compte rendu

  4   d'audience page 44 332, que la Défense déforme le concept de chaîne de

  5   commandement et le rend sans effet. La Défense le répète : le général

  6   donnait des ordres sur le plan du commandement stratégique, mais ce sont

  7   les commandants de corps au niveau opérationnel qui décidaient de la

  8   manière dont une mesure serait exécutée - paragraphe 644 du mémoire de la

  9   Défense et pièce P2201, paragraphe 2.5 - par leurs subordonnés sur le plan

 10   tactique.

 11   C'est précisément ainsi que le général Dannatt, convoqué par

 12   l'Accusation, a décrit le fonctionnement des armées de l'OTAN, P2629,

 13   paragraphe 36. Alors, pourquoi l'Accusation doit-elle désavouer de manière

 14   répétée ses propres experts militaires ? L'Accusation veut que la Chambre

 15   pense que l'accusé exerçait un contrôle exclusif sur la VRS à tous les

 16   niveaux de commandement, mais cela n'est pas corroboré par les éléments de

 17   preuve; mémoire en clôture de la Défense, paragraphes 643 à 647. L'accusé

 18   était limité par les principes et la structure de la VRS et ne pouvait pas

 19   agir en toute impunité et n'exerçait pas non plus une autorité absolue.

 20   Je pense que nous pouvons faire la prochaine pause.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vous ai vu jeter un œil sur

 22   l'horloge et je savais que vous n'alliez pas l'oublier.

 23   Nous allons faire une pause et reprendrons l'audience à 12 heures 15.

 24   --- L'audience est suspendue à 11 heures 55.

 25   --- L'audience est reprise à 12 heures 17.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Maître Ivetic.

 27   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'ai deux

 28   corrections à apporter au compte rendu d'audience à la suite de mes lapsus.


Page 44705

  1   A la page 21, ligne 20, ce qui a été transcrit comme P3528 est en réalité

  2   P3258. Et je le répète, c'était un lapsus de ma part. Ensuite, à la page

  3   40, ligne 15, je me suis trompé sur P2201 où j'ai parlé des paragraphes 4

  4   jusqu'à 9 et 11. Je devais dire paragraphes 4.9 à 4.11.

  5   A présent, je vais poursuivre mon exposé.

  6   Enfin, l'accès limité à des communications fiables et l'incapacité à

  7   recevoir des informations relatives au combat en temps réel correct ont nui

  8   à la capacité du général à contrôler et commander de manière effective ses

  9   subalternes. Si la VRS utilisait un système de rapports complet, y compris

 10   des rapports de combat quotidiens, ces rapports ont été compilés et

 11   transmis au commandement Suprême. Et à moins que le général ne les demande

 12   explicitement, ils n'étaient pas portés à sa connaissance; Trkulja, compte

 13   rendu d'audience 35 069 jusqu'à 72; Témoin Banduka, page 27 310.

 14   Il y a eu des cas où des subalternes de la VRS outrepassaient leurs

 15   ordres à l'insu du général. Cela nuisait grandement à sa capacité à

 16   contrôler et commander effectivement les forces de la VRS. Le Témoin de

 17   l'Accusation RM511 a rappelé les problèmes sérieux lorsque des officiers

 18   entreprenaient des actions de leur propre chef; compte rendu d'audience

 19   pages 5 068 à 5 069.

 20   Nous avons même un incident concernant un officier qui, à l'insu de

 21   son commandant, sans son accord, a emmené un groupe dans le but de capturer

 22   Mojmilo. Ce groupe a essuyé de graves pertes et cette initiative de

 23   l'officier a été décrite comme téméraire et n'étant pas le comportement

 24   d'un soldat formé correctement; compte rendu d'audience 5 068 à 5 069.

 25   Le dossier montre aussi pourquoi l'accusé avait de bonnes raisons de

 26   considérer comme non fiables les rapports des organisations

 27   internationales, les articles de la presse internationale. D'abord, il

 28   estimait que les organisations internationales avaient un parti pris contre


Page 44706

  1   les Serbes. Par exemple, je vous renvoie aux paragraphes 1 728 à 1 733 du

  2   mémoire en clôture de la Défense au sujet de l'impartialité de la FORPRONU

  3   à Sarajevo, telles que des enquêtes sélectives et l'utilisation importante

  4   de données et de personnels de l'ABiH, comme le témoignage de plusieurs

  5   témoins de l'Accusation et de la Défense le montre, tels que Mole, Fraser,

  6   Thomas et autres.

  7   Deuxièmement, l'accusé était au courant de la désinformation de

  8   l'ABiH, et cela est examiné aux paragraphes 2 507 à 2 512 du mémoire en

  9   clôture de la Défense. Il s'agit notamment d'exagérations fréquentes du

 10   gouvernement de la BiH de la situation dans le but de provoquer une

 11   réaction internationale, D1298, paragraphe 19.

 12   Troisièmement, nous avons vu de nombreux exemples où la presse

 13   internationale présentait des faits de manière erronée sous un jour

 14   favorable à l'ABiH. Cela est examiné aux paragraphes 2 515 à 2 517.

 15   A Srebrenica, la FORPRONU savait pertinemment que des armes étaient

 16   fournies à l'ABiH via, par exemple, l'aéroport de Tuzla, qui se trouvait

 17   sous le contrôle des Nations Unies. Il existait un effort constant

 18   d'acheminer des armes vers Srebrenica et Zepa pour assurer

 19   l'approvisionnement de la 28e Division, l'expert de l'Accusation Butler,

 20   pages 16 706 à 16 707. Par exemple, un C-130 turc escorté par des F16

 21   américains a atterri à Tuzla lorsque les radars étaient désactivés, D1240,

 22   paragraphe 13. Cet aéronef a fourni des armes aux Musulmans de Bosnie,

 23   Témoin GRM037, compte rendu d'audience 39 017 à 39 018. Toutefois, aucune

 24   mesure n'a été prise pour empêcher les violations par les Musulmans de

 25   Bosnie des résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies interdisant

 26   l'importation d'armes et d'équipement militaire. En revanche, on utilisait

 27   la force et menait des actions contre la VRS comme si l'on "attendait qu'un

 28   fait se produise", le général Rupert Smith, pages 7 417 à 7 419.


Page 44707

  1   Même si Srebrenica était censée être un havre de sécurité, la

  2   FORPRONU n'avait pas démilitarisé Srebrenica en 1993 jusqu'à 1995, à la

  3   suite de l'accord sur la démilitarisation. De la même manière, le Bataillon

  4   néerlandais s'est abstenu de désarmer la 28e Division; P23; Témoin Van

  5   Duijn, compte rendu d'audience pages 10 334 à 336; Témoin Franken, compte

  6   rendu d'audience 10 751 à 52.

  7   Et même si les Nations Unies ont mis en place un centre de collecte

  8   des armes à Srebrenica, les Musulmans de Bosnie n'ont remis que les

  9   armements anciens et hors d'usage; D270, page 5; et Témoin Butler, page

 10   16 793. Armes qui ne leur étaient d'aucune utilité, compte rendu d'audience

 11   pages 13 400 à 401. Et, de nouveau, pas de réaction des Nations Unies.

 12   L'acheminement de marchandises en contrebande était également monnaie

 13   courante par le biais des convois humanitaires, monnaie courante à

 14   Srebrenica, Zepa et Gorazde; D1615 et témoignage de GRM037, page 39 018.

 15   Plusieurs fonctionnaires des Nations Unies ont même reconnu que ces convois

 16   étaient utilisés pour approvisionner l'ABiH, compte rendu d'audience page

 17   7 528, général Smith; pages 10 673 à 74, général Nikolai pour Sarajevo.

 18   Mais ils n'ont jamais fait quoi que ce soit pour l'empêcher. De la même

 19   manière, les Nations Unies étaient tout à fait au courant de l'existence du

 20   marché noir à Srebrenica, comme le colonel Boering l'a indiqué, compte

 21   rendu d'audience page 10 038.

 22   Le transparent suivant, s'il vous plaît.

 23   L'INTERPRÈTE : Deux corrections demandées au compte rendu d'audience. Dans

 24   la toute dernière période, lorsqu'il est dit "impartialité de la FORPRONU",

 25   remplacez par "partialité de la FORPRONU". Lorsqu'il a été dit "Etats-

 26   Unis", remplacez par "Nations Unies".

 27   M. IVETIC : [interprétation] S'ajoutent à cela de nombreux témoins qui ont

 28   parlé de la partialité des Nations Unies et des entrées illégales d'armes à


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  1   Gorazde et à Bihac. Par exemple, à Gorazde, le Témoin GRM097 s'est dit

  2   choqué de voir des soldats bosno-musulmans descendre d'un véhicule des

  3   observateurs militaires des Nations Unies à Gorazde, compte rendu

  4   d'audience page T40089, Témoin GRM097. Et comme Segers, un officier des

  5   Nations Unies, l'a dit dans son témoignage, aux environs de Bihac, y

  6   compris le personnel des Nations Unies participaient aux approvisionnements

  7   illégaux de l'ABiH. Il a aussi déclaré que des hélicoptères étaient

  8   utilisés pour faire entrer illégalement des caisses de munitions dans la

  9   période où prévalait l'embargo; pièce D1465, page 4; pièce D1466, page 3.

 10   Le 29 mai 1993, des messages provenant de l'ambassade de la Bosnie-

 11   Herzégovine à Zagreb ont confirmé que des quantités importantes d'armes de

 12   l'armée étaient envoyées à Bihac en provenance de la Croatie.

 13   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je ne suis pas sûr que nous soyons en

 14   train de regarder la bonne diapositive.

 15   M. IVETIC : [interprétation] Je pense que, effectivement, c'était la

 16   précédente.

 17   Mladic n'a cessé de se plaindre au sujet de ces pratiques de contrebande et

 18   du rôle joué par les Nations Unies à cet égard; pièce D142, pages 1 et 2;

 19   pièce P785, paragraphe 57. Toutefois, rien n'a été fait au sujet de ces

 20   protestations légitimes. Est-ce que tous ces éléments de preuve démontrent

 21   que les Nations Unies adoptaient un comportement impartial et traitaient

 22   les Serbes de la même façon que l'ABiH ? Non.

 23   Je demande maintenant la diapositive suivante.

 24   Le dossier a révélé les raisons pour lesquelles l'accusé avait de

 25   bonnes raisons de considérer qu'on ne pouvait pas se fier aux médias

 26   internationaux. A l'époque, des subordonnés ont informé l'accusé que les

 27   reportages des médias n'étaient pas objectifs; par exemple, dans la pièce

 28   P3877, page 2, où ils étaient même fabriqués de toutes pièces. Pièce P3151,


Page 44709

  1   page 3.

  2   L'état-major principal estimait également que les reportages des

  3   médias n'étaient pas dignes de confiance. En page 45 de la pièce P338 ainsi

  4   que dans le rapport d'aptitude au combat de la VRS de 1992, nous voyons

  5   "une diffusion orchestrée de mensonges concernant des massacres présumés…

  6   et d'autres inventions médiatiques qui ont servi le but de donner une image

  7   déformée de la situation."

  8   Le journaliste de la BBC Martin Bell concourt à légitimer cette conviction

  9   dans sa déposition où il témoigne, pages du compte rendu d'audience 7 865

 10   et 6, que selon lui, les journalistes internationaux se servaient d'un

 11   cadre de pensée qui reposait sur le fait que les Musulmans de Bosnie

 12   étaient les gentils et les Serbes de Bosnie, les méchants. Donc :

 13   "La question n'était pas tant qu'il y avait un parti pris conscient

 14   mais que rien ne sortait jamais de la partie de Sarajevo sous contrôle du

 15   gouvernement de Bosnie-Herzégovine et voyait donc la guerre du point de ce

 16   gouvernement."

 17   Ces propos sont significatifs, car il ne suffit pas à l'Accusation de

 18   se contenter de prouver qu'un accusé a été informé que des crimes auraient

 19   été commis. Je rappelle aux Juges de la Chambre - et à vous, Monsieur le

 20   Président - ce qui s'est passé dans l'affaire Milutinovic. Comme dans le

 21   procès qui nous intéresse ici, le président Milutinovic recevait des

 22   informations, des articles ou des reportages des représentants

 23   internationaux, de ses subordonnés et des médias, et la Chambre Milutinovic

 24   a considéré qu'il avait été informé et, donc, avait connaissance des

 25   crimes. Toutefois, ceci n'a pas suffi pour considérer que les critères

 26   régissant l'élément moral étaient remplis, et ce, pour deux raisons.

 27   D'abord, la Chambre s'est posée la question de savoir si Milutinovic avait

 28   cru à la véracité de ces informations et la Chambre a conclu qu'il n'avait


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  1   pas fait confiance à ces informations. La Chambre a déclaré que les

  2   informations provenant de sources serbes soit ne disaient pas un mot de la

  3   commission de crimes ou soit, lorsque quelques mots étaient dits, ces

  4   allégations étaient considérées comme de la propagande par la communauté

  5   internationale.

  6   Et puis, la deuxième raison, c'est que Milutinovic a cru que les autorités

  7   pertinentes répondraient aux allégations. En l'espèce, même s'il y a eu

  8   quelque problème avec le système judiciaire, l'accusé s'est raisonnablement

  9   attendu à ce que les autorités responsables réagissent à ces infractions.

 10   Nous avons vu qu'il avait délégué à ses subordonnés les responsabilités de

 11   procéder à des arrestations ou de lancer des enquêtes; pièce P3066, pages

 12   du compte rendu d'audience T16953 à T16954 pour Milovanovic; pièce P244,

 13   paragraphe 32; pièce P2201, pages 21 à 27.

 14   Et qu'il était attendu de ces commandants qu'ils soient au courant de leurs

 15   responsabilités s'agissant d'imposer la discipline à leurs troupes. Il y a

 16   eu aussi une procédure engagée pour infractions pénales graves, pièce P244,

 17   paragraphe 33.

 18   Par ailleurs, l'accusé en personne a interdit à plusieurs reprises la

 19   commission des crimes; pièce P474; pièce D187; D1949; P1094; P3673. Et la

 20   Chambre a vu des exemples de rapports concernant des crimes, rapports

 21   soumis par des subordonnés et envoyés vers les échelons plus élevés de la

 22   chaîne de commandement, dans lesquels il était indiqué qu'ils avaient réagi

 23   ou qu'ils étaient en train de réagir à ces infractions. Par exemple, je

 24   renvoie la Chambre à la pièce P2843, où nous lisons :

 25   "Une enquête est en cours. Un rapport spécial va suivre."

 26   Et à la pièce P3818, où nous lisons :

 27   "Des représailles ont été commises par des soldats en permission … mais des

 28   actions énergiques ont été entreprises par la police militaire du 1er Corps


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  1   de Krajina et ces actions énergiques ont mis fin à un tel comportement."

  2   Je remarque ici que ce rapport établit aussi de la façon la plus claire que

  3   ces crimes n'avaient été ni ordonnés, ni supervisés par la police de la

  4   VRS. Ainsi, encore une fois, nous sommes en présence d'un doute

  5   raisonnable.

  6   Avoir connaissance des crimes en soi ne suffit pas aussi en raison du fait

  7   que dans plusieurs cas ces crimes étaient commis par des personnes sur

  8   lesquelles l'accusé n'exerçait aucun pouvoir. L'Accusation avance que

  9   Mladic "était au courant de crimes commis par les forces serbes."

 10   L'expression "forces serbes" englobant la police civile, les paramilitaires

 11   et même les villageois de la région. Dans des cas de ce genre, comme y

 12   compris l'expert de l'Accusation, M. Theunens l'a dit dans sa déposition,

 13   tout ce que la VRS pouvait faire consistait à rendre compte de tels crimes

 14   aux instances responsables de ces crimes; pages 20 624 à 20 625 du compte

 15   rendu d'audience.

 16   Et nous avons vu que l'accusé s'est adressé à plusieurs reprises aux

 17   autorités. Prenant les paramilitaires comme exemple, la Chambre a examiné

 18   les lettres que l'accusé a adressées au président Karadzic, pièces P3095 et

 19   D1503.

 20   Donc, finalement, sur le sujet de la connaissance que l'accusé pouvait

 21   avoir des crimes, les éléments de preuve cités par l'Accusation doivent

 22   être examinés avec le plus grand soin car ils n'apportent pas la preuve que

 23   l'accusé avait connaissance de crimes commis par la VRS. Par exemple, il

 24   est impossible de conclure à partir du fait que l'accusé aurait été informé

 25   des décès qu'il avait la moindre raison de croire que ces décès

 26   constituaient des actes criminels et n'étaient pas des événements

 27   malheureux ou des dommages collatéraux, certes, mais légaux, ou qu'il

 28   s'agissait de décès légitimes de combattants.


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  1   Et puis, l'accusé qui rencontrait une personne dont il avait légitimement

  2   le devoir de la rencontrer, eh bien, ce fait ne prouve pas que cette

  3   personne a informé l'accusé de l'existence d'un crime qu'elle venait de

  4   commettre ou qu'elle était sur le point de commettre. La destruction de

  5   zones civiles habitées par des non-Serbes n'apporte pas la preuve que des

  6   crimes ont eu lieu puisqu'il pouvait aussi s'agir d'objectifs militaires

  7   légitimes. Les éléments de preuve indiquant qu'un subordonné était au

  8   courant qu'un crime avait été commis n'apportent pas la preuve que l'accusé

  9   avait été effectivement informé lui-même.

 10   Des rapports concernant des crimes n'indiquent pas qui était la personne

 11   responsable et dans quelques cas identifient clairement une personne qui

 12   n'avait aucun lien avec la VRS, donc cela n'apporte pas la preuve que

 13   l'accusé avait la connaissance de ces crimes. Par exemple, je renvoie la

 14   Chambre à la pièce P3951, où, en page 3, il est indiqué que la police

 15   civile avait commis un massacre.

 16   Tout comme le général n'était pas au courant des actes de ses subordonnés

 17   qui ne relevaient pas de la chaîne de commandement de la VRS, il n'était

 18   pas non plus responsable des actes criminels commis par des organismes

 19   extérieurs à la VRS comme, par exemple, les cellules de Crise.

 20   Je demande la diapositive suivante.

 21   Les cellules de Crise n'étaient pas des instances criminelles. Comme le

 22   témoin de l'Accusation, M. Hanson, l'a déclaré, les cellules de Crise

 23   existaient déjà en vertu de la loi yougoslave, pièce P379. Nous avons aussi

 24   le Témoin Milincic qui a confirmé, page 28 378 du compte rendu d'audience,

 25   ce fait. Et nous le voyons également dans la pièce D732, paragraphe 8. Les

 26   cellules de Crise étaient également utilisées par les Musulmans et les

 27   Croates, pièce P379, page 5, note en bas de page numéro 5.

 28   Les cellules de Crise étaient prévues pour reprendre en main les devoirs


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  1   légaux consistant à gérer une municipalité lorsque les instances régulières

  2   chargées de cette action n'avaient plus la capacité de fonctionner,

  3   notamment en temps de guerre. Pièce D492, paragraphe 5, par exemple.

  4   La Chambre a eu sous les yeux des éléments de preuve montrant que ces

  5   cellules de Crise ont exercé leurs fonctions gouvernementales régulières,

  6   comme par exemple le maintien en capacité de fonctionner des services

  7   publics, l'obtention de vivres et d'approvisionnements pour les habitants

  8   et la garantie de fonctionnement des écoles; pièce P413, pages 6 à 8; pièce

  9   D827, page 15, pages 87 à 88; pièce P3913, page 6; pièce P2414; et pièce

 10   P3172, paragraphe 2 et paragraphes 7 à 9.

 11   L'INTERPRÈTE : Intervention du Juge Moloto pour obtenir une correction des

 12   chiffres, ce qui a déjà été fait par l'interprète qui parle en ce moment.

 13   M. IVETIC : [interprétation] Aux paragraphes 447 à 460 du mémoire en

 14   clôture de la Défense, nous voyons que les cellules de Crise ont exprimé

 15   des préoccupations à l'égard de tous les habitants, quelle que soit leur

 16   appartenance ethnique. Dans le cadre de leurs fonctions, le Dr Hanson a

 17   reconnu que les cellules de Crise étaient autorisées par le droit

 18   yougoslave à mener à bien des obligations liées à la défense; pièce P379,

 19   paragraphe 14; voir aussi pièce D1937, pages 1 à 2. Et notamment, à

 20   compléter les effectifs des unités de guerre au sujet desquelles M. Hanson

 21   a admis que ces cellules de Crise avaient une obligation préexistante "ne

 22   faisant l'objet d'aucune controverse", pages 4 206 à 4 207 du compte rendu

 23   d'audience. Donc, les cellules de Crise et les militaires avaient une

 24   interaction qui n'avait rien de criminel.

 25   L'Accusation n'a pas réussi à établir un lien entre les cellules de Crise

 26   et l'accusé. Le général Mladic n'avait absolument aucun rôle dans leur

 27   création; il n'était même pas présent sur place. Depuis le début, les

 28   cellules de Crise, pièce P408, n'étaient pas prévues pour intégrer dans ses


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  1   membres du personnel militaire. Aux paragraphes 478 à 492 du mémoire en

  2   clôture de la Défense, nous passons en revue les éléments de preuve qui

  3   démontrent que la VRS et les cellules de Crise relevaient de chaînes de

  4   commandement totalement distinctes. Nous discutons également dans ce

  5   passage de notre mémoire l'existence d'unités armées crées et commandées

  6   par les cellules de Crise et dont l'accusé, par conséquent, n'avait aucune

  7   responsabilité quant au comportement. L'Accusation a concédé, au paragraphe

  8   597 de son mémoire en clôture, que :

  9   "Aucun témoin de la VRS n'a dit dans sa déposition qu'il avait obéi à un

 10   ordre relevant d'une autre chaîne de commandement que la sienne et qu'aucun

 11   membre des cellules de Crise n'a témoigné qu'il avait émis un ordre

 12   quelconque adressé à des unités de la VRS."

 13   Aux paragraphes 493 à 498 du mémoire en clôture de la Défense, nous citons

 14   également des éléments de preuve qui montrent que les membres de la VRS ne

 15   faisaient pas partie du système de prise de décision des cellules de Crise,

 16   dont ils n'étaient pas membres; pages 26 550 à 26 551 du compte rendu

 17   d'audience, témoignage Davidovic; page 31 488, témoignage Javoric; pièce

 18   D880, paragraphe 17, pages 34 338 à 34 390 du compte rendu d'audience,

 19   témoignage Basara; page 24 751 du compte rendu d'audience, témoignage

 20   Adzic; pièce P3747; pièce D827, pages 7 à 9.

 21   Lorsque le personnel de la VRS assistait à des réunions de cellules de

 22   Crise, leur rôle consistait simplement à rendre compte sur des questions

 23   militaires; page 34 388 du compte rendu d'audience, témoignage Basara;

 24   pièce D982, paragraphe 74; sans avoir le droit de voter sur les décisions,

 25   page 34 388, témoignage Basara.

 26   Il y a eu des désaccords fondamentaux entre la VRS et les cellules de Crise

 27   pendant toute la durée du conflit, y compris des problèmes récurrents

 28   concernant les cellules de Crise et leurs tentatives de s'ingérer dans les


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  1   affaires des forces armées. A un certain moment, des autorités de la RAK

  2   ont cherché à obtenir le limogeage de l'accusé en tant que commandant;

  3   pièce D839, page 5. Ces accrochages sont discutés dans les paragraphes 502

  4   à 508 du mémoire en clôture de la Défense. Ces accrochages créent un doute

  5   raisonnable et doivent donc conduire à l'acquittement.

  6   Sur la question du désarmement des municipalités, les éléments de preuve

  7   ont démontré que contrairement aux allégations formulées, il n'y a pas eu

  8   de plan criminel de la part des cellules de Crise en vue de désarmer les

  9   non-Serbes de façon à ce que la VRS puisse ensuite attaquer des civils non-

 10   serbes désarmés. D'abord, dans de nombreux cas, la VRS n'avait pas encore

 11   été créée lorsque les prises de pouvoir dans les municipalités ont été

 12   terminées. Deuxièmement, les cellules de Crise sont des gouvernements

 13   municipaux, elles n'avaient pas seulement le pouvoir légal de désarmer les

 14   civils, mais elles avaient le devoir de maintenir l'ordre. Les instructions

 15   concernant le désarmement concernaient tous les groupes ethniques. Je

 16   renvoie la Chambre à la pièce D81, Conclusions de la cellule de Crise de la

 17   RAK, en date du 18 mai 1992.

 18   D'autres organisations distinctes regroupaient les forces de police serbes,

 19   que j'appellerai à partir de maintenant le MUP de la Republika Srpska. Eh

 20   bien, ce MUP de la RS est largement évoqué en tant qu'organisme criminel

 21   dans la description de la thèse de l'Accusation concernant la création de

 22   "structures parallèles civiles et militaires" en tant que mécanisme de

 23   nettoyage ethnique et non de gouvernement légitime; page 44 440 du compte

 24   rendu d'audience, mémoire préalable au procès de l'Accusation, paragraphe

 25   34. En réalité, le MUP de RS a fonctionné en tant qu'institution publique

 26   très importante, qui garantissait le maintien de l'ordre face à des forces

 27   armées et agressives composées par les Musulmans de Bosnie qui étaient

 28   déterminés à lancer la guerre contre les Serbes de Bosnie.


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  1   Le MUP de la RS était un organisme civil avec une structure de commandement

  2   organisée et responsable devant les structures du gouvernement civil;

  3   mémoire de la Défense, paragraphes 533 à 547; pièce P2362, paragraphe 5.2;

  4   témoignage de RM015, pièce P3855, page 3. Tout acte criminel perpétré par

  5   les officiers du MUP de RS était la responsabilité de Mico Stanisic,

  6   ministre de l'Intérieur, qui commandait les unités du MUP de la RS.

  7   Mais les carnets utilisés par l'Accusation pour documenter les efforts de

  8   Mladic dans le but de faire respecter la loi existent. Par exemple, dans

  9   l'une des citations faites par l'Accusation, elle s'appuie sur la

 10   coopération entre Mladic et Mico Stanisic, au paragraphe 511 du mémoire en

 11   clôture de l'Accusation, et d'autres déclarations sont citées dans la pièce

 12   P358, par exemple :

 13   "Pour découvrir les crimes et meurtres qui ont eu lieu."

 14   Et puis, aussi :

 15   "Qui a autorisé des bandes armées venant de Serbie à se rendre en Republika

 16   Srpska ?"

 17   Page 362 de cette pièce. Une autre citation, c'est la suivante :

 18   "Les tribunaux militaires et le droit doivent être respectés."

 19   Page 363. Et puis, autre citation :

 20   "Mener des investigations concernant toutes les exactions et en punir les

 21   auteurs de la façon la plus efficace possible."

 22   Page 365.

 23   En dehors du cadre d'une entreprise criminelle commune, ces réunions ne

 24   doivent être considérées que comme des discussions normales entre diverses

 25   instances gouvernementales dans un système qui est engagé dans un conflit.

 26   Les éléments de preuve n'ont pas la possibilité d'établir un lien entre

 27   l'accusé et les crimes présumés, et ce n'est pas la seule interprétation

 28   raisonnable permise, en vertu du paragraphe 93 de l'arrêt Gotovina, en


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  1   particulier.

  2   L'Accusation argue du fait que l'accusé a exercé un contrôle de jure et de

  3   facto sur le MUP de RS qui, à l'époque, était resubordonné à la VRS;

  4   paragraphe 530 de son mémoire en clôture. La resubordination n'a eu lieu

  5   que sur base ad hoc; et même lorsqu'il y a eu resubordination, le MUP de RS

  6   est toujours demeuré sous la chaîne de commandement très rigide du MUP de

  7   la RS, comme en atteste le témoin initié de l'Accusation, Momir Nikolic,

  8   qui le dit dans la page 12 093 du compte rendu d'audience :

  9   "Ce que je sais comme étant un fait c'est que le commandement et le

 10   contrôle sur ces unités a toujours été exercé par le MUP de la RS, même

 11   lorsqu'ils menaient des actions communes avec l'armée."

 12   Le colonel Kevac a également indiqué qu'il y avait des opérations

 13   conjointes :

 14   "La VRS et le MUP de la RS ont opéré ensemble mais comme deux unités

 15   distinctes, chacune ayant ses propres missions alors que l'autre pouvait

 16   l'aider dans le cadre de certaines missions. Rien n'indique qu'une unité

 17   disposait de l'autorité de commandement sur l'autre."

 18   Page du compte rendu d'audience 30 544 à 30 545, Kevac.

 19   D'après les éléments de preuve même de l'Accusation, le MUP était

 20   resubordonné "que chacun devait être placé sous le commandement direct de

 21   certains représentants officiels du ministère", P3855.

 22   Nous avons entendu des éléments de preuve d'action coordonnée, en "sa

 23   dejstva", en B/C/S, entre le MUP de la RS et la VRS, il ne s'agit pas là

 24   d'un cas de resubordination. Alors que l'Accusation aimerait ou faire

 25   croire que le MUP de la RS a apporté son concours dans la mise en œuvre

 26   dans le cadre de l'objectif criminel commun en fournissant du personnel à

 27   la VRS, l'Accusation précise ensuite que cela n'a pas d'importance de

 28   savoir si le MUP de la RS était officiellement resubordonné ou pas; qu'ils


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  1   aient commis des actes criminels, eh bien, ceci cadre avec la définition de

  2   l'objectif criminel commun; mémoire en clôture de l'Accusation paragraphe

  3   536. Ceci illustre ou est le reflet ou est un très bon exemple de tout

  4   l'argument de l'Accusation. Il y a un lien entre les auteurs des crimes et

  5   l'accusé, eh bien, ce lien est sans importance d'après l'Accusation;

  6   l'accusé est coupable par le simple du fait du poste qu'il occupait et il

  7   est coupable parce qu'il est Serbe.

  8   La diapositive suivante, s'il vous plaît.

  9   Le premier jour des réquisitoires de l'Accusation, pages du compte rendu

 10   d'audience 44 387 à 388, l'Accusation nous a fait entendre un

 11   enregistrement vidéo d'une conversation interceptée, P403, entre Gagovic,

 12   Unkovic, Mladic, où Mladic pose la question de savoir si les hommes d'Arkan

 13   sont placés sous le commandement de la VRS. Mladic répond :

 14   "Tous sont armés et placés sous mon commandement, s'ils souhaitent rester

 15   en vie."

 16   P403, page 3.

 17   L'Accusation tente de vous faire croire que cet extrait signifie que le

 18   groupe paramilitaire d'Arkan était placé sous le commandement d'Arkan

 19   [comme interprété], mais le contexte de cet extrait ne permet pas d'étayer

 20   cette conclusion. Si nous lisons plus avant, nous constatons que Mladic a

 21   dit, d'après l'enregistrement que :

 22   "Tout doit être placé sous notre commandement. Personne ne doit rien faire

 23   seul et la trêve de cinq jours doit être respectée."

 24   Donc, la Défense vous soumet une autre interprétation raisonnable du sens

 25   de la déclaration de Mladic. Mladic a envoyé différents ordres appelant au

 26   désarmement des paramilitaires, et a exigé que tous les paramilitaires se

 27   placent eux-mêmes sous le commandement de la VRS dans le cas où ils

 28   n'avaient pas commis de crimes. Pour ceux qui avaient commis des crimes,


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  1   ces hommes devaient être désarmés, arrêtés, et poursuivis par les tribunaux

  2   militaires de la VRS, P501; et ceux qui n'étaient pas disposés à rejoindre

  3   la VRS devaient quitter le territoire. Donc cette déclaration peut être

  4   interprétée de la façon suivante, eh bien, que Mladic entendait par là que

  5   tout Serbe armé devait être intégré à la VRS; et tel n'est pas le cas, à ce

  6   moment-là ces hommes seraient poursuivis et devraient quitter le secteur.

  7   L'Accusation a choisi ces arguments mais n'a pas présenté tous les éléments

  8   de preuve dans leur intégralité.

  9   Pour étayer encore plus avant cette interprétation, nous disposons d'une

 10   lettre datée du 20 octobre 1995, envoyée par l'accusé à Karadzic, se

 11   plaignant des hommes d'Arkan et critiquant la tolérance des activités

 12   civiles à son égard; D1503. Les Tigres d'Arkan étaient subordonnés au MUP

 13   de la RS et Arkan agissait ainsi contre la population et la VRS.

 14   Diapositive suivante, s'il vous plaît.

 15   L'Accusation avance que les membres de l'entreprise criminelle commune

 16   principale "ont redéployé des volontaires ayant une triste réputation ainsi

 17   que des groupes paramilitaires tels que les hommes de Seselj, les Aigles

 18   blancs, et les Tigres d'Arkan en Bosnie-Herzégovine en 1992."

 19   Au paragraphe 577 de son mémoire en clôture.

 20   Cependant, l'intention de Mladic à l'égard des paramilitaires était clair :

 21   les paramilitaires avaient interdiction d'intervenir sur le territoire de

 22   la Republika Srpska et des charges pénales pèseraient sur ces hommes s'ils

 23   optaient pour cela; P501. Malgré les tentatives de l'Accusation visant à

 24   intégrer d'anciens paramilitaires et des hommes innocents au sein de la

 25   VRS, nombre d'entre eux ont refusé. Des ordres permanents de la VRS avaient

 26   prescrit que les paramilitaires devaient être désarmés ou intégrés à la VRS

 27   et ceci est resté inchangé pendant toute la durée de la guerre; témoignage

 28   Corokalo, page du compte rendu d'audience 28 489. Mladic n'a pas soutenu


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  1   ces actions, et ne les a pas approuvées non plus et il n'a pas exercé de

  2   commandement et de contrôle sur eux.

  3   Une fois que les groupes paramilitaires étaient intégrés à la VRS, on n'a

  4   plus entendu parler d'eux. Par exemple, les Chetniks de Brne ont été

  5   répartis dans différentes brigades, de façon à les empêcher, les interdire

  6   de se regrouper une fois qu'ils avaient été intégrés à l'armée. Déposition

  7   Radojcic page du compte rendu d'audience 23 054 à 23 055.

  8   Leur dirigeant, leur chef, Brne a été chassé de Bosnie. Au paragraphe 580

  9   de son mémoire en clôture, l'Accusation tente de laisser entendre que les

 10   paramilitaires avaient été intégrés à la VRS et étaient autorisés à

 11   commettre des crimes au nom de la VRS, établissant ainsi un lien entre les

 12   activités criminelles menées par les groupes paramilitaires et l'accusé.

 13   L'Accusation utilise également les Panthères de Mauzer, un groupe

 14   paramilitaire qui a été intégré à la VRS, pour tenter de prouver leur thèse

 15   consistant à dire que Mladic employait les paramilitaires pour commettre

 16   des crimes dans le but de réaliser l'objectif criminel commun. L'Accusation

 17   fait valoir que les Panthères de Mauzer se sont battues sur le front et ont

 18   été arrêtées pour pillage en juillet 1992, et n'ont jamais été poursuivies;

 19   en lieu et place de cela ont été intégrées à l'IBK. Les Panthères de Mauzer

 20   étaient une forme armée qui avait été créée par la municipalité de

 21   Bijeljina pour défendre celle-ci; P3802, page 5; et P1061, page 2.

 22   Il est vrai que l'accusé a félicité Mauzer en 1993, ceci ne constituait pas

 23   une récompense pour son comportement criminel. Le Témoin Andan a précisé

 24   que ces félicitations ou ces distinctions ont été accordées à l'unité tout

 25   entière, et non pas à une seule personne ou à un groupe; P6579, page du

 26   compte rendu d'audience 22 410 à 22 411.

 27   Il est vrai également que Mauzer et son unité ont été intégrés à l'IBK, au

 28   niveau local, et ceci n'était pas le résultat d'un ordre de Mladic.


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  1   L'Accusation n'a fourni aucune preuve pour indiquer que Mladic cautionnait

  2   de telles actions criminelles. Aucun ordre n'a été donné par Mladic à

  3   Mauzer lui donnant pour instruction de commettre des crimes. Une autre

  4   explication raisonnable et plausible est que les Panthères de Mauzer ont

  5   été intégrées à la VRS en vue de contrôler et d'instiller une certaine

  6   discipline. L'allégation consistant à dire que Mladic les a utilisés comme

  7   instrument pour réaliser l'objectif criminel commun n'a pas été établi au-

  8   delà de tout doute raisonnable.

  9   L'Accusation fait valoir que les groupes paramilitaires appelés les Guêpes

 10   jaunes ont été arrêtés, n'ont pas été accusés de meurtre, malgré une

 11   déclaration où ils faisaient l'aveu de ces meurtres et enregistrés par la

 12   police militaire. Le témoin a utilisé cela, pour étayer ces propos,

 13   Dragomir Andan, pour expliquer au cours du contre-interrogatoire que 11

 14   membres paramilitaires ont été accusés d'actions criminelles et les autres

 15   ont été expulsés parce qu'on ne pouvait recueillir suffisamment de preuves

 16   pour prouver qu'ils avaient commis ces crimes, page du compte rendu

 17   d'audience 22 425 dans le cadre de la déposition Andan.

 18   Alors que Mladic a tenté d'infléchir le comportement criminel des

 19   groupes paramilitaires en les intégrant à la VRS et en les soumettant à des

 20   règles et réglementations strictes, il ne peut pas être tenu responsable

 21   pour ceux qui ont refusé de se conformer à ces règles et qui ont agi seuls.

 22   Il est clair que ces groupes paramilitaires ont agi seuls et ont bravé le

 23   commandement et le contrôle de la VRS. Toutes les fois où cela était

 24   possible, des mesures ont été prises pour les poursuivre pour leurs actes

 25   criminels.

 26   L'Accusation se concentre essentiellement sur l'allégation indiquant

 27   que l'accusé a exercé une influence sur la justice militaire pour protéger

 28   les Serbes qui avaient commis des crimes, pages du compte rendu d'audience


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  1   40 419 [comme interprété] et 44 419. Nous faisons valoir qu'à aucun moment

  2   l'accusé n'a exercé une quelconque pression sur la justice militaire. En

  3   lieu et place de cela, l'accusé a lui-même apporté son soutien et a indiqué

  4   que la justice militaire était indépendante, pages du compte rendu

  5   d'audience 9 261 et 9 262. La justice militaire a été affaiblie par un

  6   certain nombre de facteurs qui l'ont empêchée de fonctionner correctement.

  7   Ceci comprend un manque de ressources, d'experts, des inculpés ayant pris

  8   la fuite, l'absence de jurés et un manque de personnel. Il est important de

  9   se rappeler que ces tribunaux fonctionnaient dans des conditions difficiles

 10   qui étaient celles de la guerre et en présence manifestement de groupes

 11   armés.

 12   L'accusé occupait un poste où il avait un pouvoir considérable au

 13   niveau du commandement de la RS [comme interprété]. On ne peut contester

 14   que pendant toute cette période, des crimes ont été commis. Mais la Défense

 15   a démontré de façon convaincante pendant tout ce procès, tel que cela est

 16   résumé dans notre mémoire en clôture, que dans la plupart des cas la

 17   responsabilité de ces crimes repose sur des hommes se trouvant à

 18   l'extérieur de la VRS et, dans tous les cas, ceux agissant en dehors du

 19   contrôle effectif de l'accusé.

 20   Alors que l'accusé [comme interprété] a été surpris par le fait que

 21   la Défense ait cité la 16e Séance de l'assemblée et une allocution de

 22   l'accusé, 44 371 à 44 372, en pensant qu'il s'agissait d'une preuve de

 23   l'objectif criminel commun. Son allocution, d'abord en qualité de

 24   commandant de l'état-major principal de la VRS, était un appel pour agir

 25   clairement et de façon décisive. Il savait qu'il y aurait des conséquences

 26   s'il y avait la guerre et qu'il était important d'agir de façon

 27   stratégique.

 28   L'une de ses déclarations les plus importantes, pièce P431, page 35,

 


Page 44723

  1   est ce qui suit :

  2   "En conséquence, nous ne pouvons ni nettoyer ni utiliser un tamis

  3   pour que seuls les Serbes restent, pour que les Serbes passent par ce tamis

  4   ou pour que les autres partent. Bien, c'est -- c'est que -- en fait, je ne

  5   sais pas comment M. Krajisnik et M. Karadzic expliqueront cela au monde

  6   entier. Il s'agirait d'un génocide dans ce cas-là. Nous devons appeler tout

  7   homme qui s'est incliné devant ce sol pour embrasser ces terres, pour

  8   embrasser le territoire de l'état que nous planifions de créer. Cet homme

  9   aussi a sa place avec nous et à côté de nous."

 10   Il est important de dire que cette déclaration a été faite après la

 11   présentation par Karadzic de six objectifs stratégiques et qu'en fait, de

 12   cette façon-là, l'assemblée est invitée à ne pas les interpréter comme des

 13   appels à la violence illicites contre les Musulmans de Bosnie ou les

 14   Croates de Bosnie. Mladic a exprimé le souhait de galvaniser tous les gens

 15   nés en Republika Srpska et a averti qu'une guerre éclaterait uniquement en

 16   cas de la légitime défense. Pièce P431, pages 33 à 35. Et cette

 17   interprétation a été corroborée par Ewan Brown, expert militaire de

 18   l'Accusation, pages du compte rendu 19 502 et 503.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je regarde l'heure, et on est arrivé au

 20   moment pour faire la pause.

 21   M. IVETIC : [aucune interprétation]

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, avant de prendre la

 23   pause, à la page 53, la première ligne, vous avez fait référence au

 24   paragraphe 34 du mémoire en clôture de l'Accusation dans le contexte de la

 25   position du MUP de la RS. Donc, vous faites référence à des structures

 26   militaires parallèles et vous avez mis l'accent sur le MUP de la RS. Au

 27   paragraphe 34, il semble qu'il s'agisse de la subordination des

 28   paramilitaires à la VRS. Je ne sais pas s'il s'agit d'une erreur ou peut-


Page 44724

  1   être que j'ai raté quelque chose qui était pertinent.

  2   Pouvez-vous vérifier cela ?

  3   M. IVETIC : [interprétation] Bien sûr, Monsieur le Président.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons faire la pause et nous

  5   allons reprendre à 13 heures 30.

  6   --- L'audience est suspendue à 13 heures 10.

  7   --- L'audience est reprise à 13 heures 35.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, Maître Ivetic, la

  9   Chambre voudrait rendre une brève décision. Il s'agit d'une décision par

 10   rapport à deux requêtes déposées par la Défense aux fins de faire verser au

 11   dossier quatre déclarations conformément à l'article 85(A) du Règlement de

 12   procédure et de preuve. Ces requêtes ont été déposées le 5 et le 7 décembre

 13   2016. L'Accusation a répondu à ces requêtes le 8 et le 9 décembre et la

 14   Défense a déposé sa réplique le 9 décembre, ce qui a été, je pense,

 15   distribué de façon formelle aux parties ce matin.

 16   La Défense soumet que ces quatre déclarations sont essentielles pour la

 17   détermination de la peine correcte, si la Chambre concluait que l'accusé

 18   est coupable. D'après la Défense, ces déclarations confirment le bon

 19   caractère de l'accusé.

 20   L'Accusation s'est opposée à ces requêtes, en soumettant que la Défense ne

 21   fait aucun effort de faire comprendre pourquoi ces requêtes avaient été

 22   présentées trois mois après l'expiration du délai. L'Accusation dit que la

 23   Défense n'a pas montré que c'est dans l'intérêt de la justice que ces

 24   déclarations soient versées au dossier. Pour ce qui est de trois de ces

 25   déclarations, l'Accusation dit que ces déclarations se concentrent sur les

 26   questions qui sont controversées pour ce qui est de cette affaire, et cela

 27   tombe sous la coupe de l'article 85(A) du Règlement. Et si la Chambre fait

 28   verser ces déclarations, l'Accusation va demander le versement d'un autre


Page 44725

  1   document pour ce qui est du contexte.

  2   La Chambre rappelle que le 26 [comme interprété] août 2016 était le délai

  3   pour déposer les requêtes conformément à l'article 85(A) du Règlement. La

  4   Défense a demandé une prorogation du délai, après quoi la Chambre n'a pas

  5   fait droit à cette demande en septembre. Ensuite, il y avait la requête

  6   pour interjeter appel à la décision du 2 septembre 2016 et cette requête a

  7   été rejetée par la Chambre le 11 novembre 2016. La Défense n'a pas montré

  8   de raisons valables pour lesquelles elle a déposé ces requêtes à ce stade

  9   de la procédure. Et la Défense n'a pas non plus fait référence au contexte

 10   procédural que je viens de mentionner. Mais la Chambre va examiner cela

 11   pour voir si c'est dans l'intérêt de la justice d'appliquer l'article

 12   85(A)(iv) [comme interprété] du Règlement à ce stade de la procédure.

 13   La Chambre considère que la Défense avait dit en août 2016 qu'elle voulait

 14   que certaines déclarations soient versées au dossier concernant la

 15   détermination de la peine. Ces trois déclarations qui ont été versées au

 16   dossier le 5 décembre contiennent des informations concernant les contacts

 17   directs avec l'accusé. La Chambre s'est penchée sur les rapports entre ceux

 18   qui ont fait des déclarations et l'accusé ainsi que le fait que ces

 19   déclarations ont une portée très limitée. La Chambre considère en outre que

 20   ces déclarations ont été présentées au début des réquisitoires et

 21   plaidoiries, ce qui a rendu possible aux parties de se préparer et de se

 22   pencher sur ces déclarations.

 23   La Chambre considère finalement qu'il est important de donner à la Défense

 24   encore une possibilité de présenter des moyens de preuve limités dans cette

 25   affaire. Dans de telles circonstances, la Chambre considère qu'il est dans

 26   l'intérêt de la justice d'admettre à titre exceptionnel les trois

 27   déclarations qui ont été versées au dossier le 5 décembre à ce stade de la

 28   procédure.


Page 44726

  1   La Chambre souligne qu'il s'agit de documents qui concernent la

  2   détermination de la peine. Pour ce qui est d'autres informations contenues

  3   dans ces déclarations, ces informations ne seront pas examinées par la

  4   Chambre.

  5   La Chambre considère que la déclaration qui est dans la requête du 7

  6   décembre montre que cette personne qui a fait la déclaration n'a jamais

  7   rencontré l'accusé. En outre, cette déclaration concerne des questions pour

  8   lesquelles la Chambre considère qu'elles ne sont pas pertinentes pour ce

  9   qui est de la fixation de la peine. Et dans de telles circonstances, la

 10   Chambre considère que cette déclaration ne sera aucunement utile à la

 11   Chambre pour ce qui est de la fixation de la peine.

 12   Par rapport au document que l'Accusation a proposé au versement au dossier,

 13   la Chambre note que ce document contient des informations concernant le

 14   contexte et le fait de savoir si les Musulmans avaient été expulsés ou pas.

 15   Pourtant, puisque la Chambre va faire verser au dossier ces déclarations

 16   aux fins de la détermination de la peine, il n'est pas nécessaire de faire

 17   verser au dossier d'autres documents contenant des informations eu égard à

 18   certains autres crimes.

 19   Par conséquent, la Chambre fait verser les trois déclarations proposées au

 20   versement par la Défense le 5 décembre, refuse de faire verser au dossier

 21   le document proposé au versement par l'Accusation, et refuse de verser au

 22   dossier la déclaration dont le versement est demandé dans la requête du 7

 23   décembre.

 24   Donc, Maître Lukic, ces déclarations ont été présentées en annexe

 25   confidentielle. Est-ce que vous demandez leur versement sous pli scellé; et

 26   si c'est le cas, sur la base de quoi vous voulez que ces documents soient

 27   versés au dossier sous pli scellé ?

 28   [Le conseil de la Défense se concerte]

 


Page 44727

  1   M. LUKIC : [interprétation] Nous demandons qu'on passe à huis clos partiel.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, nous allons passer brièvement à

  3   huis clos partiel.

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à présent à huis clos

  5   partiel, Monsieur le Président.

  6   [Audience à huis clos partiel]

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 19   [Audience publique]

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 21   Il faut que vous réserviez trois cotes D pour ces déclarations, les

 22   déclarations qui vont être téléchargées par la Défense par rapport à la

 23   détermination de la peine.

 24   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Ces cotes

 25   seront cotes D2182, 83 et 84.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une fois ces documents téléchargés et

 27   une fois notre décision rendue concernant le versement sous pli scellé ou

 28   pas, nous allons vous donner d'autres instructions pour ce qui est de

 


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  1   joindre ces déclarations, de leur accorder ces cotes réservées. 

  2   [La Chambre de première instance se concerte]

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ces documents restent sous pli scellé à

  4   titre provisoire jusqu'à ce qu'une autre décision ne soit rendue.

  5   Maître Ivetic, vous pouvez poursuivre.

  6   M. IVETIC : [interprétation] Il est également important de dire que

  7   pour ce qui est de la théorie de l'Accusation concernant l'entreprise

  8   criminelle commune principale, l'accusé a posé une question rhétorique à

  9   Karadzic et à Krajisnik en disant que : Si ces six objectifs stratégiques

 10   étaient interprétés comme génocide, alors ils ne seront pas en mesure "de

 11   l'expliquer au monde".

 12   Donc le moment et le contexte de cet avertissement sont essentiels

 13   pour comprendre l'état d'esprit de l'accusé. Il est difficile de voir

 14   comment on peut déduire une volonté de déplacer de façon permanente des

 15   Musulmans de Bosnie et des Croates de Bosnie par rapport à une opposition

 16   motivée et résolue, bien que prudente, et c'est tout à fait compréhensible,

 17   opposition à ces interprétations plus néfastes de ces six objectifs

 18   stratégiques et l'opposition aux dirigeants de l'assemblée des Serbes de

 19   Bosnie.

 20   Comme cela a été dit dans notre mémoire en clôture, et sur la

 21   diapositive suivante, aux paragraphes 795 et 796, où il s'agit de

 22   l'intention pour ce qui est de l'entreprise criminelle commune principale,

 23   l'accusé commandait la VRS et il était conscient du fait que l'indiscipline

 24   et la criminalité étaient contre-productive.

 25   Il s'agit de la pièce D944, les dirigeants musulmans entravaient ses

 26   tentatives et procédaient à des opérations d'offensive pendant la cessation

 27   des hostilités à Sarajevo. Dans une lettre adressée au commandement de la

 28   FORPRONU, Mladic a énuméré 803 violations de la cessation des hostilités


Page 44730

  1   entre le 23 décembre 1994 et 2 mars 1995; c'est la pièce D1665.

  2   L'Accusation a utilisé de nombreuses déclarations faites par d'autres

  3   personnes en présence de Mladic pour prouver cette intention qui était de

  4   la sienne, mais on ne peut que tirer des conclusions limitées pour ce qui

  5   est de l'intention de Mladic en se basant sur des déclarations

  6   incendiaires, sélectives des hommes politiques prononcées aux réunions

  7   auxquelles il assistait. Et c'est en particulier vrai, vu les éléments de

  8   preuve qui disent que Mladic a exprimé son désaccord et de temps en temps a

  9   fait des déclarations conciliantes pour ce qui est de ces déclarations.

 10   Les six "objectifs stratégiques" et les "fins stratégiques" sont donc

 11   deux choses différentes. Il y a eu une confusion lorsqu'il s'agit des

 12   objectifs stratégiques dans des ordres militaires, cela pourrait concerner

 13   des objectifs militaires légitimes ou politiques. Par exemple, la note de

 14   bas de page 2 125 du mémoire en clôture de l'Accusation, les ordres de

 15   l'assemblée de la RS du 12 mai 1992, lorsque les objectifs ont été adoptés,

 16   on a fait référence à ces objectifs comme étant des "objectifs

 17   stratégiques". La note de bas de page 2 352, c'est l'ordre de la VRS signé

 18   par l'accusé où on peut lire, "à l'accomplissement des objectifs

 19   stratégiques en 1994"; pièce P4268, page 6. Mais la citation de l'expert

 20   militaire Theunens et le rapport de combat de la VRS font référence à ces

 21   "objectifs", et c'est 3029 et P324.

 22   La différence entre ces deux termes "fins et objectifs  stratégiques"

 23   est importante puisque l'Accusation, au début de l'analyse concernant

 24   chacune des municipalités et dans leur mémoire en clôture, essaie d'établir

 25   un lien entre les crimes présumés et les objectifs stratégiques politiques.

 26   Kelecevic s'est vu poser la question concernant ce lien avec la directive

 27   numéro 1, à la page du compte rendu 37 378, et il a répondu :

 28   "Non. Personne ne peut formuler cela de cette façon-là. L'objectif


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  1   était toujours de garder ceux qui étaient loyaux et qui étaient pour la

  2   politique de la Republika Srpska et qui étaient prêts à rester dans cette

  3   région. L'objectif était de les garder dans cette région, de les intégrer à

  4   des forces armées et non pas de séparer des peuples d'une façon si

  5   déterminée. "

  6   L'accusé a montré son intention d'interdire que les civils soient

  7   maltraités et de les protéger de la violence. Il ne s'agissait pas des

  8   ordres superficiels comme dit l'Accusation, mais des exemples qui montrent

  9   un doute raisonnable par rapport au fait que l'accusé était membre d'une

 10   entreprise criminelle commune qui avait pour but de réaliser un plan

 11   criminel commun.

 12   P474, et c'est la pièce qu'on a déjà vue, c'est la diapositive où on peut

 13   voir quelles étaient les mesures de protection ordonnées par le général

 14   Mladic concernant des civils et des prisonniers de guerre.

 15   La diapositive suivante.

 16   D187, l'ordre également rendu par Ratko Mladic, au point 1 :

 17   "J'interdis strictement des actes inhumains, traitements cruels des civils,

 18   des prisonniers de guerre et des membres des organisations

 19   internationales."

 20   La diapositive suivante.

 21   D1514, il s'agit d'un ordre de l'accusé daté du 28 novembre 1992, où on

 22   peut lire :

 23   "D'après les informations disponibles, des personnes inconnues ont harcelé

 24   la population musulmane à Vrhbarje et à Burati. Et par rapport à cela,

 25   j'ordonne ce qui suit : il faut prendre des mesures immédiates pour que la

 26   population musulmane des villages susmentionnés soit protégée de la

 27   violence des individus, puisque ces personnes sont loyales à la Republika

 28   Srpska."


Page 44732

  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je pense qu'il y a une erreur de

  2   citation. Je pense que ce n'était pas "1", c'était "I" en anglais, donc

  3   "je". "Je prends des mesures immédiatement."

  4   M. IVETIC : [interprétation] Merci.

  5   Et la VRS a pris des mesures pour protéger les non-Serbes des violences. Au

  6   D424, paragraphe 23 [comme interprété], nous avons le 1er Corps de

  7   commandement du Corps de la Krajina qui protège les populations musulmanes

  8   de personnes habitant dans les lieux :

  9   "Les actions d'individus responsables ont causé un malaise parmi la

 10   population musulmane des villages de Batkovac et Stari Majdan … Le

 11  commandement du 1er Corps de la Krajina est intervenu en envoyant un peloton

 12   de police militaire pour protéger la population musulmane de ces individus

 13   irresponsables."

 14   Mais, comme c'est souvent le cas pendant la guerre, il y a eu une migration

 15   importante. Il y avait une série de raisons que l'on peut attribuer à

 16   Mladic ou à la VRS, examinées aux paragraphes 778 et 779 du mémoire de la

 17   Défense. Par exemple, la crainte par rapport à la sécurité de la population

 18   face à la guerre.

 19   Il y a eu plusieurs raisons pour lesquelles davantage de non-Serbes

 20   ont quitté leurs domiciles. Il existait des instructions des autorités

 21   croates et musulmanes elles-mêmes. D699, paragraphe 31; et D884, paragraphe

 22   20, par exemple; et nous avons ici à l'écran D193. L'instruction du SDA

 23   pour évacuer Trebinje :

 24   "Avec l'aide de nos militants, encourager tous nos Musulmans, notamment les

 25   notables et les riches, à quitter Trebinje le plus rapidement possible et

 26   passer au Monténégro. N'hésitez pas à faire pression, voire à utiliser la

 27   force contre les Musulmans qui ne respectent pas cet ordre."

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, on peut l'examiner, mais


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  1   est-ce que vous avez une chronologie ? Nous pouvons vérifier cela, mais ce

  2   serait mieux pour pouvoir bien vous suivre.

  3   M. IVETIC : [interprétation] Il faudra que je consulte mes notes.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

  5   M. IVETIC : [interprétation] Il y a eu des cas où des civils ont été

  6   évacués à titre provisoire de certaines zones, tel qu'indiqué aux

  7   paragraphes 780 et 81 du mémoire de la Défense. En vertu du droit

  8   international humanitaire, le déplacement des populations civiles est

  9   autorisé pour des motifs :

 10   "Soit la sécurité de la population, soit des raisons militaires

 11   impératives."

 12   Je vous renvoie au paragraphe 93 de la décision du procès en appel de

 13   Gotovina, où cette Chambre a relevé que certaines preuves invoquées pour

 14   prouver l'entreprise criminelle commune auraient pu se référer à :

 15   "Un consensus légitime visant à aider les civils à quitter provisoirement

 16   une zone de conflit pour des raisons comprenant un avantage militaire

 17   légitime et la réduction des pertes. Dès lors, l'examen des prétextes des

 18   attaques à l'artillerie de l'évacuation de civils et de la mise en place de

 19   corridors de sortie peut être raisonnablement interprété comme s'inscrivant

 20   dans des opérations de combat légitimes et des activités de relations

 21   publiques."

 22   Le Procureur demande à la Chambre de considérer toutes les mesures prises

 23   par les prétendus membres de l'entreprise criminelle commune comme ayant

 24   été adoptées au service de cet objectif criminel, paragraphes 499 à 528 du

 25   mémoire. Il s'abstient d'aborder des alternatives qui sont des explications

 26   qui sont raisonnables au titre des preuves, notamment que Mladic

 27   travaillait avec des fonctionnaires pour s'acquitter de ses obligations

 28   militaires légitimes.


Page 44734

  1   Plusieurs réunions ont eu lieu entre Mladic et des dirigeants civils qui

  2   étaient obligatoires et légitimes. Les 11 prétendus membres, à l'exception

  3   d'Arkan, étaient des fonctionnaires serbes ou de la Republika Srpska.

  4   L'accusé avait l'obligation légale de rencontrer et de parler de la

  5   situation militaire avec des membres de la présidence de la RS. En

  6   cherchant à utiliser les comptes rendus de réunions pour prouver la

  7   coopération, le Procureur a en fait souligné l'absence de discussion d'un

  8   projet criminel.

  9   Même s'il existait plusieurs centres de détention qui ont été créés et

 10   gérés par plusieurs groupes, l'Accusation prétend qu'ils constituaient un

 11   seul système. En vérité, la VRS ne gérait que deux centres de détention :

 12   Manjaca et Batkovic. Manjaca a été créé fin 1991 par la JNA. Il a ensuite

 13   été fermé et rouvert comme camp de prisonniers de guerre pour détenir des

 14   suspects accusés d'attaques contre les militaires; cela est abordé aux

 15   paragraphes 510, et 705 à 726, et 839 à 906 du mémoire en clôture de la

 16   Défense. Le Procureur prétend que la majorité des prisonniers de Manjaca

 17   étaient des civils et qu'ils y étaient détenus sans motif. Toutefois, des

 18   éléments de preuve ont démontré qu'il existait une procédure d'admission

 19   détaillée pour les prisonniers de guerre et les personnes soupçonnées

 20   d'être des combattants, et tous les détenus étaient enregistrés. P6993

 21   montre que des enquêtes avaient eu lieu corroborant la légitimité des

 22   détentions, par exemple, pour la détention illégale d'armes. Batkovic a été

 23   ouvert le 2 juillet 1992. Il s'agissait d'un centre de prisonniers de

 24   guerre à la suite d'un ordre IBK, P3979. On y détenait des prisonniers de

 25   guerre et des personnes soupçonnées d'avoir commis des actes criminels ou

 26   des crimes de guerre. L'ordre P3806 dit :

 27   "Les prisonniers pour lesquels il existe des raisons de soupçonner qu'ils

 28   auraient commis des actes criminels ou des crimes contre l'humanité ou des


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  1   crimes de guerre seront transférés et détenus dans le camp de prisonniers

  2   de Batkovici."

  3   Tous les prisonniers de guerre étaient enregistrés par la Croix-Rouge

  4   à Batkovic à leur arrivée. Batkovic est abordé aux paragraphes 705 à 726 et

  5   1 628 à 1 647 du mémoire en clôture de la Défense. Depuis le début,

  6   l'accusé a ordonné à de nombreuses reprises à ses subordonnés de respecter

  7   le droit international humanitaire. Toutes les unités de la VRS ont reçu

  8   l'ordre de traiter les prisonniers de guerre dans le respect des

  9   conventions de Genève. Vous avez vu la directive numéro 1 à ce sujet.

 10   La pièce P377 est constituée d'un ordre de l'état-major principal

 11   datant de juin 1992 qui ordonnait, y compris au directeur de Manjaca, de

 12   traiter convenablement les prisonniers de guerre. L'ordre de création du

 13   centre de Batkovic, pièces P3979 et P4448, a été rédigé -- comporte une

 14   erreur de frappe dans la pièce D448 concernant la note en bas de page 1 500

 15   de notre mémoire en clôture et se lit comme suit :

 16   "L'organisation du travail et les soins donnés aux prisonniers dans

 17   le camp de prisonniers de guerre doivent se mener dans le respect des

 18   conventions de Genève."

 19   L'Accusation a décrit les conditions terribles qui régnaient à

 20   Manjaca, mais ces conditions terribles étaient ressenties dans toute la

 21   région à l'époque. Dans la pièce P217, page 2, nous voyons un rapport du

 22   1er Corps de la Krajina datant du 13 juin 1992 qui confirme les pénuries

 23   qui prévalaient.

 24   "La situation globale dans toute la région autonome ne cessait de se

 25   dégrader, en particulier en ce qui concernait l'approvisionnement dans

 26   toute la région, les pénuries et la lutte pour la nourriture."

 27   Pièce D847, paragraphe 19, dans ce document, Bosko Amidzic corrobore

 28   la difficulté de la situation.


Page 44736

  1   La VRS faisait tout ce qu'elle pouvait dans ces conditions. Aux

  2   paragraphes 714 à 716 du mémoire en clôture de la Défense, nous évoquons le

  3   fait que des vivres étaient fournis aux détenus de Manjaca et de Batkovic

  4   et que cette nourriture était la même que celle qui était fournie aux

  5   gardiens et aux soldats de la VRS. Voyez, par exemple, la page 29 470 et la

  6   page 29 471 du compte rendu d'audience dans la déposition d'Amidzic.

  7   Un détenu a dit ce qui suit dans la pièce P3134, pages 43 à 44 :

  8   "Nous étions mieux nourris à Manjaca que les Chetniks qui nous gardaient.

  9   Nous avions trois repas. Nous recevions un quart de miche de pain à chaque

 10   repas, et ce sont eux qui nous demandaient de la nourriture."

 11   En réaction à ces pénuries, la VRS a demandé l'aide d'organisations

 12   caritatives extérieures, telles que Merhamet et le CICR, afin d'améliorer

 13   les conditions d'existence. Nous trouvons une mention de cela dans la pièce

 14   P2880. Ces organismes caritatifs inspectaient les installations et

 15   fournissaient ce qui est était nécessaire, comme par exemple des

 16   équipements, des produits de nettoyage ou des articles d'hygiène

 17   personnelle. Le Témoin RM051 et le Témoin Amidzic ont attesté de ce fait.

 18   Et nous avons entendu des descriptions d'abus et de mauvaises

 19   conditions dans ces installations, mais la question pertinente à se poser

 20   consiste à se demander combien l'accusé était informé s'agissant de ces

 21   conditions. Aux paragraphes 24 et 31 de sa synthèse concernant Banja Luka,

 22   l'Accusation établit que Mladic était informé des crimes et des mauvaises

 23   conditions régnant à Manjaca en 1992. Mais dans les notes en bas de page,

 24   nous ne trouvons que deux documents mentionnés.

 25   Passons à la diapositive suivante.

 26   Première diapositive, elle concerne la pièce P230, qui est un rapport

 27   émanant du colonel Vukelic concernant une visite du CICR. Le colonel fait

 28   état des observations du CICR quant aux quantités de nourriture fournies et


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  1   aux pertes de poids subies par les détenus et déclare :

  2   "Il n'y a aucun point valable qui permettrait de corroborer leurs

  3   observations."

  4   Un peu plus loin dans le même document, nous lisons :

  5   "Leur mécontentement n'est pas le résultat des conditions qui règnent

  6   dans le camp, mais il vient du fait qu'un représentant a laissé entendre

  7   qu'ils n'agissaient pas en toute bonne foi."

  8   Sur la base de cette lettre, Mladic n'aurait pas eu de quoi

  9   raisonnablement penser qu'il y avait effectivement quelque abus qui était

 10   commis. L'expert de l'Accusation, M. Brown, sur la base de son point de vue

 11   selon lequel l'état-major principal était informé de "ce qui se passait à

 12   l'intérieur de Manjaca," évoque ce fait dans sa lettre que l'on trouve en

 13   page 19 538 du compte rendu d'audience. Mais comme Brown l'a admis en page

 14   19 544 du compte rendu d'audience, le colonel Vukelic apportait, en fait,

 15   les raisons pour lesquelles les critiques du CICR n'étaient pas justifiées,

 16   plutôt qu'il ne rendait compte des mauvaises conditions régnant dans ce

 17   centre.

 18   En pièce P3805, nous trouvons un autre rapport adressé à Mladic, et,

 19   encore une fois, il fait état de motivations sous-jacentes autres que les

 20   motivations déclarées. Je cite :

 21   "Nous déclarons en toute responsabilité que l'objectif de sa visite

 22   n'avait pas pour but d'inspecter la situation du point de vue du respect

 23   des droits de l'homme, mais bien au contraire, était lié à des objectifs de

 24   reconnaissance et de renseignement."

 25   Ce genre de rapport qui circulait vers le haut de la chaîne de

 26   commandement prévalait. Les subordonnés rendaient compte du fait que les

 27   représentants internationaux avaient des motivations sous-jacentes autres

 28   que les motivations déclarées et que les reportages des médias n'étaient


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  1   pas exacts. Nous voyons cela, par exemple, dans les pièces P2899 et P3877.

  2   Les subordonnés rendaient également compte du fait que les organisations

  3   d'aide internationales n'étaient pas satisfaites des conditions régnant,

  4   par exemple, dans la pièce P6993.

  5   Le deuxième document cité par l'Accusation aux fins de prouver la

  6   connaissance qu'avait l'accusé de cette situation, c'est le P2880, datant

  7   du 7 août 1992, qui est une lettre de Karadzic concernant les

  8   recommandations du CICR.

  9   Diapositive suivante.

 10   Si nous suivons ce qui s'est passé plus tard, nous voyons que cinq

 11   jours plus tard, pièce P2881, l'accusé a envoyé une lettre au directeur

 12   avec la mention "urgent" dans laquelle il analyse un certain nombre

 13   d'actions à entreprendre pour améliorer les conditions en vigueur.

 14   Je cite maintenant une partie d'un document que nous avons sous les

 15   yeux dans lequel nous lisons :

 16   "Les prisonniers doivent se voir garantir de bonnes conditions

 17   d'hébergement et de repas garantissant au moins 2 800 calories par personne

 18   par jour, avec un accès ininterrompu à l'eau.

 19   "Tous les prisonniers blessés, malades ou handicapés doivent être

 20   transférés dans des installations spéciales…

 21   "Il doit être mis fin immédiatement à toute forme d'abus, d'atteinte

 22   à l'intégrité physique ou de coups des prisonniers.

 23   "Prendre en considération la possibilité de libérer les prisonniers

 24   civils."

 25   Lundi cette semaine, page 44 404 du compte rendu d'audience, nous

 26   voyons une description des mauvais traitements à Batkovic de la bouche d'un

 27   témoin qui n'a pas été auditionné oralement. Toutefois, aucun élément de

 28   preuve n'a été fourni quant au fait que l'accusé aurait été au courant de


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  1   ce qu'il est convenu d'appeler les abus allégués de la part d'une unité

  2   spéciale ou d'une autre instance. La Chambre a entendu le colonel

  3   Todorovic, qui a confirmé qu'il était responsable de mener l'enquête au

  4   sujet des crimes allégués ou des abus allégués à Batkovic. Ceci figure au

  5   compte rendu d'audience. Voyez également les évocations de violation des

  6   droits de l'homme. Et, par conséquent, il n'a pas pris de mesures pour en

  7   informer l'état-major principal, n'ayant pas constaté d'abus. Pages 19 838

  8   et suivante du compte rendu d'audience.

  9   Avant de poursuivre, nous aimerions souligner que M. Tieger a reconnu en

 10   page 44 376 du compte rendu d'audience que l'Accusation ne procédait plus

 11   en l'espèce par rapport à Kalinovik; par conséquent, nous demandons

 12   l'acquittement de toutes les charges concernant Kalinovik.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, je regarde l'horloge.

 14   Nous approchons du moment de la suspension.

 15   M. IVETIC : [interprétation] Nous avons perdu 15 minutes, mais je tiens

 16   compte du temps.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Avant de lever l'audience,

 18   pourriez-vous nous donner une indication - comme je l'ai fait lorsque j'ai

 19   interrogé l'Accusation - quant à vos prévisions par rapport au temps ?

 20   M. IVETIC : [interprétation] Pour être honnête, nous sommes un peu en

 21   retard par rapport aux prévisions. J'espérais pouvoir parler de Sarajevo

 22   une vingtaine de minutes aujourd'hui, et j'en suis au point où j'allais

 23   aborder Sarajevo. Nous avons donc 20 minutes de retard.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, si nous restons dans ces

 25   limites, nous pourrions en terminer demain dans une séance un peu prolongée

 26   de 15 à 20 minutes. Mais pour le moment, nous allons suspendre pour

 27   aujourd'hui et nous nous retrouverons demain, mardi, 13 décembre, à 9

 28   heures 30, dans cette même salle d'audience.


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  1   --- L'audience est levée à 14 heures 16 et reprendra le mardi, 13 décembre

  2   2016, à 9 heures 30.

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