Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 29 mars 2011

  2   [Réquisitoires]

  3   [Audience publique]

  4   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour à tous. On pourrait savoir qui

  7   représente l'Accusation, pour commencer.

  8   M. HARMON : [interprétation] Bonjour à tous. Mark Harmon, April Carter,

  9   Bronagh McKenna, Rafael La Cruz, Carmela Javier et Barney Thomas pour

 10   l'Accusation.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Et pour la Défense.

 12   M. LUKIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour à tous.

 13   Le général Perisic est représenté, comme hier, par Novak Lukic, Gregor Guy-

 14   Smith, Tina Drolec, Boris Zorko, Chad Mair et Deirdre Montgomery.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Maître Lukic.

 16   Oui, Madame Carter.

 17   Mme CARTER : [interprétation] Je vais parler du troisième critère de la

 18   responsabilité, notamment la fourniture d'hommes de l'unité spéciale la VJ

 19   pour participer à l'opération de Pancir pour prendre le mont Zuc. La

 20   Défense a avancé dans le paragraphe 814 de son mémoire en clôture qu'aucun

 21   acte n'a été avancé en conjonction avec l'opération de Pancir pour prendre

 22   le mont Zuc, et plus précisément qu'il n'y a aucun lien entre l'opération

 23   du mont Zuc et les incidents mentionnés dans l'acte d'accusation.

 24   L'Accusation avance que la Défense comprend mal les crimes qui sont

 25   reprochés à M. Perisic. L'acte d'accusation dans les paragraphes 40 à 46

 26   précise que la base des crimes qui constitue en fait une campagne de

 27   bombardement de Sarajevo qui a résulté des morts et des blessés au sein de

 28   la population civile. Ces incidents sont représentants la campagne. Et je

 


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  1   voudrais passer à la campagne à proprement parler.

  2   La campagne contre Sarajevo a commencé en mai 1992. Le 30 mai 1992,

  3   Slobodan Milosevic avait déjà déclaré le bombardement de Sarajevo comme

  4   étant sanglant et criminel et pour lequel il n'y avait aucune

  5   justification. Les membres du 30e Personnel Ratko Mladic, Stanislav Galic,

  6   Dragomir Milosevic et, pour une brève période, Cedo Sladoje ont orchestré

  7   et exécuté cette campagne. Martin Bell a décrit le siège. Il a déclaré que

  8   : "Il s'agissait d'une guerre qui était menée dans un environnement moderne

  9   et urbain mais qui ressemblait à la Grande Guerre. Il s'agissait en fait de

 10   la roulette russe à grande envergure."

 11   Dans le mémoire en clôture, la Défense ne renie pas le fait que les civils

 12   étaient pris à partie à Sarajevo. On peut trouver ceci au paragraphe 554 du

 13   mémoire. Les premières victimes étaient une femme et son enfant qui ont été

 14   touchés par un tireur isolé de la VRS alors qu'ils étaient dans une rue le

 15   3 septembre 1993. C'est l'incident B-1. Suite à la promotion de Perisic en

 16   tant que chef d'état-major général en août 1993, les tirs se sont

 17   intensifiés. On pourrait passer rapidement en audience publique [comme

 18   interprété].

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 20   Mme CARTER : [aucune interprétation]

 21   M. LE GREFFIER : [aucune interprétation]

 22   [Audience à huis clos partiel]

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  5   [Audience publique]

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  7   Mme CARTER : [interprétation] Durant l'hiver 1993, on a observé trois

  8   incidents durant ces premiers mois. Le premier incident remonte au 2

  9   novembre 1993; c'était l'incident B-2. Une femme a été touchée alors

 10   qu'elle était à vélo; il s'agit de l'incident B-3, le 6 janvier 1994. Six

 11   enfants jouaient lorsque la VRS a pris à partie ces enfants par le biais

 12   d'un obus. Ces six enfants ont été tués, trois autres ont été blessés. Huit

 13   personnes supplémentaires ont été tuées et 18 ont été blessées lorsque les

 14   obus sont tombés sur Dobrinja en février 1994. Et enfin, le marché de

 15   Markale a été touché le 5 février et a tué 60 personnes, en blessant 140

 16   supplémentaires; incident A-3.

 17   Comme ceci a été également décrit, l'opération Pancir pour reprendre le

 18   mont Zuc, et Perisic avait déployé des membres des unités spéciales de la

 19   VJ, a également eu lieu entre décembre 1993 et février 1994. Cependant,

 20   même durant les périodes où les bombardements n'étaient pas à leur plein,

 21   les civils n'étaient pas en sécurité. J'en ai pour preuve les incidents B-

 22   4, B-5 et B-6 qui se sont déroulés durant l'été 1994 où trois adultes et un

 23   enfant ont été pris à partie par un tireur isolé à bord d'un tramway le 19

 24   juin 1994. Deux jeunes filles ont été tuées alors qu'elles étaient dans la

 25   rue le 26 juin 1994. Un garçon de 13 ans qui était dans la rue également

 26   devant un magasin a été touché par une balle d'un tireur isolé le 26 juin

 27   1994.

 28   Est-ce que l'on peut passer à huis clos partiel.

 


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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allons-y.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous y sommes.

  3   [Audience à huis clos partiel]

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 18   [Audience publique]

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Vous pouvez reprendre, Madame

 20   Carter.

 21   Mme CARTER : [interprétation] Merci. Le marché de Bascarsija a été bombardé

 22   durant ces bombardements, tuant deux personnes et blessant d'autres

 23   personnes le 22 décembre 1994. Les Juges de la Chambre se souviendront

 24   également de l'incident du tramway du 23 novembre 1994. Et vous vous

 25   souviendrez que dans les remarques liminaires de M. Harmon, il a parlé du

 26   fait que Mme Karacic gardait encore les traces de ces blessures qui lui ont

 27   été infligées durant ce jour fatidique.

 28   Une femme a été également tuée lorsqu'elle ramassait du bois dans


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  1   l'arrière-cour le 1er décembre 1994, et trois autres personnes ont fait

  2   l'objet d'un tir isolé à bord d'un tramway le 27 février 1994 [comme

  3   interprété].

  4   Est-ce qu'on pourrait passer à huis clos partiel.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allons-y.

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous y sommes.

  7   [Audience à huis clos partiel]

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 15   [Audience publique]

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Poursuivez, Madame Carter.

 17   Mme CARTER : [interprétation] Deux autres personnes ont fait l'objet de

 18   tirs isolés à bord d'un tramway le 3 mars 1995. Durant ce printemps, on a

 19   observé également l'introduction de bombes aériennes contre Sarajevo, même

 20   si l'expert de la Défense Djokic a reconnu qu'il était tout à fait

 21   inapproprié et une erreur d'utiliser des bombes aériennes dans un

 22   environnement urbain. Néanmoins, deux bombes aériennes ont été lancées le

 23   24 mai 1995, tuant deux personnes et blessant sept personnes; incidents A-5

 24   et A-6. En réponse à ces tirs et à ces agressions, la Force de réaction

 25   rapide des Nations Unies a été déployée en juin 1995. Durant ce mois,

 26   beaucoup de dangers se sont présentés en raison des tirs de la VRS, en

 27   raison donc des tirs de mortiers et d'artillerie à raison de 150 par jour

 28   qui ont été décrits par le Témoin Brennskag.

 


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  1   Ceci incluait également des tirs et des bombardements contre les centres de

  2   distribution de l'eau qui ont blessé 12 personnes et en ont tué sept.

  3   Trente-cinq personnes ont été tuées durant cet été, et 78 personnes ont été

  4   blessées lors de l'incident de Markale le 28 août 1995. La VRS a poursuivi

  5   cette campagne contre Sarajevo jusqu'au 21 novembre 1995. L'incident

  6   mentionné à l'acte d'accusation donne les détails de milliers de victimes

  7   qui ont fait l'objet de ce siège. Perisic officiait en tant que chef

  8   d'état-major général de la VJ pendant 26 mois de ce siège.

  9   Pour passer maintenant à l'opération du mont Zuc qui a eu lieu durant le

 10   contexte du siège. L'opération du mont Zuc et l'aide de M. Perisic sont

 11   détaillées dans les paragraphes 483 à 502 du mémoire en clôture de

 12   l'Accusation. Perisic a rencontré Slobodan Milosevic, Ratko Mladic, Radovan

 13   Karadzic et Momcilo Krajisnik, ainsi que d'autres le 13 décembre 1993.

 14   Durant cette réunion, Karadzic a identifié les objectifs stratégiques des

 15   Bosno-serbes, dont l'un d'entre eux était de procéder à la partition de

 16   Sarajevo. Karadzic a rappelé que Sarajevo était une priorité et que c'était

 17   la clé de la guerre. Il a poursuivi en disant que : "A Sarajevo, il fallait

 18   saisir des points plus élevés dans la ville pour garantir une percée." Et

 19   il a mentionné que le mont Zuc était tout particulièrement important.

 20   Le 14 décembre 1993, Perisic et Mladic se sont rencontrés à deux

 21   reprises. Durant la première réunion, Perisic s'est engagé à fournir des

 22   armes. Et durant la deuxième réunion, il s'est engagé à fournir une

 23   centaine de soldats professionnels avant le 20 décembre 1993 pour les

 24   mettre à la disposition de la SRK et pour les doter de matériel de combat.

 25   Le 14 décembre 1993, Mladic a également publié un addendum à sa directive

 26   numéro 6, qui mentionnait qu'en plus de la SRK, les forces spéciales de VJ,

 27   à compter d'un maximum de 120 hommes, mèneraient une attaque contre les

 28   axes de Pofalici et Zuc. Les forces spéciales de la VJ étaient dotées

 


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  1   d'hommes de la 72e Brigade spéciale, de la Brigade des Gardes, de la 63e

  2   Brigade de Parachutistes et de la Brigade des Blindés. Chacune de ces

  3   brigades faisait partie des unités spéciales de la VJ, dont le corps était

  4   directement subordonné à M. Perisic.

  5   L'état de préparation de ce corps devait être en place au 19 décembre

  6   pour l'attaque. Cependant, avant cela, le 15, Perisic a rencontré

  7   directement les membres de la 72e Brigade spéciale et leur a demandé de se

  8   déployer et de participer aux opérations offensives de la VRS contre Zuc.

  9   Lorsque les hommes de la 72e Brigade spéciale sont arrivés, le 30e centre

 10   de Personnel, par le truchement de M. Galic, les a informés des actions à

 11   venir. Il leur a dit que si Zuc était pris, tout Sarajevo serait sous le

 12   contrôle de la SRK.

 13   Un sentiment similaire a été mentionné par Perisic lorsqu'il a parlé

 14   aux hommes de la 72e Brigade, lorsqu'il a mentionné que Zuc était un lieu

 15   stratégique qui devait être contrôlé par les forces bosno-serbes.

 16   Est-ce que l'on pourrait maintenant passer à huis clos partiel, s'il

 17   vous plaît.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allons-y.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous y sommes.

 20   [Audience à huis clos partiel]

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  8   [Audience publique]

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Cela fait partie également des

 10   requêtes que nous avons déjà formulées de ralentir, Madame Carter. Vous

 11   pouvez continuer.

 12   Mme CARTER : [interprétation] En plus des chiffres décrits et repris dans

 13   le supplément à la directive 6, au 31 décembre 1993, environ 200 membres de

 14   la Brigade des Gardes avaient été déployés le long de la ligne de front.

 15   Alors qu'elle était présente là-bas, la Brigade des Gardes s'est engagée

 16   dans des opérations de combat défensives et offensives et a formé des

 17   tireurs isolés. Le 7 janvier 1994, les Nations Unies, par le truchement du

 18   président du Conseil de sécurité, ont condamné les actions à Sarajevo, en

 19   condamnant particulièrement la pression militaire continue ainsi que les

 20   bombardements effrénés par les forces bosno-serbes. On peut trouver ceci à

 21   la pièce P2475.

 22   Comme ceci a été décrit dans les annexes du rapport d'expert qui a été

 23   versé par le biais de la pièce P1535, à la page 36, du 4 au 7 janvier,

 24   Sarajevo a été touchée dans cette courte période par 3 915 obus. De plus,

 25   la Défense avance dans le paragraphe 520 de son mémoire en clôture que

 26   l'Accusation n'a pas précisé l'objectif d'avoir demandé des rapports

 27   d'experts. Les Juges de la Chambre ont accepté le versement des documents

 28   P1112 et P1535, qui constituent l'annexe de ce rapport, sans restriction

 


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  1   dans sa décision du 21 décembre 2009 qui portait sur les documents qui

  2   avaient reçu une cote MFI. P1536, le rapport dans sa forme officielle,

  3   figurait donc à la page du compte rendu d'audience 7 382, lignes 2 à 6.

  4   Je reviens maintenant aux faits qui sous-tendent la campagne de Zuc. Le

  5   lendemain de la condamnation par le président du Conseil de sécurité des

  6   Nations Unies, Perisic est arrivé à Vogosca et a rencontré les commandants

  7   de la VJ et de la VRS, ainsi que des hommes politiques de la Republika

  8   Srpska. Les membres du 30e centre du Personnel, Mladic et Galic, étaient

  9   présents, en plus du responsable du Corps des unités spéciales de la VJ.

 10   Les hommes qui faisaient partie de ce corps ne se sont pas retirés avant la

 11   période allant du 27 au 30 janvier 1994. Pour replacer la campagne du mont

 12   Zuc dans son contexte, on peut dire que ces actions menées par le général

 13   Perisic ont prêté assistance au bombardement continu de Sarajevo, pour

 14   lequel on lui reproche d'avoir participé.

 15   J'attends maintenant de savoir s'il y a des questions venant des Juges de

 16   la Chambre, et ensuite je redonnerai la parole à M. Harmon.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Madame Carter.

 18   Oui, Monsieur Harmon.

 19   M. HARMON : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

 20   Monsieur les Juges.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour, Monsieur Harmon.

 22   M. HARMON : [interprétation] Je vais essayer de changer le volume.

 23   Hier soir, j'ai réfléchi à nos échanges d'hier. J'ai lu le compte rendu

 24   d'audience, et avant de présenter mes arguments concernant les points 7(3),

 25   il y a deux points au niveau du compte rendu d'audience que je voudrais

 26   aborder. Tout d'abord, cela porte sur une réponse que j'ai donnée au Juge

 27   Moloto, que l'on trouve à la page du compte rendu d'audience 14 661. Ma

 28   réponse était :


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  1   "Ma position est identique à la situation que vous avez mentionnée dans

  2   votre situation hypothétique."

  3   Et dans les lignes qui ont suivi : "J'ai dit que la situation est identique

  4   en termes du cadre de notre requête."

  5   En fait, les faits de cette situation hypothétique ne sont pas identiques.

  6   Les principes juridiques applicables sont les mêmes, mais dans ce cas,

  7   quand on parle d'aider et encourager, on ne fait pas un distinguo pour

  8   savoir si l'assistance substantielle pour commettre des crimes est fournie

  9   à des forces armées qui auraient un caractère national ou international.

 10   Donc, quand je parlais de situations identiques, je parlais du cadre

 11   juridique au sein duquel cela s'appliquait, cadre juridique au sein duquel

 12   on peut appliquer la loi dans toute situation factuelle --

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant que vous ne passiez à votre

 14   point suivant --

 15   M. HARMON : [interprétation] Oui.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je voudrais vous rappeler qu'il ne

 17   s'agissait pas d'un cas hypothétique; il s'agit d'un cas pratique. Je

 18   voudrais savoir, en fait, quelle est votre base et votre autorité pour

 19   avancer qu'un commandant est coupable d'avoir aidé et encouragé la

 20   commission de crimes de ses subordonnés, simplement parce qu'il leur a

 21   fourni des armes et des munitions, il a payé ses salaires et il les a

 22   envoyés sur le théâtre de la guerre, et c'est à ce moment-là qu'ils ont

 23   commis des crimes.

 24   M. HARMON : [aucune interprétation]

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous demanderais de citer la

 26   jurisprudence du Tribunal ou la jurisprudence de manière générale.

 27   M. HARMON : [interprétation] Je n'ai pas la jurisprudence à portée de main,

 28   mais je dirais que pour ce qui est de l'aide et de l'encouragement --


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  1   enfin, tout d'abord, il n'y a pas d'autres affaires de ce type. Le Tribunal

  2   connaît cette affaire qui est unique, et cette affaire fera jurisprudence.

  3   Donc je ne peux pas vous donner d'élément tangible ni de jurisprudence pour

  4   répondre à votre question.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. C'est la question à

  6   laquelle je souhaitais que vous répondiez.

  7   M. HARMON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  8   Tout d'abord -- deuxièmement, je voudrais revenir à la question que vous

  9   avez posée concernant les articles 7(1) et 7(3). Nous n'avons pas répondu à

 10   votre question avec satisfaction, et j'ai donc demandé à Mme McKenna de

 11   présenter des arguments à ce sujet, et ensuite je continuerai à parler de

 12   mes arguments concernant l'article 7(3).

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Madame McKenna, c'est à vous.

 14   Mme McKENNA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Comme M.

 15   Harmon a dit, je vais parler donc de faits reprochés de manière cumulée et

 16   je fournirai des détails concernant la position de l'Accusation en la

 17   matière.

 18   Selon l'Accusation, la responsabilité en vertu des articles 7(1) et 7(3)

 19   n'est pas mutuellement exclusive. Le jugement en appel dans l'affaire

 20   Blaskic, paragraphe 91, stipule que les dispositions des articles 7(1) et

 21   7(3) ont des connotations qui signifient que les catégories sont très

 22   distinctes en matière de responsabilité pénale. Tout mode de

 23   responsabilité, lorsque ça fait l'objet de la même affaire, reflète des

 24   aspects différents de la responsabilité pénale qui est reprochée à un

 25   accusé. L'aide et l'encouragement est une forme de responsabilité

 26   accessoire et nécessite en fait un auteur principal qui commet ces crimes.

 27   Le bureau du Procureur avance que Perisic est responsable d'avoir aidé et

 28   encouragé les auteurs principaux de ces crimes, que Perisic lui-même n'est


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  1   pas l'auteur principal, mais que la responsabilité est liée au fait qu'il a

  2   aidé à la fourniture des actes positifs qui ont permis d'aider les crimes.

  3   En vertu de l'article 7(3), on reproche à Perisic d'être responsable

  4   d'avoir manqué à éviter que ces actes ne soient commis ou de n'avoir pas

  5   puni les auteurs de ces actes alors que c'était sa responsabilité de le

  6   faire.

  7   Donc, compte tenu des faits en l'espèce, l'Accusation avance que M.

  8   Perisic est responsable en vertu des articles 7(1) et 7(3). Cependant,

  9   comme vous l'avez mentionné hier, la jurisprudence du Tribunal accepte que

 10   ce n'est pas logique de considérer qu'un accusé est responsable à la fois

 11   de ne pas avoir procédé à des sanctions contre ceux qui avaient commis les

 12   actes et de le tenir responsable des actes qui ont été commis par d'autres

 13   personnes, et, par conséquent, les Juges de la Chambre décideront de savoir

 14   s'ils choisissent la responsabilité plus directe ou la responsabilité moins

 15   directe [comme interprété], à savoir l'article 7(1).

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je note que vous avez, en fait,

 17   légèrement dévié de la question de départ, à savoir que nous parlions de

 18   faits reprochés cumulatifs dans une même affaire. J'avais demandé si on

 19   pouvait avoir des faits reprochés qui étaient mutuellement exclusifs pour

 20   le même comportement. Mais vous pouvez vous asseoir. Je veux simplement

 21   vous rappeler qu'il s'agissait de ma question.

 22   Mme McKENNA : [interprétation] Merci.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous en prie.

 24   Oui, Monsieur Harmon.

 25   M. HARMON : [interprétation] Tout d'abord, je voudrais parler des

 26   réglementations en matière du caractère applicable du droit international

 27   en matière de conflit armé et si ceci s'applique au général Perisic. Vous

 28   vous souviendrez que ces réglementations avaient été abordées par M.


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  1   Starcevic. Il y avait des discussions concernant les réglementations dans

  2   notre mémoire en clôture, paragraphes 717 à 720, ainsi que pièce P2304.

  3   Une violation de ces réglementations pourrait constituer une violation du

  4   code de discipline militaire, et M. Perisic devait faire respecter ce code

  5   de discipline militaire. La position de la Défense est la suivante, à

  6   savoir que les réglementations s'appliquent conformément à ce qui est

  7   mentionné dans les paragraphes 975 à 969 [comme interprété] du mémoire de

  8   la Défense. La Défense avance que les réglementations n'imposaient pas

  9   qu'une réglementation soit appliquée par le général Perisic parce que M.

 10   Starcevic a avancé que ces dispositions ne s'appliquaient que dans le cas

 11   de conflits armés qui avaient un caractère international. Deuxièmement,

 12   durant la période couverte par l'acte d'accusation, il n'y avait pas de

 13   conflit armé, c'est ce qu'avance la Défense.

 14   Notre position est que ces réglementations s'appliquaient au général

 15   Perisic et signifiaient qu'il avait des obligations de les faire

 16   s'appliquer. Nous l'avançons aussi parce que M. Starcevic, quelque temps

 17   après avoir expliqué aux Juges de cette Chambre que les dépositions ne

 18   s'appliquaient que dans un conflit de caractère international, a ensuite

 19   expliqué qu'étant donné que les crimes étaient tellement graves et

 20   tellement terribles, les parties au sein de la RSFY dans le conflit avaient

 21   signé un protocole d'accord spécial, qu'ils s'engageaient à appliquer

 22   toutes les règles qui s'appliqueraient uniquement dans une situation

 23   habituelle à ces conflits armés à caractère international.

 24   On peut trouver ceci dans la déposition de M. Starcevic aux pages 6 976 et

 25   6 977 de sa déposition.

 26   Sur la base de ces réglementations, l'état-major général de la VJ a donc

 27   promulgué deux ordres stipulant qu'il fallait se conformer au droit

 28   humanitaire international et à leurs dispositions. Il y a donc une


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  1   transition entre la RSFY et la RFY. Et la pièce P198, qui est un article de

  2   presse portant sur la promulgation de la constitution de la nouvelle

  3   République fédérale de Yougoslavie, il y est mentionné que :

  4   "La RFY devra se tenir à toutes les obligations que la RFY avait

  5   signées au niveau international."

  6   De plus, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, la pièce P1183,

  7   à savoir la Loi de la RFY sur la Défense, article 19, mentionne, et je cite

  8   : "Les membres des forces armées de Yougoslavie qui participeront à des

  9   combats armés devront, quelles que soient les circonstances, se conformer

 10   aux règles du droit international en matière de conflit armé et aux autres

 11   règles," et cetera, et cetera.

 12   Donc nous savons, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, que

 13   les réglementations s'appliquaient et que, étant donné qu'il fallait

 14   appliquer ces lois internationales en matière de conflit armé, le général

 15   Perisic se tenait de continuer à appliquer ces obligations une fois que la

 16   RSFY était devenue la RFY.

 17   Et je voudrais maintenant passer à l'article 7(3). Il y a trois éléments

 18   constituant l'infraction. Tout d'abord, il doit y avoir un lien de

 19   subordination qui doit être établi. Deuxièmement, le supérieur hiérarchique

 20   savait ou avait des raisons de savoir que son subordonné avait commis ou

 21   était sur le point de commettre le crime sous-jacent. Troisième point, le

 22   supérieur hiérarchique n'a pas pris les mesures ou a manqué à son

 23   obligation de prendre les mesures nécessaires et de sanctionner la personne

 24   en question. Je ne vais pas aborder les autres éléments. Nous avons abordé

 25   l'élément de connaissance, c'est le 7(3), dans notre mémoire en clôture,

 26   qui se trouve aux paragraphes 563 à 683.

 27   La Défense admet que M. Perisic a manqué à son obligation de sanctionner

 28   ses subordonnés. Vous trouverez ceci dans le mémoire de la Défense au


Page 14725

  1   paragraphe 135, à l'alinéa (v), ils ont indiqué qu'effectivement, il ne

  2   disposait pas du contrôle effectif et, par conséquent, ne pouvait pas

  3   empêcher ses subordonnés de commettre des crimes.

  4   Je souhaite maintenant aborder la question du lien de la subordination, de

  5   l'existence d'un lien de subordination. Le critère retenu, à savoir s'il

  6   existe, oui ou non, un lien de subordination, s'il existe un contrôle

  7   effectif, s'il y a la capacité matérielle du supérieur hiérarchique de

  8   sanctionner le subordonné pour avoir commis les infractions. C'est une

  9   décision qui se fonde sur les faits. C'est une décision qui se fonde sur

 10   les faits, et vous devez vous pencher dessus, Madame, Messieurs les Juges.

 11   Les éléments de preuve dans cette affaire et les éléments présentés par les

 12   parties dans leurs mémoires en clôture permettent de retrouver les

 13   indicateurs de ce contrôle effectif. Dans notre mémoire, vous trouverez

 14   ceci au paragraphe 697, et dans le mémoire de la Défense, au paragraphe 75.

 15   Ce sont des indicateurs que nous citions. Il ne s'agit pas des seuls

 16   indicateurs. Il existe toute une série de possibilités, qui comprennent :

 17   la position retenue par le supérieur, sa capacité à donner des ordres, le

 18   caractère des ordres que le supérieur hiérarchique avait ou était habilité

 19   à donner, à savoir si ses ordres ont été suivis ou non, le pouvoir ou

 20   l'autorité dont il était investi pour prendre des mesures disciplinaires et

 21   le pouvoir dont il était investi pour se défaire de ses officiers.

 22    Notre position, Monsieur le Président, c'est que les membres de centres du

 23   Personnel -- qui faisaient partie du personnel de la VJ et qui servaient

 24   dans ces centres de Personnel étaient des officiers de la VJ, puisque

 25   Perisic exerçait un contrôle effectif sur eux. La position de la Défense se

 26   trouve au paragraphe 207 de son mémoire, qui indique que les officiers de

 27   la VJ qui servaient dans la VRS et la SVK étaient membres de ces deux

 28   armées, et non pas de la VJ. Donc c'est là où se trouve le point de


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  1   désaccord.

  2   Je souhaite en fait regarder les éléments de preuve qui étayent notre

  3   position. Tout d'abord, regardons les éléments de preuve et l'autorité de

  4   jure sur le personnel qui travaillait dans ces centres de Personnel.

  5   Perisic était l'officier le plus haut gradé de la VJ. Il était le supérieur

  6   hiérarchique de tous les autres officiers. Deuxième point, les centres de

  7   Personnel et leurs formations -- est-ce que nous pouvons avoir -- comme

  8   vous pouvez le constater à l'écran devant vous, faisaient partie de l'état-

  9   major général de la VJ, sous le chapitre mobilisation, effectifs et

 10   différentes questions qui relevaient de l'administration du personnel. Donc

 11   ils faisaient partie de l'état-major de la VJ.

 12   M. Starcevic a dit dans sa déposition que les personnes qui étaient

 13   détachées à ce 30e centre d'affectation du Personnel étaient des membres de

 14   la VJ d'après la loi. Vous retrouverez ceci dans sa déposition page 5 489,

 15   lignes 12 à 15. Et dans le cadre où c'est une question de droit, Perisic

 16   exerçait son autorité sur le personnel de la VJ.

 17   De surcroît, il y a eu beaucoup de débats juridiques au sein de la RFY sur

 18   le statut même des personnes qui servaient au sein des centres de

 19   Personnel. Le premier point qui a fait l'objet d'un litige et que je

 20   souhaite évoquer, vous trouverez ceci dans notre mémoire en clôture aux

 21   paragraphes 789 à 792. La première affaire que je souhaite aborder avec

 22   vous est l'affaire du colonel Blagojevic. Le colonel Blagojevic était

 23   quelqu'un que connaît ce Tribunal, qui a été condamné pour sa participation

 24   aux crimes de Srebrenica. Mais avant de venir à La Haye, il a demandé à

 25   avoir une indemnité parce que certains congés étaient des congés qu'il

 26   n'avait pas pris et il souhaitait être indemnisé pour cela. Sa demande

 27   d'indemnisation a été refusée par le 30e centre du Personnel. Il a fait

 28   appel. Il a fait appel en indiquant qu'il faisait partie des opérations


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  1   armées de Bosnie et que sur le fondement des ordres qu'il avait reçus de

  2   son supérieur hiérarchique, il était membre de la VJ. La Cour suprême

  3   militaire était d'accord avec la position de M. Blagojevic. Ils ont dit

  4   dans le jugement que vous avez sous les yeux, Madame, Messieurs les Juges :

  5   "Il n'a pas été contesté que Blagojevic ne faisait pas partie de la VJ

  6   pendant la période pour laquelle il demande une indemnisation; en tant que

  7   membre de la VJ, il faisait partie de l'ancienne -- il faisait partie du

  8   territoire de l'ex-Yougoslavie et devait répondre aux ordres d'un officier

  9   supérieur, et il n'a pas pris ses congés annuels" pour les années en

 10   question.

 11   La cour a indiqué dans l'affaire Blagojevic que c'était un soldat

 12   professionnel de la VJ, un soldat de carrière, et d'après la loi de la VJ,

 13   sa demande d'indemnisation devait être retenue, et ils ont fait droit à sa

 14   demande.

 15   La deuxième affaire est une affaire qui concerne Dragomir Milosevic, qui,

 16   comme vous le savez, a été condamné par ce Tribunal pour les crimes commis

 17   à Sarajevo. Le général Milosevic a fait valoir, je devrais dire, une

 18   demande d'indemnisation pour blessures reçues au combat à Sarajevo. La RFY

 19   a contesté sa demande. La RFY a affirmé qu'il accomplissait son devoir au

 20   nom de la VRS et parce qu'il faisait partie de l'armée. La cour a rejeté la

 21   position de la RFY. La cour a dit, comme vous l'avez devant l'écran sous

 22   les yeux : "Il a été établi au-delà de tout doute raisonnable que la partie

 23   demanderesse était un soldat professionnel de la VJ à l'époque et qu'il a

 24   été blessé et que son nom figurait sur les fiches de paie à l'époque."

 25   Dans un autre jugement, que je ne vais pas aborder dans le détail, Madame,

 26   Messieurs les Juges, vous trouverez, c'est dans le mémoire de l'Accusation,

 27   au paragraphe [comme interprété] 872. Pour l'essentiel, il s'agit de la

 28   même chose. Il s'agit d'une demande faite par Dragomir Milosevic pour une


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  1   demande d'indemnisation pour séparation.

  2   Les jugements de la Cour suprême militaire ont été suivis d'une décision

  3   rendue par le 30e centre du Personnel. Lorsque la partie demanderesse, par

  4   la suite, s'est présentée devant un organe administratif pour faire valoir

  5   sa demande, cette personne a été indemnisée.

  6   Est-ce que nous pouvons regarder à cette demande la décision qui a été

  7   prise, la décision rendue par un tribunal administratif, par le général

  8   Mladic, parce que l'homme en question n'avait pas utilisé tous ses jours de

  9   congé. Cela se trouve à la pièce de l'Accusation numéro 1919. Et vous le

 10   verrez sur l'écran devant vous, il s'agit d'une constatation factuelle que

 11   le général Mladic servait au sein de l'armée, au poste 3001, qui est le

 12   poste militaire du 30e centre du Personnel. Ils poursuivent en disant :

 13   "Conformément à la position de la Cour suprême de Belgrade, il y a eu

 14   infraction à la loi, étant donné qu'il n'est pas contesté que la personne

 15   susmentionnée n'a pas reçu de salaire déterminé pour la période en question

 16   au moment où il servait dans l'armée; à savoir, au moment où il travaillait

 17   pour l'armée yougoslave, la personne ci-dessus mentionnée est en droit de

 18   recevoir un salaire conformément aux dispositions de la loi citée ci-

 19   dessus."

 20   Nous faisons valoir, Monsieur le Président, qu'il s'agit d'une question de

 21   droit, que des personnes qui servent ou qui travaillent dans les centres du

 22   Personnel de la VJ étaient des membres de la VJ, mais cela ne permet pas de

 23   conclure qu'il faut mener une enquête et savoir si, oui ou non, le général

 24   Perisic exerçait un contrôle effectif sur les membres de ces centres de

 25   Personnel. Nous disposons de certains éléments de preuve qui indiquent

 26   qu'il exerçait ce contrôle effectif. Il faut regarder, Madame, Messieurs

 27   les Juges, les autres facteurs présentés par les deux parties qui

 28   permettent d'indiquer qu'il exerçait le contrôle effectif.


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  1   Je souhaite parcourir ces éléments maintenant avec vous. Le premier

  2   consiste à dire que les salaires et primes des personnes dans ces centres

  3   de Personnel étaient versés par la République fédérale de Yougoslavie. Ils

  4   n'étaient pas versés par la Republika Srpska. Ils n'étaient pas versés par

  5   la République serbe de Krajina. Il s'agissait d'entités qui versaient les

  6   salaires et les primes à leurs soldats, et non pas aux soldats de la VJ.

  7   Un autre indicateur du contrôle effectif était de savoir si, oui ou

  8   non, le général Perisic avait la capacité ou le pouvoir de promouvoir ses

  9   subordonnés qui servaient dans ces centres de Personnel. La Défense fait

 10   valoir dans son mémoire en clôture au paragraphe 414 que les promotions au

 11   sein de la VRS étaient déterminées par la VRS, et les seules mesures prises

 12   par la VJ consistaient à vérifier ces promotions pour protéger le statut

 13   des officiers et leurs droits.

 14   Nous acceptons une partie de cet argument. Il y a eu des promotions

 15   au sein de la VRS et du SVK. Cependant, la vérification telle qu'elle est

 16   indiquée ici consistait non seulement à protéger les droits et les statuts

 17   des soldats, mais cette vérification permettait de savoir si la personne

 18   qui servait au sein de la VRS ou de la SVK méritait une promotion ou non au

 19   sein de la VJ. En d'autres termes, les promotions étaient discrétionnaires,

 20   et non pas automatiques.

 21   Il existe deux types de promotions qui avaient lieu dans la VJ. Il y

 22   avait des promotions régulières et des promotions exceptionnelles ou

 23   extraordinaires. Cela dépendait du grade de la personne en question et de

 24   l'autorité exercée par Perisic. Hormis le grade de général, le président de

 25   la RFY disposait de cette autorité et pouvait promouvoir les soldats.

 26   Perisic pouvait promouvoir ses subordonnées qui servaient dans les centres

 27   de Personnel, toute personne qui disposait du grade de colonel -- jusqu'au

 28   grade de colonel.


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  1   Je souhaite maintenant me concentrer sur la promotion du grade de

  2   général. En général, le SDC recevait les conseils du général Perisic et

  3   souhaitait savoir de lui si, oui ou non, une personne devait être promue et

  4   si la personne le méritait. Le conseil de Défense suprême ne donnait pas

  5   ces promotions d'office. Ils recherchaient les conseils du général Perisic.

  6   Ils se tournaient vers lui pour ses recommandations sur les mérites d'un

  7   officier s'il devait être promu.

  8   Je souhaite maintenant que nous regardions la diapositive suivante,

  9   pièce 709 de l'Accusation. La 14e session du conseil suprême de Défense

 10   datée du mois d'octobre 1993, au cours de laquelle le général a dit que par

 11   rapport à la promotion des officiers de la VJ des 30 et 40e centres du

 12   Personnel, le critère retenu était le suivant :

 13   "L'homme a dû se prouver au combat et travailler d'une certaine

 14   façon."

 15   Vous trouverez cela dans la pièce de l'Accusation 709, page 39.

 16   Au cours de cette même séance, Slobodan Milosevic a dit ce qui suit:

 17   "Si nous devons trouver une solution à ce problème, je crois qu'il

 18   faut le solutionner conformément à la proposition faite par le général

 19   Perisic plutôt que de transmettre ces propositions et être un instrument de

 20   cette transmission. Nous ne connaissons pas ce critère. Le général Perisic

 21   devrait se tourner vers le général Mladic pour lui demander son avis, nous

 22   proposer leur point de vue et ensuite revenir vers vous pour que nous

 23   poussions aborder ces questions dans le détail et individuellement."

 24   Ce qui signifie que le général Perisic devait se livrer à une analyse

 25   qualitative des membres des centres du Personnel pour lesquels des

 26   promotions étaient requises au sein de la VJ, un grade équivalent au sein

 27   de la VJ. Eh bien, le général Perisic disposait de ce pouvoir

 28   discrétionnaire. Il donnait ses recommandations pour certains généraux de


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  1   la VJ.

  2   Pièce de l'Accusation 786, il s'agit du compte rendu de la 37e session du

  3   SDC datée du 7 juin 1995. Perisic rendait compte au conseil suprême de

  4   Défense, et il y avait dans ce cas une demande de promotion concernant deux

  5   personnes, Celeketic et Loncar, au rang de lieutenant-général et général de

  6   corps d'armée, respectivement. Le général Perisic a conseillé le SDC comme

  7   suit, et je cite :

  8   "Compte tenu du fait que ces personnes sont coupables de la situation là-

  9   bas, l'état-major général est d'avis qu'il ne faut pas vérifier le statut

 10   de ces deux personnes."

 11   Et le SDC a adopté la recommandation du général Perisic.

 12   Au cours de la même séance, il a proposé ou donné le nom de 12 généraux et

 13   a indiqué que six de ces généraux devaient être recommandés et a proposé

 14   que le SDC rejette les six autres généraux restants. Vous pouvez voir cela

 15   sur vos écrans actuellement, pièce de l'Accusation P786, page 32. Et il y a

 16   certaines personnes que vous pouvez reconnaître ici. Donc il a recommandé

 17   la promotion au grade de général du général Gvero, du général Miletic, du

 18   général Tolimir, mais il rejette la promotion d'autres généraux, y compris

 19   Dragomir Milosevic, "qui commandait le Corps de Sarajevo-Romanija et qui

 20   était également membre du SDS." Donc il rejette la promotion de six

 21   généraux.

 22   Et ces recommandations sont acceptées par le conseil suprême de Défense.

 23   Si nous nous tournons vers la question de promotions exceptionnelles, comme

 24   je vous l'ai dit, il existait deux types de recommandations, les

 25   recommandations régulières et les recommandations exceptionnelles. Pour ce

 26   qui est des recommandations exceptionnelles, les mêmes qualifications

 27   s'appliquent. Le président de la RFY pouvait promouvoir exceptionnellement

 28   certaines personnes jusqu'au grade de général -- ou au grade de général,


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  1   devrais-je dire. Et le général Perisic pouvait faire des exceptions et

  2   pouvait recommander certaines personnes jusqu'au grade de colonel. Le

  3   président pouvait faire ces recommandations sur la proposition --

  4   promotions exceptionnelles sur recommandation du général Perisic. Vous

  5   trouverez une description ou le texte de loi à la page 197. C'est l'article

  6   46 qui nous intéresse. Les promotions exceptionnelles, qu'est-ce que cela

  7   signifie ? Cela signifie qu'il allait y avoir une reconnaissance spéciale

  8   pour une contribution exceptionnelle d'un officier au cours de son service.

  9   Je souhaite vous demander, Madame, Messieurs les Juges, de vous reporter au

 10   compte rendu d'audience, numéro 5 498.

 11   Le général Perisic exerçait son autorité et pouvait donc promouvoir de

 12   façon exceptionnelle certains membres de la VRS et du SVK, chose qu'il

 13   faisait de façon fréquente. Regardons la pièce P1731, si vous me le

 14   permettez. Madame, Messieurs les Juges, cette pièce 1731 est extraite du

 15   dossier des centres de Personnel de Pandurevic, que vous connaissez.

 16   Vinko Pandurevic a été promu à trois reprises, et ce, à titre exceptionnel

 17   par le général Perisic. Au niveau des deux premières entrées ou mentions de

 18   ce tableau, vous voyez qu'il s'agit d'avant Srebrenica. La troisième

 19   promotion exceptionnelle au grade de colonel d'infanterie a eu lieu le 31

 20   décembre 1995, quelques mois après que le général Perisic ait été informé

 21   par Slobodan Milosevic que des milliers de personnes avaient été tuées à

 22   Srebrenica et après qu'il ait eu suffisamment de temps pour s'enquérir des

 23   événements qui s'étaient déroulés à Srebrenica.

 24   Je souhaite maintenant que nous passions à la pièce de l'Accusation 1897.

 25   Il s'agit d'un autre exemple. Ceci est un extrait du fichier -- ou du

 26   dossier personnel de Dragan Obrenovic, que cette institution connaît. Il a

 27   été condamné pour les crimes commis à Srebrenica. Vinko Pandurevic était un

 28   membre du Corps de la Drina, responsable des atrocités commises à


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  1   Srebrenica. Si nous regardons le dossier personnel de M. Obrenovic, il a

  2   été promu à titre exceptionnel à trois reprises par le général Perisic, et

  3   la troisième promotion a eu lieu après les événements de Srebrenica.

  4   Maintenant, comme je vous l'ai dit, il a également à titre exceptionnel

  5   promu certains membres de la SVK. Est-ce que nous pouvons nous pencher sur

  6   la pièce de l'Accusation P2866. Il s'agit d'un individu qui répond au nom

  7   de Veljko Bosanac, qui est un membre du 40e centre d'affectation du

  8   Personnel. Nous voyons ici qu'il s'agit d'un ordre qui a été donné par le

  9   général Perisic aux fins de promouvoir à titre exceptionnel M. Bosanac. Il

 10   s'agit donc de la promotion d'un autre individu qui indique qu'il exerçait

 11   encore une fois le contrôle effectif, et il s'agit d'une promotion

 12   exceptionnelle ou extraordinaire du général Mladic au sein de la VJ. Est-ce

 13   que nous pouvons avoir ceci à l'écran maintenant, s'il vous plaît. Il

 14   s'agit de la promotion exceptionnelle du général Mladic qui a eu lieu le 16

 15   juin 1994 en vertu d'un ordre donné par Lilic, le président Lilic,

 16   promotion exceptionnelle. Si vous faites défiler le texte un petit peu vers

 17   le bas, juste en dessous, on peut lire : "Ratko Mladic, fils de Nedzo,

 18   commandant de l'état-major principal du 30e centre du Personnel."

 19   Promotion exceptionnelle faite sur recommandation du général Perisic et en

 20   vertu de l'article 46. Cette promotion exceptionnelle est entrée en vigueur

 21   le 16 juin 1994. Cette promotion exceptionnelle est entrée en vigueur 15

 22   jours avant que le général Mladic ne reçoive un grade équivalent au sein de

 23   la SVK. Est-ce que nous pouvons passer à la pièce de l'Accusation --

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne suis pas sûr de bien pouvoir

 25   vous suivre. Vous dites que ceci est entré en vigueur 15 jours avant que le

 26   général Mladic ne reçoive un grade équivalent au sein de la SVK.

 27   M. HARMON : [interprétation] Pardonnez-moi --

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]


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  1   M. HARMON : [interprétation] Pardonnez-moi, je voulais parler de la VRS, et

  2   pas du SVK. C'est une erreur de ma part.

  3   Donc 15 jours avant que le général Mladic ne reçoive cette promotion au

  4   grade de colonel-général, il avait été promu au sein de la VJ. Cette

  5   promotion du général Mladic n'avait rien à voir avec le processus de

  6   vérification que j'ai cité. Ceci n'avait rien à voir avec la protection du

  7   statut des soldats. Il s'agit tout simplement d'une promotion au sein de la

  8   VJ.

  9   Nous faisons valoir -- et je crois que nous pouvons conclure, Madame,

 10   Messieurs les Juges, pour ce qui est des promotions, que le général Perisic

 11   était, en réalité, une personne très importante dans ce processus de

 12   promotion des membres de la VJ. Il prodiguait ses conseils, il assurait la

 13   promotion de certaines personnes. Il est clair que ces promotions n'étaient

 14   pas des promotions qui se faisaient d'office.

 15   Je souhaite maintenant passer à un autre élément, un autre indicateur

 16   du contrôle effectif. Il s'agit de la question de savoir si, oui ou non, le

 17   général Perisic disposait de l'autorité lui permettant de donner des ordres

 18   et des commandements. C'est un débat que nous avons eu et qui nous a permis

 19   de jeter beaucoup de lumière là-dessus avec M. Starcevic, qui nous a

 20   indiqué qu'il y avait une différence entre les ordres et les commandements

 21   au sein de la VJ. Il a parlé de ce qu'est un ordre, un "naredba", et qui, à

 22   ses yeux, est un ordre qui permet de définir les devoirs et les

 23   responsabilités des différents individus. Il a cité l'exemple d'un ordre de

 24   transfert comme étant un exemple de "naredba". Il a parlé d'un

 25   commandement, "naredjenje", en indiquant qu'il s'agissait d'un commandement

 26   opérationnel et, en tant que tel, faisait partie de la chaîne de

 27   commandement. Vous retrouverez sa déposition aux pages 5 462 à 5 463.

 28   Comme je vous l'ai dit, je souhaite tout d'abord me concentrer sur les


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  1   ordres de transfert, "naredba". Le général Perisic pouvait donner des

  2   ordres de transfert personnellement. Par ailleurs, ces ordres étaient

  3   donnés par l'administration du centre du Personnel, auquel il avait délégué

  4   l'autorité pour le faire. Ce que nous avons vu d'après les éléments de

  5   preuve, c'est que le général Perisic ainsi que l'administration de ce

  6   centre de Personnel transféraient des personnes d'un endroit à un autre de

  7   la VJ, du 30e centre du Personnel, au 40e centre du Personnel, quelquefois

  8   entre le 30e et le 40e centres du Personnel, et parfois ils étaient

  9   transférés au ministère de la Défense. Les personnes au sein de la VJ

 10   étaient fongibles, interchangeables. Elles devaient suivre les ordres et

 11   pouvaient être transférées en fonction des besoins du service. Et si vous

 12   regardez certains de ces dossiers des centres de Personnel et les carrières

 13   de ces différents hommes, il s'agit comme une balle de flipper dans une

 14   machine de jeu; ces personnes étaient transférées d'un centre de Personnel

 15   à un autre.

 16   C'était donc un autre indicateur de ce contrôle effectif. Ils devaient

 17   obéir à la fois -- pardonnez-moi, les membres du 30e et 40e centres du

 18   Personnel leur obéissaient. Nous savons également que s'ils n'obéissaient

 19   pas, il s'agissait d'une infraction disciplinaire. Il s'agissait

 20   d'insubordination. Et ce n'était pas dans l'intérêt public de la RFY que de

 21   poursuivre des personnes pour insubordination si ces personnes avaient

 22   refusé d'être transférées de la VJ à un autre pays.

 23   Donc qu'a fait la VJ ? La VJ a trouvé d'autres moyens pour se débarrasser

 24   des personnes qui avaient fait preuve d'insubordination. Je ne l'ai pas en

 25   tête, mais je crois que c'est au cours de la 14e session du SDC que le

 26   général Perisic nous dit : Si les personnes ne partent pas, nous trouverons

 27   d'autres moyens pour les faire partir. Mais je vais maintenant vous

 28   montrer, Madame, Messieurs les Juges, certains ordres de transfert qui ont


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  1   été donnés personnellement par le général Perisic.

  2   Est-ce que nous pouvons regarder la pièce de l'Accusation 1524, s'il vous

  3   plaît. Madame, Messieurs les Juges, il s'agit d'un ordre donné par le

  4   général Perisic, ordre donné le 5 octobre 1994 concernant une personne

  5   répondant au nom de Bogdan Sladojevic. M. Sladojevic a été transféré sur

  6   l'ordre du général Perisic du 40e centre du Personnel à la 1ère Armée de la

  7   VJ. Est-ce que nous pouvons regarder la pièce de l'Accusation 1893.

  8   Monsieur le Président, je ne peux pas vous illustrer la pièce 1893, mais

  9   j'appelle votre attention sur cette pièce. Il s'agit d'un dossier

 10   individuel du centre du Personnel qui nous permet de voir que le général

 11   Krstic est transféré par le général Perisic, et nous savons qui est le

 12   général Krstic. Il est transféré du 30e centre du Personnel à l'école de la

 13   VJ.

 14   Examinons maintenant la pièce P1690. Il s'agit du dossier d'un dénommé

 15   Smiljanic. Vous verrez en bas du document que celui-ci a été déployé

 16   conformément aux besoins du service au ministère fédéral de la Défense sur

 17   ordre du général Perisic.

 18   Et enfin, je vous invite à examiner la pièce P1522, vous verrez encore une

 19   fois le dossier de Bogdan Sladojevic. Vous verrez que M. Sladojevic, qui

 20   s'était trouvé précédemment à l'école de la VJ basée à Belgrade, a reçu

 21   l'ordre du général Perisic de se redéployer au 30e centre du Personnel.

 22   Et "naredba" ne concerne pas uniquement les ordres de transfert. Prenons,

 23   par exemple, la pièce de l'Accusation P1777. Il s'agit de la cote ID 601-

 24   0672. C'est un commandement qui a été émis le 16 septembre 1995 par le

 25   général Mrksic.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 27   M. HARMON : [interprétation] Donc c'est un commandement, "naredjenje",

 28   qu'il émet sur la base de l'ordre, "naredba", qu'il a reçu du général


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  1   Perisic. Vous verrez dans cette partie soulignée afin d'exécuter l'ordre du

  2   chef de l'état-major de la VJ, et vous verrez que le mot correspondant dans

  3   le texte en B/C/S est le mot "naredba". Donc c'est un ordre qui est donné

  4   au général Mrksic, qui commande la SVK, et donc, il demande qu'un certain

  5   nombre de choses soient faites, que le général Novakovic fasse un certain

  6   nombre de choses. Et puis, il dit au point (3) : "Sur le démantèlement,

  7   informez après en avoir informé l'état-major de la VJ à Belgrade."

  8   Nous voyons que nous avons là un "naredba", l'ordre donné par le général

  9   Perisic au général Mrksic et qu'on s'y confirme en émettant un

 10   commandement.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc vous nous dites que M. Mrksic

 12   donne ici un commandement, pas un ordre, donc un "naredjenje" et pas un

 13   "naredba".

 14   M. HARMON : [interprétation] Oui, c'est exact. Il reçoit un ordre du

 15   général Perisic et il émet un commandement afin d'exécuter l'ordre

 16   initialement émis par le général Perisic. Vous voyez en haut à gauche le

 17   mot qui se lit dans l'original, c'est le mot "ordre". Puis ensuite, nous

 18   avons le mot "naredjenje" sur la droite, qui veut dire "commandement".

 19   C'est le général Mrksic qui donne ce "naredjenje" pour se conformer à

 20   l'ordre du général Perisic. Est-ce que vous avez des questions ? Je serais

 21   prêt à vous répondre.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez dit que sur la droite, on

 23   lit le mot "naredjenje"; je suis en train de chercher ce mot.

 24   M. HARMON : [interprétation] Est-ce que vous voyez les deux encadrés

 25   surlignés en jaune ? Et en haut, vous voyez, il y a le mot qui dit ordre,

 26   qui n'est pas surligné. Ça, c'est le commandement.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

 28   M. HARMON : [interprétation] Je voudrais maintenant parler du commandement.


Page 14739

  1   Le général Perisic avait le pouvoir de commander et d'émettre des

  2   commandements à ceux qui se trouvaient dans les centres de Personnel.

  3   Prenons la pièce P2412. C'est un rapport de Slobodan Peric, qui, au moment

  4   où il émet ce document, est commandant du 18e Corps de la SVK. Il envoie ce

  5   document au général Perisic, donc au chef d'état-major de la VJ.

  6   C'est un rapport sur le comportement des officiers au sein de la SVK. Et le

  7   colonel Peric dit : "sur la base de votre ordre oral", mais si vous vous

  8   reportez au texte en B/C/S, vous verrez que l'on voit que le mot est celui

  9   de "naredjenje", c'est-à-dire le "commandement" oral. Donc vous pouvez le

 10   voir, dans ce document, il y a un commandement qui est émis oralement par

 11   le général Perisic et qui est émis au colonel Peric, qui commande le 18e

 12   Corps de la SVK, et le colonel Peric, il s'exécute.

 13   A présent, est-ce que nous pouvons examiner la pièce P1925. Alors, ici,

 14   nous avons un document qui émane du général Perisic. C'est un commandement.

 15   Il porte la date du 24 mars 1995. C'est un commandement pour la création

 16   d'un état-major de coordination afin d'aider le 40e centre du Personnel. Et

 17   si vous vous reportez à la partie équivalente du texte en B/C/S, vous

 18   verrez que le mot qui est écrit est celui de "naredjenje". En fait, le mot

 19   "ordre" en anglais correspond à "commandement", à "naredjenje". Donc nous

 20   avons ici une liste qui est dressée des personnes qui sont censées devenir

 21   membres de cet état-major de coordination, et nous voyons qu'il y a là deux

 22   membres du 40e centre du Personnel. M. Starcevic a pu voir ce document, et

 23   quand il est venu déposer, il a dit que le général Perisic a eu le pouvoir

 24   de donner des commandements aux membres du 40e centre du Personnel et que

 25   c'est en exerçant ce pouvoir qu'il a émis ce commandement. Vous pouvez

 26   retrouver cette référence aux pages 6 761 jusqu'à 6 763.

 27   Alors, je voudrais maintenant me pencher sur un autre indicateur de

 28   l'existence du contrôle effectif, à savoir la capacité du supérieur à


Page 14740

  1   sanctionner ses subordonnés. Le général Perisic était convaincu qu'il avait

  2   cette attribution-là. Prenons, s'il vous plaît, la pièce de l'Accusation

  3   P2413. Alors, ce document, il faut le replacer dans son contexte. C'est un

  4   document qui date du 9 novembre 1995. Et il a été émis après la défaite des

  5   forces dans la Krajina, sa défaite totale. C'est un document, donc, qui

  6   vient du général Perisic, et il dit :

  7   "Afin d'établir la responsabilité et résoudre les questions de statut

  8   des militaires de carrière de la VJ qui ont servi au sein du 40e centre du

  9   Personnel," il donne un ordre. Reportons-nous au point (2) de cet ordre :

 10   "S'agissant des officiers pour lesquels l'on peut raisonnablement

 11   penser qu'ils aient commis des violations de la discipline ou un crime, une

 12   enquête disciplinaire sera amorcée par l'entremise des officiers habilités

 13   à ce faire, qui sera menée à son terme au plus tard le 20 novembre 1995."

 14   Donc, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, cet ordre

 15   concerne les membres de la VJ qui étaient des membres des centres du

 16   Personnel, et cela se passe bien des mois après que les projectiles à

 17   fragmentation soient tombés sur le centre-ville de Zagreb. Donc le général

 18   Perisic n'exerce pas son pouvoir disciplinaire parce que des personnes du

 19   40e centre du Personnel ont commis des crimes de guerre. S'il émet cet

 20   ordre, c'est parce qu'il n'est pas satisfait du comportement des personnes

 21   qui étaient responsables, à son avis, de cette défaite en Croatie.

 22   Alors, il y a eu, effectivement, des procédures disciplinaires qui

 23   ont été engagées, et vous avez entendu des preuves à l'appui. Je citerai

 24   une référence. Je vous renvoie à notre paragraphe 269 dans notre mémoire. A

 25   titre d'exemple, je me penche sur un de ces incidents. Il s'agit du colonel

 26   Bulat, qui était commandant du 21e Corps de la SVK. Il s'est rendu, avec la

 27   totalité de ses effectifs, à l'ennemi. Le général Perisic n'en a pas été

 28   très satisfait, et nous pouvons citer à l'appui la pièce P2204. Excusez-


Page 14741

  1   moi, je ne l'ai pas. Je n'ai pas préparé cela pour vous illustrer mon

  2   propos. Dans cette pièce P2204, nous voyons à quel point le général Perisic

  3   n'est pas satisfait du comportement de Bulat et des autres. Que dit-il :

  4   "Je pourrais le renvoyer, mais je ne le ferai pas." Donc il reconnaît

  5   qu'il a le pouvoir de le renvoyer. Il dit à la place : "Vous allez me faire

  6   un rapport au pénal." Et c'est ce que je vous cite là, la pièce P2204. En

  7   fait, effectivement, la VJ a mené à son terme une enquête contre le colonel

  8   Bulat par rapport à sa conduite en tant que commandant du 21e Corps. Cinq

  9   témoins ont été cités à comparaître. Et une commission d'enquête de la VJ a

 10   recommandé que l'on engage des poursuites contre Bulat et qu'il soit

 11   sanctionné.

 12   Vous trouverez d'autres exemples à l'appui dans nos paragraphes 738

 13   et 739.

 14   Monsieur le Président, je vois l'heure. Le moment est peut-être venu

 15   de faire la pause.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant la pause, je vous pose une

 17   question --

 18   M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, votre question est très

 19   intéressante. Je dois dire que nous ne savons pas si cela a eu lieu. Le

 20   général Novakovic, un témoin de la Défense, est venu déposer ici et il a

 21   dit que pour autant qu'il le sache, il n'était pas sûr si le colonel Bulat

 22   a été sanctionné. Mais c'était dans l'intérêt de la RFY de ne pas rendre

 23   public ce type de geste. Donc j'y reviendrai après la pause.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, mais --

 25   M. HARMON : [interprétation] La réponse est que je ne peux pas vous

 26   répondre. Je ne connais pas la réponse.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] S'il y a eu des enquêtes, j'aimerais

 28   juste savoir si elles ont abouti.


Page 14742

  1   M. HARMON : [interprétation] Il y a eu des témoins de cités, il y a eu une

  2   recommandation qui a été faite de continuer, d'engager des poursuites. Mais

  3   je ne sais pas si cela a abouti.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Nous reprendrons à 10

  5   heures 45.

  6   --- L'audience est suspendue à 10 heures 15.

  7   --- L'audience est reprise à 10 heures 48.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Harmon, vous avez la

  9   parole.

 10   M. HARMON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 11   Avant la pause, nous parlions du pouvoir qu'avait le général Perisic de

 12   discipliner et sanctionner ses subordonnés --

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je voudrais vous demander juste une

 14   question. Vous nous avez dit que vous ne saviez si un individu au sujet

 15   duquel nous avons posé la question a été sanctionné. Est-ce qu'il y a qui

 16   que ce soit qui a été sanctionné ?

 17   M. HARMON : [interprétation] Je vais en parler. Je vais parler de quatre

 18   cas de figure.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] D'accord.

 20   M. HARMON : [interprétation] Donc je vais parler du cas particulier de

 21   quatre généraux de la SVK : Celeketic, Novakovic, Bjelanovic et un

 22   quatrième. Donc il y a eu la défaite de la SVK, et le général Perisic s'est

 23   trouvé face à un problème, à savoir ses hommes étaient des gradés. Il avait

 24   le pouvoir, bien sûr, d'amorcer une procédure disciplinaire contre eux,

 25   mais il a fait preuve d'une grande prudence finalement et il a pris l'avis

 26   du conseil suprême de la Défense.

 27   Je vais vous inviter maintenant à examiner la pièce P2203. Donc nous avons

 28   là un document du 6 novembre 1995. C'est le général Perisic qui s'adresse


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  1   au conseil suprême de la Défense, et il dit : "Comme je l'ai dit au conseil

  2   suprême de la Défense, tous les quatre devraient faire l'objet de

  3   poursuites. 'Est-il dans votre intérêt qu'ils fassent l'objet de poursuite

  4   ?' Ils ont dit oui. Et 'est-ce qu'il est dans votre intérêt que cela ne

  5   soit pas rendu public ?' La réponse a été oui. Et si nous les envoyons à la

  6   retraite, est-ce qu'il y a d'autres sanctions qui pourraient être

  7   envisagées ? Ils ont dit qu'il était nécessaire de calmer le jeu, de ne pas

  8   le rendre public, et ils ont pris la décision finalement [imperceptible] de

  9   les envoyer à la retraite tous les quatre, et c'est ce qu'ils ont fait."

 10   Donc c'est le texte du collège du 6 novembre 1995. Nous savons que ces

 11   quatre généraux ont servi dans les rangs de la SVK jusqu'en octobre, je

 12   pense, 1995. Mais sur la base de cette décision prise par le conseil

 13   suprême de la Défense, c'est à titre rétroactif qu'ils sont partis à la

 14   retraite à partir du 31 décembre 1994. Monsieur le Président, nous

 15   affirmons que cela revenait à sanctionner ces quatre généraux pour leur

 16   conduite lorsqu'ils ont servi en tant que membres de la VJ au sein de la

 17   SVK. Donc c'était d'une manière déguisée, en fait, le geste de sanction

 18   puisque, comme le dit le conseil suprême de la Défense, ils ne souhaitaient

 19   pas que ce soit rendu public. Il n'y a pas eu d'effets sensibles, si ce

 20   n'est la perte de leur position prestigieuse. Ces quatre généraux ont eu

 21   droit aux pensions de retraite pendant toute la durée de leur service

 22   d'active jusqu'en octobre 1995. En fait, ils avaient le droit à cette

 23   pension, mais ils en ont été privés parce qu'il y a eu une augmentation de

 24   ces pensions uniquement jusqu'au 31 décembre 1994.

 25   Alors, le conseil suprême de la Défense craint des procès publics, et ses

 26   craintes sont justifiées parce que cela aurait révélé la vérité sur les

 27   centres du Personnel. Cela aurait révélé le véritable rôle de ces centres,

 28   la manière dont on approvisionnait sur le plan logistique ces centres. Et


Page 14744

  1   cela aurait donc révélé tout ce qui était en fait dissimulé. Paragraphes

  2   753 et 754 de notre mémoire.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Alors, on voulait ne pas révéler les

  4   choses. Quelle était la conséquence que cela avait sur la capacité

  5   matérielle de sanctionner les subordonnés qu'avaient ces subordonnés --

  6   qu'avait l'accusé ?

  7   M. HARMON : [interprétation] Je pense qu'ils ont été sanctionnés, c'est

  8   tout. Quant à savoir si c'était ouvertement ou non… Le général Perisic

  9   avait le pouvoir de le faire, et au niveau de la direction du conseil

 10   suprême de la Défense, il était en mesure de se débarrasser des gens, qu'il

 11   s'agisse de procédures disciplinaires publiques ou non. Comme il le déclare

 12   à la 14e session, il dit : Nous allons trouver une autre manière de nous

 13   débarrasser d'eux. Donc c'est une manière dissimulée, en fait, de punir ces

 14   quatre généraux. Donc le général Perisic exerçait un plein pouvoir sur les

 15   membres de la VJ, plein pouvoir d'engager des procédures disciplinaires.

 16   Quant à la manière de les traduire dans les faits, c'est une autre chose.

 17   Donc je pense que c'est de cette manière-là que les instructions ont été

 18   données par le conseil suprême de la Défense au général Perisic et c'est de

 19   cette manière-là qu'on les a punis.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Plus concrètement, s'agissant des

 21   sanctions pour les crimes visés à l'acte d'accusation, non seulement ces

 22   quatre officiers dont vous parlez, mais tous ceux qui auraient dû être

 23   punis d'après l'Accusation.

 24   M. HARMON : [interprétation] Je pense que le général Perisic avait

 25   l'obligation et la responsabilité en tant qu'officier supérieur, officier

 26   commandant, d'engager des procédures contre ceux pour lesquels il savait

 27   qu'ils avaient commis des crimes. Le climat politique ne l'exonérait pas du

 28   tout de cette responsabilité-là. Il avait la responsabilité de prendre des


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  1   mesures qu'il n'a pas prises. Il avait le pouvoir, la capacité de le faire.

  2   Et il ne l'a simplement pas fait eu égard aux crimes de guerre.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais vous parliez du climat politique;

  4   vous semblez dire maintenant qu'il ne fallait pas en tenir compte. Mais ce

  5   climat politique lui liait les mains quant à sa possibilité de sanctionner

  6   les gens.

  7   M. HARMON : [interprétation] Nous n'avons pas eu de preuve démontrant que

  8   le général Perisic a été exonéré de ses responsabilités en tant que

  9   commandant par ses supérieurs politiques. Il avait l'obligation d'agir,

 10   indépendamment du climat politique. Il ne pouvait pas se reposer sur ce

 11   climat pour l'invoquer en tant que raison de ne pas punir. Il aurait pu

 12   agir par voie d'ordre, de commandement, il avait plusieurs --

 13   d'instruction, et il aurait même pu quitter son poste si l'ordre avait été

 14   donné de ne pas engager des poursuites. Mais il ne s'est servi d'aucun de

 15   ces instruments. En fait, comme nous le verrons plus tard, il a apporté son

 16   aide aux criminels de guerre en évitant de les traduire devant la justice.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 18   M. HARMON : [interprétation] Parlons maintenant de deux cas de figure qui

 19   font l'objet de nos paragraphes 741 à 746 de notre mémoire en clôture. Il

 20   s'agit d'Antic et de Vujic, qui ont été membres du 30e centre du Personnel.

 21   Et eux, ils ont quitté les rangs de la VRS. Ils ont tous les deux fait

 22   l'objet de mesure disciplinaire par le tribunal disciplinaire de la VRS.

 23   Pour ce qui est d'Antic et Vujic, ils ont perdu leur statut de militaire

 24   d'active. La VRS a demandé à la VJ de prendre des mesures qui s'imposaient

 25   à partir du moment où les jugements ont été prononcés. Et donc, l'affaire a

 26   été remise entre les mains de la VJ, qui devait décider que faire au sujet

 27   de ces hommes qui avaient commis des infractions disciplinaires. Alors,

 28   pour ce qui est d'Antic, lui, il a été renvoyé de la VJ. Mais Vujic n'a pas


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  1   fait l'objet de la même décision. Ils n'ont pas mis un terme à son service.

  2   Il a continué de servir dans les rangs de la VJ jusqu'en 2005. Donc, en fin

  3   de compte, c'est la VJ qui prenait les décisions sur les infractions

  4   commises dans les rangs de la VRS.

  5   Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je voudrais parler

  6   d'autres critères pour déterminer un autre indicateur de contrôle effectif.

  7   Le général Perisic était habilité à mettre fin au service de membres de la

  8   VJ qui servaient et il l'a fait. Nous avons décrit ceci dans notre mémoire

  9   au paragraphe 761 et nous avons cité un incident, mais je voudrais

 10   également présenter la pièce de l'Accusation numéro 1904. Il s'agit d'un

 11   ordre de la VJ provenant du général Perisic et qui porte sur Ljubisa Beara.

 12   M. Beara a été condamné par ce Tribunal pour génocide. Vous voyez que cet

 13   ordre date du 6 août 1997. Et on voit que conformément à l'ordre de M.

 14   Perisic, on met fin au service de M. Beara au sein de la VJ.

 15   Il exerce également cette autorité lorsqu'il s'agit des membres de la SVK.

 16   Et nous pouvons passer à la pièce de l'Accusation numéro 1684. Vous verrez

 17   que dans cet exemple, il s'agit d'un dénommé Bora Poznanovic, il était

 18   membre du 40e centre du Personnel en tant que commandant du 7e Corps de la

 19   SVK. Il a pris sa retraite de la VJ trois ans après la débâcle en Croatie.

 20   Il a pris sa retraite le 30 juin 1998 sur décision du général Perisic.

 21   Point suivant que je souhaiterais aborder, un autre indicateur du contrôle

 22   effectif.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vois que les raisons pour

 24   lesquelles ces deux personnes ont pris leur retraite c'est qu'ils avaient

 25   40 ans de service faisant l'objet de retraite.

 26   M. HARMON : [interprétation] Oui, c'est exact. Cela rentre dans le cadre de

 27   l'article 107 de la Loi sur la VJ. C'est un des critères qui permettent de

 28   mettre fin à un service au sein de la VJ. Mais ce qui est intéressant au


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  1   niveau de ces 40 ans ou 30 ans de service effectif, c'est que dans ce

  2   cadre, le général Perisic avait la possibilité de prendre des mesures

  3   disciplinaires pour ceux qui ne suivaient pas ses ordres, et il l'a dit

  4   d'ailleurs lors d'une des séances du SDC. Ils utilisaient ces dispositions

  5   de cette loi, mais ils l'utilisaient également pour prendre des sanctions

  6   sous couvert, si l'on peut dire, contre des membres des centres de

  7   Personnel qui avaient commis des infractions passibles du code

  8   disciplinaire.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais dans ce cas-là, j'aimerais savoir

 10   si ces deux personnes avaient commis des infractions de ce type ?

 11   M. HARMON : [interprétation] Eh bien, nous avons avancé dans notre acte

 12   d'accusation que le colonel Beara est une des personnes responsables des

 13   meurtres en masse commis à Srebrenica.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, je comprends bien cela, mais ce

 15   que j'aimerais savoir c'est si, bien que la raison évidente soit qu'ils

 16   avaient suffisamment d'années de service pour ouvrir droit à une retraite,

 17   est-ce que la raison exacte était qu'ils faisaient l'objet d'une punition ?

 18   M. HARMON : [interprétation] Eh bien, je ne peux pas vous le dire, j'en

 19   doute moi-même. Je pense que la raison est qu'ils avaient 40 ans d'annuité.

 20   Ce qui est intéressant de noter concernant cette retraite qui avait comme

 21   date de départ le 30 juin, c'est que -- cela a été donc décidé le 6 août

 22   1997, c'est-à-dire deux ans après les crimes qui avaient été commis à

 23   Srebrenica, deux ans après que le général Perisic ait été au courant de ce

 24   qui s'était produit à Srebrenica, et deux ans après, où il aurait eu donc

 25   le temps de lancer des enquêtes et de s'enquérir des événements qui

 26   s'étaient produits à Srebrenica. Il aurait pu donc mettre fin au service du

 27   colonel Beara deux ans auparavant -- que deux ans donc après que ces crimes

 28   aient été commis.


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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  2   M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais maintenant

  3   passer à un autre aspect qui est soulevé dans le mémoire de la Défense.

  4   Ceci porte sur le général Djordje Djukic qui a déposé ici. Le général

  5   Djukic, pour votre information, était membre du 30e centre du Personnel. Il

  6   était membre de l'état-major principal de la VRS, il était responsable de

  7   la logistique. Il a avancé, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

  8   Juges, que les officiers de la VJ qui servaient au sein des centres du

  9   Personnel conservaient les cartes d'identité de la VJ. La Défense a adopté

 10   une position contraire. Ils avancent dans le paragraphe 220 de leur mémoire

 11   que l'Accusation n'a pas prouvé que ces officiers qui servaient au sein de

 12   la VRS avaient reçu des cartes d'identité de la VJ. Deuxièmement, ils

 13   avancent que la VJ n'avait pas produit de cartes d'identité militaire pour

 14   les officiers servant dans la VRS durant la période du conflit. Et le fait

 15   que, dans sa déposition, il se soit avéré que le général Djukic avait en sa

 16   possession une carte d'identité de la VJ n'a pas été corroboré, on ne peut

 17   pas donc se fier à cela, et ceci donc ne permet pas de prouver l'existence

 18   de trois armées autonomes et indépendantes.

 19   On pourrait donc passer à la pièce de l'Accusation 1653. Vous voyez donc la

 20   carte d'identité -- vous voyez que le général Djukic avait deux cartes

 21   d'identité lorsqu'il a été interpellé et arrêté. Il avait la carte qui a

 22   été délivrée à Han Pijesak. Il s'agit d'une carte de la VRS. Et puis, si

 23   l'on passe à la partie suivante de cette pièce à charge, il s'agit de la

 24   carte d'identité de la VJ du général Djukic qui a été délivrée le 25

 25   janvier 1995. Et vous pouvez voir la traduction de ce qui est sur le

 26   premier volet qui est inscrit en cyrillique. C'est la partie en bas à

 27   gauche de l'image. Il y est mentionné : "République fédérale de

 28   Yougoslavie, armée yougoslave, carte d'identité militaire."


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  1   Donc c'est à vous de décider, Madame, Messieurs les Juges. Vous avez

  2   entendu la déposition de témoins de la Défense qui ont dit qu'ils n'avaient

  3   pas reçu de cartes d'identité de la VJ. Je vous demande donc de vous

  4   pencher sur le fait que le général Djukic avait reçu une carte d'identité

  5   de la VJ.

  6   Et maintenant, regardons ce que le général Perisic avait à dire, à savoir

  7   si le personnel de la VJ servait au sein de la VRS et de la SVK. Je vais

  8   vous faire visionner un extrait d'une vidéo, avec la transcription qui

  9   s'affiche à l'écran.

 10   L'INTERPRÈTE : Transcription que les interprètes de cabine française

 11   n'ont pas reçue, ni en version anglaise ni en version française.

 12   [Diffusion de la cassette vidéo]

 13   M. HARMON : [interprétation] Je vous demande une seconde, s'il vous plaît,

 14   Monsieur le Président. Je veux vérifier quelque chose.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous en prie.

 16   M. HARMON : [interprétation] Ce n'est pas l'extrait vidéo que je souhaitais

 17   faire visionner. Je vais donc donner lecture du texte de la pièce à charge

 18   2879. Je vais donner lecture de ce texte qui se trouve à la pièce P2879,

 19   horodateur 1 heure, 1 minute, 35 secondes à 1 heure, 2 minutes, 23

 20   secondes.

 21   Voilà la partie qui nous intéresse. Est-ce que cela apparaît sur vos écrans

 22   ?

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous avons une transcription.

 24   M. HARMON : [interprétation] Je vais donner lecture du texte. Je vous ai

 25   donné les références :

 26   "Pratiquement aucune décision en République de Krajina serbe, même si elle

 27   disposait d'instances politiques, ni en Republika Srpska, n'ont été prises

 28   sans un accord des dirigeants de l'Etat de la République fédérale de


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  1   Yougoslavie à l'époque. De la même manière, l'armée avait des liens

  2   étroits. Il y avait plusieurs raisons à cela. Tout d'abord, parce qu'il

  3   s'agissait d'une seule et même armée. Deuxièmement, parce que ses membres

  4   étaient présents dans tous les secteurs. Et troisièmement, parce qu'elle

  5   disposait de matériel dont l'appui logistique provenait pour la plupart des

  6   cas de la République fédérale de Yougoslavie."

  7   Si vous visionnez le film, qui est la pièce P2879, vous verrez qu'il y a en

  8   fait une partie du texte qui est soulignée.

  9   Je voudrais maintenant revenir à un élément légèrement différent, à

 10   savoir la capacité matérielle du général Perisic de punir des comportements

 11   criminels de ses subordonnés servant au sein des centres de Personnel. Et

 12   nous avançons que ceci allait de pair avec la capacité matérielle de MM.

 13   Karadzic, Martic, et des commandants de la VRS et de la SVK.

 14   La Défense a adopté une série de positions à cet effet. Le paragraphe

 15   155 du mémoire en Défense avance que le bureau du Procureur a formulé une

 16   théorie tout à fait nouvelle qui n'est fondée ni d'un point de vue

 17   juridique ni d'un point de vue factuel. La position de base de la Défense,

 18   qui est mentionnée dans leur mémoire aux paragraphes 154, ainsi que 857 et

 19   858, c'est que le principe de l'unité de commandement exclut l'existence de

 20   toute position de supérieur qui serait tenue par quelqu'un hors de la

 21   chaîne de commandement. Et ce qu'ils avancent c'est qu'après avoir reçu une

 22   mission au sein de la VRS, les membres du centre du Personnel entraient

 23   exclusivement dans la chaîne de commandement unique de la VRS, et que

 24   Karadzic était donc le commandant suprême de la VRS. Conformément à ce

 25   concept d'unité de commandement, M. Perisic ne pouvait pas exercer un

 26   contrôle sur les Brigades de Montagne de la VRS, qui allaient ensuite être

 27   reconnues comme faisant partie du 30e centre du Personnel.

 28   C'est notre position, que la Défense, en fait, fait l'amalgame entre


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  1   deux concepts. Il y a le principe d'unité de commandement, mais également

  2   le concept de contrôle effectif. Il s'agit de deux principes séparés et

  3   distincts. En ce qui concerne la position de la Défense, à savoir que notre

  4   position n'a aucun fondement juridique, je voudrais attirer l'attention des

  5   Juges de cette Chambre sur le jugement dans l'affaire Popovic, paragraphe 2

  6   025 :

  7   "Il est nécessaire de déterminer et de faire une distinction entre le

  8   concept militaire d'unité de commandement de l'évaluation du contrôle

  9   effectif. Pour qu'une armée fonctionne correctement, il faut qu'à un moment

 10   donné une seule personne ait le commandement d'une unité à un moment donné.

 11   Cependant, pour voir s'il y a -- non, en fait, je vais reformuler. Le test

 12   pour les relations entre les subordonnés et les personnes à qui on est

 13   subordonnés passera par la capacité de savoir où se trouve le contrôle

 14   effectif - par rapport à l'exercice de ce contrôle - il n'y a, par

 15   conséquent, aucune exclusivité dans la manière dont on déterminera ce

 16   contrôle effectif." Et puis dans le paragraphe suivant, le paragraphe 2

 17   026, les Juges de la Chambre dans l'affaire Popovic disent :

 18   "De plus, compte tenu de l'objectif de la loi concernant la

 19   responsabilité du supérieur hiérarchique, un supérieur ne peut pas se fier

 20   au principe d'unité de commandement, décrit pour garantir l'efficacité de

 21   l'armée, pour ne pas être tenu responsable des crimes les plus graves qui

 22   auraient été commis."

 23   Par conséquent, nous avançons que dans la jurisprudence du Tribunal,

 24   il y a une reconnaissance juridique de la théorie de l'Accusation.

 25   Deuxièmement, et je vais devoir passer à huis clos pour cela, il y

 26   avait une chaîne de commandement parallèle, nous l'avançons, entre le

 27   général Perisic et la SVK.

 28   Est-ce que l'on pourrait passer à huis clos pour quelques instants.


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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait passer à huis

  2   clos. Est-ce que vous voulez vraiment huis clos ou huis clos partiel ?

  3   M. HARMON : [interprétation] Huis clos partiel.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allons-y.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous y sommes.

  6   [Audience à huis clos partiel]

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 18   [Audience publique]

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Harmon.

 20   M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

 21   Juges, nous avançons que, par les éléments de preuve que nous avons

 22   présentés, nous avons prouvé qu'il y avait effectivement une chaîne de

 23   commandement parallèle entre le général Perisic et la SVK. Cette chaîne de

 24   commandement parallèle fonctionnait de la manière suivante : au sein de la

 25   SVK, en utilisant le général Mrksic comme exemple, au sein de la SVK, vous

 26   aviez donc le commandant suprême, qui était Martic, et le commandant de

 27   l'état-major de la SVK c'était Mrksic. Par conséquent, vous aviez une ligne

 28   hiérarchique qui partait de Martic en direction de Mrksic, et ensuite vers


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  1   ses subordonnés. Ce que nous avançons également c'est que vous aviez une

  2   chaîne parallèle de commandement avec Perisic, puis en direction de Mrksic,

  3   qui était membre du 40e centre du Personnel.

  4   Les éléments de preuve montrent la chose suivante : comme je l'ai

  5   mentionné, Martic était le commandant suprême de la RSK. Et immédiatement

  6   avant cela, Mrksic est devenu chef de l'état-major de la SVK, et avant

  7   cela, il était officier de la VJ, donc il était en fait chef en second de

  8   l'état-major général de la VJ pour l'armée de terre. Il a donc pris ses

  9   fonctions en tant que commandant de la SVK le 17 mai 1995 conformément à

 10   une décision qui avait été prise au sein de la SVK.

 11   Est-ce que l'on pourrait revenir à huis clos partiel [comme interprété].

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] A huis clos partiel. Je suppose que

 13   vous voulez dire huis clos partiel, et non huis clos, comme vous l'avez

 14   dit.

 15   M. HARMON : [interprétation] Oui, je suis désolé.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous y sommes.

 17   [Audience à huis clos partiel]

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 16   [Audience publique]

 17   M. HARMON : [aucune interprétation]

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 19   M. HARMON : [interprétation] Nous avons vu certains des documents. Vous

 20   avez les différents commandements. Est-ce que l'on peut passer au document

 21   P2412. Vous voyez donc qu'il s'agit d'un ordre provenant du général Perisic

 22   à l'attention de Slobodan Peric. Et ceci confirme que le général Perisic

 23   donnait des ordres aux membres du personnel de la SVK. Vous voyez que ce

 24   document date du 20 juin 1995, c'est-à-dire cinq semaines après que Mrksic

 25   soit devenu commandant de la SVK.

 26   Nous pouvons maintenant passer à la pièce P177. Nous le voyons, Monsieur le

 27   Président, Madame, Monsieur les Juges, également dans ce document.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vois qu'il s'agit du document P177,


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  1   et, en fait, il s'agit de P1177 [comme interprété].

  2   M. HARMON : [interprétation] Si j'ai dit P177, je me suis trompé.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez effectivement dit P177.

  4   M. HARMON : [interprétation] Je me souviens avoir également fait la même

  5   erreur durant le procès.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Voilà, c'est très bien. Merci

  7   beaucoup.

  8   M. HARMON : [interprétation] Vous voyez donc qu'il s'agit d'un ordre qui

  9   date du 16 septembre 1995, un ordre à l'attention du général Mrksic, qui

 10   est commandant de la SVK et qui a été à ce poste depuis le 17 mai 1995. On

 11   peut également corroborer par un autre moyen la déposition du Témoin MP-80,

 12   à savoir par la pièce P1925, document intéressant car il s'agit d'un ordre

 13   qui a été donné à la SVK avant que le général Mrksic ne devienne commandant

 14   de la SVK, donc le 24 mars 1995.

 15   Et enfin, je voudrais passer à la pièce P1340. Il s'agit d'un relevé

 16   d'écoute téléphonique entre Slobodan Milosevic et le général Perisic. Le

 17   texte qui nous intéresse est surligné, à savoir Milosevic qui fait une

 18   demande, qui demande à Perisic de : "Ne contacter que Mrksic et que celui-

 19   ci ne devrait pas prendre des ordres quels qu'ils soient de Martic." La

 20   réponse du général Perisic est révélatrice, à savoir qu'il a répondu :

 21   "Cela fait longtemps qu'il ne prend plus des ordres de Martic."

 22   Et enfin, troisième élément qui corrobore la déposition en question, c'est

 23   la déposition de M. Borovic. C'était un témoin de la Défense, il était chef

 24   de cabinet de l'état-major général de la VJ, qui a confirmé dans sa

 25   déposition que le général Perisic avait rendu visite aux unités du 11e

 26   Corps de la SVK durant l'automne 1995. Il s'agit d'une déposition que l'on

 27   peut trouver à la page du compte rendu d'audience 14 092.

 28   Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, nous avançons que


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  1   le principe de l'unité de commandement ne constitue pas un obstacle au fait

  2   que le général Perisic disposait d'un contrôle effectif sur les membres des

  3   centres du Personnel. Notre thèse montre que le général Perisic avait un

  4   contrôle effectif sur les membres de la VJ qui officiaient au sein des

  5   centres du Personnel et il avait la capacité matérielle de les empêcher de

  6   commettre des crimes. Il pouvait également punir les auteurs. Ceci allait

  7   dans le même sens que la capacité matérielle des commandants de la VRS ou

  8   de la SVK.

  9   Je voudrais rajouter que le fait que la VRS et la SVK n'aient pas

 10   exercé leur capacité matérielle de punir les auteurs des crimes, c'est-à-

 11   dire des membres de la VJ qui avaient commis des crimes en Croatie et en

 12   Bosnie, ceci n'exonère pas le général Perisic de sa responsabilité de punir

 13   ses subordonnés. Sinon, vous auriez un vide juridique énorme. Vous pourriez

 14   avoir un commandant qui pourrait envoyer ses troupes dans un autre Etat.

 15   Ils pourraient commettre des crimes. L'Etat hôte ne pourrait pas les punir.

 16   Est-ce que ceci pourrait être considéré comme une excuse de la part du

 17   général Perisic, qui a un contrôle effectif, qui est l'Etat envoyeur de ces

 18   troupes et qui ne fait rien ? Selon nous, nous pensons que ceci, en fait,

 19   minerait les mesures de protection qui figurent dans les différents

 20   instruments normatifs internationaux. Le général Perisic, par conséquent,

 21   était tenu de prendre des mesures contre ses subordonnés s'il savait qu'ils

 22   commettaient des crimes alors qu'ils officiaient en Croatie et en Bosnie.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] D'où ma question hier concernant la

 24   resubordination.

 25   M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, vous pouvez nous

 26   reposer votre question.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne vous repose pas la question; je

 28   vous dis que c'est la raison pour laquelle je vous ai posé ma question


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  1   hier.

  2   M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, je vais retrouver la

  3   question que vous m'avez posée hier puisque j'ai une copie papier du compte

  4   rendu d'audience d'hier.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La question était très simple, je

  6   voulais savoir si lorsque l'on faisait partie d'une autre armée, ce n'était

  7   pas une resubordination.

  8   M. HARMON : [interprétation] Je me souviens qu'on ait eu une discussion

  9   parce qu'il y avait les questions de resubordination et subordination.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Alors, quelle est la définition de

 11   subordination ?

 12   M. HARMON : [interprétation] Ce que nous disons, Monsieur le Président,

 13   c'est qu'il s'agissait de personnel de la VJ qui servait en Croatie et en

 14   Bosnie, et, par conséquent, Perisic avait un contrôle effectif sur eux et

 15   il avait, par conséquent, la responsabilité de prendre les mesures

 16   disciplinaires, nonobstant le fait que le contrôle opérationnel aurait pu

 17   être dans les mains d'une armée ou des armées pendant un certain temps. Le

 18   contrôle opérationnel était peut-être dans les mains de la VRS et de la

 19   SVK. Mais il avait une responsabilité, quelles que soient les

 20   circonstances, et quel que soit le terme utilisé, après le transfert ou le

 21   service qui était exercé dans ces pays.

 22   Ceci conclut, Monsieur le Président, mes remarques concernant l'article

 23   7(3). J'aurais d'autres remarques concernant le prononcé de la peine. Je

 24   voudrais les faire maintenant.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allez-y.

 26   M. HARMON : [interprétation] Ecoutez, je suis tout à fait disposé à le

 27   faire.

 28   Nous allons répéter ce que nous avons dit dans notre mémoire. La première


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  1   considération lorsqu'il s'agit du prononcé de la peine est de déterminer la

  2   peine et la gravité du crime. Il y a deux éléments qui doivent être pris en

  3   compte. La gravité des crimes sous-jacents, et la forme et le degré de

  4   participation du général Perisic.

  5   Bien. Alors, la gravité des crimes sous-jacents. Les affaires de Sarajevo

  6   ont été présentées devant ce Tribunal à deux reprises; l'attaque des

  7   missiles contre Zagreb a fait l'objet de poursuites devant ce Tribunal;

  8   quatre ou cinq fois, les affaires de Srebrenica ont été présentées devant

  9   ce Tribunal; ce Tribunal a constaté que ces crimes étaient des crimes

 10   graves. Je n'ai pas l'intention de m'étendre là-dessus. Je n'ai pas

 11   l'intention de faire des commentaires supplémentaires sur la gravité de ces

 12   crimes, Madame, Messieurs les Juges. Les décisions de cette Chambre sont

 13   suffisamment évocatrices.

 14   Je souhaite maintenant passer à la forme et au degré de participation

 15   de l'accusé. En l'espèce, c'est quelque peu à part, si je puis dire. Le

 16   général Perisic n'a jamais tiré une seule balle, il n'a jamais

 17   personnellement tué qui que ce soit, il n'a jamais personnellement mis le

 18   feu à une quelconque maison en Bosnie et en   Croatie, il n'a jamais

 19   personnellement chassé un non-Serbe de sa maison. Le comportement auquel il

 20   a pris part, je parle de comportement criminel, par le biais de ces faits

 21   est peut-être moins repoussant à nos y eux, peut-être moins repoussant eu

 22   égard à notre sensibilité, j'entends bien. Cela est en général le cas, et

 23   plus communément le cas. Nous réagissons fortement face aux personnes qui

 24   ont du sang sur les mains, sur les personnes qui terrorisent les autres,

 25   qui ont obligé d'aucuns à quitter leurs maisons, qui détruisent les

 26   monuments et les édifices culturels. La distance physique, néanmoins, des

 27   crimes en tant que telle ou un manque de participation directe à ces crimes

 28   nous frappe moins, ce qui est tout à fait naturel en termes de sensibilité.


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  1   Le général Perisic est accusé d'avoir aidé et encouragé les personnes qui

  2   ont commis toutes ces choses, qui ont tué des gens et qui ont déplacé

  3   d'autres personnes par la force, une campagne de pilonnage et de

  4   bombardement. Compte tenu des crimes qui ont été commis et de l'ampleur des

  5   crimes commis, à nos yeux, cette forme de participation ne devrait en aucun

  6   cas minimiser sa responsabilité. Il a apporté son assistance et son aide à

  7   la VRS pendant toute la durée de son mandat en tant que chef de l'état-

  8   major général, la période au cours de laquelle les crimes les plus

  9   significatifs ont été commis.

 10   Une autre chose qui doit être prise en compte par vous, Madame,

 11   Messieurs les Juges, quelque chose que j'ai déjà évoqué : le général

 12   Perisic a protégé le général Mladic. Le général Mladic est encore une des

 13   deux seules personnes mises en accusation qui n'ont pas encore été

 14   arrêtées. Nous faisons valoir, Monsieur le Président, que ses agissements

 15   sont pertinents et doivent être pris en compte par vous lorsque vous allez

 16   prononcer la peine.

 17   Le mémoire en clôture de la Défense expose un certain nombre de

 18   facteurs, à savoir sa coopération avec le bureau du Procureur; il a été

 19   d'accord pour s'asseoir avec le Procureur. Nous avons une série

 20   d'entretiens avec lui. Je parle ici de facteurs atténuants. Le général

 21   Perisic ne l'a pas fait complètement de lui-même. Nous faisons valoir que

 22   sa coopération ne doit en aucun cas constituer une circonstance atténuante.

 23   Le général Perisic s'est rendu de lui-même. Le Tribunal devrait en tenir

 24   compte; ça, j'en suis tout à fait conscient. Nous faisons valoir,

 25   néanmoins, que si nous mettons dans la balance l'ampleur des crimes en

 26   l'espèce, sa reddition volontaire ne devrait faire l'objet d'aucune

 27   considération en termes de poids à accorder à cela.

 28   Nous avons entendu au cours du procès un certain nombre de témoins

 


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  1   qui ont témoigné sur l'opposition du général Perisic à Slobodan Milosevic.

  2   Je souhaite être tout à fait clair : pendant toute la durée de la guerre,

  3   le général Perisic ne s'est pas opposé à Slobodan Milosevic. Ces deux

  4   hommes constituaient les personnalités les plus importantes à l'époque en

  5   termes d'aide fournie à la VRS et à la SVK. De surcroît, son opposition à

  6   Slobodan Milosevic est quelque chose qui s'est produit à la fin de son

  7   mandat. Nous avons entendu des témoins nous parler de la guerre au Kosovo;

  8   le général Perisic ne s'est pas opposé à l'emploi de l'armée au Kosovo s'il

  9   y avait une déclaration de guerre, mais il n'y a pas eu de déclaration de

 10   guerre, et dans ce cas-là, il s'y est opposé. Il ne s'est pas opposé à la

 11   guerre, cependant. Et nous faisons valoir que le fait de s'opposer à

 12   Milosevic à la fin de son mandat est quelque chose qui ne devrait avoir

 13   aucun poids pour ce qui est des circonstances atténuantes au regard de

 14   l'importance de ces crimes.

 15   Nous faisons valoir, Madame, Messieurs les Juges, que nous souhaitons

 16   que le général Perisic soit condamné pour tous les chefs d'accusation qui

 17   figurent à l'acte d'accusation et que vous imposiez une peine à vie pour la

 18   commission de tous ces crimes. Je vous remercie, Madame, Messieurs les

 19   Juges.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Harmon.

 21   Maître Lukic.

 22   [Plaidoiries]

 23   M. LUKIC : [interprétation] Me Gregor Guy-Smith va être le premier à

 24   s'adresser aux Juges de la Chambre. C'est ainsi que nous avons partagé

 25   notre temps. Un instant, s'il vous plaît.

 26   M. GUY-SMITH : [interprétation] Nous changeons simplement de pupitre, et

 27   ensuite je serai à vous.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]


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  1   M. GUY-SMITH : [interprétation] M'entendez-vous ?

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Maître Guy-Smith, hormis le fait

  3   que j'entends maintenant un écho.

  4   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, moi aussi.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ceci ne passe pas par mon casque,

  6   parce que je l'entends même lorsque j'enlève mon écouteur. Je ne sais pas

  7   de quoi il s'agit. Veuillez poursuivre, Maître Guy-Smith.

  8   M. GUY-SMITH : [interprétation] Merci beaucoup.

  9   A l'origine, je souhaite me faire l'écho des remerciements --

 10   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pardonnez-moi.

 12   M. GUY-SMITH : [interprétation] Pas de problème. Pas de problème.

 13   A l'origine, je souhaite me faire l'écho des remerciements qui ont été

 14   prodigués à tous les participants par M. Harmon, à toutes les personnes qui

 15   travaillent dans cette institution, qui ont travaillé avec nous pendant

 16   toute la durée de ce procès. Certains d'entre vous sont des personnes que

 17   nous connaissons de nom, et pour beaucoup d'entre nous, nous connaissons

 18   leur visage, et vous avez été très précieux pendant toute la durée de ces

 19   procès. Je souhaite remercier, et je suis certain qu'il s'agit d'une des

 20   difficultés lorsqu'on énumère le nombre de personnes que l'on souhaite

 21   nommer de la part de l'Accusation et de la Défense, et je crois que les

 22   deux parties remercient les personnes qui transcrivent nos propos de façon

 23   à ce que nos propos puissent être lus, quels que soient ces propos, sages

 24   ou non. Je souhaite également remercier M. D. Montgomery qui travaille

 25   maintenant pour l'équipe de la Défense depuis un certain temps assez

 26   considérable.

 27   Ce qui m'a frappé hier c'est la conversation qui s'est tenue. Je ne sais

 28   pas dans quelle mesure vous avez pris part à de telles conversations, mais


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  1   une des questions qui a été évoquée au cours de cette conversation

  2   méritait, à mon sens, un commentaire. Je suis un représentant de ce

  3   Tribunal, haut représentant dans cette salle d'audience, un représentant

  4   juridique, comme toutes les personnes présentes dans ce prétoire. On peut

  5   contester l'interprétation de la loi, mais nous croyons fermement à la loi.

  6   Il n'y aurait pas de loi s'il n'y avait pas de précédent, et nous pensons

  7   que les précédents sont importants. Nous nous reposons sur le précédent,

  8   c'est ce qui nous permet de présenter notre thèse. Et sans précédent, nous

  9   n'aurions aucune orientation à suivre. Sans précédent, nous n'aurions pas

 10   les affaires présentées devant Nuremberg, nous n'aurions pas les éléments

 11   historiques qui nous permettent de tirer des analogies actuelles, nous ne

 12   serions pas en mesure de faire des commentaires dessus, nous ne pourrions

 13   pas non plus comprendre la difficulté des questions qui sont soumises à ces

 14   différentes institutions.

 15   Nous pensons fermement au fondement que constituent les valeurs, les règles

 16   et les règlements. Nous espérons que tout un chacun fasse confiance à

 17   toutes ces règles et valeurs et que ces personnes vivent en conformité avec

 18   cela. Encore une fois, sans l'histoire et le recul de l'histoire, je ne

 19   pense pas que mon grand-père ait été le premier à le dire, je ne pense pas

 20   que mes petits enfants soient les derniers à le dire, mais si nous

 21   n'apprenons pas les leçons de l'histoire, nous sommes condamnés à répéter

 22   ce qui a déjà eu lieu.

 23   J'ai été un petit peu inquiet hier, parce que j'ai cru comprendre qu'on

 24   faisait valoir une certaine attitude. Toutes les fois qu'un procès a lieu,

 25   ce procès a lieu tabula rasa, on recommence à zéro. Il ne s'agit pas d'un

 26   sentiment qui, à mon sens, est un sentiment auquel vont se livrer les Juges

 27   de cette Chambre lorsque les Juges de cette Chambre vont délibérer. Si tel

 28   est le cas, je devrais dans ce cas me prévaloir d'une requête et demander à


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  1   ce que tous les faits déjà jugés soient supprimés. Je ne pense pas que ce

  2   serait une attitude raisonnable, raisonnable ou voire même logique.

  3   Lorsqu'il s'agit de prendre en considération les différentes affaires qui

  4   sont présentées devant ce Tribunal, nous sommes en présence d'éléments qui

  5   sont placés dans le contexte d'une guerre, et même si les fleurs peuvent

  6   éclore en temps de guerre, ça n'est pas quelque chose, en général, auquel

  7   nous prêtons attention.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Puis-je vous interrompre pendant

  9   quelques instants. En avez-vous terminé avec la notion de précédent ? Je

 10   souhaite faire un commentaire là-dessus.

 11   M. GUY-SMITH : [interprétation] Tout à fait.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez indiqué que nous sommes tous

 13   des représentants de la loi, et même si nous apprenons beaucoup des

 14   précédents et de l'histoire, nous créons des précédents également.

 15   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je suis complètement d'accord avec vous.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez poursuivre.

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation] Et je crois que nous pouvons tomber

 18   d'accord, c'est même quelque chose auquel M. Harmon a fait allusion, il

 19   s'agit d'une affaire tout à fait particulière et d'une situation tout à

 20   fait particulière, qui est quelque chose que nous allons peut-être aborder

 21   plus tard lorsque nous aborderons un certain nombre d'idées à cet effet. Je

 22   crois que nous pouvons nous mettre d'accord sur le fait que lorsqu'une

 23   nouvelle loi est édictée, cette loi se fonde sur une tradition très riche

 24   qui comporte un nombre important de précédents. Cette loi va peut-être

 25   évoluer, va peut-être s'écarter de la loi. Elle va peut-être produire

 26   quelque chose de complètement nouveau, mais ne va pas s'en écarter

 27   complètement. Et si l'on se penche avec minutie sur ces éléments-là, il

 28   faut tenir compte de tout ce qui a été fait avant nous, parce que si tel


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  1   n'est pas le cas, nous serions en train de réinventer la roue, chose que

  2   nous ne souhaitons pas faire, je suppose, aucun d'entre nous en tout cas.

  3   Alors, pendant quelques instants, je souhaitais parler de la guerre et

  4   lorsque les dieux de la guerre donnent libre-cours à leurs instincts, ce

  5   qui est la raison de notre présence ici aujourd'hui, qui est le tissu

  6   fragile que nous chérissons tous, à savoir lorsque l'ordre des choses est

  7   rompu après ces guerres et après que ces guerres aient été menées de façon

  8   traditionnelle et une fois que nous arrivons à la fin de la guerre et que

  9   nous parvenons à la paix, nous essayons de donner du sens à ce qui est

 10   arrivé et nous tentons de faire en sorte ou donner un semblant d'ordre à

 11   une époque qui s'est avérée chaotique.

 12   Si c'est ce que nous faisons ici, et si c'était simplement une question

 13   historique qui se présentait à nous, ce serait chose aisée, mais en

 14   réalité, notre tâche ici aujourd'hui consiste essentiellement à rendre des

 15   décisions de culpabilité ou des décisions sur l'innocence du général

 16   Perisic. Et à cet égard, nous disposons d'un mécanisme qui nous permet de

 17   tenir compte de critères très précis - c'est très simple - critères

 18   exigeants, à savoir qu'il revient à l'Accusation d'établir la culpabilité

 19   au-delà de tout doute raisonnable.

 20   Que signifie ceci ? Dans l'affaire Martic, ceci a été établi comme suit :

 21   "On ne peut expliquer de façon raisonnable les éléments de preuve présentés

 22   que par la culpabilité de l'accusé."

 23   Et si on mesure les éléments contre ce critère exigeant de la preuve, il

 24   est vrai que l'Accusation ici présente n'a pas pu prouver que ses

 25   interprétations sont complètement plausibles, encore moins qu'il ne s'agit

 26   là que des explications raisonnables des éléments de preuve présentés. La

 27   raison pour laquelle je consacre un certain temps à tout ceci pour ce qui

 28   est de notre mission ici aujourd'hui, c'est que ce procès dure depuis un


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  1   certain temps déjà et nous avons pu entendre, voir et soupeser un nombre

  2   très important d'éléments de preuve, mais cela en tant que tel ne permet

  3   pas de prouver les éléments de l'affaire.

  4   Et pour ce qui est des éléments de preuve qui ont été versés au dossier, il

  5   est important de se souvenir du fait qu'un nombre important d'éléments de

  6   preuve, comme l'a indiqué M. Harmon - et nous sommes d'accord sur ce point,

  7   et nous sommes d'accord sur beaucoup d'autres points d'ailleurs aussi - que

  8   les éléments de preuve documentaires, autrement dit, les mots couchés sur

  9   le papier, sont susceptibles d'être interprétés. Et la raison pour laquelle

 10   ceci est important d'emblée c'est parce que c'est quelque chose dont il

 11   faut se souvenir, car votre tâche consiste, à vous trois, à interpréter ces

 12   propos. L'Accusation a présenté son point de vue, ce qui peut vous sembler

 13   attirant ou non, mais s'il y a deux explications plausibles, une qui penche

 14   plutôt dans le sens de la culpabilité ou plutôt dans le sens de

 15   l'innocence, il faut certainement adopter l'explication qui penche dans le

 16   sens de l'innocence. C'est votre devoir que d'agir ainsi, parce que c'est

 17   la loi qui l'exige.

 18   Il est donc fort important, si nous gardons ceci à l'esprit, que vous

 19   examiniez attentivement le mémoire en clôture de l'Accusation et ainsi que

 20   son réquisitoire pour déterminer si, oui ou non, l'Accusation a appliqué la

 21   charge de la preuve qui convient aux éléments de cette affaire. Et je suis

 22   sûr que c'est quelque chose que vous savez, il est important de se pencher

 23   sur tous les éléments et de savoir que tous les éléments de preuve dont est

 24   accusé l'accusé doivent être prouvés au-delà de tout doute raisonnable.

 25   Parce que la plupart des éléments de preuve dont vous disposez sont

 26   des preuves indirectes, qui sont des preuves donc sujettes à déduction. La

 27   question qui se pose donc est la question de l'analyse que vous allez

 28   faire, à savoir si, oui ou non, les éléments de preuve qui ont été


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  1   présentés par l'Accusation, parce que l'Accusation a la charge de la preuve

  2   - nous n'avons pas une quelconque charge sur nos épaules - eh bien, à

  3   savoir si les éléments présentés sont au complet ou s'il s'agit de prendre

  4   les morceaux choisis. C'est quelque chose, une expression souvent utilisée,

  5   et parfois certains éléments entrent par une oreille et sortent par l'autre

  6   parce qu'il peut s'agir d'accusations peu agréables sur ce que l'une ou

  7   l'autre partie a fait, mais en réalité, ceci est beaucoup plus important

  8   que cela.

  9   Lorsqu'on prend les morceaux choisis, on prend une affaire ou on considère

 10   un individu ou certaines données dans une lumière particulière. On se

 11   penche sur un passage ou sur des données en particulier qui peuvent

 12   contredire une position ou une autre et, pour ce qui est du devoir de

 13   l'Accusation, de faire en sorte que justice soit faite, mais également pour

 14   l'Accusation d'assumer la charge de sa responsabilité. Et le fait de

 15   prendre des morceaux choisis est un acte qui diminue la charge de la

 16   responsabilité.

 17   Je dois dire aussi que dans ce cas, l'Accusation est la victime - j'essaie

 18   de choisir les bons termes - et donc, il peut s'agir en fait de

 19   supputations logiques qui s'avèrent erronées. C'est quelque chose que nous

 20   avons pu constater dans cette affaire, et je vais aborder un certain nombre

 21   de ces éléments-là ou de ces questions-là et en parler en quelques mots.

 22   Pour finir, comment analyser les éléments de preuve qui vous ont été

 23   présentés ? Quelque chose qui s'est présenté à plusieurs reprises, eh bien,

 24   comporte également un de ces sophismes logiques comme suit : parce qu'il y

 25   a une corrélation entre deux questions ne signifie pas pour autant qu'il y

 26   a un lien de causalité. Tout simplement, la façon la plus simple de le dire

 27   c'est qu'il y a une corrélation entre une alarme qui sonne et la lumière du

 28   jour. Il n'y a pas de lien de causalité entre ces deux phénomènes. Et à


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  1   plusieurs reprises, à la fois au niveau des arguments présentés et au

  2   niveau de ce qui a été dit aujourd'hui, et des arguments présentés dans les

  3   mémoires en clôture, il y a eu des certains cas où ce sophisme, cum propter

  4   hoc, est quelque chose qui a été présenté sans aucun doute.

  5   Dans le cadre de ce que nous avons entendu, il est très important de se

  6   souvenir du fait que cette affaire n'est pas statique et que les éléments

  7   de preuve qui ont été présentés sont des éléments de preuve qui ont été

  8   présentés dans une situation fort dynamique, une situation mouvante. Nous

  9   avons commencé par être confrontés à un certain nombre de difficultés qui

 10   correspondaient à la période qui a précédé le mandat de Perisic et pendant

 11   la négociation des accords de paix de Dayton. Les parties au conflit

 12   avaient adopté à ce moment-là des positions différentes, défendaient des

 13   intérêts différents, et avaient des intentions cachées. Plus

 14   particulièrement en ce qui concerne la RFY, le gouvernement à l'époque pour

 15   lequel travaillait le général Perisic en tant que chef d'état-major général

 16   de l'armée; il y avait donc des différences de points de vue aux plans

 17   politique et stratégique entre la Republika Srpska et la Republika Srpska

 18   de Krajina à l'époque.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Veuillez en terminer sur ce point,

 20   s'il vous plaît.

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je peux m'arrêter là.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous allons faire la pause maintenant

 23   et revenir à midi 30. L'audience est levée.

 24   --- L'audience est suspendue à 12 heures 00.

 25   --- L'audience est reprise à 12 heures 32.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Guy-Smith.

 27   M. GUY-SMITH : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 28   Bien entendu, nous maintenons ce que nous avons rédigé dans notre mémoire


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  1   et nous n'allons pas réitérer les mêmes arguments. Je n'en ai pas

  2   l'intention, et Me Lukic non plus.

  3   Avant d'aborder la question qui consiste à savoir si on a le droit de

  4   prendre uniquement ce qui nous convient, comme je l'estime, a procédé

  5   l'Accusation dans son mémoire en clôture - qui, je pense, exigerait un

  6   examen exhaustif plus que d'habitude - donc, avant de faire cela, je

  7   voudrais évoquer quelques points qui, de l'avis de la Défense, ne devraient

  8   pas être pris en considération par la Chambre de première instance

  9   lorsqu'elle se penchera sur les arguments de l'Accusation.

 10   Le 28 septembre 2008, cette Chambre a rendu une décision sur les requêtes

 11   aux fins de constat judiciaire pour les déclarations de culpabilité devant

 12   le TPIY. Et dans cette décision, au paragraphe 20, la Chambre a estimé que

 13   :

 14   "Lorsque l'Accusation souhaite faire consigner au compte rendu d'audience

 15   le fait qu'il existe des déclarations de culpabilité pour les subordonnés

 16   qui ont été prononcées par le Tribunal, l'Accusation est libre de le faire

 17   en renvoyant un des jugements pertinents."

 18   Pendant sa présentation des moyens, il vous appartient de décider si, oui

 19   ou non, les plaidoiries et les réquisitoires sont appropriés. Et il y a

 20   toute une série, je dois dire, de références aux déclarations de

 21   culpabilité. Par exemple, aux paragraphes 5, 62, 197, 438, 464, 469, 474,

 22   505, 510, 513, et je ne les ai pas tous énumérés. Nous estimons que cela ne

 23   devrait pas être pris en considération par la Chambre.

 24   A d'autres moments, l'Accusation affirme -- par exemple, au paragraphe 450,

 25   note de bas de page 619, l'Accusation se réfère à l'acte d'accusation comme

 26   constituant le fondement de la preuve et déclare : "La responsabilité de

 27   Perisic est engagée au titre de l'article 7(1) du Statut pour avoir aidé et

 28   encouragé la commission des crimes commis par la VRS de Sarajevo et


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  1   Srebrenica." Et de manière analogue, page 450, note de bas de page 1 620,

  2   la même référence est faite par l'Accusation à l'acte d'accusation.

  3   Au paragraphe 598, note de bas de page 1 968, l'Accusation se réfère à

  4   l'acte d'accusation en affirmant que : "La direction de la

  5   RFY et Perisic connaissaient la commission des crimes à Sarajevo, et cela

  6   est avancé comme étant le fondement de la preuve." Comme nous le savons

  7   tous parfaitement, l'acte d'accusation ne constitue pas une preuve.

  8   Et enfin, le paragraphe 818, note de bas de page 2 565, l'Accusation se

  9   repose encore une fois sur l'acte d'accusation. Donc c'est une manière de

 10   s'exprimer par des moyens détournés dans l'écriture, mais ça ne constitue

 11   pas d'élément de preuve, ça ne devrait pas être pris en considération comme

 12   tel. C'est une forme de témoignage qui n'est pas autorisée, la Défense

 13   affirme. Aux notes de bas de page 239, 251, 280 et 291, l'Accusation

 14   affirme comme suit :

 15   "Un nombre limité de," et puis, ils se réfèrent à des rapports

 16   opérationnels, des rapports de permanence de la section du renseignement et

 17   la sécurité, des rapports de l'administration du renseignement, "ont été

 18   rendus disponibles au bureau du Procureur." Comme s'ils cherchaient à

 19   justifier par là le fait qu'ils n'ont pas suffisamment de preuves. Il n'y a

 20   pas de preuve nous permettant de penser qu'il n'y a qu'un nombre limité de

 21   rapports qui ont été mis à la disposition du bureau du Procureur. Personne

 22   n'est venu déposer à cet effet, personne n'a évoqué des difficultés

 23   qu'aurait rencontrées le bureau du Procureur dans l'obtention des rapports.

 24   Donc rien de tel n'a été présenté, et cet argument ne devrait pas être pris

 25   en compte.

 26   Voyons maintenant ce qu'il en est des arguments avancés par l'Accusation

 27   dans leur mémoire. Permettez-moi de commencer par l'examen du paragraphe

 28   67. Dans ce paragraphe, l'Accusation affirme :


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  1   "L'impact négatif d'une telle aide sur les réserves de guerre de la VJ a

  2   été encore une fois souligné à l'attention du SDC par le général Blagoje

  3   Kovacevic de la VJ en juillet 1994, qui a déclaré que 'le fait de fournir

  4   de grandes quantités d'armes, de munitions, d'explosifs et de matériel de

  5   guerre, à savoir 3 640 tonnes à la VRS et à la SVK, a anéanti les réserves

  6   et que cela a fait tomber le seuil de munition au-dessous de 50 % du niveau

  7   requis.'"

  8   Et puis, je vous renvoie à la page 9 de la pièce P785, où, effectivement,

  9   il l'a affirmé, à savoir que :

 10   "En dépit des difficultés rencontrées sur une longue période, le niveau

 11   d'aptitude aux combats a été maintenu et renforcé. Il permet de créer une

 12   situation de stabilité dans des zones de crise, de maintenir la paix à nos

 13   frontières, et cetera. En application de la directive sur les mesures

 14   spéciales de l'aptitude aux combats continue, nous avons des forces prêtes

 15   à agir."

 16   Alors, si l'on ne se reposait que sur ces éléments cités au paragraphe, si

 17   on ne lisait pas l'ensemble des échanges, cela différerait de manière très

 18   considérable de ce qui a effectivement été dit par l'intervenant. Cela

 19   s'est produit à de nombreuses reprises. Je dois dire que nous avons été

 20   critiqués pour avoir pris des documents hors contexte -- analysé des

 21   documents hors contexte, or je précise encore une fois qu'aucune charge de

 22   la preuve ne repose sur la Défense. L'Accusation vous a demandé de vous

 23   pencher sur l'ensemble des éléments de preuve. Eh bien, nous allons pour

 24   notre part leur adresser les mêmes critiques et formuler la même requête.

 25   C'est un autre point d'accord entre l'Accusation et la Défense, au moins

 26   intellectuellement, à savoir que vous devez vous pencher sur l'ensemble des

 27   éléments de preuve qui vous ont été présentés, examiner chacun des

 28   documents en tant que tel, et là j'ai à l'esprit en particulier les


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  1   questions du conseil suprême de la Défense, qui constituent une mine

  2   d'informations très importante et qui jette une lumière très différente du

  3   tableau qui a été présenté par l'Accusation.

  4   Je voudrais maintenant aborder le paragraphe 69, et je ne vais pas en

  5   donner lecture de manière exhaustive. Je vais juste me contenter de la

  6   partie du paragraphe où il est question de la dépêche qui vient de

  7   Karadzic, où l'Accusation affirme qu'il a plaidé :

  8   "-- vous vous informiez en passant par l'état-major de ce qui en est de la

  9   situation sur le plan de l'équipement et vous allez voir qu'elle est pire

 10   que ce que je pourrais vous écrire dans mon télégramme. Les conséquences

 11   sont déjà graves, elles pourraient devenir tragiques," et puis nous avons

 12   une parenthèse, et l'information a été omise.

 13   Et voilà ce qu'il dit dans la suite :

 14   "Si la situation ne change pas rapidement, les Musulmans ne signeront pas

 15   l'accord d'interruption des hostilités; en revanche, ils vont continuer de

 16   combattre. Nous faisons l'impossible pour obtenir les moyens financiers et

 17   pour obtenir de l'aide à l'étranger, mais nous avons besoin du temps pour

 18   ce faire. Donc nous allons essayer de contrer leurs attaques et de briser

 19   leur offensive, nous allons signer un cessez-le-feu pour une période de

 20   quatre mois, et pendant cette période, nous allons essayer de faire en

 21   sorte que la production de l'équipement se continue ou que l'on se procure

 22   de l'équipement dans le cas où la guerre continuerait."

 23   C'est la partie qui manque.

 24   Et à la fin, nous trouvons la phrase :

 25   "Je vous demande de bien vouloir vous pencher sur cette question et de nous

 26   fournir une réponse. Nous assumons tous une responsabilité devant

 27   l'histoire."

 28   Honnêtement, et là je vous demande véritablement d'examiner cette question


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  1   en toute sincérité, si vous n'aviez pas connu le contenu de la partie qui

  2   est omise, est-ce que vous auriez l'impression que c'est toujours la même

  3   chose que l'on demande ? Et j'oserai dire que ce n'est pas le cas.

  4   Voyons maintenant quel est le contenu du paragraphe 70. L'Accusation

  5   affirme :

  6   "A cette réunion, Kovacevic a affirmé de nouveau que la situation était

  7   critique pour la RS et la RSK." Là, nous avons le D. Kovacevic, c'est un

  8   autre Kovacevic.

  9   Je m'adresse à vous, Madame et Messieurs les Juges : quelle est votre

 10   conviction sur la base de ce que je viens de vous lire ? "A cette réunion,

 11   Kovacevic a répété encore une fois que la situation est critique pour la RS

 12   et la RSK." Donc, de toute évidence, il était sur place. Nécessairement,

 13   n'est-ce pas, si on lit cette phrase. Mais voyons la pièce P784, donc le

 14   document d'où provient cette citation, voyons cette référence dans sa

 15   totalité :

 16   "Milosevic : Ils ne peuvent pas. Ils ne peuvent le faire qu'avec le

 17   ministère fédéral et l'état-major général. Ils n'ont pas de contacts

 18   d'affaires avec les producteurs des armes et de l'équipement militaire, qui

 19   ne peuvent pas être livrés directement. Ils ne peuvent être livrés que sous

 20   l'égide du ministère et par le truchement de la VJ. Aucun pays ne

 21   l'accepterait. Ce Kovacevic est le ministre de la Défense de la Republika

 22   Srpska, c'est bien ça ?" Là, c'est une question. "Ecoutez ce qu'il suggère

 23   : 'Kovacevic a répété que la situation était critique pour la Republika

 24   Srpska et la RSK.'

 25   "Qu'est-ce qu'il a à voir avec la RSK ? Il propose : 'premièrement, que

 26   l'on voie de nouveau quels sont les prix et de trouver des réserves auprès

 27   des producteurs!?

 28   "'Deuxièmement, de mettre sur pied un système d'importation conjointe


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  1   d'armes et d'équipement militaire par le gouvernement fédéral, la VJ, le

  2   MUP, afin d'importer les biens qui sont les plus nécessaires, et cela doit

  3   être résolu au niveau du gouvernement fédéral.

  4   "'Troisièmement, essayer de passer par le système de comptabilité nationale

  5   et la banque nationale de Yougoslavie pour réunir des fonds.

  6   "'Quatrièmement, la question des conscrits qui reviennent!?'"

  7   Là encore, il y a un point d'exclamation et un point d'interrogation. Et

  8   donc :

  9   "Il propose des choses qui n'ont rien à voir avec son travail." Et

 10   Milosevic propose : "Je propose que les Russes donnent au Japon les îles

 11   Kuril."

 12   Dans la transcription, il y a une annotation qui suit : rires.

 13   Donc de ce que je vous ai lu dans le mémoire de l'Accusation, donc la

 14   partie qu'ils n'ont pas citée en agissant de manière inappropriée, comme je

 15   viens de le dire là encore, ce qu'ils ont fait, c'était de ne prendre que

 16   ce qu'il leur convenait, et dans cette déclaration de Milosevic nous ne

 17   trouvons rien de ce qu'affirme l'Accusation ?

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Guy-Smith, pour que nous

 19   puissions mieux suivre, est-ce que vous pourriez nous annoncer les

 20   chapitres.

 21   M. GUY-SMITH : [aucune interprétation]

 22   M. LE JUGE MOLOTO : Le contexte dans lequel se situent vos remarques ?

 23   M. GUY-SMITH : [interprétation] Ici, l'Accusation parle de l'importance de

 24   l'aide accordée à la VRS, ou plutôt, du fait que cela a été expressément

 25   formulé à l'intention de Perisic.

 26   Ensuite, le sujet suivant dans le mémoire de l'Accusation se situe après le

 27   titre : "La VRS se repose sur la VJ pour faire la guerre." Paragraphe 75.

 28   Et il nous faudra passer à huis clos partiel.

 


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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je demande que l'on passe à huis clos

  2   partiel, s'il vous plaît.

  3   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

  4   [Audience à huis clos partiel]

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  2   [Audience publique]

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

  4   Oui, Maître Guy-Smith.

  5   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, j'ai brièvement abordé le paragraphe

  6   77, qui évoque une conversation interceptée entre Mladic et Milosevic.

  7   Milosevic déclare : "Ecoute, j'ai été en contact avec les Américains hier

  8   et je suis en contact avec les Russes sans arrêt. Ils veulent avoir la

  9   signature d'un accord de cessez-le-feu. Ils ont condamné Tudjman. Hier,

 10   l'accord a été accepté par le gouvernement de la Krajina. Aujourd'hui, ils

 11   vont le faire avec ceux-là. Le représentant d'Akashi se rend auprès des

 12   deux parties et cela doit être finalisé aujourd'hui. Les propositions

 13   d'Akashi concernent le fait que le contrôle des Nations Unies soit imposé

 14   de nouveau sur l'autoroute, qu'il n'y ait pas de forces, que personne n'ait

 15   ses forces dans une limite de 2 kilomètres en amont et en aval."

 16   La conversation continue pendant quelques temps, puis Milosevic dit : "J'ai

 17   dit que malheureusement, vous avez une direction politique complètement

 18   folle qui vous entraîne dans la mort. C'est ça le problème."

 19   Mladic qui répond : "Excusez-moi, Monsieur le Président. C'est la raison

 20   pour laquelle je vous appelle, à cause des souffrances de la population.

 21   Que ferons-nous pour eux ? Je me préoccupe pour eux. Je ne me préoccupe pas

 22   pour tel ou tel individu de la direction ici, pour les gens qui sont rendus

 23   fous par toutes sortes de --" et cetera.

 24   Milosevic : "Je dois te dire, Ratko, lorsque j'ai demandé que Martic ne

 25   ferme pas l'autoroute, il m'a dit que : 'Les gens se plaignent, donc il

 26   faut que je ferme l'autoroute.' C'était ça le problème."

 27   Mladic : "Je t'écoute."

 28   Milosevic : "J'ai une autre ligne qui interfère. Ratko, il faut diriger les


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  1   gens et il ne faut pas faire le difficile, il ne faut pas être fou, c'est

  2   là qu'il faut intervenir, il faut que tu interviennes, c'est toi le

  3   commandant et tu peux dire que c'est une honte que des informations comme

  4   ça soient diffusées, c'est une honte."

  5   Mladic : "Je sais que c'est une honte et je sais que c'est le pire, et je

  6   sais que ce n'est pas la vérité."

  7   Et ça, c'est la citation sur laquelle se repose l'Accusation : "Sans la

  8   Serbie et sans son aide, on n'aurait pas pu survivre, mais il est évident

  9   qu'il faut expliquer aux gens quelle est la situation."

 10   Comme je l'ai dit il y a quelques instants, il s'agit d'un exemple typique

 11   de ce que peut faire le génie des mots, et ceci m'amène à dire, et j'espère

 12   que ceci m'amènera à vous dire, que vous allez devoir vous armer de

 13   patience pour décider de savoir si tout ce qui est présenté par

 14   l'Accusation est fait de manière fidèle et que cela répond aux critères en

 15   la matière.

 16   Et je l'ai dit dès le départ, il y avait énormément de documents et, par

 17   conséquent, on avait une forte marge d'appréciation, et, par conséquent, il

 18   était donc nécessaire d'analyser de manière poussée et de se pencher sur

 19   les documents dans le détail. Et ceci, quel que soit le parti pris utilisé

 20   par qui que ce soit dans le choix des éléments de ces documents qui

 21   seraient présentés, et notamment au vu de ce qu'a fait l'Accusation. Par

 22   conséquent, je pense qu'il est primordial que lorsque l'on prend

 23   connaissance d'un mémoire et lorsque l'on entend les arguments qui sont

 24   présentés oralement ici, il est primordial de garder à l'esprit qu'il y a

 25   énormément d'informations, mais également énormément d'interprétations qui

 26   peuvent être données à ces informations et aux déclarations qui sont

 27   utilisées par l'Accusation et qui vont, selon l'Accusation, dans le sens de

 28   la culpabilité de M. Perisic. Parce que je dirais que ce qui est avancé


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  1   dans le paragraphe 77 a très peu à voir avec le contenu réel de la

  2   conversation qui s'est tenue entre Mladic et Milosevic à l'époque.

  3   Je voudrais également m'attarder sur un autre exemple, à savoir le

  4   paragraphe 72. Dans ce paragraphe 72, on parle de quelque chose de très

  5   intéressant. Dans le paragraphe 72, l'Accusation avance :

  6   "Milosevic a rappelé à Perisic la quantité d'aide fournie par la VJ lors de

  7   la 27e séance du SDC qui s'est tenue le 27 septembre 1994, en déclarant :

  8   'Momo, Dieu seul sait la quantité de matériel qui a été envoyée en

  9   direction de la RS et de la RSK et qui provenait de la (VJ).'" Et il s'agit

 10   de la pièce P792 qui est citée ici.

 11   Cette citation se trouve en fait à la page 46 de cette pièce. Mais les

 12   discussions qui sont abordées ici consistent à dire que Perisic avait en

 13   fait découvert qu'une personne au sein de la VJ était un voleur et qu'il

 14   avait été coupable d'abus de pouvoir dans la mesure où il avait commis des

 15   vols et il a donc été démis de ses fonctions. Et le SDC n'a pas été

 16   d'accord parce que selon eux, et ils ont été très clairs à ce sujet,

 17   Perisic avait pris une décision [imperceptible].

 18   A la page 30, on voit Milosevic qui pose la question à Perisic --

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Page 30 de quel document ?

 20   M. GUY-SMITH : [interprétation] De la pièce P782. Ou plutôt, 792. Milosevic

 21   dit : "Comment a-t-il pu s'approprier des véhicules ?" Parce que Perisic

 22   avait prétendu qu'il s'était approprié des véhicules. Et Perisic a répondu

 23   :

 24   "Il envoyait des gens dans différents endroits et leur donnait des

 25   véhicules de fonction pour des usages privés et ils utilisaient du

 26   carburant."

 27   Lilic répondant, sous l'air de la plaisanterie : "Il faudrait en fait

 28   mettre à pied toute l'armée ou la moitié de l'armée de la Yougoslavie parce


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  1   qu'ils se baladent dans Belgrade également."

  2   Perisic essaye de conserver sa position en disant : "Il n'a pas autant de

  3   munitions qu'il devrait avoir parce qu'en fait, il a puisé dans son stock

  4   de combat."

  5   Milosevic dit : "Momo, avant cette interdiction, tout le monde fournissait

  6   des munitions."

  7   Et Perisic dit : "Mais cela s'est passé après l'imposition de cette

  8   interdiction."

  9   Puis, la discussion continue. Et enfin, Milosevic dit à la page 46, qui est

 10   la page citée par l'Accusation :

 11   "Momo, Dieu seul sait les quantités de matériel qui ont été envoyées en RS

 12   et en RSK à partir de l'armée de Yougoslavie."

 13   Et Perisic répond : "Ce n'est pas nécessaire de nier cela. A partir de

 14   maintenant, je resterai silencieux. Ma conscience est claire par le fait

 15   que j'ai proposé ce que j'ai proposé sur la base d'arguments que j'ai fait

 16   valoir et vous déciderez ce que vous déciderez. En tant que soldat,

 17   j'exécuterai les ordres. Si vous tolérez que Boro [comme interprété] donne

 18   du matériel, très bien, je le réinstallerai à son poste, mais en faisant

 19   cela, nous allons créer des conditions pour que les choses de ce type se

 20   reproduisent. Il l'a fait de manière très rusée, il agissait directement

 21   sans ordre écrit et il donnait des ordres que tel ou tel matériel ou

 22   équipement soit mis à la disposition de telle ou telle personne."

 23   Alors, au vu de ce que Perisic a dit et quand on replace ceci dans le

 24   contexte plus vaste des discussions de l'époque, nous sommes au centre de

 25   ce que nous avançons et qui va à l'encontre de la thèse de l'Accusation, à

 26   savoir que des sources autres que celles de la VJ avaient été à l'origine

 27   d'un approvisionnement en matériel logistique, beaucoup de sources de

 28   différentes formes dont l'étendue de la contribution est inconnue. Nous ne

 


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  1   savons pas exactement quand cette assistance a eu lieu. Nous savons, par

  2   contre, que cela a eu lieu et nous l'avons très clairement expliqué dans

  3   notre mémoire de clôture. Ici, on pourrait -- qu'on leur a donné énormément

  4   de matériel, alors qu'en fait, si l'on replace ceci dans le contexte de la

  5   conversation dans son ensemble, il est évident que beaucoup d'aspects ont

  6   été abordés, et nous considérons, par conséquent, que ceci est de la

  7   mauvaise foi et qu'en fait, cela ne mentionne pas les faits qui se sont

  8   vraiment produits. Cela peut induire en erreur et on essaye de prouver

  9   quelque chose en hésitant à présenter des éléments de preuve qui feraient

 10   état de ce qui s'est vraiment passé dans une situation précise. Et ceci ne

 11   doit pas être autorisé.

 12   M. Thomas, lorsqu'il a présenté ses arguments hier en ce qui concerne la

 13   question des frontières, nous a laissé penser que nous n'avions pas

 14   vraiment compris la situation réelle et qu'au vu des éléments de preuve,

 15   nous en étions arrivés à une conclusion totalement différente, et il en

 16   voulait pour preuve la déposition d'un témoin pour lequel nous devons

 17   passer à huis clos partiel.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous pouvons passer à huis clos

 19   partiel.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 21   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Page 14783 expurgée. Audience à huis clos partiel.

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  3   [Audience publique]

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

  5   Oui, Maître Guy-Smith.

  6   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je crois que ce qui est plus important

  7   encore, c'est que pour ce qui est de, et je parle maintenant de la question

  8   de l'aide, je vous ai cité des exemples dans le mémoire en clôture,

  9   exemples de moments où la discussion a porté sur l'aide. Les éléments de

 10   preuve qui vous ont été présentés et qui sont au dossier établissent

 11   clairement que la VRS a reçu de l'aide de différentes sources, y compris la

 12   VJ. Dans notre mémoire, nous avons dit que nous ne nous écartions pas de

 13   cette position-là, mais la difficulté qui se présente à nous maintenant

 14   c'est qu'aucune différence n'a été établie pour vous, en ce qui vous

 15   concerne, entre l'aide reçue du ministère de l'Intérieur, l'aide reçue de

 16   la RFY en tant que telle, et l'aide reçue du ministère de la Défense,

 17   toutes sources qui constituent des organes étatiques indépendants sur

 18   lesquels ce monsieur n'avait aucun contrôle.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pourriez-vous nous dire quelles sont

 20   ces différences, s'il vous plaît ?

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bien sûr. L'autorité de Perisic est

 22   l'autorité dont il est investi au terme de la loi --

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Moi, je ne parle pas de loi; je

 24   souhaite savoir sur le terrain, ce qui se passait, d'où cela venait.

 25   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je ne peux pas, parce que nous ne le savons

 26   pas. Et si je le pouvais, et si je le pouvais --

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 28   M. GUY-SMITH : [interprétation] Et si je le pouvais, je le ferais. Dans


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  1   notre mémoire en clôture, nous avons indiqué quels sont ces domaines où,

  2   dans la mesure du possible, nous pouvons dire d'où provenaient certains

  3   approvisionnements et aide logistique. Nous ne pouvons pas vous dire dans

  4   quelle quantité, à quel moment. Nous n'avons pas d'information là-dessus.

  5   Aux fins de cet échange, ai-je dit que cela relevait de la charge de la

  6   preuve pour nous ? Non. Ce que nous avons dit c'est qu'il y avait des

  7   sources multiples d'aide logistique fournie à la VRS qui n'étaient pas sous

  8   le contrôle de la VJ. Nous avons établi qu'il existait une usine

  9   indépendante qui revêtait une importance certaine pour la VRS; c'était

 10   Pretis. Je vais en parler dans quelques instants lorsque je vais parler de

 11   la question de Zuc. Mais pour ce qui est de la quantité, vous ne le savez

 12   pas. Ce que l'on vous demande de faire, ce qui est une tâche fort

 13   malheureuse étant donné que des critères peuvent être retenus pour évaluer

 14   les éléments de l'affaire, comme je l'ai indiqué précédemment, ceci est

 15   faussé, parce qu'on vous demande de vous livrer à des conjectures. Beaucoup

 16   d'aide a été fournie. Par voie de conséquence, cette aide devait provenir

 17   de la VJ, parce qu'une aide substantielle a été fournie aux fins de mener à

 18   bien une guerre, et cette aide substantielle qui a été fournie a eu un

 19   effet substantiel sur le crime.

 20   Bien. Nous ne savons pas dans quelle mesure cette aide qui a été fournie

 21   pour mener à bien la guerre, si cette aide provenait de la VJ. Nous ne

 22   savons pas quelle quantité se trouvait sur les lieux. Nous avons entendu

 23   des témoignages, et pour ce qui est en tout cas de la question des mines,

 24   qu'il n'y avait aucune raison que des demandes soient faites aux fins

 25   d'obtenir des mines. Vous ne disposez d'aucun élément d'information sur le

 26   fait de savoir si les demandes qui ont été faites à la VJ étaient des

 27   demandes auxquelles on a répondu. On vous demande maintenant de supposer

 28   que parce que ces demandes ont été présentées, ces demandes ont été


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  1   honorées. Mais nous ne disposons d'aucune preuve sur ce point. Et en

  2   l'absence de preuve, on ne peut pas faire de constatation factuelle, parce

  3   que c'est un manque de preuve.

  4   A savoir si, oui ou non, une politique de l'Etat avait été mise en œuvre,

  5   ce qui devient en quelque sorte le mot-clé qui correspond à la culpabilité,

  6   ça reste une question ouverte. Me Lukic va en parler. Je vais l'aborder

  7   moi-même très brièvement. Je crois que nous avons établi que pendant toute

  8   la durée du conflit, le nombre de fois où les dirigeants de la RFY ont

  9   tenté de rechercher la paix était légion, le nombre de fois où leurs

 10   efforts ont été couronnés de succès était limité, et la complexité des

 11   relations internationales à l'époque signifie qu'il ne nous reste plus qu'à

 12   nous gratter la tête pour savoir comment ces hommes ont agi.

 13   C'est quelque chose qui a été abordé un peu plus tôt. La question de

 14   l'Afghanistan a été abordée. Il y a, en Afghanistan - j'en suis certain

 15   parce que j'ai vu les informations, j'ai pu regarder cela sur internet,

 16   j'ai pu l'entendre à la radio - différentes tentatives pour essayer de

 17   parvenir à des solutions pacifiques et des résolutions pacifiques.

 18   Lorsqu'il y a résolution pacifique, cela ne fait pas l'ombre d'un doute que

 19   différentes forces continuent à recevoir des armes et un appui logistique

 20   pour pouvoir conduire la guerre. Cela dépend évidemment de l'orientation

 21   que l'on prend ou de la manière dont on envisage ces questions-là. Quelle

 22   que soit la façon dont on aborde la question, cela signifie que l'on

 23   recherche le maintien de la paix. Cela semble faire partie maintenant de la

 24   formule internationale très particulière. Et dans le contexte de tout ceci,

 25   dans le fait que ceci fasse partie d'une formule internationale, je crois

 26   qu'il est très dangereux en l'espèce de dire que le fait de fournir un

 27   appui logistique pour conduire et mener à bien la guerre signifie

 28   nécessairement qu'un commandant est exposé, commandant d'une force qui ne


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  1   participe pas ou d'un pays qui ne participe pas au conflit ou que ce soit

  2   un commandant qui participe au conflit ou un pays qui participe au conflit,

  3   et qu'on sous-entende dans ce cas la responsabilité pénale de la personne

  4   en question. C'est, en réalité, l'issue recherchée.

  5    Et si c'est le cas, tout dirigeant politique quel qu'il soit dans le monde

  6   entier, et tout commandant quel qu'il soit dans le monde entier, doit dans

  7   ce cas bien entendre ce que je dis, parce qu'il est difficile, voire

  8   extrêmement difficile, de dire que des crimes ne sont pas commis au cours

  9   d'une guerre. Je ne sais pas si c'est le critère retenu ici dont nous

 10   souhaitons tenir compte. Je parle ici d'une question juridique; je ne parle

 11   pas d'une question politique. D'après ce que je comprends et d'après ce que

 12   je comprends de cette conversation, pour l'essentiel, c'est la

 13   criminalisation, non pas directe, mais indirecte d'une guerre qui est

 14   menée.

 15   Je souhaite faire une digression un instant : je vous envie.

 16   D'habitude, lorsque des arguments sont présentés et lorsque je m'adresse

 17   aux personnes qui constatent les faits, et vous êtes des personnes qui

 18   constatent les faits, en général, nous avons tendance à dire que nous ne

 19   vous envions pas parce que votre tâche est si grave, si difficile. Je vous

 20   envie. Je crois que votre tâche est extrêmement difficile et extrêmement

 21   intéressante. Je ne pense pas que la question soit aussi simple que ce qui

 22   a été présenté hier, à savoir que lorsqu'une guerre est menée, c'est une

 23   mauvaise guerre, et dans ce cas, on peut être tenu responsable. Et si c'est

 24   une bonne guerre, dans ce cas, on n'est pas tenu responsable. Je crois que

 25   M. Harmon, hier, d'une certaine façon, s'est écarté de cette position et

 26   lorsqu'il a présenté ses arguments aujourd'hui pour ce qui est de l'effet

 27   de cette aide.

 28   Je souhaite maintenant revenir aux particularités de l'affaire qui


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  1   nous concerne ici aujourd'hui, à savoir si l'aide qui a été fournie a eu un

  2   effet substantiel sur les crimes commis. Comment pouvez-vous évaluer cela ?

  3   Vous ne savez pas de combien de munitions ils disposaient auparavant. Vous

  4   ne savez pas combien de munition ils ont utilisées. Vous ne savez pas

  5   quelle quantité de munition ils ont reçue. Vous ne savez pas si les

  6   munitions qui ont été utilisées, quelles qu'elles soient - et lorsque

  7   j'utilise le terme de munitions je parle de munitions au sens générique du

  8   terme - si ces munitions ont été utilisées lorsqu'il y a eu comportement

  9   criminel. L'idée que l'on soumet c'est de dire qu'il y a eu une guerre.

 10   Nous avons dit que la guerre était une mauvaise guerre, et non pas une

 11   bonne guerre, et que des crimes ont été commis. Et l'Accusation fait valoir

 12   que M. Perisic était au courant de certains de ces crimes et, par

 13   conséquent, devrait être tenu responsable.

 14   J'ai commencé il y a quelques instants par dire que ce n'est pas

 15   parce que le réveil sonne le matin que le soleil se lève. Cela ne signifie

 16   pas qu'il y a un lien de causalité. C'est quelque chose que l'on peut

 17   soupçonner, mais cela ne constitue pas une preuve au-delà de tout doute

 18   raisonnable. Or ce que l'on vous demande ici au sujet de l'aide importante,

 19   on vous invite à vous lancer dans des conjectures en l'absence de preuves

 20   valables, tangibles. Et je suis convaincu que vous ne le ferez pas.

 21   Permettez-moi d'aborder à présent la question qui a été soulevée

 22   hier, à savoir la question d'aide et d'encouragement par le fait de laisser

 23   s'instaurer un climat d'impunité. C'est une question qui a été abordée par

 24   Mme McKenna, page 14 676 jusqu'à la page

 25   14 677. Mme McKenna affirme en ligne 5 :

 26   "Comme M. Harmon l'a déjà dit, cette forme d'aide et d'encouragement visée

 27   en l'espèce ne constitue pas une forme purement commise par omission. Il

 28   s'agit plutôt d'aide et d'encouragement par voie d'encouragement. Cette


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  1   distinction est faite dans l'affaire Brdjanin déjà, dans l'arrêt en appel,

  2   pages 263 [comme interprété] à 264 [comme interprété]."

  3   Si l'on se penche sur l'affaire Brdjanin, au paragraphe 273 :

  4   "La Chambre d'appel affirme que c'est par voie d'approbation tacite ou

  5   d'encouragement que l'aide et l'encouragement peuvent se produire. Un

  6   accusé peut être déclaré coupable d'avoir aidé et encouragé la commission

  7   d'un crime lorsqu'il est établi qu'il a agi par voie de consentement tacite

  8   et encouragement du crime et lorsque cette conduite a constitué une

  9   contribution essentielle à la commission du crime. Cette forme d'aide et

 10   d'encouragement ne constitue pas un cas où la responsabilité pénale est

 11   engagée, au sens strict du terme, par omission. Dans les cas où cette

 12   catégorie s'applique, l'accusé a occupé un poste de supérieur, il était

 13   physiquement présent sur les lieux du crime." Et nous n'avons pas cette

 14   composante. "Sa non-intervention a été interprétée comme constituant un

 15   consentement tacite et un encouragement. La responsabilité pénale

 16   individuelle au titre de l'article 7(2) [comme interprété] du Tribunal

 17   estime la Chambre se fonde dans ce cas de figure non pas sur l'obligation à

 18   agir, mais sur l'encouragement et le soutien qui pourraient être garantis

 19   aux auteurs du crime --"

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous nous dites le soutien qui est

 21   fourni aux auteurs principaux du crime; vous avez donc parlé des auteurs

 22   principaux ?

 23   M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, tout à fait. "Dans ces situations-là,

 24   cette conjecture de la position de supérieur hiérarchique et sa présence

 25   physique sur les lieux du crime permettent d'en déduire que la non-

 26   ingérence par l'accusé a constitué, en effet, de sa part un consentement

 27   tacite et un encouragement."

 28   C'est ce que Mme McKenna affirme en se fondant sur les arguments avancés


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  1   par M. Harmon, mais d'après cette théorie, nous ne pouvons pas être

  2   considérés comme étant responsables ou pénalement responsables.

  3   McKenna continue et dit :

  4   "La Chambre d'appel a reconnu à plusieurs reprises que lorsque le supérieur

  5   hiérarchique n'empêchait pas et ne sanctionnait pas, il s'agissait en fait

  6   d'un comportement qui avait des effets d'encouragement." Et elle a cité à

  7   l'appui les arrêts en appel dans les affaires Celebici et Strugar

  8   lorsqu'elle a parlé de la responsabilité individuelle pénale au titre de

  9   l'artillerie 7(3).

 10   Donc, dans le contexte de l'article 7(3), et non pas dans le contexte de

 11   l'article 7(1), parce que nous semblons naviguer un petit peu entre les

 12   deux. Je pense qu'il est important de le signaler, et Me Lukic

 13   s'intéressera plus en détail à ce volet en l'espèce, à savoir la

 14   responsabilité engagée au titre de l'article 7(3), mais je pense que nous

 15   pouvons sans crainte affirmer que la référence que cite l'Accusation

 16   infirme son propre argument s'agissant de la responsabilité pénale de

 17   Perisic qui serait engagée au titre de cette théorie qu'ils affirment donc

 18   lorsqu'ils signalent le fait qu'il a laissé s'instaurer un climat

 19   d'impunité.

 20   Quelques idées que nous avons entendues ici pendant ce procès, je

 21   pense que quelques distinctions doivent être opérées à leur égard. D'une

 22   part, la question de distinction entre influence et contrôle. Ces deux

 23   concepts ne signifient pas la même chose. Ils n'ont jamais signifié la même

 24   chose, et en l'espèce, nous savons que ce n'est pas identique. Pourquoi ?

 25   Parce que nous avons entendu des témoignages sur cette question très

 26   précisément. C'est un témoin protégé qui en a parlé. Passons à huis clos

 27   partiel.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous passons à huis clos

 


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  1   partiel.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

  3   [Audience à huis clos partiel]

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 23   [Audience publique]

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 25   Maître Guy-Smith.

 26   M. GUY-SMITH : [interprétation] Ligne 19, je vois que j'ai fait un lapsus.

 27   Si tel est le cas, je présente mes excuses au sténotypiste et aux

 28   interprètes. Donc la page citée est la page 14 547. Les lignes que je cite

 


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  1   sont celles qui vont de la ligne 3 à la ligne 12.

  2   Donc la question de la distinction entre l'influence et le contrôle se pose

  3   bien entendu lorsque nous avons des cas comme celui de Mladic. Un des

  4   meilleurs exemples de cette tentative d'influence de Mladic, on le trouve

  5   dans la conversation entre Lilic et Perisic, conversation qui porte sur la

  6   question de la libération des pilotes français. Parce qu'en fait, ils

  7   essayent de voir comment lui tendre un piège pour qu'il finisse par

  8   collaborer avec eux sans qu'il s'en rende compte, comment le leurrer à

  9   collaborer avec eux. Et donc, nous avons une conversation où ils

 10   développent un plan. Il s'agira de la pièce P886. Comment vont-ils

 11   l'emmener à faire cela ? Là, il s'agit de l'influence.

 12   Si Perisic pouvait exercer son contrôle sur Mladic, il lui aurait donné un

 13   ordre. Mais il ne l'a pas fait. Donc nous avons pleins d'endroits dans

 14   notre contrôle d'audience où l'on retrouve cette formulation, où il est dit

 15   qu'on ne sait pas comment agir avec Mladic parce que personne ne peut le

 16   contrôler. Parce qu'il est complètement autonome. Il fait ce qu'il a envie

 17   de faire, il le fait quand il a envie de le faire, donc nous affirmons

 18   qu'il agit pratiquement en toute indépendance par rapport à tous les

 19   autres.

 20   Je passerai à un autre sujet. Je propose que l'on lève l'audience

 21   pour aujourd'hui.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Je vous remercie, Maître

 23   Guy-Smith. Nous allons reprendre demain matin à 9 heures dans le même

 24   prétoire.

 25   --- L'audience est levée à 13 heures 43 et reprendra le mercredi 30

 26   mars 2011, à 9 heures 00.

 27  

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