Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 29 juin 2009

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 27.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour à tous dans ce prétoire et

  6   autour du prétoire.

  7   Monsieur le Greffier, pourriez-vous, s'il vous plaît, appeler l'affaire.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Monsieur

  9   le Juge. Bonjour à tous. C'est l'affaire

 10   IT-04-81-T, le Procureur contre Momcilo Perisic et consorts.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.

 12   Qui représente les parties aujourd'hui, à commencer par l'Accusation.

 13   Mme BOLTON : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je suis Lorna

 14   Bolton avec Mark Harmon pour l'Accusation.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

 16   Et pour la Défense.

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Daniela

 18   Tasic, Chad Meir, Kay Marshall et Colleen Rohan, Milos Androvic, Novak

 19   Lukic et je suis Gregor Guy-Smith pour la Défense de M. Perisic.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour à vous à New York, Monsieur

 21   Sacirbey et à tous ceux qui sont là-bas.

 22   Je dois vous rappeler, Monsieur Sacirbey, que vous êtes encore tenu

 23   par la déclaration que vous avez faite au début de votre déposition, qui

 24   est de dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. J'ai

 26   parfaitement compris.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le compte rendu doit indiquer que nous

 28   siégeons conformément aux dispositions de l'article 15 bis du Règlement cet

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  1   après-midi, puisque l'un des Juges doit s'occuper d'une autre affaire cet

  2   après-midi.

  3   Maître Guy-Smith.

  4   LE TÉMOIN : MUHAMED SACIRBEY [Reprise]

  5   [Le témoin répond par l'interprète]

  6   [Le témoin dépose par vidéoconférence]

  7   Contre-interrogatoire par M. Guy-Smith : 

  8   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Sacirbey.

  9   R.  Bonjour, Monsieur Guy-Smith.

 10   Q.  Je souhaiterais commencer mon interrogatoire. Il faut que je me

 11   rappelle un peu certaines règles du code de la route, en quelque sorte,

 12   pour être sûr que nous les respectons au fur et à mesure que se déroulera

 13   votre déposition. A l'origine, quand je vous poserai une question, je vous

 14   serais reconnaissant, dans la mesure où vous le pourrez, de me faire des

 15   réponses par oui ou par non. A l'évidence, si vous avez besoin d'expliquer

 16   votre réponse, certainement je n'aurai pas d'objection. Je m'attendrais

 17   même à ce que vous le fassiez.

 18   Mais en ce qui concerne un autre aspect, étant donné que nous parlons

 19   tous les deux anglais et qu'il y a une tendance pour deux personnes parlant

 20   la même langue maternelle d'accélérer leurs échanges, je vais m'efforcer -

 21   et je sais que j'aurai besoin de mal, je sais que nous n'y arriverons pas

 22   toujours si on pouvait prendre un pari entre nous pour voir si on va

 23   réussir à ne pas être interrompu par les interprètes qui voudraient nous

 24   demander de ralentir. Peut-être que ceci pourrait être plus

 25   particulièrement utile, n'est-ce

 26   pas ?

 27   R.  Tout à fait. Très bien.

 28   Q.  Vous avez vécu, Monsieur, d'après ce que je peux voir, une vie très

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  1   intéressante et assez unique en son genre. Je voudrais passer un moment

  2   avec vous pour parler de la manière dont vous êtes arrivé à votre poste

  3   d'ambassadeur.

  4   A ce que j'ai compris, vous êtes venu aux Etats-Unis comme adolescent,

  5   n'est-ce pas ?

  6   R.  J'avais 10 ans.

  7   Q.  Après cela, vous avez terminé vos études et vous êtes allé à

  8   l'université. Je crois que c'était en Louisiane; c'est bien cela ?

  9   R.  C'est exact.

 10   Q.  Quelle université était-ce ?

 11   R.  L'Université de Toulane.

 12   Q.  Pourriez-vous nous dire quand vous êtes allé à l'Université de Toulane,

 13   à quelle époque ?

 14   R.  J'y étais avant mon diplôme et également à la faculté de droit de 1974

 15   à 1980.

 16   Q.  Bien. Après la faculté de droit, est-ce que vous êtes resté en

 17   Louisiane ou est-ce que vous êtes allé à New York ?

 18   R.  Je suis allé à New York.

 19   Q.  Lorsque vous êtes arrivé à New York, d'après ce que j'ai compris de

 20   votre déposition, vous avez commencé à travailler comme avocat pendant un

 21   certain nombre d'années; c'est bien ça ? Vous avez travaillé comme avocat

 22   pendant un certain nombre d'années ?

 23   R.  Non, en l'occurrence, ce n'est pas exact. Je suis d'abord venu à New

 24   York essentiellement pour aller à la Columbia Business School, où j'avais

 25   été accepté un an plus tôt. Dans l'intervalle, j'ai commencé à faire du

 26   travail à temps partiel pendant que je me préparais à mon examen du

 27   barreau. Dès que j'ai passé mon examen du barreau, l'on m'a offert un poste

 28   à temps complet d'avocat, de conseil à l'époque, et j'ai continué pour

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  1   faire mon MBA à l'Université de Columbia.

  2   Q.  En ce qui concerne le travail que vous faisiez en tant que conseil pour

  3   cette société, Standard et Pours, d'après ce que j'ai compris, vous vous

  4   occupiez de banque d'investissement; c'est bien

  5   ça ?

  6   R.  A Standard et Pours, on n'était pas banquier chargé d'investissements.

  7   On était un analyste qui examinait divers types de produits ou

  8   d'instruments qui donnaient lieu à des cotations. Je suis devenu banquier

  9   chargé des investissements lorsque j'ai quitté cette société.

 10   Q.  Pendant cette période, lorsque vous étiez à cette société, vous vous

 11   êtes occupé d'analyse financière d'après ce que j'ai compris. Est-ce que

 12   c'était pour n'importe quel secteur ou un secteur spécifique de la

 13   profession ? Ou est-ce que vous faisiez simplement de l'analyse d'une façon

 14   générale ?

 15   R.  Bien, au début --

 16   Q.  Allez-y.

 17   R.  Au début, comme j'ai dit, j'ai travaillé comme avocat pour eux. Donc

 18   j'aurais vraiment été conseil pour la division qui s'occupait d'évaluation

 19   des créances ou des dettes pour examiner essentiellement quelles étaient

 20   les conditions pendant que j'étais plus ou moins régulièrement dans leurs

 21   bureaux, mais j'ai été également engagé par leur conseil extérieur au sein

 22   de Standard et Pours. Parce qu'il n'y avait pas t d'avocats appartenant à

 23   la société, donc je l'étais, mais de facto.

 24   Q.  Lorsque vous parlez d'évaluations des créances ou des dettes dans cette

 25   division, c'est le type de travail qui a trait, par exemple, à des

 26   obligations d'Etat; c'est cela ?

 27   R.  Non pas -- je ne m'occupais pas -- ça peut avoir trait à des cotations,

 28   mais ça pourrait avoir également des valeurs structurées, des questions de

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  1   financement de société.

  2   Q.  Bien. En ce qui concerne votre travail que vous faisiez comme analyste,

  3   je crois que c'est un type de travail qui demande le fait de maintenir des

  4   archives internes particulières.

  5   R.  En fait, la plupart du temps, je n'étais pas le premier analyste. Comme

  6   je l'ai dit, j'étais plutôt l'avocat qui vérifiait les affaires conclues et

  7   j'étais le chef de département qui s'occupait des vérifications de ces

  8   types de transactions, une fois que j'ai eu quitté ma responsabilité

  9   première de conseil.

 10   Q.  Bien. En ce qui concerne le fait que vous examiniez ces accords,

 11   serait-il juste de dire que vous vous fondiez sur le travail d'analystes

 12   qui, en fait, comportait le fait de garder les archives extrêmement

 13   soigneuses; c'est bien ça ?

 14   R.  La plupart du temps, ceci venait de celui qui avait créé la créance ou

 15   venait de la banque d'investissement.

 16   Q.  Bien. En ce qui concerne la question de la possibilité d'avoir devant

 17   vous les faits, de façon à pouvoir prendre des décisions de caractère

 18   juridique, en ce qui concerne ces faits, vous vous fondiez, je dirais, sur

 19   pas mal de documents comme éléments de preuve ?

 20   R.  C'est exact.

 21   Q.  Et lorsque vous dites qu'il s'agissait d'éléments analytiques, il

 22   s'agit de documents qui sont rédigés; bien entendu ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Maintenant il n'y a rien de particulièrement inhabituel. Ceci fait

 25   partie de la nature de la profession, n'est-ce pas ?

 26   R.  Je pense avoir compris votre question et la réponse est oui.

 27   Q.  En l'occurrence, c'est quelque chose que vous avez, si vous ne l'avez

 28   pas déjà appris avant d'être diplômé, c'est quelque chose que vous avez

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  1   appris en faculté de droit, vous savez, que c'était important de pouvoir

  2   mémoriser les faits et les événements, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  C'est quelque chose que vous avez ensuite appris de façon encore

  5   sophistiquée au moment où vous étiez en train d'obtenir votre M.B.A.;

  6   n'est-ce pas ?

  7   R.  C'est exact.

  8   Q.  Et c'est quelque chose qui, certainement, pendant une certaine période

  9   de votre vie, a constitué un exercice, à la fois pour vous,

 10   personnellement, et sur le plan professionnel, dans la mesure où vous

 11   gardiez des traces des archives et vous aviez une chronologie de ce qui

 12   s'est passé, n'est-ce pas ?

 13   R.  Très probablement, oui.

 14   Q.  Lorsque vous dites "très probablement," est-ce que vous avez le moindre

 15   doute dans votre esprit que pendant la période où vous étiez à la fois

 16   avocat pour cette société Standard et Pours, par la suite lorsque vous

 17   étiez banquier chargé des investissements ?

 18   R.  Je crois que vous voulez parler à la fois professionnellement et

 19   personnellement.

 20   Q.  C'est exact. Je vous ai posé la question de cette manière. Donc allons-

 21   y, premièrement du point de vue professionnel en ce qui concerne --

 22   R.  Non, professionnellement, je me sentais parfaitement confortable --

 23   Q.  Professionnellement, vous étiez confortable --

 24   R.  --

 25   L'INTERPRÈTE : La réponse du témoin est inaudible.

 26   Q.  Professionnellement, vous étiez confortable --

 27   R.  C'est exact.

 28   Q.  Et personnellement, je ne vous demande --

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  1   R.  Non --

  2   Q.  -- je ne vous demande pas si vous avez tenu un journal ou non. Je

  3   n'essaie pas en fait de m'immiscer dans votre vie personnelle à cet égard.

  4   R.  Bien.

  5   Q.  Bien.

  6   R.  Donc je pense que sur le plan professionnel, je n'ai eu aucun doute que

  7   le fait de tenir des archives, ça correspondait tout à fait à mes

  8   responsabilités.

  9   Q.  Lorsque vous dites "correspondait tout à fait à vos responsabilités que

 10   vous aviez," pourriez-vous les définir, ces responsabilités ?

 11   R.  Là encore, lorsque nous parlons de mon travail à la société Standard et

 12   Pours, là encore, je dois souligner que la plus grande partie de ma

 13   carrière à cette société était soit comme conseil, et je n'étais pas

 14   certainement en train de revoir des chiffres, ou j'étais le chef d'un

 15   département qui s'occupait -- parfois on appelait ça le développement de

 16   nouveaux produits. Il s'agissait d'analyser de nouveaux types de cotations

 17   de sorte que le travail était fait par quelqu'un qu'on appelait l'analyste

 18   en chef et il avait la responsabilité directe de l'évaluation. Ce type

 19   d'analyste, fréquemment on se fondait sur les informations qui étaient

 20   présentées par celui qui émettait la créance, s'il y avait un instrument ou

 21   un titre. Bien entendu, la banque d'investissement, elle se trouvait

 22   derrière ces instruments.

 23   Q.  Bien. En ce qui concerne ce travail, lorsque vous examiniez le travail

 24   qui était fait par cet analyste, vous partiez de l'hypothèse, n'est-ce pas,

 25   que les renseignements que vous aviez étaient complets et exacts ?

 26   R.  C'était d'habitude la représentation qui était faite par celui qui

 27   émettait la créance et par la banque d'investissement; c'est exact.

 28   Q.  Et faisant partie de votre travail certainement à ce moment-là, il y

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  1   avait, lorsque vous décidiez de savoir si vous pouviez vous fonder sur les

  2   analyses présentées sur le fait que vous vouliez faire cette évaluation, la

  3   totalité de ces renseignements qui étaient considérés comme étant complets,

  4   précis et fiables, n'est-ce pas ?

  5   R.  C'est exact.

  6   Q.  Est-ce que c'est l'une des choses que vous analysiez pendant cette

  7   période, les éléments tels que les dépenses ou que tel ou tel projet

  8   pouvait coûter tel qu'il vous était présenté par votre analyste ?

  9   Est-ce que vous comprenez ma question ?

 10   R.  Là encore, je pense que oui et la réponse est, bien sûr, qu'on prenait

 11   ces questions telles qu'elles vous étaient présentées, à moins qu'il y ait

 12   eu une raison sérieuse de soupçonner que les renseignements étaient

 13   inexacts.

 14   Q.  Et la façon dont vous pouviez décider de cela -- par exemple, je veux

 15   dire si vous soupçonniez que les renseignements n'étaient pas exacts,

 16   c'était basé sur les renseignements qui vous avaient été fournis par vos

 17   propres analystes, n'est-ce pas ? Ça pouvait être l'une des manières dont

 18   vous procédiez, mais c'était certainement l'une d'entre elles.

 19   R.  Oui. Dans l'ensemble, on n'avait pas ce type de problème ou de défi,

 20   parce qu'à l'évidence, celui qui émettait la créance, c'est-à-dire le

 21   banquier d'investissement, avait lui-même une bien meilleure compréhension

 22   de ce que cela représentait d'une façon générale. A l'évidence, vous

 23   connaissiez la personne avec qui vous traitiez, vous saviez qu'elle avait

 24   davantage d'expérience que les personnes qui s'occupaient des personnes des

 25   sociétés en question. Ces renseignements, notamment aux fins des dépôts,

 26   les estimations essentielles, il y avait une liste qui était faite de ces

 27   personnes. C'était une base cohérente. Il n'y avait pas de rapport ou de

 28   relation disjointe, c'était une relation proche vivante.

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  1   Q.  Lorsque vous êtes passé dans le monde des banques d'investissement, je

  2   suppose que vous aviez les mêmes discussions, mais que les renseignements

  3   que vous aviez pour prendre des décisions en ce qui concernait les

  4   investissements bancaires nécessitaient des renseignements complets et

  5   fiables ?

  6   R.  Dans l'ensemble c'est exact.

  7   Q.  Dans l'ensemble, il a été dit qu'un banquier d'investissement est

  8   quelqu'un qui joue avec l'argent d'autres personnes parce qu'ils ne peuvent

  9   pas le risquer eux-mêmes. Je ne sais pas si vous partagez ce point de vue

 10   ou non.

 11   R.  Non, en fait, je ne le partage pas. Mais c'est peut-être moins flatteur

 12   de dire qu'on est un mercenaire qui unit les éléments financiers pour

 13   quelqu'un d'autre, mais à l'évidence il n'y a pas de relation qui se

 14   poursuit comme celle qui serait comparable d'un responsable financier.

 15   C'est peu flatteur comme point de vue par rapport à ce qu'on peut dire d'un

 16   banquier d'investissement. Sans ça, en fait, véritablement vous aidez à

 17   mettre en œuvre une transaction qui tend à répondre aux exigences du marché

 18   et en même temps à répondre à ce que veut celui qui avait la créance,

 19   c'est-à-dire les institutions qui cherchent à pouvoir assurer ces

 20   financements. Franchement, je pense que si vous vouliez parler de jeu,

 21   c'est en fait pour nos tâches, on essayait davantage de répondre aux

 22   exigences des différentes parties à une transaction et d'une façon

 23   générale, il y en avait plus que deux. Il y avait plus que celui qui

 24   émettait les valeurs et celui qui avait simplement le potentiel pour

 25   investir ou les investisseurs.

 26   Q.  Serait-il juste de dire que vous vous occupiez de considérations

 27   multifinancières ?

 28   R.  C'est exact.

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  1   Q.  En ce qui concerne la période pendant laquelle vous fonctionniez comme

  2   banquier d'investissement, à cette époque-là, il serait juste de dire que

  3   c'était entre les années 1980 et 1990 où le marché était très fort.

  4   R.  Bon, je suivais également latéralement le marché à la fin des années

  5   1980 et au début des années 1990.

  6   Q.  Pendant cette période où vous pouviez constater ce marché fort, est-ce

  7   que vous vous êtes écarté de vos comportements fondamentaux, si je qualifie

  8   ceci de façon correcte, qui était de noter les informations, de garder des

  9   archives sur ces informations, et d'être à même de voir si vous pouviez

 10   vous fier à ces renseignements à l'avenir ?

 11   R.  Oui, dans l'ensemble nous avions de toute façon un département très

 12   développé qui était chargé de ces questions vers la fin de mes fonctions

 13   dans les banques d'investissement. Ceci impliquait effectivement de garder

 14   des archives importantes. Il y avait un grand nombre de personnes qui

 15   s'occupaient de cette partie du processus qui travaillaient également avec

 16   la banque et il y avait là des efforts à plusieurs facettes, qui

 17   correspondent avec ce que je crois que vous êtes en train de dire.

 18   Q.  Bien. Puisque vous nous avez parlé du chef des départements, d'après ce

 19   que j'ai compris, je fais un saut en avant parce que vous avez également eu

 20   une date butoir, je comprends que vers la fin des années 1980-1990, pendant

 21   cette période, tout en connaissant cette date butoir, vous étiez à même de

 22   voir une chronologie des investissements si vous aviez eu à prendre des

 23   décisions de ce qui pouvait être viable ou raisonnable sur la façon de

 24   procéder financièrement avec vos clients.

 25   R.  Je pense que je sais où vous voulez en venir et je pense que c'est

 26   exact. Une fois que les transactions étaient en cours, à ce moment-là, en

 27   fait, ce que vous aviez c'était d'un côté des investissements et de l'autre

 28   côté vous aviez les émetteurs. La banque d'investissement général avait en

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  1   quelque sorte des fonctions plutôt qui étaient celles d'un fidéicommis.

  2   Q.  Lorsque vous parlez de la question des responsabilités fiduciaires,

  3   pourriez-vous expliquer aux membres de la Chambre ce que vous voulez dire

  4   par ce terme ? Est-ce que vous avez eu des responsabilités par rapport aux

  5   personnes à l'égard desquelles vous traitiez ?

  6   R.  En ce qui concerne les investissements, les banques en l'occurrence,

  7   c'était essentiellement l'émetteur. Il se peut que j'aie eu des

  8   responsabilités juridiques correspondantes par rapport aux lois et

  9   règlements de l'époque à l'égard de l'émetteur, mais dans l'ensemble,

 10   j'étais un banquier chargé des investissements employés par l'émetteur.

 11   Q.  Je --

 12   R.  J'ai dit employé, on emploie ce terme "employé" pour cette fonction

 13   particulière. Bien entendu, mon employeur c'était la banque.

 14   Q.  En ce qui concerne ce que vous avez dit dans votre dernière réponse,

 15   vous avez dit que vous pouviez avoir eu des responsabilités juridiques qui

 16   correspondaient aux lois et règlements à l'époque à l'égard de

 17   l'investisseur.

 18   En ce qui concerne la notion générale de votre travail,

 19   indépendamment de vos tâches de banquier d'investissement et à l'évidence

 20   maintenant, je me réfère à ce que vous avez fait plus tard dans la vie

 21   lorsque vous êtes devenu ambassadeur.

 22   R.  Oui.

 23   Q.  D'après ce que je comprends dans ce que vous nous avez raconté, à un

 24   moment donné dans votre vie, on vous a demandé d'apporter votre aide à

 25   l'Etat naissant de Bosnie-Herzégovine du point de vue financier.

 26   R.  On m'a demandé d'aider à des transformations économiques potentielles

 27   ainsi qu'à des transformations politiques avant que ne se disloque l'ex-

 28   Yougoslavie. On ne m'a jamais demandé d'agir de sorte dans une capacité

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  1   fiduciaire. J'étais purement et simplement quelqu'un qui avait connaissance

  2   du système du marché libre plus particulièrement qui comprenait ce qui se

  3   passait aux Etats-Unis, en particulier dans le contexte économique et

  4   politique. Certainement l'idée qu'il y avait un Etat indépendant naissant,

  5   je pense, à l'époque, n'était pas vraiment le problème qui se posait pour

  6   ce qui était de l'ex-Yougoslavie, au moins d'après le système dans lequel

  7   il se trouvait sous la direction de certains dirigeants régionaux. En fait,

  8   l'ex-Yougoslavie pourrait se restructurer et maintenir une sorte de

  9   structure confédérale ou un arrangement fédéral un peu moins resserré.

 10   Q.  Bien, ceci n'est pas l'essentiel, mais une partie. Les motifs pour

 11   lesquels vous vous êtes occupé du gouvernement de la Bosnie-Herzégovine à

 12   l'époque, c'était dû au fait que vous aviez des connaissances expertes dans

 13   les domaines des investissements bancaires, n'est-ce pas ?

 14   R.  Je pense qu'il faudrait probablement que vous posiez les questions aux

 15   personnes qui m'ont demandé mon aide, et je dois admettre que mon

 16   engagement probablement jusqu'à l'année 1992 avait un côté intermittent.

 17   Q.  A un moment donné dans votre engagement, il a cessé d'être intermittent

 18   et est devenu plus constant; n'est-ce pas ?

 19   R.  C'est exact.

 20   Q.  Lorsque vous dites que votre engagement avait été intermittent avant

 21   1992, pourriez-vous nous dire de façon précise, je suppose que vous donniez

 22   des avis, des conseils financiers à l'époque au gouvernement de Bosnie --

 23   R. En fait, je pense que ceci serait me faire trop d'honneurs. Il se

 24   trouve que j'ai siégé à une réunion de la banque mondiale qui comprenait

 25   l'ex-Yougoslavie à Washington. Peut-être que j'ai eu un, deux, peut-être

 26   trois entretiens avec le président Izetbegovic sur une période de six mois.

 27   Probablement en commençant en février 1992, on m'a demandé d'organiser une

 28   réunion avec le secrétaire général M. Boutros-Ghali, à l'époque, et M.

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  1   Cyrus Vance, et c'est à ce moment-là que mon engagement est devenu plus

  2   complet, bien que j'ai continué en fait à poursuivre ma carrière en tant

  3   que banquier d'investissements avec mon associé.

  4   Q.  Bien. Lorsqu'on vous a demandé d'organiser cette première réunion en

  5   février 1992 qui était basée sur des questions financières, ou était-elle

  6   basée sur autre chose, si vous le savez ?

  7   R.  Je pense qu'elle était basée sur l'idée, oui, je suppose que c'est une

  8   question qui est juste. Pour commencer, je ne suis pas sûr nécessairement

  9   de la raison pour savoir pourquoi elle aurait été posée si ce n'est qu'à

 10   l'évidence, je vivais à New York, j'étais avocat, je savais l'anglais, je

 11   savais me débrouiller dans le monde financier et dans la communauté

 12   juridique et peut-être que je pouvais le faire mieux qu'un autre originaire

 13   de Bosnie. Mais je n'en dis pas beaucoup. Il n'y avait pas un grand nombre

 14   de Bosniaques à l'époque qui vivaient en dehors de leur pays. Il s'est

 15   trouvé que ça a été l'une des conséquences de la guerre.

 16   Q.  Bien. Mais par-dessus tout cela, il y avait un autre motif, n'est-ce

 17   pas, qui était que si vous pouviez utiliser d'une certaine manière votre

 18   propre langue, mis de façon très simple -- votre père et le président

 19   Izetbegovic étaient de vieux amis du groupe des Jeunes Musulmans ?

 20   R. C'est exact. Ma mère aussi faisait partie de ce groupe et elle avait

 21   également des relations d'amitié avec le président Izetbegovic.

 22   Q.  Maintenant, lorsque vous avez parlé de --

 23   R.  Mais à ce moment-là, je devrais ajouter que ma mère est décédée. C'est

 24   pour ça qu'elle n'est pas mentionnée dans le contexte de ce rapport.

 25   Q.  Bien. Je vous présente mes condoléances aujourd'hui, tout comme je

 26   l'aurais fait hier, mais lorsqu'on perd sa mère, c'est quelque chose qui

 27   laisse un grand vide.

 28   R.  Elle a laissé davantage qu'un grand vide émotionnel dans ma vie. Elle

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  1   était un vrai phare, une lumière qui guidait. Elle avait son idéologie et

  2   elle voyait les choses de façon extrêmement positives.

  3   Q.  Bien. Nous partageons cette expérience, Monsieur Sacirbey, nous

  4   partageons cette expérience.

  5   R.  Je vous remercie.

  6   Q.  Je voudrais que nous parlions un moment de la question du groupe des

  7   Jeunes Musulmans. Voyez --

  8    R.  Je vous en prie.

  9   Q.  D'après ce que je comprends, votre père a passé, et je crois votre mère

 10   avait passé un certain temps en prison avec le président Izetbegovic; c'est

 11   bien ça ?

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame Bolton.

 13   Excusez-moi, Monsieur Sacirbey -- mais l'Accusation demande la

 14   parole.

 15   Madame Bolton.

 16   Mme BOLTON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'étais en train

 17   de demander quelle était la pertinence de parler de M. Sacirbey père et du

 18   président Izetbegovic et de leur participation à l'organisation des Jeunes

 19   Musulmans. Je me demande ce que ça avait à voir par rapport aux questions

 20   précises qui font l'objet de ce procès. Ce n'est pas une question qui a été

 21   évoquée au cours de l'interrogatoire principal de sorte qu'en fait, à moins

 22   que ça n'ait trait à la crédibilité d'une façon ou d'une autre de M.

 23   Sacirbey, à mon avis, ça n'est pas pertinent.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Guy-Smith.

 25   M. GUY-SMITH : [interprétation] Mais s'il est constamment question dans le

 26   témoignage de M. Sacirbey en ce qui concerne la façon dont on percevait les

 27   choses concernant les Musulmans, et une société multiethnique. En ce qui

 28   concerne ces renseignements particuliers, ce n'est qu'une question

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  1   liminaire qui a trait non seulement à cet aspect particulier, mais qui est

  2   le problème de la création en fin de compte d'un Etat musulman ou non, mais

  3   aussi qui est pertinent par rapport à la question de la perception à

  4   l'extérieur de ce qu'a pu être l'intention, la perception extérieure du

  5   monde. Dans la mesure où le père de M. Sacirbey s'était occupé en tant que

  6   Jeune Musulman de ces questions, ça a une incidence en ce qui concerne la

  7   façon dont ces questions ont été perçues des années plus tard.

  8   Mme BOLTON : [interprétation] La question concernait le fait que M.

  9   Sacirbey a passé du temps en prison n'avait rien à voir avec la perception

 10   du monde étranger. Nous n'avons rien dans le témoignage, dans la déposition

 11   de M. Sacirbey sur la perception du monde extérieur et sur l'établissement

 12   d'un Etat musulman. Il n'y a rien qui ressort de l'examen principal.

 13   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je ne suis pas d'accord. Toute cette

 14   question transpire dans le texte.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Guy-Smith, le problème, c'est

 16   que vous parlez de M. Sacirbey père, et le fait qu'il ait appartenu à cette

 17   organisation de Jeunes Musulmans et non pas de M. Sacirbey que nous sommes

 18   en train d'entendre.

 19   Je ne sais pas quelles sont les perceptions extérieures de toutes ces

 20   questions sur la création d'un Etat musulman, questions d'ethnicité, mais

 21   lorsque vous nous dites que ça provient de son père, vous voulez dire que

 22   c'est quelque chose qu'on peut lui transposer ?

 23   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je ne sais pas. Je n'ai aucun moyen de

 24   savoir quelle serait la réponse à cette question. Mais je dois dire, entre

 25   autres, que le père de M. Sacirbey faisait partie de la mission aux Nations

 26   Unies et je pense que son père a rédigé des lettres aux Nations Unies

 27   concernant la position de la Bosnie-Herzégovine.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Etes-vous en train d'attribuer ces

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  1   lettres au M. Sacirbey que nous voyons là, les lettres de Sacirbey père,

  2   vous êtes en train de les attribuer à son fils ?

  3   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je ne sais pas. Je ne sais pas s'il en est

  4   conscient ou pas.

  5   J'aurais tendance à penser qu'il n'était pas au courant de tout cela,

  6   mais étant donné que c'est une question politique et étant donné qu'on a

  7   été accusé, entre autres, d'avoir un parti pris contre les Musulmans, cette

  8   question concernant la philosophie qui aurait pu être partagée ou pas

  9   d'ailleurs, mais là encore, je ne sais pas. Comme je vous le disais tout à

 10   l'heure, c'est un point qu'il peut rejeter, auquel cas ça m'ira très bien.

 11   C'est une philosophie qui a été enseignée et partagée à mon sens par M.

 12   Sacirbey que nous entendons aujourd'hui. C'est une question sur laquelle

 13   j'aimerais m'appesantir.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il me semble que c'est un peu tiré par

 15   les cheveux que de parler de son père. Si vous me parlez de lui, il n'y a

 16   pas de problème, mais de son père, je ne pense pas.

 17   L'objection est retenue. Je pense que cela n'est pas pertinent.

 18   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 19   Q.  Pardonnez-moi mon interruption.

 20   R.  Très bien.

 21   Q.  Lorsque l'on vous a demandé de vous impliquer auprès du gouvernement,

 22   je pense que l'on peut dire que si l'on vous a demandé de vous impliquer,

 23   c'est parce que vous aviez une histoire partagée avec votre père et avec le

 24   président Izetbegovic; exact?

 25   R.  Oui, je pense que c'est exact, même si je pense que le président

 26   Izetbegovic serait mieux en mesure de répondre à cette question.

 27   Q.  Oui, vous avez tout à fait raison, mais je ne pense pas qu'il soit en

 28   mesure de le faire.

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  1   R.  En effet.

  2   Q.  Et je suis sûr --

  3   R.  Je pense que votre évaluation est assez juste, c'est le moins qu'on

  4   puisse dire.

  5   Q.  A cet égard, j'en viens d'ailleurs à l'étape suivante : pourrait-on

  6   dire que l'un des principes qui ont été retenus par M. Izetbegovic

  7   concernait l'importance de la lutte islamique ? Je pense que vous voyez ce

  8   à quoi je fais illusion. Il s'agit de cette déclaration islamique pour

  9   laquelle il a été mis en prison.

 10   R.  Oui. Tout d'abord, je pense qu'il serait injuste de parler de "lutte

 11   islamique." Je pense qu'il s'agit davantage d'identité islamique.

 12   Evidemment en Europe, à bien des égards c'est tout à fait différent des

 13   autres pays islamiques musulmans, parce que les Musulmans de Bosnie avaient

 14   une identité très européenne, si vous voulez, qui reposait sur les valeurs

 15   euro-atlantiques, valeurs culturelles, et ils avaient parallèlement des

 16   valeurs musulmanes.

 17   Donc je pense qu'il y avait une lutte politique. Alors je ne sais pas

 18   ce que ça veut dire, mais en tout cas, je dirais qu'avec le recul, il est

 19   facile de dire qu'avec mon engagement, j'ai vu la survie de cette identité

 20   islamique en Bosnie comme correspondant au modèle américain de société

 21   multiculturelle. Donc je pense que beaucoup d'entre nous espéraient que

 22   l'ex-Yougoslavie aurait réussi à faire cela. Evidemment, avec le recul, on

 23   se rend compte que ça a été un échec, mais aux Etats-Unis, on maintient

 24   cette identité multiethnique. C'est le cas d'autres sociétés évidemment.

 25   Mais mon expérience, elle a été aux Etats-Unis.

 26   Q.  Très bien. Ce que vous partagez avec le président Izetbegovic - c'est

 27   une question que je suis en train de vous poser - c'est votre dégoût pour

 28   la République fédérale de Yougoslavie sous Tito ? Vous étiez enfant, mais

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  1   est-ce que ce sont des valeurs qu'on vous a enseignées ?

  2   R.  Vous parlez de dégoût, je ne suis pas sûr que ce soit la bonne

  3   définition. Oui, il y avait des réfugiés. Mes parents ont été emprisonnés

  4   par ce régime dans l'ancienne Yougoslavie. Parallèlement, on avait toujours

  5   des amis de l'ex-Yougoslavie, des amis de ce régime qui étaient dans des

  6   positions de force, y compris l'ancien ambassadeur de Yougoslavie à

  7   Washington.

  8   Q.  Très bien. Concernant la question que je vous posais tout à l'heure,

  9   j'utilisais les mots de la déclaration islamique, un document qui a été

 10   rédigé par M. Izetbegovic dans les années 70, si je ne m'abuse.

 11   R.  Oui, c'est exact.

 12   Q.  Je faisais allusion à ce qui suit : vous savez ce qui s'est passé à

 13   l'époque, vous êtes d'accord ou pas, mais --

 14   Mme BOLTON : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait avoir un document, s'il

 15   vous plaît, une copie de ce document ?

 16   M. GUY-SMITH : [interprétation] Ecoutez, on ne dispose pas du document.

 17   Mme BOLTON : [interprétation] J'aurai du mal à suivre à ce moment-là.

 18   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vous obtiendrai donc une copie.

 19   Mme BOLTON : [interprétation] Merci.

 20   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 21   Q.  Il y a cette lutte pour la défense des Musulmans sans utilisation de la

 22   force.

 23   Est-ce que c'était quelque chose que vous connaissez ou que vous avez

 24   entendu le président Izetbegovic dire ?

 25   R.  Bien, je n'ai jamais lu cette déclaration islamique dans son ensemble.

 26   Je n'étais même pas conscient de son existence jusqu'à ce qu'elle

 27   apparaisse dans les discussions politiques. Je sais qu'il y a des citations

 28   et j'ai entendu que des questions ont été posées au président Izetbegovic

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  1   sur certaines de ces questions.

  2   Q.  Concernant toutes les questions que vous avez posées au président

  3   Izetbegovic, est-ce que vous avez eu l'occasion de parler du point suivant

  4   :

  5   "Le fait que l'ordre islamique ne peut être rétabli que dans des pays

  6   où les Musulmans représentent la majorité de la population. Si tel n'est

  7   pas le cas, l'ordre islamique est réduit à une force de second ordre et il

  8   manquera un certain nombre d'éléments qui font que cela pourra entraîner

  9   des violences. Les minorités non islamiques dans un Etat islamique, à

 10   condition qu'elles soient loyales, disposeront de la liberté de culte et du

 11   niveau de protection nécessaire."

 12   R.  Dès lors que j'ai parlé de ces questions avec le président Izetbegovic,

 13   je n'en ai parlé peut-être qu'à deux ou trois reprises, on essayait de voir

 14   cela à quoi pourrait ressembler la Bosnie. Et il m'a dit très clairement -

 15   alors on peut douter de sa sincérité - mais je pense qu'il était sincère et

 16   je pense qu'il voulait que Bosnie soit un Etat laïc, pas un Etat musulman,

 17   pas un Etat dominé par tel ou tel groupe ethnique ou religieux, pas un Etat

 18   dominé par telle ou telle idéologie ou religion, comme ses voisins

 19   européens.

 20   Q.  Avez-vous parlé au président Izetbegovic de vos inquiétudes, des

 21   problèmes qui pourraient provenir de ces dépositions historiques qu'il

 22   avait prises concernant l'Islam dans le monde moderne, étant donné votre

 23   perception de ce qu'il avait dit, par rapport à ce que vous venez de dire ?

 24   R.  Bien, cette question a été soulevée à plusieurs reprises. Quant à

 25   savoir ce que représentait le président Izetbegovic, à mon avis, il était

 26   très clair qu'il était pour une société multiethnique et laïque qui n'était

 27   dominée ni par la théologie ni par une théologie de la haine. Et le modèle

 28   qu'il voulait utiliser, ou le plus crédible, était le modèle américain.

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  1   Evidemment, il y a d'autres modèles qui existent, d'autres sociétés qui

  2   existent et qui ne sont pas parfaites, mais qui correspondraient à ce

  3   modèle qu'il voulait utiliser, à savoir un Etat multiethnique, progressiste

  4   et laïc.

  5   Q.  Oui, je comprends bien ce que vous êtes en train de nous dire, mais

  6   simplement, il faudrait braquer le projecteur légèrement différemment

  7   concernant cette question.

  8   Etant donné l'existence de cette discussion, à savoir le fait que

  9   vous avez parlé de savoir si la Bosnie-Herzégovine devait tout de même

 10   devenir un Etat musulman ou un Etat multiethnique. Concernant la perception

 11   du monde extérieur, est-ce que c'est une question que vous avez abordée

 12   avec le président Izetbegovic, à savoir --

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Concernant la perception du monde extérieur, comment on allait réagir à

 15   cette question, puisqu'à mon avis, c'est une question quand même éminemment

 16   sensible et importante en termes de conflit, parce qu'on voit l'histoire de

 17   la création de cet Etat, et cetera. Avez-vous des jalons d'un plan qui

 18   déterminerait comment faire face à ces perceptions négatives qu'il aurait

 19   pu y avoir dans le monde extérieur ?

 20   R.  Bien, je pense que le fond est aussi important que la forme.

 21   Effectivement, il y a eu des moments où j'ai mis le doigt sur ces questions

 22   de fond et de forme et j'ai été largement influencé par ce que j'appelle

 23   les patriotes de Bosnie-Herzégovine, qui n'étaient pas Musulmans mais qui

 24   s'étaient engagés pour cette lutte, d'un point de vue politique, M. Divjak,

 25   par exemple, qui a été l'un des défenseurs principaux, qui a été l'un des

 26   grands commandants militaires de Bosnie-Herzégovine. Je pense que sa

 27   contribution était immense, mais qu'elle était aussi à l'instar de ce que

 28   pourrait être la Bosnie-Herzégovine. Et à mon sens, des gens comme le

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  1   général Jovan Divjak, qui ont déjà déposé devant ce Tribunal dans le passé,

  2   ça c'était quelqu'un qui pouvait choisir, décider. Il pouvait avoir des

  3   impulsions ethniques, donc avoir des visées serbes nationalistes ou alors

  4   il aurait pu continuer à soutenir ce que je considère comme étant l'avenir

  5   de la Bosnie-Herzégovine, à savoir un Etat multiethnique et progressif. Je

  6   pense que si vous me demandez quelles ont été les erreurs du président

  7   Izetbegovic en la matière, la réponse est simple. C'est quelqu'un qui,

  8   toute sa vie, a vécu dans l'ex-Yougoslavie et, contrairement à moi ou

  9   contrairement à ma famille, qui n'a jamais eu l'occasion de vivre dans une

 10   société pluraliste, démocratique, progressiste, et cetera. Même si je pense

 11   que la Yougoslavie doit devenir une société multiethnique, mais elle ne

 12   l'était pas. Reste à savoir dans quelle mesure est-ce qu'elle était

 13   progressiste à l'époque.

 14   Q.  Merci de vos réponses. Et vous avez parlé d'une personne en laquelle

 15   vous trouvez du réconfort - un terme que je n'utilise pas à la légère -

 16   quelqu'un que vous considérez comme étant un précurseur. Ma question donc :

 17   lorsque vous avez parlé du fond, vous voulez parler aussi de la forme. Est-

 18   ce que vous avez posé les jalons d'un programme qui ferait que la

 19   perception d'un Etat musulman qui serait créé pourrait être mise à mal en

 20   dehors du fait que ce serait un Etat multiethnique? Est-ce que vous avez

 21   d'autres critères ?

 22   R.  Là encore, je pense que vous essayez de séparer le fond de la forme, et

 23   là encore je ne pense pas qu'il devrait y avoir de différence entre le fond

 24   et la forme, parce qu'il faut répondre à des accusations, et ça pourrait

 25   être une réponse, mais le fond était aussi important que la forme.

 26   Q.  Nous reviendrons à ces questions plus tard pour ce qui est des alliés

 27   avec lesquels vous vous êtes retrouvé au fil des ans, d'accord ?

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne comprends pas bien. Je sais

  3   qu'on n'a pas répondu à cette question, mais j'aimerais comprendre,

  4   Monsieur Guy-Smith, ce dont vous parlez.

  5   Dans la question que vous venez de poser à l'instant, vous demandez des

  6   précisions sur des plans concernant un Etat musulman qui aurait été créé,

  7   puis dans le droit fil de cela, vous caractérisez cet Etat comme étant

  8   multiethnique. Donc j'ai l'impression que ces deux termes sont

  9   contradictoires. Alors est-ce que c'était la vision des choses de M.

 10   Izetbegovic ? Est-ce qu'il présentait l'Etat comme cela ?

 11   M. GUY-SMITH : [interprétation] Ma question était peut-être un peu

 12   verbeuse. Mais le sens est le suivant : est-ce qu'il avait mis sur pied un

 13   programme pour changer la perception qu'il crée auprès du monde extérieur,

 14   à savoir créer un Etat musulman ? C'était ça que je voulais dire.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Je comprends mieux,

 16   maintenant.

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 18   Q. J'aimerais maintenant revenir au moment où vous avez commencé à

 19   travailler comme ambassadeur; c'était quand ?

 20   R.  Officiellement, j'ai été nommé le 22 mai 1992 par le président

 21   Izetbegovic. C'est le jour où la Bosnie-Herzégovine a été admise dans la

 22   famille des Nations Unies. J'avais commencé à travailler deux ou trois mois

 23   avant en fonction de la situation lorsque Sarajevo a été assiégée début

 24   avril. Clairement, nous avons commencé à travailler d'arrache-pied. J'ai

 25   travaillé avec le Dr Haris Silajzic, qui était un ancien ministre de

 26   Bosnie-Herzégovine à l'époque, et j'ai présenté mes lettres de créance

 27   quelques semaines après, peut-être dix jours après l'admission de la

 28   Bosnie-Herzégovine à l'ONU. 

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  1   Q.  Merci. Lorsque vous avez commencé à travailler comme représentant, le

  2   travail que vous faisiez, vous le faisiez depuis votre étude ?

  3   R.  Depuis mon bureau qui était sur la 6e Avenue.

  4   Q.  Vous êtes resté dans vos bureaux, si je ne m'abuse, pendant quatre mois

  5   environ.

  6   R.  Oui, à quelques mois près.

  7   Q.  Quand vous y étiez dans ce premier bureau, vous avez eu du mal à mettre

  8   en place un compte parce que vous n'aviez pas de numéro fiscal; est-ce

  9   exact ?

 10   R.  Oui, c'est exact.

 11   Q.  Un compte pour le gouvernement de Bosnie; c'est exact ?

 12   R.  Ça aurait été un compte pour la mission de Bosnie-Herzégovine. Parce

 13   que j'étais citoyen américain, je ne voulais pas renoncer à ma nationalité

 14   américaine, donc je travaillais pour la Bosnie de manière temporaire. Je

 15   savais que je retournerais ensuite aux Etats-Unis, donc je ne pouvais pas

 16   obtenir la double nationalité. Mais aux Etats-Unis, même si je travaillais

 17   auprès des Nations Unies et que je représentais la Bosnie-Herzégovine, je -

 18   -

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci de ne pas vouloir interrompre

 20   les orateurs en plein milieu d'une réponse.

 21   Mme BOLTON : [interprétation] Bien, je pense qu'il faudrait qu'on passe à

 22   huis clos, parce qu'il y a un certain nombre de questions qui sont posées

 23   ici qui ne sont pas forcément pertinentes et qui ne relèvent pas uniquement

 24   de la Bosnie-Herzégovine.

 25   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bien, je pense qu'il y a une logique,

 26   toutefois, concernant toutes ces questions.

 27   Est-ce que vous souhaitez que je vous l'explique, Monsieur le Président ?

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne sais pas. Est-ce que votre

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  1   collègue souhaite que vous l'expliquiez ou pas --

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation] Qu'elle le veuille ou non, à vrai dire,

  3   c'est…

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous crois sur parole, mais je ne

  5   sais pas si elle veut savoir la pertinence, si elle arrive à vous suivre

  6   comme ça.

  7   Mme BOLTON : [interprétation] Non, je ne comprends absolument pas la

  8   pertinence de tout cela, à moins qu'il ne me l'explique.

  9   M. GUY-SMITH : [interprétation] J'aimerais savoir quels sont les problèmes

 10   de Mme Bolton.

 11   Mme BOLTON : [interprétation] Le problème, c'est qu'il y a des points qui

 12   vous semblent pertinents, et moi ils ne me semblent pas forcément

 13   pertinents. Je ne peux pas donner ma position au Tribunal tant que je n'ai

 14   pas compris la pertinence de ce qui est dit, même si ce qui est dit est dit

 15   par l'un de mes amis.

 16   M. GUY-SMITH : [interprétation] Le problème, c'est qu'il y a des ambiguïtés

 17   dans les termes qui sont utilisés dans les allégations qui sont faites et

 18   je ne comprends pas bien quel est le problème pour Mme Bolton.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Peut-être pourriez-vous expliquer ce

 20   que vous considérez comme étant pertinent, et peut-être qu'après elle

 21   pourra comprendre ce qui est important à vos yeux, ensuite on décidera s'il

 22   faut qu'on passe à huis clos partiel ou non.

 23   M. GUY-SMITH : [interprétation] Très bien.

 24   La question qui nous intéresse est celle du maintien des archives.

 25   C'est tout ce qui nous intéresse pour le moment. Maintenant, attendez -- en

 26   fait, je ne crois pas qu'il soit nécessaire de passer à huis clos, parce

 27   que M. Sacirbey dispose d'un conseil et si le conseil s'inquiète des

 28   questions auxquelles M. Sacirbey est exposé concernant la responsabilité

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  1   pénale, son conseil peut relever toutes ces questions. Mme Bolton est en

  2   train de défendre M. Sacirbey. Si tel est le cas, c'est tout à fait

  3   inapproprié, on a déjà connu cela l'année passée. Concernant la pertinence

  4   des questions, que ce soit une utilisation propre ou impropre du huis clos,

  5   c'est une autre question. Maintenant, si ce que l'on veut ici c'est

  6   protéger l'Accusation, cela ne va pas et nous n'en sommes pas encore là.

  7   Par contre, c'est précisément le type d'information, le type de vérité qui

  8   ne devrait pas être présenté seulement à la Chambre, mais présenté au

  9   monde. Si c'est une question qui pose problème --

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame Bolton.

 11   Mme BOLTON : [interprétation] Je parle des questions concernant la requête

 12   de l'Accusation. Au paragraphe 21 du jugement il est précisé que nous avons

 13   soulevé un certain nombre de questions sur la discussion en public de

 14   toutes ces allégations, du fait que M. Sacirbey disposerait de certains

 15   droits, droit de ne pas répondre à certaines questions concernant la

 16   Bosnie-Herzégovine, et cetera. La protection que la Cour a notée dans ce

 17   document, on disait, par exemple, que M. Sacirbey et l'Accusation pouvaient

 18   demander des séances à huis clos partiel ou à huis clos, le cas échéant.

 19   Voilà pourquoi l'Accusation le fait, je le fais parce que les décisions que

 20   vous avez prises vont dans ce sens, et pour autant que je sache, là encore,

 21   concernant les archives, bien encore, ce sont des questions qui touchent

 22   directement la Bosnie-Herzégovine. Comme je l'ai dit dans la requête

 23   initiale, c'est un sujet dont on n'a pas parlé.

 24   [La Chambre de première instance se concerte]

 25   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je pense qu'il faut que j'attende que vous

 26   preniez la parole avant de dire quelque chose.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ecoutez, c'est moi qui aura le dernier

 28   mot.

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  1   M. GUY-SMITH : [interprétation] Absolument, il ne fait aucun doute là-

  2   dessus. Voyez-vous, il ne fait aucun doute sur le fait que c'est vous qui

  3   aurez le dernier mot, je ne pourrais même pas caresser l'idée que ce soit

  4   moi qui aurait le dernier mot, le cas échéant.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien, allez-y.

  6   M. GUY-SMITH : [interprétation] Ce qui m'embête, c'est toujours la même

  7   chose. L'Accusation prend la place du conseil qui est assis à côté de notre

  8   témoin à New York et je suis convaincu que si lui à un problème, il nous en

  9   parlera.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je comprends tout à fait ce que vous

 11   voulez dire, mais si on a une décision qui autorise l'Accusation et les

 12   témoins a demander un huis clos partiel, bien, à ce moment-là, on peut

 13   obtenir ce huis clos ou ce huis clos partiel.

 14   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je comprends bien, je sais que vous aurez

 15   le dernier mot. Mais à la lecture de cette décision, on lit lorsque les

 16   circonstances le justifient. La meilleure personne qui justifie de ces

 17   décisions c'est précisément le conseil de M. Sacirbey, parce que c'est lui

 18   qui est le mieux placé pour décider de cela. Ce n'est pas l'Accusation qui

 19   est la mieux placée pour faire ce genre de choix. En agissant de la sorte,

 20   l'Accusation empêche le public d'avoir accès à la vérité et l'Accusation se

 21   place dans des souliers qui ne sont pas les siens. Mais étant donné que

 22   notre témoin dispose d'un conseil juridique, je vous demande que ces

 23   objections ne soient pas retenues.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Ce que vous êtes en train

 25   de dire, c'est de revoir complètement cette décision ?

 26   M. GUY-SMITH : [interprétation] En tout cas, je pense avoir compris la

 27   décision de la Cour.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, je pense que c'est le moment pour

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  1   le faire. Mais aux fins du compte rendu, je dis que l'objection est

  2   retenue. Nous allons faire la pause maintenant et nous allons continuer à

  3   16 heures.

  4   --- L'audience est suspendue à 15 heures 32.

  5   --- L'audience est reprise à 16 heures 04.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Guy-Smith, vous avez la

  7   parole.

  8   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui. Je vais poser ma question suivante et

  9   avant que M. Sacirbey y réponde, il faut voir d'abord -- qu'on décide

 10   d'abord s'il faut qu'on passe à huis clos partiel ou à huis clos ou pas.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 12   Maître Guy-Smith.

 13   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 14   Q.  Vous avez mentionné que le compte qui devait être ouvert serait le

 15   compte pour la mission de Bosnie-Herzégovine. Dans votre réponse, j'ai pu

 16   comprendre qu'il y avait des difficultés pour ce qui est de l'ouverture

 17   d'un tel compte, puisque vous étiez citoyen des Etats-Unis d'Amérique; est-

 18   ce vrai ? Mais avant de répondre, il faut que vous consultiez votre conseil

 19   ou que l'Accusation se prononce pour ce qui est de la question de savoir

 20   s'il faut aller à huis clos.

 21   Mme BOLTON : [interprétation] Pour ce qui est de l'Accusation, la

 22   pertinence de cette question ne concerne que des allégations concernant la

 23   Bosnie-Herzégovine. Donc si mon éminent collègue peut me fournir une autre

 24   explication ou une autre pertinence de cette question, je serais d'accord

 25   pour qu'on passe à huis clos.

 26   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je ne suis pas d'accord avec Mme Bolton,

 27   mais pour qu'on éclaircisse la chose, nous pouvons passer à huis clos ou à

 28   huis clos partiel.

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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous voulez que l'on passe à huis clos

  2   ou à huis clos partiel ?

  3   Mme BOLTON : [interprétation] D'après la décision de la Chambre, c'est à la

  4   Chambre de dire cela. Donc je voudrais plutôt qu'on passe à huis clos.

  5   M. GUY-SMITH : [interprétation] Huis clos, d'accord. Cela veut dire qu'il

  6   faut faire baisser les stores.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La différence entre les deux types

  8   d'audience doit être expliquée, donc je pense que nous allons passer à huis

  9   clos partiel.

 10   Mme BOLTON : [interprétation] Merci. Huis clos partiel.

 11   M. GUIRGUIS : Où est la différence ?

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pour ce qui est du huis clos, le

 13   public ne peut pas voir le visage du témoin. A huis clos partiel, n'importe

 14   qui dans le public peut le voir, mais ne peut pas entendre ce que nous

 15   disons.

 16   M. GUIRGUIS : Merci, Monsieur le Président.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous sommes maintenant en huis clos

 18   partiel. Est-ce que qu'on peut consigner au compte rendu que la Chambre a

 19   demandé que l'on passe à huis clos partiel.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

 21   partiel.

 22   [Audience à huis clos partiel]

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  8   [Audience publique]

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 10   Maître Guy-Smith, vous avez la parole.

 11   M. GUY-SMITH : [interprétation] Merci.

 12   Q.  Maintenant j'aimerais qu'on revienne à certaines questions pour ce qui

 13   est de vos contacts avec le bureau du Procureur de ce Tribunal. Au début,

 14   il s'agissait des contacts qui ont été établis à deux reprises.

 15   Avant d'avoir témoigné dans cette affaire, vous avez rencontré les

 16   membres de l'équipe de l'Accusation, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Vous souvenez-vous quand vous les avez rencontrés ?

 19   R.  Pour ce qui est de cette affaire, vous pensez à cette affaire où vous

 20   êtes avocat, Maître Guy-Smith ?

 21   Q.  Oui.

 22   R.  Je les ai rencontrés à deux occasions. Je pense que la première fois

 23   c'était en 2008 et nous avions des contacts pendant une semaine. C'était

 24   une semaine de travail. C'était en mai 2008. Cette année 2009, à peu près

 25   en même période de l'année, c'était la deuxième fois.

 26   Q.  Lorsque vous dites que vous avez travaillé avec eux pendant une

 27   semaine, vous voulez dire que cela a duré pendant cinq jours, n'est-ce pas

 28   ?

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  1   R.  La dernière fois que nous nous sommes rencontrés, je pense que cela a

  2   duré trois ou quatre jours, de 9 heures à 17 heures généralement.

  3   Q.  En 2008, c'était la semaine entière ?

  4   R.  Je pense que c'est également quatre jours, si je ne m'abuse. Nous avons

  5   peut-être travaillé vendredi aussi, mais je ne me souviens pas.

  6   Q.  Lorsque vous vous êtes rencontrés en 2009 et 2008, est-ce que cela a

  7   été enregistré sur une cassette audio ?

  8   R.  Je pense qu'au moins à une occasion c'était le cas.

  9   Q.  Qui était présent lors de cet enregistrement audio; pouvez-vous nous le

 10   dire ?

 11   R.  La première fois, Mark Harmon était présent lors de l'enregistrement

 12   audio - je pense qu'il est dans le prétoire et je le salue. En la deuxième

 13   occasion, Mark Harmon encore, M. Britten [comme interprété] Randall qui

 14   étaient présents et Lorna Bolton. Et Britten Randall n'est pas au Tribunal

 15   actuellement.

 16   Q.  J'ai compris. Lorsque vous avez parlé de la première et de la deuxième

 17   rencontre, vous avez donc rencontré M. Harmon et M. Randall. C'était en

 18   2008 et les autres, c'était en 2009. Pouvez-vous me dire laquelle de ces

 19   deux réunions a été enregistrée ?

 20   R.  Certainement en 2008.

 21   Q.  Avez-vous eu l'occasion de réécouter cet enregistrement audio avant de

 22   commencer à témoigner aujourd'hui ?

 23   R.  Non. J'ai peut-être parcouru le résumé de cet enregistrement audio,

 24   mais je n'ai pas réécouté l'enregistrement audio entier. C'est pour cela

 25   que je ne suis pas tout à fait certain pour ce qui est de la teneur de cet

 26   enregistrement audio, parce que je ne l'ai pas réécouté jusqu'à la fin.

 27   Q.  Je comprends. Pour ce qui est de ces rencontres avec les représentants

 28   du bureau du Procureur, ce n'était pas la première fois pourtant que vous

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  1   avez rencontré les membres du bureau du Procureur concernant les affaires

  2   qui se déroulent devant ce Tribunal, n'est-ce pas ?

  3   R.  Non, ce n'était pas la première fois. J'ai eu des conversations

  4   téléphoniques avec eux. Egalement, j'ai eu des rendez-vous personnels. Je

  5   crois que vous avez fait référence à M. Geoffrey Nice lors du procès

  6   Slobodan Milosevic.

  7   Q.  Pendant vos contacts avec Sir Geoffrey Nice, pouvez-vous nous dire en

  8   quelle année c'était ? 

  9   R.  En septembre 2004. En fait, je ne l'ai pas rencontré. Je lui ai parlé

 10   au téléphone à au moins deux reprises assez longtemps vers la fin de 2002

 11   et en 2003, au début de l'année 2003.

 12   Q.  Ces rendez-vous que vous avez eus en tête-à-tête avec M. Nice, M.

 13   Randall a été présent à ces réunions, n'est-ce pas ?

 14   R.  Lors de ces réunions en tête-à-tête, oui, M. Randall était là. J'avais

 15   de nombreuses rencontres avec les représentants du Tribunal, en particulier

 16   avec les représentants du bureau du Président [comme interprété] quand

 17   j'étais diplomate.

 18   Q.  Je comprends cela. Nous allons parler de cela un peu plus tard.

 19   Maintenant je vous pose des questions concernant les rencontres avec les

 20   représentants du bureau du Procureur concernant vos témoignages. Si j'ai

 21   bien compris, vous avez eu deux rencontres avec les représentants du bureau

 22   du Procureur, la première rencontre concernait l'affaire Milosevic et il a

 23   été question de la possibilité que vous seriez un témoin dans cette

 24   affaire.

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Et l'autre affaire, c'était l'affaire Perisic.

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Pour ce qui est de l'affaire Milosevic, ces entretiens qu'ils ont menés

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  1   avec vous ont été tous enregistrés, n'est-ce pas ?

  2   R.  Je pense que c'était le cas. Mais je crois que puisque c'était il y a

  3   longtemps -- mais vous pouvez continuer.

  4   Q.  Cela m'éclaire. Pour ce qui est de ces choses concrètes, là je pense à

  5   l'enregistrement audio de vos rencontres avec Sir Geoffrey Nice, avez-vous

  6   eu l'occasion de les réécouter ?

  7   R.  Je ne crois pas que j'ai eu l'occasion d'écouter des enregistrements

  8   audio et je ne crois pas que j'ai examiné les comptes rendus non plus.

  9   Q.  Je pense que vous avez déjà répondu à cette question, pour ce qui est

 10   de ce point, et le compte rendu et l'enregistrement, pour ce qui est de

 11   votre rencontre avec M. Harmon, vous n'avez pas eu l'occasion d'écouter

 12   l'enregistrement audio ni de lire le compte rendu de cet entretien, n'est-

 13   ce pas ?

 14   R.  Je suis à peu près sûr que je n'ai pas eu l'occasion d'écouter

 15   l'enregistrement audio et je n'ai pas eu l'occasion d'examiner tout le

 16   compte rendu de cela, mais j'ai eu l'occasion de lire certaines parties de

 17   ma déclaration.

 18   Q.  Pour ce qui est de la participation de M. Randall, à votre avis, par

 19   rapport à l'affaire Milosevic, vous avez échangé beaucoup de messages

 20   électroniques avec M. Randall concernant votre témoignage possible, n'est-

 21   ce pas ?

 22   R.  Je ne me souviens peut-être pas de ces messages électroniques, mais je

 23   pense que c'est vrai.

 24   Q.  Lorsque vous dites que vous ne vous souvenez pas de ces messages

 25   électroniques, vous voulez dire que vous ne pouvez pas vous souvenir de la

 26   teneur de ces messages aujourd'hui?

 27   R.  Ni de date particulière, mais nous avons en tout cas continué à

 28   discuter de mon rôle possible en tant que témoin dans cette affaire. A un

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  1   moment donné, j'ai été informé que je serais mis sur la liste des témoins

  2   pour ce qui est au moins de la réplique.

  3   Q.  Vous avez dit : Au moins pour ce qui est de la réplique.

  4   R.  Encore une fois, il faut que vous sachiez que j'ai été en détention

  5   provisoire pendant un an et demi, pendant que le bureau du Procureur

  6   présentait ses moyens de preuve. Sir Geoffrey Nice et Britten Randall,

  7   lorsqu'ils ont eu l'occasion de me parler, la présentation des moyens à

  8   charge de l'Accusation avait déjà fini. Donc la seule façon à laquelle

  9   j'aurais pu être convoqué en tant que témoin était pour ce qui est de la

 10   réplique.

 11   Q.  Pour ce qui est de votre détention provisoire pendant un an et demi,

 12   pouvez-vous nous dire pendant quelle période vous avez été détenu. Mais

 13   n'ajoutez rien de plus.

 14   R.  En mars, du 23 mars 2003 jusqu'au mois de juillet 2004, jusqu'au 27

 15   juillet 2004.

 16   Q.  Est-ce que vous vous rappelez avoir parlé avec M. Nice de la nature et

 17   de l'étendue de votre déposition, notamment concernant les questions que

 18   vous présenteriez lors du contre-interrogatoire ?

 19   R.  C'est une question assez large. Ce que je dirais simplement, c'est qu'à

 20   la lumière de notre discussion, il était clair qu'il y aurait un refus à un

 21   moment donné et que - mais là encore, je parle de septembre 2004, vers la

 22   fin. Je suis sûr que vous pouvez vérifier d'après la chronologie pour voir

 23   quand on a terminé l'interrogatoire principal. Je ne peux pas me rappeler,

 24   avec tous les obstacles qui ont été mis pour mon interrogatoire principal,

 25   quelles ont été les possibilités pour la réfutation.

 26   Q.  Est-ce que dans votre conversation avec M. Nice, vous avez discuté plus

 27   particulièrement des éléments de preuve qui vous seraient demandés avant de

 28   donner à M. Nice des renseignements concernant les faits ?

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  1   R.  Non, je pense que vous suggérez que M. Nice m'aurait approché avec une

  2   demande pour savoir sur quel type de déposition je pourrais peut-être

  3   fournir des éléments. Je pense qu'il s'est agi d'une discussion très large

  4   sur des questions qui, je pense, certainement, auraient pu être vues sous

  5   un jour très différent du point de vue de mon rôle en tant que témoin --

  6   Q.  Bien.

  7   R.  -- de sorte que la discussion a eu lieu pendant trois longs jours.

  8   Q.  Je comprends cela. Mais en ce qui concerne votre dernière réponse, je

  9   vais vous lire le compte rendu qui a été fourni à la Défense et voir si

 10   vous pouvez confirmer ou infirmer la déclaration suivante qui avait été

 11   faite par M. Nice parlant à vous-même concernant la question dont nous

 12   allons parler maintenant.

 13   M. GUY-SMITH : [interprétation] C'est à la page 2, s'il vous plaît.

 14   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 15   Mme BOLTON : [interprétation] Excusez-moi, mais pourrait-on s'il vous

 16   plaît, nous donner un petit peu le temps. Je voudrais prier mon confrère de

 17   nous aider à retrouver le passage de ce compte rendu avec une référence de

 18   page.

 19   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui.

 20   Mme BOLTON : [interprétation] Est-ce que mon confrère pourrait m'aider en

 21   me donnant un numéro d'intercalaire dans le dossier tel qu'il a été fourni.

 22   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, c'est exact. Ce serait l'intercalaire

 23   65. Non. 1D03-1310. Excusez-moi, 13235 [comme interprété]. Je recommence,

 24   1D03-1325.

 25   Mme BOLTON : [interprétation] Merci.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 27   M. GUY-SMITH : [interprétation] Nous allons maintenant voir l'une de ces

 28   situations où je pense que vous allez voir ça à l'écran. Dès que vous

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  1   pourrez lire ce passage, et également la Chambre a la possibilité de le

  2   faire.

  3   Q.  Je pense que vous l'avez sous forme papier avec vous, l'intercalaire 65

  4   ?

  5   R.  C'est probable. De toute façon vous allez me dire quel est l'endroit

  6   précis.

  7   Q.  Certainement. A la page 2 sur 62 pages, je commence à la ligne 30.

  8   "Donc nous avons ces deux motifs particuliers qui sont là," puis il y a un

  9   mot qui n'est pas très lisible, ensuite "le décès d'Izetbegovic" --

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi, Maître Guy-Smith, mais je

 11   croyais que vous aviez dit qu'on pourrait le mettre au rétroprojecteur.

 12   M. GUY-SMITH : [interprétation] Mais je croyais que c'était le cas.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je regarde le rétroprojecteur et je

 14   vois les parties à New York.

 15   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bien, alors il y a un bouton qui est --

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bon.

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je me trompe tout le temps avec les

 18   boutons.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avec le rétroprojecteur, il y a ce

 20   petit-là qui est là.

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation] Le prétoire électronique --

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien, vous pouvez y aller.

 23   M. GUY-SMITH : [interprétation] Merci.

 24   Q.  Ensuite :

 25   "Le décès d'Izetbegovic qui a eu un effet très net sur l'évolution

 26   générale de ce que le TPIY était en train de faire et personne d'autre n'a

 27   été vu ou considéré comme étant un candidat. Il s'agit probablement d'une

 28   situation dans laquelle une partie de l'affaire était considérée comme tout

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  1   à fait satisfaisante, mais une autre voie ou une autre raison pour laquelle

  2   certainement" -- je n'ai pas fait cela comme il convenait.

  3   "Nous avons certainement un cas qui convient pour voir au-delà des

  4   thèses de l'Accusation. Cela ne veut pas dire qu'il n'y ait pas eu un

  5   nombre important de questions pour lesquelles nous souhaiterions avoir des

  6   réponses, et ça ne veut certainement pas dire que nous aurons la meilleure

  7   déposition possible, qu'on puisse concevoir à l'évidence étant donné la

  8   situation particulière, un procès particulier pour lequel nous exerçons des

  9   poursuites indifférentes des autres".

 10   Je souhaiterais qu'on se concentre sur la partie suivante :

 11   "Notre intérêt pour l'essentiel concerne les éléments de preuve tels qu'ils

 12   existent pour le moment. En ce qui concerne cet accusé, pour établir un

 13   lien entre les crimes qui ont, sans aucun doute, ont été commis en Bosnie

 14   contre des Musulmans de Bosnie. Là encore, faisant partie de ceci, notre

 15   intérêt essentiel pour l'épreuve, c'est que nous puissions montrer qu'il y

 16   avait une participation active de la VJ aux événements qui sont devenus les

 17   événements criminels contre les Musulmans de Bosnie."

 18   R.  Oui, Maître Guy-Smith, quelle était la question ?

 19   Q.  Oui, je voulais simplement m'assurer que l'interprète avait la

 20   possibilité de finir son interprétation.

 21   En ce qui concerne la discussion que vous avez eue avec M. Nice, ne

 22   serait-il pas juste de dire qu'il y a eu une discussion très centrée, en

 23   comparaison des discussions générales que vous avez suggérées il y a un

 24   moment, selon laquelle M. Nice en fait était en train d'essayer d'obtenir

 25   de vous des informations très précises, n'est-ce pas ?

 26   R.  C'est très possible à la lecture de ce qu'on vient de voir.

 27   Franchement, je suis d'avis qu'il y avait cette vaste discussion qui avait

 28   trait à de nombreux faits. Je pense que si vous lisez ces nombreux

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  1   dossiers, je pense que vous verrez qu'un grand nombre de questions ont été

  2   discutées même au-delà de la question de la culpabilité même de M.

  3   Milosevic.

  4   Q.  Effectivement, nous allons voir.

  5   Pour le moment, je me centre sur cette question particulière dans

  6   laquelle M. Nice a discuté en produisant un type d'élément de preuve très

  7   particulier, et la question de savoir était quel type d'élément de preuve

  8   particulier nous pourrions obtenir par rapport et au-delà de ce que nous

  9   avons qui démontre la participation active de la VJ dans des événements qui

 10   sont devenus des événements criminels contre les Musulmans de Bosnie.

 11   Vous seriez d'accord avec moi que c'est un sujet très précis, n'est-

 12   ce pas ?

 13   R.  Mais vous êtes en train de suggérer que je suis en quelque sorte

 14   l'initiateur de cet effort ? A l'évidence, je peux être un témoin, ou même

 15   une partie intéressée, mais je ne suis pas sûr que je serais --

 16   Q.  Non, il n'a pas été dit quoi que ce soit dans le contraire. Je ne suis

 17   pas en train de suggérer que vous étiez également l'initiateur.

 18   R.  Bien.

 19   Q.  Je suis en train de suggérer que M. Nice l'était.

 20   R.  Ceci est possible, mais pas certain. Je pense que vous demandez que

 21   l'on qualifie sa déclaration ici d'une façon que je n'ai peut-être pas vue

 22   sous le même jour peut-être, bien qu'à l'évidence, ça l'aurait été - je ne

 23   pense pas que le mot soit nécessairement sympathique, mais il s'agirait de

 24   quelque chose d'évoqué par quelqu'un qui fait attention aux différents

 25   types d'élément de preuve ou d'éléments qu'il pourrait fournir pour arriver

 26   aux résultats qui sont présentés ici.

 27   Q.  Je m'en rends compte, mais tel n'est pas l'objectif de ma question pour

 28   le moment. Le but de ma question, l'essentiel de ma question, c'est

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  1   vraiment --

  2   R.  D'accord.

  3   Q.  -- beaucoup plus circonscrit. Si nous pouvions en passant à la page

  4   suivante, où se poursuit une discussion, enfin, il s'agit d'une déclaration

  5   de M. Nice concernant ce qui intéresse l'Accusation lorsqu'elle observe

  6   notre participation en l'espèce.

  7   Je vous prie de regarder maintenant la page 4 ligne 11 :

  8   "Gardant à l'esprit que ou compte tenu de" --

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi, mais on ne l'a pas à

 10   l'écran.

 11   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui.

 12   Q.  Si on prend la ligne 11 jusqu'à la ligne 33, il y a une discussion,

 13   n'est-ce pas, qui concerne une série de questions conceptuelles telles

 14   qu'elles ont trait au fait de l'affaire Milosevic et que M. Nice vous

 15   communique pour que vous puissiez faire vos observations.

 16   R.  La façon dont je comprends ce paragraphe à le lire et à le relire, je

 17   ne me rappelle pas d'emblée la discussion, ça fait un certain temps que ça

 18   a eu lieu. Ceci semble quand même correspondre avec l'entretien que nous

 19   avons eu. Comme vous pouvez le voir aussi, d'après ce que je peux dire, ou

 20   bien je réponds avec une phrase ou des réponses d'une seule phrase, je

 21   pense là encore qu'il y a une référence qui est évidemment au massacre de

 22   Srebrenica, dans la mesure où elle établit un lien avec les auteurs qui ont

 23   perpétré le massacre.

 24   Q.  Vous ne comprenez pas ce que je demande.

 25   R.  [aucune interprétation]

 26   Q.  La encore vous présentez des éléments de preuve en vous disant ce qui

 27   l'intéressait, et vous avez fait des réponses monosyllabiques à la page 4,

 28   ligne 1, n'est-ce pas ?

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  1   Maintenant, le "droit" en ce qui concerne ce que M. Nice voulait

  2   obtenir de vous. Oui, mais vous êtes en train de reconnaître que la

  3   déclaration qui a été faite par M. Nice en ce qui concerne les

  4   renseignements qu'il vous demande --

  5   R.  Si vous me demandez si j'ai bien compris ce qu'il était en train de me

  6   dire, la réponse est oui. Mais si vous me demandez si je suis d'accord avec

  7   tel ou tel projet particulier ou agenda, je ne peux pas dire ce que vous

  8   pensez que pourrait être l'agenda en question.

  9   Q.  Vous êtes en train de faire une hypothèse, mon ami --

 10   Q.  Bien.

 11   Q.  -- c'est malheureux. Si vous choisissez d'essayer de deviner ce qui est

 12   derrière la question, à ce moment-là, vous allez vous trouver dans une

 13   sorte de problème. Je vous posais une question très simple en ce qui

 14   concernait les renseignements contenus sur cette page.

 15   R.  Si vous êtes en train de me demander si Sir Geoffrey et si j'étais

 16   informé de ces choses, enfin, la réponse est oui, bien sûr.

 17   Q.  Je vous remercie.

 18   Vous avez également discuté avec M. Nice des différents témoins que

 19   la Défense pourrait peut-être faire déposer; n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui, nous en avons discuté.

 21   Q.  Bien. En fait, le moment est venu où --

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame Bolton.

 23   Mme BOLTON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. J'essaie

 24   de ne pas élever d'objection de façon inutile, mais j'écoute cette suite de

 25   questions, et je pense que mon confrère allait dans une certaine direction.

 26   Je ne suis pas du tout au clair de la pertinence de l'entrevue 2004 par M.

 27   Nice ainsi que par rapport aux questions qui se posent à votre Chambre.

 28   Peut-être qu'il y a quelque chose que je ne comprends pas, mais peut-être

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  1   que mon confrère pourrait s'expliquer.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Guy-Smith.

  3   M. GUY-SMITH : [interprétation]  La question qui a été discutée par M. Nice

  4   avec M. Sacirbey en 2004, dans une vaste mesure, couvrait des questions qui

  5   sont examinées dans le présent procès. Je pense, par exemple, que la

  6   discussion que nous avons revue en ce qui concerne l'intention de M. Nice

  7   d'obtenir des renseignements particuliers concernant la participation de la

  8   VJ, c'est, pour dire les choses de façon très directe, essentielle pour le

  9   présent procès, si ce n'est la question essentielle du présent procès.

 10   Mme BOLTON : [interprétation] Excusez-moi, mais peut-être que je n'étais

 11   pas suffisamment claire. Je crois que je ne comprends pas quelle est la

 12   pertinence de ces parties de compte rendu que mon confrère a présentées au

 13   témoin. Vous savez, je comprends quelle est la pertinence des questions de

 14   fond qu'il peut avoir discutées avec M. Nice, et s'il y a des déclarations

 15   qui sont incompatibles sur tel et tel aspect, à ce moment-là, certainement

 16   ça sera pertinent. Mais à moins qu'il soit en train en quelque sorte de

 17   découvrir qu'il y a eu quelque méfait de la part de M. Nice, alors à ce

 18   moment-là cette séquence de questions ne me semble avoir aucune pertinence,

 19   pour autant que je puisse voir.

 20   M. GUY-SMITH : [interprétation] Si vous permettez, brièvement, je pense que

 21   Mme Bolton s'est quelque peu précipitée pour ce qui est de ses

 22   préoccupations. C'est la raison pour laquelle la Défense pourrait attribuer

 23   une conduite répréhensible de la part de l'Accusation à un moment

 24   quelconque, pour ce qui est du bureau du Procureur en général ou M. Nice en

 25   particulier. Si c'est une question qui devra déjà être examinée par la

 26   suite. Excusez-moi.

 27   Mme BOLTON : [interprétation] Excusez-moi, je croyais que vous aviez fini.

 28   M. GUY-SMITH : [interprétation] Pour le moment, tout ce que l'on est en

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  1   train de faire, c'est qu'il y a des faits qui sont en train d'être décrits

  2   de façon développée en ce qui concerne le processus d'audition qui a eu

  3   lieu entre M. Sacirbey et M. Nice dans la mesure où cela a trait à un plan

  4   général et à des renseignements que le bureau du Procureur avait décidé

  5   d'obtenir de M. Sacirbey.

  6   Maintenant, je souhaite, d'une façon générale, je présente des

  7   excuses à M. Sacirbey, parce que ses préoccupations sont différentes des

  8   préoccupations qui ont à voir avec ce procès. Si une partie de

  9   l'argumentation va aller encore de l'avant, je voudrais demander que ce

 10   soit fait en dehors de la présence de M. Sacirbey.

 11   Mme BOLTON : [interprétation] Ma préoccupation à moi, Monsieur le

 12   Président, est que --

 13   M. GUY-SMITH : [interprétation] Excusez-moi --

 14   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je demande que l'on puisse continuer de

 15   discuter de la question en dehors de la présence du témoin.

 16   Mme BOLTON : [interprétation] Excusez-moi.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame la Greffière, là-bas à New

 18   York, est-ce que vous avez la possibilité de faire qu'on n'entende plus ?

 19   Mme LA GREFFIÈRE [à New York] : [interprétation] Oui, Monsieur le

 20   Président.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Merci.

 22   Mme LA GREFFIÈRE [à New York] : [interprétation] C'est ce que je vais

 23   faire, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien. Dites-nous quand vous l'aurez

 25   fait.

 26   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vais maintenant essayer --

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je voudrais me renseigner. Est-ce que

 28   vous réduisez le volume ou est-ce que vous faites qu'on entend rien ?

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  1   Mme LA GREFFIÈRE [à New York] : [interprétation] Maintenant, on n'entend

  2   rien.

  3   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je voudrais expérimenter, comme on dit.

  4   Est-ce que vous pouvez m'entendre maintenant ?

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allez-y, Madame Bolton.

  6   Mme BOLTON : [interprétation] En fait, j'ai demandé à M. Harmon de sortir

  7   de la salle d'audience pour rechercher un point de jurisprudence que nous

  8   avions regardé plus tôt et qui avait à voir dans quelle mesure la Défense

  9   peut demander qu'on examine des domaines relatifs à la préparation des

 10   témoins et la possibilité que de la part de l'Accusation il y ait un

 11   comportement répréhensible sans que l'on présente une requête officielle.

 12   Je ne veux pas mal citer la jurisprudence, parce qu'il s'agit de quelque

 13   chose que j'ai relu un peu plus tôt aujourd'hui. Je voudrais demander un

 14   bref instant --

 15   M. GUY-SMITH : [interprétation] Est-ce que nous sommes en train de discuter

 16   de la question de la jurisprudence en général ou ici au Tribunal ?

 17   Mme BOLTON : [interprétation] Au Tribunal.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bon, écoutez, nous allons attendre un

 19   moment.

 20   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 21   [La Chambre de première instance se concerte] 

 22   Mme BOLTON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président,  Monsieur le

 23   Juge.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Madame Bolton.

 25   Mme BOLTON : [interprétation] Monsieur le Président, j'examine maintenant

 26   ce qui est écrit par M. Tarculovski. C'est un livre sur la jurisprudence.

 27   Il cite, en l'occurrence, une décision du Tribunal pénal international pour

 28   le Rwanda, où on lit ceci :

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  1   "Il existe une présomption que les conseils remplissent leurs fonctions

  2   conformément aux principes éthiques qui régissent --

  3   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent que l'on puisse lire un peu plus

  4   lentement.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Veuillez avoir la bonté de lire plus

  6   lentement.

  7   Mme BOLTON : [interprétation] Mais c'était --

  8   M. GUY-SMITH : [interprétation] Et si nous pouvions avoir une date exacte,

  9   ce serait également apprécié.

 10   Mme BOLTON : [interprétation] "Ceci comprend le comportement des conseils

 11   au cours des réunions préparatoires avec les témoins. A moins qu'une partie

 12   ne fasse une allégation spécifique de conduite répréhensible de la part

 13   d'un conseil ou de quelqu'un de cette allégation doit être établie par des

 14   questions qui tendent à fournir des détails de la communication entre un

 15   avocat et un témoin au cours des préparatifs préalables à la déposition, si

 16   cela est autorisé par la Chambre, de façon à ce que cette présomption soit

 17   réfutée ou non.

 18   Par conséquent, des questions qui ont trait à des réunions préalables aux

 19   dépositions entre l'Accusation et des témoins, alors qu'elles sont permises

 20   doivent en l'absence de toute allégation étayée de conduite répréhensible,

 21   être limitées au nombre de ces réunions avec les dates de ces réunions et

 22   leur durée. Et telle est l'affaire, par exemple, le Procureur contre

 23   Bisamungu Augustu [comme interprété]. Il y a une requête qui a été

 24   présentée en vertu de l'article 73 qui évoque une audience du 3 mars 2005

 25  et qui donne l'impression que la décision était datée du 1er avril 2005." Et

 26   le numéro de l'affaire était

 27   ICTR-0056-T. Je pense que c'est la citation pour mon confrère.

 28   Tout simplement, ma préoccupation c'est que nous entrons dans le fond de ce

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  1   qui s'est dit dans ces réunions préparatoires qui, vraiment, sont

  2   pertinentes si mon confrère est en train de faire des réponses étayées

  3   selon lesquelles M. Nice aurait fait quelque chose d'incorrect en appelant

  4   et en centrant l'attention de M. Sacirbey sur certains aspects. Mais avant

  5   que l'on ne puisse faire cela, il faut qu'il ait officiellement et

  6   formellement fait cette allégation.

  7   Et, Monsieur le Président, vous aurez à ce moment-là à vous prononcer pour

  8   savoir si elle est fondée ou non. Autrement, d'après cette décision, il y a

  9   tout au moins une jurisprudence assez convaincante pour que vous puissiez

 10   décider qu'il ne s'agit pas d'un domaine qui convient à l'interrogatoire.

 11   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je pense qu'il y a un certain nombre de

 12   choses que j'ai remarquées comme méritant d'être relevées.

 13   Pour commencer --

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [Hors micro]

 15   M. GUY-SMITH : [interprétation] Pour commencer, il y a ce que M. MacFarlane

 16   a dit il y a de nombreuses années, à savoir que l'Accusation aurait à

 17   procéder à des recherches sur la question de son propre comportement avant

 18   que la question ne soit évoquée. Ayant dit cela, je pense, et j'ai

 19   seulement lu en diagonale la décision très brièvement, je n'ai pas pu lire

 20   les mémoires qui sont à l'appui des positions respectives qui ont été

 21   prises par les parties, qu'il est probablement utile et il mérite d'être

 22   noté que l'opinion selon laquelle, pour les motifs qui précèdent, la

 23   Chambre fait droit à la requête dans les termes qui suivent : les

 24   défendeurs pourront contre-interroger un témoin au sujet des réunions

 25   préalables aux dépositions avec l'Accusation sous réserve de telle ou telle

 26   limitation qui sont ensuite indiquées.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et quelles sont les limitations

 28   d'après ce que vous avez compris, Maître Guy-Smith ?

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  1   M. GUY-SMITH : [interprétation] D'après ceci, il s'agit du nombre de

  2   réunions préparatoires, des dates de ces réunions. Et la difficulté pour ce

  3   qui est de cette affaire, c'est que pour commencer, il s'agit d'une

  4   négation claire, patente et absolue du droit au contre-interrogatoire en

  5   vertu de l'article 21, ce qui a des incidences directes sur le droit pour

  6   l'accusé d'examiner entièrement les questions dont la Chambre est saisie

  7   dans le processus d'établissement des faits.

  8   Deuxièmement, je pense qu'il y a peut-être une certaine confusion de la

  9   part de l'Accusation ici, et je dis cela pour le moment avec prudence,

 10   parce que je n'ai pas lu les mémoires qui sont à l'appui de ceci et on

 11   risque de créer une confusion si on entre dans le domaine des travaux des

 12   avocats et de la question de la confidentialité des documents, à savoir

 13   s'il s'agit des faits et des faits seulement.

 14   Donc il y a cette question de l'influence qui pourrait éventuellement être

 15   exercée sur un témoin particulier. Suggérer que la partie qui pose des

 16   questions dans un tel domaine doit aller jusqu'à accuser l'Accusation d'un

 17   comportement répréhensible ne tient pas compte de la situation.

 18   Et la raison pour cela est tout simplement la suivante : si, après

 19   avoir entendu ce qui s'est passé au cours d'une discussion de M. Nice et M.

 20   Sacirbey ou entre l'Accusation et n'importe quel témoin en ce qui concerne

 21   les renseignements qui ont été discutés, la théorie concernant les thèses

 22   qui sont présentées, la Chambre est d'avis que ces conversations ont une

 23   incidence sur le processus d'établissement de la vérité. A ce moment-là, il

 24   s'agit de quelque chose que la Chambre peut apprécier dans son évaluation

 25   des éléments de preuve telle qu'elle ressort de la déposition faite par ce

 26   témoin. Ceci n'a rien à voir en aucun sens avec un comportement

 27   répréhensible quel qu'il soit. Ceci n'a pas besoin d'être en aucune manière

 28   quelque chose qui aurait été fait à mauvais escient. Mais effectivement, si

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  1   la façon de préparer un témoin de la part de l'Accusation a une incidence

  2   sur l'intégrité structurelle et l'indépendance de cette déposition, il

  3   s'agit là de quelque chose dont la Chambre devrait tenir compte et dont

  4   elle devrait pouvoir tenir compte. Autrement, il n'y a pratiquement aucune

  5   raison pour procéder à un contre-interrogatoire en ce qui concerne

  6   certaines questions. Il n'y en a absolument aucune, parce qu'on n'a

  7   absolument aucune idée de savoir si oui ou non le témoin a été du tout

  8   influencé ou si l'intention du témoin ou sa façon de penser a fait l'objet,

  9   dans les questions qui ont été présentées, d'une influence.

 10   Je dois vous dire quelque chose, Monsieur le Président. Sur tous les

 11   enregistrements sonores que j'ai reçus sur tous les procès pour lesquels

 12   j'ai eu un verbatim, dans la mesure où nous avons reçu des comptes rendus

 13   mot à mot pour deux affaires que j'ai dû plaider avant celle-ci, je n'ai

 14   jamais vu un substitut à un Procureur engagé dans une discussion

 15   conceptuelle avec un témoin sur ce qu'il serait préférable pour une

 16   déposition, ce que l'on pourrait attendre d'une déposition, ce que ferait

 17   le défendeur et comment on pourrait au mieux contrer une telle déposition.

 18   Ce que j'ai vu de façon ouverte, c'est un Procureur posant directement des

 19   questions concernant les faits de l'espèce, à savoir qui, quoi, où, quand,

 20   comment, mais non pas de suggérer certains domaines où il faudrait

 21   souligner certains aspects sur ce qu'on essayait de faire ou d'obtenir ou

 22   certaines théories qui devraient être prouvées.

 23   Alors si c'est ce qui est en train d'être fait maintenant, ceci est

 24   honteux. Si c'est cela qui se passe, alors honte à eux. Je ne m'attendrais

 25   pas à ce que quelque chose de ce genre puisse avoir lieu. Toutefois, j'ai

 26   constaté dans la déposition qui a été faite, qui m'a été communiquée par

 27   l'Accusation, qu'il était très clair, en ce qui concerne l'entretien entre

 28   M. Nice et M. Sacirbey, qu'il y avait une intension très précise, très

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  1   spécifique en ce qui concernait le type de déposition que M. Nice essayait

  2   d'obtenir, que ceci pouvait parfaitement influencer la déposition et que

  3   c'était quelque chose que vous deviez pouvoir prendre en considération

  4   indépendamment ou non du point de savoir si ça devait être considéré comme

  5   un comportement répréhensible de l'Accusation ou non.

  6   Du point de vue humain, du point de vue du dialogue, dans l'état

  7   d'une conversation entre personnes, c'est un élément essentiel, en

  8   particulier lorsqu'on traite d'éléments de preuve indirects, de pouvoir

  9   apprécier les circonstances pour pouvoir se déterminer en ce qui concerne

 10   la crédibilité. Et c'est essentiel que vous ayez la possibilité de

 11   comprendre ce qui s'est passé entre les deux parties. Voilà notre argument

 12   respectueusement.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Deux questions ou

 14   deux problèmes.

 15   Pour commencer, est-ce que la Chambre doit déduire de ce que vous

 16   venez de dire qu'effectivement vous contestez la façon dont M. Nice aurait

 17   interrogé le témoin M. Sacirbey, le Procureur étant M. Nice ?

 18   M. GUY-SMITH : [interprétation] Mais j'hésite quant à savoir si je réponds

 19   à cette question immédiatement sans auparavant en parler à mes confrères.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Lorsque vous dites, honte sur eux --

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation] Sur cette question, oui. Effectivement, là

 22   je maintiens ce que j'ai dit tout à l'heure. Si c'est précisément ce qu'ils

 23   ont fait, si les faits le montrent, s'ils ont voulu influencé la déposition

 24   d'un témoin et dire au témoin ce qu'il devait dire dans le cadre de sa

 25   déposition pour leur accusation, à ce moment-là, oui, honte sur eux.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que c'est ce que vous êtes en

 27   train de dire ? Je ne suis pas en train de vous demander si c'est ce qu'ils

 28   ont fait. Dans les deux affaires qui ont été les vôtres dans le passé, il y

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  1   a des questions qui ont été posées de façon ouverte, où, quand, comment,

  2   pourquoi, et cetera. Donc ma question est de savoir si vous êtes en train

  3   de dire que ce débat sur des concepts entre MM. Nice et Sacirbey était

  4   impropre de la part de M. Nice. Est-ce que c'est ça que vous êtes en train

  5   de nous dire ? Je veux simplement avoir une réponse claire à cette

  6   question. Est-ce que c'était malvenu ?

  7   M. GUY-SMITH : [interprétation] Etant donné que vous me demandez de

  8   répondre par oui ou par non, je vais devoir vous répondre par oui ou par

  9   non. Ma réponse serait donc oui, mais avec une explication.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La question suivante que vous avez

 11   soulevée à l'instant pour ce qui est de l'article 21 du Statut, la

 12   jurisprudence à laquelle faisait référence Mme Bolton est une interdiction

 13   totale pour la Défense de revenir sur le témoignage et sa crédibilité. Je

 14   n'ai pas lu cette décision et je m'en tiens à ce qui vient de nous être

 15   dit. Mais si ce qui vient de nous être dit est correct - et il ne fait

 16   aucun doute que c'est le cas - à ce moment-là, ce n'est pas une

 17   interdiction totale. Parce que comme Mme Bolton vient de le dire, dans ce

 18   cas-là, il faut que vous fassiez une demande étayée pour contre-interroger

 19   le témoin en disant : Je vais faire cette demande, donc j'aimerais me

 20   lancer dans ce domaine. Je ne pense pas que vous ayez tout à fait raison

 21   lorsque vous dites que c'est une interdiction totale.

 22   M. GUY-SMITH : [interprétation] Les limites au contre-interrogatoire sont

 23   toujours dangereuses dès lors qu'il s'agit de rendre justice. Il y a

 24   toujours des limites et je suis tout à fait disposé à l'accepter. Cela

 25   étant dit, ces limites, lorsqu'elles ont trait à des questions qui

 26   concernent directement une évaluation visant à trouver les faits, la

 27   véracité, la précision, la crédibilité des informations qui sont entendues

 28   --

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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pardonnez-moi, je dois vous

  2   interrompre, parce que je pense que vous ne disposez pas d'une interdiction

  3   totale. Vous avez une façon de la contourner en suivant la jurisprudence.

  4   M. GUY-SMITH : [interprétation] Concernant la jurisprudence, ce qui est

  5   l'une des raisons pour lesquelles je disais au départ que je ne connaissais

  6   pas ces motions qui avaient été déposées, je pense qu'il est important de

  7   noter que concernant la discussion que l'on trouve au paragraphe numéro 2,

  8   dans les soumissions qui ont été faites par les parties dans cette

  9   décision, on dit :

 10   "La Défense de Bizimungu  se rappelle que lors de l'audition du 3

 11   mars 2005, l'Accusation a fait objection à une question soulevée par la

 12   Défense, parce que l'information qu'elle cherchait à éclaircir était

 13   privilégiée. La Défense a précisé qu'il n'y avait pas de fondement de faits

 14   ou de droits et pour dire qu'un entretien entre l'Accusation et la personne

 15   en question était confidentiel."

 16   Là nous sommes dans une situation tout à fait différente, parce que

 17   dans le cas qui nous intéresse, l'information qui m'intéresse est une

 18   information qui m'a été divulguée. Donc tout privilège qui aurait pu

 19   exister doit être pondéré par rapport à cette analyse, et je pense que la

 20   situation est tout à fait différente entre ce qu'eux présentent et ce que

 21   j'ai compris en lisant très brièvement cette décision. L'Accusation est en

 22   train de dire : Attendez, on a un privilège en la matière, un privilège sur

 23   le produit de travail, qui est un privilège tout à fait différent par

 24   rapport aux discussions dans lesquelles l'Accusation a donné des

 25   informations à la Défense.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je dois dire que je n'ai pas lu cette

 27   décision et la partie qui a été citée ne fait pas allusion à une

 28   information privilégiée. Il s'agit plutôt d'entretiens de l'Accusation avec

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  1   des témoins. Alors vous pouvez peut-être lire les différentes requêtes, les

  2   différentes réponses, et cetera. Mais à mon sens, concernant la

  3   jurisprudence, ce qui nous intéresse, c'est la décision telle qu'elle a été

  4   rendue. Ici cette décision précise que vous ne pouvez pas établir comment

  5   l'information a été obtenue par l'Accusation auprès d'un témoin. Ça, c'est

  6   la jurisprudence quelle que soit la façon dont cela ce soit fait, et je ne

  7   connais pas tous les faits, mais en tout cas, c'est comme ça que ça se

  8   passe.

  9   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je suis désolé, Monsieur le Président, je

 10   vous implore, mais je lis cette décision, je ne lis pas quelque chose qui

 11   serait tombé du ciel. Je suis en train de lire une décision et que je vous

 12   ai citée, et je vous implore, avant que vous ne tranchiez, je vous demande

 13   instamment de bien vouloir lire cette décision pour que votre analyse et

 14   votre jugement reposent sur une bonne compréhension de ce qui est dit par

 15   rapport à ce que j'appellerais une espèce de sélection du côté de

 16   l'Accusation, pas de vous évidemment, mais concernant la façon dont les

 17   choses se sont déroulées. Parce que les choses se sont déroulées dans un

 18   contexte tout à fait spécifique. Je pense que l'heure est venue de faire

 19   une pause.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, je sais que c'est l'heure de

 21   faire la pause, mais une dernière remarque toutefois. Pour ce qui est de

 22   cette sélection de la décision, et cetera, je vais relire cette décision,

 23   notamment ce que vous nous disiez concernant ces différentes dispositions.

 24   Je pense que le moment est venu de faire une pause. Nous allons reprendre

 25   un petit peu plus tard. Nous allons prendre le temps de lire cette décision

 26   pendant la pause. Je pense également qu'il serait bon que vous réactiviez

 27   les micros.

 28   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, j'aimerais que l'on revienne, que l'on

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  1   rétablisse le son.

  2   --- L'audience est suspendue à 17 heures 18.

  3   --- L'audience est reprise à 17 heures 53.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Les requêtes qui avaient été

  5   présentées devant la Chambre de première instance III étaient basées, dans

  6   une certaine mesure, sur la confidentialité du rapport entre client et

  7   conseil. Toutefois - et la Chambre a indiqué clairement que l'Accusation

  8   n'était pas du tout dans le coup sur cette question - toutefois, elle dit

  9   ensuite qu'il existe néanmoins un principe moral, éthique, qui régit les

 10   relations lorsqu'il y a audition entre un avocat et un témoin, et qu'il

 11   existe certaines présomptions concernant l'honnêteté, et que si l'on veut

 12   passer cette frontière ou dire que cette frontière a été traversée, à ce

 13   moment-là, une requête doit être présentée. Ceci me semble en fait tenir

 14   parfaitement la route avec ce que nous sommes en train d'examiner ici, et

 15   non pas avec l'exemple qui a été donné dans l'autre affaire. La Chambre va,

 16   par conséquent, décider qu'elle n'interdit pas à la Défense de suivre cette

 17   série de questions, à la condition que la Défense dépose une requête. Si

 18   elle ne le fait pas, à ce moment-là -- je vois que vous voulez dire quelque

 19   chose, Maître Guy-Smith.

 20   M. GUY-SMITH : [interprétation] Effectivement. Je comprends que vous êtes

 21   en train de décider quelque chose, Monsieur le Président, mais il s'agit là

 22   d'une requête que je peux présenter oralement ou est-ce que vous voulez une

 23   requête qui soit présentée par écrit ? De quelle manière souhaitez-vous que

 24   je la présente, cette requête ? Ce que j'aimerais faire pour le moment, en

 25   ce qui concerne cet aspect, c'est que si la Chambre souhaite à ce stade

 26   qu'une telle demande soit faite, je souhaiterais pouvoir présenter certains

 27   éléments de preuve à la Chambre, ensuite faire une requête verbale en ce

 28   qui concerne ce point en particulier.

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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Tel que je comprends cette décision,

  2   elle nécessite la présentation d'une requête qui est fondée en substance.

  3   Je continue à entendre comme une voix, je ne sais pas si quelqu'un

  4   l'entend. Il semble que de toute façon il faudrait qu'il s'agisse d'une

  5   requête écrite.

  6   M. GUY-SMITH : [interprétation] Avec la Chambre, ce que je souhaiterais,

  7   c'est pouvoir faire entendre un bref enregistrement d'une conversation

  8   entre M. Nice et le témoin, et après cela, je pense que ceci expliquerait

  9   bien à la Chambre quelle est ma façon de penser. Je n'ai pas besoin

 10   nécessairement de le faire devant le témoin, parce que je ne veux pas

 11   l'influencer d'aucune manière quelle qu'elle soit, mais je pense qu'après

 12   avoir entendu cet enregistrement, les choses s'expliqueront d'elles-mêmes.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi. Nous ne sommes plus en

 14   liaison avec New York. Est-ce que j'ai dit --

 15   [La Chambre de première instance se concerte]

 16   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent] 

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] On essaie encore de rétablir la

 18   communication. Je ne sais pas --

 19   Mme BOLTON : [interprétation] Mais je croyais qu'ils avaient coupé le son

 20   là-bas.

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation] Non, ils n'avaient pas coupé le son.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous avons fait en sorte qu'ils

 23   puissent entendre à nouveau avant la suspension.

 24   Mme BOLTON : [interprétation] Bien, excusez-moi. Ç'a m'a échappé.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous entendre

 26   maintenant ? Est-ce que nous sommes en communication ?

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous vous entendons bien.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

Page 7601

  1   Maître Guy-Smith, je pense -– excusez-moi, il faut que je me répète, mon

  2   micro était éteint.

  3   Je disais que ce que vous dites revient à mettre la charrue devant les

  4   bœufs, parce que cela va à l'encontre de ce que je disais tout à l'heure, à

  5   savoir que vous le savez, la Chambre ne vous refuse pas le droit de

  6   procéder au contre-interrogatoire de cette manière. Mais sur la base de

  7   cette décision rendue par la Chambre de première instance III, il faut que

  8   vous déposiez une requête avant de pouvoir faire ce contre-interrogatoire.

  9   Maintenant, la décision exige que la requête soit fondée en substance, et

 10   je pense qu'il faut que vous mettiez sur le papier tout ce que vous

 11   souhaitez, et que vous nous la présentiez. Je ne sais pas si vous allez

 12   vouloir peut-être –- bon, on verra ce point plus tard au moment du contre-

 13   interrogatoire après le dépôt de la requête et on va poursuivre avec

 14   d'autres aspects, à moins que vous ne souhaitiez procéder dans l'autre

 15   sens. Je comprends que vous êtes au milieu de votre contre-interrogatoire,

 16   et qu'il faut du temps pour préparer et déposer une requête.

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vous remercie de ce que vous avez dit,

 18   Monsieur le Président. Et je voudrais vous expliquer à la fois le problème

 19   et les pensées que j'ai maintenant.

 20   A la fois le problème et les pensées, je vois maintenant que peut-être –-

 21   je ne sais pas si je vais réussir à vous convaincre de traiter le problème

 22   d'une autre manière. Je ne suis pas sûr d'y parvenir, mais je vais voir ce

 23   que je peux faire.

 24   Nous avons reçu de l'Accusation un certain nombre d'enregistrements

 25   sonores, sur bandes, qui portent comme désignation 1A, 1B, 2A, 2B, 3A, 3B,

 26   4A, 4B, et tous correspondent à des séances qui ont été enregistrées au

 27   magnétophone, d'entretiens entre M. Nice et M. Sacirbey. Nous avons reçu la

 28   transcription des bandes 1A et 1B, et nous avons été informés du fait que

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  1   le restant des bandes n'avaient pas été transcrites, parce qu'elles étaient

  2   inaudibles, et vraiment trop difficile à transcrire.

  3   En déployant des efforts très longs et très grands, nous avons été capables

  4   de comprendre certaines parties, mais certainement pas l'intégralité de ce

  5   qui était sur ces bandes.

  6   En ce qui concerne le problème qui se pose à nous maintenant, j'ai

  7   certaines notes qui ont trait à une partie très précise de l'un de ces

  8   enregistrements sur bande, et qui traite du problème précis que nous sommes

  9   en train de discuter. Et je pense que si vous entendiez cet enregistrement,

 10   si vous entendiez ce qu'il y a sur cette bande, ce serait peut-être

 11   suffisant pour vous convaincre que nous avons réfuté la présomption de

 12   régularités qui est prise en considération dans la décision dont nous avons

 13   parlé.

 14   Donc, ma proposition pour le moment serait, avec l'indulgence de la

 15   Chambre, serait –- bien sûr parce que je ne veux en aucune manière

 16   influencer le témoin, ma question finalement ne serait pas utile –-

 17   excusez-moi, je voulais dire non pas inutile, mais c'est la question de

 18   savoir si on entend ou si on entend pas, de couper le son, je veux dire de

 19   couper le son ou, au contraire, jouer la bande, on peut faire l'une ou

 20   l'autre de ces choses. Je peux ou bien vous lire ce que j'ai dans mes notes

 21   au brouillon, et puis ensuite vous pourriez écouter la conversation, ou

 22   bien vous pouvez écoute la conversation, et dans la mesure où les choses ne

 23   seraient pas bien claires en ce qui concerne cette conversation, peut-être

 24   à ce moment-là que cette partie de l'entretien que nous avons à un moment

 25   donné cristallisé, fixé pour nous, je pense qu'il est assez évident que

 26   lorsque vous écouterez pas seulement les paroles qui ont été prononcées,

 27   mais les phrases et l'intention qui concerne cette présomption de

 28   régularité, à notre humble avis, cela aura été réfuté.

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  1   De sorte que, ce serait ça ma proposition pour le moment. Je pense qu'il

  2   est important que vous entendiez, enfin, que vous l'écoutiez.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Certainement. Nous ne refusons pas de

  4   l'écouter, mais ceci doit faire partie de la requête, et ceci serait donc

  5   l'annexe à mettre, la prochaine annexe pour que les choses soient publiées

  6   correctement.

  7   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bien.

  8   Donc, je suis bien au clair de ce –- je voulais simplement m'assurer que

  9   j'avais bien compris ce que la Chambre va demander.

 10   Je ne veux pas trop m'avancer, je voulais simplement m'assurer que

 11   nous avons fait ce que -- à ce stade, je pense, enfin si j'ai bien compris,

 12   vous demandez une requête écrite, laquelle serait complétée par ce qui est

 13   dit oralement –- non, excusez-moi, une requête écrite qui serait complétée

 14   par l'enregistrement, la bande elle-même, de façon à ce que vous puissiez

 15   l'entendre. Mais je ne sais pas si c'est ça que vous demandez ou non. Je

 16   vais voir si –

 17   L'INTERPRÈTE : Les orateurs parlent en même temps; inaudible.

 18   M. GUY-SMITH : [interprétation] Très bien, très bien. Merci.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 20   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bien.

 21   Et donc, ceci étant entendu, il me semble que –-

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Votre consoeur a demandé la parole à

 23   la suite de ce qui a été convenu.

 24   Mme BOLTON : [interprétation] Excusez-moi, mais je pensais que mon confrère

 25   en avait terminé; il n'avait pas terminé l'exposé de ses pensées. Je

 26   souhaite pouvoir moi-même contribuer et dire quelque chose sur ce problème

 27   à un moment donné.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien, mais nous vous donnerons la

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  1   parole bientôt.

  2   Mme BOLTON : [interprétation] Merci.

  3   M. GUY-SMITH : [interprétation] Donc, ceci étant entendu et considérant à

  4   quel stade nous nous trouvons, il me semble qu'il serait peu approprié, sur

  5   la base de la décision de la Chambre, que je continue en ce sens, et il

  6   faudrait que je passe à un autre domaine, puis on reviendrait à cette

  7   question si dès que possible, lorsque la requête aurait été présentée à la

  8   Chambre.

  9   La requête que, à ce stade, je veux présenter, sera une requête présentée

 10   ex parte, de sorte que la Chambre souhaite à même de pouvoir examiner en

 11   toute indépendance les éléments de preuve, puisque le requête que je

 12   présente touche nécessairement à une conduite répréhensible de la part de

 13   l'Accusation.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] A l'évidence, la Chambre ne va pas

 15   vous donner des conseils juridiques sur la façon de plaider cette partie de

 16   votre défense. Mais, je suis en train de me demander pourquoi présenter la

 17   requête ex parte. Parce que, vous le savez, pour commencer cette Chambre de

 18   première instance III, la décision de cette Chambre ne me semble pas avoir

 19   été présenté ex parte. D'après la façon dont elle se présente, ce n'est pas

 20   le cas, ce n'est pas ex parte; elle n'est même pas confidentielle.

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je comprends cela. Juridiquement, ma

 22   préférence serait de ne pas avoir à, en quelque sorte, lancer un défi dans

 23   la mesure où, apparemment, je procède en me fondant sur une décision de

 24   justice et l'interprétation donnée par la Chambre, parce que je pense qu'il

 25   y a pour cela une base tout à fait différente. Donc, je m'efforce de –-

 26   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 27    M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vérifie encore une fois.

 28   Est-ce que vous pouvez nous entendre à New York ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous vous entendons, mais l'image est figée.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] L'image de nous-mêmes ou votre image à

  3   vous ? L'image de qui ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Lequel des deux ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est l'image qui vous représente, Monsieur le

  7   Président, et en fait, vous –-

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien. Bien. Alors, est-ce que vous

  9   seriez d'accord pour poursuivre, pourvu que vous puissiez nous entendre,

 10   même si nous avons l'air de statues pour vous, ou est-ce que vous voulez

 11   qu'on puisse voir les mouvements ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je suis d'accord pour que l'on continue.

 13   Je reconnais l'urgence et les contraintes qui s'imposent à nous. Je vous

 14   remercie, Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Sacirbey.

 16   Avez-vous fini, Maître –- vous disiez quelque chose, et c'est à ce moment-

 17   là que j'ai dit –-

 18   M. GUY-SMITH : [interprétation] Excusez-moi –-

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ce n'est pas moi. Je crois que la

 20   technologie vous en veut, Maître Guy-Smith, ce n'est pas –-

 21   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 22   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Faisons un essai. Test, test. Pouvez-

 24   vous m'entendre ?

 25   Mme LA GREFFIÈRE [à New York] : [interprétation] Nous pouvons vous

 26   entendre, Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] M'entendez-vous –-

 28   Mme LA GREFFIÈRE [à New York] : [interprétation] Pouvez-vous nous entendre

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  1   ?

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous entends très bien. Est-ce que

  3   vous m'entendez immédiatement ou y a-t-il un décalage ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous pouvons vous entendre très bien, Monsieur

  5   le Président. Je ne suis pas sûr pour ce qui est de décalage, mais en tous

  6   les cas, on vous entend clairement.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.

  8   Oui, Maître Guy-Smith, si vous pouviez être très bref.

  9   M. GUY-SMITH : [interprétation] Certainement. Comprenant la situation dans

 10   laquelle nous nous trouvons, ce que je vais faire maintenant, c'est que je

 11   vais préparer une requête, j'annexerai à cette requête les éléments de

 12   preuve qui, je crois, sont directement liés à cette requête, et nous

 13   repartirons à partir de ce point-là pour voir jusqu'où nous pouvons aller.

 14   Je crois que Mme Bolton a certaines remarques à faire, mais je ne sais pas

 15   s'il est nécessaire que j'y réponde ou non.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Commençons par voir ce qu'elle veut

 17   dire.

 18   Mme BOLTON : [interprétation] Oui, merci. Pour ce qui est la question de la

 19   présentation d'une requête ex parte, l'Accusation y est opposée. Il se peut

 20   qu'il y ait un problème où il serait nécessaire pour nous de consulter la

 21   personne qui, en l'occurrence, est accusée d'une conduite répréhensible, et

 22   cette personne devrait avoir le droit de savoir de quoi elle est accusée et

 23   la possibilité d'y répondre.

 24   Deuxièmement, comme mon confrère l'a déjà dit, je ne sais pas quelle partie

 25   des enregistrements sur bandes il évoque, mais c'est clairement une

 26   question qui a trait à la possibilité d'entendre ces enregistrements. Le

 27   problème, c'est de savoir s'ils sont audibles. Et par rapport à ce qui, en

 28   fait, est dit, il se peut très bien qu'il y ait litige ou désaccord quant à

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  1   ce qui est dit, et dans quel contexte les choses sont dites. Donc, je ne

  2   peux pas répondre à cela, et l'Accusation ne peut pas répondre à cela, à

  3   moins que nous ne soyons en réalité partie informée de la requête qui est

  4   présentée, et il se peut que cela pose également des problèmes du point de

  5   vue de l'emploi du temps, du calendrier. Parce que selon le type de

  6   documents qui seront reçu de la Défense, il se peut qu'il y ait un retard,

  7   notamment si je dois consulter, comme je pense que j'ai moralement le droit

  8   de le faire, Sir Geoffrey Nice sur les allégations quelles qu'elles soient

  9   qui sont portées contre lui.

 10   De sorte qu'il se peut que nous utilisions l'ensemble du temps du contre-

 11   interrogatoire pour cette question, ça dépendra de voir dans quel sens vont

 12   les choses. Je voulais simplement évoquer ceci comme étant une possibilité,

 13   un problème possible.

 14   M. GUY-SMITH : [interprétation] Si je peux –- excusez-moi, si je pourrais

 15   répondre.

 16   Je pense que nous sommes maintenant vraiment en train de faire des

 17   confusions à ce sujet, et je crois qu'en fait nous nous écartons du vrai

 18   problème. Le problème, c'est vraiment une question très simple. La question

 19   est de savoir si, oui ou non, il y a des éléments de preuve, à première

 20   vue, qui seraient suffisants pour que la Chambre m'autorise à procéder à un

 21   contre-interrogatoire. Ceci n'a absolument rien à voir avec la personne qui

 22   est, en fait, en train d'être accusée d'une conduite ou d'un comportement

 23   répréhensible, et du fait que cette personne ait le droit ou la possibilité

 24   de répondre à ces allégations. Il me semble qu'il s'agit de ces choses qui

 25   se produisent ici, et c'est malheureux, mais une de ces choses qui se passe

 26   ici, c'est que Mme Bolton se préoccupe de la protection d'un grand nombre

 27   de personnes qui ne sont pas parties à ce procès-ci. Le fait est pour

 28   l'essentiel que, ou bien je réussis à démontrer prima facie, à première

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  1   vue, ce qui serait suffisant pour que la Chambre m'autorise à entreprendre

  2   l'interrogatoire, ou bien je n'y parviens pas. Et c'est une détermination

  3   de faits qui peut être faite sur l'état même du dossier. D'après ce que je

  4   comprends, nous ne sommes pas pour le moment en train d'essayer d'examiner

  5   quelle était l'intention particulière de telle ou telle personne, c'est la

  6   raison pour laquelle j'ai dit il y a un moment qu'en réalité je n'essayais

  7   pas de jeter un gant et un défi de façon aussi rigoureuse qu'apparemment

  8   j'aurais besoin de le faire de façon à pouvoir poursuivre l'interrogatoire

  9   dans ses devoirs.

 10   A vrai dire, je me trouve dans une situation malheureuse, regrettable,

 11   parce que je pense que la question pourrait être développée sans avoir à

 12   lancer des accusations ou des calomnies contre quiconque, mais

 13   malheureusement il semble que ce soit la situation dans laquelle nous nous

 14   trouvons.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'entends ce que vous dites.

 16   Toutefois, comme je l'ai déjà dit précédemment, dès que vous avez parlé

 17   d'une présentation ex parte, j'ai exprimé mes doutes. Je ne pense pas qu'il

 18   y ait là une question qui doit être traitée ex parte. Indépendamment du

 19   point de savoir si l'Accusation consultera ou non M. Nice, s'ils pensent

 20   qu'ils ont encore le droit de répondre à votre requête, et vous d'y

 21   répondre.

 22   Là encore, je ne suis pas en train d'écrire aux parties de quelle

 23   manière elles devraient présenter et déposer leurs requêtes, et comment

 24   déposer ou présenter leurs répliques, et comment ils devraient le faire, et

 25   de ce qu'ils doivent inclure dans ces requêtes ou y annexer, mais je ne

 26   pense pas que la procédure d'un dépôt ex parte soit approprié.

 27   M. GUY-SMITH : [interprétation] Très bien. Avec toutes ces décisions et

 28   directives données par la Chambre, je vais poursuivre mon interrogatoire

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  1   dans un domaine qui est quelque peu différent de ce que je traitais jusqu'à

  2   maintenant.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Maître Guy-Smith.

  4   Pouvez-vous toujours nous entendre ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous pouvons vous entendre, Monsieur le

  6   Président.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci bien.

  8   Vous pouvez poursuivre, Maître Guy-Smith.

  9   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 10   Q.  Je vais maintenant passer à une question quelque peu différente, comme

 11   je crois que vous comprenez la nécessité de le faire maintenant, je vais

 12   commencer par m'entendre avec vous, si c'est possible, il s'agit d'être

 13   bien d'accord sur le moment où vous êtes devenu ambassadeur de la Bosnie-

 14   Herzégovine auprès des Nations Unies.

 15   D'après ce que j'ai compris, de ce que vous nous avez dit, avant l'époque

 16   où la Bosnie-Herzégovine a été reconnue aux Nations Unies par la voie d'une

 17   résolution, vous aviez travaillé avec le gouvernement. C'est bien ça ?

 18   R.  C'est exact.

 19   Q.  Et la date à laquelle la Bosnie-Herzégovine est devenue partie –-

 20   excusez-moi, a été reconnue, je pense que vous nous avez dit que c'était le

 21   22 mai, n'est-ce pas ?

 22   R.  C'est exact.

 23   Q.  Excusez-moi, mais il faut que nous soyons bien précis ici; 1992.

 24   R.  C'est exact.

 25   Q.  Maintenant, avant que la Bosnie-Herzégovine ne soit reconnue comme

 26   étant indépendante par les Nations Unies, les préoccupations ont existé sur

 27   le point de savoir si, oui ou non, il allait y avoir des problèmes pour ce

 28   qui est d'être reconnu; c'est bien ça ? Vous suivez ce que je veux dire.

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  1   R.  C'est exact.

  2   Q.  Bien. A cet égard, vous avez appris avant le moment où la résolution a

  3   été adoptée, qu'il y avait un plan qui était ourdi pour empêcher que la

  4   Bosnie-Herzégovine ne soit reconnue aux Nations Unies, n'est-ce pas ?

  5   R.  Il y avait un plan qui était en préparation pour retarder la

  6   reconnaissance, si possible, au-delà de celle de la Slovénie et de la

  7   Croatie, c'est exact.

  8   Q.  Exact. Et ceci –- excusez-moi, ce sont des renseignements que vous avez

  9   obtenus, je crois, du représentant de la Turquie ?

 10   R.  C'était l'une de mes sources. En fait, ce n'était pas le représentant

 11   de la Turquie, mais un ressortissant turc qui était un représentant de

 12   l'organisation de la conférence islamique.

 13   Q.  Maintenant, ce ressortissant turc qui était un représentant de

 14   l'organisation de la conférence islamique, cette personne-là donc, est-ce

 15   que, peut-être aujourd'hui même, est-ce que là où nous sommes ensemble,

 16   vous pourriez vous rappeler quel était son nom ?

 17   R.  Oui, je l'ai sur le bout de la langue, mais ça m'échappe.

 18   Q.  Pas de problème. En plus de tout cela, en dehors de cette personne qui

 19   était impliquée dans toutes ces questions, si je ne m'abuse, il y avait

 20   aussi l'ancien ambassadeur d'Arabie Saoudite qui s'inquiétait également du

 21   retard de l'adoption de la résolution de l'indépendance; est-ce exact ?

 22   R.  Je pense que la personne à laquelle vous faites allusion, c'est le

 23   président de l'assemblée générale, qui était aussi l'ancien ambassadeur de

 24   l'Arabie Saoudite et le représentant de l'Australie.

 25   Q.  Concernant la question de savoir si cette résolution sera retardée pour

 26   des raisons techniques, vous vous êtes engagé - et je pense que le Dr

 27   Silajdzic et vous-même vous étiez engagés à ce que les deux autres pays ne

 28   soient pas admis à l'assemblée générale avant que la Bosnie ne soit aussi

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  1   admise; est-ce exact ?

  2   R.  Je préférerais parler d'un train de mesures pour que la Bosnie, la

  3   Slovénie et la Croatie soient admises en même temps.

  4   Q.  Venons-en à la page 35 du transcript de la réunion que vous avez eue.

  5   Il s'agit des pages allant de 20 à 27 où vous nous dites, en fonction de la

  6   transcription qui nous a été remise par l'Accusation, qu'il s'était engagé

  7   envers du Dr Silajdzic et de moi-même pour que les deux pays ne soient pas

  8   admis et il ne permettrait pas l'arrivée de cela à l'assemblée générale

  9   tant que la Bosnie ne serait pas admise.

 10   R.  Oui, je pense, Maître Guy-Smith, effectivement dire que c'était une

 11   définition qui allait dans ce sens.

 12   Q.  J'ai bien compris ce que vous vouliez dire. Faisons apparaître ce

 13   document à l'écran dont la cote est 1D03-1325, page 35 sur 62. Voilà.

 14   R.  Oui, je l'ai ici sous les yeux.

 15   Q.  C'est ce que vous avez dit à M. Nice à l'époque, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  D'accord. Merci.

 18   A ce moment-là, est-ce que c'est quelque chose qui s'est passé en

 19   audience publique avec d'autres représentants des Nations Unies ou est-ce

 20   que c'est quelque chose qui a eu lieu à huis clos, est-ce que c'était une

 21   conversation secrète ? Comment est-ce que cela s'est-il passé ?

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation] 

 23   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 24   M. GUY-SMITH : [aucune interprétation]

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]  

 26   Mme ROHAN : [interprétation] Lorsque cette personne a dit qu'il ne

 27   permettrait pas aux deux autres pays d'être reconnus comme étant

 28   indépendants par l'assemblée générale tant que la Bosnie n'était pas

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  1   comprise parmi ces pays-là.

  2   Q.  Vous nous avez dit avoir une réunion.

  3   R.  Oui, nous avons eu des réunions avec différents ambassadeurs sur tous

  4   ces points. J'en ai parlé. Il y avait l'Autriche, ainsi que d'autres, les

  5   Etats-Unis. Donc on a reçu l'engagement du président de l'assemblée

  6   générale, qui était un ancien ambassadeur des Nations Unies.

  7   Q.  Concernant cette réunion officielle mais privée, comme vous l'avez

  8   présentée, le Dr Silajdzic était là, vous étiez là et il y avait aussi le

  9   président de l'assemblée générale, n'est-ce pas, pour cette réunion; c'est

 10   exact ?

 11   R.  Oui, c'est exact.

 12   Q.  Concernant cette réunion, est-ce que vous avez eu l'occasion de prendre

 13   des notes pendant cette réunion ?

 14   R.  C'est possible, Maître Guy-Smith, mais si j'avais pris des notes, ça se

 15   serait limité à quelques phrases, quatre ou cinq.

 16   Q.  Donc c'est une question qui se poursuit et aujourd'hui, à cet instant

 17   présent, est-ce que vous disposez de certaines des notes que vous avez

 18   peut-être prises ou que vous avez prises à l'époque ? Est-ce que vous les

 19   avez aujourd'hui ?

 20   R.  Non, je ne pense pas, sauf si elles ont atterri dans un autre document

 21   par hasard.

 22   Q.  Vous nous avez dit aussi que vous aviez eu une réunion avec le

 23   représentant de l'Autriche; est-ce exact ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  De qui s'agissait-il ?

 26   R.  Là encore, le nom de l'ambassadeur m'échappe, mais à l'époque, nous

 27   avons utilisé les locaux de la mission autrichienne pour parler de

 28   différentes questions bureaucratiques pour fournir des documents, tout ce

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  1   dont on avait besoin.

  2   Q.  Vous avez parlé aussi du fait que vous avez eu des conversations

  3   semblables concernant cette résolution, le fait quelle ne soit pas adoptée,

  4   à moins que les trois pays soient compris. Vous en avez parlé avec le

  5   représentant des Etats-Unis d'Amérique, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, nous avons eu plusieurs réunions, pas forcément avec l'ambassadeur

  7   mais avec des représentants subalternes.

  8    Nous avons eu différentes réunions avec le représentant du Japon

  9   notamment, mais aussi avec d'autres représentants du Conseil de sécurité

 10   principalement. Il me serait difficile de me souvenir de tous les

 11   ambassadeurs que nous avons rencontrés ou que j'ai rencontrés

 12   personnellement. Mais ce qui nous intéressait avant tout, c'était la

 13   mission de la Bosnie aux Nations Unies.

 14   Q.  D'après ce que j'ai compris de la situation à l'époque, il y avait des

 15   efforts qui étaient faits par celui qui était alors secrétaire général, à

 16   savoir M. Boutros-Ghali pour empêcher que la Bosnie ne soit reconnue à

 17   l'époque; est-ce exact ?

 18   R.  C'est une présentation des faits à laquelle je ne souscris pas. Je

 19   pense qu'il y a un certain nombre d'efforts qui ont été fait, nous avions

 20   des soupçons, on nous a donné des informations qui allaient dans ce sens,

 21   mais je pense que c'est une conclusion un peu hâtive et je n'ai pas

 22   d'information claire permettant de conclure cela même si je dispose

 23   d'information.

 24   M. GUY-SMITH : [interprétation] J'aimerais qu'on fasse apparaître le même

 25   document à l'écran, même page. Il s'agit des lignes qu'on a maintenant sous

 26   les yeux, 29, les derniers efforts d'empêcher la Bosnie d'être admise

 27   provenaient du secrétaire général Boutros-Ghali.

 28   Q.  J'ai des conversations sur ces événements et je pense que ça fait

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  1   allusion à ce dont vous venez de parler à l'instant, le fait que le

  2   secrétaire général participait à retarder le processus d'adhésion ou de

  3   reconnaissance de la Bosnie-Herzégovine par les Nations Unies.

  4   R.  Je parle du fait qu'il y avait des conversations qui avaient lieu et le

  5   secrétaire général était l'un des obstacles.

  6   Q.  J'avais une vision différente de la façon dont fonctionnait les Nations

  7   Unies, mais il y a quelques semaines, on en parlait. Vous allez d'ailleurs

  8   peut-être pouvoir m'aider, mais d'après ce que j'avais cru comprendre, vous

  9   aviez au moins trois réunions avec des représentants des Etats membres

 10   concernant un accord. J'utilise ce terme à dessein, un accord qui aurait pu

 11   être passé pour que votre circonscription soit reconnue par les Etats-Unis

 12   [comme interprété], ce n'est pas quelque chose qui s'est fait en public,

 13   n'est-ce pas ?

 14   R.  Maître Guy-Smith, j'aimerais revenir sur ce point et vous préciser le

 15   contexte. La Bosnie-Herzégovine avait fait une demande auprès du bureau du

 16   secrétaire général, et c'est une obligation pour être admise aux Nations

 17   Unies. Après avoir reçu l'appel de l'homme dont je parlais, le représentant

 18   de l'OIC, on m'a dit qu'il y aurait un problème concernant cette demande.

 19   J'ai voulu mettre la main sur les statuts de notre demande dans le bureau

 20   du secrétaire général.

 21   Q. Attendez, je voudrais essayer de comprendre votre réponse.

 22   A. Oui.

 23   Q. Vous nous dites après avoir reçu un appel du représentant de

 24   l'organisation de la conférence islamique, l'OCI. Est-ce que cette personne

 25   fait partie d'un comité qui décide de la validité de votre demande, de

 26   votre candidature pour faire aboutir ou non une résolution ?

 27   R.  Je viens de me rappeler du nom de cette personne, Enjin Ansaj [phon],

 28   et non, je ne pense pas et je ne l'ai jamais rencontré auparavant jusqu'à

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  1   recevoir cet appel. Il disait simplement qu'il y avait un problème dans

  2   notre candidature et pour utiliser le terme que l'on utilise souvent ici,

  3   qu'il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond, n'était pas cachère

  4   [phon].

  5   Q.   Je comprends ce que vous êtes en train de nous dire, et c'est une

  6   question d'ailleurs que je vous pose, que lorsque quelque chose n'est pas

  7   cachère au sens politique, ça veut dire qu'il y a une sorte de

  8   conspiration, de complot concernant ce qui se passe. C'est ça que vous êtes

  9   en train de nous dire ? Vous êtes en train de nous dire qu'il y avait

 10   d'autres décisions qui allaient être prises par d'autres Etats membres pour

 11   refuser à la Bosnie-Herzégovine la possibilité d'être reconnue par

 12   l'assemblée générale des Nations Unies ?

 13   R.  Je n'ai pas entendu parler d'un complot, tout ce que je sais, c'est que

 14   lorsque j'ai contacté le secrétaire général et son bureau, on m'a dit que

 15   notre candidature était au bureau A et que le bureau B avait dit qu'elle

 16   avait été égarée, à ce moment-là nous avons présenté une nouvelle

 17   candidature. Pourquoi ces problèmes ont eu lieu, je ne sais pas, on m'a

 18   raconté plusieurs histoires. On m'a dit -- je ne sais pas qui croire.

 19   Q.  Est-ce que vous pouvez nous en dire davantage sur le fait que vous

 20   receviez des informations d'une personne que vous n'aviez jamais rencontré

 21   auparavant, qui était un représentant de l'organisation de la conférence

 22   islamique ? Est-ce que vous avez des informations sur ce point ?

 23   R.  Oui, je me rappelle qu'à l'époque il y a eu un appel de la mission

 24   autrichienne parce que nous avions eu cette réunion. Il y a un certain

 25   nombre de faits qui ont été établis. Vous savez, à l'époque, on n'utilisait

 26   pas encore tous ces téléphones portables.

 27   Q.  C'est une question là encore que je vous pose, j'aimerais que vous

 28   éclairiez notre lanterne. Il y a un certain nombre d'arguments qui avaient

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  1   lieu entre différentes parties concernant cette question, à savoir

  2   l'adoption de la résolution. Est-ce que vous pourriez nous aider à mieux

  3   comprendre ce qui se passait ?

  4   R.  Oui, absolument, Maître Guy-Smith. Il s'agit de deux questions qui

  5   peuvent être reliées. Lorsque je réfléchis à ces deux questions, on voit

  6   bien qu'il y avait un débat pour savoir si la Bosnie-Herzégovine devait

  7   être admise au même moment que la Croatie et la Slovénie.

  8   Parallèlement il y avait aussi un certain nombre de ratés puisque la

  9   candidature n'a pas atterri au bon endroit, et suite à des recherches assez

 10   longues, on a réussi à la retrouver et on nous a dit que oui, peut-être que

 11   le problème c'est qu'elle avait été faxée de Sarajevo plutôt que livrée par

 12   courrier ou par coursier. On nous a demandé de fournir une nouvelle

 13   candidature. Nous avons agi rapidement avec le Dr Silajdzic qui avait le

 14   droit de le faire pour la Bosnie-Herzégovine.

 15   Dans quelle mesure est-ce que ces deux faits sont liés ? Disons que

 16   cela a entraîné un certain nombre d'inquiétudes, de doutes peut-être, est-

 17   ce qu'il y avait un complot, je ne sais pas, je ne suis absolument pas

 18   disposé à le dire, d'aller jusque-là en tout cas, et enfin, comment le

 19   résoudre ou la question était résolue finalement.

 20   Je peux vous dire que les informations que j'ai reçues n'étaient pas

 21   tout à fait cachères. Est-ce qu'on est allé au fond des choses ? En fait

 22   non. Est-ce que j'ai pensé que c'était une question qu'il fallait soulever

 23   dans mon entretien avec l'Accusation? Absolument.

 24   Q.  Très bien. Merci de cette réponse.

 25   Concernant ce qui s'est passé avant cet incident, d'après ce que je

 26   comprends, vous avez rencontré M. Vance concernant la question de

 27   référendum.

 28   Vous en souvenez-vous ?

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  1   R.  Oui, oui, je m'en souviens très bien. C'était quelques mois auparavant.

  2   Q.  Concernant cette question du référendum, cette question du référendum

  3   posait la question de savoir qui allait voter pour quel Etat, n'est-ce pas

  4   ?

  5   R.  Je --

  6   Q.  J'essaie de poser la question de manière aussi générale que possible,

  7   vous savez.

  8   R.  Disons que c'était un référendum sur le statut à venir de la Bosnie-

  9   Herzégovine.

 10   Q.  Quand vous avez rencontré M. Vance --

 11   R.  Nous venons de perdre l'image ici, voyez-vous. J'arrive à vous

 12   entendre, mais c'est tout, mais je veux bien continuer.

 13   Q. Si vous voulez bien continuer, c'est parfait. Sinon, tant pis. Mais

 14   visiblement, vous voulez bien continuer, c'est très bien. Dans votre

 15   discussion avec M. Vance, il ne faisait aucun doute que ce référendum était

 16   idoine, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Et vous l'avez dit tout à l'heure, avant de rencontrer M. Vance, la

 19   question de ce référendum était déjà un fait accompli ? Cela avait déjà été

 20   tranché ?

 21   R.  Oui, je pense.

 22   Q.  Concernant M. Vance, de qui s'agit-il d'ailleurs ? Par conséquent, que

 23   je veux tout simplement préciser cela pour le compte rendu d'audience. De

 24   qui s'agit-il ?

 25   R.  Il s'agit de quelqu'un qui est décédé, un diplomate américain de haut

 26   rang qui s'appelait M. Cyrus Vance et qui était représentant spécial aux

 27   Nations Unies.

 28   Q.  M. Vance à l'époque pensait que c'était la marche à suivre, ce

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  1   référendum. Il pensait que le référendum, c'était la solution pour

  2   continuer d'avancer, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui, à la lumière des réunions auxquelles j'ai été présent, en février

  4   1992, effectivement oui, je le pense.

  5   Q.  Concernant cette réunion que vous avez eue avec lui, la question d'un

  6   boycott potentiel a été portée à l'ordre du jour. Si je ne m'abuse, je ne

  7   pense pas que cela ait inquiété outre mesure M. Vance, concernant les

  8   retards que cela aurait pu entraîner par rapport aux élections.

  9   Mme BOLTON : [interprétation] Ecoutez, je ne crois pas que le témoin puisse

 10   répondre à cette question, et je ne pense pas qu'il puisse dire ce que M.

 11   Vance pensait à ce moment-là.

 12   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vais reformuler ma question. J'aimerais

 13   qu'on fasse apparaître le même document, page 27. Il s'agit de la ligne 14,

 14   à laquelle vous avez dit à M. Nice, je cite :

 15   "L'idée évidemment était de faire voter les Bosniaques, mais lorsque la

 16   question du boycott est apparue, ça n'a pas fait dire à M. Vance, nous

 17   devrions retarder ou ne pas organiser ces élections," N'est-ce pas ?

 18   R.  Oui, cette déclaration est juste.

 19   Q.  Merci. Concernant cette réunion, vous avez ensuite dit à M. Nice que

 20   cette réunion était secondaire. Vous avez ensuite tiré certaines

 21   conclusions qui avaient été tirées de façon hâtive. Que fallait-il

 22   véritablement faire pour que l'on puisse avancer sur la question de

 23   l'indépendance.

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Lors de cette réunion avec M. Vance, est-ce que vous avez pu savoir qui

 26   était impliqué concernant le fait que l'on organise un référendum ou pas,

 27   référendum pour l'indépendance. Est-ce que vous le savez ?

 28   R.  Non, je ne sais pas.

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  1   Q.  Si je vous pose cette question, c'est par rapport à ce dont on parlait

  2   tout à l'heure. J'ai l'impression qu'il y a plusieurs personnes qui

  3   disposaient d'informations concernant ce qui se passait à ce moment-là, et

  4   je parle du retard de la résolution, pour votre indépendance. Quand je dis

  5   vous, c'est la Bosnie-Herzégovine.

  6   Je me demandais si ces informations étaient également disponibles à

  7   d'autres membres des Nations Unies sur le fait qu'il avait été décidé qu'il

  8   y aurait un référendum d'indépendance, qu'il y ait un boycott ou pas ?

  9   R.  Maître Guy-Smith, je pense qu'il s'agit du référendum qui a eu lieu fin

 10   février, et on parle de la mission de la Bosnie aux Nations Unies. On en a

 11   déjà parlé tout à l'heure, et ça c'était le moment critique dont on parle,

 12   c'était mi-mai.

 13   Q.  Absolument. Il s'agit de la nature du type de conversation et non pas

 14   de la date de ces conversations, et le fait qu'il y ait visiblement un

 15   certain nombre de conversations en privé entre différents Etats membres

 16   auxquelles ne participent pas l'assemblée générale ou le Conseil de

 17   sécurité, et les discussions dans lesquelles les décisions internationales

 18   très importantes ont été prises.

 19   R.  Oui, si vous parlez des négociations qui avaient lieu dans différentes

 20   parties d'Europe concernant le statut de Bosnie-Herzégovine pendant cette

 21   période, je suis tout à fait conscient du fait qu'elles avaient lieu. Mais

 22   je n'y participais pas, je n'étais pas "briefé" non plus sur ces réunions.

 23   Je ne pensais absolument pas qu'on pourrait m'en informer puisque je

 24   n'étais pas un responsable bosniaque. Je prêtais main-forte. Je n'avais pas

 25   de responsabilité.

 26   Q.  Oui, j'étais en train de relire votre réponse à terme. La résolution a

 27   été adoptée, et la Bosnie est devenue un Etat membre, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui, c'est exact. Nous avons été parrainés par la Finlande.

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  1   Q.  Lorsque la Bosnie est devenu Etat membre, évidemment, elle était

  2   soumise à tous les règlements des Nations Unies, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Concernant les résolutions qui ont été adoptées avant son adhésion, il

  5   y en a une parmi ces résolutions qui, comment dire, a entraîné un certain

  6   nombre de discussions et de problèmes vous concernant, concernant cet

  7   embargo.

  8   R.  Oui, c'est exact.

  9   Q.  Je parle de la Résolution 713, la pièce P2431. Concernant cette

 10   résolution 713 --

 11   Mme BOLTON : [interprétation] J'ai M. Gregor Guy-Smith à l'écran, et je

 12   n'ai pas New York.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bienvenue au club. Et je pense que M.

 14   Sacirbey a commencé à dire une phrase, après quoi tout a été coupé.

 15   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je pense qu'il y a des moments où l'écran

 16   est gelé et il y a des moments où je peux avoir l'image.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis toujours en mesure de vous entendre.

 18   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 19   [Le conseil de la Défense se concerte]  

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur Sacirbey, pouvez-vous m'entendre ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  C'est bien. Nous avons parlé de la Résolution 713 et si j'ai bien

 25   compris, cette résolution représentait l'embargo total dans la région, y

 26   compris la Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

 27   R.  Cela concernait la Yougoslavie et par la suite cela a été considéré

 28   comme étant le territoire de l'ancienne Yougoslavie.

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  1   Q.  Pour ce qui est de la Résolution 713, pouvez-vous nous dire si vous

  2   avez compris que cette résolution avait été adoptée d'après le chapitre 7

  3   de la charte ?

  4   R.  Oui, je crois que oui.

  5   Q.  Si j'ai bien compris votre position et votre interprétation du chapitre

  6   7, donc le chapitre 7 dit que la résolution est obligatoire pour les pays

  7   membres, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Et le 22 mai, la Bosnie-Herzégovine était certainement membre des

 10   Nations Unies, un pays membre ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Nous allons parler de cela un peu plus tard, mais il s'agissait de la

 13   question à propos de laquelle vous avez entamé des conversations ou des

 14   discussions avec différents membres de l'assemblée générale et membres du

 15   Conseil de sécurité pour ce qui est de la levée des dispositions de la

 16   Résolution 713 eu égard à la Bosnie-Herzégovine, mais sans succès ?

 17   R.  Je ne suis pas sûr si je pourrais être d'accord avec vous pour ce qui

 18   est de la dernière partie de votre déclaration, à savoir sans succès. Mais

 19   certainement, il s'agissait de quelque chose sur quoi nous nous sommes

 20   penchés avec beaucoup d'intérêt.

 21   Q.  Mais c'est quelque chose que vous n'avez pas pu réaliser durant les

 22   années 1992, 1993, 1994 et une partie de 1985 [comme interprété], n'est-ce

 23   pas ?

 24   R.  Oui. Mais les initiatives des diplomates parfois ont pour résultat

 25   quelque chose qui n'est pas nécessairement direct.

 26   Q.  Je m'excuse, mais lorsque vous dites que les initiatives diplomatiques

 27   parfois donnent des résultats qui ne sont pas nécessairement directs,

 28   qu'est-ce que vous entendez par là ? Pouvez-vous expliquer cela, Monsieur ?

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  1   R.  Il y avait beaucoup de pays qui ont fini par dire que la Résolution 713

  2   n'est pas obligatoire pour la Bosnie-Herzégovine, parce que cette

  3   résolution avait été adoptée avant que la Bosnie-Herzégovine ne soit

  4   devenue pays membre et parce que la Bosnie-Herzégovine était le pays dont

  5   l'intégrité territoriale et la souveraineté étaient menacées et que la

  6   Bosnie-Herzégovine avait le droit de se défendre. Il s'agissait d'une

  7   notion principalement juridique.

  8   Q.  Ce que vous venez de dire, est-ce que c'est quelque chose qui a été

  9   accepté par le Conseil de sécurité en considérant les dispositions

 10   obligatoires du chapitre 7 de la charte ?

 11   R.  Je m'excuse, mais est-ce que vous me dites que les différents pays ont

 12   interprété différemment des lois qu'il fallait appliquer ?

 13   Q.  Je pense que la dernière déclaration, votre dernière déclaration est

 14   vraie. Deuxièmement, la résolution n'a jamais considéré la Bosnie-

 15   Herzégovine comme un pays qui était sujet à l'embargo sur les armes et

 16   certainement pas dans des conditions où la Bosnie était directement

 17   attaquée et exposée au génocide.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Sacirbey, permettez-moi de

 19   poser cette question.

 20   Avant, vous avez dit que la résolution s'appliquait à la Yougoslavie en se

 21   référant l'ancienne Yougoslavie. Est-ce que cela excluait la Bosnie-

 22   Herzégovine ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Pas explicitement, Monsieur le Président.

 24   Lorsque la résolution a été adoptée, il n'a pas été prévu que la

 25   Yougoslavie deviendrait un pays qui serait composé de plusieurs pays

 26   différents.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et comment pouvez-vous dire que la

 28   Bosnie-Herzégovine était exclue de cette résolution ? Je n'ai pas compris

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  1   cela.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que j'ai

  3   entendu par là que la Bosnie-Herzégovine n'était pas membre des Nations

  4   Unies à l'époque où la résolution avait été adoptée, et c'est pour cela que

  5   de fait la Bosnie-Herzégovine n'était pas couverte par la résolution. Si

  6   j'ai dit que la Bosnie-Herzégovine était exclue, c'est ma faute.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je m'excuse parce que je n'ai pas bien

  8   compris votre réponse, mais vous avez dit que la Bosnie-Herzégovine n'était

  9   pas un pays membre à l'époque, certainement pas, mais cela n'exclut pas la

 10   Bosnie-Herzégovine en tant que pays de cette résolution. Et si, en tout

 11   cas, l'ancienne Yougoslavie était couverte par la résolution en tant que

 12   pays entier, est-ce que la Bosnie-Herzégovine, en tant que pays membre,

 13   est-ce que le fait de savoir si la Bosnie-Herzégovine, en tant que pays

 14   membre, est couverte par la résolution ou pas devient quelque chose qui

 15   n'est pas pertinent ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Pas nécessairement. Parce que nous étions

 17   confrontés à quelque chose qui représentait des attaques contre la

 18   population. Nous devions notre souveraineté, l'intégrité territoriale et en

 19   même temps en tant qu'Etat, nous avions l'obligation de défendre ces deux

 20   valeurs, la souveraineté et l'intégrité territoriale et en particulier la

 21   population.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne suis pas certain de vous avoir

 23   bien compris. L'intervention de la résolution était comme suit :

 24   "La résolution concernait l'ancienne Yougoslavie à l'époque où la Bosnie-

 25   Herzégovine n'était pas un pays indépendant. Et après, la Bosnie-

 26   Herzégovine est devenue un Etat indépendant, ce qui lui conférait des

 27   droits et des obligations, par exemple, le droit de se défendre." Donc elle

 28   a été exempte des obligations de l'ancienne Yougoslavie, mais elle avait

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  1   maintenant des obligations en tant qu'un Etat indépendant.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est vrai, Monsieur le Président, et vu

  3   la réalité à l'époque, cette situation a continué jusqu'à la fin de la

  4   guerre, du 22 mai jusqu'à la fin de la guerre.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation]  J'ai juste voulu comprendre votre

  6   pensée. Merci.

  7   Je m'excuse, Maître Guy-Smith. Merci.

  8   M. GUY-SMITH : [interprétation] Il n'y a pas de problème, Monsieur le

  9   Président.

 10   Q.  Vu que vous avez pris cette position par rapport à la Bosnie-

 11   Herzégovine, alors la même chose devrait être appliquée à d'autres parties

 12   de l'ancienne Yougoslavie qui étaient devenues des Etats indépendants,

 13   n'est-ce pas ?

 14    R.  Là, ce serait appliqué à des pays, à des Etats qui, bien sûr, avaient

 15   un --

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pouvez-vous répéter votre réponse,

 17   parce que nous n'avons pas entendu la fin de votre réponse.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] C'étaient les droits et obligations des Etats.

 19   J'essaie de relier la position de la Bosnie et la Défense la Bosnie, parce

 20   qu'il y avait la guerre et je [comme interprété] là-bas.

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 22   Q.  Pour que tout soit clair, je dois dire que le point de vue que vous

 23   venez d'exprimer, si j'ai bien compris cela, vous témoignez que si cela

 24   était décidé de la part de la Bosnie-Herzégovine, la Slovénie et la Croatie

 25   auraient pu de la même façon exprimer cette position ?

 26   R.  Oui, la Croatie et la Slovénie auraient pu faire cela, mais je préfère

 27   ne pas parler au nom de ces Etats.

 28   Q.  Généralement parlant, cette hypothèse que vous venez de présenter est

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  1   analysable de la façon suivante. Bien que d'après les dispositions du

  2   chapitre 7 de la charte il y ait des obligations pour ce qui est de

  3   l'ancienne Yougoslavie et d'accepter les dispositions de la résolution, il

  4   y a des exceptions à cette obligation, parce qu'il faut d'abord analyser la

  5   situation à la façon à laquelle vous avez fait cela ?

  6   R.  Je pense que la Slovénie à l'époque n'était pas confrontée au conflit

  7   et pour ce qui est de la Croatie, je pense que cela aurait été probablement

  8   le cas.

  9   Q.  Vous parlez des Etats membres, parce que le chapitre 7 concerne

 10   spécifiquement les Etats membres, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Mon Dieu, j'ai dit cela parce que je vois l'heure. Vous n'avez pas

 13   bénéficié de la formation destinée aux diplomates, n'est-ce pas ?

 14   R.  C'est vrai.

 15   Q.  Avez-vous jamais entendu parler de la déclaration faite par M. Owen

 16   dans son livre. Il a écrit ce livre -- permettez-moi de trouver ce passage

 17   dans le livre. Il s'agit de la pièce 1D00-1843, intercalaire 54. Je crois

 18   que vous connaissez M. David Owen, Lord David Owen, n'est-ce pas ?

 19   Mme BOLTON : [interprétation] Je crois avoir quelque chose écrit par Marjan

 20   Malesic.

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, c'est ça. Regardez la page 25.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est la page 25, Monsieur le Greffier

 23   d'audience.

 24   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui. Et c'est la page 26 dans le prétoire

 25   électronique.

 26   Mme BOLTON : [interprétation] Je m'excuse, maintenant je ne comprends plus

 27   rien. J'ai pensé que vous faisiez référence à quelque chose écrit par Lord

 28   Owen.

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  1   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui. Soyez un peu plus patiente, je vais

  2   retrouver cela. C'est au premier paragraphe du livre. Est-ce qu'on peut

  3   faire défiler cela un peu plus vers le bas.

  4   Q.  Au premier paragraphe de son livre, Odyssée des Balkans, Lord Owen a

  5   souligné la chose suivante, je cite :

  6   "Rien n'est simple sur les Balkans. L'histoire imprègne tout et les choses

  7   complexes sont telles que même des chercheurs les plus studieux peuvent

  8   être confus. Et avant, pendant 30 ans de mes activités publiques, je n'ai

  9   jamais travaillé dans un climat de propagande et de déshonneur, et beaucoup

 10   de gens avec qui j'ai dû travailler dans l'ancienne Yougoslavie ne

 11   connaissaient pas la notion de la vérité."

 12   Est-ce que vous connaissez cette déclaration faite par Lord Owen ?

 13   R.  Oui, et nous avons parlé de cela à une ou deux reprises.

 14   M. GUY-SMITH : [interprétation] Est-ce qu'on peut faire la pause maintenant

 15   ou lever l'audience.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, l'audience est levée. Et demain,

 17   30 juin, nous allons continuer nos débats à 14 heures 15.

 18   --- L'audience est levée à 19 heures 02 et reprendra le mardi, 30 juin

 19   2009, à 14 heures 15.

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