Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 16 septembre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 14 heures 19.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour à tout le monde dans le

  7   prétoire et autour du prétoire.

  8   Je prie M. le Greffier d'audience de citer le numéro de l'affaire.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame et

 10   Monsieur les Juges. Il s'agit de l'affaire IT-04-81-T, le Procureur contre

 11   Momcilo Perisic.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Je me tourne vers les parties,

 13   d'abord l'Accusation.

 14   M. THOMAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour à tout

 15   le monde dans le prétoire et autour du prétoire. Pour l'Accusation sont

 16   aujourd'hui présents Ann Sutherland, Barney Thomas et Carmela Javier.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et pour la Défense.

 18   M. LUKIC : [interprétation] Aujourd'hui sont avec nous Tina Drolec, Milos

 19   Androvic, nos assistants juridiques; Daniela Tasic, commis à l'affaire; et

 20   M. Gregor Guy-Smith ainsi que moi-même, Me Lukic, pour la Défense de M.

 21   Perisic aujourd'hui.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Lukic.

 23   Monsieur le Témoin, bonjour.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'aimerais vous rappeler que vous êtes

 26   toujours tenu par la déclaration solennelle que vous avez prononcée hier au

 27   début de votre témoignage, de dire la vérité, toute la vérité et rien que

 28   la vérité.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai compris cela.

  2    M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Lukic, vous avez la parole.

  3   M. LUKIC : [interprétation] Aujourd'hui avec nous se trouve également Chad

  4   Meir qui est derrière moi. Je m'excuse, je ne l'ai pas donc remarqué. Il

  5   faut que cela soit consigné au compte rendu.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Lukic.

  7   LE TÉMOIN : TÉMOIN MP-011 [Reprise]

  8   [Le témoin répond par l'interprète]

  9   Contre-interrogatoire par M. Lukic : [Suite]

 10   Q.  [interprétation] Bonjour. Pour ce qui est de la première série de

 11   questions à poser au témoin, je pense qu'on peut rester en audience

 12   publique. Et nous allons parler de votre action que vous avez menée pendant

 13   que vous étiez sur le territoire de Sarajevo. Hier, vous avez témoigné de

 14   votre entretien que vous avez eu à Avala avant de partir pour Sarajevo.

 15   Vous avez donc parlé de cela hier. Est-ce qu'on peut afficher maintenant

 16   une partie de la déclaration faite par le témoin au bureau du Procureur,

 17   1D02-4597. La page en B/C/S est la page 25; en anglais, la page 30. Il

 18   s'agit du deuxième paragraphe de la même déclaration. M. Thomas vous a lu

 19   une partie de votre déclaration pour vous rappeler certains faits.

 20   Maintenant, je vais vous lire une autre partie de la même déclaration pour

 21   vous poser des questions pour savoir si vous êtes d'accord avec ce qui est

 22   écrit ici.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Lukic, les interprètes vous

 24   demandent de répéter le numéro de la page.

 25   M. LUKIC : [interprétation] 1D02-4597, pour ce qui est du prétoire

 26   électronique. Il s'agit de la déclaration du témoin de 2003. La page en

 27   anglais est la page numéro 30; en B/C/S, 25, paragraphe 73.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Lukic, vous dites qu'il s'agit

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  1   de la même déclaration où M. Thomas a lu une partie

  2   hier ?

  3   M. LUKIC : [interprétation] Oui.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que cette déclaration a été

  5   versée au dossier ?

  6   M. LUKIC : [interprétation] Il s'agissait du paragraphe 70 que M. Thomas a

  7   lu pour rappeler au témoin certaines choses. Je vais faire la même chose,

  8   mais je ne veux pas proposer le versement au dossier de cette partie.

  9   Q.  Monsieur le Témoin, en 2003, au paragraphe 73, il a été écrit comme

 10   suit, il s'agit de votre entretien avec le Procureur :

 11   "Le lendemain à l'hôtel Vogosca, le général Galic du Corps Sarajevo-

 12   Romanija nous a informés de notre mission. Il nous a dit que nous devions

 13   attaquer l'ABiH et prendre le mont Zuc, parce que du point de vue tactique,

 14   il s'agissait d'une position très importante. Puisque c'est une élévation,

 15   cette position domine les autres parties de la ville de Sarajevo qui se

 16   trouve sous le contrôle de l'ABiH. C'est un point d'observation et un point

 17   de tir également. Il a également dit que si on arrivait à prendre le mont

 18   Zuc, toute la ville de Sarajevo se serait trouvée sous le contrôle du Corps

 19   Sarajevo-Romanija."

 20   Monsieur le Témoin, vous avez dit hier que vous avez eu l'occasion de

 21   parcourir cette déclaration toute entière, et pour ce qui est de ce

 22   paragraphe, vous n'avez pas apporté de correction. Donc vous maintenez ce

 23   qui est écrit dans ce paragraphe.

 24   R.  En pratique, oui, c'est vrai, mais l'information du général Galic nous

 25   est parvenue pour nous dire quelles seraient nos missions.

 26   Q.  Le général Galic, à l'époque, c'est ce que vous avez dit, il était

 27   commandant du Corps Sarajevo-Romanija de l'armée de la Republika Srpska,

 28   n'est-ce pas ?

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  1   R.  Pour être franc, je ne me souviens pas de ce détail. Je ne me souviens

  2   pas d'avoir dit qu'il était commandant du Corps Sarajevo-Romanija de la

  3   VRS, mais je sais qu'à l'époque il était parmi les officiers les plus hauts

  4   gradés et qui donnaient des ordres et qui prenaient des décisions.

  5   Q.  Mais d'après ce que j'ai lu, vous êtes d'accord avec moi pour dire

  6   qu'il vous a confié une mission concrète, il vous a décrit l'importance de

  7   l'action qui allait se produire au mont Zuc, cette opération spéciale ?

  8   R.  En principe, je sais que l'ordre en question est arrivé du haut de la

  9   hiérarchie. Galic était commandant à l'époque. Avant que l'unité ne soit

 10   partie pour réaliser cette tâche, on était au courant de l'importance de

 11   cette position de cette élévation. A cause de cela, il a été nécessaire que

 12   cette élévation se trouve sous notre contrôle.

 13   Q.  Au paragraphe que M. Thomas vous a montré -- il vous a lu ce

 14   paragraphe, le paragraphe 71.

 15   M. LUKIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant afficher ce

 16   paragraphe sur l'écran.

 17   Q.  Le paragraphe en question vous a été lu par M. Thomas. Je ne veux pas

 18   lire cela, parce que cela a déjà été consigné au compte rendu puisque M.

 19   Thomas l'a lu, mais vous avez dit que vers la fin du mois de décembre, lors

 20   de l'entretien que vous avez eu avec Perisic et Stupar, on vous a dit que

 21   vous alliez participer à l'offensive menée par la VRS. Il n'y a rien de

 22   plus là-dessus dans cette partie de la déclaration, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui, c'est ce que je vois. C'est vrai.

 24   Q.  Maintenant, j'aimerais vous poser des questions concernant l'action

 25   même. Ici nous avons des données selon lesquelles vous êtes parti là-bas le

 26   16 ou le 17 décembre, et d'après les documents qui ont été versés au

 27   dossier, on peut conclure que l'incident s'est produit le 27 décembre 1993.

 28   Hier vous avez parlé de ces jours-là, et pendant cette période de temps,

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  1   période d'à peu près une dizaine de jours, il n'y avait pas d'action à

  2   mener. Vous étiez à l'hôtel Vogosca tout ce temps-là, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui. Il n'y avait que des actions de reconnaissance, rien d'autre.

  4   Q.  J'ai compris, d'après votre témoignage, lorsque vous avez dit que

  5   l'action a eu un échec parce qu'il y avait des embuscades ennemies et

  6   probablement qu'ils ont reçu les informations pour ce qui est de votre

  7   attaque ? Est-ce que c'est ce que vous avez dit par rapport à cet incident

  8   ? Est-ce que c'est la façon à laquelle vous avez décrit cet incident ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Cette nuit-là, il y avait beaucoup de brouillard ?

 11   R.  Oui, ce jour-là, il faisait très mauvais. Je pense plutôt aux

 12   conditions météorologiques pour l'attaque.

 13   Q.  Et cette nuit-là également ?

 14   R.  Oui.

 15   M. LUKIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher le document P393.

 16   Pour ce qui est de ce document, j'aimerais qu'on l'affiche sur l'écran et

 17   que le document soit versé au dossier.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] De quel document parlez-vous ?

 19   M. LUKIC : [interprétation] Je ne veux pas que le document précédent soit

 20   versé au dossier.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 22   M. LUKIC : [interprétation]

 23   Q.  Je ne sais pas si le Procureur vous a montré ce document pendant la

 24   séance de récolement. Si cela n'a pas été le cas, je peux vous le montrer,

 25   parce que j'ai des questions à vous poser par rapport à ce document.

 26   R.  Je ne l'ai pas vu avant.

 27   Q.  Est-ce qu'on peut faire défiler le document vers le haut, un peu. Il

 28   faut également agrandir le document. J'aimerais vous poser des questions et

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  1   j'aimerais surtout lire une phrase à propos de laquelle j'aimerais avoir

  2   vos commentaires, mais je vais attendre que vous lisiez tout.

  3   M. LUKIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut faire défiler le texte un

  4   peu. Oui, ainsi que la version en anglais, s'il vous plaît. La version en

  5   B/C/S a été signée par -- il faut qu'on affiche la signature de l'auteur du

  6   document. Est-ce qu'on peut faire défiler vers le haut encore un peu la

  7   version en B/C/S. La première phrase de la première page, dans le bas de la

  8   page, pour que le témoin voie la signature.

  9   Q.  Donc le document se passe de commentaires parce qu'il s'agit d'un

 10   rapport que le commandant du Corps Sarajevo-Romanija, Galic, a envoyé en

 11   tant que rapport intérimaire à l'état-major principal de la VRS. J'aimerais

 12   avoir vos commentaires par rapport à une phrase dans ce rapport qui se

 13   trouve au troisième paragraphe, vers le milieu du texte, et je vais lire

 14   cela :

 15   "La raison pour laquelle il y avait d'aussi grandes pertes ont été les

 16   mauvaises estimations de nos ressources ainsi que du manque d'expérience

 17   pour ce qui est de la zone du Corps Romanija à Sarajevo, ainsi que de

 18   mauvaises évaluations pour ce qui est de la possibilité d'entrer dans le

 19   centre médical."

 20   D'abord, est-ce que vous pensez que ce rapport, qui a été écrit par le

 21   commandant du Corps Sarajevo-Romanija, Galic, reflétait la situation réelle

 22   ?

 23   R.  Oui, en principe, mais ça a été un peu dilué pour éviter une partie de

 24   la responsabilité pour la situation qui prévalait sur le terrain.

 25   Q.  "Pour ce qui est de l'opération Pancir-2, le 27 décembre 1993,

 26   l'attaque planifiée du commandant Stupar, le commandant de la 72e Brigade,

 27   et de son groupe a planifié cette opération contre ce centre médical. Est-

 28   ce que cela vous dit quelque chose, le centre médical Betanija Jaziro

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  1   [phon], pour ce qui est de cette opération Pancir-2 ?

  2   R.  En principe, je suis d'accord avec ce qui est écrit ici, mais encore

  3   une fois, il faut que je souligne que le rapport a été embelli ou un peu

  4   modifié vu la situation sur le terrain.

  5   Q.  Est-ce que vous vous souvenez avoir eu des renseignements de

  6   reconnaissance concernant le terrain avant l'action même ?

  7   R.  Non. C'est pour cela qu'on ne s'est pas mis d'accord pour ce qui est de

  8   notre départ sur le terrain, une partie de l'unité voulait partir avant, et

  9   l'autre ne voulait pas. Le général Galic a essayé de se débarrasser de la

 10   responsabilité des pertes et du lancement de l'action un peu irréfléchi.

 11   Et je ne suis pas d'accord pour ce qui est de l'expérience, parce que nos

 12   combattants étaient bien équipés et bien formés pour tout type de combat,

 13   soit en zone urbaine, soit dans les bois.

 14   Q.  Vous avez donné votre commentaire par rapport à ce rapport, mais je

 15   suis d'accord avec vous pour dire qu'il n'y avait pas assez de

 16   renseignements avant le lancement de l'action. Je suis d'accord avec vous

 17   pour dire cela, parce qu'on a des documents qui en parlent.

 18   R.  Oui, tout à fait. Et ils nous disaient "pourquoi avez-vous peur", mais

 19   il ne s'agissait pas de la peur, mais de la méconnaissance des faits, de la

 20   situation. Une opération à succès ne peut être menée que quand on connaît

 21   tous les facteurs pertinents pour mener une action d'une façon adéquate.

 22   M. LUKIC : [interprétation] Nous n'avons plus besoin de ce document; je

 23   vais continuer de vous poser des questions à ce sujet.

 24   Q.  Hier, vous avez déposé que plus tard on vous a offert d'autres

 25   territoires, et vous avez dit que cela vous a été offert parce que vous

 26   représentiez une unité d'élite et vous aidiez à contribuer à remonter le

 27   moral des unités.

 28   R. Oui.

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  1   Q. Pourtant, c'était un grand choc ?

  2   R. Oui.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Lukic, je pense que M. le

  4   Greffier a levé la main. Je ne sais pas pourquoi.

  5   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] M. le Greffier d'audience veut que

  7   vous éteigniez votre micro pendant que le témoin répond à vos questions.

  8   M. LUKIC : [interprétation] Je fais de mon mieux dans ce sens-là; mais le

  9   témoin commence à répondre à mes questions un peu trop vite. Je vous prie,

 10   Monsieur le Témoin, de ralentir un peu.

 11   Q.  Vous étiez une unité d'élite par excellence, mais en décembre 1993

 12   cette action n'a pas réussi, c'était une catastrophe. Est-ce que même après

 13   cette action dans la Republika Srpska vous avez toujours bénéficié de cette

 14   réputation d'unité d'élite ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Oui. Continuez la réponse.

 17   R.  Je peux expliquer cela. C'est ce que j'ai dit dans ma déclaration, il y

 18   avait la fuite des informations -- ils nous attendaient. Il n'était pas

 19   possible pour qui que ce soit de préparer un tel accueil, si je peux dire,

 20   pour nos hommes. Parce que beaucoup d'hommes ont été tués et blessés en une

 21   courte période de temps. Les combattants étaient au courant de ces

 22   informations, même le commandant de la VRS, puisque le général Galic a dit

 23   qu'on avait un "Turc" qui a dit ce que je viens de vous dire.

 24   Q.  Par rapport à votre réponse précédente, à savoir que vous n'avez pas

 25   été bien préparé, vous n'avez pas eu des renseignements de qualité pour ce

 26   qui est de la reconnaissance du terrain, vous ne saviez pas que ces

 27   bâtiments ont été si bien gardés ? Comment saviez-vous qu'il y avait des

 28   embuscades, qu'il y avait la fuite des informations ?

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  1   R.  En principe, je suis d'accord avec vous, parce que l'action a été menée

  2   sur un terrain plus large, mais sur le terrain où nous nous sommes engagés,

  3   il y avait des surprises et il était évident que quelque chose n'allait

  4   pas.

  5   Q.  Vous supposiez que quelque chose n'allait pas.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Juste un instant, Maître Lukic.

  7   Oui, Monsieur Thomas.

  8   M. THOMAS : [interprétation] Je m'excuse de cette interruption, Monsieur le

  9   Président, mais il y avait une erreur au compte rendu, à la page 10, ligne

 10   4. Au lieu du mot "attaque" il faut qu'il y figure le mot "Turc".

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

 12   M. THOMAS : [interprétation] Il a été dit "nous avons eu un Turc" et non

 13   pas, "nous avons attaqué."

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 15   M. LUKIC : [interprétation] Et la réponse du témoin à la page 10,

 16   ligne 15 n'a pas été consignée au compte rendu, la réponse où il a dit

 17   qu'il était d'accord avec moi.

 18   Q.  Une partie de votre groupe est retourné le lendemain, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   M. LUKIC : [interprétation] Nous pouvons rester en audience publique pour

 21   le moment.

 22   Q.  Hier, à la question de M. Thomas concernant d'autres localités dans la

 23   direction desquelles votre unité devait aller, vous avez mentionné Cazin.

 24   Vous souvenez-vous de votre réponse où vous avez mentionné Cazin ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  S'il le faut, nous pouvons afficher à nouveau votre déclaration sur

 27   l'écran, mais je vais vous rappeler qu'au paragraphe 70, en répondant à la

 28   question de M. Thomas, qu'à la proposition de Stupar, il a voulu partir

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  1   avec une partie de votre unité sur le territoire de Cazin avec une dizaine

  2   de membres volontaires de votre unité.

  3   R.  J'ai dit qu'il y avait des propositions, je ne sais pas quel terme

  4   utiliser, quel serait le terme adéquat, à savoir il a été demandé s'il y

  5   avait des gens intéressés à aller en tant que membres d'une unité dans une

  6   direction.

  7   Q.  On demande si un groupe veut partir pour s'acquitter d'une mission sur

  8   un territoire. Ça a été formulé ainsi, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Vous avez également mentionné hier Tuzla et Olovo à la page 46, ligne 3

 11   du compte rendu d'audience d'hier. Dans la déclaration que vous avez faite

 12   au bureau du Procureur que vous avez d'ailleurs lue, vous avez déclaré

 13   qu'on a proposé aux membres d'aller à Olovo puisque personne ne voulait y

 14   aller. Est-ce que vous vous souvenez de cela ? C'est un passage qui figure

 15   dans votre déclaration, celle que vous avez donnée au bureau du Procureur.

 16   R.  Oui, effectivement, je me souviens de cela. Il a été question de partir

 17   sur ce territoire.

 18   Q.  D'après la déclaration que vous avez faite au bureau du Procureur

 19   concernant votre bataillon, s'agissant du théâtre des opérations de

 20   Sarajevo, vous avez déclaré qu'une cinquantaine de personnes étaient

 21   parties de votre bataillon. Ce n'est pas le chiffre précis qui m'intéresse,

 22   mais j'aimerais savoir si c'était moins que cela ? Est-ce que c'était la

 23   moitié ?

 24   R.  Oui. Puisqu'une partie de ces hommes était encore en train de suivre

 25   une formation à Nis.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Thomas.

 27   M. THOMAS : [interprétation] Je suis vraiment désolé, Monsieur le

 28   Président, je suis en train de lire le paragraphe qui commence -- je

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  1   consulte le paragraphe 73, ainsi que mon éminent confrère, mais, en fait,

  2   voilà. Je viens de le retrouver. C'est au paragraphe 74. Désolé.

  3   M. LUKIC : [interprétation]

  4   Q.  Une autre question assez brève. De nouveau, je fais référence à votre

  5   déclaration. Hier, vous avez parlé de la formation que les membres de la

  6   VRS suivaient, c'était l'armée yougoslave qui, d'abord, se servait de ce

  7   polygone pour s'entraîner. Dans votre déclaration au paragraphe 67 vous en

  8   parlez et vous dites qu'en 1994 c'était moins fréquent qu'en 1993. Vous

  9   souvenez-vous de cela ?

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous demande de ralentir. Je sens

 11   que les interprètes ont du mal à vous suivre.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, effectivement.

 13   M. LUKIC : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur le Témoin, vous étiez dans l'armée yougoslave et pendant votre

 15   service, est-ce qu'il vous est arrivé de voir à l'époque un ordre du chef

 16   de l'état-major de la VJ ?

 17   R.  Concernant quoi, exactement ?

 18   Q.  Voilà. Une décision selon laquelle votre statut était régi mais est-ce

 19   que vous avez vu par exemple un ordre opérationnel ou un ordre relatif aux

 20   opérations de combat ?

 21   R.  Non.

 22   Q.  Au cours de cette même période, est-ce qu'il vous est arrivé de voir un

 23   ordre de la VRS ?

 24   R.  Non.

 25   Q.  Est-ce que vous savez qui est le commandant qui était à l'époque le

 26   commandant suprême de la VRS ?

 27   R.  A l'époque, c'était le général Ratko Mladic, et Karadzic aussi, en

 28   coulisses, si vous voulez. Mais c'était Ratko Mladic qui décidait du

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  1   déploiement des unités, de la façon dont ces unités seraient déployées sur

  2   le terrain.

  3   Q.  Hier, nous avons parlé de deux entretiens que vous avez eus liés à

  4   cette affaire avec le bureau du Procureur, un premier entretien qui a eu

  5   lieu en 2003 et l'autre en 2007. Vous avez eu l'occasion de consulter et de

  6   relire ces deux déclarations et dans ces deux déclarations, vous n'avez

  7   jamais mentionné le fait que l'une quelconque des personnes de votre unité

  8   s'est trouvée sur le territoire de Srebrenica en 1994. Vous n'en avez

  9   jamais parlé au bureau du Procureur, n'est-ce pas ?

 10   M. THOMAS : [interprétation] Objection, Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Thomas.

 12   M. THOMAS : [interprétation] Monsieur le Président, si mon éminent confrère

 13   souhaite faire cette affirmation, à ce moment-là, il faudrait donner la

 14   référence en question et nous renvoyer au document. Si mon éminent confrère

 15   souhaite insister sur les nuances de cette phrase, il devrait à ce moment-

 16   là montrer ce passage au témoin, le passage dans lequel on parle de cela.

 17   M. LUKIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, je ne

 18   m'attendais pas du tout à avoir une telle objection. Je ne m'attendais pas

 19   à cette objection de la part de mon éminent confrère. Donc je croyais qu'il

 20   était sans doute d'accord avec moi. Je ne sais pas si les interprètes

 21   m'entendent.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Répétez, je vous prie, alors.

 23   M. LUKIC : [interprétation] De façon très concrète, j'ai posé une question

 24   au témoin et j'étais convaincu que M. Thomas n'aurait aucune objection à

 25   cet égard puisque nous avons parlé entre nous, hier. J'ai posé une question

 26   très concrète, d'ailleurs je m'attendais à ce que M. Thomas soit d'accord

 27   avec moi pour ne pas montrer toutes les déclarations au témoin. Je voulais

 28   simplement savoir si le témoin se souvient d'avoir déclaré cela dans sa

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  1   déclaration, à savoir que les membres de son unité se trouvaient sur le

  2   territoire de Srebrenica en 1995. Si vous le souhaitez, il est certain que

  3   nous pouvons montrer la déclaration au témoin, mais je crois que M. Thomas

  4   peut confirmer que le témoin n'a jamais mentionné ce fait dans le cadre de

  5   ses entretiens. Et pour moi c'est un problème puisque je n'ai jamais

  6   rencontré ces mots-là ni dans les notes de récolement ni dans des

  7   déclarations.

  8   C'est pour ça que je me suis entretenu avec M. Thomas, hier. Mais si

  9   M. Thomas nie le fait que le témoin ait déclaré au bureau du Procureur dans

 10   quelque déclaration que ce soit que les membres de son unité se trouvaient

 11   à Srebrenica en 1995, à ce moment-là, je vais montrer au témoin sa

 12   déclaration qui fait 50 pages et on fera une pause, il lira la déclaration

 13   et puis par la suite je poserai la question. Voilà.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne suis pas tout à fait certain de

 15   vous suivre, tous les deux d'ailleurs. Dans la déclaration, Messieurs,

 16   parle-t-on du fait que des membres ou des unités du témoin étaient

 17   déployées à Srebrenica en 1995 ?

 18   Monsieur Thomas, vous contestez le fait qu'on fait référence à ceci dans un

 19   passage. Pourriez-vous nous indiquer où est ce passage.

 20   M. THOMAS : [interprétation] Dans les notes de récolement, il s'agit d'une

 21   phrase.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne parle pas des notes de

 23   récolement, je parle de la déclaration.

 24   M. THOMAS : [interprétation] En fait, je parle de deux déclarations. Il y a

 25   deux déclarations, l'une qui a été faite en 2003 et l'autre en 2007. La

 26   ligne en question est la suivante, c'est que le témoin avait entendu que le

 27   général Perisic avait également demandé que le 72e participe également dans

 28   les activités de Srebrenica en 1995.

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 12  Page blanche insérées d’assurer la correspondance entre la

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  1   Alors ce n'est pas une interprétation littérale. Si on fait cette

  2   affirmation, si on pose cette question au témoin, si on lui dit que c'est

  3   ce qu'il a déclaré, à ce moment-là, il faudrait lui montrer le passage dans

  4   lequel il a fait cette déclaration. Mais on ne peut pas ne pas lui montrer

  5   ce document, car en anglais, il faut bien nous assurer que ce qu'il a dit,

  6   c'est bien cela. Voilà.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Attendez. Je rejette l'objection.

  8   M. LUKIC : [interprétation] J'ai un problème, Monsieur le Président,

  9   Madame, Monsieur les Juges. Excusez-moi, je perds le fil de mes idées, car

 10   je dois allumer et éteindre le micro.

 11    Q.  Monsieur le Témoin, vous n'avez jamais déclaré au bureau du Procureur

 12   dans le cadre de vos entretiens que des membres de votre unité étaient à

 13   Srebrenica en 1995 ? Vous n'avez jamais déclaré cela, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui, c'est exact.

 15   Q.  Vous n'étiez plus membre de la VRS en 1995, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  En 2003, vos souvenirs étaient sans doute beaucoup plus frais que

 18   maintenant. Le bureau du Procureur vous a rappelé certains faits et votre

 19   mémoire était meilleure en 2003 que maintenant ?

 20   R.  Oui, c'est exact.

 21   Q.  Concernant ce que vous avez dit hier, est-ce que vous êtes certain que

 22   des membres de votre unité étaient sur le territoire de Srebrenica en 1995

 23   ou bien est-ce que c'est une supposition qui est la vôtre ? Puisque vous

 24   nous avez dit que Srebrenica était toujours un sujet important ?

 25   R.  Je ne peux pas affirmer que l'unité était déployée à Srebrenica en

 26   1995, car je n'étais pas là. Mais comme vous l'avez dit, je peux seulement

 27   supposer qu'une partie de l'unité était déployée sur le terrain, mais je ne

 28   peux pas vous le confirmer avec certitude.

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  1   Q.  Pouvez-vous nous donner le nom d'une personne qui vous ait dit, par

  2   exemple, Voilà, j'étais à Srebrenica en 1995 ?

  3   R.  Je ne voudrais pas citer de noms.

  4   Q.  Très bien. Est-ce que vous connaissez des gens qui vous l'ont dit ? Y

  5   a-t-il des noms que vous avez à l'esprit de personnes qui vous auraient

  6   fait cette déclaration-là ?

  7   R.  Vous voulez dire est-ce que je connais le nom d'une des personnes qui

  8   m'auraient déclaré être allé à Srebrenica en 1995 ? Vous parlez de mon

  9   unité à moi ? S'agissant directement des membres de mon unité, alors non.

 10   [Le conseil de la Défense se concerte]

 11   M. LUKIC : [interprétation]

 12   Q.  Vous avez parlé de votre unité, mais j'aimerais savoir, s'agissant

 13   d'une autre unité de la VRS, est-ce que vous connaissez le nom d'une

 14   personne qui était à Srebrenica en 1995. Mais je ne parle pas des unités de

 15   Frenki. Je ne parle pas de votre unité à vous. Une autre unité qui aurait

 16   été déployée sur le terrain.

 17   M. THOMAS : [interprétation] Objection quant à la pertinence de cette

 18   question, Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Maître Lukic.

 20   M. LUKIC : [interprétation] Je ne vais pas donner de réponse à cette

 21   objection. Je crois que M. Thomas a posé la même question hier. Je ne vois

 22   vraiment pas comment cela se fait-il que je ne puisse pas poser cette

 23   question. Je faisais simplement préciser certains faits.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Quelle était la question que M. Thomas

 25   a posée au témoin -- que vous avez posée au témoin ?

 26   M. LUKIC : [interprétation] Puisque le témoin a déclaré qu'aucun membre de

 27   son unité n'était à Srebrenica en 1995, je voulais savoir simplement si le

 28   témoin sait s'il y avait d'autres personnes appartenant à d'autres unités

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  1   qui étaient déployées sur le terrain de Srebrenica en 1995. C'est une

  2   question, d'ailleurs, qui a été posée par M. Thomas hier, donc la question

  3   ne manque pas de pertinence.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Objection rejetée.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je répondre ? Oui, j'ai entendu parler

  6   que des personnes étaient là-bas. J'en ai entendu parler, donc c'est des

  7   rumeurs dans le cadre de conversations lors de rencontres, et c'était

  8   justement à l'époque où on avait bombardé la Yougoslavie. Je rencontrais

  9   d'anciens collègues de l'unité, non pas directement de mon unité à moi mais

 10   d'autres unités, et j'ai entendu dire par eux qu'il y avait des membres qui

 11   avaient participé à des opérations. Je ne peux pas vous dire ce qui s'est

 12   passé réellement à l'époque. Je ne sais pas s'ils étaient partis sur une

 13   base volontaire ou bien étaient-ils déployés par leur commandant. Je ne le

 14   sais pas, mais j'avais entendu dire qu'il y avait des personnes qui avaient

 15   participé à ces opérations, mais je ne peux pas vous l'affirmer.

 16   M. LUKIC : [interprétation]

 17   Q.  Je dois insister et essayer d'obtenir de vous la chose suivante. Si

 18   vous voulez, on peut passer à huis clos partiel, et si vous vous souvenez

 19   des noms des personnes qui vous ont dit, à savoir qu'ils étaient sur le

 20   terrain, vous devez nous le dire. Donc si vous vous souvenez des noms des

 21   personnes qui vous ont parlé de cela, qui vous ont dit que d'autres

 22   personnes étaient allées à Srebrenica, à ce moment-là, nous pouvons passer

 23   à huis clos partiel, puisque vous témoignez devant un Tribunal et vous

 24   devez nous donner cette réponse.

 25   M. LUKIC : [interprétation] Pourrait-on passer à huis clos partiel, s'il

 26   vous plaît.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Passons à huis clos partiel.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

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  1   le Président, Madame, Monsieur les Juges.

  2   [Audience à huis clos partiel]

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 24   [Audience publique]

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup. Voulez-vous maintenant

 26   que nous disions au compte rendu d'audience que vous n'avez plus de

 27   questions, Monsieur Lukic, est-ce que ça devrait être dit en audience

 28   publique ?

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  1   M. LUKIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'ai maintenant

  2   terminé mon contre-interrogatoire du témoin. Merci.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Maître Lukic.

  4   Y a-t-il des questions supplémentaires, Monsieur Thomas ?

  5   M. THOMAS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, elles seront très

  6   brèves. Pouvons-nous pour cela passer à huis clos partiel.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pouvez-nous passer à huis clos

  8   partiel.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

 10   partiel, Monsieur le Président, Monsieur et Madame les Juges.

 11   [Audience à huis clos partiel]

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 13   [Audience publique]

 14   M. LUKIC : [interprétation] Oui. Mais si nous sommes en audience publique,

 15   comment va-t-on raccompagner le témoin en dehors du prétoire ?

 16   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous allons faire une pause et nous

 18   allons revenir à 16 heures. La séance est levée.

 19   --- L'audience est suspendue à 15 heures 34.

 20   --- L'audience est reprise à 15 heures 59.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Thomas.

 22   M. THOMAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Monsieur, Madame

 23   les Juges.

 24   Pendant la pause -- j'aimerais tout d'abord vous demander de repasser à

 25   huis clos partiel, je vous prie, Monsieur le Président.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pouvons-nous passer à huis clos.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos,

 28   Monsieur le Président, Monsieur, Madame les Juges.

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  1   [Audience à huis clos partiel]

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  8   [Audience à huis clos]

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 15   [Audience publique]

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 17   M. Thomas, vous avez la parole.

 18   M. THOMAS : [interprétation] Je vous remercie. J'en ai fini avec mes

 19   activités pour aujourd'hui, ainsi que Mme Sutherland et Mme Javier. Mme

 20   Bronagh va poser des questions au témoin suivant. Est-ce que nous pouvons

 21   maintenant quitter le prétoire ?

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, vous pouvez quitter le prétoire.

 23   M. THOMAS : [interprétation] Merci.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que c'est Mme McKenna ou M.

 25   Harmon qui va prendre la parole ?

 26   M. HARMON : [interprétation] Mme Bronagh McKenna va poser des questions au

 27   témoin suivant. Je vais essayer de l'aider pour ce qui est des choses

 28   techniques et nous pouvons commencer juste après.

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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  2   Mme McKenna, je suppose que la Défense voudrait soulever des questions

  3   procédurales avant l'entrée du témoin suivant. Je vois Me Guy-Smith debout.

  4   Maître Guy-Smith, voulez-vous que cela soit fait en audience publique ou à

  5   huis clos partiel ?

  6   M. GUY-SMITH : [interprétation] Nous pouvons le faire en audience publique.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Dans ce cas-là, nous pouvons lever les

  8   stores.

  9   M. GUY-SMITH : [interprétation] C'est ce que j'ai voulu demander en premier

 10   lieu.

 11   Mme McKENNA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, nous avons voulu

 12   également demander que cela soit fait.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Cela sera fait.

 14   M. GUY-SMITH : [interprétation] Pour ce qui est du témoin suivant, je me

 15   trouve dans une situation unique, parce qu'il y a une demande qui a été

 16   communiquée pour permettre à ce témoin de déposer avec un pseudonyme.

 17   Pourtant, après avoir discuté avec l'autre partie, nous avons conclu qu'il

 18   n'y avait pas de fondement juridique pour que cela soit accordé. Mais vu

 19   l'âge du témoin et certains points personnels, il y a des raisons de nature

 20   subjective pour que cela soit fait. Il nous a été demandé, pour ce qui est

 21   des raisons humanitaires, que soit accordé au témoin le pseudonyme. Et la

 22   raison pour laquelle je suis debout pour vous poser cette question c'est

 23   pour dire que le Règlement doit être respecté et je pense que la demande de

 24   l'autre partie est tout à fait raisonnable et nous ne nous opposons pas à

 25   cela.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Est-ce que vous confirmez ce

 27   point, Madame McKenna ?

 28   Mme McKENNA : [interprétation] Oui, nous confirmons cela, c'est-à-dire la

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  1   demande de pseudonyme.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est la seule mesure de protection

  3   pour ce témoin ?

  4   Mme McKENNA : [interprétation] Oui.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il ne demande ni de déposer à huis

  6   clos, ni à huis clos partiel.

  7   Mme McKENNA : [interprétation] Je vais demander qu'on passe à huis clos

  8   partiel lorsque le témoin parlera des noms des personnes de Srebrenica qui

  9   ont survécu, sinon la déposition se déroulera en audience publique.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 11   M. GUY-SMITH : [interprétation] Nous avons communiqué une requête in limine

 12   à la Chambre pour ce qui est du témoin qui va témoigner maintenant. Vu les

 13   points qui ont été soulevés dans la décision précédente de la Chambre

 14   concernant les faits admis au dossier, je ne sais pas exactement quels sont

 15   les points-clés du témoignage de ce témoin et ce que l'Accusation veut

 16   obtenir. J'aimerais donc présenter notre position de façon claire, à savoir

 17   que pour ce qui est des faits préalablement admis, nous avons l'intention

 18   de soulever des objections s'il y a des points soulevés qui n'entrent pas

 19   dans le cadre de notre accord avec l'Accusation.

 20   Mme McKENNA : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation accepte

 21   entièrement le fait avec la position de la Défense et tout ce qui a été dit

 22   et conclu dans l'accord sera respecté. Nous n'allons pas poser des

 23   questions pour ce qui est des faits contestés. Pourtant, ce témoin est venu

 24   ici pour déposer devant cette Chambre de première instance, il est venu de

 25   loin. Il faut d'abord établir le contexte dans lequel il va témoigner

 26   devant cette Chambre de première instance.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc je suppose que ce sont les

 28   problèmes à propos desquels les parties doivent discuter une fois les

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  1   problèmes surgis. Je pense que maintenant nous pouvons faire entrer le

  2   témoin.

  3   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bien sûr, mais j'ai voulu tout simplement

  4   dire à la Chambre que la Défense réagirait probablement de cette façon-là

  5   et qu'il n'y ait pas de surprises pour la Chambre.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien sûr.

  7   Nous pouvons maintenant faire entrer le témoin dans le prétoire.

  8   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  9    M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que le témoin peut prononcer

 10   la déclaration solennelle.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 12   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 13   LE TÉMOIN : TÉMOIN MP-294 [Assermenté]

 14   [Le témoin répond par l'interprète]

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur. Vous pouvez vous

 16   asseoir.

 17   Madame McKenna, vous avez la parole.

 18   Mme McKENNA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Interrogatoire principal par Mme McKenna : 

 20   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. Monsieur le Témoin,

 21   pouvez-vous m'entendre ?

 22   Mme McKENNA : [interprétation] Monsieur l'Huissier, je pense que le témoin

 23   ne peut pas nous entendre. Pouvez-vous nous aider.

 24   Q.  Bonjour, Monsieur le Témoin.

 25   R.  Bonjour.

 26    Q.  Est-ce que vous êtes assis confortablement ?

 27   R.  Ça va.

 28   Q.  Monsieur le Témoin, la Chambre de première instance vous a accordé des

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  1   mesures de protection. Cela veut dire que pendant votre déposition, nous

  2   allons nous adresser à vous en utilisant votre pseudonyme.

  3   R.  Bien. Je vous remercie pour cela.

  4   Mme McKENNA : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant montrer le

  5   papier sur lequel le pseudonyme du témoin figure, est-ce qu'on peut le

  6   montrer au témoin.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce qu'on peut montrer au témoin ce

  8   papier sur lequel figure son pseudonyme.

  9   Monsieur l'Huissier, pourriez-vous montrer cela au témoin.

 10   Mme McKENNA : [interprétation]

 11   Q.  Monsieur le Témoin, pouvez-vous confirmer s'il s'agit de votre prénom,

 12   de votre nom de famille et de votre année de

 13   naissance ?

 14   R.  Oui, oui, c'est cela.

 15   Mme McKENNA : [interprétation] Monsieur l'Huissier, pouvez-vous montrer le

 16   document portant le pseudonyme du témoin au conseil de la Défense.

 17   Monsieur le Président, est-ce que ce document peut être versé au dossier

 18   sous pli scellé.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Madame McKenna. Est-ce qu'on

 20   peut donc accorder une cote à ce document qui sera versé au dossier sous

 21   pli scellé.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document portera la cote P2691, versé

 23   au dossier sous pli scellé. Merci.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 25   Mme McKENNA : [interprétation]

 26   Q.  Monsieur le Témoin, quelle est votre appartenance

 27   ethnique ?

 28   R.  Je suis Musulman.

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  1   Q.  Quelle était votre profession avant la guerre, qu'est-ce que vous

  2   faisiez ?

  3   R.  J'étais agriculteur. Je partais parfois pour travailler au marché noir

  4   dans le domaine du bâtiment en tant que maçon pour gagner un peu plus

  5   d'argent. J'ai payé de l'impôt, mais ce n'était pas beaucoup.

  6   Q.  Merci. Pour ce qui est de vos diplômes, pouvez-vous nous dire quels

  7   sont vos diplômes ?

  8   R.  Je suis allé à l'école primaire pendant quatre ans, et c'est tout.

  9   Q.  Où étiez-vous en juillet 1995 ? Où viviez-vous ?

 10   R.  En 1995, j'étais dans la ville de Srebrenica. Avant, je vivais dans mon

 11   village, mais après on a été chassé de nos villages et je suis arrivé dans

 12   la ville de Srebrenica.

 13   Q.  Avec qui viviez-vous dans la ville de Srebrenica ?

 14   R.  Je vivais avec les membres de ma famille. J'avais deux fils, mon

 15   épouse, une fille et j'avais quatre petits-enfants. Il y avait également ma

 16   bru avec nous.

 17   Q.  Maintenant, j'aimerais attirer votre attention tout d'abord à la date

 18   du 11 juillet 1995. Qu'est-ce qui s'est passé ce jour-là ?

 19   R.  Ce jour-là, en fait, avant le 11 juillet, pendant cinq jours, il y

 20   avait des obus qui tombaient sans cesse. Et nous nous sommes rendus compte

 21   que notre armée a repris --

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Maître Guy-Smith.

 23   M. GUY-SMITH : [interprétation] Cette partie du témoignage n'est pas

 24   certainement englobée dans l'accord pour ce qui est des faits admis, pour

 25   ce qui est de la date en question.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame McKenna.

 27   Mme McKENNA : [interprétation] Pour ce qui est des points contestables, il

 28   s'agit des événements survenus le 12 et le 13 juillet. Pour établir le

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  1   contexte approprié de la déposition de ce témoin par rapport à des

  2   événements dont il va parler, il est nécessaire qu'il nous parle brièvement

  3   des événements du 11 juillet.M. GUY-SMITH : [interprétation] Je pense que

  4   Mme McKenna va un peu plus loin que cela lorsqu'elle parle des événements

  5   du 12 et du 13 juillet qui sont contestables, parce qu'il y a des points

  6   factuels que l'Accusation aimerait renforcer. Il s'agit, d'un côté, du

  7   nombre de personnes qui sont décédées ce jour-là, mais c'est quelque chose

  8   qui est certainement distinct par rapport à l'expression utilisée par Mme

  9   McKenna. J'aimerais rappeler à la Chambre et à mon éminent collègue qu'il y

 10   a un fait admis - et c'est le numéro 72 - qui a été soulevé, et cela

 11   concerne la décision prise le 22 septembre 2008 concernant la ferme

 12   militaire de Branjevo.

 13   Mme McKENNA : [interprétation] Monsieur le Président, mon éminent collègue

 14   a raison pour dire que tous les événements du 12 et du 13 juillet ne sont

 15   pas [comme interprété] contestables, mais je n'aimerais pas parler de cela

 16   devant le témoin.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'ai un problème. Vous avez un accord

 18   entre vous, et la Chambre n'est pas au courant des détails de cet accord.

 19   Maintenant, il y a des points qui ont été contestés pour ce qui est des

 20   termes de cet accord, et je ne pense pas que c'est à la Chambre de

 21   déterminer les points de votre accord.

 22   M. GUY-SMITH : [interprétation] Si je peux le dire, Monsieur le Président,

 23   la Chambre est au courant des points de l'accord, non seulement dans une

 24   certaine mesure, mais entièrement, parce que cet accord a été incorporé

 25   dans la décision de la Chambre du 24 août 2009 par rapport -- sinon il n'y

 26   a pas d'autre accord, mis à part cet accord --

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Guy-Smith, c'est une décision

 28   que la Chambre a rendue en août, mais je ne pense pas que vous pouvez vous

Page 9050

  1   attendre à ce que la Chambre se souvienne de toutes les décisions rendues à

  2   toutes les étapes de la procédure, parce que nous ne savions pas quel

  3   témoin viendrait et quand. Nous n'avons pas toutes les décisions et toutes

  4   les informations sous nos yeux.

  5   Donc il n'est pas possible pour la Chambre de savoir tout ce qui a

  6   été fait par le passé. Vous étiez au courant du fait que ce témoin

  7   viendrait mais pas la Chambre.

  8   M. GUY-SMITH : [interprétation] Parfois oui, parfois pas, Monsieur le

  9   Président.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais dans ce cas particulier, la

 11   Chambre ne savait pas s'il y aurait le témoin suivant après la déposition

 12   du témoin dernier.

 13   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je ne veux pas créer des problèmes.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Revenons au problème. Vous demandez à

 15   la Chambre de rendre la décision concernant votre accord, et la Chambre

 16   n'est pas au courant des détails de cet accord.

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation] Nous pouvons nous occuper de cela de

 18   plusieurs façons. Nous pouvons soit présenter à la Chambre la décision

 19   ainsi que la requête conjointe qui ont été communiquées à la Chambre ainsi

 20   que la décision portant sur les faits déjà admis, ou nous pouvons procéder

 21   étape par étape. Je peux soulever des questions de façon concrète au moment

 22   où un problème surgit.

 23   Je ne crois pas que jusqu'ici il y ait eu des propositions

 24   appropriées pour ce qui est de la présentation du contexte. Les faits

 25   particuliers représentent le point sur lequel le témoin peut témoigner.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Harmon, vous avez la parole.

 27   M. HARMON : [interprétation] J'ai été impliqué à cet accord et à des

 28   discussions avec la Défense pour ce qui est de cet accord, et Mme McKenna,

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  1   non. J'aimerais intervenir maintenant pour expliquer qu'avant il y avait un

  2   autre accord précédemment conclu entre les deux parties. Et comme la

  3   Chambre de première instance le sait, il ne s'agissait pas d'un accord qui

  4   a réglé tous les points contestés dans le premier accord. C'était seulement

  5   dans le deuxième accord que nous nous sommes mis d'accord sur certains

  6   points, et les parties ont décidé alors de communiquer à la Chambre le

  7   nouvel accord.

  8   Pour ce qui est des points qui sont restés à contester, ça concerne

  9   des aspects qui n'ont pas été mentionnés dans l'accord précédent. En

 10   d'autres termes, le nouvel accord traite des choses de façon plus précise.

 11   L'accord entre les parties portait sur les points à propos desquels les

 12   parties se sont mises d'accord, mais cela n'a pas été mentionné dans le

 13   nouvel accord.

 14   Mme McKenna essaie maintenant, en posant des questions à ce témoin,

 15   de parler de faits à propos desquels les parties se sont mises d'accord

 16   dans l'accord précédent, mais qui n'ont pas été mentionnés dans le deuxième

 17   accord. Plus particulièrement, j'aimerais attirer l'attention de mes

 18   collègues à l'annexe D de l'acte d'accusation, au paragraphe 1, il y avait

 19   eu un accord pour ce qui est des officiers et des soldats de la VRS et du

 20   MUP qui ont commis un certain nombre de meurtres opportunistes à Potocari

 21   le 12 et le 13. Ensuite, il y a, dans la deuxième phrase, un point qui a

 22   fait l'objet de l'accord précédent --

 23   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je dois vous interrompre, parce que si on

 24   va parler d'autres faits qui concernent la déposition de ce témoin, je ne

 25   pense pas que cela soit approprié que le témoin nous écoute.

 26   M. HARMON : [interprétation] Je suis d'accord avec vous, mais j'aimerais

 27   attirer votre attention à une autre chose.

 28   M. GUY-SMITH : [interprétation] C'est complètement différent par rapport au

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  1   premier point soulevé, Monsieur Harmon.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] D'abord, Monsieur Harmon, maintenant

  3   que vous avez dit que vous avez été impliqué en personne à cet accord, ne

  4   serait-il pas plus approprié que vous posiez des questions à ce témoin, et

  5   non pas Mme McKenna ?

  6   M. HARMON : [interprétation] Mme McKenna est en mesure tout à fait de poser

  7   des questions à ce témoin.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'aimerais que la Chambre rende une

  9   décision là-dessus assez vite. Je vais poser une question pour ce qui est

 10   des faits. Est-ce que la question posée par Mme McKenna n'entre pas dans le

 11   cadre convenu par les parties dans l'accord pour ce qui de la période

 12   couverte par l'acte d'accusation ?

 13   M. HARMON : [interprétation] Oui.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc l'objection est retenue.

 15   M. HARMON : [interprétation] Bien, nous allons procéder conformément à

 16   cela, Monsieur le Président.

 17   Mme McKENNA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 18   Q.  Monsieur le Témoin, j'aimerais maintenant qu'on parle du 12 juillet --

 19   R.  Le 11 juillet, nous sommes descendus à Potocari. Le 12 juillet, l'armée

 20   serbe est arrivée ainsi que Mladic. Ils ont commencé les négociations pour

 21   que tout ce peuple parte. Il y avait une femme qui est arrivée à ce moment-

 22   là, qui a commencé à crier, à pleurer, en disant au peuple, Ne partez pas,

 23   ne partez pas, parce que les Serbes ne veulent pas que la Croix-Rouge

 24   arrive. Donc elle a commencé à crier et à pleurer.

 25   Q.  Monsieur le Témoin, nous allons parler de cela au fur et à mesure. Vous

 26   avez dit que l'armée serbe est arrivée le 12, ensemble avec Mladic.

 27   R.  Oui.

 28   Q.  L'avez-vous vu en personne ?

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  1   R.  Je l'ai vu. Je me souviens du moment où du pain a été lancé d'un bord

  2   de camion au peuple. J'ai vu Mladic parce que les autres disaient qu'il

  3   s'agissait de lui. Ils ont filmé cette scène pour montrer au monde entier

  4   qu'ils étaient humains et bons. Lorsqu'ils ont fait le génocide et ils ont

  5   tué les gens, il n'y avait personne pour filmer cela ?

  6   Ce jour-là, l'armée est passée par là parmi tous ces gens-là, et vers

  7   la tombée de la nuit, les gens ont été pris, et à un moment donné, il y

  8   avait des gens qui commençaient à crier, les gens ont eu beaucoup peur. Il

  9   s'agissait d'une catastrophe. Ensuite, nous avons vu que beaucoup de mal

 10   allait être fait, et c'est comme ça que --

 11   M. GUY-SMITH : [interprétation] Excusez-moi, je vous prie. Je n'ai pas

 12   voulu me lever. Je suis vraiment navré, je voulais être poli. Mais

 13   malheureusement, la réponse -- d'ailleurs, je comprends la position de la

 14   Chambre quant à ce qui peut être contenu dans une réponse, mais si le

 15   témoin n'est pas contrôlé, si on ne dirige pas le témoin d'une certaine

 16   façon, ce qui arrivera, c'est qu'on aura une violation directe de l'accord

 17   que nous avons conclu avec l'Accusation. Il n'y a absolument aucune raison

 18   que l'on se mette d'accord sur certains points avec l'Accusation, à moins

 19   de s'en tenir. Il faut respecter les accords.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame McKenna, je vous prierais de

 21   bien vouloir contrôler d'une certaine façon les réponses du témoin. Donc

 22   faites attention, ne le laissez pas donner des réponses beaucoup trop

 23   longues. Vous étiez en train de parler de M. Mladic.

 24   Mme McKENNA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 25   Q.  Monsieur, vous nous décriviez, juste il y a quelques instants, l'armée

 26   serbe qui est arrivée ce jour-là. Pourriez-vous nous décrire les soldats

 27   que vous avez vus ?

 28   R.  C'était le 12. Les soldats étaient arrivés ce jour-là. Je ne sais pas

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  1   comment vous les décrire, je ne les connaissais pas. Ils portaient du fusil

  2   automatique pour la plupart et ils avaient des uniformes de camouflage.

  3   Alors c'est tout ce que je peux vous dire pour les décrire. Mais je ne

  4   connaissais pas les personnes individuellement.

  5   Q.  Merci beaucoup. Vous nous avez parlé de personnes qui avaient été

  6   sélectionnées. Pourriez-vous être un peu plus précis. Vous avez dit que

  7   dans la nuit du 12, on avait sélectionné certaines personnes. Qu'est-ce que

  8   vous vouliez dire par là exactement ?

  9   R.  Je voulais dire que chaque fois que quelqu'un était sélectionné, à

 10   chaque fois qu'on a fait sortir quelqu'un, la personne gémissait, pleurait,

 11   criait, et ensuite il y avait les personnes qui étaient autour qui

 12   gémissaient et criaient autour de lui également. Voilà, c'était une scène

 13   horrible. Par la suite, on pouvait entendre, 15 minutes plus tard, à

 14   l'extérieur, encore d'autres gémissements. On entendait des hurlements, on

 15   entendait la personne crier. Il nous arrivait également d'entendre des

 16   coups de feu.

 17   Q.  Monsieur le Témoin --

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Lorsqu'on faisait sortir des personnes

 19   d'où exactement ?

 20   Mme McKENNA : [interprétation]

 21   Q.  Monsieur le Témoin, où étiez-vous ?

 22   R.  Les personnes qui étaient --

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'ai posé une question au témoin, vous

 24   lui posez maintenant une autre question. Alors je vous pose cette question

 25   : Monsieur le Témoin, ces personnes se faisaient sortir d'où exactement ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] On les faisait sortir, on sélectionnait

 27   les personnes, certaines personnes étaient dans les usines, d'autres à

 28   l'extérieur. Il faisait nuit. Je ne peux pas connaître chaque personne

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  1   individuellement entre 33 000 personnes. J'entendais des cris, des

  2   hurlements. Des fois, c'était de là-bas; des fois, c'était d'ici.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Merci beaucoup,

  4   Monsieur le Témoin, vous avez répondu à ma question. Merci.

  5   Madame McKenna, vous pouvez continuer.

  6   Mme McKENNA : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur le Témoin, qui procédait à cette élection ? Qui les faisait

  8   sortir ?

  9   R.  C'était l'armée serbe.

 10   Q.  Est-ce que vous savez ce qui est arrivé une fois que ces personnes se

 11   faisaient emmener ?

 12   R.  Bien, on entendait des gémissements, des cris, au début plus fort et

 13   ensuite on les entendait de plus loin. Donc les gémissements s'éloignaient,

 14   et par la suite on n'entendait plus rien. Cela voulait dire que la personne

 15   n'était plus en vie. On entendait également des rafales, et je ne pouvais

 16   que conclure que ces personnes étaient tuées.

 17   Q.  Est-ce que vous avez personnellement assisté à un meurtre ?

 18   R.  Non, je n'ai pas été témoin oculaire de rien de la sorte, mais les gens

 19   ont dit que ce genre de choses arrivait et moi aussi j'avais des membres de

 20   ma famille qui sont disparus de cette façon-là.

 21   Q.  Merci beaucoup, Monsieur le Témoin. Je voudrais maintenant passer à la

 22   journée suivante, je parle du jeudi 13 juillet. Pourriez-vous nous

 23   expliquer ce qui vous est arrivé le lendemain ?

 24   R.  Le 13 juillet, c'était un jeudi. C'est à ce moment-là que je suis

 25   sorti. J'ai compris qu'il y avait un danger qui nous menaçait, je suis

 26   sorti et je me suis dit, Ce qui arrivera, arrivera. Ensuite, je suis parti

 27   en contrebas, je suis descendu là-bas, vers peut-être 9 heures. Je suis

 28   arrivé jusqu'au camion dans l'après-midi, peut-être vers 2 ou 3 heures.

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  1   Q.  Monsieur le Témoin, permettez-moi d'être un peu plus précise peut-être.

  2   Vous nous avez dit que vous étiez avec votre famille dans la nuit du 12

  3   juillet, que vous avez passé la nuit avec votre famille. Est-ce que vous

  4   étiez avec votre famille également le 13 juillet ?

  5   R.  Oui, sauf que ma femme s'est évanouie. Mon oncle paternel s'est

  6   évanoui. Ils avaient besoin des soins médicaux, donc ils ont été emmenés à

  7   l'urgence. Il y avait ma belle-fille et il y avait les petits-enfants, et

  8   nous sommes sortis comme ça.

  9   Q.  Comment êtes-vous parti de Potocari ?

 10   R.  Lorsque je suis arrivé, il y avait un barrage, et ils laissaient passer

 11   de 150 à 200 personnes comme ça, pour monter à bord de camions. Il y avait

 12   également un autre barrage qui se trouvait de 10 à 15 mètres et ils ne

 13   faisaient que séparer les hommes des femmes et les enfants. Il y avait une

 14   maison aussi. Ils étaient emmenés vers cette maison. Je transportais de

 15   l'eau pour les enfants, et j'ai donné de l'eau à un petit enfant de huit

 16   ans. Eux, ils sont partis dans le camion vers Tuzla et on m'a dirigé vers

 17   la maison.

 18   Q.  Que s'est-il passé lorsque vous êtes arrivé à la maison ?

 19   R.  [aucune interprétation]

 20   Q.  Excusez-moi, Monsieur le Témoin, je voudrais vous demander de nous

 21   expliquer comment vous êtes arrivé du barrage à la maison. Comment est-ce

 22   que vous y êtes allé ?

 23   R.  Avec mes petits-enfants et ma belle-fille, je voulais me diriger vers

 24   Tuzla. Ensuite, un soldat serbe --

 25   Q.  Monsieur le Témoin, vous nous avez expliqué qu'au deuxième barrage, on

 26   vous a séparé de votre femme et de vos petits-enfants. Que vous est-il

 27   arrivé lorsque vous avez été séparé ?

 28   R.  Ce qui est arrivé c'est qu'on m'a dirigé vers la maison. Il y avait un

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  1   très grand nombre de personnes dans cette maison qui avaient aussi fait

  2   l'objet de cette séparation. Par la suite, les autocars sont arrivés et ils

  3   nous ont transportés vers Bratunac.

  4   Q.  Permettez-moi de vous arrêter ici. Qui vous a emmené vers cette maison

  5   ?

  6   R.  Les soldats serbes qui étaient à côté du barrage. Il y en avait peut-

  7   être cinq à six, mais eux procédaient à ce processus de séparation. Ils

  8   disaient, Voilà, toi - avec un geste de la main - va à la maison. Et les

  9   personnes qui ne voulaient pas y aller de leur propre gré étaient emmenées

 10   par la force.

 11   Q.  Combien de temps est-ce que vous avez passé dans cette maison ?

 12   R.  Environ une demi-heure. Après cela, deux autocars sont arrivés et ils

 13   nous ont transportés à l'école Vuk Karadzic de Bratunac.

 14   Q.  Qui vous a accompagné ? Qui était avec vous à bord de ces autocars en

 15   direction de Bratunac ?

 16   R.  Voyons, l'armée serbe. C'est eux qui nous escortaient et ils montaient

 17   la garde. Il y avait deux soldats par autocar et ils étaient avec nous

 18   jusqu'à Bratunac.

 19   Q.  Vous nous avez dit être emmené à l'école de Vuk Karadzic de Bratunac.

 20   Est-ce que vous savez combien il y avait d'écoles à Bratunac ? Connaissez-

 21   vous d'autres écoles à Bratunac ?

 22   R.  Oui, je sais qu'il y avait une école élémentaire. Il y avait également

 23   l'école Vuk Karadzic. C'était une école supérieure. Ça, c'est les vieilles

 24   écoles, mais il y avait aussi de nouvelles écoles qui avaient été

 25   construites. Elles étaient ailleurs. Les écoles dont je vous parle sont de

 26   vieilles écoles.

 27   Q.  Bien. Merci. Et où se trouvaient l'école élémentaire et l'école que

 28   vous avez appelée l'école Vuk Karadzic ? Où se trouvaient-elles et à quelle

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  1   distance étaient-elles l'une de

  2   l'autre ?

  3   R.  L'école primaire était très proche de l'école secondaire. Elles étaient

  4   très près, elles étaient presque ensemble.

  5   Q.  Est-ce que vous saviez à l'époque quel était le nom de l'école où on

  6   vous avait emmené ?

  7   R.  Non, je ne connaissais pas le nom de l'école à l'époque, par la suite

  8   j'ai demandé quel est le nom de cette école et on m'a dit que c'était

  9   l'école Vuk Karadzic.

 10   Q.  Que s'est-il passé lorsque vous êtes arrivé à l'école ?

 11   R.  Lorsque nous sommes arrivés à l'école, un soldat s'est présenté. Il

 12   avait un uniforme bleu, un ceinturon blanc, un pistolet dans une gaine

 13   blanche. Il est arrivé là et il a battu un homme avec la crosse de son

 14   fusil automatique.Ensuite, quelqu'un lui a donné une ceinture et lui a dit,

 15   Ne le frappe pas comme ça avec la crosse de fusil. Mais il n'aimait pas le

 16   frapper avec cette ceinture ou ce tuyau d'arrosage. Il a pris son fusil et

 17   il a commencé à lui taper la tête avec ce fusil, et ce pauvre homme a

 18   commencé à saigner. Il avait une chemise blanche, donc la chemise blanche

 19   était complètement imbibée de sang.

 20   Ensuite, le soldat est sorti et on a entendu des hurlements de

 21   l'extérieur. Des fois, c'était des gémissements. J'entendais des rafales,

 22   des coups de feu. Des fois, on n'entendait plus de coups de feu, on

 23   n'entendait plus de voix et on avait compris qu'il s'agissait d'une vie qui

 24   était éteinte.

 25   Q.  Monsieur le Témoin, j'aimerais vous demander de nous parler des

 26   soldats. Vous nous avez décrit un soldat. Vous dites que ce soldat portait

 27   un uniforme bleu, un ceinturon blanc, qu'il avait également un pistolet.

 28   Cet uniforme, pour vous, que veut-il dire, que représente cet uniforme ?

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  1   R.  Oui, un ceinturon blanc, oui. Je ne sais pas comment vous l'expliquer.

  2   Je ne sais pas s'il s'agit de l'armée civile. Je ne sais pas si c'est

  3   l'armée militaire. C'était peut-être un policier. Je crois que c'était un

  4   policier, parce que je sais que les policiers militaires avaient des

  5   ceinturons blancs et des gaines blanches pour leur arme. Je sais que la

  6   police portait les uniformes bleus, la police civile, j'entends par là.

  7   Donc j'étais moi-même perplexe, mais je crois qu'il s'agissait d'un soldat

  8   serbe.

  9   Q.  Pour ce qui est maintenant de cet homme qui avait reçu des coups de

 10   crosse de fusil, que lui est-il arrivé ? Vous nous avez dit que le soldat

 11   avait quitté la pièce. Quel est le sort qui a été réservé à l'homme qui est

 12   resté dans la pièce et qui avait reçu ces coups ?

 13   R.  Celui qui est sorti ? Il est sorti.

 14   Q.  Non, excusez-moi, je vais être un peu plus claire. L'homme qui était

 15   asséné de coups et qui était complètement recouvert de sang, que lui est-il

 16   arrivé ?

 17   R.  Il est resté avec nous environ une demi-heure. Il était assis, ensuite

 18   un autre soldat s'est présenté à la porte. Il a fait un geste de la main et

 19   il a dit, Viens, toi, avec moi. Lui ne voulait pas. Il voyait très bien que

 20   rien de bien ne l'attendait, mais d'autres personnes ont dit, Mais il faut

 21   que tu te lèves. Alors il s'est levé, il est sorti. On entendait des

 22   gémissements, des pleurs, des cris et des coups de feu, et cela ne peut que

 23   vouloir dire qu'ils l'ont tué. Il n'est plus jamais revenu. En fait, ceci

 24   n'a pas duré une heure. Ce ne sont pas des événements qui se sont passés

 25   juste pendant une heure, non, c'était des jours et des nuits entières. On

 26   entendait des gémissements, des cris, des coups de feu.

 27   Q.  Allons-y étape par étape. Pourriez-vous d'abord décrire la pièce dans

 28   laquelle vous vous étiez trouvé une fois entré à l'école ?

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  1   R.  Il m'est bien difficile de vous décrire cette pièce. Elle était

  2   poussiéreuse. Il y avait beaucoup de meubles. Tout était cassé. C'était une

  3   vieille école abandonnée. Peut-être qu'aujourd'hui elle est rénovée, parce

  4   que les photos qu'on voit maintenant de cette école ne correspondent pas du

  5   tout à l'aspect que cette école avait à l'époque.

  6   Q.  Combien de personnes y avait-il dans cette pièce ?

  7   R.  De 150 à 200 personnes. Je ne les ai pas comptées. J'avais très peur.

  8   Je n'avais pas pensé à compter les gens.

  9   Q.  Vous nous avez dit -- plutôt, quelle était la taille de la pièce ? Est-

 10   ce que vous aviez de l'espace entre vous ? Aviez-vous suffisamment d'espace

 11   ?

 12   R.  Je peux vous donner une taille approximative, 4 mètres par 5 mètres. Je

 13   ne sais pas. Je n'ai pas vraiment mesuré.

 14   Q.  Après nous avoir expliqué ce qui était arrivé à l'homme qui s'était

 15   fait battre avec cette crosse de fusil, vous nous avez dit que ce genre de

 16   chose arrivait toutes les nuits et pendant la journée. Que s'est-il passé ?

 17   R.  Non. C'était deux nuits et une journée, sans arrêt. Il y avait des

 18   changements de tours de garde. Il ne s'agissait pas des mêmes personnes. On

 19   entendait tout le temps des gens crier, hurler. Les personnes se faisaient

 20   sortir des pièces.

 21   Q.  Et qui faisait sortir les personnes des pièces ?

 22   R.  C'était l'armée serbe.

 23   Q.  Et qu'arrivait-il aux personnes qui se faisaient sortir de ces pièces ?

 24   R.  Ces personnes gémissaient de toutes sortes de façons différentes. Des

 25   fois, c'étaient des petites voix, des fois, de grosses voix. Par la suite,

 26   on entendait des coups de feu, des rafales également. Les voix

 27   disparaissaient après un certain temps et on n'entendait plus rien. Par la

 28   suite, ils faisaient de nouveau irruption dans les pièces et ils emmenaient

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  1   d'autres personnes et c'est ainsi que les choses se sont déroulées pendant

  2   toute la période pendant laquelle j'y étais.

  3   Q.  A quelle fréquence les soldats serbes sont venus dans la pièce où vous

  4   étiez pour emmener des personnes ?

  5   R.  Des fois, une fois aux demi-heures, des fois une fois par heure. Il y

  6   avait également d'autres pièces. Des fois c'était à gauche, des fois

  7   c'était à droite. A la demi-heure ou deux fois par 30 minutes ou une fois

  8   par heure.

  9   Q.  Pourriez-vous nous expliquer combien de fois a-t-on emmené des

 10   personnes qui étaient dans votre pièce à vous pendant toute la période de

 11   votre séjour là-bas ?

 12   R.  D'après ce que j'ai vu, il y avait peut-être sept ou huit personnes,

 13   mais je n'ai pas tout suivi parce que j'avais peur. Il y avait des morts,

 14   voir un mort, voir comment les gens étaient traités me donnait mal au cœur.

 15   Des fois on passait à tabac des personnes et leurs visages étaient

 16   tellement déformés, pleins d'ecchymoses que je n'arrivais même pas à les

 17   reconnaître. On n'avait pas suffisamment d'eau et il n'y avait pas de

 18   nourriture non plus. On ne pensait qu'à survivre et on savait très bien que

 19   ça n'allait pas bien se terminer. Beaucoup de personnes sont mortes.

 20   Q.  Les personnes qui avaient été emmenées depuis votre pièce à vous sont-

 21   elles jamais revenues ?

 22   R.  Dans la pièce, vous voulez dire ?

 23   Q.  Oui. Est-ce que vous les avez jamais plus revues ?

 24   R.  Non, pas mes voisins, les gens qui étaient avec moi. Mais je ne

 25   connaissais pas les Serbes.

 26   Q.  Non. Permettez-moi d'être un petit peu plus précise, Monsieur le

 27   Témoin. J'entends par là les personnes qui se sont fait emmener de la pièce

 28   dans laquelle vous étiez par les Serbes. Vous nous avez décrit le processus

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  1   et vous nous avez également décrit qu'à chaque fois que ces personnes se

  2   faisaient sortir, par la suite vous entendiez des cris et des gémissements.

  3   Est-ce que vous avez jamais vu ces personnes revenir ?

  4   R.  Non, absolument pas. Chaque fois qu'une personne était emmenée, elle ne

  5   revenait plus jamais. C'était clair. C'est tout à fait clair.

  6   Q.  J'aimerais maintenant passer au moment où vous avez quitté l'école.

  7   Pourriez-vous nous décrire d'abord de quelle façon vous avez quitté

  8   l'école.

  9   R.  Ces soldats sont venus et ils nous ont dit, Vous irez à Tuzla. Ensuite

 10   nous sommes sortis, il y avait des autocars à l'extérieur. Il y en avait

 11   plusieurs mais je ne les ai pas comptés. Ensuite, nous avons pris place à

 12   bord de ces autocars et nous nous sommes dirigés vers Bratunac. Ils nous

 13   ont donné un peu de pain, mais on n'avait pas suffisamment de pain pour

 14   tout le monde. Il y avait comme une sorte de gâteau mais il était sec, je

 15   ne pouvais pas le manger. Quand nous sommes arrivés à Konjevic Polje, il y

 16   avait peut-être des combats, peut-être une embuscade. De toute façon, on ne

 17   pouvait pas passer. Et quelques personnes avaient été emmenées vers la

 18   forêt et je crois que des personnes avaient été également prises dans la

 19   forêt. Elles avaient été placées à bord de l'autocar et ensuite nous nous

 20   sommes dirigés vers Zvornik.

 21   Lorsque nous sommes arrivés à Zvornik, j'ai regardé les maisons. Ils

 22   étaient partis en direction du pont vers la Serbie. Ensuite, ils sont allés

 23   le long de cette route jusqu'à Loznica.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Maître Guy-Smith.

 25   M. GUY-SMITH : [interprétation] Monsieur le Président, si je puis, je crois

 26   que ce dont parle le témoin fait partie de l'accord qui avait été convenu

 27   entre les parties. Je me penche très précisément sur les paragraphes 22,

 28   23, 24 et 25 de l'accord convenu entre les parties.

Page 9064

  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame McKenna.

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation] Comme j'ai dit un peu plus tôt, il y a

  3   encore une question qui reste en suspens et c'est la question qui porte sur

  4   un certain nombre de personnes et du sort qui leur a été réservé. En fait,

  5   je voudrais redire ce que j'ai dit il y a quelques instants concernant les

  6   faits jugés et plus particulièrement je parle du fait admis 72, qui porte

  7   sur cette question approximativement.

  8   Mme McKENNA : [interprétation] Les faits admis auxquels fait référence mon

  9   éminent confrère portent sur l'étape suivante du récit du témoin et nous y

 10   arriverons sous peu. Pour l'instant, le témoin nous décrit le périple qu'il

 11   a entrepris lorsqu'il a été détenu à l'école de Bratunac pour aller jusqu'à

 12   Pilica.

 13   M. GUY-SMITH : [interprétation] Est-ce que cela fait partie du contexte de

 14   cet interrogatoire ?

 15   Mme McKENNA : [interprétation] Oui, justement. C'est cela.

 16   M. GUY-SMITH : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

 17   Juges, je dois vraiment dire que je suis très préoccupé quant aux accords

 18   que nous avons conclu avec l'Accusation pour ce qui est de cette affaire-

 19   ci. Et je me demande maintenant si effectivement nous n'avons pas convenu

 20   cet accord de bonne foi. Justement, nous sommes en train de faire ce que

 21   nous avions dit que nous ne ferions pas. Je crois que l'emploi d'un

 22   témoignage contextuel, simplement pour démontrer un fait qui sera présenté,

 23   d'après moi, se trouve à l'extérieur ou va au-delà de l'accord. Je suis

 24   très préoccupé par ceci car je ne sais pas si l'Accusation détient des

 25   informations qu'ils n'ont pas partagées avec nous. Il y a peut-être une

 26   intention de ne pas avoir voulu partager cette intention.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Madame McKenna.

 28   Mme McKENNA : [interprétation] En fait, je constate l'heure et  nous

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  1   pourrions peut-être parler des préoccupations de mon éminent confrère

  2   pendant la pause et nous pourrons sans doute, à ce moment-là, réaborder

  3   cette question.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Alors nous allons prendre

  5   une pause jusqu'à 17 heures 45.

  6   --- L'audience est suspendue à 17 heures 15.

  7   --- L'audience est reprise à 17 heures 45.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame McKenna, je vous prie de bien

  9   vouloir poursuivre.

 10   Mme McKENNA : [interprétation]

 11   Q.  Monsieur le Témoin --

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Juste un instant, nous avons une

 13   objection qu'il faut traiter. Vous avez dit que vous alliez résoudre cette

 14   objection pendant la pause.

 15   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je pense que nous avons peut-être trouvé un

 16   mécanisme pour que les questions qui sont posées et les réponses qui sont

 17   données soient ciblées et contrôlées. Je pense que ça permettrait peut-être

 18   de résoudre la solution. C'est la seule chose que je puisse proposer pour

 19   l'instant. Je ne peux pas dire que notre réunion nous ait donné un accord

 20   sur de nombreuses choses, mais nous avons été d'accord sur ce point. Nous

 21   avons discuté sur ces questions qui étaient toujours contestées jusqu'à un

 22   certain point. J'essaie d'être aussi équitable et juste que possible, de

 23   part et d'autre.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous devons résoudre l'objection. Est-

 25   ce que vous retirez votre objection ? Que nous dites-vous à ce propos ?

 26   M. GUY-SMITH : [interprétation] Est-ce que je peux, pour l'instant,

 27   présenter cette objection.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Alors ça veut dire qu'il faut que je

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  1   me prononce sur cette objection.

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation] Très bien.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame McKenna, vous avez dit que vous

  4   alliez résoudre le problème pendant la pause. Comment l'avez-vous résolu ?

  5   Mme McKENNA : [interprétation] Monsieur le Président, je pense qu'il

  6   faudrait peut-être passer à la deuxième étape de la déposition du témoin et

  7   peut-être cela résoudra-t-il les préoccupations de mon ami.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non, Madame, nous avons une objection.

  9   La Chambre de première instance doit se prononcer sur cette objection.

 10   Mme McKENNA : [interprétation] Alors est-ce que je peux vous demander un

 11   instant, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui.

 13   M. GUY-SMITH : [interprétation] Effectivement, si nous passions au point

 14   suivant, la question trouvera sa résolution.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] A ce moment-là, vous devez retirer

 16   formellement votre objection. Maître Guy-Smith, je vous ai posé une

 17   question, vous aviez dit que vous présentiez cette objection.

 18   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je l'ai fait car j'avais un petit peu

 19   d'hésitation parce que je suis dans une position particulière. Si je retire

 20   mon objection et que le problème se pose de nouveau, à ce moment-là, il

 21   faudrait que je pose de nouveau cette objection, et je vais me trouver dans

 22   une situation un peu critique et vous aurez l'impression que je suis en

 23   train de sortir quelque chose que j'ai gardé en réserve dans ma poche,

 24   alors que ce n'est pas du tout ce que j'essaie de faire.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non, je ne vous critique pas, je dis

 26   simplement que du point de vue procédural, il y a une objection et qu'il

 27   faut se prononcer et résoudre la question.

 28   M. GUY-SMITH : [interprétation] Pour faciliter les choses, je ne crois pas

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  1   que je puisse retirer pour l'instant mon objection de façon procédurale.

  2   Finalement, je le fais quand même en espérant que cette solution sera

  3   trouvée lors de la prochaine question qui sera abordée.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Guy-Smith.

  5   Oui, Madame McKenna, vous pouvez poursuivre.

  6   Mme McKENNA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   Q.  Monsieur le Témoin, d'après ce que j'ai compris, vous avez été ensuite

  8   détenu, mais à l'issue de détention, on vous a chargé dans un autocar pour

  9   vous emmener dans un endroit particulier. Vous voyez à quoi je fais

 10   référence ici ?

 11   R.  Il s'agit de Pilica. C'est lorsque j'ai quitté ce centre culturel --

 12   Q.  Je vais être précise. Vous avez été détenu à Pilica, j'aimerais que

 13   vous nous décriviez ce qui s'est passé lorsqu'on vous a chargé à bord des

 14   autocars à Pilica. Est-ce que vous pouvez nous dire ce qui s'est passé à ce

 15   moment-là ?

 16   R.  Lorsqu'on nous a chargé à bord des autocars à Pilica, on nous a emmenés

 17   à Branjevo. On a fait peut-être 2 kilomètres et demi, et lorsque nous

 18   sommes arrivés près d'une colline, nous avons pu entendre des rafales de

 19   coups de feu, nous avons pu entendre qu'il y avait du bruit. Lorsque nous

 20   sommes arrivés à Branjevo, les autocars se sont garés sur le bas-côté et ce

 21   faisant, les portes se sont ouvertes et des membres de l'armée serbe se

 22   trouvaient aux abords du bus, tout autour.

 23   Q.  Combien y avait-il de personnes à bord de l'autocar dans lequel vous

 24   vous trouviez ?

 25   R.  Une cinquantaine. 51, 52, peut-être. Il y avait une cinquantaine de

 26   sièges. En règle générale, les autocars ont une cinquantaine de sièges. Il

 27   y avait peut-être une ou deux personnes qui se tenaient debout et il y

 28   avait également une escorte de soldats pour chaque autocar.

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  1   Q.  Et lorsque vous êtes arrivés --

  2   R.  Lorsque nous sommes arrivés, les autocars ont stationné sur le bas-

  3   côté, les portes se sont ouvertes, des soldats serbes se trouvaient là. Ils

  4   ont commencé à proférer des jurons à notre encontre et à l'égard de nos

  5   mères, et ils nous ont demandé de sortir des autocars.

  6   Q.  Que pouviez-vous voir lorsque vous êtes arrivé, à partir des autocars

  7   où vous vous trouviez ?

  8   R.  Je pouvais voir un arbre fruitier et des bûches. Cet arbre aurait pu

  9   être un pommier. Et puis, un peu plus loin, il y avait des granges ou des

 10   maisons ou des dépendances, mais je ne pouvais pas regarder librement, je

 11   ne pourrais pas vraiment dire ce qui s'y trouvait. Ensuite, nous sommes

 12   descendus. Quand la moitié des gens était descendue déjà, ils ont

 13   interrompu le flot des passagers et on a emmené la moitié des passagers

 14   vers l'endroit où ils allaient être exécutés. J'ai vu la scène depuis le

 15   bus et j'ai vu comment on les tuait dans ce champ. Et lorsque les rafales

 16   de coups de feu ont cessé, les soldats sont revenus aux autocars.

 17   Lorsqu'ils sont arrivés à proximité des bus, ils ont commencé à crier,

 18   Allez, sortez, Alija ne va certainement pas vous aider. Ils proféraient des

 19   jurons à l'égard de nos mères, à l'égard d'Alija, en disant, Alija ne va

 20   certainement pas vous sauver. Ce n'est que là que j'ai compris que la vie

 21   pouvait se terminer en un instant. Il n'y avait que quelques secondes qui

 22   nous séparaient de la mort. Et ce n'est que lorsque nous sortis du bus que

 23   j'ai commencé à marcher avec la colonne, et un homme m'a dit, Donnez-moi

 24   vos marks, je lui ai dit que je n'en avais pas, et à ce moment-là, il m'a

 25   donné un coup dans l'estomac.

 26   Q.  Est-ce que vous pouvez décrire l'itinéraire que vous avez suivi lorsque

 27   vous avez quitté le bus ?

 28   R.  Lorsque nous sommes sortis du bus, nous avons pris un chemin à

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  1   destination du lieu d'exécution et il y avait effectivement des cadavres

  2   qui jonchaient sur le sentier. La personne m'a demandé de lui donner de

  3   l'argent, je lui ai répondu que je n'avais pas de marks et là il m'a

  4   effectivement frappé dans l'estomac. Je me suis retourné, j'ai regardé

  5   derrière moi. Il y avait un soldat qui se trouvait derrière moi et il a

  6   crié au premier, Ne commets de génocide, tue-le, prends un fusil entre les

  7   mains et tue-le comme le ferait un soldat. Une personne dans la colonne a

  8   crié, Donnez-nous d'abord une gorgée d'eau à boire, et ensuite vous pourrez

  9   nous tuer, mais il n'a pas été entendu.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que je peux vous poser une

 11   question, Monsieur le Témoin ? Est-ce que vous connaissez le nom du lieu où

 12   vous avez été déchargés des autocars ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Le nom de l'endroit, c'était Branjevo, je ne

 14   le connaissais pas à l'époque, ce sont les autres qui ont prononcé ce nom.

 15   Il y avait, comme je l'ai, dit des granges ou des écuries, enfin, il

 16   s'agissait d'une sorte d'exploitation agricole.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

 18   Veuillez poursuivre, Madame McKenna.

 19   Mme McKENNA : [interprétation]

 20   Q.  Monsieur le Témoin, est-ce que vous pouvez poursuivre, est-ce que

 21   vous pouvez nous décrire l'endroit où vous avez été emmené par les soldats

 22   ?

 23   R.  Nous avons été emmenés à l'emplacement où les autres personnes avaient

 24   été tuées. On avait l'impression que les gens dormaient et qu'ils étaient

 25   alignés bien en rang. Lorsque nous sommes arrivés à cet endroit, on devait

 26   marcher au milieu de rangs entiers de cadavres, ils étaient très nombreux.

 27   Lorsque nous sommes arrivés au bout de ce périple, on nous a dit, Alignez-

 28   vous avec les autres et tournez-nous le dos. C'est exactement ce que nous

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  1   avons fait.

  2   Aucun ordre n'a été donné. Au lieu des tirs, on nous a dit

  3   simplement, Couchez-vous. Mais c'est à ce moment-là que nous avons entendu

  4   des rafales de tirs. Je suis tombé immédiatement, et les autres aussi.

  5   Ensuite, quelqu'un a posé une question, Est-ce qu'il y a quelqu'un de

  6   vivant ? Quelqu'un a dit, Oui, moi je suis vivant. Quelqu'un d'autre a dit,

  7   Moi aussi je suis vivant, allez-y, tuez-moi. Moi je n'ai rien dit; je suis

  8   resté muet.

  9   Ensuite, une seule balle a été tirée, en fait, il a tiré deux balles.

 10   Ensuite, ils sont partis chercher un autre lot de passagers.

 11   Q.  Monsieur le Témoin, qu'avez-vous fait à ce moment-là ?

 12   R.  Je n'ai rien dit. J'attendais de voir ce qui allait se passer. Je me

 13   demandais en fait si je devrais lever la main et me faire tuer comme les

 14   autres, mais je ne l'ai pas fait, et ils sont revenus avec une autre

 15   colonne d'individus. Ils n'arrêtaient pas d'aller en chercher, de tuer des

 16   gens et de les aligner au loin, et ils les tuaient par rafales de coups de

 17   feu.

 18   Q.  Combien de colonnes y avait-il lorsque vous étiez là, sans rien

 19   dire, en état de choc ? Combien de personnes ont été tuées par armes à feu

 20   lorsque vous étiez là ?

 21   R.  Je crois qu'il y a eu encore six ou sept colonnes de plus, et je ne

 22   sais pas combien il y avait de corps allongés. Je n'avais pas envie de les

 23   compter. Je sais qu'il y en avait beaucoup, il y avait beaucoup de

 24   cadavres, j'étais entouré de cadavres aussi loin que je pouvais regarder.

 25   Q.  Combien de personnes se trouvaient dans votre colonne ?

 26   R.  En moyenne, il y en avait entre 20 et 27 par colonne, je dirais, tout

 27   dépendait du nombre de personnes qui descendaient des autocars à la fois.

 28   Ils formaient deux colonnes avec un bus. Voilà comment ils exécutaient les

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  1   gens.

  2   Q.  Qu'est-ce qui s'est passé lorsqu'il n'y a plus eu de colonnes

  3   d'individus qui arrivaient ?

  4   R.  Lorsque tout le monde a été tué, lorsqu'il n'y avait plus de colonnes

  5   de passagers, ils sont repartis à l'endroit où se trouvaient les autocars

  6   et ils ont trouvé refuge à l'ombre, ils s'y sont reposés. J'ai essayé de

  7   libérer mes mains mais je ne pouvais pas. J'ai essayé de me libérer et j'ai

  8   eu la chance de pouvoir le faire. Ensuite, j'ai remis mes mains entre les

  9   liens pour me donner un petit peu le temps de réfléchir car on pouvait

 10   croire qu'elles étaient toujours attachées derrière mon dos. En effet, je

 11   savais qu'une patrouille allait arriver pour inspecter les cadavres, et je

 12   savais qu'il y avait un risque qu'ils comprennent que je m'étais libéré de

 13   mes liens, voilà pourquoi j'ai replacé mes mains dans leurs liens.

 14   Effectivement ils sont venus, au moins deux ou trois fois. Ils ont

 15   fait des rondes. Et une fois, lorsqu'ils sont arrivés, ils étaient cinq.

 16   Ensuite, il y a eu un tir, quelqu'un a dit, Regarde-le qui s'en va. Et il y

 17   en a eu un autre aussi qui partait. C'était des coups de feu isolés à ce

 18   moment-là qui étaient tirés. Il y avait quatre soldats serbes qui ont couru

 19   derrière eux pour les chasser, et le cinquième qui restait à l'arrière.

 20   Deux de ces soldats sont ensuite revenus. Un soldat a demandé à ces deux-là

 21   qu'est-ce qui s'est passé. La réponse a été que l'un d'entre eux avait pu

 22   s'échapper, ce qui veut dire qu'ils avaient réussi à tuer l'autre.

 23   Q.  Comment est-ce que vous vous êtes échappé ?

 24   R.  Les soldats se parlaient disant, Nous avons commis un génocide comme

 25   celui de Jasenovac en 1941. Plus tard, lorsqu'ils sont de nouveau partis,

 26   quelqu'un qui se trouvait un peu éloigné de moi murmurait à voix basse.

 27   J'ai tourné la tête sur le côté et j'ai demandé s'il y avait quelqu'un de

 28   vivant en disant qu'il fallait s'enfuir.

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  1   C'est à ce moment-là que j'ai commencé à me libérer de mes liens.

  2   J'ai regardé et j'ai vu deux personnes qui essayaient de se réfugier dans

  3   un buisson où je voulais également me réfugier. Moi aussi, effectivement,

  4   je me suis levé à ce moment-là, j'ai marché sur un cadavre. Ce faisant,

  5   j'ai essayé de voir s'il y avait des gens et j'ai entendu quelqu'un qui

  6   disait, Mais regarde-le, il s'enfuit. Et j'avais peur que si on me voyait,

  7   ça en soit fini de moi.

  8   Donc moi aussi je suis allé à quatre pattes dans le buisson où les

  9   deux autres s'étaient réfugiés. J'ai regardé derrière moi et j'ai vu deux

 10   autres personnes qui faisaient la même chose derrière moi. Eux aussi

 11   venaient dans notre direction et ils avaient effacé leurs traces derrière

 12   eux pour ne pas être remarqués. Tous les autres étaient allongés, morts.

 13   Mais il n'y avait pas beaucoup de buissons, il y avait peut-être une

 14   centaine ou 150 mètres carrés au total. Et c'est là que nous nous sommes

 15   cachés.

 16   Les soldats sont arrivés de nouveau. Ils se promenaient parmi les

 17   cadavres, ils essayaient de faire l'état de la situation, et nous n'étions

 18   pas loin d'eux à ce moment-là. Mais ensuite la nuit est tombée et ils sont

 19   partis. Nous sommes alors sortis de nos buissons, de l'autre côté, mais de

 20   ce côté-là aussi il y avait des cadavres autour de nous. Ensuite nous

 21   sommes partis dans une forêt --

 22   Q.  Monsieur le Témoin, puis-je vous interrompre.

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Combien de cadavres avez-vous vus ou combien de cadavres estimez-vous

 25   qu'il y avait sur les lieux ?

 26   R.  Je dirais qu'il devait y en avoir eu au moins un millier. Peut-être

 27   entre 1 000 et 1 500, c'est un ordre de grandeur. Bien entendu, je ne

 28   connais pas le nombre exact de cadavres qui s'y trouvaient.

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  1   Q.  Et pourquoi faites-vous cette estimation ? Sur quelle base faites-vous

  2   cette estimation ?

  3   R.  Parce que je voyais combien de cadavres se trouvaient dans ce champ. En

  4   fait, le champ entier était couvert de cadavres. Il y avait ceux qui

  5   s'étaient rendus à Potocari : des personnes âgées, des enfants qui avaient

  6   environ 14 ans, mais il y avait également des personnes qui avaient 80 ans

  7   parmi ces cadavres. L'année dernière, un homme qui était enterré, qui était

  8   mort à 84 ans, je le connaissais personnellement. Je dirais

  9   qu'effectivement il y avait des gens qui allaient jusqu'à 80 ans. Il y en a

 10   même qui étaient plus vieux que cela. C'était des civils, c'était des

 11   personnes âgées, c'était des enfants.

 12   Q.  Y avait-il ce jour-là des membres de votre famille qui étaient présents

 13   ?

 14   M. GUY-SMITH : [interprétation] Objection. Quelle est la pertinence de

 15   cette question ?

 16   Mme McKENNA : [interprétation] Je retire cette question.

 17   Monsieur le Président, Monsieur, Madame les Juges, puis-je avoir un instant

 18   pour discuter avec mon collègue.

 19   [Le conseil de l'Accusation se concerte] 

 20   Mme McKENNA : [interprétation]

 21   Q.  Monsieur le Témoin, je ne vais pas vous demander d'autres détails de la

 22   façon dont vous vous êtes échappé et dont vous avez survécu, mais en tout

 23   cas, merci beaucoup de ce que vous avez dit.

 24   R.  Très bien.

 25   Mme McKENNA : [interprétation] Monsieur le Président, cela conclut mon

 26   interrogatoire.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Madame McKenna.

 28   Maître Guy-Smith.

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  1   M. GUY-SMITH : [interprétation] Puis-je, s'il vous plaît, Monsieur le

  2   Président, sur la base de l'état du compte rendu d'audience lié à l'accord

  3   qui était convenu, je crois qu'il serait bon d'avoir cinq minutes pour que

  4   nous puissions consulter notre client. Et je crois qu'ensuite de cela, nous

  5   pourrons avancer beaucoup plus rapidement.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Nous allons prendre une

  7   courte pause et appelez-nous lorsque vous serez prêts à reprendre.

  8   --- La pause est prise à 18 heures 11.

  9   --- La pause est terminée à 18 heures 20.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Guy-Smith, vous avez la parole.

 11   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, je voudrais remercier la Chambre de

 12   première instance de m'avoir accordé une pause. Comme cela, j'ai pu parler

 13   à mon client, M. Perisic, qui, également, vous remercie. Et je peux vous

 14   dire que nous n'avons pas de questions.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur Guy-Smith.

 16   Monsieur le Témoin, ça nous mène à la fin de votre témoignage. Merci

 17   beaucoup pour être venu ici pour déposer devant ce Tribunal. Maintenant,

 18   vous pouvez sortir de ce prétoire et rentrer chez vous.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie à vous de m'avoir convoqué

 20   ici pour que je dise la vérité, parce que je cherche la justice, moi. Et je

 21   veux voir Mladic ici au banc des accusés, parce qu'il le mérite. Merci.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous souhaite bon retour chez vous.

 23   [Le témoin se retire]

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame McKenna.

 25   Mme McKENNA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Donc on en a

 26   fini avec nos témoins pour aujourd'hui. Nous n'avons pas d'autre témoin.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup. Alors on a fini pour

 28   aujourd'hui. L'audience est levée. Nous continuerons demain à 14 heures 15

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  1   dans le prétoire numéro II.

  2   M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'avons plus de

  3   témoins. Le témoin suivant est prévu pour déposer le 28 septembre. On m'a

  4   informé là-dessus.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien, dans ce cas-là, nous

  6   continuerons le 28 septembre, à 9 heures du matin, dans la salle d'audience

  7   numéro II. L'audience est levée.

  8   --- L'audience est levée à 18 heures 23 et reprendra le lundi 28 septembre

  9   2009, à 9 heures 00.

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