Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 20 mai 2009

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour à tous.

  6   Madame la Greffière, pourriez-vous, s'il vous plaît, appeler

  7   l'affaire.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour à tous dans le prétoire. Il

  9   s'agit de l'affaire IT-04-81-T, l'Accusation contre Momcilo Perisic.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

 11   Pourrions-nous avoir les présentations, s'il vous plaît. L'Accusation, tout

 12   d'abord.

 13   M. SAXON : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges. Dan

 14   Saxon, April Carter et Carmela Javier pour l'Accusation.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

 16   Qu'en est-il de la Défense.

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Donc pour

 18   la Défense, Eric Tully, Vera Manuello, c'est une nouvelle stagiaire qui a

 19   demandé à venir en prétoire pour voir ce qui se passe; Milos Androvic,

 20   Diedre Montgomery, l'une de nos juristes qui vient juste de passer son

 21   examen du barreau. D'ailleurs, nous la félicitons. Tina Drolec, Daniela

 22   Tasic et Chad Mair, et Gregor Guy-Smith, bien sûr, pour la Défense de M.

 23   Perisic.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

 25   Monsieur Saxon, maintenant.

 26   M. SAXON : [interprétation] L'Accusation appelle le général Rupert Smith.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] D'accord.

 28   M. SAXON : [interprétation] Il va témoigner selon l'article 92 ter.

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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

  2   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Faites la déclaration.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  7   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  8   LE TÉMOIN : RUPERT SMITH [Assermenté]

  9   [Le témoin répond par l'interprète]

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Vous pouvez vous

 11   asseoir.

 12   Monsieur Saxon, c'est à vous.

 13   M. SAXON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 14   Interrogatoire principal par M. Saxon : 

 15   Q.  [interprétation] Vous appelez-vous le Général Rupert

 16   Smith ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Êtes-vous citoyen du Royaume-Uni ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Monsieur Rupert, avez-vous fait une déclaration auprès du bureau du

 21   Procureur le 14 août 1996 ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Au cours des semaines précédentes, avez-vous eu l'occasion de relire

 24   votre déclaration ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Cette déclaration qui date de 1996 reflète-t-elle fidèlement ce que

 27   vous avez dit à l'époque ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Si on vous posait les mêmes questions aujourd'hui, vos réponses

  2   seraient-elles identiques ?

  3   R.  Oui.

  4   M. SAXON : [interprétation] J'aimerais s'il vous plaît, Monsieur le

  5   Président, demander le versement de la pièce 65 ter 9460, il s'agit de la

  6   version expurgée de la déclaration du témoin de 1996.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Pourrions-nous avoir une

  8   cote.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cela recevra la cote P2348.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 11   M. SAXON : [interprétation]

 12   Q.  Avant de poursuivre, Monsieur Rupert, je tiens à vous rappeler que nous

 13   parlons la même langue et afin d'épargner un peu les interprètes, il

 14   faudrait essayer de ménager une pause entre les questions et les réponses.

 15   On va essayer de le faire vous autant que moi.

 16   R.  Très bien.

 17   Q.  Monsieur Rupert, vous souvenez-vous avoir témoigné dans ce Tribunal au

 18   procès de Slobodan Milosevic, le 9 octobre 2003 ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Au cours des semaines précédentes, avez-vous pu relire le compte rendu

 21   de votre témoignage en espèce et avez-vous pu aussi voir les différentes

 22   pièces qui vous ont été présentées ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Le compte rendu de cette déposition que vous avez fait en octobre 2003

 25   reflète-t-il fidèlement vos propos à l'époque ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Si on vous reposait les mêmes questions aujourd'hui, vos réponses

 28   seraient-elles identiques ?

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  1   R.  Oui.

  2   M. SAXON : [interprétation] J'aimerais, Madame, Messieurs les Juges,

  3   demander le versement de la pièce 65 ter 9461.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien, elle sera acceptée.

  5   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Elle recevra la cote P2349.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  7   M. SAXON : [interprétation] J'aimerais aussi verser sept pièces qui sont

  8   reliées à ce document, je vais les énumérer. La 65 ter 5777.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Donnons-lui une cote.

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] P2350.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 12   M. SAXON : [interprétation] La pièce P5778.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Elle est admise.

 14   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Elle recevra la cote P2351.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 16   M. SAXON : [interprétation] La pièce 5779.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien, elle est admise. Donnons

 18   lui une cote.

 19   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Elle recevra la cote P2352.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 21   M. SAXON : [interprétation] La pièce 5780 ensuite.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Donnons lui une cote.

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La cote P2353.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 25   M. SAXON : [interprétation] La pièce 5781.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il faudrait une cote.

 27   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La cote sera P2354.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

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  1   M. SAXON : [interprétation] Ensuite la pièce 5782.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Elle est admise. Donnons lui une cote.

  3   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la cote P2355.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  5   M. SAXON : [interprétation] La pièce 65 ter 5765.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Elle sera admise.

  7   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la cote P2356.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

  9   M. SAXON : [interprétation]

 10   Q. Monsieur le Témoin, vous souvenez-vous avoir témoigné dans ce Tribunal

 11   dans le procès de Dragomir Milosevic, le 7 mars 2007 ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Au cours des semaines qui ont précédé, avez-vous eu l'occasion de

 14   relire le compte rendu de votre témoignage ainsi que les pièces s'y

 15   afférant ?

 16   R.  oui.

 17   Q.  Le compte rendu de votre déposition de mars 2007 reflète-t-il de façon

 18   fidèle vos propos donnés à l'époque ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Si l'on vous posait les mêmes questions aujourd'hui, vos réponses

 21   seraient-elles identiques ?

 22   R.  Oui.

 23   M. SAXON : [interprétation] Je demande le versement de la pièce 9467, s'il

 24   vous plaît.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Il faudrait donner une

 26   cote.

 27   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Elle recevra la cote P2357.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

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  1   M. SAXON : [interprétation] Il y a trois pièces connexes dont j'aimerais

  2   demander le versement.

  3   Tout d'abord la pièce 65 ter 8610.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien, elle est admise. Pourrions-

  5   nous avoir une cote.

  6   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la cote P2358.

  7   M. SAXON : [interprétation] Ensuite la pièce 8609.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien, elle est admise. Donnons

  9   lui une cote.

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la cote P2359.

 11   M. SAXON : [interprétation] Ensuite la pièce de la liste 65 ter 5784.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien, elle est admise. Donnons

 13   lui une cote.

 14   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cela recevra la cote P2360.

 15   M. SAXON : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur le Témoin, vous souvenez-vous avoir témoigné devant ce

 17   Tribunal lors du procès Popovic et consorts les 5, 6, et 7 novembre 2007 ?

 18   R.  Oui, je m'en souviens.

 19   Q.  Au cours des semaines qui ont précédé, avez-vous eu l'occasion de

 20   relire le compte rendu de ce témoignage ainsi que ses pièces jointes ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Le compte rendu de votre témoignage donné en novembre 2007 reflète-t-il

 23   de façon fidèle vos propos à l'époque ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Si on vous posait les mêmes questions aujourd'hui, vos réponses

 26   seraient-elles identiques ?

 27   R.  Oui.

 28   M. SAXON : [interprétation] Je demande, s'il vous plaît, le versement de la

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  1   pièce 9462, c'est la version expurgée du compte rendu du témoignage de Sir

  2   Rupert le 5 novembre 2007.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le document est admis. Il faudrait une

  4   cote.

  5   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cela sera la cote P2361.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

  7   M. SAXON : [interprétation] J'aimerais ensuite verser la pièce 9463, qui

  8   est le compte rendu expurgé du témoignage donné par Sir Rupert le 6

  9   novembre 2007.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien, ce document sera admis.

 11   Donnons-lui une cote.

 12   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cela recevra la cote P2362.

 13   M. SAXON : [interprétation] J'aimerais aussi demander le versement de la

 14   pièce 9464, qui est la version expurgée du témoignage de Sir Rupert le 7

 15   novembre 2007.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est admis. Une cote, s'il vous

 17   plaît.

 18   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La cote sera P2363.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 20   M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président, il y a sept pièces qui

 21   sont jointes à ces comptes rendus et j'aimerais donc demander le versement

 22   de la pièce 5769.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Donnons-lui une cote.

 24   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cela recevra la cote P2364.

 25   M. SAXON : [interprétation] Ensuite la pièce 65 ter 5770.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien, elle est admise. Donnons-

 27   lui une cote.

 28   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cela recevra la cote P2365.

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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  2   M. SAXON : [interprétation] Ensuite la pièce de la liste 65 ter 5771.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est admis. Une cote, s'il vous

  4   plaît.

  5   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la cote P2366.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

  7   M. SAXON : [interprétation] Je demande l'admission aussi de la pièce 5772

  8   de la liste 65 ter.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cela recevra la cote P2367.

 11   M. SAXON : [interprétation] Ensuite la pièce 65 ter 5785

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Donnons-lui une cote.

 13   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la cote P2368.

 14   M. SAXON : [interprétation] Ensuite la pièce 65 ter 5775.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

 16   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Elle recevra la cote P2359.

 17   M. SAXON : [interprétation] Ensuite la pièce 5774 de la liste 65 ter.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Elle est admise. Donnons-lui une cote.

 19   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la cote P2370.

 20   M. SAXON : [interprétation] J'aimerais maintenant avoir la permission de la

 21   Chambre de lire un résumé très bref du témoignage et des éléments de preuve

 22   apportés Sir Rupert Smith.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allez-y.

 24   M. SAXON : [interprétation] Le général Rupert Smith a servi au sein de

 25   l'armée du Royaume-Uni pendant 34 ans. Du 23 janvier 1995 au 20 décembre

 26   1995, le général Smith commandait les forces de protection des Nations

 27   Unies appelées FORPRONU en Bosnie-Herzégovine. Chaque matin, le général

 28   Smith était briefé à propos des événements militaires et politiques qui

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  1   étaient intervenus en Bosnie-Herzégovine au cours des 24 heures

  2   précédentes. En plus du cabinet de Rupert Smith, les membres du HCR, du

  3   CICR et d'autres agences présentes à Sarajevo participaient à ces réunions.

  4   Chaque après-midi, une deuxième réunion de moindre importance avait lieu,

  5   elle était composée du général Smith et de son état-major, et les

  6   événements de la journée --

  7   Je demande votre indulgence, s'il vous plaît.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

  9   M. SAXON : [interprétation] Donc au cours de cette réunion, les événements

 10   de la journée étaient discutés ainsi que des demandes à plus long terme. Le

 11   général Smith rendait visite aussi à son QG de secteur le plus fréquemment

 12   possible, échangeait des informations avec des journalistes.

 13   Au cours de son mandat, le général Smith a rencontré et avait des

 14   conversations téléphoniques avec les leaders politiques et militaires des

 15   Musulmans de Bosnie ainsi que des Serbes de Bosnie ainsi qu'avec les

 16   leaders de la République fédérale de Yougoslavie, y compris Alija

 17   Izetbegovic, Radovan Karadzic, Ratko Mladic et Slobodan Milosevic. Les

 18   priorités du général Smith étaient la résolution des difficultés impliquées

 19   dans la mise en œuvre de l'accord de la cessation des hostilités, ou COHA,

 20   qui avait été conclu entre les parties belligérantes. Les éléments de

 21   preuve apportés par le général Smith ainsi que les documents y afférant

 22   portent sur un grand nombre de ces discussions ainsi que sur les activités

 23   de la FORPRONU et de l'OTAN en Bosnie-Herzégovine au cours de l'année 1995,

 24   tout particulièrement les efforts de la FORPRONU visant à fournir l'aide

 25   humanitaire, l'emploi de la force aérienne de l'OTAN en Bosnie-Herzégovine

 26   au cours de l'année 1995, il va aussi témoigner sur la façon dont les

 27   membres de l'armée de la Republika Srpska ont pris des membres de la

 28   FORPRONU en otage au cours du printemps 1995.

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  1   Ces éléments de preuve apportés par le général Smith ainsi que les

  2   documents y afférant portent sur les pilonnages et sur les tirs embusqués

  3   dont ont été victimes les civils dans la ville de Sarajevo, tout

  4   particulièrement les résultats de l'enquête de la FORPRONU sur l'incident

  5   appelé Markale II, c'est-à-dire l'incident de pilonnage numéro 9 dans le

  6   tableau A de l'acte d'accusation.

  7   Les éléments de preuve apportés par le général Smith décrivent les efforts

  8   déployés par l'armée de la Republika Srpska dès le début février ou mars

  9   1995 pour exercer une pression sur les enclaves orientales ou les zones

 10   sûres en Bosnie-Herzégovine, y compris Srebrenica.

 11   Les éléments de preuve apportés par le général Smith et les documents y

 12   afférant décrivent aussi les événements de Srebrenica de juillet 1995 et la

 13   réponse de la FORPRONU.

 14   Ces éléments vont aussi décrire une réunion à laquelle a participé le

 15   général Smith à Belgrade le 15 juillet 1995, où participaient entre autres

 16   Slobodan Milosevic, Ratko Mladic, Karl Bildt, Thorvald Stoltenberg, et

 17   Yasushi Akashi ainsi que les discussions qui ont eu lieu lors de cette

 18   réunion à propos de Srebrenica. Tous les participants à la réunion

 19   s'étaient mis d'accord pour dire que la présence de Ratko Mladic lors de

 20   cette réunion à Belgrade reste secrète.

 21   Les éléments de preuve apportés par le général Smith expliquent que le but

 22   principal de la mission de la FORPRONU en Bosnie-Herzégovine au cours de

 23   1995 était d'aider à l'approvisionnement en aide humanitaire. Lorsque le

 24   général Smith avait besoin de la force armée pour défendre les forces de la

 25   FORPRONU en Bosnie-Herzégovine en 1995, il y avait recours. Mais ces

 26   actions n'étaient entreprises que pour protéger les unités de la FORPRONU

 27   plutôt que pour modifier l'équilibre des forces sur le terrain.

 28   Enfin, les éléments de preuve apportés par le général Smith vont décrire le

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  1   système de commandement et contrôle centralisé employé par l'armée de la

  2   Republika Srpska au cours de l'année 1995.

  3   Avec votre permission, Monsieur le Président, il y a un passage d'une

  4   déposition précédente du général Smith que j'aimerais discuter avec lui

  5   afin de clarifier certains points.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allez-y.

  7   M. SAXON : [interprétation]

  8   Q.  Monsieur Rupert, dans votre déposition dans l'affaire Slobodan

  9   Milosevic en octobre 2003, à la page 27 320, ligne 10, se poursuivant

 10   jusqu'à la page 27 321, ligne 5, vous décrivez une réunion qui aurait eu

 11   lieu à Belgrade le 15 juillet 1995. Vous étiez présent ainsi que Slobodan

 12   Milosevic, le général Mladic, M. Akashi, M. Stoltenberg, et d'autres.

 13   Vous souvenez-vous de cette déposition ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  A la page 27 321, on vous a posé la question suivante, question posée

 16   par l'Accusation, je cite :

 17   "Quels termes ont été employés par l'accusé" - ici on parlait bien sûr de

 18   Slobodan Milosevic - "Quels termes ont été employés par l'accusé pour

 19   donner des consignes à Mladic, et pouvez-vous nous dire quelle était

 20   l'autorité qui semblait être déployée ?"

 21   Votre réponse était : "Il était clairement le supérieur de Mladic. M.

 22   Milosevic l'appelait par son prénom et Mladic était extrêmement déferrant

 23   envers Milosevic."

 24   Vous vous souvenez de cette réponse ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Lorsque vous avez dit qu'il était le supérieur de Mladic, qu'est-ce que

 27   vous vouliez dire exactement ?

 28   R.  C'était plutôt une relation sociale. Lorsqu'on rentre dans une pièce et

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  1   qu'on voit les gens qui interagissent, on sait savoir qui sont les

  2   subalternes et qui sont les autres, on arrive bien à le voir d'après leur

  3   comportement. C'est un peu comme dans le règne animal, on voit qui est le

  4   chef.

  5   Q.  Très bien.

  6   M. SAXON : [interprétation] Je vais maintenant en rester là et passer la

  7   parole au Président.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, je vous remercie.

  9   Donc une question, s'il vous plaît, avant de vous donner la parole,

 10   Monsieur Guy-Smith.

 11   Sir Rupert, vous avez très certainement déjà expliqué tout ça dans votre

 12   témoignage, mais ce n'est pas sur papier pour l'instant et j'aimerais donc

 13   savoir pourquoi lors de cette réunion du 15 juillet 1995, les participants

 14   ont décidé que la présence de Ratko Mladic serait secrète et ne serait pas

 15   divulguée ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était il y a un petit moment quand même,

 17   donc je ne peux pas vraiment -- je ne me souviens pas très bien. On en a

 18   tellement parlé, je ne m'en souviens plus très bien. Je ne me souviens plus

 19   de la discussion exacte et des termes exacts.

 20   Mais ce dont je me souviens c'est la chose suivante : tout le monde

 21   savait qu'il commandait les forces des Serbes de Bosnie. La réunion a eu

 22   lieu juste après Srebrenica, enfin, la chute de Srebrenica. Je pense que

 23   personne à l'époque ne voulait que soit connu le lien entre Mladic et

 24   Milosevic, la connexion qui existait entre les deux. Donc il fallait

 25   traiter des conséquences de Srebrenica rapidement plutôt que de faire

 26   savoir que Mladic se trouvait à Belgrade.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 28   Monsieur Guy-Smith, c'est à vous.

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  1   Monsieur Saxon.

  2   M. SAXON : [interprétation] Avant que mon éminent confrère ne prenne la

  3   parole, si je puis vous aider, tout ceci a été abordé à la page 17 531 du

  4   compte rendu Popovic, de l'affaire Popovic.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Nous nous y référerons.

  6   Monsieur Guy-Smith, c'est à vous.

  7   Contre-interrogatoire par M. Guy-Smith: 

  8   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

  9   R.  Bonjour.

 10   Q.  Avant de venir témoigner aujourd'hui, j'imagine que vous avez eu

 11   l'occasion d'étudier de façon assez extensive vos propos qui sont à la fois

 12   dans les déclarations que vous avez faites ainsi que dans les dépositions

 13   viva voce que vous avez faites aussi ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Pour ce qui est donc de votre première déclaration dont vous avez parlé

 16   avec M. Saxon, qui a reçu la cote P2348, j'imagine que la déclaration que

 17   vous avez étudiée n'était pas la version expurgée, n'est-ce pas ? Vous avez

 18   lu toute la déclaration ?

 19   R.  Oui, il me semble, je pense.

 20   Q.  Très bien. Avant de venir ici, avez-vous eu l'occasion de vous enquérir

 21   des passages qui ont été expurgés dans cette déclaration ?

 22   R.  Non.

 23   Q.  Très bien.

 24   M. GUY-SMITH : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, avoir à

 25   l'écran la pièce 1D01-1445. Monsieur Saxon, j'aimerais savoir si vous avez

 26   bien reçu l'ensemble de nos communications.

 27   Je suis absolument désolé de m'adresser directement à M. Saxon, mais

 28   j'étais un peu inquiet, je n'étais pas sûr qu'il ait tout reçu.

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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Faites attention, quand même.

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, je m'en excuse.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avez-vous reçu les communications ?

  4   M. SAXON : [interprétation] Oui, j'ai tout reçu et je dois dire que je suis

  5   encore plus dans le flou qu'avant.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Bienvenue au club, comme on

  7   dit chez nous.

  8   Vous pouvez y aller, Monsieur Guy-Smith.

  9   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bien. Pouvons-nous passer à la page 18 du

 10   document qui est maintenant à l'écran.

 11   Q.  J'aimerais commencer maintenant avec le deuxième paragraphe, où on peut

 12   lire la date du 19 juillet, dans le paragraphe on voit les mots suivants :

 13   "J'ai rencontré Mladic le 19 juillet…"

 14   Est-ce que vous pouvez en prendre connaissance, est-ce que vous auriez

 15   besoin d'un zoom ?

 16   R.  En fait, oui, voilà, ce serait mieux si les caractères étaient un peu

 17   plus gros.

 18   Q.  Oui, en fait, moi aussi. Voilà.

 19   R.  C'est excellent. Je vois très bien maintenant.

 20   Q.  [aucune interprétation]

 21   R.  Est-ce que vous aimeriez que j'en prenne connaissance au complet ou

 22   bien que le paragraphe ?

 23   Q.  Non. Prenez connaissance du paragraphe. D'abord dites-nous, s'il vous

 24   plaît, si vous confirmez que c'est bien ce que vous aviez dit à l'époque ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Est-ce que vous maintenez ce que vous avez dit dans ce paragraphe ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Pour ce qui est maintenant de cette page-là, et je vous demande de

Page 6265

  1   passer maintenant aux trois derniers paragraphes qui se trouvent sur la

  2   page, pourriez-vous, je vous prie, en prendre connaissance. Lisez-les en

  3   votre for intérieur et je vais vous poser les mêmes questions, car ces

  4   paragraphes ont été expurgés de la pièce qui a été versée au dossier.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Saxon.

  6   M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président, je crois, mais je

  7   pourrais me tromper, je suis peut-être dans le flou, pour employer le terme

  8   de Me Guy-Smith, mais je crois que des paragraphes expurgés, ce n'est que

  9   le paragraphe 88 qui a fait l'objet d'une expurgation et le paragraphe 85

 10   aussi.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Comment savez-vous quel paragraphe est

 12   le 88 et lequel est le 85 ?

 13   M. SAXON : [interprétation] La version qui a été versée au dossier et qui

 14   fait partie de la liasse de documents 92 a été numérotée.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le document que nous sommes en train

 16   de regarder à l'écran porte la cote 1D [imperceptible].

 17   M. SAXON : [interprétation] Je voulais m'assurer que j'avais la même page

 18   que mon collègue, qu'on se comprenait, n'est-ce pas.

 19   M. GUY-SMITH : [interprétation] Alors passons à la page 23.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Aimeriez-vous que l'on affiche la

 21   pièce P2348 et qu'on partage l'écran ?

 22   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, ce serait extraordinaire.  

 23   En fait, je viens de comprendre. Il y a un problème. C'est que les pages ne

 24   sont pas numérotées de la même façon. Bien.

 25   Q.  Maintenant, pour ce qui est de la page 18, deux paragraphes ont fait

 26   l'objet d'une expurgation. Il s'agit des paragraphes 85 et 88. Ma question

 27   était de savoir si, Sir Rupert, vous maintenez ce que vous avez dit dans

 28   cette déclaration ?

Page 6266

  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous parlez des paragraphes expurgés ?

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui.

  3   Q.  En fait, c'est là où "il explique, il parle de Zepa," au paragraphe 85.

  4   R.  Oui, tout à fait.

  5   Q.  Bien.

  6   M. GUY-SMITH : [interprétation] Fort bien. Passons rapidement à la page 19.

  7   Encore une fois, divisons l'écran en deux, si c'est possible. La page 19,

  8   pour ce qui nous concerne, est expurgée dans son ensemble. Très bien.

  9   Merci. Elle est affichée à l'écran.

 10   Q.  Pourriez-vous, je vous prie, rapidement prendre connaissance de cette

 11   page, s'il vous plaît, en votre for intérieur.

 12   Est-ce que vous avez été en mesure de lire la page ?

 13   R.  Oui, tout à fait. Pourrait-on montrer la partie du bas, je vous prie.

 14   Q.  Aimeriez-vous que les lettres soient plus grandes ?

 15   R.  Non, en fait, il ne me reste encore que quelques paragraphes.

 16   Q.  Très bien.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Saxon.

 18   M. SAXON : [interprétation] En fait, je m'en remets entre les mains de Me

 19   Guy-Smith. Je ne sais pas si ceci pouvait aider le témoin, j'ai une copie

 20   papier.

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation] En réalité, si la Chambre souhaite que ceci

 22   est une procédure appropriée, alors à ce moment-là oui.

 23   M. SAXON : [interprétation] Je dois vous dire qu'il s'agit d'une copie

 24   personnelle, n'est-ce pas --

 25   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, en fait je n'y vois aucune objection.

 26   M. SAXON : [interprétation] Très bien.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors je viens de lire ce qui est à l'écran

 28   maintenant.

Page 6267

  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

  2   M. GUY-SMITH : [aucune interprétation]

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  4   M. GUY-SMITH : [aucune interprétation]

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  6   M. GUY-SMITH : [interprétation] 

  7   Q.  Après avoir lu ce qui est contenu sur cette page, est-ce que vous

  8   estimez que si l'on vous posait les mêmes questions vous auriez fait les

  9   mêmes déclarations et vous auriez répondu de la même façon ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Très bien.

 12   M. GUY-SMITH : [interprétation] Maintenant passons, je vous prie, à la page

 13   20.

 14   J'aimerais vous dire la chose suivante, c'est que la page 20 a eu le

 15   même sort que les pages précédentes, dans le sens où elle est entièrement

 16   expurgée. Pourrait-on agrandir, je vous prie.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, très bien, merci.

 18   M. GUY-SMITH : [interprétation] Ce sera plus facile.

 19   Q.  Vous pourrez en prendre connaissance.

 20   R.  Très bien.

 21   Q.  D'accord.

 22   R.  Pourrait-on montrer la partie du bas de la page, je vous prie.

 23   Q.  Tout à fait.

 24   R.  Très bien, j'en ai pris connaissance.

 25   Q.  De nouveau, j'aimerais vous poser la même question : si l'on vous

 26   posait les mêmes questions, est-ce que vous répondriez la même chose

 27   aujourd'hui ?

 28   R.  Oui.

Page 6268

  1   Q.  Alors avant de continuer avec le même exercice j'aimerais vous poser

  2   quelques questions : si vous prenez la deuxième phrase à partir du

  3   paragraphe du haut qui commence par :

  4   "La réunion a été importante, parce que j'ai vu Mladic fonctionner en tant

  5   que commandant, et ce, à un niveau stratégique, et je l'ai vu de mes

  6   propres yeux…"

  7   R.  Où êtes-vous, s'il vous plaît.

  8   Q.  Est-ce que l'on pourrait abaisser ou monter.

  9   R.  Non, j'aimerais voir le haut de la page.

 10   Q.  C'est une référence à la réunion que vous avez eue avec Mladic le 31

 11   juillet ?

 12   R.  Je viens d'en prendre connaissance, je viens de la lire tout à l'heure,

 13   mais je ne le vois pas du tout.

 14   Où c'est ?

 15   Q.  C'est le troisième paragraphe qui commence par, "J'ai eu une réunion

 16   avec le général Mladic" --

 17   R.  Je le vois.

 18   Q.  Vous le voyez ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Ensuite je passe aux deux --

 21   "La réunion a été importante, car j'ai vu Mladic fonctionner en tant que

 22   commandant à un niveau stratégique, qui jouait un rôle de commandement

 23   stratégique et central pour contrer l'offensive conjointe entre la HV et le

 24   HVO."

 25   J'aimerais vous demander ce que vous vouliez dire par la phrase "to

 26   operate," opérer, donc vous dites qu'il fonctionnait, qu'il "opérait en

 27   tant que commandant à un niveau stratégique." Qu'est-ce que vous entendiez

 28   par là, militairement parlant ? Que veut dire cette phrase d'un point de

Page 6269

  1   vue militaire ?

  2   R.  Dans ce cas-ci, j'avais eu des contacts avec Mladic et nous nous étions

  3   entretenus sur des questions très précises à la suite de son entrée dans

  4   Srebrenica et ainsi de suite. Ici je parlais des questions stratégiques

  5   avec lui, nous avions abordé ces questions stratégiques et il me parlait

  6   d'un niveau d'opérations supérieur, plus important que ce dont nous

  7   parlions normalement.

  8   Q.  Pourriez-vous nous aider à comprendre quelque chose, si j'ai bien

  9   compris, d'un point de vue militaire, il y a des personnes qui fonctionnent

 10   à un niveau stratégique et d'autres personnes qui fonctionnent soit à un

 11   niveau stratégique et d'autres personnes qui fonctionnent à un niveau

 12   opérationnel.

 13   Est-ce que l'on peut définir les choses de cette façon-là ?

 14   R.  Oui, tout à fait. Mais voilà, je ne crois pas que vous ayez réellement

 15   compris.

 16   Q.  Oui, voilà. Pourriez-vous nous l'expliquer.

 17   R.  Très bien. Alors un commandant supérieur peut, mais ce n'est pas

 18   nécessaire, s'occuper de questions stratégiques. Ce dernier peut s'occuper

 19   de questions stratégiques à une échelle beaucoup plus large. Dépendamment

 20   des circonstances, ce dernier peut se trouver dans des situations où il

 21   s'occupe des questions à un niveau inférieur pour des raisons

 22   particulières, par exemple, parce qu'elles lui sont imposées ou parce que

 23   cette problématique lui est importante pour quelque chose d'autre.

 24   Donc lorsque l'on parle de mes rapports avec le général Mladic au

 25   cours de ces années, la plupart de nos entretiens, des conversations que

 26   nous avions eues portaient sur des questions que l'on pourrait définir

 27   comme étant des questions ou des problèmes qui avaient trait aux questions

 28   locales, aux tactiques, tout ceci en détail, même s'il s'agissait de

Page 6270

  1   questions stratégiques. Et c'était un commandant des Nations Unies qui

  2   parlait avec le commandant de l'armée des Serbes de Bosnie.

  3   En réalité, là pour la première fois je l'ai vu et j'ai participé à

  4   des questions beaucoup plus importantes où il devait contrer cette

  5   offensive importante.

  6   Q.  Je vois. Maintenant --

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Permettez-moi de poser une question

  8   pour mieux comprendre, qu'est-ce que vous entendez par une opération

  9   importante ? Est-ce que c'était l'opération de Zepa ou est-ce que c'étaient

 10   d'autres questions stratégiques ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je dirais que l'incident de Zepa était

 12   effectivement une situation stratégique. Il s'agissait d'une zone protégée

 13   des Nations Unies qui s'était effondrée.

 14   Nous avions parlé d'échange de prisonniers, tout ceci, il s'agissait de

 15   questions tactiques du jour, si vous voulez. Lorsque nos conversations

 16   avaient lieu sur ces sujets, nous abordions tout ceci en détail. Dans ce

 17   cas-ci, l'offensive est une offensive combinée menée par les forces croates

 18   et des éléments croates des forces de la fédération en Bosnie, et tout ceci

 19   avait certainement une incidence sur les Krajina et sur Bihac en Croatie et

 20   je ne me souviens pas exactement des autres endroits, mais il y avait une

 21   menace qui planait sur les frontières bosniennes, mais il ne s'agissait pas

 22   seulement d'une menace qui planait, la situation était déjà devenue telle

 23   si vous voulez. Et il y avait des réfugiés qui arrivaient, et cetera, dans

 24   Banja Luka. Nous parlions de cette situation qui était toute nouvelle et

 25   nous en parlions en détail. Je l'ai vu fonctionné à un niveau complètement

 26   différent que lorsqu'il s'agissait de parler de détails plus simples

 27   entourant la poche.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur Guy-Smith.

Page 6271

  1   M. GUY-SMITH : [interprétation]

  2   Q.  Pour être tout à fait certain que nous comprenions très bien, vous

  3   parlez d'une capacité de fonctionner à un niveau stratégique, de

  4   fonctionner à un niveau opérationnel, je crois que vous venez d'introduire

  5   un nouveau terme et c'est le mot "tactique". Donc j'aimerais savoir est-ce

  6   qu'il y a une distinction à faire entre ces trois façons de fonctionner ?

  7   Je vais employer le terme de "fonctionnement", donc effectivement, si on

  8   parle "d'opération", ce n'est peut-être pas tout à fait clair.

  9   Alors est-ce qu'il y a une différence entre un fonctionnement

 10   opérationnel et un fonctionnement tactique ? Je crois que vous nous avez

 11   expliqué que représente un fonctionnement à un niveau stratégique, mais

 12   pourriez-vous essayer d'expliquer, je vous prie, un peu mieux.

 13   R.  Je ne veux certainement pas faire office de professeur dans une classe

 14   d'élèves, mais je vais essayer d'expliquer.

 15   Lorsqu'on parle de niveau stratégique, d'un point de vue militaire,

 16   lorsqu'on parle du niveau stratégique, on traduit les intentions politiques

 17   dans les actions militaires. Il doit exister un lien entre les deux et à ce

 18   moment-là on décide sur des questions tels les objectifs qui doivent être

 19   atteints, sur les allocations de forces, de ressources et de troupes afin

 20   de pouvoir mener à bien cette mission, quelles sont les priorités de la

 21   mission, et cetera. Et l'idée est d'essayer d'avoir un schéma cohérent.

 22   Donc je vais maintenant laisser de côté le niveau opérationnel et je vais

 23   vous parler de la tactique.

 24   Q.  Très bien.

 25   R.  Alors le niveau tactique, c'est mettre la main dans la pâte. On est là

 26   et on fonctionne. Voilà je vais vous donner une métaphore; prenez, par

 27   exemple, l'érection d'un bâtiment. Vous avez un architecte et ses

 28   conseillers et ces derniers essaient de traduire la vision qui a conçu ce

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  1   bâtiment dans un plan. Donc on construit un dessin, on met en œuvre une

  2   pensée. Mais à un certain moment donné, quelqu'un doit venir pour commencer

  3   à poser des briques et ce sont les activités tactiques.

  4   Normalement, s'il s'agit d'une maison qui n'est pas très grande, il

  5   n'est pas nécessaire d'avoir quelqu'un entre les deux, mais lorsque le

  6   projet devient de plus en plus grand, s'il s'agirait de la construction

  7   d'un grand hôtel ou d'un complexe commercial par exemple, le degré de

  8   complexité vient en jeu et il y a des décisions subsidiaires qui s'insèrent

  9   entre le niveau tactique et le niveau stratégique. Et voilà, j'ai essayé de

 10   vous expliquer le niveau opérationnel lorsqu'on parle des questions

 11   militaires.

 12   Q.  Très bien.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et dans la métaphore, qui est-ce ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien c'est le commandant qui se trouve sur le

 15   théâtre des opérations.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non, mais dans la métaphore de la

 17   construction de bâtiment.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est le gérant de projet. Donc il y a le

 19   gérant de projet, il y a l'architecte et il y a le constructeur. C'est une

 20   métaphore un peu difficile effectivement. Je ne veux pas me lancer dans ce

 21   débat, mais je crois qu'on a bien compris.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 25   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 26   Q.  Nous avons maintenant parlé de la question du niveau stratégique. Nous

 27   avons défini le niveau stratégique, et ce, en disant que ce sont les

 28   intentions politiques qui se traduisent à un niveau militaire. Donc dans

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  1   "cette situation", la situation dans laquelle vous vous êtes trouvé pendant

  2   un certain temps en juillet - donc l'intention politique était l'intention

  3   du gouvernement de la Republika Srpska, à la tête de laquelle se trouvait

  4   Karadzic, n'est-ce pas ?

  5   R.  Si vous voulez, lorsqu'on parle dans un livre d'un ouvrage, ça serait

  6   oui si vous voulez.

  7   Q.  En répondant ainsi, vous saviez qu'il n'y avait non pas seulement un

  8   président de la Republika Srpska, mais qu'il y avait également une

  9   assemblée qui faisait son travail, c'est-à-dire, on votait sur toutes les

 10   questions qui étaient importantes pour la république, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Et ceci pour les buts du modèle dont nous avons fait référence,

 13   lorsqu'on parle du niveau stratégique, un commandant militaire à un niveau

 14   stratégique trouverait sa direction pour savoir comment fonctionner ? Non

 15   pas seulement le président, mais l'assemblée également, n'est-ce pas ?

 16   R.  Je ne sais pas si vous voulez que l'on soit très théorique ici ? Si

 17   ceci peut vous aider, j'ai dit que d'un point de vue militaire, lorsqu'on

 18   parle de la stratégie, la stratégie a pour but de traduire les intentions

 19   politiques en questions militaires. Le général est là pour faire en sorte

 20   que ceci puisse avoir lieu. C'est un acteur politique, d'une certaine

 21   façon. Il est certain que le général sait très bien ce qui se passe dans le

 22   domaine politique aussi.

 23   Q.  Très bien, mais pour ce qui est de Mladic c'est une question que nous

 24   allons aborder aujourd'hui un peu plus tard.

 25   Mais vous poursuivez dans le même paragraphe pour dire que :

 26   "J'ai exposé les positions-clés de Mladic. Il était parti en Bosnie

 27   occidentale avec tous ses conseillers principaux et avec quelques forces

 28   spéciales. Nous étions avec lui à Zepa."

Page 6274

  1   Lorsque vous parlez de conseillers principaux, qui était avec lui ?

  2   R.  Je crois que le général Gvero était là. Je ne me souviens pas toutefois

  3   des personnes auxquelles je faisais allusion ici en réalité. Je ne me

  4   souviens plus qui était présent.

  5   Q.  Et si je vous disais Tolimir, est-ce que vous pensez qu'il était là ?

  6   R.  Je n'aurais pas été étonné si vous me disiez qu'il était là. Il est

  7   tout à fait possible qu'il ait été là.

  8   Q.  Pour ce qui est des personnes que vous avez reconnues par vos services

  9   de renseignements comme étant les conseillers-clés, les conseillers

 10   principaux, qui étaient les conseillers principaux de Mladic ?

 11   R.  De mémoire, Tolimir aurait été l'un d'eux, certainement.

 12   Q.  Vous avez également parlé de Gvero ?

 13   R.  Oui, tout à fait, Gvero aussi.

 14   Q.  Et --

 15   R.  En fait, c'est les deux seuls noms qui me viennent à l'esprit. Il me

 16   faudrait consulter une liste pour rafraîchir ma mémoire. Je n'arrive

 17   réellement pas à me souvenir.

 18   Q.  Permettez-moi de vous lancer certains noms. Est-ce que le nom Miletic

 19   vous dit quelque chose ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Est-ce que vous vous souvenez --

 22   R.  Je ne me souviens pas nécessairement de sa position, je ne sais pas

 23   quelle était la façon dont nous avions compris son poste ou sa position.

 24   Q.  Très bien. Si je vous disais qu'il était le chef de l'état-major, est-

 25   ce que ceci pourrait vous aider ?

 26   R.  Oui, tout à fait.

 27   Q.  Et qu'en est-il de Milovanovic ?

 28   R.  C'est un autre nom, effectivement, qui me dit quelque chose. Mais il

Page 6275

  1   faudrait que l'on rafraîchisse ma mémoire, il me faudrait revoir quel était

  2   le rapport qu'avaient toutes ces personnes.

  3   Q.  Et qu'en est-il du colonel Indic ?

  4   R.  Oui, tout à fait. Il était à Sarajevo, il était basé à Sarajevo. Je ne

  5   crois pas qu'il se serait trouvé ailleurs.

  6   Q.  C'était une personne assez particulière, n'est-ce pas, pour ce qui est

  7   de sa façon d'être, militairement parlant ?

  8   R.  Pourquoi vous dites que c'était une personne particulière, singulière ?

  9   Q.  Parce que c'était quelqu'un à qui Mladic parlait, mais il était à

 10   l'extérieur de la chaîne de commandement.

 11   R.  Oui. C'était un officier de liaison, et effectivement, ce dernier

 12   semblait avoir des liens directs avec Mladic.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Quand vous dites qu'il était "à

 14   l'extérieur de la chaîne de commandement," je ne comprends pas ce que vous

 15   voulez dire exactement.

 16   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui. Très bien. Je vais éclaircir.

 17   Ce que je veux dire par là, c'est qu'il était en mesure de donner des

 18   ordres, ou qu'il pouvait donner des ordres aux personnes qui avaient un

 19   grade supérieur au sien.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que c'est ainsi que vous aviez

 21   compris ceci, Général Rupert ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, pas du tout.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Voulez-vous répondre autrement ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. C'était l'officier de liaison de Mladic

 25   cantonné à la caserne de Lukavica à Sarajevo.

 26   C'était notre point de contact, c'était notre contact. C'était notre

 27   premier contact, si vous voulez, et c'est toujours à lui qu'on s'adressait

 28   lorsque l'on voulait avoir des contacts avec les forces serbes de Bosnie

Page 6276

  1   autour de Sarajevo.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

  3   M. GUY-SMITH : [interprétation] Passons maintenant au paragraphe suivant.

  4   Il nous faudrait descendre ou montrer la partie du bas de la page.

  5   Q.   J'aimerais maintenant de nouveau vous demander de vous pencher sur les

  6   deux dernières phrases dans lesquelles vous dites :

  7   "J'ai partagé la préoccupation de Mladic concernant la situation car il

  8   était clair que les combats s'étaient propagés, et je lui ai dit que

  9   l'offensive de la HV pourrait être justifiée conformément à l'article 51 de

 10   la charte des Nations Unies."

 11   R.  Oui.

 12   Q.  S'agissant des discussions que vous avez menées avec le général Mladic

 13   portant sur l'article 51 en tant que justification possible de cette

 14   offensive, vous souvenez-vous de ce que vous vous êtes dit ?

 15   R.  Ecoutez, je ne me souviens pas. Tout d'abord, il faudra me présenter

 16   l'article 51 de la charte. Je ne me souviens plus de ce qu'il contient. Je

 17   ne sais plus. Je me souviens qu'il se plaignait qu'il s'agissait là de

 18   l'armée croate qui devait être arrêtée et qui ne devait pas se trouver là

 19   où elle était.

 20   Q.  Cet article prévoit :

 21   "Rien dans la charte ci présente ne devrait empêcher l'exercice du droit

 22   individuel ou collectif à l'autodéfense si une attaque armée est lancée

 23   contre un membre des Nations Unies. Le Conseil de sécurité prendra les

 24   mesures nécessaires afin de maintenir la paix internationale et la

 25   sécurité.

 26   Les mesures prises par les membres qui exercent le droit de l'autodéfense,

 27   le Conseil de sécurité en sera immédiatement informé et n'affecteront en

 28   aucune manière l'autorité et la responsabilité du Conseil de sécurité,

Page 6277

  1   conformément à cette charte."

  2   Votre position au fait était que l'offensive menée par la HV était une

  3   question d'autodéfense, n'est-ce pas ?

  4   R.  Je ne sais pas. Je pensais que ça pourrait m'aider à me souvenir de ce

  5   que nous nous sommes dit, mais là, je ne me souviens plus vraiment

  6   pourquoi.

  7   Q.  Vous ne vous souvenez pas pourquoi vous avez fait référence à l'article

  8   51 ?

  9   R.  Ecoutez, j'essaye de penser vraiment à ce qui s'est passé, mais je ne

 10   me souviens pas exactement ce que c'était cette question.

 11   Q.  La raison pour laquelle je vous ai posé cette question est la suivante

 12   : dans ce passage de votre déclaration, vous avez fait une référence tout à

 13   fait concrète à un article de la charte des Nations Unies. Donc je pensais

 14   que vous pourriez nous l'expliquer davantage.

 15   R.  [aucune interprétation]

 16   Q.  Bien. Passons à la phrase suivante, vous dites :

 17   "Il était intéressant de remarquer la préoccupation énorme que montrait

 18   Mladic concernant l'intégrité de la Republika Srpska et qu'il s'intéresse

 19   peu à la possibilité d'une offensive de la HV dans les Krajina."

 20   Alors je comprends, et peut-être que j'ai raison, que cela reflète tout

 21   simplement sa position, son opinion que l'intégrité géographique de la

 22   Republika Srpska était importante.

 23   R.  C'est possible. Je suis d'accord avec vous. Il est tout à fait possible

 24   d'interpréter ce passage ainsi, mais si je me souviens bien, concernant

 25   cette question, ses commentaires étaient plutôt de nature rhétorique et la

 26   discussion portait sur le passé et sur la nécessité que tous les frères

 27   serbes habitent dans les deux Krajina parce qu'ils étaient tous un seul

 28   peuple, les Serbes, et qu'il y avait une pression qui était exercée sur

Page 6278

  1   eux. Donc je ne peux pas maintenant accepter votre affirmation que Mladic

  2   s'intéressait exclusivement aux frontières de la Republika Srpska et qu'il

  3   ne s'intéressait pas aux Krajina où également vivaient des Serbes.

  4   Q.  Alors cette conversation portait de toute évidence sur les intentions

  5   politiques de la Republika Srpska, donc c'était une discussion qui portait

  6   sur le niveau stratégique ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  D'accord.

  9   R.  Mais dans l'interprétation de Mladic.

 10   Q.  Très bien, je comprends.

 11   M. GUY-SMITH : [interprétation] Passons à la page suivante, c'est la page

 12   21, le premier paragraphe.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 14   M. GUY-SMITH : [interprétation] Tout en bas de cette page, le dernier

 15   paragraphe. Le paragraphe en question continue sur la page suivante.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est bon.

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 18   Q.  S'agissant de la première phrase qu'on voit sur cette page : "Il a

 19   également réitéré le désir des Serbes de Bosnie d'être impliqués dans le

 20   processus de la paix en affirmant que la RFY était éloignée de cette

 21   guerre."

 22   Concernant cette déclaration, je suppose qu'il a dû montrer une certaine

 23   préoccupation quant à sa possible exclusion de ce processus, ou peut-être

 24   que les autres parties étaient en train d'essayer d'atteindre des solutions

 25   qui à son avis n'étaient pas appropriées.

 26   R.  Je ne me souviens plus qu'il ait dit quoi que ce soit au sujet de ses

 27   motivations.

 28   Q.  Oui, mais comment ça se fait qu'il a commencé à parler de ceci ?

Page 6279

  1   R.  Je ne me souviens pas.

  2   Q.  Mais si vous ne vous souvenez pas, alors vous ne vous souvenez pas,

  3   c'est tout.

  4   Mais s'agissant de ces deux paragraphes ici, est-ce que vous confirmez que

  5   cela figure bien dans votre déclaration, que c'est vous qui l'avez faite ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Donc vous confirmez également que ces informations-là sont exactes ?

  8   R.  Oui.

  9   M. GUY-SMITH : [interprétation] Passons maintenant à la page 23.

 10   [Le conseil de la Défense se concerte]

 11   M. GUY-SMITH : [interprétation] Toutes mes excuses, c'était à la page 24.

 12   Q.  Le tout premier paragraphe.

 13   R.  C'est le paragraphe qui commence par la phrase : "…au début d'octobre…"

 14   Q.  Oui.

 15   M. GUY-SMITH : [interprétation] Il faudrait qu'on revienne à la page 23.

 16   Parce qu'il y a une question portant sur le quatrième paragraphe,

 17   paragraphe numéro 112. On peut travailler sur P2348, il n'importe.

 18   Il y est indiqué : "Le 10 septembre, le commandant des forces a eu

 19   une deuxième réunion avec Mladic, mais celui-ci a refusé de négocier avant

 20   que le bombardement ne cesse."

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Alors s'agissant du bombardement auquel ont fait référence ici,

 23   pourriez-vous nous expliquer quel était le bombardement en cours dont

 24   Mladic exigeait la fin ?

 25   R.  Je devrais vérifier les dates, mais c'était à la fin du mois d'août que

 26   toute une série d'attaques a été lancée par les forces aériennes de l'OTAN,

 27   la 5e Force tactique. Ensuite il y a eu une pause d'environ trois jours,

 28   puis les attaques ont repris. C'est pendant cette deuxième phase, si je me

Page 6280

  1   souviens bien, que le siège de Sarajevo a été levé et que l'aide a commencé

  2   à arriver à Sarajevo, mais le bombardement se poursuivait. Je ne suis pas

  3   sûr dans quelle phase nous étions le 10, je devrais vérifier les dates pour

  4   vous répondre précisément.

  5   Q.  S'agissant de l'arrêt des bombardements, lors de cet entretien avec

  6   Mladic, l'avez-vous informé que vous n'étiez pas en mesure de le faire

  7   compte tenu du fait que vous étiez commandant de la FORPRONU, et que la

  8   question de l'arrêt de bombardements était une décision qui devait être

  9   prise au niveau de l'OTAN ?

 10   R.  A ce moment-là, je n'étais pas à la réunion.

 11   Q.  D'accord.

 12   R.  Je --

 13   Q.  Excusez-moi, je comprends. Mais savez-vous si lors de cette

 14   conversation vous avez fait référence au fait que la FORPRONU et l'OTAN

 15   étaient séparés et qu'il y avait une question de compétence quant à la

 16   décision portant sur l'arrêt de bombardements.

 17   Si vous ne le savez pas, c'est très bien.

 18   M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Saxon.

 20   M. SAXON : [interprétation] Je dirais qu'on demande au témoin

 21   maintenant de se lancer à des conjectures. Il a tout simplement dit qu'il

 22   n'était pas présent à cette réunion.

 23   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 24   Q.  Si vous le savez.

 25    R.  Non.

 26   Q.  Bien.

 27   M. GUY-SMITH : [aucune interprétation]

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] On va faire la pause, maintenant.

Page 6281

  1   --- L'audience est suspendue à 10 heures 16.

  2   --- L'audience est reprise à 10 heures 47.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Guy-Smith, allez-y.

  4   M. GUY-SMITH : [interprétation] En ce qui concerne le document dont nous

  5   parlions et qui était affiché à l'écran, si je pouvais, s'il vous plaît,

  6   Monsieur le Président, demander le versement au dossier des paragraphes

  7   dont nous parlions, c'est-à-dire les paragraphes 85, 88 à 100, ainsi que le

  8   paragraphe 104 qui ont été expurgés.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ils sont versés au dossier. Pourrions-

 10   nous avoir une cote.

 11   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ces paragraphes recevront la cote D96.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 13   M. GUY-SMITH : [interprétation] Merci.

 14   Q.  Vous avez dit : "La guerre n'existe plus."

 15   "En revanche, la confrontation, le conflit et le combat existent dans le

 16   monde entier," ensuite vous avez énuméré un certain nombre d'endroits dans

 17   le monde où cela se fait. "Les Etats ont toujours des forces armées qu'ils

 18   utilisent en tant que symbole de puissance. La guerre est donc un événement

 19   décisif dans le cadre des affaires internationales. Mais ce type de guerre

 20   sur le champ de bataille n'existe plus."

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Donc j'aimerais savoir exactement d'où cela vient ? Je vois que vous

 23   savez d'où ça vient.

 24   R.  Oui, je savais.

 25   Q.  Cela vient de "L'utilité de la force : art de la guerre dans le monde

 26   moderne", c'est un livre que vous avez écrit vous-même, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  En ce qui concerne les événements qui se sont déroulés en Bosnie, plus

Page 6282

  1   particulièrement ce qui était appelé le siège de Sarajevo, est-ce que vous

  2   définiriez cela comme étant une guerre classique, guerre à laquelle nous

  3   sommes habitués en tant que non-combattants, ou s'agit-il, à votre avis,

  4   plutôt d'un nouveau type de confrontation ? Comprenez vous ma question ?

  5   R.  Je pense que oui. Je pense que je comprends votre question. Les combats

  6   autour de Sarajevo faisaient partie du conflit qui avait lieu dans le cadre

  7   de la confrontation.

  8   Q.  Bien. Voyons si nous pouvons obtenir des éclaircissements

  9   supplémentaires. Je pense que vous avez indiqué qu'il y a différents

 10   facteurs que l'on doit prendre en compte - je pense vous les appelez

 11   tendances générales - et qui permettent de comprendre les confrontations et

 12   les conflits; c'est bien cela ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  D'abord, il y a le but du combat, mais les buts de combat changent

 15   complètement, ce sont maintenant des objectifs beaucoup plus malléables ?

 16   R.  En effet.

 17   Q.  Nous combattons parmi les individus au sein même du peuple. Ceci est

 18   amplifié par le rôle central joué par les médias. Le combat se trouve

 19   maintenant dans toutes les salles à manger du monde entier, tout autant que

 20   dans les zones urbaines où ont lieu les conflits ?

 21   R.  Oui.

 22    Q. J'imagine qu'en disant cela vous faite allusion au fait que les médias

 23   sont maintenant utilisés, ils sont instrumentalisés pour servir presque

 24   d'arme, et les deux parties au conflit utilisent les médias de la sorte,

 25   alors qu'auparavant ce n'était pas le cas. La propagande maintenant est

 26   partout dans le cadre des conflits ?

 27   R.  Non, ce n'est pas ce que je dis. Je ne suis pas aussi affirmatif que

 28   vous le faites et je ne fais pas de lien aussi direct que vous.

Page 6283

  1   Q.  Bien.

  2   R.  J'ai mentionné ces six facteurs dont vous avez fait allusion, on les

  3   appelle des tendances. Je ne suggère absolument pas qu'ils sont toujours

  4   identiques, mais il est vrai qu'il y toujours une combinaison assez

  5   identique de ces facteurs.

  6   Q.  Très bien. En ce qui concerne cette tendance, la tendance à la

  7   médiatisation du conflit est une tendance que vous avez reconnue. Cette

  8   tendance-là a été employée dans le cadre du conflit qu'il y a eu dans toute

  9   la Yougoslavie. Donc vous êtes d'accord avec nous pour dire que la guerre

 10   de propagande qui a été effectuée a atteint de nouveaux sommets dans ce

 11   conflit dans l'ex-Yougoslavie par rapport à ce qui s'était passé auparavant

 12   ?

 13   R.  Non. Vous êtes en train de faire des affirmations -- non, quand je

 14   parle des médias et quand je parle de cette nouvelle tendance d'avoir les

 15   combats parmi les peuples -- le combat est maintenant dans le peuple, il y

 16   a deux choses. Tout d'abord, il y a le fait que les combats se font

 17   vraiment dans les centres urbains parmi les personnes, parmi les gens, les

 18   civils, et il y a aussi les médias. Les médias sont en effet ce qu'ils

 19   sont, un vecteur, un médium, un médium au sein duquel se fait l'opération.

 20   L'emploi de la propagande c'est aussi vieux que le monde. Donc je ne dirais

 21   absolument pas que la propagande a été plus utilisée ou moins utilisée en

 22   ex-Yougoslavie qu'auparavant, absolument pas. Regardez la Deuxième Guerre

 23   mondiale, c'est un cas d'école. Donc je pense qu'on ne peut absolument pas

 24   répondre à la question que vous m'avez posée.

 25   Q.  Très bien. En ce qui concerne l'utilisation de la propagande, pouvez-

 26   vous nous dire si la propagande a été employée de façon plus importante par

 27   la présidence de l'ABiH, c'est-à-dire le côté musulman, au niveau

 28   international, que par le côté serbe de Bosnie, donc pensez-vous que la

Page 6284

  1   propagande a été employée par les Musulmans plus en tant que moyen,

  2   instrument de guerre ?

  3   R.  Il faudrait d'abord définir la "propagande".

  4   Q.  Très bien. La propagande c'est une déclaration qui est employée pour

  5   influencer une partie à propos d'un événement particulier, et qui peut ou

  6   ne pas être vrai.

  7   R.  Mais c'est l'événement qui est vrai ou c'est la déclaration qui est

  8   vraie ou pas vraie ?

  9   Q.  C'est la déclaration qui peut être plus ou moins vraie.

 10   R.  Donc d'après vous la publicité c'est de la propagande ?

 11   Q.  Oui, par rapport à Edward Bernays, en effet.

 12   R.  Dans ce cas-là, les deux parties y avaient recours également. Non, je

 13   ne peux pas faire de différence --

 14   Q.  Vous ne pouvez pas faire de différence. Bien.

 15   La troisième tendance c'est que les conflits maintenant n'ont pas de cadre

 16   temporel, en effet on cherche une condition qui doit être maintenue jusqu'à

 17   ce qu'on arrive à un accord qui peut durer plusieurs décennies.

 18   Ensuite il ne faut pas perdre la force --

 19   Pourriez-vous parler de cette tendance, s'il vous plaît ?

 20   R.  Combattre pour ne pas perdre la force ?

 21   Q.  Oui.

 22   R.  J'oppose ceci au paradigme précédent où il y avait une mobilisation,

 23   conscription, l'industrialisation, et cetera. Donc dans les guerres

 24   précédentes, on risquait de perdre toute l'armée dans le conflit, et on

 25   pouvait en créer d'autres aussi, créer de nouvelles armées. On l'a vu à

 26   plusieurs reprises, entre autres pendant la Deuxième Guerre mondiale.

 27   Ce qui permet de prendre certains risques stratégiques, bien sûr, parce que

 28   la conséquence d'un échec n'est pas vraiment une catastrophe parce qu'on

Page 6285

  1   peut toujours reconstruire son armée.

  2   Alors que dans les circonstances actuelles, en tout cas c'est ce que

  3   j'avance, on ne peut plus se permettre de prendre ces risques stratégiques

  4   en employant ses propres forces, donc on conduit les opérations sur

  5   l'hypothèse de base et le prémisse qu'on ne peut pas perdre toute sa force.

  6   Parce que ce serait une catastrophe si on perd la totalité de ses forces

  7   dans le combat.

  8   Q.  Ensuite, on peut toujours trouver de nouveaux emplois pour les

  9   anciennes armes. "Celles qui étaient utilisées pour le champ de bataille où

 10   il y avait soldats et équipements sont -- étant donné que les outils de

 11   l'ancienne guerre industrielle ne peuvent absolument pas être utilisés dans

 12   une guerre qui a lieu au sein du peuple même."

 13   R.  Oui. Enfin, il y a un peu plus que ça. Cela a à voir avec

 14   l'organisation, et cetera, l'organisation des armes et de l'emploi des

 15   armes. Ce n'est pas l'arme en tant que telle qui est prise en compte ici,

 16   plutôt son emploi.

 17   Q.  D'accord.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ecoutez, Monsieur Guy-Smith, pourriez-

 19   vous nous éclairer sur votre but, pourquoi posez-vous ces questions ?

 20   M. GUY-SMITH : [interprétation] Ici je voudrais savoir ce que faisait cette

 21   personne en l'espèce, ce qu'il faisait à ce moment-là.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, mais on n'y est pas encore quand

 23   même.

 24   M. GUY-SMITH : [interprétation] Nous y arrivons lentement, mais nous y

 25   arrivons.

 26   Pourrais-je avoir, s'il vous plaît, à l'écran la pièce 1D01-0620. Page 8.

 27   Q.  Pour nous assurer que nous sommes bien sur la même page, c'est ce que

 28   je vous ai lu, c'est tout ce qui est maintenant à l'écran. Vous voyez où

Page 6286

  1   nous en sommes ?

  2   R.  Vous lisez aussi le préambule du texte.

  3   Il y a quand même plus de choses, des éléments importants qui se trouvent

  4   après le préambule.

  5   Q.  Certes, oui.

  6   R.  [aucune interprétation]

  7   Q.  Maintenant le dernier alinéa dit que : "Les parties ne sont pas des

  8   parties étatiques, la plupart du temps."

  9   R.  En effet.

 10   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je n'ai plus besoin de cela à l'écran.

 11   Q.  Maintenant en ce qui concerne le conflit auquel vous avez participé

 12   pour le compte de la FORPRONU, vous avez tout d'abord compris quelles

 13   étaient les difficultés qui existaient. Je crois qu'en 1992 vous

 14   travailliez au sein du ministère de la Défense britannique, et c'était

 15   avant même d'être envoyé sur place, n'est-ce pas, que vous avez appris un

 16   peu ce qui se passait là-bas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  [aucune interprétation]

 19   R.  J'aimerais d'abord répondre à votre première affirmation.

 20   Je ne pense pas que l'on puisse dire que la FORPRONU ait participé au

 21   conflit. La FORPRONU faisait partie de la confrontation.

 22   Q.  Très bien. Pourriez-vous nous aider à mieux comprendre le conflit et la

 23   confrontation ?

 24   R.  Le conflit pour moi n'est pas synonyme de confrontation.

 25   Il y a confrontation lorsqu'au moins deux parties, voire plus, ont un

 26   résultat différent en vue. On ne peut pas nécessairement arriver à cet

 27   objectif par le conflit. On peut y arriver par d'autres moyens.

 28   Mais si on décide d'en arriver au combat, dans ce cas-là, on a un conflit.

Page 6287

  1   Et c'est là la différence entre la confrontation et le conflit.

  2   Q.  D'accord.

  3   R.  Mais je peux, s'il vous plaît, vous donner plus d'explications…

  4   Q.  Non, je comprends très bien et je pense que nous allons y revenir.

  5   D'abord vous avez eu connaissance de cette région et des difficultés qui y

  6   régnaient lorsque vous étiez au ministère de la Défense, donc avant d'être

  7   envoyé sur le terrain ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  A ce moment-là, est-ce que vous étiez impliqué dans les discussions --

 10   non, j'ai une question à vous poser avant : y avait-il des discussions avec

 11   les forces de l'OTAN avant même que vous ne soyez envoyé en Bosnie ? Y

 12   avait-il des discussions avec l'OTAN à propos de l'emploi éventuel de

 13   frappes aériennes de l'OTAN ?

 14   R.  Oui, mais ce n'est pas avec les forces de l'OTAN. J'étais officier

 15   d'état-major à Londres et j'étais en liaison avec le QG de l'OTAN à

 16   Bruxelles, et aussi avec le QG des Nations Unies à New York.

 17   Q.  Très bien, mais peut-on dire qu'avant que vous ne vous rendiez à

 18   Sarajevo, avant que vous ne soyez envoyé à Sarajevo, il existait déjà des

 19   divergences d'opinions à propos de l'emploi de frappes aériennes dans cette

 20   région. Et ici, bien sûr, je fais allusion au fait qu'il y avait divergence

 21   à propos de la possibilité éventuelle d'utiliser des frappes aériennes ou

 22   des bombardements aériens, comme quoi ces frappes aériennes ou ces

 23   bombardements aériens devaient soit être utilisés seuls ou utilisés pour

 24   donner appui aux forces sur le terrain ?

 25   R.  Non. Il n'y avait pas du tout d'argument de ce style.

 26   Q.  Donc aidez-nous.

 27   R.  Il y avait deux organisations représentant différents groupes de pays,

 28   d'un côté les Nations Unies et de l'autre l'OTAN. Les nations dont les

Page 6288

  1   forces étaient déployées sur le terrain étaient parfois représentées au

  2   sein de ces deux organisations, de ces entités politiques, à la fois l'OTAN

  3   et les Nations Unies. Mais parfois, elles n'étaient représentées que dans

  4   l'un ou dans l'autre. Il y avait donc très certainement -- il est évident

  5   qu'il y avait une différence d'opinions dans ces deux entités qu'il fallait

  6   réconcilier. Ce n'était pas ou l'un ou l'autre, entre frappes aériennes,

  7   bombardements aériens uniquement et appui aérien aux forces au sol.

  8   Q.  Très bien. Vous étiez impliqué dans les débats à ce propos en 1992 et

  9   1993 ?

 10   R.  Pas en 1992, mais en 1993 et en 1994.

 11   Q.  Très bien. En 1993 et en 1994, vous avez participé à ces débats et

 12   j'imagine que vous l'étiez au nom du ministère de la Défense britannique,

 13   n'est-ce pas ?   

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Avant d'entrer dans les détails, j'aimerais savoir la chose suivante :

 16   avez-vous, lorsque vous négociiez avec Mladic, le cas échéant, lorsque vous

 17   négociiez avec lui, est-ce que vous avez pris en compte le fait que ces

 18   négociations étaient ce que je puis appeler des effets secondaires par

 19   rapport à une négociation qui aurait eu lieu à propos de ce qui se passait

 20   vraiment sur le terrain. Donc si vous négociiez pour un cessez-le-feu, par

 21   exemple, vous avez reçu des informations à propos d'autres choses. Les

 22   négociations, si je puis dire, faisaient partie de la guerre, elles étaient

 23   employées comme arme de guerre ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne comprends pas très bien la question.

 25   M. SAXON : [interprétation] Je trouve que la question est compliquée et

 26   trop composée.

 27   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vais simplifier les choses.

 28   Q.  Lorsque vous négociiez avec Mladic pour obtenir que certains événements

Page 6289

  1   aient lieu, avez-vous pris en compte le fait que ces négociations étaient

  2   en fait utilisées, instrumentalisées dans le cadre de la guerre; Mladic

  3   n'était pas là pour nécessairement négocier avec vous en toute bonne foi,

  4   il était là pour obtenir certains avantages ?

  5   R.  Vraiment, je ne comprends absolument pas votre question. Vraiment,

  6   rien.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] M. Saxon est debout. 

  8   M. SAXON : [interprétation] Je vais soulever à nouveau une objection

  9   lorsque M. Guy-Smith emploie le terme "le fait", parce que je pense que

 10   jusqu'à présent aucun fait n'a été établi. En tout cas, pas dans le cadre

 11   de son contre-interrogatoire, donc ce fait n'a absolument pas été établi,

 12   ce fait auquel il fait allusion.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] De plus, Monsieur Guy-Smith, je tiens

 14   à dire que je ne pense pas que vous voulez que M. Rupert Smith vous dise ce

 15   qui se passait dans la tête de Ratko Mladic.

 16   M. GUY-SMITH : [interprétation] Non, pas du tout.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc quand vous dites que Mladic était

 18   en train de négocier en vue d'obtenir d'autres bénéfices, c'est ce que vous

 19   êtes en train de lui demander ?

 20   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vais passer à autre chose.

 21   Enfin, je vais essayer d'arriver à mes fins par un autre but.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 23   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 24   Q.  Donc lorsque vous êtes allé dans la région, est-ce que vous étiez

 25   envoyé avec un mandat de maintien de la paix ?

 26   R.  Non, puisqu'il n'y avait pas de paix. Il y avait un accord de cessation

 27   des hostilités quand je suis arrivé sur place, mais rien de plus. Mon

 28   mandat était donc essentiellement de protéger et d'assurer la livraison

Page 6290

  1   d'aide humanitaire.

  2   Q.  Vous dites qu'"il y avait un accord de cessation des hostilités, mais

  3   rien de plus," d'après vous, quelles étaient les règles d'engagement en ce

  4   qui concerne votre présence sur place ? Qu'avez-vous le droit de faire et

  5   que n'avez-vous pas le droit de faire ?

  6   R.  S'agissant des règles de l'engagement, ces dernières m'avaient été

  7   données. Et encore une fois, les règles de l'engagement étaient dans leur

  8   ensemble réactives. Nous, les Nations Unies, n'avions initié rien pour ce

  9   qui est de l'emploi de la force, nous ne faisions que réagir à l'emploi de

 10   la force.

 11   Q.  Et si la force était employée, à ce moment-là, pour ce qui est des

 12   règles de l'engagement, vous pouviez répondre en qualité d'autodéfense ?

 13   R.  Oui. Les individus se trouvant dans cette situation, oui.

 14   Q.  Et pour ce qui est de la notion des frappes aériennes, les frappes

 15   aériennes n'étaient pas comprises dans les règles de l'engagement ?  

 16   R.  Non, pas dans la documentation, si vous voulez, mais les règles

 17   d'engagement avaient été données aux commandants sur le terrain et à leurs

 18   subordonnés. Et pour ce qui est maintenant du niveau qui était le mien, il

 19   y avait effectivement des règles d'engagement, et il s'agissait d'une série

 20   de documents expliquant quelles sont les circonstances dans lesquelles, par

 21   exemple, les frappes aériennes pouvaient être employées.

 22   Q.  Très bien. Lorsqu'on parle des règles d'engagement dont vous faites

 23   référence et vous nous expliquez dans quelles circonstances et quand

 24   pouvait-on faire appel aux frappes aériennes, est-ce que ces accords dans

 25   le cadre du fonctionnement du mandat du maintien de la paix ?

 26   R.  Il n'y a pas de mandat pour ce qui est du maintien de la paix.

 27   Q.  D'accord. Mais dites-moi, s'il vous plaît, si ces documents tombaient

 28   sous le mandat que vous aviez, est-ce qu'ils faisaient partie de votre

Page 6291

  1   mandat, c'est-à-dire d'engager les frappes aériennes ?

  2   R.  De nouveau, il m'est bien difficile de suivre votre question.

  3   Q.  Non. Je vais essayer de reformuler ma question si vous trouvez ma

  4   question difficile. Je vais la reformuler.

  5   Lorsque les décisions avaient été prises pour avoir recours aux frappes

  6   aériennes, où avez-vous trouvé l'autorité de procéder de la sorte ?

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous parlez des frappes aériennes de

  8   la FORPRONU, ou bien de qui exactement ?

  9   M. GUY-SMITH : [interprétation] Non, je parle des frappes aériennes de la

 10   FORPRONU.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ma question était à savoir si vous

 12   pensiez aux frappes aériennes de la FORPRONU.

 13   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 14   Q.  Y a-t-il eu des frappes aériennes de la FORPRONU ?

 15   R.  Le commandant de la FORPRONU et ses supérieurs pouvaient avoir recours

 16   aux forces aériennes et les forces aériennes étaient menées par une force

 17   telle l'OTAN.

 18   Q.  Lorsque le commandant de la FORPRONU ou ses supérieurs faisaient une

 19   demande pour avoir recours aux frappes aériennes, quels étaient les

 20   critères employés pour que cette demande soit faite ?

 21   R.  Pour être tout à fait précis, il me faudrait examiner une série de

 22   documents et il faudrait commencer par les résolutions des Nations Unies et

 23   d'autres documents qui ont été publiés au cours des années 1993 et 1994

 24   portant sur ces circonstances. Mais si je me souviens bien, il y avait deux

 25   raisons, pour m'exprimer ainsi, pour avoir recours aux forces aériennes. Le

 26   premier était le soutien aérien rapproché dans le cadre d'une autodéfense,

 27   d'une unité ou bien d'un élément de la FORPRONU ou des Nations Unies sur le

 28   terrain.

Page 6292

  1   Q.  Et quel était le deuxième critère ?

  2   R.  Le deuxième critère dans lequel on faisait appel aux frappes aériennes,

  3   c'était lorsqu'on parle des zones d'exclusion, c'est-à-dire de renforcir

  4   les zones d'exclusion, mais il me faut revenir en arrière un peu pour vous

  5   expliquer. Donc il y avait des zones protégées et au fil du temps, ces

  6   zones protégées étaient devenues des zones d'exclusion et à l'intérieur de

  7   ces zones d'exclusion, il n'était pas censé d'avoir d'artillerie lourde ou

  8   bien cette artillerie lourde devait se trouver à des points de

  9   rassemblement d'armes. On pouvait donc avoir recours aux frappes aériennes

 10   pour donner un appui à ces zones d'exclusion et ceci a commencé, si je me

 11   souviens bien, en 1994.

 12   Q.  Donc pour ce qui est du recours aux frappes aériennes pour renforcer

 13   les zones d'exclusion, j'imagine que c'était employé seulement lorsqu'il y

 14   avait une violation des zones d'exclusion par les deux parties

 15   belligérantes et c'est à ce moment-là que la FORPRONU pouvait d'abord

 16   demander dans sa qualité de FORPRONU de remédier à la situation en scindant

 17   la zone d'exclusion et en la ramenant à son état initial, par là je veux

 18   dire, il y avait certaines zones où l'artillerie n'avait pas sa place.

 19   R.  Oui, effectivement. L'idée, si vous voulez, était celle de dire que

 20   l'on ne s'attendait pas à employer immédiatement des frappes aériennes dès

 21   qu'une première arme apparaissait dans une zone d'exclusion, bien sûr.

 22   C'est graduellement que ceci devenait important.

 23   Q.  Bien sûr que non.

 24   R.  [aucune interprétation]

 25   Q.  Lorsque vous parlez de cela, vous voulez dire qu'il fallait que la

 26   FORPRONU se comporte de façon graduelle ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Est-ce que ce qu'on s'attendait de la FORPRONU à ce qu'elle réponde par

Page 6293

  1   ses frappes aériennes seulement lorsqu'il y avait une menace, n'est-ce pas

  2   ?

  3   R.  Oui. A partir du moment où les zones d'exclusion ont été créées,

  4   c'était le cas.

  5   Q.  Pouvez-vous nous dire s'il n'y a jamais eu une menace qui avait été

  6   faite à l'ABiH pour ce qui est d'une violation de la zone d'exclusion par

  7   la FORPRONU ? Et par une menace j'entends les frappes aériennes ?

  8   R.  La FORPRONU ne pouvait pas violer les zones d'exclusion.

  9   Q.  Non, l'ABiH, je parle de l'armée des Serbes de Bosnie.

 10   R.  Je croyais que vous parliez de la FORPRONU en violation

 11   de --

 12   Q.  Non, il aurait fallu mettre une virgule. Donc voilà, ma question est de

 13   savoir est-ce  --

 14   R.  [aucune interprétation]

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous l'avez entendu ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Ne parlons pas tous en même

 18   temps.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Les zones d'exclusion, lorsqu'elles ont été

 20   créées et lorsqu'elles ont été autorisées par le Conseil de sécurité,

 21   comprenaient les clauses selon lesquelles les avions de l'OTAN pouvaient

 22   être utilisés pour renforcer certaines zones d'exclusion. Ceci s'appliquait

 23   à tous.

 24   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 25   Q.  Très bien, merci. Ce que j'essaie de comprendre ici, c'est le rôle

 26   qu'avait joué la FORPRONU. Nous avons entendu des témoignages selon

 27   lesquels le rôle de la FORPRONU était un rôle de maintien de la paix. Vous

 28   avez rejeté cette affirmation.

Page 6294

  1   J'aimerais simplement savoir de quelle façon vous considérez la présence de

  2   la FORPRONU en Bosnie-Herzégovine pendant que vous y étiez de tout façon.

  3   R.  Effectivement, j'ai rejeté le titre de maintien de la paix, vous pensez

  4   que c'est un peu étroit comme réflexion, mais il n'y avait pas de paix à

  5   garder, voilà. En réalité, le concept du maintien de la paix à l'époque et

  6   des Nations Unies sur le terrain, alors que vous étiez là entre deux

  7   entités qui avaient donné leur aval pour que vous soyez là, pour que vous

  8   mainteniez la paix. Par exemple, lorsque les Nations Unies étaient

  9   déployées aux Chypres, c'était ainsi pendant plusieurs décennies.

 10   Q.  Mais ce n'était pas le cas pendant que vous étiez en Bosnie-Herzégovine

 11   ?

 12   R.  Non, effectivement. C'est la raison pour laquelle j'ai dit que nous

 13   n'étions pas une force de maintien de la paix. Toutefois, il y avait un

 14   très grand nombre de personnes à l'époque qui avaient compris ce que nous

 15   faisions sur place et pourquoi nous avions été envoyés là, et

 16   effectivement, il y a eu plusieurs exemples de cette pensée, c'est-à-dire

 17   que vous ne prenez pas part au combat. Vous êtes là pour améliorer les

 18   conditions des réfugiés, ainsi de suite.

 19   Q.  Je comprends très bien ce que vous nous dites, mais vous pourriez peut-

 20   être essayer d'expliciter encore mieux, je suis peut-être naïf, mais j'ai

 21   entendu déjà une distinction entre quelqu'un qui crée la paix et qui

 22   maintien la paix. Par là je veux dire que l'un a le mandat de faire la paix

 23   et peut donc prendre part à un comportement actif, c'est-à-dire dans les

 24   offensives ou prendre part au pilonnage pour en arriver à l'objectif qui

 25   est de garder la paix qui est bien différent bien sûr du concept de

 26   maintien de la paix.

 27   R.  Je ne suis pas d'accord avec le lien direct que vous faites entre les

 28   offensives, le pilonnage et le fait d'imposer la paix, de garder la paix.

Page 6295

  1   Q.  Est-ce que vous voyez une distinction entre le "peacemaking" et le

  2   "peacekeeping", donc le fait d'imposer la paix et le fait de garder la paix

  3   ?

  4   R.  Effectivement, alors si vous voulez imposer la paix, vous devez la

  5   garder, vous devez maintenir la paix.

  6   Q.  Pour ce qui est de l'imposition de la paix, quelles sont les activités

  7   diverses qui peuvent exister ? Je parle d'un point de vue militaire, n'est-

  8   ce pas.

  9   R.  Si une entité politique souhaite employer son armée pour créer un état

 10   de paix, ceci peut être fait. Mais pour ce faire, il faut prendre une

 11   décision hâtive, c'est-à-dire il faut décider ce que cette armée doit faire

 12   afin d'en arriver à cet objectif.

 13   Q.  Pour ce qui --

 14   R.  A cette fin.

 15   Q.  Pour ce qui est maintenant de la présence de la FORPRONU, est-ce que

 16   d'après vous les Nations Unies souhaitaient que l'armée soit employée pour

 17   créer la paix ?

 18   R.  Les actions militaires étaient là en tant qu'autodéfense, par la suite

 19   pour une défense qui s'intensifiait et pour assurer la défense des réfugiés

 20   qui se trouvaient dans la zone protégée.

 21   Q.  Et ça, c'était la FORPRONU ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Pour l'OTAN, c'est un peu différent, le rôle de l'OTAN, d'après vous ?

 24   R.  Oui, c'était différent dans le sens que l'OTAN n'était pas sur le

 25   terrain mais bien dans l'air.

 26   Q.  Et outre le fait d'avoir cette distinction de qui se trouvait sur le

 27   terrain et qui se trouvait dans l'air, l'OTAN n'était pas dans la même

 28   situation que la FORPRONU, et par là je veux dire que l'OTAN avait la

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  1   capacité de mener des frappes aériennes en l'absence d'une autodéfense.

  2   R.  Non.

  3   Q.  Est-ce que vous êtes en train de nous dire que les frappes aériennes de

  4   l'OTAN en 1994 et 1995 étaient des actions

  5   d'autodéfense ?

  6   R.  Non, pas pour ce qui est de l'OTAN. L'OTAN était là pour ces raisons-

  7   là, soit parce qu'on se servait de ces frappes aériennes en tant

  8   qu'autodéfense dans le cadre des Nations Unies ou bien pour ce qui est des

  9   zones d'exclusion.

 10   Q.  Quand on parle des zones d'exclusion, ce n'était pas en autodéfense ?

 11   R.  Comme j'ai dit un peu plus tôt, la défense et l'amélioration de la

 12   situation des zones de sécurité, on a commencé à soutenir l'idée des zones

 13   d'exclusion et ceci s'est développé au cours du mois de mars 1995.

 14   Q.  Mais ici on parle d'informations qui avaient été communiquées aux deux

 15   armées, l'armée des Serbes de Bosnie et à l'ABiH ?

 16   R.  Oui, c'était tout à fait public.

 17   Q.  Très bien. Alors vous avez dit un peu plus tôt que d'après vous aucune

 18   des parties n'était intéressée à maintenir ce que vous aviez appelé la

 19   "cessation des hostilités", n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui, c'était mon point de vue. Maintenant, à savoir si c'était une

 21   vraie détermination de leur part, je ne suis pas tout à fait sûr de cela.

 22   Q.  Bien. Alors employons le terme votre "opinion". Si je ne m'abuse, vous

 23   aviez déterminé --

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'était votre opinion.

 25   M. GUY-SMITH : [interprétation] Non, je veux dire, "Vous avez déterminé,"

 26   Monsieur le Président, et je vais dire pourquoi.

 27   Q.  Alors vous aviez pris la détermination, et maintenant je fais référence

 28   à votre déclaration au paragraphe 34, qu'à la fin de cette série de

Page 6297

  1   réunions qui avaient eu lieu avec le général Mladic, "J'en étais arrivé à

  2   la conclusion que les Serbes de Bosnie avaient conclu qu'il fallait

  3   continuer d'autres combats et que c'était inévitable."

  4   M. SAXON : [interprétation] Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Saxon.

  6   M. SAXON : [interprétation] Simplement pour aider au témoin, pourrait-on

  7   dire au témoin de quelle date on parle.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il faudrait d'abord présenter la

  9   déclaration au témoin afin qu'il puisse en prendre connaissance.

 10   M. GUY-SMITH : [interprétation] Certainement. C'est la pièce P2348. C'est à

 11   la page 9, paragraphe 34.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup.

 13   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 14   Q.  Très bien. Alors maintenant je fais référence aux termes que vous avez

 15   employés. Vous dites :

 16   "A la fin de cette série de réunions, j'en étais arrivé à la conclusion que

 17   les Serbes de Bosnie avaient conclu que d'autres combats étaient absolument

 18   inévitables et qu'il fallait absolument en arriver à une forme de

 19   conclusion avant la fin de l'année."

 20   R.  Oui, tout à fait.

 21   Q.  D'accord ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Justement, c'est à ce moment-là que vous vous étiez forgé une opinion,

 24   à savoir que c'était une thèse, comme vous l'avez appelée; vous l'avez

 25   appelée votre thèse ?

 26   R.  Oui, tout à fait.

 27   Q.  Pourriez-vous décrire aux Juges de la Chambre quelle était cette thèse

 28   qui était la vôtre ?

Page 6298

  1   R.  D'abord, c'était une thèse. C'était quelque chose sur quoi je

  2   travaillais. Ce n'était pas que ce qui allait se passer, mais c'était

  3   réellement ma compréhension de la situation dans laquelle je ne pouvais pas

  4   avoir les cartes de tout le monde et les voir.

  5   Il était essentiel, comme j'ai déjà dit, de comprendre l'équilibre des

  6   forces, et comme je l'ai déjà dit plus tôt, les deux parties essayaient

  7   d'en arriver à une conclusion. Donc les deux parties voulaient en arriver à

  8   une conclusion avant la fin de l'année. Pour ce qui est des enclaves

  9   orientales, maintenant du point de vue des Serbes de Bosnie, pour ce qui

 10   est de ces enclaves orientales, elles étaient derrières les forces serbes

 11   et elles absorbaient une partie des effectifs qui auraient été mieux

 12   déployés ailleurs.

 13   Q.  Arrêtons-nous ici quelques instants. Vous dites "du point de vue des

 14   Serbes de Bosnie," est-ce que dans votre thèse vous aviez analysé les

 15   effectifs qui étaient disponibles aux Serbes de Bosnie et à l'ABiH ?

 16   R.  Oui, justement, c'est ce que je voulais dire lorsque j'ai parlé de

 17   l'équilibre des forces, ainsi de suite.

 18   Q.  D'accord. Et quelle était votre analyse pour ce qui est de ceci,

 19   quelles étaient vos conclusions ?

 20   R.  Bien, ma conclusion était que les Serbes de Bosnie avaient un plus

 21   grand territoire à défendre et ils avaient les effectifs pour défendre ce

 22   plus grand territoire, en réalité.

 23   Q.  Bien. Vous nous avez dit, dans le même paragraphe, que les Nations

 24   Unies étaient employées comme un bouclier par les Bosniens et comme des

 25   otages par les Serbes.

 26   Alors c'est une idée que vous vous êtes forgée pour ce qui est de la

 27   présence de la FORPRONU dans la région, donc ce dilemme opposant le concept

 28   d'otages et de boulier ?

Page 6299

  1   R.  Oui, c'était dans les enclaves orientales. La présence de la FORPRONU

  2   dans l'enclave a permis de représenter une sorte de bouclier pour les

  3   forces bosniennes pour ce qui est de l'intérieur. Et d'autre part, nous,

  4   les Nations Unies, nous étions également dans l'enclave, donc nous

  5   soutenions ces personnes et nous devions mener notre propre mandat, qui

  6   était de faire parvenir l'aide dans l'enclave, nous étions les otages des

  7   Serbes de Bosnie.

  8   Q.  S'agissant de cette première question que vous venez de mentionner, à

  9   savoir que les Nations Unies étaient présentes dans les enclaves ainsi que

 10   des membres de l'ABiH, pourriez-vous nous dire de quelle manière lors de la

 11   livraison de l'aide humanitaire, vous faisiez distinction entre les non-

 12   militaires et militaires, ou leur utilisation possible par les militaires ?

 13   R.  Il faudra poser cette question à l'UNHCR qui s'occupait de la

 14   distribution de l'aide humanitaire ou à Médecins sans frontières ou

 15   d'autres. Ma mission était de faire en sorte que l'aide arrive sur place et

 16   non pas de m'occuper de sa distribution.

 17   Q.  Bien, s'agissant de ce que vous deviez faire là-bas, les forces de la

 18   FORPRONU étaient inévitablement perçues comme une force qui était partiale,

 19   qui prenait partie, n'est-ce pas ?

 20   M. SAXON : [interprétation] Tout d'abord, la question n'est pas claire. On

 21   dit perçu inévitablement, mais par qui ? On parle là des perceptions, cela

 22   relève de la conjecture.

 23   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vais essayer de reformuler la question.

 24   Q.  Vous nous avez dit que la raison de votre présence sur place était de

 25   faire arriver l'aide humanitaire dans l'enclave ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Il y avait des vivres dans cette aide, du carburant, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui.

Page 6300

  1   Q.  Des médicaments ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  D'autres choses ?

  4   R.  Ecoutez, il y avait des couvertures, d'autres choses, mais il faudra

  5   regarder les listes.

  6   Q.  Bien. S'agissant de l'aide qui a été livrée sur place, vous en tant que

  7   commandant de la FORPRONU, étiez-vous au courant du fait qu'il y avait des

  8   soldats à l'intérieur de l'enclave ?

  9   R.  Oui. Vous pensez aux soldats de l'ABiH ou des Nations Unies ?

 10   Q.  De l'ABiH.

 11   R.  Oui, je suppose que oui.

 12   Q.  Et de la FORPRONU ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Alors est-ce que vous avez jamais reçu des protestations portant sur la

 15   livraison de l'aide humanitaire aux enclaves de la part des Serbes de

 16   Bosnie, de l'aide livrée aux soldats de l'ABiH ?

 17   R.  Je ne comprends pas votre question. Il n'y avait pas de forces de

 18   Serbes de Bosnie à l'intérieur de l'enclave.

 19   Q.  Non. Ma question était formulée différemment. Je vous ai demandé si des

 20   forces des Serbes de Bosnie ont protesté au sujet de l'aide délivrée là où

 21   il y avait des soldats membres de l'ABiH ?

 22   R.  Oui, à quelques reprises, du moins une reprise je me souviens bien que

 23   nous avons reçu une complainte de leur part, mais je ne peux pas vous

 24   donner des détails.

 25   Q.  Bien, et cela portait sur la question de votre assistance ou aide. Non,

 26   je vais retirer cette question. Donc vous étiez en train d'aider un des

 27   belligérants, n'est-ce pas ?

 28   R.  Si je me souviens bien, cette plainte était beaucoup plus spécifique

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  1   que cela. Elle portait sur des choses qui étaient trouvées dans un des

  2   camions, quelque chose qui ne devait pas s'y trouver.

  3   Q.  De quoi s'agit-il ?

  4   R.  C'était soit des armes, soit des munitions. Je ne me souviens plus

  5   exactement, mais c'était à peu près ça, c'était un cas très spécifique.

  6   Q.  Alors la plainte portait sur le fait que les ressources de la FORPRONU

  7   sont utilisées afin de livrer des armes et des munitions aux membres de

  8   l'armée bosniaque ?

  9   R.  Non, cela a été retrouvé et la livraison a été arrêtée.

 10   Q.  Et qui est-ce qui l'a arrêtée ?

 11   R.  L'inspection des Serbes de Bosnie. Ils sont venus, ils ont trouvé ceci.

 12   Q.  Donc cela a dû quand même affecter votre crédibilité, n'est-ce pas ?

 13   M. SAXON : [interprétation] Objection.

 14   On demande au témoin de nouveau à se lancer dans des conjectures. Et puis

 15   crédibilité dans les yeux de qui.

 16   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 17   Q.  Bien. Je vais parler maintenant de convoi. Dites-nous, est-ce que cela

 18   représentait pour vous une source de préoccupation le fait qu'un convoi de

 19   la FORPRONU a été arrêté et que des armes et des munitions y ont été

 20   retrouvées par des Serbes de Bosnie ?

 21   R.  Bien sûr, cela nous préoccupait. Mais il ne s'agissait pas d'un convoi

 22   de la FORPRONU. Nous étions là pour protéger les convois, pour les aider à

 23   arriver à leur destination, mais nous ne les chargions pas.

 24   Bien sûr, malgré ceci, après cet événement j'ai commencé à consacrer

 25   beaucoup plus d'attention à la manière dont ces camions étaient gérés.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et qui fournissait cette aide ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout d'abord, c'est le HCR qui organisait les

 28   livraisons.

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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et cette livraison-là où il y avait

  2   des armes, qui était censé recevoir ces armes ou ce convoi ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me souviens pas. Si je me souviens bien,

  4   l'incident est parvenu au début de 1995.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

  6   M. GUY-SMITH : [interprétation]

  7   Q.  Maintenant je vais passer au paragraphe 40 de votre déclaration. Si

  8   vous pouvez confirmer ce que vous nous avez déjà dit, mais très brièvement,

  9   c'est-à-dire que vous avez eu l'opinion qui était que le gouvernement de

 10   Bosnie n'avait aucune intention de prolonger l'accord sur la cessation des

 11   hostilités au-delà de la fin du mois d'avril.

 12   R.  Au paragraphe 40, oui.

 13   Q.  Compte tenu de ceci, est-ce que cela a eu une influence sur votre

 14   manière de voir les choses, au moment où vous avez vu qu'ils se dirigeaient

 15   clairement vers un non-respect de cet accord de cessation des hostilités ?

 16   R.  Oui, les combats avaient déjà commencé et la situation a changé.

 17   Q.  Bien. S'agissant maintenant du paragraphe 43, on parle là d'un

 18   entretien que vous avez vu avec Karadzic, le président de la Republika

 19   Srpska, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Et vous avez rencontré Karadzic parce que Mladic refusait de vous

 22   rencontrer ?

 23   R.  Ecoutez, ce n'était pas une alternative, tout simplement Mladic

 24   refusait de me rencontrer et Karadzic l'a accepté, donc je l'ai rencontré,

 25   mais ce n'était pas soit l'un soit l'autre.

 26   Q.  Oui, mais puisque Mladic a refusé de vous rencontrer, c'est pour ça que

 27   vous vous êtes entretenu avec Karadzic, vous avez pris contact avec lui ?

 28   R.  Oui, mais vous le dites de telle manière qu'on ait l'impression que je

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  1   devais rencontrer soit l'un soit l'autre, alors que ce n'était pas le cas.

  2   Tout simplement j'ai rencontré le chef des Serbes de Bosnie. Je l'aurais

  3   fait de toute manière.

  4   Q.  Mais vous dites que c'était le chef des Serbes de Bosnie ?

  5   R.  Oui. Il était le président des Serbes de Bosnie.

  6   Q.  Bien. Et votre communication avec le général Mladic, pour quelle raison

  7   a-t-elle été interrompue, le savez-vous ?

  8   R.  Entre autres choses, parce qu'il y a certainement beaucoup de raisons

  9   dont je ne suis pas au courant, parce que j'ai rejeté deux de ses officiers

 10   de liaison envoyés de son commandement vers le commandement britannique du

 11   secteur Sarajevo, ou plutôt, du secteur sud-ouest. Je les ai donc renvoyés

 12   à son commandement, deux semaines avant ce refus de me rencontrer, si je me

 13   souviens bien de la chronologie des événements.

 14   Q.  S'agissant maintenant de votre rencontre avec Karadzic, il vous a dit

 15   qu'il y aurait une contre-attaque s'il y a une attaque ?

 16   R.  Si j'ai écrit ça dans la déclaration, alors c'est comme ça.

 17   Q.  En fait, ce commentaire porte-t-il aux attaques menées par l'OTAN, les

 18   attaques menées par les forces des Nations Unies, par les forces de l'ABiH,

 19   pourriez-vous nous l'expliquer, s'il vous plaît ?

 20   R.  Ecoutez, je pense qu'il s'agit de l'ABiH et les forces des Nations

 21   Unies n'ont mené aucune attaque, de toute façon.

 22   Q.  Paragraphe 44, vous parlez de votre discussion avec Karadzic au sujet

 23   des attaques menées par l'OTAN. Vous nous dites :

 24   "Il a déclaré que l'ABiH attaquait depuis Srebrenica et d'une manière

 25   régulière et que l'armée des Serbes de Bosnie avait subi de grandes pertes.

 26   Karadzic n'a exprimé aucune préoccupation par la menace exprimée par l'OTAN

 27   et a annoncé qu'il était prêt pour les actions prises par l'OTAN."

 28   R.  Oui.

Page 6304

  1   Q.  Bien. A-t-il expliqué un peu plus dans les détails de quelle manière

  2   cela allait se passer, quels étaient ses plans ?

  3   R.  Ecoutez, je ne me souviens de rien de plus que ce qui figure dans ce

  4   paragraphe numéro 44. Ça a dû être tout.

  5   Q.  Bien. Et au paragraphe 45, vous avez indiqué la chose suivante :

  6   "Ce commentaire et son intonation ont montré clairement que Karadzic

  7   exerçait un degré très élevé de contrôle politique et qu'il était

  8   effectivement en charge des Serbes de Bosnie, de leur stratégie à ce

  9   moment-là."

 10   R.  Oui. C'était mon impression.

 11   Q.  Bien. Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous expliquer sur la base de

 12   quoi vous êtes parvenu à cette conclusion, nous expliquer ce qui vous a

 13   fait dire ceci, qu'il ne s'agit pas seulement de conjectures de votre part.

 14   R.  Ecoutez, je ne me souviens plus vraiment du déroulement de cette

 15   discussion. J'ai essayé tout simplement avec mon entourage de comprendre

 16   quelles étaient les relations, mais je ne sais pas dans quelle mesure

 17   c'était basé sur des hypothèses.

 18   Q.  Bien. Alors restons maintenant dans le cadre de votre expérience avec

 19   le général Mladic. Peut-on dire, sur la base de votre expérience acquise

 20   lors de ces quelques rencontres avec lui, qu'il n'avait aucune aspiration

 21   politique, qu'il n'était pas du tout intéressé par la politique, qu'il se

 22   limitait à sa carrière militaire ?

 23   R.  Ecoutez, je ne crois pas l'avoir dit de cette manière-là.

 24   Q.  Dites-nous alors ce que vous en pensez.

 25   R.  Comme je l'ai déjà expliqué plus tôt, il occupait un poste où il était

 26   censé traduire les décisions politiques en faits militaires. Dans un poste

 27   pareil, vous ne pouvez pas vous détacher de la politique. Il est vrai que

 28   vous êtes militaire, mais vous faites partie d'un processus politique, et

Page 6305

  1   j'explique au paragraphe 45 : "A mon avis, avec le recul…"

  2   Je pense que ce que je dis là, ça ne veut pas dire qu'il était

  3   complètement détaché du processus politique.

  4   Q.  Mais ce que je voulais dire, c'est que vous avez déclaré que Mladic

  5   n'avait pas d'aspiration politique.

  6   R.  Bien sûr, je n'ai jamais dit que Mladic voulait être président. Ça,

  7   c'est sûr, si c'est ce que vous voulez dire.

  8   Q.  Bien. C'est exactement ce que je voulais vous demander. Donc il vous a

  9   clairement montré qu'il respectait, qu'il appliquait les plans ou les idées

 10   politiques de son président, Dr Karadzic, lors de ses entretiens avec vous

 11   ?

 12   R.  Non. Je ne me souviens pas qu'il ait dit quelque chose de tel.

 13   Q.  Bien. Peut-être que je formule mal mes questions, mais vous comprenez.

 14   Il s'agit de l'intention.

 15   M. SAXON : [interprétation] Ecoutez, on demande encore au témoin de se

 16   prononcer sur des conjectures.

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 18   Q.  Pourriez-vous nous aider, s'il vous plaît --

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Reformulez, s'il vous plaît.

 20   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bien.

 21   Q.  Vous souvenez-vous d'une déclaration ou d'une formule ou d'une

 22   expression quelconque que le général Mladic aurait utilisée qui vous ait

 23   conduit à cette conclusion, à savoir qu'il ne s'intéressait pas à la

 24   politique, il ne rêvait pas de devenir président.

 25   R.  Non. Je me souviens pas qu'il m'ait dit ce qu'il voulait devenir.

 26   Q.  Bien. Donc ça veut dire, vous êtes arrivé à cette conclusion en

 27   l'absence d'une déclaration disant le contraire ?

 28   R.  Oui.

Page 6306

  1    Q.  Bien. S'agissant maintenant de votre thèse que vous avez élaborée en

  2   mars et qui porte sur cet accord sur la cessation des hostilités et les

  3   conséquences découlant de cet accord, je suppose que vous avez également

  4   entrepris une analyse des conséquences de l'éclatement d'un conflit dans

  5   les enclaves, n'est-ce pas ?

  6   R.  Non. Ce n'est pas exact. En fait, vous présentez cette thèse comme

  7   quelque chose qui est beaucoup plus important que je ne le pensais moi-même

  8   à l'époque.

  9   Q.  Bien. Avez-vous pris en compte les conséquences que pourrait avoir le

 10   non-respect de l'accord sur la cessation des hostilités concernant les

 11   enclaves ?

 12   M. SAXON : [interprétation] La question vient d'être posée. Le témoin y a

 13   répondu.

 14   M. GUY-SMITH : [interprétation] J'ai posé une question différente.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Où est-ce que vous voyez que cette

 16   question a été posée ?

 17   M. SAXON : [interprétation] La question précédente, lignes 8 à 12. Ensuite

 18   la réponse commence à la ligne 13. Moi, j'ai l'impression qu'il s'agit

 19   d'une même question.

 20   M. GUY-SMITH : [interprétation] Ce n'est pas la même question. Une porte

 21   sur la thèse, et l'autre porte sur un facteur qui a été pris ou pas en

 22   compte. Le témoin m'a corrigé et il m'a dit que j'accordais trop

 23   d'importance à cette thèse, alors maintenant je lui demande si lors de son

 24   analyse il a pris tel ou tel facteur en compte, c'est tout.

 25   M. SAXON : [interprétation] Je n'arrive pas à comprendre quelle est la

 26   différence entre le fait d'entreprendre une analyse au sujet d'un événement

 27   et la prise en compte des conséquences de ce même événement ?

 28   M. GUY-SMITH : [interprétation] Tout simplement, si on analyse quelque

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  1   chose on est tenu de prendre en compte plusieurs facteurs, c'est tout.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

  3   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous avez pris en compte

  5   les conséquences qui s'en suivraient si l'accord sur la cessation

  6   d'hostilités n'était plus en vigueur concernant les enclaves ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je l'ai fait. Il fallait y penser, parce

  8   qu'on avait déjà eu beaucoup de difficultés pour faire parvenir l'aide dans

  9   les enclaves. D'une manière générale, nous étions confrontés à des

 10   difficultés relatives à l'exercice de notre mission. Evidemment j'ai dû

 11   penser à ceci à l'époque, je m'en souviens.

 12   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 13   Q.  Bien. J'aimerais maintenant qu'on aborde l'incident de Markale II. On

 14   va s'y arrêter un peu plus longtemps.

 15   S'agissant de Markale II, immédiatement une question portant sur le

 16   responsable de ce pilonnage a été posée, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui, nous avons dû mener une enquête, bien sûr.

 18   Q.  S'agissant maintenant de cette enquête qui a été conduite, peut-on dire

 19   qu'un certain nombre d'opinions différentes sur les responsables ont été

 20   exprimées ? Et je vais essayer maintenant d'être un peu plus précis.

 21   Si je ne me trompe, pendant cette enquête, vous avez réussi à

 22   exprimer vos préoccupations au général Mladic concernant cet événement ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Vous avez demandé que le général Mladic conduise une enquête pour

 25   établir si c'était la VRS qui avait pilonné, qui avait causé l'incident de

 26   Markale II, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui, je crois que je l'ai fait, mais je ne me souviens pas exactement

 28   de ce que je lui ai demandé.

Page 6308

  1   Q.  Bien. Je --

  2   R.  En fait, vous avez peut-être une trace écrite quelque part de ceci.

  3   Q.  Oui. Je vais vous lire maintenant quelque chose qui vous aidera à vous

  4   rappeler si vous avez demandé au général de mener une enquête ou pas.

  5   M. GUY-SMITH : [interprétation] Le document auquel je me réfère c'est le

  6   document qui porte le numéro R0662224 déjà versé au dossier, page 25.

  7   "A 14 heures 13, le 28 avril, le général Smith a parlé au téléphone avec le

  8   général Mladic pendant environ 10 minutes au sujet de pilonnage à Sarajevo

  9   ce matin. Mladic a informé le général Smith du fait qu'il avait appris que

 10   cet incident avait eu lieu cinq minutes avant l'appel téléphonique. Le

 11   général Smith l'a informé des circonstances de ce pilonnage du fait que

 12   plus de 30 personnes ont été tuées et plus de 40 personnes blessées.

 13   "Le général Smith a également expliqué qu'il s'agissait d'un incident très

 14   grave et m'a informé également du fait que ce pilonnage a été une violation

 15   de l'ultimatum de l'OTAN. Mladic a confirmé qu'il ferait une enquête."

 16   Vous souvenez-vous de cela ?

 17   R.  Je --

 18   Q.  Concernant --

 19   R.  Oui, mais c'est lui qui l'a dit. Je ne l'ai pas demandé.

 20   Q.  Bien.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 22   M. GUY-SMITH : [aucune interprétation]

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] On va faire une pause maintenant.

 24   --- L'audience est suspendue à 12 heures 02.

 25   --- L'audience est reprise à 12 heures 31.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Guy-Smith, c'est à vous.

 27   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 28   Q.  Nous avons établi que vous n'avez pas demandé au général Mladic

Page 6309

  1   d'enquêter, et qu'en fait, le général Mladic, si j'ai bien compris, a lancé

  2   une enquête ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  En fin de compte, il a fait rapport auprès de vos services.

  5   M. GUY-SMITH : [interprétation] Si cela peut nous aider, il s'agit de la

  6   pièce -- Pourrions-nous avoir la pièce P2370 à l'écran.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais si on passe à cette pièce,

  8   qu'allons-nous faire de la pièce R0662224 ?

  9   M. GUY-SMITH : [interprétation] Nous n'en avons pas besoin.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 11   M. GUY-SMITH : [interprétation] Il nous faudrait la page 5, s'il vous

 12   plaît, à l'écran.

 13   M. SAXON : [interprétation] Si je puis vous aider, je pense que M. Guy-

 14   Smith cherche la page 9.

 15   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vous remercie.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Saxon.

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation] C'est tout à fait ça. Je vous remercie.

 18   Pourrions-nous avoir, s'il vous plaît, le bas de la page, le troisième

 19   paragraphe, c'est-à-dire 291000, août 1995.

 20   Q.  Je voudrais faire référence au deuxième paragraphe de ce document.

 21   Vous avez parlé au général Mladic. Mladic vous a dit que d'après ses

 22   informations aucune force de la VRS n'était impliquée dans l'attaque de

 23   Markale II.

 24   Vous lui avez dit quelles étaient vos questions en ce qui concerne le

 25   type d'armes trouvées sur place, vous lui avez aussi fait part d'autres

 26   préoccupations de votre part, préoccupations internationales, le fait aussi

 27   qu'on essayait de déterminer le responsable.

 28   Ensuite faisons référence au deuxième paragraphe. Il est

Page 6310

  1   écrit :

  2   "Mladic a déclaré que toutes les positions avaient été vérifiées et qu'il

  3   était certain qu'aucune des positions n'avait lancé de tirs. Il a demandé à

  4   nouveau qu'une commission conjointe soit établie pour enquêter sur cet

  5   incident étant donné qu'il y avait certains indices qui semblaient suggérer

  6   que ceci avait été orchestré par l'ABiH."

  7   Donc nous n'allons pas nous lancer dans des spéculations à ce propos quant

  8   à savoir si c'est l'ABiH qui avait bel et bien orchestré cet incident, mais

  9   nous allons plutôt nous pencher sur la commission conjointe qui devait être

 10   établie pour enquêter sur le sujet qui avait été demandé par Mladic. Est-ce

 11   que cette commission a été mise sur pied ?

 12   R.  Non.

 13   Q.  A votre connaissance, y a-t-il eu, à un moment ou à un autre, une

 14   demande venant de la FORPRONU visant à impliquer des autorités de la RFY

 15   dans l'enquête portant sur cet incident de Markale ?

 16   R.  Non, je ne me souviens pas de quoi que ce soit de ce type.

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je n'ai plus besoin de cette pièce.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais avant qu'elle ne s'efface,

 19   pourriez-vous nous dire, Général Smith, pouvez-vous nous dire ce que veut

 20   dire le 291000 ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, c'est du jargon de l'armée du

 22   Royaume-Uni. C'est la façon dont nous gérons les dates, donc il s'agit du

 23   29 août 1995, 10 heures. Donc 29 c'est le jour, ensuite on donne l'heure.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Donc vous mettez la date

 25   entre le jour et le mois.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je ne sais pas du tout pourquoi c'est

 27   ainsi d'ailleurs.

 28   M. GUY-SMITH : [interprétation] Merci de cette clarification.

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 12      20 pages blanches insérées afin d’assurer l’équilibre entre les

 13      paginations anglaise et française.

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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation] Pourrions-nous maintenant avoir, s'il vous

  3   plaît, la pièce P2356 à l'écran.

  4   J'ai une page de garde pour ce document, j'en suis désolé.

  5   Q.  Je vais vous lire un passage de ce document, et ensuite je pense que je

  6   devrais présenter la pièce directement parce que j'ai la page de garde de

  7   ce document.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pourquoi voulez-vous le présenter

  9   directement ?

 10   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je dois en parler avec M. Saxon, j'imagine.

 11   J'ai une page de garde, il s'agit d'une page de garde de dépêche câblée

 12   venant du QG FORPRONU Sarajevo, bureau du commandant Rupert Smith, il

 13   s'agit d'un formulaire et ensuite le document est attaché en pièce jointe.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous voudriez que ce soit sur le

 15   rétroprojecteur peut-être ?

 16   M. GUY-SMITH : [interprétation] Très bien.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ainsi nous pourrons tous en

 18   bénéficier.

 19   M. GUY-SMITH : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, avoir le

 20   bas de ce document sur le rétroprojecteur.

 21   Q.  Je vais faire référence au deuxième paragraphe : "Nous souhaitons

 22   répéter nos opinions et nos préoccupations soulevées" --

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Saxon, vous êtes debout.

 24   M. SAXON : [interprétation] Je suis désolé d'interrompre mon éminent

 25   confrère, mais il y a un petit problème, je pense qu'il y a confusion. J'ai

 26   l'impression que la page que l'on voit ici est en fait la première page de

 27   la pièce P67, je pense que si on appelle le P67 d'ailleurs à l'écran on

 28   verra bien que c'est la même chose, c'est en fait le rapport définitif sur

Page 6332

  1   l'incident de Markale II.

  2   La page que nous avons ici à l'écran, on voit que la date est le 8

  3   septembre 1995. Ce qu'on avait précédemment à l'écran, c'est-à-dire la

  4   pièce P2356, est traité sous cote séparée.

  5   M. GUY-SMITH : [interprétation] Très bien. Je l'ai reçu comme cela. Si ça

  6   s'appelle le P67, parfait. Si la page de garde de mon document fait partie

  7   d'un autre document, pas de problème. Appelons le P67 à l'écran. Je n'ai

  8   pas envie de réinventer la roue.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ecoutez, avant de passer à cela, je

 10   vois que maintenant il y a en plus 19 heures 45 B. Alors c'est quoi ce B ?

 11   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Alors c'est quoi maintenant une heure

 13   avec B ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça vous donne le fuseau horaire. Ça devient un

 15   peu compliqué, je vous l'accorde.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] D'accord. Merci beaucoup.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que nous vivons dans un monde globalisé.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 19   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 20   Q.  Voyons le deuxième paragraphe de ce document, il est écrit :

 21   "Nous souhaitons réitérer notre point de vue et nos préoccupations qui ont

 22   déjà été soulevés dans notre fax du 021925Z, septembre."

 23   Donc cela doit être très certainement --

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le 2 septembre. Aidez-nous, s'il vous

 25   plaît.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, là c'est un champ de mines

 27   procédural, c'est très compliqué tout ça.

 28   L'une des raisons pour lesquelles on a ce système c'est que cela fonctionne

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  1   avec tous les systèmes de transmission, d'où qu'on soit dans le monde, on

  2   peut savoir exactement l'heure qu'il était lorsque cela a été envoyé. Donc

  3   il y a la date, l'heure, et ensuite il y a un petit suffixe. Si vous

  4   travaillez entre New York et Sarajevo, par exemple, il faut savoir

  5   exactement quel est le fuseau horaire qui a été utilisé pour envoyer le

  6   signal. Et Zulu c'est Greenwich, c'est zéro, c'est l'heure de Greenwich. Z

  7   c'est Zulu, donc deux heures avant Zulu c'est Bravo, et enfin ça marche

  8   comme ça et on revient jusqu'à Z après.

  9   C'est pour ça qu'on a ce Z, Zulu c'est heure de Greenwich. Donc il s'agit

 10   d'une dépêche qui venait de New York ou qu'on envoyait à New York, et il

 11   faut toujours bien sûr qu'il y ait référence au fuseau horaire pour que

 12   l'on sache exactement quelle est l'heure exacte par rapport à Greenwich.

 13   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 14   Q.  Très bien. Donc il est écrit, je poursuis :

 15   "Que ce rapport doit être traité avec énormément de soin et de discrétion.

 16   Nous devons être extrêmement prudents lorsque nous révèlerons au public nos

 17   éléments de preuve et les informations obtenues."

 18   Qu'est-ce que ça signifie exactement ?

 19   R.  Bien, c'est repris plus tard. On n'a rien à cacher, mais on ne voulait

 20   pas du tout rentrer dans la discussion qui avait cours à l'époque, c'est

 21   lui qui a commencé; non c'est lui; non c'est moi; non c'est l'autre, et

 22   cetera, et cetera, il y avait énormément d'hypothèses et de conjectures qui

 23   étaient lancées à ce propos à ce moment-là.

 24   Q.  Très bien. Donc lorsque vous dites : "Mais en donnant au public nos

 25   informations, nous risquons d'entrer dans une dispute d'experts dans un

 26   débat qui va mener à un jugement. D'autres soi-disant experts ont été très

 27   sélectifs dans les éléments qu'ils ont décidé de prendre en compte."

 28   Donc vous êtes en train de nous dire que c'est le débat à propos de qui

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  1   était responsable de l'incident de Markale, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Les informations objectives qui étaient disponibles n'étaient pas

  4   nécessairement détenues par tous les individus qui s'étaient lancés dans la

  5   discussion à propos de la responsabilité de l'incident ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  [aucune interprétation]

  8   R.  C'était le type, c'est pas lui; il ne savait pas, c'était des types

  9   d'arguments qui n'étaient pas du tout informés, on ne voulait pas les

 10   prendre en compte.

 11   Q.  Mais vous parlez de soi-disant experts. Donc pour ce qui est de

 12   l'expertise, vous nous dites qu'il y avait d'autres personnes qui étaient

 13   en train d'estimer qui pouvait bien être responsable en se basant sur les

 14   éléments de preuve dont ils disposaient, quels qu'ils soient ?

 15   R.  Ecoutez, je ne me souviens pas exactement du fond même du débat et de

 16   qui y participait d'ailleurs.

 17   Q.  Vous vous souvenez quand même d'un colonel russe qui s'appelait

 18   Demurenko ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Lui il évaluait qui était responsable de cet incident, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui, il était impliqué -- enfin, il faudrait que je trouve le

 22   déroulement exact des débats pour savoir qui a dit quoi à quel moment, mais

 23   je sais qu'à un moment ou à un autre il a été impliqué. Si je me souviens

 24   bien, à un moment son opinion a changé d'ailleurs. Mais je ne me souviens

 25   pas exactement du déroulement des débats.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc on est plutôt en train de se

 27   servir de la spéculation, n'est-ce pas ? Ils avaient quand même tous les

 28   mêmes éléments de preuve et il s'agissait de savoir comment interpréter ces

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  1   éléments de preuve.

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vais essayer d'y arriver, mais

  3   j'aimerais suivre un petit peu mon raisonnement.

  4   Q.  Donc le colonel Demurenko était un Russe qui faisait partie de la

  5   FORPRONU, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Il a fait une déclaration publique à propos de l'incident de Markale,

  8   n'est-ce pas?

  9   R.  Oui, il a fait une déclaration qui a été rendue publique, si je me

 10   souviens bien.

 11   Q.  Il a fait une déclaration qui a été rendue publique, et dans sa

 12   déclaration, il disait que c'était une entité autre que l'armée des Serbes

 13   de Bosnie qui était responsable de l'incident ?

 14   R.  Je ne suis pas sûr que ce soit exactement ce qu'il a dit. Je ne crois

 15   pas qu'il a été aussi affirmatif que vous venez de l'être.

 16   Q.  Très bien. Donc vous vous souvenez aujourd'hui de cette personne en

 17   train de se lancer dans des conjectures et de se demander vraiment qui

 18   pouvait bien être le responsable et n'ayant pas trouvé vraiment de réponse

 19   définitive ?

 20   R.  Oui. Je ne me souviens pas qu'il y ait eu une opinion définitive à ce

 21   propos.

 22   Q.  Mais les informations contenues dans ce rapport --

 23   R.  Lequel ?

 24   Q.  Celui qui est repris suite à la dépêche à la page de garde.

 25   Donc ces informations détenues dans ce rapport, savez-vous si elles ont été

 26   envoyées au général Mladic ? A-t-il été mis en copies ?

 27   R.  Non, je ne le pense pas.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez entendu ? Les interprètes

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  1   vous demandent d'arrêter de parler en même temps.

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, bien entendu.

  3   Q.  Savez-vous si un membre quelconque du gouvernement de la FRY a reçu ce

  4   rapport ?

  5   R.  En tout cas, pas du fait de mon QG.

  6   Q.  Savez-vous si le général Perisic a reçu copie de ce rapport ?

  7   R.  Je n'en sais rien.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vais essayer d'être parfaitement

  9   exhaustif, en ce qui concerne les autorités de l'ABiH, savez-vous si elles

 10   ont aussi été mises en copie ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne le pense pas. En tout cas, pas du

 12   fait de mon QG.

 13   M. GUY-SMITH : [interprétation] Vous avez posé ma question. En effet, nous

 14   allons maintenant épuiser le sujet.

 15   Je n'ai plus besoin de cette pièce. Elle n'a pas besoin d'être versée

 16   au dossier puisqu'elle l'est déjà.

 17   Maintenant, pourrions-nous avoir la pièce 1D01-0847 à l'écran.

 18   Pourrais-je demander, s'il vous plaît, à ce que l'on baisse le

 19   rétroprojecteur car je n'arrive pas à voir le témoin.

 20   Q.  Veuillez, s'il vous plaît, regarder de près cette carte. Arrivez-vous à

 21   vous repérer déjà ?

 22   R.  Ça ressemble à Sarajevo. Est-ce que vous pourriez zoomer un petit peu.

 23   Voir un peu le haut de la carte.

 24   Q.  Pas de problème.

 25   R.  Je n'arrive pas très bien à lire. J'en suis tout à fait désolé.

 26   M. GUY-SMITH : [interprétation] Pourrions-nous zoomer, agrandir la carte et

 27   relever la carte pour que nous puissions zoomer sur cette partie de la

 28   carte ?

Page 6337

  1   Q.  Est-ce que vous reconnaissez maintenant cet endroit ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Vous remarquerez que sur cette carte on trouve différentes annotations.

  4   J'aimerais savoir si vous reconnaissez les zones annotées comme étant des

  5   zones qui à l'époque étaient contrôlées par l'ABiH ?

  6   R.  Soyez plus précis. Vous faites allusion à quelles annotations ?

  7   Q.  Par exemple, là où il est écrit 111 vbbr.

  8   R.  Oui, mais pas là où il est écrit 1 Smbr, par exemple, en bas.

  9   Q.  Si, là aussi.

 10   R.  Non, dans ce cas-là, je ne reconnais pas ces annotations comme étant

 11   des repères de territoires contrôlés par l'ABiH.

 12   Q.  D'après vous, le 111 vbbr, cela signifie bien que le contrôle était

 13   détenu par l'ABiH, n'est-ce pas ?

 14    R.  Oui.

 15   Q.  Je vais vous poser la même question pour le 112 vbbr, le 102, le 101,

 16   le 155, le 105 et le 152, ainsi que le 115.

 17   R.  Oui. Dans ce cas-là, pas de problème.

 18   Q.  Maintenant, pour ce qui en est du 1 smbr, d'après vous, il ne s'agit

 19   pas d'un territoire qui était contrôlé par l'ABiH ?

 20   R.  Non, pas à l'époque.

 21   Q.  Très bien.

 22   M. GUY-SMITH : [interprétation] Pourrions-nous maintenant avoir la carte en

 23   entier.

 24   Q.  Vous remarquerez qu'il y a au-dessus de l'endroit que nous avons

 25   regardé précédemment certaines annotations. Ces annotations, est-ce que

 26   d'après vous ce sont des endroits qui sont détenus par l'ABiH ?

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] De quelles annotations parlez-vous ?

 28   M. GUY-SMITH : [interprétation] Le 3 Spbr, par exemple.

Page 6338

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'était pas contrôlé par l'ABiH.

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation]

  3   Q.  Très bien. Il y a une ligne pointillée qui encercle tous les endroits

  4   que vous avez reconnus comme étant détenus par l'ABiH. D'après vous,

  5   serait-ce la ligne de confrontation ?

  6   R.  J'en vois deux. Oui, en effet, il y a une ligne un peu marron rouge en

  7   pointillés et puis une ligne bleue.

  8   Si je me souviens bien, il s'agit en effet plus ou moins de la ligne

  9   de confrontation.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je suis désolé d'intervenir.

 11   Vous nous dites, Général, que vous voyez deux lignes pointillées.

 12   Moi, j'en vois une. Vous pouvez nous dire quelles sont ces deux lignes

 13   exactement ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a deux lignes pointillées qui encerclent

 15   Sarajevo, une qui est bleue, en pointillés, et l'autre qui est en rouge

 16   marron.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous regardez les lignes pointillées,

 18   non pas les lignes continues.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] En effet.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Dans ce cas-là, j'ai compris.

 21   Monsieur Guy-Smith, quelle était la question que vous avez posée ?

 22   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je voulais demander au témoin si les lignes

 23   pointillées, d'après le témoin, correspondent bien à la ligne de

 24   confrontation.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Donc vous êtes en train de

 26   dire que les forces de l'ABiH se trouvent à l'intérieur de cette ligne

 27   pointillée, c'est cela ?

 28   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je voulais en arrive là, en tout cas.

Page 6339

  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation]

  3   Q.  Le Président vous a posé une question et j'allais vous la poser. Tout

  4   ce qui se trouve à l'intérieur de la ligne pointillée en bleu, ce sont les

  5   territoires détenus par l'ABiH et la ligne pointillée, la ligne de

  6   confrontation, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Et pour ce qui est de la ligne en rouge marron, il s'agit en fait de la

  9   ligne de confrontation au-delà de laquelle se trouvait l'armée de la VRS

 10   qui contrôlait le territoire ?

 11   R.  Oui. A l'extérieur du cercle.

 12   M. GUY-SMITH : [interprétation] Pourrions-nous avoir une cote pour ce

 13   document, s'il vous plaît.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

 15   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cela recevra la cote D97.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 18   Q.  Une autre question à propos de cette carte. En la regardant,

 19   reconnaissez-vous des zones détenues par l'ABiH qui étaient le siège de

 20   position de mortier ?

 21   R.  Non, je n'en trouve pas.

 22   Q.  Très bien.

 23   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je n'ai plus besoin de cette pièce.

 24   On me dit qu'il va sans doute falloir encore poser quelques questions

 25   à propos de cette pièce.

 26   [Le Conseil de la Défense se concerte]

 27   M. GUY-SMITH : [interprétation] Mon confrère m'a demandé de traduire la

 28   chose suivante pour vous, ce qui se trouve en haut à gauche de la carte.

Page 6340

  1   R.  [aucune interprétation]

  2   Q.  Donc il y a des dates, il est écrit -- Voilà, Monsieur Lukic va

  3   simplement le lire, puis les interprètes le traduiront correctement, sinon

  4   ce sera difficile.

  5   M. LUKIC : [interprétation] Donc je vais le lire, ainsi les interprètes

  6   liront.

  7   Donc en haut en gauche il est écrit : Carte de travail du chef

  8   d'état-major. Ensuite ligne suivante : Commandement du 12 dKoV. Ensuite :

  9   01.03.1995. Il y a des points entre les numéros, donc il s'agit de la date

 10   01.03.1995. Ensuite : Fin pour réalisation 16.15. Ensuite : 14 octobre

 11   1995. A droite maintenant --

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Attendez une minute, Maître Lukic.

 13   Pouvons-nous revenir un petit peu en arrière. On ne sait pas ce que veut

 14   dire dKoV. Ca signifie quoi exactement en jargon militaire ? Et Pocetak,

 15   qu'est-ce que ça veut dire ?

 16   M. LUKIC : [interprétation] La 12e Division des forces terrestres. Enfin

 17   c'est mon interprétation, mais je ne voudrais pas être en train de

 18   témoigner, ce n'est pas à moi de le faire.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et Pocetak, qu'est-ce que ça veut dire

 20   et Zavrsetak. J'écorche les mots, j'en suis absolument désolé. Les

 21   chiffres, j'ai un peu compris quand même, mais j'ai besoin de savoir ce que

 22   veut dire Pocetak et Zavrsetak.

 23   Les interprètes pourraient-ils nous aider ?

 24   L'INTERPRÈTE : Pocetak, c'est début; et Zavrsetak, c'est fin.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 26   M. LUKIC : [interprétation] Si vous voulez, je peux vous traduire ce qui

 27   est écrit en haut à droite aussi. C'est écrit défense de la république.

 28   Ensuite secret militaire.

Page 6341

  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pourrions-nous avoir la droite de la

  2   carte à l'écran, s'il vous plaît.

  3   M. LUKIC : [interprétation] Il est écrit en lettres majuscules défense de

  4   la république. Ensuite il est écrit secret militaire. Ensuite strictement

  5   confidentiel.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  7   M. LUKIC : [interprétation] Ensuite, en bas de cette carte, si on peut

  8   avoir le bas de la carte à l'écran. Il est écrit chef d'état-major; ensuite

  9   colonel, ensuite Rizvo Pleh.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ça veut dire quoi Rizvo Pleh ?

 11   M. LUKIC : [interprétation] C'est très certainement le nom d'une personne,

 12   le nom de la personne qui avait la carte. C'est juste le nom d'une

 13   personne, les deux mots ayant une majuscule comme initiale. C'est très

 14   certainement le nom d'une personne, prénom et nom.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 16   [Le conseil de la Défense se concerte]

 17   [La Chambre de première instance se concerte]

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Alors je suis vraiment désolé, Maître

 19   Guy-Smith. Poursuivez, je vous prie.

 20   M. GUY-SMITH : [interprétation] Très bien. Merci, Monsieur le Président.

 21   Aucun problème.

 22   Q.  Je suis désolé, mais je voudrais revenir quelque peu en arrière, juste

 23   pour quelques instants.

 24   M. GUY-SMITH : [interprétation] Pourrait-on avoir à l'écran, je vous prie,

 25   la pièce P2366. Pourrait-on avoir la page 3, s'il vous plaît, à l'écran et

 26   il s'agira du paragraphe 12.

 27   Q.  Un peu plus tôt il était question de carburant. Le paragraphe 12 de ce

 28   document porte sur cette discussion et il se lit comme suit : "Au cours du

Page 6342

  1   dîner, M. Akashi, le général Smith ainsi que le général Janvier ont formulé

  2   des objections quant au refus de convois de carburant aux enclaves

  3   orientales. Les Serbes de Bosnie ont continué de dire que la FORPRONU

  4   fournissait le carburant à l'ABiH. Karadzic avait entendu le commentaire à

  5   savoir que 'vous êtes témoin que l'aide humanitaire et les convois de la

  6   FORPRONU sont des convois commerciaux envoyés aux Musulmans. Alors que nous

  7   nous avons des restrictions (sanctions) doubles, vous allez devoir vous

  8   attendre à plus de restriction.'"

  9   J'aimerais savoir, Monsieur Smith, si vous pouviez nous éclairer un peu sur

 10   la conversation qui a eu lieu concernant ces approvisionnements, à savoir

 11   qu'ils étaient destinés à l'ABiH ? Pourriez-vous nous expliquer ce qui a

 12   été dit en réalité lors de ce dîner; qu'avait dit Karadzic en réalité ?

 13   R.  Bien c'était --

 14   M. SAXON : [interprétation] Bien --

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous accorde la parole, Monsieur

 16   Saxon.

 17   M. SAXON : [interprétation] Le problème avec cette question c'est que ce

 18   paragraphe ne fait pas du tout mention de l'ABiH. Je ne sais pas si M. Guy-

 19   Smith souhaite dire que c'est ce à quoi faisait référence M. Karadzic ?

 20   M. GUY-SMITH : [interprétation] Très bien. 

 21   Q.  Lorsque M. Karadzic parlait du carburant envoyé à l'ABiH, est-ce que à

 22   ce moment-là il faisait référence à l'ABiH ?

 23   R.  Je ne me souviens pas, mais nous approvisionnons les enclaves.

 24   Q.  Les enclaves où se trouvait le personnel de l'ABiH. Il y avait donc des

 25   membres de l'ABiH.

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Les personnes qui étaient sur place, c'était le commandant Delic,

 28   n'est-ce pas, par exemple ?

Page 6343

  1   R.  Oui. L'un d'eux, c'était Delic.

  2   Q.  Il y avait également le commandant Oric ?

  3   R.  Encore une fois, ce nom me dit quelque chose, mais il me faudrait

  4   rafraîchir ma mémoire, à savoir qui il était exactement. Mais

  5   effectivement, il y avait des commandants, il y avait des défenseurs sur

  6   place.

  7   Q.  Fort bien. Est-ce qu'à l'époque, et je vais vous poser ma question

  8   maintenant, mais bien sûr un très grand nombre d'années se sont écoulées,

  9   est-ce que vous aviez des renseignements vous permettant de savoir quelle

 10   était la force des effectifs dans ces enclaves et est-ce qu'on avait

 11   mentionné Delic et peut-être même

 12   Oric ?

 13   R.  Le service de Renseignements, c'est peut-être un peu trop précis.

 14   Q.  Non. Voilà. C'est une information.

 15   R.  Nous détenions des informations selon lesquelles par nos observateurs

 16   et d'après ce que nous avions pu observer nous-mêmes, à savoir quel était

 17   le nombre de défenseurs dans ces enclaves.

 18   Q.  Très bien. Merci. 

 19   M. GUY-SMITH : [interprétation] Cette pièce ne nous sera plus utile.

 20   Pourrait-on maintenant afficher la pièce P2360, s'il vous plaît.

 21   R.  C'est un document qui fait référence à une conversation téléphonique

 22   qui a eu lieu entre vous-même et le général Mladic le 28 mai 1995.

 23   M. GUY-SMITH : [interprétation] Commençons par la page 1.

 24   Q.  A la page 1, au premier paragraphe, on lit, je cite :

 25   "Mladic prétendait que le général Smith agissait à la suite de

 26   directives politiques du gouvernement bosnien. Mladic demandait une

 27   cessation immédiate de tous les transports aériens de l'OTAN et que l'on

 28   laisse aller de façon inconditionnelle les Serbes détenus avant 18 heures."

Page 6344

  1   Vous souvenez-vous de cet incident ?

  2   R.  Non.

  3   Q.  Pour ce qui est de l'information que nous lisons dans ce document, est-

  4   ce que cette information avait été faite pendant que vous vous étiez

  5   entretenu avec Mladic ?

  6   R.  Oui, tout à fait. Je suis convaincu que c'est un rapport précis.

  7   Q.  Très bien. Alors vous ne pouvez pas nous éclairer un peu plus, à savoir

  8   de quelle façon la conversation s'est déroulée pour ce qui est de cette

  9   accusation faite par Mladic, à savoir que vous travailliez pour le

 10   gouvernement bosnien le 28 mai 1995 ?

 11   R.  Non. A moins d'avoir un autre paragraphe qui porte sur ce même sujet.

 12   Q.  D'accord. Je vais maintenant passer au paragraphe 4, qui se trouve à la

 13   page suivante.

 14   Effectivement, il y avait une grande préoccupation à l'époque par Mladic et

 15   par vous-même, préoccupation concernant la situation qui s'enflammait et

 16   qui pouvait potentiellement mettre en danger la vie d'un très grand nombre

 17   de personnes. Pour ce qui est de cette affirmation, au paragraphe 4, on lit

 18   comme suit :

 19   "Mladic a accepté l'offre du général Smith pour calmer la situation et l'a

 20   conseillé de se calmer afin de pouvoir prendre des décisions raisonnables."

 21   J'imagine que c'est vous, là, qui aviez dit à Mladic qu'il devait se calmer

 22   ?

 23   R.  Non, ça c'est Mladic qui me dit de me calmer.

 24   Q.  Bien.

 25   R.  Et il me dit d'arrêter les bombardements et d'arrêter de se comporter

 26   de façon déraisonnable.

 27   Q.  Je vois.

 28   Maintenant pour ce qui est du fait qu'il vous ait demandé de vous

Page 6345

  1   calmer, pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, pourquoi Mladic pensait

  2   que c'était vous qui étiez responsable des frappes aériennes puisque, si

  3   j'ai bien compris, ce n'était pas vous qui procédiez à ces frappes

  4   aériennes, mais plutôt l'OTAN. Pourquoi vous accusait-il de ces frappes

  5   aériennes ?

  6   R.  J'avais dit très clairement à Mladic, lors d'une adresse publique, que

  7   si les armes qui avaient été enlevées n'étaient pas remises aux mêmes

  8   endroits au point de contrôle, je demanderais que ces mêmes fonctions

  9   soient menées par l'OTAN. En fait, il n'avait pas remplacé les armes et

 10   j'ai choisi l'option des frappes aériennes. J'ai donc placé ma clé dans la

 11   serrure.

 12   Q.  Alors est-ce que vous parlez de la clé, si je comprends bien, il y

 13   avait un système de doubles clés au sein de l'OTAN et de la FORPRONU et les

 14   deux clés devaient être tournées afin que le bombardement commence ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Et le fait d'avoir tourné la clé dans la serrure, est-ce que ceci a

 17   porté fruits ?

 18   R.  Non.

 19   Q.  Que s'est-il passé ?

 20   R.  Nous n'avons pas remplacé les armes, je ne me souviens pas exactement

 21   du nombre de personnes, mais il y avait environ 400 personnes qui se sont

 22   faites prendre pour otages.

 23   Q.  Je vois.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je pensais que la question faisait

 25   référence à savoir si la clé, effectivement, a été tournée dans la serrure

 26   et si l'opération n'a pas porté fruits, c'est-à-dire que les frappes

 27   aériennes n'avaient pas eu lieu.

 28   M. GUY-SMITH : [interprétation] En fait, c'est très clair. Voilà.

Page 6346

  1   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation]

  3   Q.  Donc les clés avaient été placées dans la serrure et on avait commandé

  4   les frappes aériennes, n'est-ce pas ? Comment est-ce que ça se passait ?

  5   R.  Je suis désolé, je --

  6   Q.  [aucune interprétation]

  7   R.  Je n'aurais peut-être pas dû employer le terme "mettre la clé dans la

  8   serrure."

  9   J'ai demandé à l'OTAN de mener à bien cette action. L'OTAN a accepté de

 10   faire cela et l'opération a été menée. Mais elle n'a pas porté fruits,

 11   c'est-à-dire que le but de cette opération n'a pas été réalisé.

 12   Q.  Le but était de faire en sorte que les armes soient retournées --

 13   R.  Dans la zone d'exclusion -- au point de rassemblement des armes.

 14   Q.  Au point de rassemblement des armes ?

 15   R.  Oui, c'est cela.

 16   Q.  Maintenant, pour ce qui est du bombardement qui a eu lieu, des frappes

 17   aériennes qui ont eu lieu, est-ce que vous savez à quel endroit est-ce que

 18   les bombardements ont eu lieu ?

 19   R.  Oui, c'était à Pale.

 20   Q.  Concernant les victimes, y avait-il des victimes à Pale à la suite de

 21   ces frappes aériennes ?

 22    R.  Je ne me souviens pas quel était le nombre de victimes.

 23   Q.  Donc j'imagine qu'il y a eu des victimes et vous ne vous souvenez pas

 24   combien de victimes il y avait ?

 25   R.  Je ne peux pas vous dire combien il y avait de victimes.

 26   Q.  Fort bien.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais il y avait des victimes ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas vous l'affirmer. Je ne le sais

Page 6347

  1   vraiment pas avec précision.

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation]

  3   Q.  S'agissant de la réponse faite aux frappes aériennes, on a pris des

  4   otages; c'est ça ?

  5   R.  Oui, entre autres.

  6   Q.  Parlons maintenant des otages, pour l'instant.

  7   R.  D'accord.

  8   Q.  Pour ce qui est de l'objectif pour lequel vous étiez sur place, si j'ai

  9   bien compris, serait-il juste de dire que cet acte a fait en sorte que les

 10   choses s'intensifient - et par là je veux dire les frappes aériennes - est-

 11   ce que ceci a fait en sorte que la situation s'enflamme entre la FORPRONU

 12   et l'armée serbe de Bosnie ? Car on a fait 400 otages.

 13   R.  Cela a fait en sorte qu'effectivement, la situation s'est détériorée.

 14   Q.  Mais ce que je veux dire --

 15   R.  C'est que le problème est resté le même.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ca n'a fait qu'empirer ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ça ne fait qu'empirer.

 18   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 19   Q.  Donc vous et le général Mladic vous ne pouviez pas avoir un dialogue

 20   pour calmer un peu les esprits.

 21   R.  Je ne comprends pas votre question.

 22   Q.  Votre but était de faire en sorte que les armes retournent là-bas.

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Vous avez procédé aux frappes aériennes et comme résultat, des otages

 25   avaient été pris ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Donc vous et Mladic, vous ne vous parliez pas de façon effective. Vous

 28   ne parliez pas d'une paix sur le terrain. Ce n'est pas ce que vous vouliez,

Page 6348

  1   vous ne vouliez pas que la situation se calme dans une certaine façon. Je

  2   veux dire que le conflit armé avait perduré ?

  3   R.  Avec cette situation dans laquelle on a fait des otages, qui était le

  4   résultat des frappes aériennes en réalité, il n'y avait pas de conflit.

  5   Q.  Vous voulez dire qu'il n'y avait pas de conflit ?

  6   R.  Non, il n'y avait pas de conflit.

  7   Q.  Très bien. Nous allons parler de ce conflit dans quelques instants.

  8   Pour revenir au paragraphe 4. Mladic dit :

  9   "Si vous continuez de vous comporter de façon aussi déraisonnable, un très

 10   grand nombre de personnes des Nations Unies se trouveront dans une

 11   situation très difficile. Il a demandé que tous les vols de l'OTAN cessent.

 12   Il pensait aux vols de transport et de combat qui étaient employés pour

 13   transporter les munitions et d'autres approvisionnements aux Musulmans."

 14   C'est ce qu'il vous a dit, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Et serait-il juste de dire, à l'examen de cette situation, de façon

 17   objective, vous aviez une hostilité ouverte avec l'ABiH. Vous avez procédez

 18   aux frappes aériennes, ils ont pris des otages et ils vous accusent

 19   d'approvisionner l'ABiH ?

 20   R.  Non, pas du tout. Nous avions arrêté le conflit.

 21   Q.  C'est --

 22   R.  La confrontation existait, mais pas de complication.

 23   Q.  Je vois. Vous parlez de confrontation et la confrontation, c'est les

 24   frappes aériennes et la prise d'otages ?

 25   R.  Non, les frappes aériennes étaient une chose conflictuelle. Ça n'a pas

 26   marché.

 27   Q.  Et le temps --

 28   R.  Nous sommes restés dans une confrontation.

Page 6349

  1   Q.  Et le fait de prendre des otages --

  2   R.  Cela fait partie de la confrontation. Le fait d'avoir fait des otages

  3   est une situation conflictuelle. Mais nous nous trouvions maintenant dans

  4   une situation dans laquelle il n'y a pas de combat.

  5   Q.  Bien, je vois.

  6   R.  Mais les autorités politiques m'avaient dit d'arrêter, donc je n'avais

  7   pas le droit de continuer les frappes aériennes. Je n'avais pas le droit

  8   non plus, non pas que j'aurais pu, mais je n'avais pas le droit d'aller

  9   reprendre mes otages, donc nous étions dans une situation bien différente

 10   et je ne suis pas en désaccord pour dire qu'il y avait une confrontation

 11   sur ces questions.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc il y avait une tension, mais il

 13   n'y a pas --

 14   M. GUY-SMITH : [interprétation] Le sang ne coule pas.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Je comprends. Pas de sang.

 16   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je voudrais passer au paragraphe 6 du même

 17   document, où on peut lire : "Mladic a demandé si les troupes des Nations

 18   Unies était une force de maintien de la paix ou une force d'occupation."

 19   Q.  Est-ce que la conversation a continué dans ce sens ou est-ce que

 20   c'était simplement une affirmation faite par lui ?

 21   R.  C'était une déclaration faite par Mladic plutôt qu'un débat. Ce n'est

 22   pas une phrase qui a engendrée un débat. Dans le même paragraphe vous

 23   pouvez voir que nous parlons de ces soldats que je détenais ces soldats en

 24   tant que prisonniers.

 25   Q.  Donc vous aviez ces soldats et ces soldats étaient vos prisonniers, de

 26   quelle façon est-ce que ces derniers avaient été

 27   pris ?

 28   R.  Ils avaient été pris par une contre-attaque française menée par le

Page 6350

  1   Bataillon français après que le Bataillon français ait perdu certains

  2   soldats et qu'on ait pris les positions dans lesquelles les attaquants

  3   étaient habillés comme le Bataillon français des Nations Unies. Voilà c'est

  4   à cela que je fais référence quand je parle de ce bris de protocole.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne comprends pas très bien lorsque

  6   vous parlez de Français dans les Nations Unies.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien ils portaient des casques bleus. Ils

  8   portaient un uniforme des Nations Unies. Oui, mais en fait c'est les

  9   Casques Bleus, donc ils portaient des casques bleus et l'uniforme du

 10   Bataillon français.

 11   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 12   Q.  Maintenant j'aimerais que l'on jette un coup d'œil sur le paragraphe 12

 13   de ce même document.

 14   M. GUY-SMITH : [interprétation] Et ce que l'on peut trouver dans ce

 15   paragraphe se trouve à la page suivante.

 16   Q.  Je déduis quelque chose de la première phrase qui se lit comme suit :

 17   "Le général Smith avait dit qu'il n'était pas le commandant des forces de

 18   l'OTAN et que ce n'est pas lui qui a dirigé leurs actions".

 19   Donc, Monsieur, j'en déduis que Mladic vous accusait d'avoir commandé aux

 20   forces de l'OTAN et d'avoir donné l'ordre des frappes aériennes, en fait

 21   c'est une question que je vous pose : vous a-t-il accusé de ceci ?

 22   R.  Je ne m'en souviens pas.

 23   Q.  Mladic a dit qu'il savait que c'était un mensonge, puisque l'OTAN ne

 24   pouvait pas agir sans votre demande. Il fait référence à votre demande à

 25   vous. Je crois qu'il fait référence à quelque chose que vous avez dit un

 26   peu plus tôt, à savoir que c'était vous qui aviez donné l'ordre --

 27   R.  Oui.

 28   Q.  -- pour les frappes aériennes de l'OTAN ?

Page 6351

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Donc vous étiez la personne qui était responsable de recommander que

  3   l'attaque ait lieu, mais vous ne commandiez pas, vous n'étiez pas le

  4   commandant de ces forces.

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Est-ce que vous collaboriez avec vos collègues au sein de l'OTAN, à

  7   savoir quels étaient les objectifs appropriés pour ces frappes aériennes ?

  8   R.  Bien sûr.

  9   Q.  Est-ce que vous lui aviez informé que sur la base des informations que

 10   vous aviez reçues en tant que commandant de la FORPRONU, à savoir où des

 11   objectifs particulièrement importants se trouveraient; est-ce que vous lui

 12   aviez dit cela ?

 13   R.  Je ne suis pas tout à fait certain d'avoir compris votre question.

 14   Q.  D'accord. Lorsque vous avez collaboré avec vos collègues, est-ce que

 15   vous aviez choisi des cibles adéquates ? Quelles auraient été ces cibles,

 16   quels objectifs ?

 17   R.  Je comprends.

 18   Q.  Oui.

 19   R.  Je ne me souviens pas quelle était la base sur laquelle l'information

 20   était venue. Je ne sais pas si c'était mon information à moi ou si c'était

 21   une information de quelqu'un d'autre, mais il est certain que nous avions

 22   parlé de cibles.

 23   Q.  Est-ce que vous en aviez informé Mladic lorsque vous lui avez dit que

 24   vous n'étiez pas la personne qui avait le contrôle, que vous étiez

 25   responsable pour recommander les attaques et que c'était vous qui aviez

 26   pris certaines décisions sur les objectifs ?

 27   R.  Non.

 28   Q.  Est-ce que vous savez si, oui ou non, c'était l'information que Mladic

Page 6352

  1   prétendait avoir interceptée ?

  2   R.  Non.

  3   Q.  Bien.

  4   R.  Non.

  5   Q.  Bien. Vous avez parlé de plusieurs types d'actions aériennes.

  6   Le premier type c'est l'appui aérien, qui est utilisé dans le cadre de

  7   l'autodéfense. Je suppose que cela se fait au moment où une unité de la

  8   FORPRONU fait l'objet d'une attaque, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Le deuxième type sont des frappes aériennes telles que les deux frappes

 11   dirigées contre les Serbes de Bosnie la semaine dernière. Il ne s'agit pas

 12   là de l'autodéfense du tout. Il s'agit d'un acte coercitif, si je peux me

 13   permettre de l'appeler ainsi ?

 14   R.  Vous pouvez l'appeler de la manière que vous choisissez. Il s'agit des

 15   frappes aériennes qui sont liées aux zones d'exclusion dont nous avons déjà

 16   parlé tout à l'heure.

 17   Q.  Je comprends bien, mais ce que j'essaie de vous dire maintenant, c'est

 18   de déterminer si les frappes aériennes peuvent être utilisées autrement que

 19   dans le cadre de l'autodéfense ? Est-ce que cette menace a été exécutée par

 20   les frappes ?

 21   R.  [aucune interprétation]

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Essayons d'abord de revenir sur ces

 23   catégories.

 24   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bien, je --

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que le premier type d'action

 26   aérienne est limité exclusivement dans le cadre de l'autodéfense des forces

 27   de la FORPRONU ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. En fait nous définissons cette situation

Page 6353

  1   comme la situation de menace immédiate.

  2   Plus tard, nous avons dû un peu élargir cette définition de

  3   l'autodéfense et inclure les zones protégées, et cetera.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Inclure ?

  5   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Les zones protégées.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Les zones protégées, et cetera.

  8   M. GUY-SMITH : [interprétation] Merci. Je n'ai plus besoin de ce document.

  9   Peut-on maintenant afficher P2364.

 10   Q.  Ce qui m'intéresse, c'est le paragraphe 2(b). J'aimerais qu'on parle de

 11   l'utilisation de l'aérodrome de Tuzla.Tout d'abord, dites-nous si les

 12   forces de l'OTAN ont été utilisées afin de réparer la piste à Tuzla pendant

 13   l'année 1994 ?

 14   R.  Non, je ne crois pas. De toute manière, pas en 1994.

 15   Q.  D'après vos informations, le personnel américain dans la zone de

 16   l'aérodrome de Tuzla en 1994, pour ce qui concerne la possibilité

 17   d'utiliser l'aérodrome de Tuzla pour des actions de l'OTAN éventuelles ?

 18   R.  Non. Je n'étais pas là-bas. Je ne sais pas.

 19   Q.  Mais avez-vous reçu des informations indiquant que de telles forces

 20   pourraient se trouver dans cette zone ?

 21   R.  Non.

 22   Q.  Quand Mladic a déclaré que l'aérodrome de Tuzla était utilisé pour

 23   l'approvisionnement de l'ABiH en armes et effectué par l'OTAN, je pense

 24   qu'il y a là réponse à l'ABiH, n'est-ce pas ?

 25   R.  Qu'est-ce qu'on est en train d'examiner ? Quel passage ?

 26   Q.  C'est 2 (b).

 27   R.  Toutes mes excuses.

 28   Q.  Pas de problème.

Page 6354

  1   R.  Oui, je pense qu'on peut dire ainsi.

  2   Q.  Bien. S'agissant maintenant de votre déclaration qui figure dans ce

  3   paragraphe, quand vous avez déclaré que l'OTAN n'avait rien à voir avec ces

  4   atterrissages sur l'aérodrome de Tuzla, vous n'avez à aucun moment nié le

  5   fait que des avions atterrissaient à Tuzla ?

  6   R.  Je ne me souviens pas du tout quelle était la question à laquelle j'ai

  7   répondu à ce moment-là. Mais ce que j'ai dit clairement, c'était que l'OTAN

  8   n'avait rien à voir avec ceci.

  9   Q.  Bien. Si l'OTAN n'avait rien à voir avec ceci, d'après vous, l'entité

 10   qui utilisait l'aérodrome de Tuzla, est-ce que c'était la FORPRONU ou

 11   quelqu'un d'autre ?

 12   R.  Si l'aérodrome a été utilisé et si on parle de mars 1995, alors ça n'a

 13   pas pu être les Nations Unies et l'OTAN non plus. Voilà.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais les Nations Unies disposaient-ils

 15   des aéronefs --

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] On a eu quelques hélicoptères, un certain

 17   nombre d'aéronefs qui ont été utilisés à Zagreb mais jamais pour voler

 18   jusqu'à Tuzla. Jusqu'à Sarajevo et c'était en mars cette année-là.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il s'agit là des aéronefs appartenant

 20   aux Nations Unies ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait un avion, un avion des Nations

 22   Unies, si je me souviens bien, avec un équipage ukrainien.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avec un drapeau des Nations Unies.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 25   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 26   Q.  Bien.

 27   M. GUY-SMITH : [aucune interprétation]

 28   Q.  J'aimerais bien vous poser une question au sujet d'un monsieur qui se

Page 6355

  1   trouvait sur le terrain avant vous-même, il s'agit du général Wahlgren.

  2   Est-ce que vous avez jamais eu des contacts avec ce général ?

  3   R.  Non, pour autant que je me souvienne.

  4   Q.  Bien. Alors j'aimerais maintenant vous montrer quelque chose et vous

  5   demander si vous êtes d'accord avec ce qui figure dans ce document.

  6   M. GUY-SMITH : [interprétation] Peut-on afficher, s'il vous plaît, le

  7   document 1D00-2536, page 22.

  8   Peut-on afficher le bas de cette page. Vous allez voir qu'à peu près au

  9   milieu du dernier paragraphe, il y est dit : "Le général Wahlgren a averti

 10   les autorités politiques des Nations Unies à New York, d'une manière

 11   prophétique 'Si on permet qu'il n'y ait aucun contrôle sur les unités

 12   militaires ou paramilitaires du gouvernement bosniaque, on arrivera au

 13   scénario où les zones protégées seraient utilisées comme un refuge pour ces

 14   forces où elles pourraient se réarmer, entraîner et préparer pour des

 15   futures opérations militaires.'"

 16   Je suppose que la prophétie dont on parle ici concerne la présence des

 17   membres de l'ABiH dans les enclaves dont vous avez parlé aussi ? Peut-être

 18   que là, je suis un peu plus affirmatif que vous ne l'avez été.

 19   R.  Je pense que cela ressemble davantage à une prophétie sur la prise

 20   d'otages et l'utilisation des boucliers. Dites-moi d'où ça vient.

 21   Q. Ça provient d'un article intitulé "Responsabilité du commandement : de

 22   quelle manière les commandants de l'OTAN et des Nations Unies influencent

 23   les forces aériennes en Bosnie", par Mark Bucknam des forces aériennes

 24   américaines, le colonel Bucknam.

 25   M. GUY-SMITH : [interprétation] Juste un instant encore.

 26   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous demandez le versement avec la

 28   première page.

Page 6356

  1   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

  3   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce D98.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  5   M. GUY-SMITH : [interprétation]

  6   Q.  A un moment donné, un casque d'une autre couleur a été introduit dans

  7   cette zone, c'était les casques verts des forces de réaction rapide ?

  8   R.  Oui, ce n'était pas des casques neufs, mais il s'agissait des casques

  9   de la force de réaction rapide.

 10   Q.  Bien.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La FRR.

 12   M. GUY-SMITH : [interprétation] 

 13   Q.  La FRR a été une force créée censée opérer en dehors des limites de

 14   règles d'engagement qui valaient pour l'utilisation des forces de la

 15   FORPRONU ?

 16   R.  Non.

 17   Q.  Je vous ai posé une question.

 18   R.  Bien, ce n'était pas le cas.

 19   Q.  Bien, alors dites-nous quel était l'objectif de la création de la FRR,

 20   et qui l'a créée ?

 21   R.  Ecoutez, pour moi, il était difficile de lier leur création à un

 22   événement concret, à une décision concrète, mais vous allez voir que l'idée

 23   est née à peu près après les bombardements, fin mai. En Grande-Bretagne et

 24   en France, qui ont demandé l'envoi de forces supplémentaires et des armes

 25   lourdes supplémentaires.

 26   Donc peut-être que la date de la création pourrait tomber quelque

 27   part en juin ou à peu près, mais bon. Il a fallu un certain moment avant

 28   que les forces soient véritablement mises sur pied, et cela ne s'est passé

Page 6357

  1   que vers la fin août.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Poursuivez, Maître Guy-Smith.

  3   M. GUY-SMITH : [interprétation]

  4   Q.  Peut-on dire que vous êtes, dans votre livre, arrivé à la conclusion

  5   que : "Si on interdit de mener des actions offensives, mais l'idée de la

  6   création des forces de réaction rapide gagne en popularité ou du terrain à

  7   Londres et à Paris, alors j'accepterai le déploiement de cette force parce

  8   qu'elle assistera l'Infanterie française et britannique."

  9   Plus tard, vous dites que : "L'idée n'a pas été acceptée par les

 10   Nations Unies, il ne fallait pas qu'ils ressemblent à des membres des

 11   Nations Unies, qu'ils portent des casques bleus, qu'ils aient des véhicules

 12   qui ressembleraient à ceux des Nations Unies. Il fallait qu'ils soient

 13   clairement différents et qu'ils puissent utiliser les armes lourdes. Parce

 14   que si leurs effectifs sont suffisants et s'ils sont déployés de manière

 15   appropriée, disposant des armes appropriées, ils pourraient battre

 16   l'artillerie des Serbes de Bosnie."

 17   Est-ce que c'est ce que vous avez écrit ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Et c'était ça l'objectif de la création de ces forces ?

 20   R.  C'est ce que je souhaitais.

 21   Q.  Oui, mais vous avez dit qu'il ne fallait pas qu'ils prennent des

 22   casques bleus des Nations Unies, donc est-ce que vous vouliez dire qu'en

 23   fait, pour le public, ils allaient opérer indépendamment, mais en fait,

 24   c'est vous qui devez contrôler leurs opérations, leur emploi sur le terrain

 25   ?

 26   R.  [aucune interprétation]

 27   Q.  [aucune interprétation]

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Saxon, est-ce que vous êtes en

Page 6358

  1   train d'objecter ?

  2   M. SAXON : [interprétation] En fait, non. C'est juste la page de ce livre à

  3   laquelle fait référence Me Guy-Smith.

  4   M. GUY-SMITH : [interprétation] Page 43.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

  6   M. GUY-SMITH : [interprétation] Cela correspond à la page 354, puis page

  7   355, version électronique. Vous savez, je n'ai pas scanné l'intégralité de

  8   ce livre, bien que j'y aie songé pendant un moment.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien. Est-ce que nous avons le titre

 10   de ce livre ?

 11   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, c'est le document 1D01-0620. Et le

 12   titre, c'est "L'utilité de la force : l'art de guerre dans le monde

 13   moderne", par Rupert Smith, le soldat britannique exceptionnel des temps

 14   modernes, d'après un journal, "The Daily Telegraph".

 15   Q.  Vous dites que ce n'était pas une affaire privée. Mais vous ne vouliez

 16   pas qu'il sache qui contrôle ces forces ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Donc vous ne vouliez pas que Mladic sache qui contrôle ces forces, ou

 19   plutôt, vous ne vouliez pas qu'il sache que c'est vous. Dites-nous quel est

 20   le subterfuge que vous avez dû utiliser pour cacher cette information de

 21   Mladic ?

 22   R.  Ce n'était pas avec l'objectif de garder cette information secrète, de

 23   ne pas la lui passer, mais tout simplement j'essayais de tirer l'avantage

 24   de cette situation.

 25   Q.  En fait, vous essayiez de le désinformer, c'est ça --

 26   R.  Non. J'ai laissé tout à lui. C'était tout simplement une allusion, ce

 27   n'était pas une tentative de mentir, de le désinformer. Je l'ai laissé

 28   tirer ses conclusions tout seul.

Page 6359

  1   Q.  [aucune interprétation]

  2   R.  Je souhaitais que ces forces ressemblent autant que possible aux forces

  3   de l'OTAN et non pas à celles des Nations Unies.

  4   Q.  Etiez-vous préoccupé par la capacité qu'aurait eue l'armée des Serbes

  5   de Bosnie pour obtenir des renseignements à propos de ce plan ?

  6   R.  Oui, bien sûr.

  7   Q.  De ce fait, qu'avez-vous fait pour essayer de déguiser, si je puis

  8   dire, votre armée ?

  9   R.  Comme je vous l'ai dit, les véhicules n'étaient pas peints en blanc et

 10   les personnes n'avaient pas de casques bleus.

 11   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je pense qu'il est temps de lever la

 12   séance.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Après M. Saxon.

 14   M. SAXON : [interprétation] J'aimerais que M. Guy-Smith nous précise de

 15   combien de temps il a encore besoin pour son contre-interrogatoire. Nous

 16   avions prévu d'en avoir terminé aujourd'hui avec ce témoin. Si M. Guy-Smith

 17   n'a plus grand-chose à faire, pourrions-nous poursuivre ou peut-être

 18   pourrions-nous envisager une séance partielle cet après-midi, une courte

 19   séance cet après-midi.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Guy-Smith, de combien de

 21   temps avez-vous encore de besoin ?

 22   [La Chambre de première instance se concerte]

 23   M. GUY-SMITH : [interprétation] Ecoutez, j'allais convulser un peu mes

 24   notes pour voir ce que je pourrais abréger. Mais en tout je pense que j'ai

 25   encore besoin d'une heure, pas plus. Cela dit, je ne voudrais pas m'engager

 26   tout de suite, il y a vraiment quelques points absolument essentiels que je

 27   dois aborder.

 28   [La Chambre de première instance se concerte] 

Page 6360

  1   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je suis entre les mains de la Chambre.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous ne pouvons siéger qu'au titre de

  3   l'article 15 bis, car l'un d'entre nous sera indisponible, mais les autres

  4   Juges sont présents et il semblerait que toutes les autres personnes qui

  5   nous assistent soient présentes aussi.

  6   Mais il faudrait aussi s'enquérir de la possibilité d'un prétoire.

  7   M. GUY-SMITH : [interprétation] Il me semble, enfin je viens d'apprendre

  8   que les cousins Lukic vont siéger ici. Je ne sais pas s'il y a d'autres

  9   possibilités.

 10   Pourquoi ne pas remettre les choses à demain matin ?

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vois que le Greffe est en train de

 12   faire tout ce qui est nécessaire pour savoir s'il y a une possibilité pour

 13   siéger cet après-midi ou non.

 14   M. GUY-SMITH : [interprétation] De toute façon, je suis entre vos mains.

 15   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] On vient de me dire qu'il y a bel et

 17   bien un prétoire de libre, alors que voulez-vous faire ? Vous avez les

 18   Juges, bien sûr, au titre du 15 bis, ils ne seront pas tous là.

 19   [Le conseil de la Défense se concerte]

 20   [La Chambre de première instance se concerte] 

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation] Nous pouvons poursuivre. Je suis un peu

 22   fatigué. Je ne sais pas si le témoin est lui aussi est assez épuisé, peut-

 23   être aimerait-il une petite pause. Il faut que je me prépare pour un autre

 24   témoin qui va être entendu demain. Je dois dire que ma préférence serait

 25   plutôt de remettre tout cela à demain parce que je serais plus frais et je

 26   pense que je serais plus rapide. Mais bon, comme je l'ai dis, je suis

 27   vraiment entre vos mains.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous êtes en train de contester, de

Page 6361

  1   vous opposer à la demande de M. Saxon, c'est cela ?

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation] Ecoutez, non, ce n'est pas tant que je

  3   veuille être en désaccord avec M. Saxon, mais il faut aussi être juste

  4   envers Sir Rupert. Je ne sais pas pour lui ce qu'il préfère, mais c'est

  5   vous la Chambre, lui c'est le témoin, c'est à vous de décider.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais j'ai l'impression assez bizarre,

  7   enfin je pense vraiment que M. Saxon nous a demandé cela parce qu'il est en

  8   train de se douter de la façon dont les choses vont se dérouler demain avec

  9   le témoin suivant. Il essaie donc de gagner du temps, d'avoir du temps, de

 10   mettre du temps de côté pour bien pouvoir traiter le témoin suivant. C'est

 11   vrai que nous ne travaillerons pas vendredi.

 12   [Le conseil de la Défense se concerte] 

 13   M. SAXON : [interprétation] En effet, c'est cela.

 14   M. GUY-SMITH : [interprétation] Le témoin suivant c'est un témoin 92 ter ?

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non, il est viva voce.

 16   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je crois qu'ils ont encore modifié son

 17   statut, viva voce un jour, 92 ter le lendemain, ça change tout le temps.

 18   M. SAXON : [interprétation] Non, le témoin suivant est 92 ter.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais déjà là on a un 92 ter et on n'a

 20   pas réussi à le faire en une journée.

 21   Donc vous insistez vraiment, Monsieur Saxon, vous voulez que l'on

 22   reprenne cet après-midi pour avoir un peu de temps demain ?

 23   M. SAXON : [interprétation] Si Sir Rupert veut bien revenir demain, enfin

 24   du moins n'est pas totalement opposé à revenir demain, je laisserai faire

 25   et nous pourrons reprendre demain.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ecoutez, Sir Rupert, c'est vous qui

 27   tenez la solution, c'est à vous de voir, mais je pense que vous êtes

 28   fatigué.

Page 6362

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais ce n'est pas que je suis fatigué, mais

  2   demain c'est un jour férié en Belgique, j'ai un enfant qui ne sera pas à

  3   l'école du coup, et j'aimerais vraiment être là demain pour voir cet

  4   enfant. J'aimerais vraiment être à Bruxelles demain.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Donc nous allons reprendre

  6   cet après-midi et nous allons envoyer l'affaire Lukic dans un autre

  7   prétoire et nous resterons ici et donc nous nous reverrons à 14 heures 15.

  8   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 13 heures 54.

  9   --- L'audience est reprise à 14 heures 17.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Guy-Smith, sachez que vous avez

 11   une séance pour terminer. Nous n'allons pas tenir jusqu'à ce soir. Je veux

 12   dire terminer, c'est-à-dire avec les questions supplémentaires.

 13   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vous ai bien compris, 5 sur 5. Et j'ai

 14   aussi cru comprendre que nous allons siéger en application de l'article 115

 15   bis.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non. C'est le 15 bis seulement. Cela

 17   suffit.

 18   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je suis désolé, 15. Merci.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 20   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 21   Q.  Pourriez-vous nous dire ce que signifient les lettres MMB lorsque l'on

 22   parle de la force de réaction rapide, si cela veut dire quelque chose, bien

 23   sûr. En effet, vous l'avez employé cela, Multinational quelque chose ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] MNB. Enfin, attendez. Je pense qu'il s'agit

 25   d'une force qui a été créée sous l'égide du QG d'une brigade qui était

 26   appelée la Brigade multinationale, MNB.

 27   Q.  Donc cette force a été créée sous l'égide de ce QG de la brigade, mais

 28   était-ce pour les raisons dont on a parlé, pour être sûr qu'on ne sache pas

Page 6363

  1   que c'était sous votre contrôle direct ?

  2   R.  Ce n'était pas le but principal, mais c'était marginal. Ça a servi en

  3   effet à cela.

  4   Q.  Très bien. Maintenant, pour ce qui est de la force de réaction rapide,

  5   la FRR. Vous avez estimé que cette FRR serait utilisée pour combattre

  6   l'armée des Serbes de Bosnie, n'est-ce pas ?

  7   R.  Non, pas stricto sensu, si je puis dire. Elle visait à lutter contre

  8   quiconque.

  9   Q.  Oui, mais en toute probabilité, c'était la VRS. 

 10   R.  Oui. En tout cas, lutter contre ceux qui m'empêchaient de faire mon

 11   devoir.

 12   Q.  C'était eux qui vous empêchaient de faire ce qu'on vous demandait de

 13   faire en tout cas ?

 14   R.  Oui. Ils m'empêchaient d'exercer et de réaliser correctement ma

 15   mission.

 16   Q.  Très bien. Maintenant, pour ce qui est de la façon dont vous aviez

 17   compris l'accomplissement de votre mission, peut-on dire qu'il y avait

 18   quand même une divergence de vues entre vous-même et le général Janvier à

 19   propos de la possibilité d'avoir des négociations fructueuses ?

 20   R.  A quelle étape ?

 21   Q.  Après les bombardements de mai.

 22   R.  Oui, en effet. Nous n'étions pas d'accord sur la marche à suivre.

 23   Q.  Le général Janvier pensait que l'on pouvait éviter les combats par le

 24   biais des négociations, n'est-ce pas ? Enfin, en gros.

 25   R.  Non, je ne pense pas qu'il pensait cela. Mais il n'a qu'à venir ici

 26   pour dire ce qu'il pensait.

 27   Q.  Bien.

 28   M. GUY-SMITH : [interprétation] Si je pouvais faire référence dans ce cas à

Page 6364

  1   la page 17 779.

  2   Q.  Une page de compte rendu qui fait référence à un document à propos

  3   duquel on vous a posé des questions.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Quel document ? Quelle page ?

  5   M. GUY-SMITH : [interprétation] Il s'agit du compte rendu de l'affaire

  6   Popovic et consorts, 9 novembre 2007, un vendredi. Vous n'avez peut-être

  7   pas ce document, Messieurs, Madame les Juges, parce que l'Accusation nous a

  8   donné uniquement les informations allant jusqu'au 7 novembre et non pas

  9   jusqu'au 9. Donc pourrions-nous avoir à l'écran, s'il vous plaît, la pièce

 10   1D01-1201 [comme interprété]. Il y avait plusieurs jours de déposition et

 11   la page qui nous intéresse, c'est la 17 779, correspondant à la page 27

 12   dans le prétoire électronique.

 13   Q.  Donc je reprends la réponse que vous m'avez donnée : "Je ne pense pas

 14   qu'il croyait ça, mais il faudrait lui demander de venir s'expliquer."

 15   Donc on vous a demandé de faire un commentaire sur un document, il est

 16   écrit :

 17   "Le général Smith," là nous sommes à la ligne 10, "le général Smith et

 18   Janvier n'avaient pas les mêmes avis. Le général Janvier considère qu'il

 19   est possible de revenir à la situation d'avant mai 26 à présent le biais

 20   des négociations. Le général Smith ne considère pas que l'on peut en

 21   revenir à la situation préalable et que tout ce qu'on peut espérer, c'est

 22   un statu quo." Ensuite, il poursuit à la ligne 15 :

 23   "Le général Smith considère aussi que les deux parties veulent se combattre

 24   et que rien ne les empêchera, même pas la FORPRONU. Le général Janvier,

 25   lui, considère que l'on peut les empêcher de se battre par le biais de

 26   négociations."

 27   Et on vous a posé la question suivante : "Est-ce que ceci reprend justement

 28   les divergences qui existaient entre votre commandant et vous ?"

Page 6365

  1   Votre réponse : "Plutôt bien. De façon tout à fait adéquate."

  2   R.  En effet.

  3   Q.  Donc vous aviez une divergence de vues à propos de la marche à suivre,

  4   à savoir s'il fallait soit engager la lutte, soit poursuivre les

  5   négociations. Vous n'aimez pas ce que je viens de dire.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais il a pas parlé de combat de toute

  7   façon, ni de lutte. Il a juste dit que personne ne pouvait les empêcher de

  8   se battre. C'est différent.

  9   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 10   Q.  Je ne voudrais surtout pas déformer les propos du témoin.

 11     Donc du fait de cette divergence de vues, avez-vous décidé de votre

 12   propre chef de vous assurer de donner certains ordres que vous ayez

 13   l'approbation de votre commandant général Janvier ou non ?

 14   R.  Absolument pas. C'était mon commandant.

 15   Q.  En ce qui concerne maintenant la marche à suivre, j'aimerais obtenir de

 16   votre part des commentaires sur une déclaration qui se trouve à la page 17

 17   780, ligne 12.

 18   "Le général Smith a l'intention d'informer Zagreb de ce qu'il compte faire

 19   sans demander la permission. Sa justification serait qu'un commandant

 20   opérationnel s'engage à assurer la sécurité de ses troupes."

 21   R.  Il s'agit du même document que celui qu'on a vu précédemment. C'est

 22   juste la page suivante, n'est-ce pas ?

 23   Q.  Oui.

 24   R.  C'est donc mon témoignage. On me dit quelque chose.

 25   Q.  Oui.

 26   R.  D'où viennent mes propos ?

 27   Q.  Vous le saviez à l'époque d'où cela venait.

 28   R.  Oui. Ce n'était pas du tout contraire, c'est mon commandant. Je

Page 6366

  1   l'informe de ce que je fais, ensuite c'est à lui de m'arrêter. Je le tiens

  2   au courant et c'est à lui de m'arrêter.

  3   Q.  Je vois. On pourrait dire que votre position était la suivante, en cas

  4   de désaccord avec votre commandant à propos d'une conduite à tenir, comme

  5   vous l'avez dit, vous nous dites que si vous aviez décidé quoi que ce soit

  6   sur le plan opérationnel, si le commandant Janvier considérait qu'il ne

  7   s'agissait pas de la bonne conduite à tenir, il était tenu de vous arrêter

  8   ?

  9   R.  Oui. Je lui ai dis quelle était la conduite que j'allais tenir. On a

 10   parfois des désaccords à propos d'une marche à suivre, disons que vous

 11   voulez une marche à suivre qui est plus optimiste que la mienne.

 12   Q.  Oui.

 13   Je peux adopter votre conduite à tenir, mais je garde un peu mes

 14   arrières, si je puis dire, en préparant à faire autre chose, mais je tiens

 15   mon commandant au courant.

 16   Q.  Donc je vous comprends. C'est à la page ensuite 17 781, on

 17   poursuit la discussion sur ce sujet, on vous pose la question suivante :

 18   "Et pourquoi comme Fortin le dit, vous n'allez pas informer Zagreb."

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Où en êtes-vous ?

 20   M. GUY-SMITH : [interprétation] Page 17 781, ligne 3.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui.

 22   M. GUY-SMITH : [interprétation] C'est ce que je suis en train de lire.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais ce n'est plus à l'écran

 24   maintenant. Remettez-nous la ligne 3, s'il vous plaît.

 25   De toute façon vous êtes en train de déformer les propos précédents,

 26   puisque précédemment il est en train de dire qu'il allait informer Zagreb

 27   et maintenant il dit qu'il n'informe plus Zagreb.

 28   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je lui pose des questions à propos de cette

Page 6367

  1   question et cette réponse.

  2   Q.  "Et pourquoi est-ce que comme Fortin le dit, il ne va pas informer

  3   Zagreb et faire ce que vous voulez ? Il se pourrait que Janvier n'apprécie

  4   pas tellement ce que vous allez faire ?"

  5   Et votre réponse --

  6   R.  Pouvons-nous passer en bas de page.

  7   Q.  On va y venir. Et votre réponse est la suivante, en ce qui concerne le

  8   fait que vous avez ou non informé Zagreb, vous répondez la chose suivante :

  9   "En effet. Je ne voulais surtout pas commencer à discuter de discussions

 10   bureaucratiques soit avec les Nations Unies, soit avec la France, si je

 11   pouvais l'éviter à propos de l'endroit où les troupes sous mon commandement

 12   allaient être positionnées."

 13   R.  Oui, tout va bien.

 14   Q.  Bien. Tout va bien. D'après ce que j'ai compris, vous avez l'impression

 15   qu'en tant que commandant militaire, vous étiez en droit d'évaluer

 16   correctement comment utiliser vos troupes au mieux ?

 17   R.  Je ne sais pas, on avait pris ce passage -- vous savez, ça parle de

 18   toutes mes troupes. Je pense que précédemment dans ce passage, on était en

 19   train de dire comment employer la force de réaction rapide.

 20   Q.  Précisément.

 21   R.  Donc ce n'est pas toutes mes troupes.

 22   Q.  Je comprends.

 23   R.  Je n'étais certainement pas prêt à m'engager à dire à tout le monde ce

 24   que j'allais faire, parce que j'étais encore dans l'expectative, je ne

 25   savais pas vraiment ce que j'allais faire puisqu'il n'y avait pas encore de

 26   situation.

 27   Q.  Très bien. Merci.

 28   J'aimerais maintenant qu'on aborde quelques idées de nature générale et je

Page 6368

  1   vous demande ensuite de me dire si vous êtes d'accord avec ces idées ou

  2   pas.

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Au début de 1994, déjà l'ABiH s'est transformée en une force

  5   d'infanterie légère et efficace qui était capable de conduire des

  6   opérations offensives de petite envergure, n'est-ce pas ?

  7   R.  Vous voulez que je vous dise si je suis d'accord ou pas ?

  8   Q.  Oui. Est-ce que vous êtes d'accord avec ça ?

  9   R.  Plus ou moins.

 10   Q.  Alors qu'est-ce que cela veut dire ?

 11   R.  Il faudrait peut-être voir cela dans le contexte.

 12   Q.  Bien. Alors à quelle date vous êtes arrivé dans la région ?

 13   R.  C'était en janvier 1995. Je peux vous trouver la date si vous voulez,

 14   mais je ne la connais pas.

 15   Q.  Bien. Est-ce que vous êtes au courant des offensives menées par l'armée

 16   bosniaques en mars 1994 ?

 17   R.  Je savais qu'il y avait eu des offensives.

 18   Q.  [aucune interprétation]

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Des infractions.

 20   M. GUY-SMITH : [interprétation] Des offensives.

 21   Q.  [aucune interprétation]

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Offensives.

 23   M. GUY-SMITH : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, il s'agit des

 24   offensives.

 25   Q.  Alors étiez-vous au courant de l'offensive menée à Donje Vakuf ?

 26   R.  Je ne m'en souviens pas.

 27   Q.  Et la chute de Pika Mala Srdjaga [phon] ?

 28   R.  Je ne me souviens pas.

Page 6369

  1   Q.  Vous souvenez-vous d'une offensive qui a eu lieu fin mars 1994 sur le

  2   mont Vlasic ?

  3   R.  Non.

  4   Q.  Et en avril, dans cette même région ?

  5   R.  Non.

  6   Q.  Vous souvenez-vous peut-être d'une offensive de printemps conduite par

  7   l'ABiH qui s'approchait de la fin vers le 8 juin 1994, au moment où le

  8   cessez-le-feu a de nouveau été introduit ?

  9   R.  Non, mais je me souviens qu'il y avait des combats partout, mais je ne

 10   me souviens plus des détails des actions spécifiques des offensives.

 11   Q.  Bien. Passons à l'année 1995, le chiffre de 230 000 hommes dans les

 12   rangs de l'ABiH, ce chiffre vous paraît-il connu ?

 13   R.  Je ne crois pas que j'estimerais leurs effectifs à 230 000 hommes, mais

 14   je ne me souviens pas de toute façon.

 15   Q.  En mars 1995, vous savez bien que l'ABiH a violé le cessez-le-feu et

 16   qu'elle a attaqué en particulier le mont de Vlasic et Stolice ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Et cela s'est passé au moment où, ce qu'on appelle ici, votre thèse est

 19   née ?

 20   R.  Oui, à peu près.

 21   Q.  En mai 1995, une grande pression était exercée sur la VRS par l'afflux

 22   très important de réfugiés serbes depuis la Slavonie occidentale. Vous

 23   souvenez-vous de ceci ?

 24   R.  Oui, je me souviens bien de ces personnes arrivant de la Slavonie

 25   occidentale.

 26   Q.  Bien. Il y avait également des combats pendant la période de janvier,

 27   février 1995 auxquels a participé le 5e Corps de l'ABiH à Bihac. Vous

 28   souvenez-vous de cela ?

Page 6370

  1   R.  En janvier et février ?

  2   Q.  Oui.

  3   R.  Non, je ne me souviens pas de cela. Je crois que le cessez-le-feu était

  4   en force là-bas également. C'est un peu plus tard, fin hiver, début

  5   printemps, que la situation s'est aggravée.

  6   Q.  Vous souvenez-vous de l'attaque surprise lancée le 13 et le 14 janvier

  7   par les forces de l'ABiH de la 501e Brigade de Montagne concernant le 

  8   réservoir sur la montagne Pljesevica ?

  9   R.  Je ne me souviens pas de ceci.

 10   Q.  Bien. Et de l'attaque du 20 mars 1995 sur le mont Vlasic menée par le

 11   7e Corps de l'ABiH ?

 12   R.  Je vous ai déjà dit que je ne me souvenais pas de ces actions en

 13   détail.

 14   Q.  Vous souvenez-vous de la participation de la 17e Brigade de Montagne de

 15   Krajina, de la 727e Brigade de Montagne et de la 7e Brigade musulmane ?

 16   R.  Non, je ne me souviens plus du nom de ces formations.

 17   Q.  Juste un instant. Je viens de mentionner la Brigade musulmane. Est-ce

 18   que vous avez jamais pris connaissance du fait que l'ABiH recrutait des

 19   combattants moudjahidines ?

 20   R.  Il y a eu des allégations allant dans ce sens-là, mais il ne s'agissait

 21   pas pour moi des informations.

 22   Q.  Vous dites qu'il y a eu des allégations et elles émanaient de l'armée

 23   des Serbes de Bosnie ?

 24   R.  D'habitude, oui.

 25   Q.  En dehors des Serbes de Bosnie, quelqu'un d'autre vous a-t-il passé ce

 26   genre d'information ?

 27   R.  Oui, des journalistes.

 28   Q.  Et le Dr Karadzic a-t-il mentionné ceci en votre présence ?

Page 6371

  1   R.  Je ne me souviens pas.

  2   Q.  Est-ce que quelqu'un a parlé à vous de la présence des Moudjahidines en

  3   BiH à cette époque-là ? Est-ce que lui en a parlé, le Dr Karadzic.

  4   R.  Je ne me souviens pas.

  5      Q.  Bien. Vous souvenez-vous de l'attaque du 26 mars menée par l'ABiH

  6   par plusieurs corps d'armée sur le mont de Stolice ?

  7   R.  Oui, si c'est dans la direction de Tuzla, alors oui, je m'en souviens.

  8   Q.  Bien. Vous souvenez-vous de l'opération Zora, conduite par l'ABiH en

  9   mai 1995 ?

 10   R.  Je ne me souviens pas de l'opération s'appelant Zora, mais peut-être si

 11   vous mentionnez les lieux couverts par cette opération, peut-être que je

 12   m'en souviendrais.

 13   Q.  Bien. Ensuite, en juin, il y a eu une offensive avec l'objectif de

 14   percer le siège ?

 15   R.  Quel siège ?

 16   Q.  De Sarajevo.

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Donc cette offensive que vous avez commentée dans votre déclaration,

 19   c'est au paragraphe 68 de votre déclaration, si je ne me trompe. Si vous le

 20   souhaitez, je peux demander que ce soit affiché à l'écran.

 21   R.  Oui, s'il vous plaît.

 22   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je crois que c'est P2348.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Que fait-on avec le document 1D01-1201

 24   ?

 25   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vais demander son versement.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il sera admis.

 27   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera D99.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui. Monsieur Saxon, excusez-moi.

Page 6372

  1   M. SAXON : [interprétation] Avant que le document ne soit versé, je dois

  2   dire qu'on l'a utilisé il y a environ dix minutes et je dois admettre que

  3   je ne me souviens plus.

  4   M. GUY-SMITH : [interprétation] C'est le compte rendu du 9 novembre.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] De l'affaire Popovic.

  6   M. SAXON : [interprétation] Le compte rendu entier ?

  7   M. GUY-SMITH : [interprétation] Non, seulement les pages qu'on a lues.

  8   M. SAXON : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 10   M. GUY-SMITH : [interprétation] Autrement, moi aussi, j'aimerais bien qu'on

 11   puisse verser le compte rendu entier, mais bon.

 12   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 13   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je ne suis pas sûr d'ailleurs si M. Saxon

 14   souhaite le versement du compte rendu entier ou seulement les pages en

 15   question.

 16   M. SAXON : [interprétation] Seulement ces pages.

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bien.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'était quoi le numéro 65 ter.

 19   M. GUY-SMITH : [interprétation] 1D01-1170 [comme interprété].

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc 70 à la fin. Merci.

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation] Voilà. Le paragraphe 68. Je crois qu'il se

 22   trouve à la page 14. Non, c'est à la page 15.

 23   Q.  Donc vous avez déclaré ici que le 16 juin :

 24   "L'armée bosniaque a monté une attaque annoncée depuis longtemps afin

 25   de percer le siège de Sarajevo."

 26   R.  Je ne vois pas le passage en question.

 27   Q.  Peut-on aussi agrandir ce passage pour que le témoin voie mieux.

 28   R.  Je regardais le mauvais passage.

Page 6373

  1   Q.  D'accord.

  2   "Cet échec ou l'échec perçu des Nations Unies a conduit à ce que le

  3   gouvernement commence à croire de plus en plus que les Nations Unies

  4   doivent renégocier leur mandat et devenir effectivement les alliés des

  5   Bosniaques ou tout simplement partir."

  6   Ma question est la suivante : qui est-ce qui vous a passé cette information

  7   concernant le gouvernement bosniaque, à savoir que vous renégociez votre

  8   mandat avec eux ou que vous partiez, à défaut de devenir leur allié ?

  9   R.  Ils ne voulaient pas qu'on renégocie le contrat.

 10   Q.  J'ai compris.

 11   R.  Non. Je ne pense pas que quelqu'un me l'ait dit aussi explicitement que

 12   ça, mais on remarquait qu'il y avait de plus en plus d'incidents lors de

 13   mes contacts avec les dirigeants bosniaques. Comme je l'ai dit plus loin

 14   dans ce même paragraphe, à leur avis, la présence des forces des Nations

 15   Unies empêchait des frappes aériennes efficaces et cela faisait que la

 16   présence des Nations Unies sur place n'était pas avantageuse pour eux.

 17   C'est pour cette raison-là qu'ils voulaient que les Nations Unies soit

 18   prennent le parti des Bosniaques ou partent de Bosnie.

 19   Q.  En fait, quand vous dites le gouvernement, vous faites plutôt référence

 20   à des personnes telles que Dr Ganic ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Vous en parlez dans le paragraphe suivant ?

 23   R.  Oui ? Bien.

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Oui, j'ai eu cette impression dans mes contacts avec plusieurs

 26   personnes.

 27   Q.  Vous dites que vous n'aviez plus de contacts officiels ou officieux

 28   avec les Bosniaques.

Page 6374

  1   R.  Oui, c'est vrai.

  2   Q.  Donc s'agissant du mois de juin, tous les contacts avec les membres du

  3   gouvernement de Bosnie-Herzégovine et l'armée, dans la mesure où il y en

  4   ait eu, n'avaient rien à voir avec les Serbes de Bosnie ?

  5   R.  Cela ne veut pas dire que je n'ai pas essayé d'entrer en contact avec

  6   eux. Cela veut tout simplement dire qu'il n'y a pas eu de contact.

  7   Q.  Très bien. Je n'avais pas bien compris. Passons maintenant au

  8   paragraphe suivant, numéro 70, la deuxième page, où vous parlez :

  9   "Une décision qui a été prise au sein des Nations Unies que, pour le

 10   moment, la force des Nations Unies doit continuer à opérer conformément aux

 11   principes des missions du maintien de paix."

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Bien. Est-ce que cette décision a été prise par le Conseil de sécurité

 14   ou par le secrétaire général ?

 15   R.  Cette décision a été prise, si l'on parle du mois de juin ? Si vous

 16   avez les comptes rendus de mes dépositions préalables, vous allez trouver

 17   mes explications à ce sujet. C'était en juin, lors d'une réunion à Split,

 18   qu'on m'a dit qu'une décision de telle nature avait été prise au sein des

 19   Nations Unies.

 20   Q.  S'agissant du respect des principes des missions de maintien de la

 21   paix, de quelle manière définiriez-vous ceci dans le contexte que vous

 22   décrivez au paragraphe 70 de votre déclaration ?

 23   R.  Vous vous souvenez que j'ai déjà décrit la manière dont je comprends la

 24   mission de maintien de la paix, alors je vous ai déjà dit qu'ici, on

 25   n'utilisait pas la force pour vous défendre dans un cas particulier, mais

 26   que si vous ne prenez pas une série d'actions, il y a des chances que les

 27   combats éclatent.

 28   Q.  Bien.

Page 6375

  1   M. GUY-SMITH : [aucune interprétation]

  2   Q.  J'aimerais maintenant qu'on parle de la structure de commandement.

  3   Tout d'abord, si je comprends bien, il y a deux formes de

  4   commandement : le concept de commandement qui existe dans les pays

  5   occidentaux et celui qui existait dans les pays membres du Pacte de Warsaw,

  6   à l'époque, donc il y a une différence ?

  7   R.  Oui, en gros.

  8   Q.  [aucune interprétation]

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Pour ce qui est de la question de l'armée du général Mladic, pour

 11   l'appeler ainsi --

 12   R.  Oui.

 13   Q.  -- le général Mladic contrôlait son armée en allant du haut vers le

 14   bas. Est-ce que c'est une affirmation avec laquelle vous êtes d'accord ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Cela voulait dire que, concernant ce qui se passait, et pour employer

 17   les termes que nous avons déjà employés précédemment, au niveau

 18   opérationnel et au niveau tactique, ces décisions, à ces deux niveaux-là,

 19   étaient prises par lui-même ou par quelqu'un à qui il avait délégué la

 20   tâche de prendre ces décisions et qui, par la suite, relayait ces

 21   informations en descendant la chaîne de commandement; est-ce que c'est

 22   exact, et ce, sur le terrain ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Pour ce qui est des personnes qui se trouvaient dans l'armée de Mladic

 25   pour lesquelles vous saviez qui étaient dans son armée, est-ce que ces

 26   personnes étaient en mesure d'avoir des jugements indépendants et de

 27   prendre des actions opérationnelles, sur la base de votre propre

 28   connaissance ?

Page 6376

  1   R.  S'agissant de l'envergure de l'ordre qui a été donnée, oui, dans le

  2   sens où il y avait très peu de latitude dans les ordres. Ils n'avaient pas

  3   énormément de pouvoir discrétionnaire.

  4   Q.  Et ceci était différent de ce que l'on peut trouver dans une armée

  5   occidentale. Il y avait beaucoup plus de marge de manœuvre, n'est-ce pas,

  6   dans vos ordres à vous, par exemple ?

  7   R.  Ce n'est pas toujours le cas, mais il y a une tendance effectivement de

  8   vouloir décrire les résultats que l'on veut plutôt que de dire ce qu'il

  9   faut faire. Donc oui, il y a une plus grande marge de manœuvre quant à

 10   l'exécution.

 11   Q.  Oui.

 12   R.  Les choses se font de cette façon-là lorsqu'on parle de forces

 13   multinationales, pour toutes sortes de raisons, car il y a différentes

 14   langues, différentes formations du personnel, et cetera, et cetera.

 15   Q.  Lorsque vous parlez de forces multinationales, il y a une plus grande

 16   marge de manœuvre ? Je ne suis pas tout à fait sûr de vous avoir compris.

 17   R.  Les ordres sont donnés afin que -- on parle plutôt de résultat que de

 18   but final.

 19   Q.  Pour ce qui est maintenant de déléguer l'autorité et de déléguer le

 20   pouvoir, est-ce que il y a une distinction que l'on doit faire entre les

 21   deux, donc délégation d'autorité et délégation de pouvoir ?

 22   R.  Pas comme ça, non. Car ce que je vous décrit, c'est comment vous pouvez

 23   vous exprimer. C'est la marge de manœuvre qui est donnée à quelqu'un.

 24   Q.  Pour ce qui est de votre propre expérience de l'armée de Mladic, est-ce

 25   que vous avez trouvé, lorsque vous avez eu des contacts avec ces personnes

 26   telles Gvero, pour Indic, je crois que vous avez mentionné que vous aviez

 27   eu des contacts avec lui. Est-ce que ces derniers avaient une plus grande

 28   marge de manœuvre que d'autres ?

Page 6377

  1   R.  Ces deux personnes occupaient des postes tellement différents.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Saxon.

  3   M. SAXON : [interprétation] Non, je retire mon objection.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Smith.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] L'un est un lieutenant-colonel et l'autre est

  6   un commandant, donc vous ne pouvez pas les comparer.

  7   M. GUY-SMITH : [interprétation]

  8   Q.  Non, je comprends, ces derniers occupent des postes importants, ils ont

  9   des grades importants, bien sûr.

 10   R.  Oui, et les missions qui leur avaient été confiées, ce qui se voit de

 11   par leur grade. Je suis d'accord avec vous, à ce moment-là.

 12   Q.  Très bien. Lors de la réunion du 15 juillet tenue à Belgrade, réunion à

 13   laquelle vous avez participé, les personnes présentes, si j'ai bien

 14   compris, étaient vous-même, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Milosevic ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Mladic ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Et je ne me souviens plus qui d'autres. Vous souvenez-vous ?

 21   R.  Vous voulez que je vous donne des noms ?

 22   Q.  Oui, si vous le pouvez.

 23   R.  Il y avait Karl Bildt, il y avait Akashi.

 24   Q.  Karl Bildt, Akashi.

 25   R.  Oui. Stoltenberg.

 26   Q.  Aussi.

 27   R.  Le général de Lapresle.

 28   Q.  Le général de Lapresle était un membre de la FORPRONU, n'est-ce pas ?

Page 6378

  1   R.  Non, si je me souviens bien, il était le conseiller militaire de

  2   Stoltenberg à l'époque.

  3   Ou peut-être qu'il était le conseiller de Karl Bildt. Je ne me

  4   souviens pas très précisément, mais en tout cas il avait été commandant de

  5   la FORPRONU, ou en fait, commandant du poste de protection des Nations

  6   Unies à Zagreb et il y a passé un an environ.

  7   Q.  S'agissant de cette réunion, le but de cette réunion, quel était-il ?

  8   R.  Ce n'est pas moi qui avais organisé la réunion.

  9   Q.  Oui, je vois.

 10   R.  Oui, c'était à la suite ou au lendemain de la chute de Srebrenica, et

 11   les raisons pour lesquelles j'y étais et pour lesquelles ont m'a demandé de

 12   venir et de prendre part à la réunion portaient sur la récupération et le

 13   retrait du Bataillon néerlandais qui se trouvait à Srebrenica. C'est

 14   pourquoi on m'a demandé d'assister à la réunion. Mais je ne me souviens pas

 15   maintenant le but du reste de la réunion. Je ne sais pas de quoi il a été

 16   question autre dans la réunion, mais certainement toutes les questions

 17   portaient sur la chute de Srebrenica et sur les conséquences de cette

 18   dernière.

 19   Q.  Très bien. Des accords existaient le 15 juillet, est-ce que ces accords

 20   avaient été faits par des personnes autres que Mladic ?

 21   R.  Pardon, excusez-moi ? De quels accords parlez-vous ? Quels étaient ces

 22   accords qui existaient ?

 23   Q.  La raison pour laquelle je vous pose cette question c'est parce que

 24   vous avez fait l'observation suivante dans votre déclaration au paragraphe

 25   76, vous dites :

 26   "Le but de cette réunion était de confirmer un accord déjà pré-

 27   préparé et de l'imposer à Mladic et à Milosevic et nous n'étions là que

 28   pour en parler."

Page 6379

  1   R.  Oui, mais dans ce cas-là, vous venez de rafraîchir ma mémoire.

  2   Q.  Fort bien.

  3   R.  Si c'est ce que le but énoncé était, alors à ce moment-là il y avait

  4   certainement eu des discussions. Je m'en souviens maintenant effectivement,

  5   des personnes telles que Karl Bildt, à Belgrade, et peut-être même aussi

  6   Stoltenberg, et ces négociations avaient lieu pendant les jours qui ont

  7   suivi la chute de Srebrenica et cette réunion. Cette réunion a découlé de

  8   ces autres réunions qui avaient eu lieu avant cela à Belgrade.

  9   Q.  S'agissant maintenant de cet accord pré-préparé, préchauffé pour

 10   l'appeler ainsi, est-ce que vous pourriez nous dire qui avait pris part

 11   dans le rapport ?

 12   R.  Vous parlez de ce pré-réchauffement ?

 13   Q.  De cette pré-préparation de ce deal.

 14   R.  Non, je ne peux pas vous le dire.

 15   Q.  D'accord. Lorsqu'on parle de ce préchauffage, de cet accord déjà

 16   préparé, précuit, est-ce que vous pourriez nous dire qui était là ?

 17   R.  Oui, vous venez de rafraîchir ma mémoire et c'est lorsqu'on ma demandé

 18   de venir à la réunion que j'ai eu connaissance du fait qu'il y avait déjà

 19   eu d'autres réunions avant celle-ci.

 20   Q.  Pour nous arrêter à cette phrase "accord précuit", vous n'avez pas pris

 21   part à la préparation de cet accord, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui, c'est exact. On m'a simplement demandé de venir à la réunion en

 23   question.

 24   Q.  Oui. Où on a présenté cet accord ?

 25   R.  Oui.

 26   M. GUY-SMITH : [interprétation] Un instant, je vous prie.

 27   [Le conseil de la Défense se concerte]

 28   M. GUY-SMITH : [interprétation]

Page 6380

  1   Q.  En dernier lieu, il nous faudra peut-être de nouveau afficher votre

  2   déclaration 2384.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [Hors micro]

  4   M. GUY-SMITH : [interprétation] Excusez-moi, pardon ?

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] 2348.

  6   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, je crois que vous avez raison et je me

  7   trompe.

  8   Il faudrait passer au paragraphe 82, page 17.

  9   Q.  Vous dites que vous faites des observations supplémentaires à la suite

 10   de cette réunion, vous dites que :

 11   "Mladic n'a pas mentionné Pale, n'a pas parlé d'hommes politiques serbes de

 12   Bosnie, jamais, même pas une seule fois. Certains de ses commentaires m'ont

 13   démontré une naïveté, à savoir que les généraux seuls pouvaient avoir une

 14   solution politique à cette guerre."

 15   S'agissant de ses ambitions politiques, vous avez dit que lors de la

 16   réunion il semblerait qu'il n'y avait de preuves. Vous parlez de preuves, à

 17   savoir qu'il n'avait pas d'ambitions politiques. Je me demande ce que

 18   c'était ces preuves, c'est qu'il ne voulait pas devenir président, c'est

 19   cela ?

 20   R.  Oui, c'était à la négative. Donc il ne voulait pas devenir président.

 21   Q.  Est-ce que cela que vous voulez dire, qu'en l'absence de cette

 22   information, sur la base des éléments de preuve entendus à la réunion ?

 23   J'essaie simplement de comprendre ce que vous vouliez dire par cette preuve

 24   que vous aviez obtenue dans le cadre de cette réunion.

 25   R.  Je ne peux pas vous donner de preuve à l'appui d'une affirmation

 26   négative.

 27   Q.  Non, je vous comprends. Mais on lit la phrase à la positive, c'est le

 28   seul élément de preuve, c'est la seule preuve me permettant de conclure

Page 6381

  1   ceci dans la réunion.

  2   R.  C'est ainsi qu'il s'est comporté lors de la réunion.

  3   Q.  Très bien. Merci. Je vois.

  4   R.  Je crois que c'est cela.

  5   Q.  Très bien, merci.

  6   M. GUY-SMITH : [interprétation] Eu égard à ce que vous avez dit concernant

  7   l'heure, je peux maintenant m'arrêter.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  9   Monsieur Saxon, oui, je vous écoute.

 10   M. SAXON : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, avoir à

 11   l'écran la pièce P2348, c'est-à-dire la déclaration du général Smith. Ou

 12   plutôt, le D96.

 13   Il me semble que le D96 représente les différents paragraphes qui ont été

 14   versés par la Défense et qui ne faisaient pas partie de la version expurgée

 15   de la déclaration du témoin.

 16   Bon, ce n'est pas grave. Je vais poursuivre de toute façon.

 17   Nouvel interrogatoire par M. Saxon :

 18   Q.  [interprétation] Donc vous vous souvenez très certainement, Monsieur le

 19   Témoin, qu'au cours du contre-interrogatoire, on vous a présenté plusieurs

 20   passages de votre déclaration de 1996 que vous avez faite auprès du bureau

 21   du Procureur. A propos du paragraphe 98, mon confrère vous a posé certaines

 22   questions, et ce passage qui semblait dire qu'à cette époque-là, lorsque

 23   les armées croates avaient lancé leur offensive en 1995, Ratko Mladic

 24   semblait se soucier - enfin, je reprends - que Ratko Mladic à l'époque

 25   était principalement préoccupé par l'intégrité de la Republika Srpska et

 26   pas grand-chose d'autre à l'époque.

 27   Vous vous en souvenez ?

 28   R.  Oui.

Page 6382

  1   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, essayer de vous rappeler de ce qui

  2   s'était passé à l'époque. Pourriez-vous nous dire quelle était la position

  3   de Ratko Mladic à l'époque ?

  4   R.  Il était commandant de l'armée des Serbes de Bosnie.

  5   Q.  Alors juste à ce moment-là, après l'offensive des Croates, quel était

  6   l'enjeu pour la Republika Srpska à l'époque ?

  7   R.  Tout d'abord, un grand nombre de réfugiés sont arrivés.

  8   Ensuite, il y avait maintenant des combats qui avaient embrasé la moitié

  9   occidentale du territoire des Serbes de Bosnie, et de ce fait, ses forces

 10   se sont trouvées divisées, et il avait maintenant deux fronts, si je puis

 11   dire, il devait se battre d'un côté contre les Croates, et d'un autre côté

 12   contre les Bosniens.

 13   Q.  Il était dans cette position à ce moment-là, et pourriez-vous dire, si

 14   vous le savez, bien sûr, quelle était la responsabilité principale de Ratko

 15   Mladic en tant que commandant de son armée des Serbes de Bosnie ?

 16   R.  Ecoutez, en tant que commandant de ces forces, son but premier était

 17   d'assurer la sécurité de ses propres troupes.

 18   Q.  Très bien. Aujourd'hui, à la page 30, lignes 12 à 25, mon confrère a

 19   évoqué un autre passage de votre déclaration. Paragraphe 104 qui décrit une

 20   discussion que vous avez eue avec Ratko Mladic. Si vous vous en souvenez,

 21   dans votre déclaration, à un moment, il est dit : "Ratko Mladic a réitéré

 22   le fait que les Serbes de Bosnie voulaient absolument être impliqués dans

 23   le processus de paix."

 24   Vous vous en souvenez ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Ensuite, il poursuit en affirmant que la République fédérale de

 27   Yougoslavie est très éloignée de la guerre, est loin de la guerre ?

 28   Vous vous en souvenez ?

Page 6383

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Voici ma question : si les Serbes de Bosnie étaient exclus des

  3   négociations de paix, dans ce cas-là, qui aborderait dans le cadre de ces

  4   négociations les points affectant les Serbes de Bosnie ?

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Guy-Smith.

  6   M. GUY-SMITH : [interprétation] C'est une hypothèse que l'on demande au

  7   témoin ici.

  8   M. SAXON : [interprétation] Je demande s'il savait, le cas échéant --

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] J'aimerais savoir exactement si vous avez la

 10   date à laquelle ceci se réfère ?

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ecoutez, attendez un moment parce

 12   qu'il y a une objection de la part de Me Guy-Smith. Il faut que nous la

 13   traitions avant que vous ne répondiez.

 14   Maître Guy-Smith, vous êtes toujours debout. Donc votre éminent confrère a

 15   quand même demandé au témoin de répondre s'il le savait.

 16   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, mais il prend comme hypothèse un fait

 17   qui n'est pas encore un moyen de preuve. Il parle d'une hypothèse s'ils

 18   étaient en dehors du processus de négociations pour la paix.

 19   Ici, il y a quand même dans sa question, au départ on parle d'une

 20   prémisse qui est une hypothèse. Il y a d'abord une conjecture qui suit une

 21   hypothèse.

 22   M. SAXON : [interprétation] Ecoutez, mon confrère en a parlé lors de son

 23   contre-interrogatoire, il a parlé de ce passage dans la déclaration où le

 24   général Mladic semble avoir dit que les Serbes de Bosnie n'étaient pas

 25   impliqués dans le processus de paix.

 26   M. GUY-SMITH : [interprétation] Ecoutez, il essaie de déterminer, de faire

 27   dire au témoin ce qui se passait par la tête de Mladic. Mais si c'est ce

 28   que le témoin voulait dire dans la déclaration, je serais d'accord avec la

Page 6384

  1   question, mais dans ce cas-là, il est en train de nous poser une question à

  2   propos de ce qui se passait dans la tête de Mladic.

  3   M. SAXON : [interprétation] Il a dit, je veux faire partie du processus. Je

  4   veux être dans le processus, je veux être pris en compte. Je peux répéter.

  5   Il l'a dit, il réitère ce qu'il avait dit au départ. 

  6   Très bien. Je vais reformuler ma question.

  7   J'aimerais aussi donner la date afin de répondre aux souhaits du témoin.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allez-y.

  9   M. SAXON : [interprétation]

 10   Q.  Donc cette réunion a eu lieu le 25 août 1995.

 11   Je voudrais savoir la chose suivante. Pourriez-vous nous dire ce que

 12   voulait vraiment dire Ratko Mladic lorsqu'il a réitéré le souhait des

 13   Serbes de Bosnie d'être impliqués dans le processus de paix ? Etaient-ils

 14   déjà impliqués dans le processus de paix ou pas, à l'époque ? 

 15   M. GUY-SMITH : [interprétation] La question est formulée de façon à ce que

 16   je ne la comprends pas très bien.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il faudrait au moins que vous vous

 18   leviez pour poser votre question.

 19   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, j'essaye d'être rapide car ce qui

 20   concerne la question telle qu'elle est formulée, on demande quand même au

 21   témoin d'essayer d'interpréter les idées qui passaient par la tête du

 22   général Mladic.

 23   M. SAXON : [interprétation] J'essaie de suivre sa suggestion à la ligne 9 à

 24   12, ce qu'il nous a dit il y a 30 secondes. Si le témoin sache que cette

 25   déclaration voulait dire.

 26   Q.  Donc, Général Smith, savez-vous d'après vous ce que voulait dire le

 27   général Mladic lorsqu'il a énoncé ces propos ?

 28   R.  Je pense que oui. L'initiative Lake qui a été ensuite suivie par les

Page 6385

  1   apparences de M. Holbrooke a commencé en août, et les premières étapes de

  2   la diplomatie de M. Holbrooke étaient de prendre langue avec Belgrade et

  3   Zagreb plutôt que de prendre langue avec les factions qui se trouvaient en

  4   Bosnie-Herzégovine. Je pense que c'est de cela qu'il voulait parler à

  5   l'époque.

  6   Q.  Donc je reviens à ma question première. Si les Serbes de Bosnie

  7   n'étaient pas impliqués dans le processus de paix à l'époque, est-ce que

  8   vous savez qui s'occupait de leurs intérêts ?

  9   R.  Non.

 10   Q.  Très bien. Donc aujourd'hui, page 52 à 53 du compte rendu, vous nous

 11   décriviez la thèse que vous avez définie après avoir pris vos fonctions en

 12   1995. Donc en ce qui concerne les enclaves orientales principalement, vous

 13   dites que les Serbes de Bosnie avaient plus d'espace à défendre que de

 14   personnes permettant de défendre tout cet espace.

 15   R.  Oui, je m'en souviens.

 16   Q.  Donc au cours de la première moitié de 1995, pourriez-vous nous dire si

 17   l'armée de la Republika Srpska essayait de répondre à ce problème par la

 18   voie militaire ?

 19   R.  Si cela signifie essayer de libérer des forces, et

 20   cetera --

 21   Q.  Oui.

 22   R.  J'avais formulé ma thèse et j'en avais anticipé que les enclaves

 23   seraient très certainement réduites, que nous ne pourrions plus avoir accès

 24   à ces enclaves, que la vie dans les enclaves devient de plus en plus

 25   difficile, et en effet, tout ceci était bel et bien arrivé.

 26   Q.  Très bien.

 27   R.  Et cela a en effet libéré des troupes pour pouvoir les déployer

 28   ailleurs.

Page 6386

  1   Q.  Et votre réponse inclue bien sûr ce qui s'est passé dans l'enclave de

  2   Srebrenica ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Ensuite à la page 55, ligne 15 à 16, vous dites que la FORPRONU n'a pu

  5   convoyer d'aide humanitaire vers les enclaves qu'à peu de reprises au cours

  6   du premier semestre 1995.

  7   Alors pourquoi est-ce que les convois de la FORPRONU n'ont pas pu rentrer

  8   dans les enclaves ou à très peu de reprises ?

  9   R.  Parce qu'on ne nous donnait pas de permission. On ne nous autorisait

 10   pas à laisser passer nos convois.

 11   Q.  Qui vous refusait l'accès ?

 12   R.  C'était Mladic, plutôt l'armée des Serbes de Bosnie.

 13   Q.  Bien.

 14   M. SAXON : [interprétation] Pourrions-nous avoir maintenant à l'écran, s'il

 15   vous plaît, la pièce D97.

 16   Q.  Il s'agit de la carte qui a été employée par mon confrère au cours de

 17   son contre-interrogatoire, carte de Sarajevo.

 18   Donc vous vous souvenez de cette carte, Monsieur le Témoin. Pourrions-nous

 19   avoir le haut de la carte, s'il vous plaît, à l'écran. Nous penchez sur les

 20   mots qui sont écrits en haut à gauche, qui ont été interprétés lorsque Me

 21   Lukic les a lus comme étant quelque chose qui aurait commencé le 1er mars

 22   1995 et terminé le 14 septembre 1995.

 23   Vous vous en souvenez ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Ensuite si on voir le bas de la carte, on reconnaît des positions.

 26   Certaines sont des positions de l'ABiH.

 27   Voici ma question :  au vu de cette carte, pouvez-vous dire si les

 28   positions des unités militaires telles qu'elles sont précisées sur la

Page 6387

  1   carte, de l'ABiH tout comme l'armée de la VRS, étaient celles qui étaient

  2   tenues au 28 août 1995, c'est-à-dire le jour où Markale II a eu lieu ?

  3   R.  Non, je ne peux pas. Disons que cette carte ne me dit pas cela, pas

  4   ouvertement en tout cas.

  5   Q.  Très bien. Est-ce que vous saviez si en août 1995 des forces de la

  6   FORPRONU avaient accès aux positions de la VRS aux alentours de Sarajevo ?

  7   R.  Non, je sais qu'ils n'avaient pas accès.

  8   Q.  Dans la pièce P2360, paragraphe 1, qui vous a été montrée dans le cadre

  9   du contre-interrogatoire, vous avez déclaré que Ratko Mladic affirmait que

 10   vous agissiez sous la direction politique du gouvernement bosnien.

 11   Y a-t-il la moindre vérité dans l'affirmation de Mladic ?

 12   R.  Aucune.

 13   Q.  Page 88 maintenant du LiveNote d'aujourd'hui, ligne 15, vous avez

 14   parlé de ce qui s'est passé après le problème de prise d'otages de mai 1995

 15   et de la situation qui s'en est suivie.

 16   Vous avez dit qu'on ne pouvait pas faire de bombardement

 17   supplémentaire et qu'il était impossible non plus de recapturer les otages.

 18   Donc pourriez-vous nous dire un petit peu, à l'époque, ce que la FORPRONU

 19   pouvait faire une fois les otages capturés ?

 20   R.  On était très limité dans notre possibilité de manœuvre. Les seuls

 21   endroits où on avait liberté de mouvement, c'était soit à l'intérieur d'une

 22   enclave, soit sur le territoire détenu par les Bosniens.

 23   Q.  Quant à leur capacité d'employer la force à l'époque ?

 24   R.  Outre une définition très étroite de l'autodéfense d'un individu, il

 25   n'y avait pas réellement une possibilité d'employer la force.

 26   Q.  Pour parler encore une fois de ce concept de légitime défense, à la

 27   page 92 du compte rendu d'audience, vous nous décrivez qu'en début de 1995,

 28   la légitime défense prévue dans les règles d'engagement de la FORPRONU

Page 6388

  1   était interprétée comme une menace imminente contre les membres de la

  2   FORPRONU et du UNHCR.

  3   J'aimerais savoir s'il y avait des membres de la FORPRONU qui étaient

  4   déployés le long de la zone d'exclusion de l'enclave ?

  5   R.  Oui, effectivement. C'est ceci qu'on appelait les points de

  6   rassemblement d'armes.

  7   Q.  Et si une partie du conflit retirait les armes de ces points de

  8   rassemblement d'armes à l'intérieur de la zone d'exclusion, est-ce que ceci

  9   aurait été considéré comme une menace menée à l'encontre des membres de la

 10   FORPRONU dans la zone d'exclusion en question ?

 11   R.  Non.

 12   Q.  Très bien.

 13   Vous avez maintenant parlé de la création d'une force de réaction rapide

 14   après les bombardements du mois de mai, à la page 97 du compte rendu

 15   d'audience.

 16   J'aimerais savoir, à l'époque, quelle était l'activité qu'allait couvrir

 17   cette force de réaction rapide ?

 18   R.  Ce que je savais à l'époque, c'est que je n'étais pas en mesure de

 19   sortir de cette situation dans laquelle j'étais un otage, dans le sens

 20   d'otage et bouclier. Alors que je n'avais pas de mission précise en tête,

 21   j'avais besoin d'avoir cette capacité et c'est ainsi que j'ai commencé à

 22   développer cette force de réaction rapide.

 23   Q.  Très bien. Maintenant au paragraphe 68 de votre déclaration qui porte

 24   la cote P2348, vous dites que la FORPRONU avait été vue par le gouvernement

 25   bosnien en tant qu'obstacle pour ce qui est des frappes aériennes et de la

 26   levée de l'embargo sur les armes.

 27   Pourquoi était-elle perçue comme un obstacle ?

 28   R.  D'abord parce qu'il fallait décider si les frappes aériennes devaient

Page 6389

  1   avoir lieu, mais il y a également les conséquences de ces frappes aériennes

  2   qui allaient s'ensuivre.

  3   Deuxièmement, lorsqu'on parle de ces deux types d'opinions, à savoir

  4   si, oui ou non, on pouvait mettre la clé et l'activer, le fait d'avoir des

  5   personnes sur le terrain, ceci voulait dire qu'on était mieux en mesure de

  6   voir ou de percevoir les opinions de toutes les parties plutôt que le

  7   contraire.

  8   Q.  Très bien. Merci. Je n'ai plus d'autres questions.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur Saxon.

 10   Questions de la Cour : 

 11   Mme LE JUGE PICARD : Général, j'ai une ou deux questions à vous poser.

 12   Notamment d'après les documents écrits que nous avons, dans la

 13   transcription du procès Popovic, vous avez dit, page 27 329, on vous a

 14   demandé si, d'après vous, lors de cette réunion du 15 juillet que vous avez

 15   eu à Belgrade, Milosevic était au courant des événements qui avaient eu

 16   lieu à Srebrenica, notamment du massacre qui a eu lieu à Srebrenica,

 17   puisqu'à ce moment-là, vous-même vous n'étiez pas au courant, d'après ce

 18   que j'ai compris.

 19   Et vous avez répondu que dans votre opinion, il était au courant, il savait

 20   ce qui s'était passé.

 21   Vous confirmez ?

 22    R.  Oui, tout à fait. Je confirme cette réponse dans ce document, oui,

 23   effectivement.

 24   Mme LE JUGE PICARD : Je vous remercie.

 25   Une autre question. Dans votre qualité de commandant pour toute la

 26   FORPRONU, pour toute la Bosnie, est-ce que vous avez eu connaissance à un

 27   moment où à un autre de la présence de soldats de l'armée serbe sur le

 28   territoire de la Bosnie, que ce soit en Republika Srpska ou sur le

Page 6390

  1   territoire de la Fédération ?

  2   R.  Pour être tout à fait sûr d'avoir bien saisi votre question, est-ce que

  3   je savais que les Serbes de l'ex-République de Yougoslavie

  4   Mme LE JUGE PICARD : De l'armée serbe.

  5   R.  En fait, la seule fois où j'ai eu des preuves à l'appui, c'est lorsque

  6   j'étais à Zepa. C'était vers la fin de juillet de cette année-là, de

  7   l'année 1995. Nous avions vu des gens qui pour nous étaient des personnes

  8   qui portaient des insignes. Ils avaient des insignes sur leurs uniformes et

  9   pour nous cela voulait dire que ces personnes venaient de la Yougoslavie,

 10   ils n'étaient pas des Serbes de Bosnie.

 11   Mme LE JUGE PICARD : Dans votre témoignage écrit, au paragraphe 1, en

 12   parlant du général Mladic, vous avez dit qu'il était dépendant de la VJ

 13   pour les ressources militaires. Vous pensiez à quoi ? En hommes, en

 14   matériel, et sur quels fondements vous nous avez dit ça ?

 15   R. L'origine de l'équipement et les effectifs serbes de Bosnie venaient

 16   directement de l'armée yougoslave et après le démantèlement, ils ont pu

 17   fournir la majorité des effectifs. C'est eux qui sont devenus les forces

 18   serbes de Bosnie -- ou plutôt, ils étaient en Bosnie -- ou plutôt, excusez-

 19   moi. Je vais recommencer. Je vais essayer d'être plus clair.

 20   L'armée de la République de Yougoslavie, quand il y a eu le démantèlement

 21   de la République, l'armée à ce moment-là a eu tendance à aussi se scinder.

 22   Il y a eu un démantèlement également de l'armée, donc un très grand nombre

 23   des effectifs serbes de Bosnie, plus particulièrement parmi les officiers

 24   qui avaient servi dans l'armée yougoslave avant le démantèlement de la

 25   Yougoslavie - et maintenant, je parle d'équipement et un très grande nombre

 26   d'équipement ainsi que de l'infrastructure dont ils se servaient était

 27   l'infrastructure de l'ancienne armée.

 28   Donc à mon avis, un très grand nombre de ces personnes avait encore

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  1   été rémunéré sur la base du système de rémunération de l'ancienne armée. Et

  2   je crois que c'est à cela que je fais référence dans ce paragraphe. 

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  4   Y a-t-il des questions qui découlent des questions posées par le Juge

  5   Picard, Monsieur Saxon ? J'espère que non.

  6   M. SAXON : [interprétation] A ce moment-là, je vais m'asseoir, Monsieur le

  7   Président.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non. Vous pouvez y procéder.

  9   Nouvel interrogatoire supplémentaire par M. Saxon :

 10   Q.  [interprétation] Vous avez mentionné que les personnes de Zepa

 11   portaient des insignes sur les uniformes qui semblaient provenir de l'ex-

 12   armée yougoslave. Est-ce que c'étaient des insignes de la police ou bien

 13   est-ce que c'étaient des insignes autres ?

 14   R.  Je crois que la désignation juste serait qu'il s'agissait de forces

 15   paramilitaires.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Maître Guy-Smith.

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui.

 18   Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Guy-Smith :

 19   Q.  [interprétation] Justement pour être tout à fait limpide, s'agissant de

 20   la déposition que vous avez donnée à la page 27 329, si j'ai bien compris

 21   votre réponse, on vous a demandé la question suivante, je cite :

 22   "Est-ce que vous étiez en mesure de vous forger une opinion à savoir si

 23   Milosevic avait connaissance après l'événement, s'agissant des meurtres de

 24   Srebrenica ?"

 25   Et vous avez dit : "Oui." 

 26   La question était de savoir : "Si vous étiez en mesure de vous forger

 27   une opinion à cause de la réunion qui a eu lieu le 15 juillet, Mladic était

 28   là et il devait sans doute savoir qu'est-ce qui s'est passé."

Page 6392

  1   Vous n'avez pas reçu d'information précise, n'est-ce pas, à ce sujet;

  2   vous ne saviez pas précisément si Mladic avait transmis à Milosevic ce qui

  3   s'était passé, n'est-ce pas ? C'était une présomption de votre part, à

  4   savoir les informations qui avaient été partagées entre Mladic et

  5   Milosevic, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, c'est exact.

  7   Q.  Merci.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

  9   Merci, Général Smith, maintenant vous allez pouvoir aller chercher

 10   votre enfant à l'école.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Alors ceci met fin à votre déposition.

 13   Je vous remercie d'être venu déposer. Vous pouvez maintenant disposer.

 14   Merci beaucoup.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, Monsieur le

 16   Président, Madame le Juge.

 17   [Le témoin se retire]

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 19   La séance est levée. Nous reprendrons nos travaux demain matin à 9

 20   heures.

 21   --- L'audience est levée à 15 heures 38 et reprendra le jeudi 21 mai 2009,

 22   à 9 heures 00.

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