Page 6475
1 Le lundi 25 mai 2009
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 25.
5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour à toutes les personnes ici
6 présentes, autour du prétoire aussi.
7 Madame la Greffière, veuillez citer l'affaire.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Madame, Monsieur le Juge,
9 bonjour à tous. Affaire IT-04-81-T, le Procureur contre Momcilo Perisic.
10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup. Les parties peuvent-
11 elles se présenter, à commencer par l'Accusation.
12 M. SAXON : [interprétation] Bonjour, Madame et Messieurs les Juges. Dan
13 Saxon, Lorna Bolton, Salvatore Cannata, et Mme Inger de Ru au nom de
14 l'Accusation.
15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Avant de citer le prochain
16 témoin, une petite question d'intendance.
17 Excusez-moi, je vous avais oublié, Maître Lukic.
18 M. LUKIC : [interprétation] Bonjour, Madame et Messieurs les Juges. Bonjour
19 à toutes les personnes présentes. Aujourd'hui, nous avons pour représenter
20 M. Perisic, Me Gregor Guy-Smith, et nous avons également Milos Androvic, et
21 une stagiaire, Katharine Marshall. Si vous le permettez, elle sera présente
22 dans ce prétoire. Vous savez mon nom.
23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Lukic. Excusez-moi une
24 fois de plus. J'étais sur le point de dire qu'avant d'appeler le témoin, il
25 y avait une petite chose que je voulais souligner. Le 20 mai, la Chambre a
26 rendu une décision confidentielle en application de l'article 92 quater qui
27 faisait droit à une requête de l'Accusation en vue du versement de dix
28 pièces qui concernaient un témoin qui n'était pas disponible. Le versement
Page 6476
1 de ces pièces est un élément public, même si la motivation de la décision
2 doit rester confidentielle. Vous êtes d'accord avec moi, Monsieur Saxon ?
3 M. SAXON : [interprétation] Oui.
4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Dans ce cas, il faudra que les pièces
5 soient rendues publiques. Il s'agit des pièces 094549 [comme interprété],
6 ça devient la pièce P2376. Et nous allons jusqu'au document de la liste 65
7 ter 09558, qui devient la pièce P2385. Entre ces deux numéros, toutes les
8 pièces seront déclarées pièces publiques. Je vais demander à Mme la
9 Greffière d'y veiller.
10 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ça sera fait, Monsieur le Président.
11 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.
12 Monsieur Saxon, vous avez la parole.
13 M. SAXON : [interprétation] C'est M. Cannata qui va interroger le prochain
14 témoin.
15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Cannata.
16 M. CANNATA : [interprétation] Bonjour. Nous appelons à la barre Dragomir
17 Vasic.
18 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour, Monsieur.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Veuillez prononcer la déclaration
22 solennelle.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
24 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
25 LE TÉMOIN : DRAGOMIR VASIC [Assermenté]
26 [Le témoin répond par l'interprète]
27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur. Veuillez
28 vous asseoir.
Page 6477
1 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Cannata, vous avez la parole.
3 M. CANNATA : [interprétation] Merci.
4 Interrogatoire principal par M. Cannata :
5 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur.
6 R. Bonjour.
7 Q. Je vais vous demander de décliner votre identité et votre lieu, date de
8 naissance pour le compte rendu.
9 R. Je m'appelle Dragomir Vasic. Je suis né le 30 octobre 1964, à Tuzla, en
10 Bosnie-Herzégovine.
11 Q. Merci. Parlons des événements survenus à Srebrenica en juillet 1995.
12 Pour ce faire, pourriez-vous d'abord nous dire quel était le métier que
13 vous exerciez en juillet 1995.
14 R. Je suis diplômé de la faculté de droit. En 1995, j'étais chef du poste
15 de sécurité publique de Zvornik. Ce poste ou centre couvrait huit
16 municipalités ainsi que la région de Birac.
17 Q. Pourriez-vous énumérer les municipalités sous la tutelle du poste de
18 sécurité publique de Zvornik ?
19 R. Le siège même était à Zvornik, donc ça sera la première municipalité,
20 puis Osmace, Sekovici, Vlasenica, Milici, Bratunac, et Skelani.
21 Q. Si je compte bien, ça fait sept municipalités; la
22 huitième ?
23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais qui témoigne ici, Monsieur
24 Cannata ?
25 M. CANNATA : [interprétation] Excusez-moi, mais le témoin a dit que ce
26 centre couvrait huit municipalités.
27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que c'est ce qu'il a dit ?
28 M. CANNATA : [interprétation] Oui. Ligne 18.
Page 6478
1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Effectivement. Excusez-moi. Attendez
2 que je compte.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est moi qui me suis trompé. Après le 12
4 juillet la huitième municipalité est devenue Srebrenica.
5 M. CANNATA : [interprétation]
6 Q. Merci. Revenons aux événements du mois de juillet 1995. Où est-ce que
7 vous étiez dans la soirée du 13 juillet 1995 ?
8 R. J'ai passé toute la journée du 13 juillet 1995 dans la ville de
9 Srebrenica. J'avais pour mission d'établir un poste de sécurité publique et
10 d'assurer la protection des biens pour qu'ils ne soient pas pillés. Vu
11 l'ordre du ministère, c'était ma tâche principale. Je suis parti à 10
12 heures du matin, et je suis revenu vers 20 heures à Bratunac.
13 Q. Qu'est-ce que vous avez fait dans la soirée du 13 juillet à Bratunac ?
14 R. Après être rentré de Srebrenica, je suis allé au poste de police de
15 Bratunac, et là j'ai rencontré le chef du poste de police, Miodrag
16 Josipovic. Celui-ci m'a informé de ce qu'un grand groupe de prisonniers
17 musulmans de Srebrenica avait été emmené en ville. Ils s'étaient rendus à
18 nos forces qui se trouvaient sur la route de Bratunac à Konjevic Polje. Il
19 m'a aussi dit qu'il y avait un commandement, un ordre de la VRS qui
20 consistait à dire que les prisonniers devaient être placés dans l'école, au
21 stade ainsi que dans des bus. Il a rappelé le problème qui était d'assurer
22 la sécurité de ces hommes, et a dit que les hommes qui étaient en âge de
23 faire le service militaire à Bratunac étaient en train d'être rassemblés
24 afin d'aider la police à assurer la sécurité des prisonniers.
25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi, quand vous dites que "les
26 gens s'étaient rendus à nos forces", vous dites "nos forces." Pourriez-vous
27 préciser quelles sont ces forces ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je parlais de l'armée de la Republika Srpska
Page 6479
1 et des forces de police déployées sur cette route-là.
2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Donc vous faisiez partie de la
3 VRS ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, j'étais membre de la police, du MUP de la
5 Republika Srpska.
6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.
7 Monsieur Cannata, poursuivez.
8 M. CANNATA : [interprétation]
9 Q. Après avoir rencontré Josipovic, qu'avez-vous fait ?
10 R. Nous nous sommes tous deux rendu compte que nous avions un problème
11 considérable à Bratunac. Je suis allé voir M. Miroslav Deronjic à son
12 bureau. A l'époque, c'était un commissaire civil faisant fonction qui avait
13 été désigné par le président de la république. Je voulais lui parler de ce
14 problème, je voulais lui demander s'il pouvait communiquer avec quelqu'un
15 d'un échelon supérieur pour essayer d'obtenir les instructions pour savoir
16 ce qu'il fallait faire de ces hommes.
17 Q. Quelle heure était-il, à ce moment-là ?
18 R. C'était juste après que Josipovic m'a fait ce briefing, donc je dirais
19 qu'il devait être 20 heures 30.
20 Q. Combien de temps avez-vous passé dans le bureau de M. Deronjic ?
21 R. La première fois, j'ai vu Ljubo Simic, qui était le président de la
22 municipalité dans le bureau de M. Deronjic, ainsi que Srbislav Davidovic,
23 qui était de la communauté, M. Deronjic. Et ces trois hommes discutaient de
24 ce problème, eux aussi, j'ai vu qu'ils étaient préoccupés par la situation.
25 Je dirais que j'ai passé une demi-heure dans ce bureau.
26 Q. Merci.
27 Vous avez dit que c'était là votre première visite au bureau de M.
28 Deronjic. Qu'est-ce que vous avez fait à cet endroit ?
Page 6480
1 R. J'ai informé M. Deronjic, même s'il était déjà au courant de cette
2 situation alarmante à Bratunac, et je lui ai dit qu'il allait devoir
3 consulter soit le président Karadzic ou quelqu'un d'autre pour savoir ce
4 qu'il fallait faire.
5 M. Deronjic m'a dit qu'il allait appeler le président Karadzic pour lui
6 demander des instructions pour savoir ce qu'il fallait faire. Il nous a
7 suggéré d'essayer de trouver les hommes qui n'étaient pas disponibles pour
8 renforcer la sécurité en attendant qu'il reçoive des instructions.
9 Q. Je vous ai demandé ce que vous avez fait après votre première rencontre
10 avec M. Deronjic.
11 R. Après cette première rencontre, je suis rentré au poste de police de
12 Bratunac, au bureau de M. Josipovic. Ce soir-là, je suis allé deux ou trois
13 fois au bureau de M. Deronjic pour savoir s'il y avait eu des contacts et
14 pour savoir s'il avait reçu des instructions sur ce qu'il fallait faire.
15 Q. La dernière fois que vous avez vu M. Deronjic, que s'est-il passé ?
16 R. Il était près de minuit quand je suis allé dans le bureau de M.
17 Deronjic pour obtenir les informations les plus récentes. Il était dans son
18 bureau avec un homme que je ne connaissais pas à l'époque. M. Deronjic me
19 l'a présenté, a dit que c'était le colonel Beara. Et il m'a présenté au
20 colonel Beara en disant que j'étais le chef du centre de la sécurité
21 publique de Zvornik.
22 Je me suis rendu compte que ces deux hommes se disputaient. Il y avait
23 beaucoup de personnes dans le corridor. Deronjic a quitté son bureau
24 brièvement parce que quelqu'un avait demandé à le voir, et j'ai demandé à
25 M. Beara ce qui se passait. Je voulais savoir quel était le problème. Il
26 m'a dit qu'il était venu parce qu'il avait une mission, parce qu'il avait
27 été chargé des prisonniers, et il avait reçu un ordre qui était que tous
28 les prisonniers devaient être tués.
Page 6481
1 Je lui ai demandé qui avait donné cet ordre. Il s'est contenté de répondre
2 que "c'était venu du "boss," du chef. Quand je lui ai demandé de qui il
3 parlait, il a répondu : "Le général Mladic." Quand Deronjic et rentré dans
4 le bureau, leur désaccord, cette discussion, cette dispute s'est
5 poursuivie.
6 C'était la première fois que j'avais entendu Deronjic entrer en contact
7 téléphonique avec le président Karadzic. Le président Karadzic lui a donné
8 un ordre codé qui disait ceci : "Miroslav, la marchandise doit être dans
9 l'entrepôt." Deronjic a affirmé qu'il avait compris le message comme étant
10 l'ordre de déplacer les prisonniers qui étaient à Bratunac pour les emmener
11 dans une prison. Et à plusieurs reprises, il a insisté auprès de M. Beara
12 pour que cet ordre soit appliqué. Finalement, M. Beara, à contrecoeur, a
13 dit qu'il allait exécuter l'ordre.
14 Q. J'aimerais vous rappeler que vous devez essayer de répondre de façon
15 concise, courte à mes questions. Vous m'avez compris ?
16 R. Oui.
17 Q. Questions de suivi. Commençons par le colonel Beara. Vous aviez dit que
18 vous ne l'aviez jamais vu auparavant. Pourriez-vous nous le décrire
19 physiquement ?
20 R. C'était un homme de haute taille, de 1,90 mètre, avec une tête assez
21 grande et des cheveux gris. Ce que j'ai constaté, c'est qu'il portait des
22 vêtements civils. Je ne peux pas vous les décrire exactement, mais je suis
23 sûr qu'il était en vêtement civil.
24 Q. Merci. Vous avez aussi dit qu'à un moment donné, M. Deronjic avait
25 parlé au président Karadzic. Est-ce que vous, cette nuit-là, ce soir-là,
26 vous avez parlé au président Karadzic ?
27 R. Non, je n'ai pas parlé au président Karadzic et je n'étais pas présent
28 lorsque M. Deronjic a parlé au président Karadzic.
Page 6482
1 Q. Et enfin, vous avez indiqué que finalement, M. Beara a dit à
2 contrecoeur qu'il allait exécuter l'ordre. Est-ce que ce sont des propos
3 qu'il vous a adressés à vous personnellement ?
4 R. C'est ce qu'il a dit à Deronjic en ma présence, car c'était
5 une conversation qu'ils avaient entre eux.
6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] N'aviez-vous pas dit auparavant ceci ?
7 Vous avez dit c'était la première fois - je ne m'en souviens plus
8 exactement - mais que vous avez dit que c'était la première fois qu'il y
9 avait un contact téléphonique avec le président Karadzic. Est-ce que vous
10 pourriez répéter cette question, parce qu'apparemment ce qu'on a au compte
11 rendu n'est pas complet. Vous avez dit que le "boss" avait donné des
12 instructions, ce "boss" étant le général Mladic, et vous avez dit quand
13 Deronjic est revenu dans le bureau, cette querelle s'est poursuivie, et
14 c'était la première fois, puis je vois qu'il y a quelque chose et qu'on
15 voit que je -- et une ligne téléphonique ou un contact téléphonique avec le
16 président Karadzic. Pourriez-vous nous expliquer cette phrase. Vous vous
17 souvenez ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr. Oui, ça n'a pas été bien repris. M.
19 Deronjic a dit que lui, il avait parlé au téléphone avec le président
20 Karadzic, et qu'à l'époque, après qu'il lui expliquait la situation à
21 Bratunac, il avait reçu les instructions de la part de M. Karadzic, mais
22 des instructions encodées, codées. Moi, je n'ai pas parlé avec M. Karadzic,
23 mais c'est M. Deronjic qui a parlé.
24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais vous avez dit que "c'était la
25 première fois qu'une ligne téléphonique," et c'est ça que je ne comprends
26 pas. J'essaie de vous saisir exactement.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, je n'ai pas dit que c'était la
28 première fois. Peut-être qu'il y a une erreur au niveau de la traduction.
Page 6483
1 C'est ce que M. Deronjic m'a dit.
2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.
3 Poursuivez, Monsieur Cannata.
4 M. CANNATA : [interprétation] Vous me donnez une seconde pour vérifier le
5 compte rendu.
6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est à la page 7, si vous voulez
7 vérifier ce que je demandais, lignes 18 et 19.
8 M. CANNATA : [interprétation]
9 Q. Merci, Monsieur. Maintenant, dites-nous ce que vous avez fait après la
10 réunion avec M. Deronjic et le colonel Beara ?
11 R. Je suis allé au poste de police à Bratunac à nouveau, et après cela,
12 puisque j'étais très fatigué, je suis allé me coucher.
13 Q. Merci. Nous allons parler maintenant du lendemain, de la matinée du 14
14 juillet.
15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je m'excuse. Il y a encore un point
16 que je voudrais savoir. Ce témoin est allé voir M. Deronjic pour recevoir
17 des instructions concernant les prisonniers. Quelles étaient ces
18 instructions que vous avez reçues ? Qu'est-ce que vous deviez faire avec
19 les prisonniers, Monsieur ? Parce qu'il y avait une dispute entre ces deux
20 messieurs. Ils ont interprété ce message de façon différente. Quelles
21 étaient les instructions que vous avez reçues ? C'est pour cela que vous
22 êtes allé là-bas, n'est-ce pas ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas demandé d'instructions pour mes
24 actions, et je n'ai pas reçu d'ordres non plus concernant ce sujet. Donc
25 les instructions concernaient l'armée de la Republika Srpska, ainsi que
26 l'ordre qui a été destiné à l'armée de la Republika Srpska selon lequel
27 tous les prisonniers devaient partir de Bratunac ailleurs, et moi, je me
28 suis rendu chez M. Deronjic parce que j'étais inquiet à ce moment-là,
Page 6484
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12 Page blanche insérées d’assurer la correspondance entre la
13 pagination anglaise et la pagination française.
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 6485
1 puisque la ville était pleine de prisonniers, et il n'y avait personne pour
2 assurer leur sécurité. C'est pour cela que j'ai essayé en tant
3 qu'intermédiaire auprès de M. Deronjic d'obtenir certaines opinions pour ce
4 qui est de ce sujet.
5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez déposé que lorsque vous êtes
6 rendu le voir pour la première fois, vous avez voulu qu'il téléphone à
7 quelqu'un en échelon supérieur dans la hiérarchie pour vous donner des
8 instructions comment procéder. Pouvez-vous nous dire si vous avez obtenu
9 des instructions comment procéder ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas reçu d'instructions concernant mes
11 actions, parce que cela ne relevait pas de ma compétence. Les prisonniers
12 de guerre relevaient de la compétence de l'armée, mais M. Beara à la fin a
13 dit qu'il procéderait selon l'ordre de M. Karadzic qui a été destiné à M.
14 Deronjic.
15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.
16 Monsieur Cannata, poursuivez.
17 M. CANNATA : [interprétation]
18 Q. Maintenant, on va revenir à la matinée du 14 juillet. Pouvez-vous nous
19 dire ce que vous avez fait ce matin-là ?
20 R. Vers 7 heures du 14, je suis arrivé au poste de police à Bratunac.
21 C'est parce que j'ai reçu les informations selon lesquelles M. Tomislav
22 Kovac, ministre de l'Intérieur à l'époque, allait visiter Bratunac et
23 Srebrenica, et j'avais l'intention de préparer tout ce qu'il fallait
24 préparer pour organiser cette visite.
25 Q. Que s'est-il passé lorsque vous êtes arrivé au poste de police à
26 Bratunac ?
27 R. L'organisation de l'armée était en cours, à savoir les convois étaient
28 formés avec des véhicules à bord desquels se trouvaient les prisonniers, et
Page 6486
1 qu'ils devaient partir vers Zvornik. A ce moment-là, devant le poste de
2 police, encore une fois le colonel Beara s'est approché de moi, et c'était
3 ma deuxième rencontre avec lui.
4 Q. Qu'est-ce qu'il vous a dit ?
5 R. Il a réitéré que l'ordre du général Mladic qu'il a reçu de lui, était
6 de tuer les prisonniers, et il m'a demandé si je pouvais donner un groupe
7 de personnes de confiance - c'est ce qu'il a dit - pour l'aider à accomplir
8 cette tâche.
9 J'ai dit que je ne voulais pas donner ce groupe d'hommes à lui, et
10 que je ne voulais pas participer à une telle chose, après quoi il s'est
11 fâché et il est parti.
12 Q. Merci.
13 M. CANNATA : [interprétation] Monsieur le Président, pourrais-je consulter
14 mes collègues, s'il vous plaît.
15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allez-y.
16 M. CANNATA : [interprétation] Merci.
17 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
18 M. CANNATA : [interprétation]
19 Q. Il y a un point mineur que je voudrais tirer au clair avec vous.
20 Lorsque vous avez dit que vous avez répondu au colonel Beara en lui disant
21 que l'ordre n'était pas tel et que vous ne vouliez pas participer à une
22 telle chose, cela se trouve consigné au compte rendu dans les lignes 23 et
23 24, dites-nous quel était cet ordre, qui a donné cet ordre à l'exécution
24 duquel vous n'avez pas voulu
25 participer ?
26 R. C'était l'ordre du général Mladic. Moi, personnellement, je n'ai pas
27 voulu participer à l'exécution de cet ordre.
28 Q. Merci beaucoup, Monsieur.
Page 6487
1 M. CANNATA : [interprétation] Monsieur le Président, j'en ai fini avec mon
2 interrogatoire principal.
3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.
4 Maître Lukic, vous avez la parole.
5 Contre-interrogatoire par M. Lukic :
6 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Vasic. Je m'appelle Novak Lukic, je
7 suis avocat. Je vais vous poser des questions au nom de la Défense de M.
8 Perisic. Avant de commencer à vous poser des questions, j'aimerais que vous
9 teniez compte du fait que nous parlons la même langue, et pour qu'il n'y
10 ait pas de problèmes pour ce qui est de l'interprétation, il faut que vous
11 ménagiez une pause après ma question avant de répondre. Moi, de la même
12 façon, je vais attendre que votre réponse soit consignée au compte rendu
13 avant de commencer à poser la question suivante.
14 J'aimerais tirer au clair un point. J'ai reçu des documents
15 concernant vos déclarations précédentes, et pour autant que je sache, vous
16 êtes ici pour la première fois en tant que témoin devant le Tribunal à La
17 Haye, n'est-ce pas ?
18 R. Oui.
19 Q. Je dispose de l'information selon laquelle jusqu'ici, avec les
20 représentants du bureau du Procureur du Tribunal de La Haye, vous avez
21 parlé au total six fois pendant la période allant de 2000 à 2003, n'est-ce
22 pas ?
23 R. Oui, c'est à peu près ça.
24 Q. Le dernier entretien avec les représentants du bureau du Procureur du
25 Tribunal de La Haye a eu lieu en juin 2003, ici, dans les locaux du
26 Tribunal de La Haye. Vous vous souvenez de cela ?
27 R. Oui, c'est vrai.
28 Q. Ces derniers jours, vous avez eu la séance de récolement pour vous
Page 6488
1 préparer à ce témoignage. J'ai reçu les notes de cette séance de récolement
2 également. Ma question portait sur des interviews précédentes.
3 J'ai donc le procès-verbal de Bijeljina du mois d'août 2003. C'était
4 au centre de sécurité publique. Vous étiez témoin à cette occasion-là. Vous
5 vous souvenez de cela ?
6 R. Oui.
7 Q. Ensuite, on vous posait des questions le 19 septembre, vous aviez le
8 statut de suspect dans un procès devant la chambre chargée des crimes de
9 guerre de la cour de Bosnie-Herzégovine, et c'était devant le procureur
10 Ibro Bulic. Vous vous souvenez de cela ?
11 R. Oui.
12 Q. Et vous avez été interrogé en tant que témoin dans le procès qui a eu
13 lieu devant la cour de Bosnie-Herzégovine contre l'accusé Petar Mitrovic et
14 consorts. C'était en janvier 2007. Vous vous souvenez de cela ?
15 R. C'est vrai.
16 Q. Avez-vous fait d'autres dépositions, ou c'était tout ?
17 R. Le 9 avril 2009, j'ai également témoigné devant la cour de Bosnie-
18 Herzégovine dans l'affaire Tomic et Vukovic.
19 Q. C'est à propos de quoi, cette affaire ?
20 R. A propos de Kravica. Donc cela concerne également le mois de juillet
21 1995.
22 Q. A propos des événements survenus à Srebrenica ?
23 R. Oui, c'est vrai.
24 Q. C'était quand ?
25 R. Le 9 avril 2009.
26 Q. Est-ce que c'est tout pour ce qui est de vos dépositions ?
27 R. J'ai -- c'est pour ce qui est de Srebrenica.
28 Q. Par rapport à Srebrenica, avez-vous fait d'autres témoignages, d'autres
Page 6489
1 dépositions ?
2 R. Pour autant que je sache, non.
3 [Le conseil de la Défense se concerte]
4 M. LUKIC : [interprétation]
5 Q. Pour ce qui est d'autres affaires qui ne concernent pas Srebrenica,
6 vous souvenez-vous d'avoir témoigné dans ces autres affaires; et si oui,
7 quand ?
8 R. Mis à part Srebrenica, j'ai déposé pour ce qui est des événements
9 survenus à Zvornik en 1992 à quatre reprises. La première fois, c'était, me
10 semble-t-il, en 2002. C'était devant les enquêteurs du Tribunal de La Haye;
11 ensuite devant le parquet cantonal de Tuzla; puis au parquet spécial de
12 Belgrade, puisqu'il y a deux personnes de Zenica dont les affaires se
13 tiennent là-bas; et le 5 février 2009, j'ai témoigné à Belgrade pour ce qui
14 est de ces deux affaires, de ces deux accusés. Il s'agit des événements de
15 1992 dont j'ai témoigné.
16 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense qu'il y a un
17 problème concernant la déclaration du mois d'avril 2009, qui concerne les
18 mêmes événements, je pense que le bureau du Procureur donc devait nous
19 communiquer cette déclaration. Je ne sais pas si le bureau du Procureur
20 dispose de cette déclaration. C'est conformément à l'article 66(a), et pour
21 ce qui est de ces déclarations concernant ce témoin, elles peuvent être
22 utiles pour la Défense. Donc le bureau du Procureur devait nous communiquer
23 ces déclarations. Je ne dispose pas d'informations pour ce qui est de ces
24 déclarations et de leur communication à la Défense. Je ne me souviens pas
25 de la communication de ces déclarations.
26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne sais pas si l'Accusation les a.
27 Parce que lorsque je lis le compte rendu, cela ressemble au témoignage qui
28 a eu lieu le 9 avril mais plutôt en Bosnie-Herzégovine et non pas ici. Je
Page 6490
1 ne sais pas si l'Accusation dispose de ce compte rendu.
2 M. LUKIC : [interprétation] J'ai reçu du bureau du Procureur le compte
3 rendu des témoignages de ce témoin devant la cour de Bosnie-Herzégovine.
4 Dans d'autres affaires, je recevais les déclarations de tous les témoins
5 qui ont été faites devant les juridictions locales concernant les
6 événements dont on parle ici dans cette affaire.
7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous dites que le témoin a
8 fait une déclaration le 9 avril 2009 ? De quelle déclaration parlez-vous ?
9 Pour quelle déclaration vous dites que vous ne l'avez pas ?
10 M. LUKIC : [interprétation] Pour ce qui est de son témoignage devant la
11 cour de Bosnie-Herzégovine de 2009, du mois d'avril, concernant les
12 événements survenus à Kravica, comme il l'a dit, et les événements de
13 Srebrenica. Je ne dispose pas du compte rendu de ce témoignage. Je ne
14 dispose que du compte rendu du témoignage de 2007. Il a également témoigné
15 devant la même cour concernant les événements survenus à Srebrenica.
16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maintenant, où est le problème ? Vous
17 dites que vous ne disposez pas de cette déclaration. Je ne sais pas si
18 votre collègue a cette déclaration, parce que cette déclaration n'a pas été
19 faite devant ce Tribunal.
20 M. LUKIC : [interprétation] Non, ça n'a pas été fait devant ce Tribunal,
21 mais je suppose que le bureau du Procureur avait pour obligation de me
22 communiquer cela, cette déclaration.
23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce qu'il est au courant de cela ?
24 Est-ce que M. Cannata peut répondre à cela ? Je ne sais pas si vous êtes au
25 courant de ce qui se passe devant d'autres tribunaux.
26 M. CANNATA : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président.
27 L'Accusation ne possède pas ces comptes rendus de ces témoignages. Sinon,
28 ce compte rendu aurait été communiqué comme c'était le cas pour ce qui est
Page 6491
1 d'autres affaires concernant ce témoin. Donc nous ne disposons pas de ces
2 comptes rendus. Je ne les ai pas vus.
3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Lukic.
4 M. LUKIC : [interprétation] Je pense que conformément à l'article 66 et 68,
5 l'Accusation a pour obligation de nous communiquer toutes les déclarations
6 concernant un témoin lorsque ce témoin vient ici pour témoigner devant ce
7 Tribunal. Je ne peux pas maintenant accepter ce fait, c'est-à-dire que
8 l'Accusation n'a pas d'information concernant cette déclaration, et d'autre
9 part le témoin a fait cette déclaration.
10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il y a longtemps que je n'ai pas relu
11 l'article 66 et 68, mais je crois que l'Accusation a pour obligation de
12 communiquer seulement ce qu'elle a en sa possession. Si l'Accusation n'est
13 pas au courant de quelque chose, donc l'Accusation ne peut pas communiquer
14 non plus. C'est cela.
15 Maintenant, je vais vous lire l'article 66(a)(ii), où il est écrit
16 comme suit :
17 "Conformément aux articles 53 et 69, un délai est fixé par la Chambre de
18 première instance par le Juge de la mise en état désigné en application 65
19 ter, les copies des déclarations de tous les témoins que le témoin entend
20 citer à l'audience, ainsi que de toutes les déclarations écrites et de tous
21 les comptes rendus de déposition présentés en application des articles 92
22 bis, 92 ter et 92 quater. Les copies des déclarations d'autres témoins à
23 charge sont mises à la disposition de la Défense dès que la décision de les
24 citer est prise."
25 Je ne sais pas si on attend que l'Accusation retrouve toutes les
26 déclarations qu'un témoin aurait pu faire devant tous les tribunaux dans le
27 monde. Il a dit qu'il n'était pas au courant de cela.
28 M. LUKIC : [interprétation] Je pense, Monsieur le Président, que la partie
Page 6492
1 qui entend citer son témoin doit savoir si ce témoin avait témoigné
2 concernant surtout les faits dont on parle ici devant ce Tribunal. Parce
3 que pour ce qui est d'autres affaires dans lesquelles j'ai travaillé, la
4 première chose à faire est de demander au témoin, lorsqu'il vient ici pour
5 témoigner, si le témoin a fait d'autres déclarations ou a fait d'autres
6 témoignages concernant les faits dont on parle dans cette affaire. Je ne
7 sais pas comment. Il m'est impossible de savoir si cela a été fait.
8 C'est parce que je comprends, Monsieur le Président, que ce témoin a
9 témoigné pour ce qui est de son témoignage de 2007. Il a témoigné des
10 faits. On lui a posé des questions également au bureau du Procureur, mais
11 le bureau du Procureur ne s'intéresse pas à ça. Mais pour ce qui est du
12 témoin qui témoigne des événements de guerre et qui a témoigné à six
13 reprises, il est important de savoir s'il avait déjà témoigné dans d'autres
14 affaires pour ce qui est des mêmes faits.
15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et quand lui ont-ils parlé la dernière
16 fois avant qu'il ne soit venu ici pour témoigner aujourd'hui ?
17 M. LUKIC : [interprétation] En 2003. C'était l'entretien qui a eu lieu en
18 2003. C'est ce que j'ai.
19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ensuite, le témoin a témoigné en
20 Bosnie-Herzégovine, en avril 2009. Comment pourraient-ils le savoir alors
21 qu'ils lui ont posé des questions la dernière fois en 2003 ? Comment ils
22 pouvaient le savoir qu'il allait témoigner le 9 avril 2009 ?
23 M. LUKIC : [interprétation] Je suppose qu'ils auraient pu lui poser cette
24 question lorsqu'il est venu ici.
25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Cannata, vous lui avez posé
26 cette question pour savoir s'il avait témoigné le 9 avril quelque part ?
27 M. CANNATA : [interprétation] Non.
28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] S'il y avait eu une raison pour lui
Page 6493
1 poser cette question, ils lui auraient posé cette question. Donc ils n'ont
2 aucune raison pour lui demander. Donc ils n'utiliseront pas le compte rendu
3 de son témoignage dans cette affaire. Si vous voulez l'utiliser, vous
4 pouvez le faire.
5 M. LUKIC : [interprétation] Mais je n'ai pas le compte rendu de son
6 témoignage.
7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] L'Accusation non plus ne dispose pas
8 de ce compte rendu de son témoignage. Comment pouvez-vous vous attendre que
9 l'Accusation vous communique quelque chose qu'elle n'a pas ?
10 M. LUKIC : [interprétation] Je pense que l'Accusation pourrait établir si
11 le témoin pourrait communiquer à l'Accusation quelque chose de plus. C'est
12 comme ça que j'ai compris le comportement des parties dans un procès.
13 Bon. Je comprends que l'Accusation ne dispose pas de cette
14 déclaration.
15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Lukic.
16 M. LUKIC : [interprétation]
17 Q. Monsieur Vasic, il faut tirer certaines choses au clair. Cela n'a pas
18 été entendu devant le Tribunal. Il faut éclaircir votre position. Depuis
19 quand étiez-vous chef du centre de sécurité publique de Zvornik ?
20 R. Par une décision du ministère de l'Intérieur, je suis devenu chef du
21 centre de sécurité publique le 27 avril 1994, et je suis resté à cette
22 position jusqu'au 11 mars 1998.
23 Q. A cette position-là ?
24 R. Oui.
25 Q. Tout à l'heure, vous avez dit à M. Cannata quelles étaient les
26 municipalités couvertes par votre centre de sécurité publique, et si j'ai
27 bien compris, il y en avait au total -- quel était le nombre total de
28 centres de sécurité publique en Republika Srpska ?
Page 6494
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12 Page blanche insérées d’assurer la correspondance entre la
13 pagination anglaise et la pagination française.
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 6495
1 R. Il y en avait neuf à l'époque en Republika Srpska.
2 Q. Votre centre portait le numéro 5, n'est-ce pas ?
3 R. Oui, c'est vrai.
4 Q. Il existait dans le cadre des municipalités couvertes par votre
5 sécurité publique une différence entre les postes de police et les postes
6 de sécurité publique. Où se manifestait cette différence ?
7 R. La différence se manifestait comme suit : les postes de police avaient
8 pour chef "komandir" ou chef du poste de police, et il s'agissait
9 habituellement des petites municipalités telles qu'Osmaci et Skelani, alors
10 que les autres municipalités avaient des postes de sécurité publique à la
11 tête desquels se trouvaient chefs du poste de sécurité publique; et il y
12 avait également "komandir" du poste de police à ses côtés.
13 Q. Qui était votre supérieur hiérarchique au MUP, supérieur hiérarchique
14 direct ?
15 R. Selon la hiérarchie, le chef du secteur de sécurité publique était mon
16 supérieur hiérarchique direct. A l'époque, c'était Milan Kokarasik [phon].
17 Ensuite, à l'échelon supérieur se trouvait le ministre de l'Intérieur.
18 Q. A l'époque, c'était Tomislav Kovac, n'est-ce pas ?
19 R. Oui.
20 Q. Lors de votre travail quotidien, à qui envoyiez-vous des rapports ?
21 R. Des rapports ont été envoyés principalement au secteur de sécurité
22 publique et au cabinet du ministre, parce que comme c'était la guerre, le
23 MUP fonctionne de la façon suivante : le cabinet de ministres se trouvait
24 souvent à Pale et le cabinet du secteur de sécurité publique à Bijeljina.
25 C'est comme cela que nous envoyions des rapports aux deux cabinets.
26 Q. Pouvez-vous nous dire - vous en avez déjà parlé en répondant aux
27 questions du Procureur, le 12 juillet - comment se fait-il que vous étiez à
28 Bratunac et à Srebrenica ?
Page 6496
1 R. Par l'ordre du ministre de l'intérieur, M. Kovac. Le numéro de l'ordre,
2 c'est 407/95 du 12 juillet. Donc ma tâche était de former un poste de
3 sécurité publique à Srebrenica pour protéger la propriété des entreprises.
4 Et en procédant selon cet ordre, je suis allé à Bratunac.
5 Q. Vous connaissiez Miroslav Deronjic avant, ou bien vous avez seulement
6 entendu parler de lui ?
7 R. Miroslav Deronjic, je l'ai rencontré après la formation du centre de
8 sécurité publique. C'était en mai 1994, et c'est pour la première fois que
9 je me suis rendu à Bratunac, puisque Bratunac appartenait à ce centre de
10 sécurité publique, et la pratique était qu'il fallait consulter des
11 autorités locales lors de l'élection des fonctionnaires du poste de
12 sécurité publique, et avant tout, lors de l'élection du chef du poste de
13 sécurité publique. C'est pour la première fois que j'ai rencontré Miroslav
14 Deronjic, à cette occasion-là.
15 Q. Saviez-vous qu'il était, pour ainsi dire, bien établi dans le cadre du
16 SDS, qu'il était haut fonctionnaire du SDS ?
17 R. C'est vrai. Je le savais.
18 Q. Saviez-vous, une fois arrivé là-bas le 12 juillet, une fois arrivé à
19 Bratunac et à Srebrenica, qu'il avait été nommé commissaire civil pour la
20 municipalité de Bratunac de la part de M. Karadzic ?
21 R. Dans une disposition de la dépêche du ministre, il y avait l'ordre
22 selon lequel je devais coopérer avec M. Deronjic, et après être arrivé sur
23 le terrain, j'ai été informé qu'il avait été nommé commissaire civil pour
24 les affaires civiles.
25 Q. Vous avez mentionné cela lors des entretiens, que vous étiez présent à
26 des réunions à l'hôtel Fontana dans la matinée du 12 juillet. Comment se
27 fait-il que vous soyez présent à cette réunion, et dites-nous qui d'autre
28 était présent à cette réunion ?
Page 6497
1 R. Le chef du poste de police Josipovic a été convoqué à cette réunion et
2 puisque j'étais son subordonné, je suis allé à cette réunion. Plus tard,
3 j'ai appris qu'il a été décidé que cette réunion allait être organisée dans
4 la soirée du 11. C'était un accord entre les représentants du Bataillon
5 néerlandais de la FORPRONU et de la délégation civile des Musulmans de
6 Srebrenica. A cette réunion, il y avait le général Mladic en tant que
7 représentant de l'armée de la Republika Srpska, le général Krstic. Devant
8 les autorités civiles, il y avait M. Deronjic et Ljubo Simic. Ensuite, une
9 délégation de trois membres de la population civile de Srebrenica, et il y
10 avait des représentants du Bataillon hollandais.
11 Q. En ce qui concerne M. Deronjic et cette réunion, est-ce que vous avez
12 conclu qu'il connaissait ces représentants musulmans participant à la
13 réunion ?
14 R. A en juger par la façon dont il a parlé à la dame assise en face de
15 lui, j'ai conclu que ces personnes se connaissaient déjà.
16 Q. Voyons simplement une partie de votre déclaration préalable.
17 M. LUKIC : [interprétation] Peut-on voir le document 1D0207. Peut-on
18 afficher ce document à l'écran, plus exactement la page 11 en B/C/S, 12 en
19 anglais.
20 Q. Je suppose que vous avez eu l'occasion de relire cette déclaration
21 préalable pendant le récolement. Je suppose également que vous n'avez pas
22 manifesté d'objection, sinon le bureau du Procureur nous l'aurait déjà dit.
23 Je vais vous lire une toute petite partie. Ce sont donc des propos venant
24 d'une déclaration que vous avez faite le 9 juillet 2000. Je vais lire la
25 partie du milieu, lorsque vous décrivez cette réunion, voici ce que vous
26 dites :
27 "…j'ai remarqué que Miroslav s'adressait fort poliment aux représentants
28 musulmans et j'ai compris que ces gens se connaissaient déjà auparavant, vu
Page 6498
1 la conversation qu'ils ont eue."
2 Vous vous souvenez de cela ?
3 R. Oui.
4 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]
5 M. LUKIC : [interprétation] Oui, attendez. C'est la ligne 12, en anglais.
6 Ce n'est pas la bonne page en anglais, je pense. Oui, la page en B/C/S,
7 c'est la bonne; mais peut-être que je ne vous ai pas donné la bonne page en
8 anglais. C'est peut-être la précédente. Oui, c'est bon.
9 Q. "Le général Mladic et le colonel néerlandais ont participé à cette
10 conversation."
11 Ce que je voudrais mettre en exergue ici, c'est que le général Mladic
12 voulait savoir où se trouvait l'armée, que l'armée rende ses armes alors
13 que Miroslav, lui, répondait surtout aux demandes des civils, en ce qui
14 concerne les femmes et les enfants assemblés à Potocari pour exprimer leur
15 volonté et pour dire si ces gens voulaient rester là où ils étaient ou
16 s'ils voulaient plutôt être évacués."
17 Est-ce que vous vous souvenez de ces mots prononcés par Deronjic ? Est-ce
18 qu'il en a parlé dans sa conversation avec les représentants des civils,
19 qu'il leur a offert un choix, celui de rester ou de partir, comme ils le
20 voulaient ?
21 R. Je me souviens effectivement de cette partie, c'est comme ça que ça
22 s'est passé exactement. Il dit qu'il avait été autorisé à leur offrir ce
23 choix, entre l'option de partir ou celle de rester.
24 Q. Fort bien. Passons à un autre sujet. Vous avez dit avoir passé le plus
25 clair de la journée du 13 à Srebrenica. C'est comme ça que j'ai compris vos
26 dires; est-ce exact ?
27 R. Oui.
28 Q. Ce jour-là, nous sommes le 13, où étiez-vous exactement à Srebrenica ?
Page 6499
1 En ville ? Où exactement ?
2 R. Nous nous sommes déplacés en ville et nous avons passé la plupart du
3 temps dans le bâtiment qui était le siège, le QG du poste de sécurité
4 publique avant la guerre.
5 Q. Ce jour-là, est-ce que vous avez vu des traces de crimes qui auraient
6 été commis à Srebrenica, de tout crime, de tout méfait ?
7 R. Alors que nous nous déplacions en ville près de la mosquée qui a été
8 démolie, la seule chose que nous avons remarqué -- j'ai vu le cadavre d'une
9 femme.
10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Les interprètes ont dit qu'ils
11 n'avaient pas entendu ce que le témoin avait dit.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Pendant que nous nous sommes déplacés en ville
13 près d'une mosquée démolie se trouvant en ville, nous avons vu le cadavre
14 d'une femme, mais à part cela nous n'avons pas vu d'autres victimes ni de
15 blessés à Srebrenica.
16 M. LUKIC : [interprétation]
17 Q. Ce jour-là, est-ce que vous avez entendu des histoires qu'on aurait
18 racontées à Srebrenica portant sur des crimes
19 éventuels ?
20 R. Non.
21 M. LUKIC : [interprétation] Prenons un sujet tout à fait différent. Je
22 proposerais dès lors que nous fassions la pause dès maintenant, ce qui me
23 permettra d'aborder ce nouveau sujet avant la pause.
24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Fort bien. Nous allons faire la pause
25 maintenant, et nous reprendrons à 16 heures. L'audience est suspendue.
26 --- L'audience est suspendue à 15 heures 28.
27 --- L'audience est reprise à 16 heures 03.
28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Lukic.
Page 6500
1 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
2 Q. Je vais vous poser peu de questions, qui seront courtes, sur ces
3 réunions qui se sont tenues les 13 et 14 juillet. Lorsque vous êtes arrivé
4 au bureau de M. Deronjic - je parle de la réunion qui s'est tenue vers
5 minuit - il y avait déjà ces deux hommes dans le bureau de M. Deronjic,
6 n'est-ce pas ?
7 R. [aucune interprétation]
8 Q. Avant que vous n'entriez dans le bureau de M. Deronjic, n'y avait-il
9 pas un autre bureau ?
10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le témoin a répondu à votre question,
11 mais sans doute les interprètes ne l'ont-ils pas entendu. Il faudrait que
12 le témoin réponde à la première question que vous avez posée.
13 M. LUKIC : [interprétation]
14 Q. Attendez avant de répondre. Je vais vous reposer la question. En fin de
15 journée le 13, lorsque vous êtes arrivé au bureau de M. Deronjic, lorsque
16 vous êtes revenu dans ce bureau vers minuit, vous avez vu Deronjic et Beara
17 qui étaient déjà là, n'est-ce pas ?
18 R. Oui.
19 Q. C'étaient les deux seules personnes dans ce bureau à ce moment-là,
20 n'est-ce pas ?
21 R. Oui.
22 Q. Puisque vous êtes allé plusieurs fois dans ces locaux, est-ce que vous
23 vous souvenez du fait qu'avant le bureau de M. Deronjic, il y a un autre
24 bureau qui conduit au bureau de M. Deronjic ?
25 R. Franchement, je ne m'en souviens pas.
26 Q. Très bien. Est-ce que vous vous souvenez que cette nuit-là lorsque vous
27 êtes arrivé, est-ce que vous souvenez avoir vu M. Nikolic, Momir Nikolic ?
28 R. Je suis sûr que Momir Nikolic n'était pas présent dans ces locaux.
Page 6501
1 Q. C'est ce que j'ai trouvé dans votre déclaration, mais je voulais
2 simplement une confirmation. Vous ne le connaissiez pas à l'époque ?
3 R. Non, je ne le connaissais pas, et je ne l'ai jamais rencontré en
4 juillet 1995.
5 Q. Mais comme vous dites que vous étiez tout à fait sûr qu'il n'était pas
6 là, c'est parce que vous saviez qu'il lui ressemblait physiquement, n'est-
7 ce pas ?
8 R. Oui.
9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce qu'il y avait d'autres
10 personnes dans ce bureau ? Est-ce que il y avait d'autres personnes
11 présentes, mis à part MM. Deronjic et Beara ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai vu que Deronjic et Beara à ce moment-
13 là. Je ne me souviens pas, ou plus exactement, je ne sais pas s'il y avait
14 eu d'autres personnes dans ce bureau avant mon arrivée.
15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais combien de personnes avez-vous
16 trouvées dans ce
17 bureau ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je le répète, je n'ai trouvé dans ce bureau
19 que Deronjic et Beara.
20 Q. Vous venez de nous relater la conversation que vous avez eue avec Beara
21 dans la matinée du 14 lorsqu'il a demandé à voir ces hommes, et vous nous
22 avez dit comment vous lui aviez répondu. Plus tard, vous avez rencontré le
23 ministre Kovac. Est-ce que vous lui avez rapporté la conversation que vous
24 avez eue avec Beara ? Nous savons que ce matin-là le ministre Kovac est
25 venu à Bratunac, n'est-ce pas ?
26 R. Aussitôt après l'arrivée du ministre Kovac, je lui ai rapporté la
27 teneur de la conversation que j'avais eue lors de cette réunion et je lui
28 ai rapporté ce que je tenais de Beara.
Page 6502
1 Q. Est-ce qu'il a réagi ?
2 R. Le ministre a dit que les prisonniers militaires étaient sous la
3 tutelle de l'armée, que ce n'était pas de notre compétence et que nous ne
4 devions pas nous mêler de ces affaires-là.
5 Q. Savez-vous qu'en 1996 le président Karadzic a diligenté une enquête sur
6 toutes les circonstances entourant les événements de Srebrenica ?
7 R. Je sais qu'il y a eu une espèce de commission qui y a participé, et je
8 pense qu'il y avait dans cette commission un membre du ministère de
9 l'Intérieur.
10 Q. Si je me souviens bien, c'est ce que M. Karadzic a dit publiquement. Il
11 voulait que toute la lumière soit faite sur les événements de Srebrenica.
12 R. C'est exact.
13 Q. Votre hiérarchie du MUP ne vous avait pas donné de mission d'enquête
14 sur les faits de Srebrenica pendant toute la période pendant laquelle vous
15 avez tenu ce poste ?
16 R. Non.
17 Q. Et jamais la commission ne vous a jamais contacté pour que vous fassiez
18 une déclaration ou apportiez votre concours autrement ?
19 R. Non.
20 Q. Vous avez passé quelques jours à Bratunac et à Srebrenica, après quoi
21 vous êtes rentré à Zvornik, et jusqu'en 1998 vous avez été chef du centre
22 de sécurité publique, n'est-ce pas ?
23 R. Oui.
24 Q. Tous ces postes de police, de Srebrenica, Bratunac, entre autres, que
25 vous avez mentionnés, sont restés de votre ressort, n'est-ce pas ?
26 R. Oui.
27 Q. Pendant toute la période où vous avez été en poste, est-ce que vos
28 supérieurs vous ont chargé de mener une enquête sur Srebrenica, et ceci,
Page 6503
1 jusqu'à la fin de votre mandat ?
2 R. Non, on ne m'a chargé d'aucune mission de ce genre.
3 Q. Ces postes de police sur le territoire couvert par votre centre avaient
4 chacun un service chargé de la police judiciaire chargée d'enquêtes
5 criminelles, n'est-ce pas ?
6 R. Oui. Il existait des services dans chaque poste de sécurité publique,
7 des services chargés d'enquêter sur, disons, les crimes ordinaires,
8 criminalité économique, désordre, infraction à l'ordre public, ce genre de
9 chose.
10 Q. Fort bien. Je pense que cette question vous a déjà été posée lors d'un
11 entretien. Si c'est nécessaire, on peut montrer la page concernée, mais
12 avez-vous entendu parler du fait qu'on aurait déterré des fosses initiales
13 pour enterrer des corps ailleurs au cours de l'automne 1995 ? Dites-moi
14 d'abord si vous avez eu des contacts officiels à ce propos.
15 R. Jamais personne ne m'a transmis de requête sur ce sujet, et je n'ai pas
16 du tout participé à ceci et je l'affirme en mon âme et conscience.
17 Q. Donc quand tout ceci se passait, vous n'étiez pas du tout au courant ?
18 R. Non.
19 Q. Quelques questions qui ne sont pas en rapport direct avec le contenu de
20 votre déposition mais qui m'intéressent pour la défense du général, au
21 poste vous occupiez. Vous avez dit qu'à partir de 1994, vous avez été chef
22 du centre de sécurité publique à Zvornik.
23 R. C'est exact, à partir du 27 avril.
24 Q. Est-ce qu'il n'y avait pas un poste frontalier à Zvornik ? Il
25 s'agissait d'un pont qui séparait la Republika Srpska de la fédération
26 yougoslave, n'est-ce pas ?
27 R. Oui, et c'est toujours le cas aujourd'hui.
28 Q. D'un côté, on a Zvornik, et du côté serbe, on a Mali Zvornik et on a la
Page 6504
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12 Page blanche insérées d’assurer la correspondance entre la
13 pagination anglaise et la pagination française.
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 6505
1 police, le poste frontalier, n'est-ce pas ?
2 R. Oui. C'était vrai à l'époque, c'est toujours vrai aujourd'hui.
3 Q. Vous savez sans doute que les dirigeants de la République fédérale de
4 Yougoslavie, à partir du mois d'août 1994, ont imposé des sanctions à la
5 Republika Srpska.
6 R. Oui, je le sais.
7 Q. Et vous savez sans doute que ces sanctions ont semé beaucoup de
8 frustrations dans la population, comme au niveau de la direction politique
9 de la Republika Srpska, n'est-ce pas ?
10 R. Oui.
11 Q. Du côté de la Republika Srpska, est-ce qu'il y avait des observateurs
12 de la communauté internationale, lorsque ce poste-frontière a été érigé ?
13 R. Je pense que oui. Je ne sais plus quand ça s'est passé, mais il y a eu
14 ces observateurs après la création de ce poste frontalier.
15 Q. Et je suppose que puisque vous étiez chef du centre de sécurité
16 publique, vous avez reçu régulièrement des informations après que des
17 sanctions ont été imposées. C'étaient des rapports qui venaient d'unités de
18 police subordonnées et des postes frontaliers.
19 R. Oui. Les rapports portaient sur des événements survenus trois ou quatre
20 heures plus tôt.
21 Q. Est-ce que vous avez vu parmi ces rapports des éléments disant que
22 l'armée de Yougoslavie avait violé l'embargo, avait participé à la
23 violation de l'embargo imposé par la RFY sur la Republika Srpska ?
24 R. Non, je n'ai rien reçu ni entendu de ce genre.
25 Q. Est-ce que vous auriez reçu de l'information selon laquelle --
26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi, Maître Lukic.
27 Maître Lukic, cette dernière question que vous avez posée, je ne suis
28 pas tout à fait certain de l'avoir comprise. C'est à la page 31, ligne 11.
Page 6506
1 Elle se termine avec la RFY.
2 M. LUKIC : [interprétation] L'embargo que la République fédérale de
3 Yougoslavie avait imposé sur la Republika Srpska au mois d'août 1994, c'est
4 sur ceci que portait ma question.
5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.
6 M. LUKIC : [interprétation] Je crois que le témoin et moi, nous nous étions
7 compris, en fait.
8 Q. Est-ce que vous vous souvenez si vous aviez reçu quelque information
9 que ce soit selon laquelle les observateurs internationaux avaient quelques
10 griefs ou plaintes à formuler concernant cet embargo ?
11 R. Non, je n'ai jamais reçu de telles informations.
12 Q. Je vous remercie.
13 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président. J'ai terminé avec le
14 contre-interrogatoire de ce témoin.
15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Maître Lukic.
16 Monsieur Cannata.
17 M. CANNATA : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,
18 Madame, Monsieur les Juges.
19 Q. Petite précision. Page 20, ligne 4 du compte rendu d'audience
20 d'aujourd'hui.
21 Nouvel interrogatoire par M. Cannata :
22 Q. [interprétation] Monsieur, une question vous a été posée que l'on peut
23 lire à la ligne 20, qui se lit comme suit :
24 "A quel moment avez-vous commencé à exécuter vos tâches en tant que
25 chef du centre de sécurité publique ?"
26 Et votre réponse se lit comme suit à la ligne 3 :
27 "J'ai reçu une décision du ministre de l'Intérieur, et j'étais nommé
28 au poste par cette décision au chef du poste de police."
Page 6507
1 Dois-je comprendre que vous avez été nommé à ce poste en tant que
2 chef du centre ?
3 R. La décision selon laquelle j'ai été nommé au poste de chef du centre,
4 cette décision avait été donnée par le ministre de l'Intérieur, car c'est
5 la seule personne ayant la compétence de signer ce type de décision.
6 Q. Donc quel est le poste qui vous a été octroyé par cette décision du
7 ministère de l'Intérieur en date du 27 avril 1994 ?
8 R. J'ai été nommé au poste de chef du centre de sécurité publique de
9 Zvornik.
10 Q. Je vous remercie.
11 M. CANNATA : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions, Monsieur le
12 Président. Merci.
13 Questions de la Cour :
14 Mme LE JUGE PICARD : Oui, j'ai une ou deux questions à vous poser. D'après
15 votre témoignage, vous avez appris le 13 juillet au soir, quand vous avez
16 rencontré Beara, que celui-ci envisageait de tuer tous les prisonniers sur
17 ordre de Mladic; c'est ça ?
18 R. C'est exact.
19 Mme LE JUGE PICARD : A ce moment-là, quand vous l'avez appris, vous étiez
20 avec qui ? Avec Deronjic ?
21 R. Dans une pièce, nous nous trouvions, M. Beara et moi-même, mais après
22 le retour de M. Deronjic, la conversation a continué dans ce sens, s'est
23 poursuivie dans ce sens.
24 Mme LE JUGE PICARD : La conversation qu'avait eue M. Deronjic avec Karadzic
25 était antérieure ou postérieure ?
26 R. La conversation que Deronjic avait eue avec le président Karadzic
27 s'était déroulée avant cela. Je ne sais pas exactement à quel moment il
28 s'est entretenu avec lui, mais je sais que la conversation avait eu lieu
Page 6508
1 avant.
2 Mme LE JUGE PICARD : D'après ce que vous en savez - si vous ne le savez
3 pas, ne répondez pas - mais d'après ce que vous en savez, est-ce que
4 Deronjic avait eu une conversation avec Karadzic, pour lui dire justement
5 que Mladic envisageait de tuer tous les prisonniers ?
6 R. Deronjic avait appelé le président Karadzic pour l'informer du fait
7 qu'un très grand nombre de prisonniers avaient été emmenés à Bratunac et
8 qu'il voulait demander et savoir quelles étaient les instructions
9 concernant ceci. Donc moi, je n'ai pas de connaissance, à savoir je ne sais
10 pas s'il s'est entretenu avec ce que vous me posez comme question sur ce
11 sujet-là.
12 Mme LE JUGE PICARD : Ou est-ce que Deronjic était déjà au courant quand il
13 est venu vous rejoindre, après que Beara vous ait indiqué quels étaient les
14 ordres de Mladic ?
15 R. Il le savait, oui.
16 Mme LE JUGE PICARD : D'accord. J'ai une autre question, et c'est pareil, si
17 vous ne connaissez pas la réponse, ne répondez pas. Mais manifestement, cet
18 ordre de Mladic, cette décision qu'avait prise Mladic de tuer tous les
19 prisonniers n'était pas très confidentielle. Ce n'était pas très secret,
20 puisqu'on vous l'a dit à vous, on l'a dit à Deronjic, alors vous n'êtes pas
21 dans l'armée.
22 R. Je ne peux pas vous faire de commentaire, à savoir si c'est quelque
23 chose de nature confidentielle. Je ne sais pas à quel moment le général
24 Mladic l'ait dit à Beara. Je ne fais que transmettre ce que je sais et ce
25 que j'ai entendu de Beara.
26 Mme LE JUGE PICARD : -- le disait pas à tout le monde, mais le disait à
27 d'autres que des militaires de son armée.
28 R. Oui.
Page 6509
1 Mme LE JUGE PICARD : C'est tout ce que je veux savoir. Merci.
2 M. LE JUGE DAVID : [interprétation] A la page 27 du compte rendu
3 d'audience, à la suite d'une réponse posée par Me Lukic, conseil de la
4 Défense, il vous a demandé, je cite : "Vous venez de décrire aujourd'hui la
5 conversation qui a eu lieu avec Beara, qui a eu lieu dans ma matinée du 14,
6 lorsqu'il vous a demandé une question sur les hommes, et vous nous avez dit
7 ce que vous lui avez répondu, et plus tard le ministre Kovac vous a
8 transmis la conversation qui avait eu lieu avec Beara."
9 J'aimerais savoir si le ministre Kovac vous a informé de tous les
10 détails de la conversation et du contenu qu'il a eu dans la conversation
11 avec Beara de façon très claire.
12 R. Oui, justement, ça s'est déroulé exactement comme ceci : il m'a fait
13 part de toute la teneur de la conversation dans la soirée et dans la
14 matinée. Moi, j'ai transmis l'ensemble de la teneur de la conversation.
15 Tout ce que j'ai su, j'ai dit à Kovac.
16 M. LE JUGE DAVID : [interprétation] Deuxième question. Me Lukic vous a
17 demandé la chose suivante, à la page 28, ligne 2 : "A-t-il réagi ?" Et vous
18 avez répondu : "Le ministre a dit que les prisonniers militaires aient
19 tombé sous la juridiction de l'armée, et que ce n'était pas notre travail,
20 et que nous ne devrions pas nous immiscer dans ces affaires."
21 Lorsque vous avez dit qu'il vous a dit de ne pas vous mêler de ceci, de ne
22 pas vous immiscer dans ces affaires-là, qu'est-ce que vous aviez compris à
23 l'époque ? Pouvez-vous élaborer un peu
24 là-dessus ? Ce n'était pas votre travail, que c'était vous qui ne deviez
25 pas vous occuper de ces questions-là, intervenir dans ces affaires ?
26 R. Moi, j'avais compris ce que le ministre souhaitait dire, que les
27 prisonniers de guerre appartenaient à l'armée ou étaient sous la compétence
28 de l'armée, non pas sous la compétence de la police, sous la juridiction de
Page 6510
1 la police. Je peux également ajouter qu'étant donné que les tensions
2 étaient très tendues entre lui et M. Mladic, tout comme entre l'armée et la
3 police, qu'il était important que nous, nous ne nous occupons pas des
4 prisonniers de guerre et de ne pas nous immiscer dans ce qui ne nous
5 concerne pas.
6 M. LE JUGE DAVID : [interprétation] Je vous remercie beaucoup. Je n'ai plus
7 d'autres questions.
8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. J'aimerais poser une
9 question qui découle de lorsque question du Juge David. Est-ce que la
10 police militaire avait sa propre police ?
11 R. La police de la VRS avait la police militaire bien établie à
12 l'intérieur de toutes ses unités, qu'il s'agisse tant au niveau des
13 bataillons qu'au niveau des corps d'armée et des brigades.
14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. A la page 24, lignes 22 à 24,
15 vous avez déclaré -- ou plutôt, je vais citer la question qui vous avait
16 été posée :
17 "Ce jour-là, le 13, où étiez-vous ? A Srebrenica, dans la
18 ville ? Où étiez-vous ?"
19 Vous avez répondu :
20 "Nous sommes allés dans la ville et nous avions passé la majeure partie du
21 temps dans un bâtiment qui, avant la guerre, était le QG du poste de
22 sécurité publique."
23 Vous souvenez-vous de cette réponse ?
24 R. Oui, c'est exact.
25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pourriez-vous, je vous prie, m'aider à
26 comprendre quelque chose. Je ne suis pas sûr de bien vous avoir compris. Un
27 peu plus tôt aujourd'hui, lorsque M. Cannata vous a posé une question, il
28 m'a semblé vous entendre dire que le poste de sécurité publique de
Page 6511
1 Srebrenica avait été établi autour de la date ou tout juste après la date
2 du 12 ou 13 juillet. Est-ce que c'est ce que vous aviez dit ?
3 R. Oui, justement. Le poste de sécurité publique avait été créé le 12
4 juillet 1995. C'est ce jour-là que l'on a pris la décision, qu'on a nommé
5 les policiers au poste, qu'on a organisé un groupe de policiers à qui on
6 assignerait ce poste de sécurité publique.
7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Donc le poste de sécurité
8 publique a été créé après le 12 juillet; est-ce que c'est exact ?
9 R. Oui.
10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Alors il y a une chose que je ne
11 comprends pas. Comment alors est-il possible que vous disiez que le 13 vous
12 étiez passé dans un bâtiment qui était le QG du poste de sécurité publique
13 avant la guerre ? S'il n'y avait pas de postes de sécurité publique avant
14 la guerre, comment se peut-il qu'il y ait un bâtiment qui ait fait office
15 de QG ?
16 R. Justement, voilà. Avant la guerre, on appelait poste de police -- en
17 fait, Srebrenica avait son propre poste de police. Et aujourd'hui, même à
18 ce jour, le siège de la police se trouve à cet endroit-là.
19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il y a toujours quelque chose que je
20 ne comprends pas. S'il y avait eu un poste de police à Srebrenica avant la
21 guerre, pourquoi fallait-il créer un poste de police, d'après les
22 instructions que vous aviez reçues le 12 juillet 1995 ? Est-ce que vous
23 aviez doublé, dupliqué les postes de police ?
24 R. Avant la guerre, il y avait un poste de police à Srebrenica et il avait
25 une composition multiethnique. Pendant la guerre, il existait maintenant un
26 poste de police qui était composé principalement de Musulmans, car les
27 Serbes avaient été chassés de la région. Après le départ, toutefois, de
28 tous les Musulmans bosniens de Srebrenica, le poste est resté vide. Moi,
Page 6512
1 j'ai donc reçu pour tâche, puisque ce territoire était maintenant placé
2 sous le contrôle du centre, de procéder à la création d'un nouveau centre
3 de sécurité publique.
4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc en date du 12 juillet, les
5 Musulmans avaient quitté Srebrenica. Est-ce que c'est ce que vous nous
6 dites ?
7 R. La population civile se trouvait encore à Potocari, mais l'évacuation
8 était en cours. Et pour ce qui est de la ville même, il n'y avait plus de
9 Musulmans.
10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc c'est la raison pour laquelle
11 vous aviez reçu pour instruction d'établir un poste de police ?
12 R. Oui.
13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.
14 A la page 20, lignes 14 à 22, une question vous a été posée à la ligne 14 :
15 "Cette municipalité était donc couverte par votre centre. Y avait-il une
16 différence entre le poste de police et le poste de sécurité publique ?
17 Quelle est la différence ?"
18 Vous avez dit que la différente est la suivante : "C'est que les postes de
19 police avaient été tenus par une personne qui est le commandant du poste de
20 police, et normalement les postes de police sont établis à des plus petits
21 endroits, dans de petites localités comme Skelani et Osmaci, alors que les
22 postes de sécurité publique sont dirigés par le chef du poste de sécurité
23 publique, et outre ceci, cette station avait également un commandant du
24 poste de sécurité publique."
25 Donc je ne comprends toujours pas la différence entre les deux.
26 Pourriez-vous m'aider à les comprendre ? Est-ce que le poste de police et
27 le poste de sécurité publique, est-ce qu'ils avaient les mêmes fonctions ?
28 Faisaient-ils la même chose, ou y a-t-il une différence dans les fonctions
Page 6513
1 que les deux doivent faire, ou est-ce que c'est -- enfin, où est la
2 différence ? Appartiennent-ils à un autre service ?
3 R. Il s'agit de postes qui s'occupent du même type de travail, mais à
4 cause d'un plus grand nombre de citoyens et de plus grands problèmes dans
5 les plus grandes villes, on a ajouté des fonctions supplémentaires au chef
6 du poste de police. Lui, c'est le chef du commandant du poste de police. Il
7 est le chef du chef du service de [inaudible] c'est la section, et il est
8 le chef du chef du service criminel, et c'est le chef de l'unité des
9 communications également, et le chef de la personne qui s'occupe des
10 questions législatives. Donc c'est plus large qu'un poste de police, et le
11 commandant ou le chef est la personne qui se trouve à la tête du poste de
12 sécurité publique.
13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ce que vous nous dites, c'est que le
14 poste de sécurité publique est beaucoup plus grand qu'un poste de police, a
15 beaucoup plus de responsabilités, aussi; c'est
16 ça ?
17 R. Oui, voilà, on peut dire ainsi.
18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et le chef du poste de sécurité
19 publique, c'est une personne qui s'appelle chef du poste de sécurité
20 publique, et il est au-dessus du commandant --
21 L'INTERPRÈTE : En fait, en B/C/S, c'est "komandir," note de l'interprète.
22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] -- "komandir," qui n'est pas
23 commandant dans le sens propre du terme militaire, et il est donc le chef
24 de ce "komandir" du poste de police; est-ce que c'est exact ?
25 R. Oui.
26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.
27 Vous pouvez continuer, Monsieur Cannata.
28 M. CANNATA : [interprétation] En fait, juste pour le compte rendu
Page 6514
1 d'audience, la dernière question qui a été posée par le Juge Picard a été
2 répondue, on a répondu à la question, mais ça n'a pas été enregistré au
3 compte rendu d'audience. C'est la question qui se trouve à la ligne 34,
4 ligne 16 -- en fait, ligne 15.
5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne vois pas de question. Le Juge
6 Picard a fait une sorte de commentaire, n'a pas en réalité posé une
7 question au témoin, n'est-ce pas ?
8 M. CANNATA : [interprétation] Oui, vous avez raison, tout à fait. Merci
9 beaucoup.
10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui.
11 M. LUKIC : [interprétation] En fait, petite intervention pour le compte
12 rendu d'audience à la page 37, ligne 21. Vous avez posé une question et
13 vous avez dit : "En date du 12 juillet…"
14 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]
15 M. LUKIC : [interprétation] Ligne 21. Et le compte rendu d'audience nous
16 montre une autre date. On voit le 2, mais en fait c'est le 12. Vous aviez
17 parlé du 12.
18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que c'est tout, Maître Lukic ?
19 Vous n'avez pas de questions ?
20 M. LUKIC : [interprétation] Non, je n'ai pas de questions.
21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, Monsieur,
22 de vous être déplacé pour venir témoigner devant ce Tribunal. Vous pouvez
23 maintenant disposer. Je vous souhaite un bon retour à la maison.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
25 [Le témoin se retire]
26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Cannata.
27 Oui, Monsieur Saxon.
28 M. SAXON : [interprétation] Avec votre permission, Monsieur le Président,
Page 6515
1 je remarque l'heure, et notre prochain témoin, M. Butler, est prévu pour la
2 journée de demain. Il est actuellement en réunion avec M. Harmon. Serait-il
3 possible de lever l'audience d'aujourd'hui maintenant pour que l'on puisse
4 commencer son témoignage demain ?
5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, tout à fait. A ce moment-là, la
6 séance est levée. Nous reprendrons nos travaux demain à 14 heures 15 dans
7 l'après-midi dans la salle d'audience numéro II.
8 La séance est levée.
9 --- L'audience est levée à 16 heures 38 et reprendra le mardi 26 mai
10 2009, à 14 heures 15.
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28