Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 1er novembre 2006

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour à tous. Madame la Greffière,

6 veuillez citer l'affaire, s'il vous plaît.

7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Madame et Messieurs les Juges.

8 Il s'agit de l'affaire IT-05-88-T, l'Accusation contre Vujadin Popovic et

9 consorts.

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie. Madame la Greffière,

11 je crois que tout le monde est là, à l'exception de

12 Me Bourgon. Si à aucun moment il y a des problèmes d'interprétation,

13 veuillez nous le signaler, s'il vous plaît.

14 Nous pouvons maintenant faire entrer le témoin, je suppose.

15 A-t-il des questions préliminaires que vous souhaitez aborder ? Nous allons

16 un peu plus tard dans la journée rendre notre décision à propos des mesures

17 de protection et du sauf conduit pour le Témoin PW-115. Hier, j'avais prévu

18 quel serait le résultat. Nous faisons droit aux deux requêtes, à savoir le

19 sauf conduit et les mesures de protection, bien.

20 [Le témoin est introduit dans le prétoire.

21 LE TÉMOIN: TÉMOIN PW-113 [Reprise]

22 [Le témoin répond par l'interprète]

23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Monsieur.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous êtes-vous bien reposé ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai pas très bien dormi. Merci.

27 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ecoutez, ceci n'est pas une bonne

28 nouvelle. Mais nous allons faire un gros effort aujourd'hui et nous allons

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1 essayer de terminer votre déposition le plus tôt possible.

2 Vous vous souviendrez qu'hier, Me Krgovic, conseiller principal

3 représentant le général Gvero, était en train de vous contre-interroger

4 lorsque nous avons dû suspendre l'audience. Il va incessamment sous peu

5 reprendre son contre-interrogatoire et le terminer. Il sera suivi par Me

6 Fauveau qui représente le général Miletic et ensuite nous entendrons

7 l'équipe de la Défense qui représente le général Pandurevic. Ce ne serait

8 pas forcément dans cet ordre-là.

9 Maître Krgovic, bonjour. Maître, vous allez donc reprendre votre contre-

10 interrogatoire.

11 M. KRGOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je souhaitais

12 simplement demander à Mme l'Huissière de déplacer un petit peu l'écran de

13 façon à ce que je puisse voir le témoin.

14 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous pouvons le faire, mais je souhaite

15 simplement m'assurer que personne dans la galerie publique ne puisse voir

16 ou ne puisse apercevoir le témoin. Je vois que vous comprenez ce que j'ai

17 dit.

18 Nous prenons les protections nécessaires, ne vous inquiétez pas, pour

19 protéger votre identité.

20 Maître Krgovic.

21 Contre-interrogatoire par M. Krgovic : [Suite]

22 Q. [interprétation] Monsieur, vous souvenez-vous qu'hier je vous ai posé

23 des questions à propos de cette première journée, le 6 juillet ? Je suis

24 sûr que vous vous souvenez de votre réponse. Je vais continuer à vous poser

25 des questions dans un ordre chronologique et reprendre quelques questions

26 de l'Accusation et parler des événements qui se sont déroulés à partir du 6

27 et jusqu'au 9 ou 10 juillet. Mes questions porteront sur vos déclarations

28 précédentes. Par conséquent, je souhaite vous demander de confirmer pour

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1 moi si j'ai bien interprété ce que vous avez dit un peu plus tôt.

2 Est-ce que vous pourriez nous dire, après la date du 6 juillet, vous

3 avez entendu que les forces de la Republika Srpska avaient avancées et vous

4 vous étiez retirés à Viogor; est-ce exact ?

5 R. Oui. En réalité, nous sommes allés dans la direction du village de

6 Suceska et Viogor. Il y a un nombre important de villages rassemblés sur

7 une petite surface. Nous avons vu la FORPRONU qui avait commencé à se

8 retirer en direction de Srebrenica et nous les avons suivis.

9 Q. Après quoi, vous avez entendu dire que les soldats de l'ABiH ont mené

10 une contre-offensive, ont réussi à reprendre certaines positions ?

11 R. Je ne m'en souviens pas.

12 M. KRGOVIC : [interprétation] Je souhaite maintenant présenter la pièce

13 4D00048. Il s'agit de la page 2 de cette déclaration. Est-ce que nous

14 pouvons montrer au témoin la version B/C/S, s'il vous plaît.

15 Q. Monsieur, c'est une phrase qui se trouve quelque part au milieu qui

16 commence par : "Dans l'intervalle, nous avons entendu dire que les

17 Tchetniks avaient avancé, s'étaient déplacés en direction de Srebrenica et

18 la localité de Slapovici," et ensuite, nous allons un peu plus loin :

19 "C'est à ce moment-là que nous avons entendu dire que des membres de notre

20 armée avaient fait battre en retraite les Tchetniks jusqu'à leurs

21 positions, et peu de temps après, nos forces ont repris leurs positions de

22 départ."

23 Est-ce que vous voyez où c'est écrit ?

24 R. Oui, je ne m'étais pas souvenu de cela, mais c'est vrai. Je sais à quel

25 endroit se trouvaient les soldats de la FORPRONU. C'est sans doute à cet

26 endroit-là.

27 Q. Après cela, vous avez entendu dire de la part de vos soldats que les

28 avions de l'OTAN allaient bombarder l'armée serbe et les chars serbes et

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1 que vos soldats avaient prévus, dans ce cas, de mener une contre-offensive

2 pour reprendre les positions perdues. Vous souvenez-vous de cela ?

3 R. Ecoutez, cela fait très longtemps que j'ai lu cette déclaration. Est-ce

4 que vous me permettez de la relire ?

5 Q. Oui, tout à fait. Cela commence à l'endroit, à la phrase : "Le matin de

6 -- nous avons entendu dire de la part des soldats que les avions de l'OTAN

7 devaient bombarder..."

8 R. Il y avait une foule de gens, donc, nous avons dû entendre cela de la

9 bouche des soldats. C'est cela la réponse. Sans doute, nous avons dû

10 entendre dire cela de la part des hommes de la FORPRONU.

11 Q. Cette déclaration -- ce que vous dites dans votre déclaration

12 précédente, c'est exact ?

13 R. Oui, tout à fait.

14 Q. Après cela, vous êtes allé en direction du village de Susnjari où vous

15 avez trouvé votre père.

16 R. Nous sommes allés avec mon père -- enfin, ma mère, ma sœur, les autres

17 réfugiés du camp. Nous allions en direction de Suceska. Nous étions

18 accompagnés de personnes d'autres villages également. Je ne sais pas

19 comment j'ai perdu mon père. Je ne sais pas, il est allé mener à bien

20 quelque chose ou porter quelque chose. Je ne sais pas. Ou des vêtements.

21 Mais nous nous sommes perdus et ma mère et ma sœur sont allées à Potocari

22 et je suis allé, accompagné de mon oncle et un autre cousin, en direction

23 du village de Susnjari, et c'est là que j'ai rencontré mon père. Je crois

24 qu'il était allé chez un de mes cousins ou un de nos parents proches. Il

25 était allé chez eux pour prendre des vêtements ou quelque chose comme cela.

26 Q. Donc, vous avez trouvé votre père à Susnjari lorsqu'ils se sont alignés

27 -- enfin, ils se sont mis en rang au niveau de la brigade. Je crois qu'il

28 appartenait à la 284e Brigade de l'ABiH; c'est exact ?

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1 R. Je crois que j'ai déjà répondu à cette question hier, mais je vais

2 réitérer ma réponse. Je ne me souviens pas du numéro exact de la brigade,

3 cela fait 10 ans. Mais je crois que cette unité ou cette brigade, je ne

4 sais pas exactement ce que c'était, à Cerska ou Konjevic Polje. Lorsqu'il

5 est venu à Srebrenica, je crois que -- je ne sais pas s'ils ont été

6 démobilisés, je ne sais pas quel est le terme exact, mais je sais qu'il

7 n'était pas actif, on ne l'a pas convoqué. Il est resté avec nous pendant

8 tout ce temps.

9 Lorsqu'il est arrivé à cet endroit-là, il connaissait sans doute ces

10 personnes qui avaient fait partie de son unité et qui avaient été mises en

11 rang.

12 M. KRGOVIC : [interprétation] Donc, j'aimerais maintenant montrer la pièce

13 00046. 4D.

14 Madame et Messieurs les Juges, est-ce que ceci est diffusé parce qu'on peut

15 lire le nom du témoin en haut de ce document. Peut-être que nous devrions

16 passer à huis clos partiel.

17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Madame la Greffière nous dit que cela

18 n'est pas le cas. Bien évidemment, si vous citez quelque chose dans ce

19 document qui permettrait de révéler son identité, à ce moment-là, bien sûr

20 qu'il faudrait revoir tout ceci. Merci, Maître Krgovic pour avoir abordé

21 cette question. Vous partagez donc les préoccupations de la Chambre de

22 première instance.

23 M. KRGOVIC : [interprétation]

24 Q. Monsieur, je vous demande de bien vouloir vous reporter à cette partie

25 de votre déclaration. Cela se trouve quelque part au milieu et commence par

26 les mots "après cela".

27 R. J'essaie de le trouver.

28 Q. Là se trouve au bas de la page. On peut lire : "Après cela, nous sommes

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1 allés en direction du village de Susnjari, où j'ai trouvé mon père en rang.

2 Il faisait partie de la 284e Brigade."

3 R. Attendez, j'ai dû mal à le trouver. Accordez-moi quelques instants,

4 s'il vous plaît.

5 Je ne retrouve pas cet endroit. Est-ce que quelqu'un pourrait m'aider ?

6 Q. Est-ce qu'on peut faire remonter le document, s'il vous plaît, car j'ai

7 dû mal à voir le passage en question. Cela y est, je le vois.

8 Cela se trouve à quelle ligne à partir du bas ?

9 R. Je vais vous le dire dans quelques instants. C'est la neuvième ligne à

10 partir du bas. A cette occasion-là, je me suis caché.

11 Q. Non, non, après cela. "Après nous sommes allés en direction du village

12 de Susnjari et lorsque sa brigade était au garde-à-vous, j'ai trouvé mon

13 père qui faisait partie de la 284e Brigade."

14 R. Est-ce que c'est l'endroit ?

15 Q. Vous souvenez-vous de cela ?

16 R. Oui. Je me souvenais de cela, à ce moment-là, enfin du numéro de la

17 brigade. Je ne connais pas le numéro de la brigade maintenant, mais, à ce

18 moment-là, je devais certainement m'en souvenir.

19 Q. Monsieur, et lorsque vous étiez à Susnjari cette nuit-là, tous les

20 membres de l'armée étaient en rang et surtout ceux qui sont nés après 1980.

21 Vous vous en souvenez ?

22 R. C'est une supposition que vous faites. Peut-être que c'est comme cela

23 que les choses que les choses se sont passées, mais il y a eu beaucoup de

24 femmes également. Des femmes plus jeunes, il y avait des jeunes enfants --

25 Il y avait beaucoup de femmes et des jeunes enfants.

26 M. KRGOVIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons montrer la pièce

27 4D00048, s'il vous plaît ?

28 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur McCloskey.

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1 M. McCLOSKEY : [interprétation] Ecoutez, je me demandais quelle était la

2 pertinence de la formation dans cette colonne. Ce n'est pas quelque chose

3 qui est contesté, c'est quelque chose que nous avons déjà abordé.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bon. J'ai une idée, mais Maître

5 Krgovic, peut-être que vous pourriez mieux expliquer la situation en

6 d'autres termes. On vous dit, en somme, que cette question n'a pas été

7 véritablement contestée par l'Accusation et l'Accusation la reconnaît en

8 tant que tel. Donc, pourquoi souhaitez-vous poser ce type de question ?

9 Si je vous ai bien compris, Monsieur McCloskey, parce que si je ne vous ai

10 pas compris, s'il vous plaît, faites-le-moi savoir.

11 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui. Cela figure dans l'acte d'accusation

12 combien de personnes, nous pensions, d'après nous étaient armées, qui

13 formait la colonne, et cetera, et toutes ces questions -- tout ce qui porte

14 sur la crédibilité du témoin, bien sûr. Mais je ne vois pas que ce soit le

15 cas.

16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Krgovic.

17 M. KRGOVIC : [interprétation] Si l'Accusation accepte ou reconnaît qu'il

18 s'agit d'une colonne formée de militaires, à ce moment-là, nous allons

19 faire tomber cet argumentaire.

20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Monsieur McCloskey. Il m'est

21 difficile en fait de prévoir quelle sera votre réponse.

22 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, c'était une colonne militaire. En

23 fait, il n'y a pas de crimes de guerre que l'on reproche à cause de

24 l'attaque de cette colonne. A la tête de la colonne, il y avait une colonne

25 militaire qui lancé une attaque le 16 juillet et bon nombre de soldats

26 serbes ont été tués. Cela fait partie de cette -- ce sont les éléments de

27 l'affaire depuis le début. Cela figure dans l'acte d'accusation. C'est dans

28 le rapport de

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1 M. Butler. C'est essentiel et même fondamental ce que dit ce témoin et

2 d'autres également.

3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Mais ce témoin se trouvait à l'arrière

4 de la colonne.

5 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, mais nous avons été très clair sur ce

6 point. En tout cas, dans toute cette affaire, je n'ai aucun problème et je

7 suis d'accord avec cela.

8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Maître Krgovic, je propose donc

9 que vous terminiez rapidement cet argumentaire pour pouvoir -- et passer à

10 quelque chose où vous et l'Accusation, sur des points sur lesquels vous

11 n'êtes pas d'accord.

12 M. KRGOVIC : [interprétation] Ecoutez, je souhaite éclaircir une chose. Ce

13 sera ma dernière question. Est-ce que l'Accusation conteste le fait que

14 toute personne faisant partie de la colonne et qui est née après l'année

15 1980 était mobilisée ? Avant cela, une mobilisation générale avait eu lieu,

16 avant les événements de Srebrenica ? Toute personne née après 1980 a été

17 mobilisée ? C'est ce que je souhaite entendre de la bouche du témoin.

18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ecoutez. Il s'agit de quelque chose de

19 tout à fait différent. Maintenant, cela n'est pas du tout la question que

20 vous avez posée au témoin.

21 Est-ce que vous souhaitez faire un commentaire, Monsieur McCloskey ?

22 M. McCLOSKEY : [interprétation] Ecoutez, vous parlez de mobilisation et de

23 ces questions-là. J'aimerais en parler en dehors de la présence du témoin,

24 en l'absence du témoin, pour essayer de circonscrire ces questions-là, mais

25 je ne conteste pas grand-chose ici, en la matière.

26 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Si c'est le domaine qui vous

27 intéresse, Maître Krgovic, je vous demande de poser vos questions sur ces

28 points-là en particulier et d'oublier le reste. Il me semble que le témoin

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1 est tout à fait désireux de répondre à vos questions.

2 M. KRGOVIC : [interprétation]

3 Q. Je souhaite vous poser cette question --

4 R. Est-ce que je peux vous dire quelque chose avant que vous ne posiez une

5 question ?

6 Q. Donc, je vais d'abord vous poser la question et ensuite, vous pourrez

7 répondre comme vous le souhaitez.

8 Est-ce que vous pouvez, maintenant, vous reporter au paragraphe qui

9 commence par le terme, il est quelque part au milieu, à la fin de la phrase

10 qui commence par "en entrant à Susnjari."

11 R. Oui, je le vois.

12 Q. "Et cette nuit-là, tous les membres de l'armée et en âge de porter les

13 armes, nés après 1980 ont été mis en rang ou alignés à Susnjari."

14 Est-ce que vous voyez cela ?

15 R. Je pense qu'il devait y avoir des hommes en âge de porter les armes.

16 Dès qu'ils se sont mis à traverser la forêt, c'est certain qu'il ne

17 s'agissait pas d'handicapés.

18 Q. Pouvez-vous le voir ?

19 R. Qu'est-ce que vous entendez par là, "en âge de porter les armes" ?

20 Q. J'entends en âge de porter les armes selon le terme militaire.

21 R. On peut lire : "Membres de l'armée et en âge de porter les armes."

22 Q. Est-ce que ce qui est écrit ici est exact ?

23 R. Je vous relis la phrase en question. Je vous relis la phrase. Je

24 comprends bien. Je n'ai -- en termes linguistiques, je ne suis pas un

25 expert, mais je comprends ce que la phrase veut lire, lorsque --

26 La phrase qui commence par "Susnjari," il y a un mot qui suit qui est

27 illisible. Puis ensuite, on parle des membres de l'armée et en âge de

28 porter les armes. Cela veut dire -- on ne dit pas qu'ils sont -- qu'ils

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1 peuvent être appelés sous les drapeaux, on dit seulement qu'ils sont en

2 bonne condition et qu'ils peuvent traverser la forêt.

3 Q. Mais on parle de ceux qui sont nés après 1980.

4 R. Personne n'a vérifié leur date de naissance. S'ils se sont portés

5 volontaires, on les a mis en rang. On les a alignés. Mais il y avait des

6 femmes et des enfants parmi eux, également. Si vous assignez que toutes ces

7 personnes étaient des soldats, des membres de l'armée, je crois que c'est

8 un peu précaire comme argument.

9 Je l'ai évoqué, et non pas parce que je suis un expert sur les questions

10 militaires, mais ceci avait été fait afin de former une colonne et afin de

11 pouvoir traverser les champs minés et pour éviter les mines. Je n'ai pas

12 entendu dire qu'on avait lâché le bétail, une chose qui est arrivée

13 quelquefois. Donc, les hommes avaient été -- ou ces personnes avaient été

14 mises en rang de façon à pouvoir faire avancer la colonne. Telle était

15 l'intention.

16 Q. Donc, c'est exact ?

17 R. Oui, c'est exact, mais j'ajoute quelque chose d'autre. J'ajoute autre

18 chose à cette phrase et à cette partie de la déclaration. C'est exact, mais

19 j'ajoute quelques éléments ici. Il est vrai que l'armée avait été mise en

20 rond de cette façon. Il y avait beaucoup de gens. La nuit commençait à

21 tomber. Je ne voyais pas tout. Je faisais partie d'une partie de la

22 colonne. Il y avait beaucoup d'hommes et il y en avait beaucoup qui étaient

23 nés après 1980, mais il y avait plus jeunes, il y avait des enfants

24 également.

25 Q. Vous ne faisiez pas partie de la même unité que votre père.

26 R. Ecoutez, je vais vous expliquer comment les choses se sont passées. Il

27 y avait beaucoup de monde. Je ne sais pas si mon explication vous important

28 quelque peu. Lorsque le pilonnage a commencé --

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1 Q. Ce qui m'intéresse c'est le fait que tous ces hommes aient été alignés.

2 R. Je souhaite quand même vous parlez de quelque chose. Je n'exquise pas

3 ma réponse. Je ne protège personne. Je ne justifie personne. Je souhaitais

4 simplement vous faire part de ma réponse. Il y avait beaucoup de monde. Le

5 pilonnage a commencé. C'était tout à fait chaotique. Les gens souhaitaient

6 entrer dans la forêt que dès que possible pour se protéger des pilonnages,

7 et dans cette situation chaotique j'ai perdu mon père. Je suis resté en

8 arrière avec les civils. Ensuite j'ai rattrapé mon père plus tard. L'armée

9 ne laissait passer personne et ne laissaient pas passer les civils. L'armée

10 avait dit aux soldats de rester. Vous savez, comment sont les gens. Ils

11 souhaitent se rapprocher de soldats pour être mieux protéger. Nous avions

12 l'important d'être une charge pour eux.

13 Q. Je parle de Susnjari, et de ce moment où tous ces hommes ont été mis en

14 rang, vous étiez là en même temps que votre père dans la même unité, n'est-

15 ce pas ?

16 R. Oui, c'est cela.

17 Q. Merci, Monsieur le Témoin.

18 M. KRGOVIC : [interprétation] Je n'ai plus de questions.

19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie, Maître Krgovic.

20 Me Haynes, conseil principal représentant le général Pandurevic va

21 maintenant vous poser des questions et procéder à son contre-

22 interrogatoire.

23 Maître Haynes, vous avez la parole.

24 Contre-interrogatoire par M. Haynes :

25 Q. [interprétation] Bonjour. Mes questions ne porteront que sur un point

26 très précis, à savoir les camions dans lesquels vous avez été transporté.

27 D'après votre déposition je crois comprendre que vous vous êtes trouvé dans

28 le même camion de Sandici à Bratunac et de Bratunac à Petkovci et que

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1 c'était aussi des mêmes camions qui vous a emmené de l'école; est-ce

2 exact ?

3 R. Ce groupe de camions, cinq ou six, nous sommes embarqués, je ne suis

4 pas sorti à Bratunac du camion et avec ce même camion j'ai été transporté

5 avec les autres prisonniers. Tous ont été remmenés, transportés ou ramenés

6 jusqu'à l'endroit où nous nous étions rendus, jusqu'à l'école, en fait. Une

7 fois dans l'école, le soir nous étions dans un camion, dont je ne me

8 souviens plus exactement, il faisait sombre.

9 Q. Dans les deux camions où vous vous êtes trouvé ils étaient bâchés et

10 ils pouvaient contenir d'après vous environ une centaine de personnes.

11 R. Ces premiers camions qui nous transportaient jusqu'à Bratunac et quand

12 nous sommes entrés dans l'école nous avons vu que c'étaient des grands

13 camions, il y avait 100 ou 200 personnes. L'autre, je ne me souviens pas.

14 Il faisait sombre, et je sais seulement qu'il y avait beaucoup de

15 personnes, mais je ne peux pas avancer un nombre précis.

16 Q. Merci beaucoup. Lorsque vous avez pu voir ces camions, vous avez pu

17 déterminer que c'étaient des camions remorques de 20 tonnes, n'est-ce pas ?

18 R. C'était clair. C'étaient les camions très longs de transport. Peut-être

19 de 20 tonnes, je ne sais pas quel est le poids utile de ces camions, mais

20 probablement 20 tonnes, oui.

21 Q. Merci beaucoup. Vous avez vu que les bâches étaient jaunes et qu'à

22 l'extérieur se trouvait inscrit la mention inscrite -- la mention "Tuzla

23 Transport."

24 R. Oui, je me souviens de cette inscription, mais je ne sais pas si elle

25 figurait sur tous les camions. En revenant du champ on l'a vue, et quand on

26 est parti pour la fusillade, on a vu la çérade [phon]. Je ne me souviens

27 plus de la couleur ni de l'inscription.

28 Q. Bien entendu. Merci.

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1 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Me Fauveau votre tour est venu.

2 Me Fauveau va être le dernier conseil à vous contre-interroger. Me Fauveau

3 représente les intérêts du général Miletic.

4 Vous avez la parole.

5 Mme FAUVEAU : Merci, Monsieur le Président.

6 Contre-interrogatoire par Mme Fauveau :

7 Q. Monsieur, hier vous avez parlé de l'école à Petkovci, et vous avez dit

8 qu'à l'époque lorsque vous étiez détenu dans cette école vous ne saviez pas

9 que c'était l'école à Petkovci. Est-il exact, effectivement, que vous avez

10 appris que c'était l'école à Petkovci lorsque vous êtes arrivé sur le

11 territoire sous le contrôle de l'ABiH ?

12 R. Je crois avoir répondu hier à cette question. J'ai appris plus tard. Je

13 ne sais pas. Si c'est des personnes qui étaient à l'école -- de quelqu'un

14 qui venait de cette région-là plus tard au village. Je l'ai su plus tard,

15 peut-être, je ne m'en souviens plus des détails. En tout cas, une fois

16 arrivé je ne savais même pas que c'était une école, je ne savais même pas

17 que c'était une école et encore moins comment était son nom.

18 Q. Monsieur, vous avez témoigné dans l'affaire Milosevic. Je vais vous

19 lire ce que vous avez dit dans cette affaire concernant le moment où vous

20 avez appris que c'était l'école à Petkovci.

21 C'est le compte rendu 3675, du 17 décembre. Dans cette affaire vous avez

22 déclaré : "After we escaped --"

23 [interprétation] "Après que nous nous sommes échappés, lorsque nous

24 sommes arrivés en territoire libre les gens ont dit où nous étions alors

25 que nous traversions ces villages. Ils ont dit cela pourrait être ceci ou

26 cela pourrait être cela, mais lorsque nous sommes entrés dans cet endroit

27 nous avons su que c'était une école. Je me souviens que nous avons parlé à

28 des gens qui ont dit cela pourrait être l'école de Petkovci. Après je suis

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1 retourné là-bas avec les enquêteurs, et j'ai confirmé que c'était bien le

2 cas."

3 R. Oui, je l'ai dit. Si je l'ai dit, je suis rentré devant et j'ai

4 confirmé que c'était une école, ce qui importe c'est que c'était l'école où

5 nous étions et je l'ai confirmé par la suite. Mais je me demande si ce

6 détail est pertinent. Vous me posez toutes questions que vous voulez.

7 Mme FAUVEAU : Est-ce qu'on peut montrer au témoin la pièce P1729 ?

8 Q. Hier, c'était à la page 45 du compte rendu, vous avez reconnu ce

9 bâtiment comme étant l'école où vous étiez détenu; est-ce exact ?

10 R. Oui, effectivement, c'est l'école dans laquelle nous avons été

11 enfermés, on y voit qu'une partie de cette école et une partie de l'entrée.

12 Q. N'est-il pas que vous n'avez pas pu bien voir ce bâtiment, le bâtiment

13 où vous étiez détenu lorsque vous êtes arrivé à cet endroit en juillet

14 1995 ?

15 R. Je n'ai pas compris. Comment je n'ai pas vu le voir ?

16 Q. Que vous n'avez pas pu voir le bâtiment de l'extérieur, le bâtiment

17 dans lequel vous étiez détenu lorsque vous êtes arrivé cet endroit en

18 1995 ?

19 R. J'ai vu le bâtiment, mais personne n'avait l'idée de s'occuper de ces

20 détails, c'est ridicule.

21 Mme FAUVEAU : Je voudrais montrer au témoin la pièce 4D53. C'est la

22 déclaration du bureau du Procureur du 12 août 1995.

23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Une question, s'il vous plaît. Passons

24 à huis clos partiel, s'il vous plaît, l'espace d'un instant.

25 [Audience à huis clos partiel]

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5 [Audience publique]

6 M. McCLOSKEY : [interprétation] Est-ce qu'on conteste ce point, ici ?

7 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous me posez la question, je ne sais

8 pas.

9 M. McCLOSKEY : [interprétation] Objection, c'est sans intérêt. Cela prend

10 du temps pour rien alors que cela ne fait pas du tout avancer ce procès.

11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Maître Fauveau. Essayons d'en

12 terminer rapidement.

13 Mme FAUVEAU :

14 Q. Vous êtes allé avec un enquêteur du Tribunal à cette école ?

15 R. Oui. Je ne me souviens plus de l'année, mais, effectivement, j'ai

16 accompagné l'enquêteur.

17 Q. Là-bas, ce n'était pas vous qui avez emmené l'enquêteur, c'est

18 l'enquêteur qui vous a emmené ?

19 R. Oui, un enquêteur avec un transporteur de la FORPRONU qui nous

20 précédait, nous étions à bord d'une voiture. De la FORPRONU ou de la SFOR,

21 je ne me souviens plus.

22 Q. C'était un enquêteur du Tribunal qui vous a montré cette école; est-ce

23 exact ?

24 R. Je vais vous raconter. On m'avait montré beaucoup de photos et je

25 devais montrer que ce n'était pas d'autres écoles et, quand on m'a montré

26 la photo de cette école, j'ai conclu que c'était cela. Il m'a emmené là-

27 bas, il m'a demandé si c'était cette école. J'ai confirmé, je suis entré

28 dedans, j'ai vu les salles d'étude, les élèves, les gens qui jetaient des

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1 objets contre le tableau noir. Je ne sais pas ce que vous voulez savoir.

2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Arrêtez-vous, arrêtez-vous. Passons à

3 autre chose. Je pense que les explications sont tout à fait complètes de la

4 façon dont il est arrivé là.

5 Mme FAUVEAU : Je n'ai plus de questions, Monsieur le Président.

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie.

7 Y aura-t-il des questions supplémentaires, Monsieur McCloskey ?

8 M. McCLOSKEY : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

9 [La Chambre de première instance se concerte]

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je m'adresse à mes collègues. Non, ce

11 n'est pas le cas.

12 Monsieur, ceci revient à dire que votre déposition est terminée. Nous avons

13 la section de la Protection des Victimes et des Témoins qui s'occupe des

14 témoins en ce Tribunal et c'est-elle qui va vous prendre en charge pour

15 vous aider à rentrer chez vous sans difficulté. Je peux vous dire que ce

16 sont des gens parfaitement compétents et que vous n'avez aucun souci à vous

17 faire.

18 Pour notre part, au nom du Tribunal, au nom de Mme le Juge Prost, de

19 M. le Juge Kwon et de M. le Juge Stole, je tiens à vous remercier d'être

20 venu déposer une fois de plus ici. C'est au nom de toutes les personnes

21 présentes que je vous souhaite un bon retour chez vous. Je vous remercie.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

23 [Le témoin se retire]

24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous avons terminé -- en tout cas, le

25 témoin a terminé sa déposition, mais il y a encore la question du versement

26 des pièces. Monsieur McCloskey, à vous de jouer.

27 M. McCLOSKEY : [interprétation] Premier point, P02280. C'est le compte

28 rendu de la déposition du Témoin P-112 [comme interprété] dans le procès

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1 Blagojevic. Puis nous avons la pièce P01908, c'est une photographie de son

2 pied. Puis la pièce P01910, c'est la blessure frontale. Puis, la pièce

3 P01729, c'est la série de marches qui mènent à l'école. Puis la pièce

4 P01730, cette même volée d'escaliers, mais de l'intérieur de l'école. Puis,

5 P01731, c'est l'entrée de l'école. Puis la pièce P01732, c'est une vue

6 panoramique du plateau, du barrage. P01739, le canal de drainage du

7 plateau. Puis, nous avons enfin la pièce P02279, qui est le feuillet sur

8 lequel figure le pseudonyme.

9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Tout d'abord, y a-t-il des objections

10 de la part des équipes de la Défense ?

11 M. ZIVANOVIC : [interprétation] En ce qui concerne l'acceptation de ces

12 pièces, deux photos, celles qui portent les cotes 1908 et 1910. En fait, je

13 crois que ces photos ne sont pas assez fiables pour être versées en tant

14 que pièce. En premier lieu, parce que sur aucune de ces photos on ne voit

15 le visage de la personne blessée. D'autre part, puis dépendamment du fait

16 que ce témoin a confirmé que c'était ces photos, une prise de vue de son

17 thorax et de son pied, je pense que cela ne suffit pas, surtout au jour du

18 fait que les traitements médicaux lui ont été administrés et que, dans ce

19 dossier, plusieurs experts sont intervenus et que cette allégation de sa

20 part n'a pas été confirmée.

21 Enfin, je dirais, aussi, que nous ignorons l'auteur de cette photo, que

22 nous ignorons le moment où cette photo a été prise, pas plus que le lieu où

23 elle a été prise et que pour cette raison, il n'est pas possible d'établir

24 la façon dont cette photo est entrée en possession du Tribunal. Je pense

25 qu'en ce moment, que ces deux photos ne devraient pas être acceptées comme

26 pièce à conviction.

27 Je vous remercie.

28 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Est-ce qu'encore quelqu'un de

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1 l'équipe de la Défense voudrait rejoindre Me Zivanovic dans cette

2 objection ?

3 Il y a d'autres objections à propos de n'importe quel autre document que

4 l'Accusation propose au versement ?

5 Qu'avez-vous à dire sur l'objection de Me Zivanovic ?

6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que je peux demander pourquoi Me

7 Zivanovic n'a pas soulevé cette question pendant le contre-interrogatoire ?

8 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je pense que le contre-interrogatoire

9 n'aurait jamais pu résoudre aucune de ces questions. J

10 Je vous rappelle, le témoin parlait du mécanisme qui sont à l'origine

11 de ses blessures. Il a cité, entre autres, que l'une de ces blessures a été

12 causée par des munitions fragmentaires. Je ne pense pas que nous puissions

13 faire aucune de ces pièces plus fiables qu'elles ne le sont.

14 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur McCloskey, qu'en dites-vous ?

15 M. McCLOSKEY : [interprétation] Le témoin a dit que ce sont les blessures

16 qu'il a subies. Je pense qu'il a même situé dans le temps le moment où il

17 les a subis ou que c'était après ces blessures. Où que ce soit, dans

18 quelque système judiciaire que ce soit et que je connaisse, ceci devrait

19 suffire. Alors je ne sais pas si on va contester ce genre de chose. Il faut

20 évoquer ces questions en contre-interrogatoire, avant que le témoin ne

21 quitte le prétoire, de façon à ce que ces questions puissent être abordées

22 avec lui. Mais effectivement, je ne pense pas que ce soit si fondamental et

23 nécessaire.

24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien, c'est contraire au principe du

25 contradictoire. On ne peut pas tendre des pièges comme cela, ou des guet-

26 apens, parce qu'on attend que l'Accusation ait terminée son interrogatoire

27 principal, ses questions supplémentaires, et puis après, on dit : "Mais

28 vous n'avez pas présenté d'éléments de preuve déterminant l'identité de

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1 celui qui a pris cette photographie."

2 Mais, enfin, je ne veux pas ici engager la Chambre de première instance

3 avant d'en avoir discuter sur le siège. Ce n'est pas mon habitude. Nous

4 allons réagir dans un instant, dans moins d'une minute.

5 [La Chambre de première instance se concerte]

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bon. Nous sommes supposés donner les

7 motifs de notre décision.

8 Il s'agit donc de deux documents, le document P01908 et le document P01910.

9 Ces documents sont versés, ce qui revient à dire, Maître Zivanovic, que

10 votre objection n'a pas été retenue, qu'elle a été rejetée.

11 Pourquoi ? Tout d'abord parce que des questions ont été posées au principal

12 par M. McCloskey à propos de ces deux photographies. Le témoin a longuement

13 répondu en disant, notamment, qu'il reconnaissait que c'était des photos

14 qui montraient bien les blessures qu'il avait subies et dont il parlait

15 dans sa déposition.

16 Deuxième raison, c'est qu'au contradictoire, si vous voulez contester

17 la valeur probante d'authenticité d'un document, il faut le faire dans les

18 temps, à savoir avant que ne se termine la déposition du témoin ou au

19 moment du contre-interrogatoire que vous menez.

20 Troisième raison, la question que vous posez, au fond, concerne la

21 valeur probante qu'il faut donner à ces deux documents. C'est une question

22 que la Chambre va trancher en dernière instance. Elle ne le fera que plus

23 tard, à un stade ultérieur de ce procès. Pour le moment, ces documents sont

24 officiellement versés au dossier, comme le sont d'ailleurs les autres

25 documents dont l'Accusation demande le versement.

26 Je me suis trompé ?

27 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Une question mineure, Monsieur

28 McCloskey. Mais, à la page 29, ligne 12, vous faites référence à une vue

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1 panoramique en disant que c'est la pièce P1732, mais dans les deux listes

2 que j'ai, c'est indiqué comme étant la pièce P1737. Est-ce que vous

3 pourriez tirer ceci au clair?

4 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, c'est pareil dans ma liste mais c'est

5 ma vue qui me fait défaut. Oui, effectivement, ce n'était pas la pièce 31

6 mais 37.

7 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] D'accord. Merci.

8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Fort bien. C'est réglé. Hier nous

9 avions deux moutures d'un même document. Oui, effectivement, dans cette

10 liste on parlait du document 1737.

11 Je m'adresse maintenant aux équipes de la Défense. Je sais que certains

12 d'entre vous, parmi les avocats ont utilisé certains documents. Voulez-vous

13 verser les documents ?

14 Maître Zivanovic. Non.

15 Maître Meek.

16 M. MEEK : [interprétation] Non.

17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Nikolic.

18 Mme NIKOLIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, nous aimerions

19 demander le versement de la pièce 354D50. C'est le rapport du service de

20 sécurité du 2e Corps de l'ABiH.

21 C'est tout.

22 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] C'est un rapport des services de

23 sécurité. Est-ce que c'est le rapport -- on devait avoir deux déclarations

24 de deux personnes ?

25 Mme NIKOLIC : [interprétation] Oui.

26 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Y a-t-il des objections de votre part,

27 Monsieur McCloskey ?

28 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui. D'abord, c'est un rapport qui concerne

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1 deux individus, donc on doit deviner de qui il s'agit, mais est-ce que cela

2 fait partie d'un rapport parmi dix ou plus citation cette personne ?

3 Pourquoi est-ce important ? Pourquoi retenir l'un plutôt que l'autre ?

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] C'est celui qui a été utilisé. En tout

5 cas, je tiens compte de l'objection que vous avez soulevée. Nous en allons

6 en discuter.

7 [La Chambre de première instance se concerte]

8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Au fond, pour les mêmes raisons puisque

9 cela se résume à la question de savoir quel sera le poids à attribuer par

10 la Chambre, ce document que le témoin a vu et des questions lui ont été

11 posées à ce propos, il a fourni des réponses, donc votre objection n'est

12 pas acceptée. Elle est rejetée. Le document, j'ai oublié la cote. C'est 3,

13 voyons le numéro.

14 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera 4D50, 3D4D50.

15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] 3D -- 4D50. J'avais demandé que ce soit

16 répété parce que dans la ligne 3 de la paqe 24 c'était faux. Ce sera donc

17 3D,4D50.

18 Oui. Je m'adresserai aussi bien à la Défense qu'à l'Accusation, nous nous

19 occuperons des documents des deux parties qui devront être mis sous pli

20 scellé à la fin.

21 Maître Krgovic.

22 M. KRGOVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Madame Fauveau.

24 M. Haynes n'a pas utilisé ces documents. Donc, c'est cela.

25 Bien, les documents suivants ou les pièces à conviction suivantes doivent

26 être gardés sous pli scellé. La pièce de la Défense, de M. Nikolic sera

27 3D4D50. La pièce de l'Accusation P02279. C'est le papier avec le

28 pseudonyme. Les pièces à conviction de l'Accusation P01908 et P01910 ce

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1 sont deux photos sur les blessures.

2 Je crois qu'aucunes des autres pièces de l'Accusation ne devraient être

3 sous pli scellé. Corrigez-moi si je fais erreur. Vous pourrez d'ailleurs le

4 commenter plus tard, si vous voulez, Monsieur McCloskey.

5 Ceci dit, nous pouvons maintenant passer au témoin suivant, il s'agit du

6 Témoin numéro 54.

7 Un instant, je veux être sûr qu'il n'y ait pas de questions préliminaires.

8 Monsieur McCloskey.

9 M. McCLOSKEY : [interprétation] Je pense que non. Je voudrais tout juste à

10 propos du sujet qui a été soulevé la dernière fois, je crois qu'il a été

11 soulevé par Me Krgovic, à propos des questions de fonds par rapport au

12 dossier, je suis toujours prêt à éclairer les points -- les chefs

13 d'accusation et la position du bureau du Procureur. Je suis donc à votre

14 disposition pour le faire, certes, comme vous le savez, je répondrai

15 toujours aux questions des Juges. Aussi au procès précédent il a été

16 constaté qu'en raison de la longueur du procès les questions soulevées

17 telle que la question soulevée par Me Stojanovic, vous avez tout à fait

18 raison par rapport au survécu, par exemple, la pièce de Jadar de la

19 rivière. C'était très clair. Mais en parlant des survivants de la rivière

20 Jadar, et j'espère que nous ne l'oublierons pas, il sera très difficile

21 probablement de mettre tout cela dans le même contexte. Auparavant, la

22 Chambre a accordé à la Défense la possibilité de dire de quelle pièce

23 s'agissait-il et pourquoi une attention devrait être attirée sur cette

24 pièce, et l'Accusation avec quelques minutes pour répondre, cela

25 permettrait de mettre toutes ces choses dans le contexte, et je n'ai rien

26 contre. Cela durera un peu plus longtemps. Mais c'est une suggestion qui

27 nous permettrait de nous éclairer un petit peu, c'est les choses -- parce

28 que à propos de ce témoin, cela nous paraissait un petit peu ambigu --

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1 c'est peut-être une façon un peu plus traditionnelle --

2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je pense que c'est un bon sujet de

3 réflexion. Nous en délibérerons pendant l'une des pauses et nous vous

4 ferons part de notre position, je vous remercie de cette suggestion. Si

5 vous avez d'autres commentaires maintenant à ce propos, cela pourrait nous

6 aider davantage.

7 Maître Stojanovic à vous.

8 M. STOJANOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je vous

9 remercie. Je crois qu'en ce qui concerne notre équipe nous avons reçu une

10 suggestion de M. McCloskey qui est pour nous très important comme ligne

11 directrice de notre interrogatoire -- dans un interrogatoire.

12 Mais mon impression est que j'ai dû dire dans ma première réaction que ce

13 que M. McCloskey a dit est en liaison directe avec les chefs d'accusation,

14 à propos du nombre des victimes, des personnes qui ont péri et qui

15 représentent un crime, cela est en liaison direct avec l'article 36 de

16 l'acte d'accusation qui est mentionné. Comme je viens du système

17 continental, c'est peut-être une occasion de parler à l'Accusation à propos

18 de ces questions pour pouvoir abréger cet interrogatoire.

19 Si j'ai bien compris, les personnes qui sont mortes dans les combats ne

20 devraient pas faire partie de l'acte d'accusation, mais addition du nombre

21 des morts pourrait nous amener dans une situation très difficile dans notre

22 tentative de prouver certains faits et certains faits importants concernant

23 le nombre des victimes et des blessés.

24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Monsieur Josse.

25 M. JOSSE : [interprétation] Notre seule observation c'est qu'avant que la

26 Chambre ne prenne une décision quelconque en ce qui concerne les

27 suggestions intéressantes et utiles de notre cher confrère, est-ce que vous

28 pourriez donner un peu de temps à la Défense pour en délibérer un petit peu

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1 et pour en discuter aussi avec M. McCloskey.

2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] C'est une sage suggestion. Comme vous

3 voyez, nous ne sommes aventurés tout de suite dans la prise de décision, et

4 je vais poser la question s'il y avait d'autres objections, d'autres

5 observations, et nous ne voudrions pas en délibérer avant d'entendre vos

6 suggestions ici sur place.

7 M. JOSSE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Plus tard, nous verrons aussi ce que

9 vous avez à nous proposer.

10 Est-ce qu'il y a d'autres observations ? Non.

11 Maintenant, s'agissant de ce témoin, qui porte le nombre 54; est-ce exact ?

12 Vous aviez demandé la journée entière d'aujourd'hui, pour terminer

13 l'interrogatoire principal, je pense qu'il serait.

14 M. McCLOSKEY : [interprétation] C'est le projet, mais comme nous avançons

15 un peu plus vite maintenant grâce au système, mais peut-être vaudrait-il

16 mieux que je laisse la parole à M. Nicholls pour qu'il nous dise quelques

17 mots à ce sujet.

18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] D'accord. En attendant, nous n'avons

19 reçu aucune indication de la part de la Défense sur le temps qu'il leur

20 faut pour le contre-interrogatoire. Peut-être pendant la première pause,

21 pourriez-vous vous organiser pour nous donner vos premières appréciations,

22 l'évaluation des temps qui nous seront nécessaires.

23 Autre chose, c'est que je voudrais qu'on se mette d'accord à propos de

24 l'identification de mesures de protection à propos de laquelle nous avons

25 déjà pris une décision. Une décision d'il y a quelques jours -- non,

26 d'hier. Un pseudonyme lui a été attribué et ce sera 118, donc 118. Aussi,

27 il y a là la distorsion de l'image.

28 Bien. Maintenant, nous pouvons faire entrer le témoin et je lui expliquerai

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1 la situation.

2 Madame la Greffière, est-ce que vous lui avez expliqué pourquoi nous

3 commençons avec -- non, ne lui dites rien, c'est moi qui lui expliquerai.

4 M. NICHOLLS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. C'est le

5 Témoin 92 bis, donc, il n'y aura pas d'interrogatoire principal dans sa

6 totalité.

7 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] C'est pour cela que j'ai posé la

8 question à M. McCloskey si c'est exact que vous aviez besoin de deux heures

9 25 minutes pour l'interrogatoire principal.

10 M. NICHOLLS : [interprétation] Non, non, Monsieur le Président. Cela a été

11 inscrit ainsi pour le cas où il témoignerait -- qu'il s'agirait d'un

12 témoignage dans sa totalité, mais tel n'est point le cas.

13 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

14 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Monsieur.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Au nom du Tribunal international, je

17 vous souhaite la bienvenue dans ce Tribunal international. Vous êtes encore

18 un témoin dans ce procès qui s'occupe des événements de juillet 1995. Vous

19 êtes un témoin à charge. Nous avons que vous avez déjà déposé dans le

20 dossier Krstic, donc, vous êtes censé connaître notre procédure ici.

21 Mme la Greffière de séance, qui est à côté de vous, vous présentera le

22 texte de la déclaration formelle solennelle que vous devez lire en

23 confirmant que durant votre témoignage, vous direz la vérité, toute la

24 vérité, rien que la vérité.

25 Madame la Greffière, s'il vous plaît.

26 Monsieur le Témoin, s'il vous plaît, donnez lecture de cette déclaration

27 solennelle à haute voix et ce sera en quelque sorte votre serment solennel

28 que vous direz la vérité.

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

2 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

3 LE TÉMOIN: TÉMOIN PW-118 [Assermenté]

4 [Le témoin répond par l'interprète]

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie. Maintenant,

6 installez-vous, s'il vous plaît.

7 M. Nicholls fera partie de l'équipe de l'Accusation qui vous posera des

8 questions. On ne vous demande pas de passer en revue tous les événements

9 comme dans le cas du dossier Krstic. Nous avons versé au dossier le

10 transcript de votre déposition dans le cas Krstic qui vaudra aussi pour ce

11 procès.

12 Beaucoup de temps s'est écoulé depuis que vous avez témoigné dans le

13 dossier Krstic, donc la première des choses, c'est que

14 M. Nicholls donnera lecture d'un bref résumé de votre déposition à propos

15 de ce dossier et ensuite, il vous poser encore quelques questions après

16 quoi, vous serez contre-interrogé par plusieurs conseils de la Défense. Je

17 présenterai chaque équipe au fur et à mesure que nous avançons.

18 Le bureau d'Accusation a demandé en votre nom que vous soit accordé

19 certaines mesures de protection durant votre déposition ici. Après

20 consultation, nous avons consulté également le bureau de l'Accusation et la

21 Défense et toutes les équipes de Défense ont été prêtes à coopérer, ils se

22 sont mis d'accord avec la requête de l'Accusation de vous accorder ces

23 mesures de protection.

24 La première d'entre elle est pour pouvoir protéger et cacher votre

25 identité. Personne ne vous adressera la parole en vous appelant par votre

26 nom, mais par votre numéro. Dans le transcript de ce dossier, vous serez

27 noté comme témoin à charge PW-118.

28 Une autre mesure de protection qui a été demandée par l'Accusation et avec

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1 laquelle les équipes de la Défense se sont mises d'accord et que nous avons

2 accordée, c'est que personne ne pourra donc voir votre image, personne en

3 dehors de ce prétoire. Vous savez que ce procès est transmis de viva voce

4 avec un léger différé qu'on peut suivre aussi sur internet et pour être sur

5 que personne ne puisse vous reconnaître, votre visage n'apparaîtra pas sur

6 l'écran. Vous pouvez voir l'écran devant vous et si les caméras se

7 focalisent sur vous, vous verrez comment vous serez présenté au public qui

8 aura suivi ce procès de l'extérieur.

9 Est-ce que nous pouvons maintenant voir l'image du témoin ? Je pris que les

10 caméras soient focalisées sur le témoin.

11 Voilà, c'est comme cela que cela paraîtra. Il y a un certain nombre de

12 petits carrés en couleur que vous pouvez maintenant voir sur votre

13 moniteur.

14 Est-ce que vous êtes content de ces mesures, Monsieur le Témoin ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Parfaitement content, je vous en remercie.

16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] C'est moi qui vous remercie. Monsieur,

17 je peux en toute sécurité vous laisser à

18 M. Nicholls qui donner lecture d'abord du résumé.

19 Ensuite, nous ferons une pause à 10 heures 30, avant qu'il ne commence.

20 Monsieur, je voudrais vous expliquer que vous avez attendu dans cette pièce

21 dans le couloir pendant une heure et un quart, peut-être un peu plus

22 longtemps, ce n'était pas exprès. Nous achevions les déclarations d'un

23 autre témoin qui vient de terminer il y a à peine un quart d'heure et nous

24 devions donc nous occuper de la finalisation de certaines questions

25 procédurales. C'est la raison pour laquelle vous avez dû attendre. Je suis

26 sûr que vous comprenez.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends, ce n'est pas un problème.

28 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie.

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1 Monsieur Nicholls, à vous, s'il vous plaît.

2 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Monsieur.

3 Interrogatoire principal par M. Nicholls :

4 Q. [interprétation] Bonjour. Merci d'être venu ce matin.

5 M. NICHOLLS : [interprétation] Je dois d'abord montrer au témoin le papier

6 avec le pseudonyme. Si la Greffière de séance voudrait bien m'aider. C'est

7 P02281. J'aimerais que ce soit sous pli scellé.

8 Q. Monsieur le Témoin, regardez, s'il vous plaît. Ne lisez pas à haute

9 voix ce qui est écrit sur le papier, mais confirmez qu'il s'agit bien de

10 votre nom sous le pseudonyme PW-118 ?

11 R. Oui, c'est bien cela. C'est exact.

12 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Montrez ce feuillet à

13 Me Zivanovic.

14 Bien sûr, ceci sera versé au dossier en temps utile, sachant que c'est un

15 document qui sera conservé sous pli scellé.

16 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

17 Q. Je vais maintenant vous lire le résumé de la déposition que vous avez

18 faite dans l'affaire Krstic.

19 "Le témoin est né en 1964. Il est de confession musulmane. Il a grandi dans

20 la ville de Srebrenica et dans les alentours de cette ville. Avant la

21 guerre, il travaillait en tant que machiniste à la mine de bauxite de

22 Srebrenica.

23 "Le 11 juillet 1995, le témoin se trouvait chez lui, à Srebrenica. Il a

24 subi une blessure à la jambe au début de la guerre et il en souffrait

25 encore. Le témoin a décidé, ce jour-là, d'aller avec sa famille à Potocari.

26 Il est allé à Potocari parce qu'il avait peur d'être tué par l'armée serbe

27 qui progressait, s'il restait dans sa maison. Le témoin a pensé que, comme

28 il avait été blessé, le Bataillon néerlandais allait lui offrir une

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1 certaine protection.

2 A Potocari, il y avait une foule énorme de gens et il n'y avait aucun

3 lieu d'hébergement. Vers midi, le témoin et sa famille sont entrés dans la

4 gare d'autocars à Potocari. C'est un bâtiment qu'on utilisait pour

5 l'entretien des autocars. Le témoin et sa famille ont trouvé un coin où

6 s'installer dans le bâtiment et il a passé toute la journée dans ce

7 bâtiment. Sa femme est allée chez ses parents -- la maison était tout près

8 -- pour aller chercher quelque chose à manger. Pendant qu'elle se trouvait

9 dans la maison familiale, elle a parlé à son père. Ce fut la dernière fois

10 qu'elle vit son père.

11 "La soirée qu'ils ont passée dans cette gare d'autocars était

12 vraiment épouvantable. Les gens qui s'y trouvaient ont entendu de

13 puissantes détonations, déflagrations d'obus. Ils se sont dits que cela

14 venait du pilonnage du centre de la ville et des environs. Il n'y avait pas

15 assez d'espace dans cette structure. Elle était remplie de monde. Des

16 enfants pleuraient. Les mères avaient apporté du foin pour que les enfants

17 puissent dormir dessus. Il n'y avait pas assez à manger. Les gens devaient

18 aller aux toilettes et ils n'avaient pas la possibilité de le faire. Le

19 témoin n'a pas pu fermer l'œil de la nuit, parce qu'il a dû rester assis.

20 "Le matin du 12 juillet, la panique n'a cessé de croître dans cette

21 structure de la gare d'autocars. Les soldats serbes sont entrés dans ce

22 bâtiment et se sont bien comportés. Les soldats ont vérifié les documents

23 des hommes s'y trouvant et le témoin a montré ses papiers au soldat et il

24 leur a demandé pourquoi il était là. Il leur a dit qu'il avait été blessé

25 et les hommes qui avaient posé la question ont accepté sa réponse.

26 "Vers le crépuscule, les personnes se trouvant dans cette structure ont

27 entendu qu'on était en train de séparer les hommes. Ceci a effrayé le

28 témoin. Le témoin a décidé d'essayer de se cacher. Avec sa famille, il est

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1 parti se cacher dans un des nombreux bus en panne qui se trouvaient devant

2 cette structure. Le témoin a passé toute la nuit du 11 juillet dans cet

3 autocar et il n'a pas pu le quitter, parce qu'on entendait des hurlements

4 de femmes et d'enfants. C'était une situation indescriptible. Le témoin a

5 entendu des gens crier ce genre de chose : 'Laissez-moi partir. Non, s'il

6 te plaît. Je t'en prie, laisse-moi tranquille. Laisse-moi tranquille.' Les

7 femmes pleuraient, criaient, appelaient à l'aide.

8 "Le lendemain matin, le 13 juillet à l'aube, le témoin a décidé qu'il

9 devait partir avec sa famille. C'est d'abord sa femme qui est partie pour

10 aller chercher un peu d'eau dans une maison qui était de l'autre côté de la

11 rue. Elle est revenue et elle a dit au témoin qu'elle avait vu beaucoup de

12 sang sur le sol du rez-de-chaussée, dans cette maison. Le témoin était

13 ébranlé, mais il a quand même emmené son enfant et il est parti vers le

14 groupe qui se trouvait à la sortie, là où avaient été disposés deux

15 véhicules transporteurs de troupes des Nations Unies. A ce moment-là, la

16 mère du témoin se trouvait avec lui.

17 "Le témoin s'est retrouvé dans une foule encore plus nombreuse, de

18 personnes qui, toutes, essayaient de sortir. Il y avait des femmes, des

19 enfants, et quelques hommes. Il a fallu beaucoup de temps, mais le témoin a

20 finalement réussi à sortir de cette foule, à s'y frayer un chemin pour

21 arriver au VTT. Il portait toujours son enfant dans les bras.

22 "Là où se trouvaient les VTT, le témoin a vu des soldats des Nations Unies

23 qui faisaient un cordon pour essayer de maîtriser ce mouvement qu'avait

24 entrepris la foule pour aller vers les autocars. Le témoin a également vu

25 des soldats serbes qui étaient parvenus déjà aux autocars et qui s'en sont

26 écartés un instant, comme si quelqu'un les avait appelés. Lorsque les

27 soldats sont partis pour quelques instants, le témoin est monté dans un

28 autocar et s'est caché par terre. Il ne voulait pas que les soldats serbes

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1 le voit, parce que s'ils le voyaient, il avait peur d'être séparé, comme

2 cela avait été le cas pour d'autres hommes. L'autocar était vraiment bondé.

3 Il a fini par partir vers Bratunac.

4 "L'autocar est allé de Potocari à Bratunac. Il est allé à Glogova, Kravica,

5 Konjevic Polje, Nova Kasaba, Milici, Vlasenica, Tisca et il s'est enfin

6 arrêté à Luke.

7 "Alors que l'autocar traversait Kravica, le témoin a entendu des femmes et

8 des enfants pleurer et crier dans l'autocar, à cause de ce qu'ils voyaient

9 à l'extérieur. Le témoin a regardé lui aussi à l'extérieur et il a vu des

10 hommes allongés sur la gauche et la droite du car, qui semblait immobile.

11 Il a aussi vu une cinquantaine d'hommes qui semblaient avoir été capturés.

12 Ces prisonniers avaient les mains liées dans le dos -- les mains dans la

13 nuque. Les prisonniers étaient en vêtements civils et avaient l'air

14 absolument horrifiés. Tout près se trouvaient des soldats serbes, armés.

15 "Alors qu'il était en route vers Luke, l'autocar a été arrêté plusieurs

16 fois et inspecté. On recherchait des hommes. Le chauffeur s'est très bien

17 comporté, a dit qu'il n'y avait que des femmes et des enfants dans

18 l'autocar. Les portes avant et arrière de l'autocar ont été ouvertes,

19 lorsqu'on a fait ces vérifications, mais personne n'a vu le témoin qui se

20 cachait.

21 "A Luke, tout le monde est sorti lorsque le bus s'est arrêté. Le témoin

22 avait encore son enfant de 5 ans dans les bras. Le chauffeur de l'autocar a

23 dit aux gens de continuer leur chemin à pied. Après avoir fait quelques

24 pas, le témoin a vu plusieurs soldats serbes. Un des soldats a dit ceci au

25 témoin : 'Donne ton enfant à ta femme et toi, tu viens avec nous.' Le

26 témoin a donné l'enfant à sa femme. Il croyait qu'il n'allait plus jamais

27 revoir son enfant, donc, il a essayé de dire quelque chose à sa femme et à

28 son enfant, mais il lui était impossible de parler. Il n'a pas eu le temps.

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1 Le soldat serbe lui a donné un coup de fusil -- ou l'a poussé de la pointe

2 de son fusil et lui a dit d'avancer.

3 "Le soldat a demandé à un homme en pantalon de camouflage et en pull

4 : 'Commandant, qu'est-ce qu'on en fait ?' Le commandant a indiqué le chemin

5 en contrebas de là-bas. Le soldat a conduit le témoin vers cette route et

6 lui a demandé : 'Est-ce que tu as travaillé pour l'usine de bauxite ?' Le

7 témoin et ce soldat serbe se sont reconnus puisque tous les deux avaient

8 travaillé dans la même compagne de bauxite."

9 M. NICHOLLS : [interprétation] Monsieur le Président, je suis à peu près à

10 mi chemin, est-ce qu'on fait la pause maintenant ou est-ce que je vais

11 poursuivre ? J'ai besoin de plus de deux minutes, c'est certain.

12 [La Chambre de première instance se concerte]

13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce que j'ai le feu vert des

14 interprètes pour continuer pour cinq, six ou sept minutes et, après, on va

15 prendre la pause ?

16 L'INTERPRÈTE : Oui, Monsieur le Président.

17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien, poursuivez, Monsieur

18 Nicholls, nous ferons la pause après.

19 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci beaucoup.

20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je remercie toutes les personnes

21 présentes.

22 M. NICHOLLS : [interprétation]

23 Q. "Donc, qu'ils ont poursuivi leur chemin qu'avait signalé le commandant,

24 ils sont arrivés jusqu'à l'école. Il était environ 10 heures. Devant

25 l'école de Luke, le témoin reconnaît un prisonnier qui avait les mains

26 liées dans le dos, Abdul Kadir, un jeune technicien du laboratoire de

27 l'hôpital de Srebrenica.

28 "Dans sa déposition dans l'affaire Krstic, le témoin a reconnu un certain

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1 nombre de photos, il a reconnu ces photos en indiquant qu'il s'agit de

2 l'école où il avait été retenu prisonnier à Luke, le 13 juillet 1995."

3 M. NICHOLLS : [interprétation] Il s'agit de la pièce P0203, à la page 20.

4 C'est donc une photo panoramique de l'école. La pièce P01765, une

5 photographie prise à l'extérieur de l'école, je vais en demander le

6 versement aujourd'hui. La pièce P01766 prise à l'extérieur de l'école où

7 les prisonniers étaient assis sous un arbre, je vais demander le versement

8 au dossier de cette pièce également aujourd'hui. Pièce 01767, la salle de

9 classe à l'intérieur de l'école où les prisonniers ont été détenus. Je vais

10 également demander le versement de cette pièce aujourd'hui.

11 Q. "Dès qu'il est arrivé à l'école, les mains du témoin ont été liées dans

12 le dos à l'aide de lacets. Il n'y avait qu'un seul soldat qui répondait au

13 téléphone de l'armée qui avait été installé dans l'escalier, ce soldat

14 appelé Zeljko, ce soldat avait été appelé Zeljko par les autres soldats. Il

15 parlait au téléphone, il disait : 'Oui, Monsieur, je ferai cela, je leur

16 dirai.'

17 "Le témoin était assis à l'extérieur de l'école en présence d'Abdul Kadir,

18 et pendant toute la journée le témoin a pu observer que les prisonniers

19 étaient sans apportés à l'école. Il pouvait entendre des camions et des

20 autocars qui venaient et qui sortaient un nombre de prisons -- et le nombre

21 de prisonniers augmentait. Pour finir, il y a eu 22 prisonniers qui ont été

22 détenus devant l'école de Luke. Beaucoup de soldats serbes sont venus, et

23 repartaient à ce moment-là. Bon nombre d'entre eux menaçaient les

24 prisonniers, mais ils n'ont pas été passés à tabac.

25 "Un seul Serbe appelé Stanimir a demandé au témoin s'il connaissait

26 un soldat serbe qui s'appelait Spomenko Garic, qui travaillait également à

27 l'usine de bauxite. Le témoin a répondu en disant qu'il connaissait Garic

28 car il travaillait au même endroit. Stanimir a dit au témoin que Garic

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1 était commandant de l'Unité spéciale d'intervention et qu'il était

2 actuellement dans le champ de Kravica, il a dit que Garic reviendrait sans

3 doute un peu plus tard à l'école ce soir-là.

4 "Dans la soirée, le soldat serbe est arrivé avec une très jolie jeune

5 fille musulmane âgée d'environ 17 ans. Ceci devait lui permettre

6 d'identifier un certain nombre de prisonniers. Les soldats l'appelait la

7 fille turque et lui ont dit qu'elle était jolie et l'ont emmenée dans

8 l'école. Plus tard le témoin a entendu une femme crier dans l'école :

9 'Laissez-moi partir. Ne me touchez pas.'

10 "A la tombée de la nuit, vers 21 heures, les 22 prisonniers ont été

11 emmenés à l'école alors qu'on les faisaient venir dans l'école, les

12 prisonniers ont été fouillés et les dépouillait de leur argent et de tous

13 les objets de valeur dont ils disposaient. Ceci a été fait par les soldats

14 serbes. Dans les salles de classe de l'école, les prisonniers ont été

15 ligotés à l'aide d'un câble téléphonique. Leurs mains ont été liées dans le

16 dos. On a ordonné l'ordre aux prisonniers de s'asseoir parterre dans un

17 coin de la salle de classe, et un soldat montait la garde d'un fusil de

18 chasse -- à l'aide d'un fusil.

19 "Plus tard, Spomenko Garic est arrivé. Il a demandé qui a travaillé

20 dans l'usine de bauxite. Garic a demandé au témoin : 'Qu'est-ce que tu fais

21 ici ?' Le témoin a répondu qu'il avait été blessé, qu'il était allé à

22 Potocari et qu'ensuite il avait été fait prisonnier, et amené à l'école.

23 Garic a répondu : 'Bien, cette guerre n'a pas été bonne, ni pour toi ni

24 pour nous. Mais qu'est-ce que l'on peut faire ? Très bien, très bien nous

25 nous verrons demain.' Garic a ensuite donné au témoin une accolade amicale

26 sur l'épaule, et il est parti. Garic était habillé d'une salopette et

27 portait un mouchoir autour de la tête. Dès qu'il est parti les troupes

28 serbes sont arrivées dans la salle de classe, ils étaient habillés comme

Page 3415

1 Garic. Le garde leur a demandé : 'Et comment cela s'est passé à Kravica ?'

2 Ensuite, il ont entendu : 'Très bien, nous en avons terminé avec les

3 balijas.' Ensuite, ces soldats ont commencé à poser des questions et à

4 passer à tabac les prisonniers.

5 "Les passage à tabac étaient violents, à chaque question : 'Combien

6 de Serbes as-tu tués ?' Ils recevaient un coup. Les prisonniers ont été

7 passés à tabac à la tête à l'aide de fusil de prise. On a donné des coups

8 de pied aux prisonniers au niveau de la poitrine. Un homme âgé qui avait

9 été passé à tabac a laissé tombé sa canne en métal et un soldat l'a ramassé

10 et l'a frappé avec cette même canne. L'un d'entre eux a pris un drapeau qui

11 avait été enlevé dans une mosquée, a commencé à frapper le témoin et les

12 autre prisonniers avec le manche en métal du drapeau, et il a ensuite posé

13 des questions à propos du drapeau. Il a passé à tabac les prisonniers

14 quelque soit la réponse qu'il donnait.

15 "Le témoin avait peur et au-dessus de son oreille droit, son visage

16 était couvert de sang. On lui a donné des coups de pied alors qu'il était

17 parterre. Les passages à tabac ont duré environ une demie heure. Un homme a

18 été poignardé au visage à l'aide d'un couteau, les prisonniers étaient

19 couverts de sang. L'accent qu'avaient les soldats qui infligeaient ces

20 passages à tabac était un accent normal, l'accent des gens de Srebrenica.

21 "Les soldats qui ont frappé les prisonniers sont ensuite partis, un

22 nouveau groupe de soldats au nombre de cinq ou six sont entrés dans le

23 bâtiment. On a donné l'ordre aux prisonniers de se mettre debout devant le

24 mur, certains des hommes ne pouvaient pas se tenir debout. Ensuite, on a

25 donné l'ordre aux prisonniers qui étaient à l'extérieur de l'école --

26 ensuite on a donné l'ordre aux prisonniers de sortir de l'école et de

27 monter à bord des camions. Il y avait une plate forme qui avait été mise en

28 place et des escaliers qui menaient jusqu'à la plateforme, des escaliers

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1 qui menaient jusqu'à la plate forme de ce camion. Un soldat qui se trouvait

2 dans les escaliers a dit aux prisonniers qu'ils allaient -- qu'il allait y

3 avoir une prison militaire et que ce serait bien à cet endroit-là. Le

4 soldat a dit : "Ne soyez pas -- n'ayez pas peur, tout se passera bien.'

5 "Ensuite, on a donné l'ordre aux prisonniers de s'asseoir sur la

6 partie droite de cette plateforme de camion, et on leur a dit de ne pas

7 s'installer ou de s'asseoir sur le banc qui s'y trouvait. Deux soldats ont

8 fait monter le prisonniers que l'on avait frappé, qui ne pouvait pas

9 marcher sur la plate forme de ce camion, et ensuite, ils ont jeté les

10 autres prisonniers et ceci a formé un tas sur le sol du camion. Il n'y

11 avait pas de bâches sur le camion, quatre soldats se sont installés sur le

12 banc qui se trouvait à droite, et trois sont montés à bord de la cabine du

13 camion.

14 "Le camion, ensuite, est allé en direction de Vlasenica. A l'entrée

15 de la ville de Vlasenica, dans une rue éclairée, le camion a tourné à

16 gauche et emprunté un chemin de terre. A ce même endroit, le camion est

17 arrivé à un petit ruisseau, et le camion s'est arrêté pendant quelques

18 instants. Un seul Serbe qui se trouvait à intérieur du camion a frappé sur

19 la cabine et a dit : 'Non, pas ici. Emmenez-le, là, où il y avait les

20 autres gens.' Il a dit ceci très fort et on pouvait l'entendre très

21 clairement. Le conducteur l'a bien compris et ensuite le camion a repris

22 son chemin.

23 "Au cours de ce voyage le témoin qui avait essayé de se défaire de ce

24 câble téléphonique qui lui liait les mains en utilisant une visse qui se

25 trouvait sur la paroi du camion. Il a réussi à détacher un peu ce câble

26 téléphonique mais n'a pas réussi à défaire le noeud.

27 "Le camion s'est arrêté alors qu'il gravissait une colline. Il y

28 avait un pré et une maison à moitié démolie à cet endroit-là. Le camion

Page 3417

1 s'est arrêté près de la maison a éteint son moteur bien que les lumières

2 soient restées allumées. Quatre soldats sont descendus à l'arrière du

3 camion. Les trois soldats sont sortis de la cabine du camion. Les trois

4 soldats qui se trouvaient à l'intérieur de la cabine étaient à l'angle

5 opposé par rapport à l'endroit où le témoin était assis.

6 "L'un des quatre soldats qui se trouvaient à l'arrière du camion sont

7 allés à l'endroit où se trouvaient les trois hommes qui étaient assis dans

8 la cabine auparavant. Les trois soldats qui se trouvaient à l'intérieur du

9 camion ont commencé immédiatement à tuer les prisonniers. Ils ont commencé

10 à tirer sur les prisonniers qui étaient empilés à l'arrière du camion en

11 les jetant -- les faisant sortir et leur tirant dessus.

12 "Deux hommes ont essayé de s'échapper. Ils ont sauté du camion et ont

13 réussi à parcourir une vingtaine de mètres avant qu'on ne les abatte. Le

14 témoin a réussi à détacher ses mains. Il a sauté du camion et plaçant ainsi

15 le camion entre lui et les soldats et s'est mis à courir. Les soldats lui

16 ont tiré dessus. C'était la nuit et les soldats devaient tirer par-dessus

17 le camion. Le témoin a réussi à s'échapper dans la forêt, il a dévalé une

18 pente et il est arrivé jusqu'à un ruisseau. Il entendait toujours les coups

19 de feu. Le témoin est resté à cet endroit-là jusqu'à l'aube du lendemain.

20 "A l'aube le témoin s'est mis en route. Après sept jours, il a

21 rencontré des compatriotes, des Musulmans qui essayaient de s'échapper

22 aussi. Après avoir souffert de la faim, il est tombé sur une embuscade de

23 l'armée serbe, le témoin a néanmoins réussi à parvenir jusqu'au territoire

24 libre le 27 juillet 1995."

25 M. NICHOLLS : [interprétation] Cela conclut mon résumé.

26 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Nicholls. Je

27 remercie également tout le personnel pour leur patience et coopération.

28 Maintenant, nous prendrons une pause de 30 minutes. Merci.

Page 3418

1 --- L'audience est suspendue à 10 heures 40.

2 --- L'audience est reprise à 11 heures 13.

3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Avec un peu de chance, Monsieur le

4 Témoin, nous allons peut-être pouvoir terminer votre déposition

5 aujourd'hui.

6 Monsieur Nicholls, avez-vous d'autres questions au témoin, ou est-ce que

7 vous avez des questions à poser au témoin ?

8 M. NICHOLLS : [interprétation] J'ai quelques questions que je souhaite

9 poser sur quelques sujets.

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ecoutez, allez-y.

11 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.

12 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Si vous avez besoin d'aller à huis clos

13 partiel, bien sûr, faites-le nous savoir.

14 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.

15 Q. Monsieur, vous avez passé jusqu'en 1995 toute votre vie dans la région

16 de Srebrenica, à l'exception de votre service militaire que vous avez fait

17 au Kosovo, au sein de la JNA, en 1984; c'est exact ?

18 R. Oui, c'est exact.

19 Q. Au début de la guerre, avez-vous jamais fait partie d'une guerre

20 villageoise ?

21 R. Oui. Je dois préciser. Lorsque la guerre est arrivée à Srebrenica, les

22 gens de Srebrenica se sont organisés de façon à pouvoir protéger leur

23 village. Etant donné que je ne pouvais pas vivre dans ma maison au début de

24 la guerre, ma maison se trouvait au milieu de maisons serbes,(expurgé)

25 (expurgé)

26 (expurgé)

27 (expurgé)

28 (expurgé)

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1 Q. Merci. Puis-je demander l'expurgation du nom de l'ami de classe, s'il

2 vous plaît.

3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. Madame l'Huissière -- Madame la

4 Greffière, s'il vous plaît.

5 M. NICHOLLS : [interprétation]

6 Q. A quel moment --

7 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Cela se trouve à la

8 ligne 7; je propose que nous expurgions de la ligne 7 à la ligne 10.

9 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Madame et Messieurs les Juges.

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je propose -- je suppose qu'il faut

11 attirer l'attention du témoin là-dessus.

12 Regardez-moi, Monsieur le Témoin. Malgré toutes les précautions du monde et

13 tout ce que nous faisons pour protéger votre identité, il arrive

14 quelquefois que l'on commette des erreurs et c'est vous qui venez de

15 commettre la première erreur aujourd'hui en citant le nom de quelqu'un.

16 Ceci permettrait peut-être à quelqu'un de vous identifier, donc, faites

17 attention. Lorsque vous êtes ici, à la barre du témoin, ne citez ni des

18 noms de personnes, ni des noms d'endroits qui auraient un quelconque

19 rapport avec vous parce que ceci ne devrait pas permettre à d'aucuns de

20 vous reconnaître aujourd'hui.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie pour vos instructions,

22 Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous en prie.

24 Monsieur Nicholls.

25 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.

26 Q. Pourriez-vous me dire à peu près à quel moment vous faisiez partie de

27 la guerre villageoise ?

28 R. Du 17 avril jusqu'au moment où j'ai été blessé, le 14 mai 1992. C'est

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1 plus ou moins cela, peut-être que les dates ne sont pas tout à fait

2 exactes, mais cela correspond à peu près à ce moment-là.

3 Q. Pourriez-vous nous dire ce qui vous est arrivé le 14 juillet ? Comment

4 vous avez été blessé et quelle a été votre blessure ?

5 R. Le 14 mai 1992, j'étais donc de garde ce soir-là. Le matin, j'étais

6 assis devant la maison de mon ami, c'est à cet endroit-là qu'un obus a

7 tombé. Cet obus m'a touché et m'a blessé et cet obus a tué une femme.

8 Q. Merci. Donc0, entre le 17 avril 1992 jusqu'à la date à laquelle vous

9 avez été blessé, est-ce que vous avez pris part à des combats ?

10 R. Non. A l'époque, les Serbes contrôlaient la ville et les gens qui

11 habitaient dans les villages musulmans avaient organisé un roulement pour

12 que ces gardes des villages puissent protéger les villages. Il n'y avait

13 pas de conflits militaires à l'époque.

14 Q. Donc, après avoir été blessé en 1992, et la chute de Srebrenica en

15 juillet 1995, avez-vous pris part à des combats ?

16 R. Non. Je n'ai participé à aucun combat et il est vrai que ma

17 convalescence a été longue. J'ai marché longtemps avec deux béquilles.

18 Je dois ajouter que l'hôpital ne suffisait pas, nous n'avions pas de

19 médicaments. Au début, il fallait prendre ce que les gens avaient sur eux,

20 on pouvait demander des médicaments, mais, plus tard, il n'y a plus eu de

21 médicaments du tout.

22 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Lazarevic.

23 M. LAZAREVIC : [interprétation] Oui, je souhaite que l'on fasse la clarté

24 sur un point. Je lis le compte rendu, lorsqu'il dit que les Serbes

25 contrôlaient la ville, je souhaite savoir s'il parle ici de Srebrenica, de

26 Bratunac, est-ce qu'il peut préciser ?

27 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ecoutez, en répondant à cela, écoutez,

28 c'est à vous d'en juger. Faut-il passer à huis clos partiel ?

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1 M. NICHOLLS : [interprétation] Je demanderais de passer en audience à huis

2 clos partiel.

3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Passons à huis clos partiel pendant

4 quelques instants.

5 Merci, Maître Lazarevic.

6 [Audience à huis clos partiel]

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21 (expurgé)

22 (expurgé)

23 [Audience publique]

24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous sommes en audience publique.

25 M. NICHOLLS : [interprétation]

26 Q. Il y a quelques instants, vous avez dit que l'hôpital manquait de

27 certaines choses. Est-ce que vous vouliez parler de l'hôpital de

28 Srebrenica ?

Page 3422

1 R. Oui. Comme j'ai dit un peu plus tôt, les soldats serbes étaient en

2 train de piller tout ce qui leur tombait sur la main, y compris l'hôpital.

3 Des médicaments, de l'équipement ont été pris à l'hôpital. Ils se sont

4 livrés à des pillages et cela a été amené dans une direction inconnue.

5 L'hôpital ne fonctionnait pas normalement.

6 Après deux ou trois mois, un hôpital militaire ou un hôpital de

7 campagne a été mis en place à Srebrenica et dirigé par le Dr Nijaz.

8 Q. Très bien. Donc, après le début de la guerre et avant la chute de

9 Srebrenica, saviez-vous que la population de Srebrenica augmentait en

10 nombre puisqu'il y avait beaucoup de gens qui venaient du village voisin ?

11 R. Oui, c'est exact. Le nombre de personnes se trouvant à Srebrenica

12 augmentait sans cesse et tous les jours parce que les soldats serbes

13 attaquaient les localités musulmanes et la population musulmane a été

14 chassée des villages voisins autour de Srebrenica et on les obligeait ainsi

15 à se rabattre sur la ville de Srebrenica.

16 Un peu plus tard, les Musulmans ont pris le contrôle de Srebrenica.

17 Après une opération qui s'est déroulée à Potocari, ils ont réussi à

18 repousser les soldats serbes lors d'une embuscade qui avait été tendue à

19 Potocari.

20 Q. Très bien, merci. Je souhaite que vous nous donniez une brève

21 description des conditions de vie à Srebrenica en 1993, 1994, 1995. Quelle

22 était la situation au plan de la nourriture ? Vous nous avez déjà parlé des

23 médicaments, mais qu'en était-il de l'eau et de la surface habitable pour

24 cette population qui augmentait sans cesse ?

25 R. C'était épouvantable, à Srebrenica, pour ce qui est des vivres, des

26 vêtements, des chaussures, d'équipement médical, des médicaments; ce sont

27 des choses dont on avait énormément besoin, car le nombre de blessés

28 augmentait sans cesse et il fallait obtenir des médicaments et toute autre

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1 équipement médical, mais cela n'était pas disponible. Il fallait partir à

2 la recherche de nourriture et je peux vous en parler si vous le souhaitez.

3 La situation était épouvantable, il n'y avait pas d'eau, pas

4 d'électricité, les lignes téléphoniques avaient été coupées, il n'y avait

5 pas de quoi se nourrir. On pourrait dire que c'était épouvantable.

6 Q. Vous nous avez déjà expliqué comment vous avez été blessé par un obus.

7 Est-ce que vous pourriez brièvement nous dire comment le pilonnage de

8 Srebrenica a eu une incidence sur la vie quotidienne de la population et

9 comment ceci a une incidence sur la condition psychologique de la

10 population ?

11 R. Le pilonnage quotidien de la ville rendait la vie de plus en plus

12 difficile. Des gens ont été contraints à se diriger vers le centre de la

13 ville et à trouver toute forme d'hébergement possible pour leur famille.

14 Très souvent il y avait des morts dans les rues à cause du pilonnage et

15 nous savions tous, nous qui habitions à Srebrenica, nous savions qu'il y

16 avait jusqu'à 1 000 obus qui sont tombés par jour. Cette ville est petite

17 et l'artillerie serbe occupait les positions sur les collines autour de

18 Srebrenica pour pouvoir atteindre leur cible.

19 Je dois encore une fois citer le nom du Dr Nijaz. Ce dernier a été

20 touché par une bombe qui est tombée du ciel, il a été tué par une bombe qui

21 est tombée du ciel. Le bombardement aérien a été également dirigé contre la

22 population qui souffrait à Srebrenica.

23 Mme FAUVEAU : Monsieur le Président, le témoin pourrait-il préciser la

24 période à laquelle il se réfère ?

25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, c'est une question tout à fait

26 légitime. De quelle période s'agit-il précisément ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Au début de l'année 1993, c'est l'affaire de

28 l'année 1992. Je crois que c'était un moment très difficile et ce que

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1 j'évoque ici porte sur cette période-là.

2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je crois que ce serait mieux si nous

3 nous rapprochions de l'année 1995.

4 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

5 Q. Je souhaite maintenant aborder avec vous quelque chose que vous avez

6 dit dans votre déposition dans l'affaire Krstic, à savoir la séparation qui

7 a eu lieu à Potocari. Vous avez déjà décrit la séparation des hommes que

8 vous avez pu observé au moment où vous tentiez de monter à bord de

9 l'autocar. Vous souvenez-vous d'un croquis que vous avez dessiné, croquis

10 représentant cette scène lorsque vous aviez un entretien avec le bureau du

11 Procureur en janvier 1996 ?

12 R. Oui, je m'en souviens. Je l'ai encore en tête et je me souviens encore

13 de ce que j'ai vu ce jour-là.

14 M. NICHOLLS : [interprétation] Est-ce que nous pourrions passer à huis clos

15 partiel, s'il vous plaît, pendant que je demande à ce que l'on puisse

16 afficher le document P02282 ?

17 Monsieur le Président, pendant quelques instants, est-ce que nous pouvons

18 passer à huis clos partiel, s'il vous plaît ?

19 Je suppose que c'est l'évidence même. Bien sûr, ceci ne va pas être

20 diffusé.

21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ne vous inquiétez pas.

22 Nous sommes à huis clos partiel de toute façon.

23 [Audience à huis clos partiel]

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12 [Audience publique]

13 M. NICHOLLS : [interprétation]

14 Q. Vous avez réussi à monter dans un car avec votre épouse, votre mère, et

15 votre fille à Potocari; est-ce que votre frère lui aussi a réussi à monter

16 dans ce véhicule avec vous ?

17 R. Non. Il est allé avec d'autres, il est parti par les forêts.

18 Q. Quand avez-vous vu votre frère pour la dernière fois ?

19 R. Avant la chute de Srebrenica. Peut-être quelques jours avant la chute

20 de Srebrenica. Je ne m'en souviens pas exactement. Quoi qu'il en soit,

21 c'était juste avant la chute de Srebrenica.

22 Q. Une question concernant le moment où vous êtes descendu du car à Luke

23 avec votre famille. Est-ce que vous avez pu voir ce que ce véhicule a

24 fait ? Est-ce qu'il est resté sur place ? Est-ce qu'il est reparti ?

25 Qu'est-ce qu'il l'a fait ?

26 R. Il a fait demi-tour et il est reparti dans la direction dont nous

27 étions venu. Je suppose qu'il est allé chercher le groupe de personnes

28 suivant.

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1 Q. J'aimerais montrer au témoin -- là, je passe à un autre sujet, Monsieur

2 le Témoin. Je voudrais vous montrer la pièce 02103. C'est une photo. Il

3 n'est pas nécessaire de passer à huis clos partiel.

4 M. NICHOLLS : [interprétation] Malheureusement, la photo n'est pas en

5 couleur à l'écran. Nous pourrions peut-être montrer la photo en couleur au

6 témoin. Je préférerais agir ainsi, si ceci vous convient, Madame et

7 Messieurs les Juges.

8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. Nous préférons cette solution,

9 nous aussi.

10 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.

11 Q. Monsieur, je vous ai montré, n'est-ce pas, lorsque nous nous sommes

12 vus, il y a quelques jours ?

13 R. Oui. J'ai déjà vu cette photo.

14 Q. Dites-moi, s'il vous plaît, est-ce que vous reconnaissez l'endroit que

15 montre cette photographie ?

16 R. Oui. C'est une école où des gens ont été emmenés. En fait, on les a

17 emmenés devant l'école et plus tard, ces gens ont été emmenés dans l'école.

18 Il y a deux arbres. L'un qui est plus près du bâtiment et l'autre qui est

19 plus éloigné de l'école. C'est à ce dernier arbre que j'ai vu la personne

20 qui avait été amenée. Je me suis assis près de lui. Plus tard, tous les

21 gens se sont assis sous cet arbre, pendant la journée. Dans la soirée, on

22 les a fait rentrer dans l'école.

23 Q. Je pense que c'est clair. Vous parlez de l'arbre qui se trouve à droit,

24 à l'avant-plan de la photo, n'est-ce pas ?

25 R. Oui.

26 Q. Pour que tout soit clair, je vous demande si c'est bien l'école dont

27 vous avez parlé dans votre déposition dans le procès Krstic, que j'aie

28 mentionnée, lorsque j'ai présenté ce résumé de votre déposition

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1 aujourd'hui.

2 R. Oui.

3 M. NICHOLLS : [interprétation] Je voudrais que nous passions à huis clos

4 partiel, Monsieur le Président.

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. Nous sommes à huis clos partiel.

6 [Audience à huis clos partiel]

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3 [Audience publique]

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Zivanovic, vous avez la parole.

5 Monsieur le Témoin, Me Zivanovic défend les intérêts du général -- ou du

6 colonel Popovic.

7 Contre-interrogatoire par M. Zivanovic :

8 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

9 R. Bonjour.

10 Q. Vous avez été blessé en 1992, n'est-ce pas ?

11 R. Oui. En 1992, le 14 mai, plus exactement.

12 Q. Par la suite, après le mois de juillet 1995, est-ce que vous avez été

13 appelé à servir dans l'armée ?

14 R. Oui, mais j'ai répondu que je ne pouvais pas participer à des combats.

15 Ceci a été vérifié par les autorités qui m'ont fait passer un examen

16 médical.

17 Q. Donc, votre état de santé était tel qu'il ne vous permettait pas de

18 rejoindre l'armée ?

19 R. Exact. J'avais été blessé au mollet droit et j'avais encore une

20 blessure d'un centimètre sur un centimètre et demi. C'était un éclat

21 d'obus. J'ai une photo, je peux vous la montrer.

22 Q. Est-ce qu'on vous a demandé de rejoindre la Défense territoriale,

23 puisque vous n'étiez pas capable de joindre l'armée ?

24 R. Non, personne ne m'a demandé de rejoindre la TO ou la protection

25 civile.

26 Q. Mais qu'en est-il des obligations de travail ? Est-ce que vous avez dû

27 vous y soumettre ?

28 R. Non. Parce qu'on m'a déclaré inapte à de telles activités.

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1 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Pouvons-nous passer à huis clos partiel,

2 Monsieur le Président.

3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui.

4 [Audience à huis clos partiel]

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14 [Audience publique]

15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je suppose que vous devez répéter la

16 question parce que je vous ai coupé la parole.

17 M. ZIVANOVIC : [interprétation]

18 Q. Vous avez dit que dès que vous êtes sorti du camion ils vous ont tiré

19 dessus.

20 R. Oui, je l'ai dit parce que j'ai entendu les coups de feu. Quand on tue

21 les gens, on les tue à contre rafale. Quand j'ai sauté du camion, quelqu'un

22 a dit : "Il s'est tiré, espèce de balija." A ce moment-là, le feu s'est

23 multiplié. J'ai compris que les soldats ont commencé à tirer dans ma

24 direction pour me toucher. Ce qui était normal.

25 Q. Est-ce que vous considérez comme étant normal qui vous court après ?

26 R. Je l'ai déjà dit dans ma phrase je ne sais pas si, ensuite, ils ont

27 détourné le camion pour me courir après. Ils l'ont fait probablement, parce

28 que je sentais la proximité des rafales. Cela on peut lire dans une

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1 déclaration où j'ai décrit plus en détail comment cela aurait pu se

2 présenter.

3 La pente m'a permis, j'ai roulé jusqu'à la forêt, et la forêt se trouve sur

4 une pente encore plus abrupte, je roulais pratiquement sur cette pente.

5 Q. Dites-moi : étiez-vous capable de courir parce que vous m'avez dit que

6 vous n'étiez pas capable de tenir debout ?

7 R. Une bonne question, mais, quand on lutte pour sa vie, cela se passe

8 comme cela, croyez-moi, que je ne peux pas m'expliquer à moi-même.

9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Encore une

10 fois -- oui, vous avez reçu votre réponse. Mais ce qui m'inquiète c'est

11 encore la rapidité. Je plains les interprètes. Il s'agit des deux parce que

12 je n'arrive plus à distinguer les locuteurs. Vous ne nous donnez même pas

13 une fraction de seconde pour la pause. Il commence à vous répondre avant

14 que votre question ne soit terminée. Vous recommencez à la poser avant

15 qu'il n'ait terminé.

16 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je n'ai pas mis le casque. C'est ce que

17 j'aurais dû faire. Mais j'ai presque terminé avec mon interrogatoire,

18 enfin, je n'ai plus de questions pour lui, et je vous remercie.

19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Alors, je vous remercie.

20 Si j'ai bien compris l'équipe de la Défense de M. Beara avait demandé

21 une vingtaine de minutes.

22 A vous, Monsieur Meek.

23 M. MEEK : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] M. Meek défend M. Beara, ensemble avec

25 M. Ostojic, dans cette affaire, et c'est lui qui vous vous contre-

26 interrogera.

27 Contre-interrogatoire par M. Meek :

28 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. Comment allez-vous ?

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1 R. Très bien, et vous-même ?

2 Q. Très bien. Merci. Je n'ai que quelques questions à vous poser, et je

3 vous demande de les écouter et d'y répondre aussi simplement que possible

4 pour pouvoir avancer plus vite, pour que tout cela se termine aussi vite

5 que possible. Vous êtes d'accord ?

6 R. Oui, je suis parfaitement d'accord. Veuillez me poser vos questions.

7 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que j'ai raison en disant que tard dans la

8 matinée le 12 juillet que les soldats qui vous avaient demandé votre

9 identification vous avaient traité de façon correcte ?

10 R. Quand j'ai dit correctement, cela veut dire qu'ils ne m'ont pas battu,

11 ils ne m'ont pas provoqué, ces soldats qui étaient entrés ils étaient

12 corrects, ils se déplaçaient normalement entre les enfants et les femmes,

13 et quand ils rencontraient un homme ils lui demandaient son identification

14 et s'ils pouvaient l'approuver. Ils posaient des questions sur la

15 participation à l'armée sur les derniers événements à Srebrenica.

16 Cela s'est passé aussi avec moi. Quand ils sont venus à mon hôtel, ils

17 m'ont demandé comment je m'appelais, si j'avais une carte d'identité, et

18 cetera.

19 Q. Monsieur le Témoin, vous aviez dit, ce 12 juillet, à ces soldats que

20 vous étiez blessés. Ils vous ont demandé pourquoi vous étiez là-bas ?

21 R. Oui, je leur ai dit --

22 Q. Vous demandez déjà ma question et vous anticipez ma question et

23 j'anticipe votre réponse.

24 Vous leur avez dit que vous n'étiez pas et ils ont dit très bien.

25 R. Oui. Ils m'ont quitté pour aller voir l'homme suivant qui était à côté.

26 Cela s'est passé comme cela.

27 Q. Vous avez déjà pratiquement répondu à l'une de mes questions. Ils ne

28 vous ont pas maltraité. Ils vous ont laissé tranquille après la fin de

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1 l'interrogatoire.

2 R. Oui, c'est tout à fait vrai.

3 Q. Or c'étaient des officiers de la police militaire; est-ce que cela est

4 vrai ?

5 R. Je suppose que c'était un groupe de soldats qui avait une mission

6 spéciale. C'est mon opinion. D'entrer pour identifier éventuellement des

7 personnes. Ils se distinguaient des soldats locaux par leur accent. Nous

8 avons des accents différents en Bosnie et en Serbie, et pouvons donc en

9 nous écoutant les uns les autres, établir l'origine régional des personnes.

10 Alors, j'ai eu l'impression qu'ils venaient d'autre part, donc, d'une autre

11 région que la mienne.

12 Q. Encore une fois, je ne cherche pas que l'on mette cela sur le système

13 électronique, mais vous avez déclaré, le 24 janvier 1996; vous vous en

14 souvenez ?

15 Dans cette déclaration, vous avez dit que c'était une Unité spéciale de la

16 Police militaire ou des forces chetniks dans cette région; est-ce que cela

17 est vrai ?

18 R. C'étaient mes suppositions. Ils étaient différents des soldats normaux,

19 et je soutenais que c'était normal qu'il y avait dans les armées des unités

20 spéciales. C'était une supposition à moi.

21 Q. Est-ce que vous pouvez me dire approximativement quelle était

22 l'importance numérique de ce groupe de policiers ?

23 R. Ils se déplaçaient par deux ou par trois, en deux ou trois groupes, si

24 j'ai bien pu remarquer, dans cet ouvrage, je me trouvais. Il est possible

25 qu'il y en avait plus. Je ne pouvais pas voir. Il y avait beaucoup de

26 personnes là dans cette pièce.

27 Q. Est-ce qu'il serait correct de dire que vous avez vu dix, à 12, ou 15 à

28 20 soldats, de police militaire, divisée en différents groupes ? C'est ce

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1 que je cherche à établir.

2 R. Il est vrai que deux personnes m'ont approché. Ensuite, j'ai vu un

3 autre groupe de trois personnes qui contrôlait et interrogeait deux autres

4 hommes. Il s'agissait des groupes de deux ou trois éléments qui étaient

5 entrés normalement, ont discuté et sont repartis.

6 Q. Merci. Je comprends donc que ces deux policiers militaires qui vous ont

7 interrogé avaient un accent qui vous a fait croire qu'ils étaient

8 Monténégrins.

9 R. Exactement. J'avais conclu que leur accent -- leur accent me rappelait

10 celui d'un Monténégrin.

11 Q. Les autres policiers militaires que vous avez vus et qui demandaient

12 l'identité aux gens, est-ce que vous les avez entendu parler ou non ?

13 R. Non. Mais ils portaient le même uniforme que ces personnes. Mais leur

14 uniforme diffère de l'uniforme normal des soldats serbes est ces uniformes

15 sont de meilleure qualité et paraissent un peu plus fins que ne portent les

16 éléments de l'armée serbe en général.

17 Q. De ces deux policiers militaires qui vous avaient demandé votre

18 identité, est-ce que les deux avaient cet accent ou seulement un d'entre

19 eux ?

20 R. C'est l'un qui m'adressait la parole et l'autre se taisait.

21 Q. Vous avez mentionné dans votre déposition faite dans un procès

22 précédent sur un individu.

23 M. MEEK : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer maintenant à huis

24 clos partiel.

25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Certes, Monsieur Meek.

26 Passons pour un moment à huis clos partiel.

27 [Audience à huis clos partiel]

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25 [Audience publique]

26 M. MEEK : [interprétation]

27 Q. Est-ce que vous voulez que je répète la question ?

28 R. Pas la peine. Il s'agit de l'homme qui était emmené. Il est vrai que

Page 3449

1 plus tard, j'ai appris des défuntes qui étaient là, que l'on avait

2 mentionné son nom et que je ne ferai pas. Il a été emmené à un endroit

3 inconnu.

4 Une fois que j'ai regagné les territoires libres, pendant un certain temps,

5 on ne savait pas ce qui lui arrivait. Après, on a appris qu'il avait été

6 échangé, probablement, interrogé. On sait, on connaît la procédure et tout

7 ce qui se passe ensuite.

8 Q. Merci, Monsieur le Témoin. Ma dernière question est la suivante. Vous

9 n'avez jamais vu ce groupe de policiers militaires après ce 12 dans ces

10 uniformes ?

11 R. Non, je ne les ai plus revus.

12 M. MEEK : [interprétation] Je vous remercie.

13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Madame la Greffière, vous pouvez

14 éconduire le témoin.

15 [Le témoin se retire]

16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] En attendant, je voudrais que l'on

17 s'occupe de seulement deux choses.

18 D'abord, Monsieur McCloskey, je voudrais attirer votre attention sur

19 la question liée à votre requête et ensuite, aux réponses additionnelles et

20 ensuite, la requête pour compléter la liste des témoins selon l'article 65

21 ter et la liste selon --

22 Oui, il sait très bien de quoi je parle.

23 Nous avons terminé nos discussions en la matière. Pour ce qui est de votre

24 requête demandant l'ajout d'environ 230 pièces, nous avons conclu que même

25 si vous semblez fournir dans votre première requête des raisons, des motifs

26 détaillés demandant l'ajout de ces quelques 230 pièces à la liste initiale,

27 vous ne répétez pas ces explications pour ce qui est des 31 pièces

28 supplémentaires que vous voudriez utiliser et que vous voudriez, elles

Page 3450

1 aussi, ajouter à la liste des pièces à charge sans les identifier. Quelles

2 sont, parmi les 261 pièces mentionnées à l'annexe B de la première requête,

3 et là je reprends vos propres termes, quels sont les 230 pièces en

4 question.

5 En d'autres termes, nous ne sommes pas à même de déterminer quels sont ces

6 31 pièces. Je pense que là, il faudra que vous examiniez la question. De

7 cette façon, nous n'aurons pas à rendre deux décisions, mais une seule.

8 Vous pourrez peut-être examiner la question dans les meilleurs délais et

9 nous pourrons rendre notre décision aussitôt après.

10 Je pense que vous me comprenez, n'est-ce pas, Monsieur McCloskey. Vous

11 demandez l'ajout de 261 pièces, mais nous ne voyons pas nettement quelles

12 sont les 230 pièces d'un côté et les 31 de l'autre, alors qu'il nous faut

13 le savoir.

14 Cela c'est une chose. Hier, vous avez déposé une autre requête aux fins des

15 mesures de protection concernant un témoin qui devrait témoigner pendant le

16 mois de novembre qui commence aujourd'hui. Nous sommes, en effet, le 1er

17 novembre. Je parle de témoins au pluriel. Il y en a notamment un qui porte

18 le numéro 65 ter 40. D'après mes calculs, il devrait commencer son audition

19 au début de la semaine prochaine, sans doute. Il serait dès lors utile que,

20 du moins en ce qui concerne ce témoin, la Défense puisse nous faire part de

21 son avis d'ici à demain, disons. De cette façon, nous pourrons trancher la

22 question d'ici à vendredi, ce qui vous permettrait de faire venir le témoin

23 le plus vite possible la semaine prochaine.

24 Je vous fais confiance, je suis sûr qu'un des avocats va s'occuper de la

25 question et vous nous faire rapport.

26 Nous allons faire une pause de 30 minutes.

27 Maître Lazarevic, c'est vous qui allez maintenant contre-interroger le

28 témoin, n'est-ce pas ? Puis, ce sera vous. Pourriez-vous voir s'il est

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1 possible que vous terminiez en l'espace de 45 minutes ? Bien sûr, on ne

2 vous force pas la main.

3 --- L'audience est suspendue à 12 heures 29.

4 --- L'audience est reprise à 13 heures 03.

5 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

6 M. LE JUGE AGIUS : Madame Fauveau, qui représente --

7 Mme FAUVEAU : Monsieur le Président, je voudrais seulement vous informer,

8 malheureusement, que la Défense ne peut pas terminer en 45 minutes. C'est

9 mon collègue Lazarevic qui continuera.

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Fort bien.

11 Maître Lazarevic, veuillez commencer votre contre-interrogatoire.

12 Monsieur le Témoin, Me Lazarevic défend les intérêts de

13 M. Borovcanin.

14 Contre-interrogatoire par M. Lazarevic :

15 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

16 R. Bonjour.

17 Q. Je souhaite simplement préciser un point, une erreur. Hier, M. Nicholls

18 -- nous avons reçu hier, de la part de M. Nicholls, un feuillet

19 d'information complémentaire et il l'a informé les équipes de la Défense de

20 certains éléments qu'il avait appris au cours de la séance de récolement.

21 Il s'agit d'un document dont je souhaite lire une phrase pour clarifier les

22 choses. On peut lire ce qui suit en anglais, cela vous sera traduit :

23 "Après être arrivé sur le territoire tenu par les Musulmans, le témoin a

24 fait partie de la

25 286e Brigade de Travnik. Mais il n'a pas pris part au combat."

26 Pour pouvoir accélérer les choses, j'aimerais vous poser des questions

27 assez simples et vous pourrez répondre soit par oui ou soit par non. Tout

28 d'abord, avez-vous dit ceci à M. Nicholls pendant la séance de récolement ?

Page 3452

1 R. Je dois vous expliquer quelque chose. La phrase est exacte, mais je

2 dois dire et expliquer pourquoi je me suis retrouvé dans cette unité-là,

3 unité qui avait été créée à Stupari. Je n'étais membre d'aucune unité.

4 C'était pour ma survie. Je ne recevais aucune allocation, je n'avais rien.

5 Ma famille --je devais faire vivre ma famille.

6 Lorsque je suis arrivé dans cette unité, j'ai expliqué quelle était ma

7 situation, que j'allais avoir une intervention chirurgicale, et que je ne

8 pouvais pas faire grand-chose. Néanmoins, ils m'ont dit qu'étant donné mon

9 parcours professionnel, je pouvais travailler dans un bureau, et c'est

10 ainsi que j'ai accepté ce poste. Je ne suis resté que très peu de temps.

11 Après cela, j'ai eu une intervention chirurgicale à l'hôpital dans le

12 service orthopédique de l'hôpital à Tuzla.

13 Q. J'entends bien les raisons que vous invoquez. Je comprends tout ce que

14 vous venez de dire. Mais je vous demande de préciser, s'il vous plaît, ceci

15 c'est passé lorsque vous étiez membre de la 286e Brigade ?

16 R. Oui, la 286e Brigade.

17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ecoutez, nous sommes en train de faire

18 précisément ce que nous avons tenté d'éviter précédemment.

19 En réalité, vous avez commencé. Maître Lazarevic, alors que le témoin

20 n'avait pas encore terminé sa réponse. Vous aviez déjà -- vous posiez déjà

21 votre question suivante.

22 Vous parliez alors que le témoin parlait, alors, Me Lazarevic posait sa

23 nouvelle question. On ne peut pas continuer ainsi.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr. J'essayais simplement de gagner du

25 temps. Il est préférable d'entendre la fin de l'interprétation.

26 M. LAZAREVIC : [interprétation]

27 Q. Peut-être qu'il serait préférable de lire le compte rendu, et lorsque

28 vous voyez que plus rien ne bouge à l'écran, à ce moment-là vous pouvez

Page 3453

1 répondre.

2 Je souhaite maintenant parler de quelqu'un que vous avez cité pendant votre

3 déposition lorsque vous avez répondu aux questions posées par mon confrère,

4 Me Meek, et vous avez également cité le nom de quelqu'un dans l'affaire

5 Krstic.

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Si je me souviens bien ceci s'est passé

7 à huis clos partiel.

8 M. LAZAREVIC : [interprétation] Non. Je ne crois pas que c'est la même

9 personne que j'entendais citer.

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous en prie, allez-y.

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25 (expurgé)

26 (expurgé)et passer à huis clos partiel sur-le-champ, s'il vous plaît.

27 Nous sommes actuellement à huis clos partiel.

28 [Audience à huis clos partiel]

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11 Pages 3454-3457 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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15 [Audience publique]

16 M. LAZAREVIC : [interprétation]

17 Q. Monsieur le Témoin, que signifie le terme "sehid" ? Pourriez-vous

18 l'expliquer à la Chambre ?

19 R. C'est une question très difficile. Très honnêtement, je ne connais pas

20 le sens de ce terme.

21 Q. Mais vous avez certainement dû entendre ce terme car vous venez de

22 Srebrenica, de Bosnie. Je suis sûr que vous avez dû attendre prononcer le

23 terme "sehid" très souvent.

24 R. Oui, je l'ai entendu, je l'ai vu écrit, je l'ai lu. Mais je ne peux pas

25 vous l'expliquer. Je ne peux pas expliquer ce que cela signifie.

26 Q. Si je vous disais que "sehid" est un terme communément utilisé pour

27 décrire un combattant mort -- un combattant près à mourir pour sa foi

28 islamique.

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1 R. Ecoutez, je ne sais pas. Je ne connais pas le sens, vous essayez de me

2 faire dire quelque chose.

3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Encore une fois, vous ne marquez pas de

4 pause entre les questions et les réponses et vous allez trop vite.

5 M. LAZAREVIC : [interprétation]

6 Q. Essayons de faire un effort pour éviter d'autres avertissements des

7 Juges de la Chambre. Vous faites une pause et je vais marquer une pause

8 également. Soyons patients.

9 Est-ce que nous pouvons revenir à Potocari à la date du 12 juillet. A la

10 page 1 253 du compte rendu du procès Krstic, aux pages 9 et 10, vous avez

11 déclaré vers le 12 juillet : "De ces hommes et femmes qui souhaitaient

12 partir, qu'ils souhaitaient partir à cette date-là, vous avez entendu dire

13 que les hommes avaient été séparés."

14 Pourriez-vous répondre par oui ou par non, s'il vous plaît ? Est-ce que le

15 compte rendu dans l'affaire Krstic illustre bien vos propos de l'époque ?

16 R. Je ne suis pas sûr de bien vous comprendre la situation. Pourriez-vous

17 la répéter, s'il vous plaît ?

18 Q. Vous avez parlé dont vous aviez entendu parler à savoir la séparation

19 des hommes des femmes à Potocari le 12 juillet. En anglais on peut lire ce

20 qui suit : "Ces femmes et ces hommes qui souhaitaient sortir et partir à

21 cette date du 20, nous avons entendu dire que les hommes étaient -- qu'on

22 était en train de séparer les hommes."

23 Pardonnez-moi, c'est la date du 12 et non pas du 20.

24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Nous

25 retrouvons la ligne en question.

26 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] En fait, on peut lire 12, en réalité.

27 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. On va

28 simplement s'assurer que ceci ne fait pas partie du reste du texte.

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1 Poursuivons. Je crois qu'il vous faut relire le tout. -- vous aidez un

2 petit peu.

3 M. LAZAREVIC : [interprétation] Merci.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Témoin, regardez-moi, s'il vous plaît.

5 Monsieur le Témoin, vous vous souvenez, nous avons évoqué un peu plus tôt

6 dans votre déposition le témoignage que vous avez fait dans l'affaire

7 Krstic. Nous avons ici un compte rendu et je vais lire un court extrait à

8 propos duquel Me Lazarevic souhaite vous poser quelques questions.

9 Dans l'affaire Krstic, on vous a posé cette question-ci : "Combien de temps

10 êtes-vous resté dans l'enceinte de la gare routière le 12 juillet ?"

11 D'après le compte rendu, vous auriez répondu comme suit : "Vers la tombée

12 de la nuit, et plus tard dans l'après-midi, parmi ces femmes et ces hommes

13 qui souhaitaient sortir, et partir cette journée-là le 12, nous avons

14 entendu dire que l'on séparait les hommes, et ceci m'a fait peur, donc, il

15 était naturel que nous essayons de trouver un lieu sûr -- un endroit où on

16 nous remarquerait pas."

17 Tel est l'extrait de la déposition que vous avez faite et qui intéresse Me

18 Lazarevic.

19 Vous pouvez maintenant poser votre question, Maître Lazarevic.

20 M. LAZAREVIC : [interprétation]

21 Q. Puisqu'on vient de vous présenter cette partie-là de votre déposition,

22 ce que vous avez déclaré est-ce parfaitement conforme à la vérité ?

23 R. Oui, parce qu'à l'époque je me trouvais dans l'enceinte -- dans ce --

24 transport où on s'occupait de l'entretien des véhicules. Je n'ai pas pu

25 voir cela moi-même, mais je l'ai entendu dire. C'est pour cela que j'ai

26 pris peur, et j'ai essayé de trouver un lieu plus sûr.

27 Q. Vous n'avez pas vu ceci se passer le 12, vous en avez entendu parler

28 uniquement.

Page 3461

1 R. J'ai entendu dire qu'on était en train de séparer les hommes et plus

2 tard j'ai eu l'occasion de le voir personnellement, mais cela a été le

3 premier contact. Plus tard j'ai eu l'occasion de voir de quelle façon ces

4 groupes de soldats serbes pénétraient dans la foule. De nouveau ce soir-là

5 j'ai entendu des gémissements -- des cris de ceux qu'on était en train

6 d'emmener.

7 Q. Je pense que ma question était claire. Nous parlons ici du 12. Le 12,

8 est-ce que vous, vous avez vu de vos propres yeux tout ceci, ou est-ce que

9 vous l'avez appris d'autres ? Nous parlons du 12.

10 R. Le 12, je n'ai pas pu le voir parce que j'étais à l'intérieur de ce

11 bâtiment.

12 Q. Merci bien. La première fois que vous l'avez vu c'est le 13 lorsque

13 vous vous êtes aussi approché des deux VTT du DutchBat.

14 R. Oui, de là on pouvait le voir. On a vu -- j'ai pu voir quand on

15 séparait les hommes qui étaient envoyés à gauche, et pour ce qui était

16 devant moi ils ont été séparés ils sont allés vers la gauche vers cette

17 maison que j'ai déjà décrite.

18 Q. Vous nous avez dit que le 12 juillet vous vous trouviez dans cette

19 structure qu'on appelle le dépôt d'entretien ou de maintenance des

20 véhicules. C'est là que vous étiez. Toute cette installation se trouvait

21 remplie de réfugiés. Il y en avait à l'extérieur aussi. Est-ce bien décrire

22 l'endroit où vous étiez le 12 ?

23 R. C'est exact. C'était bondé de monde. Il y avait des gens devant aussi.

24 Il y avait vraiment beaucoup de monde.

25 Q. Puisque la Chambre de première instance avait un transport sur les

26 lieux pour mieux connaître la région, pourriez-vous dire si ce dépôt se

27 trouvait à 150 mètres de la route ? Qu'il y a environ 150 mètres qui

28 séparent ce dépôt de la route; est-ce que c'est exact ?

Page 3462

1 R. Je ne pourrais pas vous le dire exactement. Impossible de vous dire

2 quelle est cette distance.

3 Q. Fort bien. Ce n'est pas si important que cela.

4 Puisque vous étiez à l'intérieur du dépôt et qu'il y avait des réfugiés

5 entre vous et la route, le 12, il vous était impossible de voir ce qui se

6 passait sur la route là où se trouvaient les cars, n'est-ce pas ?

7 R. J'étais à l'intérieur du bâtiment. Je vous l'ai déjà expliqué il ne m'a

8 été impossible de voir depuis l'intérieur ce qui se passait. Même si

9 j'avais été devant -- à l'extérieur du bâtiment cela aurait été difficile à

10 voir vu la foule qu'il y avait.

11 Q. Pouvons-nous voir la déclaration que vous avez fournie au bureau du

12 Procureur du Tribunal le 24 janvier 1996 ? Il s'agit de la pièce 5D93.

13 Est-ce que vous vous souvenez qu'en janvier 1996, vous avez eu un

14 entretien avec des représentants du bureau du Procureur du Tribunal ?

15 R. Oui, je m'en souviens.

16 M. LAZAREVIC : [interprétation] Je ne sais pas si ceci risque de

17 compromettre l'identité du témoin. Est-ce que c'est diffusé ou pas ? Non,

18 bon, pas de problème alors.

19 Q. Lorsque vous avez parlé avec des représentants du bureau du Procureur

20 du Tribunal de La Haye, je suppose que ces personnes ont eu un comportement

21 tout à fait professionnel envers vous et que vos propos ont bien été

22 enregistrés avec exactitude, n'est-ce pas ?

23 R. Oui, je pense que oui.

24 Q. Est-ce que vous avez eu l'occasion de revoir cette déclaration lors de

25 la séance de récolement que vous avez eu maintenant avec M. Nicholls et

26 aussi à l'occasion de votre témoignage dans l'affaire Krstic ?

27 R. Oui.

28 Q. Examinons, si vous le voulez bien, la page 3. Premier paragraphe en

Page 3463

1 version B/C/S, c'est le dernier paragraphe de la deuxième page en anglais.

2 Voyez qu'ici vous parlez du 12 juillet. En effet, au troisième paragraphe,

3 vous commencez en disant : "A l'aube du 14 juillet, ce jeudi." Alors,

4 soyons précis quant au moment dont vous parlez. Dans le premier paragraphe,

5 cependant, vous dites ceci : "J'ai remarqué que les Chetniks séparaient les

6 hommes de leur famille. C'est la raison pour laquelle j'ai essayé de

7 trouver un meilleur endroit où me cacher."

8 Si l'on parle de cette déclaration, on peut conclure que vous l'avez vu

9 vous-même, je veux dire, ce qui s'est passé.

10 R. Non, parce qu'on dit : "Se rendre compte," cela peut être aussi par

11 l'ouï-dire, pourquoi pas.

12 Q. Mais se rendre compte, constater -- enfin, excusez-nous, de nouveau,

13 nous nous chevauchons. Enfin, je ne veux pas ici ergoter sur la

14 signification du terme "constater." Alors, ici, quand on dit "constater" ou

15 "percevoir", ici vous voulez dire que vous avez entendu ?

16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ecoutez, je pense que le témoin a déjà

17 donné son explication. Il n'est pas d'accord avec vous sur la signification

18 que vous donnez à ce verbe. Alors, passez à autre chose.

19 Monsieur Nicholls, oui.

20 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, et je pense qu'en anglais, quand on dit

21 : "J'en ai conclu." Il faut bien comprendre que c'est la première version

22 officielle, l'anglais. Le B/C/S, c'est une traduction, cela explique peut-

23 être la différence.

24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous parlez de quel paragraphe ?

25 M. NICHOLLS : [interprétation] C'est le haut de la page 3 en anglais.

26 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Donc, il faut passer à une autre page.

27 M. LAZAREVIC : [interprétation] Mais en anglais : "As I noticed," cela se

28 trouve au dernier paragraphe de la page 2.

Page 3464

1 M. NICHOLLS : [interprétation] Je pensais qu'on parlait du haut de la page

2 3.

3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Peu importe. Je pense que maintenant il

4 a expliqué ce qu'il voulait dire.

5 M. LAZAREVIC : [interprétation]

6 Q. Je poursuis l'examen de votre déclaration, là où vous parlez du 13

7 juillet. Lorsque vous avez déposé dans le procès Krstic et que vous avez

8 parlé des événements survenus le 13 juillet, lorsque vous avez dit que vous

9 avez décidé de parler, vous avez dit à la page du compte rendu d'audience

10 255 dans le procès Krstic, lignes 23 et 24, vous avez dit ceci : "Je ne

11 supportait plus la situation."

12 Ce sont les termes qui, à l'époque, ont été utilisés par vous. Je

13 poursuis, page suivante du compte rendu d'audience Krstic, page 256, vous

14 avez dit aux lignes 4 à 8 : "Je me suis trouvé dans une foule encore plus

15 nombreuse parce que tout le monde essayait de sortir et quand je dis les

16 gens, je parle des femmes et des enfants et des quelques hommes qui se

17 trouvaient toujours dans cette même foule. J'ai réussi à sortir. Beaucoup

18 de temps s'est écoulé, une heure, voire plus, avant que je ne réussisse à

19 parvenir au VTT."

20 Là, je cite le compte rendu d'audience du procès Krstic qui semble être le

21 souvenir le plus exact que vous avez de la perception que vous avez du

22 sentiment général qui était le vôtre et qui était celui des gens qui se

23 trouvaient là lorsque les bus sont arrivés. Est-ce que vous êtes d'accord

24 avec ce que vous avez déclaré alors ? Est-ce que vous maintenez vos dires ?

25 R. Je crois que c'est bien expliqué et que c'est très précis. Je ne

26 supportais plus la situation, dans ce cas, j'ai décidé de partir et je me

27 suis trouvé dans une foule encore plus dense où tout le monde voulait

28 partir à tout prix, mais c'était impossible de partir aussi vite.

Page 3465

1 Q. Fort bien. C'était simplement la question que je vous posais pour

2 savoir si l'explication que vous donniez alors était précise et si c'est

3 bien comme cela que les choses s'étaient passées.

4 Mais dites-moi : est-ce que cela s'est passé à 8 heures du matin ?

5 Est-ce que c'est à cette heure-là que vous êtes parti pour essayer de

6 parvenir à ces VTT du Bataillon néerlandais ? Est-ce qu'il vous a fallu une

7 heure pour arriver à ces véhicules ? Pourriez-vous être plus précis ?

8 R. Difficile de donner une idée du temps, de voir combien de temps s'est

9 écoulé. Je sais que cela s'est passé dans la matinée. Etait-il 7 heures, 7

10 heures et demie, 6 heures et demie, je ne sais plus. Franchement, croyez-

11 moi, je ne suis plus en mesure de m'en souvenir exactement.

12 Q. Bien. Mais, en tout état de cause, cela s'est passé en début de

13 matinée, très tôt le matin ?

14 R. Oui.

15 Q. Si nous partons de cela, si nous pensons qu'il vous a fallu une heure,

16 comme vous venez de le dire, pour vous frayer un chemin dans cette foule,

17 pour arriver aux véhicules blindés transporteurs de troupes néerlandais,

18 est-ce que cela veut dire qu'il était plutôt 9 heures lorsque vous vous

19 êtes trouvé dans ce bus ?

20 R. Mais c'est pareil. Quand on a parlé du moment du départ, de l'heure

21 précise, je vous ai dit que je ne me souvenais pas exactement de l'heure

22 qu'il était et à quelle heure je suis parti. Alors, cela va déterminer

23 l'heure d'arrivée. Je vous ai dit qu'il était sans doute 7 heures lorsqu'on

24 est arrivé à Luke, alors si vous faites vos calculs, et si vous essayez de

25 me dire que je me trompe, qu'il y a des moments qui ne sont pas couverts,

26 je crois que vous vous fourvoyez.

27 Q. Mais pas du tout. Je n'essaie pas du tout de vous souffler des réponses

28 que vous ne voulez pas prononcer. Mais vous pourriez dire que, par exemple,

Page 3466

1 vous étiez à Luke vers 10 heures.

2 R. Mais je vous ai donné une heure approximative, je vous ai dit qu'il

3 était difficile de se souvenir de l'heure, de tous les détails précis,

4 surtout si vous êtes en ville, par exemple, et si quelqu'un vous demande à

5 quelle heure étiez dans tel ou tel magasin, vous pourrez peut-être le dire.

6 Mais l'heure que vous donnerez ne sera qu'approximative. Impossible de

7 chiffrer précisément le temps, surtout dans des circonstances aussi

8 difficiles que celles qui prévalaient alors, c'est encore plus difficile de

9 le dire.

10 Q. Je comprends, je comprends qu'il vous est impossible de déterminer avec

11 exactitude l'heure, personne ne vous le demande de le dire à la minute

12 près, mais peut-on présumer que vous êtes arrivé à Luke dans la matinée,

13 avant midi ?

14 R. Oui. On peut être encore plus précis. On pourrait dire que nous sommes

15 arrivés à Luke vers 10 heures, à une demi-heure près.

16 Donc, c'était vers 10 heures, je dirais.

17 Q. Fort bien. Je ne vais pas insister là-dessus. Dans le procès Krstic,

18 page 1256, lignes 22 à 25, avez-vous également déclaré que lorsque vous

19 étiez passé -- vous aviez longé le VTT, là je cite : "Les soldats se sont

20 écartés pendant un instant. Je suppose que quelqu'un les a appelés. Ils se

21 sont éloignés un bref instant et ceci s'est confirmé par la suite."

22 Il s'agit ici d'une supposition exacte ? Est-ce que vous en avez parlé dans

23 le procès Krstic ? Répondez par oui ou par non. Vous pourrez me donner des

24 détails plus tard.

25 R. Oui, c'est vrai. Les soldats serbes ne sont pas entrés quand nous

26 étions là.

27 Q. Oui. Vous, qui étiez un homme, vous courriez, effectivement, le risque

28 de vous voir séparer devant le bus, mais on a appelé les soldats. Ils ont

Page 3467

1 dû s'éloigner, ce qui vous a permis d'entrer dans ce bus, n'est-ce pas ?

2 R. Oui.

3 Q. Quelques questions encore. Lorsque vous êtes montés dans ce bus et que

4 vous avez poursuivi votre périple par Bratunac, Kravica, vous avez continué

5 jusqu'à Luke, n'est-ce pas ?

6 R. Oui. Tout le monde le sait.

7 Q. Lorsque vous étiez à bord du bus, comment dire ? Vous avez décrit de

8 quelle façon vous vous êtes caché en vous cachant entre les sièges, mais

9 vous aviez dans les bras une enfant. Donc, je suppose qu'on allait vous

10 remarquer, à un moment donné du trajet, n'est-ce pas ?

11 R. Je peux vous décrire qu'il y a une porte avant et une porte arrière

12 dans un bus. Je suis entré par la porte arrière. J'ai fait quelques pas à

13 l'intérieur et je me suis assis à même le sol, entre deux sièges, deux

14 rangées de siège. Puis, les femmes sont entrées. Elles se sont amoncelées

15 autour de moi, avec les enfants. Cela a créé une espèce de mur autour de

16 moi, donc, on ne me voyait pas parce que j'étais assis par terre. Puis,

17 j'étais parmi les femmes et les enfants.

18 Q. Fort bien. Puis, le bus a suivi cette route pendant tout ce temps,

19 n'est-ce pas ? Il a continué de rouler. Est-ce qu'il y a eu des arrêts, à

20 un moment donné ?

21 R. Le bus s'est arrêté -- ou plutôt, il a été arrêté à plusieurs endroits

22 par un groupe de soldats serbes qui voulaient voir s'il y avait des hommes

23 à l'intérieur.

24 Q. Lorsque vous avez traversé Kravica, vous ne vous êtes pas arrêtés,

25 n'est-ce pas ?

26 R. Non. Le bus s'est bien arrêté à Kravica pour voir s'il y avait des

27 hommes à l'intérieur et la traversée ne s'est pas faite facilement. La

28 route à Kravica était étroite et il y avait des soldats serbes qui étaient

Page 3468

1 alignés le long de la route. A proximité, il y avait des hommes détenus. Je

2 suppose qu'ils étaient de Srebrenica. Ils avaient les mains liées dans le

3 dos.

4 Q. Nous allons en reparler un peu plus tard. Je vous demande maintenant

5 ceci. Je m'intéresse au moment où vous êtes arrivé à Tisca.

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Il nous reste deux minutes.

7 M. LAZAREVIC : [interprétation] Oui, je vois l'heure.

8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous avez au maximum le temps de poser

9 toutes les questions. Nous pourrions arrêter maintenant si vous voulez

10 aborder un autre sujet, un nouveau sujet.

11 M. LAZAREVIC : [interprétation] Effectivement, il est peut-être plus utile

12 de commencer demain.

13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous n'avons pas réussi à terminer

14 votre déposition aujourd'hui, Monsieur le Témoin. Vous avez une autre

15 équipe de la Défense qui va procéder au contre-interrogatoire. Cela va

16 prendre environ une quarantaine de minutes. Mais nous allons poursuivre

17 votre déposition demain; cependant, je pense que vous en aurez terminé en

18 une heure.

19 Pour le moment, Mme l'Huissière va vous accompagner. Vous allez bénéficier

20 de l'aide habituelle. Vous pourrez aller à votre hôtel. Veillez à ce que

21 personne ne vous contacte et que vous ne contactiez personne pour parler

22 des choses qui font l'objet de votre déposition aujourd'hui.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie infiniment, Monsieur le

24 Président. Merci de votre patience et du temps que vous m'accordez.

25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce que nous pouvons lever

26 l'audience ?

27 Maître Haynes. Mais oui. Non, non, non. Allez-y. On va baisser les stores.

28 M. HAYNES : [interprétation] Oui, on peut baisser les stores pendant que je

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1 parle.

2 Oui, je voulais simplement vous dire que j'ai posé la question des mesures

3 de protection à toutes les équipes à propos des témoins du mois de

4 novembre. Pas d'objection de qui que ce soit. Nous pensons que toutes les

5 conditions nécessaires sont remplies.

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci beaucoup, Maître Haynes. Je

7 remercie toutes les équipes de la Défense également. Nous pourrons préparer

8 notre décision. Demain ou après-demain, elle sera rendue.

9 L'audience est suspendue. Elle reprendra demain à 9 heures.

10 --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le jeudi

11 2 novembre 2006, à 9 heures 00.

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