Page 37
1 (Mardi 10 juillet 2001.)
2 (Audience sur requêtes.)
3 (Audience publique.)
4 (L'audience est ouverte à 14 heures 35.)
5 M. le Président (interprétation): Madame la Greffière, veuillez annoncer
6 l'affaire.
7 Mme Philpott (interprétation): Affaire IT-00-39 & 40-PT, le Procureur
8 contre Momcilo Krajisnik et Biljana Plavsic.
9 M. le Président (interprétation): Les parties peuvent-elle se présenter?
10 M. Harmon (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les
11 Juges. Je m'appelle Mark Harmon et aujourd'hui je suis assisté de M.
12 Fergal Gaynor et de M. Ulrich Mussmeyer. Merci.
13 M. Brashich (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Je m'appelle
14 Deyan Brashisch. Je représente les intérêts de M. Krajisnik et je suis
15 assisté de M. Goran Neskovic qui vient du barreau de la Republika Srpska.
16 M. Pavich (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les
17 Juges. Je suis Robert Pavich, et je représente les intérêts de Mme Biljana
18 Plavsic.
19 M. le Président (interprétation): Merci.
20 Cette audience est une Conférence de mise en état. Nous abordons cette
21 question, mais sans doute plus tard.
22 Tout d'abord, nous allons examiner 3 requêtes. Nous allons entendre les
23 parties si elles souhaitent s'exprimer. Ces 3 requêtes sont tout d'abord:
24 -une requête présentée par M. Krajisnik pour demander à l'accusation
25 qu'elle communique les éléments à décharge en vertu de l'Article 68 du
Page 38
1 Règlement de procédure et de preuve;
2 et puis nous avons une requête déposée par l'accusation, qui demande des
3 précisions quant au 65 ter, au 66 et au 67;
4 et enfin une requête déposée par M. Krajisnik pour obliger l'accusation à
5 communiquer l'identité de subordonnés.
6 Je dis d'emblée, qu'il y a eu des arguments oraux présentés à l'égard de
7 chacune de ces 3 requêtes. L'accusation ou plutôt la Chambre a eu
8 l'occasion d'examiner les arguments qui ont déjà été présentés. Donc
9 j'espère que les arguments oraux seront brefs.
10 La première question à examiner est celle des éléments de preuve à
11 décharge.
12 Maître Brashich, nous avons pris connaissance de votre requête. Ce qui
13 revient à demander à la Chambre d'obliger l'accusation à communiquer ou
14 plutôt d'identifier les éléments de preuve à décharge. Plutôt que de ne
15 faire ce qu'ils ont fait ici: de les communiquer mais à l'intérieur de
16 plusieurs milliers de documents.
17 M. Brashich (interprétation): C'est exact, Monsieur le Président. Je me
18 contenterai d'ajouter ceci à mes écritures. Si nous demandons à obtenir
19 ces éléments de preuve à décharge, c'est notamment parce que jusqu'à
20 présent je n'ai pas encore été en mesure de définir ni de deviner quelle
21 est la thèse défendue par l'accusation.
22 Je suis au courant, bien sûr, de l'attitude adoptée par la Chambre à
23 l'égard de certaines requêtes déposées antérieurement. Cependant, si l'on
24 interprète les termes de l'Article 68, le Procureur est censé communiquer.
25 Et pour moi, communiquer -"disclose" en anglais- est une façon de prouver
Page 39
1 positive plutôt que de se contenter de fournir des milliers et des
2 milliers de pages.
3 M. le Président (interprétation): Une question, Monsieur Brashich: ils
4 disent que vous avez eu les documents, vous avez l'occasion de les
5 examiner et que c'est donc redondant pour l'accusation de procéder à un
6 nouvel examen de tous ces documents pour voir quels sont éléments de
7 preuve à décharge. Alors que répondez-vous à cela?
8 M. Brashich (interprétation): Si nous avions examiné la totalité des
9 documents à ce jour, il se peut que cet argument ait un certain fondement.
10 Cependant, mon équipe n'a été en mesure que de parcourir la dernière fois
11 que j'étais en Bosnie… Je ne vous voudrais pas me tromper. Un instant,
12 s'il vous plaît...
13 Monsieur le Président, si ma mémoire ne me fait pas défaut, je pense que
14 nous avons pu parcourir 14 des 25 ou 35 CDs. C'est une tâche laborieuse.
15 Et jusqu'à présent, nous n'avons pas encore les facilités électroniques
16 qui nous permettent d'examiner le reste des documents; il faut donc
17 parcourir chaque document un à la fois.
18 M. Robinson (interprétation): Maître Brashich, si j'ai bien compris, vous
19 ne ramenez pas simplement ceci à une question de charge de la preuve ou de
20 travail. Vous présentez un principe ici à savoir qu'en vertu du 68, le
21 Procureur a l'obligation de procéder à cette communication.
22 M. Brashich (interprétation): Oui, c'est une bonne interprétation, je
23 pense, du Règlement. Je crois que c'est l'accusation qui doit me dire ce
24 qui est, à son avis, à décharge.
25 Si j'ai soulevé la question du volume de documents, c'était en réponse à
Page 40
1 la question posée par le Président. Mais je m'en tiens à ma position.
2 M. le Président (interprétation): Mais vous avez dit tout d'abord que vous
3 n'aviez pas été en mesure de définir quelle était la position adoptée par
4 l'accusation.
5 M. Brashich (interprétation): J'ai dit "définir et deviner", en même
6 temps.
7 M. le Président (interprétation): Je vois: deviner quelle était la thèse
8 défendue par l'accusation?
9 M. Brashich (interprétation): C'est exact.
10 M. le Président (interprétation): Mais de la façon dont est élaboré cet
11 Article du Règlement, l'essentiel de ceci viendra au moment du mémoire
12 préalable au procès, moment où l'accusation va présenter sa thèse afin que
13 la défense et la Chambre comprennent quelle est cette thèse. Pour le
14 moment, nous n'avons que l'Acte d'accusation et divers documents.
15 M. Brashich (interprétation): C'est exact.
16 M. le Président (interprétation): Merci.
17 Maître Pavich, vous n'avez rien soumis à ce propos. Avez-vous l'intention
18 de nous présenter quelque chose?
19 M. Pavich (interprétation): Simplement, pour replacer tout ceci dans le
20 contexte d'une décision rendue par le Juge Hunt dans un procès parallèle,
21 je pense que nous avons déjà attiré l'attention de la Chambre à une
22 conférence de mise en état antérieure. On cite le paragraphe 19, et je
23 pense que c'est un contexte utile pour l'examen de cette question.
24 Le Juge Hunt dit dans une affaire qui se base sur la responsabilité du
25 supérieur hiérarchique: "Ce qui compte le plus, c'est le rapport entre
Page 41
1 l'accusé et les autres qui ont agi et dont il était censé être
2 responsable. Et la conduite de l'accusé par laquelle il a su ou avait des
3 raisons de le savoir, que les actes étaient produits ou sur le point
4 d'être produits par autrui; il n'avait pas pris les mesures nécessaires
5 raisonnables pour empêcher un tel acte ou en punir les auteurs".
6 Excusez-moi, je lis un texte et je pense que je lis un peu trop vite.
7 Mais je poursuis: "… prendre des mesures raisonnables pour empêcher que
8 ces actes soient commis ou pour en punir les auteurs. Cependant, et je
9 pense que c'est ici un élément important soulevé par le Juge Hunt, et je
10 crois qu'il est tout à fait pertinent ici. Je poursuis la lecture- pour ce
11 qui est des actes commis par d'autres même si l'accusation reste sous
12 l'obligation de fournir tous les détails qu'elle est en mesure de donner,
13 les faits pertinents sont en général moins précis. C'est parce que le
14 détail de ces actes est souvent inconnu et parce que les actes eux-mêmes
15 ne peuvent pas constituer le point qui aide l'enjeu".
16 Je pense que le Juge Hunt nous suggère ici que l'accusation devrait nous
17 communiquer la totalité des renseignements qu'elle a. Elle ne peut pas
18 faire plus que ça, mais elle ne devrait pas faire moins que cela. Et
19 l'accusation a l'identité de ces personnes, et il faudrait communiquer
20 cette identité afin que nous nous attachions aux questions véritables qui
21 se posent à nous.
22 M. le Président (interprétation): Ce n'est pas une requête ultérieure plus
23 tardive, n'est-ce pas?
24 M. Pavich (interprétation): Oui, je pense que nous sommes à une requête
25 plus tardive mais je pense que l'essentiel de ce que nous essayons de
Page 42
1 faire ici et ce que la Chambre nous demande, c'est de faire plus tôt ce
2 que d'autres avocats ont fait plus tard dans d'autres affaires.
3 M. le Président (interprétation): Monsieur Harmon, qu'en pensez-vous?
4 M. Harmon (interprétation): Messieurs les Juges, nous avons déposé nos
5 écritures en l'espèce, je vais m'abstenir de répéter ce qui est contenu
6 dans ces écritures. Je vais simplement mettre l'accent sur certains faits.
7 Le premier fait, c'est que la défense en fait nous demande de faire
8 rétrospectivement un examen de tous ces documents et d'identifier à son
9 égard les éléments qui relèvent peut-être de l'Article 68.
10 La communication en l'espèce se poursuit. Elle a commencé le 7 avril 2000,
11 et la production a été continue. Le 16 avril, nous avons communiqué à la
12 défense de 80 à 85.000 pages de documents. Le 25 janvier 2001 lors d'une
13 conférence de mise en état, la défense a informé la Chambre et je cite:
14 "J'ai revu tous les documents que j'ai reçu de l'accusation". Fin de
15 citation.
16 De surcroît, le Règlement ou la modification du Règlement exige, dans le
17 cadre de la mise en état, que la défense en fin de compte identifie de
18 façon générale la nature de la défense qu'elle va adopter. Nous avons
19 tenté à plusieurs reprises d'obtenir de la défense qu'elle fournisse
20 l'identification; ce qui nous permettrait d'accélérer la procédure régie
21 par l'Article 68. Nous pourrons nous attacher de façon plus précise sur
22 des questions qui relèvent peut-être et sans doute d'ailleurs de l'Article
23 68.
24 A l'heure actuelle, on nous demande de fournir des spéculations quant à ce
25 qui pourrait être des documents relevant de l'Article 68. En substance, la
Page 43
1 défense dispose déjà de ces documents depuis longtemps. Elle a passé en
2 revue la majorité de ces documents. Que ce soit le conseil, l'accusé ou un
3 conseil antérieur ont examiné les éléments fournis par l'accusation à la
4 défense.
5 Alors, de nous demander maintenant de revenir sur tous ces documents, et
6 rétrospectivement d'essayer d'identifier dans leur intérêt ce qui relève
7 ou ne relève peut-être pas de l'Article 68, est à nos yeux un gaspillage
8 de ressources. Nos ressources doivent être concentrées à la préparation du
9 procès, à la mise en état. Notre travail ne devrait pas être refait parce
10 que ce travail a déjà été fait en partie par la défense.
11 La défense, elle, connaît sa défense; elle serait quelle sera la thèse
12 qu'elle va soutenir, elle connaît les éléments qui sont à décharge vu les
13 circonstances, elle a connaissance de l'Acte d'accusation, elle est dans
14 la meilleure position possible pour déterminer quels sont les éléments
15 relevant de l'Article 68.
16 Voilà donc des faits que j'aimerais re-soumettre à cette Chambre et qui
17 ont une incidence directe sur la question de savoir si nous devons être
18 obligés à faire ce retour en arrière pour examiner pour la défense tous
19 ces documents.
20 M. Robinson (interprétation): Vous dites que jusqu'à présent la défense ne
21 s'est pas acquittée de ses obligations qui lui incombent, en vertu du
22 nouveau Règlement, d'identifier la nature générale de sa défense et que
23 ceci vous a entravé pour ce qui est des obligations qui vous incombent en
24 vertu de l'Article 68.
25 Si la défense était à même d'identifier la nature générale de sa défense,
Page 44
1 est-ce que vous seriez dans une meilleure situation qui vous permettrait
2 davantage d'identifier les éléments à décharge?
3 M. Harmon (interprétation): Tout à fait exact, Monsieur le Juge. Mais en
4 vertu du nouveau Règlement, la défense n'est pas obligée d'identifier la
5 nature générale de sa défense tant qu'elle n'a déposé son mémoire
6 préalable au procès. Mais à deux reprises, nous avons invité la défense à
7 identifier la nature générale de sa défense puisqu'il faudra bien qu'elle
8 le fasse à un moment donné.
9 Et nous avons rappelé ceci à la défense parce que nous voulions agir et
10 être efficaces, afin qu'ils nous disent ce qui, selon eux, relève de
11 l'Article 68. Nous pourrions ainsi produire ces documents à la défense et
12 elle pourrait disposer de ces documents bien des mois avant l'ouverture du
13 procès.
14 M. Robinson (interprétation): Par ailleurs, la défense a suggéré qu'elle
15 ne connaît pas encore la totalité de votre thèse à vous, accusation. Ce
16 qui rend la tâche de l'identification des éléments à décharge difficile
17 pour la défense. C'est un peu un argument circulaire qui se développe ici
18 mais il faudra trouver une sortie à cela.
19 M. Harmon (interprétation): Merci, Monsieur le Juge.
20 M. le Président (interprétation): La requête suivante a été déposée par
21 l'accusation. Nous pourrons la qualifier, pour être plus rapides, de la
22 requête portant sur l'échange de moyens de preuve.
23 Voici quelle est la position. L'accusation a identifié 800 documents de
24 base, "core documents" c'est ainsi qu'elle les appelle. Je suppose qu'il
25 s'agit de documents sur lesquels l'accusation va se baser au moment du
Page 45
1 procès.
2 Sur ces 800 documents, près de la moitié ont été communiqués. Mais à la
3 dernière conférence de mise en état, j'étais Juge de la mise en état et en
4 cette qualité j'avais dit que plus les documents seraient communiqués et
5 mieux ce serait. Et j'avais proposé que ce soit fait dans le mois.
6 Maintenant, l'accusation demande des précisions ou a précisé quelle est sa
7 position et se fonde pour ce faire sur l'Article 66 B) ainsi que sur
8 l'Article 67 qui régit l'échange de moyens de preuve.
9 Oui, Monsieur Harmon?
10 M. Harmon (interprétation): Messieurs les Juges, voici quelle est la
11 situation dans laquelle nous nous trouvons et nous demandons des
12 précisions.
13 A une conférence de mise en état, une suggestion a été faite nous ne
14 pensons pas que c'était une ordonnance- qui invitait à communiquer à la
15 défense les documents de base. Il y a une conférence en vertu du 65 ter au
16 cours de laquelle j'ai fait une demande afin que soit précisé si nous
17 avions reçu l'ordre de communiquer des documents. La défense affirme qu'il
18 y a eu une ordonnance nous imposant la communication de ces documents de
19 base.
20 Mais j'aimerais corriger le compte rendu d'audience avant de poursuivre
21 mon argument. En effet, la réunion en vertu du 65 ter qui s'est tenue le 3
22 juillet 2001 a permis d'évoquer plusieurs questions. Nous avons été
23 informés du fait qu'il n'y avait pas d'ordonnance ordonnant la production
24 de ces documents. C'est ce qui est dit à la page 35 du compte rendu
25 d'audience de cette réunion en vertu du 65 ter. Nous partons du principe
Page 46
1 qu'il n'existe pas d'ordonnance de ce genre.
2 M. le Président (interprétation): Et s'il y avait eu une ordonnance, cela
3 aurait été formulé selon ces termes. Et si la suggestion n'était toujours
4 pas claire, je précise que c'était pour proposer une certaine marche à
5 suivre.
6 La Chambre dispose de certains pouvoirs en des circonstances
7 exceptionnelles pour revenir sur une ordonnance rendue par un Juge unique
8 de la mise en état. Nous sommes prêts à recevoir cette requête.
9 M. Harmon (interprétation): Oui, tout à fait. Je suis d'accord avec vous
10 mais je voulais corriger le compte rendu d'audience parce que, dans ses
11 arguments, la défense indique qu'il existe une telle ordonnance alors que
12 c'est tout à fait le contraire.
13 Voici dans quelle situation nous nous trouvons. Le Bureau du Procureur est
14 tout à fait prêt à procéder à la communication de tous les documents que
15 nous avons l'intention d'utiliser au moment du procès. Nous sommes prêts à
16 le faire en vertu du Règlement. Ce Règlement qui nous guide depuis
17 plusieurs années. Nous ne sommes pas prêts à le faire de façon volontaire
18 s'il n'y avait pas de réciprocité.
19 Qu'est-ce que cela veut dire? En ce qui concerne Mme Plavsic, qui invoque
20 l'échange de moyens de preuve, nous sommes prêts à communiquer la totalité
21 des documents que nous sommes censés produire en vertu de l'Article 67. Et
22 d'ailleurs, nous avons déjà commencé à fournir à la défense de Mme Plavsic
23 certains de ces documents supplémentaires que nous avons qualifiés de
24 documents de base; et nous avons fourni 85 documents supplémentaires à
25 l'accusée Plavsic.
Page 47
1 Nous sommes prêts à fournir tous ces documents à la Chambre de première
2 instance afin qu'elle soit guidée et qu'elle puisse les étudier avant le
3 commencement du procès.
4 Mais nous ne sommes pas prêts à fournir ces documents à l'accusé Krajisnik
5 qui a refusé expressément d'invoquer la disposition qui permet l'échange
6 de moyens de preuve. Pourquoi ne sommes-nous pas prêts à le faire? Parce
7 que nous pensons que le Règlement en tant que tel a été créé dans un
8 objectif bien précis qui est de créer un équilibre, de donner aux parties
9 l'occasion d'examiner les moyens de preuve qui seront soumis au moment du
10 procès, de donner aux parties l'occasion de voir si ces documents sont
11 authentiques ou pas, réels ou pas, si on peut les contester d'une
12 quelconque façon.
13 Et nous ne voulons pas nous trouver dans une situation où nous aurions
14 donné des documents à l'accusé Krajisnik bien des mois, véritablement des
15 mois, à l'avance avant une date encore provisoire d'ouverture du procès.
16 Alors que nous nous trouverions dans une situation où nous aurions des
17 documents introduits par la défense Krajisnik le jour du procès. Alors que
18 nous n'aurions pas eu l'occasion ni le temps d'examiner ces documents, de
19 les étudier, d'essayer de voir s'ils sont authentiques ou pas.
20 Et je crois que là, il y aurait vraiment un déséquilibre manifeste. Nous
21 ne voudrions pas nous trouver dans cette situation.
22 M. le Président (interprétation): Mais cela, c'est bien en amont, n'est-ce
23 pas? Pour le moment, il faut examiner la situation dans laquelle vous vous
24 trouvez en matière de communication.
25 La situation actuelle se présente comme suit: vous avez fourni la moitié
Page 48
1 des documents de base, ou du moins votre prédécesseur a fourni la moitié
2 de ces documents et, Monsieur Harmon, vous estimez qu'il ne vous faut pas
3 fournir l'autre moitié.
4 Quelles sont, selon vous, vos obligations en vertu de l'Article 65 ter, au
5 stade de la mise en état et des mémoires? Est-ce que vous êtes prêt à
6 fournir plus qu'une simple liste des pièces? Est-ce que vous êtes prêt à
7 communiquer les pièces?
8 M. Harmon (interprétation): Mais ceci soulève une question séparée,
9 d'ailleurs intéressante. Nous sommes, de toutes façons, prêts à le faire
10 pour la défense Plavsic. La question ne se pose pas. Madame Plavsic étant
11 seule et ayant invoqué l'échange de moyens de preuve, je peux fournir une
12 liste très circonstanciée ou moins circonstanciée parce que la défense
13 saurait exactement quels sont les documents que j'ai l'intention
14 d'utiliser.
15 La question qui se pose ici: lorsque vous avez un accusé qui refuse
16 l'échange de moyens de preuve, est-ce que l'Article 65 ter et les
17 descriptions qu'il faut fournir en vertu de cet Article doivent être
18 identifiés dans un mémoire? Est-ce qu'on peut ainsi contourner les
19 dispositions de communication qui se trouvent à la section 4? La section 4
20 du Règlement porte sur la communication de moyens de preuve. Et c'est là
21 qu'on trouve le 66 B) et le 67 C).
22 J'ai donc le sentiment, à la lecture de la totalité de ces règles, par
23 exemple que nous avons une règle procédurale, le 65 ter. Le 66 B) et le 67
24 C) sont des éléments de fond, des articles qui portent sur la
25 communication de renseignements d'information et de moyens de preuve à
Page 49
1 l'accusé. Je ne pense pas, et c'est d'ailleurs ce que nous faisons valoir,
2 Messieurs les Juges, nous ne pensons pas que les règles procédurales,
3 notamment le 65 ter, quand on parle de l'identité des moyens de preuve,
4 nous ne pensons pas que ceci ait primauté sur les dispositions qui
5 régissent la communication à savoir le 66 B) et 67 C). Autrement, le 65
6 ter rend tout à fait inutile les règles de communication et ce n'est pas
7 ce que visait le Règlement lorsqu'on parle de l'échange de moyens de
8 preuve.
9 Ma réponse serait donc: si vous avez un accusé qui ne souhaite pas fournir
10 ses moyens de preuve ou faire une demande d'échange de moyens de
11 production, il y a une réponse un peu différente. A savoir que la
12 description peut être inférieure, moins précise qu'une description
13 vraiment exhaustive; ça peut être une description générale, un résumé.
14 Mais en aucune circonstance, on ne devrait permettre de vider l'Article 67
15 de son sens, cet Article 67 se trouvant dans la section 4.
16 M. Robinson (interprétation): Le 65 ter, vous dites qu'il faut le lire de
17 façon conditionnelle, et il est conditionné au 66 et au 67?
18 M. Harmon (interprétation): C'est exact, Monsieur le Juge.
19 M. le Président (interprétation): Qu'êtes-vous prêt à communiquer en vertu
20 du 65 ter?
21 M. Harmon (interprétation): Je serai prêt à communiquer une description
22 plus générale de documents. Et, en tout cas, s'il s'agit de documents
23 ayant trait à des publications dans le Journal officiel; par exemple, là
24 je peux les circonscrire de façon précise.
25 Mais lorsque je commence à aborder d'autres questions, pas exemple les
Page 50
1 messages interceptés, lorsqu'on pense la question d'ordonnance spécifique,
2 je ne pense pas être obligé en vertu du 65 ter E) iii) d'identifier les
3 pièces avec une précision telle qu'il n'est pas plus nécessaire et qu'on
4 ne souhaite plus d'ailleurs avoir l'échange de moyens de preuve.
5 Le 65 ter n'est pas prévu pour la communication, n'est pas prévu pour
6 donner à la défense pleinement la possibilité d'identifier des documents.
7 Je crois que les Articles qui s'imposent ici sont le 66 B) et le 67 C). Si
8 vous voulez voir les documents que nous allons soumettre à l'audience,
9 vous invoquez ces dispositions et vous aurez le droit d'inspecter ces
10 documents.
11 M. le Président (interprétation): Mais la défense comment est-elle à ce
12 moment-là censée se présenter, comparer pour le procès?
13 M. Harmon (interprétation): C'est tout à fait facile. Vous verrez comment
14 Mme Plavsic va le faire.
15 M. le Président (interprétation): Oui mais si la défense dit: "On ne veut
16 pas se préparer de cette façon-là, on veut se préparer en partant du
17 principe que nous n'allons pas donner l'occasion à l'accusation de
18 parcourir nos documents", à supposer que ce soit là la position.
19 M. Harmon (interprétation): A ce moment-là, je répondrai de la façon
20 suivante. La défense est tout à fait en mesure d'utiliser d'autres outils
21 qui sont à sa disposition pour se préparer: ils ont un Acte d'accusation,
22 donc ils sont informés, ils ont des enquêteurs, ils peuvent se rendre en
23 Republika Srpska et ailleurs pour obtenir les éléments de preuve
24 nécessaires à leur défense, ils ont à leur disposition des ordonnances
25 contraignantes, ils peuvent faire des requêtes devant cette Chambre, ils
Page 51
1 peuvent demander des documents de la part des personnes qui les possèdent
2 en Republika Srpska ou en République fédérale de Yougoslavie. Ils peuvent
3 se préparer comme l'ont fait beaucoup d'autres accusés lorsqu'il n'y avait
4 pas eu de demandes d'échange de moyens de preuve.
5 M. le Président (interprétation): Mais ils ne savent pas ce qu'ils sont
6 censés défendre parce qu'ils ne savent pas quelle est la teneur de ces
7 documents.
8 Je vais un peu plus loin: est-ce que vous proposeriez au cours du procès
9 de produire vos pièces, de les soumettre à la Chambre pour la première
10 fois à ce moment-là?
11 M. Harmon (interprétation): Monsieur le Président, j'ai déjà dit que
12 j'étais tout à fait prêt à donner à la Chambre de première instance une
13 liste des pièces, pour que la Chambre puisse étudier en toute tranquillité
14 ceci.
15 M. le Président (interprétation): Mais est-ce qu'il serait logique que la
16 Chambre les ait et que la défense ne les ait pas? J'entrevois beaucoup de
17 problèmes, vous voyez. Par exemple: si on suivait cette pratique, ceci
18 retarderait l'ouverture du procès et la défense pourrait dire: "C'est la
19 première fois qu'on voit ce document qui est très compromettant, qui est
20 tout à fait délétère et il nous faut un certain temps pour nous préparer.
21 Nous devons recevoir des instructions".
22 M. Harmon (interprétation): Mais du même coup, cet argument s'applique
23 aussi à l'accusation. Si on nous soumettait des documents que nous devons
24 examiner, analyser, essayer d'authentifier, nous aussi nous demanderions
25 report du procès. C'est la raison pour laquelle je pense que l'échange de
Page 52
1 moyens de preuve aide tout le monde ici. Cela nous aide à identifier quels
2 sont les documents en cause, quels seront ceux qui seront contestés, quels
3 seront les documents qui vont vraiment être controversés. Et cela donne
4 aux deux parties amplement l'occasion de se préparer.
5 Pour le moment, la défense Plavsic a demandé à utiliser les échanges de
6 moyens de preuve et le procès est censé commencer en janvier, donc dans 6
7 ou 7 mois, et la défense aura amplement l'occasion je parle ici de la
8 défense Plavsic- d'examiner et d'identifier ces documents.
9 Si le co-accusé en l'espèce ne veut pas se saisir de cette possibilité et
10 utiliser ce jeu des règles et d'articles procéduraux, alors que ceux-ci
11 leur permet d'inspecter ces documents, l'accusé Krajisnik sait qu'il
12 n'aura pas l'occasion ni le temps de les examiner de la même façon que Mme
13 Plavsic, mais c'est un choix qu'il fait.
14 M. le Président (interprétation): Nous avons effectué une certaine
15 recherche là-dessus. La prépondérance en matière de pratique veut que
16 l'accusation produise ces documents et il y a une différence en matière de
17 pratique entre les différentes Chambres de première instance, entre II et
18 I.
19 Dans les affaires dont ont été saisies cette Chambre, les documents ont
20 toujours été, ou les pièces, produites sans discussion. Pareil pour la
21 Chambre n°II. Quant à la Chambre n°I, la pratique est assez différente. Ce
22 qui veut dire que nous avons maintenant un exercice d'équilibrage à
23 réaliser. Il faut aussi voir quelles seront les incidences du Règlement,
24 tout en faisant justice aux deux parties.
25 M. Harmon (interprétation): Moi, je suis guidé par le Règlement qui a été
Page 53
1 modifié 15 ou 20 fois. Ce Règlement est très bien structuré, sa structure
2 est claire. Il permet aux deux parties dans la même mesure d'examiner les
3 mêmes documents, pour autant qu'on en fasse la demande. Je ne vois aucun
4 article, si ce n'est l'Article 54, qui est général qui dit que la Chambre
5 peut rendre toute ordonnance nécessaire à la bonne conduite du procès. Je
6 ne vois pas d'autre article applicable. Je vois qu'en vertu de l'Article
7 54, la Chambre peut rendre une telle ordonnance, mais nous faisons valoir
8 aussi que les articles plus explicites sont le 66 B) et le 67 C) et que
9 ces articles ont un poids supérieur et doivent être examinés.
10 Quand on examine la totalité des articles pertinents, le 66 B) et le 67 C)
11 n'ont pas été créés comme ornement, comme décoration ou comme Articles qui
12 devraient ou pourraient être ignorés.
13 En matière de communication, on peut dire que ces Articles avaient un sens
14 quand on les a élaborés. Nous avons ici un accusé qui refuse carrément
15 d'invoquer l'échange de moyens de preuve et voudrait que vous, Messieurs
16 les Juges, imposiez à l'accusation une ordonnance qui en fait évacue le 66
17 B) et le 67 C).
18 M. le Président (interprétation): Peut-être que ce n'était pas
19 l'intention, peut-être que la formulation n'était pas très heureuse. Il se
20 peut que le but recherché par cet Article soit que l'autre partie puisse
21 examiner la totalité de vos documents. Je pense que vous en avez 3 ou 4
22 millions, on jette quelquefois ce chiffre, vous avez une masse
23 considérable de documents. Et je suis ravi que vous allez décider de ne
24 pas utiliser la plupart de ces documents. Il se peut que les pères du
25 Règlement, même s'ils ne l'ont pas dit exactement, voulaient permettre à
Page 54
1 une autre partie d'examiner tous ces documents et que ceci enclencherait
2 l'échange de moyens de preuve. Mais vous dites que l'Article 54, vous
3 voyez bien que c'est un Article que nous pourrions utiliser, mais qu'il ne
4 faudrait pas utiliser pour supplanter en fait les articles relatifs à la
5 communication. C'est bien ce que vous faites valoir?
6 M. Harmon (interprétation): Oui et je crois qu'il faut éclaircir un autre
7 point. Ce chiffre de 3 millions de documents: la défense dit: "3 millions
8 de documents, ce serait des documents que nous aurions obtenus de la
9 Republika Srpska": ce n'est pas vrai.
10 D'abord, ce chiffre c'est plutôt 2,7 millions, ce n'est pas que cela fait
11 une grande différence. Et deuxièmement, ces documents sont ceux qui se
12 trouvent dans notre base de données qui s'appliquent aux Croates de
13 Bosnie, à la Croatie, à la Republika Srpska, à toutes les parties, à
14 toutes leurs régions qui relèvent de notre compétence.
15 M. le Président (interprétation): Donc ce chiffre a trait à la totalité de
16 vos documents?
17 M. Harmon (interprétation): Oui et ce n'est pas comme la défense l'a dit,
18 ce ne sont pas uniquement des documents relatifs à la Republika Srpska.
19 M. le Président (interprétation): Si vous n'avez rien à ajouter?
20 M. Harmon (interprétation): Non, merci, Monsieur le président.
21 M. le Président (interprétation): Maître Brashich?
22 M. Brashich (interprétation): Monsieur le Président, la défense Krajisnik
23 ne veut pas refuser l'échange de moyens de preuve et l'Article qui le
24 régit, elle choisit de ne pas le faire valoir. Le déséquilibre patent dont
25 parle l'accusation, c'est un déséquilibre à l'égard de l'accusé.
Page 55
1 Dans le système juridique dont je suis issu, l'accusation procède à
2 l'enquête mais en accusation et peu de temps après, les documents de base
3 sont fournis à la défense.
4 En l'espèce, nous avons un Acte d'accusation qui a plus d'un an
5 d'existence, nous avons un accusé qui est en prison depuis plus d'un an,
6 et la communication n'est pas encore terminée. C'est dans ce contexte-là
7 que l'accusation souhaite désormais retenir, par devant elle, les
8 documents de base.
9 J'ai lu la suggestion que vous aviez faite, Monsieur le Président, pour
10 savoir si c'était une ordonnance ou pas. Moi, je l'ai pris pour une
11 ordonnance et si cela n'est pas le cas, je demande oralement que soit
12 rendue une telle ordonnance.
13 Nous ne sommes pas ici au civil où chacune des parties a une certaine
14 responsabilité, où l'accusé ne peut faire valoir sa thèse que par une
15 bonne prépondérance d'éléments de preuve. Nous sommes ici au pénal et la
16 charge de la preuve repose sur les épaules de l'accusation; c'est elle qui
17 doit fournir la totalité de ces moyens de preuve à la défense. La défense
18 n'a pas à supporter un tel fardeau. L'accusation ici ne se trouve pas dans
19 un jeu pour savoir qui va gagner ou perdre, l'accusation c'est la
20 conscience de la communauté internationale, elle est d'un niveau supérieur
21 à celui d'un simple avocat ou conseil. Et la suggestion que vous aviez
22 faite n'était rien de plus qu'une suggestion. Je demande ici oralement que
23 cette suggestion soit transformée en ordonnance, Monsieur le Président.
24 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Pavich?
25 M. Pavich (interprétation): Messieurs les Juges, quelques points puisque
Page 56
1 je ne suis pas directement concerné dans ce conflit qui se dessine ici
2 devant vous.
3 Tout d'abord, je pense effectivement que le fait que nous avions invoqué
4 l'Article 67 B) ne devrait pas empêcher la Chambre de faire face à ce
5 problème, car celui-ci sera sans doute récurrent, il va apparaître dans
6 d'autres procès et il serait utile que toutes les parties obtiennent des
7 éclaircissements sur ce point.
8 Deuxièmement, comme la Chambre l'a d'ailleurs indiqué, si la demande
9 d'inspection régie par le 66 a été faite notamment par Mme Plavsic, c'est
10 pour avoir l'occasion d'inspecter la totalité des archives du Bureau du
11 Procureur.
12 Nous en discutons avec le Bureau du Procureur pour voir s'il est possible
13 d'avoir un index de ces documents, une espèce de liste. Ce sera un point
14 de départ pour savoir lesquels parmi ces 2,7 millions documents sont les
15 documents pertinents. Et le fait que ces documents aillent plus loin qu'en
16 Bosnie-Herzégovine, ça ne veut pas dire pour autant que ces documents sont
17 sans pertinence.
18 Dans un procès de cette ampleur, il est possible que des documents
19 originaires d'autres républiques de l'ancienne Yougoslavie, de l'ex-
20 Yougoslavie soient pertinents. Et je serai d'accord avec ce qu'observait
21 la Chambre.
22 S'il y a une demande en vue d'inspection de documents en vertu du 66 B),
23 c'est précisément peut-être pour permettre à la défense d'avoir l'occasion
24 de déterminer ce qui est dans les archives et c'est la raison ou une des
25 raisons pour laquelle nous avons fait une telle requête.
Page 57
1 M. le Président (interprétation): Abordons la troisième requête déposée au
2 nom de M. Krajisnik pour obliger l'accusation à communiquer l'identité de
3 subordonnés.
4 Maître Brashich?
5 M. Brashich (interprétation): D'emblée, je précise que je ne sais pas si
6 la requête que j'ai déposée samedi a été acceptée pour qu'il y ait
7 réponse. J'ai reçu la réponse de l'accusation ce 6 juillet. Il se peut que
8 cette question n'ait plus lieu d'être puisque je pourrais fort bien
9 aborder les arguments oralement.
10 M. le Président (interprétation): Allez-y. Allez-y!
11 M. Brashich (interprétation): J'insiste une fois de plus que je suis
12 conscient de l'ordonnance rendue auparavant par la Chambre s'agissant d'un
13 exposé plus détaillé, et je rejoins ce que disait Me Pavich dans sa
14 requête. Il demandait en effet que la Chambre tienne compte de
15 l'ordonnance du 26 juin rendu par le Juge Hunt dans l'affaire Brdanin
16 Talic. Je demande également à la Chambre d'examiner la décision du 20
17 février, en l'espèce, dans cette affaire Brdanin-Talic.
18 Un exposé plus détaillé ici dans notre affaire n'a pas été accordé. La
19 Chambre de première instance laisse entendre que l'ordonnance préalable au
20 procès va la remplacer. Comme je l'avais laissé entendre dans ma requête,
21 voici ce à quoi fait face la défense: nous avons la responsabilité en
22 vertu du 7-1 et du 7-3: responsabilité du commandement.
23 Au paragraphe 18.2 de l'Acte d'accusation consolidé, il y a un chef
24 d'accusation selon lequel à Crkvina, le 5 ou 7 mai 1992, 17 Musulmans de
25 Bosnie et Croates de Bosnie auraient été tués sur le territoire de
Page 58
1 Bosanski Samac.
2 Pourquoi est-ce que je sais ce qui s'est passé le 7 ou le 9 mai 1992?
3 C'est parce que j'étais conseil principal dans l'affaire portant sur
4 Bosanski Samac. L'individu ou les individus qui auraient commis ce crime
5 en particulier, ces ou ce monsieur s'appelait Lugar. En tout cas, c'était
6 son prénom, je ne connais plus son nom de famille. C'était un
7 paramilitaire. Il était venu vers le 3 ou le 5 avril sur le territoire de
8 Bosanski Samac. A cette époque-là, il y avait un certain colonel Nikolic
9 qui était le commandant militaire. Et maintenant, je suis accusé peut-être
10 en vertu du 7-1 je ne le sais pas- est-ce que mon client a donné un ordre
11 direct où je suis accusé en vertu du 7-3 comme autorité du supérieur
12 hiérarchique?
13 Maintenant, essayez de voir quelle est la chaîne hiérarchique à partir de
14 Lugar jusqu'à mon client. Je ne pourrai pas le faire si je ne connais pas
15 le nom des individus sur lesquels j'étais censé avoir cette autorité du
16 commandement. Nous avons un paramilitaire Lugar, on pourrait aussi prendre
17 Nikolic qui était colonel de la JNA. Et si on prend Nikolic, colonel de la
18 JNA le 7 mai; à ce moment-là il n'y avait pas d'armée de la Republika
19 Srpska, Nikolic va directement à Belgrade, il ne va pas à mon client.
20 Si par ailleurs, l'accusation défend pour thèse que Lugar, nom de famille
21 inconnu, se trouvait sous le contrôle direct de la cellule de crise de
22 Bosanski Samac, à ce moment-là je dois aller voir Blagoje Simic à
23 Scheveningen et lui dire: "Est-ce que c'est vous, Blagoje Simic, qui aviez
24 un contrôle et commandement direct avec mon client à Pale?".
25 Si je n'ai pas l'identité de ces personnes, il m'est impossible de
Page 59
1 dépêcher mes enquêteurs. Je ne peux pas commencer mon travail et je ne
2 peux même pas arguer de l'opportunité de ma requête. Avec un exemple comme
3 Bosanski Samac, je ne le sais pas.
4 Je vais vous donner un exemple concret de la raison pour laquelle
5 l'accusation devrait me fournir ces renseignements maintenant. Si je les
6 obtiens plus tard, au milieu du procès par exemple, si tout d'un coup je
7 découvre que Lugar c'est en fait l'homme qui aurait commis ces meurtres; à
8 ce moment-là, je dois partir à sa recherche. Mais il est mort! Alors,
9 maintenant je dois passer à des moyens de preuves secondaires. Et je ne
10 peux pas, de façon adéquate, préparer la défense de M. Krajisnik si je
11 n'ai pas ces informations.
12 Merci, Monsieur le Président.
13 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Gaynor.
14 M. Gaynor (interprétation): Ce que dit l'accusation par rapport à cette
15 requête a été couché sur papier dans la requête du 6 juillet. Je ne vais
16 pas revenir dans le détail sur ces arguments.
17 L'accusation aujourd'hui, et effectivement dans ses requêtes, semble
18 accepter ce qui est attaqué quant à la forme de l'accusation. On avait
19 reproché à l'Acte d'accusation de n'être pas suffisamment précis quant à
20 l'identité des auteurs et des complices. Vous le savez, c'est la troisième
21 fois que l'accusation s'attache à ce travail.
22 Il y a eu d'abord le 1er août 2000 où la Chambre a décidé qu'il n'y avait
23 pas un manque de précision dans les faits allégués dans l'Acte
24 d'accusation et qu'il serait déraisonnable de demander à l'accusation un
25 supplément de précisions.
Page 60
1 La Chambre a poursuivi en disant qu'eu égard au niveau supérieur de
2 responsabilité alléguée à l'encontre de cet accusé, la Chambre estime que
3 l'accusation a satisfait aux fins de l'Acte d'accusation aux conditions
4 régissant la spécificité en précisant notamment quelles étaient les
5 personnes qui avaient commis les crimes allégués.
6 Ce que la défense de M. Krajisnik demande aujourd'hui, c'est au fond de
7 demander à la Chambre de revenir sur sa décision, de revenir sur la
8 décision du 8 mai 2001. Dans laquelle, pour la deuxième fois, la présente
9 Chambre a rejeté la demande de l'accusé aux fins de précision.
10 La défense, dans sa requête du 25 juin et dans la requête reçue hier, n'a
11 pas fourni de raisons pour lesquelles la présente Chambre devrait revenir
12 sur ces deux décisions antérieures.
13 Aujourd'hui, des arguments nous sont soumis à l'égard d'un certain Lugar.
14 L'accusation estime que la défense fait une confusion au niveau de faits
15 plaidés dans un Acte d'accusation et, entre cela, des moyens de preuves
16 qu'il faut apporter pour avoir la preuve de ces faits.
17 Or, vous avez fait une distinction très claire dans votre décision du 1er
18 août 2000; vous avez dit qu'il y a une différence entre les faits de
19 l'affaire et les moyens de preuve nécessités pour en apporter la preuve.
20 Il faut plaider les faits alors que les éléments de preuve sont soumis au
21 moment du procès. Il s'ensuit que les litiges sont à déterminer au moment
22 du procès et n'ont pas trait aux vices de forme éventuels relatifs à
23 l'Acte d'accusation.
24 Pour ce qui est de l'avis à donner, la défense dispose de toutes façons de
25 l'Acte d'accusation et des pièces jointes déposées au mois de mai 2000.
Page 61
1 Ils ont aussi 350 déclarations préalables de témoins et 393 documents de
2 base. Et le 31 août, ils ont aussi reçu ou ils vont recevoir plus
3 exactement le mémoire préalable au procès, qui doit préciser le résumé des
4 éléments de preuve pour ce qui est des chefs retenus en matière de crimes
5 allégués et aussi pour ce qui est de la forme de responsabilité encourue
6 par l'accusé.
7 Deux fois déjà cette présente Chambre a dit que l'Acte d'accusation avait
8 été suffisamment plaidé, était suffisamment précis. Et il serait tout à
9 fait inapproprié de faire droit aux mesures sollicitées par la défense.
10 M. le Président (interprétation): Merci.
11 Oui, rapidement, Maître Brashich.
12 M. Brashich (interprétation): Je ne veux pas des faits, je veux des noms.
13 Et je ne vois pas quel est le problème, pourquoi y a-t-il un problème de
14 me donner les noms maintenant? Parce que j'aurais la moitié du mois de
15 juillet, la totalité du mois d'août pour envoyer mes enquêteurs sur le
16 terrain.
17 Je ne comprends pas pourquoi cela ressemble à une séance chez le dentiste;
18 c'est un peu comme cela qu'on peut comparer la tentative visant à obtenir
19 des informations de l'accusation.
20 M. le Président (interprétation): La Chambre va examiner ces requêtes et
21 rendra ses décisions en temps utiles par écrit.
22 Nous allons passer maintenant à des questions procédurales autres et nous
23 pencher sur la situation au niveau du procès. La Chambre fait remarquer
24 qu'il s'est tenu des réunions avec plusieurs représentants juridiques et
25 nous les encourageons à poursuivre ce type de réunions aux fins de faire
Page 62
1 accélérer les choses et de faire avancer l'ensemble.
2 Je m'adresse maintenant à M. Harmon pour lui demander si l'accusation
3 souhaite soulever des questions. Je crois savoir qu'il existe des
4 problèmes concernant la rédaction de certaines expurgations et
5 conformément à l'Article 92 bis. Peut-être pourriez-vous nous dire quelle
6 est la situation à ce sujet et nous aider?
7 M. Harmon (interprétation): Oui, Monsieur le Président. En date du 22
8 juin, la défense de M. Krajisnik a retiré son accord relatif ou son accord
9 préalable, s'agissant des 21 jours précédant le début du procès concernant
10 la remise des témoignages rédigés.
11 Il y a eu donc altération de ce qui avait été accordé et convenu d'avance
12 et nous avons essayé nous essayons toujours- de contacter l'ensemble des
13 témoins qui avaient été prévus pour ce qui était de bénéficier de mesures
14 de protection et nous continuons à nous efforcer d'entrer en contact.
15 Nous nous proposons de fournir 150 déclarations sans expurgation à la
16 défense et je pense que d'ici le 31 août, nous serons en mesure de fournir
17 à la défense toutes les déclarations sous forme non rédigée non expurgée,
18 et s'il y a des requêtes de mesures de protection éventuelles qui seraient
19 formulées par la suite, ce serait une chose à étudier ultérieurement.
20 M. le Président (interprétation): Vous vous proposez donc de soumettre des
21 déclarations non expurgées, sauf s'il y a application de mesures de
22 protection concernant certains témoins dont vous communiquerez les noms à
23 la Chambre?
24 M. Harmon (interprétation): C'est cela.
25 M. le Président (interprétation): Bien. Ce sera donc fait en temps utile
Page 63
1 et je crois qu'il n'y a pas d'objection.
2 M. Harmon (interprétation): S'agissant de l'Article 92 bis, il y a
3 certaines difficultés qui persistent et nous nous efforçons de les
4 surmonter. Le 92 bis est un Article récent et je crois que cet Article est
5 entré en vigueur vers la mi-janvier de cette année. Comme les Juges de la
6 Chambre doivent le savoir, l'application de cet Article ou plutôt
7 l'obtention de telles déclarations conformément à l'Article 92 bis
8 entraîne d'énormes problèmes logistiques pour ce qui nous concerne, car
9 nous nous trouvons maintenant en position de communiquer quelque 18
10 dépositions, et j'entends par-là les déclarations faites conformément à
11 l'Article 92 bis.
12 Nous sommes en processus d'identification des témoins qui témoigneront,
13 qui feront des positions en conformité avec le 92 bis et nous avons pu
14 identifier à peu près 186 témoins et je suis convaincu que nous pourrions
15 soumettre, présenter leurs déclarations conformément à l'Article en
16 question.
17 Maintenant, nous sommes en train d'attendre une décision au sujet d'une
18 requête que nous avons déposée en date du 7 mai demandant au Greffe de
19 désigner un officier instrumentaire, conformément à l'Article 92 bis et
20 nous n'avons toujours pas reçu de décision à ce sujet.
21 Maintenant pour ce qui est du Bureau du Procureur, la question qui se pose
22 est la suivante: conformément à l'Article 65 ter E ii) e), nous sommes
23 censés déposer d'abord, de communiquer les noms de tous les témoins. Nous
24 devrons en faire état dans notre mémoire préalable au procès et sous le
25 e), nous devons préciser si les témoins déposeront en personne ou s'ils le
Page 64
1 feront en application de l'Article 92 bis où il est prévu de faire appel à
2 une déclaration écrite ou à un compte rendu d'un témoignage préalablement
3 rendu dans une autre procédure devant le Tribunal.
4 Nous sommes donc disposés à faire en sorte, d'ici le 31 août, que soient
5 respectées pratiquement à cent pour cent les dispositions de l'Article en
6 question.
7 Toutefois, les problèmes qui se posent à nous sont ceux qui sont posés par
8 l'Article 66 A) ii) car, conformément à cet Article-là, nous sommes tenus
9 de communiquer à la défense les déclarations écrites de tous les témoins
10 recueillis conformément à l'Article 92 bis. D'ici le 31 août, nous sommes
11 en mesure de communiquer à la défense les déclarations de tous les
12 témoins; cela sera précisé au mémoire préalable au procès, avec indication
13 des témoins qui viendront témoigner et des témoins qui témoigneront
14 conformément au 92 bis.
15 De là à savoir si nous allons être en mesure de compléter pleinement les
16 exigences, de répondre complètement aux exigences du 92 bis, en d'autres
17 termes nous procurer les déclarations de chacun de ces témoins, c'est une
18 chose qui nous pose des problèmes. Nous nous efforçons de les résoudre,
19 mais je ne suis pas trop optimiste, je pense en effet, que d'ici le 31
20 août nous ne serons pas en mesure d'accomplir toutes les tâches
21 nécessaires à ce sujet, compte tenu du fait que nous attendons une
22 décision en réponse à notre requête et parce que cela nous impose
23 d'énormes problèmes logistiques, pour ce qui est de se conformer aux
24 exigences de l'Article en question.
25 Je crois que la défense sera pleinement informée des témoins qui seront
Page 65
1 cités conformément à l'Article 92 bis par nos soins et que nous allons
2 compléter leurs déclarations, mais si d'ici le 31 août nous ne réussissons
3 pas à recueillir toutes les déclarations et à respecter pleinement la
4 procédure prévue,...
5 M. le Président (interprétation): Mais je suis en train de parler en mon
6 nom, je crois que vous serez en mesure de vous en tenir à cette Règle
7 autant que faire se pourra pour ce qui est de la communication de ces
8 déclarations et, par la suite, vous allez préciser quels sont les témoins
9 qui témoigneront conformément à l'Article 92 bis.
10 M. Harmon (interprétation): Bien sûr que nous allons le faire, mais la
11 question qui se pose c'est de se conformer à l'Article 66 A) alinéa ii)
12 qui demande que soit complètement appliqué le 92 bis.
13 M. le Président (interprétation): Si vous avez besoin d'un temps
14 supplémentaire, demandez-le.
15 M. Harmon (interprétation): Très bien. Merci.
16 M. le Président (interprétation): Monsieur Brashich?
17 M. Brashich (interprétation): Sur ce point particulier, je voudrais qu'il
18 y ait instruction de la Chambre. Est-ce que le délai des 14 jours prévus
19 par les dispositions du 92 bis alinéa ii) est appliqué ou pas?
20 M. le Président (interprétation): Nous étudierons la question et nous vous
21 laisserons suffisamment de temps.
22 M. Brashich (interprétation): Merci.
23 M. le Président (interprétation): J'ai remarqué que l'on prévoit 14 jours
24 pour la partie qui a l'intention de soumettre des déclarations écrites.
25 Donc ce délai commencera à couler partant du jour de la communication de
Page 66
1 ces déclarations mais nous allons étudier la chose.
2 M. Brashich (interprétation): Merci Monsieur le Président.
3 M. le Président (interprétation): Maintenant, avez-vous d'autres questions
4 à soulever, Monsieur Harmon?
5 M. Harmon (interprétation): Nous nous proposons bientôt de soumettre une
6 requête qui concernera l'approbation de rallonger le mémoire préalable au
7 procès. Etant donné que nous avons prévu quelque 400 témoins, je crois que
8 nous ne pouvons pas pouvoir en traiter en 40 ou 50 pages et nous allons
9 présenter une requête pour ce qui est de nous attribuer un nombre de pages
10 plus grand pour le mémoire préalable au procès.
11 M. le Président (interprétation): Oui, très bien. Est-ce qu'il y a
12 d'autres questions à soulever de la part de la défense?
13 M. Brashich (interprétation): Non, Monsieur le Président.
14 M. le Président (interprétation): Maître Pavich?
15 M. Pavich (interprétation): Non, Monsieur le Président.
16 Suit la Conférence de mise en état
17
18
19
20
21
22
23
24
25