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1 Le mercredi 7 février 2007
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [L'accusé Nikolic n'est pas présent dans le prétoire]
5 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
6 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.
7 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Madame la Greffière.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, madame,
9 Messieurs les Juges. Il s'agit de l'affaire
10 IT-05-88-T, le Procureur contre Vujadin Popovic et consorts.
11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie.
12 Je constate l'absence de l'accusé Nikolic. Nous avons été avisés du fait
13 qu'il arrivera plus tard car il a rendez-vous médical; sinon, toutes les
14 équipes de la Défense sont présentes et au complet. Du côté de
15 l'Accusation, nous avons M. McCloskey, du moins pour le moment.
16 Hier, je vous avais demandé si vous aviez une réponse à la demande de
17 l'Accusation qui était de transformer un témoin qui était visé par
18 l'article 68 qui passe de viva voce à 92 ter. Y a-t-il des objections de la
19 part de l'équipe de la Défense ? Non. Donc, nous faisons droit à cette
20 demande.
21 Monsieur McCloskey. Bonjour, Monsieur le Témoin. Nous allons poursuivre
22 votre audition aujourd'hui. J'espère qu'elle pourra se terminer
23 aujourd'hui.
24 Monsieur McCloskey, vous avez la parole.
25 LE TÉMOIN: TEMOIN PW-111 [Reprise]
26 [Le témoin répond par l'interprète]
27 M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci. Bonjour, Madame et Messieurs les
28 Juges. Bonjour à tous et à toutes.
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1 Interrogatoire principal par M. McCloskey : [Suite]
2 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.
3 R. Bonjour.
4 Q. Il y avait cette photo qui porte le numéro 1563 en application de
5 l'article 65 ter. En attendant qu'arrive cette photo à l'écran, revenons à
6 cette prairie à Sandici. Vous avez dit qu'il y avait là un char militaire.
7 Est-ce que vous vous souvenez s'il y avait des équipements, des armes
8 lourdes dans ce pré ou cette prairie pendant que vous vous y trouviez ?
9 R. Bien sûr que oui. Il y avait un Praga tout près de nous. Il y avait
10 aussi tout près de nous un char. Il y avait aussi un canon antiaérien qu'on
11 pouvait déplacer, de calibre 20/3 millimètre et il était près de la route.
12 Q. Est-ce qu'il y a une différence entre le Praga et cette unité mobile
13 antiaérienne que vous venez de décrire ?
14 R. Le Praga avait une position qui n'était pas amovible. Elle était fixe,
15 cette position. Elle était enfouie. Je ne sais pas s'il y avait des roues
16 qui permettaient de déplacer cette arme. C'était une base. C'était pareil
17 pour le char et aussi pour le canon antiaérien. Tous les canons étaient
18 dirigés vers les bois, d'où nous étions sortis.
19 Q. Est-ce que vous connaissez le calibre des canons du Praga ?
20 R. C'était une arme avec deux tubes. Un char en a un et il y en a trois
21 sur un canon antiaérien.
22 Q. Comment connaissez-vous ces armes ? D'où vient cette connaissance ?
23 R. Vous savez, j'ai fait mon service dans l'ex-JNA et je connais très bien
24 toutes ces armes.
25 Q. Nous avons maintenant l'intention d'examiner cette photo, parce que
26 vous aviez à poser quelques connotations -- annotations à la photo d'hier.
27 Celle-ci a été sauvegardée et versée au dossier. Maintenant, en voici une
28 sans aucune annotation. Dites-nous, lorsque les cars sont arrivés, est-ce
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1 que vous vous souvenez de façon approximative, de l'heure qu'il était ?
2 R. Je ne sais pas l'heure précise, mais c'était dans l'après-midi, fin
3 d'après-midi, même. Peut-être début de soirée. Je ne suis pas certain. Le
4 soleil était encore assez haut dans le ciel.
5 Q. Une fois que vous êtes arrivé à cet endroit, que s'est-il passé ?
6 Qu'est-ce que vous avez fait ?
7 R. Nous avons été amenés à cet endroit dans des cars, des cars qui se sont
8 arrêtés devant l'entrepôt. Le premier car était garé tout près de la
9 première entrée, celle-ci. J'étais en fait dans le premier car et le
10 deuxième s'est garé derrière le premier. On nous a donné l'ordre de sortir
11 en courrant le plus vite possible du véhicule, pour entrer dans le premier
12 entrepôt. Je peux vous montrer l'entrée, si vous voulez. C'était sur la
13 gauche.
14 Q. Je vais vous demander de prendre ce stylet une fois de plus et
15 d'indiquer par une flèche l'endroit où vous êtes entré dans l'entrepôt.
16 Madame l'Huissière va vous aider à bien utiliser ce stylet.
17 R. [Le témoin s'exécute]
18 Q. Est-ce que vous pourriez, en plus du trait, indiquer une pointe pour
19 faire une flèche et montrant ainsi aux Juges de façon précise dans quelle
20 direction vous êtes allé ?
21 R. [Le témoin s'exécute]
22 Q. On a l'impression que vous entrez par cette entrée et puis que vous
23 tournez à gauche, d'après la flèche que vous avez tracée; est-ce exact ?
24 R. Oui.
25 Q. Fort bien. Au moment où vous êtes descendu du car, que vous êtes entré
26 dans l'entrepôt, est-ce que vous auriez remarqué quelque chose de l'autre
27 côté de cet entrepôt, du côté où l'avant des bus, des autocars se
28 trouvaient ?
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1 R. Il y avait simplement des soldats serbes qui nous donnaient l'ordre de
2 sortir le plus vite possible du véhicule pour entrer dans l'entrepôt.
3 Q. Lorsque vous êtes entré dans cet entrepôt, où est-ce que vous êtes
4 allé ?
5 R. Je peux vous montrer où j'étais dans l'entrepôt. Vous voulez que je
6 vous montre ?
7 Q. Non. Indiquez simplement par un -- mettez un X sur le toit de
8 l'entrepôt. Bien sûr, vous n'étiez pas sur le toit, mais comme cela, on
9 aura une idée approximative de l'endroit où vous étiez dans cet entrepôt.
10 R. [Le témoin s'exécute]
11 Q. Bien. Qu'est-ce qu'il y avait, à l'intérieur, quand vous êtes entré ?
12 Est-ce que vous vous souvenez quelque chose que vous auriez remarqué ?
13 R. A l'entrée, juste à l'entrée, au milieu, il y avait une voiture qui
14 était renversée, qui avait été incendiée et il y avait de grands récipients
15 près du mur. Devant nous, à l'entrée même, il y avait une espèce de clôture
16 en fer, mais toute démantelée, ce qui veut dire qu'il y avait une grande
17 ouverture et que ce mur était tout à fait démoli.
18 Q. Mais vous parlez d'une clôture. Est-ce qu'elle se trouvait à
19 l'intérieur de l'entrepôt ?
20 R. Oui, à l'intérieur.
21 Q. Essayez de tracer une ligne pour indiquer l'endroit où se trouvait
22 cette clôture.
23 R. Oui.
24 [Le témoin s'exécute]
25 Q. Je vous remercie. Vous avez parlé d'une voiture. Soyons clairs. Est-ce
26 qu'elle était en feu ? C'était peut-être -- Elle était toujours en train de
27 brûler cette voiture, ou est-ce qu'elle était déjà brûlée ?
28 R. Elle n'était pas en feu en ce moment-là. Il ne restait plus rien
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1 pratiquement.
2 Q. A l'intérieur de l'entrepôt, est-ce qu'il y avait des choses, des
3 objets, des structures ?
4 R. Je ne me souviens pas. Je n'ai rien remarqué de particulier.
5 Q. Est-ce que plus tard vous avez grimpé sur quelque chose ?
6 R. Je vous l'ai dit, il y avait ce récipient, ce conteneur à proximité du
7 mur et c'est ainsi que j'ai pu sauter par la fenêtre. D'abord je suis monté
8 sur ce récipient.
9 Q. Nous allons revenir sur ce point. Lorsque vous êtes entré, vous, les
10 autres personnes qui se trouvaient dans le même véhicule que vous, où sont-
11 elles allées ?
12 R. Bien, dans la même partie de l'entrepôt que moi. Pareil pour les gens
13 qui étaient dans le deuxième car. J'étais parmi les premières personnes à
14 entrer, après moi beaucoup d'autres personnes sont arrivée en courant, tout
15 très vite la partie où je me trouvais était remplie.
16 Q. Est-ce que vous savez si mis à part les personnes qui se trouvaient
17 dans ces deux cars il y a eu d'autres personnes qui sont arrivées dans la
18 partie de l'entrepôt où vous étiez ?
19 R. Oui, plus tard. Mais évidemment je ne savais d'où ces gens venaient
20 puisque j'étais déjà à l'intérieur. Oui, il y en a beaucoup qui sont
21 arrivés en courant jusqu'au moment vraiment c'était tout à fait bondé de
22 monde.
23 Q. Cette arrivée continue d'hommes, de Musulmans, je suppose, cela a duré
24 combien de temps ce processus où vous aviez sans cesse des Musulmans de
25 Bosnie qui arrivaient, je ne sais pas si vous avez une idée ?
26 R. Je ne sais pas exactement, une heure et demie, deux heures, je dirais.
27 Q. La partie qu'on voit ou la partie qui se trouvait entre la clôture et
28 les murs de la partie de l'entrepôt où vous étiez; est-ce qu'elle était
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1 très remplie de monde ou pas ?
2 R. Oui, il y avait tout plein de monde. On était vraiment très serré. On
3 nous a donné l'ordre de nous asseoir. On était vraiment tellement serré
4 qu'on était les uns contre les autres, et c'était tellement bondé de monde
5 qu'on suffoquait. Vraiment, il y avait du monde jusqu'à l'entrée, la
6 première entrée que vous voyez ici.
7 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire à votre avis combien il y avait de
8 Musulmans de Bosnie qui se trouvaient dans cette partie de l'entrepôt où
9 vous étiez ?
10 R. Bien, 2 500, 3 000, je ne sais pas. C'est une estimation que j'ai faite
11 à l'époque.
12 Q. Qu'en est-il des gardes ? Des gardes serbes est-ce que vous en avez vus
13 de l'endroit où vous étiez amassés dans cet entrepôt ?
14 R. Il y en avait plusieurs. De temps à autre ils faisaient des allées et
15 venues. Ils se déplaçaient. Il y a d'abord un civil qui est entré il nous a
16 jetés des cigarettes de marque Malboro. Il a pris un carton de cigarettes
17 et il a jeté des cigarettes et ceux qui ont réussi à attraper une cigarette
18 étaient autorisés à l'allumer. Puis, l'ordre a été donné à ceux qui avaient
19 de l'argent ou des objets de valeur de sortir. On leur a confisqué cet
20 argent. J'avais un peu d'or sur moi on me l'a pris. Même si déjà à Sandici
21 dans le pré on m'avait déjà pris une partie de ce que j'avais sur moi, les
22 derniers objets en or que j'avais bien, je les ai donnés à un homme qui
23 était ici. Beaucoup d'hommes sont sortis ils ont donné ce qu'ils avaient --
24 l'argent qu'ils avaient, l'or, des montres. Tout ceci a été répertorié, ils
25 ont dit qu'ils finiraient par nous restituer ces objets.
26 Q. A part de civil qui vous a donné ces cigarettes, est-ce qu'il y avait
27 tout autour des hommes en uniforme, des soldats ?
28 R. Bien sûr. De temps en temps, ils entraient, ils se déplaçaient, ils
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1 marchaient devant nous. Ils ont fait sortir qui cela leur plaisait. Ils ont
2 fait sortir notamment deux hommes. Un qui, ils ont donné l'ordre de se
3 tenir debout contre le mur. Ce mur-ci, là, je suis entré par la gauche, et
4 eux, ils se sont appuyés contre ce mur.
5 Q. Je vais vous demander d'indiquer par un W pour signifier le terme
6 "wall" en anglais, l'endroit où ces hommes se sont placés contre le mur.
7 R. [Le témoin s'exécute]
8 Q. Merci. Qu'est-ce qu'il s'est passé ensuite ?
9 R. Ils les ont interrogés à propos de villages ou de soldats serbes qui
10 ont été tués. Je n'ai pas entendu les questions posées. Mais cela
11 concernait des villages ou des soldats serbes qui avaient été tués. Ils ne
12 les ont pas interrogés très longtemps, ils leur ont crié dessus, mais ils
13 ne les ont pas frappés. Puis ces hommes ont reçu l'ordre de se rasseoir
14 dans le groupe dont ils faisaient partie.
15 Q. Quels étaient les vêtements portés par le Serbes, en dehors de ce civil
16 dont vous avez déjà parlé ?
17 R. Tous étaient en tenue de camouflage, bigarré. Les uniformes étaient
18 neufs. Il y avait parmi eux un homme qui portait un casque bleu, celui des
19 Nations Unies.
20 Q. Vous parlez de tenue de camouflage, de quelle couleur c'était à peu
21 près ?
22 R. Vert.
23 Q. Bien. Il y a eu ce moment où on a dérobé ces objets de valeur à ces
24 hommes il y a eu aussi le moment où ces deux hommes ont été interrogés, de
25 quoi vous souvenez-vous ensuite ?
26 R. Après, après que l'or a été confisqué, ils nous ont amené de l'eau dans
27 un seau blanc, tout le monde se bousculait, se ruait vers l'endroit où se
28 trouvait l'eau. J'ai peut-être réussi à avoir une gorgée deux fois, les
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1 gens étaient tellement épuisés qu'il y a presque eu des coups-de-poing
2 donnés entre nous parce que tout le monde voulait prendre un peu d'eau.
3 Puis les choses se sont calmées, j'ai vu après un certain temps que les
4 soldats serbes étaient tout à fait agités et en colère. Ils entraient et
5 ils sortaient puis j'ai entendu des coups de feu à l'extérieur. Je ne sais
6 pas d'où venaient ces coups de feu, mais c'était dehors. Ils étaient
7 tellement en colère, tellement furieux que deux d'entre eux sont entrés et
8 qu'ils voulaient tirer sur nous. Celui qui portait ce casque bleu des
9 Nations Unies et un autre qui avait des cheveux longs qui arrivaient
10 jusqu'à l'épaule, des cheveux bouclés et des lunettes de soleil, ces deux
11 hommes avaient chacun un fusil automatique qu'ils ont dirigé sur nous. Il
12 est arrivé alors un troisième soldat, qui les empêchait de tirer sur nous.
13 Ce troisième homme a dit : "Ce n'est pas la faute de ces gens-ci. Ils ne
14 sont pas responsables de rien." Là-dessus, ces trois hommes sont sortis.
15 Les deux ont écouté ce que disait ce troisième homme, ils ont obéi, ils
16 sont sortis.
17 Q. Un instant, s'il vous plaît. Vous dites avoir entendu des coups de feu,
18 mais qu'auparavant, vous avez constaté que les gardes serbes étaient un peu
19 agités, énervés. Qu'est-ce que vous voulez dire par là ?
20 R. A mon avis, ils voulaient tous nous tuer. Je me disais qu'ils allaient
21 commencer à nous tirer dessus pour nous tuer tous. Ce n'est pas ce qu'ils
22 ont fait à ce moment-là. Puis il y a des coups de feu dehors. J'ai entendu
23 des cris, des gémissements. Je ne sais pas d'où cela venait. C'était
24 dehors, mais il y avait des coups de feu tellement nombreux, étaient si
25 intenses qu'on entendait des obus qui tombaient tout autour. Ici là, vous
26 voyez le chemin asphalté, de là, j'ai vu que là qu'il y avait le canon
27 antiaérien qui tirait en direction de la forêt. J'ai entendu le bruit que
28 fait le pointage. Je connais bien tout cela. Il y a aussi des tirs qui
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1 venaient de mitrailleuse antiaérienne. Puis, il y a eu une légère accalmie.
2 Les hommes sont entrés dans l'entrepôt et nous dit : "Voyez ce que vous
3 faites, ce que vos gens faites. Maintenant, nous avons rien qu'un couloir
4 pour qu'ils puissent passer par là et regarder ce qu'ils nous font."
5 Aujourd'hui, je ne sais toujours pas qui était à l'origine de ces
6 tirs. Je n'ai toujours pas compris ce qui s'était passé ce jour-là. Je vous
7 ai dit que les choses s'étaient calmées et qu'on a donné l'ordre à deux
8 Musulmans qui se trouvaient dans l'entrepôt de sortir pour aller chercher
9 leurs blessés. Ils ne sont pas restés longtemps dehors, quelques minutes
10 peut-être, puis ils sont revenus. Puis, je n'ai plus entendu qu'on leur
11 aurait posé des questions. Ils sont simplement entrés, calmement, ils se
12 sont rassis, mais pas près de moi; ils étaient plutôt sur ma gauche. Je
13 n'ai pas pu entendre, je n'ai pas entendu si ces gens ont dit quoique ce
14 soit à propos de ce qui se passait dehors.
15 Q. Très bien. Je souhaite vous poser quelques questions de clarification.
16 Encore une fois, lorsque vous avez dit qu'avant que les tirs ne commencent,
17 les gardes ont commencé à s'agiter. Est-ce que vous pourriez nous décrire
18 que voulez-vous dire par le mot, "agiter" ? Comment le savez-vous que
19 faisaient-ils, que disaient-ils ?
20 R. Ils criaient sur nous. Ils disaient : "Vous voyez, on a laissé vos
21 Musulmans passer tranquillement vers Tuzla, par ce couloir que l'on a
22 ouvert, alors qu'ils n'ont pas respecté cela," soi-disant les Musulmans
23 auraient attaqué l'entrepôt. Ils disaient que les Musulmans tiraient et que
24 eux, bien sûr, ils se défendaient et que c'était la raison pour laquelle il
25 y avait ces tirs, mais je ne sais pas ce qui s'est passé. Je n'ai jamais
26 compris et, encore aujourd'hui, je ne sais pas. Mais simplement à un moment
27 donné, j'ai remarqué qu'ils étaient en colère, et là, je parle des deux
28 premiers soldats qui sont entrés. Ils ont voulu tirer sur nous et l'autre
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1 soldat, il les a empêché.
2 Q. Je souhaite que l'on clarifie les choses suivantes, les soldats, est-ce
3 qu'ils sont devenus agités avant ces tirs ou après que les tirs ont
4 commencé, les tirs dont vous avez parlé ? Est-ce que les soldats sont
5 devenus vexés ou agités avant les tirs que vous avez entendus à
6 l'extérieur ?
7 R. Avant les tirs, bien sûr, ils étaient en colère.
8 Q. Encore une fois, comment saviez-vous qu'ils étaient en colère ?
9 R. J'ai vu, ils sont entrés, ils étaient en colère. Ils grinçaient des
10 dents, ils nous regardaient de manière fâchée. Ils criaient sur nous. J'ai
11 vu qu'ils ont pointé leur fusil vers notre groupe, et je pensais qu'ils
12 allaient tirer sur nous. Mais cet autre soldat, il est entré, il les a
13 empêchés de tirer.
14 Q. Très bien. A ce moment-là, lorsqu'ils sont tombés en colère, lorsqu'ils
15 ont commencé à crier sur vous, est-ce qu'il y a eu un changement autour de
16 vous, par rapport au moment où ils vous donnaient de l'eau ? Est-ce que
17 quelque chose a changé, quelque chose d'important, ou est-ce que leur
18 traitement vis-à-vis de vous est resté plutôt le même ?
19 R. C'était plutôt stable, leur traitement. Ils étaient gentils. Ils nous
20 donnaient des cigarettes. Ils apportaient de l'eau, puis après un certain
21 temps, je ne sais pas au bout de combien de temps, ils ont changé de
22 comportement tout d'un coup, ils sont devenus en colère. Je pensais que
23 quelque chose allait changer, mais je ne savais pas ce qui allait arriver.
24 Je ne sais pas ce qu'ils pensaient eux. Mais, soudainement, ils se sont mis
25 en colère.
26 Q. Très bien. Après qu'ils se sont mis en colère, pour une certaine
27 raison, est-ce qu'à ce moment-là, les tirs ont commencé ?
28 R. Les tirs ont commencé après cela, après cette colère. Donc, les tirs
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1 ont commencé, ont duré pendant une demi-heure peut-être.
2 Q. Est-ce que vous pourriez décrire le calibre des armes que vous avez
3 entendues ou quel type d'armes vous avez entendu ?
4 R. Des armes automatiques 84-millimètres. J'ai vu que les soldats
5 portaient des fusils mitraillettes de 84-millimètres, des fusils
6 automatiques.
7 Q. Comment avez-vous pu voir où que ce soit ?
8 R. Avant ces tirs, j'ai vu cela. Bien sûr, ils ne cessaient d'entrer, de
9 sortir et ils étaient tous armés. J'ai vu qu'ils avaient entre les mains
10 des fusils automatiques de calibre 84-millimètres.
11 Q. Un fusil 84, c'est un fusil mitraillette ?
12 R. Oui, bien sûr. Donc, c'est une arme plus grande et plus lourde qu'un
13 fusil automatique qui tire en rafale, peut utiliser beaucoup de munitions
14 et tirer pendant longtemps. Il est possible de charger jusqu'à 150 balles
15 dans cette arme. Il a son propre chargeur avec la ceinture de munitions et
16 lorsque la personne commence à tirer, cette ceinture passe à travers et
17 dépense toute la munition. Donc, c'est beaucoup plus puissant qu'un fusil
18 automatique ou cette bande de munitions.
19 Q. Lorsque les tirs ont commencé, est-ce que vous avez pu entendre des
20 tirs de fusils automatiques et de ce fusil 84, ou simplement de 84 ?
21 R. Oui, bien sûr. Des fusils automatiques aussi. Les fusils automatiques
22 et les fusils mitraillettes ont pratiquement le même bruit. Le 84 a un
23 bruit un peu différent et j'ai même entendu des tirs de chars, d'armes
24 antiaériennes de 23 millimètres, de Praga et aussi, on pouvait entendre de
25 fortes détonations d'obus et la détonation était tellement puissante que je
26 pouvais les entendre.
27 Q. Vous dites que ceci a duré pendant combien de temps environ ?
28 R. Environ une demi-heure. Je ne sais pas exactement.
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1 Q. Vous avez dit --
2 [L'accusé Nikolic est introduit dans le prétoire]
3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Un instant, Monsieur McCloskey. Pour le
4 compte rendu d'audience, je note que M. Nikolic est désormais présent dans
5 la salle d'audience.
6 M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
7 Q. Vous avez dit que l'un des gardes a fait un commentaire en vous disant
8 : "Voyez ce qui se passe," quelque chose allant dans ce sens. Au cours de
9 cette période, à quel moment est-ce que ce garde a fait ce commentaire à ce
10 groupe ?
11 R. Il l'a dit que, lorsqu'ils ont apporté cet homme blessé, ces deux
12 hommes, les Musulmans qui avaient reçu l'ordre de sortir afin d'apporter
13 cet homme blessé. Ils y sont allés vite. Ils sont vite revenus et là, ils
14 ont commencé à crier sur nous. Ensuite, on a entendu des bruits d'échanges
15 de tirs, de fusils automatiques. Ils ont dit : "Vous voyez. On vous a
16 laissé passer tranquillement, on vous a ouvert le couloir pour vous
17 permettre d'aller tranquillement à Tuzla. Vous, vous ne le voulez pas."
18 Puis, ils ont dit : "Ils nous attaquent. Regardez ce qu'ils nous font."
19 C'est cela que j'ai entendu.
20 Q. Combien de temps après ce bruit fort de tirs est-ce que ces
21 commentaires concernant une attaque musulmane ont été proférés ?
22 R. Tout ceci se passait pendant l'accalmie, lorsque les tirs se calmaient.
23 Cela, c'était au moment où ils ont apporté ce blessé. Je les ai vus tirer,
24 ici, devant. Donc, ici, devant les entrées, je les ai vus tirer. Etant à
25 l'intérieur, je les ai vus ici, en train de tirer des fusils automatiques.
26 Donc, ils tiraient dans notre direction à droite.
27 Q. Est-ce que vous pourriez placer la lettre F à l'endroit où se trouvait
28 le soldat qui tirait, ou la personne qui tirait ?
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1 R. Oui.
2 [Le témoin s'exécute]
3 Q. Avez-vous pu conclure dans quelle direction il tirait ?
4 R. Je l'ai vu de l'intérieur. J'ai vu un soldat, ici. C'est ici qu'il
5 était pendant qu'il tirait et il tirait dans cette direction. Est-ce que je
6 peux mettre une flèche ?
7 Q. Oui, faites-le.
8 R. Il tirait dans cette direction-là.
9 [Le témoin s'exécute]
10 Q. [aucune interprétation]
11 R. [aucune interprétation]
12 Q. Placez -- est-ce que vous pouvez indiquer le bout de la flèche, encore
13 une fois, pour nous permettre de voir ?
14 R. [Le témoin s'exécute]
15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je pense que nous n'avons pas besoin de
16 voir cela, Monsieur McCloskey. Nous devons voir le témoin qui dessine une
17 flèche.
18 M. McCLOSKEY : [interprétation] Je pense que nous avons une flèche
19 maintenant.
20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Merci.
21 M. McCLOSKEY : [interprétation]
22 Q. Très bien. Vous dites, n'est-ce pas, qu'il tirait dans la direction de
23 la forêt ?
24 R. Il tirait vers la droite. Je ne sais pas s'il tirait dans l'air ou
25 ailleurs. Vous savez, les gens étaient pris de panique. Nous, on était tous
26 pris de panique. On était effrayé. Je l'ai vu tirer dans cette direction-
27 là, depuis l'endroit où nous étions.
28 Q. Très bien. Dites-nous : lorsque ces tirs de fusils automatiques ont
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1 éclaté, est-ce que vous vous souvenez si les gardes -- les personnes qui
2 vous gardaient ont fait quelque chose, et si oui, quoi ? Est-ce que vous
3 avez pu voir qui que ce soit à ce moment-là ?
4 R. Oui, bien sûr. J'en ai vu. Ils se déplaçaient devant. Ils entraient à
5 l'intérieur.
6 Q. Avez-vous eu l'impression qu'ils étaient pris de panique, qu'ils
7 réagissaient à ces tirs ? Est-ce qu'ils ont réagi d'une certaine manière ?
8 Est-ce qu'ils étaient pris de panique ?
9 R. J'ai remarqué qu'eux aussi, ils étaient effrayés et pris de panique eux
10 aussi. J'ai remarqué qu'ils étaient tellement confus qu'on ne savait plus
11 qui courrait où et pourquoi. Tout ceci se passait devant nous.
12 Q. Vous nous avez dit qu'ils étaient agités avant le début des tirs. Est-
13 ce que leur comportement a changé, leur agitation ? Est-ce qu'elle a changé
14 après que les tirs ont commencé ?
15 R. Pendant que les tirs ont duré, ils sont tous sortis. Il n'y avait
16 personne à l'intérieur. Ils étaient simplement devant. Bien sûr que leur
17 comportement a changé. Ils étaient en colère.
18 Q. Très bien. Après cette demi-heure, pendant laquelle les tirs ont
19 commencé, que s'est-il passé ensuite, d'après vos souvenirs ?
20 R. Après ces coups de feu, tout s'est calmé. Nous aussi, on était pris de
21 panique. On avait très peur. On ne savait pas ce qui se passait à
22 l'extérieur. Tout ceci s'est calmé et au bout d'un certain temps, ils ont
23 fait irruption à l'intérieur et deux d'entre eux, celui qui portait des
24 lunettes noires et qui avait des cheveux jusqu'aux épaules, des cheveux
25 noirs et bouclés, et l'autre qui portait un casque bleu des Nations Unies
26 et un gilet pare-balles, de même qu'un uniforme de camouflage, eux, ils
27 étaient les premiers à tirer sur nous.
28 D'autres soldats sont entrés derrière eux, cinq à dix, mais ces deux
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1 étaient les premiers. Ce que je viens de décrire, donc les deux premiers,
2 ils ont ouvert le feu sur nous. J'ai vu lorsque le premier a ouvert le feu,
3 celui qui portait des lunettes noires. Immédiatement après, l'autre qui
4 portait un casque bleu a ouvert le feu lui aussi. A ce moment-là, je me
5 suis jeté par terre immédiatement. J'ai compris qu'ils allaient nous tuer
6 tous.
7 Pendant que j'étais par terre, je ne sais plus ce qui se passait. Il y
8 avait beaucoup de bruit, de fumée et tellement de tirs que je ne sais rien.
9 Il y avait sans cesse un bruit et je ne sais plus ce qui se passait. Il y
10 avait des pauses entre-temps et cela a duré jusqu'à la nuit.
11 Q. Cette personne aux cheveux longs qui a commencé à tirer, est-ce que
12 vous pouvez nous le décrire c'était un soldat ou un civil ?
13 R. C'était un soldat. Il portait un uniforme de camouflage, un gilet par
14 balle, des lunettes noires, et un fusil automatique.
15 Q. Très bien. Lorsque ces tirs ont commencé, est-ce qu'ils ont ouvert le
16 feu, et que vous, vous étiez dans l'entrepôt tous; est-ce que vous pouvez
17 nous décrire ce dont vous vous souvenez ? Je ne souhaite pas que l'on en
18 parle pendant longtemps, mais est-ce que vous pouvez nous dire au mieux de
19 vos souvenirs comment les choses se sont déroulées ?
20 R. Oui. J'étais par terre. Dès qu'ils ont ouvert le feu je suis tombé par
21 terre sur mon ventre, et je ne sais pas combien de temps les tirs ont duré.
22 J'étais toujours par terre. Puis, après de temps en temps ils faisaient une
23 petite pause; c'était une accalmie. Plus de tir. Ensuite, j'entendais des
24 cris, des gémissements, des gens qui criaient des noms, je ne sais pas,
25 peut-être de leurs parents ou de leurs proches, des gens qui n'étaient pas
26 encore vivants, des blessés.
27 Ensuite, pendant la nuit, il y avait plusieurs pauses. Je gisais
28 toujours par terre. Ils faisaient une petite pause, ils se reposaient, puis
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1 ensuite ils entraient de nouveau ensuite ils tiraient tant qu'ils le
2 souhaitaient. Ensuite, pendant un certain temps ils ne faisaient que jeter
3 des grenades à main à travers la fenêtre, et d'ailleurs une grenade à main
4 est tombée as trois ou à quatre mètres de moi et m'a blessé. Il s'agissait
5 d'un petit fragment de grenade qui m'a gratiné le dos.
6 Q. Oui. D'accord.
7 Donc, il y avait des pauses, ensuite, ils entraient de nouveau et ils
8 tiraient et jetaient des grenades à main. Pendant combien de temps est-ce
9 que ceci a duré ?
10 R. Ceci a duré toute la nuit, ces tirs, mais je n'étais pas à l'intérieur
11 pendant toute la nuit. Pendant la nuit, j'ai sauté à l'extérieur. Ils ont
12 fait plusieurs pauses pendant la nuit. Après une accalmie -- je dois
13 d'abord dire une chose que j'ai omise d'indiquer, c'est qu'avant qu'ils
14 ouvrent le feu sur nous, il y avait une personne dérangée bien effrayée lui
15 aussi, et il est sorti à l'extérieur en courant et il a été tué devant, et
16 ils ont dit si quelqu'un d'autre essaie de fuir, il va être tué comme
17 celui-ci.
18 Maintenant, je vais reparler de ce qui s'est passé à l'intérieur. Pendant
19 une accalmie, une pause qu'ils faisaient, j'ai réussi à arriver jusqu'au
20 conteneur, en marchant parmi les morts en bas du mur. Deux ou trois fois,
21 je suis allé jusqu'au conteneur et j'ai retourné à l'endroit où j'étais.
22 J'étais couvert de sang, baigné dans le sang. Je le ressentais, il faisait
23 tellement chaud, je gisais par terre, et j'avais l'impression que j'étais
24 allongé sur un véritable feu tellement ce sang était chaud.
25 Je suis arrivé encore une fois jusqu'au conteneur, je l'ai grimpé, et
26 j'ai vu que je pouvais arriver jusqu'à la fenêtre. C'est ce que j'ai dit,
27 j'ai fait, la fenêtre était étroite mais j'ai réussi à passer, et j'ai
28 tombé à l'extérieur, j'ai sauté à l'extérieur.
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1 Lorsque je suis tombé par terre, j'ai entendu de la direction du champ de
2 maïs, comme on voit ici, je pense que c'est un champ de maïs --
3 Q. Est-ce que vous pourriez placer la lettre T à l'endroit où vous avez
4 sauté à l'extérieur ?
5 R. Vous avez dit la lettre C ?
6 Q. Oui. Ce qui signifie le maïs, en anglais "corn."
7 R. [Le témoin s'exécute]
8 Q. Peut-on placer votre pseudonyme ici encore une fois, PW-111, et la date
9 d'aujourd'hui qui est le 7 février.
10 R. La lettre C se trouve ici au-dessus.
11 Q. Oui, je vois où vous avez placé la lettre C sur la photographie. Est-ce
12 que vous pourriez maintenant écrire votre pseudonyme, PW-111 au fond à
13 droite comme vous l'avez fait hier ?
14 R. [Le témoin s'exécute]
15 Q. La lettre W à côté de la lettre P, s'il vous plaît.
16 R. [Le témoin s'exécute]
17 Q. La date, donc, le 7 février 2007.
18 R. [Le témoin s'exécute]
19 Q. Je pense que nous pouvons terminer pour ce qui est de cette
20 photographie.
21 M. McCLOSKEY : [interprétation] Maintenant, montrez la photo suivante, à
22 savoir 1571 sur la liste 65 ter.
23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je ne sais pas, bien sûr, quelle sera
24 votre question suivante, mais j'ai l'impression que lorsque vous lui avez
25 demandé de placer la lettre C à l'endroit approximative où il avait sauté,
26 il a été interrompu. Au moins d'après le transcript, le compte rendu
27 d'audience, il a dit : "Lorsque j'ai sauté, lorsque j'ai touché la terre,
28 j'ai entendu de la direction du champ de maïs, que l'on voit ici --" et
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1 puis, je pense qu'il allait me dire ce qu'il a entendu en provenance du
2 champ de maïs ou qu'est-ce qu'il a vu. Peut-être il pourrait terminer cela.
3 M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Peut-on
4 maintenant montrer la photo suivante qui nous donne une perspective --
5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Pendant que je lisais cela, le Juge
6 Kwon a constaté que la photographie, présentée par le biais du prétoire
7 électronique avec des annotations, a changé. D'accord. Ceci a été
8 sauvegardé. Cela ne pose de problème.
9 Excusez-moi de cette interruption, Monsieur McCloskey, mais peut-être le
10 témoin pourrait continuer son récit à partir du moment que j'ai mentionné.
11 M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci.
12 Q. Comme le Président l'a dit, je vous ai interrompu. Est-ce que vous
13 pouvez terminer votre récit ? Vous nous disiez que vous avez entendu
14 quelque chose lorsque vous êtes sorti de la fenêtre. Terminez votre récit,
15 ensuite, nous allons voir ce que représente cette photo.
16 R. Oui, bien sûr, que je peux. De la direction du champ de maïs, donc,
17 j'ai entendu des cris, c'était une voix qui disait : "En voilà un autre qui
18 a sauté." Je ne savais pas qu'il y avait des gardes autour de ce bâtiment.
19 Je l'avais su, je n'aurais certainement pas osé sauter. Je pensais qu'il
20 n'y avait personne et que je pouvais fuir cet entrepôt -- ce bâtiment,
21 donc, je n'ai pas bougé. Je me suis mis par terre sur mon ventre,
22 j'attendais qu'il me tue. Je pensais que je n'allais pas m'en sortir
23 puisque j'ai entendu la voix de la direction du champ de maïs disant : "En
24 voilà, un autre qui a sauté," je savais que c'était ma fin. Mais je me suis
25 résigné à cela. Je savais que je ne pouvais pas continuer. Je suis resté,
26 gisant par terre au dessous de ces deux ou trois fenêtres - je ne sais pas
27 exactement - ces fenêtres-là. J'ai été allongé par terre, le ventre contre
28 la terre et la tête tournée vers le mur.
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1 Q. Vous avez dit que vous n'étiez pas sûr de quelle des trois fenêtres il
2 s'agissait, mais est-ce que vous pourriez indiquer approximativement la
3 partie où vous pensez que vous étiez au dessous de ces fenêtres ou de l'une
4 de ces fenêtres ?
5 R. Oui, bien sûr, que je peux.
6 [Le témoin s'exécute]
7 Q. Donc, vous avez dessiné une forme ovale autour de ces trois fenêtres.
8 Est-ce que vous vous souvenez de quelle fenêtre vous êtes sorti ?
9 R. Je ne m'en souviens pas. Je ne saurais vous le dire.
10 Q. Très bien. Vous gisiez par terre au-dessus d'un de ces trois fenêtres.
11 C'est ce que vous avez dit, n'est-ce pas ?
12 R. Oui. D'accord, est-ce que vous pouvez décrire à quoi ressemblait le
13 champ de maïs en juillet 1995 ? Ici, nous voyons son aspect en hiver, mais
14 dites-nous s'il vous plaît quelle était la hauteur du maïs ?
15 R. C'était grand, plus grand que moi de taille, environ deux mètres, peut-
16 être plus, je ne sais pas. Donc, c'était certainement plus haut que moi et
17 par endroit, c'était plus bas. Par endroit, cela ne pouvait pas pousser
18 aussi haut. Le maïs n'était pas encore mûr mais les feuilles étaient encore
19 vertes. En bas, il y avait des citrouilles que j'ai écartées, que j'ai pu
20 sentir au-dessus de moi pendant que je rampais à travers le champ de maïs.
21 Q. Bien. Écoutez, laissons cela pour le moment, enfin cette photo. Je
22 pense que nous avons une idée de l'endroit d'où vous êtes sorti, par où
23 vous êtes sorti. Pourriez-vous simplement nous dire et là encore, je sais
24 que vous avez passé un certain temps dans ce champ de maïs, mais pourriez-
25 vous nous décrire brièvement ce qui s'est passé au cours de la nuit pendant
26 que vous étiez dans ce champ de maïs, qu'est-ce que vous faites,
27 brièvement ?
28 R. J'étais là allongé lorsque j'ai entendu cette voix dont j'ai parlé tout
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1 à l'heure. Un soldat a commencé à marcher à travers le champ de maïs, je
2 pouvais l'entendre marcher. Il est passé très près de l'endroit où je me
3 trouvais. Il a braqué une torche, la lumière en ma direction et a tiré une
4 balle à une distance d'environ 2 ou 3 mètres de l'endroit où je me trouvais
5 et j'ai été touché à l'épaule droite. J'ai donc été blessé. Je suis resté
6 là, faisant semblant d'être mort, sans bouger. Il m'a demandé : "T'en veux
7 une autre ?" J'ai gardé le silence en faisant semblant d'être mort. Très
8 probablement, il a dû conclure que j'étais mort et n'a pas à nouveau tiré
9 sur moi.
10 Une séquence vidéo -- son chargeur est tombé. Il n'arrivait pas à le
11 retrouver, donc, il a appelé un autre soldat pour l'aider à le rechercher.
12 Ils ont trouvé le chargeur, et ensuite, ils sont sortis du champ. Je suis
13 resté là allongé dans ce champ de maïs jusqu'au matin.
14 Dans la matinée, à l'aube, au point du jour, comme je n'avais pas du tout
15 bougé, j'étais très courbaturé. Le soleil s'est levé, et comme il faisait
16 un peu froid dans la matinée, j'avais seulement un t-shirt sur moi. Là
17 encore, j'ai entendu quelqu'un qui s'approchait de moi à travers le champ
18 de maïs. Je suis pris d'une attaque de panique, de très grande peur. J'ai
19 continué à rester allongé là. Il y avait des centaines de mouches qui
20 étaient sur moi. J'étais attaqué par ces mouches comme si j'étais un
21 véritable cadavre. Je répandais une odeur terrible de sang.
22 Quelqu'un s'est approché de moi. Je n'ai pas vu qui c'était, très
23 probablement c'était un soldat. Il s'est approché près d'un mètre de moi,
24 et j'ai essayé de respirer le plus lentement possible de façon à ce qu'il
25 ne s'en rend pas compte que je respirais encore; sinon, il aurait tiré sur
26 moi. Il n'a pas vu que je respirais. Il est resté sur place pendant une
27 minute peut-être, il a enlevé une feuille d'un plan de maïs, j'ai pu voir
28 qu'il reniflait comme s'il avait un rhume, puis il est reparti dans le
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1 champ de maïs.
2 Ensuite, dans l'entrepôt, j'ai entendu que quelqu'un criait. C'était
3 un homme qui donnait l'ordre que l'on aide des blessés, s'il y avait des
4 blessés sur place. Il semble que la Croix-Rouge était arrivée et que les
5 blessés étaient censés être transportés à l'hôpital pour être soignés. Ceux
6 qui étaient blessés sont sortis, puis j'ai entendu --
7 Q. Comment savez-vous qu'ils sont sortis ?
8 R. Mais j'ai entendu, je les ai entendus chanter à l'extérieur. Ils sont
9 sortis, ils chantaient tous ensemble parce qu'on leur avait donné l'ordre.
10 Le soldat qui leur a donné de le faire commençait à chanter et ils devaient
11 entonner après lui. C'était une chanson concernant ou un chant concernant
12 Draza Mihajlovic. Un chant de ce genre que je ne peux pas me rappeler
13 maintenant, mais tout concernait était à propos de Draza Mihajlovic. S'ils
14 ne chantaient pas ensemble, ils les arrêtés et recommençaient à
15 entonner le chant, il fallait qu'ils suivent en cœur. Ils ont continuer à
16 le chanter pendant environ une demi-heure, puis, brusquement, j'ai entendu
17 des coups de feu. Ils les ont tous tués. Je n'ai plus entendu chanter après
18 cela.
19 Puis, j'ai vu à ce moment-là qu'ils faisaient démarrer des excavatrices et
20 qu'ils chargeaient ou réunissaient les cadavres. J'ai continué de me
21 trouver gisant sous la fenêtre.
22 Q. Le compte rendu dit que vous avez vu des excavatrices, est-ce que vous
23 avez vu quoi que ce soit alors que vous étiez en train -- vous étiez
24 allongé sur cette fenêtre ?
25 R. Je n'ai pas la chargeuse de l'excavatrice, je l'ai entendu. Je n'étais
26 pas en mesure de voir parce que j'étais allongé là à côté du mur et donc je
27 ne pouvais le voir. Je pouvais simplement -- j'ai simplement pu entendre
28 quand ils l'ont fait démarrer, puis, je pouvais entendre le godet qui
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1 grattait le sol. Je pouvais entendre le bruit que cela faisait. Puis, l'un
2 des soldats a dit : "Celui-ci a l'air d'être encore en vie. Il faut le
3 tuer." Ensuite, j'ai entendu des coups de feu séparés s'ils voyaient que
4 quelqu'un était encore en vie ils tiraient une balle si l'un des Musulmans
5 était encore en vie.
6 Après cela j'ai entendu quelqu'un qui criait qu'il y avait des cadavres
7 autour du bâtiment, et qu'il fallait les ramasser et ensuite une autre
8 personne a dit : "Non, laissons-les là pour le moment et concentrons-nous
9 sur ceux qui sont à l'intérieur." J'ai commencé à ressentir cette panique
10 qu'ils viendraient charger les corps qui se trouvaient autour du bâtiment.
11 J'ai commencé à m'étirer, toujours en position allongée. J'ai commencé à
12 bouger. J'ai pu voir que je réussissais à mouvoir mes bras et mes jambes.
13 J'ai lentement tourné la tête vers ce bâtiment-ci. Il y a un autre
14 bâtiment, qui disait "pharmacie." C'était en lettres rouges. J'ai vu deux
15 hommes y pénétrer. Je ne sais pas si c'étaient des soldats ou des civils,
16 je ne saurais dire. Je n'ai pas eu le temps de remarquer cela.
17 Puis après un bref moment, j'ai rampé dans le champ de maïs vers le centre
18 et j'ai continué à ramper sur environ deux mètres, j'ai traversé le champ
19 de maïs finalement jusqu'à l'extrémité du bâtiment. J'ai traversé, en fait,
20 une rangée de plants de maïs et là j'ai vu deux hommes qui avaient très
21 probablement sauté avant moi. Ils étaient morts, et ils étaient allongés
22 sous ces fenêtres sur la gauche.
23 Puis, je me suis approché d'un cours d'eau, j'ai pu entendre cette rivière
24 qui coulait et je m'en suis rapproché. Le sol était une sorte d'argile, et
25 le maïs ne pouvait pas bien pousser là, donc, le maïs n'était pas de haute
26 taille. J'ai vu deux autres hommes qui avaient reçu une balle dans la tête,
27 qui étaient morts. J'ai rampé en passant par-dessus eux, et je suis entré
28 dans la rivière. Ceci m'a rafraîchi un peu, j'ai un peu bu de l'eau de la
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1 rivière. Je l'ai traversée, et ensuite, je suis allé dans le champ de maïs
2 qui se trouvait sur l'autre rive, et ensuite, je suis entré dans la forêt -
3 - ou plutôt, la colline.
4 Q. Bien. Pourriez-vous nous dire quel type de blessures, encore dites-
5 nous, simplement, vous avez déjà décrit un peu cela, mais quel type de
6 blessures avez-vous subies à ce moment-là pour ce qui est du temps que vous
7 avez passé dans l'entrepôt et les blessures qui ont fini par être
8 soignées ?
9 R. J'ai oublié de dire que lorsque j'étais dans l'entrepôt j'avais reçu
10 une balle dans la jambe droite près du genou. Quand j'ai sauté à
11 l'extérieur, lorsque je me trouvais gisant sur le sol, ce soldat m'a tiré
12 dessus, donc me blessant à l'épaule droite, comme je vous l'ai dit.
13 Q. Je pense qu'il y a assez longtemps vous nous avez donné un dossier
14 médical concernant les soins que vous avez fini par recevoir pour ces
15 blessure.
16 R. Oui.
17 Q. Est-ce que vous avez toujours dit exactement, au médecin et à ceux qui
18 vous posaient des questions sur -- est-ce que vous leur avez dit de quelle
19 manière vous avez été blessé ?
20 R. Bien sûr.
21 Q. Est-ce que vous leur avez toujours dit que -- la vérité vraie, que ceci
22 faisait partie d'une exécution ?
23 R. Je leur ai dit la vérité absolue. Bien sûr.
24 Q. Je voudrais que l'on aille un petit peu -- on passe un petit peu.
25 Serait-il juste de dire -- commençons par terminer -- si vous voulez bien,
26 pour commencer parapher cette photographie et l'a datée, nous pourrons à ce
27 moment-là l'envoyer.
28 R. [Le témoin s'exécute]
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1 Q. Bien.
2 M. McCLOSKEY : [interprétation] Maintenant nous en avons fini avec cette
3 photo. Je vous remercie, Madame l'Huissière.
4 Vous rappelez-vous avoir dit à un enquêteur à un moment donné que vous
5 n'aviez pas toujours dit ou parlé aux médecins de l'exécution parce que
6 vous n'étiez pas sûr que vous obtiendriez une pension complète si vous vous
7 étiez trouvé pris dans une exécution, quelque chose de ce genre ?
8 R. Je ne me rappelle pas très bien cela. Ce n'est pas que j'ai dit à
9 chacun des médecins que j'ai vus tout ce qui s'était passé. Je leur ai
10 simplement dit de façon assez brève ce qui s'était passé. Je n'ai pas eu le
11 temps de répéter cette histoire à chacun des médecins que j'ai vus. Il
12 n'était pas nécessaire de le faire.
13 Q. Bien.
14 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] La question est un peu plus précise que
15 cela, un peu plus spécifique. En ce qui concerne l'un quelconque de ces
16 médecins qui vous ont soigné, vous rappelez-vous n'avoir jamais menti à
17 l'un ou à l'autre en particulier à ce sujet ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.
19 M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
20 Q. Bien. Alors, maintenant nous allons accélérer un peu, si possible.
21 Serait-il exact de dire que vous avez pu retourner dans les bois et trouver
22 d'autres personnes et vous frayez un chemin en direction de Zepa la plupart
23 du temps pendant la nuit en arrivant dans le secteur de Zepa en gros sept
24 ou huit jours après ce matin où vous aviez rampé en sortant du champ de
25 maïs ?
26 R. Après que je sois sorti de l'entrepôt - c'était le
27 14 juillet 1995 - je suis entré dans les bois. Au cours de cette journée-
28 là, je n'avais pas de montre sur moi, donc, je ne savais pas quelle heure
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1 il était, mais il était possible que cela ait été l'après-midi. J'étais
2 seul dans les bois. Ce jour-là je me suis assis sous un arbre et il a
3 commencé à faire froid, il a commencé à pleuvoir et même à grêler, mais pas
4 pendant très longtemps.
5 Puis le temps s'est calmé, j'ai continué mon itinéraire, mon trajet. J'ai
6 emprunté la route asphaltée pour m'orienter, et je suis retourné à la même
7 route que celle sur lesquelles était venue la colonne depuis Srebrenica
8 jusqu'à l'endroit où j'ai vu que les personnes avaient été tuées par des
9 obus, des Musulmans. J'ai trouvé d'autres vêtements. Je me suis changé et
10 j'ai trouvé des aliments, des vivres. Il y avait là trois hommes et je
11 connaissais l'un d'eux. C'était mon voisin à Srebrenica. Il habitait tout
12 près. Son nom était Djeri -- ou plutôt, c'était son surnom. Je ne
13 connaissais pas les deux autres hommes.
14 Il commençait déjà à faire nuit. Nous étions au crépuscule. Tous trois,
15 ainsi que moi, avons cherché un peu dans les sacs, sacs à dos. Il y avait
16 un grand nombre de morts, des centaines de morts, des gens qui avaient été
17 tués par des obus, par des armes automatiques. Nous avons réuni des vivres.
18 J'ai trouvé d'autres vêtements. Je me suis changé. Tous trois m'ont
19 beaucoup aidé. Ils ont bandé mes plaies et puis nous sommes partis de là
20 pour aller passer la nuit quelque part.
21 L'un des trois avait un frère qui était là et qui était blessé. Il
22 avait été touché par les éclats d'obus à la jambe droite. Il ne pouvait pas
23 marcher et il restait là, gisant au milieu des cadavres. Nous sommes restés
24 là pendant deux jours et à l'occasion, trois fois par jour, nous allions le
25 retrouver pour lui apporter à boire et à manger, pour lui parler. Nous
26 n'osions pas rester longtemps auprès de lui et donc nous le quittions
27 ensuite.
28 Le troisième jour, nous avons décidé de le laisser là. Nous n'avons
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1 pas osé lui dire. Nous lui avons laissé un pistolet et une grenade à mains,
2 de façon à ce qu'il puisse se tuer dans le cas où des soldats serbes le
3 trouveraient, afin qu'ils ne le torturent pas et qu'il puisse se suicider,
4 mais nous l'avons laissé et nous ne lui avons pas dit où nous allions.
5 C'était une des choses les plus dures pour moi, le fait que nous ayons dû
6 laisser cet homme en vie alors que nous ne le pouvions pas l'aider.
7 Nous sommes repartis en direction de Srebrenica, sommes retournés à
8 Srebrenica.
9 Q. Je comprends que ceci ait été une partie très difficile de ce récit. Je
10 n'avais pas l'intention de l'escamoter, mais si nous pouvions essayer de
11 parler, par questions et réponses, si vous êtes d'accord, est-ce qu'on
12 pourrait brièvement décrire -- je sais à quel point ce trajet a été
13 difficile pour arriver à Zepa, Monsieur le Témoin. Si vous pouvez nous
14 donner un compte rendu très bref de la façon dont vous avez réussi à
15 traverser, bien, disons, tout d'abord : pourquoi avez-vous décidé d'aller
16 vers Zepa ?
17 R. Alors que nous étions en train de repartir en direction de Srebrenica -
18 - dans la zone de Srebrenica, au cours de la journée -- alors que nous
19 allions dans cette direction, nous avons rencontré un groupe de personnes
20 qui comprenait mon oncle. Je l'ai donc vu sur cette route et ils s'étaient
21 également cachés là pendant un certain
22 -- pendant quelques jours et ils n'avaient pas pu passer à cause des obus.
23 Je suis resté deux jours auprès de lui à cause des tirs d'obus. Ces tirs
24 étaient très intenses dans ce secteur que nous étions censés traverser.
25 Pendant une accalmie, lorsque le pilonnage a cessé, nous avons réussi
26 à traverser ce terrain -- ce territoire. Nous sommes parvenus à Srebrenica
27 -- secteur de Srebrenica. Nous sommes arrivés à Jaglici à nouveau. Je suis
28 passé près d'un point de contrôle de la FORPRONU, ou plutôt qui avait été,
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1 où il y avait eu un point de contrôle de la FORPRONU précédemment. Il n'y
2 avait plus personne à ce moment-là et il faisait déjà nuit.
3 Q. Excusez-moi, Monsieur le Témoin. Je sais que cela n'est pas facile,
4 mais il faut que vous essayiez de répondre à mes questions du mieux que
5 vous le pouvez. Nous souhaiterions entendre, bien entendu, ce qui s'est
6 passé, mais il faut que vous essayiez de répondre à mes questions. Où avez-
7 vous décidé d'aller ? Quelle direction avez-vous décidé de prendre à partir
8 de là ?
9 R. Dans le groupe que nous avons rencontré là, où il y avait peut-être une
10 douzaine de personnes, nous avons appris par eux que Zepa n'était pas
11 encore tombée, que Zepa était encore sous le contrôle musulman -- que le
12 secteur était encore contrôler par les Musulmans. Donc, nous avons décidé
13 d'aller à Zepa et nous nous sommes mis en route dans cette direction.
14 Q. Bien. Pourriez-vous nous dire -- je sais que nous avons beaucoup de
15 documents et des documents importants qu'il faut que nous examinions, que
16 nous parcourions, donc, si vous pouvez essayer de nous dire de votre mieux
17 comment s'est passé ce trajet, mais nous ne pouvons pas entrer dans tous
18 les détails, excusez-moi. Vous êtes d'accord ?
19 R. Oui. Nous avons traversé des villages musulmans : Buce, Suceska. Nous
20 avons traversé cette région, Podravanje. Nous avons traversé Podravanje
21 pendant la nuit. Nous avons traversé Podravanje et nous sommes entrés dans
22 une grande forêt. Un autre groupe était passé par là avant nous et nous les
23 avons trouvés endormis dans la forêt, près d'un ravin appelé Crni Potok,
24 qui se trouve près de Zepa. Nos les avons donc retrouvés et nous sommes
25 restés là pendant un moment. Ils sont restés là à dormir et nous avons
26 poursuivi notre voyage. C'était juste avant l'aube.
27 Nous sommes arrivés aux gorges de Crni Potok et nous avons mangé.
28 Puis, nous sommes descendus dans ce défilé. Ceci nous a pris environ deux
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1 heures pour descendre tout au fond. Nous sommes arrivés à la rivière. Nous
2 avons trouvé beaucoup de personnes qui étaient là, qui se rafraîchissaient
3 à la rivière et qui se reposaient. Nous nous sommes reposés un peu et nous
4 avons poursuivi notre itinéraire en direction de Zepa. Nous sommes arrivés
5 à Vukoljin Stan, où il y avait des civils qui nous attendaient, des civils
6 et des soldats. Nous avons -- nous sommes arrivés là où ils faisaient la
7 cuisine à Vukoljin Stan. Nous sommes arrivés là et nous nous sommes
8 reposés. Il y avait un grand nombre de personnes qui étaient arrivés là
9 avant nous. C'était -- il y avait aussi des personnes qui venaient de
10 Srebrenica.
11 Q. De quel côté étaient les soldats que vous avez rencontrés ?
12 R. C'était des Musulmans.
13 Q. Est-ce que vous pourriez nous donner en gros une idée du temps, combien
14 de jours il vous a fallu pour traverser cette contrée, arriver à cet
15 endroit ?
16 R. Je peux vous donner une estimation en gros. Je me suis mis en route le
17 14 à partir de Kravica et du côté du 17, environ, je suis arrivé à Zepa. Je
18 ne suis pas absolument certain que la date soit exacte. Ce n'est qu'une
19 estimation en gros.
20 Q. Bien. Lorsque vous êtes arrivé et que vous avez trouvé ces soldats et
21 qu'on vous a donné à manger, que s'est-il passé ensuite ?
22 R. J'ai passé là toute la journée, jusqu'au soir. La nuit est tombée. Un
23 autre soldat qui se trouvait là et qui avait une voiture, un Fiat jaune, et
24 qui était de Zepa a reçu pour ordre de m'emmener avec un autre homme qui
25 était blessé au bras droit à l'hôpital de Zepa, dans la soirée. C'est ce
26 qu'il a fait.
27 Nous sommes arrivés pendant la nuit à l'hôpital de Zepa. Nous y avons passé
28 un certain temps. Il y avait un grand nombre de personnes blessées à
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1 l'hôpital. Puis, on a reçu l'ordre d'évacuer l'hôpital parce que comme ils
2 nous ont dit, ils étaient inquiets, ils craignaient que le lendemain matin
3 les soldats serbes ne prennent l'hôpital pour cible et tirent sur l'hôpital
4 avec des obus. Donc, au cours de la nuit, ils nous ont fait monter sur un
5 camion et nous ont emmenés à un village qui était proche et on trouvait des
6 locaux pour nous héberger dans différentes maisons.
7 Il y avait deux ou trois hommes avec moi, cet ami qui était blessé au bras,
8 puis un autre homme dont la gorge a été coupée. Nous avons passé quelques
9 jours là, cinq ou sept jours approximativement dans cette maison. On a
10 refait nos pansements, on nous a donné des piqûres, on nous a donné à
11 manger. Tout ceci a été fait convenable et régulièrement.
12 Q. Bien. L'heure est venue de suspendre l'audience. Je pense que c'est un
13 bon moment pour la suspension. Si je peux vous interrompre.
14 M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, l'heure est venue de
15 suspendre la séance.
16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, je sais. Je suis simplement en
17 train de noter ceci dans mes notes.
18 Nous allons donc maintenant suspendre la séance pendant 25 minutes à partir
19 de maintenant. Je vous remercie.
20 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.
21 --- L'audience est reprise à 11 heures 00.
22 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Monsieur McCloskey.
23 M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président.
24 Q. Avant la pause, vous nous avez dit que vous avez été soigné dans des
25 maisons pendant cinq à sept jours qui étaient près de l'hôpital de Zepa.
26 Pourriez-vous nous dire où se trouve l'hôpital de Zepa ?
27 R. L'hôpital est dans le centre de Zepa.
28 Q. Très bien. Après ce traitement qui a duré cinq à sept jours; qu'avez-
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1 vous fait ?
2 R. J'ai décidé avec mon collègue qui était avec moi dans la même chambre
3 d'aller à la montagne là où se trouvait l'ABiH, avec des civils, il y avait
4 des femmes et des enfants, d'autres gens. Car nous avions peur de la
5 matinée nous sommes partis pendant la nuit et nous avions peur du risque de
6 forts pilonnages au matin, et nous pensions que nous courions le risque de
7 ne pas pouvoir nous retirer. Avant cela, ce jour-là, avant d'aller à la
8 montagne, mon médecin qui me traitait m'a dit qu'il fallait évacuer des
9 personnes grièvement blessées à Tuzla. J'en faisais partie de même que mon
10 collègue, mais nous n'avons pas pu attendre l'aube. Nous avons décidé
11 d'aller à la montagne et nous sommes partis.
12 Q. Très bien. A l'aube lorsque vous êtes allé à la montagne; que s'est-il
13 passé là-bas ?
14 R. Pendant un certain temps nous étions à la montagne et nous avons décidé
15 d'aller à Vukoljin Stan.
16 Q. Pourriez-vous nous dire de quelle montagne il s'agissait et où était-
17 elle par rapport au centre-ville de Zepa ?
18 R. C'est au-dessus de Zepa. Je ne sais pas comment elle s'appelait. C'est
19 au-dessus de Zepa. Nous avons voyagé pendant longtemps en montant la
20 colline.
21 Q. Très bien. Ensuite, je vous ai interrompu, et vous avez décidé d'aller
22 ailleurs.
23 R. De la montagne, nous sommes allés à Vukoljin Stan à la cuisine, à
24 l'endroit où nous avions été accueillis en arrivant de Srebrenica. C'est là
25 que j'ai rencontré de nouveau mon oncle, de même que bien d'autres
26 personnes, donc, je suis resté pendant une brève période de temps avec eux.
27 Il y avait mon collègue à Krusev Dol. Il avait une cousine là-bas qui avait
28 épousé quelqu'un là-bas. Il m'a dit : "Qu'on pouvait aller le rendre visite
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1 plutôt lui rendre visite." Nous avons traversé des champs. Nous nous sommes
2 renseignés pour savoir où était ce village. On nous l'a dit. On l'a trouvé
3 et on est resté assis chez sa cousine pendant longtemps. On y a déjeuné.
4 C'est à ce moment-là que nous avons appris que les premiers blessés avaient
5 déjà quitté Zepa ce matin-là, qu'ils avaient été évacués. Nous avons décidé
6 de retourner à Zepa dès que possible. Nous l'avons fait. Nous avons voyagé
7 pendant longtemps. Nous sommes arrivés à Zepa.
8 Q. Pourquoi est-ce que la veille vous aviez décidé de ne pas être évacué
9 alors que le lendemain vous avez décidé d'y retourner -- d'essayer d'y
10 retourner à Zepa afin d'être évacué ? Est-ce que vous savez ce qui vous a
11 fait changé d'avis ?
12 R. Bien, j'ai considéré que ceci n'était pas sûr à 100 % en raison du
13 pilonnage le matin aussi, car tous les jours il a attaqué Zepa. Zepa était
14 déjà en train de tomber donc il y avait des attaques toute la journée. Puis
15 après on pouvait soit rester dans cette maison mais nous avions peur et
16 nous avons décidé d'aller à la montagne avant la matinée.
17 Q. Ensuite, vous avez entendu parler de l'évacuation et où êtes-vous allé
18 à ce moment-là ?
19 R. A ce moment-là, nous sommes allés au centre-ville de Zepa dans
20 l'enceinte de la FORPRONU.
21 Q. Quelle force différente de soldats y avez-vous -- autour du centre-
22 ville de Zepa lorsque vous y êtes entré à pied, si vous en avez eu vus ?
23 R. Tout d'abord, les blessés étaient les premiers à partir c'est ce qu'on
24 a appris lorsqu'on est arrivé à Zepa et à Krusev Dol aussi, bien sûr. Nous
25 en avons entendu parler c'est pour cela que nous sommes allés à Zepa. Nous
26 sommes entrés tout d'abord dans l'enceinte de la FORPRONU et les forces de
27 la FORPRONU étaient des Ukrainiens. Ils nous ont laissés entrer. Ensuite,
28 des Français sont arrivés, des médecins. Ils nous ont examinés. Ils ont
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1 pansé nos plaies. Il y avait un soldat médecin serbe parmi eux, qui portait
2 un uniforme multicolore, uniforme de camouflage, il a pris des notes aussi
3 et enregistrait des faits concernant nos blessures. Lui aussi, il nous a
4 examinés avec cet autre médecin. Au cours de la journée, de temps en temps,
5 on quittait l'enceinte de la FORPRONU. C'était permis. Dans le centre-
6 ville, il y avait un puits d'eau, avec plusieurs tuyaux et c'est là qu'on
7 est allé boire de l'eau fraîche et après avoir bu, on rentrait à l'enceinte
8 de la FORPRONU. Ce jour-là, on était examiné par le médecin.
9 Q. Excusez-moi de vous interrompre, mais lorsque vous êtes arrivé à Zepa,
10 ce jour-là, pour aller à l'enceinte, est-ce que vous avez vu des soldats
11 serbes ?
12 R. Oui, bien sûr. Les soldats serbes étaient entrés à Zepa et à ce moment-
13 là, l'évacuation des femmes, des enfants et des personnes âgées était en
14 cours. Donc, ils évacuaient de nombreuses personnes et puis il y en avait
15 d'autres qui arrivaient des villages aux alentours. Des civils ne cessaient
16 d'arriver et ils les évacuaient vers Kladanj.
17 Q. Avez-vous des véhicules dans lesquels les gens étaient évacués ?
18 R. Oui, je les ai vus. Il y avait des autocars et des camions. Il y avait
19 beaucoup beaucoup d'autocars et de camions.
20 Q. Lorsque vous avez marché au centre-ville, à la base ukrainienne, est-ce
21 que des soldats serbes vous ont harcelés ? Est-ce qu'ils vous ont arrêtés ?
22 Est-ce qu'il y avait un point de contrôle ou quoi que ce soit de
23 semblable ?
24 R. Non, pas du tout. Nous sommes immédiatement entrés dans l'enceinte de
25 la FORPRONU. C'est là qu'ils nous ont examinés. Pendant cet examen, c'est
26 ainsi que les choses se sont déroulées toute la journée. Il faisait très
27 chaud et mon collègue et moi, on s'est assis dans l'autocar avec d'autres
28 blessés et des civils, pour aller vers Kladanj, pour y être évacués. Nous
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1 sommes entrés dans le car. Nous nous sommes assis et de nouveau, ce soldat
2 médecin serbe est entré, celui qui nous avait examiné dans l'enceinte de la
3 FORPRONU. Il a laissé partir mon collègue, et moi, il m'a dit d'enlever ma
4 veste. Je l'ai fait. Il a vu que ma blessure avait été pansée, et bien sûr
5 qu'il l'avait vue, car il avait examiné toutes mes blessures dans
6 l'enceinte de la FORPRONU, avec les docteurs français. Il m'a dit : "Toi,
7 tu ne peux pas partir. Sors de l'autocar." J'ai trouvé cela bizarre. Je me
8 demandais pourquoi je ne pouvais pas partir. Il m'a dit : "Toi, tu vas être
9 transféré en hélicoptère. Un hélicoptère doit arriver et tu vas être
10 transféré en toute sécurité."
11 Je regrettais fortement le fait de savoir que mon collègue était
12 parti, alors que je suis resté. Je suis sorti de l'autocar et j'ai regagné
13 l'enceinte de la FORPRONU. Je portais sur moi un pantalon multicolore.
14 Donc, c'était la partie inférieure. C'était un pantalon de camouflage que
15 j'ai trouvé dans la forêt au-dessus de Kravica, lorsque je suis sorti de
16 l'entrepôt. Je suppose qu'il m'a fait revenir à cause de ce pantalon de
17 camouflage, à mon avis. Peut-être si je portais un pantalon civil, peut-
18 être il n'aurait pas agi ainsi, je ne sais pas. La nuit est tombée. Je suis
19 reparti avec des civils, des blessés, de nouveau dans la même maison où
20 j'avais été soigné, et c'est là que j'ai passé la nuit. J'ai enlevé ce
21 pantalon de camouflage car j'avais supposé que c'était la raison pour
22 laquelle il m'avait retiré du car. Je ne l'ai pas jeté, mais j'ai trouvé le
23 dessous d'un survêtement que j'ai enfilé, et le lendemain matin, je suis
24 retourné à la base de la FORPRONU.
25 De nouveau, des Français étaient là. Après cela, j'ai vu Avdo Palo.
26 Lui aussi, il est venu dans l'enceinte de la FORPRONU. Ce jour-là, je me
27 suis retrouvé non pas vraiment dans l'enceinte de la FORPRONU, mais peut-
28 être à 100, 200 mètres de là, près de l'eau. Une quatre-quatre verte
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1 militaire est arrivée.
2 Tolimir en est sorti - c'est ainsi qu'il s'est présenté, je ne le
3 connaissais pas avant - avec son escorte de soldats armés jusqu'aux dents,
4 avec des mitraillettes et des fusils automatiques. Il négociait avec Avdo
5 Palo et demandait, Tolimir, à Avdo Palo d'ordonner à ses soldats, de rendre
6 les armes, et il leur disait qu'ils allaient être transférés en toute
7 sécurité à Tuzla, en hélicoptère, soi-disant des hélicoptères devaient
8 arriver. Avdo ne l'a pas accepté. Ils criaient l'un sur l'autre. Je n'ai
9 pas retenu tout ce qui se disait.
10 Un certain temps s'est écoulé, après quoi je me suis éloigné, ils
11 sont restés là. Je suis retourné à la base de la FORPRONU.
12 Q. Permettez-moi de vous interrompre, Monsieur le Témoin. Vous avez dit
13 que vous connaissiez une personne répondant au nom de Avdo Palo. A
14 l'époque, quel était le poste occupé par ce monsieur, pour autant que vous
15 le sachiez ?
16 R. C'était un commandant. C'était le commandant de l'ABiH à Zepa.
17 Q. Après ce jour-là, vous l'avez vu parler à Tolimir; est-ce que vous,
18 vous avez eu l'occasion de parler à Avdo ?
19 R. Oui. Je lui ai parlé à la base de la FORPRONU.
20 Q. Quand lui avez-vous parlé ?
21 R. Mais c'était à la base de la FORPRONU.
22 Q. Mais c'était quand ? Est-ce que c'était avant ou après l'avoir vu
23 parler à Tolimir ?
24 R. Après.
25 Q. Bien. Est-ce que cela s'est passé le même jour ou un jour différent ?
26 R. Non, le même jour. La Croix-Rouge est venue après, à la base de la
27 FORPRONU, où se trouvaient tous les blessés. Ils ont enregistré nos noms,
28 je parle ici des gens de la Croix-Rouge, et la Croix-Rouge nous a donné des
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1 cartes. Sur chacune des cartes figurait notre -- le nom d'entre nous. Ils
2 nous ont dits qu'on était prisonnier de guerre. Je me suis opposé à cela.
3 J'ai dit qu'on ne pouvait pas être appelé prisonnier de guerre. Est-ce
4 qu'on avait été capturé au cours d'une action de combat ? Est-ce que vous
5 pouvez voir que nous sommes blessés, que nous portons de vêtements civils ?
6 Parce que si on était en bon état, on ne serait pas là. On serait dans les
7 montagnes. Peut-être avec l'armée. Il y avait aussi des soldats serbes. Ils
8 nous ont maltraités. Ils nous ont dits qu'il s'était trouvé un temps où
9 nous avions été des Serbes, qu'on venait des Serbes. Nous avons ignoré ce
10 qu'ils disaient. La FORPRONU nous a donné de l'eau, des rations
11 alimentaires. Nous avons mangé. Il y avait aussi des Français.
12 L'évacuation des civils se poursuivait. Avdo Palo nous a donné l'ordre de
13 déchirer les cartes que nous avait donnés la Croix-Rouge. Je n'ai pas voulu
14 le faire il me semblait que c'était un peu bizarre qu'il me demande.
15 Certains, cependant ont déchiré leur carte mais moi pas. Je l'ai gardée.
16 J'ai passé deux nuits de plus à l'extérieur de la base de la FORPRONU
17 dans une petite maison où nous étions 12 blessés. Les négociations se
18 poursuivaient toujours. Avdo Palo négociait avec eux et il nous a fait
19 savoir qu'il était toujours impossible et encore impossible de procéder à
20 l'évacuation. Je ne sais pas pourquoi. Je ne lui ai pas demandé sur quoi
21 portaient ces négociations.
22 Q. La première fois que vous avez parlé à Avdo Palo, c'est sous ce nom que
23 vous le connaissez; que vous lui avez-vous dit à propos de votre situation
24 pour autant que vous en ayez parlé ?
25 R. Il était assis sur une chaise. Je me suis assis devant lui en croisant
26 les jambes. Nous avons parlé de façon normale. Je lui ai dit en quelques
27 mots d'où je venais et ce qui s'était passé à Srebrenica, comment j'avais
28 réussi à m'échapper de Kravica de -- comment j'avais pu échapper
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1 l'exécution. Je lui ai dit que beaucoup de gens avaient été tués ou
2 capturés dans les bois. Il a répondu que d'autres personnes lui avaient
3 déjà dit cela. J'étais assis avec lui.
4 Je l'ai vu -- la première fois que je l'ai vu, je ne lui ai pas
5 parlé. La deuxième fois que je me suis assis avec lui à la base de la
6 FORPRONU - si je me souviens bien, cela s'est passé le dernier jour, après
7 le deuxième jour que j'ai passé là - je lui ai parlé. Je lui ai demandé
8 pourquoi il était là, pourquoi il ne s'échappait de là pour aller dans la
9 montagne avec l'armée. Je lui ai dit : "Ici, vous allez être arrêté par les
10 soldats serbes."
11 Il m'a répondu ceci : "Je ne veux pas partir avant que tous
12 jusqu'au dernier civil, jusqu'au dernier blessé ne soit évacué d'ici.
13 Qu'ils m'arrêtent. Qu'ils me tuent."
14 Q. Vous avez dit que cela s'était passé le dernier jour. A partir du
15 moment où le médecin serbe vous a fait descendre du car; il s'est passé
16 combien de jour jusqu'au moment de votre évacuation ?
17 R. Deux jours de plus, si je me souviens bien.
18 Q. Bien. La discussion, la conversation que vous avez eue avec Avdo Palo
19 après que le médecin vous ait fait descendre du car et avant que vous ne
20 soyez évacué; est-ce exact ?
21 R. Oui, c'est cela. Ce jour-là - je m'en souviens plus si c'était le
22 premier ou le deuxième jour - après que la Croix-Rouge nous a distribué ces
23 cartes, il nous a donnés l'ordre de les déchirer. Il n'y croyait pas. Il
24 l'a dit : "Vous n'êtes pas des prisonniers. Comment est-ce que vous
25 pourriez être des prisonniers ?" Il s'était crié : "Comment est-ce que vous
26 pouvez les traiter en tant que prisonniers ? Ces gens n'ont pas été arrêtés
27 ou quoi que ce soit."
28 Q. Est-ce que vous vous souvenez de la date à laquelle vous vous êtes
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1 inscrit, où vous avez été enregistré par la Croix-Rouge ?
2 R. Oui, je m'en souviens. Cela s'est passé le 26 juillet 1995.
3 Q. Est-ce que vous avez fourni un document de la Croix-Rouge aux autorités
4 peu de temps après ?
5 R. Oui.
6 Q. Comment se fait-il -- dans quelles circonstances avez-vous fini par
7 quitter cette région ?
8 R. Le dernier jour quand j'étais assis devant Avdo, quand je lui parlais,
9 que je lui ai dit qu'il devrait s'enfuir dans la montagne parce que, sinon,
10 il allait être arrêté ou tué, et je vous l'ai déjà dit, il m'a répondu
11 qu'il attendrait pour ce faire que le dernier civil et le dernier blessé
12 ait quitté Zepa, qu'il refusait de partir avant. C'est ce qui s'est passé.
13 Les Français ont réussi à emporter les blessés plus graves dans les camions
14 qu'ils avaient. J'ai demandé à un de ces Français de m'embarquer dans un de
15 ces véhicules transporteurs de troupes utilisés par les Français pour
16 pouvoir sortir. Il parlait le yougoslave et il m'a dit qu'il n'osait pas
17 faire ce que je lui demandais parce qu'ils allaient bien tôt franchir un
18 poste de contrôle tenu par les Serbes et que là les véhicules allaient être
19 inspectés et qu'on allait m'en faire sortir. C'est pour cela qu'il n'osait
20 pas faire ce que je lui demandais, il en était d'ailleurs désolé.
21 Je suis, une fois de plus, retourné à la base de la FORPRONU, où j'ai
22 continué d'attendre. Le dernier jour, il y avait une foule importante de
23 personnes qui attendaient à être évacuées, des femmes, des enfants, des
24 personnes âgées, dans l'après-midi nous sommes partis. J'étais dans le
25 dernier car qui est parti de Zepa, et il y avait 12 blessés, les personnes
26 âgées, des femmes, des enfants. Le bus était rempli.
27 Dans les collines environnantes, j'ai vu beaucoup de soldats serbes. J'en
28 ai vu beaucoup dans le centre. Ils nous ont parlés, mais ils n'ont touché à
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1 personne, ils n'ont crié sur personne. Ils se sont contentés de nous parler
2 de façon ordinaire. Ils ont dit : "Bon, vous nous posez pas de problème
3 vous blessés, mais qu'est-ce qu'on va faire de ceux qui sont dans les
4 montagnes ?" Je leur ai répondu : "Bien, allez les chercher dans les
5 montagnes." Ils ont ri quand je leur ai dit cela.
6 Le moment venu, ils nous ont donnés l'ordre à nous qui étions blessés -
7 nous étions 12 - de quitter la base de la FORPRONU. Nous sommes montés dans
8 ce véhicule. Avdo Palo est resté à la base de la FORPRONU après notre
9 départ, et nous avons été emmenés vers Kladanj. Le bus a été arrêté, une
10 fois de plus, à Boksanica, qui n'est pas très loin de Zepa, c'est dans la
11 direction de Rogatica.
12 Nous sommes restés là longtemps. Nous sommes descendus des cars. C'était
13 encore -- il ne faisait pas encore la nuit. Il faisait encore clair. Un
14 officier est monté dans mon car. Je ne le connaissais pas. Il avait une
15 escorte. Il était accompagné notamment d'un homme de cette escorte. Un
16 homme en uniforme de camouflage qui se tenait tout près de lui. Il avait un
17 fusil que je pense de fabrication américaine qu'on appelle un fusil
18 argentin. Il a demandé d'où on venait, et quand mon tour est venu, j'ai dit
19 Srebrenica. Il était étonné que je me fusse venu de si loin, et je lui ai
20 répondu que j'étais venu chercher de la nourriture à Zepa, que je voulais
21 ramener cette nourriture pour nourrir ma famille à Srebrenica parce que les
22 gens avaient faim à Srebrenica. C'est ainsi. J'ai appris qu'avait commencé
23 l'offensive -- l'attaque de Srebrenica et qu'il m'était impossible de
24 rentrer à Srebrenica. C'est pour cela que je devais rester à Zepa.
25 Il m'a dit : "D'accord." Ensuite, il a continué à poser des questions
26 aux passagers de l'autocar, leur demandant d'où ces gens étaient. Ils ont
27 répondu. Puis, je l'ai entendu demander à nous tous si on savait qu'il
28 était certain d'entre nous le connaissait. Moi pas. C'est sûr que les gens
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1 de Zepa le connaissaient. Ils savaient que c'était le commandant de
2 Rogatica.
3 Il nous a demandés si on savait où se trouvait Avdo Palo. Nous avons
4 répondu que non. Il a dit qu'ils l'avaient arrêté et tué. Ils l'avaient
5 d'abord arrêté à la base de la FORPRONU. Nous sommes restés silencieux,
6 nous n'avons rien dit. Il est descendu du car et il est parti.
7 Nous avions passé déjà un certain temps à cet endroit. La nuit est tombée.
8 Il faisait déjà noir quand j'ai entendu un hélicoptère atterrir. J'ai
9 entendu dire, par certains, que Ratko Mladic était arrivé, mais je ne l'ai
10 pas vu. Je ne ai pas vu non plus l'hélicoptère. Il était très loin de
11 l'endroit où je me trouvais. Tout ce que j'ai entendu dire, c'est que
12 l'hélicoptère avait atterri. Après un certain temps, peu de temps,
13 l'hélicoptère est reparti. Ensuite, on a donné l'ordre au convoi de se
14 mettre en branle et le convoi s'est remis en marche.
15 Ils nous ont conduits vers Kladanj. Nous sommes arrivés. A ce moment-
16 là, l'aube pointait déjà et nous étions en route. Donc, il a commencé à
17 faire jour. A un moment donné, ils nous ont arrêté à un certain endroit.
18 Ils nous ont laissés descendre du car au cas où on aurait besoin de faire
19 un besoin naturel. Cela n'a pas duré longtemps, puis on est remonté dans
20 les véhicules et on a donné l'ordre au convoi de se remettre en route, ce
21 que le convoi a fait. Nous sommes arrivés à un endroit qui s'appelle Luke,
22 non loin de Kladanj. La colonne s'est arrêtée une fois de plus à cet
23 endroit.
24 L'escorte qui se trouvait dans mon car se composait, en fait, d'un
25 soldat serbe de la police militaire. Il avait un ceinturon blanc. Il y
26 avait aussi les Français de la FORPRONU, des Ukrainiens. Ils escortaient
27 tout le convoi.
28 Un certain temps s'est écoulé. Nous avons attendu un peu plus
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1 longtemps. Je ne savais pas ce qui se passait. On attendait, tout
2 simplement. Tolimir a fait irruption. Il a jeté un coup d'œil dans le car
3 et il est ressorti. Il était accompagné d'une escorte composée de quelques
4 soldats. Un de ses soldats a pénétré dans le car. Il avait en mains un
5 papier. Il a commencé à lire. Il avait les noms de nous tous, qui étions
6 blessés. Il a lu chacun de ses noms. Il a dit telle ou telle personne. Il
7 a, à la lecture de nos noms respectifs, nous nous sommes levés et nous
8 sommes descendus du car.
9 A côté du véhicule se trouvait un autre car et nous avons reçu
10 l'ordre de monter dans ce car qui attendait à côté du nôtre, mais ce car
11 était tourné dans la direction inverse. Ceci a éveillé mes soupçons. Nous
12 nous sommes assis dans cet autre car. Dans l'autre car, où j'avais été
13 auparavant, ils étaient encore en train de sélectionner des hommes âgés qui
14 étaient en bon état physique. Alors, on est tous monté dans ce deuxième
15 car. Ils sont partis. Le car s'est mis en route. On ne savait pas où on
16 allait. Ceux qui étaient de Zepa connaissaient bien la région. Moi, pas. On
17 est arrivé à Rogatica. Là, j'ai entendu des gens qui disaient : "Voilà. On
18 est arrivé à Rogatica." A Rogatica, nous nous sommes arrêtés à l'entrepôt.
19 Q. Je vous remercie de faire ce récit et je sais que vous avez déjà
20 témoigné dans un autre procès. Je voudrais maintenant que nous ayons
21 davantage un entretien, un dialogue, par des questions et des réponses.
22 Cette présente Chambre de première instance a une procédure quelque peu
23 différente de celle que vous avez connue dans un autre procès. Lorsque vous
24 étiez à Luke, est-ce qu'il y a des gens qui étaient à Luke et qui sont
25 partis à Rogatica ? Est-ce qu'il y a des gens qui sont restés à Luke ?
26 R. Mais c'est normal. Il y avait un convoi de femmes et d'enfants. Nous,
27 nous sommes montés dans un car qui nous a emmené à Rogatica, mais les
28 autres, ils sont restés là, à attendre sans doute qu'ils sont partis, mais
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1 je ne sais pas ce qui leur ait arrivé après.
2 Q. Est-ce que vous avez été emmené dans une prison à Rogatica ?
3 R. Oui.
4 Q. Est-ce que vous avez été là pendant -- vous y avez passé six mois
5 environ, en subissant des mauvais traitements. Est-ce que vous avez fini
6 par être relâché le 19 janvier 1996 ?
7 R. Oui.
8 Q. Je sais que c'est une version très abrégée de ce que vous avez vécu,
9 mais vous voyez, ceci ne concerne pas la période couverte par l'acte
10 d'accusation dans ce procès. C'est pour cela que j'ai écourté notre
11 entretien. Je vous remercie.
12 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Monsieur McCloksey.
13 Vous allez commencer, Maître Lazarevic ?
14 M. LAZAREVIC : [interprétation] Oui.
15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Poursuivez.
16 Contre-interrogatoire par M. Lazarevic :
17 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.
18 R. Bonjour.
19 Q. Comme mon confrère le Procureur vous l'a dit un peu plus tôt, ce
20 système est un peu différent de celui, le système juridique dont je viens,
21 nous venons, vous et moi. Il est basé sur des questions et des réponses, à
22 la différence des autres juridictions où vous avez déjà déposé plutôt.
23 Je voudrais vous poser d'autres questions. Puisque vous-même et nous-même
24 nous comprenons tous les deux très bien, de façon à ce qu'il n'y ait pas de
25 chevauchements pour aider les interprètes, je vous demanderais de faire une
26 petite pause avant de répondre à mes questions.
27 Je voudrais commencer ce contre-interrogatoire en établissant un certain
28 nombre de faits qui ont à voir avec un certain nombre de choses que vous
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1 avez déclarées jusqu'à présent, dans les organes de Bosnie-Herzégovine et
2 ainsi qu'au Tribunal international. Je vais commencer chronologiquement
3 avec vos déclarations, juste pour nous assurer que nous avons bien toutes
4 vos déclaration, toutes les déclarations que vous avez faites jusqu'à
5 présent.
6 Sur la base des documents que nous avons ici, votre première
7 déclaration a été faite le 2 février 1996. Vous avez fait cette déclaration
8 à l'inspecteur de poste de sécurité publique de Lukavac. C'est la première
9 fois que vous avez parlé à un fonctionnaire public, n'est-ce pas ?
10 R. Oui, mais je ne me rappelle pas les dates, pour vous dire la vérité. Je
11 ne sais pas exactement quand j'ai fait mes déclarations.
12 Q. Bien. Si ceci peut vous aider, nous avons tous ces déclarations, donc,
13 il n'est pas nécessaire. Si c'était nécessaire, on vous donnerait, à ce
14 moment-là, le texte d'une déclaration, on vous fournirait un exemplaire.
15 Vous pourriez vérifier que vous l'avez bien faite cette déclaration et que
16 vous l'avez signée.
17 R. Pas de problème.
18 Q. A l'exception de cette première déclaration -- ou plutôt, en plus de
19 cette première déclaration, une autre a été faite le 16 février 1996, et
20 cela c'est la déclaration que vous avez faite à l'agent chargé d'enquêter
21 et de recueillir des documents à Tuzla.
22 R. Quelle date ?
23 Q. Probablement le 16 février 1996, cela devrait être.
24 R. C'est possible. Je ne me rappelle pas des dates.
25 Q. Toujours d'après nos documents, à un moment donné en octobre, novembre
26 et décembre 1998, vous avez rencontré M. Jean-René Ruez, un enquêteur pour
27 le compte du bureau du Procureur. Vous lui avez parlé à cette époque-là.
28 C'était en gros en octobre à décembre 1998; est-ce exact ?
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1 R. Je ne me souviens pas. Je lui ai parlé, mais je ne me rappelle pas la
2 période.
3 Q. Bien. J'avais simplement besoin que vous me confirmiez que vous aviez,
4 effectivement, rencontré M. Ruez et vous avez effectivement fait une
5 déclaration qu'il a recueillie.
6 R. Oui.
7 Q. Maintenant, il y a un autre point que je voudrais clarifier avec vous
8 concernant ces déclarations. Elles portent différentes dates, en pratique
9 il y a trois déclarations ici. Un a été faite après des entretiens qui ont
10 duré en gros trois jours, et puis, il y a d'autres déclarations. Lorsque
11 vous avez parlé à M. Ruez, vous avez aussi fait une déclaration qui n'a pas
12 été signée, qui est demeurée non signée. En ce qui concerne cette
13 déclaration-là, vous avez dit que l'un de vos amis qui était soit un
14 inspecteur ou qui était sur le point de devenir inspecteur avait recueilli
15 cette déclaration que vous faisiez, qu'en fait fondamentalement il vous
16 préparait pour que vous puissiez faire cette déclaration, et qu'il vous
17 expliquait comment il fallait que vous fassiez cette déclaration et que
18 plus tard vous avez fait cette déclaration à M. Ruez ?
19 R. Je ne me rappelle pas cela, mais je me rappelle avoir fait une
20 déclaration à cet ami.
21 Q. Bien. C'est tout ce que je voulais clarifier, à savoir que vous avez,
22 effectivement, fait cette déclaration. Parce que cette déclaration nous a
23 été communiquée par le bureau du Procureur, donc vous ne niez pas qu'il y a
24 eu cette déclaration que vous avez faite à votre ami qui était un
25 inspecteur en matière de crime et délit ?
26 R. Mais je dois mentionner que ce n'était pas une déclaration détaillée.
27 Je ne suis pas entré dans tous les détails.
28 Q. Bien. Mais vous savez, je comprends pleinement qu'est-ce que vous nous
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1 avez dit au cours de ces trois heures et demie ne peut pas entrer dans une
2 page et demie, mais ce que vous avez dit à cet inspecteur était vrai ?
3 R. Oui, ce serait probablement -- c'était vrai. Je ne me rappelle pas les
4 dates et il se peut que je me sois trompé sur certains chiffres parce que
5 j'ai fait ces déclarations avant cela et après cela.
6 Q. Oui, nous y viendrons.
7 M. LAZAREVIC : [interprétation] Est-ce que nous pourrions très brièvement
8 aller en audience à huis clos partiel ?
9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Allons en audience à huis clos partiel
10 pour un moment.
11 Nous y sommes, Maître Lazarevic.
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5 [Audience publique]
6 M. LAZAREVIC : [interprétation]
7 Q. Témoin, je vous ai déjà posé une question analogue, mais pour éclairer
8 les choses davantage. Lorsque vous avez fait vos déclarations, vous avez
9 toujours dit toute la vérité à toutes les personnes à qui vous avez parlé,
10 n'est-ce pas ?
11 R. Oui.
12 Q. Autre chose. Personne n'a exercé sur vous des pressions pour que vous
13 donniez telle ou telle version ou de modifier ou de changer quelque chose
14 dans vos déclarations ou vous amenez à omettre délibérément quelque chose.
15 Rien de ce genre n'a eu lieu, n'est-ce pas ?
16 R. Rien.
17 Q. Je vous remercie.
18 R. Merci aussi.
19 Q. Je voudrais maintenant que nous commencions avec la déclaration que
20 vous avez faite à M. Ruez, enquêteur du bureau du Procureur. Cette
21 déclaration commence au moment où vous dites : "J'ai déjà fait une
22 déclaration à l'AID et je vais maintenant vous donner certains détails
23 complémentaires. Il se peut j'ai oublié ou omis dans ma déclaration
24 précédente."
25 Est-ce que vous vous rappelez avoir dit ceci à M. Ruez et que c'était
26 essentiellement un développement de votre déclaration antérieure, faite à
27 l'AID ?
28 R. Oui. Dans mes déclarations précédentes, je n'ai pas fourni tous les
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1 détails parce qu'il aurait fallu beaucoup de temps pour cela. Plus tard,
2 j'ai relu ma déclaration, ma première déclaration, et j'ai fourni des
3 détails complémentaires.
4 Q. Je vous remercie beaucoup. Pendant que vous vous prépariez pour faire
5 une déposition ici, est-ce que M. McCloskey vous a montré toutes les
6 déclarations mentionnées jusqu'à présent ? Est-ce que vous avez eu
7 l'occasion de les voir toutes ?
8 R. Oui.
9 Q. Vous avez certains commentaires à faire et certaines corrections à
10 apporter concernant la déclaration faite à M. Ruez, notamment que certaines
11 des choses que vous lui avez dites n'étaient pas pleinement exactes et vous
12 les avez énumérées. Vous avez énuméré ces faits; est-ce exact ?
13 R. Oui. Il n'y avait pas beaucoup d'erreurs, mais il y avait quelques
14 erreurs de moindre importance, de dactylographie ou de traductions. Ce sont
15 des erreurs de caractère mineur que j'ai corrigé.
16 Q. Très bien. En plus de ces corrections que vous avez fait remarquer au
17 cours de votre récolement, il n'y a pas eu de corrections importantes
18 supplémentaires que vous ayez voulu apporter en ce qui concerne votre
19 déclaration précédente ?
20 R. Non.
21 Q. Je vous remercie beaucoup. Je souhaiterais maintenant en arriver à
22 l'essentiel de votre déposition. Au cours de votre déposition hier, vous
23 avez dit que vous étiez parti du village de Jaglici avec une colonne allant
24 dans la direction de Tuzla. Ce village de Jaglici, il se trouve tout à fait
25 aux abords de l'enclave de Srebrenica et c'est là que se trouvait le point
26 de contrôle de la FORPRONU, n'est-ce pas ?
27 R. Oui.
28 Q. Dès que vous avez passé le point de contrôle de la FORPRONU, vous et
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1 les autres hommes de la colonne, vous vous êtes trouvé dans un territoire
2 qui était sous le contrôle de l'armée de la Republika Srpska depuis 1993,
3 n'est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 Q. C'était à l'extérieur des limites de l'enclave de Srebrenica tel
6 qu'elle était définie avant la chute en 1995, ce territoire où vous vous
7 trouviez vous-même ?
8 R. Oui.
9 Q. Hier, vous avez dit au bureau du Procureur que d'après vos souvenirs,
10 vous vous êtes mis en route le 20 juillet -- pardon, le 12 juillet dans
11 l'après-midi, avec les autres hommes. Est-ce que c'est une date précise,
12 d'après vos souvenirs ?
13 R. Je suis parti de Srebrenica le 11. Je suis arrivé le matin du 12, à
14 l'aube, à Jaglici. Dans l'après-midi du 12, en compagnie des autres hommes
15 de la colonne, je suis parti vers Tuzla, en passant par les bois.
16 Q. Merci. Lors du déplacement des gens, on sait qu'en général, il y a eu
17 les femmes, les enfants, les personnes âgées qui sont parties du côté de
18 Potocari. Les hommes sont passés par les bois pour aller à Tuzla. C'est
19 comme cela que cela s'est passé. On le sait de façon générale. Mais vous,
20 est-ce que vous savez que, par exemple, il y a plusieurs blessés qui, le 12
21 et le 13, ont essayé de pénétrer dans la base de la FORPRONU à Potocari,
22 mais que les membres du Bataillon néerlandais les en avaient empêchés. Est-
23 ce que vous étiez en courant ?
24 R. Non. Je n'étais pas à Potocari et je ne savais pas ce qui s'y passait.
25 Tout ce que je sais, c'est que les femmes, les enfants, les personnes âgées
26 étaient épuisées et se dirigeaient vers la base de la FORPRONU à Potocari.
27 Mais je ne sais pas ce qui s'est passé encore ce jour-là, parce que je suis
28 passé par les bois pour aller à Jaglici.
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1 Q. Fort bien. Si vous ne savez pas, pas de problème. N'hésitez pas, si
2 vous n'êtes pas au courant, à nous le dire. Ceci nous permettra d'écourter
3 considérablement ce contre-interrogatoire. Hier, vous avez répondu à une
4 question posée par M. McCloskey. Vous lui avez dit que vous apparteniez à
5 l'ABiH; est-ce exact ?
6 R. Oui.
7 Q. Mais à part vous, est-ce qu'il y avait d'autres membres de l'ABiH qui
8 faisaient partie de la colonne qui allait à Jaglici ? Il n'y avait pas que
9 vous. Il y avait des hommes en âge de combattre, de votre âge ?
10 R. Oui.
11 Q. J'ai lu votre déclaration préalable. J'y ai trouvé des renseignements
12 disant que vous, vous n'aviez pas d'armes, que jamais vous n'avez reçu
13 d'armes, mais que c'est seulement lorsque vous alliez sur la ligne de front
14 qu'il vous a été -- vous êtes allé sur la ligne de front, que vous avez pu
15 prendre le soldat qu'avait utilisé un soldat avant vous, donc avant la
16 relève et que c'est comme cela que cela se passait, qu'on se passait --
17 qu'on se relayaient les fusils.
18 R. Oui.
19 Q. La colonne qui est allée de Jaglici à Tuzla, il y avait beaucoup de
20 gens qui avaient des armes, des fusils de chasse et d'autres armes, n'est-
21 ce pas ?
22 R. Oui.
23 Q. Poursuivons l'examen de ce sujet. Vous avez dit que vous étiez membre
24 de la 272e Brigade, qui faisait partie de la
25 28e Division; est-ce exact ?
26 R. Oui.
27 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] J'ai vu que vous acquiesciez du chef,
28 mais vous savez que les interprètes ont besoin de vous entendre dire oui ou
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1 non.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que oui. Oui, oui, j'ai dit oui.
3 Peut-être que les interprètes ne m'ont pas entendus.
4 M. LAZAREVIC : [interprétation] Oui. Le témoin s'est prononcé, mais
5 malheureusement, il y a eu un certain chevauchement.
6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. N'allez pas trop vite.
7 M. LAZAREVIC : [interprétation] Je voudrais apporter une seule correction
8 au compte rendu d'audience, page 50, ligne 9. On parle de la 272e Brigade.
9 En fait, c'est la 282e Brigade, ce qui a été confirmé par le témoin.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. C'était la 282e.
11 M. LAZAREVIC : [interprétation]
12 Q. Le commandant de la 282e, c'était Ibro Dudic, qui était à l'époque
13 commandant, n'est-ce pas ?
14 R. Je ne sais pas. Je ne connais pas son grade. Ibro Dudic, oui, c'était
15 mon commandant.
16 Q. Je vais vous poser quelques-unes -- quelques questions supplémentaires
17 à ce propos. Vous étiez membre de la 282e Brigade. Une précision : est-ce
18 que vous étiez un soldat ordinaire ou est-ce que vous avez eu des fonctions
19 de commandement, à commencer, disons, par le fait que -- bon, je vous
20 demande d'abord si vous étiez un simple soldat, puis nous verrons si vous
21 avez été, par exemple, caporal ou officier de la première classe. Est-ce
22 que vous étiez gradé ?
23 R. Non, non. J'étais un simple soldat.
24 Q. Dans la 282e Brigade, il y avait des unités plus petites; les
25 connaissez-vous ? Ou vous, vous faisiez partie de quelle unité subordonnée
26 qui était inscrite dans la 282e ?
27 R. Ecoutez, j'ai oublié beaucoup de choses. Je ne me souviens pas.
28 Q. Nous pourrons peut-être préciser ceci à l'aide de certains documents.
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1 Je demande votre aide. Pourriez-vous nous dire ce qu'on entend par
2 certaines abréviations ? Mais avant de vous montrer ce document, je vous
3 demande ceci. Si j'ai bien compris ce que vous avez déclaré, vous avez fait
4 votre service dans la JNA, mais dans l'artillerie antiaérienne; c'est
5 cela ?
6 R. Oui.
7 M. LAZAREVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense qu'il
8 faudrait passer à huis clos partiel, puisque le nom du témoin est mentionné
9 dans le document que je veux lui montrer.
10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. Passons à huis clos partiel.
11 Nous sommes à huis clos partiel.
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11 [Audience publique]
12 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous sommes désormais en audience
13 publique.
14 M. LAZAREVIC : [interprétation] Je vous remercie.
15 Q. Nous en avons terminé de l'examen de ce document. Vous avez apporté
16 toute l'aide que vous pouviez fournir.
17 Maintenant, parlons de la percée de la colonne de Tuzla vers Jaglici.
18 Cette colonne, elle est partie vers Ravni Buljim; c'est exact ?
19 R. Oui.
20 Q. Dans votre déposition, la déposition que vous avez faite dans le procès
21 Krstic ici au Tribunal, et là, je peux dire à l'Accusation quelle est la
22 page, la ligne précise du compte rendu du procès Krstic. Si je me souviens
23 bien de cette déposition, voici ce que vous avez dit : "-- avec
24 l'uniforme."
25 L'INTERPRÈTE : Il y a un chevauchement; "avec l'uniforme" c'est tout ce que
26 les interprètes ont entendu.
27 M. LAZAREVIC : [interprétation] Excusez-moi. J'ai futé une fois de plus.
28 Q. "Jamais je n'ai endossé d'uniforme, jamais je n'ai reçu
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1 d'uniforme."
2 R. C'est exact. Jamais cela n'est arrivé. J'aimerais je n'ai reçu
3 d'uniforme.
4 Q. Dans ce procès Krstic, peu de temps après, vous avez dit la chose
5 suivante, au moment où vous parliez d'armes, des personnes se trouvant dans
6 la colonne, des personnes armées dans la colonne.
7 L'INTERPRÈTE : Même problème.
8 M. LAZAREVIC : [interprétation] Je vais recommencer, parce que le début de
9 la phrase n'a pas été entendu.
10 Q. "Ceux qui avaient des armes, les avaient jetées dans les bois. Nous
11 n'avons pas osé nous rendre munis d'armes."
12 De toute façon, vous n'avez pas eu d'armes de toute façon. Mais ici,
13 nous parlons de ceux qui se trouvaient dans les colonnes, dans la colonne
14 et qu'eux qui avaient des armes qui étaient armés au moment où ils se sont
15 rendus. Est-ce que vous maintenez ce que vous avez dit dans le procès
16 Krstic, à savoir que ces gens ont jeté leur arme dans les bois avant de se
17 rendre ?
18 R. Oui, bien sûr.
19 Q. Si ces hommes ont jeté leur arme, c'est parce qu'ils ne voulaient pas
20 que les soldats serbes découvrent qu'il y avait en fait dans cette colonne
21 des soldats de l'ABiH; est-ce que bien exact ?
22 R. Oui.
23 Q. Bien entendu, ces hommes voulaient se faire passer pour des civils au
24 moment où ils allaient se rendre ?
25 R. Sans doute que oui. Même s'ils savaient qu'il y avait des hommes qui
26 avaient des armes, tous n'étaient pas armés, mais il y en avait qui
27 l'était.
28 Q. Merci beaucoup. Si vous le voulez bien, je vais montrer un autre
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1 document -- ou plutôt, revenir à cette partie de votre déposition qui était
2 très rapide dans le cadre de l'interrogatoire mené par M. McCloskey.
3 Lorsque vous essayez de faire une sortie, avant de vous rendre, vous
4 dites qu'il y avait eu un échange de coup de feu. Des tirs étaient partis
5 de la colonne et l'autre était parti du côté des "Chetniks," comme vous les
6 avez appelés; est-ce que vous avez une idée approximative de l'endroit où
7 c'est fait cet échange de coups de feu entre la colonne et les Chetniks ?
8 R. En fait, on est tombé dans une embuscade, il y a eu plus d'une seule
9 embuscade, les gens sont repoussés ou sont chassés. Puis tout cela se
10 calme, les gens reviennent dans la colonne, et puis, on continue.
11 Q. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Il y a beaucoup de témoins qui
12 ont dit être partis comme vous dans cette colonne qu'il y avait eu des
13 attaques menées contre cette colonne, qui s'était un peu désintégrée,
14 démantelée, puis s'était reconstituée. Lorsqu'il y a eu cet échange de tir,
15 si j'ai bien compris votre déclaration, cela a dû se passer le 13, à
16 l'aube; est-ce que cela s'est passé peu de temps après votre départ à
17 l'aube, le 13 ?
18 R. Non, cela s'est passé avant. C'était pendant la nuit. Je ne sais pas
19 exactement à quelle heure de la nuit il y a eu cet échange, mais c'était
20 pendant la nuit. Nous sommes tombés dans une embuscade près de Kravica.
21 C'était à proximité de l'endroit où j'étais venu sur la route asphaltée
22 pour me rendre avec les autres. C'est là que l'embuscade a été tendue. Il y
23 a eu beaucoup de tués et beaucoup de blessés qui ont été laissés sur place.
24 Il y a eu des coups de feu, des grenades à main ont été lancées. On a tiré
25 depuis la route asphaltée. Ils ont utilisé des canons antiaériens en
26 direction des bois.
27 Q. Mais vous savez pourquoi je vous pose toutes ces questions, n'est-ce
28 pas ?
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1 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Attendez, Maître Lazarevic, nous allons
2 délibérer sur le siège.
3 [La Chambre de première instance se concerte]
4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur McCloskey et Maître Lazarevic,
5 nous estimons que la dernière partie, que nous venons d'entendre dans le
6 contre-interrogatoire de Me Lazarevic au fond, porte sur des événements sur
7 lesquels il y a déjà un accord entre les parties, à savoir qu'il y avait
8 une colonne qui comptait en partie des Musulmans armés et qu'il y a eu des
9 échanges de tir; est-ce exact, Monsieur McCloskey ou pas ?
10 M. McCLOSKEY : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Président. Le
11 témoin a ajouté qu'il y a eu des centaines de morts dans cette zone.
12 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Lazarevic, partez du principe
13 que ceci est accepté par l'Accusation et passez à des éléments qui sont
14 plus importants pour votre client.
15 M. LAZAREVIC : [interprétation] Oui, je vais le faire en temps utile. En
16 toute honnêteté, Monsieur le Président, je ne suis pas tout à fait sûr de
17 l'accord qu'a accepté l'Accusation. Nous sommes en train de préparer
18 certains faits convenus, acceptés. Ces discussions se poursuivent depuis
19 pas mal de temps, et effectivement, nous allons proposer certains faits à
20 l'Accusation concertés entre les équipes de la Défense, et à ce moment-là,
21 si c'est accepté, on ne discutera plus de ce sujet.
22 Mais de là, à savoir si on est d'accord pour dire que dès le début c'était
23 une colonne militaire, est-ce que c'était un objectif militaire légitime,
24 ce sont des éléments s'ils sont acceptés par l'Accusation alors cela veut
25 dire qu'effectivement, ces éléments seront convenus --
26 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Avez-vous un commentaire, Monsieur
27 McCloskey ?
28 M. McCLOSKEY : [interprétation] Je suis prêt en discuter. Je préfèrerais de
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1 ne pas en discuter en présence du témoin. Je peux vous dire que ce n'est
2 pas un des sujets évoqués dans l'acte d'accusation, les objets de l'acte
3 d'accusation, c'est clair. Je crois que j'ai déjà apporté mon accord
4 informel, officieux à beaucoup de ces éléments, mais je pense qu'il n'est
5 pas sage de donner trop de détail en présence du témoin.
6 M. LAZAREVIC : [interprétation] Je me satisfais de -- je me déclare
7 satisfait de ces explications, mais de toute façon, j'allais passer à un
8 autre sujet.
9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. Faites-le.
10 M. LAZAREVIC : [interprétation]
11 Q. Monsieur le Témoin, vous avez essayé d'effectuer cette sortie à partir
12 de Jaglici. J'ai trouvé ces éléments d'information dans la déclaration que
13 vous avez faite à Sarajevo. Vous aviez sur vous votre passeport ainsi que
14 votre carte d'identité.
15 R. J'avais bien mon passeport. Je ne me souviens pas si j'avais aussi ma
16 carte d'identité.
17 Q. En tout état de cause, vous avez jeté la carte d'identité que vous
18 aviez -- quel que soit le document que vous aviez sur vous, vous l'avez
19 jetée quand vous étiez dans la forêt.
20 R. Oui.
21 Q. Est-ce que vous avez vu s'il y avait d'autres personnes faisant partie
22 de la colonne qui s'étaient débarrassées de leurs cartes d'identité avant
23 de décider d'aller se rendre et de descendre vers la route ?
24 R. Non, je n'ai pas vu cela.
25 Q. Merci beaucoup. Faisons la synthèse. Si je vous disais maintenant que
26 vous étiez membre de l'ABiH, mais que lorsque vous vous êtes rendu, vous
27 n'aviez pas votre uniforme, vous n'aviez pas de carte d'identité, pas plus
28 que vous n'aviez d'arme; serait-ce exact ?
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1 R. Oui.
2 Q. Au tant de choses qui ont été faites pour éviter d'être reconnu --
3 identifié en tant que soldat de l'ABiH; c'est bien cela, n'est-ce pas ?
4 R. Non, non, ce n'est pas de cela que j'avais peur. Bien sûr qu'une fois
5 que je suis arrivé sur la route asphaltée, qu'on m'a posé la question ou
6 plutôt si on m'avait posé la question -- demander mon identité nom et
7 prénom, je l'aurais dit.
8 Q. Expliquez-nous, s'il vous plaît, pourquoi vous avez jeté votre document
9 ou vos documents d'identité si vous étiez prêt à révéler votre identité, à
10 donner votre nom ?
11 R. Franchement, je ne sais pas. J'ai jeté ma carte d'identité pour n'avoir
12 rien sur moi. Je ne voulais pas avoir de document quel qu'il soit sur moi.
13 Q. Bien. Parlons de ce qui s'est passé après que vous vous soyez rendu
14 lorsque vous êtes allé sur la route asphaltée lorsque vous êtes arrivé dans
15 ce pré. Vous avez fourni une déclaration au bureau du Procureur le 3
16 décembre, dans laquelle vous dites qu'il y avait plusieurs blessés des
17 hommes qui ont été emmenés près des maisons proches, qui se trouvaient à
18 une certaine distance de l'endroit, où vous, vous étiez assis, et que si
19 cela s'était passé, c'est parce qu'il fallait éloigner les blessés du
20 soleil parce qu'il faisait chaud ce jour-là. Vous avez dit la même chose
21 pratiquement hier, n'est-ce pas ?
22 R. Oui.
23 Q. Page 18 du compte rendu de Sarajevo voici ce que vous dites, vous dites
24 que le fait d'avoir déplacé les blessés qui étaient dans le pré pour les
25 emmener dans cette maison que ceci avait fait à la demande des prisonniers.
26 Vous, pas vous personnellement, mais que d'autres personnes qui avaient été
27 capturées, vous aviez demandé aux soldats serbes que soient déplacés les
28 blessés pour qu'ils ne soient pas au soleil, ils ont accepté.
Page 7044
1 R. Non, ce n'est pas exact. Je dois vous dire ceci : les soldats serbes
2 ont vu que les blessés perdaient connaissance, s'évanouissaient. Il y a des
3 gens de mon groupe qui ont dû sans cesse aller chercher de l'eau non loin
4 de là pour essayer de rafraîchir un peu les blessés. Les soldats serbes ont
5 donc eux-mêmes pris l'initiative de déplacer ces soldats pour les emmener
6 dans une maison à l'ombre.
7 Q. Je ne nie pas que ceci se soit passé. Ce qui m'intéresse, c'est
8 simplement de savoir si c'était vous-même qui aviez pris l'initiative de
9 faire cela, vous et les prisonniers, ou si c'était eux ?
10 R. Non. C'est eux qui ont décidé de le faire.
11 Q. Lorsque vous étiez dans ce pré, est-ce que par hasard vous auriez s'il
12 y avait des femmes qui s'occupaient des blessés et qui leur portaient
13 secours, qui les aidaient ?
14 R. Non. Je n'en ai pas vues.
15 Q. Fort bien. Dans le cadre de votre déposition, hier, vous avez dit que
16 les femmes, les gamines qui avaient moins de 18 ans et qui s'étaient
17 trouvées dans ce pré à Sandici avaient été autorisées à monter dans des
18 cars pour aller à Tuzla. Quiconque avait moins de 18 ans, avait-il été dit,
19 pouvait sortir du rang et partir. Vous vous souvenez de ce que vous avez
20 déclaré hier ?
21 R. Oui.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez dit quelque chose,
23 Maître Lazarevic ?
24 M. LAZAREVIC : [interprétation] J'ai demandé qu'on passe à huis clos
25 partiel, le temps de poser une seule question.
26 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Passons à huis clos partiel.
27 [Audience à huis clos partiel]
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12 [Audience publique]
13 M. LAZAREVIC : [interprétation]
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19 R. Oui.
20 Q. Merci. Nous allons nous pencher sur d'autres détails plus tard, c'est
21 certain. Ici, dans le cadre de votre déposition, il y a quelque chose qu'on
22 n'a pas mentionné.
23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Un instant.
24 [La Chambre de première instance se concerte]
25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Passons à huis clos partiel.
26 [Audience à huis clos partiel]
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12 [Audience publique]
13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous allons faire la pause sous peu,
14 Maître Lazarevic. A vous de décider quand le moment s'y prête le mieux.
15 M. LAZAREVIC : [interprétation] De toute façon, je ne pourrai pas terminer
16 en deux minutes, autant faire la pause tout de suite.
17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Mais oui. Allez-y. Vous voulez faire la
18 pause tout de suite. Je vous avais mal compris parce que -- fort bien. On
19 peut faire la pause, si vous voulez.
20 M. LAZAREVIC : [interprétation] Oui, oui. Fort bien.
21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vais d'abord signer l'ordonnance
22 d'expurgation et nous nous retrouvons dans 25 minutes.
23 --- L'audience est suspendue à 12 heures 27.
24 --- L'audience est reprise à 12 heures 56.
25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Maître Lazarevic.
26 M. LAZAREVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
27 Q. Monsieur le Témoin, nous étions encore dans le pré de Sandici. Je vais
28 essayer de traiter de cela rapidement. Un détail était mentionné plus tôt
Page 7048
1 dans votre déposition, détail qui n'avait pas été mentionné ici, concernant
2 une citerne. Dans l'affaire Krstic, vous avez parlé du fait qu'un camion
3 citerne est arrivé et qu'à trois reprises, il vous aspergeait d'eau
4 fraîche. Est-ce que vous vous souvenez de cet épisode, concernant le camion
5 citerne ?
6 R. Oui, bien sûr.
7 Q. Merci. S'agissant de cette citerne, est-ce que vous vous souvenez
8 quelle était sa couleur, verte, jaune, rouge, s'agit-il d'un véhicule de
9 pompier ?
10 R. C'était un véhicule de pompier, donc, un véhicule rouge avec un canon -
11 si on l'appelle comme cela - un canon à l'eau qui peut produire l'eau sous
12 une forte pression, et donc ils nous aspergeaient en utilisant cela.
13 Q. Merci. Est-ce que vous vous souvenez par hasard de quelle direction le
14 véhicule est arrivé : de Koljevic Polje ou de Bratunac ?
15 R. Je ne l'ai pas remarqué. J'ai simplement remarqué que le véhicule est
16 arrivé dans ce pré mais je ne sais pas de quelle direction.
17 Q. Très bien. Dans votre déposition dans l'affaire Mitrovic et consorts à
18 Sarajevo, vous avez dit que cela vous avait fait du bien ce
19 rafraîchissement lorsque vous avez été aspergé d'eau dans ce pré; est-ce
20 que vous maintenez cette affirmation ?
21 R. Oui.
22 Q. Merci.
23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur McCloskey, pourriez-vous lire
24 les lignes 6, 7 et 8 ?
25 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, je sais que nous faisons référence de
26 nouveau à l'autre affaire et je suppose qu'il faudrait plutôt éviter cela.
27 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Poursuivons.
28 M. LAZAREVIC : [interprétation] Peut-être il faut établir une pratique car
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1 j'ai l'intention d'utiliser d'autres transcripts au compte rendu d'audience
2 de Sarajevo. Peut-être je peux mentionner cela au témoin sans mentionner la
3 date.
4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ou nous pouvons passer à huis clos
5 partiel.
6 M. LAZAREVIC : [interprétation] J'essaie d'éviter de passer à huis clos
7 partiel conformément à la politique de ce Tribunal, mais au fond, je peux
8 faire cela.
9 M. McCLOSKEY : [interprétation] Je pense qu'il vaut mieux continuer à
10 appliquer la pratique selon laquelle vous montrez l'endroit du compte rendu
11 d'audience au témoin.
12 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je suggère que vous posiez vos
13 questions directement au témoin concernant les faits sans nécessairement
14 faire cette référence, et si vous n'êtes pas satisfait de la réponse, vous
15 pouvez le confronter à sa déposition préalable ou déclaration préalable.
16 Nous allons voir à ce moment-là s'il vaut mieux passer à huis clos partiel
17 ou pas.
18 M. LAZAREVIC : [interprétation] Oui, je vais me plier à cette ordonnance.
19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Un exemple. Par exemple, votre dernière
20 question, vous auriez pu la poser de manière suivante : "Est-ce qu'il est
21 exact de dire, si je vous soumets, que lorsque vous avez été aspergé de
22 l'eau que vous avez considéré que c'était un rafraîchissement pour vous
23 dans la chaleur ?" S'il dit : "Oui," vous pouvez être satisfait de cette
24 réponse. S'il dit : "Non," bien sûr, vous pouvez le confronter à la réponse
25 précédente.
26 M. LAZAREVIC : [interprétation] Oui, vous avez raison, Monsieur le
27 Président, mais parfois ma stratégie est aussi de confronter immédiatement
28 à ce qu'il a dit à l'époque en lui demandant s'il peut le confirmer. C'est
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1 l'une des méthodes du contre-interrogatoire que je préfère,
2 personnellement. Je vais essayer d'éviter tout malentendu.
3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. Allez-y.
4 M. LAZAREVIC : [interprétation]
5 Q. Hier, au cours de votre déposition, encore une fois, concernant le
6 champ à Sandici, vous avez dit qu'il y avait environ
7 1 500 à 2 000 prisonniers; vous en souvenez-vous ?
8 R. Oui.
9 Q. Je souhaite maintenant que l'on examine une photographie. D'après
10 l'Accusation, c'est une photographie qui a été prise de l'air le 13 juillet
11 1995, vers 14 heures, donc, à l'heure à laquelle d'après votre description
12 vous vous trouviez dans le pré à Sandici.
13 M. LAZAREVIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut montrer au témoin la
14 photographie 4DP01579 ?
15 Peut-on agrandir cela, s'il vous plaît ?
16 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, examinez cette photographie et si
17 nécessaire nous pouvons l'agrandir encore plus pour vous permettre de mieux
18 voir ? Vous y voyez une route sinueuse et les autocars qui se déplacent le
19 long de cette route ?
20 R. Oui.
21 Q. Maintenant, en bas de ces cars, nous voyons une espèce de rectangle
22 noir. D'après l'Accusation il s'agit là d'une photographie des prisonniers
23 dans le pré à Sandici, le 13, à 14 heures; est-ce que vous voyez cela ?
24 Est-ce que vous pouvez distinguer de quoi il s'agit ?
25 R. Je sais de quoi il s'agit. Peut-on agrandir un peu ?
26 Q. Oui.
27 M. LAZAREVIC : [interprétation] Peut-on agrandir cette partie, s'il vous
28 plaît ?
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1 Q. Est-ce que vous voyez mieux maintenant ? Oui, maintenant. Vous voyez
2 les cars et jusqu'en bas nous voyons une espèce de rectangle juste en face
3 des cars ?
4 R. Oui.
5 Q. Si vous examinez maintenant cette photographie, seriez-vous d'accord
6 avec moi pour dire que d'après les dimensions et par rapport à ces autocars
7 que ce nombre ne s'approche qu'en même pas de 1 500 à 2 000 prisonniers
8 d'après ce qui est représenté sur cette photographie ? Je sais que vous
9 n'avez pas compté le nombre de personnes dans le pré; est-ce que vous
10 seriez d'accord avec une telle appréciation ?
11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Attendez. Oui.
12 Monsieur McCloskey.
13 M. McCLOSKEY : [interprétation] Objection sur la base de deux faits. C'est
14 que le témoin n'a pas fondé son appréciation sur un temps en particulier.
15 Si je m'en souviens, mais c'était un chiffre total. Puis, deuxièmement, on
16 demande au témoin d'évaluer une telle image sur la base des cars. On lui
17 demande alors de faire des conjectures. Ce qui n'est pas approprié.
18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Maître Lazarevic.
19 M. LAZAREVIC : [interprétation] Je comprends l'objection de
20 M. McCloskey. Cependant le témoin a fait une estimation. Il n'a jamais
21 donné de chiffre exact. Il a dit : "C'est mon estimation."
22 M. McCloskey n'a jamais établi sur quelle base il fonde cette estimation.
23 D'autre part, nous avons ici le temps qui correspond à l'incident selon
24 l'acte d'accusation, donc, je pense que j'ai le droit de lui poser cette
25 question. Je ne sais pas s'il est d'accord avec moi. S'il n'est pas
26 d'accord. D'accord.
27 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je pense que nous avons maintenant
28 entendu les arguments des deux côtés donc je pense qu'il n'est plus
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1 nécessaire de discuter de cela, cependant il faut clarifier quelque chose.
2 Lorsque vous avez dit tout à l'heure que dans cette partie il y avait 1 500
3 à 2 000 personnes; est-ce que vous avez parlé d'une période de temps en
4 particulier et de quoi parliez-vous ? Comment êtes-vous arrivé à cette
5 conclusion ? Je pense que vous avez dit qu'il y avait 1 500 à 2 000
6 Musulmans -- là-bas. Quand était-ce le cas d'après vous ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis venu avec le premier groupe, et après
8 moi, au bout d'un certain temps, au bout d'une demi-heure peut-être, je ne
9 sais pas exactement. Un deuxième groupe est arrivé. Une autre colonne qui a
10 rejoint le groupe dans lequel j'étais. J'ai reconnu deux hommes qui étaient
11 en tête de la colonne. C'étaient deux frères.
12 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Attendez. Je ne souhaite pas entendre
13 ce genre de détail. Lorsque vous êtes arrivé là-bas, d'après vous, combien
14 de Musulmans s'y trouvaient déjà ?
15 R. Donc, nous y sommes arrivés en premier.
16 Q. Vous étiez donc combien ?
17 R. Environ 1 000, 1 500. Je ne sais pas exactement.
18 Q. Très bien. Lorsque le deuxième groupe est arrivé ?
19 R. A ce moment-là, le nombre a augmenté. C'était 1 500, 1 500 à 2 000.
20 Peut-être même plus.
21 Q. Très bien. Ce deuxième groupe est arrivé combien de temps après vous ?
22 R. Je l'ai dit tout à l'heure. Une demi-heure ou une heure plus tard.
23 Q. Je sais que vous l'avez dit, mais je souhaite simplement que l'on ait
24 une vue d'ensemble.
25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Maître Lazarevic. Vous pouvez lui
26 poser la question et s'il peut vous répondre, il le fera; sinon, on verra.
27 M. LAZAREVIC : [interprétation] Très bien. Merci, Monsieur le Président.
28 Q. Donc, Monsieur le Témoin, si vous vous en souvenez ma question était la
Page 7053
1 suivante. Maintenant que vous examinez cela, est-ce que vous considérez que
2 ce chiffre de 1 500 à 2 000 personnes est exagéré, sur la base de cette
3 photographie ?
4 R. Sur cette photographie, je ne vois pas du tout des gens, car je ne
5 connais pas cet endroit. Je ne peux pas le reconnaître.
6 Q. Ceci est compréhensible. Je ne vais pas insister là-dessus. Cependant,
7 aujourd'hui, en répondant aux questions du Juge, qui est le Président de la
8 Chambre, vous avez dit que le premier groupe dans lequel vous étiez, vous
9 qui vous étiez rendu, comptait environ 1 500 à 2 000 personnes; cependant,
10 lorsque dans l'affaire à Sarajevo vous avez répondu à la même question,
11 c'est à la page 18.
12 M. LAZAREVIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Peut-
13 être il vaut mieux de passer à huis clos partiel dès à présent.
14 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Passons à huis clos partiel.
15 [Audience à huis clos partiel]
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 [Audience publique]
22 M. LAZAREVIC : [interprétation]
23 Q. Monsieur le Témoin, vous savez de quel site nous parlons. Vous nous
24 avez entendu. Donc, veuillez ne pas répéter le nom du site.
25 Q. Là-bas, sur ce site au sud, vous avez dit qu'à cette même localité, là
26 où vous vous êtes rendu, il y avait entre 15 et 20 blessés et que vous
27 étiez entre 300 et 500 au total; est-ce que vous vous en souvenez ? Il est
28 facile de le vérifier car mes collègues -- ici, nos collègues de
Page 7054
1 l'Accusation ont le compte rendu d'audience.
2 R. Je ne m'en souviens pas.
3 Q. Très bien. Je ne vais plus insister là-dessus. S'agissant de votre
4 déposition dans l'affaire Krstic et dans d'autres affaires, et s'agissant
5 des événements qui se sont déroulés à Sandici dans le pré, vous avez parlé
6 des soldats qui vous ont gardé, ainsi de suite. Mais aidez-moi à comprendre
7 à quelque chose. Ai-je bien compris ? Il y avait un groupe de soldats qui
8 vous gardaient là-bas, au moment où vous vous êtes rendu et puis, après, il
9 y avait un autre groupe de soldats qui est arrivé à un moment donné en
10 uniforme noir et, d'après vous, si j'ai bien compris, les premiers soldats,
11 qui vous gardaient, vous traitaient de manière correcte, mais que les
12 deuxièmes, en uniforme noir, c'était des personnes qui étaient arrogantes
13 qui, d'après votre déposition, ont tué l'un des prisonniers; est-ce exact ?
14 R. Oui.
15 Q. La conclusion que vous avez tirée sur la base de cela était qu'il y
16 avait quand même deux unités sur place ?
17 R. Mais je n'ai aucune idée quelle était l'unité et qui étaient ces
18 personnes en uniforme noir. Ceux qui nous gardaient, ils nous parlaient
19 normalement. Ils ne nous battaient pas du tout. Parfois, ils connaissaient
20 certaines personnes. Il y avait certains soldats de Skelani, par exemple.
21 Ils connaissaient certaines personnes de Skelani. Il y avait des soldats
22 serbes qui connaissaient ces autres personnes qui sont venues avec l'autre
23 colonne, Ahmo et son frère, Dzemo, qui parlaient en tête de la colonne. Ils
24 les ont pris de côté, à côté d'un char. Ils ont parlé avec eux. Ils ont dit
25 : "Où êtes-vous, voisins ?" Donc, j'ai conclu qu'ils les connaissaient de
26 Skelani.
27 Q. Ma question était de savoir si, d'après la manière dont vous comprenez
28 les choses, il s'agissait de deux unités différentes, ceux qui portaient
Page 7055
1 des uniformes noirs et les autres dans des uniformes de camouflage ?
2 R. Oui.
3 Q. Merci. Le meurtre d'un des prisonniers dans le champ que vous avez
4 décrit hier dans votre déposition était effectué par un membre de l'unité
5 qui portait les uniformes noirs, n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Merci beaucoup. Hier, au cours de votre déposition dans l'affaire
8 Krstic, vous avez dit aussi qu'avec Mladic, lorsqu'il est apparu dans le
9 champ, il y avait aussi un caméraman qui vous filmait. Ici, concrètement,
10 dans l'affaire Krstic, il a été dit que lui, il portait un uniforme
11 militaire. Vous avez dit, dans votre déclaration à M. Ruez, aussi, que ce
12 soldat portait un t-shirt avec des manches courtes, ce caméraman qui
13 filmait. Est-ce que vous vous en souvenez ?
14 R. Je ne me souviens pas.
15 Q. Très bien. Mais est-ce que vous excluez la possibilité que c'était le
16 cas ?
17 R. Le caméraman, il nous filmait. Mais je ne me souviens pas quel était
18 l'uniforme qu'il portait. Je ne me souviens pas qu'il portait un uniforme
19 militaire ou des vêtements civils. Il y avait aussi un photographe qui
20 prenait des photos de nous.
21 Q. Très bien. C'est compréhensible si vous ne vous en souvenez pas
22 maintenant.
23 Dites-moi : au moment où les autocars sont arrivés, est-ce que vous vous
24 souvenez de quelle direction ces deux cars sont arrivés, les deux que vous
25 avez mentionnés hier ?
26 R. Vous voulez dire --
27 Q. Les deux cars qui vous ont transporté jusqu'à l'entrepôt à Kravica,
28 est-ce que vous vous souvenez de quelle direction ils sont venus ?
Page 7056
1 R. Je ne l'ai pas vu.
2 Q. Très bien. Vous souvenez-vous, par hasard, quelle heure il était,
3 lorsque vous êtes entré dans ce car et lorsque vous avez pris le chemin de
4 Kravica ?
5 R. C'était dans l'après-midi. Il faisait encore jour et très chaud. Il y
6 avait encore du soleil.
7 Q. D'accord. Hier, vous avez dit que certains soldats serbes se trouvaient
8 dans ces cars aussi, qui n'y étaient -- qui y étaient jusqu'à ce que vous
9 n'arriviez à Kravica. Mais lorsque j'ai lu vos déclarations préalables,
10 j'ai conclu que vous n'avez pas pu identifier ces personnes comme soldats
11 qui vous gardaient à Kravica ou quelqu'un d'autre. Vous n'avez pas vraiment
12 vu les soldats qui étaient dans les cars jusqu'au moment où vous êtes
13 arrivé à Kravica ?
14 R. Ils étaient plusieurs. Ils nous escortaient, mais je n'ai pas pu voir
15 de quels soldats il s'agissait, si c'était les mêmes que ceux qui étaient
16 dans le pré ou s'il s'agissait d'autres soldats.
17 Q. Merci. C'est justement ce que j'ai voulu vérifier. C'est ainsi que
18 j'avais compris cela.
19 Dans votre déposition, jusqu'à maintenant, vous avez dit que vous étiez le
20 premier à entrer dans cet entrepôt à Kravica, qu'il n'y avait personne
21 d'autre à l'intérieur et que vous étiez pratiquement le premier groupe qui
22 est arrivé; est-ce exact ?
23 R. Oui.
24 Q. En ce qui concerne l'événement à Kravica, je pense qu'il y a eu
25 quelques moments un peu flous au cours de votre déposition car l'on vous
26 posait toujours des questions au sujet des tirs. Je vais vous poser des
27 questions en tenant compte de deux éléments. Si j'ai bien compris ce que
28 vous avez dit, il y a des tirs à l'extérieur, n'est-ce pas ?
Page 7057
1 R. Oui.
2 Q. Puis, il y a aussi des tirs lorsque ce soldat est venu et il a ouvert
3 le feu sur vous qui étiez à l'intérieur de l'entrepôt, n'est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Veuillez ralentir un peu et permettre
6 une petite pause entre les questions et les réponses pour les interprètes
7 qui ont du mal à vous suivre.
8 M. LAZAREVIC : [interprétation]
9 Q. Je souhaite que l'on détermine ce qui s'est passé de manière
10 chronologique et aussi précise que ce soit. Vous êtes entré dans le hangar
11 ensuite un autre groupe est arrivé au hangar et le hangar s'est rempli;
12 est-ce que ce que je vous dis pour le moment s'est passé ainsi ?
13 R. Oui.
14 Q. Après cela un civil serbe est arrivé. Il vous distribuait les
15 cigarettes et c'est là qu'ils vous prennent vos biens personnels, l'or et
16 les montres. Ils font une liste de ce que vous avez rendu et ceci se passe
17 après votre arrivée; est-ce exact ?
18 R. Oui.
19 Q. Après cela, après ces événements un peu de temps s'est écoulé, vous
20 vous trouviez encore à l'intérieur. Certains apportent d l'eau mais enfin
21 rien de n'important ne se passe si ce n'est que des soldats viennent et
22 posent des questions concernant les leurs, posent des questions à deux de
23 vos collègues prisonniers que vous avez montré sur le mur où ils ont été
24 interrogés. Mais ils ne les passent pas à tabac. Ils ne les maltraitent
25 pas, ensuite on retourne vers vous; c'est bien cela la séquence des
26 événements ? Est-ce que c'est exact ce que j'ai dit jusqu'à maintenant ?
27 R. Bien, les gens n'ont pas apporté de l'eau. Des soldats serbes ont
28 apporté de l'eau.
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1 Q. Peut-être que je n'ai pas été suffisamment précis, mais je vous
2 remercie de cette correction.
3 R. Oui, oui, c'est exact.
4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Lazarevic, je voudrais savoir
5 simplement si nous allons reprendre toute sa déposition morceau par morceau
6 et lui demander de tout confirmer à nouveau.
7 M. LAZAREVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président, j'avais
8 simplement quelques points-clés essentiels sur lesquels je pensais qu'il
9 n'avait pas été précisément expliqué parce que je crois qu'il y avait
10 quelques confusions et c'est ensuite que je voudrais passer à --
11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien.
12 M. LAZAREVIC : [interprétation]
13 Q. Juste une question qui me vient à l'esprit, en écoutant votre
14 déposition d'aujourd'hui. Dans cette photographie que vous avez marquée,
15 lorsque vous avez mis l'endroit où il y avait le fil de fer, la clôture;
16 est-ce que vous vous rappelez cette clôture en fil de fer ?
17 R. Oui.
18 Q. C'était une clôture qui était faite donc en fil de fer et vous pouviez
19 voir ce qui se passait ?
20 R. Oui.
21 Q. Bon, c'était tout ce qui m'intéressait sur ce point. Vous étiez en
22 mesure de voir à travers la clôture vers le passage qui -- le couloir qui
23 était devant vous ?
24 R. Oui.
25 Q. Revenons aux événements maintenant. Des soldats serbes apportent de
26 l'eau. A un moment donné vous pouvez attendre des coups de feu à
27 l'extérieur et vous ne savez pas ce qui s'est passé là; est-ce exact ?
28 R. Oui.
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1 Q. Après les coups de feu, les soldats serbes entrent dans le local et ils
2 sont en colère à cause de ce qui s'est passé à l'extérieur; est-ce exact ?
3 R. Non, ils étaient en colère avant.
4 Q. Donc --
5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Là encore, je ne pense pas qu'il soit
6 nécessaire d'apporter des éclaircissements sur ce point parce que cette
7 ligne de question a déjà été -- ces questions ont déjà été posées par M.
8 McCloskey, et nous avons eu des réponses très claires, même répétées, sur
9 le fait qu'ils étaient en colère avant cela, et qu'ils étaient également en
10 colère après. Je veux dire, je crois que c'est clair. Donc, pourquoi est-ce
11 que l'on revient sur --
12 M. LAZAREVIC : [interprétation] Oui, je peux comprendre cela, mais peut-
13 être que si on pouvait jeter un coup d'œil à d'autres documents, à ce
14 moment-là, cela pourrait changer l'opinion que l'on a bien -- mais, enfin,
15 bien, je vais y venir.
16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bon, alors dans ce cas-là, abordez les
17 autres documents.
18 M. LAZAREVIC : [interprétation]
19 Q. Alors -- ensuite, lorsque vous dites qu'ils sont venus et qu'ils
20 étaient en colère, est-ce que c'est à ce moment-là qu'ils ont voulu vous
21 tirer dessus, mais que ce jeune homme les a empêchés ?
22 R. Je ne vous ai pas très bien compris ou bien entendu. Pourriez-vous
23 redire cela ?
24 Q. Après les coups de feu à l'extérieur que vous n'avez pas vu, des
25 soldats serbes sont entrés et ils voulaient vous tirer dessus, mais l'un
26 d'entre eux a dit : "Ne fais pas, ce n'est pas de leur faute, rien n'est de
27 leur faute." Est-ce que c'est bien cela qui s'est passé ?
28 R. Oui, oui, avant cela. Pas à ce moment-là. J'ai déjà décrit ce qui
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1 s'était passé avant.
2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Il a déjà donné une description aussi
3 du moment où cela s'est passé.
4 M. LAZAREVIC : [interprétation]
5 Q. Ceci s'est passé alors qu'il faisait encore jour, n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. L'épisode période lequel un soldat que vous avez décrit est venu avec
8 des lunettes, qui avait les cheveux longs et une barbe et qui vous a tiré
9 dessus, il a eu lieu alors qu'il faisait déjà nuit, ou il faisait presque
10 nuit; est-ce exact ?
11 R. Oui.
12 Q. Entre ces deux événements, le premier lorsqu'il y a eu ces tirs à
13 l'extérieur, et ce deuxième événement où ce soldat est entré et a tiré sur
14 les prisonniers, un certain temps s'est écoulé entre les deux; c'est bien
15 cela ?
16 R. Ce soldat a tiré sur les gens -- il a tiré sur nous après les coups de
17 feu à l'extérieur.
18 Q. C'est précisément ma question. Combien de temps s'est-il écoulé entre
19 les deux événements, entre les coups de feu à l'extérieur et les tirs qui
20 ont eu lieu lorsque ce soldat vous a tiré dessus ?
21 R. Je pense que dans les déclarations précédentes je l'ai dit, mais je
22 vais le redire. Ce n'est pas un problème. Environ une demi-heure s'est
23 écoulée entre ces deux événements.
24 Q. Mais ce deuxième événement où on a tiré cela s'est passé aux environs
25 de 9 heures du soir, d'après votre estimation. Ceci se retrouve dans vos
26 déclarations, dans plusieurs de vos déclarations. C'est même du côté de 9
27 heures 30. Je pense que vous avez dit cela à M. Ruez, qu'on a commencé à
28 tirer après qu'il a déjà fait nuit environ 9 heures du soir, pour la
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1 deuxième séquence de tir ?
2 R. La première c'était -- bien, cela s'est passé alors qu'on pouvait
3 encore bien voir, il ne faisait pas tout à fait nuit, mais il commençait à
4 faire noir -- à faire sombre, ensuite une demi-heure plus tard je ne sais
5 pas à 100 % si j'ai dit cela, mais en gros, je veux dire, je n'avais pas de
6 montre pour voir l'heure qu'il était compte tenu de la crainte et de la
7 peur. Il commençait à faire nuit. Ils ont ouvert le feu sur nous. Les deux
8 premiers soldats.
9 Q. Je vous comprends très bien, mais je voulais simplement clarifier ceci.
10 Bien entendu, vous n'avez pas regardé une montre et, bien sûr, vous avez
11 conclu qu'il était environ 8 heures 30 ou 9 heures sur la base du fait
12 qu'il commençait à faire nuit, et comme on était à la mi-juillet, alors que
13 les jours sont assez longs -- le jour dure assez longtemps, vous avez
14 décidé sur la base de cela quelle était l'heure à laquelle ceci a eu lieu ?
15 R. Oui, c'est exact. La durée du jour est plus longue en été.
16 Q. Je vous remercie.
17 M. LAZAREVIC : [interprétation] Monsieur le Président, pourrions-nous aller
18 en audience à huis clos partiel, s'il vous plaît ?
19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Allons en audience à huis clos partiel.
20 Nous y sommes.
21 [Audience à huis clos partiel]
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27 [Audience publique]
28 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous voici maintenant en audience
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1 publique, donc, poursuivons.
2 M. KRGOVIC : [interprétation]
3 Q. Mais vous n'avez pas reçu d'ordre ou de décision officielle de vos
4 commandants, de vos autorités qui aurait fait que vous n'étiez plus soldat.
5 Personne à Srebrenica ne vous a officiellement remis le document ?
6 R. Non, personne ne m'a donné quoi que ce soit, c'était juste un ordre qui
7 nous est parvenu de fuir Srebrenica. Ce qui voulait dire que l'armée
8 cessait d'exister. Les gens se sont enfuis, ont fui où ils pouvaient.
9 Q. Je vais vous poser une autre question concernant l'évacuation. Dans
10 votre déposition, un peu plus tôt, vous avez dit que vous aviez pu quitter
11 l'enceinte de l'ONU pour voir l'évacuation des femmes et des enfants qui
12 quittaient Zepa ?
13 R. Oui.
14 Q. Cette évacuation a été surveillée par la Croix-Rouge internationale ?
15 R. La Croix-Rouge internationale se trouvait dans l'enceinte de la
16 FORPRONU, et seulement là. Quant à savoir s'ils ont surveillé l'évacuation,
17 je ne le sais pas.
18 Q. [aucune interprétation]
19 L'INTERPRÈTE : Les voix se chevauchent.
20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Allons en audience à huis clos partiel,
21 s'il vous plaît.
22 [Audience à huis clos partiel]
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7 [Audience publique]
8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous sommes en audience publique.
9 M. KRGOVIC : [interprétation]
10 Q. Témoin, vous avez dit que lorsque vous étiez évacué de Zepa, il y avait
11 des membres de la FORPRONU sur le car avec vous, à savoir des soldats
12 français et ukrainiens ?
13 R. Oui.
14 Q. Etaient-ils présents sur d'autres cars ? Est-ce qu'il y avait des
15 escortes sur d'autres cars aussi ?
16 R. Je ne l'ai pas vu.
17 Q. Je vous remercie.
18 M. KRGOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
19 je n'ai pas d'autres questions à poser.
20 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]
21 Mme FAUVEAU : Mais je peux commencer si vous voulez.
22 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je ne crois pas qu'à ce moment-là nous
23 puissions vraiment commencer. Nous allons en fait suspendre la séance. Il
24 faudrait plus de trois minutes.
25 Témoin, il faut que vous reveniez donc demain matin, et à ce moment-là nous
26 pourrons poursuivre votre déposition et on peut espérer la terminer.
27 Je lève la séance jusqu'à demain matin 9 heures.
28 --- L'audience est levée à 13 heures 43 et reprendra le jeudi
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1 8 février 2007, à 9 heures 00.
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