Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Vendredi 21 septembre 2001.)

2 (Audience publique.)

3 (Arguments oraux pour la fixation de la peine.)

4 (L'audience est ouverte à 9 heures 34.)

5 M. le Président (interprétation): Je demande à Madame la Greffière de

6 citer le numéro de l'affaire.

7 Mme Atanasio (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président et Messieurs

8 les Juges. Il s'agit de l'affaire IT-96-21-T bis-R117, le Procureur contre

9 Zdravko Mucic, Hazim Delic et Esad Landzo.

10 M. le Président (interprétation): Je demande aux deux parties de se

11 présenter.

12 M. Stewart (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président et Messieurs

13 les Juges, je m'appelle James Srewart, je représente l'accusation et je

14 suis assisté de Gina Butler.

15 M. Kuzmanovic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Je

16 m'appelle Kuzmanovic, je suis avec Howard Morrison pour la défense de

17 Zdravko Mucic.

18 M. Karabdic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Je

19 représente Hazim Delic avec Me Thomas Moran.

20 Mme Sinatra (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, bonjour

21 Messieurs les Juges, je m'appelle Cynthia Sinatra et avec Peter Murphy

22 nous représentons les intérêts de Esad Landzo.

23 M. le Président (interprétation): Merci.

24 L'audience d'aujourd'hui a pour but d'examiner les ajustements éventuels

25 qu'il conviendrait d'apporter au jugement prononcé initialement contre les

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1 trois accusés présents ici et ce, au vu de la Chambre d'appel rendu le 20

2 février de cette année.

3 Trois questions sont à examiner par cette Chambre de première instance

4 suite aux avis de la Chambre d'appel.

5 Premièrement, il convient d'examiner les ajustements éventuels à apporter

6 à la sentence prononcée contre Hazim Delic suite à la modification

7 concernant les chefs 1 et 2, au ramassage de ces condamnations en rapport

8 avec les chefs 1 et 2.

9 Deuxièmement, il convient d'imposer une nouvelle sentence à l'encontre de

10 Zdravko Mucic suite à la conclusion de la Chambre d'appel selon laquelle

11 la sentence initiale qui a été prononcée contre lui était manifestement

12 inappropriée. A cet égard, il portera d'envisager les erreurs de la

13 première Chambre de première instance s'agissant de l'effet négatif qu'a

14 eu le fait qu'il n'ait pas déposé lors de son procès.

15 Troisième point à examiner par nous, il conviendra que nous envisagions

16 les ajustements éventuels apportés aux sentences initialement contre les

17 trois accusés suite à la suppression du cumul de déclarations de

18 culpabilité en application de l'Article 3.

19 La Chambre de première instance a déjà défini certaines de ces questions

20 et les a déjà étudiées sur la base d'écritures qui ont été déposées et des

21 réponses déposées par les deux parties. C'est la raison pour laquelle il

22 n'y a aucune raison de revenir sur les arguments qui ont déjà été

23 présentés par écrit.

24 La Chambre de première instance consacra donc 45 minutes à l'audition des

25 arguments oraux à chacune des deux parties. Nous commencerons par

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1 l'accusation et, Monsieur Stewart, vous serez donc celui qui prendra la

2 parole en premier, mais j'ajoute avant de vous céder la parole que nous

3 aurons notre pause comme d'habitude aux environs de 11 heures ce matin.

4 M. Stewart (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Je vais vous

5 donner le plan de mon exposé, ce qui vous facilitera l'écoute et je dirai

6 ensuite quels sont les points que j'aborderai.

7 D'abord j'aimerais traiter de ce que j'appellerais la question commune: à

8 savoir l'effet de la suppression du cumul des déclarations de culpabilité.

9 Ceci concerne les trois accusés et c'est également la seule question qui

10 concerne Landzo. Je traiterai donc d'abord de ce point, si vous le voulez

11 bien.

12 En deuxième lieu, je traiterai de l'effet sur la déclaration de

13 culpabilité de Delic, du ramassage des déclarations de culpabilité

14 s'agissant de l'un des meurtres pour lesquels il a été jugé pénalement

15 responsable dans le jugement initial.

16 Troisièmement, je traiterai des éléments relatifs à la peine prononcée

17 contre Mucic.

18 Et je conclurai en présentant brièvement le point de vue du Procureur sur

19 la sentence qu'il conviendrait de prononcer contre chacun des trois

20 accusés.

21 Je traite donc d'abord de la suppression du cumul des déclarations de

22 culpabilité. La chambre d'appel a annulé les déclarations de culpabilité

23 contre Mucic, Delic et Landzo chaque fois qu'une déclaration de

24 culpabilité avait été prononcée sur la base des même faits.

25 Par conséquent, les déclarations de culpabilité pour infraction grave aux

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1 Conventions de Genève ont été conservées mais les déclarations de

2 culpabilité pour violation des lois ou coutumes de la guerre reposant sur

3 les mêmes faits ont été annulées.

4 Alors la Chambre d'appel aurait pu traiter de ceci elle-même mais elle n'a

5 pas pu entendre les parties sur ce point, elle n'a pas pu se reconstituer

6 pour entendre les parties et en tout état de cause elle a préféré voir une

7 Chambre de première instance traiter de ce point car cela concerne la

8 possibilité d'interjeter appel ultérieurement.

9 La Chambre d'appel cependant a traité d'un point, à savoir le point

10 relatif à la sentence lié au fait de savoir s'il y avait eu erreur dans

11 l'exercice du pouvoir discrétionnaire ou d'autres erreurs de droit.

12 Donc la présente Chambre de première instance est en mesure d'examiner les

13 ajustements à apporter éventuellement à ce que la Chambre d'appel a estimé

14 être en toute autre circonstance mis à part une peine appropriée. La

15 question qui se pose donc c'est l'ajustement a apporté aux sentences

16 prononcées compte tenu de la suppression du cumul des déclarations de

17 culpabilité et j'affirme que la question se pose ici aujourd'hui.

18 Si la Chambre de première instance estime qu'il faut qu'il ait réduction

19 de la sentence, la Chambre d'appel admet qu'un tel ajustement ne doit pas

20 être nécessairement un ajustement très important et je vous renvoie à

21 l'arrêt de la Chambre d'appel, paragraphe 854, page 305, notes en bas de

22 page 1458.

23 La Chambre d'appel a également admis qu'aucune réduction de la sentence

24 n'était éventuellement nécessaire et je vous renvoie à l'arrêt, paragraphe

25 769, page 274.

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1 La position du Procureur consiste évidemment à estimer qu'il n'est pas

2 nécessaire de porter une réduction aux sentences déjà prononcées mais bien

3 entendu c'est aux membres de cette Chambre de première instance qu'il

4 appartient d'en décider.

5 Pourquoi le Procureur estime-t-il qu'aucune réduction de la sentence ne

6 devrait être prononcée? Eh bien, ses raisons sont les suivantes:

7 La première Chambre de première instance, à notre avis, avait très

8 clairement pour objectif d'éviter d'infliger des sanctions multiples dans

9 la présente affaire en imposant des sentences concurrentes.

10 Dans les faits, la première Chambre de première instance a imposé une

11 sentence globale destinée à rendre compte de la totalité de la conduite

12 criminelle des accusés et de la culpabilité globale de ceux-ci.

13 La première Chambre de première instance, à notre avis, a adopté une

14 démarche tout à fait évidente si l'on s'en tient à ce qui est dit au

15 paragraphe 1286, page 450 de son jugement.

16 En effet, elle déclare avoir évité le problème du cumul des charges en se

17 fondant sur le fait que le cumul des déclarations de culpabilité était la

18 seule chose à envisager par rapport au prononcé de la peine.

19 C'est dans ce contexte que la première Chambre de première instance a

20 imposé des sentences non consécutives mais concurrentes.

21 En adoptant cette démarche, la première Chambre de première instance a

22 suivi la pratique des Chambres d'appel de ce Tribunal et de celui du

23 Rwanda s'agissant d'éviter une iniquité en rapport éventuellement avec un

24 cumul de déclarations de culpabilité au moment de la déclaration du

25 prononcé de la sentence.

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1 Ce que la Chambre de première instance a dit qu'elle faisait c'était, je

2 cite: "Il ne fait aucun doute qu'il faut considérer si les remarques de la

3 première Chambre de première instance indiquent qu'il n'y aurait pas dû y

4 avoir réduction de la sentence imposée aux accusés."

5 Ce passage que je viens de mentionner se trouve dans l'arrêt de la Chambre

6 d'appel paragraphe 769 page 274. Et en bref, la position du Procureur

7 consiste à s'appuyer sur ces propos comme la base de son avis.

8 M. le Président (interprétation): Si je me souviens bien, la position de

9 la Chambre de première instance qui a traité du premier procès devant ce

10 Tribunal, à savoir l'affaire Tadic, a estimé qu'il pouvait être rendu des

11 jugements concurrents en application de l'article 3.

12 M. Stewart (interprétation): Oui.

13 M. le Président (interprétation): Donc, mon souvenir est bon.

14 M. Stewart (interprétation): Je crois que c'est le cas.

15 M. le Président (interprétation): C'est la Chambre d'appel qui a traité la

16 première de ce problème du cumul des déclarations de culpabilité.

17 M. Stewart (interprétation): Oui.

18 M. le Président (interprétation): Et qui a dit qu'il fallait traiter de

19 ceci à un stade ultérieur.

20 M. Stewart (interprétation): C'est exact.

21 M. le Président (interprétation): A l'étape du prononcé de la sentence.

22 M. Stewart (interprétation): C'est exact. Donc la Chambre de première

23 instance, dans l'affaire qui nous intéresse, a suivi une démarche

24 comparable et je crois qu'à présent les choses sont tout à fait claires si

25 l'on tient compte de ce qu'a également dit la Chambre d'appel.

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1 Je rappelle simplement les éléments initiaux liés à cette question, à

2 savoir quelles sont les questions qui ont été examinées au fil du temps et

3 qui ont créé la pratique du Tribunal.

4 M. le Président (interprétation): Oui.

5 M. Stewart (interprétation): Donc, à mon avis, le fait de réduire une

6 sentence indépendamment de la suppression du cumul des déclarations de

7 culpabilité est à mon avis une démarche tout à fait équitable parce que,

8 alors que la décision de la Chambre d'appel a pour effet de supprimer le

9 côté stigmatisant du cumul des déclarations de culpabilité et donc de

10 supprimer toute incidence négative sur la libération ultérieure de

11 l'accusé, il y a tout de même déclarations multiples de culpabilité et la

12 conduite criminelle cependant demeure la même.

13 Donc, dans un certain sens, l'aspect stigmatisant est supprimé, le

14 préjudice potentiel est supprimé mais la Chambre doit encore traiter d'une

15 conduite sous-jacente et celle-ci doit être sanctionnée et elle l'a été

16 dans le premier procès.

17 La Chambre d'appel a maintenu les déclarations de culpabilité pour des

18 délits très graves. La conduite des personnes condamnées a été une

19 conduite tout à fait condamnable; elle a impliqué le fait d'infliger la

20 mort et des souffrances très importantes, des comportements tout à fait

21 violents et ceci contre des victimes sans défense.

22 La Chambre d'appel a estimé que ces sentences auraient été appropriées

23 dans d'autre cas sauf dans le cas de Mucic où elle estime que la peine

24 doit être augmentée. Donc j'affirme qu'aucune réduction des sentences ne

25 se justifie simplement sur la base de l'annulation du cumul des

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1 déclarations de culpabilité.

2 M. le Président (interprétation): Je suppose que la question que nous

3 avons à envisager consiste à se demander si les condamnations qui ont été

4 annulées, à savoir celles qui ont un rapport avec des délits

5 internationaux, ajoutent quelque chose au comportement criminel de

6 l'accusé parce que le comportement criminel est celui que nous devons

7 sanctionner pour l'essentiel dès lors qu'il est qualifié.

8 M. Stewart (interprétation): C'est exact. C'est le comportement criminel

9 sur lequel je m'appuie pour dire que la sentence méritée doit être

10 importante et cette conduite criminelle a été qualifiée sur le plan

11 juridique suite à la décision de la Chambre d'appel au sujet des

12 infractions aux Conventions de Genève.

13 C'est donc la position du Procureur.

14 Maintenant la Chambre sait bien que la seule question qui concerne Landzo

15 est celle que je viens d'évoquer et j'en ai parlé également pour les deux

16 autres accusés.

17 A présent, je vais passer au point qui concerne uniquement les deux autres

18 accusés.

19 M. le Président (interprétation): Parce que nous devons avancer. Donc

20 qu'en est-il brièvement de Landzo?

21 M. Stewart (interprétation): Oui. Dans le cas de Landzo, pour résumer

22 brièvement, il a tué trois détenus au cours de passages à tabac tout à

23 fait violents.

24 M. le Président (interprétation): Il était un garde, n'est-ce pas?

25 M. Stewart (interprétation): Oui, c'était un garde. Il a torturé trois

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1 autres détenus, ce qui constitue une conduite cruelle. Il a provoqué des

2 souffrances graves à deux autres détenus. L'un d'entre eux est mort mais

3 il n'a pas été prouvé qu'il était directement responsable de cette mort et

4 il a contribué à créer un climat de terreur en infligeant des souffrances

5 très importantes à d'autres détenus.

6 Bien sûr, il a proposé des facteurs constituant des circonstances

7 atténuantes y compris son jeune âge et les tares de sa personnalité,

8 cependant la première Chambre de première instance a pris tous ces

9 éléments en compte et la Chambre d'appel a estimé que la sentence

10 prononcée contre lui était dans les délais admissibles. C'est la raison

11 pour laquelle j'affirme que, sur la base des arguments que je viens de

12 vous présenter, la sentence de 15 ans devrait être maintenant à l'encontre

13 de Landzo, et je reviendrai sur ce point dans un moment s'agissant de

14 savoir s'il faut prononcer une seule sentence ou des sentences

15 concurrentes, mais j'en ai déjà parlé il y a quelques minutes.

16 S'agissant de la durée de 15 ans, c'est la sentence maximale qui a été

17 prononcée contre lui et je dis qu'elle devrait être maintenue.

18 M. le Président (interprétation): Il a été condamné à 15 ans en raison de

19 meurtres et de tortures, n'est-ce pas?

20 M. Stewart (interprétation): Oui, j'ai parlé de cela en détail dans mes

21 écritures.

22 M. le Président (interprétation): Oui.

23 M. Stewart (interprétation): Maintenant, Monsieur le Président, je vais

24 traiter de la situation de M. Delic.

25 Il a été condamné à des sentences concurrentes de 20 ans pour deux

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1 meurtres, deux homicides volontaires, mais la Chambre d'appel a annulé ces

2 déclarations de culpabilité pour l'un des meurtres. La Chambre d'appel

3 cependant n'a pas annulé la conclusion de la première Chambre de première

4 instance selon laquelle Delic avait participé au passage à tabac très

5 violent de la victime qui finalement est morte du résultat de ces coups.

6 Et j'affirme que ceci est un point important.

7 Donc ce qui s'est passé c'est que la personne décédée a subi deux passages

8 à tabac terriblement violents, dont le deuxième a provoqué la mort. Delic

9 a participé au premier passage à tabac mais aucune preuve n'existe qu'il

10 ait participé au deuxième, qui a provoqué finalement le décès.

11 L'homicide volontaire est intervenu dans la condamnation de Delic

12 s'agissant de son caractère particulièrement violent, du caractère

13 particulièrement violent de ce passage à tabac. Delic a d'ailleurs frappé

14 un autre homme à mort, donc Delic est condamné pour des infractions graves

15 impliquant une brutalité abominable, et ces éléments ont été repris par la

16 Chambre d'appel.

17 Si nous examinons la conduite sous-jacente à ces crimes, il a tué un

18 détenu, il a torturé et violé deux détenues, il a eu des comportements

19 inhumains, y compris le recours à des appareils électriques contre des

20 détenus, il a provoqué des souffrances importantes à un autre détenu qui

21 finalement est mort, il a participé à l'instauration de conditions de vie

22 inhumaines dans le camp, et selon les mots utilisés par la première

23 Chambre de première instance qui, je crois, ont été repris par la Chambre

24 d'appel –je vous renvoie d'ailleurs aux paragraphes 5 et 18 de l'arrêt de

25 la Chambre d'appel, page 175- Delic a été un participant direct et un

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1 acteur primordial dans les actes cruels qui ont eu lieu, qui ont été

2 commis.

3 A mon avis, la totalité de la conduite criminelle doit être prise en

4 compte, et il ne fait aucun doute que la vie humaine a une valeur inégalée

5 et que la mettre en rapport avec un calcul de nombre d'années

6 d'emprisonnement qui doivent être effectuées par une personne qui a pris

7 cette vie humaine, est assez difficile.

8 Le prononcé de la sentence est régi par le Statut et le Règlement de

9 procédure et de preuve de ce Tribunal, et les principes fondamentaux à

10 prendre en compte sont les suivants: gravité du délit, c'est la première

11 considération lorsqu'on impose une sentence.

12 Le critère le plus important c'est de bien rendre compte de la gravité du

13 crime. La totalité de la conduite criminelle de Delic a été réduite, c'est

14 vrai au prononcé de la sentence et à ses impératifs, mais la gravité de

15 ces crimes et la totalité de la conduite criminelle méritent une sentence

16 très importante.

17 Je me référai simplement à deux affaires en passant et j'admets que le

18 contexte est un peu différent, mais il est intéressant de remarquer la

19 démarche suivie par la Chambre d'appel en rapport au problème de

20 l'ajustement de la sentence.

21 Dans l'affaire Jelisic, la Chambre d'appel n'a pas modifié la sentence de

22 40 ans prononcée contre les accusés pour y compris 12 meurtres, même si

23 elle a pris en compte le meurtre supplémentaire en déterminant la

24 sentence, meurtre supplémentaire qui n'avait pas fait l'objet de la

25 première condamnation.

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1 Dans l'affaire Akayesu, la Chambre d'appel n'a pas modifié la peine à vie

2 prononcée contre des hommes coupables de génocide lorsqu'un acte de

3 torture était inclus par la Chambre de première instance dans sa

4 détermination de la peine.

5 Alors je ne m'appuierai pas exagérément sur ces deux affaires, je les

6 propose simplement à l'appui de mes arguments pour montrer que la Chambre

7 d'appel a eu une démarche homogène par rapport à ces ajustements de peine.

8 Et le fait que Delic ait participé à un meurtre est en soi un crime très

9 grave. La peine doit être donc à la hauteur de la gravité de ce crime. Je

10 pense qu'il faut prendre en compte les éléments dont j'ai déjà parlé et

11 qu'un ajustement vers le bas des 20 ans prononcés contre Delic ne pourrait

12 être qu'un ajustement très limité. J'ai dit dans mes écritures que la

13 peine pourrait être inférieure à 20 ans, mais qu'elle ne devrait pas

14 atteindre 15 ans, à savoir la durée proposée par la défense.

15 M. le Président (interprétation): Avant de passer à un autre point, il

16 était, si je me souviens, commandant-adjoint du camp?

17 M. Stewart (interprétation): Oui, il avait donc une position hiérarchique.

18 M. le Président (interprétation): Et la Chambre d'appel a déclaré que le

19 fait qu'un accusé occupait une position d'autorité dans un lieu de

20 détention devait être pris en compte au moment du prononcé de la sentence.

21 M. Stewart (interprétation): C'est exact et je prends cela en compte bien

22 entendu moi aussi. J'ai déjà parlé de Delic, Monsieur le Président, et si

23 vous me le permettez, je vais maintenant parler de la sentence prononcée

24 contre Mucic.

25 Les questions qui se posent sont celles dont j'ai traité, et à ces

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1 questions s'ajoute le problème du cumul des déclarations de culpabilité.

2 Comme la Chambre le sait, le Procureur a interjeté appel contre la

3 sentence de 7 ans prononcée contre Mucic et qu'il est en train de purger.

4 La Chambre d'appel a indiqué clairement qu'elle aurait prononcé une

5 sentence plus longue, qui aurait été de 10 ans environ, si elle avait pris

6 en compte des éléments tel que l'élément de double de non bis in idem lié

7 au prononcé déjà effectué d'une sentence pour un crime déterminé.

8 La question qui se pose c'est de savoir si l'annulation du cumul des

9 déclarations de culpabilité dans la présente affaire permet de réduire les

10 10 ans que la Chambre d'appel aurait retenus, aurait prononcés contre

11 l'accusé. Ma réponse à cette question est non.

12 Et l'autre question qui se pose est de savoir si la Chambre de première

13 instance a eu tort lorsqu'au moment où elle a prononcé la première peine,

14 elle a estimé que le fait que M. Mucic n'avait pas déposé, ce qui a eu un

15 effet négatif sur la sentence et de ce fait la peine de 10 ans n'en est

16 pas exclue. Ma réponse à cette question est non.

17 Parce que prononcer une peine ne dépend pas de la durée particulière de la

18 sentence mais d'un ensemble de processus global qui consiste à évaluer

19 l'ensemble des éléments pour prononcer la peine la plus appropriée en

20 tenant compte de tous les facteurs pertinents. Et je m'appuie pour ce dire

21 sur la proposition faite par la Chambre d'appel dans son arrêt, paragraphe

22 841, pages 300 à 301.

23 S'il peut donc y avoir eu une erreur, comme la Chambre d'appel l'a

24 déterminé, cette erreur n'est pas telle qu'une réduction de la sentence

25 soit justifiée par les nouveaux éléments récents, étant donné que la

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1 Chambre d'appel a estimé qu'une sentence plus longue de 10 ans était

2 appropriée.

3 J'affirme qu'il n'y aucune raison de s'écarter de l'arrêt rendu par la

4 Chambre d'appel et que Mucic devrait donc être condamné à 10 ans.

5 M. le Président (interprétation): Il était quoi?

6 M. Stewart (interprétation): Il était commandant du camp.

7 M. le Président (interprétation): Oui commandant du camp. Il a été

8 condamné en tant que supérieur hiérarchique, c'est le point dont nous

9 devons traiter dans tous les cas sauf un, ces délits ont été considérés

10 comme ayant été commis par un supérieur hiérarchique mais il y a eu

11 homicide volontaire contre un certain nombre de détenus, tortures

12 infligées à d'autres détenus, volonté d'infliger des souffrances

13 importantes et traitements inhumains.

14 M. Stewart (interprétation): Oui, il a été jugé responsable en tant que

15 supérieur hiérarchique de l'homicide volontaire de 9 personnes, de

16 tortures de 6 détenus, de la volonté de provoquer des souffrances

17 importantes à 3 détenus, de traitements inhumains contre 6 autres, et bien

18 entendu il a provoqué des souffrances importantes en raison des conditions

19 inhumaines qui prévalaient dans le camp.

20 Il est responsable en tant que commandant des conditions imposées dans ce

21 camp, donc il ne fait aucun doute selon la Chambre d'appel qu'il méritait

22 une sentence plus grave que celle qui a été prononcée initialement par la

23 Chambre de première instance. Et comme vous le savez, aucune des questions

24 qui a été soulevée en rapport au problème dont nous avons déjà parlé ne

25 justifie de réduire la sentence de 10 ans prévue par la Chambre d'appel.

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1 Un autre point que je souhaiterais évoquer, Monsieur le Président, c'est

2 le fait de savoir si le prononcé d'une seule sentence est susceptible de

3 rendre compte de la totalité de la conduite criminelle de Mucic et ce, en

4 application de l'Article 87 C).

5 Le Procureur appuiera certainement ma démarche. Je déclare qu'il vous

6 appartient d'adopter une démarche semblable s'agissant des sentences à

7 prononcer contre Delic et Landzo.

8 M. Robinson (interprétation): Monsieur Stewart, vous nous dites que les

9 faits négatifs de la prise en compte par la Chambre de première instance

10 du fait que Mucic n'avait pas témoigné ne sont pas de nature à inciter sur

11 la sentence et ne devraient pas être pris en compte. Vous insistez pour

12 votre part pour une démarche globale à adopter par rapport au prononcé de

13 la sentence.

14 M. Stewart (interprétation): Oui, mais si j'adopte en quelque sorte le

15 point de vue de la Chambre d'appel par la Chambre d'appel à examiner un

16 certain nombre de facteurs et estimer que ces facteurs auraient dû

17 entraîner le prononcé d'une peine supérieure à 7 ans de prison, nous

18 allons dans le même sens en ajoutant le facteur négatif que je viens

19 d'évoquer, à savoir le fait qu'on ait retenu contre lui qu'il n'avait pas

20 témoigné au procès, ce qui n'aurait pas dû être le cas.

21 Même si on ajoute ce facteur négatif, cela ne justifie absolument pas une

22 révision à la baisse et le prononcé d'une peine inférieure à 10 ans. En

23 d'autres termes, cela n'a aucun effet sur ce que cette Chambre de première

24 instance doit faire suite à l'arrêt de la Chambre d'appel.

25 Cela est un petit peu différent de dire que cela était pris en compte dans

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1 le premier jugement de la Chambre d'appel, difficile à dire peut-être ou

2 peut-être pas.

3 Le fait que cela ait pu avoir un effet suffit à évoquer cette question

4 devant vous, mais le fait qu'en prenant compte cet élément lui accordant

5 une valeur négative la Chambre de première instance n'ait condamné Mucic

6 qu'à 7 ans de prison, malgré tout, c'est une peine qui est insuffisante

7 pour la Chambre d'appel, et nous avançons que cela ne suffit pas à

8 prononcer une peine inférieure à 10 ans.

9 M. Robinson (interprétation): Ce qui me gêne un petit peu dans cette peine

10 globale pour laquelle vous vous prononcez, c'est qu'il peut être difficile

11 à ce moment-là d'identifier un facteur si l'on adopte une peine globale,

12 un facteur qui ait un effet sur cette peine globale parce qu'on doit

13 pouvoir trouver des facteurs qui entraînent la diminution d'une peine

14 globale.

15 Moi je suis préoccupé par la manière dont vous présentez vos arguments. On

16 pourrait arriver à la conclusion qu'il serait difficile, voire impossible

17 de trouver des facteurs ou un facteur qui entraînerait une réduction de la

18 peine globale. Parce que si vous avez une peine globale par nature, c'est

19 déjà une peine qui prend en compte toute une série de facteurs.

20 M. Stewart (interprétation): Moi je vous répondrai qu'il est difficile de

21 répondre à cette question dans l'absolu, dans la fraction, parce que moi

22 en fait ici j'adopte une attitude très concrète.

23 Ce que je dis ici c'est que ce facteur n'entraîne pas une réduction de la

24 peine à prononcer. Cependant la Chambre d'appel, la Chambre de première

25 instance si elle avait présenté les facteurs qui ont sous-tendu sa

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1 décision, à ce moment-là la Chambre d'appel aurait pu identifier les

2 facteurs auxquels on a accordé trop d'importance.

3 Si par exemple la Chambre d'appel avait accordé trop d'importance aux

4 circonstances atténuantes, la Chambre d'appel ou les parties pourraient

5 les identifier. On peut imaginer d'avoir donné trop d'importance aux

6 facteurs tels que le châtiment ou la dissuasion, et donc il devrait être

7 possible dans les raisonnements donnés par la Chambre de première instance

8 de trouver donc les erreurs éventuelles pour les corriger.

9 Il y aura toujours une certaine liberté à accorder à la Chambre d'appel

10 dans l'évaluation de ces facteurs, ce n'est pas impossible.

11 M. Robisnson (interprétation): Merci.

12 M. Stewart (interprétation): Donc j'en termine de ce point. La peine

13 unique qui reflète la totalité du comportement criminel. Nous estimons que

14 c'était ce qu'avait essayé d'obtenir la Chambre de première instance, cela

15 marche parce que cela prend en compte la gravité des crimes et les

16 comportements criminels à l'origine de la peine.

17 Nous disons, nous, que pour Mucic il faudrait une peine qui ne soit pas

18 inférieure à 10 ans. Il faut maintenir la peine de 15 ans contre Landzo,

19 et Delic devrait se voir imposer une peine proche de 20 ans de prison.

20 M. le Président (interprétation): Merci Monsieur Stewart.

21 (Les Juges se concertent sur le siège.)

22 M. le Président (interprétation): Je me tourne maintenant vers la défense.

23 Monsieur Kuzmanovic, vous allez commencer?

24 M. Kuzmanovic (interprétation): Oui, Me Morrison et moi-même allons nous

25 partager le temps qui nous est imparti mais nous n'aurons pas besoin de 45

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1 minutes.

2 M. le Président (interprétation): Fort bien, vous allez nous présenter vos

3 arguments relatifs à M. Mucic, n'est-ce pas?

4 M. Kuzmanovic (interprétation): Oui. En premier lieu, je souhaite signaler

5 que nous n'allons pas répéter ce qui figure dans notre mémoire. Vous

6 connaissez bien entendu les écritures que nous avons déposées et nous

7 n'allons pas nous répéter. Cependant je dirai que tout au moins en ce qui

8 concerne le fait qu'on ait retenu contre M. Mucic, le fait qu'il n'avait

9 pas témoigné au procès dans son mémoire, l'accusation ne nous fournit

10 aucune source digne de ce nom, aucun argument vraiment solide pour nous

11 dire que ce fait n'a pas été préjudiciable à notre client.

12 Je voudrais vous demander de vous référer à la décision de la Chambre

13 d'appel, paragraphe 787 où on peut lire, je cite…

14 M. le Président (interprétation): On vous demande de ralentir un peu votre

15 débit, il y a des interprètes qui essaient de vous suivre.

16 M. Kuzmanovic (interprétation): Oui. "Il est essentiel que le Juge qui

17 prononce la peine dispose de la totalité ou du plus possible

18 d'informations au sujet de l'accusé."

19 Et moi, j'avance ici que la Chambre d'appel a mis notre Chambre de

20 première instance en situation assez difficile parce que cette Chambre de

21 première instance nouvellement constituée n'est pas vraiment en possession

22 de toutes ces information à moins que la Chambre de première instance

23 n'ait la possibilité de visionner les enregistrements du procès, de passer

24 en revue tous comptes rendus d'audience, les dizaines de milliers de pages

25 de comptes rendus d'audience.

Page 25

1 Je pense que la Chambre de première instance n'est pas en possession de

2 toutes les informations nécessaires pour prononcer la peine.

3 M. le Président (interprétation): Mais vous savez quelle est la situation,

4 la Chambre d'appel nous a renvoyé cette affaire avec un certain nombre

5 d'instructions que nous suivons.

6 M. Kuzmanovic (interprétation): Certes, mais moi, j'avance que pour avoir

7 une idée claire et précise de la nature de notre client je ne pense pas

8 que cela soit possible pour la Chambre de première instance qui a été

9 placée dans cette situation par la Chambre d'appel.

10 M. le Président (interprétation): Mais nous avons reçu un certain nombre

11 d'instructions à ce sujet, nous allons suivre ces instructions.

12 M. Kuzmanovic (interprétation): Oui, c'est pour cela que je vous

13 demanderai de vous pencher avec attention sur le jugement de la première

14 Chambre d'appel au paragraphe 1240.

15 La Chambre dit et je cite: "Il importe de faire observer que Mucic n'a pas

16 été reconnu coupable d'avoir pris une part active aux crimes allégués dans

17 l'Acte d'accusation. Tous les verdicts de culpabilité se rapportent à des

18 crimes pour lesquels il est responsable du fait de ses subordonnés." Fin

19 de citation.

20 Ceci nous donne une perspective plus juste de M. Mucic.

21 Quelle est la position qu'il avait? Quel était le rôle qu'il jouait dans

22 l'arrestation des gens qu'on amenait à Celebici? De quel type d'autorité

23 militaire disposait-il? En avait-il une quelconque? Est-ce qu'il existe

24 des éléments de preuve qui indiquent qu'il occupait un poste de

25 commandement avant la fin juillet 1992?

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1 Et tout ceci, je crois, a été évoqué aussi bien à l'instance qu'en appel.

2 Autre question dont je souhaiterais que vous vous occupiez, c'est le

3 critère d'examen: nous le présentons aux pages 19 et 20 de notre mémoire.

4 Nous pensons que tout comme dans Aleksovski, il convient d'utiliser le

5 caractère du critère raisonnable et qu'il doit en être de même ici. Mais

6 avant de passer à la parole à Me Morrison, je souhaiterais dire la chose

7 suivante: dans quelles autres affaires avons-nous des témoignages au cours

8 desquels des détenus, des victimes d'un camp disent que si 20% des gens

9 avaient été comme M. Mucic, il n'y aurait pas eu de guerre en Bosnie.

10 Si 20% des gens en Bosnie avaient été des Todorovic ou des Jelisic, je

11 n'ose même pas penser à ce qu'aurait été la vie et la situation en Bosnie.

12 Le fait que la Chambre de première instance ait entendu donc le témoignage

13 d'une victime, pour M. Mucic, à un stade ultérieur de la procédure montre

14 les difficultés qu'on a rencontrées pour juger M. Mucic parce que si Mucic

15 avait été un directeur de camp, celui qu'on voudrait nous présenter, eh

16 bien, nous n'aurions pas eu une peine de 7 ans, mais de 20 ans ou de 25

17 ans et pense que l'on peut voir les difficultés rencontrées par la Chambre

18 de première instance lorsqu'elle a imposé une peine de 7 ans en estimant

19 que les manquements de M. Mucic, ce n'était pas ceux de quelqu'un qui

20 faisait preuve d'une intention diabolique.

21 Et maintenant je vais passer la parole à Maître Morrison. Merci.

22 M. Morrison (interprétation): Je souhaite évoquer trois questions.

23 Première chose: bien entendu, il a été établi que Mucic était le

24 commandant du camp. C'est du fait de cette position qu'il a été condamné

25 et cela n'a pas déterminé sa peine.

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1 Je reviens à ce que vient de dire Me Kuzmanovic. Si l'on examine la

2 personnalité de quelqu'un et de cet accusé en particulier, il faut voir ce

3 qu'a analysé la Chambre de première instance et les constatations qu'elle

4 a faites. Il est extraordinaire de voir qu'un détenu soit venu, et

5 d'ailleurs ce n'était pas le seul détenu dans son cas, on peut le voir en

6 examinant le compte rendu d'audience du procès, au paragraphe 853 de

7 l'arrêt de la Chambre d'appel, on peut lire la chose suivante: "Prenne en

8 compte la gravité des crimes de M. Mucic, de circonstances aggravantes. On

9 prend en compte tout ce qui a été évoqué par M. Stewart, ainsi que les

10 circonstances atténuantes évoquées par la Chambre de première instance."

11 On évoque également les questions de double incrimination avec double

12 condamnation.

13 Cette question de "double jeopardy", double incrimination, c'est quelque

14 chose qui est très important pour quelqu'un qui est condamné. La Chambre

15 d'appel dit qu'elle, elle aurait imposé à M. Mucic une peine de 10 ans

16 d'emprisonnement environ. Avec tout le respect que je dois à la Chambre,

17 ceci est bien peu précis parce que qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut

18 dire, disons, une peine de 9 à 11 ans. Difficile d'imaginer une autre

19 interprétation de ce terme. 10 ans d'emprisonnement environ.

20 M. le Président (interprétation): Mais ceci a été laissé à la liberté

21 d'appréciation de la Chambre de première instance nouvellement constituée.

22 Le problème avec vos arguments et ceux de Me Kuzmanovic, c'est que tous

23 ces facteurs ont déjà été examinés, premièrement par la Chambre de

24 première instance, en imposant à un commandant du camp ce qui semble être

25 une peine assez faible de 7 ans et lorsque la Chambre d'appel a décidé ou

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1 que cette peine était trop faible.

2 Pourquoi ne pas suivre l'indication de la Chambre d'appel?

3 M. Morrison (interprétation): Admettons que cela soit le cas sans analyser

4 ce que signifie ce terme "environ 10 ans" mais il faut prendre le point de

5 vue de l'accusé, celui qui va recevoir cette peine parce que cela fait

6 partie de l'argument du "double jeopardy", double incrimination. Le

7 principal argument qui se pose à ce moment-là, c'est l'effet que cela a

8 sur l'accusé, sur le condamné.

9 Et si l'on examine les choses de ce point de vue et si l'on voit les

10 effets pratiques d'une peine d'environ 10 ans, moi, je pense qu'à ce

11 moment-là la réponse, le sens commun nous dit que c'est une peine de 9 à

12 11 ans. Or 2 ans, entre 9 ans et 11 ans, c'est une durée considérable et

13 lorsqu'il y a ambiguïté en droit, généralement on décide que cela doit

14 profiter à la personne qui est concernée. Donc dans ces conditions,

15 environ 10 ans d'emprisonnement cela devrait se traduire par une peine de

16 9 ans.

17 A ce moment-là, on examine de nouveau le cumul des déclarations de

18 culpabilité, je pense qu'étant donné que la Chambre de première instance

19 n'a pas expliqué, explicité clairement sa manière de déterminer la peine,

20 on ne peut pas dire qu'elle n'ait pas pris en compte cette double

21 déclaration de culpabilité, mais en ce qui concerne M. Mucic, le plus

22 grave c'est le fait que la Chambre de première instance ait retenu contre

23 lui le fait qu'il n'avait pas témoigné au procès.

24 Or ceci a été balayé de la main par le Procureur. Moi j'estime au

25 contraire que c'est un élément extrêmement important dans la jurisprudence

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1 du Tribunal, voir une Chambre de première instance commettre une erreur

2 que je qualifierais de fondamentale. On ne trouve pas d'erreur plus

3 fondamentale en fait.

4 Il y a beaucoup de systèmes juridiques où si vous avez une telle erreur

5 commise dans le cadre d'un procès et si cette erreur est reconnue avant le

6 prononcé de la condamnation, eh bien, dans beaucoup de systèmes juridiques

7 on annulerait tout simplement le procès et on en referait un nouveau.

8 Dans mon système, si un juge, en résumant l'affaire, disait au jury ou

9 faisait une telle erreur en parlant au jury, cela aurait de graves

10 conséquences.

11 Donc question extrêmement importante.

12 Le problème c'est que même avec une peine de 7 ans on ne sait pas

13 exactement la part qu'a joué ce préjudice dans le prononcé de ces 7 ans.

14 Si les Juges n'en ont tenu aucun compte, s'ils n'en avaient tenu aucun

15 compte, je pense qu'ils l'auraient dit parce que c'est quand même un

16 élément essentiel. On ne peut pas le savoir, on ne peut que faire des

17 suppositions, et dans ces cas-là il faut que cela soit à l'avantage de

18 l'accusé.

19 Moi, je pense qu'ils ont dû retenir ce fait contre l'accusé.

20 Il est difficile, impossible de dire quelle partie, quelle proportion de

21 la peine cela représente, mais moi j'estime que cette erreur est tellement

22 fondamentale qu'on ne peut pas la passer sous silence, et votre Chambre,

23 je pense, devrait suivre la Chambre d'appel dans ce sens et réduire donc

24 cette peine de 9 ans, chiffre auquel je suis arrivé en vous l'expliquant

25 tout à l'heure. Voilà donc mon argument à ce sujet.

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1 (Les Juges se concertent sur le siège.)

2 M. le Président (interprétation): Maître Morrison, la question à laquelle

3 nous devons répondre est la suivante: cette peine en dehors de vos

4 arguments, est-ce que c'est une peine appropriée ou non? Parce que comme

5 vous l'avez dit, nous ne pouvons pas savoir ce que pensaient les Juges de

6 la première Chambre de première instance. Nous, nous devons nous demander

7 s'il s'agit là d'une peine appropriée ou s'il s'agit là d'une peine qui a

8 été prononcée, qui a été affectée, contaminée par les observations faites

9 par certains Juges de la Chambre de première instance.

10 M. Morrison (interprétation): C'est en lisant le jugement qu'on peut se

11 rendre compte ce que pensaient les Juges de la première Chambre, c'est la

12 seule façon de nous faire une idée de cela. Et nous savons que, pour eux,

13 ils ont retenu contre Mucic le fait qu'il n'avait pas déposé.

14 Imaginons que la Chambre de première instance ait dit "Eh bien, nous

15 réduirons les peines des personnes qui déposent", ceci entraînerait bien

16 entendu une protestation de la part de l'accusation en voyant la

17 jurisprudence du Tribunal modifiée de cette façon.

18 L'objectif du Conseil de sécurité en établissant notre Tribunal, c'est

19 d'établir une institution où les principes fondamentaux du droit non

20 seulement sont respectés mais sont améliorés. Et la Chambre de première

21 instance a fait une erreur lorsqu'elle s'est comportée de la manière dont

22 nous savons, et il appartient maintenant à cette Chambre de première

23 instance de corriger cette erreur.

24 M. le Président (interprétation): Merci Maître Morrison.

25 Qui allons-nous entendre maintenant? Maître Moran?

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1 M. Moran (interprétation): Oui je vais maintenant m'exprimer.

2 Les sujets, les questions ont été abordées abondamment par écrit, on m'a

3 fait savoir d'ailleurs que j'avais peut-être présenté des écritures un peu

4 trop abondantes, donc je ne vais pas revenir sur ce qui a été déjà dit.

5 Je vais plutôt essayer de poser un certain nombre de questions qui ont

6 déjà été évoquées, et puis de présenter ce qui me semble une manière

7 logique de répondre aux questions qui se posent à vous, et troisièmement

8 je vais vous présenter cette affaire, l'affaire qui nous intéresse sur la

9 base de la Chambre de première instance dans Todorovic.

10 En premier lieu, il y a deux questions qui ont été posées par les Juges,

11 vous avez parlé au Procureur d'une aggravation éventuelle de la peine due

12 à la position d'autorité occupée par l'accusé. C'est ce que vous avez fait

13 dans Todorovic, mais vous avez également dit qu'un facteur aggravant doit

14 être prouvé au-delà de tout doute raisonnable.

15 Je me trompe peut-être mais si je me souviens bien, dans toutes les

16 affaires où le fait d'être supérieur hiérarchique a été considéré comme un

17 facteur aggravant, cette personne avait soit été tenue responsable du fait

18 de sa responsabilité de commandant -par exemple, c'est Todorovic, il

19 l'aurait pu l'être mais il ne l'a pas été-, mais vous avez très clairement

20 dit dans le jugement qu'il était le chef de la police et qu'il était donc

21 dans cette position.

22 Ici nous avons Delic qui était accusé de tous les chefs relatifs à sa

23 responsabilité de supérieur hiérarchique, l'accusation a fait appel de

24 cette partie du jugement mais le rappel a été rejeté.

25 On ne peut donc pas prouver au-delà de tout doute raisonnable qu'il

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1 détenait une autorité de supérieur hiérarchique. Or si on lit Todorovic,

2 on voit que ceci doit être prouvé au-delà de tout doute raisonnable. Moi

3 j'avance donc que le fait que M. Delic a été adjoint du commandant du camp

4 ne doit pas être pris en compte pour déterminer sa peine.

5 M. le Président (interprétation): Il a été reconnu coupable au titre de

6 l'Article 7.1.

7 M. Moran (interprétation): Oui mais il a été condamné pour ce qu'il a

8 fait, mais pas au titre de l'article 7.3 pour ce qu'il aurait fait

9 d'autre.

10 M. le Président (interprétation): Oui mais il a été condamné pour

11 l'homicide intentionnel d'un détenu, pour avoir causé de graves

12 souffrances à un autre détenu, et il a été reconnu coupable de deux chefs

13 de tortures, pour viols ainsi que d'un chef de traitements inhumains

14 envers des détenus et pour avoir causé de grandes souffrances.

15 Vous avez donc peut-être raison mais en tout cas il a été reconnu coupable

16 de crimes très graves.

17 M. Moran (interprétation): Nous n'avons pas qu'il a été reconnu coupable

18 de crimes qui ne soient pas graves, mais vous avez évoqué la question du

19 supérieur hiérarchique, donc je pense qu'il convient de l'évoquer.

20 Le Juge Robinson a parlé de la question de la peine globale, or moi je me

21 permets de vous dire que prononcer une peine, ce n'est pas quelque chose

22 qui est scientifique. Les Juges réfléchissent, se posent des questions,

23 essaient de résoudre les questions qui se posent à eux au mieux dans

24 certains systèmes. Parce que moi, je travaille dans deux systèmes, au

25 niveau fédéral et au niveau de l'Etat dans mon pays, et au niveau de

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1 l'état on peut prononcer des peines très variées; ça peut aller de 5 ans à

2 la prison à vie pour un même crime; et ceci est laissé à la liberté des

3 personnes qui déterminent les peines alors que quand je pratique au niveau

4 fédéral ce n'est pas pareil parce qu'on a essayé de mettre en place des

5 lignes directrices pour guider les Juges lorsqu'ils prononcent les peines.

6 Et dans le Tribunal pour l'ex-Yougoslavie, il me semble qu'on est un petit

7 peu entre les deux puisque, d'une part, la Chambre de première instance a

8 un pouvoir discrétionnaire assez important pour évaluer la sanction, mais

9 d'un autre côté cette même Chambre doit motiver sa décision, et si dans

10 ses motivations on constate qu'il y a abus de pouvoir discrétionnaire, à

11 ce moment-là cela peut faire l'objet d'un appel et d'une révision en

12 appel.

13 Donc ce qui se passe généralement, c'est que la Chambre de première

14 instance explique en détail pourquoi elle a choisi d'imposer telle ou

15 telle peine, et c'est en examinant ses motivations qu'une Chambre d'appel

16 peut éventuellement réviser la peine prononcée.

17 Ceci étant dit, je vais poursuivre mon argumentation.

18 A ma connaissance, M. Delic est le premier homme à avoir été vu son cas

19 renvoyé devant une Chambre de première instance pour réévaluation de sa

20 peine après qu'on ait réduit la portée de son comportement, sa conduite

21 criminelle. Je me trompe peut-être mais je crois qu'il est bien le

22 premier.

23 Le Procureur devant la Chambre d'appel, la Chambre d'appel et le Procureur

24 ici même sont d'accord pour dire que la peine doit rendre compte de

25 l'ensemble du comportement criminel, et si ce comportement criminel est

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1 réduit, à ce moment-là il faut que la peine globale prononcée soit réduite

2 aussi.

3 Difficile de dire en se penchant sur le jugement de la première Chambre de

4 première instance, difficile de dire donc quelle partie de cette peine

5 globale, prononcée contre M. Delic, l'a été sur la base du meurtre de

6 Scepo Gotovac, chefs d'accusation 1 et 2.

7 Quand on lit le jugement, on voit que les Juges de la Chambre de première

8 instance, de la première Chambre ont été choqué par ce meurtre, parce que

9 c'est un vieil homme qui a été tué. Et en fait, il a été tué à cause d'une

10 dispute qui datait de 50 ans, qui datait de la Deuxième Guerre mondiale.

11 C'était donc un meurtre qui avait pour motivation la vengeance, et

12 inévitablement cela a dû avoir un effet sur la peine prononcée par la

13 première Chambre de première instance.

14 Or malheureusement la Chambre de première instance initiale s'est trompée

15 parce qu'il n'était pas coupable de ce meurtre, et c'est pourquoi l'accusé

16 est devant vous aujourd'hui.

17 Comme vous estimez, Messieurs les Juges, et je suis d'accord avec vous,

18 que votre rôle ici c'est d'ajuster les peines, je crois qu'il faut que

19 vous essayiez de déterminer quelle conséquence, quel effet cette

20 déclaration de culpabilité au titre des chefs 1 et 2 cela a eu sur la

21 peine prononcée, la peine globale prononcée contre mon client.

22 Je pense qu'il faut lire le jugement de la Chambre de première instance

23 initiale en ce qui concerne la peine pour bien comprendre ce que

24 ressentaient les Juges de la Chambre de première instance au sujet de ce

25 crime particulier.

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1 Et dans ces conditions, je pense qu'il faut réévaluer la peine prononcée

2 contre M. Delic en essayant d'enlever, d'effacer de cette peine l'effet

3 qu'avait eu la déclaration erronée de culpabilité qui avait été prononcée

4 contre lui pour les chefs 1 et 2.

5 (Les Juges se concertent sur le siège.)

6 M. le Président (interprétation): Oui poursuivez Maître Moran.

7 M. Moran (interprétation): Une fois ceci fait, une fois que vous aurez un

8 projet de condamnation pour M. Delic, il faudra procéder à une deuxième

9 étape, il faudra assurer un ajustement pour ce qui est du cumul des

10 verdicts de culpabilité. Cette Chambre, une fois de plus, va devoir

11 essayer de déterminer ce qu'a fait la première Chambre, dans quelle mesure

12 elle a été influencée par le cumul des verdicts de culpabilité.

13 J'ai cité des faits américains. Lorsqu'on évoque aux Etats-Unis la

14 multiplicité des peines et j'ai parlé aussi de la difficulté que des

15 Chambres de jugement ou d'appel rencontrent lorsqu'il s'agit d'aborder ce

16 problème. Mais même lorsqu'il y a confusion de peine, la deuxième

17 condamnation constitue une punition séparée pour les crimes commis, ne

18 serait-ce que parce que, à ce moment-là, vous êtes qualifié de criminel

19 pour deux raisons plutôt que pour une.

20 Dans le cadre de cette analyse, je pense qu'il faudrait penser à diminuer

21 la peine globale, pas simplement pour M. Delic, mais pour les trois co-

22 accusés du fait tout simplement qu'il y a eu cumul des verdicts de

23 culpabilité.

24 Voyons les faits qui interviennent dans l'établissement de la peine.

25 Puisqu'on a diminué le comportement criminel, il faut en tenir compte.

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1 Il y a eu d'abord le jugement de Todorovic et je parlerai de certains des

2 facteurs pris en compte par la Chambre de première instance.

3 Lorsque j'essaie de comprendre l'affaire Todorovic, il semblerait que la

4 Chambre ait tenu compte des facteurs de dissuasion et de châtiment presque

5 en même temps. Si la peine suffit pour la dissuasion, elle doit suffire

6 aussi pour ce qui est de ne pas donner à la personne condamnée de répéter

7 la même infraction.

8 Voyons le ou les crimes commis et la façon dont ils l'ont été.

9 Dans votre jugement, vous avez dit ou du moins il apparaît que vous

10 établissiez que vous ne considériez pas simplement le crime et les

11 modalités de celui-ci de façon séparée de la nature du crime. Vous les

12 voyez en même temps, vous les examinez concurremment pour parvenir à la

13 peine. Vous dites, par exemple, c'est un crime brutal qu'a commis cette

14 personne, par conséquent, la peine mérite autant d'années et le côté

15 brutal permet d'ajouter quelques années.

16 La Chambre de première instance a examiné ces deux faits ensemble.

17 Apparemment la Chambre de première instance a examiné d'autres facteurs

18 mais dans le cadre des circonstances atténuantes, quatre plus exactement:

19 le plaidoyer de culpabilité, la collaboration avec le Bureau du Procureur,

20 le remords et la capacité mentale diminuée.

21 Ici, il n'y a pas eu de plaidoyer de culpabilité. Que dirai-je à ce

22 propos? Vous avez eu raison de dire dans Todorovic que dans tout système,

23 si une personne plaide coupable, c'est pris en compte comme circonstance

24 atténuante mais le revers de la médaille, c'est que si une personne

25 insiste pour avoir droit à un procès, ce n'est pas non plus une

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1 circonstance aggravante.

2 M. le Président (interprétation): Oui, c'est exact.

3 M. Moran (interprétation): Collaboration avec le Procureur: M. Delic a

4 fourni au moment de son arrestation et de sa détention à La Haye une

5 déclaration au Procureur qui a été versée au dossier de l'instance.

6 On ne lui a pas demandé de témoigner contre d'autres personnes, on ne lui

7 a rien demandé outre cette déclaration.

8 Troisième condition: expression de remords. On n'en parle pas, on ne voit

9 rien de ce genre dans le dossier de l'audience ni dans un sens ni dans

10 l'autre.

11 Quatrième facteur: réduction de la capacité mentale. Si vous examinez le

12 dossier de la première instance, il y a un rapport du Dr Prince de

13 l'université McGeel selon lequel M. Delic, au moment de l'examen,

14 souffrait du syndrome post-traumatique.

15 Dans l'affaire Todorovic, on s'est demandé cela aussi. On s'est demandé

16 également si M. Todorovic souffrait de ce syndrome au moment de la

17 commission des infractions ou si celui-ci était apparu plus tard.

18 Par conséquent, la présente Chambre, dans cette affaire-là n'a pas pris en

19 compte ce syndrome comme étant une circonstance atténuante.

20 Mais franchement le rapport du Dr Prince n'est pas très clair sur ce

21 point. Je l'ai placé en annexe dans mon mémo initial malgré tout pour la

22 question de la peine.

23 La Chambre dans l'affaire Aleksovski n'a pas discuté de certains points

24 qui pouvaient intervenir comme circonstance atténuante. Nous avons repris

25 cela assez longuement dans notre mémoire.

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1 S'il n'y a plus de questions, j'en ai terminé.

2 M. le Président (interprétation): Maître Moran, il nous faut également

3 faire ceci. Vous avez suggéré une démarche, mais nous il nous faut aussi

4 trancher la question de savoir ce qui serait une peine appropriée au vu

5 des faits tels qu'ils nous ont été présentés. Il nous incombe de savoir et

6 de déterminer si les peines prononcées doivent être ajustées ou pas.

7 M. Moran (interprétation): Messieurs les Juges, cette Chambre-ci ne l'a

8 pas dit mais le Procureur, la Chambre d'appel est ici aussi cela a été dit

9 et nous disons qu'il y a eu acquittement en appel et que dès lors il

10 faudrait diminuer la peine. Le tout est de savoir de combien.

11 M. le Président (interprétation): Je pense que la Chambre d'appel a dit

12 ceci: "Ajustement éventuel." A nous de trancher, non pas tellement la

13 question de savoir s'il faut ajuster la peine, mais s'il le faut le faire

14 et dans ce cas-là, de combien. Et je pense que c'est la démarche que nous

15 allons devoir arrêter, n'est-ce pas, plutôt que d'essayer de rétablir une

16 nouvelle peine et de déterminer ce qu'avaient à l'esprit les Juges de la

17 première Chambre de première instance, ce que nous ne pouvons pas faire.

18 M. Moran (interprétation): Il y a deux démarches possibles sur ce point,

19 me semble-t-il: la première serait d'avoir une nouvelle peine, auquel cas

20 vous avez toute la panoplie de peines possibles.

21 Deuxième option: vous pouvez essayer de corriger, de rectifier, d'ajuster

22 la peine précédente du fait des erreurs commises par la première Chambre

23 de première instance.

24 J'ai lu les ordonnances portant calendrier, les différentes ordonnances de

25 la Chambre de première instance et les décisions de la Chambre d'appel. Je

Page 39

1 pense qu'il faut ajuster la peine initiale pour les trois co-accusés

2 d'ailleurs plutôt que de procéder à un établissement de peine tout à fait

3 nouveau.

4 M. le Président (interprétation): Si vous avez raison, il faudra ajuster

5 la peine pour autant qu'il faille le faire. A ce moment-là, il y a deux

6 étapes, me semble-t-il. Est-ce qu'il faut le faire, est-ce qu'il faut

7 ajuster la peine. Deuxième étape, si oui de combien? Vous semblez dire que

8 nous nous accordons à dire qu'il faut un ajustement de la peine.

9 M. Moran (interprétation): Je peux retrouver mon mémoire initial, mais je

10 cite deux paragraphes de l'arrêt qui parlent de sentences qui reflètent la

11 totalité du comportement criminel.

12 Le Procureur, la Chambre d'appel ont parlé de la totalité du comportement

13 criminel. Elle dit que s'il y a un crime qui vaut vingt ans, s'il y en a

14 deux, ça peut donner 22 ou 25 ans ou une autre période.

15 M. le Président (interprétation): Vous dites en résumé ceci: Puisqu'en

16 l'espèce, on a une annulation de condamnation de verdict de culpabilité,

17 il y a une réduction de la totalité du comportement criminel, il faut donc

18 une peine moins lourde.

19 M. Moran (interprétation): Nous disons c'est ce qu'exige le principe de la

20 totalité du comportement criminel. Le tout est de savoir de combien on

21 réduit la peine.

22 Nous, nous faisons une suggestion, nous disons que cela doit avoisiner 15

23 ans mais en tout état de cause puisque la totalité du comportement

24 criminel reproché à M. Delic, puisqu'il y a réduction de ce comportement

25 criminel, il semblerait logique, et s'ensuive presque directement, que la

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1 totalité du châtiment le soit aussi à l'aune du crime constaté.

2 M. le Président (interprétation): Des crimes?

3 M. Moran (interprétation): Oui, des crimes au pluriel.

4 Que ce soit dans ma mémoire ou dans mes arguments ici à l'audience, je

5 n'ai jamais tenté de nier ou de minimiser la gravité des infractions pour

6 lesquelles M. Delic a été condamné.

7 C'est impossible de le faire parce qu'il était condamné pour des

8 infractions graves, mais il a été acquitté aussi d'une infraction grave,

9 infraction grave à propos de laquelle la première Chambre avait dit

10 qu'elle avait été commise de façon tout à fait odieuse pour des motifs

11 particulièrement répréhensibles à l'encontre d'une victime

12 particulièrement vulnérable.

13 Par conséquent, à mon avis, il faudrait considérer que l'on a

14 considérablement réduit le comportement criminel.

15 Voyons les autres condamnations pour meurtre.

16 La personne qui a trouvé la mort. On a accusé cette personne d'avoir été

17 un tireur isolé pour les Serbes de Bosnie. Quant à savoir s'il l'était ou

18 pas, je ne pense pas que ce soit si important que cela. Le fait est qu'il

19 y a eu cette accusation et que les moyens de preuve semblaient prouver que

20 les gens du camp pensaient qu'il était coupable d'avoir été un tireur

21 isolé.

22 Ce Tribunal et le Bureau du Procureur aussi ont montré dans ces Actes

23 d'accusation que le fait d'être un tireur isolé est une infraction

24 considérée comme très grave, il suffit de voir l'Acte d'accusation dressé

25 contre Galic pour l'affaire de Sarajevo.

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1 Par conséquent, les motifs qui sont à la base des deux meurtres, ils sont

2 à mon avis différents. Personne n'a jamais dit -et je ne vais pas le faire

3 non plus- personne n'a jamais dit qu'un meurtre c'est une infraction peu

4 grave. Ce n'est pas un simple délit s'il y a meurtre.

5 Toutefois si le motif et les modalités d'exécution du crime interviennent

6 d'une quelconque façon dans la peine, comme vous l'avez dit dans l'affaire

7 Todorovic -vous avez dit que c'était le cas et c'était dit dans d'autres

8 affaires- à ce moment-là, à partir de cela, il faut examiner ces deux

9 meurtres.

10 (Les Juges se consultent sur le siège.)

11 M. le Président (interprétation): Poursuivez!

12 M. Moran (interprétation): Oui, je pense qu'il faut examiner ces deux

13 meurtres et ce faisant dans la mesure du possible vous devez essayer de

14 voir dans quelle mesure le meurtre relevant du chef 1 a une incidence sur

15 le verdict et la peine imposée par la première Chambre de première

16 instance.

17 M. le Président (interprétation): Vous l'avez fait déjà fait comprendre.

18 M. Moran (interprétation): Ce n'est pas une tâche facile, loin de là, et

19 je ne vous envie pas d'avoir à procéder à cet exercice.

20 Est-ce que vous avez d'autres questions? Je n'ai plus besoin d'utiliser le

21 temps qui m'avait été imparti.

22 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

23 Oui, Madame Sinatra?

24 Mme Sinatra (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

25 Nous n'avons plus que 10 minutes avant la pause. Est-ce que nous pourrions

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1 faire la pause maintenant pour ne pas être interrompus au milieu de notre

2 argumentation?

3 M. le Président (interprétation): Tout à fait, bonne idée.

4 Nous allons faire une pause d'une demi-heure. Nous serons de retour à

5 l'audience à 11 heures 20.

6 (L'audience, suspendue à 10 heures 50, est reprise à 11 heures 27.)

7 M. le Président (interprétation): Maître Sinatra, vous avez la parole.

8 Mme Sinatra (interprétation): Merci. Vous savez bien sûr que je m'appelle

9 Cynthia Sinatra, que je suis accompagnée de Peter Murphy, que nous allons

10 nous répartir l'argumentaire qui ne sera pas très long.

11 En effet, nous n'allons soulever qu'une question fondamentale à savoir

12 celle-ci: est-ce que vu le rejet du cumul des verdicts de culpabilité,

13 est-ce qu'il vaut réajuster la peine?

14 Nous sommes ravis de voir que Monsieur le Juge Fassi Fihri se porte bien,

15 qu'il s'est remis par rapport à la dernière fois et nous avons aussi été

16 ravis de pouvoir faire le voyage en avion après ces événements qui nous

17 ont frappés.

18 Nous sommes ravis de pouvoir nous consacrer à l'audience aujourd'hui.

19 Je vous rappelle notre mémoire déposé s'agissant du réajustement de la

20 peine. Je ne vais pas reprendre tous les arguments, la Chambre connaît

21 parfaitement la nature de ceux-ci.

22 Un simple rappel. Lorsque vous allez voir le résumé aux pages 1 et 2 du

23 mémoire, rappelez-vous ceci: au départ Esad Landzo avait été accusé de 18

24 chefs d'accusation et condamné.

25 La Chambre de première instance avait déterminé qu'il n'était pas coupable

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1 de deux de ces chefs et après le cumul de ces peines, 8 de ces chefs

2 avaient été rejetés.

3 Donc nous n'avons à nous occuper que de 8 chefs d'accusation. Je ne peux

4 pas minimiser cette incrimination: M. Landzo reste condamné après le rejet

5 de cumul des verdicts de culpabilité pour 3 chefs de meurtres, 3 de

6 tortures et 2 de mauvais traitements, des traitements cruels qui sont des

7 infractions très graves aux yeux de ce Tribunal.

8 Je voulais revenir, si vous me le permettez, à ce qu'a dit le Juge May, à

9 savoir que la responsabilité pénale doit être prise en compte pour

10 déterminer s'il y a des circonstances aggravantes. Vous savez que Landzo

11 n'avait aucune position de responsabilité. C'était un garde de 18, 19 ans.

12 Il n'avait aucun antécédent militaire, aucune formation antérieure. On l'a

13 forcé à aller défendre son foyer, sa ville, à l'époque. Il n'avait aucun

14 statut militaire.

15 La Chambre a déjà tenu compte de la diminution de la capacité mentale en

16 tant que circonstance atténuante, mais je vous rappelle ceci, il avait, en

17 1992, 18 ans, 19 ans peut-être. Il a aujourd'hui 28 ans. La Chambre prend

18 très au sérieux ceci au moment de l'évaluation et du réajustement éventuel

19 d'une peine, c'est l'aspect de la rééducation si vous voulez, c'est un

20 aspect important.

21 Vous savez que M. Landzo, pendant sa détention, a suivi un traitement

22 thérapeutique. Il est en prison depuis 5 ans et demi. Trois ans se sont

23 écoulés depuis le premier verdict. La question de la réinsertion étant

24 très importante. Il a été condamné en novembre 1998, donc on est près de

25 l'anniversaire de 3 ans par rapport à ce premier prononcé.

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1 Je voudrais vous faire parcourir certains des progrès réalisés par M.

2 Landzo et je vais vous demander de tenir compte de ces circonstances

3 atténuantes.

4 La Chambre de première instance a déjà examiné ces faits, à savoir qu'il

5 s'est livré, il a essayé de collaborer avec le Bureau du Procureur.

6 Si vous comparez ceci avec le cas Todorovic qui, lui, a été accusé de

7 beaucoup de crimes odieux, le Bureau du Procureur avait besoin de

8 l'assistance de Todorovic mais pas de celle de M. Landzo, mais ceci ne

9 justifie pas que M. Landzo soit puni pour le fait que le Bureau du

10 Procureur n'avait pas besoin de son aide à l'époque. Il a témoigné, il a

11 reconnu sa culpabilité.

12 Aujourd'hui, il maîtrise parfaitement l'anglais et donne un coup de main

13 aux gardes du quartier pénitentiaire. Quelquefois, il joue le rôle

14 d'interprète pour certains des détenus yougoslaves et il le fait de son

15 propre gré. Il ne s'est pas contenté d'être autodidacte en anglais. Il est

16 maintenant tout à fait compétent en informatique et il aide aussi les co-

17 détenus en matière d'informatique.

18 Lorsque j'ai rencontré M. Landzo en décembre 1996, deux fois déjà il avait

19 tenté de se suicider. Il avait fait la grève de la faim, il avait écrit au

20 Bureau du Procureur, il avait demandé à être exécuté par un peloton

21 d'exécution.

22 La métamorphose qu'a connu Esad Landzo depuis 1996 tient beaucoup peut-

23 être au fait qu'il n'est plus un gamin, mais que c'est un homme

24 aujourd'hui.

25 M. le Président (interprétation): Un instant, s'il vous plaît.

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1 Il y a eu des difficultés au niveau du compte rendu d'audience en anglais.

2 Est-ce que tout marche bien?

3 Poursuivez, Maître Sinatra.

4 Mme Sinatra (interprétation): Merci.

5 Il s'est fait des amis parmi tous les représentants des groupes ethniques.

6 Il a un travail au quartier pénitentiaire, il travaille à la lingerie et

7 il est vraiment très fier de ce travail, tous les détenus lui demandent de

8 laver leur linge parce qu'il est vraiment très propre. Il dit n'avoir plus

9 aucun ennemi et il cherche une foi, sa foi.

10 Je ne sais pas si la Chambre permettra à M. Landzo de s'adresser en

11 anglais à la Chambre, ne serait-ce que pour quelques instants?

12 M. le Président (interprétation): Non, Maître Sinatra. Nous avons examiné

13 cette requête concernant des interventions éventuelles des accusés à

14 l'audience, mais nous l'avons rejetée.

15 Mme Sinatra (interprétation): Monsieur Stewart a dit qu'il serait logique

16 de ne pas réajuster la peine imposée à M. Landzo mais comment est-ce que

17 ceci pourrait être juste?

18 Si on voit l'Article 24 du Statut ou du Règlement, tous les aspects et les

19 circonstances atténuantes ou aggravantes quand on voit la totalité du

20 comportement criminel. Or il n'y a plus 18 chefs contre lui, mais 8. Je

21 pense que la Chambre trancherait justement si elle réduisait en

22 conséquence sa peine.

23 Je rappelle aussi à cette Chambre: au cours des trois dernières années, la

24 jurisprudence de ce Tribunal a évolué, a avancé au niveau de la peine.

25 Nous avons maintenant beaucoup plus de décisions qu'en 1998 sur lesquelles

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1 nous pouvons nous fonder.

2 Cette Chambre ne peut pas ignorer cette jurisprudence. Je sais que M.

3 Moran a déjà parlé de la décision Todorovic, inutile de la relire dans sa

4 totalité mais cette Chambre sait quelles avaient été les charges retenues

5 contre M. Todorovic même si ce dernier avait collaboré avec le Bureau du

6 Procureur.

7 Todorovic aussi avait manifesté son remords, avait admis sa culpabilité

8 tout comme l'a fait M. Landzo et la Chambre a estimé que la peine

9 équitable à lui infliger était de 10 ans.

10 Monsieur Stewart estime qu'il faut encore et toujours imposer 15 ans à M.

11 Landzo. Nous ne sommes pas d'accord.

12 Nous allons demander à cette Chambre de ne pas prendre une décision

13 abstraite dans l'absolu parce que M. Landzo n'avait aucune responsabilité

14 de supérieur, aucun poste de commandement. Si vous voulez faire une

15 comparaison, il faut la faire avec Todorovic qui était chef de la police,

16 mais aussi avec un des autres accusés en l'espèce qui avait une

17 responsabilité de commandant et n'a reçu qu'une peine de 7 ans.

18 Veillez, Messieurs les Juges, à ce que cette peine ne dépasse 7 ans non

19 plus pour M. Landzo.

20 Je veux maintenant donner la parole à Me Murphy à moins que vous n'ayez

21 des questions à m'adresser, Messieurs les Juges.

22 M. le Président (interprétation): Non, ce n'est pas nécessaire. Je vous

23 remercie.

24 M. Murphy (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, bonjour

25 Messieurs les Juges. Je parlerai très brièvement. La Chambre sait bien que

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1 nous avons déposé une requête attirant l'attention de la Chambre sur la

2 compétence. Je n'ai aucune intention de rouvrir ce débat.

3 Mais le libellé de la requête n'est peut-être pas le meilleur qui soit

4 puisque nous avons parlé de la compétence de la Chambre d'appel d'une

5 façon peut-être inadéquate. La question qui se pose c'est la compétence

6 qui revient à cette Chambre de première instance et je vous rappellerai

7 simplement le contenu de notre requête à cet égard.

8 Je crois, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, que lorsque cette

9 question s'est posée très tardivement dans la procédure, il est tout à

10 fait intéressant de constater qu'en tant que conseil de la défense, en

11 tant que groupe nous avons essayé de définir les problèmes qu'il y a, la

12 différence qui existe entre une nouvelle sentence et un ajustement de la

13 peine. Et lorsque nous nous sommes intéressés à cette question, nous nous

14 sommes demandés quelle était la loi qui donnait compétence à une Chambre

15 de première instance de prononcer une sentence devant ce Tribunal.

16 Dans le cadre de cet examen, nous nous sommes rendu compte que le Statut

17 et le Règlement de ce Tribunal accordent à une Chambre de première

18 instance des pouvoirs et une compétence très spécifiques qui ne semblent

19 pas s'appliquer dans l'affaire qui nous intéresse.

20 Nous avons appelé l'attention de la Chambre de première instance sur cette

21 question car elle nous paraît importante, si elle n'a pas été résolue dans

22 l'affaire qui nous intéresse. Et si ce n'est pas le cas, il faudra qu'elle

23 soit résolue à un moment ou à un autre.

24 La question qui se pose, Monsieur le Président, si vous me permettez de le

25 dire, est une question qui a été très bien présentée au cours des

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1 arguments de ce matin, au moment où en une réponse à une question posée

2 par Me Moran, le Juge May a déclaré, si je ne m'abuse, qu'il nous

3 appartient de déterminer quelle est la sentence la plus appropriée est

4 l'ajustement le plus approprié.

5 A mon avis, il n'est pas très facile de procéder à un ajustement d'une

6 sentence sans bien comprendre tout ce qui sous-tend la criminalité,

7 l'aspect pénal de comportement. Et c'est la question qui se pose

8 implicitement devant cette Chambre car si le problème consistait

9 simplement à constater qu'un certain nombre de crimes existent pour

10 lesquels les accusés ont été condamnés au départ et qu'aujourd'hui le

11 nombre de crimes est inférieur, nous devrions nous demander si cela fait

12 une différence. Mais pour prendre une bonne décision, la Chambre de

13 première instance devrait, je pense, revenir sur le problème de l'aspect

14 pénal global, de l'aspect criminel global, à savoir donc, reprendre

15 l'attitude qu'aurait dû avoir la première Chambre de première instance.

16 Et c'est le dilemme qui s'est posé à la Chambre d'appel, dilemme que la

17 Chambre d'appel a créé, je dirai avec le respect que je lui dois, à savoir

18 comment procéder à un ajustement approprié sans avoir bien compris le

19 comportement criminel dans sa globalité.

20 Et sans tenir compte de ce que la Chambre de première instance initiale a

21 pris en compte. Monsieur le Président, Messieurs les Juges, s'agissant de

22 l'ajustement de la peine, je dirai que la Chambre de première instance, en

23 fait, reformule un nouveau jugement d'une certaine façon. En tout cas en

24 Angleterre par exemple, il est possible de réexaminer une sentence en

25 présence de certains éléments nouveaux. Donc s'il s'agit du prononcé d'une

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1 nouvelle sentence, la Chambre de première instance est néanmoins liée par

2 le Statut et par le Règlement de procédure et de preuve du Tribunal et

3 l'Article 4 du Statut ainsi que l'Article 101B) du Règlement de procédure

4 et de preuve font obligation à la Chambre de première instance de prendre

5 en compte tous les éléments de l'Article 24, c'est-à-dire pas seulement

6 les circonstances qui ont présidé à la commission du crime mais également

7 les circonstances de l'avis de l'auteur du crime.

8 Dans ces conditions, nous avons pensé qu'il était bon que nous déposions

9 une requête pour donner une possibilité à la Chambre de première instance

10 de se prononcer et de déclarer peut-être que la requête déposée au nom de

11 Delic n'était pas exactement rédigée dans les mêmes termes mais avait tout

12 de même certain mérite sur le fond, s'agissant d'avoir une image globale

13 de la situation.

14 Je dirai également qu'à l'évidence un des éléments que la Chambre de

15 première instance initiale avait à l'esprit en prononçant son jugement,

16 c'est qu'en renvoyant l'affaire devant une nouvelle Chambre de première

17 instance, elle préserverait le droit à interjeter appel.

18 Et ce qui est intéressant, c'est de savoir quel est le droit à appel qui

19 pourrait exister si l'on se prononce simplement en répondant par oui ou

20 par non par rapport à un ajustement éventuel. En effet, si l'on parle de

21 la possibilité d'interjeter appel, il faut que l'on s'intéresse à l'aspect

22 opportun, au caractère opportun de la première sentence et à la façon dont

23 l'aspect global du crime est pris en compte dans la première sentence.

24 C'est dans ces conditions que je dis, Monsieur le Président, Messieurs les

25 Juges, que la Chambre de première instance est sans doute face à un

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1 dilemme et le jugement rendu par cette Chambre doit dépendre de la

2 compétence qui appartient à cette Chambre et pas nécessairement de la

3 compétence octroyée à la Chambre d'appel.

4 Avec le respect que je dois à la Chambre, je dis que cette façon d'agir

5 est absolument indispensable à mon avis, compte tenu des circonstances qui

6 entourent la présente affaire. A moins que les Juges aient des questions à

7 me poser, j'en ai terminé.

8 M. le Président (interprétation): Merci, Maître Murphy.

9 La Chambre de première instance va examiner tous ces éléments. Nous ne

10 sommes pas en mesure de prononcer une sentence aujourd'hui, nous nous

11 donnerons le temps de la réflexion et nous rendrons notre sentence le jour

12 de la prochaine audience, date qui sera communiquée aux parties.

13 Je suspens l'audience

14 (L'audience est levée à 11 heures 45.)

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