Affaire n° IT-02-60-PT

DEVANT LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE

Composée comme suit :
M. le Juge Wolfgang Schomburg, Président
Mme le Juge Florence Mumba
M. le Juge Carmel Agius

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Date de dépôt :
27 mai 2002

LE PROCUREUR

C/

VIDOJE BLAGOJEVIC
DRAGAN OBRENOVIC
DRAGAN JOKIC
MOMIR NIKOLIC

________________________________________________

REQUÊTE AUX FINS DE DÉPOSER UN ACTE D’ACCUSATION CONJOINT MODIFIÉ EN APPLICATION DE L’ORDONNANCE DU 17 MAI 2002

________________________________________________

Le Bureau du Procureur :

M. Peter McCloskey

Le Conseil de la Défense :

M. Michael Karnavas pour Vidoje Blagojevic
M. David Eugene Wilson pour Dragan Obrenovic
M. Miodrag Stojanovic pour Dragan Jokic
M. Veselin Londrovic pour Momir Nikolic

 

En application de l’ordonnance de la Chambre de première instance II du 17 mai  2002, l’Accusation soumet en annexe l’Acte d’accusation conjoint modifié, qui est identique tant dans sa substance que dans sa forme, à l’Acte d’accusation conjoint modifié déposé le 16 avril 20021 . Ledit Acte d’accusation conjoint modifié joint à la présente et déposé précédemment le 16 avril 2002 a subi plusieurs modifications importantes par rapport à l’Acte d’accusation modifié original2 , comme suit :

Des références à Momir Nikolic ont été ajoutées dans l’Acte d’accusation conjoint modifié.

Au paragraphe 33, plusieurs phrases ont été ajoutées pour décrire la position respective de chaque accusé au sein de la structure militaire de la VRS.

Le paragraphe 36 a été ajouté afin de déterminer, pour chaque accusé, la nature et la portée générales de sa participation aux crimes et de sa responsabilité envers les prisonniers.

Le paragraphe 37 a été ajouté pour fournir davantage d’informations sur le contexte .

Une phrase a été ajoutée à la fin du paragraphe 42 pour préciser le contexte s’agissant du traitement des prisonniers à Potocari et Bratunac.

Une phrase a été ajoutée à la fin du paragraphe 45 pour décrire de manière plus détaillée le rôle de Dragan Obrenovic dans les crimes.

Le paragraphe 46.2 a été modifié pour indiquer de manière plus précise le nombre de prisonniers tués au site d’exécution de la rivière Jadar.

Le paragraphe 46.4 a été modifié de manière à fournir des informations plus précises , obtenues durant l’enquête en cours, sur la date d’ensevelissement des victimes de l’exécution de l’entrepôt de Kravica3 .

Les éléments requis pour prouver chaque crime reproché ont été énumérés dans la section relative aux chefs d’accusation (paragraphes 52 à 59).

Le Premier Substitut du Procureur
_________________

Peter McCloskey

Fait le 27 mai 2002
La Haye (Pays-Bas)

LE TRIBUNAL PÉNAL INTERNATIONAL POUR L’EX-YOUGOSLAVIE

Affaires n° IT-02-60-PT

LE PROCUREUR

DU TRIBUNAL

CONTRE

VIDOJE BLAGOJEVIC
DRAGAN OBRENOVIC
DRAGAN JOKIC
MOMIR NIKOLIC

ACTE D’ACCUSATION CONJOINT MODIFIÉ

Le Procureur du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par l’article 18 du Statut, accuse :

VIDOJE BLAGOJEVIC

de COMPLICITÉ DANS LE GÉNOCIDE, d’assassinat, persécutions, transfert forcé et actes inhumains en tant que CRIMES CONTRE L’HUMANITÉ et de meurtre en tant que VIOLATION DES LOIS OU COUTUMES DE LA GUERRE, ainsi qu’il est exposé dans la suite ;

DRAGAN OBRENOVIC

de COMPLICITÉ DANS LE GÉNOCIDE, d’assassinat, persécutions et actes inhumains en tant que CRIMES CONTRE L’HUMANITÉ et de meurtre en tant que VIOLATION DES LOIS OU COUTUMES DE LA GUERRE, ainsi qu’il est exposé dans la suite ;

DRAGAN JOKIC

d’assassinat, persécutions et actes inhumains en tant que CRIMES CONTRE L’HUMANITÉ et de meurtre en tant que VIOLATION DES LOIS OU COUTUMES DE LA GUERRE, ainsi qu’il est exposé dans la suite ; et

MOMIR NIKOLIC

de GÉNOCIDE ou, subsidiairement, de COMPLICITÉ DANS LE GÉNOCIDE, d’assassinat , persécutions, transfert forcé et actes inhumains en tant que CRIMES CONTRE L’HUMANITÉ et de meurtre en tant que VIOLATION DES LOIS OU COUTUMES DE LA GUERRE, ainsi qu’il est exposé dans la suite.

L’ACCUSÉ

1. VIDOJE BLAGOJEVIC est né dans la municipalité de Bratunac le 22 juin 1950 . Il a gravi les échelons jusqu’à devenir lieutenant-colonel de l’Armée de la République socialiste de Yougoslavie (JNA). Le 1er juin 1992, pendant le conflit armé en Bosnie -Herzégovine, il est devenu chef de la brigade de Zvornik, une nouvelle unité formée au sein de l’Armée de la Republika Srpska (VRS). Par la suite, il a fait partie de l’état-major du corps de la Drina de la VRS et a été, pendant plusieurs mois en 1993, chef d’état-major par intérim/chef en second de la brigade de Bratunac. En mai 1995, il a été nommé chef de la 1re brigade d’infanterie légère de Bratunac (brigade de Bratunac). Celle-ci était chargée de la sécurité du territoire qui s’étendait au-delà des limites nord, est et sud de la zone de sécurité de Srebrenica et a directement et effectivement participé à la prise de l’enclave de Srebrenica. En août 2001, au moment de son arrestation, il travaillait à l’état-major général de l’Armée de la Republika Srpska.

POUVOIRS HIÉRARCHIQUES ET/OU POSTE DE L’ACCUSÉ

2. À l’époque de l’attaque de la zone de sécurité de Srebrenica par la VRS et des meurtres et exécutions d’hommes musulmans de Bosnie qui l’ont suivie, VIDOJE BLAGOJEVIC était colonel et commandait la 1e brigade d’infanterie légère de Bratunac. Il était présent dans la zone de responsabilité de la brigade et a exercé des fonctions de commandement jusqu’au 17 juillet 1995 au moins ; après le 17 juillet , il a dirigé un de ses bataillons dans le cadre de l’offensive de la VRS contre l’enclave musulmane de Zepa. Après la chute de Zepa, il est retourné dans la zone de responsabilité de Bratunac, où il est resté jusqu’au 22 septembre 1995. Ce jour -là, la brigade de Bratunac a été rattachée au corps de Sarajevo-Romanija (SRK). Il n’est toutefois pas resté exclusivement dans le secteur du SRK, mais il est fréquemment retourné à la caserne de sa brigade à Bratunac. Il est resté chef de la brigade de Bratunac jusqu’à la mi-1996, date à laquelle il a été affecté à l’état-major principal de la VRS, plus tard appelé état-major général de la VRS.

3. En qualité de chef de brigade, il était chargé de la planification, de la direction et de la supervision des activités de toutes les formations subordonnées à sa brigade , conformément aux directives reçues de ses supérieurs aux niveaux du corps et de l’état-major principal.

L’ACCUSÉ

4. DRAGAN OBRENOVIC est né le 12 avril 1963 à Matino-Brdo (Rogatica), un village serbe de Bosnie. Quand le conflit a éclaté en Bosnie-Herzégovine, il était capitaine dans les forces blindées et motorisées de la JNA et était en garnison dans la municipalité de Zvornik. De décembre 1992 à novembre 1996, il était chef d’état-major/chef en second de la 1re brigade d’infanterie de Zvornik (brigade de Zvornik) de la VRS. Il a été promu du grade de chef à celui de lieutenant-colonel en décembre 1995. Le 29 avril 1996, DRAGAN OBRENOVIC est devenu chef par intérim de la 303e brigade motorisée et en août 1998, il a été nommé chef de la 503e brigade motorisée à Zvornik. Ces deux brigades étaient auparavant désignées sous le nom de brigade de Zvornik.

POUVOIRS HIÉRARCHIQUES ET/OU POSTE DE L’ACCUSÉ

5. Le 1er juillet 1995, DRAGAN OBRENOVIC avait le grade de chef et occupait le poste de chef d’état-major de la brigade de Zvornik. À ce titre, il dirigeait les activités des membres de l’état-major de la brigade. Il était chargé de la supervision et de l’organisation des activités de toutes les unités et des activités dans la zone de responsabilité de la brigade ; il devait donner des ordres complémentaires pour assurer l’exécution des ordres du chef, et agissait en tant que premier conseiller de son chef de brigade.

6. En sa qualité de chef d’état-major, il était également chef en second de la brigade de Zvornik et, en l’absence du chef, il la dirigeait et était habilité à donner des ordres à ses subordonnés.

7. Lorsque l’opération Srebrenica a commencé le 6 juillet 1995, Vinko Pandurevic , chef de la brigade de Zvornik, était retenu par d’autres fonctions hors de la zone de responsabilité de la brigade et DRAGAN OBRENOVIC, en sa qualité de chef en second, a dirigé la brigade du 6 au 15 juillet 1995 à midi, lorsque Vinko Pandurevic est retourné dans la zone de la brigade de Zvornik. DRAGAN OBRENOVIC a repris ses fonctions de chef d’état-major le 15 juillet 1995 à midi.

8. DRAGAN OBRENOVIC a été chef par intérim de la brigade de Zvornik du 4 août au 16 septembre 1995 et de nouveau du 18 au 24 septembre 1995. Le 29 avril  1996, DRAGAN OBRENOVIC est devenu chef par intérim de la 303e brigade motorisée et est demeuré à ce poste jusqu’en août 1998, date à laquelle il a été nommé chef de la 503e brigade motorisée à Zvornik. Ces brigades étaient auparavant désignées sous le nom de brigade de Zvornik.

L’ACCUSÉ

9. MOMIR NIKOLIC, fils de Vaso, est né le 20 février 1955 à Bratunac. Après ses études en génie civil, il est entré à la faculté des sciences politiques de Sarajevo. MOMIR NIKOLIC est enseignant de profession. Il a été appelé sous les drapeaux le 18 avril 1992, date à laquelle il a été affecté au quartier général de la Défense territoriale en tant que chef adjoint en charge du renseignement. En juillet 1995, il a été affecté à la première brigade d’infanterie légère de la VRS à Bratunac (brigade de Bratunac) au sein de laquelle il avait le grade de capitaine de première classe, et remplissait les fonctions de chef adjoint en charge de la sécurité et du renseignement. Cette brigade était chargée de la sécurité du territoire qui s’étendait au-delà des limites nord, est et sud de l’enclave de Srebrenica et a directement participé à la prise de celle-ci.

POUVOIRS HIÉRARCHIQUES ET/OU POSTE DE L’ACCUSÉ

10. À l’époque de l’attaque de la VRS contre l’enclave de Srebrenica et des meurtres et exécutions d’hommes musulmans de Bosnie qui l’ont suivie, MOMIR NIKOLIC était capitaine de première classe et remplissait les fonctions de chef adjoint en charge de la sécurité et du renseignement de la brigade de Bratunac. Il était présent dans la zone de responsabilité de la brigade de Bratunac lors de l’attaque contre l’enclave de Srebrenica entre le 4 juillet et le 1er novembre 1995.

11. En sa qualité de chef adjoint en charge de la sécurité et du renseignement, MOMIR NIKOLIC avait pour attribution, sur le plan de la sécurité, de surveiller les activités ennemies dirigées contre les unités de la brigade de Bratunac ou menées au sein même de celles-ci, et de proposer des mesures au chef de la brigade pour conjurer ces menaces. Il devait notamment identifier les traîtres ou autres dangers au sein des unités de la brigade de Bratunac, et faire face aux menaces extérieures telles que les sabotages, la surveillance et les interventions de l’ennemi. Il était également chargé de diriger et de coordonner les activités de la compagnie de police militaire de la brigade de Bratunac, notamment en proposant une utilisation de ses membres conformément aux ordres des chefs de la brigade. Il était aussi responsable , généralement parlant, de la coordination avec les organes du Ministère de l’intérieur (MUP) dans la zone de responsabilité de la brigade. En tant que chef adjoint en charge de la sécurité et du renseignement, et en vertu des pouvoirs dont son chef Vidoje Blagojevic l’avait investi, pouvoirs définis par le règlement de l’Armée populaire yougoslave (JNA) adopté par la VRS, MOMIR NIKOLIC était responsable des prisonniers musulmans de Bosnie capturés à Srebrenica du 11 juillet au 1er novembre  1995 au moins.

L’ACCUSÉ

12. DRAGAN JOKIC est né le 20 août 1957 à Grbavci, village serbe situé dans la municipalité de Zvornik, en Bosnie. Il a étudié à l’école militaire des sous-officiers et à l’académie militaire. Il a suivi une formation en ingénierie pour chefs de bataillon. Il a intégré la brigade de Zvornik à sa création, au début de la guerre en 1992, et y est resté jusqu’après le conflit. Pendant la période couverte par l’acte d’accusation conjoint modifié, il était chef du génie de la 1re brigade d’infanterie de Zvornik, avec le grade de commandant. Avant son incarcération à La Haye, il était lieutenant-colonel dans le 5e corps de la VRS, stationné à Sokolac, en Bosnie-Herzégovine.

POSTE DE L’ACCUSÉ

13. En juillet 1995, DRAGAN JOKIC avait le grade de commandant et occupait le poste de chef du génie de la brigade de Zvornik. En cette qualité, il était membre de l’état-major de la brigade et conseiller du chef et du chef d’état-major/chef en second de la brigade de Zvornik, s’agissant des services du génie comme les ouvrages défensifs, le minage, la construction de routes, et les projets de terrassement. Il était également chargé de planifier, de diriger, d’organiser et de superviser les activités de la compagnie du génie de la brigade de Zvornik, et était habilité à lui donner des ordres pour mettre en œuvre les instructions du chef de la brigade et/ou du chef d’état-major/chef en second.

14. De plus, DRAGAN JOKIC a été l’officier de permanence de la brigade de Zvornik pendant une période de 24 heures, à compter du 14 juillet 1995 au matin jusqu’au 15 juillet 1995 au matin. À ce titre, il était le représentant désigné du chef de la brigade ou du chef d’état-major/chef en second, et était présent au quartier général de la brigade pendant toute la durée de sa permanence. À cet égard , les ordres opérationnels du haut commandement (le corps de la Drina et l’état- major principal) passaient par lui, et il rédigeait les rapports que la brigade de Zvornik adressait au haut commandement, ou les lui transmettait. Au cas où le chef de brigade ou le chef d’état-major s’absentait temporairement du quartier général pendant la permanence, l’officier de permanence veillait à ce que leurs ordres soient transmis aux subordonnés, et que les rapports de ces derniers soient reçus en temps voulu. En tant que de besoin, l’officier de permanence transmettait ces rapports au chef de brigade ou au chef d’état-major/chef en second. Il jouait en matière de coordination et de communication un rôle essentiel dans la zone de responsabilité de la brigade de Zvornik.

ALLÉGATIONS GÉNÉRALES

15. Pendant toute la période couverte par le présent acte d'accusation conjoint modifié, la République de Bosnie-Herzégovine était le théâtre d’un conflit armé.

16. Pendant toute la période visée, les accusés étaient tous tenus de respecter les lois et coutumes régissant la conduite de la guerre.

17. Tous les actes et omissions présentés comme des crimes contre l’humanité s’inscrivaient dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique dirigée contre la population civile musulmane de Bosnie de Srebrenica et de ses environs.

EXPOSÉ DES FAITS

18. Le 12 mai 1992, Momcilo Krajisnik, Président de l’Assemblée nationale de la RS, a signé la « DÉCISION RELATIVE AUX OBJECTIFS STRATÉGIQUES DU PEUPLE SERBE DE BOSNIE-HERZÉGOVINE », publiée au Journal officiel de la Republika Srpska le 26 novembre  1993 :

« Les objectifs et priorités stratégiques du peuple serbe de Bosnie-Herzégovine sont :

1. la délimitation de l’État serbe en tant qu’entité distincte des deux autres communautés nationales,

2. la création d’un couloir entre la Semberija et la Krajina,

3. la mise en place d’un couloir dans la vallée de la Drina, celle-ci cessant du même coup de marquer la frontière entre les États serbes,

4. l’établissement de frontières le long de l’Una et de la Neretva,

5. la division de la ville de Sarajevo en zones serbe et musulmane et la mise en place d’une autorité administrative effective dans chaque zone,

6. l’accès à la mer pour la Republika Srpska. »

19. Après l’éclatement du conflit armé dans la République de Bosnie-Herzégovine (BiH) au printemps 1992, les forces militaires et paramilitaires serbes de Bosnie ont attaqué et occupé les agglomérations, villes et villages de l’est du pays, notamment Zvornik, et ont participé à une campagne de nettoyage ethnique qui a entraîné l’exode de civils musulmans de Bosnie vers les enclaves de Srebrenica, Gorazde et Zepa.

20. Le 19 novembre 1992, le général Ratko Mladic, commandant de l’état-major principal de la VRS, a pris la directive opérationnelle 04. Cette directive ordonnait, entre autres, au corps de la Drina d’« infliger à l’ennemi le plus de pertes possibles et [de] l’obliger à quitter les zones de Birac, Zepa et Gorazde avec la population musulmane de Bosnie. Demandez tout d’abord aux hommes valides et armés de se rendre et, s’ils refusent, anéantissez-les ».

21. Le 16 avril 1993, le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies , agissant en application du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, a adopté la résolution 819, par laquelle il exigeait que toutes les parties au conflit dans la République de Bosnie-Herzégovine traitent Srebrenica et ses environs comme une « zone de sécurité » qui devait être à l’abri de toute attaque armée et de tout acte hostile.

22. Le 4 juillet 1994, le lieutenant-colonel Slavko Ognjenovic, à l’époque chef de la brigade de Bratunac, a distribué un rapport à tous les membres de celle-ci , indiquant notamment : « Nous devons continuer à armer, entraîner, discipliner et préparer l’Armée de la RS pour mener à bien cette mission capitale : l’expulsion des Musulmans de l’enclave de Srebrenica. S’agissant de l’enclave de Srebrenica, il n’y aura pas de repli, nous devons avancer. Il faut rendre les conditions de l’ennemi invivables et son séjour temporaire dans l’enclave impossible pour qu’il la quitte en masse au plus vite, comprenant qu’il ne lui est plus possible d’y vivre  ».

23. Le 8 mars 1995, le commandement suprême des forces armées de la Republika Srpska a pris la directive opérationnelle 07. Dans cette directive, le Président de la Republika Srpska, Radovan Karadzic, enjoignait à la VRS (plus particulièrement au corps de la Drina de la VRS) d’« […] achever la séparation physique des enclaves de Srebrenica et de Zepa au plus vite, empêchant même les individus des deux enclaves de communiquer. Par des opérations de combat planifiées et bien préparées, créez une situation invivable d’insécurité totale, ne laissant aucun espoir de survie ou de vie future pour les habitants de Srebrenica ou de Zepa ».

24. Le 2 juillet 1995, dans l’ordre opérationnel du corps de la Drina enjoignant d’attaquer l’enclave de Srebrenica, le général Milenko Zivanovic a assigné à cette attaque l’objectif de « réduire l’enclave à sa zone urbaine ». Le 2 juillet 1995 , l’enclave avait une superficie d’environ 58 km² et la zone urbaine d’environ deux (2) km2. Une grande partie de la population musulmane de Bosnie de l’enclave habitait en dehors de la zone urbaine de Srebrenica avant le 2 juillet 1995.

25. Le 6 juillet 1995 ou vers cette date, des unités du corps de la Drina ont bombardé Srebrenica et attaqué des postes d’observation des Nations Unies situés dans l’enclave et tenus par des militaires néerlandais. L’attaque du corps de la Drina contre l’enclave de Srebrenica, et notamment les bombardements, se sont poursuivis jusqu’au 11 juillet  1995, date à laquelle des éléments des Loups de la Drina, de la brigade de Zvornik , de la brigade de Bratunac, du 10e détachement de sabotage et d’autres unités de la VRS ont pénétré dans Srebrenica.

26. Dans les quelques jours qui ont suivi cette attaque contre Srebrenica, les forces de la VRS ont capturé, détenu, sommairement exécuté et enterré plus de 7 000 hommes et garçons musulmans de Bosnie de l’enclave de Srebrenica, et en ont expulsé par la force les femmes et enfants musulmans de Bosnie. Les détails de ces événements et le rôle joué par les accusés sont exposés dans les paragraphes ci-après.

RESPONSABILITÉ PÉNALE INDIVIDUELLE

Responsabilité pénale directe

27. En vertu de l’article 7 1) du Statut, VIDOJE BLAGOJEVIC, DRAGAN OBRENOVIC , MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC sont individuellement responsables des crimes qui leur sont reprochés dans le présent acte d’accusation conjoint modifié . VIDOJE BLAGOJEVIC, DRAGAN OBRENOVIC, MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC ont commis, planifié, incité à commettre, ordonné ou de toute autre manière aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter les crimes reprochés . Par le terme « commettre » utilisé dans le présent acte d’accusation conjoint modifié, le Procureur n’entend pas suggérer que les accusés ont nécessairement perpétré matériellement et personnellement les crimes qui leur sont imputés. La « commission  » de ces crimes peut leur être imputée en raison de leur participation à l’entreprise criminelle commune.

28. En vertu de l’article 7 3) du Statut du Tribunal, VIDOJE BLAGOJEVIC est également pénalement responsable, en sa qualité de supérieur hiérarchique, des actes commis par ses subordonnés s’il savait ou avait des raisons de savoir que ceux-ci s’apprêtaient à commettre ces actes ou l’avaient fait et s’il n’a pas pris les mesures nécessaires et raisonnables pour les en empêcher ou les en punir.

29. Concernant les périodes où il était chef en second, chef par intérim ou chef , DRAGAN OBRENOVIC est pénalement responsable du fait de ses subordonnés aux termes de l’article 7 3) du Statut du Tribunal, s’il savait ou avait des raisons de savoir que ceux-ci s’apprêtaient à commettre des actes criminels ou l’avaient fait et s’il n’a pas pris les mesures nécessaires et raisonnables pour les en empêcher ou les en punir.

Entreprise criminelle commune

30. VIDOJE BLAGOJEVIC, DRAGAN OBRENOVIC, MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC, avec d’autres officiers et unités de la VRS et du MUP identifiés dans le présent acte d’accusation conjoint modifié, ont appartenu et sciemment participé à une entreprise criminelle commune dont le dessein commun était : le transfert forcé des femmes et des enfants de l’enclave de Srebrenica vers Kladanj les 12 et 13 juillet 1995, et, du 12 au 19 juillet 1995 environ, la capture, la détention, l’exécution sommaire par des pelotons d’exécution, l’ensevelissement et le réensevelissement des cadavres de milliers d’hommes et de garçons musulmans de Bosnie de l’enclave de Srebrenica, âgés de 16 à 60 ans. Le dernier enterrement connu de victimes de Srebrenica a eu lieu aux alentours du 19 juillet 1995 à Glogova, même si, par la suite, certaines ont été déterrées pour être enterrées ailleurs. Le plan initial prévoyait l’exécution sommaire de plus de 1 000 hommes et garçons musulmans de Bosnie , âgés de 16 à 60 ans, qui avaient été séparés du groupe de Musulmans de Bosnie à Potocari les 12 et 13 juillet. Le 12 juillet, il a été décidé de ne pas s’en tenir là et de procéder à l’exécution sommaire de plus de 6 000 hommes et garçons, âgés de 16 à 60 ans, pris dans la colonne d’hommes musulmans de Bosnie fuyant l’enclave de Srebrenica entre le 12 et le 19 juillet 1995 environ. La plupart d’entre eux ont été capturés le 13 juillet 1995 sur la route reliant Bratunac à Milici. Si l’entreprise criminelle commune envisageait des exécutions organisées et systématiques, VIDOJE BLAGOJEVIC, DRAGAN OBRENOVIC, MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC pouvaient prévoir que des forces de la VRS et du MUP se rendraient coupables d’actes criminels opportunistes, comme ceux décrits dans le présent acte d’accusation conjoint modifié, pendant et après la mise en œuvre de l’entreprise. Des forces de la VRS et du MUP ont commis de tels actes du 12 juillet au 1er novembre 1995. La mise en œuvre de cette entreprise criminelle commune s’est soldée par l’exécution sommaire d’environ 7 000 hommes et garçons musulmans de Bosnie de l’enclave de Srebrenica .

31. VIDOJE BLAGOJEVIC, DRAGAN OBRENOVIC, MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC étaient animé de l’intention criminelle et de l’état d’esprit requis pour la commission de chacun des crimes reprochés dans le présent acte d’accusation conjoint modifié, et leurs actes ont amplement aidé et facilité la perpétration de ces crimes. La participation des accusés à l’entreprise criminelle commune et les actes et responsabilités spécifiques décrits dans le présent acte d’accusation conjoint modifié remplissent les conditions nécessaires pour conclure qu’en vertu de l’article 7 1) du Statut, VIDOJE BLAGOJEVIC, DRAGAN OBRENOVIC, MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC ont « commis », « planifié », « incité à commettre », « ordonné » ou de toute autre manière « aidé et encouragé » un génocide ou la complicité dans le génocide, des crimes contre l’humanité (assassinat, persécutions , transfert forcé, et actes inhumains), et des violations des lois ou coutumes de la guerre (meurtre). Les actes et responsabilités spécifiques de VIDOJE BLAGOJEVIC , DRAGAN OBRENOVIC, MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC dans le cadre de l’entreprise criminelle commune sont décrits aux paragraphes 30, 35, 36, 39 et 40 à 51 du présent acte d’accusation conjoint modifié. En outre, VIDOJE BLAGOJEVIC et DRAGAN OBRENOVIC savaient ou avaient des raisons de savoir que leurs subordonnés participeraient ou avaient participé à ces actes criminels , et ils n’ont pas pris les mesures nécessaires et raisonnables pour les en empêcher ou les en punir.

32. L’entreprise criminelle commune, à laquelle VIDOJE BLAGOJEVIC, DRAGAN OBRENOVIC, MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC ont pris part et dont ils étaient les protagonistes, a été conçue et mise au point par le général Ratko Mladic et d’autres personnes les 11 et 12 juillet 1995, et dirigée et exécutée par des forces de la VRS et du MUP durant la période couverte par le présent acte d’accusation conjoint modifié et avec les moyens qui y sont décrits.

33. Ont participé à cette entreprise criminelle commune : le général Ratko Mladic , chef de la VRS ; le général Milenko Zivanovic, chef du corps de la Drina jusqu’au 13 juillet 1995 vers 20 heures environ ; le général Radislav Krstic, chef d’état -major/chef en second jusqu’au 13 juillet 1995 vers 20 heures environ, puis chef du corps de la Drina ; le colonel Ljubisa Beara, chef de la sécurité à l’état-major principal de la VRS ; le colonel Vujadin Popovic, chef adjoint en charge de la sécurité du Corps de la Drina ; VIDOJE BLAGOJEVIC, chef de la brigade de Bratunac  ; le colonel Vinko Pandurevic, chef de la brigade de Zvornik ; DRAGAN OBRENOVIC , chef en second et chef d’état-major de la brigade de Zvornik ; MOMIR NIKOLIC , chef adjoint en charge de la sécurité et du renseignement de la brigade de Bratunac ; DRAGAN JOKIC, chef du génie de la brigade de Zvornik ; ainsi que d’autres individus et unités de l’armée et de la police comprenant, sans s’y limiter , les unités suivantes :

Unités du corps de la Drina

Éléments de la brigade de Bratunac
Éléments de la brigade de Zvornik
Éléments de la brigade de Vlasenica
Éléments du 5e bataillon du génie

Unités de l’état-major principal

Éléments du 10e détachement de sabotage
Éléments du 65e régiment de protection

Unités du MUP

Éléments de la « police spéciale » de la Republika Srpska
Éléments de la police municipale de Bratunac
Éléments de la police municipale de Milici
Éléments de la police municipale de Zvornik

Le 11 juillet 1995, quatre unités du Ministère de l’intérieur ont été placées sous le commandement de la VRS.

En sa qualité de chef adjoint en charge de la sécurité et du renseignement de la brigade de Bratunac, MOMIR NIKOLIC était directement subordonné à VIDOJE BLAGOJEVIC, chef de la brigade de Bratunac, lui-même directement subordonné au général Radislav Krstic, chef du corps de la Drina. En sa qualité de chef du génie de la brigade de Zvornik, DRAGAN JOKIC était directement subordonné à DRAGAN OBRENOVIC, lequel était, en sa qualité de chef d’état-major et de chef en second de la Brigade de Zvornik, directement subordonné au colonel Vinko Pandurevic, chef de la brigade de Zvornik, et au général Krstic. Le détail de la structure militaire de la VRS est donné à l’Annexe A au présent acte d’accusation conjoint modifié.

34. Les allégations relatives à la responsabilité pénale individuelle, y compris celles formulées dans les paragraphes portant sur l’entreprise criminelle commune , sont reprises et intégrées dans chacun des chefs d’accusation exposés ci-après .

CHEFS D’ACCUSATION

CHEFS 1A et 1B
(Génocide)

(Complicité dans le génocide)

Par les actes et omissions décrits aux paragraphes ci-après, MOMIR NIKOLIC s’est rendu coupable de :

CHEF 1A : Génocide, sanctionné par les articles 4 3) a) et 7 1) du Statut du Tribunal,

ou, subsidiairement,

CHEF 1B : Complicité dans le génocide, sanctionnée par les articles 4 3)  e), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

Par les actes et omissions décrits aux paragraphes ci-après, VIDOJE BLAGOJEVIC et DRAGAN OBRENOVIC se sont rendus coupables de :

CHEF 1B : Complicité dans le génocide, sanctionnée par les articles 4 3)  e) et 7 1) du Statut du Tribunal.

35. Entre le 11 juillet et le 1er novembre 1995, VIDOJE BLAGOJEVIC, DRAGAN OBRENOVIC et MOMIR NIKOLIC, animés de l’intention de détruire une partie de la population musulmane de Bosnie en tant que groupe national, ethnique ou religieux , ont

a) tué des membres de ce groupe en procédant à des exécutions sommaires telles que décrites aux paragraphes 30, 35, 36 et 40 à 51, et
b) porté des atteintes graves à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe .

36. Étant respectivement chef de la brigade de Bratunac et chef adjoint en charge de la sécurité et du renseignement de celle-ci, VIDOJE BLAGOJEVIC et MOMIR NIKOLIC étaient responsables de tous les prisonniers capturés, détenus ou tués dans la zone de responsabilité de la brigade de Bratunac, y compris de ceux capturés dans la zone de cette brigade et ultérieurement transportés, à leur connaissance , dans la zone de la brigade de Zvornik pour y être détenus et exécutés. En ses qualités de chef en second et de chef par intérim de la brigade de Zvornik, ainsi qu’il est précisé dans le présent acte d’accusation conjoint modifié, DRAGAN OBRENOVIC était responsable de tous les prisonniers capturés, détenus ou tués dans la zone de la brigade de Zvornik, y compris de ceux capturés dans la zone de la brigade de Bratunac et ultérieurement tués dans la zone de la brigade de Zvornik . En sa qualité de chef d’état-major, ainsi qu’il est précisé dans le présent acte d’accusation conjoint modifié, DRAGAN OBRENOVIC était chargé de faciliter la planification, le contrôle, la supervision, l’organisation et l’exécution de l’ensemble de l’opération. DRAGAN JOKIC, en sa qualité de chef du génie de la brigade de Zvornik, a participé à la planification, à la supervision, à l’organisation et à l’exécution des enterrements qui s’ensuivaient. En tant qu’officier de permanence de la brigade de Zvornik les 14 et 15 juillet 1995, DRAGAN JOKIC a participé à la coordination des communications entre les officiers et les commandements de la VRS, au sujet du transport, de la détention, de l’exécution et de l’enterrement des Musulmans de Srebrenica, et a rédigé ou transmis à ses supérieurs des rapports et des mises à jour concernant l’évolution de l’opération.

37. Immédiatement après la chute de Srebrenica le 11 juillet 1995, des officiers de haut rang de la VRS, parmi lesquels Ratko Mladic et Radislav Krstic, ont inspecté la ville. À cette époque, Ratko Mladic a annoncé que « le moment [étai]t enfin venu pour [eux] de prendre leur revanche sur les Turcs dans cette région ».

38. Le 11 juillet 1995, plusieurs milliers de femmes, d’enfants et d’hommes musulmans de Bosnie ont fui vers la base des Nations Unies à Potocari, et ont demandé au bataillon néerlandais d’assurer leur protection. Pendant ce temps, environ 15 000 hommes musulmans de Bosnie de l’enclave, accompagnés de quelques femmes et enfants, se sont réunis dans les villages de Susnjari et Jaglici dans la soirée du 11 juillet 1995 et, formant une gigantesque colonne, ont fui en direction de Tuzla à travers bois. Ce groupe était composé pour environ un tiers de personnels militaires musulmans de Bosnie armés et, pour le reste, de civils et de personnels militaires sans armes.

39. Dans la soirée du 11 juillet et dans la matinée du 12 juillet, Ratko Mladic et d’autres officiers de la VRS ont tenu trois réunions cruciales à l’hôtel Fontana à Bratunac pour décider du sort des réfugiés qui avaient fui vers Potocari. Lors de la première réunion, le 11 juillet vers 20 heures, Ratko Mladic a rencontré d’autres membres de la VRS, dont MOMIR NIKOLIC, ainsi que le chef du bataillon néerlandais , qu’il a cherché à intimider en proférant des menaces. La deuxième réunion, convoquée par Ratko Mladic, Radislav Krstic, MOMIR NIKOLIC et d’autres membres de la VRS, s’est déroulée le 11 juillet, vers 23 heures, en présence de membres du commandement du bataillon néerlandais et de représentants des réfugiés musulmans de Bosnie à Potocari. Lors de cette réunion, Ratko Mladic a averti les représentants des Musulmans de Bosnie que leur peuple avait le choix entre « survivre ou disparaître ». Lors de la troisième réunion, convoquée le 12 juillet 1995 vers 10 heures par Ratko Mladic , Radislav Krstic et d’autres représentants de la VRS et des civils serbes de Bosnie , et à laquelle assistaient des officiers du bataillon néerlandais et des représentants des réfugiés musulmans de Bosnie, Ratko Mladic a expliqué qu’il superviserait l’ « évacuation » des réfugiés de Potocari et qu’il voulait voir tous les hommes musulmans de Bosnie en âge de porter les armes pour s’assurer qu’il n’y ait pas parmi eux d’éventuels criminels de guerre. C’est dans la nuit du 11 au 12 juillet 1995, lors des réunions à l’hôtel Fontana, que le plan visant à transférer la population civile réfugiée de Potocari a été élaboré. Par sa présence à ces réunions et ses actions ultérieures à Potocari, MOMIR NIKOLIC a pris part à la planification et à la mise en œuvre du transfert forcé de civils de Potocari.

40. Les réfugiés musulmans de Bosnie sont restés du 11 au 13 juillet 1995 à Potocari et aux alentours, et, pendant tout ce temps, les membres de la VRS et du MUP se sont employés à les terroriser. Les hommes ont été séparés du reste des réfugiés en présence de MOMIR NIKOLIC.

41. Le 12 juillet 1995 ou vers cette date, en présence de Ratko Mladic, de Radislav Krstic, de MOMIR NIKOLIC et d’autres individus, environ 50 à 60 autocars et camions sont arrivés près de la base militaire des Nations Unies à Potocari. Peu après l’arrivée de ces véhicules, le transfert forcé de femmes et d’enfants musulmans de Bosnie a commencé. Alors que les femmes, enfants et hommes musulmans de Bosnie montaient à bord des autocars et des camions, des soldats de la VRS et /ou du MUP ont séparé plus de 1 000 hommes des femmes et des enfants, et les ont conduits dans des centres de détention temporaires à Bratunac les 12 et 13 juillet  1995. MOMIR NIKOLIC était présent à Potocari dans l’exercice de ses fonctions à cette époque, et il a participé à la séparation et au transport de la population musulmane de Bosnie.

42. À partir du 12 juillet 1995 environ et durant toute la période où ces exécutions ont été organisées, les biens et effets personnels des prisonniers musulmans de Bosnie de sexe masculin, notamment leurs papiers d’identité et objets de valeur, ont été confisqués et détruits par des membres de la VRS et du MUP. La confiscation et la destruction de ces biens et effets personnels ont eu lieu alors que sous la direction et le commandement de VIDOJE BLAGOJEVIC, MOMIR NIKOLIC était présent à Potocari, en divers lieux de capture et de rassemblement le long de la route reliant Bratunac à Milici, ainsi qu’en divers lieux d’exécution. En outre, les individus détenus à Potocari et Bratunac n’ont reçu ni nourriture, ni soins médicaux, ni eau en quantité suffisante pendant la période de détention qui a précédé leur exécution.

Meurtres opportunistes commis à Potocari

43. Des officiers et soldats de la VRS et du MUP ont commis un certain nombre de meurtres opportunistes de Musulmans de Bosnie à Potocari les 12 et 13 juillet 1995 . Ces meurtres opportunistes étaient la conséquence naturelle et prévisible de l’entreprise criminelle commune en cours. Ces Musulmans de Bosnie avaient été faits prisonniers à Potocari avant d’être tués. MOMIR NIKOLIC a personnellement supervisé le traitement des prisonniers à Potocari et était présent dans l’exercice de ses fonctions à Potocari à cette période, avec des membres du corps de la Drina, de la brigade de Bratunac, et du MUP. Les meurtres opportunistes commis à Potocari se sont traduits de la manière suivante :

a) Le 12 juillet, les corps de neuf hommes musulmans de Bosnie qui avaient été abattus par balle ont été retrouvés près de la base des Nations Unies, dans les bois longeant la route principale du côté de Budak.

b) Le 12 juillet, les corps de neuf ou dix hommes musulmans de Bosnie ont été retrouvés à environ sept cents mètres de la base des Nations Unies, dans un ruisseau derrière la « maison blanche ».

c) Le matin du 13 juillet, les corps de six Musulmanes de Bosnie et de cinq Musulmans de Bosnie ont été retrouvés dans un ruisseau près de la base des Nations Unies à Potocari.

d) Le 13 juillet, un homme musulman de Bosnie a été emmené derrière un bâtiment près de la « maison blanche » et sommairement exécuté.

44. Du 12 au 17 juillet 1995 ou vers cette date, environ 6 000 hommes qui faisaient partie de la colonne des Musulmans de Bosnie fuyant l’enclave de Srebrenica ont été capturés par les forces de la VRS et du MUP ou se sont rendus. MOMIR NIKOLIC était présent, le 13 juillet 1995, le long de la route reliant Bratunac à Milici , et il a participé à la capture et la détention de Musulmans de Bosnie dans cette zone. À l’exception de ceux directement emmenés vers les lieux d’exécution, les prisonniers capturés le 13 juillet 1995 dans la colonne en fuite ont été conduits , comme les hommes séparés du reste du groupe à Potocari, dans des centres de détention temporaires situés à Bratunac et ses environs.

Meurtres opportunistes commis à Bratunac

45. Des officiers et des soldats de la VRS et du MUP ont commis un certain nombre de meurtres opportunistes de prisonniers musulmans de Bosnie temporairement détenus à Bratunac dans des écoles, des bâtiments et des véhicules garés le long de la route . Ces meurtres opportunistes étaient la conséquence naturelle et prévisible de l’entreprise criminelle commune. Ces meurtres opportunistes ont eu lieu entre les 12 et 15 juillet  1995 environ, en divers lieux de Bratunac :

a) Le 12 juillet, à partir d’environ 22 heures, et le 13 juillet, plus de 50 hommes musulmans de Bosnie ont été emmenés d’un hangar derrière l’école primaire Vuk Karadzic , à Bratunac, et ont été sommairement exécutés.

b) Le 13 juillet, vers 21 h 30, dans la ville de Bratunac, deux hommes musulmans de Bosnie qui se trouvaient dans un camion ont été conduits dans un garage proche où ils ont été sommairement exécutés.

c) Le 13 juillet, dans la soirée, un musulman de Bosnie, handicapé mental, a été emmené d’un autocar garé en face de l’école primaire Vuk Karadzic, à Bratunac, et a été sommairement exécuté.

d) Le 13 juillet, pendant la journée, un homme musulman de Bosnie a été frappé à la tête avec un fusil à l’école Vuk Karadzic, puis il a été emmené et sommairement exécuté. Bon nombre d’autres hommes musulmans de Bosnie détenus dans l’école primaire Vuk Karadzic ont également été sommairement exécutés dans la journée du 13 juillet .

e) Dans la soirée du 13 juillet, quatre jeunes hommes musulmans de Bosnie ont été emmenés des environs de l’école Vuk Karadzic et ont été sommairement exécutés.

f) Entre le 13 juillet au soir et le 15 juillet au matin, des hommes musulmans de Bosnie ont souvent et régulièrement été emmenés de l’école primaire Vuk Karadzic et sommairement exécutés.

Les prisonniers musulmans de Bosnie qui ont survécu à leur détention temporaire à Bratunac ont été transportés dans la zone de Zvornik entre les 13 et 15 juillet  1995 pour y être détenus puis éxécutés. Sous la direction et le commandement de VIDOJE BLAGOJEVIC, et sous la supervision de MOMIR NIKOLIC, des membres de la compagnie de police militaire de la brigade de Bratunac ont participé à la garde des prisonniers et à leur escorte vers des lieux de détention et d’exécution situés dans la zone de responsabilité de la brigade de Zvornik. MOMIR NIKOLIC a dirigé et coordonné les activités de la compagnie de police militaire de la brigade de Zvornik relatives au transport, à la détention et à l’exécution des prisonniers, en exécution des ordres du chef de la brigade, VIDOJE BLAGOJEVIC. En sa qualité de chef en second de la brigade de Zvornik, DRAGAN OBRENOVIC était chargé de trouver des lieux de détention et d’exécution, ainsi que de préparer la prise en charge de milliers de prisonniers dans la zone de responsabilité de sa brigade.

Exécutions massives et organisées

46. Pendant une période de sept jours, du 12 juillet au 19 juillet 1995 ou vers cette date, des forces de la VRS et du MUP ont pris part à l’opération planifiée et organisée consistant à exécuter en masse des milliers d’hommes musulmans de Bosnie capturés dans l’enclave de Srebrenica et à ensevelir leurs cadravres. Cette opération meurtrière organisée à grande échelle s’est déroulée en plusieurs lieux de Srebrenica , Bratunac, Zvornik et alentours, dont :

46.1 Potocari : Le 12 juillet 1995, entre l’usine de zinc et la maison d’ « Alija », des soldats de la VRS et/ou du MUP ont sommairement exécuté par décapitation quatre-vingts à cent hommes musulmans de Bosnie. Les corps ont été emportés en camion . Le 12 juillet 1995, MOMIR NIKOLIC se trouvait à Potocari, non loin de la maison d’Alija.

46.2 Rivière Jadar : Le 13 juillet 1995 vers 11 heures, un petit groupe de soldats comprenant au moins un policier de Bratunac (MUP de Bratunac), agissant de concert avec des individus et unités de la VRS et/ou du MUP, a capturé environ 16 hommes musulmans de Bosnie appartenant à la colonne d’hommes fuyant l’enclave de Srebrenica, les a conduits de Konjevic Polje jusqu’à un lieu isolé sur les rives de la Jadar et a sommairement exécuté 15 d’entre eux. Un homme qui n’a été que blessé a réussi à s’enfuir.

46.3 Vallée de la Cerska : Le 13 juillet 1995, en début d’après-midi, des soldats de la VRS et/ou du MUP ont transporté environ 150 hommes musulmans de Bosnie jusqu’en un lieu situé le long d’une piste de la vallée de la Cerska à approximativement trois (3) kilomètres de Konjevic Polje, les ont sommairement exécutés et les ont ensevelis au moyen d’engins lourds.

46.4 Entrepôt de Kravica : Le 13 juillet 1995, en début de soirée, des soldats de la VRS et/ou du MUP ont sommairement exécuté plus de 1 000 hommes musulmans de Bosnie détenus dans un vaste entrepôt du village de Kravica. Les soldats ont utilisé des armes automatiques, des grenades à main et d’autres armes pour tuer les Musulmans de Bosnie à l’intérieur de l’entrepôt. Entre le 14 et le 16 juillet 1995, des engins lourds ont été amenés et utilisés pour enlever les corps des victimes et les jeter dans deux grandes fosses communes situées dans les villages voisins de Glogova et Ravnice. Sous la direction de DRAGAN JOKIC, des hommes de la compagnie du génie de la brigade de Zvornik ont participé à l’enlèvement et à l’ensevelissement des corps.

46.5 Tisca : Pendant toute la journée du 13 juillet 1995, des soldats de la VRS et/ou du MUP ont transporté au village de Luke, près de Tisca, des femmes et des enfants musulmans de Bosnie, qui avaient été séparés à Potocari des hommes de leur famille. Des soldats de la VRS, appartenant à la brigade de Vlasenica du corps de la Drina, ont identifié et retenu à Tisca certains hommes et garçons musulmans de Bosnie restés dans le groupe, ainsi que certaines femmes, alors que le reste du groupe était transféré de force en territoire contrôlé par les Musulmans de Bosnie . Des soldats de la VRS ont forcé les hommes et les femmes musulmans de Bosnie retenus à marcher vers une école proche, où ils les ont insultés et maltraités pendant toute la journée du 13 juillet 1995. Le soir du 13 juillet et le 14 juillet 1995 ou vers ces dates, des soldats de la VRS et/ou du MUP ont fait monter 25 hommes musulmans de Bosnie se trouvant à l’école à bord d’un camion pour les emmener non loin de là, dans un champ isolé, où ils les ont sommairement exécutés à l’arme automatique .

46.6 Orahovac (près de Lazete) : Le 13 juillet dans la soirée et pendant la journée du 14 juillet 1995, des personnels de la compagnie de police militaire de la brigade de Bratunac, agissant de concert avec d’autres individus et unités , ont transporté des centaines d’hommes musulmans de Bosnie de Bratunac et de ses environs à l’école de Grbavci, dans le village d’Orahovac. Ils avaient été capturés dans la colonne d’hommes fuyant l’enclave de Srebrenica ou séparés des autres à Potocari. Le 14 juillet 1995, des personnels de la VRS, dont des membres de la compagnie de police militaire de la brigade de Zvornik, placés sous la direction et le commandement de DRAGAN OBRENOVIC, ont gardé les hommes musulmans de Bosnie détenus dans l’école de Grbavci et leur ont bandé les yeux. Le 14 juillet 1995, en début d’après -midi, des personnels de la VRS ont conduit ces hommes musulmans de Bosnie de l’école de Grbavci dans un champ voisin où des soldats comprenant des membres du 4e bataillon de la brigade de Zvornik, placés sous la direction et le commandement de DRAGAN OBRENOVIC, ont ordonné aux prisonniers de descendre des camions et les ont sommairement exécutés à l’arme automatique. Environ 1 000 hommes musulmans de Bosnie ont été tués. Les 14 et 15 juillet 1995, des membres de la compagnie du génie de la brigade de Zvornik ont, sous la direction de DRAGAN JOKIC, utilisé de l’équipement lourd pour enterrer les victimes dans des fosses communes creusées sur place, alors que les exécutions se poursuivaient. Dans la soirée du 14 juillet, les phares des engins du génie éclairaient le lieu des exécutions et des inhumations durant les opérations.

46.7 L’école de Petkovci : Le 14 juillet 1995, des personnels de la VRS et /ou du MUP ont transporté environ 1 000 hommes musulmans de Bosnie de centres de détention de Bratunac et de ses alentours à l’école de Petkovci. Ils avaient été pris dans la colonne d’hommes fuyant l’enclave de Srebrenica ou séparés des autres à Potocari. Le 14 juillet et au cours des premières heures du 15 juillet 1995, des personnels de la VRS et/ou du MUP ont frappé, battu, agressé et abattu à l’arme automatique des hommes musulmans de Bosnie détenus dans cette école. En sa qualité de chef en second de la brigade de Zvornik suppléant son chef en son absence, DRAGAN OBRENOVIC exerçait les fonctions de direction, de commandement et de coordination associées à la détention de prisonniers à l’école de Petkovci.

46.8 Le « barrage » près de Petkovci : Le 14 juillet 1995 au soir et le 15  juillet 1995 au petit matin ou vers ces dates, des personnels de la VRS de la brigade de Zvornik placés sous la direction et le commandement de DRAGAN OBRENOVIC , et notamment des chauffeurs et des camions du 6e bataillon d’infanterie de la brigade de Zvornik, ont transporté les survivants d’un groupe qui comptait environ 1 000 hommes musulmans de Bosnie, de l’école à Petkovci vers une zone située en aval du barrage près de Petkovci. Des soldats de la VRS ou du MUP les ont réunis en aval du barrage et les ont sommairement exécutés à l’arme automatique. Au matin du 15 juillet 1995, des personnels de la VRS de la compagnie du génie de la brigade de Zvornik, agissant sous la direction de DRAGAN JOKIC et de concert avec d’autres individus et unités, ont utilisé des pelleteuses et d’autres équipements lourds pour enterrer les victimes, alors que les exécutions se poursuivaient.

46.9 L’école de Pilica : Les 14 et 15 juillet 1995 ou vers ces dates, des personnels de la VRS et/ou du MUP ont transporté environ 1 200 hommes musulmans de Bosnie de centres de détention de Bratunac à l’école de Pilica. Ils avaient été pris dans la colonne d’hommes fuyant l’enclave de Srebrenica ou séparés des autres à Potocari. Les 14 et 15 juillet 1995 ou vers ces dates, des personnels militaires de la VRS ont sommairement exécuté à l’arme automatique un grand nombre des hommes musulmans de Bosnie qui étaient arrivés ou détenus dans cette école. Le 17 juillet  1995, des personnels de la VRS du bataillon « R » de la brigade de Zvornik ont, sous la direction de DRAGAN OBRENOVIC agissant en sa qualité de chef d’état -major de la brigade de Zvornik, enlevé les cadavres des victimes de l’école de Pilica et les ont transportés à la ferme militaire de Branjevo. Le 17 juillet 1995 , la compagnie du génie de la brigade de Zvornik a, sous la direction de DRAGAN JOKIC, enterré les victimes des exécutions de l’école de Pilica dans une fosse commune creusée à la ferme militaire de Branjevo.

46.10 Ferme militaire de Branjevo : Au matin du 16 juillet 1995, des personnels de la VRS ont transporté en autocar les survivants d’un groupe d’environ 1 200 hommes musulmans de Bosnie de l’école de Pilica à la ferme militaire de Branjevo. Ils avaient été pris dans la colonne d’hommes fuyant l’enclave de Srebrenica ou séparés des autres à Potocari. À leur arrivée à la ferme, ils ont été sommairement exécutés à l’arme automatique par des membres du 10e détachement de sabotage et de la brigade de Bratunac, placés sous la direction et le commandement de VIDOJE BLAGOJEVIC et agissant de concert avec d’autres individus et unités. Le 17 juillet 1995 , agissant de concert avec d’autres individus et unités, des personnels de la VRS de la compagnie du génie de la brigade de Zvornik ont, sous la direction de DRAGAN OBRENOVIC agissant en sa qualité de chef d’état-major de la brigade de Zvornik et de DRAGAN JOKIC, enterré des centaines de victimes dans une fosse commune proche.

46.11 Centre culturel de Pilica : Le 16 juillet 1995, des personnels de la VRS de la brigade de Bratunac, placés sous la direction et le commandement de VIDOJE BLAGOJEVIC, se sont rendus au village de Pilica tout proche où, de concert avec d’autres personnels de la VRS et/ou du MUP, ils ont sommairement exécuté à l’arme automatique près de 500 hommes à l’intérieur du centre culturel. Ils avaient été pris dans la colonne d’hommes fuyant l’enclave de Srebrenica ou séparés des autres à Potocari. Le 17 juillet 1995, des personnels de la VRS du bataillon « R  » de la brigade de Zvornik ont, sous la direction de DRAGAN OBRENOVIC agissant en sa qualité de chef d’état-major de la brigade de Zvornik, enlevé les cadavres des victimes du centre culturel de Pilica et les ont transportés à la ferme militaire de Branjevo. Le 17 juillet 1995, la compagnie du génie de la brigade de Zvornik a, sous la direction de DRAGAN OBRENOVIC agissant en sa qualité de chef d’état-major de la brigade de Zvornik et de DRAGAN JOKIC, enterré les victimes des exécutions du centre culturel de Pilica dans une fosse commune creusée à la ferme militaire de Branjevo.

46.12 Kozluk : Le 16 juillet 1995 ou avant cette date, des soldats de la VRS et/ou du MUP, agissant de concert avec d’autres individus et unités, ont transporté environ 500 hommes musulmans de Bosnie en un lieu isolé près de Kozluk, dans la zone de responsabilité de la brigade de Zvornik, où ils les ont sommairement exécutés à l’arme automatique. Ils avaient été pris dans la colonne d’hommes fuyant l’enclave de Srebrenica ou séparés des autres à Potocari. Le 16 juillet 1995, agissant de concert avec d’autres individus et unités, des soldats de la VRS de la compagnie du génie de la brigade de Zvornik ont, sous la direction de DRAGAN OBRENOVIC agissant en sa qualité de chef d’état-major de la brigade de Zvornik et de DRAGAN JOKIC, enterré les victimes des exécutions dans une fosse commune proche .

Meurtres opportunistes commis dans les zones des brigades de Bratunac et Zvornik

47. Pendant et après la campagne d’exécutions organisées, les meurtres opportunistes d’hommes musulmans de Bosnie capturés dans l’enclave de Srebrenica, meurtres imputables aux personnels de la VRS et du MUP, n’ont pas cessé jusqu’au 1er novembre 1995 environ . Ces meurtres opportunistes, qui étaient une conséquence naturelle et prévisible de l’entreprise criminelle commune à laquelle VIDOJE BLAGOJEVIC, DRAGAN OBRENOVIC, DRAGAN JOKIC et MOMIR NIKOLIC ont pris part et dont ils étaient les protagonistes, ont été commis dans les zones de responsabilité des brigades de Bratunac et de Zvornik. Parmi les meurtres opportunistes commis dans les zones des brigades de Zvornik et de Bratunac :

Zone de la brigade de Bratunac

47.1 Nova Kasaba : À une date comprise entre le 13 et le 27 juillet 1995, des personnels de la VRS et/ou du MUP ont capturé et exécuté 33 hommes musulmans de Bosnie qui faisaient partie de la colonne fuyant l’enclave de Srebrenica. Au moins 26 des victimes ont été sommairement exécutées après avoir été placées dans deux fosses creusées peu auparavant. Parmi les 33 hommes, 27 avaient les mains liées dans le dos lorsqu’ils ont été exécutés. Ces fosses se trouvaient près du village de Nova Kasaba.

47.2 Konjevic Polje : À une date comprise entre le 13 et le 27 juillet 1995 , des soldats de la VRS et/ou du MUP ont capturé deux hommes musulmans de Bosnie de la colonne, les ont placés dans un trou près du village de Konjevic Polje et les ont sommairement exécutés, puis enterrés.

47.3 Glogova : À une date comprise entre le 17 et le 27 juillet 1995, des soldats de la VRS et/ou du MUP ont capturé 12 hommes musulmans de Bosnie de la colonne , les ont attachés deux par deux, ont tué chacun d’eux d’une balle dans la tête et les ont enterrés dans une fosse commune située près du village de Glogova.

47.4 Marché de Kravica : Dans la nuit du 13 au 14 juillet, près d’un supermarché de Kravica, un soldat de la VRS ou du MUP a placé le canon de son fusil dans la bouche d’un prisonnier musulman de Bosnie et l’a sommairement exécuté. Dans le même temps, des soldats de la VRS et/ou du MUP ont battu, frappé à coups de crosse de fusil et sommairement exécuté des prisonniers musulmans de Bosnie qui étaient détenus dans des camions garés près du supermarché. Tous ces prisonniers avaient été pris dans la colonne d’hommes fuyant l’enclave de Srebrenica ou séparés des autres à Potocari.

47.5 Brigade de Bratunac : À une date comprise entre le 12 juillet et le 1er novembre 1995, six hommes musulmans de Bosnie originaires de Srebrenica ont été capturés par les forces du MUP, puis livrés aux membres de la sécurité de la brigade de Bratunac, placés sous la direction et le commandement de VIDOJE BLAGOJEVIC et sous la direction de MOMIR NIKOLIC, qui les ont interrogés ; ces hommes ont ensuite été sommairement exécutés par des inconnus. L’un de ces hommes (Resid Sinanovic) avait été capturé par des soldats du MUP de la Republika Srpska (RS) et livré personnellement à MOMIR NIKOLIC, avant d’être exécuté. Ces six hommes musulmans de Bosnie sont :

a) Zazif AVDIC, fils de Ramo, date de naissance : 15 septembre 1954.
b) Munib DEDIC, fils d’Emin, date de naissance : 26 avril 1956.
c) Aziz HUSIC, fils d’Osman, date de naissance : 8 avril 1966.
d) Resid SINANOVIC, fils de Rahman, date de naissance : 15 octobre 1949.
e) Mujo HUSIC, fils d’Osman, date de naissance : 27 août 1961.
f) Hasib IBISEVIC, fils d’Ibrahim, date de naissance : 27 février 1964.

Zone de la brigade de Zvornik

47.6 Nezuk : Le 19 juillet 1995, des personnels de la VRS appartenant à la 16e brigade du 1er corps de Krajina, laquelle avait été rattachée au commandement de la brigade de Zvornik, ont, sous la direction de DRAGAN OBRENOVIC agissant en sa qualité de chef d’état-major et directement sous son autorité, capturé une dizaine d’hommes musulmans de Bosnie de la colonne et les ont sommairement exécutés à l’arme automatique en un lieu situé près de Nezuk.

47.7 Brigade de Zvornik : Le 19 juillet 1995 ou vers cette date, les quatre hommes musulmans de Bosnie cités ci-dessous ont été capturés dans la colonne par les forces de la VRS et/ou du MUP, dans la zone de responsabilité de la brigade de Zvornik, et ils ont été livrés aux membres de la sécurité de la brigade de Zvornik , placés sous la direction de DRAGAN OBRENOVIC agissant en sa qualité de chef d’état-major de la brigade :

a) Sakib KIVIRIC, fils de Salko, date de naissance : 24 juin 1964.
b) Emin MUSTAFIC, fils de Rifet, date de naissance : 7 octobre 1969.
c) Fuad ÐJOZIC, fils de Senusija, date de naissance : 2 mai 1965.
d) Almir HALILOVIC, fils de Suljo, date de naissance : 25 août 1980.

Le 22 juillet 1995 ou vers cette date, ces hommes ont été interrogés par des membres de la brigade de Zvornik et sommairement exécutés un peu plus tard par des personnes inconnues agissant de concert avec les membres de la sécurité de la brigade de Zvornik .

47.8 Brigade de Zvornik : Le 20 août 1995, Dzemail SALIHOVIC, un Musulman de Bosnie originaire de Srebrenica, a été capturé par des hommes de la brigade de Zvornik près de Kalesija alors qu’il essayait de gagner le territoire contrôlé par les Musulmans. M. Salihovic a été interrogé par des membres de la brigade de Zvornik placés sous la direction de DRAGAN OBRENOVIC agissant en sa qualité de chef d’état-major de la brigade, et il a été sommairement exécuté un peu plus tard par des inconnus.

48. Entre le 18 juillet et le 1er novembre environ, d’autres hommes musulmans de Bosnie de la colonne ont été capturés ou tués par des forces de la VRS et du MUP dans les zones de responsabilité des brigades de Bratunac et de Zvornik.

49. En sa qualité de chef de la brigade de Bratunac, ainsi qu’il est précisé dans le présent acte d’accusation conjoint modifié, VIDOJE BLAGOJEVIC savait ou aurait dû savoir, avant, pendant et après les meurtres et les exécutions massives commis entre le 12 juillet et le 1er novembre 1995, que ses subordonnés participeraient ou avaient participé à ces actes criminels et il n’a rien fait pour empêcher ces crimes ou punir les responsables des violences, exécutions et enterrements dans les zones de responsabilité des brigades de Bratunac et Zvornik.

50. En sa qualité de chef par intérim puis de chef de la brigade de Zvornik, ainsi qu’il est précisé dans le présent acte d’accusation conjoint modifié, DRAGAN OBRENOVIC savait ou aurait dû savoir, avant, pendant et après les meurtres et les exécutions massives commis entre le 12 juillet et le 1er novembre 1995, que ses subordonnés participeraient ou avaient participé à ces actes criminels et il n’a rien fait pour empêcher ces crimes ou punir les responsables des violences, exécutions et enterrements dans la zone de responsabilité de la brigade de Zvornik .

51. Entre le 1er août 1995 et le 1er novembre 1995 environ, des personnels de la VRS et du MUP ont participé à un effort organisé de grande ampleur visant à dissimuler les meurtres et les exécutions commis dans les zones de responsabilité des brigades de Zvornik et de Bratunac, en exhumant des cadavres de leur fosse d’origine à la ferme militaire de Branjevo, à Kozluk, au « Barrage » près de Petkovci, à Orahovac et à Glogova, pour les transférer dans des fosses secondaires en douze lieux le long de la route de Cancari (fosses contenant des cadavres de la ferme militaire de Branjevo et de Kozluk), en quatre lieux près de Liplje (fosses renfermant des cadavres du « Barrage » près de Petkovci), en sept lieux près de Hodzici (fosses contenant des cadavres d’Orahovac) et en sept lieux près de Zeleni Jadar (fosses renfermant des cadavres de Glogova). Cette opération de transfert dans des fosses secondaires était une conséquence naturelle et prévisible des exécutions et du plan initial d’ensevelissement des corps échafaudé dans le cadre de l’entreprise criminelle commune. Des hommes de la compagnie du génie de la brigade de Zvornik ont participé à cette opération de transfert des corps, sous la direction de DRAGAN JOKIC et sous la direction, le commandement et les ordres de DRAGAN OBRENOVIC. Le 16 octobre 1995, MOMIR NIKOLIC a, sous la direction et le commandement de VIDOJE BLAGOJEVIC, participé à l’exhumation et au transfert des corps des victimes des exécutions.

52. Le comportement de MOMIR NIKOLIC satisfait aux quatre conditions nécessaires pour qu’il y ait génocide, à savoir :

a) l’accusé a tué une ou plusieurs personnes,
b) ces personnes appartenaient à un groupe national, ethnique, racial ou religieux précis,
c) l’accusé avait l’intention de tuer ces personnes, et
d) l’accusé a tué ces personnes dans l’intention de détruire, en tout ou en partie , ce groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel.

Ou

53. À défaut, le comportement de MOMIR NIKOLIC présentait les trois éléments constitutifs de la complicité de génocide, à savoir :

a) l’accusé était complice d’un crime,
b) ce crime a été commis, et
c) l’accusé savait que ce crime était commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel.

54. En outre, le comportement de VIDOJE BLAGOJEVIC et DRAGAN OBRENOVIC présentait les trois éléments constitutifs de la complicité de génocide, à savoir  :

a) l’accusé était complice d’un crime,
b) ce crime a été commis, et
c) l’accusé savait que ce crime était commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel.

Et

CHEF 2
(Extermination)

Par les actes et omissions décrits aux paragraphes ci-dessus, VIDOJE BLAGOJEVIC , DRAGAN OBRENOVIC, MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC se sont rendus coupables de :

CHEF 2 : Extermination, un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ, sanctionné par les articles 5 b), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal, l’article 7 3) ne s’appliquant pas à MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC.

55. Le comportement de VIDOJE BLAGOJEVIC, DRAGAN OBRENOVIC, MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC satisfait aux quatre conditions nécessaires pour qu’il y ait extermination en tant que crime contre l’humanité, à savoir :

a) l’existence d’un conflit armé,
b) le fait qu’un acte ou une omission de l’accusé ou d’un subordonné a entraîné la mort de la victime dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique contre une population civile,
c) le fait que cet acte ou omission était illicite et intentionnel, et constituait une faute grave ou une négligence coupable, et
d) le fait que l’accusé était informé du contexte général dans lequel s’inscrivait son comportement.

Et

CHEFS 3 - 4
(Assassinat/meurtre)

Par les actes et omissions décrits aux paragraphes ci-dessus, VIDOJE BLAGOJEVIC , DRAGAN OBRENOVIC, MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC se sont rendus coupables de :

CHEF 3 : Assassinat, un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ, sanctionné par les articles 5 a), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal, l’article 7 3) ne s’appliquant pas à MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC.

56. Le comportement de VIDOJE BLAGOJEVIC, DRAGAN OBRENOVIC, MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC satisfait aux quatre conditions nécessaires pour qu’il y ait assassinat en tant que crime contre l’humanité, à savoir :

a) l’existence d’un conflit armé,
b) le fait que l’accusé a causé la mort d’une ou plusieurs personnes dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique contre une population civile,
c) le fait que, par son comportement, l’accusé avait l’intention de tuer ou d’infliger de graves blessures dans un mépris total de la vie humaine, et
d) le fait que l’accusé était informé du contexte général dans lequel s’inscrivait son comportement.

Et

CHEF 4 : Meurtre, une VIOLATION DES LOIS OU COUTUMES DE LA GUERRE, sanctionnée par les articles 3, 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal, l’article 7  3) ne s’appliquant pas à MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC.

57. Le comportement de VIDOJE BLAGOJEVIC, DRAGAN OBRENOVIC, MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC satisfait aux quatre conditions nécessaires pour qu’il y ait meurtre en tant que violation des lois ou coutumes de la guerre, à savoir  :

a) l’existence d’un lien entre le meurtre et un conflit armé,
b) le fait que, par son comportement, l’accusé a causé la mort d’une ou plusieurs personnes,
c) le fait que, par son comportement, l’accusé avait l’intention de tuer ou d’infliger de graves blessures dans un mépris total de la vie humaine, et
d) le fait que la ou les victime(s) étai(en)t des personnes qui ne participai(en )t pas directement aux hostilités.

Et

CHEF 5
(Persécutions)

Par les actes et omissions décrits aux paragraphes ci-dessus, VIDOJE BLAGOJEVIC , DRAGAN OBRENOVIC, MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC se sont rendus coupables de :

CHEF 5 : Persécutions pour des raisons politiques, raciales et religieuses, ayant pris la forme de meurtres, traitements cruels et inhumains, terreur infligée à la population civile, destruction de biens personnels et transfert forcé (ce dernier ne s’appliquant pas à DRAGAN OBRENOVIC et DRAGAN JOKIC), un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ sanctionné par les articles 5 h), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal, l’article 7 3) ne s’appliquant pas à MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC.

58. Le comportement de VIDOJE BLAGOJEVIC, DRAGAN OBRENOVIC, MOMIR NIKOLIC et DRAGAN JOKIC présentait les quatre éléments constitutifs de persécutions en tant que crime contre l’humanité, à savoir :

a) l’existence d’un conflit armé,
b) le fait que, dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique contre une population civile, l’accusé a commis des actes ou omissions à l’encontre d’une victime ou d’une population victime en portant atteinte à un droit de l’homme fondamental,
c) le fait que l’accusé s’est comporté de la sorte pour des raisons politiques, raciales ou religieuses, et avec l’intention discriminatoire requise, et
d) le fait que l’accusé était informé du contexte général dans lequel s’inscrivait son comportement.

59. Comme il a été précisé dans le présent acte d'accusation conjoint modifié, le crime de persécutions a été perpétré, exécuté et mis en œuvre par les moyens suivants  :

a) le meurtre de milliers de civils musulmans de Bosnie, hommes, femmes, enfants et personnes âgées,
b) le traitement cruel et inhumain de civils musulmans de Bosnie, notamment sous forme de sévices corporels graves à Potocari et dans des centres de détention à Bratunac et à Zvornik,
c) le fait de terroriser les civils musulmans de Bosnie à Srebrenica et à Potocari,
d) la destruction des biens et effets personnels des Musulmans de Bosnie, et
e) le transfert forcé de Musulmans de Bosnie de l’enclave de Srebrenica.

Et

CHEF 6
(Transfert forcé)

Par les actes et omissions décrits aux paragraphes ci-dessus, VIDOJE BLAGOJEVIC et MOMIR NIKOLIC se sont rendus coupables de :

CHEF 6 : Actes inhumains (transfert forcé), un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ , sanctionné par les articles 5 i), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

Fait le 27 mai 2002

La Haye (Pays-Bas)

Graham T. Blewitt
________________

Le Procureur adjoint



1 - Le Procureur c/ Vidoje Blagojevic, Dragan Obrenovic, Dragan Jokic, affaire n° IT-02-53-PT, et Le Procureur c/ Momir Nikolic, affaire n° IT-02-56-PT, 16 avril 2002.
2 - Le Procureur c/ Vidoje Blagojevic, Dragan Obrenovic et Dragan Jokic, affaire n° IT-02-53-PT, 22 janvier 2002 (acte d’accusation conjoint relatif à ces trois accusés).
3 - Il s’agit de la seule modification substantielle concernant l’acte d’accusation original émis à l’encontre de Momir Nikolic (Le Procureur c/ Momir Nikolic, affaire n° IT-02-56-I, 26 mars 2002), toutes les autres modifications substantielles mentionnées dans la présente concordant avec cet acte d’accusation.

 


ANNEXE A

STRUCTURE MILITAIRE DES FORCES ARMÉES DE LA REPUBLIKA SRPSKA (VRS)

1. Les forces armées de la Republika Srpska se composaient de l’Armée de la Republika Srpska et des unités du Ministère de l’intérieur de la Republika Srpska.

2. En juillet 1995, les forces armées de la Republika Srpska étaient sous la direction et le commandement de leur commandant en chef, Radovan Karadzic, dont le quartier général était à Pale.

3. L’état-major principal de la VRS, dont le quartier général était à Han Pijesak et qui était commandé par le général Ratko Mladic, était directement subordonné au commandant en chef. Le commandant de l’état-major principal était chargé de prendre des directives et de donner des ordres et des instructions en vue de l’exécution des ordres émanant du commandant en chef et de s’acquitter des fonctions de commandement qui lui étaient déléguées par ce dernier. L’état-major principal de la VRS était composé d’officiers d’état-major et de personnel de soutien ainsi que de certaines unités spécialisées telles que le 65e régiment de protection, destiné à assurer la protection de l’état-major principal et à assurer des missions de combat, et le 10e détachement de sabotage, une unité formée pour mener des opérations derrière les lignes ennemies et d’autres missions de combat spéciales.

4. La grande majorité des unités combattantes de la VRS proprement dite était répartie en six corps d’armée, qui étaient responsables d’un secteur géographique déterminé et étaient tous subordonnés au général Mladic et placés sous son commandement et , par conséquent, du commandant en chef, Radovan Karadzic. Au mois de juillet 1995 , les six corps en question étaient le corps de la Drina, le 1er corps de Krajina , le 2e corps de Krajina, le corps de Sarajevo-Romanija, le corps d’Herzégovine et le corps de Bosnie orientale.

5. Chacun de ces six corps disposait de son propre chef et de son état-major, lesquels étaient directement subordonnés au général Mladic dans la hiérarchie de la VRS.

6. Milenko Zivanovic a été nommé premier chef du corps de la Drina lors de la création de celui-ci le 1er novembre 1992 et l’est resté jusqu’au 13 juillet 1995, vers 20  h 00, moment où le général Krstic l’a remplacé. Le général Radislav Krstic a assuré le commandement du corps de la Drina à compter du 13 juillet 1995 vers 20 h 00 jusqu’à la fin du conflit. Avant d’être promu chef du corps de la Drina, le général Radislav Krstic en a été le chef d’état-major et le chef en second, fonctions qu’il exerçait depuis octobre 1994.

7. Les fonctions de chef d’état-major et de chef en second du corps de la Drina ou de toute brigade relevant de ce corps se recoupaient. Lorsque le chef était absent , empêché ou dans l’incapacité d’exercer ses fonctions de commandement, le chef d’état-major/chef en second le suppléait automatiquement, sans avoir besoin d’autres autorisations, et assumait et exerçait le commandement des unités subordonnées selon les principes généraux arrêtés par le chef. En pareilles circonstances, le chef d’étatmajor/chef en second exerce des fonctions de supérieur hiérarchique au sens de l’article 7 3) du Statut et, en outre, la responsabilité pénale d’une personne occupant ce poste peut être engagée en vertu de l’article 7 1) du Statut.

8. L’état-major du corps de la Drina était dirigé par le chef d’état-major, comme l’indique le paragraphe précédent. Le commandement, dont le quartier général se trouvait à Vlasenica, comportait trois organes spécialisés, chacun étant dirigé par un chef adjoint. Il s’agissait de l’organe chargé des affaires touchant à la sécurité du corps, de l’organe chargé du moral et des affaires juridiques et religieuses du corps et de l’organe chargé des services d’appui (logistique). Outre les organes spécialisés susmentionnés, l’état-major comportait également une dizaine d’organes opérationnels chargés de la planification au jour le jour, d’opération et de combat . Ces organes comprenaient le département Opérations et instruction, le département Renseignement, le département Blindés et forces mécanisées, le département Protection NBC (nucléaire, bactériologique et chimique), le département Génie, le département Artillerie et missiles, le département Transmissions, le département Défense antiaérienne , le département Administration du personnel et le département Sécurité électronique .

9. Le corps de la Drina comptait environ 15 000 hommes répartis en 13 unités subordonnées , qui étaient tous responsables d’un secteur géographique déterminé, à savoir la 1re brigade d’infanterie de Zvornik, la 1re brigade d’infanterie légère de Vlasenica , la 1re brigade d’infanterie légère de Birac, la 1re brigade d’infanterie légère de Milici, la 1re brigade d’infanterie légère de Bratunac, la 2e brigade motorisée de Romanija, la 1re brigade d’infanterie légère de Podrinje, la 5e brigade d’infanterie légère de Podrinje, le 5e régiment d’artillerie mixte, le 5e bataillon de police militaire, le 5e bataillon du génie, le 5e bataillon de transmissions et un bataillon d’infanterie indépendant, le bataillon de Skelani.

10. Chacun des bataillons, régiments et brigades mentionnés au paragraphe précédent disposait de son propre commandement et de nombreuses unités subordonnées organisées en bataillons, compagnies et pelotons. Les chefs et les soldats des brigades de Bratunac et de Zvornik, relevant du corps de la Drina, ont joué un rôle de premier plan dans les crimes visés dans l’acte d'accusation. On trouvera ci-après la structure de ces brigades :

A. 1re brigade d’infanterie légère de Bratunac

Commandement

Unités subordonnées

1er bataillon d’infanterie
2e bataillon d’infanterie
3e bataillon d’infanterie
4e bataillon d’infanterie
Bataillon de réserve
Batterie d’artillerie mixte
Section du génie
Section de police militaire
Section d’intervention (Bérets rouges)

B. 1re brigade d’infanterie de Zvornik

Commandement

Unités subordonnées

1er bataillon d’infanterie
2e bataillon d’infanterie
3e bataillon d’infanterie
4e bataillon d’infanterie
5e bataillon d’infanterie
6e bataillon d’infanterie
7e bataillon d’infanterie
8e bataillon d’infanterie
Bataillon de réserve
Bataillon logistique
Bataillon d’artillerie mixte
Compagnie blindée/mécanisée
Compagnie de police militaire
Compagnie d’artillerie antiaérienne légère
Compagnie du génie
Détachement de Podrinje (les « Loups de la Drina »)
Section de transmissions

11. Chaque état-major de brigade était dirigé par le chef d’état-major/chef en second de la brigade. La structure et la fonction de l’état-major de brigade étaient, pour l’essentiel, semblables à ceux de l’état-major du corps, mais il y avait entre les deux une différence d’échelle.

12. Une différence importante dans la structure de ces états-majors de brigade concerne l’organe de sécurité. Dans une brigade d’infanterie légère, il y a un seul chef adjoint chargé à la fois des affaires de sécurité et du renseignement. Dans une brigade d’infanterie classique, les postes de commandant adjoint chargé des affaires de sécurité et de chef du renseignement sont distincts.

13. Outre les brigades de Bratunac, Zvornik et Vlasenica, des unités de l’état-major principal de la VRS ainsi que des unités d’autres corps de la VRS, des forces spéciales de police du Ministère de l’intérieur de la Republika Srpska et des forces ordinaires de la police municipale se trouvaient dans la zone de responsabilité du corps de la Drina pendant la période couverte par l’acte d'accusation. Il s’agissait en particulier  :

1) d’éléments du 65e régiment de protection (état-major principal de la VRS)
2) d’éléments du 10e détachement de sabotage (état-major principal de la VRS)
3) d’éléments des forces spéciales de police de la Republika Srpska (Ministère de l’intérieur)
4) de la police de Zvornik (Ministère de l’intérieur)
5) de la police de Vlasenica (Ministère de l’intérieur)
6) de la police de Milici (Ministère de l’intérieur)
7) de la police de Bratunac (Ministère de l’intérieur)
8) de la police de Skelani (Ministère de l’intérieur)
9) de la police de Visegrad (Ministère de l’intérieur)
10) de la police de Rogatica (Ministère de l’intérieur)

14. Toutes les entités mentionnées dans les cinq paragraphes précédents étaient des unités de la VRS ou du Ministère de l’intérieur de la Republika Srpska ; elles étaient organisées et fonctionnaient conformément aux lois pertinentes de la Republika Srpska et étaient placées sous le commandement d’individus dûment nommés conformément aux lois pertinentes de la Republika Srpska.

15. Le territoire de l’enclave de Srebrenica relevait entièrement de la zone de responsabilité du corps de la Drina de la VRS (voir les suppléments A et B ci-joints ). Plus précisément, l’enclave de Srebrenica se trouvait sur le territoire placé sous la responsabilité de la 1re brigade d’infanterie légère de Bratunac, de la 1re brigade d’infanterie légère de Milici et du bataillon indépendant de Skelani . D’autre part, tous les actes criminels reprochés ont été commis dans la zone de responsabilité du corps de la Drina, en particulier dans les secteurs assignés à la 1re brigade de Zvornik, à la 1re brigade d’infanterie légère de Milici et à la 1re brigade d’infanterie légère de Bratunac.


ANNEXE B

ENQUÊTE SUR SREBRENICA ­ RÉSUMÉ DES PREUVES MÉDICO-LÉGALES

IDENTIFICATIONS CERTAINES

Le tableau ci-dessous énumère les individus portés disparus à Srebrenica et localisés par le TPIY dans les fosses communes indiquées. Ces identifications se fondent sur des données rassemblées ante et post mortem par le PHR et le CICR, ainsi que sur des identifications certaines d’effets personnels et de vêtements par des membres de la famille de la personne disparue. Les autorités bosniaques ont délivré des certificats de décès pour ces personnes sur la base de ces identifications.

CERSKA

Abréviation : CSK

Type : Fosse d’origine

Fosse secondaire correspondante : Aucune

Cas

Identité du corps

Liste des disparus de Srebrenica du CICR/PHR

CSK ­ 12

KARIC(Idriz) Saban

BAZ-903596, KONJEVIC POLJE

CSK ­ 60

SPIODIC (Kemal) Samir

BAZ-902013, BURNICE

CSK ­ 65

MEMISEVIC (Alija) Mehmed

BAZ-900629, BURNICE

CSK ­ 69

NUKIC (Ramo) Hasib

BAZ-910699, FORÊT (SUMA)

CSK ­ 73

KADRIC (Adem) Adil

BAZ-912502, FORÊT

CSK ­ 82

MUMINOVIC (Bekto) Medo

BAZ-913006, KONJEVIĆ POLJE

CSK ­ 138

MEHIC (Muharem) Beriz

BAZ-910946, KAMENICA

CSK ­ 142

MUMINOVIC (Aljo) Osmo

BAZ-964981, FORÊT

CSK ­ 144

NUKIC (Omer) Arif

BAZ-910797, KRAVICA

FERME DE BRANJEVO
Abréviation : PLC
Type : Fosse d’origine
Fosse secondaire correspondante : Route de Cancari 12

Cas

Identité du corps

Liste des disparus de Srebrenica du CICR/PHR

     

PLC ­ 04

SINANOVIC (Safet) Sead

BAZ-902370, JADAR

PLC ­ 11

SELIMOVIC (Sabrija) Elizebet

BAZ-905958, BRATUNAC

PLC ­ 13

MEHIC (Mehmed) Edhem

BAZ-966527, KAMENICA

PLC ­ 16

EFENDIC (Mustafa) Nezir

PHR-000566, POTOCARI

PLC ­ 18

SPIODIC (Salko) Hasan

BAZ-917120, ZEPA

PLC ­ 32

DURAKOVIC (Meho) Salih

BAZ-912685, POTOCARI

PLC ­ 33

SMAJLOVIC (Bekto) Mujo

BAZ-914086, KAMENICA

PLC ­ 35

AHMETOVIC (Seco) Ramadan

BAZ-900755, INCONNU

PLC ­ 53

MALIC (Fazlija) Teufik

BAZ-902079, KALDURMICA

PLC ­ 67

BEGIC (Becir) Dzemal

BAZ-901696, POTOCARI

PLC ­ 69

VILIC (Ibrahim) Nazif

BAZ-102829, POTOCARI

PLC ­ 72

HMJIC (Mumin) Reuf

PROJET IDENTIFICATION PODRINJE

PLC ­ 92

OSMANOVIC (Mujo) Osman

BAZ-904572, INCONNU

ORAHOVAC (LAZETE 2)
Abréviation : LZ2
Type : Fosse d’origine
Fosse secondaire correspondante : Route de Hodzici 3, 4 et 5

 

Cas

Identité du corps

Liste des disparus de Srebrenica du CICR/PHR

     

LZ2 ­ 007

Avdic (Osman) Selmo

BAZ-914343, POTOCARI

LZ2 ­ 010

Cogaz (Suljo) Sulejman

BAZ-912703, POTOCARI

LZ2 ­ 102

Huseinovic (Aljo) Alija

BAZ-905886, POTOCARI

LZ2 ­ 106

Bekric (Jusuf) Suvad

BAZ-901075, POTOCARI

LZ2 ­ 031

Alic (Meho) Hakija

BAZ-901616, POTOCARI

LZ2 ­ 037

Mustafic (Ismet) Esad

BAZ-905659, POTOCARI

LZ2 ­ 043

Mesanovic (Juso) Barjo

BAZ-911301, POTOCARI

LZ2 ­ 046

Smajic (Meho) Alija

BAZ-906026, POTOČARI

LZ2 ­ 052

Bosnjakovic (Mehmed) Meho

BAZ-901750, POTOCARI

LZ2 ­ 053

Ahmetovic (Muharem) Ramiz

BAZ-905432, POTOCARI

LZ2 ­ 063

Hidic (Husein) Suljeman

PROJET IDENTIFICATION PODRINJE

LZ2 ­ 067

Hodzic (Salih) Suljeman

BAZ-913006, POTOCARI

LZ2 ­ 068

Mehmedovic (Sevko) Huso

BAZ-904605, POTOCARI

LZ2 ­ 072

Mehmedovic (Meho) Saban

BAZ-105069, POTOCARI

LZ2 ­ 074

Alic (Alija) Hedib

BAZ-905659, POTOCARI

LZ2 ­ 076

Delic (Nezir) Camil

BAZ-915200, POTOCARI

LZ2 ­ 084

Husejnovic (Zaim) Ramo

BAZ-965208, POTOCARI

LZ2 ­ 086

Ramic (Ibrahim) Saban

BAZ-901462, POTOCARI

LZ2 ­ 098

Ridic (Jahija) Zajko

BAZ-105000, KRAVICA

LZ2 ­ B25

Ramic (Hamed) Ramo

BAZ-900617, KARAKAJ

LZ2 ­ B31

Salihovic (Ibrahim) Mirsad

BAZ-103098, NOVA KASABA

NOVA KASABA (1996)
Abréviation : NKS
Type : Fosse d’origine
Fosse secondaire correspondante : Aucune

 

Cas

Identité du corps

Liste des disparus de Srebrenica du CICR/PHR

     

NK03 ­ 4

Husic(Ramo) Fadil

BAZ-901846, KONJEVIC POLJE

ROUTE DE CANCARI 12
Abréviation : CR12
Type : Fosse secondaire
Fosse secondaire correspondante : Ferme militaire de Branjevo (Pilica)

 

Cas

Identité du corps

Liste des disparus de Srebrenica du CICR/PHR

     

CR12 B 163

Muminovic (Salko) Saban

BAZ-105066, CERSKA