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1 Le jeudi 17 février 2005
2 [Audience sur requêtes]
3 [Audience publique]
4 --- L'audience est ouverte à 8 heures 36.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, à tous.
6 Madame la Greffière, veuillez citer l'affaire, s'il vous plaît.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Il s'agit
8 de l'affaire IT-04-78-PT, l'Accusation contre Rahim Ademi et Mirko Norac.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.
10 La présentation des parties, s'il vous plaît.
11 M. SCOTT : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Ken Scott du
12 bureau du Procureur, accompagné ce matin d'Ann Sutherland et Laurie
13 Sartorio, et notre commis aux audiences Lakshmie Walpita.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Scott.
15 Pour la Défense.
16 M. PRODANOVIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. La Défense
17 représentant M. Ademi, je suis accompagné de Mme Jadranka Slokovic.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Prodanovic.
19 Pour M. Norac.
20 M. OLUJIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Je représente
21 ici M. Norac. Je suis un avocat et je travaille en République de Croatie.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
23 Je remercie les deux parties. Nous avons ce matin des invités qui sont des
24 représentants de la République de Croatie. Veuillez vous présenter, s'il
25 vous plaît.
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1 M. HORVATIC : [interprétation] Je représente l'Etat croate. Je suis le
2 président de l'Académie des sciences croate et je suis conseiller auprès du
3 ministère de la Justice.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quel est votre nom, s'il vous plaît ?
5 Vous pouvez nous le rappeler.
6 M. HORVATIC : [interprétation] Zeljko Horvatic.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Vous êtes accompagné de --
8 M. MULJACIC : [interprétation] Je suis Jaksa Muljacic. Je représente la
9 République croate ici. Je suis l'adjoint au ministre de la Justice. Je suis
10 accompagné de Sinisa Milevoj qui représente l'ambassade de Croatie ici.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Messieurs. Nous avons
12 un amicus curiae présent parmi nous ce matin.
13 M. KRAPAC : [interprétation] Bonjour. Je travaille en tant que professeur à
14 la faculté de droit de Zagreb.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que le professeur Damaska n'a
16 pas pu venir ce matin, comme vous nous l'avez indiqué dans un court
17 courrier de l'amicus curiae que nous avons reçu.
18 M. KRAPAC : [interprétation] Précisément.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Merci beaucoup.
20 Nous sommes dans le prétoire aujourd'hui pour entendre vos arguments ainsi
21 que différentes requêtes qui ont été présentées par l'Accusation aux fins
22 de renvoyer cette affaire concernant M. Norac et M. Ademi de renvoyer cette
23 affaire devant un tribunal croate. Avant de poursuivre dans cette voie, je
24 souhaite demander à la Défense, étant donné que les accusés ne sont pas
25 présents dans le prétoire, si les accusés sont d'accord pour que cette
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1 audience se tienne en dehors de leur présence. Nous savons que M. Ademi a
2 été mis en liberté provisoire. Nous savons que M. Norac est détenu en
3 Croatie. Pourriez-vous, s'il vous plaît, vous exprimer sur ce point, à
4 savoir, l'absence des accusés à l'audience de ce matin, et nous dire s'ils
5 sont d'accord que cette audience se tienne malgré cela.
6 M. PRODANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, lorsque le général
7 Ademi était le seul accusé dans cette affaire il y a un an et demi environ,
8 il a eu l'occasion de s'exprimer à propos du renvoi anticipé de cette
9 affaire devant un tribunal croate et il est d'accord avec le contenu de
10 cette requête. Il est également d'accord avec le fait que cette affaire
11 soit renvoyée auprès d'un tribunal croate. Il ne souhaitait pas être
12 présent au cours de cette audience.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.
14 Monsieur Olujic.
15 M. OLUJIC : [interprétation] Monsieur le Président, comme vous le savez, M.
16 Mirko Norac, mon client, a été condamné à 12 ans d'emprisonnement et il
17 purge sa peine dans l'établissement approprié. C'est la raison pour
18 laquelle, avec votre permission, j'ai pu prorogé le délai, me permettant de
19 répondre plus tardivement à la Chambre. J'ai donc consulté mon client
20 entre-temps et il est d'accord et n'a mis aucune réserve sur la question.
21 Il est tout à fait d'accord pour que ces deux audiences se tiennent sans
22 qu'il ne soit présent aujourd'hui. Il est tout à fait d'accord que cela
23 peut se dérouler sans lui.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, nous allons donc mener cette
25 audience sans que les deux accusés en question ne soient présents. C'est la
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1 première fois que ce Tribunal entend une requête en audience publique sur
2 un renvoi d'une affaire devant un autre Tribunal. C'est la première fois
3 que nous ne parlons pas des différentes questions qui découlent des
4 arguments consignés par écrit des deux parties.
5 Je souhaite demander aux deux parties de, ceci va nous mener jusqu'à la
6 première pause, je demande aux deux parties de résumer brièvement leurs
7 positions, les positions qu'ils ont adoptées jusqu'à ce jour, puisque c'est
8 est la première fois que ce sujet est traité en audience publique. Donc, un
9 bref résumé, s'il vous plaît, des positions de parties d'autres et, bien
10 sûr, s'il y a des points supplémentaires qui doivent être abordés c'est
11 l'occasion de le faire, car, comme vous le savez et vous connaissez la
12 position des Amici Curiae et de la position de la République de Croatie qui
13 en fait part au tribunal de première instance.
14 Je vais commencer par donner la parole à l'Accusation, lui donner environs
15 20 ou 25 minutes de temps de paroles. Ensuite, je me tourne vers les
16 conseils de M. Ademi et vers le conseil de M. Norac, et vous aurez
17 également un temps de parole.
18 Monsieur Scott, vous avez la parole.
19 M. SCOTT : [interprétation] Plaise au Tribunal de première instance,
20 conseil, représentants de la République de Croatie, et Amici Curiae.
21 Il s'agit aujourd'hui d'une situation difficile. Pour bon nombre d'entres
22 nous, envoyer une affaire de crimes graves pour qu'elle soit jugée ailleurs
23 va à l'encontre de son sentiment naturel. Nous voulons terminer ce qui a
24 été commencé, nous voulons terminer ce qui a été commencé ici. Mais nous
25 nous ne méprenons pas si nous aurions les ressources nécessaires et le
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1 temps nécessaire, Mme Carla Del Ponte souhaiterait, bien évidemment, juger
2 cette affaire ici; moi-même, personnellement, aussi, je préférais juger
3 cette affaire ici. Je préférais poursuivre ces deux accusés ici, eu égard
4 aux crimes épouvantables dont on leur fait leurs reproches si nous avions
5 le temps nécessaire et les ressources nécessaires à cet effet. Mais en même
6 temps, nous sommes tous ici membres du Tribunal. Nous nous trouvons dans
7 une position qui est une position que nous connaissions dès le début de la
8 création de ce Tribunal. Nous savions que cela se passe, les choses
9 évolueraient ainsi. Nous savions toujours et nous savons toujours au jour
10 d'aujourd'hui, que ce Tribunal ne pourra jamais poursuivre tous les
11 criminels de guerre pour les crimes graves qui ont été commis au cours de
12 cette épouvantable guerre des Balkans.
13 Ce que je dis résume la situation dans laquelle nous nous trouvons : Nous
14 voulons terminer ce que nous avons commencé, nous voulons terminer ce que
15 nous avons commencé ici. C'est là que le dilemme se pose à nous. Nous
16 voulons terminer ce que nous avons commencé, nous voulons terminer ce que
17 nous avons commencé ici. Mais nous voulons clore ces affaires, et parfois
18 il s'agit de cas graves et d'affaires importantes - mais puis-je ajouter, y
19 a-t-il des affaires qui le sont moins que d'autres ? - même les affaires
20 qui sont relativement importantes doivent être jugées ailleurs et décidées
21 par quelqu'un d'autre. Telle est la réalité des choses.
22 Cela étant dit, l'Accusation affirme, et Messieurs les Juges, j'affirme
23 encore une fois qu'on ne peut pas transférer une affaire qui aurait pour
24 conséquence ultime une décision d'impunité. Ces Juges, ou ce collège de
25 Juges, doivent décider du transfert d'une affaire. Une affaire ne peut pas
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1 être transférée si on compromet l'intérêt de la justice. Pour ce cas-là,
2 l'affaire doit être jugée ici.
3 Si je regarde vers l'avenir un petit peu, je relis les instructions de
4 consignes données par le conseil de Sécurité et la Résolution 1534,
5 paragraphe 4, le conseil de Sécurité a déclaré que : "Ils ont demandé au
6 TPIY et au Procureur d'examiner la charge de travail du TPIY, en
7 particulier aux fins d'examiner les affaires en question qui pourront être
8 renvoyées vers d'autres juridictions, et ce aux fins de réaliser les
9 objectifs qui ont été fixés pour la stratégie d'achèvement dans cette
10 Résolution 1503."
11 Dans cette Résolution 1503, en 2003, le conseil de Sécurité a affirmé ce
12 qui avait déjà été dit le 23 juillet 2003 [comme interprété] : "Le
13 président du conseil de Sécurité qui cautionnait la stratégie d'achèvement
14 du TPIY aux fins de terminer les enquêtes d'ici l'an 2004, et tous les
15 procès en première instance à la fin de 2008, et les appels en 2010, aux
16 fins de poursuivre les dirigeants les plus haut placés, ceux qui sont
17 considérés comme étant les plus responsables pour les crimes qui ont été
18 commis, et ceux qui sont jugés devant le Tribunal en transférant ceux qui
19 n'ont pas ce niveau de responsabilité, de renvoyer ces personnes là devant
20 leur juridiction nationale, tout en renforçant évidemment les structures de
21 telles juridictions nationales."
22 Le président et le Procureur de ce Tribunal se sont engagés dans des
23 déclarations similaires. Comme nous l'a dit le président Meron, au mois de
24 juin l'année dernière : "Comme le conseil a reconnu dans ces Résolutions
25 1503 et 1534, sa capacité à renvoyer des affaires des accusés de rang
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1 intermédiaire et subalterne de devant des juridictions nationales et
2 également vers la chambre spéciale créée en Bosnie-Herzégovine est une
3 condition sine qua non à la réalisation de notre stratégie d'achèvement."
4 Le président Meron a également rappelé la déclaration de l'OSCE: "Il n'y a
5 aucune raison de croire" - et je sais que certaines questions ont été
6 posées à cet égard, quelque chose que nous allons certainement aborder au
7 cours de la journée, le président Meron a déclaré au mois de juin l'année
8 dernière - "nous n'avons aucune de croire que le système judiciaire en
9 Croatie ne pourrait pas gérer ces affaires de façon juste et équitable, en
10 particulier eu égard à ses juges et à ses procureurs qui ont reçu une
11 formation spéciale ainsi que des ressources qui leur sont dédiées."
12 Le président Meron, le 23 novembre 2004, a fait une autre déclaration et a
13 insisté encore une fois sur l'importance du transfert de ces affaires ce
14 faisant partie de la stratégie d'achèvement de ce Tribunal. Je ne vais pas
15 lire ses commentaires dans le détail dans l'intérêt de gagner du temps.
16 Néanmoins, le président Meron a déclaré et a reconnu : "Qu'en utilisant
17 cette procédure 11 bis, permettant de renvoyer ces affaires vers les
18 tribunaux de Bosnie-Herzégovine, Serbie-et-Monténégro, et de Croatie, ceci
19 permet pour beaucoup de les intégrer dans ce processus judiciaire, ce qui
20 évidemment va bien au-delà de la stratégie d'achèvement de ce Tribunal et
21 permet de décharger le Tribunal d'une partie de sa charge de travail. Ceci
22 permet évidemment d'impliquer les gouvernements nationaux dans ce processus
23 de traduire en justice certaines personnes et permet également d'assurer la
24 mise en application de la règle de droit.
25 "Des juridictions nationales peuvent également jouer un rôle, mais si les
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1 tribunaux sont utilisés à des fins politiques, cela ne sera pas approprié,
2 il faut également que le respect du contradictoire et de cette procédure
3 soit mis en place."
4 En particulier, à Zagreb, une lettre a été envoyée par le président Meron
5 en déclarant: "Je suis optimiste sur la capacité croissante que vous avez à
6 juger certaines affaires conformément aux droits de l'homme et aux droits
7 internationaux et des normes d'une procédure contradictoire. J'ai émis
8 quelques réserves quant à la mission de l'OSCE en Croatie dans une lettre
9 datée du mois de novembre 2004. Il faut limiter le nombre d'affaires qui
10 sera transféré. Ceci pourrait être géré par un petit nombre de tribunaux en
11 Croatie."
12 Madame le Procureur, Mme Del Ponte, s'est faite l'écho de ces propositions
13 et a souligné l'importance du transfert de ces affaires aux fins de
14 réaliser la stratégie d'achèvement. Elle reconnaît également qu'au-delà de
15 l'assistance attribuée au Tribunal pour compléter ses travaux, une
16 poursuite des crimes de guerre et de ces affaires dans différents pays de
17 l'ex-Yougoslavie constitue une étape importante et permet de favoriser la
18 réconciliation et le progrès, qui ont déjà été faits, compris dans ce
19 domaine-là, comme je vous l'ai dit. Comme je l'ai dit, il y a quelques
20 instants, le bureau du Procureur comprend très bien l'importance que revêt
21 le transfert de ces affaires et on a pris bien compte, en analysant
22 certains facteurs qui pourront être analysés lorsque certaines décisions
23 sont prises.
24 Je retourne à notre affaire, Monsieur le Président, Messieurs les
25 Juges, cette affaire Norac/Ademi, nous remarquons, dès le but, comme nous
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1 l'avons fait déjà, dans nos premiers arguments, qu'il s'agit d'une affaire
2 qui pourrait aller dans un sens ou dans un autre. L'Article 11 bis, il est
3 vrai que ces accusés sont des candidats potentiels. Nous considérons qu'il
4 s'agit d'accusés de rang subalterne, mais cela ne minimise en rien les
5 chefs d'accusation qui leur sont reprochés, si nous pouvons utilisés ce
6 type de terminologie, étant donné les types de crimes devant ce Tribunal.
7 On ne peut pas considérer qu'il s'agit de crimes plus sérieux ou moins
8 sérieux. Il s'agit ici des accusés, de la gravité des infractions commises.
9 On peut envisager également qu'il soit approprié que ces personnes soient
10 jugées par le TPIY. Quoi qu'il en soit, il faudra arriver à la meilleure
11 solution dans cette procédure, et c'est vrai que cela tient à une loterie
12 en quelque sorte. Certaines affaires seront peut-être renvoyés plutôt vers
13 une juridiction que celle-ci.
14 Quoi qu'il en soit, les affaires que le Tribunal va analyser et que
15 cette formation de renvoi va analyser, va couvrir un certain nombre
16 d'accusés et des situations différentes. L'Accusation devra en juger, le
17 Procureur devra en juger et considérer quels seront ceux qui sont les plus
18 importants ou non. Dans notre argument initial dans cette affaire, nous
19 avons estimé qu'il s'agit tout à fait d'une affaire qui peut être jugée par
20 le TPIY et qui peut également être transférée ou considérée comme une
21 affaire qui peut être transférée. Ce sera aux Juges d'en décider.
22 L'Article 11 bis déclare : "En décidant si oui ou non une affaire
23 devra être renvoyée, la Chambre de première instance, conformément à la
24 résolution du conseil de Sécurité des Nations Unies 1534, doit considérer
25 ou prendre en compte la gravité des crimes commis et le niveau de
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1 responsabilité de l'accusé."
2 Encore une fois, la plupart d'entre nous qui sont parties prenantes à
3 cette procédure estiment qu'il est difficile et parfois un petit artificiel
4 de classer ces affaires dans certaines catégories, si on part des crimes
5 les plus horribles à ceux qui le sont moins. Le meurtre ou l'abus de
6 personnes de ce qu'elles soient au nombre de 5 ou 100, voire encore moins
7 de 1 000 ne peut, en aucune façon, être quelque chose que l'on approuve et
8 ne peut être minimisée en aucune façon non plus. Le conseil de Sécurité,
9 dans sa résolution par rapport à la stratégie d'achèvement, exige qu'une
10 telle procédure soit lancée en tout cas.
11 Nous estimons qu'il est important d'observer ceci avant de parler des
12 questions plus spécifiques relatives à cette affaire. Je me rends compte
13 que mes commentaires sont surtout des commentaires en guise d'introduction
14 qui pourront être débattus au cours de la journée.
15 Nous pensons qu'il est important de noter dès le départ, Monsieur le
16 Président, Messieurs les Juges, que dans cette requête, cette requête
17 devant la Chambre, n'a qu'un lien limité avec les violations qui seront
18 faites par rapport au système juridique et judiciaire dans l'ensemble de la
19 République de Croatie. Nous savons, bien sûr, que différents rapports,
20 études et évaluations ont été faites y compris celles de l'OSCE. A cet
21 égard, néanmoins, la question qui a été soumise au collège des Juges
22 concerne cet averti en question et le renvoi de cette affaire vers les
23 meilleurs tribunaux de Croatie. Il existe des tribunaux spécialisés qui ont
24 été désignés pour entendre des affaires difficiles comme celle-ci. On nous
25 a donné les assurances que les Procureurs, en tout cas, pour ce qui
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1 concerne les questions de procédure et de pratique connaissent fort bien la
2 loi. Des réformes ont été adoptées dans le système juridique et cela
3 signifie aussi que ces tribunaux sont en mesure de recevoir et d'adamettre
4 les éléments de preuve donnés par le TPIY.
5 La Chambre, avec tout le respect, n'a besoin de prendre en compte
6 notre point de vue sur l'éventualité de ce renvoi vers les tribunaux
7 Croates à Split ou à Vukovar, quelle que soit la région dans laquelle le
8 crime a été commis, ou quelles que soient les circonstances. Si le renvoi
9 de cette affaire se fait sous condition des engagements qui ont été donnés
10 par le gouvernement de Croatie. Néanmoins, cela va s'en dire et cela n'est
11 un secret pour personne que la Croatie sait et saura que cette affaire sera
12 suivie de très près du début à la fin. Si le TPIY n'est pas satisfait avec
13 la manière dont se déroule cette affaire, avec la procédure appliquée en
14 Croatie, le TPIY pourra ordonner, en tout cas, le bureau du Procureur
15 demandera à ce que ce renvoi soit retiré et que l'affaire revienne ici.
16 Je vais maintenant me tourner brièvement vers deux sujets. Il s'agit
17 de la gravité des crimes reprochés et le niveau de responsabilité de
18 l'accusé. Encore une fois, aux fins de gagner du temps, je dois vous dire
19 que la gravité des infractions commises a été soulignée et indiquée dans
20 nos différents arguments par écrit, en particulier, les conclusions du mois
21 de novembre. Il s'agit effectivement de crimes très graves. Ce qui s'est
22 passé dans la poche de Medak en septembre 1993 était franchement
23 épouvantable. Cela, il est vrai, portait sur une petite région environ de 5
24 kilomètres sur 5, mais ce qui a complètement ravagé des régions serbes, des
25 maisons, des zones, des villages de toute la région; et nous avançons que
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1 ceci a été fait avec une intention délibérée de façon systématique, ce qui
2 a provoqué la mort d'un bon nombre de personnes, 29 au total, ce qui est un
3 chiffre assez conservateur, 29 victimes serbes, bon nombre d'entre les
4 victimes, des femmes, des personnes âgées sur lesquelles on a tiré avec une
5 arme de courte portée et on leur a tiré dans le dos. La plupart dans des
6 bâtiments qui se trouvent dans la poche de Medoc, environ 168 foyers. Ces
7 maisons et ces bâtiments ont tous été détruits par le feu et par des engins
8 explosifs. L'enquête a montré que malheureusement ces crimes, ces crimes
9 que l'on allègue, se sont commis après l'application d'un cessez-le-feu;
10 c'est-à-dire que ceci ne s'est passé au cours des opérations de combat mais
11 après la fin du combat. De l'essence a intentionnellement été versée
12 partout, et des animaux morts ont été jetés dans les puits aux fins de les
13 polluer. L'enquête a également montré que ces crimes allégués se sont
14 passés alors que les forces des armées croates tentaient délibérément
15 d'empêcher les forces du maintien de la paix des Nations Unies de rentrer
16 dans la région, FORPRONU, ainsi que d'autres organisations. En conséquence,
17 il y a eu une campagne généralisée systématique dans la poche de Medak, ce
18 qui a rendu cet endroit totalement invivable. Ce qui a été fait à dessein,
19 le but était de chasser les Serbes de cette poche et de cette région et de
20 rendre les conditions tellement difficiles, quelles étaient devenues
21 inhabitables, que les personnes ne pouvaient pas retourner. C'est
22 effectivement, une affaire très grave.
23 En matière de responsabilité des accusés, nous avançons Messieurs les
24 Juges, encore une fois, nous en avons parlé dans nos arguments qu'à la fois
25 M. Ademi et M. Norac se trouvent dans les échelons supérieurs, non pas les
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1 échelons supérieurs hiérarchiques, mais les échelons intermédiaires. En
2 tout cas, la première partie de cet échelon intermédiaire. Comme différents
3 accusés qui ont été traduits ici et contre lesquels les actes d'accusation
4 ont été rédigés devant ce Tribunal. Je ne pense pas qu'on puisse même
5 imaginer honnêtement qu'il s'agisse ici d'accusés ayant un niveau
6 subalterne. M. Ademi était, en réalité, un représentant de haut rang et
7 supérieur, et il occupait un poste élevé dans la chaîne de commandement. Il
8 était le commandant en juin, ensuite, il a été nommé commandant par intérim
9 du district militaire de Gospic, une position qu'il tenait au moment où ces
10 crimes lui ont été reprochés. M. Norac était commandant de la 6e Brigade
11 des gardes HV, ce qui par la suite s'est appelée la 9e Brigade motorisée
12 des gardes. Ce qui était la principale unité motorisée qui a été impliquée
13 dans ces atrocités, semble-t-il, commises.
14 Nous avons établi un tableau qui montre la position relative de
15 l'accusé dans la hiérarchie militaire croate. Dans ce tableau figure
16 évidemment le Président Tudjman, au sommet, en tant que commandant en chef.
17 Ensuite, le tableau descend jusqu'au niveau du simple soldat. Par ailleurs,
18 sur ce tableau, nous avons établi une comparaison par rapport aux autres
19 affaires jugées par le TPIY y compris 11 affaires que le TPIY jugera à
20 l'avenir.
21 En résumé, le niveau hiérarchique occupé par l'accusé Ademi peut se
22 comparer en autres aux accusés Krstic, Blaskic, et Stanislav Galic. Nous
23 estimons que M. Ademi occupait un poste comparable au leur. Tant qu'à M.
24 Norac, on peut le comparer à Cerkez et "Tuta." Ce tableau montre également
25 que de nombreuses personnes mises en jugement par ce Tribunal à tort ou à
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1 raison occupaient des niveaux inférieurs que M. Ademi et M. Norac.
2 Je pense que je suis probablement arrivé aux limites du temps qui m'est
3 imparti, mais j'aimerais ajouter quelques commentaires sur quelques autres
4 questions qui seront discutées durant la journée. Bien sûr, une question
5 importante pour la Chambre a été évoquée s'agissant du droit sur le fond et
6 des affaires qui seront considérées comme envisageables pour un renvoi
7 devant la Croatie. Il nous apparaît ainsi qu'à toutes les parties, et aux
8 Amici Curiae que notre accord est nécessaire pour cette décision dans le
9 cadre de l'application d'une loi de 1993, avec quelques variantes, une loi
10 qui s'applique à l'époque où les crimes ont été commis. Il peut y avoir
11 certaines variantes, je viens de le dire, si la convention européenne de
12 Protection des droits de l'homme Article 7(2) s'applique, elle prévoit des
13 exceptions à l'interdiction générale de rétroactivité du jugement par la
14 loi de certains crimes, je cite : "Le procès et la sanction de toute
15 personne pour un acte ou une omission qui à l'époque où il a été commis
16 était criminel selon les principes généraux du droit est reconnu par les
17 nations civilisées."
18 Nous affirmons, Monsieur le Président, que la nature des crimes dont nous
19 parlons ici et les théories de responsabilité que nous invoquons relèvent
20 du droit international à l'époque des événements, c'est-à-dire en 1993.
21 Encore une fois, en quelques mots --
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Scott, avant de poursuivre,
23 vous avez sans doute remarquer qu'il semble y avoir un désaccord assez
24 important tant à l'applicabilité des normes du droit international ou du
25 droit coutumier entre le bureau du Procureur et les Amici Curiae et le
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1 gouvernement croate. Je viens d'entendre, une nouvelle fois, l'expression
2 de votre position mais, pour l'instant, il n'y a pas de réponse fondée sur
3 les motifs pour lesquels les Amici et le gouvernement croate ont des doutes
4 à cet égard. Il serait bon de savoir s'il peut y avoir décisions
5 divergentes au sujet de ces normes du droit international. Pourriez-vous
6 répéter ce que vous venez de dire ?
7 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, oui. Je pensais que nous
8 y viendrions à un certain moment au cours de l'exposé détaillé.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous le faire un peu plus tard
10 dans ce cas ?
11 M. SCOTT : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président. Il me semble,
12 s'agissant de la responsabilité hiérarchique, en particulier, que la
13 question de la responsabilité hiérarchique en tant que théorie de
14 l'Accusation a été déjà suffisamment traitée par les tribunaux croates
15 jusqu'à présent.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai rien contre que vous reveniez
17 sur le sujet de la responsabilité hiérarchique, cela me semble un sujet
18 tout à fait urgent. Veuillez procéder.
19 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, pour répondre à vos
20 questions et en prévision des débats qui vont venir, il nous semble que les
21 Amici de l'Etat de Croatie préférait une solution équilibrée au problème du
22 droit national croate qui pourrait prendre la forme de statut du code pénal
23 en vue de mettre en œuvre ce statut afin de répondre aux dispositions de
24 l'Article 7(3) du Statut du TPI sur la responsabilité hiérarchique. Dans
25 l'ensemble, l'Accusation est d'avis, comme nous l'avons savoir il y a
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1 quelques jours, que c'est à la Chambre qu'il appartient de traiter des
2 questions d'application du droit international qui fournirait une base
3 fiable pour le renvoi de telles affaires devant les tribunaux croates. Nous
4 estimons qu'il faut qu'il y ait une prise en compte complète du Protocole 1
5 de la convention de Genève qui était en vigueur à l'époque, ainsi que des
6 dispositions du droit coutumier où la responsabilité hiérarchique est un
7 aspect qui est pris en compte comme l'appel interlocutoire Hadzihasanovic
8 l'a admis.
9 Monsieur le Président, certaines applications du droit national et,
10 notamment, la question de l'intention délictueuse du mens rea joue un rôle
11 important à cet égard. L'intention indirecte et la négligence non-
12 intentionnelle, je suppose, feront l'objet de nos débats durant la journée
13 d'aujourd'hui. Faute de temps, je suis empêché de vous présenter les autres
14 commentaires que j'aurais pu vous présenter en ce moment même.
15 A moins que les Juges n'aient des questions à me poser, j'en arrive à la
16 conclusion de mon propos en disant que, pour l'essentiel, l'Accusation a
17 examiné la question, a pris en compte les nouveaux actes d'accusation, a
18 examiné le droit croate; et il serait malhonnête de dire que nous n'avons
19 aucune préoccupation sur toutes ces questions, ce sont des questions qui
20 légitiment peuvent susciter une certaine préoccupation, mais dans
21 l'ensemble nous pensons qu'il existe un fondement justifié et de bonnes
22 conditions en Croatie apparemment pour que des tribunaux spéciaux, à savoir
23 ceux qui ont été créés, et compte tenu de la nouvelle législation qui a été
24 adoptée, nous pensons que les conditions sont satisfaisantes pour un tel
25 renvoi. Merci, Monsieur le Président.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Scott.
2 [La Chambre de première instance se concerte]
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous pouvons poursuivre. Nous allons, à
4 présent, donner la possibilité à la Défense de
5 M. Ademi de s'exprimer.
6 M. PRODANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président,
7 Messieurs les Juges, collègues de l'Accusation, représentants du
8 gouvernement, à savoir, Amici Curiae.
9 Je dirais avant tout, et c'est la position générale de la Défense du
10 général Ademi, que nous sommes d'accord avec la proposition de
11 l'Accusation, à savoir que l'affaire Ademi/Norac soit renvoyée devant la
12 justice croate, compte tenu, bien sûr, de la stratégie d'achèvement comme
13 on l'appelle du TPI, et de tout ce qui a été fait depuis une date récente,
14 en particulier, compte tenu de la Résolution 1534 des Nations Unies. Je ne
15 souhaite pas répéter ce que l'Accusation vient de dire, bien que, j'y serai
16 contraint dans une certaine mesure. Bien sûr, les crimes jugés par le
17 Tribunal, dans les locaux duquel nous nous trouvons, se divisent en crimes
18 de gravité variable. Nous nous exprimons, bien sûr, en termes relatifs, et
19 c'est ce qui nous pousse à utiliser ce terme. Bien sûr, certaines personnes
20 ont été jugées qui étaient de rang inférieur, soit par leur grade, soit par
21 leur position dans la hiérarchie militaire.
22 Cependant, nous sommes guidés par des critères qui reposent sur les
23 conditions invoquées par l'Accusation, à savoir la connaissance de la
24 situation et, selon ces critères, tous les procès ne sont pas à juger par
25 ce Tribunal. Nous estimons, dans ces conditions, qu'il serait juste de les
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1 renvoyer devant la justice croate. Pourquoi ? Parce qu'à notre avis, dans
2 l'affaire qui nous intéresse, certains crimes ne sont parmi les plus
3 graves, ils peuvent se situer, dirons-nous, à un niveau intermédiaire de
4 responsabilité et de gravité, ils n'impliquent pas des responsables
5 officiels de plus haut rang, que ce soit sur le plan politique ou
6 militaire, et par conséquent, les critères du tribunal sont respectés.
7 Mon introduction n'était qu'un début, je pense qu'il faut tout de même être
8 conscient qu'il est question de crimes importants; d'accusés qui avaient un
9 certain niveau de responsabilité et des positions d'une certaines
10 importance; mais il faut en même temps être conscient du fait que ces
11 procès ne peuvent être jugés dans les délais requis compte tenu des
12 capacités réduites de ce Tribunal à l'heure actuelle. Par conséquent il est
13 indispensable d'en arriver à la solution dont il était question, il y a
14 quelques minutes. S'agissant de la teneur de l'Article 11 bis, et j'ai
15 mentionné un certain nombre de limites de ce Tribunal, mais dès lors que
16 nous parlons de la sentence, la Défense n'est pas toujours d'accord avec
17 les allégations contenues dans les actes d'accusation dressés par
18 l'Accusation, nous reviendrons sur ce point lorsque les plaidoiries
19 commenceront, mais la Défense tient à dire d'emblée que nous pensons que,
20 compte tenu de la période réduite qui fait l'objet de l'acte d'accusation,
21 il est question d'opérations militaires justifiées. La seule chose qui
22 n'est pas encore très certaine, c'est est-ce que les victimes ont été le
23 résultat d'actions militaires ou le résultat d'actions répréhensibles comme
24 l'affirme le Procureur de la part de leurs auteurs. Ces questions devront
25 être résolues au cours du procès.
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1 Quand au niveau de responsabilité, donc à l'importance de la position
2 occupée par le général Ademi, la Défense reviendra sur la position qu'elle
3 a déjà exposée au moment de son propos liminaire, à savoir que le général
4 Ademi n'a jamais, dans la réalité, exercé un control effectif sur toutes
5 les unités militaires présentes dans la région pendant les actions
6 concernées. L'Accusation affirme que lorsque nous avons parlé du grade du
7 général Ademi, nous nous sommes laissé aller à un débat théorique ou
8 virtuel. Mais regardons ce qui s'est passé en 1993, le général Ademi, bien
9 entendu, agissait en corrélation avec d'autres accusés, autrement dit avec
10 d'autres personnes. Nous avons affirmé, et ceci confirmait les propos du
11 Procureur d'une certaine façon, que l'accusé Ademi, au moment évoqué dans
12 l'acte d'accusation, n'occupait pas un rang supérieur aux autres officiers
13 militaires présents sur le territoire des opérations. Au moment des
14 opérations, il y avait quatre généraux dans la région dont chacun occupait
15 des fonctions tout à fait précises et participait du point de vue de
16 l'émission des ordres et de la réalisation des opérations d'une façon tout
17 à fait spécifique. Donc, l'accusation admet d'ailleurs que le général
18 Bobetko a été mis en accusation pour des actes tout à fait similaires
19 compte tenu du fait qu'il était celui qui avait conçu, ordonné et supervisé
20 l'opération. Or deux autres généraux sont en cause également pour ces mêmes
21 opérations, ils se trouvaient dans la poche de Medak à l'époque des faits
22 et chacun d'entre eux, à sa façon, y a joué un rôle déterminé.
23 Je me résume, à l'époque des faits, le général de brigade Ademi n'était que
24 théoriquement le suppléant du commandant. Donc il avait un contrôle sur les
25 unités de jure, mais étant donné que c'est le Grand quartier général qui a
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1 planifié les opérations, on le voit dans l'ouvrage dont le général Bobetko
2 est l'auteur, compte tenu du fait qu'au moment des opérations il y a eu
3 communication directe entre le Grand quartier général et les unités de rang
4 inférieur alors que le général Adémi n'était pas au courant, compte tenu de
5 tout cela il est absolument indubitable que le général Ademi n'était pas le
6 point de départ de toutes ces opérations contrairement aux affirmations et
7 allégations de l'Accusation.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Prodanovic, je comprends qu'afin
9 de déterminer le niveau de gravité des crimes et le niveau de
10 responsabilité, s'en tenir à la lettre de l'acte d'accusation peut ne pas
11 permettre d'interpréter à juste titre ou d'interpréter correctement les
12 allégations retenues contre votre client. Par ailleurs, si nous entrons
13 exagérément dans les détails de l'affaire sur le fond, je tiens à vous dire
14 que les Juges de cette Chambre n'ont pas lu l'ouvrage dont le Général
15 Bobetko est l'auteur. Ils n'ont pas entendu les témoins parlant de cela.
16 Nous ne parlons pas ici du détail des motifs qui pourraient justifier un
17 renvoi devant d'autres tribunaux. Je vous prierais, par conséquent, de vous
18 en tenir aux faits pour le moment et de vous prononcer sur ce qui est
19 indispensable afin de déterminer la gravité des crimes et le niveau de
20 responsabilité tels qu'indiqué dans l'acte d'accusation. Veuillez procéder.
21 M. PRODANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'en ai
22 terminé d'ailleurs sur l'exposé des faits. J'ai dit à l'avance que j'allais
23 me permettre d'entrer dans ce sujet même s'il est tout à fait clair qu'en
24 ce moment même ce n'est pas l'aspect le plus important des choses. Mais je
25 voulais répondre à l'Accusation d'une certaine façon puisque le Procureur a
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1 lu le livre du général Bobetko. Pour moi, il est tout à fait clair
2 également qu'il n'existe aucun réel critère qui, en droit, permet de
3 déterminer exactement la gravité d'un acte déterminé, car il n'existe pas
4 dans le Statut du Tribunal pénal international un barème des sentences
5 selon la gravité des actes. C'est la raison pour laquelle, nous avons
6 essayé de trouver des critères auxiliaires puisqu'il est dit ici que les
7 actes dont notre client est tenu responsable sont d'une telle gravité qu'il
8 est indispensable d'agir de cette façon. Je souhaitais dire cela s'agissant
9 de la gravité du crime, mais du niveau de responsabilité de mon client
10 l'accusé, le général Ademi.
11 S'agissant du cadre juridique qui préside à ce procès, la Défense aimerait
12 joindre sa voix à celle des Amici Curiae et du représentant du gouvernement
13 qui affirme que le principe de la légalité et l'interdiction de la
14 rétroactivité sont des principes de base dans nos débats.
15 J'ai lu l'ordre du jour de l'audience d'aujourd'hui et j'ai constaté qu'il
16 serait largement question des possibilités concrètes de jugement devant une
17 instance judiciaire croate. J'ajouterais simplement à ce qui a été dit
18 jusqu'à présent, que vu les conditions réelles en Croatie il existe des
19 possibilités effectives de juger de tels crimes, notamment ceux qui
20 résultent de l'Article 3.7 du Statut, à savoir des procès intentés pour
21 responsabilité hiérarchique. Nous sommes tout à fait d'accord avec les
22 Amici Curiae et les représentants du gouvernement qu'en au fait que
23 s'agissant de l'omission de prévention d'un crime, il faut la considérer
24 selon les dispositions du code pénal applicable tel que prescrit en 2003.
25 Autrement dit, dès lors qu'un crime a été commis, son auteur doit être
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1 traduit en justice avec application des sentences prévues dans le code
2 pénal à l'époque. Je tiens à appeler votre attention sur l'Article 18 du
3 code pénal ainsi que sur les dispositions de la convention internationale
4 dont l'application est envisageable lorsque des sentences ne sont pas
5 prévues dans les codes pénaux nationaux pour punir certains crimes.
6 Je vois que le temps qui m'est imparti s'écoule très rapidement, donc j'en
7 arriverais d'emblée à un certain nombre de questions qui nous ont été
8 posées auxquelles nous avons déjà répondues par écrit, et je m'efforcerai,
9 bien entendu, d'être le plus concis possible. Les Tribunaux de la
10 République de Croatie ont, d'une certaine façon, appliqué déjà les
11 conditions prévues par ce Tribunal. Je rappelle, ici, que Dinko Sakic a été
12 jugé en Croatie pour son activité dans le camp de Jasenovac, et qu'il a été
13 condamné entre autres pour le fait de n'être pas intervenu au moment où un
14 certain nombre de crimes ont été commis dans ce camp de Jasenovac à
15 l'époque.
16 S'agissant des problèmes éventuels que pourraient poser la protection des
17 témoins, autrement dit, la protection des victimes, tout ce que je puis
18 dire, c'est qu'en Croatie, le problème est relativement bien réglé grâce
19 aux dispositions du code de procédure pénal, du code de la police, et
20 d'autre acte législatif. Je l'ai déjà dit au moment de mon propos
21 liminaire; je n'y reviendrai pas. Bien sûr, la condition préalable c'est
22 que dans toutes ces affaires les témoins puissent être protégés, et un juge
23 de la Cour suprême de Croatie a été nommé pour se charger exclusivement de
24 cette tâche dans le cadre d'une commission qu'il préside. Je sais bien que
25 les victimes et les témoins ont quelques craintes par rapport à leur
Page 23
1 protection qui pourrait ne pas être totalement assurée. Ils craignent un
2 certain danger, mais je ne crois vraiment pas que cette question puisse
3 intervenir de façon significative et s'écarter grandement des dispositions
4 prises à cet égard par le TPIY.
5 Quant à l'assistance judiciaire internationale, elle est réglementée par
6 des dispositions tout à fait précises. Elle intervient dans de nombreuses
7 circonstances dès le début du processus, c'est-à-dire, dès l'audition
8 préalable des témoins. Etant donné que la Yougoslavie, l'ancienne RSFY,
9 n'existe plus, un grand nombre de témoins résident hors du territoire de la
10 République de Croatie, des problèmes concrets peuvent se poser. Cela étant
11 la pratique, de l'aide judiciaire internationale a déjà été utilisée
12 largement par la République de Croatie qui est très accoutumée à y avoir
13 recours.
14 L'Accusation a évoqué, il y a quelques instants, le rapport de l'OSCE
15 relatif aux sentences prononcées à l'issu de procès pour crimes de guerre
16 dans la République de Croatie. Ce rapport est assez négatif par rapport à
17 la justice croate, mais dans notre réponse nous avons dit que nous
18 estimions que la situation était dépeinte de façon déformée dans ce
19 rapport, car ce rapport traite d'une période de dix ans, et la plupart des
20 objections sont directement dirigées vers des procès qui avaient lieu au
21 début de la période, c'est-à-dire, avant le début des évolutions
22 judiciaires en République de Croatie. Ces critiques très virulentes à
23 l'égard du système judiciaire de la République de Croatie existent, mais
24 elles sont formulées également, et ce de façon tout à fait publique sur le
25 territoire de la République de Croatie. Nous avons, en République de
Page 24
1 Croatie, émis certaines critiques qui ont fait l'objet d'ailleurs de
2 jugement différent de la part de la Cour suprême en dernière instance.
3 Certains procès, par ailleurs, ont été menés de la meilleure façon qui soit
4 conformément aux normes les plus élevées du droit international et du droit
5 voulu par la communauté internationale. Le président Meron a dit son avis
6 tout à fait favorable par rapport à la situation actuelle, en République de
7 Croatie, et par conséquent, je pense que le renvoi des affaires dont nous
8 parlons ne poserait aucun problème. Le système judiciaire croate mènera ces
9 procès comme il se doit. C'est déjà ce qui s'est passé dans l'affaire
10 Gospic, que nous connaissons tous.
11 J'en arrive à la fin du temps qui m'est imparti. J'espère que j'ai évoqué
12 les points les plus importants qu'il était indispensable que j'évoque. Bien
13 sûr, il existe certains risques qu'il faut prendre en compte, mais ils ne
14 sont absolument pas d'une importance suffisante pour justifier une décision
15 négative par rapport au renvoi de cette affaire devant les tribunaux
16 croates.
17 Je vous remercie.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Prodanovic, vous avez évoqué
19 l'Article 18 du code pénal croate lorsque vous parliez de l'application du
20 droit international. Je ne suis pas sûr que les Juges de cette Chambre
21 disposent du code pénal croate. Pourriez-vous, je vous prie, donner lecture
22 de cet Article 18.
23 M. PRODANOVIC : [interprétation] Très franchement, j'ai mentionné cet
24 article après avoir lu un certain nombre d'articles du code pénal. Or, je
25 n'ai pas le code pénal croate sur moi aujourd'hui, mais c'est lorsque j'ai
Page 25
1 fait une comparaison entre divers articles du code et l'interprétation
2 qu'en faisaient d'auteurs que j'ai décidé de citer cet article. Je n'ai pas
3 le code pénal sur moi aujourd'hui.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous nous en donner la teneur ?
5 M. PRODANOVIC : [interprétation] La teneur de cet article est la suivante :
6 à savoir que si certains actes ne sont pas sanctionnés par le code pénal de
7 la République de Croatie, grâce au fait qu'un certain nombre de conventions
8 internationales ont été adoptées par la République de Croatie, les
9 incriminations peuvent être reprises au titre de ces conventions
10 internationales.
11 Je n'ai pas fait d'erreur.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je vois que le représentant du
13 gouvernement croate et les Amici Curiae procèdent en ce moment un exercice
14 de vérification. Je crois comprendre, Maître Prodanovic, que vous n'avez
15 rien contre à vous faire aider par ces juristes.
16 M. PRODANOVIC : [aucune interprétation]
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais que l'on nous donne la teneur
18 de l'Article 18 du code pénal. Maître Prodanovic, vous avez parlé du
19 paragraphe 2, n'est-ce pas ?
20 M. HORVATIC : [interprétation] Monsieur le Président, il n'est pas question
21 de l'Article 18. D'ailleurs, il faut bien que nous sachions que nous
22 mettons en balance deux articles du code pénal; l'un qui réglementait les
23 sanctions prononcées dans le cadre des sanctions appliquées aux actes dont
24 M. Ademi et M. Norac sont accusés dans le cadre de la loi 1993. Par
25 ailleurs, il y a une autre loi qui est entrée en vigueur le 1er janvier
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1 1998, lorsque le nouveau code pénal a été adopté. Il ne peut y avoir
2 rétroactivité dans l'affaire qui nous intéresse, mais les principes qui
3 régissent le nouveau code pénal font que, le droit international dans
4 certains cas peut être considéré comme source droit national croate, ce
5 principe s'appliquera à tous les procès pour crimes de guerre commis avant
6 l'entrée en vigueur de la loi de 1998, étant donné l'application de l'état
7 de droit. Ceci ne figure pas à l'Article 18. C'est un principe général qui
8 sous-tend le système judiciaire croate à l'heure actuelle.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Professeur Horvatic, bien sûr vous aurez
10 la possibilité plus tard d'expliquer la position du gouvernement que vous
11 représentez, mais en ce moment nous aimerions simplement savoir ce que
12 contient l'article du code cité par Me Prodanovic.
13 Maître Prodanovic, je dois dire que dans vos écritures nous avons eu
14 quelques problèmes à déterminer les sources des positions défendues par vos
15 arguments écrits. La Chambre aimerait vraiment recevoir le texte de
16 l'article du code que vous avez cité ce matin. Donc, nous aimerions
17 recevoir par écrit, l'Article 18, paragraphe 2, puisque vous l'avez évoqué
18 dans vos arguments oraux ce matin. Cela serait-il possible, peut-être, au
19 cours de la pause ?
20 M. PRODANOVIC : [interprétation] Je crains fort que cela ne soit pas
21 possible aujourd'hui.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Essayez tout de même de le faire
23 aujourd'hui, parce que cela pourrait être un élément important par rapport
24 aux arguments qui seront développés plus tard dans la journée. Nous
25 aimerions, donc, beaucoup avoir ce texte sous les yeux.
Page 27
1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le passage en question est disponible en
2 page 4 de vos propos du 3 février. Je vous le dis à titre d'information.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
4 Maître Prodanovic, merci, de votre exposé. Auriez-vous quelque chose à
5 ajouter, parce que le temps passe. Vous avez encore quelque temps, mais si
6 vous en avez terminé --
7 M. PRODANOVIC : [interprétation] Vous m'avez accordé 20 minutes, si je ne
8 m'abuse.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais si vous regardez la montre,
10 vous verrez que le temps passe très vite. Pas mal de temps a été utilisé
11 dans cette discussion.
12 M. PRODANOVIC : [interprétation] En tout cas, j'en ai terminé, Monsieur le
13 Président. Merci.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Maître Olujic, je vous donne à
15 présent la parole.
16 M. OLUJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je souhaite
17 remercier mes éminents confrères également et saluer toutes les personnes
18 présentes dans le prétoire; des représentants de la République de Croatie,
19 les Amici Curiae, ainsi que mes collègues de la Défense.
20 Au cours des propos liminaires de mes confrères ainsi que des conseils de
21 la Défense, je constate qu'il est très difficile lorsqu'on évoque une
22 question comme celle que nous évoquons aujourd'hui, de ne pas aborder les
23 faits par rapport aux crimes qui sont allégués dans l'acte d'accusation.
24 Bien évidemment, je vais essayer d'éviter le sujet, mais je dois néanmoins
25 évoquer les arguments présentés par mes confrères, lorsque M. Scott a dit
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1 que cette affaire pourrait être jugée soit devant le TPIY, soit devant les
2 tribunaux croates. Avec tout le respect que je lui dois, j'estime qu'il
3 s'agit là d'un stratagème rhétorique, car aujourd'hui nous parlons d'une
4 affaire qui a été lancée à l'origine par l'Accusation, et à propos de
5 laquelle l'Accusation demande le renvoi devant un tribunal croate.
6 Les craintes exprimées par mes confrères à propos des tribunaux
7 croates et de leur fonctionnement sont des craintes tout à fait infondées.
8 Si l'Accusation souhaite avoir les meilleurs procureurs pour juger cette
9 affaire, ce sera chose faite; mais nous avons besoin également des
10 meilleurs conseils de la Défense qui soit, évidemment, car nous voulons
11 tous que la vérité, que la lumière soit faite sur la vérité. Nous savons
12 tous qu'aux termes de l'Article 11 bis, non seulement il y a possibilité de
13 suivre le procès à tout moment, mais la possibilité de désaisir ce Tribunal
14 et de le renvoyer auprès de ce Tribunal s'il existe toujours, si le cas se
15 présente, et si quelque chose qui n'est pas conforme à la loi ait commis.
16 Je suis sûr que l'intention derrière cette disposition est une intention
17 tout à fait louable. Autrement dit, un procès ne doit pas être mené au
18 détriment de l'accusé. Là, il s'agit encore d'une question tout à fait
19 théorique. Les droits de la Défense peuvent être violés également si
20 l'affaire est renvoyée devant le TPIY.
21 Messieurs les Juges, vous avez déjà une certaine garantie. Nous, en
22 tant qu'équipe de la Défense, nous sommes tout à fait d'accord avec la
23 requête qui a été déposée par l'Accusation, comme l'atteste l'ensemble de
24 notre correspondance avec ce Tribunal ainsi que toutes les requêtes que
25 nous avons déposées. Quoi qu'il en soit, nous sommes entièrement convaincu
Page 29
1 que la Chambre en République de Croatie sera une Chambre tout à fait
2 objective [comme interprété], si vous décidez de renvoyer cette affaire
3 devant un tribunal croate. Nous sommes tout à fait certain qu'une chambre
4 croate ne sera pas bien disposée envers mon client, étant que mon client a
5 été déjà condamné à 12 ans d'emprisonnement. Ceci a été décidé par la Cour
6 d'appel de Croatie. C'est un des arguments, Monsieur le Juge, que vous
7 allez certainement examiner lorsque vous allez procéder à vos délibérations
8 et rendre une décision.
9 Je souhaite, Messieurs les Juges, parler très brièvement de la
10 question de la responsabilité hiérarchique, ou de son niveau de la
11 responsabilité plutôt, car j'estime que l'Accusation n'a pas suffisamment
12 décrit la position qu'occupait mon client. Comme l'Accusation l'a décrit,
13 nous devrions le faire de toute façon de deux façons, mais l'Accusation n'a
14 pas suffisamment indiqué la différence qui existait entre un grade
15 militaire et le rôle joué par un commandant en matière de tempore criminus
16 suspecti qui est la position qu'occupait mon client. Je crois qu'avec tout
17 le respect que je dois à mes éminents confrères, il ne faut pas confondre
18 la position de mon client, Mirko Norac, qui était colonel à l'époque. Nous
19 ne devrions pas confondre sa position avec ce rang dans d'autres armées. La
20 Défense a étudié les différents rangs dans les différentes armées, allant
21 du rang de colonel à celui de général. Entre ces grades, entre les grades
22 de colonel et de général, il y a également un général de brigade et un
23 brigade détaché au près de l'état-major. Des brigadiers détachés auprès de
24 l'état-major sont des grades qui sont au-dessus des grades de colonel dans
25 l'armée croate. Les grades dans l'armée croate, si on les compare avec les
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1 armées occidentales, sont maréchal de campagne, général, général de
2 division, et lieutenant général ---.
3 L'INTERPRÈTE : Il s'agit de la traduction proposée par le conseil de
4 la Défense.
5 M. OLUJIC : [interprétation] La position du général de brigade Ademi,
6 à l'époque, n'a pas été clairement précisée. Il y avait d'autres supérieurs,
7 Yoracic [phon], le général Bobetko, par exemple, qui était sous le
8 commandement direct du ministère de la Défense. Entre le ministère de la
9 Défense et le général de brigade Ademi, il y avait un certain nombre de
10 généraux et de brigadiers détachés à l'état-major, sans parler de cette
11 relation qui existait avec le colonel Norac.
12 Pour ce qui est de la position de l'Accusation, nous ne contestons pas le
13 fait que le conseil de Sécurité a adopté la Résolution 1534 et que suite à
14 cette résolution ou conformément à celle-ci cette Chambre spéciale
15 considère qu'il s'agit là d'une définition des critères qui doivent être
16 appliqués. Dans le cas Aleksovski, par exemple, quel que soit le grade
17 occupé, cette affaire ne serait pas jugée devant ce Tribunal-ci
18 conformément ou en application de cette Résolution 1534. J'estime qu'il
19 n'est pas nécessaire de revenir en arrière, mais qu'il faut plutôt prendre
20 en compte les requêtes qui sont déposées à l'heure actuelle à lumière de la
21 Résolution 1534 et en faisant cela, Messieurs les Juges, vous allez
22 certainement comprendre qu'il s'agit d'une affaire qui peut absolument être
23 renvoyée devant les tribunaux croates.
24 Messieurs les Juges, en réponse aux questions que vous avez posées à la
25 Défense, votre première question portait sur le droit applicable dans cette
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1 affaire, à savoir si la loi de 1993 ou si c'est le code pénal de 2004 qui
2 devait être appliqué ? La Défense est d'avis qu'il ne peut y avoir aucun
3 doute sur la question et l'ad tempore criminus suspecti est la loi qui
4 s'applique ici et qui est davantage en faveur de l'accusé. Je constate que
5 c'est également la position adoptée par la République croate ainsi que les
6 Amici Curiae, c'est la loi de 1993 qui doit être appliquée ici, car le code
7 pénal de la République de la Croatie ainsi que tout le droit romano-
8 germanique, tous ces systèmes se fondent sur le nullum crimen sine lege et
9 la Défense considère que cette question en juridique ne peut pas jouer un
10 rôle prépondérant lorsqu'il s'agit de décider de renvoyer cette affaire
11 devant les tribunaux croates. Si vous deviez décider qu'il était important
12 que cette procédure soit conforme à la loi et lorsque la Chambre va rendre
13 sa décision, de savoir quel type de peine va être appliquée ou s'il y aura
14 un acquittement, ceci doit être fait conformément à la loi.
15 La deuxième question portait sur les mesures de protection qui sont
16 disponibles en Croatie pour les victimes et les témoins et comment de
17 telles mesures pourraient-elles être accordées ? Encore une fois, je
18 souhaite vous parlez des débats auxquels j'ai assisté en Croatie lorsque le
19 général Norac a été accusé et condamné à 12 ans d'emprisonnement, ce qui
20 est une peine très lourde. Au cours de ce procès, il y avait des dizaines
21 de témoins qui n'avaient rien de particulier à dire à propos de l'acte
22 d'accusation mais qui ont témoigné néanmoins devant la Chambre, mais cela
23 n'a posé aucune difficulté particulière.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous avez fait part de vos
25 observations dans votre argument par écrit, vous avez critiqué la procédure
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1 telle qu'elle a été organisée dans cette affaire contre
2 M. Norac, ce n'est pas quelque chose que nous pouvons examiner ici, à
3 savoir si ce témoin a menti ou n'a pas menti dans le cadre de ces débats-
4 là. Cela va bien au-delà de ce que cette Chambre de première instance est
5 en mesure de traiter. Je crois que vous n'auriez même pas dû en parler dans
6 votre conclusion par écrit, car ici vous répétez ce qui s'est produit au
7 cours d'une audience orale, et ceci n'est pas approprié.
8 M. OLUJIC : [interprétation] Je vais être bref, et je crois que quoi qu'il
9 en soit, si je soutiens ce qu'on dit mes éminents confrères au cours de
10 leur requête, je crois que les arguments des Amici Curiae ainsi que des
11 représentants de la République croate, je crois que cette affaire a tous
12 les éléments nécessaires et peut être renvoyée sans aucune réserve devant
13 la République de Croatie qui mènera les débats contre M. Norac et M. Ademi
14 conformément à la loi. Merci.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Olujic.
16 [La Chambre de première instance se concerte]
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaite donner l'occasion aux Juges
18 de la Chambre de poser d'autres questions, des points de clarification si
19 les Juges de la Chambre le souhaite. Nous n'avons pas besoin d'aborder ceci
20 en détail, mais peut-être qu'il y a des questions.
21 Le Juge Kwon.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Scott, simplement une remarque.
23 Vous avez parlé de l'éventualité qui existait pour les tribunaux croates
24 d'appliquer le droit international, entre autres le Protocole numéro 1 de
25 la convention de Genève et vous avez également indiqué que vous étiez
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1 soucieux à propos de l'application du droit national dans certains domaines
2 comme le mens rea, l'intention délictueuse. Est-ce que cette demande dépend
3 des réponses que vous allez obtenir à cette question. Autrement dit, votre
4 position est bien connue des parties et la Chambre pourrait répondre
5 davantage si elle entendait les réponses du gouvernement croates et des
6 Amici Curiae.
7 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Monsieur Juge
8 Kwon.
9 L'Accusation évalue l'acte d'accusation actuel, cette affaire contre cet
10 accusé en estimant qu'il ne s'agit pas de quelque chose qui porte
11 uniquement sur la question de la responsabilité hiérarchique en vertu du
12 7(3). Cela étant dit, nous aimerions tenir compte d'une composante
13 importante, à savoir que l'Accusation nous souhaitons ici être prudent et
14 c'est la position du Procureur du TPIY. En Croatie, il est important que
15 cette théorie de la responsabilité hiérarchique telle qu'elle est pratiquée
16 en matière de droit international et par le TPIY. Donc, c'est la pratique
17 du TPIY, la jurisprudence du TPIY qui autorise des poursuites, si vous
18 voulez sur le principe de "avait raison de" ou "devait savoir", ce critère-
19 là qui est utilisé et qui porte sur le mens rea, l'intention délictueuse,
20 Monsieur le Juge Kwon, c'est une question que j'ai déjà évoquée.
21 Avant de parler davantage de la question du mens rea, de l'intention
22 délictueuse, je crois que votre question porte pour l'essentiel sur ceci.
23 Oui, il est vrai que l'Accusation au bout du compte estime que c'est ni
24 l'Accusation, ni les Juges de la Chambre n'étaient suffisamment sûrs et
25 n'avaient les assurances nécessaires qui lui permettaient de croire que les
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1 tribunaux croates allaient juger de cette question de la responsabilité
2 hiérarchique en bonne et du forme, je crois pose la question de savoir si
3 cette affaire doit être transférée. Bien sûr, nous avons posé nos
4 conditions, nous avons évalué la situation et je crois que c'est ici le
5 droit international qu'il faudrait appliqué. Mais nous estimons qu'il y
6 aurait un fondement ici et ce fondement est celui que nous avons exposé. Ce
7 sera important pour nous, et c'est ce que nous avons indiqué dans votre
8 requête mais je suis d'accord, Monsieur le Juge Kwon, si la question
9 portait là-dessus, je crois qu'effectivement nous serions très inquiets.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Scott.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai quelques questions à vous poser,
12 Monsieur Scott, étant donné que vous êtes debout. Je souhaite attirer votre
13 attention à la page 2 de la dernière écriture, datée du 20 janvier.
14 M. SCOTT : [interprétation] C'est l'écriture de l'Accusation ?
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. A la page 224.
16 J'essaie de comprendre vos commentaires à la lumière de l'Article 28, au
17 paragraphe 2. "Article 28, paragraphe 2, précise qu'un manquement a la
18 possibilité d'empêcher, s'il existe, la capacité juridique d'empêcher, 'si
19 un tel manquement correspond à une commission des crimes en agissant.'"
20 J'essaie de comprendre cette phrase. J'ai deux questions à cet égard à vous
21 poser. Deux fois, nous avons ici le terme "si", si nous avons le devoir
22 juridique d'empêcher quelle est la conséquence ? Si un tel manquement
23 équivaut en termes juridiques à la commission du crime en agissant en même
24 temps.
25 S'il y a manquement à agir de par sa nature même, cela ne correspond pas à
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1 dire qu'il s'agit d'un acte en tant que tel, c'est la raison pour laquelle
2 nous avons besoin ici d'arguments juridiques à l'appui, aux fins de nous
3 prémunir contre ce genre de situations. Mais dans la dernière partie de la
4 phrase : "Si de tels manquements et agissements correspondent à la
5 commission d'un crime par ces actes." Vous dites que cela veut dire la même
6 chose." Nous essayons ici de signaler les différences. Pourriez-vous nous
7 préciser ceci, s'il vous plaît ?
8 M. SCOTT : [interprétation] Je vais tenter de le faire. Je crois que les
9 termes utilisés sont une traduction de l'Article 28, c'est ainsi que je
10 comprends les choses. Peut-être qu'il s'agit d'une question de traduction
11 ou cela correspond, je ne sais pas, au statut croate. Bien, évidemment, il
12 y a une omission ici, dans la plupart des systèmes juridiques, y compris en
13 Croatie, on parle d'omission, et l'omission n'est considérée que criminelle
14 si la personne qui a omis d'agir avait l'obligation d'agir d'une manière ou
15 d'une autre. Autrement dit, il ou elle avait l'obligation de faire quelque
16 chose, elle ne l'a pas fait -- ou devait faire quelque chose. Dans ce sens-
17 là, il y a un manquement à avoir agi ou avoir fait quelque chose
18 conformément à la loi ou de quelques cas juridiques qui lui demandaient
19 d'agir.
20 C'est ainsi que l'on définit l'infraction pour ce qui est des termes
21 utilisés si de tels manquements en sens et en acte correspondent à la
22 commission des crimes en agissant, j'interprète ceci, et les représentants
23 de la République croate et les Amici Curiae peuvent me corriger ici, mais
24 j'interprète ceci, pensant qu'une personne qui participe à la commission
25 d'un crime en manquement ou ne l'empêche pas a une responsabilité qui est
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1 identique à celle qui commet le crime en question. Je ne pense que ceci
2 soit forcément un concept inusité où les co-auteurs, ou l'entreprise
3 criminelle commune, ou aider et encourager. Si l'on contribue au crime, on
4 contribue en omettant d'empêcher, cela correspond à mon sens à ce que
5 commettent les auteurs sur le terrain. C'est ainsi que je l'entends.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En même temps, il y avait un "si." Tous
7 les manquements ne sont pas classés dans cette catégorie. Tous les
8 manquements ne sont pas identiques. La question juridique est celle-ci : de
9 quel côté cela se penche-t-il ? Si c'est oui ou si c'est non. Je crois que
10 la question se pose en ces termes-là. Comme je vous l'ai dit précédemment
11 lorsqu'on le lit, si c'est vrai, c'est vrai.
12 M. SCOTT : [interprétation] Encore une fois, je suis d'accord avec vous,
13 Monsieur le Président. J'accepte que mes collègues croates me contredisent.
14 Je crois qu'il s'agit là des termes adoptés dans le statut de la République
15 de Croatie. Je crois qu'il s'agit là de points importants et c'est ce qui
16 fait que nous nous écartons de ce droit national, et nous essayons de
17 trouver la réponse dans le droit national, et c'est la raison pour laquelle
18 nous préférons nous tourner vers le droit international de façon à avoir un
19 meilleur fondement.
20 Pour répondre davantage à votre question, y a-t-il une obligation d'agir et
21 tous les manquements ne sont pas forcément criminels ? On revient à la
22 question du mens rea, de l'intention délictueuse. A moins que l'on ne
23 puisse arriver au point où nous sommes satisfait du fait que la notion du
24 mens rea dans le droit croate existe dans la même mesure où il est appliqué
25 par le TPIY, à ce moment-là, nous pourrions nous reposer là-dessus. Je
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1 crois que les différents statuts du droit croate ont été cités par les
2 Amici
3 Curiae et par les représentants.
4 Il me semble qu'aucun crime commis par négligence ne figure dans la loi
5 croate, on parle ici de négligence avérée, de négligence involontaire. J'ai
6 remarqué en même temps qu'il y a un statut qui évoque très précisément la
7 question de la négligence dans un cadre pénal et peut-être que le conseil
8 souhaite aborder cette question-là. Mais cela est toute la série de
9 questions qui nous posent problèmes.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Scott, je crois que l'Article
11 28, au paragraphe 3, présente quelques difficultés pour vous. Au paragraphe
12 11, page 4 de cette même écriture, vous nous donnez une interprétation,
13 bien sûr, ce qui pose la question évidemment de l'autre interprétation.
14 Avant tout, le texte de l'Article 28 ici. Donc l'Article 18, s'il vous
15 plaît, des conseils de la Défense, et l'Article 28 de l'Accusation, s'il
16 vous plaît.
17 M. SCOTT : [interprétation] Oui, je vais certainement vous remettre le
18 texte de ces articles.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, s'il vous plaît. Je n'ai peut-être
20 pas terminé mes questions, mais nous allons maintenant faire la première
21 pause. Nous allons d'abord faire une pause et ensuite, nous aurons peut-
22 être d'autres questions à poser aux parties après la pause. Une fois que
23 nous aurons entendu les parties, nous entendrons les arguments des Amici
24 curiae et du gouvernement croate.
25 Nous allons suspendre l'audience jusqu'à 10 heures 30.
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1 --- L'audience est suspendue à 10 heures 01.
2 --- L'audience est reprise à 10 heures 35.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous reprenons l'audience. J'ai
4 quelques questions à poser.
5 Maître Prodanovic, d'abord, je vous demande si l'Article 18 du code pénal
6 est disponible ou pas ?
7 M. PRODANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je crains
8 fort de ne pas pouvoir vous en dire beaucoup sur ce point, car il me semble
9 que dans notre désir d'illustrer l'une des exceptions prévues par la loi,
10 nous avons évoqué un exemple qui existe dans un article du code. Mais j'ai
11 discuté de cela avec les professeurs présents ici, et ils considèrent que
12 ce n'est pas un bon exemple pour la situation que je souhaitais illustrer.
13 Donc, j'ai l'intention de revenir sur ce que j'ai dit, il y a un instant,
14 qui d'ailleurs, n'était pas un point fondamental. Je m'en remets à l'avis
15 des professeurs que j'ai consultés. De toute façon, je n'avais cité cet
16 exemple qu'à titre d'illustration pour vous donner une source de droit qui
17 montrait dans quel cas on pouvait s'écarter de certains principes légaux.
18 Cela dit, je n'ai peut-être pas choisi le meilleur exemple s'agissant
19 d'illustrer ce point.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est le seul exemple que vous avez
21 donné. Si vous dites que ce n'est pas le meilleur, nous en attendrons un
22 autre si vous pouvez nous le soumettre. Sinon, il n'y aura pas d'exemple.
23 M. PRODANOVIC : [interprétation] Merci.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Scott, après l'Article 18 du
25 code pénal de la république de Croatie, je vous deamnde si vous le libellé
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1 de l'Article 28 ?
2 M. SCOTT : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je ne voudrais pas
3 m'exprimer en lieu et place du conseil de la Défense, au risque de
4 présenter la position de la Défense sous un jour déformé, mais nous
5 disposons du texte de l'Article 18. Cela dit, je ne sais pas si le conseil
6 de la Défense estime que c'est un bon exemple ou pas, nous pouvons lui
7 remettre ce texte en tout état de cause. Nous ne ferons pas de commentaires
8 sur la position adoptée par le conseil de la Défense. Nous pourrons
9 simplement fournir un exemplaire de ce texte de loi à la Chambre.
10 Nous avons discuté avec le représentant de la république de Croatie et nous
11 croyons comprendre que pour le moment, ce texte est retiré mais nous
12 pourrons obtenir des éclaircissements plus précis ultérieurement.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous vous entendrons sur ce
14 point à une date ultérieure. Je crois comprendre également, indépendamment
15 du fait que c'est un bon exemple ou pas, que l'Article 18 du code de 1993,
16 porte sur les restrictions statutaires et pas sur l'application positive
17 des dispositions du droit pénal.
18 M. SCOTT : [interprétation] C'est effectivement ce qui semble être le cas.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Je ne sais pas si de votre côté
20 vous considérez cela comme un bon ou un mauvais exemple. Pour l'instant,
21 nous laissons la question de côté jusqu'à ce qu'un meilleur exemple puisse
22 être fourni. Oui.
23 Très bien, Monsieur Scott, je pense qu'il y a une autre question sur
24 laquelle je n'insisterai pas pour obtenir une réponse immédiate, mais elle
25 me semble d'un caractère tout à fait capital. En tout cas, c'est une
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1 question qui divise le gouvernement croate et les Amici, par rapport au
2 bureau du Procureur. Nous aimerions tout de même que sur les questions
3 essentielles vous ayez un point de vue identique. Il s'agit de
4 l'application du droit international, du droit des traités, du droit
5 coutumier par un tribunal national. D'abord, je me demande s'il ne
6 conviendrait pas que nous distinguions entre la situation où un Etat est
7 lié par les obligations qu'il a acceptées en signant un traité ou même
8 qu'il n'aurait pas accepté éventuellement, mais en tout cas, une situation
9 dans laquelle l'Etat est lié par ces traités, par le droit international
10 coutumier, et par les principes du droit international et la situation dans
11 laquelle un tribunal applique directement les dispositions de ces traités
12 et du droit coutumier.
13 Je vous lis une ordonnance, non pas parce qu'elle apporte une réponse à
14 cette question, mais parce qu'elle pose très clairement le problème. Le
15 président dans cette institution se trouve dans un ouvrage de droit pénal
16 international qui dit ce qui suit, je cite : "En tant normal, les tribunaux
17 nationaux n'entament pas des procédures pour crimes commis au niveau
18 international sauf sur la base du droit coutumier international, à savoir,
19 dès lors qu'un crime ait évoqué dans ce corps du droit. Ils ont tendance à
20 exiger qu'un statut national émanant d'une juridiction pénale nationale
21 traite de ce crime, ou qu'un traité ait été ratifié sur ce point par l'Etat
22 concerné qui, en conséquence, accepte la mise en œuvre et le
23 dessaisissement des tribunaux nationaux afin de mieux prendre mieux en
24 compte les dispositions de ce traité." C'est en page 303.
25 C'est en page 305 qu'on trouve un phénomène assez semblable qui prévoit
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1 donc que "les tribunaux nationaux se dessaisissent au profit de tribunaux
2 internationaux."
3 Vous avez déclaré, pour votre part, que la Croatie ne se contentait d'avoir
4 la possibilité, si je vous ai bien compris, mais que les tribunaux croates
5 avaient le devoir d'appliquer le droit international. Vous n'avez pas cité
6 de sources pour cette affirmation si la Chambre a bien compris, mais vous
7 avez évoqué l'aspect non monolithique de cela en regard du droit
8 international et des systèmes judiciaires en indiquant qu'en général,
9 c'étaient les règles du droit constitutionnel qui permettaient de trancher.
10 Mais le problème c'est que dans certains cas tel ou tel pays adopte une
11 démarche plus monolithique par rapport à la question, et applique tous les
12 aspects du droit international, alors que dans d'autres systèmes
13 judiciaires l'applicabilité du droit international ou d'un traité résulte
14 d'une décision des cours constitutionnels. Par exemple, dans le système
15 constitutionnel allemand, que j'ai bien en tête, les principes généraux du
16 droit international peuvent s'appliquer directement, alors que les
17 dispositions des traités ne s'appliquent pas directement au niveau des
18 tribunaux allemands. Ceci est juste un exemple, mais c'est là que vient le
19 problème. A moins que vous consacriez quelques minutes à votre convenance
20 pour soumettre une solution en droit international, je considérerais que
21 vous n'avez pas expliqué dans quelles conditions le droit constitutionnel
22 croate rend la chose possible. A cet égard, le bureau du Procureur a une
23 position assez différente de celles des représentants du gouvernement
24 croate et de celles des Amici. Il a pour tâche de revenir plus en détail
25 sur ce problème.
Page 42
1 J'ai également d'autres questions à vous poser. En page 7 de vos écritures,
2 vous adoptez une position qui est également adoptée par les conseils, en
3 tout cas, les conseils y souscrivent, à savoir que des ordonnances
4 secondaires peuvent être émises par le Tribunal, et ceci semble indiquer
5 que, selon vous, une décision de renvoi ne voudrait pas dire que le
6 Tribunal international est totalement exclu de l'affaire dont le Tribunal
7 international est dessaisi. Pourriez-vous, je vous prie, vous expliquer
8 plus avant sur votre position quant au rôle du Tribunal pénal pour assurer
9 la coopération internationale sur des procès au pénal.
10 M. SCOTT : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je vais essayer de
11 le faire. Je pense que le paragraphe 18 de nos écritures peut permettre de
12 dire en mots notre idée sur ce point. Les dispositions du 11 bis et le
13 rapport avec le statut et les autres documents régissant la procédure,
14 telle que l'assistance des Etats, les ordonnances potentiellement
15 exécutoires, les injonctions à comparaître ou à délivrer des documents, et
16 cetera, si nous prenons tous ces textes, il nous ait venu à l'idée, et je
17 l'ai peut-être déjà dit, d'ailleurs, qu'il pourrait être la base permettant
18 de combler des lacunes du code de procédure sur les questions liées en
19 particulier à la coopération internationale. Je vais simplement prendre un
20 exemple qui me vient à l'esprit; la Croatie pourrait ne pas obtenir en cas
21 de nécessité l'assistance demandée à la
22 Serbie-et-Monténégro, par exemple, et dans ce cas, le Tribunal pénal
23 international pourrait, je suppose, souhaiter jouer les intermédiaires afin
24 d'apporter l'assistance nécessaire qui ne pourrait pas être obtenue par
25 ailleurs. La transparence, encore une fois, me force à dire que c'est une
Page 43
1 idée qui m'est venue quant à une possibilité qui existe dans une situation
2 de ce genre, rien de plus.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. La médiation ne relève pas
4 d'ordonnance secondaire. La Défense a utilisé le terme de médiation
5 également. Est-il possible pour le bureau du Procureur de ce Tribunal
6 international, même si l'affaire est renvoyée sans être reprise par le
7 TPIY, est-il possible pour le TPIY d'utiliser ses compétences au terme des
8 dispositions du chapitre 7 de la charte des Nations Unies éventuellement ?
9 Est-ce que nous avons le pouvoir d'agir dans ce sens ?
10 M. SCOTT : [interprétation] Il me semble, Monsieur le Président, notamment
11 si l'on tient compte des Etats issus de l'ex-Yougoslavie, qui, je crois,
12 ont un rapport particulier au TPIY, il me semble que s'il devait y avoir un
13 problème dans lequel le Tribunal pourrait apporter son aide -- je cherche
14 des exemples. On a les ordonnances au titre de l'Article 54, du Règlement
15 de procédure et de preuve, adressés aux Etats, qui pourraient être un
16 véhicule utile en l'espèce. La Croatie pourrait se faire représenter devant
17 le TPIY, et dire, par exemple : cette affaire a été renvoyée devant nos
18 tribunaux, mais nous avons un problème pour obtenir des éléments de preuve.
19 Pourriez-vous nous aider ou intervenir au titre de médiateur en émettant
20 des ordonnances qui nous permettraient d'accéder aux documents que nous
21 n'avons pas pu obtenir, par exemple, au titre des traités d'assistance
22 mutuelle. Encore une fois, c'est une idée qui me vient, une idée créative
23 pour tenter de résoudre ce problème.
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vois une difficulté à cet égard,
25 Monsieur Scott. C'est que les pouvoirs d'évolue au TPI si je ne m'abuse
Page 44
1 doivent être compris comme permettant d'apporter une aide ou d'exercer sa
2 compétence dans la situation dont nous parlons, c'est-à-dire, dès lors
3 qu'une affaire serait renvoyée devant le tribunal d'un autre Etat. Je
4 dirais que nous n'avons pas de fondement juridictionnel pour émettre un
5 ordre de la nature dont vous venez d'évoquer.
6 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge Parker,
7 je pense que cet argument est tout à fait valable, mais nous évoquons dans
8 nos écritures une situation plus définie au titre de l'Article 11 bis. Je
9 pense qu'il est permis de discuter, la Chambre ne serait peut-être pas
10 d'accord, mais il est permis de discuter de la signification exacte de
11 l'Article 11 bis, qui semble disposer implicitement qu'il faudrait une
12 supervision permanente des procédures dans l'Etat nouvellement saisi de
13 l'affaire. Si vous examinez les paragraphes (F) et (G) de l'Article 11 bis,
14 il y est question du dessaisissement possible de l'affaire des tribunaux
15 nationaux. Je pense que cette supervision est tout à fait raisonnable. Je
16 n'aime pas utiliser le mot compétence trop souvent, mais il y a une espèce
17 de compétence permanente dans le sens où il y a possibilité d'intervenir et
18 de reprendre l'affaire, le cas échéant. Je pense que le règlement le
19 prévoit. Dans ce sens, si vous parlez de compétence des Chambres du
20 Tribunal, au moins dans cette mesure restreinte, il est possible d'arguer
21 du fait qu'une action permettrait d'aider à la solution du problème.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais vous poser une question peut-
23 être plus délicate. Monsieur Scott, est-ce que le bureau du Procureur
24 estime qu'une affaire serait mieux jugée si le témoin X comparaissait ou si
25 le Procureur local ne citait pas ce témoin à la barre, est-ce que
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1 l'Accusation pourrait demander une ordonnance au Tribunal pour que le
2 témoin soit tout de même cité devant le Tribunal national ? Je veux dire,
3 est-ce que votre position consiste à dire : puisque nous avons toujours
4 compétence de reprendre l'affaire devant le TPI, certains pouvoirs peuvent
5 être exercés par nous. Si vous dites que vous reprenez l'affaire et que
6 vous tenez à entendre le témoin, est-ce que ce pouvoir ne pourrait pas
7 également être exercé sous forme d'instruction donnée aux tribunaux croates
8 pour citer un témoin à la barre ?
9 M. SCOTT : [interprétation] Je pense que c'est un point tout à fait
10 intéressant. Il est possible d'arguer à mon avis que nous aurions le
11 pouvoir de faire pas mal de choses, et éventuellement, le pouvoir de faire
12 moins de choses. Si la Chambre a le pouvoir de retirer l'affaire aux
13 tribunaux nationaux, il est permis d'arguer du fait qu'il ne serait
14 intervenir dans d'autres domaines. Ce serait dans ce cas une démarche de
15 tout ou rien. Si le Tribunal ne peut rien faire, ne peut avoir aucune
16 intervention à moins que quelqu'un ne juge cette intervention acceptable,
17 nous reprendrions l'affaire. On pourrait envisager une intervention
18 possible en tout état de cause, ou une intervention possible de façon plus
19 ponctuelle, ceci est à discuter.
20 Nous sommes dans un territoire neuf, et nous pensons que le Tribunal
21 devrait tout de même avoir des moyens d'apporter son aide à la résolution
22 de ces affaires. Certains auront des points de vue différents sur l'étendue
23 des compétences, mais à notre avis, le paragraphe (F) de l'Article 11 bis,
24 prévoit très clairement la possibilité de reprendre une affaire à un
25 Tribunal national.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela est certain. Je pense à une période
2 ultérieure nous entendrons le gouvernement croate quant à sa perception de
3 ses compétences et de la perte de compétence du Procureur tel qu'exposée il
4 y a quelques instants.
5 Encore une question, Monsieur Scott. Est-ce que l'Accusation, parce que je
6 regarde la page 7 de vos écritures où vous parlez des documents que vous
7 adressez aux tribunaux nationaux, le cas échéant, est-ce que le Procureur
8 estime qu'il y a pour obligation de communiquer tous les documents à
9 décharge qui sont encore en sa possession dans le cadre de l'affaire
10 concernée ?
11 M. SCOTT : [interprétation] Bien sûr. Je pense que ceci est une de nos
12 premières responsabilités par rapport à l'affaire dans son ensemble. C'est
13 une obligation pour nous.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, vous renverriez au tribunal
15 national saisi de l'affaire les documents en question, mais vous ne les
16 enverriez pas directement à la Défense.
17 M. SCOTT : [interprétation] Cela dépend du système qui sera adopté. S'il y
18 a un juge d'instruction ou un procureur, nous enverrions ces documents au
19 procureur ou au juge d'instruction.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, d'accord. Bien. J'en arrive à ma
21 dernière question. Page 10 de vos écritures des arguments discutables sont
22 évoqués quand à la responsabilité hiérarchique, à savoir est-ce qu'il
23 s'agit d'une responsabilité, non, non, il n'y a pas de divergence sur ce
24 point; c'est plutôt sur le problème de la gravité du crime qu'on trouve une
25 différence sur le plan des principes. J'appelle votre attention sur la note
Page 47
1 en bas de page 9 où non trouvons les sanctions qui pourraient être imposées
2 pour responsabilité hiérarchique aux termes du droit actuel. Cinq à huit
3 ans selon la gravité au titre de l'Article 7(3) du Statut avec des niveaux
4 de peine bien inférieurs lorsque la responsabilité est inférieure. Mais il
5 y a là quelques divergences de points de vue sur le fait que selon le
6 grade, la peine doit être égale ou inférieure. Alors ma question est la
7 suivante : les tribunaux croates, peut-on s'attendre d'eux qu'ils
8 appliquent et qu'ils se plient à la tradition dans le cadre de leur
9 nouvelle législation où une sanction inférieure est envisagée pour des
10 niveaux de responsabilité hiérarchique inférieurs. Ou est-ce qu'on peut
11 s'attendre à ce qu'ils s'en tiennent totalement à l'interprétation de
12 l'Article 7(3) du Statut dès lors que la gravité du crime est la même quel
13 que soit le niveau hiérarchique, la peine est la même. On trouve cela
14 également à l'Article 7(1) du Statut.
15 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Juge Orie, je ne m'attends vraiment
16 pas à ce que le système judiciaire croate accorde la moindre attention à
17 mon avis dans un sens ou dans un autre.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais est-ce qu'il serait conseillé
19 ou pas --
20 M. SCOTT : [interprétation] Je pense que le point crucial c'est
21 l'application à un degré plus ou moins important du Statut par rapport au
22 prononcé de la sentence et là nous avons quelques préoccupations. Cela nous
23 ramène à cette question du droit international. Je suppose que les Juges
24 croates devront appliquer le droit international, mais peut-être
25 accepteront-il éventuellement d'appliquer les peines prévues au droit
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1 international, mais bien entendu, je vois là un sujet de discussion, vous
2 avez tout à fait raison, Monsieur le Juge Orie.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci de votre réponse, Monsieur Scott.
4 J'aimerais voir s'il y a des questions supplémentaires du côté de la
5 Défense. Nous en avons déjà entendu pas mal.
6 Maître Olujic, vous avez parlé des grades militaires dans votre exposé il y
7 a quelques instants. Sur notre écran, nous avons reçu un message des
8 interprètes qui indiquait qu'il y avait quelques problèmes de traduction de
9 ces grades que nous devions prendre en compte et qui a été soumis à notre
10 attention.
11 Je vous demanderais donc de répondre à ma question sous une formulation un
12 peu différente. Je ne sais pas s'il y a des accords entre votre position et
13 celle du Procureur, mais combien d'hommes étaient sous le commandement de
14 votre client, donc sous le commandement de M. Norac dans la période visée à
15 l'acte d'accusation dans la poche de Medak ?
16 M. OLUJIC : [interprétation] En cet instant, je ne saurais vous le dire,
17 mais en tout état de cause, ce sont les hommes de sa brigade qui étaient
18 sous son commandement, c'est-à-dire les hommes sur lesquels il avait
19 compétence et personne d'autre. Sinon, nous entrons sur le territoire
20 d'autres unités militaires qui relevaient du ministère de l'Intérieur à
21 savoir des unités spéciales. Quant à M. Norac, il était commandant de
22 l'unité qui lui était affectée, si je puis m'exprimer ainsi. Quand au
23 nombre d'hommes précis placés sous ses ordres au moment des crimes visés à
24 l'acte d'accusation, Monsieur le Président, je suis incapable de vous citer
25 le chiffre exact aujourd'hui.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, beaucoup. Maître Olujic, il
2 semble qu'en page 2 de vos dernières écritures, vous exprimez l'avis que le
3 Tribunal doit s'en tenir strictement aux principes de non-rétroactivité.
4 Quel qu'en soit le résultat et que ce résultat n'a aucune incidence sur la
5 décision de renvoi. Alors, je vous pose une question pour vous comprendre
6 parfaitement bien. Dites-moi si je me trompe, mais il me semble qu'à cet
7 instant il est déjà clair que certains comportements ne sont pas pris en
8 compte par le droit matériel applicable en Croatie et que, néanmoins, il
9 peut y avoir renvoi devant les tribunaux croates sans manquement à
10 l'équité. Dites-moi ce que vous pensez de cela.
11 M. OLUJIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je considère que
12 tous les chefs d'accusation peuvent être pris en compte et jugés par les
13 textes de loi de la République de Croatie, en ce moment.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Même la responsabilité hiérarchique, eu
15 état à la disposition très spécifique qui prévoit de ne pas punir dès lors
16 qu'une personne ne savait ou n'était pas tenue de savoir que des crimes
17 étaient sur le point de se commettre ou que des crimes avaient été commis ?
18 Cette disposition, à votre avis, peut être prise en compte par le code
19 pénal de Croatie applicable en 1993 ?
20 M. OLUJIC : [interprétation] Je pense que oui, je pense que oui, Monsieur
21 le Président.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si nous avons besoin de davantage
23 d'informations sur ce point, nous demanderons à l'obtenir. En tout cas, des
24 renseignements complémentaires pourraient grandement aider les Juges de la
25 Chambre. C'était, pour le moment, la seule question que j'avais sur ce
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1 sujet.
2 A présent, j'aimerais donner la possibilité aux Amici Curiae, à commencer
3 par le Pr Krapac, de s'exprimer devant la Chambre. Professeur, pourriez-
4 vous dire ce que vous aimeriez ajouter au mémoire que vous avez déposé,
5 mémoire rédigé par vous-même et par le Pr Damaska.
6 M. KRAPAC : [interprétation] Monsieur le Juge, Messieurs les Juges --
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous dire qu'il y a une bonne
8 tradition ici, à savoir que l'homme qui doit prendre la parole n'a pas de
9 pupitre. Ceux qui en ont un peuvent le lui confier, mais si vous ne voulez
10 pas de pupitre vous pouvez y aller.
11 M. KRAPAC : [aucune interprétation]
12 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
13 M. KRAPAC : [interprétation] Messieurs les Juges, je voudrais d'abord vous
14 remercier au nom du Pr Damaska et en mon nom propre pour nous avoir
15 autorisés à venir faire figure ici d'Amici Curiae. Le Pr Damaska est l'un
16 des experts éminents en matière de droit pénal comparatif et de droit
17 international comparé qui traite depuis assez longtemps de droit pénal et
18 de justice pénale depuis fort longtemps. Moi-même, je suis, depuis assez
19 longtemps, les efforts déployés par la communauté internationale, à savoir
20 la communauté de droit pour que cette justice pénale internationale
21 contribue au développement du droit international et notamment aux fins de
22 la réalisation des objectifs de ce Tribunal tel qu'indiqué au Statut.
23 Permettez-moi de le dire, je me trouve dans une situation, une position
24 assez inconfortable, ce que nous avons rédigé, je me dois de l'exposer au
25 travers d'une voix seulement parce que le Pr Damaska n'a pas pu se déplacer
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1 vu son état de santé. Il ne me reste rien d'autre que de parler plus fort
2 ou de parler plus longtemps que nous l'aurions fait tous les deux ensemble,
3 aussi vous demanderais-je de faire preuve d'un peu de patience.
4 Ce que nous avons indiqué dans nos écritures en présentant l'opinion des
5 Amici Curiae, se répartit en trois questions fondamentales que vous avez
6 déjà eu l'occasion de voir, à savoir déterminer si cette affaire peut être
7 renvoyée aux autorités de la République de la Croatie; aux fins de savoir
8 si le droit croate satisfait aux conditions normatives, aux fins de
9 conduire avec succès et en temps utile le procès là-bas; et parler des
10 problèmes qui pourraient survenir dans la coopération entre la justice
11 croate et le bureau du Procureur de ce Tribunal-ci.
12 Je me dois de dire dès le départ que la première question, pour moi du
13 moins en personne, a été l'une des questions les plus difficiles qu'il nous
14 ait été donné d'essayer de résoudre, à savoir la question du grade occupé
15 ou du niveau occupé par les accusés et de leur responsabilité pénale
16 individuelle. La réponse, en tout état de cause, constitue un précédent au
17 sujet duquel nous nous sommes efforcés de trouver une solution au travers
18 d'un courrier que le président du Tribunal pénal pour le Rwanda a adressée
19 au conseil de Sécurité au mois de mai de l'an passé. Il y figure une liste
20 de critères qui doivent être pris en considération pour déterminer quels
21 sont les critères à conserver et quels sont les critères à éliminer. Le
22 président de ce Tribunal pour le Rwanda a indiqué qu'il s'agissait des
23 critères suivants :
24 "Pour ce qui est du statut des individus pour ce qui est de la perpétration
25 de crimes; la corrélation entre les individus et d'autres affaires; la
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1 nécessité de couvrir de grandes zones géographiques dans lesquelles les
2 crimes ont été perpétrés; la disponibilité des éléments de preuve pour ce
3 qui est des individus concernés; la responsabilité concrète pour ce qui est
4 de l'arrestation des individus et la disponibilité de la documentation
5 afférentes aux enquêtes diligentées pour ce qui est de la transmission à
6 l'Etat qui est chargé de poursuivre en justice au niveau national."
7 Ceci est une série de critères qui ne peut pas s'appliquer automatiquement,
8 mais peut servir pour ce qui est de la prise de décision pour ce qui est du
9 renvoi de ces affaires devant les autorités croates. La plus grande
10 difficulté réside dans l'application des critères parce que le bureau du
11 Procureur est l'instance qui, s'agissant de toutes les parties en présence
12 dans cette affaire, se trouve être la mieux informée des circonstances
13 concrètes qui peuvent être citées au niveau des critères dont j'ai parlé et
14 qui pourraient permettre de procéder à une classification des délits au
15 pénal. Nous avons entendu M. Scott nous dire qu'il a été établi un tableau
16 comparatif dont il découle une réponse partielle à la question de ce niveau
17 occupé et de la gravité du crime. Maintenant, s'agissant de la gravité du
18 crime, je crois que nous avons présenté, peut-être pour le mieux, cet
19 élément en nous référant à une déclaration faite par le Procureur général,
20 Mme Del Ponte, qu'elle a fourni devant le conseil de Sécurité, où elle a
21 dit que ce Tribunal, de son avis, se devait de maintenir dans ses
22 attributions toutes les affaires qui se rapportaient aux accusés qui ont
23 commis les crimes les plus graves relevant de ses attributions. Nous
24 allons, une fois de plus, citer en anglais : "Qui ont, s'agissant de leur
25 plan criminel, réalisé énergiquement dans ce domaine en se couvrant les
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1 mains de sang," cette métaphore se trouve être probablement la plus
2 appropriée pour exprimer, pour élaborer ce qu'il est entendu dans ce
3 courrier du président du Tribunal du Rwanda, et où il est fait état des
4 critères dont le Tribunal devrait tenir compte lorsqu'il s'agit de renvoyer
5 des affaires devant les autorités nationales.
6 S'agissant maintenant des critères mentionnés dans ce courrier, je pourrais
7 ensuite dire que nous avons tiré la conclusion aux termes de laquelle les
8 critères relatifs à la corrélation entre ces affaires et les crimes
9 perpétrés sur le territoire de la République de Croatie pourraient
10 constituer un argument en faveur du renvoi des affaires, étant donné que la
11 conduite de cette affaire sur le territoire de la République de Croatie
12 permettrait ce qui est d'habitude qualifiée de communication plus aisée des
13 parties en présence avec la population locale avec toutes les connotations
14 qui en découle et que je ne vais pas traiter dans le détail. Cela
15 permettrait une présentation plus aisée des éléments de preuve portant sur
16 des faits déterminés par rapport à l'un et à l'autre des deux accusés, tant
17 pour ce qui est des crimes qui leur sont reprochés que pour ce qui est de
18 leurs circonstances familiales respectives, comportement et activités
19 déployées au poste de commandement; et pour finir, dans le cas d'un
20 prononcé de peine éventuelle. Il y aurait, bien entendu, les renseignements
21 relatifs au comportement des condamnés qui durant la purgation de la peine,
22 chose qui doit être prise en compte pour ce qui est du prononcé des peines.
23 Je me dois de souligner, en particulier, le fait qu'un cas de renvoi de
24 cette nature permettrait un rôle plus important aux victimes de ces délits
25 au pénal. Parce que le droit procédurier croate fournit, par rapport à
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1 d'autres droits, un rôle assez important à cet intervenant-là au procès, ce
2 droit permet aux victimes, aux endommagés, de prendre un rôle actif sous la
3 forme de propositions d'éléments de preuve; interrogatoires des témoins et
4 des accusés; ainsi que présentation d'allocutions devant les Juges de la
5 Chambre. Sans parler du droit que peut avoir, par exemple, la victime en sa
6 qualité de personne endommagée, peut faire figure de procureur par
7 substitution, cette partie lésée donc peut se substituer au procureur pour
8 présenter sa plainte.
9 S'agissant, maintenant, des autres éléments, Messieurs les Juges, l'étude
10 de nos écritures comme vous avez pu le voir se rapporte à la question de la
11 responsabilité du commandant. Nous sommes conscients du fait que c'est là
12 une notion centrale du droit pénal international, et que c'est précisément
13 grâce à la juridiction et aux activités de ce Tribunal-ci que cette notion
14 juridique a connu un développement très important. Toutefois, nous nous
15 devons de tenir compte, d'autre part, du fait que la pratique de ce
16 Tribunal-ci pour ce qui est de la définition et du développement de la
17 notion de la responsabilité du commandant pour l'intégrer à une notion
18 sophistiquée sur le plan juridique a rencontré de l'incompréhension au
19 niveau de la Croatie. Ceci en raison d'une divergence notable entre ce
20 droit national et le droit international. Je me dois de mentionner, chemin
21 faisant, et pour cette raison précise le fait des nécessités sur le plan
22 national que le législateur national, avec ces innovations toutes récentes
23 du droit pénal, il a été introduit des dispositions nouvelles emménageant
24 trois types de responsabilités de commandement. Il y a les dispositions de
25 l'Article 167(A), paragraphe 1, 2 et 3. Cela n'a pas de pertinences pour
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1 cette affaire-ci, mais je le mentionne pour illustrer la disposition qui
2 existe au niveau des autorités croates et, notamment, au niveau du
3 parlement croate pour que cette question de responsabilité de commandement,
4 en sa qualité de l'une des questions clées du droit pénal international,
5 soit résolue, d'un côté, du point de vue de cette notion, telle
6 qu'enregistré par la pratique de ce Tribunal, et d'autre part, en
7 contradiction avec les éléments clés qui constituent le droit national en
8 la matière.
9 Bien entendu, c'est qu'il vous appartient à vous de vous pencher sur
10 le fait de savoir si les formes de responsabilité de commandement qui
11 existaient en vertu de la législation pénale croate en 1993, peuvent être
12 harmonisées ou peuvent-elles être mises en œuvre pour ne pas être en
13 désharmonie avec les requêtes présentées par le bureau du Procureur
14 aujourd'hui, ainsi que dans sa requête du 7 février de cette année ? Dans
15 les pages 10, 11 et 12, nous avons indiqué les points préalables où nous
16 estimons que le bureau du Procureur trouve les divergences les plus grandes
17 pour ce qui concerne la notion de responsabilité et de commandement telle
18 qu'appliquée et telle que citée dans la législation croate de 1993. Nous
19 avons conclu que les divergences n'étaient pas insurmontables. Je vais
20 compléter mes propos en disant qu'indépendamment du fait de voir pour cette
21 solution être appliquée, la première des possibilités que nous avons
22 laissées entendre, à savoir, l'application des normes du droit
23 international, des normes pertinentes du droit international qui existaient
24 avant la loi croate de 1993, ou alors, la solution pourrait-elle être
25 recherchée au travers d'une application créative des dispositions du code
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1 pénal de 1993, voire d'une façon et d'une autre. De l'une quelconque de ces
2 façons, pour reprendre les termes du Procureur, aux fins d'assurer au cas
3 où les accusés seraient jugés effectivement coupables, l'application de
4 cette notion de responsabilité de commandement pourrait être reprise
5 suivant des modalités qui satisferaient le bureau du Procureur.
6 Troisième élément de nos écritures ou nous nous sommes référés --
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krapac, si vous ne voyiez
8 pas d'inconvénient, j'aimerais vous poser deux petites questions. Dans vos
9 écritures à la note de bas de page, j'ai trouvé qu'il est fait mention de
10 l'Article 167(A), et en page 21, vous nous avez fourni le texte du 167(A).
11 Quoique nous ne sachions que ce n'est pas là des articles pertinents en
12 matière de droit, nous avons remarqué qu'en page 21, il est fait état de la
13 version de 2003, or dans la note de bas de page 15, il est fait état de la
14 version adoptée en juin 2004. Je me demande, à présent, s'il y a une
15 différence entre ces deux versions. Même si ce ne sont pas des dispositions
16 de droit pertinentes, je crois qu'il serait utile de le préciser pour qu'il
17 n'y ait pas de confusion entre 2003, 2004 et le reste.
18 M. KRAPAC : [interprétation] Monsieur le Juge, en effet il y a une
19 erreur dans la rédaction. L'innovation dans la législation portait le
20 numéro 167(A). Cependant, suite à une décision de la Cour constitutionnelle
21 de la République de Croatie au mois de novembre 2003, elle a été proclamée
22 non-constitutionnelle, parce qu'à l'occasion du vote au parlement, il y a
23 eu moins de délégués à voter que la loi ne le prévoyait. C'est la raison
24 pour laquelle, en 2004, le nouveau gouvernement élu a repris ces deux
25 procédures d'adoption de cette innovation, et la même norme, le 167(A), est
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1 désormais entrée dans le texte de loi, parce que cette fois-ci le
2 législateur a bien réalisé la procédure d'adoption de la loi. Ce qui fait
3 que la formation que vous avez à la note de bas de page 15, en page 9, se
4 trouve être exacte, Messieurs les Juges.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Professeur Krapac. Le texte
6 est le même, mais il y a seulement une version qui a été promulguée de
7 façon appropriée, et l'autre non. J'ai bien compris.
8 Vous pouvez continuer, je vous prie.
9 M. KRAPAC : [interprétation] Permettez-moi alors de prononcer
10 quelques propos encore au sujet de cette troisième et dernière partie de
11 nos écritures; un bref aperçu des caractéristiques principales de la
12 justice pénale en Croatie. Cela nous permet de voir que la procédure au
13 pénal est règlementée par une loi de procédure pénale très vaste de 1997.
14 Ce n'est pas la seule source du droit pénal. Il est une source que nous
15 avons cité comme étant pertinente et qui serait appliquée ici. Ce serait un
16 droit continental de type mixte avec des dispositions développées
17 concernant la procédure préalable; concernant le bien fondé ou le mal fondé
18 des éléments de preuve; le rôle des différents éléments de la procédure,
19 que je ne vais pas mentionner dans le détail ici. S'agissant maintenant de
20 l'élaboration de la procédure, nous nous trouvons convaincus du fait que
21 les Tribunaux et le procureur du ministère public se trouvent être capables
22 de réaliser la procédure de façon équitable et efficace, comme on le dit en
23 anglais : fair and efficient.
24 D'autres part, dans la rédaction de ces écritures, nous avons été
25 certes conscients des objections formulées à l'encontre de la jurisprudence
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1 croate, notamment pour ce qui concerne la période précédente de son
2 intervention qui pourrait être englobée par les années mi-1990 et la fin
3 des années 1990. C'est un fait qui découle de bon nombre de témoignages et
4 on y fait, dans une certaine mesure, référence dans la lettre que le
5 représentant de l'OSCE en Croatie, M. Semneby, a envoyée au président de ce
6 Tribunal-ci. Les faits mentionnés dans un autre rapport de printemps de
7 l'an passé, en font également état pour ce qui est de la situation dans la
8 justice croate. Nous pensons, cependant, partant de l'expérience acquise à
9 ce jour dans les procès qu'on diligentait pour ce qui est -- de guerre
10 perpétrée dans la région de Gospic, et dont on a parlé aujourd'hui la
11 Défense, pour ce qui est de l'affaire de Dinko Sakic, qui a également été
12 mentionnée par la Défense, partant également des faits auxquels s'est
13 référé le représentant de l'Accusation ici, à savoir que les tribunaux
14 croates peuvent être identifiés de façon aisée comme étant qualifiés ou
15 non, étant donné que ces procédures seront conduites par les meilleurs des
16 Juges, nous estimons que votre décision finale pour ce qui est du renvoi de
17 l'affaire, il ne devrait pas y avoir de doutes d'exprimés pour ce qui est
18 de la possibilité de voir l'affaire renvoyée, réalisée, et achevée devant
19 le tribunal croate de la plus grande qualité, certaines questions de
20 procédure.
21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] J'espère que vous ne me voudrez pas de
22 vous interrompre en ce moment-ci, Professeur. J'ai essayé de voir quel est
23 le cadre législatif qui serait à même d'assurer que l'affaire concrète
24 aboutisse auprès de tel ou tel autre tribunal concret. Je n'ai pas très
25 bien compris. Vous avez indiqué que nous pouvions être certains du fait que
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1 cette affaire serait poursuivie et conduite devant une cour spéciale. Y a-
2 t-il une structure législative à même d'assurer cela ?
3 M. KRAPAC : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Juge. Cette structure
4 existe. Elle figure dans la loi portant application du statut du Tribunal
5 pénal international, et pour ce qui est de la poursuite des délits aux
6 pénales relatifs aux crimes de guerre, cela a été adopté le 24 septembre
7 2003. Cela se rapporte notamment à la coopération de la République de
8 Croatie avec la Cour pénale internationale, la CGI [comme interprété]. Mais
9 dans une partie de cette réglementation, il est des dispositions qui sont
10 applicables avec le TPIY. Je me réfère notamment à l'Article 49 de cette
11 loi, qui, explicitement, indique que : dans la coopération réalisée avec ce
12 Tribunal-ci, il sera mise en application l'Article 28. Au cas où les Juges
13 disposeraient de la traduction de cette Article 28, je me proposerais de ne
14 pas en donner lecture ici à présent.
15 M. LE JUGE PARKER : [Interprétation] Merci. Je l'ai, mais je n'ai pas
16 compris sa signification pendant que je l'ai lue. Je vous remercie de votre
17 aide. Merci. Je m'excuse de vous avoir interrompu.
18 M. KRAPAC : [interprétation] Si les Juges de la Chambre me le permettent,
19 je me proposerais de conduire à un terme cette partie de mon exposé et,
20 bien entendu, je m'attends à ce que les détails soient pris en
21 considération ultérieurement. Nous avons conclu notre mémoire en indiquant
22 qu'en réalité les questions cruciales qui seront posées à l'occasion du
23 renvoi de cette affaire vers la République de Croatie sont des problèmes et
24 questions susceptibles d'être résolus moyennant coopération et moyennant
25 interprétation créative de certaines dispositions du droit pénal matériel
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1 et procédurier en République de Croatie.
2 Si vous me le permettez, j'aimerais me référer également à un texte du Juge
3 Orie, qui a fait un commentaire des Statuts du Tribunal de la Cour pénale
4 internationale, où il est dit que l'interprétation de la part des Juges
5 pour ce qui est des normes du droit statutaire, un élément-clé pour ce qui
6 est de leur mise en œuvre réussie. Je m'excuse si je n'ai pas cité à la
7 lettre, mais c'est ainsi que j'ai compris.
8 Je plaiderais, pour finir, en faveur de ce que nous avons présenté
9 comme conclusion dans notre mémoire, à savoir que cette Chambre-ci devrait
10 prendre une décision dans le sens du renvoi de l'affaire vers la République
11 de Croatie, en concluant qu'il n'y a pas d'obstacles majeurs à ce que ce
12 renvoi se fasse. Nous sommes convaincus qu'une décision de cette nature se
13 situerait sur, et dans le contexte, dès la résolution du conseil de
14 Sécurité, le 1503, notamment, de l'an 2003, qui indique que le renforcement
15 des organisations et du jurisprudence nationale revêtent une importance
16 majeure pour le règne du droit.
17 Je mentionnerais, en chemin faisant, un rapport présenté par le
18 secrétaire général des Nations Unies pour ce qui est du règne du droit et
19 pour ce qui est de la justice en matière de transition dans les sociétés
20 issues ou sortant de conflits armés. Je vais dire qu'en août 2004, on a
21 tiré bon nombre de conclusions demandant que ces accords-là, et les
22 résolutions appropriées du conseil de Sécurité au point (H), où il est dit
23 :
24 "D'éviter d'imposer des modèles extérieurs aux fins d'assurer un
25 processus de coopération nationale, sous-entendant une participation
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1 significative du gouvernement de la société civile, et des éléments
2 cruciaux au niveau national, pour développer la justice nationale et
3 restaurer l'état de droit."
4 Suivant ces propos, conformément à ces propos du secrétaire général,
5 nous estimons qu'une décision portant renvoi de cette affaire vers la
6 République de Croatie aurait satisfait à la finalité de celle-ci.
7 Je vous remercie, Messieurs les Juges, de l'opportunité que vous nous
8 avez fournis de présenter les arguments des Amici devant le Tribunal.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le
10 Professeur Krapac, pour votre intervention.
11 Je souhaite maintenant donner l'occasion aux représentants du
12 gouvernement croate de s'exprimer. Monsieur le Professeur Horvatic, vous
13 avez la parole.
14 M. HORVATIC : [interprétation] Pour moi, ceci est une occasion qui
15 m'est donnée pour vous saluer, Messieurs les Juges, les représentants de
16 l'Accusation, les représentants de la Défense, et le Professeur Krapac, qui
17 est un de mes collègues depuis un certain nombre d'années.
18 Ceci a été très clairement dit au début de cette audience. Nous parlons ici
19 d'un point qui revêt une importance capitale, car nous allons décider pour
20 la première fois sur une question de renvoi, conformément à l'Article 11
21 bis, renvoi d'une affaire devant un autre tribunal. En ce qui me concerne,
22 et en tant qu'homme de science et un homme d'expérience en la matière, je
23 pense que ceci est quelque chose qui me tient beaucoup à cœur en tant que
24 représentant de la République croate et en tant que représentant de mon
25 pays qui, suite à une décision prise par cette Chambre de première
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1 instance, aura l'occasion pour la première fois de gérer cette affaire.
2 Dans mon curriculum vitae, il s'agit d'une journée capitale, d'un J en ce
3 qui me concerne.
4 Le droit pénal international a véritablement été mis en œuvre et a été
5 confronté à un certain nombre de difficultés, il s'agissait de questions
6 d'interprétation et de compréhension en matière juridique. Il s'agit
7 également d'évaluer la situation au plan politique. En ce qui concerne
8 l'application du 11 bis qui nous concerne ici, je souhaite vous faire part
9 de mes observations, et j'espère pouvoir vous convaincre du bien-fondé de
10 tout ceci.
11 La deuxième observation que j'aimerais faire en m'adressant à vous, Juges
12 de la Chambre, il est très rare que l'Accusation; la Défense; et un Amicus
13 Curiae tombent d'accord devant un tel Tribunal; et les points de vue de la
14 République de Croatie concordent également. La République de Croatie serait
15 tout à fait disposée à juger cette affaire. Il n'y a aucun conflit ou
16 différend en la matière, les différentes parties, les Amici Curiae, ainsi
17 que l'Etat croate vers lequel sera renvoyé l'acte d'accusation comprend
18 qu'il s'agit là d'une application de l'Article 11 bis, ce qui rend ceci
19 possible. Bien, évidemment, il y a toute une série de questions qui sont
20 liées à tout ceci et qui doivent être débattues, car la décision rendue par
21 le Tribunal ne se fonde pas sur des éléments contenus dans un accord
22 général, car cette Chambre de première instance a le devoir de remplir ses
23 obligations, chose, je suis sûr dont elle va s'acquitter, elle doit
24 appliquer l'Article 11 bis comme elle l'entend et le comprend, ceci sera la
25 première fois que ceci sera appliqué de cette façon.
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1 Eu égard aux demandes qui ont été déposées par le Tribunal et aux fins
2 d'adopter la demande déposée par l'Accusation en vertu de l'Article 11 bis,
3 à savoir le renvoi de l'acte d'accusation vers un autre tribunal dans le
4 cadre de l'affaire Ademi/Norac, précisément la République de Croatie dans
5 cette affaire, la République de Croatie a répondu, de façon très complète,
6 à toutes les questions posées dans deux mémoires, le 20 janvier et un autre
7 mémoire daté du mois de novembre. Ce qui justifie d'autant les demandes ou
8 les requêtes faites par l'Accusation. Nous nous en tenons à notre position
9 et nous estimons qu'il n'y aucun obstacle qui se pose ici, le Tribunal
10 devrait pouvoir rendre une ordonnance aux fins de renvoyer cette affaire
11 vers un autre tribunal conformément à l'Article 11 bis, autrement dit, de
12 le renvoyer devant les tribunaux de la République de Croatie.
13 Néanmoins, toute une série de questions ont été posées ce matin au cours de
14 cette audience, et j'aimerais pouvoir en parler. Mais j'aimerais, plus
15 particulièrement, pouvoir aborder quelque chose qui m'a semblé quelque peu
16 controversé. Autrement dit, l'application de la notion de responsabilité
17 hiérarchique tel que l'interprète ce Tribunal. Evidemment, l'acte
18 d'accusation fait état de cette notion et le code pénal croate de 1993 en
19 tient compte, le nouveau code pénal néanmoins ne tient pas compte de cette
20 notion et ne parle pas de la question de la responsabilité hiérarchique.
21 Néanmoins, la position prise par le procureur de la République, la position
22 adoptée est celle-ci, cette question est évoquée et je souhaite vous faire
23 part de quelques remarques supplémentaires à cet égard. Je souhaite ici
24 citer en anglais et ajouter quelques remarques par rapport à ce qu'a dit M.
25 Scott de l'Accusation. Si on ne peut pas suffisamment bien comprendre tout
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1 ceci parce que cela porte sur des questions d'interprétation.
2 "A préciser que des difficultés pourraient être rencontrées à cause de la
3 différence des dispositions des différents statuts respectifs et des
4 Règlements de procédure et de preuve ainsi que de la présentation des
5 moyens de preuve, des moyens de preuve fournit par le TPIY par rapport au
6 droit pénal croate. Un des points abordés a évoqué…" les points
7 susmentionnés ont été abordés au cours de séminaires. Il s'agissait de
8 séminaires qui avaient été organisés aux fins de former les Juges et
9 Procureurs qui allaient participer à ce Tribunal et qui seraient les futurs
10 Procureurs appelés à juger ce type d'affaire, "a évoqué la question de la
11 responsabilité hiérarchique ce qui est contenu dans l'Article 7(3) du
12 Statut et ceci n'est pas stipulé dans le code pénal de la République de
13 Croatie à l'époque où les crimes que l'on reproche aux accusés dans cette
14 affaire ont été commis.
15 "A ces séminaires, un point de vue a été adopté, les points de vue des
16 juges de la Cour suprême ainsi que des procureurs de la république ont
17 donné leur opinion : est-ce que la question de la responsabilité
18 hiérarchique peut, dans la plupart des cas, être remplacée par
19 l'application de l'Article 28 du code pénal croate, le code pénal de 1993,
20 j'entends, qui régit la question de la commission d'un crime par omission.
21 "Le procureur de la république estime que l'Article 28 de ce code pénal en
22 même temps que l'application des conventions de Genève et des Protocoles
23 additionnels pourraient, dans la plupart des cas, remplacer la notion de
24 responsabilité hiérarchique telle que c'est indiqué à l'Article 7(3) du
25 Statut du Tribunal de La Haye."
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1 Messieurs les Juges, nous avons entendu le procureur aujourd'hui, et vous
2 avez, Monsieur le Juge, posé une question qui portait sur l'application du
3 droit international par les tribunaux croates, et ce trois manières : peut,
4 doit et devrait.
5 On ne peut pas dire "devrait", je reste convaincu que les tribunaux pénaux
6 de Croatie appliqueront ce droit pénal international. Les critères
7 applicables et les sources de droit non seulement seront appliqués dans le
8 cadre de cette affaire-ci, mais également dans le cadre d'autres affaires.
9 Je vais maintenant parler croate avec vous. Telle est la position de la
10 République croate conformément à ce que nous avons entendu aujourd'hui, les
11 arguments présentés par le Procureur, les questions posées par les Juges de
12 la Chambre, et les arguments présentés par les conseils de la Défense, je
13 crois le mot-clé est le mot "créativité", une situation nouvelle étant
14 donné qu'un acte d'accusation est renvoyé vers un autre tribunal. Je crois
15 qu'une grande souplesse en matière d'interprétation ici, de façon à ce que
16 l'on se rapproche davantage des critères appliqués en matière de droit
17 international. Ce droit international qui évolue beaucoup sur la question
18 du fond et du contenu, choses qui nous auraient paru tout à fait impossible
19 il y a quelque 20 ou 50 ans, sans parler de la question de l'appartenance à
20 une communauté internationale, comment chaque Etat appartient à la
21 communauté internationale et le lien de souveraineté qui existe non
22 seulement par le biais de la ratification de conventions, mais
23 l'application des critères du droit coutumier et les droits de chaque Etat
24 qui reconnaissent les principes de Jean- Jacques Rousseau, en réalité, ou
25 les principes à l'origine de la création d'un système de droit pour
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1 éradiquer le totalitarisme.
2 Nous regardons et analysons la question de la souveraineté et nous
3 rattachons ce principe de souveraineté à celui de l'intérêt de la
4 communauté internationale au sens large, sans parler de crime organisé, ni
5 de terrorisme, mais lorsqu'il s'agit de traduire devant la justice des
6 individus pour les actes qu'ils ont commis. Le système, ou la justice
7 croate est tout à fait au courant de cela. Quand bien même il y a des
8 individus qui ne sont pas d'accord avec cela, certaines personnes qui ont
9 été élues, juges ou avocats doivent respecter la constitution croate et les
10 décisions prises par les autorités croates.
11 L'Article 11 bis constitue le fondement ici de cette décision, cette
12 décision et peut être interprétée au sens large ou non. Si cela était
13 interprété au sens large, cela peut étendre trop le champ, l'inverse est
14 également vrai. Ceci peut également trop limiter le champ d'application.
15 Est-ce qu'on parle du paragraphe (G) ou (F).
16 Ici, si la Chambre de première instance où les Juges souhaitent me
17 demander des questions particulières, je serais tout à fait disposé à y
18 répondre. Mais, si vous me posez la question comme la question que
19 l'Accusation a posée : dans quelle mesure et dans quel cas -- que se
20 passerait-il si un témoin X ou Y était disposé à témoigner, est-ce au
21 gouvernement croate d'intervenir ou est-ce à vous d'intervenir, ou la
22 Chambre de première instance devrait-elle intervertir ? Quelle serait sa
23 responsabilité à cet égard ? Je dois dire que si l'on interprète l'Article
24 11 bis correctement, et à la lumière des observations déjà présentées, les
25 paragraphes (G) et (H) donnent toute latitude ici pour le faire et nous
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1 également que nous pouvons agir dans ce sens.
2 Mais ce dont il s'agit ici, nous sommes en train de préparer quelque
3 chose qui sera appliqué à l'avenir. Nous faisons cela ensemble et il faudra
4 anticiper sur la manière dont ceci sera organisé plus tard. C'est la
5 première fois qu'il y a renvoi d'une affaire devant un tribunal croate et
6 je crois qu'il s'agira d'une première, quelque chose qui nous permettra de
7 comprendre quelles sont les possibilités offertes à nous. Le président de
8 ce tribunal, M. Meron a parlé de cela, l'Accusation l'a cité en ses propres
9 termes. Il a parlé de l'assurance et de la confiance que l'on plaçait ici
10 dans ces nouveaux tribunaux précisés par les Amici Curiae également.
11 Comment l'Etat de droit peut être appliqué dans ces Etats. Nous verrons que
12 cet Article 11 bis n'était pas seulement une éventualité, mais un
13 instrument de grande valeur qui permettra à la juridiction de ce Tribunal
14 d'être entendue à d'autres Etats lorsque les actes d'accusation seront
15 renvoyés devant les tribunaux de ces autres Etats. Il faut trouver un
16 équilibre entre une interprétation au sens large et une interprétation plus
17 étroite de l'Article 11 bis.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous ralentir un petit peu,
19 s'il vous plaît, car notre compte rendu d'audience en souffre.
20 M. HORVATIC : [interprétation] Pardonnez-moi. Je suis quelque peu
21 surpris.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Malheureusement, vos propos ne
23 seront pas consignés sur le compte rendu d'audience, nous sommes arrêtés à
24 la ligne 19. La Chambre voudrait savoir si le compte rendu peut fonctionner
25 à nouveau.
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1 M. HORVATIC : [aucune interprétation]
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais tels ne sont pas vos propos.
3 M. HORVATIC : [interprétation] Je me souviens pas de mes propos
4 exactement.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons recommencer ou
6 redémarrer le programme informatique. Je peux relire vos propos tels qu'ils
7 sont consignés au compte rendu d'audience.
8 "La première affaire renvoyée devant les tribunaux croates sera une
9 première et nous permettra de voir quelles sont les possibilités qui nous
10 sont offertes. Le Président de ce tribunal M. Meron" et c'est là où le
11 compte rendu n'est plus lisible.
12 M. HORVATIC : [interprétation] En anglais, je pense que cela sonne
13 mieux qu'en croate.
14 Oui, effectivement, c'est là où je voulais en venir. Je souhaite
15 reprendre à partir de ce moment-là. En réalité, la question du droit pénal
16 portant sur l'intention ici, le système pénal en Croatie consiste à
17 reconnaître que cela est possible, que cela doit et devra s'accomplir de
18 cette mission si elle doit remettre cette affaire entre les mains du
19 système judiciaire croate.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Professeur
21 Horvatic.
22 Si nous regardons l'ordre du jour, le point suivant de notre ordre du
23 jour est quelque chose qui a été prévue pour après la pause. Une
24 intervention faite par le greffier. Je crois que M. le Greffier n'est pas
25 encore présent dans le prétoire étant donné que notre journée est très
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1 chargée, peut-être qu'il serait préférable de faire une pause maintenant et
2 consacré davantage de temps après, parce que vous vous êtes conformés
3 tellement au temps qui vous était imparti que nous reconnaissons que tout
4 ceci a été organisé ainsi.
5 [La Chambre de première instance se concerte]
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons suspendre l'audience
7 jusqu'à une 1 heure moins quart, ce qui nous donne quasiment, nous avons
8 quasiment 65 minutes pour la pause de déjeuner.
9 --- L'audience est suspendue pour le déjeuner à 11 heures 52.
10 --- L'audience est reprise à 12 heures 52.
11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous reprenons nos débats.
12 On me dit que mon micro n'est pas allumé. Je vois une lumière rouge sur mon
13 micro, donc je pense qu'il est allumé. Tout va bien ? Bien.
14 Nous avons à l'ordre du jour une intervention prévue au titre de l'Article
15 33(B) du Règlement de procédure et de preuve, une intervention du Greffe,
16 car cette question n'est pas nouvelle simplement pour l'ensemble d'entre
17 nous, mais également pour le Greffe, compte tenu de ses implications
18 pratiques dont nous devons sans doute prendre connaissance. Qui va
19 s'exprimer au nom du Greffe ? Est-ce M. Christian Rohde ?
20 M. ROHDE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, avec l'aide de
21 ma collègue.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, Monsieur Rohde. Une liste
23 résumée des questions à traiter a été distribuée. J'espère qu'elle a bien
24 été distribuée aux parties.
25 M. ROHDE : [interprétation] Je ne sais pas exactement ce qu'elle en est,
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1 Monsieur le Président, mais en tout état de cause, je m'en tiendrais aux
2 éléments figurant sur cette liste qui devrait avoir été distribuée aux
3 parties.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder. Abordez les questions
5 dans l'ordre qui vous convient. Vous vous exprimez ici en tant que
6 représentant du Greffe, donc il serait normal que vous exposiez les
7 positions qui sont celles du Greffe.
8 M. ROHDE : [interprétation] Au nom du Greffe, nous aimerions aborder
9 quelques points pratiques qui s'ajouteront à la teneur de nos débats
10 jusqu'à présent. Ces éléments sont ceux qui pourraient être examinés en cas
11 de transfert éventuel d'un accusé. Nous avons réfléchi à la question, et
12 nous avons déterminé un certain nombre de points qui fera l'objet de notre
13 exposé ici. Nous espérons qu'ils seront utiles aux Juges de la Chambre.
14 Première question : le transfert des dossiers et des documents
15 confidentiels. Manifestement, le transfert des dossiers joue un rôle tout à
16 fait déterminant dans le fonctionnement sans erre de l'ensemble du
17 processus. Nous parlons, par exemple, de la responsabilité du responsable
18 qui sera chargé de conserver les dossiers fournis par le Tribunal. La
19 question qui se pose consiste à savoir qui dans le nouveau système
20 judiciaire devra être le destinataire de ces dossiers de façon à ne pas
21 retarder la procédure ?
22 Autre question : selon quelle modalité ces dossiers seront remis aux
23 nouvelles équipes d'Accusation et de Défense, dans l'état devant laquelle
24 l'affaire sera renvoyée ?
25 Troisième question : comment traiter les documents ex parte ?
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1 Par exemple, quant aux comptes rendus établis par le TPI, la question se
2 pose de savoir comment après leur transfert ils pourront être accessibles
3 aux parties concernées. Je parle notamment des parties des comptes rendus
4 d'audience qui ont un aspect confidentiel, et qui reprennent des propos
5 tenus en audience à huis clos partiel. Il y a également eu parfois des
6 expurgations qui doivent être prises en compte, et se pose également le
7 problème de la disponibilité éventuel des enregistrements audio en B/C/S,
8 si je ne m'abuse. La solution de toutes ces questions aidera, j'en suis
9 sûr, tant les parties que les Juges du nouveau système judiciaire concerné
10 par ces affaires. Les documents à l'appui de l'acte d'accusation doivent
11 être pris en compte également. Je parle des premiers documents à l'appui de
12 l'acte d'accusation. Une autre question se pose au sujet des éléments de
13 correspondance et autres documents divers qui peuvent intéresser les
14 nouveaux tribunaux saisis de l'affaire.
15 Nous pensons, je le répète, que le contrôle de l'accès aux documents
16 confidentiels est une question particulièrement importante, compte tenu du
17 fait qu'il faudra peut-être s'écarter des dispositions prises en matière de
18 protection. C'est donc manifestement une question capitale. L'aspect
19 administratif de la question a également son intérêt. Je parle en
20 particulier du coût de production des copies des dossiers et du coût du
21 transfert de ces dossiers, qui constitue un volume non négligeable de
22 papier. Je suppose qu'il sera plus facile d'effectuer ce transfert par
23 voies électroniques. Cela facilitera la tâche du TPI.
24 Voilà ce que j'avais à dire au sujet des dossiers et des documents.
25 Le deuxième point sur notre liste concerne la protection des témoins --
Page 72
1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Rohde, permettez-moi de
2 vous interrompre. Au titre de l'Article 11 bis du Règlement, sous-
3 paragraphe (D)(iii), il semblerait que ce soit le Procureur qui assume la
4 responsabilité primordiale de l'établissement des liasses de documents. Le
5 Greffe et l'Accusation, ont-ils discuté de la question de leur
6 responsabilité relative dans cette tâche complémentaire pour ces deux
7 instances, par exemple, est-ce le Greffe qui est chargé de fournir les
8 originaux des dossiers d'audience ? La question a-t-elle été examinée ?
9 M. ROHDE : [interprétation] Monsieur le Président, suite aux premières
10 discussions entre les représentants du Greffe et les représentants du
11 bureau du Procureur, à cet égard, je dirais que les détails n'ont pas
12 encore été abordés, mais le Greffe est très certainement d'avis que
13 l'Accusation a un rôle important à jouer en la matière. Le Greffe, n'étant
14 qu'une espèce de détenteur des documents, donc nous proposons la plus large
15 coopération à la matière.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.
17 M. ROHDE : [interprétation] Merci. Je m'apprêtais à prononcer quelques mots
18 au sujet du problème de la protection des documents. Cette question, bien
19 sûr, comptera au nombre des questions que la Chambre aura à superviser. Il
20 importe de ne pas perdre de vue que le Tribunal est chargé de fournir
21 certains services au témoin, d'apporter une certaine aide au témoin, car,
22 bien entendu, certains témoins se voient proposer une réinstallation. Je ne
23 sais pas si c'est le cas dans l'affaire qui nous intéresse, mais c'est une
24 question qui, à notre avis, doit être prise en compte. Les témoins
25 bénéficiant des mesures de protection, si nous n'allons pas jusqu'à parler
Page 73
1 de mesures de réinstallation, doivent également faire l'objet d'une
2 réflexion attentive. Nous proposons que le bureau du Procureur, ainsi que
3 la section chargée des Victimes et des Témoins interviennent avec le
4 Greffe pour contribuer à la solution de ces problèmes, de façon à ce que
5 les témoins soient placés dans des conditions leur permettant de témoigner
6 dans le nouveau système judiciaire concerné dans des bonnes conditions,
7 c'est-à-dire, en ayant pleine assurance que la sécurité de leurs familles,
8 et leur sécurité personnel, sera garantie.
9 Il y a d'autres questions que nous considérons dignes d'intérêt, même si
10 elles sont moins importantes dans la présente affaire. Au nombre de ces
11 questions, il y a la nécessité éventuelle de déterminer à quel moment la
12 responsabilité de détention des documents et de l'accusé du TPI peut être
13 transférée sur une autre instance judiciaire. S'agissant des
14 responsabilités respectives des uns et des autres, c'est une question qui
15 manifestement a son importance.
16 Le troisième point le Greffe aimerait en parler, car c'est une question
17 fondamentale pour l'accusé, à savoir, le transfert de sa Défense, qui
18 implique de se pencher sur un certain nombre de questions. Le Greffe estime
19 que la garantie d'une défense appropriée dans le nouveau système judiciaire
20 pour l'accusé est un point essentiel, à savoir que l'accusé doit, devant le
21 nouveau tribunal saisi de l'affaire, tribunal national, bénéficier de la
22 même qualité de défense qu'auprès du TPI. Si tel n'était le cas, cela
23 posera un problème important, notamment en raison du transfert des
24 dossiers.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être pouvez-vous nous dire
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1 brièvement quelles sont les questions qui vous intéressent, et peut-être
2 pourrais-je interroger la Défense brièvement, car j'ai cru comprendre, et
3 j'espère que ma mémoire ne me trahit pas,
4 Maître Prodanovic et Maître Olujic, que vous continuerez à représenter les
5 intérêts de M. Ademi et de M. Norac, respectivement; c'est exact ?
6 M. PRODANOVIC : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Olujic ?
8 M. OLUJIC : [interprétation] Oui, absolument, Monsieur le Président.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, dans ces conditions, Monsieur
10 Rohde, je suppose que les problèmes des rémunérations des conseils, si
11 elles doivent poser problème ne le feront qu'à l'avenir. S'agissant de
12 l'affaire qui nous intéresse le problème ne se posera pas, je suppose. Je
13 crois savoir que c'est également la position adoptée pour le gouvernement
14 croate dans ses récentes écritures.
15 Veuillez poursuivre.
16 M. ROHDE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Sur le dernier
17 point que vous venez d'évoquer, je rebondis en vous disant que le problème
18 que nous pensons devoir examiner est également celui de la commission
19 d'office d'un conseil de la Défense, ce sera également un point important.
20 Je vais maintenant passer à deux questions qui ont peut-être déjà été
21 abordées par la Chambre. J'en traiterai rapidement. La première est la
22 suivante : le nouveau système judiciaire concerné pourrait avoir un rôle à
23 jouer dans l'examen des immunités accordées à tel ou tel témoin ou à tel ou
24 tel représentant des Nations Unies, par exemple, selon les accords sur les
25 privilèges et immunités existant à l'heure actuelle, et qui devront faire
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1 l'objet d'une dérogation pour permettre à un représentant du bureau du
2 Procureur de témoigner éventuellement.
3 Je suppose que la question des documents relevant de l'Article 70 du
4 Règlement a déjà été traitée.
5 En conclusion, j'ajouterais quelques mots sur le principe, bien sûr, tous
6 les problèmes susceptibles de surgir peuvent être réglés par des
7 ordonnances de la Chambre. Cependant, il est possible que certaines
8 difficultés administratives puissent se régler par d'autres voies, et dans
9 ce cas, le Greffe, bien sûr, pourra examiner ces questions au nom des
10 Nations Unies avec les responsables croates pour régler toutes difficultés
11 administratives dans le rôle de liaison qui est le sien compte tenu de
12 l'existence de point de contact qui, en général, sont très utiles en la
13 matière. Voilà le dernier mot de mon exposé. Je vous remercie, Monsieur le
14 Président.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Rohde. S'agissant de ce
16 que vous venez de dire au sujet des documents relevant de l'Article 70 du
17 Règlement, je crois me rappeler que le procureur a traité de la question du
18 transfert des documents à la nouvelle juridiction concernée et que, pour
19 l'instant, nous n'avons encore entendu aucune réponse, en tout cas aucun
20 commentaire ou aucune observation négative à cet égard. Je vous remercie
21 beaucoup, Monsieur Rohde.
22 Point suivant à l'ordre du jour, il s'agit des questions éventuelles
23 que les Juges pourraient avoir à poser aux Amici Curiae, aux représentants
24 du gouvernement croate ou aux représentants du Greffe.
25 J'aurais pour ma part quelques questions à adresser en premier lieu aux
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1 Amici. Professeur Krapac, j'aimerais appeler votre attention sur la page 4
2 de vos écritures, dans votre mémoire je remarque qu'un certain nombre de
3 faits sont évoqués. Vous savez certainement que cette Chambre n'a pas
4 entendu de témoignages sur la réalité des événements. Je ne vois pas très
5 bien sur quel fondement vous vous appuyez pour invoquer ces faits. Vous
6 comprendrez, j'en suis sûr, qu'il nous faudra éventuellement les laisser de
7 côté si nous n'obtenons pas d'explication claire quant à l'aspect notoire
8 de ces faits, qui est le seul cas où les faits concernés ne justifient pas
9 l'audition d'un témoin. Si ce qui figure dans vos écritures n'est que
10 l'expression d'une hypothèse de votre part ou de vos idées personnelles,
11 les choses sont loin d'être claires. Je vous demanderais si vous avez des
12 fondements particuliers pour évoquer ces faits dans votre mémoire.
13 M. KRAPAC : [interprétation] Puis-je répondre immédiatement ?
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vous en prie.
15 M. KRAPAC : [interprétation] Monsieur le Président, certaines des
16 affirmations qui se trouvent dans notre mémoire, si tel est le terme qu'il
17 faut appliquer, à moins que l'on appelle cela déclarations, sont le
18 résultat d'informations qui sont arrivées jusqu'à nous à partir de moyen
19 des médias, mais ces médias sont des médias croates. Nous n'avons pas voulu
20 nous appuyer exclusivement sur ces articles de presse. Mais puisqu'il est
21 question de faits de notoriété publique pour l'Accusation et pour la
22 Défense, nous avons pensé pouvoir en évoquer certains, car je suppose, bien
23 entendu, qu'au cours de cette affaire toutes les parties ont suivi les
24 publications des médias.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci d'avoir éclairci les Juges sur la
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1 source des faits que vous avez cités.
2 Page 4, toujours de votre mémoire, dans les dernières lignes de cette page.
3 Vous écrivez, je cite : "Cela concerne l'éventualité que des condamnations
4 prononcées par les tribunaux croates en l'espèce pourraient contribuer dans
5 une grande mesure à la réconciliation entre les groupes ethniques
6 affectés."
7 Une condamnation pourrait avoir l'effet que vous évoquez, mais un
8 acquittement n'aurait-il pas l'effet inverse ? Pour que ma question soit
9 plus claire, j'ajoute : que dans vos écritures mais également dans un
10 certain nombre d'autres écritures, nous nous trouvons en présence
11 d'attentes assez clairement exprimées quant aux résultats du procès et,
12 dans la plupart des cas, cette attente évoque la possibilité d'une
13 condamnation à l'issue du procès qui, bien sûr, doit être envisagée
14 également par la juridiction nationale.
15 Voulez-vous répondre, Monsieur Krapac ?
16 M. KRAPAC : [interprétation] Nous sommes partis de l'idée que le procès, au
17 cas où il y avait renvoi devant des tribunaux croates, nous avons estimé en
18 raison de la haute qualité des dispositions prises d'ores et déjà, un tel
19 procès serait efficace et équitable. Au cas où le verdict rendu à l'issue
20 d'un tel procès était un verdict de condamnation ou un verdict
21 d'acquittement, il devra jouir de l'appui de l'opinion publique, nonobstant
22 le fait que cette opinion publique, parce que vous avez parlé de
23 l'affrontement interethnique, donc nonobstant le fait que cette opinion
24 publique soit l'opinion publique croate ou l'opinion publique serbe. Bien
25 entendu, il ne peut que s'attendre à l'expression d'un certain
Page 78
1 mécontentement des deux côtés. Mais j'ajouterais qu'à notre avis ce qui est
2 tout à fait fondamental, c'est que le verdict soit conforme aux
3 dispositions du code pénal croate ainsi qu'aux dispositions des documents
4 de base de ce Tribunal, le TPIY, dispositions applicables en vertu de
5 l'Article 28 du code pénal de la république de Croatie. Mais la réaction de
6 l'opinion publique sera la même donc, indépendamment, du fait que le
7 verdict est un verdict de condamnation ou d'acquittement. A mon avis, c'est
8 cela, l'aspect principal de la question.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Puis-je reprendre la question posée par
10 le Président et vous poser quelques questions supplémentaires sur le même
11 sujet.
12 Dans vos arguments oraux, Professeur Krapac, vous avez parlez du rôle
13 des victimes entre autres questions abordées par vous. En page 4 de votre
14 mémoire, vous évoquez l'éventualité que des verdicts de condamnation s'ils
15 étaient prononcés par les tribunaux croates aient le pouvoir de contribuer
16 grandement à la réconciliation entre les groupes ethniques. Ce qui nous
17 préoccupe un petit peu, le Juge Orie et moi-même, c'est l'autre face de la
18 médaille. En effet, si à l'issue d'un procès équitable, l'accusé est
19 acquitté, en vertu du fait que le droit pénal international ne s'applique
20 pas au procès qui lui est intenté et si en revanche devant un tribunal
21 international, le verdict aurait été un verdict de condamnation, alors la
22 situation est aggravée de ce point de vue-là. Pouvons-vous traiter cette
23 question, je vous prie ?
24 M. KRAPAC : [interprétation] Si nous évoquons les questions qui
25 seront débattues de façon plus détaillées dans quelques instants, à savoir
Page 79
1 la contradiction qui existe du point de vue de la prise en compte de la
2 responsabilité hiérarchique entre le Tribunal pénal international et un
3 tribunal croate. Si nous parvenons à l'issue de nos débats à découvrir une
4 traduction créative du code pénal croate sur ce point, dans ce cas, le
5 problème que vous venez d'évoquer, m'apparaît tout à fait théorique. Ce qui
6 est absolument concevable mais je répète, qu'à l'issue d'un procès mené
7 dans le plein respect du droit et de la façon la plus efficace que ce soit,
8 ce risque est véritablement à mes yeux un risque minime. En effet, le
9 Procureur quittera à la barre un certain nombre d'éléments de preuve à
10 charge, ce processus sera repris par le procureur public du tribunal croate
11 et à l'issue du procès, c'est le code pénal de la République de Croatie qui
12 s'appliquera pour prononcer un verdict déterminé à l'encontre de l'accusé.
13 Je tiens à vous rappeler que la législation de la République de
14 Croatie qui, s'agissant de l'appréciation des éléments de preuve est
15 absolument au même niveau que les législations mises en œuvre dans d'autres
16 pays occidentaux, cette libre appréciation des éléments de preuve qui est
17 prévue dans tous ces systèmes judiciaires n'autorisent en aucun cas une
18 décision arbitraire. Il existe effectivement un processus grandement
19 structuré qui doit être appliqué dans le cadre de cette appréciation.
20 Lorsqu'un tribunal prononce un verdict qu'il s'agisse d'un verdict de
21 condamnation ou d'un verdict d'acquittement. Il est tenu au préalable,
22 d'examiner avec le plus grand soin, la situation de fait à prendre en
23 compte avant de prononcer un verdict et il doit également rendre compte
24 dans les détails de la façon dont il est parvenu à l'appréciation faite par
25 lui, de tous les éléments de preuve. Il doit donc exposer dans le plus
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1 grand détail selon quelles modalités, il a décidé de prononcer un verdit de
2 culpabilité ou d'acquittement. La situation est absolument transparente et
3 toute erreur de la part du tribunal qui risquerait de nuire à la
4 transparence de ce processus est considérée selon le droit pénal croate
5 comme une faute grave dans l'application du droit.
6 Les juristes de la République de Croatie craignent comme la peste,
7 oserais-je dire, une telle situation, c'est-à-dire l'éventualité de
8 commettre une erreur en droit dans le prononcé d'un verdict. Donc, ils
9 tirent avantage de tout ce qui est à leur disposition pour éviter de
10 commettre une telle erreur. Dès lors que le verdict est rendu par une
11 Chambre de première instance, le jugement peut être examiné par une Chambre
12 de niveau supérieur qui en l'espèce serait un jugement de Cour suprême de
13 la République de la Croatie qui, elle-même, joue un rôle tout à fait
14 comparable à celui de la Chambre d'appel au TPI. La Cour suprême va
15 examiner les différents éléments du dossier pour établir éventuellement
16 l'existence d'une faute et se prononcer sur la base d'un réexamen des
17 éléments de preuve.
18 Je répète une fois encore, que je comprends tout à fait votre
19 inquiétude, les craintes qui sont les vôtres, mais que je crois à l'heure
20 actuelle que des dispositions suffisantes existent sur le plan de la
21 procédure pour réparer toute erreur éventuelle ou en réduire au maximum le
22 risque.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Professeur, pour le compte rendu
24 d'audience, en anglais, j'indique qu'en page 69, ligne 20, nous lisons en
25 anglais le mot "pre-evaluation", alors qu'il s'agissait de "free
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1 evaluation".
2 M. KRAPAC : [aucune interprétation]
3 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krapac, à la page 6 de
5 votre mémoire, vous parlez de l'Article 120 et des articles suivants en ce
6 qui concerne le code pénal de la Croatie. Je ne vois pas dans l'annexe
7 l'Article 123. Pourrait-on obtenir cet Article 123, s'il vous plaît, je
8 pense que cet article et sa lecture pourraient être utiles à la Cour. Je
9 vois que vous vous inquiétez, ceci ne figure pas évidemment sur le compte
10 rendu mais je souhaite que votre réponse soit néanmoins reflétée.
11 Ma question suivante portera sur la page 9 de votre mémoire. Vous
12 nous expliquez la définition des instigateurs et vous nous dites que, tout
13 comme des complices ou des coauteurs, ces instigateurs sont responsables
14 seulement dans les limites de l'intention qui est la leur. Vous nous
15 dites : "Toutefois, en ce qui concerne des crimes très graves, et ceux
16 relatifs au chapitre 15 du code pénal de Croatie, il faut établir une ligne
17 de démarcation entre la perpétration et la complicité."
18 Je ne sais pas très bien comment le droit croate traite cette
19 question. Est-ce qu'il y a une disposition statutaire particulière ? Est-ce
20 qu'il y a des antécédents ? Comment le droit croate se distingue-t-il
21 exactement de cette ligne généralement acceptée, par ailleurs, entre la
22 perpétration et la complicité ?
23 M. KRAPAC : [interprétation] En ce qui concerne la première question, je ne
24 sais pas si cette Chambre me permettra de vous donner lecture de l'Article
25 123 que j'ai ici avec moi. Nous ne l'avons pas ajouté à dessein car son
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1 titre est : "L'organisation d'un groupe et instigation de la commission de
2 génocide et de crimes de guerre." Nous pensons que cet article ne
3 s'appliquerait pas en l'espèce. Toutefois, si le membres de cette Chambre
4 le souhaite, je peux vous donner lecture de sa disposition particulière, ou
5 peut-être pourrait-on vous photocopier cet article et vous le soumettre en
6 croate.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, peut-être que ce serait là le
8 meilleur moyen de procéder. Nous ferons traduire ce document. Je comprends,
9 vous n'avez pas souhaité inclure ce document, puisque en l'espèce il ne
10 s'agit pas d'une responsabilité de groupe ou d'une entreprise criminelle
11 conjointe quel que soit le terme que vous choisissiez, mais il ne s'agit
12 pas d'une conduite collégiale ou collective qui entraîne une responsabilité
13 pénale individuelle pour ceux ayant contribué à cette entreprise. Si telle
14 est votre raison et vous souhaitiez simplement dire que dans cette
15 situation le droit croate se distingue un peu mais que la disposition
16 néanmoins pas applicable, nous aimerions toutefois recevoir cet Article
17 123, s'il vous plaît.
18 Veuillez poursuivre.
19 M. KRAPAC : [interprétation] La deuxième question -- je dois vous dire que
20 je ne suis pas sûr de bien avoir compris. Pourriez-vous la répéter, s'il
21 vous plaît ?
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien sûr. Je crois que
23 m'intéressait --
24 M. KRAPAC : [interprétation] A quelle page, Monsieur le Président, faisiez-
25 vous référence ?
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A la page 9, et je crois que j'ai parlé
2 du droit croate qui s'est distingué un petit peu d'autres dispositions, et
3 j'ai essayé de savoir de quelle manière il le faisait, mais peut-être que
4 la réponse à ma question se trouve dans l'Article 123 : "Vous parlez de co-
5 auteurs, comme les co-auteurs, les instigateurs sont responsables seulement
6 dans la limite de l'intention qui est la leur, l'intention qu'ils
7 poursuivent; toutefois, dans le cas de crimes extrêmement graves qui sont
8 énumérés dans la section ou le chapitre -- du FCSC, le droit croate se
9 démarque quelque peu de la division adoptée par ailleurs entre perpétration
10 et complicité."
11 Vous continuez : "Comme nous l'avons indiqué, une personne occupant un
12 poste d'autorité qui ordonne à une autre personne de commettre un crime est
13 traité comme auteur plutôt que comme complice."
14 M. KRAPAC : [interprétation] Le concept de co-auteur est défini à l'Article
15 20 du texte des droits positifs de la République de Croatie, et il est
16 question d'un certain nombre d'individus comme étant un acte en tant que
17 complice, donc ces personnes commettent ensemble un acte criminel. Chacun
18 est condamné à une peine prévue pour le crime en question. En Croatie, les
19 experts ayant commenté cette disposition sont d'accord pour dire qu'elle
20 est fondée sur la théorie de la responsabilité ou de l'autorité vis-à-vis
21 d'un acte particulier, qui dans le cas d'une perpétration conjointe exige
22 une composante subjective et une composante objective. La composante
23 subjective est la volonté collective des co-auteurs qui se sont avérés
24 auteur d'un acte particulier. En ce qui concerne la deuxième composante
25 objective, il s'agit de leur contribution à l'exécution de l'acte en
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1 particulier qui est d'une importance particulière. Donc, un co-auteur ne
2 doit pas nécessairement participer à la commission de l'acte lui-même, à la
3 commission du crime lui-même, mais il peut contribuer à sa mise en œuvre en
4 quelque sorte en agissant de manière concrète au cours de la période au
5 cours de laquelle un tel acte est commis.
6 Chaque auteur doit être tenu responsable vis-à-vis de l'intention qui est
7 la sienne. Les experts ayant commenté notre droit sont d'accord pour
8 reconnaître que le texte d'un autre article, l'Article 23, paragraphe 1, de
9 notre code de 1993 envisage la possibilité de co-perpétration avec une
10 intention consciente de la part des auteurs du crime en question, et il
11 envisage également la non-perpétration de crime.
12 Par conséquent, si plusieurs personnes participent à un acte en
13 particulier, ceci nous renvoie à la question de l'instigation. Dans
14 l'Article 21, paragraphe 1 du code de 1993, il est prévu une forme de co-
15 perpétration par un certain nombre d'individus qui ont l'intention de
16 commettre un crime avec d'autres. En ce qui concerne l'individu en
17 question, il y a donc décision de sa part de commettre un crime, et il y a
18 également commission de l'acte ou du crime en particulier. C'est la raison
19 pour laquelle dans le droit croate, lorsque l'on parle d'instigation,
20 l'instigateur doit avoir perpétré un acte criminel et cet acte doit être
21 jugé comme étant un crime. La sentence prescrite est la sentence prévue
22 pour l'auteur d'un acte commis, d'un acte criminel.
23 Troisième forme, il s'agit de la question d'aider et d'encourager, abordée
24 à l'Article 22 de la loi de 1993. On y définit le fait d'aider et
25 d'encourager en tant que forme de co-perpétration de la part d'un certain
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1 nombre de personnes ayant l'intention de le faire, et contribuant de facto
2 à la commission par une autre personne, donc d'un acte criminel. La
3 personne qui aide et qui encourage peut se voir sanctionner par une peine
4 similaire ou identique. La loi de 1993 prévoit une définition relativement
5 large du fait d'aider et d'encourager, et il peut s'agir d'un encouragement
6 ou d'une aide intellectuelle, d'une aide physique, il peut s'agir de
7 l'octroi de conseil, d'instructions, de tentatives visant à masquer le
8 crime commis, et cetera, et cetera, ou également la possibilité de fournir
9 les moyens nécessaires à la commission d'un crime, et j'en passe.
10 Afin qu'il y ait de la part de la personne en question l'existence d'une
11 aide ou d'un encouragement qui ait été donné un crime doit avoir été
12 commis, ou en tout cas, il doit y avoir eu tentative et les auteurs eux-
13 mêmes ne seront pas nécessairement considérés comme pénalement
14 responsables. Il peut y avoir également aide et encouragement par omission.
15 Voilà, j'ai essayé de vous expliquer comment les choses fonctionnent,
16 comment la loi croate fonctionne. Je parle de la loi 1993 et les
17 différences qui peut y avoir entre ce texte et la manière dont les choses
18 sont faites ici dans ce Tribunal.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Professeur Krapac. Ceci nous aide
20 à comprendre votre mémoire. J'aimerais, maintenant, vous renvoyez à la page
21 10 de ce même mémoire. Presque en bas de cette page : "Une autre manière
22 d'encourager les tribunaux croates à reconnaître la responsabilité
23 indirecte du supérieur hiérarchique c'est d'affirmer que le Protocole
24 numéro 1 de la convention européenne pour la Protection des droits de
25 l'homme, incriminant la négligence et autres ou plutôt le manquement dû à
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1 la négligence visant à empêcher ces crimes."
2 Ce Protocole numéro 1 de la convention européenne a pris séance sur le
3 droit croate. Je ne vois pas très bien ce à quoi vous faites référence dans
4 ce Protocole numéro 1 pour la Protection du droit de l'homme et des
5 libertés, qui porte surtout sur des questions liées à des questions de
6 propriétés pas nécessairement à des questions pénales.
7 M. KRAPAC : [interprétation] Non. Il y a une erreur ici. Ce n'est pas le
8 Protocole numéro 1 de la convention européenne, mais c'est le Protocole
9 numéro 1 de la convention de Genève. Effectivement, c'est une erreur
10 typographique, et je vous remercie d'avoir attirer mon attention sur ce
11 lapsus qui a été fait dans le cadre de ce mémoire.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci de cet éclaircissement.
13 A la page 11, vous nous expliquez que si un manquement ou la non sanction
14 contribue à perpétuer l'activité criminel par des subordonnés, dans ce cas,
15 le supérieur peut être tenu responsable en sa qualité de complice, c'est-à-
16 dire, dans la mesure où il aura aidé à la perpétration de telle ou telle
17 activité.
18 Je pense que vous avez eu accès à l'acte d'accusation modifié, renforcé,
19 déposé contre M. Norac et M. Ademi. Je suppose également que vous savez que
20 les crimes allégués ont été commis au cours d'une période relativement
21 brève au cours de l'opération qui a eu lieu dans la poche de Medak. Cette
22 brève période de temps au cours de laquelle il y a eu perpétration des
23 crimes, et au cours de laquelle les personnes responsables n'ont pas été
24 punies, la brièveté, en quelque sorte, de cette période, pourrait-elle
25 réduire la probabilité de voir une responsabilité pénale démontrée quant à
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1 l'incidence du comportement d'un supérieur sur la perpétuation d'activités
2 criminelles qui, finalement, se sont étalés sur une période de temps
3 extrêmement brève; nous parlons de quelques jours, à peine.
4 M. KRAPAC : [interprétation] Notre avis est le suivant, Monsieur le
5 Président : Nous avons une troisième approche afin d'apporter une solution
6 à la question, afin d'appliquer de manière créative les dispositions de la
7 loi en 1993 de manière créative, ce qui veut dire en d'autres termes --
8 mais j'aimerais aborder la question de manière prudente, puisqu'il s'agit
9 d'une question ouverte à un certain nombre de spéculations, qui dépend d'un
10 certain nombre de choses; la quantité, la qualité des pièces à conviction,
11 des éléments de preuve dont dispose l'Accusation à l'appui de l'acte
12 d'accusation. Si le Procureur, l'Accusation, devait permettre à un
13 Procureur croate de démontrer devant le Tribunal que ces lacunes peuvent
14 être mises en perspective vis-à-vis du dolus eventualis de la part de
15 l'accusé, dans ce cas -- et là encore, il ne s'agit que d'une hypothèse, il
16 pourrait y avoir condamnation sur la base de l'Article 28, paragraphe 2,
17 cette condamnation serait certaine, serait définitive. Mais là, une fois de
18 plus, je le répète, cela dépend de la quantité et de la qualité des
19 éléments de preuve disponibles. Je ne peux pas malheureusement, ici et
20 maintenant, apporter une réponse dans un sens ou dans un autre à cette
21 question. Si le Procureur dispose de suffisamment d'éléments de preuve pour
22 convaincre le tribunal saisi, pour convaincre qu'il y a dolus eventualis
23 même au cour d'une période très brève, qu'il s'agisse de deux jours, de
24 quelques heures même, période donc au cour de laquelle les événements
25 décrits dans l'acte d'accusation se sont déroulés.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien entendu. Nous apprécions la
2 créativité dans le cadre de nos vies personnelles respectives. Je ne suis
3 pas tout à fait sûr que nous devions faire preuve d'une telle créativité
4 dans le domaine de l'interprétation du droit. Ne pensez-vous pas d'ailleurs
5 que ceci soit contraire à un certain nombre de principes de droit, dont
6 celui de in dubio pro
7 reo ?
8 M. KRAPAC : [interprétation] Monsieur le Président, nous parlons ici d'une
9 interprétation de dispositions juridiques, conformément à la doctrine de in
10 dubio pro reo en Croatie et dans d'autres pays également. Le principe de in
11 dubio pro reo est appliqué dans des cas où le doute existe en ce qui
12 concerne un certain nombre de positions factuelles. Ces doutes peuvent être
13 résolus par un autre principe, le principe de in dubio mitius. Par
14 conséquent, résoudre une question juridique, telle que celle-ci, à notre
15 avis exige de la créativité de notre part, parce qu'il s'agit ici de
16 concept de droit qui nous renvoie à la pratique et aux concepts appliqués
17 par un Tribunal, et qui nous renvoie également à la législation croate, à
18 la pratique. Il nous faut trouver le juste milieu. Il nous faut trouver un
19 équilibre entre ces différents éléments. Pour ce faire, il nous faut faire
20 preuve de la créativité à laquelle nous venons de faire référence. Par
21 conséquent, je crois que ce Tribunal ne doit pas craindre d'appliquer le
22 principe de in dubio pro reo, dans la mesure où le tribunal croate,
23 lorsqu'il appliquera ce concept ou ce principe dans une situation
24 déterminée, vis-à-vis, par exemple, d'un élément de preuve ne répondant pas
25 nécessairement aux normes appliqués par la Croatie dans une situation donc
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1 qui pourrait mener à un éventuel acquittement. Bien entendu, le Procureur
2 de ce Tribunal coopérera en étroite collaboration avec le bureau du
3 Procureur de la République de Croatie. Les choses ne se feront pas de
4 manière unilatérale. Ce sera également un processus qui s'inscrira dans le
5 temps, qui aura lieu d'ailleurs, qui s'inscrira pendant toute la durée du
6 procès qui aura lieu en première instance. Dans ce cas, toutes lacunes,
7 toutes difficultés qui sera ressenties par le Procureur vis-à-vis de la
8 qualité, ou éventuellement de la quantité d'éléments de preuve fournis à
9 l'appui de l'acte d'accusation, toutes ces lacunes pourront être comblées
10 rapidement par le biais d'une action conjointe, dirais-je, entre les deux
11 bureaux du Procureur.
12 [La Chambre de première instance se concerte]
13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Professeur,
14 mais vous nous apprenez tant de choses que je suis tenté de vous poser
15 davantage de questions. Je vous renvois à l'Article 28 du code de 1993,
16 paragraphe 2 de cet article. On nous dit qu'un acte criminel est commis par
17 omission seulement si l'auteur s'abstient d'effectuer un acte qu'il avait
18 pour obligation d'effectuer.
19 Pour vous, d'où provient cette obligation au sein du droit national croate,
20 obligation dont nous savons qu'elle correspond à la responsabilité du
21 supérieur hiérarchique aux termes de notre Article 7(3), où il est question
22 d'empêcher les crimes commis par un subordonné et de les sanctionner.
23 Alors, d'où émerge cette obligation dans le cadre du droit national croate,
24 obligation dont il est question dans le sous-paragraphe dont j'ai donné
25 lecture ?
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1 M. KRAPAC : [interprétation] Permettez-moi de répondre à cette question --
2 ou enfin, pour répondre à cette question, j'aimerais que vous lisiez : "Les
3 crimes reprochés qui sont pertinents en la matière." Nous avons énuméré une
4 série de ces crimes lorsque nous avons rédigé la partie relative aux
5 éléments matériels du crime, notamment, en ce qui concerne les crimes de
6 guerre. Il est question des crimes contre les populations, crimes contre
7 les personnes malades et les personnes blessées, crimes contre les
8 prisonniers de guerre, et cetera, et cetera. Dans cette liste d'éléments de
9 crimes, si vous voulez, nous abordons le comportement de la personne qui
10 commet cet acte. Nous parlons également de l'acte consistant à émettre un
11 ordre visant dans la commission d'un tel acte, la violation des normes du
12 droit international, et cetera. Vous voyez quelles sont les obligations en
13 terme de garantie, obligations d'un commandant d'une unité militaire. Il a
14 pour obligation de faire tout ce qui est en son pouvoir, tout ce qui doit
15 être fait pour prévenir la commission d'un crime, ou plutôt, pour réagir de
16 manière appropriée, face à une situation telle que celle-ci.
17 Nous pourrions en parler de manière extrêmement détaillée. Il y a ces
18 obligations dans le droit croate, nous pourrions en parler. Dans le droit
19 croate et comme dans d'autres systèmes juridiques, il y a un certain nombre
20 de dispositions qui ont trait à certains postes, commandants militaires,
21 commandants des forces de police, et cetera; on peut également déduire ces
22 obligations d'un certain nombre de principes plus généraux. Dans le cadre
23 de la pratique, des tribunaux croates, vous trouverez un certain nombre de
24 décisions au terme desquelles, omission en tant que forme de commission
25 d'un acte. Lorsqu'il y a omission des personnes sont sanctionnées,
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1 personnes responsables du comportement d'autres personnes. Je parle,
2 notamment, des parents qui sont responsables des actes ou des omissions de
3 leur progéniture, également responsables lorsqu'ils ont manqué à leurs
4 devoirs de prévenir la commission de tel ou tel acte par les enfants, bien
5 que ceci ne figure pas dans le droit pénal, bien entendu. Si un enfant, et
6 je reprends cet exemple à dessein, si un enfant ou un mineur n'est pas tenu
7 pénalement responsable, alors qu'il a commis un acte et que le parent n'a
8 pas fait ce qu'il fallait pour prévenir la commission d'un acte, que ce
9 parent sera tenu responsable conformément à l'Article 28, paragraphe 1.
10 Cette obligation n'est pas nécessairement exprimée mais elle existe
11 pourtant.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Dois-je comprendre que vous êtes
13 d'avis qu'un commandant a une obligation et ce, en vertu du droit
14 international coutumier ?
15 M. KRAPAC : [interprétation] Cela découle du droit international coutumier,
16 mais aussi des crimes reprochés. Vous allez toujours retrouver, lorsque
17 vous vous pencherez sur les crimes reprochés, vous allez trouver les
18 commandants qui -- ou l'énoncé qui dit : celui qui aurait donné l'ordre. A
19 mon avis, c'est plus simple et plus efficace de procéder ainsi pour
20 déterminer la responsabilité dans ce cas concret, c'est-à-dire passer par
21 le biais de cet Article 28, plutôt que de passer par les dispositions du
22 droit international.
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Professeur Krapac. Soyons clair, les
25 crimes reprochés que vous mentionnez, quand est-ce que cela a-t-il été
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1 énoncé comme texte ?
2 M. KRAPAC : [interprétation] En 1993.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Professeur, vous nous avez expliqué
5 qu'en vertu de la législation croate des accusations cumulatives ne
6 sauraient être permises. Dois-je comprendre, par exemple, qu'il ne serait à
7 advenir qu'un accusé soit accusé de meurtre en tant que crime contre
8 l'humanité, et du même crime en sa qualité de violation des lois et
9 coutumes de la guerre. Vous ai-je bien compris ?
10 M. KRAPAC : [interprétation] [inaudible]
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ma question suivante s'adresse à vous,
12 Monsieur Scott. Croiriez-vous que cette impossibilité de reprocher dans cet
13 acte d'accusation modifié les chefs d'accusation 2 et 3 pourraient
14 constituer un problème du point de vue du bureau du Procureur ou pas --
15 M. SCOTT : [interprétation] Je crois, Monsieur le Président, que je devrais
16 plutôt me pencher sur l'énoncé du texte de loi croate pour voir dans quelle
17 mesure il y a divergences d'éléments et quels sont les problèmes pratiques
18 que cela pourrait engendrer. La raison en est que nous ici, au TPIY, voyons
19 l'existence d'éléments différents en vertu de chefs d'accusation basés sur
20 l'Article 3 et sur l'Article 5. C'est la raison pour laquelle lorsqu'il y a
21 charge ou chefs d'accusation cumulatifs, nous voulons couvrir les deux sous
22 l'Article 50. Je voudrais maintenant en parler en terme abstrait. Je ne
23 peux pas vous dire jusqu'à quelle divergence il peut être abouti si nous
24 reprenons des éléments en vertu de l'Article 50 et de l'Article 51, et s'il
25 s'agit là d'éléments différents, si nous pouvons couvrir l'un et l'autre
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1 des chefs par ces éléments cumulatifs. Je ne sais pas si cela est le cas en
2 Croatie, et je ne sais pas quelle est la situation à laquelle va avoir à
3 faire face le procureur local.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, certainement. Il découle des
5 exposés précédents qu'au cas où l'acte d'accusation ne couvre pas de façon
6 acceptable tous les chefs d'accusation qui seraient effectués de façon
7 adéquate, à notre avis, nous ne savons pas dans quelle mesure cela serait
8 acceptable. Nous pourrions avoir une situation où le ministère public local
9 ne pourrait pas être en possibilité de poursuivre quelqu'un pour crime,
10 pour meurtre en tant que crime contre l'humanité, et crime en tant que
11 violation des lois et coutumes de la guerre. Qu'allez-vous demander ?
12 Allez-vous peut-être demander le renvoi vers cette instance-ci ?
13 M. SCOTT : [interprétation] Je suis désolé, Monsieur le Président, je n'ai
14 peut-être été suffisamment clair. Je crois comprendre ici que le procureur
15 croate se doit de se pencher sur les modalités suivant lesquelles il devra
16 se comporter dans ce cas. Il se peut que le problème ne se pose pas du tout
17 pour ce qui est des chefs d'accusation alternatifs.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous poursuivez quelqu'un pour cause
19 de meurtre en tant que crime de l'humanité et que vous avez des difficultés
20 à le prouver, à savoir vous ne pouvez pas prouver l'élément d'attaque
21 systématique et de grande envergure, vous pouvez recommencer et essayer de
22 prouver cela comme étant un crime contre l'humanité et comme étant un
23 meurtre en sa qualité de violation de lois et coutumes de la guerre.
24 M. SCOTT : [interprétation] Je ne connais pas suffisamment la loi croate
25 pour vous dire quel est le scénario suivi par les confrères locaux. Est-ce
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1 qu'ils vont suivre ce scénario plutôt qu'un autre ? Je ne sais pas du tout
2 si cette situation est réaliste. S'il y a une seule modalité de dresser un
3 acte d'accusation en Croatie soit l'on procédera en vertu de cette loi,
4 soit on ne dressera pas d'acte d'accusation du tout. Là, la question de
5 l'acte d'accusation alternative ne se pose pas à la différence d'ici où
6 nous avons l'Article 3 et l'Article 5, et on ne peut reprocher à quelqu'un
7 des faits suivant l'un et l'autre de ces articles.
8 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
9 M. SCOTT : [aucune interprétation]
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Très bien. Monsieur Krapac, si nous
11 ne pouvons pas dresser un acte d'accusation contre quelqu'un pour des
12 raisons de crime contre l'humanité tout simplement parce que cela
13 n'existait pas dans la législation à l'époque, que pensez-vous du fait de
14 devoir prendre en considération la présence de comportements systématiques
15 et de grandes envergures qui ont amené à la perpétration de crime ? Allez-
16 vous considérer que c'est là une circonstance aggravante ? Je ne sais pas
17 du tout ce que vous seriez à même de nous dire à ce sujet. Peut-être qu'un
18 représentant du gouvernement croate voudrait-il et pourrait-il nous
19 répondre ?
20 M. KRAPAC : [interprétation] Je vais peut-être essayer de répondre
21 brièvement à cette question, et peut-être le représentant du gouvernement
22 vous apportera-t-il son élément de réponse ? Ce que M. Scott, en sa qualité
23 de représentant du Procureur, a dit c'est que l'essentiel réside dans la
24 phrase qui figure à la page 12, et qui s'énonce, je vais vous donner
25 l'énoncé en anglais : "L'acte d'accusation se doit d'englober une
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1 description concrète pour ce qui est du fondement factuel des chefs
2 d'accusation."
3 Si le ministère public en Croatie, au début de la procédure, dans son acte
4 d'accusation place des fondements factuels suffisamment larges, alors, dans
5 le courant des débats, il sera possible aux Juges de la Chambre de prendre
6 en considération l'acte d'accusation pour fonder leurs décisions sur les
7 éléments juridiques qui correspondent à la qualification juridique et à
8 l'énoncé du texte de la loi. Ce qui importe, c'est que le ministère public
9 puisse entamer sa procédure, qualifions cela brièvement de base factuelle,
10 de plus grande envergure.
11 Alors que la qualification juridique de l'acte en tant que tel, en matière
12 de droit croate, relève des attributions du Tribunal, seul, et c'est le
13 Tribunal qui décidera alors si, ce délit au pénal, est un délit suivant le
14 code pénal ordinaire, alors s'il s'agit de meurtre, de meurtre grave ou
15 s'il s'agit d'un délit au pénal, de crime contre l'humanité, de crime
16 contre le droit humanitaire et ainsi de suite. Il est important pour le
17 Tribunal de disposer de cette base factuelle, parce que si la base
18 factuelle n'est pas suffisante, aucune condamnation, ni en vertu du droit
19 pénal ordinaire, ni en vertu de ces responsabilités particulières qui
20 découlent des crimes de guerre, ne sera possible. Par conséquent, c'est là
21 qu'on peut entendre la présence des questions les plus importantes, les
22 questions cruciales pour ce qui est des modalités de comportement des
23 autorités croates. Ce n'est pas au niveau de la question de savoir si cette
24 matière va être qualifiée de crime de guerre contre une population civile
25 ou crime de guerre à l'égard des dispositions du droit humanitaire
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1 international et ainsi de suite, ou alors, qualifiera-t-on cela de meurtre
2 ou de meurtre grave en application des dispositions du code pénal général.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Merci.
4 Le Professeur Horvatic.
5 M. HORVATIC : [interprétation] Comme le dirait les Amis de la Chambre, je
6 pense que le gouvernement saurait ajouter quelque chose. Il me semble que
7 le débat qui s'est déroulé jusqu'à présent, nous montre que le problème est
8 bien moindre de taille que l'on ne penserait, partant des interventions du
9 Procureur et des Amis de la Chambre. En effet, partant de l'opinion
10 formulée par un juge de la Cour suprême, que je me suis procuré en arrivant
11 ici, je dirais qu'il y a une analyse comparée avec laquelle que je suis
12 tout à fait d'accord. Cette analyse comparée des délits au pénal contre
13 l'humanité relevant de la loi de 1993, puis des statuts de ce Tribunal-ci,
14 il est une conclusion à tirer, à savoir que les descriptions des délits au
15 pénal, vu que cela se réfère aux conventions de Genève et leurs Protocoles
16 sont, soient identiques, soient presque identiques. La question de la
17 technique de l'élaboration de l'acte d'accusation, à la lecture, par
18 exemple, de l'acte d'accusation contre Ademi et Norac, dressé par le
19 présent Tribunal, seront des éléments, certes, dont le ministère public
20 tiendra compte, pour les adapter aux besoins croates. Je suis convaincu du
21 point de vue juridique, que cette documentation factuelle qui figure ici,
22 peut faire partie des modalités de la rédaction de l'acte d'accusation
23 devant les tribunaux croates en fonction de la loi de 1993, tout en ayant
24 recours aux articles pertinents de cette loi et très certainement, celle
25 qui figure au chapitre 15, crimes contre l'humanité et le droit coutumier
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1 international.
2 Il y a des analogies pour ce qui est de la perception du droit régissant
3 contre les crimes contre l'humanité et le droit international, ainsi que
4 les mœurs individuelles, qui résultent des activités déployées par la
5 jurisprudence des tribunaux croates. Lorsqu'il y a des crimes reprochés,
6 pour ce qui est de délits contre l'humanité, en vertu de la loi existant en
7 1993, peut être utilisé pour juger un individu et au cas où il serait
8 prouvé, ce que l'on s'efforce de prouver avec cet acte d'accusation,
9 présenté et rédigé devant ce Tribunal, il n'est aucune raison pour le
10 tribunal en Croatie de ne pas procéder de façon identique.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Professeur Horvatic. Oui,
12 Monsieur Scott.
13 M. SCOTT : Monsieur le Juge, si je puis intervenir pour quelques instants.
14 Je vais me référer au débat qui se déroule au fil des quelques dernières
15 minutes et des questions que vous avez soulevées, Monsieur le Juge Orie,
16 puisque j'en ai entendu davantage. Maintenant, si la question se pose de
17 savoir si le procureur croate dans un même acte d'accusation peut accuser
18 de meurtre, en tant que crime ordinaire et de meurtre en tant que violation
19 des lois et coutumes de la guerre envers l'application de l'Article 120, je
20 ne sais pas si l'un quelconque des représentants croates pourrait nous dire
21 qu'il y aurait là chefs d'accusation cumulatifs, ce serait le scénario. Par
22 exemple, si le Procureur nous dit : Je vais l'accuser de meurtre et je vais
23 l'accuser de crimes de guerre contre la population civile. Je ne sais pas
24 si cela serait possible en application de la législation croate.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mis à part l'exemple que j'ai indiqué
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1 pour ce qui est des limites d'éléments d'accusation cumulatifs, je voulais
2 dire que toutes les charges, que tous les chefs à charge devaient être liés
3 à un même comportement, à une même région et à une même période.
4 M. SCOTT : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.
5 La deuxième partie de l'élément soulevé par la Chambre et que vous
6 nous avez demandée d'examiner, c'est ce qui suit : en nous penchant sur les
7 écritures des Amis de la Chambre, en page 12, je me pose la question et je
8 dis bien, que je me pose seulement la question, de savoir si j'interprète
9 bien, parce qu'ici on dit: "Il n'est pas autorisé de dresser des chefs
10 d'accusation à titre cumulatif." Quelques lignes plus bas, on dit : "Au cas
11 où les éléments de preuve présentés au procès indiquent qu'il y a une autre
12 sorte de faits par rapport aux faits énoncés dans l'acte d'accusation, le
13 procureur a même et a le droit d'amender son acte d'accusation."
14 Je ne suis sûr si on peut nous conformer au système de "common law"
15 pour ce qui est des éléments de preuve à charge. Si on arrive à la fin du
16 procès et qu'on n'a pas réussi à prouver le meurtre mais qu'on a réussi à
17 prouver l'existence d'un crime de guerre, dans ce cas-là, nous allons
18 modifier l'acte d'accusation pendant le procès, avant d'aboutir à un
19 jugement. Si cela est la situation qui existerait en Croatie, je ne vois
20 pas en quoi cela diffèrerait de chefs d'accusation cumulatifs. Dans l'un et
21 l'autre cas, on arrive à un même résultat; qu'on le fasse dès le début ou
22 qu'on ait la possibilité de modifier l'acte d'accusation vers la fin du
23 procès.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce que je voulais dire, c'est que si
25 vous arrivez à la fin du procès et il vous a été modifié l'acte
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1 d'accusation, vous allez avoir un problème avec les avocats de la Défense.
2 La Défense ne vous laissera pas modifier l'acte d'accusation vers la fin du
3 procès.
4 M. SCOTT : [interprétation] Je comprends tout à fait, Monsieur le
5 Président, je comprends et je réalise que la façon d'aborder la question
6 varie d'un système à l'autre. Je sais également que dans certains systèmes,
7 il n'est pas impossible de procéder à une modification de l'acte
8 d'accusation vers la fin du procès.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Entendons ce que le M. Juge Parker veut
10 nous dire.
11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je ne sais pas si l'expérience de
12 l'Australie peut vous aider dans la solution de ce problème, mais je vais
13 vous indiquer ce qu'il est possible de faire. Il est possible à la fin de
14 la présentation des éléments au cours du procès qu'il y ait modification de
15 l'acte d'accusation, pour l'adapter aux éléments de preuve, mais seulement
16 suivant les différents chefs d'accusation déjà existant. Ce qui fait que si
17 un certain détail, ou un élément de preuve particulier, venait à être
18 modifié, l'acte d'accusation pourrait être modifié pour être harmonisé.
19 Mais on ne peut pas d'un coup énoncer de nouveaux chefs d'accusation et
20 modifier l'acte d'accusation de façon significative. Nous avons dans le
21 système des éléments de preuve à charge cumulatifs et alternatifs. Dans
22 certains cas, on applique un système, dans d'autres cas on applique l'autre
23 système.
24 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Juge Orie, je ne sais pas si j'ai
25 été utile, mais je me suis efforcé de vous apporter une forme d'assistance.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne vais pas encore m'exprimer.
2 Monsieur Horvatic, avez-vous quelque chose à ajouter ?
3 M. HORVATIC : [interprétation] Mon expérience de juriste me pousse à dire
4 que je ne vois pas de problèmes pour ce qui est de l'alternatif et du
5 cumulatif, tels qu'on les mentionne ici. Je veux bien que des juristes qui
6 en savent plus long que moi me prennent pour un ignare. Si je prends
7 lecture de l'Article 120 qui parle du délit au pénal ou crimes contre la
8 population civile, et je crois que vous devez certainement l'avoir en
9 langue anglaise dans ce registre des crimes reprochés, on y dit :
10 "Quiconque violerait, pendant un conflit international et/ou en temps en
11 guerre, est une violation des règles, et que cela aurait pour conséquence
12 des décès," il me semble que si le décès est interprété, tout comme
13 blessure grave ou atteinte grave à la santé, cela peut constituer une
14 modalité de surmonter cet élément de cumulatif à l'acte d'accusation.
15 Mais ce qui a été dit pour ce qui est de la modification à apporter à
16 l'acte d'accusation, cela, d'après la pratique de nos tribunaux, ne
17 constitue pas un problème majeur, parce que le débat, dans toute sa
18 continuité, dispose d'une certaine dynamique, et ont raison ceux qui disent
19 qu'il serait difficilement réalisable, ou difficilement acceptable pour un
20 tribunal que de voir à la fin des débats ou vers la fin de ces débats, voir
21 arriver des éléments, des faits nouveaux qui influeraient de façon
22 significative sur la modification de l'acte d'accusation. Mais ici, nous
23 avons un fondement factuel qui, dès le départ, dès le début du procès
24 devant la jurisprudence croate en cas de disposition positive de cette
25 Chambre-ci, peut suffire pour l'adapter aux besoins du droit pénal matériel
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1 et pénal croate. Donc, toute cette construction de renvoi est entamée et
2 dure depuis ce matin, de façon concertée, et je crois que nous nous
3 entendons bien pour dire qu'il n'y a pas de problème majeur pour ce qui est
4 de l'application du droit tel que fait par ce Tribunal-ci et celle qui
5 serait présente devant les tribunaux nationaux en Croatie.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Professeur Krapac, vouliez-vous ajouter
7 quelque chose, peut-être ?
8 M. KRAPAC : [interprétation] Je voulais seulement ajouter une chose. Le
9 représentant du bureau du Procureur, M. Scott, a, à très juste titre,
10 remarqué que dans la phrase avant la fin du paragraphe en page 12, on dit,
11 le Procureur se doit de procéder à la modification à l'acte d'accusation.
12 Je vous rappelle que le droit procédurier croate a un principe qui est
13 appliqué. C'est le principe de la légalité de poursuite judiciaire au
14 pénal. C'est le principe de poursuite obligatoire. Donc, dès que le
15 ministère public se rend compte du fait qu'il y a modification des éléments
16 de preuve, il doit compléter et amender, l'acte d'accusation.
17 Bien entendu, il se pose la question que vous avez soulevée. Comment va
18 réagir la Défense ? Dans ces cas-là, la loi portant procédure au pénal dit
19 que le débat est rapporté pour une période prolongée parfois, afin que la
20 Défense ait la possibilité de se préparer vis-à-vis de ce nouvel acte
21 d'accusation. Mais je vous rappelle que le débat principal en Croatie est
22 quelque peu différemment structuré que cela n'est le cas dans le procès
23 réalisé en application du droit anglo-saxon. Le débat se déroule assez
24 rapidement depuis le début et jusqu'à la fin, donc depuis la présentation
25 de l'acte d'accusation, la présentation des éléments de preuve et le
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1 jugement. Le débat et le procès en tant que tel, dans la procédure croate,
2 dure quelque peu plus longtemps, avec la possibilité d'avoir des reports
3 prolongés pour étudier certaines questions, ou se procurer de nouveaux
4 éléments de preuve, voire encore réagir à ce type de situation précis,
5 lorsqu'il s'agit d'un crime autre, ou de qualification de crime différente.
6 Si on dit qu'à première vue les divergences semblent être grandes, parce
7 qu'on n'a pas de cumulatif dans notre système, je dirais que compte tenu de
8 ces éléments-là, cette divergence n'est pas si grande que cela.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Monsieur Krapac, nous sommes
10 presque arrivés au moment où il nous aura été donné d'entendre les
11 participants, les parties en présence, et autres participants. Cela fait
12 une heure et demi que nous travaillons. Nous allons très rapidement revenir
13 aux questions de corrélation entre le droit national et le droit
14 international. Aussi, vous demanderais-je vous-même, ou aux représentants
15 du gouvernement croate, pour se référer aux aspects constitutionnels de ces
16 questions ? La règle nulla pena, nullum crimen si elle est alléguée, si
17 j'ai bien compris, cela a été repris à l'Article 31 de la constitution
18 croate ? Je vous vois opiner du chef. Je vois que tout le monde opine du
19 chef.
20 Alors, je demande si cette disposition constitutionnelle a été modifiée
21 récemment, ou alors a-t-elle été formulée précisément aux fins de refléter
22 la situation telle qu'elle se présente en matière de droit international ?
23 Je veux demander par là, est-ce que cette disposition existait dès 1993 ?
24 Je vais vous dire ce que dit le texte que j'ai sous les yeux, Article 31,
25 paragraphe 1. On dit que :
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1 "Personne ne serait être puni pour un acte qui, avant sa commission, n'a
2 été défini en tant que délit passible d'une peine en vertu de la loi ou de
3 la loi internationale, et ne serait être puni au cas où une peine n'aurait
4 pas été prévue par la loi si la loi précédente en vigueur prévoyait une
5 peine inférieure, de moindre importante."
6 Tout d'abord, je vous vois opiner de la tête. Je le dis pour les fins du
7 compte rendu d'audience.
8 Vous faites référence à ce droit international en application de l'Article
9 31. Est-ce que cela existait déjà en 1993 ?
10 M. HORVATIC : [interprétation] Oui. C'est la constitution de 1990 qui était
11 en vigueur lors de l'application de ce code pénal. Bien entendu, la
12 constitution l'emportait sur le code pénal. Avec la loi de 1997, qui est
13 entrée en vigueur en 1998, on reprend cela à la lettre. Il y avait pour
14 fondement une disposition constitutionnelle qui reprend nullum crimen sine
15 lege a été interprété sur les bases dont vous avez donné lecture à partir
16 de l'Article 31.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Ma question porte sur ce que je
18 pense pouvoir être fourni par l'Article 140 de la constitution croate que
19 j'ai sous les yeux où on y lit : "Les accords internationaux conclus et
20 ratifiés en conformité avec les dispositions de la constitution, et qui ont
21 été rendus publics, ils sont donc entrés en vigueur, font partie intégrante
22 de l'ordre juridique interne à la République de Croatie, et auront des
23 effets légaux. Leurs dispositions peuvent être changées seulement suivant
24 les modalités indiquées dans l'énoncé des textes analogues au droit
25 international."
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1 Est-ce que je me réfère bien, Monsieur Horvatic ?
2 M. HORVATIC : [interprétation] Oui, c'est cela.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ma question porte sur ce qui suit :
4 l'Article 140 se réfère seulement aux accords internationaux, mais ne se
5 réfère pas aux principes généraux du droit international, pas plus qu'au
6 droit coutumier international. Devons-nous comprendre par là une limite,
7 est-ce que cela limite les effets ou la portée de l'Article 140 seulement
8 aux accords internationaux ?
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez brancher votre micro, s'il vous
10 plaît, Monsieur Horvatic.
11 M. HORVATIC : [interprétation] Est-ce une question que vous posez à
12 l'Amicus Curiae ou à la Croatie ?
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A toute personne apte à répondre à la
14 question.
15 M. MULJACIC : [interprétation] Monsieur le Président, la disposition de la
16 constitution qui porte sur les conventions et accords internationaux
17 l'emporte sur le droit, et elles sont appliquées de manière systématique,
18 particulièrement dans un certain nombre de cas dans lequel les dispositions
19 prescrites dans les conventions de Genève et dans d'autres Protocoles, est
20 que la République de Croatie, alors qu'elle était encore au sein de
21 l'ex-Yougoslavie et après son indépendance, le 8 octobre 1992 ont signé. La
22 Croatie était donc liée et devait respecter ces conventions par le droit
23 international. Cette disposition constitutionnelle, je parle de la
24 disposition contenue dans la constitution de 1990, elle fait référence à la
25 force de ces accords et de ces conventions internationales qui est
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1 supérieure à celle du droit national.
2 Voici le sens qu'il faut lui donner dans un cas particulier, par le biais
3 de l'Article 28(2) du code pénal de 1993, et aux termes de l'application
4 des conventions de Genève qui sont en vigueur, et nous incluons dans ce
5 cadre le droit coutumier international. Nous pensons que ces dispositions
6 doivent être appliquées en l'occurrence puisque le système de ces
7 dispositions exprime l'esprit particulier de quelque chose. Ces
8 dispositions expriment l'esprit du droit et des conventions conformément à
9 la constitution de 1990, par conséquent, elles doivent être appliquées
10 directement par le biais des dispositions pertinentes existantes du code
11 pénal de 1993, qui ne prévoit pas la responsabilité du commandant, du
12 supérieur hiérarchique, comme nous l'avons dit, mais les tribunaux croates
13 appliquent, néanmoins, tiennent compte de cette responsabilité. Nous avons
14 parlé de l'affaire Sakic, notamment, il a été condamné à la peine la plus
15 lourde, conformément ou sur la base de l'Article 28, paragraphe 2, et
16 conformément, également, aux conventions de Genève parce que la Croatie
17 était partie à ces conventions.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur. Votre intervention
19 m'est d'un grand secours. Mais je voudrais savoir si cette interprétation
20 est cohérente avec la disposition de l'Article 28, paragraphe 2, où il est
21 question de l'assignation d'un certain nombre de procédures par la Cour
22 pénale internationale, où il est dit : "Les procédures au sein de la
23 République de Croatie doivent être menées conformément à la mise en œuvre
24 du droit matériel pénal national et la procédure pénale."
25 M. MULJACIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
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1 Il suffit qu'un juge applique les conventions internationales qui sont
2 également en vigueur. Un juge ne peut pas se contenter d'appliquer le code
3 pénal de l'année en question applicable à un moment donné. Il y a un
4 certain nombre de dispositions qui doivent être appliquées. Il y a les
5 dispositions contenues dans la constitution, il y a également les
6 dispositions des conventions de Genève. Il y a également les dispositions
7 du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie. Voici notre
8 position.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous en prie, Monsieur Horvatic.
10 M. HORVATIC : [interprétation] Comme je l'ai dit ce matin, la position du
11 ministère public de la République de Croatie correspond tout à fait à la
12 position qui vient d'être exposée. Une position commune a été obtenue par
13 le biais de discussions lors de séminaires, et il y a été dit que l'Article
14 28 du code pénal de 1993, qui régit un certain nombre d'éléments, que cet
15 article s'applique tout comme les conventions de Genève et les Protocoles
16 additionnels de ces dernières, et que c'est sur cette base que la
17 responsabilité du supérieur hiérarchique telle que définie dans l'Article
18 7(3) peut être invoquée. Voici le document officiel qui a été produit par
19 le ministère public de la République de Croatie en juillet 2004, là encore,
20 je me sentais le devoir de vous en redonner lecture, ici, dans le cadre de
21 cette audience.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
23 Une dernière question, brève question avant que nous ne concluions cette
24 séance.
25 La voici : dans l'interprétation de l'Article 21 [comme interprété] de
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1 l'Article 141 [comme interprété] de la constitution, la Cour
2 constitutionnelle aurait-elle un quelconque rôle à jouer, ou les tribunaux
3 pénaux se chargeraient-ils exclusivement de cette tâche ? La Cour
4 constitutionnelle aurait-elle une quelconque contribution à faire en
5 matière d'interprétation de ces dispositions ?
6 M. HORVATIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne peux pas
7 répondre à cette question. Si cette question devait être posée à la Cour
8 constitutionnelle, cette dernière devrait y accorder une attention
9 particulière, conformément à l'intention qui sous-tend le texte de la
10 constitution. La séquence de la constitution lui est tout à fait propre,
11 mais elle exprime également un certain esprit. Cet esprit consiste à
12 consacrer la loi internationale comme un droit l'emportant sur le droit
13 national parce que la Croatie, en venant rejoindre la communauté
14 internationale, a épousé cette position qui accepte que le droit
15 international l'emporte sur le droit national. Par conséquent, il est
16 difficile de prédire ce qui se passerait à ce moment-là, mais je pense que
17 la Cour constitutionnelle tiendrait compte de tous les éléments qui ont été
18 débattus dans le cadre de nos débats aujourd'hui, je ne vois pas comment la
19 Cour constitutionnelle pourrait adopter une position contraire au principe
20 énoncé, donc les choses sont assez difficiles à prédire quant aux choses
21 qui se produiraient si tel était le cas.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons faire une pause et je pense
23 qu'il serait bon que nous nous tournions quelques instants supplémentaires
24 vers le Procureur de cette Cour -- de ce Tribunal sur les frictions ou les
25 tensions qui semblent se faire jour entre le droit coutumier international
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1 et le droit national.
2 L'une des questions qui n'a pas été abordée suffisamment au cours de notre
3 discussion c'est les applications ce qui dans la pratique se ferait en
4 matière de protection de témoin conformément au nouveau applicable en
5 Croatie. Je crois que c'est une question qui mérite une attention
6 supplémentaire de notre part.
7 Enfin, je crois que nous avons entendu un certain nombre de critiques qui
8 portaient sur le rapport de l'OSCE, à savoir qu'il ne se concentrait que
9 sur ces dix dernières années et qui, finalement, ne couvrait qu'une
10 pratique passée et qui ne reflétait pas la situation actuelle. J'ai
11 remarqué que dans le rapport du novembre 2004, on y trouve davantage
12 d'informations plus actuelles, ce qui est encourageant, mais ce qui n'est
13 pas peut-être totalement satisfaisant. Peut-être que les parties
14 souhaiteraient s'exprimer sur la question, y a-t-il amélioration ou pas ?
15 Il y a la question thématique des points 3 et 4. Je pense qu'un certain
16 nombre de ces points ont déjà été couverts d'une manière ou d'une autre.
17 J'aimerais savoir si au cours de nos prochaines discussions, et nous allons
18 séparer jusqu'à 15 heures, et j'espère que nous pourrons conclure nos
19 travaux. Nous levons la séance jusqu'à 15 heures.
20 --- L'audience est suspendue à 14 heures 26.
21 --- L'audience est reprise à 15 heures 02.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous reprenons nos travaux. Nous
23 espérons pouvoir les conclure au cours de l'heure ou l'heure et demie à
24 venir. Tout d'abord, je donnerais la possibilité aux représentants du
25 Procureur de bien vouloir conclure ces arguments et nous rappeler, entre
Page 109
1 autre chose, l'importance de la responsabilité du supérieur hiérarchique
2 et, notamment, l'importance de cette responsabilité dans les cas où ces
3 derniers n'auraient pas empêché la commission d'un crime ni sanctionner les
4 auteurs des dits crimes.
5 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'ai essayé de
6 faire la synthèse des différents éléments qui ont été présentés aujourd'hui
7 au cours de la journée, en tout cas, la plupart d'entre eux, y compris ce
8 qui a été dit par les représentants de la Croatie.
9 Ce matin, le Procureur avait l'opinion que, dans le cadre d'une
10 procédure nationale, la base essentielle, à l'existence de la
11 responsabilité d'un supérieur hiérarchique, serait à trouver dans le droit
12 international, en partie à cause des raisons exprimées par le Juge Kwon
13 lors de notre séance de travail précédente, lorsqu'il a fait référence à
14 l'application créative, ou l'interprétation créative du droit national.
15 Toutes les choses pourraient effectivement se produire, et les Juges
16 croates pourraient interpréter leurs droits dans ce sens. Mais toutefois,
17 nous pensons que l'application du droit international fournira une des
18 meilleures bases dans ce domaine, base donc nécessaire à la conduite de
19 procédure et de poursuite.
20 J'ai fourni au Greffier un exemplaire de l'Article 140 de la
21 Constitution croate. Nous l'avions fait au cours de la pause du déjeuner.
22 J'aimerais qu'une copie de cet article soit fournie à l'ensemble des
23 participants présents. Vous en avez déjà parlé, Monsieur le Président Orie.
24 Je ne souhaitais pas interrompre les débats de la Chambre en distribuant
25 cet Article, mais je souhaite que cela soit fait dès maintenant. Pour les
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1 conseils de la Défense, ce texte est disponible en croate en haut de la
2 page et, en anglais, sur le bas de la page.
3 Comme l'a indiqué notre Président déjà, il s'agit-là de la base
4 fondamentale de la réponse à apporter à la question qui a été posée par
5 vous, Monsieur le Président, un peu plus tôt aujourd'hui, sur quoi repose
6 véritablement notre position. Il s'agit-là de la base fondamentale de notre
7 position. Il s'agit de la disposition dont il est question dans cet
8 article, de la constitution en vigueur en 1990, avant l'exécution de crimes
9 rapprochés en l'espèce. Il s'agit donc d'une disposition qui fait référence
10 aux accords internationaux, ratifiés selon la procédure appropriée, et
11 qu'il est dit, notamment, dans cette disposition, que les accords
12 internationaux ont force de droit à l'échelle nationale. Non seulement
13 cela, mais qu'ils ont précédence sur le droit national au sein du système
14 national croate. J'ai également attaché ou joint à ce document un certain
15 nombre de commentaires, qui ont trait à un certain nombre de questions,
16 notamment sur la différence entre un certain nombre de systèmes de droit.
17 Il me semble que les conseils de la partie adverse se corrigeront, si j'ai
18 tort, mais il me semble que le système croate est assimilable à un système
19 monoiste [phon], en ce qui concerne l'application du droit international,
20 par rapport à un système dualiste. Nous pensons que cette disposition de la
21 constitution à l'Article 140 fournit une base solide, qui permet
22 d'appliquer le droit des traités, tout du moins les conventions de Genève,
23 dans le cadre de procédures engagés devant des tribunaux croates et,
24 notamment, les dispositions concernant la responsabilité du supérieur
25 hiérarchique. Nos recherches indiquent que les conventions de Genève et les
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1 Protocoles additionnels et, notamment, le Protocole additionnel numéro 1,
2 sont des éléments de droit contraignants dans le droit national croate. En
3 tout cas, dès octobre 1991, en tant qu'Etat successeur à l'Etat de l'ex-
4 Yougoslavie, qui a été consacrée dans une décision relative à l'Article 90
5 bis [comme interprété], dans le cadre du procès Milosevic.
6 L'Article 86 du Protocole additionnel 1, paragraphe 2, précise que le
7 fait qu'une violation des conventions ou de ce Protocole, était commis par
8 un subordonné n'absout pas les supérieurs de ce dernier d'une incrimination
9 de sa responsabilité au pénal, ou de mesures disciplinaires en fonction du
10 cas concerné, s'ils savaient ou avaient des informations qui lui auraient
11 permis de conclure dans le contexte de l'époque, qu'ils étaient en train de
12 commettre, ou qu'ils étaient sur le point de commettre ce type de
13 violation, et qu'il n'a pas pris toutes les mesures envisageables qui
14 étaient entre ses moins ou en son pouvoir pour empêcher ou réprimer la dite
15 violation.
16 De même l'Article 87, où il est question des devoirs des commandants,
17 section 1 précise que les hautes parties contractantes, et les parties au
18 conflit doivent demander aux commandants militaires, en ce qui concerne les
19 membres de leurs forces armées sous leur commandement et d'autres personnes
20 sous leur contrôle, de prévenir -- et lorsque cela s'avère nécessaire, de
21 faire rapport aux autorités compétences des violations des conventions, et
22 de ce Protocole.
23 Il pourrait s'agir ici en réalité d'un manquement à l'obligation de
24 prévenir. La section 3 poursuit, en disant : "Les hautes parties contractes
25 et les parties au conflit doivent demander à tous commandants conscients
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1 que des subordonnés, ou d'autres personnes placées sous son contrôle, sont
2 en train de commettre ou ont commis une violation des conventions ou de ce
3 Protocole, de prendre les mesures nécessaires pour prévenir la dite
4 violation des conventions ou de ce Protocole et, le cas échéant, à engager
5 des poursuites disciplinaires ou pénales contre les auteurs de cette
6 violation," qui est ici donc un manquement à l'obligation de punir.
7 Voilà donc, à notre avis, qu'elles sont les dispositions les plus
8 applicables. Il s'agit du Protocole additionnel numéro 1 de l'Article 86 et
9 de l'Article 87. Etant donné que ces dispositions ont été adoptés ou
10 transposés en quelque sorte par la Croatie, au moins avant 1992, et étant
11 donné l'Article 140 de la Constitution de la République de Croatie, nous
12 pensons que ces différentes dispositions fournissent une base de poursuite
13 à l'échelle nationale, et pas seulement les poursuites lorsqu'il y a
14 responsabilité du supérieur hiérarchique. Mais, si l'on reprend l'Article
15 86, paragraphe 2, dès qu'une personne avait des raisons de savoir, ou
16 disposait d'information qui aurait du lui permettre de conclure, et cetera,
17 dans le contexte donné.
18 Donc, nous pensons que, là aussi, cet élément particulier est abordé
19 dans les dispositions.
20 Brièvement, j'aimerais mentionner la convention de Vienne sur les
21 traités de 1969, Article 66 [comme interprété]. L'article nous dit que tout
22 traité en vigueur est contraignant pour les parties à ce traité, et ces
23 traités doivent être appliqués en toute bonne foie. L'Article 27 dit qu'une
24 partie ne peut évoquer les dispositions de son droit national pour
25 justifier son manquement à l'obligation d'appliquer lesdits traités.
Page 113
1 Par conséquent, voilà la base fondamentale que nous voyons. Il s'agit donc
2 de la convention sur le droit du traité. Il s'agit des conventions de
3 Genève, bases fondamentales qui à notre avis devrait permettre au ministère
4 publique croate de fonctionner.
5 En ce qui concerne maintenant le droit coutumier international,
6 conformément à la décision qui était prise dans le cadre de l'affaire
7 Hadzihasanovic, nous pensons qu'à l'époque concernée, en tout cas, au
8 milieu des années 1990, la responsabilité du supérieur hiérarchique faisait
9 partie -- était englobée dans le droit coutumier. Maintenant, je pense que,
10 puisque l'Article 140 fait référence direct aux traités ou aux accords
11 internationales, peut-être que quelques questions vont se poser concernant
12 le droit coutumier. Peut-être que, dans cette situation, le droit coutumier
13 ne nous aide pas beaucoup, parce qu'il y a les conventions de Genève, et
14 ses dispositions ont été adopté, ont été mises en œuvre dans le cadre du
15 droit des traités. Donc, peut-être que dans ce contexte particulier, ce
16 droit coutumier ne nous aide pas beaucoup. Toutefois, nous ne le rejetons
17 pas entièrement. Il y aura peut-être des discussions supplémentaires sur ce
18 point. Quoi qu'il en soit, sous pensons que l'application directe des
19 conventions de Genève, telles que ratifiées et adoptées par la Croatie,
20 constituent la principale base de travail.
21 En outre, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, sur la base des
22 écritures de la Croatie, et sur la base de la discussion que nous avons eu
23 aujourd'hui, il nous semble que la Croatie semble être en faveur de
24 l'application du droit croate. J'entendu tous les représentants s'exprimer
25 cet après-midi, et je crois que tout le monde a été d'accord sur ces
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1 principes, l'ami de la cour également. Je crois qu'il y a eu une réponse
2 qui a été apportée à une question du Juge Parker. Je crois que l'Ami de la
3 Cour a répondu à cette question que l'une d'ailleurs des sources ayant
4 rendue obligatoire le devoir d'agir. Cette source, c'était justement le
5 droit international coutumier.
6 Je crois que notre position est renforcée en examinant les dispositions
7 croates relatives aux crimes de guerre. En ce qui concerne ceux-ci, la
8 Croatie nous a fourni un certain nombre de documents, lorsqu'on examine
9 l'Article 120, l'Article 121, l'Article 122, l'Article 124, et cetera, tous
10 sont exprimés de la sorte : "Toute personne, en violation des règles du
11 droit international."
12 Il semble que d'après les dispositions adoptées par la Croatie et en
13 vigueur depuis 1993 qu'il y ait incorporation très explicite de la part de
14 la Croatie du droit international dans ces dispositions. A la page 3, ceci
15 a été mentionné un peu plus tôt dans des échanges entre le Juge Orie et les
16 conseils, il est mentioné que le protocole additionnel 1 de la convention
17 européenne pour la Protection des droits de l'homme, qui d'après ce que
18 nous avons compris était une citation erronée en référence au protocole 1
19 des conventions de Genève.
20 Ceci a été précisé sans rentrer dans davantage de détail, il s'agit des
21 points essentiels que nous souhaitions soulever s'agissant de l'application
22 du droit international pour ce qui est de la responsabilité des supérieurs
23 hiérarchiques.
24 Pour en revenir à une question posée par le Juge Orie, nous avons mentionné
25 brièvement ce matin, mais à la lumière des discussions d'aujourd'hui, il
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1 nous faudrait revenir sur l'Article 7(2) de la convention européenne sur
2 les droits de l'homme, où il est question du principe de la rétroactivité,
3 ceci s'applique à toute personne ayant commis un acte ou une omission qui,
4 à l'époque, était considéré comme un acte criminel à l'époque selon les
5 principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées. Il y a eu
6 certains commentaires à cet égard, selon lesquels ces actes pouvaient être
7 jugés même s'ils n'étaient pas couverts par le droit national de l'époque.
8 Nous pensons pour ce qui est de la rétroactivité que ceci ne se pose pas
9 étant donné que toutes les dispositions y afférant étaient en vigueur en
10 1993. Nous renvoyons à la Chambre, si elle souhaite se pencher davantage
11 sur la question à l'Article 7(1) de la convention européenne sur les droits
12 de l'homme.
13 Monsieur le Juge Orie, en réponse à votre question sur l'importance de la
14 théorie de la responsabilité du supérieur hiérarchique pour l'Accusation.
15 Il me faut dire que ceci est très important. Il est important de poursuivre
16 les personnes responsables de ce type d'acte, nous l'avons appris au TPIY,
17 il est important que ces personnes soient poursuivies, plus la
18 responsabilité est diluée entre les simples exécutants et les personnes
19 exerçant une responsabilité importante, il est important que les
20 dispositions visées à l'Article 7(3) s'appliquent. Toutes les personnes
21 pouvant être tenues responsables en leur qualité de supérieur hiérarchique
22 doivent être poursuivies. Comme nous l'avons dit ce matin, il s'agit d'une
23 question importante.
24 Voilà, Monsieur le Président.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
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1 Je souhaite vous poser une question au sujet des arguments que vous venez
2 d'avancer. Vous dites, que le droit coutumier ne jouit peut-être pas un
3 rôle aussi important, car il existe au protocole 1 aux conventions de
4 Genève, il existe aux conventions de Genève. Pourriez-vous me préciser la
5 chose suivante. Dans l'acte d'accusation consolidé, les crimes reprochés
6 ont eu lieu dans le contexte d'un conflit armé, et non pas dans le cadre
7 d'un conflit armé international. Si je ne me trompe, le protocole
8 additionnel 1 s'applique aux conflits internationaux, par conséquent, est-
9 ce que nous ne devrions pas nous fonder sur le droit coutumier plutôt que
10 sur l'Article 86 qui ne s'applique pas directement à ce type de conflit ?
11 M. SCOTT : [interprétation] C'est exact. C'est la raison pour laquelle j'ai
12 précisé dans ma réponse que nous ne souhaitions pas complètement abandonner
13 la question du droit coutumier, car dans certains cas, et notamment, en
14 l'espèce, je pense que ceci serait important. Dans d'autres affaires qui
15 pourraient être éventuellement renvoyées par la suite, les crimes reprochés
16 auraient pu avoir lieu dans le cadre d'un conflit armé international. Je
17 suis d'accord que si nous avons uniquement un conflit armé sans l'aspect
18 international, il s'agit d'une préoccupation supplémentaire que nous
19 devrons nous efforcer de résoudre sur la base du droit coutumier.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Nous nous pencherons sur ce type
21 de problèmes par la suite s'ils surgissent dans d'autres affaires de
22 renvoi.
23 Ceci, étant dit, j'invite les conseils de la Défense à présenter leurs
24 arguments en clôture. Maître Prodanovic, c'est vous qui allez commencer. Je
25 souhaite souligner que dans les rapports supplémentaires joints au dernier
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1 mémoire de l'Accusation, le représentant de l'OSCE exprime ses
2 préoccupations concernant des pressions qui pourraient être plus fortes
3 aujourd'hui qu'elles ne l'ont été dans le passé. Dans le passé, la
4 situation était inverse, aujourd'hui, les accusés croates ont peur que les
5 pressions pourraient être telles sur le Tribunal devant lequel ils seront
6 jugés, qu'ils risqueraient d'être déclarés coupables plus facilement que
7 dans le passé. Qu'avez-vous à nous dire, Maître Prodanovic ?
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je souhaiterais savoir si vous êtes
9 d'accord avec l'application directe du droit international en tant que
10 conseil de la Défense ?
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que vous vouliez parler du
12 conseil de l'Accusation et non pas du conseil de la Défense ?
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je voulais avoir le point de vue du
14 conseil de la Défense, si le conseil de la Défense pensait que le droit
15 international pouvait s'appliquer en l'espèce ?
16 M. PRODANOVIC : [interprétation] Juste une question, Monsieur le Président,
17 Messieurs les Juges. Est-ce que je vous ai bien compris ? Est-ce qu'il
18 s'agit là de mes arguments en clôture ? Est-ce qu'il me faut exposer tous
19 les faits, les résumer, ou est-ce que je dois répondre aux questions que
20 vous venez de me poser ?
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Après avoir entendu les arguments
22 présentés aujourd'hui, vous avez la possibilité de faire vos commentaires à
23 présent. Il est inutile de réitérer les arguments qui ont été présentés par
24 écrit, mais si vous souhaitez souligner certains points vous êtes en mesure
25 de le faire. Nous vous avons simplement demandé de prêter une attention
Page 118
1 toute particulière aux deux questions que nous venons de soulever.
2 M. PRODANOVIC : [interprétation] Bien, je vais commencer par répondre aux
3 deux questions que vous venez de poser. Dans notre mémoire, nous avons
4 traité de la question qui vient d'être posée par le Juge Kwon, nous pensons
5 que les Amicus ont invoqué trois manières de résoudre les problèmes
6 juridiques, y compris la possibilité d'appliquer directement le droit
7 international en invoquant certaines dispositions de notre constitution et
8 les conventions signées par la République de Croatie avant l'époque où les
9 crimes reprochés ont été commis. Il est inutile de répéter ce que j'ai dit
10 ce matin. Nous pensons que la législation croate et le droit croate, je
11 veux parler du droit matériel, fournissent un fondement suffisant pour que
12 les crimes soient poursuivis en vertu du droit croate applicable, qu'il
13 s'agisse du code pénal lui-même ou des dispositions relatives à la
14 responsabilité du supérieur hiérarchique ou de la responsabilité indirecte
15 tel que prévu à l'Article 3, le manquement et l'obligation de punir peut
16 entrer dans le cadre du fait d'aider et encourager un crime après que
17 celui-ci ait été commis. L'Article 28 porte sur les omissions, et c'est
18 l'une des manières dont on pourrait traiter de cette question.
19 Pour ce qui est du rapport de l'OSCE et des pressions qui peuvent être
20 présentes dans l'opinion publique, et des sentiments des accusés qui sont
21 censés être jugés devant des tribunaux croates, je dois dire que,
22 personnellement, ils ne se sentiront pas plus mal qu'ils ne se sentent
23 maintenant; à savoir, tout procès, quelle que soit la situation, lorsqu'on
24 vous reproche des crimes aussi graves, et quelle que soit la juridiction
25 devant laquelle vous êtes traduit, donne lieu à des sentiments d'inquiétude
Page 119
1 et d'anxiété. Toutefois, la situation sociale dans la République de Croatie
2 a beaucoup changé au cours des dernières années. Les procès menés contre
3 des membres de la minorité Serbe sont du passé; nous pouvons présenter les
4 choses ainsi. Il s'agissait là de procès qui étaient assez courants avant
5 et qui ne respectaient pas les normes minimales acceptables pour la
6 conduite d'un procès. Nous avons déjà déclaré ce matin que l'OSCE avait
7 présenté certains faits qui sont erronés. Je pense que l'aspect temporel
8 doit être gardé à l'esprit, à savoir que certains éléments qui nuisaient au
9 bon fonctionnement du système judiciaire croate n'existent plus. Les
10 nouvelles affaires entendues par les tribunaux croates aujourd'hui montrent
11 que nous avons fait du progrès. Nous ne prendrons pas de risques plus
12 importants si l'affaire devait être renvoyée devant le tribunal de Zagreb,
13 justice sera faite, bien sûr. Ceci ne signifie pas que nous savons quelle
14 sera la sentence, il y aura un verdict de culpabilité ou un acquittement.
15 Mais nous sommes convaincus que le procès sera équitable et que la justice
16 sera faite de façon professionnelle.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tels étaient vos arguments, Maître
18 Prodanovic ? En avez-vous terminé ?
19 M. PRODANOVIC : [interprétation] Si je ne me vois pas fournir d'autres
20 possibilités de m'exprimer, peut-être ajouterais-je quelque chose; sinon,
21 peut-être pourrais-je faire quelques déclarations en clôture.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y, je vous en prie.
23 M. PRODANOVIC : [interprétation] Je ne vais pas me répéter. Je ne vais pas
24 dire grand-chose de nouveau, non plus. Toujours est-il qu'après l'audience
25 d'aujourd'hui, je suis tout à fait convaincu que les conditions préalables
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1 sont toutes remplies pour que cette affaire soit renvoyée aux autorités de
2 la Croatie, que ce soit en ce qui concerne la gravité des crimes reprochés
3 ou que ce soit en ce qui concerne la position hiérarchique occupée par le
4 général de brigade Ademi à l'époque des faits reprochés. Ce Tribunal est en
5 pleine stratégie d'achèvement, ce qui veut dire que le Tribunal ne sera pas
6 en mesure de juger toutes les affaires dont il est saisi. Je souscris
7 pleinement à la proposition faite par l'Accusation qui a présenté des
8 arguments à l'appui de sa demande. Je comprends la position ambivalente
9 dans laquelle se trouve l'Accusation. D'une part, il leur faut défendre
10 l'acte d'accusation et la gravité des accusations qui y sont portées.
11 D'autre part, ces nouveaux critères doivent être remplis. Malgré tout, il
12 me semble que la Chambre de première instance, notamment, après avoir
13 entendu les représentants de la République de Croatie et les Amici Curiae,
14 a été rassurée sur le fait de savoir que le système judiciaire croate était
15 tout à fait capable de connaître de cette affaire de façon satisfaisante.
16 Le cadre juridique est également satisfaisant, c'est-à-dire, qu'il
17 permettrait de juger cette affaire en Croatie.
18 Je vous remercie.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Prodanovic.
20 Maître Olujic, je vous écoute.
21 M. OLUJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
22 Dans nos conclusions écrites, nous avons expliqué en détail les raisons
23 pour lesquelles nous pensons que cette affaire devrait être renvoyée devant
24 une juridiction croate pour y être jugée. Nous sommes d'accord avec les
25 arguments généraux présentés par l'Accusation.
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1 Lorsque nous nous sommes préparés pour cette audience, nous avons entendu
2 une synthèse juridique tout à fait intéressante. Nous avons entendu le Pr
3 Krapac qui nous a parlé de droit processuel et nous avons eu le
4 représentant du gouvernement de la République de Croatie, qui est un
5 spécialiste du droit matériel. Tous les arguments que nous avons entendus,
6 aujourd'hui, disent qu'il faut renvoyer cette affaire devant les tribunaux
7 croates.
8 L'un des Juges de la Chambre, et le Président de la Chambre m'ont posé la
9 question de savoir mon opinion. Je vais m'efforcer de répondre. Nous sommes
10 des juristes; la théorie est une chose, la pratique en est une autre. Il y
11 a toujours cette ombre du doute. Je crois que le dilemme qui se pose, et
12 j'entends cela comme une question d'ordre académique, ne devrait être
13 présente, cette ombre du doute, j'entends. Si nous nous penchons sur les
14 formes de culpabilité au sujet desquelles des questions ont été soulignées
15 par les Juges de la Chambre à l'intention du ministère public, ainsi qu'à
16 l'intention des représentants du gouvernement de la République de Croatie,
17 ce souci a fait partie de la question posée. Vous me permettrez d'apporter
18 mon grain de sel en quelque sorte avec ma réponse.
19 Bien sûr, dirais-je, Messieurs les Juges, juridiquement parlant, il ne
20 saurait être condamné qui que ce soit pour une culpabilité qui tempore
21 criminus suspecti n'aurait pas été qualifiée comme telle dans son pays.
22 Toutefois, la juridiction pénale de la République de Croatie a repris les
23 sanctions prévues par toutes les juridictions ou par toute la législation
24 internationale. A chaque fois qu'il y a une peine de prévue, il en est
25 prévu dans la législation croate pour les auteurs et pour ceux qui n'ont
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1 pas empêché la perpétration.
2 Maintenant, on se pose la question de savoir ce qui se passe avec le 7(3),
3 ce n'est pas explicitement mentionné. Mais, Messieurs les Juges, de la part
4 la logique des choses, non seulement en temps de guerre, et je dirais
5 surtout en temps de guerre, cela fait partie de l'institut ou de la notion
6 de co-perpétration. Ceux qui ont des attributions sont tenus d'empêcher les
7 actes de leurs soldats, et s'ils ne l'ont pas fait, ils sont devenus quoi,
8 ils sont devenus co-auteur. Pourquoi le punir ? Le punir en sa qualité de
9 co-auteur, et cela est prévu par la législation de mon pays. Le fait de ne
10 pas punir un crime fait partie du fait d'encourager la perpétration
11 d'autres crimes, et cela est aussi passible de sanctions que la
12 perpétration elle-même, notamment lorsqu'il s'agit de crimes de guerre
13 lorsque bon nombre de soldats, par exemple, voient ce que font leurs
14 commandants. Bien sûr que cela est passible d'une peine et, bien sûr, que
15 cela fait partie de la totalité de la législation sur le plan pénal en
16 Croatie.
17 Le Tribunal, les Juges ont posé la question de savoir quelle est la
18 position de la Défense concernant les rapports de l'OSCE dont nous avons
19 parlés. En ma qualité de conseil de Défense, je voudrais dire au sujet de
20 ces rapports, qu'il s'agit d'extraits de rapports en réalité, qui nous font
21 perdre la qualité de la totalité des positions parce que tout est présenté
22 sous forme de statistiques. Il n'y a pas de contexte réel. Je ne vais pas
23 être trop long, je ne vais pas vous priver de votre temps précieux, mais il
24 me semble que tous les préalables sont là pour que cette affaire au pénal,
25 qui est unique et qui comporte un acte d'inculpation à l'encontre de M.
Page 123
1 Ademi et de M. Norac, devrait être renvoyée aux tribunaux croates. Je ne
2 vais pas, pour ma part, me faire répétitif par rapport à l'énoncé des
3 motifs pour ce qui est de la surveillance à exercer qui pourra toujours, en
4 cas de besoin, faire en sorte que l'affaire soit reprise. Je ne pense pas
5 que cela soit nécessaire.
6 Bien entendu, les lois de 1993 qui sont applicables se trouvent être tout à
7 fait compatibles pour ce qui est des éléments à charge de mon client, à
8 toute réserve formulée au sujet, bien entendu, des faits et du reste,
9 choses qui s'avèreront et se révèleront dans le courant de la procédure qui
10 sera réalisée quelle que soit la sentence au final, qu'elle soit une
11 sentence d'acquittement ou de jugement.
12 Merci.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krapac, je souhaite vous
14 fournir la possibilité d'ajouter tout ce que vous jugez nécessaire à cet
15 égard. Je souhaiterais vous poser la question suivante : on nous a fourni
16 des rapports ultérieurs de l'OSCE dans lesquels il y ait fait référence à
17 la jurisprudence de la Cour suprême croate. L'affaire République de Croatie
18 contre Milijan Strunjas et une autre affaire appelée Vila Vidiva [phon].
19 Il apparaît que la Cour suprême invoquait les Articles 86 et 87 du
20 Protocole 1 des conventions de Genevève, ou plutôt, j'en ai déduit qu'ils
21 faisaient référence au Protocole plutôt qu'aux conventions elles-mêmes,
22 afin d'établir l'obligation d'agir, mais ne s'en ont pas servis comme
23 fondement direct pour engager la responsabilité pénale. Est-ce que vous
24 pourriez inclure cette question dans vos observations finales, je vous
25 prie, la Chambre vous en serait très reconnaissante.
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1 M. KRAPAC : [interprétation] Messieurs les Juges, vous êtes en train de
2 parler d'un jugement rendu par la Cour suprême de la République de Croatie
3 qui est mentionné dans le rapport de l'OSCE. Je me suis efforcé pour ma
4 part, après avoir reçu un exemplaire du rapport du procureur daté du 7
5 février, je me suis efforcé de trouver des renseignements au sujet de ce
6 jugement rendu par la Cour suprême, et la Cour suprême a une base de
7 données électroniques qui a été mise en œuvre il y a un an et demi, comme
8 cela n'a pas été complété, je n'ai pas pu retrouver le jugement en
9 question. Je n'ai pas eu le temps de me trouver un exemplaire noir sur
10 blanc, couché sur papier. Je n'ai pas ce jugement, à moins que le
11 gouvernement de la République de Croatie n'en dispose elle-même d'un
12 exemplaire.
13 Pour me préparer à intervenir, j'ai trouvé une autre décision, une décision
14 du tribunal de première instance à Bijelovar qui a été confirmée par la
15 suite par la Cour suprême de la République de Croatie et qui date de 1999.
16 Cette décision-là est étoffée de commentaires dans la littérature
17 professionnelle qui traite du droit pénal. A vrai dire, cela ne se rapporte
18 pas à la construction de la responsabilité hiérarchique eu égard à des
19 crimes de guerre, mais cela se rapporte à un délit au pénal de privation de
20 liberté grave ou de grave privation de liberté d'individus, dans laquelle
21 affaire, la culpabilité du commandant a été fondée sur les dispositions de
22 manque d'agir, à savoir, de l'omission. Cela illustre le fait que les
23 tribunaux en Croatie, tant les tribunaux de première instance que les Cours
24 suprêmes, mettent en œuvre effectivement ces dispositions relatives à la
25 responsabilité hiérarchique. Dans l'affaire en question, c'est un directeur
Page 125
1 de prison qui est condamné parce qu'il n'a pas remis en liberté une
2 personne qui a été auparavant arrêtée de façon illicite au mois de novembre
3 1991, et cette personne a fait l'objet de traitements cruels de la part des
4 gardiens. L'individu en question a été sanctionné pour un délit pénal par
5 omission.
6 Le tribunal a constaté que cet homme qui a effectivement exercé une
7 autorité au niveau de cette prison où des peines au pénal étaient purgées,
8 la victime a été détenue, et à un certain moment l'intéressé a fait cesser
9 les mauvais traitements à l'égard de personnes qui ont été attraper par les
10 gardiens alors qu'elles essayaient de fuir, mais l'individu en question a
11 omis de stopper les mauvais traitements. Quand cette deuxième personne, une
12 deuxième fois, a essayé de s'enfuir, le détenu en question a été blessé et
13 envoyé à l'hôpital.
14 Dans le jugement rendu à l'égard de ce directeur de la prison, le tribunal
15 a constaté qu'il a ignoré les avertissements relatifs à ces mauvais
16 traitements, et au fait de privation illicite de la liberté, et il a omis
17 de faire cesser ce type d'activités. Partant de ces responsabilités au
18 niveau de la police, il avait pour mission d'empêcher la perpétration
19 d'acte au pénal de la part de ses subordonnés. Comme il ne l'a pas fait, le
20 tribunal a constaté qu'il devait en répondre comme s'il en était auteur par
21 omission d'entreprendre ceux qui relevaient de ses attributions. Les
22 auteurs même, qui ont procédé à ces mauvais traitements, n'ont pas été
23 identifiés et n'ont pas pu être poursuivis eux-mêmes. Ceci est un exemple
24 de pratique judiciaire que j'ai pu me procurer en ce peu de temps qui m'a
25 été disponible.
Page 126
1 Pour ce qui est du rapport de l'OSCE, je crains que je ne puisse pas le
2 commenter, parce que je ne l'ai pas.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Y a-t-il d'autres questions que
4 vous souhaiteriez aborder ?
5 M. KRAPAC : [interprétation] Est-ce une sorte de propos de clôture de la
6 part de l'ami de la Chambre ?
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Veuillez prendre le temps
8 nécessaire pour évoquer toutes les questions que vous jugerez utile de
9 soulever.
10 M. KRAPAC : [interprétation] Peut-être me suis-je trompé dans la façon dont
11 je me suis exprimé, parce que dans le droit en matière de procédure, les
12 propos de clôture sont une forme d'allocution qui est donnée, la
13 possibilité de prononcer aux parties, et c'est ensuite aux Juges qu'il
14 appartient de décider. Pour ce qui est des amis de la Chambre, cela n'est
15 pas du tout nécessaire. Il n'est définitivement pas nécessaire de
16 convaincre quelqu'un ou d'essayer de convaincre quelqu'un de quelque chose,
17 alors que c'est un ami qui essaie de le faire savoir. Je vais essayer de
18 faire passer le message sur deux segments, très brièvement.
19 Notre opinion, Messieurs les Juges, c'est que la décision du Procureur de
20 proposer l'application, la mise en œuvre de l'Article 11 bis, ne signifie
21 pas la mise en œuvre de critères nouveaux pour ce qui est de sélectionner
22 les poursuites judiciaires de ceux qui seront poursuivis ici, et de ceux au
23 sujet desquels l'on renoncera aux poursuites. Le représentant du bureau du
24 Procureur, M. Scott, a dit lui-même, aujourd'hui, qu'au cas où il y a
25 aurait une décision de renvoi, il sera procédé de façon très attentive de
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1 la part du bureau du Procureur une surveillance de ce qui se passe au
2 niveau de l'affaire et des modalités suivant lesquels le ministère public
3 en Croatie agit dans le traitement de cet affaire. Pour ce qui est des
4 préoccupations aux termes desquels on pourrait comprendre qu'il s'agit-là
5 d'une renonciation à l'affaire aux fins d'aboutir à des économies dans le
6 traitement des affaires, je crois que cela ne tient pas debout. Il faut le
7 dire, non pas seulement pour nous ici, mais plus encore pour l'opinion
8 publique d'une manière générale. Cela, c'est d'un.
9 De deux, Messieurs les Juges, j'ai pour opinion, toujours et encore, celle
10 que j'ai essayé de vous laisser entendre lorsque j'ai cité l'opinion du
11 Juge Orie pour ce qui est des commentaires des statuts de Rome. Je suis
12 toujours de l'avis suivant : votre décision de renvoi éventuel de cet
13 affaire vers les autorités de la République de Croatie en application du 11
14 bis, ne constituera que, et je vais citer en anglais :
15 "Dont le bon fonctionnement dépendra, en définitive, des principaux
16 protagonistes, notamment des Juges." Par conséquent, si aujourd'hui, au
17 travers de ces débats, nous avons parlé des éléments de confiance à l'égard
18 des juges en République de Croatie, notamment, à l'égard des juges au sein
19 de ces quatre tribunaux spécialisés qui ont suivi une formation appropriée,
20 qui ont suivi des stages avec des représentants du TPIY et autres
21 participants, je serais alors d'avis que la décision que vous prendrez,
22 Messieurs les Juges, dans cette affaire, la décision que vous êtes appelés
23 à prendre devrait, à mon avis, être aisée à prendre.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai oublié de poser quelques petites
25 questions au cours de la séance précédente.
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1 Monsieur Krapac, je suis désolé de vous avoir posé autant de questions,
2 peut-être que la représentant de la Croatie souhaitera répondre également à
3 mes questions.
4 Page 8, fin du premier paragraphe, vous faites référence au crime qui
5 consiste à aider l'auteur d'un crime, après que le crime a été commis, et
6 le manquement à l'obligation de rendre compte de ce crime. Pourriez-vous
7 nous dire quelle est la grille des peines envisageables pour ce type de
8 crime d'après les dispositions en vigueur ?
9 M. KRAPAC : [interprétation] Si je puis me le permettre, Monsieur le Juge
10 Kwon, j'aimerais citer les dispositions de cette loi de 1993, et dans
11 l'affirmative, je proposerais de me référer à l'Article 22 qui s'énonce
12 comme suit : "A toute personne qui aiderait quiconque dans l'exécution d'un
13 délit pénal, cette personne serait punie comme si elle l'avait perpétré
14 elle-même ou pourrait bénéficier d'une peine moins lourde."
15 Au cas où le tribunal déclarait quelqu'un coupable d'avoir aidé --
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Krapac, vous parlez de la loi
17 pénale de Croatie, la FCSC, Article 116, et au code pénal de la Croatie,
18 Article 176. Si vous ne pouvez pas trouver ces Articles, vous pouvez nous
19 les transmettre plus tard.
20 M. KRAPAC : [interprétation] J'avais l'intention de me référer à l'Article
21 120, justement, que vous venez de mentionner. Mais l'Article 22 qui se
22 rapporte à l'aide à la perpétration fait partie des dispositions générales
23 de la loi, or le 120 et les articles suivants font parties du segment, du
24 volet, qui parle des peines imparties.
25 Si vous me permettez, j'aimerais ajouter une phase : "Le juge, qui déclare
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1 quelqu'un coupable d'avoir aidé quiconque à perpétrer un délit au pénal, a
2 la possibilité de prononcer à son encontre une peine égale à celle de
3 l'auteur lui-même." Si l'Article 120, pour l'auteur, prévoit au moins cinq
4 ans ou 20 ans de prison, le juge peut le sanctionner de quelque peine que
5 ce soit dans cette intervalle-là.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez votre mémoire d'ami
7 de la Chambre sous les yeux ?
8 M. KRAPAC : [interprétation] Oui.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je souhaiterais attirer votre attention
10 sur la page 8 de votre rapport. Premier paragraphe dans la version en
11 anglais, vous parlez de l'Article 116 du FCSC, et vous mentionnez également
12 l'Article 176 du CAC du code pénal croate.
13 M. KRAPAC : [interprétation] C'est exact. Je me suis concentré sur la
14 question principale qui se rapportait à ceux qui aidaient les auteurs de
15 crimes, et la possibilité de les sanctionner. S'il est possible d'établir
16 une relation de causalité, il y a cette référence qui j'ai faite.
17 Maintenant, vous vous référez à l'autre cas où cela n'est pas possible.
18 Dans cet autre cas, le comportement de la personne concernée tombe sous la
19 coupe d'un autre délit au pénal, et je me réfère notamment à l'Article 116
20 que vous avez mentionné précisément vous-même. Si vous ne l'avez pas sous
21 les yeux ou si vous n'en disposez pas, je peux vous en donner lecture. Or,
22 si vous estimez que cela n'est point nécessaire, nous pouvons vous le
23 communiquer ultérieurement. J'ajouterais que la peine en application de
24 l'Article 116 va de un an à dix ans d'emprisonnement.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
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1 Ma question suivante, s'agissant de la période maximale de phase préalable
2 au procès ou de détention préventive, si j'ai bien compris, et corrigez-moi
3 si je me trompe, cette limite s'applique également à la période de 12
4 mois ?
5 M. KRAPAC : [interprétation] Oui. En application de la réglementation
6 actuelle de procédures pénales, il y a des limites de temps imparti pour la
7 durée totale de ce que vous qualifiez la détention préalable au procès
8 jusqu'au prononcé de verdict. Ce qui fait que ces délais de détention
9 provisoire sont comptés à double titre. Dans cette procédure préalable, il
10 y a un délai, et pour le procès tout entier, depuis le début de la
11 procédure jusqu'au prononcé de sentence, il y a un délai final et total
12 pour la durée de l'affaire. A notre avis, nous avons dû suggérer que ce
13 délai dans la procédure préalable, s'agissant de la détention avant le
14 début du procès, on pourrait le compter ou le décompter en application des
15 dispositions de la loi portant sur les obstacles à poser ou les entraves à
16 poser à la corruption et au comportement criminel, cela serait ce qui se
17 rapporterait à la procédure préliminaire.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soyons clairs : est-ce qu'il faut que le
19 procès se termine dans des délais précis à compter de l'arrestation de
20 l'accusé ?
21 M. KRAPAC : [interprétation] Non.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ma dernière question est la suivante :
23 pourriez-vous, je vous prie, examiner la page 17 de votre mémoire, ou
24 plutôt, le passage qui m'intéresse commence en bas de la page 16. Ceci
25 entre dans le cadre du résumé de vos arguments. Là, vous dites :
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1 "Cependant, il n'y aurait aucun problème en vertu du droit croate existant
2 à l'époque pour condamner un commandant en raison du manquement à son
3 obligation d'empêcher un crime si tant est qu'il connaissait, qu'il savait
4 que le crime était en préparation. Même s'il ne le savait pas, mais si le
5 crime commis par ses subordonnés était prévisible, sa responsabilité peut,
6 malgré tout, être engagée sur le fondement du type de culpabilité appelé
7 négligence délibérée."
8 M. KRAPAC : [interprétation] Je pense que oui parce que nous nous sommes
9 efforcés, en deux ou trois phrases, de résumer ce que nous avons rédigé au
10 sujet de l'actus reus du mens rea pour ce qui est de la responsabilité du
11 supérieur hiérarchique.
12 Si je puis me permettre d'ajouter autre chose. La question cruciale qui se
13 posera ici est celle des éléments de preuve. Le ministère public de Croatie
14 aura-t-il à sa disposition des éléments de preuve qui démontreront qu'il y
15 a possibilité de déterminer le fait que le commandant savait que des délits
16 étaient en cours de préparation ou en cours d'exécution, voire, même s'il
17 ne le savait pas, avait-il pu le savoir, avait-il pu prévoir que les délits
18 de cette nature pourraient être commis. Si le Procureur dispose d'éléments
19 de preuve illustrant cette possibilité, le tribunal n'aura aucune entrave
20 pour ce qui est de la prise d'une décision en ce sens.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le
22 Professeur.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krapac, j'ai un peu honte de
24 moi. Vous avez attiré notre attention à deux reprises sur des déclarations
25 que j'ai faites. Je pense que les parties sont en droit de connaître le
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1 contexte. Je souhaite préciser dans quelle circonstance j'ai déclaré cela,
2 ce qui a été cité. Cela m'aidera également quand mes souvenirs ne seront
3 pas très clairs à ce sujet, non plus. Je suis sûr que la citation était
4 exacte. Je souhaiterais enfin demander aux représentants de la République
5 de Croatie de s'adresser à la présente Chambre de première instance, et je
6 m'adresse au Pr Horvatic.
7 Peut-être pourrais-je vous demander d'être plus précis s'agissant d'une
8 déclaration que vous avez faite. Vous avez fait référence à une déclaration
9 ou à un document que je ne connais pas, mais à deux reprises, vous avez dit
10 : En grande partie, ces problèmes sont couverts par le droit croate. Ce qui
11 me préoccupe, c'est : qu'est-ce qui se passe pour ceux qui ne sont pas
12 couverts par le droit croate. Je vous ai invité un peu plus tôt à nous
13 fournir un complément d'information concernant les statistiques relatives
14 au fonctionnement des tribunaux croates eu égard aux critiques exprimées
15 par l'OSCE. Nous avons pris connaissance de votre approche générale, mais
16 si vous disposez d'information plus détaillée, je vous ai demandé de nous
17 fournir des informations supplémentaires concernant l'application pratique
18 de la législation adoptée en terme de protection de témoins. Veuillez
19 poursuivre.
20 M. HORVATIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vous remercie pour
21 votre question.
22 Pour ce qui est des statistiques, personnellement, et en tant que
23 représentant du gouvernement, je pense que des données statistiques sont
24 parfois présentées de telle façon qu'elles ne sont pas toujours fiables, ne
25 permettent pas toujours de fournir une réponse. A chaque fois, cela
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1 constituait pour moi des éléments d'information. Je suis tout à fait contre
2 les données statistiques, surtout si je regarde le chiffre des
3 condamnations ou des acquittements. Si on utilise ceci pour fonder un
4 jugement, je ne suis pas d'accord. Vous savez qu'en regardant le dossier
5 dans son ensemble, et ce n'est qu'au vu du jugement d'un tribunal, est-ce
6 qu'on peut faire des commentaires de type scientifique sur la manière dont
7 la loi est appliquée, surtout lorsque certains rapports, comme ceux qui
8 sont précisés ici, par le jugement en première instance. Dans la République
9 de Croatie, ces jugements en deuxième instance, c'est-à-dire, les jugements
10 rendus par la Cour suprême sont annulés ou infirmés. Je crois qu'il ne
11 s'agissait pas là d'une critique contre le jugement rendu par le tribunal
12 de première instance, mais plutôt l'expression de la manière dont
13 fonctionne le système judiciaire en Croatie, et que la décision finale
14 revient à la Cour suprême.
15 Le nombre d'affaires qui ont été jugées par les tribunaux croates
16 pourraient être divisées, comme nous l'avons entendu ce matin et au début
17 de l'après-midi, en deux phases. La deuxième phase qui couvre les deux ou
18 trois dernières années, il est difficile d'être plus précis à cet égard en
19 matière de jours et de mois. Là, je crois qu'il s'agit d'une approche tout
20 à fait différente, dans ce cas-ci, qui est la conséquence directe ou qui
21 résulte directement d'un niveau d'étude de l'accomplissement du système, et
22 je crois que la Croatie, en ces termes-là, est disposée à répondre aux
23 exigences de l'état de droit. Même si c'est un jeune pays, dès le jour de
24 son accession à l'indépendance, a clairement indiqué que c'était un pays
25 mûr en matière de pouvoirs exécutifs et de pouvoirs législatifs en
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1 particulier.
2 Pour ce qui est de la protection de témoins, je prends la liberté d'attirer
3 votre attention sur ce rapport. Le 2 janvier de cette année, et à la page
4 15, sous le titre, je cite ici le texte de loi : "La loi portant sur la
5 protection des témoins datant du 1er octobre 2003, et de la Gazette du
6 peuple, 163." Tous les articles contiennent, ici, je dois dire, et je suis
7 tout à fait convaincu que du fait que cette loi est non seulement conforme
8 à d'autres actes semblables dans d'autres pays, mais il s'agit, là, d'un
9 texte de loi qui est conforme à l'esprit et au comportement et aux sources
10 sur lesquelles s'appuie ce Tribunal.
11 Ce texte de loi portant sur la protection de témoins --
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai peut-être pas été assez précis
13 lorsque je vous ai posé la question. La loi est très claire en ce sens.
14 Ceci a été présenté de façon très détaillée, c'est un annexe qui cite
15 toutes les mesures de protection provisoires et définitives, ou lorsqu'il
16 s'agit de l'appliquer dans un autre pays. Mais la question porte surtout
17 sur ceci, et je ne sais pas si je vous ai déjà posé la question, Monsieur
18 le Professeur Krapac, parce que je n'en ai pas parlé beaucoup, je parle de
19 l'application de la loi, ce qui est utilisé dans la pratique, quelles en
20 sont les conséquences et les résultats. C'est cela qui m'intéresse
21 davantage, c'est l'application de ceci.
22 M. HORVATIC : [interprétation] Oui. Je dois dire que le ministère de
23 l'Intérieur et le ministère de la Justice, qu'à l'intérieur de ceci, un
24 service particulier a été mis en place aux fins de veiller à l'application
25 de cette loi. Différentes affaires liées à des cas de crimes organisés,
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1 d'autres affaires liées à des crimes de guerre ont été étudiées. Je suis
2 sûr que ces affaires sont renvoyées devant nos tribunaux, je suis sûr que
3 si la question de la protection de témoins se pose, c'est alors que cette
4 loi sera véritablement appliquée. L'Etat croate a donné ses assurances, et
5 a dit que cette loi sera appliquée dans les faits et concrètement. Cela est
6 dans notre intérêt, par opposition à d'autres textes de loi qui sont peut-
7 être moins importants. Nous avons quelques difficultés à mettre en place
8 certaines lois portant sur les questions financières et économiques. Cette
9 loi est certainement une priorité pour nous.
10 Je puis saisir l'occasion pour répondre à d'autres questions qui m'ont été
11 posées par le Greffe.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que j'ai cru comprendre, d'après
13 ce que vous dites, que l'Accusation, à la page 5, dans ses écritures du
14 mois de janvier, a précisé que ce système législatif n'avait pas encore
15 fait ses preuves ? Autrement dit, ceci pourrait être vrai jusqu'à un
16 certain point. Il s'agit ici du premier cas de renvoi d'une affaire, et
17 qu'il s'agit de faire les preuves et de voir si ce texte législatif sur la
18 protection de témoins peut effectivement être appliqué. Vous étiez assez
19 vague lorsque vous avez répondu à mes questions en disant que des affaires
20 de crimes organisés ou des crimes de guerre avaient déjà été traitées,
21 j'entends par là, si le système fonctionne ou si ceci a été appliqué, mis
22 en œuvre par ce comité. Combien de demandes de renvoi vers vos tribunaux
23 portant sur les crimes de guerre ont été déposées ?
24 M. HORVATIC : [interprétation] A mon sens, il y a deux demandes de ce type,
25 ces demandes ont ensuite été rejetées car les témoins ne sont pas
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1 présentés, pour autant que je m'en souvienne à propos des affaires de
2 crimes de guerre.
3 Mais le service de Protection des témoins qui a été créé, qui permet de
4 protéger l'identité de ces mêmes témoins, ce service fait partie du
5 ministère de l'Intérieur et du ministre de la Justice, et est disponible et
6 peut fonctionner normalement si une telle requête, comme dans cette
7 affaire, est déposée. L'Etat croate garantie que la loi sera mise en œuvre.
8 Nous n'avons pas suffisamment de recul pour comprendre si, oui ou non,
9 cette loi a été appliquée ou non. Nous avons eu trois cas de prévention
10 contre les crimes au moment où cette loi a été appliquée. Je crois que nous
11 savons exactement ce qui nous reste à faire le moment venu.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.
13 M. HORVATIC : [interprétation] Pour ce qui est de la question posée par le
14 Greffe sur le transfert du dossier, ainsi que tous les moyens de preuve,
15 une réponse a été donnée, réponse partielle. Il s'agit ici de l'Article 11
16 bis qui est visée ici, et comme vous l'avez dit à juste titre, l'Accusation
17 est tenue de fournir au tribunal en question tous les éléments et, en
18 particulier, les éléments à l'appui de l'acte d'accusation. A savoir à qui
19 ces éléments seront remis, et de quelle manière, nous répondons aujourd'hui
20 en disant que ceci sera remis au procureur de la République de Croatie.
21 Nous sommes, néanmoins, quelque peu septique à l'égard de communication de
22 moyens de preuve par des moyens électroniques, car ceci peut poser un
23 certain nombre de difficultés, difficultés auxquelles nous sommes déjà
24 confrontés. L'équipe de la Défense nous en a déjà fait part, l'équipe de la
25 Défense qui travaille dans ce Tribunal. Parfois, il y a tellement de
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1 documents, que la communication, la photocopie, et la sélection de ces
2 documents peut être un problème. Ce que je propose, c'est que l'Accusation
3 et nos procureurs puissent tomber d'accord là-dessus, et peut-être par
4 l'intermédiaire d'un officier de liaison pour voir comment ceci peut être
5 effectué.
6 Pour finir, la question des témoignages de personnes bénéficiant d'une
7 immunité. Cela n'est peut-être pas quelque chose qui agré à ce Tribunal si
8 je dis que : si ce cas devait se présenter, nous avons des instruments
9 juridiques que nous pourrons utiliser dans ce cas. Mais je pense que le
10 système judiciaire croate, comme l'a fait par le passé avec des personnes
11 qui avaient l'immunité diplomatique qui auraient pu témoigner dans d'autres
12 affaires qui n'ont aucun lien avec celle-ci, la justice croate a été très
13 prudente et a préféré ne pas appeler ce témoin et le mettre dans une
14 position où il ne bénéficiait pas de sa diplomatie ou de l'entendre dans un
15 contexte où il ne bénéficiait pas de cette immunité diplomatique. Je pense
16 que l'affaire doit être débattue si la question se présente.
17 Pour finir, je suis tout à fait d'accord avec ce qu'a dit le Pr Krapac,
18 l'Amicus est encore représentant du gouvernement. Je souhaite également
19 proposer comme plaidoirie à la fin de cette journée fatigante, et pour
20 vous, et pour nous, j'aimerais dire dans ce prétoire, que quel que soit
21 l'aboutissement de tout ceci, et la décision que vous allez rendre,
22 j'espère que la décision que vous allez rendre ce sera une décision en
23 faveur de l'Accusation, à ce moment-là, nous pourrions faire un pas en
24 avant en direction de l'application de ce droit pénal international, et je
25 puis vous assurer que toutes les personnes qui s'intéressent à la question,
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1 et cette Chambre de première instance, en particulier, je puis vous assurer
2 que la République croate reprendra l'acte d'accusation et reprendra cette
3 affaire en ayant pleine connaissance de toutes ces responsabilités. Nous
4 sommes dans l'obligation d'agir ainsi, mais l'élément, qui à mes yeux,
5 revêt la plus grande importance est celui qui figure au paragraphe (F) de
6 l'Article 11 bis, à savoir : "A aucun moment après qu'une ordonnance ait
7 été rendue conformément à cet article et avant que tribunal national ne
8 condamne ou n'acquitte l'accusé en question, la Chambre de première
9 instance peut à la requête du Procureur -- et à la demande du Procureur, et
10 après avoir donné aux autorités de l'état en question les assurances que
11 cette personne a été entendue," révoquer cette ordonnance et faire une
12 demande formelle de dessaisissement -- de renvoi au terme de l'Article 10 -
13 - si ceci -- annuler l'ordonnance et demander officiellement le
14 dessaisissement au terme de l'Article 10. Si ceci devait se produire et que
15 le gouvernement croate et son système judiciaire fera tout ce qui est en
16 son pouvoir pour éviter ceci, car ceci enverrait des signaux très négatifs
17 au Tribunal de La Haye, avec tout le respect que je vous dois, ceci serait
18 très mauvais pour l'image de la justice croate. C'est avec de façon très
19 sérieuse et en étant tout à fait conscient de la responsabilité qui nous
20 incombe nous prenons part à cette initiative à laquelle nous nous sommes
21 engagés et ces différentes affaires seront réparties entre nos différents
22 tribunaux. J'espère que ceci contribuera au progrès de l'humanité, nous
23 espérons ainsi que les atrocités qui ont été commises au cours de ces
24 crimes de guerre et ces crimes contre l'humanité ne se reproduiront pas.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup Professeur Horvatic.
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1 Puis-je vous demander un point de clarification ? Vous avez dit eu égard à
2 l'immunité et en réponse à une des observations qui ont été faites par le
3 représentant du Greffe, vous avez dit : "La question du témoignage par des
4 personnes bénéficiant de l'immunité, si cela n'est pas acceptable pour ce
5 Tribunal je dois dire que nous utiliserions les instruments juridiques à
6 notre disposition pour ce faire."
7 Je n'ai pas très bien compris ce que vous avez dit lorsque vous avez fait
8 référence à ce tribunal s'il s'agit du tribunal croate, et je ne sais pas
9 quels sont ces instruments juridiques dont vous disposez. Pourriez-vous
10 nous en fournir une explication, s'il vous plaît ?
11 M. HORVATIC : [interprétation] Un représentant du Greffe de ce tribunal a
12 posé un certain nombre de questions, parmi ces questions qui portaient sur
13 la question du renvoi a cité le témoignage de certaines personnes
14 bénéficiant d'immunité de ce tribunal quand bien même ces témoins devaient
15 venir témoigner devant un tribunal croate dans le cadre de ces affaires. Ma
16 réponse a été de dire qu'il y a certains cas où ces témoins bénéficiaient
17 d'une immunité mais pas dans les cas des crimes de guerre aux crimes contre
18 l'humanité, car quelque fois, ils font l'objet d'insultes, et nous avons
19 tout fait pour que les questions soient posées à les personnes qui
20 bénéficient d'une immunité. Je pense qu'il ne faut pas insister là-dessus,
21 et il ne faut pas insister pour que de tels témoins viennent témoigner à
22 moins que cela revête une importance capitale pour établir soit la
23 culpabilité soit l'innocence de l'accusé en question. Nous n'allons pas
24 demander la levée de l'immunité des personnes qui vont venir témoignage. Je
25 dois également préciser qu'on ne peut pas anticiper sur tout mais que nous
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1 agirions conformément à notre loi. Donc c'est quelque chose qui ne m'est
2 jamais venu à l'esprit jusqu'à présent, mais comme le représentant du
3 Greffe l'a précisé, j'estimais que c'était de mon devoir d'en parler.
4 Il y avait d'autres questions administratives comme la question de
5 l'officier de liaison, je crois que tout ceci peut être résolu de façon
6 assez simple. Je crois qu'il suffit simplement d'entrer en contact avec le
7 ministère de la Justice ainsi que le procureur de la république, et nous
8 avons déjà coopéré de cette manière. Nos avocats se sont rendus utiles et
9 ont échangé des informations avec le Procureur. Je crois qu'avec le
10 téléphone et la messagerie électronique, on peut facilement régler ce genre
11 de problème.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, il y a peut-être un malentendu.
13 Monsieur Rohde, j'ai peut-être mal interprété vos commentaires. Si c'est le
14 cas, dites-le moi, s'il vous plaît.
15 Je comprends fort bien que c'est la politique des Nations Unies que
16 d'inscrire tout ceci dans des instruments et des salariés des Nations Unies
17 pour -- s'il s'agit des salariés des Nations Unies c'est important
18 d'assurer la sécurité, c'est important qu'ils ne soient pas gêner
19 lorsqu'ils doivent remplir leurs obligations à l'avenir. Il est important
20 que les Nations Unies demandent avant de citer à la barre un témoin qui est
21 un membre des Nations Unies que la levée de l'immunité soit faite. C'est ce
22 qui s'est passé dans ce Tribunal si vous faites attention aux intérêts des
23 uns et des autres, les Nations Unies, en général, font très attention et
24 tiennent compte des besoins du Tribunal lorsqu'ils entendent les témoins.
25 C'est ce que nous avons -- c'est l'expérience que nous avons ici au sein de
Page 141
1 ce Tribunal, et c'est en général -- on constate qu'on parvient à un accord
2 et que le Tribunal rendra ou communiquera les éléments nécessaires à la
3 prise de décision et dans -- il fera particulièrement attention pour
4 sauvegarder la sécurité de ces salariés des Nations Unies. Monsieur Rohde,
5 si j'ai mal compris votre position, faites-le-moi savoir, s'il vous plaît.
6 M. ROHDE : [interprétation] Vous avez tout à fait interprété ceci
7 correctement. Ce qui est important néanmoins c'est que la Croatie reconnaît
8 l'immunité et c'est eux -- également que la possibilité existe de déroger
9 à cette immunité.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Rohde.
11 Je pense que tout a été dit, toutes les questions ont été posées. On a
12 répondu à toutes les questions qui ont été posées. Tout ce que nous avons
13 jugé utile, questions et réponses ont été posées et données.
14 Etant donné que je ne vois personne qui dit "non," je souhaite terminer
15 cette audience. Nous avons prêté attention à toutes les exigences inscrites
16 dans l'Article 11 bis de ce Tribunal, en particulier, la gravité et le
17 niveau de responsabilité. Il y a d'autres points que nous n'avons pas
18 abordés car il semble être découlés de source. Nous avons également prêté
19 une attention particulière à la question de l'application du droit positif
20 croate, si dans le cas où, cette affaire serait renvoyée devant ce tribunal
21 croate, à savoir si ce droit peut -- substantif, en mesure de tenir compte
22 du type de comportement, type de responsabilité de l'accusé en question,
23 qui est accusé devant ce Tribunal-ci. Nous avons passer beaucoup de temps
24 et à discuter du droit pénal croate, à niveau théorique et à niveau
25 concret, et nous avons abordé la question de savoir s'il avait atteint le
Page 142
1 niveau qui permettrait à ce Tribunal de renvoyer des affaires devant ces
2 juridictions-là, eu égard aux rapports qui existent entre cette
3 institution, le TPIY, et les tribunaux croates une fois qu'un affaire
4 serait renvoyé devant un tribunal croate. Mais, pour l'instant, aucun
5 jugement définitif n'a été rendu à cet égard. La Chambre de première
6 instance remercie les différentes parties pour leurs arguments, permettant
7 ainsi à la Chambre de préparer sa décision. Je remercie également les
8 représentants du gouvernement croate, le Pr Horvatic, M. Muljacic, et M.
9 Milevoj. Nous vous remercions d'avoir répondu aux questions qui vous
10 avaient été posées par la Chambre de première instance, et finalement la
11 Chambre de première instance souhaite remercier le Pr Krapac pour avoir
12 accepté de jouer le rôle d'amicus aujourd'hui. Nous le remercions pour ses
13 observations. Il comprend fort bien l'importance de son rôle, à savoir,
14 celui d'un Ami de la Chambre. Il ne s'agit pas de plaidoiries, il s'agit
15 simplement des arguments définitifs qui permettent d'attirer l'attention
16 des Juges de la Chambre sur ces questions-là.
17 Nous vous invitions, Monsieur le Professeur Krapac, ainsi qu'au Pr Damaska.
18 Nous vous remercions d'avoir ainsi contribué à la préparation du mémoire de
19 l'Amicus Curiae.
20 Je souhaite également attirer l'attention des parties, ainsi que des
21 représentants du gouvernement croate, et des Amici Curiae, que l'Article 11
22 bis a été modifiée le 11 février, et cette modification a été publiée le 15
23 février. Donc, il n'est pas encore entré en vigueur. Ce serait le 22
24 février. Simplement pour votre information.
25 La Chambre va se pencher sur la question, et va délibérer. Elle vous fera
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1 savoir si une décision a été rendue ou non, ou si la Chambre de première
2 instance a besoin d'autres éléments complémentaires avant de rendre sa
3 décision.
4 L'audience est levée.
5 --- L'audience est levée à 16 heures 28.
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