Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 13 décembre 2016

  2   [Plaidoiries]

  3   [Audience publique]

  4   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 34.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous dans ce

  7   prétoire et à l'extérieur du prétoire.

  8   Monsieur le Greffier, veuillez citer l'affaire, je vous prie.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci. Bonjour, Messieurs les Juges. Il

 10   s'agit de l'affaire IT-09-92-T, le Procureur contre Ratko Mladic.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.

 12   Maître Ivetic, si vous êtes prêt, c'est à vous.

 13   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je souhaite tout

 14   d'abord apporter des corrections au compte rendu d'audience d'hier et

 15   aborder la demande que vous nous avez formulée.

 16   A la page du compte rendu d'audience 44 723, lignes 7 à 14, vous nous avez

 17   demandé de préciser une référence au paragraphe 34 du mémoire en clôture de

 18   l'Accusation. La référence, en réalité, renvoyait au mémoire préalable au

 19   procès de l'Accusation, paragraphe 34, dans lequel est citée la déclaration

 20   : "Créer des structures parallèles serbes civiles et militaires."

 21   A la page 44 730, ligne 11, la référence au P324 était censée être un

 22   renvoi au P3029, page 324.

 23   A la page du compte rendu d'audience 44 732, lignes 22 à 24, en réponse à

 24   votre question, Monsieur le Président, la date de la pièce à conviction

 25   D193 est le 20 janvier 1993.

 26   Et à la page du compte rendu d'audience 44 735, ligne 22, la référence au

 27   P3906 devrait renvoyer au P3806.

 28   Voilà les corrections et réponses que je souhaitais apporter aujourd'hui,


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  1   Messieurs les Juges.

  2   Alors, je souhaite commencer ce matin par aborder la question de Sarajevo.

  3   L'Accusation, l'autre jour, a commencé à parler du fait répertorié G1 comme

  4   un bombardement massif de Sarajevo et des nombreuses victimes qui en ont

  5   résulté, choisissant ainsi de mettre en lumière la seule victime qu'ils ont

  6   citée à la barre, Mme Fadila Tarcin. Je trouve que c'est insultant envers

  7   Mme Tarcin et la Défense que M. Weber ait utilisé de façon insensible une

  8   jeune fille de 16 ans pour mettre en lumière le manque de cibles militaires

  9   légitimes, tel que c'est allégué à Sirokaca et ait omis de mentionner que

 10   l'obus de mortier, qui a détruit sa vie et l'a rendue invalide, provenait

 11   des forces de Sarajevo d'Alija Izetbegovic, non pas de la partie bosno-

 12   serbe. Comme elle a dit dans sa déposition, cela provenait de la ville, et

 13   non pas du haut de la colline, pages du compte rendu d'audience 3 447 à 3

 14   448. L'Accusation agit quelquefois comme si elle dissimulait les crimes

 15   d'Alija Izetbegovic et de ses forces plutôt qu'un Procureur.

 16   A l'instar du fait non répertorié de Vase Miskina, ils se cachent ou, en

 17   tout cas, ne tiennent pas compte de la déposition de l'ambassadeur

 18   Cutileiro, qui a indiqué que l'officier chargé de l'artillerie des Nations

 19   Unies portugais avait mené une enquête et a dit que les forces d'Alija

 20   devaient en porter la responsabilité dans ce cas-là également; déclaration

 21   de M. Cutileiro lorsqu'il a témoigné devant la Chambre en l'espèce, pages

 22   du compte rendu d'audience 4 203 à 4 204.

 23   Comme toutes les guerres, le conflit de Sarajevo avait commencé bien avant

 24   que le premier tir n'ait été tiré. Comme vous le savez, cela était dû à une

 25   flambée de nationaliste en Bosnie-Herzégovine et l'introduction d'élections

 26   multipartites, l'influence politique d'Izetbegovic et le refus du SDA

 27   d'assurer l'égalité entre les représentants de chacun des trois principaux

 28   groupes ethniques à Sarajevo aux dépends des peuples constitutifs de


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  1   Bosnie. Selon les propres termes de Kecmanovic à propos du vote de

  2   l'indépendance :

  3   "Il ne s'agissait pas simplement d'un événement mais de quelque chose de

  4   très important sur l'égalité ethnique qui a été violée."

  5   Déposition de Kecmanovic.

  6   Lorsqu'il est apparu manifeste qu'Izetbegovic n'était pas capable de

  7   réaliser ses objectifs par des moyens démocratiques et politiques, il a

  8   commencé à promulguer un plan lui permettant de réaliser ces objectifs en

  9   ayant recours à la force et en indiquant :

 10   "Je suis disposé à sacrifier la paix pour la Bosnie-Herzégovine."

 11   Paragraphe 45, D735.

 12   Et, à cet effet, le SDA a importé et distribué des armes de façon illégale

 13   sur l'ensemble de Sarajevo, a formé des groupes paramilitaires, a

 14   approvisionné des départements du gouvernement, notamment le MUP, et a mis

 15   en place des groupes secrets, comme Seve. Paragraphes 1 683 à 1 710 de

 16   notre mémoire en clôture. Ils ont encouragé la discorde au sein de la

 17   communauté; et un certain nombre d'attaques non punies ou non sanctionnées

 18   contre les Bosno-Serbes sont devenues plus importantes, une véritable

 19   crainte a surgi que l'Etat ne serait plus capable de les protéger ou de les

 20   traiter de façon égale.

 21   Comme la guerre se profilait à l'horizon et devenait une réalité

 22   imminente, le SDA s'est efforcé d'établir et d'organiser une défense à

 23   Sarajevo. Officiellement le 22 mai 1992, après la mise en place de l'ABiH -

 24   P1999, page 42; D270, page 1; et P2008 - cela a pris un certain temps avant

 25   que le SRK, pour autant que le SRK n'ait jamais été unifié, ait constitué

 26   un corps unifié. L'ABiH était numériquement plus importante, mieux armée et

 27   possédait des armes supérieures; D468, paragraphe 25; page du compte rendu

 28   d'audience 25 846; D488 [comme interprété].


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  1   L'ABiH a pris le contrôle de Sarajevo. En utilisant des mortiers mobiles

  2   montés à l'arrière de véhicules, ceci s'est avéré être une force mobile

  3   très importante. Vujasin en a parlé à D641, paragraphe 34. Leurs stocks

  4   d'armes et de munitions ont pu rester à ce niveau grâce à une contrebande

  5   illégale des convois humanitaires, et par la suite faisant transiter cela

  6   par le tunnel sous l'aéroport. Ils ont utilisé la présence de civils dans

  7   la ville pour se protéger, en cachant des postes de commandement dans des

  8   magasins et des bureaux de poste, mettant en place des caches d'armes dans

  9   des bâtiments résidentiels et des sous-sols, ont formé de nouvelles recrues

 10   dans les écoles primaires aux côtés d'enfants qui assistaient à leurs

 11   cours, et positionnant leurs tireurs embusqués dans les tours de la ville;

 12   paragraphe 1 765 du mémoire en clôture de la Défense.

 13   Le Témoin Draskovic, un membre de la 1ère Brigade motorisée de Novo

 14   Sarajevo, a témoigné et a dit à la page 38 044 comme suit :

 15   "…il y avait des tireurs embusqués 24 heures sur 24. On ne pouvait être sûr

 16   à aucun moment au cours de 24 heures, par exemple, même nos gardes

 17   n'étaient pas en sécurité à leurs postes, même s'ils disposaient de

 18   fortification. Il y avait toujours une possibilité pour les tireurs

 19   embusqués d'avoir une vision de nuit, et donc nous étions exposés à leurs

 20   tirs 24 heures sur 24, incapables de bouger. Le fait même d'être simplement

 21   en attente d'un mauvais pas à tout moment qui peut changer votre vie est

 22   une sensation très inconfortable, et c'est ainsi que la terreur a été

 23   propagée au sein de nos soldats et de nos civils."

 24   C'est absurde que de suggérer que le SRK et le peuple de la Republika

 25   Srpska auraient dû abandonner leur égalité sur un plan ethnique sans se

 26   plaindre, auraient dû se soumettre aux attaques illégales de l'ABiH au

 27   commencement du conflit, par la suite auraient autorisé cette contrebande

 28   illégale d'armes sans sourciller, auraient simplement dû se soumettre à ces


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  1   tirs et ce pilonnage incessant qui a résulté du côté de l'ABiH et auraient

  2   simplement dû compter leurs morts et leurs blessés en silence. C'est

  3   néanmoins ce que la communauté internationale exigeait d'eux.

  4   Effectivement, le SRK, d'après le général Mladic, avait interdiction de

  5   tirer à moins que cela ne soit strictement nécessaire. Ceci s'appliquait

  6   également aux cessez-le-feu. Ce qu'il faut noter, le général Mladic n'a eu

  7   de cesse de donner des ordres aux hommes politiques et de permettre une

  8   solution pacifique à ce conflit. D66, P5031, D151, D1575 et D1707.

  9   Izetbegovic, néanmoins, avait très peu d'égard pour les cessez-le-feu ou

 10   les accords de paix. Il souhaitait la guerre et le gain politique qui

 11   pouvait en résulter pour lui. Il a dit de façon très claire qu'il

 12   "…n'accepterait qu'une intervention ou la mort pour son peuple en tant que

 13   solution finale."

 14   D1426, page 1.

 15   Izetbegovic et les dirigeants de la BiH ont fait tout ce qu'ils ont pu, par

 16   conséquent, pour prolonger la crise et se dépeindre comme les victimes

 17   d'agressions indiscriminées.

 18   "Le pilonnage a considérablement diminué à Sarajevo," a écrit la base de la

 19   FORPRONU de Sarajevo à la page 2 de D1426, "mais la présidence continue de

 20   perpétrer le mythe que la ville est actuellement bombardée. Ceci n'est pas

 21   le cas, cependant; c'est la version d'un homme qui attend l'aide militaire

 22   internationale."

 23   C'était un secret de Polichinelle qu'il était nécessaire pour la BiH

 24   d'avancer ce récit, et c'était tellement important pour eux qu'ils ont

 25   continué à pilonner et à tirer sur leur propre peuple. Effectivement, le

 26   général Rose a reconnu qu'il savait que Ganic avait organisé en secret le

 27   tir de tireurs embusqués de la police sur des tramways à un angle

 28   particulier qui correspondait à la ligne de défense serbe, de façon à ce


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  1   que l'on puisse faire porter la responsabilité au SRK; pages du compte

  2   rendu d'audience 8 736 et 8 737. Quelque chose qui a été confirmé par les

  3   aveux de Hereneda, un membre important de Seve qui a tiré sur des civils et

  4   du personnel des Nations Unies en présence de civils dans la ville qui

  5   tentaient de se protéger.

  6   A Skrba, un commandant de compagnie de la Smbr se souvient des massacres

  7   qui ont été commis par l'ABiH, la 10e Brigade de Montagne, contre des

  8   civils dans leur zone de responsabilité; Skrba, D524. Dragicevic se

  9   souvient des tirs fréquents de l'ABiH contre les écoles, les jardins

 10   d'enfants, les hôpitaux et les immeubles; D554, paragraphe 29, Dragicevic.

 11   Et Grey, un observateur militaire des Nations Unies, a dit dans sa

 12   déposition que l'ABiH avait mis en place ses propres cibles, et ceci était

 13   particulièrement visible lors des visites du personnel de la communauté

 14   internationale, lorsque les médias étaient présents ou que la BiH

 15   souhaitait que Sarajevo "fasse à nouveau la une des journaux." D116,

 16   paragraphe 3; paragraphes 1 861 à 1 867 du mémoire en clôture de la

 17   Défense.

 18   RM413, par exemple, a noté que :

 19   "…à plusieurs occasions dans certains endroits qui étaient particulièrement

 20   accessibles aux médias, des tirs embusqués ont pu être constatés, ces tirs

 21   ne pouvant provenir que de la ville elle-même."

 22   P640, page 4.

 23   En se cachant parmi les dispositifs civils, utilisant les civils comme

 24   boucliers, en violation de l'article 51 des conventions de Genève, et en

 25   tirant sur leur propre peuple, Izetbegovic et l'ABiH ont fait en sorte que

 26   la guerre éclate, même pour ceux qui ne le souhaitaient pas.

 27   Et cela n'est pas une coïncidence que l'ABiH était particulièrement

 28   préoccupée par cela et souhaitait cacher ses activités. Même l'officier et


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  1   capitaine Hansen, l'assistant de l'observateur militaire des Nations Unies

  2   Per Oien, en juin 1995, lorsqu'il a dit à son officier de liaison qu'il

  3   fallait cesser de tirer sur son propre peuple après une attaque de l'ABiH

  4   sur le bâtiment de la RTV. Pages du compte rendu 43 192, 43 193 [comme

  5   interprété]. Cette expulsion a été déformée par l'Accusation lors de ses

  6   réquisitoires vendredi dernier.

  7   A la page du compte rendu d'audience 44 516, M. Weber se concentre

  8   sur la manière dont la Défense tente d'utiliser "des événements présumés"

  9   sans aucun fondement pour prouver ces tirs "allégués" de l'ABiH contre

 10   leurs propres bâtiments des postes de télécommunication impliquant

 11   l'observateur militaire des Nations Unies Hansen.

 12   Messieurs les Juges, je me vois contraint de signaler ce que M. Weber

 13   indique comme étant une "défense" et des "événements présumés" sans

 14   fondement. Ceci émane même d'une déclaration d'un témoin à charge, M.

 15   Hansen, où les conseils de l'Accusation - et non pas la Défense - ont

 16   rassemblé les informations selon lesquelles la Défense s'est fondée. M.

 17   Weber souhaite que nous ignorions la partie importante de cette déclaration

 18   qui a été présentée devant cette Chambre en l'espèce :

 19   "Au cours de cette période, il y avait énormément de bombes aériennes

 20   manuelles qui ont atterri dans ce secteur; cela doit correspondre à environ

 21   dix événements de ce genre en l'espace de 15 jours avant que le bâtiment de

 22   la télévision ne soit touché. Au poste d'observation, on pouvait constater

 23   que certaines de ces bombes avaient été tirées depuis Ilidza du côté des

 24   Bosno-Serbes, de l'armée bosno-serbe. J'ai été informé par un observateur

 25   militaire des Nations Unies qui avait vu le pilonnage contre le bâtiment de

 26   la télévision et de cette bombe en particulier qui avait atterri sur le

 27   bâtiment de la télévision et qui avait été tiré depuis la partie de la BiH.

 28   Un autre observateur militaire des Nations Unies qui a entendu la bombe


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  1   siffler a dit que la bombe n'avait traversé les airs que pendant une courte

  2   période de temps, ce qui correspondait aux conclusions du premier

  3   observateur militaire des Nations Unies, à savoir que la bombe avait été

  4   tirée depuis le territoire de la BiH. J'ai envoyé mon rapport au sujet de

  5   cet événement à mes supérieurs hiérarchiques par des voies sûres."

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, en général, vous nous

  7   donnez les références des pièces à conviction. Y a-t-il une raison pour

  8   laquelle vous nous avez donné des numéros 65 ter et non pas les numéros des

  9   pièces à conviction ?

 10   M. IVETIC : [interprétation] Oui, en fait, on ne peut pas verser ce

 11   document à des -- parce qu'il s'agissait de plaider ce que ce témoin avait

 12   à dire et je ne peux pas le verser au dossier.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci n'a pas été versé au dossier, donc

 14   cela ne peut pas --

 15   M. IVETIC : [interprétation] La partie que je vous ai lue à ce moment-là

 16   correspondait à la déposition de Jan Segers et Per Oien.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas, je vous demande de citer

 18   les comptes rendus d'audience et non pas des numéros 65 ter.

 19   M. IVETIC : [interprétation] En fait, j'ai lu l'extrait du compte rendu

 20   d'audience.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si maintenant vous nous donnez des

 22   références qui correspondent au compte rendu d'audience, c'est plus facile

 23   pour nous de le retrouver et de retrouver la source de ce que vous nous

 24   dites.

 25   M. IVETIC : [interprétation] Pages du compte rendu d'audience 43 812 à 813.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 27   Et à ce moment-là, nous pouvons retirer cela de nos écrans.

 28   Veuillez poursuivre.


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  1   M. IVETIC : [interprétation] De même, Jan Segers, un autre témoin des

  2   Nations Unies, a confirmé qu'il était au courant d'un autre cas où la même

  3   chose s'était passée, et l'observateur militaire des Nations Unies qui

  4   s'était plaint a été renvoyé par l'ABiH. Je rejette donc les commentaires

  5   de M. Weber, autrement dit que ceci a été inventé de toutes pièces par la

  6   Défense et intégré à une déclaration d'un témoin à charge. Qu'ils

  7   s'abaissent à une tactique aussi facile montre simplement qu'ils souhaitent

  8   gagner à tout prix, même au prix de leur intégrité.

  9   Je vais maintenant changer de thème et aborder les affirmations de

 10   l'Accusation en vertu desquelles l'engagement des cibles à Sarajevo a été

 11   faite de façon indiscriminée et disproportionnée. Ils laissent entendre que

 12   ceci est prouvé par la prise pour cible, ostensiblement de cibles civiles,

 13   l'impact des obus à une certaine distance de la ligne de confrontation et

 14   des soi-disant bombardements contre la ville. Et réalité, le SRK a fait

 15   particulièrement attention de ne pas prendre pour cible les civils ou des

 16   cibles civiles, ce qui a été confirmé par des observations visuelles ou des

 17   renseignements collectés par des informateurs ou des personnes qui avaient

 18   fui Sarajevo. Page du compte rendu d'audience 38 460, le témoin Tusevljak;

 19   D535, paragraphe 136; D824; D825; D643, paragraphe 41; D540; D468,

 20   paragraphe 12; et D658, paragraphe 14, il s'agit notamment des éléments de

 21   preuve qui évoquent ce sujet.

 22   La liste des positions connues de l'ABiH était fort longue et illustre la

 23   manière dont l'ABiH a abusé des dispositifs civils. Cela comprenait un

 24   déploiement important de l'ABiH dans le quartier de Hrasnica, notamment le

 25   poste de commandement avancé de la 104e Brigade à Hrasniki Stan, D559; le

 26   témoin Sehovac, paragraphe 21; le centre d'entraînement des forces

 27   spéciales de l'ABiH à l'école Aleksa Santic, également lors de la

 28   déposition de témoin Sehovac et la même pièce. Cela comprend également un


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  1   nombre important de positions -- de postes à Centar, Stup, Alipasino Polje,

  2   notamment le bâtiment de la RTV [comme interprété], D2015, page 3. Mejtas,

  3   Pofalici où se trouvait le bâtiment des postes de télécommunication; D1412,

  4   Témoin Grey, paragraphe 9. Les nombreuses positions à Dolac-Malta,

  5   notamment la tour Unis, D647, page 2. Au moins cinq positions à Kosevo,

  6   deux à Bijelave, notamment l'auberge des étudiants. Et de nombreux autres

  7   répartis, et en particulier dans la vieille ville Bascarsija et à Sokolje,

  8   Butmir, Dobrinja, Nedzarica, Otoka, Vojnicko Polje, Cengic Vila, Buca

  9   Potok, Sokubunar/Kovacici, pour ne citer que quelques-uns de ces endroits.

 10   Il faut noter que cette liste est loin d'être exhaustive et n'inclut pas

 11   les différentes patrouilles militaires, les mortiers mobiles et la

 12   concentration de troupes qui a eu lieu à Sarajevo.

 13   Même les ambulances de la ville ont été utilisées pour servir de taxi

 14   pour les hommes politiques de Sarajevo, pour le transport de munitions

 15   plutôt que pour les patients. Et les mortiers mobiles ont régulièrement

 16   tiré de façon indiscriminée depuis le sol contre les deux hôpitaux, il

 17   s'agissait d'une tactique de base décrite par Jordan, page du compte rendu

 18   d'audience 1 819, une façon de menacer qui n'avait "aucun sens et qui

 19   n'était pas précise", contre des civils se trouvant à l'extérieur de

 20   Sarajevo, mais également contre ceux qui se trouvaient à l'intérieur de la

 21   ville, cette tendance qui consistait à utiliser les mortiers mobiles qui

 22   souvent tournaient court, un phénomène qui s'est produit souvent, car

 23   personne -- plus souvent que l'on aurait souhaité, en particulier parce que

 24   le mortier avait été monté à la hâte. T1818, 1819, comme a témoigné Jordan.

 25   La présence même des mortiers mobiles à Sarajevo remet en cause

 26   l'allégation de l'Accusation indiquant que le RSK tirait de façon

 27   indiscriminée et cadre avec les conclusions de la Chambre d'appel dans

 28   Gotovina, paragraphe 66 de l'arrêt, la présence des mortiers mobiles :


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  1   "…soulève la question du doute raisonnable de savoir si les lieux d'impact

  2   de l'artillerie se trouvaient éloignés ou non des cibles de l'artillerie

  3   fixes considérées comme légitime … montre qu'il y a eu pilonnage illégal."

  4   Cette conclusion par rapport à Sarajevo est plus marquée compte tenu de la

  5   déposition de témoins de la communauté internationale qui savaient qu'une

  6   vaste majorité des positions de l'ABiH ou des positions des mortiers

  7   mobiles, à tout moment, en était la cause, P421, paragraphes 72 et 128;

  8   déposition de Fraser et Mole, 5 876 à 5 877, 4 346 à 4 357 des comptes

  9   rendus d'audience.

 10   Cette ignorance a résulté - au moins en partie - du déséquilibre de

 11   répartition des postes d'observation des Nations Unies sur le territoire de

 12   chacune des parties belligérantes, du système partial d'enregistrement de

 13   cas de pilonnage dans la ville et autour de la ville de Sarajevo, et des

 14   missions politiques de certains membres du personnel de la communauté

 15   internationale, dont on parlera plus en détail en temps utile. Il faut voir

 16   le témoignage du Témoin Mole, page du compte rendu 4 304; le document P503,

 17   paragraphes 19, 35, 37; pièce P504, paragraphe 2.

 18   Etant donné ces cas de partialité, les représentants de la communauté

 19   internationale n'étaient pas en position de juger que des tirs provenant du

 20   RSK étaient des tirs indiscriminés, ce qui met en cause leurs affirmations

 21   concernant l'origine ainsi que l'impact des tirs de pièces d'artillerie, de

 22   mortier et d'armes d'infanterie à Sarajevo. Paragraphe 79 de l'arrêt dans

 23   l'affaire Gotovina, il a été constaté que les observations des témoins -

 24   qui n'avaient pas d'expérience dans le domaine de l'artillerie et par

 25   rapport au point de vue de ces témoins, il était difficile de déterminer

 26   dans quelle direction étaient lancés ces obus et où ils ont atterri - ne

 27   représentaient pas une base suffisante pour conclure que ces pilonnages

 28   étaient des pilonnages indiscriminés.


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  1   Ces conclusions n'ont pas, semble-t-il, influencé l'Accusation qui, sans

  2   aucune réserve, a adopté les suppositions des représentants de la

  3   communauté internationale avec un tel enthousiasme qu'ils ont négligé leur

  4   devoir de prouver la culpabilité du RSK pour ce qui est de ces événements,

  5   tels que les événements répertoriés à l'annexe G4, F11, F13, la plupart ou

  6   sinon tous les faits répertoriés à l'annexe F et G. L'Accusation, en fait,

  7   a jeté la responsabilité sur le RSK pour ce qui est des événements et des

  8   incidents par rapport auxquels les moyens de preuve font comprendre que le

  9   RSK n'en était pas responsable; par exemple, dans la rue Vase Miskina,

 10   ainsi que les incidents survenus à Markale, aux annexes G8 et G18 de l'acte

 11   d'accusation. Pour ce qui est du fait répertorié à l'annexe G8, par

 12   exemple, l'Accusation rejette tous les éléments de preuve contraires à leur

 13   position en affirmant qu'il s'agit d'une "théorie du complot".

 14   L'Accusation voudrait que vous, Monsieur le Juge, fassiez abstraction des

 15   conclusions de l'expert de la Défense Subotic et des enquêtes nombreuses

 16   des Nations Unies qui n'ont pas déterminé l'origine des tirs avec un

 17   certain degré de certitude.

 18   C'est D1466, page 6.

 19   Egalement, le témoignage d'un autre témoin des Nations Unies, Russel, qui

 20   croyait que l'obus était provenu d'un site qui était plus proche du cratère

 21   et non pas plus loin du cratère. C'est D1219, paragraphe 22.

 22   Maintenant, j'aimerais qu'on passe à huis clos partiel.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons passer à huis clos partiel.

 24   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel à

 25   présent, Monsieur le Président.

 26   [Audience à huis clos partiel]

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 21   [Audience publique]

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 23   M. IVETIC : [interprétation] Il est plus facile à l'Accusation de prétendre

 24   qu'il s'agit des éléments d'une théorie du complot que d'admettre ce que

 25   les éléments de preuve montrent, à savoir que la culpabilité du RSK pour

 26   cet incident ne peut pas être déterminée au-delà d'un doute raisonnable.

 27   Une approche similaire sélective pour ce qui est des événements a été

 28   adoptée par l'Accusation pour ce qui est de faits répertoriés à l'annexe


Page 44754

  1   G18. L'Accusation se fonde essentiellement sur le rapport du colonel

  2   Powers, dont les conclusions s'écartent des résultats de toutes les

  3   enquêtes précédentes, P797, page 21. L'Accusation n'a pas produit de moyens

  4   de preuve pour justifier cet écart ou pour expliquer pourquoi ses

  5   conclusions devaient être acceptées. Ils n'ont dit que ces conclusions

  6   étaient le résultat d'une réunion entre Powers, qui était le commandant des

  7   forces, et le chef des observateurs militaires des Nations Unies, c'était

  8   une suggestion qui a été rejetée par le lieutenant-colonel Per Oien, qui a

  9   examiné tous les rapports concernant cet incident et a dit dans son

 10   témoignage qu'il n'y avait pas de chef des observateurs militaires des

 11   Nations Unies, et qu'il n'avait pas reçu un tel rapport de Powers. Nous en

 12   parlons dans notre mémoire en clôture, paragraphes 2 083 et 2 084.

 13   Powers était officier de liaison des Etats-Unis entre l'OTAN et Smith - et

 14   c'est à la page du compte rendu d'audience 7 451 du témoignage de Smith -

 15   on sait que Smith travaillait au ministère de la Défense à Londres et avait

 16   participé aux entretiens avec l'OTAN pour ce qui est de l'utilisation des

 17   frappes aériennes contre la VRS, même avant son arrivée en Bosnie-

 18   Herzégovine. Page du compte rendu 7 361 [comme interprété]. Smith avait des

 19   liens avec le ministère des Affaires étrangères des Etats-Unis, et il leur

 20   envoyait directement des rapports en contournant ses supérieurs aux Nations

 21   Unies, et il était suspecté d'avoir participé aux opérations secrètes ayant

 22   pour but de déstabiliser l'ancienne Yougoslavie, ce qui est démontré en

 23   partie par son refus de répondre à des questions concernant ce sujet, pages

 24   du compte rendu 7 367, 7 368, et il a été soupçonné d'avoir agi en Bosnie

 25   avec une mission claire "de briser le système de la FORPRONU et de frayer

 26   un chemin pour que la communauté internationale provoque une guerre en

 27   Bosnie-Herzégovine," ce sont des dépêches qui montrent cela, des dépêches

 28   envoyées par Smith, et il s'agit des pièces D1462 et D452.


Page 44755

  1   Monsieur le Président, maintenant j'aimerais qu'on regarde les affirmations

  2   de l'Accusation dans leur mémoire en clôture au paragraphe 1 041 pour ce

  3   qui est du fait que l'ABiH n'a pas réussi à séparer les civils des

  4   installations militaires, ce qui a rendu les attaques du RSK sur ces

  5   positions de l'ABiH illégales.

  6   Je suis sûr du fait que, Messieurs les Juges, vous êtes conscients du

  7   libellé de l'article 51(7) de AP I des conventions de Genève, où il est dit

  8   que l'interdiction d'utiliser des boucliers humains est interprétée de

  9   façon large pour comprendre le déplacement forcé des civils pour protéger

 10   des objectifs militaires, ainsi que des pratiques plus subtiles, telles que

 11   de placer de façon délibérée un objectif militaire au milieu ou près d'une

 12   zone civile. On peut dire cela en particulier s'il est interdit aux civils

 13   de cette zone de la quitter. Et pour ce qui est des actions de l'armée de

 14   BiH qui avait des positions dans des zones civiles, elles tombent

 15   directement dans cette catégorie. Par exemple, les paragraphes 1 838 à 1

 16   840 de notre mémoire en clôture.

 17   L'article 51(7) stipule clairement que :

 18   "On ne peut pas utiliser des civils pour prendre certains sites ou

 19   certaines zones pour les mettre à l'abri des opérations militaires."

 20   Cela veut dire qu'il n'était pas interdit au Corps Sarajevo-Romanija

 21   de tirer sur les positions de l'armée de BiH où l'armée de BiH utilisait

 22   des boucliers humains, et l'armée de BiH faisait cela dans presque toute la

 23   ville de Sarajevo. Une position légale contraire, Messieurs les Juges,

 24   voudrait dire que l'armée de BiH était récompensée d'utiliser des boucliers

 25   humains et encourageait également l'utilisation des boucliers humains dans

 26   des conflits futurs. Des déclarations comme celles de l'Accusation au

 27   paragraphe 1 014 [comme interprété] de leur mémoire en clôture doivent être

 28   interprétées dans ce contexte. Et vu tout cela, la Chambre doit admettre


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  1   que l'utilisation des dispositifs civils à des fins militaires, ainsi que

  2   la présence de l'armée de BiH dans ces dispositifs, annule les protections

  3   normalement considérées comme la protection de ces positions et, par

  4   conséquent, leur permet d'être la cible du SRK.

  5   Dans l'arrêt dans l'affaire Galic, cela concerne les hôpitaux -

  6   paragraphe 346 - vu la présence régulière des mortiers mobiles dans

  7   l'enceinte des hôpitaux.

  8   Pour ce qui est de la légalité des attaques sur ces positions, on peut dire

  9   qu'il s'agissait d'une question liée au principe de proportionnalité, et

 10   c'est sur quoi l'Accusation a exposé des affirmations pas corroborées par

 11   des témoignages d'experts militaires parce qu'aucun expert militaire n'a

 12   été cité à la barre par l'Accusation pour parler de cette question. En

 13   fait, il semblait que l'Accusation avait peur de parler de ce sujet.

 14   C'était peut-être parce que l'Accusation ne comprend pas le principe de

 15   proportionnalité, ce qui est montré par le fait de l'Accusation s'est

 16   fondée constamment sur les témoignages des témoins de la communauté

 17   internationale qui disaient que le SRK utilisait une puissance de tir plus

 18   grande par rapport à la puissance de tir de l'armée de BiH et que, par

 19   conséquent, le SRK a agi de façon disproportionnée. Comme vous le savez,

 20   Messieurs les Juges, le devoir d'appliquer le principe de proportionnalité

 21   ne veut pas dire qu'il faut avoir un niveau égal des tirs lorsqu'il s'agit

 22   de ce type d'assauts, et il ne s'agit pas non plus de compter des victimes

 23   civiles et de les comparer avec le nombre de combattants ennemis qui sont

 24   mis hors de combat. En fait, il s'agit d'une obligation qui consiste à

 25   protéger contre un dommage collatéral excessif en utilisant la force

 26   uniquement lorsqu'un avantage militaire anticipé pour ce qui est de

 27   l'utilisation de cette force est proportionné à ce dommage collatéral

 28   attendu. En pratique, cela veut dire que ceux qui planifient ou lancent une


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  1   attaque doivent considérer l'impact de leurs actions avant d'attaquer une

  2   cible.

  3   La Défense a montré aux paragraphes 1 762 et 63 du mémoire en clôture qu'il

  4   a été demandé à chaque membre du SRK de prendre cela en considération. Mais

  5   l'Accusation n'a pas montré cela. Il leur a été demandé. En fait,

  6   l'Accusation n'a pas montré que des cibles ont été touchées en dépit de

  7   cette anticipation du dommage collatéral excessif. Par exemple, Radojcic

  8   s'est souvenu d'avoir renoncé au combat dans la rue Dobrinjaska en 1993

  9   puisqu'ils ont remarqué qu'il y avait un grand nombre de femmes et

 10   d'enfants dans cette rue. Il se souvenait également d'avoir arrêté

 11   l'attaque contre Butmir sur les ordres du général Mladic puisqu'ils

 12   disposaient des informations confirmées disant qu'il y avait un grand

 13   nombre de civils là-bas et que des tirs de pièces d'artillerie auraient

 14   causé beaucoup de victimes parmi ces civils. Pièce D535, paragraphe 35,

 15   Radojcic.

 16   La même chose s'appliquait aux mortiers mobiles et les attaques lancées sur

 17   ces mortiers. L'Accusation a essayé de vous convaincre que des obus qui

 18   touchaient des zones civiles ne peuvent pas être attribués ou justifiés par

 19   ces attaques sur les mortiers mobiles. C'est le paragraphe 1 039 du mémoire

 20   en clôture de l'Accusation.

 21   Mais permettez-moi d'éclaircir cela, Messieurs les Juges, parce qu'il y

 22   avait beaucoup de cibles militaires situées dans des zones civiles. La

 23   Défense ne veut pas dire que ces cibles étaient limitées que sur des

 24   mortiers mobiles ou que, vu la présence de ces cibles, seulement les

 25   mortiers mobiles étaient pris pour cible dans ces zones.

 26   On a déjà vu que dans l'arrêt dans l'affaire Gotovina, et c'est paragraphe

 27   63, il a été constaté que les mortiers mobiles représentaient des cibles

 28   militaires légitimes et que la Chambre de première instance avait commis


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  1   une erreur lorsqu'elle a conclu que les obus n'avaient pas pour cible des

  2   mortiers mobiles qui étaient des cibles militaires et qui se déplaçaient

  3   dans la ville. Cette conclusion met en question les affirmations de

  4   l'Accusation selon lesquelles prendre pour cible des mortiers mobiles par

  5   le SRK était en soi illégal et que toutes les attaques lancées sur les

  6   positions des mortiers mobiles qui étaient déjà partis n'étaient pas

  7   valides. En fait, conformément à leur droit d'utiliser la force en légitime

  8   défense, il était tout à fait légitime de la part du SRK de riposter à la

  9   suite de l'attaque contre leurs positions. En fait, Jordan a confirmé ces

 10   pratiques comme étant une procédure opérationnelle standard. Lorsque vous

 11   ripostez, il est peu probable que ceux dont les positions étaient attaquées

 12   savaient qu'ils ont été attaqués par un mortier mobile du simple fait que

 13   les effets des tirs d'un mortier mobile sont les mêmes que des tirs lancés

 14   d'un mortier stationnaire. Pages du compte rendu 5 532, 5 506 et 5 493.

 15   Ceux qui se trouvaient à ces positions savaient seulement que l'attaque

 16   était lancée d'une direction déterminée. On ne peut pas s'attendre à ce

 17   qu'ils doivent savoir qu'ils ont été attaqués par un mortier mobile avant

 18   de riposter.

 19   Et lorsqu'on rend une décision d'utiliser la force au milieu d'une attaque,

 20   c'est une décision pour ce qui est de la légitime défense. Et, très

 21   souvent, les informations disponibles sont peu nombreuses. Mais la position

 22   de ceux qui attaquaient était différente : ils disposent probablement de

 23   plus d'information puisqu'ils ont plus de temps pour planifier et préparer

 24   l'attaque.

 25   Comme l'Accusation a allégué, il est effectivement possible que le

 26   mortier mobile était parti de la position où il se trouvait à l'insu de la

 27   victime, même avant que la victime ait pu riposter, et c'est ce qu'on

 28   appelle habituellement la tactique de "tirer et filer". Les éléments de


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  1   preuve montrent effectivement que ceux qui ripostaient à l'attaque dans de

  2   telles circonstances l'ont fait parce qu'ils voulaient avoir un avantage

  3   militaire important pour montrer à la partie opposée qu'ils étaient au

  4   courant de leurs positions et pour intimider l'armée de BiH pour qu'elle

  5   arrête ses attaques. Page du compte rendu 38 034.

  6   Cela met en question les affirmations de l'Accusation selon lesquelles de

  7   telles attaques n'étaient menées qu'avec l'objectif de semer la terreur.

  8   Pour ce qui est de l'affaire concernant une citerne de carburant, c'était

  9   en Allemagne en 2010, pages 63 à 66, le tribunal a conclu :

 10   "Vu la pression qui était effectuée au moment où la décision devait être

 11   rendue, l'annulation de ce principe peut être supposée lorsque la force a

 12   été utilisée de façon excessive et lorsque le commandant a fait abstraction

 13   des considérations du principe de proportionnalité et s'est abstenu d'agir

 14   de façon honnête, raisonnable et compétente."

 15   L'Accusation n'a pas produit d'éléments de preuve montrant que ceux qui ont

 16   ordonné les attaques sur les mortiers mobiles à Sarajevo ou ceux qui

 17   avaient riposté à ces attaques en légitime défense agissaient par

 18   négligence à cet égard. En fait, ils n'ont pas montré non plus que pas un

 19   seul décès ou un cas de dommage collatéral aurait résulté de l'attaque

 20   contre un mortier mobile, indépendamment du fait si ces mortiers mobiles

 21   étaient déjà partis de la position où ils se trouvaient. Les actions du SRK

 22   qui avaient pour but de prendre pour cible des mortiers mobiles, par

 23   conséquent, ne peuvent pas être considérées comme des attaques

 24   disproportionnées, même lorsqu'il s'agit des mortiers mobiles qui étaient

 25   positionnés dans l'enceinte des hôpitaux à Sarajevo.

 26   Est-ce qu'on peut passer à huis clos partiel pour quelques instants.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons passer à huis clos partiel.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel à


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  1   présent, Monsieur le Président.

  2    [Audience à huis clos partiel]

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 16   [Audience publique]

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 18   M. IVETIC : [interprétation] Les allégations de l'Accusation au paragraphe

 19   1 042 de leur mémoire en clôture, où ils ont dit que le SRK a fait cela,

 20   ont été mises en question par les références aux témoignages des témoins

 21   dans le même paragraphe, les témoins qui ont nié le fait que les mortiers

 22   mobiles se trouvaient dans l'enceinte des hôpitaux. Il faut voir le

 23   paragraphe 1 766 de notre mémoire en clôture, puisque c'est une affirmation

 24   absurde et beaucoup d'éléments de preuve disent le contraire. De plus, il y

 25   a des éléments de preuve qui démontrent également que des tirs de riposte

 26   prenaient pour cible les mortiers mobiles, et non pas des hôpitaux, comme

 27   cela a été confirmé par les Témoins Mole et Segers, P421, paragraphe 125.

 28   En fait, dans un incident dont Segers a été témoin oculaire à l'hôpital


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  1   Kosevo, il a vu que des tirs de riposte du SRK sur le mortier mobile

  2   étaient d'une durée très courte et n'ont pas provoqué de dommages matériels

  3   importants. Il est important de dire que Segers a noté également que la

  4   pratique du SRK était d'envoyer un avertissement avant de riposter, en

  5   assurant ainsi le caractère légal de leurs attaques, et c'est en conformité

  6   avec l'arrêt dans l'affaire Galic, paragraphe 346.

  7   Monsieur le Président, je vois qu'il est venu le moment pour faire la

  8   pause.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, nous allons faire la pause

 10   maintenant et nous allons revenir à 10 heures 50.

 11   --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

 12   --- L'audience est reprise à 10 heures 54.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Maître Ivetic.

 14   M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation veut

 15   également vous faire croire que vu un grand nombre d'obus qui était dirigé

 16   sur Sarajevo pendant des attaques à des différents moments du conflit, ces

 17   pilonnages ont, ipso facto, violé le principe de proportionnalité et de

 18   choisir de façon sélective des cibles. Le fait est qu'une attaque ou une

 19   série d'attaques qui sont des attaques d'une grande ampleur ne sont

 20   nécessairement pas considérées comme des attaques excessives sans

 21   justification militaire.

 22   Il est dit que "l'avantage concret et direct militaire" représente la

 23   combinaison des éléments prévus par celui qui lance l'attaque au moment

 24   pertinent. Et cela veut dire que cet avantage ne doit pas être

 25   nécessairement lié en contexte temporaire ou géographique à l'objet de

 26   l'attaque. En d'autres termes, ce principe de proportionnalité d'une

 27   attaque doit être perçu par rapport aux opérations ou au conflit dans leur

 28   intégralité et par rapport aux objectifs militaires. Cette approche a été


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  1   adoptée par un certain nombre de pays dans leurs manuels militaires :

  2   Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, les Etats-Unis, Allemagne, Italie, et le plus

  3   important, l'ancienne Yougoslavie. C'est ce que l'on voit dans la

  4   diapositive. Donc l'objectif militaire principal du SRK était d'obtenir la

  5   cessation complète des hostilités à Sarajevo. Et par rapport à cela, ils

  6   ont agi uniquement en conformité avec la stratégie de la légitime défense.

  7   Ils n'ont pas cherché à prendre Sarajevo ou de faire avancer leurs

  8   positions, c'était pour l'unique raison de se défendre contre les attaques

  9   de l'armée BiH. L'Accusation donc souligne cela dans leur mémoire en

 10   clôture, en particulier lorsqu'il s'agit des opérations Otes, Lukavac 93,

 11   et Pancir-2, paragraphes 938 et 956 du mémoire en clôture de l'Accusation,

 12   et l'Accusation suggère que les directives connexes sont la preuve d'un

 13   projet criminel commun.

 14   Une bonne évaluation de la proportionnalité requiert que l'on

 15   comprenne l'objectif pour lequel une attaque a été lancée : pour le SRK, il

 16   s'agissait des deux objectifs que je viens de mentionner, la défense de sa

 17   position et la cessation complète des hostilités. Le soi-disant

 18   "bombardement", dont il est question au paragraphe 779 du mémoire en

 19   clôture de l'Accusation, qui a censément eu lieu le 21 mars 1993, est comme

 20   les preuves le démontre un acte de légitime défense contre une attaque

 21   intensive de l'ABiH contre une voie d'approvisionnement essentielle pour le

 22   SRK, la route Pale-Lukavica. Voir le témoignage de RM176.

 23   En tant que voie d'approvisionnement essentielle, la route était

 24   d'une importance significative pour le SRK et pour sa capacité à défendre

 25   sa position. Des zones essentiellement touchées par ce pilonnage

 26   contenaient toutes des objectifs militaires-clé. Les témoins Sehovac,

 27   Sladoje, et Dzino en parlent. Compte tenu des difficultés auxquelles le SRK

 28   aurait été confronté pour défendre leurs positions si l'attaque de l'ABiH


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  1   avait abouti, le pilonnage intense mais court de ces cibles était de toute

  2   évidence proportionnelle. Et les preuves ne font état en fin de compte

  3   d'aucun dommage collatéral.

  4   Les faits répertoriés G1 et G2 prouvent que le SRK agissait

  5   conformément à son objectif de résoudre de manière permanente le conflit à

  6   Sarajevo. En mettant en œuvre la campagne G1 :

  7   "Toutes les cibles militaires qui se trouvaient dans la zone de

  8   Sarajevo faisaient partie du plan de combat."

  9   Compte rendu d'audience page 4 990.

 10   Les ordres de Mladic avaient été interprétés comme s'appliquant

 11   uniquement à des objectifs militaires valables, dont beaucoup étaient

 12   situés dans la vieille ville où, selon le témoin de l'Accusation Wilson

 13   "l'essentiel des tirs semblait se concentrer."

 14   Compte rendu d'audience page 3 970.

 15   Aucune autre preuve n'est présentée selon laquelle des objectifs non

 16   militaires étaient visés systématiquement. Dans le contexte d'attaques

 17   constantes et durables de l'ABiH sur les positions du SRK, l'absence de

 18   négociation de paix et par les voies diplomatiques et politiques et la

 19   volonté explicite d'Izetbegovic de poursuivre le conflit à Sarajevo, à tout

 20   prix, on peut comprendre qu'une cessation complète des hostilités n'aurait

 21   pas pu être mise en place à Sarajevo sans une utilisation d'une force

 22   importante. Toutefois, la cessation des hostilités aurait non seulement

 23   permis au SRK de réaliser son objectif à Sarajevo mais aurait également

 24   sauvé un nombre d'innombrables de vies et de millions de dollars pour les

 25   deux parties. L'avantage militaire prévu était dès lors considérable. Des

 26   attaques intensives et prolongées de cette nature ont été utilisées par

 27   d'innombrables armées dans le monde entier pour réaliser leurs objectifs.

 28   De tels assauts sont souvent qualifiés d'assauts de choc et stupéfaction,


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  1   ou de stupeur ou de "domination rapide."

  2   Et je voulais passer à huis clos partiel.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Passons à huis clos partiel.

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

  5   [Audience à huis clos partiel]

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 18   [Audience publique]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup.

 20   M. IVETIC : [interprétation] Compte tenu de la nature anticipative du

 21   principe de la proportionnalité, le fait que le SRK n'ait pas réalisé

 22   l'objectif qu'il entendait réaliser ne rend pas l'attaque illicite. C'est

 23   l'affaire dont nous avons parlé sur les citernes de mazout, pages 63 à 66.

 24   Et cela ne prouve pas non plus l'accusation de terreur. Etant donné que

 25   chaque assaut était justifié sur le plan militaire, qu'il s'agisse d'actes

 26   de défense contre une menace immédiate, d'un repositionnement pour

 27   améliorer les défenses contre une menace prévue ou de tentatives pour

 28   mettre fin au conflit pour éliminer la menace, le SRK ne peut pas être


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  1   considéré comme ayant agi pour répondre à l'objectif premier de répandre la

  2   terreur parmi la population civile de Sarajevo.

  3   Je vais à présent passer à l'utilisation des bombes aériennes modifiées à

  4   Sarajevo.

  5   L'Accusation prétend que l'utilisation des bombes aériennes modifiées dans

  6   les dernières années de la guerre a été particulièrement disproportionnée.

  7   Mais, au contraire, lorsque l'on évalue la proportionnalité d'une attaque,

  8   ceux qui la planifient, la lancent, ou répondent à une autre attaque ont le

  9   droit de tenir compte de l'arsenal disponible et des besoins futurs de leur

 10   armée. A l'époque, selon des preuves où des bombes aériennes modifiées ont

 11   été utilisées, le SRK souffrait d'une grave pénurie d'artillerie et

 12   d'armement; D468 [comme interprété], 686, et 535.

 13   Compte tenu de leur stock limité, l'utilisation des seuls mortiers aurait

 14   épuisé leur stock à un tel point qu'ils n'auraient plus se défendre

 15   efficacement contre les attaques de l'ABiH. C'était une considération

 16   particulière parce qu'en dépit de ce que l'Accusation veut vous faire

 17   croire, les preuves montrent que l'ABiH était devenue considérablement plus

 18   forte et mieux armée pendant la guerre; D468, paragraphes 17 à 19.

 19   Si le SRK était dépourvu de mortier et d'artillerie en suffisance, on

 20   pensait que l'ABiH pouvait percer les lignes du SRK et massacrer les civils

 21   qui vivaient dans le territoire protégé par celui-ci. Ce n'était pas

 22   déraisonnable, la préservation d'une variété était dès lors importante et

 23   représentait un avantage militaire pour ce qui est de la capacité du SRK à

 24   se défendre contre les attaques de l'ABiH. Et c'est pour cette raison et

 25   pour aucune autre que les bombes aériennes modifiées ont été conçues,

 26   construites et utilisées par le SRK à Sarajevo. Elles n'étaient pas - comme

 27   le prétend l'Accusation - introduites pour terroriser la population civile

 28   de Sarajevo et elles n'étaient pas - comme le prétend aussi l'Accusation -


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  1   conçues par des amateurs, imprécises, et improvisées par le SRK. Aux

  2   paragraphes 1 005 et 1 006, même de son mémoire en clôture, même

  3   l'Accusation reconnaît que ces bombes aériennes modifiées ont été conçues

  4   par des experts; construites dans l'une des plus grandes usines de

  5   production d'armes spécialisées de l'ancienne Yougoslavie, Pretis; et

  6   soumises à toute une batterie de tests avant leur distribution et

  7   utilisation. Les bombes aériennes modifiées étaient également accompagnées

  8   d'une table de tir détaillé, une table de tir, faut-il le relever, que

  9   dément l'Accusation dans sa tentative désespérée de corroborer ses

 10   accusations contre le général Mladic, l'Accusation a prétendu que ces

 11   tables n'existaient pas. Donc l'utilisation des bombes aériennes modifiées

 12   ne peut pas être considérée comme disproportionnée ou illégitime.

 13   Je voulais à présent parler des accusations ou des affirmations de

 14   l'Accusation selon lesquelles le pilonnage indiscriminé de Sarajevo est

 15   prouvé par l'impact occasionnel d'un ou deux obus dans les zones

 16   résidentielles de Sarajevo, par exemple, au paragraphe 778 du mémoire en

 17   clôture de l'Accusation; l'Accusation prétend également que des tirs

 18   embusqués qui sont illicites sont prouvés par la mort des civils par balle.

 19   Il faut relever d'emblée que l'Accusation n'a fourni aucun élément de

 20   preuve démontrant que ces obus aient été tirés délibérément par le SRK sur

 21   ces quartiers ou que l'on ait tiré délibérément sur des civils avec des

 22   fusils de précision. L'on sait que la précision d'une arme dépend de

 23   plusieurs facteurs, notamment la météo et les conditions atmosphériques,

 24   Témoin Hamill, page 5 525. Et il y a également des variations entre les

 25   armes de même type. Il faut garder cela à l'esprit lorsqu'on analyse des

 26   faits tel que G6, dans lequel l'Accusation prétend que le SRK a tiré trois

 27   obus rue Gatilova [comme interprété] et rue Bosanska à Alipasino Polje,

 28   passant totalement sous silence le fait que son propre témoin a reconnu que


Page 44768

  1   la caserne Kulin Ban de l'ABiH était située de l'autre côté du bâtiment

  2   touché par le mortier; compte rendu d'audience 4 293. Et le Procureur a

  3   fait étalage d'une ignorance apparente en demandant au témoin s'il

  4   connaissait personnellement M. Kulin Ban. La caserne Kulin Ban était à 150

  5   mètres seulement, on peut le voir dans D82, à l'intérieur de la zone

  6   d'impact d'un système de mortier, comme en a témoigné le Témoin de

  7   l'Accusation Hamill. La majorité des dégâts infligés aux objets civils à

  8   Sarajevo est intervenue aux alentours du front. Seuls très peu de dégâts

  9   ont été infligés à des zones plus éloignées; P640, page 16. L'Accusation

 10   n'a pas prouvé que Mladic ait délibérément ordonné le pilonnage de ces

 11   positions ou que le SRK les ait attaquées délibérément. De ce fait,

 12   l'Accusation ne peut pas prétendre que ces impacts non volontaires d'obus

 13   et de balles, s'ils étaient causés par le SRK, n'étaient pas le résultat

 14   des conditions météorologiques, d'armes défectueuses ou de variations

 15   naturelles entre les armements.

 16   Dès lors, les attaques du SRK sur Sarajevo ne peuvent pas être considérées

 17   comme illicites ou cherchant à répandre la terreur du simple fait qu'un

 18   petit nombre d'incidents de pilonnage et de tir embusqué auraient touché

 19   des cibles non militaires. En fait, on peut même dire que c'est toute la

 20   ville de Sarajevo qui était une cible militaire légitime dans sa totalité.

 21   Comme le sait le Tribunal, l'article 3(c) du Statut, le droit international

 22   général interdit les attaques ou bombardements des villes non défendues,

 23   quels qu'en soient les moyens. Toutefois, Sarajevo ne répond pas aux

 24   conditions du statut de ville non défendue compte tenu de l'intensité des

 25   activités militaires qui y ont eu lieu. Selon la théorie et la pratique

 26   militaire de la Bosnie-Herzégovine et de la RSFY, pour qu'une ville soit

 27   considérée comme non défendue, ce fait doit avoir été reconnu par les

 28   parties en présence ou, en tout cas, un certain nombre de conditions


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  1   doivent être remplies comme, par exemple, l'absence de forces armées et

  2   d'activités de nature militaire sur place. Nous le trouvons inscrit dans

  3   les instructions militaires de la Bosnie-Herzégovine de 1992 ainsi que dans

  4   le manuel militaire de la RSFY pour 1988. Le droit international impose que

  5   la ville en question soit reconnue par les parties belligérantes en tant

  6   que ville "ouverte" ou, à défaut de cela, qu'elle remplisse certaines

  7   conditions préalables telles que l'absence de toute défense et de toutes

  8   forces armées. C'est ce que l'on voit dans un très grand nombre de manuels

  9   militaires, et notamment dans les manuels militaires du Royaume-Uni, du

 10   Canada, de l'Australie, de la Belgique, de l'Allemagne et des Etats-Unis.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais m'assurer d'un point. Est-ce

 12   que l'Accusation soutient que Sarajevo était une ville non défendue ?

 13   M. TIEGER : [interprétation] Je ne crois pas que l'on trouve ce point en

 14   tant qu'argument développé dans le mémoire en clôture. Je ne crois pas que

 15   vous ayez entendu ces mots dans la bouche de M. Weber lorsqu'il a présenté

 16   ses arguments, mais vous entendrez notre réponse, c'est-à-dire

 17   l'affirmation de notre position par rapport à la Défense, dans notre

 18   réplique. La question n'est pas centrée sur ce point. Nous disons que ce

 19   n'était pas une raison suffisante pour mener une campagne de terreur

 20   illégale.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. J'évoque ce point, Maître Ivetic,

 22   parce qu'apparemment vous avez répondu à une position -- en tout cas,

 23   c'était une tentative de votre part dans votre mémoire en clôture, en

 24   déclarant que la ville de Sarajevo n'était pas non défendue. Donc,

 25   n'oubliez pas ce point pendant la procédure.

 26   Veuillez procéder.

 27   M. IVETIC : [interprétation] Je le ferai, Monsieur le Président, mais

 28   l'Accusation mène ses poursuites au titre d'un article du Statut, et je


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  1   crois qu'elle nous a poussés et que nous devons répondre à ce point.

  2   M. TIEGER : [interprétation] De quel Statut parle Me Ivetic ? J'aimerais

  3   que vous lui posiez la question, Monsieur le Président. Comment il parvient

  4   à intégrer cet élément à l'argument de l'Accusation ?

  5   M. IVETIC : [interprétation] J'ai simplement donné lecture d'un point. Je

  6   ne suis pas ici pour participer à un débat, Monsieur le Président.

  7   J'aimerais pouvoir poursuivre.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous sommes ici pour entendre les

  9   réquisitoires et plaidoiries, et c'est à la Chambre --

 10   Dans la mesure où nous avons des interrogations sur tel ou tel point, nous

 11   devons obtenir la réponse que nous cherchons à obtenir par rapport aux

 12   propos de la partie adverse. Nous sommes ici pour obtenir des

 13   éclaircissements.

 14   Mais veuillez procéder. N'oubliez pas cela, ce que je viens de dire.

 15   M. IVETIC : [interprétation] D'accord.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mladic, il vous est interdit de

 17   parler à haute voix.

 18   Maître Lukic, pourriez-vous prendre le temps nécessaire pour poursuivre

 19   votre conversation avec votre client sans que chacun puisse l'entendre.

 20   M. LUKIC : [interprétation] C'est exactement ce que je m'efforce de faire,

 21   Monsieur le Président.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Sinon, il pourrait peut-être

 23   conserver ses arguments ou ses commentaires jusqu'à la prochaine pause.

 24   [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

 25   M. IVETIC : [interprétation] Puis-je poursuivre ?

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, dès lors que M. Mladic aura cessé

 27   de parler à haute voix.

 28   [La Chambre de première instance se concerte]


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Nous avons compris que vous

  2   souhaitiez citer le droit.

  3   Veuillez poursuivre.

  4   M. IVETIC : [interprétation] Comme chacun le sait désormais, Sarajevo a été

  5   la scène de combats soutenus et importants --

  6   Monsieur le Président, apparemment l'interprétation n'est plus entendue par

  7   mon client.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Mladic doit cesser de s'exprimer de

  9   façon audible pour nous.

 10   M. LUKIC : [interprétation] Mais il vient de se plaindre du fait qu'il

 11   n'entendait pas l'interprétation et il voulait vous en informer.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci est tout à fait admissible. Est-ce

 13   que les personnes qui écoutent le B/C/S peuvent vérifier si le son leur

 14   parvient.

 15   M. LUKIC : [interprétation] Maintenant tout va bien.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Lorsque vous n'entendez pas

 17   l'interprétation, Maître Lukic, il va sans dire que M. Mladic peut toujours

 18   en informer la Chambre.

 19   Veuillez procéder, Maître Ivetic.

 20   M. IVETIC : [interprétation] L'imposition d'un accord de démilitarisation

 21   ayant échoué en 1994, il n'y a jamais eu d'accord stipulant le statut de

 22   Sarajevo en tant que ville ouverte. Bien au contraire, même si cela peut

 23   déplaire à l'Accusation, les éléments de preuve démontrent que la ville a

 24   été à tout moment occupée par le personnel de l'ABiH et qu'elle a abrité un

 25   nombre important d'objets militaires, faisant de Sarajevo, en conséquence,

 26   une ville défendue. Par ailleurs, l'emplacement stratégique de Sarajevo, sa

 27   capacité industrielle et la nature même de la ville en font, sans nul doute

 28   possible, une ville qui a contribué de manière effective aux actions


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  1   militaires. Il s'agit de la capitale du pays et du centre urbain le plus

  2   important de Bosnie-Herzégovine, ce qui, ipso facto, fait de sa

  3   destruction, de sa capture ou de sa neutralisation un avantage militaire

  4   incontesté.

  5   De plus, la neutralisation des troupes de la Bosnie-Herzégovine présentes

  6   dans la ville offrait un avantage militaire incontestable. En conséquence,

  7   Sarajevo répond aux conditions d'une définition de cette ville en tant

  8   qu'objet militaire légitime. Voir l'article 52(2) du Protocole additionnel

  9   I, 1977. Ce qui rend d'autant plus horrible le refus de l'ABiH d'autoriser

 10   la population de Sarajevo à quitter la ville. En tant que telles, les

 11   attaques qui visaient cette ville étaient effectivement des attaques

 12   légitimes, et l'accusé ne peut pas être tenu responsable d'avoir rempli ses

 13   responsabilités en tant que général de l'armée dans les limites imposées

 14   par le droit.

 15   Tous ces points ont été discutés ce matin et mènent à la conclusion,

 16   Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, qu'il n'y a eu aucun

 17   plan criminel destiné à ou mis en œuvre à Sarajevo, et encore moins une

 18   quelconque modulation d'une campagne supposée qui aurait utilisé cet effet

 19   de levier pour imposer un accord aux dirigeants bosno-musulmans. En dépit

 20   des tentatives de l'Accusation de vous faire croire le contraire et des

 21   omissions délibérées qu'elle commet par rapport au contexte, les éléments

 22   de preuve nous démontrent que les actions du SRK étaient militairement

 23   justifiées car, répondant aux attaques de l'ABiH, destinées à améliorer ses

 24   positions défensives, et ont tenté de mettre un terme au conflit de

 25   Sarajevo. Au vu de cela, il n'est pas permis de dire que le but premier du

 26   SRK aurait consisté à terroriser la population civile de Sarajevo. Il n'y a

 27   pas eu de jeu sur les bombardements consistant à en accroître ou en

 28   diminuer l'intensité à volonté. En fait, ce jeu d'intensification ou de


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  1   désintensification [phon] alléguée par l'Accusation concorde uniquement

  2   avec un des accords majeurs négociés pendant la durée du conflit, un accord

  3   qui a été remanié totalement par Izetbegovic, d'ailleurs, et qui aurait du

  4   mal à prouver l'existence d'une campagne modulée de la part de la VRS et de

  5   la Republika Srpska pour manipuler les opposants afin qu'ils agissent

  6   conformément à ses désirs. L'Accusation n'a jamais mis en œuvre le moindre

  7   lien entre cette intensification/désintensification voulue du conflit et la

  8   progression de ce conflit dans d'autres zones de la Bosnie. De quelle

  9   façon, par conséquent, Sarajevo aurait-elle été utilisée en tant que levier

 10   ? En fait, la cause de l'Accusation est si faible qu'elle ne réussit même

 11   pas à démontrer l'existence d'un quelconque lien entre le SRK et les pics

 12   de bombardement ou les diverses attaques dont l'Accusation parle aux

 13   paragraphes 770, 777 et 797 de son mémoire en clôture. Au vu des

 14   innombrables éléments de preuve qui démontrent la propension de l'ABiH à

 15   prendre pour cible ce qu'elle représente, ces pics ne sont que la preuve du

 16   fait qu'il n'y a pas eu modulation du conflit de la part du SRK ou du

 17   général Mladic, mais qu'il est très possible que ces pics et ces

 18   désintensifications du conflit aient illustré uniquement le cours ordinaire

 19   de toute guerre.

 20   Les allégations selon lesquelles l'aide humanitaire a été restreinte

 21   ou interdite sans la moindre raison et que cela faisait partie d'une espèce

 22   de complot destiné à répandre la terreur ou à utiliser Sarajevo en tant que

 23   monnaie d'échange pour les négociations, pour reprendre les mots utilisés

 24   par l'Accusation, ne sont qu'une théorie du complot. Citant le mémoire en

 25   clôture de la Défense, page du compte rendu d'audience 44 502, M. Weber a

 26   sélectivement omis d'évoquer les éléments de preuve très nombreux qui

 27   démontrent l'utilisation abusive généralisée des aéroports et des convois

 28   d'aide humanitaire pour fournir illégalement armes, munitions et matériel


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  1   militaire à l'ABiH. Les éléments de preuve qui démontrent qu'une fois que

  2   ces matériels ont été saisis, et parfois même en dépit de la présence de

  3   ces matériels introduits illégalement, ils démontrent que l'aide

  4   humanitaire à ce moment-là a été autorisée à se poursuivre. En fait, une

  5   enquête du HCR des Nations Unies entreprise en 1993 a permis de découvrir

  6   que plus de 2 500 tonnes de vivres ont été stockées et que seule une

  7   fraction de cette aide est parvenue effectivement jusqu'aux civils,

  8   situation qui a peu changé pendant tout le cours de la guerre. Un rapport

  9   de 1994 permettant de découvrir que moins d'un tiers de cette aide est

 10   arrivé jusqu'à la ville et aux civils qui l'habitaient.

 11   Il est ridicule de penser ou de dire que l'accusé aurait joué sur les

 12   approvisionnements en gaz, en eau et en électricité pour terroriser la

 13   ville de Sarajevo. Ces arguments n'ont que peu d'efficacité pour prouver

 14   l'affirmation de l'Accusation selon laquelle le général Mladic aurait joué

 15   sur ces approvisionnements et ces services pour s'en servir en tant que

 16   monnaie d'échange dans les négociations.

 17   Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, je pourrais

 18   m'étendre longuement sur le discours prononcé devant la 16e Séance de

 19   l'assemblée que l'Accusation a largement utilisé pour affirmer que ces

 20   propos prouvaient une intention supposée du général à s'engager dans un

 21   plan criminel commun. Mais nous avons déjà parlé de ce sujet et, par

 22   conséquent, je ne vais pas répéter ce qui a déjà été dit au sujet de ces

 23   éléments de preuve.

 24   Comme nous le voyons dans la partie du texte consacré à l'entreprise

 25   criminelle commune, il est beaucoup question de la responsabilité de la VRS

 26   et du SRK. Mladic était un militaire. Le peuple serbe ne pouvait pas non

 27   plus admettre qu'il exprime un désaccord public vis-à-vis de son commandant

 28   suprême qui était Karadzic. Les conversations entre Mladic et Karadzic se


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  1   sont donc déroulées le plus souvent à huis clos, même si des éléments de

  2   preuve significatifs démontrent qu'il y a eu y compris des désaccords, des

  3   querelles entre Karadzic et Mladic. Nous le voyons dans un certain nombre

  4   de documents. Le même commentaire peut s'appliquer aux rapports que Mladic

  5   entretenait avec un certain nombre de ses subordonnés, en particulier Galic

  6   et Milosevic. Dans la pièce P1052, pages 7 à 8, il est indiqué que Karadzic

  7   et Krajisnik convoquaient souvent Milosevic pour qu'il vienne discuter des

  8   plans opérationnels concernant Sarajevo avec eux. Karadzic n'a pas invité

  9   le général Mladic à quelle que rencontre que ce soit, qu'elle soit à

 10   composition limitée ou à composition plus large. Il est simplement question

 11   de contact et d'invitation adressée à Milosevic, le commandant du SRK. En

 12   plusieurs occasions, Milosevic a répondu à ces invitations, ce qui a

 13   provoqué des réprimandes de Mladic à son égard, qui l'a averti qui lui

 14   était interdit de se rendre à de telles discussions sans son accord. En

 15   raison de tels comportements, Karadzic et Krajisnik se sont même querellés

 16   avec lui, et il leur a été répondu que des officiers subordonnés ne

 17   pouvaient pas répondre à des convocations sans qu'il en soit informé. Pour

 18   reprendre les propos de M. Tieger : Grattez la surface, comme il l'a dit,

 19   et vous trouvez la vacuité totale de sens des allégations de l'Accusation.

 20   L'Accusation parle de meurtres et d'attaques illégales, de terreur,

 21   et elle évite de citer certains éléments du contexte qui seraient plus

 22   aptes à prouver l'existence ou la non-existence de ces crimes. Elle

 23   bombarde les Juges de la Chambre de chiffres, d'images et de nombres aptes

 24   à provoquer leur adhésion pour mieux masquer le fait qu'elle n'a pas réussi

 25   à satisfaire à la charge de la preuve obligatoire par rapport aux charges

 26   alléguées. Elle s'efforce donc de montrer les souffrances infligées à toute

 27   la population pendant le conflit. En regardant ces images, en écoutant ces

 28   témoignages, il est impossible à quelque être humain que ce soit de ne pas


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  1   ressentir une émotion. Cette émotion provoque chez la plupart des humains

  2   la tendance à se hâter de conclure sur la base de ce ressenti. Et, ce

  3   faisant, il est aisé d'oublier que les conflits doivent être vus sous de

  4   différents angles et qu'à partir de l'intérieur de Sarajevo, où étaient

  5   stationnés la plupart des représentants internationaux et des représentants

  6   médiatiques, ces images et ces vidéos ne donnaient pas une image complète

  7   de l'intégralité de la situation.

  8   Les éléments de preuve présentés en l'espèce ne prouvent pas au-delà

  9   de tout doute raisonnable que le SRK ou le général Mladic auraient autorisé

 10   des actes ou des attaques illégales. Il ne prouve pas que la terreur était

 11   le but poursuivi, pas plus que n'était le but d'obtenir la mort de qui que

 12   ce soit à Sarajevo suite à des actions qui auraient été délibérées par le

 13   SRK ou le général Mladic. Il ne prouve pas qu'il existait une entreprise

 14   criminelle commune ou que le conflit de Sarajevo aurait été modulé pour

 15   atteindre un niveau imaginaire dans lequel la Republika Srpska aurait

 16   souhaité obtenir la satisfaction de ses objectifs avant de participer à des

 17   négociations politiques ou autres. Ce qui est prouvé, c'est que le SRK et

 18   le général Mladic ont combattu pour défendre leurs foyers, leurs vies et

 19   leurs droits à ce que tout groupe ethnique soit traité sur un pied

 20   d'égalité, aussi bien politiquement que socialement. Ce qui est prouvé,

 21   c'est la difficulté à prendre des décisions pour le général et pour ses

 22   hommes qui faisaient face au quotidien à des efforts importants pour

 23   défendre eux-mêmes et leurs familles des assauts incessants de l'ABiH,

 24   décidé par le dirigeant politique Izetbegovic, prêt à tout sacrifier pour

 25   obtenir ce qu'il voulait.

 26   J'aimerais maintenant parler de Sarajevo [comme interprété] qui est évoquée

 27   dans plusieurs parties de l'acte d'accusation, où il est question en

 28   particulier de transfert forcé de population, de persécutions et de


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  1   génocide.

  2   Nous estimons qu'un doute raisonnable assez important peut existe quant à

  3   ce qui s'y est passé et aux raisons qui l'ont motivé. Pendant que la

  4   Défense ne nie pas qu'un certain nombre d'hommes et de jeunes hommes ont

  5   été tragiquement tués dans des actes de vindicte personnelle à Srebrenica,

  6   ces meurtres, en fait, n'ont rien à voir avec une quelconque enquête bien

  7   menée concernant Srebrenica et nous ne saurons donc jamais la réelle

  8   vérité. Nous ne pourrons jamais déterminer le nombre exact de personnes qui

  9   ont été tuées au cours de ces crimes qui n'étaient pas des morts au combat,

 10   mais qui se sont produites dans des conditions diverses pendant des années,

 11   avant même de donner lieu au chiffre évoqué par l'Accusation. Nous n'aurons

 12   pas cette possibilité, car il n'y a pas eu d'enquête correcte.

 13   Donc plutôt que de chercher la vérité et la réconciliation, M.

 14   McCloskey vous a demandé de "frapper en retour" M. Mladic pour ces crimes.

 15   Page 44 526 du compte rendu d'audience. Avec le respect que je dois à la

 16   Chambre, je ne crois pas que le mandat de ce Tribunal concerne des actes de

 17   vengeance ou de vigilance destinés à la vindicte personnelle; le but de la

 18   Chambre doit être la recherche de la justice et de la vérité. C'est la

 19   seule façon d'appliquer correctement la justice et seule la vérité peut

 20   guérir les plaies de Srebrenica et conduire à la réconciliation et la paix.

 21   La vérité, c'est que nous ne saurons jamais si les événements tragiques de

 22   juillet 1995 auraient pu être évités. On peut discuter comme l'a fait la

 23   communauté internationale, et les Nations Unies en particulier, mais en

 24   particulier -- de savoir si cette communauté internationale et les Etats-

 25   Unis en particulier ont agi en toute bonne foi s'agissant de démilitariser

 26   Srebrenica et les troupes de l'ABiH de Naser Oric, si celles-ci se sont

 27   comportées de toute bonne foi en 1993, 1994 et même 1995, lorsqu'elles

 28   étaient appelées à déposer les armes. La démilitarisation était une


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  1   illusion et un mensonge dans un jeu tragique dans lequel seul Ratko Mladic

  2   a adhéré aux objectifs poursuivis en toute bonne foi, c'est-à-dire à la

  3   volonté de démilitariser et de rétablir la paix à Srebrenica pendant que

  4   les Etats-Unis fermaient les yeux sur leurs obligations d'imposer la

  5   démilitarisation contre l'ABiH et qu'ils ont apporté un concours actif aux

  6   troupes de Naser Oric pour violer les accords et reprendre la fourniture

  7   d'armes. Nous avons vu dans les éléments de preuve présentés que l'ABiH n'a

  8   fait que s'opposer à l'arrêt de fonctionnement des armes, tout en

  9   dissimulant les armements et les forces à sa disposition dans l'enclave à

 10   partir de laquelle elle a procédé à des attaques barbares et féroces contre

 11   les villages serbes environnants, tuant plus de 1 300 Serbes au cours des

 12   années précédant 1995.

 13   Le général Mladic n'a cessé de plaider auprès des Nations Unies pour

 14   que la démilitarisation de Srebrenica soit mise en œuvre et qu'une

 15   cessation complète des hostilités soit décidée.

 16   Il a réellement cherché à rétablir la paix. Tous les autres

 17   participants au conflit avaient des intentions cachées, opposées à la

 18   démilitarisation de Srebrenica et au respect de son statut de zone

 19   protégée. Donc, ce n'est pas le général Mladic à qui l'Accusation doit

 20   reprocher les échecs de ces tentatives en 1995 et ce n'est pas lui qui doit

 21   porter la responsabilité qu'on lui impute.

 22   Cette tendance, le fait de rechercher la vengeance, a été confirmée

 23   par l'enquêteur du bureau du Procureur, M. Ruez, page du compte rendu

 24   d'audience 10 417. L'expert militaire Kovac a également indiqué que telle

 25   était la cause des meurtres de Srebrenica, page du compte rendu d'audience

 26   41 395. Les crimes d'Oric n'excusent pas les crimes de vengeance en 1995,

 27   mais les expliquent et montrent pourquoi certaines personnes ont agi

 28   contrairement aux ordres du général Mladic concernant les prisonniers de


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  1   guerre.

  2   En outre, les arguments de l'Accusation ignorent, en réalité, qu'en

  3   vertu de la loi, Srebrenica était une ville défendue, comme nous en avons

  4   déjà donné une définition lorsque nous avons parlé de Sarajevo. C'est un

  5   statut particulier que celui de zone protégée. Ceci a été rendu nul à cause

  6   du manquement de l'ABiH de démilitariser la ville.

  7   Le Témoin GRM097 a témoigné et a parlé du manquement à l'obligation

  8   de désarmer et de relâcher des Serbes de leurs obligations en vertu des

  9   accords de Srebrenica, puisqu'ils avaient le droit de légitime défense

 10   contre les attaques de l'ABiH. Le Témoin Akashi a dit que le secrétaire

 11   général s'était plaint des faiblesses et manquements des zones protégées

 12   des Nations Unies au Conseil de sécurité des Nations Unies, et ce, en vain,

 13   y compris le manquement à l'obligation de démilitariser l'enclave.

 14   Aucune des actions de la VRS menées avant l'opération Krivaja ne peut

 15   être compris comme une preuve de l'intention criminelle de commettre le

 16   génocide ou autre, en raison d'une autre conclusion qui est au vu des

 17   éléments de preuve qui consistent à conclure que de tels actes étaient des

 18   réponses légitimes aux attaques et empiètements des forces de l'ABiH de

 19   Srebrenica et au manquement à l'obligation de démilitariser du statut de

 20   Srebrenica en tant que ville défendue. Encore une fois, le conseil de

 21   l'Accusation, M. McCloskey et l'expert Butler ont reconnu que l'opération

 22   même Krivaja 95 constitue un objectif militaire légitime et, par

 23   conséquent, Messieurs les Juges, ceci ne peut pas être utilisé comme moyen

 24   de preuve d'un crime, chose que nous avons pu voir vendredi dernier dans le

 25   cadre de notre présentation PowerPoint. Je vous ai montré quels étaient nos

 26   points de vue là-dessus.

 27   Et maintenant, au paragraphe 1 116 du mémoire en clôture de

 28   l'Accusation, l'Accusation présente une nouvelle thèse, à savoir que


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  1   Krivaja 95 était censée contraindre les personnes à partir et créer des

  2   conditions humanitaires insupportables. Nous avons entendu dire déjà la

  3   semaine dernière comment l'Accusation a tenté de déformer les réunions qui

  4   se sont tenues à l'hôtel Fontana, et ce, contrairement aux moyens de preuve

  5   présentés par M. Butler. Ne les laisser pas faire cela. Une fois qu'ils ont

  6   dit que quelque chose était illégal et criminel, ils ne peuvent pas revenir

  7   là-dessus et prétendre que cela est le cas.

  8   Nous avons démontré dans nos arguments que la position de

  9   l'Accusation consiste à désavouer non moins de trois experts militaires qui

 10   sont les leurs. Et la Défense ne peut pas insister suffisamment sur le fait

 11   que l'Accusation a reconnu par le truchement de son témoin expert Richard

 12   Butler que pas un seul ordre émanant du général Mladic n'a pu être trouvé

 13   concernant les meurtres allégués à Srebrenica; page du compte rendu

 14   d'audience 16 573 du Témoin Butler. Messieurs les Juges, ceci est assez

 15   convainquant s'agissant du doute raisonnable et d'un acquittement. Un

 16   acquittement devient d'autant plus nécessaire que vous examinez les

 17   éléments de preuve de l'Accusation. A titre préliminaire, on a laissé

 18   entendre que l'équipe de Défense de général Mladic fait porter la

 19   responsabilité au général Krstic pour les crimes de Srebrenica; rien ne

 20   peut être plus éloigné de la vérité. Notre rôle ne consiste pas à accuser

 21   qui que ce soit et encore moins à déclarer quelqu'un coupable.

 22   La semaine dernière, l'Accusation a montré plusieurs vidéos de

 23   Potocari pour montrer que "les images parlent d'elles-mêmes", images de

 24   personnes prenant la fuite; page du compte rendu d'audience 44 536 et

 25   44 537. Les images qui vous ont été montrées ont été savamment éditées, de

 26   sorte que lors d'une série d'images on vous a montré des civils, et alors

 27   que le général Mladic s'adressait à eux, cette partie-là a été coupée par

 28   l'Accusation, tel que les expressions de reconnaissance envers le général


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  1   Mladic pour son comportement humanitaire. Vous avez vu ces séquences vidéo.

  2   Mais maintenant, je vais parler des allégations de transfert forcé. La

  3   semaine dernière, M. McCloskey a dit, et maintenant je le cite, page du

  4   compte rendu d'audience 44 537 :

  5   "L'idée que ces personnes sont parties de leur plein gré est insultante."

  6   Il s'agit de mots forts. Je dois dire que quel que soit le comportement qui

  7   ait contrarié M. McCloskey, il est malvenu s'il se tourne vers mon client,

  8   si vous vous penchez sur la raison pour laquelle ces personnes sont

  9   parties. Rien ne peut être plus éloigné de la vérité. Mais penchons-nous

 10   sur les moyens de preuve avancés par M. McCloskey sur ce thème, parce que

 11   c'est à lui que revient la charge de la preuve; et ses propres moyens de

 12   preuve montrent que l'on ne peut pas faire porter à M. Mladic la

 13   responsabilité des transferts forcés de Srebrenica.

 14   En réalité, les éléments de preuve de l'Accusation montrent que c'était en

 15   premier lieu le commandement de la BiH à Srebrenica qui a décidé

 16   d'abandonner Srebrenica et qui a dirigé les civils vers Potocari et la base

 17   des Nations Unies qui se trouvait là, et que les hommes devaient partir en

 18   formation militaire depuis Susnjari et essayer de percer les lignes serbes,

 19   P1547, paragraphe 2. Alors, s'il y a insulte, cette insulte doit se tourner

 20   vers les dirigeants musulmans de Bosnie, et non pas Mladic. Mon client ne

 21   peut pas être tenu responsable des actes de ces personnes. Il s'agit de

 22   preuve soit d'un départ volontaire ou que le SDA et l'ABiH aient contraint

 23   ces personnes à partir. Dans les deux cas, le général Mladic n'est pas

 24   responsable de cela.

 25   Cela étant dit, la pièce P1462 a été versée au dossier en l'espèce en tant

 26   que déclaration 65 ter du Témoin Malagic. Il s'agit d'un extrait de sa

 27   déposition dans l'affaire Tolimir, où M. McCloskey lui-même a recueilli la

 28   déposition suivante aux pages 12 et 13 du prétoire électronique :


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  1   "Q. Veuillez nous décrire, s'il vous plaît, ce qui s'est passé à cet

  2   endroit. Que se passait-il, au mieux de vos souvenirs…

  3   "R. Mon frère aîné, mon mari et mes fils ont décidé à ce moment-là, avec

  4   d'autres hommes valides, de rejoindre Tuzla à pied. Ils se sont donc

  5   dirigés vers le territoire libre. Ils recherchaient une voie de sortie. Ils

  6   n'ont pas osé se rendre à Potocari. Ils nous ont dit que les femmes et les

  7   enfants et les invalides devaient se rendre à Potocari et ils nous ont dit

  8   que la FORPRONU allait nous protéger. Ils n'ont pas pu emprunter le même

  9   chemin."

 10   Encore une fois, les éléments de preuve présentés par M. McCloskey ne

 11   permettent pas de prouver que le général Mladic a indiqué où les gens

 12   devaient se rendre. Les Musulmans de Bosnie ont décidé cela par eux-mêmes.

 13   Cela étant dit, le mémoire en clôture de l'Accusation reconnaît au

 14   paragraphe 1 141 [comme interprété] que le colonel Karremans du Bataillon

 15   néerlandais a demandé à Mladic l'autorisation de partir à la fois pour les

 16   hommes du Bataillon néerlandais et les civils de Potocari, parce que les

 17   civils de Srebrenica souhaitaient partir. Le mémoire en clôture indique

 18   qu'ils souhaitaient partir. Prêtez attention à cela, ce que l'Accusation a

 19   avancé. Le doute raisonnable, par conséquent, est digne d'un acquittement.

 20   Maintenant, nous avons la déposition du Témoin de l'Accusation Franken

 21   donnée au ministère de la Défense néerlandais. La page 6 a été caviardée.

 22   Et nous constatons ici :

 23   "Concernant le transport des réfugiés, nous nous sommes mis d'accord avec

 24   Mladic pour que la FORPRONU supervise ces convois. Notre rôle consistait à

 25   être présent le plus possible et à escorter ces personnes. Les hommes ont

 26   été séparés des femmes. Les Musulmans étaient d'accord pour que les hommes

 27   fassent l'objet d'enquête pénale sous la surveillance du CICR [comme

 28   interprété] et de la Croix-Rouge."


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  1   Et :

  2   "NB : Franken dit qu'il possède le texte en anglais et en bosniaque,

  3   texte de l'accord avec Mladic. Lui-même s'est fondé sur une interprétation

  4   orale."

  5   Le transport des réfugiés, donc, il ne s'agit pas d'expulsion ou de

  6   transport forcé. C'est bien le contraire.

  7   Si nous regardons l'ensemble des éléments de preuve, il est clair que

  8   le personnel des Nations Unies, à l'intérieur et l'extérieur de Srebrenica,

  9   a déterminé qu'une évacuation dans des conditions humanitaires des

 10   personnes de Potocari était une nécessité. Nous avons, entre autres,

 11   entendu le général Nikolai, le commandant Franken et le colonel Boering,

 12   qui ont tous attesté de cela sous serment dans la salle d'audience. Ils ont

 13   utilisé le terme d'"évacuation". Les preuves documentaires de la VRS

 14   démontrent que ce qu'ils avaient l'intention de faire et ce qu'ils avaient

 15   compris à l'époque était une évacuation, et ce sont ces termes-là qui ont

 16   été utilisés. Penchez-vous sur la pièce P1714, par exemple. Sauf votre

 17   respect, Messieurs les Juges, l'Accusation, en citant ces événements comme

 18   étant des actes de transfert forcé et d'expulsion, ils vont ignorer et

 19   déplacer la pléthore de preuves contraires.

 20   Regardons maintenant le P1165, la déclaration du Témoin à charge

 21   Cornelius Nikolai recueillie par l'Accusation en 1996. Au paragraphe 59.

 22   Diapositive suivante.

 23   Encore une fois, si l'Accusation se sent insultée par ce qui est dit ici,

 24   ce sentiment n'a pas été démontré au moment où ce document a été versé au

 25   dossier. Comme nous pouvons le constater, voici ce que dit cette --

 26   "Le colonel Karremans a commencé les négociations avec le général Mladic

 27   cette nuit-là et m'a dit pour la première fois que Mladic se trouvait sur

 28   le terrain là-bas. Le lendemain, les négociations devaient continuer avec


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  1   Mladic. Nous avons donné des instructions au colonel Karremans pour ce qui

  2   est de ce qu'il devait faire pendant ces négociations - ces négociations

  3   qui ont été menées par téléphone et par écrit. Nous lui avons donné des

  4   instructions de rester avec la population civile pour que lui-même ainsi

  5   que ses hommes puissent surveiller l'évacuation, pour que l'évacuation se

  6   passe en conformité avec le règlement international. Tout de suite, les

  7   frappes aériennes ont cessé. Nous avons compris que la population civile

  8   devait être évacuée de Srebrenica puisqu'il n'y avait pas de nourriture, de

  9   médicaments ou d'abri pour les gens qui se trouvaient là-bas. Nous

 10   espérions que la FORPRONU s'occuperait de l'évacuation et même nous

 11   donnerait des camions, si nécessaire. Le 11 juillet, j'ai informé le

 12   ministre de la Défense néerlandais de l'évacuation planifiée et de notre

 13   intention d'utiliser les camions de la FORPRONU, et il en était d'accord."

 14   Il est clair que lorsque la FORPRONU a cessé les frappes aériennes,

 15   il a été décidé d'évacuer les civils de Srebrenica. Il n'y avait pas eu de

 16   consultation avec Mladic à ce sujet. C'est les Nations Unies qui ont décidé

 17   là-dessus avant la rencontre entre Karremans et le général Mladic. Encore

 18   une fois, si le départ des civils de Srebrenica représente un crime ou fait

 19   partie d'une entreprise criminelle commune, les éléments de preuve de

 20   l'Accusation laissent entendre que ce crime a été conçu par la FORPRONU,

 21   ainsi que le ministre néerlandais de la Défense, ainsi que le chef du QG du

 22   commandement de la BiH qui était néerlandais, et non pas par le général

 23   Ratko Mladic. Et rappelons-nous que le général Nikolai a parlé de cela de

 24   façon sincère lors de son témoignage.

 25   "Q. Je suppose alors, Monsieur, que les instructions et les ordres que vous

 26   avez envoyés au colonel Karremans avant sa rencontre avec le général Mladic

 27   pour la première fois concernaient l'évacuation et le besoin de évacuer les

 28   réfugiés, n'est-ce pas ?


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  1   "R. Oui. Il n'était plus nécessaire d'expliquer au colonel Karremans que

  2   cela était nécessaire. Il pouvait comprendre cela. Et il s'agissait tout

  3   simplement d'un ordre provenant de la FORPRONU à l'attention du colonel

  4   Karremans que l'évacuation devait avoir lieu. Mais, bien sûr, nous devions

  5   l'informer concernant la façon à laquelle l'évacuation devait avoir lieu

  6   puisque, pour l'exécution, nous avions besoin de la coopération des forces

  7   des Serbes de Bosnie, ce sur quoi il devait négocier sur les lieux."

  8   Monsieur le Président, je pense que le moment est venu pour faire la pause.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Ivetic. Merci de m'avoir

 10   rappelé cela. Nous allons faire la pause et nous allons reprendre à 12

 11   heures 15.

 12   --- L'audience est suspendue à 11 heures 55.

 13   --- L'audience est reprise à 12 heures 16.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, vous pouvez poursuivre.

 15   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 16   J'ai oublié de mentionner la page du compte rendu, ce que je viens de lire

 17   par rapport au général Nikolai. Il s'agit de la page du compte rendu 10 654

 18   dans notre compte rendu, et on a attiré mon attention sur le fait que dans

 19   le compte rendu provisoire, page 7, ligne 13, j'ai dit "le bâtiment de la

 20   PTT", et j'aurais dû dire le "bâtiment de la RTV", lorsque j'ai fait

 21   référence au commentaire de M. Weber l'autre jour.

 22   Maintenant, je vais continuer.

 23   Par rapport à ce témoignage de Nikolai, nous pouvons voir que le colonel

 24   Karremans a reçu des ordres de ses supérieurs des Nations Unies pour

 25   négocier sur ce que les Nations Unies voulaient qu'il soit négocié, à

 26   savoir de la coopération avec la VRS pour faire sortir les civils musulmans

 27   de Bosnie de Srebrenica [comme interprété]. Et s'il y a un ordre criminel

 28   concernant le déplacement des gens de Srebrenica, cet ordre ne porte pas la


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  1   signature de M. Mladic, mais le tampon des Nations Unies.

  2   La diapositive suivante, c'est la séquence vidéo concernant Srebrenica, la

  3   séquence de l'Accusation, P1147, où on voit la première réunion entre le

  4   colonel Karremans et le général Mladic. Il dit :

  5   "Ensuite j'ai demandé une équipe des autorités civiles et de l'UNHCR pour

  6   nous donner des autocars et d'autres moyens. La seule chose que je puisse

  7   faire est de voir quel est le nombre de personnes et, pour le faire, donc

  8   pour les compter, et ensuite nous avons besoin des autocars pour les

  9   transporter. Mais je vais également demander des autocars à mes autorités

 10   militaires, mais je ne sais vraiment pas ce que ces autorités peuvent me

 11   donner, je ne sais toujours pas cela. Nous nous occupons du fait de voir

 12   quelles sont les personnes qui veulent partir et dans quelle direction, et

 13   pour le faire, il nous faut du temps, et je ne sais pas ce qui est possible

 14   de faire à ce sujet. Mais je suppose que c'est quelque chose par rapport à

 15   quoi M. Mandzic est en mesure de nous dire quelque chose. Je ne sais pas

 16   dans quelle direction ces gens veulent partir. Et ensuite, nous pouvons

 17   préparer un plan pour l'évacuation pour savoir quelles sont les personnes

 18   qui doivent partir en premier, parce qu'elles sont âgées, malades, et

 19   cetera."

 20   Encore une fois, je fais remarquer que personne n'a utilisé le mot

 21   "déportation" ou "transfert forcé"; c'est toujours le mot "évacuation" qui

 22   a été mentionné. M. Mandzic, et vous allez vous souvenir de lui, c'est

 23   Nesim [phon] Mandic, représentant des civils des Musulmans de Bosnie.

 24   Encore une fois ici, on peut donc conclure de façon raisonnable sur la base

 25   des éléments de preuve que les civils des Musulmans de Bosnie ont décidé de

 26   leur plein gré de partir et dans quelle direction. Donc cela veut dire

 27   qu'il y a un doute raisonnable et que l'acquittement est justifié.

 28   La diapositive suivante.


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  1   Le colonel Boering a également témoigné, et après que la même

  2   séquence vidéo lui a été montrée, il a dit ce qui suit, les pages du compte

  3   rendu 10 067 et 68 :

  4   "R. Nous avons organisé la deuxième réunion. Nous avons considéré de

  5   différentes organisations qui pouvaient peut-être nous aider. Ensuite il y

  6   avait eu des demandes des gens pour aller à Tuzla, on en a parlé avec des

  7   différentes organisations, mais pour ce qui est du plan concret, je ne

  8   souviens pas de cela. Il s'agissait des choses dites en général. Nous avons

  9   mentionné des organisations et de la façon à laquelle ils parlaient et

 10   agir.

 11   "Q. Lieutenant-colonel Karremans dit, pour préparer un plan

 12   d'évacuation, il faut que ce plan englobe des priorités de ces gens qui

 13   voulaient partir. Lorsque vous vous êtes préparé pour cette réunion, est-ce

 14   que vous avez jamais parlé de ces priorités et comment les déterminer ?

 15   "R. Oui, je me souviens d'avoir discuté de cela, du fait qu'il

 16   fallait d'abord transporter les personnes blessées, et ensuite les

 17   personnes âgées, et dans la phase finale, les personnes en bonne santé.

 18   Donc les priorités ont été établies, mais je ne sais pas si on en a parlé

 19   en détail lorsqu'on a déterminé tout cela."

 20   Donc, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, nous voyons qu'il y

 21   avait des demandes des gens qui voulaient partir à Sarajevo et à Tuzla, et

 22   je vous rappelle qu'il s'agissait des zones contrôlées par l'ABiH. Si on

 23   s'appuie sur les éléments de preuve, encore une fois, des gens ont choisi

 24   eux-mêmes où partir.

 25   Et revenons à ce que M. Mladic a dit à ce sujet. La semaine dernière,

 26   nous avons vu la troisième réunion à l'hôtel Fontana, et rien d'inapproprié

 27   n'a été dit lors de cette réunion. La diapositive suivante nous montre la

 28   rencontre entre M. Koster et M. Mladic dans cette séquence vidéo de


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  1   l'Accusation, l s'agit d'Eelco Koster du Bataillon néerlandais, et

  2   l'Accusation parle de cela de façon erronée.

  3   Maintenant, pour ce qui est de cette vidéo, vous allez vous rappeler

  4   le fait que M. Koster a traduit de façon erronée à Potocari les mots

  5   prononcés par M. Mladic, qui aurait dit que tout le monde va faire monter à

  6   bord des autocars et pour ce qui est de la traduction révisée de cette

  7   séquence, il a dit :

  8   "Nous allons faire monter à bord des autocars toutes les personnes

  9   qui veulent partir."

 10   Cet incident nous amène à la réflexion suivante et, en fait, à plusieurs

 11   réflexions. Les membres du Bataillon néerlandais sur le terrain, en

 12   s'appuyant sur cette traduction incorrecte, ne peuvent pas être

 13   suffisamment fiables pour présenter correctement les mots du général

 14   Mladic. Donc, on ne peut pas exclure la possibilité que ce même interprète

 15   interprétait de façon erronée d'autres mots du général Mladic qui n'ont pas

 16   été enregistrés dans cette vidéo. Nous n'avons pas donc la possibilité de

 17   vérifier cela maintenant, mais les membres des Bataillon néerlandais, comme

 18   par exemple Leendert van Duijn en ont témoigné. Il y a une autre par

 19   rapport à ces traductions erronées. Il s'agit de la conversation

 20   interceptée P1236 citée par l'Accusation, mais il n'y a pas

 21   d'enregistrement où Mladic a dit ce qui aurait été enregistré, ce qui donc

 22   éveille d'autres soupçons. Mais dans cette conversation interceptée, dans

 23   la transcription, il a dit que ceux qui veulent être évacués seront

 24   évacués, ainsi que d'autres qui ne veulent pas être évacués.

 25   Etant donné que cela a été corrigé récemment et qu'on dispose d'une

 26   nouvelle version corrigée, on se demande s'il est possible d'exclure la

 27   possibilité que quelqu'un aurait intérêt ou falsifié ces conversations

 28   interceptées pour que cela cadre avec l'accusation concernant le transfert


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  1   forcé qui pèse sur Mladic, en s'appuyant sur les interprétation erronées ou

  2   en espérant qu'une interprétation erronée serait utilisée pour soutenir

  3   l'authenticité de cette conversation interceptée ? Je ne peux pas écarter

  4   cette réflexion de mon esprit. Encore une fois, il y a un doute

  5   raisonnable, là.

  6   Regardons une autre séquence de Potocari que l'Accusation a omise

  7   lors de sa présentation la semaine dernière.

  8   [Diffusion de la cassette vidéo]

  9   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 10   "Mladic : Non, n'ayez pas peur. Doucement, doucement. Il faut d'abord

 11   que des enfants et des femmes partent. Il y aura trois autocars. Nous

 12   allons vous transporter vers Kladanj -- de Kladanj où vous allez pouvoir

 13   passer sur le territoire contrôlé par les forces d'Alija. Ne paniquez pas.

 14   Passez des enfants et des femmes. Il ne faut pas que les enfants soient

 15   perdus. N'ayez pas peur. Personne ne vous nuira.

 16   "Homme dans la foule : Merci, merci. Que ta vie soit longue.

 17   "Journaliste : Général, après la libération de Srebrenica, on a ici

 18   plusieurs centaines de civils musulmans. Qu'est-ce qu'il va se passer pour

 19   ce qui est de ces civils ?

 20   "Mladic : Bien, je viens de recevoir une délégation de la population

 21   qui est ici, ils m'ont demandé de permettre aux civils qui veulent partir

 22   de ce territoire de passer sur le territoire contrôlé par les Musulmans et

 23   les Croates. Notre armée n'a pas pour but de lutter contre les civils ni

 24   contre les forces de la FORPRONU. Et nous avons organisé les moyens de

 25   transport pour eux, les vivres, de l'eau et des médicaments et dans le --

 26   premièrement, aujourd'hui, des femmes, des enfants et des personnes âgées

 27   seront évacuées et tous ceux qui veulent partir de leur plein gré de cette

 28   zone où il y a des activités de combat. Personne ne vous nuira ici.


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  1   "Bonjour. Quel âge as-tu ? Comment t'appelles-tu ? S'il vous plaît,

  2   soyez patients. Tous ceux qui veulent rester peuvent rester et tous ceux

  3   qui veulent quitter ce territoire peuvent partir. Nous avons suffisamment

  4   d'autocars et de camions et vous allez être transportés à Kladanj."

  5   M. IVETIC : [interprétation] Pour que tout soit clair, je vais rappeler que

  6   nous venons d'entendre le général Mladic en train de répéter que des gens

  7   ont le choix de partir ou de rester. Ce qu'il a dit au représentant de la

  8   population à la troisième réunion à l'hôtel Fontana. Les civils musulmans

  9   de Bosnie rassemblés ont exprimé leur gratitude au général Mladic et ils

 10   l'ont béni pour ces mots et le comportement envers eux. C'est le même

 11   général Mladic qui est aujourd'hui devant vous et qui est patiemment à

 12   écouter des accusations blessantes présentées par l'Accusation la semaine

 13   dernière. S'il y a une personne dans ce prétoire qui doit se sentir

 14   insultée par les insinuations concernant le transfert forcé, c'est le

 15   général Mladic, Monsieur le Président.

 16   Nous avons vu que la décision portant sur le départ des gens de

 17   Srebrenica est la décision qui a été d'abord prise par les habitants de

 18   Srebrenica ainsi que les représentants de l'armée BiH qui se trouvaient à

 19   Srebrenica. Après quoi, les Nations Unies ont donc ordonné pour que

 20   l'évacuation soit faite et a chargé le colonel Karremans de présenter

 21   l'évacuation comme un fait accompli auprès du général Mladic et de lui

 22   demander de l'aide pour organiser l'évacuation humanitaire. Le général

 23   Mladic a été d'accord pour aider et a entrepris des mesures en personne

 24   pour obtenir des autocars en peu de temps. Et comment peut-on conclure, sur

 25   la base des éléments de preuve, que ceux qui ont planifié et ordonné le

 26   départ de la population et le présenter à Mladic, ce sont des saints et que

 27   Mladic doit être considéré comme le diable, coupable des crimes du

 28   transfert forcé ? Nous ne pouvons pas accepter cela, à moins que vous,


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  1   encore une fois, je répète cela, les Serbes soient coupables, même pour les

  2   choses considérées comme des choses humanitaires.

  3   Et j'ai déjà dit que M. McCloskey a inventé l'histoire concernant le

  4   dîner auquel ont assisté Krstic et Mladic. C'est ce qu'il nous a décrit

  5   l'autre jour lors de leur réquisitoire. Regardons ce qu'ils ont vraiment

  6   dit, aux paragraphes 1 073 [comme interprété], 1 105 de leur mémoire en

  7   clôture. 

  8   "A un moment donné entre la soirée du 11 juillet et la matinée du 12

  9   juillet, Mladic et d'autres membres de l'entreprise criminelle commune ont

 10   établi des plans concrets pour mettre en détention et exécuter sommairement

 11   un grand nombre d'hommes et de garçons musulmans et de transporter par la

 12   force des enfants et des femmes de Srebrenica sur le territoire contrôlé

 13   par BiH."

 14   Cela nous dit beaucoup. Après tout ce temps-là, l'Accusation admet

 15   qu'elle ne sait même pas quand ce plan a été conçu, donc cette histoire

 16   fantaisiste concernant le dîner est inventée. Donc, un doute raisonnable

 17   existe et l'acquittement est justifié.

 18   Regardons le deuxième paragraphe sur ces diapositives, et il s'agit

 19   du paragraphe 1 105 du mémoire en clôture de l'Accusation. 

 20   "Jusqu'à ce moment-là, l'objectif était de déplacer de façon

 21   permanente et par la force la population musulmane de Bosnie de Srebrenica.

 22   Et peu après que Mladic et d'autres membres de l'entreprise criminelle

 23   commune se sont rendus compte du fait qu'un grand nombre d'hommes et de

 24   garçons se trouvaient à Potocari, une entreprise criminelle commune a été

 25   conçue ayant pour le but criminel commun d'éliminer les Musulmans de

 26   Srebrenica."

 27   Au paragraphe 1 175, l'Accusation dit que cela s'est passé à un

 28   moment donné entre la soirée du 11 juillet et la troisième réunion à


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  1   l'hôtel Fontana qui s'était tenue à la date du 12 juillet, à 10 heures du

  2   matin. Donc dans leur mémoire en clôture, l'Accusation admet qu'il n'existe

  3   pas une entreprise criminelle commune pour tuer, excepté le fait si cette

  4   réunion mystérieuse ait existé, mais ils n'ont pas d'éléments de preuve

  5   pour nous dire où cela s'est passé. Supposons que la déclaration de M.

  6   Mladic devant une caméra à Srebrenica soit vraie, à savoir qu'il ait dit

  7   "Il est venu le moment pour se venger des Turcs", elle ne peut pas être

  8   liée à l'existence d'une entreprise criminelle commune de commettre le

  9   génocide ou de tuer parce que cela précède cette réunion mystérieuse qui

 10   s'était tenue entre le 11 juillet et le 12 juillet par rapport à laquelle

 11   l'Accusation a dit que c'est la date de départ de l'existence de

 12   l'entreprise criminelle commune. Il faut donc que l'acquittement soit

 13   prononcé.

 14   Essayons de retrouver cette réunion mystérieuse où tous devaient être

 15   présents pour discuter de l'entreprise criminelle commune, car sans celle-

 16   ci la thèse de l'Accusation s'effondre. Le paragraphe 1 175 du mémoire de

 17   l'Accusation indique :

 18   "Pour décider de tuer des hommes en âge de porter les armes de Potocari,

 19   Mladic a dû consulter Krstic et ses officiers responsables du renseignement

 20   et de la sécurité présents à Bratunac, Popovic, Keserovic et Jankovic."

 21   Ensuite, pour étayer cette accusation, il y a une note de bas de page où il

 22   est question du témoignage de Milovanovic. Malheureusement, aucune de ces

 23   références à ce témoignage ne disent quelque chose sur ce qui est cité dans

 24   le mémoire de l'Accusation. Donc, l'Accusation invente sa thèse lorsqu'elle

 25   n'en a pas la preuve.

 26   Plusieurs preuves relatives à la réunion de l'hôtel Fontana le soir

 27   du 11 juillet 1995 soutiennent la conclusion raisonnable qu'aucun projet

 28   n'a été discuté ou abordé. Pour commencer, il faut relever que même le


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  1   témoin intérieur phare de l'Accusation, Momic Nikolic, ne parvient pas à

  2   affirmer que quoi que ce soit de criminel ait été abordé lors de cette

  3   réunion. Nikolic n'était pas présent, mais il a vu l'accusé, le général

  4   Krstic et les commandants de groupes de chaque brigade qui ont participé à

  5   l'opération de Srebrenica, Pandurevic, Blagojevic, Tribic, Andric. Selon

  6   Momir Nikolic, cette réunion a eu lieu vers 17 ou 18 heures, lorsqu'il

  7   faisait encore jour, avant la réunion à l'hôtel Fontana le même jour, et

  8   cela se trouve dans le document D1228.Après, il a appris de la bouche de

  9   Blagojevic ce qu'il a été dit lors de la réunion, à savoir que l'opération

 10   de Srebrenica a été analysée et qu'il y avait eu un conflit entre

 11   Blagojevic et Krstic car ils n'étaient pas d'accord sur la participation de

 12   la Brigade de Bratunac. Ensuite, il y a eu une discussion sur l'opération

 13   de Zepa et Pandurevic ne voulait pas lancer Zepa avant que l'on ne se soit

 14   occupé de la 28e Division et de la colonne.

 15   Donc, à nouveau, Nikolic n'apporte pas la preuve que des desseins

 16   criminels aient été abordés lors de la réunion.

 17   Plusieurs témoins ont déclaré avoir participé ou entendu parler d'une

 18   réunion ce soir-là au cours de laquelle rien de criminel n'a été dit; mais,

 19   plutôt, ce sont les plans de Zepa qui ont été analysés. C'est ce que dit

 20   Nikolic également. Il s'agit du colonel Andric, D1033, paragraphe 19;

 21   Milenko Jevdjevic, compte rendu d'audience pages 32 059 et suivantes;

 22   Miodrag Dragutinovic, qui nous a dit que Pandurevic a parlé de la réunion

 23   avec lui, compte rendu d'audience 32 241 jusqu'à 242. L'Accusation prétend

 24   que tous ces témoins mentent et que la réunion dont ils parlent a

 25   effectivement eu lieu le 12 juillet, sur la seule base du P1467, l'agenda

 26   du colonel Trivic, qui comporte une réunion du 12 juillet d'une nature

 27   similaire. Il est intéressant de relever que, tout en disant que tout le

 28   monde ment, l'Accusation ne vise pas Momir Nikolic et son témoignage selon


Page 44795

  1   lequel rien de criminel n'a été dit lors de la réunion du soir du 11

  2   juillet. Mais cette affirmation comporte un problème. L'Accusation dit

  3   qu'il ne faut croire personne, mais l'agenda est crédible, fiable,

  4   détaillé, précis et exact. Paragraphe 1 216 du mémoire en clôture de

  5   l'Accusation. Mais cet agenda n'a aucune réunion le 11 juillet, ni à un

  6   quelconque moment où l'on aurait parlé d'une entreprise criminelle commune

  7   pour tuer les habitants de Srebrenica. Donc, où est la preuve positive de

  8   l'Accusation établissant au-delà de tout doute raisonnable la réunion, la

  9   genèse de l'ECC ? Pour le dire simplement, elle n'est pas présente.

 10   Indépendamment des dates, il n'y a aucune preuve qui relie le général

 11   Mladic à une réunion où ce crime a été discuté.

 12   Alors, après avoir déterminé que cette réunion mystérieuse a dû se

 13   produire, l'Accusation réfute des paroles du général Mladic lors de la

 14   troisième réunion Fontana où il donne à la population le choix de rester ou

 15   de s'en aller. Elle dit que c'est un mensonge.

 16   "Il n'en avait pas clairement l'intention."

 17   C'est au paragraphe 1 161 [comme interprété] de leur mémoire. En substance,

 18   l'Accusation nous dit que le général ment parce qu'il a pris cette décision

 19   lors de cette réunion mystérieuse qu'elle ne peut prouver. L'Accusation

 20   reconnaît qu'il y a un doute raisonnable.

 21   Passons au transparent suivant.

 22   Les actes et paroles du général Mladic confirment à maintes reprises qu'il

 23   n'a aucune intention criminelle à l'égard des prisonniers de guerre

 24   musulmans de Bosnie capturés à Srebrenica avant son départ à Belgrade. Les

 25   preuves sont également claires car elles indiquent que le général Mladic,

 26   personnellement, n'était à l'époque pas au courant des crimes dont il est

 27   accusé. Au contraire, les preuves apportées par les témoins de l'Accusation

 28   et de la Défense démontrent chaque fois que l'accusé a donné des ordres


Page 44796

  1   légitimes et appropriés pour ce qui est du traitement des membres détenus

  2   de la 28e Division. De nombreux témoins de l'Accusation et de la Défense

  3   ont expliqué que l'accusé les a, de fait, traités comme des prisonniers de

  4   guerre et les a échangés avec d'autres. RM292 a expliqué comment l'accusé a

  5   parlé aux prisonniers de guerre à Nova Kasaba, il a dit que :

  6   "Les prisonniers ne doivent pas avoir peur, ils vont retourner chez eux et

  7   seront échangés."

  8   RM292 a également indiqué que les détenus, les prisonniers, ont

  9   applaudit l'accusé.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous parlez de RM292 ?

 11   M. IVETIC : [interprétation] C'est exact.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Regardez la page 53, ligne 25, et

 13   veillez à ce que la référence soit exacte. On parle de "229".

 14   M. IVETIC : [interprétation] Toutes mes excuses si j'ai fait un lapsus --

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne dis pas que c'est de votre

 16   faute. Je dis ce qu'il y a à l'écran, est-ce que c'est cela que vous voulez

 17   dire ?

 18   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. Je parle de RM292. Il

 19   s'agissait de la page 12 672.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 21   M. IVETIC : [interprétation] Le témoin n'a pas identifié d'ordre illégal de

 22   l'accusé pour les prisonniers de guerre.

 23   Subotic, qui est lui-même policier militaire, a confirmé qu'au stade de

 24   Nova Kasaba l'accusé a dit aux prisonniers de guerre qu'ils seraient

 25   échangés, et ils l'ont applaudi; 32 826 à 827. Subotic a confirmé que

 26   l'accusé a dit que les prisonniers de guerre seraient transportés à

 27   Bratunac, logés, nourris, et transférés aux autorités civiles pour le

 28   recueil d'information et pour être échangés; D926, paragraphes 29 et 30.


Page 44797

  1   Ensuite, des ordres explicites donnés par l'accusé à la police militaire

  2   présente prévoyaient la protection physique des prisonniers de guerre, et

  3   comme le décrit en détail Subotic :

  4   "Et il nous a dit strictement de bien nous occuper des prisonniers, que des

  5   cars arriveraient dans l'heure, que les hommes devaient signer, qu'ils

  6   devaient tous monter dans les cars et que les cars seraient remis à la

  7   police civile de Bratunac. C'est cela que j'ai entendu et c'est ce que j'ai

  8   vu lorsque le général Mladic était présent au stade."

  9   Compte rendu d'audience 32 826 à 827.

 10   Selon la preuve, Subotic a exécuté ces ordres légitimes de l'accusé,

 11   a donné de l'eau aux prisonniers et les a protégés jusqu'à leur remise à la

 12   police civile, D926, paragraphe 31.

 13   Donc, nous avons des preuves d'ordres d'explicites de l'accusé contre

 14   la commission de meurtres ou de crimes. Il existe également des preuves

 15   selon lesquelles les blessés présents sur place ont reçu un traitement

 16   médical ou ont été envoyés à l'hôpital; D926, paragraphes 32 à 36. Ces

 17   actes cadrent avec les paroles de l'accusé selon lesquelles ces prisonniers

 18   de guerre devaient être traités correctement et échangés, et sont

 19   incompatibles avec les projets de meurtre. RM346 était prisonnier de guerre

 20   à Nova Kasaba, et lui aussi confirme ce que Subotic et RM292 ont dit au

 21   sujet des paroles explicites prononcées par l'accusé. Concrètement, RM346 a

 22   déclaré que l'accusé a dit qu'ils iraient déjeuner à Bratunac et seraient

 23   tous plus tard échangés.

 24   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce que vous parlez de RM346 ou

 25   364 ?

 26   M. IVETIC : [interprétation] Moi, j'ai écrit 346, mais je vois à l'écran

 27   364. Je peux clarifier en disant que je parle de la pièce à conviction

 28   P1118, page 9. Je pense que cela ne s'applique, je l'espère, qu'à un seul


Page 44798

  1   témoin.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Votre équipe pourra peut-être le

  3   préciser.

  4   M. IVETIC : [interprétation] Oui, peut-être. RM346.

  5   RM253, également, se trouvait lui aussi à Nova Kasaba et il a répété qu'il

  6   a entendu l'accusé dire :

  7   "Ne vous en faites pas, vous serez échangés et rejoindrez vos

  8   familles à Tuzla. Vous allez à présent être transportés en camions à

  9   Bratunac ou Kravica, où vous passerez la nuit et recevrez à manger."

 10   Compte rendu d'audience 12 532 et P1547, paragraphe 20.

 11   Le Témoin Jovic -- Jovicic, le chauffeur de Borovcanin, commandant du MUP,

 12   s'est souvenu que l'accusé a parlé à des prisonniers de la 28e Division à

 13   Sandici et a indiqué que :

 14   "Le transport des femmes et des enfants vers Kladanj et Tuzla était en

 15   cours et qu'ils seraient transportés."

 16   Il n'existe aucune preuve crédible liant la présence du général Mladic sur

 17   des sites de meurtre ou d'exécution ou prouvant avoir des contacts avec des

 18   prisonniers de guerre, si ce n'est ce qui précède. Tout ceci démontre que

 19   les ordres explicites de l'accusé ne comportaient aucun ordre de tuer.

 20   Momir Nikolic est le seul témoin qui déclare avoir vu un geste qu'il

 21   indique comme ceci : [indique], et Nikolic a interprété ce geste de

 22   l'accusé comme signifiant que tous devraient être tués. Mais la nature

 23   absurde de son témoignage et sa crédibilité contestable sont analysées en

 24   détail dans notre mémoire. Une grande partie des moyens de preuve de

 25   l'Accusation relatifs aux ordres donnés par l'accusé aux personnes de la

 26   VRS pour ce qui est des meurtres de Srebrenica proviennent d'une manière ou

 27   d'une autre du témoignage suspect et discrédité de Nikolic. Donc, on peut

 28   conclure raisonnablement que Nikolic colportait des propos inexacts. Nous


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  1   ne pouvons pas assez souligner que malgré son témoignage défendant ses

  2   intérêts, il a déclaré qu'il n'avait jamais reçu un ordre direct de qui que

  3   ce soit - en ce compris de Mladic - de commettre les meurtres à Srebrenica

  4   qu'il a commis. D1228, page 3.

  5   Donc, Nikolic admet ou reconnaît avoir participé aux meurtres mais n'a

  6   jamais reçu d'ordre dans ce sens. L'affirmation selon laquelle un geste de

  7   la main tel que celui-ci [Indique] doit être interprété comme un ordre de

  8   tuer n'est même pas une affirmation faite par Momir Nikolic, mais ça

  9   n'empêche pas l'Accusation de chercher à l'utiliser pour inventer un ordre

 10   de tuer qui n'existe pas. Une telle position est grotesque. Mladic pourrait

 11   avoir dit à Nikolic : Allez-vous-en, laissez-moi. Ou il aurait pu dire :

 12   Pourquoi est-ce que tu m'écoutais pas ? Il aurait pu dire : Je n'ai pas de

 13   temps pour répondre à ta question idiote. Un doute raisonnable existe. En

 14   tout état de cause, Bursik, enquêteur du bureau du Procureur, a indiqué que

 15   l'Accusation ne pouvait même pas démontrer que la rencontre entre Momir

 16   Nikolic et Mladic sur le bord de la route se soit produite. Le récit des

 17   raisons qui avaient amené Nikolic à la barre change. Dans une version

 18   c'était un ordre du colonel Blagojevic, et dans une autre version c'était

 19   son subalterne de la police militaire. Mais ce n'est pas du tout logique.

 20   En outre, Bursik a confirmé que Nikolic n'a jamais parlé de ce fameux

 21   geste, si ce n'est --

 22   [Le conseil de la Défense se concerte]

 23   M. IVETIC : [interprétation] Je recommence.

 24   Donc, M. Bursik a confirmé que Momir Nikolic n'a jamais parlé du prétendu

 25   geste de Mladic, si ce n'est pour la première fois dans cet unique

 26   entretien que l'Accusation a décidé de ne pas enregistrer, et que d'une

 27   manière générale Momir Nikolic était vague et n'était pas coopératif. Donc,

 28   lorsque l'on examine le témoignage de Momir Nikolic, un doute raisonnable


Page 44800

  1   s'installe.

  2   Donc, la thèse de l'Accusation montre un ensemble de faits dans lesquels

  3   les paroles explicites de l'accusé dirigées aux prisonniers de guerre de la

  4   28e division selon lesquels ils seraient échangés et retrouveraient leurs

  5   familles, de telles paroles excluent la possibilité qu'il ait eu

  6   l'intention de les tuer ou ait eu connaissance de plans visant à les faire

  7   tuer. Et en l'absence d'un ordre explicite indiquant le contraire, les

  8   preuves doivent être acceptées comme indiquant que l'accusé n'a pas remis

  9   d'ordres et ne voulait pas la mort de ces personnes.

 10   Je vais parler maintenant de certains de ces meurtres. Nous avons abordé en

 11   détail chaque site d'exécution. Commençons par Kravica parce que vraiment

 12   les paroles me manquent par rapport aux affirmations de l'Accusation. Les

 13   Juges de la Chambre se souviendront que nous avons eu devant nous des

 14   éléments de preuve - que M. McCloskey a admis l'autre jour - que quelques

 15   heures après que Mladic avait quitté le secteur et qu'il était déjà en

 16   route vers Belgrade, un autobus rempli de détenus a été affrété par le MUP

 17   pour emmener ces détenus jusqu'à l'entrepôt de Kravica. Et que certains

 18   détenus ont pris le dessus sur les gardes, saisi leurs armes et engagé un

 19   combat contre ces gardes, en tuant un, et qu'un garde s'est alors brûlé la

 20   main en reprenant un fusil à un détenu et que la révolte a été ainsi

 21   arrêtée. Nous n'avons aucun moyen de savoir combien de détenus sont morts

 22   dans le combat qui a précédé la fin de cette situation. Nous savons et nous

 23   convenons à présent qu'après cette émeute, les gardes du MUP se sont vengés

 24   sur un nombre important de détenus qu'ils ont tués. La deuxième série de

 25   meurtres peut être considérée comme un crime, certes, mais en tout cas pas

 26   comme un crime ordonné, commis sur ordre.

 27   La semaine dernière, j'ai écouté M. McCloskey vous dire, comme le public

 28   l'a entendu, que :


Page 44801

  1   "La thèse de l'Accusation consiste à considérer cet incident comme une

  2   exécution organisée en application d'ordres donnés, avec l'incident de la

  3   main brûlée se produisant bien après le début des exécutions en tant que

  4   réaction désespérée de la part d'un Musulman aux exécutions qui se

  5   produisaient autour de lui mais qui n'ont pas été le point de départ de

  6   celles-ci."

  7   Page 44 544 du compte rendu d'audience. Ensuite, il vous dit que la

  8   conclusion était "évidente" suite à l'analyse des éléments de preuve. Page

  9   44 545 du compte rendu d'audience. Aucun élément de preuve n'indique cela.

 10   Voyons Erin Gallagher. Mme Gallagher est l'enquêteur de M. McCloskey

 11   concernant Kravica et Srebrenica, et Dieu la garde pour avoir tenté de dire

 12   la vérité. C'est un membre honnête de l'équipe de l'Accusation.

 13   "Sur la base de votre travail d'enquête, est-ce que vous avez obtenu

 14   des informations au sujet de l'incident au cours duquel un groupe de

 15   détenus musulmans de Bosnie a essayé de prendre le dessus sur les gardes de

 16   la police qui les gardaient, s'emparant même du fusils d'un garde et le

 17   tuant, un autre garde étant blessé alors qu'il essayait de récupérer son

 18   fusil. Est-ce que vous êtes au courant de cela ?

 19   "R.  Je suis au courant d'un cas qui s'est produit dans l'entrepôt de

 20   Kravica au cours duquel un homme musulman s'est emparé d'un fusil. Oui, il

 21   est s'emparé du fusil et Rade Cutoric s'est battu pour faire sauter le

 22   fusil de la main de celui qui le tenait et peut après, les hommes qui se

 23   trouvaient d'un côté de l'entrepôt ont été tués.

 24   "Q.  Est-ce que dans le cadre de votre enquête, cela se serait produit

 25   avant que certains tentent de prendre le pouvoir sur les gardes et de

 26   s'emparer de leurs fusils, alors que personne n'avait été tué par balle à

 27   ce moment-là ?"

 28   "R.  Il ne s'est pas agi d'une exécution de masse avant que cette exécution


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  1   ait lieu, pas que je sache en tout cas, non."

  2   Plus tard, durant le contre-interrogatoire, le conseil de l'Accusation

  3   Vanderpuye et Mme Gallagher ont admis qu'il n'y avait aucune information

  4   concrète pouvant prouver que les choses se sont passées d'une façon ou de

  5   la façon contraire. Apparemment, ce qui apparaît à l'évidence aux yeux de

  6   l'enquêteur de M. McCloskey n'est pas vu de la même façon par tout le

  7   monde. Un doute raisonnable existe et dès lors qu'une conclusion possible

  8   peut être considérée comme n'étant pas la seule, puisque l'autre enquêteur

  9   de M. McCloskey qui a passé plus de dix ans à enquêter sur Kravica, M.

 10   Tomasz Blaszczyk, nous dit à la page 12 346 et 12 347 du compte rendu

 11   d'audience, qu'il admettait que la question était toujours en suspens

 12   s'agissant de savoir exactement ce qui s'était passé. Le doute existe donc.

 13   "R.  Eh bien, Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, notre

 14   enquête a révélé que cet incident lié à un garde qui a été tué par un

 15   détenu a eu lieu. Mais quand cet incident a lieu demeure une question en

 16   suspens à mes yeux. En fait, est-ce que cet incident s'est produit parce

 17   qu'il y avait eu un autre meurtre avant et est-ce que cet incident

 18   particulier a éclaté ? Voyez-vous, juste en tant qu'événement faisant suite

 19   aux meurtres et a provoqué le massacre de toutes ces personnes, vous savez,

 20   c'est la question s'agissant de savoir ce qui s'est passé dans l'entrepôt

 21   de Kravica."

 22   Et il est inquiétant de voir que le conseil de l'Accusation façonne la

 23   réalité pour la rendre conforme à sa thèse. L'affaire est entendue

 24   s'agissant de Kravica, vous devez acquitter.

 25   Une autre indication de l'absence d'intentions répréhensibles dans le cadre

 26   de cet incident, c'est le témoignage de RM274 qui nous indique que les

 27   gardes de Kravica ont toujours pris soin des détenus au début, leur

 28   fournissant même des cigarettes et de l'eau. RM274 estime que le processus


Page 44803

  1   s'est poursuivi dans le même cadre pendant environ une heure et demie à

  2   deux heures. Aucun mauvais traitement n'est allégué pendant cette période.

  3   RM274 indique que les choses ont commencé à changer seulement après

  4   l'incident qui a provoqué la colère des gardes. RM274, de même, rappelle

  5   qu'un garde blessé a été amené sur place et que c'est seulement après cet

  6   incident que d'autres gardes sont arrivés qui avaient l'air effrayé et

  7   paniqué et qu'ils ont commencé à tirer sur les détenus dans l'entrepôt. Des

  8   éléments de preuve existent qui concernent la période antérieure à

  9   l'arrivée du commandant du MUP Borovcanin où nous voyons qu'il n'avait pas

 10   la moindre idée de ce qui se passait. Borovcanin s'exclamant : "Oh mon

 11   dieu, qu'est-ce qui se passe ici ?" lorsqu'il a découvert les cadavres.

 12   Ensuite, Borovcanin s'adresse aux dirigeants municipaux civils pour parler

 13   de ce qui s'est passé. Tous ces points indiquent une absence de plan

 14   préalable en vue de tuer ces personnes et plutôt l'existence d'un acte

 15   regrettable de vengeance qui s'est produit au moment de la tentative

 16   d'évasion. Mladic ne peut pas être tenu responsable de cela au vu des

 17   faits.

 18   Je voudrais maintenant rapidement aborder le problème de Trnovo.

 19   L'Accusation a admis la semaine dernière :

 20   "Et je ne vais pas vous montrer une nouvelle fois les terribles

 21   images de la vidéo montrant les Skorpions, mais prêtez attention à ce que

 22   je vais dire maintenant, je vous prie. Parfois, parce que la vidéo est très

 23   claire et que les Musulmans manifestement viennent de Srebrenica, nous

 24   n'avons pas établi les faits, tous les détails des crimes, autant que nous

 25   aurions dû le faire. Nous le faisons maintenant. Mais ceci doit être fait

 26   si nous voulons comprendre pleinement que ceci faisait partie d'une

 27   opération meurtrière, que ceci faisait partie d'une entreprise criminelle

 28   commune en vue d'élimination."


Page 44804

  1   Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, prêtez attention

  2   au sens de ces mots. L'Accusation admet qu'elle n'avait pas, au préalable,

  3   établi les faits dans un détail suffisant, contrairement à ce qu'elle

  4   aurait dû faire. L'Accusation a donc failli à son devoir vis-à-vis de la

  5   charge de la preuve. L'acquittement est obligatoire.

  6   Je n'avais pas passé en revue les autres charges concernant les

  7   meurtres, mais je vous invite instamment à tenir compte de celui que nous

  8   avons analysé dans notre mémoire en clôture. Nous estimons qu'il reste des

  9   doutes sérieux et de graves ambiguïtés et même des contradictions après

 10   examens des éléments de preuve de l'Accusation, qu'un doute raisonnable est

 11   donc toujours présent, n'a pas été levé et que l'acquittement s'impose.

 12   Nous vous demandons également de prendre note des éléments de preuve

 13   concernant la réaction horrifiée de M. Mladic après son retour à Belgrade,

 14   car elle démontre qu'il est certain qu'il n'a pas ordonné les meurtres de

 15   qui que ce soit. La Défense a établi en page 869 à 873 les questions liées

 16   à la période ultérieure aux faits qui affecte sa capacité à faire quoi que

 17   ce soit après les faits.

 18   A présent, j'aimerais que nous parlions de l'alibi, cette période que

 19   le général a passée hors de Srebrenica lorsqu'il était à Belgrade. Tout

 20   d'abord, l'Accusation s'est efforcée de souligner le témoignage général

 21   d'Obradovic et de dire que ce témoignage était indicatif du fait que Mladic

 22   exerçait toujours son commandement jusqu'à plus de sept jours après le

 23   début de son absence. Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges,

 24   pourquoi est-ce que l'Accusation néglige le témoignage sous serment de son

 25   propre témoin, le général Manojlo Milovanovic, qui a dit sous serment et

 26   sans la moindre réserve, ce qu'il a dit et qu'il n'a pas hésité à affirmer

 27   que pendant que Mladic se trouvait hors du théâtre des opérations, hors de

 28   la Republika Srpska, lui, le général Milovanovic a assumé le commandement


Page 44805

  1   et était responsable de la VRS. Page 11 751 et 16 950 du compte rendu

  2   d'audience.

  3   Et il est certain que cet aveu doit se voir accorder le poids qui est

  4   le sien, un poids plus important que les témoignages vagues et très

  5   généraux des autres témoins. Nous devons également souligner que les

  6   éléments de preuve indiquent plutôt que loin d'avoir participé à des

  7   meurtres ou avoir agi sur des sites de meurtres, le général Mladic se rend

  8   à une rencontre secrète à Dobanovci à Belgrade, les 14 et 15 juillet 1995,

  9   où il rencontre des représentants de l'Union Européenne et des Nations

 10   Unies. Dans le cadre de cette rencontre, comme le montre la pièce D1413, le

 11   général Mladic conclut un accord avec le général Smith en vue d'autoriser

 12   le CICR à rencontrer les prisonniers de guerre de Srebrenica. Le sens

 13   commun et la logique imposent de voir dans ce fait qu'il n'avait pas la

 14   moindre idée au sujet d'un quelconque plan visant à tuer les prisonniers de

 15   guerre de Srebrenica, car dans le cas contraire, il aurait été stupide de

 16   sa part de conclure un tel accord. La Défense soutient que cet élément de

 17   preuve conduit à une conclusion raisonnable selon laquelle le général

 18   Mladic croyait honnêtement que ses ordres concernant le traitement accordé

 19   aux membres détenus de la 28e Division en tant que prisonniers de guerre

 20   jusqu'à leur libération était appliqué et qu'il n'avait pas la moindre idée

 21   que d'autres personnes étaient en train de tuer les détenus en question.

 22   Le document identifie également Mladic comme ayant souhaité que tous

 23   les généraux des deux parties en présence se rencontrent afin d'obtenir une

 24   cessation complète des hostilités. Ceci correspond aux paroles qu'il a

 25   adressées aux détenus avant de quitter la Bosnie, en leur disant que

 26   bientôt ils seraient échangés avec des prisonniers de la partie adverse. Le

 27   général Mladic n'a cessé de défendre un seul but en permanence, qui était

 28   la recherche d'une paix durable, et pas la mise en œuvre d'une vengeance ou


Page 44806

  1   la commission d'atrocités. Pourquoi est-ce que l'Accusation a négligé les

  2   éléments de preuve concernant cette réunion qui fait l'objet de nombreux

  3   éléments de preuve à notre disposition tout en insistant sur une

  4   mystérieuse rencontre le 11 juillet que l'on ne trouve nulle part dans les

  5   éléments de preuve ? Parce que cette réunion établit l'existence d'un doute

  6   raisonnable. Les ordres du général Mladic relatifs aux prisonniers de

  7   guerre n'ont jamais changé, et ceci prouve qu'il n'avait pas la moindre

  8   intention de les tuer, que le fait qu'ils aient été tués relève de la

  9   responsabilité d'autres personnes, et notamment de personnes assoiffées de

 10   vengeance, de représentants de la population locale et de traîtres parmi

 11   les organes de sécurité.

 12   Alors, quelques mots encore au sujet de Srebrenica. Le gros des éléments de

 13   preuve proposés par l'Accusation tourne autour de prétendues communications

 14   interceptées par radio, que nous avons analysées en détail dans notre

 15   mémoire en clôture pour démontrer que si l'on tient compte des avancées de

 16   la science, de la technologie, et si nous tenons compte de la simple

 17   logique, ces communications ne pouvaient pas être interceptées par l'ABiH

 18   ou d'autres parties, contrairement à ce qui a été allégué. J'ajouterais

 19   simplement que RM275 est la personne que l'Accusation a citée à la barre

 20   pour authentifier ces communications interceptées, mais RM279 a nié que

 21   RM275 ait pu rédiger les rapports qui sont mentionnés. RM279, de même que

 22   d'autres responsables de l'ABiH, démontrent que RM275 ne travaillait pas au

 23   sein de l'unité chargée des communications interceptées dans la période de

 24   temps concernée et évoquée dans les dépositions. Voir pièces D316 et D1463.

 25   En conséquence, ceci soulève un doute raisonnable important quant à

 26   l'authenticité des interceptions en question.

 27   Pourquoi est-ce qu'un faux témoin tel que RM275 est venu authentifier les

 28   enregistrements qu'il n'a pas réalisés, à moins que ces enregistrements


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  1   aient été faits beaucoup plus tard, c'est-à-dire qu'ils aient été fabriqués

  2   de toutes pièces après la guerre.

  3   Nous avons également parlé en détail des éléments de preuve médico-légaux

  4   concernant les fosses communes dans notre mémoire en clôture. Je ne

  5   m'appesantirai pas sur ces points, mais souhaite en souligner quelques-uns

  6   particulièrement importants. D'abord, les éléments de preuve démontrent que

  7   dans certaines des fosses communes censées concerner les événements de

  8   juillet 1995 à Srebrenica, des restes humains ont été découverts dans des

  9   housses mortuaires. Pièce P1737, pièce P1938, pièce P1448 et pièce P1987.

 10   Nous avons entendu le Dr Stankovic disant qu'il avait créé et utilisé ces

 11   housses mortuaires pour les restes humains en 1992 et que ce qui en restait

 12   a été utilisé ensuite jusqu'en 1993, page 43 277 à 43 278 du compte rendu

 13   d'audience Stankovic. Ceci soulève un doute raisonnable et significatif

 14   quant au fait que les cadavres découverts dans les fosses communes auraient

 15   pu comprendre des corps de personnes tuées dans les années précédentes dont

 16   les restes auraient été mélangés dans les fosses communes. En fait, ceci

 17   correspond à la déposition selon laquelle Momir Nikolic avait en fait pillé

 18   les fosses communes pendant les années antérieures à la période en

 19   question. Pages 11 485, 11 486 du compte rendu d'audience, RM306. Ce fait à

 20   lui seul permet de mettre en doute les éléments de preuve concernant les

 21   victimes de Srebrenica et est une raison suffisante pour acquitter.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, est-ce que vous pourriez

 23   vérifier la référence D1413.

 24   M. IVETIC : [interprétation] Oui, la rencontre à Dobanovci.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est la déclaration du témoin qui en a

 26   parlé.

 27   M. IVETIC : [interprétation] Je vais vérifier quelle est la référence pour

 28   le télégramme de M. Akashi à M. Annan.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela ne figure pas dans mon prétoire

  2   électronique.

  3   M. IVETIC : [interprétation] Nous parlons depuis longtemps des combats

  4   auxquels a participé la 28e Division et du fait que des victimes tombées au

  5   combat à ce moment-là ont été considérées comme des victimes d'exécution

  6   par l'Accusation. Dans le cadre de la procédure, toutefois, nous avons

  7   entendu pas moins de quatre professionnels de médecine légale qui ont

  8   fourni leur avis d'expert quant à ce que l'Accusation désigne sous le nom

  9   de bandeaux qui seraient la preuve que des exécutions ont eu lieu alors

 10   qu'en réalité, il s'agit de bandanas portés par des combattants, bandanas

 11   qui sont retombés sur les yeux pendant la décomposition des cadavres, et

 12   notamment au moment où les oreilles et les yeux de ces cadavres sont

 13   tombés. Nous avons la page 43 463 de la déposition du Dr Stankovic au

 14   compte rendu d'audience, ainsi que d'autres dépositions de responsables de

 15   médecine légale. Ceci soulève un doute raisonnable quant au sort qui a été

 16   subi par ces victimes. Les éléments de preuve dont nous disposons sont ceux

 17   aussi du Dr Dunjic, D1448, D1449; Dr Stankovic, page 43 463 du compte rendu

 18   d'audience; du Dr Lawrence, pages 14 802-14 804 du compte rendu d'audience;

 19   et Pecerelli, page 18 442 à 18 443 du compte rendu d'audience. Monsieur le

 20   Président, il a même été dit que tout cela était de notoriété publique,

 21   page 14 803 du compte rendu d'audience. L'Accusation n'a pas tenu compte de

 22   cette possibilité. Elle indique que les ligatures et les bandeaux

 23   découverts dans les fosses communes de Srebrenica, même lorsqu'ils étaient

 24   détachés, avaient parfois une couleur rose ou rouge ou marron, assortis de

 25   fleurs. Pièce P1735, pièce P1740.

 26   Encore une fois, voyons les éléments de preuve vidéo qui existent qui

 27   montrent des combattants de l'ABiH portant des bandanas et des rubans

 28   d'identification. Pièces D339 et D340, et des photos, deux très


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  1   instructives en particulier, qui sont les photos de combattants de l'ABiH,

  2   membres de la colonne de Srebrenica à leur arrivée à Tuzla. Le doute

  3   raisonnable est soulevé selon lequel de prétendues victimes d'exécution

  4   seraient en fait des victimes tombées au combat et enterrées avec des

  5   bandanas et des rubans identifiants, et non des bandeaux ou des ligatures.

  6   Donc, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, quel que soit

  7   l'endroit ou l'on examine les éléments de preuve de plus près, ces éléments

  8   concernant Srebrenica s'effondrent, en tout cas lorsqu'il est question du

  9   général Mladic. L'Accusation s'appuie sur ces éléments pour remplir les

 10   vides de sa cause à l'aide d'une histoire correspondant à ce que vous vous

 11   seriez attendus à entendre. Elle n'a pas fait son travail. Des trous

 12   importants demeurent. Le doute raisonnable existe; par conséquent, la seule

 13   décision convenable et équitable consiste à prononcer un acquittement vis-

 14   à-vis de Ratko Mladic.

 15   Je vais maintenant évoquer le chef d'accusation numéro 11.

 16   L'Accusation a présenté un récit concernant une intention criminelle en

 17   dehors du contexte. Si nous pouvons voir la première diapositive :

 18   "Des éléments précis des forces de la FORPRONU ont participé activement à

 19   guider l'aviation de l'OTAN et les forces d'intervention rapide vers les

 20   cibles serbes."

 21   Comment le fait de reprocher le libellé de l'article commun numéro 3,

 22   c'est-à-dire des conflits armés qui n'ont pas un caractère international,

 23   comment peut-on reprocher cette situation en impliquant un conflit devenu

 24   international ?

 25   Aucune condamnation ne peut être prononcée contre l'accusé lorsque

 26   les faits matériels ont été omis. Dans l'affaire Karadzic, par exemple,

 27   décision sur la requête de l'accusé aux fins de mesures pour remédier aux

 28   vices de forme de l'acte d'accusation, 30 septembre 2014, paragraphe 15.


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  1   Comment une Chambre peut-elle conclure qu'il y a conflit armé international

  2   lorsque ceci n'a pas été argumenté ?

  3   En outre, le fait d'abandonner l'article commun numéro 3 et son application

  4   exclusive aux conflits qui n'ont pas un caractère international, eh bien,

  5   ceci sape les fondements mêmes du droit coutumier.

  6   Deuxièmement, l'Accusation n'a présenté aucune notification eu égard

  7   aux faits matériels. Alors que l'article commun numéro 3 peut s'appliquer

  8   aux conflits à caractère national et à un conflit armé qui n'a pas un

  9   caractère international, décision Karadzic en appel, décision de la Chambre

 10   de première instance sur des exceptions préjudicielles aux fins de rejeter

 11   le chef d'accusation numéro 11 de l'acte d'accusation. L'Accusation n'a pas

 12   réparé ceci en fournissant des "informations claires et cohérentes sur une

 13   base factuelle détaillée", comme l'exigent les conditions dans l'affaire

 14   Karadzic. Je fais référence à la décision en l'espèce mentionnée au

 15   paragraphe 15. Notification de "tous les éléments du droit humanitaire

 16   international", ceux-ci sont insuffisants et portent préjudice à la

 17   Défense.

 18   Troisièmement, si le caractère même du conflit n'est pas pertinent

 19   pour ce qui est de l'article commun numéro 3, confer décision en appel dans

 20   l'affaire Karadzic, ceci signifie que ce qui a été dit par la Chambre de

 21   première instance dans sa décision et son exception préjudicielle aux fins

 22   de rejeter le chef 11 de l'acte d'accusation, 9 juillet 1991 [comme

 23   interprété], paragraphe 25, ceci diminue de façon incorrecte la charge de

 24   la preuve qui revient à l'Accusation et sape les fondements mêmes d'un

 25   procès équitable. Cela permet à l'Accusation d'avancer plus facilement dans

 26   ces accusations de crime allégué; par conséquent, le chef numéro 11 est

 27   vicié.

 28   Est-il l'heure de faire la pause ?


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est l'heure de faire la pause.

  2   Mais avant de faire la pause, je souhaite vous renvoyer à une question de

  3   connaissance générale à -- je souhaite vérifier.

  4   M. IVETIC : [interprétation] Alors, 14 803, d'après mes notes.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] 14 803. Je vais vérifier. Je crois que

  6   quelque chose d'autre a été enregistré au compte rendu d'audience.

  7   Oui, vous avez dit 14 083, ou en tout cas c'est ainsi que cela a été

  8   consigné. Nous allons voir. Bon, ceci a été expliqué.

  9   Nous allons avoir une pause et nous reprendrons à 13 heures 35. Est-ce que

 10   vous êtes dans les temps, Maître Ivetic ? Parce que sinon il va falloir

 11   prendre les mesures nécessaires.

 12   M. IVETIC : [interprétation] Ecoutez, j'ai rattrapé le temps, mais je suis

 13   encore un petit peu en deçà, je crois, de 20 à 25 minutes.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, vous avez rattrapé, parce qu'hier

 15   je crois que vous aviez perdu 15 à 20 minutes.

 16   [La Chambre de première instance se concerte]

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons demander au Greffier de se

 18   renseigner et voir s'il est possible de vous accorder 20 minutes

 19   supplémentaires, et nous poursuivrons alors jusqu'à 14 heures 35.

 20   Nous allons avoir une pause maintenant pour ne pas perdre trop de temps et

 21   nous reprendrons à 13 heures 35.

 22   --- L'audience est suspendue à 13 heures 17.

 23   --- L'audience est reprise à 13 heures 36.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Par la présente, j'informe les parties

 25   en présence que 20 minutes supplémentaires ne posent pas de problèmes

 26   particuliers pour toutes les personnes qui nous assistent.

 27   J'invite de surcroît les parties à voir si elles peuvent se mettre d'accord

 28   pour la journée de jeudi : deux fois une heure et demie d'un seul tenant ou


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  1   si vous préférez avoir une heure, ensuite une pause, et ensuite une demi-

  2   heure supplémentaire.

  3   Je m'en remets entre les mains des parties. Et il faut tenir compte, bien

  4   évidemment, de la position de M. Mladic.

  5   C'est à vous.

  6   M. IVETIC : [interprétation] Avant de poursuivre, je souhaite effectivement

  7   corriger ce sur quoi vous avez attiré mon attention tout à l'heure, le

  8   D1413 concernant la réunion à Dobanovci. J'aurais dû évoquer le D410. C'est

  9   mon erreur, pardonnez-moi.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder.

 11   M. IVETIC : [interprétation] Dans le cas où cette Chambre constate que le

 12   chef 11 n'est pas vicié, le chef 11 ne peut être retenu en raison de son

 13   bien-fondé, comme indiqué au paragraphe 6 de notre mémoire en clôture. Je

 14   vais premièrement parler de la légitime défense et des bombardements de

 15   l'OTAN qui ne sont pas justifiés. Ensuite, je parlerai du chef 11 et je

 16   préciserai qu'il ne peut être retenu, et ce, pour quatre raisons : une base

 17   légitime pour détenir existe; un traitement incorrect a été perpétré par

 18   les paramilitaires; la VRS a ordonné qu'il y ait conformité aux conventions

 19   de Genève; et quatrièmement, aucune preuve fiable ne prouve l'entreprise

 20   criminelle commune.

 21   Contrairement à la description que fait l'Accusation des

 22   bombardements justifiés de l'OTAN, les attaques de l'OTAN ont provoqué la

 23   détention des prisonniers de guerre, et ceci découlait d'une situation

 24   injuste lorsque les Nations Unies étaient d'accord pour autoriser le

 25   retrait des armes des centres de collecte d'armes, et ce, dans le cadre

 26   d'une légitime défense, et ensuite sont revenues sur cet accord.

 27   Premièrement, vers le 14 février 1994, le protocole entre la FORPRONU

 28   et la VRS précisait que "l'armée serbe de Bosnie se réservait le droit de


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  1   mettre en œuvre des mesures adéquates de légitime défense."

  2   Confirmé par le Témoin GRM097 que les centres de collecte d'armes ont

  3   été établis autour de Sarajevo "pour que dans le cas d'attaque … ils

  4   pourraient se défendre eux-mêmes."

  5   Ce qui est important, c'est que s'ils étaient attaqués, la partie

  6   attaquée, par conséquent, n'était plus tenue par l'accord sur la

  7   démilitarisation.

  8   Le protocole montre qu'il y a eu participation des Nations Unies

  9   puisqu'on emploie le terme de "BSA", armée des Serbes de Bosnie, qui est le

 10   jargon des Nations Unies. Il apparaît sur les documents envoyés par

 11   télécopie du commandement de la FORPRONU. A partir du mois d'août 1994, les

 12   activités de la BiH avaient déjà donné lieu à un retrait d'armes de la part

 13   de l'armée serbe de Bosnie. Le 5 septembre 1994, la FORPRONU se rétracte de

 14   l'accord d'origine, y compris le chapitre sur la légitime défense,

 15   précisant qu'elle "ne cautionnait pas cette position."

 16   La partie musulmane de Bosnie a également été limitée dans le sens

 17   où, vers le mois de mars 1994, la partie serbe avait déjà rapporté à la

 18   FORPRONU les violations répétées du côté des Musulmans. La FORPRONU n'a pas

 19   mené des attaques aériennes contre les forces musulmanes pour violation en

 20   raison de l'hésitation des Américains de l'OTAN d'agir contre l'ABiH.

 21   GRM037, GRM097, le général Rose et M. Harland en ont parlé.

 22   Selon les propres termes de Dragicevic, la FORPRONU avait pris le

 23   parti des Musulmans, D554, paragraphe 31. Par conséquent, la partie serbe a

 24   retiré ses armes, armes utilisées pour une défense légitime. Les Nations

 25   Unies ont ignoré ce but légitime et, en lieu et place de cela, les ont

 26   bombardés.

 27   Je vais maintenant parler du fondement légitime pour détenir les

 28   personnes.


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  1   Les forces serbes, à terme, ont estimé que la FORPRONU n'était pas

  2   neutre mais était en faveur des combattants. GRM037. Il est important de

  3   montrer qu'il y a violation contre des personnes qui n'ont pas participé

  4   directement aux hostilités. Jugement en première instance de Blaskic au

  5   paragraphe 177. Ainsi, la base légitime permettant de détenir des

  6   combattants des Nations Unies exclut les prisonniers de guerre des Nations

  7   Unies de l'article commun numéro 3. Ce qui est également important, c'est

  8   que cette détention légitime justifie le fait que la VRS ait détenu du

  9   personnel de l'ONU pour empêcher d'autres bombardements.

 10   Les éléments de preuve justifient une autre alternative raisonnable,

 11   à savoir que le personnel des Nations Unies était détenu en tant que

 12   combattants, puisqu'ils l'étaient, échangeant des coups de feu; défendant

 13   leur territoire, D554; sollicitant les frappes aériennes de l'OTAN, P2558;

 14   guidant les pilotes vers des cibles serbes, P6644; rassemblant du

 15   renseignement contre les Serbes, page du compte rendu 39 023; transportant

 16   clandestinement des armes pour les forces ennemies contre la VRS, D535; et

 17   faisant en sorte que même des prisonniers de la VRS ont été fait

 18   prisonniers, D1586 et P785 [comme interprété].

 19   Le 27 mai 1995, le Témoin RM401 a témoigné du fait que les forces des

 20   Nations Unies armées ont pris à nouveau un pont, aidés par l'armée de BiH

 21   qui, donc, tirait des "tirs d'appui" pour les couvrir et pour aider les

 22   personnes des Nations Unies. C'est RM401, page 18 260. Cela était le fait

 23   que le VRS aurait perçu de façon raisonnable les personnes des Nations

 24   Unies et de l'armée BiH qui coopéraient avec eux comme étant des

 25   combattants.

 26   Vers le 28 mai 1995, en réaction à la façon à laquelle le personnel

 27   des Nations Unies avait mis en détention des soldats serbes dans ce

 28   document, il est dit que :


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  1   "Les Nations Unies n'ont pas le droit légal de mise en détention des

  2   prisonniers de guerre et de les tenir en tant que détenus."

  3   Il est dit que :

  4   "La crédibilité des Nations Unies eu égard au droit international

  5   humanitaire est également corrompue si une telle pratique est mise en

  6   place."

  7   En une seule occasion la FORPRONU n'a demandé que l'OTAN attaque le

  8   côté des Musulmans de Bosnie. Le personnel des Nations Unies ont enregistré

  9   les sites du VRS et ils ont formé le personnel pour naviguer des aéronefs

 10   au sol. Pour ce qui est de la prise des cibles, les personnels des Nations

 11   Unies au sol communiquaient directement avec des pilotes de l'OTAN. Pendant

 12   le témoignage du général Nicolai de la FORPRONU, le Juge Orie lui a posé la

 13   question suivante :

 14   "Est-ce que la FORPRONU aurait apporté de l'aide à l'OTAN pour

 15   déterminer ces cibles sur le territoire serbe de Bosnie ?"

 16   Réponse :

 17   "Oui, les cibles étaient déterminées au QG de la FORPRONU à Sarajevo

 18   et, par la suite, ces informations étaient transmises à l'OTAN avec la

 19   demande qu'ils tirent sur ces cibles."

 20   La FORPRONU appuyait les frappes aériennes de l'OTAN à grande échelle

 21   au mois de mai 1995. C'est D1468, page 9. Les dirigeants des Serbes de

 22   Bosnie considéraient que le personnel des Nations Unies était devenu ainsi

 23   la force combattante. Le général Smith, donc, a envoyé un document aux

 24   Etats-Unis et non pas aux Nations Unies. Il s'agit d'une dépêche qui

 25   n'était pas secrète. Et il a dit le 25 mai 1995 : "J'ai cassé la machine."

 26   Il s'agit de D1462.

 27   Le 28 mai 1995, encore une autre dépêche non secrète qui nous montre

 28   que Smith avait dit que la seule option était de devenir faible ou de faire


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  1   la guerre. Et devant ce Tribunal, dans sa déclaration, le général Smith a

  2   admis ce qui suit :

  3   "Nous n'étions pas les forces pour le maintien de la paix … puisqu'il

  4   n'y avait pas de paix pour le maintenir" et "nous procédions au pilonnage

  5   d'une partie."

  6   Segers a également parlé d'un colonel de la FORPRONU qui était du

  7   Pakistan qui a pris le parti des Musulmans lorsqu'un observateur militaire

  8   des Nations Unies a rapporté que des Musulmans de Bosnie étaient en train

  9   de pilonner leur propre village pour en jeter la responsabilité sur les

 10   Serbes. Le colonel en question a répondu : "Vous êtes menteurs." D1465,

 11   page 11.

 12   Donc, les traitements incorrects étaient donc perpétrés par les

 13   paramilitaires et c'est dans notre mémoire en clôture, paragraphe 3 349

 14   jusqu'à 3 386. Il est important de dire que l'officier de la VRS Vojvodic

 15   était chargé par le général Tolimir de s'occuper de ces détenus du

 16   personnel des Nations Unies et d'assurer leur sécurité et personne ne les a

 17   malmenés. La CICR leur a rendu visite et personne n'a exprimé de plaintes;

 18   c'est D1224, paragraphe 9. Pour ce qui est de la Croix-Rouge -- pour ce qui

 19   est du pont, il a d'abord dit que ceux qui les ont capturés étaient les

 20   membres des forces des Serbes de Bosnie, après quoi il a apporté des

 21   clarifications en disant qu'il s'agissait des policiers. Cela voulait dire

 22   qu'il s'agissait :

 23   "Des gens qui ont pris des armes, qui ont des uniformes retrouvés sur

 24   le terrain, qui agissaient en uniforme ou sans uniforme et qui ont pris

 25   part aux combats aux côtés des membres de l'armée régulière."

 26   C'est comme ça qu'il les a décrits. C'est RM401. Il a dit aux pages

 27   18 238 et 239 qu'on leur a dit qu'ils seraient remis à l'armée serbe

 28   régulière. P2537. Et lorsqu'ils étaient en détention au VRS, des détenus


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  1   étaient traités en conformité avec les conventions de Genève; page du

  2   compte rendu 18 263, RM401.

  3   Les ordres du VRS montrent que l'intention du VRS était de traiter le

  4   personnel des Nations Unies en tant que prisonniers de guerre et

  5   d'appliquer les dispositions du droit international humanitaire. Dans un

  6   ordre du VRS du 29 mai 1995, il est dit :

  7   "Il faut que vous assuriez que le personnel de la FORPRONU soit

  8   traité de façon appropriée en tant que prisonniers de guerre."

  9   Sehovac a mis en détention des prisonniers de guerre en soulignant :

 10   "Nous ne les avons pas malmenés, nous avons respecté les conventions

 11   de Genève."

 12   Page du compte rendu 24 052.

 13   Vers le 26 mai 1995, le contingent français a reçu des ordres de ne

 14   pas se rendre, le VRS et les Français se sont mis d'accord pour que le VRS

 15   tirent à l'extérieur et que, par la suite, les Français se rendent. Page du

 16   compte rendu 25 215 à 217, dans la pièce P6717. Au vu de tout cela, il est

 17   clair que le personnel des Nations Unies et la VRS coopéraient pour trouver

 18   une solution pacifique à toutes ces questions et que personne n'a jamais

 19   été mis en danger.

 20   Les éléments de preuve étayent également le fait que le traitement

 21   réservé aux prisonniers de guerre était correct. Des détenus utilisaient la

 22   radio pour faire des rapports toutes les heures. Ils pouvaient laver leurs

 23   vêtements. Le Témoin Vojvodic a confirmé que les détenus recevaient des

 24   lettres de la Croix-Rouge. Riley a même dit lors de sa déposition que des

 25   détenus qui étaient membres du personnel des Nations Unies pouvaient même

 26   garde leurs propres armes, donc il n'y a pas d'élément de preuve fiable

 27   prouvant qu'un plan ou un accord impliquait l'accusé, il n'y a rien de

 28   cela. Dans une conversation interceptée présumée du 28 mai 1995 entre le


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  1   général Smith et le général Mladic, P790, il est dit Mladic a dit que des

  2   otages étaient tenus par la VRS, mais il a dit cela seulement en apparence.

  3   Ils ont fait ça seulement en apparence. Ce sont les forces paramilitaires

  4   qui ont commis des actes inadmissibles contre quelques membres du personnel

  5   des Nations Unies; le général Mladic l'a appris comme toutes les autres

  6   personnes à la TV; et le général Mladic a ordonné à ses unités de prendre

  7   le contrôle de ces prisonniers de guerre; et quatrièmement, le général

  8   Mladic a parlé à Smith et a assumé tacitement la responsabilité de mauvais

  9   actes pour prendre le dessus; ce bluff du général ne fonctionne plus, mais

 10   il n'y avait plus de prisonniers de guerre qui étaient posés devant les

 11   antennes de radio.

 12   Donc, par conséquent, donc le chef 11 de l'acte d'accusation ne tient

 13   pas, puisqu'il y a des vices dans l'acte d'accusation, étant donné que même

 14   sur les éléments de preuve, on ne peut pas dire que la seule conclusion

 15   qu'on peut en déduire est que la VRS, sur les ordres de Mladic, prenait le

 16   personnel des Nations Unies en otage pour, donc, empêcher les frappes

 17   aériennes de l'OTAN. Au contraire, les éléments de preuve démontrent qu'il

 18   y avait la détention légitime des prisonniers de guerre qui étaient

 19   combattants. Ils ont été traités en conformité avec les conventions de

 20   Genève. Il ne faut pas qu'une condamnation soit prononcée pour ce qui est

 21   du chef 11.

 22   Maintenant, je passe aux arguments relatifs aux circonstances atténuantes

 23   et à la fixation de la peine.

 24   J'espère que nous avons été assez clairs dans notre mémoire final,

 25   notamment dans la section VII, pages 899 et suivantes, ainsi qu'au cours

 26   des derniers jours dans nos arguments oraux, que nous estimons que la seule

 27   issue juste et équitable est l'acquittement car l'Accusation n'a pas réussi

 28   à s'acquitter de la charge de la preuve. Vous le savez, mais le public


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  1   l'ignore peut-être, le Règlement particulier de ce Tribunal nous oblige à

  2   présenter ces arguments à ce stade, car il n'existe pas de phase de

  3   plaidoiries pour la détermination de la peine. Et donc, je vais répondre à

  4   l'Accusation qui demande la prison à vie. Nous estimons que ce serait

  5   injuste compte tenu de la jurisprudence et des éléments de preuve. La

  6   situation personnelle et le comportement de l'accusé lors du conflit

  7   appellent la peine la moins sévère, et certainement pas la prison à vie. Je

  8   ne répéterai pas les arguments présentés. Les commentaires de l'autre jour

  9   de l'Accusation sont incorrects. Chacun a droit à la prise en compte de

 10   circonstances atténuantes si les preuves démontrent leur existence.

 11   Selon la jurisprudence du TPIY, la manifestation de remords peut être

 12   considérée comme des circonstances atténuantes si les remords sont sincères

 13   et authentiques. Et dans des affaires comme Oric, le conseil a exprimé les

 14   remords au nom de l'accusé, paragraphe 752. Exemples de remords exprimés :

 15   RM084, 079, 010, 115 et 291.

 16   Il y a également des preuves des déclarations de Mladic qui font preuve de

 17   remords. Nous en parlons. C'est notamment le cas avec ce qu'a présenté

 18   l'Accusation par le biais du commandant de la FORPRONU Rupert Smith. Mladic

 19   est enregistré comme disant au sujet de Markale :

 20   "Notre partie n'a pas de projectiles à haut impact de ce type qui

 21   pourraient toucher tant de personnes, et je suis désolé pour le malheur qui

 22   a frappé toutes ces personnes, qu'elles aient été tuées ou blessées."

 23   Un autre cas, c'est la preuve qui montre qu'il n'a appris les meurtres à

 24   Srebrenica qu'après les faits, et il a été manifestement bouleversé en les

 25   apprenant. Page 32 589. Après avoir constaté cela, il a été consterné et

 26   préoccupé et a condamné les actes. Le Témoin Todic en a parlé, D798,

 27   paragraphe 28. Il a déclaré que ceux qui sont responsables de ces actes

 28   doivent être fous. D798, paragraphe 28, Todic.


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  1   Si l'Accusation présente les cahiers de l'accusé comme authentiques, alors

  2   ils doivent accepter qu'ils indiquent que l'accusé prônait la création

  3   d'une commission paritaire pour faire des enquêtes sur tous les meurtres.

  4   Alors, je vais expliquer pourquoi l'application du droit interdit

  5   l'imposition d'une peine dépassant les 15 ans ou 20 ans pour les crimes les

  6   plus atroces. Je me réfère aux règles en matière de fixation des peines de

  7   la RSFY qui interdisent toute peine dépassant les 15 ans ou 20 ans pour les

  8   crimes les plus graves. Même si ce Tribunal a déclaré ne pas être tenu par

  9   les pratiques en matière de fixation de peine en ex-Yougoslavie, il est

 10   tenu par le droit international, le droit qui était en vigueur au moment de

 11   la commission des crimes, nullum crimen sine lege, nullum poena sine lege.

 12   De ce fait, toute peine qui dépasserait les paramètres du Code pénal de

 13   1976 de la RSFY serait une violation du principe de légalité et de la non-

 14   rétroactivité du droit. De la même manière, la Cour européenne de justice a

 15   récemment réaffirmé cette règle pour la Bosnie-Herzégovine; elle devrait

 16   s'appliquer à ce Tribunal également.

 17   Le droit en vigueur au moment de la commission des crimes était le

 18   Code pénal de 1976, qui est resté en application jusqu'en 1998 et 2000 en

 19   Bosnie-Herzégovine et en Republika Srpska, respectivement. Il prévoit que

 20   les crimes de guerre sont passibles d'une peine de prison de cinq à dix

 21   [comme interprété] ans ou sont punis par la peine de mort pour les crimes

 22   les plus graves. Toutefois, la peine de mort a été abolie par l'accord de

 23   Dayton et remplacée par la possibilité d'imposer une peine de 20 ans.

 24   L'interdiction de l'effet rétroactif implique automatiquement la non-

 25   application rétroactive de la lex gravior, donc, de la peine la plus

 26   sévère. De ce fait, il est illégal d'imposer une peine plus sévère qui

 27   n'existait pas au moment de la commission des crimes. Il existe le principe

 28   du droit international largement reconnu selon lequel lorsqu'un crime est


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  1   punissable au titre de deux dispositions successives, l'une la plus

  2   clémente, la peine la moins sévère doit être appliquée en vertu du principe

  3   favor libertatis. Décision Maktouf et Damjanovic contre la BiH, Cour

  4   européenne des droits de l'homme, page 11. Et page 46 de ce même arrêt, le

  5   principe de l'interdiction de la rétroactivité appartient au droit

  6   coutumier international et est une norme impérative du droit international

  7   et ne souffre d'aucune exception.

  8   Donc, la Cour européenne des droits de l'homme a considéré l'application du

  9   Code pénal de la BiH de 2003 plutôt que du Code pénal de 1976 de la RSFY

 10   comme illégale et comme une violation du droit du demandant, Maktouf et

 11   Damjanovic contre la BiH, page 32. En somme, la fixation par la Chambre

 12   d'une peine non prévue par le droit applicable à l'époque serait une

 13   enfreinte à la norme de droit coutumier international interdisant

 14   l'application rétroactive du droit. Par conséquent, la Chambre est dans

 15   l'obligation de fixer une peine comprise entre cinq et 20 [comme

 16   interprété] ans ou de 20 ans pour les crimes les plus graves qui auraient

 17   été passibles de la peine de mort. S'il ne le fait pas, le Tribunal agira

 18   ultra vires. Quel message le Tribunal donnerait-il au monde s'il persistait

 19   dans des pratiques de fixation de peine que la Cour européenne des droits

 20   de l'homme a à présent interdites aux juridictions nationales au motif

 21   qu'elles étaient injustes ? Nous affirmons que l'héritage et la réputation

 22   mêmes du Tribunal souffriraient s'il refuse et enfreint la norme proclamée

 23   par la Cour européenne des droits de l'homme.

 24   J'en arrive à présent aux affirmations de l'Accusation concernant les

 25   circonstances aggravantes. L'Accusation n'a pas prouvé au-delà de tout

 26   doute raisonnable qu'il y ait eu abus de pouvoir de l'accusé en vertu de la

 27   position qu'il occupait. En tout état de cause, un poste à haute

 28   responsabilité ne justifie pas à lui seul le prononcé d'une peine plus


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  1   sévère; et quoi qu'il en soit, l'accusé n'a abusé à aucun moment de son

  2   poste de pouvoir.

  3   L'Accusation a souligné à de nombreuses reprises qu'il existait une

  4   hiérarchie très bien définie au sein de la VRS qui était tenue de respecter

  5   les ordres. Toutefois, cette hiérarchie très claire n'a aucune pertinence

  6   par rapport à la responsabilité de l'accusé puisque aucun ordre susceptible

  7   de relier l'accusé aux crimes qui ont été allégués par l'Accusation n'a été

  8   prouvé. Encore une fois, s'agissant de Srebrenica, l'Accusation -- et

  9   notamment, son Témoin expert Richard Butler a déclaré qu'il n'avait vu

 10   passer sous ses yeux aucun ordre émanant de l'accusé et ordonnant la

 11   commission des crimes allégués. Par conséquent, il serait déraisonnable de

 12   dire au vu des éléments de preuve que l'accusé aurait abusé de son pouvoir

 13   à des fins criminelles. Et, en tout état de cause, la présente Chambre doit

 14   rejeter cet argument présenté par l'Accusation comme un facteur aggravant,

 15   car il n'a pas été évoqué par l'Accusation dans l'acte d'accusation et, en

 16   tant que tel, il ne satisfait pas aux conditions requises pour prononcer

 17   des conditions aggravantes.

 18   L'Accusation a argué de la vulnérabilité particulière des victimes en

 19   tant qu'élément aggravant. Une telle démarche n'est pas autorisée car il

 20   est interdit de prendre en compte deux fois le même élément au titre de la

 21   double prise en compte étant donné que l'un est supplanté par l'autre, la

 22   vulnérabilité particulière étant supplantée par la gravité particulière des

 23   infractions.

 24   L'Accusation affirme aussi une absurdité, à savoir que l'accusé

 25   mériterait la sentence la plus lourde au seul motif que sa peine devrait

 26   être plus lourde que celle qui a été prononcée à l'encontre de ses

 27   subordonnés. Ceci est totalement incompatible et contradictoire par rapport

 28   aux principes d'individualisation de la peine et de certitude juridique.


Page 44824

  1   Cette position de l'Accusation représente par extension une déclaration de

  2   culpabilité relevant de la culpabilité collective. Encore une fois, il

  3   s'agit de revenir sur le désir de faire de Ratko Mladic un surhomme afin de

  4   pouvoir s'en servir comme brebis expiatoire sacrifiée symboliquement au nom

  5   des crimes commis par tous les Serbes.

  6   Une autre affirmation de l'Accusation faite au paragraphe 1 741 de son

  7   mémoire en clôture consiste à dire que l'accusé a joué un rôle dominant

  8   dans la commission des crimes en ne respectant pas le droit humanitaire

  9   international. Ceci est réfuté très clairement par les nombreux ordres

 10   versés au dossier de l'espèce qui montrent que l'accusé a ordonné

 11   exactement le contraire. Et puis, l'Accusation affirme au paragraphe 1 737

 12   de son mémoire en clôture que les subordonnés de Mladic ont exécuté

 13   sommairement des milliers de personnes à Srebrenica, argument dépourvu de

 14   pertinence en l'absence du lien requis entre l'accusé et de telles

 15   allégations.

 16   Je demande maintenant que nous passions à huis clos partiel.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Passons à huis clos partiel.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 19   [Audience à huis clos partiel]

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 28   [Audience publique]


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.

  2   M. IVETIC : [interprétation] A partir de la lecture de la déclaration de

  3   Darko Mladic, nous voyons que l'accusé l'a élevé dans un esprit de

  4   nécessité d'aide à toute personne indépendamment de son appartenance

  5   ethnique. L'aspect le plus important, c'est d'être un bon être humain,

  6   paragraphe 8, et Darko Mladic détaille un certain nombre de bonnes actions

  7   réalisées par son père dans le but d'aider des civils qui n'étaient pas

  8   Serbes aussi bien pendant la guerre qu'en dehors de la guerre. Nous pensons

  9   que cela montre que cet élément justifie des circonstances atténuantes.

 10   En résumé, nous vous demandons de rejeter les efforts de l'Accusation

 11   pour appliquer une culpabilité collective en faisant apparaître M. Mladic

 12   comme surhumain et en lançant un appel pour que la Chambre agisse en

 13   contradiction avec un certain nombre de maximes légales en imposant une

 14   peine à vie. Le critère approprié et les principes juridiques appropriés

 15   imposent que la peine soit limitée et minimale du point de vue de sa

 16   nature, étant donné l'existence de circonstances atténuantes et des autres

 17   circonstances que j'ai déjà évoquées devant vous.

 18   Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, pour toutes les

 19   raisons qui viennent d'être présentées depuis trois jours, la Défense

 20   soutient que l'Accusation n'a pas respecté et rempli son devoir face à la

 21   charge de la preuve qui lui incombe s'agissant des éléments de preuve

 22   nécessaires pour prouver sa cause et étayer ces allégations par rapport aux

 23   charges contenues dans l'acte d'accusation. Nous estimons, par conséquent,

 24   que le seul verdict possible doit être l'acquittement.

 25   J'aimerais maintenant consacrer quelques moments à quelques mots

 26   supplémentaires.

 27   Monsieur le Président, mon client aujourd'hui m'a parlé en tant que

 28   son avocat, et m'a demandé de m'exprimer devant vous en son nom. C'est une


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  1   charge importante de m'exprimer au nom de cet homme qui a été délibérément

  2   ici complètement mal compris, qui a eu la possibilité -- qui a été tenu

  3   d'écouter des allégations très répréhensibles à son encontre jour après

  4   jour. C'est une situation difficile pour moi que nombre d'entre nous ne

  5   pourraient pas supporter facilement. A l'époque, ses émotions ont pris le

  6   dessus sur lui, et vous savez à la lecture des rapports médicaux le

  7   concernant, quel est son état de santé et comment cet état de santé a

  8   évolué mais aussi comment il a pu provoquer des excès dus à l'émotion. Le

  9   Tribunal n'a pas eu la possibilité de tenir compte de son état de santé, et

 10   il a été expulsé à plusieurs reprises du prétoire par le passé.

 11   Mais ce qui est plus important, c'est d'essayer de voir les choses de

 12   son point de vue. Et je me suis donné une mission, en me préparant à

 13   l'audience d'aujourd'hui, de le faire, j'ai examiné les propos de mon

 14   client dans l'affaire Karadzic le 28 mai 2014 lorsqu'il a été contraint par

 15   injonction à comparaître de témoigner contre ses propres intérêts dans une

 16   affaire relevant des mêmes charges. Il a dit, je cite le compte rendu

 17   d'audience :

 18   "LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur Kwon, Mesdames et Messieurs,

 19   pour ce qui est de ce Tribunal de La Haye, de cette Cour, je ne la supporte

 20   pas, je ne la reconnais pas, et je ne peux pas témoigner devant elle. Je ne

 21   peux pas prêter serment parce que cette pression qui est exercée sur moi en

 22   tant que personne, contre ma santé, contre mon peuple. Cela constitue

 23   toujours des sanctions, et tout a pris fin.

 24   "Je vous demande, s'il vous plaît, de m'accorder la possibilité

 25   suivante. Sauf votre respect, le président Radovan Karadzic et les efforts

 26   qu'il a déployés, qu'il a fait pour sauver notre peuple, j'ai contribué à

 27   quelque chose pour faire du bien, je ne souhaite pas que ce procès échoue,

 28   et je vais vous demander si vous avez la possibilité et le temps de


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  1   m'entendre jusqu'au bout. J'ai écrit sept pages hier soir la veille de la

  2   St-Sava. Aujourd'hui c'est la St-Sava. Si vous me le permettez, je souhaite

  3   lire cela jusqu'au bout. Après, je pourrai prêter serment.

  4   "Je ne reconnais pas le Tribunal de La Haye. C'est une création de

  5   l'OTAN. C'est une cour démoniaque, cela n'est pas une cour de justice, et

  6   ce Tribunal nous juge simplement parce que nous sommes Serbes, parce que

  7   nous protégeons notre peuple."

  8   Le Juge Kwon :

  9   "Monsieur Mladic, je vous coupe. Veuillez vous asseoir. Je vais

 10   consulter mes confrères.

 11   "Le Président : Monsieur Mladic, comme vous le savez, nous avons nos règles

 12   qui encadrent nos procès. Je vous recommande encore une fois de prêter

 13   serment et de répondre à la question, si vous le permettez…" aux questions

 14   qui sont posées par M. Karadzic.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avez-vous dit "Le Tribunal de La Haye

 16   " ou le tribunal de la haine."

 17   M. IVETIC : [interprétation] Le Tribunal de La Haye.

 18   Et ensuite, je vais vous permettre de lire ces documents et mon

 19   client pour finir a dit :

 20   "LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur Kwon, vous êtes beaucoup plus

 21   jeune que moi. Vous exercez une pression contre moi sans aucune raison. Je

 22   ne crains que Dieu. J'ai la conscience tranquille concernant toutes ces

 23   questions.

 24   "Vos citations à comparaître et vos platitudes au Tribunal de La Haye

 25   et vos faux actes d'accusation, je m'en soucis et je m'en moque. Je ne

 26   souhaite pas fatiguer toutes ces personnes ici. Je vais faire cette

 27   déclaration mais je ne reconnais pas votre tribunal, le Tribunal de La

 28   Haye. Celui n'existe pas à mes yeux."


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  1   C'est ce que mon client a dit, et je peux vous dire qu'il a cru à

  2   chaque parole qu'il a prononcée ce jour-là. Cela correspondait à la vérité

  3   pour lui. Et je dois vous demander : pouvons-nous véritablement le blâmer

  4   pour l'opinion qu'il a du Tribunal qui est si négatif parce que cette

  5   opinion se fonde uniquement sur son ressenti de la façon dont il a été

  6   traité depuis sa venue ici. Je souhaite que vous compreniez d'où il vient

  7   et lorsque vous rendrez votre verdict et votre jugement d'essayer de lui

  8   donner tort, parce que moi-même je n'ai pas réussi à soulever des arguments

  9   pour lui donner tort, même si j'ai essayé. Peut-on véritablement blâmer mon

 10   client pour avoir une telle opinion ?

 11   La diapositive suivante.

 12   C'est la devise qui se trouve dans le foyer de ce Tribunal et cette

 13   devise ne traduit ni le respect ni la reconnaissance du principe de la

 14   présomption d'innocence ni la protection des droits de l'accusé. La devise

 15   dit : "Traduire les criminels de guerre en justice et rendre justice aux

 16   victimes."

 17   Pouvez-vous vraiment blâmer mon client d'avoir un point de vue

 18   négatif pour ce qui est de ce Tribunal, étant donné que vous l'avez fait

 19   sortir lors de sa comparution initiale parce qu'il a essayé tout simplement

 20   de faire référence à son droit de renoncer à écouter la lecture de l'acte

 21   d'accusation. Vous l'avez fait sortir et vous avez donné lecture de l'acte

 22   d'accusation. Et l'accusé suivant qui était arrivé, M. Hadzic, a demandé au

 23   Tribunal que l'acte d'accusation ne soit pas lu et vous avez fait droit à

 24   sa demande. Pouvez-vous vraiment blâmer mon client puisque deux de trois

 25   Juges ont constaté qu'il était coupable ? Vous, le Président Orie dans

 26   l'affaire Galic; et vous, le Juge Fluegge, dans l'affaire Tolimir. Pouvez-

 27   vous vraiment le blâmer d'avoir été septique pour ce qui est de la

 28   protection de ses droits étant donné que le président du MTPI qui a dit au


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  1   maire de Srebrenica que Karadzic et Mladic seront traduits en justice et

  2   que le président du TPIY qui a donc conclu de façon affirmative de sa

  3   culpabilité dans l'affaire Popovic ? Pouvez-vous blâmer mon client d'avoir

  4   peur de la justice, étant donné que dans l'affaire Karadzic il y a eu des

  5   constatations attestant sa culpabilité ? Après quoi, vous avez amené ici

  6   des gens qui ont travaillé dans cette affaire pour vous aider à rédiger ce

  7   jugement, et récemment vous avez admis que ce jugement était en cours

  8   d'être écrit. Pouvez-vous vraiment blâmer mon client au moment où la

  9   Chambre d'appel dans l'affaire Popovic a donc constaté de façon qui n'était

 10   pas nécessaire, qu'il était coupable et c'était dans une autre affaire où

 11   il ne pouvait pas se défendre ? Pouvez-vous le blâmer lorsque dans cette

 12   affaire vous avez permis à l'Accusation de dire qu'il devait arrêter de

 13   s'entretenir avec son conseil ?

 14   Et, Monsieur le Président, Monsieur le Juge, j'espère que vous allez

 15   comprendre pourquoi il n'a pas confiance en vous. Et essayer de faire ce

 16   que je n'ai pas pu faire, à convaincre mon client que ce Tribunal est juste

 17   et honnête et que vous allez apprécier les éléments de preuve de façon

 18   correcte que vous n'allez pas céder devant les arguments de l'Accusation ou

 19   pression politique, et que vous allez vous assurer que le critère le plus

 20   haut de la charge de la preuve soit appliqué. J'espère que vous allez

 21   prouver que mon client à tort, et que vous allez montrer au public qui

 22   éprouve peut-être la même chose que mon client. Si vous prononcez un

 23   acquittement, cela prouverait qu'il avait tort et cela enverrait un message

 24   fort pour ce qui est du patrimoine légal de ce Tribunal et de la justice.

 25   Et j'espère que vous allez rendre cette décision-là.

 26   Et, finalement, nous avons entendu M. McCloskey lire un poème ou une

 27   lettre provenant de la guerre civile en Amérique la semaine dernière.

 28   C'était la semaine dernière. Je n'ai rien de similaire, et je ne suis pas


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  1   sûr que cela soit pertinent pour notre affaire. Le général Mladic m'a

  2   demandé de vous dire à la fin quelque chose qui est plus pertinent et plus

  3   efficace. Pendant ces dernières quatre années, nous avons parlé des

  4   questions concrètes et des incidents, et dans une affaire comme la nôtre,

  5   il est facile de perdre de vue une image globale. La guerre est une chose

  6   qui est moche, et à la fin, la violence, donc, ne fait pas de distinction

  7   entre des gens. Le général Mladic est un militaire, mais il regardait son

  8   pays s'enliser dans le chaos et se dissoudre, donc cela l'a bouleversé et

  9   cela de façon que ce Tribunal ne peut jamais comprendre. Il a une demande.

 10   Il vous demande d'observer deux minutes de silence à la mémoire et pour

 11   commémorer toutes les victimes de cette guerre insensée en Bosnie-

 12   Herzégovine, la guerre qui, si je peux ajouter, n'a été ni commencée ni

 13   poursuivie par lui. Lorsque je dis "à la mémoire de toutes les victimes",

 14   c'est que le général Mladic veut dire que lui-même ainsi que son équipe de

 15   Défense considèrent que toutes les vies perdues en guerre, la vie de tout

 16   Bosniaque, de tout Serbe, de tout Croate, de tout Rom, de tout Albanais, de

 17   tout homme, femme et enfant est une tragédie, et cette liste de victimes

 18   inclue 1 300 victimes serbes de la région de Srebrenica qui ont perdu leurs

 19   vies à cause de la violence horrible perpétrée par Naser Oric et leur voix

 20   n'est pas souvent entendue en ces lieux. Qu'on se souvienne toujours d'eux

 21   et que l'humanité tire des leçons de cela. On a besoin aujourd'hui -- on a

 22   besoin de aujourd'hui.

 23   C'est tout ce que le général Mladic a voulu que soit fait avant la fin de

 24   l'audience. C'est à vous maintenant de décider si deux minutes de silence

 25   sont observées.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Ivetic. Cette demande --

 27   on ne peut pas faire droit à cette demande de M. Mladic, donc cela ne fait

 28   pas partie de nos compétences.


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  1   Et nous allons lever l'audience. Nous allons poursuivre jeudi, 15 décembre.

  2   Mais avant la levée de l'audience, j'aimerais savoir si les parties se sont

  3   mis d'accord pour ce qui est de comment nous allons travailler jeudi. Est-

  4   ce qu'on aura deux volets d'audience ou une pause entre les deux ?

  5   M. IVETIC : [interprétation] Pour ce qui est de la Défense, nous pouvons

  6   travailler pendant une heure et demie et puis faire une pause et travailler

  7   encore une heure et demie.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, nous pouvons procéder ainsi. Nous

  9   avons travaillé pendant deux volets d'audience de une heure et demie.

 10   L'audience est levée. Nous allons poursuivre jeudi, 15 décembre à 9

 11   heures 30 dans cette même salle d'audience.

 12   --- L'audience est levée à 14 heures 26 et reprendra le jeudi, 15 décembre

 13   2016, à 9 heures 30.

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