Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL Affaire IT-96-21-T

2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE

3 Vendredi 13 février 1998

4 L'audience est ouverte à 11 heures.

5 M. le Président (interprétation). - Bonjour, Mesdames et

6 Messieurs. Ravi de vous revoir après une aussi longue absence. Vous serez

7 sans doute aussi contents d'apprendre que le Dr Gow est prêt à

8 comparaître.

9 Pouvons-nous commencer sans plus tarder ?

10 D'abord les comparutions peut-être.

11 M. Niemann (interprétation). - Je m'appelle Me Niemann, je

12 comparais avec Me Dixon, Turone, et Khan, au nom de l’accusation.

13 Mme Residovic (interprétation). - Bonjour, Madame et Messieurs

14 les Juges. Je m’appelle Edina Residovic. Je comparais avec

15 Eugène O’ Sullivan, professeur canadien, pour défendre Zejnil Delalic.

16 M. Olujic (interprétation) - Bonjour, Madame et Messieurs les

17 Juges, je m’appelle Zeljko Olujic, je suis avocat de Croatie, je comparais

18 avec Me Michael Greaves et je défends avec lui M. Mucic.

19 Avant que mon autre confrère se présente, nous avons une demande

20 à formuler, à savoir que M. Mucic demande à cette Chambre de lui permette

21 de s'absenter après midi, pour les raisons suivantes : une messe

22 catholique va se tenir au quartier pénitentiaire et un prêtre va venir à

23 cette occasion. Etant donné que M. Mucic n'a pas été en mesure d'assister

24 régulièrement au service religieux par le passé, il demanderait à cette

25 Chambre de lui permettre de s'absenter

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1 au cours du témoignage de M. Gow, aujourd'hui, et me permettrait de le

2 représenter en son absence.

3 M. Karabdic (interprétation). - Je m'appelle Salih Karabdic,

4 avocat de Sarajevo. Je défends M. Hazim Delic en compagnie de

5 Me Thomas Moran, avocat de Houston au Texas.

6 M. Ackerman (interprétation). - Bonjour Madame et Messieurs les

7 Juges. Je m’appelle John Ackerman, je comparais avec Me Cynthia McMurrey,

8 au nom de M. Esad Landzo.

9 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie. Je pense

10 que nous pouvons faire droit à la requête formulée par Me Olujic. M. Mucic

11 pourra s’absenter puisqu’apparemment, son absence ne lésera pas la

12 défense. Il est donc fait droit à sa requête.

13 M. Olujic (interprétation) - Je vous en remercie, Monsieur le

14 Président.

15 M. Niemann (interprétation). - Maître Niemann, peut-on faire

16 entrer le témoin ?

17

18 (Le Dr Gow est introduit dans la salle)

19 M. le Président (interprétation). - Veuillez faire prêter

20 serment au témoin.

21 M. Gow (interprétation). - Je déclare solennellement que je

22 dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

23 M. le Président (interprétation). - Vous pouvez-vous rasseoir.

24 Installez-vous.

25 M. le Président (interprétation). - Maître Ackerman, vous pouvez

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1 commencer.

2 M. Ackerman (interprétation). - Bonjour, Docteur Gow

3 M. Gow (interprétation). - Bonjour.

4 M. Ackerman (interprétation). - Comment allez-vous ?

5 M. Gow (interprétation). - Bien, merci.

6 M. Ackerman (interprétation). - Nous avons pris connaissance de

7 votre accident, nous espérons que vous êtes remis et que tout va bien pour

8 vous.

9 M. Gow (interprétation). - Oui.

10 M. Ackerman (interprétation). - Commençons ce matin, si vous le

11 voulez bien, en abordant quelques résolutions du Conseil de sécurité des

12 Nations Unies. Je vais transmettre certains exemplaires au Greffe ainsi

13 qu'aux juges de la Chambre, et si quelqu'un peut m'aider, ce serait fort

14 utile.

15 Peut-on demander qu'une copie soit fournie aux cabines

16 d'interprétation.

17 M. le Président (interprétation). - J'espère que vous avez tous

18 vos papiers bien préparés.

19 M. Ackerman (interprétation). - J'y arrive, Monsieur le

20 Président. Je voudrais encore que le greffier me donne des cotes pour

21 chacun de ces documents. Il y en a quatre.

22 Mme le Greffier. - D-30/4 pour le document numéro 1; D-31/4

23 pour le numéro 2, D-32/4 pour le numéro 3 et D-33/4 pour le numéro 4.

24 M. Ackerman (interprétation). - Je vous remercie.

25 Docteur Gow, vous avez sous les yeux quatre documents et au coin

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1 supérieur gauche, vous avez une numérotation : 1, 2, 3, 4. C’est dans cet

2 ordre que j'aborderai les documents pour que nous en discutions. Je vous

3 demanderai d'abord de voir le document numéro 1 : résolution 777 du

4 19 septembre 1992. Ce qui m'intéresse, c'est que vous vous attachiez au

5 deuxième paragraphe de cette résolution qui commence par le terme "vu"ou

6 "étant donné que".

7 M. Gow (interprétation). - Je vois.

8 M. Ackerman (interprétation). - Le paragraphe dit ceci : "Etant

9 donné que l’Etat qui était autrefois connu comme la République fédérative

10 socialiste de Yougoslavie a cessé d’exister". Est-ce bien ce que cela

11 dit ?

12 M. Gow (interprétation). - Oui.

13 M. Ackerman (interprétation). - Un autre témoin est venu

14 témoigner ici et a dit que, étant donné les termes utilisés par le Conseil

15 de sécurité, il était clair que cela date du 19 septembre 1992. C’est à ce

16 moment-là que la RSFY a cessé d’exister. Vous ne seriez pas d'accord avec

17 ce que ce témoin a dit, n'est-ce pas ?

18 M. Gow (interprétation). - Ce que je dirais, avec ce document

19 que j'ai sous les yeux, c’est que l’Etat autrefois connu comme étant la

20 RSFY a cessé d'exister, mais je ne pense pas que le document dise qu'il a

21 cessé d'exister dès ce moment-là.

22 M. Ackerman (interprétation). - Je vois.

23 M. Gow (interprétation). - Le document se penche sur la question

24 de la poursuite de la succession des Etats.

25 M. Ackerman (interprétation). - Donc, ce serait une totale

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1 mauvaise interprétation de ce document que de dire que c'est à ce moment-

2 là que la fin de la RSFY peut être fixée.

3 M. Gow (interprétation). - Ce serait une erreur de dire

4 qu'aucune question ne se soit encore posée par la suite s'agissant de la

5 dissolution de ladite République, mais je ne pense

6 pas que l'on puisse dire que c'est à cette date que la RSFY a cessé

7 d'exister. Si vous voulez utiliser ceci comme argument -parce que ceci

8 renvoie à la question qui se poursuit de la succession de l'Etat-, je ne

9 pense pas que l'on puisse dire que ce soit le cas.

10 M. Ackerman (interprétation). - Pourriez-vous examiner le

11 document numéro 2 ; page 2 de ce document qui porte la cote D-31/4, il y a

12 un paragraphe qui commence par : "décide".

13 M. Niemann (interprétation). - Permettez-moi de soulever une

14 question : nous ne disposons pas des numérotations 1, 2, 3, 4, mais j'ai

15 une copie des résolutions. Alors, Me Ackerman pourrait-il citer la

16 résolution, nous pourrions ainsi mieux suivre son exposé.

17 M. Ackerman (interprétation). - Il s'agit de la résolution 760

18 du 18 juin 1992 et le paragraphe de la deuxième page qui m'intéresse

19 commence par les termes ou le terme : "décide". Voyez-vous ce paragraphe ?

20 M. Gow (interprétation). - Il s'agit du dispositif de la

21 résolution 761 ?

22 M. Ackerman (interprétation). - Non, de la 760. Au coin

23 supérieur gauche de la page 2, on voit un paragraphe qui commence par le

24 terme "décide".

25 Nous sommes bien à la deuxième page.

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1 M. Gow (interprétation). - Oui, c’est la fin de la

2 résolution 760.

3 M. Ackerman (interprétation). - Oui. Ce paragraphe fait-il bien

4 référence à la République fédérale de Yougoslavie, entre parenthèses :

5 Serbie et Monténégro -fin de parenthèse ?

6 M. Gow (interprétation). - Oui.

7 M. Ackerman (interprétation). - Ce qui veut dire que le

8 18 juin 1992, le Conseil de sécurité des Nations Unies reconnaissait tout

9 du moins l'existence de facto de la République Fédérale de Yougoslavie, à

10 savoir la Serbie et le Monténégro. Peut-on le dire sans risque de se

11 tromper ?

12 M. Gow (interprétation). - Politiquement, ceci reconnaît qu'il y

13 a une entité dénommée République fédérale de Yougoslavie. La référence à

14 la Serbie et au Monténégro semble suggérer que dans ce cas comme dans

15 d'autres, le Conseil de sécurité ne voulait pas préjuger de toute une

16 série d'autres questions.

17 M. Ackerman (interprétation). - J'aimerais maintenant que nous

18 nous intéressions au document 3, D-32/4, il s'agit de la Résolution 757 en

19 date du 30 mai 1992. Dans ce document, je vous demande de vous intéresser

20 au premier paragraphe complet qui commence par le terme : "Considérant" ou

21 "attendu que". Le voyez-vous ? Ce que dit le Conseil de sécurité ici,

22 c'est, dans les termes suivants : "L'ex-République fédérative socialiste

23 de Yougoslavie". Est-ce bien le cas ?

24 M. Gow (interprétation). - Oui.

25 M. Ackerman (interprétation). - C'est donc la reconnaissance en

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1 date du 30 mai 1992 que la RFSY n'existait plus, n'est-ce pas ?

2 M. Gow (interprétation). - Ce serait ainsi reconnaître, à mon

3 avis, que la RFSY se trouvait dans un processus de dissolution et qu'à ce

4 stade-là, il y avait une reconnaissance de fait que ce processus était en

5 train de s'achever.

6 M. Ackerman (interprétation). - Mais lorsque vous parlez de

7 John Major comme étant un ancien Premier ministre de Grande-Bretagne, vous

8 ne dites pas qu'il est en train d'abandonner ses fonctions de Premier

9 ministre, il n'est tout simplement plus Premier ministre ?

10 M. Gow (interprétation). - Ce serait le cas s'agissant de

11 M. Major. Mais j'aimerais attirer votre attention, dans le cadre de mon

12 témoignage, sur les avis de la Commission consultative Badinter lors de la

13 Conférence internationale sur la Yougoslavie, qui a donné un avis en

14 novembre 1991 indiquant par là que la RFSY se trouvait dans un processus

15 de dissolution. Ils faisaient référence au fait que les événements de

16 l'été 1991 avaient commencé

17 ce processus, processus qui n'était pas encore terminé en novembre 1991.

18 M. Ackerman (interprétation). - Le processus de dissolution

19 porte sur des questions qu'il faut aborder lorsqu'un Etat cesse d'exister,

20 n'est-ce pas ? Ce n'est pas un processus par lequel un Etat, petit à

21 petit, commence à perdre son existence. Seriez-vous d'accord avec moi pour

22 dire que dans le plus commun des bons sens, lorsqu'on dit : "Ex-RFSY",

23 cela veut dire que la RFSY n'existe plus et que nous n'avons plus que des

24 questions qui entourent ce fait, cette réalité ?

25 M. Gow (interprétation). - Si vous me le demandez à moi en tant

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1 que particulier, je vous dirai qu'à l'époque, j'avais comme opinion que la

2 RFSY avait cessé d'exister. Si vous me posez cette question à moi en tant

3 qu'expert censé prêter assistance sur la question, je dirai qu'il y a eu

4 un processus qui se poursuivait.

5 M. Ackerman (interprétation). - Mais vous estimez

6 personnellement que la RFSY avait cessé d'exister.

7 Je vais maintenant vous parler du quatrième document D-33/4, je

8 parle de la Résolution 752 du Conseil de sécurite en date du 15 mai 1992,

9 et plus particulièrement du deuxième paragraphe qui commence par les

10 mots : "Vivement préoccupés par". Ne retrouve-t-on pas les mêmes termes :

11 "L'ex-République fédérative socialiste de Yougoslavie" ?

12 M. Gow (interprétation). - C'est exact.

13 M. Ackerman (interprétation). - Je demanderai l'admission au

14 dossier des pièces D-30/4, D-31/4, D-32/4 et D-33/4.

15 M. le Président (interprétation). - Les pièces sont admises.

16 M. Ackerman (interprétation). - Je vous remercie, M. le

17 Président.

18 Parlons, si vous le voulez bien, pendant quelques instants de la

19 JNA, de l'Armée nationale yougoslave.

20 M. Gow (interprétation). - Si vous le voulez, nous pouvons.

21 M. Ackerman (interprétation). - Pendant la période au cours de

22 laquelle la JNA était encore la Force armée légitime de la RSFY,

23 seriez-vous d'accord avec moi pour dire qu'elle remplissait finalement

24 deux grandes fonctions : l'une étant la protection de la Yougoslavie

25 contre toute agression extérieure, l'autre étant la protection de l'Etat

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1 de Yougoslavie contre toute insurrection interne ?

2 M. Gow (interprétation). - Je serai tout à fait d'accord avec

3 vous pour ce qui est du premier point de la première fonction, mais

4 j'aimerais quelque peu modifier le libellé de la deuxième fonction. Vous

5 avez parlé de l'Armée yougoslave nationale, je dirai que c'est plutôt

6 l'Armée populaire. Il y a bien sûr la connotation communiste qui renvoie à

7 la nature du système. Je crois qu'ici, il est important de noter la

8 différence puisque la mission qui lui était confiée, s'agissant de

9 l'intégrité du système, était de sauvegarder l'ordre socialiste dans la

10 République socialiste fédérative de Yougoslavie.

11 M. Ackerman (interprétation). - Et aussi d'assurer le maintien

12 de l'intégrité territoriale de la RSFY ?

13 M. Gow (interprétation). - Précisément, de maintenir, de

14 préserver l'ordre socialiste de même que l'intégrité territoriale de cette

15 République.

16 M. Ackerman (interprétation). - Donc cela ferait partie de des

17 fonctions légitimes de cette Armée alors qu'elle existait ?

18 M. Gow (interprétation). - Effectivement.

19 M. Ackerman (interprétation). - Et tout combat qui se serait

20 déroulé au sein de la RSFY pendant qu'elle existait aurait eu lieu parce

21 que la JNA remplissait sa fonction qui consistait à défendre l'intégrité

22 territoriale de la RSFY ?

23 M. Gow (interprétation). - Je ne dirais pas que c'était

24 simplement ce cas-là, c'était une interprétation possible de certaines

25 actions menées, par exemple des opérations de la JNA en Slovénie en

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1 juin 1991. C'est effectivement une interprétation que l'on pourrait prêter

2 à cet

3 événement. Certains des commandants de la JNA ont donné cette

4 interprétation également pour certaines de leurs opérations en Croatie.

5 Mais je crois avoir déjà déposé ici -peut-être pas devant cette Chambre

6 mais devant une autre- et une décision a été prise. Pourquoi formellement

7 y a-t-il eu poursuite de l'existence de la RSFY pendant cette période,

8 alors que les généraux ont décidé de ne pas chercher à maintenir

9 l'intégrité territoriale de la RSFY mais d'arriver à de nouvelles

10 frontières ?

11 M. Ackerman (interprétation). - Nous allons revenir à cela mais

12 précisément? vous avez déjà mentionné l'exemple que je voulais vous

13 suggérer, celui de la Slovénie. Au cours d'un témoignage précédent, dans

14 l'affaire Tadic et dans de nombreux écrits de votre main, vous avez parlé

15 des modifications de la composition de la JNA subies depuis le début 1991

16 jusqu'au début 1992, il y a eu beaucoup de changements dans la composition

17 de l'Armée, n'est-ce pas ?

18 M. Gow (interprétation). - Oui.

19 M. Ackerman (interprétation). - Fin mai 1991, il me semble que

20 vous avez dit que moins de 3 % de la JNA étaient composés d'autres

21 personnes que des Serbes et des Monténégrins.

22 M. Gow (interprétation). - Ne faites-vous pas une erreur ? Vous

23 parlez de 1991, ne faut-il pas parler de 1992 ? Si je me souviens de mon

24 témoignage, on fait référence à mars 1992.

25 M. Ackerman (interprétation). - Vous avez tout à fait raison,

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1 c'est une erreur de typographie, il s'agit bien de 1992 et non de 1991.

2 Vous avez dit dans votre déposition dans le procès Tadic qu'en

3 fait, la partie Serbe de l'Armée en mars 1992 était de 90 %, et il n'y

4 avait plus que 10 % de non-Serbes.

5 M. Gow (interprétation). - C'est exact.

6 M. Ackerman (interprétation). - Vous avez estimé qu'à ce stade,

7 il y aurait eu

8 environ 5 % de Monténégrins ?

9 M. Gow (interprétation). - Approximativement.

10 M. Ackerman (interprétation). - Et la partie serbe de la JNA à

11 ce stade comportait énormément de Serbes de Bosnie, n'est-ce pas ?

12 M. Gow (interprétation). - En mars 1992 ? C'est exact.

13 M. Ackerman (interprétation). - Selon certaines estimations, il

14 y aurait eu au moins 80 % de Serbes de Bosnie dans la JNA.

15 M. Gow (interprétation). - Il se peut que des estimations aussi

16 élevées aient été prononcées. Je pensais plutôt à 50 ou 80 000 personnes.

17 M. Ackerman (interprétation). - Je cite ce que vous avez écrit

18 dans "James*" en août 1992. Je vais vous demander si vous êtes d'accord :

19 "Selon certaines estimations, dans la YPA" -la même chose que la JNA- "on

20 estime qu'il y a éventuellement 80 % de Serbes de Bosnie", ce sont vos

21 termes ?

22 M. Gow (interprétation). - Oui, je suis d'accord puisque c'est

23 ce que j'ai écrit.

24 M. Ackerman (interprétation). - Dans le même paragraphe, vous

25 dites qu'il est certain qu'au moins 80 % des YA en Bosnie sont restés sur

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1 place lorsque le nouvel Etat yougoslave a ordonné à ses citoyens dans

2 l'Armée de rentrer de Bosnie. Vous parlez de la décision prise en mai 1992

3 pour diviser la JNA ?

4 M. Gow (interprétation). - Oui.

5 M. Ackerman (interprétation). - Mais n'y a-t-il pas eu un moment

6 où la JNA elle-même a cessé d'exister en tant que Force armée légitime de

7 la RSFY ?

8 M. Gow (interprétation). - Si je puis me permettre, je vous

9 demanderai d'éviter le terme "légitime" pour que les choses soient plus

10 simples et plus courtes. Je dirais que oui, en effet, la RSFY a cessé

11 d'exister en mai 1992, bien que son fantôme se soit poursuivi pendant

12 toute la guerre de Bosnie et qu'aujourd'hui, il y ait une relation qui

13 continue à exister, c'est-à

14 dire que la JNA continue à constituer un obstacle dans le processus de

15 Dayton, comme l'Ambassadeur représentant spécial des Etats-Unis l'a

16 souligné il y a quelques mois.

17 M. Ackerman (interprétation). - Vous seriez d'accord avec moi

18 pour dire, n'est-ce pas, que d'une manière générale, une armée ne peut

19 être une armée légitime que si elle sert un Etat légitime ?

20 M. Gow (interprétation). - Je crois que c'est un problème très

21 complexe, tout dépend du fait de savoir si vous parlez de légitimité

22 juridique ou de légitimité en tant que phénomène social. A moins que vous

23 n'insistiez auprès de moi, je voudrais éviter d'entamer un séminaire sur

24 cette question.

25 M. Ackerman (interprétation). - Dans votre ouvrage

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1 intitulé "Légitimité", votre premier ouvrage, vous discutez de la question

2 et vous dites qu'une armée ne peut pas être légitime si elle ne sert pas

3 un Etat qui existe. A moins qu'il y ait situation de guerre ou quelque

4 chose de ce genre.

5 M. Gow (interprétation). - Je dirai que toutes les armées ont

6 besoin d'Etat. Une armée telle que la JNA, qui existait dans un système

7 fédéral et dans un pays multi-ethnique, ce qu'était la RSFY, a besoin

8 d'avoir un certain degré de consentement social et politique, elle a

9 besoin d'une certaine orientation pour pouvoir effectuer le travail qui

10 incombe à une armée. Je crois que ce que dit le général Kadijevic dans ses

11 propos est fonda mental, aucune armée au monde ne peut exister s'il n'y a

12 pas un Etat derrière cette armée. C'est ce qui explique la modification de

13 la mission de la JNA qui, au départ, protégeait la RSFY et ensuite a eu

14 une autre mission.

15 M. Ackerman (interprétation). - Pourquoi la RSFY a-t-elle cessé

16 d'exister ? Du point de vue de la légitimité puisque le pays a cessé

17 d'exister, la JNA aurait nécessairement dû cesser d'exister également ?

18 M. Gow (interprétation). - Je ne suis pas sûr de bien comprendre

19 ce que vous

20 voulez dire par : "Du point de vue de la légitimité". La JNA a traversé un

21 processus de désintégration comme la RSFY et à un certain moment, les deux

22 entités ont cessé formellement, officiellement, d'exister.

23 M. Ackerman (interprétation). - Au fil des questions que je vais

24 poser maintenant, je suppose que vous comprendrez mieux ce que je veux

25 dire par là. Un moment est arrivé où les officiers et les soldats qui

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1 faisaient partie de la JNA se sont trouvés dans une situation où elle

2 servait les intérêts autres, par exemple d'anciens membres de la JNA sont

3 entrés dans l'Armée croate, d'anciens membres de la JNA sont entrés dans

4 l'armée Serbe de Bosnie, d'anciens membres de la JNA sont entrés dans

5 l'armée de Bosnie-Herzégovine, d'anciens membres de la JNA sont entrés

6 dans l'armée de la République fédérale yougoslave. Donc, d'une certaine

7 façon, il est permis de parler de ceux qui se battaient pour chacune de

8 ces quatre armées ou pour chacun de ces quatre partis militaires comme

9 d'anciens membres de la JNA.

10 M. Gow (interprétation). - La question que vous me posez est :

11 peut-on parler de ceux qui étaient dans l'ancienne JNA comme d'anciens

12 membres de la JNA, comme constituant l'ancienne JNA ?

13 M. Ackerman (interprétation). - Oui.

14 M. Gow (interprétation). - En effet.

15 M. Ackerman (interprétation). - Donc, si quelqu'un parle des

16 événements en cours en Bosnie-Herzégovine à l'époque et les situe dans ce

17 contexte comme impliquant une composante de l'ex-JNA, ils peuvent parler

18 de l'Armée croate, de l'Armée de Bosnie-Herzégovine, de l'Armée serbe de

19 Bosnie en utilisant ce mot parce que dans toutes ces armées il y avait des

20 composantes de l'ancienne JNA.

21 M. Gow (interprétation). - Je crois que ce serait une

22 interprétation abusive ou trompeuse que de dire que la présence

23 d'individus suffit à parler comme vous le faites. On peut parler de

24 composantes, mais si l'on parle de composantes, cela signifie, je suppose,

25 qu'il faut

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1 aussi des orientations théoriques de la JNA et il est assez douteux que

2 l'armée de Bosnie-Herzégovine ait hérité des théories de la JNA.

3 C'est ce que vous venez de dire. Nous parlons de l'armée croate

4 de Bosnie-Herzégovine, de la Défense territoriale slovène, mais ces

5 éléments sont dans une situation où d'anciens membres de la JNA ont changé

6 de bord de façon à ne plus se battre contre leur propre parti.

7 M. Ackerman (interprétation). - Mais si vous regardez les unités

8 de l'ancienne JNA, vous constatez dans pas mal de cas que ces anciennes

9 unités sont restées pratiquement intactes et qu'elles ont gardé leurs

10 officiers, leurs soldats et leurs équipements.

11 M. Gow (interprétation). - A l'époque de la division de la JNA,

12 les unités de Bosnie-Herzégovine ont simplement été reprises en l'état.

13 M. Ackerman (interprétation). - Oui.

14 Je crois que la position que vous défendez ici aujourd'hui

15 correspond d'ailleurs à celle que vous avez défendue dans l'affaire Tadic

16 et consiste à dire que la JNA a cessé d'exister en mai 1992. Ai-je bien

17 compris ?

18 M. Gow (interprétation). - Elle a été divisée officiellement en

19 mai 1992.

20 Dans cette affaire, dans l'affaire Tadic et en d'autres

21 occasions, j'ai dit que cette division n'était pas une division absolument

22 authentique.

23 M. Ackerman (interprétation). - En avril 1992, au moment de la

24 constitution de la République fédérale yougoslave... C'est bien en

25 avril 1992 ?

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1 M. Gow (interprétation). - Je crois qu'elle a été programmée le

2 27 avril 1992.

3 M. Ackerman (interprétation). - Oui, à un certain moment en

4 avril. Donc, en mai 1992, nous voyons la JNA annoncer la division dont

5 nous venons de parler, c'est-à-dire le retrait de toutes les composantes

6 serbes et monténégrines du territoire de la Bosnie-Herzégovine en laissant

7 en Bosnie-Herzégovine les Serbes de Bosnie qui faisaient partie de ces

8 anciennes unités de la JNA.

9 M. Gow (interprétation). - Je crois que vous avez parlé du mois

10 d'avril ; en fait c'est le 4 mai 1992 et les soldats serbes et

11 monténégrins ont été authentiquement retirés même si dans certains

12 documents vous trouverez des références à la présence de ces soldats par

13 la suite ; officiellement ils se sont retirés.

14 M. Ackerman (interprétation). - Et ce retrait a été effectué par

15 la République fédérale yougoslave parce qu'elle estimait que laisser des

16 Monténégrins et des Serbes sur le territoire de Bosnie-Herzégovine

17 entraînerait une évaluation négative de la part de la communauté

18 internationale eu égard à la JNA. C'est bien cela ?

19 M. Gow (interprétation). - C'est cela.

20 M. Ackerman (interprétation). - Ceci est fondée sur une décision

21 prise par la Présidence de la République fédérale yougoslave

22 le 4 mai 1992, décision de retirer tous ceux qui s'élevaient au sein de la

23 JNA et qui étaient serbes et monténégrins du territoire de Bosnie-

24 Herzégovine.

25 M. Gow (interprétation). - Oui.

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1 M. Ackerman (interprétation). - Cette évacuation a commencé le

2 19 mai 1992 ?

3 M. Gow (interprétation). - Moi, j'ai compris qu'elle devait

4 commencer après le 4 mai et s'achever, c'est-à-dire prendre effet

5 le 19 mai 1992. En fait, elle n'a pas été achevée à cette date mais

6 l'intention initiale consistait à la terminer à cette date.

7 M. Ackerman (interprétation). - Si vous examinez les sujets dont

8 nous venons de discuter ce matin, et ceux dont nous avons discuté la

9 dernière fois que vous vous êtes trouvé dans cette salle, une fois déclaré

10 l'existence de la République fédérale yougoslave comme associant la Serbie

11 et le Monténégro, -nous en avons parlé la dernière fois que vous étiez

12 ici- l'autorité de ce gouvernement ne pouvait pas aller au-delà des

13 frontières du territoire de la Serbie et du Monténégro ; ces frontières

14 constituaient donc l'élément territorial de ce

15 gouvernement. J'ai du mal à trouver les mots mais ce sont bien les limites

16 de l'autorité territoriale de ce gouvernement, Serbie, Monténégro.

17 M. Gow (interprétation). - Vous avez un avantage sur moi, vous

18 vous rappelez ce que nous avons dit au mois de décembre, mais enfin je

19 crois qu'effectivement la Serbie et le Monténégro ont déclaré

20 officiellement l'existence de la République fédérale yougoslave avec à

21 l'esprit les questions dont nous avons discuté, c'est-à-dire éviter d'être

22 considérés comme responsables des événements survenus en Bosnie-

23 Herzégovine dans lesquels cette République fédérale jouait tout de même un

24 rôle important.

25 Mais le contenu juridique, le contenu officiel de cette

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1 République, c'étaient la Serbie et le Monténégro. Je pense que si l'on

2 parle d'autorité, il apparaît clairement que cette autorité s'étendait

3 aussi au territoire de la Republika Srpska, de Voïvodine et d'ailleurs.

4 C'est la raison pour laquelle les représentants de ces autres entités se

5 rendaient souvent à Belgrade pour rechercher des instructions.

6 On peut aussi penser, au moment où Belgrade reconnait

7 officiellement que la RSFY ne sera pas reconstituée, et qu'elle aborde le

8 problème des droits sur la Krajina de cette République socialiste

9 fédérative de Yougoslavie, avec transfert sur la République fédérale

10 yougoslave... Il y a un passage de la constitution qui stipule que la

11 République fédérale yougoslave se compose de la Serbie et du Monténégro

12 mais que les autres ont toujours le droit de la rejoindre.

13 M. Ackerman (interprétation). - Sur un plan purement juridique,

14 je suis d'accord avec vous sur la date du 27 avril pour notre discussion.

15 En tout cas, à partir du moment où la République fédérale yougoslave a été

16 déclarée Etat composé de la Serbie et du Monténégro, les habitants de

17 Slovénie , de Croatie, de Bosnie-Herzégovine ne pouvaient plus être des

18 sujets de la République fédérale yougoslave puisqu'ils étaient les sujets

19 d'autres pays dotés de légitimité et indépendants.

20 M. Gow (interprétation). - Moi, j'ai quelque hésitation à parler

21 de pays qui n'entrent pas réellement dans mes compétences mais le terme de

22 "sujets" ne me paraît pas le plus approprié.

23 La question, me semble-t-il, se résume au fait de savoir si

24 c'était bien le choix des autorités de la République fédérale yougoslave

25 qui s'exerçait quant au fait de savoir si elle acceptait ou pas ces

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1 citoyens comme ressortissants de son pays. Les passeports de la République

2 socialiste fédérative yougoslave étaient acceptés en République fédérale

3 yougoslave mais pas tous, donc c'était la RFY qui choisissait les

4 passeports qu'elle acceptait ou ceux qu'elle n'acceptait pas. Par

5 conséquent, il est difficile de rester lié absolument par les mots puisque

6 finalement cette autorité s'exerçait sur la base d'un choix de l'Etat

7 plutôt que du choix des individus concernés.

8 M. Ackerman (interprétation). - Avez-vous lu la constitution de

9 la RFY ?

10 M. Gow (interprétation). - Oui.

11 M. Ackerman (interprétation). - Savez-vous comment elle définit

12 les ressortissants de la RFY ?

13 M. Gow (interprétation). - Elle les définit comme habitants de

14 la Serbie et du Monténégro pour autant que je me rappelle.

15 M. Ackerman (interprétation). - Merci.

16 M. Gow (interprétation). - Mais pour revenir à ce problème de la

17 décision, les habitants de la Serbie et du Monténégro peuvent être

18 n'importe quelle personne que les autorités de RFY ont accepté sur leur

19 territoire.

20 M. Ackerman (interprétation). - Dans un langage normal, il

21 s'agit de gens qui vivent sur un territoire donné.

22 M. Jan (interprétation). - Quand la constitution est-elle entrée

23 en vigueur ?

24 M. Moran (interprétation). - Monsieur le Juge, j'ai un

25 exemplaire, je peux

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1 répondre à cette question : c'est avril 1992 mais je ne me rappelle pas la

2 date exacte.

3 M. Gow (interprétation). - Le 27 avril 1992.

4 M. Jan (interprétation). - Merci.

5 M. Gow (interprétation). - Je vous prie de m'excuser : puis-je

6 terminer ma réponse ? C'était une question de choix et de ce fait, pas mal

7 de personnes qui étaient ressortissants de RFY ne résidaient pas sur le

8 territoire de la RFY, comme dans cette salle ici aujourd'hui nous avons

9 pas mal de personnes qui ne sont pas des ressortissants des Pays-Bas.

10 C'était donc une question qui dépendait du choix du gouvernement.

11 Je connais des personnes qui habitaient en Serbie et au

12 Monténégro et à qui le gouvernement de la RFY a refusé la citoyenneté et

13 je connais également des gens qui ne sont pas ressortissants de Serbie et

14 du Monténégro et qui ont été admis.

15 M. Jan (interprétation). - Est-ce que la Serbie le Monténégro

16 sont des unités géographiques bien définies ?

17 M. Gow (interprétation). - Oui, tout à fait.

18 M. Ackerman (interprétation). - Je voudrais maintenant que nous

19 poursuivions notre discussion au sujet de l'arrêt de mai 1992 selon lequel

20 les officiers et les soldats qui servaient au sein de la JNA en Bosnie-

21 Herzégovine ont été renvoyés en Serbie et au Monténégro. Connaissez-vous

22 cet arrêt de la Présidence qui est paru le 21 mai 1992 à ce sujet ?

23 Je vais d'ailleurs vous en remettre un exemplaire de façon que

24 vous sachiez exactement de quoi nous parlons.

25 M. Niemann (interprétation). - Y a-t-il un exemplaire pour

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1 l'accusation ?

2 M. Ackerman (interprétation). - Je crois que cela vous a déjà

3 été remis avant la déposition de ce témoin, la dernière fois. C'est un

4 document où l'on voit en entête : "Pourquoi utiliser la société et le

5 droit ?" Vérifiez, Monsieur Niemann, mais si vous ne l'avez pas ici, je

6 peux vous en remettre un autre exemplaire immédiatement.

7 Ensuite, nous lisons dans le texte : "Chronologie des

8 événements". Monsieur le Président, je parle du passage en deuxième page

9 qui commence par la date du 21 mai. Est-ce que le Greffe pourrait me

10 donner la cote de cette pièce à conviction ?

11 Mme le Greffier (interprétation). - Document D-34/4.

12 M. Ackerman (interprétation). - Merci. Avez-vous ce document

13 entre les mains maintenant, Docteur Gow ?

14 M. Gow (interprétation). - Oui.

15 M. Ackerman (interprétation). - J'aimerais vous renvoyer aux

16 termes qui sont inscrits en page 2, sous la date du 21 mai. Dans ce

17 passage, vous trouverez l'expression : "La Présidence de la Yougoslavie

18 n'a plus compétence pour prendre des décisions relatives aux opérations

19 militaires sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine". Est-ce que vous

20 voyez ce passage ?

21 M. Gow (interprétation). - Oui.

22 M. Ackerman (interprétation). - C'est bien une indication,

23 n'est-ce pas, émanant en tout cas de la Présidence de la République

24 fédérale yougoslave que celle-ci n'exerçait plus aucun contrôle sur les

25 habitants, sur les ressortissants de Bosnie-Herzégovine qui participaient

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1 au conflit dans l'armée des Serbes de Bosnie ?

2 M. Gow (interprétation). - S'il vous plaît, pourriez-vous

3 répéter ?

4 M. Ackerman (interprétation). - C'est une déclaration qui émane

5 de la Présidence de la République fédérale yougoslave, selon laquelle

6 celle-ci déclare ne plus avoir aucune compétence lui permettant de

7 contrôler les opérations militaires menées sur le territoire de Bosnie-

8 Herzégovine par les membres de l'armée serbe de Bosnie.

9 M. Gow (interprétation). - C'est une déclaration qui va dans ce

10 sens.

11 M. Ackerman (interprétation). - J'aimerais maintenant vous

12 montrer un autre

13 document. Maître Niemann, c'est le document qui porte la date du 25 mai.

14 Ce sera donc la pièce à conviction D-35/4 ?

15 Mme le Greffier (interprétation). - 0ui, en effet.

16 M. Ackerman (interprétation). - Merci.

17 M. le Président (interprétation). - (Hors micro.)

18 M. Ackerman (interprétation). - La différence, Monsieur le

19 Président, c'est le contenu de la deuxième page. Les premières pages sont

20 toutes identiques, elles donnent le contenu du document et en deuxième

21 page, nous avons des extraits de la source en question. Avez-vous ce

22 document entre les mains, Docteur Gow ?

23 M. Gow (interprétation). - Oui.

24 M. Ackerman (interprétation). - Selon ce document, le 25 mai, la

25 Présidence de la Yougoslavie a discuté de la résolution du Conseil de

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1 sécurité des Nations Unies du 15 mai, c'est-à-dire celle par laquelle le

2 Conseil de sécurité ordonnait à la République fédérale yougoslave de

3 retirer la JNA du territoire de Bosnie-Herzégovine. Elle a discuté

4 également du rapport de Secrétaire général sur la Yougoslavie et des

5 démarches effectuées par le Président du Conseil de sécurité le 21 mai.

6 "La Présidence prend note du fait que des tentatives

7 injustifiées sont faites pour transférer la responsabilité de la guerre

8 ethnique en Bosnie-Herzégovine sur la République fédérale yougoslave. Elle

9 déclare que la République fédérale yougoslave fera de son mieux pour

10 coopérer et participer aux activités et décisions des Nations Unies.

11 "Elle déclare qu'elle est prête à contribuer aux efforts des

12 Nations Unies et des organisations humanitaires internationales qui

13 oeuvrent en Bosnie-Herzégovine.

14 Elle lance un appel à toutes les parties pour qu'elles

15 autorisent le déblocage de l'aéroport de Sarajevo.

16 Elle appelle également toutes les parties belligérantes à

17 immédiatement

18 interrompre leurs pilonnages sur Sarajevo et Mostar et à immédiatement

19 cesser les destructions subies par les autres villes.

20 Elle appelle certaines formations militaires présentes en

21 Bosnie-Herzégovine à cesser leurs actes inacceptables et cet appel

22 s'adresse notamment aux formations de cette nature relevant du peuple

23 serbe."

24 C'est bien ce qui est écrit dans ce passage, n'est-ce pas ?

25 M. Gow (interprétation). - Oui, en effet.

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1 M. Ackerman (interprétation). - Est-ce que vous connaissez le

2 message que Branko Kostic a envoyé le 1er juin 1992 à Boutros Boutros-

3 Ghali, Secrétaire général des Nations Unies, Branko Kostic étant le

4 Président de la Présidence yougoslave ?

5 M. Gow (interprétation). - Non cela ne me revient pas

6 immédiatement.

7 M. Ackerman (interprétation). - Pour vous aider, je peux vous

8 dire qu'il s'agit d'un message envoyé au Secrétaire général, selon lequel

9 la résolution du 30 mai des Nations Unies reposait sur des accusations et

10 des présomptions erronées.

11 M. Gow (interprétation). - Je suis au courant du fait qu'un

12 message de ce genre a été envoyé.

13 M. Ackerman (interprétation). - Et en fait, le 1er juin 1992,

14 Kostic invite le Conseil de sécurité des Nations Unies à envoyer un

15 observateur en Yougoslavie pour qu'il puisse voir la réalité des faits de

16 ses yeux.

17 M. Gow (interprétation). - Je suis prêt à accepter ce que vous

18 dites comme étant exact. Je me rappelle qu'un appel a été lancé pour

19 envoyer des contrôleurs sur tout le long de la frontière, ce qui, bien

20 sûr, a été considéré comme inacceptable car cela allait nettement trop

21 loin.

22 M. Ackerman (interprétation). - Permettez-moi de vous montrer un

23 autre document, s'il vous plaît.

24 M. Ackerman (interprétation). - Maître Niemann, il s'agit du

25 document du 1er juin, à titre d'information.

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1 Avez-vous le document entre les mains ?

2 M. Gow (interprétation). - Oui, en effet.

3 M. Ackerman (interprétation). - Il est daté du 1er juin 1992 et

4 dit ce qui suit : "Dans son message au Secrétaire général des Nations

5 Unies, Boutros Boutros-Ghali, Branko Kostic, Président de la Présidence

6 yougoslave, déclare que le Conseil de sécurité des Nations Unies a imposé

7 des sanctions sévères à la Yougoslavie sur la base d'accusations erronées

8 selon lesquelles la Yougoslavie aurait commis une agression contre la

9 Bosnie-Herzégovine.

10 De façon à se faire une idée exacte de la situation, Kostic

11 propose aux Nations Unies d'envoyer des observateurs en Yougoslavie" (fin

12 de citation). Voilà les termes utilisés dans cette déclaration, n'est-ce

13 pas ?

14 M. Gow (interprétation). - Effectivement, si les termes utilisés

15 vous intéressent, je reviendrai à ce que nous avons déjà dit avant, à

16 savoir que les termes "Président de la Présidence" sont des termes qui

17 viennent de la République socialiste fédérative de Yougoslavie et qu'ils

18 concernent une fonction qui d'ailleurs n'existe plus après la déclaration

19 de la République fédérale yougoslave.

20 M. Ackerman (interprétation). - Suite aux ordres donnés aux

21 ressortissants de la République fédérale yougoslave leur demandant de

22 quitter la Bosnie-Herzégovine, vous savez que les derniers membres de l'ex

23 JNA ont quitté la caserne du maréchal Tito de Sarajevo le 5 juin 1992.

24 M. Gow (interprétation). - Je suis prêt à accepter le fait

25 qu'ils sont partis de la caserne du maréchal Tito le 5 juin 1992, je ne me

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1 rappelle pas la date exacte de cet événement, mais cela ne me pose pas de

2 problème d'accepter celle que vous venez de donner.

3 M. Ackerman (interprétation). - Je voudrais maintenant que nous

4 examinions ensemble un autre document.

5 M. Gow (interprétation). - J'ajouterai qu'ils ont quitté la

6 caserne du maréchal Tito, mais que cela ne signifiait pas qu'ils étaient

7 les derniers ressortissants de la RFY à quitter le territoire de Bosnie-

8 Herzégovine.

9 M. Ackerman (interprétation). - J'aimerais que ce document soit

10 enregistré. Je pense que ce sera la pièce portant la cote D-37/4.

11 M. le Greffier (interprétation). - En effet, c'est cela.

12 M. Ackerman (interprétation). - Maître Niemann, il s'agit du

13 rapport du Secrétaire général à la suite de la résolution du Conseil de

14 sécurité 752, paragraphe 4 de cette résolution.

15 Docteur Gow, disposez-vous de ce document maintenant ?

16 M. Gow (interprétation). - Oui, il s'agit du rapport du

17 Secrétaire général.

18 M. Ackerman (interprétation). - A la deuxième page de ce

19 document que vous avez sous les yeux, la page 517, en bas, vous

20 constaterez au paragraphe 6, un rapport du Secrétaire général détaillant

21 le retrait des citoyens Serbes et Monténégrins de Bosnie-Herzégovine. Il

22 dit : "la plupart d'entre eux, semble-t-il, se sont rendus en Serbie et au

23 Monténégro, certains d'entre eux ont fait l'objet d'attaques pendant leur

24 retrait, d'autres sont restés dans diverses garnisons de Bosnie-

25 Herzégovine, notamment dans les zones contrôlées par les Serbes, y compris

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1 deux installations aux abords de Sarajevo. Des personnels ont été bloqués

2 dans leur caserne par la Défense territoriale de Bosnie-Herzégovine ou par

3 des forces irrégulières hostiles, la plupart du temps, dans la région de

4 Sarajevo".

5 Ensuite, il parle de 600 à 1000 soldats bloqués dans la caserne

6 du maréchal Tito de Sarajevo.

7 A l'alinéa b, il parle de plusieurs centaines de soldats de la

8 JNA basés

9 logistiquement à Sarajevo qui étaient sur le point de se retirer le

10 27 mai, 28 mai et qui ont fait l'objet d'attaques de membres de forces

11 irrégulières Serbes qui s'opposaient au retrait de Bosnie-Herzégovine et

12 plusieurs centaines de cadets de la JNA ont été bloqués à Posevic*, près

13 de Sarajevo. Ils ont finalement été évacués le 29 mai.

14 Essentiellement, le Secrétaire général au Conseil de sécurité à

15 ce moment-là a dit qu'à sa connaissance, en se fondant sur ses sources,

16 les unités Serbes et Monténégrines restant en Bosnie-Herzégovine étaient

17 celles qui voulaient…, mais étaient empêchées d'une manière ou d'une autre

18 soit par les forces Serbes, soit par la Bosnie-Herzégovine qui les

19 bloquaient à divers endroits. Est-ce là une bonne interprétation ?

20 M. Gow (interprétation). - Oui, c'est le contenu de ce que vous

21 avez lu.

22 M. Ackerman (interprétation). - Dans ce rapport, au

23 paragraphe 17, à la page 590, il est évident que ce rapport a été déposé

24 auprès du Conseil de sécurité après l'adoption de la résolution du 30 mai

25 imposant des sanctions à la République fédérale yougoslave pour n'avoir

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1 pas retiré les citoyens Serbes et Monténégrins de Bosnie-Herzégovine,

2 parce que le Secrétaire général fait référence à cette décision au

3 paragraphe 17, n'est-ce pas ?

4 M. Gow (interprétation). - Oui

5 M. Ackerman (interprétation). - On peut interpréter cela comme

6 une information donnée au Conseil de sécurité, conformément à ce qu'a

7 déclaré Branko Kostic à ce Conseil de sécurité, l'autorisation se fonde

8 sur des faits non existants et, de ce fait, est impropre. En fait, le

9 Secrétaire général dit à peu près la même chose, à savoir que toute le

10 monde qui était autorisé à quitter la Serbie et le Monténégro était parti

11 et ils étaient les seuls qui étaient maintenus contre leur volonté.

12 C'est une résolution intéressante du Conseil de sécurité, nous

13 espérons que ceci aura un certain effet sur la détermination de la

14 communauté internationale pour mettre un terme au combat en Bosnie-

15 Herzégovine et facilitera les négociations pour parvenir aux

16 accords nécessaires.

17 M. Gow (interprétation). - C'est une façon de lire le

18 paragraphe 17, cela peut l'être, je ne pense pas qu'il soit nécessaire

19 d'avoir une lecture précise et de le lier aux déclarations de Kostic. Cela

20 dit, simplement, dans ce rapport et dans le paragraphe, cela fait

21 référence à des éléments produits essentiellement autour de Sarajevo. Dans

22 ce rapport, vous voyez au paragraphe 4, étant donné les restrictions

23 considérables, qu'il n'a pas été possible d'obtenir les informations

24 complètes. Donc, je crois que le rapport du Secrétaire général commence

25 par reconnaître que les informations sur lesquelles il peut effectuer une

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1 vision concrète, sont ces éléments, mais cela ne fait pas nécessairement

2 référence à l'ensemble de la situation dans tout le pays et il y a une

3 différence, à mon avis, entre ce que le Secrétaire général dit dans son

4 rapport, en faisant état d'un certain nombre de faits : "je ne connais pas

5 tous les éléments" et ce que Branko Kostic déclare, car il a une volonté

6 politique et il essaie de s'opposer aux mesures du Conseil de sécurité qui

7 vient du rôle joué par Belgrade en Bosnie-Herzégovine. Je voudrais dire

8 que si vous voulez dire que Kostic a dit ceci, effectivement, il l'a dit.

9 Cela ne veut pas dire que c'est absolument précis, mais ce n'est pas la

10 question que vous m'avez posée et je pense que la réponse à cela serait

11 "pas nécessairement".

12 Donc, je ne sais pas si vous allez produire le rapport du

13 Secrétaire général du 15 juin. Si vous voulez, nous pourrons revenir à

14 cela concernant la présence des unités de la JNA ou des éléments de la JNA

15 de Serbie et du Monténégro demeurés en Bosnie-Herzégovine en dépit du

16 délai du 19 mai qui avait expiré. Il y a toute une série d'éléments qui ne

17 correspondent pas nécessairement exactement à ce que le Secrétaire général

18 et Branko Kostic disent. Il ne faut pas oublier deux éléments : Belgrade

19 sciemment prend des décisions en vue de tromper ou de déguiser ses

20 intentions, pour essayer d'éviter d'être sanctionnée et pour

21 officiellement diviser l'Armée et la laisser là où elle est, comme vous

22 l'avez décrit vous-même, les unités, les composantes, dans le cadre d'une

23 campagne de Belgrade. Donc le Conseil de

24 sécurité se penche sur la responsabilité de Belgrade pour cette situation

25 tandis que dans d'autres cas, la Slovénie, la Croatie, d'autres parties

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1 serbes de la Bosnie et la Macédoine ont activement retiré tout

2 l'équipement qu'elles pouvaient afin qu'il ne tombe pas dans les mains

3 d'autrui. Ils ont détruit tout ce qu'ils ont pu derrière eux et je crois

4 que les membres permanents du Conseil de sécurité avaient peut-être, par

5 voie diplomatique, d'autres informations que le rapport du Secrétaire

6 général. Il ne faut pas oublier tout cela.

7 M. Ackerman (interprétation). - Il est improbable que le Conseil

8 de sécurité aurait eu plus d'éléments concernant la situation en Bosnie-

9 Herzégovine que le Secrétaire général à propos de la situation le 30 mai.

10 M. le Président (interprétation). - Pourrions-nous arrêter un

11 moment et reprendre à 14 heures 30 de façon à ce que M. Mucic puisse aller

12 à son service religieux ?

13 M. Ackerman (interprétation). - D'accord, mais avant la pause

14 j'aimerais que l'on verse au dossier les pièces 34/4, 35/4, 36/4 et 37/4.

15 M. le Président (interprétation). - Je ne comprend pas ce que

16 vous venez de dire.

17 M. Ackerman (interprétation). - Je veux simplement que l'on

18 verse ces pièces au dossier.

19 Mme Residovic (interprétation). - J'aimerais que l'on nous

20 accorde une demi-heure parce que, si j'ai bien compris, les officiers de

21 sécurité vont être aux côtés de nos accusés dans la salle d'audience ; je

22 souhaiterais qu'on leur donne la possibilité de sortir. Pourrait-on avoir

23 une pause d'une demi-heure de façon à ce que nos accusés puissent sortir

24 fumer une cigarette ?

25 M. le Président (interprétation). - Mais nous avons levé la

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1 séance jusqu'à 14 heures 30.

2 Mme Residovic (interprétation). - Veuillez m'excuser.

3 (L'audience est suspendue à 12 heures 10, elle reprendra à 14 heures 30.

4 (L'audience est reprise à 14 heures 35.)

5 M. le Président (interprétation). - Bon après-midi Mesdames et

6 Messieurs.

7 Vous pouvez peut-être rappeler le témoin à la barre.

8 (Le témoin est introduit tant la salle d'audience.)

9 M. le Président (interprétation). - Veuillez rappeler au témoin

10 qu’il témoigne toujours sous serment.

11 M. Gow (interprétation). - J'en suis conscient.

12 M. le Président (interprétation). - Le témoin est à vous, Maître

13 Ackerman.

14 M. Ackerman (interprétation). - Merci beaucoup.

15 Professeur Gow, j’ai une bonne et une mauvaise nouvelles pour

16 vous. La bonne nouvelle, c’est que je n’ai que très peu de questions à

17 vous poser, et la mauvaise nouvelle, c’est qu’il y a trois autres avocats

18 qui vont me succéder.

19 M. Gow (interprétation). - Je m'y attendais.

20 M. Ackerman (interprétation). - Avec l'aide de l'huissier, je

21 vais vous soumettre un dernier document. Il y a une copie supplémentaire à

22 l'intention de Me Niemann.

23 Quelle sera la cote de ce document ?

24 Mme le Greffier. - D-38/4.

25 M. Ackerman (interprétation). - Je vous remercie.

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1 Professeur Gow, vous avez une traduction en anglais et

2 l'original en serbo-croate de cette pièce. Je crois qu'il y a sur

3 l'original aussi une signature originale.

4 Voici ma question : reconnaissez vous ce document comme étant un

5 document que vous avez déjà vu ?

6 M. Gow (interprétation). - En ce moment même, je ne peux pas

7 vous dire. Cela ressemble à des documents que j'ai vu, mais il m’est

8 impossible de vous dire sans autre moyen

9 de contrôle que j’ai déjà vu ce document ci.

10 M. Ackerman (interprétation). - Apparemment, ce document serait

11 un ordre émanant du chef de l'état-major des forces armées qui ordonne que

12 des citoyens de la République fédérale de Yougoslavie soient évacués de

13 Bosnie-Herzégovine et l’on énumère les unités qu’il faudra enlever du

14 territoire de Bosnie-Herzégovine.

15 M. Gow (interprétation). - Cela semble être quelque chose de ce

16 genre. Je vois, à partir de la traduction, que c'est le chef d'état-major

17 des forces armées -tout du moins la photocopie le dit mais l'original ne

18 le montre pas clairement.

19 M. Ackerman (interprétation). - Mais vous savez que le 11 mai ou

20 aux alentours de cette date en 1992, il y a eu un ordre qui a été donné.

21 Vous en avez parlé dans votre témoignage.

22 M. Gow (interprétation). - Bien sûr, il y a eu des ordres

23 concernant la redistribution du personnel et des unités.

24 M. Ackerman (interprétation). - Je demanderai que cette pièce

25 soit admise au dossier. Il s'agit de la pièce portant cote 38/4.

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1 M. le Président (interprétation). - Cette pièce sera admise.

2 M. Ackerman (interprétation). - Merci.

3 Professeur Gow, en juin 1993, vous avez publié un article dans

4 **James** et lorsque vous avez rédigé cet article, il était clair pour

5 vous que l'Armée de la République fédérale de Yougoslavie n'était pas

6 engagée à ce moment-là dans des combats en Bosnie-Herzégovine.

7 Est-ce là une façon équitable d'interpréter ce document ?

8 M. Gow (interprétation). - Je ne suis pas de cet avis là. Je ne

9 vois pas tout à fait comment vous lisez cet article.

10 M. Ackerman (interprétation). - Avant d'aller plus loin soyons

11 honnêtes et citons

12 vos mots. Si besoin en est, je pourrai vous montrer l'article et vous

13 pourrez confirmer mes dires, vous me direz si c'est nécessaire. Je cite :

14 "Les déclarations des Généraux** Stefanovic* et Panic selon lesquelles la

15 YA pouvait entrer en Bosnie et en Croatie doivent être prises

16 sérieusement. Il se peut que les menaces visant à utiliser l'armée

17 yougoslave dans le cas où il y aurait une intervention internationale sur

18 le territoire de l'ex-Etat de Yousgoslavie ne soient que de la rhétorique.

19 Il n'empêche qu'avec la démarche Stefanovic qui gagne en ascendant, il y a

20 toutes les chances pour que l'Armée yougoslave n’engage pas des actions

21 inutiles contre toute intervention potentielle". Je dois poursuivre :

22 "L'engagement de l'Armée yougoslave en Bosnie n'est pas inconcevable et en

23 même temps l’élite politico-militaire de Belgrade a pris soin de vérifier

24 quels étaient les seuils de la tolérance internationale, ils ne

25 s'engageraient sans doute pas dans une action, si cette élite politico-

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1 militaire pensait qu'il y avait une façon plus prudente d'agir" (fin de

2 citation).

3 M. Gow (interprétation). - Je crois que c'est assez juste, il

4 faut bien sûr le replacer dans son contexte. Il y a une différence entre

5 l'utilisation dissimulée d'unités de l'Armée yougoslave en plus des

6 éléments de l'ex-JNA qui étaient restés sur le terrain pour travailler par

7 procuration en Bosnie-Herzégovine et la situation diffère effectivement de

8 celle où il y aurait la possibilité discutée par le général Stefanovic

9 d'un engagement vraiment formel et net de la VJ, à savoir de l'Armée

10 yougoslave.

11 Ce qui veut dire qu'en plus, des unités qui sont restées sur le

12 terrain de la VRS et des forces qui travaillent à l'appui de ces forces de

13 façon dissimulée, pourraient changer une situation pour qu'il y ait une

14 situation où il y aurait vraiment un engagement ouvert, auquel cas le type

15 de question dont nous parlons ne se poserait pas.

16 Je pense qu'effectivement il faut comprendre ce qui a été écrit

17 dans le contexte de cet article, savoir s'il est question d'un engagement

18 formel et ouvert de l'Armée yougoslave comme étant vraiment un tout plutôt

19 qu'une intervention particulière. Il est clair, d'après la

20 référence citée, qu'on voulait vraiment mettre à l'épreuve les résistances

21 à l'idée d'une intervention et que cette idée n'était pas acceptable, mais

22 il était concevable que ces circonstances se présentent où il n'y aurait

23 pas d'autres choix que d'avoir un engagement ouvert.

24 Si vous me permettez, je n'ai pas eu l'occasion de répondre à

25 quelque chose que vous me demandiez ce matin. Vous me demandiez ce qu'il

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1 en était de la connaissance qu'aurait le Secrétaire général par rapport

2 aux représentants des membres permanents du Conseil de sécurité. Il faut

3 dire ceci, avec tout le respect que l'on peut avoir pour les possibilités

4 de prise de connaissance, de tel ou tel événement dans le chef du

5 Secrétaire général, il faut bien comprendre que les membres permanents par

6 le truchement d'agences de leur gouvernement peuvent établir ce qu'il en

7 est dans une situation particulière. Ce type de réflexion se répercute

8 notamment dans les mémoires de l'ancien ambassadeur des Etats-Unis à

9 Belgrade, Warren Zimmermann et, effectivement, on peut penser que les

10 membres permanents du Conseil de sécurité en savaient autant à propos de

11 la situation en Yougoslavie que ce qu'ils savent aujourd'hui à propos de

12 la situation présente en Irak. Alors, on pourrait demander ce qu'ils

13 savaient, ce que le Secrétaire général savait. Je pense que l'on peut

14 dire, sans risque se tromper, que les représentants de mon propre

15 gouvernement et de votre gouvernement savent parfaitement quels sont les

16 enjeux de la situation.

17 Je m'excuse d'être revenu sur ce point, mais je n'avais pas

18 fourni de réponse à cette question.

19 M. Ackerman (interprétation). - Pensez-vous que les membres

20 permanents du Conseil de sécurité, à dessin, n'ont pas informé le

21 Secrétaire Général de ce qui ce passait ?

22 M. Gow (interprétation). - Je crois qu'on peut dire que tous les

23 gouvernements ne s'informent pas ou n'informent pas tout le monde de ce

24 qu'ils savent.

25 M. Ackerman (interprétation). - La réponse que vous avez fournie

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1 avant celle-ci m'amène naturellement à poser la question suivante : Il

2 était dans l'intérêt de la RFY, en tous

3 cas du Monténégro d'être vu comme n'étant pas partie prenante à la guerre

4 en Bosnie, pour que ce soit conçu comme étant un conflit civil et purement

5 interne.

6 M. Gow (interprétation). - C'était dans l'intérêt de la RFY, si

7 elle pouvait montrer que c'était ainsi que les événements se déroulaient.

8 Vous m'avez montré des documents ce matin, notamment la déclaration de

9 Kostic, qui viennent de publications officielles yougoslaves et qui

10 disaient toutes : "ceci ne nous préoccupe pas" parce qu'ils ne voulaient

11 pas qu'on considère que c'était de leur responsabilité.

12 Ceci est vrai également des décisions prises en mai répercutées

13 dans le document que j'ai sous les yeux.

14 Nous avons effleuré ce document un peu trop vite. Dans ce même

15 document, on fait référence à la deuxième page pour dire que si, pour une

16 raison quelconque, le transfert prévu à la première page ne peut pas être

17 réalisé, le commandement du district militaire pourra prendre des

18 décisions. Si vous voulez vraiment avoir un compte rendu circonstancié de

19 ce qui s'est passé, manifestement, les unités concernées ne se sont pas

20 rendues aux destinations indiquées ici. Mais, bien sûr, ceci devrait être

21 examiné davantage.

22 M. Ackerman (interprétation). - La question que je vous ai posée

23 était la suivante : il était dans l'intérêt de la RFY, la Serbie et le

24 Monténégro d'être vues comme n'étant pas impliquées dans la guerre en

25 Bosnie et de faire en sorte que le conflit ne soit considéré que comme un

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1 conflit purement interne et civil. Pourquoi ne répondez-vous pas

2 directement ?

3 M. Gow (interprétation). - J'ai répondu directement en disant

4 "oui", mais je vous ai donné quelques éléments à l'appui.

5 M. Ackerman (interprétation). - Si vous êtes d'accord avec une

6 question que je pose, pourriez-vous simplement répondre par

7 l'affirmative ?

8 M. Niemann (interprétation). - Pour autant que la réponse soit

9 équitable, parce qu'il ne suffit pas de dire "oui" à une question, surtout

10 lorsque la question consiste à demander

11 s'il est vrai que Belgrade n'avait jamais eu d'aspirations à l'égard de la

12 Bosnie-Herzégovine. Dans le contexte d'un commentaire émis par un homme

13 politique, on pourrait peut-être simplement répondre par "oui", mais si

14 l'on demande des explications, on ne peut pas répondre simplement d'un

15 mot. Donc je fais objection à ce qu'on force le Pr Gow à donner des

16 réponses trop lapidaires. S'il faut une explication, il doit pouvoir la

17 donner pour expliquer pourquoi il répond peut-être "oui" sur le contenu

18 d'un document, mais la situation est telle que ce n'est pas un simple

19 "oui" et qu'il faut fournir des explications supplémentaires.

20 M. Ackerman (interprétation). - Lorsque c'est le cas, je n'ai

21 pas d'objection.

22 M. le Président (interprétation). - Il ne faut pas trop insister

23 sur une question parce que c'est une affaire d'opinion que vous demandez,

24 parce qu'il n'est pas là le représentant du gouvernement de Yougoslavie.

25 Il ne donne jamais que son avis.

Page 9457

1 M. Ackerman (interprétation). - N'était-il pas dans l'intérêt du

2 gouvernement de Bosnie-Herzégovine d'être perçu comme étant la victime

3 d'une agression internationale puisque ce gouvernement essayait d'obtenir

4 une assistance de l'extérieur ?

5 M. Gow (interprétation). - C'est le cas.

6 M. Ackerman (interprétation). - Nous en avons déjà discuté en

7 décembre, souvenez-vous-en. Et la situation politique avec le gouvernement

8 de la RFY et de celui de Bosnie-Herzégovine qui avaient tout intérêt à ce

9 que l'extérieur perçoive les choses d'une façon bien déterminée. Tout ceci

10 nous donne des difficultés pour savoir, à partir des rapports fournis par

11 les deux parties, ce qui se passait effectivement sur le terrain parce

12 qu'on ne sait jamais si l'on a affaire à une déclaration politique ou à un

13 exposé de faits.

14 En principe, qu'en pensez-vous ?

15 M. Gow (interprétation). - En principe oui, mais même en tant

16 que principe, il faudrait être très prudent dans l'interprétation parce

17 qu'il faut voir quelles sont les sources disponibles, le contexte, tout ce

18 qui a été dit à ce propos.

19 M. Ackerman (interprétation). - Certes. Mais, par exemple, vous

20 savez qu'il y en a qui affirment que des groupes paramilitaires serbes

21 opéraient en Bosnie-Herzégovine sous la direction du gouvernement de

22 Belgrade et encouragés par celui-ci. Vous savez que de tels avis existent.

23 M. Gow (interprétation). - Effectivement et j'irai même jusqu'à

24 dire que j'affirme cela moi-même.

25 M. Ackerman (interprétation). - Dans l'affaire Tadic, lorsqu'une

Page 9458

1 question vous a été posée à ce sujet, vous avez répondu : "Je n'ai pas de

2 connaissances particulières ou précises s'agissant de réunions entre des

3 représentants du gouvernement et des membres de groupes paramilitaires,

4 réunions visant à établir une stratégie particulière". Est-ce bien exact ?

5 M. Gow (interprétation). - Pourriez-vous répéter ?

6 M. Ackerman (interprétation). - Vous avez dit, au cours de

7 l'affaire Tadic : "Je n'ai pas de connaissances précises relatives à des

8 réunions éventuelles entre des représentants du gouvernement et des

9 membres de groupes paramilitaires, réunions visant à établir une stratégie

10 particulière".

11 M. Gow (interprétation). - Si c'est ce que dit le compte rendu,

12 je suis sûr qu'il est fidèle à mes propos, mais si par"des membres de

13 gouvernement", on entend aussi des membres de la JNA, par exemple le

14 Général Stefanovic, effectivement il y a eu des réunions. Et aussi dans

15 les éléments de preuve apportés dans l'affaire Tadic, nous avons eu le

16 témoignage personnel de Cecel*, un des dirigeants des groupes

17 paramilitaires, s'agissant de réunions avec le Président Milosevic lui-

18 même, mais je ne suis pas sûr... Je crois qu'il faudrait agir avec

19 circonspection.

20 M. Ackerman (interprétation). - Tout à fait et nous allons

21 entrer dans le détail dans un instant. Un des problèmes rencontrés par la

22 communauté internationale en général -et

23 là, je parle du processus Vance-Lord Owen-, au cours de tous les efforts

24 déployés par des organisations internationales pour essayer de venir à

25 bout de la situation qui prévalait en Yougoslavie, une des difficultés

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1 consistait à savoir qui contrôlait quoi à tel ou tel moment.

2 M. Gow (interprétation). - Il fallait essayer d'établir quel

3 était le degré de contrôle qu'il allait falloir exercer. Il a toujours été

4 clair que si Belgrade voulait avoir un certain contrôle, une certaine

5 influence sur les forces qu'il y avait en Bosnie-Herzégovine, elle pouvait

6 le faire et cela a été prouvé puisque la guerre s'est terminée.

7 Souvent, par exemple, le chef de la sécurité, Stanic*, a été

8 envoyé en Bosnie et effectivement cela s'est réalisé.

9 M. Ackerman (interprétation). - Remontons à des temps bien

10 antérieurs. Avant même que n'éclatent les hostilités en Slovénie, il y

11 avait des activités à Belgrade déployées par la JNA pour former un nouveau

12 Parti communiste. Est-ce bien exact ?

13 M. Gow (interprétation). - Oui.

14 M. Ackerman (interprétation). - Pour délivrer des mandats

15 d'arrêt à l'encontre du ministre croate de la Défense ?

16 M. Gow (interprétation). - Oui.

17 M. Ackerman (interprétation). - Pour déployer des chars dans les

18 rues de Belgrade à la suite de spéculations relatives à l'imposition de la

19 loi martiale.

20 M. Gow (interprétation). - Les déploiements de chars à Belgrade

21 à la suite de l'accord intervenu entre le Conseil d'Etat et la Présidence

22 pour le faire venaient des représentants serbes, au nom des autorités

23 serbes, en réponse à des manifestations qu'il y avait eu le 9 mars 1991

24 dans les rues de Belgrade. L'état d'urgence a été déclaré ou est intervenu

25 le lendemain.

Page 9460

1 M. Ackerman (interprétation). - A propos de ces trois choses,

2 vous avez dit ceci

3 dans "Le journal de Slavie du Sud", vous avez dit : "Chacun de ces

4 éléments démontre que les actions militaires sont régies par l'attachement

5 qu'il y a encore aux racines communistes et est dû aussi à l'absence

6 d'autorité centrale en Yougoslavie". Ce qui m'intéresse, c'est la dernière

7 partie, l'absence d'autorité centrale en Yougoslavie. Est-ce bien exact ?

8 M. Gow (interprétation). - Qu'est-ce qui est correct ?

9 M. Ackerman (interprétation). - Que ces actions entreprises par

10 la JNA s'étaient faites en l'absence d'autorité, c'est-à-dire qu'ils ont

11 fait cavaliers seuls.

12 M. Gow (interprétation). - Non. Ils n'ont pas agi seuls, à leur

13 propre initiative. Par exemple le déploiement de troupes dans les rues de

14 Belgrade, cette décision a été prise parce qu'il y avait une autorité du

15 Président en conclusion aux décisions prises à la demande ou sous la

16 pression exercée par Borislav Jovic représentant d'un parti serbe, l'état

17 d'urgence a été déclaré ensuite. Ceci relevait de l'accord conclu entre

18 **Jelovic** et Kadijevic. Alors dire qu'ils ont fait cavaliers seuls

19 serait erroné, si vous me permettez de reformuler ce que j'ai écrit

20 lorsque j'ai dit : "Absence d'autorité centrale".

21 M. Ackerman (interprétation). - Effectivement, vous avez dit :

22 "Absence d'autorité centrale en Yougoslavie".

23 M. Gow (interprétation). - Ce ne serait peut-être pas l'absence

24 totale mais plutôt la faiblesse de ces autorités centrales et le fait

25 qu'il y avait division en leur sein à ce stade et jusqu'au démantèlement

Page 9461

1 final.

2 M. Ackerman (interprétation). - Donc ce que vous avez dit dans

3 ce journal n'était pas tout à fait exact, est-ce bien ce que vous nous

4 dites aujourd'hui ?

5 M. Gow (interprétation). - Je dis que cela représente bien la

6 situation mais que si l'on voulait donner une interprétation spécifique

7 dans le contexte qui n'aurait pas été écrit pour ce journal mais plutôt

8 pour une Chambre ou un Tribunal, je suppose que j'aurais affiné mes

9 propos. Effectivement, dire simplement "absence" serait erroné mais cela

10 ne dénature pas le

11 sens, à savoir qu'il y avait déjà un démantèlement progressif de

12 l'autorité centrale et que l'Armée essayait déjà de prendre le rôle que

13 vous avez défini ce matin, à savoir : maintenir l'ordre socialiste.

14 Effectivement, il fallait essayer de résoudre ces problèmes de faiblesse.

15 M. Ackerman (interprétation). - Donc dans ce que vous écrivez,

16 faut-il lire vos écrits sachant que vous avez peut-être choisi un mot qui

17 n'était pas le plus juste et que les termes ne sont pas toujours aussi

18 précis ?

19 M. Gow (interprétation). - Pas du tout. Ce dont je me souviens,

20 par exemple en décembre, c'est que vous me posiez des questions, je

21 n'étais pas trop sûr. Vous reposiez la question en citant quelque chose.

22 J'étais beaucoup plus satisfait de la citation de ce que j'avais écrit que

23 de la façon dont vous aviez formulé le propos. Je ne peux pas vous dire

24 que je ne me suis jamais trompé, rétrospectivement, j'aurais peut-être

25 mieux formulé telle ou telle chose.

Page 9462

1 M. Ackerman (interprétation). - Mais lorsque vous écrivez, vous

2 avez sans doute l'occasion de relire ce que vous avez écrit, et vous le

3 faites peut-être souvent pour être sûr que vous avez choisi le mot juste.

4 M. Gow (interprétation). - C'est souvent le cas, ce n'est pas

5 toujours le cas. Et il se peut qu'une chose ait été écrite à un moment et

6 que dix ans plus tard, ce qui a été écrit ne soit pas tout à fait la

7 meilleure formulation. Mais heureusement, pas trop différent.

8 M. Ackerman (interprétation). - Par contraste avec le témoignage

9 devant un Tribunal, vous n'avez pas l'occasion de revoir ce que vous avez

10 dit pour trouver la précision voulue, est-ce bien exact ?

11 M. Gow (interprétation). - Effectivement, la même occasion ne

12 m'est pas donnée. Dans la mesure du possible, je pèse mes mots pour être

13 sûr qu'ils traduisent fidèlement ce que je veux que vous compreniez, vous

14 et le Tribunal. J'essaie d'aider le Tribunal et d'être le plus précis

15 possible.

16 M. Ackerman (interprétation). - Mais vous aviez la possibilité

17 de modifier les termes que vous avez utilisés dans ce journal ?

18 M. Gow (interprétation). - Franchement, je ne me souviens plus.

19 Je suppose que j'ai sélectionné certains termes. Excusez-moi, mais je ne

20 vois pas vraiment quelle est la pertinence de tout ceci. Il est vrai que

21 j'ai rédigé quelque chose mais en substance, je ne retirerais aucun de ces

22 mots. Mais pour être bien précis devant ce Tribunal, je dirai que

23 "l'absence d'autorité centrale" n'était peut-être pas la meilleure

24 formulation. Mais je suis prêt à nuancer ceci.

25 M. Ackerman (interprétation). - Excusez-moi, mais je voudrais

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1 vous dire aussi que celui qui doit juger, ce n'est pas vous mais le juge.

2 M. Gow (interprétation). - Je comprends.

3 M. Ackerman (interprétation). - Parlons maintenant des combats

4 en Slovénie. Vous savez de quoi je parle quand je parle des combats

5 en Slovénie ?

6 M. Gow (interprétation). - Je crois que je comprends.

7 M. Ackerman (interprétation). - Au cours de ces combats et de ce

8 conflit court, la JNA agissait de sa propre initiative dans ce qu'elle a

9 fait, n'est-ce pas, dans une large mesure ?

10 M. Gow (interprétation). - Dans une large mesure, oui.

11 Officiellement, elle était déployée pour aider la Police fédérale mais les

12 actions menées par cette Armée ont dépassé de loin le cadre de ce qui

13 avait été autorisé. Donc effectivement, de sa propre initiative dans une

14 large mesure.

15 M. Ackerman (interprétation). - Je vous cite à nouveau : "La

16 YPA" c'est-à-dire la JNA, "semblait agir dans une grande mesure de sa

17 propre initiative en Slovénie". Voulez-vous changer quoique ce soit de ce

18 que vous avez écrit dans cette revue ?

19 M. Gow (interprétation). - Non.

20 M. Ackerman (interprétation). - Non ?

21 M. Gow (interprétation). - Non.

22 M. Ackerman (interprétation). - Toujours dans ce même article,

23 vous avez dit ceci : "Après que les médiateurs de la Communauté européenne

24 se soient rencontrés à Belgrade le 29 juin et qu'ils aient présenté leur

25 projet de cessez-le-feu en trois points, l'Armée fédérale, à savoir la

Page 9464

1 JNA, quant à elle, a agi sans disposer de l'autorité politique, de l'aval

2 politique et a déclenché ses plus lourdes attaques à ce jour contre

3 la Slovénie". C'est ce que vous avez écrit, n'est-ce pas ?

4 M. Gow (interprétation). - Oui, effectivement, je l'ai écrit, et

5 en plus c'était le cas.

6 M. Ackerman (interprétation). - Fort bien. Il y a même eu des

7 cas, n'est-ce pas, que l'on peut indiquer, au cours desquels la JNA

8 elle-même avait très peu de contrôle sur ce que faisait ses propres

9 commandants ?

10 M. Gow (interprétation). - Il est vrai qu'il y a eu des cas dans

11 lesquels les commandants de la JNA semblaient agir avec une bonne mesure

12 d'initiative et d'autorité locale.

13 M. Ackerman (interprétation). - Ceci a été noté et rappelé dans

14 des rapports par des observateurs européens qui travaillaient en

15 Yougoslavie.

16 M. Gow (interprétation). - Oui.

17 M. Ackerman (interprétation). - Et cela a été aussi admis par le

18 Ministre adjoint de la Défense, Brovet.

19 M. Gow (interprétation). - Cela a été reconnu par Brovet mais il

20 faut se demander si l'on peut être sûr que ces paroles n'ont pas été

21 prononcées peut-être pour dire le contraire.

22 M. Ackerman (interprétation). - Je crois que le mieux est de

23 vous citer dans ce cas-là. Je vous cite d'une revue intitulé : "RFE/RL ".

24 J'ai oublié ce que représente ce sigle.

25 M. Gow (interprétation). - "Radio pour l'Europe/Radio Liberté".

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1 M. Ackerman (interprétation). - Je vous cite : "Dans certains

2 cas, la YPA (la JNA)

3 avait peu de contrôle sur ses commandants locaux, comme l'ont dit des

4 observateurs de la Communauté européenne et comme l'amiral Stane Brovet,

5 Ministre adjoint de la Défense, l'a concédé". Vous êtes bien d'accord

6 puisque ce sont vos termes ?

7 M. Gow (interprétation). - Une fois de plus, je suis d'accord

8 pour dire que j'ai écrit cela et je suis en gros d'accord avec ce que j'ai

9 écrit. Rétrospectivement, j'aurais peut-être une interprétation quelque

10 peu différente, cela a été écrit à l'époque. Mais j'insiste, une situation

11 évolue, cela veut dire que moi aussi mais d'autres également ont peut-être

12 eu un regard différent sur ce qui avait été interprété à un moment donné.

13 Rappelez-vous ce que nous disions il y a un instant : la

14 démarche stratégique montrait l'importance qu'il y avait à déguiser ce qui

15 se passait peut-être dans les faits, donc on essayait de donner un

16 sentiment de désordre, de confusion. On peut concevoir que ce qui se

17 passait n'était peut-être pas tout à fait comme je l'ai écrit ou décrit

18 mais faisait partie d'un schéma de camouflage délibéré, si vous voulez. Il

19 y a toujours, bien sûr, cet élément de confusion. On essayait de

20 comprendre ce qui se passait et dans ce cadre-là, des conclusions ont été

21 tirées qui, rétrospectivement, peuvent être confirmées ou réévaluées.

22 C'est ce que je vous disais par rapport aux mots précis que j'aurais

23 utilisés.

24 M. Ackerman (interprétation). - Cette réserve que vous venez

25 d'émettre, vous ne l'avez pas partagée avec vos lecteurs lorsque vous avez

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1 rédigé cet article à l'intention de Radio pour l'Europe/Radio Liberté,

2 n'est-ce pas ?

3 M. Gow (interprétation). - Il est vrai que je n'ai pas fait part

4 de ces réserves à ces personnes, en général vous ne communiquez pas ce

5 genre de réserve à vos lecteurs. On écrit toujours à partir d'un matériau

6 qui est disponible à un moment donné et s'il y a des choses qui

7 interviennent par la suite, il n'est pas erroné d'ajouter ce qui vient par

8 la suite pour mieux comprendre ce qui s'est passé, pour ajuster dans la

9 mesure du possible ce qui avait été compris à un moment précis. C'est ce

10 qui s'est passé pour cet article dont vous parlez. Par exemple, on a

11 mieux compris la nature des groupes paramilitaires, la façon dont ils

12 fonctionnaient, il était beaucoup plus facile de comprendre comment ils

13 fonctionnaient par la suite. Au départ, ils faisaient partie de ce chaos,

14 de cet environnement tout à fait confus, et tout ceci a montré finalement

15 qu'il y avait des liens avec les organes officiels de Belgrade.

16 Depuis, des éléments de preuve ont été apportés ici même dans ce

17 cadre lors de témoignages.

18 M. Ackerman (interprétation). - En octobre 1991, la Communauté

19 européenne tentait de négocier plusieurs cessez-le-feu pour l'ex-

20 Yougoslavie et, en octobre, le plan qui était proposé a été accepté par

21 cinq des six directions des Républiques, il n'y a que Milosevic qui s'y

22 soit opposé.

23 Vous avez discuté de ces projets de la communauté européenne

24 dans un article que vous avez écrit avec un Monsieur qui s'appelle

25 M. Friedmann, attendez que je m'y retrouve... L'existence de groupes

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1 extrémistes tant Croates que Serbes, de même que l'existence d'une Armée

2 fédérale qui fonctionne en dépit de ce que continue à dire Kadijevic, tout

3 ceci se trouvait en dehors de toute autorité politique et signifiait sans

4 doute qu'un accord politique ne viendrait pas rapidement mettre un terme

5 au combat. C'est bien ce que vous avez dit, n'est-ce pas?

6 M. Gow (interprétation). - Oui.

7 M. Ackerman (interprétation). - Poursuivons sur cette lancée.

8 Vous dites que du fait qu'il y avait là l'Armée fédérale et les groupes

9 extrémistes qui agissaient en dehors de l'autorité politique de Belgrade

10 ou d'autres, l'accord conclu par les chefs des différentes Républiques

11 peut ne pas signifier grand-chose puisque ces Républiques n'avaient pas de

12 moyen de contrôle à propos ou sur ces organisations qui combattaient.

13 M. Gow (interprétation). - Je pense que, effectivement c'est une

14 interprétation possible des mots que vous venez de citer, mais c'est aussi

15 une interprétation possible de

16 mémoires de Kadijevic. Il est clair que l'interprétation était quelque

17 peu différente. Le manque apparent d'autorité politique faisait partie

18 d'un processus à deux termes, processus par lequel les dirigeants Serbes

19 et la JNA étaient réunifiés pour établir le type de frontières dont nous

20 avons parlé, mais il y avait aussi une autre partie de ce processus où il

21 était toujours possible de parvenir à des accords politiques, alors qu'on

22 n'avait pas du tout l'intention de les mettre en oeuvre, parce que les

23 forces armées seraient utilisées pour poursuivre en fait une autre

24 politique sur le terrain. Ici, vue dans le contexte, vous avez l'idée

25 suivante : alors qu'on tentait d'arriver à des accords politiques, à des

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1 règlements éventuels, sur le terrain un conflit faisait rage, qui visait à

2 établir des faits sur le terrain, lesquels faits devraient être repris

3 comme étant des données de la négociation.

4 M. Ackerman (interprétation). - Vous parlez des mémoires de

5 Kadijevic, les mémoires servent surtout à l'auteur de ces mémoires. Si

6 quelqu'un écrivant ses mémoires veut établir des faits indéniables, c'est

7 souvent le propos poursuivi, n'est-ce pas ?

8 M. Gow (interprétation). - C'est vrai pour la première partie de

9 vos prémisses, il est vrai qu'en général des mémoires servent souvent

10 l'auteur. Dans ce contexte, je ferai remarquer que lors de la publication

11 à Belgrade des mémoires de Kadijevic, plusieurs des nationalistes Serbes

12 qui avaient critiqué Kadijevic comme étant trop yougoslave, ont repris ce

13 point, à savoir que ses mémoires servaient surtout l'auteur pour qu'il

14 donne l'impression que, tout du long, il avait fait ce que ces

15 nationalistes voulaient.

16 A d'autres endroits, il émet des avis dont je dirai qu'il n'en

17 avait pas vraiment la connaissance effective, mais s'agissant des

18 opérations militaires, là où ils étaient informés, je peux penser que ce

19 qu'il présentera comme élément sera digne de foi et je dirai que des

20 éléments présentés dans d'autres cas, par exemple dans le journal intime

21 de Jovic, effectivement, là vous retrouvez le matériau de base établissant

22 ce qui s'est véritablement passé, puisque c'étaient les protagonistes qui

23 relataient ces faits

24 M. Ackerman (interprétation). - Vous souvenez-vous d'un incident

25 qui s'est produit en octobre ou en novembre 1992 ? Milan Panic qui était

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1 alors premier ministre de la République fédérale de Yougoslavie, qui

2 voulait améliorer la situation prévalant en Bosnie-Herzégovine, avait

3 donné son accord pour que des avions Serbes soient transférés à la Serbie

4 pour y être gardés.

5 M. Gow (interprétation). - Oui.

6 M. Ackerman (interprétation). - Et vous souvenez-vous qu'il y a

7 eu des négociations avec Lord Owen pour ce qui est des restrictions en

8 matière de vol ? Et vu les efforts américains pour mettre ceci en oeuvre,

9 Radovan Karadzic avait donné son accord pour que les avions Serbes de

10 Bosnie soient transférés à la Serbie pour y être conservés.

11 M. Gow (interprétation). - Effectivement, il y a eu des

12 informations de ce genre.

13 M. Ackerman (interprétation). - Et vous savez également que le

14 commandant des forces aériennes Serbes de Bosnie, le major général Nikovic

15 avait refusé ce transfert, parce que, pour lui, ceci équivalait à une

16 capitulation et même Karadzic ne pouvait pas accepter une capitulation.

17 M. Gow (interprétation). - Là vraiment, je ne sais pas. Mais je

18 voulais dire que, dans toutes ces choses, il faut toujours voir l'effet

19 politique recherché, l'impression que l'on veut donner.

20 M. Ackerman (interprétation). - C'est ce que l'on pourrait dire

21 de tout ce qui se passe, il est tout à fait difficile de dire ce qui est

22 réel et ce qui ne l'est pas. Etes-vous d'accord pour dire ceci ?

23 M. Gow (interprétation). - Moi-même ou en général ?

24 M. Ackerman (interprétation). - En général.

25 M. Gow (interprétation). - C'est vrai.

Page 9470

1 M. Ackerman (interprétation). - Merci de m'avoir accordé ce

2 temps, je n'ai plus de

3 question à vous poser.

4 M. Gow (interprétation). - Je vous remercie.

5 M. le Président (interprétation). - Maître Olujic, c'est votre

6 tour à présent.

7 M. Olujic (interprétation). - Merci Monsieur le Président.

8 M. le Président (interprétation). - Maître, vous pouvez

9 procéder.

10 M. Olujic (interprétation). - Merci. Bonjour, Professeur Gow.

11 M. Gow (interprétation). - Bonjour.

12 M. Olujic (interprétation). - J'espère avant tout que, compte

13 tenu de ce qui vous est arrivé -car nous avons entendu dire que vous aviez

14 eu des problèmes de santé- la longue durée de votre présence dans ce

15 prétoire ne vous gênera pas.

16 Je tiens à vous dire d'emblée que je vais faire de mon mieux

17 pour ne pas répéter inutilement les questions qui vous ont déjà été posées

18 par mon confrère, Me Ackerman. Je tâcherai simplement de rendre certaines

19 choses plus objectives, car vous devez savoir, Professeur Gow, que s'il

20 existe des domaines dans lesquels un certain nombre de choses peuvent être

21 déterminées avec une grande précision et une certaine certitude, ici, nous

22 nous mouvons dans un domaine, celui des sciences sociales, où tout dépend

23 de l'expérience, êtes-vous d'accord avec cela ?

24 M. Gow (interprétation). - Au cours de l'interrogatoire

25 principal que vous avez subi dans le cadre de l'affaire Tadic, vous avez

Page 9471

1 déclaré entre autres qu'il existait également une catégorie de personnes

2 appelées les "Yougoslaves". Est-ce exact ?

3 M. Gow (interprétation). - Je me suis appuyé sur des documents

4 statistiques de la RSFY qui permettaient aux gens de se classer en

5 particulier en tant que "Yougoslaves".

6 M. Olujic (interprétation). – Mais, Professeur Gow, en vertu de

7 la constitution de 1974, cette catégorie n'existait pas et en réponse aux

8 questions du recensement ils se déclaraient comme indéterminés. Etes-vous

9 au courant de cela ?

10 M. Gow (interprétation). - Vous parlez des deux versions. Si

11 j'ai bien compris ce que vous venez de dire, tous les peuples constituant

12 l'Etat de la RSFY étaient considérés comme yougoslaves, car il était des

13 Slaves du sud C'est la raison pour laquelle il n'était pas pertinent de

14 les traiter de la même façon en tant que constituants de telle ou telle

15 population puisqu'ils faisaient tous partie du même Etat. Mais il y a un

16 élément de votre question qui m'échappe en raison de la traduction sans

17 doute, en tout cas la deuxième partie. Je vous prierai donc d’avoir

18 l’amabilité de bien vouloir répéter cette deuxième partie de votre

19 question.

20 M. Olujic (interprétation). - En vertu de la Constitution de

21 1974 qui est la dernière constitution votée en RSFY, la catégorie des

22 Yougoslaves n’existait pas, mais en réponse aux questions de

23 l’interrogateur principal dans l’affaire Tadic, vous avez dit qu'il

24 existait une catégorie intitulée Yougoslave en tant que nation. C’est ce

25 qui figure au compte rendu, et puisque je suppose que vous connaissez la

Page 9472

1 teneur de la constitution de 1974, vous devez être d'accord avec ma

2 constatation, car elle est incontestable.

3 M. Gow (interprétation). - Je suis d'accord avec vous s'agissant

4 des peuples constitutifs de l'Etat, puisque tous ces peuples sont des

5 Slaves du sud, mais s'agissant de la deuxième partie de votre question,

6 c'est-à-dire de la catégorie des Yougoslaves, dans le recensement, je

7 suppose que cette catégorie ressort du recensement au sein de la RSFY où

8 il existait, pour les habitants, la possibilité de se déclarer

9 yougoslaves, et ces gens-là le faisaient. C'était le terme « narod » qui

10 était utilisé pour faire référence aux Yougoslaves, mais les Yougoslaves

11 étaient une catégorie du recensement et non pas un peuple fondateur,

12 constitutif de l'Etat. Il existe, à mon avis, une différence entre un

13 classement dans le recensement et la dénomination de peuple fondateur de

14 l'Etat. J'espère vous avoir bien compris.

15 M. Olujic (interprétation). - Oui, et c'est là que réside la

16 différence, car dans le recensement, ces gens-là se déclaraient comme

17 indéterminés, c’est-à-dire comme n’étant ni

18 serbes, ni croate, ni slovènes, ni un autre peuple, mais ils se classaient

19 dans la catégorie des non déterminés, n’est-ce pas ?

20 Mais avançons, si vous le voulez bien, Monsieur le Professeur.

21 En réponse aux questions de l’interrogatoire principal dans

22 cette affaire, c'est-à-dire en réponse aux questions de Me Niemann, en

23 page 92-47 du compte rendu, vous avez déclaré que ces dernières années,

24 vous vous étiez professionnellement concentré sur l’étude de l’ex-

25 Yougoslavie. Est-ce exact ?

Page 9473

1 M. Gow (interprétation). - Oui, cela a été le cas, je ne me suis

2 pas concentré exclusivement sur ce sujet, mais je me suis concentré sur ce

3 sujet.

4 M. Olujic (interprétation). - Pouvez-vous nous dire à partir de

5 quelle date cette déclaration est exacte, si nous pouvons le déterminer à

6 peu près ? A partir de quelle année.

7 M. Gow (interprétation). - Certainement, à partir de 1983, peut-

8 être même un peu avant. C'est une question difficile, en tout cas comme

9 point de départ.

10 M. Olujic (interprétation). - Mais cela veut dire que cela fait

11 environ quinze ans. C'est bien cela ?

12 M. Gow (interprétation). - Oui.

13 M. Olujic (interprétation). - Auriez-vous l'amabilité,

14 Professeur, de me dire quel était le titre de votre thèse de doctorat ? Je

15 ne suis pas parvenu à le découvrir.

16 M. Gow (interprétation). - Je crains de ne pas être en mesure de

17 vous répondre. Je ne me rappelle pas exactement, mais les termes

18 « légitimité » et « Armée populaire yougoslave » en faisaient partie. Une

19 partie de ce texte est entrée dans l'ouvrage intitulé "Légitimité et

20 Armée" auquel Me Ackerman a fait référence précédemment.

21 M. Olujic (interprétation). - Vous avez déclaré également que

22 vous utilisiez les langues slaves du sud, c'est-à-dire que vous pouviez

23 lire la langue croate et la langue serbe. Est-ce exact ?

24 M. Gow (interprétation). - Je ne me rappelle pas quel nom j'ai

25 donné à ces langues, mais je peux lire effectivement dans ces langues.

Page 9474

1 M. Olujic (interprétation). - Pouvez-vous lire le Macédonien ?

2 M. Gow (interprétation). - Je peux aborder le Macédonien et

3 d'autres langues slaves du sud au niveau élémentaire. J'ai lu certains

4 textes en Macédonien, j'ai tiré des informations de textes rédigés

5 également dans d'autres langues slaves du sud.

6 M. Olujic (interprétation). - Et le slovène ?

7 M. Gow (interprétation). - La même remarque s'applique au

8 slovène.

9 M. Olujic (interprétation). - Cela signifie-t-il que nous

10 pourrions ici même discuter ensemble dans l'une des langues slaves du sud

11 et que vous n'auriez pas besoin de passer par l'anglais, ou ne pouvez-vous

12 que lire dans ces langues ?

13 M. Gow (interprétation). - Si c'est nécessaire, nous pouvons

14 parler en serbo-croate, mais je pense que ce serait préférable de parler

15 en anglais pour une meilleure compréhension.

16 M. Olujic (interprétation). - Professeur, avez-vous lu les lois

17 de la RSFY en traduction anglaise ou dans l'une des langues slaves du Sud

18 quand vous avez étudié la législation ?

19 M. Gow (interprétation). - Si vous parlez de textes tels que la

20 constitution, je suppose que je les ai lus dans les deux langues, selon le

21 moment, en fonction de ce qui était disponible, mais j'ai toujours cité de

22 l'original, lorsque je l'ai fait et lorsque c'était possible.

23 M. Olujic (interprétation). - Avez-vous entendu parler d'un

24 auteur qui s'appelle Taylor et qui a écrit pas mal de choses au sujet de

25 la monarchie habsbourgeoise ? Taylor.

Page 9475

1 M. Gow (interprétation). - De quel Taylor parlez-vous ?

2 M. Olujic (interprétation). - A.J. Peter.

3 M. Gow (interprétation). - A.J. Peter, oui, bien sûr.

4 M. Olujic (interprétation). - Professeur, pourriez-vous nous

5 faire connaître les

6 textes, la littérature que vous avez lus dans vos travaux, vos études au

7 sujet de l'ex-Yougoslavie ou cela serait-il difficile ? Pourriez vous nous

8 en donner une liste ?

9 M. Gow (interprétation). - Je pense que ce serait difficile. Je

10 suis en train de chercher par quel moyen je pourrais vous fournir cette

11 liste. En tout cas je ne pourrai pas vous la remettre aujourd'hui même.

12 M. Olujic (interprétation). - Je pensais à une date ultérieure,

13 mais pourriez-vous nous remettre plus tard une liste des articles de

14 journaux et des ouvrages que vous avez écrits au sujet de la Yougoslavie ?

15 M. Gow (interprétation). - Je n'en suis pas sûr, mais je crois

16 que cela a déjà été fait.

17 M. Niemann (interprétation). - Ces textes ont déjà été fournis

18 et si ces questions se poursuivent au sujet de ce que le témoin a lu, je

19 tiens à intervenir dans le débat, parce que cela risque de nous prendre

20 deux ans...

21 M. Olujic (interprétation). - Je vous en prie.

22 M. Gow (interprétation). - Excusez-moi, je pensais que j'avais

23 terminé.

24 M. Jan (interprétation). - Comment pouvez-vous demander à qui

25 que ce soit de faire la liste de tout ce qu'il a lu !

Page 9476

1 M. Olujic (interprétation). - Monsieur le Président, je parlais

2 de la liste des articles écrits au sujet de la Yougoslavie, mais le témoin

3 a déclaré que c'était possible, donc en cas de nécessité. C'est la raison

4 pour laquelle je lui ai posé la question, je n'imaginais pas qu'il allait

5 nous remettre cette liste à l'instant même, loin de là, mais poursuivons.

6 Professeur, au cours de l'interrogatoire principal...

7 M. Gow (interprétation). - ... Excusez-moi, je voudrais être

8 tout à fait clair, ma réponse était oui, et j'ai dit que j'avais le

9 sentiment que cela avait déjà été fait. Je crois que Me Niemann a confirmé

10 que cette liste avait déjà été remise à la défense. Je suppose qu'elle a

11 d'ailleurs été utile à Me Ackerman dans la préparation de son contre-

12 interrogatoire. Si ce que je

13 dis n'est pas exact, je suis sûr qu'il est possible de faire quelque chose

14 à ce sujet.

15 M. Olujic (interprétation). - Merci.

16 En réponse aux questions de l'interrogatoire principal ainsi

17 qu'aux questions de Me Ackerman, vous avez dit entre autre, que le

18 développement de la crise de la RSFY a débouché sur la division de l'Armée

19 populaire yougoslave et sur le retrait de certaines de ses composantes

20 serbes. C'est bien cela ?

21 M. Gow (interprétation). - J'ai dit qu'au cours de ce processus,

22 il y avait eu collusion entre les dirigeants serbes et la JNA.

23 M. Olujic (interprétation). - Cela est exact.

24 Je vais maintenant vous demander si vous pouvez nous citer un

25 cadre temporel plus précis au sujet de cet événement. Quand s'est-il

Page 9477

1 produit ?

2 M. Gow (interprétation). - Il a duré un certain temps. Je

3 situerais l'un des instants les plus critiques de ce processus au début de

4 1991. Je sais que certains diront qu'il y avait collusion complète depuis

5 une date antérieure et je n'en exclus pas entièrement la possibilité, bien

6 que les preuves fournies indiquent qu'il y a eu une évolution.. Me

7 Ackerman a parlé d'événements qui se situaient en mars 1991 et qui ont

8 permis aux dirigeants serbes d'obtenir des chars et des blindés

9 transporteurs de troupes qui ont été déployés dans les rues de Belgrade et

10 d'autres villes aussi, si je ne m'abuse.

11 Pour ma part, j'ai suivi les circonstances dans lesquelles la

12 JNA, agissant aux côtés des dirigeants politiques serbes, a tenté

13 d'obtenir que le Conseil d'Etat, c'est-à-dire la Présidence collective de

14 la RSFY déclare l'état d'urgence, notamment en Croatie, mais la question

15 se posait également pour l'ensemble du territoire de la RSFY. Une réunion

16 s'est tenue, je crois même que ce sont deux réunions qui se sont tenues

17 les 11 et 12 mars 1991, au quartier général de l'Armée à Belgrade,

18 réunions au cours desquelles le Général Kadijevic, soutenu par

19 Borislav Jovic, a posé cette question au Conseil d'Etat. Le Conseil d'Etat

20 était divisés sur la question et n'a pas accepté de déclarer l'état

21 d'urgence. Ce processus de collusion ou de collaboration, quel que soit le

22 nom dont on veut l'appeler, s'est poursuivi avec l'arrangement qui a été

23 mis au point par les dirigeants serbes et Kadijevic, arrangement en vertu

24 duquel Jovic devait démissionner du Conseil d'Etat, Jovic étant, à

25 l'époque, Président du Conseil d'Etat, ce qui eut créé un vide, c'est-à-

Page 9478

1 dire quelque chose qui allait dans le sens de cette d'autorité centrale

2 dont j'ai parlé avec Me Ackerman précédemment. Ce n'était peut-être pas un

3 vide complet, une absence d'autorité complète, mais en tout cas une

4 situation dans laquelle une partie de cette autorité manquait à l'appel.

5 Et dans le cadre de cet arrangement, il était stipulé qu'à ce moment-là,

6 Kadijevic pourrait faire appel à l'Armée pour déclarer l'état d'urgence.

7 J'ai un exemplaire d'un texte qui montre que Kadijevic manquait

8 de confiance ou de conscience dans cette situation. En tout cas, il n'a

9 pas accepté de s'engager dans ce type d'action et, peu de temps après,

10 Jovic a repris sa place au sein du Conseil d'Etat, c'est-à-dire de la

11 Présidence. Je crois que cet exemple montre clairement l'existence de

12 cette collusion dont j'ai parlé.

13 M. Olujic (interprétation). - Moi, j'aimerais que nous

14 retournions encore en arrière, c'est-à-dire en 1989. Vous avez beaucoup lu

15 au sujet de la Yougoslavie, vous savez donc que cette année-là a été

16 célébré le 600ème anniversaire de la bataille de Kosovo.

17 M. Gow (interprétation). - Oui.

18 M. Olujic (interprétation). - Ce fait vous est connu ?

19 M. Gow (interprétation). - Oui. Oui, oui, excusez-moi. Oui,

20 absolument.

21 M. Olujic (interprétation). - Professeur, est-ce que vous savez

22 à qui rendaient compte à ce moment-là les généraux de la JNA, à qui ils

23 ont rendu compte de ces célébrations ? Etait-ce à Milosevic ?

24 M. Gow (interprétation). - Non. Kadijevic était à l'époque

25 membre du Conseil

Page 9479

1 exécutif fédéral, donc du gouvernement. Il rendait compte au gouvernement,

2 mais l'autorité sur la JNA était détenue par le Conseil d'Etat, c'est-à-

3 dire par la présidence collective, et je crois que le Président du Conseil

4 était Janez Stanovnic, si je ne me trompe.

5 M. Olujic (interprétation). - Drnovsek. Stanovnik. Mais

6 Stanovnik n'a jamais... Et je vous demandais...

7 M. Gow (interprétation). - Je pensais que c'était Stanovnik.

8 Peut-être que c'était Stanovnik. Je pensais qu'il était venu après.

9 Enfin... Excusez-moi si ma mémoire m'a trompé.

10 M. Olujic (interprétation). - S'il était prouvé sans l'ombre

11 d'un doute que les généraux de la JNA rendaient compte à Milocevic à

12 l'époque, en 1989, qu'est-ce que cela signifierait et qu'est-ce que

13 Milosevic était en fait en Yougoslavie à l'époque ? Il était Président de

14 la Présidence de Serbie, n'est-ce pas ?

15 M. Gow (interprétation). - Je voudrais dire quelque chose

16 d'emblée très clairement. Nous parlons ici d'hypothèses, nous ne parlons

17 pas d'éléments factuels. Nous ne pouvons pas nous mettre d'accord

18 objectivement quant au fait que Kadijevic ait pu rendre compte à

19 Milosevic. Nous disons : au cas où Kadijevic aurait rendu compte à

20 Milocevic, que se serait-il passé ?

21 M. Olujic (interprétation). - Je crois que vous ne m'avez pas

22 bien compris. Les généraux rendaient effectivement compte à Milosevic en

23 1989. Mais poursuivons.

24 M. Gow (interprétation). - Est-ce que vous parlez des

25 cérémonies qui ont eu lieu à Kosovo Polje et est-ce que vous dites que les

Page 9480

1 généraux l'ont salué ?

2 Sur ce plan-là, nous pouvons être tout à fait d'accord, ce n'est

3 pas un problème. Je pensais que vous parliez de chaîne de commandement, de

4 processus de commandement. Mais je ne crois pas que nous puissions aller

5 très loin dans cette voie.

6 M. Olujic (interprétation). - Professeur, si une cérémonie qui a

7 un caractère interne sur le plan du serbisme est érigée au niveau de

8 l'Etat tout entier et si les généraux rendent

9 compte non pas à la Présidence qui dirige l'Etat mais à l'homme qui est

10 Président de la Présidence de Serbie, alors nous en arrivons à ce que vous

11 venez de dire, n'est-ce pas ? C'est ce que cela signifie ?

12 M. Gow (interprétation). - Je ne suis pas sûr que ce que soit le

13 cas car je ne suis pas sûr de ce que vous avez à l'esprit lorsque vous

14 parlez de ce que je viens de dire, mais d'après ce dont je me souviens,

15 une question a été évoquée à l'époque, une question quant au fait de

16 savoir ce qui pouvait être considéré comme une fête serbe en fait.

17 M. Jan (interprétation). - Mais en quoi est-ce que cela a

18 quelque rapport avec ce qui nous intéresse ?

19 M. Olujic (interprétation). - C'est tout à fait intéressant pour

20 déterminer un certain nombre de points. A savoir, nous constatons que le

21 Pr Gow a été interrogé sur toutes sortes de choses par le Procureur et

22 nous devons maintenant vérifier tous les faits que nous pouvons trouver

23 dans le cadre de ce procès, notamment des faits relatifs à la structure de

24 l'Etat et la date à laquelle cet Etat a commencé à agoniser. En effet, la

25 Commission Badinter est une chose, mais le début effectif de ce processus

Page 9481

1 -pour l'appeler ainsi- en est une autre, et étant donné que le Pr Gow est

2 un politologue bien connu et qu'il parle également les langues slaves du

3 Sud, j'essaie d'obtenir de sa part une réponse qui nous permettrait de

4 confirmer sans l'ombre d'un doute la date de commencement de ce processus.

5 M. Jan (interprétation). - Mais peut-être qu'ils ont salué

6 Milosevic, mais ils ont certainement salué également les autres membres

7 importants du Conseil d'Etat, donc quel rapport cela peut-il avoir avec le

8 début de la dissolution ? En effet, les généraux ont salué plusieurs

9 personnes.

10 M. Olujic (interprétation). - Oui, mais Milosevic à ce moment-là

11 n'occupait pas des fonctions dans lesquelles il représentait l'ensemble de

12 l'Etat. Il occupait des fonctions qui ne faisaient de lui que le

13 représentant de la Serbie et compte tenu du fait que le Pr Gow nous a

14 aidés comme il a pu sur ce sujet, je pense que nous pouvons maintenant

15 passer à un autre sujet et poursuivre.

16 M. Gow (interprétation). - Puis-je prendre la parole ? Cela ne

17 me poserait aucun problème de passer à un autre sujet, mais je pensais

18 pouvoir ajouter quelques détails qui permettraient de clarifier la

19 situation, notamment après la question du Juge Jan. Il s'agissait d'une

20 fête serbe, mais qui était replacée dans un contexte yougoslave.

21 Revenons sur ce nom de Stanovnik qui a déjà été prononcé. A

22 l'époque, des débats politiques intenses ont eu lieu en Slovénie, dus aux

23 événement au Kosovo, quant au fait de savoir si Stanovnik devait ou non

24 être présent à cette cérémonie, et donc recevoir le salut des généraux. Je

25 pense qu'il était important d'ajouter ces quelques phrases pour que les

Page 9482

1 choses soient tout à fait claires.

2 M. Olujic (interprétation). - Professeur, êtes-vous certain que

3 l'agression contre la Bosnie-Herzégovine avait uniquement pour objet

4 d'annexer certaines parties de ce territoire, ou y avait-il un autre

5 objectif en arrière-plan ?

6 M. Gow (interprétation). - Je ne suis pas absolument certain de

7 ce que vous voulez dire par "y avait-il un autre objectif en arrière-

8 plan ?". Pourriez-vous me préciser un peu ce que vous entendez par ces

9 mots ?

10 M. le Président (interprétation). - En fait, le conseil de la

11 défense vous demande si, à votre avis, il existait d'autres raisons pour

12 lesquelles cette agression a eu lieu, d'autres raisons que celles qui ont

13 été mentionnées.

14 M. Gow (interprétation). - Ecoutez, je ne voudrais pas m'engager

15 dans une direction erronée, mais j'ai déjà dit à plusieurs reprises qu'il

16 y avait une campagne visant à créer une nouvelle Yougoslavie sur la base

17 de ces territoires et que cette nouvelle Yougoslavie serait pour

18 l'essentiel construite autour du peuple serbe et destinée au peuple serbe.

19 Le résultat a été cette pratique qui est plus connue sous le nom

20 de nettoyage

21 ethnique.

22 M. Jan (interprétation). - Mais vous avez dit ce matin que la

23 JNA était impliquée dans ce processus destiné à déterminer les nouvelles

24 frontières de l'Etat yougoslave. Si je ne m'abuse, c'est ce que vous avez

25 dit ce matin.

Page 9483

1 M. Gow (interprétation). - Oui, en effet, j'ai dit quelque chose

2 dans ce sens, à savoir qu'un projet existait, destiné à créer les

3 nouvelles frontières de ce qu'eux considéreraient comme la mini

4 Yougoslavie, la nouvelle Yougoslavie. Il s'agissait donc d'une série

5 d'Etats : Serbie, Monténégro et certains territoires de Bosnie-Herzégovine

6 et de Croatie, avec éventuellement, à une certaine date, également la

7 Macédoine. Et sur ces parties de la Bosnie-Herzégovine et de la Croatie,

8 des efforts ont été faits pour créer l'impression que des conditions

9 devaient être mises en place pour faire échec à ceux qui, sur ces parties

10 de la Bosnie-Herzégovine et de la Croatie, risquaient de s'opposer à ce

11 projet.

12 M. le Président (interprétation). - Je ne sais pas si cela

13 répond vraiment à votre question, Maître Olujic. Avez-vous encore besoin

14 d'un perfectionnement de la réponse ?

15 M. Olujic (interprétation). - Non, pas ce sur ce sujet. Merci.

16 Professeur, vous savez que des experts, des professionnels, ont

17 affirmé à l'époque qu'il était anticonstitutionnel et illégal pour la

18 République de Bosnie-Herzégovine et la République de Croatie de demander

19 leur indépendance.

20 M. Gow (interprétation). - Oui, je sais que certains ont affirmé

21 cela, oui.

22 M. Olujic (interprétation). - Etes-vous d'accord, Professeur,

23 pour dire que la Republika Srpska a été créée comme moyen de résister à

24 certaines menaces, qu'elle a toujours dit à la République de Bosnie-

25 Herzégovine que si celle-ci s'engageait sur la voie de l'indépendance, la

Page 9484

1 Republika Srpska réagirait et opposerait une résistance. Donc la Republika

2 Srpska est passée de l'application d'un plan minimal à l'application d'un

3 plan maximal, mais elle s'est toujours située comme obéissant aux

4 instructions de Belgrade.

5 M. Gow (interprétation). - Il y a beaucoup d'éléments dans cette

6 question. Fondamentalement, je serais d'accord pour dire que ce qui

7 finalement s'est appelé la Republika Srpska faisait partie de ce projet

8 destiné à créer une nouvelle série de territoires fédéralisés dont

9 Belgrade serait la capitale et qui seraient, pour l'essentiel, destinés

10 aux Serbes.

11 En 1993-1994, si l'on doit vraiment définir cette période

12 politiquement, les dirigeants serbes de Bosnie ont commencé à prendre des

13 décisions pour leur propre compte et ce, dans le cadre toujours de ce

14 projet, de ce plan plus vaste.

15 M. le Président (interprétation). - Mais cela n'est qu'une

16 partie de la question.

17 M. Gow (interprétation). - Oui, il y avait pas mal d'éléments

18 dans la question.

19 M. le Président (interprétation). - Je crois que le conseil de

20 la défense souhaitait savoir s'ils n'ont pas été les premiers à porter les

21 coups ou qui a porté les coups le premier.

22 M. Gow (interprétation). - Je crois qu'il serait permis de dire

23 que le démarrage des hostilités armées sur le territoire de Bosnie-

24 Herzégovine est issu de cette stratégie, c'est-à-dire qu'il faudrait une

25 enquête très précise pour savoir qui a tiré les premiers coups en Bosnie-

Page 9485

1 Herzégovine. Certains disent que ce sont les Croates qui ont tiré les

2 premiers coups de feu, mais sans cette recherche très minutieuse, la seule

3 chose qu'il est possible de dire, c'est que le démarrage du conflit armé

4 s'est appuyé sur ce concept, sur cette idée stratégique de création, de

5 constitution d'une nouvelle Yougoslavie.

6 M. Olujic (interprétation). - Mais vous êtes d'accord pour dire

7 que la Republika Srpska a été la première à menacer la Bosnie-Herzégovine

8 d'anéantissement si celle-ci s'engageait sur la voie de l'indépendance

9 avec une organisation et une structure données ?

10 M. Gow (interprétation). - Je répondrai que oui.

11 M. Olujic (interprétation). - Merci.

12 Etes-vous d'accord avec moi pour dire que les ordres et les

13 orientations sont toujours venus de Belgrade ?

14 M. Gow (interprétation). - Eh bien, je vous renverrai à ma

15 réponse précédente. Ceci a toujours fait partie d'un projet qui,

16 effectivement, a été initié par Belgrade, mais parfois, dans certains buts

17 politiques, le degré de contrôle n'était pas aussi important qu'il l'a été

18 au cours d'autres périodes. Par exemple en 1993 et 1994, à des fins

19 politiques, Belgrade a établi un cadre afin que les Serbes de Bosnie

20 apparaissent comme indépendants, mais lorsque Belgrade le souhaitait, il

21 pouvait -et il l'a d'ailleurs fait- prendre le contrôle.

22 Donc, en fait, le projet appliqué était toujours celui qui avait

23 été conçu par Belgrade.

24 M. Olujic (interprétation). - Je reviendrai à la deuxième partie

25 de votre réponse, mais pour le moment elle me satisfait pleinement, merci.

Page 9486

1 Passons maintenant à la question de Konjic dont vous avez parlé

2 longuement au cours de l'interrogatoire principal et au cours du contre-

3 interrogatoire de mon collègue, Me Ackerman. Etes-vous d'accord avec moi

4 pour dire qu'à l'époque du crime, il y avait différentes formations à

5 Konjic ?

6 M. Gow (interprétation). - En 1992, c'est cela ?

7 M. Olujic (interprétation). - Oui.

8 M. Gow (interprétation). - Il y avait effectivement différentes

9 formations armées.

10 M. Olujic (interprétation). - Au cours de la période qui nous

11 intéresse, c'est-à-dire depuis le mois de mai ou peut-être avril, donc

12 d'avril jusqu'à octobre 1992...

13 M. Gow (interprétation). - Oui.

14 M. Olujic (interprétation). - ...Etes-vous également d'accord

15 pour dire que ces formations n'étaient pas totalement disciplinées,

16 organisées d'un point de vue militaire ?

17 M. Gow (interprétation). - Oui. D'après le souvenir que j'ai de

18 mon interrogatoire principal qui date de bien longtemps maintenant, j'ai

19 dit effectivement que cette formation qui avait lieu au sein des forces

20 armées de la Bosnie-Herzégovine était en cours d'élaboration, des

21 éléments de structure étaient en train d'être organisés.

22 M. Olujic (interprétation). - Etes-vous d'accord pour dire qu'il

23 n'y avait pas de commandement conjoint dans ce processus de formation,

24 c'est-à-dire au cours de la période dont nous parlons maintenant et pas

25 par la suite ?

Page 9487

1 M. Gow (interprétation). - Si je le pouvais, je vous demanderais

2 de m'expliquer ce que vous voulez dire par "commandement conjoint".

3 M. Olujic (interprétation). - Ce que je veux dire est la chose

4 suivante : une filière de commandement, une hiérarchie où il y a des

5 supérieurs et des subordonnés, des grades, un règlement, des uniformes,

6 tous les éléments qui constituent une armée, qui font d'une armée une

7 armée.

8 M. Gow (interprétation). - Je vous demande cela parce qu'il y

9 avait un commandement conjoint qui avait été créé entre les forces croates

10 précédemment dans la région de Konjic, d'une part et, d'autre part, la

11 Défense territoriale en Bosnie-Herzégovine.

12 Si vous parlez de la commande générale dans l'Armée de la

13 Bosnie-Herzégovine, elle était en évolution. Elle était fondée sur

14 certains éléments qui constituent une armée et qui font d'une armée une

15 armée.

16 Si vous parlez de la commande générale dans l'Armée de la

17 Bosnie-Herzégovine, elle était en évolution, elle était fondée sur

18 certains éléments de la Défense territoriale, de sa structure ; elle était

19 créée en se fondant sur le cadre de la ligue patriotique dont j'ai parlé

20 au cours de l'interrogatoire principal. Il y avait une certaine filière de

21 commandement mais, comme je l'ai dit, c'était une structure qui ne

22 correspondait pas à ce que l'on pourrait voir dans une force armée

23 régulière ; c'était quelque chose qui était en plein développement et elle

24 a été formée, en fait, à la fin de la période dont vous avez parlé

25 précédemment, à peu près vers le mois de novembre, donc elle a évolué au

Page 9488

1 cours de l'année, mais il y avait effectivement certains éléments de

2 hiérarchie et de commandement même si les grades, etc, n'ont pas été

3 officiellement adoptés.

4 M. Olujic(interprétation). - Nous sommes donc d'accord pour dire

5 qu'il n'y avait pas d'uniforme obligatoire, qu'il n'y avait pas de règle

6 de combat, qu'il n'y avait pas de grade particulier, tous ces éléments

7 dont j'ai parlé, donc vous êtes d'accord avec moi ?

8 M. Gow (interprétation). - Il y avait certains de ces éléments ;

9 c'était une situation en pleine évolution. La plupart de ces éléments

10 étaient sur le point d'être créés, ces structures de commandement et de

11 hiérarchie. En ce qui concerne une des questions dont nous avons parlé au

12 mois de décembre, il existait un processus dans lequel un certain nombre

13 de forces armées finissaient par jouer un rôle.

14 Et puis, il y a eu une structure de groupes tactiques qui a été

15 adoptée en réaction à l'absence d'une hiérarchie globale et d'une

16 structure de commandement globale ; on avait donné une certaine

17 responsabilité au commandement des groupes tactique pour toutes les unités

18 dans une zone d'opérations donnée, et par la suite, le groupe tactique a

19 mené à la formation des corps d'armée dans l'Armée de Bosnie-Herzégovine.

20 Il y a donc un processus d'évolution et de renforcement des autorités de

21 contrôle et de commandement.

22 M. Olujic (interprétation). - C'est la raison pour laquelle je

23 vous pose cette question parce que la question suivante a trait à votre

24 réponse. Pourriez-vous nous dire si, dans une quelconque armée, il existe

25 ce grade de coordinateur en tant que grade, position officielle ?

Page 9489

1 M. Gow (interprétation). - Je ne pense pas que "coordinateur"

2 soit utilisé en tant que "grade", c'est simplement une fonction comme

3 commandant en chef ; ce n'est pas un grade dans les forces armées, c'est

4 une fonction mais, bien, sûr tenue par les personnes occupant les grades

5 les plus élevés dans la hiérarchie.

6 M. Olujic (interprétation). - Mais le grade de coordinateur

7 n'existe pas, nous sommes d'accord.

8 M. Gow (interprétation). - Oui.

9 M. Olujic (interprétation). - Excusez-moi, vous rappelez-vous

10 s'il y a eu des conflits auxquels ont participé les Musulmans à cette même

11 époque aux environs de Konjic ?

12 M. Gow (interprétation). - Je n'ai aucun souvenir qu'il y ait eu

13 conflit armé entre les Musulmans dans cette zone. Il y a eu un certain

14 conflit politique, c'était manifeste, entre M. Ramic, qui était le

15 coordinateur... Mais là je ne sais pas, je vous dis cela à partir de

16 certaines informations que j'ai eues, mais j'ai eu l'impression qu'il y

17 avait eu effectivement un petit conflit entre le capitaine Ramic et

18 M. Delalic. Donc, si c'est de cela que vous parlez quand vous dites

19 "conflit", je vous répondrai oui, mais si vous parlez de conflit armé, je

20 n'ai aucune connaissance d'un conflit armé entre Musulmans.

21 M. Olujic (interprétation). - Dites-moi, Professeur, savez-vous

22 quoi que ce soit sur le MUP et, à votre avis, avait-il son propre

23 commandement qui ne reconnaissait pas les autres filières de

24 commandement ? Sommes-nous d'accord sur ce point ? Le MUP avait un

25 commandement autonome et ce commandement ne reconnaissait jamais aucun

Page 9490

1 autre commandement tel que celui de l'armée, de la Défense territoriale et

2 autres formations.

3 M. Gow (interprétation). - Je suppose que vous parlez de la même

4 période là encore ?

5 M. Olujic (interprétation). - Oui, je parle toujours de la même

6 période. Excusez-moi si je n'ai pas été très clair.

7 M. Gow (interprétation). - Oui, je souhaitais que les choses

8 soient claires avant de répondre. Le ministère de l'Intérieur et les

9 forces de ce ministère étaient l'une des trois composantes qui ont

10 participé à la création de l'armée de Bosnie. C'était une structure

11 différente, elle avait sa ligne de commandement différente, mais c'étaient

12 l'une des composantes comme en Croatie qui avait fini par déboucher sur la

13 création de l'armée.

14 Je ne suis pas d'accord sur le fait qu'elle n'ait jamais accepté

15 d'autre commandement

16 ou d'autre autorité, mais je suis d'accord pour dire qu'au départ, c'était

17 une filière de commandement différente, autonome, une organisation

18 différente mais qui rentrait cependant dans le cadre général qui allait

19 devenir l'Armée de Bosnie-Herzégovine par la suite. Il y avait des

20 éléments armés, bien sûr.

21 M. Olujic (interprétation). - Sans doute, par la suite, mais

22 moi, je vous parle de cette période particulière : en plus de la Défense

23 territoriale, le ministère de l'Intérieur et ses forces armées ainsi que

24 d'autres forces qui existaient à cette même époque et à cet endroit, je

25 crois que nous pouvons dire qu'à cette période-là, le MUP avait son propre

Page 9491

1 commandement mais que ce commandement n'était pas intégré dans d'autres

2 commandements, qu'il ne travaillait pas en coordination, donc qu'ils

3 n'avaient à répondre de leurs actes que devant eux-mêmes parce que, du

4 point de vue opérationnel, ils n'étaient pas liés à d'autres

5 commandements.

6 M. Gow (interprétation). - D'après ce que j'ai compris, c'était

7 le cas officiellement mais il y a également d'autres dispositions qui ont

8 été prises en vertu de la doctrine de la défense populaire généralisée et

9 d'autres unités devaient être assignées ou devaient travailler en

10 coopération avec la Défense territoriale ou ces unités. Il faut souligner

11 qu'il y avait des éléments séparés mais qu'ils allaient tous être

12 rassemblés en une seule formation, mais cela s'est fait comme un

13 processus.

14 M. Olujic (interprétation). - Mais ces conclusions sont les

15 vôtres, n'est-ce pas ? C'est votre opinion personnelle que vous

16 exprimez ?

17 M. Gow (interprétation). - Excusez-moi, je ne comprends pas très

18 bien votre question. Oui, c'est effectivement la conclusion que j'ai

19 tirée.

20 M. Olujic (interprétation). - Très bien, merci.

21 Monsieur le Président, avec votre permission peut-être devrions

22 nous faire notre pause maintenant ou dois-je poursuivre ?

23 M. le Président (interprétation). - Très bien, nous allons faire

24 une pause et suivre votre proposition et nous reviendrons à 16 heures 30.

25 (L'audience est suspendue à 16 heures.)

Page 9492

1 (L'audience est reprise à 16 heures 30.)

2 M. le Président (interprétation). - Veuillez faire entrer le

3 témoin, s'il vous plaît.

4 (Le témoin, Dr. Gow est introduit dans la salle.)

5 M. le Président (interprétation). - Maître Olujic, veuillez

6 poursuivre s'il vous plaît.

7 M. Olujic (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

8 Professeur Gow, vous connaissez les lois et coutumes de la guerre

9 internationale ?

10 M. Gow (interprétation). - Je connais l'existence d'un ensemble

11 de lois internationales, humanitaires en temps de conflit. Dire que je les

12 connais, je n'irai pas jusque là. Je connais quelques éléments de leur

13 contenu, mais je ne me qualifierai pas d'expert dans ce domaine et je ne

14 suis peut-être pas très bien placé pour faire des commentaires, même si je

15 serais prêt à discuter de ces différents points en tant que personne

16 normale. Mais je n'irai pas jusqu'à prononcer des jugements.

17 M. Olujic (interprétation). - Mais si je vous pose certaines

18 questions sur les lois de la guerre internationale, vous y répondrez ?

19 M. Gow (interprétation). - Vous pouvez me poser des questions si

20 les réponses sont de mon ressort ou si je peux y répondre.

21 M. Olujic (interprétation). - Merci. Professeur Gow, connaissez-

22 vous quoi que ce soit sur la répercussion des coutumes et lois de la

23 guerre internationale en ex-Yougoslavie ?

24 M. Gow (interprétation). - Je ne suis pas sûr que c'est une

25 question à laquelle j'ai la capacité de répondre, en tout cas de la façon

Page 9493

1 dont je l'ai.

2 M. Olujic (interprétation). - Je vous remercie. Professeur Gow,

3 vous avez participé

4 de façon très enrichissante aux travaux du bureau du Procureur, n'est-ce

5 pas ?

6 M. Gow (interprétation). - J'ai coopéré avec lui, oui. Cela a

7 été une expérience enrichissante. J'espère que c'est une expérience

8 réussie, je ne sais pas, c'est à eux de décider, à d'autres personnes en

9 tout cas que moi.

10 M. Olujic (interprétation). - J'ai lu certains de vos

11 témoignages précédents et je voudrais vous demander si le bureau du

12 Procureur est satisfait de votre travail.

13 M. Jan (interprétation). - (Hors micro.)

14 M. Niemann (interprétation). - Objection, Monsieur le Président.

15 M. le Président (interprétation). - Ce n'est pas une question à

16 laquelle doit répondre le témoin.

17 M. Olujic (interprétation). - Professeur Gow, en tant que témoin

18 expert, votre fonction consiste-t-elle plutôt à informer les juges sur

19 certaines circonstances, notamment sur l'histoire, le droit et la

20 politique ? Peut-on définir votre fonction de cette façon ? En d'autres

21 termes, Professeur Gow, je voudrais simplement développer un peu. Vous

22 n'êtes pas un témoin en médecine légale, vous n'avez pas à nous donner des

23 informations sur le crime lui-même et la situation du crime, vous êtes

24 simplement ici pour décrire certaines situations nées sur le territoire de

25 l'ex-Yougoslavie.

Page 9494

1 M. Gow (interprétation). - D'après ce que je comprends de ma

2 fonction, et je pense que toutes les personnes qui se trouvent dans cette

3 salle le comprennent mieux que moi, elle consiste à apporter mon concours

4 au Tribunal en fournissant des informations sur lesquelles nous pourrons

5 comprendre le contexte dans lequel les crimes ont été commis. Ces

6 informations peuvent être pertinentes pour établir si certains articles du

7 statut sont pertinents ou peuvent être appliqués. Je crois que c'est ma

8 fonction. Mais si quelqu'un me disait que ce n'est pas le cas, je serais

9 prêt à entendre ses suggestions.

10 En ce qui concerne les éléments de preuve de nature médecine

11 légale ou autres, je

12 suis ici pour témoigner en tant qu'expert plutôt que pour donner des

13 éléments très précis sur ce qui s'est passé à Konjic à cette période. Je

14 suis ici pour établir un contexte qui permettra d'établir un lien entre ce

15 que je dis et sur d'autres éléments plus précis de Konjic. Bien sûr, je

16 signale que ma connaissance des événements de Konjic est assez limitée et

17 que je les ai tirés principalement des éléments que j'ai pu consulter ici.

18 M. Olujic (interprétation). - Et bien sûr, pour nous, vous êtes

19 un scientifique ici, donc je voudrais vous poser la question suivante en

20 tant que scientifique, vous avez dit au cours de l'interrogatoire

21 principal que l'intention de la JNA de se diviser en tant qu'officiers

22 Serbes et autres n'était pas simplement votre propre opinion. Cela veut-il

23 dire que vous fondez votre opinion sur l'opinion de tiers ?

24 M. Gow (interprétation). - Il est vrai qu'à l'époque, j'ai fondé

25 mon opinion sur des débats avec d'autres, je crois que je l'ai déclaré et

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1 que cela a été très clair dès le départ. J'ai également utilisé des

2 documents d'autres sources, des documents publiés et puis des documents

3 qui m'ont été fournis par le bureau du Procureur. J'ai donc utilisé toute

4 une gamme de sources différentes pour recueillir des informations.

5 M. Olujic (interprétation). - Et fondez-vous vos opinions sur la

6 position du bureau du Procureur également ?

7 M. Gow (interprétation). - Non, parce que je ne suis pas sûr de

8 savoir très bien quelle est la position du bureau du Procureur. Je sais

9 qu'il doit présenter des arguments et qu'il y a peut-être certains

10 critères à respecter, mais je fonde simplement mon opinion sur

11 l'évaluation personnelle des informations que je compulse et sur la façon

12 dont je comprends une situation particulière et les événements. Mais je

13 comprends que le bureau du Procureur me demande de venir ici en tant que

14 témoin parce que la nature des éléments dont je dispose peut être utile

15 pour ses arguments.

16 M. Olujic (interprétation). - Au cours de l'interrogatoire

17 principal,

18 Professeur Gow, vous avez dit que ce que M. Jovic disait était très

19 important, n'est-ce pas ?

20 M. Gow (interprétation). - Je crois qu'il est très important de

21 prendre ce que M. Jovic a dit au sujet de décisions et d'événements en

22 compte, parce que c'était une personne qui a agi de façon active dans ce

23 processus.

24 M. Olujic (interprétation). - Savez-vous qu'il avait des

25 intérêts personnels et qu'il a joué un des rôles cruciaux dans ces

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1 événements ?

2 M. Gow (interprétation). - Oui. Je l'ai dit auparavant, j'ai dit

3 qu'il avait été très utile et qu'il avait même eu un rôle très important

4 dans les événements qui ont eu lieu.

5 M. Olujic (interprétation). - Ne pensez-vous pas qu'il aurait dû

6 craindre des sanctions pour les actes qu'il a commis ?

7 M. Gow (interprétation). - C'est une question philosophique à

8 laquelle il est difficile de répondre. Je ne connais pas très bien la

9 personnalité de M. Jovic, donc, je ne voudrais pas me prononcer. D'un

10 point de vue pratique, il reviendrait à d'autres de décider si le contenu

11 des révélations de Jovic devait mener à des craintes de sa part pour les

12 actes dont vous venez de parler. Mais si les circonstances étaient là pour

13 que ces événements mènent à des poursuites, peut-être M. Jovic devrait-il

14 avoir quelques craintes effectivement.

15 M. le Président (interprétation). - Vous n'avez pas répondu à la

16 question, non, vous n'y avez pas répondu. Quelle est votre réponse donc ?

17 M. Gow (interprétation). - C'est très difficile, je croyais que

18 j'avais fait de mon mieux pour répondre de la façon la plus appropriée à

19 la question.

20 M. Niemann (interprétation). - Je crois que c'est une question

21 qui n'est pas pertinente. Le témoin ne devrait pas avoir à y répondre, il

22 ne doit pas déterminer si une personne ou une autre devrait se sentir

23 coupable de quoi que ce soit. C'est un témoin expert qui est là pour

24 témoigner sur son domaine particulier et Monsieur le Président, à mon

25 avis, c'est

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1 une question totalement inappropriée.

2 M. le Président (interprétation). – Mais, peut-être ne sait-il

3 pas. Savez-vous s'il a peur ou pas ?

4 M. Gow (interprétation). - Si c'est une question factuelle qui

5 consiste à dire : "a-t-il peur ou pas", je n'en ai aucune idée, mais je

6 pensais que la question portait plus sur une supposition qu'une réalité.

7 Mais si c'est la question, je suis heureux de répondre que non, je ne sais

8 pas si M. Jovic a peur ou pas.

9 M. Olujic (interprétation). - Ce qui m'intéresse,

10 Professeur Gow, c'est la chose suivante : si les conclusions que vous avez

11 tirées du journal de M. Jovic et vous en avez parlé au cours de

12 l'interrogatoire principal et du contre-interrogatoire, si vous n'avez pas

13 utilisé ces mêmes conclusions dans l'affaire Tadic, pourquoi les mettre en

14 avant maintenant que des Musulmans et des Croates sont en procès ?

15 M. Gow (interprétation). - Je ne crois pas que ce dernier

16 argument ait quelque chose à voir avec l'utilisation ou non de ces

17 éléments. L'utilisation du journal intime a pour objectif de renforcer ce

18 que j'ai dit au cours du procès Tadic. A ce moment là, j'ai fait référence

19 à la cassette de l'interview "Mort de la Yougoslavie" dans laquelle Jovic,

20 en ses propres termes, dit cela. Mais dans la cassette, ne figurait pas la

21 date, à savoir le 5 décembre 1991. J'avais juste dit que c'était arrivé

22 avant. Donc, pourquoi est-ce que je l'utilise maintenant ? Simplement pour

23 renforcer ce point particulier. Si vous me demandez maintenant si peut-

24 être nous aurions dû utiliser la date précise à ce moment-là, je dis oui,

25 peut-être que cela aurait été mieux, mais je n'ai pas utilisé cet élément

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1 à ce moment-là, parce que je pensais que les éléments que je présentais à

2 ce moment-là suffiraient pour me faire comprendre.

3 M. Olujic (interprétation). - Je vais être sincère avec vous,

4 Professeur Gow, je n'ai pas lu ce journal intime et je crois qu'il n'est

5 absolument pas pertinent pour l'affaire qui nous occupe parce que je

6 connais très bien la pensée et les actions de M. Jovic. Mais je crois

7 qu'il

8 essaie de se protéger en accusant des tiers. Je voudrais maintenant savoir

9 si l'utilisation de ce journal intime dans cette affaire, dans l'affaire

10 Celebici et non dans l'affaire Tadic n'a pas entraîné un certain manque

11 d'équilibre, parce qu'en fait il y a deux démarches différentes qui sont

12 adoptées, l'une dans l'affaire Celebici, l'autre dans l'affaire Tadic qui,

13 d'un point de vue scientifique, devrait être similaires, voire identiques.

14 M. Gow (interprétation). - En fait, votre idée de la vérité

15 scientifique me pose problème, mais je laisserai ce point de côté. Je peux

16 dire simplement que la seule différence entre les témoignages présentés et

17 l'utilisation du journal intime permet de mettre le doigt sur la date, ce

18 que la cassette ne permet pas de faire. Effectivement cela n'a pas été le

19 cas dans l'affaire Tadic. L'utilisation de la cassette de l'interview n'a

20 pas permis de fixer la date précisément. Donc je ne crois pas que cela

21 brise l'équilibre, cela permet simplement de préciser une date et de

22 renforcer l'argument présenté à l'époque.

23 M. Olujic (interprétation). - Au cours de l'interrogatoire

24 principal, vous avez parlé de la création de la Yougoslavie. Savez-vous

25 qui était Vouksvanovic**Kadjovicic ? Savez-vous ce qu'il a dit des Croates

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1 et de leur appartenance ethnique ?

2 M. Gow (interprétation). - Peut-être pourriez-vous m'aider un

3 peu en me suggérant l'idée que vous avez. Je pense à certaines choses bien

4 sûr, mais...

5 M. Olujic (interprétation). - ... Il a dit que tous les Croates

6 étaient en fait des Serbes par ethnicité. Connaissez-vous cette

7 déclaration ?

8 M. Gow (interprétation). - Oui. Il les considérait comme des

9 Serbes d'une religion différente, qui ne réalisaient pas vraiment... en

10 tout cas, c'est ce qu'il disait, qu'ils étaient serbes. C'était une sorte

11 de dénominateur commun pour tous les slaves du Sud. Tous devaient être vus

12 de la même façon. C'est en tout cas ce qu'il disait.

13 M. Olujic (interprétation). - Savez-vous que la célébration sa

14 naissance était l'un des événements majeurs lorsque Milosevic se dirigeait

15 vers les hautes sphères du pouvoir ?

16

17 M. Gow (interprétation). - Je ne m'étais pas rendu compte

18 effectivement que c'était un des événements majeurs au cours de

19 l'ascension de Milosevic vers le pouvoir, mais enfin...

20 M. Olujic (interprétation). - Savez-vous, Professeur Gow, qu'en

21 1989, une tentative a été faite afin de transformer le 1er décembre, date

22 de la création du royaume des Serbes, Croates et Slovènes, qui ne

23 reconnaissait aucune nation indépendante, qu'il y avait donc eu une

24 tentative de faire de ce jour un jour férié ?

25 M. Gow (interprétation). - En 1989, avez-vous dit ? Je ne me

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1 rappelle pas que c'était particulièrement en 1989, je sais qu'il y a eu

2 une certaine discussion autour de ce point, mais...

3 M. Olujic (interprétation). - Savez-vous que dans l'ancienne

4 Yougoslavie, on ne pouvait porter que des bannières serbes, en tant que

5 bannières religieuses, mais c'était en tout cas la seule que l'on pouvait

6 porter publiquement ?

7 M. Gow (interprétation). - Je ne comprends pas très bien ce que

8 vous voulez dire pas la bannière serbe. Vous parlez du drapeau de la

9 République de Serbie ou d'autre chose ?

10 M. Olujic (interprétation). - Non je parle du drapeau serbe,

11 avec l'emblème serbe. C'était le seul que l'on pouvait publiquement porter

12 dans l'ancienne Yougoslavie, alors que les autres drapeaux ne pouvaient

13 pas être utilisés publiquement, pendant les vacances ou autres, mais si

14 vous ne savez pas ce n'est pas très grave.

15 M. Gow (interprétation). - Quant à l'utilisation de ce genre de

16 drapeau, je sais que des drapeaux de différentes Républiques ont été

17 brandis, mais si vous parlez d'un drapeau spécifique, ce n'est pas un

18 aspect des choses que j'ai étudié.

19 M. Olujic (interprétation). - Au cours de l'interrogatoire

20 principal, vous avez dit que la Republika Sprska incluait dans sa

21 Constitution qu'elle faisait partie de la Yougoslavie. Est-ce exact ?

22 M. Gow (interprétation). - Oui effectivement.

23 M. Olujic (interprétation). - Et depuis le début, a-t-elle

24 menacé de faire sécession de Bosnie-Herzégovine, si la Bosnie-Herzégovine

25 faisait sécession de la Yougoslavie ? Pas seulement pour annexer certaines

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1 parties de la Bosnie-Herzégovine mais également pour éviter que la Bosnie-

2 Herzégovine n'acquière son indépendance. Je voudrais simplement donner un

3 exemple : pour la Krajina en Croatie, il n'y avait qu'un seul objectif, à

4 savoir le maintien de la RSFY, mais il y avait simplement les événements

5 qui ont changé à cause de la réaction de la communauté internationale.

6 Milosevic a finalement accepté de dissoudre la République à Krajina en

7 Croatie, mais pas la Republika Srpska, n'est-ce pas ?

8 M. Gow (interprétation). - Là encore, il est difficile de

9 répondre parce qu'il y a beaucoup d'éléments dans votre question. Il faut

10 que je me rappelle de tous. Je serai d'accord pour dire que la démarche

11 dans la Republika Srpska Krajina et par la suite avec la formation de la

12 Républika Srpska était à peu près identique, et c'était une démarche

13 commune. Je serai également d'accord pour dire que s'il avait été possible

14 de maintenir la RSFY en l'état, ceux qui auraient poursuivi ce projet,

15 auraient été tout à fait prêts à le faire. C'est le cas pour les

16 représentants de la JNA. Je crois qu'il est un peu inutile de débattre de

17 tous les détails de ce qui s'est passé, alors que le fait est que les

18 événements ont suivi une certaine progression et qu'une fois que la

19 dissolution de la RSFY a été reconnue en réaction à cela, la JNA a agi en

20 coopération avec les dirigeants serbes, les forces de sécurité serbes,

21 afin de mener à bien ce projet qui avait pour but de conquérir certains

22 territoires de la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine. Mais par exemple,

23 pour Kadijevic, s'il avait été impossible de conserver l'intégralité de la

24 Bosnie-Herzégovine et certaines parties de ce que l'on considérait être la

25 Yougoslavie, je pense -en tout cas c'est probable- qu'il l'aurait fait.

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1 Mais je ne peux pas dire avec précision qu'il l'aurait fait, ou non. Je

2 dirai simplement qu'il était tout à fait improbable, étant donné les

3 circonstances, qu'il y ait des discussions sur ce point. Mais si j'ai

4 tort, je serais ravi que l'on me contredise.

5 M. Olujic (interprétation). - Professeur Gow, pour continuer sur

6 ce que vous venez de dire, savez-vous ce que Milosevic a dit lorsque les

7 pressions internationales se sont amenuisées en 1991 et 1992, et comment

8 il a justifié son agression contre la République de Croatie ? Savez-vous

9 qu'il a dit que le monde entier était conscient des nazis qui

10 envahissaient, qui allaient contre lui et que bientôt le monde allait

11 réagir et les détruire ?

12 M. Gow (interprétation). - Je ne me rappelle pas très bien de ce

13 que Milosevic a dit à ce moment-là, je me souviens simplement que le

14 Général Kadijevic a évoqué une certaine idée et que donc les nazis

15 revenaient à la charge. Il a fait la même chose, lors d'une réunion au

16 quartier général militaire les 11 et 12 mars, ce à quoi j'ai fait

17 référence avant la pause.

18 A ce moment-là, effectivement, il a exprimé de telles opinions,

19 mais en janvier 1991, Milosevic, lors d'un déjeuner avec les ambassadeurs

20 de l'Union européenne et des Etats-Unis, a dit que si la RSFY devait se

21 démanteler, ce type d'action serait lancée, sans rentrer dans les détails

22 bien sûr, sans parler des frontières par exemple.

23 M. Olujic (interprétation). - Savez-vous qu'il était avec les

24 putchistes contre Eltsine, qu'ils avaient des contacts permanents, qu'ils

25 discutaient ensemble ?

Page 9503

1 M. Gow (interprétation). - Je ne suis pas particulièrement au

2 courant du fait qu'ils auraient eu des contacts avec Milosevic. Ce que je

3 sais, c'est que le Général Kadijevic et le Colonel Iazov qui était alors

4 ministre de la Défense russe, étaient en contact avec lui et qu'il y avait

5 là une coordination, que Kadijevic était au courant de plans qui auraient

6 été tramés en vue de lancer un coup contre Gorbatchev en Union Soviétique;

7 et que Jovic était au courant des activités de Kadijevic. Mais je ne sais

8 plus si Jovic lui-même avait ce genre de contact. Je n'étais pas au

9 courant de ce que Milosevic avait des contacts directs.

10 Cela ne veut pas dire qu'il n'en avait pas, mais je ne me

11 rappelle plus.

12 M. Olujic (interprétation). - Savez-vous que Milosevic a même

13 accusé le pape et l'Allemagne en disant que ces derniers étaient des

14 nazis, que le monde se retournerait contre

15 eux et que le monde saurait gré à la Serbie d'avoir attaqué la République

16 de Croatie ?

17 M. Gow (interprétation). - Je sais que ces choses ont été dites,

18 mais je ne me souviens pas qu'il faille attribuer ces propos à Milosevic,

19 je n'ai pas un souvenir précis.

20 M. Olujic (interprétation). - Dites-nous, Professeur Gow, au

21 cours de l'interrogatoire principal, vous savez qu'à votre avis, les

22 conflits entre les Serbes eux-mêmes étaient importants dans le cadre de

23 ces événements. Ne pensez-vous pas que s'agissant de ces conflits, ils

24 étaient quand même d'accord sur l'idée fondamentale d'une grande Serbie.

25 Alors pourquoi y aurait-il entre les Serbes, des conflits qui seraient

Page 9504

1 importants ? Ceci, pour apporter quelques précisions sur ces événements

2 dont nous parlons.

3 M. Gow (interprétation). - Je ne saisis pas tellement le sens de

4 votre question.

5 M. Olujic (interprétation). - Je vous comprends. Au cours de

6 l'interrogatoire principal, pages 93-71, un peu avant et un peu après

7 aussi, vous avez dit ceci : "pour comprendre les événements dans leur

8 substance, pour comprendre l'évolution des événements, il est important

9 également de se souvenir des conflits qui existaient entre les Serbes de

10 Bosnie et les Serbes".

11 Maintenant, je vous demande pourquoi ces conflits éventuels

12 auraient une telle importance, puisqu'en principe, ils étaient d'accord

13 entre eux ?

14 M. Gow (interprétation). - Certes, en quintessence, il y aurait

15 un accord entre eux s'agissant de l'objectif global. Je ne me souviens pas

16 d'une référence particulière que j'aurais faite dans le cadre de ma

17 déposition, mais je suppose que vous faites allusion à des différences

18 entre les Serbes de Bosnie et les Serbes de Belgrade, différences en ce

19 qui concerne la tactique et le style, Belgrade voulant peut-être ce qui

20 pouvait représenter un avantage politique à un moment précis, ce qui

21 signifie qu'il y aurait un accord apparent pour tenir compte des

22 préoccupations internationales. Ainsi en 1994, tous ceux qui examinaient

23 la situation pensaient

24 que Belgrade voulait véritablement que le plan qui avait été offert soit

25 accepté et semblait vouloir vraiment essayer de convaincre les Serbes de

Page 9505

1 Bosnie d'accepter ce plan, sans pour autant prendre des mesures de

2 contrôle complet. En effet, ceci aurait voulu dire que l'on aurait divisé

3 les efforts qui avaient été entrepris pour arriver à cet accord. Or, les

4 Serbes de Bosnie semblaient suivre une évolution que ne voulait pas

5 Belgrade, mais la question n'était pas suffisamment importante pour

6 Belgrade à ce moment-là, pour que Belgrade fasse ce qu'elle pouvait pour

7 que les Serbes de Bosnie rejoignent le rang effectivement. A ce moment-là,

8 les intérêts politiques des deux côtés étaient quelque peu différents

9 peut-être, et il y avait donc peut-être des intérêts différents dans les

10 communautés serbes. J'ai souvent fait référence aux mémoires du Général

11 Kadijevic. Dans ses mémoires, il dit notamment qu'ils sont parvenus à

12 faire ce qu'il était possible de faire, étant donné l'environnement

13 international de l'époque. Il dit aussi que les Serbes ou les Yougoslaves

14 de Belgrade avaient un accord, accord qui valait pour le moment, mais que

15 dans cinq ou dix ans, les Serbes de Bosnie rejoindraient la République

16 fédérale de Yougoslavie, que les choses étaient comme elles étaient à un

17 moment donné, mais qu'elles pouvaient évoluer. Je ne sais pas si j'ai été

18 clair, et je suis désolé d'avoir fait tant de détours pour donner la

19 réponse, mais c'est là qu'il est important d'être conscient des

20 différences parce que je ne sais pas s'il y avait vraiment l'idée d'un

21 objectif général ou si effectivement l'on pourrait dire qu'il y avait

22 accord général sur l'objectif.

23 M. Olujic (interprétation). - On peut dès lors dire que Belgrade

24 et Pale étaient en principe d'accord pour créer une grande Serbie.

25 M. Gow (interprétation). - Sans parler de grande Serbie, ils

Page 9506

1 étaient effectivement d'accord pour constituer une série de territoires

2 qui soient fédérés.

3 M. Olujic (interprétation). - Dans le cas de l'interrogatoire

4 principal, nous avons cru comprendre que votre position vous permettrait

5 de répondre aux questions que je vous pose, maintenant que vous n'êtes pas

6 ici pour témoigner d'événements particuliers à Konjic,

7 sans parler bien sûr de Celebici. Quand je dis Konjic, je pense à

8 Celebici.

9 M. Gow (interprétation). - Effectivement, je ne pense pas que

10 mon rôle consiste à donner des éléments particuliers qui soient dérivés de

11 mon expérience personnelle ou d'enquêtes que j'ai menées personnellement

12 sur la question, ce qui ne veut pas dire que... Pour autant que je me

13 souvienne de l'interrogatoire principal, j'ai effectivement fait référence

14 à certaines choses que j'avais constatées à propos de Konjic qui

15 coïncidaient dans les grands traits avec le témoignage que je faisais.

16 M. Olujic (interprétation). - Merci. Passons, si vous le voulez

17 bien, à un autre sujet. Vous avez assez longuement parlé de l'histoire et,

18 dans le cadre de l'interrogatoire principal, en réponse à des questions

19 qui vous ont été posées par Me Niemann, mais aussi dans l'affaire Tadic,

20 vous avez parlé de la formation du royaume des Serbes, des Croates et des

21 Slovènes, et de l'idée qui se dissimulait aussi derrière de créer un grand

22 état commun, n'est-ce pas ?

23 M. Gow (interprétation). - Oui.

24 M. Olujic (interprétation). - Voici ma question, Professeur

25 Gow. : savez-vous qui a élu le comité yougoslave ?

Page 9507

1 M. Gow (interprétation). - Je crois que je vais répondre par la

2 négative.

3 M. Olujic (interprétation). - Je vais répondre à la question :

4 personne ne l'a élu. Et savez-vous où a été constitué ce Comité

5 yougoslave

6 M. Gow (interprétation). - Pour autant que je sache, à Londres.

7 M. Olujic (interprétation). - Non, en Italie.

8 Et savez-vous quel nom a été donné à ce comité et en quelle

9 année il a été constitué ?

10 M. Gow (interprétation). - (réponse inaudible)

11 M. Olujic (interprétation). - Et quel a été le nom donné à ce

12 comité ? Disons-le

13 autrement : êtes-vous d'accord pour dire qu'il s'est appelé le Comité

14 croate qui a été constitué en 1914 ?

15 M. Gow (interprétation). - Je serai très prudent dans ma réponse

16 et dans tout ce que je peux dire à ce propos. Je ne sais pas quelle sera

17 l'importance accordée à ce que je vais dire.

18 Il y a eu un Comité croate mais quant à affirmer que je suis

19 d'accord pour dire que c'était synonyme avec le Comité yougoslave, je ne

20 veux pas que mes mots se voient accorder un poids trop considérable. Je

21 serai très prudent.

22 M. Olujic (interprétation). - Savez-vous qu'à Zagreb, le sabor*

23 ou l'assemblée croate n'a jamais marqué son accord dans sa majorité avec

24 la formation du royaume conjoint des Serbes, des Croates et des Slovènes,

25 en d'autres termes, qu'elle n'a jamais avalisé l'existence de cet état ?

Page 9508

1 M. Niemann (interprétation). - Madame et Messieurs les Juges, je

2 ne sais pas si c'est vraiment passionnant mais, à mon avis, ceci n'a rien

3 à voir avec ce qui nous intéresse.

4 M. Olujic (interprétation). - Nous sommes devant un tribunal qui

5 est le plus élevé dans ce monde. Il faut établir certains faits.

6 Me Niemann a dit qu'il voulait apporter la preuve de certains faits qui

7 sont importants dans l'histoire des nations.

8 Personnellement, avec tout le respect que je dois au Professeur

9 Gow, j'affirmerai qu'en dépit du fait qu'il soit politologue, j'ai quand

10 même le droit d'attirer l'attention sur toute erreur éventuelle qui aurait

11 pu être commise au cours de son témoignage, non seulement devant cette

12 Chambre, mais aussi devant la Chambre siégeant dans l'affaire Tadic.

13 M. Niemann (interprétation). - Je ne me souviens pas avoir dit

14 ceci mais, si c'est le cas, je l'ai fait dans le contexte de la pertinence

15 des débats qui se tiennent devant vous et en tout état de cause, ce

16 contre-interrogatoire se fonde sur plusieurs prémisses qui ont été énoncés

17 à propos de témoignages.

18 On essaie de savoir si le Professeur Gow connaît ces choses,

19 mais je ne pense pas

20 que cela fasse avancer le procès.

21 M. Olujic (interprétation). - Monsieur le Président, avec votre

22 permission, je dirai que lorsque la défense va présenter ses témoins, elle

23 va aussi appeler à la barre des témoins experts et je ne vois pas la

24 moindre raison pour laquelle certaines des hypothèses avancées par le

25 Professeur Gow ne peuvent pas être soumises au feu de la critique. Pour ce

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1 faire, il faut examiner toutes les circonstances qui présentent une

2 certaine pertinence.

3 M. le Président (interprétation). – Poursuivez, mais dites-nous

4 exactement ce que vous voulez, quel but vous recherchez.

5 M. Olujic (interprétation). - Merci Monsieur le Président. La

6 question que j'ai posée au Professeur Gow est pertinente. En effet,

7 lorsque quelque chose est erroné d'emblée, cela ne va pas s'améliorer en

8 cours de route. Si l'Assemblée croate n'a jamais accepté l'Etat des

9 Serbes, des Croates et des Slovènes au titre du droit international ou au

10 titre des conventions internationales, on ne peut jamais dire que ce sera

11 un état tout à fait légal et légitime.

12 Professeur Gow, savez-vous si l'Assemblée croate n'a jamais

13 adopté de décision en faveur de ce royaume ?

14 M. Gow (interprétation). - Oui. Je sais aussi qu'une décision a

15 été prise pour qu'il y ait une jonction avec le royaume de Serbie. Ceci

16 n'a pas trait au sabor*, à l'Assemblée, mais c'est plutôt une décision

17 prise par le Conseil national à Zagreb. Si j'ai bien compris, c'est un

18 deuxième Conseil national et cette décision a été prise en premier lieu en

19 fonction du fait que c'était une décision du Conseil national visant à la

20 création d'un troisième élément slave au sein de l'Empire austro-hongrois

21 et qu'au titre de l'accord de 1915, une annexe avait été promise par les

22 alliés, à savoir la Dalmatie. Donc, la décision a été prise par commodité

23 pour qu'il y ait alliance avec un des autres alliés, à savoir la Serbie,

24 et c'était là une des meilleures options disponibles.

25 Je ne me souviens pas avoir déposé sur l'une quelconque de ces

Page 9510

1 questions que ce

2 soit dans l'affaire Tadic ou ici, mais ce sont effectivement des éléments

3 qui expliquent qu'en aval se soit finalement constituée la Yougoslavie.

4 Cela peut être utile d'en parler puisque j'essaie de vous prêter

5 assistance, mais ce que vous indiquez à propos de choses que j'aurais

6 dites dans le cadre d'une déposition est exact parce que je ne me souviens

7 pas avoir parlé de cela.

8 M. Olujic (interprétation). - Dites-nous, si vous voulez bien,

9 Professeur Gow, depuis la formation de cette Yougoslavie-là en 1918, êtes-

10 vous au courant des génocides des Musulmans, des Turcs, des Albanais et

11 d'autres persécutions qui se sont produites en Yougoslavie ?

12 M. Gow (interprétation). - Une fois de plus, je crois qu'il faut

13 aborder le sujet avec beaucoup de prudence. Je sais, par exemple, qu'au

14 cours de la deuxième guerre mondiale, il y a eu des meurtres en masse de

15 Musulmans dans certaines parties de la Bosnie-Herzégovine, notamment à

16 Foca. Je sais aussi que, toujours pendant la deuxième guerre mondiale et

17 sitôt après, des campagnes, à défaut d'un meilleur terme, ont été menées

18 contre les Albanais, à la suite de quoi beaucoup sont partis en Turquie.

19 Mais je ne sais pas ce que vous recherchez. Si vous me demandez si je

20 connais certaines choses et si je prends votre question au pied de la

21 lettre effectivement, je suis au courant de certaines questions.

22 M. Olujic (interprétation). - Merci. Nous avons consacré

23 beaucoup de temps à la question de la fin de l'existence de la RSFY.

24 Aidez-nous, si vous le voulez bien, et si vous le pouvez. La question

25 n'est pas de savoir quand elle cesse d'exister, mais plutôt quand elle

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1 cesse d'exister de la façon qui avait été envisagée et requise par la

2 volonté librement exprimée. En d'autres termes, la commission Badinter ne

3 pouvait décréter que la fin de l'existence, mais pourrions-nous nous

4 mettre d'accord pour dire qu'elle avait cessé d'exister bien avant la

5 commission Badinter ?

6 M. Gow (interprétation). - Je me souviens de ma déposition dans

7 l'affaire Tadic,

8 j'ai avancé l'avis suivant : j'avais dit que la fin définitive de ce

9 processus de dissolution, un peu comme si le certificat de décès avait été

10 proclamé par la commission Badinter pouvait être le 27 avril 1992, mais, à

11 mon avis, elle cesse d'exister en mai 1991. Si vous me demandez si elle a

12 vraiment cessé d'exister plus tôt, je dirai que, dès la fin des années 80,

13 des événements, un processus ont été mis en branle avec des facteurs qui

14 ont contribué à cette évolution et pour aboutir à la fin de l'existence de

15 cette Fédération. Personnellement, je dirai qu'elle a cessé d'exister et

16 de fonctionner le 15 mai 1992.

17 M. Olujic (interprétation). - Par conséquent, jusqu'en avril

18 1992, nous savons que des dizaines de milliers de personnes avaient déjà

19 été tuées en Croatie ainsi qu'en Bosnie-Herzégovine, et que c'était alors

20 les autorités fédérales qui avaient lancé l'agression contre la Croatie,

21 la Slovénie et la Bosnie-Herzégovine. Ce qui veut dire que, dès ce moment-

22 là, et la Croatie et la Slovénie avaient abandonné la Yougoslavie, se

23 basant sur leur droit constitutionnel pour ce faire. Sommes-nous d'accord

24 là-dessus ?

25 M. Gow (interprétation). - Je suis d'accord pour dire que la

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1 Croatie et la Slovénie avaient déjà pris les mesures que vous venez

2 d'évoquer et je subodore personnellement que les dirigeants serbes avaient

3 pratiquement fait la même chose, c'est-à-dire la perspective de maintenir

4 la République socialiste fédérative de Yougoslavie.

5 M. Olujic (interprétation). - C'est précisément ce que je

6 voulais vous demander. Est ce que les Serbes ont empêché qu'il y ait

7 référendum dans leurs villes et autres localités ?

8 M. Gow (interprétation). - De quel référendum parlez-vous, de

9 celui qui s'est tenu en Bosnie-Herzégovine ?

10 M. Olujic (interprétation). – Effectivement, en Bosnie-

11 Herzégovine.

12 M. Gow (interprétation). - Apparemment, s'il était possible

13 d'empêcher la tenue de ce référendum, ces efforts auraient été déployés.

14 C'était surtout dans les villes ou dans les régions où il y avait une

15 majorité serbe.

16 M. Olujic (interprétation). - Professeur Gow, j'en ai terminé

17 avec mon contre-interrogatoire. Je tiens à vous remercier une fois de

18 plus. Merci Monsieur le Président, merci, Madame et Messieurs les Juges.

19 M. Gow (interprétation). – Merci.

20 M. le Président (interprétation). – Merci. Maître Moran.

21 M. Moran (interprétation). - Il est 17 heures 20, et j'ai toute

22 une pile de documents, ne vous en faites pas, il y a beaucoup

23 d'exemplaires du document. Voulez vous que je commence maintenant ou lundi

24 matin ? J'ai dix minutes.

25 M. le Président (interprétation). - Vous ne pouvez faire que

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1 très peu de choses en l'espace de dix minutes. Mais vous vous dites que

2 plutôt que de continuer lundi, autant commencer. Vous pouvez déjà

3 présenter les documents.

4 M. Moran (interprétation). - Mais je voudrais aussi poser des

5 questions de fond au témoin. A part les questions posées aujourd’hui, je

6 veux simplement demander l'admission de certains documents, mais je ferai

7 quand même certains commentaires de fond.

8 M. le Président (interprétation). - Avant que le témoin n'oublie

9 les questions et les réponses qu'il a fournies, vous pouvez peut-être

10 tirer parti des dix minutes qui vous restent.

11 M. Moran (interprétation). Fort bien. Bonjour.

12 M. Gow (interprétation). - Bonjour.

13 M. Moran (interprétation). - Cela fait des siècles que j'utilise

14 les écouteurs et si je peux m'en passer tant mieux, je préfère faire sans.

15 Je m'appelle Tom Moran, je défends Hazim Delic. Connaissez-vous

16 Hazim par hasard ? Avez-vous eu l'occasion de le voir ?

17 M. Gow (interprétation). - Non, je n'ai pas eu ce plaisir. Je

18 suppose que je l'ai vu bien sûr, puisqu'il est dans le groupe, mais je ne

19 le distinguerai pas d'autres.

20 M. Moran (interprétation). - Fort bien. Vous connaissez la

21 chanson.

22 M. Gow (interprétation). – Oui, maintenant, je l'ai identifié.

23 M. Moran (interprétation). – Effectivement, c'est l'homme qui se

24 trouve là-bas à ma gauche. Vous avez dit en réponse à une des questions de

25 Me Ackerman qu'il est important de comprendre les questions. Et c'est

Page 9514

1 absolument juste. Parfois, je commence à accélérer mon débit et je parle

2 plus vite que je ne pense. Et quelquefois, mes questions ne sont pas aussi

3 claires qu'elles ne devraient être. Alors n'hésitez pas, dites : "Je ne

4 comprends pas la question" et si vous ne comprenez pas la question,

5 n'hésitez pas à m'interrompre, j'essaierai de la reformuler jusqu'au

6 moment où finalement vous aurez l'occasion de la comprendre.

7 M. Gow (interprétation). - Je crois que j'ai intérêt à être

8 précis et concis pour que vous ne reveniez pas à la charge.

9 M. Moran (interprétation). - Fort bien, merci. Et pour que tout

10 soit clair dans ma propre tête, vous êtes expert en affaires militaires,

11 pour la Yougoslavie, en questions politiques relatives à la Yougoslavie et

12 on peut dire qu'en ex-Yougoslavie, le politique a souvent une incidence

13 sur le militaire. Est-ce le genre d'expérience que vous avez ?

14 M. Gow (interprétation). - S'agissant de mes connaissances,

15 elles se portent surtout sur des questions militaires militairo-politiques

16 et des questions internationales.

17 M. Moran (interprétation). - Fort bien. Est ce que l'huissier

18 peut m'aider, car j'ai quelques documents.

19 En attendant qu'on enregistre ces pièces, je vais vous dire d'où

20 je viens et ce que je vais faire de ces documents pour ne pas vous ménager

21 d'effet de surprise.

22 Il y a une certaine contestation dans cette enceinte quant au

23 moment précis où la Yougoslavie, l'ex-RSFY s'est démantelée. Aujourd'hui,

24 vous déposez devant nous et ce sont sans doute des documents qui vont

25 corroborer votre avis. Pourrait-on avoir la cote pour le premier document,

Page 9515

1 celui du Conseil de sécurité ?

2 Mme le Greffier (interprétation). - D-14/3.

3 M. Moran (interprétation). - Et pour la constitution de la

4 République fédérale de Yougoslavie, ce sera D-15/3 ? Merci. Vous êtes en

5 train de le faire, vous examinez la pièce D-14/3, avez-vous déjà eu

6 l'occasion de voir ce document, pas nécessairement sous cette forme-ci ?

7 M. Gow (interprétation). - Oui.

8 M. Moran (interprétation). - C'est une copie d'une lettre venant

9 du Chargé d'affaire de la RSFY au Président du Conseil de sécurité des

10 Nations Unies.

11 M. Gow (interprétation). - Pour que je sois précis, je n'ai pas

12 vu la lettre auparavant mais j'ai vu la déclaration.

13 M. Moran (interprétation). - Vous avez donc vu la déclaration en

14 annexe de ce document.

15 Conviendrez-vous avec moi pour dire que ce document est la

16 déclaration, le certificat de naissance de la République fédérale de

17 Yougoslavie ?

18 M. Gow (interprétation). - Je ne suis pas sûr de votre métaphore

19 mais effectivement, c'est à cette date qu'a été proclamée la République

20 fédérale de Yougoslavie, Serbie et Monténégro.

21 M. Moran (interprétation). - Paragraphe 1, elle affirme être la

22 poursuite, la continuation de la République socialiste fédérative de

23 Yougoslavie.

24 M. Gow (interprétation). - C'est ce que ce document ou cette

25 République affirme, elle affirme être le successeur politique.

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1 M. Moran (interprétation). - Donc l'Etat successeur.

2 M. Gow (interprétation). - Oui . L'Etat successeur. Peut-être le

3 seul Etat successeur, mais c'est une question évidemment qui porte à

4 controverse.

5 M. Moran (interprétation). - Oui, mais on arrive à cette

6 contestation. Document D-15/3. Ce document affirme être une copie de la

7 Constitution de la République fédérale de

8 Yougoslavie, et pour que vous connaissiez la chose, il suffit d'ailleurs

9 de regarder ce document pour le voir, cela vient du site Internet

10 subventionné par le Gouvernement.

11 M. Gow (interprétation). - Oui, c'est le site officiel Internet

12 du Gouvernement.

13 M. Moran (interprétation). - Etes-vous d'accord pour dire que

14 c'est une copie de la Constitution, avec quelques coquilles qui se sont

15 glissées dedans ?

16 M. Gow (interprétation). - Oui.

17 M. Moran (interprétation). - Voyons l'article 2 première page.

18 On y définit quels sont les éléments constitutifs de la RFY.

19 M. Gow (interprétation). - Oui, Serbie et Monténégro comme étant

20 les éléments composant la RFY. Mais le texte poursuit en disant que

21 d'autre Républiques pourraient se joindre à la République fédérale.

22 M. Moran (interprétation). - Mais personne ne l'a fait jusqu'à

23 présent ?

24 M. Gow (interprétation). - A cette date, non.

25 M. Moran (interprétation). - Parlons de l'article 17 de ladite

Page 9517

1 Constitution. Cet article porte sur la citoyenneté. Madame et Messieurs

2 les Juges, il s'agit de la page 4.

3 M. Gow (interprétation). - Oui.

4 M. Moran (interprétation). - Que dit l'article 17 : que la RFY

5 confère la citoyenneté yougoslave à ses habitants et que pour être

6 yougoslave, il faut être simultanément citoyen de l'une des républiques.

7 M. Gow (interprétation). - Oui.

8 M. Moran (interprétation). - Donc pour être citoyen de la RFY,

9 il faut être citoyen de la République de Serbie ou de la République de

10 Monténégro ?

11 M. Gow (interprétation). - Ou de tout autre république s'il y en

12 a d'autres.

13 M. Moran (interprétation). - Si d'autres états membres

14 rejoignent la République...

15 M. Jan (interprétation). - (Hors micro.)

16 M. Moran (interprétation). - Oui, Monsieur le Juge. Indiquant

17 par là qu'à une date ultérieure, la Fédération peut accueillir en son

18 sein...

19 M. Jan (interprétation). - Effectivement, "peut se joindre à la

20 Fédération".

21 M. Moran (interprétation). - Donc il faudrait en faire la

22 demande. Je demande l'admission de la pièce D-14/3 et de la pièce D-15/3.

23 M. le Président (interprétation). - Les pièces sont admises.

24 M. Moran (interprétation). - Merci, Monsieur le Président. J'ai

25 encore quelques documents. Libre à vous de décider quand on termine ou

Page 9518

1 pas, Monsieur le Président. Peut-on encore consacrer quelques minutes au

2 dépôt de ces pièces ?

3 M. le Président (interprétation). - Oui.

4 M. Moran (interprétation). - Avec l'aide de l'huissier.

5 M. Gow (interprétation). - Me permettez-vous d'indiquer quelque

6 chose ?

7 M. Moran (interprétation). - Oui.

8 M. Gow (interprétation). - Nous avons parlé des citoyens, des

9 habitants. Je me souviens qu'il y a une référence similaire dans la

10 Constitution, mais dans la déclaration proprement dite, je pense que cela

11 se trouve au septième paragraphe en sus des dispositions dont nous venons

12 de parler, on affirme explicitement que les droits et obligations de la

13 RSFY restent d'application vis-à-vis notamment de la Krajina et d'autres

14 régions. Ce qui voudrait dire que cette Fédération se proclame comme

15 l'autorité responsable de ces régions-là. Je ne sais pas si ceci cadre

16 tout à fait avec la définition des habitants ou la composition de la

17 population. Je pense qu'il y avait une référence analogue dans la

18 Constitution.

19 M. Jan (interprétation). - Où commence ce paragraphe ?

20 M. Gow (interprétation). - C'est le deuxième paragraphe à partir

21 de la fin.

22 M. Jan (interprétation). - Quand on parle des droits et des

23 obligations ?

24 M. Gow (interprétation). - Dernière phrase de ce paragraphe :

25 "La République fédérale de Yougoslavie respectera les droits et

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1 obligations de la RSFY par rapport au territoire de la Krajina qui sera

2 placé sous la tutelle des Forces des Nations Unies de maintien de la

3 paix".

4 M. Moran (interprétation). - Ces documents sont en train d'être

5 transmis au juge, sont en train d'être identifiés aux fins

6 d'enregistrement. Vous disiez il y a un moment que la RFY affirme être le

7 seul Etat successeur, et vous avez dit que ceci était mis en doute ou

8 sujet à controverse.

9 M. Gow (interprétation). - Oui.

10 M. Moran (interprétation). - Et c'est contesté encore

11 aujourd'hui ?

12 M. Gow (interprétation). - Et je suppose que ce sera encore

13 contesté à l'avenir et pour longtemps.

14 C'est une question distincte qui n'a rien à voir avec ce que

15 vous me posiez comme question précédemment, à savoir l'existence de

16 communautés politiques ou territoriales.

17 M. Moran (interprétation). - Je comprends, mais j'attends de

18 recevoir la cote pour ces pièces. Vous avez peut-être l'original, en

19 fait ?

20 M. Gow (interprétation). - Il y a quatre lettres, la première

21 est une note du Président du Conseil de sécurité, vous l'avez ?

22 M. Gow (interprétation). - Oui, j'ai une note.

23 M. Moran (interprétation). - Au verso, il y a une cote.

24 M. Gow (interprétation). - C'est D-16/3. Vous voulez changer ?

25 M. Moran (interprétation). - Non, ça va.

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1 M. Gow (interprétation). - Ah, j'ai un nouveau boulot ! Je suis

2 maintenant assistant Greffier.

3 M. Moran (interprétation). - Puis il y a une lettre en date du

4 5 mai 1992, qui

5 émane du représentant-adjoint des Etats-Unis aux Nations Unies, adressée

6 au Président du Conseil de sécurité.

7 M. Gow (interprétation). - Oui, c'est une lettre en date du 26

8 mai ?

9 M. Moran (interprétation). - Non, c'est une lettre en date du

10 5 mai émanant du représentant-adjoint des Etats-Unis auprès des Nations

11 Unies.

12 M. Gow (interprétation). - Je ne la trouve pas.

13 Oui, j'ai les Etats-Unis.

14 M. Moran (interprétation). - Quelle en est la cote ?

15 M. Gow (interprétation). - D-19/3.

16 M. Moran (interprétation). - Puis il y a deux lettres émanant

17 du Canada, l'une en date du 6 mai, l'autre en date du 26 mai.

18 M. Gow (interprétation). - Pour le 6 mai, c'est le D-18/3, et

19 pour la lettre du 26 mai, c'est D-17.

20 M. Moran (interprétation). - Avez-vous déjà vu ces pièces

21 auparavant ?

22 M. Gow (interprétation). - Littéralement, oui, parce que je

23 crois que vous les avez remises au Bureau du Procureur. En tout cas, c'est

24 le Bureau du Procureur qui, au début de la journée, me les a montrées.

25 M. Moran (interprétation). - Fort bien. Ceci montre que

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1 plusieurs membres du Conseil de sécurité, à des moments divers, ont parlé

2 de l'ex-RSFY.

3 M. Gow (interprétation). - A les examiner rapidement maintenant,

4 elles portent sur le fait que l'affirmation faite par la RFY d'être le

5 seul successeur était contestée.

6 M. Moran (interprétation). - Par exemple, il y a la lettre en

7 date du 26 mai (D-17/3) qui vient de l'ambassadeur du Canada.

8 M. Gow (interprétation). - Permettez-moi de remarquer qu'il n'y

9 a pas de barre oblique 3 dans la cote.

10 Mme le Greffier (interprétation). - Oui, ce devrait être barre

11 oblique 3.

12 M. Moran (interprétation). - De toute façon, ce sera arrangé

13 par le Greffe.

14 M. Gow (interprétation). - Je veux m'assurer que je fais bien

15 mon boulot.

16 M. Moran (interprétation). - Est-ce qu'il y est fait référence

17 à la RSFY ?

18 M. Gow (interprétation). - Oui.

19 M. Moran (interprétation). - A l'époque, le Canada était membre

20 du Conseil de sécurité, n'est-ce pas ?

21 M. Gow (interprétation). - Je ne me souviens pas.

22 M. Moran (interprétation). - En tout cas, ceci indique à coup

23 sûr que le gouvernement du Canada, en tant que pays-membre des Nations

24 Unies, conteste la compétence qu'aurait la République fédérale de

25 Yougoslavie à agir en tant que seul Etat successeur de la RSFY.

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1 M. Gow (interprétation). - De quelle lettre parlons-nous ?

2 M. Moran (interprétation). - De la lettre du 26.

3 M. Gow (interprétation). - C'est une demande pour que des

4 sanctions soient imposées contre la Serbie et le Monténégro.

5 M. Moran (interprétation). - Et est-il fait référence à

6 l'ex-RSFY ?

7 M. Gow (interprétation). - Oui.

8 M. Moran (interprétation). - Et ceci semble indiquer que le

9 gouvernement du Canada pensait que la RSFY avait cessé d'exister ?

10 M. Gow (interprétation). - Oui.

11 M. Moran (interprétation). - Bien.

12 Examinons la lettre portant la cote D-18/3, lettre en date du

13 6 mai émanant de l'ambassadeur du Canada auprès des Nations Unies. Ceci

14 indiquera, n'est-ce pas, ou semblerait

15 indiquer que le gouvernement du Canada avait reconnu la création de la

16 République fédérale de Yougoslavie, mais avait des doutes quant à la

17 qualité de la RFY comme étant le seul Etat successeur de la RSFY.

18 M. Gow (interprétation). - Il me semble que ceci reconnaît qu'il

19 y a déclaration par la RFY de son existence, ce qui effectivement soulève

20 des questions.

21 M. Moran (interprétation). - Et cela semblerait indiquer que

22 tout le monde est d'accord, y compris l'ambassadeur et le gouvernement du

23 Canada, que la RSFY avait cessé d'exister en date du 6 mai ?

24 M. Gow (interprétation). - Je ne sais pas si c'est une

25 indication absolument claire. En tout cas, ceci cadre bien avec le genre

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1 de convictions qu'il y avait à l'époque.

2 M. Moran (interprétation). - D-18/3, lettre émanant du

3 représentant-adjoint des Etats-Unis auprès des Nations Unies, lettre dans

4 laquelle sont évoquées beaucoup de questions sérieuses pour savoir si la

5 RFY est bien la continuation de la RSFY, ce qui nous amènerait à penser

6 que la politique américaine était effectivement qu'à la date du 5 mai, la

7 RSFY avait cessé d'exister. Est-ce là une estimation valable ?

8 M. Gow (interprétation). - Apparemment.

9 M. Moran (interprétation). - Et maintenant la D-16/3. Il s'agit

10 d'une note émanant du Président du Conseil de sécurité qui renvoie à la

11 publication de plusieurs documents des Nations Unies, la cote étant

12 S/2023/8/7/7 (?), lettre venant de la RFY pour indiquer sa création. Cette

13 lettre semblerait indiquer que des questions subsistent au sein du Conseil

14 de sécurité quant au droit qu'aurait la République fédérale de Yougoslavie

15 d'être un Etat successeur. C'est vraiment libellé en des termes très

16 prudents, mais vous serez d'accord avec moi pour dire que c'est une

17 indication ?

18 M. Gow (interprétation). - Indication qu'il y a un nouveau fait

19 politique et que ce fait est reconnu sans porter préjudice à d'autres

20 questions.

21 M. Moran (interprétation). - Et cela semblerait indiquer qu'il

22 y avait consensus sur un accord général, tout du moins au sein du Conseil

23 de sécurité, pour dire que la République socialiste fédérative de

24 Yougoslavie avait cessé d'exister et qu'il y avait désormais une nouvelle

25 entité dénommée RFY.

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1 M. Gow (interprétation). - Je crois qu'il y a eu une

2 reconnaissance politique de facto, en tout cas, si elle n'avait pas cessé

3 d'exister, que la RSFY n'allait pas continuer son existence. Au niveau

4 politique, il était généralement reconnu que cette proclamation de la RFY

5 mettait formellement fin à la République socialiste fédérative. C'est

6 l'événement qui met officiellement fin à l'existence de la République

7 socialiste fédérative.

8 M. Moran (interprétation). - Et donc, le 27 avril la RFSY…

9 M. Gow (interprétation). - Si ce n'est pas plus tôt.

10 M. Moran (interprétation). – Mais manifestement, à partir de ce

11 moment-là…

12 M. Gow (interprétation). – Oui.

13 M. Moran (interprétation). – Monsieur le Président, est-ce un

14 moment adéquat pour interrompre nos travaux ?

15 M. le Président (interprétation). - Je pense que oui.

16 Mme McMurrey (interprétation). - Nous aimerions poser une

17 question à la Chambre.

18 M. Landzo voudrait être excusé lundi et mardi 16 et 17 février.

19 La Croix-Rouge a eu l'obligeance de lui accorder une visite de sa famille

20 de Bosnie. M. Landzo aimerait disposer de ce temps pour rencontrer ses

21 parents.

22 M. le Président (interprétation). - Je suppose en consultation

23 avec ses avocats. Oui, on n'a pas vraiment besoin de lui. Donc, il pourra

24 être excusé lundi et mardi.

25 Mme McMurrey (interprétation). - Merci.

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1 M. Moran (interprétation). - Merci de m'avoir laissé poursuivre

2 un peu plus

3 longtemps que prévu.

4 (L'audience est levée à 17 heures 45.)

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