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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL AFFAIRE N° IT-96-21-T
2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE
3 Mercredi 15 juillet 1998
4 L'audience est ouverte à 10 heures 05.
5 (Le témoin est introduit dans le prétoire.)
6 M. le Président (interprétation). - Bonjour Mesdames et
7 Messieurs. Les parties peuvent-elles se présenter, s'il vous plaît ?
8 M. Cowles (interprétation). - Bonjour Monsieur le Président,
9 Madame et Messieurs les Juges. Je m'appelle Jim Cowles, je représente le
10 Bureau du Procureur. A mes côtés M. Georges Huber. Je tiens à informer
11 les Juges de cette Chambre que Me McHenry a eu le malheur d'apprendre
12 qu'un de ses proches était décédé. Elle est repartie aux Etats-Unis, elle
13 sera absente pendant quelques jours et c'est moi qui représenterait le
14 Bureau du Procureur.
15 M. le Président (interprétation). - Merci de nous avoir fait
16 part de cette information. Veuillez transmettre toutes nos condoléances à
17 Me McHenry.
18 M. Cowles (interprétation). - Merci, Monsieur le Président, je
19 n'y manquerai pas.
20 M. le Président (interprétation). - Du côté de la défense, s'il
21 vous plaît ?
22 M. O'Sullivan (interprétation). - Bonjour Monsieur le Président.
23 Je m'appelle Eugène O'Sullivan, je représente M. Delalic.
24 Madame Residovic, ma collègue, ne sera pas avec nous ce matin. Je vous
25 fais part, cependant, de la présence de notre conseiller juridique,
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1 Me Michael Greaves, qui travaillera avec moi aujourd'hui.
2 M. Olujic (interprétation). - Bonjour, Monsieur le Président,
3 Madame et Messieurs les Juges. Je m'appelle Zeljko Olujic, je représente
4 ici M. Zdravko Mucic en compagnie de mon confrère, Me Duric. Nous sommes
5 tous deux avocats croates.
6 M. Karabdic (interprétation). - Bonjour, Monsieur le Président.
7 Je m'appelle Salih Karabdic, je suis avocat de Sarajevo. En compagnie de
8 mon confrère Me Tomas Moran, avocat de Houston au Texas, je représente
9 M. Hazim Delic.
10 Mme McMurrey (interprétation). - Bonjour Monsieur le Président,
11 Madame et Messieurs les Juges. Je m'appelle Cynthia McMurrey, je
12 représente ici M. Esad Landzo. Maître Boler n'est pas là ce matin, c'est
13 M. Sanders qui la remplacera pour nos travaux.
14 M. le Président (interprétation). - Merci beaucoup,
15 Maître McMurrey. Nous allons pouvoir commencer par l'audition de votre
16 premier témoin de la journée, Maître McMurrey. Il conviendrait d'ailleurs
17 de faire prêter serment à ce témoin. Le témoin devrait lire la déclaration
18 solennelle.
19 Mme McMurrey (interprétation). - Nous appelons à la barre le
20 Pr Marco Lagazzi.
21 M. Lagazzi (interprétation). - Je jure solennellement de dire la
22 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
23 M. le Président (interprétation). - Merci beaucoup.
24 Mme l'interprète (interprétation). - Je jure d'exercer mon
25 métier d'interprète impartialement, sincèrement, fidèlement et en tout
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1 respect des principes de confidentialité.
2 M. le Président (interprétation). – Merci.
3 Mme McMurrey (interprétation). – Monsieur le Président, puis-je
4 commencer ?
5 M. le Président (interprétation). - Je vous en prie.
6 Mme McMurrey (interprétation). - Merci beaucoup. Bonjour,
7 Professeur Lagazzi.
8 M. Lagazzi (interprétation). - Bonjour.
9 Mme McMurrey (interprétation). – Veuillez décliner votre
10 identité, s'il vous plaît.
11 M. Lagazzi (interprétation). - Je m'appelle Marco Lagazzi, je
12 suis psychiatre légiste, je viens de l'université de Gênes, en Italie.
13 Mme McMurrey (interprétation). - Nous nous sommes rencontrés
14 pour la première fois au mois de juin dernier, n'est-ce pas ?
15 M. Lagazzi (interprétation). - C'est exact.
16 Mme McMurrey (interprétation). - Comment en êtes-vous venu à
17 travailler pour ce Tribunal international ?
18 M. Lagazzi (interprétation). - C'est d'abord le Bureau du Greffe
19 de ce Tribunal qui m'a demandé d'apporter mon concours à ce Tribunal sur
20 la demande du Bureau du Procureur et de son représentant, Me Turone. Il
21 s'agissait d'abord d'un entretien avec M. Landzo, qui a eu lieu en
22 novembre 1996.
23 Il y avait un comité de trois personnes, constitué de M. Logan,
24 de M. van Leeuwen et de moi-même. Nous avons travaillé ensemble sur ce
25 comité. Ensuite, au mois de janvier 1997, en compagnie des deux mêmes
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1 collègues que je viens de citer, je me suis vu confier une autre mission.
2 Puis en avril 98, l'équipe de la défense de M. Landzo m'a demandé de
3 procéder à un deuxième examen de M. Landzo. On m'a également demandé de
4 faire part de mes conclusions au Tribunal.
5 Enfin, en mai 1998, le Bureau du Procureur m'a autorisé à mener
6 à bien cet examen tout en bénéficiant de mon statut d'expert neutre et
7 objectif. En tant qu'expert et à la demande du conseil de la défense, j'ai
8 mené à bien cet examen qui s'est réalisé au cours de la deuxième quinzaine
9 du mois de juillet 1998 et j'ai abouti à certaines conclusions qui sont
10 établies dans un rapport.
11 Mme McMurrey (interprétation). – Pardon, n'est-ce pas le mois de
12 juin 98 et non pas celui de juillet ?
13 M. Lagazzi (interprétation). – Absolument, excusez-moi,
14 deuxième quinzaine du mois de juin.
15 Mme McMurrey (interprétation). - Vous avez écrit une lettre au
16 Greffe parce que vous vouliez vous assurer que cet examen que vous alliez
17 mener à bien n'allait pas vous empêcher de préserver votre statut de
18 psychiatre parfaitement neutre et objectif, n'est-ce pas ?
19 M. Lagazzi (interprétation). – Effectivement. Voyez-vous,
20 d'après la loi italienne, un consultant neutre qui travaille pour le
21 Bureau du Procureur n'est pas autorisé à mener à bien quelque examen que
22 ce soit pour l'équipe de la défense, mais on m'a dit que cette situation
23 ne me poserait aucun problème, que je pourrai rester tout à fait neutre et
24 que je pouvais mener à bien cette mission.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Ceci vous a été expliqué lors
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1 d'un entretien téléphonique avec Me Turone ?
2 M. Lagazzi (interprétation). - C'est exact. Je me suis entretenu
3 à plusieurs reprises au téléphone avec le représentant du Bureau du
4 Procureur, Me Turone. Au cours de ces entretiens, je lui ai effectivement
5 demandé de me dire exactement ce que l'on me demandait de faire et,
6 lorsque j'ai bien compris quelle était la mission que l'on me demandait de
7 mener à bien, j'ai accepté.
8 Mme McMurrey (interprétation). - Merci. Pourriez-vous expliquer
9 aux Juges quel type d'entretien vous avez eu avec diverses personnes
10 depuis votre arrivée à La Haye cette semaine ?
11 M. Lagazzi (interprétation). - J'ai rencontré les membres de
12 l'équipe de la défense de M. Landzo, j'ai rencontré les collègues dont
13 j'ai parlé tout à l'heure, j'ai rencontré Me McMurrey, Me Boler, je vous
14 ai rencontrée à plusieurs reprises.
15 J'ai rencontré également les représentants du Bureau du
16 Procureur, M. Cowles, notamment, Me McHenry et ensuite j'ai eu un
17 entretien avec Me Moran, assez tard hier soir, un entretien tout à fait
18 informel et j'ai discuté avec tous ces interlocuteurs. J'ai notamment fait
19 part de mes opinions sur cette affaire. Si je ne m'abuse, dimanche
20 dernier, à la demande du conseil de la défense, j'ai rencontré le
21 Pr van Leeuwen et le Pr Crepone, deux experts qui ont travaillé sur cette
22 affaire.
23 Le Pr van Leeuwen avait travaillé avec moi dans le cadre
24 d'autres missions et j'ai rencontré le deuxième collègue dont j'ai parlé
25 pour la première fois lors de cet entretien. Dimanche, le Pr Verde était
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1 également présent ; le professeur a témoigné hier, si je ne m'abuse.
2 Mme McMurrey (interprétation). - Dimanche, lorsque nous nous
3 sommes rencontrés, personne ne savait quelles étaient les conclusions
4 établies par les autres psychiatres, n'est-ce pas ?
5 M. Lagazzi (interprétation). - Effectivement, je n'avais pas la
6 moindre idée de ce qu'avaient conclu les deux autres psychiatres après
7 leur examen. Pour ce qui est du Pr Verde, comme nous avons voyagé à
8 La Haye ensemble, nous avons un peu parlé de ses conclusions et c'est sur
9 la base de ses conclusions que j'ai établi une partie de mon rapport.
10 Mme McMurrey (interprétation). - Donc ce n'est que dimanche que
11 les différents acteurs ont compris que trois psychiatres indépendants
12 étaient arrivés, en fait, aux mêmes conclusions.
13 M. Cowles (interprétation). - Objection, Monsieur le Président,
14 à ce type de question. Je crois que tout cela n'est pas pertinent. On
15 dirait que Me McMurrey essaie de faire valoir la crédibilité de ce témoin
16 avant même que celui-ci ait pris la parole.
17 Mme McMurrey (interprétation). - Moi je crois que c'est
18 important que les Juges comprennent bien que chacun de ces psychiatres a
19 mené à bien un examen indépendant de M. Landzo, que chacun de ces
20 psychiatres a établi des conclusions indépendantes.
21 M. le Président (interprétation). - Mais est-ce que ce n'est pas
22 ce qui va ressortir de la déposition du témoin ?
23 Mme McMurrey (interprétation). - Mais dimanche, tous les
24 rapports avaient déjà été établis, toutes les conclusions avaient été
25 couchées sur le papier. C'est dimanche que nous en avons tous pris
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1 conscience.
2 M. le Président (interprétation). - Mais tout cela apparaîtra au
3 cours de la déposition.
4 Mme McMurrey (interprétation). - Fort bien, dans ce cas je vais
5 poursuivre. Monsieur le Président, j'ai déposé le curriculum vitae du
6 Pr Lagazzi. Nous n'avons que très récemment reçu la traduction en anglais
7 de ce curriculum vitae. Je vais demander donc à l'huissier de vous faire
8 passer la version en anglais de ce curriculum vitae, ainsi vous pourrez
9 suivre les précisions données par le témoin. L'accusation a tout récemment
10 reçu un exemplaire de ce curriculum vitae en anglais.
11 M. le Président (interprétation). - Vous avez toujours la
12 capacité, Maître, de faire part de vos documents à la toute dernière
13 minute. Nous aurions apprécié de recevoir ce document un peu à l'avance.
14 Mme McMurrey (interprétation). - Nous avions ce document rédigé
15 en italien, mais pas dans une autre langue.
16 M. le Président (interprétation). - Je comprends bien, mais tout
17 de même, c'est un peu tard !
18 Mme McMurrey (interprétation). - Professeur Lagazzi, je vais en
19 fait vous donner la parole. Pourriez-vous nous parler de votre carrière,
20 de la formation que vous avez suivie, s'il vous plaît ?
21 M. Lagazzi (interprétation). - Bien sûr, je vais le faire. J'ai
22 suivi l'école primaire, l'école secondaire, je suis allé au collège, au
23 lycée puis je suis entré à la faculté de médecine. Je suis donc un
24 médecin, j'ai un diplôme en médecine.
25 En 1984, j'ai obtenu ce diplôme, puis j'ai commencé une
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1 spécialisation en psychologie médicale. Cette formation, je l'ai suivie
2 jusqu'en 1988. Alors, j'ai passé une thèse en psychiatrie légiste, je suis
3 docteur en psychiatrie légiste, j'ai soutenu ma thèse en 1992. J'étais
4 toujours à la faculté de médecine et pendant que je suivais les cours, je
5 travaillais dans le cadre de la criminologie médico-légale, je travaillais
6 dans le département de la psychologie de la faculté de médecine de Gênes.
7 Bien sûr, cela fait partie de l'université de Gênes.
8 Je travaille depuis 1986 en tant que psychiatre légiste.
9 J'ai suivi divers stages de formation, notamment au Canada, et
10 j'ai travaillé en étroite collaboration avec l'école de psychiatrie
11 légiste de Lyon, en France.
12 Mme McMurrey (interprétation). - Cette école de Lyon, en France,
13 n'est-elle pas considérée comme une des plus grandes écoles dans le
14 domaine des sciences du comportement ? Elle a une réputation mondiale,
15 n'est-ce pas ?
16 M. Lagazzi (interprétation). - Oui, soyons très précis : c'est
17 un des centres de recherche les plus réputés dans le monde en matière de
18 psychiatrie légiste.
19 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que, notamment dans ce
20 centre, on étudie certains comportements, certains types de comportement ?
21 M. Lagazzi (interprétation). - En tant que psychiatre légiste,
22 psychiatre médico-légal, je m'occupe tout particulièrement des domaines du
23 comportement humain. J'ai écrit nombre d'articles sur ce sujet, notamment
24 je fais des recherches sur les troubles mentaux, sur les comportements
25 criminels, sur les liens qui existent entre les services psychiatriques et
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1 les tribunaux, et je travaille dans nombre de villes italiennes avec le
2 Bureau du Procureur des tribunaux de ces villes. Je travaille avec les
3 autorités du maintien de l'ordre, j'essaie de les aider à établir le
4 profil de tueurs en série, notamment. Et j'essaie toujours d'intervenir
5 dans le cadre de procès d'auteurs de crime, des tueurs en série.
6 Mme McMurrey (interprétation). - Quel est exactement le poste
7 que vous occupez à l'université de Gênes ?
8 M. Lagazzi (interprétation). - Je suis professeur associé en
9 psychiatrie médico-légale dans le cadre des études de troisième cycle du
10 département de la psychiatrie pénale et médico-légale à l'université de
11 Gênes.
12 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que cette école de Gênes
13 n'a pas récemment modifié sa structure afin de pouvoir mener des
14 recherches dans un domaine plus élargi ?
15 M. Lagazzi (interprétation). - Comme je l’ai dit et comme l’a
16 dit le Pr Verde je crois, nous avons élargi notre département. C'est un
17 département maintenant qui comprend la psychologie médicale, la
18 psychiatrie médico-légale, la médecine, etc.
19 Mme McMurrey (interprétation). - Vous occupez d'autres postes
20 dans le cadre d'autres universités, n'est-ce pas ?
21 M. Lagazzi (interprétation). – Oui, c'est exact. J'enseigne dans
22 les mêmes domaines, notamment à l'université de Milan, à l'université de
23 Turin. J'ai des contrats à court terme qui me rattachent à ces
24 universités. J'enseigne, je l’ai dit, les mêmes sujets exactement. Et je
25 le fais dans un certain nombre d'écoles également, qui délivrent certains
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1 types de diplômes supérieurs. Je participe également à la formation de
2 personnel médical en liaison avec le ministère de la Justice.
3 Et je participe également à la formation de certains Juges, de
4 certains magistrats sur la demande du Conseil supérieur de la magistrature
5 en Italie. Et puis, je forme également en psychologie et en psychiatrie
6 certains membres de l'administration italienne.
7 Mme McMurrey (interprétation). - Vous travaillez donc avec le
8 ministère de la Justice, avec l'administration de façon générale. Est-ce
9 que vous vous êtes spécialisé notamment sur l'étude des comportements
10 violents dans le cadre de ce travail avec ces administrations ?
11 M. Lagazzi (interprétation). - Il faut comprendre que la
12 psychiatrie médico-légale est un domaine extrêmement vaste. On ne traite
13 pas seulement de la violence et du comportement violent. Depuis un certain
14 nombre d'années, je travaille sur l'étude des problèmes liés à la
15 commission de crimes graves.
16 J'étudie donc les comportements violents, j'étudie les
17 comportements des tueurs en série notamment, j'étudie ce qui se passe dans
18 le cadre du crime commis par les membres des crimes organisés.
19 Mme McMurrey (interprétation). – Pouvez-vous nous détailler
20 également quelles sont les organisations dont vous êtes membre,
21 organisations scientifiques ?
22 M. Lagazzi (interprétation). - Eh bien, voyons, je vais essayer
23 de résumer. Je suis membre de la Société Internationale de Criminologie,
24 je suis membre du Comité de l'Académie italienne de psychiatrie et de
25 psychologie et de droit. Il y a huit membres qui constituent cette
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1 académie. Je suis membre du Comité scientifique de la société italienne de
2 criminologie, c'est une académie constituée de vingt personnes et je suis
3 également membre du conseil d'administration de l'Académie de psychiatrie
4 médico-légale.
5 Mme McMurrey (interprétation). - Merci beaucoup.
6 Professeur Lagazzi, vous êtes également Juge en Italie, n'est-ce pas
7 exact ?
8 M. Lagazzi (interprétation). – C’est parfaitement exact. Je
9 suis Juge honoraire de ce qui est appelé le Tribunal responsable des mises
10 en liberté sous caution. C'est un Tribunal un peu particulier qui traite
11 notamment des détenus déjà condamnés. C'est un Tribunal qui est constitué
12 de deux experts et de deux Juges : deux experts en psychiatrie médico-
13 légale et en criminologie et il y a également deux Juges. J'occupe ce
14 poste depuis 1993.
15 Mme McMurrey (interprétation). - Vous avez également pris part
16 aux activités des hôpitaux militaires en Italie, n'est-ce pas ? Dans le
17 cadre de l'armée italienne ?
18 M. Lagazzi (interprétation). - C'est exact. Depuis plusieurs
19 années, en tant qu'officier médical civil, je suis chargé de désigner les
20 personnes qui souhaitent rejoindre les rangs de l'armée italienne. Je suis
21 chargé de procéder à un examen médical de ces personnes. Je regarde si
22 elles sont aptes à servir dans l'armée, je regarde notamment si elles
23 souffrent de problèmes psychologiques.
24 Mme McMurrey (interprétation). - Lorsque vous faites passer cet
25 examen psychologique clinique dans le but de recruter des jeunes soldats,
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1 vous menez cet examen dans le but de détecter des troubles de la
2 personnalité, n'est-ce pas ?
3 M. Lagazzi (interprétation). – C’est parfaitement exact.
4 Mme McMurrey (interprétation). - Nous allons aborder un autre
5 domaine de compétence, Docteur. Vous avez écrit un certain nombre
6 d'ouvrages, nombre d'articles sur le sujet de la simulation, de la
7 simulation je dis bien.
8 Pourriez-vous expliquer aux Juges de cette Chambre quel est
9 votre degré d'expertise dans ce domaine de la simulation de maladie ?
10 M. Lagazzi (interprétation). – Oui. ce que je peux dire, et
11 j'utiliserai le terme anglais de "mulingering" qui veut dire "simulation"
12 parce que le terme en italien est un peu moins précis. En Italie, on parle
13 de "simulation" ou de "dissimulation", mais ce sont des termes plus vagues
14 que le terme anglais. Ces personnes qui simulent des troubles
15 psychiatriques et des troubles de la personnalité, qui tentent de
16 dissimuler ces troubles ont fait, c'est exact, l'objet de nombreuses
17 recherches de ma part, notamment dans le cadre de ces hôpitaux de l'armée.
18 Nous avons mené à bien une étude et nous avons publié les
19 résultats de cette étude. J'ai également rédigé nombre d'articles sur ce
20 thème. Nous avons établi nombre de recueils sur ce thème. Le dernier
21 article que j'ai écrit est un article qui fait partie d'un manuel de
22 psychologie médico-légale. J'ai écrit cet ouvrage en collaboration avec un
23 collègue de l'université de Gênes. Cet ouvrage sera publié en octobre, il
24 traite notamment des problèmes de la simulation et dissimulation.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Il s'agit donc d'un ouvrage qui
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1 sera publié en octobre et c'est vous qui avez rédigé le chapitre portant
2 sur la simulation, c'est bien exact ?
3 M. Lagazzi (interprétation). – Oui, enfin, j'ai rédigé
4 l'intégralité de cet ouvrage et bien sûr les chapitres qui traitent de ce
5 thème précis.
6 Mme McMurrey (interprétation). - Vous avez dit qu'il y avait
7 simulation et dissimulation, mais pourriez-vous être très précis et
8 expliquer aux Juges ce que vous voulez dire exactement ?
9 M. Lagazzi (interprétation). - Bien sûr. C'est quelque chose que
10 l'on trouve non seulement dans le domaine militaire mais encore dans tout
11 le cadre d'incidents psychiatriques. Disons simplement que l'on rencontre
12 souvent ce type de problème dans le domaine militaire parce qu'il y a
13 beaucoup de personnes qui refusent de faire leur service militaire et par
14 conséquent ils font semblant de souffrir de problèmes psychologiques.
15 Très souvent, nous travaillons auprès des tribunaux qui traitent
16 de problèmes de troubles de la personnalité, qui traitent d'affaires où
17 des personnes ont dissimulé, simulé certaines maladies. En fait, ils
18 simulent une maladie mais cela révèle qu'ils souffrent d'autres problèmes.
19 Il y a souvent simulation dans le cadre de certains crimes. Des
20 personnes essaient de simuler un trouble psychiatrique dont en fait elles
21 ne souffrent pas. En fait, dans le cadre du crime organisé, on trouve
22 différents cas, et souvent il n'y a pas de symptômes psychiatriques chez
23 les auteurs de crime de ce type. La dissimulation est quelque chose de
24 complètement différent.
25 En d'autres termes, dans ce cadre on parle de personnes qui ont
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1 effectivement des désordres psychiatriques, des personnes qui dans une
2 certaine mesure sont conscientes du fait qu'ils souffrent de problèmes
3 psychiatriques et par conséquent nous ne parlons pas ici des psychotiques,
4 qui ne sont pas conscients du fait qu'ils souffrent d'une maladie.
5 Les personnes qui dissimulent sont des personnes qui tentent de
6 dissimuler leurs troubles psychiatriques. Dans le cadre du domaine
7 militaire, nous nous trouvons confrontés à des cas où il y a des personnes
8 qui font partie des forces armées ou de la police, qui ont un problème
9 d'alcoolisme, par exemple, et qui essaient de dissimuler ce problème
10 d'alcoolisme afin d'être autorisées à demeurer dans la structure à
11 laquelle elles appartiennent.
12 Nous nous trouvons également fréquemment confrontés à des cas où
13 une personne souffre de démence sénile. Cette personne agit pour des
14 raisons pathologiques mais essaie de justifier ce qu'elle a fait. Ce
15 faisant, elle essaie de dissimuler ses propres difficultés.
16 Mme McMurrey (interprétation). - Lorsque quelqu'un souffre de ce
17 problème de dissimulation, vous essayez également de déterminer si ces
18 personnes souffrent de problèmes schizoïdes, si ces personnes sont des
19 personnes qui sont asociales, notamment ?
20 M. Lagazzi (interprétation). – Effectivement, en fait nous
21 menons à bien un examen psychologique complet, nous essayons de déceler
22 toutes sortes de pathologies. Nous essayons de voir si ces personnes
23 souffrent de quelque pathologie que ce soit.
24 Mme McMurrey (interprétation). - Diriez-vous que M. Landzo
25 souffre à la fois de simulation et de dissimulation ?
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1 M. Lagazzi (interprétation). - Dans une certaine mesure, je
2 répondrai oui à cette question. Mais si vous souhaitez que j'entre dans le
3 détail, je crois que nous allons entrer dans une discussion extrêmement
4 exhaustive. Je préférerais en venir aux détails un peu plus tard, lorsque
5 j'aurai fait part de mes conclusions suite aux examens faits passer à
6 M. Landzo. Je pourrais alors vous expliquer de quels problèmes souffre
7 M. Landzo.
8 Mme McMurrey (interprétation). – Absolument, nous n'en avons pas
9 encore terminé de votre curriculum vitae. Vous avez parfaitement... Nous
10 n'avons pas encore approché la question des diplômes. Combien d'expertises
11 faites-vous au cours de l'année ?
12 M. Lagazzi (interprétation). - Je pense qu'en moyenne nous avons
13 entre 120, 130 expertises auxquelles nous procédons et moi,
14 personnellement, j'en ai faites. Il s'agit donc des expertises qui sont en
15 faveur du Tribunal, c'est le Tribunal qui m'a désigné.
16 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que nous pouvons
17 rajouter encore quelque chose, s'il vous plaît ? La plupart du temps,
18 comme vous êtes expert, vous travaillez pour le Procureur. Est-ce vrai ?
19 M. Lagazzi (interprétation). - C'est vrai, c'est exact. Je peux
20 m'expliquer dans beaucoup de cas. Au fond, je travaille directement en
21 tant qu'expert qui a été désigné par le Tribunal, mais de l'autre côté
22 également, il y a des cas où il s'agit d'un certain nombre de ceux qui ont
23 commis des meurtres par série, ou des actes de crime qui ont été
24 organisés. Par conséquent, je travaille directement pour le Procureur.
25 Cependant, je ne travaille pas uniquement en tant qu'expert
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1 psychiatre légiste, mais je fais des recherches, également des enquêtes,
2 je travaille avec les forces de police, avec les agents de police et au
3 cours de l'enquête j'essaie d'identifier des profils différents des
4 criminels.
5 Par ailleurs également, nous cherchons les instruments qui
6 seront les meilleurs pour les utiliser, pour identifier le crime et pour
7 le comprendre sous l'aspect psychologique, psychiatrique, pour se rendre
8 compte aussi si la personne qui est arrêtée est véritablement la personne
9 qui a commis le crime, etc.
10 Mme McMurrey (interprétation). - En tant qu'expert, vous essayez
11 de voir comment aider les personnes en question ?
12 M. Lagazzi (interprétation). - Oui, dans cette partie de mon
13 travail, effectivement, c'est de cela dont il s'agit. Je pense qu'en
14 effet, dans ce rôle, en tant qu'expert, en ce qui concerne la psychologie
15 légiste, mon rôle consiste à être un expert neutre, cela c'est une
16 première tâche.
17 Une deuxième tâche, c'est d'essayer d'être en même temps le
18 conseiller qui a été nommé, désigné par la police.
19 Mme McMurrey (interprétation). - Vous avez rédigé les
20 trois rapports au sujet de M. Landzo, de sa capacité également de
21 participer devant ce Tribunal.
22 M. Lagazzi (interprétation). - Oui.
23 Mme McMurrey (interprétation). - Nous pouvons voir d'abord le
24 premier rapport si vous voulez bien. Auriez-vous l'amabilité d'expliquer
25 aux Juges quel est le but de votre rapport et ce que vous avez pu définir
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1 au sujet de M. Landzo ?
2 M. Lagazzi (interprétation). - Oui. J'ai été chargé le
3 1er novembre 96 d'identifier ou plutôt, de constater s'il y avait un
4 trouble psychiatrique ou s'il n'y avait pas ce trouble, pour qu'il prenne
5 part dans ce procès. Est-il en état ou pas d'y participer ? J'ai parlé
6 avec le Juge, c'est Mme de Sampayo, du secrétariat, qui m'avait chargé de
7 contacter de manière urgente son client et surtout de faire une enquête au
8 sujet d'un risque de suicide.
9 En d'autres termes, la première question à laquelle j'ai donné
10 la réponse après avoir vu M. Landzo, j'avais donc précisé quelles étaient
11 les démarches à entreprendre pour empêcher éventuellement ou bien le
12 suicide, ou bien des blessures qu'il aurait provoquées sur lui-même.
13 Nous avons parlé avec Mme de Sampayo, avec le Président Cassese,
14 nous avons parlé donc des démarches à entreprendre pour le protéger et
15 surtout pour pouvoir contrôler, surveiller la détention de M. Landzo.
16 Ensuite, nous avons parlé également d'un certain nombre d'autres questions
17 et notamment, s'il pouvait suivre ou non le procès.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Au moment où vous avez évalué,
19 vous avez éventuellement pensé à un suicide, à un risque de suicide ou
20 pas ?
21 M. Lagazzi (interprétation). - Je pense qu'il y avait un risque
22 effectivement, et un très haut risque de suicide. C'est la raison pour
23 laquelle j'avais donné un conseil dans le sens de traitement psychiatrique
24 et que ce traitement devait être suivi par M. Landzo.
25 J'ai rencontré très rarement les Juges qui étaient aussi
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1 conscients de cette question, et pour moi c'était extrêmement important,
2 une expérience professionnelle très importante.
3 Mme McMurrey (interprétation). - En d'autres termes, les Juges
4 se préoccupaient véritablement de cette question-là, de la santé des
5 accusés et de leur détention, etc.
6 M. Lagazzi (interprétation). - Oui, je peux dire que c'est
7 exact.
8 Mme McMurrey (interprétation). - Maintenant, si vous voulez
9 bien, je voudrais revenir à une autre question, et pendant la pause que
10 nous aurons tout à l'heure, je vais pouvoir vous distribuer le rapport.
11 Pour le moment, je ne dispose que d'un seul rapport.
12 Hier, M. Moran, au moment du contre-interrogatoire du Dr Verde,
13 avait lu une part de votre rapport. Et il avait constaté que M. Landzo
14 pouvait vous tromper, en quelque sorte en dissimulant son comportement.
15 C'est la page 35 du rapport.
16 M. Lagazzi (interprétation). - 35, vous parlez de la version
17 anglaise ?
18 Mme McMurrey (interprétation). - Heureusement,
19 Monsieur le Président, le Dr Lagazzi parle très bien l'anglais.
20 Auriez-vous l'amabilité, s'il vous plaît, de nous préciser en
21 détail ce que vous avez constaté et ce qui fait l'objet de votre rapport
22 du 15 novembre 96 ?
23 M. Lagazzi (interprétation). - Vous voulez dire que j'explique
24 de très près ce qu'est la dissimulation ? Effectivement, il y a une
25 simulation. C'était une tentative de simulation qui a été assez nette.
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1 J'ai parlé avec le monsieur de quoi il s'agissait. J'ai pu donc constater
2 qu'il s'agissait d'une personne qui était complètement consciente et qui
3 pouvait se souvenir de tous les détails, des détails logiques, et il
4 pouvait même suivre et retenir plein de choses.
5 Il y avait une souffrance psychologique, mais il a été en état
6 d'exprimer son point de vue. Il a été parfaitement conscient qu'on
7 l'interrogeait au moment même. Il a été également conscient qu'il y avait
8 un certain nombre d'actes pénaux, d'actes criminels qu'il avait commis.
9 Il se souvenait du 15 novembre, je pense 96. C'était le
10 15 novembre 96, et subitement, au cours de la réunion et en présence de
11 son représentant du conseil de la défense, même si M. Loga était également
12 un expert -mais il a été désigné par la défense-, tout d'un coup,
13 subitement, il a commencé la conversation. Il avait dit qu'il ne savait
14 pas quelle était la saison, quelle était la date, le jour de notre
15 réunion, et ce type de simulation nous est donc parvenu parfaitement
16 claire.
17 Mais d'un autre côté, quand vous avez une personne qui
18 auparavant a été parfaitement consciente : le jour avant elle savait
19 reconnaître les gens, elle savait avec qui elle parlait -nous avons parlé
20 de choses différentes- et le lendemain son comportement change
21 définitivement, et pratiquement se comporte comme s'il était une personne
22 qui avait reçu un coup dans la tête, alors que ce n'était pas le cas, nous
23 pouvons tout de suite penser qu'il s'agit de simulation.
24 Il n'y avait pas une cohérence dans le comportement. Ce dont
25 j'ai parlé dans mon rapport, du point de vue d'une perspective clinique,
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1 la personne qui n'a aucun signe clinique et qui était parfaitement capable
2 de réfléchir logiquement, et le lendemain, comme je l'ai dit, de démontrer
3 qu'il n'était pas capable, qu'il ne pouvait plus réfléchir, la conclusion
4 s'imposait que ce n'était pas un tableau clinique parfait, et qu'il était
5 évident qu'il y avait des forces psychologiques qui étaient présentes, et
6 nous avons automatiquement supposé qu'il s'agissait de simulation.
7 Ses possibilités de réflexion n'ont pas été touchées, et au
8 cours de la réunion pendant laquelle nous avons fait cette enquête, cela a
9 été clair.
10 C'est la raison pour laquelle moi j'avais terminé, j'avais
11 conclu mon rapport en précisant que nous sommes en présence d'un cas qui a
12 des problèmes et des troubles psychologiques. J'ai précisé qu'il
13 s'agissait d'un symptôme qui était fort caractéristique pour le stress
14 post-traumatique. J'ai conclu par ailleurs qu'il a été capable de
15 participer au procès, d'être dans cette salle d'audience et si ses
16 déclarations qu'il nous avait présentées au cours d'un entretien et qui
17 devaient prouver qu'il n'était pas orienté, qu'il ne savait pas quelle
18 était la saison, quelle était la date, le jour, etc., à ce moment-là, bien
19 évidemment, il n'aurait pas été capable d'être jugé. Mais j'avais pensé
20 qu'avec une psychothérapie on aurait pu également éviter le risque de
21 suicide.
22 M. Lagazzi (interprétation). - Revenons à un certain nombre
23 d'informations qui n'étaient pas complètes, de M. Moran hier. Vous n'avez
24 pas parlé de simulation dans votre rapport mais vous avez dit que ce
25 n'était pas justifié du point de vue clinique et qu'il n'y avait pas une
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1 coopération qui était bonne du côté du patient.
2 M. Lagazzi (interprétation). - Effectivement, il y a une absence
3 de coopération, c’est un terme plus élégant que celui que nous utilisons
4 en Italie quand nous voulons parler de simulation.
5 Mme McMurrey (interprétation). - Au moment où vous avez porté la
6 conclusion, le 15 novembre 96, quelles étaient les informations dont vous
7 avez disposé, que vous avez pu voir avant de porter une conclusion ?
8 M. Lagazzi (interprétation). - J'aurais préféré voir mon rapport
9 en italien, en langue italienne, pour être précis. Je ne dispose que d'une
10 copie de l'interrogatoire de l'accusé du mois de juillet 96.
11 Mme McMurrey (interprétation). - Excusez-moi, quand vous parlez
12 du deuxième interrogatoire, c’est le Bureau du Procureur qui avait
13 organisé cette réunion, cet interrogatoire avec l'accusé.
14 M. Lagazzi (interprétation). - Oui. Je me dois de vous dire que
15 je n'ai pas le document devant moi mais je pense qu'il s'agissait d'un
16 rapport, d'un compte rendu plutôt où le Procureur -je ne me souviens pas
17 de son nom-, c'est peut-être Me Niemann...
18 Mme McMurrey (interprétation). - C'est Teresa McHenry également.
19 M. Lagazzi (interprétation).- J'ai reçu la copie des rapports
20 précédents qui ont été préparés en novembre 96, un qui a été préparé par
21 le psychologue, Dr de Man, ensuite le Pr van Leeuwen et le Pr Loga
22 également, tous les deux ont fait des rapports 96.
23 Mme McMurrey (interprétation). - Dans ces rapports précédents,
24 on a essayé de déterminer s'il pouvait vivre dans les conditions de
25 détention et non pas dans la salle d'audience, n'est-ce pas ?
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1 M. Lagazzi (interprétation). - Effectivement, nous avons mis
2 l'accent notamment sur sa capacité de rester dans la maison de détention.
3 Le Dr Roorda et le Dr van Leeuwen avaient proposé également de voir quel
4 était le degré de responsabilité du patient et à la lumière des tableaux
5 cliniques.
6 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous vous êtes fondé
7 sur ce tableau clinique ?
8 M. Lagazzi (interprétation). - Oui, j'ai pris en considération
9 les détails et les précisions qui faisaient l'objet du rapport du
10 Dr Roorda et j'avais précisé également qu'il y avait un certain nombre de
11 tests psychologiques auxquels on avait procédé et un certain nombre de
12 tests, à vrai dire, très franchement, ne me sont pas connus. Je ne pouvais
13 pas faire la comparaison entre ce qui était ma propre expérience.
14 Il y a d'autres tests auxquels on procède dans le cadre des
15 enquêtes. Je pouvais en tenir compte mais je n'avais pas la copie du
16 compte rendu ni du protocole des tests. J'ai pu voir simplement les
17 résultats dont on a parlé dans le compte rendu en ce qui concerne le
18 protocole, ce sont les réponses, les évaluations, les calculs, enfin toute
19 une série d'éléments, de facteurs dont je me sers personnellement pour le
20 test. Je n'ai eu que les comptes rendus des psychologues.
21 Mme McMurrey (interprétation). - Maintenant, nous allons revenir
22 sur le test auquel on avait procédé, mais vous ne le connaissiez pas, en
23 plus. On demande à des psychiatres et à des psychologues italiens une des
24 raisons pour lesquelles ils n'ont pas procédé à ce genre de test, qu'est-
25 ce vous répondez ?
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1 M. Lagazzi (interprétation). - Il y a des tests auxquels on
2 procède dans le monde entier, des tests qui sont de coutume, enfin
3 auxquels on procède régulièrement. Ensuite, il y a des tests auxquels on
4 procède également au niveau des administrations, selon leur choix.
5 Théoriquement parlant, il est souhaitable que quand il y a une
6 expertise on procède à tous les tests qui s'appliquent dans le monde, avec
7 le test neurologique, le test de laboratoire, etc. Mais il va sans dire
8 que chaque pays a un certain nombre de traditions.
9 Et ce que je peux vous dire pourtant, c'est que le Dr Roorda a
10 donc procédé à ce test que je ne connais pas en Italie. Je n'ai jamais vu
11 un tel test. Ni le neurologue, ni le psychiatre n'ont jamais fait appel à
12 moi pour procéder à un tel test, même dans le cadre de dispensaires pour
13 les patients psychiatriques, on n'a jamais effectué de tels genres de
14 test. Je ne les connais pas, dans mon expérience, je ne les connais pas.
15 Mais d'autres tests, ce sont les tests qui sont les tests
16 standard, Rorschach ou la vision, la mémoire, la mémoire visuelle, c'est
17 peut-être un terme qui est plus approprié.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Ce sont les tests également
19 qui… sont les tests, qui sont en corrélation avec le manuel de Kaplan et
20 des tests psychologiques ?
21 M. Lagazzi (interprétation). - Oui effectivement, j'ai pu voir
22 un certain nombre de tests, de manuels Kaplan, mais je dois dire que ceci
23 ne veut aucunement dire que ce test n'est pas valable. Chacun de nous peut
24 utiliser un certain nombre de tests, car nous pouvons sentir le besoin et
25 nous pouvons considérer qu'il est souhaitable d'examiner un aspect
Page 13830
1 spécifique. En d'autres termes, ceci ne veut pas dire que le test en
2 question ne pourrait pas être utilisé dans d'autres cas.
3 Chacun parmi nous va identifier un certain nombre de tests
4 auquel il veut procéder. Nous avons même la tendance de procéder à une
5 série de tests. Par exemple, quand il y a des criminels violents, on
6 utilise en Italie un qui est Rosenzweig. C'est le seuil de tolérance que
7 nous essayons d'identifier, de voir quel est le coefficient, à quel degré,
8 à quel niveau la réaction d'un patient va être visible, se manifestera.
9 Vous avez, par exemple, un exemple classique du meurtre où la
10 victime vous dit : "Tu peux tirer, tu peux me tuer si tu oses le faire".
11 C'est extrêmement important parce que ce sont les frustrations d'un
12 individu auxquelles on peut parvenir grâce à ce test.
13 Nous autres, on n'aurait pas procédé à ce genre de tests. Par
14 exemple, quand il s'agit de quelqu'un qui veut cacher la démence sénile.
15 Personnellement, je le répète, je ne connais pas ce test et si vous
16 m’autorisez, je peux vous dire que tous les autres psychiatres avec
17 lesquels j'ai pu parler ne connaissent pas le test, et quotidiennement, je
18 n'ai jamais procédé à ce test, mais cela ne veut pas dire qu'il est
19 mauvais.
20 Mme McMurrey (interprétation). - Merci, Docteur. Est-ce que vous
21 avez consulté des tests psychologiques de Roorda de Man qui n'ont pas été
22 indispensables à pratiquer sur Landzo ?
23 M. Lagazzi (interprétation). - J'ai pu, j'étais plutôt dans la
24 situation à me rendre compte que le Dr Verde avait donné une réponse hier
25 à cette question. Mais ils n'ont pas été peut-être tout à fait complets
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1 dans la réponse. C'est la raison pour laquelle il me semble qu'il serait
2 utile d'entreprendre une nouvelle enquête aux fins de diagnostic
3 psychiatrique.
4 Mme McMurrey (interprétation). - Il a été clair, il en sortait
5 clairement du rapport du Dr Roorda de Man que les résultats ne manquaient
6 pas, parce que c'est elle qui ne s'y est pas bien prise, mais parce que
7 tout simplement M. Landzo n'avait pas donné des réponses précises à cette
8 partie de son test ?
9 M. Lagazzi (interprétation). - Je pense effectivement que vous
10 avez raison de le dire car vous devez avoir présent à l'esprit que tout
11 diagnostique, toute enquête, même si vous procédez tout simplement à des
12 tests, sont le résultat des rapports entre les deux personnes, les
13 deux interlocuteurs. Par conséquent, les réponses à un certain nombre de
14 questions qui ont été posées sont le reflet de la coopération qui existait
15 entre les deux interlocuteurs, entre la personne que nous interrogeons et
16 celui qui l'interroge.
17 Il y a d'autres facteurs également qui ont joué. C’est la raison
18 pour laquelle j’avais considéré qu'il était indispensable de demander une
19 nouvelle enquête, un nouvel interrogatoire pour avoir de nouvelles
20 données.
21 Mme McMurrey (interprétation). - A votre avis, les tests
22 auxquelles on avait procédé en 96, est-ce que le trouble de PTSD aurait pu
23 avoir un certain effet ?
24 M. Lagazzi (interprétation). - Le syndrome de post traumatique
25 est effectivement une évaluation à laquelle sont parvenus mes collègues et
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1 je considère que ces tests ont confirmé cet aspect.
2 Mme McMurrey (interprétation). - Auriez-vous l'amabilité de
3 jeter un coup d'oeil sur votre premier rapport ? Je vais me référer à un
4 certain nombre de chapitres où on donne la description des réponses de
5 M. Landzo, et je vais vous demander de bien vouloir mettre en corrélation
6 ces réponses avec les troubles mentaux que vous avez constatés chez
7 M. Landzo.
8 M. Lagazzi (interprétation). - Quelle est la page dont vous
9 parlez ?
10 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur le Président, je vais
11 commencer avec la page 16 où l'on parle de cet incident de la grenade
12 qu'il jette dans un appartement. Il y a des jeunes filles qui sont là-
13 dedans, dans ce local, il ne leur permet pas de sortir... Vous voyez, vous
14 vous souvenez. Il dit par exemple, entre autres choses : "J'aurais tué mon
15 propre père s'il était devant moi en tant qu'ennemi". Ou bien à titre
16 d'exemple, je vais citer encore quelques autres phrases, qu'il "préfère
17 donc le combat rapproché plutôt qu'un bon déjeuner".
18 Il parle également du fait qu'il se souvient des personnes qui
19 se sont battues, où il y avait des blessés, que pour lui c'était tout à
20 fait normal car, au cours de la guerre, "on apprend à voir que l'être
21 humain ce n'est pas l'être humain mais c'est quelqu'un qui est dangereux,
22 c'est quelqu'un qu'il faut tuer", etc.
23 Il y a d'autres exemples probablement dans votre rapport, de
24 tels genres de description, mais auriez-vous l'amabilité s'il vous plaît
25 de nous dire s'il y a une corrélation avec les troubles de la personnalité
Page 13833
1 et ce qui a été répondu ?
2 M. Lagazzi (interprétation). - Pour répondre à cette question,
3 il va falloir que je parle du diagnostic. Et pour cela je dois expliquer
4 aux Juges de cette Chambre un certain nombre de points qui apparaissent
5 dans mes deuxième et troisième rapports. Vous me demandez en fait
6 d'anticiper sur ma déclaration finale et vous me demandez de revenir sur
7 mon premier rapport et d'expliquer la teneur de ce premier rapport. C'est
8 bien ce que vous souhaitez que je fasse ?
9 Mme McMurrey (interprétation). - Pardon, je suis un peu
10 désorganisée. Vous avez un mode de raisonnement beaucoup plus logique,
11 beaucoup plus organisé que le mien. Je m'en remets à vous, Docteur.
12 Venons-en à votre deuxième rapport si vous le voulez bien.
13 M. Lagazzi (interprétation). - Eh bien, voyons. Je vais essayer
14 d'expliquer un certain nombre de choses aux Juges si vous le voulez bien.
15 J'ai procédé à un examen à trois reprises sur une période d'un an et demi,
16 examen de l'accusé, bien évidemment. Mes collègues et moi-même, qui avons
17 tous travaillé indépendamment, sommes arrivés à diverses conclusions.
18 Tout d'abord, nous nous sommes concentrés sur ce syndrome de
19 stress post traumatique. Nous avons compris certains des aspects de la
20 personnalité de l'accusé et, à partir de cela, nous avons été capables de
21 mieux comprendre d'autres traits de sa personnalité : personnalité
22 dépendante avec une composante narcissique. Cela, c'est une chose. Dans
23 mon troisième rapport, j'ai réexaminé, relu tout ce qui avait été fait
24 précédemment.
25 J'aimerais nuancer ma conclusion en disant que le diagnostic que
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1 j'ai pu établir a été le résultat d'un certain nombre de points que nous
2 avons précisés. Nous avons compris peu à peu un certain nombre de choses.
3 Moi, je vais parler de ma position, de mon point de vue.
4 Lorsque j'ai rédigé les phrases qui viennent d'être citées par
5 Me McMurrey, je l'ai fait parce qu'il m'a semblé que ces aspects étaient
6 révélateurs d'une personnalité fragile, d'une personnalité souffrant d'un
7 syndrome de stress post traumatique. Mais aujourd'hui, avec tout ce que
8 nous savons de M. Landzo, je peux émettre un avis selon lequel il apparaît
9 que ce qu'il a dit peut être relié plus directement à l'aspect de
10 dépendance de sa personnalité.
11 Monsieur Landzo a cette tendance à agir, jouer un rôle
12 spécifique, et c'est plus lié à cet aspect qu'à ce syndrome
13 post traumatique. Donc, les phrases que vous avez lues peuvent être
14 reliées dans une certaine mesure à ce syndrome de stress post traumatique,
15 mais elles sont plus directement reliées à cette capacité d'agir de telle
16 ou telle façon. Et c'est sa personnalité qui le pousse intrinsèquement à
17 agir de la sorte, à jouer ce rôle. Je répète qu'il a cette personnalité
18 très dépendante.
19 Je voudrais donner un exemple très précis aux Juges de cet
20 aspect de la personnalité. Dans mon troisième rapport, j'ai parlé du film
21 de Woody Allen, Zelig. Le personnage principal de ce film, lorsqu'il est
22 en contact avec telle ou telle personne, essaie de jouer le rôle de cette
23 personne, essaie de devenir lui-même cette personne. Et c'est ce qui fait
24 toute la magie de ce film et ces phrases que vous avez citées, je les ai
25 interprétées comme étant une indication de la capacité de l'accusé à jouer
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1 ce rôle du soldat agressif, de ce combattant.
2 Monsieur Landzo a choisi de jouer ce rôle, a choisi de se
3 présenter ainsi lorsqu'il servait dans les forces armées. Lorsque nous
4 l'avons rencontré en 1996, il continuait à jouer ce rôle. Je dirai donc
5 que les avis qui ont été émis, relatifs à sa capacité à jouer ce rôle,
6 démontrent bien qu'il a eu cette tendance à jouer le rôle d'un mercenaire,
7 d'un combattant qui aime tuer l'ennemi, qui aime battre, se battre pardon.
8 Mais plus tard, M. Landzo a donné une autre interprétation à ses
9 phrases qu'il avait énoncées antérieurement. Et aujourd'hui, il a un
10 comportement tout à fait différent. Aujourd'hui, nous nous trouvons face à
11 une personne bien différente de celle que nous avons rencontrée pour la
12 première fois en 1996.
13 Pour ce qui est de l'examen psychiatrique que j'ai décrit, je
14 dirais que le comportement actuel de M. Landzo doit être vu comme un
15 comportement tout nouveau, un comportement qu'il a adopté tout récemment,
16 et qui va tout à fait dans le sens de sa personnalité dépendante. Comme il
17 a cette personnalité dépendante, eh bien n'est-ce pas, cette personnalité
18 évolue parce qu'il est en contact avec diverses figures représentant
19 l'autorité.
20 En 1996, c'était le cadre militaire qui était son cadre de
21 référence. Alors qu'aujourd'hui, la situation est assez différente, son
22 comportement est différent. Son comportement est celui d'un détenu idéal,
23 du prisonnier idéal, un prisonnier qui prend une part active à
24 l'établissement de sa ligne de défense. Mais cela montre aussi quelles
25 sont ses incompétences, ses incapacités, et c'est sur la base de ces
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1 incapacités, de ces incompétences que nous avons réussi à établir cette
2 définition de trouble majeur dont il souffre, trouble majeur de la
3 personnalité.
4 Mme McMurrey (interprétation). - Lorsque vous avez rencontré
5 M. Landzo pour la première fois en 1996, est-ce qu’il avait le crâne
6 rasé ?
7 M. Jan (interprétation). - Quelle importance ce détail a-t-il ?
8 Mme McMurrey (interprétation). - Cela montrerait qu'il avait ce
9 rapport très particulier avec le cadre militaire. A l'époque, il portait
10 un uniforme de camouflage, il avait un képi avec une tête de mort sur le
11 devant, et ces questions nous montrent bien quelle était la personne avec
12 laquelle le témoin s'est entretenu à l'époque, et la personne avec
13 laquelle il a eu l'occasion de s'entretenir très récemment.
14 M. Jan (interprétation). - (Hors micro)
15 Mme McMurrey (interprétation). - Tout ceci montre bien quel
16 était le trouble de la personnalité telle que décrit dans le DSM-IV. Tous
17 les psychiatres ont parlé, ou vont parler de ce trouble de la personnalité
18 dépendante. Permettez-moi de poser ces questions Monsieur le Juge, parce
19 que sincèrement il me semble devoir les poser. Merci.
20 Professeur, en 1996, est-ce que M. Landzo n'était pas seulement
21 autorisé à parler à une ou deux personnes ? Il n'avait pas le droit de
22 s'entretenir avec plus d'une ou deux personnes ?
23 M. Lagazzi (interprétation). - Effectivement, il a dit qu'il
24 détestait les Serbes, qu'il détestait les Néerlandais. Donc, il a
25 effectivement dit qu'il détestait pratiquement tout le monde, mais il y
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1 avait aussi ce comportement très bizarre : il cherchait à éviter certaines
2 choses, il ne voulait pas se souvenir de certains événements parce qu'il
3 disait que d'y penser lui faisait mal. Il ne voulait pas repenser à la
4 guerre, c'est un des éléments qui montre bien quelle était sa
5 personnalité, personnalité incohérente.
6 Mme McMurrey (interprétation). - Décrivez-nous son apparence
7 en 1996 et d'autre part dites-nous, si vous le savez, s'il était autorisé
8 à s'entretenir avec d'autres personnes. Ne citez aucun nom, s'il vous
9 plaît.
10 M. Lagazzi (interprétation). - Voyons, je n'ai pas un souvenir
11 très précis de ces aspects-là de notre rencontre, mais pour autant que je
12 m'en souvienne, il n'avait pas le droit de s'entretenir avec les autres
13 accusés. Il pouvait parler à d'autres interlocuteurs, mais en fait il
14 avait ce même problème de communication avec les gardes, les gardes qui
15 venaient de l'ex-Yougoslavie.
16 Mme McMurrey (interprétation). - Dans vos examens, vous
17 n'essayez pas d'établir si le patient dit ou non la vérité. Qu'essayez-
18 vous en fait de détecter dans le cadre de ces examens ?
19 M. Lagazzi (interprétation). - Mon Dieu, je vais devoir me
20 lancer dans une description exhaustive. Je vais devoir me lancer dans une
21 tirade extrêmement longue. Je vais tâcher de raccourcir un peu les choses.
22 Dans le cadre de tout examen psychiatrique, il faut prendre en
23 compte deux niveaux : il y a d'abord le niveau clinique, c'est-à-dire le
24 niveau médical et psychologique qui permet d'établir un diagnostic et il y
25 a un deuxième niveau, le niveau disons plus juridique. On essaie d'établir
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1 une définition juridique, légale du cas du patient.
2 Il est bien évident qu'un expert psychiatrique, un expert en
3 psychiatrie dispose d'un certain nombre de paramètres qui lui permettent
4 de savoir sur quels incidents reposent le procès dans lequel le patient
5 est impliqué. S'il dispose de ces paramètres, l'expert en psychiatrie est
6 mieux à même d’évaluer la cohérence des déclarations faites par l'accusé,
7 mieux à même de déterminer la cohérence des événements qui sont reprochés
8 à l'accusé.
9 Ce n'est pas tout à fait la même chose que le fait de pouvoir
10 déterminer la véracité des dires de l'accusé. Dans le cadre de mes
11 trois examens, j'utilisais ce que me disait M. Landzo comme point de
12 référence. C'est une limite assez importante qui m’était imposée. Je ne
13 pouvais que comparer ce qu'il me disait aux résultats des tests que lui
14 avait fait passer le Dr Roorda de Man.
15 Dans le cadre du dernier rapport, j'ai pu également travailler
16 en comparant ce que me disait M. Landzo aux résultats des tests du
17 Pr Verde. En tant que médecin et en tant que spécialiste, je peux
18 reconnaître un cas manifeste de simulation et c'est bien le cas de
19 M. Landzo, mais je ne peux pas dire si M. Landzo dit ou non la vérité. Je
20 dois partir de l'hypothèse qu'il exprime sa vérité à lui, sa vérité
21 subjective.
22 En termes psychiatriques, on parle de la perception qu'a le
23 patient de lui-même et de son comportement, la perception qu'a l’accusé de
24 sa vie et des événements de sa vie. Il faut absolument prendre en compte
25 ce point très particulier. Pour nous, cela représente des limites très
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1 importantes dont il faut tenir compte dans le cadre d'une expertise.
2 Moi-même et le Pr van Leeuwen avons demandé qu'il nous soit
3 permis de faire passer un examen à l'accusé dans un cadre où nous serions
4 autorisés à discuter librement de certains événements avec l'accusé. Nous
5 avons été confrontés à ces limites méthodologiques.
6 Tout ce que je peux dire en termes psychologiques et en tenant
7 compte de la situation émotionnelle de l'accusé, je ne peux pas dire si
8 l'accusé a dit ou pas la vérité. Moi-même et mes collègues avons dû fonder
9 notre avis sur les déclarations de l'accusé, ce qu’il nous a dit à propos
10 de sa vie, à propos de ses rapports avec sa mère, des expériences qu'il
11 avait traversées lorsqu'il était dans ce camp de formation en Croatie
12 en 91.
13 Mme McMurrey (interprétation). - Vous n'essayez pas de
14 déterminer la véracité de ce qu'il vous dit. Je vais poser une question
15 tendancieuse, Monsieur le Président, mais permettez-moi de le faire. Vous
16 regardez si les symptômes cliniques que vous pouvez détecter ont des liens
17 avec les éléments de preuve cliniques. Cette comparaison vous permet-elle
18 de voir s'il y a trouble de la personnalité ?
19 M. Lagazzi (interprétation). - Disons que le patient fait montre
20 de divers symptômes cliniques. Ces symptômes sont peut-être réels, peut-
21 être pas. Nous, les psychiatres, nous les considérons comme étant des
22 symptômes cliniques réels s'ils semblent être dans la logique de
23 l'apparence de l'accusé. J'entends par là le ton de sa voix, ses émotions
24 et tout le reste.
25 Si les symptômes sont dans la ligne de ses comportements
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1 extérieurs, alors nous en tenons compte. En revanche, si les symptômes
2 cliniques ne sont pas cohérents avec les éléments de preuve cliniques que
3 nous mettons à jour, nous disons qu'il ne s'agit pas de symptômes réels.
4 Ils ne sont pas dans la ligne des éléments de preuve cliniques.
5 Pour revenir à cet exemple que j'ai utilisé précédemment, qui
6 portait sur la simulation, lorsque M. Landzo a dit qu'il était incapable
7 de se repérer dans l'espace et dans le temps, lorsqu'il faisait cela, cela
8 ne correspondait pas du tout avec les éléments cliniques que nous avions
9 pu trouver antérieurement. Et lors de cet incident je me suis tout de
10 suite dit que tout cela n'était pas réel, que ses symptômes n'étaient pas
11 réels.
12 En psychiatrie médico-légale, nous sommes constamment à la
13 recherche d'une cohérence, d'une logique entre les symptômes et les
14 éléments cliniques dont nous disposons car cela nous permet d'en venir à
15 une conclusion fondée, circonstanciée, mais lorsqu'il s'agit de ce
16 deuxième niveau d'expertise et d'évaluation, tout devient beaucoup plus
17 difficile.
18 M. Jan (interprétation). - Nous avons entendu beaucoup
19 d'arguments théoriques, Maître. Pouvons-nous en venir au détail de cette
20 affaire ?
21 Mme McMurrey (interprétation). - Il me semblait important de
22 faire valoir tous ces différents arguments théoriques parce que nous
23 pouvons voir les différences qui existent entre ce qui s'est passé
24 autrefois et ce qui se passe aujourd'hui. Je voudrais demander au témoin
25 s'il pense que ces éléments ne sont pas très importants pour le Tribunal.
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1 M. Jan (interprétation). - Si quelqu'un souhaite remettre en
2 cause ce que dit le témoin, il y aura contre-interrogatoire.
3 Mme McMurrey (interprétation). - J'essaie d'éviter que des
4 questions fassent l'objet de controverses, fassent l'objet d'un contre-
5 interrogatoire.
6 M. Jan (interprétation). - N'essayez pas de faire cela, tâchez
7 d'obtenir vos conclusions et si quelqu'un veut essayer d’obtenir plus de
8 détails, il posera des questions précises au professeur.
9 Mme McMurrey (interprétation). – Est-ce qu’il pourrait
10 simplement vous dire quels sont les trois critères sur lesquels il s'est
11 appuyé pour établir ses conclusions ?
12 M. Jan (interprétation). – Continuez, avancez, posez-lui des
13 questions qui sont en relation directe avec cette affaire précise.
14 Mme McMurrey (interprétation). - Professeur, je vais avancer un
15 petit peu, vous avez donc mené à bien trois examens de M. Landzo, vous
16 avez passé nombre d'heures avec lui. Pourriez-vous expliquer aux Juges de
17 la première instance à quelles conclusions vous en êtes arrivé pour ce qui
18 est notamment de la personnalité de M. Landzo, pour ce qui est des
19 pathologies dont il pouvait souffrir et dont il peut souffrir
20 aujourd'hui ?
21 Pourriez-vous expliquer ce dont il souffrait lorsqu'il était
22 enfant et pourriez-vous nous expliquer ce qui s'est passé en 1992, quel
23 était son état en 1992 ? Cela vous paraît plus précis ?
24 M. Jan (interprétation). – Tâchez d'être pertinente, Maître,
25 plus précise, ce qui nous intéresse ce sont des conclusions précises.
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Je vais lui demander de donner
2 des conclusions mais ces conclusions ne portent pas seulement sur ce qui a
3 pu se passer tout récemment, elles portent sur ce qui a pu se passer
4 également en 92 et même avant.
5 M. Jan (interprétation). – (Inaudible.)
6 Mme McMurrey (interprétation). - Oui Monsieur le Juge, je
7 comprends bien que vous aimiez que les choses soient précises, nettes. Moi
8 aussi d'ailleurs, mais là c'est un peu différent, je suis dans le cadre
9 d’une ligne de la défense.
10 Professeur Lagazzi, quelles conclusions avez-vous pu établir
11 relatives à l’état de M. Landzo et quels sont les liens qui existe entre
12 ces conclusions et cette affaire ?
13 M. Lagazzi (interprétation). - Bien sûr, je vais tâcher de
14 répondre à cette question.
15 M. Landzo souffre actuellement d'un problème clinique très
16 complexe. Il faut s'attacher à des niveaux différents dans ce cadre
17 clinique. Il y a d'abord le premier niveau et si on s'appuie sur le DSM-
18 IV, on peut parler du niveau 1, celui du syndrome de stress
19 post traumatique. Il est vrai que je me suis plus concentré sur ce
20 syndrome de stress post traumatique dans mon premier et mon
21 deuxième rapport.
22 Aujourd'hui, ce syndrome me semble être de moindre importance
23 parce que ce n'est qu'un élément d'un trouble de la personnalité beaucoup
24 plus vaste. Aujourd'hui, je dirais qu'il faudrait attribuer le chiffre 2 à
25 cet élément dans le cadre du DSM-IV. Je dirais qu'il y a trouble de la
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1 personnalité très important, il y a une personne qui est impulsive, qui a
2 des tendances narcissiques et nous sommes en présence d'une personne qui
3 psychologiquement parlant n'est pas mûre. Psychologiquement, son
4 développement n'est pas tout à fait normal si l'on regarde la différence
5 qui existe entre son état psychologique et son âge.
6 Tous ces éléments étaient déjà présents en 1992, notamment à
7 l'époque dont nous parlons ici, à l'époque où il se trouvait dans le camp
8 de Celebici.
9 Mme McMurrey (interprétation). - Quand vous parlez du DSM-IV,
10 vous ne voulez pas dire que ce syndrome de stress post traumatique a
11 disparu aujourd'hui ? Vous voulez simplement dire qu'il fait partie d'un
12 trouble de la personnalité beaucoup plus vaste que vous ne l'aviez pensé
13 au départ ?
14 M. Lagazzi (interprétation). - Effectivement. Dans le cadre de
15 mon examen, j'ai établi que le trouble de la personnalité était présent
16 dès le départ et ensuite ce trouble de la personnalité m’est apparu comme
17 comprenant notamment ce syndrome stress post traumatique.
18 J’ai également déterminé qu'il y avait ce problème de
19 dépendance. Tous ces éléments, nous les retrouvons dans l'état actuel de
20 l'accusé. Et puis, il y a également tout ce qui a à voir avec les
21 expériences qu'il a traversées quand il était dans le camp, quand il était
22 prisonnier en Bosnie, etc., l'expérience qu'il traverse aujourd'hui-même,
23 alors qu'il se trouve en détention.
24 Tout ceci a entraîné des changements très rapides dans le
25 comportement qu'il a vis-à-vis du monde extérieur. J'ai parlé de tous ces
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1 aspects dans mon rapport. Tous ces éléments sont corroborés par les
2 résultats des tests menés à bien par le Pr Verde.
3 Mme McMurrey (interprétation). - Pour que tout le monde
4 comprenne bien ce que vous entendez quand vous dites que M. Landzo n'est
5 pas mûr, en fait, ce n'est pas la seule pathologie dont il souffre, mais
6 pourriez-vous expliquer exactement ce que vous entendez par "pathologie",
7 en termes psychiatriques ?
8 M. Lagazzi (interprétation). – Il est vrai que nous établissons
9 des définitions très précises des troubles mentaux, des définitions qui
10 sont valables au plan international, qui s'appliquent à un trouble
11 relativement clairement établi, relativement stable, état qui provoque de
12 la souffrance chez l'individu, chez le malade, qui entraîne une perte
13 d'amour propre, une perte de confiance en soi, qui entraîne chez le
14 patient une incapacité à avoir des rapports avec autrui.
15 Lorsque nous nous référons à des termes tels que "pathologie",
16 "psychopathologie", en termes psychiatrique ces mots ne sont pas des mots
17 subjectifs. La psychiatrie repose sur différents types de modèles. Il y a
18 le modèle descriptif qui est le DSM, dont nous avons parlé, mais c'est un
19 modèle parmi d'autres. Il y a le DSM qui est un certain type de
20 classification, mais il y a aussi d'autres choses comme l'ECD qui a été
21 mis au point par l'Organisation mondiale de la santé. Et puis il y a
22 d'autres domaines, notamment psychiatrie dynamique. Et dans ce cadre, on
23 attribue au terme "pathologie" un sens assez différent de celui qui lui
24 est attribué dans le cadre de l'étude de comportement de l'individu.
25 Et dans notre travail quotidien de psychiatre légiste, la
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1 pathologie peut être appliquée dans un cadre encore différent, par
2 exemple, dans celui du comportement sexuel. Selon le cadre dans lequel
3 vous utilisez, le terme "pathologie" recouvre une acception différente.
4 Dans un cadre précis il peut signifier qu'il y a absence
5 d'autocontrôle chez le sujet, absence de contrôle de soi.
6 Mme McMurrey (interprétation). - Maintenant, pour ce qui est de
7 la définition de base, est-ce que, en termes de psychologie médico-légale,
8 la pathologie cela veut dire maladie ?
9 M. Lagazzi (interprétation). - Ce concept de maladie est
10 généralement relié à quelque chose qui est beaucoup plus circonscrit dans
11 le temps. Donc, nous, nous parlerions plutôt de troubles. Ce n'est pas
12 pareil, la maladie et le trouble. Un trouble, c'est une définition
13 générique, alors que la maladie cela recouvre le terme de "pathologie".
14 Peut-être que ceci donnera naissance à certains problèmes dans
15 le cadre du contre-interrogatoire, mais je crois qu'il faut préciser les
16 choses et j'essaierai de les préciser plus avant si besoin est.
17 Mme McMurrey (interprétation). - Pour que tout soit clair, vous
18 avez sous les yeux un exemplaire d'un document qui établi les critères qui
19 ont été mis au point par Kaplan et par Sadock. Ce document était versé au
20 dossier, pièce D484 je crois. Et puis pièces 776 et 777, je ne sais pas
21 exactement. Nous avons parlé de cela.
22 M. Lagazzi (interprétation). - Excusez-moi, mais à quoi faites-
23 vous référence ?
24 Mme McMurrey (interprétation). - 776 et 777. Pour que tout soit
25 clair pour les Juges, pourriez-vous nous dire de quel trouble de type DSM
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1 souffre M. Landzo ? Pourriez-vous nous indiquer, sur ces différents
2 tableaux que vous avez sous les yeux, de quel trouble souffre M. Landzo ?
3 Si ces tableaux ne vous sont pas utiles, vous pouvez vous appuyer sur les
4 documents qui vous seront utiles.
5 M. Lagazzi (interprétation). - Est-ce que vous faites référence
6 au tableau 27 ? Je ne comprends pas à quoi vous faites référence. C'est le
7 tableau qui se trouve à la page 776 du document par Kaplan. Si c'est à
8 cela que vous faites référence, alors non, ce tableau ne recouvre pas les
9 critères utilisés dans le cadre du DSM-IV. Il recouvre les critères de
10 l'ECD10, qui est une autre table de classification. Ces deux tableaux ont
11 été plus ou moins fusionnés dans certains cadres, mais dans le cadre de la
12 classification mise au point par Kaplan, il faut utiliser le DSM-IV pour
13 ce qui est de l'évaluation des troubles individuels.
14 Mme McMurrey (interprétation). - Je me suis trompée dans ma
15 présentation de ces documents à la Chambre. Je vais demander l'aide de
16 l'huissier. Est-ce que l'huissier pourrait placer ce document qui contient
17 les critères de DSM-IV sur le rétroprojecteur, ainsi tout le monde pourra
18 voir l'image apparaître sur l'écran ?
19 Mme le Greffier (interprétation). - Je demanderai au conseil de
20 la défense de faire parvenir un exemplaire de ces documents au Greffe,
21 sinon je serais obligée de conserver ces documents dans le dossier de la
22 Cour.
23 Mme McMurrey (interprétation). - Je crois que vous avez la
24 page 777 et la page 776. Ils constituent la pièce D48/4. Mais pour ce qui
25 est de ce nouveau document, bien sûr, je vais essayer de vous en fournir
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1 un exemplaire dès que nous le pourrons, après la pause je pense. Comme je
2 l'ai précisé, moi-même je n'ai pas pu voir ce document de très près, je
3 n'en ai pas eu l'occasion.
4 Est-ce que le témoin pourrait être autorisé à s'asseoir un peu
5 plus près du rétroprojecteur, ainsi il pourrait faire ses commentaires en
6 faisant des indications sur ledit rétroprojecteur ?
7 Monsieur le Président, peut-être devrions-nous prendre la pause
8 dès à présent ? Cela me permettrait de faire des copies de ce document
9 pour tout le monde. Peut-être qu'il vaudrait mieux procéder ainsi parce
10 qu'il est 11 heures 30 de toute façon. Cela fait une heure et demie que je
11 suis sur mes jambes, je suis un peu fatiguée.
12 M. le Président (interprétation). - Eh bien, Maître, lorsque
13 vous serez un peu plus pertinente dans vos questions, vous ne serez pas
14 obligée de rester debout si longtemps. Soit, nous allons prendre notre
15 pause et nous reprendrons nos travaux à midi.
16 Mme McMurrey (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.
17 (Suspendue à 11 h 30, l'audience est reprise à 12 h 00.)
18 Mme le Greffier. - Je vous rappelle, Monsieur, Madame, que vous
19 êtes toujours sous serment.
20 M. le Président (interprétation). - Merci.
21 Mme McMurrey (interprétation). - Il y a un certain nombre de
22 copies qui n'ont pas été encore préparées, par conséquent, je vais
23 attendre que mon confrère revienne ici pour nous apporter les copies. Mais
24 je vais poser quelques questions en attendant.
25 Docteur Lagazzi, vous avez donc décrit la pathologie en tant que
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1 maladie. Auriez-vous l'amabilité de démontrer devant les Juges ce que
2 c'est une maladie psychiatrique, qu'est-ce que c'est une définition de la
3 pathologie psychiatrique ?
4 M. Jan (interprétation). - (Hors micro.)
5 M. Lagazzi (interprétation). - En ce qui concerne le cas très
6 précis, le cas concret dont nous parlons, nous pouvons parler d'une
7 personnalité anormale. Le terme "pathologie" ou "maladie" est extrêmement
8 un terme précis. Quand vous parlez de la pathologie psychiatrique, ce mot-
9 là, c'est un problème de schizophrénie, le delirium, la démence également
10 maniacale. Il s'agit des maladies qui sont définies en tant que
11 pathologies.
12 Mais en revanche, quand on parle d'une pathologie tout court, à
13 ce moment-là c'est un comportement qui n'est pas normal et qui définit une
14 personnalité.
15 Mme McMurrey (interprétation). - Docteur, pourriez-vous, avec le
16 tableau que vous avez préparé, nous décrire ce que c'est la pathologie, le
17 terme "pathologie psychiatrique" et quand il s'agit du désordre
18 psychiatrique, donc sous cet aspect-là, la pathologie ?
19 M. Lagazzi (interprétation). - Je pense que nous avons parlé,
20 nous avons donné un exemple des souliers rouges. C'est effectivement un
21 exemple, mais je vais m'expliquer. Nous parlons de quelque chose de
22 différent ; c'est beaucoup plus facile de définir que l'absence de
23 normalité chez une personne. Quand on parlait de schizophrénie, à ce
24 moment-là c'est en permanence la pathologie, et quand on parle du
25 désordre, de troubles de la personnalité, c'est quelque chose qui n'est
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1 pas normal.
2 Il est indispensable de définir le terme pour pouvoir en parler
3 dans le détail. Et nous devons également déterminer où l'aspect normal
4 devient une situation pathologique ou anormale. En d'autres termes, si
5 vous voulez, je peux vous présenter sur le tableau un certain nombre
6 d'exemples et surtout vous présenter quelques éléments pour fonder mon
7 opinion.
8 M. Jan (interprétation). - (Hors micro.)
9 M. Lagazzi (interprétation). - Absence d'un état normal, c'est
10 l'absence d'un état normal, aussi bien au niveau de la structure qu'au
11 niveau de l'expression du comportement de la personnalité.
12 Actuellement, au niveau de la psychiatrie, de neurochimie, on en
13 parle de plus en plus souvent. Mais nous avons un autre facteur dont il
14 faut parler : nous utilisons très peu de substances qui excitent et qui
15 agissent sur les processus chimiques dans une personnalité et ont un
16 impact sur son comportement. Nous sommes sûrs actuellement et nous pouvons
17 dire quelles sont les lésions au niveau du cerveau. Il y a des études
18 selon lesquelles on peut déterminer qu'il y avait des changements au
19 niveau chimique et qui, par conséquent, ont eu une influence sur le
20 comportement.
21 Mais dans le cas concret, dans le cas du désordre de la
22 personnalité, de trouble de la personnalité, on parle du comportement. Le
23 modèle de comportement, on ne peut pas parler véritablement des
24 changements au niveau chimique. Nous pouvons suivre les structures
25 différentes de la personnalité, les niveaux différents du comportement de
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1 la personnalité. Il y a de la chimie là-dedans, mais pas autant.
2 Je pense par exemple que, dans cent ans, la psychiatrie
3 probablement aura évolué de la manière qui pourtant… qui certainement,
4 prendra en compte les éléments et les facteurs chimiques, et saura par
5 exemple, comment fonctionne le cerveau. Ce n'est pas le cas aujourd'hui.
6 M. le Président (interprétation). – Docteur Lagazzi, avant de
7 commencer à donner la description de votre tableau, j'aimerais savoir ce
8 dont vous avez disposé. Quelle est la corrélation entre le trouble de la
9 personnalité et l'acte par exemple, qu'il avait commis, l'acte criminel
10 qu'il avait commis ? Dans quel sens il est responsable et pas
11 responsable ? C'est ce que j'aimerais vous entendre dire, parce que vous
12 êtes un expert en psychiatrie légiste.
13 M. Lagazzi (interprétation). - Bien sûr, Monsieur le Président.
14 Je me dois de vous dire qu'en ce qui concerne la responsabilité dont j'ai
15 parlé également dans mon rapport, c’est une évaluation qui se fonde sur la
16 probabilité.
17 Nous avons une évaluation qui, bien évidemment, ne se fonde pas
18 sur la véracité, sur la sécurité. Nous sommes en présence des troubles
19 psychiatriques et nous faisons face à une personnalité qui avait commis un
20 certain nombre d'actes, mais elle n'en a pas parlé avec moi. Ce que j'ai
21 essayé de faire, c'était d'évaluer la personnalité aux fins d'établir ma
22 conclusion sur ce qui m'a été dit et il s'agit de conditions tout à fait
23 spécifiques.
24 Il y a l'autorité également qui a été mise en cause et les
25 rapports entre les personnalités de son entourage. Dans ce cadre-là, on
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1 peut accepter un certain nombre d'ordres et de ne pas agir en libre
2 arbitre. Il y a une absence de libre arbitre, mais je me dois d'ajouter
3 également que cette évaluation à laquelle je suis parvenu se fonde, une
4 fois de plus, je le répète, sur la probabilité, pas vraiment sur des
5 éléments véridiques sans des éléments cliniques et sans connaître tous les
6 détails et toutes les informations.
7 J'ai dit que M. Landzo était dans un état clinique tel qu'il est
8 fort probable, au moment où il a obtenu les ordres spécifiques, qu'il
9 avait agi d'une manière pas libre, donc pas de son libre arbitre. Je vais
10 donc expliquer une fois de plus qu'il s'agit d'une évaluation qui ne
11 pourrait pas être fondée sur une très grande certitude, sauf si vous avez
12 tous les facteurs et tous les faits.
13 Nous devrions demander à M. Landzo pour nous interpréter cette
14 situation. C'est la même situation d'ailleurs dans laquelle nous nous
15 sommes trouvés au moment où nous avons posé les questions au
16 Dr van Leeuwen. Il fallait donc connaître sa personnalité, déterminer tous
17 les éléments, mais comme je le dis, c’est la probabilité.
18 Mme McMurrey (interprétation). – Merci. Docteur Lagazzi, vous
19 avez également parlé d'un troisième aspect dans votre évaluation. C'est ce
20 dont vous vous êtes rendu compte véritablement, pas sur la base des
21 questions qui vous ont été données par M. Landzo.
22 M. Lagazzi (interprétation). - Oui effectivement, c'est sur mon
23 observation, sur les entretiens, sur les examens cliniques, sur les
24 résultats des tests que j'ai pu en tirer la conclusion. Je me dois de vous
25 dire que personnellement je suis d'avis que cette évaluation concorde
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1 parfaitement avec d'autres, avec des évaluations d'autres collègues et
2 tout particulièrement celles du Pr van Leeuwen.
3 Mais, permettez-moi de dire que le coefficient de fiabilité
4 d'une évaluation psychiatrique est beaucoup plus grand si vous avez
5 davantage d'informations. Cela dépend également de la quantité
6 d'informations obtenues par le psychiatre.
7 En d'autres termes, si nous parlons des faits, à ce moment-là
8 nous serions en possibilité de dire sur la base de ces faits, de ces
9 éléments, M. Landzo aurait pu être dans un état de capacité restreinte ou
10 de responsabilité atténuée, mais en l'absence des faits, à ce moment-là,
11 vous agissez différemment.
12 Mme McMurrey (interprétation). - Par conséquent, si vous n'avez
13 pas des informations très précises, à ce moment-là vous êtes obligé de
14 vous fonder sur d'autres informations, d'autres sources d'informations au
15 sujet de M. Landzo ?
16 M. Lagazzi (interprétation). – Effectivement, si les Juges
17 disent que c'est possible...
18 Mme McMurrey (interprétation). - Mais je pense que ceci serait
19 clair si on expliquait un peu plus les termes de "pathologie" et notamment
20 cet exemple des "souliers rouges".
21 M. Lagazzi (interprétation). - Il ne s'agit pas d'une
22 plaisanterie.
23 Mme McMurrey (interprétation). – Non, bien évidemment, ce n'est
24 pas une plaisanterie.
25 M. Lagazzi (interprétation). - Je voudrais tout simplement, à
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1 titre d'illustration, vous donner un exemple pour vous décrire un type de
2 comportement, aussi bien pour la défense que pour l'accusation, pour
3 démontrer comment un type de comportement peut contenir une composante
4 pathologique qui peut être pertinente dans le cas concret.
5 Nous allons faire un petit dessin. C'est tout à fait
6 hypothétique bien évidemment. Nous avons anormalité. Nous sommes en
7 présence d'anormalité au niveau du comportement d'un individu. Nous
8 prenons un exemple, nous avons un cas limite.
9 Pour bien me faire comprendre, je vais donc citer la sexualité.
10 Nous savons que tout est relatif et que cela change d'un individu à
11 l'autre. Je me réfère bien évidemment au DSM-IV. Nous pouvons être en
12 présence, par exemple, d'une situation, d'une personne, d'un homme qui
13 s'excite au moment où il voit une femme qui porte des chaussures rouges.
14 Nous partons donc du fait qu'il y a une anormalité théorique et
15 quand il s'agit de belles femmes qui portent de belles chaussures, il y a
16 des fantasmes qui, bien évidemment, n'influencent pas la vie de tous les
17 jours d'un individu mais cela fait part d'une subjectivité et de la
18 personne. C'est quelque chose qui est normal dans une personnalité.
19 Mais si la personne en question a un rapport avec sa femme qui
20 porte un type de chaussures très précis, à ce moment-là il n'y a pas
21 véritablement de liberté de comportement étant donné qu'il a été
22 conditionné. Un certain nombre de besoins sont reconnus dans cette
23 personnalité mais ce n'est pas de la pathologie.
24 M. Jan (interprétation). - Qu'est-ce que le diagramme et les
25 lignes que vous avez dessinées ? Vous voulez bien me les décrire un peu
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1 plus ?
2 M. Lagazzi (interprétation). - Nous avons le coefficient
3 d'anormalité et il y a un autre axe où nous avons présenté le
4 comportement.
5 Mme McMurrey (interprétation). - Je pense que nous avons perdu
6 quelque chose dans l'interprétation. Vous parlez des chaussures mais si
7 vous ne précisez pas des chaussures rouges, à ce moment-là, il n'y a pas
8 une situation qui est complexe et particulière par ce conditionnement dont
9 on a parlé.
10 M. Lagazzi (interprétation). - D'accord, il s'agit d'un rapport
11 et d'une corrélation entre la normalité et l’anormalité. Si vous voulez,
12 nous pouvons continuer en parlant des chaussures rouges. Si nous avons des
13 fantasmes uniquement, il y a un impact, une influence des effets sur le
14 comportement des personnes. Du point de vue clinique, nous ne sommes pas
15 dans une situation absolue de normalité mais nous savons que dans la
16 psychiatrie il n'y a pas de normalité absolue, tout est relatif.
17 Si la personne en question demande à son épouse, à la femme de
18 porter des chaussures très précises, son comportement diffère par rapport
19 à la réaction de la majorité. En d'autres termes, si cette personne peut
20 être en rapport avec la femme uniquement si elle porte des chaussures très
21 précises, à ce moment-là, il est important, il ne peut pas avoir un
22 puissant... il ne peut pas avoir un rapport sans cela. Il présente une
23 situation qui est beaucoup plus complexe, et limite même vers la
24 pathologie. Et il serait également indispensable qu'il s'adresse à un
25 psychiatre pour pouvoir être traité, etc.
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1 Cela, c'est un cas, mais il y a un autre cas pour satisfaire son
2 besoin, et avoir un rapport uniquement avec les femmes qui portent telles
3 ou telles chaussures. A ce moment-là, la personne en question a des
4 rapports uniquement avec des prostituées. C'est encore un autre degré, si
5 vous voulez, d'anormalité de la pathologie.
6 Il y a encore d'autres éléments. La personne en question est
7 obligée de battre la personne, la femme qui porte les chaussures rouges,
8 pour pouvoir avoir un rapport sexuel avec la personne, etc. C'est un
9 troisième degré, c'est anormalité totale. Il y a donc une évolution, une
10 continuité. Nous commençons avec quelque chose qui existe en chacun de
11 nous.
12 M. Landzo, par exemple, est narcissique. Tous ces éléments sont
13 présents en chacun de nous-mêmes, mais si vous voulez définir une
14 personnalité comme pathologique, vous devez avoir une fourchette, enfin
15 avoir un éventail. Nous avons un seuil, seuil pour le changement du
16 comportement.
17 Nous serions tous d'accord, je pense, que si quelqu'un viole une
18 femme tout simplement parce qu'elle porte des chaussures rouges, il
19 présente un cas pathologique. Cependant, il s'agit d'une courbe, une
20 courbe qui a une certaine continuité, et nous devons déterminer jusqu'à
21 quel point il a été conditionné, il n'a pas été conditionné dans son
22 comportement, et ce qui va véritablement influencer son comportement.
23 Quand nous appliquons ce test sur le comportement et sur le
24 trouble de la personnalité, là nous nous référons à DSM-IV, il y a un
25 certain nombre de caractéristiques et de faits d'éléments qui, une fois de
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1 plus, font part intégrante de chacun de nous. Ce n'est pas automatiquement
2 pathologique, mais si une personnalité est déstructurée à ce moment-là,
3 nous pouvons parler d'anormalité de la personne en question.
4 Si l'aspect anormal est tel qu'il menace son comportement, qu'il
5 met en question son comportement de manière très grave, à ce moment-là
6 nous parlons de la pathologie, pathologie de la personnalité. Dans le cas
7 concret, je répète une fois de plus, il ne s'agit pas de psychose,
8 paranoïa, schizophrénie, ce n'est pas aussi clair, ce n'est pas aussi
9 distinct. Nous devons d'abord observer les troubles de simulation limite,
10 un trouble structurel, où le seuil de normalité peut être très bas.
11 Tout simplement parce que nous avons un certain nombre de
12 désordres et d'éléments qui nous conduisent à dire qu'il y a des
13 psychoses, et le seuil de pathologie est beaucoup plus élevé. Tout
14 simplement parce qu'il y a un certain nombre de manifestations qui peuvent
15 être présentes chez de tels sujets, et de manière très intense, très
16 prononcée.
17 En revanche, quand on parle de paraphylie, la pathologie
18 dépendra du type de trouble, du type de conditionnement et de quelle
19 manière cette lésion influencera le comportement de la personnalité.
20 Pour revenir à la sexualité, nous pouvons donc mettre à côté les
21 chaussures rouges, c'est un exemple soi-disant plaisant. La pathologie est
22 beaucoup plus présente chez les pédophiles, par exemple. Les fantasmes,
23 là, sont beaucoup plus présents. Dans ce cas-là effectivement, il s'agit
24 des cas pathologiques. Il y a des fantasmes qui sont présents et qui dans
25 d'autres cas sont acceptables, mais ici, ils prouvent la présence d'une
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1 pathologie très grave.
2 Maintenant, nous allons parler de la responsabilité. Nous allons
3 donc revenir à l'exemple de pédophilie. Nous pouvons constater la chose
4 suivante : vous avez l'individu qui a des problèmes de pédophilie. Il se
5 trouve dans une situation pathologique, s'il veut rentrer en rapport avec
6 un enfant qui est dans la rue, qui est accompagné de sa mère, etc. Cela
7 conditionne son comportement car il a cet aspect anormal pathologique en
8 lui.
9 Un psychiatre légiste mettra en question sa responsabilité car
10 il a un comportement totalement inadéquat. Si vous avez par exemple une
11 personne qui ne commet pas de telles actions dans sa ville, mais se rend
12 par exemple dans une autre ville ou un autre pays où cela est permis, dans
13 un sex-shop, etc., dans ce cas-là, il s'agit véritablement d'un individu
14 qui est complètement responsable de ses actes.
15 Dans la pathologie légiste, nous essayons de voir comment son
16 comportement peut se manifester ou se traduire en présence d'une femme qui
17 porte des chaussures rouges, à n'importe quel endroit, etc., qui va
18 entraîner son arrestation, etc., ou il viole une femme, il ne peut plus le
19 reconnaître. Il change la voiture, il s'attaque à une prostituée parce
20 qu'il est beaucoup plus facile de kidnapper une prostituée et il trouve un
21 alibi.
22 Dans ce cas-là, son comportement est beaucoup plus organisé.
23 Cela a été fait de manière beaucoup plus… c'est beaucoup plus organisé
24 comme je l’ai dit, c’est fait sciemment et pas inconsciemment. Et si nous
25 voulons aboutir à une évaluation, dans ce cas-là, ce serait beaucoup plus
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1 facile. Dans le cas de M. Landzo, bien évidemment, il faut procéder d'une
2 autre manière.
3 Mme McMurrey (interprétation). - En ce qui concerne les troubles
4 qui concernent M. Landzo, je pense que c'est plutôt au niveau pathologique
5 que vous avez apporté vos conclusions ?
6 M. Lagazzi (interprétation). – Oui, c'est vrai.
7 Mme McMurrey (interprétation). - Dans le troisième rapport que
8 vous avez rédigé, vous avez même décrit une situation qui aurait pu
9 éventuellement donner une explication plus précise et concernant la
10 voiture, l'automobile dont vous avez parlé tout à l'heure.
11 M. Lagazzi (interprétation). - Revenons à un autre exemple. Dans
12 le cas de M. Landzo, ce que j'avais remarqué au cours des interrogatoires
13 et de nos rencontres différentes, c'est la manière dont il s'exprime et le
14 changement de son comportement. Au cours de ma première rencontre, il
15 avait tout simplement simulé. Cela m’a semblé clair. En revanche, la
16 dernière fois, quand je l'ai rencontré, il avait apporté plusieurs
17 éléments pour minimiser son expérience et réduire l'effet qu'il avait
18 laissé la première fois, se montrer normal.
19 Par conséquent, il s'agit d'une personne qui est intelligente et
20 cela a été démontré lors de nos tests, il est complètement conscient de
21 l'acte d'accusation, du fait où il se trouve, etc. Par conséquent, il
22 change en permanence son approche, son attitude et son comportement, cela
23 est intimement lié à sa personnalité.
24 Si quelqu'un conduit vite une voiture, il provoque un accident,
25 il sort de la voiture, il prend une autre voiture, il conduit rapidement
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1 et provoque un autre accident, puis il ressort de cette voiture, etc. Dans
2 ce cas-là, vous avez une dégradation de la personnalité.
3 Mais quand vous êtes en présence d'une personne qui est
4 intelligente, consciente de la situation dans laquelle elle se trouve, à
5 ce moment-là vous devez vous dire que c'est une anormalité, une pathologie
6 de la personnalité.
7 Mme McMurrey (interprétation). – Merci beaucoup, Professeur, je
8 crois que vous pouvez vous asseoir. Cet exemple de la voiture, c’est
9 l’exemple que vous avez utilisé dans le cadre du troisième rapport, je le
10 précise.
11 M. Lagazzi (interprétation). – En effet.
12 Mme McMurrey (interprétation). – Je ne voudrais pas oublier une
13 chose. Professeur Lagazzi, vous avez rédigé le premier rapport le
14 15 novembre 1996, le second rapport a été établi le 9 janvier 1997, quant
15 au troisième, il a été rédigé le 3 juillet 1998, nous sommes bien
16 d'accord ?
17 M. Lagazzi (interprétation). - Oui.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Dans ces rapports, vous faites
19 état de vos opinions qui reposent sur les examens, sur les tests
20 psychologiques et sur votre évaluation de l'état de M. Landzo. Vous pensez
21 que les avis que vous avez émis à l'époque sont toujours valables et
22 exacts ?
23 M. Lagazzi (interprétation). - Bien évidemment.
24 Mme McMurrey (interprétation). - Je demande le versement au
25 dossier de ces trois rapports Monsieur le Président, s'il vous plaît.
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1 Mme McMurrey (interprétation). – Pardon, je m'aperçois que nous
2 avons ici le rapport du mois de novembre, mais nous n'avons pas pu agrafer
3 les pages qui composent ce document.
4 Mme le Greffier (interprétation). - Le premier rapport porte la
5 cote D61/4, le deuxième rapport est la pièce D62/4 et le troisième rapport
6 porte la cote D63/4.
7 M. le Président (interprétation).- Ces rapports qui concernent
8 l'état de l'accusé sont admis au dossier.
9 Mme McMurrey (interprétation). – Merci, Monsieur le Président.
10 Avant la pause, nous essayons de parler de divers critères et
11 j'ai là les copies du document qui fait état des critères qui doivent être
12 utilisés dans le cadre du DSM-IV. J'aimerais faire passer d'abord un
13 exemplaire de ces documents au Greffe. Le document a déjà reçu une cote ?
14 Parfait, merci.
15 Monsieur l'Huissier, veuillez distribuer ces exemplaires
16 aux Juges, je vous prie.
17 Mme le Greffier (interprétation) – La page 791 a reçu la
18 cote D58/4 et la page 619 a reçu la cote D59/4.
19 Mme McMurrey (interprétation). - Je me tourne vers l'accusation.
20 Vous disposez d'un exemplaire de ce document ? Oui ? Je vous remercie.
21 M. Moran (interprétation). – Pourrions-nous avoir nous aussi un
22 exemplaire de ce document, cela nous permettrait de suivre ?
23 Mme McMurrey (interprétation). - Vous avez le livre qui contient
24 ce document entre les mains.
25 M. Moran (interprétation). - Maître McMurrey ne cesse de verser
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1 certains documents qui sont tirés de plusieurs livres, je ne sais pas de
2 quoi on parle.
3 Mme McMurrey (interprétation). – Je plaisantais, je pense que
4 nous avons des exemplaires en nombre suffisant, nous pouvons en donner un
5 à Me Moran.
6 M. Cowles (interprétation). – S’il s’agit du document D48/4,
7 alors je crois que nous avons déjà une copie de cela.
8 Mme McMurrey (interprétation). – Je crois que la page 791 ne
9 fait pas partie du document D48/4.
10 M. Cowles (interprétation). – A ce moment-là, nous ne disposons
11 pas de cette page supplémentaire.
12 Mme McMurrey (interprétation). - Vous disposez du document tiré
13 du livre du Dr Kaplan ?
14 M. Cowles (interprétation). - Non.
15 M. Lagazzi (interprétation). – Pourrais-je obtenir un exemplaire
16 de ce document ?
17 Mme McMurrey (interprétation). - L'huissier va placer
18 l’exemplaire qui vous est destiné sur le rétroprojecteur.
19 M. Lagazzi (interprétation). - Je vous remercie.
20 Mme McMurrey (interprétation). - Tâchons de bien préciser la
21 nature du trouble de la personnalité dont souffre M. Landzo. Pourriez-vous
22 expliquer aux Juges ou montrer aux Juges quel est exactement ce trouble de
23 la personnalité et pourriez-vous donner une définition pathologique de ce
24 trouble de la personnalité en vous fondant sur les critères DSM-IV ?
25 M. Lagazzi (interprétation). – Oui, je suppose que vous avez des
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1 exemplaires de ce document, je parle du DSM-IV.
2 Nous avons décelé les éléments suivants : syndrome de stress
3 post traumatique, tout d'abord, nous pensons que ce syndrome résulte des
4 expériences traversées dans le cadre du camp de formation militaire. Dans
5 le cadre de notre dernier entretien, j'ai compris, d'après ce que disait
6 M. Landzo, d'après ce qu'il nous a montré également, il nous a montré un
7 film qui faisait état du fait qu'il avait traversé une expérience pire
8 encore que celle du camp de formation. Donc, ce syndrome de stress
9 post traumatiques a également été entraîné par ces images de destruction
10 de sa propre patrie, par ces images de meurtres et d’assassinats qui ont
11 été commis.
12 L'autre élément très important est celui du trouble de la
13 personnalité dépendante. Les critères qui apparaissent ici sont ceux qui
14 sont toujours utilisés dans le cadre de la définition d'un tel trouble.
15 C'est utilisé par les psychiatres du monde entier. Je souscris entièrement
16 à ces critères mais je voudrais apporter une nuance à ce que j'ai dit. Il
17 y a quelque chose de très important pour ce qui est de l'utilisation qui
18 est faite du DSM-IV.
19 Il est très facile d'utiliser des étiquettes en psychiatrie,
20 pour que tout le monde se mette d'accord sur tel ou tel point. Mais le
21 DSM-IV est utilisé dans le cadre de la médecine médico-légale. Dans ce
22 cadre, il faut être extrêmement précautionneux. Les auteurs du livre le
23 précisent. Nous avons le terme qui est utilisé "diagnostic pluriaxé " (ou
24 pluriaxial peut-être pense l'interprète), cela indique que la personne est
25 composée de différents traits de personnalité. Il y a donc ce symptôme de
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1 ce stress post traumatique, et il y a ces désordres, ce trouble de la
2 personnalité dépendante. En outre, il y a ce comportement impulsif et
3 narcissique qui a été décelé par M. van Leeuwen. Il y a également ces
4 tendances schizoïdes.
5 Donc, en sus de toutes les étiquettes que nous pourrions
6 utiliser dans ce cas précis, il faut également se dire une fois pour
7 toutes que nous avons en face de nous une personnalité extrêmement
8 complexe. C'est une personnalité, un trouble de la personnalité mixte, si
9 vous voulez. Mais je préférerais, moi, parler d'un cas très complexe
10 constitué de différents éléments qui font tous partie d'un état général,
11 éléments qui sont tous liés les uns aux autres. Nous utilisons certes le
12 DSM-IV comme cadre de référence, mais chacun des traits de la personnalité
13 qui compose l'individu est étroitement lié aux autres traits qui composent
14 cette même personnalité.
15 Dans les ouvrages de références, il est bien établi que le
16 syndrome du stress post traumatique est accru par d'autres traits de la
17 personnalité et de même, s'il y a un trouble de la personnalité
18 dépendante, les éléments qui ont à voir avec le syndrome de stress
19 post traumatique sont encore rendus plus aigus.
20 Il faut ajouter à cela cette tendance narcissique, cette
21 tendance au comportement impulsif, il y a un effet cumulatif. Cela aggrave
22 l'état du patient. Donc, cliniquement parlant, on obtient un examen
23 complexe, examen qui permet de déterminer la personnalité très complexe
24 d'une personne.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Eh bien voilà, Juge Jan vous
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1 avez des étiquettes très précises et vous pourrez les utiliser à toutes
2 fins utiles.
3 Les étiquettes telles que vous venez de les décrire, sont celles
4 qui feraient partie de la partie supérieure du graphique que vous avez
5 tracé tout à l'heure, celles qui se situeraient au-dessus de la ligne, au-
6 dessus de laquelle vous avez indiqué "pathologie", n'est-ce pas ?
7 M. Lagazzi (interprétation). - Oui je vous comprends, en effet.
8 Mme McMurrey (interprétation). - Je vais vous poser des
9 questions relatives à un autre tableau qui a été réalisé hier dans le
10 prétoire. Hier, un témoin est venu déposer : Elmir Hadzajlic, alias Miro.
11 Cette personne a déclaré qu'il avait essayé de faire en sorte que
12 M. Landzo reste à ses côtés, mais M. Landzo l'avait quitté pour rejoindre
13 les rangs de la Défense territoriale. Pourriez-vous expliquer aux Juges
14 pourquoi cela va dans la droite ligne du trouble de la personnalité dont
15 vous avez parlé ?
16 M. Lagazzi (interprétation). - Si nous prenons pour une
17 certitude le fait que M. Landzo a refusé de rester aux côtés de ce Miro,
18 tout ce que je peux ajouter sur ce sujet, c'est une explication qui repose
19 sur ma perception des faits.
20 Je pense que ceci pourrait recevoir l'explication suivante :
21 M. Landzo a ressenti ce besoin de s'identifier avec une structure
22 puissante, plus puissante que sa dépendance vis-à-vis de M. Miro. C'est
23 une explication possible. C'est ainsi que je vois les choses en tout cas,
24 que je les interprète.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Cette structure, comme vous
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1 l'avez appelée, cette structure plus puissante était également attirante à
2 ses yeux, parce que son père et son frère lui ont dit qu'il devait
3 rejoindre les rangs de la Défense territoriale et défendre sa ville ?
4 M. Jan (interprétation). - Avons-nous des éléments de preuve qui
5 nous permettent de déduire cela ?
6 Mme McMurrey (interprétation). - Il y en aura.
7 M. Jan (interprétation). - Vous posez là des questions
8 hypothétiques. Vous décrivez une situation hypothétique qui pourrait mener
9 à telle ou telle conclusion. Ce n'est pas très normal.
10 Mme McMurrey (interprétation). - Je vais essayer de changer ma
11 question. Professeur Lagazzi, vous ne savez pas exactement quelle était
12 cette force plus puissante qui l'attirait. Vous vous basez simplement sur
13 la nouvelle opinion que vous vous êtes forgée, n'est-ce pas ?
14 M. Lagazzi (interprétation). - Je prends en compte la façon dont
15 M. Landzo a décrit ses sentiments vis-à-vis du fait de porter un uniforme.
16 Il a dit qu'il était attiré par les armes, par le fait de porter un
17 uniforme, et il est très clair de toute façon que les personnalités
18 dépendantes, lorsqu'elles sont très dépendantes vis-à-vis d'éléments
19 extérieurs, souhaitent avoir des liens étroits avec une structure
20 puissante, par exemple une structure militaire. Ce type de structure a un
21 attrait tout particulier pour les personnalités dépendantes.
22 M. Landzo m'a fait me souvenir de ce jeune homme qui était venu
23 me voir, qui voulait être membre de l'armée italienne. Avant d'être formé
24 pour servir dans l'armée italienne, il voulait servir dans le cadre des
25 troupes des Nations Unies et dans les zones de combat où les Nations Unies
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1 intervenaient. Nous ne comprenions pas très bien la nature de leurs
2 demandes et quand nous faisions passer des tests psychiatriques à ces
3 jeunes recrues, nous avons tous découvert qu'ils souffraient de troubles
4 psychiatriques extrêmement complexes, nous ne pouvions pas accéder à leur
5 demande.
6 Mme McMurrey (interprétation). – Professeur, je voudrais
7 également m'appuyer sur un exemple que j’ai lu dans votre premier rapport,
8 rapport en date du 15 novembre 1996, et je voudrais établir un lien entre
9 ces exemples et le diagnostic que vous avez établi.
10 Pourriez-vous nous parler de ces exemples ? Pourriez-vous nous
11 parler du comportement de M. Landzo en 1996 et des liens qui existent
12 entre ces comportements, ces exemples et les troubles très particuliers
13 dont il souffre ? Est-ce que ces comportements et ces éléments sont en
14 rapport direct avec ces troubles ou non ?
15 M. Lagazzi (interprétation). - Dans le rapport de 1996, j'ai
16 précisé que le modèle de comportement de M. Landzo et sa personnalité
17 étaient tout à fait en ligne avec le comportement qu'il avait eu
18 antérieurement. Mais par la suite, ce comportement, cette attitude a
19 changé du tout au tout.
20 Auparavant, il semblait vraiment être heureux du fait qu'il
21 pouvait se considérer comme étant un mercenaire et un combattant. Ceci
22 était en ligne directe avec le fait qu'il y avait cette dépendance vis-à-
23 vis d'un modèle très fort, très puissant. Ceci n'a fait que confirmer ce
24 qu'il avait déjà dit. Il a dit : "Je voulais être le soldat idéal."
25 C'était tout à fait en ligne avec cette déclaration.
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1 Cette image qu'il se faisait du soldat idéal expliquait son
2 comportement. En fait, il nous disait que sa perception du soldat idéal,
3 ce qu'il pensait être un soldat idéal guidait son comportement. Il se
4 reportait à cette image qu'il se projetait pour agir.
5 Mme McMurrey (interprétation). - Vous avez décrit ce trouble en
6 parlant de fausses perceptions de son être. Pourriez-vous expliquer
7 exactement ce que vous entendez par là ?
8 M. Lagazzi (interprétation). – Oui, fausse perception de soi et
9 non pas perception idéale, Monsieur le Juge, je crois que vous vous êtes
10 trompé.
11 M. Jan (interprétation). – Parlez-vous de fausse perception de
12 soi ou de perception idéale de soi ?
13 M. Lagazzi (interprétation). - C'est une question très élégante,
14 Monsieur le Juge. Dans ce cas précis, il s'agit plus d'une fausse
15 perception de soi, perception qui est tout à fait conforme au niveau de
16 dépendance ressenti vis-à-vis d'autrui.
17 On peut parler de faux ego, si vous voulez, alors que la
18 perception idéale de soi, l'ego idéal en l'occurrence, aurait été ce
19 comportement de soldat idéal. Mais dans ce cas précis, M. Landzo a plutôt
20 choisi l'approche du faux ego. Il n'a pas tant été inspiré par l'archétype
21 du soldat idéal mais par d'autres exemples qui étaient plus proches de
22 lui. Nous ne pouvons pas vraiment parler d'une perception de soi idéale.
23 N'oubliez pas que nous sommes dans le cadre d'une personnalité
24 narcissique. Il s'agit ici d'un cas de faux ego.
25 M. Jan (interprétation). - Peut-être que j'ai moi-même une
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1 tendance au narcissisme, c’est peut-être pour cela que j'ai utilisé cette
2 expression de perception de soi idéale.
3 M. Lagazzi (interprétation). - Vous soulevez un débat très
4 intéressant.
5 Mme McMurrey (interprétation). - Revenons à cette idée du faux
6 ego. Est-ce que la personne essaie de se créer ce faux ego pour éviter ce
7 qu'il a vraiment en lui, parce qu'il ressent un vide en lui ?
8 M. Lagazzi (interprétation). – Oui, c'est cela qui différencie
9 le faux ego de la perception idéale de soi. Ici, effectivement, le sujet
10 souffre de cette impression de vide de façon très aiguë et à ce vide
11 s'ajoute l'aspect narcissique. Un peu plus tard, il y a cet aspect du
12 trouble de la personnalité dépendante qui intervient.
13 Je vous ai parlé de cet exemple du film de Woody Allen, Zelig.
14 On essaie de suivre l'exemple d'une personne qui revêt une autorité
15 absolue. Vous suivez cette personne et ses actes sans aucun sens critique.
16 Vous le prenez comme modèle absolu et vous tâchez d'imiter votre modèle.
17 C'est un comportement ou une approche beaucoup moins sophistiquée que
18 celle qu'impliquerait le fait qu'une personne ait une vocation, vocation à
19 devenir prêtre ou vocation à devenir soldat, par exemple, c’est très
20 différent.
21 On a la même approche, dans la mesure où on prend une structure
22 puissante comme modèle de référence. Mais dans le cas de l'accusé, cette
23 tendance à s'inspirer du modèle est beaucoup plus aiguë, elle est poussée
24 à l'extrême. C'est une approche beaucoup moins sophistiquée, beaucoup plus
25 archaïque parce qu'on imite le modèle en tout.
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Cette idée du faux ego que vous
2 avez soulevée implique que la personne qui souffre de ce trouble ne peut
3 pas exercer son libre arbitre lorsqu'il veut, lorsqu'il doit suivre un
4 ordre qui lui permet de devenir cette fausse personne, ce faux ego.. C'est
5 totalement différent de la situation évoquée par le Juge Jan quand il
6 parlait de la perception de soi comme modèle idéal, n'est-ce pas ?
7 M. Lagazzi (interprétation). – Ici, le problème du faux ego,
8 surtout dans ce cadre de la personnalité dépendante, et notamment si la
9 personne vis-à-vis de laquelle vous êtes dépendant vous donne un ordre ou
10 vous soumet un modèle de comportement très particulier, vous allez suivre
11 ce modèle de comportement, vous allez exécuter l'ordre sans aucune
12 discussion, donc il n'y a pas exercice du libre arbitre dans ce cas. Le
13 libre arbitre n'intervient pas.
14 Mais je voudrais nuancer mon propos en précisant que cet élément
15 du libre arbitre doit tout de même être pris en compte dans le cadre d'une
16 probabilité générale, si on applique tout ce que je dis à ce qui s'est
17 passé dans le camp de Celebici. Si vous voulez bien que nous parlions de
18 cela, il nous faudra nous pencher sur chacun des éléments qui ont donné
19 jour à ce comportement particulier.
20 Mme McMurrey (interprétation). - Sur la base de vos conclusions
21 de psychiatre légiste, sur la base de votre diagnostic, pourriez-vous nous
22 dire qu'en toute probabilité à l'époque, en 1992, M. Landzo souffrait de
23 troubles mentaux ?
24 M. Lagazzi (interprétation). - Oui, parce que l'apparition et
25 l'évolution de cette anormalité de la personnalité ont commencé bien
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1 avant 1992.
2 Mme McMurrey (interprétation). - Et cet aspect anormal de son
3 esprit a eu une influence sur sa capacité ou non à contrôler la situation
4 dans laquelle il se trouvait en tant que garde du camp de Celebici
5 en 1992, je parle toujours en termes psychiatriques. Ce trouble influait
6 sur sa capacité à s'autocontrôler ?
7 M. Lagazzi (interprétation). – Oui, mais n'oublions pas les
8 nuances que je viens d'apporter. Je crois pouvoir dire que, de façon
9 générale, pour ce qui est de cette période temporelle particulière, il y a
10 une forte probabilité qu'en effet ce trouble mental a eu une influence sur
11 son comportement. Mais il faudrait que nous entrions dans les détails des
12 faits dans lesquels il a été impliqué. Cela nous permettrait d'avoir une
13 opinion plus précise.
14 Mme McMurrey (interprétation). - En vous fondant sur les
15 diagnostics psychiatriques que vous avez établis, et en ne tenant pas
16 compte des faits qui se sont produits à Celebici, est-ce que l'on peut
17 dire qu'il souffrait de cette absence de libre arbitre en 1992 déjà ? Et
18 est-ce qu'aujourd'hui encore il souffre de cette absence de libre
19 arbitre ?
20 M. Lagazzi (interprétation). - Je peux vous dire que cette
21 absence de libre arbitre, il en souffrait déjà en 1992 et même peut-être
22 avant, il en souffrait du fait d'un trouble de la personnalité
23 pathologique ressenti antérieurement, trouble de la personnalité entraîné
24 par un syndrome de stress post traumatique, la situation de syndrome de
25 stress post traumatique étant due à la situation très particulière dans
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1 laquelle il se trouvait.
2 Donc, il y a eu d'abord ce trouble de la personnalité, mais je
3 ne suis pas vraiment à même de dire s'il pouvait à un moment donné exercer
4 son libre arbitre.
5 Pour ce qui est de sa situation actuelle, je n'ai pas parlé de
6 son libre arbitre, si je me souviens bien. Ces notions de libre arbitre et
7 de responsabilité de l'individu ne sont liées qu'au fait que des crimes
8 ont été commis. Pour autant que je le sache, M. Landzo avant 1992 n'a
9 commis aucun crime et je n'ai d'ailleurs aucune connaissance des crimes
10 qu'il serait susceptible d'avoir commis depuis. Si vous me demandez s'il
11 est à même de suivre les débats de ce procès, je vous réponds oui, c'est
12 tout ce que je peux dire.
13 Mme McMurrey (interprétation). - Ce n'est pas ce que je vous
14 demande, mais, en revanche, je vais vous demander, toujours en vous
15 fondant sur les examens que vous avez fait subir à M. Landzo, quels sont
16 vos pronostics pour l'avenir, notamment si M. Landzo ne reçoit pas des
17 soins psychiatriques ?
18 M. Lagazzi (interprétation). - Pour établir ce type de pronostic
19 sur l'avenir, il faudrait que je puisse rencontrer M. Landzo dans un cadre
20 très précis, très clairement défini. Etant donné les caractéristiques de
21 sa personnalité, je crois qu'il existe des risques réels que M. Landzo
22 connaisse une régression, qu'il retourne en arrière. Il pourrait se
23 retrouver dans un état semblable à celui qui était le sien en 1996.
24 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous pensez qu'il y
25 aurait un risque accru de tentative de suicide à l'avenir s'il n'y avait
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1 pas de prise en charge psychiatrique ?
2 M. Cowles (interprétation). – Objection, Monsieur le Président,
3 quant à la pertinence de ce type de question.
4 Mme McMurrey (interprétation). – J'abandonne cette question,
5 Monsieur le Président. Je pensais simplement que cette question pouvait,
6 si une réponse y était apportée, sembler utile aux yeux des Juges.
7 Monsieur le Professeur, n'intervenez pas, parce que les Juges ne
8 se sont pas prononcés sur la pertinence de la question.
9 M. Lagazzi (interprétation). - En termes éthiques, je
10 préférerais ne pas apporter de réponse à cette question, je préférerais
11 donner un avis médical sur la question.
12 M. le Président (interprétation) - La période qui nous intéresse
13 ici est la période que l'accusé a passé à Celebici, donc je crois que vous
14 n'avez pas à répondre à cette question car elle n'est pas pertinente pour
15 les faits qui nous intéressent.
16 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur le Président, j'en ai
17 terminé de mon interrogatoire principal. Peut-être que le moment est bien
18 choisi pour faire la pause déjeuner ?
19 M. Jan (interprétation) - Oui parce qu'il y aura contre-
20 interrogatoire. Est-ce que les contre-interrogatoires pourraient être
21 menés à bien avant 13 heures ?
22 Mme McMurrey (interprétation). - Je peux un peu prolonger mon
23 interrogatoire principal si vous le souhaitez ?
24 M. le Président (interprétation). - Si vous n'êtes pas fatiguée
25 Maître, et si vous avez encore quelques points à soulever, allez-y.
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1 Mme McMurrey (interprétation). – Parfait, parfait, j'ai encore
2 des choses à évoquer. En fait, j'avais essayé d'être brève, mais puisque
3 vous me donnez encore quelques minutes…
4 Professeur, j'aimerais que vous nous parliez du
5 troisième rapport en date du 3 juillet 1998. Je sais que dans votre
6 rapport vous avez fait état de certaines conclusions, mais pourriez-vous
7 expliquer aux Juges quelles ont été vos observations ? Vous avez notamment
8 fait état de la différence totale qui existait entre M. Landzo tel que
9 vous l'avez vu récemment et le M. Landzo que vous aviez vu précédemment.
10 M. van Leeuwen a déjà dit des choses sur ce problème, mais je
11 crois que votre point de vue est quelque peu différent ?
12 M. Lagazzi (interprétation). - Pour ce qui est du comportement
13 de M. Landzo et de sa capacité à avoir des relations avec autrui, oui. Le
14 changement est radical entre la situation qui prévalait en 1996, celle qui
15 prévalait en 97 et celle qui prévaut aujourd'hui. A l'époque, c'était une
16 personne vraiment traumatisée qui avait beaucoup de problèmes dès qu'il
17 s’agissait d'établir des contacts avec son environnement immédiat.
18 Et tout ceci m’a poussé à me pencher de très près sur l'état de
19 sa personnalité. Mais aujourd'hui, il semble suivre un modèle très
20 puissant, très fort. Pas aussi fort que le modèle militaire qu'il suivait
21 autrefois, mais très fort tout de même. Là, c'est le modèle de ce procès,
22 dans le cadre d'une instance internationale, modèle qui découle de sa
23 détention dans le quartier pénitentiaire.
24 Le fait qu'il a appris l'anglais, le fait qu'il a demandé à
25 pouvoir suivre des cours. Il s'est adapté à ce cadre international et
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1 maintenant, son approche à l'environnement est très différente. Il veut
2 absolument montrer qu'il est tout à fait à l'aise, qu'il contrôle
3 parfaitement la situation. Il est très gentil, très hospitalier et il
4 donne presque des ordres aux gardes qui l'entourent.
5 Et ce comportement semble montrer qu'il y a un aspect anormal
6 dans sa personnalité. Autrefois, il ne s'adaptait pas à son environnement.
7 C'était un problème, mais aujourd'hui, la façon dont il s'adapte à
8 l'environnement pose problème également. Ce n'est qu’une étape
9 supplémentaire dans le processus d'évolution de sa personnalité.
10 Mais ce n'est en rien une indication qu'il est plus mûr, que sa
11 personnalité est plus mûre. Nous parlons toujours de la même personnalité
12 qui a pris pour modèle quelque chose de différent, en l'occurrence cette
13 structure internationale.
14 Mme McMurrey (interprétation). - Vous me donnez l'occasion de
15 poser une autre question : monsieur Landzo, lors des différents
16 entretiens…
17 M. le Président (interprétation). – Non, nous allons interrompre
18 les débats. Monsieur le Témoin, merci beaucoup, vous allez pouvoir vous
19 reposer. Nous reprendrons nos travaux à 14 heures 30.
20 (L’audience, suspendue à 12 h 00, est reprise à 14 h 45.)
21 Mme McMurrey (interprétation). - Madame Odio Benito, ne vous
22 inquiétez pas, je n'ai plus de questions à poser au témoin.
23 Mme le Greffier (interprétation). - Monsieur, je vous rappelle
24 que vous êtes toujours sous serment.
25 M. le Président (interprétation). - Les conseils de la défense
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1 souhaitent-ils procéder à un contre-interrogatoire ?
2 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur le Président, la
3 défense de M. Delalic n'a pas de questions.
4 M. Olujic (interprétation). - Monsieur le Présidenet, la défense
5 de Zdravko Mucic n'a pas de questions à poser.
6 M. Moran (interprétation). - En revanche nous aurions quelques
7 questions à poser au témoin.
8 M. le Président (interprétation). - Je vous en prie, Maître,
9 vous avez la parole.
10 M. Moran (interprétation). - Bien, je vais commencer. Bonjour,
11 Professeur. Vous avez pu vous reposer pendant la pause déjeuner ?
12 M. Lagazzi (interprétation). - Oui, enfin à peu près.
13 M. Moran (interprétation). - Je ne sais pas si vous avez été au
14 courant de l'alerte au feu qui a été déclarée pendant la pause déjeuner ?
15 Enfin, il ne faut pas s'inquiéter, tout est en ordre. J'ai quelques
16 questions à vous poser. Ce sont des questions d'ordre général pour la
17 plupart.
18 Hier soir, nous avons eu un entretien de cinq ou dix minutes,
19 n'est-ce pas ? Nous avons parlé en termes généraux de ce que vous aviez
20 fait, nous avons échangé quelques plaisanteries, mais c'est la seule fois
21 que nous nous sommes vus, n'est-ce pas ?
22 M. Lagazzi (interprétation). - Oui.
23 M. Moran (interprétation). - Est-ce que vous auriez parlé à
24 quelqu'un de votre déposition pendant la pause déjeuner ? Ou est-ce que
25 quelqu'un vous a parlé de votre déposition ?
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1 M. Lagazzi (interprétation). - En aucun cas.
2 M. Moran (interprétation). - Fort bien. Vous avez peut-être
3 l'impression que je passe du coq à l'âne, mais je vais essayer de suivre
4 tout de même un ordre à peu près digne de ce nom, pour ne pas vous perdre
5 en cours de route.
6 D'après ce que je comprends, il vous manque des informations,
7 n'est-ce pas ? Vous auriez besoin d'autres sources d'informations pour
8 établir certaines conclusions ? C'est M. Landzo qui vous a donné la
9 plupart des informations relatives à son état de santé, à la façon dont il
10 se sentait, n'est-ce pas ?
11 M. Lagazzi (interprétation). - Oui, et notamment s'il me fallait
12 mener à bien un bilan plus complet de la situation, il me faudrait pouvoir
13 discuter plus calmement, plus librement de ce qui est arrivé à M. Landzo.
14 Il faudrait que j'en parle avec lui pour voir comment il s'est senti
15 lorsqu'il a traversé toutes ces expériences.
16 M. Moran (interprétation). - Voyons, est-ce que son avocate vous
17 a donné accès à l'autobiographie que M. Landzo a rédigée au cours des
18 dernières années ?
19 M. Lagazzi (interprétation). - Non.
20 M. Moran (interprétation). - Il s'agit de l'autobiographie
21 d'Esad Landzo rédigée par l'accusé lui-même.
22 M. Jan (interprétation). - C'est la première fois que j'en
23 entends parler.
24 M. Moran (interprétation). - Tous les conseils de la défense
25 sont au courant de l'existence de ce recueil ?
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1 M. Lagazzi (interprétation). - Non.
2 M. Moran (interprétation). - Vous n'avez jamais vu cette
3 autobiographie ?
4 M. Lagazzi (interprétation). – Non.
5 M. Moran (interprétation). - Avez-vous jamais discuté avec ses
6 amis, ses proches à Konjic ?
7 M. Lagazzi (interprétation). - Non.
8 M. Moran (interprétation). - Cela vous aurait été utile
9 pourtant, n'est-ce pas ?
10 M. Lagazzi (interprétation). - Peut-être, oui, mais il aurait
11 fallu que la Chambre m'autorise à pousser l'examen un peu plus loin.
12 M. Moran (interprétation). - Vous savez que le Pr Gripon s'est
13 rendu à Konjic à plusieurs reprises. Vous lui en avez parlé ?
14 M. Lagazzi (interprétation). - J'ai effectivement discuté avec
15 ce collègue que j'ai rencontré pour la première fois dimanche dernier. Je
16 lui ai parlé du résultat de mes tests. Mais je n'ai disposé d'aucune autre
17 information, je n'ai disposé que de quelques informations relatives au
18 personnage de la mère de l'accusé, apparemment la personne la plus
19 importante dans la famille.
20 M. Moran (interprétation). - Voyons d'abord ce que n'est pas
21 Esad Landzo. Vous seriez d'accord avec moi, Docteur, pour dire que
22 M. Landzo n'est pas un psychotique ? Il ne voit pas des serpents sortir
23 des placards, il n'entend pas des voix ?
24 M. Jan (interprétation) – (Inaudible.)
25 M. Lagazzi (interprétation). - Il ne souffre d'aucun trouble
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1 psychotique.
2 M. Moran (interprétation). - Monsieur Landzo sait faire la
3 différence entre le bien et le mal ?
4 M. Lagazzi (interprétation). - Eh bien, il faudrait que je
5 réponde à deux niveaux. Il n'y a pas de troubles psychotiques qui
6 pourraient avoir une influence négative sur sa perception de la réalité,
7 il n'y a pas d'hallucination, mais, du point de vue psychologique
8 maintenant, étant donné son état actuel, parce que je crois que vous
9 faites référence à l'état actuel de l'accusé, ce que je peux dire, c'est
10 que l'accusé est tout à fait apte à suivre les débats.
11 Pour ce qui est maintenant de son habilité à distinguer le bien
12 du mal, du point de vue psychologique toujours, et toujours pour ce qui
13 est de son état actuel, étant donné qu'il n'a pas été fait état de crimes
14 qui auraient été commis, nous parlons ici d'un point de vue plus
15 philosophique que clinique.
16 M. Moran (interprétation). - Ne parlons pas des crimes qui sont
17 reprochés pour l'instant à l'accusé. Monsieur Landzo vous a dit au moins
18 une fois, n'est-ce pas, qu'il avait lancé une grenade à main dans une
19 maison où se trouvaient quelques jeunes filles qui leur avaient tiré
20 dessus avec une mitraillette ?
21 Et lors d'un autre entretien, il a reconnu devant vous qu'il
22 avait frappé et battu certains détenus du camp de Celebici ?
23 M. Lagazzi (interprétation). - Ce dont je me souviens en toute
24 certitude c'est de cet incident avec la grenade à main qui a été jetée
25 dans un appartement, effectivement. Puis ensuite, on m'a dit qu'en fait
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1 l'accusé avait simplement tiré des coups en direction du plafond. Pour ce
2 qui est maintenant de l'autre incident dont vous parlez, le rapport
3 de 1996 en fait état.
4 M. Moran (interprétation). - Ce rapport de 1996 précise qu'il y
5 avait quelques femmes impliquées dans l'incident et dans le rapport
6 de 1998 on parle d'un homme, d'un jeune homme. C'est à la page 6 de la
7 version anglaise de votre rapport.
8 M. Lagazzi (interprétation). - En effet.
9 M. Moran (interprétation). - Si Esad Landzo a reconnu qu'il
10 avait frappé et battu des détenus, et si dans le cadre d'un autre
11 entretien il a reconnu qu'il avait frappé un détenu parce qu'un autre
12 détenu s’était plaint que le premier détenu avait volé son morceau de
13 pain, cela ne serait pas vrai ? Cela se trouve aux pages 5 et 6 du
14 rapport. Est-ce que ce ne serait pas un crime d'agir ainsi ? Est-ce que
15 vous ne seriez pas d'accord pour dire avec moi s'il ne s'agit pas d'un
16 crime… ?
17 M. Lagazzi (interprétation). – Excusez-moi mais il faut vérifier
18 ce que j'écris dans le rapport.
19 M. Moran (interprétation). - Je vais vous lire un des passages.
20 M. Lagazzi (interprétation). – Non, je confirme ce que vous
21 venez de dire. Bien sûr qu'il s'agit de crime, il n'y a pas de doute.
22 M. Moran (interprétation). - Lorsque vous dites qu'il n'a jamais
23 reconnu avoir été l'auteur d'un crime, vous voulez dire qu'il n'a jamais
24 reconnu être l'auteur d'un crime hormis ceux qui consistaient à frapper et
25 à battre des gens ?
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1 M. Lagazzi (interprétation). - Non, ce n'est pas cela que je
2 voulais dire. Je voulais dire qu'il n'a fait référence qu’à certains
3 faits. Nous n'avons jamais discuté de tous les faits qui lui sont
4 reprochés.
5 M. Moran (interprétation). - Je comprends très bien, en tant
6 qu'avocat, et je suis sûr que vous-même, en tant que Juge, vous comprenez
7 très bien pourquoi cela n'a pas été le cas.
8 M. Lagazzi (interprétation). - Absolument.
9 Mme McMurrey (interprétation). – Objection,
10 Monsieur le Président. Est-ce que M. Moran lui-même dépose et donne son
11 avis à la Chambre ?
12 M. le Président (interprétation). - Je ne crois pas que M. Moran
13 nous ait fait part de son opinion, il essayait simplement de savoir si le
14 témoin considérait que tel ou tel agissement était un crime ou pas.
15 M. Jan (interprétation). - Maître Moran.
16 M. Moran (interprétation). – Oui, Monsieur le Juge ?
17 M. Jan (interprétation). – Y a-t-il des éléments qui prouvent
18 que M. Landzo a effectivement commis ces crimes, et y a-t-il des indices
19 qui prouvent que c'est sur l’ordre de votre client que ces crimes ont été
20 commis ?
21 M. Lagazzi (interprétation). - Je crois qu'il y a des éléments
22 de preuve qui existent, auxquels je ne donne aucune crédibilité mais il y
23 a des éléments de preuve relatifs à ces points dans le dossier de
24 l'accusation.
25 M. le Président (interprétation). - Vous avez qualifié ces faits
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1 de crimes, mais c'est en fait ce que l'expert a dit dans son propre
2 rapport, c'est ce que vous êtes en train en tout cas de suggérer. Si
3 effectivement ces faits se sont passés, on peut admettre que cela a été le
4 cas, mais si c'est votre opinion que vous formulez selon laquelle cela
5 s'est produit, alors non, cela ne peut pas faire partie des éléments de
6 preuve que nous sommes en droit d’admettre dans le cadre de votre contre-
7 interrogatoire.
8 M. Moran (interprétation). – Pour les besoins de mon contre-
9 interrogatoire, il m’a semblé que le témoin avait déclaré que M. Landzo
10 n'avait pas reconnu avoir été l'auteur d'un crime et j'ai essayé
11 simplement de suggérer qu'au vu de ce rapport il apparaissait qu'il y
12 avait eu reconnaissance par M. Landzo qu'il avait commis un crime.
13 M. le Président (interprétation). – Oui, ce n'est que dans ce
14 cadre là que de tels arguments peuvent être reçus par la Chambre.
15 M. Moran (interprétation). - Oui, Monsieur le Président, c'est
16 la seule raison pour laquelle j'avance cet argument.
17 M. le Président (interprétation). - Poursuivons.
18 M. Moran (interprétation). – Professeur, dans les systèmes de
19 droit que nous connaissons tous les deux, deux critères sont nettement
20 établis. Il s'agit dans un cas de savoir si quelqu'un est apte à suivre le
21 procès. Est-ce qu’il est apte à comprendre les actes, les charges qui sont
22 retenues contre lui ? Est-ce qu'ils sont à même de comprendre ce que fait
23 leur avocat, etc. ?
24 Et l'autre critère, je n'arrive pas très bien à trouver mes
25 mots, mais c'est le critère d'après lequel il apparaît que l'accusé
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1 n'arrive pas à séparer le bien du mal, ne sait pas si ses actes sont bons
2 ou mauvais.
3 Ils n'arrivent pas à établir un lien entre leurs actes et ce qui
4 peut être bon ou mauvais. Nous sommes d'accord sur ces définitions ?
5 M. Lagazzi (interprétation). - De façon générale, je répondrai
6 que oui, mais je préciserai qu’en Italie nous n'utilisons pas ce concept
7 qui permet à quelqu'un de distinguer le bien et le mal. Nous ne reposons
8 par sur ce type de critères. La loi italienne retient plutôt le principe
9 de capacité atténuée à comprendre et à établir ou plutôt à apprécier la
10 capacité de l'accusé à comprendre exactement ce qu'il fait.
11 Je ne crois pas qu'on peut comparer ce qui se fait en droit
12 italien et ce qui se fait en droit américain.
13 M. Moran (interprétation). – Bien. Monsieur, vous pouvez
14 affirmer avec moi, n’est-ce pas, que M. Landzo sait distinguer le bien du
15 mal. Il sait que c'est mal de voler, il sait que c'est mal de faire
16 d'autres types d'actes répréhensibles ?
17 M. Lagazzi (interprétation). - Aujourd'hui, au vu des
18 caractéristiques psychologiques de sa personnalité et qui l'empêchent dans
19 une certaine mesure de procéder à ce type d'évaluation, je pourrais dire
20 que la réponse à la question peut être oui, mais c'est une réponse qui ne
21 correspond qu'à son état actuel.
22 M. Moran (interprétation). - Vous ne savez rien de son état
23 en 1992, n'est-ce pas ?
24 M. Lagazzi (interprétation). – Non, mais pour ce qui est de son
25 état en 1992, j'ai déjà fait part de mon avis. J'ai dit que, du fait de la
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1 pathologie dont il souffrait du point de vue de sa personnalité, il est
2 probable qu'à l'époque il n'était pas en mesure d'exercer son libre
3 arbitre. Mais bien évidemment, il est possible qu'à cette période cet état
4 l'empêchait de distinguer le bien du mal.
5 M. Moran (interprétation). - Revenons à cette histoire de
6 l'exercice du libre arbitre. Il y a un garde là-bas qui a un pistolet à la
7 hanche. Si moi je prends ce pistolet et que je l’appuie contre votre tempe
8 et que je vous donne à vous un revolver et que je vous dis : "Abattez
9 Me McMurrey.", si vous le faisiez, est-ce que vous agiriez de votre propre
10 gré ? Est-ce que vous exerceriez votre libre arbitre, ou plutôt est-ce que
11 nous pouvons nous mettre d'accord sur le fait que justement, vous ne
12 seriez pas en train d'exercer votre libre arbitre ?
13 M. Lagazzi (interprétation). – Moi, j’essaierais de vous tirer
14 dessus. Ma réaction à moi, ce serait de vous tirer dessus, ce serait
15 l'exercice de mon libre arbitre.
16 M. Moran (interprétation). - Mais si moi je vous disais
17 d'abattre Me McMurrey sous la menace d'un pistolet, vous n'exerceriez pas
18 le libre arbitre ?
19 Mme McMurrey (interprétation). - On confond ici menace,
20 coercition et libre arbitre. Je fais objection à ce type de question.
21 M. Moran (interprétation). - Revenons à votre
22 première rencontre, à votre premier entretien avec M. Landzo en 1996. Vous
23 n'avez pas besoin de vous référer à vos notes, je parle en termes
24 généraux. Précédemment, vous avez déclaré que, lors de cet entretien, son
25 crâne était rasé, il avait un calot militaire sur la tête, et il vous a
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1 dit qu'il détestait les Serbes, qu’il détestait les Néerlandais.
2 M. Lagazzi (interprétation). - En effet.
3 M. Moran (interprétation). - Au vu de ce qui s'est passé en ex-
4 Yougoslavie, vous pourriez être d'accord pour dire que, du point de vue de
5 l'accusé, il n'est pas totalement irrationnel de détester les Serbes,
6 notamment si vous êtes Bosniaque ou musulman de Bosnie. Cela peut paraître
7 normal, n’est-ce pas ?
8 M. Lagazzi (interprétation). - Oui.
9 M. Moran (interprétation). - Mais pour ce qui est des
10 Néerlandais ?
11 M. Lagazzi (interprétation). - Pour ce qui est des Néerlandais,
12 si je me souviens bien de ce qu'il a dit à cette époque-là, il avait un
13 problème, notamment du fait du comportement des Néerlandais pendant la
14 guerre. Je ne me rappelle plus exactement de ce qui a été dit sur ce
15 sujet, il faudrait que je revienne à mes notes.
16 M. Moran (interprétation). - Si je vous disais Srebenica,
17 Docteur, est-ce que cela vous aiderait à retrouver la mémoire ? Srebenica,
18 cela vous dit quelque chose ?
19 M. le Président (interprétation). - Oui Srebenica, cela vous
20 rafraîchit la mémoire ?
21 M. Lagazzi (interprétation). - Peut-être que nous parlons là du
22 comportement des troupes néerlandaises pendant cet incident, mais
23 sincèrement il faut que je consulte mes notes pour voir quel était le
24 contexte qui entourait cette phrase prononcée par M. Landzo. Vous pourriez
25 me renvoyer à une page de mon rapport ?
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1 M. Moran (interprétation). - Non, je ne peux pas vous renvoyer à
2 une page de votre rapport, c'est quelque chose que vous avez dit oralement
3 ce matin, dans le cadre de votre déposition. Si c'est dans votre rapport,
4 en tout cas moi je n'ai pas trouvé de traces.
5 M. Lagazzi (interprétation). - Moi je me souviens qu'il m'a dit
6 qu'il avait des problèmes avec les Néerlandais, que les Néerlandais lui
7 posaient problème. Avec l'autorisation des Juges, je voudrais compulser
8 mon rapport de 1997 et voir si je peux y trouver des références à cet
9 entretien.
10 M. Jan (interprétation). - (Inaudible.)
11 M. Moran (interprétation). - C'est bien possible,
12 Monsieur le Juge. Ma question suivante serait la suivante, dès lors que
13 l'on ne sort pas des limites du raisonnable.
14 Mme McMurrey (interprétation). - Je fais objection,
15 Monsieur le Président. Monsieur Moran a passé bien moins de temps au
16 quartier pénitentiaire que moi, et moi je sais que ces gardes sont parmi
17 les personnes les plus sympathiques qu'il m'a jamais été donné de
18 rencontrer.
19 M. Jan (interprétation). - (Inaudible.)
20 Mme McMurrey (interprétation). - C'est bien possible. Si
21 Me Moran ne fait que demander l'opinion du témoin expert, alors je suis
22 d'accord, mais s'il veut simplement poser des situations hypothétiques, là
23 je fais objection.
24 M. le Président (interprétation). - Tâchons de bien nous
25 entendre. Lorsque le témoin a déclaré dans le cadre de l'interrogatoire
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1 principal, il a dit que l'une des raisons pour lesquelles il était arrivé
2 à certaines de ses conclusions c'est que M. Landzo lui avait dit qu'il
3 détestait les Néerlandais et les Serbes.
4 M. Moran (interprétation). - Tout à fait, Monsieur le Président,
5 votre mémoire est bonne.
6 M. Lagazzi (interprétation). - Effectivement,
7 Monsieur le Président, c'est ce qu'il a dit, mais est-ce que je peux
8 simplement faire remarquer que l'avocat n'a pas pu trouver de références à
9 ces phrases dans mon rapport de 1996 ? Alors que moi, cela apparaît à la
10 page 7 de la version en anglais de mon rapport de 1997. C'est à la
11 troisième ligne de cette page. On parle du massacre de Srebenica à cet
12 endroit du rapport.
13 Et c'est la raison pour laquelle M. Landzo a objecté à
14 l'intervention de M. van Leeuwen parce que M. van Leeuwen est néerlandais.
15 Et quelques phrases plus bas, on voit que l'accusé a précisé qu'il n'avait
16 rien contre les Italiens mais qu'en revanche, il déteste les Néerlandais.
17 M. Moran (interprétation). - Vous dites que l'accusé n'avait
18 rien contre les Italiens, mais en fait est-ce qu'il n'admirait pas
19 Benito Mussolini ?
20 M. Lagazzi (interprétation). - Oui, c'est ce qu'il a dit.
21 M. Moran (interprétation). - Nous parlions de Srebenica. Le fait
22 qu'un Musulman de Bosnie déteste les Néerlandais de façon générale ne
23 paraît pas complètement anormal, n'est-ce pas ? Notamment lorsqu'on
24 connaît ce qui s'est passé à Srebenica.
25 M. Lagazzi (interprétation). - Non, ce n'est pas tout à fait
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1 logique.
2 M. Moran (interprétation). - Ce n'est pas tout à fait logique
3 certes, mais cela ne révèle pas une maladie mentale.
4 M. Lagazzi (interprétation). - Bien sûr, pas nécessairement.
5 M. Moran (interprétation). - Vous avez parlé d'un test tout à
6 l'heure Docteur, il s'agissait du test Rorschach. Est-ce que, Docteur,
7 vous avez procédé également à ce test pour le cas de M. Landzo ?
8 M. Lagazzi (interprétation). - Non, je ne l’ai pas pratiqué sur
9 M. Landzo. Quand j'ai procédé à une première expertise, il y avait un
10 certain nombre de tests, c'était les tests standard et en dernier, le test
11 de Rorschach.
12 M. Moran (interprétation). - Au moment où vous avez interviewé
13 M. Landzo, et si j'ai bien compris ce que vous avez dit ce matin, vous
14 avez dit également qu'il ne s'agissait pas uniquement de lui d'ailleurs,
15 vous avez dit que le patient avait une perception qui était sa propre
16 perception, sa propre vérité de soi-même.
17 M. Lagazzi (interprétation). – Oui, effectivement, c'était notre
18 conclusion, notre attitude, car dans la psychiatrie légale on utilise ces
19 termes. On n'est pas des enquêteurs, nous ne sommes pas des Procureurs,
20 nous ne sommes pas des Juges, mais nous acceptons la vérité subjective et
21 nous faisons la comparaison avec le tableau clinique du patient en
22 question.
23 M. Moran (interprétation). - Je vais revenir à un certain nombre
24 de questions d'ordre général, si vous voulez bien. Ce matin, Docteur, vous
25 avez parlé d'un certain nombre de questions spécifiques et à un moment
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1 donné, si je m'en souviens bien, Me McMurrey vous a demandé de lui décrire
2 l'exemple des chaussures rouges.
3 Votre première réaction c'était qu'il ne s'agissait pas d'une
4 plaisanterie, et elle vous a effectivement répondu : "Non, ce n'est pas
5 une plaisanterie". Un des exemples que vous avez avancés par ailleurs
6 était l'exemple de pédophilie, en d'autres termes, d'un comportement pour
7 le moins bizarre vis-à-vis des enfants.
8 Au moment où vous en avez parlé, quand il s'agissait de
9 maltraiter les enfants, et au moment où ce mauvais traitement, qui était
10 également un traitement abusif sur le plan de la sexualité, c'est
11 également une question de responsabilité personnelle. A ce propos,
12 Docteur, je vais vous demander de me dire si d'après vous la pédophilie
13 est une maladie mentale.
14 M. Lagazzi (interprétation). – Non, ce n'est pas une maladie
15 mentale.
16 M. Moran (interprétation). - Il s'agit de paraphilie, c’est une
17 maladie pathologique, et vous avez parlé de l'exemple de pédophiles et
18 justement vous avez précisé qu'il faisait la distinction entre le bien et
19 le mal.
20 M. Lagazzi (interprétation). – Effectivement, dans un certain
21 nombre de cas, et notamment quand il s'agit de la psychiatrie légale, nous
22 autres en Italie nous contestons le souhait, notamment au niveau où ils ne
23 savent pas se décider entre le bien et le mal mais cela compromet
24 également l'action de libre arbitre.
25 M. Moran (interprétation). – Etes-vous d'accord avec moi si je
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1 dis que rien n'empêcherait les pédophiles de se comporter comme ils se
2 comportent, ils ne s'adressent jamais pour demander de l'aide, par exemple
3 de les séparer des enfants ?
4 M. Lagazzi (interprétation). - Je ne comprends pas tout à fait
5 la substance même de votre question.
6 M. Moran (interprétation). - Mais vous considérez qu'il n'y a
7 rien qui puisse empêcher le pédophile pour s'adresser à un médecin, pour
8 être traité, pour être soigné, etc. ?
9 M. Lagazzi (interprétation). - En gros, c'est vrai, mais dans la
10 réalité je dois constater que nous avons un certain nombre de pédophiles
11 qui sont dépendants réellement et qui pensent que ce n'est pas
12 véritablement un crime et qu'ils ne commettraient rien qui pourrait être
13 désigné comme un crime. Personne ni rien ne peut arrêter le pédophile. Il
14 ne demande pas d'aide ni de traitement médical, ni d'être soigné, etc.
15 M. Moran (interprétation). – En Italie, vous aviez de tels
16 genres de cas et vous avez connu des pédophiles, par exemple, qui ne se
17 sont pas adressés aux médecins pour demander d'être soignés et qui
18 considéraient véritablement que c’était des choses bonnes qu'ils faisaient
19 comme ceci est les cas chez nous ?
20 Mme McMurrey (interprétation). – Objection,
21 Monsieur le Président. Ce qui est le bien ou le mal en Italie ne doit pas
22 automatiquement être bon ou mauvais dans un autre endroit. Il faut faire
23 la distinction entre ce qui est normal et ce qui est anormal, ce qui est
24 un trouble et ce qui ne l'est pas, ce qui est donc pertinent et ce qui ne
25 l'est pas.
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1 M. le Président (interprétation). - Maître Moran, pourquoi ce
2 parallèle ? Pourquoi essayez-vous de parler de la pédophilie ?
3 M. Moran (interprétation). - Mais il parle d'une diminution de
4 la capacité mentale et c'est en corrélation avec la psychopathologie et
5 par conséquent je voulais tout simplement expliquer la notion de ce terme.
6 Si vous considérez que ce n'est pas indispensable, je suis d'accord, on va
7 passer à un autre sujet.
8 M. le Président (interprétation). - D'accord, passons à un autre
9 sujet.
10 M. Moran (interprétation). - Pendant que vous avez préparé les
11 rapports, vous avez pu également consulter le rapport du Dr van Leeuwen,
12 n'est-ce pas ?
13 M. Lagazzi (interprétation). - Effectivement, pendant que je
14 rédigeais mon premier rapport, pendant ce temps-là, je me suis entretenu,
15 comme cela figure d'ailleurs dans mon rapport, avec le Dr van Leeuwen. Il
16 s'agit par conséquent du rapport de 1996.
17 En ce qui concerne le rapport de 97, je ne peux pas vraiment me
18 souvenir de mes conversations avec le Dr van Leeuwen.
19 M. Moran (interprétation). - Je m'en excuse.
20 M. Lagazzi (interprétation). - Pour ce qui est du rapport de 98,
21 ce n'est qu'il y a trois jours que j'ai rencontré le Dr van Leeuwen.
22 M. Moran (interprétation). - Il y avait un certain nombre de
23 témoignages sur les camps de mort où M. Landzo avait soi-disant vu qu'on
24 égorgeait les Croates, qu'on leur coupait la gorge, etc. Dans le rapport
25 du médecin néerlandais, il semble que c'est marqué, même si ce n'est pas
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1 tout à fait clair, qu'il a été mobilisé à la police militaire, tout au
2 moins c'est ce qui a été écrit dans ce rapport, mais ce n'était pas tout à
3 fait précis et il paraît que c'était l'été, en été 91. Il est vrai qu'il y
4 a une description de la situation au mois de juillet ou août,
5 éventuellement, quand il a rejoint l'armée, quand il est allé dans ce
6 centre de formation croate.
7 M. Lagazzi (interprétation). - Je ne sais pas.
8 M. Moran (interprétation). - Si vous ne savez pas, vous pouvez
9 ne pas répondre.
10 M. Lagazzi (interprétation). - Je peux éventuellement vous dire
11 autre chose. Effectivement, j'ai parlé du camp croate uniquement dans le
12 cadre de ma discussion avec M. Landzo. C'est lui qui m'avait parlé de 91.
13 M. Moran (interprétation). - Est-ce que vous savez à quel moment
14 en 91 ?
15 M. Lagazzi (interprétation). - Je vais vérifier mais je peux
16 vous dire avec certitude que c'est M. Landzo effectivement qui m'avait dit
17 qu'au moment où il avait appris que la guerre s'est déclenchée entre les
18 Croates et les Serbes que lui même, ainsi que ses amis ont décidé de
19 s'enfuir.
20 M. Moran (interprétation). - Oui, Docteur. Je vais essayer tout
21 simplement d'apprendre si c'était la première moitié de 91, si c'était
22 mi 91 ou la fin 91.
23 M. Lagazzi (interprétation). - Je ne peux pas vous répondre.
24 M. le Président (interprétation). - N'était-ce pas la même
25 période où il avait travaillé pour Miro ?
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1 M. Moran (interprétation). - Oui, Docteur... était à la galerie
2 au moment où Miro avait présenté ici le témoignage. C'était la question
3 suivante que je voulais poser, Monsieur le Président. C'est vous à ma
4 place qui l'avez posée.
5 Vous avez entendu le témoignage de Miro, vous étiez à la
6 galerie ?
7 M. Lagazzi (interprétation). - Oui.
8 M. Moran (interprétation). - Ceci ne pouvait pas arriver après,
9 dans la deuxième moitié de l'année en question ?
10 Mme McMurrey (interprétation). - Objection,
11 Monsieur le Président. Il a dit qu'il ne pouvait pas se rappeler
12 exactement de la date quand il avait commencé à travailler pour lui, par
13 conséquent cela ne peut pas être une preuve.
14 M. le Président (interprétation). - Ce qu'il avait dit, c'est
15 qu'il ne savait pas exactement de quelle date il s'agissait, il savait que
16 c'était l'été 91, mais il n'était pas sûr de la date et quand M. Landzo
17 était parti, quand il a rejoint l'armée, mais il savait que c'était à peu
18 près en 92 et il avait même parlé de juin 92.
19 M. Moran (interprétation). - Je pense qu'il avait parlé à
20 deux reprises et qu'il avait dit que c'est la deuxième moitié de 92 qu'il
21 avait travaillé pour ce monsieur.
22 M. Moran (interprétation). - Docteur, vous avez parlé par
23 ailleurs que Landzo souhaitait jouer un rôle du soldat parfait. Est-ce que
24 vous vous en souvenez ?
25 M. Lagazzi (interprétation). - Oui.
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1 M. Moran (interprétation). - Vous avez dit par ailleurs qu'il
2 avait été inspiré d'un certain nombre d'exemples des gens qui étaient
3 proches, qui lui ont été proches, qui n'étaient pas des soldats, qu'on
4 pourrait qualifier comme des soldats idéaux.
5 M. Lagazzi (interprétation). - Oui, c'était mon hypothèse.
6 M. Moran (interprétation). - Est-ce que c'était raisonnable de
7 supposer qu'il était un soldat parfait, John Wayne ou Rambo, par exemple ?
8 Mme McMurrey (interprétation). - Objection,
9 Monsieur le Président. Il y a une spéculation ici. Et je suis sûre que le
10 docteur ne peut pas dire ce qu'il a vu exactement.
11 M. Jan (interprétation). - Mais il y avait des héros dans
12 l'histoire bosniaque, pourquoi citer les héros américains ?
13 M. Moran (interprétation). - Mais avant de commencer cette
14 question et de la poser, j'ai demandé. Quelques-uns de mes amis bosniaques
15 prétendaient que Rambo et John Wayne étaient très connus en Bosnie.
16 M. Jan (interprétation). - Mais John Wayne est un peu trop vieux
17 pour Landzo.
18 M. Moran (interprétation). - Vous voulez dire que je suis un peu
19 trop âgé ? Mon épouse serait très affligée de vous entendre dire cela. Par
20 conséquent, si c'est John Wayne dont on parle, elle va le regarder dans la
21 nuit.
22 M. Moran (interprétation). - Est-ce que cette idée au sujet du
23 soldat parfait est une idée qui vous est proche, Docteur ? Est-ce que vous
24 avez une idée, quel était son modèle ?
25 M. Lagazzi (interprétation). - Non, j'ai peur que je ne peux
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1 absolument pas vous dire quel était son modèle, quelle était sa projection
2 directe. Ce que je peux vous dire c'est qu'il m'avait effectivement
3 répondu qu'il souhaitait être un soldat parfait.
4 M. Moran (interprétation). - Qu'est-ce que c'est qu'un soldat
5 parfait, cela dépend probablement de la personne en question ?
6 M. le Président (interprétation). - Je pense que ce n'est plus
7 indispensable d'abuser du temps du docteur, Maître Moran, car on essaie,
8 cela suffit.
9 M. Moran (interprétation). - Eh bien, vous avez parlé de la
10 personnalité dépendante et vous avez dit également qu'il lui a été
11 indispensable de s'identifier à une structure qui était beaucoup plus
12 puissante par rapport à lui, qu'il a été attiré également par l'uniforme
13 et le fait de porter les armes, etc.
14 M. Lagazzi (interprétation). - Si, effectivement, je confirme ce
15 que j'avais déjà dit.
16 M. Moran (interprétation). - L'armée par conséquent était
17 l'endroit où il voulait aller ?
18 M. le Président (interprétation). - Pourquoi toutes ces
19 questions, Maître ?
20 M. Moran (interprétation). - C'est pour diagnostiquer la maladie
21 de M. Landzo.
22 M. le Président (interprétation). - Tout se tient. Tous ces
23 facteurs-là nous ont conduits à une conclusion car il y avait un certain
24 nombre de facteurs et d'éléments avant d'arriver à la conclusion.
25 M. Moran (interprétation). - Docteur, je pense que votre
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1 hypothèse principale se fondait sur la personnalité de M. Landzo que vous
2 avez qualifiée comme une personnalité dépendante. Il y a bien évidemment
3 d'autres éléments qui se sont joints, comme le stress post traumatique, le
4 comportement impulsif, un aspect narcissique.
5 M. Lagazzi (interprétation). - Je le confirme.
6 M. Moran (interprétation). - Est-ce que quelqu'un qui est
7 dépendant c'est exactement comme toute autre personne qui se trouve dans
8 une maison de détention entourée des gardes, par exemple ? Est-ce que vous
9 pensez que c'est une personne qui véritablement prend des décisions ? Est-
10 ce que c'est une personne que l'on pourrait qualifier de dépendante parce
11 qu'elle prend les décisions à un moment donné ?
12 M. Lagazzi (interprétation). – Non, je ne le dirais pas. Je
13 pense que la personnalité dépendante est une personnalité qui agit
14 différemment et pas de cette manière-là.
15 Au lieu de prendre la personne telle que vous la décrivez, pour
16 moi la personne dépendante est la personne qui essaie d'obtenir un
17 traitement tout à fait spécifique dans une situation particulière. Par
18 conséquent, une personne qui veut contrôler la situation, qui par moment
19 également critique les gardes de sécurité tout en étant gentil vis-à-vis
20 d’eux ne manquerait pas de cohérence et ne pourrait pas se confondre avec
21 la personnalité dépendante.
22 M. Lagazzi (interprétation). - Personnellement, je ne suis pas
23 de votre avis car je pense qu'il s'agit d'une personne qui a une
24 composante narcissique très aiguë. C'est la raison pour laquelle le modèle
25 de la personne dépendante doit être mis en corrélation avec l'aspect
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1 narcissique.
2 Lui, il est égocentrique, il vaut être un protagoniste dans une
3 situation où il se retrouve. Par conséquent, vous avez des aspects
4 narcissiques, des aspects dépendants et ensuite, vous arrivez au
5 comportement que vous venez de décrire, Maître. En d'autres termes, il est
6 dépendant.
7 M. Moran (interprétation). - Il est dépendant et je pensais que
8 ce qui lui manque c'est la conscience qu'il a besoin d'être aidé pour
9 exécuter un certain nombre de tâches. Est-ce que, quand vous parlez de ce
10 genre de personnes, vous parlez des personnes qui manquent de confiance ou
11 qui en ont trop ? Personnellement j'ai pensé à des personnes qui manquent
12 de confiance. Il s'agit d'un trait de caractère propre également au DSM-
13 IV, la version anglaise, page 666.
14 M. Lagazzi (interprétation). - Vous avez raison de le dire,
15 c'est exact. Mais en même temps, j'aimerais attirer votre attention sur le
16 fait que les critères DSM-IV, les critères qui parlent de la dépendance,
17 sont au nombre de cinq, peut-être même plus, jusqu'à huit. Cet aspect de
18 dépendance n'est pas le plus important et le plus évident, toujours est-il
19 que c'est une personne qui est capable d'exécuter les ordres et il les
20 exécute.
21 M. Moran (interprétation). - Il exécute et de cette manière-là
22 il arrive à une satisfaction. Nous pouvons donc commencer par ces
23 décisions. Est-ce que vous pensez que M. Landzo a des difficultés ou pas
24 pour exécuter un certain nombre de tâches sans demander l’avis des
25 autres ?
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1 Je vais vous proposer également de réfléchir sur une autre
2 situation où vous avez quelqu'un, par exemple, qui doit prendre les
3 décisions mais qui ne peut pas les prendre automatiquement et tout seul et
4 qui se consulte quand même avec son entourage.
5 M. Lagazzi (interprétation). - En ce qui concerne le critère
6 n° 2, je pense qu'il ne peut pas véritablement s'adresser toujours aux
7 autres pour prendre une décision.
8 M. Moran (interprétation). - Mais vous décrivez Esad Landzo et
9 vous parlez également d'un certain nombre de situations dans lesquelles il
10 n'avait pas besoin d'être contrôlé et surveillé et qu'il pouvait prendre
11 sa propre décision sans exécuter les ordres des autres.
12 M. Lagazzi (interprétation). - Est-ce que je peux donc vous
13 donner la réponse ? Je pense que toutes ces caractéristiques peuvent... se
14 trouvent dans la personnalité de M. Landzo et ceci à cause de sa
15 personnalité mixte tout à fait spécifique. Donc toutes ces qualités se
16 joignent également à l'aspect narcissique de sa personnalité. Tous les
17 critères qui ont été démontrés dans le cadre de DSM-IVsont exacts mais
18 nous parlons d'une même personne, nous parlons du fait que vous trouvez
19 dans une même personne des éléments différents.
20 Et vous avez un élément qui apparaît plus ou moins à travers sa
21 personnalité, le critère n° 1 par exemple, les difficultés de prendre les
22 décisions quotidiennement, par exemple. Et ceci sans avoir à faire appel à
23 d'autres personnes qui sont dans son entourage.
24 Nous avons devant nous la personne qui doit être confirmée par
25 les autres, mais si nous traduisons cela par l'aspect narcissique qui est
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1 présent chez M. Esad Landzo, comme ceci a été démontré par des résultats
2 obtenus grâce aux tests, nous pouvons lier cet élément avec le terme
3 "dépendance totale de la personne". Je vais m'expliquer de manière plus
4 précise. Si vous devez imiter en permanence les personnes, si vous devez
5 être rassuré en permanence par les personnes qui sont de votre entourage,
6 si vous dépendez à tel point d'une personne ou de plusieurs personnes,
7 dans ce cas-là vous n'êtes pas obligé de demander à l'extérieur l'aide, et
8 il y a ce critère qui a été satisfait.
9 Je peux également prendre l'exemple d'autres critères et vous
10 expliquer en détail ce que je vous ai déjà précisé.
11 M. Moran (interprétation). - Pardon, Docteur, mais je m'y perds.
12 Je me penche, moi, sur quelqu'un qui souffre de troubles de la
13 personnalité. C'est une personne qui a du mal à prendre les décisions
14 quotidiennes. C'est quelqu'un qui souhaite que les autres assument la
15 prise de décision pour ce qui est des événements qui vont marquer sa
16 propre vie.
17 Et puis il y a la personne qui souffre d'un problème
18 narcissique, et moi je vois que dans ce cadre une personne souffre d'un
19 ego énorme. Il exagère tout ce qu'il arrive à faire, l'importance de ce
20 qu'il arrive à faire. Il se reconnaît lui-même comme étant la personne la
21 plus à même de réaliser certaines choses. Il pense qu'il a des
22 possibilités de succès illimitées.
23 Franchement, Docteur, je ne vois pas comment réconcilier ces
24 deux personnalités. Comment est-ce qu'en même temps une personne peut
25 penser qu'elle n'est pas à même de prendre des décisions quotidiennes, et
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1 penser qu'elle a d'autre part cette importance absolue, cette arrogance
2 dans tout ce qu'elle fait, dans tout ce qu'elle entreprend ? Comment est-
3 ce que ces deux extrêmes seraient conciliables ? Vous voyez où j'en
4 viens ?
5 M. Lagazzi (interprétation). - Je comprends parfaitement ce que
6 vous voulez dire. Tout ce que je puis vous dire c'est que moi-même et mes
7 collègues, dont le Pr van Leeuwen que vous avez entendu s'exprimer ici,
8 que moi-même et mes collègues donc nous en sommes arrivés à cette
9 conclusion après avoir mené à bien certains examens, certains tests, tests
10 réalisés sur une seule et même personne.
11 Il s'agit d'un cas très particulier, comme je l'ai dit
12 précédemment. Nous avons établi que M. Landzo avait cette personnalité
13 dépendante et ceci est dû à ce composant narcissique qui est apparu
14 antérieurement. Si on essaie toujours d'établir des étiquettes, si on
15 essaie toujours de s'en tenir aux critères établis dans le DSM-IV et si on
16 se penche sur ces critères individuellement, c'est vrai qu'il apparaît
17 qu'il y a des points qui ne sont pas réconciliables.
18 Mais si on se fonde sur ces critères du DSM-IV, sur d'autres
19 manuels de psychiatrie, si on se base plus sur ces critères que sur notre
20 capacité à établir nous-mêmes un diagnostic, alors on s'aperçoit qu'en
21 fait tous ces facteurs sont interdépendants, sont liés les uns aux autres.
22 Bien sûr, c'est une personnalité paradoxale, bien sûr qu'il
23 semble paradoxal qu'on puisse être à la fois dépendant et narcissique,
24 mais en l'occurrence, ces éléments sont étroitement reliés aux
25 caractéristiques d'une personnalité dépendante. C’est ça qui fait dire à
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1 M. Landzo "Je veux être un soldat idéal". Là, nous avons une personne qui
2 est devenue dépendante de la structure internationale dans laquelle il se
3 trouve, dépendant du cadre que constitue sa cellule, la prison dans
4 laquelle il se trouve, etc.
5 Nous avons quelqu'un qui est ouvertement dépendant vis-à-vis
6 d'autres personnes. Une personne qui demande l’avis des gardes, l’avis de
7 nombreuses personnes. L'accusé se plaint auprès des gardes, mais il se
8 sent partie intégrante de cette structure. Je vous l’ai dit, c’est un cas
9 éminemment complexe et une situation très particulière. Mais je peux vous
10 affirmer que tout cela est vérifié du point de vue clinique.
11 M. Moran (interprétation). - Monsieur Landzo n'aime pas la
12 prison, n’est-ce pas ? Il préférerait ne pas se trouver en prison, n'est-
13 ce pas ?
14 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur le Président, nous
15 suivons très difficilement les débats parce que nous avons l’alarme qui
16 nous vient dans les écouteurs. On est très déconcentrés.
17 M. Moran (interprétation). - Il y a un problème avec mon
18 ordinateur. Peut-être que c'est mon ordinateur qui fait ce bruit.
19 Effectivement, il semble y avoir un problème technique,
20 Monsieur le Président.
21 M. le Président (interprétation). - Est-ce que vous êtes à même
22 d'indiquer quel est le problème ?
23 Mme Residovic (interprétation). - Le bruit s'est arrêté,
24 Monsieur le Président.
25 M. le Président (interprétation). - Bien, merci.
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1 M. Moran (interprétation). - Je vais poursuivre.
2 M. Jan (interprétation) - Où en venez-vous exactement ?
3 M. Moran (interprétation). - Ne vous inquiétez pas
4 Monsieur le Juge, nous y arrivons. Comme je le disais, M. Landzo n'aime
5 pas la prison, n’est-ce pas ? Il préfère être libre ?
6 M. Jan (interprétation) - Bien sûr que tout le monde préfère
7 être libre. Il n’y a rien de particulier, cela n’indique pas un trouble
8 mental.
9 Mme McMurrey (interprétation). - Je crois que le Pr Lagazzi peut
10 vous apporter une explication un peu différente. En fait, je crois que
11 cette question est très pertinente dans le cadre de la défense de
12 M. Landzo.
13 M. le Président (interprétation). - Vous pouvez poser cette
14 question, Maître Moran.
15 M. Moran (interprétation). - Monsieur Landzo souhaite être
16 libre, n'est-ce pas, Docteur ? Et pour être libre, il est prêt à beaucoup
17 de choses, n'est-ce pas, pour pouvoir sortir de prison ? Je vais vous
18 donner un exemple. Les premières fois où vous l'avez vu en 1996…
19 Mme McMurrey (interprétation). - Objection,
20 Monsieur le Président. Maître Moran a demandé si M. Esad Landzo souhaitait
21 sortir de prison, mais il n'a pas laissé au professeur le temps de
22 répondre.
23 M. Moran (interprétation). - Je croyais que je lui avais laissé
24 le temps de répondre.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Ce n'est pas le cas.
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1 M. le Président (interprétation). - Je ne comprends pas du tout
2 la stratégie dont je suis le témoin en ce moment même. Lorsque le témoin
3 se voit poser une question, il faut qu'il y répondre. Et une fois que le
4 témoin a répondu vous pouvez reposer une autre question, mais attendez la
5 réponse Maître Moran.
6 M. Moran (interprétation). - Alors je vais lui donner le temps
7 de répondre.
8 M. Lagazzi (interprétation). - Merci. Je crois qu'actuellement
9 M. Landzo considère l'unité de détention des Nations Unies, il ne s'agit
10 pas de n'importe quelle prison, comme un tremplin si vous voulez, un
11 tremplin qui lui permettra peut-être de passer un certain temps en prison
12 aux Etats-Unis, qui lui permettra peut-être de suivre des cours d'une
13 université américaine et qui lui permettra peut-être à terme de s'établir
14 quelque part.
15 Donc, pour l'instant M. Landzo a des sentiments assez peu
16 négatifs vis-à-vis de la prison. En tout cas, bien moins négatifs que la
17 grande majorité des détenus dans ce monde.
18 M. Moran (interprétation). - Cette perception qu'il a de
19 l'avenir est-elle bien rationnelle ?
20 M. Lagazzi (interprétation). – Non, à mon avis, non.
21 M. le Président (interprétation). - Même aux vues des
22 circonstances dans lesquelles se trouve l'accusé, vous ne pensez pas que
23 c'est une attitude rationnelle ?
24 M. Lagazzi (interprétation). - Je ne crois pas que cela soit un
25 raisonnement rationnel. En fait, M. Landzo sous-estime la situation dans
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1 laquelle il se trouve actuellement. Il l'a sous-estime même gravement. Il
2 sous-estime les implications pénales de sa situation. Je crois qu'en fait,
3 d'une certaine façon, il ne se rend pas compte qu'il est en prison. C'est
4 du moins ce que laisse supposer son comportement.
5 Moi j'ai l'impression, je n'exprime ici que mon avis personnel,
6 j'ai l'impression donc que dans une certaine mesure, lorsque nous-mêmes
7 nous nous déplaçons dans ce bâtiment, nous nous déplaçons, nous sommes
8 entourés de gardes, nous avons une mission à accomplir et nous souhaitons
9 l'accomplir. Eh bien, j'ai l'impression que M. Landzo se voit comme étant
10 lui aussi acteur de cette situation générale. Il ne se considère pas comme
11 un détenu, il se voit plutôt comme un protagoniste qui a quelque chose à
12 accomplir.
13 M. Moran (interprétation). - D'où est-ce qu'une personne comme
14 Esad Landzo pourrait tirer l'idée qu'à la fin de son procès il pourrait
15 aller aux Etats-Unis pour passer un peu de temps dans une prison fédérale,
16 puis aller suivre les cours d'une université, ensuite s'établir et vivre
17 une vie heureuse ?
18 M. Lagazzi (interprétation). - Je ne sais pas.
19 Mme McMurrey (interprétation). - Aucune pertinence, ça n'a
20 aucune pertinence. Objection, Monsieur le Président.
21 M. Jan (interprétation). - C'est parfaitement inutile.
22 M. Moran (interprétation). - Venons-en maintenant au diagnostic.
23 Entrons dans le vif du sujet. Pouvez-vous corroborer que votre
24 premier diagnostic a été celui d'un syndrome de stress post traumatique,
25 découlant de l'expérience traversée par l'accusé dans le cadre d'un camp
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1 de formation militaire croate ?
2 M. Lagazzi (interprétation). - Effectivement.
3 M. Moran (interprétation). - Et n'avez-vous pas dit à la page 8
4 de votre rapport, votre rapport le plus récent, n'avez-vous pas dit que
5 l'examen le plus récent que vous aviez effectué permettait de réduire
6 l'importance que l'on pouvait assigner à ce syndrome de stress
7 post traumatique ?
8 M. le Président (interprétation). - Venez-en au fait s'il vous
9 plaît, au but.
10 M. Moran (interprétation). - Est-ce que vous avez des éléments
11 de preuve qui vous permettent de supposer qu'il souffrait déjà de ce
12 syndrome en 1992 ? Est-ce qu'il en souffrait au point qu'il n'était plus à
13 même d'exercer son libre arbitre ? Est-ce que vous disposez d'éléments de
14 preuve autres que ceux qui vous ont été fournis par l'accusé lui même ?
15 M. Lagazzi (interprétation). - Les faits dont nous disposons
16 sont ceux dont l'accusé lui-même nous a fait part. Mais je me fonde
17 également sur les examens que je lui ai fait passer, sur les examens que
18 mes collègues lui ont fait passer. Je rappelle que moi-même et mes
19 collègues sommes arrivés aux mêmes conclusions, au même diagnostic.
20 Maintenant pour ce qui est du syndrome de stress
21 post traumatique, moi je pense que ce diagnostic a été établi sur la base
22 du fait qu'il y avait un trouble qui existait antérieurement. Ce syndrome
23 de stress post traumatique n'est pas le facteur essentiel. Pour moi, ce
24 qui caractérise la vie de M. Landzo depuis sa naissance ce sont les traits
25 de sa personnalité qui ont à voir avec une dépendance totale et avec le
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1 narcissisme.
2 Nous avons également entendu dire qu'il s'agissait d'un cas
3 limite du point de vue de la personnalité, qu'il y avait aussi là un cas
4 de psychodynamisme. Et c'est vrai que ces éléments peuvent être utiles,
5 mais moi ce ne sont pas des éléments sur lesquels je me suis reposé pour
6 poser mon diagnostic. Moi, je crois que les caractéristiques principales
7 de ce cas sont le narcissisme et la personnalité dépendante. Ces traits,
8 nous les retrouvons tout au long de la vie de l'accusé.
9 Sur la base des faits de 1991, on peut dire que ce syndrome de
10 stress post traumatique est venu s'ajouter aux éléments qui existaient
11 déjà. Mais sur la base des informations dont j'ai pu disposer, j'ai
12 rassemblé un certain nombre de données qui découlent des examens cliniques
13 que j'ai menés à bien, et qui découlent également de ce que M. Landzo lui-
14 même a dit. S'il n'y avait pas eu de camp de formation, alors j'aurais
15 changé entièrement mes conclusions, mais j'ai essayé de travailler sur la
16 base de ce que j'ai pu observer, de ce que nous avons pu observer, moi-
17 même et mes collègues.
18 M. Moran (interprétation). - Votre patient est, à l'heure
19 actuelle, détenu et il se peut qu'il passe une bonne partie de sa vie
20 entre les quatre murs d'une cellule. Vous êtes d'accord ?
21 M. Lagazzi (interprétation). - C'est possible, effectivement.
22 M. Moran (interprétation). - La question, n'est-ce pas, est
23 entre les mains de ces trois Juge que vous avez devant vous ? Le sort de
24 M. Landzo est entre leurs mains, pas entre vos mains ni entre les
25 miennes ?
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1 Vous avez en face de vous un homme qui, en 1996, réagissait de
2 telle façon dans le cadre des examens psychologiques, de telle façon qu'il
3 semblait être psychotique. Il apparaissait au vu de son comportement qu'il
4 ne pouvait pas suivre les débats du procès, c'est bien exact ?
5 Et puis, ce même homme en 1998, grâce apparemment à des soins
6 psychologiques, souligne le fait qu'il n'est pas fou, souligne qu'il n'a
7 jamais voulu simuler quoi que ce soit, qu'il n'a jamais voulu simuler une
8 difficulté à s'orienter du point de vue spatio-temporel.
9 Est-ce qu’il a dit cela parce qu'en 1996 personne n'a voulu
10 croire à son histoire ? Est-ce qu’il a fait cela parce qu'il a pensé
11 qu'une histoire différente pourrait peut-être mieux le servir, mieux
12 servir ses intérêts ?
13 M. Lagazzi (interprétation). - Il faut qu'une chose soit très
14 claire. Si je me rappelle bien, il a admis le fait qu'il avait simulé
15 certains troubles en 1996 lors de nos entretiens. C'est ce dont je crois
16 me rappeler. J'espère que je ne me trompe pas et il faut que je puisse
17 consulter mon dernier rapport.
18 M. Moran (interprétation). - C'est à la page 3,
19 quatrième paragraphe à partir du bas de la page.
20 M. Lagazzi (interprétation). - Voilà précisément : il dit qu'il
21 n'est pas fou.
22 M. Moran (interprétation). - Il dit qu'il n'a jamais simulé un
23 trouble de l'orientation spatio-temporelle. Peut-être qu'il y a eu erreur
24 de traduction.
25 M. Lagazzi (interprétation). – Excusez-moi, Maître, mais donnez-
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1 moi trois minutes. Je veux absolument lire le rapport original.
2 M. Moran (interprétation). - Vous avez raison, si c'est une
3 erreur de traduction, nous pouvons simplement biffer l'erreur d'un coup de
4 crayon.
5 M. Lagazzi (interprétation). - J'ai sous les yeux le texte de
6 mon rapport, le texte original en italien. Je vais lire le passage qui
7 nous intéresse, l'accusé exprime un avis critique vis-à-vis de la
8 stratégie de défense qui a été adoptée par son premier avocat. Il souligne
9 le fait qu'il a simulé certaines choses lors des examens psychiatriques,
10 qu'il a simulé ce problème d'orientation spatio-temporelle parce que c'est
11 ce qu'on lui a recommandé de faire.
12 M. Moran (interprétation). – Donc, il y a bien une erreur de
13 traduction. En fait, l'accusé a pensé qu'il fallait simuler la folie pour
14 avoir des chances de sortir de prison en 1996, c'est cela ?
15 M. Lagazzi (interprétation). - D'après ce que l'on m'a dit
16 en 1998, c'est son premier conseil de la défense qui lui a suggéré
17 d'adopter ce type de comportement, mais je ne peux pas mettre une date
18 précise sur cela.
19 M. Moran (interprétation). – Mais, vous n'avez pas, n'est-ce
20 pas, été dupe de cette simulation, jamais vous n'avez pensé qu'il était
21 fou ?
22 Mme McMurrey (interprétation). – Objection,
23 Monsieur le Président. Ici, on essaie de savoir non pas si l'accusé est
24 fou comme le dit Maître Moran, on essaie de savoir si l'accusé était à
25 même de suivre les débats de ce procès.
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1 Il y a une grande différence entre ces deux éléments et je
2 voudrais absolument qu'on arrête de dire que l'accusé est fou ou n'est pas
3 fou, c'est un emploi d'expression auquel je ne souscris pas et ce n 'est
4 pas une expression scientifique. Le docteur ne peut pas réagir à ce type
5 d'utilisation de ces termes.
6 M. Moran (interprétation). - Dans le rapport de 1997, le rapport
7 du 9 janvier 1997 qui est la pièce de la défense 67/4, à la question n° 2,
8 on lit : "Est-ce que l'état mental de l'accusé à l'époque des événements a
9 influé sur sa capacité à comprendre la nature répréhensible de sa conduite
10 présumée ? Est-ce que son état a eu une influence sur son comportement et
11 si la réponse est oui, dans quelle mesure ?" Et dans ce rapport on utilise
12 le mot "fou".
13 J'essaie d'être bref, Monsieur le Juge.
14 M. Jan (interprétation). - On n'est pas forcément fou, il y a
15 différents degrés à établir.
16 Mme McMurrey (interprétation). - Pour ce qui est de savoir si
17 l'on agit bien ou mal, on parle plutôt ici non pas de folie, mais plutôt
18 de responsabilité mentale atténuée.
19 M. Moran (interprétation). – Monsieur le Président, est-ce que
20 vous aller autoriser Me McMurrey à déposer elle-même ?
21 M. Jan (interprétation). - Mais c'est parce que vous dépassez de
22 loin ce qui a été soulevé par le conseil de la défense.
23 M. Moran (interprétation). - Mais enfin, il y a une stratégie de
24 défense mise en place antérieurement et qui n'a pas fonctionné. Je pose
25 des questions au professeur relatives à cette stratégie de défense.
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Je fais objection, il n'y a pas
2 eu de ligne de défense antérieure, de stratégie de défense antérieure. La
3 seule ligne de défense qui a toujours été avancée par notre équipe est
4 celle de la responsabilité mentale atténuée.
5 M. Jan (interprétation). – Maître McMurrey essaie de montrer
6 qu'il n'y avait pas d'exercice du libre arbitre. Esad a été poussé à
7 accomplir certains actes par d'autres personnes.
8 M. Moran (interprétation). – Monsieur le Président j'avance
9 qu'en 1996 le premier avocat de l'accusé essayait d'utiliser une stratégie
10 de défense qui reposait sur la folie de l'accusé et en fait, d'ailleurs,
11 je me fonde sur les déclarations de M. Landzo, déclarations faites
12 en 1998.
13 Cette ligne de défense n'a pas marché. Personne n'a été dupe du
14 fait que l'accusé essayait de se faire passer pour fou.
15 M. Jan (interprétation). – Maître Moran, je crois que vous êtes
16 en train de jouer le rôle de l'accusation ici et pas celui d'un conseil de
17 la défense.
18 M. Moran (interprétation). – Monsieur le Président, j'ai
19 quelques rapports avec moi, je les ai lus et ma ligne de défense à moi
20 c'est qu'on ne peut pas dire que mon client a donné des ordres à quelqu'un
21 pour que cette personne commette des actes répréhensibles.
22 Je crois que quelqu'un qui portait le nom de mon client a agi de
23 façon répréhensible.
24 M. le Président (interprétation). - Nous avons nous aussi des
25 rapports sous les yeux. Chacun de ces rapports porte sur des conclusions
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1 relatives à l'état mental de l'accusé. Il y a d'abord la question de
2 savoir si l'accusé est à même de pouvoir rester dans un centre de
3 détention. Ensuite, il y a la question de savoir s’il est apte à suivre
4 les débats de ce procès et enfin il y a la question de la responsabilité
5 mentale de l’accusé, et de cette responsabilité mentale ou pas ? Ce sont
6 les éléments qui sont au cœur de la défense.
7 M. Moran (interprétation). - Effectivement.
8 M. le Président (interprétation). - La ligne de défense qui a
9 été utilisée est celle d'une responsabilité mentale atténuée.
10 M. Moran (interprétation). – Monsieur le Président, je suis de
11 l’avis suivant : un certain nombre de choses ont été faites, un certain
12 nombre d'actes ont été commis. Je n'accuse pas Me McMurrey d'avoir mal
13 travaillé ou mal agi.
14 Mais il y a eu antérieurement certaines choses qui ont été
15 faites afin d'essayer de faire sortir M. Landzo de prison. On a essayé de
16 le faire sortir de prison en disant qu'il n'était pas apte à suivre les
17 travaux du procès.
18 M. le Président (interprétation). - C'est parce que vous
19 présentez les choses de façons très différentes.
20 Mme McMurrey (interprétation). – Objection,
21 Monsieur le Président. Maître Moran essaie de présenter des conclusions au
22 Tribunal mais ce n’est pas la bonne façon de procéder. Maître Moran est en
23 fait en train de déposer devant vous. S'il veut absolument émettre une
24 opinion, qu'il prononce la déclaration solennelle et qu'il vienne à la
25 barre en tant que témoin.
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1 M. Moran (interprétation). - Je ne voulais vraiment pas donner
2 cette impression, je ne voulais pas émettre une opinion et je m'excuse.
3 M. le Président (interprétation). – C’est moi ici qui dirige et
4 pas vous.
5 M. Moran (interprétation). - Je suis tout à fait d'accord avec
6 vous, Monsieur le Président.
7 En 1996, il a été établi que l'accusé était à même de suivre les
8 travaux du procès. Ensuite, il y a eu un travail d'expert qui a permis de
9 savoir si l'accusé était fou ou pas.
10 M. Jan (interprétation). - Mais en quoi cela peut-il vous aider
11 dans le cadre de la défense de l'accusé Delic ?
12 M. Moran (interprétation). – Eh bien, parce que lorsque je lis
13 ces rapports j'y trouve un peu partout le nom de mon client.
14 M. Jan (interprétation). - Vous y trouvez des éléments de preuve
15 à charge pour votre client ?
16 M. Moran (interprétation). - Nous disposons de beaucoup
17 d'éléments de preuve dans ce procès et ces éléments de preuve n'ont pas
18 tous été déposés dans le cadre d'un témoignage fait sous serment.
19 M. le Président (interprétation). – Oui, mais enfin des éléments
20 de preuve contre un accusé qui n'est pas le vôtre, contre un autre accusé.
21 M. Moran (interprétation). - Ce n'est pas exactement à cela que
22 je pensais.
23 M. Jan (interprétation). - Il y a effectivement une déclaration
24 de l'accusé mais ce n'est pas une déclaration faite sous serment contre un
25 autre accusé. Pourtant c'est sur ce type d'argument que vous fonctionnez.
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1 M. Moran (interprétation). – Non, je sais bien que cette Chambre
2 a bien précisé que cette déclaration ne serait pas retenue à la charge de
3 M. Delic.
4 M. Jan (interprétation). - Quand le prochain témoin arrivera,
5 vous pourrez procéder à son contre-interrogatoire.
6 M. Moran (interprétation). - Mais je veux simplement faire état
7 devant cette Chambre du fait qu'au moins une personne a parlé à ce témoin
8 qui est aujourd'hui devant nous, une personne dont les motifs n'étaient
9 pas clairs.
10 M. Jan (interprétation). - Mais c'est vous qui avez mis en avant
11 cet argument selon lequel il y a eu modification des stratégies de
12 défense. Peut-être que les déclarations qui ont été faites par l'accusé
13 relatives à l'autre accusé ne sont pas fiables car en fait le
14 premier accusé a déjà modifié la teneur de ses déclarations. Vous avez
15 déjà rendu cela très clair.
16 M. Moran (interprétation). - Je voulais simplement établir un
17 certain nombre de choses, mais nous allons passer à quelque chose d'autre.
18 Je pense que le diagnostic du Dr Gripon est un diagnostic beaucoup plus
19 raisonnable et j'attendrai qu'il vienne pour en parler.
20 Mme McMurrey (interprétation). – Monsieur le Président, je
21 persiste à penser que M. Moran est en train de déposer. Il vous parle des
22 éléments de preuve qu'il vous a communiqués et moi, pour que tout soit
23 clair, je veux absolument préciser que dans le troisième rapport il n'y a
24 aucune conclusion définitive qui est avancée.
25 M. le Président (interprétation). - Cessez d'intervenir ! Ce
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1 n'est pas ainsi qu'il faut se comporter ! Si ce qu’est en train de dire
2 M. Moran va contre vos intérêts, Maître McMurrey, c'est à la Chambre de
3 première instance d’en décider et de protéger ses intérêts.
4 Mme McMurrey (interprétation). - Mais je vais laisser Me Moran
5 continuer s'il a encore des questions à poser. Simplement, je veux
6 absolument qu'il soit fait état du fait que je pense que certaines
7 questions ne sont pas pertinentes.
8 M. le Président (interprétation). – Maître Moran, vous pouvez
9 poursuivre.
10 M. Moran (interprétation). - Je voudrais surtout que le nom de
11 mon client n'apparaisse pas autant de fois que c'est le cas dans ces
12 rapports. Il apparaît au moins dans l'un de ces rapports. Ensuite, je ne
13 vais pas accepter le fait que Me McMurrey fasse objection sur la base des
14 arguments qu'elle avance.
15 M. le Président (interprétation). - Mais vous anticipez sur ce
16 qui va être dit devant cette Chambre de première instance. La Chambre de
17 première instance ne peut pas intervenir tant qu'elle ne sait pas quels
18 sont les éléments de preuve qui lui seront présentés.
19 M. Moran (interprétation). - Oui, Monsieur le Président. Moi,
20 j'essayais d'obtenir un certain nombre d'informations de la part de ce
21 témoin, mais je peux attendre le témoin suivant, si c'est ce que vous
22 préférez. Je ne vais pas poursuivre.
23 M. le Président (interprétation). - Comme je n'ai cessé de le
24 répéter, ces témoins sont invités à déposer dans le cadre... dans un cadre
25 très précis. On leur demande d'apporter certains éléments de preuve très
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1 précis. Tout ce que vous souhaitez obtenir, par les biais du contre-
2 interrogatoire, doit l'être par le biais du témoin que vous avez devant
3 vous. Il faut que vous respectiez les limites dans lesquelles les témoins
4 déposent.
5 M. Moran (interprétation). - J'essaie de savoir quel est le
6 degré d'expertise de l'avis de ce médecin. Et j'essaie de savoir, d'autre
7 part, sur quoi reposent toutes les conclusions auxquelles il est arrivé.
8 Et moi, ce que je dis surtout, c'est qu'une grande partie de ses
9 conclusions se fondent sur des déclarations qui lui ont été faites par une
10 personne qui est intéressée au premier degré par l'issue de cette affaire.
11 M. le Président (interprétation). - Vous répondez une fois
12 encore aux Juges de cette Chambre, Maître ? Faites attention. Vous avez
13 très clairement établi vos arguments dans le cadre des questions que vous
14 avez posées à ce témoin. La Chambre de première instance prendra en compte
15 ce qui lui paraît utile de prendre en compte.
16 M. Moran (interprétation). - Et c'est parfait. Moi, je pensais
17 agir en bonne et due forme et si je n'ai pas vraiment répondu à vos
18 questions, Monsieur le Président, je m'en excuse.
19 M. le Président (interprétation). - Merci. Nous allons suspendre
20 nos travaux, nous reprendrons à 16 heures 30 et nous poursuivrons le
21 contre-interrogatoire.
22 (L'audience, suspendue à 16 h 00, est reprise à 16 h 40.)
23 M. le Président (interprétation). - Nous allons donc redire à
24 notre témoin qu'il est encore sous serment, à la dame également qui
25 interprète. Vous avez la parole.
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1 M. Cowles (interprétation). - Bonjour, Monsieur le Président,
2 bonjour, Docteur. Vous nous avez dit que pour vous il serait utile de
3 savoir comment M. Landzo a procédé en commettant les crimes, pour pouvoir
4 nous dire, de manière plus précise, à quel niveau de responsabilité on
5 peut le juger, si c'est la responsabilité atténuante ou non.
6 M. Lagazzi (interprétation). - Oui, ce serait utile.
7 M. Cowles (interprétation). - Pour le moment, vous n'avez aucune
8 information, vous ne savez pas comment il a commis les actes criminels
9 en 92 enfin, pendant une période.
10 M. Lagazzi (interprétation). - Non, je ne sais pas. Tout ce que
11 je sais, c'est ce qu'il m'avait dit lui-même concernant un certain nombre
12 d'événements spécifiques, ce que j'ai rédigé dans mon rapport.
13 M. Cowles (interprétation). - Ne sachant pas comment il avait
14 procédé aux crimes, votre point de vue concernant la responsabilité
15 atténuée est une opinion qui est plutôt théorique.
16 M. Lagazzi (interprétation). - J'aimerais me faire comprendre.
17 Il s'agit du point de vue de l'opinion, pas de spéculation. En d'autres
18 termes, il s'agit de mon pronostic, de mon évaluation sur la base de
19 certaines données, sur la base du tableau clinique. Ce qui veut dire qu'il
20 y a eu probabilité et probabilité d'ordre général. Je ne veux pas dire par
21 là que M. Landzo, au moment où il avait donc été l'auteur de ces crimes,
22 qu'il avait la responsabilité atténuée. Ceci devrait être vérifié sur la
23 base des incidents mais moi, en tant que psychiatre légal, ce que je peux
24 dire c'est qu'il y a une probabilité. Il s'agit donc d'une évaluation qui
25 est de l'ordre général et ceci devrait être vérifié ou confirmé.
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1 M. Cowles (interprétation). - Effectivement en Italie, dans le
2 cadre de votre système, de votre profession…
3 Mme McMurrey (interprétation). - Objection,
4 Monsieur le Président. Ce n'est pas pertinent, il n'est pas indispensable
5 en fonction de la législation italienne...
6 M. Cowles (interprétation). - Mais je pose la question
7 d'expertise qui a été faite et qui se lie justement à une expérience en
8 Italie. Est-il vrai que vous coopérez par conséquent avec l'expert, avec
9 la police pour connaître comment il a commis l'acte criminel, pour savoir
10 s'il avait la responsabilité atténuée ou non ?
11 M. Lagazzi (interprétation). - C'est exact.
12 M. Cowles (interprétation). - Votre dernier rapport du
13 3 juillet 98 à la page 14, version anglaise dernier paragraphe, je cite :
14 "Compte tenu que la responsabilité du patient n'a pas encore été définie,
15 etc., etc.". C'est donc à ce paragraphe que nous nous référons, n'est-ce
16 pas, Docteur ?
17 M. Lagazzi (interprétation). – Oui, certainement.
18 M. Cowles (interprétation). - Ceci est tout à fait en rapport
19 avec votre compte rendu du 9 janvier97, la date, 15 novembre 96 la
20 page 13, version anglaise. Votre conclusion porte sur le paragraphe
21 numéro 2 ?
22 M. Lagazzi (interprétation). – Oui, je peux le confirmer. Je
23 peux vous confirmer que c'était une expertise qui nous a permis de voir
24 différemment le patient et d'évaluer la probabilité en ce qui concerne la
25 responsabilité atténuée.
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1 Je vous parle en tant qu'expert neutre. Ceci nous a aidés à
2 comprendre mieux le problème. Nous ne pourrons pas aboutir à une
3 évaluation concrète et le pronostic définitif avant de vérifier une fois
4 de plus avec le patient.
5 M. Cowles (interprétation). - Mais si vous avez des informations
6 sur les événements concrets, est-ce que vous pourrez changer votre point
7 de vue, étant donné qu'à cette époque-là une responsabilité atténuée
8 n'existait pas éventuellement ?
9 M. Lagazzi (interprétation). - Bien sûr. Ceci pourrait se
10 produire. J'ai donné un pronostic général, mais pour pouvoir être tout à
11 fait exact je devrais être également en possession d'un certain nombre
12 d'informations très concrètes.
13 M. Cowles (interprétation). - En d'autres termes, en ce qui
14 concerne les informations concrètes, cela pourrait vous aider pour nous
15 dire s'il avait agi en libre arbitre, s'il avait pu distinguer le bien du
16 mal, s'il pouvait choisir librement ce qu'il faisait, etc. ?
17 M. Lagazzi (interprétation). - Théoriquement, c’est possible.
18 M. Cowles (interprétation). - Par conséquent, il avait des
19 troubles de la personnalité mais ne voulait pas dire qu'il ne pouvait pas
20 faire la distinction entre bien et mal et qu’il pouvait ne pas être sujet
21 à une responsabilité atténuée au moment où il avait exécuté un certain
22 nombre d'actes criminels ?
23 M. Lagazzi (interprétation). - Comme je l'ai déjà précisé
24 auparavant, le rapport, le tout nouveau, celui que je viens de rédiger,
25 met l'accent sur ce qui a été déjà constaté, c'était un résumé de ce qui a
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1 été fait. Et si nous acceptons la définition d'anormalité qui est présente
2 chez la personne en question, à ce moment-là, nous pouvons considérer
3 qu'effectivement nous sommes parvenus à un tel diagnostic à cause d'un
4 certain nombre d'éléments qui étaient en notre possession.
5 Par exemple, vous pouvez être en présence d'un patient
6 schizophrénique. Si un schizophrénique tue quelqu'un tout simplement parce
7 qu'il considère que c'est un monstre et parce qu'il a des hallucinations,
8 etc., à ce moment-là je pense que tout le monde serait d'accord pour dire
9 qu'il n'est pas coupable pour le meurtre qu'il avait commis. Mais si le
10 schizophrène, par exemple, regarde un match de football et il vole des
11 tickets poux rentrer sur le stade, pour regarder le match, il en est
12 responsable, même s'il est schizophrène.
13 En d'autres termes, il a un trouble, un désordre de la
14 personnalité qui est dû à une pathologie, mais en général, nous pouvons
15 dire que ceci influence les décisions qu'ils prennent. Donc, le libre
16 arbitre. En d'autres termes, si nous voyons les événements différents et
17 si nous les observons à ce moment-là, nous allons constater que cela
18 dépend également de l'état général de la personne. Ce n'est qu'à partir de
19 cela que nous pouvons parler de la responsabilité atténuée ou de la
20 responsabilité qui existait, etc.
21 M. Cowles (interprétation). - Si vous connaissez les faits à ce
22 moment-là, vous pouvez constater qu'il était dépendant vis-à-vis des
23 autres ou tout simplement parce que lui-même éprouvait une satisfaction de
24 l'avoir fait ?
25 M. Jan (interprétation). - Il a déjà répondu à cette question.
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1 M. le Président (interprétation). - Vous avez déjà eu la réponse
2 à cette question.
3 M. Cowles (interprétation). - Docteur Lagazzi, est-ce que vous
4 êtes d'accord avec moi si je dis que le diagnostic qui a été établi pour
5 M. Landzo c'est qu'il manipule les gens dans son entourage parce qu'il est
6 narcissique ? Je pense que c'est le Dr Verde qui l'avait dit.
7 M. Jan (interprétation). - (Hors micro.)
8 M. Cowles (interprétation). - Est-ce que vous êtes d'accord avec
9 ce que je viens d'avancer ?
10 M. Lagazzi (interprétation). - Oui, je suis d'accord avec vous.
11 Je pourrais même donner une paraphrase. Moi, je ne suis pas psychanalyste,
12 ce qui est le cas du Dr Verde. Je suis psychiatre, c'est un vocabulaire
13 qui m'est beaucoup plus proche, il est plus concret mais de toute façon il
14 a la même signification.
15 M. Cowles (interprétation). - Il s'agit d'une personne qui est
16 prévenante, qui est gentille, n'est-ce pas ?
17 M. Lagazzi (interprétation). - Là, je ne suis pas d'accord. Je
18 n'abonde pas dans votre sens. Quand on parle de quelqu'un qui est amical,
19 qui est gentil, qui est prévenant, cela veut dire qu'il y a une empathie
20 également entre les personnes, en d'autres termes, les gens qui
21 s'acceptent les uns les autres.
22 Je peux également vous donner un exemple. Vous avez les
23 deux amis qui boivent du whisky ensemble, c'est ce qui les rattache l'un à
24 l'autre. Dans le cas concret, cette personne a un comportement antisocial,
25 mais elle peut être prévenante, elle peut être plus ou moins amicale vis-
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1 à-vis de vous. Mais le psychiatre qui est en sa présence peut tout de
2 suite se rendre compte qu'il y a une agressivité que cet état masque.
3 Par exemple, dans le cas de M. Landzo, il a été très prévenant,
4 il a été gentil. Il voulait discuter avec nous et converser avec nous. Je
5 n'ai jamais véritablement pu déceler un comportement agressif qui est
6 caractéristique pour une personne antisociale. Je n'ai pas remarqué une
7 antipathie (empathie ?), tout simplement parce que le type de problème
8 qu'il présente est tel qu'il n'est pas capable véritablement d'être en
9 liens relationnels avec d'autres personnes. Il peut être correct, il peut
10 être gentil, mais je n'ai jamais senti véritablement de son côté de
11 l'antipathie(empathie ?), comme je l'ai dit. Je n'ai jamais ressenti de
12 l'empathie, tout simplement parce que c'est une personnalité comme cela.
13 Quand il s'agit... des problèmes psychologiques rendent
14 impossible cette relation et cela je l'ai senti dans le contact avec lui.
15 M. Cowles (interprétation). - Toujours est-il que c'était
16 agréable de se trouver en sa compagnie. Vous n'avez pas remarqué qu'il y
17 avait de l'agressivité vis-à-vis de vous ?
18 M. Jan (interprétation). - (Hors micro.)
19 M. Cowles (interprétation). - En 96, il y avait une différence
20 que vous avez ressentie entre 96 et 98 ?
21 M. Lagazzi (interprétation). - Oui, en 96, il a été sans aucune
22 doute beaucoup plus anxieux. Il avait souffert davantage, il avait
23 beaucoup plus de difficultés au niveau de la communication avec les
24 autres.
25 Début 97, nous avons considéré encore qu'il se trouvait dans le
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1 même état, même s'il y avait une certaine amélioration que nous avons
2 constatée.
3 En revanche en 1998, il avait changé apparemment et c'est ce que
4 j'ai marqué dans mon rapport. Nous avons pu constater une attitude
5 différente.
6 M. Cowles (interprétation). - Est-ce que vous avez reçu un
7 certain nombre d'informations, par exemple qu’en 92 l'accusé avait bu de
8 l'alcool, qu'il prenait en même temps des cachets ?
9 M. Lagazzi (interprétation). - Au cours de ma
10 première conversation, il m'avait effectivement dit qu’en 92 il avait pris
11 un certain nombre de cachets, des médicaments, il n'a pas précisé. Il
12 m'avait dit également qu'il prenait un certain nombre de stimulants, peut-
13 être de l’alcool.
14 En 97, il me l’a confirmé et il a dit qu'il buvait à cette
15 époque-là. Après le choc traumatique et le stress traumatique, quand il a
16 vu son ami très proche tué, il a continué à boire parce qu'il a été
17 complètement détruit à l'intérieur.
18 En 98 en revanche, il avait nié tout cela, il avait dit qu'il
19 prenait un certain nombre de cachets. Il n'était pas capable de me dire
20 comment ces cachets s'appelaient. Je pense que c'était du benzodiazodine
21 mais je ne suis pas tellement sûr. Si c'est le médicament en question,
22 c'est un médicament qui provoque des hallucinations et c'est surtout pour
23 dormir.
24 M. Cowles (interprétation). - Mais il l'avait nié ?
25 M. Lagazzi (interprétation). - Il l'avait nié après.
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1 M. Cowles (interprétation). - En 92, il a commis un certain
2 nombre d'activités criminelles.
3 M. Jan (interprétation). – (Hors micro.)
4 M. Cowles (interprétation). - Mais je pense que le docteur peut
5 témoigner.
6 M. Jan (interprétation). - Votre question devrait être orientée
7 vers la responsabilité.
8 M. le Président (interprétation). - Maître Cowles, parlez-nous
9 un peu plus de sa responsabilité.
10 M. Cowles (interprétation). - Il a été influencé par l’alcool.
11 Vous êtes psychiatre, est-ce que vous considérez que ceci aurait pu
12 également l’emmener dans un état de responsabilité atténuée ? Je ne veux
13 pas rentrer en conflit avec vous, Monsieur le Président, mais c'est un
14 expert.
15 Mme McMurrey (interprétation). – Objection, nous avons demandé
16 la responsabilité atténuée d’un côté, et de l'autre côté de la capacité
17 également qui a été réduite.
18 M. Cowles (interprétation). – C’est moi maintenant qui suis
19 confus. Conformément à la règle 57, on parle de la responsabilité
20 atténuée.
21 Mme McMurrey (interprétation). - Les psychiatres parlent de la
22 capacité mentale et non pas de déterminer la responsabilité atténuée.
23 M. Cowles (interprétation). - D'après vous, Docteur, en 92,
24 M. Landzo comprenait-il son comportement ? Pouvait-il distinguer le bien
25 du mal ?
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Objection,
2 Monsieur le Président. Nous ne parlons pas du bien et du mal dans ce
3 prétoire, nous parlons de la capacité restreinte.
4 M. le Président (interprétation). - Mais qu'est-ce que cela veut
5 dire, la capacité diminuée ?
6 Mme McMurrey (interprétation). - C'est la responsabilité
7 diminuée, la responsabilité atténuée.
8 M. le Président (interprétation). - Par conséquent, il ne s'agit
9 pas de la capacité, il s'agit de la responsabilité. Est-ce que vous voulez
10 bien répondre à cette question, Docteur ?
11 M. Cowles (interprétation). - Docteur, si vous voulez bien
12 répondre à cette question.
13 M. Lagazzi (interprétation). - Pouvez-vous me reposer la
14 question, s'il vous plaît ?
15 M. Cowles (interprétation). - Excusez-moi, je vais vous la
16 répéter.
17 M. Lagazzi (interprétation). - Je vois de quoi vous parlez. Je
18 pense effectivement qu’en 92 M. Landzo était parfaitement capable de faire
19 la distinction entre le bien et le mal et que son comportement le
20 prouvait.
21 En 1992, à ma connaissance, et une fois de plus, c'est à titre
22 général que je parle, nous avons parlé de la période qu’il avait passée à
23 Celebici, dans le camp de Celebici. En ce qui concerne cette période que
24 l'accusé avait passée dans le camp de Celebici, je pourrais dire qu'il
25 avait de très, très grandes difficultés de distinguer le bien du mal.
Page 13924
1 En revanche, si nous parlons de la personnalité dépendante et
2 j'en ai déjà parlé, j'ai dit que c'est notre pronostic, et qu'il est
3 indispensable également de disposer d'autres facteurs pour pouvoir en
4 tirer une conclusion définitive. Je pense qu'il avait obtenu un certain
5 nombre d'ordres, qu'il avait exécuté ces ordres, qu'il allait être
6 récompensé pour l'exécution de ces ordres, et dans de telles conditions,
7 il y avait la difficulté de distinguer le bien et le mal. C'était de toute
8 façon une responsabilité restreinte.
9 M. Cowles (interprétation). - Nous devions revenir à des
10 événements très concrets ?
11 M. Lagazzi (interprétation). - Oui.
12 M. Cowles (interprétation). - Vous ne possédez pas ces
13 informations, mais vous considérez qu'il n'était pas capable d'agir en
14 libre arbitre disons, pendant deux mois, trois mois, l'été 92 ?
15 Est-ce qu'il a été tout simplement une marionnette qui avait
16 subi l'influence très forte de quelqu'un, d'après vous, Docteur ?
17 M. Lagazzi (interprétation). - Excusez-moi, mais je vais tout
18 d'abord vous dire la manière dont j'ai travaillé. Tout d'abord, j'avais un
19 certain nombre d'éléments cliniques. Nous avons constaté le trouble
20 pathologique de la personnalité. J'ai la définition juridique également
21 qui porte sur la normalité de la personnalité, comme une cause possible de
22 la responsabilité atténuée. C'est ce qui m'avait donc conduit à vous dire
23 que, si les deux éléments sont cumulés, à ce moment-là, il y a une
24 probabilité de responsabilité atténuée. Il y a une possibilité qu'il
25 existe une responsabilité atténuée.
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1 Je ne sais pas si vous voulez que je développe un peu ce sujet-
2 là, que je vous dise également qu'il a été une marionnette dans les mains
3 des autres. Cela pourra être tout à fait vrai à la lumière d'un certain
4 nombre de faits, mais de l'autre côté cela pourra être également erroné si
5 on lie ça à d'autres éléments.
6 Pour moi, le problème c'est qu'il me faudrait également que je
7 puisse parler avec le patient auparavant. Il ne serait pas approprié de ma
8 part de vous présenter ici une évaluation, ou d'établir un diagnostic qui
9 irait plus loin que la méthodologie que j'applique.
10 M. Cowles (interprétation). - Par conséquent, ce serait la
11 spéculation, étant donné que vous ne connaissez pas les événements.
12 M. le Président (interprétation). - Il vous a déjà répondu à
13 cette question, il a dit qu'il n'était pas au courant.
14 M. Cowles (interprétation). - Etes-vous toujours d'accord pour
15 dire qu'il y a ce stress post traumatique qui a été présent chez M. Landzo
16 après 92 ?
17 M. Lagazzi (interprétation). - Oui. Je suis du côté du
18 diagnostic que j'avais déjà établi.
19 M. Cowles (interprétation). - Vous êtes d'accord avec les
20 critères, dans le cadre de DSM-IV, pour définir le stress
21 post traumatique ?
22 M. Lagazzi (interprétation). - Oui.
23 M. Cowles (interprétation). - N'est-il pas vrai que la personne
24 aurait pu souffrir de ce stress post traumatique après un événement
25 traumatisant ? Est-ce que c'est vrai ?
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1 M. Lagazzi (interprétation). - Mais c'est un critère qui est
2 primaire...
3 M. Cowles (interprétation). - L'événement traumatique et
4 l'expérience qu'il avait vécue dans ce camp de formation croate en 91,
5 n'est-ce pas ?
6 M. Lagazzi (interprétation). - Oui. J'en suis arrivé à cette
7 conclusion et je parle également au nom de mes collègues puisqu'eux aussi
8 en sont arrivés à cette conclusion. Nous avons vu qu'il y avait des
9 symptômes de ce stress post traumatique et moi j'établis un lien entre les
10 différents éléments.
11 M. Cowles (interprétation). - Monsieur Landzo, dans le camp,
12 regardait des vidéo qui montraient des images de personnes qui étaient en
13 train de se faire tuer. Et il a affirmé qu'il avait vu de ses propres yeux
14 des personnes se faire tuer dans ce camp, c'est bien ce qu'il vous a dit;
15 c'est bien ce genre d'expérience qu'il vous a dit avoir traversée ?
16 M. Lagazzi (interprétation). - Oui.
17 M. Cowles (interprétation). - N'est-il pas exact que le
18 premier critère qui permet d'établir, dans le cadre du DSM-IV, l'existence
19 d'un syndrome de stress post traumatique, c'est le fait qu'il y a un
20 événement traumatisant qui s'est produit et dont la personnalité de la
21 victime ou dont des personnes proches de la personnalité de la victime...
22 Vous êtes d'accord avec moi ?
23 M. Lagazzi (interprétation). - Oui.
24 M. Cowles (interprétation). - Mais cet événement dont nous
25 parlons et dont l'accusé dit qu'il l'a traumatisé, en fait c'est un
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1 événement au cours duquel l'accusé lui-même n'a jamais été directement
2 menacé ?
3 M. le Président (interprétation). - Cela n'a pas d'importance à
4 présent.
5 M. Jan (interprétation). - Peut-être qu'on n'est pas en train de
6 vous massacrer mais cela ne veut pas dire que ce n'est quand même pas un
7 traumatisme.
8 M. le Président (interprétation). - Vous vous sentez tellement
9 mal vis-à-vis de ce dont vous êtes témoin et c'est tellement bouleversant
10 que bien sûr cela vous touche dans une certaine mesure.
11 M. Cowles (interprétation). - Mais le problème c'est que…
12 M. le Président (interprétation). – Oui, c'est ce que tout le
13 monde s'accorde à dire, c'est un fait.
14 M. Jan (interprétation). - On n'a pas besoin de demander à un
15 expert de se prononcer sur la question. Si vous voyez quelqu'un se faire
16 tuer sous vos yeux, bien sûr que vous êtes traumatisé.
17 Manifestement, cela ne vous est pas arrivé parce qu’à vos yeux,
18 Maître Cowles, il faut être massacré avant de ressentir un traumatisme.
19 M. Cowles (interprétation). – Non, Monsieur le Juge mais le DSM-
20 IV précise bien que, pour qu'il y ait stress post traumatique, il faut que
21 l'individu se sente physiquement menacé, qu'il y ait menace concrète vis-
22 à-vis de la personne.
23 M. le Président (interprétation). – Oui, mais tout de même, nous
24 sommes à même de nous prononcer sur la question, c'est ce que nous apprend
25 la simple expérience de la vie.
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1 M. Cowles (interprétation). - Je continue.
2 Monsieur le Professeur, savez-vous quelle a été la réaction de l'accusé à
3 cet événement dont il dit qu'il s’est produit ?
4 M. Lagazzi (interprétation). - L'accusé a dit que sa réaction a
5 été celle d'une terreur intense, il a ressenti cette terreur affreuse.
6 M. Jan (interprétation). - Ceci répond à votre
7 première question.
8 M. Cowles (interprétation). – Pardon ?
9 M. Jan (interprétation). - Cela répond à votre
10 première question.
11 M. Cowles (interprétation). – Absolument. Savez-vous ce qu'il a
12 fait après avoir traversé cette expérience ?
13 M. Lagazzi (interprétation). - Ce qui s'est passé suite à cet
14 événement ? Je vous répète encore ce qu'il m'a dit, il est apparemment
15 rentré chez lui et puis il a rejoint les rangs de l'armée.
16 M. Cowles (interprétation). - Peu de temps après, n'est-ce pas,
17 il s'est lui-même porté volontaire pour être garde dans un camp, c'est
18 bien cela ?
19 M. Lagazzi (interprétation). - C'est exact.
20 M. Cowles (interprétation). - Il prenait part à une situation
21 violente.
22 M. Lagazzi (interprétation). – Certes, mais puis-je élaborer sur
23 un point, cela va me permettre d'élaborer aussi sur ce que j'ai pu dire
24 précédemment.
25 Lors du dernier entretien que j'ai eu avec lui, l'accusé a dit
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1 qu'il avait rejoint les rangs de l'armée, en fait qu'on l'avait forcé un
2 peu à rejoindre les rangs de l'armée. Ensuite, on l'a envoyé dans un camp
3 parce que tous les jeunes gens qui n'avaient pas suivi de formation
4 militaire devaient suivre les cours de ce camp. Il faut absolument que je
5 nuance ce que j'ai pu dire tout à l'heure. Pardon de vous avoir
6 interrompu, Maître.
7 Il y a cette autre question que vous avez posée. Vous m'avez
8 demandé s’il prenait part à une situation violente, je réponds par
9 l'affirmative, oui. Il s'est rendu dans un camp et le fait de sa présence
10 dans ce camp lui permettait de prendre part à certains actes.
11 M. Cowles (interprétation). - Il l'a fait volontairement,
12 personne ne le forçait à prendre part à de tels actes, n'est-ce pas ?
13 M. Jan (interprétation). - Mais enfin tout de même, il était en
14 poste dans ce camp alors évidemment qu'il devait agir, ce n'était pas
15 forcément un acte volontaire, c'est ce que le docteur a dit.
16 M. Cowles (interprétation). - C'est volontairement qu'il a
17 rejoint l'armée, il voulait servir dans l'armée.
18 M. Jan (interprétation). - Je ne suis même pas tout à fait sûr
19 de cela. Il y a eu conscription, mobilisation. Il a dû rejoindre l'armée
20 parce qu'il y a une loi qui le prévoit.
21 M. Cowles (interprétation). - Il n'a pas essayé de s'échapper.
22 Je ne veux pas entrer dans un conflit avec vous, Monsieur le Juge.
23 M. Jan (interprétation). - Merci de ne pas entrer en conflit
24 avec moi, mais je crois que c'est assez évident comme situation.
25 M. Cowles (interprétation). – A-t-il essayé d'éviter certaines
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1 expériences violentes après 1992 ? Du fait de ce qui avait pu se passer
2 dans ce camp de formation croate en 91, est-ce qu'il a essayé d'éviter
3 certaines expériences ?
4 M. Lagazzi (interprétation). - Vous vous référez au critère C
5 des critères établis dans le DSM-IV. Ce critère dit que le facteur clé qui
6 est en question ici c'est la situation de stress qui se produit et qui est
7 associée avec l'apparition du traumatisme. Ensuite, il y a un certain
8 nombre d'autres éléments à prendre en compte, qui ont un impact.
9 L'accusé a dit qu'il n'était pas resté avec Miro. Il a dit qu'il
10 avait préféré aller servir dans l'armée. Si vous appuyez sur le seul
11 syndrome de stress post traumatique, je crois qu’on peut affirmer que le
12 critère C ne peut pas être retenu pour ce qui est de la prémisse générale
13 que vous avez énoncée.
14 Mais le problème c'est que dans cette situation précise, il y
15 avait des stimuli ambivalents parce que, d'un côté, il y avait cette
16 tendance à éviter certaines situations, mais de l'autre côté, du fait de
17 cette tendance narcissique et de cette personnalité dépendante, il y avait
18 cette tendance à rechercher l'appréciation des autres, la reconnaissance
19 des autres, cette volonté de porter l'uniforme, de faire partie de
20 l'armée. Il y avait cette dépendance vis-à-vis de l'appartenance à une
21 structure.
22 Et puis, on peut parler de situations analogues, situations dans
23 lesquelles des personnes qui ont connu des situations très stressantes et
24 qui ont traversé des expériences traumatisantes ou éminemment stressantes,
25 dans ces situations, ces personnes peuvent réagir de façon exactement
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1 opposée à celle qui apparaît dans le critère C. Par exemple, lorsque vous
2 avez un jeune adolescent qui est frappé ou maltraité, il arrive que
3 parfois ces adolescents deviennent eux-mêmes très violents et passent à
4 l'acte. Donc, ils n'évitent pas la violence, au contraire. Ces personnes
5 recherchent cette situation de violence.
6 On peut également dire que certains enfants sont battus chez
7 eux. Ces enfants plus tard deviennent des adultes violents, deviennent eux
8 aussi des personnes qui maltraitent d'autres personnes.
9 M. Cowles (interprétation). - Mais est-ce qu'il n'est pas exact
10 de dire que s'il n'y a pas ce phénomène d'éviter quelque chose, il n'y a
11 pas syndrome de stress post traumatique ? Lorsqu'on n'évite pas quelque
12 chose, est-ce que cela signifie qu'on n'a pas le syndrome de stress
13 post traumatique ?
14 M. Lagazzi (interprétation). - Je ne suis pas d'accord avec
15 vous. Le DSM-IV énonce tous les critères. Tous ces critères sont bien sûr
16 très importants, mais chacun de ces critères doit être rattaché à des
17 circonstances très spécifiques. Nous, nous avons établi un diagnostic sur
18 la base d'un certain nombre d'axes. Mais il faut tout observer, tout
19 décrire. Tout doit être vu à la lumière d'une évaluation globale de la
20 situation, et c'est comme cela que j'arrive à expliquer ce cas précis.
21 M. Cowles (interprétation). - Qu'est-ce qui a fait que
22 l'expérience traumatisante de M. Landzo a été si exceptionnelle, parce que
23 des tas de personnes traversent ce type d'expérience affreuse ? Qu'est-ce
24 qui a été si particulier dans son expérience à lui ? Qu'est-ce qui permet
25 de dire que cette expérience a été si traumatisante que cela atténue sa
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1 responsabilité, cela atténue sa capacité à exercer son libre arbitre ou à
2 agir six mois plus tard de telle ou telle façon, comme il l'a fait
3 d'ailleurs ? En quoi cette expérience est-elle si particulière ?
4 M. Lagazzi (interprétation). - Je vais répéter ce que j'ai déjà
5 dit. Si nous ne parlons que du syndrome de stress post traumatique, alors
6 nous savons tous qu'en psychiatrie ce syndrome en tant que tel -et j'ai
7 encore tout récemment lu un article d'un psychiatre croate sur la
8 question, article qui traitait justement des crimes de guerre-, donc on
9 sait très bien que ce syndrome n'a pas forcément un impact sur cette
10 question de la responsabilité atténuée.
11 Mais en revanche, si l'on prend ce syndrome et si on fait entrer
12 en jeu également les autres facteurs dont nous avons parlé pour ce qui est
13 du cas de la personnalité de M. Landzo, alors, on est à même de faire une
14 évaluation globale de la situation. Cette évaluation globale de la
15 situation nous permet de penser qu'il y a effectivement responsabilité
16 atténuée avec tout ce que cela entraîne, toutes les limitations
17 méthodologiques dont il faudrait tenir compte et dont nous avons déjà
18 parlé.
19 M. Cowles (interprétation). - Vous pensez qu'il y a
20 responsabilité atténuée alors que vous ne connaissez pas les faits ?
21 M. Lagazzi (interprétation). - Je dois répondre oui à cette
22 question. Et je vais répéter encore une fois ce que j'ai dit. Moi j'ai
23 essayé de vous transmettre une évaluation qui prend en compte.... Excusez-
24 moi, je me fatigue un petit peu. Je parlais de responsabilité mais ce
25 n'est pas cela, je voulais dire "probabilité" d'un point de vue clinique.
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1 Je suis fatigué, pardon.
2 Pour être à même de dire qu'une personne est responsable ou non
3 d'un crime particulier, je dois absolument savoir ce qu'est ce crime
4 précis. Et pour essayer de savoir ce qu'est ce crime, il faut absolument
5 que j'ai un entretien long, un long entretien avec M. Landzo.
6 M. Cowles (interprétation). - Vous avez eu ce type d'entretien
7 avec M. Landzo ?
8 M. Lagazzi (interprétation). - Oui, j'ai eu des entretiens assez
9 longs avec M. Landzo, mais ces entretiens ne portaient pas sur ce point
10 précis.
11 M. Cowles (interprétation). - Merci, Monsieur le Président. Je
12 n'ai plus de questions.
13 M. le Président (interprétation). - Merci. Des questions
14 supplémentaires ?
15 Mme McMurrey (interprétation). - Oui, Monsieur le Président. Je
16 souhaite exercer mon droit de réplique. Puis-je commencer ? Merci.
17 Monsieur le Professeur, M. Cowles vient de vous poser des
18 questions relatives au critère C du DSM-IV, critère relatif au syndrome de
19 stress post traumatique. En 1996, lorsque vous avez eu un entretien avec
20 M. Landzo, vous avez établi un rapport. Pouvez-vous s'il vous plaît vous
21 référer à la page 16 de votre premier rapport, s'il vous plaît ?
22 Dans le paragraphe du milieu... Ah pardon, je vous ai donné la
23 référence de la version en anglais. En fait, c'est le passage où il dit se
24 rappeler avoir vu des gens qui étaient frappés et battus. Il a dit que
25 cela lui semblait presque normal parce qu'en temps de guerre, les gens
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1 sont comme des animaux, pas tellement comme des humains. Les gens peuvent
2 être potentiellement dangereux. C’est ce qu'il dit dans ce passage.
3 Dans le critère C, est-ce qu’il n'est pas précisé qu'il faut
4 qu'il y ait une conduite rémanente où l'individu cherche à éviter certains
5 stimuli qui entraînent des traumatismes et qui influent sur la capacité de
6 l'individu à réagir, et est-ce que la situation dont nous parlons n'est
7 pas précisément une situation dans laquelle la capacité de l'individu à
8 réagir est presque paralysée ?
9 M. Lagazzi (interprétation). - Effectivement.
10 Mme McMurrey (interprétation). - Il y a un certain nombre de
11 critères qui apparaissent dans le DSM-IV et qui s’appliquent notamment au
12 syndrome de stress post traumatique. On dit aussi qu'il ne faut pas
13 forcément satisfaire à tous ces critères pour souffrir du syndrome de
14 stress post traumatique. Dans le critère C par exemple, on dit que si on
15 remplit au moins trois des sept critères qui sont établis, cela suffit,
16 n'est-ce pas ?
17 M. Lagazzi (interprétation). – Oui, c’est tout à fait courant.
18 Dès lors qu'il y a un trouble, on essaie de déceler la présence d'un
19 facteur déterminant, la présence de plusieurs facteurs déterminants peut-
20 être.
21 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur Moran et M. Cowles ont
22 tous les deux dit que si vous aviez connu les faits qui nous intéressent
23 ici, vous auriez peut-être été à même de vous prononcer sur cette question
24 de la responsabilité atténuée. Mais comme vous l'avez dit précédemment,
25 vous n'avez pas limité votre opinion aux éléments d'informations qui vous
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1 ont été donnés par M. Landzo, n’est-ce pas ? Vous vous êtes appuyé sur
2 d'autres éléments pour arriver à votre conclusion finale ?
3 M. Lagazzi (interprétation). – Oui, j'ai utilisé ma méthode
4 d'observation clinique également. J'ai utilisé ces tests pour établir mon
5 diagnostic. J'ai également utilisé les résultats des examens qui avaient
6 été faits précédemment. J'ai tenu toutes ces informations en compte.
7 Mme McMurrey (interprétation). – C’est généralement ainsi que
8 vous procédez n'est-ce pas, parce que vous n'avez pas toujours la
9 possibilité de vous entretenir avec le malade de ce qui lui est arrivé.
10 C'est un petit peu un luxe de pouvoir le faire ?
11 M. Lagazzi (interprétation). - De façon générale, ce que l'on
12 peut dire, c'est que si l'on n'a pas la possibilité de s'entretenir avec
13 le patient de ce qui est arrivé, on essaie de se forger une opinion qui,
14 bien évidemment, est beaucoup plus restreinte que celle qui aurait pu être
15 obtenue suite à un entretien prolongé. Même dans ce cas de la
16 responsabilité atténuée, je crois qu'il ne faut pas oublier de prendre en
17 compte des faits concrets.
18 Dans cette mesure si on n'aborde pas avec le patient le sujet de
19 faits précis, et pas seulement pour savoir comment le patient a réagi à
20 ces faits, si on ne peut pas parler de ces faits, alors on ne peut pas
21 vraiment comprendre quel était l'état psychiatrique du patient lorsqu'il a
22 commis tel ou tel acte. L'opinion que j'ai émise s’étend sur une période
23 de temps assez importante. Au cours de cette période, il y a eu un certain
24 nombre de situations qui se sont présentées.
25 Je voulais simplement apporter ma contribution pour qu'il vous
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1 soit plus facile de comprendre l'affaire. J'ai apporté une réponse assez
2 large aux questions qui m'étaient posées. Je me suis fondé sur ce qui me
3 semblait être une probabilité concrète. Mais, je le répète, si nous
4 parlons de responsabilités pour ce qui est d'événements individuels, il
5 faudrait que j'obtienne plus d'informations sur ces événements.
6 Mme McMurrey (interprétation). - Lorsque vous avez établi ce
7 diagnostic de trouble mental en 1998, vous avez été capable de comprendre
8 la nature de ce trouble, de cette anormalité et vous avez été capable
9 d'établir un lien entre ce trouble et une période de temps écoulé. Vous en
10 êtes arrivé à l'établissement d'un certain degré de probabilité, c'est
11 cela ?
12 M. Lagazzi (interprétation). - Oui.
13 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur Moran a dit que vous
14 aviez parlé avec le Pr Gripon, que vous aviez pu parler avec lui de ses
15 voyages en Bosnie, etc. Mais en fait, vous n'avez jamais parlé de cela
16 avec le Pr Gripon, vous n’avez jamais parlé des entretiens qu’il avait pu
17 avoir avec l'accusé ou des voyages qu'il avait pu faire, n'est-ce pas ?
18 M. Lagazzi (interprétation). - Bien sûr que non. J'ai un peu
19 parlé au Pr Gripon de mes examens lors de cet entretien que nous avons eu.
20 Mais nous n'avons fait que des allusions très rapides à cette idée de la
21 prépondérance de la mère au sein de la cellule familiale de M. Landzo. Je
22 ne sais pas exactement quelles sont les sources d'informations
23 collatérales. Je n'ai pas du tout travaillé en étroite coopération avec le
24 Pr Gripon.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Maître Moran a dit également
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1 que dans l'un de vos rapports, vous déclarez que l'accusé s'est rendu dans
2 le camp croate alors qu'il faisait chaud. Et M. Moran a dit qu'on pouvait
3 en tirer la conclusion qu'il s'y était rendu au mois d'août ou juillet.
4 M. Moran (interprétation). - C'est faux. Ceci est tiré du
5 rapport du Pr van Leeuwen. C'est bien ce que j'ai dit quand j'ai posé la
6 question au témoin.
7 Mme McMurrey (interprétation). - Moi je pose cette question
8 parce que cette question, dont je viens de parler, a été posée par
9 M. Moran dans le cadre de son contre-interrogatoire. L'Italie, n'est-ce
10 pas, est à peu près au même niveau que la Bosnie ? Au mois d'avril, au
11 mois de mai, il peut faire chaud en Italie, n'est-ce pas ?
12 M. Lagazzi (interprétation). - Alors, je ne suis pas expert en
13 météorologie, que cela soit bien clair. Tout dépend de l'année dont vous
14 parlez, tout dépend du climat, mais au vu de ce que j'ai pu voir à la
15 télévision, il semble que la Bosnie soit une région beaucoup plus froide
16 que les régions centrales et méridionales de l'Italie, donc je ne peux
17 véritablement pas répondre à votre question.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Précédemment, en réponse à une
19 question de Me Moran, vous avez parlé du rôle que joue M. Landzo dans le
20 cadre du quartier pénitentiaire des Nations Unies. Vous savez, n'est-ce
21 pas, vous savez qu'il a passé du temps à Celebici en 1992 ? Vous savez
22 qu'il a servi dans l'armée en 1994, vous savez qu'il a été détenu de 1994
23 à 1996, et vous savez qu'il se trouve à l'unité de détention depuis 1996.
24 Vous savez tout cela, n'est-ce pas ? Ce sont des faits dont vous avez
25 connaissance ?
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1 M. Lagazzi (interprétation). - Eh bien, oui.
2 Mme McMurrey (interprétation). - Donc, peut-on affirmer que
3 M. Landzo se sent à l'aise dans cet environnement ? Est-ce que d'une
4 certaine façon il ne s'est pas parfaitement adapté à cet environnement qui
5 est le sien depuis un certain temps ? Il s'est adapté à cette
6 institution ?
7 M. Lagazzi (interprétation). - Pour ce qui est du quartier
8 pénitentiaire des Nations Unies, c'est à cela que vous faites référence ou
9 bien est-ce que vous parlez de la prison en Bosnie ?
10 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur Landzo, depuis l'âge
11 de 19 ans, s'est trouvé d'une façon ou d'une autre détenu dans tel ou tel
12 endroit. Est-ce qu'il se sent plus à l'aise lorsqu'il est détenu ou
13 lorsqu'il est en liberté ?
14 M. Lagazzi (interprétation). - Eh bien, M. Landzo a aujourd'hui
15 d'excellents rapports avec tout le personnel du quartier pénitentiaire des
16 Nations Unies. Mais je ne peux pas me prononcer sur son type de rapport
17 avec, par exemple, les membres du personnel de la prison en Bosnie, ou
18 avec ceux qu'il serait susceptible d'avoir avec le personnel de prison
19 d'un autre pays.
20 Mais ce qui est vrai, c'est que dans ce quartier pénitentiaire
21 des Nations Unies, il a trouvé des éléments qui lui ont permis de
22 développer le comportement qui est le sien aujourd'hui.
23 Et c'est quelque chose qui concorde tout à fait avec sa
24 situation subjective.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Maître Moran n'a pas utilisé le
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1 terme de "simulation". Mais il n'a cessé de faire référence à cette
2 manipulation. Il a accusé M. Landzo de manipuler le système, de vous
3 manipuler. Il vous a manipulé lorsqu'il vous a fait certaines
4 déclarations. Je voudrais que vous expliquiez bien au Tribunal que vous ne
5 pouvez pas être si facilement manipulé, on ne vous manipule pas aussi
6 facilement.
7 Pour que vous puissiez bien expliquer cela aux Juges, je
8 voudrais que l'huissier vous fasse passer certains tableaux qui ont été
9 réalisés par M. Landzo. Il y en a trois.
10 M. Cowles (interprétation). - Objection. Cela n'a rien à voir
11 avec le contre-interrogatoire. Cela ne devrait pas faire partie du droit
12 de réplique.
13 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur le Président, on a dit
14 que le témoin n'était pas à même de reconnaître une situation où l'accusé
15 l'aurait manipulé, où l'accusé aurait simulé quelque chose. Je crois qu'au
16 contraire le témoin est parfaitement à même de savoir s'il est en train
17 d'être manipulé ou pas. Ces tableaux nous permettraient peut-être
18 d'obtenir des informations.
19 M. Jan (interprétation). - Qu'est-ce que ces tableaux ont à voir
20 avec le fait de simuler ?
21 Mme McMurrey (interprétation). - Si vous voyiez ces tableaux
22 Monsieur le Juge, vous comprendriez qu'ils ont été faits pour induire
23 quelqu'un en erreur.
24 M. le Président (interprétation). - Le témoin s'est prononcé sur
25 cette question de la simulation à plusieurs reprises, à la fois dans le
Page 13940
1 cadre de l'interrogatoire principal et du contre-interrogatoire. Cela
2 suffit comme cela.
3 Mme McMurrey (interprétation). - Mais j'essaie simplement de
4 démontrer que le professeur ne peut pas être manipulé, ne peut pas être
5 dupe d'une simulation.
6 M. le Président (interprétation). - En quoi ces tableaux vous
7 aident-ils à dire cela ? Cela ne change rien du tout.
8 Mme McMurrey (interprétation). – Professeur Lagazzi, avez-vous
9 vu les tableaux peints par M. Landzo et le cas échéant, est-ce que vous
10 avez vu dans ces tableaux quelque chose qui avait été préparé à l'avance
11 afin de vous manipuler ?
12 M. Lagazzi (interprétation). - Sur la base des prémisses que
13 vous venez d’énoncer, tout ce que je puis dire, c'est que je n’ai pas été
14 manipulé. Tout ce que je peux répondre, c'est non.
15 D'un point de vue logique, évidemment que je ne peux pas dire
16 que j'ai été manipulé. Mais j'aimerais tout de même jeter un coup d’œil à
17 ces tableaux. Est-ce que je peux également montrer ces tableaux
18 aux Juges ?
19 Je les ai vus pour la première fois, il me semble, dimanche
20 dernier, c'est l'avocate de M. Landzo qui me les a montrés.
21 Ce tableau est pour moi un tableau absolument typique. J'ai vu
22 nombre de tableaux de ce type réalisés en prison par des jeunes hommes ou
23 par des adultes qui s'inspirent d'une culture de hard rock, si vous
24 voulez, rien d'autre que cela.
25 Pour moi, il ne s'agit en aucun cas d'un élément qui a quoi que
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1 ce soit à voir avec la psychopathologie.
2 Pour ce qui est de ce deuxième tableau, je n'ai pas grand-chose
3 à dire. On peut voir que, sous le drapeau, il y a la forme d'un corps,
4 mais je ne peux rien dire de plus.
5 Ce troisième tableau nous montre une scène similaire, mais là
6 encore, je n'ai pas grand-chose à dire. Ce tableau nous montre une scène
7 qui est étroitement liée à l'idée de suicide. Cela montre un certain
8 dédain pour la vie, mais je ne peux rien dire d'autre.
9 Mme McMurrey (interprétation). - Pour ce qui est du tableau où
10 il y a cette balance de la justice au-dessus du personnage principal,
11 n’avez-vous pas dit à un moment que c'était un exemple de simulation ?
12 M. Lagazzi (interprétation). - Pour celui-ci, c'est exact.
13 D'abord, je voudrais préciser qu'une peinture donne toujours à celui qui
14 l'observe, ou transmet toujours à la personne qui l'observe un message
15 envoyé par le peintre. Je crois qu'il est très clair que tout ceci est
16 vraiment de l'ordre du stéréotype. Il n’y a là absolument pas de
17 projection d'idée subconsciente. C'est une tentative qui vise à projeter
18 une image de soi, une image de son avenir. Il y a ici une représentation
19 idyllique et puis vous avez également la justice qui est représentée dans
20 cette image.
21 Pour en revenir à ce qu’a dit le Pr Verde hier, peut-être qu'il
22 y a manipulation inconsciente, peut-être qu'il y a tentative de donner une
23 image de soi qui est aussi positive que possible, mais je répète une fois
24 encore qu'il s'agit-là de mes observations, je vous les livre à vif, peut-
25 être que j'ai été manipulé de mille autres façons.
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Merci, Monsieur l'Huissier.
2 Monsieur Moran a décrit une scène dans laquelle vous travaillez
3 dans le cadre du Bureau du Procureur, vous allez sur le terrain pour mener
4 une enquête et vous essayez de savoir si une personne souffre de troubles
5 mentaux ou si cette personne n'arrive pas à distinguer le bien du mal.
6 Mais en fait, ce n'est pas vraiment ce que vous avez fait. En
7 fait, lorsque vous travaillez pour le Procureur, avant d’en arriver au
8 stade du procès, vous essayez d'abord, n'est-ce pas, de trouver une
9 solution au crime ? Vous essayez d'aider les enquêteurs à trouver la
10 personne qui a commis le crime et vous essayez aussi de décrire le profil
11 de la personne ? Vous essayez d'établir quelle est sa personnalité ?
12 M. Lagazzi (interprétation). - Quand vous êtes consultant en
13 psychiatrie, que vous travaillez en étroite collaboration avec la police,
14 notamment sur le cas d'un tueur en série et que vous essayez de déterminer
15 quand il va frapper à nouveau, quand vous vous fondez sur des éléments qui
16 ont été trouvés préalablement, quand vous essayez d'établir le profil du
17 tueur en série, vous travaillez à la fois avec le Procureur et avec les
18 enquêteurs.
19 Mais, vous pouvez également travailler dans le cadre d'une
20 enquête psychiatrique et médico-légale, enquête menée par le Procureur
21 parce que le Procureur souhaite que vous fassiez un bilan de la capacité
22 mentale de la personne. Est-ce que cette personne souffre de troubles
23 mentaux ou pas.
24 Nous participons à nombre d’enquêtes de police et nous prenons
25 part à nombre d'enquêtes psychiatriques et médico-légales. Ces enquêtes
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1 sont menées au nom du Bureau du Procureur.
2 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur Landzo, n'est-ce pas,
3 ne tombe pas dans cette catégorie établie par le DSM-IV ? Il n'est pas
4 asocial, tel que cela est défini dans le DSM-IV ?
5 M. Lagazzi (interprétation). - Je ne dirais pas qu'il est
6 asocial. Rien ne permet de l'affirmer parce que, dans son comportement
7 antérieur, il n'y a aucun indice qui nous permette de dire qu'il est
8 asocial. En tout cas, il est clair que son comportement ne cadre pas avec
9 les critères qui permettent de parler d'une personnalité asociale. Et
10 puis, en plus de toutes ces étiquettes, il n'a pas du tout un comportement
11 asocial, notamment au cours de l'entretien. Ce n'était pas du tout son
12 comportement. Lui a d'autres problèmes.
13 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur Cowles a dit que
14 M. Landzo prenait des cachets, qu'il buvait. M. Cowles a dit que Landzo
15 disait que c'était peut-être à cause de cela que certains actes avaient
16 été perpétrés à Celebici. Mais depuis que vous connaissez M. Landzo, il a
17 toujours nié le fait qu'il avait bu alors qu'il était de garde dans ce
18 camp et dans ce cadre militaire ?
19 M. Lagazzi (interprétation). - Je vais tâcher d'être précis dans
20 ma réponse. Dans le dernier rapport que j'ai rédigé, je précise que
21 l'accusé affirme qu'il n'a pas utilisé de médicaments, qu'il n'a pas bu
22 d'alcool. Dans le rapport que j'ai établi en 1996, l'accusé fait référence
23 au fait qu'il a effectivement pris des médicaments et qu'il a bu de
24 l'alcool, mais à cette époque, il a également précisé qu'il n'aurait pas
25 absorbé ces substances pendant ses heures de garde.
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1 Ensuite, en 97, il dit qu'il ne buvait pas lorsqu'il était de
2 garde, mais qu'il lui arrivait de boire pendant des périodes de temps
3 assez prolongées.
4 Pour ce qui est de l'influence possible de médicaments et
5 d'alcool sur son comportement, eh bien je pense que vous savez tous quels
6 sont les effets de l'alcool sur le comportement d'un individu. Mais si
7 l'on établit une relation entre ce type d'influence et les faits dont on
8 dit qu'ils ont été commis en 1992, alors là, je ne peux absolument pas me
9 prononcer, notamment pour ce qui est de l'absorption de médicaments ou
10 d'alcool.
11 Mme McMurrey (interprétation). – Pouvez-vous expliquer aux Juges
12 pourquoi le fait que M. Landzo a modifié ses histoires, pourquoi ses
13 changements de comportement ont un lien avec son trouble de la
14 personnalité avec cette pathologie dont vous avez pu établir qu'il
15 souffrait ?
16 M. Lagazzi (interprétation). – Tout ce que je peux dire en
17 effet, c'est que personnellement, j'ai été fort impressionné par le fait
18 que justement, en ce moment, M. Landzo atténue ce qu'il avait dit
19 auparavant et à l'époque pour lui c'était important. Maintenant ce n'est
20 pas le cas. C'est tout à fait le contraire par rapport à la simulation
21 chez les personnes qui souhaitent sortir de la prison, s'il s'agit des
22 personnes qui présentent les troubles mentaux.
23
24 Par conséquent, la question que je me suis posée, et c'est
25 surtout que j'étais étonné, c'est : quelles étaient les raisons pour
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1 lesquelles il s'adonnait à la simulation, et surtout au niveau de l'état
2 mental, de son état mental, alors qu'actuellement, il atténue comme je
3 l'ai dit tous ces aspects ?
4 Eh bien, j'ai considéré, quand il s'agit d'une telle attitude,
5 d'une nouvelle attitude, qu'elle explique sa personnalité dépendante et
6 que cela même met l'accent sur sa personnalité dépendante, parce qu'il
7 veut faire diminuer l'importance de ces effets.
8 Actuellement, on a l'impression qu'il participe de manière
9 assez… je dirais qu'il s'engage énormément dans ce procès, et qu'il essaie
10 de réduire également un certain nombre d'autres éléments. Ceci prouve une
11 fois de plus que la personnalité, sa personnalité, a été troublée par un
12 certain nombre de dépendances.
13 Mme McMurrey (interprétation). - Docteur Lagazzi, est-ce que
14 vous pensez qu'il est victime toujours, qu'il continue d'être victime ?
15 M. Lagazzi (interprétation). - Si nous parlons d'une personne
16 qui a des problèmes de personnalité, qui présente des désordres et des
17 troubles mentaux, qui a une expérience vécue dans un passé très récent, si
18 vous tenez compte également de l'âge de M. Landzo, en tant que psychiatre
19 légiste, je pense qu'effectivement nous sommes en présence d'une personne
20 qui est victime, victime d'une situation donnée et comme beaucoup
21 d'autres, souhaiterait être considéré comme une victime qui a des
22 expériences dramatiques, c'est pareil dans le cas concret.
23 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que, d'après vous,
24 Docteur, on a exploité M. Landzo ?
25 M. le Président (interprétation). - Il n'est pas important si
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1 c'est la dernière question que vous posez, mais si c'est véritablement la
2 question que vous posez dans le cadre de votre contre-interrogatoire...
3 Mme McMurrey (interprétation). - Je voulais tout simplement
4 savoir s'il avait profité... Par exemple, Miro, s'il avait profité ou pas
5 de Landzo ?
6 M. Lagazzi (interprétation). - Mon sentiment : Monsieur Landzo a
7 travaillé pour M. Miro, et il a été très appliqué au travail. Il est fort
8 probable qu'on avait parlé d'un adolescent qui avait travaillé à plein
9 temps, qui ne dormait pas chez lui, qui restait donc à son poste de
10 travail, même pour passer les nuits. Il n'est pas impossible, et on peut
11 même supposer qu'il y a un rapport de dépendance vis-à-vis de son patron,
12 vis-à-vis de Miro et que par conséquent, Miro l'a exploité en quelque
13 sorte.
14 Mais il est fort délicat de définir la ligne de démarcation et
15 de voir où est la dépendance et l'exploitation. Personnellement; je ne
16 pourrais pas vous répondre de manière très exacte.
17 Mme McMurrey (interprétation). - Docteur Lagazzi, je vous
18 remercie d'avoir passé la journée entière. Je n'ai plus de questions
19 Monsieur le Président.
20 M. le Président (interprétation). - Avant de clore la séance, je
21 voulais tout simplement poser une question ou plutôt savoir quelque chose.
22 Docteur, la conclusion de votre témoignage, si je comprends bien, serait
23 que, vu les conditions dans lesquelles M. Landzo s'était trouvé, on
24 pourrait donc penser qu'il avait la responsabilité atténuée, la
25 responsabilité mentale atténuée ?
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1 M. Lagazzi (interprétation). - Oui. D'après tout ce que j'ai dit
2 jusqu'à maintenant.
3 M. le Président (interprétation). - Donc, ce que vous suggérez,
4 c'est qu'au fond, il doit être libéré de la responsabilité.
5 M. Lagazzi (interprétation). - Est-ce que cela doit être une
6 conclusion juridique ?
7 M. le Président (interprétation). - Est-ce que ceci le libère de
8 la responsabilité ?
9 M. Lagazzi (interprétation). - Monsieur le Président, ce n'est
10 pas de mon devoir de libérer une personne de sa responsabilité. On m'avait
11 demandé de bien vouloir établir une opinion qui est liée à une expertise
12 médico-légale. J'ai donc procédé à une certaine méthodologie et j'ai
13 donné, établi un diagnostic et s'il y a eu responsabilité atténuée ou s'il
14 n'y a pas de responsabilité atténuée du point de vue juridique.
15 Quand il s'agit d'une personne qui a un aspect, qui présente un
16 aspect d'anormalité, à ce moment-là éventuellement, je pourrais vous
17 donner une réponse qui irait dans votre sens.
18 M. le Président (interprétation). - Je vais expliquer pourquoi
19 j'ai posé une telle question. Il y a donc des personnalités qui présentent
20 une pathologie, une psychopathologie, qui présentent également des aspects
21 d'anormalité et actuellement, je pense que vous considérez l'accusé
22 également comme appartenant à cette catégorie.
23 Une deuxième catégorie de personnes est libérée de la
24 responsabilité. Dans le cas concret, je pense que vous avez conclu que
25 vous êtes en face d'un client qui a une responsabilité atténuée. Est-ce
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1 que cette responsabilité atténuée, d'après vous, peut figurer dans la
2 catégorie de ceux qui doivent être libérés de la responsabilité ?
3 M. Lagazzi (interprétation). - En ce qui concerne les
4 psychopathes, en général, les personnes qui présentent la psychopathologie
5 et qui se cadrent selon les critères de DSM-IV, qui présentent également
6 un caractère antisocial, un comportement antisocial, les psychopathes
7 effectivement ne sont pas considérés comme des personnes qui ont le droit
8 d’être considérées comme des personnes qui sont sujettes à la diminution
9 de la responsabilité, tout au moins en Italie.
10 M. le Président (interprétation). – Donc, la responsabilité
11 diminuait si je comprends bien ?
12 M. Lagazzi (interprétation). - J'ai bien précisé et j'ai bien
13 parlé de cette catégorie, pour une raison tout à fait simple : on m'avait
14 demandé d'examiner cette catégorie et j'ai utilisé exactement le même
15 terme. Je me suis référé à cette catégorie pour cette raison.
16 Si nous observons l'état actuel de la personne, je peux
17 confirmer ce que j'ai déjà dit en ce qui concerne les personnes qui
18 figurent dans la catégorie des psychopathes. Selon mon expérience, en
19 Italie, nous ne considérons pas que ce genre de personnes souffrent de
20 troubles mentaux.
21 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie, Docteur,
22 je voulais tout simplement obtenir une réponse plus précise de vous-même
23 et surtout au sujet de la diminution de la responsabilité atténuée.
24 M. Lagazzi (interprétation). - S'il s'agit de la responsabilité
25 atténuée, ceci veut dire qu'il y a encore un degré de responsabilité. Dans
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1 ce cas-là, je considère qu'effectivement il y a une responsabilité
2 atténuée.
3 M. le Président (interprétation). - Merci.
4 Mme McMurrey (interprétation). - J'ai encore une question à
5 poser aux Juges : demain matin, mes enfants doivent partir à 11 heures.
6 M. le Président (interprétation). - Vous allez donc nous dire le
7 détail.
8 Mme McMurrey (interprétation). - Je demande simplement que
9 l'audience de demain commence une heure plus tard. Je dois me rendre à
10 l'aéroport pour signer un ordre de décharge pour mes enfants.
11 M. le Président (interprétation). - Vous pouvez être remplacée
12 par l’avocate qui vous aide dans votre travail.
13 Le Tribunal va lever ses travaux. Nous reprendrons à 10 heures
14 comme prévu.
15 L’audience est levée à 18 heures.
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