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1 Le jeudi 8 décembre 2005
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour. Je vous rappelle la
7 déclaration solennelle que vous avez prononcée au début de votre
8 déposition. Elle est toujours contraignante.
9 Maître Bulatovic, vous avez la parole.
10 LE TÉMOIN: WITNESS P-032 [Reprise]
11 [Le témoin répond par l'interprète]
12 M. BULATOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, bonjour. Bonjour à
13 mes confrères, bonjour au témoin.
14 Contre-interrogatoire par M. Bulatovic :
15 Q. [interprétation] Je suis l'avocat Bulatovic. Je suis l'un des conseils
16 qui représente le commandant Sljivancanin. Je vais vous poser quelques
17 questions. Toutes les petites mises en garde qui vous ont déjà été données
18 par mes confrères qui vous ont posé des questions précédemment
19 s'appliquent. Je vous prie de les respecter pour qu'on puisse avancer de la
20 manière la plus efficace aujourd'hui.
21 Vous avez dit que le 17 novembre vous êtes allé dans la cave où étaient
22 vos parents, et que votre père vous a dit que Vukovar était tombée. Il vous
23 a dit qu'il a reçu cette information de la part d'un policier. Vous ai-je
24 bien compris ?
25 R. Oui.
26 Q. Dites-moi, s'il vous plaît, quand vous êtes allé voir votre père, vous
27 y êtes allé seul ou en la compagnie d'un autre membre du Corps de la Garde
28 nationale qui a fait partie de la même unité que vous ?
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1 R. Seul.
2 Q. Pouvez-vous nous dire combien de temps vous êtes resté là-bas ?
3 R. Une heure.
4 Q. Pendant cette heure que vous avez passée en la compagnie de vos
5 parents, en la compagnie de votre père, avez-vous parlé d'autres choses,
6 pas seulement du fait que Vukovar était tombée ? J'entends par là les
7 projets qu'il avait. Est-ce que vous lui avez demandé, est-ce qu'il vous a
8 dit ce qu'il avait l'intention de faire ? Pourriez-vous nous en dire
9 quelques mots, s'il vous plaît ?
10 R. Simplement, nous nous sommes mis d'accord sur le fait que si Vukovar
11 tombait, que nous allions nous retrouver à Zagreb. C'était toute la teneur
12 de notre conversation.
13 Q. Vous lui aviez demandé comment il entendait, lui, sortir de Vukovar, de
14 quelle manière ?
15 R. Je lui ai demandé ce qui allait advenir d'eux, et il m'a dit : "La même
16 chose qu'à tous les autres."
17 Q. Quand il a dit "la même chose que tous les autres," qu'entendait-il par
18 là ? Qui était les autres ?
19 R. Il pensait aux autres civils qui se trouvaient dans la cave.
20 Q. Pendant que vous aviez cette conversation avec votre père, pendant
21 cette heure-là, est-ce qu'il y a eu d'autres civils qui ont pris part à
22 cette conversation donnant des suggestions, des propositions, des idées ?
23 Si oui, de quelle nature était-ce ?
24 R. Non.
25 Q. Par conséquent, vous n'avez reçu aucune information de la part des gens
26 qui se sont trouvés à l'abri, donc les gens parmi lesquels il y avait
27 également votre père, ils ne vous ont pas dit comment ils entendaient
28 sortir de Vukovar ?
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1 R. Non.
2 Q. Hier, vous avez dit que dans la maison d'un de vos amis vous avez
3 laissé des armes. J'aimerais savoir de quelles armes il s'est agi ? Vous
4 avez dit que c'était un fusil. Dites-moi de quel fusil il s'est agi ?
5 R. C'était un M-48 et un fusil automatique.
6 Q. Savez-vous quel était le calibre du fusil M-48, et aussi quel était le
7 calibre du fusil automatique ?
8 R. C'était 7.62 pour le fusil automatique, et pour le fusil M-48, je
9 l'ignore.
10 Q. Dans votre réponse, vous venez de mentionner le fusil PAP, Papovka ?
11 R. Oui.
12 Q. Le M-48 était-ce une Papovka ?
13 R. Non.
14 Q. Est-ce que vous aviez des fusils PAP ?
15 R. Oui.
16 Q. Vous avez dit que vous étiez huit dans ce groupe, si je vous ai bien
17 compris hier ?
18 R. Oui.
19 Q. Dites-moi, s'il vous plaît, quel a été l'armement de tout un chacun ?
20 Quelle est l'arme que les différents groupes ont reçue ?
21 R. Il y avait quatre M-48, trois fusils PAP et un fusil automatique.
22 Q. Pouvez-vous me dire combien de munitions vous aviez pour chacune de ces
23 armes ?
24 R. Je ne le sais pas.
25 Q. Parmi l'armement que vous aviez, aviez-vous des grenades à main ?
26 R. Oui.
27 Q. Voulez-vous bien me dire combien de pièces, si vous vous en souvenez ?
28 R. Je ne m'en souviens pas.
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1 Q. Puisque vous aviez des fusils PAP, donc des fusils semi-automatiques,
2 est-ce que vous aviez des tromblons ?
3 R. Non.
4 Q. Par rapport à l'école où vous vous trouviez, quelle était la distance
5 entre celle-ci et votre appartement ?
6 R. Entre 50 et 100 mètres.
7 Q. Jusqu'à la date du 18 novembre 1991, à quelle fréquence vous rendiez-
8 vous dans votre appartement, à partir du moment où vous avez rejoint le
9 Corps de la Garde nationale ?
10 R. Deux fois par semaine.
11 Q. La cave dans laquelle se sont trouvés vos parents, était-ce une cave
12 faisant partie du bâtiment dans lequel était situé votre appartement ?
13 R. Oui.
14 Q. Pourriez-vous me dire pour quelle raison vous vous rendiez deux fois
15 par semaine dans cet appartement, si vos parents étaient là sur place, ils
16 pouvaient aller voir ce qui en était de l'appartement ?
17 R. J'allais les voir.
18 Q. Je crois que ma question était claire. Je voulais savoir à quelle
19 fréquence vous alliez voir l'appartement. Si j'ai bien compris, vos parents
20 étaient dans la cave. Par conséquent, si vos parents étaient dans la cave,
21 pourquoi alliez-vous voir l'appartement si eux-mêmes pouvaient le faire ?
22 R. Personne n'allait vérifier ce qui en était des appartements puisque
23 tout le monde était dans la cave.
24 Q. Dans votre appartement, aviez-vous un poste de télévision, une radio ?
25 R. Oui.
26 Q. A l'école, où était stationnée votre unité ? Y aviez-vous un poste de
27 télévision, une radio ?
28 R. Non.
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1 Q. Avez-vous eu l'occasion, pendant ces événements et pendant que vous
2 étiez membre de la Garde nationale, n'avez-vous jamais eu l'occasion de
3 suivre les programmes de la télévision ou de la radio ?
4 R. Tant qu'il y a eu de l'électricité, on a écouté ou regardé. Après, on
5 ne l'a plus fait.
6 Q. Pouvez-vous nous dire jusqu'à quel moment il y a eu de l'électricité ou
7 plutôt, à partir de quel moment, de manière définitive, il n'y en a plus
8 eu ? Jusqu'à quel moment avez-vous pu regarder la télévision et écouter la
9 radio ?
10 R. Je ne sais pas.
11 Q. Je voudrais reparler du moment où vous avez abandonné vos armes, et
12 vous et votre ami, vous êtes partis vers l'hôpital. Vous avez fait une
13 déclaration que vous avez donnée au bureau du Procureur où vous citez son
14 nom et son prénom. Compte tenu de vos mesures de protection, pour qu'il n'y
15 ait pas de révélation de votre identité grâce aux liens qui existent entre
16 vous et cet homme, je vais vous poser la question suivante sans prononcer
17 son nom. Est-ce que cet homme a été en votre compagnie pendant tout le
18 temps, sans interruption, à partir du moment où vous avez abandonné les
19 armes dans la maison de votre voisin jusqu'à votre départ pour Mitrovica ?
20 R. Oui.
21 Q. Etiez-vous ensemble lorsqu'on vous a transportés à Mitrovica ?
22 R. Oui.
23 Q. Etiez-vous ensemble quand on vous a relâchés de Mitrovica également ?
24 R. Oui.
25 Q. A Mitrovica, avez-vous eu l'occasion de vous voir ?
26 R. Oui.
27 Q. Vous êtes-vous parlés à Mitrovica ?
28 R. Oui.
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1 Q. Je vais maintenant vous poser des questions sur des détails qui
2 concernent votre arrestation le 19 novembre 1991; c'est bien cela ?
3 M. BULATOVIC : [interprétation] Correction, s'il vous plaît. Page 6,
4 première ligne, on lit "18 novembre". Je n'ai pas dit 18; j'ai dit le "19
5 novembre."
6 Q. Cette journée du 19, est-ce qu'on peut considérer que c'est ce jour-là
7 que vous avez été arrêtés, d'après ce que vous nous avez décrit ?
8 R. Oui.
9 Q. Vous dites qu'on vous a arrêtés, qu'un véhicule à bord duquel il y
10 avait quatre soldats vous a arrêtés. Pouvez-vous tout d'abord nous décrire
11 le véhicule, de quel type était-il ?
12 R. C'était une Jeep de couleur verte.
13 Q. Il y avait quatre soldats dans cette jeep; c'est bien cela ?
14 R. Oui.
15 Q. Vous avez dit qu'un homme est descendu de cette jeep, que vous l'avez
16 reconnu plus tard. Je vous poserai des questions portant là-dessus, pour
17 savoir de quelle manière vous l'avez reconnu. Vous avez dit que vous l'avez
18 identifié en tant que commandant Sljivancanin. Pouvez-vous décrire ce
19 Veselin Sljivancanin, son uniforme, son armement et tout le reste que vous
20 avez vu, de la manière dont vous avez vu cet homme ?
21 R. Lorsque la jeep s'est arrêtée, la portière s'est ouverte. Ce monsieur a
22 demandé où allions-nous. Mon voisin et moi, nous avons dit : Vers
23 l'hôpital. Il a dit qu'il fallait qu'on monte à bord du véhicule, qu'il
24 allait nous emmener. Quand on est arrivé à l'hôpital, on est descendu de la
25 jeep, ce monsieur a dit aux soldats qui étaient au portail --
26 Q. Excusez-moi, ce n'est pas ce que je vous ai demandé. Je vous ai demandé
27 de nous décrire cet homme.
28 R. Il avait un uniforme de camouflage. Il était grand, il avait une
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1 moustache et il avait le couvre-chef de l'époque de Tito.
2 Q. Est-ce qu'il portait une arme ? Si oui, laquelle ?
3 R. Je pense qu'il n'avait pas d'armes.
4 Q. Où pouvait-on voir son grade ?
5 R. Je ne sais pas.
6 Q. C'est également l'homme que vous avez vu dans ce journal, sur cette
7 photographie que vous avez décrite.
8 R. Oui.
9 Q. Cette description de cet officier, de cet homme, est-ce que cela
10 correspond à quelque chose que vous avez pu voir à la télévision ?
11 R. Après ma sortie du camp, oui.
12 Q. Compte tenu de vos activités au sein du Corps de la Garde nationale,
13 d'après ce que j'ai compris, aujourd'hui en répondant à mes questions, vous
14 avez dit que vous étiez armé relativement bien. Maintenant, j'aimerais
15 savoir si vous pouvez nous décrire vos opérations, vos actions de combat.
16 Où les avez-vous menées ? Comment étaient constitués les groupes ? Qui
17 concevait les plans ? Qui commandait ?
18 R. Là où j'étais, où je me trouvais, on ne faisait rien.
19 Q. Mais si j'ai bien compris, pendant tout ce temps de la guerre ou du
20 conflit armé de Vukovar, vous n'avez pas tiré une seule balle ?
21 R. Si.
22 Q. Vous avez tiré sur qui ?
23 R. Sur des transporteurs.
24 Q. Qui appartenait à qui ?
25 R. Ils étaient militaires.
26 Q. Mais si vous tiriez sur des transporteurs militaires, ceci veut dire
27 qu'il y avait quand même des actions militaires. J'aimerais savoir comment
28 cela s'est fait qu'il y ait une action militaire, que vous tiriez, que
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1 quelqu'un vous organise, que quelqu'un commande ?
2 R. Personne ne donnait d'ordres, mais lorsque les transporteurs se
3 mettaient en branle, ils ouvraient le feu les premiers.
4 Q. Je ne veux plus vous poser de questions là-dessus; c'est parfaitement
5 clair. Il y a un autre point qui m'intéresse. Vous êtes arrivé avec des
6 soldats le 19. Des soldats vous ont croisé dans la rue et vous ont
7 transporté à bord de cette jeep et ils vous ont amené à l'hôpital. Là, vous
8 êtes resté pendant combien de temps ?
9 R. Je ne sais pas, dix à 15 minutes, à peu près.
10 Q. Mais là, vous avez eu une conversation avec les soldats, d'après votre
11 déclaration que vous avez donnée au bureau du Procureur, et vous avez
12 appris qu'il s'agissait de soldats venus de Cacak ?
13 R. Oui.
14 Q. Ces soldats vous ont offert des cigarettes, d'après ce que vous avez
15 dit ?
16 R. Oui.
17 Q. Il en ressort - je pense que vous serez d'accord avec moi - que la
18 conversation de votre voisin avec ces soldats était tout à fait amicale ?
19 R. Demandez à mon voisin. C'est à lui qu'il faut le demander.
20 Q. Mais vous étiez bien là, n'est-ce pas ?
21 R. Oui.
22 Q. Cela veut dire que vous avez été témoin de cette conversation. Enfin,
23 c'est bon. Je vous comprends. Quelque part, je comprends votre hostilité.
24 Je vais vous poser une autre question. Est-ce que l'armée a cherché à
25 obtenir des renseignements de votre part ? Les soldats vous ont donné des
26 cigarettes, vous ont parlé et comment en êtes-vous arrivé à commencer à
27 parler, à discuter d'armes ? Est-ce que c'est votre ami, vous ou les
28 soldats qui ont commencé à en parler ?
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1 R. Ce sont les soldats qui nous ont posé des questions.
2 Q. Qu'est-ce qu'ils vous ont demandé précisément ? Qui vous a posé ces
3 questions ?
4 R. Ceux qui nous ont dit de monter à bord du véhicule transporteur de
5 troupes pour nous emmener à Velepromet.
6 Q. Qu'est-ce qu'ils vous ont demandé ? De quelle façon vous ont-ils posé
7 ces questions ?
8 R. Ils nous ont demandé si on avait eu des armes, si on avait des armes.
9 Le voisin a dit que oui. Là-dessus, ils nous ont demandé où. On a expliqué
10 où. Nous sommes allés à cet endroit et nous avons donné nos armes, livré
11 nos armes.
12 Q. Ces hommes de l'armée, qu'est-ce qu'ils vous ont dit après cela, quand
13 vous avez livré vos armes ? Est-ce qu'ils vous ont demandé d'où vous étiez,
14 ce que vous faisiez à l'endroit où vous vous étiez trouvés, où se
15 trouvaient vos positions ?
16 R. Non, ils n'ont pas posé de questions.
17 Q. Est-ce qu'ils vous ont frappé là où vous avez livré vos armes, lorsque
18 vous les avez emmenés à cet endroit -- ou plutôt, lorsque vous attendiez
19 ces hommes à l'endroit où vous aviez laissé vos armes ? Est-ce que vous
20 avez subi de leur part un mauvais traitement quelconque ?
21 R. Non.
22 Q. Dites-moi, s'il vous plaît, quelle heure il était ce jour-là, le 19
23 novembre 1991, lorsqu'on vous a emmené à Velepromet ?
24 R. Il était à peu près 6 heures et demie du matin.
25 M. BOROVIC : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, je dois
26 répéter ma question parce que je pense qu'il y a un problème au niveau du
27 compte rendu. Il y a une confusion dans la réponse. Je vais répéter ma
28 question pour tirer tout ceci au clair.
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1 Q. Quelle heure était-il lorsqu'on vous a emmené à Velepromet ?
2 R. Il était 6 heures et demie du matin.
3 Q. De quelle façon avez-vous été amené à cet endroit ?
4 R. Dans un véhicule blindé transporteur de troupes.
5 Q. A votre arrivée à Velepromet, il y avait combien de civils sur place
6 dans la cour ?
7 R. Il y en avait beaucoup.
8 Q. Est-ce que vous pourriez être plus précis ? Beaucoup, cela fait
9 combien, d'après vous ?
10 R. Je ne me souviens pas parce que j'avais été obligé de garder les mains
11 dans le dos, de garder les yeux baissés, ce qui veut dire que je ne pouvais
12 pas regarder autour de moi.
13 Q. Ce qui m'intéresse uniquement, c'est ce que vous avez été en mesure de
14 voir. Je vous demande, étant donné les circonstances et de ce que vous avez
15 pu voir, combien de civils il y avait sur place ?
16 R. Je ne sais pas.
17 Q. Mais il y a un instant, vous avez dit qu'il y en avait beaucoup. Vous
18 avez quand même pu voir qu'il y en avait beaucoup. Ce qui m'intéresse
19 maintenant, c'est d'être plus précis. Qu'est-ce que cela veut dire, pour
20 vous, "beaucoup" ? Est-ce que c'est plus de 100 ? Plus de 1 000 ? Donnez-
21 nous une idée ne fut-ce qu'approximative ?
22 R. Je vous l'ai dit, je n'ai pas pu regarder autour de moi. Je n'ai pu
23 voir que ce que j'ai pu voir.
24 Q. Mais c'est précisément ce qui m'intéresse. Qu'est-ce que vous avez été
25 en mesure de voir ? Vous avez pu voir combien de gens, à peu près ?
26 R. Je ne sais pas.
27 Q. Est-ce que vous voulez dire que vous ne connaissez pas le nombre
28 exact ? Je ne tiens pas à savoir le nombre exact; ce qui m'intéresse, c'est
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1 d'avoir une idée plus précise de ce que vous dites quand vous dites
2 "beaucoup."
3 R. Je ne sais pas.
4 Q. Ecoutez, est-ce que je peux vous demander ceci ? Vous avez dit que vous
5 aviez des armes, des munitions. Vous aviez combien de munitions pour votre
6 fusil, beaucoup ou peu ?
7 R. Ce qu'on pouvait transporter, c'est tout ce qu'on avait.
8 Q. Cela faisait combien ?
9 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas entendu ce qu'a dit le témoin.
10 M. BULATOVIC : [interprétation]
11 Q. Est-ce que vous auriez l'obligeance de répéter ce que vous avez dit.
12 Les interprètes n'ont pas bien entendu ou compris. Je vous ai demandé
13 combien de munitions vous aviez.
14 R. A peu près 500 balles.
15 Q. Ces 500 balles, où est-ce que vous les gardiez ? Est-ce que c'était
16 dans votre barda ou est-ce que vous aviez un chargeur ou des chargeurs dans
17 lesquels elles se trouvaient ? Où est-ce qu'elles se trouvaient, ces
18 balles ?
19 R. On n'avait pas de chargeurs.
20 Q. D'accord. Vous avez, tous et chacun, reçu 500 balles ?
21 R. Non.
22 Q. Bien. Dites-nous combien chacun d'entre vous avait de balles.
23 R. On avait ce qu'on pouvait transporter.
24 Q. Ecoutez, je vous demande sans arrêt : combien de balles, combien de
25 munitions vous avez été en mesure de porter sur vous et ce qui faisait la
26 différence, de quoi cela dépendait ?
27 R. De toute façon, j'ai donné ce que j'avais.
28 Q. Vous souvenez-vous du nombre de balles que vous avez données ?
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1 R. A peu près 500.
2 Q. Fort bien. Revenons à Velepromet. Vous dites que d'abord, vous êtes
3 resté dans une salle ou pièce et qu'après, on vous a transféré vers une
4 autre; est-ce exact ?
5 R. Oui.
6 Q. Quelle est la distance qui sépare ces deux pièces ? Comment étaient-
7 elles positionnées l'une par rapport à l'autre ? On parle de la première,
8 d'abord; puis, de la seconde.
9 R. Dès que nous avons quitté la première salle, nous sommes entrés dans la
10 suivante. C'était peut-être à cinq, dix ou 15 mètres de distance, dans le
11 même bâtiment.
12 Q. Pourriez-vous nous dire de quelle taille était cette deuxième salle ?
13 R. Non.
14 Q. Vous avez fourni une déclaration au bureau du Procureur, à ses
15 enquêteurs, en 1995, s'agissant du moment où vous avez été transporté de
16 l'hôpital à Velepromet. Vous dites que M. Sljivancanin vous avait dit qu'il
17 allait vous emmener dans sa camionnette à l'hôpital. Mais aujourd'hui, vous
18 ne parlez pas du tout de camionnette. Dites-nous, qu'est-ce qui s'est passé
19 exactement ?
20 R. Je ne comprends pas votre question.
21 Q. Dans votre déclaration préalable que vous avez fournie aux enquêteurs
22 du bureau du Procureur, vous avez déclaré que
23 M. Sljivancanin vous avait dit que c'était lui l'homme qui vous a demandé
24 où vous alliez et vous avez déclaré que cet homme vous avait dit qu'il
25 allait vous emmener à l'hôpital en camionnette. Aujourd'hui, vous nous avez
26 dit que les soldats qui vous avaient dit de vous arrêter se trouvaient dans
27 une Jeep. Or, il y a une différence importante entre une Jeep et une
28 camionnette. Pourriez-vous vous expliquer ?
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1 R. Nous avons été emmenés à l'hôpital en Jeep. Plus tard, c'est dans un
2 véhicule blindé transporteur de troupes que nous avons été emmenés à
3 Velepromet.
4 Q. Vous nous avez dit ici même, si j'ai bien compris vos propos d'hier,
5 que vous avez été interrogé par des représentants de la Défense
6 territoriale serbe. Vous ditesqu'il y avait une vingtaine d'autres
7 personnes qui vous écoutaient, qui étaient là présents. J'aimerais en
8 savoir plus quant à la méthode utilisée pour vous poser des questions. Est-
9 ce que vous avez été interrogés l'un après
10 l'autre ? Est-ce que vous avez eu une déclaration écrite ? Est-ce que vous
11 auriez signé une déclaration dactylographiée ? J'aimerais savoir plus
12 s'agissant de la procédure utilisée à Velepromet.
13 R. Nous étions 20. Nous sommes sortis pour aller dans cette autre pièce.
14 Le monsieur qui s'est présenté comme étant un policier de la police
15 militaire, lorsqu'il m'a reconnu, il m'a pris à part. Il m'a posé des
16 questions à propos du type d'armes que j'avais, combien d'enfants serbes
17 j'avais tués, combien de bracelets j'avais faits avec les doigts, les
18 oreilles. On n'a écrit aucune déclaration, on a rien signé.
19 Q. Ceci se passait dans la salle où vous étiez tous ou est-ce que c'est
20 quand on vous a fait sortir de cette pièce ? Est-ce que vous avez pu parler
21 en tête-à-tête ?
22 R. Nous étions tous dans cette pièce.
23 Q. Pendant que cet homme vous parlait, les autres écoutaient ce que vous
24 disiez ?
25 R. Oui.
26 Q. Vous déclarez que l'homme qui vous a interrogés, vous a reconnu.
27 Comment a-t-il pu vous reconnaître ? Est-ce que c'était un habitant de
28 Vukovar ? Comment se fait-il qu'il vous reconnaissait ?
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1 R. C'était un habitant de Vukovar. Nous nous connaissions parce que nous
2 sommes des pêcheurs.
3 Q. Le 19 à Velepromet, combien d'autocars avez-vous vus ? Est-ce que vous
4 vous en souvenez ?
5 R. Je ne m'en souviens pas.
6 Q. Très bien. Dites-moi ceci : vous dites qu'au départ, vous étiez 60, et
7 que vous avez fini par rester à 38. Pourriez-vous nous donner les noms de
8 certaines de ces 38 personnes qui sont restées avec vous ? Si ceci est de
9 nature de révéler votre identité, nous allons, bien entendu, passer à huis
10 clos partiel.
11 R. Slobodan Vuletic, Emil Cakalic, Djoko Vladisavljevic, Djordje. Je ne me
12 souviens pas d'autres noms.
13 Q. A partir de ce moment-là, après les questions qui vous ont été posées à
14 Velepromet et jusqu'au moment où à Srmeska Mitrovica, en février 1992, au
15 moment où on vous a posé des questions, est-ce qu'il y a eu des gens qui
16 vous ont posé d'autres questions dans cette intervalle ?
17 R. J'ai fait une déclaration écrite le 20 janvier 1992.
18 Q. Excusez-moi. Je me suis trompé. J'ai dit février, j'aurais dire
19 janvier. Je me reprends. Entre le 19 novembre 1991 et la fin janvier 1992,
20 est-ce qu'il y aurait quelqu'un d'autre qui vous aurait posé d'autres
21 questions ?
22 R. Non, personne ne m'a parlé jusqu'au mois de janvier, jusqu'au 20
23 janvier 1992.
24 Q. Hier, vous avez déclaré qu'à Sremska Mitrovica, vous n'avez pas reçu
25 d'information. Il n'y avait pas de journal, pas de télévision, pas de
26 radio. C'était le silence complet, n'est-ce pas, c'était un black-out. J'ai
27 bien compris ?
28 R. Oui.
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1 Q. Dans la déclaration que vous avez fournie au bureau du Procureur, vous
2 avez parlé de la façon dont vous avez reconnu Veselin Sljivancanin. Vous
3 avez dit, en l'occurrence, que vous aviez vu sa photo dans une espèce de
4 revue militaire. Dans le contexte de ce que vous venez de nous déclarer, le
5 fait que vous n'aviez pas de presse écrite à votre disposition, comment,
6 Grand Dieu! est-ce que cette revue militaire est apparue, tout d'un coup,
7 venant de nulle part à Sremska Mitrovica ?
8 R. On a rien eu tant que ne sont pas arrivées les conventions de Genève.
9 Q. Vous voulez dire la Croix-Rouge internationale ? Je vous ai bien
10 compris ?
11 R. Oui.
12 Q. Cela s'est passé combien de jours avant qu'on vous ait autorisés de
13 repartir en Croatie avant l'échange dont vous avez fait l'objet ?
14 R. C'était en décembre, le 12 décembre. C'était en décembre.
15 Q. Est-ce que vous vous souvenez du mois de décembre 1991 ? Est-ce que
16 vous avez parlé à des représentants de la Croix-Rouge internationale à
17 Sremska Mitrovica ?
18 R. Non.
19 M. BULATOVIC : [interprétation] Il y a peut-être une petite erreur au
20 compte rendu d'audience, ligne 11, page 15, on dit :
21 "Décembre, puis 12 décembre. Je ne pense pas que le témoin a parlé du 12
22 décembre. Je pense qu'il voulait partir -- parler du douzième mois de
23 l'année, donc du mois de décembre.
24 Q. Mis à part ces contacts avec des représentants de la Croix-Rouge
25 internationale à Sremska Mitrovica en décembre 1991, est-ce qu'à un autre
26 moment ils ont pris contact avec vous ?
27 R. Oui. Tous ceux qui se trouvaient là avaient des contacts avec la Croix-
28 Rouge, mais ce n'était pas des contacts personnels.
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1 Q. Vous parlez de "ceux qui étaient là." Quels étaient ces contacts ? De
2 quel genre ? Je ne parle pas ici simplement de contacts personnels; je
3 parle de contacts officiels qui auraient été pris avec vous.
4 R. Ils sont venus dans notre pièce. Ils nous ont amenés des magazines, des
5 revues, des livres. Ils nous ont demandé si nous avions besoin d'autres
6 choses.
7 Q. Mis à part cette conversation-là, il n'y a jamais eu d'autres
8 conversations ?
9 R. Nous avons envoyé des messages à nos familles en Croatie.
10 M. BOROVIC : [interprétation] Mesdames et Messieurs les Juges, est-ce que
11 nous pouvons passer rapidement à huis clos partiel ?
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.
13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur
14 le Président.
15 [Audience à huis clos partiel]
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13 [Audience publique]
14 M. BULATOVIC : [interprétation]
15 Q. Je vais vous poser des questions au sujet de certaines personnes et de
16 leurs noms. Dites-moi, s'il vous plaît, si vous en avez entendu parler, et
17 si oui, ce que vous savez à leur sujet. Tout d'abord, Ivo Madzarevic ?
18 R. Non.
19 Q. Branko Krizmanic ?
20 R. Non.
21 Q. Filip Karaula ?
22 R. Oui.
23 Q. Marin Pliso ?
24 R. Oui.
25 Q. Ivica Arbanas ?
26 R. Oui.
27 Q. Ante Roso ?
28 R. Non.
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1 Q. Je vais vous poser une question au sujet de votre retour de Sremska
2 Mitrovica. Après votre retour de Sremska Mitrovica, étiez-vous en contact
3 avec les représentants de la Croix-Rouge internationale à Mitrovica, juste
4 avant la libération, après votre libération, lorsque vous êtes arrivé à
5 Zagreb ou à quelque autre moment que ce soit ?
6 R. Nous allions à Mitrovica, lorsque nous sommes partis en échange. A
7 Zagreb, je n'ai pas eu de contact.
8 Q. Lors de ce contact, lors de l'échange, est-ce que vous avez dû remplir
9 un formulaire concernant l'échange, un document officiel qui devait leur
10 fournir des données concernant la durée de votre détention, le lieu de
11 votre arrestation, le moment de votre arrestation et ce genre de chose,
12 quelles étaient les conditions de détention aussi ?
13 R. Non.
14 Q. Aucun formulaire, aucun document n'a été rempli par vous, les
15 représentants de la communauté internationale et de la Croix-Rouge
16 internationale n'ont pris aucune déclaration de votre part concernant la
17 période que vous aviez passé en détention ?
18 R. On n'écrivait que des messages, mais je ne me souviens pas si on
19 écrivait autre chose, pas pour autant que je m'en souvienne.
20 Q. Avez-vous réalisé certains droits en raison de votre détention à
21 Sremska Mitrovica ?
22 R. Est-ce que vous pourriez répéter votre question ?
23 Q. Est-ce que vous avez réalisé certains droits, est-ce que vous avez eu
24 une certaine récompense en raison d'avoir été en détention à Sremska
25 Mitrovica ?
26 R. Non.
27 M. BOROVIC : [interprétation] Je demanderais qu'on passe à huis clos
28 partiel, s'il vous plaît.
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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Huis clos partiel.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
3 [Audience à huis clos partiel]
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18 [Audience publique]
19 M. AGHA : [interprétation] Monsieur le Président, peut-on demander que le
20 document dans son intégralité soit versé au dossier le moment voulu car
21 apparemment, il ne s'agit, ici, que d'un extrait de deux pages.
22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce qu'il y a une pertinence pour
23 ce qui est de l'intégralité du document ?
24 M. AGHA : [interprétation] Peut-être il y aura d'autres personnes qui
25 viendront déposer et qui ont été détenues à Sremska Mitrovica.
26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ce document, est-ce qu'il existe en
27 entier sous forme électronique ?
28 M. AGHA : [interprétation] Je devrai faire des recherches avant de le
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1 savoir.
2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Dans ce cas-là, vous pourrez soulever
3 la question de nouveau, lorsque vous aurez votre réponse. Mais pour le
4 moment, nous allons admettre ces deux pages.
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ces deux pages seront la pièce à
6 conviction 133 sous scellé.
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci beaucoup.
8 M. BULATOVIC : [interprétation]
9 Q. Si je vous disais que dans des documents officiels du gouvernement de
10 la République de Croatie, il est écrit que vous avez été arrêté le 18
11 novembre 1991 et que deux de vos frères ont été arrêtés le même jour, puis,
12 également que le 20 novembre 1991, votre ami et voisin a été arrêté, lui,
13 que diriez-vous à ce sujet ?
14 R. Je ne comprends pas la question. Que voulez-vous dire par privé le 18
15 novembre ?
16 Q. C'est vous qui avez dit que vous avez été privé le 19 et je vous dit
17 que d'après les documents officiels du gouvernement de la Croatie, il ne
18 s'agissait pas de la date du 19, mais du 18, ce qui veut dire que le 19,
19 vous n'étiez pas à l'hôpital, comme vous l'avez dit. Est-ce exact ou pas ?
20 R. Non. J'étais à l'hôpital le 19.
21 Q. Merci
22 M. BULATOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai terminé le
23 contre-interrogatoire de ce témoin.
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Bulatovic.
25 Oui, Monsieur Agha.
26 Nouvel Interrogatoire principal par M. Agha :
27 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, lorsque vous serez prêt, je vous
28 poserai un certain nombre de questions vous permettant d'apporter des
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1 clarifications nécessaires pour la Chambre de première instance suite aux
2 questions posées par mes éminents collègues de la Défense.
3 Dans le cadre de votre contre-interrogatoire, on vous a posé des
4 questions au sujet de votre mission de garde dans l'immeuble et ce que ceci
5 impliquait sur le plan pratique. Vous avez dit que vous deviez observer
6 afin de voir si des véhicules transports de troupes ou des militaires
7 allaient arriver depuis la direction de la caserne. Puis, vous avez dit,
8 par la suite, également que la caserne n'était pas assiégée. Qu'est-ce qui
9 se passait dans la caserne, au cours de cette période, si vous pouviez
10 l'observer ?
11 R. Je n'ai pas pu observer cela puisque la caserne se trouve plus haut
12 dans la colline, à une certaine distance de mon immeuble. Mais le
13 commandant m'avait dit de le contacter si je remarquais qu'ils
14 descendaient.
15 Q. Quel a été le rôle joué par la caserne dans le conflit, si vous le
16 savez ?
17 R. Je ne sais pas. Je ne m'en souviens plus.
18 Q. Nous allons parler d'un autre sujet soulevé par mes éminents collègues
19 de la Défense. On vous a posé, au cours du contre-interrogatoire, la
20 question de savoir quelle unité du ZNG était stationnée dans le palais du
21 comte Eltz et vous avez dit que vous ne le saviez pas. Est-ce que vous
22 savez si une unité du ZNG était stationnée dans le palais du comte Eltz au
23 cours des mois de juillet et août ?
24 R. Je ne sais pas.
25 Q. Récemment, ce matin, au cours du contre-interrogatoire, mes éminents
26 collègues de la Défense vous ont posé la question de savoir quand vous êtes
27 allé rendre visite à vos parents et vous avez dit que vous pouviez regarder
28 la télévision, écouter la radio chez eux. Qu'avez-vous entendu dire à la
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1 radio ou à la télévision au sujet de l'hôpital, si vous avez entendu quoi
2 que ce soit ?
3 M. BOROVIC : [interprétation] Monsieur le Président ?
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Borovic.
5 M. BOROVIC : [interprétation] Excusez-moi, mais je dois intervenir de
6 nouveau. Je n'ai pas eu le temps car la caserne n'a pas été mentionnée,
7 mais peu importe. Le témoin a dit qu'il est allé dans la cave et qu'il
8 n'est pas allé dans l'appartement pour regarder la télévision ou quoi que
9 ce soit de semblable. Il n'a pas dit cela et je pense que cette question
10 était extrêmement directrice.
11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je pense qu'il ne s'agit pas de la
12 question de savoir s'il s'agit d'une question directrice car il essaie de
13 rappeler une partie de la déposition au témoin. Mais je pense que vous avez
14 mal compris une partie de sa déposition.
15 Je ne pense pas du tout qu'il ait dit cela Monsieur Agha ?
16 M. AGHA : [interprétation] D'après ce que j'ai compris et il va falloir que
17 je vérifie le compte rendu d'audience --
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais avant cela, ce qui nous intéresse
19 le plus, c'est le témoin. Peut-être qu'il serait mieux si nous ne
20 discutions pas de cela, mais de sa manière de comprendre la vérité à lui.
21 M. AGHA : [interprétation]
22 Q. Monsieur le Témoin, dans le cadre du contre-interrogatoire, ce matin,
23 on vous a demandé si vous êtes allé dans la maison de vos parents et si
24 vous avez pu voir la télévision et écouter la radio.
25 M. BULATOVIC : [interprétation] Objection.
26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.
27 M. BULATOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'est moi qui ai
28 contre-interrogé ce témoin et je ne lui ai pas du tout posé cette question.
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1 Je lui ai demandé simplement s'il est allé chez lui et s'il avait un poste
2 de télévision et de radio dans son appartement. Mais je ne lui ai pas
3 demandé s'il le regardait ou écoutait. Simplement, je lui avais demandé
4 s'il y avait un poste de télévision ou de radio à l'école ou ailleurs où
5 ils auraient pu regarder la télé et écouté la radio. Il a mal compris.
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, ceci est plus ou moins conforme à
7 la manière dont je me souviens de cela, Maître Bulatovic. Maintenant, nous
8 avons exposé le tout.
9 Je suggère, Monsieur Agha, si vous souhaitez poursuivre dans ce sens,
10 que vous posiez au témoin la question de savoir où il regardait la
11 télévision et écoutait la radio, si jamais il le faisait.
12 M. AGHA : [interprétation]
13 Q. Afin de clarifier, Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez eu
14 l'opportunité de suivre le programme télévisé ou à la radio ?
15 R. Je pouvais écouter la radio, mais je ne pouvais pas regarder la
16 télévision.
17 Q. Avez-vous, par conséquent, entendu parler de l'hôpital à la radio ?
18 Est-ce qu'il y a eu des discussions à ce sujet ?
19 R. Nous avons entendu le Dr Bosanac dire que l'hôpital était pilonné.
20 Q. Avez-vous entendu quoi que ce soit à la radio au sujet de la caserne de
21 la JNA et ce qui s'y préparait ?
22 R. Je ne sais pas. Je n'arrive plus à m'en rappeler.
23 Q. Je souhaite --
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Avant cela, la Chambre souhaiterait
25 savoir où il écoutait la radio.
26 M. AGHA : [interprétation]
27 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous pourriez clarifier pour la Chambre
28 de première instance où vous écoutiez la radio.
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1 R. Chez mes parents, dans la cave.
2 Q. Maintenant, je souhaite que l'on aborde un autre sujet. Je vais
3 commencer par le contre-interrogatoire de ce matin. Ce matin, le conseil de
4 la Défense a mentionné que lorsqu'une jeep, une quatre-quatre verte est
5 arrivée jusqu'à l'entrée de l'hôpital - on vous a posé des questions à ce
6 sujet - vous avez dit qu'un homme en est sorti, et il s'est adressé à ceux
7 qui se tenaient à l'entrée. A ce moment-là, vous avez été interrompu. Qu'a
8 dit ce monsieur aux soldats qui étaient à l'entrée ?
9 R. Il leur a dit de nous garder, et qu'il allait envoyer un véhicule pour
10 nous transporter à Velepromet.
11 Q. Qui était cet homme qui a dit qu'il allait envoyer un véhicule à
12 Velepromet pour vous y transporter ?
13 R. C'était M. Sljivancanin.
14 Q. Nous allons rester sur le sujet de M. Sljivancanin. Au cours du contre-
15 interrogatoire, vous avez dit que vous avez pu le reconnaître d'après une
16 photo, et qu'à Mitrovica, vous ne receviez pas d'information jusqu'au 12
17 décembre 1991, la date de l'arrivée de la Croix-Rouge. Quand avez-vous pu
18 voir la photo vous permettant de reconnaître M. Sljivancanin,
19 approximativement ?
20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Peut-on indiquer que d'après nos
21 souvenirs, le 12 a été mentionné, mais il y a eu quelques confusions au
22 sujet de l'interprétation. Nous avons compris qu'il s'agissait du douzième
23 mois et non pas du douzième jour. Peut-être, il y a un malentendu.
24 M. AGHA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
25 Q. Afin de clarifier, dites-nous, approximativement, à quel moment vous
26 avez vu la photo de M. Sljivancanin ?
27 R. Peut-être au bout de quelques jours, ou plutôt quelques jours avant
28 l'arrivée de la convention de Genève.
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1 Q. Nous allons aborder un autre sujet soulevé au cours de votre contre-
2 interrogatoire ce matin. On vous a posé une question au sujet de vos armes,
3 et il a été suggéré que vous aviez dit que vous étiez relativement bien
4 armés. De quelles armes lourdes disposiez-vous ?
5 R. Sur les positions que l'on détenait, nous n'avions pas du tout d'armes
6 lourdes.
7 Q. Je souhaite que l'on traite maintenant de votre déposition concernant
8 Velepromet. Au cours du contre-interrogatoire, vous avez indiqué que vous
9 êtes arrivés à Velepromet à 6 heures 30 le
10 19 novembre. Vous avez dit que vous avez vu un grand nombre de civils dans
11 la cour, même si vous ne pouviez pas dire leur nombre exact. Pourquoi est-
12 ce que vous étiez dans la cour avec d'autres civils ?
13 R. Lorsqu'ils nous ont amenés jusqu'à l'entrée de Velepromet, ils nous ont
14 dit de baisser la tête et de mettre nos mains derrière nos dos, et nous
15 sommes entrés dans la cour. Dès que nous sommes sortis, certains des
16 soldats ont dit : Voici les membres du MUP. Pourquoi je n'étais pas là, où
17 se trouvaient d'autres civils ou les civils, je ne sais pas.
18 Q. Puisque vous n'étiez pas dans la cour, dites-nous où est-ce qu'ils ont
19 amené les hommes du MUP et vous ?
20 R. Il n'y avait que moi et mon voisin. Ils nous ont amenés dans cette
21 pièce, la salle que nous avons appelé la salle de la mort.
22 Q. Au cours de l'ensemble de votre contre-interrogatoire, à la fois hier
23 et aujourd'hui, mes éminents collègues de la Défense ont posé des questions
24 différentes au sujet de Velepromet, par exemple, la sortie, l'entrée, la
25 cour, les pièces. Est-ce que vous vous souvenez de Velepromet ? Est-ce que
26 vous pourriez le reconnaître ?
27 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président.
28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Vasic.
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1 M. VASIC : [interprétation] La Défense n'a pas fait objection à la question
2 précédente non plus, mais je pense que cette question est directrice,
3 puisque le témoin a dit hier où il était détenu, où se plaçait cette salle.
4 Si l'on demande au témoin s'il se souvient de cela, je pense qu'on essaie
5 de l'amener à dire autre chose, alors qu'hier, le témoin avait dit
6 clairement qu'il s'en souvenait.
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Vasic, la question de savoir
8 quels sont les souvenirs du témoin de Velepromet découle de manière
9 appropriée, à mon avis, du contre-interrogatoire et des questions posées
10 par plusieurs conseils de la Défense. Le témoin a donné des descriptions
11 plus ou moins détaillées, tout d'abord de son arrivée à Velepromet, ensuite
12 de l'endroit où il était détenu, là où l'on transférait et de l'endroit où
13 il a été interrogé. Je pense que tout ceci permet de manière appropriée de
14 poser la question de savoir quel est le niveau de vos souvenirs concernant
15 Velepromet. Cette question n'est pas une suggestion. Je pense que l'on
16 essaie, par le biais de cette question, de lui dire : Dites-nous si vous
17 vous souvenez de quelque chose. Donc, je pense que c'est une question
18 appropriée.
19 Allez-y, Monsieur Agha.
20 M. AGHA : [interprétation]
21 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, dire à la Chambre ce dont vous vous
22 souvenez de Velepromet.
23 R. Je me souviens de l'arrivée. Je me souviens du moment où on a été
24 fouillé, de l'arrivée dans la pièce, la sortie dans l'autre pièce, le
25 retour dans la première, le départ pour la caserne.
26 Q. Merci. Je voudrais que l'on continue de parler de Velepromet. Je vais
27 vous demander la chose suivante ou plutôt, je vais vous demander des choses
28 qui ont à voir avec les questions qui vous ont été posées hier, et cela a à
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1 voir avec la déclaration que vous avez donnée au bureau du Procureur en
2 1995. Hier, pendant le contre-interrogatoire, vous avez vu que dans votre
3 déclaration, vous n'avez pas appelé la pièce où on vous a détenus salle de
4 la mort. Vous avez expliqué que c'était le nom que vous avez donné à la
5 pièce où vous étiez détenus. En 1995, lorsque vous avez fait votre
6 déclaration, est-ce que les enquêteurs vous ont demandé si vous aviez
7 baptisé d'une manière spécifique cette pièce ?
8 R. Non.
9 Q. Je continue de parler de votre déclaration, parce que je voudrais que
10 l'on précise un point, quelque chose qui a à voir avec la déclaration que
11 vous avez donnée en 1995. Vous dites dans cette déclaration que vous avez
12 fait l'objet de mauvais traitements, d'abus à Velepromet. D'après ce qui
13 ressort du contre-interrogatoire, il n'est pas tout à fait clair de savoir
14 si vous avez fait l'objet de mauvais traitement à Velepromet ou si cela
15 s'est passé uniquement dans la pièce. Pourriez-vous. s'il vous plaît.
16 préciser cela en vous fondant sur la déclaration ? Est-ce qu'on peut voir
17 ce qui est écrit dans la déclaration ?
18 M. AGHA : [interprétation] Je demanderais que l'on donne au témoin sa
19 déclaration en B/C/S.
20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce que vous voulez citer une page
21 ou une paragraphe en particulier ?
22 M. AGHA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
23 Q. Dans votre déclaration hier, on vous a demandé de donner lecture de
24 votre déclaration en commençant par la phrase où il est dit : "Nous étions
25 entre 50 et 60 dans cette pièce."
26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] C'est quelle page ?
27 M. AGHA : [interprétation] C'est la page 3, en bas, du moins dans la
28 version anglaise.
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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il faudrait peut-être que le témoin
2 essaie de se reporter en page 3; ceci l'aidera beaucoup.
3 M. AGHA : [interprétation]
4 Q. Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît, retrouver la portion de votre
5 déclaration où vous dites : "Nous étions en tout 50 ou 60 dans cette
6 pièce."
7 Pouvez-vous lire cela ?
8 R. "Dans cette pièce, nous étions en tout 50 ou 60. Je n'ai pas été
9 maltraité, mais j'ai vu des hommes -- des soldats de la JNA."
10 Q. S'il vous plaît, pouvez-vous vous arrêter là. Lorsque vous dites que
11 vous n'avez "pas fait l'objet de mauvais traitements," d'après ce que j'ai
12 compris, ceci veut dire que vous n'avez pas été soumis à de mauvais
13 traitement pendant que vous étiez dans cette pièce, n'est-ce pas ?
14 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président.
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Vasic.
16 M. VASIC : [interprétation] J'ai l'impression qu'il s'agit là d'une
17 question directrice. Il conviendrait de demander ce que cela signifie. Il
18 ne faut pas suggérer la réponse au témoin.
19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous avez tout à fait raison, Maître
20 Vasic. Mais il me semble que le mal est déjà fait.
21 M. AGHA : [interprétation] Je présente mes excuses à la Défense et à la
22 Chambre.
23 Le témoin peut-il répondre à ma question ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas fait l'objet de mauvais
25 traitements pendant qu'on y était, mais quand on est revenu, puisque
26 j'avais ce fils de fer sur mes mains.
27 M. AGHA : [interprétation]
28 Q. Monsieur le Témoin, je vais vous demander de vous reporter à la
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1 dernière page de votre déclaration. Ceci a à voir avec le moment où vous
2 êtes à l'extérieur de la salle de la mort. Je vais vous demander de nous
3 donner lecture d'un passage. En anglais, c'est à peu près quatre pages à
4 partir de la fin.
5 Cela commence par : "Cet interrogatoire a duré environ dix minutes.
6 J'étais assis dans cette pièce et un homme est venu vers moi. Son surnom
7 était Topola."
8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Vasic.
9 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président, ceci ne me pose pas de
10 problème que le témoin donne lecture du passage que souhaite faire lire mon
11 confrère, mais il conviendrait aussi de faire lire la phrase précédente
12 pour qu'on puisse se faire une idée de cet interrogatoire. Mon confrère a
13 omis cette première phrase.
14 M. AGHA : [interprétation] Ceci ne me pose aucun problème que l'on donne
15 lecture également de cette première phrase.
16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie. Nous nous remettons
17 entièrement à vous puisque nous n'avons pas lu la déclaration.
18 M. AGHA : [interprétation] Très bien. Alors, presque à la fin de la
19 déclaration, est-ce que vous pouvez lire la partie où cela commence par :
20 "Il souhaitait me poser des menottes mais il n'arrivait pas à les trouver."
21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pouvez-vous trouver ce passage dans la
22 déclaration : "Il voulait me poser de menottes" ? Est-ce que vous pouvez
23 retrouver cela dans le texte ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne l'ai pas encore trouvé.
25 M. VASIC : [interprétation] Je peux aider.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai trouvé.
27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Maître Vasic, il l'a
28 trouvé.
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1 Est-ce que vous pouvez en donner lecture ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] "Il voulait me poser des menottes mais il
3 n'arrivait pas les trouver. C'est la raison pour laquelle il m'a attaché
4 les mains avec du fil de fer. Il ne m'a pas battu pendant l'interrogatoire.
5 L'interrogatoire a duré environ dix minutes. J'étais assis dans cette
6 pièce, et à ce moment-là, un homme s'est approché de moi. Son surnom était
7 Topola. Il était de Negolavci. (Je ne me rappelle aucun autre détail à son
8 sujet; je l'ai vu là pour la première fois.) Il m'a donné une balle à
9 pistolet et il m'a donné l'ordre de l'avaler. Compte tenu des
10 circonstances, j'ai été obligé de le faire. Il est parti, mais il est
11 revenu plus tard. Il m'a donné une deuxième balle et m'a demandé de
12 l'avaler. Il m'a provoqué. Il me disait que j'étais un Oustachi, et j'ai
13 été obligé d'avaler la deuxième balle. Plusieurs fois, il m'a donné des
14 coups sur la tête mais il ne m'a pas blessé. C'était de la torture
15 psychologique. Puis, nous sommes revenus dans notre pièce."
16 M. AGHA : [interprétation]
17 Q. Je vous remercie, Monsieur le Témoin, cela suffira.
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce que vous souhaitez que le
19 témoin vous dise si cela correspond à sa mémoire ?
20 M. AGHA : [interprétation]
21 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que c'est de cette manière-là que vous vous
22 rappelez ces événements aujourd'hui ?
23 R. Oui.
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Agha, nous avons atteint
25 pratiquement la fin de la bande. Est-ce qu'il vous reste encore beaucoup de
26 questions ?
27 M. AGHA : [interprétation] Je crois qu'il me reste à peu près dix minutes.
28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Dans ce cas-là, nous allons faire une
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1 suspension d'audience.
2 --- L'audience est suspendue à 10 heures 42.
3 --- L'audience est reprise à 11 heures 14.
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Monsieur Agha.
5 M. AGHA : [interprétation] Monsieur le Président, avant que je ne reprenne
6 pour terminer mes questions supplémentaires, la dernière pièce utilisée par
7 la Défense a été la pièce 133. Il s'agissait de deux pages de la liste
8 complète et il a été dit que je pourrais faire des recherches dans la base
9 informatique.
10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.
11 M. AGHA : [interprétation] Je l'ai fait et je comprends maintenant que les
12 conseils de la Défense ont reçu cela aux termes de l'article 68. Je
13 demanderais, pour la bonne administration du procès, que ce soit le
14 document dans son intégralité qui soit versé.
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, tout à fait. Vous allez le verser
16 pendant vos questions supplémentaires.
17 M. AGHA : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
18 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais nous ne l'avons pas encore
20 enregistré sur le support informatique. Nous ne l'avons pas dans le système
21 électronique.
22 M. AGHA : [interprétation] Oui, malheureusement, il ne l'est pas encore.
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il nous faudra attendre un petit peu
24 et quelqu'un pourra s'y prendre un petit peu plus tard.
25 M. AGHA : [interprétation] Ce sont les aléas de notre administration
26 électronique des preuves.
27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui. Espérons qu'à la date du 23
28 janvier, nous pourrons parler "des aspects positifs," "des bénéfices de
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1 l'administration électronique" et non plus de ses aléas.
2 M. AGHA : [interprétation] Je vous remercie.
3 Q. Monsieur le Témoin, avant la suspension, nous avons examiné votre
4 déclaration au sujet de laquelle les conseils de la Défense vous ont posé
5 plusieurs questions. Pendant le contre-interrogatoire, on vous a posé des
6 questions au sujet du policier qui a été sorti de la salle de la mort et il
7 semblerait que ceci prête à confusion -- enfin, les propos que vous avez
8 avancés dans votre déclaration au sujet de la manière dont ce policier est
9 mort.
10 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président.
11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Vasic.
12 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président, il me semble qu'à aucun
13 moment le témoin n'a dit qu'il a vu le policier mourir. Il a parlé de
14 traces et il a parlé de sons, de bruits. Il n'a pas vu l'homme mort.
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Comme d'habitude, vous avez très bien
16 vu, Maître Vasic.
17 M. AGHA : [interprétation] A ce stade, je voudrais préciser --
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Voyez-vous ce qui pose problème dans
19 la manière dont vous vous y êtes pris ?
20 M. AGHA : [interprétation] Oui, je vois.
21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous n'êtes pas le seul conseil à qui
22 cela arrive. Je pourrais en nommer d'autres, mais cela se passe un peu trop
23 souvent. On présume de la réponse du témoin, alors que ceci n'a pas encore
24 été dit par le témoin. Je vais vous demander d'essayer de maîtriser cela.
25 M. AGHA : [interprétation]
26 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous pouvez examiner la
27 page 3 de votre déclaration ? Je vais vous demander de donner lecture du
28 passage qui se trouve vers la fin de la page et qui commence par les mots :
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1 "Plus tard, je ne me souviens pas quand, il a été sorti de cette pièce."
2 R. "Plus tard, je ne me souviens pas quand, il a été de nouveau sorti par
3 les soldats de la JNA. Il a été sorti de cette pièce et nous l'avons
4 entendu crier, hurler de douleur. Après cela, il n'est plus revenu dans
5 cette pièce. Je ne l'ai pas vu tué, mais en route vers notre pièce,
6 lorsqu'on nous emmenait dans la caserne de la JNA, j'ai vu du sang par
7 terre et j'ai vu son corps qui gisait là, dans une pièce qui ressemblait
8 aux toilettes."
9 Q. Monsieur le Témoin, est-ce bien de cette manière-là que vous vous
10 souvenez de ces événements aujourd'hui ?
11 R. Oui.
12 Q. Je vais passer à un autre passage dans votre déclaration. Les conseils
13 de la Défense vous ont demandé pourquoi vous n'avez pas mentionné votre
14 déclaration de Sremska Mitrovica au bureau du Procureur, en 1995. Je vais
15 vous demander maintenant d'examiner les trois dernières lignes de votre
16 déclaration et d'en donner lecture à l'attention de la Chambre.
17 R. "Les soldats de la JNA nous ont réveillé vers 8 heures. Ils ont dressé
18 la liste de noms et ils ont donné à tout un chacun d'entre nous deux
19 paquets de cigarettes et un peu de nourriture" --
20 Q. Monsieur le Témoin, si vous pouviez tout simplement nous donner lecture
21 des trois dernières lignes, cela suffira.
22 R. "A Sremska Mitrovica, j'ai passé quatre mois et demi et j'ai été
23 échangé le 27 mars 1992. S'il le faut, je peux faire une déclaration au
24 sujet de mon séjour au camp. C'est tout ce que je suis en mesure de dire au
25 sujet des événements qu'on m'a demandé de décrire."
26 Q. Plus tard, le bureau du Procureur vous a-t-il demandé de faire une
27 autre déclaration au sujet de ce temps que vous avez passé au camp ?
28 R. Mis à part cette déclaration-ci, je n'en ai pas -- je ne me souviens
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1 pas si j'en ai fait d'autres. Peut-être que si, peut-être que non.
2 Q. Je voudrais maintenant qu'on parle de cette déclaration que vous avez
3 donnée au camp, à la prison de Sremska Mitrovica. Vous avez dit à la
4 Chambre que cette déclaration n'était pas véridique parce que si vous leur
5 aviez tout dit, ils vous auraient traité d'une manière encore pire. Ceci a
6 à voir avec la déclaration que vous avez donnée à la prison de Sremska
7 Mitrovica. En 1995, lorsque vous avez donné votre déclaration au bureau du
8 Procureur, de quelles sortes de mauvais traitements vous avez été menacés
9 par les enquêteurs du bureau du Procureur ?
10 R. Pouvez-vous répéter votre question.
11 Q. Lorsque vous avez donné votre déclaration, en 1995, au bureau du
12 Procureur, le bureau du Procureur vous a infligé quel type de mauvais
13 traitements ou il a proféré quel genre de menaces à votre égard ?
14 R. Je n'ai plus rien écrit, mis à part cette déclaration et il n'y a pas
15 eu de mauvais traitements.
16 Q. Cette déclaration que vous avez donnée au bureau du Procureur, est-ce
17 qu'elle est véridique ?
18 R. Non.
19 Q. De quelle manière elle n'est pas véridique ?
20 R. Il n'y a pas l'ombre d'une vérité là-dedans; tout ce que j'ai écrit, ce
21 sont des mensonges et des contrevérités.
22 Q. Monsieur le Témoin, je parle de la déclaration que vous avez donnée au
23 bureau du Procureur en 1995. Cette déclaration-là, est-ce qu'elle est
24 véridique ?
25 R. Ce que j'ai dit en 1995 est vrai.
26 M. AGHA : [interprétation] J'en ai terminé avec mes questions
27 supplémentaires. Je n'ai pas d'autres questions à poser à ce témoin.
28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Agha. Le
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1 Témoin suivant sera un témoin protégé. C'est exact ? Peut-être qu'on
2 pourrait s'occuper des rideaux maintenant, pendant que je suis en train de
3 parler.
4 Je vous remercie. C'est avec plaisir que vous apprendrez que c'est la
5 fin de votre interrogatoire. Le Tribunal vous remercie d'avoir eu la
6 gentillesse de venir nous aider, de venir à La Haye et vous aurez du
7 plaisir à apprendre que vous êtes libre maintenant de retourner chez vous,
8 où que ce soit. Je vous remercie et vous allez être raccompagné par
9 l'Huissier.
10 Monsieur Agha, un point.
11 M. AGHA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Excusez-moi.
12 [Le témoin se retire]
13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il s'agit de quelque chose de très
14 solennel, de très grave. On a attiré notre attention sur le fait que nous
15 n'allons plus vous revoir, Monsieur Agha ?
16 M. AGHA : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.
17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous souhaite tout le bien pour la
18 poursuite de votre carrière en Sierra Leone et nous espérons que cette
19 expérience vous sera satisfaisante sur le plan personnel et professionnel.
20 M. AGHA : [interprétation] Je tiens à remercier à la Chambre de m'avoir
21 adressé ces mots et je remercie au conseil de la Défense de la
22 collaboration que nous avons eue.
23 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour, Monsieur.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vais vous demander de donner
27 lecture de la déclaration solennelle qui figure sur ce carton qui vous est
28 remis.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
2 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur. Veuillez
4 vous asseoir.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Moore, vous avez la parole.
7 M. MOORE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
8 Je voudrais évoquer une question, Monsieur le Président -- en fait,
9 deux. Est-ce que je peux le faire à huis clos partiel ?
10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.
11 M. MOORE : [interprétation] C'est en rapport avec le présent témoin.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous voulez un huis clos complet parce
13 que la différence, ce sont les stores.
14 M. MOORE : [interprétation] Les stores, cela ne compte pas pour ce qui est
15 de ces points, mais ce qui est important, c'est que les sujets dont je vais
16 parler ne soient pas entendus en dehors de ce prétoire.
17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] C'est possible à huis clos partiel.
18 M. MOORE : [interprétation] Merci beaucoup.
19 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
20 [Audience à huis clos partiel]
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10 [Audience publique]
11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Des motifs viennent d'être évoqués en
12 audience à huis clos partiel, qui font que la Chambre est désormais
13 convaincue qu'il est préférable que ne soit pas entamée la déposition de ce
14 témoin qui vient de prononcer la déclaration solennelle. Il est fort peu
15 probable, pratiquement exclu, qu'il lui soit possible de terminer sa
16 déposition des les temps prévus. Etant donné les problèmes de santé qu'il
17 connaît, il ne serait pas juste d'arrêter au milieu de sa déposition. La
18 meilleure chose à faire, malheureusement, est de suspendre l'audience. Il
19 reste à espérer que le témoin sera suffisamment en bonne santé pour être
20 présent au début de l'année prochaine. En raison de ces motifs et de ces
21 circonstances, l'audience est suspendue. Elle reprendra l'année prochaine.
22 Nous souhaitons à chacun et chacune une bonne suspension, de bons travaux
23 et nous leur présentons nos meilleurs vœux.
24 L'audience est levée.
25 --- L'audience est levée à 11 heures 40 et reprendra le lundi 23 janvier
26 2005, à 14 heures 15.
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