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1 Le jeudi 29 novembre 2007
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 19.
5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour. Madame la Greffière
6 d'audience, pourriez-vous appeler la cause, s'il vous plaît.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame
8 et Messieurs les Juges, c'est l'affaire IT-05-88-T, le Procureur contre
9 Popovic et consorts.
10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.
11 Je vois que tous les accusés sont là. Les équipes de la Défense, je vois
12 l'absence de Me Haynes et de Me Bourgon.
13 Pour l'Accusation, M. McCloskey et M. Thayer. Y a-t-il des questions
14 préliminaires à évoquer ?
15 M. THAYER : [interprétation] Non, pas du côté de l'Accusation, Monsieur le
16 Président.
17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Ce témoin n'a pas besoin de
18 mesures de protection, je suppose ?
19 M. THAYER : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Alors, nous sommes prêts à
21 l'entendre.
22 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Thayer, avez-vous toujours
24 l'intention d'interroger le témoin pendant trois heures et demie ?
25 M. THAYER : [interprétation] Je vais essayer de réduire le temps de mon
26 interrogatoire principal, Monsieur le Président. Je vais essayer de le
27 ramener à trois heures et peut-être moins, si possible. Je crois que j'ai
28 déjà réussi à l'abréger de façon importante, y compris pour les pièces à
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1 conviction.
2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie. Ce qui veut dire,
3 Monsieur Thayer, que si vous vous en tenez à vos estimations, tout au moins
4 il faudra que l'un des avocats de la Défense commence son contre-
5 interrogatoire aujourd'hui.
6 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
7 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Général.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous souhaite la bienvenue à ce
10 Tribunal. Je suis le Juge qui préside cette Chambre. Mon nom est Carmel
11 Agius. A ma droite j'ai le Juge Kwon et le Juge Stole. A ma gauche, j'ai le
12 Juge Prost. Ensemble nous composons cette Chambre de première instance.
13 Vous êtes sur le point de commencer votre déposition. Avant de la faire, je
14 vous prierais de bien vouloir faire une déclaration solennelle comme
15 l'exige notre Règlement, à savoir que vous direz la vérité. Allez-y.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
17 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
18 LE TÉMOIN: CORNELIS HENDRIK NICOLAI [Assermenté]
19 [Le témoin répond par l'interprète]
20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Je vous remercie, Général.
21 Veuillez vous installer confortablement.
22 Vous allez d'abord avoir des questions qui vous seront posées par M.
23 Thayer. Ceci sera suivi ensuite par les différentes équipes de la Défense
24 pour un contre-interrogatoire. Pas tous, mais la plupart d'entre eux.
25 Monsieur Thayer, c'est à vous.
26 M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour tout le
27 monde.
28 Interrogatoire principal par M. Thayer :
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1 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur.
2 R. Bonjour.
3 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, indiquer votre nom et en donner
4 l'orthographe pour le compte rendu.
5 R. Je suis Cornelis Nicolai.
6 Q. Quel est votre âge, Monsieur ?
7 R. J'ai 60 ans.
8 Q. Ai-je raison de penser que vous êtes devenu officier dans l'armée des
9 Pays-Bas en 1969 et que vous avez pris votre retraite avec le rang de
10 général de division ?
11 R. En 1965, je suis entré au service de l'armée. J'ai quitté le service
12 comme général de division.
13 Q. Quand avez-vous pris votre retraite, s'il vous plaît ?
14 R. En 2004.
15 Q. Vous avez servi en Bosnie pendant environ six mois en 1995; est-ce
16 exact ?
17 R. C'est exact. Depuis la fin du mois de février 1995 jusqu'au début du
18 mois de septembre, j'étais là-bas.
19 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, dire aux membres de la Chambre de
20 première instance comment il s'est trouvé que vous avez été nommé à la
21 FORPRONU en Bosnie. Est-ce que c'était un poste que vous avez demandé ?
22 R. Dans ce cas particulier, oui, je l'ai demandé. Ce n'est pas habituel.
23 D'habitude on est nommé à un poste. Précédemment, on m'avait offert une
24 autre situation qui ne me convenait pas pour d'autres raisons. Lorsqu'on
25 m'a demandé ce que je voulais, j'ai dit que je souhaitais pouvoir être
26 envoyé sur le terrain, déployé.
27 Q. Quel était votre poste lorsque vous avez commencé votre service en
28 Bosnie ?
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1 R. En Bosnie, j'ai servi comme chef d'état-major de ce qui était à
2 l'origine appelé le commandement BiH, qui par la suite a été appelé la
3 FORPRONU.
4 Q. Quelles étaient vos fonctions et responsabilités en tant que chef
5 d'état-major du commandement en Bosnie-Herzégovine ?
6 R. Le commandement pour l'aider a un état-major. A la tête de cet état-
7 major, il y a un chef d'état-major qui est responsable des commandements
8 quotidiens et qui s'assure pour les opérations que des rapports sont prêts
9 à temps, que le commandant est correctement informé, que les missions sont
10 remplies et que les plans sont préparés, que la situation est suivie. Il
11 s'agit en l'occurrence de fonctions quotidiennes qui sont celles de l'état-
12 major, sous la direction du chef d'état-major.
13 Q. Juste pour que le compte rendu soit bien clair, Général, quel était le
14 commandant en Bosnie-Herzégovine alors que vous serviez que comme chef
15 d'état-major ?
16 R. C'était avec le général de corps d'armée britannique, Rupert Smith.
17 Q. Vous-même, Monsieur, est-ce que vous aviez un adjoint ?
18 R. Oui, c'était un colonel français du nom de Philippe Coiffet.
19 Q. En plus du colonel Coiffet, aviez-vous aussi un assistant militaire ?
20 R. Oui, c'est exact. J'avais un lieutenant-colonel néerlandais qui, pour
21 l'essentiel, m'aidait dans toutes mes activités quotidiennes.
22 Q. Quel était le nom de ce lieutenant-colonel, s'il vous plaît ?
23 R. Andrew De Ruiter.
24 Q. Quand le général Smith était absent, qui le remplaçait ?
25 R. C'était le général le plus gradé à l'époque qui prenait le commandement
26 la plupart du temps. C'était le général de division Gobillard qui était le
27 commandant du secteur de Sarajevo.
28 Q. A ce moment-là, pendant vos fonctions, quel était votre grade ?
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1 R. J'étais à ce moment-là général de brigade.
2 Q. Général, je voudrais vous poser des questions maintenant concernant vos
3 contacts avec le haut commandement de la VRS. Vous rappelez-vous les noms
4 d'officiers de l'état-major général de la VRS pendant le temps que vous
5 avez passé en Bosnie ?
6 R. Oui. Régulièrement, la personne avec qui j'avais le plus de contact
7 était le général Milovanovic. Pour autant que je le sache, il était le chef
8 d'état-major du général Mladic. Il était aussi, dirais-je, le premier
9 contact désigné pour moi. Lorsqu'il était absent, on me passait quelqu'un
10 d'autre au téléphone. Quelquefois, c'était le général Mladic lui-même, mais
11 j'ai également parlé plusieurs fois au général Tolimir et au général Gvero.
12 Q. Y avait-il d'autres officiers de l'état-major général de la VRS dont
13 vous auriez entendu le nom ou que vous connaissiez ou que vous avez
14 rencontré pendant la période que vous avez passée en Bosnie ?
15 R. Pas pour autant que je sache. Il n'y avait guère de raison de parler à
16 des officiers d'un grade inférieur à celui de général parce qu'aucune
17 décision n'a été prise à un tel niveau.
18 Q. Que voulez-vous dire par là, Monsieur ?
19 R. Ce que je veux dire c'est que si vous aviez une question à poser ou une
20 demande à présenter, la seule réponse utile pouvait être donnée au niveau
21 des généraux. C'était eux qui pouvaient prendre apparemment les décisions.
22 Dans des rangs subalternes, tout au mieux, on accepterait d'entendre la
23 question et de la transmettre. Il faudra admettre la réponse.
24 Q. Attardons-nous un moment pour évoquer un certain nombre de ces
25 officiers de l'état-major dont vous avez donné la liste. Vous avez parlé du
26 général Milovanovic. Est-ce que vous vous rappelez l'avoir rencontré en
27 personne à un moment quelconque ?
28 R. Oui. Au cours de la première semaine suivant mon arrivée, mon
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1 prédécesseur m'a présenté aux contacts des autres parties, et pour la VRS
2 c'était le général Milovanovic.
3 Q. Vous avez dit il y a un moment que vous aviez eu le plus de contacts
4 avec le général Milovanovic. Y avait-il un protocole à suivre pour ce qui
5 est de la personne avec qui vous devriez être en contact du côté de la VRS
6 qui régissait d'une façon typique les entretiens que vous deviez avoir et
7 les personnes avec qui vous devriez les avoir ?
8 R. Oui, un tel protocole existait. Il y avait des accords précisant que
9 les membres des états-majors ne pouvaient pas avoir de contacts avec des
10 personnes de leur propre niveau, de sorte que le commandement de l'ABiH
11 pouvait traiter avec le commandement de l'armée, le commandement du secteur
12 interagissait avec les commandants les corps d'armée et les troupes avec
13 lesquelles ils étaient en contact et au sein de l'état-major. D'une façon
14 générale, le chef d'état-major parlait au chef d'état-major et le
15 commandant parlait au commandant. Mais bien entendu, il y avait des
16 exceptions à l'occasion, si quelqu'un était absent.
17 Q. Si par exemple, le général Milanovic était absent, y avait-il une autre
18 personne en particulier qui, à ce moment-là, le remplaçait dont vous vous
19 souvenez, si ce n'est sauf quand vous parlez au général Mladic ou au
20 général Tolimir parfois, comme vous l'avez dit ?
21 R. Non. En ce qui me concerne, cela dépendait d'une coïncidence, à savoir
22 qui se trouvait être là à ce moment-là. Si le général Milovanovic n'était
23 pas présent, je parlais à l'un des généraux que j'ai déjà mentionnés.
24 Q. Sur quelle question est-ce que vous traitiez avec le général
25 Milovanovic ?
26 R. C'était tout un éventail de questions, toute une gamme de sujets. Pour
27 commencer, s'il avait eu des actes de violence tels que des incidents
28 comportant des tirs d'arme à feu, à ce moment-là ce serait discuté. Une
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1 protestation serait élevée. Il pouvait également y avoir des discussions
2 concernant la permission de faire passer un convoi pour apporter des
3 fournitures pour des civils dans des enclaves. Nous discutions également de
4 la question d'échange de prisonniers entre les différentes parties.
5 D'autres conversations concernaient les prisonniers de guerre. Excusez-moi,
6 des victimes ou des blessés, également ceci avait eu lieu très
7 régulièrement. Si des personnes blessées devaient être évacuées, il y
8 aurait à ce moment-là des négociations sur ce sujet aussi. Une autorisation
9 était nécessaire pour pouvoir transporter et traverser le territoire de
10 l'une des parties.
11 Q. En ce qui concerne le général Gvero, quand vous rappelez-vous avoir eu
12 les premiers contacts avec lui ?
13 R. Pour autant que je m'en souvienne, ce fut le 11 juillet, le jour où
14 l'enclave de Srebrenica est tombée. Je crois me rappeler que le lendemain
15 du 12 juillet, je lui ai parlé à nouveau.
16 Q. Nous parlerons de ces conversations dans un moment. A votre
17 connaissance, où se trouvaient situés ces officiers du haut commandement de
18 la VRS, Mladic, Milovanovic, Tolimir et Gvero ? A quel endroit, est-ce que
19 cet état-major général avait son quartier général à votre connaissance à
20 l'époque ?
21 R. Pour autant que je sache à l'époque, c'était à Pale. Plus tard, j'ai
22 appris que c'était inexact. Nous, nous étions toujours en contact avec ceux
23 qui se trouvaient à Pale.
24 Q. Vous avez parlé du fait que vous avez rencontré le général Milovanovic.
25 Où l'avez-vous rencontré ?
26 R. C'était également à Pale.
27 Q. Lorsque vous l'avez rencontré à Pale, est-ce que vous l'avez rencontré
28 dans ce que vous croyez être le quartier général de l'état-major général de
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1 la VRS ou est-ce que vous étiez dans un autre bâtiment ?
2 R. Cela n'avait pas l'air d'être une caserne ni un quartier général, mais
3 le bâtiment avait apparemment une destination officielle. En tout état de
4 cause, il y avait des militaires de la VRS qui se trouvaient là.
5 Q. A l'époque à ce moment-là, comment est-ce que vous avez compris où se
6 trouvait physiquement l'état-major général lui-même, où avait-il son
7 quartier général ?
8 R. Je croyais que c'était près de Pale quelque part. Je n'avais pas un
9 intérêt immédiat à savoir où il se trouvait.
10 Q. N'avez-vous jamais entendu parler d'installations qui se trouvaient à
11 Han Pijesak ou à Crna Reka ?
12 R. Oui. Par la suite, et quand je dis par la suite, je veux dire après
13 être déjà revenu de Bosnie. J'ai compris où se trouvait ce quartier général
14 de la VRS.
15 Q. Maintenant, lorsque vous vouliez vous mettre en contact avec l'état-
16 major général de la VRS par téléphone, pourriez-vous décrire aux membres de
17 la Chambre de première instance comment ces appels téléphoniques, d'après
18 ce que vous avez compris, étaient passées d'une façon matériellement. Etape
19 par étape, s'il vous plaît.
20 R. Oui. Pour passer les appels téléphoniques, ce n'était pas si difficile
21 que cela. Nous avions une connexion directe avec un poste à Pale que nous
22 pouvions appeler. J'avais une interprète qui pouvait appeler et établir le
23 contact. Ensuite, la conversation avait lieu. Si nous voulions envoyer des
24 messages rédigés, il y avait un poste des observateurs militaires de l'ONU
25 à Pale. Nous avions une connexion fax qui nous permettait d'envoyer des fax
26 aux observateurs militaires de l'ONU qui pouvaient ensuite apporter ce
27 message aux autorités de la VRS qui étaient présentes à ce moment-là, à cet
28 endroit-là.
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1 Q. Général, vous avez parlé d'une interprète il y a un instant. Vous
2 rappelez-vous son nom ?
3 R. Son prénom était Svetlana. Malheureusement, je ne me rappelle pas son
4 nom de famille.
5 Q. Est-ce que vous vous rappelez le nom d'autres interprètes au service
6 desquels vous faisiez régulièrement appel ?
7 R. Je pense qu'il y en avait un appelé Zdravko, mais je ne me rappelle pas
8 exactement. Dans 90 % de tous les cas, je travaillais avec Svetlana.
9 Q. Qui était son employeur, qui l'avait recrutée ?
10 R. Elle avait aidé à un grand nombre de mes prédécesseurs, et au moment où
11 je suis arrivé dans ce poste, cela faisait trois ans quelle faisait ce
12 travail. C'est probablement un de mes prédécesseurs qui l'avait engagée.
13 Q. Je voudrais maintenant que vous prêtiez attention à la question des
14 convois qui venaient apporter les fournitures à la fois au Bataillon
15 néerlandais et à tous les bataillons du maintien de la paix du Bataillon
16 néerlandais ainsi qu'à la population civile de Srebrenica. Vous avez
17 mentionné que c'était l'un des domaines dont vous vous occupiez avec le
18 général Milovanovic. Pourriez-vous, s'il vous plaît, décrire la procédure
19 que vous deviez suivre en ce qui concernait ces convois qui venaient
20 réapprovisionner ?
21 R. L'un des faits très malheureux, voyez-vous normalement les soldats de
22 l'ONU ont toute liberté de mouvement. Au tout début, il semble que cela ait
23 été le cas en Bosnie aussi. Après un certain temps toutefois, il a été
24 contrevenu à ce principe, ce qui veut dire que nous avions besoin de
25 demander une autorisation pour pouvoir faire passer les convois. Il était
26 nécessaire que nous demandions la permission de la partie dont c'était le
27 territoire. Si nous voulions envoyer un convoi de réapprovisionnement à
28 l'enclave de Srebrenica, alors il fallait qu'on fasse savoir quelques jours
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1 d'avance combien de véhicules nous avions l'intention d'y envoyer en
2 passant par quel itinéraire et avec quel chargement. Nous devions demander
3 la permission pour ces mouvements. D'une façon ordinaire, nous recevions
4 cela très peu de temps à l'avance, parfois il y avait des restrictions qui
5 étaient imposées ou nous n'étions pas autorisés à envoyer autant de
6 véhicules que nous le souhaitions, ou certaines parties des chargements
7 n'étaient pas acceptées.
8 Q. De part et d'autre, ici nous parlons du côté de la FORPRONU et du côté
9 de la VRS. Comment la demande initiale visant à obtenir l'autorisation de
10 réapprovisionnement par les convois était-elle traitée, à quel niveau
11 d'après vos souvenirs ?
12 R. Une fois que les besoins avaient été établis par l'état-major au sein
13 d'une certaine enclave à ce moment-là, l'officier chargé des transports
14 déterminait le nombre de véhicules qui étaient nécessaires pour transporter
15 ce chargement, puis il demandait, je crois qu'il faisait cela par fax, il
16 remplissait une formule pour demander la permission de faire passer ce
17 convoi. Si tout se passait bien, si la permission était accordée, à ce
18 moment-là je n'avais pas besoin de m'en occuper. Si à un moment quelconque
19 l'autorisation était refusée, à ce moment-là il fallait qu'on essaie à un
20 niveau plus élevé, qui d'habitude était le niveau du chef d'état-major,
21 pour voir si nous pouvions obtenir la permission après tout ou si nous
22 pouvions nous enquérir du motif pour lesquelles certaines choses n'étaient
23 pas autorisées.
24 Q. Avec quelle fréquence, est-ce que --
25 L'INTERPRÈTE : Microphone, si possible.
26 M. THAYER : [interprétation] Excusez-moi. Le microphone était éteint.
27 Q. Avec quelle fréquence est-ce que la VRS vous refusait le passage de
28 certains convois ?
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1 R. Il est difficile de le dire, cela s'est passé très régulièrement, au
2 bas mot la requête était changée, et régulièrement était rejetée aussi. Je
3 ne dirais pas que cela se passait chaque semaine, mais certainement chaque
4 mois. Cela dépendait de la période. Au début de mon mandat ce n'était pas
5 si fréquent, mais certainement aux mois de mai et juin, cela se passait
6 régulièrement.
7 Q. Lorsque vous étiez en contact avec le général Milovanovic au sujet du
8 rejet des requêtes de convois, comment décririez-vous ce que vous deviez
9 faire afin d'obtenir une permission de la part du général Milovanovic ?
10 R. Je ne disposais pas de beaucoup de moyens. J'essayais d'employer des
11 tactiques persuasives afin d'expliquer pour quelles raisons ces convois
12 étaient nécessaires. Ensuite, j'essayais de convaincre la partie adverse
13 qu'il fallait accorder la permission. Neuf fois sur dix, c'est ce qui se
14 passait.
15 Une fois je suis allé plus loin. C'était tôt au cours du mois de mars 1995.
16 Nous avons menacé, en cas de refus de convois de nourriture, d'organiser
17 des ponts aériens dans l'enclave et d'avoir recours à la force, si
18 nécessaire.
19 Q. Lorsque vous dites "avoir recours à la force," à quoi pensez-vous ?
20 R. S'ils essayaient de bloquer les vols de réapprovisionnement en tirant
21 sur les avions, dans ce cas-là nous utiliserions nos armes aériennes afin
22 de forcer le passage et d'accomplir ces vols de d'approvisionnement de
23 toute façon.
24 Q. Vous avez dit que ceci a été dit en mars. A cette époque-là, est-ce que
25 vous avez effectivement eu un plan de ponts aériens afin éventuellement de
26 corroborer cette menace et la réaliser, comme vous l'avez décrit ?
27 R. Non, pas encore à l'époque. Autrement dit, si nous aurions dû exécuter
28 cela à cette époque-là, ceci aurait impliqué énormément d'improvisation.
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1 Une fois confronté au fait que de plus en plus de convois se faisaient
2 refuser de recevoir la permission, et qu'on avait de moins en moins
3 d'approvisionnement, nous avons réalisé qu'il fallait rédiger un plan au
4 cas d'urgence réelle. Nous devions rédiger un plan que nous pourrions
5 exécuter afin de pouvoir approvisionner nos troupes, si nécessaire, en
6 ayant recours à la violence. C'est la raison pour laquelle le général Smith
7 a demandé aux membres de son état-major d'établir un plan pour cette
8 éventualité. C'était un plan très détaillé. Je me souviens que nous avons
9 passé plus de deux mois à ce faire pour consigner tout par écrit. Vers la
10 fin du mois d'avril le plan était prêt.
11 Q. Est-ce que vous vous souvenez si M. Akashi par exemple, a approuvé ce
12 plan ? Commencez avec M. Akashi.
13 R. Oui. C'était un plan militaire. D'abord, il fallait que ceci soit
14 approuvé par le général Janvier. M. Akashi était conscient de cela et il
15 l'a accepté.
16 J'essaie de dire, pour le compte rendu d'audience, que cela ne veut
17 pas dire que le plan aurait automatiquement été réalisé. Les avions émanant
18 des pays différents auraient participé à cette époque-là à son exécution.
19 La permission aurait exigé que tous ces pays approvisionnent leurs troupes
20 là-bas. Il fallait avoir une autorisation de la part de tous les Etats qui
21 avaient envoyé leurs troupes sur place.
22 Q. Vous avez décrit cela comme un plan qui demandait beaucoup de travail
23 au sein de l'état-major et beaucoup de temps. Quelles étaient les
24 conditions générales entre mars, avril et mai qui justifiaient que l'on
25 consacrait autant de temps et de ressources à un plan de ponts aériens pour
26 vous permettre d'adopter une autre procédure par rapport à celle que vous
27 aviez déjà mis en place avec la VRS ?
28 R. Il était nécessaire de développer ce plan en raison des refus de plus
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1 en plus nombreux d'accorder la permission de d'approvisionner les convois
2 et ainsi de d'approvisionner les militaires dans les enclaves, tout comme
3 les civils, ce qui est devenu très difficile et la situation se
4 détériorait. L'intention du plan concernait la situation éventuelle dans
5 laquelle ces gens-là seraient sur le point d'être affamés. Dans ce cas-là,
6 il fallait les approvisionner si nécessaire, par le biais de la violence.
7 Q. D'après la manière dont vous compreniez les choses, est-ce que les
8 Serbes avaient pris une décision concernant la question de savoir s'ils
9 allaient approuver ou refuser le convoi ?
10 R. Je suppose que c'était le quartier général de la VRS.
11 Q. Je souhaite que l'on se concentre momentanément sur le
12 réapprovisionnement en carburant. Est-ce que vous vous souvenez combien de
13 convois de carburant ont été approuvés pour le Bataillon britannique par la
14 VRS entre février et juin 1995 ?
15 R. Oui, je m'en souviens très clairement, car il n'y en a pas eu beaucoup.
16 Au cours de mon mandat, un convoi de carburant est entré dans l'enclave.
17 C'était le convoi qui a été acheminé début mars. Après cela, tous les
18 convois de carburant ont été rejetés.
19 Q. S'agissant des convois d'approvisionnement de la nourriture et d'autres
20 fournitures, à la fois pour le Bataillon néerlandais et pour la population
21 civile, est-ce que vous avez reçu des rapports concernant ce qui arriverait
22 à certains des convois qui auraient reçu leur approbation pendant leur
23 trajet vers leur destination ?
24 R. Est-ce que vous pouvez répéter la question ?
25 Q. Je vais essayer de la simplifier. Est-ce que vous n'avez jamais reçu
26 des rapports concernant le fait que les convois de nourriture et d'autres
27 vivres, là je ne parle pas de carburant, n'arriveraient pas jusqu'à leur
28 destination finale malgré l'approbation ?
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1 R. Absolument. C'est ce qui se passait régulièrement aussi. Malgré le fait
2 qu'une permission était accordée, quelque part le long de la route à un
3 point de contrôle, des véhicules étaient bloqués, renvoyés. Parfois, il
4 fallait décharger le véhicule. Les commandants du convoi avaient
5 l'interdiction de ce faire.
6 Si l'on refusait le passage d'un véhicule ou de son chargement,
7 probablement il rentrait sans avoir accompli la mission.
8 Q. Pendant votre mandant en Bosnie, s'agissant de l'approvisionnement des
9 enclaves orientales, quelle est la partie qui bloquait ou renvoyait le plus
10 souvent les convois ?
11 R. Il est évident que c'était la VRS, compte tenu du fait qu'il fallait
12 traverser le territoire de la VRS afin d'arriver aux enclaves. Parfois
13 pendant le passage à travers le territoire bosniaque -- les vivres étaient
14 destinés pour les Bosniaques dans les enclaves aussi. Donc nous n'avons pas
15 vraiment eu de problèmes là-bas, mais nous avons rencontré des problèmes
16 avec la VRS.
17 Q. Monsieur, est-ce que vous pouvez nous décrire, d'après votre
18 expérience, dans quelle mesure est-ce que la FORPRONU dépendait de la VRS
19 afin de pouvoir approvisionner ses troupes de maintien de la paix dans les
20 enclaves orientales ?
21 R. Ceci était nécessaire, car sans permission de la VRS, nous ne pouvions
22 pas faire passer ces convois et nous n'étions pas en mesure à l'époque
23 d'avoir recours à la violence, sauf en employant les forces aériennes. Et
24 nous souhaitions pouvoir utiliser ces moyens dans les cas extrêmes et
25 seulement en situation de véritable urgence.
26 Q. J'ai quelques autres questions à ce sujet-là et d'un sujet semblable
27 avant de passer à autre chose. Est-ce que quelque chose a changé au cours
28 de vos six mois de mandat pour ce qui est des permissions des troupes de
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1 maintien de la paix du Bataillon néerlandais ?
2 R. Oui. Il y a eu des problèmes à ce sujet-là aussi. Je dirais presque que
3 s'agissant de tous les aspects il y a eu des problèmes. Mais parfois
4 lorsque les soldats du Bataillon néerlandais quittaient l'enclave dans le
5 cadre de leurs permissions, lorsqu'ils revenaient au bout de quelques
6 semaines, ils étaient bloqués et on leur refusait la permission de
7 retourner à leurs bases. Le résultat définitif de cela était que le nombre
8 des soldats dans l'enclave était passé de 600 à environ 350 soldats.
9 Clairement, après cela nous n'autorisions plus de permissions.
10 Q. Qui au sein de la VRS -- avec qui au sein de la VRS étiez-vous en
11 contact au sujet de ces problèmes de permission ?
12 R. Il s'agissait de plusieurs personnes à des niveaux différents. Tout
13 d'abord en tant que chef d'état-major, je commençais à parler avec mon
14 homologue de la VRS au sujet de cela. Ensuite nous avons écrit des lettres
15 officielles signées par le général Smith, et le chef de la division des
16 affaires civiles a eu des négociations à ce sujet-là aussi, mais tout ceci
17 n'a rien donné.
18 Q. Et vous-même, est-ce que vous avez été en contact avec le Bataillon
19 néerlandais et notamment son commandant au sujet de la situation en matière
20 du réapprovisionnement et les conséquences de cela sur la capacité du
21 Bataillon néerlandais de rester opérationnel ?
22 R. Je n'ai pas eu de contacts formels directs avec le commandant du
23 Bataillon néerlandais en raison du fait qu'il y avait en réalité un niveau
24 entre les deux. Donc strictement parlant, je devais être en contact avec le
25 commandant du Bataillon néerlandais par le biais du quartier général de
26 Tuzla. D'autre part, compte tenu du fait que j'ai été un officier
27 néerlandais de haut niveau, en fait du plus haut niveau au sein du
28 commandement, j'ai reçu l'autorisation de contacter directement les autres
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1 ressortissants de mon pays, donc je pouvais le faire. J'avais une ligne
2 directe. Et évidemment je le contactais régulièrement afin de demander à
3 quoi ressemblait la situation et si tout se passait bien, notamment
4 lorsqu'il y a eu des problèmes. Bien sûr, je le contactais plus souvent
5 afin de demander s'il y avait des problèmes.
6 Q. Est-ce que le commandant du Bataillon néerlandais a jamais soumis par
7 écrit ses plaintes ou ses préoccupations à votre commandement ?
8 R. Oui. Je vais essayer de vous fournir une réponse complète. Il l'a fait
9 à la fois verbalement et par écrit. Au début, verbalement, afin d'indiquer
10 quels étaient les problèmes rencontrés, par exemple, liés à la pénurie de
11 carburant. Donc très vite, en raison de la pénurie de carburant, il a dû
12 arrêter ses patrouilles motorisées et il a pu continuer à avoir seulement
13 les patrouilles de fantassins. Au bout d'un certain temps, ils ont
14 également cessé d'utiliser le carburant afin de chauffer les bâtiments,
15 afin de l'économiser, et afin de pouvoir permettre aux groupes électrogènes
16 de fonctionner puisque ceux-ci étaient nécessaires afin de pouvoir utiliser
17 les appareils de communication.
18 Bien sûr, ce sont les conséquences qui mettent à mal les possibilités
19 opérationnelles. Et lorsque les choses se sont détériorées, je pense que
20 c'était à un moment donné en mai, il a rédigé un premier rapport au sujet
21 de la situation. C'était un rapport écrit présenté par le biais de la ligne
22 officielle du commandement, dans lequel il expliquait à quel moment sa
23 situation de réapprovisionnement était difficile par rapport au carburant,
24 par rapport aux pièces détachées, aux munitions, de même que par rapport à
25 la qualité des munitions, la pénurie de nourriture, et que tout ceci
26 compromettait de manière sérieuse ses possibilités opérationnelles.
27 Je me souviens d'un autre rapport du début juin dans lequel il disait au
28 fond qu'il est arrivé à un point où sur le plan opérationnel il ne pouvait
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1 plus s'acquitter de manière appropriée de ses tâches.
2 Q. Nous allons parler de l'attaque de la VRS contre l'enclave, nous en
3 parlerons tout à l'heure, mais tout d'abord, est-ce que vous pourriez nous
4 dire comment vous décririez la situation militaire en termes généraux au
5 sujet des activités autour de l'enclave de Srebrenica en juin 1995 ?
6 R. De toute façon, l'enclave a été encerclée de tous les côtés par les
7 troupes de la VRS. Clairement, nous avions l'impression qu'au cours du mois
8 de juin le nombre de troupes s'était augmenté et ceci nous a poussés à nous
9 poser des questions au sujet des intentions de la VRS, est-ce qu'ils
10 souhaitaient attaquer l'enclave, et quel serait le but d'une telle attaque;
11 est-ce qu'ils avaient l'intention de saisir une partie de l'enclave, par
12 exemple, la partie au sud qui était très importante pour la route de
13 réapprovisionnement ou s'ils allaient essayer de prendre le contrôle de
14 l'ensemble de l'enclave.
15 Il était difficile de trancher. Au début dans notre commandement, nous
16 avons cru que ceci concernerait seulement la partie sud. Au bout d'un
17 certain temps, la VRS a effectivement commencé à attaquer les cibles de
18 l'ONU, et en juin l'un des postes d'observation a fait l'objet d'une
19 attaque et le Bataillon néerlandais a été forcé à quitter ces postes
20 d'observation au début juillet, car de plus en plus souvent l'on attaquait
21 et l'on tirait sur ces postes d'observation. Il s'agissait là de postes
22 statiques à des endroits exposés, et même s'ils étaient protégés par des
23 sacs de sable, ils ne pouvaient certainement pas résister aux tirs de
24 chars. Donc si l'on tirait sur eux en utilisant des chars, la seule chose à
25 faire était d'abandonner le poste d'observation.
26 Q. Très bien. Général, nous allons en parler encore un peu. En termes
27 généraux, s'agissant des incidents de tir ou des attaques de l'une ou
28 l'autre partie belligérante au cours du mois de juin dans la région de
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1 Srebrenica, est-ce que vous vous souvenez avoir reçu des plaintes de l'une
2 quelconque des parties belligérantes au sujet de telles attaques ou des
3 incidents de tir, et ainsi de suite ? Et si oui, est-ce que vous vous
4 souvenez ce que vous avez fait au sujet de ces plaintes émanant de l'une ou
5 l'autre partie belligérante ?
6 R. Oui. Il y a eu des plaintes émanant des deux parties, à la fois la VRS
7 et l'ABiH. La VRS se plaignait des soldats musulmans qui étaient exfiltrés
8 des enclaves vers le territoire de la VRS. Ils se plaignaient du fait que
9 visiblement l'ONU ne pouvait pas mettre fin à cela.
10 L'ABiH se plaignait du fait qu'ils essuyaient des tirs de la part de
11 la VRS. Ceci pouvait être observé également par le Bataillon néerlandais.
12 Nous étions tout à fait en mesure de vérifier effectivement si ces plaintes
13 étaient justifiées ou pas. En réalité, il y avait parfois une troisième
14 partie; parfois on tirait sur l'ONU elle-même. Donc on recevait des
15 protestations à ce sujet-là aussi.
16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Thayer, je souhaite simplement
17 m'assurer d'une chose, si l'interprétation est exacte ici, ligne 24 de la
18 page précédente, page 18 : "L'ABiH se plaignait du fait qu'ils essuyaient
19 des tirs de la part de la VRS. Ceci pouvait être observé aussi par le
20 Bataillon néerlandais." Le témoin a dit néerlandais -- effectivement,
21 c'est-à-dire que la VRS se plaignait qu'on tirait sur eux ou que la VRS
22 tirait sur eux ou les bombardait ?
23 M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je souhaite simplement m'assurer que
25 l'interprétation était exacte.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vais clarifier cela. On observait les
27 deux situations. Parfois il y avait des tirs directs de petit calibre, mais
28 puisque souvent on tirait depuis les collines, on pouvait voir cela.
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1 Parfois, il y avait des incidents de pilonnage, des tirs d'artillerie ou de
2 mortier; parfois contre les positions des soldats musulmans, mais parfois
3 aussi de manière indiscriminée sur les civils.
4 M. THAYER : [interprétation]
5 Q. En réponse à ces plaintes émanant des deux belligérants, est-ce que
6 vous ou qui que ce soit d'autre au sein de votre commandement a envoyé des
7 protestations formelles ?
8 R. Oui. Bien sûr, au début c'était quelque chose qui devait être fait par
9 le commandant du bataillon néerlandais, afin de résoudre cela et mettre fin
10 localement aux hostilités. Mais si la situation menaçait d'échapper au
11 contrôle pour en arriver à un point où ils ne pouvaient plus reprendre le
12 contrôle de la situation, bien sûr dans ce cas-là, il pouvait s'adresser à
13 un échelon supérieur au sein de son commandement afin d'essayer de mettre
14 fin à ces hostilités à un niveau plus élevé. Et c'est ce qui s'est passé
15 plusieurs fois.
16 Q. Pour finir, est-ce que vous vous souvenez des lettres de protestation
17 émanant des commandements de l'ABiH du niveau du secteur plus élevé
18 envoyées aux deux parties belligérantes au cours du mois de juin ?
19 R. Oui, ceci se passait régulièrement, avec l'exception de l'utilisation
20 du soutien aérien, les lettres de protestation étaient le seul moyen auquel
21 on a eu recours afin d'essayer de faire quelque chose au sujet de la
22 situation.
23 Q. Je souhaite attirer votre attention maintenant sur l'attaque de la VRS
24 contre l'enclave, et je souhaite vous demander au sujet de plusieurs
25 conversations que vous avez eues avec les hauts officiers de la VRS au
26 cours de cette attaque.
27 Tout d'abord, je souhaite attirer votre attention sur la mort d'un soldat
28 néerlandais, Raviv Rensen, qui a succombé aux tirs musulmans le 8 juillet.
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1 Est-ce que vous vous en souvenez ?
2 R. Oui.
3 Q. Est-ce que vous pourriez nous décrire brièvement les
4 circonstances de sa mort et ce que vous avez fait en réponse à sa mort ?
5 R. Oui. L'un des postes d'observation a fait l'objet d'une attaque et de
6 tirs entre autres choses de char. A un moment donné, le commandant du poste
7 d'observation a décidé que la situation est devenue insupportable, il a
8 demandé la permission d'abandonner le poste d'observation. On a fait droit
9 à cette requête, et le commandant a reçu la tâche de retourner au
10 commandement de Potocari avec ses hommes.
11 En rentrant, il a dû passer près des positions de l'ABiH qui était en
12 désaccord total s'agissant de l'abandon de ce poste d'observation. Ils ont
13 essayé d'arrêter le véhicule, sans succès. Ils ont aussi tiré sur le
14 véhicule. Et lors de cet incident, l'un des soldats dans le véhicule a été
15 touché par balle et il est mort avant d'arriver à la base. Bien sûr, le
16 commandant du Bataillon néerlandais a envoyé un rapport à ce sujet peu de
17 temps après.
18 Ensuite j'ai contacté le quartier général de Sarajevo, le quartier
19 général de l'ABiH afin de protester en raison de cette situation et afin
20 d'insister de manière véhémente qu'ils laissent tranquilles les troupes du
21 Bataillon néerlandais dans l'enclave et qu'ils leur accordent la liberté de
22 mouvement. J'ai également annoncé qu'une protestation écrite allait suivre.
23 Bien sûr, j'ai également protesté auprès de la VRS au sujet du fait qu'ils
24 avaient attaqué le poste d'observation et au sujet du fait qu'ils étaient
25 en train de pénétrer dans l'enclave. J'ai insisté avec véhémence qu'ils
26 retirent leurs troupes derrière les lignes déterminées dans le cadre de
27 l'accord passé précédemment.
28 Q. Soyons clairs. Pourriez-vous nous dire exactement à qui
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1 appartenait le char qui a tiré sur le poste d'observation, Général ?
2 R. Ce sont les troupes de la VRS qui ont tiré sur le poste
3 d'observation, mais le véhicule était en route depuis le poste
4 d'observation du centre de la base, quand il revenait du centre
5 d'observation jusqu'à la base c'est là que les troupes de l'ABiH ont tiré
6 dessus.
7 Q. A qui appartenait le char ?
8 R. Le char appartenait à la VRS, puisque les troupes musulmanes dans
9 l'enclave n'avaient absolument pas de char -- enfin ce type d'équipement.
10 Q. Très bien. Etes-vous entré en contact personnellement avec l'une ou
11 l'autre des parties belligérantes suite à cet incident ?
12 R. Oui, oui. Comme je vous l'ai dit, j'ai pris contact avec le général
13 Hajrulahovic pour lui parler de la perte de ce soldat. Il s'agissait du
14 chef d'état-major au commandement de l'ABiH à Sarajevo. Pour ce qui est de
15 l'attaque sur le poste d'observation, là, j'ai contacté le général Tolimir
16 de la VRS.
17 M. THAYER : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, avoir la
18 pièce de la liste 65 ter numéro 2750 sur l'écran.
19 Je ne montre pas la version en anglais. De toute façon nous attendons
20 qu'elle s'affiche.
21 Si cela ne vient pas, de toute façon j'ai des copies papier que l'on
22 peut mettre sur le rétroprojecteur --
23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] En effet, il semble qu'il y a un
24 petit problème technique.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
26 M. THAYER : [interprétation] Pourrions-nous l'avoir sur le
27 rétroprojecteur, s'il vous plaît. Merci.
28 Q. Avez-vous pu lire rapidement ce document, Monsieur le Témoin ?
Page 18465
1 R. Oui. Il s'agit du compte rendu d'une conversation téléphonique que j'ai
2 eue avec le QG de la VRS. A ce moment il y avait énormément de tension, il
3 y en avait de plus en plus surtout, donc nous avions pris l'habitude de
4 toujours rendre compte des conversations téléphoniques par écrit. Donc ce
5 sera mon aide de camp qui l'aura rédigé avec l'aide de mon interprète. Ce
6 type de compte rendu était diffusé pour information. Information tout
7 d'abord au commandant; puis au chef des affaires civiles; ensuite au chef
8 du bureau des informations.
9 Q. Quel était le nom de votre interprète, s'il vous plaît ?
10 R. C'était toujours Svetlana. Et pour ce qui est de mon aide de camp il
11 s'agit du lieutenant-colonel de Ruiter. D'ailleurs on trouve sa signature
12 au bas du rapport ou du compte rendu.
13 Q. Vous aviez l'habitude à l'époque de relire ces comptes rendus une fois
14 rédigés ?
15 R. Oui, oui, tout à fait. C'était moi qui avais eu l'entretien
16 téléphonique, donc c'était à moi d'approuver le compte rendu. C'était moi
17 en connaissais la teneur.
18 Q. Pourriez-vous nous décrire la précision de ce compte rendu, d'après
19 vous souvenirs bien sûr ?
20 R. Pour ce qui est du contenu, c'est correct à 100 %.
21 Q. Très bien. Je vais vous montrer d'autres exemples de rapports ou de
22 comptes rendus de ce type. Pour gagner du temps, j'aimerais savoir s'il y
23 avait toujours la même procédure qui était appliquée et si c'était toujours
24 les mêmes personnes qui faisaient le compte rendu, c'est-à-dire s'il y
25 avait toujours vous-même; votre interprète, Svetlana; et votre aide de camp
26 le lieutenant-colonel de Ruiter dans le cadre de toutes ces conversations
27 téléphoniques qui ont eu lieu au cours de ces deux ou trois jours
28 d'escalade ?
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1 R. Oui. Mon aide de camp, mon assistant militaire, le lieutenant-colonel
2 de Ruiter et Svetlana étaient toujours là. Ils assistaient toujours à ces
3 conversations. Bien sûr, j'avais besoin de Svetlana, sans elle je n'aurais
4 même pas pu comprendre quoi que ce soit. Pour ce qui est de mon aide de
5 camp il était aussi très impliqué, il participait dans ces conversations.
6 Parfois il y avait il y avait aussi une troisième ou une quatrième personne
7 qui assistait à ces conversations. Mais généralement, il y avait nous
8 trois.
9 Q. Très bien. Nous allons maintenant étudier la teneur de la conversation
10 téléphonique. Il est dit qu'au QG de la VRS aucun général n'était
11 disponible, et de ce fait vous avez dû laisser un message et vous avez fait
12 allusion à la conversation précédente que vous aviez déjà eue avec le
13 général Tolimir. Vous souvenez-vous déjà de la teneur de la conversation
14 préalable que vous aviez eue plus tôt dans la journée avec le général
15 Tolimir ?
16 R. Oui. J'avais appelé à cause de l'attaque sur le poste d'observation,
17 cet incident dont on vient de faire référence. Vers 15 heures ce jour-là,
18 le poste d'observation a été pilonné, donc les soldats ont dû l'abandonner.
19 Comme je vous l'ai déjà dit, j'ai tout d'abord protesté auprès des troupes
20 de l'ABiH, ensuite j'ai contacté le général Tolimir et j'ai fait une
21 protestation par rapport à cette attaque sur le poste d'observation.
22 J'ai insisté pour qu'il arrête immédiatement son attaque et que ses troupes
23 se retirent derrière les lignes de cessez-le-feu. Etant donné qu'en fin
24 d'après-midi rien n'avait été fait, je l'ai rappelé à nouveau pour insister
25 à nouveau et exiger que ce retrait ait lieu.
26 Q. Il est écrit ici que le général Tolimir avait promis que les positions
27 des Nations Unies et de la FORPRONU ne seraient pas attaquées. Suite à
28 cette conversation que vous avez eue à 19 heures 45, savez-vous si le
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1 général Tolimir a bien tenu sa promesse et n'a pas attaqué la FORPRONU ni
2 les positions des Nations Unies ?
3 R. Ma réponse sera très courte : non, non. Comme chaque fois que l'on
4 faisait une protestation par rapport à des attaques de la VRS, il y avait
5 toujours un déni de leur part, ils disaient toujours qu'ils n'allaient
6 absolument pas attaquer les forces des Nations Unies et que les forces des
7 Nations Unies d'ailleurs n'avaient pas été attaquées alors que les rapports
8 reçus du Bataillon néerlandais montraient clairement que cela n'était pas
9 le cas.
10 Q. Très bien. Passons maintenant au jour suivant, le 9 juillet. L'attaque
11 de la VRS s'est-elle poursuivie ce jour-là ?
12 R. Oui, si je me souviens bien, d'autres postes d'observation ont essuyé
13 des tirs, ont été attaqués. Quant à savoir combien de postes d'observation
14 ont été attaqués le dimanche 9, ça je ne m'en souviens pas, en tout cas pas
15 comme ça.
16 M. THAYER : [interprétation] Y a-t-il un problème d'interprétation ?
17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Continuez. De toute façon ça va
18 s'arranger. Ce sera quand le témoin parlera en néerlandais que l'on verra
19 si l'interprétation est à nouveau sur le bon canal ou pas.
20 M. THAYER : [interprétation] Je poursuis.
21 Q. Savez-vous si quoi que ce soit a été fait pour ce qui est de la
22 dépouille mortelle du soldat Rensen, a-t-il pu être renvoyé chez lui ?
23 R. Oui, oui. Cela a encore compliqué ma position puisqu'il fallait que je
24 proteste avec véhémence par rapport à ce qui s'était passé; mais d'un autre
25 côté, il fallait aussi que je demande de l'aide afin que la dépouille du
26 soldat Rensen puisse sortir de l'enclave. Donc j'ai demandé de l'aide - je
27 dois dire d'ailleurs que j'ai reçu cette aide et que tout s'est passé
28 exactement selon ce qui avait été convenu.
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1 Q. Très bien.
2 M. THAYER : [interprétation] Passons maintenant à la pièce 2972 de la liste
3 65 ter, s'il vous plaît.
4 Q. Si vous pouviez, s'il vous plaît, prendre connaissance du document qui
5 est à droite sur l'écran ?
6 R. Oui, j'ai déjà commencé à le lire.
7 Q. Ce qui m'intéresse c'est le dernier paragraphe. Il est écrit que : "Le
8 général Tolimir a répondu qu'il n'était pas au courant du fait que ses
9 commandants subordonnés bloquaient la route de Casevac. Il a demandé au
10 général Nicolai lui demandant que ses hommes aillent immédiatement à
11 Bratunac en disant qu'il allait dire à ses troupes de leur permettre
12 d'aller jusqu'à Zvornik. Ensuite, plus forts en territoire de la VRS ses
13 hommes seraient réceptionnés par ses troupes et il donnerait immédiatement
14 des instructions pour que les unités de la VRS agissent selon ses ordres."
15 J'ai quelques questions à vous poser à propos de ce paragraphe. La
16 référence tout d'abord que fait le général Tolimir à "ses commandants
17 subordonnées" ?
18 R. Il voulait dire les commandants locaux qui étaient sur site, c'est-à-
19 dire les commandants de la VRS qui se trouvaient autour de l'enclave ou
20 dans l'enclave.
21 Q. Très bien. Qu'est-ce qu'il dit exactement le général Tolimir ici ?
22 R. Il faudrait que j'aie une petite minute afin de pouvoir lire la
23 totalité de ce document et ainsi cela me rafraîchirait la mémoire.
24 Oui. Je m'en souviens bien maintenant. Mis à part le fait que j'aie parlé
25 au général Tolimir du retour des soldats du Bataillon néerlandais qui
26 avaient fui le territoire serbe à partir de leurs postes d'observation
27 parce qu'ils avaient peur de traverser les positions de l'ABiH, en fait
28 l'essentiel de ce document parlait du transport de la dépouille du soldat
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1 qui avait été tué.
2 Je leur ai dit que tout est arrivé comme convenu, mais visiblement il y a
3 eu un petit problème à un moment. La première fois qu'ils ont essayé de
4 transporter la dépouille mortelle sur la route de Bratunac, ils ont été
5 arrêtés par les troupes de la VRS. Et j'ai parlé ainsi après au général
6 Tolimir pour lui demander de faire comprendre à ses troupes que nous étions
7 d'accord pour que ce convoi puisse passer.
8 Q. A votre connaissance, le général Tolimir a résolu le petit problème,
9 n'est-ce pas ? Et le convoi a pu passer sans encombres ?
10 R. Oui. Oui, tout ça a été résolu. La dépouille du soldat Rensen a été
11 transportée ce jour-là.
12 Q. Très bien.
13 M. THAYER : [interprétation] Maintenant, regardons, s'il vous plaît, la
14 pièce 2751.
15 Q. Ce document est assez étoffé, je ne sais pas si vous arrivez à bien
16 lire sur l'écran, sinon j'ai une copie papier. Mais de toute façon, prenez
17 votre temps pour le lire. Il y a quand même quatre paragraphes bien denses,
18 donc prenez votre temps.
19 R. Mais j'arrive très bien à lire sur l'écran.
20 Oui, j'ai fini de lire.
21 Q. Vous souvenez-vous de cette conversation ?
22 R. Oui. La situation empirait, il y avait eu un grand nombre de contacts
23 entre le QG à Sarajevo et le QG à Zagreb sur cette situation qui empirait,
24 et on s'est bien rendu compte que des lettres de réclamation ne feraient
25 pas grand-chose. C'est pour cela que j'ai à nouveau contacté le général
26 Tolimir et qu'une fois de plus, je lui ai intimé l'ordre de retirer ses
27 troupes, sinon nous aurions recours à la force pour obliger les troupes à
28 se retirer. Ce qui en fait signifiait avoir recours à des armes aériennes.
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1 Ensuite, je lui ai demandé d'autoriser le retour des soldats qui
2 s'étaient enfuis sur le territoire serbe. Le général Tolimir m'a dit que
3 ces soldats avaient eu le droit de retourner à leurs bases, mais cela s'est
4 révélé faux. Et le général Tolimir m'a rappelé à nouveau que les Nations
5 Unies n'étaient en aucun cas une cible de la VRS, et ne seraient jamais
6 ciblées en aucun cas, ce qui contredisait totalement tous les rapports
7 émanant du commandant du DutchBat. Le général Tolimir a promis et s'est
8 engagé à vérifier tout cela à nouveau pour s'assurer que ses troupes sur le
9 terrain n'attaqueraient pas le Bataillon néerlandais.
10 Q. Si nous regardons le dernier paragraphe du document, il est écrit
11 que : "Le général Tolimir a promis qu'il allait vérifier cette information
12 directement sur le terrain pour savoir si elle était vraie", mais il vous a
13 dit qu'il ne pensait pas que c'était vrai. Il vous a demandé de le rappeler
14 une demi-heure plus tard. Vous vous en souvenez ? Vous a-t-il rappelé ?
15 R. Si je me souviens bien, il m'a en effet rappelé, mais pas dans la
16 demi-heure. Il a mis un peu plus de temps. Il a appelé plus tard dans la
17 soirée.
18 Q. Vous souvenez-vous avoir essayé de contacter le général Tolimir
19 personnellement au bout d'une demi-heure lorsqu'il n'a pas rappelé tout de
20 suite ?
21 R. Oui. Je sais que j'ai essayé. Si je me souviens bien, j'ai essayé de
22 lui téléphoner à plusieurs reprises. Mais tous les documents que vous avez
23 en main devraient vous permettre de savoir exactement quand j'ai réussi à
24 rentrer en contact avec lui, moi, je ne m'en souviens plus.
25 Q. Très bien. Nous avons encore assez de temps avant la pause pour
26 étudier un autre document de la liste 65 ter, le document 2973.
27 C'est encore un document assez dense, avec deux pages bien fournies.
28 Prenez votre temps pour le lire. Ce n'est pas grave si nous ne pouvons pas
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1 poser de question avant la pause.
2 R. [aucune interprétation]
3 Q. La conversation téléphonique précédente que vous aviez eue a eu lieu à
4 17 heures 50, le 9 juillet. Maintenant, c'est une autre conversation
5 téléphonique, qui a eu lieu à 19 heures 30, dont il est rendu compte dans
6 ce document. Quel était le but de ce nouvel appel téléphonique ?
7 R. Il faut que je vous dise ce qui s'est passé aussi ce jour-là dans le
8 cadre du réseau des Nations Unies. Après consultation avec les QG de
9 Sarajevo et de Zagreb et avec l'implication personnelle du général Janvier,
10 nous avons décidé d'envoyer un message très fort selon lequel les limites à
11 la patience des Nations Unies avaient été franchies.
12 Donc le général Janvier a donné l'ordre que des unités du Bataillon
13 néerlandais s'installent sur des positions de blocage au sud de Srebrenica
14 pour bloquer la route aux forces serbes qui approchaient tout d'abord, et
15 aussi pour faire en sorte que si les forces de la VRS continuaient à
16 vouloir s'approcher de Srebrenica, elles seraient obligées de s'attaquer
17 aux positions des Nations Unies. Et dans ce cas-là, si à la fois la
18 population civile et les Nations Unies étaient attaquées, la communauté
19 internationale ne pourrait que comprendre que la situation était devenue
20 telle que le seul recours était des largages de bombes, donc des frappes
21 aériennes.
22 Nous voulions que les Serbes comprennent ça bien, et c'est pour cela que
23 nous leur avons rédigé cet ultimatum par écrit pour qu'ils comprennent bien
24 quelles seraient les conséquences de la poursuite de leurs attaques, et le
25 coup de fil a eu lieu juste avant tout ceci, je voulais tout d'abord que la
26 VRS arrête d'attaquer les positions des Nations Unies; ensuite, alors
27 qu'ils avaient déjà pénétré dans l'enclave, je voulais qu'ils comprennent
28 bien qu'il fallait absolument qu'ils retirent leurs troupes de l'enclave
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1 même s'ils mettaient un terme à la violence et à la force qu'ils
2 employaient. Non seulement il fallait qu'ils arrêtent d'employer la force,
3 mais aussi qu'ils retirent les troupes des frontières de l'enclave.
4 Q. Très bien. Maintenant je pense que nous pouvons faire la pause.
5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien.
6 Nous reprendrons dans 25 minutes.
7 --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.
8 --- L'audience est reprise à 16 heures 15.
9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Thayer, c'est à vous.
10 M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
11 Q. Bonjour à nouveau, Général.
12 R. Oui, bonjour.
13 M. THAYER : [interprétation] Pourrait-on faire apparaître à l'écran la
14 première page du document 2973 à nouveau, s'il vous plaît. Je souhaiterais
15 qu'on ait les deux versions.
16 Q. Le premier paragraphe dit que vous étiez curieux de connaître
17 l'information du général Tolimir sur les événements qui se déroulaient à
18 Srebrenica et que vous vous étiez concentrés sur la confirmation par le
19 général Tolimir de son message antérieur. Pourriez-vous expliquer
20 brièvement ce passage, s'il vous plaît ?
21 R. Oui. Ce qui s'est passé, c'est que chaque fois que je disais au général
22 Tolimir ce qui se passait, à savoir que l'ONU était attaqué, il niait
23 systématiquement, et la toute dernière fois avant ce coup de téléphone, il
24 a promis de s'informer auprès du commandant qui était sur place pour savoir
25 ce qui se passait. Et chaque fois à nouveau il continuait de nier que les
26 troupes de l'ONU étaient attaquées par la VRS.
27 Q. Dans le deuxième paragraphe où il vous dit qu'il a transmis le message
28 à ses commandants subordonnés et qu'il était informé du fait que la VRS
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1 n'avait pas de problèmes particuliers avec la FORPRONU, ni avec la
2 population civile à Srebrenica, comment est-ce que ceci cadrait avec les
3 renseignements que vous receviez à l'époque ?
4 R. C'était systématiquement inexact. Le commandant du Bataillon
5 néerlandais me tenait continuellement informé de ce qui se passait. Le
6 général Tolimir niait ceci sous toutes ces formes. Et je suis pleinement
7 convaincu qu'il savait exactement ce qui se passait mais qu'il ne voulait
8 pas le confirmer. Et en fin de compte, je lui ai dit qu'il y ait eu en fait
9 combat ou pas à ce moment-là n'avait plus guère d'importance; le fait était
10 que "vos soldats avaient déjà pénétré dans l'enclave à plus de quatre
11 kilomètres et qu'il était nécessaire qu'ils se retirent au-delà des limites
12 de l'enclave."
13 Q. Je voudrais reprendre quelque chose que vous venez juste de mentionner
14 dans votre réponse, Général. Vous avez décrit les contacts que vous aviez
15 avec le colonel Karremans. Quelles étaient vos sources d'information au
16 cours de cette période ?
17 R. La source la plus importante, c'étaient des rapports de situation que
18 le commandant du Bataillon néerlandais m'envoyait directement ou par
19 l'intermédiaire du quartier général du commandement du secteur de Tuzla. En
20 plus de cela, nous avions d'autres sources de renseignements. Il y avait
21 des forces spéciales anglaises dans l'enclave qui rendaient compte
22 directement à un bureau spécial au quartier général de Sarajevo.
23 Q. A ce moment-là, quels types d'armes étaient utilisés par la VRS au
24 cours de son attaque ? Et est-ce que vous vous rappelez approximativement à
25 quels endroits elles se trouvaient situées dans l'enclave ?
26 R. L'ensemble de l'enclave était encerclé par les positions de la VRS, y
27 compris des positions d'artillerie de la VRS, et il y avait des systèmes de
28 lancement pour des lance-roquettes multiples. Il y avait des batteries de
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1 mortier. Les postes d'observation étaient attaqués en partie par des chars.
2 Je sais avec certitude qu'il a été rendu compte qu'un T-55 était là.
3 C'était un char d'origine russe. Et il y avait des tirs qui avaient eu lieu
4 en plusieurs endroits par des armes de petit calibre et des armes légères.
5 Q. Sur la base des renseignements que vous receviez, comment décririez-
6 vous l'opération de la VRS du point de vue militaire, du point de vue de
7 son organisation, et de son exécution ?
8 R. A ce stade, il devint parfaitement clair que la VRS attaquait
9 l'enclave. Il n'était pas immédiatement clair où ils s'arrêteraient, mais
10 ils avaient pénétré de façon suffisamment profonde pour avoir presque
11 atteint -- pour avoir atteint la ville de Srebrenica. Donc il était grand
12 temps de stopper ce mouvement d'attaque, et c'est la raison pour laquelle
13 nous avons menacé d'utiliser des frappes aériennes.
14 Q. Nous allons venir à cela dans un instant. Mais juste pour être bien
15 clair pour le compte rendu, lorsque vous parlez de l'utilisation de la
16 puissance aérienne, est-ce que vous voulez parler de frappes aériennes ou
17 d'un appui aérien rapproché, ou des deux ?
18 R. Pour commencer, de façon rapprochée, il s'agissait d'un appui aérien
19 qui était la chose la plus évidente. Mais à ce moment-là, c'était la seule
20 chose que les éléments de l'ONU en Bosnie étaient habilités à utiliser.
21 Pour l'autorisation de frappes aériennes, d'attaques aériennes massives, il
22 fallait que celle-là soit donnée de New York. Et les niveaux nécessaires
23 pour une telle autorisation à la suite du fiasco de l'attaque aérienne à la
24 fin de mai, le niveau avait été élevé de sorte que nous parlions là d'appui
25 aérien rapproché.
26 Q. Bien. Retournons à la première page du document 2973. Et je vais
27 maintenant un petit peu ralentir. J'ai senti que j'accélérais là. Et au
28 troisième paragraphe de la version en anglais - c'est aussi le troisième
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1 paragraphe de la version en B/C/S - vous parlez d'un avertissement très
2 fort appuyé par le commandant de la force, le général Janvier, et M. Akashi
3 qui a été donné par écrit. Est-ce qu'un tel avertissement a effectivement
4 été donné, Général ?
5 R. Oui, dans la soirée du 9 juillet, cet avertissement a été envoyé au
6 quartier général de la VRS.
7 Q. Nous allons y venir dans un instant.
8 Maintenant passons, je crois qu'il faut que nous allions à la deuxième page
9 de la version en B/C/S, mais on reste tout à fait au bas de la page du
10 texte anglais. On voit que le général Tolimir avait réaffirmé ce qu'il
11 avait dit dans son rapport, à savoir qu'il n'y avait "aucun affrontement
12 entre la FORPRONU, l'armée serbe en Bosnie, et la population civile de
13 Bosnie-Herzégovine à Srebrenica."
14 Là encore, sur la base de ce que vous saviez à l'époque, est-ce que c'était
15 un énoncé véridique ou une fausse déclaration ?
16 R. C'était faux. C'était absolument faux, sans aucun doute.
17 Q. Et si nous passons à la page suivante, le général Tolimir vous dit que
18 les Bosniaques sont en train d'utiliser six véhicules blindés de transport
19 qui leur avaient été ou bien donnés ou bien qu'ils avaient eux-mêmes pris à
20 la FORPRONU. Comment avez-vous répondu à cette information ?
21 R. Nous avons répondu de façon quelque peu irritée. Il était malheureux
22 qu'il ait fallu communiquer cela par le truchement d'un interprète parce
23 que cette accusation était si absurde que j'étais extrêmement irrité.
24 Q. Là encore, si nous regardons deux paragraphes avant la fin de la page
25 en anglais - et il faut faire défiler le texte en B/C/S pour trouver
26 l'équivalent - le général Tolimir -- ceci est la dernière phrase, deux
27 paragraphes avant la fin, il avait promis de contacter ses propres
28 éléments. Est-ce que vous vous rappelez qu'il ait fait cette promesse de se
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1 mettre en contact avec ses subordonnés ?
2 R. Oui, je me rappelle absolument tout ce qui est dit ici. Mais rien ne
3 s'est passé. En fait, c'est le contraire qui s'est passé. Plutôt que de
4 voir les soldats se retirer, ils ont poursuivi leur attaque, de sorte que
5 ces promesses qui n'étaient pas tenues ne servaient à rien pour nous.
6 Q. Bien. Nous en avons terminé avec ce document. Et si nous pouvions
7 regarder maintenant le document 2975 de la liste 65 ter s'il vous plaît.
8 J'attends qu'on voie le texte en B/C/S, la traduction.
9 Maintenant, voyez-vous le document devant vous, Général ?
10 R. Oui.
11 Q. Pouvez-vous lire la ligne où il y a la date et l'heure, pouvez-vous
12 nous dire à quelle heure -- enfin quel horaire donne ce document et quelle
13 est la date ?
14 R. Il s'agit du 9 juillet à 22 heures 20, en juillet 1995.
15 Q. Comme nous pouvons le voir ceci émane du quartier général du
16 commandement de la FORPRONU et les destinataires pour une distribution
17 interne -- la distribution internationale. De quel chef d'état-major
18 s'agit-il ici ?
19 R. C'est le chef d'état-major qui se trouve au quartier général de sorte
20 qu'il s'agit de moi ou enfin c'était moi.
21 Q. Il est dit que cette page couverture indique qu'il y a : "Annexé le
22 dernier avertissement envoyé aux Serbes de Bosnie. Nous l'avons envoyé en
23 message au général Mladic et nous allons le diffuser comme déclaration
24 générale."
25 Vous rappelez-vous que ceci a été fait, Général ?
26 R. Oui. Ce document a été rédigé après un échange d'idées très approfondi
27 entre le quartier général de Zagreb et Sarajevo. Et en fin de compte il a
28 été couché par écrit par le lieutenant-colonel Baxter qui était l'aide de
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1 camp du général Smith. A la suite de l'approbation de ce texte par à la
2 fois le général Janvier et le général Gobillard, il a été adressé au
3 général Mladic -- ou plutôt, à son quartier général.
4 Q. Est-ce que vous vous rappelez ce que disait cet avertissement en somme,
5 en fin de compte ?
6 R. Oui. C'est évident, parce que les difficultés étaient parvenues à un
7 stade tel qu'il s'agissait maintenant de notre tout dernier avertissement
8 avant de recourir à la violence.
9 Q. Bien, regardons maintenant la page suivante. Regardons donc la page
10 suivante.
11 A la première ligne, Général, on lit que : "L'armée des Serbes de Bosnie a
12 repris les attaques contre l'enclave de Srebrenica, le vendredi 7 juillet
13 1995, en tirant de façon aveugle sur la zone sécurisée en prenant
14 directement pour cible les installations de l'ONU, ce qui a causé divers
15 morts parmi les civils."
16 Vous rappelez-vous avoir reçu des renseignements au cours de cette période
17 selon lesquels des civils avaient été tués par les tirs d'artillerie de la
18 VRS ?
19 R. Oui, c'est exact. Il en a été rendu compte à plusieurs reprises.
20 Q. Un peu plus loin dans ce paragraphe il est rendu compte du fait que :
21 "Deux postes d'observation ont été investis par l'armée serbe de Bosnie
22 dans la soirée et que 15 éléments chargés du maintien de la paix ont été
23 faits prisonniers. Et 7 autres soldats chargés du maintien de la paix ont
24 été pris cet après-midi."
25 Vous avez indiqué plus tôt dans votre déposition que certains de ces
26 soldats chargés du maintien de la paix s'étaient enfuis du côté serbe parce
27 qu'ils avaient peur de passer par les lignes bosniaques. Est-ce que vous
28 avez eu des relations, ou rapports, ou des renseignements selon lesquels
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1 les Néerlandais chargés du maintien de la paix avaient été pris, avaient
2 été pris contre leur gré plutôt que volontairement sur leur poste
3 d'observation ?
4 R. Oui, leur fuite vers les territoires serbes, c'était volontaire en ce
5 sens qu'ils avaient encore plus peur de passer par les positions de la BiH.
6 Bien sûr, il n'est pas agréable de se rendre à l'une des deux parties, mais
7 ils pensaient que les Serbes les traiteraient mieux que les soldats de la
8 BiH.
9 Q. Qu'en était-il en ce qui concerne ces autres soldats qui se trouvaient
10 aux autres postes d'observation qui avaient été investis et qui ont été
11 pris ? Est-ce que vous avez reçu d'autres informations selon lesquelles ils
12 se seraient rendus à la VRS sous la menace des armes plutôt que de s'enfuir
13 vers la VRS ?
14 R. Oui, ceci aussi avait eu lieu, tout particulièrement au cours des jours
15 qui ont suivi. Donc dans certains cas, ils se sont rendus fondamentalement
16 parce qu'ils étaient forcés de le faire volontairement. Dans d'autres cas,
17 ils ont été menacés par les menaces des armes et ils ont à ce moment-là
18 déposé les armes et ils se sont rendus aux Serbes. Ça aussi ça a eu lieu.
19 Q. Si nous regardons maintenant tout à fait en bas de la page au dernier
20 paragraphe, il est question de la position -- la position SR et FC ont
21 décidé que si la position qui était attaquée par les forces de la VRS,
22 l'appui aérien rapproché de l'OTAN serait employé.
23 Est-ce que c'est ça que vous avez décrit juste avant la suspension de
24 séance, Général, c'est-à-dire le blocage des positions ?
25 R. C'est exact.
26 Q. Vous avez parlé ou décrit de nombreuses conversations que vous avez
27 eues soit directement, soit par le truchement du commandement du secteur
28 nord-est, je crois le secteur nord-est avec le commandement avec le colonel
Page 18479
1 Karremans, je ne suis pas sûr que nous l'ayons jamais encore nommé en
2 donnant son nom, mais l'officier qui commandait le Bataillon néerlandais à
3 Srebrenica. Est-ce que vous vous rappelez que le colonel Karremans ait
4 couché par écrit son appréciation et ses inquiétudes concernant l'attaque
5 de la VRS à un moment donné le 9 juillet ?
6 R. Oui, je m'en souviens très bien. Ce qui me reste plus particulièrement
7 en l'esprit, en la mémoire, c'est son inquiétude, ses préoccupations que
8 l'appui aérien serait effectivement déployé. Et il craignait que ceci ne
9 conduise à des mesures de rétorsion massives, des actions prises par la VRS
10 et il a dit qu'à moins que ces forces aériennes ne soient capables de
11 s'occuper de toutes les positions de la VRS autour de l'enclave, il
12 craignait qu'il n'y ait des mesures de rétorsion extrêmement graves par la
13 VRS contre ses propres éléments, dans ses propres effectifs.
14 Q. Est-ce que vous partagiez cette crainte de mesures de rétorsion
15 massives par la VRS si un appui aérien rapproché était employé ?
16 R. J'avais certainement compris ce qu'il craignait, ce qu'il voulait dire.
17 Ce scénario n'était pas inconnu pour moi parce que précédemment à la fin du
18 mois de mai, la VRS avait répondu à des frappes aériennes en tirant sur les
19 enclaves. C'était l'exemple le plus frappant avec un bain de sang au centre
20 de Tuzla, donc il était extrêmement probable que ceci pourrait être une
21 réaction.
22 En ce qui concerne les dirigeants des éléments de l'ONU, il n'y avait
23 certainement aucune raison de renoncer à l'arme aérienne parce que
24 certainement nous allions l'utiliser, enfin nous avions certainement
25 l'intention de la déployer.
26 Q. Mais plutôt que de déployer ou plutôt que de l'employer. C'est ça que
27 vous voulez dire, tout du moins pour le moment ?
28 R. Permettez-moi de présenter les choses de cette manière : en dépit des
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1 conséquences potentiellement grave pour le Bataillon néerlandais ou pour la
2 population civile au sein de l'enclave, nous avions certainement
3 l'intention d'utiliser les armes aériennes si nécessaire.
4 Q. Bien.
5 M. THAYER : [interprétation] Regardons maintenant la pièce 2975 de la liste
6 65 ter un instant, si vous voulez bien. Nous attendons un instant pour
7 avoir la traduction en B/C/S à l'écran.
8 Q. Est-ce que vous reconnaissez ce document, Général ?
9 R. Oui, certainement. Il s'agit bien du document dans lequel le colonel
10 Karremans exprime ses inquiétudes par rapport à la situation qui s'est
11 créée et ses craintes concernant les conséquences qui pourraient se
12 réaliser.
13 Q. Maintenant, pourrions-nous voir au premier paragraphe il est question
14 de tirs d'artillerie pilonnant les postes d'observation, Srebrenica
15 proprement dit, et de victimes civiles. Vous avez déjà parlé de cela, donc
16 passons maintenant au paragraphe 2. Il écrit -- ou il a écrit :
17 "Pendant ces trois jours, ces opérations ont été exécutées par tous
18 moyens : attaques de positions de l'ABiH et de l'ONU, tirs d'artillerie sur
19 l'enclave et d'attaques contre le -- essayer de réprimer toute action du
20 Bataillon néerlandais par des moyens d'intimidation en utilisant de
21 l'artillerie, des mortiers, et des MLRS, lance-roquettes (M-63 et M-77)."
22 Qu'est-ce que c'est les MLRS ?
23 R. MLRS veut dire "système de lance-roquettes multiples" donc oui système
24 de lance-roquettes multiples.
25 Q. Le colonel Karremans a écrit que : "L'armée serbe de Bosnie sait
26 exactement ce qu'elle fait et ils savent jusqu'où ils peuvent aller. Ils
27 exécutent leurs opérations conformément à un plan prédéterminé et bien
28 organisé."
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1 Sur la base des renseignements que vous receviez, Général, est-ce que ceci
2 cadrait bien avec ce que vous étiez en train de recevoir ?
3 R. Il s'agit là d'une hypothèse. On ne peut jamais prouver une hypothèse
4 au-delà de l'ombre d'un doute, mais il semblait bien qu'il s'agissait d'un
5 plan soigneusement conçu et nous avions de plus en plus cette impression.
6 Q. Maintenant, regardons la deuxième page de ce document. Au paragraphe 5
7 il est question d'un APC néerlandais, un véhicule blindé qui a été perdu
8 entre les mains de la VRS. Vous rappelez-vous si plus d'un véhicule blindé
9 APC a été perdu entre les mains de la VRS au cours de cette opération,
10 Général ?
11 R. Plusieurs véhicules sont tombés entre les mains de la VRS. A chaque
12 poste d'observation, il y avait un véhicule blindé de transport de troupes.
13 Si les types se rendaient, à ce moment-là le véhicule tombait entre les
14 mains de l'armée serbe au même moment, la VRS.
15 Q. Passons maintenant au paragraphe 7, le colonel Karremans parle de
16 plusieurs positions qui se trouvent dans la partie sud-est de l'enclave et
17 dit qu'elle a été investie et prise par la VRS et indique -- il parle en
18 fait des environs du poste d'observation précédent, poste d'observation
19 Echo. Ensuite il indique qu'il a déjà exprimé ces inquiétudes il y a un
20 mois, le mois dernier.
21 Pourriez-vous brièvement développer ce dont il vous parlait, lorsqu'il dit
22 : "J'ai déjà exprimé le mois dernier ces préoccupations." De quoi s'agit-
23 il, s'il vous plaît ?
24 R. Oui. J'ai déjà précédemment indiqué au cours de cette audience que les
25 premiers postes d'observation sont tombés aux mains de la VRS au mois de
26 juin, ou tout au moins, avaient dû être abandonnés sous la pression de la
27 VRS. Ce c'était le premier avertissement que quelque chose était imminent.
28 Karremans a exprimé sa préoccupation. Il ne s'attendait pas à ce qu'un seul
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1 poste d'observation soit en cause; il pensait qu'il y aurait des actions
2 qui suivraient.
3 Q. Bien. Maintenant, regardons le dernier paragraphe avant de passer à
4 autre chose. Il écrit : "Utilisation d'un appui aérien rapproché de toutes
5 les façons possibles, à mon avis n'est pas encore réalisable. Il va
6 provoquer l'armée serbe de Bosnie de telle manière qu'à la fois Srebrenica
7 proprement dit et les postes d'observation et les périmètres de l'ONU
8 seront pris pour cible par tous les moyens."
9 Est-ce que c'est de ça que vous parliez il y a un instant dans votre
10 déposition, Général, c'est-à-dire cette préoccupation qu'il fallait avoir à
11 faire face à tout un système d'armes dans le cas où un appui aérien
12 rapproché serait employé ?
13 R. Oui, c'est la menace dont je parlais récemment. Karremans craignait
14 vraiment que la VRS ne déploie tous les moyens dont elle disposait autour
15 de l'enclave comme représailles pour l'utilisation de la force aérienne et
16 il craignait que les habitants de Srebrenica n'en soient victimes.
17 Q. Bien. Maintenant, passons à la journée du 10 juillet. Les positions de
18 blocage sont mises en place. Brièvement, Général, quelle évolution
19 importante a eu lieu ce jour-là ?
20 R. En fait, le scénario s'est développé comme l'un des scénarios éventuels
21 que nous avions imaginés selon lequel les troupes de la VRS ont poursuivi
22 leurs attaques et pour finir ont attaqué les positions de blocage, le
23 blocus. A partir de ces positions de blocage, les troupes de l'ONU ont
24 riposté en tirant. Parce que nous avions déjà repéré que cette situation
25 était possible, nous avions repéré cela d'avance, et nous avions déjà
26 achevé les préparatifs visant à demander l'appui aérien la veille. Toutes
27 les formes prévues avaient été mises en place, et nous n'avions plus qu'à
28 donner la dernière mise à jour concernant la situation et mettre notre
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1 signature à la procédure de demande de l'appui aérien de façon à ce qu'elle
2 se fasse très rapidement. Nous avons réalisé que cette situation à la fin
3 de l'après-midi du 10, et le résultat a été que le colonel Karremans a
4 alors demandé l'appui aérien.
5 Cette demande a été envoyée à Sarajevo par l'intermédiaire du quartier
6 général de Tuzla, et Sarajevo a répondu : Oui, c'est exactement la
7 situation dont nous avons dit qu'elle justifierait un appui aérien. Ceci
8 voulait dire que nous approuvions immédiatement la demande et que nous
9 l'envoyions à Zagreb, parce que c'était à Zagreb que se trouvait le niveau
10 nécessaire pour l'approbation définitive, le niveau ultime.
11 Q. Maintenant, étant donné ce que vous avez dit dans votre déposition du
12 point de vue du blocage des positions et de l'établissement des conditions
13 préalables à l'obtention de l'autorisation d'un appui aérien rapproché,
14 est-ce que ceci c'était la première fois que ces conditions d'appui aérien
15 rapproché étaient réunies au cours de l'attaque de la VRS ou est-ce que ces
16 conditions d'emploi d'un appui aérien rapproché avaient déjà réunies à
17 plusieurs reprises au cours de ces quelques journées qui s'étaient écoulées
18 ?
19 R. Beaucoup plus tôt il y a eu des situations dans lesquelles ceci aurait
20 justifié le déploiement d'un appui aérien rapproché. Si vous lisez les
21 résolutions de l'ONU, la Résolution 824 et la Résolution 836 de l'ONU, là
22 on trouve clairement décrit quelles sont les circonstances dans lesquelles
23 le déploiement d'un appui aérien est justifié, certainement dans les cas de
24 légitime défense pour les troupes de l'ONU, mais également dans des cas
25 dans lesquels la population civile dans les zones protégées serait
26 attaquée. Et ceci s'était déjà produit plusieurs fois.
27 Les raisons pour lesquelles aucun appui aérien n'avait été utilisé à ce
28 moment-là c'était parce qu'à la fin du mois de mai, des directives
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1 complémentaires ou supplémentaires avaient été émises pour le déploiement
2 d'un appui aérien et des restrictions très importantes avaient été
3 demandées pour le déploiement d'un appui aérien. C'est la raison pour
4 laquelle dans le cas de la demande de M. Karremans, les 6 et 8 juillet pour
5 un appui aérien, aucun appui aérien rapproché n'avait été accordé. C'est
6 seulement après qu'une telle situation grave s'était développée comme ça a
7 été le cas le 10 juillet, comme on l'a dit, si vous ne le faites pas
8 maintenant c'est maintenant ou jamais. A ce moment-là, sinon, il sera trop
9 tard. Tout au moins au niveau de Sarajevo, le quartier général de Sarajevo,
10 la permission a été donnée, mais le niveau qui avait en fin de compte le
11 pouvoir, qui était en fin de compte habilité à donner cette autorisation a
12 tardé si longtemps qu'en fin de compte ils n'ont pas donné cette permission
13 à la date du 10 juillet.
14 Q. Pourquoi ?
15 R. Le problème consistait en ce qu'ils s'étaient réunis pour rester
16 longtemps à cette réunion, entre-temps la nuit était tombée, par conséquent
17 nous étions dans une situation où les troupes de l'ONU et de VRS étaient si
18 près les uns des autres qu'il était difficile de faire distinction entre
19 ces deux forces en présence. Ce qui a fait qu'il était vraiment devenu
20 extrêmement dangereux de déployer un appui aérien, c'était fort risqué.
21 Q. Pourquoi a-t-on insisté sur l'appui aérien au lieu d'avoir, par
22 exemple, des frappes aériennes. Pourquoi le colonel Karremans a-t-il requis
23 tout cela ?
24 R. Ceci devait être un moyen en dernier ressort a utilisé à cette fin.
25 Fallait-il demander la permission à New York, par conséquent devait-on
26 avoir encore plus de temps à notre disposition et que nous étions certains
27 qu'on n'aurait pas à faire droit ou donner réponse à notre requête.
28 Secundo, second facteur, consistait dans le fait que peut-être aurait-il
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1 été plus facile de voir qu'un appui aérien aurait peut-être reçu en
2 réaction une autre fois, par conséquent, il pourrait peut-être dissuader
3 les Serbes pour qu'ils se retirent.
4 Q. Ensuite, est-ce que vous avez reçu définitivement une réponse pour ce
5 qui est un appui aérien en date du 10 juillet ?
6 R. Oui.
7 Q. Comment vous y êtes-vous pris ?
8 R. Si ma mémoire est bonne, je crois que par téléphone j'avais contacté
9 les deux parties et que nous avons demandé et requis un appui aérien.
10 M. THAYER : [interprétation] Je voudrais que pour un bref temps on se
11 penche sur la pièce à conviction 2976 sur la liste 65 ter.
12 Q. Mon Général, familiarisez-vous avec ce document, prenez-en
13 connaissance.
14 R. Je l'ai déjà fait.
15 Q. Vous avez d'abord envoyé une requête pour dire comment les parties ont
16 été informées, en voici un rapport sur cette conversation par téléphone.
17 R. Il s'agissait de l'une de ces conversations par téléphone pertinentes
18 où je les ai déjà informés du fait qu'un appui aérien a été demandé.
19 Q. Très bien. Maintenant je voudrais vous faire voir quelque chose
20 d'autre, quelque peu différent.
21 M. THAYER : [interprétation] Je voudrais que l'on affiche la pièce P02753,
22 moyennant le prétoire électronique.
23 Q. Mon Général, il s'agit là de la déclaration du général Gvero telle que
24 présentée par les services d'information du quartier général de VRS en date
25 du 10 juillet 1995. Vous rappelez-vous que nous nous penchions ensemble sur
26 ce document lors du récolement avec vous ?
27 R. Oui.
28 Q. Etait-ce pour une première fois, pour autant que vous en rappeliez,
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1 pour vous de voir ce document ?
2 R. Oui, c'est exact.
3 M. THAYER : [interprétation] Je voudrais qu'on se penche sur la page
4 2, version anglaise. Maintenant pour ce qui est de la version en B/C/S, je
5 crois que nous avons besoin de la page 3. Etant donné la façon dont il a
6 été procédé pour rédiger ce document, nous avons plusieurs pages dans ce
7 lot de pages où il n'y pas de texte.
8 Voilà nous y sommes en version en B/C/S.
9 Q. Au milieu du texte dans le paragraphe qui commence : "Ils ont également
10 tué un soldat de l'ONU" il y a là une ligne faisant partie intégrante de la
11 déclaration du général Gvero disant que : "Nos activités actuellement ne
12 visent qu'à neutraliser les terroristes musulmans et ne prennent pas pour
13 cible aucunement ni des civils non plus que des membres de la FORPRONU."
14 Lorsqu'il dit que : "Leurs activités de combat n'ont aucunement visé des
15 civils ou des membres de la FORPRONU", est-ce exact ou pas comme assertion
16 ?
17 R. Tout à fait inexact. Les réponses qui ont été les miennes préalablement
18 permettent de voir de toute évidence qu'on ne tirait pas uniquement sur les
19 positions sous le contrôle de l'ABiH mais également on prenait pour cible
20 la population civile.
21 Q. Merci. Nous n'avons plus besoin de ce document.
22 Passons à la date du 11 juillet. Je crois qu'il y a sans conteste là de
23 problème pour dire que ce jour-là en vérité un appui aérien a été donné.
24 Nous n'allons pas descendre dans le détail, comment ceci s'est produit, la
25 Chambre de première instance en a été déjà informée par des dépositions.
26 Dites, Général, tout simplement, est-ce que cet appui aérien a pu mettre
27 fin à des attaques de la VRS ?
28 R. Ma réponse à cette question est négative, et cela pour plusieurs
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1 raisons. Primo, l'appui aérien direct a été d'ailleurs effectué par un
2 nombre d'appareils très petits. Secundo, il s'agit de parler d'un appui
3 aérien rapproché sur des troupes qui ont été développées et déployées, je
4 dirais, sur des sites encore beaucoup plus larges. Si on était dans un
5 désert, par exemple, où des unités semblent être concentrées, un tel appui
6 aérien serait efficace, mais là où les sites pris en position par des
7 unités se trouvent éparpillés et étant donné la végétation et le terrain,
8 il a fallu avoir des combats de blindés, et cetera. Lorsqu'on vole à 1 000
9 kilomètres par heure, cela est difficile, même une fois notés et observés,
10 il est difficile de les combattre au sol.
11 Pour une telle situation, il y a moins d'efficacité.
12 Q. Ce à quoi et sur quoi je voudrais me concentrer pendant un certain
13 temps serait comme suit : que dirait-on et qu'avait-on dit et qu'avait-on
14 fait de la part du VRS qui était conséquence directe de cet appui aérien ?
15 R. Nous l'avions su déjà depuis le temps où toutes les fois où l'ONU avait
16 procédé à des forces aériennes, la VRS a réagi violemment. De même en
17 était-il cette fois-ci. Pour être concret, cela veut dire que, vers midi en
18 date du 11 juillet, le général Gvero a fait appel auprès de notre
19 commandement, nous avons reçu un coup de fil, le général disait que si on
20 n'arrêtait pas les frappes aériennes, les bases de Potocari et les parages,
21 les environs seraient pris pour cible et bombardés.
22 Peut-être vous vous rappelez le tableau général qui se présentait, mais je
23 peux expliquer. A cette époque-là, la base a été vraiment dans la situation
24 de recevoir des réfugiés qui se comptaient à Srebrenica par milliers. S'il
25 y avait un pilonnage de la part de mortiers ou de la part d'artillerie,
26 ceci aurait donné lieu à une effusion de sang. Les victimes en seraient des
27 réfugiés innocents.
28 En outre, il y avait énormément là de femmes et d'enfants. Cette
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1 menace a été prise au sérieux de la part de nous autres qui nous trouvions
2 au quartier général de Sarajevo. Faudra-t-il ajouter à cela qu'en ce
3 moment-là, Srebrenica était déjà prise, la localité même. D'après nous, la
4 bataille était déjà finie et de ce point de vue là nous avons dit que se
5 remettre à des risques tels effusion de sang, il a fallu tout simplement
6 rappeler toutes ces attaques et frappes aériennes.
7 Q. Bien. Maintenant, Mon Général, avez-vous été la seule personne qui a
8 reçu cette menace, et outre la menace qui a été formulée par le général
9 Gvero, avez-vous été la seule personne à recevoir une menace qui a été
10 causée par le fait qu'il y avait là un raid aérien rapproché direct ?
11 R. Je ne suis pas à 100 % certain. Je crois qu'un avertissement a été
12 envoyé également au colonel Karremans, chose faite par le commandant serbe
13 local. Mais je n'en suis pas entièrement certain, par conséquent, je me
14 dois de prendre quelques réserves à cet égard.
15 Q. Bien. Maintenant penchons-nous sur le document 2906, document au titre
16 de l'article 65 ter.
17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Une seconde. En attendant l'affichage
18 de ce document lorsque le général fait mention d'un avertissement de la
19 part d'un commandant serbe local qui s'était adressé au colonel Karremans,
20 qui aurait-il pu être ? Avez-vous une idée de la personne dont vous parlez
21 lorsque vous faites référence à un "commandant serbe local" ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Malheureusement, je ne sais pas qui était le
23 partenaire direct en matière de ces négociations à l'intention du colonel
24 Karremans.
25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Mon Général.
26 M. THAYER : [interprétation]
27 Q. Mon Général, voyez-vous ce document sur l'écran ?
28 R. Oui.
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1 Q. Faites-en une lecture silencieuse, après quoi familiarisez-vous avec le
2 texte. Je vais poser quelques questions après cela.
3 R. Oui, j'ai lu le document.
4 Q. Vous avez parlé tout à l'heure de la menace qui a été faite par le
5 général Gvero au cours de cette conversation par téléphone. Sur la base de
6 ce dont vous vous souvenez, pouvez-vous dire qu'il s'agit là de cette
7 conversation, et lors de la conversation cette menace a été proférée ou
8 peut-être qu'il s'agit d'une autre conversation ?
9 R. Non, non, il s'agit bien de cette conversation-là.
10 Q. Dans le second paragraphe, nous voyons qu'on cite comme suit : "Le
11 général Gvero réfutant tout cela a dit que les unités de l'armée des Serbes
12 de Bosnie ne s'attaquaient pas contre la FORPRONU."
13 R. Je crois que jusqu'à ce stade-là il était tout à fait clair que c'était
14 une assertion qui ne tenait pas debout. Pendant des journées déjà, la VRS
15 attaquait l'ONU et c'est ainsi que nous étions dans la situation où la
16 ville de Srebrenica a été prise. Alors qu'eux de leur côté présumaient
17 qu'il n'y avait pas d'attaques, chose tout à fait absurde et peu croyable.
18 Q. Si l'on se penche maintenant sur le troisième paragraphe, à commencer à
19 regarder le texte par le bas de la page, Mon Général, nous y voyons que :
20 Le général Gvero a répondu : "Il n'y a rien à arrêter et qu'il ne
21 devait pas le faire car l'ONU et la FORPRONU, ni Srebrenica n'étaient pas
22 attaqués. Au cas où on arrêtait l'appui aérien, le commandant Nicolai
23 serait considéré comme responsable du destin de ses hommes et également
24 responsable du destin de la population de Srebrenica."
25 Comment avez-vous compris cette déclaration ?
26 R. J'ai compris comme quoi le fait de voir le général Gvero passer la
27 responsabilité de toute conséquence qui pourrait y avoir sur le bataillon
28 et sur moi-même, si le bataillon et la population civile avaient été
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1 attaqués, vous avez demandé donc un appui aérien, par conséquent : "Vous
2 êtes directement responsable de ce qui surviendra une fois que nous aurons
3 réagi."
4 Q. Comment avez-vous compris quelles devaient être les ripostes, quelles
5 devaient être les réactions de leur part ?
6 R. J'ai compris qu'il devait y avoir le fait de voir le feu ouvert contre
7 la base de Potocari et qu'il y aurait une effusion de sang et que d'après
8 lui, d'après ces propos-là, j'en aurais été responsable.
9 Q. Cette menace-là, l'avez-vous prise au sérieux, comme quoi il y aurait
10 un pilonnage de la base ?
11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Josse.
12 M. JOSSE : [interprétation] Ceci ne va pas bien, Monsieur le Président. Mon
13 confrère a vraiment fait entrer le terme "menace" et il devait en être
14 censuré. Il sait très bien les raisons pour lesquelles il le fait.
15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je peux demander à M. Thayer de
16 répondre ?
17 M. THAYER : [interprétation] Je vais demander à mon confrère de se calmer.
18 Il s'agit d'un terme qui était déjà utilisé par le témoin lorsqu'on en a
19 traité. Je voulais tout simplement l'entendre et vérifier cela.
20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Josse, il y a certainement une
21 bonne compréhension et intelligence entre M. Thayer et le général. Pendant
22 ces 15 dernières années lorsque ces questions ont été posées le terme, le
23 mot de "menace" a créé différentes formes en description de ces termes ont
24 été utilisés lors de la conversation et le témoin a compris de quoi il
25 s'agit.
26 M. JOSSE : [interprétation] J'ai deux remarques à faire. Serait-il
27 intéressant ou utile de faire référence aux fragments ou au passage du
28 compte rendu d'audience où ceci a été fait. Même si on devait le faire,
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1 Monsieur le Président, à voir toutes les questions préalables, M. Thayer
2 voulait entendre le témoin dire le terme de "menace." Il ne l'a pas reçu en
3 réponse et délibérément, intentionnellement il assumait cela en soumettant
4 le document au témoin.
5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bon. Lorsqu'il a posé la question au
6 témoin il lui a montré le document et il lui a posé la question : "Ce
7 document permettait-il d'indiquer cette menace qui a été faite par le
8 général Gvero à cette occasion et à une autre," le témoin a tout simplement
9 accepté et a répondu de façon affirmative. Je ne sais pas comment on
10 pourrait décrire tout cela, mais je suis un peu surpris de voir le témoin
11 accepter la suggestion comme quoi il s'agissait de menace.
12 M. THAYER : [interprétation] Mon honorable collègue devrait m'assister à ce
13 moment-ci. Page 47, ligne 9, lorsque j'ai posé la question de savoir :
14 "Qu'est-ce qui a été fait par la VRS très exactement en résultat de cet
15 appui aérien ?"
16 Il a fait réponse : "Toutes les fois où nous avons eu recours à un
17 appui aérien, nous savions que de telles choses devaient se produire.
18 Concrètement le 11 juillet, nous avons reçu un coup de téléphone du général
19 Gvero qui disait que le quartier général qui était le nôtre, il n'arrêtait
20 pas l'utilisation de ces appuis aériens rapprochés, lui entamerait le
21 pilonnage de la base de Potocari et des parages.
22 "Peut-être vous vous rappelez les photos et le tableau général, en ce
23 moment-là la base était bondée de réfugiés. Non loin de la base se
24 trouvaient de réfugiés qui se trouvaient à ciel ouvert. Si le pilonnage
25 avait lieu, il aurait un bain de sang où d'ordinaire des réfugiés innocents
26 auraient péri. Il s'agit pour la plupart des cas d'enfants et de femmes.
27 Cette menace a été prise très au sérieux dans les quartiers qui étaient les
28 nôtres à Sarajevo."
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1 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Allons-nous aller de l'avant, Monsieur
2 Josse ?
3 M. JOSSE : [interprétation] De toute évidence cet interrogatoire sera
4 poursuivi. J'ai déjà dit que je n'étais pas dans mon droit en disant que le
5 terme de "menace" n'a pas été employé. Mais encore je m'en tiens à ce que
6 j'ai dit que mon honorable confrère ne devait pas utiliser tout cela dans
7 le contexte de ses questions.
8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bon. D'accord. Vous pouvez encore une
9 fois, comment vous vous entendez à voir que M. Thayer qualifie tout cela ?
10 M. JOSSE : [interprétation] De toute évidence à deux reprises en posant des
11 questions il voulait entendre dire ce terme par le témoin. Je l'ai déjà dit
12 à trois reprises.
13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. Mais tout de même vous avez dû
14 intervenir, parce qu'il devait y avoir cette intelligence et cette
15 compréhension entre le Procureur et le témoin.
16 M. JOSSE : [interprétation] Il n'y avait pas d'inconvénients et rien
17 d'erroné en ce qui concerne les autres questions posées.
18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Alors, allons de l'avant.
19 [La Chambre de première instance se concerte]
20 M. THAYER : [interprétation]
21 Q. Excusez-nous pour tout cela, cet interlude. Pardonnez-le, Mon Général.
22 Pourquoi avez-vous pris au sérieux la menace du général Gvero ?
23 R. Je l'ai déjà dit ici en répondant que lors des appuis aériens
24 rapprochés de la part de l'ONU, nous avons eu comme réaction, comme
25 riposte, des attaques violentes que nous avons essuyées. Notamment je me
26 réfère à ces attaques les 25 et 26 mai, où non seulement des civils ont été
27 pris pour cible, mais entre autres le centre de Tuzla a été touché, pris
28 pour cible et touché, où plus de 80 personnes ont trouvé la mort et il y a
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1 eu pas mal de blessés. Le tout ayant été le résultat de la riposte lorsque
2 les appuis aériens ont été utilisés.
3 Q. Est-ce que vous vous rappelez que le général Gobillard a eu des
4 conversations avec le général Gvero un petit peu plus tard au cours de la
5 même journée ?
6 R. Oui, je m'en souviens.
7 Q. Quel en a été d'ailleurs le sujet quant à ces conversations par
8 téléphone ?
9 R. Pour autant que je m'en souvienne, d'une part, voulait-on dire
10 clairement qu'il n'y avait plus, un terme avait été mis à tous les appuis
11 aériens rapprochés; d'autre part, le général Gobillard a envoyé un
12 avertissement à la VRS comme quoi de nouveaux appuis aériens ne devraient
13 pas cesser si la VRS poursuit ses activités de combat et d'attaque, de même
14 devait-on procéder à des négociations pour savoir ce qu'il fallait faire
15 avec la population locale qui a fui en direction de l'enclave.
16 Q. Est-ce que vous vous rappelez ou avez-vous été présent lors de cette
17 conversation qui a eu lieu entre le général Gobillard et le général Gvero ?
18 R. Non, je n'ai pas été présent pendant tout le temps de cette
19 conversation. Je sais que la conversation a eu lieu, je crois que j'étais
20 présent au début de la conversation, mais comme vous pouvez l'imaginer
21 vous-même probablement et le comprendre, il y avait beaucoup à faire et
22 j'ai été convoqué pour m'en aller quelque part parce que je devais répondre
23 à un coup de téléphone par le ministre de la Défense des Pays-Bas, voilà la
24 raison pour laquelle j'ai dû quitter le bureau où cette conversation par
25 téléphone a eu lieu. J'ai lu le rapport d'ailleurs concernant cet appel par
26 téléphone un peu plus tard.
27 Q. Très bien. Nous avons entendu énormément d'éléments de preuve à propos
28 de cette fameuse conversation téléphonique, donc nous allons passer à autre
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1 chose.
2 Nous allons passer maintenant au 12 juillet, s'il vous plaît. Vous
3 souvenez-vous avoir contacté l'état-major général de la VRS ce jour-là à
4 nouveau pour leur parler des problèmes de l'évacuation des réfugiés qui
5 s'étaient regroupés dans l'enclave ?
6 R. Oui, je m'en souviens bien. J'ai essayé d'offrir mes services en tant
7 que négociateur pour pouvoir parler avec les membres de la VRS, en effet
8 après les incidents qui avaient eu lieu nous considérions que le colonel
9 Karremans n'était peut-être pas la personne idoine pour ces conversations.
10 Nous avons aussi appris que le général Mladic en personne était avec ses
11 propres troupes dans l'enclave, et nous considérions que les négociations
12 devraient sans doute se passer entre généraux plutôt qu'entre un général
13 d'un côté et un colonel de l'autre.
14 Q. Très bien. Donc qu'avez-vous fait au niveau de la FORPRONU pour faire
15 en sorte qu'une personne d'un grade supérieur à celui d'un colonel puisse
16 s'entretenir avec Mladic ?
17 R. Le général Janvier a proposé l'envoi d'une équipe de négociateurs
18 depuis Zagreb, et Sarajevo a proposé que je sois négociateur aussi, mais
19 une autre alternative était de proposer le chef du département des affaires
20 civiles en tant que négociateur. Mais tout cela a échoué. Puisque Mladic a
21 fait savoir qu'il se proposait de négocier avec Karremans et qu'il n'y
22 avait pas besoin d'autres négociateurs dans l'enclave.
23 Q. Mais pourquoi est-ce que vous-même ou le général Gobillard n'êtes pas
24 monté dans un APC pour vous rendre immédiatement à Srebrenica ?
25 R. Je comprends pourquoi vous me posez cette question. Mais toute personne
26 qui savait ce qui se passait à ce moment-là aurait souri en entendant cela.
27 Parce que cela signifiait d'essayer de se frayer un chemin au travers du
28 territoire détenu par les Serbes, ce qui aurait demandé beaucoup plus qu'un
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1 seul APC. Avec un seul APC, on n'aurait même pas pu passer les frontières
2 pour rentrer dans les territoires détenus par les Serbes.
3 On ne pouvait pas non plus y aller en hélicoptère, c'était impossible. Nous
4 savions que la VRS avait des roquettes antiaériennes. Un avion à réaction
5 américain avait été abattu quelques mois précédemment. Alors un
6 hélicoptère, c'est une cible facile pour ce type d'arme. Je ne l'ai pas
7 fait parce qu'il aurait fallu être complètement fou pour se lancer dans une
8 aventure de la sorte.
9 Q. Très bien.
10 M. THAYER : [interprétation] Pourrions-nous maintenant avoir la pièce
11 P02907.
12 Q. Là encore, pourriez-vous lire ce document à voix basse, afin d'en
13 prendre connaissance. Il s'agit d'un rapport qui fait deux pages.
14 R. J'ai lu la première page.
15 Q. Merci.
16 R. J'ai fini de lire.
17 Q. Très bien. Revenons-en à la première page, car j'ai quelques questions
18 à vous poser à ce propos.
19 La première ligne, il s'agit d'une conversation téléphonique entre vous et
20 le général Gvero en date du 12 juillet 1995 à 14 heures 45, vous dites au
21 général Gvero que vous l'avez appelé parce qu'il y a eu une réunion le
22 matin même entre le colonel du DutchBat à Srebrenica et le général Mladic à
23 propos de l'évacuation des réfugiés qui se trouvent à Srebrenica.
24 Vous vous en souvenez ?
25 R. Oui.
26 Q. Vous souvenez-vous de la réponse que vous a donnée le général Gvero
27 lorsque vous avez suggéré que vous pouviez peut-être vous rendre à
28 Srebrenica pour parler directement avec les autorités de la VRS ?
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1 R. Oui, ce n'était pas nécessaire. Mladic pouvait traiter la chose
2 parfaitement avec le colonel Karremans. Et qu'il n'y avait aucun besoin
3 d'envoyer des hélicoptères avec des médicaments, des équipements médicaux,
4 parce que les hôpitaux serbes étaient parfaitement en mesure de s'occuper
5 des blessés.
6 Q. Très bien. Passons à autre chose. Nous en avons terminé avec ce
7 document.
8 Selon les expériences que vous avez des contacts téléphoniques personnels
9 avec le général Gvero, des rapports que vous receviez, des conversations
10 que vous avez eues avec le général Gobillard et le général Gvero, avez-vous
11 réussi à mieux comprendre quel rôle avait joué le général Gvero au sein de
12 l'état-major de la VRS à ce moment-là ?
13 R. Oui. Je pense que c'était le général à qui on avait donné pour mission
14 de maintenir le contact avec les Nations Unies en l'absence du général
15 Mladic, parce qu'il était sur place dans l'enclave. Et le général Gvero
16 sans doute était responsable du QG à l'époque.
17 Q. D'après vous, quel était le rôle du général Milovanovic au cours de
18 cette période ?
19 R. Je n'en n'ai aucune idée. D'habitude le général Milovanovic était
20 déployé pour résoudre les problèmes quand il y avait des problèmes, mais là
21 je ne sais pas où il était. Il était sans doute au CS, cela dit, il semble
22 qu'il n'était pas à Srebrenica, je n'en ai pas l'impression, donc il avait
23 sans doute été envoyé ailleurs.
24 Q. Très bien. Suite à toutes ces conversations avec le général Gvero,
25 avez-vous réussi à savoir ce que savait exactement le général Gvero de la
26 situation alors qu'il était, comme vous venez de nous le dire, chef du QG ?
27 R. D'après ce qu'on s'est dit lors de nos conversations, je pourrais en
28 conclure qu'il ne savait pas grand-chose, mais je ne suis pas suffisamment
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1 naïf pour prendre cela pour argent comptant. Je me doute bien qu'il savait
2 exactement ce qui se passait. Cela dit, il n'en laissait rien voir.
3 Q. Sur quoi vous basez-vous pour dire qu'en fait finalement il savait
4 parfaitement ce qui se passait ? Comment en arrivez-vous à cette conclusion
5 ?
6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Josse.
7 M. JOSSE : [interprétation] Je suis désolé, je vais être pédant à nouveau,
8 mais il y a une différence entre une hypothèse et une conclusion.
9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous avez raison donc il va falloir que
10 vous reformuliez votre question, Monsieur Thayer.
11 M. THAYER : [interprétation]
12 Q. Vous avez dit qu'en vous basant sur ce que vous aviez entendu dans le
13 cadre des conversations que vous avez eues avec M. Gvero, "on pourrait en
14 déduire que le général Gvero ne savait pas grand-chose", alors qu'en fait
15 "je pensais qu'il savait parfaitement ce qui se passait", alors pourquoi
16 est-ce que vous le pensiez ?
17 R. Je le pensais parce que la VRS m'a donné l'impression d'être une armée
18 extrêmement bien organisée, très bien disciplinée. Et dans toute armée bien
19 disciplinée, bien organisée, on fait des comptes rendus, il y a des
20 rapports quotidiens, voire plusieurs fois par jour à propos de ce qui se
21 passe. Ils avaient les moyens de transmission nécessaires pour se tenir au
22 courant. Donc je ne vois pas comment le QG de la VRS n'aurait rien su de ce
23 qui se passait dans l'enclave de Srebrenica.
24 Q. Merci. J'ai encore quelques points à aborder, mais je pense que nous
25 pourrons en terminer avant la prochaine pause. Avant de demander que l'on
26 affiche le document suivant, j'aimerais que l'on fasse encore un petit saut
27 de quelques jours. Une fois que les civils ont été évacués de la base de
28 Potocari, vous souvenez-vous d'un événement où l'on a évacué médicalement
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1 des blessés de l'enclave, et pouvez-vous nous dire comment vous y avez
2 participé ?
3 R. Oui, il y a eu quelques blessés qui étaient à l'hôpital de Bratunac.
4 Quelques jours après la chute de l'enclave, des accords ont été conclus
5 pour qu'ils soient évacués sur Tuzla. Un convoi d'évacuation médical a été
6 organisé, un "medevac", et ce convoi médical passerait par un itinéraire
7 sécurisé pour arriver à Tuzla.
8 Mais quand ce convoi est arrivé à la frontière du territoire serbe,
9 il a essuyé des coups de feu, il a donc dû revenir sur ses pas. J'étais au
10 téléphone pour essayer de savoir pourquoi alors qu'il y avait eu accord sur
11 ce transport - tout d'un coup ce transport a essuyé des tirs - pour savoir
12 pourquoi la mission n'avait pas pu aller à son terme.
13 M. THAYER : [interprétation] Pourrions-nous avoir s'il vous plaît la
14 pièce 2978 à l'écran.
15 Q. Veuillez le lire, s'il vous plaît.
16 R. Oui, je l'ai lu.
17 Q. Il s'agit d'un rapport en date du 16 juillet 1995, à 15 heures. Pouvez-
18 vous nous dire le lien entre ce rapport et ce dont vous venez de nous
19 parler ?
20 R. Oui, c'est exactement ça.
21 Q. Non, mais je vous ai demandé s'il y a un lien entre ce que vous avez
22 raconté sur cette évacuation et ce qu'il y a dans ce rapport ?
23 R. Oui, c'est le rapport, le compte rendu de la conversation téléphonique
24 que j'ai eue à propos de cet incident, le fait que malgré l'accord qui
25 avait été conclu pour le laisser passer, ce transport médical a essuyé des
26 tirs. J'ai aussi demandé que l'on prévienne le plus rapidement possible de
27 la nouvelle date de départ de ce convoi et l'itinéraire qu'il pouvait
28 emprunter. Et on m'a répondu que le général Gvero était en réunion avec les
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1 autorités du HCR à propos du destin des réfugiés et des itinéraires qu'ils
2 emprunteraient pour être évacués.
3 C'est étonnant qu'il y ait eu un accord avec les Nations Unies mais
4 qu'il fallait quand même un autre accord avec le HCR alors qu'il avait déjà
5 eu un accord précédent avec les Nations Unies, cela m'a tout à fait
6 surpris.
7 Q. Très bien. Vous souvenez-vous d'avoir reçu des informations selon
8 lesquelles le général Gvero avait en effet rencontré soit le HCR soit
9 d'autres représentants d'ONG le 16 juillet ou aux environs du 16 juillet ?
10 R. Non, je n'en ai pas entendu parler. Chaque jour, il y avait un
11 représentant du HCR qui participait à nos réunions d'état-major. Il n'a pas
12 dit quoi que ce soit à ce propos. La seule possibilité existante est que
13 les autorités du HCR à Tuzla, les locaux du HCR à Tuzla, s'entretenaient
14 directement avec Gvero. Mais ça paraît plutôt improbable.
15 Q. Très bien. J'aimerais que nous parlions de ce qui s'était passé le 21
16 juillet. Vous vous souvenez vous être rendu sur la zone de Srebrenica pour
17 une raison quelconque ce jour-là ?
18 R. Oui, je m'en souviens comme si c'était hier.
19 Q. Quelle était votre mission ?
20 R. Dans l'accord conclu entre le général Smith et le général Mladic
21 portant sur l'évacuation du Bataillon néerlandais de l'enclave, et portant
22 aussi sur d'autres sujets, il avait été dit que le général Mladic et le
23 général Smith assisteraient au départ du DutchBat, soit le général Smith
24 soit un adjoint du général Smith, parce que le samedi 22 juillet il y avait
25 une conférence importante à laquelle le général Smith devait assister. Il
26 m'a demandé de le remplacer et d'assister au départ du Bataillon
27 néerlandais. C'est pour cela que je suis parti à Srebrenica.
28 Le 21, en route pour Srebrenica, les troupes du général Mladic m'ont
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1 arrêté. Il était là d'ailleurs. C'est la première fois que je l'ai
2 rencontré. Il a demandé que je me mette derrière sa voiture pour aller
3 jusqu'à Bratunac. A Bratunac, nous avons déjeuné, nous avons parlé des
4 arrangements éventuels permettant le départ du Bataillon néerlandais, et
5 ensuite nous sommes allés à la base pour voir comment se passaient les
6 préparatifs de départ, si le convoi était prêt à partir, et ensuite nous
7 avons assisté au départ en tant que tel.
8 Q. Très bien. Quelle était votre priorité ce jour-là ?
9 R. La priorité numéro 1 m'avait été confiée par le chef d'état-major de la
10 défense des Pays-Bas, il m'avait dit que le Bataillon néerlandais devait
11 absolument quitter l'enclave ce jour-là parce qu'il y avait sans doute des
12 décisions très forte qui allait être prise à la Conférence de Londres et il
13 ne fallait absolument pas que les Néerlandais restent dans l'enclave, parce
14 que cela pourrait avoir des conséquences terribles. Donc il m'a dit :
15 Faites ce que vous voulez, mais il faut absolument que tous ces Néerlandais
16 partent et quittent non seulement l'enclave mais aussi tout le territoire
17 détenu par les Serbes.
18 Q. Très bien. Nous allons maintenant voir une vidéo pour gagner du temps.
19 M. THAYER : [interprétation] Il y a un certain nombre de séquences vidéo
20 que nous devons regarder. Nous allons d'abord regarder la P02909. Il s'agit
21 de la pièce V000-6100.
22 La première séquence que nous allons regarder commence à 20 minutes et 45
23 secondes.
24 [Diffusion de la cassette vidéo]
25 M. THAYER : [interprétation]
26 Q. Nous nous sommes arrêtés à 20 minutes 57 secondes. Reconnaissez-vous le
27 pont ?
28 R. Oui. C'est le pont qu'il faut emprunter pour quitter le territoire
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1 détenu par les Serbes de Bosnie pour entrer dans les autres zones serbes.
2 Q. Très bien. Maintenant regardons la séquence suivante. Séquence qui
3 commence à 26 minutes 41 secondes.
4 [Diffusion de la cassette vidéo]
5 M. THAYER : [interprétation]
6 Q. Nous avons arrêté la séquence à 27 minutes 17 secondes. J'ai quelques
7 questions à vous poser à propos de ce cliché.
8 On voit un véhicule des Nations Unies avec une personne qui semble saluer à
9 la portière. Pouvez-vous nous dire qui est cette personne à la portière qui
10 salue ?
11 R. C'est le commandant du véhicule. Mais je n'ai absolument aucune idée de
12 qui ça peut bien être. Je ne sais pas du tout qui c'est.
13 Q. Non, ce n'est pas la question que je vous ai posée, qui salue-t-il ?
14 R. Je comprends votre question maintenant. A droite de la route il y avait
15 le général Mladic avec certains de ses adjoints, et moi, j'étais à côté de
16 lui. Le général Mladic a salué les troupes qui quittaient l'enclave, et
17 parce que j'avais imaginé que certains soldats néerlandais auraient du mal
18 à saluer le général Mladic après ce qui venait d'arriver, je les ai salués
19 pour qu'ils me saluent moi pour que cela n'augmente pas le trouble qui
20 existait déjà, donc pour que le départ se passe bien.
21 Q. De l'autre côté de la route on voit quand même encore des véhicules des
22 Nations Unies et du personnel des Nations Unies. Savez-vous de qui il
23 s'agissait ?
24 R. L'un des véhicules c'est mon blindé, et l'autre venait aussi de notre
25 QG, il y avait quelques GCO qui étaient aussi à bord, c'étaient ceux qui
26 nous servaient d'interprètes ou de liaison avec le QG.
27 M. THAYER : [interprétation] Très bien. Pouvons-nous poursuivre la séquence
28 vidéo ?
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1 [Diffusion de la cassette vidéo]
2 M. THAYER : [interprétation]
3 Q. Nous avons arrêté la séquence à 28 minutes 21 secondes et deux
4 centièmes. Pourriez-vous, s'il vous plaît, identifier les personnes qui se
5 trouvent sur ce cliché ?
6 R. Il y en a deux que je reconnais très bien. Il y a le colonel Karremans,
7 il y a moi aussi, les autres sont des Serbes. Il me semble qu'à gauche on a
8 un représentant des autorités locales, mais je n'en suis pas sûr.
9 Q. L'homme au milieu qui se trouve avec la moustache en arrière-plan, vous
10 ne le reconnaissez pas ?
11 R. Non.
12 Q. Très bien.
13 M. THAYER : [interprétation] Regardons maintenant la dernière séquence
14 vidéo. C'est une séquence qui va commencer à 33 minutes 9 secondes.
15 [Diffusion de la cassette vidéo]
16 M. THAYER : [interprétation]
17 Q. Nous avons arrêté la séquence à 33 minutes 34 secondes deux centièmes.
18 Pouvez-vous identifier qui que ce soit sur ce cliché, en tout cas en ce qui
19 concerne les forces des Nations Unies ?
20 R. Oui. Ce sont les hommes qui ont les bérets bleus, alors celui qui est à
21 droite il s'agit de mon aide de camp, le lieutenant-colonel de Ruiter.
22 Celui qui se trouve tout à fait à gauche c'est mon garde du corps. Et celui
23 qui est au milieu, c'est moi. Je parle uniquement des trois personnes qui
24 ont des bérets bleus.
25 Q. Merci. Je pensais en avoir fini avant la pause. Malheureusement, j'ai
26 encore quelques questions à poser, donc il faudra reprendre après la pause.
27 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Nous allons faire la pause
28 et nous reprendrons dans 25 minutes.
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1 --- L'audience est suspendue à 17 heures 46.
2 --- L'audience est reprise à 18 heures 14.
3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Thayer, c'est à vous de
4 reprendre et de poursuivre.
5 M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
6 Q. Bonsoir, Mon Général.
7 R. Bonsoir.
8 Q. Juste pour en finir avec quelques questions. Revenons à la date du 21
9 juillet, vous avez fait mention du fait que vous avez eu un repas avec le
10 général Mladic à Bratunac. Y a-t-il eu un accord quelconque concernant le
11 départ de la FORPRONU avec tous ses équipements ?
12 R. Oui. Un accord conclu par les généraux Mladic et Smith à Belgrade plus
13 tard, qui a été réitéré et confirmé en date du 19 juillet, dit clairement
14 que les membres du Bataillon néerlandais auraient été autorisés à quitter
15 l'enclave dotés de tous leurs équipements et leurs avoirs individuels. Au
16 cours de la conversation que j'ai eue avec le général Mladic j'en ai fait
17 mention une référence a été faite par moi à ce sujet et j'ai demandé si
18 tout ceci a été en quelque sorte préparé et plus tard lors de l'arrivée du
19 colonel Karremans il a demandé si l'autre a récupéré tous ces équipements,
20 et cetera. Il a dit que "oui". Ensuite, je lui ai demandé s'ils ont tous
21 les équipements des gens qui se trouvaient dans les postes d'observation et
22 qui ont fui vers les territoires serbes. Il a répondu qu'il n'avait
23 toujours pas ces équipements-là.
24 J'ai voulu évidemment m'informer auprès du général Mladic au sujet de ces
25 équipements : "Quand c'est que je pouvais les récupérer ces équipements ?"
26 Ceci l'a mis en colère. Il a dit ceci était absolument hors question, que
27 ceci ne pourrait jamais avoir lieu et que c'est lui qui dictait les
28 conditions dans lesquelles l'évacuation devait avoir lieu et que plus tard
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1 un arrangement devait être conclu avec le général Janvier au sujet des
2 véhicules et de quelques autres équipements qui appartenaient au poste
3 d'observation.
4 Q. Etant donné que vous avez été un témoin oculaire lors du retrait du
5 Bataillon Néerlandais, est-ce que vous avez fait le voyage de Srebrenica,
6 Mon Général ?
7 R. Oui. Ceci a été prévu également par l'accord conclu. En fait, je me
8 devais de faire un tour des villes de Srebrenica et de Bratunac, pourtant
9 le général Mladic a dit qu'il n'y avait pas suffisamment de temps pour
10 faire cela et qu'il n'y avait de temps que pour une visite de Srebrenica,
11 chose faite d'ailleurs.
12 Q. S'il vous plaît, voulez-vous dire à la Chambre de première instance ce
13 que vous avez vu lorsque vous avez visité Srebrenica en date du 21 juillet
14 ?
15 R. Oui. Le tableau qui semble gravé le plus profondément et vivement en ma
16 mémoire, c'est qu'il y avait un chaos immense, beaucoup de déchets, de
17 débris, de vêtements, de lainage ou de literie, et cetera. Il s'agissait
18 évidemment de pays qui ont été pilonnés ou détruits qui étaient la source
19 de tous ces déchets, et des maisons qui ont été prises pour cible par les
20 pilonnages et bombardements et qui ont été détruites avant.
21 A part cela, le village était pratiquement désert. Il y avait très
22 peu de gens là-bas. Les gens que nous avons pu voir en premier, je suppose
23 qu'ils étaient Serbes. Nous les avons vus entrer dans le village portant
24 leurs bagages sur leur dos. De toute évidence, ils avaient l'intention
25 d'emménager dans les maisons qui ont été abandonnées.
26 Q. Vous avez mentionné que vous vouliez faire un tour à Bratunac. Pour
27 quelle raison, Monsieur ?
28 R. Dans les deux semaines ou dix jours qui se sont passés depuis la chute
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1 de l'enclave, une immense rumeur se faisait entendre quant au destin de
2 Musulmans qui ont fui l'enclave. Entre autres, il y avait des rumeurs comme
3 quoi un bon nombre d'entre eux se sont faits capturer par les Serbes et
4 qu'ils étaient gardés prisonniers à Bratunac. C'était la raison pour
5 laquelle je voulais jeter un coup d'œil sur ce qui se passait à Bratunac,
6 peut-être pour voir de plus près, chose que je ne pouvais pas faire avant.
7 A mon retour, j'ai été autorisé seulement à passer par le village lorsque
8 je retournais à Sarajevo. Mais je n'ai pas été autorisé à voir plus en
9 détail tout cela.
10 Q. Pourquoi n'avez-vous pas insisté pour que quelque chose du genre vous
11 soit permis.
12 R. Ça ne sert pas à grand-chose d'insister si vous n'avez pas de moyens
13 pour le faire. Si vous n'êtes accompagné que de deux ou trois gardes du
14 corps, alors vous pouvez peut-être partiellement tout simplement faire
15 telle ou telle requête, c'est tout ce que vous pouvez faire.
16 M. THAYER : [interprétation] Merci, Mon Général. Je n'ai plus de questions
17 pour vous.
18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Monsieur Thayer.
19 Monsieur Zivanovic, vous avez demandé 30 minutes. Avez-vous besoin encore
20 toujours de 30 minutes ?
21 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Non, nous ne nous proposons pas de contre-
22 interroger ce témoin.
23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.
24 Madame Nikolic, vous avez demandé dix minutes. Est-ce que vous en
25 avez besoin toujours ?
26 Mme NIKOLIC : [interprétation] Oui. Dix minutes --
27 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Le conseil de la Défense de M.
28 Borovcanin confirme qu'il n'y aura pas de contre-interrogatoire ?
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1 M. LAZAREVIC : [interprétation] Oui, c'était --
2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Sarapa, en ce qui concerne --
3 M. SARAPA : [interprétation] Peut-être le tout dépend évidemment des
4 contre-interrogatoires qui auront été menés par d'autres, mais peut-être au
5 maximum s'agira-t-il de dix minutes, pas plus.
6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. Très bien, dix minutes.
7 Monsieur Ostojic, Monsieur Meek, qui sera le premier à s'occuper de ce
8 témoin ?
9 M. MEEK : [interprétation] Monsieur le Président, sur la base de ce qui a
10 été entendu, je crois qu'à ce stade il n'y aura pas de questions, le tout
11 dépendra du contre-interrogatoire de Mme Fauveau.
12 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Cela veut dire qu'il nous reste à
13 entendre Mme Fauveau.
14 Madame Fauveau, vous avez demandé une heure et 15 minutes.
15 Mme FAUVEAU : J'ai une vraie surprise. Je pense que je ne dépasserai pas
16 cinq minutes.
17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Ensuite, procédez et après
18 vous, c'est M. Josse ou M. Krgovic.
19 Allez-y, Madame Fauveau.
20 Contre-interrogatoire par Mme Fauveau :
21 Q. Bonjour, Monsieur.
22 R. [aucune interprétation]
23 Q. Je voudrais seulement vous poser une question. Est-ce que vous savez si
24 les membres du DutchBat étaient approvisionnés par les Serbes, notamment
25 par Bratunac ?
26 R. Je suis désolé. Qui aurait passé par Bratunac ?
27 Q. Est-ce que vous savez que le DutchBat recevait la nourriture de
28 Bratunac ?
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1 R. Vous voulez dire que ce serait arrivé pendant qu'ils étaient dans
2 l'enclave; c'est cela ? Les approvisionnements ne venaient pas de Bratunac,
3 ils venaient dans l'enclave par les convois, c'est tout ce que je sais.
4 Q. Je voudrais vous montrer la pièce 5D525. Et je voudrais attirer votre
5 attention que c'est la version B/C/S qui est l'originale, il y a une erreur
6 de date dans la version en anglais, donc il s'agit du 18 mars 1995.
7 Et il s'agit d'un contrat d'approvisionnement en nourriture et boisson
8 entre un hôtel à Bratunac et le représentant du DutchBat, le commandant
9 Boering. Avez-vous eu l'occasion de voir ce contrat ?
10 R. Non.
11 Q. Est-ce que vous savez qui est le commandant Boering ?
12 R. Je ne connais aucun militaire du nom de Boering; mais je n'exclus pas
13 qu'un commandant de ce nom à un moment donné ait pu être un membre du
14 Bataillon néerlandais, mais je ne le connais pas.
15 Q. Je vous remercie.
16 R. Ça c'était avant que je ne prenne mes fonctions.
17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Fauveau, je vous remercie, mais
18 est-ce que vous souhaitez épeler le nom, le nom de famille Boering au
19 témoin. Peut-être que oui, mais en fait je ne sais pas si le témoin suit le
20 compte rendu ou non. Il s'agirait de
21 B-o-e-r-i-n-g.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je l'ai lu.
23 Mme FAUVEAU : Je vous remercie beaucoup. Je n'ai pas d'autres questions.
24 M. LE JUGE AGIUS : [en français] Merci, Madame.
25 [interprétation] Monsieur Krgovic, Monsieur Josse.
26 Contre-interrogatoire par M. Josse :
27 Q. [interprétation] Vous savez que je m'appelle Me Josse. Nous sommes
28 rencontrés brièvement --
Page 18508
1 [La Chambre de première instance se concerte]
2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Poursuivez, mais dites-nous aussi de
3 combien de temps vous avez besoin, s'il vous plaît.
4 M. JOSSE : [interprétation]
5 Q. Nous nous sommes rencontrés il y a quelques semaines dans le cadre de
6 la coopération avec l'Accusation. Je représente les intérêts du général
7 Gvero, je pense que vous le savez.
8 M. JOSSE : [interprétation] Pour répondre à la question des Juges de la
9 Chambre, il me faut au moins deux heures, voire trois, puisque j'avais
10 demandé trois heures.
11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je ne veux surtout pas rogner vos
12 ailes, mais j'avais besoin de le savoir.
13 M. JOSSE : [aucune interprétation]
14 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Dans ce cas, avez-vous un témoin prévu
15 pour demain. J'aimerais savoir si l'Accusation a prévu quelqu'un.
16 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
17 M. THAYER : [interprétation] Si je me souviens bien, nous avons encore
18 notre témoin qui sert de bouche-trou à propos de la série des documents
19 obtenus du Corps de la Drina, on a encore quelques questions à lui poser.
20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] On ne sait toujours pas si vous avez
21 conclu un accord avec l'autre partie à propos des nouveaux documents à
22 ajouter à la liste 65 ter.
23 M. THAYER : [interprétation] Pour ce qui est du "road book", du journal, je
24 pense que oui. Il faut que je vérifie auprès de M. Nicholls. Mais c'est
25 encore autre chose que la série des documents du Corps de la Drina.
26 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Monsieur Josse, vous allez
27 avoir amplement le temps d'interroger ce témoin.
28 M. JOSSE : [interprétation] Je vous remercie.
Page 18509
1 Q. [interprétation] Le commandant Boering, ça vous dit rien; c'est cela ?
2 R. Non, rien, je suis désolé.
3 Q. Qu'en est-il du commandant Franken ?
4 R. Oui, celui-là, je le connais bien. C'était l'adjoint du colonel
5 Karremans.
6 Q. Non, je suis certain que vous vous souvenez de tout cela, vous vous
7 souvenez qu'à un moment lors de l'interrogatoire principal, je me suis un
8 petit peu énervé - pas du tout après vous, bien sûr - mais je me suis un
9 peu énervé, il s'agit d'une réponse que vous avez donnée à la page 45 du
10 compte rendu d'aujourd'hui, la réponse a été répétée par M. Thayer en
11 réponse à l'objection que je venais de soulever.
12 Vous avez dit : "Concrètement, cela signifiait que dans l'après-midi
13 du 11 juillet on a reçu un coup de fil du général Gvero à notre QG disant,
14 pour résumer, que si on n'arrêtait pas immédiatement d'employer la force
15 aérienne, il pilonnerait la base de Potocari ainsi que tous les endroits
16 environnants."
17 Est-ce exactement les mots qu'a employés mon client le 11 juillet ?
18 R. Je ne me souviens pas des mots exacts qu'il a employés. Je sais qu'il
19 m'a menacé puisqu'il a dit que si les attaques aériennes se poursuivaient,
20 j'en subirais les conséquences et j'en serais responsable. Il y a aussi eu
21 cette menace selon laquelle on tirerait sur la base et sur les environs de
22 la base. Je l'ai déjà dit plus tôt dans l'après-midi, j'ai dit que je ne
23 sais plus très bien si j'ai entendu ça directement du général Gvero ou si
24 cela a été relayé par le colonel Karremans. En tout cas, il y avait cette
25 menace qui était connue, et le général Gvero a parlé des conséquences, les
26 conséquences qui arriveraient si nous n'arrêtions les attaques aériennes.
27 Q. Je sais très bien que tout ceci s'est passé il y a 12 ans, mais
28 j'aimerais quand même que vous vous rappeliez exactement ce que vous dites
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1 que Gvero vous aurait dit et qui vous a tant troublé.
2 R. Je n'étais pas troublé ou irrité. Ce n'est pas vraiment ça. Je sais que
3 cet après-midi-là, on a entendu parler d'une menace selon laquelle la base
4 de Potocari et tous ses environs allaient être pilonnés. De ce fait, il y a
5 eu beaucoup de discussions au sein de l'état-major, et on est arrivé à la
6 décision de mettre un terme aux attaques aériennes. Quant à savoir comment
7 j'ai reçu la nouvelle et qui a dit exactement quoi, en quels termes, je
8 fais de mon mieux pour me souvenir de ce qui s'est passé, mais ça fait 12
9 ans, et je ne peux pas vous dire exactement ce qui se passait.
10 Q. Est-ce que c'est Gvero qui a proféré cette menace ?
11 R. A ma connaissance, oui.
12 Q. C'est une allégation extrêmement grave, le savez-vous vous ?
13 R. Oui. C'est pour cela que je me suis exprimé de la sorte. Je sais qu'une
14 menace a été reçue. Je sais en tout cas que le général Gvero a dit qu'il y
15 aurait des conséquences si les attaques aériennes ne cessaient pas, et que
16 ce serait moi qui serais responsable de ces conséquences. Et j'ai considéré
17 que ces conséquences étaient le pilonnage de la base.
18 Q. Très bien.
19 M. JOSSE : [interprétation] Regardons maintenant la pièce P2906, qui est le
20 compte rendu du lieutenant-colonel de Ruiter de la conversation dont on
21 parle.
22 Il s'agit du bas de la page, s'il vous plaît.
23 Q. Gvero vous dit qu'en tant qu'adjoint du commandant "vous seriez
24 responsable de toute l'évolution de la situation et de la destinée de vos
25 hommes et de la population civile à Srebrenica."
26 Voici ce qu'il dit, donc il ne dit absolument pas qu'il va pilonner la base
27 de Potocari ?
28 R. Oui, en effet. Ce n'est pas dit -- les mots ne sont pas là.
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1 Q. Vous a-t-il véritablement dit cela lors de la conversation, a-t-il
2 prononcé ces mots ?
3 R. Je vous ai déjà dit que je ne pouvais pas me souvenir exactement des
4 mots qui ont été prononcés.
5 Q. Je suis désolé, là j'insiste, mais comme je l'ai déjà dit à la page 45
6 aujourd'hui et M. Thayer l'a déjà répété dès qu'il l'a pu, vous avez
7 allégué quand même qu'il a bel et bien employé ces mots. Et c'est une
8 allégation extrêmement grave, ce n'est pas quelque chose que l'on peut
9 proférer à la légère.
10 R. Certes. En tout cas, ce que je sais, c'est que nous avons reçu cette
11 menace cet après-midi-là. Quant à savoir si cela venait directement de la
12 bouche du général Gvero, ou si on l'a entendu par le biais de la bouche de
13 mon colonel Karremans, ça je n'en sais rien. Tout ce que je sais, c'est que
14 lorsque cette conversation a eu lieu, lorsque le général Gvero m'a dit
15 qu'il risquait d'y avoir des conséquences, moi, j'ai pris comme cela une
16 menace, la menace étant que la base de Potocari allait être pilonnée. Mais
17 vraiment, je n'arrive pas à me souvenir des mots exacts qui ont été
18 prononcés, je ne suis pas sûr à 100 % des mots prononcés.
19 Q. Pourquoi avez-vous pris les mots qui sont dans les notes de de Ruiter,
20 comme étant - excusez-moi, un instant - une menace de pilonner la base ?
21 Pourquoi, en d'autres termes, avez-vous pris les mots repris dans les notes
22 de de Ruiter comme étant une menace de pilonner la base ?
23 R. Ceci est le reflet de cette conversation. Certainement à ce moment-là
24 je n'ai pas considéré qu'une autre façon de libeller cette conversation
25 pouvait être utilisée à un moment quelconque. Ça n'était pas un rapport qui
26 avait été établi en ayant à l'esprit l'idée que nous nous verrions l'un et
27 l'autre ici aujourd'hui au Tribunal.
28 Q. Si j'ose dire, sur un point analogue, je voudrais vous poser la
Page 18512
1 question suivante : savez-vous qu'il existe un autre compte rendu, un
2 compte rendu différent de la conversation que vous avez eue avec Gvero ce
3 jour-là ?
4 R. Non, je n'en ai pas connaissance.
5 Q. La situation est celle-ci : les services de sécurité musulmans
6 interceptaient des conversations émanant de l'état-major général de la VRS
7 et --
8 R. [aucune réponse verbale]
9 Q. Je vois que vous opinez du chef, probablement ce n'est pas une grande
10 surprise pour vous du point de vue tactique de la part des musulmans; c'est
11 bien cela ?
12 R. Oui.
13 Q. Je crois que vous avez dit, il me semble que vous avez dit oui.
14 R. Vous vous attendiez à une réponse. Oui, je sais que c'était très
15 probable que toutes les conversations étaient enregistrées. Je ne suis pas
16 surpris par conséquent.
17 Q. Nous trouvons-nous dans la situation satisfaisante. Nous nous trouvons
18 dans cette situation satisfaisante d'avoir un compte rendu de cette
19 conversation en partie, et quand je dis "en partie" nous avons ce que Gvero
20 a dit et non pas ce que vous vous avez dit.
21 M. JOSSE : [interprétation] Je voudrais maintenant inviter les membres de
22 la Chambre à voir ce qui sera présenté au prétoire électronique. Il s'agit
23 de la pièce P2374 et il est probable qu'il ne faudrait pas la diffuser à
24 l'extérieur.
25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vérifions cela, s'il vous plaît. Mais
26 je pense, Maître Josse, que vous avez raison.
27 Pas de diffusion.
28 [Le conseil de la Défense se concerte]
Page 18513
1 M. JOSSE : [interprétation]
2 Q. Là encore pour redire quelque chose d'évident. D'après vos
3 renseignements, Général, pour votre information, il s'agit d'une
4 traduction. L'original de ce document est en B/C/S. Vous-même tout comme
5 moi, nous allons avoir besoin de travailler à partir d'une traduction.
6 Je ne veux pas vous gêner ou être injuste à votre égard, mais bien
7 sûr la traduction est en anglais et pas en néerlandais. Si vous en avez
8 besoin en néerlandais, je suis tout à fait disposé à en donner lecture et
9 des traducteurs qui sont ici pourront donner la traduction. Voulez-vous, ça
10 nous aide, est-ce que vous avez besoin que ce soit traduit dans votre
11 propre langue ?
12 R. Non, je ne pense pas avoir besoin de cette traduction.
13 Q. Bon, je vous donne le temps de lire ce qui est là.
14 R. Je l'ai lu et je crois que ceci correspond très bien à notre propre
15 transcription.
16 Q. Passons à la deuxième page. Le texte continue.
17 M. JOSSE : [interprétation] Il est clair que nous avons des difficultés à
18 obtenir ce texte.
19 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
20 M. JOSSE : [interprétation] Peut-être pourrait-on le mettre au
21 rétroprojecteur, Monsieur le Président. La pièce n'a pas été marquée, et ne
22 comporte pas d'annotations.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai fini de lire.
24 M. JOSSE : [interprétation]
25 Q. Le général Gvero ne vous a pas dit qu'il allait faire pilonner la base
26 à Potocari et la zone avoisinante, n'est-ce pas ?
27 R. Tout ce que je sais c'est ce que Svetlana m'a dit en interprétant ce
28 qu'elle entendait. Si ces transcriptions sont exactes, je suis prêt à
Page 18514
1 supposer qu'elles le sont, alors il n'a pas dit cela en termes précis au
2 cours de cette conversation.
3 M. JOSSE : [interprétation] Si nous pouvons revenir à la page 1, en bas de
4 la page, s'il vous plaît.
5 Q. La partie pertinente semblerait être : "Troisièmement au cas où le
6 général Nicolai n'ordonne pas l'arrêt des bombardements et le retrait des
7 frappes des avions de l'OTAN, il portera personnellement la responsabilité
8 des événements qui suivront et la destinée de toutes les personnes qui se
9 trouvent dans le secteur."
10 R. Oui, c'est exact, c'est comme ça que c'est écrit et c'est comme ça que
11 je l'ai compris à l'époque.
12 Q. Quelle était la menace qui était proférée par ces termes-là ?
13 R. Je vous ai déjà expliqué cela. Le pilonnage de la base, des environs et
14 des civils qui se trouvaient dans ces environs.
15 Q. Mon Général, maintenant vous voulez imputer à mon client une menace qui
16 aurait pu être faite par quelqu'un d'autre de la VRS à l'intention de vous-
17 même ou de Karremans ou une personne tierce ?
18 R. Je ne serais pas prêt maintenant à accuser le général Gvero de façon
19 explicite que c'est en ces termes-là notamment qu'il a proféré cette
20 menace. J'ai dit pour ma part que nous avons reçu cette menace et au cours
21 de la conversation par téléphone que nous avons conduit environ vers 16
22 heures, le général Gvero m'a rappelé une fois de plus que je devais
23 endosser la responsabilité du fait que nous ne mettions pas une fin à ces
24 bombardements.
25 Comment mettre en corrélation tout cela avec le pilonnage de la base et des
26 environs, je ne vois pas très bien comment on pourrait le faire. Je ne me
27 rappelle pas très exactement ces termes-là. Peut-être il se peut que le
28 colonel Karremans aurait reçu une telle menace et qu'après coup je n'aie
Page 18515
1 fait que supposer que le général Gvero se référait à de telles
2 conséquences.
3 Mais après 12 années qui se sont écoulées maintenant, mot à mot je n'arrive
4 pas à me rappeler si cela a été dit littéralement dans ces termes-là. Je ne
5 peux pas le lire non plus dans ce transcript, non plus que dans le
6 transcript qui a été rédigé par le colonel de Ruiter.
7 Q. Il ne vous a pas menacé moyennant les termes que vous alléguez à la
8 page 45 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui. Ne serait-ce que sur cela
9 nous sommes en mesure de nous mettre d'accord sur la base du transcript ?
10 Dites-moi si je suis dans mon droit ou pas.
11 R. Ceci n'a pas été rédigé dans ces termes-là. Si c'était le cas ceci
12 aurait littéralement été repris par le transcript.
13 Q. Mais j'insiste encore sur cela, et je voudrais vous voir me dire avec
14 plus de précision. En effet, moi, je trouve que les termes tels qu'ils ont
15 été transcrits par les services de sécurité musulmans me permettent de dire
16 que ceci ne représentait aucune menace ?
17 R. Cela dépend évidemment de la façon dont on interprète tout cela. Dans
18 l'ensemble de cette transcription les termes du message passé par le
19 général Gvero ne seraient que de l'ordre de 50 % être que des non-sens et
20 des mensonges. C'est comme ça que je vois ce qui m'a été dit comme quoi
21 j'aurais été et je devais être responsable des conséquences. Chose
22 intéressante j'ai pu le constater dans les deux transcriptions, le colonel
23 de Ruiter et de l'autre faite par la BiH, mention faite des conséquences ne
24 me permettait pas de savoir de quel ordre devaient être les conséquences.
25 Il me semble de toute évidence que j'ai dû entendre parler de cette menace
26 formulée autrement, les conséquences devaient nous rappeler le fait que la
27 menace devait se traduire dans les faits.
28 Q. Vous avez été un général brigadier de l'armée royale néerlandaise.
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1 Grande était votre responsabilité en tant que chef de l'état-major de la
2 FORPRONU. Vous aviez une grande responsabilité, n'est-ce pas ? Gvero n'a
3 dit de toute évidence que la vérité à cet égard ?
4 R. Il ne m'a pas du tout parlé de la vérité. La moitié de son message est
5 relié à cela, relié par le fait que la VRS ne lançait pas des attaques
6 contre l'ONU, c'était inexact. C'était un mensonge pur et simple. C'est
7 dans cet ordre d'idée que ceci ne pouvait pas m'impressionner -- enfin ce
8 que le général Gvero a dit ne pouvait pas m'impressionner.
9 L'essentiel maintenant est de savoir si en ce moment-là, lui a proféré
10 cette menace, à savoir : "Cessez, sinon nous allons prendre pour cible la
11 base" ? Sur la base de ce document-là, pouvons-nous savoir qu'il a dit dans
12 ces termes-là en ce moment-là, mais en tout cas cette menace a fini par
13 arriver au commandement de l'ONU, et c'est ainsi que nous l'avions
14 interpréter, le général Gobillard et moi pour parler de notre
15 responsabilité, et à mes yeux cela voulait dire que si on ne mettait pas un
16 terme aux attaques, que la menace finira par être réalisée dans les faits.
17 Q. Vous n'avez toujours pas répondu à ma question. Je vais vous donner une
18 autre occasion, maintenant essayons d'élaborer ce que vous dites que : "50
19 % de cette menace n'était sans fondement et n'était que des mensonges."
20 Mais répondez tout d'abord à ma question. Votre responsabilité était
21 grande, et dans ce sens-là, le général Gvero disait la vérité ?
22 R. Oui, oui, lorsqu'il s'agit de la responsabilité qui était la mienne à
23 ce stade-là et en ce moment-là, conjointement avec d'autres personnes j'ai
24 été responsable des décisions à prendre en ce moment-là.
25 Q. Vous et d'autres gens, vous déteniez entre vos mains la destinée d'un
26 grand nombre de gens, n'est-ce pas ? N'est-ce pas exact ?
27 R. Oui, je le savais à cette époque-là, et je le sais encore aujourd'hui.
28 Q. Mon Général, mais où est la menace alors ?
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1 R. C'est une autre question. J'ai déjà dit que préalablement sur la base
2 de deux transcriptions quelque chose n'a pas été dit dans cet ordre-là de
3 façon littérale, par conséquent je n'ai rien à ajouter à cela. Ne serait-ce
4 que lorsqu'il s'agit de cette conversation. Mais lorsqu'il s'agit de
5 conséquences qui s'ensuivront et qui visaient la population de cette zone,
6 quant à moi j'ai interprété cela comme quoi cette menace devra être
7 réalisée, à savoir on tirera dessus sur la population civile, et que cette
8 menace sera traduite dans les faits.
9 Q. Je vous ai promis de vous permettre de nous dire en quoi consiste les
10 50 % qui ne sont que des non-sens et des mensonges. A vous de faire un
11 choix. La transcription de Ruiter ou ce qui a été intercepté, parlez nous
12 de ces 50 % de non-sens et de mensonges, s'il vous plaît.
13 R. Toutes les allégations faites comme quoi il n'y a pas eu d'attaque
14 contre les troupes de l'ONU de la part de la VRS, mais plutôt il y avait
15 une attaque de la part de l'ABiH. Ce sont des non-sens, des absurdités, des
16 mensonges. De même en est-il pour en parler de ce que nous voyons dans la
17 transcription faite par l'ABiH où il était dit et à combien de reprises que
18 de fausses allégations ont été faites comme quoi la VRS s'attaquait aux
19 troupes de l'ONU. Que ceci s'était passé à Bihac et ailleurs, et que
20 d'ordinaire tout ceci n'était que de la propagande des Musulmans pour
21 parler de Bihac et des autres. Cela est absolument absurde et ceci n'est
22 surtout pas pertinent pour notre débat ici.
23 Q. Par conséquent, quant à vous, vous dites que Gvero mentait lorsqu'il
24 disait que l'ABiH essayait d'impliquer la FORPRONU dans cette dispute au
25 sujet de Bihac et de Gorazde; est-ce la réponse ?
26 R. Oui.
27 M. JOSSE : [interprétation] Je voudrais qu'on affiche le document 6D204,
28 s'il vous plaît.
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1 Q. Le document qui sera affiché, Mon Général, est le rapport du général
2 Janvier daté du 10 juillet 1995. Il s'agit d'un rapport quotidien qui
3 était, entre autres, envoyé à M. Annan, nous pouvons le voir à l'en-tête.
4 Il s'agit d'un document où on traite du secteur nord-est, on traite de
5 Srebrenica et nous avons une estimation militaire assez bonne de la
6 situation.
7 Je voudrais que l'on se penche sur la page 6, s'il vous plaît.
8 [La Chambre de première instance se concerte]
9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Allez-y. Vous avez quatre minutes
10 encore à votre disposition.
11 M. JOSSE : [interprétation] Je voudrais que l'on fasse défiler le texte
12 pour voir le bas de la page.
13 Q. Nous lisons : "Similaire à la situation qui prévaut dans Gorazde (au
14 printemps 1994), la BiH pourrait tenter d'impliquer la FORPRONU, dans le
15 conflit, et ceci, du côté de la BiH. L'abandon subit des positions, la
16 simulation de la chute d'enclaves, rapports alarmants de la partie du côté
17 bosnien de cette situation permettront d'indiquer comment tout ceci a été
18 travaillé."
19 Première question : saviez-vous qu'il y a eu quelque chose entre l'ABiH et
20 la FORPRONU au printemps 1994 à Gorazde sous forme d'accord ?
21 R. Je n'ai pas eu connaissance de ce qui s'était passé au printemps 1994 à
22 Gorazde. J'ai été informé de ce qui s'était passé au printemps 1995 à
23 Gorazde. Tout comme ce qui se passait à Srebrenica, en 1995, sous la
24 pression de la VRS, se sont trouvés d'abord l'ONU, on savait très bien que
25 les postes d'observation se trouvaient cible des attaques de la VRS et que
26 l'ONU se trouvait obliger de les quitter pour se retirer vers la base de
27 Gorazde.
28 Q. Au sujet de Bihac, savez-vous quels étaient les problèmes rencontrés
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1 par une Section du Bangladesh avec l'ABiH là-bas ?
2 R. Lorsqu'il s'agit de Bihac, et lorsqu'il faut évidemment comparer la
3 situation de Bihac, je n'ai aucune information là-dessus.
4 Q. Vous ne connaissiez pas les problèmes qui en quelque moment que ce soit
5 étaient ressentis par la Section du Bangladesh à cette époque-là ?
6 R. Non, pas au temps où j'ai été à la tête du quartier général.
7 Q. Revenant au document que nous avons à l'écran, ayant en vue ce que la
8 FORPRONU disait au sujet de ce qui s'était passé à Gorazde au printemps
9 1994, ce que Gvero était en train de vous dire sur le texte intercepté
10 n'est pas un mensonge, ne serait-ce que pour parler de Gorazde ?
11 R. Bien, en fait, la seule chose connue de moi c'était ce qui m'a été
12 interprété par Svetlana. Dans la transcription, on peut lire vraiment
13 ainsi, à savoir on écrit sur ce que le général disait. Peut-être référence
14 est faite aux incidents de 1994. Je n'en n'avais aucune information. Ceci
15 n'ayant pas été traduit pour moi. A mon sens, ceci n'était pas pertinent.
16 Mais ce qui est essentiel pour moi, c'est ce que le général me
17 disait, à savoir la VRS ne s'attaquait pas à la FORPRONU. Laissant de côté
18 ce qui s'était passé ailleurs, j'ai considéré cela comme étant des
19 mensonges. Sur la base des rapports qui m'ont été envoyés par le Bataillon
20 néerlandais, je m'y suis enfin fié non pas sur des rapports de l'armée BiH.
21 Nous ne recevions pas ces rapports.
22 Par conséquent, il n'y a pas de bases sur lesquelles on pourrait
23 procéder à des comparaisons avec les situations préalables. Lorsqu'il
24 s'agit pourtant de la situation prévalant à Gorazde au printemps 1995, j'ai
25 été à la tête du quartier général, dans des rapports pouvait-on voir des
26 compilations faites des rapports portant sur les attaques par la VRS contre
27 les postes d'observation. Après cela, les forces de l'ONU se sont retirées
28 dans la base. Encore une fois, notre information ne venait pas de la BiH,
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1 mais plutôt de la FORPRONU.
2 M. JOSSE : [interprétation] Monsieur le Président, il est 7 heures.
3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Mon Général, je crois que nous
4 reprenons les débats demain à 9 heures et espérons que vous pouvez terminer
5 votre déposition demain.
6 Je remercie tout le monde dans le prétoire et autour du prétoire.
7 L'audience est levée.
8 --- L'audience est levée à 19 heures 00 et reprendra le vendredi 30
9 novembre 2007, à 9 heures 00.
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